La procédure et les usages de la Chambre des communes
Sous la direction de Robert Marleau et Camille Montpetit
Édition 2000Plus d’informations …
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Séance quotidienne

La Chambre tient habituellement chacune de ses séances un jour différent. Au dix-neuvième siècle, il est toutefois arrivé qu’on tienne deux ou plusieurs séances un même jour pour tenter d’accélérer les travaux de la Chambre en contournant la règle interdisant qu’un projet de loi ne fasse l’objet de plus d’une « lecture » le même jour [30] . En général, quelque temps avant la prorogation ou la dissolution du Parlement, la Chambre adoptait un ordre stipulant qu’il y aurait deux séances par jour, en précisant l’heure du début et de l’ajournement de chacune [31] . La prolongation des séances, l’habitude de prolonger les heures de séance en juin juste avant l’ajournement pour l’été, et la limitation du débat sur certaines mesures législatives par l’attribution de temps ou la négociation d’accords en vue de suspendre les règles ont entraîné l’abandon de cette pratique. Au vingtième siècle, c’est pour de tout autres raisons, comme la fin et l’ouverture de sessions successives d’une législature [32] , et pour permettre aux députés de participer à des cérémonies spéciales [33] , qu’il y a eu deux séances le même jour.

Le Règlement stipule que la Chambre doit se réunir le lundi à 11 heures, le mardi, le jeudi et le vendredi à 10 heures, et le mercredi à 14 heures [34] . Une fois qu’elle est réunie et a amorcé ses travaux, la Chambre n’ajourne habituellement pas avant l’heure d’ajournement fixée, c’est-à-dire 18h30 le lundi, le mardi, le mercredi et le jeudi, et 14h30 le vendredi [35] . Le lundi, le mardi, le mercredi et le jeudi, une motion d’ajournement de la Chambre est réputée avoir été présentée et appuyée. Cette motion peut faire l’objet d’un débat, appelé débat ou délibérations sur la motion d’ajournement, également connu sous le nom de « late show [36] », d’au plus 30 minutes après quoi le Président la considère adoptée et ajourne la Chambre jusqu’au prochain jour de séance [37] . Le vendredi, aucune motion d’ajournement de la Chambre n’est présentée, et le Président lève la séance sans mise aux voix.

Modification des jours et heures de séance

Par dérogation aux règles, la Chambre peut modifier les jours ou les heures de séance au moyen d’ordres spéciaux. Diverses raisons ont motivé de tels ordres : pour annuler une séance afin de permettre à des députés de participer à un congrès politique [38] ; pour amorcer une séance plus tôt certains jours afin d’étudier des affaires émanant du gouvernement [39] ; pour retarder le début d’une séance afin qu’une personnalité étrangère ou un chef d’État en visite puisse prendre la parole devant les deux chambres [40] ; pour ne pas siéger certains jours où une séance serait autrement prévue [41] ; et pour siéger certains jours où autrement la Chambre ne siégerait pas, dont le samedi et le dimanche [42] . Si l’ordre spécial adopté en vue de siéger un samedi ou un dimanche ne le précise pas, l’ordre du jour est celui d’une séance du vendredi [43] . À une époque, il était assez courant que la Chambre siège le samedi en fin de session ou juste avant l’ajournement pour l’été lorsque le gouvernement voulait accélérer l’adoption de mesures législatives. Depuis l’entrée en vigueur d’articles du Règlement qui permettent de prolonger les heures de séance sans déroger au calendrier parlementaire habituel, il est toutefois rare que la Chambre siège le samedi ou le dimanche [44] .

Suspension d’une séance

Même si les travaux de la Chambre se poursuivent sans interruption du début d’une séance jusqu’à l’ajournement, la Chambre peut s’entendre pour faire une pause. De telles « suspensions » se font couramment et pour diverses raisons, car cette procédure fort simple permet à la Chambre de gérer son emploi du temps comme elle l’entend. Dès la suspension d’une séance, le Président quitte le fauteuil, mais la masse demeure sur le Bureau pour indiquer que la Chambre reste en exercice. Les séances de la Chambre sont souvent suspendues avec l’intention de reprendre les travaux plus tard dans la journée. Aucun article du Règlement ne régit explicitement la suspension d’une séance. Le libellé d’une motion ou d’un ordre spécial de la Chambre peut entraîner une suspension de la séance [45] ; ou la Chambre peut suspendre ses travaux simplement par consentement unanime [46] .

Les séances sont le plus souvent suspendues lorsque, ayant terminé l’étude d’une question, la Chambre arrête ses travaux jusqu’à la convocation de la présidence ou jusqu’à l’heure prévue du prochain point à l’ordre du jour. Cela se fait soit sur l’initiative d’un député, qui demande si la Chambre consent à l’unanimité à suspendre la séance [47] , soit par une intervention du Président qui, voyant que le débat sur une affaire est terminé, suspend la séance [48] . Il est généralement entendu, dans ce dernier cas, que le Président agit avec l’assentiment de la Chambre.

Au cours des dernières années, la Chambre a suspendu ses séances pour diverses raisons : pour attendre l’heure fixée par la Chambre pour un vote par appel nominal [49] ; pour permettre la tenue éventuelle d’une cérémonie de sanction royale [50] ; pour permettre au Président de délibérer sur une décision [51] ; pour attendre l’heure fixée pour la présentation d’un Budget [52] ; à cause d’une alerte d’incendie [53] ; pour permettre la présence de députés particuliers à la Chambre en vue d’un débat [54] ; pour attendre un message du Sénat concernant un amendement à un projet de loi [55] ; pour permettre aux partis de tenir des négociations sur une mesure législative [56] ; pour permettre la reproduction de motions déposées sans préavis [57] ; pour attendre une déclaration anticipée du premier ministre [58] ; pour permettre aux députés d’assister aux funérailles d’un député [59] ; pour permettre aux députés d’assister au dévoilement d’une statue sur la colline du Parlement [60] ; pour réparer le système d’interprétation simultanée de la Chambre [61] ; et parce qu’une députée s’est effondrée à la Chambre [62] .

Pour reprendre la séance, le Président prend place au fauteuil et fait retentir la sonnerie brièvement. Les travaux de la Chambre reprennent sans vérifier s’il y a quorum, soit conformément à l’ordre spécial adopté par la Chambre ou soit selon l’entente conclue par la Chambre avant la suspension.

Poursuite ou prolongation d’une séance

Dans certaines situations, tout député peut, sans préavis, proposer une motion visant à poursuivre ou à prolonger une séance au-delà de l’heure normale d’ajournement quotidien afin de poursuivre l’étude d’une affaire particulière à une ou à plusieurs étapes [63] . Depuis l’entrée en vigueur de l’heure d’ajournement fixe en 1927 jusqu’en 1965, une multitude de motions visant à poursuivre ou à prolonger les séances pendant l’heure des repas ou au-delà de l’heure habituelle d’ajournement quotidien ont été adoptées, souvent par consentement unanime. Au début des années 1960, il devenait toutefois de plus en plus difficile d’obtenir l’accord des députés en vue de prolonger une séance au-delà de l’heure d’ajournement obligatoire à la fin d’un jour donné [64] . Ce genre de rigidité a sans doute contribué à la création d’un autre mécanisme de prolongation des séances par l’adoption, en 1965, d’un nouvel article du Règlement [65] .

Depuis lors, une motion visant à poursuivre ou à prolonger une séance de la Chambre peut être proposée, pourvu que la Chambre soit en train d’examiner l’affaire en cause [66]  et que ce soit dans l’heure qui précède celle à laquelle l’étude de cette affaire serait normalement interrompue par les Affaires émanant des députés ou l’heure fixée pour l’ajournement quotidien [67] . Une telle motion, qui ne peut faire l’objet ni d’un débat ni d’un amendement [68] , ne peut être proposée pendant la période des Affaires émanant des députés [69] . Tout député peut en faire la proposition au cours du débat, mais il ne doit le faire ni en invoquant le Règlement [70] , ni pendant la période de questions et observations qui suit un discours de député [71] , ni lorsque la Chambre est engagée dans des délibérations qui doivent prendre fin à une heure précise. Une motion visant à prolonger la séance au-delà de l’heure normale d’ajournement ne peut, par exemple, être proposée lorsque des votes sont prévus les jours réservés aux travaux des subsides, pendant le débat sur l’Adresse en réponse au discours du Trône ou sur le Budget, lorsqu’un projet de loi ou une motion fait l’objet d’une motion d’attribution de temps ou de clôture, ou lorsqu’un ordre spécial de la Chambre lui fixe une échéance précise pour disposer d’une affaire.

Lorsqu’une motion visant à poursuivre ou à prolonger une séance est présentée, le Président met la question aux voix et demande spécifiquement aux députés qui s’y opposent de se lever. Si 15 députés ou plus se lèvent, la motion est réputée retirée; autrement, elle est adoptée [72] . Il est arrivé que la même motion soit proposée plus d’une fois durant la même heure [73] .

Lorsque la Chambre s’est formée en comité plénier, le comité doit lever brièvement la séance afin que la motion puisse être présentée dans les règles et que la Chambre puisse en disposer alors que le Président occupe le fauteuil [74] . Lorsqu’une motion visant à prolonger une séance est adoptée le mardi, le mercredi, le jeudi ou le vendredi avant de passer aux Affaires émanant des députés, le débat sur l’affaire en cause se poursuit après l’heure consacrée aux initiatives parlementaires.

Lorsqu’une motion visant à poursuivre ou à prolonger la session a été adoptée, le Président ne peut lever la séance qu’une fois terminées les délibérations de la Chambre sur l’affaire en cause ou, si l’étude de l’affaire en cause n’est pas terminée, après l’adoption d’une motion d’ajournement proposée par un ministre [75] .

Séances prolongées en juin

Depuis l’établissement, en 1982, du calendrier parlementaire fixe, le Règlement permet de prolonger les heures de séance au cours des 10 derniers jours de séance en juin [76] . La Chambre n’a fait qu’officialiser une pratique de longue date par laquelle, avant une prorogation du Parlement ou l’ajournement pour l’été, elle prolongeait les heures de séance afin de terminer ou de faire avancer ses travaux. Cette prolongation des heures de séance se faisait le plus souvent par l’ajout d’une séance le samedi [77] ; l’ouverture des séances plus tôt dans la journée [78] ; l’ajout de séances les soirs où il n’était pas prévu par ailleurs que la Chambre siège [79] ; ou la suspension des pauses-repas le midi et le soir [80] .

Pour prolonger les heures de séance en juin, un ministre doit, pendant les Affaires courantes, le dixième jour de séance qui précède le 23 juin, présenter une motion qui n’exige pas de préavis [81] . La motion, qui doit proposer de prolonger les séances jusqu’à une heure donnée, sans que cela s’applique nécessairement chaque jour durant cette période [82] , peut faire l’objet d’un débat d’au plus deux heures avant que le Président ne mette la question aux voix [83] .

Même si l’article du Règlement qui permet de prolonger les heures de séance en juin est en vigueur depuis 1982, on n’y a pas fait appel chaque année. Dans certains cas, des ordres spéciaux ont plutôt été proposés et adoptés, habituellement par consentement unanime [84] .

Séances de plus d’un jour

Une séance de la Chambre ne se limite pas nécessairement à un seul jour. Avant l’adoption, en 1927, d’heures d’ajournement fixes pour chaque jour de la semaine [85] , les séances s’étendaient souvent sur plus d’un jour [86] . Devenues rares depuis lors, de telles séances ont découlé surtout d’événements comme : le retentissement prolongé de la sonnerie d’appel [87] ; la prolongation d’une séance au-delà de l’heure normale d’ajournement quotidien en vue d’étudier une affaire précise [88] ; la poursuite d’un débat d’urgence au-delà de l’heure normale d’ajournement stipulée par le Règlement [89] ; et la décision de faire franchir à un projet de loi toutes les étapes qui restent [90]  ou de permettre à tous les députés qui le souhaitent de prendre la parole sur une question [91] . À la fin d’une séance prolongée, la Chambre ajourne jusqu’à l’heure normale du début de la prochaine séance, qui est soit plus tard le même jour si l’heure n’a pas encore été dépassée, ou le lendemain si la séance s’est prolongée au-delà [92] .

Modification des heures d’ajournement

Il peut arriver que la Chambre veuille avancer ou retarder provisoirement l’heure d’ajournement prescrite par le Règlement. Elle peut le faire par l’adoption d’un ordre spécial en ce sens [93] . La Chambre peut aussi, lorsque le débat sur une affaire prend fin peu de temps avant l’heure d’ajournement normale, ajourner avant l’heure habituelle par consentement unanime si des députés demandent au Président de « déclarer qu’il est 18h30 » (« 14h30 » le vendredi). Comme la Chambre acquiesce habituellement à cette demande, la nécessité d’une motion d’ajournement est évitée [94] .

La Chambre peut aussi ajourner dans d’autres circonstances. Tout député peut proposer une motion d’ajournement de la Chambre sans préavis sauf lorsque le Règlement l’interdit spécifiquement [95] ; une motion demandant « Que la Chambre s’ajourne maintenant » ne peut faire l’objet ni d’un débat ni d’un amendement. Son adoption met fin immédiatement à la séance.

Lorsque la Chambre a prolongé ses heures de séance au-delà de l’heure d’ajournement normale pour terminer une affaire précise [96] , seul un ministre peut, d’autre part, présenter une motion d’ajournement de la Chambre avant d’en terminer l’étude [97] . Une fois que la Chambre en a terminé de l’affaire pour laquelle ses délibérations ont été prolongées au-delà de l’heure d’ajournement normale, le Président lève la séance jusqu’au jour de séance suivant de la façon habituelle [98] . Lorsqu’une séance a été prolongée pour un débat exploratoire, le Président ajourne la Chambre quand plus aucun député ne demande la parole, à moins que l’ordre spécial en vertu duquel le débat se tient stipule un mécanisme particulier d’ajournement [99] .


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