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SHUR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON HUMAN RIGHTS AND INTERNATIONAL DEVELOPMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

SOUS-COMITÉ DES DROITS DE LA PERSONNE ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 26 novembre 1997

• 1541

[Traduction]

La présidente (Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.)): Je déclare ouverte la séance du Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international.

Nous avons reçu un appel nous indiquant que M. Bonwick est en route, et nous allons donc supposer qu'il y a quorum.

Janice va rédiger une motion pour la prochaine séance afin de peut-être réduire le quorum pour que nous n'ayons pas à subir de retards aussi souvent.

Aujourd'hui, j'ai le plaisir de vous présenter le sergent John Oliver. Il travaille au Bureau d'enregistrement des enfants disparus de la GRC. Je crois savoir que le sergent Oliver a beaucoup d'informations intéressantes à nous présenter.

Avez-vous une déclaration à faire?

Le sergent John W. Oliver (Bureau d'enregistrement des enfants disparus, Gendarmerie royale du Canada): Oui.

La présidente: Merci beaucoup. Vous avez la parole.

Sgt John Oliver: Le Bureau d'enregistrement des enfants disparus est un service permanent de la GRC depuis le 1er janvier 1988. Son mandat initial a été élargi en 1992 quand le Conseil du Trésor du Canada a approuvé le programme Grandir ensemble: investir dans les enfants du Canada.

Le mandat du Bureau d'enregistrement consiste à chercher, à réunir et à analyser de l'information et des données statistiques sur des enfants disparus; à offrir aux agences d'application de la loi une source d'information exacte et rapide sur la situation de tout enfant disparu; à surveiller le dossier des personnes disparues du Centre d'information de la police canadienne ou à fournir de l'information additionnelle et à donner suite aux enquêtes sur des enfants disparus; à aider les agences d'application de la loi ainsi que d'autres groupes et organisations intéressés à obtenir de l'information sur des enfants disparus; à favoriser la corrélation de l'information par la publication de documents comme des bulletins nationaux sur les enfants disparus; à coordonner l'échange d'informations sur des programmes de prévention au sein de la communauté policière canadienne et parmi des groupes qui cherchent des enfants disparus; à coordonner un programme de déplacements et de réunion, en vue du retour d'enfants enlevés au Canada par un parent, en empruntant des itinéraires établis par des sociétés qui nous appuient; à acquérir un savoir-faire unique en matière de recherche d'enfants disparus, soit en établissant par exemple le profil psychologique de pédophiles et d'autres individus au comportement social déviant qui pourraient être mêlés à l'enlèvement d'enfants; à promouvoir ses efforts de collaboration et de réseautage avec tous les pays, mais plus spécialement avec ceux appartenant au réseau d'Interpol et ceux qui ont signé la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants; à contribuer aux efforts internationaux pour promouvoir la coopération internationale en ce qui concerne les enfants disparus, maltraités et exploités; et à mettre au point une formation spécialisée et à offrir des ressources pédagogiques pour les forces policières.

En outre, le Bureau d'enregistrement offre un service d'anticipation du vieillissement ainsi que des possibilités d'exposition aux médias, comme Internet, où l'on trouve le site Web CyberRECHERCHE enfants disparus Canada du Bureau d'enregistrement des enfants disparus. Il collabore avec Wal-Mart Canada, qui affiche des photographies d'enfants disparus dans ses magasins, et Blue Line Magazine, qui présente un cas de disparition d'enfants dans chacun de ses numéros. Il publie un bulletin trimestriel, Nos enfants disparus, qui est distribué partout dans le monde.

• 1545

Le Bureau d'enregistrement des enfants disparus a pour effectif quatre membres réguliers de la GRC, deux membres civils, deux employés de la fonction publique et deux agents de Douanes Canada.

Quand on a créé le Bureau d'enregistrement, nous avons communiqué avec tous les services de police pour les informer de notre existence et de notre mandat. Le Bureau d'enregistrement reçoit principalement des demandes d'aide relatives à des cas internationaux ayant trait à des enlèvements par un parent. Par conséquent, le personnel du Bureau d'enregistrement des enfants disparus a acquis un savoir-faire dans la gestion des cas de ce genre.

En 1989, le Bureau d'enregistrement recevait en moyenne neuf demandes par mois. En 1997, il en reçoit environ 65 par mois. Il ne faudrait pas en déduire que le problème s'aggrave, mais plutôt que les agences font de plus en plus appel aux services de notre bureau.

Un lien informatique a été établi afin que tous les cas de personnes disparues inscrits sur le système informatisé du Centre d'information de la police canadienne figurent automatiquement dans la base de données du Bureau d'enregistrement des enfants disparus. On peut ainsi, à des fins statistiques, assurer une surveillance continue des cas rapportés d'enfants disparus au Canada.

À la demande d'un service de police canadien, le Bureau coordonnera les enquêtes effectuées en leur nom dans d'autres aires de juridiction, à l'intérieur comme à l'extérieur du Canada. Le Bureau a conclu une entente négociée avec INTERPOL Ottawa de manière que tous les cas d'enfants disparus soient traités par l'intermédiaire du Bureau. Quand INTERPOL Ottawa reçoit une demande d'un service de police canadien, celle-ci est renvoyée au Bureau pour qu'il y donne suite. Le service de police canadien est alors informé que le Bureau des enfants disparus va donner suite à sa demande. Le Bureau examine l'information et communique avec l'enquêteur.

Si la demande concerne un enfant qui a été conduit dans un pays autre que les États-Unis, le Bureau envoie au pays concerné un message par l'intermédiaire du réseau d'INTERPOL. Si l'enfant est censé se trouver aux États-Unis, le Bureau d'enregistrement entre directement en contact avec les services policiers fédéraux ou de l'État qui peuvent obtenir l'information dont nous avons besoin.

Quand INTERPOL Ottawa reçoit une demande d'aide d'un autre pays, il achemine la demande au Bureau d'enregistrement pour qu'il y donne suite. Celui-ci agit au nom du service policier étranger pour établir si l'enfant se trouve au Canada.

Le Bureau agit de la même manière dans le cas des autorités centrales provinciales qui adhèrent à la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants. Si une autorité centrale ne sait pas où se trouve l'enfant, le Bureau l'aide à le localiser afin qu'on puisse utiliser des recours judiciaires adéquats en vertu de la Convention.

Quand l'enfant a été repéré, le Bureau joue un rôle actif en vue de son retour. Toutes les possibilités sont étudiées avec le service de police qui a présenté la demande et le parent de l'enfant. Le programme de déplacements et de réunion est conçu à cette fin. Nous pouvons ainsi aider les parents ou les tuteurs qui ne peuvent pas se permettre de payer les frais de retour au Canada ou de déplacement à l'intérieur du Canada de l'enfant disparu qui a été retrouvé.

Le programme de déplacements et de réunion est parrainé par Air Canada, les Lignes aériennes Canadian International, VIA Rail et Choices Hotels Canada. Ceux-ci ont généreusement accepté d'offrir le transport gratuit jusqu'au Bureau d'enregistrement des enfants disparus ou jusque chez le tuteur ou le parent. Choices Hotels offre l'hébergement gratuitement partout dans le monde quand on n'arrive pas à trouver un vol de correspondance. Le Bureau d'enregistrement informe le service de police qui a fait la demande de tous les détails ainsi que de toutes les ententes qu'on peut prendre pour aider le tuteur légal ou le parent.

Pour avoir droit à une aide au titre du déplacement, il faut respecter les critères suivants: il doit s'agir du retour d'un enfant qui a été illégalement enlevé du Canada et qui doit être rendu à un tuteur légal au Canada; le parent doit être dans le besoin; l'enfant peut légalement sortir de l'aire de juridiction où il se trouve; et pour éviter toute complication, le Bureau d'enregistrement doit avoir l'assurance que le parent obtiendra la garde physique de l'enfant dès l'arrivée. Afin de faciliter cette mesure, nous demandons que l'enfant soit confié à la garde de l'État jusqu'à ce que le parent arrive.

Le Bureau d'enregistrement a conçu une formation spécialisée qui est offerte au cours d'un atelier d'une durée de deux jours. En 1997, nous avons tenu 10 ateliers au Canada; huit sont déjà prévus pour les deux premiers mois de 1998. À l'échelle internationale, nous avons offert des ateliers et d'autres séances de formation. En 1996, l'ambassade du Canada à Varsovie, en Pologne, a parrainé un atelier auquel ont assisté des représentants de divers pays d'Europe de l'Est. En outre, nous avons présenté des exposés à des réunions d'INTERPOL et à d'autres conférences internationales.

• 1550

Je suis membre du Groupe de travail d'INTERPOL sur les infractions contre les mineurs, qui se réunit deux fois l'an pour échanger de l'information sur des cas concernant des enfants. Le Bureau fait aussi partie de l'Association internationale des tribunaux de la famille et des conciliateurs.

Le Bureau a établi une base internationale de personnes-ressources qui travaillent dans le domaine de la protection de l'enfance; elle compte plus de 2 400 agents de police, des juristes et d'autres services intéressés. Nous faisons constamment appel à ce vaste éventail d'intermédiaires pour nous aider à retrouver et à récupérer des enfants disparus.

Notre programme pour les enfants disparus fait appel à quatre services gouvernementaux: la GRC, le Bureau d'enregistrement des enfants disparus, Revenu Canada, le projet Retour international, Citoyenneté et Immigration Canada et le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Chacun de ces services assume son propre rôle, mais les quatre travaillent de concert. Notre but est de retrouver les enfants disparus et de les rendre à ceux qui en ont la garde légitime.

Notre programme des enfants disparus sert, entre autres choses, d'abord, à intercepter et à récupérer les enfants disparus et enlevés qui traversent des frontières internationales. Il permet d'émettre des avis de signalement aux frontières. Si l'on suppose qu'un enfant ou que quelqu'un qui a enlevé un enfant s'apprête à traverser une frontière internationale, on émet des avis de signalement concernant ce pays. Nous affichons des photographies d'enfants disparus à tous les postes frontaliers canadiens. Nous donnons une formation au personnel des services d'application de la loi et à d'autres services comme le personnel des sociétés aériennes qui acquiert ainsi des techniques pour repérer les auteurs d'enlèvement d'enfants ou les enfants victimes d'enlèvement.

La présidente: Merci.

Madame Debien.

[Français]

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Bonjour, monsieur Oliver, et bienvenue à notre comité.

J'ai trois questions au départ. Vous avez dit vers la fin de votre intervention que de 1989 à 1997, il y avait eu une certaine progression dans le nombre de demandes. Vous avez dit qu'en 1989, il y avait eu neuf demandes par mois et qu'en 1997, il y en avait eu 65 par mois. Vous avez ajouté que cela ne voulait pas dire que les problèmes étaient plus graves, mais que les gens étaient plus conscientisés à la problématique.

J'aimerais vous entendre un peu plus là-dessus. La semaine passée, quand nous avons rencontré d'autres intervenants au dossier, on nous a remis un document de la Convention de La Haye sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants ainsi que des statistiques canadiennes qui démontrent qu'entre 1994 et 1997, il y a eu une augmentation réelle du nombre de demandes d'accès ou de retour, et de retour et de non-retour. Donc, j'aimerais que vous nous expliquiez un peu pourquoi vous dites que les problèmes ne sont pas plus graves malgré le fait qu'il y a une augmentation évidente du nombre de cas. Vous en avez donné vous-même un exemple.

Le cas d'un enlèvement international est certainement plus facile à traiter pour un pays qui est partie à la Convention de La Haye que pour un pays qui n'en fait pas partie. Dans le cadre du programme des enfants disparus, quelles mesures pouvez-vous prendre dans le cas d'un enfant canadien qui serait enlevé par un parent et amené dans un pays qui n'est pas partie à la Convention?

Vous avez parlé des mesures d'aide que le programme peut offrir aux parents qui n'auraient pas les ressources nécessaires pour subvenir à leurs besoins pendant les différentes étapes de la demande de retour. Vous avez dit qu'il y avait différentes compagnies qui les aidaient en leur payant des billets d'avion ou leurs frais de séjour là-bas. On sait très bien que ce qui coûte très cher, ce sont les frais d'avocat. Dans le cadre de ce programme, êtes-vous en mesure de défrayer une partie des frais d'avocat du parent demandeur qui n'a pas les moyens de les payer? C'est très onéreux, m'a-t-on dit.

Je m'arrête là pour le moment.

• 1555

[Traduction]

Sgt John Oliver: Selon nos relevés statistiques, qui font état des cas rapportés à la police canadienne, le nombre d'enfants enlevés qui sont signalés à la police canadienne demeure assez constant, et se situe aux environs de 400 à 500 par an.

Nous nous efforçons, mais nous n'y sommes pas encore arrivés, de trouver combien de cas au Canada n'ont pas été rapportés à la police. En cas de disparition d'un enfant, le parent, naturellement, a le choix entre un recours au civil ou au criminel, ou de faire les deux. Nos statistiques ne font état que des cas rapportés à la police canadienne, et ce nombre de 400 à 500 par année demeure assez constant. Je travaille au Bureau d'enregistrement depuis 10 ans et ce nombre n'a pas vraiment varié.

Pour ce qui est des enfants emmenés dans des pays qui n'adhèrent pas à la convention de La Haye, vous avez raison, c'est beaucoup plus difficile. Quand nous repérons des enfants dans ces pays, nous mettons tout en oeuvre pour négocier et établir la meilleure façon de ramener l'enfant au Canada. S'il existe un traité d'extradition, nous recommandons alors au service de police canadien de l'invoquer pour procéder à l'arrestation et au retour du parent.

Normalement ce qui se produit, si c'est l'option qu'on retient, c'est que le parent est arrêté en vertu de notre demande de retour, l'enfant est confié à la garde de l'État, et nous pouvons faire revenir l'enfant. Si nous retrouvons l'autre parent et que celui-ci peut prouver qu'il est le parent et qu'il a la garde de l'enfant, les pays avec qui nous traitons normalement consentent à lui rendre l'enfant.

Les problèmes se compliquent quand nous avons affaire à un pays qui n'a pas signé la Convention de La Haye et avec qui nous n'avons pas signé de traité d'extradition ou encore avec ceux avec lesquels nous avons un tel traité, mais qui ne le respectent pas ou qui estiment qu'il ne s'agit pas vraiment d'un crime. Dans ces cas, nous devons employer d'autres méthodes et nous demandons habituellement au ministère des Affaires étrangères d'utiliser les services consulaires pour intercéder au nom du service de police. Dans ces cas, ils ont déjà habituellement communiqué avec le parent pour employer la voie diplomatique pour tenter une négociation.

Il y a d'autres moyens que nous pouvons utiliser par l'intermédiaire du réseau des services sociaux du pays où l'enfant se trouve, pour établir si le parent a enlevé l'enfant et ce qu'il va réellement faire et s'il va permettre qu'il y ait des contacts en cas de négociation. Voilà donc les méthodes que nous employons, mais tout dépend du pays auquel nous avons affaire et de la difficulté en cause.

J'ai oublié votre troisième question. Excusez-moi.

[Français]

Mme Maud Debien: On aide les familles de différentes façons. Je parlais des frais d'avocat, qui sont quand même ce qu'il y a de plus onéreux, semble-t-il. Le programme comble-t-il ce type de besoins?

[Traduction]

Sgt John Oliver: Le programme n'est conçu que pour les déplacements. Les sociétés qui nous appuient nous fournissent gratuitement des billets d'avion et l'autre société qui nous appuie fournit l'hébergement à l'hôtel.

Je sais que les frais juridiques sont très élevés. Dans les pays signataires de la Convention de La Haye, selon le système en vigueur dans ces pays, l'enfant peut ou non obtenir une aide juridique, mais à ma connaissance il n'existe pas de programme dans le cadre duquel nous pourrions fournir une assistance financière aux parents pour payer les frais juridiques.

La présidente: Merci.

Monsieur Bonwick.

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Sergent Oliver, je vous remercie beaucoup d'être venu.

J'aimerais aborder trois ou quatre points et obtenir vos commentaires. Premièrement, au sujet des pays qui ne sont pas signataires de la Convention de La Haye et avec lesquels nous n'avons pas de traité de déportation ou d'extradition, y a-t-il des tactiques ou des stratégies que nous n'employons pas à l'heure actuelle et que d'après vous, nous devrions employer pour essayer de rapatrier ces enfants?

J'ai également une ou deux questions supplémentaires. Je peux vous les poser toutes en même temps ou, si vous préférez, une à la fois.

Sgt John Oliver: Comme vous voulez.

M. Paul Bonwick: Avez-vous des suggestions quant aux moyens à prendre pour resserrer nos frontières pour supprimer ou réduire ce crime terrible qui consiste à sortir des enfants du pays? Pouvez-vous nous suggérer des mesures pour mieux sceller les frontières?

• 1600

Troisièmement, pouvez-vous nous dire comment nous pouvons vous être utiles, à vous et à vos collègues, dans vos enquêtes pour retrouver ces enfants?

Quatrièmement, êtes-vous d'avis que pour un crime comme celui-là, des peines plus sévères ou le recouvrement des coûts, pour aborder le volet juridique du problème, serviraient de moyen de dissuasion?

Sgt John Oliver: Je vais répondre à votre première question au sujet des pays non signataires de la Convention de La Haye. Lorsque, après enquête, nous déterminons le lieu où se trouve l'enfant, nous amorçons toujours des négociations. Nous collaborons avec nos partenaires—les Affaires étrangères dans la plupart des cas—pour déterminer la meilleure méthode et les meilleures stratégies qui nous permettront de ramener cet enfant au Canada. Si les réseaux policiers ne peuvent nous aider en effectuant une extradition, la meilleure méthode consiste à faire appel aux Affaires étrangères qui amorceront des négociations avec le gouvernement concerné.

Je travaille dans ce domaine depuis de nombreuses années et, pour chaque cas, nous essayons d'utiliser toutes les ressources à notre disposition pour trouver et ramener l'enfant, selon le pays concerné. Nous utilisons déjà tous les recours possibles. Je ne pense pas qu'il y ait...

M. Paul Bonwick: Une fois l'enfant localisé, vous pensez que nous utilisons tous les moyens à notre disposition?

Sgt John Oliver: Oui.

La présidente: Y compris l'enlèvement?

Sgt John Oliver: Non.

La présidente: On ne peut pas enlever un enfant pour le ramener?

Sgt John Oliver: En tant qu'agent de police, il m'est impossible de conseiller la perpétration d'un crime en territoire étranger. Je ne préconiserais pas cela.

M. Paul Bonwick: Ma question suivante portait sur les moyens à prendre pour rendre nos frontières plus étanches afin d'empêcher ce crime. Avez-vous des suggestions sur les moyens que nous pourrions prendre, outre ceux que nous prenons déjà?

Sgt John Oliver: À l'heure actuelle, il n'y a pas de contrôles au départ. La seule possibilité, si le départ se fait par un aéroport canadien, c'est de mieux former le personnel de sécurité des aéroports et des sociétés aériennes afin qu'il puisse déceler un enlèvement. Nous avons fait des efforts en ce sens au fil des ans, mais à Transports Canada, on nous a dit que le principal souci du personnel chargé de filtrer les passagers et de vérifier leurs bagages était la sécurité des passagers et non de faire avorter l'enlèvement d'un enfant par un parent. L'autre étape consiste à essayer de sensibiliser l'équipage des sociétés aériennes.

M. Paul Bonwick: Je voulais aussi savoir comment nous pouvons vous aider, vous ou vos collègues, dans vos enquêtes pour trouver les enfants enlevés? Y a-t-il des ressources que nous pourrions vous offrir?

Sgt John Oliver: Nous avons toujours besoin de ressources additionnelles.

M. Paul Bonwick: Je ne parlais pas nécessairement d'argent.

Sgt John Oliver: C'est difficile à dire.

M. Paul Bonwick: Si vous voulez, vous pouvez répondre maintenant ou, si quelque chose vous vient à l'esprit au cours des prochains jours...

Sgt John Oliver: Nous avons commencé à négocier avec les autorités américaines pour essayer d'obtenir plus de coopération à la frontière même. Le degré de coopération sur le territoire est excellent, mais nous essayons de resserrer la frontière pour que les Canadiens qui entrent aux États-Unis soient mieux surveillés, surtout lorsqu'il s'agit d'un parent voyageant avec des enfants.

Par ailleurs, nous devons travailler avec d'autres pays, obtenir qu'ils reconnaissent que ce genre de délit mérite d'être pris très au sérieux par leurs autorités tant frontalières que policières. Il y a plusieurs pays qui ne font pas cela pour l'instant. C'est le mieux que nous puissions faire: négocier avec d'autres pays pour les convaincre du danger couru par les enfants enlevés par leurs parents, et les persuader de travailler avec nous.

• 1605

M. Paul Bonwick: À votre avis, est-ce que des peines plus sévères et un système de recouvrement des coûts serviraient de moyen de dissuasion, ou bien s'agit-il le plus souvent de crimes de passion pour lesquels ce genre de considération n'intervient pas, ou de crimes planifiés d'avance?

Sgt John Oliver: Ce genre de délit est assez étrange. Les enlèvements par les parents sont soit extrêmement bien préparés d'avance, soit tout à fait impulsifs. Il n'y a pratiquement rien entre les deux. Quant aux peines, elles varient d'une province à l'autre, certaines provinces étant plus sévères que d'autres. Mais certainement, des peines plus sévères auraient un effet dissuasif.

Il faut se rendre compte que ce genre de situation est très instable. Les parents en instance de divorce sont en lutte ouverte, et ils utilisent les enfants comme une arme. C'est très émotif, et le parent qui enlève l'enfant prétend qu'il le fait pour le bien de l'enfant, mais s'il se calmait un peu et y réfléchissait vraiment, il se rendrait compte que ce n'est pas le cas.

C'est donc un crime de passion, comme vous l'avez dit, et la plupart du temps, c'est impulsif, mais nous voyons des cas où tout a été soigneusement préparé. Je ne sais pas si un système de recouvrement des coûts ou des peines plus sévères y changeraient quelque chose.

M. Paul Bonwick: Merci. Soit dit en passant, si vous avez un complément d'information ou si vous pensez à quelque chose après en avoir discuté avec vos collègues, n'hésitez pas à nous envoyer cela par écrit.

Sgt John Oliver: Merci.

La présidente: Merci. Madame Augustine.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, sergent Oliver. J'ai quatre questions à vous poser. Je vais les poser toutes, après quoi vous pourrez y répondre en bloc.

Combien de pays environ participent au programme international Projet retour? Dans quelle mesure est-ce que ce programme tient compte des particularités culturelles des parents ou de certains pays où la façon dont le Canada considère ce genre de chose peut ne pas être généralement reconnue?

Quand nous voyageons, il nous arrive souvent de voir un parent seul voyager avec un enfant, et souvent nous sommes alertés à cette possibilité. Supposons que nous voyagions dans un avion et que les relations entre un «parent» et un enfant ne nous semblent pas normales, qu'est-ce que nous devons faire? Y a-t-il une procédure? Est-ce que nous pouvons ou devons faire quelque chose quand nous avons l'impression que les relations entre un enfant et un adulte à bord d'un avion sont suspectes?

Ma dernière question me ramène au nombre des incidents. À part les États-Unis, y a-t-il un pays ou deux pays ou trois pays où le nombre d'enlèvements d'enfants canadiens est particulièrement élevé?

Sgt John Oliver: Pour cette dernière question, est-ce que vous parlez des pays de destination?

Mme Jean Augustine: Oui. Apparemment, les États-Unis viennent en tête de liste. Quels sont les pays qui suivent?

Sgt John Oliver: Les pays du pourtour de la Méditerranée. Il n'y a pas de pays en particulier, mais d'après notre expérience, les pays de cette région-là.

Je reviens à votre première question au sujet du Projet retour, un programme de Douanes Canada. Ce ministère collabore à notre programme sur les enfants disparus avec la participation d'un organisme comparable à INTERPOL, l'Organisation mondiale des douanes. Je ne sais pas exactement combien de pays appartiennent à ce groupe, mais par l'entremise de l'Organisation mondiale des douanes, ils placent des avertissements dans les différents services frontaliers des pays membres.

• 1610

En ce qui concerne les aspects culturels, lorsqu'un enfant a été enlevé par un de ses parents, et lorsqu'un tribunal canadien a déterminé que cet enfant devrait vivre avec un parent au Canada, nous ne nous inquiétons pas des particularités culturelles d'un autre pays. Nous essayons de récupérer l'enfant et de le placer là où les tribunaux canadiens ont décidé qu'il ou elle devait être placée. C'est parfois un peu difficile, mais c'est un cas où un tribunal canadien a décidé que l'enfant était censé vivre au Canada avec un de ses parents. C'est tout ce qui nous intéresse. En effet, à cause de la culture du pays où on a amené l'enfant, il est parfois plus difficile de le récupérer, mais la seule chose qui nous importe, c'est qu'un tribunal canadien a pris une décision.

En ce qui concerne les soupçons, des parents ou des membres du public nous appellent souvent pour nous dire qu'ils ont vu des enfants qui avaient l'air d'avoir été enlevés par l'adulte qui les accompagnait. Si une personne a de tels soupçons, elle peut contacter mon bureau ou la police locale—qui finira probablement par nous contacter—pour obtenir le plus d'informations possible sur les personnes en cause. Nous vérifions et nous rappelons la personne pour lui dire si, pour autant que nous puissions en juger, l'enfant a été enlevé ou pas.

Mme Jean Augustine: Je pensais à quelque chose de plus urgent. Par exemple, je suis dans un avion et je trouve que les relations entre un adulte et un enfant ne sont pas normales. En effet, il y a toutes sortes de signaux, l'heure du jour, etc. Dans un tel cas, qui est responsable? Dois-je parler aux gens de la compagnie aérienne? Que faut-il faire dans une telle situation? Je vous demande une solution pratique...

Sgt John Oliver: Dans une telle situation, je pense que c'est à l'hôtesse de l'air qu'il faudrait parler. Vous pouvez lui demander de dire au capitaine de communiquer par radio aux autorités les plus proches pour que la police puisse vérifier les informations et, le cas échéant, accueillir les passagers lorsqu'ils arrivent à destination. Si cela n'est pas fait, vous pouvez immédiatement contacter les autorités policières en arrivant à votre destination, soit les autorités d'immigration ou les douanes. S'il s'agit du Canada ou des États-Unis, tout le monde connaît le programme, et ils vérifieront.

Ainsi, vous devez parler à un agent de bord ou contacter la police après l'atterrissage. On vérifiera pour vous, j'en suis certain. Cela n'est vraiment pas un problème.

La présidente: Madame Bradshaw.

Mme Claudette Bradshaw (Moncton, Lib.): Je crois comprendre que lorsqu'il y a une ordonnance du tribunal, il n'y a pas de problème. Vous pouvez intervenir et faire ce qui doit être fait. Mais je pense surtout à une situation où il n'y a pas d'ordonnance. Supposons que les deux parents aient tous deux la garde légale de leurs enfants, mais que l'un d'entre eux décide de les emmener dans un autre pays. Si l'autre conjoint vous téléphone pour vous dire que les enfants ont disparu, qu'ils ont été enlevés par l'autre conjoint, est-ce que vous pouvez faire quelque chose?

L'autre question découle de ma connaissance intime de la pauvreté. Les questions d'aide juridique me préoccupent, car j'en ai fait l'expérience. Est-il arrivé que nous renoncions à rechercher un enfant parce que l'un des parents n'était pas en mesure d'assumer le coût des poursuites ou les dépenses—de quelque ordre qu'elles soient—nécessaires à cet effet? Ce cas s'est-il jamais produit dans notre pays?

Ce que j'aimerais également bien vous faire comprendre, c'est que si nous siégeons à ces comités, c'est parce que nous voulons être à l'écoute, nous voulons entendre vos recommandations. Je voudrais, moi aussi, insister sur ce que disait Paul: si vous pouvez, de retour dans votre bureau, nous faire une liste des mesures à prendre que nous pourrions recommander à notre ministre, nous le ferons certainement, parce que cette cause nous est chère. En tant que parents, nous craignons tous, je pense, de perdre nos enfants d'une façon ou d'une autre.

• 1615

Pour moi c'est donc la question d'aide juridique qui me tient à coeur. Est-il arrivé que nous refusions d'aider un parent à retrouver son enfant, parce qu'il n'avait pas de moyens financiers? Ce cas s'est-il jamais produit?

Sgt John Oliver: Mon travail se fait, pour l'essentiel, par le réseau de la police où la question d'honoraires ne se pose pas. Notre travail consiste à demander, que ce soit par extradition ou toute autre voie juridique possible, le retour du parent ravisseur et de l'enfant.

Dans un cas pareil il n'y a donc pas d'honoraires juridiques en jeu, car l'affaire n'est pas portée devant un tribunal. C'est d'abord le retour au Canada qui doit se faire et ensuite, si besoin est, l'affaire sera jugée par un tribunal. Les tribunaux interviennent lorsque nous ne pouvons faire appel à cette méthode, ou lorsqu'il s'agit d'un pays qui n'a pas adhéré à la Convention de La Haye; certains des pays qui y ont adhéré accordent une aide juridique, d'autres pas.

Aux États-Unis, il n'existe pas d'aide juridique pour ce genre de cause. Je sais que les pouvoirs fédéraux, aux États-Unis, déploient beaucoup d'efforts pour trouver des avocats qui consentent, à titre bénévole, à défendre le parent originaire du pays étranger, qui ne peut payer les frais de cour. Nous sommes en contact quotidien avec ces autorités américaines pour d'autres cas, et je sais qu'ils font de leur mieux. Il y a, aux États-Unis, certains avocats qui consentent à faire du travail bénévole.

En ce qui concerne d'autres pays, je ne connais pas très bien leurs systèmes judiciaires. Au Canada, si une personne peut obtenir une aide juridique dans son pays d'origine, la plupart des provinces lui en accorderont une ici. Ce n'est donc généralement pas un problème au Canada, mais je ne sais pas au juste quelle est la situation dans les autres pays.

En l'absence d'une ordonnance de tribunal, l'article 283 du Code criminel déclare coupable, soit d'un acte criminel... soit d'une infraction punissable... quiconque enlève un enfant... qu'une ordonnance ait été rendue ou non par un tribunal au Canada. Les procureurs généraux des provinces ont convenu de plusieurs lignes directrices pour entamer des poursuites.

Tout dépend donc des circonstances: une poursuite pourrait être engagée contre le parent qui enlève un enfant.

Mais nous interviendrions certainement: la plupart des services de police accepteraient la plainte pour enfant disparu.

La présidente: J'aimerais revenir à quelques questions, par exemple l'enlèvement. Supposons que mon mari enlève mon enfant et l'emmène, mettons, en Roumanie, qui n'est pas signataire de la Convention. Mes moyens financiers me permettent de découvrir où l'enfant se trouve. Est-ce que j'aurais l'aide, par exemple, du ministère des Affaires étrangères, pour ramener l'enfant de Roumanie, bien que son père, qui se trouve là-bas, puisse affirmer que c'est moi, en fait, qui enlève l'enfant pour le ramener?

C'est là ce que j'entendais par «enlèvement». C'est davantage que le gouvernement se livrant à une activité clandestine. Si j'ai les moyens pour faire moi-même les recherches, puis-je compter sur la coopération de mon gouvernement?

Sgt John Oliver: Je pense que si vous parveniez à amener l'enfant à une ambassade canadienne, le ministère des Affaires étrangères vous aiderait à le ramener au pays.

La présidente: Très bien.

Nous parlions tout à l'heure de voyage par voie de terre. En Amérique du Nord, il est beaucoup plus facile d'enlever les enfants, parce qu'on peut rester sur le même continent. Vous disiez que si je prends l'avion, en compagnie d'un enfant mineur, pour le Mexique, par exemple, il me faut une déclaration de l'autre parent indiquant qu'il est au courant du fait que j'emmène cet enfant au Mexique.

Qu'adviendrait-il si le Canada exigeait une permission d'entrer pour les mineurs en provenance d'autres pays? Combien d'autres pays ont cette exigence?

Pourriez-vous également m'en dire davantage sur le visa de sortie, mentionné tout à l'heure?

Sgt John Oliver: Pour autant que je sache, le Mexique est le seul pays à exiger d'un parent qu'il prouve, s'il ne voyage pas en compagnie du conjoint, qu'il a l'autorisation d'emmener l'enfant.

La présidente: Quelle en est la raison?

Sgt John Oliver: Je n'en sais rien.

Quand on voyage par voie de terre, nous n'avons pas de loi à cet effet, mais nos agents des douanes ont pour consigne de demander au parent, à l'entrée au Canada, s'il a l'autorisation d'amener l'enfant. Nos agents sont formés à chercher des indices leur permettant de détecter si un délit est en train d'être commis; en cas de besoin, ils contactent l'autre parent pour s'assurer que l'enfant se trouve en toute légalité avec cette personne.

• 1620

L'une des mesures que vous mentionniez pourrait être utile: si l'on exigeait, pour ceux qui arrivent au Canada avec des enfants, la preuve qu'ils ont la permission d'amener ces enfants, nous serions sur un pied d'égalité avec le Mexique, seul pays à ma connaissance, comme je le disais, à imposer ce règlement.

La présidente: Nous avons également évoqué le cas de gens qui viennent au Canada avec de faux papiers—par exemple un visa de visiteur sous un autre nom—et revendiquent, à l'arrivée, le statut de réfugié. Dans ce cas, les compagnies aériennes doivent payer une amende pour ne pas avoir vérifié la documentation des passagers qu'elles amènent au Canada. S'agit-il là d'une loi, promulguée par le Parlement? Pourrait-on exiger quelque chose d'analogue pour les mineurs qui arrivent sans autorisation en bonne et due forme?

Sgt John Oliver: Vous abordez là des problèmes qui relèvent de la Loi sur l'immigration que je ne connais pas très bien, mais je sais que c'est ce qui arrive effectivement. Les compagnies aériennes se voient imposer une amende si elles amènent au Canada des gens qui n'ont pas des documents de visiteurs en bonne et due forme.

On pourrait certainement faire adopter une loi afin de ne pas accorder le statut de visiteurs autorisés à ceux qui ont commis un délit dans leur pays d'origine. Je ne sais si les compagnies aériennes seraient en mesure de s'en informer pour chaque visiteur étranger, à moins que nous n'exigions des passagers, avant leur arrivée au Canada, de produire des documents prouvant qu'ils ont l'autorisation d'être accompagnés de leurs enfants à leur départ de leur pays.

La présidente: Je vous remercie.

Monsieur Bonwick.

M. Paul Bonwick: Je voudrais revenir à la question posée par Mme Augustine.

J'ai l'impression que dans certaines circonstances il n'existe pas de lignes directrices spécifiques ou bien tracées. Mme Augustine mentionnait le cas où, en avion, on est témoin d'une chose qui vous met mal à l'aise ou qui vous paraît suspecte. Vous en faites part à l'agent de bord, celui-ci n'y donne pas suite, vous pouvez alors, au débarquement, le signaler aux autorités. Mais si le pays où vous vous rendez n'a pas signé la Convention, cette démarche s'avérera probablement vaine.

C'est ainsi que dans certaines municipalités—certainement dans l'une qui se trouve dans ma circonscription—dans tous les endroits publics sont affichées des lignes directrices auxquelles tous les employés municipaux doivent obéir si certaines situations leur sont signalées. Ainsi, si un employé municipal voit que quelqu'un tourmente un enfant il a une route toute tracée. Peu importe qu'il ne sache pas ce qui va s'ensuivre... Il doit obéir à une série de lignes directrices.

Y a-t-il une série de lignes directrices que vous ou vos collègues voudriez recommander à ce comité, qui devraient être appliquées par les compagnies aériennes, les aéroports, les gares ferroviaires, les postes frontière ou tout autre endroit de ce genre, de sorte qu'au cas où un fait de cette nature se produit il n'y ait pas d'hésitation et que l'employé sache quelle est la procédure à laquelle il doit strictement adhérer, sans compromis possible.

En second lieu, s'il est vrai qu'il est possible d'esquiver l'un ou l'autre de ces contrôles, le fait est que plus il y en a, plus cela devient difficile et plus on décourage donc des actions de ce genre.

J'ai encore une autre suggestion à vous faire, que la présidence, si je ne me trompe, a déjà abordée. Serait-ce utile d'exercer un contrôle beaucoup plus strict dans les cas où un parent quitte le pays, en avion, avec un enfant? C'est ainsi qu'au cas où je voudrais emmener mon fils en Floride je devrais, par exemple, obtenir une autorisation signée de la mère de l'enfant, et un contrôle strict devrait être effectué... Ce n'est pas là ma spécialité, je ne sais donc pas quel genre de document il faudrait produire, mais il faudrait prouver aux autorités que je n'enlève pas l'enfant, mais que mon conjoint l'a autorisé à m'accompagner.

• 1625

La première question portait sur un ensemble de lignes directrices destinées à aider le personnel.

Sgt John Oliver: Les lignes directrices à l'intention des compagnies aériennes—afin de leur donner des consignes, à elles ou aux voyageurs, sur ce qu'il convient de faire au cas où ils auraient des soupçons et pour nous assurer alors que les compagnies aériennes vont prendre des mesures adéquates. Il faudrait donc donner des instructions aux compagnies aériennes, puis informer le public du genre de choses qu'il faudrait signaler et leur faire savoir qu'ils peuvent déposer une plainte, ou s'adresser à l'hôtesse de l'air.

Il serait certainement fort utile pour nous si les compagnies aériennes, pour les vols en provenance et à destination de l'étranger, recevaient des instructions sur la façon d'agir si un passager leur signale un fait suspect.

M. Paul Bonwick: Il faut rendre ces instructions obligatoires, ne pas en faire une simple option.

Sgt John Oliver: Quand vous parliez de quitter le pays... Quand les avocats nous appellent, nous leur recommandons toujours d'insérer dans l'ordonnance de garde une clause afin de restreindre les déplacements de l'enfant, sauf autorisation du tribunal ou du parent. S'il existe une telle clause et qu'un parent essaie de franchir la frontière, il se rend coupable d'un acte criminel.

Mais quand vous franchissez la frontière avec les États-Unis, la difficulté c'est que vous vous adressez à un agent américain, et non à un agent canadien. Nous devons conclure des ententes avec les services d'immigration des États-Unis et avec les douanes américaines, pour leur faire procéder aux mêmes vérifications lorsque nos sujets entrent dans leur pays que nos services de douanes et d'immigration effectuent pour les sujets étrangers à leur arrivée au Canada. La négociation de ces ententes est en cours.

Si une loi était promulguée exigeant qu'une personne qui voyage avec un enfant sans son conjoint a l'autorisation de ce dernier pour emmener l'enfant, ce serait utile à condition que les autorités des États-Unis exigent la même autorisation, ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle. Ils se basent uniquement sur des documents, qu'il s'agisse du passeport ou de la carte d'identité...

M. Paul Bonwick: Lorsque j'achète le billet, je n'ai donc pas à fournir des documents pour mon fils.

Sgt John Oliver: C'est exact.

M. Paul Bonwick: Je peux le faire avec ma carte de crédit, et si l'on me dit...

Sgt John Oliver: S'il s'agit d'un voyage en avion. C'est ce que font les Mexicains, mais il s'agit alors de gens qui entrent au Canada. Lorsque vous voyagez en avion, les agents de voyage savent que vous ne pouvez entrer au Canada sans preuve que vous êtes autorisé à voyager avec l'enfant. Le problème, c'est que dans la majorité des cas, les enfants canadiens amenés aux États-Unis ne le sont pas en avion, mais franchissent la frontière à l'un des postes frontaliers terrestres.

Nous nous penchons actuellement sur cette question avec les autorités américaines. Nous leur avons proposé de donner à leurs agents la même formation que reçoivent, au Canada, les agents des Douanes et de l'Immigration. Il s'agit d'un cours élaboré par nos services d'immigration et de douanes à l'intention de leur personnel, et nous pourrions leur assurer la même formation.

Ce serait d'un grand secours pour nous d'obliger le parent à fournir ce document, mais nous devons également amener les autres pays à exiger ce document pour les enfants qui quittent le Canada.

Nous n'arrêtons pas de dire aux autorités américaines que nous empêchons leurs enfants d'entrer au Canada et que nous voudrions qu'ils fassent de même. Les négociations à cet effet sont en cours.

[Français]

La présidente: Madame Debien.

Mme Maud Debien: Monsieur Oliver, je vais inventer deux situations purement hypothétiques, et j'aimerais que vous me donniez votre avis.

Je suis un parent qui a la garde de l'enfant et celui-ci est enlevé par l'autre parent. Je fais appel à la GRC, à tous les services concernés et au programme pour qu'on puisse m'aider à retrouver cet enfant. Après des mois et même des années de recherche, on ne réussit pas à retrouver l'enfant. Entre-temps, j'apprends où est mon enfant.

Dans le cas où il est dans un pays signataire de la Convention, en supposant que je me rende sur place et que, par toutes sortes de subterfuges, j'aille chercher l'enfant, qu'est-ce que je fais à partir de là? Je sais où il est et je réussis à l'amener avec moi dans un hôtel. À partir de là, qu'est-ce que je fais?

• 1630

Si je suis dans un pays non signataire de la Convention, ce qui est possiblement plus problématique, qu'est-ce que je fais comme parent? Que me conseillez-vous de faire comme parent?

Bien sûr, plus tôt, vous nous avez laissé entendre qu'il ne fallait pas transgresser les lois au risque d'être criminalisé ici.

Si j'étais un parent et que je retrouvais mon enfant dans un pays signataire de la Convention ou dans un pays non signataire de la Convention, qu'est-ce que je ferais? J'ai mon enfant avec moi. Qu'est-ce que je fais?

[Traduction]

Sgt John Oliver: Si vous vous trouvez dans un pays qui est signataire de la Convention de La Haye, vous pouvez vous adresser directement à l'autorité centrale de ce pays, qui devrait intervenir pour vous auprès de ses tribunaux pour ordonner le retour de l'enfant.

Le transport gratuit pour que vous et l'enfant puissiez retourner au Canada devrait pouvoir se faire dans le cadre du programme de voyage. Nous pourrions organiser cela par le truchement de l'ambassade du Canada. Il en serait de même si vous vous trouviez dans un pays non signataire de la Convention de La Haye et si vous aviez l'enfant avec vous: dans ce cas, vous pourriez l'amener à une ambassade canadienne et nous vous aiderions, à la demande du ministère des Affaires étrangères, à ramener l'enfant au pays.

[Français]

Mme Maud Debien: Donc, dans les deux cas, il est préférable de se rendre à l'ambassade.

[Traduction]

Sgt John Oliver: Certainement.

[Français]

Mme Maud Debien: C'est ce que vous nous dites.

En lisant le dépliant qu'on nous a remis, j'ai vu que trois organismes gouvernementaux étaient impliqués avec le Bureau d'enregistrement des enfants disparus et dans le programme de retour international, soit la GRC, Revenu Canada et Citoyenneté et Immigration Canada.

J'aimerais savoir, si vous êtes en mesure de me répondre, monsieur Oliver, quel est le budget du Bureau d'enregistrement et du programme de retour d'enfants.

[Traduction]

Sgt John Oliver: Le budget de la GRC pour le Bureau d'enregistrement des enfants disparus dépasse légèrement 700 000 $. Je ne connais pas le budget pour les douanes.

[Français]

Mme Maud Debien: C'est pour le Bureau d'enregistrement qui assure la gestion du programme de retour d'enfants. C'est bien cela?

[Traduction]

Sgt John Oliver: Oui.

[Français]

Mme Maud Debien: Merci. Je ne vous demanderai pas si vous trouvez cela suffisant.

[Traduction]

La présidente: J'ai seulement quelques questions à poser.

Il doit y avoir des facteurs de risque connus pour les enlèvements familiaux. Pourriez-vous me dire quels sont ces facteurs, et quelles sont les mesures préventives que nous pourrions envisager?

Sgt John Oliver: Un enfant enlevé par une personne amie est tout autant en danger qu'un enfant enlevé par un étranger; c'est donc l'enfant qui est en danger, un danger d'ordre psychologique. Il y a également les dangers de négligence, voire de mauvais traitements. L'enfant est en danger physique, et plus longue a été son absence, lorsque nous le retrouvons et le ramenons à la maison, plus long sera le traitement psychologique dont il aura besoin.

Voilà 10 ans que je travaille sur ce terrain, et il m'a été difficile de convaincre bien des gens que ce délit est grave et lourd de dangers pour l'enfant. Des études ont été menées, en particulier aux États-Unis, qui montrent que l'enfant est tout autant en danger que s'il avait été enlevé par un étranger.

• 1635

Quant à l'élément préventif dans les enlèvements par un parent, cela dépend des actes du parent qui a la garde, et des contraintes que contient l'ordonnance de garde. Si l'on a des raisons de penser que l'autre parent risque d'enlever l'enfant, l'ordonnance de garde devrait être aussi restrictive que possible. J'ai vu des ordonnances stipulant simplement que l'un des parents avait la garde et l'autre pas, et j'en ai vu énonçant des conditions strictes au point d'expliquer exactement où l'enfant devait se trouver certain jour de la semaine, qui a l'enfant pour les vacances, etc. L'école devrait également être avisée de la personne qui est autorisée à venir chercher l'enfant à la sortie, et les médecins devraient être informés dans la mesure où l'enfant a un dossier médical. Tout devrait être mis en oeuvre pour empêcher l'autre personne de venir chercher l'enfant à la garderie ou ailleurs...

Ce sont les mesures élémentaires de prévention. Si l'enfant est plus âgé, nous proposons toujours de... Il est surprenant de constater combien d'entre eux ne savent pas faire un appel interurbain, un appel à frais virés, d'une cabine téléphonique.

La présidente: Existe-t-il un profil type de famille à risque élevé, auquel ce genre de choses risque d'arriver? Quelles seraient les caractéristiques générales d'une famille comme celle-là?

Sgt John Oliver: Ce sont généralement des gens de la classe moyenne, dans la trentaine, mais à part cela il n'y pas d'autres caractéristiques bien précises. Ce n'est plus non plus un acte criminel commis plus fréquemment par une personne de l'un ou l'autre sexe. Il y a autant de mères que de pères qui enlèvent leurs enfants. Cela dépend de la façon dont l'ordonnance de garde a été faite. C'est généralement la mère qui enlève l'enfant avant que ne soit délivrée l'ordonnance de garde, parce qu'elle craint que celle-ci ne soit pas en sa faveur; le père a plutôt tendance à enlever l'enfant après, parce qu'il considère que le juge n'a pas pris la bonne décision.

Comme je le disais tout à l'heure, ce sont généralement des familles de la classe moyenne, sans autre signe distinctif.

La présidente: Si, par exemple dans ma famille, les deux parents étaient citoyens canadiens, y aurait-il moins de risque que l'enfant soit enlevé dans un autre pays que si mon mari, par exemple, était d'une nationalité différente? Et la double nationalité, joue-t-elle un rôle?

Sgt John Oliver: Effectivement, la double nationalité joue un rôle, comme nous le disions tout à l'heure. S'il s'agit uniquement de citoyens canadiens et qu'il y a enlèvement, celui-ci se fait généralement dans une autre région du Canada ou aux États-Unis, où la langue et la culture sont semblables.

Nous avons de plus en plus affaire à des couples dont un parent a une double nationalité—il est donc à la fois citoyen du Canada et d'un autre pays—et c'est dans ce dernier qu'il emmène l'enfant. Les cas de ce genre, dans lesquels on nous demande d'intervenir, sont de plus en plus fréquents.

Là encore une mesure de prévention consiste à faire déposer le passeport des parents auprès du tribunal.

La présidente: À part cela, dans les pays qui n'ont pas ratifié la Convention de La Haye, les agents des douanes coopèrent-ils avec le Programme international de retour? Sont-ils même au courant de son existence?

Sgt John Oliver: L'Organisation mondiale des douanes, à ma connaissance, est au courant de l'existence de ce programme, mis en place par les douanes canadiennes. Cela dépend du pays: certains font preuve de bonne volonté, d'autres pas.

La présidente: Cela dépend sans doute également de la personnalité de l'agent des douanes.

Sgt John Oliver: Certes, mais on en arrive là à un problème de culture du pays: ils coopéreront s'ils voient dans cet acte un crime ou non.

La présidente: Monsieur Bonwick.

M. Paul Bonwick: Ma question s'adresse davantage au comité. Il s'agit simplement de la façon dont j'interprète certaines des questions qui ont été posées, et une mesure que nous devrions peut-être envisager. Madame la présidente, je trouve que tout est très flou. La position ne semble pas bien arrêtée, ni les lignes directrices précisées. Je n'ai pas encore eu l'occasion de revoir cette question, mais j'aurais pensé qu'il existait un manuel de politiques de plusieurs centaines de pages disant «Voici les caractéristiques de ce genre de situation» ou «Voici les définitions qui s'appliquent à cette question et les mesures qui permettent d'identifier ces situations». Vous avez posé des questions d'ordre général, par exemple où ce genre de fait se produit le plus souvent, et nous entendons des réponses tout aussi vagues, par exemple: «Peut-être que la double nationalité est un facteur qui joue...»

La présidente: C'est ce qui se trouve ici.

M. Paul Bonwick: Cela se trouve ici?

• 1640

La présidente: Vous trouverez quantité de renseignements dans bon nombre des documents que nous avons reçus à ce jour. Nos questions sont peut-être un peu vagues...

M. Paul Bonwick: Comme je le précisais, ce reproche ne s'adresse pas au sergent. Il me semble simplement que nous travaillons dans le vide... nous devrions peut-être y songer, mais comme je le disais, je n'ai pas eu l'occasion de lire tous ces documents.

La présidente: L'un des objectifs de ces audiences, c'est que bien que nos idées soient encore assez vagues, nous espérons, en fin de compte, les tirer au clair et en dégager une orientation. Notre vrai objectif, c'est de diminuer ce problème. Si les réponses étaient si simples, nous n'aurions pas à nous concerter.

Y a-t-il d'autres questions à l'adresse du sergent Oliver?

Sgt John Oliver: Dans la trousse de documentation, vous trouverez un manuel de l'enquêteur, adressé à tous les services de police du Canada. Ce sont les principes et lignes de conduite de la GRC, mais je ne peux les imposer à d'autres services de police. Vous les trouverez dans votre trousse d'information, et ils ont été diffusés dans tout le Canada.

La difficulté, en l'occurrence, c'est qu'il existe encore plusieurs pays qui ne reconnaissent pas l'enlèvement comme étant un crime. Il reste toujours encore à convaincre les gens. À leurs yeux, un enfant qui est avec un parent est en sécurité, et c'est là où les choses deviennent vagues. Nous nous efforçons toujours de convaincre en particulier les organismes des autres pays que ces enfants sont en danger, que l'acte d'enlèvement devrait être considéré par eux comme un délit grave et qu'ils devraient collaborer avec nous pour restituer ces enfants.

La présidente: Je vous remercie beaucoup, sergent Oliver. C'est là un problème considérable, pour lequel il n'existe pas de solutions toutes prêtes, et vos réponses nous ont été fort utiles. Nous vous remercions d'avoir bien voulu venir.

Quant aux témoins de la semaine prochaine, nous allons entendre Child Find Canada, Missing Children's Society of Canada, Réseau enfants retour Canada et Service social international Canada.

Les témoins proposés sont Coming Home International, société basée à Washington, prévue pour le 10 décembre; Heather Ritchie, avocate qui a un cabinet privé à Toronto, et peut-être, si elle accepte de venir, Angelina Mejed-Cosovic, mère dont l'enfant a été enlevé. Si vous avez d'autres propositions de témoins, je demande aux membres du comité de les adresser à Mme Hilchie.

La séance est levée.