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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 4 octobre 1994

AFFAIRES COURANTES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

AGRICULTURE ET AGROALIMENTAIRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

    Projet de loi C-280. Adoption des motions portant présentation et première lecture 6475

LA LOI SUR LE SYSTÈME CORRECTIONNEL ET LA MISE EN LIBERTÉ SOUS CONDITION

    Projet de loi C-281. Adoption des motions portant présentation et première lecture 6475

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBR

    Adoption de la motion 6476

PÉTITIONS

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DE LA PERSONNE

LES DROITS DES FOETUS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE CODE CRIMINEL

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-277. Adoption de la motion visant à modifier le libellé du titre 6476
    Mme Gagnon (Québec) 6476

QUESTIONS AU FEUILLETON

DEMANDE DE DÉBAT D'URGENCE

LA PÊCHE AU SAUMON SUR LA CÔTE OUEST

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR LES GRAINS DU CANADA

    Projet de loi C-51. Motion portant deuxième lecture 6477
    M. Chrétien (Frontenac) 6480
    M. Speaker (Lethbridge) 6491
    Adoption de la motion 6500

LA LOI SUR LE MINISTÈRE DES AFFAIRES EXTÉRIEURES

    Projet de loi C-47. Motion portant deuxième lecture 6500
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loi et renvoi à un comité 6505

LOI SUR LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

    Projet de loi C-52. Reprise de l'étude de la motion portant deuxième lecture et de l'amendement 6505
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 6505
    M. Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine) 6508

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES COURSES TERRY FOX POUR LA RECHERCHE SUR LE CANCER

LE FÉDÉRALISME

LA JUSTICE

LES PAGES DU PARLEMENT

LE NATIVE COUNCIL OF NOVA-SCOTIA

LA SEMAINE DE SENSIBILISATION À LA MALADIE COELIAQUE

LE FINANCEMENT DU BLOC QUÉBÉCOIS

LES COMMUNIQUÉS DE PRESSE DU GOUVERNEMENT

LA FUSION DE RADIO MUTUEL ET DE TÉLÉMÉDIA

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

L'ENVIRONNEMENT

LES AFFAIRES INTERGOUVERNEMENTALES

OCTOBRE

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 6511

LE FÉDÉRALISME

LES SIMPLES DÉPUTÉS LIBÉRAUX

WORD ON THE STREET

TRACADIE

L'ÉCONOMIE

QUESTIONS ORALES

LE COMMERCE INTERNATIONAL

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6512
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6513
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6513
    M. Gauthier (Roberval) 6513
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6513
    M. Gauthier (Roberval) 6513
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6513

LE DÉFICIT

    M. Speaker (Lethbridge) 6514
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 6514
    M. Speaker (Lethbridge) 6514
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 6514
    M. Speaker (Lethbridge) 6514
    M. Martin (LaSalle-Émard) 6514

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 6514
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 6514

L'IMMIGRATION

LES RÉGIMES ENREGISTRÉS D'ÉPARGNE-RETRAITE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 6515
    M. Martin (LaSalle-Émard) 6515

LES RÉFUGIÉS

LA RECONVERSION INDUSTRIELLE

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 6516
    M. Martin (LaSalle-Émard) 6516
    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 6516
    M. Martin (LaSalle-Émard) 6516

LE CANADIEN NATIONAL

SALINAS MENDOZA

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 6517
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 6517

LA RECONVERSION INDUSTRIELLE

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

    Mme Stewart (Northumberland) 6518

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

L'IMMIGRATION

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE 1994 MODIFIANT LA LÉGISLATION PÉNALE

    Projet de loi C-42. Motion portant deuxième lecture 6520
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loi; avec le consentement unanime, formation de la Chambre en comité plénier, sous la présidence de M. Kilger 6525
    Adoption des articles 2 à 19 inclusivement 6525
    Rejet de l'amendement 6528
    Adoption de l'article 6529
    Articles 20 à 106 inclusivement 6529
    Adoption des articles 21 à 106 inclusivement 6529
    Adoption de l'article 1 6529
    Adoption de l'annexe 6529
    Report; approbation du projet de loi; troisième lecture et adoption du projet de loi 6529

LOI SUR LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

    Projet de loi C-52. Reprise de l'étude de la motion et de l'amendement 6529

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 6544
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 6545

MOTION D'AJOURNEMENT

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES TARIFS DOUANIERS


6475


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 4 octobre 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

AGRICULTURE ET AGROALIMENTAIRE

M. Jerry Pickard (Essex-Kent): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le deuxième rapport du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, qui porte sur le projet de loi C-49, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Agriculture.

[Français]

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le trente-huitième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres associés des comités.

Si la Chambre donne son consentement, j'ai l'intention de proposer l'adoption de ce rapport plus tard aujourd'hui.

* * *

(1005)

[Traduction]

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre) demande à présenter le projet de loi C-280, Loi visant à prévenir l'interruption par des conflits de travail de l'acheminement régulier du grain des exploitations agricoles au point d'exportation et modifiant le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique en conséquence.

-Monsieur le Président, je demande à présenter aujourd'hui ce projet de loi d'initiative parlementaire intitulé Loi visant à prévenir l'interruption par des conflits de travail de l'acheminement régulier du grain des exploitations agricoles au point d'exportation et modifiant le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique en conséquence.

Ce projet de loi a pour objet de prévenir les arrêts de travail touchant le transport du grain de l'exploitation du producteur jusqu'au point d'exportation, en établissant une formule d'arbitrage des propositions finales très conforme au processus de négociation collective.

Je constate avec plaisir que plusieurs de mes collègues ont officiellement exprimé leur appui à l'égard de cette mesure. Il s'agit des députés de Lisgar-Marquette, Végréville, Okanagan-Shuswap, Prince George-Peace River, Yorton-Melville et Kinsdersley-Lloyminster.

Leur appui et celui d'autres députés sont grandement appréciés et seront dûment et officiellement reconnus au cours des travaux à la Chambre sur ce projet de loi.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LA LOI SUR LE SYSTÈME CORRECTIONNEL ET LA MISE EN LIBERTÉ SOUS CONDITION

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est) demande à présenter le projet de loi C-281, Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et la Loi sur les prisons et maisons de correction.

-Monsieur le Président, les détenus incarcérés dans les établissements fédéraux ont parfois trompé d'innocentes personnes en leur écrivant.

Récemment, une Britannique a commencé à correspondre avec un détenu de ma circonscription. Elle est venue s'établir au Canada en croyant que les circonstances étaient normales et qu'elle avait entretenu une correspondance normale. Malheureusement, elle a été assassinée au cours d'une visite conjugale en prison.

Aujourd'hui, j'ai l'honneur de déposer un projet de loi obligeant les administrateurs à inscrire clairement sur tout le courrier des détenus qu'il s'agit d'une lettre expédiée d'un établissement correctionnel. Je crois que ce projet de loi protégera les innocents.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonné.)

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a consentement unanime de la Chambre pour nous dispenser de la lecture du trente-huitième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.


6476

Si c'est bien le cas, je propose, également avec le consentement unanime de la Chambre, que le trente-huitième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté plus tôt à la Chambre aujourd'hui, soit adopté.

(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LE SUICIDE ASSISTÉ

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je veux déposer deux pétitions au nom des électeurs de Surrey-Nord, ma circonscription.

La première pétition, qui porte une quarantaine de signatures, demande au Parlement canadien d'interdire ou de continuer à interdire le suicide assisté et d'appuyer les dispositions du Code criminel interdisant pareille activité qui a cours à l'heure actuelle.

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Margaret Bridgman (Surrey-Nord): Monsieur le Président, la seconde pétition, qui est aussi signée par une quarantaine de personnes, demande au Parlement de n'apporter au Code des droits de la personne, à la Loi canadienne sur les droits de la personne ou à la Charte des droits et libertés aucune modification qui tendrait à indiquer que la société approuve les relations entre personnes de même sexe ou l'homosexualité et, notamment, de n'apporter au Code des droits de la personne aucune modification de nature à ajouter l'expression non définie «orientation sexuelle» à la liste des motifs interdits de discrimination.

(1010)

[Français]

Mme Gagnon (Québec): Monsieur le Président, je m'excuse, je n'ai pas de pétition à présenter, mais j'ai une motion. Est-ce que je devais le faire auparavant?

Le Président: Nous pourrions y retourner, avec le consentement de la Chambre.

[Traduction]

LES DROITS DES FOETUS

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui deux pétitions.

La première concerne l'avortement, sujet très important qui fait à nouveau les manchettes ces jours-ci. C'est un honneur pour moi de présenter une pétition signée par 88 de mes électeurs qui prient le Parlement d'adopter une mesure législative visant à protéger les foetus.

Les pétitionnaires et moi-même regrettons qu'aucune loi ne régisse encore l'avortement au Canada et nous prions le gouvernement de protéger les membres les plus faibles de notre société.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une deuxième pétition au nom d'électeurs de ma circonscription. Celle-ci est signée par des membres de la congrégation réformiste néerlandaise et a trait à l'orientation sexuelle.

Les pétitionnaires soutiennent qu'il ne faut pas accorder un statut spécial aux couples formés de deux personnes du même sexe et ils ne veulent pas que le gouvernement inclue l'expression non définie «orientation sexuelle» dans une loi sur les droits de la personne, ce qui, à leur avis, encouragerait ce genre de mode de vie. Je suis d'accord avec leurs conclusions.

LE CODE CRIMINEL

M. John Duncan (North Island-Powell River): Monsieur le Président, je veux présenter une série de pétitions portant sur cinq sujets différents. Elle m'ont été envoyées par des électeurs de ma circonscription, North Island-Powell River.

J'ai deux pétitions contre toute modification du Code criminel concernant le suicide assisté par un médecin, une pétition demandant l'interdiction du jeu du tueur en série, une pétition en faveur du respect des foetus, deux pétitions exhortant le Parlement à résister aux pressions qu'il subit pour l'inclusion de l'orientation sexuelle dans la Loi canadienne sur les droits de la personne et une dernière pétition, présentée en mémoire de Dawn Shaw, demandant que les enfants soient mieux protégés des agressions sexuelles.

Le Président: Mesdames et Messieurs, par inadvertance, je n'ai pas donné la parole à un de nos collègues au moment des motions. Y a-t-il consentement unanime pour revenir aux motions?

Des voix: D'accord.

* * *

[Français]

LE CODE CRIMINEL

Mme Christiane Gagnon (Québec): Monsieur le Président, je demande à la Chambre le consentement unanime pour proposer une modification au libellé du titre de mon projet de loi C-277, Loi modifiant le Code criminel (circoncision des personnes de sexe féminin) en retirant le mot «circoncision» et en le remplaçant par les mots «mutilation génitale».

J'aimerais aussi que la version anglaise du titre soit modifiée en conséquence.

(La motion est adoptée.)

* * *

[Traduction]

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le Président: Les questions restent-elles toutes au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

6477

DEMANDE DE DÉBAT D'URGENCE

LA PÊCHE AU SAUMON SUR LA CÔTE OUEST

Le Président: J'ai reçu du député de Kamloops un avis de motion en vertu de l'article 52 du Règlement.

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui, conformément à l'article 52 du Règlement, pour demander la tenue d'un débat d'urgence sur le problème critique qui touche actuellement la côte ouest du Canada.

Lorsque j'ai soulevé cette question il y a deux semaines, 1,3 million de saumons avaient mystérieusement disparu. Personne ne savait où ils étaient passés. Comme la situation nous inquiétait, nous avons demandé la tenue d'un débat d'urgence. Il y a maintenant 1,9 million de saumons de plus qui ont disparu.

Je sais que le ministre a dit qu'il y aurait une enquête et qu'un rapport serait présenté l'an prochain. Je crois que ce ne sont pas seulement les députés de la côte ouest qui veulent ce débat, mais bien tous les députés, car nous savons tous très bien ce qui s'est passé sur la côte est parce que le gouvernement n'était pas disposé à prendre les mesures nécessaires et à faire preuve de leadership.

C'est un désastre. La situation est critique.

(1015)

Les habitants de la Colombie-Britannique ont perdu toute confiance dans ceux qui étaient chargés de la gestion de ces ressources. C'est pourquoi, Monsieur le Président, je vous demande d'autoriser la tenue d'un débat d'urgence sur cette question plus tard aujourd'hui.

Le Président: Il s'agit effectivement d'une question importante. Le député a déjà trouvé bon de la proposer à deux reprises à la Chambre pour discussion. J'estime cependant que sa demande ne répond pas pour le moment à toutes les conditions pour permettre la tenue d'un débat d'urgence.

_____________________________________________


6477

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LES GRAINS DU CANADA

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire) propose: Que le projet de loi C-51, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et concernant certains règlements pris en vertu de celle-ci, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Madame la Présidente, je suis heureux de présenter aujourd'hui en deuxième lecture ce projet de loi visant à modifier la Loi sur les grains du Canada. Ces modifications contribueront beaucoup à assurer la compétitivité de notre industrie céréalière et le bien-être du grand nombre de localités, de familles et de Canadiens dont le gagne-pain dépend de ce secteur très important de l'économie canadienne.

Comme les députés le savent sans doute, c'est la Commission canadienne du blé qui est chargée d'appliquer la Loi sur les grains du Canada. Aux termes de la loi, la Commission est tenue de réglementer la manutention du grain au Canada et d'établir et faire respecter des normes de qualité pour le grain canadien. La Commission joue un rôle essentiel pour maintenir la réputation internationale dont jouit le Canada quant à la grande qualité de ses grains.

Je voudrais donc profiter du lancement du débat d'aujourd'hui pour reconnaître brièvement le travail créateur accompli par les employés de la Commission depuis Prince Rupert, en Colombie-Britannique, jusqu'à Baie-Comeau, au Québec. Je voudrais également remercier les fonctionnaires de la commission qui ont contribué à l'élaboration des modifications que je propose aujourd'hui à la Chambre. En exprimant cette gratitude, je suis convaincu de m'exprimer au nom de tous les députés qui apprécient et comprennent les défis que nous, les législateurs, imposons aux hommes et aux femmes qui travaillent au sein de la fonction publique du Canada.

Je m'en voudrais de ne pas reconnaître également l'importante contribution apportée au projet de loi par l'industrie céréalière canadienne. Ces modifications sont en effet le fruit de longues et minutieuses consultations auprès de tous les éléments de l'industrie céréalière canadienne, avec les producteurs, avec les dirigeants d'entreprises et avec les organismes agricoles qui représentent tout l'éventail de cette importante industrie.

Je voudrais expliquer le processus de consultation pour que les députés puissent être aussi assurés que moi que le projet de loi répond aux besoins et aspirations de l'écrasante majorité des acteurs dans tous les secteurs de notre industrie céréalière et reflète fidèlement leur opinion.

En février 1991, la Commission canadienne des grains a entrepris une étude sur les questions de permis et de sécurité découlant de la loi. Elle a diffusé un document de travail et tenu des consultations directes avec les représentants de 45 organismes qui sont les porte-parole des producteurs de grains, des exploitants de silos à grains, des commerçants de grains et ainsi de suite.

Puis, en août 1991, la commission a diffusé une proposition de politique qui a servi de point de départ à un large débat sur toute l'industrie céréalière. Elle a rencontré les représentants de 57 organismes. Cette deuxième série de consultations a donné des résultats très utiles et abouti à une proposition révisée qui a été rendue publique en novembre 1991. Chaque groupe qui avait participé à ces premières consultations a reçu un exemplaire de la proposition et a été invité à soumettre des observations écrites et des recommandations.

(1020)

En s'appuyant sur les réponses à ces dernières consultations, une nouvelle proposition révisée a été élaborée et rendue publique en février 1992. D'autres suggestions ont été faites au cours de discussions avec les protagonistes de tout le secteur pendant le processus de révision de la réglementation fédérale en 1992.

Les modifications législatives que je présente à la Chambre aujourd'hui découlent de ces longues consultations et constituent un élément essentiel de l'engagement général du


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gouvernement à renforcer la position concurrentielle du Canada sur les marchés mondiaux.

Aux fins de notre discussion d'aujourd'hui, je grouperais les modifications à l'étude en trois grandes catégories. La première catégorie concerne l'amélioration de la compétitivité. La deuxième traite d'une protection accrue pour les producteurs de grains. La troisième est axée sur les nouvelles garanties offertes aux contribuables canadiens.

J'aimerais tout d'abord parler de l'amélioration de la compétitivité. L'industrie céréalière canadienne évolue, et le rythme des changements qu'elle subit s'accélère. Pour rester concurrentiels sur les marchés mondiaux, marchés où le Canada vend la majeure partie de sa production céréalière, nous avons besoin d'un cadre réglementaire et législatif qui protège les intérêts communs de tous les intervenants.

Ce cadre doit par ailleurs aider les particuliers et les groupes de l'industrie à soutenir la concurrence, ajoutant, lorsque c'est possible, de la valeur à leurs efforts. C'est précisément dans cette optique que nous proposons d'apporter des modifications à la Loi sur les grains du Canada.

La Loi sur les grains du Canada sera modifiée de manière à renforcer le rôle que joue la qualité dans l'industrie céréalière canadienne. Cela contribuera à renforcer les nombreuses mesures que nous prenons au Canada pour garantir que seules les meilleures variétés de grain sont mises au point, commercialisées et transportées grâce à notre système de manutention en vrac. Ces modifications confirment que, au fil de l'évolution du secteur céréalier canadien, la qualité demeurera une pierre angulaire de la stratégie canadienne de commercialisation des grains.

L'engagement du Canada par rapport à la qualité des grains sera aussi renforcé d'autres façons. La définition de grain contaminé sera clarifiée, et la responsabilité des exploitants de silos, relativement à la manutention sécuritaire des substances dangereuses et à l'élimination sécuritaire des grains contaminés, sera clairement énoncée.

De plus, une modification confirmera le pouvoir de la commission d'établir des normes concernant le séchage des grains. C'est peut-être plus important que cela ne semble à première vue. Parce qu'il est souvent impossible de déceler les grains mal séchés avant leur transformation, le premier signe d'un problème à ce chapitre pourrait se traduire par un client mécontent, et il serait évidemment trop tard à ce moment-là.

Cette modification constitue donc un autre moyen pour la commission de conserver sa réputation de producteur de grain de qualité. Cela se traduit par une compétitivité accrue pour le secteur des céréales du Canada.

Dans le but de supprimer des lois inutiles, les silos de conditionnement n'auront plus à se soumettre au pesage des céréales. Cette pratique constitue en fait une vérification visant à vérifier le tonnage en stock par grade. Le pesage est évidemment utile quand il est fait au terminal et aux silos de transbordement parce que, en pareils cas, les silos manutentionnent souvent du grain qui ne leur appartient pas. Par contre, comme les silos de conditionnement sont propriétaires du grain en stock, le pesage ne sert à rien.

Un des principaux objectifs du gouvernement consiste à abroger les lois et les règlements qui n'ont plus aucune utilité. La modification dont nous sommes saisis est conforme à cet objectif.

Ainsi que je l'ai annoncé en juillet 94, la Commission canadienne des grains ne sera plus tenue d'établir des tarifs maximaux pour les services offerts aux silos. Les tarifs des silos sont les frais que prélèvent les compagnies de silos à grain pour leurs services. La réglementation des tarifs par l'État date d'une époque où les producteurs étaient bien moins en mesure de se protéger contre l'établissement de tarifs injustes. Cependant, étant donné que des entreprises appartenant aux producteurs ou contrôlées par ceux-ci ont la mainmise sur la majorité des silos au Canada, il n'est plus nécessaire que le gouvernement continue de fixer les tarifs au nom des producteurs.

(1025)

Cette déréglementation des tarifs maximums se fera en deux étapes. D'abord, au cours d'une période de transition de deux ans, la commission conservera son pouvoir d'établir des tarifs maximums par ordonnance. Je ne prévois pas de difficulté particulière à cet égard.

Au cours de la campagne agricole actuelle, les exploitants de silos terminaux ont obtenu, par ordonnance de la commission, le pouvoir de fixer leurs propres tarifs. De façon générale, leurs hausses de tarifs ont été relativement mineures et équitables. Cela augure bien pour l'avenir, et j'ai confiance que le fait de laisser le marché fonctionner plus librement profitera à tous les intéressés.

En outre, même après la période de transition de deux ans, la commission aura encore le pouvoir de fixer des tarifs maximums, au besoin. Lorsque commencera la période de transition, la Commission des grains assumera un rôle de médiateur et de protecteur, en répondant aux plaintes et en cherchant des solutions.

Je tiens à signaler que cette proposition de modification découle de l'engagement que nous avons pris de procéder à une réforme visant à éliminer les règles d'application qui gênent la compétitivité de l'industrie canadienne et d'élaborer un régime de réglementation qui soutienne les efforts que déploient les entreprises canadiennes en vue de rivaliser avec leurs concurrents au niveau international.

Le projet de loi C-51 abolit la règle prévoyant que seuls les transporteurs publics peuvent assurer le transport du grain d'une province à l'autre. Cette mesure profitera aux producteurs en ce sens qu'elle leur offrira une gamme de choix de transport qui leur permettront de réduire certains coûts de commercialisation. D'autres modifications autoriseront la Commission des grains à faire en sorte que la transmission électronique remplace les documents papier de comptabilisation des transactions. Cette autre mesure fera gagner du temps et économiser de l'argent à la Commission des grains et à l'industrie tout entière.

Passons maintenant à la question de la protection des céréaliers. La Loi sur les grains du Canada de 1912 a créé la Commission canadienne des grains et l'a surtout chargée de protéger les intérêts des producteurs de grain canadiens. Cet objectif est maintenu dans la nouvelle loi et plusieurs


6479

propositions de modification dont nous sommes saisis aujourd'hui visent précisément à perpétuer cette fonction de protection.

Il y a tout d'abord les dispositions qui accordent à la Commission des grains le pouvoir d'agir contre les sociétés qui utilisent illégalement les appellations de grade de la Loi sur les grains du Canada. On trouve également dans le projet de loi des dispositions qui stipulent que les marchands de grain titulaires d'une licence doivent utiliser les appellations de grade de la Loi sur les grains du Canada dans l'ensemble de leurs transactions avec les producteurs. Ces dispositions précisent la façon dont les conditions du collage des grades et la teneur en humidité sont déterminées et enregistrées dans les élévateurs primaires du pays et autorisent la suspension des licences des élévateurs primaires où les excédents sont supérieurs à la limite fixée.

Par «excédent», on entend tout écart entre la quantité de grain qu'un élévateur contient effectivement et la quantité de grain qu'il devrait contenir, selon les registres des livraisons et des réceptions. Les modifications proposées renferment aussi des dispositions confirmant que la Commission canadienne des grains a le pouvoir d'exiger que les exploitants assurent entièrement les grains stockés dans leurs silos.

Les rapports exigés à l'heure actuelle ne sont pas aussi efficaces qu'ils devraient l'être en vertu de la loi, car ils ne permettent pas de déterminer adéquatement la situation financière des demandeurs de licences. Par conséquent, ce projet de loi renferme des dispositions obligeant les demandeurs de licences à fournir des données financières précises qui démontrent leur viabilité économique.

Quant à la protection accrue des contribuables en vertu de ce projet de loi, les modifications proposées assureraient effectivement cette protection aux contribuables du pays. Les députés se souviendront que, en 1991, la Cour d'appel fédérale avait statué que la Commission canadienne des grains était responsable des pertes subies par les producteurs au début des années 80, alors que deux titulaires de licences avaient fait faillite et que leurs garanties déposées auprès de la commission étaient inférieures au montant de leur dettes.

Cette décision a obligé les contribuables canadiens à payer plus de 3,9 millions de dollars, soit la différence entre les garanties fournies par les entreprises et les dettes réelles de celles-ci envers les producteurs.

Bien que la Cour d'appel fédérale n'ait pas été de cet avis, bon nombre de gens dans l'industrie croient que l'objectif de la Loi sur les grains du Canada n'est pas d'assurer aux producteurs de grains une protection illimitée, quelles que soient les circonstances.

(1030)

Une protection commerciale illimitée du genre de celle apparemment préconiséé dans le jugement de la Cour d'appel fédérale n'existe pratiquement pas dans les autres secteurs de notre économie. La plupart des organisations de producteurs comprennent comment une telle protection pourrait inciter les producteurs à prendre des décisions de gestion imprudentes.

Par conséquent, bien que la protection, sous forme de garantie fournie par les titulaires de licences, fasse partie des droits attribués aux producteurs en vertu de la loi, je crois que les producteurs de grains doivent assumer une plus grande part de responsabilité pour leurs propres transactions commerciales. La majorité des organisations de producteurs consultées par la commission sont aussi de cet avis.

Certaines des modifications que nous proposons donnent à la commission un pouvoir accru à l'égard des titulaires de licences dont la garantie serait insuffisante, mais d'autres obligent les agriculteurs à minimiser eux-mêmes leurs propres risques. Ces dispositions comprennent tout d'abord une modification prévoyant une réglementation protégeant les producteurs pour une période donnée, à partir de la date où ils livrent leur grain à un titulaire de licence.

Si les producteurs refusent d'accepter un paiement pour leur grain durant ce délai, ils n'auront pas le droit d'être payés à partir de la garantie fournie par le titulaire de licence, si cette entreprise fait faillite. En fonction des consultations que la Commission canadienne des grains a tenues auprès des producteurs et des représentants de l'industrie, on a fixé la période réglementaire à 90 jours. L'agriculteur devra aviser la commission dans les 30 jours suivant l'omission ou le refus de payer par une entreprise.

En outre, il incombera dorénavant aux agriculteurs de s'assurer qu'ils font affaire avec une société bel et bien titulaire d'une licence, étant donné que seules ces entreprises fournissent des garanties à la commission. Les réclamations ne seront pas valables si l'agriculteur traite avec une entreprise qui n'a pas de licence.

Une disposition forcera le producteur à obtenir des commerçants de grains et d'autres titulaires d'une licence de la commission des documents certifiés par la commission. Ces modifications permettront à la commission d'établir des limites en pourcentage en ce qui concerne la protection offerte par la garantie. La commission ne sera cependant pas en mesure d'utiliser ce pouvoir de réglementation particulier sans l'approbation du gouverneur en conseil. À l'heure actuelle, la protection est de 100 p. 100. Je prévois que cela demeurera le cas dans un avenir prévisible.

Enfin, les nouvelles dispositions limitent de façon explicite la capacité de la commission de s'assurer que la garantie fournie par le titulaire d'une licence est suffisante pour s'acquitter de ses obligations. On veut ainsi faire en sorte que la protection offerte aux producteurs soit plus comparable à celle de nombreux autres secteurs. C'est un peu analogue aux limites qui existent concernant les montants garantis par le gouvernement à la suite de la faillite d'une institution financière.

Ces dispositions ne sont pas une panacée. Aucune loi ne peut garantir que les sociétés céréalières ne prendront pas de mauvaises décisions ni empêcher les faillites. Néanmoins, ces modifications imposeront aux producteurs une plus grande responsabilité de traiter avec des sociétés viables, titulaires de licence. En outre, ces dispositions encourageront les producteurs à ne pas courir de risques inutiles lorsqu'ils font affaire avec une société, qu'elle soit titulaire ou non d'une licence.

Ces modifications réduiront les risques que le contribuable devait assumer autrefois. Comme je l'ai dit dans mes observations préliminaires, cet ensemble de modifications a été


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précédé d'une série de consultations approfondies dans toute l'industrie céréalière au Canada.

Ces consultations montrent de façon concluante que l'industrie a changé, ce qui renforce notre conviction que les lois canadiennes doivent répondre à ces changements. Je crois que les modifications dont la Chambre est saisie aujourd'hui reçoivent l'appui de la majeure partie des intervenants de l'industrie céréalière. Ces organismes partagent ma conviction que ces modifications rapporteront des avantages considérables aux producteurs, aux contribuables et à l'ensemble de l'industrie. Je recommande à la Chambre d'approuver les modifications prévues dans le projet de loi C-51.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac): Madame la Présidente, je vous remercie de me donner la chance ce matin d'intervenir sur le projet de loi C-51, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada.

(1035)

Le projet de loi C-51, modifiant la Loi sur les grains du Canada, dont nous discutons cet après-midi ne fera pas beaucoup de vagues. Les modifications apportées sont de nature plutôt administrative. Elles ont pour objet d'améliorer l'efficacité des opérations et de l'administration de la Commission canadienne des grains et de l'industrie céréalière.

La Commission canadienne des grains est chargée d'appliquer la Loi sur les grains du Canada. Elle est l'instance tenue d'établir la qualité du grain canadien et de réglementer la manutention du grain au Canada.

Le projet de loi qu'on nous propose vise trois objectifs: tout d'abord, rehausser la compétitivité de l'industrie céréalière; deuxièmement, assurer une plus grande protection aux producteurs lorsqu'ils transigent avec les négociants en grain et les grosses compagnies; et finalement, protéger les contribuables d'une façon plus adéquate.

Samedi dernier, dans ma circonscription, j'ai eu la chance de rencontrer des producteurs de tomates en serre et l'un d'eux me racontait un cas qu'il me plaît de vous citer ce matin. Il me racontait que ses tomates, qu'il livre d'ailleurs lui-même au supermarché, puisqu'il s'occupe de la mise en marché, à 70c. la livre, le même supermarché les détaille, quelques minutes plus tard, non pas 79c. la livre, non pas 1,39 $ la livre, mais, tenez-vous bien, 2,39 $ la livre.

Alors, ce producteur en serre me disait: «Monsieur le député, je dois travailler mes tomates pendant quatre mois avant de pouvoir les écouler à 70c. la livre, et le propriétaire de ce supermarché peut les garder dans son réfrigérateur ou dans son étalage de 24 à 48 heures pour réaliser un bénéfice brut de 1,70 $.»

Parfois, on croit que c'est l'agriculteur qui empoche la grosse somme, mais ce n'est pas lui. Dans le cas que je vous ai raconté ici, celui des tomates de serre, il n'y a pas d'intermédiaire; c'est le producteur lui-même qui s'occupe de la mise en marché, qu'il vend à 70c. la livre et dont, 24 à 36 heures plus tard, les mêmes tomates se vendent 2,39 $ la livre.

Revenons au projet de loi C-51. De façon à accroître la concurrence, la commission ne sera plus chargée d'établir des tarifs maximaux perçus au silo à grain. Cette déréglementation se fera cependant par étape, et la commission se garde le droit d'établir un plafond par règlement. Elle pourra par ailleurs donner suite aux plaintes et, bien sûr, les résoudre. On nous dit que cette mesure donnera aux exploitants de silos une plus grande souplesse dans la fixation de leurs prix et que cela permettra à la loi du marché de fixer les prix.

En cas de problème, la commission se réserve le droit de fixer un plafond. Les producteurs devront être suffisamment protégés pour éviter que le laps de temps nécessaire pour traiter leurs plaintes ne les accule à la faillite.

Certaines des modifications soulèvent quelques préoccupations, cependant, puisque les règlements qui accompagnent le projet de loi auront une très grande influence sur ce dernier. Et ici, nous souhaitons que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire dépose les règlements en comité afin d'être en mesure d'évaluer l'impact du projet de loi que nous étudions ce matin.

(1040)

Par ailleurs, il est peu probable que la déréglementation prévue par ce projet de loi conduise à une augmentation des prix à la consommation, et je m'explique. La Commission canadienne du blé paie les producteurs selon le prix qu'elle obtient sur le marché international. De son côté, le gouvernement fixe un prix de base qu'il s'engage à payer aux producteurs, en tenant compte des perspectives du marché.

Depuis plusieurs années, le prix de base est fixé à un niveau très bas, ce qui minimise l'obligation du gouvernement de rembourser, dans le cas d'un effondrement possible des ventes sur le marché international. Lorsque le prix international est plus élevé que le prix initial, la commission verse le différentiel aux producteurs. Dans le cas inverse, c'est le gouvernement qui paie la différence. Notons que les coûts de production ou de transport n'influencent pas le niveau de prix initial.

Si le prix du marché chute de façon importante, les producteurs recourront au programme tripartite de soutien du revenu, soit le Régime d'assurance du revenu brut et le Compte de stabilisation du revenu net. Si le prix du marché demeure stable, mais que les coûts de production d'un producteur augmentent, alors il recourra à son compte de stabilisation de son revenu net. Ce compte est généré par les contributions du producteur. Il y a un maximum de 2 p. 100 de ses recettes brutes avec contrepartie du fédéral et du provincial et d'un 20 p. 100 additionnel possible, sans contrepartie.

Le producteur reçoit un versement en intérêt sur les fonds placés de 3 p. 100 supérieur au taux du marché. Le producteur accède à son compte si sa marge bénéficiaire est inférieure à une moyenne mobile des années antérieures. Par conséquent, il faudrait que les abus des exploitants soient élevés pour faire chuter la marge bénéficiaire du producteur, qui aurait alors droit de recourir à son compte de stabilisation.


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La chose est donc peu probable mais néanmoins, dans ce cas, ce serait les contribuables qui, par les versements de contrepartie, seraient touchés par une baisse du revenu net du producteur. La déréglementation permet aussi aux producteurs d'utiliser le transport privé-c'est une nouveauté-plutôt que public pour transporter son grain d'une province à l'autre.

Madame la Présidente, laissez-moi maintenant vous démontrer, à vous et à cette Chambre, comment ce banal projet de loi est un exemple parfait du fossé qui sépare le Québec du reste du Canada. Puisque c'est dans l'Ouest canadien qu'on retrouve le plus grand nombre de producteurs céréaliers, il est logique que ce soit les associations qui les représentent qui sont consultées quant aux répercussions du projet de loi qui nous occupe, le projet de loi C-51.

(1045)

Par curiosité, je suis allé tâter le pouls du côté du Québec. Les producteurs qui devraient être concernés, les céréaliers du Québec, ne le sont pas. La raison en est fort simple: ils sont principalement régis par une loi provinciale. Donc, pour les producteurs du Québec, il faut encore une fois faire affaire avec les deux paliers de gouvernement. Par exemple, les silos primaires sont de juridiction provinciale, et les silos de transbordement, de transformation et terminaux sont, quant à eux, de juridiction fédérale.

Tout ce qui concerne le marché intérieur, le transport des grains y compris, relève du gouvernement du Québec. Dès qu'on met le pied à l'extérieur des frontières québécoises, on relève du gouvernement du Canada. Et la liste de pareilles pertes de temps et d'argent, dans tous les domaines, dans tous les ministères, est fort longue.

Le Québec, pour ce qui est de nourrir son bétail en grain, est autosuffisant de 70 à 80 p. 100, et ici je dois rendre hommage à l'ex-ministre de l'Agriculture du Québec, mon ami Jean Garon, avec qui j'ai eu la chance de travailler à plusieurs occasions, Jean Garon qui a propulsé l'autosuffisance en grain à 80 et quelque pour cent, lorsqu'il a quitté son ministère de l'Agriculture, en 1985.

Le reste de grain qui manque, entre 20 et 30 p. 100, provient soit de l'Ontario ou encore des États-Unis. Ces pourcentages démontrent bien pourquoi les producteurs du Québec ont des préoccupations autres que celles touchées par ce projet de loi. Leur réalité est complètement, mais complètement différente. Puisque le gouvernement fédéral nous offre si souvent l'occasion de faire des suggestions, je me permets d'en faire une ce matin: pourquoi le ministre de l'Agriculture ne se penche-t-il pas sur le problème des producteurs de sirop d'érable, puisque c'est au Québec que nous produisons 86 p. 100 du sirop d'érable de cette Planète bleue?

Les montants investis dans ce domaine par son ministère sont dérisoires. Dans mon comté, le comté de Frontenac, où on produit une quantité impressionnante de sirop d'érable, mais du sirop d'érable d'une qualité exceptionnelle, les producteurs de sirop d'érable déplorent, et à juste titre, que l'on vende encore leur sirop au prix d'il y a dix ans. Puisqu'il y a des surplus importants, ils n'ont d'autre choix que de se contenter du prix qu'on leur offre. Leur dernière trouvaille pour écouler leur stock: on retrouve, par exemple, le sirop d'érable dans la crème glacée avec des pépites de sucre d'érable, ce qui obtient présentement un succès fou aux États-Unis, au Canada et au Québec, bien sûr. Vous avez également le yoghourt au sirop d'érable. Mais là j'espère qu'on ne trouvera pas un substitut pour remplacer le sucre ou le sirop d'érable par un dérivé qui pourra avoir le même goût mais qui ne sera pas la même chose et qui souvent coûte à peu près le même prix.

Je voudrais également vous inviter, vous, madame la Présidente, et mes collègues députés, à goûter aux galettes de la boulangerie de Saint-Méthode. . . Oui, vous y avez goûté, c'est bien. . . Des galettes au sirop d'érable, pas de l'imitation, du vrai sirop d'érable. Lorsque j'ai visité la boulangerie de Saint-Méthode, le printemps dernier, ils étaient fiers de me dire qu'ils avaient déjà écoulé 500 barils de sirop d'érable.

(1050)

Or, notre gouvernement fédéral devrait se donner la peine de regarder non seulement ce qui se fait dans l'Ouest pour les agriculteurs, mais de venir au Québec, ne pas avoir peur d'investir dans la recherche et le développement. Je prends l'exemple, ce matin, du sirop d'érable. J'aurais pu prendre d'autres exemples où le Québec jouit d'une confortable avance sur les autres provinces ou encore sur les autres pays, comme c'est le cas par exemple du sirop d'érable. L'autre exemple pourrait être le lait, où l'on produit 48 p. 100 du lait produit au Canada.

Alors, pourquoi ne pas investir davantage pour développer le potentiel de ce secteur qui a déjà fait ses preuves? Il est donc évident que nous du Bloc québécois ne nous opposerons pas à des mesures que les agriculteurs de l'Ouest soutiennent et que leur association qui les représente si bien soutiennent. Nous avons fait des consultations, nous avons fait des vérifications, et le projet de loi C-51 nous paraît bienvenu chez les agriculteurs de l'Ouest. Les agriculteurs de l'Ouest sont les mieux placés pour savoir ce qui est bon pour eux. Il convient par conséquent de leur donner les outils nécessaires à leur développement.

Ce que nous souhaitons, c'est que l'on respecte de la même façon le choix que le peuple québécois fera au cours de la prochaine année. Laissons donc les gens qui savent ce qui est le meilleur pour eux décider eux-mêmes de leur avenir.

Alors, madame la Présidente, je vous remercie, et je peux assurer le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire qu'il aura dans ce projet de loi C-51 l'appui de la députation du Bloc québécois en cette Chambre.

[Traduction]

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Madame la Présidente, je remercie les deux députés de leurs commentaires. Il y a certains points de ce projet de loi sur lesquels je suis d'accord et d'autres sur lesquels je ne suis vraiment pas d'accord.

La Loi sur les grains du Canada est administrée par la Commission canadienne des grains qui a pour mandat d'établir des normes de qualité pour le grain et de réglementer la manutention du grain au Canada.

Je souscris au but principal de ce projet de loi qui est de rendre notre industrie céréalière plus compétitive. Nous voulons tous que le Canada consolide sa réputation de producteur et de fournisseur de grain de qualité.


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Il faut souligner que l'industrie céréalière se compose de nombreux éléments importants et que nous devrions tous faire en sorte qu'ils fonctionnent le mieux possible pour garantir la santé et la viabilité de ce secteur.

Par exemple, nous avons vu, l'an dernier, les problèmes que les perturbations dans le système de transport du grain ont causés. Il semble que certains de ces problèmes vont refaire surface cette année, ce qui est vraiment catastrophique pour notre industrie et ternit sa réputation. De toute évidence, nous devons apprendre à voir les problèmes tels qu'ils sont et essayer de les régler en nous basant sur les expériences passées, sans mettre en péril l'avenir ou le bon fonctionnement de l'industrie.

Je voudrais parler de certaines des dispositions de ce projet de loi. La Commission canadienne des grains ne sera plus tenue d'établir des tarifs maximums pour les services offerts aux silos. Avec le temps, on espère que cela permettra aux exploitants de silos d'être plus souples et plus compétitifs dans la détermination des prix de leurs services et que cela favorisera les investissements. Cela donnera également aux acheteurs de grains plus de pouvoir pour pénaliser les gens qui laissent le grain entreposé trop longtemps dans les silos.

(1055)

Cette modification pourrait permettre de résoudre un problème qui s'est manifesté l'an dernier lorsque la Commission canadienne du blé a rempli les silos de grain pour lequel il n'y avait pas d'acheteurs immédiats.

En vertu du projet de loi, les terminaux ne sont pas tenus d'attendre que les commissions vendent le grain mais ils peuvent décréter des hausses de tarifs. Cette mesure aura probablement un effet positif sur le système. Le Cabinet, par l'intermédiaire du gouverneur en conseil, pourra invalider ces modifications. Il reste à savoir si la modification proposée dans le projet de loi conférera aux terminaux un véritable pouvoir ou si la Commission canadienne du blé continuera de bénéficier de la protection du gouvernement par un recours non démocratique au gouverneur en conseil.

Il y a également lieu de se demander si le gouvernement invoquera ces dispositions dans l'avenir pour accroître les pouvoirs de la Commission canadienne du blé en matière de réglementation de l'industrie.

Le projet de loi prévoit qu'une fois les tarifs maximaux éliminés, la Commission canadienne du blé agira comme conciliateur dans les différends tarifaires. Cette disposition soulève la question de savoir comment le rôle de la commission sera défini de façon plus précise, si le besoin s'en fait sentir. Le gouvernement aura-t-il recours à une loi ou agira-t-il par l'intermédiaire du gouverneur en conseil?

Le projet de loi autorise le libre mouvement du grain à l'intérieur du territoire de l'Ouest et à l'intérieur du territoire de l'Est mais pas de l'un à l'autre. Je m'interroge au sujet de ces restrictions qui frappent le commerce interprovincial au Canada. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, il y a davantage d'obstacles au commerce entre les provinces canadiennes qu'entre les pays de la Communauté européenne. Je m'interroge sérieusement quant au bien-fondé des restrictions qui frappent le mouvement du grain au Canada.

Cet été, les premiers ministres ont signé un accord commercial interprovincial qui a fait bien peu pour faciliter le libre-échange. Je suis étonné de constater qu'ils ont eu la possibilité de résoudre un problème qui doit l'être mais ont fait bien peu pour y arriver, en particulier dans le domaine de l'agriculture. C'est d'autant plus étonnant que ces restrictions ne sont pas imposées par nous, par des gouvernements étrangers ou par une réglementation internationale. Il s'agit de pièges que nous nous sommes tendus à nous-mêmes et auxquels nous devrions nous attaquer avec plus de détermination.

En éliminant les barrières commerciales internes, nous pouvons supprimer les distorsions de nos marchés et faire en sorte que les producteurs canadiens contrôlent mieux les prix, au lieu d'avoir un système où des barrières commerciales internes font en sorte que les prix demeurent artificiellement gonflés.

Le projet de loi supprime également la restriction qui réservait aux seuls transporteurs publics le droit de transporter le grain entre les provinces. C'est une bonne idée qui, espérons-le, permettra aux producteurs de réduire les coûts de commercialisation de leur produit en mettant à leur disposition plusieurs options en matière de transport.

Les changements proposés dans le projet de loi C-51 visent aussi à mieux protéger les producteurs de grains. Ces changements consistent entre autres: à conférer à la Commission canadienne des grains le pouvoir de prendre des mesures à l'encontre des entreprises qui utilisent illégalement une appellation de grade établie au titre de la loi; à exiger que les négociants en grains titulaires d'une licence utilisent les appellations de grade établies en vertu de la Loi sur les grains du Canada dans toutes leurs transactions avec les producteurs; à préciser la façon de déterminer et d'enregistrer le grade, les impuretés et la teneur en eau au silo primaire; à autoriser la Commission canadienne des grains à suspendre les licences des exploitants de silos primaires où la charge dépasse les limites autorisées, une très bonne idée; à confirmer le pouvoir de la Commission canadienne des grains d'exiger des exploitants de silos qu'ils assurent entièrement le grain stocké dans leurs silos; enfin à exiger des entreprises qui demandent une licence qu'elles fournissent certains renseignements prouvant qu'elles sont financièrement viables.

Il est certain que l'on doit chercher à mieux protéger les producteurs. Cependant, il y a toujours un risque, celui de surcharger de plus en plus le système en ajoutant de nouvelles règles. Nous devons trouver des moyens de protéger les producteurs sans nous immiscer dans leur façon d'opérer.

(1100)

Par certains côtés, ces changements permettront aussi, espérons-le, de mieux protéger les contribuables. Aux termes de ce projet de loi, un producteur disposera de 90 jours pour obtenir le paiement de son grain après livraison à une entreprise titulaire d'une licence. Si le producteur n'a pas cherché à obtenir le paiement dans ces délais, celui-ci ne pourra pas être prélevé sur la garantie donnée par le titulaire de la licence, si celui-ci fait faillite.

En cas de non-paiement par le titulaire d'une licence, le producteur est également tenu d'en informer la Commission canadienne des grains dans un délai de 30 jours. Il appartiendra aux agriculteur de déterminer si les sociétés avec lesquelles ils font affaire ont une licence de la Commission canadienne des grains.


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Étant donné que pour obtenir une licence, les sociétés doivent déposer une garantie à la Commission canadienne des grains, les agriculteurs ne pourront rien revendiquer s'ils traitent avec des compagnies non licenciées. La limite de responsabilité de la commission sera le montant de la garantie déposée par le titulaire de la licence. C'est semblable aux garanties que le gouvernement accorde aux déposants si leur institution financière vient à faire faillite.

Voilà des règlements que je peux appuyer. Comme la Chambre le sait, je n'ai guère de sympathie pour l'Office national des transports ou la Commission canadienne des grains. Pourquoi? Je voudrais rappeler à la Chambre qu'en tant qu'agriculteur, et en tant que politicien aujourd'hui, j'aime à traiter honnêtement avec tout le monde.

En mai de cette année le Co-Operator, une publication manitobaine, publiait un article intitulé: «Deux poids, deux mesures.» «La Commission canadienne des grains, la gardienne du système de contrôle de la qualité qui garantit que nos exportations sont les meilleures du monde, dit une chose aux agriculteurs, alors que l'un de ses commissaires adjoints pratique autre chose. Ce commissaire a fait pousser du blé non enregistré pendant un an avant d'obtenir une licence à l'interne.» Si ce n'est pas là deux poids, deux mesures, si c'est ce que l'on appelle protéger l'agriculteur canadien, alors je ne suis pas d'accord avec le projet de loi.

«Quel rôle la politique a-t-elle joué dans la décision de ne pas enregistrer le grain Grandin, puis dans la décision de l'accepter?» a demandé un agriculteur de la région de Domain interrogé à ce sujet. Dans sa réponse, le commissaire Murta de la Commission canadienne du blé disait: «Cela indique que le système est presque en avance sur lui-même et vous voyez le résultat.»

Voilà une commission des grains qui est censée protéger la qualité de nos grains, et qu'a-t-elle fait? Elle a elle-même permis à l'un de ses commissaires adjoints de livrer du grain.

Quand on lui a demandé ce qu'il en pensait, un autre agriculteur a fait le commentaire suivant: «Le premier arrivage de blé Grandin est entré illégalement dans les Prairies, mais l'un des premiers à en faire l'importation affirme que les fonctionnaires d'Agriculture Canada, en leur expliquant comment remplir les documents requis, leur ont dit qu'il n'était pas nécessaire d'utiliser le nom de la variété, que le numéro de lot suffisait.»

Est-ce là le genre de commission des grains que nous voulons? En tant qu'agriculteur, je dis non. Cela me dérange de voir qu'il n'y aura pas de limite imposée aux coûts d'entreposage. Cela va-t-il vraiment stimuler la concurrence ou plutôt permettre aux grandes sociétés céréalières de remplir leurs silos et de faire payer les frais aux agriculteurs, par l'intermédiaire de la commission du blé? La commission du blé n'a aucun intérêt à vendre ce grain parce que c'est moi qui paie les frais, et pas la commission du blé.

On en a un exemple de choix quand on regarde la situation à Churchill aujourd'hui. Depuis lundi, deux navires attendent un chargement. Il n'y a pas de grain disponible. Les silos du sud des provinces sont fermés et les wagons couverts restent à ne rien faire. Nous n'avons pas besoin de wagons-trémies pour aller à Churchill. Les wagons couverts restent à ne rien faire. Il en coûte de 10 $ à 20 $ de moins la tonne pour assurer le transport jusqu'à Churchill que pour se rendre aux côtes est ou ouest. Mais les sociétés céréalières n'ont aucun intérêt à envoyer leur grain à Churchill, parce que le terminal céréalier appartient au gouvernement.

(1105)

En juillet dernier, quand je suis allé vérifier quelle était la situation dans le port, on attendait un navire d'une capacité de 40 000 tonnes. Ce terminal d'une capacité de cinq millions de boisseaux ne contenait alors que 4 000 tonnes. Si c'est ça le règlement dont nous sommes saisis aujourd'hui, si c'est avec un système de ce genre qu'on va protéger les agriculteurs, on est en train de se faire avoir.

Il y a de quoi être inquiet. La semaine dernière, j'ai reçu une lettre d'une petite entreprise de nettoyage des graines qui ne relève pas de la Commission canadienne des grains et qui, par ses propres moyens, a créé un marché spécialisé pour ses services. Cette entreprise a été avisée qu'il fallait qu'elle devienne soit un silo soit un marchand de grains et qu'elle fasse une demande de licence. Cela l'obligerait à fournir un cautionnement, une assurance, bref à faire des frais supplémentaires qu'une entreprise de nettoyage des graines de cette taille, comme il y en a des centaines dans les Prairies, ne peut se permettre. Le propriétaire m'a dit sans ambages que si on l'y obligeait, il ne pourrait survivre, qu'il ne pouvait pas soutenir la concurrence d'une coopérative de nettoyage ou de l'Union des producteurs de grains. Cela lui est impossible.

En fait d'accroître la concurrence, moi je crois plutôt que ça la fait diminuer. Et pourquoi? Pourquoi laissons-nous constamment les bureaucrates et le gouvernement appliquer des règlements qui nuisent aux petites gens?

J'aimerais dire un ou deux mots de plus. Le ministre a dit, dans ses remarques préliminaires, que le but était d'économiser l'argent des contribuables. C'est un souci constant des réformistes. On pourrait très facilement faire des économies en se débarrassant de quelques-uns des commissaires de la commission du blé, des anciens politiciens qui touchent une pension de retraite dorée en plus de leur salaire qui est supérieur à celui des députés de cette Chambre. Si c'est comme ça qu'on s'occupe des petites gens, je préfère qu'on ne s'occupe pas de moi. En plus, ces commissaires sont nommés à vie.

D'après le projet de loi, il n'y aurait plus de limite d'âge. Pourquoi? Est-ce que 65 ans ce n'est pas l'âge de prendre sa retraite? Pourquoi leur permettre de rester là jusqu'à ce qu'ils meurent et attendre tout ce temps-là pour que les agriculteurs soient représentés par les leurs?

Pis encore, j'ai lu un peu plus loin dans cette mesure législative que les commissaires peuvent désormais fixer leur propre taux de rémunération. Cette décision n'a plus à être soumise au Cabinet et à faire l'objet d'un décret. Si c'est ainsi qu'on veut économiser l'argent des contribuables, je ne pense pas pouvoir appuyer ce projet de loi.

Il me fait penser à un aviculteur qui veut protéger ses volailles. Il cherche un chien de garde et quelqu'un lui présente un renard déguisé en chien en lui disant: «Voilà un bon chien de garde. Postez-le à l'entrée du poulailler.» Non seulement nous nous laissons duper par ce chien de garde, mais nous l'envoyons dans le poulailler et fermons la porte. Ce chien va pouvoir se rassasier


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à sa guise et déguster n'importe quel poulet qui lui plaît. Il m'est impossible d'appuyer cette mesure législative.

(1110)

L'article 84 est modifié de manière à déréglementer le transport du grain. Désormais, il vous faudra non seulement un permis d'exportation de la Commission du blé pour transporter le grain d'une province à l'autre, mais également une attestation de la Commission canadienne des grains prouvant que vous avez le droit de transporter votre propre grain. Est-ce logique? C'est ce que j'appelle une réglementation accrue et non de la déréglementation.

En tant qu'agriculteur et nouvel élu sur la scène politique, jamais je n'aurais cru voir un exercice de démocratie comme celui dont j'ai été témoin ce matin. Lorsqu'on me dit que je dois, en tant que député, accepter ce que le gouvernement désire et m'en satisfaire, sinon je n'aurai pas voix au chapitre, cela me contrarie énormément.

Je voudrais signaler aux députés d'en face que, aux prochaines élections, l'agriculteur et homme politique que je suis n'oubliera pas les décisions que vous aurez prises et continuera de rappeler aux agriculteurs de l'Ouest la façon dont nous avons été traités par les députés de l'autre côté de la Chambre.

Nous serons en pleine santé que nous quitterons ce monde. On peut dépenser des millions et des millions pour construire des piscines et des patinoires, mais on ne peut pas appuyer un système de transport du grain, faute d'argent.

L'autre jour, j'ai lu un communiqué où l'on disait que le gouvernement fédéral versera 4 millions de dollars à Winnipeg pour subventionner les services de loisirs. Pendant ce temps, nous n'avons pas les moyens d'améliorer la voie ferrée menant à Churchill. Nous mourrons peut-être de faim, mais nous mourrons en santé.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex): Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Prince-Albert-Churchill River.

Je tiens à appuyer moi aussi le projet de loi C-51, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada et cela, pour maintes raisons. Comme on l'a déjà fait remarquer, ces modifications sont fort avantageuses pour ce qui est d'améliorer la compétitivité des grains du Canada sur les marchés mondiaux, de mieux servir le secteur industriel et de protéger les céréaliculteurs et les contribuables.

Je félicite tous les responsables d'avoir mis au point un projet de loi aussi complet et utile. Je suis impressionnée de voir que le projet de loi renforce et respecte l'esprit original de la Loi sur les grains du Canada de 1912 tout en tenant compte des nombreux défis que posent les marchés céréaliers internationaux des années 90.

L'esprit de cette mesure législative était à l'origine et est toujours de défendre les intérêts des producteurs et c'est au nom des producteurs céréaliers que je présente mes observations aujourd'hui. Il est beau de défendre les intérêts des producteurs céréaliers, mais encore faut-il comprendre qui sont ces producteurs. Avant de rédiger ces modifications législatives, on a longuement consulté des représentants de tous les secteurs de l'industrie céréalière.

Et en premier, les organisations de producteurs céréaliers. Par l'intermédiaire de leurs représentants, ces organisations ont demandé à la Commission canadienne des grains de continuer à protéger l'intégrité du système canadien de manutention des grains, de garder et de renforcer le système qui a valu au Canada une réputation enviable sur le plan international pour la qualité de ses grains.

En même temps, ils ont dit avoir besoin d'une certaine souplesse pour conquérir de nouveaux marchés et relever de nouveaux défis, pour exploiter de nouvelles possibilités, pour s'adapter à une situation qui change rapidement. Donc, nous gardons et renforçons le système canadien de contrôle de la qualité du grain, d'une part, et, d'autre part, nous supprimons les contraintes qui sont devenues lourdes et contre-productives. C'est en gardant cela à l'esprit que je vais donner maintenant un aperçu des caractéristiques de ce projet de loi qui, du point de vue des producteurs, atteint admirablement ces objectifs.

(1115)

Afin de protéger l'intégrité du système canadien de classification qui, comme le comprennent les producteurs, met en valeur la qualité marchande de leur grain, la loi va renforcer la notion voulant que la qualité du grain qui passe par le système canadien de manutention du grain satisfasse aux besoins des utilisateurs ultimes.

Cela va contribuer à donner encore plus de force aux nombreuses petites choses que nous faisons au Canada pour nous assurer que seules les meilleures variétés de grain sont produites, commercialisées et expédiées par l'intermédiaire de notre système de manutention en vrac.

Avec l'évolution du système, la modification confirme que la qualité demeure le fondement de la stratégie de commercialisation des céréales au Canada.

L'engagement du Canada en faveur de la qualité des céréales sera renforcé par d'autres mesures. Par exemple, la définition de «grains contaminés» sera précisée et la responsabilité des exploitants de silos dans la manutention sûre de produits dangereux et dans l'élimination des grains contaminés sera clairement définie. Il est évident que cela sera à l'avantage des producteurs qui comprendront les raisons morales de la mesure et les avantages que la livraison d'un produit sûr et sain représente pour la mise en marché.

Par ailleurs, une modification confirmera le pouvoir de la commission de fixer des normes pour le séchage des grains. Cela est important, car souvent, on ne peut pas détecter les grains séchés selon de mauvaises techniques avant leur transformation. Le premier signe de l'existence d'un problème serait un client insatisfait.

La question du séchage a été soulevée le 22 septembre dernier à une réunion annuelle de la Commission ontarienne de commercialisation du blé, dans ma circonscription, Lambton-Middlesex. Lorsque ses principaux clients, soit les producteurs américains de la rive sud du lac Érié, exigent un blé ayant un pourcentage d'humidité de 13,5 p. 100, la commission a intérêt à disposer d'un moyen de le leur garantir.


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Il s'agit là d'une autre arme pour protéger la réputation du Canada pour ce qui est de la qualité des céréales. Cela améliore donc la position concurrentielle des producteurs de céréales canadiens.

Le projet de loi éliminera l'obligation de confier le transport interprovincial des céréales à des transporteurs publics. Cela permettra aux producteurs de choisir le moyen de transport leur permettant de réduire leurs coûts. En outre, le 8 juin dernier, les ministres de l'Agriculture et des Transports ont exprimé leur intention de modifier rapidement la Loi sur le transport des grains de l'Ouest, ce qui, conjugué à la disposition que je viens de mentionner, jette les bases d'un système juste et efficace de livraison des céréales dans toutes les régions du Canada.

Plusieurs autres modifications proposées à la Loi sur les grains du Canada reflètent les opinions exprimées par les producteurs, qui souhaitent qu'on continue d'assurer l'intégrité des transactions relatives au grain. Voici quelques-unes de ces modifications: les dispositions qui autorisent la commission à prendre des mesures contre les compagnies qui utilisent illégalement les appellations de grade prévues dans la Loi sur les grains du Canada; les dispositions qui exigent que les négociants titulaires de licences utilisent les appellations de grade prévues dans la Loi sur les grains du Canada dans toutes les transactions avec les producteurs; les dispositions qui précisent de quelle façon le grade, les impuretés et le taux d'humidité doivent être déterminés et consignés dès que le grain arrive au silo; les dispositions permettant la suspension des licences des exploitants de silos primaires où la surutilisation dépasse les limites permises.

La surutilisation est la différence entre la quantité de grain qu'il y a dans un silo comparativement à la quantité qu'il devrait y avoir dans ce silo d'après les documents d'expédition et les récépissés.

Enfin, le projet de loi comporte aussi des dispositions qui confirment le pouvoir de la commission de refuser de délivrer des licences aux compagnies qui, selon elle, ne sont pas fiables.

Ces dispositions vont bien avec celles qui donnent aux producteurs plus de responsabilités à l'égard des transactions relatives au grain. Je crois que cette approche équilibrée reflète une des valeurs fondamentales auxquelles tiennent les producteurs, l'industrie et le gouvernement, soit que nous sommes tous obligés de partager les risques et les responsabilités. Cette approche est avantageuse à la fois pour les producteurs, l'industrie et l'ensemble des Canadiens.

Ensemble, ces modifications à la Loi sur les grains du Canada offrent aux producteurs un train de mesures qui les aideront à travailler et à prospérer dans un marché céréalier mondial de plus en plus compétitif. C'est pourquoi j'encourage les députés de la Chambre à appuyer ce projet de loi.

(1120)

M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River): Madame la Présidente, j'interviens pour appuyer le projet de loi C-51 proposant certaines modifications à la Loi sur les grains du Canada. Nous avons là un gouvernement d'action. Je suis très fier du gouvernement actuel et notamment des mesures prises par le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire dont le travail est couronné de succès.

Je voudrais tout d'abord féliciter le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire qui a joué un rôle important dans le fructueux achèvement des négociations de l'Uruguay Round. Durant plusieurs années, la communauté internationale a été en proie à une guerre des subventions qui a eu une incidence très négative sur les prix des céréales et, partant, des répercussions très négatives pour les agriculteurs canadiens et l'économie du pays, surtout celle de l'Ouest qui dépend tellement des céréales.

Comme le Canada disposait d'un trésor bien moins garni que celui de nos concurrents d'Europe ou des États-Unis, nous ne pouvions pas soutenir la concurrence des subventions offertes par ces pays. Notre ministre a donc dû se battre énergiquement à la table des négociations du GATT pour faire réduire le niveau des subventions dans le monde, et ses efforts ont été couronnés de succès.

Avec le temps, les prix des grains augmenteront à mesure que diminuera le niveau des subventions. Nous pouvons tous lui en être reconnaissants. Cela sera bénéfique pour les agriculteurs de ma circonscription de Prince Albert-Churchill River et pour tous les agriculteurs canadiens. C'est une perspective dont nous pouvons tous nous réjouir.

Notre ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a en outre fait montre de talents de négociateur et de leadership en réussissant à conclure un bon arrangement pour les agriculteurs canadiens lors du différend qui nous a opposés récemment aux États-Unis en matière d'exportation de blé. Nous avons en effet obtenu des limites sur les exportations qui sont bien supérieures à tous les niveaux d'exportation de blé que nous ayons connus jusqu'ici.

Par ailleurs, nous avons obtenu un accord garantissant que les sanctions commerciales répressives prévues par les lois commerciales américaines ne s'appliqueraient pas pendant un an. Ainsi, le GATT pourra devenir efficace et faire obstacle au recours à ces tactiques commerciales sévères à l'avenir.

Ces mesures prises par le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire illustrent bien la manière dont le gouvernement aborde ces questions. Le gouvernement cerne les problèmes, il consulte tous les intéressés et il travaille d'arrache-pied avec eux pour trouver une solution.

Malgré la lourdeur de la tâche, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire ne s'est pas arrêté là. En allant chercher l'opinion du public, des agriculteurs, de leurs organisations, des sociétés céréalières, bref de tous les intéressés du secteur du transport du grain et de l'industrie céréalière, le ministre a proposé des modifications efficaces à la Loi sur les grains du Canada pour améliorer l'efficacité opérationnelle et administrative de la Commission canadienne des grains et de l'industrie céréalière.

Le monde change. La technologie progresse. La concurrence de plus en plus vive sur le marché international, le déficit fédéral et la protection des contribuables sont autant de préoccupations qui doivent nous retenir. Ce sont des problèmes auxquels nous devons nous attaquer. Il nous faut protéger tous les Canadiens, les agriculteurs et les contribuables.


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Les modifications proposées sont très variées, mais elles ont des conséquences appréciables. Certains changements sont d'ordre administratif ou de régie interne; ils modifient les définitions contenues dans la loi ainsi que certaines traductions, rendant ainsi la loi plus cohérente aux niveaux interne et externe.

D'autres modifications confèrent à la Commission canadienne des grains le pouvoir d'établir, par règlement, sous réserve de l'approbation du Cabinet, ce qui constitue une substance dangereuse, les documents financiers que doit présenter le titulaire de licence, les types de polices d'assurance que l'exploitant d'un silo doit posséder et la façon dont il doit se débarrasser du grain contaminé.

Dorénavant, c'est la Commission canadienne des grains, plutôt que le Cabinet, qui est habilitée à déterminer les allocations devant être versées aux membres des tribunaux d'appel pour les grains ou des comités de normalisation des grains. Il ne fait aucun doute que le Canada produit le grain de la meilleure qualité qui soit à l'échelle internationale. Les pays du monde entier le reconnaissent et s'ils ont le choix, ce sont nos grains qu'ils achèteront, à condition que nous demeurions des fournisseurs concurrentiels et fiables.

Les modifications à la Loi sur les grains du Canada réitèrent et reconnaissent l'engagement de longue date de notre pays par rapport à la qualité du grain. La qualité est un aspect très important de notre capacité de commercialiser nos grains. Nous devons continuer de faire tout notre possible pour la maintenir.

(1125)

Une modification confère aussi à la Commission canadienne des grains le pouvoir de fixer, par règlement, sous réserve de l'approbation du Cabinet, le délai concernant la réalisation d'une garantie donnée par un titulaire de licence à la Commission canadienne des grains, et elle fixe à 30 jours le délai dont dispose un producteur à la suite d'un défaut de paiement pour faire à la CCG une réclamation à l'égard de la garantie qu'elle détient.

Les modifications confèrent aussi à la Commission canadienne des grains le pouvoir de fixer une limite, sous réserve de l'approbation du Cabinet, au pourcentage de la valeur de la garantie qu'elle détient qui peut être réclamé. Les modifications stipulent clairement que la Commission canadienne des grains n'est responsable qu'envers les producteurs étant titulaires d'une licence délivrée par elle et ayant obtenu les documents prescrits au moment de la livraison du grain, jusqu'à concurrence du montant de la garantie donnée.

Ces dispositions sont là, entre autres choses, pour rassurer et protéger les contribuables aussi bien que les producteurs canadiens. Au cours des récentes consultations tenues auprès de tous ceux qui s'intéressent au transport du grain, il est devenu évident, afin de garantir la fiabilité des approvisionnements et de maintenir intacte la réputation bien méritée du Canada de fournisseur fiable de produits céréaliers, la Commission canadienne des grains doit être capable d'éliminer l'exigence relative à l'établissement de tarifs maximums.

Il est fort probable que ces modifications assureront le mouvement du grain dans nos ports et vers nos navires. En outre, ils nous feront économiser les frais de surestarie qu'il fallait auparavant verser parce que nombre de navires étaient immobilisés à vide dans les ports au lieu de transporter du grain.

Nous voulons tous que les paiements soient faits afin que le grain soit transporté plutôt que de rester sur place. C'est une mesure qui représente un net progrès. En outre, nous conservons la garantie que constitue le maintien, par la commission, du pouvoir d'établir des tarifs maximums, au besoin.

Le projet de loi renferme d'autres modifications visant à garantir une compétitivité accrue et équilibrée, une plus grande sécurité financière, une meilleure protection des contribuables et une plus grande flexibilité opérationnelle pour la Commission canadienne des grains.

Je tiens à féliciter notre ministre de l'Agriculture d'avoir présenté ces modifications afin d'aider l'industrie agricole canadienne à continuer de connaître du succès. J'estime que ce qui caractérise notre gouvernement et notre ministre de l'Agriculture, c'est que lorsqu'un problème surgit, nous mettons tout en oeuvre pour le régler et que nous aidons nos agriculteurs et les contribuables en adoptant des lois sensées, comme celle-ci.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Madame la Présidente, j'ai bien aimé cette intervention. Ça me réjouit d'entendre dire de bonnes choses au sujet du secteur agricole.

J'aimerais savoir si le député est au courant que l'article 705(5) de l'Accord de libre-échange précise qu'il ne peut y avoir de restrictions aux importations, à moins d'une production excessive attribuable à la mise en place de nouveaux programmes agricoles. Cette disposition, le gouvernement libéral savait pertinemment qu'elle figurait dans l'Accord de libre-échange qu'il a signé.

Je me demande également si le député se rappelle avoir entendu, une semaine avant que cet accord sur le blé ne soit signé, quelqu'un-je crois que c'était le ministre de l'Agriculture-dire qu'il valait mieux ne pas avoir de marché du tout qu'un mauvais marché. Le député aurait-il l'obligeance de se prononcer sur cette déclaration?

Du même coup, il pourrait nous donner des précisions sur les mesures prises pour résoudre les problèmes de transport, comme le transit des céréales, et nous renseigner sur le rythme de croisière du gouvernement pour savoir s'il va continuer de régler les problèmes aussi rapidement qu'il l'a fait jusqu'ici, puisque c'est un début encourageant.

M. Kirby: Madame la Présidente, je voudrais remercier le député de ses questions.

L'accord intervenu entre les États-Unis et le ministre de l'Agriculture dans le dossier du litige du blé est excellent pour le Canada. Si l'on fait l'histoire des relations entre les deux pays et des exportations de blé vers les États-Unis, on peut dire que le Canada est sorti gagnant de ces négociations.

(1130)

D'abord, le ministre a négocié le même niveau d'exportations très élevé et bien supérieur aux niveaux d'autrefois. En outre, et cela est encore plus important, à mon avis, il a obtenu que les deux pays acceptent un moratoire sur toute mesure commerciale


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éventuelle qui pourrait nuire à l'industrie des céréales de l'ouest du Canada. Ce délai permettra l'entrée en vigueur des dispositions du GATT et empêchera le gouvernement américain de mettre en application des mesures commerciales aussi draconiennes et sévères à l'avenir. Voilà une excellente mesure provisoire et des résultats remarquables qui nous incitent à féliciter le ministre de l'Agriculture.

Je voudrais ajouter, en réponse à la question du député, que le ministre de l'Agriculture fait de nombreuses démarches pour améliorer le système de transport des céréales. Ce projet de loi renferme certains exemples des efforts du ministre. Je tiens à dire que le gouvernement va appuyer les agriculteurs de l'ouest du Canada. Lorsqu'on entend le chef du parti du député déclarer qu'il y a trop d'agriculteurs dans l'Ouest, je peux vous dire que nous, du Parti libéral, ne sommes pas d'accord avec cette affirmation. Nous aimerions qu'il retire la déclaration faite à Halifax il y a deux ans environ. Voilà le genre d'appui que les producteurs reçoivent de l'autre côté de la Chambre.

M. Vic Althouse (Mackenzie): Madame la Présidente, je suis heureux d'entendre que le député de Prince Albert-Churchill River pense toujours que son gouvernement défend les intérêts des agriculteurs.

Il me semble toutefois que ce projet de loi et ses deux compagnons, qui viennent d'être déposés cet automne, ont pris un revirement assez considérable en faveur du secteur agroalimentaire et de l'agriculture d'affaires, en prévoyant des protections et des dispositions pour répondre à leurs besoins, parfois aux dépens de l'agriculteur.

Pour illustrer brièvement cette situation, pourrait-il nous expliquer, puisqu'il a soulevé la question dans son discours, comment des droits non limitatifs fixés par des exploitants de silo terminal peuvent aider les agriculteurs? Quel avantage un agriculteur peut-il avoir à apporter ses céréales à un silo terminal s'il découvre par la suite que les droits ont été modifiés?

M. Kirkby: Madame la Présidente, en ce qui concerne les droits qui seront exigés, j'estime que la libre concurrence qu'exerceront les différents expéditeurs dans les ports fera en sorte que les tarifs imposés seront raisonnables. Toutefois, la commission des grains conserve toujours le pouvoir de réglementer cette question.

Le député croit-il qu'il est sage que les agriculteurs paient pour des navires qui restent vides et ne transportent pas de céréales, ou bien qu'ils paient pour des navires qui transportent ces céréales, afin que le Canada continue d'être un fournisseur fiable sur tous ses marchés mondiaux?

M. David Chatters (Athabasca): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer au débat sur le projet de loi C-51, car cette mesure a des répercussions directes sur une industrie qui m'est très chère, à moi et à ma famille, étant donné que j'ai travaillé dans ce secteur toute ma vie.

Après avoir étudié cette mesure législative, je peux dire généralement que, à quelques exceptions près, il y a peu de dispositions que je n'appuie pas. Ce n'est pas qu'il s'agisse là d'un projet de loi remarquable ou complet, loin de là. Ma première impression, à la lecture de ce projet de loi, a été de me dire que le ministre avait demandé à ses bureaucrates de présenter une mesure législative qui montre bien que le gouvernement attache beaucoup d'importance à l'agriculture, qui ne suscite pas la controverse et qui ne soit ni novatrice ni nouvelle.

(1135)

Ce projet de loi officialise, en grande partie, ce qui existe déjà, à part quelques modifications mineures apportées aux procédures. Pourtant, le secteur céréalier est en crise et se trouve forcé de procéder à une restructuration en profondeur depuis quelques années, à cause des prix extrêmement bas qui s'expliquent par la guerre commerciale que se livrent les Américains et les Européens et une grave récession mondiale.

Cette restructuration fondamentale a eu des répercussions terribles sur d'innombrables familles qui cultivaient des céréales et des graines oléagineuses, surtout celles dont la production était destinée à l'exportation. Beaucoup de mes voisins ont perdu leur maison, leur famille et le travail de toute une vie pour ne pas dire, dans certains cas, celui de plusieurs générations.

Ceux qui ont réussi à survivre, grâce à la rationalisation de leurs opérations, au refinancement de leurs dettes ou à des revenus d'appoint, demandent au gouvernement, depuis un certain temps, de procéder à la même restructuration fondamentale des règlements et des services gouvernementaux offerts à ce secteur.

Il s'agit de prendre les règlements régissant le transport et la commercialisation de leurs récoltes pour offrir une plus grande latitude et plus de choix aux agriculteurs et pour répondre ainsi aux besoins actuels de ce secteur qui est basé sur des volumes élevés et des marges bénéficiaires peu élevées. Qu'est-ce que le gouvernement offre à cette nouvelle génération d'agriculteurs? Il ne fait rien, si ce n'est de maintenir le statu quo et de reprendre sous une forme quelque peu différente les idées éculées du passé.

Le projet de loi C-51 a pour objectif de faire en sorte que ce ne soit plus le gouvernement, mais le vendeur, qui s'assure de l'honnêteté de ceux qui achètent et vendent du grain. C'est peut-être la bonne voie à suivre, mais seulement si ces règlements sont suivis et respectés à la lettre, contrairement à ce qu'a fait l'ancien ministre de l'Agriculture qui s'est empressé de renflouer un certain nombre de producteurs ayant des liens étroits avec lui et éprouvant des difficultés, ce qui a coûté très cher aux contribuables.

Si c'est là l'importance qu'on accorde à ces règlements et procédures, cela importe peu alors qu'ils existent ou pas. On déréglemente également le secteur des silos pour établir un marché libre.

Ces initiatives seraient acceptables également si, du même coup, les agriculteurs étaient libres de vendre leurs récoltes où ils le voudraient et comme bon leur semblerait. Il y a vingt ans, il y aurait eu de grands avantages à déréglementer les tarifs des services offerts aux silos. À l'époque, presque tous les grains passaient par le système des installations primaires avant d'arriver au marché. Ce n'est plus le cas aujourd'hui.


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Une autre tendance troublante qui ressort des mesures législatives que ce gouvernement présente au sujet de l'agriculture et des autres secteurs de notre économie, c'est le mouvement en vue de réunir les pouvoirs décisionnels au Cabinet. Cette tendance ressort clairement dans les articles 2, 4, 9, 15, 33 et 35 et constitue un véritable affront aux députés qui ont été élus pour défendre les intérêts de tous les Canadiens.

Cette tendance devrait inquiéter tous les Canadiens dans tous les secteurs, mais elle est particulièrement troublante dans le secteur qui nous intéresse ici, celui de l'industrie céréalière. Je pense ici à un ancien premier ministre libéral qu'un ministériel a qualifié hier de meilleur premier ministre que le Canada ait jamais connu.

Bon nombre des députés d'en face faisaient partie de ce gouvernement. À mon avis, ce premier ministre a fait plus que quiconque pour détruire l'unité canadienne. Je me souviens très bien du mépris qu'il avait pour les producteurs de grain du Canada. Nous nous souvenons tous du geste obscène que Trudeau avait lancé aux producteurs de grain de l'Ouest.

Le gouvernement libéral d'aujourd'hui est en train de se montrer aussi méprisant à l'égard des personnes qui lui réclament de vrais changements et des mesures transparentes. Il a été très peu question des problèmes de l'agriculture dans le livre rouge. Par contre, le gouvernement s'est engagé à être efficace et transparent.

S'il était sincère quand il a pris cet engagement envers les Canadiens, pourquoi nous présente-t-il constamment des mesures législatives qui ne riment à rien et qui ne mènent nulle part? Pourquoi ne pas traiter ces rajustements mineurs dans le cadre d'un plan global qui viserait à restructurer les règlements sur la délivrance de licences aux nouvelles variétés végétales, à examiner les embouteillages dans le secteur du transport du

(1140)

Je voudrais démontrer brièvement certaines choses dont j'ai essayé de parler et que j'ai essayé de démontrer en avril dernier à un groupe de producteurs de ma région, qui essayaient d'obtenir à titre d'essai une licence pour cultiver une variété de chanvre utilisée dans la production de fibres industrielles. Celle-ci est cultivée depuis longtemps en France et en Grande-Bretagne, ainsi que, dans une certaine mesure, aux États-Unis, parce que ce produit n'a plus de propriétés hallucinogènes, on les a supprimées.

À mon avis, nous avons au Canada la possibilité d'être les premiers à mettre au point une nouvelle culture présentant un énorme potentiel pour la production de fibres industrielles. Un acre de chanvre peut produire autant de fibre que quatre acres d'arbres, et ce, en un an, alors qu'à la vitesse à laquelle nos arbres croissent, il faudrait 70 ou 80 ans à nos forêts pour produire la même quantité de fibre.

Afin d'aider ce groupe de producteurs, j'en ai parlé au ministre qui m'a répondu ceci dans une lettre qu'il m'a envoyée au bout de deux mois et demi environ: «Les renseignements que vous m'avez fournis justifient que l'on étudie la possibilité de produire le chanvre en tant que source de fibre industrielle sur une base commerciale.» Et d'ajouter un peu plus loin: «La mesure législative dont est actuellement saisi le Parlement permettrait à la ministre de la Santé de délivrer des licences aux producteurs de chanvre à des fins industrielles.» Il ajoute encore: «Le projet de loi C-7 poserait les assises d'un cadre juridique qui permettrait d'étudier la possibilité de cultiver le chanvre en tant que source de fibre industrielle.»

N'ayant pas pris conscience des possibilités énormes qu'offrait le projet de loi C-7, j'en ai fait un examen attentif pour voir où se trouvait cette disposition, mais je n'y ai trouvé aucune information concluante. Perplexe, j'ai communiqué avec les services de la ministre de la Santé qui parraine le projet de loi. J'ai aussi communiqué avec le ministère du Solliciteur général et avec le ministère de la Justice, et on m'a assuré aux trois endroits que le projet de loi C-7 ne contenait aucune disposition traitant de quelque manière que ce soit de la possibilité de tirer des fibres industrielles du chanvre.

Encore une fois, nous nous trouvons dans une impasse et nos efforts en vue de permettre aux agriculteurs canadiens de produire une culture qui offre d'énormes possibilités de rendement et qui pourrait supplanter certaines cultures traditionnelles peu rentables des Prairies semblent voués à l'échec.

Apparemment, le ministre n'était pas le seul à ne pas comprendre la question ou à ne pas être prêt à aider ce groupe, voire l'ensemble des agriculteurs de l'Ouest. C'est ce qui leur arrive constamment. Si, comme nous l'avons entendu il y a quelques instants, le gouvernement veut vraiment protéger l'industrie canadienne et l'aider à retrouver une partie de sa vigueur et de son équilibre financier, qui sont si importants pour les Canadiens, nous n'avons vu aucune indication en ce sens jusqu'à maintenant, du moins dans les projets de loi dont la Chambre a été saisie.

J'encourage le nouveau gouvernement, qui est dans la première année de son mandat, à proposer de nouvelles mesures, à apporter des changements réels et à écouter l'industrie qui exige et demande ces changements, au lieu du rafistolage et de l'absence d'action que nous avons pu constater jusqu'à maintenant.

M. Boudria: J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Conformément au paragraphe 43(2) du Règlement, je désire informer la Chambre que les députés du parti au pouvoir partageront désormais leur temps pour toutes les interventions sur ce sujet.

M. Lyle Vanclief (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Madame la Présidente, je voudrais tout d'abord présenter aux députés du Bloc québécois et du Parti réformiste les excuses du ministre qui ne peut rester pour le débat sur ce projet de loi en raison de fonctions officielles. Il m'a assuré qu'il lirait vos observations.


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(1145)

Je voudrais préciser une ou deux choses à l'intention du Parti réformiste. Le député de Lisgar-Marquette a fait des observations auxquelles nous n'avons pas pu répliquer immédiatement et c'est pourquoi j'aimerais le faire maintenant. Le député a parlé du blé Grandin. Je peux dire au député que peu de temps après avoir pris le pouvoir, le gouvernement a consulté l'industrie. Celle-ci estimait que le blé Grandin n'améliorerait pas la qualité de l'excellent produit que nous vendons. En conséquence, cette variété de blé n'a pas été homologuée.

Il a parlé d'un commissaire adjoint qui s'était occupé de cela. Je suis en mesure d'indiquer au député que cette personne n'est plus commissaire adjoint de la Commission canadienne des grains.

Je trouve cependant étrange-et j'aimerais bien un commentaire du député d'Athabasca à ce sujet-que le Parti réformiste, le grand défenseur de la libre entreprise, s'inquiète de ce que nous voulions, en tant que gouvernement, que tous ceux qui traitent avec la Commission aient une licence et déposent une garantie, un cautionnement afin de protéger les agriculteurs.

C'est un de nos devoirs. Je me demande ce qu'ils diraient si c'était un producteur de leur circonscription qui traitait avec quelqu'un n'ayant pas déposé de garantie.

Une dernière précision. Je voudrais faire remarquer aux députés du Parti réformiste et en particulier au député de Lisgar-Marquette qui disait que les commissaires étaient nommés à vie, que les commissaires sont nommés pour sept ans et les commissaires adjoints pour cinq ans. Je tenais à mettre ces précisions au compte rendu.

M. Chatters: Madame la Présidente, j'aimerais répondre brièvement à la question concernant l'obligation d'obtenir une licence de la Commission canadienne des grains et de verser un cautionnement. J'appuie ces initiatives qui sont plus importantes maintenant que jamais. Il y a quelques années, lorsque presque tous les grains produits dans ce pays passaient par le système des silos primaires et que ces derniers appartenaient à des sociétés qui les géraient et les dirigeaient elles-mêmes, ces règlements étaient moins importants.

Mais la prolifération actuelle des négociants en grains dans le monde entier rend cette protection plus importante que jamais.

Je me demande cependant pourquoi, alors que c'est des plus important, le gouvernement impose aux agriculteurs une responsabilité qui devrait relever de la Commission canadienne des grains, à savoir celle de déterminer qui détient une licence en bonne et due forme et qui a versé un cautionnement. J'appuie cette initiative et je crois que la plupart des producteurs sont d'accord aussi.

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain): Madame la Présidente, je veux exprimer mon appui au projet de loi C-51, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada.

Le projet de loi C-51 propose plusieurs changements nécessaires à la Loi sur les grains du Canada. Je crois que les producteurs, l'industrie céréalière et les Canadiens en général y trouveront tous quelque chose qui réponde à leurs attentes.

Je veux discuter particulièrement des éléments du projet de loi qui amélioreront la compétitivité de l'industrie céréalière du Canada, à l'échelle internationale. Le Canada est un pays commerçant, et il doit absolument être compétitif.

Dans notre monde de libéralisation des échanges, notre capacité de préserver et d'améliorer les conditions de vie des Canadiens est directement liée à notre niveau de compétitivité. Rares sont les industries canadiennes qui dépendent davantage du commerce international que l'industrie du grain. Nous exportons tous les ans de 25 à 30 millions de tonnes de grain, soit plus de la moitié de notre production annuelle. Nous arrivons au deuxième rang des principaux exportateurs, dans le monde, pour ce qui est du blé et de l'orge. Pour d'autres grains, par exemple le canola et le lin, nous sommes le plus grand exportateur au monde. Il n'y a aucun doute que ce sont les échanges internationaux qui permettent de soutenir l'industrie du grain, et que le succès de notre industrie est essentiel à la santé et au bien-être de nos collectivités rurales, surtout dans l'Ouest.

(1150)

Le rôle du gouvernement est en partie d'assurer une réglementation qui renforce les efforts des Canadiens pour créer, produire et soutenir la concurrence. Pour ce faire, il faut entre autres concevoir de nouvelles lois qui soutiennent nos intérêts communs. Il faut aussi retirer les lois qui ne sont plus utiles ou qui ne servent plus leurs fins.

Le projet de loi C-51 comporte une importante initiative, la déréglementation des plafonds des tarifs des silos. Les tarifs des droits d'élévateurs à grains correspondent aux frais que les sociétés exploitant des silos-élévateurs imposent pour leurs services concernant, entre autres, la manutention, le stockage, le nettoyage et le séchage. En vertu de la Loi sur les grains du Canada actuelle, la Commission canadienne des grains régit les tarifs en établissant des plafonds; les exploitants doivent en outre donner un préavis de 14 jours quand ils veulent hausser les tarifs.

Selon le projet de loi C-51, la CCG ne plafonnera plus les tarifs et les exploitants pourront modifier leurs tarifs sans aviser la CCG à l'avance.

Certains s'opposeront à cette mesure en accusant le gouvernement d'abandonner les producteurs et de les exposer aux frais excessifs imposés par des exploitants. Un examen plus approfondi montrera toutefois qu'il n'est plus nécessaire de plafonner les tarifs et que les producteurs sont amplement


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protégés contre les frais excessifs. L'établissement de tarifs maximaux par le gouvernement remonte au temps où les producteurs étaient moins en mesure de se protéger contre la fixation de prix inéquitables. Cependant, étant donné que des sociétés appartenant à des producteurs ou contrôlées par eux exploitent aujourd'hui la plupart des silos-élévateurs au Canada, nous jugeons que le gouvernement n'a plus autant besoin d'intervenir à ce chapitre au nom des producteurs.

Sur la côte ouest, des sociétés appartenant à des producteurs ou contrôlées par eux possèdent 54 p. 100 de la capacité des installations terminales. À Thunder Bay, cette proportion est de 75 p. 100. Il est donc logique que ces sociétés agissent dans les intérêts des producteurs propriétaires et fixent des prix concurrentiels. Faute de concurrence, le gouvernement n'a pas besoin de fixer les prix.

Même si nous croyons que les exploitants de silos-élévateurs se montreront responsables, nous avons inscrit dans le projet de loi C-51 de nombreuses garanties pour les producteurs. L'établissement de tarifs maximums sera éliminé graduellement. Au début, la commission conservera son pouvoir de plafonner les tarifs par décret pour une période de transition de deux ans. Après cette période de transition, la commission aura toujours le pouvoir de réglementer pour établir des tarifs maximums, si nécessaire. Pendant et après la période de transition, la CCG jouera un rôle de médiation en donnant suite aux plaintes et en cherchant des solutions.

Compte tenu du comportement responsable des sociétés intéressées, nous avons raison d'être optimistes face à la récolte actuelle; les exploitants des silos terminaux ont été autorisés, par décret de la commission, à établir leurs propres tarifs des droits d'élévateurs à grains. Dans la plupart des cas, les hausses ont été faibles et, dans l'ensemble, très équitables. Cela est de bon augure et, à mon avis, permettra au marché de fonctionner plus librement, de sorte que tout le monde en bénéficiera. Parmi les avantages, on peut s'attendre à de plus forts investissements de capitaux par les exploitants et à une flexibilité et compétitivité plus grandes en ce qui concerne les silos-élévateurs.

Au fait, la réglementation n'a pas empêché l'établissement de tarifs élevés. Par exemple, pour plusieurs raisons, les tarifs des États-Unis sont moins réglementés et moins élevés que ceux du Canada.

Cet amendement traduit donc notre engagement à supprimer la réglementation qui limite la compétitivité de l'industrie canadienne. Le projet de loi C-51 prévoit d'autres initiatives similaires. Ainsi, il n'y aura plus de pesage de contrôle aux silos de transformation. Le pesage de contrôle est une vérification visant à attester que le volume et la qualité du grain entreposé dans un silo correspondent à ce qui a été déclaré. Le pesage de contrôle contribue à préserver l'intégrité des transactions effectuées aux installations terminales et aux silos de transbordement, car les exploitants de ces silos manutentionnent souvent du grain qui ne leur appartient pas. Toutefois, les exploitants de silos de transformation sont propriétaires du grain qu'ils entreposent. Par conséquent, le pesage de contrôle entraîne, pour eux, des frais inutiles et mine, par conséquent, leur compétitivité.

(1155)

J'ai déjà mentionné la nécessité d'avoir des lois ajoutant de la valeur aux efforts des Canadiens. J'ai signalé que cela impliquait, à mon avis, la suppression d'obstacles inutiles, comme l'établissement de tarifs maximaux et le pesage de contrôle aux silos de transformation. Cela signifie également qu'il nous faut, de temps à autre, adopter de nouvelles lois.

Le projet de loi C-51 renferme des dispositions renforçant le rôle que l'égalité joue dans l'industrie céréalière du Canada. De plus, le projet de loi C-51 établit la responsabilité des exploitants de silos en ce qui concerne la manutention des substances dangereuses et l'élimination du grain contaminé. Il confirme le pouvoir de la CCG d'établir des normes relatives au séchage du grain. Toutes ces mesures ajoutent de la valeur au grain canadien et servent à accroître la compétitivité du Canada sur la scène internationale.

En terminant, je désire signaler que le projet de loi C-51 est le fruit de nombreuses consultations menées auprès des représentants de tous les secteurs de l'industrie céréalière. Les organisations de producteurs ont joué un rôle important dans ces consultations, de même que les entreprises de stockage, de transformation et de commercialisation du grain. Étant donné que le projet de loi C-51 jouit d'un large consensus au sein de l'industrie, j'estime qu'il mérite l'appui de tous les députés.

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris): Madame la Présidente, je tiens à me prononcer aujourd'hui en faveur du projet de loi C-51, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada.

Le projet de loi C-51 est louable à bien des égards. Il répond au besoin de réforme en matière réglementaire. Il prévoit des garanties nécessaires pour les producteurs et pour les contribuables, et il donne à la Commission canadienne des grains un plus grand nombre des outils dont elle a besoin pour travailler au nom des producteurs, du secteur céréalier et des Canadiens en général.

Le projet de loi C-51 comporte maints aspects qui valent la peine d'être signalés. Celui dont je tiens à parler, toutefois, est l'accent qui y est mis sur la qualité des céréales.

Nous dépendons beaucoup du commerce international. Comme l'a fait remarquer ma collègue, nous exportons de 25 à 30 millions de tonnes de grain par année, soit plus de la moitié de notre production céréalière annuelle. On ne dira jamais assez à quel point la qualité du grain est cruciale pour notre réussite sur les marchés internationaux. Aucun autre facteur n'est aussi essentiel à la commercialisation impressionnante sur le plan international qui est la nôtre dans ce domaine.

Lorsqu'on songe aux inconvénients que subissent les producteurs canadiens, on comprend pourquoi la qualité est devenue notre atout de commercialisation. Nos producteurs sont plus loin des ports d'exportation que tout autre de leurs concurrents étrangers. Notre climat rigoureux ne favorise pas de hauts rendements. Notre assiette fiscale est plus petite que celle de nos concurrents et nous ne pouvons pas compter sur les subventions à l'exportation. Il ne nous reste plus qu'à jouer la carte de la qualité et le Canada le fait très bien.

Avec peut-être 20 p. 100 du marché international, le Canada est en moyenne le deuxième plus grand exportateur de blé au


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monde, devant la Communauté européenne, l'Australie, l'Argentine et tous les autres. Nous ne sommes dépassés que par les États-Unis. Nous sommes au deuxième rang pour l'orge, accaparant plus de 30 p. 100 du marché international. Nous dominons plus de 40 p. 100 des marchés mondiaux du canola, soit à peu près autant que tous les pays de l'Europe occidentale réunis. Nous sommes uniques en ce sens que nous sommes le seul grand exportateur de ce produit.

Le Canada est le plus grand exportateur de graines de lin au monde, accaparant plus de 70 p. 100 du marché. Le refus du Canada de livrer autre chose que des cargaisons de qualité uniforme et constante nous a bien servis. Étant donné que la CCG joue un rôle central dans le système canadien du transport du grain, je constate avec plaisir que des dispositions du projet de loi C-51 renforcent cette stratégie de commercialisation.

Par exemple, une disposition permet à la CCG de mettre au point des méthodes, visuelles ou autres, pour déterminer les caractéristiques du grain en vue de satisfaire aux critères de qualité des commandes de grain. Cette modification est importante, car elle donne à la commission le pouvoir de préciser des méthodes pour déterminer la qualité du grain, de telle sorte que le secteur industriel livre du grain de la qualité désirée par les utilisateurs ultimes.

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Compte tenu de l'expertise de la Commission canadienne des grains en évaluation de la qualité des céréales, la modification lui permettra de voir à ce que les nouvelles méthodes et techniques aident à répondre aux besoins des consommateurs et d'accroître les profits des producteurs.

Une autre disposition du projet de loi C-51 confirme le pouvoir de la CCG de réglementer la manutention des céréales et des produits dangereux dans les silos. Cette disposition renforce l'engagement du Canada en faveur d'aliments sûrs et sains et de la protection de l'environnement.

Enfin, le projet de loi C-51 confirme le pouvoir de la CCG de fixer des normes sur le séchage des grains. La commission s'intéresse à cet aspect depuis longtemps parce que de mauvaises techniques de séchage peuvent altérer sérieusement la qualité des céréales. Souvent, les dommages ne sont pas visibles à l'oeil nu et les problèmes n'apparaissent qu'au moment de la transformation. C'est pourquoi la commission a fait de grands efforts pour informer les producteurs et les autres personnes du milieu des bonnes techniques. La disposition donnera plus de pouvoir à la CCG à cet égard.

Certains croient que le Canada attache trop d'importance à la qualité des céréales. Ils soutiennent que dans un monde affamé, il est inutile pour le Canada de faire tout ce qu'il fait pour que ses céréales répondent aux normes élevées qui ont fait sa réputation.

Je crois pour ma part que l'importance de la qualité ira grandissante. Avec la ratification du GATT, des barrières tarifaires seront abattues partout dans le monde et les subventions fondront comme neige au soleil. Pour conserver leur position et soutenir notre concurrence, nos compétiteurs les plus riches, en Europe et aux États-Unis, devront accorder plus d'attention à la qualité. Certains indices nous permettent déjà de croire qu'ils commencent à comprendre.

Je terminerai en citant les paroles qu'un client du Canada prononçait au symposium international organisé par la Commission canadienne des grains l'an dernier: «Le système canadien actuel, où la stratégie de commercialisation repose sur la qualité à tous les niveaux pour garantir l'exportation de 80 à 90 p. 100 de la récolte totale de blé, est unique dans le monde. Si nous commençons à changer les choses pour accroître nos ventes à court terme, nous deviendrons très rapidement un fournisseur parmi tant autres, c'est-à-dire un fournisseur comme le monde en compte déjà beaucoup trop.»

Cette position a été réitérée par bien des orateurs à la conférence. Mais, bien sûr, la fidélité de nos clients en dit beaucoup plus long sur ce qu'ils pensent de la qualité de notre produit.

Le projet de loi C-51 renforce le système d'assurance de la qualité des céréales canadiennes. Pour cette seule raison, il mérite notre soutien.

M. Ray Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer à ce débat sur le projet de loi C-51, qui vise à modifier la Loi sur les grains du Canada.

C'est la deuxième fois que j'ai l'occasion de parler à la Chambre d'un projet de loi portant sur l'agriculture, l'autre étant le projet de loi C-50, que nous avons débattu la semaine dernière.

Dans le projet de loi C-50, nous avons pris des mesures visant à donner aux producteurs un plus grand contrôle à l'égard de la recherche agricole. Le projet de loi C-51, que nous étudions aujourd'hui, vise à donner à la Commission canadienne des grains une plus grande flexibilité opérationnelle et à rehausser la compétitivité dans l'industrie du grain. Ce sont certes là deux objectifs valables pour un organisme qui est responsable d'un aspect très important de l'industrie céréalière au Canada. Il est essentiel de confier à cet organisme ce genre de responsabilités.

Le Parti réformiste appuiera ce projet de loi aujourd'hui, tout comme nous avons appuyé le projet de loi C-50. Nous profiterons toutefois de l'occasion pour exprimer certaines de nos préoccupations plus générales au sujet de l'avenir de l'agriculture au Canada. Plus particulièrement, nous aimerions mettre l'accent sur le fait que, à l'origine, les organismes comme la Commission canadienne du blé, ont été créés par le gouvernement dans le but d'aider les agriculteurs canadiens. Nous croyons que ces organismes deviennent de plus en plus des obstacles au marché libre et qu'il conviendrait de réexaminer leur raison d'être à ce moment-ci de notre histoire.

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Comme on a déjà longuement parlé des détails du projet de loi C-51 à la Chambre, j'ai l'intention de prendre quelques instants pour soulever un ou deux points concernant un aspect particulier de cette mesure législative avant de passer à d'autres sujets liés à l'agriculture au Canada.

L'aspect du projet de loi C-51 dont je veux parler porte sur l'élimination de certains des obstacles au commerce interprovincial pour les agriculteurs. L'article 25 abolit les


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restrictions relatives au transport du grain d'une province à une autre ainsi que celles relatives au transport du grain par des transporteurs publics.

Cette mesure représente un pas dans la bonne direction, mais il convient de se poser une question très importante: Pourquoi y aurait-il encore quelque restriction que ce soit en ce qui concerne le commerce à l'intérieur du Canada? Pourquoi ne pouvons-nous pas avoir des frontières ouvertes et permettre la libre circulation des marchandises dans le pays afin de donner des chances égales à tous les Canadiens? Je crois que c'est là un point important qui doit être examiné non seulement par le gouvernement fédéral, mais aussi par chacune des provinces. Nous devons unir nos efforts pour améliorer l'industrie agricole.

Il y a plus d'obstacles au commerce interprovincial au Canada qu'il y a d'obstacles au commerce entre les pays membres de la Communauté européenne. C'est un point qui a déjà été mentionné à la Chambre par un de mes collègues. Pourquoi alors faut-il que la Commission canadienne des grains impose quelque restriction que ce soit en ce qui concerne le transport du grain de l'étranger au Canada ou vice versa dans ce projet de loi?

Par ailleurs, pourquoi la Commission canadienne du blé empêche-t-elle les agriculteurs canadiens de profiter pleinement des possibilités de commerce international créées par la conclusion de l'Accord du GATT et de l'ALENA? Ne devrait-on pas l'obliger à éliminer certaines des restrictions qu'elle impose actuellement aux agriculteurs?

J'ai dit l'autre jour à la Chambre que nous devrions éliminer certaines de ces restrictions pour que les agriculteurs puissent pénétrer sur un marché international plus libre ou déterminer leurs propres marchés. On devrait imposer certaines restrictions ou un certain cadre d'action aux agriculteurs qui désireront plus tard exercer certaines activités commerciales par le truchement de la Commission canadienne du blé.

Nous, les agriculteurs, ne pouvons pas tout avoir, un organisme créé par le gouvernement et le marché libre. Il faut qu'il y ait un compromis quand ce genre de possibilité s'offre à nous.

Les réformistes ont déjà démontré clairement la nécessité de réformer la Commission canadienne du blé. Ce n'est là cependant qu'un exemple des problèmes agricoles auxquels notre assemblée doit s'attaquer.

Quand on parle du secteur agricole, il est important de constater que ce sont les agriculteurs qui prennent l'initiative touchant les principaux problèmes actuels. Le ministre nous l'a dit très clairement dans son intervention ici au début de la séance: le projet de loi dont nous sommes saisis est attribuable à l'initiative des agriculteurs et des organismes agricoles, et j'en suis certainement très heureux.

Nous constatons souvent dans ces circonstances que le gouvernement fait des pieds et des mains pour s'adapter aux attitudes du monde agricole. C'est très certainement le cas actuellement dans le débat concernant la Commission canadienne du blé.

J'ai lu un article du Financial Post portant sur les ventes directes de grains aux marchés américains que la Commission canadienne du blé considère illégales à l'heure actuelle. Ces ventes sur les marchés américains représentent maintenant environ 20 p. 100 du volume total des exportations canadiennes de grains aux États-Unis.

Nous ne pouvons qu'espérer que cette manifestation massive d'une certaine désobéissance civile de la part des producteurs canadiens de blé convaincra le gouvernement qu'il faut apporter des changements aux pratiques de la Commission canadienne du blé. Je le répète, c'est une situation où les agriculteurs prennent l'initiative, trouvent des marchés et maintiennent la stabilité économique de leur exploitation agricole. Le gouvernement n'a cependant pas examiné la situation et réagi de façon positive.

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La même tendance s'observe dans les restrictions au transport du grain de l'est vers l'ouest et dans la réticence du gouvernement à créer un marché continental de l'orge. Dans les deux cas, des agriculteurs excédés ont décidé de ne pas attendre le gouvernement pour apporter des changements. Ils prennent eux-mêmes les choses en main. Ensuite, il nous appartient de réagir et nous devons recommander ces changements au gouvernement libéral. Notre assemblée doit dominer la situation et se montrer capable de répondre aux agriculteurs lorsque ceux-ci perçoivent un besoin.

À ce propos, j'ai lu avec intérêt que le ministre de l'Agriculture avait promis aux céréaliculteurs un débat sur l'avenir de la Commission canadienne du blé à l'occasion d'une assemblée spéciale cet automne. Je le félicite.

Je l'encourage aussi à faire un pas de plus et à tenir un référendum sur le monopole de la vente attribué à cet organisme. Il est clair que l'agriculture canadienne a beaucoup changé depuis 1912, année où la Commission canadienne des grains a été créée.

La prochaine décennie sera cruciale pour l'agriculture. Les agriculteurs, au moment où ils se préparent à faire les rajustements exigés par le GATT et la libéralisation des échanges, ont besoin d'un gouvernement qui soit prêt à les aider à acquérir l'avantage concurrentiel nécessaire pour livrer concurrence de mieux en mieux sur les marchés mondiaux. C'est dans ce contexte, celui d'un marché planétaire, que nous devons nous préparer. Il ne faut pas se limiter au Canada. Ni aux États-Unis. C'est pour le marché mondial que les agriculteurs travaillent aujourd'hui.

Le Parti réformiste a travaillé fort à l'élaboration d'une stratégie agricole complète et équilibrée qui soit à la hauteur des besoins et des défis du XXIe siècle, besoins et défis que nous expliquerons à cette assemblée.

Pour sa part, le gouvernement libéral, cela me déçoit un peu, semble naviguer de crise en crise, et les mesures proposées à la Chambre semblent inspirées par la fonction publique. Il est vrai que c'est là le point de vue des agriculteurs et de leurs associations et non des législateurs de cette assemblée.

Les projets de loi C-50 et C-51 sont de bonnes mesures en soi, mais non dans le contexte plus large que nous devons considérer, à titre de dirigeants du secteur agricole. Ce sont des mesures modestes limitées à des rajustements mineurs et à certains éléments du régime agricole.


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Quand le gouvernement réagira-t-il aux pressions croissantes, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Canada, et proposera-t-il les mesures législatives d'importance qui sont nécessaires aux agriculteurs d'un pays tel que le nôtre?

M. Bernie Collins (Souris-Moose Mountain): Madame la Présidente, j'ai écouté avec intérêt ce qu'a dit le député d'en face. Je le félicite d'avoir la sagesse d'appuyer les projets de loi C-50 et C-51.

Voici un résumé de son exposé. Il veut que le secteur agricole et les agriculteurs en général puissent se prononcer sur l'orientation que nous adopterons, et de notre côté, nous nous sommes engagés, dans le livre rouge, à continuer de soutenir la Commission canadienne du blé.

Le député d'en face peut demander pourquoi le gouvernement ne tient pas de référendum. Voici ce que j'aimerais qu'il m'explique. À son avis, n'est-il pas préférable de connaître préalablement l'opinion de tous les milieux agricoles que de préconiser la tenue d'un référendum et de recommander l'orientation qu'il convient d'adopter?

Actuellement, il dit au gouvernement de ne pas bouger. J'appuie ces dispositions. Nous devons le faire. Certaines des mesures que nous proposons dans le projet de loi C-51 visent cet objectif. J'aimerais savoir comment le gouvernement peut aller de l'avant et tenir un référendum tout en permettant maintenant aux milieux agricoles, par l'entremise du ministre de l'Agriculture, de faire part de leurs opinions avant que ne soit adopté le projet de loi.

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M. Speaker (Lethbridge): Madame la Présidente, en résumé, le ministre de l'Agriculture n'a pas dit clairement aux agriculteurs, notamment ceux de l'Ouest et ceux qui sont assujettis à la Commission canadienne du blé, que la tenue d'un référendum était une possibilité. Il n'est pas clair que cette possibilité existe.

Il serait bon que le gouvernement annonce la tenue d'un référendum et, en prévision de celui-ci, tienne des audiences importantes devant le comité permanent de l'agriculture de la Chambre, afin de déterminer le libellé, la teneur de la question et les répercussions des réponses à la suite du référendum.

Actuellement, nous ne savons pas très bien ce qui va se produire ni en quoi consiste l'engagement du gouvernement. Si le gouvernement prenait un engagement en ce sens, nous pourrions alors aller de l'avant.

M. David Iftody (Provencher): Madame la Présidente, je prends la parole pour dire que j'appuie le projet de loi C-51, qui modifie la Loi sur les grains du Canada. Ce projet de loi comprend de nombreux éléments positifs, des mesures qui favoriseront la prospérité et, à mon avis, la compétitivité de nos agriculteurs, pour le plus grand bien des Canadiens.

Les dispositions de ce projet de loi qui m'intéressent portent sur la suppression de l'obligation du gouvernement consistant à établir des tarifs maximums pour les services fournis par les exploitants de silos de transbordement et d'installations terminales.

Pour les députés qui ne connaissent pas bien le secteur du grain, le tarif, c'est ce que les silos font payer pour des services comme la manutention, le nettoyage, le stockage et le séchage du grain. Selon le libellé actuel de la Loi sur les grains du Canada, la Commission canadienne des grains est tenue d'établir, par règlement, un tarif maximum pour chaque service fourni par les silos. Si une compagnie veut modifier son tarif, elle doit donner un avis de 14 jours à la commission. Si elle veut offrir un nouveau service, elle doit attendre que la commission établisse un tarif maximum pour ce service.

Cette loi date d'une époque où les agriculteurs avaient peu d'options de commercialisation et où les associations de producteurs étaient relativement faibles. Dans les premières décennies de ce siècle, ces dispositions étaient utiles parce que les compagnies de silos n'étaient pas toujours aussi honnêtes qu'elles auraient dû l'être et les agriculteurs étaient vulnérables. Des modifications ont donc été apportées, à un moment opportun, pour accorder aux producteurs une certaine protection à laquelle tous les députés, je n'en doute pas, sont favorables.

Dans le secteur des grains des années 90, toutefois, ce genre d'intervention de l'État, comme mes collègues du Parti réformiste en conviendront, ne profite plus aux producteurs parce qu'elle dresse des obstacles inutiles sur la route des compagnies de silos.

Je ne suis pas le seul à penser ainsi. Cette opinion est aussi celle de l'industrie des céréales et des groupes de producteurs, comme l'atteste l'examen de la réglementation relative aux céréales et aux oléagineux effectué en 1992. Comme le ministre l'a déclaré ce matin, 57 groupes ont été consultés et, en plus, nous avions reçu des réponses par écrit. Le gouvernement partage le point de vue de ces groupes représentatifs.

Si les principaux participants souhaitent cette modification, de quel droit refuserions-nous? Nous allons nous plier à leur demande. Nous avons conclu que la réglementation des tarifs maximums pour les services offerts aux silos n'était pas dans l'intérêt du secteur céréalier. Nous croyons que la suppression de ces tarifs encouragera les investissements dont on a un urgent besoin de la part des exploitants de silos. Nous sommes donc persuadés que les mesures que nous proposons aujourd'hui accroîtront la souplesse et la compétitivité du secteur des silos.

Quelles sont les modifications que nous proposons? Tout d'abord, on va éliminer l'obligation pour la Commission canadienne des grains d'établir des tarifs maximums pour les services offerts aux silos. Les exploitants de silos vont décider eux-mêmes du montant qu'ils vont exiger pour leurs services. En outre, même si nous continuons de leur demander de


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soumettre leurs tarifs à la commission, ils ne seront plus tenus d'aviser la commission 14 jours à l'avance lorsqu'ils souhaitent modifier leurs tarifs. On donnera ainsi à ces entreprises la même liberté dont jouissent d'autres sociétés et d'autres groupes dans les domaines de l'agriculture et de l'agroalimentaire, c'est-à-dire la liberté d'ajuster rapidement leurs prix pour répondre aux conditions du marché local.

Nous avons discuté de ces notions en ce qui a trait à la Commission canadienne du blé et à d'autres types d'institutions qui travaillent pour les céréaliers canadiens et nous sommes persuadés que c'est la façon de répondre aux besoins de ces créneaux sur le marché. Il en est question dans ce projet de loi. En outre, les exploitants n'auront plus à exiger le même tarif à tous leurs silos. Ils auront donc davantage les coudées franches pour établir leurs tarifs.

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Nous n'allons pas apporter ces modifications du jour au lendemain. Je le répète, sur les conseils des producteurs et en agissant prudemment avec les sociétés céréalières, nous avons reconnu la nécessité de prévoir une période de transition. Pendant deux ans, la Commission canadienne des grains conservera le pouvoir d'établir des tarifs maximums par décret, si le tarif exigé est exagéré. Il existe donc des poids et contrepoids et ces mesures de protection sont là pour les députés qui représentent des céréaliers dans leur région susceptibles de s'inquiéter au sujet de modifications peut-être draconniennes qui pourraient ne pas avoir le résultat escompté. Eh bien, nous pouvons compter sur ces contrôles.

À la fin de cette période de transition de deux ans, la commission aura encore le pouvoir de faire enquête sur des plaintes. On espère que les problèmes qui pourraient survenir après cette période de transition de deux ans seront réglés grâce à la discussion et à la pression morale. Ainsi, nous voulons ramener les gens intéressés à la table des négociations pour discuter de leurs craintes et des problèmes qui pourraient être encore évidents dans la politique du gouvernement.

Quoi qu'il en soit, le gouvernement se réserve le pouvoir d'intervenir au besoin. La commission sera encore en mesure d'imposer à nouveau des tarifs maximums, sous réserve de l'approbation du gouverneur en conseil, si les circonstances l'exigent.

Inévitablement, dans une situation comme celle-ci, il faut tout d'abord se demander en quoi cette mesure touchera les producteurs. Je crois que tous les députés qui participent à ce débat aujourd'hui se préoccupent d'abord et avant tout de l'intérêt des producteurs.

Or, la protection de l'intérêt des producteurs céréaliers demeure l'un des principaux objectifs de cette loi. Le gouvernement a apporté à la loi de nombreuses modifications qui seront avantageuses pour les producteurs, et tel est le cas pour cette modification en particulier.

Alors, comment les producteurs sont-ils protégés, étant donné la déréglementation des tarifs? Tout d'abord, il y a un aspect important que je désire souligner, notamment aux membres du Parti réformiste, et je parle ici du Manitoba. Ces producteurs possèdent ou contrôlent leurs propres sociétés d'exploitation de silos pour protéger leurs intérêts. Je songe à des sociétés comme l'Union des producteurs de grain. Les Manitoba Pool Elevators, qui comptent 18 000 membres au Manitoba, sont propriétaires des silos. Les intérêts des propriétaires et ceux des agriculteurs ne font donc qu'un. Il n'y aura pas de problèmes d'assujettissement et de conflits d'intérêts qui feront qu'on profitera des producteurs qui apportent leurs céréales aux silos si ces producteurs sont engagés à ce point dans le système.

Il y a également le Saskatchewan Wheat Pool et l'Alberta Wheat Pool. Nous ne croyons pas un seul instant-et j'en suis convaincu-que les agriculteurs laisseront leurs propres sociétés profiter d'eux. Les coopératives appartenant à des producteurs sont des joueurs redoutables dans l'industrie céréalière. À Thunder Bay, par exemple, des sociétés possédées ou contrôlées par des producteurs exploitent 75 p. 100 de la capacité des silos terminaux.

Comme le député de la Saskatchewan l'avait mentionné précédemment, sur la côte ouest, les producteurs possèdent 54 p. 100 de cette capacité; ils sont donc actionnaires majoritaires. Dans l'intérêt de leurs propriétaires, ces sociétés maintiendront une pression à la baisse sur les tarifs, obligeant les sociétés privées à rivaliser avec elles. En outre, la plupart des producteurs auront des choix qu'ils n'avaient pas en 1912, lorsque la Loi sur les grains du Canada a été adoptée. S'ils n'étaient pas satisfaits des tarifs imposés par une société, ils apportaient leurs céréales à une autre. Offrir des possibilités est le secret de cet avantage concurrentiel et de la libre concurrence. La concurrence permettra de maintenir les tarifs à un niveau raisonnable et, dans certains cas, j'en suis convaincu, de les réduire.

Si les sociétés possédées par des céréaliers qui exercent une concurrence sur le marché ne peuvent pas établir des prix équitables, la Commission canadienne des grains peut toujours faire enquête. Elle pourra limiter les tarifs. En outre, elle conservera le droit de fixer des tarifs maximums par règlement. Toutefois, elle n'exercera ce droit que dans des situations extrêmes.

Les députés peuvent être assurés que, même avec la déréglementation des tarifs, la Commission canadienne des grains disposera des moyens juridiques nécessaires pour défendre les intérêts des céréaliers, que ce soit à Lisgar-Marquette, Provencher ou Brandon-Souris, les importantes circonscriptions manitobaines où se trouvent les céréaliers.

En terminant, j'encourage les députés à appuyer ce projet de loi. Je remercie ceux qui l'ont fait. À mon avis, il offre à nos producteurs de céréales de grandes possibilités de devenir plus concurrentiels. Par la même occasion, il conserve des moyens appropriés pour protéger les vrais intérêts des producteurs si ces intérêts étaient menacés.

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M. Vic Althouse (Mackenzie): Madame la Présidente, je remercie le député de ses propos. J'ai deux questions pour lui.

Selon lui, le problème que pose aux sociétés céréalières la fixation des tarifs concernant les nouveaux services va être résolu par le simple fait qu'elles n'auront pas à déclarer ces services à la Commission des grains et que le système sera complètement déréglementé. Le député voudrait-il donner à la Chambre une idée des nouveaux services qui pourraient entraîner des frais supplémentaires?


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La deuxième chose qui a attiré mon attention, c'est son argument préconisant que, contrairement à la situation qui régnait au début du siècle, les sociétés céréalières font maintenant preuve d'une honnêteté irréprochable lorsqu'elles traitent avec leurs clients ou leurs fournisseurs, les agriculteurs. Je voulais lui signaler que, chaque année, on constate qu'il y a des sociétés céréalières qui font des affaires au niveau international, aussi bien que des sociétés céréalières qui transigent au Canada et aux États-Unis, qui trompent leurs clients sur le poids, qui ne livrent pas les bons grades, qui n'acquittent pas le plein montant, et ainsi de suite.

Sa foi dans les exploitants de silos-élévateurs tient à ce qu'il croit qu'un très bon policier, c'est-à-dire la Commission canadienne des grains, qui va pourtant cesser d'exercer un contrôle aussi rigoureux qu'avant. Il va être beaucoup plus facile pour bon nombre de ces sociétés céréalières de revenir aux pratiques qui sont les leurs à l'extérieur du Canada, dès que la Commission des grains se retirera. Le député a-t-il quelque chose à dire sur ces deux constatations?

M. Iftody: Madame la Présidente, je remercie le député de ses intéressants propos.

Je voudrais d'abord répondre le plus brièvement possible à sa deuxième question. Il dit que les sociétés céréalières trompent les producteurs, mais je n'en ai aucune preuve. Je n'ai jamais lu de documents ni entendu de la bouche d'agriculteurs de Provencher des propos allant dans le sens de ces déclarations pour le moins surprenantes.

Par ailleurs, je signale au député que j'ai appelé les représentants d'un élévateur syndical au Manitoba ce matin même. Je les ai interrogés sur le nombre de membres qu'ils avaient et sur l'appui dont il disposaient. Ils sont 18 000. Je peux donner au député l'assurance que je me fie au jugement de ces membres pour prendre les décisions qui s'imposent et surveiller de près ces sociétés de manière à défendre leurs intérêts.

Il en va de même en ce qui concerne les frais de service. Étant donné que les frais applicables aux nouveaux services et que les effets de ces changements fondamentaux seront réexaminés dans deux ans, je crois que ces membres auront amplement l'occasion d'intervenir, s'il y a lieu. Je peux donner au député l'assurance que nous ne permettrons pas aux sociétés céréalières de faire ce que bon leur semble sans se préoccuper le moindrement des intérêts des producteurs.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Madame la Présidente, je me demande si le député de Provencher voudrait me donner son avis sur ce qui suit. Les syndicats se transforment de plus en plus en des sociétés publiques. L'Union des producteurs de grain ne veut plus traiter avec elles. Certaines sont devenues des sociétés publiques. Ce sont les actionnaires qui votent et qui dirigent.

Ce qui est intéressant, c'est que l'un des directeurs du syndicat du Manitoba a été très choqué de voir que la Commission canadienne des grains n'avait pas obtenu l'appui nécessaire pour faire faire une enquête indépendante sur la bourse des grains à Winnipeg, sur les marchés des produits. Cet organisme, la Commission canadienne des grains, est censé réglementer cette bourse. Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas approuvé la réalisation d'une enquête indépendante sur la bourse?

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M. Iftody: Madame la Présidente, je trouve ces suggestions plutôt surprenantes, à moins qu'il n'y ait eu quoi que ce soit d'irrégulier dans la manutention ou la négociation des grains.

Je tiens seulement à dire au député de Lisgar-Marquette-et je suis certain que l'État et le ministre qui défend les intérêts des agriculteurs seront d'accord là-dessus-que si jamais l'on découvre quoi que ce soit d'irrégulier, et si le député a des preuves, des faits ou des renseignements pour appuyer cela, je me ferai un plaisir d'en informer le ministre de l'Agriculture pour qu'une telle enquête puisse être faite.

M. John Maloney (Erie): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-51 qui doit mettre à jour et actualiser la Loi sur les grains du Canada, comme l'a expliqué le ministre de l'Agriculture.

Les modifications proposées feront porter une plus grande part de responsabilité aux utilisateurs du système, soit les producteurs, les négociants et les exploitants de silos.

Nous, du gouvernement, savons que nous devons apprendre à départager ce qu'il faut réglementer ou non. La réglementation proposée dans ce projet de loi vise à améliorer la qualité des produits et la protection des producteurs, mais nous ne désirons ni réglementer le prix exact des services, ni restreindre de quelque façon que ce soit la commercialisation des céréales.

Une partie de ce projet de loi a aussi pour but de renouveler et de renforcer notre engagement envers la qualité du produit. Le Canada s'est gagné une réputation de fournisseur de céréales de qualité uniforme et constante. Ce renom a été utile pour la commercialisation de nos céréales dans toutes les régions du globe. Les acheteurs s'attendent à recevoir des céréales de grande qualité lorsqu'ils les achètent au Canada. Nous ne devons pas les décevoir.

Le projet de loi définit nettement le rôle de la commission dans l'attribution des grades et des appellations de grades, de même que les méthodes à employer pour déterminer ces grades. Ainsi la commission profitera d'une base solide pour améliorer sans cesse l'uniformité des grades des céréales canadiennes.

Le projet de loi supprime l'obligation pour la Commission canadienne des grains de fixer des tarifs maximums pour l'utilisation des silos. Ainsi les prix des services qui, selon la commission, pourraient profiter des pressions du marché pourront justement être déterminés en fonction des fluctuations du marché. Le projet C-51 supprime aussi l'obligation pour un exploitant de silo de donner un préavis de 14 jours à la commission avant de modifier ses tarifs. Ainsi, les exploitants auront plus de latitude pour faire face aux pressions variables du marché.

Pour régler le problème des droits excessifs, le projet de loi autorise la Commission canadienne des grains à établir par ordonnance des tarifs maximums pour les deux prochaines années. Si l'enquête faite à la suite d'une plainte d'un utilisateur de silo permet de constater qu'un tarif en particulier n'est pas justifié, la commission aura le droit de fixer un plafond. La


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Commission canadienne des grains est aussi habilitée à fixer, par règlement, un plafond si les tarifs cotés par les exploitants de silos sont excessifs.

Ce gouvernement note aussi que la majorité des installations primaires ou terminales appartiennent aux producteurs de grains réunis en coopératives. Ce gouvernement ne juge pas nécessaire de protéger les producteurs de grains de l'Ouest contre eux-mêmes.

Cette mesure législative assure une meilleure protection aux producteurs de grains en ce sens qu'elle autorise la commission à exiger de la part des négociants en grains et des exploitants de silos des garanties supplémentaires déterminées par elle. Ce qui permet de veiller à ce que les producteurs soient payés pour leurs produits et leur assure donc une meilleure protection.

Cette mesure législative protège aussi les Canadiens qui n'auront pas à payer la facture si un négociant en grains ou un exploitant de silo, dont la garantie donnée à la commission ne suffit pas à couvrir les montants dus aux producteurs, fait faillite. Si la garantie donnée à la commission ne suffit pas à couvrir le montant des dettes, les créanciers seront dédommagés au prorata, ce qui est la façon la plus juste de procéder. Les contribuables ne devraient pas avoir à payer pour de mauvaises pratiques commerciales.

Cette mesure législative améliore les dispositions de la Loi sur les grains du Canada de façon à faciliter le mouvement du grain entre les provinces et à l'exportation. Les changements apportés simplifient le règlement régissant le transport du grain. Ils éliminent les règles contrôlant le transport du grain à l'intérieur de la région est ou de la région ouest. On doit avoir recours à des transporteurs publics pour le transport du grain entre ces régions, ainsi que pour son importation ou son exportation.

J'encourage les députés à appuyer cette mesure législative. Nous voulons aider nos producteurs de grains et faciliter la vente et l'écoulement de leur produit. Je pense que cette mesure législative le fait.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir prendre de nouveau la parole à la Chambre au sujet de l'agriculture, plus précisément au sujet du projet de loi C-51 qui concerne la Commission canadienne des grains et ses pouvoirs.

Dans l'ensemble, le projet de loi C-51 constitue un bon point de départ à l'amélioration de l'agriculture au Canada.

(1235)

Certaines dispositions du projet de loi me préoccupent et j'en parlerai plus en détail plus tard. On y trouve aussi des aspects positifs, dont j'aimerais parler brièvement.

Premièrement, et c'est sans doute l'aspect le plus important, le projet de loi impose aux agriculteurs l'obligation de s'assurer qu'ils font affaire avec un négociant en grains titulaire de licence. Le projet de loi indique clairement que la Commission canadienne des grains, et par conséquent les contribuables canadiens, n'est tenue de dédommager que les gens qui ont traité avec des titulaires de licence.

Cette mesure de protection permet aux agriculteurs de savoir exactement à quoi s'en tenir et elle met les contribuables à l'abri des dépenses excessives. Dans le passé, les Canadiens ont dû payer pour des demandes de paiement faites par des sociétés qui ne détenaient pas de licence et je suis heureux de constater que le projet de loi prévoit cette forme de protection.

Certains feront valoir que le libellé de l'article 13 du projet de loi n'indique pas clairement quelles demandes pourront être payées. Aussi, j'encourage et j'appuie tout amendement visant à resserrer le libellé du projet de loi, à l'étape de l'étude en comité, afin de protéger les contribuables contre des demandes de paiement faites par des personnes qui ne sont pas titulaires de licence.

Dans ma propre circonscription, avant les dernières élections, une société de nettoyage de graines a cessé ses activités, laissant de nombreux agriculteurs dans une situation délicate. Les choses étaient très confuses. Des accusations d'ingérence et de favoritisme politiques ont été portées. Il ne faudrait certainement pas que de pareilles histoires d'horreur se répètent.

L'article 12 du projet de loi confère à la Commission canadienne des grains une certaine autorité pour décider s'il y a lieu ou non de fermer un silo qui éprouve des difficultés financières ou des problèmes de liquidités. Il s'agit là d'une mesure positive pour les agriculteurs car beaucoup d'entre eux se sont déjà retrouvés face à un exploitant de silo insolvable ou à une société de nettoyage de graines en difficulté.

Le projet de loi assure également une meilleure protection financière aux agriculteurs en les obligeant à obtenir une garantie adéquate pour le grain expédié vers un silo et à s'assurer que le nom du grain et les quantités expédiées figurent sur l'accusé de réception.

Le projet de loi fait en sorte que les agriculteurs bénéficieront d'une protection davantage comparable à celle offerte dans d'autres secteurs d'activité financière. Les agriculteurs disent depuis longtemps qu'ils ne veulent pas de traitement spécial, mais seulement des conditions aussi équitables que celles qui sont accordées aux petites entreprises. Le projet de loi va un peu en ce sens.

Les agriculteurs seront heureux de constater que le projet de loi contribue quelque peu à assouplir le commerce interprovincial. Évidemment, fidèles à leur habitude, les libéraux n'ont adopté qu'une demi-mesure, puisque le projet de loi n'assouplit les conditions qu'à l'intérieur de la région du blé de l'Ouest et à l'intérieur de la région du blé de l'Est respectivement. Cette mesure n'en fait certainement pas assez pour abolir les barrières interprovinciales. En outre, et c'est peut-être encore plus important, le projet de loi ne prévoit absolument rien sur la question du commerce avec les États-Unis. Il y a là une pomme de discorde que le gouvernement libéral actuel n'est pas prêt à trancher dans un esprit constructif.

Ce projet de loi fixera et fera respecter l'utilisation des noms de grade les plus courants. Cet élément est très apprécié des producteurs, car il y aura beaucoup moins de confusion au sujet de la qualité du grain envoyé au silo.

Comme je le disais en commençant, ce projet de loi comporte des avantages. Certaines parties comportent aussi, toutefois, des problèmes très graves-des questions très importantes n'étant même pas abordées.


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Ce projet de loi donne un plus grand pouvoir de décision au gouverneur en conseil. Nous savons que c'est par l'intermédiaire de cet organisme constitutionnel officiel que le Cabinet exerce son pouvoir exécutif.

Si les députés examinent le projet de loi, ils verront que les articles 2, 4, 9, 15, 33 et 35 ont tous la caractéristique de conférer les pouvoirs à l'exécutif, au Cabinet. Cette façon du gouvernement de garder la main haute sur ces questions est en contradiction flagrante avec son engagement à nous offrir des services plus ouverts et plus démocratiques, comme le promettait cet infâme livre écrit à l'encre rouge.

En enlevant tellement de pouvoir aux législateurs et aux producteurs pour le donner au Cabinet, qui l'exercera par décrets, le gouvernement fait le contraire de ce que veulent les agriculteurs. Les producteurs agricoles ont toujours dit que les commissions et les institutions agricoles devraient être démocratiques et avoir des comptes à rendre. En conférant plus de pouvoirs discrétionnaires et en favorisant la prise de décisions à huis clos, on ne va pas dans le sens de la volonté des agriculteurs canadiens.

L'article 34 est un bon exemple de cette appropriation du pouvoir. Cet article donne au Cabinet le pouvoir de définir et d'approuver tous les règlements qui ne sont pas inscrits dans la loi. Cela revient pour le Parlement à donner au ministre un chèque en blanc, il lui suffira ensuite d'indiquer le montant.

Ce qui paraît être la règle pour le gouvernement libéral, c'est de ne pas régler les problèmes. Laisser simplement aux bureaucrates et au Cabinet la possibilité de préparer des règlements selon les besoins. Le passé nous démontre que l'on se prépare à bien des ennuis lorsque l'on agit de la sorte. Nous devrions tirer la leçon des expériences du précédent gouvernement conservateur qui a autorisé un marché continental par décret du conseil au lieu de le soumettre au Parlement et d'obtenir l'aval des représentants élus de la nation, comme il aurait dû le faire. Si le Parlement avait pu débattre de cette question, elle aurait été résolue d'une façon ou d'une autre et les producteurs n'en seraient pas à se battre et à demander un plébiscite et des initiatives du gouvernement.

(1240)

Le projet de loi démontre une fois de plus que le ministre de l'Agriculture est le ministre des bureaucrates et non le ministre des agriculteurs. Non seulement le Cabinet s'approprie des pouvoirs du Parlement, mais la bureaucratie obtient aussi toute une série de nouveaux pouvoirs.

Par exemple, la Commission canadienne des grains aura maintenant le pouvoir de fixer les salaires des membres des comités de normalisation des grains et des tribunaux d'appel pour les grains, pour l'Ouest et pour l'Est du Canada. Je ferai remarquer qu'il n'est pas habituel que les bureaucrates fixent leur propre salaire; en tous les cas, ça ne devrait pas l'être. Non seulement ces gens ont le pouvoir de décider de leur propre rémunération, mais en plus, bien souvent, ils sont nommés par favoritisme.

En général, les commissions, qui reviennent très cher et dont les membres sont là par favoritisme, n'ont qu'un rôle consultatif. Le ministre n'est donc pas obligé de suivre leurs recommandations.

Il sera intéressant de suivre l'évolution des salaires, après l'entrée en vigueur de ce projet de loi, au sein de ces comités consultatifs qui doivent leur existence au favoritisme. Je suppose que leurs membres, ayant vu ce qui se passait en cette Chambre où les députés fixent leurs propres rémunération et pension de retraite, ont décidé d'en faire autant.

Ce qui m'inquiète, c'est qu'un beau matin les contribuables canadiens vont se rebeller en disant que puisque les députés et les bureaucrates fixent leur propre rémunération, ils vont décider eux-mêmes le montant des impôts qu'ils vont payer, que le gouvernement le veuille ou non.

Il semble qu'à bien des égards ce projet de loi soit conçu pour mettre l'empire bureaucratique à l'abri des changements qui vont bouleverser l'agriculture. J'aimerais dire quelques mots au sujet d'une culture spéciale, celle des légumineuses à graines, qui est en train de révolutionner l'agriculture, particulièrement dans ma province, la Saskatchewan.

Le ministre n'ignore pas que, depuis quelques années, de nombreux agriculteurs diversifient leur production afin que leur exploitation demeure rentable et concurrentielle. La diversification est une bénédiction pour l'agriculture. Beaucoup de producteurs qui se sont lancés dans la culture de plantes non traditionnelles telles que les pois, les lentilles, les graines à canaris, les graines de moutarde et autres, continuent à rentabiliser leur exploitation. Le secteur agricole est florissant et prospère sans que le gouvernement ait à intervenir de façon importante ou à imposer des règlements et des contrôles. Ou peut-être devrait-on dire qu'il prospère grâce justement à l'absence relative d'intervention de la part du gouvernement. Je sais que c'est ce que pensent de nombreux agriculteurs.

Le canola est le parfait exemple d'une plante mise au point dans les Prairies où elle est en passe de devenir l'une des cultures de base. Le canola, qui n'était encore qu'à l'état expérimental il y a une dizaine d'années, est maintenant l'une des principales cultures commerciales dans cette région. Je suis persuadé, et je sais que mes collègues réformistes sont du même avis, que la culture de plantes non traditionnelles peut prendre de l'expansion et être une bonne source de revenus pour les agriculteurs si le gouvernement ne s'en mêle pas et n'impose pas des règlements et des restrictions qui entraveront son essor.

Les associations d'agriculteurs, en collaboration avec tous les acteurs dont les coopératives, la Commission canadienne du blé et autres, ont mis des années à mettre sur pied des initiatives pour encourager la culture des légumineuses à graines.

Le ministre sait ce qui passe à cet égard depuis un bon bout de temps, mais il n'a pas cru bon d'inclure les légumineuses à graines dans son projet de loi. La rumeur veut qu'une mesure législative concernant ces récoltes soit présentée dans un an ou un an et demi.

Compte tenu des dispositions sur l'exécution inscrites dans le projet de loi C-51, le ministre devrait nous dire ce qui arrivera dans l'intervalle dans ce secteur indispensable. L'absence de


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dispositions sur les cultures spéciales, combinée à la chasse aux sorcières que fait la Commission canadienne des grains pour délivrer des licences et contrôler les activités de nettoyage et de distribution des graines spéciales, peut avoir un effet dévastateur sur l'agriculture dans son ensemble.

Comme les dispositions du projet de loi C-51 prévoient uniquement les paiements dans le cas de demandes provenant des sociétés dûment agréées, la volonté de la Commission canadienne des grains de délivrer des licences aux sociétés produisant des légumineuses à graines et de les assujettir à des vérifications ne peut être interprétée que comme une tentative pour acculer de nombreuses petites entreprises à la faillite. Il en résulterait finalement un monopole que des bureaucrates dirigeraient en toute tranquillité.

Les agriculteurs ne veulent aucun changement en ce qui concerne les légumineuses à graines. Les consommateurs n'en veulent pas davantage. Un marché libre pour ces produits, c'est ce que tout le monde demande, sauf les hauts fonctionnaires de l'Agriculture apparemment.

Puisque les légumineuses à graines ne sont pas produites dans des quantités comparables à celles des grains tels que le blé, l'orge ou le colza canola, ce sont de bien plus petits exploitants qui les nettoient et les traitent. Or, le coût des licences, des cautions et des vérifications de la Commission canadienne des grains varie entre 20 000 et 30 000 $ par année. Un tel coût forcerait donc la plupart des exploitants de légumineuses à graines à se retirer au moment même où ce secteur devrait s'étendre et se renforcer.

(1245)

Je crains fort que ce projet de loi ne protège pas adéquatement ces exploitants et les producteurs avec qui ils font affaire. C'est une lacune importante. Si nous attendons 12 ou 18 mois, voire davantage, pour que le ministre s'occupe de ce secteur, il sera peut-être trop tard et bon nombre de ces exploitants auront abandonné.

Parce qu'il ne contient aucune disposition sur les légumineuses à graines, le projet de loi C-51 opposera les agriculteurs et les bureaucrates en ce qui concerne ce secteur.

Le ministre devra me prouver que ce ne sera pas le cas. S'il y parvient, je serai le plus heureux des députés. Je lui demande de déposer un projet de loi qui fasse l'affaire des agriculteurs, pas seulement des mesures pour protéger et améliorer les emplois de ses hauts fonctionnaires.

Bien que le projet de loi comporte certains aspects très positifs, on est en droit de se demander pourquoi le ministre présente une mesure législative assurant confort et sécurité aux mandarins du gouvernement tout en faisant attendre les agriculteurs au moins une autre année avant que des mesures ne soient prises pour régler les questions qui les préoccupent.

Ce projet de loi représente un premier pas dans la bonne direction, mais il devra être grandement amélioré à l'étape de l'étude en comité.

J'espère que le ministre pourra mettre fin à l'épreuve de force qui l'oppose à ses collègues, ce qui lui permettra, à lui et à son gouvernement, de régler les dossiers qui intéressent les agriculteurs.

Fait assez intéressant à noter, depuis leur élection, il y a maintenant près d'un an, le ministre et son gouvernement n'ont pris à peu près aucune mesure pour laisser les producteurs diriger leur propre industrie.

S'il y a une chose que j'ai apprise en cultivant la terre et en côtoyant les producteurs, c'est qu'ils ne craignent pas les responsabilités et n'ont pas peur de prendre des décisions. D'ailleurs, leurs décisions sont en général très bonnes. Il arrive souvent que, en adoptant des décrets et des mesures législatives incomplètes comme le projet de loi C-51, le gouvernement nuise à l'industrie plus qu'il ne l'aide.

J'encourage le ministre à réexaminer son projet de loi en se demandant ce qu'il peut faire pour permettre aux producteurs de diriger leur propre industrie et de prendre les décisions et les mesures nécessaires pour renforcer leur industrie, sans que le gouvernement, qui est censé les représenter et défendre leurs intérêts, ne vienne les gêner dans leur travail.

M. Wayne Easter (Malpèque): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je prends la parole au sujet du projet de loi C-51, Loi modifiant la Loi sur les grains du Canada.

Il importe de signaler tout de suite et de mettre en perspective le rôle qu'a joué la Commission canadienne des grains pour que le Canada soit considéré comme le fournisseur international fiable de grains de grande qualité.

L'association de la Commission canadienne du blé, comptoir unique de commercialisation pour les exportations de blé et d'orge, et de la Commission canadienne des grains, avec son système d'inspection et de contrôle de la qualité et à titre de «chien de garde», a extrêmement bien fonctionné dans l'intérêt du Canada et dans celui des producteurs primaires de grain.

Le principal argument de vente de nos céréales sur le marché international a certes été notre système de contrôle de la qualité. Les meuniers du monde entier savent que le blé canadien est d'une qualité telle qu'ils peuvent le mélanger à des produits de tous les autres pays et obtenir quand même un pain d'une assez bonne qualité.

Par contre, les États-Unis, que des collègues d'en face voudraient nous voir imiter, sont considérés au niveau international comme un fournisseur de grain de dernier recours. On tient compte de leurs produits dans la fixation des cours mondiaux, mais ils sont des fournisseurs de dernier recours parce qu'ils n'ont pas le système de contrôle de la qualité qu'a le Canada par suite de règlements de la Commission canadienne des grains.

Ce projet de loi a pour objet de maintenir le soutien pour l'inspection et le classement en fonction de la qualité. Toutefois, dans notre démarche législative, il nous faut veiller


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constamment à ne pas céder devant ceux qui croient que la réduction des coûts est la seule chose qui compte.

Le gouvernement fédéral tient à l'inspection et au contrôle de la qualité parce que ce sont là deux éléments qui nous assurent nos marchés d'exportation.

(1250 )

Lorsqu'il a témoigné devant le Comité de l'agriculture, Dennis Wallace, directeur exécutif de la commission, a fait la remarque suivante: «Nous cherchons à simplifier le pesage et l'inspection à l'intérieur du pays. Nous procéderons au rythme que l'industrie fixera, dans la mesure où nous penserons pouvoir maintenir nos normes de qualité dans ce processus. À notre avis, la qualité n'a pas souffert des mesures que nous avons prises jusqu'ici». Le fait que la qualité n'ait pas souffert des mesures prises jusqu'à maintenant est un point important.

En tant que gouvernement, nous devons voir à ce que les normes qui ont été si avantageuses pour l'industrie céréalière canadienne soient maintenues.

J'espérais avoir le temps de parler à la Chambre de certains des dangers qui existent, car plusieurs groupes qui ont témoigné devant le Comité permanent de l'agriculture, notamment l'Alliance de la fonction publique du Canada, ont décrit certains des problèmes qui sont survenus à Thunder Bay. Ils ont donné un bon exemple de ce qui peut se passer sur le plan du contrôle de la qualité lorsqu'on n'a pas un organisme fort comme la Commission canadienne des grains, appuyé par des règlements solides, pour protéger les intérêts des producteurs et de l'industrie céréalière en général.

Je n'ai pas le temps de citer ces témoignages à la Chambre, mais j'invite les députés à lire le mémoire présenté par l'Alliance de la fonction publique le 26 avril 1994, dans lequel elle décrit certains des dangers possibles sur le plan du contrôle de la qualité.

En tant que gouvernement, nous devons assurer la sécurité de notre système de réglementation et d'inspection et nous devons voir à ce que les réductions d'effectifs ou les efforts en vue de promouvoir la compétitivité ne nous fassent pas perdre notre situation concurrentielle qui est fondée sur la production et l'exportation de grains satisfaisant aux plus hautes normes de qualité dans le monde.

Les députés des deux côtés de la Chambre ont beaucoup parlé de l'article 14. Aux termes de cet article, la Commission canadienne des grains ne sera plus tenue de fixer les droits maximums pouvant être réclamés par les exploitants de silos.

Franchement, c'est un point qui me laisse perplexe. Nous aurons certainement un débat intéressant sur ce sujet au Comité de l'agriculture. Il y a un certain nombre de questions qui doivent être soulevées à cet égard.

Je ne crois pas que nous puissions nous fier au mouvement coopératif pour protéger les intérêts des producteurs. J'ai appartenu à cette industrie dans l'Ouest pendant de nombreuses années et je crois que le mouvement coopératif, lorsqu'il doit prendre des décisions dans un contexte international comme celui que nous connaissons en ce moment, doit vraiment se demander s'il protège ses propres intérêts ou s'il protège les intérêts de ses membres. Par conséquent, je crois que le gouvernement doit, dans une certaine mesure, protéger les intérêts des producteurs primaires. Nous en discuterons sûrement au moment de l'étude en comité.

D'autres questions se posent également. Il faudra apporter quelques précisions sur le rôle assimilable à un rôle d'ombudsman que la commission sera appelée à jouer. Dans quelles circonstances pourra-t-elle intervenir? Quels pouvoir détiendra-t-elle pour régler les plaintes et d'où tirera-t-elle ce pouvoir? Dans quelles circonstances la commission pourra-t-elle fixer des tarifs maximums ou adopter des règlements en ce sens?

Un élément important du projet de loi-et je l'appuie sans réserve-est la disposition qui prévoit que lorsque la Commission canadienne des grains estime qu'il y a un danger que quelqu'un, dans l'industrie des céréales, abuse du système mis en place, elle peut intervenir et imposer des tarifs maximums.

(1255)

Je soulève ces points parce que je crois que la Chambre des communes et le comité sont les endroits qui conviennent pour tenir un débat sérieux et approfondi qui nous aidera à arriver aux meilleures décisions possibles.

Je vois qu'il ne me reste plus beaucoup de temps. J'ai entendu des députés d'en face parler de compétitivité. Je pense qu'il faut regarder la situation dans l'ouest du Canada, là où la Commission canadienne des grains mène ses activités, et reconnaître que dans les petites collectivités où on trouve des silos, les entreprises de production de céréales se font de moins en moins concurrence.

Ces entreprises sont en train de fusionner leurs activités. Ce n'est pas parce que le tarif est plus bas à tel silo que l'agriculteur va nécessairement y acheminer sa production, car les installations peuvent se trouver à 50 ou 100 milles, et les frais de transport sur cette distance engouffreraient toutes les économies.

La plus grande prudence s'impose donc dans ces décisions, car, au moment où les échanges internationaux entrent dans une ère nouvelle, où des regroupements s'opèrent, notamment dans l'ouest du Canada-avec les conséquences que cela peut avoir sur les producteurs du secteur primaire-nous avons besoin d'une Commission canadienne des grains extrêmement forte pour protéger les intérêts des producteurs et de tout le pays dans le commerce céréalier.

Je conclurai en rappelant que la Commission canadienne du blé et la Commission canadienne des grains ont bien servi le Canada par le passé. J'estime qu'elles peuvent continuer à le faire à l'avenir. J'espère que nous pourrons maintenir ces normes et veiller à ce que le Canada reste, comme par le passé, un fournisseur sûr.


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M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Madame la Présidente, je tiens à remercier le député de son intervention. Il m'arrive d'être d'accord avec lui de temps à autre sur certains points.

Je sais qu'il est un excellent exploitant, et très efficace, et qu'il a probablement des employés à qui il verse un salaire. Ne pense-t-il pas que lorsque, en tant qu'agriculteur, je paie 92 p. 100 des salaires versés par la Commission canadienne des grains, je devrais avoir mon mot à dire sur ce que sont ces gens? Je me sentirais beaucoup plus à l'aise si, en tant qu'agriculteur, j'avais mon mot à dire sur ce que sont ces gens et comment ils travaillent. Les employés d'une entreprise en forment vraiment le pivot, car la direction compte sur eux. Le député pourrait-il dire ce qu'il en pense?

M. Easter: Madame la Présidente, j'avais bien quelques chiffres. Je crois que les chiffres que vous citez, M. Hoeppner, sont exacts. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je tiens à rappeler au député que nous ne devons pas désigner les députés par leur nom, mais par leur circonscription, en l'occurrence Lisgar-Marquette.

M. Easter: Je m'excuse, madame la Présidente. Je crois que les chiffres cités par le député sont exacts. Les députés d'en face parlent souvent du principe de l'utilisateur-payeur. La société canadienne dans son ensemble profite beaucoup de ces institutions, comme la Commission canadienne des grains, de même que certaines de nos normes d'inspection dans les secteurs des viandes ou de l'horticulture. Je ne crois pas que les producteurs devraient tout payer.

Quant à savoir si les agriculteurs ont leur mot à dire concernant la Commission canadienne des grains, je ferai remarquer au député d'en face qu'ils ont leur mot à dire par l'intermédiaire des producteurs du secteur primaire de même que par l'intermédiaire du Comité consultatif de la Commission canadienne du blé, organisme dont les membres sont élus dans onze districts de l'ouest du Canada. Ces membres conseillent la Commission du blé et ils devraient conseiller le ministre, comme ils le font certainement, du moins ceux à qui j'ai parlé, sur toutes les questions reliées aux grains, notamment en matière de grades, de normes et de réglementation.

Les agriculteurs ont donc leur mot à dire à l'heure actuelle par l'intermédiaire du Comité consultatif de la Commission canadienne du blé et, par l'intermédiaire des députés élus à la Chambre, directement au ministre, qui est responsable de la Commission canadienne des grains.

(1300)

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je ne vois personne d'autre qui souhaite intervenir dans le débat. La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.)

LA LOI SUR LE MINISTÈRE DES AFFAIRES EXTÉRIEURES

L'hon. Herb Gray (au nom du ministre des Affaires étrangères) propose: Que le projet de loi C-47, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires extérieures et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères): Madame la Présidente, j'ai le très grand plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-47, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires extérieures.

Au moment de son assermentation, notre gouvernement a pris l'engagement de faire du ministère des Affaires extérieures le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Ce changement de nom rend compte de l'évolution qu'a connu le mandat du ministère au cours de ses 85 années d'existence.

Le ministère des Affaires extérieures a été créé en 1909 par le premier ministre Wilfrid Laurier afin d'appliquer la politique étrangère du Canada. Depuis, sa mission a été adaptée pour répondre à la place croissante prise par le Canada dans le monde.

Durant la Première Guerre mondiale, le Canada a joué un rôle important sur la scène internationale, aussi bien par sa participation aux forces alliées que comme membre du cabinet impérial de guerre. À l'issue du conflit, il était devenu une nation véritablement indépendante. Cette maturation devait entraîner des changements au sein du tout jeune ministère.

C'est au cours des années 20 qu'il commence, sous la houlette du sous-secrétaire d'État O.D. Skelton et du conseiller Loring Christie, à prendre la forme qu'on lui connaît aujourd'hui, et c'est alors aussi qu'est constitué le corps diplomatique canadien.

La Deuxième Guerre mondiale contribue encore à la croissance du ministère. Le Canada intervient désormais activement sur la scène mondiale. Il est membre fondateur des Nations Unies et participant de plein droit à diverses autres organisations internationales dont l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord ou OTAN, l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce ou GATT, le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et, bien sûr, le Commonwealth.

Ces dernières années, le Canada a continué de jouer un rôle de plus en plus actif dans les affaires mondiales. Nous nous sommes joints à de nouvelles organisations, comme le G-7, le groupe des sept principaux pays industrialisés, la Francophonie et l'Organisation des États américains, l'OEA.

Le ministère prend une large part dans les travaux de ces organismes et s'acquitte avec diligence de la mission qui lui est dévolue, à savoir: représenter, promouvoir et défendre partout dans le monde les intérêts du Canada et les valeurs qui lui sont chères; améliorer la connaissance et la compréhension qu'ont les Canadiens du reste du monde; et servir les Canadiens au pays comme à l'étranger.

Le projet de loi C-47 modifiera la Loi sur le ministère des Affaires extérieures de façon à changer le nom officiel du ministère ainsi que les titres des ministres et des hauts


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fonctionnaires. Dorénavant, le secrétaire d'État aux Affaires extérieures sera le ministre des Affaires étrangères. Le ministre du Commerce extérieur deviendra le ministre du Commerce international. Quant au ministre de second rang des Relations internationales, il deviendra le ministre de la Coopération internationale.

(1305)

Les titres des hauts fonctionnaires comportant le terme «sous-secrétaire» changeront également en fonction du nouveau nom du ministère. Ainsi, le sous-secrétaire d'État aux Affaires extérieures sera désormais le sous-ministre des Affaires étrangères.

Le projet de loi C-47 ne modifie aucunement le ministère dans sa structure fondamentale. Il ne fait que lui donner un nouveau nom, mieux adapté à son mandat actuel.

J'aimerais ajouter quelques mots au sujet du rôle des deux nouveaux postes qui ne figurent pas dans le projet de loi, mais qui sont importants pour le développement de la politique étrangère canadienne. Il s'agit du poste de secrétaire d'État pour l'Amérique latine et l'Afrique-et je vois que la titulaire écoute attentivement ce que je dis-et, bien sûr, le secrétaire d'État pour l'Asie et le Pacifique.

Ces secrétaires d'État se sont révélés extrêmement utiles pour la politique étrangère du Canada. Ils voyagent beaucoup et rencontrent les dirigeants des nombreux pays où le Canada a des intérêts en matière de politique étrangère. Je sais combien ils sont actifs dans leurs relations avec le corps diplomatique ici, au Canada. Ils complètent très efficacement le travail du ministre.

N'oublions pas le rôle du secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, un poste qui ne figure pas non plus dans ce projet de loi, mais qui est néanmoins important, puisque son titulaire assure le remplacement du ministre des Affaires étrangères lorsque celui-ci est en mission à l'étranger pour représenter notre pays dans l'exercice de ses nombreuses fonctions. Je connais personnellement la lourde tâche du ministre. Les secrétaires d'État et le secrétaire parlementaire sont donc très utiles au ministre et au ministère.

[Français]

Pour conclure, l'objectif de ce projet de loi est très clair. Il vise tout simplement à faire en sorte que notre présence à l'étranger et dans les instances internationales reflète la réalité canadienne d'aujourd'hui.

Au fil de notre histoire, nous sommes passés du statut de colonie à celui de Dominion et enfin à celui de nation indépendante. Le nouveau titre du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international est à l'image de cette évolution.

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, il me fait plaisir, à mon tour, d'intervenir sur le projet de loi C-47, loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires extérieures et d'autres lois en conséquence.

Je profite de l'occasion pour saluer mon collègue, le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, qui a fait une très bonne intervention, je pense. Comme il l'a très bien souligné, le projet de loi C-47 vise à changer le nom du ministère des Affaires extérieures et du Commerce extérieur en ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Le projet de loi vise, en fait, à actualiser le nom du ministère et de certains de ses fonctionnaires par rapport à la structure administrative déjà existante.

Vous me permettrez de rappeler un certain nombre d'éléments historiques qui justifient ce changement de nom qui nous paraît approprié.

De 1867 à 1909, la Grande-Bretagne restait essentiellement en charge de l'ensemble des relations extérieures du Canada; c'est d'ailleurs la Grande-Bretage qui a, en quelque sorte, déclaré la guerre, en 1914, au nom du Canada. À ce moment-là, le Canada n'avait pas ses propres ambassadeurs.

En 1909, comme l'a souligné le secrétaire parlementaire, on a procédé à la création d'un ministère des Affaires extérieures propre au Canada, qui était alors présidé par un secrétaire d'État aux Affaires extérieures, poste qui avait déjà été créé en 1868. Mais dans les faits, le premier ministre demeurait largement en charge de ce ministère. Fait à noter, au moment de sa création, le ministère comptait cinq employés et, en 1911, il n'en comptait pas plus de 15.

Le 1er avril 1912, le ministère des Affaires extérieures est placé directement sous la juridiction du premier ministre; le ministère s'occupe essentiellement des relations du gouvernement canadien avec les autres dominions de la Couronne britannique, d'où le choix du terme «extérieures» pour désigner ce qui n'est pas tout à fait étranger. Et ce terme, jusqu'à aujourd'hui, est demeuré.

(1310)

Juste avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale, le Canada avait, à l'étranger, en dehors des autres dominions de la Couronne britannique, un bureau à Washington qui comptait neuf personnes, un Haut-commissariat à Londres qui comptait onze personnes et un Commissariat général à Paris qui en comptait huit.

Après la Première Guerre mondiale, le Canada a vu sa personnalité internationale être confirmée, notamment par les exploits de guerre, les hauts faits d'armes des troupes canadiennes à Vimy. En 1923, le Canada signe son premier traité en tant qu'État autonome, le Traité de Halibut, et envoie des représentants diplomatiques à l'étranger. En 1931, on le sait, le Canada est devenu, dans les faits, un État indépendant par le Traité de Westminster qui accordait l'indépendance complète au Canada.

De 1935 à 1939, qui est une période que l'on considère un peu comme la période de l'essor du service extérieur canadien, correspond également aux années durant lesquelles plusieurs pays ont établi une représentation diplomatique ici, à Ottawa. En 1939, c'est à titre d'État indépendant que le Canada a déclaré la guerre à l'Allemagne et aux autres puissances de l'Axe.

La politique étrangère du Canada, qui est un des membres fondateurs des Nations Unies, a connu un nouvel essor après la Seconde Guerre mondiale, notamment en 1946, et par la nomination du premier secrétaire d'État véritablement indépendant, par l'adoption de la Loi canadienne sur le ministère des Affaires extérieures, loi qui est toujours en vigueur


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aujourd'hui, en dépit des quelques modifications législatives qui ont été apportées avec le temps.

Dans les années 1960, on a assisté au début des efforts pour intégrer les différents programmes s'occupant de commerce international au ministère des Affaires extérieures. En 1983, on a procédé à la création d'un poste de ministre du Commerce extérieur et à la création d'un poste de ministre des Relations extérieures. Au cours des années, divers programmes, comme le programme de l'Office du développement des marchés d'exportation, sont passés sous la juridiction du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, et certains autres, comme le Bureau de marketing du grain, ont été transférés vers d'autres ministères.

Aujourd'hui, on se retrouve ici, en cette Chambre, pour discuter du projet de loi C-47 qui vise à transformer, comme je le disais tout à l'heure, le nom du ministère des Affaires extérieures et du Commerce extérieur en ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.

Au moment où on se parle, le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international compte plus de 4 000 employés canadiens et près de 5 000 engagés locaux partout dans le monde entier. Si on compare les débuts plutôt modestes du ministère, dont j'ai fait état précédemment, on peut voir qu'il y a eu une grande évolution depuis.

Nous avons l'intention bien sûr d'appuyer ce projet de loi puisque, comme le soulignait le secrétaire parlementaire, nous croyons qu'il est temps d'actualiser le nom de ce ministère qui, dans sa forme actuelle, rappelle le statut de colonie qu'a longtemps eu le Canada. On pourrait souhaiter également que le gouvernement aille de l'avant pour éliminer complètement les derniers relents de ce statut de colonie, comme par exemple l'abolition pure et simple de cette autre Chambre qui constitue un anachronisme flagrant et qui n'est absolument pas adaptée à la réalité canadienne. On pourrait également souhaiter que le gouvernement canadien aille de l'avant dans cette voie au niveau du statut politique et constitutionnel du Canada.

Je pense que ce projet de loi cadre bien également dans le contexte d'une révision de la politique étrangère dans le sens où on veut la rendre plus moderne. On émet toutefois trois réserves à l'égard de ce projet de loi qui ne sont pas des réserves banales, c'est le moins qu'on puisse dire.

Tout d'abord, on regrette que le ministre ne profite pas de l'occasion pour faire le ménage dans tous les postes qui n'ont jamais été comblés depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux. Je parle plus précisément des articles 4, 8(2) et 9 du projet de loi, où le gouvernement se donne la possibilité de combler des postes vacants, je le répète, depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux, et même avant dans certains cas, les postes vacants de ministre de la Coopération internationale, de sous-ministre délégué et de coordonnateur des Relations économiques internationales.

En fait, il faut comprendre de ces postes qui sont laissés vacants que le gouvernement se laisse la possibilité de distribuer des postes de façon discrétionnaire. Si ces postes sont inutiles, il faut qu'ils soient tout simplement abolis. C'est particulièrement le cas du poste de ministre de la Coopération internationale, qu'on appelait jusqu'à présent le ministre des Relations extérieures, qui n'est pas comblé actuellement. Si le gouvernement ne lui trouve aucune pertinence, qu'il l'abolisse tout simplement plutôt que de le garder en réserve pour, éventuellement, faire des nominations hautement partisanes.

(1315)

D'autre part, nous croyons que l'ACDI, dont le mandat est plutôt flou, imprécis, devrait avoir sa propre loi constitutive qui régisse ses activités en tant qu'organisme autonome. Une loi constitutive aurait l'avantage de donner au ministre responsable de l'ACDI un mandat clair et non équivoque. Et, bien sûr, une telle loi éviterait le gaspillage de ressources monétaires et humaines.

Ma troisième réserve se rapporte au paragraphe (3) de l'article 7, qui nous cause également un problème. Si vous me le permettez, monsieur le Président, je ferai la lecture de cet article: «Le ministre peut élaborer et mettre en oeuvre des programmes relevant de ses pouvoirs et fonctions en vue de favoriser les intérêts du Canada, notamment en vue de stimuler le commerce international du Canada et d'aider les pays en voie de développement.» Il nous apparaît inapproprié que dans le même article de loi, et aussi explicitement, le ministre associe de façon claire et directe les intérêts commerciaux du Canada et l'aide au développement.

Il est bien sûr, et on n'en disconvient pas, que l'aide au développement fournie par le Canada a pour effet de favoriser les intérêts du Canada sur la scène internationale d'un point de vue politique. Mais maintenir dans le même article de loi la question de l'aide au développement avec celle du commerce international peut porter à confusion et peut laisser entendre que le gouvernement a l'intention encore une fois de continuer à privilégier l'aide liée. Et dans ce sens, je pense qu'on ne peut admettre que ces deux éléments se retrouvent dans le même article du projet de loi.

En conclusion, nous allons bien sûr appuyer ce projet de loi, tout en gardant en tête que nous avons ces trois réserves très sérieuses et que nous aimerions que le gouvernement les prenne en considération dans le processus qui doit conduire à son adoption. Ce projet de loi, comme je le soulignais plus tôt, s'inscrit dans une démarche historique qui, malheureusement, a duré de trop nombreuses années.

Je pense qu'il était plus que temps que le gouvernement canadien décide d'actualiser le nom du ministère des Affaires extérieures et le ministère du Commerce extérieur pour en faire un véritable ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Malheureusement, comme je le soulignais plus tôt en parlant des réserves, nous déplorons que le ministre n'ait pas profité de cette occasion pour procéder à quelques réaménagements qui auraient eu pour effet de moderniser encore plus le ministère.

Je pense que l'objectif que poursuit le gouvernement par l'adoption de ce projet de loi, c'est de moderniser ce ministère. Donc, il est un peu inquiétant et étonnant de voir que le gouvernement veut maintenir dans ce projet de loi un certain nombre de postes qui sont plus ou moins pertinents, à preuve, le fait que ceux-ci soient encore vacants au moment où l'on se parle.

J'arrête ici mes remarques. Nous aurons certainement l'occasion, au cours de débats ultérieurs, d'en reparler.


6503

[Traduction]

M. Charlie Penson (Peace River): Monsieur le Président, à titre de porte-parole du Parti réformiste en matière de commerce international, je suis heureux de parler aujourd'hui du projet de loi C-47 et de ses répercussions sur la modernisation et la revitalisation du ministère des Affaires étrangères.

Le projet de loi à l'étude ne propose pas d'énormes changements. Il propose de remplacer le nom du ministère des Affaires extérieures par celui du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international et de modifier les titres des ministres et des sous-ministres visés conformément au nom du nouveau ministère.

Je suppose que ce changement de nom vise à garantir que le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international témoignera des besoins et des valeurs des Canadiens durant les années 90, mais je me demande si ce changement est nécessaire et si les coûts qu'il occasionne sont justifiables. Je sais que, somme toute, la réimpression de 4 000 nouvelles séries de cartes d'affaires et de toute la papeterie ne représente pas un montant faramineux, mais le contribuable s'attend à ce que le gouvernement applique de nouvelles normes d'efficacité, et cette mesure semble futile.

(1320)

Pendant une dizaine d'années, le commerce international a été une des composantes du ministère des Affaires extérieures. Pourquoi est-il tout à coup nécessaire d'inclure dans le titre du ministère la longue mention du commerce international?

Pourquoi, alors que la dénomination des affaires extérieures a très bien convenu durant des années, avons-nous besoin de la dénomination «Affaires étrangères et Commerce international»? Qu'arrivera-t-il si, un jour, dans sa grande sagesse, un nouveau gouvernement décide de retransférer la composante du commerce international au ministère de l'Industrie ou qu'une société d'État est chargée de la promotion du commerce? Qu'arrivera-t-il si toutes ces fonctions sont confiées au secteur privé? Devrons-nous recommencer tout ce processus encore une fois?

Modifier le mode de promotion du commerce n'a rien d'inconcevable. Ce matin même, le Globe and Mail a fait paraître un article selon lequel un groupe de gens d'affaires d'Ottawa a dit que le gouvernement fédéral pourrait économiser près de 117 millions de dollars par an en concentrant ses efforts de promotion commerciale sur des petites entreprises, en mettant fin au double emploi et en liant l'aide au commerce. On lit plus loin dans l'article que le président de l'International Business Development Review a déclaré que le gouvernement fédéral allait devoir prendre des décisions courageuses pour priver les entreprises des initiatives d'aide commerciale, mais qu'il serait surpris de la réaction positive de la population, qui est surchargée d'impôts. J'incite le ministre à se pencher sur ces options et à les étudier plus à fond.

Passons maintenant à ce à quoi les Canadiens s'attendent de leur ministère des Affaires extérieures ou plutôt étrangères, comme on l'appelle maintenant. Le Comité mixte spécial sur l'examen de la politique étrangère a entendu nombre d'observations de Canadiens. Le rapport de ce comité guidera le ministère dans les restructurations qui s'avéreront nécessaires, dans le règlement des problèmes et dans l'élaboration de la politique étrangère du Canada pour les années à venir.

Plus particulièrement, les Canadiens nous ont dit qu'il fallait restructurer l'ACDI afin de la rendre plus comptable et plus précise dans sa conception de l'aide au développement. Ils nous ont parlé de la nécessité de mieux définir les critères de participation du Canada aux futures activités de maintien de la paix. Ils nous ont dit que les organismes non gouvernementaux, les ONG, pouvaient jouer un plus grand rôle dans l'élaboration et la mise en oeuvre des programmes d'aide étrangère du Canada. Ils nous ont dit qu'il fallait que le Canada s'emploie d'une façon dynamique à développer ses relations commerciales dans la région de l'Asie et du Pacifique, où le marché est en pleine expansion. Le comité a fait une foule d'autres recommandations, mais nous devrons attendre la publication du rapport pour les connaître.

Nous savons toutefois avec certitude que les Canadiens veulent la sécurité économique et que l'emploi de plus de 2 millions d'entre eux dépend du commerce international. En effet, chaque milliard de dollars de nouvelles exportations représente la création de 11 000 nouveaux emplois. Par conséquent, le ministère des Affaires étrangères doit faire de son mieux pour garantir le succès des entreprises canadiennes sur le marché international.

En 1993, le Canada a exporté des biens et services d'une valeur de 181 milliards de dollars, soit 30 p. 100 de notre PIB. Pour que ce chiffre augmente, le Parti réformiste est d'avis que le Canada doit être un ardent défenseur du libre-échange ou d'une libéralisation des échanges dans le monde entier. Nous avons d'ailleurs pris d'importantes mesures en ce sens, et nous en félicitons le gouvernement.

L'un des instruments clés de cette libéralisation sera l'organisation mondiale du commerce qui sera créée à l'issue des négociations du GATT. Il est vital que le Canada participe au succès de cette nouvelle organisation. Le Canada doit jouer un rôle de chef de file en garantissant son bon fonctionnement. Nous devons continuer de promouvoir une plus grande libéralisation des échanges au cours de la deuxième ronde de négociations en agriculture qui aura lieu au GATT ou à l'OMC dans six ans. Le Canada doit poursuivre activement de nouveaux accords de libre-échange susceptibles d'améliorer sa position commerciale sur le plan international.

L'élargissement rapide et fructueux de l'ALENA serait particulièrement intéressant pour le Canada. Dans l'examen de nouveaux membres éventuels, le Canada devrait encourager ses partenaires actuels, les États-Unis et le Mexique, à ne pas traîner dans ces négociations. L'élargissement de l'ALENA sera profitable à nous tous à longue échéance. Le Canada est une nation commerçante. Nous devons agrandir ses marchés.

Ce qui intéressera toujours le Canada au premier chef, cependant, ce sont ses relations commerciales avec les États-Unis, qui représentent actuellement environ 75 à 80 p. 100 de son commerce bilatéral. Ces relations puissantes avec les États-Unis ont permis au Canada de devenir la septième nation commerçante au monde, même s'il ne se situe qu'au 31e rang pour sa population.

Si le Canada doit toujours s'efforcer de diversifier ses activités commerciales pour que sa prospérité ne demeure pas tributaire des États-Unis, nous devons reconnaître qu'il faut


6504

encourager et promouvoir dans toute la mesure du possible les relations commerciales canado-américaines.

(1325)

Outre qu'il doive cultiver nos relations commerciales avec les États-Unis, le ministère des Affaires étrangères doit constamment s'employer à trouver de nouveaux débouchés pour le Canada dans le monde. Son rôle consiste à prospecter les nouveaux marchés internationaux en croissance et à faire en sorte que les entreprises canadiennes puissent y pénétrer et faire preuve de compétitivité.

Comme je l'ai dit, un de ces nouveaux marchés en croissance les plus prometteurs, ce sont les pays côtiers du Pacifique qui, d'ici cinq ans, pourraient bien représenter 40 p. 100 de la consommation totale de biens d'exportation dans le monde. Par conséquent, le ministère des Affaires étrangères devrait tout mettre en oeuvre pour que le Canada reste un intervenant dynamique et performant dans cette région du globe.

À preuve que nous avons obtenu du succès, le Japon qui est déjà notre deuxième partenaire commercial en importance, achète plus de produits canadiens que le Royaume-Uni, l'Allemagne et la France réunis. En outre, la Chine a l'économie qui croît le plus rapidement au monde et, avec la forte poussée de population qu'on y prévoit, elle pourrait bien constituer la deuxième puissance mondiale au début du siècle prochain.

Comme il a été mentionné, le Canada a tout intérêt à élargir ses relations commerciales dans notre hémisphère, de préférence dans le cadre de l'ALENA, qui a déjà donné au Canada un accès unique et privilégié au Mexique, pays qui représente un marché en croissance de plus de 85 millions de consommateurs. D'autres pays, tel le Chili, ont manifesté la ferme intention d'adhérer à cet accord. Le Canada doit donc se faire le chef de file dans ce mouvement en faveur de l'adhésion à l'ALENA, sans quoi les Américains vont prendre les commandes, dominer le marché et privilégier leurs intérêts commerciaux.

Le ministère des Affaires étrangères devrait s'assurer que les Canadiens sont toujours bien représentés en jouant un rôle de premier plan dans la défense des valeurs et des intérêts canadiens. Pour mener cette tâche à bien, il devrait envisager sérieusement de réaffecter ses ressources afin d'optimiser cette activité primordiale qu'est la promotion commerciale. Cela signifie qu'il devra prendre des décisions sérieuses, notamment de retirer les ressources des régions où les marchés ne présentent aucune possibilité de croissance pour le commerce canadien. En outre, dans ces pays où nos missions sont principalement diplomatiques et consultatives, nous devrions chercher à réduire les coûts.

Bien entendu, nos échanges avec les autres pays doivent se situer à divers niveaux et pas uniquement sur le plan commercial. Le Canada a un rôle très spécial à jouer dans les affaires internationales, car il possède une riche tradition d'intermédiaire honnête dans la résolution des différends et de pays capable de multinationalisme efficace. Il doit poursuivre cette tradition et cultiver sa réputation de puissance intermédiaire respectée et efficace. Étant donné nos capacités et nos antécédents sur le plan de l'innovation et de l'utilisation dynamique de la diplomatie, de nombreux pays comptent sur une contribution spéciale de la part du Canada dans le domaine des affaires internationales. Nous devrions être fiers de fournir ce service.

Les Canadiens voudront toujours que l'on fasse valoir cette image de puissance intermédiaire, mais ils veulent aussi que l'on vive selon nos moyens. Le Canada doit donc élaborer une politique étrangère qui soit proactive, efficace et marquée au coin de la responsabilité financière. Cela signifie que nous devons mettre de l'ordre dans nos finances. Nous devons nous concentrer sur la réduction des obstacles au commerce intérieur et faire baisser le coût de ce commerce national pour que nos entreprises soient plus compétitives sur les marchés mondiaux.

Qu'il agisse à titre de catalyseur dans un processus de changement international, de facilitateur amenant des parties à un accord ou de médiateur devant désamorcer un conflit international, le ministère des Affaires étrangères doit toujours s'efforcer d'être un leader mondial dans tout ce qu'il entreprend.

Un domaine où le Canada est déjà un chef de file, c'est celui de nos relations avec les Nations Unies qui ont 50 ans cette année. La nécessité d'accroître l'efficacité des Nations Unies constitue une tâche importante pour le Canada et un défi pour le XXIe siècle. Selon moi, il y a bien des facettes de l'organisation que le Canada devrait examiner pour améliorer l'efficience et l'efficacité des Nations Unies et faire en sorte qu'elles rendent davantage de comptes.

Premièrement, les règles qui forcent les pays à payer leurs cotisations aux Nations Unies doivent être appliquées. Autrement, cette organisation sera toujours inefficace et toutes les autres réformes ne serviront absolument à rien.

Deuxièmement, le nouvel inspecteur général des Nations Unies doit obtenir un mandat très large pour pouvoir mettre un terme aux dépenses excessives, aux chevauchements et au gaspillage.

Troisièmement, on devrait établir un système d'avertissement rapide pour prévenir les conflits internationaux catastrophiques et la détérioration de l'environnement.

Quatrièmement, on devrait créer une cour internationale de justice par l'entremise des Nations Unies pour punir les criminels internationaux qui profitent actuellement des frontières nationales et d'une mauvaise coordination internationale pour échapper à toute sanction.

(1330)

Cinquièmement, il faut revoir la structure du Conseil de sécurité des Nations Unies et le pouvoir de veto de ses membres permanents. Dans le cadre de cet examen, l'organisation doit envisager de faire du Canada un membre permanent pour le récompenser des services qu'il rend depuis longtemps et de son dévouement à l'égard des Nations Unies et du maintien de la paix.

Pour que ces réformes aboutissent, il est nécessaire que le ministère des Affaires étrangères joue un rôle efficace dans les coulisses et qu'il établisse publiquement le programme de changement.

En conclusion, si les députés réformistes ont été élus à partir d'un programme national, nous sommes conscients que nous devons également être en mesure de présenter une politique étrangère sérieuse et d'établir une bonne relation de travail avec le ministère des Affaires étrangères. Je voudrais donc exprimer mon appui à ce projet de loi, pas en tant que mesure d'ordre


6505

administratif devant être adoptée rapidement, mais en tant que signe avant-coureur d'un nouveau ministère des Affaires étrangères dynamique et efficient qui défendra les intérêts des Canadiens et leurs valeurs tout au long du siècle prochain.

Le Parti réformiste aura beaucoup d'autres choses à dire dans le domaine de la politique étrangère durant la session qui vient, mais j'espère que j'ai bien montré certains des points qui sont importants, selon nous, pour le ministère.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre a entendu les termes de la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

* * *

LOI SUR LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 30 septembre 1994, de la motion: Que le projet de loi C-52, Loi constituant le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et modifiant ou abrogeant certaines lois, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général): Madame la Présidente, je suis très heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-52, communément appelé la Loi sur le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, qui vise à regrouper et à fusionner quatre anciens organismes de services communs du gouvernement fédéral.

[Français]

Ce sont les anciens ministères des Travaux publics et des Approvisionnements et Services, de même que l'Agence des télécommunications gouvernementales.

Le nouveau ministère ainsi créé aura un rôle essentiel à jouer. Il permettra en effet d'augmenter efficacement la rentabilité des opérations du gouvernement fédéral. Grâce au regroupement de ces importants services en fonction d'une seule et même opération où les politiques seront uniformes et où la planification à long terme sera coordonnée, nous serons en mesure d'offrir un meilleur service à l'ensemble de l'appareil gouvernemental canadien et, ce faisant, aux contribuables canadiens.

Le gouvernement s'est fermement engagé devant tous les Canadiens et Canadiennes à leur offrir une administration qui soit à la fois équitable, efficace, innovatrice et accessible.

[Traduction]

Les Canadiens savent que les chevauchements, le double emploi et une piètre coordination y sont pour quelque chose dans le fardeau fiscal qu'ils doivent tous assumer. Les Canadiens s'attendent à ce que nous prenions toutes les mesures possibles pour simplifier nos opérations, réduire les frais administratifs, diminuer la paperasserie et améliorer nos services dans la mise en oeuvre des programmes gouvernementaux.

La création du nouveau ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux répond directement à ce défi. Ce ministère permettra, mieux que jamais auparavant, de centraliser toute une gamme de services qui contribuent de façon importante au bon fonctionnement d'environ 150 ministères et organismes gouvernementaux.

[Français]

L'objectif du projet de loi n'est pas de présenter de nouvelles politiques, mais plutôt de mettre en place un cadre qui, grâce à la synergie et à la dynamique créées par la nouvelle organisation, nous aidera à simplifier la prestation des services du gouvernement à la population canadienne et enfin à en améliorer la rentabilité.

[Traduction]

Le nouveau ministère est un organisme de services communs très important du gouvernement fédéral. Au moment de la fusion, il comptait 18 000 employés répartis à 200 endroits au Canada et avait un budget annuel d'environ quatre milliards de dollars. Il offre toute une gamme de services. Il fournit, entre autres, des services de télécommunications et des services informatiques professionnels et techniques à d'autres ministères ou organismes fédéraux. Il sert de principal agent de contrats du gouvernement et garantit le rendement optimal de l'argent dépensé, grâce à un processus d'achat transparent, juste et concurrentiel. Il émet des chèques et fait des dépôts directs pour environ 20 millions de dollars chaque année dans le cadre des responsabilités qui lui échoient, en tant que receveur général. Il assure au gouvernement tout une gamme de services de communication et publie des milliers de titres chaque année. Il offre des services de consultation et de vérification comptable qu'il facture. Il fournit la plupart des services nécessaires au gouvernement en architecture et en génie et une vaste gamme de services concernant les immeubles. Et voici mon service préféré, il assure les services d'interprétation et de traduction au Parlement et à la fonction publique, très prisés des députés. Il s'occupe de l'aliénation et de la vente des biens de l'État. Ce ne sont là que quelques-uns des services multiples et variés qui sont fournis par le ministère.

(1335)

Afin de s'acquitter de son mandat efficacement, Travaux Publics et Services gouvernementaux doit établir des relations de travail étroites et productrices avec des intérêts nombreux et variés, principalement ceux qui font affaire avec le gouvernement du Canada, les nombreux ministères et organismes gouvernementaux, qui comptent sur les services de Travaux Publics et Services gouvernementaux, enfin le public


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canadien, qui exige une prestation rapide et efficace des services gouvernementaux.

Nous ne devons pas oublier que le gouvernement fédéral est de loin le plus important acheteur de biens et de services au Canada. Chaque année, le gouvernement fédéral, à l'exclusion des sociétés d'État, en achète pour plus de 16 milliards de dollars. Quelque 65 p. 100 de ces achats, soit 10 milliards de dollars, passent par Travaux Publics et Services gouvernementaux.

[Français]

Il ne fait aucun doute que cette nouvelle façon plus globale d'aborder le service des achats du gouvernement saura profiter à tous les intéressés canadiens.

Nous serons ainsi à même de mettre en place des méthodes et des politiques qui seront davantage coordonnées et normalisées, d'utiliser des technologies de pointe permettant la simplification des processus en place, et de donner aux fournisseurs éventuels une idée plus précise de leur interlocuteur.

Les premières réactions à la fusion ont été positives. Elles le seront encore plus quand la loi sera adoptée et que la mise au point du nouveau ministère sera plus avancée.

[Traduction]

Le gouvernement a dit et redit que les opérations gouvernementales doivent être flexibles et axées sur l'action et les résultats et non pas soumises aux impératifs bureaucratiques, comme le disent souvent certains députés de l'autre côté.

C'est tout à fait le cas des services centraux fournis par le nouveau ministère et je crois qu'il sera mieux équipé pour établir des liens plus étroits et plus souples avec les ministères clients.

[Français]

Les avantages directs de cette fusion que retire le gouvernement, et en particulier les contribuables, sont plus que remarquables. Déjà, le chevauchement, un concept si cher au Bloc québécois, et le double emploi ont pu être sensiblement réduits partout au ministère, et la simplification des opérations va bon train.

Si l'on tient compte des examens opérationnels, ainsi que des recommandations s'y rapportant, des nouveaux systèmes qui seront implantés et de la fusion elle-même, les économies réalisées devraient s'évaluer approximativement à 180 millions de dollars sur cinq ans.

[Traduction]

L'effectif sera réduit de plus de 20 p. 100, passant de 18 000 au moment de la fusion à environ 14 000 à la fin du siècle. De façon plus précise, les services administratifs des groupes composant le nouveau ministère ont déjà été regroupés, ce qui a permis de réaliser une économie de 500 postes à temps plein.

[Français]

Je tiens à préciser que toutes ces économies seront réalisées grâce à l'élimination du double emploi, à la simplification des systèmes et à l'utilisation accrue des technologies de pointe, telles que l'infométrie.

Je vous assure qu'elles ne diminueront en aucune façon la qualité du service offert actuellement à la clientèle du ministère et, bien entendu, à la population canadienne.

(1340)

Quelle que soit l'organisation des services communs, la clé du succès reposera toujours sur l'efficacité. Et pour ce faire, il faut réduire le chevauchement et le double emploi partout au gouvernement et devenir un centre d'excellence dont les efforts seront axés sur l'élaboration de nouvelles méthodes et de technologies en matière de prestation des services.

Le résultat net sera des économies pour les contribuables, un centre multiservices pour les ministères clients, une expertise spécialisée accessible partout au gouvernement, un guichet unique pour les fournisseurs et les entrepreneurs qui traitent avec le gouvernement-et c'est un point important à souligner-un guichet unique, on n'entend que ça de la part de l'opposition par les temps qui courent, et avant tout, l'amélioration de la capacité du gouvernement à servir les Canadiens et les Canadiennes.

[Traduction]

Dans le contexte actuel de compressions budgétaires, l'efficience et l'économie des opérations gouvernementales ne sont pas un luxe mais une nécessité absolue. Je crois que le projet de loi C-52, qui regroupe la majorité de tous les services communs sous la responsabilité d'un ministère, nous permettra d'être plus efficients et de donner le plus de satisfaction possible à nos clients.

J'espère que tous les députés se joindront à moi et aux députés de mon parti pour appuyer ce projet de loi novateur. Nous avons déjà beaucoup fait, mais l'adoption du projet de loi nous permettra de progresser encore davantage et avec confiance sur la voie de la rationalisation et de l'amélioration des opérations du gouvernement fédéral.

[Français]

M. Gérard Asselin (Charlevoix): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-52. Vous me permettrez de souligner que lorsque j'étais conseiller municipal à la ville de Baie-Comeau, fonction que j'ai occupée pendant 14 ans, j'étais président de la commission des travaux publics.

Au niveau municipal, un conseiller a les mêmes responsabilités qu'un député en cette Chambre. Un conseiller municipal doit gérer les taxes provenant des contribuables municipaux. Il en va de même au niveau fédéral. Les députés


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doivent être préoccupés par la bonne gestion des deniers publics en matière d'impôts et de taxes, et ce, au nom de la transparence.

De plus en plus, les politiciens perdent leur crédibilité. De plus en plus, les politiciens sont incapables de répondre à leurs électeurs sur des questions de sous-traitance, de privatisation, de transparence, ainsi que sur différents autres sujets similaires.

Dans ce discours, je vous entretiendrai du projet de loi C-52, mais principalement de la sous-traitance, de la privatisation et de la façon dont le gouvernement devrait profiter de l'occasion qui lui est offerte. En effet, le projet de loi C-52, qui est une loi qui existe déjà à l'intérieur du gouvernement, vise l'unification des ministères des Travaux publics, des Approvisionnement et Services, et des Communications et Traduction.

C'est une loi qui remonte aux années 1870 environ. Bien sûr que cette loi ne donne aucun pouvoir additionnel au gouvernement et principalement au ministre. Nous aurions cru, nous, du Bloc québécois, que ce projet de loi aurait accordé au ministre des pouvoirs de contrôle et de gestion afin que le gouvernement libéral, selon ses promesses du livre rouge, laisse au moins voir une certaine transparence dans ce projet de loi en lui donnant un cadre rigide, un cadre de contrôle, afin d'être clairvoyant et limpide dans les décisions qu'il aura à prendre à l'avenir.

(1345)

Il y a un proverbe qui dit «On n'est jamais si bien servi que par soi-même». J'aimerais que le gouvernement nous dise de quel ordre sont les économies réalisées grâce à la sous-traitance et à la privatisation des équipements fédéraux. On dit que le passé est garant de l'avenir. Je suis drôlement plus inquiet si le passé est garant de l'avenir, car on se rappellera l'infâme dossier de la privatisation de l'aéroport Pearson, le seul aéroport fédéral rentable au Canada.

Bien sûr, le gouvernement fédéral veut se départir, principalement au Québec, des équipements qui lui appartiennent et qui ne sont plus rentables. Cependant, s'ils ne sont pas rentables pour le gouvernement fédéral, ils le sont encore moins pour les MRC, pour les municipalités ou pour les intervenants économiques des régions.

De l'équipement fédéral, il y en a dans ma circonscription. On retrouve des aéroports à Baie-Comeau, à Forestville et à Charlevoix. Il y a, dans ma circonscription, environ 20 quais sous juridiction fédérale. Quelques quais sont encore opérationnels, et plusieurs autres sont déclarés excédentaires par Pêches et Océans, Transports Canada et Travaux publics.

Je suis également préoccupé par la sous-traitance ainsi que par la privatisation que s'apprête à faire le ministère des Transports dans le transport ferroviaire, maritime et aéroportuaire. Chez nous, il y a la compagnie SOPOR qui transporte les matériaux de la compagnie Reynolds, de la corporation QUNO, en direction de la Rive Sud. SOPOR est une compagnie importante pour le développement économique de la région, et d'autant plus utile pour le transport, pour expédier les produits d'aluminium de la Reynolds et les produits de papier journal de la compagnie QUNO à la grandeur de la planète.

Or, le transport, la sous-traitance ou la privatisation nous empêchent de développer le tronçon ferroviaire entre Québec et Pointe-au-Pic, car on sait que ce tronçon va être transféré très prochainement à l'entreprise privée. C'est un dossier qui traîne en longueur. De plus, nous sommes en attente de la mise sur pied du fameux train touristique en provenance de la Gare centrale de Québec jusqu'au casino de Charlevoix.

La sous-traitance doit donner une meilleure qualité et de meilleurs services, et ce, à meilleurs coûts. Je ne veux pas par ce discours dire que je suis contre la sous-traitance, ce que je veux avoir de la part du gouvernement, de la part du ministère, de la part du comité, ce sont des preuves à l'effet que la sous-traitance ou la privatisation est rentable pour le gouvernement.

On sait que le gouvernement doit aller en appel d'offres publiques pour tous les contrats de plus de 25 000 $. Pour les contrats de 2 500 à 25 000 $, le ministère est autorisé à octroyer les contrats, même sur invitation. Bien sûr qu'à l'intérieur des ministères, il y a une marge de manoeuvre pour ce qui est des contrats qui se situent entre 1 $ et 2 500 $.

On nous reproche souvent à nous, du Bloc québécois, par l'entremise de différents ministres, de critiquer, mais de n'apporter aucune solution. Je peux vous dire que le Bloc québécois apporte de très bonnes solutions au projet de loi C-52 afin d'avoir un meilleur contrôle pour que le gouvernement puisse développer un esprit de transparence.

(1350)

Ignorer les solutions du Bloc québécois qui désire réduire les coûts des programmes ainsi que le déficit revient à empêcher de trouver un moyen d'offrir des services aux Canadiens de façon rentable et efficace.

Dernièrement, lors d'une séance du Comité des opérations gouvernementales, j'ai demandé au ministre responsable: «Vous engagez-vous aujourd'hui devant ce comité à cerner clairement les besoins d'un ministère, à préparer un bon devis, à enclencher un processus de soumissions publiques juste, à ouvrir des soumissions publiques et à rédiger un rapport des soumissionnaires, à analyser publiquement les soumissions, à faire une recommandation par le sous-ministre et, monsieur le ministre, êtes-vous prêt à vous engager, à la suite de ce processus, à accepter la plus basse soumission conforme aux devis préparés par le ministère?» La réponse fut «non».

Comment un ministère ou un ministre peut-il se qualifier de «transparent» tout en n'acceptant pas la plus basse soumission conforme? Cela veut dire qu'il pourrait être blâmé un jour ou l'autre d'avoir encouragé un ami du régime ou d'avoir encouragé quelqu'un qui, à un certain moment, a assisté à un souper à1 000 $ le couvert.

Dans le livre rouge du gouvernement et pendant la campagne électorale, on a parlé de transparence. La transparence, il ne faut pas que ce soit uniquement pendant la campagne électorale, il faut qu'elle se prolonge tout au long du mandat. Dans tous les ministères, on a la préoccupation d'une saine gestion. Et nous, comme politiciens, comme députés, nous avons à faire preuve de notre bonne volonté afin d'obtenir la meilleure crédibilité possible auprès des électeurs dans chacune de nos circonscriptions.

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La politique actuelle de sous-traitance nous fait-elle économiser de l'argent? Dans l'affirmative, de quel ordre sont ces économies et comment sont-elles réalisées? Quels sont les avantages et les inconvénients les plus importants de la sous-traitance? Certains inconvénients ont été décelés, telle la mauvaise qualité du travail effectué. De plus, on est en mesure de douter de la confidentialité de certains documents.

D'autres questions me viennent à l'esprit: Quels sont les justifications acceptables de la sous-traitance? Combien de fonctionnaires sont «tablettés»? À votre avis, quel est leur nombre, et cette proportion va-t-elle s'accroître? En résumé, plusieurs questions sont sans réponse.

La sous-traitance nous paraît dispendieuse. Des fonctionnaires n'ont pas été mis à pied et on confie quand même de plus en plus de contrats en sous-traitance. Une sécurité d'emploi des fonctionnaires, le Groupe de Communications Canada qui utilise des fonds en fin d'exercice financier pour ne pas se les faire couper l'année d'après dans son budget, la privatisation de l'aéroport Pearson, voilà autant d'exemples importants qui devraient faire réfléchir le gouvernement afin qu'il vote en faveur de l'amendement proposé par le Bloc québécois et qu'il vote contre ce projet de loi si l'amendement est rejeté.

Dans la capitale nationale, 79 p. 100 des services offerts par le gouvernement fédéral le sont par du personnel temporaire. Selon les rapports, 64,4 millions de dollars ont été consacrés à des services offerts par du personnel temporaire, en 1993, uniquement dans la région de la capitale nationale, alors que des milliers d'employés à temps plein sont déclarés excédentaires. Cette pratique est ridicule et constitue un gaspillage des fonds publics.

(1355)

En 1992-1993, une secrétaire à temps plein, pour le gouvernement fédéral, gagnait 24 000 $ plus les avantages sociaux. Une agence de personnel temporaire demande au gouvernement pour des services de secrétariat, 36 000 $ par année ou 20 $ l'heure.

Vous me permettrez de citer quelques exemples pour démontrer ce que ça coûtait au gouvernement fédéral et ce que ça coûte aujourd'hui par l'intermédiaire de la sous-traitance.

Un mécanicien du gouvernement gagnait 16 $ l'heure et l'agence demande au gouvernement 26 $ l'heure. Un plombier gagnait, ici au niveau fédéral, à l'entretien, 18 $ l'heure, et une agence demande encore 26 $ l'heure. Un menuisier pour le gouvernement fédéral, menuisier attitré à l'entretien, gagnait17 $ l'heure, tandis qu'une agence demande 25 $ l'heure, et cela pour les mêmes services.

Il est faux de croire que la sous-traitance fait épargner de l'espace et de l'équipement. Dans la capitale nationale, des centaines de sous-traitants travaillent dans les bureaux qui appartiennent au gouvernement fédéral et utilisent l'équipement, les locaux et le matériel payés par les contribuables canadiens et québécois.

Il est temps que ce gaspillage cesse. En 1991, la sous-traitance dans la fonction publique a coûté 5 milliards de dollars. De 1984-1985 à 1992-1993, les coûts de la sous-traitance ont augmenté en moyenne de 7,5 p. 100 comparativement à 5,3 en ce qui concerne les autres dépenses d'exploitation gouvernementale.

On se rappellera que dans un rapport récent également en 1984-1985, ça coûtait en sous-traitance, à l'époque, 2,9 milliards de dollars; en 1992-1993: 5 milliards, donc le double. Je reprendrai après la période des questions orales.

M. Patrick Gagnon (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada): Madame la Présidente, j'écoutais avec intérêt les propos tenus par l'honorable député ainsi que par ses collègues. On parle toujours de dédoublement, de gaspillage et de transparence.

Justement, je crois que le gouvernement fédéral fait des efforts considérables pour rendre le processus transparent. Nous avons quand même un service des invitations ouvertes à soumissionner, qu'on appelle le SIOS, où on invite même les députés de l'opposition, les petits entrepreneurs, les grandes entreprises à y soumissionner afin de voir s'il existe certains contrats, ici au gouvernement fédéral, pour rendre service aux entreprises de chez vous.

Je peux quand même vous citer des exemples. Chez moi, dans Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine, et je parle ici des pêcheurs madelinots, souvent, on soumissionne auprès du gouvernement fédéral pour divers services. Il y a justement eu des demandes de soumissions à l'ACDI pour des caisses de hareng. Je peux vous dire ceci: les Madelinots, à cause de la qualité de leurs produits, le prix compétitif, ont su capturer. . .

Le Président: À l'ordre! Comme il est 14 heures, conformément à l'article 30(5) du Règlement, la Chambre procédera maintenant aux déclarations de députés, conformément à l'article 31 du Règlement.

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6508

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES COURSES TERRY FOX POUR LA RECHERCHE SUR LE CANCER

M. Peter Adams (Peterborough): Monsieur le Président, les courses Terry Fox se multiplient aujourd'hui dans le monde, et je suis ravi de voir que nombre de ces courses connaissent encore un grand succès dans certaines parties du Canada, par exemple à Peterborough où Terry Fox s'était rendu lors de sa propre course.

Cette année, la course organisée à Peterborough par Doug Boden et son comité a permis à la Ville de recueillir 17 000 $. Les écoles de Peterborough ont réuni plus de 90 000 $. Je remercie toutes les personnes qui ont participé.

Dans le petit village de Havelock, dont les habitants ont tissé des liens étroits avec Terry quand il a traversé leur localité, plus de 10 000 $ ont été recueillis grâce aux efforts sensationnels d'Ernie Hamilton. Nous adressons nos remerciements au village de Havelock, aux communes de Belmont et de Methuen, à la Légion de Havelock et à tous ceux et celles qui ont participé à ce remarquable effort.

Nous remercions particulièrement les élèves de l'école publique de Havelock, Belmont et Methuen pour leur contribution de 246 $.

Terry Fox continue à recueillir des fonds pour la recherche sur le cancer.


6509

* * *

[Français]

LE FÉDÉRALISME

M. Bernard Deshaies (Abitibi): Monsieur le Président, les fuites concernant le document de travail qui servira de discussion au ministre du Développement des ressources humaines nous confirment que les fantômes du fédéralisme centralisateur se réactivent. Ces fantômes qu'on espérait voir disparaître à jamais s'apprêteraient à couper 2,3 milliards de dollars dans les paiements de transfert aux provinces en matière d'éducation postsecondaire et ce, afin de mieux s'immiscer dans le domaine de juridiction exclusive des provinces.

Quelles sont les raisons qui poussent ce gouvernement à vouloir se donner une plus grande visibilité d'action dans les domaines de juridiction exclusive des provinces. Le gouvernement fédéral veut-il donner l'impression qu'il est le mieux placé pour régler les problèmes déjà existants?

Dans les deux cas, le gouvernement fédéral fait preuve d'un désaveu complet envers la capacité d'action des provinces et les députés du Bloc québécois ne veulent pas souscrire à cette idée.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley): Monsieur le Président, le 2 octobre, le Sun d'Ottawa rapportait qu'un homme condamné pour un meurtre sauvage commis en 1976, va se voir accorder une deuxième chance de libération conditionnelle anticipée, tout cela parce que la Cour suprême a décidé que, durant la première audience, la Couronne avait constamment et abusivement fait appel aux sentiments du jury.

La cour a décidé que ce meurtrier, qui a asséné 132 coups de couteau à sa victime à l'aide de cinq couteaux différents mérite une deuxième chance. Et la victime? Et ses chances à elle? Et la chance qu'elle aurait eu de vivre une vie pleine et heureuse? Elle n'a pas eu de deuxième chance.

Il est temps de donner une deuxième chance aux citoyens respectueux de la loi, une deuxième chance de reprendre confiance dans notre système de justice pénale. Il est temps de remédier aux lacunes et de se débarrasser de tous les libertaires qui, souvent, permettent le retour de délinquants aussi dangereux dans la société.

Quand des crimes de cette sauvagerie sont commis, les Canadiens réclament la peine d'emprisonnement à perpétuité, et à perpétuité signifie à perpétuité, sans deuxième chance.

* * *

LES PAGES DU PARLEMENT

M. Paul Steckle (Huron-Bruce): Monsieur le Président, c'est un grand honneur pour moi aujourd'hui de prendre la parole pour rendre hommage à nos pages. Des pages sont au service des parlementaires depuis la signature de la Confédération en 1867. Les premiers ministres sir John A. Macdonald, sir Wilfrid Laurier, Lester B. Pearson, Mackenzie King et Louis Saint-Laurent ont tous été servis de la même façon par de distingués jeunes Canadiens.

Les pages assument de nombreuses fonctions. Entre autres, ils vont porter les messages, le Feuilleton et le hansard aux pupitres des députés, et servent même des verres d'eau à l'occasion.

À une certaine époque, la possibilité d'occuper ce poste était un privilège réservé aux jeunes hommes. Cette pratique a changé en 1974, et cette équipe compte maintenant des jeunes femmes.

La Chambre des communes a maintenant une équipe de 42 pages à son service, et toutes les provinces y sont représentées. Ces étudiants sont un exemple pour tous les jeunes du pays. L'un d'eux, Roger Label, vient de ma circonscription, Huron-Bruce, plus précisément de Port Elgin.

Les pages sont des personnes dévouées et assidues. C'est au nom de tous les députés que je saisis l'occasion de les remercier de leur bon travail et de leur soutien.

* * *

LE NATIVE COUNCIL OF NOVA-SCOTIA

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants): Monsieur le Président, le vendredi 30 septembre, j'ai eu l'honneur d'assister à la 20e assemblée générale annuelle du Native Council of Nova-Scotia. Cette conférence de trois jours était l'occasion idéale pour les Mi'kmaq de Nouvelle-Écosse vivant hors réserve de participer aux discussions sur la meilleure façon de réaliser l'autonomie gouvernementale.

Parallèlement à cette conférence, la province de Nouvelle-Écosse a annoncé qu'elle avait créé une tribune tripartite chargée d'examiner les grandes questions relatives aux affaires des autochtones. C'est une première au Canada, et je suis fier de la collaboration apportée par toutes les parties pour trouver des solutions positives et dynamiques.

Je tiens à louer les travaux accomplis par ce conseil pour promouvoir des changements positifs. Appuyons la nation Mi'kmaq dans le processus qui lui donnera un mode de gouvernement plus conforme à ses traditions.

* * *

LA SEMAINE DE SENSIBILISATION À LA MALADIE COELIAQUE

Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre): Monsieur le Président, je désire attirer l'attention de la Chambre sur une maladie qui n'a rien de spectaculaire et dont on parle peu, mais qui n'en demeure pas moins tragique. La semaine du 2 au 8 octobre a été désignée semaine de sensibilisation à la maladie coeliaque par l'Association canadienne de la maladie coeliaque.

Cette maladie est un trouble de l'absorption intestinale par intolérance au gluten, substance qui se trouve communément dans le pain et dans tous les produits contenant du blé, du seigle ou de l'avoine. Les lésions causées à la paroi de l'intestin grêle par le gluten rendent impossible l'absorption des éléments nutritifs, des protéines, des vitamines et des minéraux essentiels à la croissance et à une bonne santé.


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Quelque 20 000 Canadiens souffrent de la maladie coeliaque. Le traitement de cette maladie chronique repose sur la mise à un régime sans gluten. Cela veut dire que pendant toute leur vie les personnes atteintes ne peuvent manger ni pâtes, ni pain, ni pâtisseries ni tout autre aliment contenant du gluten.

(1405)

L'Association canadienne de la maladie coeliaque sensibilise la population à cette maladie et offre des services aux personnes atteintes pour que le diagnostic soit établi rapidement et qu'elles reçoivent l'appui et l'information nécessaires.

Je profite de cette occasion pour féliciter l'Association canadienne de la maladie coeliaque pour ses efforts en vue de faire connaître une maladie dont on parle très peu.

* * *

[Français]

LE FINANCEMENT DU BLOC QUÉBÉCOIS

M. Michel Daviault (Ahuntsic): Monsieur le Président, un titre du journal La Presse laisse entendre aujourd'hui que le Bloc québécois refuse de divulguer l'état de ses finances et les noms des contributeurs à son financement.

Le Bloc québécois tient à faire la lumière sur ces allégations inexactes. À peine au milieu de sa première année financière en tant que parti politique reconnu, le Bloc soumettra donc au printemps prochain son premier rapport financier contenant la liste des donateurs pour la période allant des élections de 1993 à la fin de 1994.

La liste des donateurs du Bloc québécois ayant contribué pour plus de 100 $ est disponible dès maintenant, sur demande, au bureau du parti à Montréal. Le Bloc n'accepte que les dons des particuliers et limite leur contribution à 5 000 $ par année. Il respecte l'esprit de la loi québécoise, esprit qui était l'essence d'une motion que les libéraux ont refusée d'adopter la semaine dernière.

* * *

[Traduction]

LES COMMUNIQUÉS DE PRESSE DU GOUVERNEMENT

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, ce mois-ci un communiqué de presse du Fonds de diversification de l'économie de l'Ouest annonçant une subvention de 39 millions de dollars est arrivé sur mon bureau. Il se terminait par la phrase suivante: «Ceci illustre la façon dont le gouvernement priorise ses dépenses pour mieux servir les Canadiens en utilisant l'argent de leurs impôts de façon efficace.»

J'ai fait une petite enquête et j'ai découvert que le bureau du Conseil privé avait demandé que cette phrase apparaisse à la fin de tous les communiqués de presse du gouvernement annonçant l'octroi d'un financement. Depuis quand une déclaration partiale de ce genre constitue-t-elle une nouvelle? Ce n'est ni plus ni moins qu'un message publicitaire politique. Ce type de consigne est une insulte aux fonctionnaires dont il viole l'impartialité.

Par égard pour les fonctionnaires et leur moral, je demande au gouvernement d'annuler immédiatement cet ordre, de laisser la propagande à sa place, dans les pages poussiéreuses de son livre rouge que plus personne ne lit, et de ne pas soumettre à des messages aussi tendancieux notre fonction publique qui se doit de rester indépendante.

C'est à ce genre de dépenses que nous devons une dette publique qui atteint maintenant 532 956 930 422,47 dollars.

* * *

[Français]

LA FUSION DE RADIO MUTUEL ET DE TÉLÉMÉDIA

M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, après 40 ans, cinq mois et une semaine en ondes, CJMS 1280, longtemps connu comme le numéro 1 de l'information à Montréal, a cessé ses opérations. Avec lui, disparaissent six autres postes appartenant au réseau Radio Mutuel, à Québec, Hull, Trois-Rivières, Chicoutimi et Sherbrooke.

Cette disparition frappe un coup dur pour les régions qui sont ainsi privées d'un certain pouvoir et où il est de plus en plus important de renforcer et de diversifier l'information du public plutôt que de la réduire. Cette fusion entre Radio Mutuel et Télémédia ressemble un peu trop à une concentration de l'information et c'est la sécurité même de la vie démocratique en région qui est en cause.

Je demande donc au CRTC de se pencher attentivement sur la question avant de donner son accord à cette fusion.

* * *

[Traduction]

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

Mme Karen Kraft Sloan (York-Simcoe): Monsieur le Président, un nouveau rapport de l'Institut canadien de la santé infantile fait état d'un nombre inacceptable d'enfants pauvres au Canada.

Dans un milieu pauvre, le taux de mortalité à la naissance est plus élevé, le poids à la naissance est plus faible et un plus grand nombre des enfants présentent des problèmes de santé chroniques et des troubles mentaux.

J'invite le ministre du Développement des ressources humaines et le gouvernement à penser d'abord aux enfants quand ils procéderont à la prochaine réforme de nos programmes sociaux. On ne s'est pas occupé des enfants canadiens. Il est temps de manifester un vrai leadership et de la compassion. Nous devons maintenant améliorer la vie des enfants et des familles au Canada.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

M. Tony Valeri (Lincoln): Monsieur le Président, le Comité de l'environnement se penche actuellement sur la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Cet examen a soulevé un élément très prometteur qui concerne la mise en application d'instruments financiers.

De tels instruments peuvent constituer l'incitatif qu'il faut pour que l'industrie adopte pour philosophie la prévention de la pollution. Ces instruments pourraient entraîner un changement de comportement dans l'industrie, de sorte qu'on protégerait


6511

l'environnement en pensant aux futures générations. Comme ils représentent un incitatif en vue d'améliorer la technologie, nous pourrons non seulement prévenir la pollution au Canada, mais aussi mettre au point des technologies que nous pourrons exporter partout dans le monde.

(1410)

La pollution ne se limite pas à des frontières ou à des domaines de compétence. Je demande à tous les paliers de gouvernement de collaborer pour s'attaquer à nos problèmes environnementaux et mettre en oeuvre des mesures législatives visant à empêcher la pollution.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES INTERGOUVERNEMENTALES

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales comparait hier l'épisode du remboursement du Québec pour le référendum de Charlottetown à un match de lutte arrangé d'avance. Défendre les intérêts des contribuables québécois n'est pas un jeu. S'il y a un match de lutte, comme le prétend le ministre, c'est parce que lui-même a voulu jouer aux gros bras et au vilain de service.

Le ministre des Affaires intergouvernementales n'en est pas à sa première gaffe. Après l'épisode disgracieux de la conversation téléphonique entre MM. Chrétien et Parizeau, et celui du référendum, où il affirmait avec arrogance que le gouvernement fédéral ne devait rien au Québec, voilà qu'il s'entête dans le dossier du voyage de Team Canada en Asie, en exigeant que ce soit M. Parizeau et personne d'autre qui représente le Québec.

* * *

[Traduction]

OCTOBRE

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, le film Octobre illustre l'extrême tolérance dont on fait preuve et qui va jusqu'à protéger la liberté d'expression au Canada. La tolérance est poussée à ses limites au Canada avec les menaces quotidiennes de séparation.

Octobre est un film séparatiste, subventionné, encore une fois, par l'argent des contribuables canadiens. Le gouvernement fédéral a dépensé 1,4 million de dollars pour propager un mensonge. L'Office national du film a contribué 400 000 $ et Téléfilm Canada, 1 million de dollars, au financement de cette faible prétention à la véracité.

Les faits sont clairs. Pierre Laporte a été assassiné par des terroristes séparatistes et, aujourd'hui, l'argent des contribuables canadiens sert à glorifier et à dénaturer ce meurtre insensé perpétré par une bande de meurtriers et de voyous séparatistes.

Qu'on en vienne à réduire le meurtre de Pierre Laporte, commis de sang-froid, à un film aussi intellectuellement malhonnête qu'Octobre, c'est aberrant. Mais qu'on se serve des deniers publics pour le réaliser, c'est scandaleux. Les états d'âme et les émotions des meurtriers ne nous intéressent guère.

[Français]

LE FÉDÉRALISME

M. Gilles Bernier (Beauce): Monsieur le Président, le monde d'aujourd'hui est en constante mutation. Des changements s'opèrent sur tous les plans. On s'adapte facilement à la modernité.

Ici, au gouvernement, on ne sent pas cette évolution. Pourquoi vouloir continuer à pratiquer un fédéralisme intransigeant, immobile, hermétique, rigide, pour ne pas dire dépassé. Le temps est à l'ouverture d'esprit, la flexibilité et la souplesse. Qu'attendons-nous pour bannir le statu quo dans nos relations avec les provinces. De grâce, adoptons une conception du fédéralisme plus à la page. Attardons-nous aux revendications normales des provinces et du Québec, ce sont les voix du modernisme et du bon sens.

Je constate que le mot «évolution» ne fait pas partie du vocabulaire des mandarins du pouvoir et, chez certains élus, la subtilité fait défaut. Partout au pays il y a un désir de décentralisation. Remettons au Québec et aux autres provinces des pouvoirs qui relèvent d'elles selon la Constitution. Agissons, c'est le temps.

* * *

[Traduction]

LES SIMPLES DÉPUTÉS LIBÉRAUX

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord): Monsieur le Président, la semaine dernière, à une conférence de presse tenue à Toronto, le chef du Parti réformiste a déclaré que les simples députés libéraux de l'Ontario ne défendent pas les intérêts de leur province, parce qu'ils ne veulent surtout pas déroger à la discipline de leur parti.

Le député de Calgary-Sud-Ouest et, en fait, tous les députés du Parti réformiste, devraient comprendre que les députés libéraux de l'Ontario ne font que respecter la volonté de plus de 69 p. 100 des Ontariens qui appuient la politique du gouvernement.

La prochaine fois que le chef du Parti réformiste aura envie de dire que les Ontariens ont l'impression que les libéraux ne les défendent pas, il devrait prendre en considération l'opinion de plus de 69 p. 100 des Ontariens qui ne partagent pas son avis.

Le chef réformiste prétend-il que les députés libéraux de l'Ontario devraient uniquement représenter les 7 p. 100 d'Ontariens qui appuient l'idéologie du Parti réformiste?

* * *

WORD ON THE STREET

M. Tony Ianno (Trinity-Spadina): Monsieur le Président, je tiens à féliciter ici les organisateurs, les participants et les promoteurs de la cinquième édition de la Foire du livre et de la revue Word on the Street qui a eu lieu le dimanche, 24 septembre, dans ma circonscription. Il s'agit d'une fête de la culture et de la

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littérature canadiennes, qui-et c'est ce qui compte-fait valoir à quel point il est important de savoir lire et écrire.

Cette année, plus de 100 000 personnes ont vu, rue Queen ouest, les nombreux étalages des libraires, des maisons d'édition et de maints groupes de promotion de l'alphabétisation et de l'érudition.

Comme nous le savons tous, le Canada ne pourra se développer et prospérer que si tous les Canadiens disposent des outils nécessaires pour réaliser leur plein potentiel. Les Canadiens doivent savoir lire et écrire pour que notre pays soit vraiment compétitif au niveau international.

L'an prochain, grâce au financement du gouvernement fédéral et à notre engagement à l'égard du Programme national d'alphabétisation, la foire Word on the Street se tiendra aussi à Vancouver et à Halifax, devenant ainsi un événement vraiment national.

* * *

(1415)

TRACADIE

Mme Elsie Wayne (Saint John): Monsieur le Président, je tiens à féliciter aujourd'hui le nouveau député provincial de la circonscription néo-brunswickoise de Tracadie pour sa victoire retentissante à l'élection partielle du 27 septembre dernier.

La circonscription provinciale de Tracadie, qui se trouve dans la circonscription fédérale d'Acadie-Bathurst, était un bastion libéral depuis 82 ans. Les libéraux provinciaux considéraient ce siège comme leur «Rocher de Gibraltar».

La circonscription a été enlevée avec 1 364 voix de majorité, ce qui constitue une victoire incroyable pour le Parti conservateur. Les électeurs se sont débarrassés des libéraux parce que ceux-ci n'ont pas réussi à relancer l'économie, parce que leur politique est néfaste pour la création d'emplois et parce qu'ils ne sont tout simplement pas à l'écoute des électeurs. Le peuple a parlé et il a dit qu'il en avait assez.

Le Parti conservateur est bien vivant au Nouveau-Brunswick et le «Rocher de Gibraltar» s'est écroulé.

* * *

L'ÉCONOMIE

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona): Monsieur le Président, l'examen gouvernemental de la politique sociale devrait être assorti d'un examen des politiques qui ont véritablement creusé le déficit. Au Canada, les dépenses au titre des programmes sociaux ne sont pas hors de proportion par rapport à ce qui se fait dans d'autres pays. C'est notre façon de financer ces dépenses qui doit être examinée sérieusement.

Du côté des recettes, des gouvernements canadiens successifs ont accordé des milliards de dollars en allégements fiscaux de toutes sortes, à commencer par John Turner, dans le milieu des années 1970. Du côté de la politique monétaire, le maintien de taux d'intérêt élevés, combiné à une réduction du rôle de la Banque du Canada dans le financement de la dette nationale, a conduit à une dépendance regrettable face aux prêteurs et aux porteurs d'obligations étrangers.

Bien sûr, du côté économique, l'obsession du libre-échange et des marchés dits libres a conduit à la disparition de centaines de milliers d'emplois et a fait peser de fortes pressions sur un système social conçu pour des politiques économiques moins bêtes.

Le gouvernement aurait intérêt à s'occuper de cela plutôt que d'attribuer nos problèmes financiers à nos programmes sociaux et à leurs bénéficiaires.

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6512

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE COMMERCE INTERNATIONAL

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, dans l'affaire de la mission commerciale Team Canada en Chine, l'intransigeance du gouvernement fédéral mène tout droit à un affrontement stérile entre Ottawa et le nouveau gouvernement du Québec. Hier encore, le premier ministre a fait preuve d'entêtement en refusant à M. Parizeau de se faire remplacer par un de ses ministres.

Le premier ministre ne comprend-il pas que M. Parizeau, qui vient tout juste d'être élu avec le mandat de remettre le Québec en marche, a des priorités plus urgentes que d'aller passer 15 jours en Chine avec lui?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, lorsque nous avons discuté de ce projet au mois de décembre entre premiers ministres et que nous avons décidé de travailler ensemble, les premiers ministres ont trouvé que c'était une très bonne idée, pour ceux qui pouvaient le faire, de m'accompagner dans ce voyage.

À l'époque, nous croyions qu'il y en aurait trois ou quatre qui viendraient. Depuis, les gens d'affaires ont manifesté un très grand intérêt et le nombre de gens qui viennent sera très élevé, dont un très grand nombre du Québec.

Au cours de l'été, d'autres premiers ministres, ne croyant pas pouvoir venir, avaient demandé à être remplacés. On leur a dit qu'il avait été convenu, entre les premiers ministres, que ceux qui pourraient, viendraient et que, pour les autres, c'était regrettable. De toute façon, c'est une délégation canadienne qui comptera énormément de gens d'affaires. Il y en aura deux fois plus que ce qui avait été prévu. Le Canada sera représenté ainsi que le Québec et les gens des autres provinces par les gens d'affaires qui seront là et par le premier ministre du Canada qui, au surplus, est un Québécois.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, si on considère la question sous l'angle du bon sens le plus élémentaire et pas de la partisanerie politique, il est difficile d'expliquer l'entêtement du premier ministre. Ne serait-ce pas qu'après avoir été forcé de payer la note de Charlottetown, qu'il refusait de payer indûment, il tente maintenant de se reprendre en démontrant au Canada anglais qu'il peut tenir tête aux demandes, mêmes légitimes, du Québec?


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Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, le chef de l'opposition devrait dire que le voyage n'est pas de 15 jours, le voyage est de 5 ou 6 jours en Chine. Ensuite, je me rends à Hong Kong; puis à la conférence de l'Organisation de coopération économique Asie-Pacifique en Indonésie et je visiterai ensuite le Viêt-Nam. La partie qui concerne les gens d'affaires, c'est la visite en Chine, c'est-à-dire trois ou quatre jours. C'est pour la création d'emplois. Je suis prêt à collaborer avec tous les gouvernements. En ce qui a trait au paiement que nous avons fait la semaine passée, nous nous sommes assurés que la promesse faite au Québec était vraiment une promesse. J'ai été prudent en prenant cette décision-là.

(1420)

Le chef de l'opposition devrait avoir la gentillesse de se lever et de me remercier d'avoir changé la décision du précédent gouvernement qui ne voulait pas payer; ce que M. Mulroney avait dit en privé, mais qu'il n'a jamais soumis, ni lui, ni Mme Campbell, au gouvernement conservateur de l'époque. J'ai réglé le problème. Je n'ai pas peur de la réaction du Canada anglais, au contraire! Tous les éditorialistes du Canada ont approuvé le geste que nous avons posé, sauf un ou deux. Les autres ont conclu que nous avions pris la bonne décision. Si on me reproche d'avoir été prudent pour m'assurer que ça ne tourne pas en controverse, j'accepterai le reproche, mais je ne serai jamais trop prudent avec l'argent des contribuables.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, il ne faudrait pas que le premier ministre s'imagine qu'il peut acheter le silence du Bloc, uniquement parce qu'il a payé, de mauvaise grâce par surcroît, un dû au Québec.

[Traduction]

Le premier ministre ne voit-il pas que son entêtement à exclure le Québec et l'Ontario, deux provinces qui comptent plus de 60 p. 100 de la population du Canada, minera sérieusement la crédibilité de la délégation commerciale canadienne qui ira en Chine?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, nous n'excluons personne. Il s'agit d'une initiative fédérale. Je dirige la délégation. J'ai offert aux premiers ministres provinciaux de venir avec moi.

Au début, il y en avait très peu qui croyaient pouvoir venir, mais l'enthousiasme les a gagnés au cours des mois étant donné tous les hommes d'affaires qui viennent de partout au Canada. Il y a une forte délégation d'hommes d'affaires québécois confiants. Ils veulent être avec moi pour travailler afin de créer des emplois pour la population du Québec. Je suis désolé que les premiers ministres du Québec et de l'Ontario ne puissent pas venir. Ils ne sont pas obligés d'être là parce que je représenterai tous les Canadiens.

Des voix: Bravo!

M. Chrétien (Saint-Maurice): Je serais heureux de représenter le Bloc québécois aussi.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, la propension naturelle du premier ministre du Canada à générer des conflits entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec ne date pas d'hier. Quand ce n'est pas en entrant de plain-pied dans des juridictions qui ne sont pas les siennes, c'est en se mettant les pieds dans les plats qu'il le fait.

Le premier ministre du Canada ne réalise-t-il pas qu'en choisissant lui-même qui doit représenter les gouvernements du Québec ou de l'Ontario, il s'ingère directement, ce faisant, dans une responsabilité qui ne regarde que les chefs de ces gouvernements et un seul, pas lui?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, il a été convenu à l'amiable avec tous les premiers ministres des provinces et moi-même, au mois de décembre, de travailler ensemble. Je leur ai offert de m'accompagner. Plusieurs m'ont dit: «Nous aimerions le faire, mais nous ne pourrons pas y aller». Certains m'ont appelé pour me dire: «Est-ce que je pourrais me faire représenter?» et j'ai dit: «Non», parce qu'il a été convenu que c'étaient les chefs de chacun des gouvernements qui y allaient. Alors, je n'ai pas cherché de confrontation. C'est une délégation canadienne. On a invité les premiers ministres à venir: ceux qui le peuvent viennent, et ceux qui ne le peuvent pas ne viennent pas.

On m'accuse de provoquer le gouvernement provincial, alors que le ministre des Finances, par exemple, essaie de trouver une solution de remplacement de la TPS et cherche à obtenir la collaboration des provinces. Or, le gouvernement du Québec a déjà dit: «Non, on ne participera pas». Quand la ministre des Ressources naturelles, à la demande des députés du Bloc québécois, veut contribuer au programme de développement forestier au Canada, le ministre responsable des forêts du Québec refuse d'assister à la conférence des ministres des Forêts, au Nouveau-Brunswick. Et les gens très agréables veulent collaborer avec le gouvernement fédéral. . . Le premier ministre du Québec, la semaine passée, a dit: Je n'ai qu'un but en tête dans les mois à venir, c'est de faire dérailler la machine fédérale.

(1425)

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, ce dont nous parlons, c'est de la conduite du premier ministre du Canada, pour l'instant.

Ma question est la suivante: En voulant soumettre le premier ministre du Québec à son diktat, est-ce que le premier ministre réalise qu'il se dirige vers un affrontement inévitable et inutile avec le gouvernement du Québec car le véritable objectif, l'objectif inavoué, est d'isoler le gouvernement souverainiste du Québec et de l'exclure de sa mission fédérale?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, franchement, c'est de l'exagération. La décision a été prise au mois de décembre l'an dernier d'agir de cette façon-là. C'était un gouvernement libéral à l'époque, et j'aurais bien aimé qu'il demeure libéral. Ce n'est pas moi qui ai décidé de la date des élections, et si le premier ministre du Québec ne peut pas quitter le Québec quelques jours pour venir en Chine, que les Québécois se disent que nous sommes bien représentés par des gens d'affaires du Québec, par un député du Québec qui est aussi le premier ministre du Canada.


6514

* * *

[Traduction]

LE DÉFICIT

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, il est intéressant de voir le gouvernement et le Bloc québécois se disputer à la Chambre au sujet de qui ira en voyage à un moment où le pays connaît de graves difficultés financières.

Le ministre des Finances a dit à la Chambre que les économies résultant de la réforme sociale serviraient à réduire le déficit, alors que la vice-première ministre a affirmé le contraire.

Le premier ministre peut-il dire à la Chambre si, oui ou non, les économies résultant de la réforme sociale serviront à réduire le déficit?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre): Monsieur le Président, le député pourra lire la réponse dans le document.

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, pas plus tard que jeudi dernier, le ministre des Finances a dit ici même, à la Chambre, que la réforme sociale permettrait de réduire les dépenses.

Le premier ministre peut-il préciser si, oui ou non, c'est là la politique de son gouvernement? Si ce n'est pas le cas, il faudrait le dire clairement aux Canadiens dès aujourd'hui.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, je suis heureux de voir à quel point le député s'intéresse à la réforme sociale.

Je dirais que le député est en retard d'environ neuf mois, car les paramètres financiers de notre programme de réforme sociale ont été très clairement établis dans le budget de février.

M. Ray Speaker (Lethbridge): Monsieur le Président, le gouvernement ne veut pas dire aux Canadiens quelle est sa position sur le sujet et s'il est prêt à assumer ses responsabilités.

Le ministre des Finances peut-il nous dire si son exposé économique, qui doit être publié à la mi-octobre, montrera aux Canadiens que le gouvernement a suffisamment de courage pour réduire les dépenses au titre des programmes sociaux afin de pouvoir enfin s'attaquer au déficit?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, le gouvernement a déjà fait un certain nombre de déclarations à ce sujet et il a toujours maintenu que nous voyons la réforme sociale comme un moyen de servir les Canadiens de la façon la plus efficace et la plus efficiente possible.

Nous comprenons également les pressions exercées sur nous. Par exemple, le ministre du Développement des ressources humaines parlait l'autre jour de la dette massive qui doit être réduite.

(1430)

Il a dit ensuite que, si nous n'acceptons pas cette réalité, ce seront les courtiers en obligations à New York qui nous dicteront notre politique sociale. La seule différence entre les députés de l'opposition et nous, c'est que nous comprenons que notre souveraineté économique et sociale est en jeu et que nous ne laisserons personne nous dicter la direction que notre pays doit prendre.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le ministre ne déposera demain qu'un simple document de discussion, après avoir promis pour avril dernier un plan d'action déterminant les orientation du gouvernement en matière de réforme des programmes sociaux. De plus, en raison des objections de plusieurs provinces, ce projet de réforme accuse déjà un retard considérable par rapport à l'échéancier original.

Le ministre admettra-t-il que le dépôt d'un simple document de discussion confirme son échec à présenter un véritable plan d'action déterminant les orientations gouvernementales en matière de réforme des programmes sociaux?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Non, monsieur le Président.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, doit-on comprendre de ce «no» que le ministre, sous prétexte d'une vaste consultation, cache son véritable objectif: couper quatre milliards de dollars dans les transferts aux provinces et les prestations aux individus?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien): Monsieur le Président, le député me semble atteint d'agitation prématurée.

Le meilleur remède à cette affection serait d'attendre à demain pour voir ce que le document dit vraiment et ce qu'il propose vraiment.


6515

L'IMMIGRATION

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, le prétendu processus de consultation du ministre de l'Immigration est maintenant terminé.

Je suppose qu'en plus des groupes de pression, le ministre a consulté M. Don Devoretz, un éminent expert des questions d'immigration, selon qui la politique de réunification des familles a fait baisser le taux de réussite des immigrants d'aujourd'hui.

Le ministre est-il résolu à agir selon les voeux des Canadiens tels que révélés par plusieurs sondages successifs, de même que selon les constatations des experts? Réduira-t-il sensiblement le nombre des immigrants admis au Canada?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, non seulement M. Devoretz était une personnalité invitée à notre conférence de deux jours, mais il a aussi fait partie d'un groupe de travail. Nous avons examiné très attentivement le travail qu'il a produit en Colombie-Britannique. Il est certainement un éminent spécialiste de certains des aspects économiques de l'immigration.

On devrait également remarquer qu'il a affirmé très clairement que l'immigration contribue à bâtir notre pays; d'ailleurs, quand on examine l'aspect fiscal de l'immigration-et ce sont là ses propres paroles-on constate que les immigrants ont payé davantage en taxes et en impôts qu'ils n'ont reçu en prestations sociales.

Quand on réfléchit à certaines des choses qu'il a dites, on peut les adapter à tout ce qu'il a dit.

Mme Deborah Grey (Beaver River): Monsieur le Président, si l'on examine précisément le rapport, on se rend compte qu'une partie de ces témoignages ont été cités hors contexte.

Les propres fonctionnaires du ministre ont réclamé une réduction du nombre des immigrants dans deux rapports distincts. Les députés ministériels d'arrière-ban en ont fait autant. Le gouvernement néo-démocrate de l'Ontario a suggéré en termes très énergiques de réduire le nombre des immigrants ou de doubler les subventions d'intégration.

Le ministre avouera-t-il qu'il n'écoute personne, ni les experts, ni ses députés d'arrière-ban, ni ses fonctionnaires ni même les autres gouvernements, ni certes les Canadiens en général. Son processus de consultation en matière d'immigration qui a coûté plusieurs millions de dollars a été une farce.

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, la députée devrait peut-être attendre que le gouvernement annonce, au plus tard le 1er novembre, le nombre des immigrants qui seront admis avant d'accuser le gouvernement de n'écouter personne et de ne pas agir.

Je ferai remarquer à la députée que jamais processus de consultation n'a été aussi ouvert que celui auquel nous nous sommes livrés depuis huit mois. Jamais auparavant on n'a fait participer des milliers de personnes plutôt que 120. Jamais auparavant on n'a distribué 30 000 trousses d'information.

Le processus que nous avons entrepris a été pris au sérieux et a produit beaucoup de bons résultats qui aideront notre gouvernement au lieu de le gêner quand nous présenterons ces chiffres à la Chambre.

* * *

[Français]

LES RÉGIMES ENREGISTRÉS D'ÉPARGNE-RETRAITE

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Le gouvernement laisse libre cours aux spéculations quant à la possibilité que les régimes enregistrés d'épargne-retraite soient taxés dès le prochain budget fédéral. Le ministre des Finances alimente lui-même l'incertitude concernant cette possibilité qualifiée de rétrograde, de scandaleuse et d'odieuse par certains observateurs.

(1435)

Le ministre des Finances ne convient-il pas qu'en alimentant lui-même l'incertitude quant à l'avenir des REER, il complique singulièrement la tâche de milliers de contribuables de la classe moyenne qui doivent à cette période de l'année prendre des décisions extrêmement importantes pour la planification de leur retraite?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, j'ai dit à maintes reprises que je n'ai pas l'intention de faire des commentaires ou des suggestions spécifiques concernant le budget avant de le présenter. Je pense que le député pose la même question pour la cinquième fois, je ne sais pas comment il peut m'accuser de vouloir alimenter cette inquiétude.

M. Pierre Brien (Témiscamingue): Monsieur le Président, le ministre des Finances ne réalise-t-il pas qu'en envisageant de taxer les REER, il donne un signal clair qu'il a choisi l'option de taxer davantage les contribuables, plutôt que de faire ce que tout le monde attendait de lui, à savoir couper dans les dépenses du gouvernement?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, j'ai été très clair sur le fait qu'il va falloir couper les dépenses gouvernementales et c'est avec une grande anticipation que j'attends du député, membre du Comité des finances, ses suggestions très précises où on devrait couper.

* * *

[Traduction]

LES RÉFUGIÉS

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, en 1985, la Cour suprême a statué que l'article 7 de la Charte des droits et libertés s'appliquait à quiconque se trouve en territoire canadien. Le Parti réformiste a soutenu que les demandeurs du statut de réfugié devaient pouvoir se faire entendre selon des conditions humanitaires et justes, mais sans que le système judiciaire soit empêtré dans d'interminables procédures.


6516

Le ministre de l'Immigration ne convient-il pas qu'il faut modifier la Constitution afin que les non-résidants aient moins de latitude pour paralyser le processus de détermination du statut de réfugié et le système judiciaire par des appels incessants?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Non, monsieur le Président, je ne le crois pas.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Question complémentaire, monsieur le Président.

Les contribuables en ont assez de payer l'aide juridique pour ces appels incessants interjetés par des gens dont l'expulsion a été ordonnée. La réponse négative du ministre est d'autant plus étonnante qu'il a lui-même déclaré en 1986 que, pour reprendre le contrôle de notre processus de détermination du statut de réfugié, il y aurait peut-être lieu de construire au Canada des camps de réfugiés afin de limiter leur liberté de mouvement.

Une voix: Quoi?

Des voix: Oh, oh!

M. Hanger: Sur quelle disposition de la charte le ministre peut-il s'appuyer pour avancer cette idée?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, la réponse à la première question reste inchangée.

Les députés d'en face parlent de procédures judiciaires. Le collègue du député représentant Vancouver pose régulièrement des questions sur l'affaire Mendoza. Le gouvernement fédéral a interjeté appel auprès de la Cour fédérale. Hier, celle-ci a infirmé la décision et ordonné un nouveau procès.

Le système judiciaire fonctionne. Le député ne peut pas jouer sur les deux tableaux.

* * *

[Français]

LA RECONVERSION INDUSTRIELLE

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, la reconduction de l'entente auxiliaire sur les forêts n'a rien à voir avec la présence du Québec à une table de négociation, mais bien avec le respect d'un engagement formel de la part de ce gouvernement de la renouveler. Si le premier ministre a oublié, qu'il le demande à son ministre responsable du Développement régional pour le Québec à qui ma question s'adresse.

À la suite de fermetures de bases militaires, les Maritimes ont obtenu une compensation de 20 millions de dollars, l'Ontario a obtenu 8 millions, les provinces de l'Ouest 5 millions, et le Québec n'a reçu qu'un maigre 200 000 $ pour la perte de 1 000 emplois.

Comment le ministre responsable du Développement régional du Québec peut-il justifier que le Québec n'ait reçu que des miettes comme compensation pour la fermeture de ses bases militaires et doit-on comprendre par ceci que le ministre n'a tout simplement pas fait son «job» pour défendre les intérêts du Québec?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, lorsqu'on regarde les chiffres, le Québec a certainement reçu sa juste part.

(1440)

En ce qui concerne la rencontre sur les forêts, la ministre des Ressources naturelles a déjà indiqué dans cette Chambre qu'elle et moi sommes prêts et avons l'intention de tenir ces rencontres dans un avenir rapproché. C'est simplement une question de faire un bon horaire.

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, si le Québec a reçu sa juste part, comment le ministre responsable du développement régional du Québec peut-il justifier que les compensations financières pour la fermeture des bases militaires au Canada soient accompagnées d'une aide à la diversification économique et que, pour le Québec, ce ne soit pas le cas?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, c'est le cas.

* * *

[Traduction]

LE CANADIEN NATIONAL

M. Ron MacDonald (Dartmouth): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

L'offre que le CP a faite récemment d'acheter le réseau ferroviaire du CN dans l'est du Canada a fait naître quelques importantes préoccupations, lesquelles sont dues principalement au fait que le CP a déjà abandonné une bonne partie de ses lignes dans l'est du Canada ainsi qu'à la concurrence que le CP livre au CN avec sa propre ligne D et H, qui relie New York et Montréal.

Compte tenu des antécédents que je viens de mentionner, le ministre peut-il nous donner l'assurance que cette offre ou toute autre offre n'aura pas pour effet l'abandon de cette grande ligne ferroviaire qui revêt une si grande importance pour le développement économique de Moncton, du port de Halifax, voire de l'ensemble de l'est du Canada?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, mon collègue sait sans doute que si le gouvernement acceptait l'offre non sollicitée du CP, cela aurait pour effet que toutes les lignes de chemin de fer à l'est de Winnipeg seraient privatisées. C'est pourquoi le gouvernement estime qu'il faut étudier cette offre non sollicitée du CP d'un point de vue commercial. Mais cela soulève aussi une question très grave liée à l'intérêt public. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons demandé aux députés ministériels de se pencher sur d'autres options, comme la commercialisation du CN avec la participation des employés.

Dans le cadre de la politique du gouvernement, nous estimons qu'il est absolument essentiel de maintenir une ligne ferroviaire entre Halifax et Vancouver. Telle est la politique que le gouvernement mettra en oeuvre.


6517

M. SALINAS MENDOZA

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je trouve ignoble que le ministre de l'Immigration se vante à la Chambre du traitement réservé au cas Salinas Mendoza.

Depuis 1989, Salinas Mendoza a été trouvé coupable, au Canada, de 12 chefs d'accusation au criminel. Une jeune femme de ma circonscription a accepté que Mendoza bénéficie d'une suspension des accusations d'agression sexuelle qui pesaient contre lui à la condition qu'il soit renvoyé au Salvador. Il a été renvoyé là-bas, mais il est maintenant de retour et revendique le statut de réfugié.

J'ai suivi de nombreux procès et audiences concernant cet individu; ils ont coûté plus de 250 000 $ depuis son retour.

Monsieur le ministre, quels intérêts ont préséance lors des audiences visant la détermination du statut de réfugié au Canada? Ceux du contribuable. . .

Le Président: Je rappelle à tous les députés de bien vouloir adresser leur question à la présidence.

M. White (Fraser Valley-Ouest): Je m'excuse, monsieur le Président. Le ministre de l'Immigration peut-il nous dire quels intérêts ont préséance lors des audiences visant la détermination du statut de réfugié dans notre pays? Ceux du contribuable, du citoyen respectueux des lois ou ceux du criminel qui demande le statut de réfugié?

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je vais dire au député ce qui est ignoble. Ce qui est ignoble, c'est d'exploiter des tragédies personnelles pour simplement marquer des points sur l'échiquier politique à la Chambre.

En réponse à cette question, je dirai que c'est clairement la justice qui a préséance. Dans le projet de loi C-44, nous essayons d'arriver à un équilibre encore plus net. Le projet de loi C-44 nous permet en effet d'interrompre le processus de détermination du statut de réfugié dès que nous constatons qu'un individu a un dossier criminel et il nous permet d'entreprendre à ce sujet une enquête de l'immigration. Jusqu'à maintenant, la loi actuelle ne nous a pas permis d'agir ainsi.

Le projet de loi C-44 met justement en application ce que le député préconise, mais ce dernier refuse de l'appuyer.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, c'est vraiment incroyable. Après avoir vu le ministre fanfaronner, je constate que M. Mendoza ne s'est pas présenté à l'audience au sujet de son cautionnement ce matin et qu'il s'en est finalement tiré.

Quelle est la position du ministre par rapport à toutes les modifications proposées aux audiences visant la détermination du statut de réfugié? Je n'arrive pas à croire que cet individu. . .

(1445)

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, nous assistons à un numéro de cirque, et le député est le clown.

Le Président: À l'ordre. Je rappelle à mes collègues que toutes les questions devraient évidemment être adressées au ministre compétent.

J'invite les députés à se montrer courtois envers leurs collègues et à ne pas laisser les questions ou réponses devenir simplement l'occasion de s'insulter. Je vais donner au ministre la possibilité de poursuivre sa réponse, mais je l'inviterais à baisser un peu le ton à partir de maintenant.

M. Marchi: Monsieur le Président, si le député veut connaître les faits, je vais les lui expliquer. L'individu en question est entré dans notre pays illégalement. En avril dernier, nous avons ordonné une enquête de l'immigration. L'arbitre s'est prononcé en faveur d'une expulsion, mais contre la détention. Nous en avons appelé de la décision au sujet de la détention devant la Cour fédérale.

Hier, la Cour fédérale a annulé la décision de l'arbitre de l'immigration et a prévu la tenue d'une autre audience d'arbitrage de l'immigration aujourd'hui, pour que nous puissions demander la détention de l'individu.

Le gouvernement a pris des mesures et a fait ce qu'il convenait de faire.

* * *

[Français]

LA RECONVERSION INDUSTRIELLE

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. En août dernier, la compagnie Expro, située à Valleyfield, licenciait quelque 150 employés. En effet, cette compagnie spécialisée dans les produits explosifs s'est vue privée d'un important contrat américain et ce, dans un contexte d'effondrement des marchés militaires sur la scène mondiale.

Que fait le gouvernement du ministre pour empêcher la fermeture de la compagnie Expro et y maintenir les 300 emplois qui s'y trouvent?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, le député a posé plusieurs questions au sujet de l'industrie de la défense et des changements dans cette industrie. Il a même fait un petit discours en anglais, dont je le félicite, dimanche soir à ce sujet.

J'ai expliqué plusieurs fois que ce n'est pas la politique du gouvernement de trouver des solutions pour toutes les entreprises qui ont des problèmes. Nous sommes prêts à travailler avec chaque entreprise pour l'aider à trouver de nouveaux marchés, des moyens de s'adapter aux changements, des stratégies, lui donner de l'information. Mais ce n'est pas simplement une question de donner de l'argent, comme le député l'a recommandé plusieurs fois.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve): Monsieur le Président, le ministre n'a pas écouté mon discours jusqu'à la fin, j'en suis navré. Reconnaît-il que faute d'une véritable stratégie de reconversion, c'est plus de 10 000 emplois qui sont menacés dans la région de Montréal? Qu'attend-il pour intervenir comme son gouvernement s'y est engagé dans le livre rouge? Nous avons besoin d'une véritable stratégie de reconversion industrielle et c'est ce que disait mon discours.


6518

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, on dirait que le député a beaucoup de mal à saisir mes réponses.

L'approche que nous tentons d'appliquer consiste à miser sur le rôle qui sied au gouvernement, non seulement pour créer un cadre propice à l'entreprise, mais également pour venir en aide à l'industrie de défense en lui fournissant, à partir des outils à notre disposition, des renseignements, des conseils et des stratégies dans le cadre du Programme de productivité de l'industrie du matériel de défense, ou PPIMD, de façon à permettre aux entreprises de créer des technologies à double usage et de trouver des applications civiles à des technologies de défense.

(1450)

En ce qui concerne le PPIMD-le député le sait pertinemment-sur 41 demandes approuvées par le gouvernement, 39 portaient sur des applications civiles ou tant militaires que civiles. C'est ce qu'on appelle une stratégie de reconversion de l'industrie de défense!

* * *

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke): Monsieur le Président, dans le discours plein d'imagination, faute d'être tout à fait exact, qu'il a prononcé sur le réaménagement de l'aéroport Pearson dans le cadre du récent débat sur les amendements au projet de loi C-22, le ministre des Transports a déclaré que le contrat portant sur les aérogares 1 et 2 n'était pas une bonne entente. Il a ensuite mal cité la position que j'ai exprimée au cours de la période des questions d'hier.

Si le ministre pense que le contrat actuel, qui aurait vu le secteur privé consacrer 750 millions de dollars, que le gouvernement n'a pas, au réaménagement des aérogares 1 et 2 laisse à désirer, pourrait-il dire à la Chambre, ainsi qu'à tous les utilisateurs de l'aéroport Pearson qui doivent se contenter d'installations tout à fait inacceptables, quelle autre solution il a pour leur permettre de profiter rapidement d'installations acceptables?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, la vérité finira par triompher. Dans le cas présent, alors qu'il est question du projet de loi C-22, nous sommes confrontés à des conservateurs déguisés non pas en moutons, mais en loups. Le député sait pertinemment que nous avons cité le passage de sa conférence de presse où il a déclaré qu'il n'y avait rien de mal dans l'accord sur l'aéroport Pearson.

Le porte-parole du Parti réformiste pour les questions de transport fait partie de la minorité d'environ 35 personnes dans tout le pays qui pensent qu'il s'agissait d'un excellent accord.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke): Monsieur le Président, nous ne savons pas à quoi nous en tenir, car les libéraux étouffent toute l'affaire.

Il faudra attendre jusqu'en 1997 le programme national sur les aéroports du ministre et, à ce moment-là, le processus de financement et de construction des aérogares 1 et 2 de l'aéroport Pearson commencera.

Le ministre peut-il dire honnêtement à la Chambre et aux utilisateurs de ces deux aérogares qu'on peut très bien attendre jusqu'au siècle prochain pour avoir des installations dont on a besoin maintenant? Autrement, peut-il préciser à la Chambre où le gouvernement libéral très prodigue va trouver de 750 millions à un milliard de dollars de plus en deniers publics pour les consacrer à un aéroport qu'il veut privatiser en fin de compte?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, il est incroyable que, dans la même question, le député parle d'un gouvernement libéral prodigue et nous demande ensuite où nous allons trouver l'argent.

Le porte-parole du Parti réformiste dans le domaine des transports vient de dire qu'il ignorait s'il s'agissait là d'un bon accord ou non. En fait, il a déclaré que son parti ne savait pas au juste à quoi s'en tenir. Je le crois au moins sur ce point, monsieur le Président.

Alors que les réformistes ignorent s'il convient de verser 445 millions de dollars au consortium, nous savons qu'il n'en est rien et nous allons nous assurer que le projet de loi est adopté à l'autre endroit d'une façon ou d'une autre.

* * *

[Français]

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard): Monsieur le Président, le Canada participe actuellement avec honneur, par l'entremise de ses Casques bleus, à de nombreuses missions de paix, dont celles de l'ex-Yougoslavie, du Rwanda et de Haïti.

Ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères. Selon diverses sources fiables, le Burundi serait le prochain théâtre d'un conflit inter-ethnique très grave. Que fait le Canada pour prévenir de nouveaux conflits?

[Traduction]

L'hon. Christine Stewart (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique)): Monsieur le Président, le député a raison d'être préoccupé par la situation qui règne au Burundi au moment où nous avons les yeux rivés sur la crise au Rwanda. Le gouvernement s'est engagé à tenter de déceler les signes avant-coureurs de conflits et de prévenir ces derniers.

À cette fin, en juillet, nous avons nommé un envoyé spécial en Afrique centrale. Depuis juillet, cet envoyé, M. Dusseault, s'est rendu à deux reprises au Burundi, a rencontré les autorités et les a encouragées dans leurs négociations et leur dialogue.

(1455)

Au début du mois dernier, je me trouvais en Éthiopie. J'ai rencontré le secrétaire général Salim Salim, de l'Organisation de l'unité africaine, et lui ai dit que le Canada était disposé à aider son nouveau comité qui se penche sur la résolution de conflits.

Je compte également me rendre cet automne au Rwanda et au Burundi, pour m'assurer que le Canada est bien au fait de cette question importante.


6519

[Français]

LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ

M. François Langlois (Bellechasse): Monsieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général.

Le président du comité de surveillance du SCRS, M. Jacques Courtois, déclarait récemment que les activités d'infiltration du Syndicat des postiers remontaient avant la création du SCRS en 1984. Or, selon le réseau anglais de Radio-Canada, le SCRS aurait utilisé l'informateur Grant Bristow pour infiltrer ce syndicat en 1989.

Le solliciteur général confirme-t-il que le SCRS aurait essayé d'infiltrer le Syndicat des postiers en 1989?

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, le SCRS nie catégoriquement avoir tenté d'infiltrer l'Union des postiers du Canada.

Toutefois, on m'informe que le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité examinera les dernières allégations qui ont été faites à la télévision, hier soir, à ce sujet.

[Français]

M. François Langlois (Bellechasse): Monsieur le Président, comment le solliciteur général peut-il s'en remettre au comité de surveillance du SCRS pour faire toute la lumière sur cette question, alors que c'est justement son président qui est contredit par l'information de Radio-Canada?

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, je crois que les allégations que mentionne le député ont trait à des déclarations antérieures du président. Ce dont nous parlons ici, ce sont des reportages qui ont été diffusés hier soir sur le réseau de la SRC. Le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité m'a informé qu'il examinera ces reportages.

* * *

L'IMMIGRATION

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, selon le ministre de l'Immigration, la présence d'un quart de million d'immigrants au Canada ne pose pas de problème. Toutefois, le ministre du Revenu national sait que certaines personnes, les familles astronautes comme on les appelle, sont venues au Canada pour y établir des résidences de convenance dans le but de se soustraire au paiement de l'impôt.

Étant donné que des gens comme ceux-là créent une mauvaise réputation à la majorité des immigrants qui sont probes, droits et honnêtes, quelles mesures le ministre entend-il prendre pour mettre fin à cette situation?

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, nous ne tentons pas de cibler certains groupes en particulier, quel que soit leur pays d'origine ou le quartier où ils habitent à Vancouver.

Je répondrai au député, qui a déjà vu ces informations dans la presse, que nous suivons toutes les pistes et que nous analysons toutes les données mises à notre disposition concernant toutes les personnes, qu'elles appartiennent à ce groupe en particulier ou à d'autres, pour veiller à ce qu'elles paient leur juste part d'impôt.

J'ai répété souvent, à la Chambre même, que nous avions l'intention de voir à ce que tous les impôts soient payés et à ce que les règles soient les mêmes pour tous les habitants du Canada.

Pour ce qui est des gens qui vivent au Canada et qui travaillent à l'étranger, je crois que, lundi de cette semaine, un juge d'un tribunal provincial de Vancouver a reconnu une personne coupable de fraude fiscale et lui a fait payer 140 000 $ en amendes et en impôts qu'elle devait.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, c'est ainsi que les libéraux des banquettes ministérielles conçoivent le monde. En réalité, les ressources du ministre ne suffisent pas face au quart de million d'immigrants qui viennent s'établir dans notre pays.

La chroniqueuse Barbara Yaffey, du Vancouver Sun, a écrit ce qui suit, le 29 septembre dernier:

Fait intéressant, la plupart des appels que j'ai reçus sur la question, ces derniers jours, sont venus de membres de la communauté sino-canadienne qui ont dit qu'ils étaient au courant des fraudes fiscales et qu'ils trouvaient cela scandaleux.
Le ministre peut-il nous dire, étant donné qu'il a, de toute évidence, des ressources limitées, ce que le gouvernement libéral a réellement l'intention de faire en inondant le Canada d'immigrants?

(1500)

L'hon. David Anderson (ministre du Revenu national): Monsieur le Président, le député part du principe que le Canada a trop d'immigrants. Sa question pourrait nous porter à croire que le ministre du Revenu national n'a pas assez d'inspecteurs et de vérificateurs.

Nous faisons de notre mieux pour veiller à ce que tous les Canadiens, peu importe l'endroit d'où ils viennent, respectent la loi et paient des impôts. Il est indispensable d'agir ainsi pour que tous, au Canada, sachent que le système est juste et que personne n'en profite sans payer sa part. Nous agissons ainsi avec tout le monde, qu'il s'agisse d'immigrants, d'immigrants fraîchement arrivés au pays ou encore de Canadiens implantés ici depuis longtemps.

6520


6520

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI DE 1994 MODIFIANT LA LÉGISLATION PÉNALE

L'hon. Arthur C. Eggleton (au nom du ministre de la Justice) propose: Que le projet de loi C-42, Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois (en divers domaines), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Mme Sue Barnes (London-Ouest): Monsieur le Président, je suis heureuse de participer au débat en deuxième lecture du projet de loi C-42. Le projet de loi C-42, intitulé Loi modifiant le Code criminel et d'autres lois (en divers domaines), ne doit pas être confondu avec le projet de loi C-40, la loi corrective de 1994 adoptée par la Chambre le 20 juin, qui apportait des modifications mineures visant à corriger les anomalies, contradictions ou erreurs relevées dans les Lois du Canada et à abroger certaines dispositions ayant cessé d'avoir effet par caducité ou autrement.

Le projet de loi C-40 apportait également des modifications mineures et non controversées à d'autres lois. Le projet de loi C-42 dont nous sommes saisis aujourd'hui, qui, s'il est adopté cette année sera appelé la Loi de 1994 modifiant la législation pénale, vise principalement le Code criminel mais modifie aussi la Loi sur la preuve au Canada, la Loi sur les contraventions, la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle et la Loi sur la Cour suprême.

Certaines modifications peuvent être considérées comme mineures mais d'autres, plus importantes, apportent des améliorations au système de justice pénale. Ce projet de loi était attendu depuis longtemps.

Des mesures semblables ont été présentées à intervalles réguliers dans le passé. Le dernier projet de loi similaire a été déposé en 1985. Le ministre de la Justice entend revenir à la formule précédente et prévoit déposer un second projet de loi du même genre une fois que le Parlement aura terminé l'étude de celui-ci.

La plupart des modifications proposées proviennent de la section de droit criminel de la Conférence sur l'uniformisation des lois du Canada. Cette section est composée de délégués de chaque province et territoire et du gouvernement fédéral et comprend aussi des procureurs de la Couronne et des avocats de la défense. Au cours des réunions annuelles de la Conférence sur l'uniformisation des lois du Canada, la section examine des résolutions qui proposent des modifications au Code criminel et à des lois connexes.

Les autres modifications contenues dans le projet de loi ont été proposées par l'ancienne Commission de réforme du droit du Canada, par des juges, des membres du Barreau et des fonctionnaires des ministères fédéraux et provinciaux. Dans l'ensemble, ces modifications, qui visent à accroître l'efficacité de notre système judiciaire dans l'intérêt de tous les Canadiens, représentent un tournant important pour le droit pénal.

(1505)

Dans la lettre que le ministre de la Justice adressait récemment à ses collègues des provinces et des territoires au sujet de ce projet de loi, il mentionnait que chaque proposition appartenait à au moins une des catégories visées dans les résolutions issues de la Conférence sur l'uniformisation des lois.

En bref, les propositions doivent porter sur les sept objectifs suivants: premièrement, raviver la confiance du public dans notre système de justice pénale; deuxièmement, accroître l'efficacité des dispositions du Code criminel; troisièmement, suivre l'orientation indiquée par les tribunaux; quatrièmement, combler les lacunes constatées dans le Code criminel; cinquièmement, mettre l'informatique et les nouvelles techniques de communication, dont l'enregistrement sur vidéo, au service de la justice; sixièmement, améliorer la procédure judiciaire; et septièmement, garantir une plus grande équité envers les parties à la procédure

Ces objectifs, qui sont ceux d'une politique saine en matière de droit pénal, constituent les grands thèmes de ce projet de loi. Jusqu'à présent, les réactions des provinces à ces propositions sont très positives.

J'aimerais souligner que ces propositions auront pour effet de rendre le système de justice pénale plus rentable tout en maintenant, voire en améliorant, l'objectivité fondamentale de notre justice.

Les modifications proposées au Code criminel touchent surtout à la procédure. L'ensemble des propositions aura pour effet de moderniser celle-ci afin que le Code criminel puisse être appliqué avec plus d'efficience et d'efficacité. Ces propositions vont de la mesure qui autorise le procureur général à reprendre les poursuites privées pour des infractions à la législation fédérale autres que le Code criminel jusqu'aux simples changements permettant une plus grande utilisation du téléphone, d'appareils vidéo et du télécopieur dans certains cas.

En vertu de ces modifications, les juges pourraient obtenir la permission de terminer un procès en cours même s'ils sont nommés à un autre tribunal. Quand il faudra remplacer un juge pour d'autres raisons, au cours d'un procès, le nouveau juge pourra reprendre l'affaire en cours sans avoir à recommencer à zéro, lorsque cela s'y prête, bien sûr.

Ces propositions devraient contribuer à garder la confiance du public dans notre système de justice pénale. Elles assureront aussi une plus grande justice aux personnes visées, particulièrement aux victimes et aux témoins.

D'autres modifications visent à faciliter les règlements judiciaires pour les tribunaux de première instance et les cours d'appel. Il sera plus facile de reporter certaines affaires, lorsque le juge n'est pas disponible, et on pourra fixer la date du procès dès qu'il y aura renvoi à procès après l'enquête préliminaire.

Les changements apportés à la Loi sur la Cour suprême faciliteraient l'administration de la charge de travail de ce tribunal et lui permettraient de renvoyer certaines affaires à des tribunaux inférieurs pour qu'elles soient traitées de nouveau lorsque cela s'impose.


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Certaines propositions visent à améliorer l'administration de la preuve. Par exemple, plusieurs modifications permettraient que des éléments de preuve soient recevables sur la foi d'un certificat, ce qui éviterait à certaines personnes de comparaître devant le tribunal pour témoigner. D'autres changements visent la manière de recueillir des preuves à l'étranger et de veiller à ce que ces preuves soient plus facilement admises par les tribunaux au Canada.

Certaines modifications visent à encourager le recours à la technologie, par exemple à permettre l'utilisation d'un télécopieur dans certaines circonstances. Une autre disposition permettrait à un témoin de comparaître à la télévision en circuit fermé à certaines étapes de l'enquête préliminaire.

Un certain nombre de propositions ont trait à l'arrestation, à la mise en liberté avant le procès et à d'autres questions mettant en cause les pratiques et procédures policières. Par exemple, le fait de permettre à la police de relâcher une personne arrêtée à certaines conditions limitant sa liberté plutôt que d'avoir uniquement le choix, comme c'est maintenant le cas, de relâcher sans condition ou de maintenir en détention un accusé jusqu'à ce que l'affaire puisse être entendue par un juge de paix, sera une nette amélioration sur le plan de l'utilisation des ressources judiciaires.

Le fait, dans certains cas, de réduire la période de détention avant le procès est plus équitable pour l'accusé. La police pourra ainsi se concentrer davantage sur la prévention du crime au lieu de devoir attendre dans les couloirs des tribunaux.

Les changements les plus importants qui contribueront à renforcer l'efficacité du système de justice pénale visent la procédure applicable à certains délits. Le choix de la procédure, infraction punissable sur déclaration de culpabilité ou infraction punissable sur acte d'accusation, serait laissé à la Couronne pour les voies de fait causant des lésions corporelles, les inflictions illégales de lésions corporelles ou la profération de menaces d'utiliser une arme pour infliger la mort ou des lésions corporelles.

Dans le cas d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, la peine d'emprisonnement pour ce genre d'infraction et pour les agressions sexuelles sans circonstance aggravante serait au maximum de 18 mois au lieu des six mois normalement prévus dans le Code criminel pour ce genre d'infraction.

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Cela réduira l'engorgement des cours supérieures, allégera la pression sur les témoins, en particulier les victimes, et aidera les tribunaux à traiter les causes à l'intérieur de brefs délais, comme l'exige la Charte canadienne des droits et libertés. Les modifications indiqueront clairement aux juges que des peines sévères s'imposent quand il y a de la violence, même en cas de délits mineurs.

On obtiendra des avantages du même genre en portant à5 000 $ le plafond de compétence actuel de 1 000 $ pour connaître des affaires de vol et d'autres infractions contre les biens. Ainsi, un plus grand nombre d'infractions courantes ayant trait à des biens relèveront des cours provinciales, éliminant de ce fait le besoin de tenir des enquêtes préliminaires et des procès devant jury pour des causes entraînant rarement des peines de prison.

Les propositions ont pour objet d'éliminer les dispositions périmées ou de combler des lacunes dues aux circonstances qui évoluent. On comblerait ainsi les lacunes actuelles concernant la publicité de certaines mesures préparatoires à des procès.

Il importe que le droit du prévenu à un procès équitable devant un jury impartial ne soit pas compromis par la diffusion de renseignements admissibles ou non en preuve.

Il faut aussi protéger les droits des témoins et des victimes contre la divulgation de renseignements personnels. Il serait possible d'interdire la publication de documents délicats communiqués au prévenu uniquement pour lui permettre de réunir tous les éléments nécessaires à sa défense. On pourrait ainsi maintenir un équilibre entre le droit du prévenu de réunir tous les éléments nécessaires à sa défense et le respect du caractère confidentiel pour encourager la population à collaborer aux enquêtes et aux poursuites pénales.

Ce projet de loi vise aussi à améliorer les mesures préventives qui sont déjà dans la loi, puisqu'il contient plusieurs modifications pour que l'engagement de garder la paix soit plus efficace. Grâce à ces modifications, le processus de justice pénale sera plus équitable envers ceux qui y participent, mais qui craignent des représailles.

Un engagement de garder la paix est pris par une personne assujettie à l'ordonnance d'un juge et est valide pour une période allant jusqu'à douze mois. C'est un moyen de prévenir un crime ou, plus important, des actes de violence criminels.

Cet engagement sera plus efficace, puisqu'une violation pourra entraîner un acte d'accusation et une déclaration sommaire de culpabilité, et puisque les juges devront envisager l'imposition de conditions précises, par exemple, se tenir loin de la partie plaignante ou ne pas communiquer avec elle. La police, entre autres, pourra exiger des engagements de garder la paix au nom de ceux qui sont menacés.

Selon l'enquête nationale sur la violence faite aux femmes, menée par Statistique Canada en 1993, une Canadienne mariée, séparée ou divorcée sur trois a été victime d'au moins un acte de violence physique ou sexuelle commis par son conjoint. Dans près de la moitié, soit 45 p. 100, des cas, il s'agit de voies de fait causant des blessures physiques. Toujours selon cette enquête, le tiers des femmes violentées par leur conjoint ont craint, à un moment ou l'autre, de perdre la vie.

Il convient également de signaler que, dans près de 40 p. 100 des violences conjugales, les enfants ont été témoins des actes de violence commis contre leur mère. Les résultats de l'enquête nous apprennent également que la police n'a été informée que de 26 p. 100 des cas de violence conjugale.


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Ces statistiques prouvent qu'un grand nombre de femmes sont victimes de divers genres d'agression. Ces dispositions du projet de loi nous offrent d'importants outils pour régler le problème de la violence conjugale et tenir les conjoints violents loin des femmes et des enfants, comme nous nous sommes engagés à le faire dans le livre rouge.

Il faut commencer à songer à utiliser notre système de justice pénale pour prévenir la criminalité au lieu de nous contenter de ramasser les morceaux, comme cela se produit malheureusement trop souvent après une tragédie.

Il est évident que le projet de loi touche à bon nombre de questions et que je n'ai, en fait, qu'effleuré quelques-uns des sujets abordés dans la centaine de dispositions que contient la mesure législative. Bon nombre de ces dispositions sont très techniques et ne seront peut-être pas abordées au cours du débat. Toutefois, combinées aux articles dont j'ai déjà parlé, elles contribueront à améliorer l'administration de la justice pénale au Canada et à accroître la confiance que les Canadiens doivent avoir dans la législation pénale.

Il faut mettre l'accent sur une administration à la fois efficace et efficiente de la justice. Il nous incombe à nous, les législateurs, de trouver des façons d'améliorer l'administration du système, afin que les Canadiens puissent profiter de meilleurs services.

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Je suis convaincue que tous les députés seront satisfaits des avantages tout à fait sensés que procure ce projet de loi, qui se fait attendre depuis longtemps. D'ailleurs, les dispositions de cette mesure législative devraient entrer en vigueur dès que possible. J'espère sincèrement que les députés sauront oublier leurs convictions sectorielles le temps d'examiner ce projet de loi et que le comité l'étudiera attentivement, mais rapidement.

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, c'est un véritable honneur pour moi de prendre ici la parole au sujet du projet de loi C-42 qui vise à apporter plus d'une centaine de modifications au Code criminel.

Certes, la criminalité est une question nationale et médiatisée, ces jours-ci, et, au cours de la campagne électorale, des électeurs m'ont dit vouloir que le gouvernement fédéral rende le système canadien de justice criminelle plus sévère et fasse qu'il ne fonctionne pas en apparence que pour les criminels, mais aussi pour eux.

Les Canadiens parlent de leur système de justice criminelle parce qu'il leur appartient. Toutefois, j'ai entendu maintes fois à la Chambre des députés parler comme s'ils étaient les seuls à y connaître quelque chose, comme s'ils allaient le modifier sans tenir de véritables consultations publiques, sans bénéficier d'un vaste appui politique ni sans vraiment rendre de comptes à la collectivité.

Je le demande: La façon dont le Code criminel est appliqué à l'heure actuelle est-elle conforme aux principales valeurs canadiennes?

L'esprit de ce projet de loi doit cadrer avec celui du projet de loi C-41, qui en est encore à l'étape de la deuxième lecture. Les Canadiens disent qu'ils veulent se sentir en sécurité dans la rue. La semaine dernière, par exemple, plus de 3 000 personnes sont venues à Coquitlam, en Colombie-Britannique, exprimer leurs préoccupations et leurs sentiments de frustration à l'égard de la Loi sur les jeunes contrevenants.

Les Canadiens sont donc sérieux dans leur désir d'être protégés. Ils sont sérieux lorsqu'ils demandent que la criminalité soit convenablement dénoncée. Les journaux sont remplis d'articles sur la criminalité et la population veut savoir ce qu'on peut faire pour abaisser le taux de cette criminalité qu'elle juge inacceptable.

On ne peut pas attendre que la criminalité atteigne des proportions incontrôlables pour faire quelque chose. C'est maintenant qu'il faut apporter les modifications que la population réclame. Le Parti réformiste veut que cela change. N'oublions pas que tout changement commence par la reconnaissance qu'un problème existe.

En parcourant ce projet de loi, j'ai relevé plusieurs points intéressants que je ne saurais passer sous silence. Le projet de loi C-42 est un projet de loi acceptable, mais il est loin d'être un grand projet de loi ou un projet de loi parfait. Toutefois, il comprend des modifications qui renforceront effectivement le Code criminel. Par contre, certaines parties du projet de loi C-42 me déçoivent.

Par exemple, il est dit au paragraphe 28(3) que «quiconque commet un méfait à l'égard d'un bien. . . dont la valeur dépasse cinq mille dollars est coupable». La modification vise à remplacer «mille»par «cinq mille». Si l'on revenait en arrière pour ce qui est de ce paragraphe du Code criminel, on découvrirait des choses intéressantes.

En 1954, la limite était de 50 $. Était coupable d'un acte criminel quiconque était reconnu coupable d'avoir volé un bien dont la valeur dépassait 50 $. En conséquence, le vol d'un bien valant moins de 50 $ était une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. C'est en 1975 que ce paragraphe a été ensuite modifié de telle sorte que quiconque volait un bien valant plus de 200 $ était coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de dix ans.

Le montant a été porté à 1 000 $ en 1985 et c'est ce qui figure dans la loi que nous avons aujourd'hui. Tout vol de plus de1 000 $ constitue un acte criminel passible d'un emprisonnement maximal de 10 ans. Lorsque les sommes en cause ne dépassent pas 1 000 $, il s'agit d'une infraction punissable par procédure sommaire.

Les majorations depuis 1954 sont stupéfiantes. Passer de 50 $ à 200 $ représente une hausse de 400 p. 100; de 200 $ à 1 000 $ une hausse de 500 p. 100; et de 1 000 $ à 5 000 $ encore une hausse de 500 p. 100. Cependant, sur l'ensemble des 40 dernières années, la hausse totale a été de 10 000 p. 100.

On adoucit la loi. Si l'on suit la tendance historique, j'imagine que la prochaine modification portera le montant limite à25 000 $. C'est incroyable. Quelqu'un pourrait alors voler tous les meubles de ma maison et s'en tirer avec une infraction punissable par procédure sommaire. C'est inacceptable.

Au Canada, les crimes contre la propriété sont les infractions au Code criminel les plus répandues. En 1990, les vols de plus et de moins de 1 000 $ représentaient plus des deux tiers de tous les crimes contre la propriété signalés à la police. Selon un rapport de Statistique Canada de 1990, on enregistre en 1990 une hausse de toutes les catégories de crimes contre la propriété par rapport à l'an dernier, notamment des augmentations de 13 p. 100 du


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nombre de vols de véhicules à moteur, de 9 p. 100 du nombre d'entrées par effraction, de 8 p. 100 du nombre de cas de possession d'articles volés, de 8 p. 100 du nombre de vols de plus ou de moins de 1 000 $ et de 7 p. 100 du nombre de cas de fraude. Il est intéressant de noter que c'était la septième année consécutive que l'on enregistrait une augmentation du nombre de vols de véhicules à moteur. En 1992, 823 748 vols de moins de 1 000 $ ont été rapportés au Canada. Cela représente près de la moitié du nombre de crimes contre la propriété pour cette année-là.

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Si le gouvernement hausse le montant limite pour la catégorie des «vols de moins de» il est évident que le nombre de vols entrant dans cette catégorie va augmenter tandis que le nombre de vols de la catégorie des «vols de plus de» va diminuer. Les libéraux prétendront alors que le nombre de crimes graves va en diminuant. Mais est-ce bien la tendance? Je ne le crois pas. Selon le même raisonnement, on pourrait faire passer la limite à 100 000 $ pour faire vraiment diminuer le taux officiel de crimes de cette catégorie. Au lieu d'essayer de créer un moyen de dissuasion, le gouvernement ne fait que jouer avec les statistiques.

Le problème concerne la catégorie des vols dont la valeur dépasse un certain montant. Entre 1986, année suivant celle où l'on a porté la limite à 1 000 $, et 1992, les vols appartenant à cette catégorie se sont accrus de 9 p. 100. Je suis certain que le gouvernement de l'époque pensait que le fait de porter la limite de 200 $ à 1 000 $ contribuerait à freiner la croissance des taux publiés de crimes contre les biens. Aujourd'hui, avec le projet de loi C-42, le gouvernement espère que, en portant la limite de 1 000 $ à 5 000 $, il arrivera à freiner la croissance des taux de crimes contre les biens à partir de 1995. Eh bien, je crois que le gouvernement devrait examiner attentivement ce que ces mesures ont eu comme résultat dans le passé avant d'aller de l'avant avec ce projet de loi en ne pouvant qu'espérer que cette stratégie fonctionnera.

Le gouvernement devrait laisser la limite à 1 000 $ et continuer d'imposer les mêmes sanctions. Aujourd'hui, si une personne volait un téléviseur à écran de 28 pouces et un magnétoscope dans un magasin d'appareils électroniques, elle serait coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de dix ans. Par contre, si cette personne volait les mêmes appareils après l'adoption de ce projet de loi, elle serait coupable d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et serait passible d'un emprisonnement maximal de dix-huit mois. C'est ce que j'appelle une réduction de la peine et un ramollissement de la loi.

Le gouvernement se trouve à envoyer un message clair aux criminels: «Voici votre chance. Allez voler des objets de grande valeur et nous ne ferons que vous taper sur les doigts.» Ce n'est pas en étant moins sévères avec les criminels que nous allons réduire le taux de criminalité. Le gouvernement n'envoie pas le bon message aux Canadiens.

L'occasion fait le larron. Autrement dit, une lacune sur le plan juridique est vite comblée par le potentiel négatif de la nature humaine. Le gouvernement veut faire croire à la population qu'il lutte avec acharnement contre la criminalité. Cependant, lorsqu'on examine de près cette mesure législative, on se rend compte que les libéraux sont vraiment sur la mauvaise voie.

Le projet de loi C-42 propose de donner au procureur de la Couronne le choix de traiter certaines infractions comme des actes criminels ou comme des infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Cela s'appliquera, par exemple, à une personne qui commet des voies de fait causant des lésions corporelles, qui cause illégalement des lésions corporelles ou qui menace de causer la mort ou des lésions corporelles à quelqu'un. Ce sont toutes des infractions qui, actuellement, sont traitées comme des actes criminels. Cependant, ce projet de loi permettra à la Couronne de les traiter comme des infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire si elle le désire.

Je veux signaler quelque chose que j'ai vu dans le communiqué de presse publié par le ministre de la Justice lorsque ce projet de loi a été déposé à la Chambre. À propos de la disposition d'option entre deux procédures, il a dit que, normalement, la procédure sommaire était plus rapide, plus directe et occasionnait moins de tension et de dérangements aux victimes et aux témoins. Par conséquent, si quelqu'un est agressé et s'il y a lésion corporelle, dois-je comprendre que, de l'avis du ministre, la victime préférera que l'agresseur ait une peine légère et sorte de prison presque aussitôt, pour peu qu'il y aille, plutôt que justice soit vraiment faite et que le coupable reste longtemps derrière les barreaux?

Aux termes des dispositions actuelles du Code criminel, la peine maximum, lorsqu'on recourt à la procédure sommaire, est de six mois d'emprisonnement. Le projet de loi C-42 porte ce maximum à 18 mois. J'en félicite le gouvernement. Ces peines plus lourdes aideront sûrement à réprimer la criminalité qui sévit dans nos villes et localités. Les tribunaux pourront se montrer plus sévères. Il y a donc des modifications valables dans le projet de loi. À titre d'opposition loyale et constructive de Sa Majesté, il est de notre devoir d'examiner l'ensemble du projet de loi et d'en faire remarquer non seulement les éléments méritoires, mais encore ceux qui sont préoccupants.

Dans un autre ordre d'idées, je rappelle que la technologie progresse à vue d'oeil. Je croyais que les télécopieurs étaient un dispositif étonnant jusqu'à que ce que les ordinateurs personnels fassent leur apparition. Les progrès de la miniaturisation sont renversants. La poste était certainement le moyen le plus rapide et le plus efficace pour acheminer une lettre, mais cela a changé quand le courrier électronique et l'autoroute électronique sont arrivés dans le milieu du travail. Nous devons nous adapter à la technologie pour rester efficaces.

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Le projet de loi C-42 propose d'autoriser les télécopieurs et la télévision en circuit fermé pour certains éléments des audiences. Cela permettra sûrement d'abaisser les frais de transport des témoins qui devaient venir de diverses régions pour assister aux audiences. Grâce à la télévision en circuit fermé, un témoin peut assister à une audience et y participer même s'il se trouve à un millier de milles, et les frais seront réduits. Voilà une bonne initiative du gouvernement. Si seulement il sabrait les coûts sur toute la ligne, nous nous en porterions tous bien mieux, n'est-ce pas?


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Moi qui ai travaillé dans les milieux de la justice, j'ai passé beaucoup de temps dans les salles d'audience. Une personne qui témoigne a généralement eu le choix entre prêter serment et faire une affirmation solennelle. Cependant, comme je l'ai vu moi-même à maintes reprises, il est évident que nombre de témoins ne savaient pas très bien comment témoigner par affirmation solennelle. Dans ce projet de loi, on clarifie la notion d'affirmation solennelle dans le Code criminel.

Dans un autre article du projet de loi, on permet à la police d'obtenir un mandat pour un échantillon de sang jusqu'à quatre heures après un accident. Le délai actuel n'est que de deux heures, ce qui est nettement insuffisant. D'après les conversations que j'ai eues avec des policiers, il est évident que ces derniers doivent s'occuper d'une foule de questions logistiques par suite d'un accident, de sorte que si un accidenté est inconscient, mais soupçonné d'avoir un taux d'alcoolémie supérieur à la limite permise, le policier disposera d'un peu plus de temps, soit quatre heures, pour obtenir un mandat l'autorisant à prélever un échantillon de sang.

La conduite en état d'ébriété est un grave problème au Canada. Des groupes comme Mothers Against Drunk Driving, mieux connu sous l'acronyme MADD, se réjouiront sûrement de cette modification. Je considère que c'est une bonne modification qui reflète l'opinion publique du moment.

Il y a une autre modification que j'aurais aimé voir dans ce projet de loi, le C-42, mais je ne l'ai pas trouvée. Il s'agit de la création d'un registre national d'échantillons d'ADN prélevés sur des personnes reconnues coupables de crimes graves comme un meurtre au premier degré, un homicide volontaire, des mauvais traitements infligés à des enfants, une agression sexuelle, etc. Il s'agit là d'actes criminels.

L'idée de verser des renseignements dans une banque n'est pas nouvelle, car on le fait déjà dans le cadre de la Loi sur l'identification des criminels et de la Loi sur la preuve au Canada. La police conserve des banques d'empreintes digitales et s'en sert abondamment pour traquer des personnes soupçonnées d'un crime. Les empreintes digitales sont un outil fondamental pour le système judiciaire. Il faudrait faire la même chose avec l'ADN.

La technique des empreintes génétiques a été utilisée aux États-Unis et devient de plus en plus connue à cause d'affaires comme celle impliquant O.J. Simpson. À l'exception des globules rouges, toutes les cellules du corps humain peuvent être typées, qu'il s'agisse des globules blancs, des racines des cheveux, de la salive, du sperme, de la peau et même des os. Étant donné que l'ADN ne change pas d'une cellule à l'autre, toute partie du corps peut être comparée à une autre. À l'aide d'un échantillon prélevé en quelques instants seulement, un policier peut identifier une victime plus facilement et dispose ainsi d'un bien meilleur outil pour trouver le coupable. Une preuve aussi solide peut aussi bien innocenter un suspect que le condamner.

Nous voulons concevoir des lois qui nous permettront de faire des économies, car le système judiciaire est surchargé. Le projet de loi dont nous sommes saisis pourrait nous permettre d'atteindre cet objectif. Les enquêtes policières coûtent très cher et prennent beaucoup de temps. Le gouvernement propose plus de 100 modifications dans ce projet de loi, mais il a raté une occasion de vraiment aider les responsables de l'application des lois à mieux s'acquitter de leurs fonctions et à mieux protéger la population.

Aux États-Unis, 21 États ont adopté des lois permettant, à différents degrés, la collecte de données sur l'ADN. En outre, sept autres États ont présenté des projets de loi à ce sujet. L'Académie des sciences des États-Unis a expliqué que si les profils d'échantillons d'ADN d'une population étaient gardés en mémoire dans des bases de données informatiques, on pourrait, grâce à l'ADN, dresser un profil du coupable dans les crimes où il n'y a pas de suspect. Pour chercher les suspects, les enquêteurs pourraient comparer aux informations d'une base de données les profils d'ADN des échantillons biologiques prélevés comme preuves.

Une commission royale britannique a souligné qu'une banque de données permettrait aussi d'éclaircir des crimes antérieurs non résolus; on pourrait en effet faire des recoupements entre les échantillons d'ADN prélevés lors d'un crime antérieur mais non reliés à un suspect et ceux prélevés auprès d'un suspect dans une affaire criminelle plus récente.

Si le gouvernement veut vraiment résoudre le problème de la criminalité et permettre à la justice de triompher, il ne doit pas rester à rien faire et accuser un retard technologique par rapport aux autres pays. Nous pouvons exiger une prise de sang pour la conduite en état d'ébriété, mais pas pour les cas de viol et de meurtre. C'est insensé.

Je me réjouis par ailleurs des peines plus sévères que le projet de loi prévoit pour ceux qui quittent les lieux d'un accident. Actuellement, la peine maximale prévue est de deux ans, ce qui est tout à fait inacceptable. En vertu d'une modification proposée dans le projet de loi C-42, la peine maximale passerait à cinq ans.

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En guise de conclusion, ce projet de loi a raté la cible à plusieurs égards. La marge dans la valeur de l'objet est beaucoup trop élevée et déphasée par rapport à ce que les Canadiens attendent du système de justice. Il s'agit clairement d'un stratagème du gouvernement pour publier des statistiques montrant une réduction du taux de criminalité. Par exemple, les options de procédure ne feront que retourner plus rapidement dans la société un plus grand nombre de criminels, et les avocats pourront faire passer un plus grand nombre de clients devant les tribunaux. Il s'agit manifestement d'un assouplissement de la loi.

Le plus gros échec de tout ce projet de loi, c'est qu'il ne prévoit pas un registre national d'échantillons d'ADN. Le ministre de la Justice a déclaré antérieurement, à propos des modifications apportées au projet de loi C-42, que «beaucoup de ces changements se traduiront par des économies importantes d'argent et de temps pour l'administration de la justice et aideront les responsables de l'application de la loi à bien s'acquitter de leurs fonctions».

C'est ce qu'il prétend. La seule observation que je puisse faire est celle-ci: Le ministre sait-il vraiment ce que les responsables de l'application de la loi pourraient utiliser pour économiser du temps et de l'argent? S'il le savait, il aurait certainement prévu un registre d'échantillons d'ADN dans le projet de loi C-42 ou C-41.

Nous appuierons le projet de loi à cette étape-ci. En tant que réformiste, je me suis engagé à proposer des solutions de


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rechange constructives au gouvernement. Ce projet de loi comporte certaines modifications qui renforceront le Code criminel. Encore une fois, le gouvernement doit comprendre que les victimes de crime veulent se sentir protégées par le Code criminel car, à l'heure actuelle, la seule personne qui semble protégée, c'est le contrevenant.

Par exemple, cette semaine, nous avons entendu parler d'autres cas qui, selon les Canadiens, ont favorisé les contrevenants et ce, en raison de problèmes de forme dans la loi. J'encourage le gouvernement à présenter d'autres modifications, à donner une chance à quelques-uns des nombreux projets de loi d'initiative parlementaire et à les approuver s'il est incapable de présenter lui-même des mesures législatives.

Lorsque la Chambre se réunira en comité plénier, je proposerai une modification visant à maintenir à leur niveau actuel les normes prévues dans le Code criminel. J'espère que le gouvernement prendra bonne note de notre contribution.

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je ne vais pas faire un discours. Je veux simplement apporter des précisions en réponse à certaines questions soulevées au cours de l'intervention du député de New Westminster-Burnaby.

La première question a trait aux infractions mixtes, c'est-à-dire qui peuvent être poursuivies par voie de mise en accusation et de déclaration sommaire de culpabilité. Si, face à des infractions mixtes, on préfère parfois poursuivre par voie de déclaration sommaire de culpabilité, c'est que, bien souvent, les tribunaux ne condamnent pas certains délinquants pour des infractions punissables sur acte d'accusation. Il est on ne peut plus vrai que, dans bien des cas, on ne porte même pas d'accusation pour des infractions punissables sur acte d'accusation, alors que, si nous avions eu affaire à des infractions punissables sur déclaration sommaire, nous aurions pu au moins réclamer une condamnation de la part des tribunaux.

La décision appartient au juge, tout comme la peine. Il peut s'agir d'une peine réduite, mais, dans bien des cas, mieux vaut une peine réduite que pas de peine du tout. Cette flexibilité, c'est ce que nous voulons.

En ce qui concerne l'augmentation de 1 000 $ à 5 000 $ de la peine maximale, dans le cas de crimes contre les biens qui pourraient être jugés devant des tribunaux provinciaux, le ministre de la Justice et moi-même sommes favorables à l'augmentation du nombre de ces causes. Cela peut aller très vite. Nous avons la compétence pour les entendre, tout comme les juges des tribunaux provinciaux.

L'augmentation de 1 000 $ à 5 000 $ ne va pas entraîner cinq fois plus de travail pour les juges des tribunaux provinciaux. Certes, il y aura augmentation, mais les instances supérieures vont connaître une diminution. Nous estimons que le système sera plus efficace. Nous allons avoir le même niveau élevé de justice partout. Et ça va être moins coûteux.

L'autre question concerne le registre national ADN. Le député a soulevé une question très intéressante. Si ça ne figure pas dans le projet de loi, c'est qu'il y a actuellement un document de travail sur l'ADN actuellement en circulation. Le ministre de la Justice a promis de donner jusqu'au 20 novembre aux personnes qui désirent faire parvenir leur opinion par écrit sur ce document de travail.

Il s'est engagé à présenter la nouvelle loi, sinon à la fin de l'année, du moins au début de la nouvelle année. Toute la question de la création d'un registre est examinée conjointement avec les autres questions touchant l'ADN.

(1535)

Je proposerais maintenant que nous nous formions en comité plénier. Je pense qu'il y a consentement unanime de la part de tous les partis pour procéder de la sorte.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième fois et, avec le consentement unanime, la Chambre se forme en comité plénier, sous la présidence de M. Kilger.)

Article 2

M. Milliken: Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je crois qu'il y a consentement unanime pour étudier les articles 2 à 19 en bloc. Je crois qu'ils pourraient tous être adoptés sur-le-champ. Si vous vouliez ensuite passer à l'article 20, nous pourrions en débattre.

Le vice-président adjoint: Y a-t-il consentement unanime pour adopter en bloc les articles 2 à 19?

Des voix: D'accord.

(Les articles 2 à 19 inclusivement sont adoptés.)

Article 20

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le président, je voudrais présenter une motion, puis en parler. Je propose:

Que l'article 20 soit modifié par la suppression du mot «cinq» et que leparagraphe (2) soit modifié par la suppression du mot «cinq».
(1540)

-Monsieur le président, les tribunaux se sont toujours basés sur la valeur de l'objet d'une infraction pour déterminer les peines, et cela a toujours envoyé un message clair aux gens. Il n'y a pas si longtemps, on prévoyait des peines pour les infractions dont l'objet valait moins de 50 $ et d'autres pour les infractions dont l'objet valait plus de 50 $. Puis, on a fixé la ligne de démarcation à 200 $. Ensuite, à 1 000 $. Je peux imaginer le message qui va être envoyé à ma collectivité quand on va la fixer à 5 000 $. Quel beau message cela va lui envoyer!

Je peux comprendre qu'il puisse être souhaitable pour la justice pénale, du point de vue administratif, de procéder ainsi pour alléger les procédures de mise en accusation, mais le système de justice pénale n'appartient pas seulement aux experts. Il y a aussi le rôle éducatif du message que la loi envoie à la collectivité sur ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. Cette modification ne semble vraiment pas adaptée à l'humeur de la collectivité et à ce qui est approprié, à ce moment-ci.


6526

Rien, dans la collectivité, ne laisse entendre qu'il y a en cour, à ce moment-ci, une situation vraiment problématique qui nous pousse à prendre une telle mesure et à faire passer de 1 000 $ à 5 000 $ la valeur de l'objet de l'infraction.

Je me demande quel problème on cherche à régler en procédant ainsi. Je dois signaler que cela laisse entendre à la collectivité que la loi est moins sévère. J'aimerais savoir ce que d'autres députés en pensent.

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le président, je comprends ce que dit le député de New Westminster-Burnaby. La population se préoccupe de la criminalité, de tous les genres de crimes. Elle veut que justice soit faite, que le système de justice intervienne et règle le problème de la criminalité.

Je ne dis pas que le crime contre la propriété n'est pas important. Au contraire, il est très important. J'y reviendrai. Toutefois, la grande majorité des citoyens de nos villes s'inquiètent surtout des crimes avec violence. Ils veulent avoir la certitude que notre système peut régler rapidement le problème des crimes violents.

La justice ne souffrirait absolument pas du fait qu'on porte de 1 000 $ à 5 000 $ le seuil des causes de vol transmises aux cours provinciales. Cela signifierait tout simplement que certaines causes actuellement instruites devant un tribunal supérieur le seraient dorénavant devant les tribunaux provinciaux.

Les juges des cours provinciales sont tout à fait à la hauteur et les causes pourront être entendues plus rapidement. La justice sera rendue en moins de temps, les coûts seront moindres, les décisions et les résultats seront tout aussi excellents.

Je crois sincèrement que cette disposition ne nuirait ni à la valeur ni à la qualité de la justice.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, j'aurais une question à poser pour savoir si je comprends bien la modification du gouvernement, à savoir d'augmenter de 1 000 $ à 5 000 $, et par conséquent, je vais comprendre l'amendement du Parti réformiste. Est-ce que je comprends que comme conséquence de cette modification, tous les vols de moins de 5 000 $ pourront être traités par voie sommaire de culpabilité?

(1545)

[Traduction]

M. MacLellan: Monsieur le président, les vols de moins de 5 000 $ pourraient être traités par mise en accusation, mais celle-ci serait faite par un juge de la cour provinciale.

[Français]

M. Bellehumeur: Mais cela, c'est à la suite de la modification. À l'heure actuelle, un vol de 4 500 $ n'est pas traité par voie sommaire.

Quelles sont les conséquences de cette modification-là, compte tenu du projet de loi? On ne comprend peut-être pas de la même façon la modification, étant donné qu'un dit oui et l'autre dit non. Nous sommes à l'article 20 du projet de loi.

[Traduction]

M. MacLellan: Monsieur le président, l'objectif est de transférer un plus grand nombre de causes de vol aux cours provinciales. Cela ne signifie pas que, en portant le montant du vol de 1 000 $ à 5 000 $, on multipliera par cinq le nombre de causes soumises aux cours provinciales. De même, cela ne signifie pas que les peines seront moins sévères. La détermination de la peine se fait à la discrétion du juge qui entend la cause.

Nous affirmons que les causes de vol de moins de 5 000 $ peuvent être traitées avec autant de compétence par les systèmes provinciaux, qu'il serait plus efficace de procéder ainsi et que la qualité de la justice n'en souffrirait absolument pas.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le président, si nous transférons les causes de la cour supérieure à la cour provinciale, nous ne ferons qu'augmenter la charge de travail des cours provinciales; qu'arrivera-t-il aux causes déjà inscrites au rôle provincial? Ne risquons-nous pas de limiter le nombre de poursuites, de voir la courbe atteindre un tel sommet que les responsables ne seront même plus intéressés à poursuivre les coupables?

M. MacLellan: Monsieur le président, on a examiné et discuté de ces modifications avec les provinces pour obtenir leur approbation.

Le fait est que, dans le système des cours provinciales, la période d'attente n'est pas aussi longue que dans celui des instances supérieures. On va donc libérer quelque peu les tribunaux supérieurs. Dans certains cas, on va ajouter à la charge de travail des cours provinciales, mais, selon le ministère fédéral de la Justice, ainsi que les procureurs généraux et les ministres de la Justice provinciaux, cela ne va pas poser de problème ni alourdir la tâche des cours provinciales au point de les surcharger.

Les cours supérieures auront alors plus de temps pour entendre les causes de vols importants et des crimes violents.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le président, cela va, sans aucun doute, réduire la gravité des infractions. On va diminuer la peine pour les vols de plus de 1 000 $.

La procédure sommaire prévoit une peine maximale de 18 mois. Ainsi, les auteurs de vols de 5 000 $ punissables par voie de mise en accusation, qui, si je ne m'abuse, sont passibles d'une peine d'emprisonnement maximale de dix ans, ne risqueront plus dorénavant qu'une peine d'emprisonnement de 18 mois, si on leur impose le maximum possible dans une cour provinciale.

Cela assouplit sans aucun doute la loi. C'est ce à quoi je m'oppose. Nous allons maintenant faire en sorte qu'une personne condamnée pour vol soit passible d'une peine moindre. C'est ce qui est écrit. Ce qui m'inquiète, c'est ce que j'ai entendu mon collègue dire, avant que nous ne nous formions en comité plénier, que l'une des raisons pour lesquelles nous sommes placés dans cette situation, c'est que les tribunaux ne condamnent pas les individus en cause, car il s'agit d'un acte criminel.


6527

(1550)

Si c'est faux. . .

Le vice-président adjoint: Le député de Crowfoot pourrait peut-être terminer ses observations, et je m'assurerai ensuite que le secrétaire parlementaire puisse répondre.

M. Ramsay: Monsieur le président, je souhaiterais que le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice réponde à cela. J'espère me tromper, mais j'ai cru comprendre que la raison pour laquelle les tribunaux ne condamnaient pas les individus en cause réside dans le fait qu'ils ne voulaient pas reconnaître coupable d'un acte criminel une personne accusée de vol.

M. MacLellan: Monsieur le président, je faisais allusion à une autre remarque faite par le député de New Westminster-Burnaby dans son intervention. Il a parlé des infractions mixtes, autrement dit les infractions doubles punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire et sur acte d'accusation. Que l'accusation porte sur une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire ou sur acte d'accusation n'a rien du tout à voir avec cette disposition particulière. Il s'agissait, si j'ai bien compris, d'une remarque générale voulant que, dans certains cas, le juge ne condamne pas une personne pour une infraction punissable sur acte d'accusation s'il estime que l'infraction n'est pas assez sérieuse pour le justifier. Si nous laissons le choix de la procédure, déclaration de culpabilité ou acte d'accusation, et que nous optons pour la procédure sommaire, le juge sera alors plus disposé à condamner la personne en question.

Le député de Crowfoot a fait, quant à lui, une remarque au sujet du transfert de la cour supérieure à la cour provinciale de certains cas de vol. D'accord, la peine maximale est actuellement de 10 ans, mais on n'impose pas 10 ans pour les vols de moins de 5 000 $. En vertu du nouveau Code criminel, les personnes reconnues coupables de vol auraient à purger une peine maximum de deux ans. Deux ans dans un pénitencier. Cependant, je n'arrive pas à m'imaginer qu'un juge impose une peine de deux ans à une personne qui a commis un vol d'une valeur inférieure à 5 000 $, car cela voudrait dire que celle-ci devrait être détenue dans un pénitencier. Je ne crois vraiment pas qu'un juge ferait cela.

M. Ramsay: Monsieur le président, si je comprends bien ce qu'a dit le député, j'ai raison lorsque je dis que les juges ne vont pas, pour déterminer la culpabilité, se fonder sur la preuve, mais sur le fait qu'il s'agit d'une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire ou d'une infraction punissable sur acte d'accusation. Je veux que le député s'explique. Si j'ai bien compris le député, c'est exactement ce qu'il a dit.

M. MacLellan: Monsieur le président, lorsque j'utilise les termes «procédure sommaire» et «acte d'accusation», je parle de façon générale. Il y a dans le Code criminel des articles prévoyant que l'infraction peut être jugée par voie de procédure sommaire ou par voie d'acte d'accusation. Dans certains cas où l'infraction est un crime mais pas un crime grave, si la seule façon de juger était par voie d'acte d'accusation, le juge déciderait que la peine qu'il serait obligé d'infliger serait beaucoup trop sévère. C'est pourquoi il y a dans le Code criminel des articles qui donnent le choix entre la procédure sommaire et l'acte d'accusation.

Cela ne dépend pas du juge, mais de la façon dont l'affaire est jugée, soit par voie de procédure sommaire, soit par voie d'acte d'accusation. Ce n'est pas laissé à la discrétion du juge. C'est décidé avant que l'affaire n'arrive devant le tribunal. Il s'agit seulement de décider quel est le meilleur moyen d'obtenir une condamnation. C'est le procureur de la Couronne qui décide comment l'affaire sera jugée. Faut-il essayer d'obtenir la peine maximum et se retrouver sans rien ou juger l'accusé par voie de procédure sommaire et être au moins certain qu'il sera condamné?

(1555)

M. Ramsay: Monsieur le président, il est certain que la condamnation doit s'appuyer sur des preuves. Dans tous les procès auxquels j'ai assisté, la culpabilité était déterminée par les preuves, non par la façon de procéder, que ce soit par procédure sommaire ou par mise en accusation, et c'est exactement ce que je dis. Je ne veux pas retarder indûment les délibérations, mais c'est ce que dit clairement le député. Il a dit trois fois que la façon de procéder par procédure sommaire ou par mise en accusation aurait une importance pour le juge qui déterminera la culpabilité.

Ce que je désire faire ressortir, c'est que les tribunaux ont toujours jugé en fonction des preuves et non de la façon de procéder.

M. MacLellan: Monsieur le président, on détermine toujours la culpabilité en fonction des faits en l'espèce, mais la peine aussi est déterminée par les faits en l'espèce. Si les faits sont tels qu'une peine sévère n'est pas méritée, c'est un problème. S'il y a un choix, on peut procéder par procédure sommaire et le juge peut imposer une peine mieux adaptée au processus judiciaire et aux intérêts de la société; on peut ainsi obtenir une condamnation et celle-ci, de même que la peine, sera juste.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, plus il y a de questions, plus il y a d'histoires. J'aimerais simplement savoir si le fait de changer le montant de 1 000 $ à 5 000 $ changera quoi que ce soit aux principes de jurisprudence ou autres établis par les tribunaux. Ce n'est pas une question de preuve, c'est une question d'évaluation, qu'il s'agisse d'un bien de 1 000 $ ou de 5 000 $.

Deuxièmement, lorsque vous parlez de la Cour provinciale, la Cour supérieure, une des conséquences-et c'est là-dessus que ma question portait plus tôt-une des conséquences, dis-je, c'est que finalement, dans un dossier de vol de moins de 5 000 $, le voleur, l'accusé ne pourrait pas demander d'être jugé par juge et jury ou par juge seul à la Cour supérieure. Il sera immédiatement traité par la Cour provinciale, et au Québec, c'est la cour du Québec. Est-ce bien ce que je dois comprendre? Oui? Je vous remercie.


6528

[Traduction]

M. MacLellan: C'est exact, monsieur le président.

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway): Monsieur le président, en vertu des dispositions actuelles concernant les déclarations de culpabilité par procédure sommaire, la peine maximale est de six mois d'emprisonnement. Quelqu'un a dit que le gouvernement allait essayer de porter cela à 18 mois.

En cour provinciale, il est toujours possible de procéder par mise en accusation pour les cas les plus graves, mais je vois que le principe, ici, est de retirer à l'accusé la possibilité de recourir à un tribunal de plus haut niveau.

En pratique, lorsqu'il s'agit de vols, les infractions sont habituellement cumulatives. L'accusation contre l'inculpé porte sur de nombreux actes de vol. Limiter la valeur permettant le recours à la procédure sommaire va réellement gêner le juge qui n'aura pas toute la latitude voulue pour déterminer la peine requise.

Nous estimons que, actuellement, il n'y a pas de problème particulier dans le système judiciaire et que ce changement envoie un mauvais signal à la communauté. Nous ne voyons pas ce qui peut réellement justifier cet article.

M. MacLellan: Monsieur le président, dans le cas d'une série de petites infractions, les peines peuvent être consécutives, ce qui fait que la peine totale serait plus grande. C'est toujours le cas.

Cependant, le député a raison, le choix n'est plus là, mais nous n'avons pas l'intention de changer les peines. Comme convenu, nous allons maintenir la situation telle qu'elle est. La possibilité de peines plus sévères est toujours présente pour une série de petites infractions si le juge choisit d'exiger que les peines soient purgées consécutivement.

M. Robinson: Monsieur le président, j'aimerais effectivement que le secrétaire parlementaire parle de la valeur symbolique de la loi en tant que moyen d'éducation de la communauté; c'est essentiel pour qu'elle puisse avoir un effet de dissuasion.

La peine qui peut être imposée, ou la conséquence d'une infraction, doit être directement reliée à la gravité que cette infraction peut avoir aux yeux de la collectivité.

(1600)

Ainsi, l'entrée par effraction dans une résidence est punissable d'une peine maximale d'emprisonnement à perpétuité. Or, il est rare que la peine maximale soit imposée pour une telle infraction, mais elle montre cependant que cette infraction doit être prise très au sérieux.

Dans le cas du vol ordinaire, qui est très fréquent en justice et qui est l'une des infractions dont les tribunaux sont le plus souvent saisis, le fait de changer les limites enverrait un message erroné et compromettrait l'effet de dissuasion générale.

Je voudrais que le secrétaire parlementaire s'attaque à cette question plus générale plutôt qu'à des éléments techniques comme le fait de savoir si le délinquant aura la possibilité de s'adresser à une instance supérieure, et qu'il nous dise quel problème cette disposition va permettre de résoudre et comment elle va miner l'efficacité de la dissuasion générale.

M. MacLellan: Oui. En fait, monsieur le président, nous pensons exactement le contraire, c'est-à-dire que cette disposition va favoriser l'efficacité de la dissuasion générale parce qu'il va nous falloir accélérer la procédure judiciaire et parce que nous pourrons traduire les accusés devant les tribunaux plus rapidement.

D'une part, de nombreuses affaires impliquant des vols d'une valeur de plus de 1 000 $ continuent d'être entendues par des juges des cours provinciales pour des raisons de preuve. En effet, comment peut-on savoir que tel ou tel bien volé par quelqu'un avait une valeur de 3 500 $ par exemple? Étant donné que nous savons qu'il y a eu vol, nous utilisons la procédure applicable aux vols d'une valeur de moins de 1 000 $ même si la valeur du vol est plus élevée. C'est que personne ne veut se préoccuper de porter des accusations plus graves, car on croit que l'affaire sera entendue plus rapidement par la cour provinciale, qui possède la compétence voulue et que, de toute façon, justice sera rendue.

D'autre part, il faut tenir compte de l'effet de violation qui s'ajoute au vol. Le vol par effraction constitue une violation de la personne. Il s'agit non seulement d'une violation matérielle mais d'un viol psychologique. Quiconque a été cambriolé ou s'est fait voler des biens personnels se sent comme une victime de viol. Peu importe ce qui a été pris, il y a eu viol. L'opinion publique juge très sévèrement les vols et souhaite que les auteurs de ces actes soient traduits en justice et punis. Le ministère de la Justice croit que les modifications proposées permettront non seulement de réaliser ce processus mais encore de l'améliorer.

Le vice-président adjoint: L'amendement proposé par le député de Westminster-Burnaby est-il adopté?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Des voix: Avec dissidence.

(L'amendement est rejeté.)

[Français]

M. René Laurin (Joliette): Monsieur le Président, on aimerait savoir exactement si on vote sur le sous-amendement ou sur l'amendement, parce qu'il y a un amendement présenté par les représentants du Parti libéral et un sous-amendement présenté par le Parti réformiste, si j'ai bien compris? Je voudrais savoir sur lequel on vote actuellement?

Le vice-président adjoint: Il y avait un amendement, celui proposé par le député de New Westminster-Burnaby. L'article 20 est inclus dans le projet de loi. Alors, le vote portait


6529

simplement sur l'amendement du député de New Westminster-Burnaby et il a été rejeté avec dissidence.

[Traduction]

L'article 20 est-il adopté?

Des voix: D'accord.

(L'article est adopté.)

Le vice-président adjoint: Le projet de loi C-42 compte en tout 106 articles. Puis-je grouper les articles 21 à 106, ou y a-t-il d'autres articles que les députés veulent traiter séparément?

Des voix: D'accord.

Articles 20 à 106 inclusivement

Le vice-président adjoint: Le vote porte donc sur les articles 21 à 106 inclusivement.

(1605)

Les articles 21 à 106 inclusivement sont-ils adoptés?

Des voix: D'accord.

Des voix: Avec dissidence.

(Les articles 21 à 106 inclusivement sont adoptés.)

(L'article 1 est adopté.)

(L'annexe est adoptée.)

(Le titre est adopté.)

(Rapport est fait du projet de loi, qui est agréé, lu pour la troisième fois et adopté.)

* * *

[Français]

LOI SUR LE MINISTÈRE DES TRAVAUX PUBLICS ET DES SERVICES GOUVERNEMENTAUX

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-52, Loi constituant le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et modifiant ou abrogeant certaines loi soit lu une deuxième fois et renvoyé à un comité; ainsi que de l'amendement.

M. Gérard Asselin (Charlevoix): Monsieur le Président, je vous remercie de me permettre de continuer le discours sur le projet de loi C-52.

Comme je le disais avant la période des questions, le coût du gouvernement, en 1992-1993, au niveau de la sous-traitance était de 5 milliards de dollars. Cette somme que le gouvernement du Canada a dépensée en sous-traitance aurait dû être utilisée pour améliorer les services offerts aux Canadiens et Canadiennes, au lieu d'entretenir des relations de favoritisme envers les amis de l'État.

Permettez-moi de vous dire qu'entre 1984-1985 et 1992-1993, les coûts ont augmenté avec la sous-traitance. Les coûts ont augmenté à Travaux publics Canada de 56 p. 100 au cours de cette même période, c'est-à-dire neuf ans. Ils ont augmenté également de 114,2 p. 100 à la Défense nationale. Ils ont augmenté de 207 p. 100 à Santé et Bien-Être Canada. Ils ont augmenté également de 247 p. 100 à Approvisionnements et Services. Et voici la cerise sur le «sundae», ils ont augmenté de 628 p. 100 à Douanes et Accise.

(1610)

Pendant dix ans, malgré les pressions exercées par le vérificateur général et le Comité permanent des comptes publics à la Chambre des communes, le gouvernement fédéral n'a pas réussi à faire la preuve que la sous-traitance était rentable. Le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux est un ministère très important. Il y a de gros sous qui y passent. Permettez-moi de vous donner quelques exemples.

Le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux est responsable de l'encaissement et du décaissement de tous les deniers publics. Il tient un solde de caisse quotidien moyen de 2,3 millions de dollars. Il est responsable également du système comptable et effectue pour 163 millions de dollars de transactions financières. Il effectue pour 200 millions de dollars de paiements annuels pour le compte du Régime de pensions du Canada, du Régime de sécurité de la vieillesse, des taxes sur les produits et services, de la rémunération des fonctionnaires, etc.

Il est également un organisme chargé des achats de l'État. Il a acquis, l'an dernier, pour 13 milliards de dollars en biens et services dans 17 000 catégories différentes. Il passe 175 000 marchés par année. Il est le gardien des biens immobiliers fédéraux. Il est propriétaire des biens immobiliers évalués à 6,5 milliards de dollars. Il fournit des locaux à environ 170 000 employés, situés à 4 000 endroits différents. Il dépense 2 milliards de dollars annuellement.

Comment peut-on s'assurer que les contrats de sous-traitance ou de privatisation ne serviront pas à enrichir les amis du régime? Autrement dit, comment éviter toute forme de patronage dans l'attribution de contrats de sous-traitance ou de privatisation de la part du gouvernement fédéral?

Le projet de loi C-52 devrait avoir plus de dents. Voici la proposition du Bloc québécois. Nous demandons que soit créée, à même le projet de loi, une commission publique de surveillance chargée de scruter les contrats qui sont transigés par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et d'assurer la transparence.

Deuxièmement, nous demandons qu'un code de sous-traitance soit clairement défini dans ce projet de loi.

Troisièmement, nous exigeons que tous les députés fédéraux, quelle que soit leur allégeance politique, soient consultés et informés du processus d'attribution des contrats gouvernementaux qui impliquent les comtés qu'ils représentent.

Quatrième et dernière proposition, nous demandons que Travaux publics et Services gouvernementaux Canada établisse des relevés périodiques-rapports mensuels-pour établir la transparence du gouvernement fédéral dans l'attribution des contrats. La problématique de ce projet de loi, c'est l'impossibilité pour les députés fédéraux de savoir quels sont les contrats du gouvernement qui touchent directement leur comté. Il n'y a aucun moyen de responsabiliser les fonctionnaires fédéraux dans les dépenses que ces contrats entraînent ou qu'ils observent à l'interne. Ce serait utiliser la notion de dénonciation du gaspillage de fonds publics.


6530

Également, nous recommandons dans ce projet de loi de mettre fin aux paiements anticipés, tels que ceux dont nous nous sommes aperçus récemment avec Communications Canada.

(1615)

Également, ce projet de loi doit protéger le gouvernement car avec ce projet de loi, il a ouvert la porte toute grande aux lobbyistes. Le projet de loi ne permet pas suffisamment de transparence, et tout dernièrement en cette Chambre, le député de Richelieu a proposé une motion pour empêcher les compagnies, les intervenants, les lobbyistes à financer les caisses électorales du gouvernement. Malheureusement, cette motion a été défaite par le gouvernement libéral et largement défaite également par le Parti réformiste.

Je pense que les lobbyistes qui assistent occasionnellement à des soupers organisés par le premier ministre, à 1 000 $ le couvert, sont en droit d'essayer d'obtenir, de la part du gouvernement, leurs parts.

Pour toutes ces raisons, le Bloc québécois propose la création d'une commission publique tripartite de surveillance formés des commissaires et d'élus provenant de tous les partis politiques représentés et reconnus officiellement par la Chambre des communes; deuxièmement, d'experts spécialisés dans les rouages de l'appareil public; et, troisièmement, de fonctionnaires du bureau du vérificateur général. C'est un pouvoir additionnel de vérification que le gouvernement devrait se doter à même ce projet de loi.

Ce sont là certainement des critères premiers de transparence dont le gouvernement devrait se doter.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux): Monsieur le Président, mon collègue, en parlant de la sous-traitance, donne quand même un compte rendu de nombre d'abus qu'il a vus pendant le dernier gouvernement. C'est exactement une des raisons pour lesquelles les Canadiens et les Canadiennes à travers le pays ont décidé de mettre l'ancien gouvernement dehors.

C'est aussi à cause des soucis que nous avons que nous sommes en train d'étudier, mon collègue et moi, de même que d'autres collègues, la question de la sous-traitance, parce qu'on veut s'assurer que le tout soit juste, équitable et transparent.

J'ai une question très importante quand même à poser à mon collègue. Il parle de transparence, de justice, d'équilibre, etc. Je me demande si mon collègue sait que le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a offert à tous les députés de cette Chambre, il les a invités à s'abonner au service des invitations ouvertes à soumissionner et à la publication Marché public. La raison pour laquelle je pose cette question, c'est que toutes les questions ou un grand nombre des questions qu'il a posées, il pourrait trouver les réponses s'il était abonné à ces services. C'est un service qui est offert par le ministre.

Maintenant, si j'ai raison, et je viens juste de le vérifier, donc j'ai l'impression que j'ai probablement raison, aucun député du Bloc ne s'est inscrit à ce service. Je n'ai pas vérifié pour hier et aujourd'hui, mais à partir de vendredi. Lorsque mon collègue parle d'honnêteté, de transparence et de justice, pourquoi ne s'est-il pas abonné à ces services offerts par le ministre afin qu'il puisse déterminer lui-même si oui ou non nous avons été justes? Pourquoi ne l'a-t-il pas fait ou pourquoi certains de ses collègues ne l'ont pas accepté, ce service? La transparence, la justice, l'honnêteté, c'est là.

M. Asselin: Monsieur le Président, effectivement, j'ai fait les démarches auprès du ministère en vue de m'abonné au service dont le député, M. Duhamel, fait mention. Ils m'ont aussi dit que cela coûterait 500 $ par année pour avoir accès à cette information-là. Également, ce que le député n'a pas dit c'est que. . .

Le président suppléant (M. Kilger): C'est probablement simplement un oubli, mais je veux rappeler qu'on ne peut pas nommer les collègues en cette Chambre, mais plutôt les identifier selon leur responsabilité ou leur comté.

(1620)

M. Asselin: Le député de Saint-Boniface a mentionné qu'on peut toujours avoir accès également à la bibliothèque ou au Service d'information public, mais c'est tout un labyrinthe, même pour les députés de la Chambre. Effectivement, moi et mon collègue, le député de Québec-Est, serons bientôt abonnés à ce service.

Mais au sujet de la transparence, le député devrait comprendre que lorsque le ministre ne peut pas s'engager à accepter le plus bas soumissionnaire conforme, ça devient un peu moins transparent, ça devient un peu nébuleux.

[Traduction]

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, j'ai écouté la traduction en anglais des observations du député où il a recommandé que les députés soient consultés et informés au sujet des contrats gouvernementaux qui sont accordés dans leur circonscription. C'est bien ce qu'il a dit, je crois.

Je ne m'oppose pas du tout à la communication de l'information, mais, pour ce qui est de la consultation, le député ne croit-il pas que cela risque de donner l'impression que les politiciens, les députés, interviennent dans ce qui devrait être un processus ouvert et qu'ils exercent une influence sur une question qui ne devrait pas avoir la moindre couleur politique?

[Français]

M. Asselin: Monsieur le Président, tout dernièrement, au Comité des opérations gouvernementales, un député du gouvernement a saisi celui-ci d'une expérience qu'il venait de vivre dans sa circonscription.

Il n'a été averti ni par le ministre ni par un fonctionnaire, mais, heureusement, étant préoccupé par sa circonscription, il a lu un avis public du ministère disant que le gouvernement cherchait un autre endroit pour relocaliser le bureau de poste de sa circonscription. Le député est intervenu auprès du ministère et a permis d'économiser un million de dollars dans cette transaction.

[Traduction]

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je reprends l'argument du député d'en face pour faire remarquer au député que le fait de proposer que les parlementaires soient consultés ou qu'ils interviennent dans un


6531

processus d'adjudication est tout à fait malavisé. C'est précisément ce qu'il faut éviter en politique.

Nous n'avons pas à savoir ce qui se passe dans le processus d'adjudication et nous n'avons pas besoin d'y prendre part; autrement dit, nous n'avons rien à voir avec les dépenses de fonds publics dans nos propres circonscriptions. La situation est différente en ce qui concerne les autres circonscriptions, mais dans nos propres circonscriptions, nous devons absolument rester à mille lieux de ce processus.

L'autre argument que je voudrais aussi faire valoir auprès du député concerne la nécessité de toujours choisir le soumissionnaire le moins disant. Je crois qu'il est normal en affaires d'être sur ses gardes quand on veut faire un bon achat de ne pas toujours choisir le soumissionnaire le moins disant. À mon avis, il faut se montrer flexible, parce qu'en affaires du moins, comme je l'ai constaté, le prix est un facteur important, mais ce n'est pas le seul dont il faut tenir compte avant d'accorder un contrat. J'aimerais bien connaître la réaction du député.

[Français]

M. Asselin: Monsieur le Président, c'est une question à deux volets. Première chose, lorsque j'ai mentionné dans mon discours que je trouverais anormal que le député soit informé des biens, des services qui peuvent être attribués soit par contrat, soit par sous-traitance, des affaires gouvernementales dans son comté à titre de consultation.

On consulte les députés en cette Chambre, on leur impose des votes, on doit intervenir. Lorsqu'arrive le temps de travailler dans notre comté, il est du devoir du député d'intervenir. Il ne s'agit pas de s'ingérer ou de s'immiscer dans les affaires du gouvernement, mais au moins d'être informé de ce qui se passe dans sa circonscription.

Deuxièmement, on parlait du plus bas soumissionnaire conforme. On a clarifié au départ ce qu'on avait besoin de mettre dans notre devis, afin d'être clairs dans ce devis. Si on a mis cela dans un devis, qu'on va en soumission, lorsqu'on dit que le soumissionnaire est conforme, c'est qu'il est conforme au devis, à ce qu'on voulait avoir. À ce moment-là, je pense que bien administrer les deniers publics c'est d'accepter le plus bas soumissionnaire conforme.

(1625)

[Traduction]

Mme Brenda Chamberlain (Guelph-Wellington): Monsieur le Président, étant donné que le gouvernement s'est engagé à accroître l'efficacité de ses activités ainsi qu'à contrôler et à réduire le déficit, la fusion de services communs inscrite dans le projet de loi C-52 m'apparaît fort logique.

Comme on l'a clairement démontré, une des principales causes du gaspillage et de la confusion est le dédoublement inutile des services et des fonctions au sein même du gouvernement et entre divers paliers de gouvernement.

De nos jours, nous ne pouvons tout simplement pas tolérer que des ressources humaines et financières soient affectées à l'accomplissement de tâches dans un grand nombre de ministères et d'organisations gouvernementales, si ces tâches peuvent être réalisées d'une façon plus efficace et rentable dans un organisme central.

C'est la raison principale qui sous-tend la création du nouveau ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux du Canada. Même si la fusion a commencé il y a environ un an à peine, nous avons déjà constaté une amélioration de l'efficacité et de la rentabilité. On peut s'attendre à ce que l'amélioration soit encore plus forte dans les prochaines années, à mesure que l'union se raffermira.

Travaux publics et Services gouvernementaux dispense des services communs à plus de 150 ministères, organisations gouvernementales et sociétés d'État. Le ministère offre un large éventail de services pour répondre aux besoins en matière de gestion immobilière, de communications, d'impression et de publication, de traduction, d'architecture et de génie, entre autres.

Le ministère se charge aussi de verser tous les paiements du gouvernement du Canada et de faire chaque année, au nom de ses clients, des acquisitions d'une valeur de plusieurs milliards de dollars. Bref, Travaux publics et Services gouvernementaux effectue quotidiennement des milliers d'opérations administratives au nom de ses clients, de sorte que chaque ministère peut centrer tout son temps et son énergie sur ses propres programmes et priorités. Je pense que c'est excellent.

Les quatre composantes qui se fusionnent pour former la base du nouveau ministère, c'est-à-dire, les anciens ministères Travaux publics Canada et Approvisionnements et Services Canada, l'Agence des télécommunications et le Bureau des traductions, ont déjà tracé la voie de l'efficacité. Par exemple, les services de gestion des quatres composantes procèdent à une intégration. Ces services de gestion effectuent des fonctions centrales telles que les finances, l'administration, la planification ministérielle, la gestion des réclamations contractuelles et la sécurité.

Si l'on tient compte des études opérationnelles qui ont été effectuées, des recommandations et des systèmes qu'on doit mettre en oeuvre et de la fusion qu'il faut réaliser, ces initiatives nous feront économiser, tenez-vous bien, 180 millions de dollars en dépenses sur une période de cinq ans à partir de la date de la fusion. À mon avis, il s'agit là d'une bonne affaire.

Les opérations régionales ont aussi été intégrées et le nombre total de bureaux régionaux a été ramené de 10 à 6, ce qui contribue également à réduire les dépenses. Toutes ces mesures ne nuisent en rien aux services offerts aux ministères clients, encore moins à la population. De toute évidence, le nouveau ministère intégré des Travaux publics et des Services gouvernementaux a déjà prouvé qu'il peut fournir au gouvernement des services plus complets à un prix moindre pour les contribuables.

Bien que l'efficacité que peut atteindre Travaux publics et Services gouvernementaux au sein de sa propre organisation soit considérable, elle ne représente qu'un des objectifs visés. En mettant en commun l'expérience et la compétence des diverses organisations fusionnées, nous créons au sein du ministère un


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centre d'excellence plus important et plus compétent que ce que nous avions auparavant.

Cette initiative nous permettra de réaliser de plus grandes économies et d'accroître notre efficacité non seulement au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, mais dans tous les ministères et organismes fédéraux.

(1630)

Le ministère fera réaliser des économies à l'ensemble du gouvernement en remaniant les systèmes qu'utilisent tous les ministères. Grâce notamment à des systèmes perfectionnés de gestion des achats et des règlements, des postes de travail ergonomiques automatisés, des systèmes de gestion des voyages, on notera une nette amélioration dans la rationalisation des procédés en application au gouvernement, la prestation des services, la répartition des ressources et les économies réalisées.

Grâce à son rôle stratégique et à ses liens étroits avec tous les autres ministères et organismes, le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux jouera un rôle de premier plan dans les nombreuses initiatives que prendra le gouvernement pour réduire les dépenses et éliminer le double emploi.

Par exemple, le ministère participe très activement à l'initiative gouvernementale que l'on appelle les services d'appui partagés localement. L'idée de cette initiative est de consolider les services et de réduire les coûts en encourageant les ministères et les organismes qui habitent un même immeuble ou un même ensemble d'immeubles à partager certains services de soutien matériel. Je répète que ce supermarché de services pour tous est une excellente idée.

Les services en question peuvent comprendre la sécurité, la salle du courrier et la gestion des installations. Pris individuellement, ces arrangements ne représentent peut-être pas grand-chose, mais pris collectivement, soit pour des centaines de bureaux fédéraux répartis dans tout le Canada, ils peuvent représenter des économies de plusieurs millions de dollars pour les contribuables canadiens. J'ose croire, je le répète, que la Chambre verra que c'est une très bonne chose et une excellente idée.

Travaux publics et Services gouvernementaux Canada s'est arrangé pour appuyer et encourager cette initiative dans tout son réseau de comptoirs régionaux. Il a prévu mettre ce plan en oeuvre en deux temps. Dans un premier temps, les grands ministères, y compris Travaux publics et Services gouvernementaux Canada lui-même, vont mettre à profit leur taille, leur représentation régionale et leurs économies d'échelle. Ils vont offrir leurs services aux petits ministères.

Dans un second temps, les services électroniques seront réorganisés et intégrés. C'est alors qu'on offrira une infrastructure de télécommunication et d'informatique, des services de bureautique et de vidéoconférence ainsi que toutes les installations de soutien similaires à celles du secteur privé.

Un certain nombre de ces initiatives novatrices font l'objet d'un projet pilote au cours du présent exercice financier. Certaines économies ont déjà été réalisées dans tout le pays en partageant les services d'une réceptionniste et par la gestion intégrée de réserves et d'entrepôts.

Le fait est que la création du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux par fusionnement de la plupart des organismes gouvernementaux de services courants va non seulement permettre à ce ministère de réaliser des économies substantielles, mais encore constituer un centre consolidé de compétence et de commandement qui pourra aider une foule d'autres ministères et organismes fédéraux à réaliser des économies similaires.

Cela se traduira dans les années à venir en centaines de millions de dollars d'économies pour les contribuables canadiens. Je crois que c'est suffisant pour que nous tous, ici, appuyions et adoptions rapidement le projet de loi C-52.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, j'aurais une question à poser à la députée qui vient de faire son exposé. Face à ce projet de loi, on n'est pas contre le principe de tenter de faire plus avec moins d'argent, ce n'est pas un principe que nous mettons de côté, au contraire on favorise cela dans notre approche gouvernementale, nous du Bloc québécois. Ce projet de loi n'est rien d'autre qu'un ramassis de vieux articles de projets de loi, des anciens ministères pour n'en faire qu'un seul sous une nouvelle dénomination. Est-ce que la députée pourrait nous dire où exactement dans ce projet de loi, il y a quelque chose de nouveau pour justement donner plus de transparence à ce ministère qui était autrefois qualifié de ministère du bon vieux patronage? Est-ce qu'il y a quelque chose de nouveau dans ce projet de loi qui donne la transparence dont on parle depuis le début de la 35e législature?

(1635)

[Traduction]

Mme Chamberlain: Monsieur le Président, le gouvernement est déterminé à avoir un processus d'adjudication des marchés qui soit ouvert, juste et transparent. Cela ne fait pas de doute. C'est pourquoi le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a invité tous les députés à s'abonner à la revue Marchés publics.

Les abonnés à cette revue ont instantanément accès à des renseignements tels que les possibilités de marchés, les avis de marchés à fournisseur unique et les avis d'adjudication de marchés. On y trouve aussi des informations sur les marchés adjugés dans le passé, par exemple à qui ils ont été adjugés et pour quel montant.

À mon avis, on ne peut pas avoir un processus beaucoup plus transparent que cela.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, je suis d'accord avec la députée pour dire que c'est certainement bien pour le gouvernement de viser des économies de 180 millions de dollars après cinq ans. Toutefois, je remarque que le budget du ministère est de 2,3 milliards de dollars par année.


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Je viens de faire un calcul rapide. Si je ne m'abuse, nous parlons ici d'une réduction de 8 p. 100 après une période de cinq ans. La députée ne croit-elle pas qu'on aurait pu faire un peu mieux que réduire le budget de seulement 8 p. 100 en cinq ans?

Mme Chamberlain: Monsieur le Président, le député a tout à fait raison. Nous réduirons peut-être le budget de 8 p. 100 seulement. Cependant, je ne suis pas d'accord avec lui pour dire que c'est tout ce que nous allons économiser.

Il y a beaucoup d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte ici. Nous parlons d'une approche intégrée. Nous parlons d'un guichet unique qui facilitera les choses pour vos électeurs et les miens. Nous parlons de regrouper tous les services sous un même toit.

Le président suppléant (M. Kilger): Je veux seulement rappeler à tous les députés que, même si ce n'est pas critique à ce moment-ci du débat aujourd'hui, ils doivent s'efforcer de toujours s'adresser à la présidence.

Mme Chamberlain: Monsieur le Président, un avantage remarquable sera le regroupement sous le même toit d'experts de différents champs d'activité. Ils pourront faire les choses d'une façon tout à fait unique. Il n'y a là que des avantages.

Que mon vis-à-vis sache qu'en 2005, les économies se chiffreront à un milliard de dollars. Nous réaliserons donc de véritables économies. Mais il y a plus. Nous nous nous engageons dans une voie encore inexplorée qui nous conduira bien avant dans le XXIe siècle.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je voudrais poser une question à la députée de Guelph-Wellington. La bonne nouvelle, d'après ce qu'elle a dit, c'est que les modifications élimineront une grande partie du dédoublement des services entre le gouvernement fédéral et les provinces.

La députée serait-elle prête à dire que cela éliminera l'une des principales sources de friction entre le gouvernement fédéral et les provinces, et que des provinces comme l'Alberta et le Québec, par exemple, devraient s'en réjouir?

Mme Chamberlain: Monsieur le Président, je dirai à l'intention du député que je crois que ces mesures feront beaucoup pour éliminer certaines préoccupations que des provinces ont soulevées auprès du gouvernement fédéral. Je remercie le député d'avoir posé la question.

[Français]

M. Duhamel: J'invoque le Règlement. Je vous donne un conseil, monsieur le Président. Lorsque mon collège du Bloc a fait un commentaire tout à l'heure, il a indiqué que le système offert par le ministre coûtait 500 $ à chaque député. Je croyais que c'était très élevé, je suis allé vérifié et on m'indique que ce n'est que 37 $. Donc, je voudrais. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre! Alors, je m'excuse, mais ce n'est vraiment pas un recours au Règlement. C'est peut-être une question de débat, et je suis certain qu'on pourra poursuivre plus tard. Questions et commentaires? Débat. Je cède la parole au député de Kootenay-Est.

(1640)

[Traduction]

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, il est toujours agréable de pouvoir dire quelque chose de positif à propos de l'orientation que prend le gouvernement. En l'occurrence, je crois qu'il va dans la bonne direction en choisissant la consolidation, l'efficacité et les économies de fonctionnement.

En toute justice pour les Canadiens qui ont subi une perte de revenu réel depuis cinq ans et qui ont peut-être été déplacés ou dont certains membres de la famille l'ont été-beaucoup de Canadiens ont dû faire des pieds et des mains pour survivre-ils doivent ressentir un manque de sympathie bien compréhensible. Je puis comprendre cette absence de sympathie de la part des Canadiens à l'égard de services au sein de la fonction publique qui sont gonflés et inefficaces. Il n'en reste pas moins que le gouvernement va dans la bonne direction.

Je crois également qu'au sein de n'importe quel personnel, que ce soit dans la fonction publique ou dans n'importe quelle industrie, les gens le savent quand ils ne produisent pas de façon efficace. Quand des gens occupent des emplois sans avenir et se rendent compte qu'ils devraient être réaffectés, ils éprouvent une certaine nervosité, un sentiment de malaise sur leur lieu de travail.

Il règne habituellement sur le lieu de travail un manque de satisfaction professionnelle, et certainement un sentiment d'insécurité. Je le sais, il m'est arrivé de temps à autre d'occuper un emploi où il était évident que l'entreprise pour laquelle je travaillais n'allait nulle part, et cela provoque un sentiment d'insécurité. Quand il y a absence d'orientation au sommet, absence d'énoncé de politique et absence de plan venant du sommet, cela aggrave la situation.

J'ai évoqué hier à la Chambre le cas de Parcs Canada. Nous avons dans ma circonscription une situation où les membres du personnel du parc national Yoho, au nombre de 90 seulement, se trouvent dans un véritable dilemme. Ils n'ont aucune idée de ce qui se prépare. Les cadres du service des parcs n'en ont aucune idée non plus.

Il y a toutes sortes de choses qui sont proposées. Par exemple, pour ce qui est du déblaiement de la route, qui constitue la principale activité en hiver, on propose maintenant de déplacer toute l'opération à Lake Louise. Quelles répercussions une telle décision aura-t-elle pour les commerces de Golden? Quelle incidence aura-t-elle en matière d'efficacité? On propose également de déménager le bureau principal à Jasper. Qu'est-ce


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que cela signifie? J'essaie de faire comprendre qu'il règne là-bas un malaise généralisé.

Quand il s'agit de réduire des effectifs, que ce soit dans les cas prévus dans le projet de loi C-52 ou dans l'ensemble de la fonction publique, le gouvernement doit être prêt à faire une chose. Cette mesure doit être spécifique, incisive comme un rasoir, mais surtout intégrée à un plan d'ensemble.

Avec le plus grand respect pour les ministres libéraux, je ne vois pas trace jusqu'à maintenant d'un plan incisif et global. Par conséquent, toute la fonction publique, de haut en bas, se demande: «Quand allons-nous savoir à quoi nous en tenir? Est-ce que je serai visé? Que va-t-il se passer?»

Les députés de la Colombie-Britannique doivent se douter qu'ils vont recevoir des lettres, des pétitions de la part de fonctionnaires. J'ignore ce qu'il en est dans le reste du Canada, mais je peux dire que, en Colombie-Britannique, nombre d'entre nous recevons des instances de fonctionnaires fédéraux qui veulent savoir ce qui se passe, à quoi ils doivent s'attendre.

Il y a un terrible sentiment d'insécurité. J'exhorte les ministres à élaborer un plan d'ensemble et, plus important encore, à l'expliquer une fois qu'ils l'auront élaboré. La peur et l'anxiété qui hantent la fonction publique fédérale ne peuvent que se traduire par une perte de productivité.

(1645)

J'ai parlé il y a un instant des économies de 180 millions de dollars qui seront réalisées au bout de cinq ans, sur un budget de 2,3 milliards. Je le répète, le gouvernement est dans la bonne voie. La difficulté, c'est qu'il prend des mesures plutôt timides.

Je voudrais lire un extrait d'un discours que le président du conseil de la Banque canadienne impériale de commerce a prononcé le 15 février dernier à Halifax. Cette personne est responsable, à titre de président du conseil d'administration, d'actifs se chiffrant par milliards de dollars, et de dizaines de milliers d'employés. Il s'agit d'une des grandes banques du Canada et elle a à ce titre une excellente idée de la direction que suit notre pays. Je propose que nous écoutions attentivement cet extrait de son intervention:

Il n'est que trop facile de penser que la dette est le problème du gouvernement. Ce n'est pas le cas. La dette ne coûte rien aux gouvernements; mais elle coûte cher aux contribuables. Ils la paient directement tous les jours en acquittant les intérêts par leurs impôts.
Je signale un détail avant de poursuivre: ce n'est pas le Parti réformiste qui parle, malgré les apparences, mais le président du conseil d'administration de la Banque canadienne impériale de commerce. Il dit:

Les frais d'intérêt annuels par habitant s'élèvent à 2 200 $ environ, prélevés sur les recettes fiscales; 2 200 $ par Canadien par année vont au paiement de l'intérêt sur la dette accumulée avant qu'un seul dollar de recette ne soit redistribué, qu'une seule pièce de 10c. ne soit versée pour les programmes sociaux, qu'une seule pièce de 1c. ne soit dépensée pour tout autre programme du gouvernement.
M'écoutez-vous? Souvenez-vous, ce montant. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Si vous m'en donnez l'occasion, je vais réagir chaque fois. Quand vous vous adressez la parole directement, vous m'excluez du débat. J'aime bien mon travail et je voudrais être inclus, un peu plus que maintenant.

M. Abbott: Monsieur le Président, j'apprécie votre intervention. Je crois que nous avons tous quelque chose à apprendre; c'est certainement mon cas, moi qui suis l'un des nouveaux députés. Je vous remercie.

Il convient de rappeler que chacun de nous doit 2 200 $ uniquement pour payer les intérêts sur la dette. Il n'est même pas question du principal encore. En conséquence, la dette cumulative des gouvernements fédéral et provinciaux augmente à raison de 60 milliards de dollars par année. Et les intérêts composés s'accumulent. La situation persiste depuis des années. Exagère-t-on quand on qualifie la situation de «cancer financier»? Comment la décririez-vous?
Et il faut se rappeler que ce ne sont pas les politiciens, les gouvernements ou les fonctionnaires qui ont fait cela. Ce sont nous, les Canadiens prospères, pacifiques et sensés, qui nous sommes fait cela à nous-mêmes.
Quel que soit le parti, le premier ministre ou le ministre des Finances en fonction, le gouvernement du Canada n'a jamais présenté un budget équilibré en 20 ans. Pendant la même période, des tas de budgets ont été présentés dans les provinces. Relativement peu de ministères des Finances provinciaux ont présenté des budgets équilibrés, et rares sont ceux qui ont atteint leurs objectifs.
Évidemment, il y a eu des élections; à 83 occasions différentes, les gens ont pu exercer leur droit démocratique de choisir les gouvernements national et provinciaux. Nous avons tous eu l'occasion de modifier les orientations générales. Nous avons élu des gouvernements libéraux, progressistes-conservateurs, néo-démocrates, créditistes et péquistes. Nous leur avons donné des mandats de gouvernements majoritaires ou minoritaires. Nous avons même eu, de temps à autre, des débats nationaux passionnés sur la dette et les déficits, mais notre dette totale a quand même continué de monter en flèche.
(1650)

Il continue de parler des Canadiens et dit:

Nous sommes les seuls à blâmer. La plupart des politiciens d'expérience, qui forment une bonne majorité dans les différents cabinets de notre pays, admettent, en privé, qu'aucune circonscription n'est prête à réduire ses dépenses. Les Canadiens veulent bien que l'on coupe les dépenses, pour autant que cela ne les touche pas. Cela a donné lieu à une suite interminable de directives compliquées à l'intention de nos dirigeants politiques. On leur dit de réduire les dépenses ici, mais pas là, de faire des économies ici, mais pas là.
Ce type me plaît bien. Il ajoute:

Nos politiciens méritent vraiment toute notre pitié. Dans une situation aussi difficile, il aurait fallu la sagesse de Salomon et la patience de Job, mais ni l'un ni l'autre n'a été élu.
On a tendance à ramener trop facilement les problèmes d'argent du gouvernement à une question d'inefficacité. Certains disent qu'il est possible de régler le problème en réduisant les dépenses partout. Cela aiderait, mais ce ne serait qu'un début. Le vrai problème, c'est que bon nombre de programmes gouvernementaux sont désuets et ce n'est pas seulement que nous dépensons trop, mais que nous dépensons mal.
Le vrai problème, à mon avis, c'est que nous, en tant que politiciens, avons la responsabilité d'être francs avec nos électeurs. Au cours de la dernière campagne électorale, chaque fois qu'ils parlaient franchement et disaient qu'il fallait réduire le déficit à zéro le plus rapidement possible, les réformistes se faisaient reprocher, par les libéraux et les conservateurs, de n'avoir que le mot «réduction» à la bouche.


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Le fait est que le Canada est acculé au pied du mur. Nous nous en sommes bien tirés avec les dépenses d'infrastructure ou, devrais-je dire, avec le transfert de la dette aux générations futures, à mes petits-enfants que je ne connais pas encore, qui ne sont pas encore nés, et à leurs descendants, tout cela, pour l'amour des élections.

Il est du devoir de tous les politiciens, quelle que soit leur couleur politique, de faire accepter aux gens le fait que cela va faire mal. Cela va me faire mal, cela va vous faire mal, monsieur le Président, et cela va faire mal à toutes les personnes qui nous écoutent en ce moment ou qui liront la transcription de mes propos dans le hansard. Cela va faire mal. Nous avons fondamentalement le choix de nous faire mal nous-mêmes, de façon contrôlée, ou de laisser des forces extérieures nous faire mal.

Aujourd'hui, le ministre des Finances a dit ici même, avec vigueur et éloquence que «nous allons maintenir le contrôle». Comment peut-il dire que l'on va maintenir le contrôle quand, chaque jour, le gouvernement dépense 110 millions de dollars de plus qu'il n'en gagne? C'est impossible! Vous ne pouvez maintenir le contrôle dans un système où il existe non seulement des intérêts composés, mais aussi une dette composée, comme c'est le cas actuellement. Si vous dépensez quotidiennement 110 millions de dollars que vous n'avez pas, vous transférez tout simplement le coût des activités de 1994 vers un inconnu quelque part ailleurs.

Je conclurai en résumant brièvement. Le projet de loi C-52 va dans le bon sens, et ce, pour toutes les bonnes raisons. Excusez-moi si je suis un peu tatillon, mais je viens de lire dans ce rapport que l'un des objectifs du projet de loi C-52 était d'autoriser le Cabinet à nommer le sous-ministre.

Je constate que dans tous les ministères, le sous-ministre est important; il a un grand pouvoir, il oriente le ministère et conseille fermement le ministre. Il me semble qu'on pourrait stipuler, non seulement dans le projet de loi C-52, mais dans tous les autres projets de loi, que les sous-ministres devront se présenter devant le comité permanent et faire l'objet d'un examen plus public, car ces hauts fonctionnaires ont de plus en plus de pouvoirs. Il serait peut-être sain de procéder ainsi.

(1655)

Bref, je crois que nous allons dans la bonne direction en proposant le projet de loi C-52 et je l'appuie. Je comprends très bien tous les éléments qu'a mentionnés l'orateur précédent, mais ses objections ne font pas le poids, loin s'en faut. Nous, les politiciens, devons favoriser une culture d'acceptation puisque nous vivons bien au-delà de nos moyens. Nous devons être honnêtes avec les électeurs. Nous devons convaincre les Canadiens que nous réussirons à prendre la bonne direction.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de reprendre la période de questions et d'observations, en conformité de l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qui seront soulevées ce soir à l'heure de l'ajournement: le député de Rosedale, le contrôle des armes à feu; le député de Verchères, les tarifs douaniers.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud): Monsieur le Président, dans les observations qu'il a faites à la fin de son discours, l'orateur précédent a dit que nous devrions être francs avec les Canadiens. Je suis d'accord.

Si le parti du député avait formé le gouvernement, ce gouvernement dépenserait-il aujourd'hui plus qu'il ne reçoit? Ma question porte évidemment sur le fait que, peu importe le parti qui est au pouvoir, il faut manifestement plus d'un an pour éliminer les dépenses et le déficit. Pourtant, le député continue de râbacher la même chose comme si le Parti réformiste pouvait les éliminer comme par magie. Je me demande si le député pourrait répondre à cette simple question: Aujourd'hui, le Parti réformiste dépenserait-il lui aussi plus qu'il ne reçoit?

M. Abbott: C'est une question très valable. Bien sûr que oui. On ne peut pas simplement couper à tour de bras pour en finir.

Cependant, si le gouvernement compte accroître sa dette de 100 milliards de dollars après trois ans, il fait totalement fausse route. Le Parti réformiste ne serait pas endetté davantage après trois ans. Le Canada n'en a pas les moyens. Les Canadiens le savent intuitivement. Ils attendent seulement que certains politiciens soient ouverts, directs, honnêtes, sincères et francs avec eux et s'attèlent à la tâche qu'ils devront accomplir.

M. Alex Shepherd (Durham): Monsieur le Président, je suis heureux que le député de Kootenay-Est veuille être ouvert et franc.

Notre gouvernement a constamment dit qu'il voulait ramener le déficit à 3 p. 100 du produit intérieur brut. C'est là notre plan, la voie que nous entendons suivre et l'objectif que le ministre des Finances est bien décidé à atteindre. Alors que nous parlons du réexamen des programmes sociaux dont nous discuterons demain, nous allons avoir à ce moment-là un plan à proposer sur les diverses orientations que nous pouvons prendre par rapport à nos dépenses sociales.

Nous voulons parler d'honnêteté. Pourquoi mon vis-à-vis ne demande-t-il pas ce qui va arriver sans assurance-chômage? Pour quelles raisons ne veut-il pas savoir si on va supprimer ce régime, ainsi que tous nos programmes sociaux et réduire les pensions? C'est le genre d'honnêteté dont il parle. J'attends encore qu'il soulève ces questions.

M. Abbott: Monsieur le Président, le gouvernement prévoit actuellement de s'endetter de cent autres milliards de dollars au cours des trois prochaines années avec le chiffre de 3 p. 100 dont il parle et qu'il n'a absolument pas l'intention de réduire. Il n'entend pas ramener le déficit à zéro. Il veut simplement qu'il s'établisse à 3 p. 100 du produit intérieur brut.

L'ancienne première ministre Kim Campbell a déclaré durant la dernière campagne électorale qu'il n'y aurait aucun problème si elle réussissait à ramener les dépassements budgétaires à un certain niveau, qu'elle allait réussir ainsi à équilibrer le budget, car nous n'aurions pas à emprunter de l'argent. Si on analyse, en fait, ce dont elle parlait, on s'aperçoit que, fondamentalement, elle allait utiliser les contributions au Régime de pensions du Canada, les rentrées de fonds dont profitait le gouvernement. C'est le même genre d'idées confuses que proposent les libéraux. Il y a peut-être quelque chose d'inhabituel de ce côté-là de la Chambre. Lorsque les gens passent de ce côté-ci, où siégeaient la


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plupart des ministres actuels au cours de la dernière législature, à ce côté-là et obtiennent des postes au Cabinet, tout à coup leur position devient confuse.

(1700)

La réalité, c'est que le gouvernement n'a absolument pas pour objectif de mettre un terme aux dépassements budgétaires. Je ne parlerai pas de déficit, car cela pourrait semer une certaine confusion. Le déficit équivaut tout simplement à la différence entre ce qu'on dépense par rapport à ce qu'on reçoit.

Quant à la question des cibles, penchons-nous sur l'assurance-chômage. Le ministre des Ressources humaines passe actuellement son temps à lancer des ballons d'essai à gauche et à droite. Le principe du Parti réformiste est simple et s'énonce clairement. Ça s'appelle l'assurance-chômage.

Le malheur, c'est que, au cours des vingt dernières années, tous les politiciens de la Chambre ont oublié le mot «assurance». L'assurance, ça fonctionne sur une base actuarielle. L'assurance, il ne faut pas l'utiliser comme s'il s'agissait d'un quelconque programme social à rabais. C'est là que réside le problème. En ce moment, le ministre et le gouvernement procèdent à un examen de l'assurance-chômage, comme s'il s'agissait d'un programme social à rabais, au lieu de la considérer pour ce qu'elle est, c'est-à-dire une assurance-chômage.

J'aurais beaucoup d'autres choses à ajouter, mais disons que, en gros, il n'existe pas de solution simple à ce problème. Je suis prêt à signaler à la population canadienne que ça va faire mal. Nous avons le choix: effectuer l'opération nous-mêmes ou la subir aux mains d'autrui. Tant que nous continuerons d'entretenir une dette nationale de cent milliards de dollars, tant que nous continuerons de dépenser cent millions de dollars par jour, nous ne réussirons pas à résoudre le problème. Nous ne ferons qu'élargir le gouffre.

[Français]

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies): Monsieur le Président, j'aimerais poser une question à mon honorable collègue du Parti réformiste qui nous a fait un exposé remarquable. Mon collègue nous dit que les vrais politiciens devraient nous dire que ça va faire mal. Jusqu'à un certain point, j'accepte cette définition. Maintenant, à qui ça va faire mal?

À l'heure actuelle, il y a des milliards de dollars qui sont soustraits à l'impôt, dans des paradis fiscaux, dans des fiducies familiales. Est-ce que mon honorable collègue-et c'est ça ma question-est prêt à faire mal aussi à ces gens-là, afin que tout le monde paie dans la société?

[Traduction]

M. Abbott: Monsieur le Président, j'ai eu le privilège de passer au Comité des finances et je trouve l'expérience des plus instructives. Certains entretiennent un mythe énorme selon lequel des milliards de dollars sont cachés quelque part et que si seulement ils pouvaient mettre la main dessus, tout le problème de la dette et du déficit serait réglé. Ce mythe, qui a été créé à l'origine par le NPD, est malheureusement perpétué par le Bloc québécois.

La simple vérité est que les fiducies familiales ont surtout trait aux gains en capital. Les fiducies familiales sont soumises à l'impôt sur leurs revenus et elles paient les impôts courants sur l'intérêt. Les fiducies familiales ne sont pas assujetties à l'impôt sur les gains en capital accumulés tant que ces gains n'ont pas été réalisés. Le Bloc entretient le mythe selon lequel les fiducies familiales ne paient jamais d'impôt ou reportent toujours l'impôt à payer. En réalité, les fiducies familiales paient de l'impôt de la même façon que tout autre contribuable.

Je trouve instructif de siéger à ce comité, où les bloquistes persistent à entretenir le mythe selon lequel il existe une équation simple et magique, une réponse toute simple, alors qu'en réalité il n'y en a pas.

(1705)

Je reviens au même sujet. Cela va faire mal à tous les Canadiens. Pour répondre plus à fond à la question du député, la réalité est que si nous n'exerçons pas de contrôle, ce sont ceux qui en ont le moins les moyens qui seront le plus durement touchés. Nous devons utiliser nos maigres ressources pour faire en sorte que les personnes les plus défavorisées reçoivent le plus d'aide possible.

Je ne crois pas que les grands industriels et ceux qui ont accumulé des millions et des millions de dollars en fiducies familiales, dont le Bloc parle constamment, aient besoin des programmes sociaux. Le Parti réformiste entend protéger ceux qui ont le plus besoin de protection.

M. Peter Adams (Peterborough): Monsieur le Président, le projet de loi C-52, qui regroupe au sein du nouveau ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux des fonctions autrefois réparties dans divers ministères, est à première vue un projet de loi technique, une mesure législative technique mais nécessaire pour un tel regroupement. Il ressort manifestement de ce débat que cette mesure législative est plus que cela. Ce projet de loi fait partie des efforts de ce gouvernement en vue de rationaliser le système de gouvernement au Canada et de faire en sorte que le gouvernement serve mieux le public. Vous me voyez, pour cette raison, ravi de pouvoir donner mon avis sur le projet de loi C-52.

Une partie du programme électoral qui a mené à l'élection de ce gouvernement consistait en la promesse ferme de réformer le gouvernement et d'en revoir les mécanismes de façon à redonner aux Canadiens confiance dans leurs dirigeants et dans leurs institutions. Une partie consistait aussi à réduire les coûts et à accroître l'efficacité du gouvernement de façon à réduire le déficit et à soulager les contribuables.

Ce projet de loi, de même que plusieurs autres mesures législatives présentées à la Chambre ces dernières semaines, est conçu de sorte à tenir ces promesses. La fusion du ministère des Travaux publics, du ministère des Approvisionnements et Services, de l'Agence des télécommunications et du Bureau de la traduction au moyen du projet de loi C-52 permet au gouvernement d'offrir des services plus rationalisés et mieux adaptés en réduisant les coûts pour les contribuables. Cette


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fusion permettra d'économiser quelque chose comme 180 millions de dollars d'ici 1998 et donc de réduire le déficit.

Cette mesure législative est fidèle à la promesse du gouvernement de restaurer la confiance dans l'administration. D'autres députés ont fait allusion à l'énorme tâche que va devoir accomplir le nouveau ministère. Gérer un budget annuel de 1,4 billion de dollars, acheter pour 10 milliards de dollars de produits par an, passer 175 000 contrats par an, gérer des biens immobiliers représentant une valeur de 6,5 milliards de dollars, tout cela va désormais être la tâche d'un seul ministère gouvernemental. Ce que cette mesure législative a de remarquable, c'est qu'elle crée une seule organisation placée sous la responsabilité d'un ministre pour accomplir tout ce travail.

Ainsi, non seulement les ministères et organismes gouvernementaux clients mais aussi les nombreuses firmes canadiennes qui font affaire avec le gouvernement pourront traiter avec un seul organisme. Une équipe de gestion relevant d'un seul ministre sera chargée de veiller aux intérêts du client et du fournisseur. C'est vraiment un service gouvernemental à guichet unique pour les entreprises canadiennes.

Soyez assuré que le nouveau ministère consacrera tous ses efforts à veiller aux intérêts des ministères gouvernementaux clients et aux intérêts du monde des affaires. Celui-ci regroupe des entreprises de toutes tailles et de toutes sortes. Il est essentiel que ces entreprises soient compétitives si l'on veut arriver à une économie solide et innovatrice.

C'est pour cela que lorsqu'il effectue les nombreux achats, petits et grands, du gouvernement, le nouveau ministère essaie toujours de rester innovateur et à jour. Il maintient les meilleures pratiques dans ses rapports avec les fournisseurs et il gère ses affaires de façon à encourager l'innovation et la concurrence entre les entreprises canadiennes.

C'est pour cela que le projet de loi est une version révisée de la loi antérieure qui donnera une plus grande souplesse de gestion des achats et permettra ainsi d'atteindre les objectifs stratégiques du gouvernement, par exemple la pénétration des marchés étrangers par de petites et moyennes entreprises canadiennes.

(1710)

Bien que le nouveau ministère cherche avant tout à atteindre son objectif premier, la fourniture de services efficaces au gouvernement, il est guidé également dans ses pratiques d'achats par les principes de concurrence, d'égalité de traitement et de transparence.

Chaque fois que c'est possible, les contrats sont accordés après un appel d'offres. Des conditions et des critères d'évaluation uniformes s'appliquent à tous les soumissionnaires. Pour rester compétitifs, les fournisseurs ou fournisseurs potentiels doivent être informés et tenus au courant des besoins du gouvernement. Ils doivent connaître non seulement la demande, mais aussi les règles et les règlements à respecter.

Le nouveau ministère utilise divers moyens pour donner ces renseignements et de l'aide en général. Un des moyens les plus nouveaux et les plus innovateurs est le service des invitations ouvertes à soumissionner qui a été mentionné et expliqué par la députée de Guelph-Wellington un peu plus tôt. Ce service donne à tous les fournisseurs du Canada qui disposent d'une ligne téléphonique accès à des renseignements sous forme électronique 24 heures sur 24. Les abonnés peuvent ainsi obtenir tous les renseignements dont ils ont besoin pour soumissionner en connaissance de cause pour un appel d'offres du gouvernement. Ils n'ont plus besoin de se faire mettre sur une liste d'envois du gouvernement ou d'attendre qu'on les invite à soumissionner.

Ce processus a été très bien accueilli par les petites entreprises des petites localités qui n'étaient pas dans le circuit d'Ottawa. C'est le cas, par exemple, de Peterborough, dans ma circonscription. Les abonnés peuvent examiner les possibilités pour leurs produits et dans leur domaine et commander des documents pour les appels d'offres qui les intéressent. Ces documents sont envoyés aussi rapidement que possible par le moyen choisi, que ce soit le télécopieur, la poste ou un service de messageries. Des renseignements sur les attributions de contrats et sur les contrats passés sont disponibles pour les abonnés à ce service.

D'autres ministères et sociétés d'État, ainsi que les gouvernements de l'Alberta et de l'Ontario, ont décidé d'utiliser ce service des invitations ouvertes à soumissionner pour faire connaître leurs besoins. Cela élargit considérablement le marché ouvert aux fournisseurs par une seule source de renseignements. Les invitations ouvertes sont aussi l'objet de la publication appelée «Marchés publics» qui paraît trois fois par semaine.

J'ai été plutôt stupéfait des critiques qui ont été faites à l'égard du ministre et du projet de loi. On a affirmé que les pratiques d'achat du gouvernement n'étaient pas suffisamment transparentes et qu'il faudrait fournir plus de renseignements. Je ne comprends vraiment pas quelle vision déformée des faits a pu justifier une telle plainte.

Les achats du gouvernement fédéral sont déjà passés à la loupe par le Parlement, le Conseil du Trésor, le vérificateur général, le Tribunal canadien du commerce extérieur, la Commission de règlement des réclamations contractuelles, ainsi que par tous les médias, les fournisseurs eux-mêmes et, bien sûr, les contribuables. Ajoutons que, pour couronner le tout, les contrats de 25 000 $ ou plus sont annoncés par le service des invitations ouvertes à soumissionner que je viens de décrire. De même, les travaux de construction, d'entretien, d'architecture et d'ingénierie de 60 000 $ ou plus sont aussi annoncés. Quand, pour les besoins de la cause, il faut accorder le marché à un fournisseur unique, cette information est communiquée par le service des invitations ouvertes à soumissionner et annoncée dans la publication Marchés publics.

Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux a pris des moyens encore plus énergiques pour garantir la disponibilité de l'information sur les marchés publics. Il a écrit à tous les députés, comme le savent tous ceux qui ont ouvert leur courrier, pour les exhorter à utiliser le service des invitations ouvertes à soumissionner. Le secrétaire parlementaire nous a renseignés sur le coût de ce service. Les députés serviraient sans doute mieux leurs électeurs en suivant ce conseil qu'en ajoutant à la paperasserie administrative


6538

engendrée par le dépôt des tonnes de documents auxquelles donnent lieu 175 000 contrats gouvernementaux.

Nous vivons à l'ère électronique. Les citoyens et les entreprises du Canada s'adaptent rapidement aux développements de l'autoroute électronique. Les députés qui se plaignent de manquer d'information devraient se mettre au fait. L'un des moyens de le faire est d'utiliser le service des invitations ouvertes à soumissionner.

Le Bloc a aussi exprimé son mécontentement face à l'incapacité de ce nouveau ministère de fournir des données précises sur les marchés passés dans chacune des circonscriptions.

(1715)

Le fait est que les données du ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux ne sont pas classées par circonscription. Les systèmes n'ont pas encore été intégrés depuis l'amalgamation des différents services gouvernementaux. En outre, plusieurs examens des bases de données tant électroniques que manuelles ont révélé que tous les systèmes étaient désuets et devaient être modernisés. Par conséquent, le ministère n'est pas en mesure, pour le moment, de produire automatiquement de tels rapports, à savoir des rapports par circonscription.

De plus, il ne faut pas oublier que rendre compte des activités dans chaque circonscription ne donne pas toujours une idée de la réalité et peut même être carrément trompeur.

Ainsi, prenons le cas de deux grosses compagnies pétrolières, la Compagnie pétrolière impériale Ltée et Petro-Canada. Toutes deux émettent leurs factures pour les achats faits par le gouvernement-qui s'élèvent à 300 millions de dollars par an-à partir de leurs bureaux d'Ottawa, sans égard à l'endroit où a eu lieu la tansaction, que ce soit ailleurs au Canada ou même à l'étranger. Plutôt que de compiler et de publier des statistiques trompeuses par circonscription, le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux fait quelque chose de beaucoup plus pratique pour essayer de répartir les achats du gouvernement de façon égale entre les régions. Lorsque les accords commerciaux tels que l'Accord de libre-échange nord-américain et l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce le permettent, les retombées pour la région sont un critère d'évaluation primordial des soumissions présentées en vue d'obtenir des contrats importants du gouvernement.

De tels exemples ne sont pas difficiles à trouver. Qu'on songe entre autres au contrat de 1,2 milliard de dollars accordé à Saint John Shipbuilding Limited, au Nouveau-Brunswick, pour la construction des frégates canadiennes; au contrat de 40 millions de dollars passé avec SHL Systemhouse, à Ottawa, pour moderniser le système d'approvisionnement des Forces canadiennes; et au contrat de 16 millions de dollars portant sur le système d'alerte du Nord qui a été accordé à une firme de Richmond, en Colombie-Britannique.

La décision du ministre selon laquelle les honoraires conditionnels n'ont pas leur place dans le système d'achats gouvernementaux est une preuve supplémentaire du désir de ce dernier de s'assurer que les achats se fassent au grand jour et en toute équité. Les contrats contiennent maintenant une clause interdisant ce genre d'honoraires. Dorénavant, les soumissionnaires doivent certifier que, pour obtenir un contrat, ils n'ont pas retenu les services d'un lobbyiste dont la rémunération dépendait en partie de leur obtention dudit contrat.

Autre exemple: le ministre a apporté des améliorations majeures dans la façon dont sont accordés les contrats de publicité et les contrats en vue de sondages d'opinion. Auparavant, à toutes fins utiles, il n'existait pas de lignes directrices concernant l'achat de services aussi névralgiques. Depuis longtemps, les médias et le public y voyaient une source d'abus et une façon de récompenser les amis du pouvoir. Pour la première fois, le Cabinet a approuvé de nouvelles lignes directrices qui visent à appliquer à l'octroi de contrats de publicité et de sondages d'opinions les mêmes règles d'équité et de transparence qui régissent l'octroi de tous les autres marchés publics.

Ces nouvelles lignes directrices, le nouveau service d'invitations ouvertes à soumissionner et la nouvelle disposition concernant les lobbyistes prouvent la détermination du gouvernement, qui tient à rétablir l'intégrité du régime et à redonner à la population canadienne confiance dans nos systèmes politiques et administratifs.

Les faits sont clairs. Le gouvernement et le nouveau ministère que crée ce projet de loi appuient les bons principes et les bonnes pratiques de gestion au Canada, ce qui devrait être favorable tant pour les opérations gouvernementales que pour le secteur privé et les contribuables.

En guise de conclusion, je voudrais dire que le projet de loi C-52 est plus qu'une mesure législative extrêmement complexe fusionnant divers services gouvernementaux. Il illustre à merveille l'engagement qu'a pris le gouvernement de se montrer ouvert et juste envers les entreprises canadiennes.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, tantôt-je pense que le député était présent également-on a répondu à une question en disant que ce projet de loi, projet que le député vient de commenter, empêchait certains chevauchements avec d'autres provinces, et que c'était un plus, finalement, à cet esprit de non chevauchement que nous prônons au Bloc québécois.

Ma première question est donc celle-ci: Où exactement, dans ce projet de loi, de façon très spécifique on empêche ce genre de chevauchement?

(1720)

Voici ma deuxième question au député: Le Bloc québécois a déposé un amendement motivé sur cela, qui se lit comme suit:

«cette Chambre refuse de donner deuxième lecture au projet de loi C-52, Loi constituant le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux et modifiant ou abrogeant certaines lois, parce que le principe du projet de loi ne prévoit pas la mise en place d'un code d'éthique précis visant à rendre transparent la passation de marché et l'acquisition de tous les biens et services par le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux.»


6539

Le député est-il d'accord avec cet esprit accru de transparence qu'on veut donner par ce projet de loi? Et dans l'affirmative, où exactement dans le projet de loi offre-t-on cet esprit de transparence?

[Traduction]

M. Adams: Monsieur le Président, je remercie le député pour ses observations.

La réponse à ses deux questions est la même. Pour ce qui est de l'accroissement de l'efficacité des relations entre les niveaux de gouvernement, j'ai parlé du service d'invitations ouvertes à soumissionner et j'ai mentionné, à titre d'exemple, que les gouvernements de l'Alberta et de l'Ontario ont déjà utilisé ce service électronique qui est accessible par téléphone partout au pays. Voilà une des mesures prises pour accroître l'efficacité des relations entre les niveaux de gouvernement.

J'espère que les gouvernements des autres provinces profiteront de cette merveilleuse occasion qui leur est offerte. Elles rendront ainsi les relations entre le gouvernement fédéral et les provinces encore plus efficaces.

En ce qui concerne la transparence, j'ai décrit de mon mieux le service d'invitations ouvertes à soumissionner. Il s'agit d'un service offert à toutes les entreprises, même les plus petites. Les gens ont tous le téléphone. Les frais sont minimes. Le service vous donne la liste des marchés à conclure bientôt de même que les résultats des marchés précédents, autrement dit, le nom des fournisseurs choisis au cours des dernières semaines et des derniers mois.

Ce service est offert à tous les bureaux de toutes les régions du pays. Il y a aussi une publication qui est diffusée trois fois par semaine et qui contient des renseignements similaires. Cependant, je crois savoir où le député veut en venir, parce que cela est moins accessible à bon nombre de petites entreprises.

Pour répondre à sa question sur la transparence, je lui dirai que le service des invitations ouvertes à soumissionner me semble aussi transparent que possible.

[Français]

M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, depuis un an déjà notre gouvernement est arrivé au pouvoir avec un programme très clair et des engagements très précis envers les citoyens canadiens. Nous avons dit que nous voulions développer un pays où les gouvernements savent se montrer efficaces, novateurs et coopératifs non seulement entre eux mais aussi avec les entreprises, les syndicats, le domaine de l'éducation et les autres.

Nous avons dit que nous voulions souligner la notion de partenariat dans toutes nos transactions. Nous nous sommes engagés à faire de la création d'emplois et de la croissance économique nos premières priorités. Nous avons promis de réduire le déficit et d'exercer une discipline de fer en matière de contrôle des dépenses fédérales. Nous avons également dit que nous allions rétablir la confiance du public dans l'intégrité et la probité du gouvernement.

Tous les engagements que nous avons pris et toutes les promesses que nous avons faites se retrouvent dans les priorités et le rendement du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux au cours des 12 derniers mois.

Le ministère, qui représente le regroupement de la plupart des services communs du gouvernement fédéral, a travaillé fort pour accroître l'efficacité du gouvernement, établir des partenariats et convaincre les Canadiens que le gouvernement mène ses affaires équitablement, avec transparence et dans l'intérêt public.

Le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux est bien placé pour relever le défi du gouvernement qui est d'assurer des services efficaces, d'établir des liens solides et d'éliminer les dédoublements dans les prestations des services du gouvernement.

[Traduction]

Du point de vue de l'efficacité des services et de la réduction des doubles emplois, le fusionnement a déjà commencé à porter fruit. Au cours de la dernière année, on a fait beaucoup de progrès dans l'établissement des services ministériels centraux, telles que les finances et l'administration, et à les fusionner en un seul service qui répond aux besoins des diverses divisions du ministère tout en réalisant d'importantes économies en ressources financières autant qu'humaines.

(1725)

Une rationalisation similaire des ressources a eu lieu au niveau régional, permettant encore là de réduire considérablement les coûts et les doubles emplois. Il reste encore beaucoup à faire pour réaliser toutes les économies que ce fusionnement permettra de réaliser.

[Français]

Le ministre est confiant de pouvoir réduire de plus de 20 p. 100 les effectifs nécessaires à la prestation des services communs au cours des quatre prochaines années, sans réduire les niveaux de services fournis aux ministères et aux organismes clients des Travaux publics et des Services gouvernementaux.

Le processus complet engendrera des économies globales de quelque 180 millions de dollars. Ce processus de rationalisation non seulement répond à la promesse du gouvernement de réduire des pertes et des doubles emplois, mais il contribue également, de manière significative, à l'engagement du gouvernement à lutter contre le déficit par des réductions importantes dans le coût de l'administration de l'État.

Travaux publics et Services gouvernementaux Canada a également fait des progrès constants à l'égard de l'objectif du gouvernement d'avoir de solides ententes avec d'autres paliers de gouvernement, le secteur privé, ses clients au sein de la fonction publique et la population en général. Le potentiel de coopération intergouvernementale a obtenu un coup de pouce important l'été dernier avec la signature d'accords entre le gouvernement fédéral et la plupart des provinces en vue de travailler ensemble à réduire les coûts gouvernementaux.

Travaux publics et Services gouvernementaux travaille déjà avec les provinces pour déterminer quels sont les domaines où les deux paliers gouvernementaux peuvent collaborer à réduire le double emploi ou encore mieux, partager les services au bénéfice de nos contribuables.

6540

Certaines dispositions du projet de loi C-52 faciliteront ce passage à une coopération intergouvernementale plus étroite.

[Traduction]

Par exemple, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada pourra offrir sur demande aux autres ordres de gouvernement, soit les provinces et les municipalités, des services immobiliers, des services architecturaux et des services d'ingénierie, ce qui n'était pas possible jusqu'à maintenant. Ce projet de loi va simplifier la démarche en permettant de donner suite aux possibilités de coopération intergouvernementale.

J'ai bon espoir que, au cours des prochaines années, tous les ordres de gouvernement s'efforceront de plus en plus de supprimer les doubles emplois, de partager au niveau des acquisitions lorsque ce sera avantageux et de mieux coordonner les services à la population canadienne.

Le ministère a aussi travaillé dur et réussi à établir des partenariats plus forts et plus satisfaisants avec le secteur privé canadien. En tant que premier organisme d'acquisition du gouvernement qui achète chaque année pour quelque dix milliards de dollars de biens et de services, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada est l'un des principaux points de contact entre le gouvernement et le secteur industriel canadien.

Jusqu'à maintenant, les deux principaux sujets de friction et de mécontentement en ce qui concerne les rapports entre le gouvernement et le secteur privé ont été le sentiment des entrepreneurs, premièrement, que les transactions avec le gouvernement sont lentes, lourdes et coûteuses et, deuxièmement, qu'elles sont l'objet de trop d'ingérence politique et de cynisme. Autrement dit, on reproche au système de ne pas être aussi juste et transparent qu'il le devrait.

Notre gouvernement a vu à ce que Travaux publics et Services gouvernementaux règlent ces deux problèmes.

[Français]

En favorisant le recours à une technologie de pointe dans les communications avec les entreprises, le ministère a réussi à simplifier le processus et à le rendre moins coûteux. Le système d'acquisition et de règlement électronique, SARE, en est un bon exemple. Ce système relie les ministères clients et les fournisseurs à un système central de contrôle et de règlement qui leur permet de faire affaires par voie électronique. Le système permet également de placer des commandes sans demande sur papier, de payer des fournisseurs sans l'envoi de factures et de produire des pièces justificatives sans document sur papier.

Le système a subi avec succès un essai pilote, et on prévoit sa mise en oeuvre complète au cours de l'année. Il est tout aussi populaire au sein du gouvernement que chez les fournisseurs.

[Traduction]

Le système des invitations ouvertes à soumissionner que je viens de décrire est en place et offre un info-panneau qui donne à tous les fournisseurs potentiels la même chance de connaître et de satisfaire les besoins du gouvernement.

Maintes fois, le ministre a invité personnellement tous les députés, y compris les députés du Bloc et du Parti réformiste, à se prévaloir du service d'adjudication publique. On devrait les mettre au défi de faire comme moi et de profiter de cette offre.

Le ministre a aussi prévu que tous les contrats comportent une disposition qui supprimera la pratique des honoraires conditionnels pour l'obtention de contrats gouvernementaux, mettant ainsi fin à l'influence des lobbyistes dans ce domaine. Il a aussi prévu. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Le député aura certainement la possibilité de terminer son intervention lorsque le projet de loi sera à nouveau débattu à la Chambre des communes.

Comme il est 17 h 30, la Chambre passe à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


6540

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA CHARTE CANADIENNE DES DROITS ET LIBERTÉS

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait remplacer le titre de la «Charte canadienne des droits et libertés» par «Charte canadienne des droits, libertés et responsabilités».
-Monsieur le Président, avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais prendre une ou deux minutes pour expliquer aux téléspectateurs la différence entre une motion d'initiative parlementaire et une motion d'initiative ministérielle et ce qui va certainement arriver à cette motion dans exactement une heure.

Une motion d'initiative parlementaire est débattue pendant une heure à la Chambre. Après cela, elle est rayée du Feuilleton et ne reparaît plus, à moins que le sujet suscite l'intérêt et refasse surface.

Cela fait partie du système de freins et de contre-poids de notre système parlementaire. Les motions d'initiative parlementaire donnent aux simples députés et aux députés de l'opposition la chance de faire valoir un point de vue. Elles donnent aux députés de l'opposition et aux ministériels la possibilité de discuter d'idées.

S'il s'agissait d'un projet de loi qui fait l'objet d'un vote plutôt que d'une motion, le débat durerait au total trois ou quatre heures. Le débat se ferait en deux ou trois fois, puis il y aurait un vote. Il peut arriver, mais très rarement, et à la condition qu'il y ait unanimité à la Chambre, qu'un projet de loi présenté par un député de l'opposition soit adopté et devienne loi.

Les chances que cela se produise sont très minces, mais nous pouvons espérer que c'est une possibilité envisageable au cours de la présente législature puisque c'est véritablement là


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l'essence et l'esprit de la démocratie parlementaire. Personne, à la Chambre des communes, n'est fermé aux bonnes idées. Si nous tirions efficacement parti de toutes les possibilités que nos offrent nos fonctions de parlementaires, nous apprendrions les uns des autres et nous proposerions mutuellement des amendements à nos projets de lois d'initiative parlementaire pour atteindre un objectif commun.

Quoi qu'il en soit, ma motion m'est venue à l'esprit parce que j'ai l'impression que notre nation est en train de devenir une nation qui se définit en fonction de droits individuels. Cela se fait à notre détriment et surtout au détriment de la jeune génération.

Pendant la campagne électorale, mes adversaires et moi avons participé à un débat dans une école secondaire d'Edmonton. Au cours de la période des questions, un élève a demandé ce que nous allions faire pour lui trouver un emploi.

Le tirage au sort m'ayant favorisé, j'ai été le dernier à répondre. J'ai pu écouter les autres candidats. Je les ai entendu dire à tous ces jeunes réunis là que nous allions créer un nirvana-choix de mot malheureux-que nous n'allions faire que du beau et du bon. Ils promettaient de dépenser ici et là pour créer des emplois.

Je pouvais voir le visage des jeunes se fermer parce qu'ils avaient déjà entendu tout cela avant et qu'ils n'avaient pas de raison de le croire. Mon tour de répondre est arrivé et j'ai pensé: «Je vais leur dire la vérité.»

(1735)

J'ai dit à ce jeune homme: «Écoute, si tu veux savoir qui te trouvera un emploi lorsque tu termineras tes études secondaires, jette un coup d'oeil dans le miroir parce que tu es la seule personne au monde qui soit responsable de ton avenir. Ton succès dans la vie dépendra directement de ce que tu fais pour te préparer. Si tu t'attends à ce que moi, tes parents, l'école ou n'importe qui d'autre fasse pour toi ce que tu dois faire toi-même, tu seras très déçu dans la vie.»

J'étais vraiment M. Dinosaure du Parti réformiste. Le jeune devait penser: «Ce vieux n'a aucune idée de ce qui se passe aujourd'hui. Comment peut-il me dire que je suis responsable de mon avenir, comme si je n'avais pas besoin d'aller à l'école tous les jours. Si j'arrive en retard, personne ne dira un mot. Ce n'est pas juste parce que ce n'est pas comme ça dans la vie.»

Voilà un peu comment nous nous sommes retrouvés dans cette situation. Ce n'est pas seulement les individus qui estiment avoir des droits, c'est nous tous. Toute notre société est devenue une société de droits. Si une personne veut se lancer en affaires, que fait-elle? Elle ne prend pas ses économies et ne s'associe pas avec ses parents et ses amis pour ouvrir une entreprise. La première chose qu'elle fait, c'est se rendre à la banque pour voir si le gouvernement garantira un prêt. N'y a-t-il pas une subvention pour ce genre de projet? Quelqu'un d'autre ne peut-il pas risquer son capital pour que je puisse avancer dans la vie? Ce n'est pas comme ça que les choses fonctionnent dans le monde d'aujourd'hui.

Nous sommes devenus une société de droits. Cela n'a pas commencé avec l'adoption de la Charte des droits et libertés. C'est un processus qui avance lentement mais sûrement. Il a probablement commencé dans les années 1950 et s'est accéléré durant les années 1960. Cependant, l'événement qui a vraiment codifié toute cette notion de droits, c'est l'adoption de la Charte des droits et libertés au Canada.

Au cours de mon discours cet après-midi, je ferai référence à des renseignements tirés d'un livre intitulé Protecting Rights and Freedoms-Essays on the Charter's Place in Canada's Political, Legal and Intellectual Life. Je recommande ce livre à quiconque s'intéresse à l'impact de la Charte des droits et libertés dans notre pays.

Je tiens à mentionner que je citerai des passages tirés des essais de trois personnes que tous mes collègues à la Chambre ainsi que vous, monsieur le Président, connaissez bien. La première est la très honorable Kim Campbell, lorsqu'elle occupait le poste de solliciteur général. Elle a fait un exposé sur le sujet lors d'une conférence marquant le 10e anniversaire de la Charte des droits et libertés. La deuxième personne est Lysiane Gagnon, une journaliste québécoise bien connue, et la troisième, Jeffrey Simpson, que je n'ai pas besoin de présenter.

Il est intéressant de noter que dans un autre de ses écrits, Mme Kim Campbell affirmait que les Canadiens, par rapport aux Américains, ont une vision vraiment différente de l'État. Nous voyons dans l'État le protecteur de nos droits et de nos libertés. Le Canadien moyen ne craint pas l'État. Elle faisait la comparaison avec la situation aux États-Unis où le citoyen considère l'État plus importun.

Mme Campbell comparait le cas de notre charte des droits et ce qui se fait aux États-Unis. Il n'y a pas exactement de rapport entre les deux situations, mais je vais vous exposer l'essentiel de ce qu'elle disait en parlant de la tension qui existe au Canada entre le Parlement et la magistrature. Avec la Charte des droits et libertés, la Cour suprême s'est vue investie de grands pouvoirs qui, selon notre tradition de common law, ne devaient pas auparavant être confiés à des magistrats nommés par le gouvernement. Il incombait au Parlement de refléter les moeurs de l'époque et d'interpréter ce qui se passe dans la société. Nous avons évolué vers un système qui ressemble davantage au système américain, où les juges ont beaucoup plus à dire sur ce qui se passe.

(1740)

Voici en effet ce que disait Mme Kim Campbell: « Les tribunaux ont maintenant à choisir entre des conceptions et des valeurs contradictoires. La véritable question qui se pose donc n'est pas de savoir si les tribunaux déterminent la politique, mais plutôt quelles limites il convient d'imposer au rôle des tribunaux en matière de détermination de la politique. » C'est ce qu'elle disait à l'époque où elle était procureur général du pays. Ce sont des propos profonds.


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Elle ajoutait: «En donnant aux Canadiens des droits et des libertés consacrés par la Constitution et en confiant aux tribunaux la tâche de les faire respecter, la Charte a donné aux tribunaux un rôle beaucoup plus important et beaucoup plus visible dans notre système gouvernemental. Cela a provoqué des tensions et suscité des questions quant au véritable champ de compétence de l'examen judiciaire dans un régime parlementaire.»

Elle craignait qu'à moins que le Parlement et les tribunaux ne comprennent et respectent leur rôle respectif, nous finissions par aboutir à un système où ce seraient les tribunaux, plutôt que les membres démocratiquement élus des assemblées législatives, qui seraient considérés comme les premiers protecteurs et défenseurs des droits et des libertés.

C'est ce qui est arrivé. Les tribunaux ont acquis un rôle de plus en plus grand dans notre société, et le rôle et la responsabilité du Parlement en ont été par conséquent diminués.

On se demande donc pourquoi nous avons une Charte des droits et libertés pour commencer. La Charte des droits et libertés ne dit pas un traître mot des responsabilités. La notion même de responsabilité n'y trouve pas place. Comment est-ce possible?

C'est parce que la charte n'a jamais été prévue pour autre chose, du moins selon l'avis de nombreuses personnes. La Charte des droits et libertés a été adoptée essentiellement parce que Pierre Trudeau la voulait. Selon lui, si nous avions une charte garantissant les droits et libertés individuels, nous pourrions, en faisant jouer la loi et la notion de droits individuels, faire une place aux Québécois francophones dans le Canada et aux Canadiens anglophones au Québec. Si je ne me méprends pas, il ne s'agissait pas d'avoir ces droits partout au Canada. Les Québécois voulaient se sentir chez eux au Québec. Maîtres chez nous, non pas dans tout le Canada, mais au Québec.

Le Québec n'a pas participé au rapatriement de la Constitution, qu'il n'a pas signée. Au lieu de devenir un élément que nous chérissons et qui nous unit, elle est devenue un irritant de plus.

Lysiane Gagnon écrit: «Ce fut un autre épisode dans le long antagonisme entre deux écoles de pensée. L'une, incarnée par Trudeau, était centrée sur les droits des Canadiens-français comme individus. Avec des chances égales et une protection convenable pour leur langue, ils devraient pouvoir s'affirmer dans tout le pays. La deuxième école mettait l'accent sur le droit collectif des Québécois de se doter de leurs institutions et d'accroître les pouvoirs de la province qui est leur vraie patrie, l'endroit où ils forment la majorité.»

Nous avons maintenant partout au Canada une Charte des droits et libertés qui ne tient aucun compte des responsabilités. Le but visé était que le Québec se sente plus à l'aise dans le pays. Ce fut un échec. Où en sommes-nous? Les tribunaux prennent désormais des décisions qui devraient revenir au Parlement, et certaines de ces décisions vont à l'encontre du bon sens.

J'ai des exemples. Je n'ai pas besoin de m'attarder là-dessus pour le moment, mais les exemples abondent. Le député d'en face en veut un? D'accord.

Le plus haut tribunal a déclaré l'autre jour qu'on pouvait invoquer un état d'ébriété excessive comme défense dans une affaire de viol. Un type boit trop, il viole une femme. Pour toute défense, il dit qu'il ne pouvait avoir l'intention de commettre un crime, et le tour est joué.

(1745)

Voilà une décision qui est rendue par les tribunaux, mais qui n'est pas représentative de ce que pense la plupart des gens. Que se passe-t-il? Les gens sont témoins d'une situation semblable et ils se disent que le Parlement ne comprend certainement pas ce qui se passe. Les tribunaux ne comprennent pas ce qui se passe, et les gens se sentent loin des institutions dont ils devraient se sentir proches et avec lesquelles ils devraient se sentir à l'aise.

Des droits sont maintenant garantis par la Charte des droits et libertés. Que nous aimions cela ou non, à mon avis, nous devons composer avec la Charte des droits et libertés parce qu'elle a une énorme valeur symbolique dans notre pays. Selon un sondage réalisé en 1991, la Charte des droits et libertés avait, pour les Canadiens, une valeur symbolique plus grande que toute autre chose, y compris le drapeau.

Je crois qu'elle fera partie de notre vie pendant encore longtemps, mais dans le chapitre qu'il a écrit, Jeffrey Simpson a parlé d'un ouvrage du professeur de Harvard Mary Anne Glendon, qui estime que le langage des droits est celui de l'absence de compromis. Elle dit: «En laissant notre société pluraliste se complaire dans les discussions simplistes sur les droits, nous multiplions inutilement les occasions de dissensions civiles.

Il devient alors difficile pour les individus et les groupes qui ont des intérêts et des opinions opposés d'établir des coalitions, d'arriver à des compromis ou même d'acquérir le minimum de tolérance et de compréhension mutuelles qui est garant d'une coexistence pacifique et qui laisse la porte ouverte à d'autres communications.»

Nous avons été témoins de cela au Parlement, la semaine dernière, lorsque deux députés aux opinions très différentes ont commencé à se quereller parce que l'un d'eux avait un droit et que l'autre s'estimait privé de ce droit. Pourtant, la vie elle-même est un compromis sous une forme ou une autre. C'est un moyen de nous entendre avec autrui. Sous prétexte de garantir des droits, nous nous retranchons dans des camps où le compromis ne fait tout simplement pas partie de l'équation.

Je vais à nouveau lire une citation de Jeffrey Simpson: «Une caractéristique de ces discussions sur les droits, c'est la mesure dans laquelle les décisions discrétionnaires du gouvernement et les tensions normales et parfois saines qui existent dans une société pluraliste et démocratique sont élevées au niveau de discussions sur des droits de la personne apparemment


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fondamentaux. Ces droits, du simple fait qu'ils sont des droits, ne peuvent facilement faire l'objet de compromis. Ils peuvent seulement être défendus au maximum. Ces droits sont également rarement assortis d'obligations ou de responsabilités.»

En conséquence, que pouvons-nous faire? Que faisons-nous à partir de là? Il est fort probable que la Charte des droits et libertés nous soit imposée à tout jamais. Comment allons-nous faire en sorte que la Charte des droits et libertés produise davantage les effets initialement escomptés, qu'elle nous rapproche, qu'elle nous unisse, qu'elle protège les particuliers des excès des pouvoirs publics, qu'elle protège les minorités des majorités et qu'elle prévoie des règles que nous pourrions respecter.

Je suis d'avis que nous pourrions y parvenir si, d'une certaine façon, nous réussissions à convaincre les tribunaux d'interpréter la Charte des droits et libertés de manière à conférer un certain sens à la société dans son ensemble pour que, dans des causes liées à la Charte, les juges n'interprètent pas toujours la Charte de la manière la plus libérale en ce qui touche les droits individuels et de la manière la plus étroite en ce qui a trait aux droits de la société.

Je ne sais pas comment pareil équilibre délicat peut être atteint, mais la chose vaut certainement la peine d'être tentée parce que la situation actuelle est telle que les gens ne pensent plus qu'à leurs droits et à leurs privilèges. Nous sommes dans une situation où, quelle que soit la couleur du livre que cite le gouvernement, qu'il s'agisse du livre bleu du Parti réformiste, du livre rouge du Parti libéral ou du livre du Bloc, il existe un certain nombre de choses que nous devons faire en tant que nation.

(1750)

Nous devons commencer à vivre selon nos moyens. À mesure que l'argent se fait rare, les gens vont invoquer de plus en plus leurs droits étroitement individuels et nous allons devoir commencer à penser de plus en plus à nos responsabilités nationales.

Rappelons-nous ces mots que le président Kennedy a prononcés il y a des années: «Ne pensez pas à ce que votre pays peut faire pour vous, mais à ce que vous pouvez faire pour votre pays.»

Si nous pouvions faire nôtre cette pensée et l'appliquer à notre pays, je pense que nous réglerions une bonne partie des conflits qui font rage à la Chambre, des conflits entre le gouvernement et l'opposition, des conflits entre des particuliers qui ne se préoccupent que de leurs droits. Nous prendrions davantage conscience de nos responsabilités les uns envers les autres et envers notre pays et accorderions beaucoup d'importance à nos droits individuels et à nous-mêmes.

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, le député d'Edmonton-Sud-Est propose que la Charte canadienne des droits et libertés s'intitule désormais la Charte canadienne des droits, des libertés et des responsabilités.

Il s'agit d'une proposition intéressante, mais je dois avouer que je n'y souscrirais pas pour plusieurs raisons. En 1982, on a modifié la Constitution du Canada pour y inclure la Charte des droits et libertés et, même si la Charte est entrée en vigueur en 1982, les droits et libertés qui y figurent ne sont pas nouveaux. La Charte s'inscrit, en effet, dans la tradition des droits de la personne que le Canada partage avec d'autres pays comme la France, l'Angleterre et les États-Unis.

En Angleterre, la Grande Charte de 1215 était une première tentative en vue de formuler par écrit les droits de l'individu. En France et dans les anciennes colonies britanniques, les révolutions ont également abouti à des tentatives visant à consigner les droits des particuliers face à l'État. Il a été décidé que les particuliers ne pouvaient pas être privés de ces droits par le souverain ou dans un régime démocratique. Un organisme qui est élu et qui représente la volonté de la majorité devait empêcher le gouvernement de contourner les droits de l'individu.

Les Français ont appelé leur document La déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Les Américains ont baptisé le leur The Bill of Rights. Par la suite, nous devions intituler, bien sûr, le nôtre La Charte canadienne des droits et libertés.

Ces documents constitutionnels représentent des tentatives en vue de rédiger des déclarations des droits à l'échelle nationale. Sur le plan international, La Ligue des nations et les Nations Unies ont commencé à s'intéresser aux droits de la personne avant, pendant et après la Seconde Guerre mondiale. Le mouvement international pour l'élaboration de normes universelles relatives aux droits de la personne a pris de l'ampleur à l'issue de la Seconde Guerre mondiale, à la suite des atrocités commises pendant cette terrible guerre.

En 1948, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme, alors que la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales était adoptée en 1950.

Au Canada, après la Seconde Guerre mondiale, les provinces ont commencé à promulguer des lois interdisant diverses formes de discrimination et d'autres lois, comme le Saskatchewan Bill of Rights, qui devaient finir par prendre la forme de nos actuels textes législatifs sur les droits de la personne. À cette époque et tout au long des années 50, au fur et à mesure que se développait l'image que le Canada avait de lui, en tant que pays, on a présenté des propositions en vue d'élaborer une Déclaration canadienne des droits.

Un comité mixte a examiné la question en 1947, puis en 1950. Dix ans plus tard, la Déclaration canadienne des droits recevait la sanction royale. Loi fédérale, la Déclaration canadienne des droits s'appliquait aux domaines de compétence fédérale, mais elle n'était pas considérée comme un document constitutionnel.

Parallèlement, dans les années 60 et 70, le processus législatif des Nations Unies aboutissait à la signature et à la ratification du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.


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(1755)

Au Canada, une autre période de négociations constitutionnelles commençait avec l'adoption, notamment, d'une Charte des droits de la personne plus complète.

Je ne vais pas faire l'historique de l'adoption de la Charte. Beaucoup d'autres personnes connaissent bien la question. Je me contenterai de dire qu'il n'est pas facile de modifier la Constitution. Toutes les dispositions, y compris cette question, ont été examinées attentivement par le gouvernement, par le Comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes sur la Constitution du Canada et, par la suite, par les premiers ministres provinciaux.

À la fin, la Charte canadienne des droits et libertés est devenue une partie intégrante de la Constitution, aux termes de la Loi constitutionnelle de 1982. La Charte est et vise à être une déclaration faite par les Canadiens au sujet des libertés et des droits auxquels nous attachons le plus d'importance dans notre société démocratique.

Dans cette perspective, la Charte protège tout un éventail de droits, notamment le droit à l'égalité et le droit à la liberté d'expression.

Bon nombre des droits prévus dans la Charte découlent de la déclaration universelle dont j'ai parlé tout à l'heure ou ont leur équivalent dans cette dernière. Il existe donc une tradition très large en ce qui concerne les droits, la lutte pour les droits et l'établissement de droits dans des documents officiels.

Les droits ne viennent cependant pas sans responsabilités et ne sont pas non plus absolus. Toutes les modifications touchant les droits de la personne reconnaissent ce fait. À l'article 1 de la Charte, on précise que les droits et libertés d'une personne ne peuvent être restreints que dans des limites qui soient raisonnables. Lorsqu'ils établissent ce qui constitue des limites raisonnables dans une société libre et démocratique, les gouvernements et les tribunaux concilient les droits des gens comme individus et les intérêts de la société dans son ensemble. Ce processus même permet de s'assurer que nos tribunaux tiennent compte à la fois des responsabilités et des droits. Il est inutile de modifier le titre de la Charte pour souligner le lien qui existe entre les droits d'une personne et ses responsabilités envers le reste de la société.

Chose peut-être plus importante encore, je le répète, pour modifier le titre de la Charte canadienne des droits et libertés, il faudrait une modification constitutionnelle, car la partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, dont j'ai parlé tout à l'heure, renferme les dispositions de la Charte et l'article 34 de la partie I établit le titre de la Charte. Ce titre fait donc partie de la Constitution et ne peut être modifié qu'en ayant recours à la procédure de modification prévue à la partie V de la Loi constitutionnelle de 1982.

Cette procédure de la partie V comprend la procédure normale de modification prévue à l'article 38 de la loi. En vertu de cet article, on peut modifier la Constitution avec le consentement du Sénat, de la Chambre des communes et de l'assemblée législative d'au moins deux tiers des provinces dont la population confondue représente au moins 50 p. 100 de la population de toutes les provinces. Comme nous avons pu le constater par le passé, il est difficile d'obtenir ce consentement ou cet accord. Le premier ministre a signalé que le gouvernement ne prévoyait pas rouvrir les discussions constitutionnelles dans un avenir prévisible. Je pense que cela s'applique également à toute modification du titre de la Charte.

[Français]

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe): Monsieur le Président, j'ai le plaisir, à titre de député de Richmond-Wolfe et de député de l'opposition officielle, de prendre part à ce débat, d'éclairer notre position sur la motion d'initiative de notre collègue d'Edmonton-Sud-Ouest, et d'éclairer cette position par rapport au contexte politique nouveau, à la fois au Québec et au Canada.

La motion d'initiatives parlementaires sur la Charte canadienne des droits et libertés est très intéressante en soi. Ce que nous propose notre collègue d'Edmonton-Sud-Ouest, c'est d'ajouter au titre de la charte le mot «responsabilités». Ainsi la nouvelle appellation serait la suivante: la Charte canadienne des droits, libertés et responsabilités.

Cette motion nous rappelle un passé relativement récent, lorsque feu le président John F. Kennedy proposait au peuple américain, et à chaque individu en particulier, de ne pas se demander ce que le gouvernement peut faire pour lui, mais bien ce que lui peut faire pour son gouvernement.

(1800)

Rappelons-nous le contexte particulier. Nous sommes au début des années 1960, de nouvelles frontières à franchir apparaissent à l'horizon de l'empire américain. Rappelons-nous l'invasion du Vietnam, la conquête de l'espace et l'imminence d'un nouveau contrat social.

L'idée de la responsabilité individuelle, je le répète, n'est pas mauvaise en soi. Cependant, le contexte canadien actuel est tout autre que celui des États-Unis au début des années 1960. Il est possible que nous soyons à la veille de changements sociaux majeurs en cette partie du continent nord-américain et ces changements ne vont certainement pas dans le sens d'une consolidation de l'État canadien. Le message du président Kennedy s'adressait à une nation. Or, le peuple québécois ne fait pas partie de la nation canadienne, et la Charte canadienne des droits et libertés ne s'adresse pas à lui.

D'abord, le Québec a sa propre charte, rappelons-le. et aura bientôt sa propre constitution. Le débat entourant la responsabilité du citoyen, dans le contexte de la Charte canadienne des droits et libertés, ne nous concerne pas. Pourquoi? La Charte canadienne des droits et libertés est, pour le peuple québécois, un symbole de domination pour ne pas dire un symbole de trahison. Je m'explique: L'adoption et l'entrée en vigueur de la Charte canadienne des droits et libertés, invoquée à


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la Loi constitutionnelle de 1982, ont marqué l'aboutissement de la politique de nationalisme canadien du Parti libéral du Canada. La nouvelle Constitution de 1982, en enchâssant une déclaration des droits et libertés, allait enlever à l'Assemblée nationale du Québec des pouvoirs législatifs en matière de langue et d'enseignement, des droits pour lesquels le peuple québécois se bat depuis la conquête.

L'enchâssement de la Charte des droits et libertés dans la Loi constitutionnelle de 1982-rappelons-nous du rapatriement unilatéral du gouvernement libéral Trudeau-marque un déclin très net, voire l'abandon des plus importantes traditions britanniques dans le droit et les institutions canadiennes.

Le droit et les institutions britanniques font reposer sur le Parlement seul toute la souveraineté de l'État; résultat de la longue lutte entre la bourgeoisie et l'aristocratie. La Charte canadienne de 1982, contrairement à la tradition britannique, accentue la souveraineté de l'individu tout en diminuant celle de l'État. C'est le règne de la primauté du droit individuel sur le droit collectif.

Avec la Charte canadienne des droits et libertés, c'est l'autorité judiciaire de la Cour suprême du Canada qui est substituée à la souveraineté de l'Assemblée nationale du Québec. Cette Charte de 1982 «consacre, au plan constitutionnel, l'intégration du Canada dans l'orbite américaine», comme le mentionnait Pierre Mackay aux Presses de l'Université du Québec en 1988 sous le titre «L'ère des libéraux: Une réforme constitutionnelle qui s'impose», en ce sens que la souveraineté ultime dans l'État, comme États-Unis, ne repose pas sur le Parlement, mais sur le peuple, dont la Constitution est désormais la gardienne et la représentation juridique.

Ainsi, la préséance du principe d'une société distincte pour l'État québécois, dans le contexte de l'enchâssement de la Charte canadienne des droits et libertés dans la Constitution, n'existe pas. Elle est bafouée par toute la puissance de la Cour suprême du Canada qui applique à toute la société québécoise les principes de la Charte.

Il va sans dire que la Charte canadienne ne reconnaît pas le droit des peuples à l'autodétermination. En regard du droit constitutionnel canadien donc, la seule façon pour un peuple autochtone ou pour le Québec d'atteindre l'indépendance serait d'obtenir un amendement à la Constitution canadienne, ce qui est nettement impossible-on l'a entendu de notre collègue-très difficile, dans le contexte de la formule d'amendement de la Loi constitutionnelle de 1982.

Sur le droit des collectivités donc, la Charte canadienne est bien pauvre. Rien, comme je l'ai mentionné, ne reconnaît le caractère distinct ou particulier de la société québécoise. La Charte canadienne des droits et libertés de 1982 reconnaît à l'individu des droits et libertés à l'encontre de l'État. Elle lui permet de recourir aux tribunaux pour faire valoir ses droits et aller jusqu'à faire invalider des lois adoptées par l'Assemblée nationale du Québec.

(1805)

Le Bloc québécois s'oppose à toute Charte canadienne des droits et libertés et ne se sent absolument pas concerné par la motion du député réformiste d'Edmonton-Sud-Ouest.

Au Québec, la vie en société mérite une protection aussi grande que la protection accordée aux droits individuels dans la charte canadienne. Les droits collectifs au Québec sont essentiels à la survie du peuple québécois et le principe de la responsabilité du citoyen s'inscrit dans le processus de la solidarité qui caractérise si bien l'activité économique et humaine de certains secteurs de la société québécoise.

Avec l'élection du Bloc québécois au Parlement canadien et celle du Parti québécois à l'Assemblée nationale du Québec, l'État du Québec s'oriente vers un projet de société majeur qui va permettre de reconnaître la spécificité de son peuple; un projet de société où la responsabilité des individus par rapport à l'État s'inscrit avant tout dans le cadre d'une nouvelle solidarité qui entoure la consolidation et l'indépendance de ce même État.

[Traduction]

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole ce soir sur la motion que mon collègue a présentée. Je trouve que c'est une motion très importante. Si nous la prenons au sérieux, elle pourrait changer notre pays à de nombreux égards.

J'ai écouté attentivement ce que mes collègues d'en face et d'ici avaient à dire. J'espère qu'ils écouteront encore plus attentivement. Je pense qu'ils n'ont pas compris ce que mon collègue a voulu dire en présentant cette motion.

Bon nombre de réformistes s'intéressent depuis longtemps à l'élaboration d'une charte des responsabilités qui ferait contrepoids à la Charte des droits et libertés. Tout le monde sait que pour pouvoir jouir de nos droits et libertés, nous devons tout d'abord nous acquitter de nos responsabilités de citoyens.

Un certain nombre de pays ont défini les devoirs qu'une personne a envers sa famille, les autres citoyens et son pays. Il s'agit entre autres de la Suisse, de l'Allemagne, de l'Équateur, d'Israël, du Maroc, du Japon, du Pakistan et de la Thaïlande. Quand on regarde ce qui se passe dans ces pays, comme je vais le faire dans un instant, on constate qu'il y a là-bas des choses assez intéressantes que nous pourrions reprendre ici.

Je n'ai rien imaginé. Je n'invente rien. Voyant ce qui se passait au Canada, dans nos tribunaux, dans nos programmes sociaux et dans nos familles, les habitants de ma circonscription m'ont demandé de prendre la parole à la Chambre pour dire que nous insistons trop sur les droits, dans notre pays, et pas assez sur les responsabilités. C'est ce que je fais aujourd'hui. Je tiens à dire


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que nous devons insister davantage sur les responsabilités dans notre pays, et pas seulement sur les droits.

Je voudrais passer rapidement en revue une liste de responsabilités qui devraient, à mon avis, être insérées dans la charte des droits, des libertés et des responsabilités. J'en donnerai ensuite quelques exemples.

Premièrement, chaque Canadien a le devoir et la responsabilité de contribuer à défendre le pays contre une attaque par une puissance étrangère ou une insurrection de l'intérieur. Je suis certain que nous sommes tous d'accord là-dessus.

Deuxièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de se conformer à la Constitution du Canada, de respecter, d'observer et de maintenir les lois du pays, ainsi que d'obéir aux autorités et les aider à faire appliquer ces lois.

Troisièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de prêter assistance en cas d'urgence ou de calamité ou dans des circonstances susceptibles de mettre en danger l'existence ou le bien-être d'une partie ou de la totalité de la population. Nous tenons cela pour acquis, et nous devrions l'énoncer.

Quatrièmement, chacun a le devoir et la responsabilité d'exercer ses droits et ses libertés d'une manière responsable, en respectant les droits et les libertés d'autrui sans les réprimer. Nous oublions souvent cela.

(1810)

Cinquièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de voter aux élections et aux référendums et de participer aux affaires municipales, selon les limites et les conditions établies par la loi.

Sixièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de payer sa juste part des impôts, selon les limites et les conditions établies par la loi.

Septièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de recevoir une éducation et une formation, selon les conditions et d'une manière prévues par la loi, afin de répondre à ses obligations envers sa famille, sa collectivité et l'ensemble de la société. Les gens ont l'obligation de faire de leur mieux et d'acquérir des connaissances pour pouvoir servir leurs compatriotes le mieux possible.

Huitièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de procurer les choses essentielles à ses enfants, de les éduquer et de les protéger jusqu'à l'âge adulte. Si nous nous interrogions sur la signification de ce point, notre attitude envers nos programmes sociaux changerait radicalement.

Neuvièmement, chacun a le devoir et la responsabilité d'assumer les crimes commis par ses enfants s'il peut être prouvé qu'il a négligé d'assurer une surveillance et un contrôle adéquats. Nous devons tenir les parents responsables des actes de leurs enfants.

Dixièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de soutenir et de protéger ses parents en cas de nécessité et dans la mesure de ses moyens, surtout lorsqu'ils sont âgés et incapables de travailler. J'en donnerai un exemple qu'on trouve dans un autre pays et qui fonctionne très bien.

Onzièmement, chacun a le devoir et la responsabilité d'aider et de soutenir les autres membres de sa famille immédiate, en cas de besoin, dans la mesure de ses moyens.

Douzièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de faire sa juste part pour la société et de ne profiter ni des autres, ni de l'État. Réfléchissez à la portée de cette affirmation.

Treizièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de combler ses propres besoins avant de compter sur un programme, une subvention ou un prêt du gouvernement.

Quatorzièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de travailler selon sa capacité et de ne pas réclamer des prestations d'aide sociale avant et à moins d'être complètement dans le besoin et incapable de travailler à cause d'un handicap, de l'âge ou de la maladie et avant d'avoir tenté sans succès d'obtenir de l'aide auprès d'autres membres de sa famille, d'organismes de charité privés et d'organisations non gouvernementales. Ce point changerait entièrement la façon de penser de certaines personnes dans notre pays.

Quinzièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de se donner un code personnel de conduite, de comportement et de mode de vie qui ne fera pas de lui un fardeau pour sa famille, sa collectivité ou la société en général.

Seizièmement, chacun a le devoir et la responsabilité de coopérer avec le gouvernement dans l'application de la loi et de signaler aux autorités toute activité illégale.

Le dix-septième et dernier point de cette liste qui n'est pas exhaustive, mais qui donne un exemple de ce que l'on pourrait inclure, dit que chacun a le devoir et la responsabilité de se conduire de manière honnête et juste à l'égard des autres afin de contribuer au bien-être de sa famille, de sa collectivité, de sa province et de toute la société en général.

J'ai dit que je donnerais aussi des exemples des répercussions de ces différents points. Prenons la Loi sur les jeunes contrevenants. Voilà un cas où nous devrions exiger que les gens assument davantage la responsabilité de leurs gestes. Très souvent, la justice relaxe des jeunes contrevenants et ne les oblige à verser que peu ou pas de dédommagement à leurs victimes.

Dans ma circonscription, il y a quelques années, un groupe d'adolescents a saccagé une très belle automobile qui appartenait à un autre jeune. Le véhicule a été tellement endommagé qu'il n'avait plus aucune valeur. La police a traduit les jeunes devant le tribunal qui leur a dit qu'ils n'avaient pas agi de façon très brillante.

Le tribunal les a pour ainsi dire laissés aller en leur demandant seulement de payer la franchise de 500 $. Le reste a été payé par les citoyens. Six de ces jeunes s'en sont tirés impunément. Ils auraient dû rendre des comptes et être tenus responsables. Les


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parents de ces jeunes auraient dû être tenus responsables de leurs actes. Nous devons nous attaquer à ce problème. C'est pourquoi la charte doit prévoir aussi des responsabilités.

(1815)

La famille, et non pas le gouvernement, doit être la première à subvenir aux besoins des membres de la société. Je fais ici référence à certains programmes sociaux. Les parents doivent aussi avoir la responsabilité de subvenir aux besoins de leurs enfants. Cette responsabilité première leur incombe.

On me permettra de lire un extrait du Code civil suisse. En Suisse, le taux de chômage n'est que de 2 p. 100 à 2,5 p. 100, et cela est dû en grande partie au fait qu'il existe en Suisse une charte des responsabilités. Je n'ai pas le temps d'en expliquer toutes les ramifications, mais j'en donnerai un exemple.

Depuis 1978, la loi suisse oblige les familles à prendre soin de leurs membres qui sont dans le besoin, avant de demander l'aide du gouvernement. Les pères, les mères, les grands-parents et les autres membres de la famille doivent prendre soin des enfants. Les gouvernements peuvent poursuivre les grands-parents au nom de leurs enfants nécessiteux et les personnes âgées peuvent poursuivre leurs rejetons en vue d'obtenir leur soutien. Les tribunaux suisses perçoivent les sommes d'argent.

Voici l'extrait du Code: «Chacun est tenu de subvenir au besoin de ses ascendants et descendants en ligne directe et de ses frères et soeurs si, à défaut de cette aide, ils se retrouvent dans le besoin.»

Nous pouvons voir à quel point la situation est différente au Canada, où parents, grands-parents et enfants ne se voient imposer à peu près aucune responsabilité à l'égard des autres membres de leur famille. Nous devons nous ressaisir et insister sur le rôle que doivent jouer les familles dans notre société. Nous devons raviver la conscience de l'importance de la famille comme unité de base de la société, unité économique de base, unité culturelle de base, l'unité de base que devrait être la famille.

Les parents doivent non seulement avoir le droit mais aussi l'obligation d'imposer la discipline à leurs enfants. Le gouvernement voudrait retirer aux parents le droit de donner une fessée à leurs enfants. Ne devrions-nous pas aller dans l'autre direction et mettre l'accent sur la responsabilité des parents pour ce genre de chose?

Mon collègue n'est pas au courant de ce que fait le gouvernement. Ce gouvernement voudrait que le ministre de la Justice retire du Code criminel l'article qui permet aux parents de donner une fessée à leurs enfants. Si nous faisions cela, les parents qui utilisent cela comme outil de discipline ne pourraient plus y avoir recours. Beaucoup de mesures législatives présentées ici sont un pas dans la mauvaise direction.

Nos écoles devraient enseigner aux enfants ce que signifie la citoyenneté canadienne et ce qui fait un bon citoyen. J'ai constaté que le Bloc était fortement opposé à cela, et je comprends pourquoi. Si de tels cours avaient existé, nous n'aurions peut-être pas ici un groupe de personnes dont le but est de détruire le pays. Nous devons mettre cela au programme de nos écoles.

Il y a aussi des conséquences énormes pour l'immigration, certains immigrants faisant venir leur famille et la laissant rapidement à la charge de l'État. Il faut accorder plus d'importance à la famille et au rôle qu'elle doit jouer dans la société. Les gouvernements ont miné le rôle des familles.

En conclusion, nous devrions dire clairement aux gens que lorsqu'ils viennent dans notre grand pays, ils ont des droits, certes, mais ils ont aussi des responsabilités. Nous devons faire savoir à la population canadienne que le gouvernement n'est pas le premier filet de sécurité. Une des meilleures façons de faire cela est de modifier notre charte des droits et libertés pour y ajouter des responsabilités.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je ne peux pas appuyer cette motion bien que je sache ce qui l'a motivée. Je conviens sans hésitation que la charte a donné beaucoup de travail aux tribunaux. Le rôle du Parlement en a été quelque peu diminué.

Dans son libellé actuel, la motion confond la notion de droits et libertés avec le comportement. Lorsqu'on parle de «responsabilité», on fait allusion à la façon dont les citoyens devraient se conduire. À mon avis cette motion aurait davantage de sens si elle proposait une charte des responsabilités dans le cadre de la Loi sur la citoyenneté qu'on est en train de revoir.

(1820)

Même dans ce cas, j'aurais du mal à appuyer cette motion car c'est l'une des libertés fondamentales dont nous jouissons au Canada, à savoir la liberté de ne rien faire. Nous avons la liberté de ne pas être forts, de passer pour faibles; il n'en demeure pas moins que nous ne méritons pas d'être pénalisés pour la simple raison que nous ne sommes pas aussi forts que d'autres. C'est pour cela que nous avons besoin d'une charte des droits de la personne.

Récemment, j'ai éprouvé beaucoup de difficultés lors des audiences en vue de la révision de la Loi sur la citoyenneté. J'ai été tout aussi agacé par la clause Canada contenue dans l'accord de Charlottetown. En effet, ce document prétendait m'apprendre à moi qui suis Canadien qui et quoi respecter. On y disait que je devais respecter les minorités, les individus en raison de leur sexe et pour toutes sortes d'autres raisons.

Je n'ai pas besoin qu'on me le dise. Du seul fait que je sois Canadien et que j'ai vécu comme j'ai vécu, je sais d'instinct que tout le monde dans ce pays doit être traité de la même façon. Cela va de soi.

Lorsque nous parlons de responsabilité, nous commençons à vouloir imposer nos propres règles de conduite aux autres. Le député d'en face a dit, par exemple, que chaque Canadien devrait avoir la responsabilité de dénoncer les contrevenants,


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d'informer les autorités dès qu'on estime que quelqu'un fait quelque chose allant à l'encontre d'une loi ou d'un règlement. Cela s'est déjà fait, il y a une soixantaine d'années en Allemagne sous le régime nazi. Sauf erreur, Staline avait lui aussi instauré un tel système.

Une voix: Oh! Oh!

M. Bryden: Une minute! C'est exactement la situation. Si on propose quelque chose, on doit offrir un choix. Les orateurs précédents n'ont pas dit comment on obligerait les gens à assumer leurs responsabilités. Est-ce qu'elles seraient obligatoires ou facultatives?

Si c'est quelque chose de volontaire, c'est le genre de règle de conduite ou ce qu'on attendrait d'un bon citoyen, et cela relève plutôt d'une loi sur la citoyenneté que d'une charte des droits et libertés.

D'un autre côté, comme un député l'a suggéré, il y a cette idée que l'on devrait en fait l'exiger des citoyens. Et nous revenons à la question de savoir où l'État exige un certain comportement de la part des citoyens et les oblige à l'observer.

Il se peut qu'il y ait des cas où un citoyen canadien ne veut pas, pour une raison quelconque, peut-être parce qu'il a peur, signaler un crime dont il a été témoin. Devons-nous le punir? Je remonte maintenant le cours de l'histoire pour montrer que dans les dictatures, il est très courant de punir les gens qui ne signalent pas les infractions commises contre l'État. C'est une chose très grave.

Je ne pense pas que ce soit dans cette intention que les députés de l'autre côté demandent une charte des responsabilités. Je crois qu'ils veulent parler essentiellement de la Loi sur la citoyenneté.

J'aimerais faire une autre remarque parce que c'est se lancer sur un terrain extrêmement dangereux que de discuter de questions comme celle-ci-et nous devons sans aucun doute en discuter. Un autre député a parlé de la différence entre les droits et libertés individuels et les droits et libertés collectifs. Ici, nous avons un autre problème. La charte actuelle se rapporte aux individus et, à mon avis, c'est ainsi que ça doit être car chacun de nous est un individu, qui a des convictions profondes et qui a besoin d'être protégé en tant qu'individu parce que l'individu que nous sommes n'est peut-être pas aussi fort que les autres.

Quand on parle de droits collectifs, toutefois, on se met dans le même type de situation que l'on a connue au début du XXe siècle, lorsque le nationalisme était florissant en Europe et a mené notamment à l'ascension de l'Allemagne nazie et à l'Espagne de Franco.

(1825)

Au sujet des droits collectifs, il semblerait que certaines personnes dans la province de Québec aimeraient avoir des droits collectifs dans une perspective d'autodétermination. Si nous souscrivons à cette idée, alors les Cris du nord du Québec devraient aussi avoir des droits collectifs. C'est là qu'il y a contradiction. Parler de droits collectifs, c'est détruire le pays. Si les séparatistes étaient fidèles à ce principe, ils détruiraient le Québec.

Le président suppléant (M. Kilger): Pour être sûr que tout le monde comprenne bien, je demande le consentement de la Chambre à ce qu'on appelle le droit de réplique. Précisons que si j'accorde le droit de réplique à l'auteur de la motion, cela signifie que personne d'autre ne peut prendre la parole. Quand le député d'Edmonton-Sud-Ouest aura pris la parole, le débat sera clos.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest): Monsieur le Président, je tiens à remercier mes collègues pour les propos réfléchis et sincères qu'ils ont formulés sur cette question. Nous parlons de la Charte des droits et libertés, de notre Constitution et de nos relations entre nous. C'est là un débat vraiment très important.

L'objet du débat qui se termine maintenant à la Chambre est probablement ce qui justifie la présence ici de plusieurs d'entre nous. Nous voulons faire part de nos idées et expliquer pourquoi notre pays fonctionne comme il le fait. Ce n'est pas parce qu'un objectif est difficile à atteindre qu'il faut cesser de le considérer comme un objectif valable. Comme mon collègue vient de le dire, si un but valable ne peut être atteint d'une façon, il faut trouver une autre façon peut-être plus appropriée. Cela résume bien l'idée centrale de ce débat.

Par exemple, si l'on croit que les observations formulées par mon collègue allaient trop loin, nous avons le devoir de présenter une proposition de compromis. Nous ne devons pas nous contenter de toujours dénoncer radicalement les opinions contraires aux nôtres. C'est en mettant de l'eau dans notre vin qu'on ajoute à la beauté et au charme de notre démocratie.

Il y a des jours où nos avons l'impression que notre présence en cette magnifique enceinte n'est pas vraiment utile. Nous ne nous rendons peut-être pas utiles tous les jours, mais si nous pouvons faire avancer l'opinion publique ou le débat même juste un tout petit peu dans un sens qui nous permettra de léguer un pays meilleur à nos petits-enfants, nous avons fait quelque chose de grand.

Je conclus sur une anecdote qui met en vedette mon petit-fils de trois ans, qui est ma raison de vivre. Le jour de son retour d'Oshawa, où il avait passé environ un mois chez ses grands-parents maternels, ma femme est allée le chercher à l'aéroport. En entrant dans la voiture il a cherché papa des yeux. De sa petite voix de trois ans, il a demandé: «Où est papa?» Ma femme a répondu: «Papa est à Ottawa.» Il a réfléchi une minute, puis il a dit: «Ah oui, papa est à Ottawa. Papa est allé sauver le pays.» C'est le genre de petite chose qui vous réchauffe le coeur.

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Tous les députés ici présents et tous ceux qui suivront travaillent à sauver le pays. C'est en échangeant nos idées que nous y parviendrons. Je remercie tous mes collègues pour l'attention qu'ils ont portée à ce débat et pour leur contribution utile.

Le président suppléant (M. Kilger): La période réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée.

Conformément au paragraphe 96(1) du Règlement, l'article est rayé du Feuilleton.

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6549

MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

(1830)

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Bill Graham (Rosedale): Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de revenir sur une question que j'ai posée au ministre de la Justice il y a quelque temps, au sujet du contrôle des armes à feu.

En guise d'introduction, je veux rappeler à tous les députés certaines réalités importantes dont il faut tenir compte relativement à ce dossier délicat et complexe. Il existe une grande différence entre la perception qu'ont ceux qui vivent en milieu rural et qui ont des intérêts et des problèmes particuliers, et celle qu'ont ceux qui vivent en milieu urbain.

Je viens d'un milieu urbain et je veux faire part au ministre des graves préoccupations de mes concitoyens relativement à cette question.

Je représente la circonscription de Rosedale, que les députés et d'autres personnes imaginent souvent comme un secteur résidentiel prospère, avec des rues bordées de beaux arbres et de jardins. Pourtant, cette description ne s'applique pas à ma circonscription dans son ensemble. En effet, une grande partie de celle-ci est très densément peuplée, comme c'est le cas dans bien d'autres centres urbains au pays.

Une partie de ma circonscription, où l'on trouve plusieurs immeubles d'habitations, est aux prises avec de graves problèmes de violence souvent reliés à la consommation de drogues. Ces problèmes sont souvent causés par de jeunes rebelles qui peuvent facilement se procurer des armes à feu.

Durant la dernière campagne électorale, deux jeunes hommes ont été frappés par des balles dans le secteur de Regent Park. Plus récemment, des balles tirées dans un immeuble d'habitations sont passées au travers des fenêtres de personnes qui n'avaient absolument rien à voir avec l'incident.

Je ne vous décris pas un phénomène particulier qui n'existe pas ailleurs au pays. Je sais, pour en avoir discuté avec d'autres députés ainsi qu'avec des personnes intéressées, que ce problème existe aussi ailleurs.

La question est de savoir ce qui doit être fait et ce que le ministre compte faire. Ceux qui vivent en milieu urbain n'ont pas besoin d'une carabine. Il n'est absolument pas nécessaire d'avoir un fusil lorsque vous vivez dans la rue Sherbourne, comme c'est mon cas. Les seules personnes qui possèdent des armes de poing sont des gens qui s'en servent pour pratiquer un sport. Il n'y a aucune raison de posséder une arme de poing à moins d'être un policier ou un agent chargé de faire respecter des lois.

Mais comment alors mettre fin à la violence? Comment pouvons-nous protéger nos collectivités et les empêcher de devenir comme les collectivités américaines où une culture de violence est répandue par la télévision et par les autres médias?

J'ai des questions à poser au ministre. Où en sommes-nous dans le dossier de l'enregistrement des armes? Où en sommes-nous dans le dossier du contrôle de la vente des munitions? Où en sommes-nous dans le dossier du resserrement des règles applicables aux armes de poing et dans celui du contrôle des frontières et de la prévention de l'entrée au Canada d'armes bon marché en provenance des États-Unis? Où en sommes-nous dans le dossier de l'interdiction complète de toutes les armes d'assaut? Et où en sommes-nous dans notre reconnaissance que ce problème appelle peut-être une solution différente dans les régions rurales et dans les régions urbaines? Personne dans les régions urbaines ne veut empêcher les peuples autochtones de conserver leur mode de vie traditionnel. Personne dans les régions urbaines ne veut empêcher les agriculteurs des régions rurales d'avoir des armes à feu pour chasser dans leurs loisirs, voire uniquement éliminer les animaux nuisibles à la ferme.

Ce que nous tentons d'obtenir, c'est la protection de nos régions urbaines. Mais nous devons aussi reconnaître qu'il pourrait y avoir des solutions différentes pour des problèmes différents. Je demanderais au ministre si le ministère est capable de rédiger des lois qui reconnaîtraient la différence fondamentale entre le mode de vie de ceux d'entre nous qui vivent à la ville et ceux d'entre nous qui ont des besoins différents du fait qu'ils vivent dans les régions rurales de notre vaste pays.

M. Russell MacLellan (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, le gouvernement a dit que d'autres modifications législatives sur le contrôle des armes à feu seraient proposées à la Chambre avant Noël. Il s'agit d'un défi de taille pour nous tous. Je suis convaincu que les députés de tous les côtés de la Chambre conviendront avec moi que nous devons chercher ensemble des façons de rendre cette loi claire, efficace et juste.

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D.(1835)

Le ministre de la Justice a récemment déclaré que la première et la plus importante des obligations du gouvernement doit être de protéger la vie et la sécurité de tous les Canadiens. Je suis entièrement de son avis. La sécurité dans nos maisons et nos rues est l'essence même d'une société stable, paisible et prospère.

Certains ont dit que cette question divisait les Canadiens des régions urbaines et des régions rurales. Je ne suis pas d'accord. Les attitudes diffèrent sans aucun doute, mais la réalité est la même. Si une arme a feu sert à commettre un crime, que celui-ci soit commis à la ville ou à la campagne, ce n'en est pas moins un crime. Un crime restera toujours un crime. C'est un problème pour tous les Canadiens, pas seulement pour ceux qui vivent dans les grandes villes.

Je suis certain que nous pouvons trouver des moyens efficaces de contrôler les armes à feu sans brimer les personnes qui s'adonnent au tir, en tant que sport.

Dernièrement, des centaines de propriétaires d'armes à feu se sont rassemblés ici même, à Ottawa. Ils demandaient au gouvernement de ne pas les blâmer. Ils ont l'impression que le gouvernement les fait payer pour des crimes qu'ils n'ont pas commis.

Ni mes collègues ni moi ne critiquons les nombreux Canadiens qui possèdent des armes à feu et qui s'en servent de façon responsable, en respectant les règles de la sécurité. Le gouvernement ne blâme pas les tireurs responsables et il ne les fait pas payer pour les crimes que d'autres ont commis. Ce qu'il fait, cependant, et ce qu'il doit continuer de faire, c'est élaborer des mesures législatives qui répondent aux besoins de tous les Canadiens.

Nous devons trouver des moyens de contrôler l'accès aux armes à feu sans imposer aux propriétaires trop de règlements ou des règlements inefficaces. Nous devons trouver des moyens pour punir et dissuader ceux qui pourraient être tentés d'utiliser des armes à feu à mauvais escient ou pour menacer d'autres personnes. La dissuasion ne fonctionne pas toujours, mais nous devons à tout prix veiller à ce que, dans la loi et dans son exécution, la dissuasion soit la plus efficace possible.

Au Canada, certains croient que le port des armes devrait être autorisé pour tout le monde. Je ne suis pas de cet avis. Cette opinion n'est pas conforme à l'esprit des Canadiens et une grande partie d'entre eux s'y opposeraient. Posséder une arme à feu est un privilège qu'il faut préserver soigneusement. Nous devons donc assurer la formation et l'éducation en ce domaine pour que les armes à feu soient utilisées de façon responsable.

Je crois en outre qu'on ne doit pas user de ce privilège sans justification. En restreignant l'accès aux armes à feu, nous créons peut-être des complications pour des Canadiens respectueux des lois. Dans ce cas, nous devons nous assurer d'agir en pensant à la sécurité de toute la population et de légiférer à cet égard en gardant toujours à l'esprit ce privilège et ceux qui l'exercent.

[Français]

LES TARIFS DOUANIERS

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, le 5 mai dernier, j'adressais une question au ministre du Commerce international dans laquelle je lui demandais, en substance, s'il avait l'intention de résister aux pressions américaines qui étaient exercées sur le Canada à l'égard des tarifs que celui-ci entend imposer sur les productions agricoles contingentées, telles la volaille, les oeufs et le lait. Je voulais savoir si le gouvernement avait l'intention de se prêter à une espèce de marchandage avec les États-Unis en se montrant conciliant sur la question des tarifs douaniers sur les produits agricoles contingentés de façon à faciliter l'entrée du blé dur et de l'orge canadien sur le marché américain.

Le ministre a catégoriquement nié vouloir se prêter à une quelconque forme de marchandage de cette nature dans les pourparlers entre le Canada et les États-Unis sur la question des produits céréaliers.

La conclusion de l'entente du 2 août dernier sur les exportations canadiennes de blé aux États-Unis aura effectivement démontré qu'un marchandage a bel et bien eu lieu, mais à un tout autre niveau. Le Canada n'a pas sacrifié les intérêts des producteurs canadiens et québécois de lait, d'oeufs et de volaille au profit des producteurs de blé; il a tout simplement abdiqué devant les revendications américaines et sacrifié les intérêts des producteurs de blé, en acceptant l'imposition d'un plafond sur nos exportations de blé aux États-Unis. Et l'ironie c'est que tout sera à recommencer d'ici un an.

Je voulais également savoir de la part du ministre si, à son avis, les dispositions du GATT auraient préséance sur celles de l'ALENA en matière de litiges commerciaux, ce à quoi il a répondu par l'affirmative, et s'il pouvait déposer les avis juridiques sur lesquels il appuyait sa réponse. Immédiatement après la période des questions, le ministre de l'Agriculture m'approchait pour confirmer verbalement les informations qui m'avaient été laconiquement fournies par le ministre du Commerce international, et pour m'assurer qu'il ferait tout en son pouvoir pour me faire parvenir une copie des avis juridiques pertinents.

(1840)

Je n'ai jamais vu ces avis juridiques, ni même un résumé ou une synthèse de ces avis. Quelques jours plus tard, un officiel du ministère de l'Agriculture communiquait avec moi pour m'informer qu'il n'était pas usuel de rendre publics de tels avis. Après quelques minutes de délibérations laborieuses, au cours desquelles je lui rappelais l'engagement du ministre, on finit par me promettre une version «allégée» des avis juridiques. J'apprends plus tard que cette version était en préparation et que je devais en obtenir une copie dès qu'elle serait disponible, soit environ deux semaines plus tard.

Après trois semaines, j'étais toujours sans nouvelle. Après avoir établi le contact avec une nouvelle personne-ressource au cours de l'été, celle-ci nous explique que le retard est dû à une confusion entre le ministère du Commerce international et le ministère de l'Agriculture, mais que la lettre était maintenant sur le bureau du ministre de l'Agriculture, en attente d'être signée. Il faut croire que le ministre ne signe pas souvent son courrier car j'ai attendu cette lettre pendant plus de deux mois et je l'attends toujours, d'ailleurs.

Cette expérience malheureuse contraste quelque peu avec celle vécue par mon collègue François Beaulne, député de la circonscription électorale québécoise de Marguerite-D'Youville, qui a réussi l'exploit d'obtenir, en

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quelques semaines seulement, une réponse que d'aucun qualifieront d'imprécise à ces questions.

En effet, le 13 mai dernier, M. Beaulne faisait parvenir une lettre au ministre du Commerce international lui demandant les fameux avis juridiques. Aussi incroyable que cela puisse paraître, il reçut une réponse datée du 22 juin, dans laquelle le ministre répondait à ses questions, mais d'une façon très sommaire, faut-il le préciser.

Force est de constater que les ministres de l'Agriculture et du Commerce international se montrent peu loquaces et peu transparents, c'est le moins qu'on puisse dire, lorsqu'il s'agit de faire état des données pertinentes sur lesquelles ils appuient les décisions qu'ils prennent au nom du public canadien et québécois.

En vertu du principe du gouvernement responsable, les ministres se doivent de rendre compte de leurs actions à la Chambre. La désinvolture avec laquelle les ministres de l'Agriculture et du Commerce international ont agi à mon égard est donc étonnante et inadmissible. Lorsque des ministres transmettent à l'extérieur de la Chambre des informations qui ont été refusées à un député qui les avait sollicitées en Chambre, il nous faut conclure que ces ministres abusent de leur pouvoir, portent atteinte à la dignité de cette Chambre et bafouent nos institutions et nos valeurs démocratiques.

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international): Monsieur le Président, comme le savent les membres de la Chambre, le Canada et les États-Unis ont engagé des négociations en décembre 1993 pour tenter de régler plusieurs problèmes liés au commerce bilatéral des produits agricoles. Bien que ces questions aient été examinées dans leur ensemble, des négociations ont été tenues au niveau de chaque produit. Il n'y a eu et il n'y aura aucun compromis entre les produits.

Le récent protocole d'entente sur les grains en est la preuve. Le protocole ne traite que de notre commerce céréalier avec les États-Unis et n'a absolument aucun lien avec les questions non encore réglées.

Le protocole d'entente avantage les céréaliculteurs canadiens en leur donnant stabilité et sécurité d'accès à un marché américain où les cours sont élevés. Par le protocole, le Canada a obtenu l'accès garanti au marché américain du blé à un niveau supérieur aux niveaux historiques moyens des exportations canadiennes. De plus, les exportations traditionnelles de blé ne relevant pas de la CCB ne sont pas frappées de restrictions aux États-Unis. Le niveau d'accès prévu dans le protocole d'entente est nettement plus avantageux que l'inévitable solution de rechange, soit une mesure américaine hautement restrictive qui aurait réduit nos exportations à environ la moitié de la quantité prévue dans le protocole.

Le protocole d'entente établit aussi une commission mixte des grains, chargée d'examiner les pratiques américaines et canadiennes de commercialisation des céréales et leurs effets sur le marché céréalier international. La commission fera un examen critique du programme d'encouragement des exportations, un programme américain de subventionnement des exportations qui fausse grandement les échanges.

De plus, le protocole d'entente oblige les États-Unis à retirer la mesure sur le blé et l'orge prise aux termes de l'article XXVIII de l'accord général et leur interdit d'imposer toute autre mesure restrictive sur les céréales non conforme à l'ALENA ou à l'accord général pendant les douze mois d'application du protocole.

Je peux garantir à la Chambre qu'un règlement satisfaisant des problèmes agricoles qui subsistent entre le Canada et les États-Unis reste la priorité absolue du gouvernement. J'aimerais aussi souligner que chaque question sera examinée au mérite et qu'il n'y aura aucun compromis entre les dossiers.

Le commerce bilatéral des produits agricoles et des produits agroalimentaires est évalué à 13,7 milliards de dollars. Le Canada et les États-Unis ont tous deux intérêt à ce qu'il se développe dans les deux sens et avantage ainsi les deux pays.

En ce qui concerne l'allégation du député à propos d'une discussion qui a pris place entre lui et le ministre de l'Agriculture et le ministre des Affaires internationales, je ne suis pas au courant de cela. Le député peut écrire aux deux ministres pour les informer de son intention de soulever la question à la Chambre.

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément au paragraphe 38(5) du Règlement, la motion portant que la Chambre s'ajourne est maintenant réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 14 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 45.)