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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent des langues officielles


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 15 février 2005




¿ 0905
V         Le président (M. Pablo Rodriguez (Honoré-Mercier, Lib.))
V         Mme Madeleine Chevalier (présidente, Fédération nationale des conseils scolaires francophones)

¿ 0910

¿ 0915
V         Le président
V         M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC)
V         Mme Madeleine Chevalier

¿ 0920
V         M. Paul Charbonneau (directeur général, Fédération nationale des conseils scolaires francophones)
V         M. Pierre Poilievre
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Paul Charbonneau

¿ 0925
V         M. Pierre Poilievre
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Paul Charbonneau
V         Le président
V         M. Guy André (Berthier—Maskinongé, BQ)
V         M. Paul Charbonneau

¿ 0930
V         M. Guy André
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Guy André
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Guy André
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Guy André
V         Le président
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V         Mme Madeleine Chevalier

¿ 0935
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau

¿ 0940
V         Le président
V         Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.)
V         M. Paul Charbonneau
V         Mme Françoise Boivin
V         M. Paul Charbonneau

¿ 0945
V         Mme Françoise Boivin
V         M. Paul Charbonneau
V         Mme Françoise Boivin
V         Le président
V         Mme Françoise Boivin
V         M. Paul Charbonneau
V         Le président
V         M. Andrew Scheer (Regina—Qu'Appelle, PCC)
V         M. Paul Charbonneau
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Paul Charbonneau
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Andrew Scheer

¿ 0950
V         M. Paul Charbonneau
V         Le président
V         M. Jean-Claude D'Amours (Madawaska—Restigouche, Lib.)
V         M. Paul Charbonneau

¿ 0955
V         M. Jean-Claude D'Amours
V         M. Paul Charbonneau
V         Le président
V         M. Odina Desrochers (Lotbinière—Chutes-de-la-Chaudière, BQ)
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Odina Desrochers

À 1000
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Odina Desrochers
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Odina Desrochers
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Odina Desrochers
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Odina Desrochers
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Odina Desrochers
V         M. Paul Charbonneau
V         Le président
V         M. Pierre Poilievre
V         Le président
V         M. Yvon Godin
V         Le président
V         M. Odina Desrochers
V         M. Yvon Godin
V         Le président
V         M. Odina Desrochers
V         Le président
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin

À 1005
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Paul Charbonneau
V         Le président
V         M. Pierre Poilievre
V         M. Paul Charbonneau

À 1010
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Pierre Poilievre
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Pierre Poilievre
V         Le président
V         M. Guy André
V         Mme Madeleine Chevalier

À 1015
V         M. Guy André
V         M. Paul Charbonneau
V         Le président
V         L'hon. Raymond Simard (Saint Boniface, Lib.)
V         M. Paul Charbonneau
V         L'hon. Raymond Simard
V         Mme Madeleine Chevalier
V         L'hon. Raymond Simard
V         Mme Madeleine Chevalier
V         M. Paul Charbonneau
V         L'hon. Raymond Simard

À 1020
V         M. Paul Charbonneau
V         L'hon. Raymond Simard
V         M. Paul Charbonneau
V         L'hon. Raymond Simard
V         Le président
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Yvon Godin
V         Mme Madeleine Chevalier
V         Le président










CANADA

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 017 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 février 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¿  +(0905)  

[Français]

+

    Le président (M. Pablo Rodriguez (Honoré-Mercier, Lib.)): Bonjour à tous.

[Traduction]

    Bienvenue.

[Français]

    Nous avons le plaisir ce matin de recevoir la Fédération nationale des conseils scolaires francophones, que je remercie d'être ici. Cela va durer jusqu'à 10h30 environ. Par la suite, nous devrons discuter de certains détails au sujet des réunions futures.

    Sans plus tarder, je vous cède la parole. Vous pouvez faire une brève présentation. Ensuite, nous pourrons commencer une discussion avec les membres du comité.

    Madame Chevalier, pourriez-vous également nous présenter la personne qui vous accompagne?

+-

    Mme Madeleine Chevalier (présidente, Fédération nationale des conseils scolaires francophones): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs les députés. Nous vous remercions de nous avoir invités dans le cadre de votre examen de l'éducation dans la langue de la minorité.

    Je suis Madeleine Chevalier et je suis la présidente de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones. M. Paul Charbonneau, notre directeur général, m'accompagne aujourd'hui.

    Comme vous le savez, les 30 conseils scolaires francophones répartis dans l'ensemble du Canada que nous représentons ont reçu une obligation constitutionnelle. Ils doivent s'assurer que la minorité francophone du Canada reçoive dans sa langue une instruction qui soit de qualité égale à celle qui est donnée aux élèves de la majorité. Cette responsabilité nous est confiée en même temps qu'aux paliers de gouvernement provincial, territorial et fédéral. C'est en assumant pleinement cette responsabilité que nous nous présentons devant vous.

    Nous prendrons quelques minutes pour vous exposer l'état actuel du système d'éducation en français et de ses besoins, puis nous vous présenterons notre stratégie pour compléter ce système conformément à la vision de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

    La situation actuelle de notre système d'éducation est inquiétante. En deux mots, nous pensons qu'il est sous perfusion. Nous sommes bien loin de l'épanouissement souhaité aux communautés par la Loi sur les langues officielles.

    Certes, depuis 1982, nous comptons sur les droits scolaires garantis par la charte, et vous savez combien il en a coûté à nos communautés francophones et acadienne pour arracher devant les tribunaux la pleine reconnaissance de ces droits. Il a fallu trois jugements clés de la Cour suprême du Canada, l'arrêt Mahé en 1990, le renvoi manitobain en 1993 et l'arrêt Arsenault-Cameron en 2000, pour forcer les gouvernements des provinces et territoires à concéder la gestion scolaire à la minorité francophone. Pendant ce temps, l'assimilation maintenait le chantier ouvert il y a un siècle par les différentes interdictions qui ont condamné l'instruction en français à disparaître ou à vivoter dans l'ensemble du Canada.

    Depuis une quinzaine d'années, nous avons donc connu de grands succès en créant progressivement 31 conseils scolaires francophones qui gèrent aujourd'hui quelque 675 écoles. Nous sommes fiers de veiller à l'instruction qui est dispensée à ces quelque 150 000 élèves, pour lesquels les attentes ne sont pas minces. En plus des standards scolaires canadiens, nous souhaitons que nos élèves acquièrent une connaissance de leur culture, de leur histoire et des valeurs de leur société, qu'ils développent une fierté de leur langue, une conscience d'être minoritaires, une identité forte, un leadership envers leur communauté et une capacité multilingue.

    Dans quel contexte devons-nous réaliser cette mission? Pour en avoir une idée précise, notre fédération a récemment commandité un inventaire des besoins en matière scolaire. Parmi une cinquantaine de besoins importants ressentis dans les conseils scolaires francophones, il en est ressorti une dizaine qui sont, d'un commun accord, prioritaires. De plus, nous avons consulté une cinquantaine d'organismes communautaires, qui ont généralement validé ces besoins et clairement exprimé l'importance de rapprocher l'école et la communauté afin de soutenir la vitalité ethnolinguistique de celle-ci.

    Comme vous le savez, l'absence ou la faiblesse des écoles de langue française au Canada depuis un siècle a gravement réduit l'effectif scolaire visé par l'article 23 de la charte. Cette injustice passée, comme l'a qualifiée la Cour suprême du Canada, a fait en sorte qu'à peine plus de la moitié des élèves des ayants droit fréquentent actuellement l'école de langue française. Cette école manque aujourd'hui de moyens. Elle ne peut offrir une variété de programmes d'étude, de services spécialisés et d'équipements comparable à ce qui est offert dans les écoles de langue anglaise ou même dans les écoles d'immersion concurrentes. Souvent, ses infrastructures sont désuètes ou inadéquates. Elle manque de personnel enseignant et administratif.

    Elle a, en outre, des besoins qui sont propres à sa situation minoritaire pour recruter les ayants droit et promouvoir l'école auprès d'eux, pour franciser les jeunes avant et même pendant leur inscription scolaire et pour accueillir et accompagner les parents exogames.

    Enfin, pour accroître ses chances de réussite, l'école doit pouvoir compter sur des services à la petite enfance et des services de garde qui préparent les enfants à une scolarité en français.

¿  +-(0910)  

    Force est donc de constater que nous, les conseils scolaires, les gouvernements provinciaux et territoriaux et le gouvernement fédéral n'assumons pas pleinement les obligations relativement à la minorité francophone dictées par la partie VII de la Loi sur les langues officielles, la Charte et le principe constitutionnel de protection des minorités. Il y a donc urgence de donner un coup de barre pour changer cette situation.

    Comment y parvenir? Comment mettre en oeuvre dans leur plénitude les droits scolaires annoncés par l'article 23? Notre fédération a adopté la stratégie proposée par son comité directeur, qui est présidé par M. Gallant. Cette stratégie d'action se fonde à la fois sur l'analyse des besoins et sur les contextes juridiques et politiques actuels.

    D'abord, nous jugeons que les droits et les obligations en matière scolaire pour les minorités de langue officielle sont maintenant clairement établies par la jurisprudence. Il est préférable de procéder diligemment à leur mise en oeuvre plutôt que de continuer à combattre devant les tribunaux. Sur le plan politique, le regain d'intérêt tant attendu pour la dualité linguistique de la part du gouvernement fédéral augure d'un vent nouveau pour la gestion scolaire francophone en milieu minoritaire.

    Le Plan d'action pour les langues officielles de 2003 promet de nouveaux investissements et vise haut en matière de résultats: faire passer le taux de participation de l'effectif scolaire cible francophone à 80 p. 100 d'ici 2013. Il nous apparaît que seule une stratégie concertée des intervenants communautaires, des conseils scolaires, des gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral sera en mesure de relever ce défi.

    À notre sens, les provinces et territoires sont aujourd'hui ouverts à envisager une telle stratégie. Un représentant du Conseil des ministres de l'Éducation a d'ailleurs pris part aux travaux de notre comité directeur, et nous rencontrerons bientôt le Bureau de la Conférence ministérielle sur les affaires francophones. Nous avons aussi des rencontres prévues avec les directeurs généraux de l'éducation des provinces et territoires et avec les hauts fonctionnaires fédéraux.

    Du côté communautaire, notre fédération a rallié les principaux organismes entretenant un mandant à l'égard de l'éducation. Il y a l'Association canadienne d'éducation de langue française; la Commission nationale des parents francophones; la Fédération culturelle canadienne-française; la Fédération canadienne des enseignantes et enseignants; la Fédération canadienne pour l'alphabétisation en français; le Réseau des cégeps et collèges francophones du Canada; l'Association des universités de la francophonie canadienne; l'Alliance canadienne des responsables, des enseignants et enseignantes en français langue maternelle; et la Fédération de la jeunesse canadienne-française.

    C'est désormais conjointement que nous préparons le plan d'action pour réaliser la promesse de l'article 23. De plus, nous comptons inviter les représentants des gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral à prendre part à l'exercice, puisqu'il en va aussi de leurs responsabilités. À cette fin, nous tiendrons, en juin prochain, un sommet des intervenants en éducation pour la mise en oeuvre de l'article 23 en milieu francophone minoritaire.

    Comme votre comité l'a si bien noté, l'éducation doit être vue comme un continuum s'étendant de la petite enfance jusqu'au palier postsecondaire. Bien que notre intérêt principal soit le système scolaire, nous ne pouvons écarter les services à la petite enfance, qui prépare les enfants, le contexte de l'alphabétisme familial, qui conditionne les élèves, et la perspective de poursuivre des études aux niveaux collégial et universitaire.

    Notre stratégie comporte ainsi six axes d'intervention pour redynamiser le système d'éducation: l'identification, le recrutement et la rétention de la clientèle scolaire admissible, les infrastructures scolaires, le recrutement, la formation et la rétention d'un personnel qualifié en français, les services à la petite enfance, la programmation scolaire et les ressources pédagogiques, et l'encadrement linguistique et culturel.

    Compte tenu du nombre d'intervenants engagés dans cette stratégie, nous préconisons la mise en place de mécanismes de coordination permanents auxquels participeront les représentants des conseils scolaires, des gouvernements et des communautés.

    Nous demandons aussi qu'une réévaluation budgétaire globale soit entreprise afin de tenir compte des investissements requis par cette stratégie. Certes, le programme des langues officielles en enseignement reste un outil privilégié pour soutenir cette stratégie, mais il ne devrait pas être le seul.

¿  +-(0915)  

    Le gouvernement fédéral, auquel vous faites vos recommandations, devra aussi accroître sa contribution à plusieurs titres: le développement des ressources humaines dans le secteur de l'éducation; la mise en place des infrastructures scolaires; l'appui au leadership exercé par les conseils scolaires et les organismes communautaires; l'appui à la petite enfance; l'appui au réseautage technologique des écoles et communautés; l'appui au volet socioculturel de l'instruction des jeunes francophones.

    Il est utile de rappeler que la jurisprudence a clairement reconnu aux conseils scolaires l'autorité de définir les besoins propres de leur communauté et de dépenser les fonds prévus pour l'instruction de la minorité. En outre, le plus haut tribunal a jugé que les ressources accordées aux écoles de la minorité linguistique doivent être au moins équivalentes à celles accordées à la majorité et qu'elles doivent parfois être supérieures, compte tenu des besoins qui leur sont particuliers.

    Enfin, mentionnons que le plan d'action devra prévoir un cadre d'imputabilité afin d'en assurer la transparence et de faciliter l'atteinte de ses objectifs.

    En terminant, nous souhaitons rappeler qu'il y a urgence à l'égard de l'éducation de la minorité francophone. Les ayants droit sont en nombre décroissant parce que bon nombre de leurs enfants ne sont pas actuellement inscrits en français. Dès lors, ces derniers ne pourront plus, à leur tour, passer leur droit à leurs enfants. L'avenir de la dualité linguistique canadienne est en jeu si nous ne pouvons maintenir la vitalité de la minorité francophone.

    Nos conseils scolaires en ont pris conscience. Appuyés des organismes de nos communautés, ils ont entrepris de changer la donne par une sérieuse prise en charge de leur avenir. Il reste à convaincre le gouvernement fédéral de l'importance de cette stratégie et de son urgence. Nous espérons vivement pouvoir compter sur l'appui de votre comité à cette fin.

    Merci.

+-

    Le président: Merci beaucoup, madame Chevalier.

    Nous allons passer à une période d'échanges jusqu'à 10h30 environ. Nous allons commencer avec M. Poilievre.

+-

    M. Pierre Poilievre (Nepean—Carleton, PCC): D'abord, je dois vous remercier pour votre travail et votre témoignage. Merci d'être ici.

    J'ai lu qu'il y avait une augmentation de l'intérêt des parents partout au pays pour le système d'éducation en français et que les parents envoient leurs enfants en plus grand nombre à des écoles francophones et des écoles d'immersion.

    Est-ce vrai? Est-ce que cela augmente la pression sur le système?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Les systèmes scolaires travaillent toujours de pair avec les parents: les parents sont les clients des systèmes scolaires. Alors, chaque conseil scolaire doit être à l'écoute de sa clientèle pour pouvoir offrir les services qui sont le plus profitables à sa clientèle.

    Je ne sais pas si vous êtes conscient que cela fait plus de 10 ans, entre autres en Ontario, que nous avons intégré les maternelles, les enfants de 4 et 5 ans, dans les systèmes scolaires, justement pour favoriser toute la question de l'acquisition de la langue maternelle dès un bas âge afin que, lorsqu'ils commencent la première année, les enfants soient davantage prêts à apprendre.

    Il faut comprendre aussi le contexte minoritaire dans lequel les francophones vivent de plus en plus. Je ne peux pas parler pour les écoles d'immersion. Nous ne touchons absolument pas aux écoles d'immersion. Nous ne touchons que les écoles francophones.

    Est-ce que cela met plus de pression? Je vous dirais que c'est vraiment une synergie, non seulement entre les parents, mais aussi entre des organismes communautaires et des systèmes scolaires, afin de vraiment aboutir à un système d'éducation, dans le but d'assurer l'épanouissement de la francophonie.

¿  +-(0920)  

+-

    M. Paul Charbonneau (directeur général, Fédération nationale des conseils scolaires francophones): S'il y a une pression, c'est que dans les faits, on retrouve présentement la moitié des gens qui ont droit à l'école française dans nos écoles. L'autre moitié, environ 150 000, aimeraient bien y être, dans plusieurs cas, mais ils ont un problème d'accès. On se rend compte, lorsqu'on construit une école française, qu'elle se remplit rapidement et qu'elle déborde rapidement. Si on prend l'exemple de Halifax, le premier centre scolaire et communautaire a été bâti, et cinq ou six ans plus tard, on avait besoin de deux fois plus d'espace.

    La pression provient du fait que beaucoup de jeunes qui ont un droit constitutionnel à l'école française n'ont pas nécessairement la facilité linguistique pour être inscrit à la maternelle. Alors, cela demande des classes de francisation, de préparation à l'école française. Or, non seulement on manque d'espace, mais on manque de budget. Il y a beaucoup de pourparlers pour un programme de petite enfance où on préparerait les jeunes de 2 et 3 ans à fréquenter nos écoles. Mais présentement, faute de ressources, de moyens et de structures d'accueil, on a des conseils scolaires qui refusent des enfants qui, en fait, pourraient contester ce refus devant les tribunaux.

[Traduction]

+-

    M. Pierre Poilievre: Il me semble qu'un d'entre vous a dit que les jeunes enfants absorbent les langues un peu comme une éponge. C'est justement pour ça que j'estime que votre travail est particulièrement important. Même si vous n'êtes pas responsables des programmes d'immersion, j'aimerais quand même vous en parler car c'est quelque chose qui m'intéresse et je suppose que, par la force des choses, ils ne vous sont pas étrangers.

    Êtes-vous en mesure de nous dire comment on pourrait encourager les parents à inscrire leurs enfants aux programmes d'immersion? J'estime que c'est de cette manière qu'on pourra vraiment promouvoir la dualité linguistique. Si on veut vraiment qu'un plus grand nombre de personnes à Red Deer, en Alberta, à Moose Jaw en Saskatchewan, ou encore à Saint John, au Nouveau-Brunswick, parlent français, c'est-à-dire parlent les deux langues à long terme, il faut que les jeunes s'y mettent très tôt. En effet, il est très difficile d'apprendre une deuxième langue quand on est en âge d'entamer une carrière.

    Comment peut-on, au Canada, encourager les parents à inscrire leurs enfants aux programmes d'immersion?

[Français]

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Je crois qu'il est très important que vous puissiez comprendre le concept des écoles d'immersion. Une école d'immersion n'est pas une école pour un francophone. Une école d'immersion est une école où on enseigne une deuxième langue, le français, aux anglophones. Donc, l'approche est très différente.

    Les écoles francophones ont un double mandat, la langue et la culture. Or, la culture vient des tripes, des antécédents de chacun, de la façon dont on a été élevé, de nos ancêtres, de l'histoire du Canada. Alors, c'est une partie qui ne se traduit pas mais qui se vit, tout simplement. C'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui en train de vous parler des écoles françaises. Nous sommes certainement favorables aux écoles d'immersion pour les anglophones, afin qu'ils puissent avoir une plus grande facilité à apprendre une deuxième langue, le français.

+-

    M. Paul Charbonneau: En fait, vous avez dit plus tôt que pour affirmer la dualité linguistique au Canada, il fallait que les anglophones apprennent le français. Je suis tout à fait d'accord. Cependant, il faut d'abord et avant tout que les francophones le conservent, à l'extérieur du Québec. Selon moi, un gouvernement qui affirme clairement ses positions sur la dualité linguistique valorise par le fait même l'apprentissage, au sein de la majorité, de la langue française.

    Par contre, il sera difficile de convaincre un jeune en Alberta d'aller dans une classe d'immersion si son environnement est composé de francophones assimilés qui ne parlent pas le français. Donc, à la base, il faut s'assurer qu'il y a encore des Canadiens français. Par la suite, faire la promotion de la dualité va entraîner aussi--on le constate déjà--une augmentation des inscriptions en immersion.

    Pour le reste, au niveau langagier, c'est clair, peu importe qu'il s'agisse de la langue première ou la langue seconde, plus jeune on l'apprend, mieux c'est.

¿  +-(0925)  

[Traduction]

+-

    M. Pierre Poilievre: Je ne voudrais pas que vous pensiez qu'en posant une question sur les écoles d'immersion, je minimisais l'importance des écoles francophones. C'est simplement une autre question qui m'intéresse.

    Pour revenir aux écoles francophones, dans quelle mesure les parents francophones en situation minoritaire désirent-ils transmettre leurs traditions culturelles par le biais du système scolaire francophone?

[Français]

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, ce sont les parents qui sont les clients des systèmes scolaires. Alors, les conseils scolaires ont la responsabilité de répondre aux besoins et aux attentes des parents. Le lien est donc très, très étroit.

+-

    M. Paul Charbonneau: Dans la plupart de nos conseils, ce sont les parents qui élisent les conseillers scolaires. Donc, ils sont passablement impliqués. L'intérêt est évident dans toutes les familles homogènes. On récupère à peu près 90 p. 100 des familles homogènes francophones. Pour les autres, la difficulté n'est pas le manque d'intérêt, mais comme il n'y a pas d'écoles à proximité, comme il n'y a pas de soutien à la famille lorsque la famille est bilingue, cela complique un peu les choses.

    Par contre, il y a dans cette clientèle de plus en plus de gens qui sont conscients que la meilleure façon d'être bilingue, c'est de fréquenter une école française. Auparavant, il y avait beaucoup de couples exogames qui s'inscrivaient dans des classes d'immersion. De plus en plus les gens se rendent compte que les plus grands bilingues au pays sont les francophones en milieu minoritaire. Déjà là, cela nous permet une carte de promotion que personne d'autre ne peut avoir.

+-

    Le président: Merci, monsieur Poilievre.

    Nous poursuivons avec M. André.

+-

    M. Guy André (Berthier—Maskinongé, BQ): Bonjour et bienvenue au comité. Je suis très heureux de vous rencontrer.

    Dans un premier temps, je voudrais m'adresser à vous concernant les services à la petite enfance. Vous dites que les minorités francophones font face à une assimilation importante dans certaines provinces. La valorisation du français, en relation avec la politique fédérale sur les langues officielles et la politique au niveau de la gestion scolaire, serait finalement un peu discutable parce que vous avez des problèmes au niveau des ressources financières, matérielles, etc.

    Vous n'avez pas tout ce qu'il vous faut pour être en mesure d'exercer votre leadership au niveau de la francophonie au Canada. Vous n'avez pas la tâche facile. Je vous félicite pour tout le travail que vous faites et pour toute la volonté que vous déployez pour offrir les services à vos enfants et à vos familles francophones.

    On s'entend pour dire que l'apprentissage de la langue est crucial entre l'âge de deux à cinq ans. Dans le même ordre d'idées, près de 50 p. 100 des enfants sont assimilés avant l'âge de cinq ans et ne se rendent pas à l'école de langue française. Il y a donc un taux d'assimilation assez important.

    Je crois savoir que vous proposez le développement d'un service de garde de la petite enfance qui pourrait être hébergé au sein du réseau scolaire francophone. Je crois qu'un réseau de la petite enfance en français offrirait aux parents et aux enfants une multitude de services en éducation, en santé et en services sociaux adaptés à vos besoins. En réalité, cela pourrait être une excellente initiative. C'est un projet en développement. J'aimerais donc vous entendre à cet égard.

    Vous avez parlé des services à la petite enfance. On parlait de réseaux de services intégrés au niveau de la gestion scolaire. Est-ce que vous avez des avancées à ce sujet? Est-ce qu'il y a des choses qui se développent présentement?

+-

    M. Paul Charbonneau: En fait, le groupe porte-parole de cette initiative au niveau de la francophonie, c'est la Commission nationale des parents francophones. Les membres de la commission en font la promotion et nous les soutenons dans le cadre de notre stratégie. Notre stratégie intègre les bonnes initiatives de tout le monde. Ils font la promotion des centres de la petite enfance. C'est un service préscolaire pour des enfants âgés de 0 à 3 ans, mais encadré pédagogiquement et socialement, car il peut y avoir des interventions auprès des familles.

    D'ailleurs, nous étions au comité du Sénat hier, et la CNPF y était. Je sais qu'ils sont en pourparlers avec le ministère de M. Dryden. Cependant, il n'y avait pas de nouvelles à propos de ce qui avait été discuté en fin de semaine, à savoir notamment si on avait parlé des minorités francophones au cours de cette discussion.

    À notre avis, il faut avoir ce genre d'infrastructure. Il faut l'avoir le plus près possible de l'école, idéalement dans l'école, sans aucun doute géré par des parents. Il faut même créer rapidement l'habitude chez les parents et les enfants de venir dans l'institution publique qu'est l'école de langue française, même si on ne veut pas que les enfants âgés de 0 à 3 ans fassent partie du système scolaire et que ce soit transféré aux ministères de l'éducation. Si on n'a pas cela, ça ne fonctionnera pas.

¿  +-(0930)  

+-

    M. Guy André: C'est indispensable. Si vous inscrivez vos enfants à une garderie anglophone et qu'ensuite vous les envoyez dans une école primaire francophone, en maternelle ou en première année, il y a un problème important.

+-

    M. Paul Charbonneau: C'est un travail inouï. J'ai quatre enfants issus d'un mariage mixte: deux « newfies » et deux « Buffalo ». Ce qu'on a fait est incroyable pour que nos enfants parlent français, d'autant plus que ma conjointe de l'époque était anglophone. J'étais payé pour être francophone, d'une certaine façon, car j'ai toujours été dans ces réseaux, à quelques années près.

    Pour que les jeunes gardent leur langue, pour qu'ils puissent la pratiquer, nous avions même accepté d'avoir un chien à condition qu'ils lui parlent en français. Je m'étais abstenu d'acheter un téléviseur neuf, car sur le vieil appareil, en enlevant le bouton, les enfants n'avaient d'autre choix que d'écouter toujours les dessins animés en français.

    Je me suis rendu compte que j'étais un des seuls parents d'un mariages mixtes dont les jeunes fréquentaient l'école de langue française. Aujourd'hui, on ne voit nos enfants qu'une heure et demie à deux heures par jour à cause du travail et des transports. C'est donc indispensable.

    Présentement, il y a des initiatives communautaires. Cependant, il faudrait que ce soit structuré, parce que si les enfants âgés de 0 à 3 ans n'ont pas la construction identitaire nécessaire, nous aurons de la difficulté par la suite à les récupérer à l'âge de quatre ou cinq ans.

+-

    M. Guy André: Est-ce que vous pensez que l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés s'applique?

+-

    M. Paul Charbonneau: Je pense que l'article 23 de même que les jugements sont relativement clairs à ce sujet. La jurisprudence impose une obligation de résultat. Nous ne sommes pas forcés d'avoir les mêmes écoles que les anglophones, mais nos résultats doivent être aussi bons que les leurs.

    C'est au début, lorsque nous avons établi les écoles et les conseils scolaires, que nous avons commis une erreur. Je faisais partie du groupe, à l'époque. En fait, nous ne connaissions pas beaucoup le domaine. Ce que nous voulions, c'était des écoles comme celles que les anglophones avaient dans les quartiers, mais en français. Nous voulions un conseil scolaire comme celui qui existait déjà, mais en français.

    Nous avons donc, à peu de choses près, reproduit le modèle existant. Nos écoles sont en français et on y dispense un cours d'anglais langue seconde. En outre, notre conseil scolaire est soumis exactement aux mêmes lois et règlements, à quelques exceptions près. Or, à l'usage, nous nous rendons compte que ce n'était peut-être pas ce dont nous avions besoin. C'est pourquoi nous avons une stratégie.

    Nos écoles fonctionnent relativement bien. On peut affirmer sans réserve que les écoles où il y a une clientèle homogène fonctionnent bien, mais pour ce qui est des autres, les choses vont moins bien. Nous aurions peut-être dû penser les programmes, les curriculums et l'organisation scolaire différemment. Ayant une obligation de résultat, nous devrions pouvoir affirmer être en mesure d'offrir la maternelle pour les 4 et 5 ans, partout dans nos écoles. On peut certainement faire valoir la nécessité de créer une école différente.

+-

    M. Guy André: Est-ce qu'il y a une ouverture en ce sens? Vous avez rencontré le ministre Dryden. Est-ce qu'il s'est montré ouvert à cette proposition?

+-

    M. Paul Charbonneau: Nous ne l'avons pas rencontré: c'est le CPF qui l'a fait. On nous dit néanmoins qu'il y a une ouverture.

+-

    M. Guy André: Je pense que c'est indispensable.

+-

    Le président: Merci, monsieur André.

    On continue avec M. Godin.

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, monsieur le président.

    Je voudrais vous souhaiter la bienvenue.

    Vous disiez plus tôt que vous ne vouliez pas avoir les mêmes écoles que les anglophones, mais que vous vouliez obtenir les mêmes résultats. Vous disiez aussi que comparativement à ces écoles, vous manquiez d'argent.

    Pourriez-vous nous donner plus de détails à ce sujet?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Il en coûte plus cher d'instruire en français: cela a été prouvé. Par exemple, nos manuels coûtent plus cher et nos ressources sont plus dispersées. Comme on vient de le mentionner, nous devons offrir des services aux 4 et 5 ans: nous nous rendons compte à quel point l'intégration des enfants est importante à cet âge. Il est certain qu'avec tous les changements survenus et toutes les réductions budgétaires imposées au sein des différents gouvernements, nous avons dû envisager de faire les choses autrement. Mais il arrive un temps où il n'est plus possible de fonctionner. Nous sommes maintenant à la limite.

    Je sais que les systèmes d'éducation ont fait l'objet de réductions assez considérables. En Ontario, la création du dernier conseil scolaire remonte à 10 ans. Il y a eu une importante restructuration, le but étant, bien sûr, de faire des économies. Maintenant, nous en subissons les conséquences. Les francophones ont été très pénalisés par tout ce remaniement.

¿  +-(0935)  

+-

    M. Yvon Godin: Avez-vous l'impression que les 700 millions de dollars du plan Dion sont en train de changer certaines choses? Est-ce que l'argent va à la bonne place, ou devez-vous encore vous battre, malgré ces fonds que vous recevez? Est-ce que les provinces ont vraiment compris que ces fonds devaient être utilisés pour améliorer la situation des écoles françaises ou, comme vous le disiez plus tôt, celle des jeunes? Je pose beaucoup de questions à la fois, mais nous n'avons pas beaucoup de temps. Je veux seulement vous donner une idée de ce que je veux savoir.

    À l'heure actuelle, on parle d'un système national de garderies, comme celui du Québec. Est-ce qu'il va y avoir de la place pour les francophones? Comme vous le disiez, quand les enfants fréquentent d'abord des garderies anglophones, à l'âge de cinq ans, il est déjà trop tard. Quelles sont vos inquiétudes? Est-ce que les choses vont dans la bonne direction et, le cas échéant, progressent-elles assez rapidement?

+-

    M. Paul Charbonneau: En ce qui concerne les garderies, je ne sais pas comment la mécanique va se développer. Pour ce qui est de la question des relations fédérales-provinciales, je vais simplement vous donner l'exemple des langues officielles dans l'enseignement. Je pense que cela va bien illustrer nos préoccupations.

    En théorie, le gouvernement fédéral serait censé avoir deux façons de contribuer au financement de nos écoles. Il y a le protocole sur les langues officielles en enseignement, un accord multilatéral où toutes les provinces doivent être d'accord sur un libellé, dont découlent des ententes bilatérales. Cela existe depuis les années 1970. En parallèle, il y a ce qu'on a appelé le plan Dion, qui était censé établir des ententes bilatérales avec les provinces qui le voulaient.

    Pour notre part, lorsque le plan Dion a été annoncé, nous avons applaudi. En effet, il y a dans ce plan 209 millions de dollars pour l'éducation en français langue première. Ce n'était pas tellement d'argent neuf, car il y avait eu 179 millions de dollars au cours des cinq années précédentes. Cela faisait 30 millions de dollars de plus et, au moins, cela donnait un caractère permanent à ce budget. Nous avons surtout applaudi le fait que le plan Dion voulait avoir un mécanisme de reddition de comptes et une transparence que l'on ne trouve pas dans le protocole négocié avec le Conseil des ministres de l'Éducation.

    Je pense que les montants versés par le gouvernement fédéral ne sont pas si grands que cela. Il s'agit de 90 millions de dollars par année sur un budget de 1,5 milliard de dollars pour la trentaine de conseils scolaires que nous représentons. Grosso modo, le fédéral finance entre 5 p. 100 et 6 p. 100 du budget au nom des coûts supplémentaires en éducation.

    Cependant, dans le programme historique, certaines choses nous ont toujours embêtés. Il y a eu certains résultats positifs. Lorsqu'on a mis sur pied des conseils scolaires, le fédéral a aidé à les bâtir pendant cinq ans et même dix ans. On peut voir des résultats concrets dans les projets de centres scolaires et communautaires. C'est clair que, s'il y a un volet communautaire, il y a une contribution fédérale. Par contre, il y a tellement de cas où nous ne savons pas ce qui est fait avec l'argent parce que nous ne faisons pas partie du processus que nous ne pouvons pas vraiment répondre. Nous avons toujours déploré que l'entente avec les provinces n'ait pas changé depuis qu'on a des conseils scolaires. Pourtant, les conseils scolaires auraient dû faire une différence.

    J'ouvre une parenthèse. Je cite les cours. Ce n'est pas parce qu'on veut y aller, mais il y a assez de jurisprudence pour éclairer la question. Les cours ont dit que les conseils scolaires, ou une autorité ou une structure homogène francophone, sont les seuls habilités à se prononcer sur toute question de langue et de culture reliée à l'éducation. Or, lorsqu'il y a une négociation entre une province et le gouvernement fédéral sur l'éducation, nous ne connaissons même pas le plan d'action que la province présente. Souvent, nous le connaîtrons six ou douze mois après que l'argent aura été dépensé. Pourtant, nos ministères de l'Éducation ne sont pas des structures homogènes. Ils ont une division bilingue à l'intérieur d'un ministère anglophone. Donc, le fédéral devrait imposer aux provinces l'obligation de nous parler avant de présenter leur plan au gouvernement fédéral. Cependant, nous n'en sommes pas là, bien que nous soyons un conseil scolaire reconnu constitutionnellement.

+-

    M. Yvon Godin: Feriez-vous la recommandation que vous devriez participer à ces négociations?

+-

    M. Paul Charbonneau: Oui.

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Absolument.

+-

    M. Yvon Godin: Cela me fait penser aux infrastructures des municipalités: c'est un tiers, un tiers, un tiers, et les municipalités ne font pas partie de la négociation. Cela peut être pris dans le même sens. C'est vous qui devriez en profiter, mais vous ne faites pas partie des négociations et vous ne savez pas où va l'argent.

+-

    M. Paul Charbonneau: De plus, comme Fédération nationale des conseils scolaires francophones, nous sommes le seul palier de gouvernement qui ait une raison d'être constitutionnelle, avec le fédéral et les provinces. Ils pourraient fermer tous les conseils scolaires de la majorité partout au pays, mais ils ne pourraient pas fermer les nôtres. D'ailleurs, dans votre province, au Nouveau-Brunswick, ils ont essayé à un moment donné de fermer tous les conseils scolaires. S'ils les ont recréés, c'est parce qu'ils ne pouvaient pas fermer ceux des Acadiens, à cause de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

    Donc, nous devrions être là. Cela aiderait le gouvernement fédéral à vérifier où va son argent. Pour reprendre l'exemple du Nouveau-Brunswick, comment se fait-il que le per capita pour un étudiant en milieu rural soit le même pour un anglophone que pour un Acadien? Le per capita au Nouveau-Brunswick, en milieu urbain, est le même pour un anglophone que pour un Acadien. Que font-ils avec cet argent? Nous avons un coût supplémentaire. D'après moi, cet argent va au fonds consolidé. Nous ne pouvons même pas vous dire où va cet argent.

¿  +-(0940)  

+-

    Le président: Monsieur Godin, votre temps est écoulé. On a noté la recommandation. Merci beaucoup.

    On poursuit avec Mme Boivin.

+-

    Mme Françoise Boivin (Gatineau, Lib.): Si on pouvait appliquer le même principe aux niveaux municipal, provincial et fédéral, ce serait merveilleux. Je suis d'accord avec M. Godin à ce sujet.

    Ce qui me frappe toujours en ce qui concerne les minorités linguistiques, c'est qu'il y a beaucoup d'organismes qui travaillent très fort, comme vous d'ailleurs, pour certaines missions. Entre autres, je regarde vos statuts et règlements et je vois qu'il est mentionné que vous vous êtes donné comme mission de « revendiquer les droits des francophones et des Acadiens en matière d’éducation auprèsdu gouvernement fédéral. » Je me rends compte que d'autres organisations ont un peu la même mission, entre autres l'Alliance canadienne des responsables, des enseignantes et des enseignants en français langue maternelle, ou l'ACREF, l'Association canadienne d'éducation de langue française, ou l'ACELF, et la Commission nationale des parentsfrancophones, ou la CNPF. Je suis intéressée à savoir s'il y a une communication entre tous ces groupes. Parfois, je l'avoue, n'étant pas dans ce milieu au quotidien, j'en perds mon latin quand je regarde tous ces acronymes. Y a-t-il de la collaboration?

+-

    M. Paul Charbonneau: Il y en a maintenant.

+-

    Mme Françoise Boivin: Il y a donc de la collaboration maintenant.

+-

    M. Paul Charbonneau: La raison est qu'il est temps de mettre sur pied notre stratégie. On veut convaincre le gouvernement fédéral de s'y associer, parce qu'il a une responsabilité, même en éducation. C'est le plan de tous les intervenants en éducation. Ils ont tous leur créneau et ils gravitent tous, pour la plupart, autour des conseils scolaires. Nous présidons une table ronde et, lorsque nous présenterons un plan d'action au mois de juin, ce sera le plan de tout le monde. Ce sera la première fois que les francophones et les Acadiens seront aussi unis sur le plan national depuis que nous travaillons sur ce projet.

¿  +-(0945)  

+-

    Mme Françoise Boivin: Maintenant, en ce qui concerne votre stratégie pour compléter le système d'éducation en français langue première, vous avez établi un plan d'action autour de cet axe d'intervention. Le point qui m'intéresse est l'Axe 3 de votre rapport, à la page 11. Vous y parlez de: « Recrutement, formation et rétention d'un personnel qualifié en français. » En matière de langues officielles, on parle souvent du problème de l'assimilation des francophones. Au niveau de votre perception et de votre vécu, si vous avez un problème de rétention de personnel, comment est-il possible d'y remédier? Quel est le problème? Où vont ces personnes? Pourquoi avez-vous de la difficulté à recruter des enseignants en français?

+-

    M. Paul Charbonneau: Le premier constat est que nous n'avons pas assez de machines à faire des enseignants. Nous avons quelques facultés. Ils sont très en demande à la fois chez nous, pour le core Frenchet pour l'immersion. Traditionnellement, nous allions recruter au Québec, mais cela devient difficile ici aussi. Il y a donc de moins en moins de possibilités de ce côté. Non seulement il y a un problème de production, pour parler le langage des enseignants, mais il y a aussi un problème de préparation de ces personnes.

    J'ai une licence en éducation. Je peux vous dire que j'étais à peine formé pour entrer dans une salle de classe. Je l'étais encore moins pour entrer dans une école en milieu minoritaire. Quand on recrute quelqu'un à Montréal et qu'on l'amène dans la région de Rivière de la Paix, ce n'est pas évident du jour au lendemain.

    Je me souviens d'avoir recruté des enseignants qui partaient de Montréal pour Grande Terre à Terre-Neuve-et-Labrador. À Grande Terre, il y a un dépanneur, qui évidemment n'est pas ouvert 24 heures sur 24, et un petit bar avec une vue merveilleuse sur l'Île Rouge. Cela se résume à 300 ou 400 personnes au bout du monde. Si on ne prépare pas ces personnes, si on ne leur explique pas dans quelle situation culturelle et géographique ils vont se retrouver, si on ne les prépare pas à cette pédagogie, ils vont rapidement se lasser.

    Nous avons présenté au gouvernement fédéral une stratégie nationale. La compétition entre nous est un autre problème. Il est évident qu'un enseignant gagne davantage en Alberta qu'au Nouveau-Brunswick. Pour éviter cette compétition, nous nous sommes dit qu'il fallait développer un plan national, recruter pour le bénéfice de tout le monde et développer des programmes de rétention. Nous pourrions le faire aussi pour les personnes qui travaillent en immersion.

    Il y a un problème à l'échelon du gouvernement fédéral. Plusieurs fonctionnaires ne veulent pas s'y investir, car ils considèrent que l'éducation dans la langue de la minorité relève de la juridiction provinciale. Nous disons--et les avis juridiques le démontrent--que le gouvernement fédéral a une responsabilité en la matière, au nom du développement des minorités. Les cinq principes non écrits ont été clarifiés dans le renvoi sur la sécession du Québec où il est bien dit que le gouvernement fédéral a une responsabilité envers l'éducation. Cela veut dire que le gouvernement fédéral peut s'impliquer directement. Il ne peut pas changer les lois et les règlements des provinces, mais il peut s'impliquer sur le plan national. Si nous ne faisons pas cela sur le plan national...

    Nous avons des conseils scolaires de 250 élèves. À l'opposé, nous avons des conseils scolaires de 17 000 étudiants. Le pauvre gars à Terre-Neuve-et-Labrador qui essaie de recruter tout seul n'y arrive tout simplement pas. Nous faisons donc ces tentatives, mais jusqu'à présent, nous n'avons pas eu de résultats.

+-

    Mme Françoise Boivin: Est-ce qu'il me reste du temps?

+-

    Le président: Oui.

+-

    Mme Françoise Boivin: Sur le plan de votre financement, on parle de retards dans le renouvellement des ententes fédérales-provinciales-territoriales dans le domaine de l'éducation, ententes qui sont financées dans le cadre du programme des langues officielles. Quel est l'impact de chaque retard à cet effet?

+-

    M. Paul Charbonneau: Premièrement, il n'y a pas de planification à long terme. Je vais vous donner un exemple. En Saskatchewan, à Moose Jaw et à Saskatoon, ils ont besoin de deux écoles. Tant qu'à le faire, autant que ce soit des centres scolaires et communautaires. À cause de l'incertitude qui pèse sur le financement--le plan d'action du ministre Stéphane Dion sort au compte-goutte, d'une année sur l'autre, alors que le protocole est renouvelé sur une base intérimaire; j'espère que cela sera terminé cette année--, il y a des projets qui s'étalent sur un, deux ou trois ans. La plupart du temps, on a tendance à dire qu'on va attendre que ce soit signé. C'est vrai que tout est paralysé.

+-

    Le président: Merci, madame Boivin.

    Nous passons à un deuxième tour de questions.

[Traduction]

    Monsieur Scheer, cinq minutes.

+-

    M. Andrew Scheer (Regina—Qu'Appelle, PCC): Merci.

    J'ai l'impression que les obstacles à la coordination de la mise en oeuvre de certaines de vos stratégies en collaboration avec les provinces se situent justement au niveau des provinces. J'entends par là que la détermination qui permettrait à ceux qui le veulent de faire leur scolarité dans la langue minoritaire fait parfois défaut.

    Je vous demanderais de clarifier votre proposition, dans laquelle on a l'impression que vous préconisez un système scolaire parallèle, c'est-à-dire un système scolaire national pour les enfants en situation minoritaire. Est-ce qu'on peut résumer en disant que dans toutes les provinces, il y aurait un système public et un système national fédéral distinct pour la communauté linguistique en situation minoritaire?

+-

    M. Paul Charbonneau: Pas tout à fait.

[Français]

+-

    Mme Madeleine Chevalier: En fait, chaque province a une situation qui lui est propre. Il est très important de respecter cela. Cependant, dans le cadre de cette spécificité, il est important de reconnaître le droit des francophones de recevoir leur instruction en français, et ce, en vertu de l'article 23 de la Charte des droits et libertés.

    Nous demandons simplement que cela soit reconnu et que les fonds allant de pair avec cette reconnaissance nous soient octroyés, de façon à ce que nous obtenions dans nos écoles francophones les mêmes résultats que ceux obtenus dans les écoles de la majorité.

+-

    M. Paul Charbonneau: Il est évident que nous devons développer bien des choses sur le plan national. Il s'agit de petits conseils qui, comme je le disais plus tôt, ne peuvent y arriver seuls. La solidarité de ces conseils nous permet d'avoir accès à plus de ressources. Il n'est pas question pour autant de faire appel à un ministère de l'Éducation national.

    Il va falloir développer la concertation interprovinciale, mais il sera aussi nécessaire que le gouvernement fédéral intensifie son appui, étant donné qu'on parle ici de minorités. Or, tant que le gouvernement fédéral nous considérera comme de simples créations des provinces, nous nous ferons sans cesse renvoyer à notre ministère respectif, chacun de son côté.

    Bref, les provinces auront à se concerter; le fédéral, pour sa part, peut et doit soutenir les conseils scolaires à cet égard.

+-

    Mme Madeleine Chevalier: En ce qui a trait aux conseils scolaires, il est important de préciser que les directions de l'éducation ont créé un regroupement leur permettant de se concerter, de se faciliter la tâche et de mettre un frein au problème de dédoublement. Elles peuvent ainsi mettre en commun certaines ressources, particulièrement de nature pédagogique. Cette volonté existe donc au sein de chaque direction de l'éducation, à l'échelle nationale.

[Traduction]

+-

    M. Andrew Scheer: Ce serait plutôt au gouvernement fédéral de garantir du financement pour assurer une qualité minimale et ensuite de travailler en collaboration avec les premiers ministres provinciaux ou les ministres de l'Éducation pour conclure ce qui ressemblerait à des accords bilatéraux avec chaque province, ou a-t-on besoin de...? La stratégie nationale dont vous avez parlé, serait-ce une initiative fédérale qui serait appliquée à toutes les provinces, un seul modèle pour toutes les provinces—ou pensiez-vous plutôt à des accords distincts avec chacune des provinces, en fonction des besoins?

¿  +-(0950)  

[Français]

+-

    M. Paul Charbonneau: En fait, on parle ici de deux choses. Le financement bilatéral va devoir s'intensifier. On a toujours dit que le gouvernement fédéral investissait beaucoup. Nous pensons pour notre part que ces investissements sont passablement importants. Tout compte fait, 90 millions de dollars sur 1,5 milliard de dollars, ce n'est quand même pas énorme quand il s'agit d'assumer le principe de la dualité linguistique.

    Notre stratégie consiste à établir un vrai partenariat avec les provinces et le gouvernement fédéral. Nous voulons ainsi être en mesure d'appliquer nos recommandations. Évidemment, cela prendra une forme différente selon la situation de chacune des provinces. Ce plan ne sera pas imposé aux provinces, mais il donnera lieu à des ententes et à des dialogues entre les ministères de l'Éducation, nos conseils scolaires et, nous l'espérons, le gouvernement fédéral.

    D'abord et avant tout, nous voulons que la nécessité d'appliquer l'article 23 soit reconnue. Il faut que tout le monde se joigne à nous pour mettre la main à la pâte, y compris le gouvernement fédéral.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, monsieur Scheer.

    Monsieur D'Amours, cinq minutes.

[Français]

+-

    M. Jean-Claude D'Amours (Madawaska—Restigouche, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Je tiens à vous remercier d'être ici ce matin. J'aimerais d'abord aborder le Résumé du Rapport du comité directeur, plus précisément les Axes 4 et 6. Le premier porte sur les services à la petite enfance, et le deuxième sur l'encadrement linguistique et culturel.

    Tout le monde s'entend pour dire que sur le plan linguistique, le développement des enfants en bas âge permet à ces derniers de mieux comprendre et progresser lorsqu'ils débutent l'école, sans compter le fait qu'ils arrivent aussi à avancer plus rapidement, de façon globale.

    L'Axe 6 est intéressant; on y parle de l'aspect culturel dans le contexte des écoles. Or, il y a là deux réalités: l'école et tout ce qui l'entoure, entre autres les activités parascolaires. Les jeunes discutent souvent entre eux dans l'autre langue, ce qui occasionne chez eux un manque de pratique. Du point de vue culturel, il est important que les choses se passent aussi en français pour que ces jeunes progressent et prennent goût à cette langue. Il se passe de bonnes choses en français.

    Pourriez-vous nous donner des détails à ce sujet? À mon avis, il est logique que ces deux axes soient orientés vers le développement culturel.

+-

    M. Paul Charbonneau: D'après moi, c'est ce qui fait la différence d'une école en milieu minoritaire francophone. C'est une question de langue mais aussi, la plupart du temps, une question de partage ou de renforcement culturel, souvent dans la seule institution homogène qui existe dans la communauté. Il faut que cela se fasse à l'école dès la petite enfance, parce qu'on veut que les enfants profitent des ressources de l'école et qu'ils soient le plus prêt possible. Nous devons renforcer nos programmes d'études et nos activités culturelles. En effet, dans les milieux qui sont un peu plus éclatés, les enfants retournent chez eux et vivent dans un quartier anglophone.

    Historiquement, on a toujours associé la culture aux arts, à un spectacle de temps en temps. Comme on n'avait pas beaucoup de ressources, on avait toujours le même spectacle. On prenait la troupe la plus proche et elle faisait le tour des écoles tous les ans. Mais c'est plus que cela. La Fédération culturelle canadienne-française nous propose des mécanismes, une pédagogie d'animation socioculturelle que nous voulons retenir. En effet, il faut remettre dans un contexte un peu plus moderne les activités culturelles que nous avions avant. Je suis le premier à reconnaître que nous y sommes allés un peu fort sur la ceinture fléchée. En 2005, nous ne garderons pas un jeune dans une école secondaire francophone avec ce genre de folklore. Il faut non seulement intensifier l'activité, mais aussi l'actualiser. On a plusieurs endroits où il y a des programmes intégrés qui fonctionnent. Il y a des troupes de théâtre intégrées aux écoles à Edmonton. Le centre d'arts et de culture à Sydney, en Nouvelle-Écosse, est carrément, physiquement, dans l'école, et l'école lui reconnaît même des crédits pour atteindre sa certification du secondaire.

    C'est une remise en question. Comme les activités culturelles existaient avant les écoles, cela a toujours fonctionné en parallèle, qu'il y ait un bâtiment ou pas. Maintenant, on cherche à intégrer les deux, autant dans la petite enfance que par la suite.

¿  +-(0955)  

+-

    M. Jean-Claude D'Amours: C'est intéressant à voir. Avant que l'on commence à parler davantage du développement de la petite enfance, nos jeunes étudiants étaient garrochés--excusez l'expression--en 1ère année. C'était donc beaucoup plus difficile. On sautait une étape. Maintenant, on veut revenir à l'étape qu'il ne faut pas sauter. En plus, il y a une suite logique: ça permet d'avancer culturellement et de contribuer à l'éveil de nos jeunes. C'est très bien.

    Je n'ai pas bien saisi ce que vous mentionniez tout à l'heure à mon collègue d'Acadie--Bathurst au sujet de la portion allouée per capita. Peut-être n'avez-vous pas eu la chance de terminer. Pourriez-vous revenir là-dessus, s'il vous plaît?

+-

    M. Paul Charbonneau: Cela dépend des provinces, mais il y a des provinces où un conseil scolaire anglophone et un conseil scolaire francophone reçoivent l'argent selon la même formule de financement. Le meilleur exemple est le Nouveau-Brunswick. Je n'ai pas les chiffres en tête, mais si un conseil scolaire reçoit un montant x pour un anglophone à Moncton, le conseil scolaire acadien va recevoir le même montant pour un Acadien à Moncton. La question qu'on se pose est la suivante: où vont les subventions pour les coûts supplémentaires?

    C'est une question de per capita. Ailleurs, c'est une question de brume complète. Il y quelques années, on a entendu parler d'une étude qu'ils faisaient en Nouvelle-Écosse pour vérifier où les fonds fédéraux avaient été dépensés. On n'a jamais vu le rapport, on suppose qu'ils n'ont pas trouvé la réponse. Il y a des endroits dont on apprend, une année plus tard, qu'ils ont reçu de l'argent du ministère pour faire telle chose, mais on n'a pas eu les résultats.

    Au Manitoba, il y a deux ou trois ans, nous étions allés rencontrer le sous-ministre adjoint pour lui demander combien de publications de ressources pédagogiques avaient été faites en français. Il y avait eu plus d'argent pour faire des ressources en français langue première qu'en immersion. Je pense qu'il y avait eu une ou cinq publications en français langue première contre 45 ou 50 en immersion. À ce moment-là, nous nous sommes demandé si cela voulait dire que notre argent avait été fourni à l'immersion. Je n'en suis pas sûr à 100 p. 100, mais je pense que c'est ce qui est arrivé.

    Tant qu'on ne sait pas en quel nom les provinces demandent de l'argent, tant qu'on ne sait pas ce qu'elles en font, car le rapport arrive longtemps après la fin de l'année scolaire, on ne peut rien dire, et encore moins quand on n'a pas reçu l'argent alors qu'on s'occupe d'environ 80 p. 100 de l'éducation scolaire reliée au système.

    À l'heure actuelle, on ne peut pas vous dire ce qu'ils font avec l'argent tout le temps.

+-

    Le président: Merci, monsieur D'Amours.

    Monsieur Desrochers.

+-

    M. Odina Desrochers (Lotbinière—Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Merci, monsieur le président. Tout d'abord, bienvenue à notre Comité permanent des langues officielles.

    Depuis le début des délibérations, j'écoute les revendications que vous faites, les réponses que vous recevez de part et d'autre des gouvernements provinciaux.

    Est-ce que, selon vous, il y a une volonté politique de la part des gouvernements provinciaux pour s'attaquer à ce problème? Essaie-t-on simplement d'envoyer les responsabilités à des paliers qui n'ont pas un pouvoir décisionnel? Sentez-vous une volonté politique?

    Ici, à Ottawa, on reconnaît les deux langues officielles et on peut se présenter devant les tribunaux en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, mais sent-on qu'il y a une volonté politique de régler cette question? Je pense que certaines provinces se foutent complètement des langues officielles. Sentez-vous qu'il y a vraiment une volonté politique? Le problème passe par là.

    Dans le cadre de vos revendications, de vos demandes, sans aller dans les détails, pouvez-vous nous donner un genre de palmarès des provinces qui collaborent le plus et de celles qui se font le plus tirer l'oreille pour emboîter le pas afin de vous aider à solutionner vos problèmes?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: D'abord, lorsque nous avons mis sur pied le comité directeur pour développer la stratégie nationale, il y a de cela un an et demi ou deux ans, nous avions--et nous avons encore--un représentant de l'administration du Conseil des ministres de l'Éducation au comité. Il devrait donc tenir les membres du Conseil des ministres de l'Éducation très au courant du développement de tout le projet en fonction de la stratégie, qui est très intégrée.

+-

    M. Odina Desrochers: A-t-il un rôle d'acteur ou d'observateur?

À  +-(1000)  

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Il peut jouer le rôle qu'il veut. Il peut avoir un rôle de participant.

+-

    M. Odina Desrochers: Est-ce que cette personne qui représente les ministères de l'Éducation est là pour agir ou tout simplement pour observer?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Elle a la possibilité d'agir. Nous avons aussi des membres de notre comité qui sont de Patrimoine Canada et du Conseil privé. On est quand même allés chercher des partenaires pour s'assurer de ne pas travailler en vase clos et, en bout de ligne, se retrouver dans une situation où tout le monde nous dirait non. On est donc allés chercher des voix importantes pour s'assurer, en bout de ligne, d'avoir des oreilles réceptives.

+-

    M. Odina Desrochers: Depuis combien de temps cette structure est-elle sur pied?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Cela fait un an et demi, depuis le tout début du travail. On a commencé avec tous ces membres de comité.

+-

    M. Odina Desrochers: Si je vous demandais de me faire une rétroaction des derniers 18 mois, diriez-vous que vous sentez que ces gens agissent, ou qu'ils observent?

+-

    M. Paul Charbonneau: Il y a une volonté politique qui est...

+-

    M. Odina Desrochers: Elle est là ou elle n'y est pas.

+-

    M. Paul Charbonneau: Ce n'est pas qu'elle n'y est pas. C'est un peu notre faute. Lorsqu'on a gagné les conseils scolaires, on s'est dit, les groupes francophones, que le problème était réglé et qu'on allait passer à autre chose: la santé, l'économie, etc. On avait raison de faire autre chose, mais on a eu aussi, comme francophones, le sentiment qu'en gagnant un conseil, il fallait faire autre chose, parce que cela était consolidé. C'est nous qui n'avons pas nécessairement rappelé aux ministères de l'Éducation que la question était loin d'être réglée et que les choses ne fonctionnaient pas. On commence à le faire. Il y a une certaine volonté politique, mais il y a aussi des difficultés économiques dans plusieurs provinces.

    Par exemple, à l'Île-du-Prince-Édouard, on a annoncé l'ouverture d'une école de la maternelle à la troisième année. Après la troisième année, plus rien. Ils n'ont pas un sou. J'essaie d'inviter des fonctionnaires des ministères de l'Éducation à participer à nos rencontres. Dans les petites provinces, ils me demandent si je vais payer leur billet alors que ma subvention est de 115 000 $ pour mon budget de fonctionnement de base.

+-

    M. Odina Desrochers: Monsieur Charbonneau, cela veut dire que la volonté politique des provinces n'est pas là, si elles réagissent ainsi. Si elles étaient vraiment conscientes du problème, elles auraient les ressources et l'argent nécessaires pour vous appuyer.

+-

    M. Paul Charbonneau: Peut-être, mais on doit dire en même temps et en parallèle que les systèmes d'éducation anglophones ont quelques difficultés aussi.

    Vous demandiez quel était le palmarès. Pour me rependre un peu, je parlerai du Nouveau-Brunswick. Il faut quand même dire que dans cette province, on a un ministère de l'Éducation indépendant du ministère de l'Éducation anglophone. Ce sont des gens qui collaborent. Plus les provinces sont riches, plus elles collaborent. C'est un fait. Pour le reste, on n'a pas véhiculé ce discours d'une façon assez soutenue au cours des dix dernières années. Je pense qu'il y a de l'ouverture, mais c'est évident que la volonté politique devra se traduire, un moment donné, par du financement: nous en manquons. Présentement, 1,5 milliard de dollars proviennent des provinces pour notre système, et 90 millions de dollars proviennent du gouvernement fédéral, qui a aussi une responsabilité dans ce domaine.

+-

    Le président: Merci, monsieur Desrochers.

+-

    M. Pierre Poilievre: Monsieur le président, j'aurais juste une question à poser.

+-

    Le président: C'est au tour de M. Godin.

    Monsieur Godin, la parole est à vous.

+-

    M. Yvon Godin: J'aimerais entendre la question qu'il veut poser. Je reviendrai ensuite.

+-

    Le président: Vous voyez, monsieur Desrochers, à quel point vous nous avez manqué: tout le monde vous offre son temps de parole.

+-

    M. Odina Desrochers: Ah! j'en suis très touché.

+-

    M. Yvon Godin: Je ne perds pas mon tour, par contre.

+-

    Le président: Vous perdez le temps qui vous était alloué.

+-

    M. Odina Desrochers: Monsieur le président, poursuivons nos travaux, s'il vous plaît.

+-

    Le président: C'est bien.

    Monsieur Godin.

+-

    M. Yvon Godin: Tout à l'heure, vous parliez avec M. D'Amours d'une formule. Je crois que c'était au Nouveau-Brunswick. Il s'agissait de savoir si vous aviez ce que vous devriez avoir comparativement à ce qui est accordé aux anglophones.

+-

    M. Paul Charbonneau: Présentement, en ce qui concerne les conseils, c'est le cas.

+-

    M. Yvon Godin: Mais la formule n'est pas celle-là.

+-

    M. Paul Charbonneau: C'est la formule, et je pense que c'est la même chose en Ontario, sauf que les provinces reçoivent de l'argent pour les coûts supplémentaires.

+-

    M. Yvon Godin: C'est ce que je cherche à comprendre. Vous dites que les provinces reçoivent de l'argent.

+-

    M. Paul Charbonneau: Elles en reçoivent pour les coûts supplémentaires. Quant à nous, nous avons le même per capita que les anglophones.

+-

    M. Yvon Godin: Ils reçoivent cet argent du fédéral?

+-

    M. Paul Charbonneau: En effet.

+-

    M. Yvon Godin: Dans ce cas, nous avons le même problème que celui qui se posait en Nouvelle-Écosse, où l'argent était alloué à la Nouvelle-Écosse mais n'était pas versé aux écoles francophones.

+-

    M. Paul Charbonneau: Nous avons le sentiment que tel est le cas.

+-

    M. Yvon Godin: Vous avez ce sentiment. N'en parlez-vous pas au ministre?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Ce n'est pas une information divulguée.

+-

    M. Paul Charbonneau: Ce n'est pas connu.

+-

    M. Yvon Godin: Je pense qu'il serait intéressant de le savoir et d'en prendre note. J'aimerais qu'on fasse une recherche à ce sujet. Si le fédéral verse de l'argent pour aider les communautés francophones, que ces sommes doivent être augmentées parce que les coûts augmentent également et que ces sommes ne sont pas versées, je veux que nous en prenions note. Je veux savoir ce qui se passe.

À  +-(1005)  

+-

    M. Paul Charbonneau: Probablement que cet argent va quelque part pourvu que c'est utile. Nous savons certaines choses parce qu'elles sont visibles.

+-

    M. Yvon Godin: Les gouvernements ne sont pas parfaits.

+-

    M. Paul Charbonneau: Il y a certaines choses que nous constatons, comme un centre scolaire communautaire ou un livre d'histoire, par exemple. Cependant, il y a certaines autres choses que nous ne pouvons voir.

+-

    M. Yvon Godin: Oui, mais si vous, les experts, oeuvrez dans le milieu scolaire et qu'on ne vous consulte pas, je pense qu'il y a un problème.

+-

    Mme Madeleine Chevalier: En toute honnêteté, il faut quand même reconnaître que dans certaines provinces, les ministres ont une communication avec certains conseils scolaires. Dans certaines provinces, ce mécanisme existe. En revanche, les conseils scolaires ne connaissent jamais les montants alloués en fonction de toutes les enveloppes. Le protocole d'entente prévoit deux enveloppes.

+-

    M. Paul Charbonneau: En principe, on connaît ce qui se passe dans le cas du plan d'action. Par contre, dans ce cas-ci, comme il est aussi sur une base intérimaire, il ne se passe pas grand-chose.

+-

    M. Yvon Godin: Vous êtes certainement au courant de cette histoire survenue en 1997, lorsqu'on voulait fermer les écoles de Saint-Sauveur et de Saint-Simon, au Nouveau-Brunswick. Il y avait eu des émeutes et des bavures. Les parents s'étaient fait frapper, les enfants s'étaient fait mordre par les chiens de la GRC, etc. Je m'en souviens. Les parents se battaient pour garder leurs écoles ouvertes alors qu'elles accueillaient 135 personnes.

    Nous avons une école près de chez nous, dans une communauté anglophone, qui demeure ouverte pour cinq élèves. Ceux qui veulent aller à l'école secondaire y vont par taxi. On peut voir la différence entre deux communautés, c'est connu.

+-

    M. Paul Charbonneau: Au sujet de la consultation, je vous dirai que dans le protocole établi avec le Conseil des ministres qui s'est terminé en 2002-2003, la clause 8.3 parlait de la consultation en ces termes:

8.3 Chaque gouvernement provincial/territorial accepte également, lorsque cela est jugé nécessaire, de consulter les associations et les groupes intéressés quant aux programmes d'éducation mis en place en vertu de ce Protocole.

    On dit bien « lorsque cela est jugé nécessaire ». Or, je vous dirais que dans la majorité des provinces, quand c'est jugé nécessaire, cela ne dure qu'une demi-heure. Nous sommes parfois consultés, mais cela ne veut pas nécessairement dire que ce que nous disons sera présenté au fédéral par la province. Cependant, nous sommes le seul gouvernement homogène capable de décider des besoins des francophones en matière d'éducation.

    Nous sommes d'avis que cette clause doit changer. On doit nécessairement nous impliquer, autrement on sera obligé de créer des ministères de l'éducation francophone partout au pays. Ce n'est pas ce que nous voulons. Si nous faisions partie du système, nous pourrions leur dire qu'ils font une bonne affaire, parce qu'il est vrai que nous avons tel besoin. Par la suite, nous pourrions dire au fédéral, à la fin de l'année, que nous avons dépensé pour telle chose et que tels sont les résultats.

+-

    M. Yvon Godin: Le conseil scolaire qui avait été créé au Nouveau-Brunswick--ou qui a été détruit, devais-je plutôt dire--ne procédait même plus à des élections. C'étaient des comités consultatifs, etc.

    Comment voyez-vous les changements survenus depuis? Est-ce mieux, ou est-ce à peu près la même chose?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: C'est absolument très favorable.

+-

    M. Paul Charbonneau: Cinq de nos conseils scolaires fonctionnent merveilleusement bien.

+-

    Le président: Merci, monsieur Godin.

    Monsieur Poilievre.

[Traduction]

+-

    M. Pierre Poilievre: Selon le plan d'action pour les langues officielles de 2003, le gouvernement doit faire passer la proportion d'ayant-droits inscrits à l'école francophone des 68 p. 100 qu'on connaît aujourd'hui à 80 p. 100, en dix ans. Pour ce faire, il compte augmenter le financement accordé aux accords fédéral-provinciaux-territoriaux dans le domaine de l'éducation. Ainsi, 381,5 millions de dollars s'ajouteront au cours des cinq prochaines années aux 929 millions de dollars déjà consentis.

    Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de faire tous les calculs, mais pensez-vous que ce financement suffira pour augmenter la proportion d'élèves qui se prévalent de leur droit d'aller à l'école francophone?

[Français]

+-

    M. Paul Charbonneau: Dans le cadre du plan d'action, 209 millions de dollars sur cinq ans étaient destinés à la minorité francophone. Le montant de 381 millions de dollars inclut l'immersion. Il y avait quelques millions au début, et plus de millions à la fin. Cela représente 30 millions de plus que ce dont on disposait auparavant. Il existait alors des ententes auxiliaires sur la gestion scolaire de l'ordre de 179 millions de dollars, mais elles n'avaient pas un caractère permanent.

    Comme je le disais plus tôt, le système d'éducation reçoit en moyenne un total de 90 millions de dollars. Le reste va à l'anglais langue seconde et, au Québec, à l'anglais langue première, bref à l'immersion. À cet égard, il reste que notre quote-part se limite à ce montant.

À  +-(1010)  

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Pour répondre à votre question, non, ce n'est pas suffisant.

+-

    M. Pierre Poilievre: Croyez-vous que le plan d'action, dans son ensemble, vous permette d'atteindre vos buts pour ce qui est de l'éducation en français dans vos communautés francophones?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: À mon avis, il ne s'agit pas seulement de nos buts mais aussi de ceux du gouvernement fédéral. Ce dernier parle en effet de faire passer à 80 p. 100 le pourcentage de la population francophone inscrite dans des écoles francophones d'ici 2013. C'est vraiment viser très haut, même s'il s'agit là d'un objectif très louable. Il reste que pour obtenir ces résultats, il faudra que les ressources nécessaires soient investies.

    Dans le contexte actuel, alors que nous en sommes à élaborer notre stratégie, nous trouvons que le temps est propice à l'atteinte de cet objectif: il existe une synergie entre les communautés et les systèmes scolaires. Cependant, vous pourriez très rapidement calculer combien il en coûterait aux conseils scolaires pour mettre sur pied les classes destinées aux 4 et 5 ans.

    Je ne suis pas en mesure de vous donner ces chiffres, mais je suis certaine que les conseils scolaires pourraient nous les soumettre rapidement.

+-

    M. Paul Charbonneau: Le plan, c'est un bon début, mais pour atteindre 80 p. 100, il n'y aura de toute évidence pas assez d'argent.

+-

    M. Pierre Poilievre: Je n'ai pas d'autres questions à poser, alors M. Desrochers pourrait, s'il le veut, utiliser le reste de mon temps.

+-

    Le président: De toute façon, c'est le tour de M. André.

    Avez-vous besoin de plus de cinq minutes?

+-

    M. Guy André: Je peux partager mon temps avec Odina.

    Je vais donc commencer. En lisant les recommandations de votre rapport, j'ai noté que vous disiez avoir des problèmes de recrutement à l'égard de la main-d'oeuvre et des enseignants. Vous avez mentionné les psychologues et d'autres spécialistes gravitant autour de l'école. Je voudrais d'abord que vous nous parliez de ces services spécialisés.

    Ensuite, vous avez souligné un important problème de rétention des étudiants. Je lisais votre plan d'action et je dois dire que ce n'est pas clair pour moi. Quels moyens proposez-vous concrètement pour augmenter le recrutement des enseignants et le nombre d'étudiants? C'est ma première question.

    Pour ce qui est des enfants, on a parlé des services à la petite enfance. Pour ma part, je pense que ce pourrait être un avantage. On parle malgré tout d'une clientèle constituée à 50 p. 100 d'enfants francophones qui n'ont pas atteint l'âge de 5 ans. Il serait avantageux de les intégrer aux services à la petite enfance. Selon moi, c'est déjà là une partie de la solution. En ce qui a trait au corps enseignant et aux spécialistes, vous proposez certaines choses à l'Axe 3, mais je ne vois là aucun moyen concret.

    Pour finir, vous avez mentionné rapidement qu'instruire en français un enfant d'une minorité francophone entraînait plus de coûts que d'instruire un enfant dans une école anglaise. Quelle est la différence? Est-ce que vous avez évalué le coût en termes de pourcentage ou de chiffres, par exemple 10 000 $ pour l'un et 11 000 $ pour l'autre?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Je sais qu'en Ontario, ces données ont été comptabilisées. On a fait ce calcul pour tous les conseils scolaires francophones, et ce, uniquement pour être en mesure de répondre aux besoins auxquels ils sont présentement tenus de répondre. Entre autres, pour le soutien administratif et pour tous les cadres d'imputabilité qui sont mis sur pied avec les gouvernements--cela a aussi de très bons côtés--, il faut de la main-d'oeuvre. La production de rapports sur les élèves en difficulté demande du temps et de la main-d'oeuvre. C'est très long. Or, les conseils scolaires francophones sont plus petits que les conseils scolaires de la majorité et, en plus, ils ont un ratio à respecter pour ce qui est du nombre d'étudiants par rapport à la taille de l'administration.

    Cela signifie entre autres qu'ils disposent de beaucoup moins de personnel pour répondre à des exigences qui sont les mêmes que celles des écoles de la majorité. Tout le volet de la petite enfance, soit celui des 4 et 5 ans, doit aussi être pris en compte. En outre, compte tenu que les programmes traduits ne répondent pas aux besoins de notre clientèle, il faut ajouter l'élaboration de tous les programmes.

À  +-(1015)  

+-

    M. Guy André: Est-ce que cela a été comptabilisé d'une façon ou d'une autre?

+-

    M. Paul Charbonneau: Il n'y a pas de règle générale, mais il existe certaines formules. Par exemple, on est en train d'en élaborer une au Manitoba. On s'inspire pour ce faire du modèle d'un conseil scolaire nommé Frontier qui est situé sur un grand territoire. En Saskatchewan, la façon de comptabiliser cela n'est pas la même qu'en Ontario. On n'a pas le choix: il faut voir quel est le contexte. Dans certains cas, il n'y a dans toute la province qu'un conseil scolaire et peu d'élèves, alors que dans d'autres, la province compte douze conseils scolaires et la moitié des jeunes du pays. Il reste qu'on peut faire le calcul dans chacune de ces situations.

    Pour ce qui est des moyens concrets que nous mettons en oeuvre en matière de main-d'oeuvre, je dois préciser qu'à l'heure actuelle, la situation est la suivante: nous recrutons un assez grand nombre de personnes, mais peu d'entre elles restent. Il nous faut absolument trouver des mécanismes permettant de préparer ces gens au milieu auquel ils sont destinés. Comme je le disais plus tôt, une personne qui, étant partie de Moncton, aboutirait à Souris, à l'Île-du-Prince-Édouard, se retrouverait dans un monde complètement différent, même si les Acadiens se ressemblent beaucoup entre eux. Il faudrait voir à ce que les gens qui s'établissent chez nous sachent ce qui les attend. En outre, il arrive souvent que nos classes soient petites et qu'elles comportent plusieurs niveaux. Dans certains cas, les jeunes de la maternelle n'ont pas tous la même capacité en termes de compréhension langagière. Il faut aussi former les nouveaux venus à cet égard. Les conseils scolaires, étant chacun de son côté, ont de la difficulté à y arriver.

    Il s'agirait ici d'élaborer des programmes destinés à préparer les enseignants à la pédagogie, à l'environnement communautaire et à l'approche des parents. En effet, vu que les enseignants font affaire à des parents exogames, la première chose qu'ils devraient faire, c'est apprendre un peu d'anglais. Ensuite, de notre côté, nous devrions leur apprendre des techniques qui leur permettraient d'aider les jeunes lorsque ces derniers se retrouvent à la maison.

    Bref, il y a toute une foule de mesures de ce genre à prendre. Au départ, 5 p. 100 des enseignants abandonnent la profession au cours des cinq premières années. Si on les décourage en les envoyant vers l'inconnu, ils vont le faire encore plus. C'est donc ce genre de programme qu'il faut mettre sur pied.

+-

    Le président: Merci.

    Monsieur Simard.

+-

    L'hon. Raymond Simard (Saint Boniface, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Merci, monsieur Godin, pour votre gentillesse.

    Bienvenue, madame Chevalier et monsieur Charbonneau. J'aurais deux questions. Effectivement, le plan Dion préconise des investissements assez importants en éducation, mais on parle aussi d'imputabilité, de résultats mesurables.

    Êtes-vous une création des provinces?

+-

    M. Paul Charbonneau: D'une certaine façon, oui.

+-

    L'hon. Raymond Simard: Il me semble, pour que les provinces atteignent leurs objectifs, qu'elles auraient intérêt à vous impliquer dans cette décision. Quelle est la relation entre les provinces et vos conseils? Voulez-vous jouer un rôle au-delà de cela, comme partenaire égal des provinces et du fédéral, par exemple?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Nous voulons faire davantage que d'être consultés, nous voulons être partie prenante à toutes ces décisions. Les experts en éducation sont les conseils scolaires. Quand je dis « nous », je ne veux pas dire que la Fédération nationale des conseils scolaires francophones veut se retrouver à la table de négociation pour chaque entente avec les provinces. Toutefois, nous aimerions que chaque conseil scolaire ou regroupement de conseils scolaires, selon la province visée, établisse ce lien privilégié entre le ministère de l'Éducation et les systèmes scolaires, parce que ces derniers sont ceux qui doivent livrer le produit fini. Il est donc absolument essentiel et crucial qu'ils puissent se prononcer.

+-

    L'hon. Raymond Simard: Les provinces ont-elles le réflexe de vous consulter ou de communiquer avec vous pour livrer le produit aux francophones?

+-

    Mme Madeleine Chevalier: Certaines provinces le font, oui, mais pas toutes.

+-

    M. Paul Charbonneau: C'est anticonstitutionnel de ne pas le faire.

+-

    L'hon. Raymond Simard: Oui, alors il y a les deux côtés.

    Vous avez parlé aussi d'une stratégie nationale. Je ne sais pas si j'ai bien compris, mais vous avez mentionné que tous les groupes impliqués sont en train de développer une stratégie nationale. Il y a évidemment une question de timing aussi. On dit que les enveloppes spéciales pourraient être signées d'un jour à l'autre.

    Cela a-t-il un impact? Devrait-on attendre cette stratégie nationale avant de signer des ententes avec les provinces?

À  -(1020)  

+-

    M. Paul Charbonneau: Non. On attend depuis trop longtemps déjà. Je pense cependant que cela pourrait servir de ligne directrice quand il y aura des négociations avec les provinces. Je pense que si c'est le plan de tous les intervenants en éducation chez les francophones et les Acadiens, il faudra que cela devienne aussi le plan des provinces et du gouvernement fédéral. Nous pensons que c'est la façon de réaliser ce qu'il y a dans le Plan d'action pour les langues officielles.

+-

    L'hon. Raymond Simard: Pensez-vous que vous devriez jouer un rôle, à prime abord, avec le gouvernement fédéral pour établir les résultats ou les choses qu'on veut mesurer, par exemple? Le fédéral vous a-t-il consultés?

+-

    M. Paul Charbonneau: La difficulté, face au ministère du Patrimoine canadien, est que, sur une base historique, il négocie avec les provinces. Selon la compréhension actuelle, même si c'est aussi de compétence fédérale, c'est délicat. D'ailleurs, je suis obligé de vous dire que nous avons rencontré jusqu'ici trois ministres du Patrimoine canadien chacun à trois reprises et que la réponse a toujours été non.

+-

    L'hon. Raymond Simard: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Merci beaucoup. On termine rapidement.

    Monsieur Godin.

+-

    M. Yvon Godin: Je crois que nous avons fait un bon survol des questions et des préoccupations que vous et les régions minoritaires francophones du Canada avez. Je crois vraiment au programme de garderies auquel on travaille présentement. Je pense que cela fait partie du plan. Sinon, on manque le bateau au départ. On nous mettra encore un bâton dans les roues si... On devrait vraiment partir du moment où un enfant voit le jour. Cela devrait aussi faire partie de nos recommandations.

    Tout à l'heure, un collègue conservateur a dit que la responsabilité des écoles francophones devait être une responsabilité nationale. Ce n'est pas ce que vous suggérez. Vous continuez de dire qu'en vertu de la Constitution, c'est du domaine provincial, mais qu'il faut, à l'intérieur de cela, respecter les deux langues officielles. Or, la façon de le faire, c'est en donnant la formation et l'éducation dont les gens ont besoin. Nous avons besoin d'outils. Pour le faire en français, cela coûte plus cher. Par exemple, quand on écrit une lettre en français, elle est un peu plus longue qu'en anglais. Nous apprenons des verbes qu'ils n'ont pas besoin d'apprendre.

    Merci bien.

+-

    M. Paul Charbonneau: Ce n'est pas pour autant une raison pour que le fédéral n'en fasse pas sa juridiction, car il est aussi responsable de cet aspect, au nom de la dualité linguistique.

+-

    M. Yvon Godin: C'est le surplus pour s'assurer, lorsque le fédéral verse de l'argent aux provinces, que ces dernières soient tenues de respecter certaines normes.

+-

    Mme Madeleine Chevalier: C'est cela.

-

    Le président: Merci beaucoup.

    Je vous remercie d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer et de répondre à toutes nos questions.

    Ce volet de la séance se termine là-dessus.

    Nous allons poursuivre nos travaux à huis clos pour deux minutes.

    Merci beaucoup.

    [La séance se poursuit à huis clos.]