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SRSR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la science et de la recherche


NUMÉRO 026 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 31 janvier 2023

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

     Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la 26e séance du Comité permanent de la science et de la recherche de la Chambre des communes.
    La séance d'aujourd'hui se déroule en format hybride, conformément à l'ordre pris par la Chambre le 23 juin 2022. Les membres y participent en personne dans la salle et à distance par l'entremise de l'application Zoom.
    Conformément à l'article 108 du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le lundi 26 septembre 2022, nous poursuivons l'étude sur les programmes internationaux ambitieux.
    Je voudrais formuler quelques observations à l'intention des témoins et des députés. Veuillez attendre que je vous accorde la parole avant de parler. Les personnes qui participent à la séance par vidéoconférence doivent activer leur micro en cliquant sur l'icône de microphone et le mettre en sourdine quand ils ne parlent pas. Pour entendre l'interprétation sur Zoom, elles ont le choix, au bas de leur écran, entre le parquet, l'anglais et le français. Les personnes dans la salle peuvent utiliser leur oreillette pour sélectionner le canal désiré.
    Souvenez-vous que toutes les interventions doivent s'adresser à la présidence. Les députés dans la salle qui veulent prendre la parole doivent lever la main, alors que ceux qui participent à la séance par l'application Zoom doivent utiliser la fonction « lever la main ». Le greffier et moi-même gérerons l'ordre des interventions de notre mieux, et nous vous remercions de votre patience et de votre compréhension à cet égard.
    J'informe le Comité que, conformément à notre motion de régie interne, tous les témoins ont procédé aux tests de connexion requis avant la séance. Le greffier avisera la présidence si certains témoins n'ont pas effectué le test.
    Je voudrais maintenant souhaiter la bienvenue à nos deux témoins d'aujourd'hui, soit Mme Young, qui témoigne en ligne pour la Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau; et M. Blais, de l'Université de Sherbrooke. Bienvenue à vous deux.
    Chacun d'entre vous disposera de cinq minutes pour faire son allocution d'ouverture.
    Nous commencerons par Mme Young.
    Je vous remercie, monsieur le président et distingués membres du Comité, du travail et de l'attention que vous accordez à la cause scientifique.
    Je suis née à Labrador City et j'ai grandi à Fort McMurray, en Alberta. Jamais je n'aurais rêvé d'avoir l'occasion de m'adresser à vous tous aujourd'hui.
    Je m'appelle Jennie Zin-Ney Young et je suis responsable de la direction générale de la Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau. Titulaire d'un doctorat en neuroscience de l'Université de l'Alberta, j'ai travaillé pendant 14 ans aux États-Unis au MIT à titre de cheffe scientifique du personnel pour le lauréat du prix Nobel Susumu Tonegawa et pour le directeur actuel de l'institut Picower Li‑Huei Tsai. Je suis revenue au Canada pour relever le défi consistant à comprendre le cerveau de manière différente, et j'espère que ce que vous entendrez aujourd'hui vous permettra de comprendre pourquoi.
    Nos cerveaux sont au centre de tout ce que nous faisons et ce que nous sommes. Ils conservent nos souvenirs, créent nos passions, produisent notre art et notre commerce, et édifient nos sociétés. Les lésions et les déficiences du cerveau peuvent avoir des répercussions sur tout ce qui fait ce que nous sommes, qu'il s'agisse de ce que nous percevons et ressentons ou de la manière dont nous pensons, planifions et agissons en interaction avec les autres et le monde.
    La triste réalité, c'est que presque toutes les familles canadiennes comptent un membre atteint d'un trouble neurologique, d'une lésion cérébrale, d'une maladie mentale ou d'une dépendance. Vous-mêmes connaissez probablement quelqu'un qui a un tel trouble. De plus en plus, nous voyons des gens comme Lou, un résidant d'Ottawa. Il fait partie des nombreuses personnes auxquelles nous avons parlé lors de l'élaboration de la stratégie nationale. Lou est atteint de la maladie de Parkinson. Un de ses enfants est autiste et il prend soin d'un parent atteint de démence précoce.
    À mesure que notre population vieillit, le fardeau des troubles cérébraux ne fera que croître. Pour la vaste majorité des troubles cérébraux, y compris les maladies mentales, les options de traitement sont malheureusement limitées, voire inexistantes. Dans bien des cas, il n'existe aucun traitement.
    Chaque Canadien mérite d'avoir un cerveau sain pour l'aider à réaliser son plein potentiel au cours de sa vie. Nous avons besoin d'une stratégie nationale de recherche sur le cerveau, car le défi est le suivant: chaque cerveau humain est composé de 100 milliards de cellules — soit autant qu'il y a d'étoiles dans notre galaxie — reliées entre elles par 1 000 billions de connexions neuronales. Chaque connexion façonne notre expérience et notre génétique particulières, et chacune change constamment. Il peut sembler impossible de comprendre le système biologique le plus complexe jamais connu, mais nous devons relever le défi, car plus nous comprenons comment un système fonctionne, mieux nous pouvons le réparer quand il fait défaut. Ce n'est qu'en étoffant nos connaissances grâce à la recherche que nous pouvons espérer trouver des traitements et des remèdes.
    Nous sommes sur le point de réaliser des progrès remarquables dans la compréhension du cerveau, des progrès qui pourraient, de notre vivant, permettre à nos familles de bénéficier des traitements et de remèdes. Les neuroscientifiques et les chercheurs en maladie mentale canadiens — notre pays figure parmi les cinq meilleurs du monde — sont sur le point de faire un pas de géant, un bon audacieux dans le domaine de la recherche sur le cerveau. De nouvelles technologies, comme l'intelligence artificielle, ont le potentiel de changer radicalement ce qui est possible dans ce domaine, et les nouvelles données sur le cerveau s'accumulent plus rapidement que jamais dans l'histoire.
    Imaginez les répercussions d'une percée concernant une maladie comme l'Alzheimer. Imaginez les économies de coût et l'allègement du fardeau sur notre système de soins de santé quand on peut améliorer la santé de millions de Canadiens parce qu'ils ont de meilleurs traitements et des cerveaux plus sains.
    Les troubles cérébraux coûtent 61 milliards de dollars par année à l'économie canadienne, et ce chiffre va croissant. Pour un pourcentage infime de ce montant, nous pouvons mettre en œuvre maintenant une stratégie nationale pour tirer parti des forces uniques à notre écosystème de recherche sur le cerveau et, surtout, améliorer le bien-être à long terme de nos citoyens, de nos familles et de nos communautés.
    L'esprit humain est notre ressource la plus précieuse au monde. Les États-Unis ont investi dans leur initiative nationale BRAIN, et l'Union européenne, la Corée, le Japon et la Chine ont pris des mesures semblables. Qu'il s'agisse de l'Amérique du Sud, de l'Afrique ou de l'Océanie, de nombreux autres pays sont en train d'élaborer des initiatives de recherche sur le cerveau, mais le Canada a devant lui une occasion incroyable et unique d'être à la tête d'un changement de paradigme mondial dans la recherche sur le cerveau.
    La Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau est un effort pancanadien dirigé par la communauté qui unit une coalition vaste et diversifiée dans l'écosystème de recherche sur le cerveau. Le Comité a entendu certains de nos chefs de file scientifiques et reçu 13 mémoires de la part d'organisations sans but lucratif et organismes caritatifs du secteur de la santé faisant partie de notre coalition. Cette stratégie repose également sur l'apport d'intervenants autochtones, de patients et de leurs familles. Plus de 25 organisations finançant la recherche sur le cerveau sont aussi mises à contribution, et nous tendons la main à des partenaires de l'industrie.
    Fort d'un réseau, de partenariats et d'une vision unifiée et consolidée, nous avons la responsabilité de changer la donne au chapitre de la santé et de la maladie du cerveau pour tous les Canadiens et pour le monde.
(1105)
     Je vous remercie.
    Je vous remercie, madame Young.
    Nous entendrons maintenant M. Blais.

[Français]

     Bonjour, et merci de me donner l'occasion de vous parler aujourd'hui.

[Traduction]

     Selon moi, les programmes ambitieux peuvent aider le Canada à jouer un rôle de chef de file sur la scène mondiale dans des domaines d'importance stratégique. Dans les minutes qui suivent, je traiterai de certains éléments qui, à mon avis, peuvent contribuer au succès des programmes ambitieux, ainsi que de certains aspects auxquels il faut porter attention. Mes propos s'appuient sur l'expérience que j'ai acquise en participant aux efforts à grande échelle déployés par le Canada, l'Europe et les États-Unis dans le domaine de la recherche quantique.
    Sachez d'abord que la recherche inspirée par la curiosité est à l'origine de l'innovation. Si les fondateurs de la physique quantique avaient mis l'accent sur l'innovation au lieu de chercher à comprendre les rouages internes de la nature à l'échelle de l'atome, ils auraient probablement investi leurs efforts pour améliorer le télégraphe ou la cire à chandelle, auquel cas les technologies qui ont transformé la société et dont le développement reposait sur la physique quantique, comme les ordinateurs, les lasers et les GPS, n'auraient pu voir le jour. En résumé, les révolutions technologiques sont le résultat de la recherche inspirée par la curiosité, et tout programme ambitieux devrait en tenir compte.
    En outre, par définition, les programmes ambitieux ont des objectifs ambitieux aux grands horizons. Le niveau et, surtout, la durée du financement devraient être établis en conséquence.
    Je citerai, comme exemple de programme existant qui fonctionne bien à cet égard, le Fonds d'excellente en recherche Apogée Canada, ou FERAC, qui offre du soutien pendant sept ans. Le financement du FERAC a eu un effet transformateur à l'Université de Sherbrooke. Sa durée de sept ans nous a permis d'adopter une vision à long terme pour le développement de la science et de la technologie quantiques, et d'agir en fonction de cette vision.
    Je recommande également que le financement des programmes ambitieux soit souple. De fait, la plupart des occasions de financement laissent peu de place aux idées nouvelles sur la manière optimale d'utiliser les fonds une fois que la subvention commence à être versée. Les initiatives à grande échelle et à long terme devraient avoir la latitude nécessaire pour utiliser le mieux possible les fonds accordés.
    Dans le cas du financement que le FERAC accorde à l'Université de Sherbrooke, la souplesse et la nature à long terme du programme nous ont permis de prendre des mesures qui ont débouché sur la création d'une zone d'innovation en science quantique dans la région de Sherbrooke afin d'appuyer de jeunes pousses sherbrookoises et d'attirer des entreprises étrangères. En bref, le FERAC a permis à l'Institut quantique d'avoir une incidence allant bien au‑delà de la création d'une science excellente. Cela a été rendu possible grâce à la longue durée et à la souplesse du financement.
    Cet exemple nous a également appris que le soutien des centres d'excellence peut avoir une incidence considérable. Ces centres peuvent permettre de créer la capacité d'attirer le talent et de rallier les efforts de toute la communauté de recherche pour que nous puissions réaliser des projets ambitieux.
    Dans le cadre des projets ambitieux, il faut également faire des choix. Pour avoir une incidence, ils doivent concerner des enjeux canadiens et se fonder sur nos forces. Les exemples qui me viennent à l'esprit sont ceux du vieillissement, de la biodiversité, des changements climatiques et des sciences quantiques.
    En ce qui concerne les sciences quantiques en particulier, il existe dans d'autres pays des exemples de programmes dont nous pourrions nous inspirer. Dans tous les cas que je connais, les programmes n'étaient pas prescriptifs quant aux objectifs scientifiques et technologiques, qui étaient plutôt définis par l'ensemble des acteurs universitaires, industriels et gouvernementaux.
    De façon plus générale, les programmes ambitieux peuvent contribuer à inspirer la prochaine génération de scientifiques et d'innovateurs. En appuyant ces programmes, le Canada peut montrer aux jeunes qu'il peut être fascinant de travailler dans les domaines de la science et de l'innovation, et les encourager à y faire carrière.
    Permettez-moi maintenant d'aborder quelques aspects auxquels il faut porter attention.
    D'abord, les occasions de financement mettent habituellement l'accent soit sur les opérations, soit sur les infrastructures. C'est notamment le cas du FERAC, qui finance les opérations, et de la Fondation canadienne pour l'innovation, qui finance les infrastructures. Cependant, les efforts de grande envergure ont besoin des deux. Il faudrait intégrer les deux formes de financement dans le programme ou, à tout le moins, assurer la coordination entre les organismes de financement.
    En outre, la collaboration internationale sera certainement importante dans tout programme ambitieux. La circulation transfrontalière des fonds accordés à la recherche peut s'avérer difficile, mais les programmes devraient prévoir des manières d'encourager les acteurs internationaux clés à contribuer à ces efforts.
    Il importe également d'attirer le talent au Canada, y compris des chercheurs établis et des étudiants. Cependant, malgré la pénurie de main-d'œuvre, il semble que cela devienne plus difficile que plus facile à faire.
    Enfin, la formation constitue un élément crucial. Par exemple, c'est un fait que nous ne formons pas suffisamment d'étudiants et de postdoctorants dans le domaine de la science et de la technologie quantiques. Un programme ambitieux dans ce domaine — et c'est probablement vrai pour tout programme ambitieux — devrait soutenir les établissements universitaires afin de former plus d'étudiants et d'élaborer des programmes novateurs pour contribuer à constituer des bassins de talents compétents pouvant combler les besoins des programmes ambitieux et de l'écosystème de jeunes pousses qui se formera autour de ces programmes.
    En résumé, un programme ambitieux aiderait le Canada à être à la fine pointe de la science et de la technologie. Les programmes ambitieux devraient porter sur les enjeux canadiens et s'appuyer sur nos forces.
(1110)
    La souplesse et le soutien à long terme sont essentiels. L'aide accordée aux centres d'excellence contribuera à la réussite des programmes ambitieux.
    Je vous remercie.
    Nous vous remercions, monsieur Blais et madame Young, de ces témoignages.
    Nous entamerons maintenant le tour de questions, avec des interventions de six minutes. C'est M. Soroka qui lancera le bal.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je commencerai avec Mme Young, qui est intervenue en premier et qui est une concitoyenne albertaine. Je suis enchanté de vous rencontrer.
    Vous étudiez le cerveau lui-même et tentez d'en comprendre les connexions. Vu que le cerveau contient un milliard de cellules, c'est assez difficile. Où avez-vous eu de grandes révélations ou découvert des choses incroyables jusqu'à maintenant?
    Je vous remercie, monsieur le président. C'est une excellente question.
    J'étudie la maladie d'Alzheimer depuis longtemps. Ce qui est épatant, c'est que nous commençons à accomplir des progrès à cet égard. Pendant longtemps, les gens ont cru qu'il était trop tard quand on détectait la maladie, mais le fait que nous disposions de nouvelles technologies qui nous aident à la déceler plus tôt et à mieux en comprendre l'éventail de répercussions montre à quel point le domaine a évolué, après des décennies de stagnation.
    Ce sont les nouvelles technologies comme l'intelligence artificielle et le fait de disposer de plus de données qu'avant qui nous permettront de faire fond sur les découvertes initiales et de réaliser un bond en avant.
(1115)
    Vous parlez de la maladie d'Alzheimer. J'ai eu et j'ai encore des membres de ma famille atteints de cette maladie.
    Vers quelles solutions pensez-vous que nous nous dirigions? Vers des traitements médicamenteux ou plutôt vers la stimulation cérébrale? Quels traitements peuvent renverser le processus ou au moins en arrêter la progression?
    C'est vraiment une excellente question.
    Il existe un certain nombre de traitements. À mesure que nous disposons de plus de données sur le cerveau, nous constatons que ce n'est pas qu'une seule maladie, car ses manifestations varient selon les gens. La stimulation cérébrale peut fonctionner pour certains, alors qu'un médicament fonctionnera pour d'autres.
    Je pense que c'est la raison pour laquelle nous avons essuyé autant d'échecs par le passé. Nous traitions la maladie comme un seul trouble et offrions le même traitement à tout le monde. Pour avoir un effet, nous devons adopter des approches variées et comprendre la complexité du cerveau chez les diverses personnes et populations. Il s'en vient de nombreuses technologies et approches nouvelles.
    Je poserai une question vraiment facile, alors. Pensez-vous pouvoir prédire quand on pourra guérir la maladie d'Alzheimer?
    C'est une question fort épineuse, mais je vous remercie de me la poser.
    Je sais que certains membres de notre coalition cherchent cette réponse. Le Centre d’innovation canadien sur la santé du cerveau et le vieillissement, ou CABHI, propose un objectif de « démence zéro » d'ici 2050. Je pense que c'est une cible à laquelle nous pouvons aspirer.
    Je pense que la stabilité et le financement à long terme d'un programme ambitieux de recherche sur le cerveau dont M. Blais a parlé permettront à quelque chose de semblable de survenir. D'ici 2050, nous pourrions non seulement avoir des traitements réels qui auraient un effet considérable et qui amélioreraient la qualité de vie, mais aussi atteindre potentiellement l'objectif de « démence zéro ».
    Madame Young, je vous remercie de cette réponse. Je voudrais seulement que vous trouviez une solution un peu plus rapidement. À mon âge, je pourrais en avoir besoin un peu plus tôt.
    Monsieur Blais, vous avez indiqué qu'il faut accorder un financement adéquat et souple aux programmes ambitieux. Auriez-vous l'obligeance de m'expliquer un peu plus en détail ce que vous entendez par là?
    Oui. Je vous remercie de la question.
    Permettez-moi de vous expliquer les choses ainsi.

[Français]

     Au moment de déposer la demande de subvention, on doit indiquer de quelle façon les dépenses vont être effectuées au cours des années couvertes par la subvention. On doit aussi indiquer le nombre d'étudiants et d'étudiants postdoctoraux ainsi que l'équipement qui sera utilisé, entre autres. Or, comme on vient de le mentionner, en réalité, il est difficile de prédire le rythme du progrès de la science et les besoins d'une année à l'autre. Il faut absolument que les programmes nous permettent, par exemple, d'acquérir du nouvel équipement au lieu d'embaucher comme prévu un certain nombre d'étudiants. C'est ce qui va vraiment changer la donne.
    On développe des écosystèmes dans le cadre des programmes internationaux ambitieux. Par exemple, à Sherbrooke, nous en développons par l'intermédiaire du Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada. Pour cela, nous avons besoin d'excellents talents en science, c'est-à-dire des chercheurs et des chercheuses, ainsi que des étudiants. Cependant, nous avons aussi besoin de personnel qui s'occuperait de la gestion de la recherche. Or, très peu de subventions majeures — voire aucune — permettent de subventionner ce personnel de recherche, sans lequel la productivité diminue de façon draconienne.
    Ma réponse est donc la suivante: nous avons besoin de flexibilité pour décider à quoi seront affectés les budgets et pour embaucher plus de personnel, ce que les subventions de recherche typiques n'offrent pas.
(1120)

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur Soroka.
    Nous accorderons maintenant la parole aux libéraux pour six minutes.
    C'est M. Lauzon qui aura la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.

[Français]

    Je remercie les deux témoins, Mme Young et M. Blais, de leur présence.
     Madame Young, vous nous avez soumis un mémoire en février 2022 dans le cadre de notre étude « Réussites, défis et opportunités pour la science au Canada ».
     Aujourd'hui, vous avez parlé de l'esprit, du cerveau humain et de tout ce que cela peut signifier. Vous avez donné des exemples en lien avec l'autisme, la maladie de Parkinson, le syndrome d'Asperger et d'autres maladies mentales. Vous avez aussi parlé d'un objectif « démence zéro » d'ici 2050, et des maladies liées au vieillissement.
    S'est-on donné des objectifs pour chaque maladie dégénérative? Pouvez-vous nous expliquer brièvement le processus qui permet de faire des prédictions sur 25 ans dans le cas de la démence, mais pas pour l'autisme ou le syndrome d'Asperger?
    Je vous remercie de votre question.
    Veuillez m'excuser, mais je suis en train d'apprendre le français.

[Traduction]

    Vous pouvez répondre en anglais si vous le souhaitez.
    C'est vraiment une excellente question.
    C'est parce que toutes ces maladies sont interreliées qu'une stratégie nationale de recherche fonctionnera. Certains mémoires présentés par des organisations membres de notre coalition contiennent des données à ce sujet.
    En ayant une compréhension fondamentale du fonctionnement du système, nous pourrons mieux corriger ce qui fonctionne mal. Nous l'avons découvert plus récemment, au cours des dernières décennies. Par exemple, la maladie d'Alzheimer a une importante composante inflammatoire ou pousse le système immunitaire à réagir, peut-être de la mauvaise manière. Or, il se trouve que d'autres maladies aux composantes inflammatoires connues, comme la sclérose en plaques, pourraient reposer sur les mêmes mécanismes à la base. Le fait de comprendre le cerveau et la manière dont il évolue au fil des âges nous permettra d'accumuler des connaissances grâce auxquelles nous mettrons au point des traitements pouvant traiter et guérir d'autres maladies également.

[Français]

    Dans ce même document, vous avez présenté six initiatives visant à transformer la recherche sur le cerveau, notamment un échange accru d'informations sur la plateforme scientifique dont vous avez parlé dans votre allocution d'ouverture.
    Au bénéfice des membres du Comité, j'aimerais que vous nous parliez des mesures qui en font un programme ambitieux.

[Traduction]

    Ce qui sous-tend et résume les six initiatives, c'est la nécessité d'investir dans les personnes, et comme l'a mentionné M. Blais, la stabilité et la souplesse du financement. Au lieu de se concentrer sur une question scientifique donnée, il faut plutôt rehausser l'ensemble de l'écosystème. Il faut renflouer les effectifs dans le milieu des neurosciences dans toutes les disciplines universitaires, dans l'industrie et ailleurs. Il faut être en mesure de renforcer la recherche sur le cerveau aussi bien dans les petits centres de recherche que dans les grands complexes scientifiques.
    Les six initiatives présentent des moyens précis de promouvoir les activités liées à la recherche sur le cerveau collaborative, transdisciplinaire et ouverte. Le Canada détient la force qu'il faut pour y parvenir. Moi qui ai travaillé dans de grands centres de recherche aux États-Unis, je peux dire que cette capacité est unique au Canada. Voilà la seule manière dont nous pouvons contribuer de façon significative à l'étude de quelque chose d'aussi complexe que le cerveau.
    Certaines des initiatives renferment le concept de science ouverte, c'est‑à‑dire le partage de données, de protocoles et de matériel. La culture du partage de données est très présente au Canada. Nous savons tous que la recherche est un milieu qui peut être très compétitif en ce qui a trait aux demandes de subventions, mais au Canada, nous préconisons le partage de données. Nous offrons des plateformes de recherche et nous mettons en commun les ressources.
    Lors de sa comparution devant le Comité, le Dr Guy Rouleau a dit que son équipe avait réussi à attirer un chercheur qui avait présenté sa candidature à un poste en Allemagne et qui s'était vu offrir une subvention de 10 millions d'euros. Le candidat est venu à McGill parce qu'en Allemagne, il faut 10 millions d'euros pour mettre sur pied un laboratoire, tandis que McGill offre des ressources et des infrastructures partagées. Les installations n'appartiennent pas à l'université; elles sont partagées et la recherche est collaborative.
    Nous voulons reproduire ce système dans l'ensemble de l'écosystème au Canada. Le pays compte 30 chefs de file de la recherche et directeurs d'institut, que ce soit dans de grands centres comme Toronto, ou encore à Lethbridge et à l'Université Carleton, ici à Ottawa. Nous voulons utiliser à bon escient cette excellence en recherche.
    Voilà ce sur quoi portent nos priorités. Nous voulons que l'excellence essaime partout au pays avec le concours de tous. Cette culture spéciale et unique est propre au Canada.
(1125)
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Blanchette du Bloc québécois.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président. Permettez-moi tout d'abord de vous saluer. C'est un plaisir de vous voir à la présidence du Comité.
     Je me permets également d'avoir une pensée des plus sincères pour notre collègue Kirsty Duncan, qui nous écoute peut-être. Je lui souhaite un prompt rétablissement. Nous avons hâte de la revoir.
    Monsieur Blais, c'est avec plaisir et fierté que je m'adresse à vous en français aujourd'hui. Le domaine quantique connaît présentement une réelle effervescence. C'est tout particulièrement le cas à l'institut que vous dirigez à Sherbrooke. On parle ici d'une action coordonnée du gouvernement fédéral et du gouvernement du Québec, notamment avec la Stratégie quantique nationale du Canada et la création d'une zone d'innovation. Des ressources importantes ont été accordées à la recherche et à la commercialisation dans le domaine quantique.
    De quelle façon ces actions positives ont-elles réellement changé les choses, notamment pour la recherche dans le domaine quantique au Québec?
    Je vous remercie de la question.
    Comme vous l'avez dit, l'Institut quantique de Sherbrooke bénéficie d'investissements importants, à la fois fédéraux et provinciaux. Au cours des dix dernières années, nous avons développé une vision, à savoir un écosystème qui permet à nos étudiants d'utiliser de belles idées issues de la recherche fondamentale et de créer leur propre entreprise. Cela a mené à l'apparition de plusieurs jeunes entreprises dans le domaine quantique à Sherbrooke.
    Avec le soutien du gouvernement du Québec, cela a fini par mener à la création d'une zone d'innovation en sciences quantiques. Vous y avez fait allusion plus tôt. On parle ici d'un investissement majeur de plus de 200 millions de dollars, qui soutient ces entreprises en démarrage en plus d'attirer des compagnies de l'extérieur, dont plusieurs ont déjà commencé à s'établir à Sherbrooke.
    Dans notre ville, tout comme dans la plupart des endroits au pays où il y a des centres importants dans le domaine quantique, notre produit d'exportation numéro 1 était auparavant le talent. Nous formions des gens, qui allaient ensuite travailler à l'extérieur du pays pour les grands comme Google, IBM, et ainsi de suite. Or, grâce aux efforts que nous avons faits au cours des dernières années, nous réussissons maintenant à garder ces talents à Sherbrooke. Nous investissons dans la formation de ces personnes et pouvons profiter de leur savoir-faire pendant les années productives de leur carrière.
    Comme je l'ai dit dans mon allocution, c'est vraiment le fait de recevoir un financement stable, à long terme et flexible qui nous a permis de développer cette vision et de progresser de façon agile vers cette idée.
     Merci, monsieur Blais. C'est un plaisir d'entendre parler également d'attraction et de rétention des talents. Je vais y revenir un peu plus tard.
    Est-ce que ce modèle dans le domaine quantique gagnerait à être reproduit dans d'autres domaines?
    Oui, tout à fait. Par contre, cela prend des endroits qui sont prêts à être agiles. Je peux dire qu'un des avantages de l'Université de Sherbrooke est que notre institution est de taille modeste, mais qu'elle sait être très agile et s'adapter rapidement aux situations changeantes.
     C'est ce qui peut parfois rendre ce modèle difficile à reproduire, comme je peux le constater en discutant avec certains de mes collègues. Toutefois, il ne fait aucun doute qu'il gagnerait à être reproduit.
(1130)
    Merci, monsieur Blais.
    Selon vous, comment le gouvernement fédéral pourrait-il concrètement vous aider à développer la recherche quantique?
    Merci.
    La Stratégie quantique nationale, qui représente un investissement de 360 millions de dollars sur sept ans, a été annoncée il y a seulement quelques semaines. C'est un excellent premier pas.
     Par contre, cette première stratégie, si je peux utiliser ce terme, utilise les programmes existants pour distribuer l'argent de façon très uniforme, mais aussi de façon aléatoire, en réponse à de petites demandes de subvention faites par de petits groupes d'un peu partout au pays. Avec cette approche, on va faire de la belle recherche, mais elle ne sera pas coordonnée, ce qui l'empêchera d'en faire un programme ambitieux. Il est donc temps de se montrer un peu plus stratégique.
     C'est pourquoi j'aime beaucoup l'idée des programmes ambitieux. Ce qui est important, c'est de soutenir les centres d'excellence en recherche quantique, qui sont peu nombreux au pays. Ils peuvent vraiment aider à rassembler la communauté. Grâce à leur écosystème et à leur excellence en recherche, ils sont capables de produire les résultats nécessaires à la réalisation de programmes ambitieux. Cela nécessite des ressources, évidemment.
    Bref, mon message consiste à dire qu'il faut mettre un peu plus de stratégie dans la Stratégie quantique nationale.
    Merci, monsieur Blais.
    Vous parliez de ressources. Nous allons revenir sur l'attraction et la rétention de talents.
    Le fait que le Canada est un cancre en matière d'investissements en recherche‑développement ne date pas d’hier. C'est le seul pays du G7 à avoir réduit ses investissements en recherche‑développement ces 20 dernières années. Il y a à peine quelques mois, la revue Science — ce n'est pas n'importe laquelle — décriait la situation et s'inquiétait des chercheurs qui viennent au Canada pour leur recherche, mais qui n'ont pas de financement.
     Cela envoie le mauvais message. Si on regarde de l'autre côté de la frontière, on voit que les Américains ont doublé le financement de la recherche dans le cadre de la National Science Foundation. Vous comprenez donc que les cerveaux fuiront inévitablement vers les États‑Unis. Comment faire pour garder les cerveaux ici s'il n'y a pas d'investissements de la part du gouvernement fédéral?
    C'est une excellente question.

[Traduction]

     Je suis désolé, monsieur Blais, mais je vais devoir vous demander de présenter votre réponse par écrit, car le temps est écoulé.
    Je vais le faire.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Blanchette-Joncas.
    Nous passons maintenant au NPD. Monsieur Cannings, vous avez six minutes.
    Je vais permettre à M. Blais de continuer sur le même thème. Je voulais de toute façon poser une question à ce sujet à un moment donné. Je la pose donc tout de suite.
    Au Comité et ailleurs au Parlement, nous entendons souvent dire, ces derniers temps, que le financement dans la formation de nouveaux talents, que ce soit des étudiants ou des chercheurs postdoctoraux, est insuffisant. Le nombre de bourses octroyées par les trois conseils n'a pas augmenté depuis 20 ans.
    Les programmes ambitieux et les idées novatrices, tout cela est très bien, mais ce que je trouve intéressant dans ce que vous avez dit, c'est votre description de ce que nous devons faire pour assurer le succès de ces programmes ambitieux.
    Sur ce point en particulier, que devrions-nous faire, selon vous, pour que les étudiants acquièrent leur formation au Canada? Quelles mesures aideraient à mettre sur pied des laboratoires et des programmes de recherche? Il est important d'accroître le financement pour permettre aux chercheurs qui travaillent sur ces programmes très importants de vivre décemment.

[Français]

     Merci de la question.
    Il y a beaucoup de choses à dire ici et je vais donc me limiter à quelques idées.
    Premièrement, les bourses étudiantes n'ont pas augmenté depuis plusieurs années, ce qui fait qu'en ce moment, les étudiants vivent carrément sous le seuil de la pauvreté. C'est donc une chose qu'il faut absolument changer.
    Attirer plus de jeunes en science et technologie devrait être notre mission à tous, et c'est difficile de le faire en ce moment. Les bourses à elles seules ne permettront pas d'y parvenir. Il faut aussi commencer très tôt et, pour cela, nous avons besoin d'un programme national afin d'éveiller l'intérêt des jeunes aux sciences et aux technologies. Sans cela, nous ne nous en sortirons pas.
    J'ajouterais que ce n'est pas la première fois que le domaine quantique change la société ou s'apprête à la changer. Il l'a fait avec le laser et les ordinateurs actuels. Sans le domaine quantique, nous ne pourrions pas nous parler aujourd'hui par l'entremise de Zoom.
    En observant les résultats de cette première révolution quantique, qui s'est faite autour des années 1950, on constate que le Canada n'a pas les industries requises, notamment celle des semiconducteurs, ni d'entreprises comme Apple, Facebook et compagnie. En recherche, le Canada était là dès le début de cette révolution, mais, par la suite, ces industries n'ont pas pris leur place au pays et se sont plutôt implantées aux États‑Unis, puis maintenant en Corée et à Taïwan.
    Il faut donc investir plus en recherche, mais de façon stratégique. Il faut être ambitieux et faire des choix. On ne peut pas être excellent en tout. C'est pour cela que j'apprécie beaucoup l'idée des programmes ambitieux. On doit choisir les programmes spécifiques dans lesquels on excellera. De plus, il faudrait privilégier l'ensemble de la chaîne, de la recherche fondamentale jusqu'à la commercialisation.
(1135)

[Traduction]

     Merci. Je vais poursuivre sur cette lancée.
    Vous avez parlé du premier Fonds d'excellence en recherche du Canada. Vous avez expliqué que ce modèle était bon en raison de la souplesse de son financement à long terme. Selon vous, ce modèle devrait‑il simplement s'appliquer aux programmes ambitieux ou devrions-nous y injecter davantage d'argent? Comment ce type de financement pourrait‑il cadrer avec des programmes ambitieux sur des champs de recherche que vous avez mentionnés tels que le vieillissement, la biodiversité et les changements climatiques?
    Faut‑il travailler à partir de ce fonds, ou faut‑il créer un modèle similaire pour les programmes ambitieux, mais qui serait peut-être encore plus ambitieux?

[Français]

    C'est un modèle à suivre, mais je ne pense pas que ce soit exactement le programme à utiliser. En effet, le Fonds d'excellence en recherche Apogée Canada soutient une institution dans sa mission. Pour sa part, un programme ambitieux devrait plutôt encourager plusieurs institutions canadiennes à travailler ensemble. Ce n'est pas interdit par le Fonds, mais ce n'est pas cet aspect qui est mis de l'avant. Or, le pays a besoin d'un programme qui possède une vision différente, un peu plus globale.

[Traduction]

     Vous avez parlé du partage de données et de la science ouverte. Pourriez-vous développer cette idée en une minute? On a déjà fait remarquer devant le Comité que le partage ouvert des données n'est pas une pratique usuelle en science, qui est un milieu très compétitif en règle générale.
    Comment votre stratégie permettra-t-elle de changer la donne, et comment pourrions-nous l'appliquer à d'autres branches de la science?
    Merci de votre excellente question.
    La science ouverte pose de nombreux défis. Au Canada, en dépit de la concurrence, il existe une culture de collaboration et de partage de données. Pourtant, les chercheurs qui veulent partager leurs données se butent souvent à des obstacles qui ne sont pas vraiment de nature culturelle, contrairement à ce qui existe dans des milieux vraiment compétitifs tels que le MIT, où je me trouvais. Ces difficultés sont dues à l'infrastructure.
    M. Blais a également souligné le manque de personnel dans la gestion des données de recherche. Les nombreux postes liés au partage de données ne sont pas soutenus par du financement. C'est surtout le cas dans les petits centres. Ce sont eux pourtant qui ont le plus besoin de partager leurs données et de participer à la recherche. Voilà quelques-uns des défis inhérents à la science ouverte.
    Je sais que le gouvernement a établi une feuille de route fédérale pour la science ouverte, ce qui est formidable, et que les trois conseils prennent des mesures pour instaurer cette pratique pour toutes les subventions octroyées par des organismes de recherche fédéraux. C'est tout à fait logique, car la recherche financée par des fonds publics devrait être rendue publique.
     Merci, madame Young. J'essaie seulement de respecter l'horaire de la séance.
    Nous passons maintenant aux séries de questions de cinq minutes. La parole est à M. Lobb.
(1140)
    Merci, monsieur le président.
    La dernière question portait sur la science ouverte et le partage de données. Le comité de l'industrie a traité de ce thème il y a environ sept ans.
    Lorsque le gouvernement provincial ou fédéral finance une initiative, à qui devrait revenir la propriété des résultats de recherche ou des percées réalisées? Est‑ce au groupe de recherche qui a obtenu le financement ou encore à l'université où la recherche a eu lieu que devraient aller ces droits? Est‑ce plutôt le gouvernement qui devrait détenir les droits ou avoir son mot à dire à ce sujet? À quoi ressemblent la plupart des ententes aujourd'hui?
    Merci pour cette question extrêmement pertinente.
    Vous avez énuméré un certain nombre de défis liés aux droits de propriété intellectuelle et d'autres questions du même genre qui viennent avec la science ouverte.
    Je vais commencer par le point que vous avez soulevé au sujet de l'industrie.
    La science ouverte et la commercialisation et la participation de l'industrie ne sont pas des concepts mutuellement exclusifs. En fait, au Canada, Biogen et Roche font partie des entreprises qui investissent dans des projets de science ouverte. Ces investissements ne se font qu'au Canada. Ces grandes multinationales savent que nous allons partager ces données et que les données qu'elles partagent ne mèneront pas immédiatement à la commercialisation. Ce ne sont que des données primaires. Il reste encore plusieurs étapes à franchir avant la commercialisation.
    Je veux seulement souligner que la commercialisation et la science ouverte ne s'opposent pas nécessairement. La relation est la même entre les droits de propriété intellectuelle et le partage ouvert de données. Tout dépend de la situation.
    À quoi ressemblent les ententes conclues par Biogen, un des exemples que vous avez fournis?
    Biogen et Roche financent des essais sur la sclérose en plaques au Canada.
    Ces essais sont-ils assortis de clauses qui prévoient que les droits de propriété des résultats, le cas échéant, iront à ces entreprises? Qui détient les droits des résultats de ces essais?
    Je ne connais pas les détails de cette entente juridique en particulier. En gros, elle permettait que... Ils recueillent un ensemble de données sur un certain nombre de patients, qu'ils suivent pendant plusieurs années. Les données sont ouvertes. Ils sont les premiers à pouvoir consulter les données, qui deviennent ensuite accessibles à quiconque veut les utiliser dans le cadre de ses recherches.
    Quant aux ententes, vous avez raison de dire que dans ce domaine, s'il y avait plus de surveillance du gouvernement fédéral ou peut-être une politique nationale qui aiderait les différents organismes qui financent et qui soutiennent la recherche à mieux établir les contrats, la pratique de la science ouverte serait beaucoup plus efficace, car les gens sont prêts pour cette transition. Par exemple, une bonne partie des organismes de financement que j'ai mentionnés — nous en avons plus de 25 à la table — financent déjà la science ouverte. Ils doivent chaque fois établir eux-mêmes leur contrat juridique. Ce processus est ardu et inefficace.
    Pendant la pandémie, nous avons tous constaté de visu que les contribuables paient deux ou trois fois. Ils paient pour la recherche sur la mise au point de vaccins. Une fois les vaccins créés, ils paient encore. Ils ne paient pas vraiment le prix du gros. Ils paient le plein prix, ou le meilleur prix que le gouvernement peut négocier à grande échelle. S'il y avait un programme ambitieux pour la recherche dans certains domaines de pointe tels que l'Alzheimer, la démence, la sclérose en plaques ou la sclérose latérale amyotrophique, nous serions en droit de nous attendre que les contribuables...
    Ce n'est pas trop demander, à mon avis. De toute manière, c'est une discussion plus vaste que nous tiendrons une autre fois.
    Ensuite, au sujet des programmes ambitieux et d'autres programmes similaires par rapport à la commercialisation, au fil des années, j'ai entendu toutes sortes de choses au comité de l'industrie et de la technologie et au comité de la santé. Il y a les gens qui aiment travailler dans les laboratoires universitaires. Je ne veux rien insinuer contre ces personnes, car elles sont visiblement très brillantes, mais elles aiment tout simplement travailler dans leur laboratoire. Elles ne s'intéressent pas à la commercialisation. Leurs travaux deviennent presque le projet de toute une vie, et c'est très bien ainsi. Par contre, si les travaux de ces chercheurs pouvaient être commercialisés pour le bien-être de l'humanité... Y a‑t‑il énormément de cas comme ceux‑là ou est‑ce seulement une légende urbaine?
(1145)
     Je pense vraiment que...
    Je suis désolé de vous interrompre, madame Young.
    Monsieur Lobb, puis‑je me permettre de demander une réponse écrite?
    Je serais tenté de contester la décision de la présidence, mais je vais passer l'éponge cette fois‑ci.
    Des voix: Oh, oh!
    Vous pouvez toujours contester, mais l'horloge dit que votre temps est écoulé.
    M. Ben Lobb: D'accord. Très bien. Merci.
    Le vice-président (M. Corey Tochor): Merci beaucoup pour les questions. Nous sommes surtout très reconnaissants pour les réponses que nous a fournies Mme Young aujourd'hui.
    Passons maintenant à Mme Bradford.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux deux témoins, qui travaillent dans des domaines qui, à mon avis, sont un terreau idéal pour les programmes ambitieux.
    Mes premières questions s'adressent à M. Blais. En décembre, le ministre Champagne a fait une annonce sur la stratégie quantique à l'Institut d'informatique quantique à Waterloo. Pourriez-vous nous dire comment la stratégie quantique contribuera à l'avancement des sciences et de l'innovation?
    Oui.

[Français]

     Je vous remercie de la question.
    Un des aspects importants de cette stratégie consiste à utiliser des programmes existants, en particulier ceux du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, et des subventions Missions d'Alliance, qui favorisent le lien entre les laboratoires universitaires et l'industrie. Environ la moitié des ressources proviennent donc du Conseil et visent la commercialisation. Il y a aussi beaucoup d'argent consacré aux stages en industrie comme les stages Mitacs.
    Par contre, comme je l'ai dit dans une de mes réponses précédentes, je pense qu'il y a place à davantage de stratégie dans la Stratégie quantique nationale du Canada, notamment pour soutenir les centres d'excellence et favoriser la collaboration entre eux, par exemple sous la forme d'un programme ambitieux. Cela pourrait nous aider à aller encore plus loin que le permet cette première mouture de la Stratégie.

[Traduction]

    Je voudrais savoir ensuite comment faire pour faciliter la collaboration entre les chercheurs en sciences quantiques, l'industrie et le gouvernement.

[Français]

    Je vous remercie de la question.
    Comme Mme Young en a parlé un peu dans une de ses réponses, cela met en cause plusieurs questions, dont certaines en lien avec la propriété intellectuelle.
     Il faut que les ententes de propriété intellectuelle soient claires. Elles se négocient généralement une université à la fois et, à ma connaissance, il n'y a pas de directive nationale à cet égard. Cela peut donc rendre les choses un peu plus complexes, car, s'il y a plusieurs partenaires universitaires, chacun aura ses façons de faire en matière de propriété intellectuelle.
    Cela dit, je pense que le programme de subventions Alliance est un bon début, parce qu'il permet aux entreprises de collaborer avec l'industrie.
    Par contre, dans le domaine quantique, il ne faut jamais oublier qu'il ne faut pas que travailler avec l'industrie. Il y a encore des découvertes fondamentales à faire. Si on ne soutient que la recherche effectuée par les laboratoires universitaires et l'industrie, on risque de passer à côté de nombreuses recherches fondamentales qui sont nécessaires au développement des technologies. Il est important de surveiller cela, mais il ne faut pas seulement investir dans le domaine de la recherche.

[Traduction]

    Je vais m'adresser très rapidement à Mme Young.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé de façon convaincante de la nécessité d'établir une stratégie plus claire sur la recherche sur le cerveau. Vos recherches portent-elles sur les lésions cérébrales? Nous savons que ces blessures peuvent être causées par des commotions à répétition ou par un traumatisme tel qu'un accident. Quelle est votre expérience et quel est l'état de la recherche dans ce domaine?
    Je ne connais pas aussi bien ce domaine. En revanche, au laboratoire où j'ai travaillé au MIT, nous nous penchions surtout sur la maladie d'Alzheimer, mais il y avait aussi quelqu'un qui étudiait les lésions cérébrales. Nous pouvions observer des similarités dans la réaction du cerveau lors de la réponse immunitaire, par exemple. Cela nous ramène encore une fois aux retombées que pourra avoir la recherche fondamentale sur le cerveau dans ces différents champs de recherche, que ce soit les lésions cérébrales ou la maladie d'Alzheimer.
    De fait, le Réseau canadien des commotions, qui se compose de chercheurs et de patients, et la fondation sans but lucratif Lésion cérébrale Canada font partie de cette coalition eux aussi.
(1150)
     De quelle manière l'ordre de priorité est‑il établi entre les différents champs de recherche?
    C'est une très bonne question.
    Au niveau de la stratégie nationale, nous nous concentrons sur ce qui pourrait aider l'écosystème en entier, mais il y a aussi différentes stratégies nationales portant chacune sur une question scientifique ciblée. De fait, une stratégie nationale sur la démence est en place et une stratégie nationale sur l'autisme est en train d'être élaborée. Les experts en la matière posent des questions scientifiques précises dans le cadre de ces stratégies, mais nous voulons également que les scientifiques soient correctement outillés pour trouver des remèdes à ces questions.
    Merci.
    Merci énormément pour les questions et les réponses. Je suis désolé, mais le temps est écoulé.
    Nous passons à la série de questions de deux minutes et demie.
    Nous commençons avec M. Blanchette-Joncas.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Blais, je vais de nouveau m'adresser à vous et revenir sur les questions que j'ai posées tout à l'heure.
    Dans vos derniers commentaires, vous avez parlé de la Stratégie quantique nationale. D'après ce que je comprends ou décode de votre message, investir dans cette stratégie est positif, mais il y a un manque de coordination et de vision de la part du gouvernement fédéral. Il n'y a pas de directives très claires.
    Est-ce exact?
    Je suis tout à fait d'accord sur cet énoncé.
     Merci.
    Je reviens sur l'attraction et la rétention des talents. J'ai dressé la table plus tôt en mentionnant l'insuffisance des investissements du Canada. Normalement, quand on se compare, on se console. Dans ce cas-ci, par contre, on se désole assurément. En effet, le Canada est en queue de peloton des pays du G7 pour ce qui est des investissements en recherche-développement.
    Vous avez dit qu'on se fondait sur un modèle basé sur l'attrait, mais qu'on s'assurait maintenant d'investir également des efforts dans la rétention des talents. Le Canada est pourtant le seul pays du G7 à avoir perdu des chercheurs au cours des six dernières années. Je souligne les efforts de l'Université de Sherbrooke et de certaines universités, mais, pour ce qui est de la diplomation aux études supérieures, le Canada est encore une fois en queue de peloton des pays du G7.
    On peut bien créer des stratégies quantiques nationales, d'autres stratégies et des programmes ambitieux, mais, si on ne dispose pas des investissements nécessaires, comment peut-on s'assurer d'avoir les meilleurs talents au sein de nos établissements et de centres de recherche comme le vôtre?
    Je vous remercie de la question, mais il n'est évidemment pas facile d'y répondre.
     Je pense qu'il faut continuer à attirer précisément certaines personnes en investissant des montants importants dans des programmes de chaires de recherche. Cela dit, certains de ces programmes, comme le Programme des chaires d'excellence en recherche du Canada, sont très impressionnants sur papier. Cependant, si on compare leurs ressources avec celles de l'extérieur, on voit qu'elles ne sont pas nécessairement suffisantes pour attirer de grandes vedettes, si vous me permettez l'expression.
    Je pense qu'il faut continuer à étudier la question des chaires de recherche.
    En votre qualité de professeur et de directeur scientifique de l'Institut quantique de l'Université de Sherbrooke, j'aimerais que vous me disiez quelles seront les conséquences concrètes du sous-financement du gouvernement fédéral sur cet institut.
    Il est certain que nous avons de la difficulté à attirer les meilleurs talents. Le Canada avait une longueur d'avance dans le domaine quantique, il était présent dans ce domaine depuis le début. Par contre, les autres nations sont en train de prendre les devants.
     Le danger est qu'il se passe la même chose qu'avec la première révolution quantique, que nous soyons présents au début, mais que nous n'ayons pas la capacité de faire la commercialisation une fois cette étape venue.

[Traduction]

    Encore une fois, merci beaucoup pour la série de questions.
    Nous passons maintenant au NPD et à M. Cannings.
    Merci.
    Je vais poursuivre sur ce que disait M. Blais. Mes questions vont s'adresser à Mme Young au sujet de la Stratégie canadienne de recherche sur le cerveau. J'aimerais savoir ce que font les autres pays. La stratégie canadienne est-elle façonnée selon ce qui se fait ailleurs, par exemple, dans le domaine de la recherche sur le cerveau et dans d'autres domaines?
    Comme nous l'avons entendu à plusieurs reprises, le Canada est un chef de file mondial de la recherche sur le cerveau. Risquons-nous de perdre ce statut? Je compare ce que nous faisons avec ce que font d'autres pays. Que devrions-nous faire dans une perspective à long terme?
    Lorsque vient le temps de se comparer aux autres pays, il est naturel de le faire avec les États-Unis. Leur initiative BRAIN, qui devait aller de 2014 à 2024, a été prolongée. En janvier dernier — il y a un peu plus d'un an —, les États-Unis y avaient investi 2,4 milliards de dollars. Ces investissements se chiffreront à plus de 5 milliards de dollars au terme de la période de 10 ans.
    La différence, c'est que le financement est réparti en 1 100 bourses octroyées à des centaines de chercheurs. Nous ne pouvons pas concurrencer ce niveau de financement au Canada, mais nous possédons d'autres forces que nous pouvons utiliser pour faire des investissements stratégiques judicieux. Voilà un point de comparaison.
    Les pays de l'Union européenne ont également mis en œuvre en 2013 une initiative sur le cerveau d'une durée de 10 ans. Ils en sont en ce moment à leur dernière phase d'investissement dans les infrastructures, et ce, à hauteur de presque 1 milliard d'euros. Le Japon a lui aussi lancé son initiative en 2014. La Chine et la Corée ont leur propre initiative sur le cerveau, qui ont toutes deux démarré à peu près en même temps.
    Des initiatives sur le cerveau prennent forme également en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Finlande. Même les pays qui ne sont pas membres de l'OCDE, en Amérique latine et dans les Caraïbes, mettent sur pied la leur. Il en est de même en Afrique.
(1155)
    Que pouvons-nous apprendre de ces autres initiatives? Comportent-elles des aspects qui pourraient s'appliquer au Canada?
    Les pays de l'Union européenne ciblaient des questions scientifiques précises, mais ils étendent désormais les investissements à la construction d'infrastructures pour la recherche. Nous pouvons en tirer des enseignements.
    Je pense que nous pouvons apporter une grande contribution. Nous avons donné une présentation à l'Initiative internationale sur le cerveau, événement auquel assistaient les pays que je viens de mentionner. Tous voulaient en savoir plus sur notre modèle. En effet, contrairement au leur qui est centré exclusivement sur les scientifiques, le nôtre a comme atout d'amener toutes les autres parties concernées à la table.
    Merci.
    Merci aux membres du Comité et aux témoins.
     Monsieur Blais et madame Young, je vous remercie de vos mémoires et des réponses que vous avez fournies au Comité aujourd'hui. Votre contribution nous sera très utile.
    Nous allons suspendre brièvement la séance avant de nous connecter à Zoom pour la partie à huis clos. Je demanderais donc à tous les témoins et invités de quitter la pièce. Je vous souhaite une bonne fin de journée.
    La séance est suspendue.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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