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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 8 décembre 1998

• 0906

[Traduction]

Le président (M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)): Bonjour.

Madame Minna, je suis heureux de vous voir ici. Nous pouvons commencer.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons procéder à l'examen du chapitre 17 (Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés) du Rapport du vérificateur général du Canada de septembre 1998.

Nous entendrons aujourd'hui quelques témoins qui nous connaissent déjà: Mme Maria Barrados, vérificatrice générale adjointe, M. Ronald Campbell, directeur de la Direction générale des opérations de vérification du Bureau du vérificateur général et des représentants du CEPMB, c'est-à-dire du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, M. Robert Elgie, président et M. Wayne Critchley, directeur exécutif.

Je sais que tous les témoins connaissent notre procédure habituelle. Nous voudrions que les exposés durent environ cinq minutes, pendant lesquelles vous pourrez également céder la parole à votre collègue. Nous passerons ensuite aux questions.

Je donne la parole à M. Elgie.

Monsieur Elgie,

[Français]

à vous la parole.

[Traduction]

M. Robert Goldwin Elgie (président, Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés): Merci beaucoup, monsieur le président.

Bonjour. J'apprécie l'occasion qui m'est donnée aujourd'hui de vous exposer le point de vue du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés concernant le rapport du vérificateur général. Comme vous l'avez signalé, je me présente en compagnie du directeur exécutif du conseil, Wayne Critchley.

Vous savez aussi bien que nous qu'au cours des 18 derniers mois, le conseil a reçu plus d'attention et a fait l'objet de plus d'intérêt que jamais depuis sa création en 1987. Nous pensons que cette situation est directement attribuable à la polémique dont fait actuellement l'objet la politique pharmaceutique en général et plus particulièrement la politique régissant les brevets ainsi que les coûts des médicaments au Canada.

En 1997, le Comité permanent de l'industrie a passé en revue le projet de loi sur les brevets pharmaceutiques, c'est-à-dire le projet de loi C-91. Dans son rapport, le comité a formulé plusieurs recommandations concernant le conseil. La première de ces recommandations a été que le gouvernement révise et renforce le mandat du conseil. La deuxième a été que le vérificateur général effectue une vérification, et c'est précisément l'objet de ma comparution aujourd'hui. La troisième a été que le conseil entreprenne une vaste consultation auprès du public et des intervenants afin de déterminer quels autres éléments d'information il pourrait fournir au sujet du prix des médicaments.

Tel que je vous en avais fait part au mois d'avril, nous avons donné suite à la troisième recommandation en menant dans tout le pays des consultations publiques qui se sont étalées sur une année complète. Le conseil a publié en septembre dernier les résultats de cette consultation dans son rapport intitulé Guide pour la prochaine décennie. Je crois que chacun de vous a reçu un exemplaire de ce rapport. Sinon, nous en avons apporté plusieurs aujourd'hui et vous pourrez par conséquent vous en procurer un.

D'après les commentaires reçus au cours de la réunion du 20 novembre à laquelle ont participé une vingtaine d'intervenants, notre rapport a été très bien accueilli.

Comme vous le savez, le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés est un tribunal quasi judiciaire et indépendant du gouvernement. Il administre le régime d'examen des prix des médicaments brevetés et applique les normes adoptées par le Parlement.

Notre récent rapport intitulé «Tendances des prix des médicaments brevetés» a révélé que la valeur des ventes totales de médicaments dans le monde a augmenté d'environ 8,6 p. 100 entre 1996 et 1997, pour atteindre un sommet de 400 milliards de dollars. Au cours de la même période, la valeur des ventes au Canada a augmenté de 7 p. 100 et a atteint les sept milliards de dollars.

• 0910

La valeur des ventes de médicaments brevetés a toutefois augmenté à un rythme beaucoup plus rapide. En 1997, les ventes de médicaments brevetés au Canada ont représenté pour la première fois plus de la moitié de la valeur des ventes totales de médicaments, au prix départ-usine. Elle a augmenté dans l'ensemble de 23 p. 100 en 1997 pour atteindre 3,7 milliards de dollars.

Il convient toutefois de préciser—et c'est un point que l'on a parfois tendance à oublier—que les prix des médicaments brevetés n'ont pas augmenté, même si les dépenses concernant les produits pharmaceutiques sont plus élevées. L'augmentation de la valeur des ventes est principalement attribuable à un accroissement de la consommation de médicaments brevetés et, dans une mesure moindre, au lancement de nouveaux produits sur le marché.

La population canadienne s'inquiète, ce qui est compréhensible, de l'augmentation des dépenses concernant les produits pharmaceutiques et accorde par conséquent plus d'importance que jamais au rôle du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés. Ainsi, la vérification que le vérificateur général a effectuée à la demande du comité permanent est tombée à point nommé en aidant à maintenir la confiance de la population canadienne à l'égard de notre travail.

Il importe aussi de souligner que le vérificateur général a effectué un examen très approfondi du conseil, passant en revue toutes les facettes de nos activités. Nous n'avons d'ailleurs pas caché notre enthousiasme et avons montré que nous apprécions les recommandations constructives. Tel que mentionné dans le rapport, nous souscrivons à presque toutes les recommandations et nous y donnons suite.

Dans son rapport, le vérificateur général écrit, et je cite:

    Le Conseil a aidé à restreindre l'augmentation des prix des médicaments brevetés vendus au Canada.

Il en est également arrivé à la conclusion que nous appliquons en général à la lettre nos lignes directrices en matière de prix. Il a ajouté qu'il approuve sans réserve l'orientation que le conseil a donnée à ses consultations.

Le vérificateur général a également fait état dans son rapport de certaines lacunes et recommandé certaines améliorations à apporter. Il a notamment fait valoir que notre champ de compétence et les limites de notre rôle en matière de protection des intérêts des consommateurs n'étaient pas bien compris. Il a également exprimé l'opinion qu'une étude qui date de deux ans a surestimé l'influence du conseil parce qu'elle n'a pas tenu compte de l'effet d'autres facteurs sur la limitation des prix des médicaments au Canada. Il a aussi révélé quelques cas où les motifs de nos décisions ne lui apparaissaient pas clairs et transparents et nous a invités à chercher des moyens rentables de vérifier l'exactitude des renseignements sur les prix qui nous sont fournis et d'améliorer la rigueur des rapports sur les tendances des prix des médicaments et des dépenses de R-D.

Il a toutefois davantage critiqué le cadre législatif du conseil que la façon dont celui-ci exerce son mandat. Il a notamment affirmé:

    Nous avons constaté que certaines exigences de la Loi et du Règlement sont difficiles à appliquer en pratique. Il faut envisager d'examiner si ces exigences sont toujours pertinentes.

Dans ce dernier cas, j'ai saisi le ministre de la Santé des préoccupations exprimées par le vérificateur général et lui ai assuré l'entière collaboration du conseil afin d'apporter toutes les améliorations requises à la loi.

Pour tous les aspects relevant de la compétence directe du conseil, nous avons pris les mesures qui s'imposaient. Notre processus de consultations publiques auprès des divers intervenants qui s'est étalé sur toute une année a permis de relever les mêmes préoccupations que celles dont le vérificateur général a fait état dans son rapport. Notre Guide pour la prochaine décennie résume les propos que nous avons entendus et propose un plan d'action.

À la suite de notre réunion du 20 novembre, il a été convenu de constituer un groupe de travail qui se penchera sur plusieurs questions importantes liées à notre mandat et fera des recommandations, à savoir: premièrement, les mesures qui pourraient être mises en oeuvre pour améliorer le processus d'examen des prix et, par ricochet, lui donner plus de transparence; deuxièmement, les lignes directrices qui s'appliquent aux nouveaux médicaments ne constituant pas une découverte et troisièmement, l'utilisation, dans nos comparaisons des prix internationaux, des données sur les prix payés par le ministère des Anciens combattants des États-Unis. D'autres sujets, dont les lignes directrices s'appliquant aux nouveaux médicaments constituant une découverte, s'ajouteront probablement en cours d'année à la liste des sujets sur lesquels se penchera le groupe de travail.

Le Guide pour la prochaine décennie fait également état des préoccupations exprimées par de nombreux intervenants au sujet de notre mandat. Beaucoup se sont dits préoccupés par l'absence de contrôle des prix des médicaments non brevetés, qu'ils soient de marque ou génériques. Plusieurs ministères provinciaux ont notamment, au cours de nos audiences, déploré l'absence de contrôle sur les prix des médicaments non brevetés disponibles auprès d'un fournisseur exclusif.

• 0915

D'autres préoccupations ont notamment été exprimées en ce qui concerne le groupe de pays sur lesquels nous nous basons pour comparer les prix et plus particulièrement de l'inclusion, dans cette brochette de pays, de certains pays où les prix pratiqués sont très élevés. Nous en avons saisi le gouvernement par le truchement de notre rapport.

Dans une conjoncture où les activités et le mandat du conseil sont devenus plus visibles et plus importants que jamais, nous sommes bien conscients qu'il faudra modifier notre façon d'exercer notre mandat.

Premièrement, nous devrons élargir notre dialogue avec nos intervenants et c'est précisément ce que nous tentons de faire par nos consultations plus fréquentes.

Deuxièmement, nous devons être prêts à évaluer d'autres façons d'exécuter les principaux volets de nos activités et c'est en partie la raison pour laquelle nous avons créé le Groupe de travail sur les questions relatives à l'examen des prix, qui entamera ses travaux au mois de janvier.

Mais par-dessus tout, nous ne devons pas ménager nos efforts pour que la population canadienne soit mieux informée sur les principaux aspects des activités du conseil et des tendances des prix des médicaments brevetés. Dans cette perspective, nous multiplions nos efforts de communication et saisissons toutes les occasions qui se présentent pour établir des liens de communication avec d'autres organismes représentant diverses associations de soins de santé.

Pour nous, le conseil est en plein processus de transition. Cette transition est directement liée aux points de vue exprimés par nos intervenants, par les comités parlementaires et par le vérificateur général. Ce processus est actuellement en cours.

Je serais heureux de revenir témoigner n'importe quand pour vous communiquer les résultats des efforts que nous déployons pour arriver à protéger encore mieux les intérêts de la population canadienne.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Elgie. Vous avez scrupuleusement respecté le temps que nous vous avions accordé pour votre exposé. Vous aviez cinq minutes pour M. Critchley et cinq minutes pour vous et c'est exactement le temps que vous avez pris. Je croyais avoir parlé de cinq minutes en tout mais ce n'est rien...

Madame Barrados, je sais que votre exposé durera plus de cinq minutes mais plusieurs de mes collègues souhaitent entendre ce que vous avez à dire.

Mme Maria Barrados (vérificatrice générale adjointe, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci, monsieur le président. J'essayerai de ne pas parler plus de cinq minutes, peut-être six.

Le président: On se demande de combien vous dépasserez ce délai. Les paris sont ouverts.

Des voix: Oh, oh!

Mme Maria Barrados: Merci de nous donner l'occasion de présenter les résultats de notre vérification du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, que nous avons communiqués dans le chapitre 17 du Rapport de 1998 qui a été déposé le 29 septembre.

Dans son cinquième rapport, publié en avril 1997, le Comité de l'industrie a recommandé que le Bureau du vérificateur général fasse une vérification du CEPMB en vue de fournir au Parlement de l'information sur le rendement et l'efficience de cet organisme. Nous avons entrepris une étude préparatoire et décidé ensuite de faire une vérification approfondie de l'optimisation des ressources du conseil.

Le CEPMB est un petit conseil qui a un effectif de 35 employés et un budget annuel d'environ trois millions de dollars. Toutefois, son influence peut être considérable. En 1997, les ventes de médicaments brevetés par les fabricants se sont chiffrées à environ 3,7 milliards de dollars au Canada.

[Français]

La Loi sur les brevets relève du ministre de l'Industrie, mais les articles se rapportant au travail du conseil sont du ressort du ministre de la Santé.

Le conseil a le mandat de protéger les intérêts des consommateurs et de contribuer au système de santé canadien en s'assurant que les prix demandés par les fabricants de médicaments brevetés ne sont pas excessifs. En fait, le mandat du conseil est assez limité.

Par exemple, le conseil réglemente seulement le prix auquel le breveté vend le médicament. Il s'agit habituellement du prix que le fabricant exige d'un grossiste ou directement d'un hôpital ou d'une pharmacie. Cela n'inclut pas les marges bénéficiaires, les coûts de distribution ni les autres facteurs qui influent sur le prix éventuel payé par les consommateurs. En plus, le conseil n'est pas habilité à réglementer les prix des médicaments non brevetés. Toutefois, cela n'est pas toujours bien compris par le public. Il en résulte un écart considérable.

Lors de notre examen du rendement du conseil en matière de réglementation des prix des médicaments, nous avons constaté que les prix de la majorité des médicaments brevetés vendus au Canada étaient conformes à ce qu'autorisent les lignes directrices du conseil. Généralement, les lignes directrices du conseil ont été appliquées rigoureusement.

Toutefois, le conseil compte essentiellement sur les sociétés elles-mêmes pour lui fournir les données sur les prix sur lesquelles se fonde la réglementation des prix de leurs médicaments. Nous nous attendons à ce que le conseil fasse plus pour assurer un niveau raisonnable de confiance dans l'exactitude de ces données. Le conseil doit trouver des moyens rentables de vérifier l'exactitude de l'information sur les prix fournie par les fabricants.

• 0920

Nous avons décelé des secteurs où le conseil doit être plus transparent et où il doit améliorer la présentation de l'information sur l'efficacité de son travail. Nous craignons que l'estimation communiquée au Parlement par le conseil sur les montants qu'il a fait économiser au système de santé canadien est surestimée.

[Traduction]

D'après les estimations du conseil, il aurait fait économiser entre 2,9 et 4,2 milliards de dollars au système de santé canadien entre 1988 et 1995. Même si le conseil a exercé un contrôle sur les prix des médicaments brevetés vendus au Canada, nos travaux révèlent que d'autres facteurs ont aussi contribué au ralentissement des prix de ces médicaments. Au nombre de ces facteurs se trouvent les mesures de contrôle prises par les gouvernements provinciaux et la pénétration accrue du marché par les fabricants de médicaments.

Le conseil doit utiliser de meilleures méthodes d'évaluation pour tenir compte de ces facteurs externes lorsqu'il mesure l'incidence réelle de ses activités. Monsieur le président, le comité voudra peut-être demander au conseil où il en est dans ses projets d'amélioration de l'évaluation de son efficacité.

La vérification a aussi permis de déceler des éléments du cadre législatif qui sont difficiles à appliquer ou qui pourraient ne plus être pertinents. Nous ne nous préoccupons pas des aspects plus généraux de la Loi sur les brevets et des règlements. Nos préoccupations concernent plutôt certaines dispositions précises.

Par exemple, pour déterminer si un prix est excessif, la loi exige que le conseil tienne compte des prix à l'étranger pour d'autres médicaments de la même catégorie thérapeutique. Le personnel du conseil est d'avis qu'il n'est pas possible de satisfaire à cette exigence en raison de la non-disponibilité de données valides.

De plus, les règlements exigent que les prix soient comparés dans des pays étrangers précis. Cependant, il est souvent impossible de faire des comparaisons significatives. Dans 20 p. 100 des cas, le seul pays étranger où le médicament était vendu était les États-Unis, pays où les médicaments sont généralement les plus chers.

Par ailleurs, la loi passe deux questions importantes sous silence ou du moins ne donne aucune indication précise. D'abord, la Loi sur les brevets ne parle pas du recours aux engagements de conformité volontaire ni, par le fait même, de la distribution de l'argent recueilli grâce à ces engagements. Ensuite, la loi ne traite pas non plus de la cession des brevets au public ni de l'autorité du conseil à l'égard des produits dont le brevet a été cédé. Enfin, étant donné que l'industrie des produits pharmaceutiques de marque a respecté l'engagement qu'elle avait pris de porter à 10 p. 100 de son chiffre de vente, avant la fin de 1996, ses dépenses annuelles de R-D, on se demande si l'exigence selon laquelle le conseil doit communiquer cette information est encore pertinente.

Le conseil a indiqué que, dans le contexte de ses consultations auprès des parties intéressées, il allait de l'avant en vue de donner suite à bon nombre des constatations formulées dans notre rapport. Le comité voudra peut-être chercher à obtenir d'autres renseignements plus précis sur les mesures que le conseil entend prendre pour mettre nos recommandations en oeuvre et sur le moment où il compte le faire.

Monsieur le président, ceci met fin à mon exposé liminaire. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

Le président: Merci, madame Barrados. Avec toute la précision et le souci du détail qui caractérise le vérificateur général, vous avez parlé exactement cinq minutes.

Monsieur Elley.

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Nous sommes très heureux de vous avoir parmi nous aujourd'hui. Je suis certain que nous avons tous des questions très importantes à vous poser.

Comme consommateur—et je suppose que nous sommes tous à un moment ou l'autre des consommateurs de médicaments—, je sais que le coût des médicaments est un facteur très important dans le régime des soins de santé. Il continue à absorber une bonne partie des fonds investis dans ce régime.

Le rapport indique que le prix des médicaments brevetés a augmenté d'environ 1 p. 100 par an. L'indice des prix à la consommation a augmenté en moyenne de 2,8 p. 100 par an. C'est ce qui me permet de dire que vous êtes, de toute apparence, parvenus à restreindre l'accroissement du coût des médicaments au Canada, comme vous vous le proposiez.

Vous avez toutefois parlé de quelques facteurs supplémentaires susceptibles d'influencer ces prix. J'apprécierais que M. Elgie nous fournisse davantage de précisions sur ces facteurs et je voudrais que Mme Barrados nous dise si elle pense que le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés nous a dressé un portrait exact de l'efficacité de ses efforts de maintien des prix à la baisse, compte tenu de tous ces autres facteurs.

• 0925

M. Robert Elgie: Permettez-moi d'insister sur le fait que notre intervention se situe uniquement au niveau des prix. Le coût des médicaments—autrement dit les dépenses des particuliers ou des organismes publics—est le coût dont nous parlons. Ce que j'ai dit dans notre document, et ce que nous proclamons dans toutes sortes d'autres circonstances, est que bien d'autres facteurs interviennent dans le coût global des médicaments.

Si vous me le permettez, j'essayerai de répéter les propos de l'actuel doyen de la Faculté de pharmacie de Montréal. Dans le coût total des médicaments interviennent une multitude de facteurs tels que le nombre de bénéficiaires—c'est-à-dire la taille de la population—, l'état de santé de la population, la pauvreté, les facteurs démographiques ainsi que l'espérance de vie. Les Canadiens vivent-ils plus longtemps? Oui. Par ailleurs, nous devons faire face à de nouveaux types de maladies telles que le sida, sans compter les maladies connues depuis longtemps pour lesquelles on découvre actuellement des traitements, comme la maladie d'Alzheimer. En outre, on connaît maintenant des traitements plus efficaces pour des maladies connues de longue date et plus précisément pour certaines maladies mentales. Les habitudes d'un médecin en matière de prescriptions ont également une certaine influence sur le coût final, tout comme la surconsommation de médicaments, les prix et leur évolution.

Par conséquent, les fabricants se sont regroupés. Quels nouveaux médicaments seront mis sur le marché et quel sera le degré d'utilisation des médicaments existants? Celui-ci dépend du nombre de consommateurs potentiels et du nombre de maladies—les nouvelles et celles qui sont connues depuis longtemps—ainsi que des nouveaux types de traitements.

M. Reed Elley: J'ai une autre question à vous poser, monsieur Elgie. Qui surveille les sociétés pharmaceutiques pour comparer le coût de production des médicaments au coût réel pour la pharmacie ou l'hôpital? Existe-t-il un organisme chargé d'assurer une surveillance sur les profits excessifs et autres abus de ce genre?

M. Robert Elgie: Non. Cela ne fait pas partie de notre mandat ni de celui d'aucun organisme, à ce que je sache.

M. Reed Elley: N'y a-t-il personne qui soit chargé de surveiller les profits dans le secteur pharmaceutique?

M. Robert Elgie: Non. Vous avez demandé si quelqu'un surveillait le coût de production des médicaments, y compris les frais de R-D, et quelle est la partie de ces coûts que devraient payer les Canadiens. Je ne connais aucun organisme chargé d'assurer ce type de surveillance. D'ailleurs, ce ne serait pas facile.

M. Reed Elley: Oui, mais ce serait peut-être nécessaire.

Madame Barrados, je vous en prie.

Mme Maria Barrados: Les commentaires que nous avons faits au sujet du rendement du conseil dans notre rapport de vérification sont fondés en grande partie sur les critères que nous appliquons, comme vérificateurs, et que nous nous attendons à ce que tous les organismes gouvernementaux respectent. Nous nous attendons à ce que les organismes gouvernementaux fassent un rapport sur leur rendement. Nous ne sommes pas les seuls à avoir cette exigence; le Parlement et le Conseil du Trésor l'ont également.

Par conséquent, nous avons examiné le rapport que le conseil a fait sur son rendement et nous avons signalé notamment que les économies réalisées étaient surestimées en raison même de la méthode utilisée. C'est pourquoi nous avons signalé que le conseil aurait dû tenir compte d'un certain nombre d'autres facteurs dans son analyse.

D'autres facteurs interviennent dans les efforts qui sont déployés pour contenir les prix, surtout les programmes provinciaux d'assurance-médicaments qui négocient les prix et imposent un plafond sur les prix. Le conseil aurait également pu tenir compte de certains facteurs économiques comme l'évolution des marchés au cours de la période de transition de l'ancien au nouveau régime.

Sachez que ce sont les évaluations faites par le conseil que nous mettons en doute, parce que nous les trouvons exagérées, mais nous demeurons convaincus que le conseil a un effet restrictif sur le prix des médicaments.

M. Reed Elley: Merci.

Le président: Madame Lalonde.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Je vous remercie tous.

Madame Barrados, compte tenu des critiques que vous avez formulées, avez-vous tenté d'évaluer les économies réellement imputables au travail du conseil?

Mme Maria Barrados: Non, notre vérification a consisté à évaluer l'étude qu'a préparée le conseil. Nous n'avons pas fait notre propre estimation.

Mme Francine Lalonde: Merci. Je ne désirais pas adresser une critique au conseil puisque je comprends très bien qu'il travaille avec les instruments dont il dispose et qu'ils ne sont pas grands. Nous sommes préoccupés de ce que le coût et, par la suite, le prix des médicaments brevetés dont les droits ont été cédés ont pu de ce fait échapper au contrôle du conseil.

• 0930

Estimez-vous que, pour les entreprises faisant de la recherche, c'était possiblement une façon d'échapper au contrôle du conseil? On constate que de 1989 à 1995, on a cédé les droits de brevet de plus de 130 produits. J'aimerais entendre le point de vue de nos deux témoins à ce sujet. Il pourrait s'agir d'une question importante.

[Traduction]

M. Robert Elgie: Vous avez certainement raison de mettre en évidence un problème qui nous a été signalé pendant les consultations que nous avons menées à travers le pays, à savoir celui des médicaments non brevetés, qu'ils soient de marque ou génériques. C'est un problème qui préoccupe tous les gouvernements provinciaux et la plupart des intervenants qui nous ont donné leur opinion. En fait, un de nos interlocuteurs, à savoir le ministre de la Santé de la Saskatchewan, a même indiqué qu'il était disposé à nous déléguer ses responsabilités pour ce qui est des médicaments non brevetés disponibles chez un fournisseur exclusif. C'est donc effectivement un problème.

Fait-on le nécessaire pour remédier à la situation? C'est une question qui n'est pas de notre ressort mais, à titre de conseiller technique, nous aidons le groupe de travail fédéral-provincial- territorial qui étudie un certain nombre de problèmes, y compris celui des médicaments disponibles auprès d'un seul ou de nombreux fournisseurs. Quand il aura terminé son étude, il faudra attendre de voir ce que l'on fait des données recueillies à ce sujet. Ce n'est pas notre tâche, mais celle du groupe de travail. Par contre, nous l'aidons à organiser ses bases de données sur les formulaires pour lui faciliter cette tâche.

Le président: Madame Barrados.

Mme Maria Barrados: On a posé une question au sujet de la cession des brevets, et c'est un domaine où la législation laisse plutôt à désirer: elle n'indique pas de façon très claire ce que l'on attend du conseil. Nous avons signalé dans notre rapport les initiatives que le conseil a prises tout en sachant que, du fait que les médicaments dont le brevet a été cédé ne sont pas réglementés, il y a eu une hausse des prix que le conseil jugeait injustifiée.

Une des recommandations que nous avons faites dans le rapport est que le conseil essaie de déterminer de façon méthodique quels médicaments ont fait l'objet d'une cession de brevets et les procédures qui s'imposent à leur égard. Le conseil indique qu'il répondrait aux plaintes. Nous estimons qu'un organisme quasi judiciaire devrait faire preuve de méthode dans la recherche d'une solution à ce problème.

M. Robert Elgie: Puis-je ajouter quelques mots au sujet de la cession des brevets, monsieur le président? Je n'en ai pas parlé et je vous prie de m'en excuser.

Le président: Allez-y, monsieur Elgie.

M. Robert Elgie: La cession des brevets est un processus en vertu duquel une société cède son brevet, autrement dit—et c'est ce dont vous parlez—les prix après brevet.

Je suis arrivé au conseil en 1995 et nous avons remarqué à cette époque que, dans le cadre d'une audience qui avait eu lieu en 1993, M. Eastman avait manifesté certaines craintes parce qu'une société, qui comparaissait devant le conseil, avait cédé son brevet sans avertissement.

La Loi sur les brevets ne contient aucune disposition concernant la cession des brevets mais le commissaire aux brevets a pris l'habitude d'accepter cette procédure. Nous avons examiné toutes les données qui existent à ce sujet et nous avons constaté que, de 1969 à 1987, deux brevets pharmaceutiques seulement avaient été cédés. Après 1987, environ 460 brevets ont été cédés. Nous en avons conclu que cela posait un problème.

Je crois, comme d'autres personnes auxquelles j'en ai parlé, que, selon les principes de la common law, il faudrait remonter à l'époque où vous avez annoncé que vous examiniez le problème—autrement dit, où vous avez commencé à annuler certaines décisions concernant la cession de brevets. Il est très difficile de remonter plus loin en arrière. En effet, comme législateurs, vous savez que la justice a horreur des changements rétroactifs qui ne s'appuient pas sur des dispositions législatives claires et précises.

• 0935

Par conséquent, nous sommes convaincus que la façon de procéder que nous avons adoptée à cet égard depuis janvier 1995 est efficace. Il n'y a pas eu d'autres problèmes dus à la cession de brevets. Le problème que signale Mme Barrados—ce qui est normal de la part du vérificateur—est le suivant: que ferait-on s'il fallait remonter à une période antérieure à janvier 1995. Ce serait difficile. Si le problème se posait, comme je l'ai déclaré devant le Comité de l'industrie il y a deux ans, nous expliquerions au gouvernement que nous avons dû essayer de le régler, comme pour toute autre tentative manifeste de se soustraire à notre contrôle.

Le président: Monsieur Elgie, je faisais partie du Comité de l'industrie à cette époque et un des problèmes qui avait été signalé alors l'a été à nouveau par certains de mes collègues ce matin. Je crois que vous en avez parlé également. Il s'agit du problème du contrôle des prix, non seulement des produits brevetés mais aussi des produits non brevetés ou des produits génériques.

J'ai l'impression—et j'espère que d'autres personnes l'ont aussi—qu'en ce qui concerne du moins les produits génériques, les prix sont déjà réglementés parce que ces produits ne peuvent généralement pas être inscrits au formulaire tant que leur prix n'a pas baissé d'un certain montant par rapport à celui des médicaments brevetés qu'ils sont censés remplacer. Est-ce bien cela?

M. Robert Elgie: C'est vrai mais la différence de prix varie d'une province à l'autre. En Ontario, on applique je crois la règle du 90-75, c'est-à-dire que le prix doit correspondre à 90 p. 100 s'il s'agit d'un médicament provenant d'un fournisseur exclusif et ensuite à 75 p. 100 du prix du produit breveté. C'est donc la règle qui est en vigueur dans cette province. En ce qui concerne le Québec, cette province exige, si je ne me trompe, que le prix proposé soit le prix le plus bas à l'échelle nationale.

Le président: Bien.

Monsieur McTeague.

M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Elgie, je m'intéresse à la discussion concernant l'élargissement du mandat du CEPMB, mais je tiens avant tout à parler des problèmes dont je vous ai fait part dans le témoignage que j'ai présenté en juin dernier devant votre comité, qui a tenu des audiences à travers le pays l'année dernière. Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de témoigner.

Je suis toutefois très préoccupé par les méthodes que vous employez et surtout par le fait que le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés base ses calculs sur les prix moyens dans sept pays mais qu'en réalité, comme vient de le signaler la représentante du Bureau du vérificateur général, il s'agit uniquement des prix aux États-Unis.

Je n'irai pas par quatre chemins: pourriez-vous nous dire dans combien de cas les prix de lancement sont établis en fonction de l'information fournie par les fabricants?

M. Robert Elgie: Vous parlez de toute évidence d'un médicament de la catégorie numéro deux, qui représente une amélioration substantielle ou constitue une découverte.

M. Dan McTeague: Oui, dont le prix maximum n'est pas excessif.

M. Robert Elgie: Oui. La loi exige que la société nous communique les prix départ-usine accessibles au public pour chaque catégorie de clients. Jusqu'à présent, nous avons compté sur les renseignements qui nous étaient fournis bien que, lorsque nous avions des raisons de douter de leur exactitude, nous ayons téléphoné à certaines personnes connues de nos employés, dans divers pays, et que nous ayons pu vérifier les formulaires de ces pays.

Il ne faut pas oublier que les États-Unis appliquent un système très différent de celui des autres pays. En effet, en Europe, le prix que le gouvernement payera pour le produit est négocié, puis inscrit au formulaire.

M. Dan McTeague: Estimez-vous que c'est une question de rabais sur le prix? Cela constitue-t-il un rabais dont le CEPMB ne tient bien entendu pas compte?

M. Robert Elgie: Nous en tenons compte dans les limites de notre compétence, parce que la loi précise qu'il faut en tenir compte.

M. Dan McTeague: Comparez-vous toutefois les prix et vérifiez- vous si le prix d'un médicament breveté ne dépasse pas le prix au rabais de l'équivalent vendu dans un pays comme les États-Unis, comme vous venez de le signaler?

M. Robert Elgie: Les États-Unis posent un problème. Si vous examinez notre guide et notre programme de recherche, vous constaterez qu'en ce qui concerne les médicaments de la catégorie deux, le problème est notamment de savoir quel prix fixer pour un produit alors que nous n'avons pour tout point de comparaison que les prix pratiqués dans un ou deux pays.

Vous me posez toutefois une question au sujet des rabais. Quand nous avons fait faire une vérification par la firme Deloitte Touche, celle-ci a indiqué que nous pourrions trouver le prix réel départ-usine en cessant de nous fonder sur le prix indiqué au formulaire du gouvernement, le prix du formulaire étant celui que le gouvernement paye.

• 0940

Nous avons suivi son conseil. Dans le document que vous avez en votre possession, qui est intitulé «Tendances des prix des médicaments brevetés», et en vérifiant les prix des médicaments brevetés, vous constaterez que la plupart des données qui nous ont été fournies sont conformes à la loi.

Je n'arrive pas à croire qu'un organisme gouvernemental qui fixe le prix qu'il est disposé à payer pour un produit n'exige pas que la société concernée lui fournisse des renseignements ou des preuves sur le prix réel. Nous avons toutefois une méthode de vérification des renseignements qui nous sont fournis par les entreprises, ce qui est un grand progrès.

M. Dan McTeague: Quand avez-vous adopté cette méthode, monsieur Elgie? Quand? Tout récemment?

M. Robert Elgie: Oui. C'est indiqué dans les documents que nous vous avons envoyés.

M. Dan McTeague: Bien.

Le président: Mme Barrados voudrait faire un commentaire au sujet de cette question.

Mme Maria Barrados: Je voudrais seulement attirer l'attention du député sur quelques observations que nous avons faites dans notre rapport.

Les renseignements sur les prix des médicaments viennent pour ainsi dire exclusivement des sociétés pharmaceutiques. C'est ainsi que le système fonctionne et le conseil...

M. Dan McTeague: Je m'excuse de vous interrompre, madame Barrados, mais voici le problème qui préoccupe plusieurs d'entre nous. Si l'on essaie de surveiller les prix des médicaments et si les personnes qui communiquent les renseignements sur les prix aux organismes et aux représentants du gouvernement sont les mêmes que celles que nous questionnons de temps en temps, considérez-vous que cela puisse être une source de conflits d'intérêts? Dans l'affirmative, pouvez-vous nous dire comment nous pourrions régler ce problème?

Mme Maria Barrados: Parmi les observations que nous avons faites dans notre rapport, nous avons notamment signalé que le conseil devrait faire davantage d'efforts pour vérifier soigneusement ces renseignements. Le conseil ne peut pas faire ce qu'il veut mais il pourrait envisager certaines options.

En ce qui concerne certains des autres problèmes que vous signalez, je vous recommande de consulter le rapport de vérification. Comme nous l'avons indiqué au paragraphe 52, nous craignons que les prix que le conseil compare avec ceux d'autres pays ne soient pas toujours exactement équivalents et que ses lignes directrices ne permettent pas de tenir compte des différences. Nous lui avons recommandé d'appliquer rigoureusement ses lignes directrices ou, si ce n'est pas possible, de les modifier.

La difficulté réside toutefois dans les divers éléments qui entrent dans la composition de ce prix. Les prix départ-usine et autres types de prix communiqués par d'autres pays ne sont pas nécessairement établis de la même façon qu'ici. Il est nécessaire d'avoir des points de comparaison rigoureusement identiques.

À la fin de son rapport de vérification, la firme Deloitte indique que les prix étrangers, ou du moins la façon dont le conseil peut les obtenir, lui fourniraient l'information nécessaire. Si l'on examine toutefois la question de très près, on se rend compte qu'il existe des écarts importants pour 10 des 50 médicaments sur laquelle est fondée l'étude. Par conséquent, la situation n'est pas tout à fait rassurante.

Le président: Vous aurez à nouveau la parole, monsieur McTeague.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Merci beaucoup.

Je vais continuer à poser des questions du même style que celles de Dan. Certaines observations du rapport du vérificateur général concernant la fiabilité des données fournies par les sociétés pharmaceutiques et la vérification de ces données par le CEPMB sont très sérieuses. Elles ont sans aucun doute contribué à convaincre les Canadiens que cet organisme ne sert pas nécessairement leurs intérêts et qu'il a en fait des liens très étroits avec les multinationales pharmaceutiques.

Le vérificateur général dit clairement ceci:

    Le Conseil compte largement sur les sociétés elles-mêmes pour lui fournir les données sur lesquelles se fonde la réglementation des prix de leurs médicaments.

La réponse du CEPMB est très semblable à ce que vous avez dit ce matin, monsieur Elgie, à savoir que vous ne pensez pas que ce soit le cas et que, de toute manière, des amendes rigoureuses sont prévues. Je voudrais toutefois que vous me disiez quelles dispositions vous avez prises pour obtenir un deuxième avis sur les renseignements que vous fournissent les sociétés pharmaceutiques et comment vous élargissez votre base de recherche pour vous acquitter de cette tâche importante.

M. Robert Elgie: Permettez-moi de faire avant tout un commentaire sur un sujet dont nous avons déjà parlé: on continue d'insinuer que nous avons des liens avec l'industrie pharmaceutique et qu'il se passe quelque chose de louche, pour reprendre une expression que l'on utilisait à l'école secondaire, monsieur le président.

• 0945

Je vous ai dit alors, et je l'ai déclaré publiquement à chaque réunion, que je n'avais aucun lien avec l'industrie pharmaceutique. À la réunion avec les intervenants qui a eu lieu le 20 novembre, je leur ai demandé clairement s'il serait approprié d'avoir des réunions avec l'industrie pharmaceutique et la plupart d'entre eux estimaient que ce serait dangereux mais ils m'ont dit qu'ils réfléchiraient encore pour voir si c'était possible.

Je n'ai aucun lien avec l'industrie pharmaceutique. Elle n'a pas une influence particulière sur le conseil et j'espère que l'on n'entendra plus de telles insinuations pour un bon bout de temps. Comme l'a dit le président Kennedy, les mythes sont souvent plus difficiles à détruire que les mensonges et il s'agit en l'occurrence d'un mythe qu'il faut détruire.

Pour ce qui est de la validité de nos données, les sociétés sont tenues, comme vous le savez, de certifier que les renseignements qu'elles nous fournissent sont exacts, sinon nous pouvons leur imposer des pénalités sévères et de lourdes amendes.

En ce qui concerne les données sur les prix étrangers, je vous ai signalé que nous utilisions maintenant un système qui nous permet de vérifier le prix départ-usine et il nous satisfait. Nous continuerons toutefois d'essayer de trouver des moyens plus efficaces de garantir à la population que nos renseignements sont exacts.

Je tiens à préciser également que ces renseignements sont divulgués publiquement à chaque audience et qu'ils sont par conséquent accessibles au public.

Nous n'avons encore jamais dû envisager de porter des accusations et je ne crois pas que le vérificateur général ait décelé ou nous ait signalé un seul cas où nous aurions dû le faire. Toutes ces considérations ne doivent toutefois pas nous empêcher d'essayer de trouver des moyens de garantir à la population que les données que nous obtenons sont exactes. Nous nous efforcerons d'en trouver.

Le président: Madame Barrados.

Mme Maria Barrados: Il ne faut pas oublier que le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés doit respecter les dispositions de la loi et les modalités de fonctionnement qui lui ont été imposées. Le conseil est soumis à certaines contraintes et nous l'indiquons à plusieurs reprises dans notre rapport. Il suit les directives qui lui ont été données.

Malgré tout, on pourrait par exemple avoir des exigences plus strictes à l'égard des sociétés pharmaceutiques. Nous pourrions demander au vérificateur du conseil de vérifier ces prix. À cause des contraintes auxquelles il est soumis, de son mandat et de son cadre législatif, le conseil ne peut pas procéder à des vérifications sur place. Il ne possède pas les pouvoirs nécessaires. Par conséquent, nous lui recommandons d'autres options, comme celle-ci, qui lui permettraient peut-être d'avoir une plus grande certitude que les renseignements qu'il obtient sont exacts.

Le président: Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: À propos des contraintes auxquelles est soumis le conseil dans l'exercice de ses fonctions—du fait qu'il est soumis à une loi qui ne lui donne pas toute la latitude nécessaire pour régler certains problèmes qui ont été soulevés—, le Comité de l'industrie a entendu, dans le cadre de l'étude qu'il a effectuée il y a deux ans, de nombreux témoignages concernant le mandat du conseil dans lesquels il était notamment question de transparence et de reddition de comptes accrues.

Ce comité en avait conclu qu'une révision et un renforcement du mandat du CEPMB étaient nécessaires. À mon avis, cela veut dire qu'il faut faire une révision complète au lieu de se contenter de tenir des consultations sur le mandat actuel, comme le fait essentiellement le conseil depuis un an.

Ma question s'adresse par conséquent à Mme Barrados et à M. Elgie. Compte tenu des observations faites dans le rapport du vérificateur général et de certaines remarques qui ont été faites aujourd'hui, ne serait-il pas temps que le gouvernement ou plutôt le ministre de la Santé entame une étude indépendante sur toute cette question? En effet, il serait relativement difficile pour le conseil de faire un auto-examen et de déterminer quel type de mandat serait approprié pour lui.

Le président: Monsieur Elgie, votre réponse est probablement négative mais allez-y, essayez.

M. Robert Elgie: Non, ce sont des questions importantes, monsieur le président.

• 0950

Nous avons envoyé au gouvernement un exemplaire du Guide pour la prochaine décennie qui a été établi à la suite des consultations que nous avons menées. Dans ce document, nous notons tout ce qu'on nous a dit au sujet de ce que devrait être le mandat du conseil et non seulement au sujet de son mandat actuel. Nous avons spécifié que, si le gouvernement désire réviser ce mandat, nous sommes disposés à participer au processus. Nous avons indiqué par ailleurs les carences qui nous ont été signalées.

Le vérificateur général a signalé quelques autres problèmes et j'ai envoyé au ministre de la Santé et au ministre de l'Industrie une lettre dans laquelle je leur ai fait part des observations du vérificateur, ajoutant que nous étions prêts à collaborer avec eux s'ils ressentaient le besoin de faire un examen plus approfondi.

En attendant, nous prenons certaines mesures dans les limites de notre compétence. J'ai dit que nous nous efforcerions de savoir s'il n'existe pas d'autres moyens de garantir avec plus de certitude à la population canadienne que les données que nous obtenons sont fiables, dans le cadre de notre mandat actuel. Je vous signale que leur fiabilité n'a jamais été démentie jusqu'à présent mais c'est toujours possible, et les Canadiens ont le droit de savoir que l'on se préoccupe de cette éventualité.

Le président: Voulez-vous répondre également, madame Barrados?

Mme Maria Barrados: Le Bureau du vérificateur général n'a pas l'habitude de discuter de politique générale ni de faire des recommandations de principe. Tout ce que je pourrais ajouter, c'est que, deux ans après le dépôt d'un rapport, nous vérifions les changements qui ont été faits et nous demandons aux intéressés quels types de changements ont été apportés dans les secteurs liés au cadre législatif.

Le président: Nous estimons que le processus qui a été entamé immédiatement après les recommandations faites il y a un an et demi est déjà un signe encourageant. Certains résultats sont déjà visibles. Par conséquent, je tiens à signaler à ceux et celles qui pensent que les comités n'ont aucune influence, que le vérificateur général et le CEPMB suivent notre recommandation.

Monsieur Myers.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Elgie, je voudrais parler de la contribution de 10 p. 100 de l'industrie à la R-D. Avez-vous la certitude que cet objectif est atteint? L'industrie jure ses grands dieux que c'est le cas, mais je voudrais savoir si c'est rigoureusement exact.

Par ailleurs, je m'intéresse au document que vous avez publié au sujet des «resquilleurs» et je me demande si vous ne pourriez pas nous en parler un peu. Ce qui m'intéresse principalement, c'est de savoir comment vous vous assurez le concours des sociétés, pour autant que ce soit possible.

M. Robert Elgie: Je commencerai par la question concernant les resquilleurs. C'est un nouvel élément que nous avons ajouté à notre rapport annuel. Si vous en avez un exemplaire, je vous signale qu'il en est question à la page 29. Nous indiquons que sur les 75 entreprises qui nous soumettent un rapport, 18 ne font aucune contribution à la R-D, 32 font une contribution de moins de 10 p. 100 et 25 une contribution de plus de 10 p. 100.

Bien entendu, les sociétés dont la contribution est supérieure à 10 p. 100 sont celles qui représentent la plupart des recettes de vente de ce secteur mais 18 entreprises n'ont pas fait la moindre contribution à la R-D—du moins en 1997—et 32 ont fait une contribution inférieure à 10 p. 100. Nous devons nous contenter de le signaler au gouvernement et c'est à lui seul de décider ce qu'il entend faire de ce renseignement.

L'autre question concerne la fiabilité des données. Comme vous le savez, nous publions nos données chaque année; celles-ci indiquent le pourcentage du chiffre de vente consacré à la R-D L'association pharmaceutique publie également un feuillet d'information indiquant quelle est la contribution de ses membres à la R-D, d'après les calculs de son vérificateur. On note généralement de légères différences entre les deux séries de données, mais elles sont minimes.

Je ne pense pas que l'on ait la moindre raison de douter de ces chiffres et je tiens à rappeler que le vérificateur général précise que le but n'est pas de savoir si ces sociétés trichent mais de faire savoir à la population que certains mécanismes de vérification de l'exactitude des données sont en place. Nous devrons essayer de déterminer si nous pouvons faire le nécessaire dans les limites de notre mandat actuel.

Le président: Voulez-vous entendre une réponse de Mme Barrados?

M. Lynn Myers: Dans une minute, si c'est possible.

Monsieur Elgie, je voudrais poser une autre question à ce propos. Vous avez dit que vous deviez vous contenter de signaler la chose au gouvernement. Dans le même document, j'ai lu que certains des intervenants estiment qu'il y aurait peut-être une meilleure façon de procéder et que, d'après ce que je peux comprendre, il faudrait créer un fonds de recherche alimenté par les entreprises pharmaceutiques, en fonction de leurs profits. Pensez-vous que c'est une bonne suggestion? Est-ce en fait une option?

M. Robert Elgie: Ce sont des questions d'ordre stratégique auxquelles le gouvernement devra faire face. C'est une des recommandations que M. Eastman a faites lorsqu'il était président de la commission royale d'enquête sur l'industrie pharmaceutique et qui a été faite également dans d'autres pays. Je ne connais aucun pays qui l'ait déjà mise en oeuvre mais c'est une option que le gouvernement devrait examiner.

• 0955

M. Lynn Myers: Sans vouloir s'aventurer dans le domaine explosif des questions stratégiques, ce serait une option, je présume.

M. Robert Elgie: Certainement. Tout est une option.

M. Lynn Myers: Madame Barrados, je me demande ce que vous pensez au sujet de l'exactitude des données et si vous connaissez un meilleur moyen de s'en assurer.

Mme Maria Barrados: Je n'ajouterai rien au sujet des questions de politique. Je le ferais comme simple citoyenne mais pas dans le cadre de mes fonctions officielles.

M. Robert Elgie: Allez, faites-le!

Des voix: Oh, oh!

Mme Maria Barrados: J'aime le bureau où je travaille.

Des voix: Oh, oh!

Mme Maria Barrados: En ce qui concerne l'exactitude des chiffres, cette question pose un problème parce que l'obligation d'indiquer le pourcentage des recettes consacré à la R-D est rattachée à la législation fiscale qui était en vigueur en 1987, alors que celle-ci a évidemment changé et que les exigences ont changé également. Par conséquent, il est très difficile de porter un jugement sérieux sur la situation réelle ou d'avoir recours à d'autres méthodes pour vérifier l'exactitude de ces chiffres.

Il faudrait essayer de déterminer si un tel effort se justifie. Ce serait très difficile pour le conseil et on se demande s'il serait utile de lui imposer la lourde tâche que cela représenterait.

M. Lynn Myers: Cela voudrait-il dire la même chose que ce que vous avez déclaré il y a quelques minutes, à savoir qu'il faudrait que l'industrie vous fournisse des états vérifiés, que vous vérifieriez à votre tour? Est-ce ce que vous voulez dire?

Mme Maria Barrados: Les états sont certifiés par les vérificateurs mais la certification n'est pas fondée sur les mêmes critères que la vérification.

M. Lynn Myers: Je vois.

Mme Maria Barrados: C'est que les temps ont changé.

M. Robert Elgie: C'est pourquoi il y a de légères différences.

M. Lynn Myers: Merci.

Le président: Dans le même ordre d'idées, je vous signale, madame Barrados, qu'une des raisons pour lesquelles cela devient pour beaucoup de députés une question de principe est que d'une part, les instituts de sciences médicales—hôpitaux et universités—réclament aux députés de tous les partis un financement stable pour la recherche fondamentale et que, d'autre part, d'après le CEPMB, les sommes investies par les entreprises dont il est question dans son rapport ne cessent de diminuer. Le conseil affirme pourtant qu'elles respectent les prescriptions en matière de R-D.

D'après le Bureau du vérificateur général, y a-t-il pour nous moyen de faire une distinction entre le type de recherche—la R-D fondamentale—pour lequel on fait du lobbying auprès des députés et le reste de la R-D qui vise la mise en marché d'un produit? Avez- vous vérifié uniquement si les sociétés respectaient les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu—et je crois qu'il s'agit des dispositions de 1987?

Mme Maria Barrados: Je ferais peut-être mieux de fournir des explications supplémentaires au sujet des états vérifiés avant d'essayer de répondre à votre question, monsieur le président.

Les entreprises ont bien entendu des états vérifiés qui donnent certains de ces renseignements mais l'information fournie au conseil est un état certifié conforme par l'entreprise, qui n'a toutefois pas été vérifié.

Nous n'avons pas réfléchi beaucoup aux possibilités d'obtenir d'autres informations mais au moment où ce système a été instauré, on voulait que les renseignements soient semblables à ceux qui sont exigés par Revenu Canada. Cela facilite beaucoup la tâche. Par contre, nous n'avons pas beaucoup cherché plus loin. Je ne sais pas si le CEPMB a approfondi davantage la question.

Le président: Monsieur Elgie, est-il exact d'en conclure que vous n'étiez pas absolument tenu de le faire ou que votre mandat n'exige pas que vous fassiez une distinction entre ces deux types d'information, même si vous faites l'analyse?

M. Robert Elgie: Oui. Nous faisons l'analyse. Notre mandat consiste seulement à faire état de la R-D et nous avons mis au point un protocole de rapport de la situation au Parlement et à la population.

Vous avez signalé que le pourcentage des fonds de recherche consacré aux sciences fondamentales n'a pas augmenté de façon radicale et qu'il a au contraire légèrement diminué. Nous en avons déjà parlé. Nous sommes certainement d'accord sur le fait que les fonds investis dans la recherche fondamentale donnent une indication du sens des responsabilités de l'entreprise à l'égard du pays.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Elley.

• 1000

M. Reed Elley: Je voudrais exposer le point de vue concret d'un consommateur et je parle en ce moment au nom de ma femme. Elle souffre de migraines. Elle prend un médicament de prescription, l'Imitrex. Je crois qu'il est en vente au Canada depuis trois ou quatre ans. C'est un médicament très coûteux, comme vous le savez. Je crois qu'il revient à 18 $ le comprimé.

C'est probablement un des seuls remèdes qui fassent de l'effet dans son cas. Quand les signes annonciateurs se manifestent et que la migraine atteint plus ou moins son paroxysme, l'Imitrex permet d'atténuer beaucoup les symptômes et la migraine disparaît en une heure environ. Tous ceux et celles qui souffrent de migraines savent qu'un médicament comme celui-là devient indispensable.

Il est très coûteux. Nous apprécions beaucoup les régimes d'assurance-médicaments, qui sont pour la plupart des régimes privés, car ils nous aident à acheter ce genre de médicament. Je me demande par contre depuis combien de temps ce médicament est utilisé aux États-Unis, par rapport au Canada. Avez-vous des chiffres indiquant combien il coûte aux États-Unis, de combien son coût a diminué à la longue et quelle est la tendance du prix au Canada?

En fin de compte, je voudrais savoir quand on peut s'attendre à ce que le prix d'un médicament comme celui-là diminue de façon appréciable. Combien de consommateurs faut-il pour que le prix baisse?

Cela fait beaucoup de questions, je le sais, mais j'essaie de m'informer.

M. Robert Elgie: Pour répondre brièvement à une partie de votre question, je signale qu'il est évident que lorsqu'un autre médicament—ce que l'on appelle généralement un médicament de la catégorie trois—se trouve sur le marché, la concurrence a tendance à faire diminuer les prix.

En ce qui concerne l'Imitrex, nous pouvons vérifier comment son prix a évolué et vous communiquer ce renseignement.

M. Reed Elley: Vous n'êtes pas obligé de le faire pour nous, bien que ce type de renseignement soit susceptible d'intéresser certains de mes collègues; personnellement, cela m'intéresserait de le savoir.

M. Robert Elgie: Je le ferai avec plaisir.

Le président: Pourriez-vous nous communiquer ce renseignement par l'intermédiaire de nos attachés de recherche?

M. Robert Elgie: Oui, volontiers.

Le président: Merci.

M. Reed Elley: J'aimerais également savoir combien de temps il faut pour que le prix d'un médicament tel que l'Imitrex, qui est protégé par un brevet, commence à baisser et quels sont tous les facteurs qui contribuent à cette baisse.

M. Robert Elgie: S'il s'agit d'un produit exclusif, c'est-à- dire d'un médicament qui constitue une découverte ou une amélioration substantielle, le prix restera tel qu'il a été fixé par le fabricant jusqu'à l'arrivée d'un produit concurrent sur le marché ou jusqu'à l'expiration du brevet, après quoi un produit générique concurrent apparaîtra sur le marché. La présence d'un produit concurrent sur le marché suffit pour que le prix diminue.

L'augmentation du prix au cours d'une année ne peut être supérieure à l'IPC et par conséquent, les prix ont tendance à suivre la même courbe que l'IPC. Par contre, le maintien du prix dépend du degré d'exclusivité du produit sur le marché.

M. Reed Elley: Combien de temps dure la protection assurée par un brevet?

M. Robert Elgie: La période est de 20 ans, à partir de la date de la demande de brevet.

M. Reed Elley: Par conséquent, il faudra attendre assez longtemps pour qu'un médicament comme l'Imitrex ait de la concurrence.

M. Robert Elgie: Non. D'autres produits font leur apparition.

M. Reed Elley: Bien. Merci.

Le président: Lorsqu'un produit est lancé sur le marché, s'il s'agit d'un médicament qui constitue une découverte ou d'un médicament exclusif, on ne conteste pas le prix fixé par le fabricant pour autant qu'il corresponde aux prix moyens dans les sept pays en question. S'il n'existe aucun point de comparaison, comment faites-vous pour savoir si le prix est raisonnable?

M. Robert Elgie: C'est une des questions que le groupe de travail sera chargé d'examiner. Par exemple, il y avait au Canada un médicament constituant une découverte appelé Photofrin, dont il n'existait aucun équivalent dans le monde. Nous avons par conséquent joué un rôle de consultants auprès de la société qui le fabriquait et nous nous sommes entendus sur un prix, à la condition que celui-ci soit révisé quand on trouvera des prix pouvant servir de points de comparaison dans d'autres pays. C'est ainsi que nous avons procédé dans ce cas-là.

Par contre, un problème se pose quand on n'a qu'un autre pays comme point de comparaison, surtout s'il s'agit des États-Unis. C'est un problème auquel nous accordons une attention toute spéciale. Dans un premier temps, nous consultons le formulaire du ministère des Anciens combattants, qui est sur Internet.

• 1005

Le président: Madame Barrados.

Mme Maria Barrados: Je tiens à ajouter que l'une des difficultés consiste, bien entendu, à déterminer dans quelle catégorie se classe le médicament, s'il s'agit de la catégorie un, deux ou trois—la catégorie deux comprenant les produits qui constituent une découverte et les autres catégories comprenant les produits moins récents, en quelque sorte—, après quoi on porte un jugement sur le prix.

Un des commentaires que nous faisons dans le rapport de vérification est que Santé Canada a l'obligation de s'assurer de l'innocuité des médicaments et de les approuver. Ce ministère à une procédure d'approbation accélérée d'un médicament et les critères ressemblent beaucoup à ceux qui s'appliquent aux médicaments qui constituent une découverte. Dans une de nos recommandations, nous signalons qu'il existe une possibilité de collaboration en vue de rationaliser et d'accroître l'efficacité des jugements que l'on porte sur les médicaments étant donné que dans certains cas, Santé Canada, estimant que le produit présentait des avantages précis, appliquait le processus accéléré alors que par la suite, le CEPMB considérait qu'il ne s'agissait pas d'un médicament constituant une découverte.

Le président: Madame Minna.

Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci, monsieur le président.

Étant donné que j'utilise du Migrainal parce que je souffre de très fortes migraines, je sais exactement ce que vous voulez dire, monsieur Elley. Cela me coûte 15 $ l'unité.

M. Robert Elgie: Ma femme et mes deux enfants souffrent de migraines également. Par conséquent, je sais ce que c'est.

Mme Maria Minna: Le rapport où il est question des médicaments nouveaux et de leur classement indique qu'ils sont répartis essentiellement en trois catégories. L'une est celle qui contient les produits médicamenteux qui constituent un nouveau produit d'une forme pharmaceutique existante d'un médicament existant; l'autre est celle qui comprend les produits médicamenteux qui constituent une découverte et la troisième est celle qui comprend les produits médicamenteux qui offrent des bienfaits thérapeutiques modestes ou minimes ou n'en procurent aucun. Je voudrais que l'on m'explique la différence entre la première et la troisième catégorie. Je n'arrive pas très bien à la comprendre.

M. Robert Elgie: Le médicament de la première catégorie contient généralement une dose plus forte du même produit—autrement dit, il s'agit d'un comprimé de 50 ou de 100 milligrammes.

Mme Maria Minna: Pourquoi le considère-t-on dès lors comme un nouveau produit?

M. Robert Elgie: Pour le calcul du prix. Il faut qu'il soit relativement approchant du prix du produit qui existe déjà sur le marché, parce qu'il s'agit seulement d'une forme plus concentrée de ce produit. Le produit de la catégorie trois peut être un produit chimique complètement différent ou il peut s'agir d'un produit médicamenteux existant se présentant sous une forme nouvelle.

Mme Maria Minna: Ma question concerne une des plaintes qui reviennent constamment quand je parle à des représentants de fabricants de médicaments génériques. Les fabricants de médicaments brevetés se contentent parfois de modifier très légèrement la composition d'un médicament existant, ne fût-ce qu'un seul élément. Cela ne change pas du tout l'effet thérapeutique du médicament mais sa composition. Par conséquent, ce médicament est considéré comme un produit nouveau et le processus est différent ou l'élément différent est nouveau et par conséquent, le médicament doit...

Est-ce le cas dans la catégorie trois et, dans l'affirmative, comment peut-on résoudre ce problème?

M. Wayne D. Critchley (directeur exécutif, Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés): S'il s'agit seulement d'une version légèrement modifiée d'un médicament existant, ce produit est considéré comme un produit de la catégorie un, c'est-à-dire comme un nouveau dosage ou une variation de dosage d'un médicament existant, comme l'a expliqué M. Elgie.

Par contre, ce type de plainte s'applique parfois à un médicament dont on a légèrement modifié la composition chimique. Dans ce cas, il s'agit d'un produit chimique différent du produit existant, même si la différence est minime.

M. Robert Elgie: Il est traité comme un produit différent.

M. Wayne Critchley: Oui et ce produit est traité comme un nouveau produit chimique. Santé Canada le considère bien entendu comme un nouveau produit et l'examine en conséquence. Il fait alors partie de la catégorie trois.

Dans les deux cas, l'effet de nos lignes directrices est toutefois le même: elles limitent le prix de ce nouveau médicament de façon à ce qu'il ne dépasse pas le prix du produit existant qui est déjà en vente.

Mme Maria Minna: Par contre, la durée de la période de protection de ce nouveau produit change. Elle est prolongée de 20 ans.

M. Wayne Critchley: Oui, s'il fait l'objet d'un nouveau brevet.

M. Robert Elgie: Oui, on lui attribue un nouveau DIN.

Mme Maria Minna: Êtes-vous ou plutôt Santé Canada est-il en mesure de décider, après examen, s'il s'agit effectivement d'une nouvelle composition et d'analyser le médicament pour déterminer si ses propriétés thérapeutiques ont effectivement changé ou si le but principal de l'opération était de prolonger la durée du brevet?

• 1010

M. Robert Elgie: Nous n'intervenons pas du tout dans l'attribution des brevets ou des DIN mais le prix ne peut être augmenté si la différence n'est que minime.

Mme Maria Minna: D'accord.

Le président: Monsieur McTeague.

M. Dan McTeague: Merci, monsieur le président.

Monsieur Elgie, je vous ai entendu dire à deux reprises qu'il n'était pas possible de comparer les prix de lancement, notamment avec les prix américains. Par conséquent, puisque vous avez eu plusieurs mois pour examiner mon rapport ainsi que d'autres études, pourriez-vous expliquer pourquoi, s'il n'y a pas moyen d'obtenir des renseignements sur les rabais pratiqués aux États-Unis, on ne pourrait pas se baser sur le prix suggéré de détail canadien pour fixer le prix de lancement maximum non excessif plutôt que sur le prix de transaction?

M. Robert Elgie: Il faut analyser tout d'abord les renseignements que nous vous avons fournis dans le document de vérification, dans lequel nous avons examiné les prix européens, qui sont très différents.

M. Dan McTeague: Il ne s'agit pas de prix de lancement, monsieur Elgie. Il s'agit de 50 médicaments brevetés qui sont sur le marché depuis un certain temps. Je parle des prix de lancement.

M. Robert Elgie: Et moi je parle de la façon dont nous vérifions les données concernant les autres pays. Permettez-moi alors de parler des États-Unis.

Les données provenant d'autres pays sont, sauf dans le cas des États-Unis, des données tirées d'un formulaire, que nous pouvons vérifier d'après des renseignements accessibles au public pour confirmer si l'entreprise en question nous communique le prix départ-usine. Aux États-Unis, il n'existe pas de prix départ-usine et par conséquent, cela nous complique beaucoup la tâche.

En ce qui concerne la comparaison des prix de détail, nous avons fait une étude à ce sujet en 1994 mais le prix suggéré de détail au Canada n'est pas l'équivalent du prix suggéré de détail européen. J'ignore si la base de comparaison est la même en ce qui concerne les États-Unis, mais c'est difficile. Dans certains autres pays, le prix suggéré de détail comprend toutes les marges bénéficiaires et c'est le prix indiqué dans le formulaire. Elles ne sont pas comprises dans le prix suggéré de détail canadien. Il ne faut pas oublier qu'après notre intervention, la vente n'est plus réglementée.

M. Dan McTeague: Mais il ne s'agit pas d'un médicament qui est censé être déjà inscrit au formulaire. Je crois que la plupart des provinces canadiennes reconnaissent qu'elles ne sont pas en mesure de payer.

J'apprécie que vous nous ayez fourni des explications à ce sujet il y a quelques semaines. Je vous ai toutefois fourni des renseignements depuis six mois et je n'ai pas encore reçu de réponse. J'essaie d'en obtenir une maintenant.

Ce que je voudrais surtout savoir, c'est comment vous établissez l'indice du prix des médicaments brevetés. L'année dernière, votre directeur exécutif, M. Critchley, qui est ici aujourd'hui, a déclaré à l'Ottawa Citizen que certains prix, surtout ceux qui font l'objet d'un examen, ne sont pas compris dans l'indice. Si c'est le cas, l'indice des prix des médicaments brevetés du CEPMB ne comprend pas les prix de tous les médicaments brevetés pour la période d'examen mais uniquement ceux qui sont dans la fourchette autorisée. Je lis seulement un extrait de cet article parce que j'ai jugé que c'était assez important pour vous envoyer directement le texte en question.

Je crois que toutes les personnes ici présentes ou toutes celles qui nous écoutent admettront que c'est extrêmement trompeur. Cette déclaration met certainement une sourdine à vos affirmations; vous prétendez en effet que votre réussite est due au fait que vous avez toujours été capables de maintenir les hausses de prix des médicaments brevetés en dessous du taux d'inflation.

Il est à mon avis impossible que l'indice des prix des médicaments brevetés du CEPMB excède l'IPC pour la période concernée, puisqu'il n'inclut pas les prix qui sont dans la fourchette autorisée.

Monsieur Critchley et monsieur Elgie, je voudrais savoir si, par conséquent, le CEPMB ne tient pas compte des prix des médicaments faisant l'objet d'une enquête dans son indice des prix des médicaments brevetés et, si c'est le cas, quelle influence cela peut avoir sur l'indice.

Madame Barrados, cette question s'adresse uniquement au Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés.

Merci.

M. Robert Elgie: La réponse est non. Nous n'excluons pas ces médicaments.

M. Dan McTeague: Vous ne le faites pas?

M. Robert Elgie: Non. J'ai fait faire une enquête à ce sujet parce que j'en avais déjà entendu parler. J'ai appris qu'en 1992, on avait omis d'inclure 13 médicaments dans l'indice pour des raisons que j'ignore. On les a ensuite rajoutés et cela ne s'est plus jamais produit depuis lors.

M. Wayne Critchley: Je dois des excuses à M. Elgie. Pour une fois, l'Ottawa Citizen a cité mes déclarations correctement et je me trompais. C'était une erreur.

Je pensais notamment au cas du Virazole, dont le prix n'était pas inclus dans l'indice parce que nous ne le connaissions pas. Nous étions en procès avec le fabricant et, par conséquent, nous ne possédions pas ce renseignement. Le produit n'était donc pas compris dans notre indice. Il l'est actuellement, comme l'a signalé M. Elgie, étant donné que nous avons gagné notre procès.

Tous les documents sur les tendances actuelles des prix que vous avez en votre possession contiennent des renseignements qui sont entièrement à jour, et cette lacune a été comblée. Cette omission a eu pour effet de faire baisser très légèrement l'indice des prix des médicaments brevetés. Elle n'a toutefois pas eu une grosse influence. Elle l'a fait légèrement diminué au lieu de le faire augmenter.

Je suis heureux que vous ayez posé la question.

• 1015

M. Dan McTeague: Moi aussi, parce que je sais que vous avez eu beaucoup de renseignements à analyser, mais j'ai l'impression que nous sommes témoins du fait que certains Canadiens...

Je vois que mon collègue du Bloc québécois, M. Bigras, est sur le point de s'en aller, mais il connaît probablement mieux que moi le rapport qui a été préparé par d'éminents médecins de Montréal indiquant que les médicaments sont tellement coûteux que les patients ne respectent pas les doses recommandées.

Par conséquent, comme défenseurs des politiques gouvernementales et comme législateurs, nous sommes dans la situation peu enviable de devoir admettre que si notre régime de soins de santé est censé protéger tous les Canadiens, il ne couvre pas les prix des médicaments alors que la plupart des Canadiens n'ont pas les moyens de se les payer.

La question suivante ne s'adresse pas nécessairement à vous, Mme Barrados pourrait peut-être y répondre.

Pendant l'enquête ou l'examen concernant le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés qui a été effectuée par le vérificateur général, avez-vous eu accès à tous les documents? Un délai s'est-il écoulé entre la date à laquelle l'enquête a été annoncée ou à laquelle elle a été recommandée et la date à laquelle vous avez entamé l'examen? Votre ministère a-t-il eu accès aux représentants du conseil ici présents? Vous a-t-il manqué des documents?

Mme Maria Barrados: Les seuls retards que nous avons connus sont ceux qui ont été causés par notre charge de travail. Nous avons bénéficié de l'entière collaboration des membres du conseil. Nous n'avons par ailleurs jamais eu l'impression que l'on nous cachait certains documents ou que l'on nous en refusait l'accès.

M. Dan McTeague: Avez-vous participé à cet examen, madame Barrados?

Mme Maria Barrados: Il s'est déroulé sous ma direction.

M. Dan McTeague: Avez-vous été en contact avec toutes ces personnes au cours de cette période?

Mme Maria Barrados: Oui.

M. Dan McTeague: Bien. Merci.

Merci, monsieur le président.

Le président: C'est bien, monsieur McTeague.

Après la réponse de M. Critchley, je me pose maintenant des questions au sujet des journalistes. Dois-je comprendre d'après votre réponse que lorsqu'ils déforment nos propos et les vôtres, ils disent la vérité alors que lorsqu'ils les citent fidèlement, c'est nous qui nous trompons?

Des voix: Oh, oh!

M. Wayne Critchley: Je ne voudrais pas généraliser.

M. Robert Elgie: Je ne vous recommanderais pas d'exploiter le filon au cours de votre prochaine campagne.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Apparemment, on a compris le truc.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je voudrais reparler d'un commentaire que vous avez fait tout à l'heure, monsieur le président, à propos des résultats des travaux des comités de la Chambre.

Le président: Ce n'est pas moi qui suis le témoin, ce sont eux.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Non, mais je voulais en parler en guise d'entrée en matière, parce que j'ai une opinion bien moins haute des travaux des comités, qui est fondée sur le rapport du Comité de l'industrie...

Le président: Madame Wasylycia-Leis, il y a ici au moins une personne qui était là lorsque le comité en question...

Mme Judy Wasylycia-Leis: Certainement. Je dois reconnaître que je n'étais pas là et même si j'ai tendance...

Le président: Nous pensions que nous avions été plutôt sévères.

Mme Judy Wasylycia-Leis: ... à me méfier systématiquement du gouvernement, nous avons deux cas flagrants en ce qui nous concerne: aujourd'hui, avec le CEPMB et la semaine dernière, avec l'Agence canadienne d'inspection des aliments. D'autres comités avaient déjà étudié ces questions de façon approfondie et avaient fait de nombreuses recommandations auxquelles on n'a presque pas donné suite.

Je parle du rapport de 1994 sur la STbr et des recommandations très précises qui avaient été faites par un comité de la Chambre. Nous avons appris la semaine dernière que ces questions sont toujours à l'examen.

Aujourd'hui, nous examinons un cas sur lequel le Comité de l'industrie avait déjà fait des recommandations très strictes; les examens et les consultations se poursuivent mais on ne propose pour ainsi dire aucune solution concrète.

Aussi, la question suivante s'adresse à Mme Barrados.

Vous avez dit que vous ne pouviez pas faire de commentaires sur la politique gouvernementale et que votre rôle se borne à examiner les dispositions actuelles de la loi et les activités d'organismes tels que le CEPMB. Par contre, dans votre rapport, vous indiquez qu'il est nécessaire d'apporter certaines modifications à la loi et vous signalez clairement plusieurs problèmes à régler. Ne nous recommanderiez-vous pas de faire preuve d'une plus grande fermeté, c'est-à-dire d'essayer de forcer le gouvernement à rendre davantage de comptes et de le tenir responsable de la mise en oeuvre des bonnes recommandations qui ont été faites par divers comités au cours des dernières années?

Le président: Aimez-vous toujours votre emploi, madame Barrados?

Des voix: Oh, oh!

Mme Maria Barrados: J'aime toujours mon emploi.

À titre de vérificateurs, notre rôle consiste à présenter nos rapports au Parlement. Nous sommes très heureux d'avoir l'occasion de témoigner devant les comités permanents et si nous le faisons, c'est pour discuter de tous ces rapports et des recommandations qu'ils contiennent, dans l'espoir que cela les intéressera et qu'ils feront le nécessaire pour qu'elles soient mises en oeuvre.

• 1020

Par conséquent, nous encourageons vivement les comités permanents à passer à l'action ou à faire d'autres rapports ou d'autres enquêtes, ou encore à nous faire revenir, ou à faire revenir le CEPMB, pour voir si des progrès ont été réalisés. Nous reviendrons avec plaisir.

Comme vérificateurs, nous faisons un premier rapport, puis un autre rapport de vérification, et nous vérifions deux ans plus tard quels progrès ont été réalisés, mais nous ne nous ingérons pas dans les politiques ni dans les activités gouvernementales, parce que ce n'est pas notre rôle.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Vous avez notamment signalé dans votre rapport certaines lacunes en ce qui concerne la transparence et la reddition de comptes. D'après la discussion que nous avons eue ce matin, il semblerait que le CEPMB ne puisse être soumis qu'à un examen public restreint, en raison de la nature de la loi, je suppose. Est-il vrai que le mandat législatif du CEPMB limite les possibilités d'examen public et de reddition de comptes, ou pouvons-nous avoir beaucoup plus d'attentes à l'égard de cet organisme en la matière?

Mme Maria Barrados: À vrai dire, le CEPMB analyse des renseignements qui sont délicats sur le plan commercial. Il doit respecter les renseignements qu'il obtient; c'est une obligation. Nous étions soumis à la même obligation lorsque nous avons examiné tous ses dossiers et tous ses documents.

Nous avons fait deux ou trois recommandations et observations à ce sujet dans notre rapport. Nous avons dit que nous estimions que le conseil pourrait expliquer les motifs de ses décisions avec plus de transparence. Nous avons toutefois constaté qu'il faisait preuve de beaucoup de bonne volonté en reconnaissant ces carences et en s'engageant à essayer d'y remédier. C'est le genre de chose qui nous intéresse au cours du suivi; nous vérifions s'il y a amélioration. Le conseil a toutefois bel et bien manifesté sa volonté d'apporter certaines améliorations à cet égard.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Estimez-vous que la réponse de M. Elgie à ma question portant sur la recherche d'autres sources d'information dans le cadre de l'évaluation des données sur les prix des médicaments qui sont fournies par les sociétés pharmaceutiques est satisfaisante? Peut-on attendre davantage du conseil? Quel genre de délai faudrait-il envisager? Que suggéreriez-vous à cet égard?

Mme Maria Barrados: Comme je l'ai signalé dans ma déclaration liminaire, il serait utile que le comité fixe des échéanciers plus précis. Cela ne dépend peut-être pas entièrement de M. Elgie mais aussi du ministre de la Santé.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Dan McTeague a posé deux questions. L'une concerne l'opinion que le conseil a en fait comparé les prix de transaction au Canada aux prix suggérés de détail dans d'autres pays. Son autre question portait sur l'exclusion de l'indice de certains médicaments dont le prix est excessif ou du moins supérieur à la fourchette autorisée. À la suite de vos investigations, êtes-vous convaincus que ces deux problèmes ont été réglés et qu'ils ne se perpétueront pas, contrairement à ce que pensent la plupart des Canadiens?

Mme Maria Barrados: En ce qui concerne les comparaisons de prix, nous avons signalé dans le rapport de vérification un problème d'interprétation de la loi dans les lignes directrices, en ce qui concerne les types de prix sur lesquels ces comparaisons sont fondées. Nous estimons que ce problème doit être examiné et réglé.

Ce qui importe à nos yeux, comme vérificateurs, c'est qu'il y ait une certaine concordance entre la loi et les lignes directrices—que ce soit clair et transparent—et que ces lignes directrices soient mises en application avec rigueur. Nous estimons que l'interprétation des lignes directrices en ce qui concerne les prix à comparer posait un problème mais le conseil a décidé de l'examiner et de le régler.

Pour ce qui est de l'indice, nous l'avons examiné et nous avons constaté un certain manque d'efficacité de la part du conseil, du fait que Statistique Canada fait un travail analogue. Nous lui avons recommandé de consulter de façon plus systématique Statistique Canada et d'utiliser le même genre de données pour exploiter les ressources disponibles de la façon la plus économique possible. Nous avons fait une recommandation à ce sujet dans le rapport.

Le président: Voulez-vous poser une autre question?

Mme Judy Wasylycia-Leis: Certainement, bien que je ne voudrais pas que l'on m'accuse d'accaparer...

• 1025

Le président: Je ne voudrais toutefois pas que vous sortiez d'ici en pensant que les comités ne sont pas efficaces. En toute justice pour nos témoins...

Je fais allusion à quelqu'un qui fait partie de l'auditoire, mais je ne prononcerai pas son nom. Il pourrait probablement confirmer ce que M. Elgie doit ressentir pour le moment.

Il y avait toutes sortes de perceptions au sujet des comités autrefois et grâce à leurs efforts, le vérificateur général a été saisi de certains problèmes qui, d'après eux, n'avaient pas été réglés de façon satisfaisante. C'est précisément le rapport du vérificateur général que nous examinons.

Je suis très subjectif mais j'estime que les questions qui ont été posées n'étaient pas particulièrement tendres. Elles étaient plutôt directes. Je félicite M. Elgie et Mme Barrados pour la façon dont ils ont répondu. Ce que l'on fait des réponses qu'ils nous ont données est notre affaire et je ne tiens pas à sous-estimer nos capacités. Leur présence indique qu'un comité antérieur a fait oeuvre utile.

Voulez-vous y aller, monsieur McTeague?

Mme Judy Wasylycia-Leis: Permettez-moi de terminer...

Le président: Eh bien, vous devrez attendre.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Vous voyez, je dois attendre.

M. Dan McTeague: Ce ne sera pas long, Judy. Nous allons former un tandem.

Le président: C'est un croisement pollinique.

M. Dan McTeague: Les réponses sont excellentes et elles nous aident à prendre certaines décisions au sujet du CEPMB.

Madame Barrados, quand l'enquête ou l'examen a eu lieu... Je déteste employer le terme «enquête»; cela fait presque penser à quelque chose de clandestin. Quand vous avez fait l'examen sur le CEPMB, les employés qui en étaient chargés connaissaient-ils déjà le conseil ou le faisaient-ils uniquement parce que le Parlement l'exigeait et en raison de leur expérience en comptabilité? Avaient-ils des compétences ou des connaissances particulières ou auraient-ils fait n'importe quel genre de travail avec le CEPMB?

Mme Maria Barrados: Les noms des membres de l'équipe sont indiqués dans le rapport. M. Campbell, qui était chef d'équipe, est ici. Aucun de ces employés n'avait déjà travaillé avec le CEPMB. Ils ont tous une formation de comptable et de vérificateur. Il y avait deux diplômés universitaires au niveau de la maîtrise et un économiste. Ils ont fait de gros efforts pour se mettre au courant du système d'approbation et d'établissement des prix des médicaments.

Par ailleurs, nous avons formé un groupe consultatif, selon la méthode habituelle. Ce groupe était composé d'experts en matière d'établissement des prix des médicaments, de médecins et l'un d'entre eux avait eu des contacts avec le CEPMB. Nous jugions que c'était important et nous avons par conséquent obtenu l'avis de tout un éventail d'experts. Il s'agissait toutefois uniquement d'un processus consultatif, pour moi comme pour le vérificateur général.

M. Dan McTeague: Je vous ai demandé si un certain délai s'était écoulé entre la date à laquelle l'équipe de vérificateurs a annoncé l'enquête et la date où celle-ci a effectivement débuté. Avez-vous dit qu'elle a débuté immédiatement? Ai-je bien compris?

Mme Maria Barrados: Non, je n'ai pas dit cela. L'enquête a été annoncée au mois d'avril. Nous avons commencé en septembre. Il y a eu un délai.

M. Dan McTeague: Il y a donc eu un délai.

Mme Maria Barrados: C'est un fait, mais nous en étions entièrement responsables. Il était dû au fait que nous avions d'autres vérifications en cours.

M. Dan McTeague: Je comprends cela. Je me demandais seulement si un certain délai...

Les renseignements que vous avez obtenus du CEPMB étaient tous fournis par cet organisme. Est-ce exact? Autrement dit, vous avez examiné les documents qu'il vous avait fournis. Aviez-vous la possibilité de demander des renseignements ou des documents supplémentaires?

Mme Maria Barrados: Je ne suis pas certaine de comprendre parfaitement le sens de votre question mais j'essaierai d'y répondre. Vous pourrez toujours me poser d'autres questions.

La loi nous confère de très grands pouvoirs d'accès aux ministères, notamment au ministère de la Santé. Nous sommes allés au ministère de la Santé quand c'était nécessaire. Nous avons accès à tous les documents du conseil et nous en avons profité. Nous n'avons pas les mêmes pouvoirs d'accès que les vérificateurs indépendants.

M. Dan McTeague: Bien. Si quelqu'un avait par exemple déchiqueté un document pendant ce délai, vous n'auriez évidemment pas pu obtenir des renseignements qui vous auraient permis de mieux comprendre les qualités et les défauts du CEPMB. C'eût été manifestement impossible.

Mme Maria Barrados: Mes vérificateurs ont examiné tous les dossiers. Ils ont prélevé environ 80 boîtes de documents qu'ils ont examinés à fond. Ils auraient été à même de déceler les lacunes manifestes.

• 1030

Ils ont parlé à tous les membres du CEPMB. Ils ont même convoqué certaines personnes dans nos bureaux, au lieu d'aller les rencontrer dans les locaux du CEPMB, parce que les médias avaient laissé entendre qu'il y avait des récriminations. Mes vérificateurs n'ont relevé aucune anomalie leur permettant de croire que l'on nous avait caché certains renseignements ou qu'il se passait quelque chose de louche.

M. Dan McTeague: Vos vérificateurs ont-ils parlé à d'ex- employés du CEPMB?

M. Ronald Campbell (directeur, Direction générale des opérations de vérification, Bureau du vérificateur général du Canada): Je ne pense pas.

M. Dan McTeague: Ma dernière question concerne la R-D. Il y a un certain temps, comme je viens de l'expliquer à mon collègue Bob, le volet R-D n'était pas nécessairement considéré comme de la R-D au sens où l'entendrait un profane.

Monsieur Elgie, vous pourriez peut-être nous donner des explications à ce sujet. Comment le CEPMB définit-il la R-D? Pouvez-vous nous assurer que cela ne comprend pas la publicité ni les activités des services d'information ou des services de relations avec la clientèle, ni des agents de vente qui vont dans les pharmacies?

M. Robert Elgie: Je peux vous dire exactement ce qui n'est pas inclus; c'est d'ailleurs indiqué à la page 31 de notre dernier rapport. Cela n'inclut pas la recherche de marché, la promotion des ventes, le contrôle de la qualité ou les essais individuels, les dispositifs ou les produits, ni la collecte de données. Rien de tout cela n'est inclus dans la R-D.

M. Dan McTeague: Est-ce que ce sont des renseignements que vous exigez des sociétés pharmaceutiques quand elles vous remettent un état de leurs dépenses totales de R-D? Est-ce volontaire ou vérifiez-vous ces renseignements?

M. Wayne Critchley: Comme l'a signalé le vérificateur général, l'enquête, comme vous l'appelez, est relativement limitée.

Les renseignements sont fournis conformément aux règlements dont la définition de R-D est la même que la définition de 1987 de la Loi de l'impôt sur le revenu, comme l'a expliqué Mme Barrados. Le but était que le Parlement puisse vérifier si l'industrie pharmaceutique respectait les engagements qu'elle avait pris en 1987.

M. Dan McTeague: Et si je respectais mes engagements tout en incluant dans les dépenses de R-D plusieurs postes de dépenses qui ne doivent pas être inclus, en l'absence de tout système de contrôle? En fait, je voudrais savoir si le CEPMB vérifie ces renseignements? Vérifiez-vous si les données fournies par les sociétés pharmaceutiques sont exactes ou si elles exagèrent leurs dépenses de R-D en y incluant d'autres dépenses?

M. Wayne Critchley: Les renseignements qui sont fournis sont comparés par nos employés aux déclarations antérieures et ils les examinent en fonction de ce qu'ils savent de l'industrie. Ils ne vont pas faire de fouilles sur place pour vérifier les déclarations mais si une société indiquait qu'elle a inclus dans les dépenses de R-D certains frais de promotion, on ne lui permettrait pas de le faire.

Par conséquent, on met en doute les renseignements obtenus, on les vérifie et en fait...

M. Dan McTeague: Sont-ils vérifiés?

M. Wayne Critchley: Sous certaines réserves...

M. Dan McTeague: Pour préserver certains intérêts commerciaux, si je comprends bien.

M. Wayne Critchley: ... qui sont justifiés. Il ne s'agit pas d'états vérifiés.

Le seul commentaire que je puisse ajouter pour vous aider, monsieur McTeague, c'est que Santé Canada et Industrie Canada nous consultent souvent parce que ces deux ministères se demandent fréquemment s'il ne conviendrait pas de donner une acception plus large au terme «R-D». Par conséquent, ils nous posent les mêmes questions, car nous savons qu'on leur demande fréquemment si les définitions ne sont pas trop restreintes. Je ne peux pas vous en dire beaucoup plus.

M. Dan McTeague: Un gouffre sépare effectivement les intérêts privés des sociétés pharmaceutiques et ceux des Canadiens qui tiennent à ce qu'elles respectent leurs obligations. C'est précisément à cause des droits de propriété et des privilèges que nous avons fini par examiner cette question très importante et vous n'êtes qu'un des intervenants.

Je vous remercie pour toutes ces réponses.

Le président: Madame Wasylycia-Leis, avez-vous quelque chose à ajouter?

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je pourrais encore parler pendant deux ou trois heures, si nous en avions le temps.

Le président: Essayons d'abord de nous contenter de deux ou trois minutes.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Parfait.

En ce qui concerne la R-D, le vérificateur général a, comme l'a signalé Dan McTeague, fait une observation très importante à propos de la tendance de certains employés du conseil à compter sur les renseignements fournis par les entreprises concernées, c'est-à- dire par les titulaires de brevets, lorsqu'il s'agit de déterminer si l'industrie a respecté ses engagements en ce qui concerne l'accroissement des dépenses de R-D au Canada.

• 1035

Cette situation nous incite à nous poser une foule de questions quant au pourcentage réel du chiffre de vente consacré à la R-D et quant à la possibilité de le déterminer si les seuls renseignements que nous obtenons sont ceux qui sont fournis par les titulaires de brevets eux-mêmes.

Que compte faire le CEPMB pour essayer de savoir exactement quelle est la proportion de R-D réellement innovatrice?

M. Robert Elgie: Le vérificateur général nous a recommandé d'obtenir des états vérifiés. J'ignore si nous avons le pouvoir de les exiger mais je ne tiens pas à donner l'impression que nous n'avons pas le même objectif que la population et que vous, à savoir obtenir des renseignements aussi exacts que possible.

Nous verrons d'abord ce que nous pouvons faire par nos propres moyens. Si nous avons besoin de l'aide d'autres organismes comme le ministère de la Santé, nous le leur ferons savoir.

J'insiste à nouveau sur le fait que nous n'avons pas encore reçu une seule plainte concernant la falsification des renseignements qui nous ont été fournis. Si nous recevions des plaintes, nous vérifierions si elles sont fondées. C'est absolument garanti.

Nous ne sommes à la solde de personne, je tiens à vous le rappeler.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Madame Barrados, êtes-vous satisfaite de la réponse aux observations que vous avez faites au sujet des dépenses de R-D?

Mme Maria Barrados: Oui. Nous avons également demandé s'il est toujours nécessaire que le conseil continue à s'intéresser à ces renseignements. C'est une question pertinente.

Si l'on juge que c'est très important, on pourrait réclamer beaucoup plus de renseignements, des renseignements beaucoup plus précis, que les employés du conseil analyseraient. Il y a toutefois à notre avis une question de rentabilité qui entre en ligne de compte. Le conseil est un petit organisme et sa priorité est d'examiner les prix des médicaments. Par conséquent, nous n'avons pas donné d'information à ce sujet dans notre rapport.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Par conséquent, vous confirmez l'existence de certaines lacunes quant à une tâche importante qui doit être accomplie par le gouvernement—qui ne relève pas nécessairement de la responsabilité du CEPMB mais du gouvernement—et vous reconnaissez qu'il se doit de nous fournir une évaluation exacte de l'évolution des dépenses de R-D, compte tenu des engagements qui ont été pris lorsque les modifications à la législation sur la protection par brevet ont été mises en place.

Mme Maria Barrados: Je m'exprimerais probablement d'une autre façon mais en soumettant la législation au Parlement, le gouvernement a indiqué l'importance qu'il accorde à la R-D, puisque c'est prévu dans la loi. En fait, nous nous demandons si le contrôle est une tâche facile et rentable.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Pourriez-vous expliquer encore une fois cette dernière observation?

Mme Maria Barrados: C'est prescrit dans la loi et celle-ci impose actuellement au conseil une tâche dont nous mettons la facilité en doute, étant donné que cette prescription est liée à une loi qui date de 1987.

Le conseil obtient des renseignements qui ne sont pas très précis et qui n'ont pas été vérifiés. On ne peut toutefois s'empêcher de se demander si cela devrait effectivement être une priorité pour le conseil d'obtenir des renseignements aussi précis et de mobiliser une partie de ses ressources pour les analyser. C'est pourquoi nous n'avons pas fait beaucoup d'observations à ce sujet et nous avons recommandé de vérifier si c'était vraiment nécessaire.

Pour l'instant, le conseil est tenu d'accomplir cette tâche.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je voudrais poser deux ou trois questions à M. Elgie.

Au début de la discussion, vous avez dit que vous espériez que nous pouvions dissiper une bonne fois pour toutes l'impression que les intérêts de l'industrie pharmaceutique passent avant l'intérêt public. Je vous fais remarquer...

Le président: En ce qui concerne le CEPMB.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Oui, en ce qui concerne le CEPMB.

Je vous fais remarquer que le rapport du vérificateur général ne nous donne aucune raison d'être rassurés parce qu'il contient quelques critiques très sévères qui nourrissent l'impression qu'ont les Canadiens que c'est l'industrie pharmaceutique qui mène la danse.

• 1040

Si l'on y ajoute les graves préoccupations suscitées par le fait que le conseil compte sur les données fournies par les sociétés pour vérifier si la réglementation concernant le prix des médicaments est respectée et par l'absence présumée de reddition de comptes et de transparence, auxquelles viennent se greffer certains doutes au sujet de la R-D—bien que nous ayons eu quelques explications à ce sujet—, on finit par avoir de sérieux doutes quant à la faculté du CEPMB et du gouvernement d'appliquer une politique officielle saine qui serve l'intérêt public supérieur et fasse en sorte que les prix des médicaments soient les plus bas possible, pour répondre aux besoins des Canadiens.

M. Robert Elgie: Je ne peux pas parler au nom du gouvernement mais je ne connais aucun texte législatif dans lequel il est question des «prix les plus bas pour les Canadiens». Le terme employé dans la loi est «prix non excessifs».

Il ne faut pas prêter foi aux rumeurs publiques injustifiées. J'ai déjà dit que les données que nous obtenons sur la R-D, en vertu de la législation de l'impôt sur le revenu de 1987, peuvent effectivement être légèrement différentes des données que les sociétés pharmaceutiques sont tenues de fournir aux termes des dispositions actuelles de la Loi de l'impôt sur le revenu.

L'Association canadienne de l'industrie du médicament remet chaque année un état vérifié des dépenses de R-D conforme aux dispositions actuelles de la Loi de l'impôt sur le revenu et l'écart entre les deux types de données est minime. Ses chiffres sont généralement légèrement supérieurs à ceux que nous obtenons grâce aux données conformes aux dispositions législatives de 1987. Par conséquent, je ne pense pas qu'il y ait la moindre raison de clamer sur tous les toits qu'il y a des tricheurs.

Si l'on juge absolument nécessaire que les sociétés nous remettent un état vérifié, c'est une question que le gouvernement doit régler en modifiant les règlements. Personnellement, je n'ai pas le moindre soupçon que des irrégularités sont commises ou que nous n'arrivons pas à obtenir les meilleurs renseignements possible avec les pouvoirs que nous possédons.

Le président: Madame Minna.

Mme Maria Minna: Merci.

Monsieur Elgie, j'ai examiné votre Guide pour la prochaine décennie. À la page 26, vous indiquez que les ventes de médicaments brevetés ont augmenté d'environ 23 p. 100, principalement grâce aux nouveaux médicaments qui ont été lancés sur le marché au cours des dix dernières années—c'est du moins ce qui est indiqué.

M. Robert Elgie: Cette augmentation est due à un accroissement de la consommation et à quelques nouveaux médicaments.

Mme Maria Minna: Oui, et à quelques nouveaux médicaments.

Ce document indique également que les nouveaux médicaments mis en marché au cours des dix dernières années représentent 89 p. 100 des ventes de médicaments brevetés. C'est un pourcentage très important. Votre bureau suit-il tous les nouveaux médicaments qui ont été lancés sur le marché au cours des dix dernières années pour savoir combien de temps il faut attendre pour que les prix commencent à diminuer ou si les prix restent élevés? En effet, s'il s'agit d'un nouveau médicament, vous ne trouvez pas nécessairement de points de comparaison aux États-Unis ou dans d'autres pays. Le prix de ce genre de médicament a tendance à être élevé, comme nous avons déjà pu le constater.

Par conséquent, surveillez-vous tous ces médicaments pour savoir combien il y en a et à quel moment leur prix commence à baisser ou si les prix restent élevés? Le prix restera sans doute élevé dans la plupart des cas pendant une vingtaine d'années, jusqu'à l'expiration du brevet. Le brevet fait-il augmenter le prix du nouveau médicament pendant une longue période?

Il existe un plafond pour les médicaments qui sont sur le marché depuis longtemps, ce qui est très bien, mais tous les nouveaux médicaments qui sont apparus sur le marché au cours des dix dernières années ont relevé ce plafond, du fait même qu'ils sont nouveaux. Combien de temps les prix resteront-ils élevés? Pendant 20 ans? Faites-vous un suivi de tous ces médicaments? J'essaie seulement de comprendre, parce que le plafond a une influence sur les prix à long terme.

M. Robert Elgie: Nous avons suivi un certain nombre de nouveaux médicaments et la diminution du nombre de vieux médicaments. Pour ce qui est d'un suivi systématique, êtes-vous au courant de certaines activités dont j'ignore l'existence?

M. Wayne Critchley: Non, nous ne faisons rien pour le moment, bien que ce serait intéressant. Normalement, ces prix ne baissent pas. Le prix des médicaments de marque ne baisse généralement pas mais il continue à augmenter, même après l'arrivée sur le marché de produits génériques concurrents; c'est du moins ce qu'indiquent toutes les études spécialisées. Par conséquent, à l'arrivée d'un produit générique semblable sur le marché, les consommateurs bénéficient d'une possibilité d'acheter un produit analogue moins coûteux; ils peuvent donc se procurer ce médicament à un prix moins élevé mais le prix du produit de marque ne change généralement pas.

Mme Maria Minna: Mais ils ont le choix.

M. Wayne Critchley: Ils ont le choix; c'est exact.

Mme Maria Minna: C'est ce que je veux dire. Étant donné que les médicaments brevetés bénéficient d'une période de protection de 20 ans, tous les nouveaux médicaments ne font-ils pas augmenter le plafond des prix des médicaments? Vous dites que leur prix ne diminue probablement pas.

• 1045

M. Wayne Critchley: Pas celui du produit de marque qui retarde sans aucun doute le lancement du produit générique moins coûteux; cela ne fait aucun doute.

Mme Maria Minna: Ce qui influence le coût global des médicaments, étant donné que l'exclusivité est assurée aux médicaments de marque pendant 20 ans.

M. Wayne Critchley: Effectivement.

M. Robert Elgie: Le processus d'approbation et les autres formalités durent un certain temps et par conséquent, la période d'exclusivité n'est pas tout à fait de 20 ans.

Mme Maria Minna: Pardon?

M. Robert Elgie: Elle n'est pas tout à fait de 20 ans. Il y a le processus d'approbation, puis la recherche...

Mme Maria Minna: À partir du moment où le brevet est accordé.

M. Robert Elgie: Non, à partir du moment où la demande de brevet est présentée.

Mme Maria Minna: C'est ça.

M. Robert Elgie: C'est à partir du moment où la demande de brevet est présentée. Selon le produit, des années, ou du moins quelques années, peuvent s'écouler avant que le fabricant ne reçoive l'avis de conformité et qu'il ne puisse par conséquent commencer à mettre son médicament en vente.

Mme Maria Minna: Je me demandais si l'on suivait certains des nouveaux médicaments introduits sur le marché pour voir si le prix commençait à diminuer à un certain moment, même s'il s'agit de médicaments brevetés.

M. Robert Elgie: C'est une idée intéressante.

Mme Maria Minna: Après qu'ils aient été sur le marché depuis une dizaine d'années, par exemple, ils ne sont peut-être plus aussi...

M. Robert Elgie: Nous y réfléchirons.

Mme Maria Minna: Il serait intéressant de voir si les prix changent ou s'ils restent les mêmes que pendant la période de lancement du produit.

M. Robert Elgie: Merci.

Le président: Je sais que Judy veut faire une dernière déclaration.

M. Robert Elgie: Ne dites pas qu'elle veut critiquer.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Avant de lui donner la parole, je voudrais poser une question qui a déjà été posée à plusieurs reprises. Je l'ai déjà posée moi-même plus tôt.

Je n'ai peut-être pas lu votre rapport assez attentivement mais je sais que dans le rapport précédent, vous aviez indiqué les résultats des investissements dans la R-D et vous aviez comparé le nombre de médicaments constituant une découverte ou une innovation, produits au Canada, au nombre de médicaments de la même catégorie produits aux États-Unis. Je n'ai pas vu de telles comparaisons dans ce rapport. Y a-t-il une raison?

M. Robert Elgie: Nous avons fait une étude comparative internationale sur la R-D et c'est dans cette étude que se trouvait le tableau dont vous parlez.

Le président: C'est bien, mais vous ne l'avez pas publié dans le présent rapport.

M. Robert Elgie: Non, nous ne l'avons pas encore inséré dans le rapport annuel.

Le président: Bien. Je vous ai déjà posé la question avant, parce que si... Mes collègues vous ont posé des questions sur le rapport qui existe entre l'investissement dans la R-D et le point de référence, qui est la Loi de l'impôt sur le revenu de 1987. Les calculs sont établis en fonction des dispositions de cette loi.

Il y a un autre point de référence, et c'est ce que l'objectif visé était censé être. L'objectif était le développement d'installations de R-D justifiant les prix.

Vous aviez parfaitement raison de faire remarquer que les règlements prévus dans la loi précisent que le prix du produit ne doit pas être excessif et qu'il ne s'agit pas nécessairement du prix le plus bas. En contrepartie, nous nous efforcions de créer un cadre stratégique et un environnement globaux propices au développement de cette industrie.

Dans votre dernier rapport—et c'est pourquoi je l'ai trouvé instructif—, vous avez signalé qu'au Canada, trois produits médicamenteux constituant une découverte avaient été lancés sur le marché depuis 1976, si j'ai bien compris, c'est-à-dire depuis 20 ans. Le Canada se place donc au tout dernier rang parmi les pays industrialisés, au tout dernier. L'avant-dernier est le Luxembourg ou la Belgique—je ne sais trop lequel—, avec environ neuf ou dix nouveaux médicaments. Je me demande si vous pourriez faire à nouveau ce genre de tableau et ce genre de comparaison, parce que cela donne une meilleure perspective.

Mes propos sont un peu décousus mais je voudrais tout de même faire une petite digression. Vous avez supporté quelques questions assez directes ce matin, ce dont je vous félicite, mais si on vous a posé de telles questions, c'est en partie parce que mes collègues et d'autres personnes veulent qu'on en arrive à un compromis acceptable. Ces problèmes ne relèvent pas uniquement du domaine de la santé mais aussi de celui de l'industrie. Vous en avez eu quelques preuves lorsque le Comité de l'industrie a fait son étude. Il s'agit de vérifier si l'on a un bon rapport qualité-prix, comme dans pratiquement tous les domaines. Je me demande si vous pourriez peut-être insérer à nouveau un tableau comparatif de ce genre dans votre dernier rapport, pour nous tenir au courant.

M. Robert Elgie: Oui, c'est faisable. Cela veut dire que nous devons examiner ce qui se passe dans les autres pays.

Vous n'assistez pas aux assemblées de l'industrie pharmaceutique mais je vous signale qu'un des reproches que nous font constamment les représentants de l'industrie est que nous ne donnons pas une indication exacte des niveaux de R-D. Ils affirment que les dépenses de R-D représentent plutôt environ 16 p. 100 de leurs revenus parce que certaines entreprises de biotechnologie canadiennes font de la R-D dont on ne tient pas compte dans les calculs vu que nous n'avons aucun droit de regard sur leurs activités du fait qu'elles n'ont pas de produits en vente.

• 1050

Le président: C'est une remarque pertinente.

M. Robert Elgie: C'est ce que l'on me dit à chaque occasion. Je leur réponds que nous avons comparé les données à celles qui sont fournies au Centre for Medicines Research britannique et qu'il emploie la même méthode que nous: il ne tient pas compte des entreprises de biotechnologie qui n'ont pas de produits en vente. Nous avons par conséquent essayé d'avoir des points de comparaison semblables et j'estime que c'est un reproche injustifié.

Vous voulez toutefois savoir si nous pouvons fournir certains renseignements comparatifs dans notre prochain rapport annuel. Nous étudierons sérieusement la question.

Le président: Merci beaucoup.

Judy, vous serez peut-être une des dernières à parler car nous discutons depuis un certain temps. Allez-y.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je voudrais parler de deux sujets dont nous avons déjà discuté, le premier étant l'influence présumée de l'industrie pharmaceutique.

Je n'essayais pas d'insinuer qu'il y a eu collusion volontaire ou des irrégularités. Ce que je veux dire, et je crois que c'est confirmé par le rapport du vérificateur général, c'est qu'en l'absence de mesures préventives de la part du gouvernement et de ses organismes, nous laissons l'industrie pharmaceutique mener la danse et réglementer les prix selon ses besoins.

Je n'ai pas entendu aujourd'hui beaucoup de déclarations qui soient de nature à démentir ces soupçons ni à me convaincre que le gouvernement dispose des moyens nécessaires pour obliger l'industrie pharmaceutique à rendre des comptes ni pour garantir aux Canadiens—ce n'est peut-être pas indiqué comme tel dans la loi mais c'est de cela qu'il s'agit—que nous essayons d'obtenir les prix les plus bas possible pour les médicaments, afin de ne pas les accabler par des coûts excessifs qu'un nombre croissant d'entre eux affirment ne plus pouvoir assumer. C'est une question que je voudrais que l'on examine de plus près.

L'autre question, et c'était en fait ma première, portait sur le rôle des comités. Je n'insinue pas que le travail que nous avons fait aujourd'hui n'a pas été constructif. Je parle de comités antérieurs qui ont fait des études fouillées qui n'ont apparemment pas eu beaucoup d'effet, car la situation persiste indéfiniment. Nous n'arrivons pas à trouver un moyen d'obliger le gouvernement à prendre ses responsabilités dans ce domaine.

Le fait auquel je fais allusion aujourd'hui, c'est que le Comité de l'industrie avait recommandé clairement en avril 1997 un examen et un renforcement du mandat du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés. Je ne pense pas qu'on y soit arrivé par le biais de la série de consultations que le CEPMB a tenues à travers le pays. Il faut que cet examen soit fait par un organisme indépendant.

Ma question s'adresse par conséquent à M. Elgie. Pense-t-il que le processus de consultation ait permis d'atteindre les objectifs visés par la recommandation du comité concernant la révision du mandat du CEPMB?

Madame Barrados, estimez-vous—et je sais que ces questions débordent un peu de vos attributions—que cette recommandation n'a pas été suivie et qu'il reste du travail à accomplir à cet égard?

Le président: En toute justice, je ne suis pas sûr que nos témoins puissent faire des commentaires au sujet de certaines des questions qui viennent systématiquement de ce côté-ci de la table mais j'espère qu'ils examineront les problèmes qui concernent directement le CEPMB et ses fonctions, et qu'ils tiendront compte du jugement du vérificateur général sur la tâche qui avait été confiée au conseil, conformément aux recommandations faites en 1997.

M. Robert Elgie: Je ne tiens pas à faire des commentaires sur une recommandation du comité permanent qui était adressée au gouvernement et pas à nous, concernant l'élargissement et le renforcement du mandat du CEPMB. Nous en avons beaucoup entendu parler au cours des déplacements que nous avons faits à travers le pays et ces commentaires ont été communiqués au gouvernement. S'il sollicite notre aide pour quelque examen que ce soit, nous collaborerons avec plaisir.

• 1055

J'ai l'impression que vous critiquez un peu le processus de consultation. Il faut bien comprendre qu'il s'agit en fait de ce que les tribunaux administratifs appelleraient un processus d'élaboration de règlements. Quand on veut modifier ses règlements ou ses lignes directrices, ce qui revient au même, il faut avoir recours à un processus de consultation qui donne une indication de la situation présente, de ce qu'il conviendrait de faire et de ce que l'on se propose de faire à la suite du processus. Par conséquent, je me demande bien pourquoi nous aurions dû renoncer à procéder ainsi.

C'est ce qu'on appelle un processus d'élaboration de règlements et c'est ce qui donne de l'importance et de la vigueur aux lignes directrices qui en découlent. C'est précisément le processus auquel je participe. J'y ai déjà participé avant, parce qu'il faut avoir une bonne base avant de pouvoir entamer un processus d'élaboration de règlements. Je déplore que vous le critiquiez, parce qu'il a été un moyen très efficace d'essayer de communiquer avec la population et d'obtenir l'opinion des Canadiens sur un certain nombre de sujets.

Si vous examinez notre programme de recherche, vous constaterez que nous étudions des questions de fond. Nous demandons à un groupe de travail composé d'intervenants de se réunir avec nous. Nous aurons des représentants au sein de ce groupe, les provinces aussi et il y aura un représentant du Comité consultatif pour les médicaments pour usage humain. C'est de l'action, c'est du mouvement. C'est conforme aux bonnes pratiques d'élaboration des règlements.

Le président: Merci, monsieur Elgie.

Voudriez-vous faire un tout dernier commentaire, madame Barrados?

Mme Maria Barrados: Je répète que mon bureau fait tout son possible pour servir le Parlement et pour aider les comités, et que nous continuerons de le faire.

Quant à savoir si la réaction aux recommandations a été satisfaisante, je signale que la vérification a été faite à la suite d'une recommandation du comité. Il en est de même en ce qui concerne le processus de consultation que mène actuellement le CEPMB.

La situation évolue. On se demande quelle sera l'étape suivante et c'est une question pertinente. Nous ne le savons pas encore, et nous ne savons pas quelles sont les étapes qu'il nous reste à franchir, mais je pense que cela viendra.

Le président: Au nom du comité, je vous remercie pour votre courage et votre patience face à plusieurs questions très directes. D'après ce que j'ai pu constater depuis que je suis au Parlement, c'est-à-dire pas très longtemps, les questions ne sont pas toujours aussi directes et aussi gênantes. Je n'ai pas interrompu ceux et celles qui les posaient. Certaines de ces questions frisaient l'impudence mais j'apprécie le fait que vous ayez répondu à toutes les questions. Je vous assure que vos réponses nous aideront à déterminer le rôle que nous pourrions jouer au cours de la prochaine étape de ce processus.

Merci beaucoup, monsieur Elgie et monsieur Critchley.

Merci beaucoup, madame Barrados et monsieur Campbell.

Je suis certain que nous vous convoquerons tous les quatre à nouveau.

Je demande à mes collègues de rester quelques minutes. Je suspens la séance pour environ cinq minutes, puis nous réglerons quelques affaires internes.

[La séance se poursuit à huis clos]