,
appuyé par le député de Lac-Saint-Louis, propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Madame la Présidente, je remercie mes collègues qui sont ici ce soir parce que c'est un projet de loi émanant des députés très important.
[Traduction]
Je suis très honorée de prendre la parole au sujet du projet de loi dans la première heure de l'étape de la deuxième lecture. Je veux commencer par un meegwetch bien senti et je veux reconnaître que nous nous trouvons en territoire algonquin. Ce territoire est le leur.
Je veux prendre le temps de décrire comment nous nous sommes retrouvés dans la situation actuelle, parce qu'il est rare qu'un projet de loi d'initiative parlementaire qui en est à la première heure de l'étape de la deuxième lecture possède un historique parlementaire et le projet de loi à l'étude en possède déjà un bien étoffé.
Je voudrais d'abord affirmer que le projet de loi, connu sous le nom de projet de loi , avait déjà recueilli de larges appuis lorsqu'il a été présenté par une autre députée lors de la législature précédente. C'est l'excellente ex-députée de Cumberland—Colchester, Lenore Zann, qui avait présenté le projet de loi. Lenore a été élue sous la bannière libérale au fédéral, mais c'est une personne très détachée de la partisanerie. Elle a également siégé avec distinction comme députée néo-démocrate à l'Assemblée législative de la Nouvelle‑Écosse et elle se préoccupe du racisme environnemental depuis longtemps. Elle m'a fait un grand honneur en présentant un projet de loi non partisan et je suis honorée que le président du comité de l'environnement soit le comotionnaire du projet de loi à l'étude. Nous voulions que cette démarche demeure non partisane à l'instar de la démarche d'origine pour le projet de loi C‑230.
Le projet de loi , qui portait le même nom, visait à remédier au racisme environnemental et à faire progresser la justice environnementale. Ce texte avait en fait été adopté à l'étape de la deuxième lecture et renvoyé au comité. Des amendements y avaient été apportés au comité de l'environnement, et je les ai intégrés dans le projet de loi pour l'étape de la première lecture. Le texte que nous avons sous les yeux est donc le fruit du travail déjà accompli par le Parlement.
Je souhaite de tout cœur que nous trouvions tous au fond de nous — quel que soit notre parti — la volonté d'adopter très prochainement ce texte à l'unanimité afin qu'il puisse sauter les étapes qu'il a déjà franchies et être renvoyé à l'autre endroit. Il pourrait alors devenir loi. Nous pourrons ensuite commencer à travailler en amont pour faire progresser la justice environnementale. C'est l'espoir que je porte ce soir en m'adressant à tous les députés.
Je suis reconnaissante de l'appui non partisan dont jouit déjà ce projet de loi, et je pense que nous serons témoins de cet appui en écoutant les discours à venir. Nous savons aussi — après la question que j'ai posée au pendant la période des questions — que le gouvernement soutiendra ce projet de loi. Nous avons bon espoir que ce texte sera adopté, mais nous aimerions que ce soit le plus rapidement possible.
J'en viens maintenant à l'aspect historique. Il ne s'agit pas d'un problème récent, et nous tardons à agir. Toutefois, avant d'aller plus loin, je tiens à dédier ce projet de loi à la mémoire d'une de mes amies, Clotilda Coward Douglas Yakimchuk. C'était une femme remarquable et une héroïne de sa collectivité. Ses parents sont venus de la Barbade au début du siècle dernier pour travailler dans l'aciérie de Sydney.
Clotilda était une femme noire et fière de l'être. Elle a été la première militante communautaire avec laquelle j'ai travaillé sur la question du racisme environnemental. Clotilda Yakimchuk est décédée il y a tout juste un an, le 15 avril 2021. Elle a été emportée par la COVID‑19. Elle a été la première personne noire à recevoir un diplôme d'infirmière d'une école de soins infirmiers de la Nouvelle‑Écosse. Elle a été la première femme noire à présider l'association des infirmières et infirmiers autorisés de la Nouvelle‑Écosse. Consciente de la pollution engendrée par les fours à coke de l'aciérie de Sydney et par l'aciérie elle-même, qui a entraîné des taux élevés de cancer dans la collectivité de Whitney Pier, elle s'est battue contre ce problème. Lorsque ce projet de loi sera promulgué, j'espère que les gens garderont à l'esprit qu'il est dédié à la mémoire de Clotilda Yakimchuk.
Une des leçons que j'ai apprises en nettoyant les étangs bitumineux de Sydney avec Mme Yakimchuk, c'est que nous pouvons reconnaître que les produits chimiques toxiques ne font pas de discrimination. Ils ne prêtent pas attention à la couleur de notre peau lorsqu'ils se logent dans notre corps, lorsqu'ils traversent le placenta pour se rendre jusqu'aux enfants, lorsqu'ils provoquent des cancers et lorsqu'ils causent des malformations congénitales. Ils ne se soucient pas de la couleur de notre peau. Cependant, la politique publique qui expose beaucoup plus souvent les peuples autochtones et les communautés de couleur à des produits chimiques toxiques tient compte de la couleur de la peau. Elle remarque si nous sommes marginalisés ou non. Elle remarque si nous avons de l'argent ou pas.
Par conséquent, c'est tout à fait le cas au Canada, comme le montrent toutes les preuves indéniables de la présence du racisme. Je sais que ce projet de loi met les gens mal à l'aise. Y a-t-il du racisme au Canada? Oui, il y en a. Nous venons de recevoir un rapport aujourd'hui sur le racisme qui pousse de nouvelles recrues à quitter l'armée. Il y a du racisme dans toutes les institutions de notre pays. Le racisme environnemental n'est pas quelque chose de nouveau.
Passons en revue une partie de l'histoire du racisme dans notre pays. Je vais me tourner vers des livres pour un moment. Le premier livre qui portait vraiment sur le problème a été publié en 1977 par l'un des grands journalistes canadiens, Warner Troyer. Le livre, intitulé No Safe Place, raconte l'histoire de la contamination de la communauté autochtone de Grassy Narrows par l'usine de papier de Dryden. Nous sommes toujours confrontés à cette contamination au mercure.
Un autre livre qui traite de la contamination au mercure de Grassy Narrows est intitulé A Poison Stronger than Love: The Destruction of an Ojibwa Community et a été écrit par Anastasia Shkilnyk. Elle était l'une de mes concitoyennes, et c'est également en sa mémoire que je présente le projet de loi aujourd'hui.
En 2000, en fait, j'ai coécrit avec Maude Barlow, qui était alors la présidente nationale du Conseil des Canadiens, le livre Frederick Street: Life and death on Canada's Love Canal, qui traite de la question que j'ai mentionnée, et j'y ai fait référence. C'est là que Clotilda Yakimchuk et moi sommes devenues amies. La contamination des étangs bitumineux de Sydney a entraîné les taux de cancer les plus élevés au Canada. C'était dans la région industrielle du Cap-Breton. L'endroit où s'étaient formés les étangs bitumineux était un estuaire où la communauté micmaque aménageait traditionnellement des camps de pêche d'été. La terre a été volée, bien sûr, et est ensuite devenue l'endroit le plus pollué au Canada en raison des fours à coke et de l'aciérie.
Entre les deux, il y avait une collectivité appelée Whitney Pier, composée presque exclusivement d'immigrants, dont beaucoup de personnes originaires d'Ukraine. J'ai mentionné que le nom de famille de Clotilda était Yakimchuk. Son mari, Dan Yakimchuk, était un travailleur de l'acier ukrainien. Whitney Pier est un véritable creuset culturel. C'est un endroit fantastique, mais le taux de cancer y est très élevé. La terre a été volée aux Micmacs. Ils ont aussi été contaminés. Tout comme la seule collectivité noire du Cap-Breton. Comme Clotilda me l'a décrit, et je l'ai noté dans le livre, il était impossible de trouver un logement ailleurs que dans cette collectivité. C'est donc dire qu'il y avait du racisme. Nous n'avions pas de lois Jim Crow en Nouvelle-Écosse dans les années 1970, mais cela aurait pu être le cas, car une infirmière expérimentée de race noire, revenue de Grenade avec ses enfants après le décès de son premier mari, ne pouvait trouver un logement que dans les quartiers les plus contaminés. Cela s'appelle du racisme environnemental. Voilà ce que c'est.
Ainsi, il y a toute une histoire derrière cela.
Pour ce qui est des livres, l’événement le plus important, sans aucun doute, est la publication en 2018 du livre There’s Something In The Water: Environmental Racism in Indigenous & Black Communities par Ingrid Waldron. Ce livre a changé la conversation au Canada. Ce projet a pris de l’importance quand, un an plus tard, Mme Waldron a coproduit l’adaptation cinématographique du livre avec le brillant acteur néo-écossais Elliot Page. Ils ont présenté ce concept aux gens, et ils font partie de cette histoire.
Examinons d’autres exemples d’action contre le racisme environnemental. J’ai été un peu choquée et perturbée, comme l’a été mon amie Lenore Zann, par certaines réactions au dépôt de ce projet de loi sur les médias sociaux, comme si nous étions d’étranges gauchistes ayant inventé ce concept et voyant du racisme partout. Non, ce phénomène a été prouvé empiriquement. Nous savons qu’il est réel.
En 1994, le gouvernement américain a agi parce qu’il avait des preuves claires que les personnes qui vivaient dans des communautés de couleur ou autochtones avaient beaucoup plus de risques d’être exposées à des niveaux de contamination par des substances toxiques qui mettaient en danger leur santé et celle de leur famille, de leurs enfants, de leurs voisins, des gens de leur quartier, et aussi d’autres personnes non racisées, mais marginalisées. Ainsi, cet enjeu a de nombreuses facettes. Si quelqu’un a du pouvoir et de l’argent et habite à Shaughnessy ou à Westmount, personne n’ira ouvrir un dépotoir de déchets toxiques dans sa cour. C’est la réalité. Au Canada, comme aux États‑Unis, si quelqu’un est marginalisé, n’a pas de pouvoir économique, est une personne de couleur ou autochtone, il a beaucoup plus de risques d’être exposé à la contamination par des substances toxiques. Les États‑Unis ont reconnu cela et, depuis 1994, le gouvernement américain, par l’intermédiaire de son Agence de protection de l’environnement, a un programme disposant de bonnes ressources pour la justice environnementale.
À quoi ressemble cette justice? Elle ressemble à des outils mis à la disposition des personnes marginalisées pour qu'elles puissent lutter pour leur propre santé, à des ressources pour les épidémiologues et les toxicologues, et à un engagement des gouvernements de verser l'argent nécessaire pour réparer les dégâts.
Au Canada, nous accusons du retard. Les États‑Unis ont pris des mesures. Encore une fois, je demande aux députés de m'entendre: les États‑Unis sont passés à l'action il y a 28 ans. Ce problème n'est pas nouveau. Nous accusons du retard, alors il faut adopter le projet de loi. Il faut défendre la justice environnementale au Canada avec un programme de justice environnementale bien financé et il faut enlever nos œillères et affirmer que oui, le racisme environnemental existe. Nous n'allons pas diluer le problème ni l'ignorer, parce que cela continue. Cela se produit encore de nos jours, où l'on essaie de rouvrir l'usine de Pictou et de recommencer la contamination qui a tant nui aux gens de Pictou Landing.
En passant, comme le est à la Chambre, j'en profite pour le féliciter d'avoir été le premier député fédéral de Central Nova prêt à dire que cette usine devait fermer parce que les emplois qu'elle procurait ne faisaient pas le poids devant les dommages que subissaient Boat Harbour, la communauté autochtone de Pictou Landing et les quartiers de Pictou. Il a fait preuve de courage quand il l'a dit. Des personnes tentent encore de rouvrir l'usine.
On peut aussi penser à Kanesatake, où il y a encore des déversements illégaux de produits chimiques toxiques dans la communauté mohawk et aux alentours. Une telle chose ne devrait pas être permise. Elle ne se produirait pas dans d'autres communautés.
Nous examinons encore Grassy Narrows et Sarnia, où se trouve la Première Nation aamjiwnaang. J'invite les députés de tous les partis à se rendre à Sarnia et à visiter les enclaves entourées d'usines pétrochimiques où se trouve le cimetière de la Première Nation aamjiwnaang. Ces enclaves sont complètement entourées, et l'industrie vient d'obtenir une prolongation de deux ans pour l'élimination du dioxyde de soufre provenant de la raffinerie. Les contaminants toxiques de ce genre touchent aussi les Canadiens des groupes colonisateurs. Dans le cas de la nation aamjiwnaang, toutefois, le centre de la communauté est complètement entouré.
On peut aussi penser aux sables bitumineux qui contaminent les communautés de la Première Nation de Lubicon depuis tellement longtemps que nous en avons parlé, en 2000, dans le livre Frederick Street: Life and Death on Canada's Love Canal.
Inutile de regarder très loin ou de remonter loin dans le passé. Il faut toutefois être honnêtes au sujet du fait qu'il s'agit d'une question pressante et qu'il faut agir. Je suis désolée d'avoir à dire cela, et c'est sans malice, car mes collègues libéraux appuient ce projet de loi, mais il est vraiment honteux que les élections aient été déclenchées au moment où elles l'ont été, car malgré tout le soutien dont il bénéficiait, ce projet de loi est mort au Feuilleton, et nous devons tout recommencer.
Tout comme mon amie Lenore Zann, qui est à Ottawa aujourd'hui en tant qu'ancienne députée et marraine d'origine de ce projet de loi, j'aimerais vraiment qu'il passe une deuxième fois à l'étape de la deuxième lecture. Nous en serions vraiment ravies. Je suis persuadée que d'autres députés de tous les partis aimeraient que nous n'ayons pas à le renvoyer une fois de plus au comité et à l'étudier de nouveau. Nous ne pouvons pas y apporter les mêmes amendements, car le projet de loi inclut déjà les amendements proposés la première fois.
Posons un geste pour la justice environnementale. Ayons le courage de dire qu'il existe une meilleure façon d'aborder le droit à un environnement sain, droit qui n'existe pas actuellement dans ce pays. Il est possible de concrétiser le droit à un environnement sain pour chaque citoyen, peu importe la couleur de sa peau ou sa situation économique. Les peuples autochtones vivent une double horreur: on leur vole leurs terres, qu'on remplit ensuite de produits chimiques toxiques. Aucun parlementaire ne devrait se sentir à l'aise de laisser une telle chose se poursuivre. J'implore donc tous mes collègues, peu importe le parti auquel ils appartiennent.
[Français]
Je comprends bien que c'est un enjeu difficile particulièrement parce qu'il est question de racisme et d'inégalités et c'est une question de mots. J'exige que tout le monde appuie ce projet de loi émanant des députés.
[Traduction]
Je pense qu'il me reste 35 secondes de temps de parole. Je tiens à répéter que ce projet de loi émanera de nous tous. Ce n'est pas un projet de loi du Parti vert. Enfin, mon collègue de m'appuie sans réserve, mais nous ne tenons pas à ce que ce projet de loi nous soit attribué exclusivement. Nous devons tous mettre la main à la pâte. Ce projet de loi changera les choses, notamment pour la justice environnementale, pour notre avenir et pour notre identité.
:
Madame la Présidente, j'aimerais moi aussi reconnaître que nous sommes ici aujourd'hui sur les terres ancestrales non cédées du peuple algonquin.
C'est un honneur pour moi de me lever cet après-midi pour discuter du projet de loi , marrainé aujourd'hui par la députée de Saanich—Gulf Islands, mais qui a vu le jour durant la 43e législature. Ce projet de loi, assez visionnaire puisqu'on ne parlait pas du concept à l'époque, avait été déposé par Lenore Zann, alors députée de Cumberland—Colchester. J'espère d'ailleurs qu'elle reviendra parmi nous à la Chambre bientôt.
D'une certaine manière, c'est effectivement un nouveau concept. La députée de Saanich—Gulf Islands a mentionné que le racisme environnemental était reconnu comme un problème depuis assez longtemps aux États‑Unis, mais cette notion représente tout de même un concept assez nouveau.
Je pense que le projet de loi C‑226 arrive à un moment propice dans notre société alors qu'elle s'interroge sur les systèmes qu'elle a créés. Lorsqu'il est question de discrimination et de racisme, qu'il soit environnemental ou autre, on reconnaît que ce n'est pas simplement une question de préjugés personnels, mais que cela existe peut-être de manière impersonnelle dans les systèmes que nous avons bâtis, lesquels reflètent une certaine façon de penser et une certaine échelle de priorité.
C'est donc un projet de loi qui nous fait réfléchir sur cette idée, laquelle n'était pas vraiment bien connue avant que Lenore Zann ne dépose son projet de loi. Je lui suis très reconnaissant d'avoir pris le temps à l'époque de venir parler de son projet de loi de manière virtuelle devant le Conseil jeunesse du Lac-Saint‑Louis, dont les membres n'étaient pas non plus au courant de cette notion de racisme environnemental dans le contexte du concept de justice environnementale.
J'aimerais maintenant parler un peu de ce que propose le projet de loi C‑226.
[Traduction]
Le projet de loi énonce les éléments qui seraient inclus dans une stratégie nationale, comme une étude examinant le lien entre la race, le statut socioéconomique et le risque environnemental. Il établit également une liste non exhaustive de mesures qui pourraient être prises pour faire progresser la justice environnementale. Ces mesures permettraient d'évaluer, de prévenir et de traiter le racisme environnemental, y compris d'éventuelles modifications de lois, politiques et programmes fédéraux, l'indemnisation des individus ou des collectivités, et la collecte d'informations et de statistiques relatives aux résultats en matière de santé dans les localités situées à proximité de risques environnementaux.
Voilà de quoi il s'agit au bout du compte. Nous voulons éviter que la santé et la qualité de vie de quiconque soient compromises en raison de leur identité et du groupe à proximité duquel ils vivent. Il s'agit de la qualité de vie et de la dignité de tous les peuples, quelle que soit leur origine.
Le projet de loi exige que le ministre dépose un rapport exposant la stratégie nationale dans les deux ans suivant la sanction royale, qu'il publie ce rapport sur le site Web du ministère et qu'il rédige et dépose un rapport sur l'efficacité de la stratégie tous les cinq ans. Le projet de loi s'aligne sur le plan du gouvernement visant à élaborer une stratégie de justice environnementale et à examiner le lien entre la race, le statut socioéconomique et l'exposition aux risques environnementaux.
Nous sommes prêts à travailler avec d'autres personnes non seulement pour que ce projet de loi soit adopté, mais aussi pour que son étude soit menée rapidement. Il est important d'assurer l'adoption rapide de ce projet de loi, car il arrive à un moment où nous prenons grandement conscience des effets du racisme systémique et où la question de la justice environnementale est de plus en plus préoccupante pour les Canadiens et pour le monde entier. Il devient de plus en plus évident que les effets bénéfiques et nuisibles qu'on observe dans l'environnement ne touchent pas de la même façon tous les groupes de la société.
Dans bien des cas, certains groupes et communautés, notamment les communautés autochtones, les communautés racialisées et les groupes qui se trouvent au bas de l'échelle socioéconomique, sont affectés de façon démesurée par les problèmes environnementaux comme la pollution et la dégradation de l'environnement. Je pense que la députée de a mentionné que, dans certains cas, les personnes qui sont désavantagées par une décision gouvernementale, quel que soit l'ordre de gouvernement concerné, ne sont pas nécessairement des gens appartenant à un groupe racial donné, mais des gens qui ont en commun de se trouver au bas de l'échelle socioéconomique.
En lisant, l'autre jour, j'en ai appris davantage sur un quartier de Montréal qui s'appelait le Village-aux-Oies et qui n'existe plus aujourd'hui. Il a été essentiellement rayé de la carte à l'approche de l'Expo 67. Situé près du quartier montréalais de Griffintown, le Village-aux-Oies était un quartier pauvre, mais habité par des gens fiers dont les propriétés étaient bien entretenues. Le maire de l'époque, Jean Drapeau, ainsi que son administration, jugeaient que cet endroit, qui se trouvait à proximité du site choisi pour l'Expo 67, allait quelque peu gâcher la vue aux visiteurs de l'exposition universelle. C'était avant la mise en place des évaluations environnementales et le genre d'engagement militant que nous voyons de nos jours.
Il a été décidé que cette zone serait rasée, et on a avancé que c'était pour des raisons d'insalubrité et de santé publique. J'ai lu que lorsqu'ils ont pris connaissance du rapport du service de santé publique de la ville de Montréal, il était indiqué qu'il s'agissait d'un quartier bien entretenu. Le statut socioéconomique y était peu élevé, mais le quartier était bien entretenu. Les habitants étaient fiers de leur maison et de leur quartier. Je le répète, cette discrimination n'était pas de caractère raciste, mais le gouvernement a usé de son pouvoir pour bafouer les droits d'un groupe défavorisé sur le plan socioéconomique.
Cela me fait penser à la construction de l'autoroute Ville-Marie à Montréal. Elle n'a pas été construite dans les quartiers les plus favorisés et elle a engendré le déplacement d'une population racialisée. Une bonne partie de la communauté afro-canadienne de la Petite-Bourgogne s'est retrouvée déplacée. Aujourd'hui, ce quartier n'est pas aussi intact qu'avant. Il est traversé par une autoroute et il se trouve en bas d'une colline au lieu d'être en haut.
Cette communauté a toute une histoire. Oscar Peterson venait de là. L'église Union United se trouve dans ce quartier. Jackie Robinson, lorsqu'il jouait pour les Royaux de Montréal, fréquentait cette église. L'histoire de ce quartier a des racines très profondes. Il existe un film d'archives montrant la démolition des maisons pour construire l'autoroute. Ce quartier n'était pas uniquement peuplé de Noirs, mais c'était un quartier pauvre.
Ce projet de loi nous permet de réfléchir à la façon dont les décisions doivent être prises pour nous assurer qu'elles ne sont pas motivées par des préjugés implicites. La justice environnementale représente une grande avancée pour notre société. Cela signifie que nous reconnaissons mieux les intérêts des concitoyens, leur dignité et leur qualité de vie, quels que soient leur parcours, leur statut socioéconomique ou leur race, et que les décisions que nous prenons se font dans ce respect.
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Madame la Présidente, je suis heureux de me joindre au débat sur ce projet de loi. Je veux remercier la députée de d’avoir présenté cette mesure législative. Je sais qu’elle est une ardente défenseure de l’environnement et qu’elle a toujours de bonnes intentions quand elle propose un projet de loi.
Je partage sa préoccupation au sujet des projets de loi qui sont morts au Feuilleton en raison d’élections inutiles et coûteuses déclenchées par le gouvernement libéral. Le projet de loi , qui visait à exonérer les champs agricoles de la taxe sur le carbone, est également mort au Feuilleton. J’espère que les députés, y compris celle de , essaieront d’aider à faire adopter rapidement le projet de loi .
En ce qui concerne le projet de loi de la députée, j’ai certes quelques réserves. Premièrement, les stratégies nationales me préoccupent en général. Le gouvernement actuel a de la difficulté avec certaines mesures législatives existantes qu’il essaie de faire adopter au sujet de l’environnement. Aujourd’hui, nous avons reçu cinq rapports du commissaire à l’environnement, et le gouvernement a obtenu la note de zéro dans chacun des cinq. Au baseball, comme moyenne au bâton, c’est un désastre. Quand il s’agit du gouvernement, c’est une tragédie pour notre pays.
Lorsqu'il s'agit de concevoir une stratégie nationale dans un domaine donné, nous devons tenir compte de la capacité du gouvernement de mener à bien ce projet ambitieux. Je crains que nous n'ayons pas les capacités nécessaires. Pensons, par exemple, à la motion que la Chambre a adoptée à l'unanimité au sujet de la mise en place d'une ligne de prévention du suicide, le service 988. Nous en avons parlé tout récemment. Cela fait 500 jours que cette motion a été adoptée à l'unanimité à la Chambre. Absolument rien n'a été fait depuis ce temps, et les Canadiens attendent toujours des progrès dans ce dossier.
La solution à ce problème ne passe pas par l'adoption d'une stratégie nationale. Nous pourrions peut-être envisager d'apporter des modifications à des projets de loi déjà à l'étude. Par exemple, le député a parlé d'inscrire le droit à un environnement sain dans la loi. Or, cela fait déjà partie de certaines modifications à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement qui sont actuellement à l'étude au Sénat. On s'est déjà penché sur ce genre de mesures législatives.
Nous avons déjà un cadre réglementaire compliqué pour ce qui est de la réalisation des projets au Canada. J'ai mes doutes à l'égard de cette stratégie nationale, de ce qu'elle accomplira et de la manière dont elle risque de compliquer tous ces processus. En examinant le projet de loi et ce dont il traite, notamment des modifications possibles à des lois, à des politiques et à des programmes fédéraux, on constate qu'il accorderait un pouvoir très vaste. Nous ne savons pas exactement où cela pourrait mener. Je ne suis pas tout à fait certain si cela créerait plus d'incertitude dans d'autres domaines.
En ce qui a trait à l'indemnisation des particuliers ou des collectivités, il n'y a aucun paramètre pour indiquer ce que cela pourrait représenter, la manière dont ce sera élaboré et ce que cela signifiera. En règle générale, je n'aime pas donner des chèques en blanc illimités à un gouvernement, surtout pas au gouvernement actuel. En ce moment, ce projet de loi nous préoccupe certainement, car nous ne savons pas à 100 % ce qu'il signifiera.
Évidemment, nous, députés conservateurs, voulons soutenir un environnement sain et nous tenons à lutter contre le racisme. Toutefois, pour les raisons que je viens d'énumérer, je ne crois pas que cette mesure législative atteindra ces objectifs. Je ne pense pas que le gouvernement fera le travail. La façon appropriée de traiter ce genre de question est d'examiner les lois en vigueur, comme la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Si nous voulons, par exemple, recueillir des informations et des statistiques sur les revenus, nous pourrions étudier la possibilité de modifier une des lois actuelles. Si nous voulons obtenir des informations et des statistiques sur l'emplacement des risques environnementaux, je pense que nous pourrions, entre autres, examiner les dispositions des lois en vigueur et voir si nous pourrions ajouter des mesures de protection pour les Canadiens.
Je ne pense pas que la meilleure façon de procéder est d'attendre deux ans pour que le gouvernement mette en place une stratégie nationale, ce qui donnerait lieu à des débats sans fin. En plus, je ne sais même pas si des mesures seraient mises en œuvre.
Je salue le travail rigoureux et assidu de la députée sur ce projet de loi, mais je ne pense pas que nous pourrons l'appuyer dans sa version actuelle.
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Madame la Présidente, j'aimerais à mon tour remercier la députée de Saanich—Gulf Islands de permettre le discours, la controverse et les discussions. Je dirais que nous avons pris cela à cœur, au Bloc québécois. Nous en avons discuté pendant plus d'une heure. Il se pourrait cependant que nous ne soyons pas d'accord sur tout.
Pour nous, iI ne fait pas de doute que le gouvernement fédéral a une responsabilité à l'égard de certaines populations au Canada, des citoyens qui subissent des inégalités dans leur rapport à l'environnement. L'état et la qualité de l'environnement, nous avons vécu cela de façon assez dramatique depuis deux ans. Nous savons que cela revêt une importance capitale pour tout le monde.
Le Bloc québécois est en faveur de la volonté exprimée dans le titre et dans le préambule du projet de loi , quand il est question de justice environnementale. Si le Parlement doit adopter une telle loi, nous pensons que le concept de justice environnementale doit en être le sujet principal et le concept central.
Les conditions de vie dans lesquelles certaines personnes et certaines communautés au Canada en rapport avec l'environnement se trouvent — je pense particulièrement ici à l'eau potable — sont inconcevables et irrecevables dans un pays membre du G7 et supposément riche.
Conséquemment, nous jugeons qu'il est justifié que la Chambre exprime sa volonté d'agir contre les phénomènes d'iniquité et de discrimination liés à l'environnement, de les étudier plus en profondeur, d'en comprendre les mécanismes et d'explorer des solutions potentielles. Il n'y a pas de souci sur ce plan.
L'existence de problèmes de disparités géographiques dans le niveau de vie et dans l'accès à un environnement de qualité est en effet préoccupante. Il y a lieu de s'inquiéter du fait que des citoyens, qui sont issus de l'immigration, qui appartiennent à des minorités visibles et à des communautés autochtones ou qui sont socio‑économiquement défavorisés, soient directement affectés par ces disparités.
Ainsi, le Bloc québécois est en faveur d'une action gouvernementale pour contrer les inégalités subies par toutes les communautés dans leur rapport à l'environnement. Toutefois, en contexte fédératif, nous ne sommes pas convaincus que l'adoption de cela, d'un océan à l'autre, soit la bonne approche si l'on souhaite protéger les droits de l'ensemble de la population en matière de santé et d'accès à un environnement de qualité.
Une action gouvernementale canadienne devrait tenir compte des prérogatives du Québec et des provinces, parce que la protection de l'environnement, la santé et les services sociaux relèvent du Québec et des provinces. Il faudrait donc reconnaitre l'expertise du Québec dans ce domaine.
Dans tous les cas, nous sommes convaincus qu'il serait inconséquent de prétendre lutter pour la justice environnementale au palier fédéral et de ne pas à la fois réclamer la défense de la souveraineté environnementale du Québec.
Certaines infrastructures fédérales échappent à nos lois de protection. Je vais parler d'un cas très particulier: le quartier Limoilou, collé au port de Québec. Les lois environnementales du Québec, qui sont beaucoup plus restrictives que celles du fédéral, ne s'appliquent pas parce que les ports sont de compétence fédérale. Ce qui fait que toutes les personnes de Limoilou, peu importe si elles sont immigrantes ou non immigrantes, voient leur qualité d'environnement et de santé dégradée par des poussières issues du transbordement de minerais. Dans le quartier Limoilou, tout le monde en souffre. La particularité de ce quartier est d'avoir des revenus très bas.
La Chambre a pourtant rejeté à plusieurs reprises la solution avancée par le Bloc québécois en votant contre notre projet de loi sur la souveraineté environnementale du Québec. Cela contraste manifestement avec la volonté unanime des députés de l'Assemblée nationale du Québec exprimée le 13 avril 2022 — c'est assez récent, on en convient — en faveur de la primauté de la compétence du Québec en matière d'environnement. Unanimement, ils s'opposent à toute intervention du gouvernement fédéral en matière d'environnement sur le territoire québécois.
D'ailleurs, au Québec, le droit de vivre dans un environnement sain et respectueux de la biodiversité est inscrit dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne depuis 2006.
La Chambre des communes aura en fin de compte l'occasion de suivre notre exemple puisque le projet de loi , est actuellement à l'étude au Sénat. Il doit revenir à la Chambre, et nous ne pouvons qu'être en accord avec l'introduction d'un tel droit dans la législation canadienne.
On le voit, les droits de la personne relatifs à l'environnement sont appelés à se développer. La meilleure protection contre les inégalités demeure le filet social québécois et la défense de nos choix collectifs.
Il y a un élément important que je tiens à rappeler. Il y a un consensus voulant que le phénomène qui sous-tend cette quête de justice environnementale prenne racine dans un terreau fait de disparités socioéconomiques, d'un accès limité aux organes décisionnels et d'un manque de pouvoir et de représentation politique. C'est tout cela qui est en cause quand on parle de justice environnementale.
Les facteurs que je viens d'énumérer ne pourront être ignorés si on souhaite prendre ce chemin de la justice. Ce n'est pas un mince projet: il y a beaucoup de travail devant nous.
Le Québec a fait le choix de la solidarité. En Amérique du Nord, le Québec demeure l'endroit où la richesse est la mieux répartie. Cela se mesure. Les normes et stratégies pancanadiennes vont souvent à l'encontre de nos choix collectifs et sont contre-productives. Il existe plusieurs exemples dans le dernier budget dont nous discutons ces temps-ci. Les intrusions fédérales dans les affaires sociales sont nuisibles et non adaptées à la réalité québécoise.
Le Bloc québécois œuvre et milite en faveur de l'avènement du pays du Québec, fondé sur la reconnaissance mutuelle entre les nations autochtones et dans lequel tous les citoyens, peu importe la couleur de leur peau ou le pays où ils sont nés, seront égaux et jouiront également des bienfaits de la justice sociale et environnementale.
Une bonne politique est certainement une politique dont les mesures sont caractérisées par un degré raisonnable de souplesse. Il y a certainement des situations extrêmes, comme des conditions de vie non acceptables, qui exigent une réponse publique conséquente. Néanmoins, rappelons qu'une bonne politique est universelle; elle est au service du bien commun et s'adresse à l'ensemble de la population.
Les politiques publiques à vocation universelle — j'insiste là-dessus — ont aussi pour effet de démanteler les structures inégalitaires et les pratiques discriminatoires. Que ce soit au Québec, en France ou ailleurs, les politiques sociales qui ont le plus et le mieux servi l'avancement des droits, le développement de la protection sociale, le recul des inégalités, bref, le développement de l'État providence, je le répète, sont des politiques universelles qui s'adressent à tout le monde
Le Bloc Québécois tient à rappeler son attachement à ce principe d'universalité, qui sous-entend la poursuite du bien-être économique et social de l'ensemble des membres de la société.
Si nous instituons de nouvelles politiques fondées sur de nouveaux droits, tel le droit à un environnement sain, tout le monde devrait en jouir, sans exception. Si la politique est bien pensée, c'est-à-dire si les mesures mises en œuvre réussissent de façon mesurable à rectifier les situations inégalitaires, ce sont ceux qui subissent le plus les injustices qui recevront alors l'aide et le soutien de l'État, voire la réparation des torts causés.
Si la jouissance des droits et les critères pour bénéficier de la protection et du soutien de l'État sont universels et que leurs principes sont appliqués à tous, sans discrimination, alors la politique aura aussi pour effet d'éliminer les inégalités fondées sur les différences.
Je vais citer un extrait d'une chanson de Gilles Vigneault, grand poète québécois qui chantait ce qui est un hymne au Québec intitulé Mon pays. II y évoque l'esprit chaleureux qui caractérise le peuple québécois et l'universalité.
De ce grand pays solitaire
Je crie avant que de me taire
À tous les hommes de la terre
Ma maison, c'est votre maison
Entre ses quatre murs de glace
Je mets mon temps et mon espace
À préparer le feu, la place
Pour les humains de l'horizon
Et les humains sont de ma race
Au Bloc Québécois, nous croyons que ces droits, comme les politiques qui en découleront, devront être universels: tous devront en jouir, sans égard à leurs différences.
Alors, nous serons dotés d'outils légaux puissants pour contrer les iniquités et les discriminations, notamment selon l'origine, la langue ou l'appartenance culturelle, qui sont induites par des facteurs environnementaux inégalitaires comme l'exposition à la pollution ou la privation d'accès à l'eau potable ou à des ressources nécessaires à la vie.
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Madame la Présidente, je suis ravie d'appuyer ce projet de loi. Le racisme environnemental est un problème urgent au Canada et lutter contre l'injustice environnementale est l'une des raisons pour lesquelles je me suis lancée en politique. Ce dossier est prioritaire pour mes collègues néo-démocrates et moi.
J'aimerais remercier la députée de d'avoir présenté ce projet de loi et saisi de nouveau la Chambre de cet important dossier. Cela fait des années que je surveille le progrès des efforts déployés en vue de faire adopter un projet de loi sur le racisme environnemental, à commencer par le projet de loi provincial auquel notre ancienne collègue Lenore Zann avait travaillé de concert avec la Dre Ingrid Waldron et qu'elle avait présenté à l'Assemblée législative de la Nouvelle‑Écosse lorsqu'elle était députée provinciale néo-démocrate.
Avant d'être élue pour représenter Victoria, j'enseignais à l'Université de Victoria. Je donnais un cours qui se concentrait sur le racisme environnemental et j'ai fait lire à mes étudiants ce projet de loi provincial qui était le premier du genre en Amérique du Nord.
Malheureusement, malgré plusieurs tentatives, la Nouvelle‑Écosse n'a jamais adopté le projet de loi. J'étais si excitée de voir Lenore présenter une nouvelle version fédérale de son projet de loi à la législature précédente, et j'ai été profondément déçue qu'il meure au Feuilleton lorsque les élections ont été déclenchées, alors qu'il avait franchi l'étape de l'étude en comité, au comité de l'environnement, et jouissait de l'appui de tous les partis.
Le racisme environnemental est un énorme problème, mais il est souvent ignoré ou, pire encore, nié par ceux qui ne veulent pas reconnaître l'existence du racisme systémique au Canada. Partout dans le pays, nous savons que des décharges de matières toxiques, des projets polluants, des oléoducs dangereux et des sources d'eau potable contaminées, ainsi que les effets de la crise climatique nuisent de manière disproportionnée aux communautés autochtones, noires et racisées. La discrimination systémique s'est implantée dans les politiques environnementales.
L'application des règlements et des lois est inégale. Les communautés autochtones, noires et racisées sont ciblées pour y construire des installations de gestion de déchets toxiques et la présence de poisons et de polluants mortels est officiellement approuvée. Les communautés qui sont touchées de manière aussi disproportionnée sont trop souvent exclues de la prise de décisions concernant l'environnement.
Le projet de loi a été très bien accueilli par la société civile ainsi que par les représentants des groupes de défense de l'environnement, dont Mme Waldron, qui a consacré beaucoup d'années à militer pour des changements dans ce dossier, de même que le projet ENRICH et la coalition canadienne pour la justice environnementale et climatique. J'ai bon espoir que d'autres députés appuieront ce projet de loi essentiel pour l'aider à progresser rapidement à l'étape qu'il a atteint au cours de la législature précédente. J'espère que nous pourrons l'adopter, cette fois-ci. Nous devons prendre des mesures urgentes en matière de justice environnementale, et ce projet de loi représente une étape importante en ce sens.
En plus d'une stratégie nationale visant à s'attaquer au racisme environnemental, j'aimerais également que le droit à un environnement sain soit inscrit dans la loi. J'aimerais qu'un bureau de la justice environnementale soit créé; il pourrait aider à superviser la stratégie visant à s'attaquer au racisme environnemental qui est proposé dans le projet de loi. Ce genre de bureau pourrait améliorer notre compréhension des risques environnementaux pour la santé évitables qui pèsent sur les communautés autochtones, noires et racialisées, groupes pour lesquels les données font cruellement défaut. Il pourrait évaluer les interventions possibles pour réduire ces risques et faire en sorte que tous les Canadiens jouissent du même degré de protection contre les risques environnementaux pour la santé. Il pourrait aussi accroître les capacités et aider à coordonner l'intégration de l'équité environnementale au sein des gouvernements.
S'attaquer au racisme environnemental et faire progresser la justice environnementale n'est pas une mince tâche. Le Canada n'a pas en ce moment d'instance de coordination qui lui permettrait de faire en sorte que les communautés racialisées et marginalisées aient le même degré de protection que les autres Canadiens. De plus en plus de données confirment que les communautés noires, autochtones, racialisées et marginalisées subissent de façon disproportionnée les effets de la crise climatique et des risques environnementaux pour la santé évitables, comme la pollution, les substances toxiques et la dégradation de l'environnement.
Selon l'Agence de la santé publique du Canada, il existe des inégalités en santé substantielles parmi les Canadiens à faible revenu, les Autochtones, les minorités sexuelles et raciales, les immigrants et les personnes ayant une déficience physique ou mentale.
Même si la crise climatique touchera tout le monde, les rapports du gouvernement fédéral ont confirmé à maintes reprises qu'elle exacerbera ces inégalités existantes. Les programmes, les politiques et les règlements du gouvernement sur les risques environnementaux abordent rarement ces inégalités. Un bureau fédéral de la justice environnementale pourrait promouvoir les efforts déployés pour faire progresser la justice environnementale.
On a déjà parlé un peu du fait que les États‑Unis possèdent des modèles dont nous pouvons nous inspirer. On y trouve un bureau de la justice environnementale depuis le début des années 1990. Il pourrait servir de modèle. Le bureau de la justice environnementale des États‑Unis a pour mandat de protéger et de promouvoir la santé environnementale et publique dans les communautés en situation minoritaire, à faible revenu et tribales et dans d'autres communautés vulnérables. En 1994, un groupe interorganismes de haut niveau a publié un décret complémentaire sur la justice environnementale et a exigé que tous les organismes fédéraux intègrent dans leur mission l'atteinte de la justice environnementale.
La Coalition du budget vert a recommandé que le gouvernement finance un bureau canadien de la justice et de l'équité environnementales pour appuyer une approche pangouvernementale, qui reflète la structure de gouvernance aux États‑Unis et assure une coordination active des efforts avec les autres ministères. C'était l'une des cinq principales demandes budgétaires. Malheureusement, le gouvernement ne l'a pas retenue et ne l'a pas incluse dans le présent budget.
J'étais fière de voir la création d'un bureau de la justice environnementale dans la plateforme du NPD. Je continuerai d'inciter le gouvernement à prendre une telle initiative pour contribuer à la lutte contre le racisme environnemental au Canada.
Le Canada a beaucoup de travail à faire pour mettre fin au racisme environnemental. Les inégalités systémiques qui existent sont directement attribuables à la colonisation passée et présente, et c'est un fait bien documenté.
Après sa visite au Canada, en 2019, le rapporteur spécial sur les incidences sur les droits de l'homme de la gestion et de l'élimination écologiquement rationnelles des produits et déchets dangereux écrivait: « J'ai observé une tendance répandue à l'inaction du côté du gouvernement du Canada face aux menaces pour la santé découlant de décennies d'injustices environnementales passées et présentes. » Un rapport présenté au Conseil des droits de l'homme indiquait que « [l]a pollution et l'exposition à des produits toxiques menacent le droit à la vie, à une vie dans la dignité ». Il ajoutait également que « la violence invisible infligée par les produits toxiques est un fardeau insidieux qui affecte de façon disproportionnée les Autochtones au Canada ». Nous sommes nombreux à connaître le nom des communautés qui se sont retrouvées aux prises avec des déversements de produits toxiques et qui ont été abandonnées par le gouvernement, qui les a laissées s'occuper des conséquences désastreuses. Pensons à Chemical Valley, à Grassy Narrows, à Boat Harbour et à Africville, pour ne nommer que celles-là.
Nous savons que la crise climatique touche de façon disproportionnée les Autochtones. Le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète et le Nord du Canada, environ trois fois plus vite, ce qui épuise les sources de nourriture traditionnelles, augmente le coût des substituts alimentaires importés et contribue à un problème croissant d'insécurité alimentaire, ainsi qu'aux effets négatifs sur la santé. Le Canada ne soutient pas suffisamment les efforts des Autochtones pour s'adapter à la crise climatique et il ne contribue pas suffisamment à la réduction des gaz à effet de serre. Le Canada ne tient pas suffisamment compte de la science et des connaissances autochtones en matière de protection environnementale. Il est évident qu'il y a un problème de racisme systémique au Canada et que le gouvernement ne fait pratiquement rien pour le régler. En l'absence d'une action gouvernementale ou d'un projet de loi, les communautés autochtones et racialisées et leurs alliés, souvent exclus des hautes sphères des grands mouvements environnementaux, réclament la justice environnementale et exigent qu'on respecte leurs droits et qu'on tienne compte de leur opinion.
Je veux aussi parler du droit à un environnement sain. Plus de 150 pays ont déjà des obligations juridiques à l'égard de la protection du droit à un environnement sain. Malgré cela, le Canada ne compte pas encore de loi fédérale reconnaissant le droit à un environnement sain. Le NPD le réclame depuis longtemps. L'ancienne députée néo-démocrate Linda Duncan a présenté un projet de loi visant la création d'une charte canadienne des droits environnementaux. Ce projet de loi a été présenté à nouveau à la Chambre par mon collègue du NPD, le député d'. La Loi canadienne sur la protection de l'environnement ne fait aucune référence à la justice environnementale ni aux droits de la personne, en plus d'être désuète depuis 20 ans. Bien que j'accueille favorablement le projet de loi , qui est actuellement à l'étude au Sénat, le gouvernement propose de fixer des limites troublantes. J'ai hâte de débattre de ce projet de loi, de le renforcer et de faire en sorte que les Canadiens jouissent du droit à un environnement sain.
En terminant, je veux encore une fois remercier la députée de et lui dire que je soutien ce projet de loi. Je veux aussi féliciter encore une fois Ingrid Waldron de son travail acharné pour attirer l'attention sur le racisme environnemental. Nous devons agir rapidement pour atténuer les conséquences environnementales disproportionnées que subissent les communautés autochtones, noires et racialisées, ainsi que pour promouvoir la justice environnementale au Canada.
J'ai hâte d'appuyer ce projet de loi et de continuer à travailler avec des collègues pour lutter contre le racisme environnemental, mais aussi pour créer un bureau de la justice environnementale et garantir le droit à un environnement sain à tous les Canadiens.
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Madame la Présidente, j'ai peine à exprimer toute ma joie de pouvoir parler du projet de loi.
Je tiens à féliciter Mme Zann, car son leadership en matière de racisme et de justice environnementale est exemplaire. J'ai eu l'honneur et le bonheur, tout comme la députée qui a pris la parole plus tôt, d'entendre Mme Zann et Mme Waldron nous dire à quel point le racisme et la justice environnementale sont des questions pressantes dans ce pays pour les communautés noires, autochtones et racialisées.
Nous devons féliciter tous ceux qui ont défendu cette cause et lutté pour elle. À l'heure actuelle, nous sommes en mesure de ramener cette question sur la table, comme il se doit. Il faut célébrer ce leadership et honorer l'importance du moment, avec le projet de loi, car le racisme systémique existe bel et bien au Canada et dans le monde entier.
Un des députés conservateurs s'est interrogé tout à l'heure sur la capacité du gouvernement à faire cela et sur sa capacité à agir et à réagir à la situation. Je vais puiser dans mes racines juives, car il existe une belle expression en hébreu dont je vais vous faire part:
[La députée s'exprime en hébreu]
[Traduction]
« Il ne t'incombe pas d'achever la construction du royaume, mais tu dois saisir l'occasion d'entamer le travail. »
[La députée s'exprime en hébreu.]
[Traduction]
« Tu n'as pas la liberté d'échapper à l'obligation d'amorcer ce travail. »
Cette tâche attend depuis plus de 70 ans. Des communautés d'un bout à l'autre du pays souffrent depuis 70 ans. On ne saurait comprendre toutes les incidences sur leur statut socioéconomique, leur santé et leur bien-être tant et aussi longtemps que nous n'adopterons pas un projet de loi comme celui-ci et que nous ne commencerons pas à scruter les études scientifiques et les données pour véritablement comprendre les torts causés.
Je suis si heureuse d'appuyer ce projet de loi à la Chambre et d'appuyer le travail qui doit être fait, car j'y ai déjà travaillé. Je tiens à remercier encore une fois Mme Ingrid Waldron, Mme Zann et tous les défenseurs de cette cause. Nous avons tant à apprendre, tant de problèmes à régler et tant de torts à réparer. Nous avons besoin de la compréhension, des données, du savoir, d'une loi et d'un cadre en place pour apprendre, poser des questions et voir nos réponses remises en question afin de déterminer la voie de l'avenir.
La marée monte, mais elle n'est pas égale pour tous. C'est ce que nous savons de la justice environnementale et du racisme environnemental. Tout le monde n'est pas dans le même bateau et tout le monde n'a pas vécu la même expérience. Nous avons l'obligation de veiller à ce que tous les Canadiens aient un environnement sain et sûr où vivre, grandir, s'épanouir et réussir. Si nous ne posons pas ces questions difficiles dans un cadre comme cette stratégie nationale, nous ne serons pas en mesure de leur donner les réponses qu'ils méritent.
Je mets au défi mes collègues qui remettent en question notre capacité à le faire d'arrêter de remettre en question notre capacité à le faire et de simplement le faire. Nous n'avons pas besoin de nous demander pourquoi, peut-être, si ou si c'est possible. C'est possible parce que nous choisissons de le rendre possible. Pour le bien des communautés marginalisées et racisées, nous avons absolument l'obligation de le faire.
À tous les députés qui se sont battus pour les principes de la lutte contre les changements climatiques, dont ma collègue du Bloc, avec qui j'ai siégé au Comité permanent de l'environnement et du développement durable, et beaucoup d'autres collègues qui comprennent que le moment est venu, nous devons poser ces questions et présenter ces types de projets de loi pour obtenir les bonnes réponses pour tous les Canadiens.