[Français]
Bonjour, tout le monde.
[Traduction]
J'aimerais souhaiter la bienvenue à tout le monde ici ce matin.
C'est aujourd'hui la Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Notre étude d'aujourd'hui est donc d'autant plus pertinente.
C'est la 20e réunion du Sous-comité des droits internationaux de la personne. Conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022, elle se déroule sous forme hybride, avec des gens qui sont ici en personne et d'autres qui participent à distance grâce à l'application Zoom.
Pour ceux et celles qui participent à distance et qui sont nouveaux au Comité, vous choisissez l'interprétation en cliquant sur l'icône du globe au bas de votre écran. Je vous demanderais d'attendre qu'on vous nomme avant de prendre la parole. Vous aurez cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Je vous ferai un signe de la main lorsqu'il vous restera une minute, puis à nouveau lorsqu'il vous restera 30 secondes, après quoi je vous laisserai conclure.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le vendredi 23 septembre 2022, nous allons commencer notre étude sur les droits et libertés des femmes autour du monde, et plus particulièrement en Afghanistan, en Iran et en Arabie saoudite.
Nous accueillons trois témoins éminents dans ce premier groupe. Il y a d'abord Mme Jacqueline O'Neill, ambassadrice pour les femmes, la paix et la sécurité au ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement. Mme O'Neill est ici en personne et c'est elle qui témoignera en premier.
Nous accueillons aussi Mme Farida Deif, directrice de Human Rights Watch au Canada, qui se joint à nous par vidéoconférence.
Aussi par vidéoconférence, nous accueillons Mme Sanam Naraghi-Anderlini, fondatrice et directrice générale de l'International Civil Society Action Network.
Sans plus tarder, madame O'Neill, vous pouvez commencer.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie le Comité d'entreprendre cette étude très importante.
Être une femme qui lutte pour les droits et la paix ne va jamais sans risque. Je n'oublierai jamais, il y a environ 15 ans, une politicienne kényane qui me disait que lorsqu'elle allait à des activités de campagne, elle portait deux pantalons de jeans très serrés pour empêcher des voyous associés au parti adverse de la violer lors de ses propres activités de campagne. Aussi, il y a quelques années à peine, une Colombienne m'a dit qu'elle avait refusé un prix de son propre gouvernement pour avoir négocié un accord de paix, parce qu'elle savait que cette récompense pourrait valoir des menaces de mort très sérieuses à sa famille.
Nous avons maintenant des données qui montrent que les risques augmentent pour les femmes qui défendent les droits de la personne et qui œuvrent pour la paix. Le mois dernier, le secrétaire général des Nations unies a déclaré qu'elles étaient de plus en plus la cible d'attaques qui les réduisaient au silence et les écartaient de la vie publique. Il a ajouté qu'en ce qui concerne les droits des femmes, nous allions à reculons et nous assistions à un renversement des acquis générationnels.
[Français]
L'exemple extrême est sans doute celui de l'Afghanistan, où les talibans tentent d'effacer complètement les femmes de la vie publique. Il s'agit d'une approche que de nombreux militants qualifient d'apartheid des genres.
Nous sommes témoins d'attaques contre des manifestantes pacifiques en Iran, au Soudan ainsi qu'au Myanmar, où l'armée a tué des centaines de manifestantes.
Nous sommes également témoins de violences sexuelles liées aux conflits en Éthiopie, en Haïti et dans le contexte de l'invasion illégale de l'Ukraine par la Russie.
Des femmes autochtones militant pour le climat ont été assassinées.
De dangereuses campagnes de désinformation ciblent les défenseurs des droits de la personne ainsi que les femmes œuvrant pour la paix.
Pourquoi observe-t-on ces tendances?
L'une des raisons principales est liée aux attaques contre la démocratie. Généralement, l'autoritarisme et la misogynie se renforcent mutuellement. Les dirigeants autoritaires perçoivent souvent les femmes qui défendent les droits de la personne et la paix comme une menace directe à leur pouvoir. C'est donc dans l'intérêt de ces dirigeants de réduire ces femmes au silence.
Le gouvernement du Canada réagit de diverses façons. Je n'en décrirai brièvement que cinq, mais je me ferai un plaisir de vous en parler davantage au cours de notre discussion.
[Traduction]
Tout d'abord, nous partons du principe que les femmes qui défendent les droits de la personne et qui œuvrent pour la paix s'exposent à des risques importants en raison de leur travail. Lorsqu'elles demandent du financement surtout, elles ne devraient pas avoir à prouver que leur travail peut être dangereux. Notre programme de soutien aux artisanes de la paix comprend maintenant des fonds réservés à la sécurité, reconnaissant qu'elles doivent parfois munir leur bureau de serrures ou de caméras de surveillance ou suivre une formation en sécurité numérique.
De plus, avec le concours de la société civile, nous élaborons les lignes directrices à l'égard des « Voix à risque » afin d'orienter concrètement l'action des diplomates canadiens pour appuyer les défenseurs des droits de la personne.
[Français]
Deuxièmement, nous essayons d'obtenir un financement accru pour les organisations féministes qui luttent contre le recul des droits des femmes.
Nous avons réalisé des investissements importants, mais nous savons que cela ne suffit pas. Nous essayons d'augmenter la quantité de ressources, d'en accroître la flexibilité et d'en améliorer l'accessibilité.
[Traduction]
Troisièmement, nous nous mettons résolument à l'écoute des femmes mêmes qui défendent les droits de la personne et qui œuvrent pour la paix afin de comprendre la nature changeante des menaces qui pèsent sur elles. Elles nous disent par exemple qu'elles sont souvent l'objet de violence verbale et de menaces en ligne, et nous apprenons que ces menaces faites contre les femmes en ligne sont plus susceptibles de se traduire en violence physique que celles faites contre les hommes.
Il y a quelques semaines, en Moldavie, j'ai interrogé une journaliste au sujet de menaces dirigées contre elle et ses collègues. Elle m'a expliqué que son équipe de quatre journalistes avait récemment mené une étude, une enquête, sur la corruption au sein du gouvernement. Toutes les quatre ont reçu des menaces de mort, et deux d'entre elles ont vu leurs photos et leurs coordonnées affichées sur des dizaines de sites Web liés à la prostitution.
Il est essentiel aussi d'entretenir un dialogue avec les réfugiées des diasporas établies au Canada, et les femmes qui défendent les droits de la personne et qui œuvrent pour la paix pour comprendre leurs besoins uniques pendant leur séjour au Canada. Par exemple, certaines ont fait savoir que, contrairement à de nombreux autres réfugiés, elles préfèrent ne pas s'installer en des endroits où se concentre une importante diaspora de leur pays d'origine, parce que cela leur fait courir de plus grands risques. Certaines ont aussi souligné la nécessité d'une collaboration et d'une coordination accrues entre partenaires fédéraux.
[Français]
Quatrièmement, le Canada s'efforce d'accroître la visibilité de ce travail essentiel, qui est de plus en plus menacé. Nous faisons de la sensibilisation à cet égard, par exemple à l'occasion de nos discours et de nos déclarations.
Cinquièmement, nous créons de manière proactive des coalitions et des réseaux, certains officiels et d'autres informels, afin de corriger les faux récits selon lesquels l'égalité des genres est une notion occidentale.
Pour gagner du temps, je vais m'arrêter ici. Je serai heureuse de répondre à vos questions.
Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, de m'avoir invitée à comparaître devant votre sous-comité.
Je vais commencer par parler de l'Afghanistan, où la situation est terriblement sombre, surtout pour les femmes et les filles. Aux prises avec une grave insécurité alimentaire, avec une crise économique et avec les violations des droits de ses femmes et ses filles, le pays voit s'effriter des décennies de développement et d'égalité des sexes et frôle l'effondrement humanitaire.
Au cours des 15 derniers mois, les talibans ont effectivement sorti les femmes de la vie publique. Ils ont interdit de facto l'éducation secondaire des filles et banni les femmes de la plupart des formes d'emploi. Une ordonnance rendue en mai oblige les femmes à se couvrir le visage en public et à ne sortir de la maison qu'en cas de nécessité, et impose des sanctions aux membres masculins de la famille en cas de désobéissance, obligeant essentiellement les hommes à appliquer la loi talibane aux membres féminins de leur propre famille.
Les talibans ont démantelé le système de lutte contre la violence fondée sur le sexe, créé de nouveaux obstacles à l'accès des femmes aux soins de santé, empêché les services d'aide aux femmes de faire leur travail et attaqué impunément les manifestants pour les droits des femmes.
Jusqu'à maintenant, la réaction internationale à cette crise est tout à fait insuffisante. Si de nombreux pays ont publié des déclarations, exprimé de vives inquiétudes et appelé les talibans à mettre fin aux violations des droits, les mesures concrètes et coordonnées sont rares et espacées. Nous nous attendons à une réaction beaucoup plus énergique de leur part, surtout des pays qui ont une politique étrangère féministe comme le Canada. Nous demandons à ces gouvernements de concerter étroitement leur action, d'utiliser tous les mécanismes et toutes les mesures à leur disposition, y compris les sanctions contre les dirigeants talibans, et de faire des droits des femmes et des filles afghanes une priorité de leur politique étrangère.
En ce qui concerne l'Arabie saoudite, il est clair que le royaume ne progresse pas en matière de droits de la personne, malgré les réformes promises. La dissidence n'a plus guère de marge où s'exprimer et une nouvelle loi est venue codifier la tutelle masculine abusive à l'égard des femmes, faisant d'elles en permanence des mineures aux yeux de la loi. À bien des égards, l'Arabie saoudite est devenue encore plus répressive.
Par exemple, en août, une cour d'appel saoudienne a fait passer de 6 à 34 ans la peine de prison de Salma al‑Shehab, une étudiante au doctorat, pour le seul motif de son activité sur Twitter. On croit que cette peine est la plus longue jamais imposée à une Saoudienne qui s'exprimait pacifiquement en ligne.
Un autre exemple de ces réformes creuses, c'est lorsque les autorités saoudiennes ont libéré de prison l'an dernier trois éminentes militantes des droits des femmes. Elles avaient été arrêtées pour avoir appuyé publiquement les réformes que le prince héritier Mohammed bin Salman disait justement vouloir promouvoir. Même si elles ne sont plus derrière les barreaux, elles n'ont pas le droit de voyager et purgent en fait des peines avec sursis, si bien que les autorités peuvent les renvoyer en prison au moindre soupçon d'activité criminelle.
Les autorités saoudiennes se sentent clairement habilitées à continuer d'écraser la dissidence, et les femmes saoudiennes sont parmi leurs principales cibles. Le Canada devrait veiller à condamner rapidement et publiquement ces actions, ces jugements et ces décisions qui visent les Saoudiennes et réduisent encore plus leur espace public.
Enfin, il y a l'Iran. Des manifestations qui ont commencé après le décès en septembre d'une jeune Kurde iranienne détenue abusivement par la police de la moralité...
:
Bonjour. Je vous remercie de m'accueillir.
D'abord, ils ont fermé les écoles. Puis ils ont empêché les femmes d'aller travailler. Ensuite, ils leur ont interdit de fréquenter les parcs. Selon les dernières nouvelles en provenance d'Afghanistan, les femmes ne sont pas autorisées à acheter des cartes SIM. Bienvenue dans l'Afghanistan de 2022.
Est‑ce qu'on aurait pu empêcher le retour des talibans au pouvoir lors des pourparlers de Doha? Pour répondre à cette question, il faut vous demander: si des Afghanes qui militent et qui œuvrent pour la paix, si des délégations de jeunes femmes et des représentantes féminines des minorités avaient pris part à ces pourparlers, est‑ce que l'issue aurait été la même? Est‑ce que M. Khalilzad, l'envoyé des États-Unis, aurait pu accepter de relâcher 5 000 prisonniers talibans alors même que les talibans bombardaient des écoles et des cliniques de maternité?
Mesdames et messieurs, bonjour et merci de me donner l'occasion de m'adresser à vous.
Je m'appelle Sanam Naraghi-Anderlini. Je suis la fondatrice et la directrice générale de l'International Civil Society Action Network ou l'ICAN. Nous nous employons à bâtir la paix dans une démarche inclusive et adaptée aux genres et à prévenir l'extrémisme violent. Nous sommes le fer de lance de l'Alliance des femmes pour le leadership en matière de sécurité, communément appelée WASL, qui regroupe des organisations locales indépendantes dirigées par des femmes, reliées à l'échelle mondiale, qui œuvrent pour la paix dans 40 pays fragilisés par la violence et la fermeture de l'espace politique.
Nous sommes reconnaissantes au gouvernement du Canada de nous appuyer, ainsi que notre fonds d'innovation pour la paix et notre campagne She Builds Peace, qui ont permis de verser jusqu'à maintenant 6,9 millions de dollars à plus de 60 organisations dans 31 pays, par des subventions allant de 200 $ à 100 000 $.
Je vous en parle parce que le travail qui se fait sur le terrain aux premières lignes des pays touchés par les conflits et la violence est souvent invisible. C'est le travail des femmes. Elles ne sont pas derrière les manchettes. Elles sont en avance sur les manchettes.
Depuis quelques années, l'ICAN sert de pont entre ces activistes locales et la communauté internationale, et nous ne pourrions pas le faire sans votre aide.
Cela dit, la situation sur le terrain est sombre, et nous devons être très prudentes devant l'adversité. Alors que l'année 2022 tire à sa fin, les artisanes de la paix sont prises au milieu d'un écheveau complexe de crises qui se recoupent et qui vont en s'aggravant.
Autant nous célébrons les Iraniennes et nous attirons l'attention sur elles — étant moi-même d'ascendance iranienne, je trouve extrêmement émouvant de voir comment le monde les appuie —, autant il est frappant de constater à quel point les Afghanes sont encore laissées à elles-mêmes. Tandis que nous avons les yeux rivés sur l'Ukraine et que nous lui fournissons l'aide humanitaire dont elle a besoin, mes consœurs en arrachent toujours au Yémen, en Syrie et dans d'autres pays où la guerre continue.
La guerre en Ukraine et le déplacement des fonds et de l'attention internationale ont des répercussions sur les femmes en d'autres endroits et dans d'autres contextes. Il ne faut pas les oublier. Il ne faut pas oublier qu'il y a un monde au‑delà de nos frontières et au‑delà de nos propres intérêts régionaux.
Quant à l'information que je veux vous communiquer aujourd'hui, je vais me concentrer sur les problèmes que décrivent actuellement les femmes qui œuvrent pour la paix dans mon réseau — les conflits, les crises, les catastrophes climatiques, inondations et autres, et ce qu'elles vivent avec la COVID.
Pendant la pandémie, le monde a oublié les gens qui étaient aux premières lignes de la guerre et de la fragilité. Lorsque l'OMS a recommandé de se laver les mains avec de l'eau et du savon, mes consœurs du Cameroun, de la Somalie et du Yémen ont dit: « Nous n'avons pas de savon et nous n'avons pas d'eau. »
Les femmes ont dû se débrouiller par elles-mêmes. Dans nos groupes WhatsApp, elles ont échangé de l'information sur la fabrication de savon et de désinfectants pour les mains à partir de produits naturels. De notre côté à l'ICAN, nous avons diffusé l'information qui nous venait des CDC américains et d'ailleurs. Nous nous sommes rendu compte que la solidarité et la connectivité mondiales, l'écosystème que nous avons, sont essentiels au travail et à la survie des artisanes de la paix et des collectivités qu'elles aident.
Nous avons aussi constaté que ce sont elles qui puisent dans la réserve de confiance qu'elles ont dans leur collectivité pour offrir des services. Donc, quand on parle du triple lien entre l'aide humanitaire, le développement et la paix, ce sont les femmes sur le terrain qui le font. Œuvrer pour la paix de nos jours ne peut se faire si on a du mal à trouver de l'eau ou si on se débat avec une sécheresse ou une inondation. Ces choses‑là sont interreliées, et ce sont les femmes en première ligne qui dispensent les services essentiels.
Comme ma collègue l'ambassadrice O'Neill l'a mentionné, elles courent un risque incroyable. C'est du travail solitaire. Travailler pour la paix n'est pas facile. Dans les sociétés polarisées, lorsque les communautés sont polarisées, que ce soit en ligne ou dans la vie courante, bâtir des ponts, tenter d'être un interlocuteur, tâcher de trouver un espace de médiation, tout cela suppose qu'on met sa vie, et souvent sa famille, en danger.
Nous voyons de plus en plus comment les femmes exercent leur militantisme au moyen de campagnes publiques. Dans le cadre de notre campagne She Builds Peace, qui, je le répète, est appuyée par le Canada, nous pénétrons profondément dans les sociétés et nous propageons l'idée de militer pour la paix, l'égalité et le pluralisme — la reconnaissance du travail de paix — auprès de beaucoup de gens ordinaires, surtout des jeunes.
À cette époque où le monde connaît tant de difficultés, où l'ONU a du mal à réunir des fonds pour les urgences humanitaires existantes, où elle n'arrive pas à réunir même le quart de ce qu'il faudrait, ces femmes et activistes sur le terrain qui cherchent à protéger leurs communautés, qui tentent d'assumer cette charge de protection, ce sont elles qui le font de façon non violente. Elles sont irremplaçables et nous devons les appuyer. Nous devons favoriser l'écosystème. Personne ne peut y arriver seul.
C'est ce message que je veux vous laisser: faire en sorte que les activistes qui risquent leur vie obtiennent le soutien nécessaire et que le Canada et d'autres pays appliquent leurs propres valeurs en adoptant une approche sexospécifique et adaptée.
Merci de votre attention.
:
Merci, monsieur le président.
Je remercie nos témoins d'être ici aujourd'hui.
L'une des choses que j'aimerais savoir — j'en ai déjà une idée intuitive, mais je voudrais quelque chose de concret, et toutes vos organisations ont probablement fait du travail dans ce domaine —, ce sont les grandes tendances qui se dégagent pour certains de ces enjeux. J'ai l'impression que tout va de mal en pis. Je me demande si vous pourriez citer un article ou une étude en particulier, ou encore un résultat que vous constatez probablement sur le terrain, qui permettrait de faire ressortir la courbe des tendances.
Y a‑t‑il un point positif dans le monde? On a l'impression que la situation empire partout. Je suis beaucoup d'indicateurs de la liberté de religion dans le monde. Ils montrent que dans 200 pays, partout, la situation est inchangée ou s'est détériorée. Dans 200 pays, il n'y a pas eu d'amélioration.
Je m'adresse d'abord à Human Rights Watch Canada. Pourriez-vous nous donner une idée des tendances dans les domaines où vous travaillez?
:
Merci beaucoup de la question.
Ce que nous constatons quant aux tendances, même si nous ne les documentons pas de façon serrée, c'est que plus on accepte un rapprochement avec des États répressifs — qu'il s'agisse de l'Arabie saoudite, comme nous l'avons vu récemment avec l'administration Biden, ou d'autres pays qui, invités à participer à d'importants sommets, à des réunions bilatérales et à de grands événements sportifs, profitent de ces occasions pour, en quelque sorte, se refaire une image et tenter de masquer leur répression — et plus les autres États y consentent et s'abstiennent de demander des comptes et de critiquer la répression contre les femmes et les défenseurs des droits de la personne, plus leur impunité grandit.
Je pense que c'est pourquoi nous demandons constamment aux États, chaque fois qu'une militante des droits des femmes est détenue, y compris dans des États alliés du Canada... Il faut dénoncer cela très publiquement, puisque notre silence devient un consentement à une normalisation de ces pratiques, à un retour à la situation antérieure avec des États répressifs qui sont des alliés ou dans lesquels nous avons d'importants intérêts. Nous constatons alors, malheureusement, une détérioration croissante de la situation pour les femmes et pour la société civile en général.
Nous savons, d'après des études, que seulement 3 % de la population mondiale vit aujourd'hui dans des pays où l'action de la société civile peut s'exercer ouvertement et que l'état de paix a généralement régressé dans le monde pendant 11 des 14 dernières années. C'est une tendance qui ressort de l'étude annuelle sur le terrorisme et d'autres sources.
Je veux faire écho à ce que disait ma collègue de Human Rights Watch au sujet l'application de deux poids, deux mesures. Nous demeurons silencieux sur la situation en Arabie saoudite ou sur ce qui se passe en Palestine sous l'effet de l'activisme israélien. Cependant, nous critiquons des pays qui ne sont pas nécessairement des amis de l'Occident ou nous fermons les yeux sur ce qui se passe dans pays comme l'Inde et sur la situation de sa population musulmane. Il y a de graves signes avant-coureurs.
Il s'agit de savoir quelle peut être l'influence de pays comme le Canada. Ce que nous avons vu dans le cas de l'Iran, de la Syrie et d'autres pays, c'est que les sanctions générales qui touchent une grande partie de la population encouragent les partisans de la ligne dure et ont un effet extrêmement préjudiciable sur la société civile et les citoyens ordinaires. Nous devons nous assurer de ne pas leur causer du tort, de ne pas aggraver leur situation.
Les sanctions ciblées, comme celles que vous venez de mettre en place dans le cas de l'Iran, sont beaucoup plus efficaces pour faire comprendre au public ce que vous soutenez et ce que vous combattez.
Nous avons causé beaucoup de tort par le passé à la population syrienne et à la population iranienne en imposant des sanctions générales, et il est très difficile de réparer ce genre de tort.
Je me ferai un plaisir de vous en dire davantage.
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je crois qu'il convient de souligner que nous nous réunissons aujourd'hui au début de la période de 16 jours d'activisme contre la violence faite aux femmes.
J'adresse ma première question à l'ambassadrice O'Neill.
J'ai été heureuse de vous entendre faire le parallèle entre, d'une part, le déclin et le recul de la démocratie et les menaces à la démocratie et, d'autre part, l'augmentation de la violence et des menaces contre les femmes. Nous constatons aujourd'hui que la polarisation n'est plus entre la gauche et la droite. Elle est entre l'autoritarisme ou la tyrannie et la démocratie et les valeurs qu'elle véhicule, notamment l'égalité entre les sexes, le pluralisme et la diversité.
À cet égard, j'aimerais vous poser quelques questions au sujet de cette extraordinaire convergence de la COVID‑19, des urgences climatiques et l'accroissement des conflits que nous voyons actuellement et qui fait que ce sont vraiment les femmes du monde qui souffrent le plus. En même temps, nous constatons une augmentation du conservatisme sexiste. Cela ne se produit pas seulement dans les pays autoritaires. Nous le voyons chez nos voisins du Sud, où d'importants droits durement acquis par les femmes sur leur propre corps sont remis en cause.
Dans ce contexte, pourriez-vous nous parler un peu de la nécessité de réseaux mondiaux? Dans quelle mesure est‑il important, lorsque des femmes sont réduites au silence dans un pays, que des femmes ailleurs soient en mesure de faire entendre leurs voix et d'attirer l'attention et, ce faisant, de procurer quelque sécurité à celles qui se battent sur place?
L'autre question que je voudrais poser découle de l'étude faite par le Comité lors d'une législature précédente sur les femmes défenseures des droits de la personne. Nous recommandions à ce moment‑là que le Canada crée un volet d'immigration pour les défenseurs des droits de la personne parce que nous savions que, quand les choses se gâtent, elles se gâtent rapidement.
Hier, j'ai assisté à une activité du Dignity Network, où j'ai entendu le témoignage d'une femme transgenre vivant dans un pays où les structures juridiques ne sont pas accommodantes. Elle a dit qu'en cas d'incident, elle doit sortir du pays dans les trois heures. Mais les personnes dans sa situation ne veulent pas partir. Ce n'est pas de l'immigration. Elles ne sont pas des réfugiées. Elles veulent rentrer chez elles, continuer à se battre pour leur pays. Elles ont simplement besoin d'un asile temporaire, pour pouvoir sortir quand la situation s'envenime et rentrer ensuite quand les choses se calment.
À la suite de notre étude, le gouvernement du Canada a créé un volet d'immigration de 250 défenseurs des droits de la personne. Je pense que nous sommes tous d'accord pour dire que c'est insuffisant.
Pourriez-vous nous donner des conseils sur la façon d'accélérer le processus et de l'adapter pour qu'il reflète mieux les réalités des défenseurs des droits de la personne sur le terrain?
Peut-être pourriez-vous aussi nous en dire un peu plus sur la façon dont le Canada pourrait mieux promouvoir, même parmi les parlementaires, les réseaux mondiaux qui nous permettraient d'amplifier les voix et de faire en sorte que les femmes qui se battent effectivement en première ligne sont vraiment soutenues par la communauté internationale.
L'une des raisons pour lesquelles cette étude... Je suis très heureuse que le Comité se penche sur cette question. Nous devons reconnaître que ces attaques contre l'égalité des sexes et les droits des femmes ne sont pas le fruit du hasard. Pour répondre à la question du député précédent au sujet des données et des tendances, il y a des tendances absolues et une opposition tout à fait concertée et organisée aux droits des femmes. Nous devons faire preuve d'autant d'organisation, de concertation et de stratégie que ceux qui s'opposent à nous. Je pense que nous devons le faire de différentes façons.
Pour revenir au début de votre question sur la démocratie et l'autoritarisme, et peut-être à la question du député précédent, l'un des principaux indices que nous devons surveiller est celui de la répression et du musellement des voix. Les voix des femmes dans la société civile sont ordinairement les premières à être étouffées.
Nous assistons à que certains appellent une épidémie de coups d'État partout dans le monde. Souvent, il s'agit d'une prise du pouvoir par les militaires et, de nouveau... des formes poussées de suppression. Je n'ai pas les chiffres devant moi, mais, alors qu'il y a eu des coups d'État dans quelques pays au cours des 20 ou 30 dernières années, nous en voyons maintenant trois ou quatre fois plus. Nous assistons à un recul marqué sur ces fronts.
Nous voyons aussi des attaques très délibérées contre l'égalité des sexes de la part de pays qui se concertent, en particulier la Russie et la Chine, sur le plan institutionnel. Aux Nations unies, à l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et à l'Union africaine, par exemple, nous voyons des pays tenter délibérément et souvent subtilement de faire reculer les gains que nous avons réalisés. Un de mes collègues a dit que nous avions l'habitude de pousser un rocher vers le haut de la colline, mais que désormais nous tentons simplement de le garder en place.
Pour des enjeux comme le droit de la société civile et le droit des militantes de s'exprimer dans des forums — de se faire entendre directement, plutôt que par l'entremise de représentants du gouvernement — ou la reconnaissance du rôle de la société civile dans le partenariat avec le gouvernement, il y a un léger recul sur le plan institutionnel. Pour pouvoir reconnaître ces tactiques, les anticiper et les contrer, les réseaux que vous avez mentionnés revêtent une extrême importance.
Le même travail de sape se fait au niveau individuel. Vous avez dit que la pandémie a vraiment exacerbé les problèmes. Tout d'abord, comme vous le savez très bien, les gens ne pouvaient pas se rencontrer en personne. Ils ont dû faire une grande partie de leur travail en ligne, ce qui a créé d'énormes possibilités de surveillance par l'État des organisateurs et militants des droits de la personne. Encore une fois, nous devons penser à des réseaux et à des moyens permettant d'assurer différemment la sécurité des gens.
Je félicite sincèrement le Comité pour les recommandations qu'il a faites, ainsi que d'autres comités, celle, par exemple, de créer un volet d'immigration réservé aux défenseurs des droits de la personne, recommandation qui, comme vous le savez, a abouti à des mesures très précises. Nous en sommes très fiers et espérons que d'autres initiatives seront prises en ce sens.
Comme nous l'avons mentionné, il existe des besoins très précis que nous pouvons comprendre en écoutant les activistes. Beaucoup de défenseures des droits de la personne et de femmes bâtisseuses de paix disent qu'elles ne demandent pas le statut de résidente permanente. Elles doivent pouvoir s'échapper dans les moments de grand risque, mais leur but ultime est, bien entendu, est de rentrer chez elles. Ce n'est pas à cet obstacle qu'elles sont confrontées au départ.
Comme je l'ai mentionné, certaines personnes disent ne pas vouloir se retrouver dans un endroit où beaucoup de leurs concitoyens sont concentrés parce qu'elles doivent rester discrètes, ce qui les expose à des risques différents. Elles peuvent avoir des besoins différents en matière de soutien.
Nous devons recueillir des données désagrégées selon le sexe pour toutes les demandes et les réinstallations afin de nous assurer que les femmes et les hommes ont la même compréhension des possibilités qui s'offrent à eux. Le plafond de 250 inclut, bien sûr, les membres de la famille, et il est donc atteint très rapidement.
Merci.
:
Merci, monsieur le président.
Je vous remercie tous les trois d'être parmi nous aujourd'hui pour cette importante étude.
Je vais procéder assez rapidement. J'étais vice-président du Comité spécial sur l'Afghanistan, alors je vais commencer par la situation dans ce pays.
Beaucoup d'ONG canadiennes sont venues me voir, souvent en privé, pour me dire que le Code criminel canadien les empêchait de faire leur travail en Afghanistan. À ce sujet, le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté la résolution 2615, mais le Canada ne l'a jamais suivie. Au mois de juillet, tout le monde se disait d'accord, y compris la et le . Au mois de septembre, on nous a dit que les changements s'en venaient.
Jusqu'à présent, madame O'Neill, avez-vous vu un changement dans le Code criminel canadien concernant les ONG?
:
Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci à nos témoins. Grands cieux, quel groupe intéressant — tous l'ont dit — en cette Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes.
Madame Naraghi-Anderlini, je connais très bien les deux autres témoins et je les considère comme des chefs de file dans ce domaine. Votre témoignage a été tel que je n'hésite pas à vous mettre parmi les femmes les plus influentes qui militent pour les droits des femmes partout dans le monde. Je vous remercie toutes de ce que vous faites.
J'aimerais revenir brièvement sur ce que mon collègue du Bloc a dit. Nous sommes conscients que le Canada ne peut pas travailler en Afghanistan comme il le devrait parce que nous n'avons pas cette exemption humanitaire. Ce n'est pas sans conséquences. L'une de mes grandes préoccupations, c'est que, si nous ne faisons pas attention, si nous ne sommes pas réfléchis et, je suppose, si nous n'envisageons pas ce qui pourra survenir à l'avenir en Iran... Si nous devions, par exemple, déclarer que le CGRI est une organisation terroriste, serait‑il possible que cela ait pour résultat d'empêcher que des groupes soient en mesure de travailler avec la société civile en Iran? Est‑ce que cela limiterait ce que le Canada peut faire, faute d'avoir cette exemption humanitaire dans le Code criminel.
Puis‑je vous poser cette question, madame Naraghi-Anderlini?
Les sanctions en Iran sont si sévères à l'heure actuelle, et la répression par l'État tellement systématique, que l'idée même des organisations de la société civile est très différente. Cela dit, il devrait certainement y avoir des exemptions pour l'aide humanitaire, l'action civique, etc. Il devrait y avoir des exemptions pour permettre aux gens ordinaires d'envoyer des secours aux membres de leur famille.
Il est presque impossible de fournir des ressources aux gens ordinaires, y compris, soit dit en passant, aux Afghans qui ne font que transiter par l'Iran parce que, selon ce que nous savons des Afghans, par exemple, qui passent par notre réseau, ils font l'objet d'une vérification par l'Allemagne, mais doivent se rendre en Iran ou au Pakistan pour obtenir leurs visas dans les ambassades dans ces pays. Il est vraiment important de disposer des moyens et des mesures nécessaires pour que les gens puissent passer, et la présence de l'ambassade et autres services est également très importante pour d'autres raisons.
Les exemptions humanitaires sont absolument essentielles. Nous n'arrivons pas toujours à obtenir de l'argent pour des organismes de bienfaisance qui s'occupent d'enfants atteints de cancer ou d'orphelins, par exemple. C'est censé être possible, mais cela a été très difficile.
Merci.
:
Bien sûr, merci beaucoup.
Il y a plusieurs choses.
Premièrement, nous pouvons apprendre d'autres pays comment ils s'attaquent à ce problème dans leurs programmes. J'ai mentionné que nous avons maintenant inclus des postes budgétaires pour la sécurité numérique des bâtisseuses de paix que nous soutenons. Je pense que nous pouvons poursuivre nos échanges avec d'autres pays afin d'apprendre quelles sont les meilleures solutions.
Nous avons travaillé dans différents forums. Par exemple, l'Organisation des États américains a maintenant un programme de cybersécurité, et le Canada a financé un cours en ligne gratuit sur la cybersécurité et l'égalité des sexes. Nous faisons donc au sein de diverses institutions multilatérales un travail de sensibilisation à cette question et de priorisation de la cybersécurité pour les femmes. Nous avons créé une bourse sur les femmes et la cybersécurité, et quelques autres choses.
Nous venons également de nous joindre — je pense que c'est une initiative qui mérite une attention accrue, y compris, je le souhaite, au niveau parlementaire — à ce qu'on appelle le partenariat mondial pour l'action contre la violence et le harcèlement sexiste en ligne. Nous reconnaissons ainsi la nécessité de travailler à l'échelle internationale pour définir les normes et les pratiques exemplaires.
Il faut aussi constater le peu de recherches faites dans ce domaine en vue de déterminer ce qui fonctionne réellement, ce qui fonctionne par rapport aux entreprises de TI, les entreprises de technologie, quel doit être leur rôle, quel doit être le rôle de la législation, puis quelle pourrait être précisément l'action des gouvernements.
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Nous reprenons nos travaux.
Bienvenue à tous au deuxième groupe de témoins en cette Journée internationale pour l'élimination de la violence à l'égard des femmes. Bienvenue à notre étude sur les femmes, en particulier celles de l'Afghanistan, de l'Iran et de l'Arabie saoudite, et sur les droits et libertés des femmes dans le monde.
Je remercie les témoins de leur présence.
[Français]
Parmi nous, en personne, nous avons Julia Tétrault‑Provencher, conseillère juridique pour Avocats sans frontières Canada.
[Traduction]
À distance, nous accueillons Meghan Doherty, directrice de la politique mondiale et défense des droits, d'Action Canada pour la santé et les droits sexuels. À titre personnel, nous accueillons Me Sayeh Hassan.
Merci à vous deux de vous joindre à nous virtuellement.
Nous allons maintenant commencer par Me Tétrault‑Provencher, pour cinq minutes.
Distingués membres du Sous-comité des droits internationaux de la personne du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international, je tiens avant tout à vous remercier, au nom d'Avocats sans frontières Canada, ou ASFC, de l'intérêt que vous portez aux droits et libertés des femmes et des filles autour du monde.
ASCF est une organisation non gouvernementale de coopération internationale qui, depuis 20 ans, contribue à la mise en œuvre des droits de la personne pour les femmes et les filles par le renforcement de l'accès à la justice et la représentation juridique.
En effet, plusieurs de nos projets financés par Affaires mondiales Canada visent la lutte contre les violences basées sur le genre, ce qu'on appelle les VBG, la promotion et la protection des droits sexuels et reproductifs des femmes et des filles, ainsi que la protection des défenseurs et des défenseuses des droits de la personne.
Dans les pays où ASFC intervient, soit la Colombie, le Honduras, le Salvador, le Guatemala, Haïti, le Mali, le Bénin, le Burkina Faso et la République démocratique du Congo, il est possible de dégager de notre expérience auprès d'organisations de défense des droits de la personne certaines tendances qui, tout en tenant compte des différents contextes, semblent assez répandues. J'aimerais aborder cinq de ces tendances dans le temps qui m'est imparti.
Premièrement, les normes, les pratiques et les croyances socioculturelles discriminatoires sont des obstacles considérables à l'accès à la justice des femmes et des filles. Ces dernières doivent pouvoir avoir accès à des services juridiques de qualité et bénéficier d'un accompagnement multisectoriel adapté à leurs besoins. À titre d'exemple, ASFC et ses partenaires ont renforcé les services d'assistance judiciaire et d'aide juridique au Mali, assurant un accompagnement sensible aux réalités des femmes et des filles victimes de VBG. Plus de 80 femmes victimes du conflit ont ainsi pu être représentées par des avocats et des avocates auprès d'instances nationales et internationales.
Deuxièmement, le rétrécissement de l'espace civique et démocratique ainsi que la montée des différentes formes d'extrémisme nuisent considérablement au travail des organisations de la société civile, qui ne peuvent plus défendre les droits de la personne des femmes et des filles et en faire la promotion. Nous sommes témoins de trois formes d'attaque contre les défenseurs et les défenseuses des droits de la personne, soit la criminalisation de leurs activités, les menaces et les attaques contre leur intégrité physique et leur vie, ainsi que la diffamation et les attaques publiques. Ces attaques touchent de façon disproportionnée les femmes qui défendent les droits de la personne.
Troisièmement, les femmes et les filles sont trop souvent exclues des cercles de prise de décision, et leurs expériences particulières ne sont pas prises en compte. Pourtant, nous avons constaté que, pour assurer la pérennité d’un processus de paix, notamment en matière de justice transitionnelle, elles doivent être parties prenantes, tant dans la vie politique que dans la vie économique et sociale. Elles doivent avoir leur place aux tables de négociations, comme le prévoit le Programme sur les femmes, la paix et la sécurité.
Quatrièmement, nous notons avec beaucoup d'inquiétude le non-respect grandissant de l'autonomie sexuelle et reproductive des femmes et des filles. Nous avons notamment été témoins de gouvernements qui ont tenté, parfois même avec succès, de criminaliser l'accès à l'avortement en toutes circonstances, ce qui va à l'encontre des normes internationales en la matière. ASFC et ses partenaires travaillent activement à protéger l'accès aux services de santé sexuelle et reproductive pour tous et toutes, notamment au Honduras, au Salvador et au Guatemala, en rappelant aux États les obligations internationales auxquelles ils sont légalement tenus.
Finalement, les femmes et les filles en situation de vulnérabilité ou de marginalisation, y compris les femmes et les filles en situation de handicap, celles vivant en milieu rural, celles vivant en milieu défavorisé, les personnes issues de la diversité sexuelle ou de genre, ainsi que les femmes appartenant à un groupe minoritaire, sont plus susceptibles de voir leurs droits et libertés être violés et de subir des VBG. Nous avons noté des cas de stérilisation forcée, de violence obstétrique et de mariage forcé visant particulièrement ces groupes de personnes. On ne peut non plus passer sous silence la pandémie de l'ombre et la montée des féminicides commis par des partenaires intimes ou des membres de la famille depuis le début de la pandémie de la COVID‑19.
À la lumière de notre travail, pour mieux protéger les droits des femmes et des filles, nous notons l'importance d'avoir un cadre législatif international qui est respecté à l'échelle nationale. À cet égard, nous recommandons en premier lieu au Sous-comité de profiter des forums internationaux pour demander aux États ne l'ayant pas encore fait de ratifier dès maintenant la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, y compris l'Iran, et de rappeler à ceux qui y sont déjà parties, dont l'Afghanistan et l'Arabie saoudite, leurs obligations en vertu de cette convention. Nous demandons également une contribution plus active, notamment en matière de coopération internationale, pour promouvoir des programmes d'aide qui se concentrent sur l'accès à la justice des femmes et des filles. Ces programmes devraient soutenir la protection des organisations locales de défense des droits des femmes et des filles ainsi que les avocates et les avocats spécialisés dans les questions de VBG.
Cette brève allocution visait à offrir un aperçu général de notre expérience. Je me ferai un plaisir de vous donner plus de détails sur certains enjeux lors de la période réservée aux questions.
Merci beaucoup de votre temps.
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Merci, monsieur le président.
Nous sommes en train de traverser des crises concomitantes sur les plans de la santé, de l'économie, de l'environnement et de l'aide humanitaire. Tous ces facteurs ont des répercussions profondes et différenciées selon le sexe, qui sont aggravées par la situation sociale, économique et géographique des femmes. Ces répercussions sont indéniables et comprennent une hausse marquée des taux de féminicide et de violence fondée sur le sexe, par l'incapacité d'accéder aux services essentiels de santé sexuelle et reproductive ou de les payer, par une augmentation du travail non rémunéré, par une plus grande précarité, par des salaires moins élevés et par moins de protections des travailleurs. Ce ne sont pas là des effets secondaires malheureux et inévitables d'un monde en tourmente, mais un échec lamentable des droits de la personne et de ceux qui sont responsables de les défendre.
Ce qui rend ce moment de l'histoire particulièrement dangereux pour les femmes, c'est qu'en même temps que ces crises, nous assistons également à un sentiment antidémocratique croissant au sein de démocraties bien établies, à l'émergence de régimes d'extrême droite et autoritaires, à une accélération de la propagation de la désinformation, à une érosion délibérée de la confiance dans les institutions chargées de faire respecter les normes et les règles en matière de droits de la personne, et à une augmentation de l'organisation transnationale et du financement parmi les groupes suprémacistes blancs et les acteurs opposés aux droits de la personne et à l'égalité des sexes.
Cette confluence d'événements et d'acteurs a entraîné une intensification sans précédent des attaques contre les droits liés à la sexualité, au genre et à la reproduction, contre ceux qui les défendent et contre les mécanismes que nous utilisons pour obtenir protection, recours et responsabilisation. Cela se fait en ligne, dans les écoles, dans les parlements, dans les bureaucraties, dans les tribunaux et aux Nations unies.
En septembre dernier, des Afghanes défenseures des droits de la personne se sont adressées au Conseil des droits de l'homme pour demander à la communauté internationale d'agir en réponse à l'effacement complet des femmes de tous les aspects de la vie publique depuis l'arrivée au pouvoir des talibans. En Arabie saoudite, les femmes sont emprisonnées pour des décennies en vertu des lois antiterroristes de l'État pour avoir publié sur Twitter. Les récentes manifestations en Iran, déclenchées par le meurtre de Gina Mahsa Amini, arrêtée pour avoir violé des lois strictes sur les vêtements que les femmes peuvent porter, sont vraiment emblématiques de la façon dont les droits et le corps des femmes sont profondément liés à l'État-nation.
Aucun pays ni aucune région n'est à l'abri, et ce serait une erreur de penser que les violations des droits des femmes se produisent seulement dans ce que nous considérons comme des États répressifs. Il suffit de regarder la récente décision de la Cour suprême des États-Unis qui a annulé près de 40 ans de protection fédérale du droit à l'avortement.
La question est de savoir pourquoi ces acteurs ciblent l'égalité des sexes et les droits sexuels et reproductifs. Le genre et la sexualité sont des concepts profondément symboliques et culturellement significatifs dans toutes les sociétés. Les acteurs antidémocratiques comprennent le pouvoir qui découle de l'utilisation de questions qui peuvent être controversées sur le plan culturel, comme l'avortement, les droits des transgenres et l'éducation sexuelle, pour galvaniser les gens et obtenir leur soutien.
Au cœur de bon nombre de ces mouvements contre les droits, il y a l'engagement à perpétuer les familles patriarcales et les systèmes hétéronormatifs axés sur la reproduction, lesquels peuvent exister seulement par le contrôle du corps, de la sexualité et de l'expression de genre des femmes. À ce titre, la mise en œuvre des droits sexuels et reproductifs et de l'égalité entre les sexes constitue un défi direct aux autocrates et aux mouvements populistes qui ont défini et ciblé ces droits comme des menaces à leur objectif. Les défenseurs féministes des droits sexuels et reproductifs sont aux premières lignes des attaques contre les droits de la personne et la démocratie et sont exposés à d'énormes risques pour leur vie, leurs moyens de subsistance et la sécurité de leurs familles.
Lorsqu'il est question d'accès à l'avortement, de violence sexiste ou de mariage précoce et forcé, il s'agit aussi de démocratie, de droits de la personne, de consolidation de la paix et de liberté face à la tyrannie. Lorsque nous identifions des acteurs étatiques et non étatiques qui organisent, financent et influencent les institutions démocratiques afin de miner l'autonomie physique, les droits des femmes et les droits des personnes LGBTQI, nous observons des signes clairs que la démocratie est menacée.
L'histoire nous a montré que la justice sociale, les droits des femmes et les mouvements féministes sont à l'avant-garde de l'élargissement et du renforcement des droits de la personne partout dans le monde. Les politologues ont largement documenté le fait que la promotion des droits des femmes et la démocratie vont de pair, puisque la participation politique des femmes est une condition préalable à un véritable progrès démocratique égalitaire.
Pour renverser le cours des violations en cascade des droits des femmes, il nous faut nous engager le plus fermement possible au côté des mouvements féministes et de justice sociale à l'échelle nationale, dans tous les aspects de la politique intérieure et étrangère du Canada.
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Je vous remercie de me donner l'occasion de m'adresser au Sous-comité des droits internationaux de la personne sur la question de la diminution rapide des droits des femmes et des filles en Iran.
C'est la première fois que je comparais devant le Sous-comité, et j'en suis heureuse. Merci beaucoup de m'avoir invitée.
Je vais vous parler un peu de moi pour mettre en contexte le témoignage que je vous présente aujourd'hui. Je suis née en Iran en 1980, juste après la révolution et après que le régime islamique eut détourné la révolution et pris le contrôle du pays. Quand j'avais sept ans, mes parents ont décidé de fuir l'Iran, en partie parce qu'ils ne voulaient pas que ma sœur cadette et moi grandissions sous un régime répressif qui ne respectait pas les droits des femmes.
Ma famille et moi avons vécu en Turquie pendant cinq ans avant que nous puissions venir au Canada, alors que j'avais 13 ans, et je suis très reconnaissante de la décision difficile que mes parents ont dû prendre et de la possibilité de vivre au Canada.
Je défends ardemment les droits de la personne et la démocratie en Iran depuis 20 ans. J'ai commencé à militer pendant mes études de premier cycle à l'Université Carleton, où ma sœur et moi avons créé ce qui est, à ma connaissance, la première association d'étudiants iraniens axée sur les droits de la personne en Iran. J'ai continué à militer après être devenue avocate en tenant un blogue, en écrivant des articles, en restant en contact avec des militants en Iran, en m'adressant à des députés et en intervenant lors de diverses conférences nationales et internationales.
Dénoncer l'oppression du régime islamique n'est pas une activité populaire et, par conséquent, j'ai subi des représailles constantes de la part des partisans du régime, tant en Iran qu'au Canada. L'exemple le plus notable remonte à une dizaine d'années, lorsque la télévision nationale du régime a diffusé ma photo en direct à la télévision. On m'a nommée en soulignant que j'étais une ennemie de l'État. Je continue à voir d'autres personnes qui s'opposent ouvertement au régime subir des menaces et du harcèlement similaires.
Cependant, je me sens à la fois privilégiée et chanceuse parce que je vis au Canada, où je peux m'exprimer sans craindre d'être arrêtée, torturée, violée ou assassinée pour mes opinions et mes croyances. Malheureusement, ce n'est pas le cas pour des millions de femmes et de filles iraniennes qui ont subi exactement ce genre de traitement au cours des 40 dernières années. C'est cette oppression qui m'a incitée à dénoncer le régime islamique chaque fois que j'en ai eu l'occasion. Je veux m'assurer que le monde peut entendre la voix de millions de femmes et de filles iraniennes.
Depuis deux mois et demi, les femmes et les filles iraniennes ont pu montrer au monde entier non seulement l'oppression à laquelle elles sont confrontées depuis 40 ans, mais aussi le fait qu'elles sont prêtes pour le changement. Elles sont prêtes pour la liberté, et elles sont prêtes à risquer leur vie pour obtenir ce changement et cette liberté.
Les manifestations actuelles en Iran, que plusieurs d'entre nous appellent la révolution iranienne, ont commencé après le meurtre d'une jeune femme, Mahsa Amini, par des agents du régime parce qu'ils n'aimaient pas la façon dont elle portait son hidjab obligatoire.
Son meurtre a déclenché un tollé qui a mené aux plus grandes manifestations que nous ayons vues en 40 ans. Ce qui est unique dans ces manifestations, outre le fait qu'elles ont lieu dans tout le pays et qu'elles perdurent depuis deux mois et demi, c'est qu'elles sont menées par des femmes et des jeunes filles. Des écolières du primaire retirent leur hidjab obligatoire, retirent la photo de Khamenei dans leurs salles de classe et disent non à la répression. C'est une incroyable leçon d'humilité pour moi de voir ces jeunes femmes courageuses revendiquer ce qui leur revient de droit, le droit de choisir ce qu'elles portent, ce qu'elles pensent et comment elles se comportent. Je suis reconnaissante d'avoir l'occasion d'être ici aujourd'hui pour essayer d'être leur voix.
Le gouvernement du Canada a condamné les brutalités du régime au cours des deux derniers mois et demi, et il a pris des mesures limitées pour sanctionner les Gardiens de la révolution islamique iranienne en vertu de la Loi sur l'immigration. Il s'agit là de premières mesures très positives, mais le Canada peut faire beaucoup plus, notamment en inscrivant l'ensemble des Gardiens de la révolution islamique iranienne sur la liste des organisations terroristes du Code criminel.
J'espère que le gouvernement du Canada prendra des mesures concrètes et significatives pour aider ces femmes et ces filles courageuses à atteindre leurs objectifs de liberté et d'égalité.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie les témoins d'avoir pris le temps de se joindre à nous aujourd'hui.
Les droits des femmes sont des droits de la personne, et ils sont au cœur de notre politique étrangère. Nous avons entendu plusieurs témoignages sur la politique étrangère du Canada aujourd'hui, et nous sommes tout à fait d'accord avec le mandat bien intentionné de la en ce qui concerne la politique étrangère féministe sur la scène mondiale.
J'ai quelques questions au sujet de notre politique étrangère féministe internationale. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et si vous pouvez nous éclairer à ce sujet.
Je sais qu'Affaires mondiales Canada s'est engagé à consacrer 15 % de son aide bilatérale au développement international dans tous les domaines d'intervention pour mettre en œuvre des initiatives visant à promouvoir l'égalité des sexes et à améliorer la qualité de vie des femmes et des filles. Dans le cadre de sa lettre de mandat, la ministre Joly a été invitée à poursuivre l'élaboration et la mise en œuvre de la politique étrangère féministe du Canada avec l'appui d'organismes partenaires.
Ma question est la suivante: comment la communauté internationale peut-elle aider à promouvoir et à protéger les droits des femmes et des filles, l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes et des filles dans des contextes fragiles de conflits et d'après-conflits?
N'importe lequel des témoins peut répondre.
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Merci. Je peux commencer.
L'une des premières choses que je dirais à ce sujet, c'est que la communauté internationale, notamment les pays nordiques, affirme qu'il faut cesser de perpétuer cette fausse dichotomie entre le développement et les droits de la personne — entre les droits civils et politiques d'une part, et les droits économiques, sociaux et culturels d'autre part. Les principes fondamentaux des droits de la personne exigent que nous comprenions que tous les droits de la personne sont interdépendants et indivisibles, de sorte que nous ne pouvons pas bénéficier d'un ensemble de droits sans les autres.
Si l'on considère spécifiquement le contexte des États fragiles et des situations humanitaires, je pense que les droits des femmes — dans mon domaine d'expertise, en particulier les droits sexuels et reproductifs — ne peuvent pas être relégués uniquement à l'aide au développement ou à des conférences spéciales qui ne se concentrent que sur les femmes, pour ensuite être commodément laissés de côté quand on parle d'accords commerciaux, de financement de la dette, de ventes d'armes ou de réponses aux pandémies. On ne peut pas séparer ces choses, car nous voyons à quel point elles sont interreliées, et elles doivent donc faire partie intégrante du processus. Nous devons examiner les aspects civils et politiques ainsi que les droits économiques, sociaux et culturels.
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Merci, monsieur le président.
Je remercie toutes les témoins d'être parmi nous pour étudier cette question extrêmement importante et pour examiner le rôle que le Canada doit jouer dans tout cela.
Je vais m'adresser à Mme Tétrault‑Provencher.
L'étude porte sur les droits et libertés des femmes dans le monde, principalement en Iran, en Arabie saoudite et en Afghanistan. Or, il y a également lieu de s'inquiéter lorsqu'on observe ce qui se passe chez notre voisin du Sud en matière de libertés, où les lois antiavortement gagnent du terrain. Nous l'avons vu par la révocation de l'arrêt dans la cause opposant Roe et Wade. Je sais que cela peut sembler fou, mais, lorsque la révocation de l'arrêt a été prononcée, des députés et élus canadiens se sont même réjouis publiquement de la situation, sans aucune gêne, selon ce qu'on a pu voir sur certaines vidéos.
Lorsque des choses comme celles-là se passent dans des pays comme le Canada et les États‑Unis, est-ce dangereux pour les femmes sur le reste de la planète?
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Nous travaillons aussi dans des contextes où il n'y a pas nécessairement de conflits, même s’il peut y avoir des difficultés.
Pour ce qui est de la réparation, habituellement on se rend compte qu'elle est très difficile à obtenir, notamment pour les femmes et les victimes qui sont survivantes de violences basées sur le genre, et surtout dans le cas de violences sexuelles. Il y a beaucoup de stigmatisation. Les femmes n'ont pas accès au système et, bien souvent, elles n'y font pas confiance. Il y a des stéréotypes liés à cela. Souvent, elles sont aussi abandonnées par leur famille.
Pour elles, il est très difficile d'avoir accès à la justice, tout d'abord. Une fois qu'elles y ont accès, la réparation est mineure ou n'est pas mise en œuvre. Finalement, il n'y a pas de fonds qui existent pour cela, pas de mise en œuvre de la réparation, pas de suivi à cet égard. Il est donc très difficile pour les femmes d'avoir accès à la réparation. Dans beaucoup d'endroits, la réparation n'a jamais lieu. Il n'y a pas de mise en œuvre. C'est notamment le cas en République démocratique du Congo, où nous travaillons. Il faut souvent insister sur cela.
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Je voulais aussi poser une brève question.
Madame Doherty, honnêtement, vos commentaires faisant le parallèle entre la démocratie et les droits des femmes... Quand nous perdons les droits des femmes, nous perdons la démocratie et une grande partie de notre capacité. Je pense qu'il est très important de le reconnaître.
Il y a une chose sur laquelle j'aimerais revenir un peu quant à certains des témoignages précédents, c'est que nous n'avons pas en fait de politique étrangère féministe au Canada. Une telle politique n'a pas été mise en œuvre. Nous avons une politique d'aide internationale féministe qui est fantastique et que j'ai contribué à élaborer, mais nous n'avons pas de politique étrangère féministe comme telle. Cela signifie, comme vous l'avez souligné, Mme Doherty, que nous n'avons pas la perspective féministe dont nous avons besoin dans les domaines du commerce, de la défense et ainsi de suite.
Je veux que ce soit très clair pour ce témoignage.
Madame Doherty, quels sont les impacts directs sur les femmes quand nous n'appliquons pas cette perspective féministe en matière de politique étrangère pour des choses comme le commerce et la défense?
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Merci beaucoup de la question.
Dans le contexte du commerce, par exemple, on sait que les femmes sont les moins bien payées, qu'elles ont les conditions de travail les plus précaires et qu'elles sont les plus exposées à l'exploitation. Quand des accords commerciaux sont conclus sans tenir compte de la main-d'œuvre et de la protection des femmes dans certains pays ou certaines régions, nous exacerbons la vie des femmes, leur santé, leur sécurité et celle de leur famille.
Je prendrais l'exemple d'institutions financières internationales comme le FMI et la Banque mondiale, lorsqu'elles se penchent sur le refinancement de la dette dans le cadre d'une politique d'austérité. On sait que les femmes sont les plus touchées par les mesures d'austérité en matière de santé et de services sociaux. Si l'on ne tient pas compte de ces facteurs et si l'on ne reconnaît pas les effets néfastes que ces politiques peuvent avoir sur les femmes, beaucoup d'autres efforts déployés par le Canada et d'autres pays pour améliorer les droits des femmes seront compromis.
Il faut qu'il y ait une cohérence dans tous ces domaines de la politique étrangère si l'on veut vraiment défendre et promouvoir les droits des femmes. Il est insensé de le faire uniquement dans un domaine et de le miner dans un autre. Une politique cohérente est nécessaire pour y parvenir.
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Je vous remercie encore une fois de votre question.
Oui, le Canada a pris l'engagement énorme de consacrer700 millions de dollars pour la santé et les droits sexuels et reproductifs au cours des 10 prochaines années, dont 500 millions de dollars devraient être affectés aux domaines négligés de l'avortement, de la contraception, de la santé sexuelle et reproductive des adolescentes et de la défense des droits en matière de SDSR.
Des gens vont mourir si nous ne soutenons pas les organismes et les mouvements féministes qui travaillent fort chaque jour pour s'assurer qu'ils ont accès aux services et à l'information dont ils ont besoin. Cela est le plus urgent. Nous savons que les taux de mortalité maternelle dans le monde montent en flèche et... Désolée, je devrais reformuler ma phrase. Ils sont très élevés. Environ 300 000 femmes meurent chaque année, et leur nombre pourrait augmenter en raison de la pandémie.
Quand l'accès à l'avortement est restreint, les femmes cherchent des moyens non sécurisés si nécessaire, s'il n'y a pas de moyens légaux. Elles souffrent de graves problèmes de santé et d'invalidité à long terme si elles ont recours à des avortements non médicalisés.