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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 044 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 4 mai 2015

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

     Je déclare ouverte la séance numéro 44 du Comité permanent du patrimoine canadien.
     Aujourd’hui, nous entamons notre étude de la danse au Canada. Pendant la première heure, nous accueillons deux représentants du ministère du Patrimoine canadien: Marc Lemay, directeur général de la Direction générale de la politique des arts, ainsi que Robert Hunter, directeur de l’appui stratégique aux arts à la Direction générale de la politique des arts. Nous accueillons aussi Amy Bowring, directrice des Collections et de la recherche de Dance Collection Danse, et, par vidéoconférence, nous entendrons John Dalrymple de l’École nationale de Ballet du Canada à Calgary.
    Chacun de nos trois groupes aura jusqu’à huit minutes pour prononcer des remarques liminaires avant que nous leur posions des questions.
    Nous allons commencer par les représentants du ministère du Patrimoine canadien. Vous avez huit minutes maximum.
    La parole est à vous.
     Le ministère du Patrimoine canadien est heureux de l’occasion qui lui est offerte de se présenter devant le comité dans le contexte de son étude sur la danse au Canada.
    Notre objectif aujourd’hui est de présenter aux membres du comité un aperçu du secteur de la danse professionnelle sans but lucratif et de la façon dont le gouvernement fédéral soutient ce secteur. Nous répondrons avec plaisir à vos questions.
    Passons directement à la page 3 du document qui donne un aperçu du secteur artistique professionnel sans but lucratif. Au Canada, les arts regroupent une vaste gamme d’activités culturelles, notamment les arts de la scène, les arts visuels, les arts médiatiques et la littérature. La danse est l’une des nombreuses disciplines du secteur artistique professionnel. Le travail des artistes et des troupes de danse comprend la création, la production et la présentation de spectacles ainsi que les tournées nationales ou internationales effectuées par divers organismes artistiques qui proposent une expérience artistique directe aux Canadiens dans un grand nombre de collectivités, tout en contribuant à l’économie.
    Si vous prenez la page 4, vous verrez que le secteur artistique canadien contribue en effet de manière importante à l’économie canadienne: une contribution de 12,2 milliards de dollars au PIB, dont 1,9 milliard provient des arts de la scène. En 2011, on comptait 136 600 artistes au Canada, dont 8 100 Canadiens qui travaillent comme danseurs, et ces personnes représentent 6 % de l’ensemble des artistes canadiens. En 2012, le Canada comptait 1 115 organismes professionnels sans but lucratif spécialisés dans les arts de la scène et, durant l’exercice 2013-2014, 139 troupes de danse sans but lucratif ont obtenu un soutien du secteur public

[Français]

     Passons à la page 5, où il est question du financement des organismes artistiques professionnels au Canada.
     Le secteur des arts du Canada se caractérise par une combinaison diversifiée et équilibrée de ses revenus qui proviennent à la fois du secteur privé et du secteur public. Les organismes professionnels canadiens comptent sur des sources de revenus variées dont la vente de billets, les revenus de tournées ainsi que les contributions du secteur privé et des gouvernements de tous ordres.

[Traduction]

    Environ les trois quarts des revenus des organismes canadiens des arts de la scène sont générés par les organismes eux-mêmes ou proviennent de fonds privés. Le financement gouvernemental représente, en moyenne, 26 % de leurs revenus. De ces fonds publics, la contribution fédérale représente généralement environ 8 %. Pour les organismes de danse, en particulier, environ les deux tiers de leurs revenus sont générés par les organismes eux-mêmes, et environ 14 % proviennent de sources de financement fédérales. Selon l’Enquête sur les arts d’interprétation, menée par Statistique Canada, plus de 1,3 million de personnes ont assisté en 2012 à des spectacles de danse donnés par des organismes de danse professionnels sans but lucratif. Selon la même enquête, l’auditoire des spectacles de danse demeure stable depuis 2006.
    Le cadre du soutien fédéral aux arts. Le soutien fédéral direct aux arts est offert dans le cadre des programmes complémentaires du Centre national des arts, du Conseil des arts du Canada et du ministère du Patrimoine canadien. Le Centre national des arts s’occupe principalement de la production et de la présentation des arts de la scène dans la capitale nationale. Le Conseil des arts du Canada soutient principalement les artistes et les organismes artistiques professionnels. Il s’occupe surtout de financer la création et la production dans toutes les disciplines artistiques.
     Patrimoine canadien est responsable des politiques et de la législation. Il offre aussi des programmes qui contribuent à renforcer les pratiques dans le secteur; à améliorer l’infrastructure culturelle, à assurer aux Canadiens un accès à des expériences artistiques professionnelles dans leur collectivité et à former les futurs artistes du Canada. Les organismes artistiques obtiennent aussi un soutien pour des projets spéciaux de la part d’autres institutions fédérales, notamment de la part d’Infrastructure Canada pour leurs salles de spectacle.
(1535)

[Français]

     Je vais maintenant parler du Centre national des arts.
     Le Centre national des arts coproduit ou présente des oeuvres, particulièrement en danse, dans le cadre de tournées nationales et internationales ainsi que de festivals tels que les événements de Scène Ontario, qui ont lieu présentement, soit au mois de mai.
    Le Conseil des arts du Canada investit principalement dans le travail artistique des artistes professionnels et des organismes en soutenant la création, la production et les tournées. Le Conseil des arts du Canada joue un rôle important dans le soutien des danseurs ainsi que la création et la production de la danse au pays.
    Le ministère du Patrimoine canadien, pour sa part, compte quatre principaux programmes qui appuient le secteur des arts professionnels à but non lucratif. Premièrement, le Fonds du Canada pour la formation dans le secteur des arts permet aux artistes les plus prometteurs du Canada de recevoir une formation de pointe les destinant à des carrières nationales et internationales dans le secteur des arts. Quarante pour cent du budget de ce programme soutient des établissements de formation dans le domaine de la danse.
    Un deuxième programme, le Fonds du Canada pour la présentation des arts, investit dans quelque 600 festivals artistiques et saisons de spectacles dans plus de 250 communautés chaque année, un peu partout au pays. Deux cent trente-huit festivals et saisons de spectacles financés dans le cadre de ce programme en 2013-2014 ont offert une programmation en danse.

[Traduction]

    Troisièmement, le Fonds du Canada pour les espaces culturels occupe un créneau unique dans le financement fédéral des infrastructures en soutenant de petits projets d’organismes sans but lucratif qui améliorent les conditions pour la création et la présentation d’oeuvres artistiques professionnelles. Quelque 42 projets touchant à la danse ont été financés par ce programme depuis 2006.
    Enfin, en 2013-2014, le volet Incitatifs aux fonds de dotation du Fonds du Canada pour l’investissement en culture a fourni des fonds de contrepartie à 22 organismes de danse pour un total de 8,8 millions de dollars, tandis que le volet Initiatives stratégiques a fourni une aide financière à quatre projets de partenaires en danse, pour un total de 1,5 million de dollars.
    En conclusion, le soutien de la création artistique, y compris en danse, et de l’accès à des expériences artistiques canadiennes est un objectif poursuivi par les gouvernements successifs. L’investissement du gouvernement fédéral dans le secteur canadien de la danse a amélioré l’accès des Canadiens à des spectacles de danse professionnels dans tous les coins du pays. Il a aussi permis à ce secteur de renforcer sa résilience et sa culture entrepreneuriale. Les priorités de financement des programmes artistiques fédéraux font la promotion des valeurs canadiennes fondées sur la diversité, la dualité linguistique et l’excellence de calibre national.
    Le défi pour les décideurs est de toujours s’adapter dans un monde où les conditions changent rapidement afin que les artistes et les organismes artistiques continuent de contribuer à la vitalité de leurs communautés.
    J’aimerais vous remercier de m’avoir accordé une partie de votre temps. Mon collègue et moi-même nous ferons un plaisir de répondre à vos questions.
    Nous entendrons maintenant le témoignage d’Amy Bowring de Dance Collection Danse. Vous avez huit minutes maximum.
     Merci de me donner l’occasion de vous parler aujourd’hui d’une activité qui occupe une grande place dans ma vie depuis 1978. La danse joue, depuis très longtemps, un rôle dans la vie des Canadiens. Au Canada, la profession de danseur remonte à encore plus loin que les gens puissent penser. Elle recoupe aussi l’histoire sociale, politique, économique et militaire du Canada. Les récits des danseurs canadiens sont de véritables récits canadiens.
     Je suis directrice des Collections et de la recherche au sein de Dance Collection Danse, organisme artistique sans but lucratif qui combine des archives, une salle d’exposition, une maison d’édition et un centre de recherche. Nous avons pour mission de préserver et de faire connaître le patrimoine de la danse théâtrale d'ici et nous sommes le seul organisme canadien à être investi de ce mandat. Nous offrons des services à toutes sortes de personnes, allant des universitaires et des étudiants aux journalistes et aux réalisateurs, en passant par les conservateurs de musées, les généalogistes amateurs et les artistes eux-mêmes. Nous présentons des expositions dans notre salle à Toronto. Nous prêtons des objets à d’autres musées, comme le Pier 21 à Halifax, et nous coproduisons des expositions avec des partenaires comme le Musée d'art du Centre de la Confédération à Charlottetown.
    Nous faisons connaître l’histoire de la danse au Canada au grand public par le truchement de notre magazine annuel ainsi que des 39 livres que nous avons publiés, dont la seule encyclopédie de danse bilingue au pays. Nous offrons des programmes au public sous forme de présentations, de discussions, de projections et d'ateliers communautaires d’archivage.
     Notre site web contient aussi nombre de récits de danseurs canadiens et nous essayons d'établir des liens entre nos ancêtres dans le domaine de la danse et la communauté dynamique d’aujourd’hui. Parmi les différents chercheurs qui font appel à nous, il y a les Canadiens qui ont découvert que leur mère ou leur père avait fait de la danse professionnelle. Ils nous posent des questions sur leurs parents et nous les aidons à retracer une partie de leur arbre généalogique qu’ils connaissaient peu. Je pense à un homme en particulier, un géographe à la retraite de Kingston, qui a fait tellement de recherches qu’il a fini par publier un livre sur la carrière de danseuse de sa mère à l’époque du vaudeville.
    Nous recevons moins de visiteurs que Bibliothèque et Archives Canada ou le Musée royal de l’Ontario, mais pour les Canadiens que nous aidons, nous sommes souvent les seuls à pouvoir le faire. L’importance de Dance Collection Danse réside dans notre capacité de puiser à même les archives extraordinairement riches du monde de la danse au Canada dont la plupart des Canadiens ignorent l'existence. Nous tenons beaucoup à continuer de découvrir cette histoire et de la raconter.
    Les récits que renferme notre collection s’inscrivent dans le récit plus vaste du Canada. Au fil des décennies pendant lesquelles les suffragettes et ensuite les cinq femmes célèbres ont lutté pour le droit des femmes, les danseuses et les professeures de danse pratiquaient et légitimaient le type de responsabilisation féminine qu'Agnes Macphail et Nellie McClung s’efforçaient d’obtenir. Les danseuses gagnaient leur propre argent sur les scènes du vaudeville au Canada et achetaient leur indépendance et leur droit de choisir leur propre style de vie. Les professeures de l’époque étaient des propriétaires d’entreprises et des femmes qui payaient le loyer de studios et de salles de spectacles. Elles payaient des musiciens, achetaient du papier à musique et des costumes, et contribuaient à l’économie.
    La professeure de danse de Toronto, Amy Sternberg, a même créé ce qui est probablement le premier programme de formation à l’enseignement de la danse au Canada. Elle a ainsi contribué à former la génération suivante de professeures et à responsabiliser les jeunes femmes des années 1920.
    Les danseuses ont aussi participé à l’effort de guerre pendant les deux guerres mondiales. Leur rôle pour remonter le moral des troupes en organisant des spectacles et en visitant les bases locales a été essentiel pour les hommes qui attendaient d’être déployés à l’étranger. Des groupes comme les Bomba-Dears à Winnipeg et les Rhythmettes à London se réunissaient après l’école ou le travail avec un sac à lunch brun dans les mains et prenaient le bus pour se rendre dans les bases de leur région et donner des spectacles. Elles rentraient chez elles aux petites heures du matin et se levaient tôt le lendemain pour recommencer. Elles ont souvent dû pelleter pour dégager le bus pendant des tempêtes de neige et pouvoir rendre visite aux soldats. Certaines de leurs homologues ont fini par participer à de grandes revues militaires qui ont fait une tournée au Canada et ont ensuite suivi les alliés en Europe après le jour J.
     Les danseuses ont organisé des concerts-bénéfices pour collecter des fonds afin d’appuyer les efforts de recrutement ou de la Croix-Rouge. Tout le monde avait la larme à l’oeil pendant le Ballet de la Paix présenté dans le cadre du spectacle somptueux d’Amy Sternberg à Massey Hall en 1915. Le public a regardé les centaines de soldats présents qui s’étaient entraînés sur les lieux de l’Exposition nationale canadienne et qui partiraient peu après à l'étranger.
    Les danseurs sont aussi devenus soldats et auxiliaires médicaux. Les rangs des danseurs du ballet canadien de Boris Volkoff ont rapidement été décimés au début de la Deuxième Guerre mondiale lorsque les danseurs ont rejoint le Corps de santé canadien ou la Force aérienne. Pour bien des gens, ces années sans formation ont signifié la fin de leur carrière en herbe, mais plusieurs d’entre eux ont repris la danse après la guerre et utilisé leur pension du MAC pour payer leur formation.
(1540)
     L’histoire de l’immigration canadienne se révèle aussi à travers la danse. Il est probable que les danses sociales et sacrées soient pratiquées au Canada depuis l’arrivée des premiers Autochtones. La danse de salon a été importée par les colons français et britanniques et chaque population immigrante a apporté avec elle ses danses folkloriques ou du pays.
    Même lorsque nous retraçons l'histoire de la danse théâtrale et du travail des danseurs professionnels formés du Canada, elle est aussi parallèle à l'histoire de notre immigration. Pendant et après la révolution russe, des danseurs de ballet formés sous l’empire ont commencé à ouvrir des studios et à organiser des concerts dans diverses villes canadiennes. Après la Deuxième Guerre mondiale, des personnes déplacées ont commencé à arriver d’Europe orientale et à importer le ballet ainsi que la danse moderne expressionniste allemande de Mary Wigman.
     Nos trois troupes de ballet les plus anciennes ont été fondées par des immigrantes et lorsque les portes de l’immigration se sont ouvertes plus grandes aux immigrants asiatiques, africains et antillais vers la fin du 20e siècle, une gamme variée d’artistes ont apporté leurs danses au Canada et offert au public canadien des types de danse excitants qu’il n’avait auparavant pu voir que dans le cadre de spectacles de troupes en tournée. Menaka Thakkar et Rina Singha ont importé d’Inde le bharatanatyam et le kathak. Patrick Parsons a fait connaître les danses des Caraïbes. William Lau a ajouté l’opéra de Pékin à notre paysage artistique, et il reste toujours des mystères à élucider. Nous avons trouvé des preuves de la présence d’une école de danse espagnole et de flamenco à Toronto dès 1925. Nous savons qu’il nous reste des choses à découvrir et que l’histoire est plus riche et plus profonde que ce que nous pensons.
    Lorsque le gouvernement fédéral a fondé le Conseil des arts en 1957, tout a changé. Cette nouvelle politique culturelle a rendu possible la création d’une scène artistique au Canada. Elle a donné aux artistes une véritable chance de développer la culture canadienne malgré la proximité du géant américain. Les artistes pouvaient partager des récits riches et dynamiques avec les Canadiens et le monde entier.
    Pour la danse, cette politique s’est traduite par de meilleures formations, des salles de spectacle adéquates et la chance de gagner sa vie en dansant dans notre propre pays. Dance Collection Danse veille à ce que l’investissement que le gouvernement, les fondations et les donateurs privés ont fait dans la danse constitue un héritage durable pour les générations futures.
    J’imagine un Canada où la danse et son patrimoine comptent. J’aimerais voir une politique culturelle qui reconnaisse tous les arts comme des atouts précieux pour la société canadienne et dans laquelle la danse et son patrimoine sont perçus comme des fils essentiels dans le tissu de notre grande nation, construite grâce à une vision elle-même façonnée dans les salles de danse de Charlottetown et de Québec en 1864.
    Je vous remercie.
(1545)
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant entendre le témoignage de John Dalrymple, qui nous parlera depuis Calgary, en Alberta, pour huit minutes maximum.
    La parole est à vous, monsieur.
     Merci beaucoup. Je suis ravi d'être parmi vous. Je suis ici pour représenter l'École nationale de ballet du Canada. Notre principale source de financement étant le ministère du Patrimoine canadien, vous comprendrez pourquoi nous sommes très heureux d'être ici aujourd'hui.
    L'école de ballet existe depuis 55 ans. Nous avons essentiellement pour vocation de faire valoir l'utilité de la danse dans la vie de chaque Canadien. La danse enrichit la qualité de vie, améliore la santé et procure des bienfaits émotionnels et cognitifs, que vous soyez spectateurs ou danseurs. Quel est notre rôle dans ce processus? Il s'agit principalement — et ce, depuis la création de notre organisation — de fournir aux jeunes une formation de calibre olympique pour faire d'eux les grands interprètes et vedettes de demain. L'école repose sur ce principe indéfectible.
    Dans le cadre de nos réflexions sur l'avenir de notre art et de notre organisation, il y a une question qui nous paraît essentielle: comment faire pour exposer un plus grand nombre de personnes à l'utilité de la danse? En général, seul un petit segment de la population est exposé à la danse à un jeune âge, et ces gens deviendront, nous l'espérons, les spectateurs de demain. Mais qu'en est-il des autres jeunes Canadiens et du reste de la population canadienne, notamment des personnes âgées pour qui la danse peut également s'avérer très bénéfique?
    Nous avons lancé un programme appelé Sharing Dance, et c'est vraiment là-dessus que portera mon exposé d'aujourd'hui. Sharing Dance est un programme-cadre qui comporte trois volets. Le premier s'adresse aux jeunes. Il s'agit d'appuyer les enseignants du système scolaire public, partout au pays, en offrant un contenu qui est déjà inclus dans le programme d'éducation physique et qui est lié à la danse. Quand j'étais enfant — et c'est encore le cas dans de nombreuses écoles —, on nous apprenait la danse carrée dans le cadre de trois cours d'éducation physique, et c'est à peu près tout ce qu'on avait comme initiation à la danse. Le problème, c'est qu'il y a très peu de spécialistes de la danse dans les écoles publiques ordinaires. La danse fait partie du programme général d'éducation physique. Nous estimons donc qu'il nous incombe d'aider les enseignants à faire rayonner la danse à l'école.
    Le deuxième volet s'adresse aux personnes âgées. Le vieillissement entraîne des troubles cérébraux, mais il est possible d'en combattre les effets grâce à des activités régulières, dont la danse spécialisée. C'est justement l'objectif d'un programme appelé Dancing With Parkinson, que nous administrons.
    Le troisième volet, appelé Sharing Dance Day, se veut l'occasion de présenter une chorégraphie de danse amusante et très accessible à l'ensemble de la collectivité. Elle s'adresse aux participants des deux autres volets ainsi qu'à toute autre personne qui souhaite y prendre part. Une fois par année, nous organisons une célébration multigénérationnelle de la danse au Canada et, maintenant que le compte à rebours avant 2017 est enclenché, notre but est d'amener un million de Canadiens à participer à ce programme tout au long de l'année du 150e anniversaire.
    Le programme Sharing Dance aborde de grands enjeux sociaux. À mon avis, c'est là un rôle important pour toute forme d'art ou toute discipline artistique. Il ne suffit pas de dire qu'il faut financer les arts pour le simple plaisir de la chose. Nous devons absolument examiner certaines des grandes questions qui se posent à la société. L'obésité juvénile et le manque d'activité physique constituent de véritables priorités pour la plupart des Canadiens. Il y a un manque de ressources pour les arts, la danse, et même les activités d'éducation physique dans la plupart des écoles publiques. Tous ces cours subissent une pression à la baisse. La santé émotionnelle des jeunes est une question qui préoccupe les gens. Par ailleurs, les Canadiens considèrent que les questions liées au vieillissement constituent une autre priorité, à mesure que vieillissent les membres de la génération du baby-boom. Nous croyons que les efforts visant à intégrer la danse dans la collectivité peuvent avoir des effets positifs sur toutes ces questions.
    Durant le reste de mon exposé, je voudrais faire un lien entre mes observations et les grandes lignes qui m'ont été fournies en prévision de ce témoignage.
    Pour commencer, nous avons sollicité des commentaires sur la façon dont la danse peut définir et exprimer les divers aspects de la culture canadienne. À la lumière des programmes que nous offrons dans le système scolaire, nous savons que certains élèves ont du mal à s'exprimer en anglais ou en français comme ils le voudraient. Un des aspects positifs de la danse, c'est son caractère inclusif. Ainsi, la danse leur permet d'être sur un pied d'égalité avec leurs camarades de classe. Il en va de même pour les élèves qui ont de graves handicaps physiques ou problèmes de mobilité.
    Les enfants manifestent un intérêt envers la danse, souvent en raison de leurs origines culturelles. Donc, si nous donnons aux enfants plus d'occasions de danser dans le cadre scolaire, nous leur permettrons de miser là-dessus et d'y aller de pied ferme. La danse célèbre nos différences, mais elle souligne aussi nos similarités, parce que même si les styles de danse varient d'une culture à l'autre, nous racontons tous la même histoire.
    Par ailleurs, nous voulions savoir comment les jeunes Canadiens peuvent profiter de la danse pour acquérir et perfectionner leurs aptitudes physiques ou leurs talents musicaux. Vous avez demandé à obtenir des renseignements sur les bienfaits de la danse sur la santé. En fait, la danse est une excellente forme d'activité physique. Il n'y a probablement aucune autre forme d'art qui met en jeu la même intensité ou qualité d'activité physique. À preuve, d'après des études réalisées par l'Université de l'État de l'Arizona et le National Cancer Institute aux États-Unis, les niveaux d'intensité d'équivalent métabolique de la danse, exécutée dans un contexte scolaire, dépassent souvent ceux de la plupart des autres activités physiques traditionnelles pratiquées en classe, notamment le hockey, le basketball et le baseball. En somme, nous avons là une activité qui offre tous les bienfaits émotionnels et cognitifs associés à l'expression artistique, mais qui procure aussi des bienfaits physiques supérieurs à ceux offerts par les autres activités physiques qui sont traditionnellement pratiquées dans le système scolaire. Ces avantages sur le plan mental et émotionnel sont d'une importance cruciale.
(1550)
    Nous reconnaissons que les enfants d'aujourd'hui font face à un grand nombre de sources de stress complexes. La possibilité de favoriser les compétences sociales et le bien-être affectif grâce à une activité créatrice est quelque chose de vraiment important. En outre, cette spécialité nous permet de redonner à la collectivité, ce qui compte pour notre grande organisation artistique.
    J'ajouterais, en dernier lieu, qu'environ 15 % des enfants canadiens ont accès à la danse dans le cadre d'activités récréatives payées par leurs parents. Mais cela signifie que 85 % des enfants y ont accès de façon officielle uniquement par l'entremise du système scolaire. Donc, c'est pour nous une occasion en or de remédier à la situation.
    En ce qui concerne les répercussions sur les économies locales, en gros, nous cherchons à créer les spectateurs de demain. On ne peut pas s'attendre à ce qu'un individu s'intéresse à la danse avant-gardiste, créative et de calibre olympique, s'il n'y a jamais été exposé dans son enfance. C'est fondamental, et il y a des tonnes de recherches pour le démontrer.
    Par conséquent, nous estimons que les investissements dans les activités de danse pour les enfants sont d'une importance capitale pour l'avenir de notre art. Nous examinons aussi des programmes qui nous permettent d'identifier les enfants ayant des capacités de leadership afin de leur fournir des expériences d'immersion.
    Quant à savoir comment le gouvernement appuie la danse au Canada, comme je l'ai dit, entre 10 et 15 % des jeunes Canadiens participent à des programmes officiels. Notre organisation étant la plus grande organisation de formation de danse, nous recrutons, chaque année, des jeunes à partir de cette petite tranche de danseurs engagés afin de les inviter à suivre notre programme de ballet professionnel. Par conséquent, il y a un nombre inconnu de jeunes qui sont doués sur le plan kinesthésique et qui ont le potentiel de poursuivre une excellente carrière en danse, mais qui n'ont pas encore été découverts parce qu'ils n'ont pas encore été exposés à cette forme d'art. L'aspect le plus merveilleux de cette initiative, c'est que non seulement elle nous aide à repérer un plus grand nombre de danseurs formidables de calibre olympique au Canada, mais elle donne aussi l'occasion à tous les jeunes Canadiens de profiter de ces bienfaits.
    Pour ce qui est d'encourager nos danseurs à rester au Canada, si on revient à l'argument selon lequel il faut former les spectateurs de demain, je pense que ces efforts encourageront un plus grand nombre d'artistes à demeurer au Canada. Beaucoup de danseurs vont en Europe parce que leur travail est plus valorisé à l'étranger qu'ici. Selon moi, le financement de ces programmes permettra de faire rayonner la pertinence de la danse, ce qui en fera augmenter la valeur ici, au Canada.
    Enfin, nous cherchons à recueillir de l'information sur la façon dont nous pouvons aider les danseurs qui envisagent un changement de carrière. D'ailleurs, comme notre organisation administre le plus grand programme de formation pour les professeurs de ballet professionnel et récréatif au Canada, nous savons que l'occasion d'exposer plus de jeunes à la danse permettra de bâtir et d'appuyer une plus grande collectivité de danse récréative, ce qui offrira plus de débouchés aux professeurs et plus d'emplois aux danseurs qui sont en réorientation de carrière.
    Je serai heureux de répondre à vos questions, et je vous remercie de votre attention.
(1555)
    Nous passons maintenant à la période des questions, et je rappelle aux membres du comité que M. Dalrymple est aussi parmi nous.
    Nous allons entendre M. Weston, qui dispose de sept minutes.
    Merci, à vous tous, de votre présence. J'aimerais vous souhaiter la bienvenue, en particulier à Amy Bowring, car nous sommes tous deux diplômés de l'Université York. Je suis heureux de vous voir ici.
    Monsieur Dalrymple, quand vous avez dit que la danse permet aux enfants de miser sur leur individualité et d'y aller de pied ferme, sachez que nous avons compris le jeu de mots.
    En fait, ce n'était pas intentionnel, mais je vais l'utiliser à partir de maintenant. Merci.
    J'aimerais aborder quatre points, dans la mesure du possible, vu le peu de temps dont je dispose.
     Tout d'abord, monsieur Dalrymple, vous avez établi un lien très étroit entre la condition physique et la danse. Sachez que les parlementaires ont adopté, juste avant Noël, un projet de loi sur la Journée nationale de la santé et de la condition physique. Nous sommes tous préoccupés par l'augmentation des taux d'obésité, comme vous l'avez signalé, et la solution est bien claire, selon vous: il faut exposer les enfants à la danse dans les écoles. Je me demande si vous pouvez expliquer un peu cette idée, et peut-être nous dire s'il existe des préjugés à l'égard de la danse. Y a-t-il des jeunes, dans les écoles, qui trouvent que ce n'est pas « cool »? Est-ce là une situation avec laquelle vous devez composer dans le cadre du travail admirable que vous faites?
     Oui, c'est le cas. Je crois qu'il y a deux choses qui nuisent à la présence de la danse dans les salles de classe. Tout d'abord, la danse peut être intimidante pour les enseignants. Si vous ne pratiquiez pas la danse étant jeune, la perspective de vous tenir debout devant les élèves et d'essayer de diriger une chorégraphie ou un exercice est très intimidante.
    Pour remédier à cela, nous ne nous contentons pas de fournir des ressources vidéo ou de la documentation sur les activités du programme, mais nous avons aussi mis en ligne un système de gestion de l'apprentissage qui offre un soutien en temps réel pour aider les enseignants à surmonter leurs appréhensions. Nous pouvons créer du contenu dont ils peuvent se servir et l'envoyer directement dans la salle de classe. Pendant ces diffusions en direct de Toronto, les enseignants peuvent aider les enfants, piloter les exercices qui sont vraiment nécessaires pour les faire bouger et veiller à ce que toutes les activités du programme soient exécutées.
    Vous vouliez aussi savoir si la danse était considérée comme étant « cool ». Bien entendu, au début, bon nombre de garçons refusent de danser, surtout dans le cours d'éducation physique; ils croient que c'est nul de danser. C'est en partie parce qu'ils n'ont jamais reçu un enseignement de qualité en matière de danse. Or, je peux affirmer sans réserve que ces garçons changent d'avis à tout coup lorsque nous commençons à donner notre programme dans leur école. L'aide d'un donateur très généreux nous a en outre permis de mettre sur pied un programme de bourses. Donc, grâce à ce donateur, lorsque notre travail dans les écoles du centre-ville de Toronto nous fait découvrir un enfant qui a un don pour la kinesthésie, nous lui proposons de suivre gratuitement le programme que nous offrons après l'école et les fins de semaine.
    Il y a ces trois garçons, dont l'un vient de l'Éthiopie, l'autre, de l'Afghanistan et le troisième, de l'Amérique du Sud. Au début, ils ne voulaient pas danser, alléguant que la danse était une activité ennuyeuse. Or, il s'est avéré que les trois garçons avaient vraiment du talent et qu'ils répondaient bien à un enseignement kinesthésique. Ils sont donc devenus des leaders pour la classe, et ils commenceront bientôt à suivre le programme de ballet de l'école.
     Ce sont des réalités avec lesquelles il faut composer et, compte tenu de ce que nous avons vu, je crois que notre programme est en mesure de surmonter ces obstacles.
    J'ai trouvé très convaincante votre explication selon laquelle la danse est beaucoup plus efficace que certains sports traditionnels sur le plan de l'engagement physique et je vous encourage à travailler avec Sports Canada et d'autres organismes semblables. Autrement dit, je vous conseille de faire de la pollinisation croisée.
     À ce jour, 180 municipalités ont institué une journée nationale de la condition physique. Dans ce contexte, les organismes de danse devraient peut-être approcher les maires et les conseillers municipaux pour leur proposer de promouvoir la danse lors de cette journée. Je crois que c'est un élément très intéressant de ce que nous avons entendu aujourd'hui. Permettez-moi cependant de passer à autre chose.
    J'aimerais aborder une question à laquelle deux d'entre vous ont fait allusion. En fait, je crois que c'était vous, monsieur Lemay.

[Français]

     Vous avez discuté du rôle du CNA, ici à Ottawa. Je suis moi-même très impressionné par la programmation, surtout maintenant. Il y a un véritable smörgåsbord d'arts, y compris la danse.

[Traduction]

    Comment cela se transmet-il au reste du pays? Je sais que nous avons une capitale, et que le CNA y a nécessairement pignon sur rue. Mais sommes-nous en mesure de nous assurer qu'une partie de ces spectacles sont retransmis d'une certaine façon afin de tirer parti de la programmation formidable qui est offerte à Ottawa?
    Je suis un député de la Colombie-Britannique, alors cela me tient à coeur.
    Je peux vous fournir certaines indications pour que vous obteniez la réponse à votre question. Je crois que les gens du CNA seraient mieux placés que moi pour parler de cela. Bien sûr, le CNA présente parfois des spectacles qui sont en tournée nationale ou internationale, alors on peut aussi les voir ailleurs, comme à Toronto, à Calgary, à Vancouver et à Montréal.
    Les spectacles qu'on peut voir au CNA ne sont pas des exclusivités. Il faut passablement d'argent pour créer un nouveau spectacle de danse, alors il faut qu'il soit présenté dans plus d'une ville. C'est pourquoi ces productions font des tournées.
    Le CNA réalise aussi des coproductions avec d'autres compagnies de danse d'un peu partout au pays et il s'assure que ce qui est présenté à Ottawa est le travail le plus accompli des danseurs et des chorégraphes canadiens. Le travail résultant peut être présenté dans une perspective nationale, donc dans différentes régions du Canada.
(1600)
    Voilà qui est vraiment bon à savoir. Et c'est encourageant d'entendre que cela profite à l'ensemble du pays.
    Permettez-moi de passer à la question du financement. Vous avez dit qu'il y a de nombreuses compagnies de danse sans but lucratif. Le sont-elles par choix ou par la force des choses?
    Vous avez indiqué que les trois quarts du financement venaient du secteur privé ou qu'ils étaient autogénérés, et que le reste venait du gouvernement. Je ne sais pas qui peut se prononcer sur ce qui est bon ou mauvais, bien ou mal. Est-ce qu'Amy ou Marc aurait quelque chose à dire à ce sujet? Que pensez-vous de ces proportions: trois quarts autogénérés et un quart du gouvernement? Et je crois que 8 % de ce 26 % provient du gouvernement fédéral?
     Ces chiffres sont pour l'ensemble des arts de la scène, pas seulement pour la danse. Pour les organismes de danse, la proportion est d'un tiers, deux tiers.
    Mais dans le cas des arts de la scène, vous avez raison. Les trois quarts du financement proviennent du secteur privé ou sont autogénérés.
    Quand vous dites un tiers, deux tiers, cela signifie que le tiers du financement est autogénéré?
    Non, un tiers provient du gouvernement et les deux autres tiers sont autogénérés ou proviennent de contributions du secteur privé.
    Merci de le préciser.
    Sur ce, nous allons passer à M. Nantel, pour sept minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins de leur présence car on parle trop rarement de la danse.
     Madame Bowring, vous avez clairement établi le fait que la danse contribue éminemment à la création d'un patrimoine et que cela fait partie des enjeux. On parle de qualité de vie, bien sûr, mais aussi de sens d'identité et de fierté canadienne.
    J'aimerais donc demander aux représentants du ministère du Patrimoine canadien, à M. Lemay notamment, s'ils peuvent nous donner, maintenant ou ultérieurement, les pourcentages des sommes attribuées au secteur artistique professionnel sans but lucratif.
     Seriez-vous en mesure de nous donner, en gros, le pourcentage que représente ce que reçoit la danse par rapport aux autres disciplines?
    Je pourrais vous fournir les détails, plus tard. En ce qui concerne le Conseil des arts du Canada, on parle d'un investissement de 18 millions de dollars. Cela représente 12 % des sommes qui sont versées par le Conseil des arts du Canada annuellement.
    Ces sommes vont à la danse.
    C'est cela.
     Au ministère du Patrimoine canadien, les pourcentages varient d'un programme à l'autre. Comme je l'ai mentionné, en ce qui concerne la formation, 40 % des ressources du programme vont à la danse. Cela varie donc d'un programme à l'autre. Nous pourrions vous donner un tableau détaillé.
    Je pense qu'il est très utile pour tout le monde ici de connaître ce genre de détails. Lors de notre étude sur la musique, nous avons été souvent surpris des très petits revenus des musiciens. C'est la même chose, si je ne me trompe pas, du côté des instrumentistes des orchestres symphoniques de différentes villes, où les salaires ne sont pas très élevés compte tenu du temps de pratique qu'il faut consacrer pour maintenir une qualité de jeu.
    Êtes-vous en mesure de nous dire combien gagne une danseuse ou un danseur professionnel? Il y a certainement beaucoup de variations. J'imagine que le danseur étoile à Winnipeg gagne un peu plus. Je poserais d'ailleurs certainement la même question à M. Dalrymple, mais monsieur Lemay, avez-vous des statistiques sur le salaire des danseurs professionnels?
(1605)
    Nous avons des données là-dessus, en effet. Les revenus moyens tirés de la danse, pour un danseur professionnel, sont en moyenne d'un peu plus de 17 000 $ par année. On comprend qu'à 17 000 $ par année les danseurs vont souvent avoir d'autres formes de rémunération, d'autres types de travail. Les danseurs professionnels ont un revenu moyen de 35 000$ par année, dont un peu plus de la moitié qui provient vraiment de la danse. D'autres revenus peuvent provenir d'autres activités connexes.
    C'est assez révélateur des conditions de travail. Quand on est un passionné de la danse, le fait que le revenu total soit à peine le double des revenus propres à la danse démontre qu'ils ne peuvent pas non plus avoir une carrière avec de gros salaires. C'est nécessairement du travail à temps partiel, puisque, au total, on arrive à 35 000 $.
    Y a-t-il des incitatifs pour bonifier cette situation? Que peut-on faire pour aider le milieu de la danse sur le plan des salaires? J'imagine que vos ressources ne sont pas illimitées et vous avez évoqué le soutien accru du privé. Vise-t-on une meilleure rémunération des artistes danseurs dans ce contexte? Parle-t-on plutôt de soutien à l'industrie, à la présentation, à la production, ou autre?
     Ce n'est pas un enjeu pour lequel il y a une solution simple. Il y a eu des investissements de différents ordres de gouvernement et du secteur privé. C'est ainsi que, pour la danse comme pour d'autres disciplines artistiques, les revenus moyens ne sont pas très élevés.
     Cependant, il faut faire attention. L'écosystème de la danse est assez complexe. La façon dont nous investissons des fonds pourrait avoir des conséquences négatives, inattendues et importantes.
    Par exemple, je ne crois pas qu'investir davantage d'argent pour former plus de jeunes danseurs, qui auraient de la difficulté à se trouver des emplois relativement biens rémunérés et du travail comme danseurs professionnels, renforcerait le secteur de la danse.
    Il existe un autre élément évoqué par notre collègue de l'École nationale de ballet, soit le développement des auditoires. Je crois qu'il est important pour les Canadiens d'apprécier et de valoriser la danse. Une bonne partie de la solution pourrait se trouver de ce côté.
    Merci beaucoup, monsieur Lemay.
    J'aimerais poser la même question à M. Dalrymple.
     Le gouvernement joue-t-il un rôle?

[Traduction]

    Je suis d'accord avec la réponse qui vient d'être donnée. À l'évidence, le gouvernement a un rôle très important à jouer dans tout cela. Pour ce qui est d'augmenter la rémunération des artistes, il est tout à fait exact de dire que le premier danseur du Ballet national du Canada — c'est-à-dire, celui qui est au sommet de la pyramide, le meilleur danseur au pays — gagne peut-être 150 000 $ par année. Or, si vous étiez le plus gros joueur de l'industrie minière, votre rémunération serait beaucoup plus élevée. Je crois que le gouvernement a un rôle à jouer, mais il faut que son intervention soit stratégique. Comme nous l'avons dit, je pense que les investissements dans des programmes qui, de diverses façons, cherchent à bonifier l'accès à la danse pour les jeunes permettront, au fur et à mesure que ces jeunes grandiront, d'ajouter de la valeur au travail qui se fait dans ce domaine.
    Nous avons une infrastructure de bon calibre avec nos immeubles destinés aux arts de la scène. Il y a eu un gros investissement à ce chapitre, à Toronto. Notre établissement pour former les danseurs est le meilleur au monde. Pour que le Canada dise qu'il a un centre de formation en art meilleur que n'importe quel autre dans le monde, il faut que ce soit important.
    Nous devons être en mesure de nous tourner vers le grand public pour lui demander: « Êtes-vous partie prenante de la croissance de cette forme d'art avec nous? » Je ne crois pas que le gouvernement va avoir assez d'argent pour offrir plus de bourses afin d'aider les artistes à gagner plus d'argent. Mais si les compagnies de danse ont plus de succès, si les entreprises qui les parrainent prennent de la valeur à cause de la valeur accrue que la société accorde à cette forme d'art, je crois que cela fera boule de neige et que les artistes se retrouveront là où ils doivent être, c'est-à-dire au même niveau que les joueurs de hockey, car les artistes s'entraînent et travaillent aussi fort qu'eux.
(1610)

[Français]

    Merci, monsieur Nantel.
    Monsieur Dion, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci, monsieur Dalrymple.

[Français]

    Madame Browring, monsieur Lemay et monsieur Hunter, je vous remercie de nous avoir fourni une très bonne photographie de la situation.
     Toutefois, si j'utilisais mes sept minutes pour vous demander de me décrire le film, quel genre de présentation auriez-vous fait, tous les trois, il y a cinq ou dix ans? Y a-t-il des choses qui ont changé? Vers quoi nous dirigerions-nous si nous continuions à appliquer les politiques d'aujourd'hui dans cinq ou dix ans d'ici? Il serait très utile pour les membres du comité de vous entendre non seulement utiliser une approche synchronique, mais aussi diachronique.
    M. Lemay pourrait commencer.
    Je vous remercie.
    Retournons 10 ou 15 ans en arrière.
    Nous parlons de la danse.
    Nous verrions, par exemple, que l'accès à des représentations en danse professionnelle au Canada s'est largement accru. Les gens ont un accès amélioré à une programmation en danse plus diversifiée dans un plus grand nombre de communautés et de municipalités du pays. C'est le cas non seulement dans les grands centres urbains mais aussi un peu partout au Canada.
    Avez-vous des données à ce sujet?
    Oui, nous en avons.
    Pouvez-vous en faire part aux membres du comité?
    Oui, nous pourrons le faire.
    En particulier, j'ai probablement quelques chiffres entre les mains relativement aux investissements du Fonds du Canada pour la présentation des arts. Il y a une douzaine d'années, en 2002-2003...
     Ça va, je vous crois; continuez
     Il y a aussi des mesures fédérales et provenant des autres ordres de gouvernement qui ont encouragé le secteur des arts, plus particulièrement le secteur de la danse, à faire davantage d'efforts pour diversifier ses sources de financement et accroître les revenus de sources privées. Notre secteur des arts et de la danse est davantage entrepreneurial et mieux en mesure d'obtenir du soutien du secteur privé. Des partenariats se sont développés avec les années et on peut le démontrer.
    Des investissements importants ont été faits pour ce qui est de fonder des compagnies de danse depuis les 10 ou 15 dernières années, ce qui a permis aux organismes oeuvrant dans le secteur de la danse d'avoir une plus grande stabilité financière. Dans le secteur des arts en général — et c'est certainement vrai également pour le secteur de la danse —, il y a des organismes artistiques qui sont mieux gérés et dont la gouvernance est plus solide que ce n'était le cas il y a 10 ou 15 ans.
    Là où il y a encore des défis, c'est évidemment du côté des auditoires. Nous sommes bien conscients du fait que le monde a changé. Les technologies numériques ont complètement changé le monde culturel. L'offre culturelle est beaucoup plus grande qu'il y a 20 ou 30 ans. C'est un défi, pour une discipline comme la danse, de continuer à faire sa place, à attirer les gens en salle, à renouveler ses auditoires et à les élargir.
    Est-ce à cause de la révolution numérique?
    En partie. De plus, la concurrence est plus grande. Les gens ont beaucoup plus de choix quant à la façon de dépenser leur argent dans la culture qu'il y a une trentaine d'années. L'offre est plus grande. Il faut faire des efforts. Je suis d'accord que cela doit commencer très jeune. Souvent, cela commence dans la famille et se poursuit à l'école. Plus les jeunes ont un contact avec les arts tôt dans leur vie, plus ils seront susceptibles de devenir des consommateurs intéressés par les arts.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

     Madame Bowring, quel est votre point de vue sur la question?
    Comme je suis dans les tranchées avec les artistes, mon point de vue est plutôt anecdotique. Mais je dirais que les investissements n'ont pas suivi l'augmentation du prix des oeufs, du lait et du beurre des 5 ou 10 dernières années. Les subventions sont primordiales. Nous avions des danseurs professionnels de qualité avant 1957, mais ils n'étaient pas payés. Nous sommes passés de « payés » à « non payés », puis nous sommes revenus à « payés ». Nous nous sommes tournés vers le vaudeville, où les gens étaient payés. Puis, à partir de la fin du vaudeville — essentiellement, de 1930 à 1957 —, les gens se sont trouvé d'autres emplois tout en continuant à danser les soirs et les fins de semaine. Puis, avec le Conseil des arts du Canada, ils ont pu trouver des emplois dans leur domaine.
    Le fait est que les subventions sont très importantes pour avoir un pays artistique, et que l'éducation est cruciale, elle aussi. Je sais que l'éducation n'est pas une compétence fédérale. C'est aux provinces de décider. Mais je suis d'avis qu'on ne voit pas assez d'art dans nos écoles, et surtout, pas assez de danse. J'ai deux jeunes garçons qui ne sont pas très intéressés par les sports. Ils n'aiment pas particulièrement la compétition. Il y en a un qui dessine et un qui danse. Ces goûts leur sont venus naturellement. Pourtant, en classe, dans notre petite ville de Whitby, ils ne sont pas très exposés à l'art.
(1615)
    Merci.
    Monsieur Dalrymple, qu'en pensez-vous?
    Je vais continuer sur la question du numérique. Je crois qu'en général, cela a son importance. Je vois cela comme une occasion favorable pour ce secteur. Nous savons que les gens qui vont voir du contenu culturel sur Internet sont deux fois plus enclins à se procurer des billets ultérieurement que s'ils n'avaient pas vu ce contenu. Alors, pour ce qui est d'élargir l'auditoire, je pense que le numérique est essentiel. Et la tendance est encore plus prononcée chez les jeunes. Nous avons été parachutés dans le monde du numérique, mais eux y sont nés. Nous devons nous assurer d'investir dans la sphère numérique et veiller à y offrir du contenu et une programmation de qualité, parce que c'est dans cette sphère que nous allons trouver les jeunes, et que les possibilités associées au numérique ne sont pas négligeables. L'idée d'asseoir des spectateurs dans une salle de spectacle d'une certaine taille est une chose, mais c'en est une autre de penser à offrir des programmes à des milliers ou des millions de personnes. La technologie numérique nous permet de faire cela.
    La santé publique est un aspect qui n'était pas très reconnu il y a environ cinq ans et l'on n'en parlait à peu près pas. Mais à cause des arguments très solides qu'elle met de l'avant pour présenter la danse comme un bienfait pour la santé physique, l'esprit et les émotions, l'École nationale de ballet suscite un vif intérêt auprès de bailleurs de fonds et de partenaires potentiels qui n'auraient jamais pensé à s'associer à elle, comme Au Canada le sport c’est pour la vie et l'Agence de la santé publique du Canada.
    Le dernier élément est l'accessibilité. Nous devons voir la danse comme une forme d'art corporelle, mais nous pouvons créer des activités de danse de qualité qui s'adressent à tous, sans égard pour leur état de santé ou leur mobilité physique. Ces enjeux ont plus d'importance aujourd'hui qu'ils n'en avaient il y a cinq ans.
     Merci.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Passons maintenant à M. Hillyer, pour sept minutes.
    Je n'ai que deux questions. Elles ne seront pas toutes dans le même ordre d'idée, alors il se peut qu'elles vous semblent manquer un peu de cohérence.
    Madame Bowring, votre exposé m'a intéressé. Est-ce vous qui avez dit que la danse est quelque chose qui échappe à la plupart des Canadiens?
    Non, j'ai dit que la plupart des Canadiens n'ont pas conscience de l'ampleur de l'histoire de la danse au Canada.
    Oui. Et je crois que ce n'est pas seulement le cas de l'histoire, mais aussi celui de votre organisme. Nous en ignorons l'existence. Or, je pense que c'est une bonne chose qu'il existe.
    J'ai deux questions. Tout d'abord, avez-vous une idée de la façon de faire connaître la danse ou l'histoire de la danse à tous ceux d'entre nous qui ne la connaissent pas? Ensuite, pourquoi croyez-vous que nous devons avoir un organisme distinct ou une institution distincte pour l'histoire de la danse plutôt que d'inclure ce sujet dans l'histoire ordinaire, dans l'histoire de la culture ou dans l'histoire de l'art?
    D'accord. Pardonnez-moi. Pouvez-vous répéter votre première question?
    La première question était: comment pouvons-nous faire connaître l'histoire de la danse à tous ceux d'entre nous qui ne la connaissent pas?
    Je pourrais avoir plus d'employés, plus de place et une plus grosse équipe de marketing. Nous existons depuis près de 30 ans et nous restons un secret très bien gardé en raison de la taille modeste de notre organisation, et ce, malgré le fait que nous soyons le principal organisme au pays à travailler à la préservation du patrimoine en matière de danse. Notre organisation a été fondée par deux anciens danseurs du Ballet national du Canada.
    Et quelle était votre deuxième question?
    Ma deuxième question est la suivante: pourquoi pensez-vous que nous avons besoin d'une organisation distincte?
    Dance Collection Danse a débuté en tant que projet de reconstruction entre 1983 et 1986. Durant les travaux de recherche qui ont mené au projet de reconstruction en 1986 — je parle de la reconstruction des danses de l'époque avant le Conseil des arts du Canada —, les chercheurs revenaient sans cesse à Toronto de partout au pays avec des sacs remplis de films, d'albums, de photos et de coupures de presse.
    Au terme du projet de recherche et de la reconstruction, nos fondateurs ont fait des recherches dans les archives provinciales, nationales et même municipales, et ils ont tous dit, « Ce n'est pas notre mandat de recueillir ces documents; nous ne pouvons pas le faire », mais ils ont ensuite accepté et ont créé Dance Collection Danse pour s'acquitter de ce mandat.
(1620)
    C'est surprenant, mais...
    Eh bien, comme vous le savez, les archives sont débordées en ce moment, n'est-ce pas? Tout le monde a des années de retard dans le catalogage, le triage, etc., et on arrive au point où les directeurs des archives doivent dire, « Nous n'avons pas la capacité de prendre d'autre travail ».
    Donc, si ce n'était de notre organisation, ces documents pourraient rester dans des sacs dans le garde-robe de quelqu'un.
    Ou à la poubelle ou dans des incinérateurs.
    D'accord.
    Monsieur Dalrymple, y a-t-il des écoles nationales, même si ce n'est pas une organisation gouvernementale officielle, pour des styles de danse autres que le ballet?
    Oui. Dans le secteur de la danse, il y a l'École nationale de ballet, l'École royale de ballet de Winnipeg, l'École supérieure de ballet de Montréal et l'École de ballet de l'Alberta. Elles se concentrent toutes sur le ballet en raison de l'entraînement rigoureux qu'exige cette forme d'art. Les enfants doivent commencer très jeunes et s'entraîner énormément pour devenir danseurs de ballet professionnels.
    Il y a un très grand nombre d'écoles de danse professionnelle. De nombreuses compagnies de danse qui font des prestations dirigent aussi une école parallèlement, et il y en a — je ne sais pas combien — des centaines et des centaines. Il y a donc des enseignants de calibre professionnel qui enseignent la danse à des élèves qui aspirent à devenir danseurs professionnels. Les départements des beaux-arts dans des établissements d'enseignement postsecondaire offrent également une formation en danse professionnelle, dans une variété de styles.
    Dans quelle mesure les grandes écoles de ballet mettent-elles l'accent sur d'autres styles de danse que le ballet?
    Cela dépend de l'école. À l'École nationale de ballet du Canada, nous savons certainement qu'il est important que les étudiants soient exposés à une variété de styles de danse. Il y a environ 20 ans, Peggy Baker, qui est une grande danseuse moderne et une véritable légende au Canada, est devenue notre artiste en résidence. Les élèves de deuxième cycle suivaient des cours avec Peggy de la 10e à la 12e année pour apprendre des mouvements de danse contemporaine. Nous offrons des cours de danse indienne, de danse d'Asie du Sud et de danse folklorique. Ils sont donc exposés à une variété de styles de danse. J'imagine que c'est la même chose dans les autres grandes écoles, pour que les élèves soient préparés au vaste éventail de chorégraphies qui sont montées dans les compagnies de nos jours.
    Je n'ai pas fait d'études à ce sujet, mais j'imagine que si mon foyer reflète ce qui se passe dans la société en général, des émissions comme Dancing with the Stars et So You Think You Can Dance ont fait accroître la popularité de la danse, du moins pour ce qui est de la regarder. Mes enfants et moi sommes tout simplement dépassés par les gens qui ne sont même pas des professionnels et qui participent à l'émission So You Think You Can Dance, ainsi que par la puissance et l'incidence de la danse.
    J'imagine que ce genre de visibilité fait augmenter la popularité de la danse. Y a-t-il d'autres mesures que nous pouvons prendre pour promouvoir la danse? Cela augmenterait probablement la capacité des gens de gagner leur vie avec la danse. Vous avez parlé de gagner de l'argent et de ne plus en gagner et d'en gagner à nouveau. Cela dépend un peu du marché. Si les gens sont férus de danse, alors ils vont payer pour voir des spectacles. Puisque j'ai regardé ces émissions, si une bonne troupe de danse était de passage ici, je serais plus enclin, parce que c'est maintenant dans mon esprit, d'acheter des billets et d'emmener mes enfants voir le spectacle.
    Y a-t-il un moyen de faire cette promotion pour contribuer à augmenter la popularité et, par le fait même, le revenu des danseurs professionnels?
    On vous écoute.
    Une émission comme So You Think You Can Dance a certainement beaucoup contribué à faire augmenter la popularité de la danse. En fait, nous n'avons pas vu cette même popularité depuis l'âge d'or de la télévision de variétés sur la chaîne CBC dans les années 1950.
    Il y a de nombreux cinéastes, tels que Moze Mossanen et Rhombus Media, qui produisent de nombreux films de danse, mais ils ont maintenant beaucoup de mal à créer et à diffuser leurs productions à cause des coupures à la chaîne CBC.
    Très bien. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à M. Stewart pour cinq minutes, puis ce sera tout.
    Je remercie tous les témoins d'être venus aujourd'hui. C'est une excellente première journée pour entamer cette étude.
    Nous faisons trois études. Nous venons d'en terminer une sur l'industrie de la musique. Nous sommes en train d'en mener sur l'industrie cinématographique, et nous en sommes maintenant à étudier l'industrie de la danse. Il est intéressant d'entendre les perspectives des différents intervenants de toutes ces industries.
    J'ai remarqué que dans l'industrie de la musique — j'ai déjà été musicien —, les musiciens ont cru à un moment donné qu'ils pourraient devenir des vedettes du rock millionnaires, mais ils doivent maintenant s'adapter en raison du piratage. Les auteurs-compositeurs-interprètes pensent maintenant qu'ils ne peuvent plus gagner leur vie avec leur musique ou qu'ils doivent aller dans un autre pays pour pouvoir le faire, tel que les États-Unis.
    Dans l'industrie cinématographique, on pense en quelque sorte qu'on va aux États-Unis pour faire des superproductions, ou qu'on reste ici pour faire des films indépendants, ou quelque chose en ce sens.
    J'essaie de me faire une idée de l'industrie de la danse et de comprendre comment les danseurs perçoivent leur carrière et comment le gouvernement peut essayer de promouvoir la danse pour préserver notre culture, afin de ne pas perdre... J'essaie de me faire une idée d'une personne qui débute dans cette industrie comme directeur ou danseur et de savoir comment ils conçoivent leur carrière jusqu'à leurs vieux jours et leur retraite.
    Je vais commencer avec Mme Bowring, et j'aimerais ensuite entendre M. Dalrymple.
(1625)
    C'est une grande question. Chose certaine, personne ne se lance dans cette industrie pour l'argent. On le fait pour l'amour de la danse, tout en sachant qu'il sera difficile de faire sa place. Certaines personnes vont se rendre loin et seront connues sur la scène internationale comme Crystal Pite ou Jean-Pierre Perreault, et d'autres vont tirer le diable par la queue tout au long de leur carrière.
    Quand on demande comment le gouvernement peut aider, c'est en offrant des subventions. Je sais que je reviens toujours aux subventions, mais c'est vrai. Nous avons constaté que recevoir du financement a été un événement marquant pour le Conseil des arts du Canada. Cela a énormément changé comment l'art est créé et présenté au Canada. Cela a démontré qu'un gouvernement qui accorde de l'importance à l'art et qui le subventionne est d'une aide précieuse.
    D'accord, nous pouvons y revenir dans un instant.
    Monsieur Dalrymple, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?
    À l'école de ballet, environ une vingtaine d'élèves par année obtiennent leur diplôme. Pour les cinq dernières années, nous avons atteint un taux de placement de 100 %, ce qui est bon pour une école de formation professionnelle. Ce qu'il faut faire en grande partie, c'est de s'assurer que l'éducation qu'ils reçoivent est également de grande qualité. Pour nous, c'est plus facile en quelque sorte. Notre école est dirigée par l'école de ballet. On peut donc intégrer les arts à ce que les enfants sont exposés au quotidien, ce qui les aide à exceller sur le plan scolaire et artistique.
    Je pense que la possibilité d'avoir plus d'une forme d'arts à l'école publique serait très utile pour aider les enfants en ce sens, car les danseurs ne peuvent pas vivre de leur art jusqu'à ce qu'ils soient âgés; ils doivent faire autre chose. Certains peuvent devenir chorégraphes ou directeurs artistiques, et un certain nombre de nos diplômés ont pu le faire avec succès. D'autres deviennent neuroscientifiques, biologistes de la vie marine ou avocats, mais ils doivent retourner aux études.
    Ce que nous avons découvert, c'est que la danse leur a donné de la concentration, des aptitudes de gestion du temps et de la discipline, ce qui leur permet d'exceller dans d'autres programmes.
    Nous tiendrons un symposium pour nos anciens élèves l'année prochaine. Nous aurons tous nos anciens élèves, même ceux qui ne peuvent pas être présents se joindront à nous par voie électronique, pour parler de leur carrière. Nous pourrions préparer un rapport sur les élèves de l'école de ballet qui ont reçu leur diplôme il y a 40 ou 50 ans et sur leur carrière. Si cela vous intéresse, nous nous ferons un plaisir de vous le faire parvenir.
    D'accord, merci.
    C'est peut-être plus comme l'athlète olympique que vous avez décrit dans votre exposé. C'est utile pour moi de le savoir.
    La deuxième chose qui m'intéresse, c'est de faire des comparaisons. Vous ne vous concentrez pas seulement sur le Canada. Vous avez parlé des artistes internationaux.
    Je me demande si les gens qui viennent d'autres pays ont une expérience différente. Je suis certain que le Conseil des arts du Canada a été créé en raison de ce qui se passait sur la scène internationale. Je me demande s'il y a d'autres choses qui se font sur la scène internationale que nous devrions essayer de reproduire pour demeurer concurrentiels par rapport aux autres pays qui reçoivent peut-être du financement pour l'industrie de la danse de façon plus rigoureuse.
    M. Lemay peut peut-être intervenir sur cette question.
    Monsieur Dalrymple, vous avez l'air prêt à intervenir. Vous pouvez peut-être commencer.
    Je dirai simplement que dans le cadre du modèle en Europe, par exemple, où l'on attache beaucoup d'importance à la danse et où un danseur peut obtenir un poste après avoir été cinq ans au sein d'une compagnie, un danseur est rémunéré pour le reste de ses jours. On accorde beaucoup d'importance à cette forme d'art là-bas. C'est formidable, mais on voit également l'état des économies en Europe et la capacité de maintenir ce modèle à long terme est peut-être compromise.
    Aux États-Unis, l'appui du gouvernement n'est pas aussi élevé, mais leurs organisations éprouvent les mêmes difficultés que nous. Je pense que ce qui est vrai aux États-Unis, quand nous parlons à nos collègues, c'est que la priorité de démontrer la pertinence de la danse au plus grand nombre de personnes possible est une façon de constituer des auditoires pour l'avenir.
    Je trouve qu'en Europe, on ne s'inquiète pas encore de cela, mais je ne crois pas que les Européens ont un plan secondaire extraordinaire si les subventions gouvernementales ne sont pas durables à long terme.
    Dans d'autres régions du monde, telles qu'au Japon et en Chine, on investit massivement dans la danse, mais leurs économies ne sont pas de la même envergure.
(1630)
    Très bien, merci beaucoup.
    Merci à nos témoins. Si vous avez d'autres contributions à faire à notre étude, veuillez nous les faire parvenir par écrit.
    Sur ce, nous allons brièvement suspendre nos travaux.
(1630)

(1630)
    Nous allons reprendre la séance no 44 du Comité permanent du patrimoine canadien.
    Dans la deuxième heure de la réunion d'aujourd'hui, nous accueillons, de l'Assemblée canadienne de la danse, Mme Kate Cornell, directrice exécutive. Du Regroupement québécois de la danse, nous recevons M. Harold Rhéaume, président, et Mme Lorraine Hébert, directrice générale. Du Centre de ressources et transition pour danseurs, Mme Amanda Hancox est ici avec nous. Elle est la directrice générale du bureau national. Parise Mongrain, directrice du bureau du Québec, est également parmi nous. Par vidéoconférence, nous accueillons Mme Coralee McLauren, une ancienne danseuse.
    Les trois groupes disposeront chacun de huit minutes.
    Nous commencerons avec Kate Cornell, de l'Assemblée canadienne de la danse.
    La parole est à vous.
(1635)

[Français]

[Traduction]

    L'Assemblée canadienne de la danse est l'organisme de services nationaux dans le domaine des arts pour le secteur de la danse professionnelle. L'ACD contribue à favoriser une communauté créative, dynamique et durable. L'ACD représente plus de 100 organisations de danse — vous entendrez un grand nombre d'entre elles au cours de ces séances — et près de 500 danseurs. Nos partenaires comprennent toutes les organisations provinciales, la Performing Arts Alliance des organismes de services nationaux dans le domaine des arts, ou OSNA, et la Coalition canadienne des arts.
    Je veux tout d'abord remercier le comité de l'intérêt qu'il porte à la danse au Canada et de me donner l'occasion de témoigner.
    Le Conseil des arts du Canada est un bailleur de fonds public respecté et digne de confiance du secteur de la danse. Je tiens à souligner les investissements soutenus que le gouvernement offre au Conseil des arts du Canada durant cette période économique difficile. Le Conseil des arts du Canada emploie des spécialistes qui comprennent vraiment les besoins du secteur, comme le démontre l'étude cartographique de la danse dont vous entendrez parler le 13 mai. L'étude cartographique de la danse se penche sur l'ampleur et l'influence de la danse professionnelle et non professionnelle au Canada. L'Assemblée canadienne de la danse est extrêmement reconnaissante que cette étude soit réalisée, qui va me tenir occupée pour de nombreuses années. Au Canada, les danseurs sont commandités par des organismes de services comme l'ACD et le regroupement, qui veulent leur bien-être. Par exemple, le Conseil des arts du Canada appuie les organismes de services dans le renforcement communautaire.
    Récemment, Simon Brault, le PDG du Conseil des arts du Canada, a annoncé un nouveau modèle de financement. L'un des nouveaux programmes sera axé sur l'accès aux marchés internationaux. Le programme de tournées est considéré par le secteur de la danse comme étant absolument essentiel à son développement. La danse n'a pas de frontières. La danse est une langue universelle et les danseurs peuvent trouver un travail dans n'importe quel pays. L'échange créatif entre les danseurs et les chorégraphes est au coeur d'une écologie de la danse saine. Les tournées internationales et la réciprocité sont des éléments essentiels dans notre domaine. Le secteur de la danse se réjouit de cette annonce du programme internationale du Conseil des arts du Canada, mais aimerait également que les ambassades canadiennes et le ministère des Affaires étrangères envisagent d'appuyer ces tournées.
    Mon mémoire renferme plusieurs recommandations. L'une d'elles est que l'ACD recommande que les organisations de danse, en vue d'établir une réciprocité avec leurs partenaires internationaux, devraient avoir accès à plus de financement pour les tournées internationales de la part du Conseil des arts du Canada et du ministère des Affaires étrangères.
    Pour illustrer l'absence de frontières dans la danse, je veux vous parler de la chorégraphe canadienne Crystal Pite, dont le nom a été mentionné à la séance précédente. Crystal Pite est connue dans le monde entier. Elle est actuellement artiste associée à la compagnie de ballet Sadler's Wells à Londres. Elle est également artiste associée au Centre national des arts à Ottawa. L'an dernier, elle était la seule chorégraphe canadienne qui a participé à la création de la série de spectacles de danse en direct au Théâtre Nederlands Dans, qui ont été présentés dans les cinémas, notamment dans les cinémas Cineplex au Canada.
    Crystal Pite est un excellent exemple d'une Canadienne qui travaille dans le secteur de la danse. Elle a été formée dans un studio à Victoria, a dansé pour la première fois avec Ballet BC, puis a ensuite quitté le Canada pour danser en Allemagne avec l'extraordinaire chorégraphe William Forsythe. Elle est retournée plus tard au Canada pour être chorégraphe résidente pour Les Ballets Jazz de Montréal. Elle a par après fondé sa compagnie Kidd Pivot et sa carrière internationale a débuté. Sa compagnie canadienne a fait une tournée où elle s'est produite dans 52 villes en 2014, ce qui est incroyable. Ces villes étaient au Canada, aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Europe. Sa danse n'a aucune frontière, mais Crystal Pite est une Canadienne à 100 %.
    Puisque son travail a connu du succès dans de nombreux pays, Crystal Pite a vu des centaines de danseurs internationaux de talent, un peu comme un entraîneur d'une équipe de la LNH voit une foule de hockeyeurs de talent. Bien entendu, elle entretient des relations durables avec des danseurs canadiens accomplis qu'elle emploie régulièrement, mais lorsqu'elle fait passer une audition à un danseur qui peut exécuter sa chorégraphie exigeante, elle ne demande pas de voir son passeport. Crystal Pite embauche le danseur et laisse son gérant, Bernard Sauvé, s'occuper de la paperasse. Depuis juillet 2014, les exigences liées à cette paperasse ont nui à l'industrie de la danse.
    En janvier, la revue The Dance Current a publié un article de fond sur le Programme des travailleurs étrangers temporaires et son incidence sur le milieu de la danse.
(1640)
    Voici le calvaire administratif de la nouvelle co-création de Pite:
Pite a été chargée de créer une oeuvre pour les Jeux panaméricains qui se dérouleront à Toronto à l’été 2015. Le processus de création et l’horaire des répétitions pour cette nouvelle oeuvre s’étendent sur plus de 18 mois...
      — ce qui est on ne peut plus habituel —
... incluent la participation de trois collaborateurs étrangers — des danseurs que Pite admire et avec lesquels elle souhaite travailler — et se déroulent dans trois provinces et sont répartis sur trois différentes périodes de travail. Cela signifie que Kidd Pivot doit payer 9 000 $ pour présenter neuf demandes distinctes concernant les trois danseurs qui seront rémunérés pour travailler dans trois provinces différentes, qui demandent chacune une demande distincte; qui plus est, il ne faut pas oublier les tracasseries administratives que cela entraîne.
« C’est extrêmement complexe; cela nécessite beaucoup de temps; c’est très dispendieux; et cela ne favorise pas la création artistique », soupire le directeur Bernard Sauvé.
    Malheureusement, Kidd Pivot n’est que l’une des nombreuses troupes de danse qui doivent dépenser des milliers de dollars par année en raison du Programme des travailleurs étrangers temporaires.
    Ce programme d’EDSC ne tient pas compte de la réalité de la danse qui est fondamentalement de nature internationale, à l’instar du hockey professionnel. Il y a de nombreuses similitudes entre le hockey et la danse. Les athlètes s’entraînent durant une décennie pour devenir des athlètes professionnels. Ces travailleurs sont susceptibles de subir du jour au lendemain des blessures qui mettent un terme à leur carrière, mais les joueurs de hockey ont des emplois très bien rémunérés et hautement spécialisés, tandis que les danseurs ont des emplois peu rémunérés et hautement spécialisés, comme nous l’avons déjà entendu. Les joueurs de hockey professionnels se font échanger et passent rapidement d’une équipe à l’autre grâce au Programme de mobilité internationale.
    Voici deux exemples pour vous illustrer la différence entre le hockey et la danse.
    Le hockeyeur américain Ryan Miller des Canucks de Vancouver gagne environ 6 millions de dollars par saison. Le danseur américain Gilbert Small de Ballet B.C. gagne environ 30 000 $ par saison. Si Ryan Miller venait au Canada aujourd’hui, les Canucks de Vancouver devraient payer 230 $ en vertu du Programme de mobilité internationale, tandis que Ballet B.C. devrait payer 1 000 $ pour Gilbert Small en vertu du Programme des travailleurs étrangers temporaires.
    Les joueurs internationaux contribuent à relever le niveau de jeu au hockey, à en faire un sport de calibre mondial et à rendre le sport plus attrayant pour le public canadien. Il en va de même pour les danseurs internationaux dans les troupes de danse canadiennes.
    Compte tenu des nombreuses similitudes entre la danse professionnelle et le hockey professionnel, les troupes de danse ont demandé d’être admissibles au Programme de mobilité internationale. Par conséquent, l’Assemblée canadienne de la danse recommande que les organismes de danse soient admissibles au Programme de mobilité internationale au lieu du Programme des travailleurs étrangers temporaires.
    En conclusion, la danse est un élément essentiel de la culture canadienne. Les Canadiens dansent actuellement dans des studios, des centres communautaires, des sous-sols d’église, des écoles, des parcs, des salons et des théâtres partout au Canada. La danse est un moyen de communication non verbale qui exprime parfaitement le pluralisme complexe de la culture canadienne aux spectateurs de tout acabit. La danse transcende les barrières et contribue à définir qui nous sommes en tant que Canadiens.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Passons maintenant à Harold Rhéaume et à Lorraine Hébert. Vous avez huit minutes.

[Français]

    Mon collègue Harold Rhéaume et moi représentons le Regroupement québécois de la danse. Harold en est le président.
    Je vais vous parler des réalités du secteur que nous représentons et qui est essentiellement composé de compagnies de recherche et de création en danse. Nous allons vous décrire ses avancées, ses défis ainsi que les constats et les recommandations que nous avons formulés dans le mémoire. Ce dernier s'inspire du « Plan directeur de la danse professionnelle au Québec », que nous avons publié en juin 2011. Il est le résultat du travail de plus de 200 professionnels de la danse pendant quelques années. Il s'agit d'un secteur d'activités atypique. Mes collègues vous en ont parlé tout à l'heure. Je vais reprendre quelques points seulement.
    La danse de recherche et de création a connu un boom pendant les années 1980. C'était en pleine période de récession. Les récessions se sont poursuivies et répétées jusqu'à maintenant, ce qui explique que le secteur a dû trouver des manières de s'organiser, de partager des ressources et des services à moindre coût. Ce secteur a donc développé plusieurs modèles organisationnels qui sont basés sur le partage de ressources et de services. Nous en sommes très fiers.
    En danse, des modèles organisationnels comme Diagramme Gestion culturelle, la Rotonde, Centre chorégraphique contemporain de Québec, Circuit-Est centre chorégraphique, La danse sur les routes du Québec et la Fondation Jean-Pierre Perreault constituent en quelque sorte la colonne vertébrale de tout notre écosystème.
    Environ 35 compagnies de recherche et de création sont soutenues, en matière de fonctionnement, par au moins deux ordres de gouvernement. Il reste que, dans la majorité des cas, ces compagnies sont de très petites organisations qui reposent sur un ou deux employés. En 2008, nous avons réalisé une étude interne avec les HEC. Selon cette dernière, le salaire d'un employé qui travaille dans une organisation de danse se chiffre à 35 000 $. Les conditions de travail sont très stressantes étant donné le fonctionnement multitâches et le surplus d'heures travaillées.
    Cela dit, parce que ces compagnies sont tout de même très efficientes, on observe depuis 2004 que l'économie de la danse est en croissance. Il s'agit d'une croissance lente mais sûre. Selon les chiffres du Conseil des arts de Montréal, les revenus associés aux activités de ces 35 compagnies de danse représentaient en 2012-2013 un peu plus de 33 millions de dollars. En revanche, les marges de manoeuvre étaient extrêmement serrées puisque les dépenses se chiffraient à un peu plus de 31 millions de dollars.
    Le financement provient des gouvernements, pour une part, et de la diffusion, notamment la diffusion internationale, pour une autre part, en l'occurrence la part la plus importante. À notre avis, le marché local de la danse est sous-développé.
    La somme considérable des heures travaillées mais mal rémunérées ou encore la somme des heures travaillées mais non rémunérées, dans le cas des danseurs et des chorégraphes, participe aussi à l'équilibre budgétaire de cet écosystème. Selon quelques statistiques provenant d'une étude récente sur la situation des danseurs et chorégraphes — revenons ici aux chiffres mentionnés plus tôt —, les revenus bruts tirés non pas de l'enseignement ou d'autres tâches connexes, mais de la pratique de la danse, sont en moyenne de 13 900 $. Or si on en soustrait les dépenses, par exemple l'entraînement, la gestion de la carrière, les déplacements, les soins de santé préventifs ou curatifs, les auditions et même les investissements personnels dans une oeuvre de création, on en arrive à un revenu net de 9 300 $.
(1645)
     Il faut savoir que 70 % des chorégraphes et des danseurs qui ont participé à l'enquête sont des travailleurs indépendants. Quarante-deux pour cent des danseurs souffrent de douleurs chroniques à la suite de blessures en danse et, dans un même pourcentage, ils ne sont pas couverts par des régimes complémentaires de protection sociale ou de sécurité du revenu.
    Selon une autre étude récente réalisée pour le compte du ministère de la Culture et des Communications sur la protection sociale des artistes et autres travailleurs indépendants dans les arts, pour que ces artistes aient accès à un filet de sécurité sociale, il faut que les gouvernements mettent en place des mesures à l'instar de celles qui ont été mises en oeuvre dans d'autres pays comme la France, la Belgique ou l'Allemagne.
    En conclusion, l’amélioration des conditions de pratique des artistes et des travailleurs est un enjeu crucial pour toutes nos organisations, mais notre secteur ne peut le résoudre seul. La danse a quand même connu des avancées importantes au cours des 30 dernières années, notamment sur la scène internationale. Cela dit, ces avancées sont fragiles. L'écosystème de la danse est efficient, mais fragile et vulnérable aux changements.
    À titre d'exemple, les changements annoncés au système de financement du Conseil des arts du Canada peuvent inquiéter. On pourrait se retrouver devant une diminution des fonds alloués à l'ensemble du secteur de la danse ou devant une répartition des fonds faisant fi de notre écosystème, qui est essentiel pour la productivité et l'excellence artistique de la danse. C'est un écosystème dont tous les éléments sont interdépendants. Si on en affaiblit un, on affaiblit l'ensemble de la chaîne.
    Ma collègue a parlé plus tôt des répercussions qu'a eues la modification du programme de la mobilité internationale et de l'accueil des travailleurs étrangers. Nous subissons ces répercussions et en voyons les effets, malheureusement. Cela compromet des projets de coproductions et de tournées, ainsi que des projets de développement de compagnies. Cela coûte très cher. C'est une somme de tracasseries administratives franchement contre-productives.
    Pourquoi la danse ne bénéficie-t-elle pas d'une exception comme celle dont bénéficie le Cirque du Soleil, puisque la mobilité internationale fait partie intégrante de son histoire et de son économie? Je dirais qu'il y a quand même des perspectives d'avenir pour la danse puisque ce secteur repose sur des structures, sur des organisations et sur des artistes extrêmement engagés qui ne veulent pas faire autre chose que danser, pour un bout de temps en tout cas. L'engagement en danse est un investissement profond très personnel et ne se fait pas pour faire beaucoup d'argent, mais pour se réaliser.
    Les défis d'avenir reposent sur des investissements d'avenir. Investissons davantage dans la diffusion internationale. Investissons toujours davantage dans toute la chaîne de production...
(1650)

[Traduction]

    Je dois vous interrompre. Vous avez largement dépassé vos huit minutes. Vous aurez l’occasion d’en parler davantage dans les séries de questions.
    Passons maintenant à Amanda Hancox, à Parise Mongrain et à Coralee McLaren.
    Vous avez huit minutes à vous partager entre vous.
    Merci.
    Je tiens à vous remercier de nous donner l’occasion de vous parler de la situation des danseurs professionnels en ce qui a trait à la réorientation professionnelle.
    Fondé en 1985, le Centre de ressources et transition pour danseurs est un organisme de bienfaisance national dont la mission est de soutenir les danseurs dans les transitions nécessaires en début, en milieu ou en fin de carrière. Nos services sont offerts aux danseurs professionnels de partout au Canada dans les deux langues officielles.
    Dans notre exposé, nous mettrons particulièrement l’accent sur des enjeux entourant strictement les danseurs ayant fait carrière dans le domaine, sans vouloir minimiser ceux vécus par l’ensemble du milieu et d’autres travailleurs culturels. Nous sommes bien conscients que la discipline est aux prises avec des problèmes endémiques et interreliés qui inquiètent tous les danseurs et qui influent, au final, sur leur carrière. Nous croyons cependant que nos collègues des autres associations sauront vous éclairer adéquatement sur ces problèmes.
    La réorientation professionnelle des danseurs est un problème international bien documenté. J’aimerais tout d’abord citer Making Changes: Facilitating the Transition of Dancers to Post-Performance Careers, soit le rapport découlant d’une importante recherche internationale menée en 2004 par le Research Center for Arts and Culture de l’Université Columbia. Voici ce que nous pouvons lire dans le rapport:
À notre connaissance, aucun autre métier ne requiert une formation aussi exigeante, ne suscite autant d’admiration sur le plan de sa contribution à la culture et ne rémunère aussi peu.
    Comme vous l’avez entendu,
... à long terme, la vitalité de la danse elle-même exige de porter attention au bien-être de ceux qui pratiquent ce métier.
Ainsi, l’insuffisance de soutien en matière de réorientation professionnelle entraîne des problèmes importants pour les danseurs et a également un coût social en raison du gaspillage du capital humain.
    Comme vous l’avez entendu, devenir un danseur requiert beaucoup de rigueur, de passion, de discipline et d’engagement. Une carrière en danse est extrêmement exigeante et hautement compétitive. Il est juste de comparer, comme c’est souvent le cas, une carrière en danse à la carrière d’un athlète de haute performance. La formation d’un danseur débute à un très jeune âge, souvent dès l’âge de 8 ans. Il faut environ 10 ans avant de percer le milieu.
    Lorsqu'ils commencent leur carrière en danse, la majorité des danseurs constatent qu’ils sont des travailleurs autonomes contractuels et qu’ils doivent parfois jongler avec plusieurs contrats à la fois. Ils créent souvent leurs propres projets, parce qu’ils veulent vraiment danser. Les danseurs émergents ont tendance à développer une forte résilience aux difficultés financières.
    Selon une enquête nationale sur les danseurs professionnels au Canada réalisée en 2005 par Hill Strategies Research — et les données vont dans tous les sens —, le revenu annuel moyen des danseurs était de 18 000 $, mais le salaire médian était seulement d’un peu plus de 11 000 $. En dépit de ces données, au lieu d’abandonner leur carrière, la majorité des danseurs choisissent de diversifier leurs activités. Nous constatons que 72 % des danseurs professionnels complètent leur revenu avec un emploi à temps partiel dans le milieu de la danse ou à l’extérieur du milieu.
    Selon de nombreuses études et les propres observations du CRTD, la carrière d’un danseur dure environ 15 ans. Plusieurs raisons peuvent mettre fin à une carrière. C’est souvent causé par des limitations physiques en raison de l’âge ou de blessures, le stress financier et le manque d’emplois, mais le découragement, le stress lié à la performance, la douleur chronique et le manque de possibilités artistiques sont aussi des raisons qui poussent un danseur à prendre la décision difficile d’arrêter de danser.
    C’est pratiquement une étape inévitable, et cela nécessite un soutien spécialisé. Même si nous sommes heureux que des améliorations des conditions dans le milieu de la danse aient contribué à la prolongation des carrières, aucune action ne permettra d’éliminer complètement ce problème. Au final, la carrière de la majorité des danseurs professionnels se termine avant la quarantaine. Alors que la majorité des professionnels atteignent le point culminant de leur carrière et ont un statut socio-économique stable à cet âge, il n’est pas inhabituel de voir se terminer la carrière d’un danseur. Il arrive parfois que cette carrière se termine abruptement, ce qui laisse des séquelles psychologiques et financières.
    De nombreux danseurs ont beaucoup de difficulté à surmonter l’étape difficile de la réorientation professionnelle. Pour s’attaquer à ce problème, de très nombreux pays ont mis en place des programmes spéciaux. Au fil des ans, notre organisme a élaboré et a adapté des programmes pour s’attaquer de la manière la plus économique et la plus adéquate possible au défi que doivent surmonter les danseurs et indirectement tout le milieu. Le coeur de notre mission demeure de soutenir les danseurs durant le processus de réorientation professionnelle, parce que nous savons que, lorsqu’ils sont adéquatement soutenus, ils peuvent prendre conscience de leurs compétences transférables et peuvent se fixer des objectifs qui correspondent adéquatement à leur potentiel unique.
(1655)
    En offrant aux danseurs du soutien en matière de réorientation à la fin de leur carrière, le CRTD s’assure que les gens continuent d’utiliser leur sens artistique en combinaison avec leurs nouvelles compétences et contribuent à la société de manière considérable, parce que ce sont des citoyens doués qui veulent demeurer productifs. Quarante ans, c’est très jeune pour accrocher ses souliers.
    J’aimerais vous citer un autre extrait de l’étude internationale Making Changes: « Pour un danseur, la réorientation professionnelle entraîne des problèmes sur divers plans. Ces difficultés concernent non seulement les danseurs qui ont besoin d’aide sur les plans émotionnel, financier et éducationnel à la fin de leur carrière, mais aussi le milieu de la danse et le milieu culturel dans son ensemble. »
    Pour le milieu de la danse, la question de la réorientation des danseurs est liée au recrutement et au maintien des danseurs. Comme le marché du travail est de plus en plus concurrentiel, les aspirants danseurs et leur famille peuvent hésiter à s’engager dans un milieu qui ne veille pas aux besoins financiers, éducationnels et psychologiques à long terme des danseurs.
    À titre informatif, la directrice artistique de l’École nationale de ballet du Canada, Mavis Staines, a communiqué cet automne avec la ministre Glover. Voici un extrait de ce qu’a dit la directrice:
Je considère que les contributions du CRTD au milieu pancanadien de la danse professionnelle sont uniques et inestimables. D’ailleurs, c’est grâce aux services offerts par le CRTD que je peux en mon âme et conscience encourager les parents canadiens à appuyer leurs enfants qui nourrissent le rêve de faire carrière dans le milieu de la danse.
    Pour la population en général, la question de la réorientation professionnelle entraîne la perte d’une occasion économique de transférer du précieux capital humain sur le marché du travail; les anciens danseurs peuvent se lancer dans de nouvelles carrières utiles et satisfaisantes, et les employeurs profitent de travailleurs hautement qualifiés, créatifs et très recherchés qui ne demandent qu’à être formés. De plus en plus de travaux indiquent que les danseurs développent des compétences et des aptitudes uniques et utiles tout au long de leur formation et de leur carrière professionnelle. Lorsqu’une réorientation professionnelle adéquate est offerte, les danseurs peuvent contribuer considérablement aux divers secteurs économiques et à la société.
    Si le Canada considère la danse comme une forme d’art qu’il souhaite protéger et dont l’existence est justifiée par les effets externes positifs qu’elle génère et si le Canada souhaite former d’excellents danseurs et conserver ses artistes, sa seule option est de tenir compte de l’ensemble de la réalité du métier de danseur et de soutenir les danseurs tout au long du cycle naturel de leur carrière.
    Merci.
(1700)
    D’accord. Merci beaucoup.
    Passons maintenant aux séries de questions. Nous commencerons par M. Young.
    Je remercie tout le monde de leur présence et de leur temps.
    J’aimerais commencer par la fin de la carrière d’un danseur, ce qui est quelque chose que nous ne considérons pas normalement, parce que ce qui arrive à la fin a une très grande importance sur ce qui se passe au début, soit la décision pour un jeune danseur d’en faire une carrière ou non.
    Je crois que la majorité des gens connaissent les athlètes professionnels. Nous avons entendu les sommes qu’ils gagnent au cours de leur carrière et nous savons que, lorsque ces athlètes arrivent à la fin de la trentaine, leurs genoux, leurs ligaments ou leurs tendons commencent à être usés un peu, et les athlètes n’ont plus la même force. Ils se préparent donc à prendre leur retraite. Cependant, nous n’avons pas normalement tendance à penser la même chose pour les danseurs, alors que c’est exactement la même chose pour eux, parce que ce sont en fait des athlètes.
    Nous avons entendu parler du salaire des danseurs. Nous avons entendu que les danseurs travaillent à temps partiel et de manière sporadique. Les athlètes professionnels qui gagnent peut-être de 6 à 7 millions de dollars en moyenne par saison dans la LNH, par exemple, ont beaucoup d’argent et peuvent en mettre de côté pour leur retraite et ils ont une association pour les aider à négocier leurs avantages sociaux, leurs revenus de retraite, etc. Ce n’est bien entendu pas le cas pour les danseurs. Bref, lorsqu’ils arrivent à la fin de leur carrière, ils doivent en gros se débrouiller seuls. Ils ont peut-être 35 ans; ils épluchent les journaux à la recherche d’offres d’emploi; ils possèdent peut-être des compétences recherchées; et ils se préparent à commencer leur deuxième carrière.
    Madame Hancox, votre organisme les aide à planifier leur avenir pour avoir du succès dans leur carrière. C’est excellent, mais je crois qu’il est encore plus important de souligner que cela leur permet, s’ils en ont les moyens, de faire carrière en danse. C’est lié à ce qui se passe à la retraite. Les gens savent ainsi qu’il y a une lumière au bout du tunnel.
    Qu’est-ce que le gouvernement devrait faire pour aider votre organisme à aider les danseurs à choisir une carrière en danse et ainsi contribuer à la croissance de la danse au Canada?
    Le ministère du Patrimoine canadien appuie grandement notre organisme depuis la création en 1996 du Fonds du Canada pour la formation dans le secteur des arts, qui a déjà porté un autre nom, mais qui était la même chose. Le ministère nous a très bien soutenus.
    C’est un programme qui vise à soutenir le développement dans les arts. Dès le début, nous avons été une anomalie, mais il était convenu qu’une formation pour une seconde carrière pour un danseur fait vraiment partie de la formation pour être danseur. Il faut avoir un tel soutien, parce que, comme vous l’avez entendu et comme Mavis Staines l’a dit, les parents ne laisseraient pas leurs enfants faire carrière en danse s’ils savaient qu’il n’y avait tout simplement rien à la fin.
    L’an dernier, les responsables du Fonds du Canada pour la formation dans le secteur des arts nous ont posé des questions, parce que nous n’offrons pas de formations dans le secteur des arts. Ils disent qu’ils ne savent pas ce que nous faisons dans leur programme, parce que nous ne correspondons pas exactement à leurs critères. C’était une surprise pour nous, parce que nous profitons depuis le début de ce programme et que personne ne nous en a parlé.
    Pour les danseurs qui sont en réorientation, d’où le soutien en la matière provient-il? C’est une situation unique, parce que nous sommes un organisme unique. Nous ne cadrons peut-être pas entièrement dans la formation dans le secteur des arts, mais nous ne cadrons pas vraiment dans la santé ou dans l’éducation.
    Nous espérons vraiment que le gouvernement encouragera le Fonds du Canada pour la formation dans le secteur des arts à reconnaître que la danse est un domaine inhabituel, unique et différent et que la formation pour être danseur inclut la préparation à la réorientation.
    Nous commençons à parler à ces danseurs alors qu’ils sont toujours à l’école; nous leur disons toujours de se garder des options et de faire des études pendant qu’ils dansent pour commencer à préparer leur réorientation avant d’avoir 30 ou 35 ans ou — nous ne le souhaitons pas — de subir à 26 ans une blessure qui met un terme à leur carrière et de se rendre compte du jour au lendemain qu’ils n’ont rien. Voilà ma recommandation.
(1705)
    Madame Mongrain.

[Français]

     Il faut savoir que le processus de transition de carrière d'un danseur dure à peu près trois ans. Donc, si notre organisme est financé sur une base annuelle, cela compromet notre capacité à fournir aux danseurs un accompagnement de qualité. Si nous savions que notre financement est assuré pour un certain nombre d'années, cela nous aiderait beaucoup.

[Traduction]

    Kate Cornell, je suis certain que vous y avez déjà pensé souvent. Si le Centre de ressources et transition pour danseurs n’existait pas et que beaucoup moins de jeunes gens choisissaient de faire carrière en danse, quelles conséquences cela aurait-il sur la danse comme forme d’art au Canada?
    C’est difficile d’imaginer un tel avenir, mais nous constaterions que moins de gens auraient le courage de faire carrière en danse. Comme Amanda Hancox l’a déjà mentionné, les parents seraient réticents à inscrire leurs enfants dans des programmes à temps plein dans une école de ballet ou même dans des programmes de formation postsecondaire en danse contemporaine ou en danse indienne classique.
    Ne pas avoir cette mince sécurité... Je me dois de mentionner que la majorité des danseurs et même la majorité des travailleurs dans le secteur des arts n’ont pas de régime de retraite et sont même rarement couverts par une assurance-maladie. La sécurité qu’offre le Centre de ressources et transition pour danseurs est essentielle dans notre milieu. Comme Mme Hancox l’a dit, c’est très important.

[Français]

    Monsieur Nantel, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous d'être ici. J'espère que nous aurons la chance de parler à Mme McLaren. Le temps file tellement vite.
    J'ai des questions pour vous, madame Hébert. Tout à l'heure, Mme Bowring a dit que Radio-Canada/CBC était un joueur important et qu'il était fragilisé récemment. Mme Cornell, quant à elle, a dit que le rôle des ambassades est de moins en moins culturel. Je suis d'accord pour dire qu'il faut soutenir la tournée internationale de nos créateurs en danse.
    Au Québec et au Canada, que pourrait-on faire pour stimuler la demande? Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour que le public s'intéresse davantage à la danse?
    Vous avez parlé plus tôt des années 1980. Je me souviens de la compagnie La La La Human Steps d'Édouard Lock et de toutes les autres. Qu'est-ce qui avait créé cette effervescence? Que pourrait-on faire pour ramener une telle effervescence d'abord localement?
(1710)
     L'effervescence existe encore. Le public qui fréquente la danse au Québec représente quand même 4 % de l'ensemble des publics des arts de la scène. Même s'il ne représente qu'une petite portion, ce public connaît une croissance.
    Qu'est-ce qui contribue au développement des publics et de la danse? On parle, entre autres, de diffuseurs qui développent des compétences, qui ont de l'équipement, qui font de la médiation culturelle, qui ont les moyens de faire la promotion de la danse et qui sont inscrits dans leur communauté. Ce dernier point est très important. Les diffuseurs doivent être inscrits dans leurs communautés.
    Je pense que, localement, il faut continuer à investir dans le développement du réseau de diffusion de la danse. Il faut donner davantage de moyens aux diffuseurs et il faut les encourager à travailler en réseaux. Enfin, il faut absolument investir dans le Web.
    Madame Hébert, vous parlez de diffuseurs. S'agit-il de ceux qui achètent les spectacles pour les diffuser dans les salles des différentes villes du pays?
    Oui, ils ont un rôle majeur à jouer. Ce sont des plaques tournantes, ce sont des animateurs de la danse dans les communautés. Il faut qu'ils soient outillés.
    Afin de bâtir l'auditoire pour la danse, croyez-vous qu'on pourrait offrir une plus grande visibilité grâce à une interaction directe avec des jeunes?
    Cela se fait déjà, mais c'est très exigeant. Pour que cela se fasse bien, il faut des partenariats. Il faut établir et développer des partenariats avec d'autres organisations et avec les écoles. Bien que ce soit un travail de terrain, un travail de fond, un travail de longue haleine, ce travail rapporte.
    Précisément, vous parlez d'écoles. Un peu plus tôt, M. Dalrymple, en Alberta, nous a parlé de collaboration avec les écoles. Quel genre de collaboration croyez-vous que l'on devrait susciter pour créer un intérêt, tant envers le fait de danser qu'envers le fait d'aller voir des spectacles de danse?
    Il faut regarder de très près ce que la danse est en train de développer auprès du jeune public, dans les écoles et dans les centres communautaires. Il est assez fascinant de voir l'impact des spectacles de danse jeune public auprès des jeunes et auprès des parents. Je crois qu'il y a là un investissement d'avenir.
    Quand on se préparait à cette étude, on voyait souvent l'expression « recherche-développement ». Je ne doute pas qu'une chorégraphe fasse beaucoup de recherche-développement avant de présenter son spectacle, mais à quoi fait-on allusion essentiellement?
    Une oeuvre est une création qui suppose de la recherche, de l'expérimentation et des répétitions. Une oeuvre a une durée de vie assez courte, en général, à moins de s'inscrire dans un réseau de tournées important sur la scène internationale. Les chorégraphes sont donc constamment appelés à se renouveler et à créer de nouvelles oeuvres pour maintenir leur place dans le marché. Ce qui fait qu'on a la cote en danse est ce qui est original. Pour être original, il faut constamment se renouveler
    D'ailleurs, j'ai bien entendu Mmes Hancox, Mongrain et McLaren faire une croisade pour améliorer la situation des danseurs qui arrivent à l'âge de la retraite prévue pour un athlète ou un danseur.
    Ne croyez-vous pas qu'on peut espérer qu'il y aura un acte de médiation pour faciliter l'accessibilité à la danse? On a parlé de certaines émissions télévisées qui ont créé un intérêt. N'y a-t-il pas une approche qui faciliterait la compréhension, l'interprétation et l'accessibilité de la danse?
    Il faudrait au minimum faire en sorte qu'elle soit plus visible dans nos médias. Le manque de visibilité de la danse dans nos médias est pathétique, et ce, tant à la télévision que dans les médias traditionnels. Il faut savoir que, dans notre pays, la danse s'est développée grâce à la télévision. Dans les années 1950 et 1960, on a vu de la danse à la télévision.
(1715)
     Maintenant, vous suggérez qu'on aille vers les nouveaux médias, mais dans quelle forme?
    Nous suggérons les deux. Les chaînes de télévision font quand même plus autorité que les médias sociaux. C'est la combinaison des médias faisant autorité et des médias sociaux qui créent le buzz. Il faut créer le buzz.
    Vous dites qu'il faudrait aller vers les nouveaux médias, mais à quoi faites-vous allusion? À plus de captations?
    Il y a de plus en plus de vidéos de danse qui se développent. Il y a de plus en plus d'événements qui sont captés.
    Par exemple, le cinéma Excentris diffuse des films d'art. On peut aller voir le film en salle ou payer pour le regarder de chez soi. Ce genre d'initiative, comme les captation dans les locaux, serait-elle possible?
    Je n'en suis pas certaine parce qu'il reste que la danse demande un contact avec le public. C'est très important. Mais cela fait de belles images et cela peut donc servir à autre chose.
    Je remercie tout le monde ainsi que vous, madame Hébert.

[Traduction]

    Je rappelle aux membres du comité que nous avons également Mme McLaren à Toronto en vidéoconférence, si vous voulez lui poser des questions.

[Français]

    Monsieur Dion, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Madame McLaren, je vous souhaite la bienvenue, et je vous remercie infiniment d'être avec nous.

[Français]

    Je remercie Mmes Mongrain, Hancox, Cornell et Hébert ainsi que M. Rhéaume.

[Traduction]

    Je ne suis pas certain d'avoir le temps de poser des questions à chacun d'entre vous en sept minutes.

[Français]

    J'ai été intrigué par certaines de vos recommandations. Je vais donc vous inviter à développer certaines d'entre elles en vous demandant d'être succincts. Si nous passons sept minutes sur la première, nous ne pourrons pas parler des suivantes.
    Madame Hébert, vous avez fait une recommandation sur le Fonds des médias du Canada.
    Oui.
    Je vais la lire:
Créer un nouveau programme, ou volet dans le Fonds des Média Canada, répondant aux besoins du secteur de la danse en création, production et diffusion de contenus numériques, en ressources et compétences spécialisées en gestion, conception et développement de projets avec l’industrie.
    Qu'est-ce que ça mange en hiver? Qu'est-ce que cela ferait que les programmes existants ne font pas?
    Comment faisons-nous pour financer ces projets? Quelle sorte d'équipement avons-nous? Comment payons-nous les compétences spécialisées dont nous avons besoin? Sauf exception, c'est là que le secteur de la danse en est. Nous n'avons pas de programme d'accès comme celui auquel a accès l'industrie. Nous n'avons pas de fonds de recherche-développement ni de crédits d'impôt. Notre secteur est composé d'organisations sans but lucratif. Il faut bien que nous recevions une aide quelconque pour démarrer nos projets. Pour le moment, nous n'avons pas accès à cela.
    Est-ce un programme dans lequel vous voudriez que le gouvernement investisse beaucoup?
    Il faudrait qu'il investisse.
    Où cela se situerait-il parmi toutes les priorités?
    Soit c'est le Conseil des arts du Canada, soit c'est Patrimoine canadien qui a le plus de crédits pour nous aider. Arrangez-vous comme vous voudrez, mais nous avons besoin de fonds!
    Je me demandais pourquoi il fallait un nouveau programme. Pourquoi le programme existant ne convient-il pas?
    Le programme a été conçu en fonction de l'industrie. Il n'est pas adapté à nos secteurs d'activité artistique.
    D'accord. Je vous remercie.

[Traduction]

    Madame Cornell, voici ce que dit votre quatrième recommandation:
Que le gouvernement fédéral reconnaisse le travail des organisations du secteur de la danse qui oeuvrent à améliorer la santé et le mieux-être des Canadiens en leur donnant accès au financement fédéral auprès d’organismes tels que Santé Canada et Industrie Canada.
    Qu'avez-vous en tête ici?
    Il y a de nombreuses organisations de danse qui travaillent dans les écoles d'un bout à l'autre du Canada pour aider les professeurs qui craignent d'enseigner cette discipline. Les écoles ont la chance d'avoir un artiste professionnel qui expose les jeunes à la danse professionnelle. Ces organisations contribuent à garder les Canadiens en santé.
    Puisque l'éducation relève évidemment de la compétence des provinces, ces programmes dépendent actuellement du fonds d'exploitation du Conseil canadien des arts du Canada, et possiblement du ministère du Patrimoine canadien. Ces programmes ne reçoivent toutefois aucun financement spécial.
    Je ne peux m'empêcher de remarquer que le programme Canada 150 d'Industrie Canada comporte un volet culturel, et pourtant, bon nombre de ces programmes ne sont pas admissibles — je crois qu'il s'agit pour la plupart de programmes sans but lucratif. Cette voie pourrait donc être envisagée.
    Je suis loin d'être spécialiste en santé. Mais compte tenu des avantages énormes dont parlait M. Dalrymple à propos du programme Sharing Dance qui incite un million de Canadiens à danser, je me demande aussi s'il peut y avoir un financement qui reconnaisse la valeur de la danse pour la santé, et le travail que réalisent ces grandes organisations de danse.
(1720)
    Merci beaucoup.
    J'ai d'autres questions à vous poser, mais j'y reviendrai si j'ai le temps. Pour le moment, je demanderais à Mmes Hancox et Mongrain de répondre.

[Français]

     Mme McLaren pourrait intervenir à ce moment-là.

[Traduction]

    Pourriez-vous nous expliquer une de vos recommandations? Vous parlez de la déclaration de Monaco. Qu'entendez-vous par là? Quelle est la position du Canada à ce sujet? Pourquoi avez-vous insisté pour en faire une recommandation?
    C'était une recommandation internationale que tous les pays devaient adopter.
    Et le Canada ne l'a pas encore fait?
    En fait, la recommandation a été présentée, et en tant qu'organisation qui s'occupe de danseurs professionnels, nous faisons ce travail. La recommandation est donc une façon de dire que les gouvernements des pays devraient bel et bien se pencher sur la question.
    Qu'est-ce qui changerait si le Canada le faisait?

[Français]

    Nous nous rendons compte aussi que, d'une certaine manière, notre milieu est assez hermétique. Je crois que nous sommes méconnus. Le comité peut en témoigner. En effet, la nature spécifique du métier de la danse n'est pas connue. Le CRTD a été dépositaire de la Déclaration de Monaco. Or il serait bon que le Canada embrasse cette déclaration.
    Qu'est-ce que cela changerait?
    Il s'agit d'une prise de conscience. À partir du moment où des écoles de formation sont financées, si l'on veut que les danseurs canadiens soient excellents, il faut tenir compte du fait qu'ils doivent être soutenus tout au long de leur carrière et que c'est normal.
    Que vous a dit le gouvernement lorsque vous avez fait cette proposition?
    Nous ne l'avons pas faite, à ma connaissance.
    Il s'agit donc pour nous d'une primeur.
    Exactement. Nous vous lançons la balle.
    D'accord.
    En ce qui concerne votre deuxième recommandation, elle va comme suit:

[Traduction]

Il est recommandé que le Comité permanent du patrimoine canadien veille à ce que soit réaffirmée la volonté politique du gouvernement canadien de soutenir le Centre de ressources et transition pour danseurs.
    Pourquoi en avons-nous besoin? N'avez-vous pas déjà l'impression de recevoir l'appui du gouvernement?
    Comme je l'ai dit plus tôt, c'est simplement que nous ne savons pas exactement quelle place nous allons occuper. Les responsables du programme du Canada pour la formation dans le secteur des arts disent ne plus savoir le rôle que nous jouons dans ce programme. C'est donc une façon de dire que nous espérons que le gouvernement trouve notre travail important et souhaite nous faire une place quelque part.
    Nous avons reçu une aide remarquable à ce jour. Ce n'est qu'au cours de la dernière année que notre financement est passé de plusieurs années à un an. Les responsables n'ont eu aucun problème relatif à notre travail ou à notre mandat. Je pense qu'ils disent simplement que nous ne convenons pas vraiment au programme, ce qui nous inquiète pour la suite des choses.
    Vous voulez donc que nous demandions au gouvernement de vous rassurer?
    En fait, ce n'est pas seulement pour nous, mais bien pour l'ensemble de l'industrie de la danse.
    Nous allons maintenant laisser la parole sept minutes à M. Yurdiga, après quoi nous aurons terminé.
    J'aimerais remercier les témoins d'être ici aujourd'hui dans le cadre de cette étude des plus importante.
    Ma première question s'adresse à Mme Cornell. J'aimerais vraiment en savoir plus sur le programme des travailleurs étrangers temporaires dans le domaine de la danse. Pourriez-vous s'il vous plaît expliquer en quoi les danseurs étrangers contribuent au secteur canadien de la danse, et en quoi ils profitent en retour aux Canadiens?
    Bien sûr.
    J'aimerais commencer par parler des danseurs étrangers qui travaillent au sein des troupes de danse canadiennes de nos merveilleuses écoles. Le programme de Patrimoine canadien appuie la formation dans 14 écoles extraordinaires, y compris l’École nationale de ballet du Canada, dont vous avez entendu le témoignage aujourd'hui. Nos écoles sont tellement réputées qu'elles attirent des étudiants internationaux, qui suivent leur formation aux côtés des Canadiens. Les directeurs artistiques canadiens viennent assister aux cours, et les étudiants passent des auditions. Lorsqu'un chorégraphe tombe sur un danseur avec lequel il veut travailler, il ne va pas lui demander son passeport, comme je l'ai dit en exposé.
    La présence de ces danseurs étrangers est très avantageuse pour démontrer le calibre mondial de la danse au Canada et pour intégrer différents styles, diverses façons de travailler, de même que le travail d'autres chorégraphes. Voilà qui représente bien l'absence de frontières en danse et la grande mobilité des danseurs canadiens, qui travaillent quelques années en Allemagne avant de rentrer au pays, et inversement.
    Pour le public, il est extraordinaire de voir que la diversité de la population canadienne est représentée sur scène. Il est merveilleux de voir sur la scène que ces gens sont capables de danser et de mettre en valeur le travail d'un chorégraphe.
    Je pense que la mobilité des danseurs ne limite en rien nos chorégraphes, mais leur permet au contraire de travailler avec les danseurs de leur choix dans l'intérêt des Canadiens.
(1725)
    Merci.
    À ce sujet, combien d'artistes étrangers se produisent actuellement au Canada? Il s'agit évidemment d'une part très importante de votre organisation.
    Tout à fait. Comme je l'ai dit au début, nous avons quelque 100 organisations membres. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais je pourrai vous les faire parvenir sans problème. Par exemple, je crois que les Grands Ballets canadiens comptent près de 30 travailleurs étrangers temporaires.

[Français]

     Certains d'entre eux sont déjà citoyens canadiens ou résidents permanents, mais il reste que les Grands Ballets canadiens comptent quatre Canadiens.
    Une voix:Combien sont-ils, au total?
    Mme Parise Mongrain: Il y a 36 danseurs.

[Traduction]

    Je vais en discuter avec nos membres pour vous donner les chiffres exacts.
    Merci.
    Quels programmes et services votre organisation offre-t-elle aux particuliers?
    En tant qu'organisme de services nationaux dans le domaine des arts, ou OSNA, nous sommes fort intéressants. Lorsque je rencontre mes confrères de la Coalition canadienne des arts, je constate que nous sommes une des seules OSNA qui s'adresse tant aux artistes qu'aux organisations. Nous nous sommes associés à la Société Fraternelle ACTRA afin d'offrir des services de santé abordables et accessibles aux danseurs, ce qui est tout à fait essentiel — non seulement pour que leurs enfants puissent aller chez le dentiste, mais aussi en cas de blessures. Il est très important de leur donner accès à des soins de santé. Croyez-le ou non, ils s'intéressent beaucoup à notre travail de sensibilisation à l'échelle fédérale, et ils souhaitent l'appuyer personnellement. Nous nous associons aussi avec bien d'autres organisations, comme la Canadian Alliance of Dance Artists, qui n'est pas un syndicat, mais qui représente les droits des danseurs. L'alliance a d'ailleurs un document sur la protection des droits des danseurs canadiens. Nous favorisons aussi des milieux de travail sécuritaires, de sorte qu'un studio ne soit pas glacial lorsque les danseurs arrivent, que les athlètes dansent sur un plancher absorbant les chocs, ce qui est extrêmement important pour prévenir les blessures, et ainsi de suite. Nous faisons de notre mieux pour tenir les personnes au courant et pour les protéger.
    Une voix: Et pour qu'ils continuent de bouger.
    Mme Kate Cornell: C'est exact.
    Merci beaucoup de votre réponse.
    Par curiosité, madame McLaren, comment le Centre de ressources et transition pour danseurs vous a-t-il aidée dans votre transition de la danse à une autre carrière?
    Merci, monsieur le président. Je vous remercie de me poser cette question.
    Sans l'aide du Centre de ressources et transition pour danseurs, je ne serais très certainement pas là où j'en suis aujourd'hui dans ma vie. C'était en 2002, lorsque j'ai pris ma retraite de la danse et que j'ai cessé d'être membre du Toronto Dance Theatre. Ce que mon parcours m'a appris depuis plus de 10 ans, alors que j'ai maintenant un doctorat en soins infirmiers, c'est vraiment de tirer parti des compétences, de la discipline, de la motivation et de la créativité que j'ai acquises en tant que danseuse. J'y suis parvenue grâce au Centre de ressources et transition pour danseurs, qui m'a aidée non seulement sur le plan financier, mais m'a aussi fait comprendre que ces compétences peuvent s'appliquer à une autre carrière, et qu'une carrière en danse ressemble beaucoup à une carrière en infirmerie. Je mène des recherches auprès d'enfants handicapés, et j'utilise la danse comme méthode pour comprendre le mouvement d'une nouvelle façon. J'emploie aussi toutes sortes de théories fondées sur la danse pour comprendre comment nous pouvons améliorer la vie des jeunes enfants handicapés.
    À bien des égards, je n'y serais jamais arrivée sans l'aide du Centre de ressources et transition pour danseurs, et sans la confiance en moi qu'il m'a redonnée, moi qui dirige aujourd'hui un travail que je trouve tout à fait passionnant, et qui, je l'espère, contribuera à la société canadienne.
(1730)
    Merci.
    Je remercie beaucoup nos témoins. Je vous remercie de votre contribution à notre étude. Si vous avez d'autres commentaires, je vous invite à nous les faire parvenir par écrit d'ici une ou deux semaines.
    Cela dit, la séance est levée.
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