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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 9 février 1995

AFFAIRES COURANTES

LES FINANCES

DÉCRETS DE NOMINATIONS

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LOI SUR LA RADIODIFFUSION

    Projet de loi C-300. Adoption des motions de présentation et de première lecture 9377

PÉTITIONS

LES DÉLINQUANTS VIOLENTS

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 9377

LE SUICIDE ASSISTÉ

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9377

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9378

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9378

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DE LA PERSONNE

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES JEUNES CONTREVENANTS

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES JEUNES

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LES DROITS DE LA PERSONNE

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 9379

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 9379

LE SUICIDE ASSISTÉ

    M. Breitkreuz (Yellowhead) 9379

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion d'adoption du 51e rapport 9380

AFFAIRES COURANTES

AFFAIRES AUTOCHTONES

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Reprise de l'étude de la motion 9390
    M. Harper (Calgary-Ouest) 9396

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE BUDGET

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

L'IMPÔT SUR LE REVENU

LA SEMAINE DES TROUBLES DE L'ALIMENTATION

LA SEMAINE DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

LE BUDGET

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Leroux (Shefford) 9414

LE VOTE ÉLECTRONIQUE

    M. White (North Vancouver) 9415

L'ENVIRONNEMENT

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

LES RESSOURCES HUMAINES

LE SECTEUR MINIER

LE REVENU FAMILIAL

L'INDUSTRIE DES PÂTES ET PAPIERS

L'INSTALLATION DU GOUVERNEUR GÉNÉRAL

LE PARTI LIBÉRAL

QUESTIONS ORALES

LA DÉFENSE NATIONALE

    M. Gauthier (Roberval) 9417
    M. Gauthier (Roberval) 9417
    M. Gauthier (Roberval) 9417

LA RÉFORME DES PENSIONS

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 9419
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 9419
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 9419

LE BUDGET

    M. Martin (LaSalle-Émard) 9420
    M. Martin (LaSalle-Émard) 9420

LES AFFAIRES INDIENNES

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 9421
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 9421

L'IMMIGRATION

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

LES FORCES CANADIENNES

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9422
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 9422
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 9423
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 9423

LE TRANSPORT AÉRIEN

LES FORCES CANADIENNES

LES PESTICIDES

LA TRANSCANADIENNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    M. Gauthier (Roberval) 9425

QUESTION DE PRIVILÈGE

LES QUESTIONS AU FEUILLETON-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Reprise de l'étude de la motion 9427
    Vote différé sur la motion 9435

LOI SUR L'ORGANISATION DU GOUVERNEMENT (ORGANISMES FÉDÉRAUX)

    Projet de loi C-65. Reprise de l'étude de la motion de deuxième lecture 9435
    Report du vote sur la motion 9436

LOI SUR LE TRIBUNAL DES ANCIENS COMBATTANTS (RÉVISION ET APPEL)

    Projet de loi C-67. Motion de deuxième lecture 9436
    Report du vote sur la motion 9445

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LOI SUR L'INTÉRÊT

    Projet de loi C-273. Motion visant à la deuxième lecture 9446
    M. Leblanc (Longueuil) 9450

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    Suspension de la séance à 18 h 12 9451

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 18 h 17 9451

MOTION D'AJOURNEMENT

LA VISITE DU PRÉSIDENT AMÉRICAIN


9377


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 9 février 1995


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LES FINANCES

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Madame la Présidente, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le Livre blanc intitulé «Renforcer et assainir le secteur des services financiers canadien».

* * *

[Français]

DÉCRETS DE NOMINATIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, il me fait grand plaisir de déposer aujourd'hui en Chambre, dans les deux langues officielles, des décrets annonçant des nominations faites récemment par le gouvernement.

Conformément à l'article 110(1) du Règlement, ces décrets sont réputés avoir été renvoyés aux comités permanents indiqués en annexe.

* * *

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Je suis aussi heureux de déposer, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, la réponse du gouvernement à 12 pétitions.

* * *

(1005)

LOI SUR LA RADIODIFFUSION

M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-300, Loi modifiant la Loi sur la radiodiffusion (politique canadienne de radiodiffusion).

-Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter ce projet de loi proposant la modification de la Loi sur la radiodiffusion.

Au cours des dernières semaines, les Canadiens ont fait savoir clairement qu'ils étaient en total désaccord avec la politique du CRTC autorisant les entreprises de câblodistribution à exiger de leurs clients le paiement d'un abonnement à des canaux, alors qu'ils ne l'avaient ni demandé, ni autorisé. Le CRTC a répondu que cette façon de faire était un mal nécessaire inhérent à la mise en service de nouveaux canaux.

Le projet de loi que je présente aujourd'hui modifiera la section de la Loi sur la radiodiffusion qui renferme la politique canadienne de radiodiffusion afin que la discrétion du CRTC soit limitée relativement à tout mal nécessaire de ce genre, par exemple la facturation pour abonnement par défaut. Les entreprises de câblodistribution auront moins de pouvoir à l'égard de leur clientèle et les Canadiens ont dit clairement quelle était leur position à ce sujet.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

PÉTITIONS

LES DÉLINQUANTS VIOLENTS

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Madame la Présidente, je prends la parole à la Chambre pour la quatrième fois en quatre jours pour présenter la pétition no 4. Ces pétitions sont présentées au nom d'électeurs qui souhaitent empêcher la libération anticipée de Robert Paul Thompson. La date de l'audition de sa demande est fixée au 11 avril 1995.

Les pétitionnaires que je représente veulent que nos rues soient plus sûres pour nos citoyens. Ils s'opposent à la pratique courante qui consiste à libérer les délinquants violents avant qu'ils n'aient purgé intégralement leur peine.

Ils demandent que nos rues soient rendues plus sûres pour les citoyens respectueux des lois et pour les familles des victimes de meurtriers qui ont été reconnus coupables.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Madame la Présidente, j'ai plusieurs pétitions à présenter à la Chambre.

Les signataires de la première pétition demandent au Parlement de faire appliquer rigoureusement les dispositions actuelles du Code criminel du Canada qui interdisent le suicide assisté et de n'apporter à la loi aucune modification qui aurait pour effet d'approuver ou de permettre le suicide assisté ou l'euthanasie active ou passive.


9378

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Madame la Présidente, les signataires de la deuxième pétition affirment que ce n'est qu'une minorité fort bruyante qui invite le Parlement à mettre sur pied un double système de commercialisation du blé et de l'orge pour l'exportation.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de maintenir le monopole de la Commission canadienne du blé pour ce qui est de la commercialisation du blé et de l'orge destinés à l'exportation.

La troisième pétition est semblable à la deuxième. En effet, les pétitionnaires soutiennent que ce n'est qu'un groupe de citoyens peu nombreux, mais fort bruyants qui invitent le Parlement à mettre en place un double système de commercialisation du blé et de l'orge. De plus, ils exhortent le Parlement à maintenir le monopole de la Commission canadienne du blé.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Madame la Présidente, les signataires de la dernière pétition demandent au Parlement d'appuyer des mesures législatives qui puniront sévèrement tous les criminels violents qui utilisent des armes pour commettre un crime, d'appuyer l'introduction, dans le Code criminel, de nouvelles dispositions sur le contrôle des armes à feu qui reconnaissent et protègent le droit des citoyens respectueux des lois de posséder et d'utiliser des armes à feu à des fins récréatives et enfin, d'appuyer une mesure législative qui abrogera ou modifiera les dispositions actuelles sur le contrôle des armes à feu qui n'ont pas amélioré la sécurité publique, qui ne se sont pas révélées rentables ou qui sont si complexes qu'elles en perdent toute efficacité ou deviennent impossibles à appliquer. Cette pétition est signée par un grand nombre de personnes.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui à la Chambre quatre pétitions dûment certifiées au nom des habitants de ma circonscription, Moose Jaw-Lake Centre.

(1010)

Les 70 signataires de la première pétition demandent au Parlement de faire appliquer rigoureusement les dispositions actuelles du Code criminel interdisant le suicide assisté et de n'apporter aucune modification à la loi.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais déposer une pétition exprimant les désirs de 30 personnes qui prient le Parlement de ne pas modifier le Code des droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Madame la Présidente, je dépose une pétition renfermant les préoccupations de 30 personnes qui demandent au Parlement de modifier immédiatement le Code criminel afin d'accorder aux enfants à naître la protection dont jouissent les autres êtres humains.

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Allan Kerpan (Moose Jaw-Lake Centre, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais déposer une pétition contenant les préoccupations de 28 personnes qui demandent au Parlement de continuer d'accorder à la Commission canadienne du blé le monopole de la commercialisation du blé et de l'orge destinés à l'exportation.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, j'ai trois pétitions à présenter ce matin.

La première est signée par plus de 100 habitants de Brownsburg, Arundel et Lachute, au Québec. Ils demandent au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ni la Charte canadienne des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe ou l'homosexualité et, notamment, de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, 110 habitants de la région d'Etobicoke dans le Grand Toronto m'ont demandé de présenter une pétition pour exhorter le Parlement à exécuter rigoureusement les dispositions actuelles du Code criminel du Canada qui interdisent le suicide assisté et à n'apporter aucune modification qui tendrait à approuver ou à autoriser l'aide ou l'encouragement au suicide ou l'euthanasie active ou passive.

LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, enfin, plus de 200 citoyens m'ont demandé de présenter une pétition au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants. Ils prient le Parlement de tenir compte des préoccupations qu'ils ont et, en particulier, de modifier le Code criminel du Canada et la Loi sur les jeunes contrevenants afin de prévoir des sanctions plus sévères dans le cas des personnes coupables de crimes violents.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Madame la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai le devoir et l'honneur de présenter aujourd'hui une pétition que m'a envoyée Val Lozier de Meadow Lake, en Saskatchewan, et qui est signée par des habitants de Meadow Lake, Green Lake, Loon Lake, Makwa, Dorintosh et Rapid View, toutes des localités situées dans ma circonscription, The Battlefords-Meadow Lake.

Les pétitionnaires font remarquer que la majorité des Canadiens croient que les médecins au Canada devraient chercher à sauver des vies et non à y mettre un terme. Ainsi, les pétitionnaires prient le Parlement de veiller à l'application rigoureuse des dispositions actuelles du Code criminel du Canada qui interdisent le suicide assisté et de ne pas modifier la loi de manière à approuver ou à autoriser l'aide ou l'encouragement au suicide ou l'euthanasie active ou passive.


9379

LES JEUNES

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Madame la Présidente, je désire présenter deux pétitions. La première comporte la signature de 830 électeurs de ma circonscription, Okanagan-Similkameen-Merritt.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que les lois et autres mesures adoptées par le gouvernement du Canada, et l'interprétation qui en a été faite par les tribunaux et en vertu de la Charte des droits et libertés, ont réduit les droits et l'autorité des parents sur leurs enfants.

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de rendre aux parents, aux enseignants et aux personnes investies de l'autorité le droit d'exercer un contrôle éclairé sur les actes des enfants et de protéger le droit des personnes investies de l'autorité à l'égard des enfants à employer une force raisonnable pour corriger leur comportement, conformément à l'article 43 du Code criminel du Canada.

Les pétitionnaires demandent également au Parlement de modifier la Loi sur les jeunes contrevenants, la Charte des droits et libertés et les autres lois applicables afin de rendre leur autorité aux représentants de la loi appelés à s'occuper d'enfants ou de mineurs.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Madame la Présidente, la seconde pétition vient grossir les rangs des opposants dans la circonscription d'Okanagan-Similkameen-Merritt à toute loi supplémentaire concernant le contrôle des armes à feu. Jusqu'à maintenant, quelque 1 356 pétitionnaires ont demandé au Parlement de s'opposer à toute nouvelle loi sur l'acquisition et la possession d'armes à feu et d'imposer des directives strictes et une détermination de peine obligatoire à l'égard de l'utilisation ou de la possession d'une arme à feu pendant la perpétration d'un acte criminel violent.

Les habitants d'Okanaga-Similkameen-Merritt estiment que le problème réside dans la criminalité et non pas dans les armes à feu, et je suis d'accord.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je crois que le moment est venu de rappeler aux députés que, lorsqu'ils présentent des pétitions, tout ce qu'ils peuvent ajouter à la pétition même relève du débat. Je demanderais donc aux députés de faire des interventions brèves. Le simple fait de dire que vous êtes d'accord avec les pétitionnaires tient du débat.

(1015)

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Madame la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition des habitants de ma circonscription, Athabasca.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de n'apporter à la Loi canadienne sur les droits de la personne ou à la Charte canadienne des droits et libertés aucune modification pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe ou l'homosexualité et de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter une pétition conformément à l'article 36 du Règlement. Les pétitionnaires demandent au Parlement de modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne de manière à protéger certaines personnes contre la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Madame la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de déposer trois pétitions dûment certifiées qui m'ont été présentées par mes électeurs.

La première est signée par 61 personnes venant surtout des districts d'Assiniboia et de Rockglen. Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas adopter d'autres mesures législatives, règlements ou décrets sur les armes à feu.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Madame la Présidente, les deux autres pétitions sont identiques. L'une compte 53 signatures d'habitants des districts de Swift Current et Maple Creek qui demandent au Parlement de veiller à ce que les dispositions du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient appliquées rigoureusement et de ne faire aucun changement à la loi qui approuverait ou permettrait l'aide ou l'encouragement au suicide ou encore l'euthanasie active ou passive.

La troisième pétition est identique et est signée par 32 personnes de la région de Coronach, qui demandent aussi au Parlement de ne pas approuver le suicide assisté.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Madame la Présidente, conformément aux dispositions de l'article 36 du Règlement, je prends la parole pour présenter plusieurs pétitions signées par des électeurs de ma circonscription de Yellowhead.

La première pétition demande au Parlement de ne pas modifier le Code des droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière pouvant donner l'impression que la société approuve les relations sexuelles entre personnes de même sexe.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Madame la Présidente, la deuxième pétition prie le Parlement d'accorder aux enfants à naître la même protection qu'aux autres êtres humains.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Madame la Présidente, la troisième pétition demande au Parlement de n'apporter aucune modification à la loi qui aurait pour effet de sanctionner ou de permettre l'aide ou l'encouragement au suicide ou à l'euthanasie, qu'elle soit passive ou active.

9380

C'est avec plaisir que je présente ces pétitions.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Toutes les questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


9380

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

L'hon. David Anderson (au nom du leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada) propose:

Que, conformément à l'alinéa 68 (4)a) du Règlement, le 51e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre le vendredi 25 novembre 1994, soit adopté.
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui pour participer à ce qui est véritablement un débat historique, non pas parce que la question de la délimitation des circonscriptions est nouvelle ou parce qu'il y a quelque chose de révolutionnaire dans le projet de loi soumis à la Chambre, ou qui lui sera soumis à l'issue du débat d'aujourd'hui, mais bien parce que c'est la première fois que nous utilisons une nouvelle procédure, adoptée l'an dernier, qui autorise les comités à préparer et à soumettre des projets de loi.

Ce 51e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre contient un avant-projet de loi qui modifiera la Loi sur la révision des circonscriptions électorales, ou plutôt, qui remplacera cette loi. Le projet a été rédigé par les membres du comité, qui ont travaillé là-dessus pendant pas mal de temps.

(1020)

En tant que président de ce comité, je suis particulièrement heureux de pouvoir prendre la parole au nom du leader du gouvernement à la Chambre pour proposer que ce rapport soit adopté.

L'adoption de cette motion reviendra à ordonner au gouvernement de présenter un projet de loi basé sur le rapport du comité. Je suis confiant que la Chambre terminera l'étude de cette motion aujourd'hui même, afin que le rapport soit adopté. Le gouvernement pourra ensuite nous présenter très rapidement un projet de loi définitif, avec peut-être quelques modifications mineures au niveau de la formulation. Ce projet de loi pourra alors être renvoyé au comité qui en fera une étude détaillée et présentera son rapport à la Chambre.

La nouvelle méthode a pour but de renforcer le rôle que jouent les députés en participant à la prise de décisions d'orientation en matière législative, et le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre a eu l'occasion d'entendre nombre de témoins exposer leurs vues, vues dont on a tenu compte dans le projet de loi incorporé dans le rapport qui a été présenté à la Chambre.

À mon avis, les membres du comité ont travaillé dans un bel esprit de collaboration et sans parti pris pour élaborer ce qui constitue, à notre connaissance, le meilleur ensemble de règles régissant la délimitation des circonscriptions électorales au Canada.

Je tiens à remercier les membres du Bureau des conseillers législatifs de la Chambre des communes, soit Mme Diane McMurray et M. Louis-Philippe Côté, qui ont collaboré à l'élaboration du projet de loi.

[Français]

Je voudrais remercier le directeur général des élections du Canada, M. Jean-Pierre Kingsley et ses employés MM. Jacques Girard et Carol Lesage qui ont aidé le comité dans ses délibérations.

Le comité a aussi reçu l'aide de plusieurs témoins de partout au Canada qui sont venus à Ottawa, en juillet, quand nous avons passé trois jours à considérer les propos et les idées concernant la redistribution. Je voudrais remercier ces témoins, leur aide a été importante.

Je voudrais remercier en particulier les députés du comité qui ont travaillé si fort en juillet et depuis en lisant les ébauches du rapport et en faisant des suggestions pour améliorer ces ébauches. Je remercie surtout les honorables députés de Bellechasse, de Calgary-Ouest et de Kindersley-Lloydminster qui ont essayé de travailler avec les membres du gouvernement pour trouver la méthode la plus efficace de changer cette loi.

L'honorable député d'Ontario, de ce côté, le secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics, l'honorable député de Glengarry-Prescott-Russell et l'honorable député de Scarborough-Rouge River ont aussi beaucoup contribué à ce comité.

[Traduction]

Nos réunions ont été très fructueuses et nous avons fait du bon travail ensemble, ce dont témoigne d'ailleurs le rapport, malgré la dissidence du Parti réformiste sur deux points importants, points sur lesquels j'aimerais revenir plus tard.


9381

Qu'est-ce qui nous a amenés à faire tout cela? Pourquoi, nous demande-t-on, avoir entrepris de remanier la loi? Parce que la vieille loi pose un certain nombre de problèmes que nous avons voulu corriger.

Premièrement, les cartes dressées l'an dernier, peu après la convocation des Chambres, l'ont été sans préavis et sans que les députés aient l'occasion de faire des recommandations quant à leur contenu. Les députés, comme le public, se sont trouvés devant un fait accompli. On était au tout début d'une nouvelle législature, au lendemain d'élections qui avaient notamment porté sur les limites des circonscriptions. Le comité s'est penché sur ce problème. Dorénavant, on va procéder à des consultations avant de dresser une carte.

Deuxièmement, les commissions n'étaient pas tenues d'expliquer leurs choix, quoique certaines le faisaient quand même. Il était donc difficile, voire impossible, pour le public comme pour les députés de savoir ce qui motivait les changements proposés et de faire des suggestions constructives pour améliorer le découpage. Le comité a clairement laissé entendre dans son rapport que les commissions doivent exposer les motifs de leurs décisions.

(1025)

Troisièmement, les critères servant à tracer les limites des circonscriptions électorales étaient d'ordre très général. Les commissions pouvaient donc procéder comme elles l'entendaient, et les méthodes pouvaient varier d'une province à l'autre.

En notre qualité de parlementaires et de citoyens, nous pouvions difficilement critiquer les propositions du fait que nous n'avions pratiquement aucun critère sur lequel nous fonder. L'avant-projet de loi définit clairement des critères tout en maintenant le principe général d'une représentation efficace.

Quatrièmement, de nombreux députés se sont plaints que les commissions avaient apporté des modifications parfaitement inutiles aux districts électoraux simplement pour procéder à une redistribution. Le comité s'est aussi penché là-dessus.

Cinquièmement, bien des députés ont dit s'inquiéter de la taille de la Chambre des communes et de sa croissance continue. Le comité a étudié la question, mais n'a recommandé aucune modification à la loi actuelle.

Enfin, la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis, qui a présenté son rapport il y a quelques années, avait fait des recommandations concernant la redistribution, mais le Parlement précédent ne les a jamais étudiées.

En fait, la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales n'a pas fait l'objet d'un examen approfondi depuis 30 ans. Le comité a donc profité de l'occasion pour examiner chaque partie de la loi, étudier les recommandations de la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis, et formuler une série de recommandations à la Chambre.

Je voudrais d'abord m'arrêter sur la question du plafonnement ou de la réduction du nombre de sièges à la Chambre des communes. Les députés de tous les partis ont abordé cette question en disant espérer ce plafonnement ou cette réduction. Après avoir examiné attentivement la question, entendu des témoins et étudié le rapport de la commission auquel je viens de faire allusion, la majorité des membres ont convenu qu'il était tout simplement impossible, pour le moment, de procéder à un plafonnement ou une réduction.

Selon la formule actuelle, le nombre des députés augmentera légèrement après les prochaines élections, passant de 295 à 301. La difficulté de plafonner ou de réduire ce nombre découle de problèmes constitutionnels, en particulier de la garantie qu'aucune province n'ait moins de sièges à la Chambre qu'elle n'en a au Sénat.

Le nombre de sénateurs n'est ni égal ni lié à la taille de la population. Ce nombre n'a rien à voir avec la population, contrairement à la représentation à la Chambre des communes. Le plafonnement du nombre de députés perpétuerait l'iniquité de la représentation, car les provinces qui ont déjà autant de sièges à la Chambre des communes qu'au Sénat ne pourraient aller en deçà de ce nombre. Par ailleurs, les provinces où il y a croissance démographique ne pourraient obtenir les sièges supplémentaires auxquels elles auraient autrement droit.

Je sais que les membres du Parti réformiste récusent l'opinion du comité relativement à cette question. Ceux-ci estiment que le nombre de députés à la Chambre pourrait être ramené à 265, ce qui représente une réduction importante par rapport à l'effectif actuel de 295. Selon les réformistes, cette diminution n'affecterait pas de façon sensible le caractère égal des votes au pays. Ce point de vue n'est pas partagé par la majorité des membres du comité, qui estiment en outre que ce n'est pas ce que les Canadiens souhaitent.

En Ontario, la plupart des députés représenteront des circonscriptions comptant environ 100 000 personnes. C'est un nombre élevé qui suppose beaucoup de travail et de contacts avec les électeurs. Le fait d'élargir sensiblement les circonscriptions ne servirait pas les intérêts des Canadiens.

Les circonscriptions de certaines provinces deviendraient beaucoup plus importantes que celles d'autres provinces. Sans vouloir donner d'exemples précis, il y a au Canada des circonscriptions qui comptent moins de 20 000 personnes, ce qui est très peu comparé à une circonscription de 100 000 résidents, bien qu'il existe souvent des différences très importantes du point de vue de la superficie.

Il est évident que la question de la représentation dans un pays aussi vaste et diversifié que le Canada soulève des problèmes majeurs. Le comité s'est penché sur ces problèmes mais, compte tenu qu'il ne s'agissait que d'une augmentation de six députés, il a conclu que ce n'était pas le moment d'apporter des changements dans un sens ou dans l'autre.


9382

De nombreux Canadiens se disent en faveur d'une réduction de l'effectif à la Chambre des communes. Toutefois, si l'on élargissait les circonscriptions, il deviendrait plus difficile pour les gens de communiquer avec leur député et lui faire part de leurs préoccupations, et celui-ci aurait moins de temps pour les rencontrer. Je pense que les Canadiens constateraient que la représentation actuelle, ou une autre très semblable, donne les meilleurs résultats.

En 1986, des changements ont été apportés afin de limiter la croissance de l'effectif à la Chambre des communes. Ces changements étaient guidés à la fois par la volonté d'assurer une représentation en fonction de la population et par le désir de réduire le nombre de députés à la Chambre. Si la formule utilisée avant 1986 avait été maintenue, le nombre de sièges aurait atteint près de 400. Il n'a atteint cependant que 301, ce qui représente une augmentation raisonnable et essentielle pour que les localités canadiennes en pleine expansion soient bien représentées.

(1030)

Toutefois, étant donné la gravité du problème et l'intérêt qu'il suscite, le comité recommande au Parlement de réexaminer la question du nombre de sièges à la Chambre des communes afin de pouvoir surmonter les obstacles au plafonnement d'ici le recensement de 2001. Nous disposerons des données du recensement quinquennal de 1996. Nous serons en mesure de constater à combien se chiffre l'accroissement de la population et dans quelles régions il y a eu des mouvements de population.

Si les députés de la prochaine législature pensent qu'ils peuvent apporter des changements, maintenir le nombre de sièges à 301 ou encore le réduire, ils seront libres de prendre cette décision en se fondant sur les analyses effectuées à partir des données du recensement de 1996.

[Français]

Le deuxième problème est la notion de la méthode de sélection des membres des commissions et il y avait, de l'avis du comité, un problème avec la méthode de sélection. Nous avons entendu de nombreux témoins à ce sujet et beaucoup ont indiqué que nous avons un bon système, mais qu'il y avait toujours des considérations, politiques et autres, dans la méthode de sélection.

Le comité a décidé que le processus pourrait être beaucoup plus ouvert et il a recommandé plusieurs changements. Tout d'abord, les demandes pour des postes feront l'objet d'un avis publié. Le Président de la Chambre sera obligé de consulter plusieurs personnes avant de procéder à une nomination, qu'il doit déposer ici, en Chambre.

Si les députés de cette Chambre ne sont pas en accord avec ce que le Président a décidé au sujet de ces nominations, et si 20 députés ont signé un avis de motion, un député peut présenter une motion demandant un vote en Chambre sur une des nominations. Ce vote sera important, parce que si la majorité considère que la nomination n'est pas acceptable, le Président doit soumettre un autre nom.

[Traduction]

L'un des problèmes qui découle du système de révision actuel est lié au fait que les circonscriptions sont remaniées tous les dix ans, après chaque recensement décennal. Le dernier recensement du genre remonte à 1991, le prochain aura lieu en 2001. Il y a donc révision des limites des circonscriptions électorales tous les dix ans. L'accroissement et les mouvements de la population sont parfois très importants, ce qui provoque de grandes perturbations au sein des circonscriptions électorales, dont la taille était à l'origine raisonnable, mais est devenue au fil des ans trop grande ou trop petite.

Le comité était d'avis qu'une révision plus fréquente contribuerait à régler une grande partie du problème. Par conséquent, il a recommandé que, après chaque recensement quinquennal, c'est-à-dire le recensement plus court et plus simple effectué tous les cinq ans entre deux recensements décennaux, les sièges soient répartis à nouveau au sein des provinces. Il n'y aurait pas une nouvelle répartition des sièges entre les provinces comme c'est le cas après un recensement décennal, mais il y aurait, dans des provinces, une nouvelle délimitation des circonscriptions électorales là où le nombre le justifierait. Nous avons fixé un nombre minimum.

Il faudra qu'une circonscription excède considérablement le quotient provincial pour qu'un tel remaniement quinquennal ait lieu. Ce faisant, nous sommes confiants d'éviter des remaniements massifs tous les dix ans. Cela se ferait dans certaines provinces, probablement un petit nombre d'entre elles, aux cinq ans. Évidemment, tout dépendrait des mouvements de population à l'intérieur des provinces.

Le comité propose que les remaniements n'aient lieu, en principe, que lorsqu'ils sont nécessaires pour assurer une représentation efficace et égale.

Ensuite, il y a la question de l'opinion publique et des commissions. L'un des principaux problèmes que pose la loi actuelle a trait au processus de consultation publique. Notre avant-projet de loi prévoit un certain nombre d'améliorations visant à permettre une plus grande participation de la population au travail des commissions de délimitation des circonscriptions électorales. Le premier changement prévoit qu'il faudra publier, au début du processus, un avis comportant l'information suivante: premièrement, le nombre de personnes par circonscription électorale existante; deuxièmement, l'écart percentuel de chaque circonscription par rapport au quotient provincial; et, troisièmement, une déclaration sur ce que la commission entend faire.

(1035)

Chaque commission doit donc publier son propre énoncé de politique annonçant les principes qu'elle entend suivre dans son travail de remaniement.

[Français]

Le deuxième changement consiste à demander aux commissions de produire trois cartes de leur travail, avec justifications des cartes électorales qu'ils ont sélectionnées. Cela permettra au public d'être informé des options disponibles. Le public peut participer aux audiences des commissions et présenter des suggestions d'autres cartes. Il peut indiquer sa préférence pour une carte à une autre sans avoir la difficulté de préparer sa propre carte. En ce moment, les membres du public et les députés éprouvent des difficultés parce qu'ils ne bénéficient pas des


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ressources nécessaires pour pouvoir préparer d'autres propositions de cartes à la commission.

[Traduction]

Le troisième changement concerne les audiences publiques. Le comité était d'avis qu'il faudrait tenir une autre série d'audiences publiques si la commission modifiait de façon importante la carte électorale après avoir consulté la population.

Enfin, on propose de modifier le processus actuel dans lequel le Parlement examine les avant-projets des commissions.

Comme ne l'ignorent pas les députés, après le deuxième avant-projet, la question peut être renvoyée à un comité parlementaire, qui peut alors présenter des recommandations aux commissions. Une commission est libre d'accepter ou de rejeter ces recommandations, mais le processus n'est accessible qu'aux députés qui présentent des instances à un comité parlementaire.

Cette façon spéciale de procéder serait supprimée dans la nouvelle loi. Tous les travaux des commissions seront publics et les députés n'auront aucune possibilité particulière de plus que maintenant de faire valoir leur point de vue. Je crois que cela rend le processus plus ouvert. Nous croyons que cela permettra à la population de participer au processus et de constater qu'il n'y a pas de tractations discrètes de la part des députés, que l'on croyait peut-être dans une situation privilégiée face aux commissions.

Il est clair que l'opinion des députés sur la délimitation des circonscriptions électorales est importante. Il y a peu de Canadiens qui sont plus intéressés par les limites des circonscriptions électorales que les députés, mais la participation de ces derniers aux travaux des commissions doit se faire publiquement, au vu et au su de tous. Nous croyons que le projet de loi instaurera la transparence voulue.

L'avant-projet de loi prévoit quelques modifications aux dispositions régissant actuellement la façon dont les commissions prennent leurs décisions sur la délimitation des circonscriptions électorales. Nous avons opté pour le principe du plus petit nombre de changements possible. Beaucoup de députés ont reproché aux commissions de recommander des changements tout simplement pour changer plutôt que parce qu'ils étaient nécessaires.

Le député de Bonavista-Trinity-Conception a présenté un mémoire à la commission de Terre-Neuve, et je l'en remercie. Dans cette province, la population a très peu varié, mais les limites de plusieurs circonscriptions électorales ont été modifiées sans que cela soit vraiment nécessaire pour des motifs démographiques. Le député alléguait dans son mémoire que la commission n'aurait dû modifier aucune circonscription.

Nous nous sommes penchés sur la situation. Ainsi, il n'y aura pas de commission de formée dans une province où la population n'a pas beaucoup changé, où le nombre de circonscriptions n'a ni augmenté ni diminué et où il n'y a pas eu de variations appréciables par rapport au quotient provincial.

Beaucoup de personnes se sont dites préoccupées par la façon vague dont l'expression communauté d'intérêts est définie dans la loi actuelle. Les commissions ont à toutes fins utiles carte blanche dans l'interprétation de la loi. Par conséquent, nous avons modifié la définition de l'expression pour en limiter l'extension et pour qu'elle permette mieux d'évaluer le travail des commissions.

Le comité a également entendu des députés de centres urbains alléguer que les commissions ne tenaient pas compte de la forte croissance, en cours ou imminente, de leur circonscription. Cela est souvent mesurable. Les plans de nouveaux lotissements sont enregistrés. Lorsque les travaux de construction sont prêts à commencer, il devient évident, particulièrement dans les grands centres urbains du Canada, que la population d'une circonscription augmentera de 10 000 ou 15 000 dans un an ou deux.

Les commissions pourront maintenant tenir compte de la croissance future dans leurs délibérations sur la détermination des limites des circonscriptions électorales et apporter les modifications nécessaires.

(1040)

Le projet de loi proposé retirerait également aux commissions la possibilité d'aller au-delà de l'écart permis de 25 p. 100 entre la population de la circonscription électorale et le quotient provincial. La loi actuelle permet à une commission d'établir les limites d'une circonscription électorale de façon à ce que la population de la circonscription soit supérieure ou inférieure de plus de 25 p. 100 au quotient provincial. Par exemple, si le quotient provincial est de 100 000 personnes par circonscription, la loi actuelle permettrait qu'une circonscription compte moins de 75 000 personnes ou encore qu'elle en compte plus de 125 000.

Nous éliminerons cette disposition de la loi et exigerons que les circonscriptions où l'écart par rapport au quotient peut excéder le pourcentage fixé soient précisées dans une annexe à la loi. Autrement dit, c'est la Chambre qui déterminera dans quelles circonscriptions l'écart pourra aller au-delà des paramètres établis dans la loi. Ces circonscriptions seront nommées dans une annexe, et les commissions ne pourront pas toucher aux limites de ces circonscriptions.

Le comité a jugé que c'était là une façon juste et équitable de régler cette question au lieu de laisser une trop grande discrétion aux commissions.

Certaines personnes ont exprimé l'opinion selon laquelle l'écart de 25 p. 100 est trop grand. Les partis représentés au sein du comité n'étaient pas tous d'accord sur ce point. La Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis et certains des témoins que le comité a entendus ont proposé qu'on réduise l'écart à 15 p. 100. Le Parti réformiste a également manifesté le désir qu'on limite l'écart à 15 p. 100.

Cette suggestion a beaucoup de mérite du point de vue de l'équité et de la justice dans le système électoral. Je concède que c'est juste et je respecte les députés qui sont d'avis que c'est la voie à suivre, car ils ont des arguments solides en leur faveur. Néanmoins, pour de grandes parties du Canada rural en particulier, un changement visant à réduire le degré d'écart de 25 à 15 p.


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100 donnerait lieu à un déplacement considérable de sièges des zones rurales aux zones urbaines de notre pays.

Les députés de la campagne font valoir avec beaucoup de force qu'il est beaucoup plus difficile de représenter une grande circonscription géographique composée de nombreuses localités et exigeant de longs déplacements d'un bout à l'autre du territoire que ce ne l'est de représenter quelques îlots d'immeubles au coeur de certaines de nos grandes villes. Les députés de la ville contestent parfois ce point de vue.

Je ne voudrais pas me ranger de l'avis de l'un ou l'autre groupe. Je représente une circonscription en grande partie urbaine, mais qui compte un modeste élément rural surtout dans le secteur des îles.

M. Hermanson: Vous abstenir de prendre position ne vous rend pas perplexe?

M. Milliken: Absolument pas perplexe, pour calmer l'inquiétude du député de Kindersley-Lloydminster. Je pense que représenter une circonscription rurale comporte des difficultés, mais représenter une circonscription urbaine présente également des défis dont le député de Kindersley-Lloydminster ne se rend peut-être pas compte. Je crois que sa circonscription est beaucoup plus rurale que bien d'autres mais peut-être pas toutes.

Je sais cependant qu'il défendra l'autre point de vue. Je tiens à faire remarquer qu'il défend sa position à partir d'une base solide car, en Saskatchewan, les commissions n'ont pas tenu compte du degré d'écart de 25 p. 100 et ont plutôt respecté un degré d'écart d'environ 5 p. 100. Un degré de 15 p. 100 ne ferait absolument aucune différence dans sa province.

Je félicite la commission de la Saskatchewan d'avoir dessiné ainsi les limites des circonscriptions. Je me rappelle avoir entendu beaucoup de plaintes au cours de la dernière législature à propos de la délimitation des circonscriptions. Ces plaintes se sont maintenant dissipées, car nous avons un nouveau groupe de députés de la Saskatchewan. Nous nous sommes débarrassés des geignards et nous avons un nouveau groupe de députés qui se plaignent de choses différentes. Il est vrai que certains siègent de ce côté-ci, mais ils ne se plaignent aucunement. Ils sont tout bonnement enchantés de ce projet de loi, et ils vont l'appuyer. J'espère que, en temps et lieu, le député de Kindersley-Lloydminster va discuter avec eux.

Nous nous sommes entendus sur 25 p. 100. Ce pourcentage figure dans la loi depuis quelque temps. Selon moi, c'est un critère raisonnable que nous pouvons appliquer. Pour éviter des difficultés qui seraient profondément ressenties par les députés ruraux, par les populations rurales de l'Ontario et du Québec, notamment, il vaut mieux pour l'instant ne proposer aucun changement à cet égard. Le comité a maintenu le chiffre de 25 p. 100, et c'est ce qu'il recommande à la Chambre.

(1045)

Le comité a apporté un certain nombre d'autres modifications qui rendront le système plus efficace, en particulier au sujet de la suspension du système lorsque des élections sont déclenchées.

Les députés réformistes, dans leur rapport minoritaire, soutiennent que les modifications que le comité propose à la loi ne justifient pas la suspension du processus. La suspension est déjà chose faite, et cette décision sera entérinée lorsque le projet de loi aura été adopté, car de nouvelles commissions seront nommées en vertu de cette loi. Elles rendront leurs propositions publiques de la manière prévue par la loi et elles proposeront trois cartes au public au lieu d'une.

Je ne suis pas d'accord sur la position des réformistes. Les changements que nous avons apportés sont importants et précieux. Ils constituent une amélioration radicale par rapport au système électoral actuel pour les motifs que j'ai exposés dans mon intervention. Je suis donc farouchement opposé à l'attitude qui me paraît plutôt négative exprimée dans le rapport minoritaire du Parti réformiste.

J'espère que, lorsque les députés auront lu intégralement le rapport, comme ils l'ont déjà fait et le feront encore, lorsqu'ils auront entendu les observations très raisonnables que je formule aujourd'hui pour les inciter à appuyer cette initiative, j'espère, dis-je, que le député de Calgary-Ouest reviendra sur son hérésie et soutiendra cette excellente proposition du comité.

J'ai bon espoir que nous pourrons achever l'étude de ce projet de loi rapidement, afin qu'il soit adopté avant le 22 juin, date où l'ancien système doit recommencer à s'appliquer si nous n'adoptons pas une nouvelle loi. À mon sens, cette dernière est une bonne affaire pour les électeurs. Elle représente un progrès appréciable dans le processus de remaniement de la carte électorale. J'exhorte tous les députés à l'appuyer.

[Français]

M. François Langlois (Bellechasse, BQ): Madame la Présidente, je ne prendrai pas le même temps que le député de Kingston et les Îles puisqu'il a fait un résumé, somme toute, fort objectif des travaux qui se sont déroulés devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

Hormis la dernière partie de son exposé qui a été plus un échange avec le Parti réformiste qu'une adresse directe du rapport soumis, le député de Kingston et les Îles a défini la situation et les projets de modification de façon fort juste.

Permettez-moi de rappeler que l'opposition officielle a participé pleinement à l'élaboration du projet qui sera soumis éventuellement à la Chambre, suite à l'adoption du rapport, de façon à ce que nous ayons la meilleure loi possible. Nous avons démontré le sérieux du travail parlementaire qui doit être accompli par tous les députés de cette Chambre, même si la finalité de notre formation politique est de faire en sorte que cette loi ne s'applique jamais au Québec, que nous ne soyons plus soumis à cette loi


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lors de la prochaine élection fédérale. Pourtant, nous avons participé, nous avons pris au sérieux ce travail.

J'aurai l'occasion dans quelques instants de revenir sur un élément ou deux que le député de Kingston et les Îles n'a pas mentionné dans son exposé, et cela permettra de compléter le portrait.

Bien sûr, je désire moi aussi remercier le député de Kingston et les Îles, le député de Kindersley-Lloydminster, celui de Calgary-Ouest également, qui d'une façon généralement non partisane ont permis de faire un travail qui, sans être impeccable, a produit des résultats quand même excellents.

Je remercie aussi les gens qui nous ont aidé, particulièrement ceux du bureau du directeur général d'Élections Canada, M. Jean-Pierre Kingsley lui-même, MM. Jacques Girard et Carol Lesage qui ont été d'une ressource incroyable et assidus lorsque nous avons demandé leur assistance et leur coopération. Je veux également remercier les collègues qui, en juin et juillet, en plein été, sont venus à Ottawa faire des représentations devant le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

Là où j'ai plus de difficulté avec le projet de loi qui sera éventuellement soumis, l'ébauche rapportée par le comité, c'est lorsqu'on a refusé de façon systématique de parler d'une représentation minimale pour le Québec. On s'est heurté à une muraille de Chine quand on a voulu aborder cette question de 25 p. 100 de sièges garantis que le sénateur Rivest soulevait lors de sa comparution, au mois de juin, cette idée voulant que le Québec ne puisse pas avoir une représentation de moins de 25 p. 100 à la Chambre des communes parce qu'il perdrait à ce moment son pouvoir d'influence sur les décisions qui se prennent.

(1050)

Le sénateur Rivest, est-il besoin de le rappeler, n'est pas reconnu comme étant un souverainiste, du moins pas de la première heure. Son point de vue a été largement repris par mon collègue, l'honorable député de Mégantic-Compton-Stanstead, lorsqu'il est venu comparaître, en juillet, devant le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, à l'effet qu'il fallait une garantie constitutionnelle, alors que le Québec a actuellement 25 p. 100 des sièges, une garantie constitutionnelle à l'effet que le Québec devait continuer d'avoir cette garantie de 25 p. 100 des sièges, peu importe les variations qui pourraient survenir dans la population québécoise.

Bien sûr, nous voulons régler la question de la représentation du Québec dans cette Chambre d'une façon toute autre. Mais, dans l'éventualité où le Québec devrait continuer à être représenté dans cette Chambre, cette masse critique doit lui être reconnue, et c'est en ce sens qu'elle doit être reconnue de nos collègues de toute la Chambre, mais aussi de toute la population du Québec en général. Alors que l'on discute de l'avenir même du Québec devant les commissions sur l'avenir du Québec, ces jours-ci, il n'a pas été possible de convaincre les collègues de souscrire à une proposition qui aurait garanti 25 p. 100 des sièges au Québec.

On comprend mieux la situation dans laquelle nous sommes, c'est-à-dire que nous nous retrouvons à un moment où nous avons un choix à faire au Québec, entre notre accession à la souveraineté, de maîtriser nos lois, de toutes les faires, de percevoir nos impôts et de signer nos traités et de devenir un membre comme les autres de la fédération canadienne. Ce sera le véritable test qui se posera, lors de la tenue du référendum prochain au Québec. Et les Québécois et les Québécoises doivent savoir sous quel régime ils seront, advenant un vote négatif, lors du référendum au Québec. On le voit déjà, une demande minimale comme celle-là n'a pas été retenue. Une représentation minimale du Québec en cette Chambre n'est pas reconnue. Cela méritait donc d'être souligné à ce stade-ci.

Un autre point dans le rapport qui a été présenté par le député de Kingston et les Îles est celui qui touche les circonscriptions dites spéciales. Sous l'empire de la législation actuelle, les commissions provinciales peuvent tenir compte de circonstances spéciales pour permettre qu'une circonscription voie sa population varier plus grandement ou plus considérablement, par rapport au quotient provincial. Ainsi, actuellement, si on prend l'exemple type d'une circonscription qui compterait 100 000 électeurs, avec le 25 p. 100 de déviation du quotient, ça permet d'aller de 75 000 électeurs à 125 000. Mais, la loi actuelle non modifiée permet à une commission provinciale de tenir compte de circonstances spéciales, comme dans le cas, par exemple, de la circonscription du Labrador, qui dévie du quotient provincial; comme dans le cas des Îles de la Madeleine qui pourraient, cela a été mentionné à plusieurs reprises devant le comité, dévier du quotient provincial.

Cela ne sera plus possible à l'avenir, puisqu'il y a une disposition qui prévoit que les cas spéciaux devront figurer à l'annexe du projet de loi. Pour des raisons qui peuvent être discutables, le comité a choisi d'adopter une annexe en blanc, c'est-à-dire qu'il n'y a pas eu de débat, au comité, sur les circonscriptions qui figureraient à l'annexe. C'est une procédure qui peut être valable, nous allons le voir à l'exercice.

Mais, l'exercice auquel le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre va se livrer doit être, à mon avis, un exercice très large, non limité aux seuls parlementaires. Que le député du Labrador veuille faire des représentations, par exemple, par rapport à sa circonscription, qu'elle soit incluse à l'annexe, que le député de Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine veuille en faire pour que les Îles de la Madeleine retrouvent enfin le statut qu'elles avaient avant 1968 et constituent une circonscription indépendante, fort bien.

(1055)

Mais à mon avis, la procédure suivie par le comité devrait s'élargir à la communauté et permettre l'intervention de personnes du milieu et d'autres milieux. Lorsqu'il semble aller de soi que la circonscription de Labrador et des Îles-de-la-Madeleine devraient avoir droit à leur député, même si leur population est en deçà des normes établies par la loi, il se peut bien qu'ailleurs au Canada, pour des circonstances tout à fait spéciales, des personnes puissent raisonnablement soumettre que leur circonscription devrait être incluse à l'annexe. Il faudrait ouvrir le processus de consultation pour que l'annexe reflète vraiment ce


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que la population désire et que les membres de cette Chambre comprennent les désirs de la population.

S'il devait s'avérer-et c'est là qu'il faudrait trouver le mécanisme approprié-qu'il n'est pas possible de fonctionner avec des auditions ouvertes permettant à tous et à toutes de s'exprimer de la façon la plus large possible, je soumets qu'il faudrait en revenir à la procédure actuelle qui permet aux commissions provinciales de tenir compte des circonstances spéciales. Et dans des cas comme le Labrador, les Îles-de-la-Madeleine, possiblement Manicouagan et la péninsule gaspésienne, permettre une déviation qui irait au-delà des 25 p. 100 qui sont actuellement proposés et qui sont demeurés le critère généralement admis depuis que les cartes électorales ne sont plus dressées par cette Chambre, soit depuis 1964, alors que les commissions indépendantes étaient créées.

De toute façon, nous aurons l'occasion de rediscuter de cette question devant le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, et de la façon d'y parvenir le mieux possible.

On a mentionné tout à l'heure que la population serait consultée davantage. Eh bien, oui, et c'est normal parce que la carte électorale est faite d'abord et avant tout pour la population et non pas pour les élus. Tout le monde a été d'accord avec ce principe. J'y souscris également. Tout comme les lois électorales sont faites pour les électeurs et les électrices et non pas pour les élus. C'est nous qui devons nous soumettre à ces critères.

La méthode de désignation des membres des commissions provinciales a été également grandement améliorée. Alors qu'il s'agissait d'un processus en vase clos, désormais il y aura un processus beaucoup plus ouvert où le Président de la Chambre pourra procéder à des nominations, conjointement avec les juges en chef des provinces. Il pourra même y avoir un débat parlementaire si un nombre minimum de 20 membres de cette Chambre le requiert. L'ouverture du processus nous apparaît également excellente.

Au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, on a discuté également, pendant de longs mois, de la question de fixer un nombre limite ou de réduire le nombre de députés en cette Chambre. Ce sont particulièrement nos collègues du Parti réformiste qui ont amené cette proposition.

Fondamentalement, nous sommes d'accord avec la proposition faite à l'effet qu'il faut réduire le nombre de députés en cette Chambre. Cependant, nous ne le voyons pas de la même façon. Quant à nous, du Bloc québécois, nous voulons bien sûr réduire le nombre de députés en cette Chambre de 295 à 220, tout simplement en soustrayant les 75 députés du Québec qui, après le référendum, devront se retirer de cette Chambre.

Des voix: Bravo!

M. Langlois: On peut le visualiser ici, ceci va physiquement libérer une portion de sièges qui va représenter à peu près la moitié de ceux réservés à l'opposition, toutes oppositions confondues.

Il n'est pas besoin de penser à refaire l'architecture de la Chambre, de défoncer des murs, ou de reculer encore tout ce qu'on voit à ma gauche ou en face de vous, madame la Présidente. L'après-référendum québécois sera très visible dans cette Chambre puisque la moitié de notre côté de la Chambre sera libérée pour faire place à de plus grands pupitres pour les autres, de la façon que l'on voudra. Le droit à l'autodétermination s'applique aussi au Canada. Nos amis du Canada pourront également restructurer cette Chambre comme ils le voudront.

(1100)

Les recensements quinquennaux vont apporter, bien sûr, des données qui permettront d'agir beaucoup plus rapidement pour des corrections ponctuelles à la carte électorale et éviter d'avoir à refaire, aux recensements décennaux, donc tous les dix ans, des chambardements trop importants où la population ne s'y retrouve plus. C'est une amélioration aussi souhaitable qui a été fait par le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.

On a mentionné plus tôt que les députés n'auraient plus un mot à dire. Je suis tout à fait d'accord avec le fait que les députés-et cela existe depuis au-delà de 30 ans-n'ont plus le dernier mot en matière de redistribution électorale et d'établissement des circonscriptions, mais ils avaient jusqu'à présent-et ils ont encore, puisque la loi n'est pas modifiée-un dernier mot à dire, ce qui permet aux commissions de se pencher sur des problèmes qui peuvent être soulevés par des députés.

Je ne suis pas sûr que ce soit une si bonne chose que d'enlever aux députés leur droit de dire un mot puisqu'ils peuvent, en bout de piste avoir des recommandations à faire, dont les commissions tiendront ou ne tiendront pas compte. Que les députés ne décident pas en dernier lieu des limites des circonscriptions électorales, fort bien, mais de leur enlever le pouvoir d'intervenir, c'est au moins discutable.

Bien sûr, on me rétorquera que les députés pourront intervenir devant les commissions provinciales. Mais ne serait-il pas bon que les députés, comme corps parlementaire, comme groupe institué, puissent intervenir, soit directement, soit par le biais d'un comité comme celui de la procédure et des affaires de la Chambre?

Cela étant dit, je rappellerai simplement que le travail non partisan qui a été effectué tout au cours des délibérations du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre a prouvé l'efficacité d'une procédure qui, devant un comité comme celui qui nous présente son rapport ce matin, peut être valable, mais qu'il y a encore des preuves à faire devant les autres comités. Et je souhaite que bientôt nous voyions dans les autres commissions parlementaires permanentes un même travail dégagé de partisanerie politique que celui que nous avons eu au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre.

[Traduction]

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de participer au débat sur la motion no 20.

Le 19 avril dernier, la Chambre a chargé le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre d'examiner le processus de révision des limites des circonscriptions électorales et de lui soumettre un projet de loi à ce sujet, pour qu'elle l'étudie. Le comité était expressément chargé de proposer une formule pour


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plafonner ou réduire le nombre de sièges à la Chambre des communes, d'examiner la pertinence de l'actuel mode de sélection des membres des commissions de délimitation des circonscriptions électorales, d'examiner les règles et les critères que les commissions utilisent pour modifier les limites des circonscriptions et d'examiner la participation du public et de la Chambre des communes aux travaux des commissions de délimitation.

Le projet de loi C-18, qui a reçu la sanction royale le 15 juin 1994, a entraîné une grave interruption du processus électoral impartial. Il prévoyait la suspension de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales. Un tel geste de la part du gouvernement ne pourrait se justifier, et j'insiste là-dessus, que s'il modifie ou améliore considérablement le processus de révision des limites des circonscriptions.

Ce projet de loi ne propose toutefois pas de modifications importantes. Cela ne veut pas dire qu'il ne propose pas d'améliorations. Bon nombre des petits problèmes ont en effet été réglés d'une manière très satisfaisante. Les mesures proposées par le gouvernement laissent toutefois à désirer en ce qui concerne les questions plus importantes. Il y en a trois: le nombre de sièges à la Chambre, les écarts de population selon les circonscriptions et les règles régissant la révision des limites de circonscriptions.

(1105)

Comme il est plus facile de traiter des aspects positifs du projet de loi parce qu'ils sont moins nombreux, je commencerai par parler de ceux-ci.

Premièrement, l'idée de confier à un comité permanent le soin de préparer un projet de loi a été un exercice positif et productif. Malheureusement, une majorité de députés libéraux font partie du comité. Ce sont eux qui ont le dernier mot. Certaines propositions excellentes ont été laissées de côté parce que la majorité n'était pas bien disposée envers les autres membres et les autres participants aux travaux du comité.

Je tiens à féliciter particulièrement le personnel d'Élections Canada, notamment M. Jean-Pierre Kingsley, qui a été d'une aide inestimable dans la rédaction du projet de loi. J'encouragerais la Chambre à continuer de recourir aux comités dans l'avenir, comme nous venons de le faire en l'occurrence.

Ce fut également un plaisir de travailler avec le président du comité, qui a fait preuve d'équité dans l'attribution du temps de parole à tous les témoins que nous avons entendus sur cette question. Nous remercions l'opposition officielle de sa participation, bien que ce soit un peu pour la forme puisque, ainsi que le député de Bellechasse l'a dit, le but de ce parti est de se séparer. J'ai été plutôt surpris de voir un député ministériel applaudir à cela. Je pense que c'était le député d'Etobicoke-Lakeshore. Peut-être y a-t-il un séparatiste dans les rangs des libéraux, sait-on jamais.

Le député de Calgary-Ouest, qui est un constitutionnaliste et connaît fort bien la Loi sur les élections, y est allé d'un apport inestimable. Je le remercie. Ce fut un plaisir que de travailler avec lui.

Parmi les améliorations, il importe de mentionner la révision des limites des circonscriptions dans chacune des province après le recensement quinquennal. Cette révision tous les cinq ans nous permettra de réduire le nombre de modifications radicales et très perturbatrices qui sont survenues dans le passé. La population canadienne peut changer considérablement en dix ans. Des modifications mineures apportées plus souvent sont préférables à la pratique actuelle.

Le refus du gouvernement d'accepter la dernière révision est la preuve que la population accepte plus facilement les modifications mineures. La révision tous les cinq ans présente un autre avantage: la période consacrée à ce processus est beaucoup plus courte.

Les commissions de délimitation des circonscriptions seront plus enclines à mieux informer le public et à présenter des solutions de rechange pour les propositions de révision. Alors que leur rôle et leur participation sont accrues, l'influence des députés est réduite. J'applaudis à cela. Si les députés veulent faire une intervention, ils peuvent le faire dans le cadre des réunions publiques actuelles. Je considère cette modification comme un excellent moyen de garantir le plus possible la neutralité politique du processus de révision des limites des circonscriptions électorales.

Je ne crois pas qu'il faille modifier ou maintenir les limites des circonscriptions électorales dans le seul but de faciliter la campagne électorale du député. Tous les députés aimeraient se porter candidat dans une région où ils ont déjà gagné une élection, puisqu'ils ont noué de nombreuses relations et se sont fait bien des amis au cours des années où ils ont représenté ce coin de pays. Par ailleurs, de modifier le processus de délimitation des circonscriptions électorales dans le but explicite d'accorder un avantage certain à un député en poste équivaudrait, à mon avis, à une grave entorse à l'éthique politique.

Ce qu'il y a de paradoxal dans la suspension du processus de délimitation des circonscriptions électorales, c'est que le processus qui était déjà en place fonctionnait quand des députés ou de simples citoyens se sont dits peu satisfaits de la proposition venant des commissions de délimitation des circonscriptions électorales. Il existait déjà une procédure de remaniement de la carte électorale. Si les députés avaient pris le temps de comparaître aux audiences des commissions de délimitation des circonscriptions électorales, la chose aurait été possible.

Le député de Prince George-Peace River et un grand nombre de ses électeurs ont comparu devant la Commission de délimitation des circonscriptions électorales de la Colombie-Britannique. Les commissaires ont examiné leur proposition et modifié en conséquence les limites des circonscriptions électorales. Certains libéraux de l'Ontario ont fait de même. Il semble bien qu'on n'ait pas eu besoin du projet de loi C-18, une mesure antidémocratique. Les libéraux ont paniqué, ce qui a été fort malheureux.

En ce qui concerne le processus de sélection des commissaires, on a apporté des changements mineurs, mais bénéfiques, aux attributions et aux pouvoirs du directeur général des élections et on a clarifié le processus de délimitation des circonscriptions électorales.

Ces aspects du projet de loi sont positifs. Comme je viens de le dire, toutes ces améliorations et tous ces changements auraient pu être apportés sans qu'il ne soit nécessaire d'interrompre le processus de délimitation des circonscriptions électorales et de


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gaspiller les cinq millions de dollars qu'ont coûtés les rapports des commissions.

Le rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre fait un bilan d'échec à toutes les rubriques du mandat confié au comité, dont le nombre de députés à la Chambre des communes, la variance de la population d'une circonscription à l'autre, ainsi que l'ordre de priorité des critères servant à délimiter les nouvelles circonscriptions.

La plupart des Canadiens veulent un gouvernement de taille plus modeste. La plupart des Canadiens estiment que les députés sont déjà trop nombreux. Même quand on leur a soumis une bonne formule qui aurait pu réduire le nombre de députés à la Chambre, les libéraux ont refusé de bouger au chapitre de la taille du gouvernement. Ils ont refusé de réduire, ou du moins de ne pas augmenter, le nombre de députés qui s'élève actuellement à 295 et qu'on se propose de faire passer à 301.

(1110)

Ils ont même refusé de limiter la croissance de la Chambre dans l'avenir. Il semble que les libéraux soient prêts à faire passer leurs propres intérêts avant ceux de la nation. Voilà qui est fort regrettable! Les motifs qu'ils invoquent pour refuser d'agir sont bien minces. Ils prétendent qu'il est impossible pour le moment de plafonner ou de réduire la taille de la Chambre des communes. Ils n'ont pas le courage politique d'agir! Ils disent que le nombre de sièges abolis se résumerait à presque rien et que le résultat perturberait beaucoup de choses.

Les libéraux invoquent aussi certains problèmes constitutionnels pour ne pas restreindre la taille de la Chambre des communes. Ces problèmes seraient attribuables à la répartition des sièges au Sénat. Il est inacceptable d'utiliser ainsi la Chambre des communes pour corriger les lacunes de l'autre endroit.

Le problème de la représentation inégale à la Chambre vient du refus du présent gouvernement, et du gouvernement conservateur qui l'a précédé, de réformer la Chambre haute de manière que toutes les provinces et les régions de ce pays y soient représentées efficacement. La Chambre des communes doit être le lieu où tous les Canadiens sont représentés avec égalité.

Le principe fondamental de la Chambre des communes est justement la représentation fondée sur la population. La Chambre haute ne peut représenter correctement les intérêts des provinces et des régions puisque sa structure entraîne une représentation inégale et que ses membres ne sont pas élus.

Le fait que le Sénat moderne soit de plus en plus incompatible avec le système confédératif d'aujourd'hui ne devrait pas empêcher la meilleure représentation possible à la Chambre des communes. Il me semble que la résistance du gouvernement à améliorer le Sénat fait obstacle à l'efficacité de la Chambre.

La Chambre des communes devrait être structurée de la façon la plus efficace possible et dans l'intérêt de tous les Canadiens. Si cette structure commande en plus la réforme du Sénat, ce n'est là qu'un avantage additionnel. Nous ne devons pas affaiblir la Chambre des communes en maintenant sa structure actuelle. Par ailleurs, nous ne devons pas la laisser croître sans limite simplement pour éviter la réforme d'un Sénat tout à fait dépassé.

Aucune excuse ne justifie le refus de réduire la taille de la Chambre des communes. Les gens de ma province, la Saskatchewan, accepteraient de perdre quelques députés si les réductions étaient équitables pour toutes les provinces.

En Saskatchewan, le nombre de sièges à l'assemblée provinciale a été réduit et la population a approuvé et accueilli favorablement cette mesure. Le gouvernement fédéral devrait peut-être examiner ce dossier et s'en inspirer.

Si, à la suite d'une réduction du nombre des députés, les Canadiens obtenaient un Sénat triple E, élu par eux, responsable envers eux et défendant leurs intérêts au lieu d'être de simples machines à voter, la possibilité d'économiser l'argent des contribuables par l'élection de moins de députés davantage à l'écoute de la population deviendrait encore plus alléchante.

J'ai entendu dire que beaucoup de députés libéraux des régions rurales de l'Ontario se plaignaient des problèmes liés à de grandes circonscriptions. Pour traverser ma circonscription, il faut compter plus de quatre heures et demie en voiture, selon la direction qu'on prend. Si les députés sont ingénieux et déterminés à servir leurs électeurs, ils peuvent trouver des moyens de bien répondre aux besoins d'une grande circonscription.

Par exemple, j'ai mis sur pied un bureau de circonscription mobile qui se déplace pour atteindre les électeurs qui ne peuvent pas me joindre. De plus, les députés qui ont de vastes circonscriptions bénéficient déjà d'allocations de voyage supplémentaires. Si certaines circonscriptions s'agrandissaient en raison de la réduction de la taille de la Chambre, les frais de déplacement supplémentaires ne seraient rien comparativement aux économies réalisées.

Les techniques de communication modernes dont nous disposons aujourd'hui facilitent les contacts avec les électeurs, sans qu'il soit nécessaire d'effectuer des déplacements considérables. Je tiens à dire aux députés qui représentent des circonscriptions urbaines que, peu importe si leur circonscription est petite et populeuse, je peux transmettre des télécopies dans la mienne plus rapidement qu'ils peuvent traverser la leur en automobile.

Bien sûr, si les circonscriptions sont moins nombreuses, chaque député devra servir plus d'électeurs. Encore une fois, je soutiens qu'une augmentation modeste des ressources en personnel ou en matériel du bureau d'un député pour répondre aux besoins des Canadiens coûterait moins cher qu'un nombre plus élevé de députés. Non seulement les Canadiens veulent moins de politiciens fédéraux, mais c'est également plus logique d'un point de vue financier.

Or, les libéraux refusent de faire quoi que ce soit au sujet de la taille de la Chambre. Ils ont adopté la solution facile. Ils ont recommandé que d'autres, peut-être dans une nouvelle législature, prennent des mesures au sujet du nombre croissant de députés.

Il est temps d'agir dès maintenant, car nous avons déjà un problème. Ce projet de loi représente une excellente occasion de s'y attaquer. Il n'y aura pas à l'avenir une meilleure occasion que celle-ci. J'imagine que les libéraux de demain, s'il y en a, ne seront pas plus disposés à affronter le problème que ceux qui


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forment actuellement le gouvernement. Ils refusent tout simplement d'examiner toute solution qui diffère de leur mode actuel de pensée. C'est bien simple: les libéraux ne veulent jamais prendre des mesures sur quoi que ce soit.

Un autre défaut important dans ce projet de loi, c'est qu'il ne fait rien pour régler le problème des grandes différences de population entre les circonscriptions, même entre celles qui se trouvent dans une même province.

(1115)

Un écart de plus ou de moins 25 p. 100 signifie que même dans la même province, une circonscription peut compter deux fois plus d'habitants qu'une autre. Cet écart dans le nombre de voix est considéré comme inacceptable, et je demande à tous les députés de ne pas oublier que l'on ne retrouve pas cet écart entre des circonscriptions dont la population a changé récemment et que l'on s'apprête à corriger. Cela constitue plutôt un point de départ. On permet aux commissions d'établir les choses ainsi, à la base.

Il peut y avoir, au départ, un écart important entre des circonscriptions et il peut ensuite s'écouler cinq ans, au cours desquels il y a des mouvements de population, avant que l'on ne fasse quelque chose. Aussi inéquitable que cela puisse paraître, cet important écart sera dépassé par les circonscriptions dont le nom figurera dans une annexe spéciale.

Ces circonscriptions ne seront pas tenues de respecter le quotient permis. Si un très grand écart est déjà accepté par les commissions, il n'est pas nécessaire de prévoir une annexe spéciale. Par contre, si l'on crée une annexe pour les cas particuliers, il n'est pas nécessaire d'avoir un écart aussi important.

Un député peut représenter moins de 20 000 personnes tout comme il peut en représenter plus de 120 000. C'est incroyable, et c'est ce qui constitue le point de départ, si nous incluons une annexe en plus d'un écart énorme de 25 p. 100.

Les raisons pour l'inclusion à la fois de l'annexe et de l'écart dépassent les rêves les plus fous de ceux qui aimeraient que le découpage se fasse à leur avantage. Si la Chambre décide des sièges qui devraient figurer dans une annexe, elle ouvrira la porte à des préjugés selon le parti auquel on appartient, à des préjugés entre les députés qui représentent des circonscriptions rurales et ceux qui représentent des circonscriptions urbaines. Cela donnera lieu à des querelles internes et à des comportements terribles chez les députés. Le fait d'encourager de tels comportements chez les députés et les partis ne me plaît guère. Cela n'a pas sa place. On aurait pu corriger ce problème.

Je demande à tous les députés de la Chambre de voter contre ce rapport tant que l'on n'aura pas réglé cette grave iniquité. Le fait que ces deux lacunes se retrouvent simultanément dans le projet de loi anéantit le principe de l'égalité du nombre de voix même à l'intérieur d'une même province. Cette situation est aggravée par l'exigence constitutionnelle d'avoir, au départ, une représentation provinciale inégale.

Pour moi, il est clair que la mesure législative que recommande ce rapport ne fait rien pour garantir ou même favoriser l'égalité des Canadiens, sur le plan électoral. Cela suffit pour justifier le rejet de ce projet de loi, à moins qu'une correction n'y soit apportée au moyen d'un amendement.

La troisième lacune de ce projet de loi, c'est qu'il fait passer la communauté d'intérêts avant l'équité des électeurs. Même si ce n'est pas dit aussi clairement, on demande aux commissaires de tenir compte de considérations sociologiques avant de rendre les circonscriptions égales, du point de vue des chiffres. Il s'agit de la conséquence automatique d'un écart élevé par rapport au quotient électoral prévu.

C'est le rêve d'un ingénieur social. Ces considérations, ajoutées à des écarts beaucoup trop généreux, entraîneront un système de représentation des Canadiens en fonction de caractéristiques plutôt qu'en leur qualité de citoyens d'une région géographique donnée. Cela reflète une politique d'intérêts spéciaux que nous souhaitons éviter.

Certaines des considérations que renferme la définition de l'expression «communauté d'intérêts» peuvent et doivent servir à trancher entre diverses propositions aussi équitables les unes que les autres envers les électeurs. Elles ne devraient pas être le principal facteur d'établissement des limites des circonscriptions électorales.

Comme je l'ai dit au début de mes observations, malgré quelques améliorations mineures apportées au processus de remaniement de la carte électorale, le projet de loi comporte de grandes lacunes et représente une excellente occasion ratée de faire avancer les choses à cet égard. Le projet de loi proposé dans ce rapport ne justifie en rien la décision du gouvernement d'interrompre le processus qui existait auparavant.

Les mesures qu'ont prises les ministériels dans la rédaction de ce rapport confirment que le projet de loi C-18 se voulait avant tout, au départ, une tentative de manipulation grossière et partisane du processus électoral. Les députés libéraux de l'arrière-ban de l'Ontario et quelques-uns de la région de l'Atlantique n'ont pas apprécié de voir les limites de leur circonscription modifiées. Ils ont témoigné devant le comité et nous ont fait part du problème. Lorsqu'un parti détient pratiquement tous les sièges dans une province, il est évident que ses membres vont faire tout ce qu'ils peuvent pour conserver les mêmes règles du jeu.

Dans le cas présent, le gouvernement voulait modifier la dernière révision de la carte électorale simplement parce que les nouvelles limites ne lui convenaient pas. Certaines passaient sur la sixième avenue plutôt que la dixième.

On a présenté le projet de loi C-18 pour camoufler toute l'opération, en faisant croire qu'il s'agissait de rendre le processus plus transparent dans le but de l'améliorer et de le moderniser. Ce rapport et l'absence de véritables modifications dans ce dernier montrent qu'il n'y a jamais eu d'intention sincère de la part des ministériels de vraiment moderniser le processus.

(1120)

Parlons du noeud de la question, alors que je termine mes observations. Le problème, c'est que notre pays a besoin de réformes dans de nombreux domaines. Une des choses moins prioritaires est la réforme de la carte électorale. C'est important, je le reconnais, et je sais que mes collègues sont d'accord là-dessus. Cependant, nous avons besoin d'une réforme des programmes sociaux, du processus de dépense des deniers publics et de notre système de justice. La tradition libérale consiste à parler de

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réforme, mais à finir par ne prendre aucune mesure. Il devient tout à fait évident que seuls les réformistes, comme le nom de leur parti l'indique, souhaitent procéder à ces réformes au Canada.

Notre pays a une tradition démocratique dont il est très fier. Les Canadiens méritent le meilleur système électoral possible. Je vais essayer de parvenir à une réforme électorale constructive, à une réforme du Sénat, ainsi qu'à un plafonnement et à une réduction des sièges à la Chambre des communes, non parce que cela m'est favorable, mais parce que c'est ce que les Canadiens souhaitent. Ils veulent des mesures concrètes et une véritable réforme.

La motion que le gouvernement a présentée pour promulguer le projet de loi établissant une nouvelle Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales n'est pas une véritable réforme. Elle se contente d'apporter des modifications de forme mineures pour essayer de cacher le désaccord des ministériels avec les limites établies dans le cadre de la dernière révision.

M. Milliken: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je regrette d'interrompre le débat, mais je me demande si je peux demander le consentement unanime de la Chambre pour revenir à l'étape du dépôt des documents. Le document qui aurait dû être déposé ce matin ne l'a pas été, et je demande le consentement unanime pour le faire maintenant.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député a-t-il le consentement unanime?

Des voix: D'accord.

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AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, je suis heureux de déposer, dans les deux langues officielles, un rapport spécial de la Commission royale sur les peuples autochtones qui concerne le suicide chez les autochtones et qui s'intitule «Choisir la vie».

_____________________________________________


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INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

La Chambre reprend l'étude de la motion.

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais poser une question au député qui vient de prendre la parole. Je tiens tout d'abord à dire qu'une des choses qui manquent aux réformistes est le sens de l'humour, et il est souvent important d'en avoir dans les discussions.

Je croyais que le député d'en face faisait allusion aux réformistes qui étaient en train de faire de la place pour 75 libéraux de l'autre côté. C'est pour cette raison que j'ai applaudi. Quelle perspective de voir 75 libéraux remplacer ceux qui se trouvent actuellement de l'autre côté et faire face à leurs autres collègues!

J'ai de la difficulté à comprendre les propos compliqués du député concernant ce qui est et n'est pas et ce que les réformistes appuient et n'appuient pas. Quels sont les éléments positifs du projet de loi qu'il appuie? Je crois que cet aspect s'est perdu dans la discussion.

M. Hermanson: Madame la Présidente, je donne l'assurance à ma collègue que les députés réformistes ont un merveilleux sens de l'humour. Nous trouvons très amusante la polka que dansent les libéraux avec ce projet de loi, comme ils l'ont d'ailleurs fait avec beaucoup d'autres. Un pas en avant, deux pas en arrière, mais ils restent à côté de la question.

On trouve des aspects positifs dans ce projet de loi, ou plutôt dans cette motion qui pourrait devenir un projet de loi si le gouvernement le décide. Un des aspects positifs dont d'autres députés parleront certainement est le choix des membres des commissions de délimitation, qui a fait l'objet de quelques améliorations mineures. On consulte davantage les députés, de sorte que le Président exercerait une autorité moins exclusive sur le choix des deux membres de la commission désignés au niveau fédéral. Bien entendu, on ne change rien à la façon dont les membres sont désignés par les provinces.

Les solutions de rechange qui seront proposées aux électeurs constituent aussi un aspect positif. Au lieu de présenter une seule carte électorale, on pourra en présenter trois, soit une carte privilégiée et deux cartes de rechange. Ce sont là, cependant, des améliorations mineures qui ne justifiaient certainement pas une suspension de la réforme.

Mis à part ces détails d'importance mineure, il y a surtout des lacunes et des omissions, et je suis justement préoccupé davantage par les omissions et le manque de changements dans le projet de loi. Si nous avions voulu apporter ces améliorations mineures, nous aurions pu le faire sous forme d'amendement au projet de loi, pendant que la réforme était en cours.

(1125)

En fait, le processus de réforme initial qui avait débuté il y a un certain temps a été interrompu par la tenue des élections et il subsiste des écarts considérables. Certains députés représentent des populations énormes alors que d'autres comptent un nombre très limité d'électeurs. Le projet de loi dont nous sommes saisis ne remédie pas au problème; il brode autour, contient quelques changements superficiels et de rares améliorations mineures.


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M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte, Lib.): Madame la Présidente, au sujet de ce que disait le député d'en face, j'ai une ou deux choses à dire et peut-être une question à laquelle j'aimerais qu'il réponde.

J'ai écouté son discours avec attention et ses observations allaient très loin. Venant du Nouveau-Brunswick, ce qui m'a frappé, peu de temps après mon arrivée à la Chambre, lorsque l'on nous a remis les cartes des circonscriptions électorales, c'est qu'il y avait eu changement unilatéral. La province n'avait pas de nouveau siège et elle n'en demandait pas. Il continuait d'y avoir 10 sièges au Nouveau-Brunswick, comme avant, mais toutes les circonscriptions, selon la nouvelle carte proposée, étaient modifiées.

De mon point de vue, c'était politiquement important, car ma circonscription était passablement modifiée. Le message de mes électeurs était que nous dépensions des millions à faire des changements pour le plaisir de changer. J'ai dû admettre que ce redécoupage n'avait aucun sens.

Je voulais surtout que ceux de mes électeurs qui avaient quelque chose à dire se présentent aux audiences et exposent leurs objections. Personnellement, je ne me suis pas présenté aux audiences, justement pour les raisons que donnait le député. Je ne voulais pas que l'on pense que je pouvais avoir des raisons politiques de m'opposer aux changements.

Ce que l'on me disait, c'est pourquoi changer pour le plaisir de changer. Parce que la population de quelques régions urbaines avait légèrement augmenté, nous allions modifier les 10 circonscriptions du Nouveau-Brunswick et dépenser des millions. Cela n'avait aucun sens.

Ce genre de problème n'était pas unique au Nouveau-Brunswick, on retrouvait la même chose dans plusieurs provinces. Je pense que ce projet de loi nous donne des critères sensés et défendables du point de vue du contribuable canadien qui, en fin de compte, paie pour ces modifications des cartes électorales.

J'aimerais l'avis du député là-dessus, compte tenu de ce qu'il a dit précédemment.

M. Hermanson: Madame la Présidente, le député de Carleton-Charlotte soulève un point très intéressant dont beaucoup de députés ont fait état devant le comité. Le problème, c'est que s'il faut faire des rajustements dans une province, cela crée un effet d'entraînement.

Ma province, la Saskatchewan, est dans une situation certainement très semblable à celle du Nouveau-Brunswick. Dans bon nombre des circonscriptions, la population n'a pas changé considérablement. Pourtant, si une ou deux circonscriptions ont connu des changements importants, généralement attribuables à l'expansion d'une région urbaine, il faut redessiner les limites électorales de certaines parties de la province. En modifiant une limite, on change la circonscription voisine, qui compte moins d'habitants parce que les limites de la ville ont été rapprochées. On modifie alors la circonscription suivante et ainsi de suite.

Une fois qu'il faut redessiner les limites d'une circonscription parce que sa population dépasse la marge de variabilité acceptable, nous devons la plupart du temps redessiner la carte électorale de toute la province. C'est inévitable, même si la distribution de la population n'a presque pas changé sur les trois quarts du territoire. La nouvelle procédure ne changera pas grand-chose à ce problème.

Pour répondre à la députée d'Etobicoke, je mentionnerai une autre amélioration, soit le fait que le rajustement se fera tous les cinq ans, ce qui pourrait avoir pour effet de réduire l'importance des changements. Il n'y aura pas de modifications majeures comme par le passé.

(1130)

Encore une fois, dès qu'on commence à redessiner une limite, par exemple si l'on redessine Carleton-Charlotte, les circonscriptions voisines sont touchées. On ne s'en sort pas. Peu importe si ça se produit tous les cinq ans ou tous les dix ans, il faut redessiner la carte électorale de toute la province. La solution, c'est de tracer ces limites de la façon la plus judicieuse possible, ce que doivent faire les commissaires d'après les recommandations du public. Ce système existait avec l'ancienne loi et existera toujours dans la mesure dont nous sommes saisis.

Bref, cette mesure présente quelques améliorations mineures. Elle permet une participation un peu plus grande du public et offre quelques solutions de rechange.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je ne puis m'empêcher de poser une question au député de Kindersley-Lloydminster qui, à mon avis, a désespérément fouillé dans le rapport du comité pour y trouver de quoi se plaindre.

Je le félicite toutefois pour son discours dans lequel il a tout au moins vigoureusement défendu la position du Parti réformiste à l'égard des deux principales questions qui nous divisent. À mon avis, il a choisi un sujet sur lequel, je sais, le député de Calgary-Ouest va comme lui revenir quand il va se lever, à savoir le projet de loi sur la suspension de la révision des limites des circonscriptions électorales qui, il en est convaincu, est défectueux.

Il sait bien que plusieurs membres de son propre parti ont jugé les propositions des commissions tout à fait inacceptables quand elles sont sorties. Il se trouve que lui non. Il sait que certains de ses collègues les ont jugées inacceptables. Je sais que le député de Calgary-Ouest n'était pas très satisfait des propositions quand il en a eu connaissance la première fois. Je sais que les députés de la Colombie-Britannique ne l'étaient pas du tout et cela vaut pour tous les partis représentés à la Chambre qui comptent des députés de la Colombie-Britannique.

Le député peut fort bien dénoncer le contenu et chercher ce qui ne va pas dans cette mesure, mais je crois qu'il se rend compte que l'ancien système laissait à désirer et nécessitait des retouches. Il doit reconnaître, et je l'invite à le faire, que-contrairement à ce qu'il suggère-les propositions faites dans ce projet de loi ne sont pas insignifiantes, mais constituent des améliorations importantes par rapport au système précédent, notamment en ce qui concerne le processus de nomination des commissaires et


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l'obligation pour les commissions de soumettre un énoncé général de la façon dont elles entendent procéder avant de se lancer dans le tracé de cartes électorales et de soumettre ensuite trois projets de révision des limites des circonscriptions électorales au lieu d'un.

C'est là une amélioration substantielle qu'on ne peut ignorer et non un ajustement mineur comme il essaie de le suggérer dans ses propos qui sont injustes si l'on considère l'excellent travail qu'a fait ce comité.

M. Hermanson: Madame la Présidente, je suis d'accord avec le député de Kingston et les Îles pour dire que c'est une amélioration valable. Cependant, elle ne vaut certainement pas les 5 millions de dollars que les contribuables ont dépensés pour suspendre la révision des limites des circonscriptions électorales et tout recommencer.

Je suis prêt à parier ma carte de député que les membres de son parti ne seront probablement pas entièrement satisfaits des nouvelles limites qui seront tracées la prochaine fois. Nous n'arriverons jamais à satisfaire tous les députés à la Chambre lorsque qu'il s'agira de retracer les limites. C'est absolument impossible.

Pour terminer, en ce qui concerne l'autre point que le député a soulevé, il est vrai que certains membres de notre parti ne sont pas satisfaits de la façon dont les limites des circonscriptions électorales ont été révisées. Nous sommes cependant prêts à jouer selon les règles que nous respectons, y compris le député de Calgary-Ouest.

Les habitants de la ville de Calgary qui ont comparu devant la commission pour faire des recommandations ont obtenu que soient apportées à la carte électorale certaines modifications qui font qu'elle est meilleure. Ils se sont servis du système et ont fait en sorte qu'il soit efficace. La commission qui les a entendus était une commission impartiale. Elle a corrigé le problème. Elle a joué selon les règles. Les libéraux n'étaient pas prêts à en faire autant. Ils voulaient imposer leurs propres règles.

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Ouest, Lib.): Madame la Présidente, je prends la parole aujourd'hui en faveur de la motion d'adoption du 51e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant la révision des limites des circonscriptions électorales.

L'art de gouverner est une question qui intéresse tous les députés. En ma qualité de députée de Mississauga-Ouest, la plus vaste circonscription du pays à une exception près et sans doute la plus diverse, le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui m'intéresse vivement du fait qu'il risque de profondément modifier ma circonscription. Les enjeux sont énormes.

Le Canada a une longue tradition d'équité et de conciliation en ce qui concerne le découpage électoral de la nation. Depuis le début de la confédération, cette Chambre a pris des mesures exceptionnelles afin que des régions aussi différentes que l'Île-du-Prince-Édouard, le Québec et les Territoires du Nord-Ouest soient traitées avec la plus grande considération. Le Canada est une fédération au sein de laquelle sont regroupés des cultures, des modes de vie et des origines ethniques très variés; les liens entre ces divers groupes n'ont pas toujours été très évidents.

L'un des liens les plus importants est un gouvernement fédéral fort représenté par les députés qui siègent ici. Dans l'intérêt de l'harmonie, de la justice et de l'équité, il faut parfois revoir et ajuster la façon dont nous sommes gouvernés ainsi que la méthode de sélection des représentants du peuple au Parlement. La justice et l'équité devraient être un souci primordial.

(1135)

En 1900, plus de 80 p. 100 des Canadiens étaient d'origine anglaise ou française et vivaient à la campagne. Les choses ont beaucoup changé depuis. En 1995, la population est principalement urbaine et compte un grand nombre de néo-Canadiens qui ont des points de vue très différents mais qui sont animés du même désir de participer activement à la vie de leur nouveau pays. Malgré tout, une vive controverse continue à entourer l'idée de procéder à un nouveau découpage électoral qui représenterait cette population très diversifiée, de façon juste et équitable.

Dans la circonscription de Mississauga-Ouest, plus de 250 000 résidents essaient de gagner leur vie, de s'habituer à des coutumes nouvelles et de se faire une place au soleil. Cette circonscription, qui est au moins trois fois plus grande que la moyenne ontarienne, a une population qui est le double de celle de l'Île-du-Prince-Édouard qui, en passant, est représentée par quatre excellents députés à cette Chambre.

De toute, évidence, le moment est venu de relever le défi que constitue la région hautement urbanisée et en pleine expansion qu'est Mississauga-Ouest où plus de 40 p. 100 de la population ne parle ni l'une ni l'autre de nos langues officielles. Avec plus de 131 langues représentées dans nos écoles, le pourcentage d'élèves anglophones ou francophones est inférieur à 10 p. 100. C'est un renversement spectaculaire qui n'a pris que dix ans.

Pour vous donner une meilleure idée de la situation, je vais vous parler du rythme de croissance de la ville de Mississauga, dans la région de Peel. Depuis sa fondation, en 1974, Mississauga a triplé. Selon les données fournies par la municipalité, la ville croît à un rythme accéléré et ininterrompu conforme aux prévisions.

En 1974, Mississauga comptait 165,000 résidents. Aujourd'hui, la population de la ville dépasse les 500,000. Seules les récessions de 1982-1983 et de 1993-1994 ont ralenti une croissance aussi forte que soutenue. Cette année, Mississauga est la neuvième ville canadienne en importance et celle dont la croissance est la plus rapide. J'en représente la moitié.

Nous avons dépassé de plus de 250 millions de dollars les prévisions pour 1994, avec une performance de 850 millions de dollars, soit un taux de croissance comparable à ceux enregistrés en 1988-1989, avant la récession. La croissance industrielle a également progressé de 30 p. 100 par rapport à 1993.

Je rappellerai à la Chambre que des tels taux sont courants dans toute l'agglomération torontoise. C'est la même chose dans des villes comme Markham, Brampton et Oakville. Les nouveaux centres urbains attirent tous les ans des milliers de personnes et, avec elles, de nouvelles entreprises et le goût de disposer de services gouvernementaux, sans parler du désir tenace et


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exprimé bruyamment d'avoir une ligne de communication directe avec son député.

Nous savons tous la somme de travail énorme qui entre dans la construction de nouvelles villes. Nous savons comment il faut se démener pour obtenir des fonds pour les écoles, la voirie, les parcs et les autres éléments de l'infrastructure. Il y a les besoins urgents et évidents de toute nouvelle collectivité. Il y en a aussi qui sont moins évidents. Quels sont-ils? Nombreux sont les néo-Canadiens qui ont besoin de beaucoup d'aide de la part de leur député fédéral et de son bureau de circonscription. On ne peut plus compter sur l'aide communautaire bénévole comme celle que l'on trouve plus couramment en milieu rural. Les centres urbains sont généralement des milieux plus menaçants, moins accueillants et, pour tout dire, des milieux dans lesquels il est plus difficile de s'intégrer.

Il n'est pas rare que mon bureau de circonscription reçoive une centaine d'appels par jour, et la plupart de ceux-ci portent sur des questions assez compliquées concernant l'immigration et le chômage, sans compter tous les conseils et toutes les solutions miracles que l'on nous propose pour venir à bout de nos difficultés budgétaires.

Les problèmes en matière culturelle et linguistique sont énormes. Essayez de vous imaginer face à au moins 40 grands groupes ethniques ayant chacun ses besoins et problèmes particuliers. Les membres de mon équipe ont fini par apprendre quelques mots de langues en usage dans tous les coins du monde entier à force de se dévouer pour apporter une aide efficace et amicale à nos électeurs. Un membre de notre équipe a même dû être hospitalisé.

Voilà le genre de problèmes que posent des circonscriptions de la taille de celle de Mississauga-Ouest. Je sais que chacun de vous pense à sa propre circonscription en ce moment, à ses problèmes, à ses défis, à ses circonstances particulières. De ce point de vue, nous sommes tous sans exception des hommes et des femmes qui font leur possible pour faire face aux situations qui surviennent au jour le jour.

Toutefois, les régions à croissance rapide, comme York-nord, Ontario, Scarborough et Mississauga-Ouest, doivent faire partie d'une classe à part aux fins du découpage. Le rapport à l'étude fait vraiment beaucoup pour aider à répondre aux besoins des collectivités qui connaissent une forte croissance.

J'attire l'attention des députés sur la disposition concernant l'écart de population de plus ou moins 25 p. 100 dont il a été question tout à l'heure. Cette disposition donnerait aux régions à forte croissance plus de flexibilité pour déterminer des limites électorales réalistes et durables. À ce chapitre, les prévisions et les efforts de planification qui s'ensuivent sont relativement corrects. Il est facile de déterminer quelles sont les régions à forte croissance et d'apporter ensuite des rajustements. Le risque d'erreur est faible, si l'on en juge d'après les prévisions établies dans le passé et les modèles de croissance actuels.

Selon le nouveau processus de détermination des limites des circonscriptions électorales, une commission serait constituée après chaque recensement quinquennal, si plus de 10 p. 100 des circonscriptions électorales d'une province ont un écart de population de 25 p. 100 et plus par rapport à la moyenne provinciale.

(1140)

De plus, ces rajustements effectués par suite des recensements quinquennaux garantiront que les tailles des circonscriptions soient équitables, sans que le nombre réel de sièges pour chaque province ne change. Ainsi, une région comme celle de Mississauga-Ouest, ou toute la région de Mississauga, pourrait être divisée en quatre ou cinq circonscriptions, chacune disposant d'une marge de croissance de 25 p. 100.

En effet, pour la toute première fois, nous ferions preuve d'une bonne planification et nous reconnaîtrions les circonstances spéciales de villes comme celle de Mississauga. Après tout, les politiciens représentent des gens et non des espaces géographiques. Ils travaillent pour des gens et pas pour des collines, des montagnes et des plaines.

Dans le passé, certaines régions ont connu une croissance fulgurante, par exemple, en dix ans, la population de Mississauga-Ouest est passée de 140 000 à 250 000, ce qui signifie que le nombre d'électeurs inscrits admissibles est passé de 80 000 à 163 000. Les rajustements aux dix ans ne sont pas satisfaisants. Nous devons admettre que, lorsque la région s'étend et prend racine, ceux qui s'installent dans les nouvelles collectivités apportent un énorme surcroît de travail.

Les services fédéraux ne peuvent suivre le rythme, de sorte que le fardeau s'alourdit au bureau d'un député. Les bureaux de l'assurance-chômage et de la Société canadienne des postes, les centres des passeports et les bureaux de district d'impôt ne suffisent pas à la tâche. La fuite des citadins vers les banlieues s'effectue plus rapidement que l'ajout des services fédéraux nécessaires. Nous savons qu'un grand nombre des immigrants qui arrivent à l'aéroport Pearson vont s'installer en banlieue, où les taxes, les loyers et les services coûtent moins cher que dans les centres urbains.

Le 51e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant les limites des frontières électorales reconnaît également un aspect souvent négligé des limites des circonscriptions, des communautés d'intérêts et des municipalités actuelles. Dans le passé, les architectes de la redistribution ont souvent concocté des limites de circonscription assez originales, même si elles étaient compliquées. Un grand nombre étaient plus représentatifs d'une croustille que d'une circonscription. Je ne peux que spéculer quant aux motifs qui sous-tendent les changements particulièrement innovateurs aux limites des circonscriptions électorales.

Je me contenterai de dire que les intérêts de la collectivité ne peuvent être servis que si la délimitation des circonscriptions respecte la notion de communauté d'intérêts. Il faut tenir compte de l'homogénéité et des préoccupations communes de certaines régions ou municipalités.

Récemment, certaines propositions visaient à inclure Brampton et une partie de Mississauga dans la même circonscription. Cela peut sembler plutôt normal aux yeux de certains, puisque Mississauga est la porte d'entrée de Brampton, peut-être même le centre du nouvel univers en ce qui me concerne. Toutefois, une telle mesure engendrerait des problèmes pratiques.

Songez au travail supplémentaire inutile qui serait nécessaire dans une circonscription divisée du point de vue géographique, ou extrêmement diversifiée quant aux intérêts, à la situation économique ou au mode de vie de ses résidents. Il serait délicat et


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plutôt futile d'essayer de concilier des différences aussi nombreuses et marquées. Le député de Bramalea-Gore-Malton sait exactement de quoi je parle.

Le rapport dont nous discutons aujourd'hui aborde cette question délicate. Les nouvelles lignes directrices offrent plus d'occasions d'améliorer nos relations avec les municipalités de la région, un peu comme cela s'est fait lorsque le gouvernement a élaboré et mis en oeuvre son programme d'infrastructure dans un climat de grande collaboration.

Les responsables locaux de la planification, les résidents et les édiles municipaux devront assumer des responsabilités et jouer un rôle beaucoup plus importants pour faire en sorte que les besoins de la collectivité soient pris en considération bien avant que les limites de la circonscription ne soient arrêtées. Les députés n'auront pas à prendre des décisions comme le roi Salomon, c'est-à-dire en étant contraints de jongler avec divers intérêts et de trancher en faveur d'une communauté d'intérêts au détriment d'une autre.

Le rapport renferme une autre proposition innovatrice. Comme on l'a mentionné, il est prévu que, pour chaque nouvelle délimitation des limites d'une circonscription, trois solutions différentes soient présentées par la commission électorale, qui devra fournir une justification détaillée de l'option qu'elle privilégie. Ainsi, la commission retiendra diverses possibilités et fera un choix justifié parmi celles-ci; toutefois, pour la première fois, ceux qui auront des objections quant à ce choix pourront prendre connaissance des autres solutions possibles.

Cette nouvelle façon de procéder donne beaucoup plus de poids à l'opinion des citoyens et des édiles locaux. Au cours des audiences, les intéressés pourront opter pour une autre solution prévoyant une distribution égale de la population, mais fondée sur d'autres communautés d'intérêts ou sur d'autres considérations géographiques.

Jusqu'à maintenant, le processus de délimitation des limites de circonscription était une sorte d'exercice mystérieux et empreint de favoritisme auquel se livrait le gouvernement fédéral une fois par décennie. Dorénavant, ce processus sera clair, transparent et démocratique. La révision prévue après cinq ans, au lieu de dix ans comme c'est le cas actuellement, est aussi une amélioration, compte tenu que certaines régions connaissent une croissance spectaculaire.

Enfin, le rapport vise à favoriser l'équité et l'équilibre lorsque l'on révise les limites d'une circonscription. Il faut être juste envers tous les Canadiens, où qu'ils vivent. Tous les votes doivent avoir la même valeur. Dans toute la mesure du possible, compte tenu des dispositions de la Loi constitutionnelle, tous les votes doivent avoir le même poids.

Les centres urbains prennent rapidement de l'expansion et la justice politique veut que l'on continue de créer des circonscriptions là où les gens vivent. Il faut reconnaître que cela est inévitable. Mes 250 000 électeurs méritent d'être bien représentés, d'avoir pleinement accès au suffrage et d'exercer à fond leur pouvoir démocratique.

(1145)

La population de Mississauga-Ouest atteindra bientôt les 300 000 habitants et pourtant, elle n'a qu'un vote au Parlement, aussi fort soit-il. Il faut relever ce défi en ayant l'esprit ouvert et en visant l'équité. On n'arrivera probablement jamais à satisfaire tous les Canadiens, peu importe les efforts qu'on y met.

Il y en aura toujours pour s'accrocher à des notions surannées à l'intérieur d'un processus qui est depuis longtemps dépassé. Je comprends qu'il est très difficile de desservir des régions qui se dépeuplent et où les petits bassins de population sont très éloignés les uns des autres.

Ce rapport porte aussi sur les préoccupations des régions peu peuplées et les établissements ruraux. Les circonscriptions dont l'histoire remonte à la Confédération trouvent suspecte toute idée de remaniement ou d'expansion. Je suis aussi très consciente de l'argumentation en faveur de certains cas spéciaux, tel celui de l'Île-du-Prince-Édouard. Je me plais à dire au député de l'Île-du-Prince-Édouard qui siège en face de moi que je vaux huit députés comme lui.

Ces exceptions à la règle générale de la représentation au prorata de la population ont longtemps servi l'intérêt supérieur du Canada et je comprends que l'harmonie et l'équité exigent certains compromis.

Toutefois, le temps est venu pour tous les députés de reconnaître qu'une croissance démographique rapide crée aussi des circonstances spéciales d'égale importance. Avec cette motion, le gouvernement s'attaque pour la première fois au problème croissant que posent les régions urbaines du Canada. Pour la première fois, on prévoit que le rajustement se fera aux cinq ans plutôt qu'aux dix ans. Cela permettra d'établir des circonscriptions à croissance rapide à 25 p. 100 sous la moyenne provinciale afin de tenir compte de l'expansion qu'elles prendront probablement en-dedans de cinq ans.

On insiste sur la communauté d'intérêts comme premier critère de délimitation des circonscriptions électorales. On exige la présentation de trois options distinctes pour une consultation intelligente de la population sur une nouvelle délimitation des circonscriptions électorales.

J'invite tous les députés, quelle que soit leur allégeance politique, à examiner attentivement ces propositions et à adopter de tout coeur la motion du gouvernement.

Pour terminer, je tiens à remercier très humblement le comité de m'avoir permis de me joindre à lui à mi-chemin de ses délibérations. J'ai l'impression d'être montée sur un cheval blanc juste à temps pour empêcher que les grosses circonscriptions ne soient, comme par le passé, traitées de façon très cavalière.

Le président du comité a accompli un merveilleux travail et cela a vraiment été un grand honneur pour moi de siéger à ce comité.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais faire quelques observations au sujet du projet de loi sur le remaniement des circonscriptions électorales. Le débat tourne davantage autour du nombre de sièges à la Chambre des communes.

Je n'arrive pas à croire que le président du comité ait affirmé dans son discours qu'il était impossible de plafonner ou de réduire le nombre de sièges à cause de considérations constitutionnelles. Je n'arrive pas à comprendre la logique derrière l'argument qu'avance le député de Kingston et les Îles pour prétendre que nous ne devrions pas aborder la question de la


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taille de la Chambre des communes et de sa croissance. Il défend le statu quo et cache ainsi son manque de leadership.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je suis désolée, mais je dois interrompre le député. Je demanderais au député d'adresser ses questions et ses observations à l'orateur précédent, la députée de Mississauga-Ouest.

M. Silye: Madame la Présidente, la députée de Mississauga-Ouest défend, elle aussi, ce projet de loi. Je ne comprends pas qu'elle puisse, en tant que membre du comité, défendre le fait que le nombre de sièges à la Chambre ait augmenté et atteint 301.

Thomas Jefferson, le plus grand libéral de tous les temps, disait que le gouvernement qui gouverne le mieux est celui qui gouverne le moins. Ce principe a été oublié.

Comparons la situation dans l'État de la Californie à celle du Canada. La Californie compte 29 millions d'habitants. Elle a 52 membres du Congrès, deux sénateurs, un président et un gouverneur. En tout, 56 personnes dirigent la destinée de 29 millions d'habitants.

Le Canada a 27 millions d'habitants. Si l'on compte les sénateurs et les députés, cela fait 399 dirigeants politiques, ce qui est incroyable. Nous craignons de ne pas bien représenter 30 000 ou 85 000 personnes. Lorsqu'elle se rendra aux États-Unis, la députée devrait peut-être aborder la question avec un membre du Congrès qui représente 571 000 habitants. La solution consisterait peut-être à engager quelques fonctionnaires de plus pour régler les problèmes de l'immigration et du chômage, au lieu d'augmenter le nombre de sièges à la Chambre.

Il devrait y avoir au plus 265 députés à la Chambre des communes. La ville de Calgary n'a pas besoin de six ou sept députés aux prochaines élections fédérales. Il lui en faut seulement quatre. Plus de députés qui veulent représenter cette ville devraient adopter cette philosophie.

(1150)

Une voix: Là où il faut huit libéraux, il faudrait peut-être seulement quatre réformistes.

M. Silye: Oui, c'est vrai, quatre réformistes pourraient faire le travail de sept libéraux.

Si les États-Unis appliquaient le même système que nous et avaient un représentant élu pour 85 000 ou 90 000 habitants, il y aurait aux États-Unis 2 900 membres du Congrès. Cela prouve dans quelle mesure notre système est disproportionné. Notre situation est dix fois pire que celle des États-Unis parce que nous ne respectons pas le principe selon lequel le gouvernement qui gouverne le mieux est celui qui gouverne le moins.

Le Parti libéral prétend être responsable sur le plan financier, mais à la première occasion qui se présente, à l'étude du premier projet de loi portant sur la révision des limites des circonscriptions électorales, il refuse de faire preuve de leadership et de réduire les frais généraux et le coût du gouvernement. Il préfère plutôt augmenter les dépenses en utilisant la réforme constitutionnelle comme excuse.

Je voudrais savoir pourquoi la députée est en faveur de l'augmentation du nombre de sièges à la Chambre des communes, étant donné que je sais personnellement, pour avoir collaboré avec elle au sein d'autres comités, qu'elle préconise les compressions budgétaires?

Mme Parrish: Madame la Présidente, je remercie le député pour son compliment. Je crois qu'il a dit que j'étais la seule libérale à tenter d'économiser de l'argent qu'il ait jamais rencontrée. Bien sûr, ce n'est pas vrai, mais cela dénote un certain parti pris et c'est pourquoi il aime échanger avec moi sur des sujets comme celui-là.

Aux États-Unis, la population est beaucoup plus concentrée qu'ici. Les représentants élus servent donc une population regroupée sur un beaucoup plus petit territoire. Le Canada, et c'est une de ses caractéristiques, est très étendu et très diversifié, sauf dans les régions comme celle de Mississauga-Ouest, aussi avons-nous des problèmes de logistique.

Une autre chose, à mon avis, qui existe aux États-Unis, c'est qu'il y faut des millions de dollars pour se faire élire, ce qui fait que seuls les riches le peuvent. Si la même chose était vraie ici, j'ignore si le député aurait été élu, mais ce ne serait certainement pas mon cas. Dire qu'il faut une longue campagne et aussi dépenser beaucoup, c'est dire que seuls les très riches peuvent être élus à la Chambre des représentants.

Bien sûr, j'aimerais qu'un jour, on limite la croissance du nombre de députés. Mon vis-à-vis et moi sommes d'accord là-dessus. Cependant, au cours du processus démocratique suivi par le comité, nous en avons parlé et nous avons conclu qu'il fallait une étude beaucoup plus approfondie du sujet que ce que le comité pouvait se permettre à ce moment. J'espère que cela répond à la question du député.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, j'ai apprécié le discours de la députée. Je sais qu'elle a grandement contribué à l'inclusion du sous-alinéa 19(2)b)(iii) dans le projet de loi. Je crois qu'elle sait de quel sous-alinéa il s'agit. Voici ce que dit cette disposition:

. . . la probabilité que la population de la circonscription augmentera considérablement au cours des cinq prochaines années.
Cette disposition vise à permettre qu'on rapetisse une circonscription électorale où l'on prévoit une croissance rapide afin d'éviter les différences de population trop importantes entre les circonscriptions. C'est probablement un bon principe, mais il va à l'encontre du principe appuyé par beaucoup de députés des régions rurales qui veulent que leurs circonscriptions restent petites.

Je me demande lequel de ces deux principes devrait avoir préséance selon la députée. Est-ce le principe selon lequel nous devrions rapetisser les circonscriptions urbaines pour permettre la croissance, ou est-ce le principe selon lequel nous devrions faire en sorte que la superficie des circonscriptions rurales ne soit pas trop vaste, quitte à ce que leur population soit moins


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nombreuse? Ces deux principes sont directement contradictoires. L'un ou l'autre doit avoir préséance. Lequel des deux devrait avoir préséance selon la députée?

Mme Parish: Madame la Présidente, je dois remercier le député d'en face d'avoir signalé un point qui, je l'espérais, ne serait pas remarqué par les députés des circonscriptions rurales. Il sait que j'espérais que cette disposition passe inaperçue.

Je dois évidemment représenter le secteur où j'habite. Je crois également à la représentation d'après la population lorsque c'est possible. J'espère de tout coeur que nous arriverons à régler ce problème à l'amiable, puisque c'est là l'attitude adoptée par les libéraux, partout où des circonscriptions urbaines et rurales se touchent. J'ai toujours favorisé avant tout la représentation d'après la population lorsque c'est possible. Je défendrai jusqu'au bout cette petite disposition que j'ai contribué à faire inclure dans le projet de loi.

(1155)

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, je prends moi aussi la parole aujourd'hui pour discuter de la motion proposée par le gouvernement au sujet du remaniement de la carte électorale, et pour y faire connaître mon opposition. Ce faisant, je voudrais exprimer quelques mots de félicitation concernant le travail accompli.

Tout d'abord, comme on l'a déjà dit, nous avons joui d'un excellent soutien de la part d'Élections Canada tant au comité que sur le terrain. MM. Kingsley, Girard et Lesage ont apporté une collaboration très utile au comité. Il faut également souligner que les commissions de délimitation des circonscriptions électorales ont accompli leur travail avec la plus grande exactitude et dans des conditions très difficiles pendant tout ce temps-là, et on doit les en féliciter.

Je voudrais également louer le travail du président du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre. Je crois que c'est la première fois qu'un comité a rédigé avec succès un projet de loi qui, prévoyons-nous, sera présenté ici à la Chambre. Malgré de grandes divergences d'opinions sur d'importantes questions de principe, nous avons néanmoins réussi à travailler loyalement et efficacement à la rédaction d'un projet de loi et à la solution des problèmes sur lesquels nous avons pu en arriver à un consensus.

[Français]

Nous nous opposons à cette motion du Comité de la procédure et des affaires de la Chambre pour un nouveau système de redistribution électorale, et je voudrais mentionner les raisons qui motivent notre opposition. Il y a plusieurs améliorations dans le rapport du comité, mais il y a aussi deux problèmes principaux. Le premier, ce sont les frais de cinq millions de dollars qu'occasionnerait le processus de redistribution électorale pour ce recensement, soit le recensement de 1991. Le deuxième problème se situe au niveau de l'échec du gouvernement, appuyé par les bloquistes, de ne pas réduire le nombre de députés, quand on connaît le coût engendré par le nombre de sièges dans cette Chambre.

[Traduction]

Si je m'oppose au rapport, c'est surtout parce qu'il n'a pas réussi à résoudre correctement le problème de la réduction ou du plafonnement du nombre des sièges à la Chambre des communes. Le comité a rejeté toutes les tentatives du Parti réformiste pour faire porter le débat sur cette question et pour faire effectuer un changement dès maintenant au lieu d'attendre un changement mythique qui devrait supposément s'opérer à un moment donné au cours du siècle prochain.

En abordant cette question du plafonnement ou de la réduction du nombre des sièges à la Chambre des communes, je voudrais d'abord exposer brièvement quelle a été exactement l'évolution de la question. On nous dit que la Chambre des communes a grandi depuis l'époque de la Confédération. Je voudrais passer en revue ce qui s'est passé, les raisons qui ont motivé cette évolution et pourquoi cette question est devenue en quelque sorte cruciale.

En 1867, la Chambre des communes comptait 181 députés. Même depuis le début, il y a eu des éléments qui favorisaient la croissance tout en protégeant les provinces plus petites, et qui avaient trait soit au nombre de sièges qui leur était attribué soit aux cas où elles perdraient ces sièges. La formule initialement prévue dans la Constitution pour la répartition des sièges à la Chambre des communes reposait sur l'attribution d'un nombre fixe de 65 sièges au Québec, en fonction duquel le nombre de sièges des autres provinces pouvait augmenter ou diminuer.

On a par ailleurs apporté des modifications à cette formule en 1915 afin de protéger le nombre des sièges des très petites provinces, avec l'adoption de l'article 51A relatif au nombre des sièges au Sénat, dont on a déjà parlé plus tôt aujourd'hui.

(1200)

Plus tard, la formule a été modifiée. Le nombre de députés du Québec n'était plus fixé à 65. C'est celui des sièges qui était fixe, et les autres chiffres fluctuaient en fonction du total, mais il y avait toujours des protections contre la diminution du nombre de sièges. Ces modifications ont été proposées en 1943 et en 1952.

Pendant toute cette période, c'est-à-dire de 1867 jusqu'aux diverses modifications, en 1915, 1943 et 1952, il n'y a eu qu'une augmentation minime du nombre de députés à la Chambre: 30 p. 100 pendant toute cette période. Les principales raisons de cette croissance ont été l'ajout de nouvelles provinces et le peuplement de l'ouest du Canada.

En dehors de cela, le nombre de sièges a fort peu augmenté. Enfin, en 1949, Terre-Neuve s'est jointe à la Confédération.

Nous n'avons commencé à assister à une augmentation excessive du nombre de sièges qu'avec les formules adoptées sous le gouvernement Trudeau. En 1974, il a proposé une formule sans précédent qui refaisait du Québec le point de repère pour fixer le nombre de sièges aux Communes. Mais au lieu d'établir un nombre fixe de sièges pour le Québec, le nombre pouvait augmenter, et tout le reste avec. Comme cette province a eu tendance à avoir une proportion des sièges stable ou légèrement en dimi-


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nution, on en est rapidement arrivé à une situation où le nombre de députés aurait augmenté par centaines en quelques décennies.

Nous sommes passés de 264 sièges en 1979 à 295 aujourd'hui. D'autres modifications ont été apportées en 1985 pour régler ce problème. Elles aussi favorisaient la croissance, notamment celle qui veut qu'aucune province ne peut se retrouver avec un nombre de sièges inférieur à celui dont elle disposait durant les années 70. Évidemment, si l'on veut préserver le principe de la représentation proportionnelle, il faut absolument que la représentation des grandes provinces augmente continuellement.

Si l'on examine ce qui s'est produit ici et au Sénat, on constate que, durant les quelque 100 premières années de la Confédération, le nombre de sièges a augmenté d'environ 30 p. 100, ce qui s'expliquait presque entièrement par la croissance du pays lui-même. Après cette période, le nombre de sièges au Sénat a évidemment cessé de croître, tandis que celui à la Chambre des communes a augmenté de 30 ou 40. À la suite de cette révision, il y en aura six de plus, et le nombre de sièges continuera de s'accroître à ce rythme dans l'avenir.

Que proposons-nous de faire à ce sujet? Évidemment, nous proposons une sorte de formule qui plafonnerait ou réduirait le nombre de sièges à la Chambre des communes. Voici la formule que le caucus réformiste a proposée. À l'origine, cette formule avait été proposée par le député de Kindersley-Lloydminster et appuyée par le député de Calgary-Centre et moi-même.

Nous avons proposé de fixer à 265, en permanence, le nombre de sièges à la Chambre. C'est là le nombre de sièges qu'il y a eu pendant longtemps, durant la majeure partie des années 50 et pendant les années 60 et 70. Nous avons aussi proposé des dispositions prévoyant une légère augmentation de la représentation.

La raison en est bien simple. Le paragraphe 51a) de la Constitution concerne la représentation sénatoriale et garantit qu'aucune province n'aura jamais moins de députés que de sénateurs. Cette disposition fausse les données, que le niveau de représentation soit modeste ou important. De toute évidence, le nombre de 265 sièges est plutôt réaliste, et la légère croissance possible minimise le risque de distorsion. Je parle en l'occurrence d'une très légère croissance.

En vertu de notre formule, lors de la prochaine législature, il y aurait à la Chambre 273 sièges, ce nombre pouvant augmenter de peut-être deux ou trois tous les dix ans. Il s'agit donc d'une augmentation très modeste.

Les autres partis se sont opposés à cela pour un certain nombre de raisons. Je vais en donner deux ou trois exemples. Dans le rapport, on dit, entre autres choses, qu'une réduction ou un gel du nombre de sièges à la Chambre des communes perpétuerait et, dans certains cas, creuserait davantage les écarts de représentation entre les provinces et saperait encore plus le principe de la représentation proportionnelle. On mentionne ensuite l'effet qu'aurait sur les provinces le fait de perdre des sièges.

(1205)

En fait, avec notre formule, les provinces n'auraient pratiquement pas perdu de sièges, et c'est l'une des raisons pour lesquelles elle était équitable. Qui plus est, si l'on s'en tient aux faits, l'énoncé contenu dans le rapport est tout simplement faux. En fait, la formule que nous proposons, soit de ramener à 273 le nombre de sièges, une modeste réduction de 10 p. 100 pour la prochaine législature, aurait donné une meilleure approximation du principe de la représentation proportionnelle que ne le fait la formule actuelle. La raison en est que nous avons supprimé la distorsion créée par la clause des droits acquis, qui cause bien plus de disparités que la clause sénatoriale; c'est la Chambre qui a imposé la clause des droits acquis, et elle peut la supprimer.

Ainsi, il est faux de dire que cela déformerait la représentation proportionnelle. En fait, notre proposition aurait augmenté le pourcentage de sièges que détiennent actuellement l'Ontario et la Colombie-Britannique. Ces deux provinces sont celles qui sont le plus désavantagées par la formule actuelle.

Les représentants du gouvernement et du Bloc ont donné d'autres raisons pour expliquer leur opposition à cette formule, mais elles étaient d'une nature tout à fait différente. lls ne se préoccupaient pas vraiment du mécanisme de la formule ni de la croissance du nombre de députés. Il s'agissait en fait de raisons fondées sur l'intérêt personnel: «Je manquerai à mes électeurs si je perds mon siège.» Ou quelque chose du genre.

Fait à noter, très peu d'interventions comme celle-là ont été faites quand cette motion a été présentée. La principale raison pour laquelle le gouvernement a suspendu la commission et chargé le comité d'étudier cette question, c'est que les députés s'inquiétaient de la taille de la Chambre et du coût astronomique que cela comporte.

Je voudrais rafraîchir la mémoire des députés. J'en aurais pour longtemps si je vous rappelais toutes les interventions que divers députés ont faites au sujet de la recommandation du rapport visant à plafonner, voire à réduire le nombre de députés. Je tiens à rappeler cela aux députés pour qu'au moment du vote ils puissent s'opposer à cette motion et s'en tenir à leurs principes.

Le député de Parry Sound-Muskoka a dit lors du débat sur le projet de loi C-18 que ses électeurs ne lui avaient pas dit qu'il fallait accroître la taille du gouvernement ni augmenter les dépenses. Je suis d'accord avec lui. C'est pourquoi nous nous opposons à cette motion.

Le député de Halton-Peel a dit qu'en Australie il y a deux fois plus d'électeurs par député, que nous sommes rendus au point où il faut apporter des modifications, sinon il va falloir abattre


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quelques cloisons. Je suis d'accord avec lui. Je voudrais entendre le député de Halton-Peel.

La députée de Nepean a déclaré: «Voici un parti qui propose d'accroître de six le nombre des députés fédéraux, alors que nous savons que chaque député coûte au moins un million de dollars par année. J'ai donc beaucoup de mal à comprendre que ce parti prenne une telle position.» Je suis entièrement de cet avis, bien entendu. Voilà, encore une fois, pourquoi ce rapport ne devrait pas être accepté à moins qu'il ne soit modifié afin qu'on puisse plafonner ou réduire le nombre de sièges à la Chambre des communes, précisément dans le but de minimiser les coûts.

Comme l'a bien compris la députée de Nepean, tous ces problèmes concernant la représentation peuvent être résolus grâce à la technologie moderne, grâce à une utilisation plus efficiente des ressources humaines. Il n'est pas nécessaire que la taille de la Chambre des communes grimpe jusqu'à 350 sièges au cours des vingt ou trente prochaines années.

Le député de la circonscription d'Ontario a dit: «Pourquoi avons-nous besoin de sièges additionnels? Il me semble que, en ajoutant des sièges [. . .]nous ne ferions pas une utilisation judicieuse de l'argent durement gagné des contribuables canadiens.»

Le député libéral de Victoria-Haliburton a déclaré: «Je pense que le Parti réformiste et moi-même devrions envisager sérieusement ce qu'il en coûterait d'avoir six nouveaux députés. Pourquoi dépenser ce supplément d'argent? Pourquoi, en ces temps difficiles, envisager d'ajouter des millions de dollars aux dépenses des contribuables?»

(1210)

Le Parti réformiste a examiné la question et a proposé une solution de remplacement. Nous sommes curieux de voir ce que le député de Victoria-Haliburton aura fait à la suite de l'étude du dossier.

Le député de La Prairie a affirmé: «Un principe m'apparaît important: on ne devrait pas ajouter de circonscriptions au Canada. Deux cent quatre-vingt-quinze circonscriptions pour 27 millions d'habitants, c'est déjà trop. . .». Je suis entièrement d'accord.

Le secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics, le député de Saint-Boniface, a demandé, pour sa part, si nous n'avions pas là une occasion en or de voir s'il était possible de réduire le nombre de députés d'un quart ou peut-être d'un tiers. Il a ajouté que, à son avis, les Canadiens accueilleraient avec plaisir une décision en ce sens qui entraînerait des économies importantes. Je suis d'accord avec cela également.

La proposition de notre parti concernant la réduction du nombre de sièges à la Chambre des communes est modeste, comparativement à cela. Nous parlons d'une réduction d'environ 10 p. 100. Nous pourrions aller plus loin, mais, à ce moment-là, des problèmes importants se posent en ce qui a trait à la clause sénatoriale. Elle n'a plus alors la même portée. Cela ne veut pas dire pour autant que nous ne devrions pas aller de l'avant. Il s'agit d'envisager une réforme du Sénat. Nous devrions réformer cette institution, ce qui nous permettrait de modifier la clause sénatoriale.

Je constate que le gouvernement n'est pas disposé à le faire et je comprends pourquoi. Il est très difficile de parvenir à une réduction du nombre de députés, comme celle que propose le député de Saint-Boniface, mais il est certes possible de réduire ce nombre de 10 p. 100.

Le solliciteur général a déclaré, et je cite: «Depuis la Confédération, le nombre de sièges à la Chambre des communes a augmenté régulièrement. . .» comme je l'ai mentionné. Il a ajouté: «Le nombre de députés serait déjà maintenant de plus de 340 et c'est là une chose dont il faut tenir compte.»

Le député de Scarborough-Rouge River, qui est intervenu avec beaucoup d'éloquence au comité, a déclaré, pour sa part, que les Canadiens ne voulaient pas d'une Chambre comprenant 301 députés, mais bien d'un Parlement qui fonctionne. Il a précisé qu'ils souhaitaient que la Chambre puisse mener à bien ses activités avec 295 députés et non 301, 310, 320 et combien d'autres encore.

Le député de Waterloo a dit, quant à lui, que, si nous poursuivions dans cette voie, nous ne cesserions d'augmenter le nombre de députés à la Chambre des communes et qu'il fallait agir rapidement pour régler cette question. Il a ajouté qu'il continuerait toutefois de lutter avec fermeté pour maintenir le nombre de députés à 295 plutôt qu'à 301, comme c'était censé être le cas.

La secrétaire parlementaire du ministre de la Citoyenneté, l'honorable députée libérale de Halifax, a demandé si, en cette époque d'austérité, il fallait vraiment envisager d'accroître le nombre de députés. Je pense que la question se passe de réponse.

Selon le député libéral de Hillsborough, toutes sortes d'institutions essaient de se maintenir, de réduire les chiffres et de ne pas aller de l'avant avec d'autres projets. Il a ajouté qu'il avait remarqué qu'on procédait dans sa province à une nouvelle réforme électorale et que ce n'était pas le meilleur moment pour aller de l'avant et accroître le nombre de sièges à la Chambre des communes, compte tenu des coûts supplémentaires que cela entraînait.

Quant à lui, le député libéral de Perth-Wellington-Waterloo a signalé que, si notre population en vient à égaler celle de notre voisin du Sud, nous aurons besoin de 3 000 sièges à la Chambre des communes.

Comme le député de Calgary-Centre l'a mentionné, c'est une autre raison de nous attaquer à la question de l'établissement d'une limite. Nous n'avons pas besoin d'autant de sièges. Au Canada, nous n'avons pas besoin d'un nombre de politiciens qui dépasse à ce point le nombre de politiciens que l'on peut retrouver dans un État comme la Californie.

Le député d'Algoma a dit ceci: «Nous ne pourrons pas retarder indéfiniment l'accroissement du nombre de sièges à la Chambre, mais nous voulons savoir à quelle vitesse leur nombre croîtra».

Le comité n'a pas répondu à cela. Dans son rapport, il n'a même pas proposé de solution pour réduire l'accroissement du nombre de sièges, dans l'avenir. Il a dit qu'il fallait examiner cette question, que le Parlement devrait en être saisi. C'est ce qu'il devait faire lui-même, mais il n'en a rien fait.


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Le député de Bramalea-Gore-Malton a fait la déclaration suivante: «. . . la Chambre serait bien plus efficace et efficiente s'il y avait beaucoup moins de députés que maintenant et que ce soit un nombre fixe».

Le secrétaire d'État (Affaires parlementaires), député libéral, nous a donné son avis en ces termes: «Enfin, selon la formule actuelle,. . . les résultats du recensement de 1991 donneront lieu à une augmentation du nombre de sièges à la Chambre des communes, soit de 295 à 301, ce qui me préoccupe, étant donné les restrictions financières du moment».

(1215)

Je pourrais vous rappeler aussi ce qu'ont dit quelques autres députés. Le député de Carleton-Gloucester, un député libéral, a déclaré ceci:

À ce rythme-là, on en arrivera, en 2050 ou en 2090, à un point où la Chambre ne sera plus assez grande pour contenir tous les nouveaux députés. Il faudra la démolir et la reconstruire pour pouvoir y ajouter tous les nouveaux sièges. Quand on regarde ce qui se passe chez nos voisins du Sud, on constate qu'il n'y a que 100 sénateurs pour une population d'environ 250 millions d'habitants.
Il y a eu littéralement des douzaines de députés libéraux qui ont parlé en faveur de ce que le Parti réformiste propose. Nous comptons sur leur appui quand viendra le moment de voter sur cette question.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, je dois féliciter le député pour son discours. C'est la première fois que j'entends un aussi bon discours de la part d'un député réformiste à la Chambre depuis le début de la législature. La raison principale est que mon collègue a constamment cité des députés libéraux. S'il continue de le faire, il occupera rapidement la place de son chef qui ne cite pas suffisamment les libéraux. Je suis sûr que s'il le faisait, sa popularité monterait dans les sondages au lieu de descendre.

Je voudrais poser une question sérieuse au député. Il s'est attardé dans son discours aux avantages d'une Chambre réduite et a proposé le chiffre de 265 députés. Selon lui, nous pourrions y arriver en abolissant la clause de droits acquis qui protège certaines provinces.

Je me demande si mon collègue et le député de Kindersley-Lloydminster ont consulté les habitants de la Saskatchewan à ce sujet. Je me demande si mon collègue a été franc et leur a dit qu'une fois la clause de droits acquis abolie, la province perdrait quatre sièges et qu'en cas de remaniement de la carte électorale fondé sur la population, la Saskatchewan perdrait cinq sièges.

Le député a-t-il informé les habitants de la Saskatchewan, dans des envois collectifs et d'autres documents ou par le truchement d'annonces publiques que si la politique réformiste était adoptée la province perdrait cinq sièges? A-t-il informé la population du Manitoba du nombre de sièges que perdrait cette province? A-t-il dit aux habitants de Terre-Neuve et de la Nouvelle-Écosse combien de sièges ils perdraient? A-t-il établi avec les députés du Bloc et d'autres députés combien de sièges le Québec perdrait?

Nous devons tenir compte de ces faits. Si la taille de la Chambre est réduite à 265 sièges, nous devrons tenir compte du fait que plus de la moitié des provinces verront le nombre de leurs représentants à la Chambre diminuer. Je ne crois pas que les provinces soient prêtes à l'accepter, et surtout pas la province de la Saskatchewan dont la députation à la Chambre serait décimée.

Je sais que le député de Kindersley-Lloydminster voudrait pouvoir répondre, mais le député de Calgary-Ouest a déclaré que Calgary n'a pas besoin de plus de députés. Je suis d'accord pour dire que cette ville n'a pas besoin de plus de députés réformistes. Elle en a plus qu'assez. Les citoyens de Calgary auraient cependant intérêt à avoir une représentation libérale et un accroissement du nombre de sièges augmenterait leurs chances à cet égard. Mon collègue le sait bien.

L'Alberta n'obtient pas de nouveaux sièges mais je me souviens que lorsqu'il a été question de retarder la mise en oeuvre de la représentation préalablement proposée par les commissions de délimitation, la Colombie-Britannique, dont le ministre du Revenu national est originaire, a protesté énergiquement contre le fait qu'elle n'obtiendrait pas les deux sièges supplémentaires auxquels elle avait droit en vertu du projet actuel qui prévoit 301 sièges.

Le ministre a protesté. Le député le sait bien. Il y a eu un tollé dans la population. Il y a eu des éditoriaux, des appels téléphoniques, un énorme cri de protestation devant la perspective de perdre ces deux sièges.

S'il en a été ainsi en Colombie-Britannique, je doute que les habitants de la Saskatchewan réclament à grands cris que leur députation à la Chambre soit réduite de cinq sièges. C'est pourtant ce que propose le Parti réformiste. Je crois que si cette solution était adoptée et que des élections avaient lieu à la suite d'un remaniement de ce genre, tous les députés réformistes de la Saskatchewan seraient chassés, y compris le très compétent député de Kindersley-Lloydminster.

Qu'en pense le député?

M. Harper (Calgary-Ouest): Madame la Présidente, l'objectif essentiel de mon intervention était d'illustrer ce que nos concitoyens disent à propos de la représentation parlementaire, à savoir qu'ils n'ont pas besoin de plus de députés. En effet, comme nous le constaterons probablement dans cette mesure législative, ils n'ont pas besoin de plus de députés qui se disent en faveur de telle ou telle chose, mais qui votent contre quand leur parti le leur demande.

En Saskatchewan, par exemple, il importe peu qu'il y ait 14 députés, ou bien 20 ou 28, s'ils ne représentent pas leurs électeurs à la Chambre des communes quand vient le moment de voter.

(1220)

Les gens d'en face jouent sur les mots. Les Canadiens ne sont pas aussi idiots que certains propos veulent bien le laisser croire. Ils comprennent que, en vertu de notre Constitution-il y en a qui ont du mal à se mettre cela dans la tête-la représentation à la Chambre des communes est fonction de la population et la voix


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de la Saskatchewan, qu'elle soit représentée par 14 des 301 députés, par 12 des 280 députés ou encore par 10 des 250 députés, reste la seule et même voix. Tout ce qui importe, c'est de savoir si la même voix, en tous points la même, va nous coûter davantage ou moins cher.

Il faut se rendre à l'évidence: les gens sont bien conscients que, si aucune province ne vient jamais à perdre des sièges et que la représentation est fondée sur la population, la seule façon de maintenir le statu quo à ce chapitre est d'augmenter à jamais le nombre de députés à la Chambre des communes. Les gens comprennent cela. À mon avis, ce ne sont pas les grandes envolées de certains orateurs qui vont changer quoi que ce soit à cette constatation au sein de la population. Il est malheureux que nous ne nous soyons pas attaqués à ce problème.

Sincèrement, si le gouvernement libéral avait adopté notre proposition, les électeurs auraient fait très bon accueil à ce geste. C'est ce qu'on entend dire en Saskatchewan, comme me l'a confirmé le député de Kindersley-Lloydminster, c'est ce qu'on entend dire en Alberta, tout comme c'est ce que nous lisons dans le courrier qui nous vient de tous les coins du pays.

M. Andy Mitchell (Parry Sound-Muskoka, Lib.): Madame la Présidente, je prends la parole pour traiter du remaniement électoral, notamment, de la motion qui a été déposée aujourd'hui.

Je tiens d'abord à féliciter le comité de la procédure et des affaires de la Chambre pour l'excellent travail qu'il a accompli. Je suis également très heureux qu'on utilise pour la première fois une nouvelle procédure, à savoir que le comité recommande l'adoption du projet de loi. C'est un système avantageux qui a bien fonctionné dans ce cas-ci et qu'on devrait employer plus souvent à l'avenir.

Si je prends la parole aujourd'hui, c'est aussi parce que la question du remaniement électoral a des répercussions très importantes sur ma circonscription. Elle a des conséquences très importantes pour tout le nord de l'Ontario et, bien sûr, pour toutes les régions rurales du Canada. Dans ces régions, les défis que posent la représentation et la répartition ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux que doivent relever les régions urbaines.

Dans les régions rurales, nous sommes aux prises avec le déclin des populations. Il est également difficile d'essayer de représenter de vastes régions et de trouver des moyens de communiquer avec nos électeurs. Les communications ne sont pas difficiles dans de très petites régions urbaines. Mais elles revêtent beaucoup d'importance lorsqu'il faut compter quatre ou cinq heures pour se déplacer d'un bout à l'autre d'une circonscription.

Dans les grandes circonscriptions du Nord, nous sommes également aux prises avec la question de la diversité: diversité des populations, des industries et de la géographie, comme je l'ai mentionné. Ce sont là des défis particuliers auxquels doivent faire face les habitants des régions rurales du Canada, du nord de l'Ontario et de ma circonscription dans toute cette question de remaniement électoral.

Je voudrais maintenant aborder trois aspects précis. Le premier est le plafonnement du nombre de députés à la Chambre des communes et l'écart de 25 p. 100. Le deuxième est l'idée d'un processus de consultation publique qu'on présente dans cette proposition. Le dernier, et non le moindre, est la définition de communauté d'intérêts. C'est une notion très importante dont je voudrais parler très brièvement.

Pour ce qui est du plafonnement et de l'écart de 25 p. 100, j'estime que le rapport du comité établit un bon équilibre entre ce qui existait essentiellement auparavant, c'est-à-dire un accroissement sans restriction du nombre de sièges à la Chambre, et une proposition permettant d'accroître de façon modérée le nombre des députés.

Le rapport du comité m'a encouragé, parce que nous avons évité toute la chicane constitutionnelle qui aurait pu s'ensuivre si nous avions appliqué certaines autres recommandations, comme celles que présente le parti d'en face. Ce n'est pas le moment de discuter de détails constitutionnels, mais bien de s'attaquer à nos problèmes économiques. Je suis heureux que le comité ait jugé bon de nous éviter cette avenue.

En étudiant les idées contenues dans ce plan, il faut garder à l'esprit qu'il importe que les députés soient en mesure de bien représenter leurs électeurs. Tous les députés à la Chambre veillent à servir efficacement un grand nombre d'électeurs. Dans mon cas, mon bureau répond à quelque 900 appels téléphoniques par mois. Nous recevons près de 100 lettres par jour. Nous assistons à un grand nombre d'assemblées publiques tenues aux quatre coins d'un vaste territoire.

(1225)

Tous les députés doivent relever de pareils défis pour parvenir à représenter leurs nombreux électeurs. C'est une partie importante de notre travail. Nous devons écouter nos électeurs, prendre connaissance de leurs points de vue et en faire part à la Chambre. Si nous décidons de restreindre le nombre de députés sur un territoire où la population augmente sans cesse, notre capacité de représenter nos électeurs sera menacée.

Je suis heureux que ce rapport ait pu équilibrer les choses entre l'objectif de restreindre le nombre de députés, ce que nous devons faire pour des raisons financières, et celui d'assurer un nombre suffisant de députés pour que la population soit bien représentée. Je crois que c'est ce que fait cette proposition.

J'ai aussi été heureux de voir qu'on a maintenu la règle des 25 p. 100. Je pense que c'était absolument nécessaire pour un certain nombre de raisons, la première étant les facteurs géographiques. Il faut limiter la superficie des circonscriptions. Si un député doit faire six, huit et même parfois dix heures de route pour traverser sa circonscription d'un bout à l'autre, comme c'est le cas pour certains députés du Nord, il devient très difficile d'assurer une représentation efficace. Je crois que le maintien de la règle des 25 p. 100 assurera la souplesse nécessaire pour que ces facteurs soient pris en considération.


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Il faut aussi tenir compte de la nécessité d'offrir un service un peu différent aux électeurs des régions rurales, par rapport à ce qui se fait dans les zones urbaines du Canada. Selon moi, il faut répondre à ces besoins spéciaux du Canada rural, dont j'ai déjà parlé à la Chambre. Je pense que la souplesse qu'offre la règle de 25 p. 100 le permettra.

Ce qui est plus important, du moins en ce qui me concerne, c'est que cette règle de 25 p. 100 et la souplesse qu'elle offre nous permettront d'observer les lignes directrices sur la communauté d'intérêts prévues dans cette mesure législative. Je parlerai de ces lignes directrices dans quelques instants.

Je tiens à féliciter sincèrement le comité pour le processus de consultation populaire qu'il a recommandé dans le projet de loi. Je crois que, une fois qu'il aura été mis en oeuvre, on s'apercevra que c'est un processus de consultation de loin plus efficace, certainement beaucoup plus transparent et efficient. Je vais m'arrêter brièvement sur ces trois points.

Premièrement, l'efficacité de la consultation. L'idée que nous allons pouvoir tous les cinq ans nous rendre dans chaque circonscription ou chaque province pour réviser les limites des circonscriptions électorales quand la marge de 25 p. 100 a été dépassée signifie que nous serons mieux en mesure de veiller de façon efficace et efficiente à ce que la représentation soit proportionnelle.

Il est également important que le comité ait suggéré que, après s'être rendues sur place et avoir écouté les recommandations des Canadiens, les commissions ne soumettent pas seulement un projet à prendre ou à laisser, mais plusieurs projets afin que les personnes chargées d'examiner la question aient devant elles un certain nombre d'options sur lesquelles se fonder pour apporter leur contribution et s'entendre sur ce qui leur semble être la meilleure solution. Il n'y a pas de doute que le système recommandé par le comité est transparent.

Selon ce nouveau système, les deux membres de la commission nommés par le Président seront choisis au terme d'une campagne de recrutement publique. Le processus suivi par le Président pour doter ces commissions de personnel sera ouvert à tous et, en outre, le Parlement pourra remettre en question le choix de candidats et, le cas échéant, déposer une motion devant la Chambre rejetant ces derniers. Donc, on le voit, le processus mis en place sera des plus transparent.

Ensuite, toujours au chapitre de la transparence, conformément à cette mesure législative, la commission devra dès l'abord révéler les paramètres qui guideront la révision des limites des circonscriptions électorales. L'un des inconvénients du processus actuel est que le seul moment où nous pouvons y participer en tant que Canadiens, et où les électeurs ont leur mot à dire est une fois que tout le travail est fini et que les résultats sont déposés sur le Bureau.

Je pense que le fait que les lignes directrices soient rendues publiques avant le début du processus est important. La participation des Canadiens, qui est indispensable, est ainsi garantie. Il est très important que le processus soumis aux députés dans cette mesure législative soit exactement le même pour le grand public.

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Les députés qui sentiront le besoin de faire part de leur opinion pourront le faire lors de réunions organisées dans le cadre d'une consultation publique, et non seulement dans le cadre d'un processus séparé ayant lieu dans cette Chambre. Je me réjouis de voir que les députés participeront au processus au même titre que tous les autres électeurs.

Je pense que l'efficacité sera la marque de ce processus. L'un des faits les plus importants est que si les paramètres ne sont pas dépassés, si les variations de population ne sont pas suffisantes, si l'écart ne dépasse pas les 25 p. 100, une commission ne sera pas mise sur pied et il n'y aura pas lieu de réviser les limites.

C'est un changement majeur par rapport à ce qui se fait à l'heure actuelle; en effet, même faute de changements, les limites doivent être révisées. Cela va permettre au gouvernement fédéral et aux contribuables canadiens de faire des économies substantielles. Je suis très en faveur de cela.

Je pense aussi que les Canadiens seront très heureux de voir que le gouvernement, dans ce cas précis, va cesser de faire quelque chose qui était inutile. C'est une initiative que j'appuie sans réserves.

La troisième chose dont je voudrais parler est la question de la communauté d'intérêts et le fait qu'on la définit très clairement dans la mesure législative. Je pense que c'est vraiment crucial. En Ontario, et en particulier dans ma circonscription de Parry Sound-Muskoka, le manque d'attention au principe de la communauté d'intérêts a créé beaucoup de difficultés lorsque les recommandations ont été présentées.

Je voudrais citer quelques exemples de la façon dont cela s'est passé en prenant ma circonscription comme modèle. Une des stipulations de la communauté d'intérêts est l'économie locale. Ma circonscription est constituée des districts de Parry Sound et de Muskoka. Les deux ont en quelque sorte un marché commun en matière de tourisme. En vertu de la proposition qui avait été déposée, ces deux régions auraient été divisées sans tenir compte du fait qu'elles ont une industrie commune, un même marché touristique.

Au chapitre des traditions, la communauté d'intérêts doit prendre l'histoire en considération. Dans le cas de ma circonscription, elle existe depuis un demi-siècle. C'est quelque chose dont on n'a pas tenu compte lors du précédent découpage, et la circonscription éclatait en trois morceaux rattachés à d'autres. Le projet de loi dit clairement que les limites traditionnelles constituent un élément important.

Il mentionne également la nécessité de faire une distinction entre les régions urbaines et les régions rurales. En ce qui concerne la circonscription de Parry Sound-Muskoka, on allait prendre une région essentiellement rurale et lui adjoindre à peu près 20 000 personnes d'un centre urbain. On se serait retrouvé avec une circonscription qui n'était plus exclusivement rurale ni ex-


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clusivement urbaine, mais avec un mélange dépareillé des deux, qu'il aurait été très difficile de représenter.

De plus, au chapitre de la communauté d'intérêts, il est question de frontières naturelles. Je crois qu'il s'agit d'un point important. Dans le nord de l'Ontario, il y a un grand nombre de telles frontières qu'il convient de respecter quand on essaie de délimiter une circonscription qui a du bon sens.

Celle de Parry Sound-Muskoka par exemple est bornée au nord par une rivière, au sud par une autre rivière, à l'ouest par la baie Géorgienne et à l'est par le parc Algonquin. Voilà les frontières naturelles qui ont servi à délimiter ma circonscription. Les limites ont été révisées sans tenir compte des intérêts communs, si bien qu'elles n'avaient plus d'allure.

Je trouve très encourageant que l'on ait renforcé considérablement cet aspect de la mesure législative. C'est une bonne idée.

En conclusion, j'appuie le projet de loi parce que j'y vois un juste équilibre entre la nécessité de limiter le nombre de députés et celle d'en avoir un nombre suffisant pour assurer une bonne représentation. Je l'appuie parce qu'il prévoit un meilleur processus de consultation publique, processus auquel les Canadiens et les Canadiennes vont pouvoir prendre une part active.

Enfin, je l'appuie parce que la disposition relative à la communauté d'intérêts a été renforcée, ce qui va favoriser la constitution de circonscriptions plus homogènes.

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Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Madame la Présidente, je ne doute aucunement de la sincérité du député de Parry Sound. Il semble très sincère. Je crains toutefois qu'il ne rejette les observations des réformistes comme étant des chinoiseries constitutionnelles. Il dit se rendre compte que les changements proposés entraîneront des coûts.

Je m'inquiète parce qu'il ne semble pas reconnaître nos besoins financiers. La situation financière du Canada est pire que jamais et il faut admettre que nous avons là une façon, proposée par les réformistes, de réduire le nombre des députés.

Nous savons tous que chaque député coûte environ un million de dollars. Je rentre de Washington, où j'ai rencontré des parlementaires et des électeurs au cours de la dernière semaine. Nous avons vraiment parlé de ce sujet. Ces gens m'ont dit être satisfaits de leur représentation. Comme les députés le savent, il y a plus de 400 représentants pour 270 millions d'habitants aux États-Unis. Nous avons le dixième de cette population.

Je voudrais que le député m'explique pourquoi il ne faudrait pas trop s'en faire au sujet de l'aspect financier de cette question.

M. Mitchell: Madame la Présidente, je remercie la députée pour ses observations. Il est exact que nous devons tenir compte des problèmes financiers du Canada en étudiant cette question.

Je crois d'ailleurs que ces propositions en tiennent compte et cela, pour diverses raisons. Tout d'abord, le nouveau processus sera nettement plus efficace. Il permettra des économies simplement du fait qu'il est prévu que, s'il n'y a eu aucun changement dans une province, si la population n'a pas changé ou s'il n'y a pas d'écart dans les circonscriptions, le processus ne s'appliquera pas.

Nous réaliserons donc de bonnes économies. Cette recommandation est dans le projet de loi et c'est une des raisons pour lesquelles je l'appuie. J'y suis favorable aussi parce que la question me préoccupe beaucoup. Le document propose notamment 265 sièges. Pourquoi pas 220, 210, voire 150?

Un principe important qui est en jeu ici, c'est que, à titre de parlementaires, nous devons, entre autres, représenter les électeurs. Si nous réduisons le nombre des députés au point où cette représentation devient impossible, le gouvernement devient une bureaucratie.

Nous avons besoin d'un contrôle gouvernemental venant de la Chambre des communes, non pas de tous les édifices de la région d'Ottawa, mais bien de la Chambre des communes. Pour que la Chambre contrôle le gouvernement, sa façon de fonctionner, il doit y avoir un nombre suffisant de députés pour y parvenir.

C'est pourquoi l'équilibre que propose ce projet de loi entre une très faible croissance et un nombre suffisant de représentants pour contrôler le gouvernement est important et, au bout du compte, permettra vraiment de réaliser des économies.

Enfin, si nous envisageons une mesure qui exige une modification constitutionnelle, il nous faudra l'accord unanime des dix provinces, ce qui entraînerait des coûts que nous ne voulons certainement pas engager.

M. Brent St. Denis (Algoma, Lib.): Madame la Présidente, j'ai écouté avec un vif intérêt le discours du député. Comme il a l'habitude de le faire, celui-ci a formulé clairement et succinctement d'excellents arguments, qui appuient non seulement cette mesure législative mais qui tiennent compte aussi des besoins du Canada rural, notamment le nord de l'Ontario.

J'aimerais que le député dise quelques mots sur la règle d'écart de 25 p. 100. Je pense que, tout comme moi, le député est conscient du fait qu'il est pour le moins difficile de concilier les besoins des populations rurale et urbaine du Canada. Nous sommes à même de le constater dans le débat qui fait rage sur la question du contrôle des armes à feu.

Dans un monde parfait, ceux qui vivent en milieu rural ne paieraient pas leur essence plus cher et auraient accès aux mêmes soins de santé que les personnes qui vivent en milieu urbain.

Compte tenu qu'il faut établir un équilibre entre les besoins des populations rurale et urbaine au pays, ça n'a pas de sens de vouloir appliquer une définition stricte selon laquelle tous les


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Canadiens, peu importe où ils vivent, ont un seul vote de même valeur. Cette formule a donné de bons résultats jusqu'à maintenant, bien qu'il existe certains problèmes. J'aimerais que le député, qui appuie le nord de l'Ontario et les autres régions rurales du Canada, donne quelques explications sur l'importance de cette règle d'écart.

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M. Mitchell: Madame la Présidente, je tiens à remercier le député d'Algoma pour avoir soulevé ces points précis et pour avoir insisté sur la règle des 25 p. 100.

Comme moi, le député représente une circonscription du nord de l'Ontario et nous éprouvons tous les deux beaucoup des problèmes associés à la représentation d'une vaste région rurale.

Le député a parfaitement raison. Il nous faut pouvoir bénéficier de la souplesse de la règle des 25 p. 100. C'est particulièrement important dans les régions rurales du Canada. Nous avons besoin de la souplesse qu'elle offre sur le plan géographique. La proposition avancée comporte des aspects qui pourraient vouloir dire que la circonscription du député-et il me corrigera si je me trompe-s'étende de la baie d'Hudson au lac Huron, formant une large bande entre ces deux points. Nous pouvons tous nous imaginer ce que cela représenterait sur la carte de l'Ontario.

On ne peut pas laisser faire une telle chose. Il est impossible de représenter une circonscription aussi étendue. Lorsqu'on connaît la région et qu'on sait à quel point les localités y sont éloignées les unes des autres, on comprend toute l'importance de la règle des 25 p. 100.

Une chose dont le rapport traite et à laquelle le député a fait allusion, c'est toute la question de l'équilibre. Il faut établir un équilibre entre les besoins des régions rurales du Canada et ceux des régions urbaines. Ce n'est pas une question de tout ou rien où l'on s'en tient strictement à la lettre et aux chiffres pour tracer des lignes sur la carte. Ce n'est pas comme cela qu'il faut s'y prendre. Il faut tenir compte des défis spéciaux que pose le Canada rural. Il faut tenir compte de certains besoins spéciaux découlant de la géographie, de la diversité des secteurs industriels et de beaucoup des choses dont j'ai parlé.

Le député a parfaitement raison de signaler l'importance de l'écart de 25 p. 100 pour ceux d'entre nous qui représentent le nord de l'Ontario ou l'une ou l'autre des circonscriptions du Canada rural.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le discours prononcé par mon collègue, un député d'une circonscription rurale. Je représente, moi aussi, une circonscription rurale.

Au paragraphe 19(2) du projet de loi, le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre propose, entre autres critères de détermination des limites des circonscriptions électorales, le souci de faire en sorte que la superficie des circonscriptions ne soit pas trop vaste. C'est d'ailleurs ce que le député vient de mentionner. Dans le projet de loi, on parle aussi au paragraphe suivant de «la probabilité que la population de la circonscription augmentera considérablement au cours des cinq prochaines années». Autrement dit, le député affirmera que sa circonscription, située en Ontario, devrait être passablement réduite, disons de près de 25 p. 100, à cause de sa taille actuelle. Le problème, c'est que sa collègue, la députée de Mississauga, soutiendra, elle aussi, que sa circonscription devrait englober 25 p. 100 moins d'habitants, puisqu'elle devrait connaître un essor démographique notable.

Les députés ne peuvent pas avoir, tous les deux, gain de cause. L'un devra avoir la préséance sur l'autre. Je voudrais savoir si le député croit que la superficie devrait être le principal critère et si les circonscriptions rurales devraient demeurer petites ou s'il devrait céder le pas à ses collègues des régions urbaines qui soutiennent que la taille de leur circonscription doit être réduite en prévision de la croissance démographique et compter moins d'habitants que le quotient de référence.

M. Mitchell: Madame la Présidente, je répondrai simplement que le Parti libéral est toujours à la recherche d'une solution équilibrée. Il ne s'agit pas, ici, d'une proposition dichotomique. La députée représente une région urbaine et a un besoin particulier; nous en tiendrons compte. Le député représente une circonscription rurale et a, lui aussi, un besoin particulier; nous en tiendrons compte. Nous trouverons un juste milieu et une solution qui contiendra des éléments susceptibles d'aider la députée d'une région urbaine et le député d'un secteur rural. La situation n'a rien de dichotomique.

Je serai franc, les députés d'en face ne se rendent jamais compte que la situation n'est pas toute blanche ou toute noire. Il y a des zones grises. Nous pouvons faire des compromis et trouver un juste milieu.

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M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Madame la Présidente, j'espère que l'on ne me rappellera pas au Règlement si je commence mon intervention en parlant de principes. Nous n'en entendons pas beaucoup parler à la Chambre. Parfois, nous semblons oublier leur importance. Pourtant, se sont les principes qui devraient nous guider. Comme l'a déjà dit Yogi Berra: «Si vous ignorez où vous allez, vous pouvez bien vous retrouver ailleurs.»

Comme le vérificateur général l'a déclaré récemment, peut-être d'une façon qui marquera moins les esprits, ce qui n'enlève rien à la justesse de ses paroles: «Si vous n'avez pas une idée claire des objectifs d'un programme, d'une loi ou d'une politique, et si vous ne disposez pas de critères précis pour l'évaluer, vous ne saurez jamais s'il a été efficace.» Bien sûr, le vérificateur général pensait d'abord et avant tout au feu de joie des contribuables que l'on appelle le budget fédéral. Cela ne m'empêche pas d'appliquer le même principe au projet de loi C-18.

Les limites des circonscriptions électorales, quel sujet passionnant! Le projet de loi C-18, sur la délimitation des circonscriptions électorales, contient, à l'article 19, paragraphe 2, alinéa b), sous-alinéa (i), une disposition qui va provoquer la panique parmi les fabricants de somnifères. On pourrait aussi croire qu'il s'agit d'un sujet n'ayant rien à voir avec les principes, d'une question que l'on pourrait régler dans une salle retirée, libre de fumée.

Je prends très au sérieux la remarque de M. Berra. Je crois qu'une personne qui n'a pas de convictions politiques et prétend être un pragmatique est soit un socialiste qui tente de cacher ses


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convictions, soit une personne tout simplement inconsciente de ses motivations.

Prenons le projet de loi et tout particulièrement la disposition où il est dit que les commissions, en délimitant les circonscriptions électorales, devront tenir compte d'une «communauté d'intérêts». C'est à l'article 19, paragraphe 2, alinéa b), sous-alinéa (i), comme je l'ai dit.

Pourquoi une telle disposition? C'est en raison des hypothèses implicites, ou explicites de mes collègues ministériels au sujet du gouvernement. C'est en raison de leurs hypothèses sur la démocratie et la politique. Tout cela se ramène à l'idée que le processus électoral n'a pour but que de faire valoir les fameuses paroles de H.L. Mencken «encan anticipé sur propriété volée».

Le but de la création de circonscriptions où il y aurait une communauté d'intérêts est de réunir des gens qui, ensemble, auraient une tendance naturelle à se regrouper pour enlever quelque chose à leurs concitoyens par l'intermédiaire du processus politique. Il s'agit, comme qui dirait, d'uniformiser les règles du jeu pour permettre le pillage politique.

Pendant l'élaboration du projet de loi, je sais que les députés de ce côté-ci de la Chambre ont lutté pour amener le gouvernement à modifier sa définition officielle de communauté d'intérêts. Si nous regardons au paragraphe 19(4), nous voyons que la liste des éléments de la communauté d'intérêts est raisonnablement anodine selon les normes contemporaines. Les références à la race et à l'appartenance ethnique ont disparu.

En passant, j'espère que l'idée d'élections sénatoriales basées sur le sexe est morte et enterrée pour de bon. Je ne suis pas aussi sûr que j'aimerais l'être que ces idées sont bien disparues. On a peut-être éliminé des mots sur les circonscriptions délimitées en fonction de l'origine ethnique ou raciale sans pour autant renoncer à l'idée. Je suis très inquiet de constater que la liste du paragraphe 19(4) n'est pas exhaustive. Les commissions tiendront compte de ces facteurs, mais pas des autres.

Il existe un risque réel de voir les commissions tenter de créer des circonscriptions à très forte majorité indo-canadienne ou sino-canadienne, par exemple. J'espère qu'elles ne le feront pas. Je l'espère sincèrement. Je suis horrifié à l'idée que des gens ne puissent être représentés que par des gens qui leur ressemblent physiquement. J'espère que personne ne croit que certains de mes collègues sont plus ou moins aptes à représenter leurs électeurs en raison de leur origine ethnique ou de celle de leur électeurs.

L'idée que les Sikhs, les Indiens, les Chinois ou les Anglo-Saxons devraient tous être regroupés dans une même circonscription afin de pouvoir élire un Sikh, un Indien, un Chinois ou un Anglo-Saxon pour les représenter au Parlement est la manifestation la plus choquante de la notion selon laquelle les circonscriptions électorales devraient en principe regrouper des gens ayant un intérêt commun afin qu'ils puissent élire quelqu'un comme eux. Sa corollaire c'est que les gens devraient se regrouper avec leurs semblables pour élire quelqu'un qui leur ressemble et pour profiter ensemble de l'assiette au beurre. À mon avis, ce n'est pas ça la politique, ce n'est pas ça la démocratie et ce n'est pas de cette façon que les limites des circonscriptions électorales devraient être établies.

(1250)

Je crois que le but du gouvernement est de protéger la vie, les libertés et les biens des citoyens. Si un gouvernement ne peut pas protéger ses citoyens, il ne vaut rien. Le problème, c'est que tout gouvernement qui est assez fort pour protéger la vie, les libertés et les biens de ces citoyens est également assez fort pour être lui-même une menace. C'est le paradoxe du gouvernement, un paradoxe qui a préoccupé tous les philosophes politiques sérieux.

Une des solutions qui s'est dégagée de la pratique britannique et de la philosophie politique anglo-américaine est l'élection des titulaires de charge publique. C'est un point essentiel. L'élection des titulaires de charge publique est un moyen d'empêcher que le gouvernement ne devienne trop puissant et non un moyen de légitimer ce qu'il fait. La raison, c'est que tous les citoyens ont le même intérêt fondamental, soit avoir un gouvernement qui respecte leurs droits.

Les Canadiens n'entrent pas dans l'isoloir pour voler leurs concitoyens, du moins cela ne devrait pas être le cas. Ils le font pour porter un jugement sur la façon dont le gouvernement a protégé leurs droits.

En 1964, dans une campagne donquichottesque pour accéder à la présidence des États-Unis, le sénateur Barry Goldwater a abordé cette question. Il a dit qu'il ne ferait pas de pillage politique. «Si on me reproche d'avoir négligé les intérêts de mes électeurs», a-t-il dit, «je répondrai que j'ai compris que leur intérêt fondamental est la liberté et que je fais tout ce que je peux dans ce sens.»

Je considère que les intérêts de mes électeurs, qui qu'ils soient, sont fondamentalement les mêmes que ceux de tous les Canadiens. Ils veulent un gouvernement qui les protège contre la force et la fraude et qui les laisse libres de faire leurs affaires comme bon leur semble. C'est pourquoi nous n'avons pas besoin de circonscriptions où il y a «communauté d'intérêts», mais bien des circonscriptions où tous les citoyens sont traités de façon égale. Par conséquent, au nom de mes électeurs, je voterai contre ce projet de loi.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais dire dès le début de mon intervention à quel point mes collègues et moi avons apprécié le climat de collégialité qui a régné au cours des travaux du comité dont nous examinons aujourd'hui le rapport. J'ai beaucoup aimé en effet les échanges d'opinions avec les députés du Bloc québécois et avec ceux du Parti réformiste au comité. Ce fut un bon processus dialectique et un excellent échange d'idées. C'est dans cet esprit que j'interviens maintenant dans le débat.


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J'ai été impressionné par les remarques des députés de Kindersley-Lloydminster et de Calgary-Ouest, qui ont soutenu que le projet de loi négligeait de s'attaquer à ce qui leur paraissait être le problème essentiel, c'est-à-dire la taille de la Chambre des communes. Vous en trouverez plusieurs de ce côté-ci de la Chambre qui sont d'accord pour dire que tout ce principe a besoin d'un réexamen et d'un changement en profondeur.

Nous devons cependant prendre en considération la quantité de modifications qu'il faudrait peut-être apporter à la Constitution pour restructurer la taille de la Chambre afin qu'elle corresponde mieux aux réalités sociologiques actuelles du Canada. Quand on songe à la quantité d'efforts que cette entreprise pourrait exiger et au fait que ce processus pourrait prendre plusieurs années, je me demande bien s'il est correct de considérer cette mesure comme un projet de loi omnibus qui devrait résoudre d'un seul coup tous les problèmes de la législature actuelle. Je la considère plutôt comme un projet de loi axé sur un seul problème auquel elle veut remédier dans un but bien précis. Compte tenu des réalités actuelles, cette mesure doit être soumise à une autre Chambre avant de pouvoir être adoptée.

Je crois qu'il est juste en ce sens de dire qu'il vaut mieux remettre le problème de la taille de la Chambre à plus tard et de le confier peut-être à un autre comité. Je ne vois aucune raison pour qu'on ne puisse pas s'attaquer à ce problème au cours de la présente législature. En ce qui a trait cependant à ce problème en particulier, je crois que nous avons un tas de problèmes en ce qui concerne la représentation électorale.

(1255)

J'ai noté plus particulièrement dans l'intervention du député de Kindersley-Lloydminster qu'il n'avait pas parlé seulement de la taille de la Chambre, mais aussi d'autres principes, notamment la question de l'écart de population entre les circonscriptions, à propos de laquelle il avait évoqué la nécessité d'établir une priorité de critères pour la délimitation des circonscriptions électorales.

Il a employé une expression sur laquelle je reviendrai un peu plus tard. Il a parlé de sociologie appliquée, un concept intéressant. C'est une boîte de Pandore, mais je reviendrai là-dessus tout à l'heure, parce que c'est la clé du problème que nombre d'entre nous éprouvent au sujet des rapports des commissions de délimitation.

Ce qui m'a paru troublant, à la lecture des 11 derniers rapports, c'est une certaine anarchie intellectuelle. Autrement dit, il y avait 11 rapports, mais pas de critères communs.

En discutant de la question avec le directeur général des élections, homme de compétence exceptionnelle qui nous a fait l'honneur de nous donner des réponses franches et directes, nous avons établi que les commissions n'avaient pas consulté le directeur général pour obtenir des conseils concernant ce qui s'était fait par le passé ni sur les critères qui doivent les guider dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire que leur confère la loi actuelle.

En un sens, c'est plutôt étrange. Cela illustre la grande diversité, pour ne pas dire les divergences, qui existe dans les principes qui guident les membres de ces commissions. À l'examen de celles-ci, je constate que leur efficacité fonctionnelle est limitée à cause de la nature de la formation de leurs membres.

Il ne me plaît pas de dire cela d'une profession que j'ai exercée, mais il me semble qu'on trouve dans ces commissions un trop grand nombre de professeurs. On peut dire que ceux-ci ont un rôle honorable dans notre société. Ils sont une source d'idées. Mais devraient-ils faire les choix? N'aurait-il pas été préférable de faire appel aux professeurs à titre de conseillers et de laisser les décisions à des commissions plus représentatives de l'ensemble de la société?

C'est l'une des questions abordées dans le projet de loi dont le comité a fait rapport. Le projet de loi actuel tente de régler ce problème en établissant un nouveau processus de nomination qui devrait garantir une plus vaste représentation du grand public, une sorte de répartition plus étendue de son expérience.

Le deuxième aspect qui m'a préoccupé quand j'ai examiné ces 11 rapports, c'est l'absence de motifs. Il est question, en l'occurrence, de représentants qui ne sont absolument pas élus, qui sont nommés en vertu d'une certaine prérogative, mais qui exercent d'énormes pouvoirs discrétionnaires.

Tous les étudiants en droit administratif savent fort bien que le problème des gouvernements modernes, c'est justement l'utilisation ou l'abus que les représentants non élus font des pouvoirs discrétionnaires. Il y a des façons de limiter ces pouvoirs et de les rendre efficaces.

L'une d'elles consiste à exiger des organismes qui exercent pareils pouvoirs d'expliquer les raisons pour lesquelles ils le font. Quand j'examine ces rapports, je constate qu'il n'y est pas question des motifs. Pourquoi font-ils ceci ou cela? Il faut deviner, et l'on revient alors au point que le député de Kindersley-Lloydminster a soulevé lorsqu'il a parlé de sociologie appliquée.

Il est très facile de s'enfler la tête quand on exerce ce genre de pouvoir discrétionnaire. Il est aussi très facile, pour les mauvaises raisons, d'invoquer des motifs illicites pour dire qu'un choix politiquement justifiable a été fait.

Pour remédier à cela, il faut que les motifs soient expliqués. Un autre avantage à cela, c'est que les critères sont énoncés dans chacun des rapports. Ils peuvent très facilement faire l'objet d'un examen et d'une rectification judiciaires.

(1300)

Un des problèmes au Canada, c'est que notre Constitution n'énonce pas les principes fondamentaux du pouvoir de l'électeur. Ce pouvoir a préséance sur le pouvoir constitutionnel lui-même. Voilà le point de départ d'une société démocratique: le


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pouvoir de l'électeur; comment le gouvernement est créé; comment ses députés sont élus.

Les constitutions modernes-la nôtre date du XIXe siècle-énoncent directement ces éléments dans la charte constitutionnelle elle-même. Mieux que cela, elles énoncent les principes et elles ont des tribunaux qui fonctionnent bien, des tribunaux constitutionnels spécialisés ou des cours suprêmes traitant des cas de nature générale, qui ont une imposante jurisprudence et qui garantissent le respect de ces principes, non seulement en ce qui concerne la lettre de la loi, mais encore leur adaptation créative aux problèmes de la société moderne.

La transformation des États-Unis en une société privilégiée où le droit de vote est très restreint, non pas seulement en fonction de critères raciaux, mais encore de critères sociaux, a été grandement favorisée par le rôle que la Cour suprême des États-Unis a joué dans l'interprétation des lois. C'est un élément qui, fondamentalement, n'existe pas dans la société canadienne et que nous devons établir dans l'avenir.

Par conséquent, j'estime que c'est une objection légitime. L'une des choses qui me préoccupaient le plus quand je lisais ces rapports, c'est qu'il n'y avait pas de critères bien définis pour l'exercice de ces pouvoirs discrétionnaires. Il y avait de toute évidence de grandes différences sur le plan des faits dans les rapports d'une commission provinciale à une autre. Cela me rappelle ce qu'on disait du lord chancelier Eldon dans un autre contexte, que le tribunal de l'equity, qu'il était chargé d'administrer, se résumait à peu de choses. C'est cet élément, tel qu'énoncé par le comité, que le projet de loi tente de corriger.

Je pourrais parler plus en détail du rapport de la commission en ce qui a trait à ma province, la Colombie-Britannique. Je trouve inquiétant, compte tenu de l'évidente augmentation de la population de la vallée du Fraser, qu'aucun siège supplémentaire ne soit prévu pour cette région. On redécoupe les limites du coeur de la ville, qui est très peuplé, où la population a très peu changé. On les accumule simplement pour créer un nouveau siège. Pourquoi?

Voilà une chose qui donne lieu à des spéculations intéressantes. C'est sans doute à cause d'un concept particulier de sociologie appliquée qui n'a pas été énoncé, auquel je pourrais penser, mais que, dans les processus constitutionnels, les tribunaux devraient être en mesure d'examiner et de corriger.

Je voudrais revenir sur certaines de ces questions parce que le député de Kindersley-Lloydminster, dans son discours de ce matin, a très justement parlé de la nécessité d'établir la priorité des critères. Il faut certes dire que les critères eux-mêmes doivent être définis. Il est difficile de les ranger par ordre de priorité. La plupart des pays qui ont des lois ou des principes constitutionnels en cette matière reconnaissent qu'il y a une certaine antinomie ou contradiction entre certains de ces principes. Les commissaires ou le juge chargé de l'examen judiciaire font un choix créatif. Mais ils estiment que l'élément clé qu'on demande de la personne exerçant la discrétion consiste à dire quel critère elle préfère plutôt que tel autre et pourquoi. S'agit-il d'un choix rationnel ou, comme je l'ai déjà dit, de quelque chose qui se résume à peu de choses?

Nous ne sommes pas allés aussi loin que la Cour suprême des États-Unis. On peut franchement se demander si nous avons atteint le point où le juge Brennan mentionnait, en l'approuvant, le concept de discrimination bienfaisante lorsqu'on lui a demandé si cette forme de discrimination était acceptable parce qu'elle vise à remédier à la situation d'un groupe de personnes désavantagées plutôt qu'à rabaisser ou à insulter un groupe racial?

(1305)

Ce concept est intéressant. Il fait certainement partie de l'histoire sociale américaine et la décision était sans aucun doute justifiée dans l'optique de la Cour suprême des États-Unis.

Je crois qu'une des choses sur lesquelles il faudrait insister dans un pays doté d'un système parlementaire aussi distinct du système américain fondé sur le Congrès et la division des pouvoirs, c'est le lien particulier qui existe entre un député et ses électeurs.

Pendant la campagne électorale, qui constitue une expérience très émouvante, le porte-à-porte permet de construire une relation de confiance avec les électeurs. Le député pourra ensuite maintenir ce lien en s'occupant des problèmes que les électeurs éprouveront par la suite. J'ai constaté que, dans leurs rapports, les commissions traitaient de façon un peu cavalière le principe de la continuité de la représentation. Il s'agit là d'une valeur ancrée dans notre Constitution. C'était là l'idée favorite d'un philosophe que les partis d'opposition aiment beaucoup citer, Edmund Burke. Je ne veux pas m'attarder aux particularités de Burke, mais j'insisterai néanmoins sur la notion de proximité et de responsabilité du député envers son électorat.

L'action d'une commission de délimitation des circonscriptions électorales au Canada, dans notre système parlementaire, doit reposer au départ sur le respect du principe de la continuité. Nous ne pouvons écarter ce principe que pour des raisons que nous sommes prêts à expliquer, par exemple des déplacements de population. Les critères que le comité énonce dans son rapport constituent des lignes directrices qui faisaient en grande partie défaut jusque-là. J'aurais voulu que le comité aille plus loin, et je lui ai fait des suggestions en vue d'établir des critères plus précis.

J'ai été appuyé, je crois, par le Parti réformiste et le Bloc, mais je n'ai pas été en mesure de persuader une majorité. Pourtant, j'accepte avec plaisir une décision majoritaire. Je tiens simplement à dire que, dans ce domaine, les critères doivent être établis précisément.

Une des choses que nous avons essayé de faire, c'est de reconnaître cette notion de communauté d'intérêts. Comme quelqu'un l'a dit tout récemment, le Canada est la société du XXIe siècle. Je pense que c'est vrai. Nous avons créé une notion spéciale de culture canadienne, de communauté d'intérêts dans une expression que l'ancien premier ministre d'un autre parti a utilisée sans citer sa source initiale. Cela se produit très souvent. Cette expression venait de Martin Buber, un Austro-hongrois de naissance qui est devenu un philosophe dans le nouvel État d'Israël et qui a élaboré la théorie en question pour expliquer, ainsi que souligner la relation spéciale qui existait entre la


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majorité juive et les citoyens arabes, la notion de communauté de communautés.

Ce qui me frappe dans les sièges urbains au Canada, lorsque j'examine la carte électorale, c'est le fait que nous avons historiquement reconnu cette notion de communauté de communautés dans bien des cas, peut-être par accident. Je suis heureux de constater qu'on retrouve 22 différentes collectivités dans ma circonscription et que pour être choisi comme candidat d'un parti et obtenir une majorité dans une élection, il faut offrir un programme électoral conforme à la position de son parti et établir un consensus s'étendant à tous les groupes ou à un nombre suffisant d'entre eux.

L'une des choses qui m'inquiètent dans les rapports des onze commissions de délimitation des circonscriptions électorales dont je parle, c'est le fait que, une fois de plus, elles ont mis de côté cette notion de façon plutôt cavalière. Elles semblent vouloir revenir sur la notion du XIXe siècle des circonscriptions basées sur des communautés uniques.

Je pense que c'est intéressant, mais c'est un pas en arrière. Je parle de cela simplement pour dire que, en tant que comité, nous sommes saisis de rapports extrêmement controversés venant des commissions de délimitation des circonscriptions électorales. À la décharge des hommes et des femmes qui sont membres de ces commissions, je dois dire que ces gens ont été victimes eux-mêmes des lois qui ne précisaient pas exactement ce qu'ils devaient faire.

(1310)

Parce que c'est un homme extrêmement intelligent et d'une très grande intégrité, un homme qui a beaucoup de respect pour la Constitution, le directeur général des élections a conclu qu'il ne lui incombait pas d'essayer d'établir les critères que le Parlement lui-même n'avait pas fixés.

C'est pourquoi nous avons essayé, dans une loi exhaustive sur ce problème, de bien régler la question des limites des circonscriptions électorales et de nous concentrer sur ce problème.

J'aurais aimé également aborder la question du plafonnement du nombre de députés à la Chambre. Cependant, il semble qu'elle sera abordée dans une autre loi. Je veux simplement ajouter, en tant que député de la Colombie-Britannique, que le projet de loi garantit le maintien de notre droit constitutionnel à deux sièges supplémentaires à la Chambre des communes dans le cadre des prochaines élections fédérales, ce à quoi ma province attache beaucoup d'importance. On retrouve, dans le cas présent, une garantie absolue à ce sujet.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt le député de Vancouver-Quadra qui a siégé au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre et a, pendant un certain temps, participé très activement aux délibérations sur le processus actuellement à l'étude.

Universitaire s'étant intéressé à l'histoire et à l'état actuel de ce processus, il est en quelque sorte une autorité dans le domaine. Je vais lui demander d'enlever son chapeau d'universitaire, puisque je sais qu'il possède une certaine expérience concrète de la chose, ayant déjà siégé à une commission. De plus, il connaît très bien le contenu de la mesure législative dont le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre nous a saisis.

Il a siégé à une commission de la Colombie-Britannique et, qui sait, il répétera peut-être encore l'exploit s'il continue à multiplier les carrières. À l'intérieur et au nord de la Colombie-Britannique, on a fortement le sentiment que les circonscriptions devraient se situer à l'extrémité inférieure du quotient variable, c'est-à-dire moins 20 et non pas zéro. C'est un sentiment fortement partagé à la fois par les députés et par la population. Dans la partie sud-ouest de la Colombie-Britannique, les avis sont tout à fait contraires. Comme le député l'a fait observer, c'est que la population croît rapidement. Ces électeurs réclament qu'on tienne compte de cette croissance et que leurs circonscriptions se situent à environ 20 p. 100 sur l'échelle des moins du quotient variable.

Je sais que le député est un homme on ne peut plus impartial. Or, si lui et les autres commissaires n'étaient pas impartiaux, qu'ils habitaient le sud-ouest de la Colombie-Britannique et décidaient de représenter les vues des électeurs de cette région, plutôt que celles des habitants de l'intérieur et du nord de la Colombie-Britannique, ce projet de loi leur interdirait-il de faire preuve de partialité?

M. McWhinney: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question très sérieuse. Je n'ai jamais accepté la notion voulant qu'on applique une règle de façon absolument égale dans toutes les circonstances. Comme la Cour suprême et le juge Douglas l'ont dit, il faut traiter les choses également, mais il faut aussi user de discrétion.

Dans le respect du principe de l'égalité de la représentation, je reconnais que nous avons le droit de faire des écarts et que nous devons décemment en faire pour tenir compte des situations géographiques extrêmes qui existent, par exemple, dans le nord et dans l'intérieur de la Colombie-Britannique.

Par le passé, lorsque nous avons exercé notre pouvoir discrétionnaire à titre de commissaires à la délimitation des circonscriptions électorales en Colombie-Britannique, nous avons effectivement tenu compte de ces situations, en dépit des revendications des circonscriptions urbaines, qui exigeaient l'égalité numérique de la représentation dans toutes les circonscriptions. J'estime que, dans les paramètres établis par la loi, un commissaire exercerait un pouvoir discrétionnaire semblable.

Je me demande, et je crois que c'est également l'opinion personnelle du député d'en face, si l'écart de 25 p. 100 n'est pas trop élevé et si un écart de 15 p. 100 ne serait pas plus réaliste dans les circonstances actuelles.

(1315)

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-18. Il y a onze mois, j'ai participé au débat sur ce


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projet de loi qui suspend les travaux de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales. J'avais alors remis en question l'ingérence politique, le gaspillage de millions de dollars et le fait que nous, politiciens, participions à ce processus compliqué.

Je trouve que toute cette affaire est injuste pour le public, car nous gaspillons encore une fois l'argent des contribuables, cinq millions de dollars, et nous allons encore une fois solliciter leur participation. Les gens à qui j'ai parlé m'ont dit qu'ils avaient perdu le fil en ce qui concerne cet exercice de remaniement des circonscriptions électorales, et je dois avouer que cela m'arrive, à l'occasion. Cela commence à ressembler à une mauvaise histoire.

Certaines des choses qui ont été dites ici aujourd'hui me font clairement comprendre pourquoi les politiciens ne devraient pas participer à la délimitation des circonscriptions. Certaines des objections que l'on a entendues reviennent à cela.

Il y a onze mois, j'avais aussi exprimé mes regrets et mes préoccupations face au rejet d'un processus auquel on avait l'habitude de recourir chaque décennie, depuis 1867. J'avais dit que c'était la première fois, à ma connaissance, que le gouvernement agissait ainsi. Mon opinion n'a pas changé depuis lors.

C'est une honte que nous ayons procédé ainsi et, ensuite, que nous ayons obtenu si peu de résultats. Je pense que ce que nous avons devant nous aujourd'hui le confirme. C'est un exercice qui vient à l'encontre d'une méthode de découpage neutre qui existait depuis longtemps.

La Constitution énonce la formule à suivre pour avoir un gouvernement représentatif. Cette formule se base sur le concept de l'égalité du nombre de voix, un concept qui veut que tous les Canadiens aient une voix égale en ce qui concerne leur gouvernement. Ce concept a été modifié au cours des ans pour le bienfait de l'égalité et de la permanence. Le rapport d'aujourd'hui contribue bien peu à consolider cette notion. Nous avions espéré que le rapport serait utilisable. Cette tentative n'est pas conforme à nos normes et c'est pourquoi nous avons présenté un rapport minoritaire.

D'abord, le nombre total de sièges à la Chambre n'est pas réduit. En fait, il passe de 295 à 301, conformément à ce qui avait été proposé dans les rapports antérieurs de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales. Nous avons déjà fait cet exercice et nous sommes revenus à la case départ.

À notre avis, il est temps de réduire le coût de fonctionnement de la Chambre et une première étape fort importante serait la réduction du nombre de sièges. Il semble, selon une certaine école de pensée, que plus nombreux sont les députés, plus nombreuses sont les réalisations. Il ne faut pas confondre la quantité et l'agitation avec le progrès réel.

Le député de Calgary-Ouest a très bien décrit le plafonnement du nombre de sièges, et je n'ai pas l'intention d'épiloguer sur le sujet dans mon discours d'aujourd'hui. Toutefois, je voudrais souligner que le message est demeuré le même tout au long des travaux dans ce dossier. Étant donné que je suis un député de la Colombie-Britannique, où la situation est quelque peu particulière puisque deux des six nouveaux sièges proposés appartiendraient à cette province, je voudrais dire que nous avons été constants. Le message a toujours été le même, c'est-à-dire que le nombre de sièges soit ramené à 265 ou porté à 301: la Colombie-Britannique devrait avoir un nombre équitable de représentants, tout comme les autres provinces et territoires du pays. Nous avons entrepris cet exercice en croyant que le gouvernement libéral voulait maintenir le nombre de sièges au niveau de 1993. Ce n'est pas ce qui se produit maintenant.

(1320)

Les recommandations sur le facteur du quotient qui ont été présentées dans le rapport à l'étude aujourd'hui ne traitent pas efficacement de l'écart de 25 p. 100 ou de ce que certains appellent le facteur de variance de la population.

La Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales stipule qu'une commission doit délimiter les circonscriptions électorales de telle façon que la population de chaque circonscription se rapproche autant que possible du quotient obtenu si l'on divise le nombre total de personnes qui ont le droit de voter dans une province par le nombre de sièges pour cette province. Selon cette proposition, aucune circonscription ne peut avoir une population inférieure à 75 p. 100 de ce chiffre ou supérieure à 125 p. 100, d'où le quotient de 25 p. 100.

Selon Élections Canada, 51 des 295 circonscriptions existantes dépassent les écarts actuellement permis en ce qui a trait à la population. En suspendant la révision des limites des circonscriptions électorales, nous avons perpétué les iniquités du système actuel. La conséquence du projet de loi C-18 et de la suspension des travaux de la commission est que l'on nous propose aujourd'hui une marge de 25 p. 100. Nous devrions sans aucun doute nous attendre à une amélioration après ces délais et cette étude. Eh bien, non. En fait, ce que l'on recommande est pire et, ultimement, la situation sera pire.

Nous craignons fort que les commissions ne continuent d'être autorisées à tracer les limites de circonscriptions qui dès le départ s'écartent de 25 p. 100 du quotient électoral. Ce problème sera aggravé par les fluctuations de population qui se seront produites entre chaque révision.

Dans leur rapport minoritaire, les députés réformistes membres du comité préconisent un écart maximal permissible de 15 p. 100, pour garantir que l'égalité de pouvoir électoral l'emporte sur les considérations sociologiques.

Il est dit dans le rapport du comité que l'écart entre la population de certaines circonscriptions et le quotient électoral d'une province pourrait être supérieur ou inférieur à 25 p. 100 et que ces circonscriptions devraient être énumérées dans une annexe de la loi. Quelle contradiction. Nous sommes en train d'autoriser un écart supérieur ou inférieur à 25 p. 100. Quand on fixe un écart de 25 p. 100, il ne devrait pas y avoir d'exceptions, pas besoin d'annexe, qui plus est une annexe sans lignes directrices.

Dans l'ensemble, pouvons-nous vraiment dire que des changements substantiels ont été apportés au projet de loi? Quand on considère qu'il n'y a pas de réduction de la taille de la Chambre des communes, on ne peut que s'interroger sur la sincérité et les motifs des auteurs de ce projet de loi. On peut difficilement justifier de mettre au rancart le travail qu'ont fait les commissions de délimitation des circonscriptions électorales existantes pour arriver à ces soi-disant changements, un travail qui a coûté beaucoup d'argent aux contribuables.


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M. Derek Lee (Scarborough-Rouge River, Lib.): Monsieur le Président, de mon point de vue, c'est aujourd'hui un jour important pour le Parlement, car nous reconnaissons pour la première fois une nouvelle façon de travailler. Nous étudions aujourd'hui une motion-mais j'espère que la Chambre l'adoptera-en vertu de laquelle le gouvernement proposera une mesure législative qui a été rédigée non pas par le ministère de la Justice, non pas par un fonctionnaire inconnu que je respecte cependant en général, mais bien par des parlementaires réunis en comité.

(1325)

C'est ce qui s'est passé grâce aux nouvelles règles de procédure présentées par le gouvernement au tout début de cette législature. C'est vraiment une initiative stimulante. Je pense qu'il est juste de dire que, pour la première fois, les Canadiens auront devant eux une mesure législative préparée par leurs députés.

Je ne dis pas que c'est ainsi que tous les projets de loi devraient être préparés, mais avec cette mesure nous montrons à la population que le système fonctionne, que le Parlement fonctionne, et que nous pouvons faire un travail qui influe fondamentalement sur la façon dont les Canadiens nous perçoivent.

Nous avons devant nous une motion d'approbation d'un travail qui a été effectué par un certain nombre de députés de tous les partis qui ont travaillé plutôt dur en comité. J'étais là. J'étais du nombre des participants. Nous espérons ardemment que ce document soit approuvé et qu'il devienne un projet de loi de la Chambre des communes.

J'espère que cette expérience se renouvellera fréquemment à l'avenir. J'espère que l'administration, la fonction publique, l'exécutif et tous les avocats dont le travail est de préparer des projets de loi, commenceront à comprendre et à appuyer ce qui, j'espère, deviendra un rôle de plus en plus important pour les parlementaires, mettre sur papier leurs propos et leurs principes.

Je pense qu'au-delà de l'importance de l'étape que nous venons de franchir en préparant cette mesure, nous avons également produit une bonne mesure. Nous avons fait de notre mieux, dans le contexte politique actuel au Canada, pour parvenir à un projet qui conduira à un meilleur processus de révision des limites de circonscriptions. Nous ne parlons que du processus. Il ne faut pas penser que la mesure législative permettra aux députés de refaire le découpage des circonscriptions électorales. Il ne s'agit pas de cela du tout.

Nous avons modifié le processus selon lequel les commissions de délimitation des circonscriptions électorales procèdent au découpage électoral du pays. Nous avons pris un certain nombre de mesures pour réformer et améliorer le processus.

L'une des questions qui avaient été soumises à l'étude du comité, mais que l'on ne retrouve pas dans l'avant-projet de loi, était de savoir s'il convenait d'imposer une limite au nombre de députés siégeant à la Chambre des communes. Le comité avait reçu l'autorisation et le mandat de se pencher sur cette question dans le cadre de son examen du projet de loi, bien qu'en soi il ne porte pas directement sur ce sujet. Le projet de loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales ne fixe pas de formule pour déterminer le nombre de députés que devrait compter la Chambre des communes.

En fait, ces formules sont dans la Constitution. Ce qu'on nous avait demandé en tant que comité était de nous pencher sur les dispositions constitutionnelles qui déterminent ce nombre. Ces formules, dont il est question dans plus d'un article, prescrivent qu'en fonction de la population actuelle, le nombre de sièges à la Chambre des communes devrait être de 301 lors des prochaines élections générales, en 1997 ou 1998. À l'heure actuelle, il y en a 295. Cela représenterait donc une augmentation de six.

Ce n'est pas énorme, mais plusieurs d'entre nous au comité ont senti qu'un principe était en jeu. Je suis l'un de ceux qui ont souscrit au principe voulant que la Chambre des communes ne devrait pas pouvoir continuer à croître indéfiniment, que peut-être nous devrions imposer un plafond. Par exemple, ou pourrait dire que 295, ça suffit pour représenter les diverses régions du pays. On n'aura jamais besoin de 350 ou 400 ou même 500 députés.

(1330)

C'est l'impression que j'avais. Je pense toujours de la même façon, et je crois que nous avons une formule non limitative. Le nombre de députés grandira à mesure que la population augmentera. Cela se fera graduellement, et ce sera négligeable au fil des ans. Pour le moment, je ne crois pas que ce soit le genre de chose qui doive m'empêcher de dormir. Nous aurons six députés de plus. La Chambre peut loger six personnes de plus, même si nous commençons à être un peu à l'étroit.

La vraie question, c'est de savoir si nous voulons mettre un terme à cette croissance. Je suis de ceux qui aimeraient trouver un moyen de le faire de façon équitable pour toutes les provinces, comme le disait mon collègue de North Island-Powell River. C'est là que le bât blesse. Comment faire pour être juste envers toutes les provinces?

Deux dispositions constitutionnelles définissent actuellement cette croissance. Il y a la clause sénatoriale qui dit qu'aucune province ne doit avoir moins de députés que le nombre actuel de ses sénateurs. L'autre figure à l'article 51 de la Loi constitutionnelle et dit que les provinces dont la population diminue ne doivent pas être lésées par cette diminution. Autrement dit, le nombre de députés d'une province ne peut pas diminuer proportionnellement au déclin de sa population, même si sa population diminue par rapport au reste du pays.

Ce sont des dispositions constitutionnelles et je crois que tous les parlementaires savent que ce n'est pas le moment de chercher à modifier la Constitution. Je considère que le Parlement doit traiter de la question de sa croissance future, mais ce n'est pas le moment de remettre en question des dispositions de notre Constitution. Les Canadiens en ont plein le dos de la réforme constitutionnelle.

En tant que comité, nous n'étions tout simplement pas en mesure de régler cette question. J'ai accepté qu'un autre comité-ou peut-être le même-soit plus tard, au cours de la présente législature ou de la suivante, habilité à traiter de la question du plafonnement de la taille de la Chambre.


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Qu'avons-nous fait dans le projet de loi actuel pour améliorer la façon dont nous délimitons les circonscriptions? Cette question n'a rien à voir avec le nombre de députés ou le nombre de circonscriptions. Nous avons accepté que la population d'une circonscription donnée puisse varier de plus ou moins 25 p. 100 par rapport à la moyenne. C'est l'écart qu'on applique depuis un certain temps.

Il y a cependant des exceptions. Le député qui a pris la parole avant moi a précisé que 50 des 295 circonscriptions ne respectaient pas cette norme. Ces différences ont leur raison d'être. La Commission de délimitation des circonscriptions électorales a considéré que les écarts de population entre les circonscriptions étaient justifiés. J'admets que certaines raisons peuvent justifier l'existence de ces différences et que cette situation peut être maintenue.

Prenons ma province par exemple. En Ontario, la population est soit stable, soit en baisse dans le Nord, tandis qu'elle croît rapidement dans le Sud. Si aucun écart n'était toléré, il faudrait remanier les circonscriptions électorales du nord de l'Ontario au point que la représentation des gens de cette région à la Chambre des communes serait considérablement réduite.

Je ne me voyais pas en train de leur dire: «Vous allez devoir vous passer d'un ou deux députés. Vous m'en voyez désolé, mais d'après nos calculs, vous avez trop de députés.» Ces députés ont des circonscriptions extrêmement vastes, et les problèmes du ressort fédéral dont ils saisis ne sont pas moins importants que ceux de leurs collègues des zones urbaines. Je ne voulais pas être celui qui allait leur dire qu'ils devaient renoncer à être représentés à la Chambre. C'est pour ainsi dire le statu quo en matière d'écart.

(1335)

Nous avons cependant recommandé, et cela figure dans le projet de loi, que les commissions de délimitation des circonscriptions électorales n'aient plus la faculté de dépasser l'écart de 25 p. 100. Cette possibilité n'existe plus. Je crois qu'à l'heure actuelle, cela n'est arrivé que dans un, deux ou peut-être trois cas. Je devrais préciser qu'il y a une distinction à faire entre ces circonscriptions et celles où ce pourcentage a été dépassé pour la simple raison que la population a augmenté depuis le dernier redécoupage de la carte électorale.

Depuis la dernière fois qu'une décision a été prise au sujet de la taille des circonscriptions, la limite de 25 p. 100 n'a été dépassée que dans un ou deux cas. Nous estimons, et j'espère que la Chambre est d'accord, que les commissions proprement dites ne devraient plus avoir le loisir de dépasser cette limite.

Nous avons aussi apporté d'autres changements qui nous paraissent utiles et rentables dans le cadre du processus actuel de révision des limites des circonscriptions électorales. Ainsi, nous avons adopté un mécanisme de révision quinquennale. Sans entrer dans les considérations mathématiques, disons simplement que, si la population d'une circonscription croît rapidement, il sera possible de rajuster ses limites et celles des circonscriptions avoisinantes tous les cinq ans plutôt que tous les dix ans, pour ne pas avoir de circonscriptions sous-représentée par rapport à d'autres, ni des circonscriptions très peuplées comme celles qui sont apparues au cours de la présente législature.

C'est plutôt injuste pour les habitants de ces très grosses circonscriptions comptant un quart de million de personnes, et il y en a une ou deux comme ça. Ma circonscription à moi compte 150 000 habitants, alors que la moyenne ontarienne est d'environ 100 000. Autrement dit, il est un peu plus difficile de représenter ces circonscriptions. Si nous avions une redistribution quinquennale pour certaines circonscriptions à croissance rapide, nous réglerions le problème plus vite et ne serions plus aux prises avec des circonscriptions gigantesques qui peuvent apparaître au bout de dix ans.

Nous avons prévu une méthode plus transparente pour nommer les membres des commissions de délimitation des circonscriptions électorales. Le processus nous semble meilleur parce qu'il nous permettra un contrôle plus serré. Nous sommes d'avis que la qualité des nominations s'en trouvera améliorée. Nous invitons le Président de la Chambre des communes à participer directement dès le départ, de sorte que nous serons davantage assurés, même si nous ne le serons jamais totalement, que les nominations aux commissions de délimitation des circonscriptions électorales seront de qualité et apolitiques.

Il faut noter que, comme par le passé, le président de chaque commission sera un juge de la Cour suprême de la province ou un juge nommé par le juge en chef de la province. Cela a toujours favorisé la neutralité du découpage des limites.

Le nouveau processus prévoit la parution d'un avis plus détaillé. Il ne s'agira plus d'écrire: «Attention, nous allons procéder à une redistribution de vos circonscriptions et en redessiner les limites.» Il faudra fournir plus de renseignements.

De plus, les commissions ne pourront plus publier simplement leurs projets de révision. Les commissions vont devoir proposer deux solutions de rechange, de sorte que les Canadiens ordinaires qui voudront participer au processus pourront voir les différentes façons de réviser les limites de circonscription.

Les Canadiens auront tôt fait de constater que lorsque nous modifions les limites de la circonscription A, nous changeons forcément celles de la circonscription voisine B, puis de la circonscription C, et ainsi de suite. Par conséquent, le fait d'inclure les cartes supplémentaires sera très utile, non pas tant aux députés mais plutôt aux Canadiens qui souhaitent comprendre le processus et y participer.

Comme je l'ai dit, nous sommes aussi en train de modifier le processus de nomination au sein des commissions. La période qui s'écoulera entre le déclenchement du processus et la décision finale a été raccourcie, ce qui devrait se traduire par des économies. Or, je suis convaincu que les Canadiens souhaitent de telles économies. Nous avons aussi trouvé des façons d'économiser aux étapes de l'impression et de la distribution des cartes.


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(1340)

Enfin, il faut mentionner qu'en vertu de la loi en vigueur, une fois que les commissions avaient déposé leur rapport sur la révision des limites de circonscriptions, il était possible pour les députés d'en discuter à la Chambre. Je crois savoir que cela s'est produit dans le passé. Je rappelle que cet exercice ne se tient qu'une fois tous les 10, 11 ou 12 ans. Toutefois, il existait un risque de découpage arbitraire des circonscriptions. Ainsi, dans le passé, une fois que les commissions avaient terminé leur travail, les décisions prises pouvaient être discutées ici à la Chambre.

Cela ne se produira plus. En effet, le Parlement laissera les commissions faire leur travail et il acceptera tout simplement leurs décisions comme étant les meilleures possibles.

En terminant, je félicite les députés de tous les partis qui ont participé au processus de révision. Le nouveau projet de loi n'a pas été appuyé à 100 p. 100 par chaque député. Des compromis ont dû être faits, et, encore maintenant, certains députés souhaiteraient probablement voir dans cet avant-projet de loi des contrôles et des mesures qui n'y figurent pas. Néanmoins, je pense que nous avons conçu et produit une mesure législative qui répond aux besoins des années 1990 et qui servira les intérêts des députés et de leurs électeurs durant de nombreuses années.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, j'ai écouté attentivement le député vanter ce projet de loi.

Comme l'a signalé tout à l'heure mon collègue, le député de Calgary-Ouest, lorsqu'il a cité le député, celui-ci a fait savoir très clairement qu'il s'opposait à l'accroissement du nombre des députés fédéraux. En fait, je me rappelle parfaitement que, lorsque j'ai siégé avec lui au Comité de la procédure et des affaires de la Chambre, qu'il trouvait même absolument inacceptable que le nombre des députés soit porté à 301. Je crois qu'il avait alors employé un langage imagé, disant qu'on risquait de devoir jeter à bas les murs de la Chambre des communes et de détruire la beauté de cette enceinte si l'on ne réglait pas rapidement le problème de l'accroissement rapide du nombre des députés.

La population canadienne s'accroît avec l'immigration et la natalité et ce projet de loi prévoit que le nombre de sièges soit fonction de la population. Au moins 200 000 immigrants entrent au Canada chaque année, ce qui veut dire deux sièges de plus par année. Puis il y a la croissance démographique découlant de la natalité. Je ne suis pas vraiment au fait des dernières statistiques, mais on peut parler peut-être d'un nombre similaire. Même s'il s'agissait de moitié moins, cela représenterait trois sièges par année. Or donc, cela représenterait beaucoup plus de sièges additionnels d'ici à l'an 2000 que les six sièges qui porteraient le nombre de députés de 295 à 301.

Ce projet de loi ne prévoit absolument rien pour régler le problème. En fait, il reconnaît seulement qu'on ne peut pas le régler. On va laisser à quelque organisme, commission ou comité futurs le soin de le régler.

Comment le député a-t-il pu changer son fusil d'épaule à cet égard?

M. Lee: Madame la Présidente, le député a tort de prétendre que j'ai changé d'avis. J'ai déjà clairement dit que je ne veux pas voir le nombre de députés à la Chambre des communes augmenter. Je l'ai mentionné au début de mon intervention.

De toute évidence, le député n'a jamais eu à piloter l'adoption à la Chambre d'un amendement constitutionnel. Moi non plus d'ailleurs. Il n'en aura probablement jamais l'occasion. Si le député croit que nous pouvons tout simplement adopter une mesure législative plafonnant à 295 le nombre de sièges à la Chambre des communes, il se trompe. C'est beaucoup plus compliqué.

Premièrement, même si nous voulions limiter le nombre à 295, il faudrait trouver une nouvelle formule pour répondre aux besoins de toutes les provinces. Le député lui-même a commencé son discours en disant que nous devions nous montrer justes envers sa province, la Colombie-Britannique. Il nous faut être justes envers toutes les provinces, y compris celles où la population diminue, car elles diront: «Nous voulons un plancher. Vous pouvez ajouter des sièges ailleurs, mais vous ne nous retirerez pas d'autres sièges.»

(1345)

Le gouvernement doit élaborer une nouvelle formule, faire adopter un amendement constitutionnel, le faire approuver par toutes les provinces ou par des provinces représentant deux tiers de la population canadienne et ce, dans le cadre d'un processus qui durera plusieurs années. Bien que je sois prêt à me lancer dans cette aventure, je sais fort bien que le changement ne se produira pas ni ce mois-ci, ni cette année, ni au cours de cette législature.

J'appuie le principe et l'objectif visé.

M. Joseph Volpe (Eglinton-Lawrence, Lib.): Madame la Présidente, je tiens à féliciter le député de Scarborough-Rouge River qui nous a résumé en trois formules très simples et très faciles à comprendre une question très complexe.

Tout d'abord, il a parlé du processus auquel participe la Chambre des communes et que tous les députés devraient applaudir. Le comité a donné au Parlement la possibilité de prendre conscience de ce que les députés peuvent et devraient faire.

Je félicite le député et les autres membres du comité qui ont proposé ce processus, et je parle non seulement de la façon de fonctionner du comité, mais également de la façon dont il est


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arrivé à une décision. J'exhorte tous les députés à appuyer la recommandation. Je tiens aussi à féliciter le député de la manière habile dont il a expliqué les questions fondamentales et le contenu de la proposition.

Le projet de loi touche un principe très important à la Chambre des communes et c'est la façon dont nous allons travailler pour les électeurs canadiens et la façon dont les Canadiens seront représentés à la Chambre des communes. Nous ne pouvons pas faire cela simplement en réduisant ou en augmentant le nombre de sièges bon gré mal gré et de façon fantaisiste.

En soulignant, dans son explication, comment nous voudrions voir évoluer le processus qui sert à déterminer la forme de représentation de la population à la Chambre, il nous a tous fait honneur. Plus important, le député a fait quelque chose que tous les autres députés ont malheureusement négligé, il a donné une idée des raisons et des motifs qui sous-tendent la proposition.

L'idée de départ, c'est que la Chambre a toujours beaucoup de difficulté à arriver à un point de vue unanime. Il y a une excellente raison à cela. Le pays est diversifié et grand et on ne peut donc pas y retrouver un point de vue unique sur une question même simple, ne serait-ce qu'en raison de l'esprit de parti.

Je félicite le comité d'avoir reconnu cette difficulté inhérente à la gestion d'un pays comme le nôtre et d'en avoir tenu compte dans les dispositions sur les raisons des délimitations des circonscriptions électorales pour que les députés puissent faire valoir à la Chambre les différentes opinions, motivées par toutes sortes de raisons, des Canadiens.

Je félicite le député de Scarborough-Rouge River. Il a donné aux députés la possibilité d'examiner les choses de façon froide et impartiale, mais en se tournant tout de même vers l'avenir.

J'invite tous les députés non seulement à manifester leur appui à la position, mais également à applaudir les efforts du comité et à se prononcer d'une voix unanime sur la question.

M. Lee: Madame la Présidente, je remercie le député pour ses remarques.

Pour faire suite à la suggestion du député d'en face qui a dit que nous aurions dû faire quelque chose pour essayer de limiter ou même de réduire le nombre de députés à la Chambre des communes, je lui dirai que, si la Chambre était saisie d'une motion à cet effet, je voterais en faveur de cette motion. Qu'il voie à ce qu'une telle motion soit présentée à la Chambre, et je voterai en faveur de cette motion.

Toutefois, je tiens à lui signaler que, une fois qu'il aura fait adopter cette motion, il devra quand même se conformer à toute la procédure de réforme constitutionnelle et proposer une formule qui sera acceptée d'un océan à l'autre. Voilà le défi.

(1350)

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Madame la Présidente, je remercie le député pour ses remarques, mais je tiens à lui signaler que mon collègue de Calgary-Ouest a proposé des changements constitutionnels qui pourraient être déterminés ici même, à la Chambre des communes, sans l'accord des provinces, parce qu'ils n'ont aucune incidence sur le Sénat et ainsi de suite.

Il n'a pas semblé appuyer de tels changements lorsqu'il en a eu l'occasion, et je dois donc en conclure qu'il a changé d'idée.

M. Lee: Madame la Présidente, je voudrais simplement demander au député si sa province, la Saskatchewan, serait vraiment prête à céder des sièges pour qu'on puisse limiter le nombre de députés comme son collègue l'a proposé.

Je crois savoir que ce n'est pas le cas, mais cela vaudrait peut-être la peine de vérifier. Si jamais il y a une motion visant à freiner la croissance de la Chambre des communes, je voterai en faveur de cette motion.

[Français]

M. Réginald Bélair (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Madame la Présidente, c'est évidemment avec beaucoup d'intérêt que je prends la parole aujourd'hui, parce que mon comté de Cochrane-Supérieur est situé dans le nord de l'Ontario et sa survie est en jeu.

Tout d'abord, mes hommages au président du comité, ainsi qu'à tous mes collègues qui ont participé à la rédaction de ce rapport apolitique, devrais-je dire. J'ai assisté à quelques séances et je dois affirmer, en toute sincérité, que le travail qui a été accompli est énorme. Cependant, c'était un travail qui devait être fait, parce que la situation l'exigeait. Tout d'abord, on a une loi désuète qui remonte à 1964 et qui ne correspond plus d'aucune façon à la réalité de ce qu'est la carte électorale canadienne d'aujourd'hui.

Pour les questions de représentation, le rapport fait grand état du quotient, de la variance de 25 p. 100. C'est toujours quelque chose de très important pour moi, pour la simple raison qu'à cause de ce quotient, les grands comtés ruraux du Canada n'auront jamais la chance de se voir assurer une sécurité. Les commettants de ces mêmes comtés ruraux du Canada ne peuvent jouir d'une représentation égale, ici à la Chambre des communes. Qu'il suffise de mentionner, tout simplement, les grandes distances que nous avons à parcourir, dans le but de desservir nos commettants. Notre première raison d'être est de servir les gens.

D'éliminer un comté comme le mien, par exemple, ne servirait qu'à agrandir quatre autres comtés avoisinants, et ici, je me sers de la recommandation du rapport de la fin septembre. Alors, cela ne servirait qu'à surtaxer le travail de chacun de ces députés, c'est-à-dire leurs capacités, leurs énergies et leurs possibilités de se rendre dans les communautés isolées.

J'ouvre une parenthèse ici pour parler des communautés isolées. Mon comté de Cochrane-Supérieur compte 21 communautés indiennes, dont 16 sont situées au nord du 49e parallèle. Dans la grande majorité des cas, il n'y a pas de route d'accès, ce qui signifie que pour aller les voir, pour me mettre à leur disposition, je dois prendre des vols nolisés, ce qui est extrêmement cher, mais il faut que ça se fasse. Cela contredit, en fin de compte, l'argument du Parti réformiste qui dit que ça coûte trop cher d'avoir un trop grand nombre de députés en Chambre. Il n'y a rien qui frôle plus le ridicule qu'un argument comme celui-là. À mon avis, cela ne servira qu'à augmenter, doubler la population d'un tel comté avec le même député, si les ressources, tant humaines que financières, ne sont pas là pour appuyer le travail que le député doit accomplir.

9413

(1355)

À quoi ça va servir aussi d'éliminer un grand nombre de comtés ruraux pour agrandir une fois de plus des comtés dits urbains qui vont, encore une fois, surtaxer les capacités et l'énergie des députés. Chose plus importante, à mon avis, si cela se produisait ce serait une atteinte directe à la démocratie, ici au Canada, parce que tous les Canadiens, où qu'ils vivent, ont droit à une représentation égale à la Chambre des communes.

Évidemment j'aimerais garder l'essence même de mes commentaires pour la troisième lecture du projet de loi, lorsque celui-ci sera déposé.

C'étaient les quelques points que je voulais présenter à ce moment-ci. Je ne suis pas entré dans la substance comme telle du rapport. J'attendrai que le projet de loi soit déposé. À ce moment-là je serai en mesure de vous fournir toutes les statistiques pour appuyer ce que je viens d'énoncer.

Pour le nord de l'Ontario, ce rapport n'est pas acceptable, pas du tout. À ce point-ci il n'est pas acceptable. C'est dans cet esprit que je déposerai sûrement un amendement en Chambre, tout d'abord pour rétablir l'annexe des comtés que l'on dit «extraordinaires» à cause de leur géographie. Cela a été enlevé du rapport. J'ai la ferme intention de tenter de la réinsérer. J'espère que mes collègues sauront comprendre et par conséquent m'appuyer sur ce point.

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Madame la Présidente, je félicite le député d'avoir signalé un problème très réel dans notre Constitution. Nous avons là une véritable anomalie. Si nous voulions être sincères, nous devrions dire qu'une modification constitutionnelle s'impose à cet égard.

Si la population du Canada demeure constante tandis que celle du Québec diminue, nos règles actuelles exigeraient que nous ayons plus de députés à la Chambre des communes pour cette raison. Cela n'a pas de bon sens, de l'avis général. Il est donc nécessaire d'effectuer un changement à cet égard. Il faudrait trouver une formule qui tienne compte du facteur géographique, de la superficie d'une circonscription, car c'est un facteur bien réel dans n'importe quelle circonscription éloignée des zones plus densément peuplées.

Le député qui vient de parler avait parfaitement raison de dire que nous devons modifier les règles afin de permettre au député de faire son travail. Quant au nombre de sièges, je crois que les Canadiens n'auront absolument aucun mal à appuyer leurs députés.

Le Président: Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passera maintenant aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.


9413

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE BUDGET

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, mes électeurs m'ont adressé un message clair à transmettre au ministre des Finances à propos du budget.

Il faut supprimer le gaspillage des fonds publics en mettant fin notamment à la véritable dilapidation de l'argent des contribuables à laquelle se livrent les militaires avec leur gestion incompétente des déménagement des employés de l'État, et en mettant en application les propres rapports du gouvernement qui recommandent de sous-traiter la gestion de ces déménagements.

Il faut mettre fin au cumul des pensions et salaires chez les députés et les fonctionnaires. Il faut réformer le régime de retraite des députés. Il faut s'attaquer résolument au déficit pour mettre de l'ordre dans les finances publiques du Canada.

Nous devons également réaffirmer notre attachement à notre système d'enseignement supérieur de réputation internationale en en maintenant l'accessibilité grâce à un régime de remboursement des prêts aux étudiants en fonction du revenu, et en finançant nos organismes subventionnaires fédéraux chargés de soutenir les efforts de recherche universitaire au Canada. Nous devons faire des investissements stratégiques à long terme dans la création de richesse en finançant la recherche universitaire.

L'Université de Waterloo, l'Université Wilfrid Laurier et le Collège Conestoga, dans ma circonscription, sont de véritables exemples de création de richesse pour tous les Canadiens grâce au soutien à la recherche et à l'enseignement supérieur.

* * *

[Français]

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, les associations étudiantes du Québec ont manifesté dans plusieurs villes leur indignation envers la réforme des programmes sociaux, notamment en ce qui a trait au financement de l'enseignement postsecondaire.

Elles sont unanimes à dire que ces propositions sont inacceptables et qu'elles auront des conséquences néfastes en raison d'une hausse sans précédent des frais de scolarité qui entraîneront, pour les étudiants, un endettement qui prendra des proportions incontrôlables.

Lucienne Robillard, candidate du Parti libéral dans Saint-Henri-Westmount, est sûrement d'accord avec les critiques des étudiants. En effet, dans un de ses discours à l'Assemblée nationale du Québec, le 29 mai 1991, elle affirmait, et je cite: «Je le dis et je le répète, le fédéral m'apparaît complètement en dehors de la réalité qui se vit à l'heure actuelle dans le monde de l'éducation.»


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Est-il besoin d'en rajouter?

* * *

[Traduction]

L'IMPÔT SUR LE REVENU

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui féliciter un député libéral. J'étais dernièrement à une assemblée de circonscription à laquelle assistaient des représentants des médias. Cet important député a fait une promesse étonnante. Il s'est engagé à voter contre le budget du gouvernement si celui-ci prévoit de nouveaux impôts s'appliquant à autre chose qu'à l'essence et aux gains de loterie.

Les réformistes disent qu'il ne faut pas hausser les impôts, mais cet important député a fait cette promesse. Tout le monde l'a entendu. Imaginez: plus de lignes de parti dictées au troupeau aux fins de la solidarité ministérielle, et des députés libres de voter conformément à la volonté de leurs électeurs!

Je voudrais féliciter le député de Cambridge et lui signaler que les électeurs se souviendront de sa promesse et que nous surveillerons de près s'il la tiendra ou non. Félicitations!

* * *

LA SEMAINE DES TROUBLES DE L'ALIMENTATION

Mme Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à rappeler aux députés et aux Canadiens que la Semaine des troubles de l'alimentation se déroule du 6 au 12 février.

Le thème de cette semaine est: «La liberté. . . grandeur nature.» L'objectif est de sensibiliser davantage la population aux facteurs sociaux qui contribuent au développement de l'anorexie, de la boulimie et de l'obsession liée au poids, afin de les enrayer.

L'anorexie et la boulimie sont plus fréquentes chez les femmes ayant entre 13 et 25 ans et ces maladies gagnent rapidement du terrain au Canada, dans une société qui glorifie la minceur.

Durant cette semaine, le National Eating Disorder Information Centre présentera des messages en accord avec le programme Vitalité de Santé Canada. En faisant la promotion du poids santé, le programme Vitalité signale les préoccupations de la société par rapport au poids et à une taille irréaliste et il nous propose d'y remédier en améliorant notre estime personnelle et en ayant de notre corps une image positive.

Les gens en bonne santé ont des tailles et des silhouettes variées. Un poids adéquat, c'est un poids où l'on est en bonne santé et non pas simplement un poids peu élevé. Dissiper les mythes au sujet du poids et orienter les Canadiens vers les bonnes ressources ne sont qu'un premier pas pour nous aider à venir à bout de ces maladies insidieuses qui font des ravages chez les jeunes femmes.

* * *

LA SEMAINE DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, comme cette semaine est la Semaine du développement international, les Canadiens doivent prendre davantage conscience des défis qu'ont à relever les pays en voie de développement d'Afrique, d'Asie, d'Amérique latine et des Antilles. Il faut également prendre conscience de l'efficacité des programmes de développement international du Canada, qui servent à soutenir le développement durable et à lutter contre la pauvreté dans les pays en voie de développement.

Grâce aux programmes d'aide, plus de 80 p. 100 des enfants du monde ont été vaccinés, les conditions sanitaires et la qualité de l'eau ont été améliorées, plus de gens vivent plus longtemps et sont en meilleure santé, la production alimentaire a triplé et plus de gens ont appris à lire et à écrire.

La coopération entre les gouvernements, le secteur privé, les Nations Unies, les banques internationales et d'autres organismes a été extrêmement bénéfique à la communauté internationale, et continuera de l'être. Pendant la Semaine du développement international, nous devrions garder à l'esprit que nous vivons tous sur la même planète et que nous partagerons le même avenir.

* * *

LE BUDGET

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, dernièrement, nous avons entendu nombre de spéculations sur le budget fédéral qui sera bientôt présenté. Le gouvernement précédent a relevé les impôts 39 fois pour diminuer le déficit, mais celui-ci a continué d'augmenter inexorablement.

J'ai dit souvent pendant la campagne électorale et à la Chambre qu'il fallait que plus de contribuables paient des impôts et non que les contribuables paient plus d'impôts. J'estime que les Canadiens ne sont généralement pas contre les impôts, mais j'ai la conviction qu'ils n'accepteront que des modifications qui rendront le système plus équitable.

(1405)

Ces dernières semaines, le chef du Parti réformiste et d'autres membres de son parti ont beaucoup parlé d'une révolte des contribuables. Ce discours négatif n'est pas constructif et ne reflète pas la nouvelle façon de faire de la politique que le Parti réformiste a si souvent évoquée avant son arrivée à Ottawa.

Il n'est pas nécessaire de tenir un tel discours. En effet, le gouvernement et tous les députés savent fort bien que les Canadiens moyens ne peuvent payer plus d'impôts. En fait, les députés libéraux se sont attaqués de front à ce problème au cours de la dernière campagne électorale.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, un large consensus s'est dégagé lors de la consultation sur la réforme des programmes sociaux. La grande majorité des témoins ont soutenu que le principal problème est la rareté de l'emploi et que la lutte au déficit ne doit pas se faire sur le dos des étudiants et des chômeurs, car les budgets des programmes sociaux ont déjà trop écopé au cours des dix dernières années.


9415

Pourtant, malgré ce consensus des témoins au comité sur le projet de réforme, le ministre des Finances et celui du Développement des ressources humaines semblent être prêts, cet hiver, à répéter le coup du dernier budget en faisant porter l'essentiel des coupures sur le dos des plus démunis et de la classe moyenne.

Qu'attend le premier ministre pour raisonner ces deux ministres? L'effort de redressement des finances publiques doit faire appel d'abord aux mieux nantis, aux riches qui échappent actuellement à l'impôt.

* * *

[Traduction]

LE VOTE ÉLECTRONIQUE

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, dans le monde entier, des gouvernements prennent des initiatives qui s'inspirent de la démocratie directe alors que le gouvernement libéral refuse même d'envisager de modifier notre régime parlementaire dépassé.

La Nouvelle-Zélande, premier pays à opter pour le suffrage universel, a adopté en 1993 le Citizens' Initiative and Referendum Act, tandis que l'État du Montana a autorisé récemment le vote électronique dans les élections des conseils scolaires.

Élections Canada a étudié soigneusement la possibilité de voter par téléphone à clavier, et j'ai bon espoir que, avant la fin du siècle, cet organisme mettra à l'essai un système de vote électronique dans une élection complémentaire.

Bien entendu, c'est le Parti réformiste qui est à l'avant-garde en ce domaine. En effet, nous participerons à deux autres assemblées publiques faisant appel à des moyens électroniques les 12 et 19 février, à 20 heures, heure de l'Est, de manière à promouvoir et à développer l'utilisation de cette technologie.

J'exhorte tous les députés à écouter la station de leur câblodiffuseur dimanche pour observer de leurs propres yeux l'émergence de cette nouvelle forme de démocratie.

* * *

L'ENVIRONNEMENT

Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le Président, en novembre dernier, il a été annoncé à la Chambre que la vice-première ministre et ministre de l'Environnement présiderait une rencontre internationale des ministres de l'Environnement du G-7.

C'est pour moi un plaisir d'informer la Chambre que cette importante réunion aura lieu à l'Université McMaster, à Hamilton, du 29 avril au 1er mai. Nous montrerons que le Canada joue un rôle de premier plan dans la recherche de solutions aux défis redoutables de notre planète, comme les changements climatiques, la préservation de la diversité biologique, la gestion des substances toxiques et les mécanismes internationaux que nous utilisons pour résoudre ces problèmes.

Le gouvernement exposera aux autres pays du G-7 les mesures qu'il a prises récemment pour mettre de l'ordre chez nous et mieux respecter l'environnement dans nos activités et nos politiques. Des invitations ont été envoyées aux ministres de l'Environnement de France, d'Allemagne, d'Italie, du Japon, du Royaume-Uni, des États-Unis, ainsi qu'à l'Union européenne et au directeur général du Programme de l'environnement des Nations Unies.

Tous les Canadiens se féliciteront de ces efforts déployés pour régler les problèmes environnementaux de la planète.

* * *

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, la SRC a fait une demande en vue de télédiffuser le déroulement du procès de Paul Bernardo. Les familles des innocentes victimes, Kristen French et Leslie Mahaffy, y sont fortement opposées.

Il faut nous interroger sur les motifs de cette demande. On songe immédiatement à la cote d'écoute, au sensationnalisme et aux avantages pécuniaires qui pourraient en découler. Chez nous, les audiences sont publiques. Un jury composé de nos pairs représente la société. Cela suffit amplement.

Nous, les habitants de Niagara, connaissions les victimes et connaissons leurs familles. Ces deux malheureuses adolescentes sont devenues des enfants de notre pays. Protégeons leur dignité dans la mort!

Le moment est venu de laisser aux tribunaux le soin de redresser la situation et de faire preuve du sens des responsabilités dans le respect du droit des victimes de ne pas être exploitées encore une fois. Il est inutile de chercher à médiatiser à outrance ces tragiques événements. Ne soyons pas la proie des journaux à sensations! N'allons pas jusqu'à recréer au Canada le cirque qu'est devenu le procès d'O.J. Simpson.

Je supplie la SRC de retirer sa demande. C'est contraire aux moeurs des Canadiens.

* * *

LES RESSOURCES HUMAINES

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, nous devons féliciter le ministre du Développement des ressources humaines de vouloir interdire les briseurs de grève. Une telle mesure calquerait les lois déjà en place au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique.

(1410)

L'interdiction des briseurs de grève n'a pas nui à l'économie de ces provinces. Bien au contraire, une loi de la sorte inciterait les représentants syndicaux et patronaux à se presser à la table des négociations et préviendrait ainsi des arrêts de travail coûteux.

Étant donné que les grèves soulèvent parfois les passions, cette mesure aiderait aussi à prévenir des événements tragiques, comme ceux qui sont survenus récemment à la mine d'or de Yellowknife.

Les libéraux seront heureux d'adopter un tel projet de loi.


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[Français]

LE SECTEUR MINIER

M. Bernard Deshaies (Abitibi, BQ): Monsieur le Président, alors que le ministre des Finances prépare son Budget, j'espère que le gouvernement fédéral a consacré toute l'attention nécessaire aux recommandations contenues dans le cinquième rapport du Comité permanent des ressources naturelles. Ces recommandations, je le rappelle, ont été faites suite aux témoignages de tous ceux et celles qui ont pris la peine de venir exposer la situation du secteur minier devant notre comité.

Je veux rappeler particulièrement la deuxième recommandation de ce rapport, à savoir: «Que le gouvernement fédéral prenne dans son Budget de février 1995 des mesures fiscales pour encourager l'exploration minière au Canada. La preuve est faite que l'exploration minière est un investissement et non une dépense.»

L'application de cette recommandation fiscale aura un impact direct et bénéfique, un impact plus qu'attendu sur la création d'emplois dans ma région d'Abitibi et du nord du Québec, ainsi que dans toutes les régions minières du Canada.

* * *

[Traduction]

LE REVENU FAMILIAL

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, le rapport annuel de Statistique Canada sur le revenu familial confirme ce que beaucoup de Canadiens savent depuis bien des années: les budgets familiaux ne sont pas équilibrés. Pourquoi? Statistique Canada rapporte que le revenu familial a diminué de 6,7 p. 100 depuis qu'il a atteint un sommet en 1989. Selon le rapport, il s'agit là de la diminution la plus longue et la plus forte des quatre dernières décennies. En fait, en 1993, le revenu familial moyen était légèrement inférieur à celui enregistré en 1980.

Comme si cela ne suffisait pas, le revenu personnel par habitant et le salaire net ont également diminué. Les coupables? La TVP, la TPS, les cotisations à l'assurance-chômage. Notre revenu est imposé à l'extrême.

Il semble facile au gouvernement de faire la sourde oreille aux mouvements populaires contre les impôts, qui surgissent un peu partout au Canada. En agissant ainsi, il manifeste une grande insouciance envers les terribles épreuves financières qui attendent les individus et les familles qui doivent bâtir l'avenir de notre pays.

Le ministre des Finances doit reconnaître que les familles canadiennes ne se contenteront pas de surveiller tranquillement la tendance à augmenter toujours plus les impôts, comme il se propose de le faire dans son prochain budget.

L'INDUSTRIE DES PÂTES ET PAPIERS

M. Stan Dromisky (Thunder Bay-Atikokan, Lib.): Monsieur le Président, on a annoncé récemment, à ma grande joie, que l'usine de papier journal Avenor de Thunder Bay allait se doter d'un système de traitement qui allait permettre d'éliminer totalement les effluents.

Il s'agit là du premier projet concernant une usine à être entrepris en vertu du protocole d'entente qui a été signé en mars 1994 par le gouvernement fédéral et l'Institut canadien de recherches sur les pâtes et papiers.

Les deux essais que l'on a faits du processus que l'on entend utiliser ont été couronnés de succès et un système de traitement secondaire sera installé à l'usine en 1995. Le nouveau processus, qui permettra l'élimination totale des effluents, devrait être opérationnel à la fin de 1996.

Cette initiative de l'industrie des pâtes et papiers et des sociétés comme Avenor montre clairement l'importance que l'industrie accorde à la protection de l'environnement et au développement durable.

* * *

L'INSTALLATION DU GOUVERNEUR GÉNÉRAL

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn, Lib.): Monsieur le Président, au nom de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, je voudrais remercier les observateurs du Parti réformiste qui nous ont hier honorés de leur présence à la cérémonie d'installation du gouverneur général.

Mes collègues du Parti libéral prient les députés du Parti réformiste de vouloir bien, à l'occasion de la prochaine cérémonie de ce genre, donner un peu plus de signes de vie qu'hier où l'on a craint un moment que tous ne soient éteints sur leur siège. Beaucoup d'entre eux doivent avoir extrêmement de mal à rester assis si longtemps sans broncher.

Après la cérémonie, on m'a dit que l'on n'y avait pas vu certains députés du Parti réformistes. Peut-être n'ont-ils pas réussi à trouver un taxi dont ils auraient bien sûr fait passer les frais sur leurs indemnités non imposables, ou bien peut-être se sont-ils perdus dans Ottawa-Vanier? Après tout, il n'est pas facile de lire les noms des rues en français.

* * *

(1415)

LE PARTI LIBÉRAL

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je me propose de vous donner un cours de perfectionnement en traduction de prose libérale.

Quand les libéraux disent qu'ils détestent la TPS et qu'ils vont essayer de la supprimer, ils veulent vraiment dire qu'ils vont essayer de nous la faire avaler sous un nouveau nom et au taux de 8 p. 100.

Quand ils disent que leurs projections concernant les taux d'intérêt se sont avérées exactes, ils veulent vraiment dire à 4 p. 100 près.

Quand le premier ministre dit que tout le monde veut aller au ciel mais que personne ne veut mourir, il veut vraiment dire que les impôts vont augmenter.

9417

Quand les libéraux disent qu'ils vont être très stricts avec les jeunes contrevenants, ils veulent vraiment dire que ces jeunes contrevenants s'en tireront avec une simple réprimande.

Quand ils disent que le programme de diversification de l'économie de l'Ouest aide des milliers d'entreprises de cette région à conquérir de nouveaux marchés, ils veulent vraiment dire que les prochaines élections à Winnipeg sont gagnées d'avance.

Quand les libéraux disent qu'ils vont réformer les programmes sociaux quoi qu'il en coûte, c'est exactement ce qu'ils vont faire, quoi qu'il en coûte.

Enfin, lorsque le ministre des Finances a recours à des clichés du genre «C'est la quadrature du cercle», prenez garde, monsieur le Président; ce qu'il veut vraiment dire, c'est que, tout comme le premier ministre et son Cabinet, il ne sait vraiment pas quoi faire.

_____________________________________________


9417

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Défense, répondant hier à une de nos questions en Chambre, a déclaré tout ignorer, absolument tout ignorer de l'existence d'une troisième cassette vidéo concernant le Régiment aéroporté de Petawawa.

Comment le ministre de la Défense pouvait-il affirmer ignorer l'existence d'une troisième cassette vidéo, alors que le général de Chastelain l'avait informé explicitement de l'existence de cette troisième cassette dans un mémo qu'il lui adressait personnellement le 23 janvier dernier?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, hier, l'honorable député de Charlesbourg m'a posé la question suivante:

Le ministre peut-il prendre l'engagement que cette nouvelle cassette ne sera pas détruite, comme ce fut le cas avec certains éléments [. . .]
[Traduction]

Il a également dit que la cassette était aussi moche et horrible que celle décrivant la cérémonie d'initiation dont il avait déjà été question. J'ai répondu que je n'avais aucune preuve de l'existence de cette cassette. J'ai consulté à nouveau le rapport et nous avons publié hier soir un communiqué visant à clarifier les choses, de telle sorte qu'il ne subsiste aucun malentendu.

Dans ce rapport qui m'est parvenu, il était question d'une cassette vidéo décrivant ce que l'on a qualifié de partie d'accueil, où l'on verrait surtout des gens boire de la bière et faire des choses qu'on fait parfois dans des réunions sociales. Mais une cassette où l'on voyait des gens mastiquer des bouchées de pain trempées dans un produit dégoûtant, nous trouvons cela absolument odieux. On en parlait dans le rapport comme quelque chose de pas très sérieux qui n'avait rien à voir avec les premières cassettes.

Ce qui est intéressant, c'est que je viens de recevoir, à 13 h 55, une information-et je tiens à tirer les choses au clair après la période des questions, qui ne peut malheureusement pas attendre-une information, donc, qui ne correspond pas à la description des événements figurant dans le rapport que le chef d'état-major de la défense m'a remis, il y a deux semaines.

Comme je veux tirer les choses au clair, je demande l'indulgence des députés, à qui je promets de fournir demain des éclaircissements sur cette affaire.

(1420)

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, il faut le faire! Il faut le faire! Compte tenu de la controverse qui entoure la question du régiment de Petawawa, compte tenu que cette controverse a même provoqué le démantèlement immédiat de ce régiment, comment le ministre peut-il nous expliquer sérieusement, deux semaines après avoir pris connaissance du rapport de son chef d'état-major, pas n'importe qui, son chef d'état-major, comment peut-il nous dire le plus sérieusement du monde, hier, qu'il ignorait tout de l'existence d'une troisième cassette et aujourd'hui qu'il n'est pas bien sûr que ce qu'il y a dans le rapport de son général en chef n'est pas vraiment ce qu'il y a dedans?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, il faut remettre dans son contexte la question que le député de Charlesbourg a posée hier.

Il a fait allusion à l'existence d'une cassette pire que celles qui ont été rendues publiques et qui ont mené à la dissolution du régiment. J'ai dit hier et je répète aujourd'hui que j'ignore tout de l'existence d'une telle cassette.

Ce que je dis, c'est que, dans le rapport que j'ai reçu il y a deux semaines, il n'était aucunement question d'une cérémonie d'initiation ni de quoi que ce soit de la sorte. On y parlait d'une cérémonie d'accueil dans les termes que j'ai utilisés.

Ce que je dis, c'est que la description qu'on m'a faite de la cassette, il y a deux semaines, ne correspond pas à celle qu'on vient de me communiquer. Elle n'a rien à voir non plus avec la première cassette dont le contenu avait dégoûté les Canadiens.

Ce que je dis, c'est que, comme je viens seulement d'obtenir cette information, je voudrais tirer les choses au clair.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre affirme ne pas avoir de preuve de l'existence de cette cassette. Il me semble que le rapport du général en chef d'état--


9418

major des forces armées, le fait qu'il en parle, si ce n'est pas une preuve pour le ministre, je me demande ce qu'il lui faut.

Doit-on comprendre que si le ministre a procédé aussi rapidement à démanteler le régiment aéroporté de Petawawa sans avoir pris connaissance, de son propre aveu, de tous les faits et de tous les documents qui existaient dans le dossier, c'est probablement qu'il tentait de mettre ainsi le couvercle sur la marmite? Essayait-il de cacher et de protéger des gestes répréhensibles qui auraient été commis par des officiers supérieurs de l'armée canadienne et qui ternissent la réputation de l'armée?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, la décision de dissoudre le régiment était fondée. Elle a été annoncée il y a deux semaines nonobstant les recommandations des officiers supérieurs des forces armées.

Si j'ai cru bon de dissoudre alors le régiment, c'est notamment que je ne savais pas en tant que ministre ce qu'il pouvait y avoir d'autre derrière cette affaire.

Lorsque le député s'est adressé à moi, hier, j'ai cru qu'il faisait allusion-j'ai entendu tellement de rumeurs au sujet de l'existence d'autres cassettes-à d'autres éléments de preuve qui seraient apparus.

Ce que nous avons fait, il y a deux semaines, c'est étudier le déroulement des événements, soit le déploiement au Rwanda, où des membres du Régiment aéroporté se sont mal conduits, et les deux cassettes vidéo, d'où nous avons déduit qu'il y avait quelque chose qui clochait sérieusement dans ce régiment et que le problème était systémique. C'est pourquoi nous avons ordonné la dissolution du régiment.

Le Président: Je connais la gravité de cette question. Je vous demanderais de bien vouloir faire preuve de concision dans vos questions et vos réponses.

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, avant de commencer j'aimerais dire au ministre que s'il n'y a rien de sérieux sur cette cassette, qu'on la rende publique, on verra. La police militaire la détient et personne ne peut le nier.

En décembre dernier, le ministre de la Défense annonçait la mise sur pied d'une commission d'enquête relativement aux événements survenus en Somalie impliquant des soldats du régiment aéroporté de Petawawa. En dépit de faits nouveaux qui aggravent encore la situation, le ministre n'a pas jugé bon de prendre des dispositions immédiates.

Comment le ministre de la Défense peut-il justifier ne pas avoir encore mis sur pied une commission d'enquête sur les agissements du régiment aéroporté, alors que l'article 45 de la Loi de la Défense nationale lui en donne les pleins pouvoirs?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, nous reparlons de choses qui ont été réglées il y a déjà deux semaines.

Nous avons estimé que la juxtaposition du rapport sur les infractions au Rwanda, du deuxième film vidéo sur le comportement raciste de personnes actuellement en cour martiale et du troisième film vidéo sur l'initiation des nouvelles recrues était plus que suffisante. Il fallait mettre un terme à tout cela. Nous avons estimé que le problème était d'origine systémique et que la seule solution était de dissoudre le régiment. Je pense que, d'une façon générale, nous avons l'appui du public.

(1425)

Dans un monde parfait, j'aurais attendu les résultats d'une enquête avant de prendre des mesures à l'égard du régiment. Je tiens à souligner cependant que le gouvernement a hérité de ce dossier particulier et que l'on nous jugera sur la façon dont nous avons agi, non pas sur la façon dont tout a commencé, il y a des mois.

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais souligner au ministre qu'il est important de faire la différence entre les événements de Somalie et les événements à Petawawa. L'article 45 de la Loi de la Défense nationale lui permet d'instituer une commission d'enquête immédiatement, plutôt que de démanteler le régiment et de se laver les mains et de ne punir personne, sauf de simples soldats.

Comment le ministre peut-il prétendre mériter la confiance de cette Chambre et de la population, alors que le jour même où il a procédé au démantèlement du régiment aéroporté, il a caché à la population l'existence d'une troisième cassette?

[Traduction]

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je ne prends pas à la légère les déclarations du député. Le fait est que nous parlons de l'existence d'autres films vidéo. Je ne sais pas combien il y en a, ni combien d'exemplaires de chacun. Je ne sais pas combien de cinéastes il y avait, mais ce qui se passe, c'est que la technologie progresse plus vite que les institutions, y compris les forces armées. Les gens filment certaines activités et je ne sais pas exactement ce que l'on pourrait trouver.

En ce qui concerne la question d'une enquête, oui, nous avons le pouvoir d'en ordonner une immédiatement. Cependant, il y a actuellement une décision d'un tribunal devant la Cour suprême au sujet de la catastrophe de la mine Westray, qui fait douter de la légalité de l'existence simultanée d'une enquête judiciaire, d'une enquête de coroner et d'un procès.

Une fois le procès commencé-et il a commencé avant que nous soyons élus-nous n'avions pas d'autre choix que d'ajourner l'enquête originale. Ce que nous disons, c'est que lorsque les


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procès en cour martiale seront terminés, probablement vers le milieu de mars, il y aura une enquête publique, sous la responsabilité d'un civil, où l'on répondra à toutes ces questions, notamment celle de savoir si le régiment était apte à servir en Somalie.

* * *

LA RÉFORME DES PENSIONS

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens d'un bout à l'autre du pays sont furieux, comme nous avons pu le voir hier soir à Toronto, lors d'une grande manifestation contre les mesures fiscales envisagées par le gouvernement. Les Canadiens ne peuvent croire que le gouvernement envisage de hausser les impôts.

Une voix: C'étaient tous des réformistes.

Mme Grey: Je ne pense pas qu'il n'y avait que des réformistes à cette manifestation.

Peu avant les élections de 1993, l'actuel premier ministre avait demandé à la première ministre de l'époque, Kim Campbell, de rappeler la Chambre des communes au milieu du mois d'août pour s'occuper de la réforme des pensions des députés. Il avait publiquement promis que les libéraux régleraient cette question en une journée. Plus de 600 jours se sont écoulés depuis et les Canadiens attendent toujours.

Ma question s'adresse au premier ministre. Qu'est-ce qui a changé depuis la campagne électorale de 1993? Pourquoi le premier ministre revient-il maintenant sur sa parole? Va-t-il déposer une mesure législative pour procéder à une réforme des pensions des députés?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je veux d'abord remercier la députée de Beaver River et les autres membres du Parti réformiste qui ont assisté hier à la cérémonie d'installation du gouverneur général.

[Français]

Je voudrais aussi remercier le député de Laurier-Sainte-Marie et les autres députés du Bloc québécois qui ont participé à cette cérémonie.

[Traduction]

C'était là un signe de respect envers l'institution. Ces députés ont fait ce que l'on est en droit d'attendre de tous les députés du Parlement. Ils ont fait preuve de bonnes manières.

Pour ce qui est de la question de la députée, un projet de loi sera déposé très bientôt à la Chambre. En fait, cette mesure sera annoncée juste avant le dépôt du budget ou en même temps que celui-ci.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, nous avons entendu quelque chose dans ce sens ce matin, durant l'émission Canada AM. Ce qui me surprend, c'est que les ministres, et en particulier le premier ministre, ont toujours déclaré ne pas pouvoir dévoiler les mesures du budget. Les choses changent puisque le premier ministre vient de nous annoncer qu'en toute probabilité la question de la réforme des pensions sera abordée dans le budget.

(1430)

Le premier ministre a déjà dit que la réforme des pensions des députés était un engagement pris dans le livre rouge et qu'il entendait respecter tous les engagements pris dans ce document. Malheureusement, ce document vide de sens est devenu le livre des excuses des libéraux. C'est un peu comme le caractère fin d'un contrat ou comme la promesse qu'avait faite la vice-première ministre de démissionner si la TPS n'était pas éliminée en moins d'un an. Nous attendons qu'elle donne suite à cette promesse.

Le premier ministre fera-t-il plus que le strict minimum mentionné dans le livre rouge, qui ne traite pas du fait qu'un député ait droit à une pension après seulement six ans et que le rapport des cotisations employeur-employé soit de 8 à 1?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, par courtoisie envers la députée, je ne voudrais pas que le projet de loi soit adopté avant le 13 mars, puisqu'elle deviendra alors admissible à la pension.

On va s'occuper de la mesure législative. Nous avons pris des engagements dans le livre rouge et nous allons les respecter. Certains voudraient que l'on aille encore plus loin. Nous étudions cette possibilité.

Cela dit, je signale aux députés et à la population que les salaires des députés sont gelés depuis des années. Les députés travaillent très fort et ne sont pas bien rémunérés. Il y a beaucoup de directeurs d'école, de chefs de police et d'autres personnes qui gagnent beaucoup plus que les députés.

Je ne suis pas de ceux qui essaient de se faire du capital politique sur le dos de personnes qui se dévouent pour leurs concitoyens en les représentant à la Chambre.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, je reconnais que les Canadiens ne sont pas déraisonnables. Personne ne laisse entendre que les députés ne travaillent pas fort ou qu'ils ne méritent pas une juste rémunération pour les années qu'ils consacrent au service de la population. Les Canadiens veulent simplement que le régime de pension des députés soit conforme à la réalité qui existe dans le secteur et qu'il n'enfreigne pas les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Si les libéraux ne sont pas prêts à modifier leur régime de pension en or, qu'ils commencent avec le mien, qui entre en vigueur le 13 mars.

Comment le premier ministre peut-il justifier l'existence d'un régime de pension qui est huit fois plus généreux que ceux des contribuables canadiens qui en font les frais?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, une commission s'est récemment penchée sur cette question et a déposé un rapport dans lequel elle mentionne que les députés sont sous-payés, compte tenu des tâches qui leur incombent. Je suis d'accord avec elle.

Le régime de pension des députés a été créé il y a longtemps. En avril, il y aura 32 ans que je suis député fédéral. Au cours de cette période j'ai vu des députés partir et éprouver énormément de difficultés de réinsertion. On me dit qu'il y a beaucoup d'anciens députés, dont certains ont 58, 59 ou 60 ans et étaient encore


9420

ici il y a deux ans, qui ont des difficultés à se trouver un autre emploi parce qu'ils ont siégé ici durant une quinzaine d'années et qu'il leur est difficile de faire la transition vers le secteur privé.

Je n'ai pas l'intention de me faire du capital politique avec cette question. Nous allons être justes envers les députés. Le programme que j'ai avancé durant ma campagne électorale, on le retrouvera tel quel, sinon plus, dans ce qui sera annoncé d'ici la fin du mois.

* * *

[Français]

LE BUDGET

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Selon le député libéral de Gander-Grand Falls, les hauts fonctionnaires du ministère des Finances ont recontré des représentants influents du milieu des affaires et des banques pour présenter des options envisagées par le ministre des Finances lors de son prochain budget.

Le ministre des Finances confirme-t-il que parmi ces options, on envisage une réduction de quatre milliards de dollars dans les paiements de transfert aux provinces, une augmentation de 1 p. 100 de la TPS ainsi qu'une taxe de 1 p. 100 sur le capital de fonds de pension et des REER?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, le député sait fort bien que je n'ai pas l'intention de faire des commentaires sur des suggestions spécifiques en ce qui concerne le budget. Cela étant dit, je peux confirmer que la rencontre telle que décrite par le député dans la lettre n'a jamais eu lieu.

(1435)

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Finances pourrait nous décrire d'abord comment cette rencontre a eu lieu, si ce n'est pas dans le contexte que j'ai mentionné. D'autre part, compte tenu de l'impact désastreux qu'aurait une taxe de 1 p. 100 sur le capital accumulé en REER et en fonds de pension, le ministre des Finances peut-il s'engager à écarter immédiatement et sans équivoque cette taxe qui coûterait quelque 5 milliards de dollars principalement à la classe moyenne?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, voilà le problème quand on écrit la question supplémentaire avant d'avoir obtenu la réponse.

Il m'est impossible de décrire une rencontre qui n'a jamais eu lieu.

[Traduction]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes.

Selon un article paru dans le Winnipeg Free Press d'aujourd'hui, une bande autochtone du nord du Manitoba s'apprête à envoyer, aux frais des contribuables, 53 de ses membres à une conférence qui se tiendra en République dominicaine.

Le ministre approuve-t-il ce gaspillage de l'argent des contribuables? Sait-il seulement ce qui se passe dans son propre ministère?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est une nouvelle qui vient de paraître et cela ne relève pas de mon ministère. C'est une décision des autochtones.

J'examinerai cette affaire et je recommuniquerai avec le député pour lui donner plus d'information. Contrairement aux députés réformistes, je tiens à entendre la version de l'autre partie en cause avant de réagir.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre disait il y a quelques minutes que les députés ont de la difficulté à trouver du travail quand ils quittent leurs fonctions, mais c'est à cause du désastre économique qu'ils ont créé.

Je comprends que le ministre ait de la difficulté à comprendre pourquoi ce genre de chose insulte les contribuables. En fait, les membres de son caucus aiment bien faire ce genre de voyage aux frais de la princesse.

Le ministre peut-il dire à la Chambre quel est le but de ce voyage et en quoi cette dépense est justifiée? Le gouvernement cherche-t-il simplement de nouveaux moyens dispendieux d'avoir l'air ridicule? Si c'est le cas, il réussit admirablement bien.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme je le disais, j'en discuterai avec les premières nations du Manitoba.

Si je trouve que cette dépense n'est pas justifiée, je le ferai savoir, mais je vais au moins en parler avec les intéressés. Je ne ferai pas comme le député, qui parle de justice mais qui, quand il tient une assemblée dans sa propre circonscription, en avise tout le monde aux frais du gouvernement mais oublie d'aviser ses électeurs autochtones.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le ministre du Développement des ressources humaines affirmait, en début de semaine, que le gouvernement irait de l'avant avec sa réforme des programmes sociaux et qu'il consulterait les


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provinces à cet égard. On sait que la dernière conférence fédérale-provinciale des ministres de la Sécurité du revenu a été annulée, le 18 avril dernier, en raison de l'opposition farouche de plusieurs provinces à sa réforme.

Le ministre du Développement des ressources humaines entend-il, avant le prochain Budget fédéral, convoquer une conférence fédérale-provinciale sur la réforme des programmes sociaux?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de me poser la question. Je lui répondrai, et je serai très bref, que mon sous-ministre a rencontré ses homologues provinciaux juste avant les Fêtes pour discuter des modalités. Les sous-ministres des services sociaux ont également été convoqués à une réunion sur le même sujet, laquelle a eu lieu au cours de la troisième semaine de janvier.

Ce que les provinces nous ont dit, c'est qu'elles préféreraient attendre le dépôt du budget avant d'amorcer un processus officiel, pour être bien fixées sur les paramètres financiers.

J'aimerais cependant faire observer à la députée que, pas plus tard que la semaine dernière, j'ai rencontré tous les ministres des Services sociaux et du Travail des provinces de l'Atlantique.

(1440)

Nous avons eu des échanges très fructueux sur la façon d'établir un processus de consultation permanente avec les provinces. Je dois rencontrer d'autres ministres provinciaux à titre individuel dans les semaines qui viennent. Je puis assurer à la députée que plusieurs provinces sont d'ores et déjà disposées à s'atteler sérieusement à la tâche d'élaborer ensemble un nouveau projet de réforme sociale.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, doit-on comprendre qu'en ne convoquant pas, même après les discussions qu'il y a eu, une conférence fédérale-provinciale sur le projet de réforme avant le prochain Budget qui prévoit des coupures additionnelles, au sujet desquelles il y a trop de rumeurs pour qu'elles ne soient pas fondées, le gouvernement fédéral entend placer les provinces devant un fait accompli en annonçant, sans consultations préalables, quelles seront ces coupures pour les provinces?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme je viens de l'expliquer à la députée, lors des rencontres que nous avons eues avec des hauts fonctionnaires en décembre et en janvier, il a été question de la façon de procéder pour que les discussions soient profitables, et les représentants des provinces ont dit souhaiter qu'aucune autre réunion des ministres ne soit convoquée avant le dépôt du budget fédéral.

Nous portons toujours beaucoup d'intérêt et d'attention au point de vue des provinces; c'est pourquoi nous respectons leur volonté.

* * *

L'IMMIGRATION

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, afin d'économiser des centaines de millions de dollars venant des contribuables, le ministre pourrait-il envisager l'étude des propositions suivantes des réformistes: éliminer la Commission de l'immigration et du statut de réfugié; sélectionner un plus grand nombre de réfugiés à l'étranger; repenser les visas pour mettre un terme aux abus; dresser une liste de tiers pays sûrs; négocier une réduction à l'aide juridique en cas d'appels interjetés par des résidents non autorisés; ne plus accorder d'amnisties lorsque des demandeurs se voient opposer un refus?

Le Président: Chers collègues, au cours de la période des questions, on pose habituellement une question qu'on peut accompagner en douce d'une autre plus courte, mais aller jusqu'à cinq, c'est beaucoup. Le ministre peut répondre aux deux premières.

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je suis entièrement d'accord avec vous.

La réalité, c'est que le gouvernement a déjà pris des mesures pour améliorer non seulement le système d'immigration, mais aussi celui de la détermination du statut de réfugié.

L'autre soir, nous avons adopté le projet de loi C-44 qui, outre qu'il améliore le système, doit aussi réduire les abus. Nous avons aussi déclaré à la fin de l'année dernière que, dans le cadre de l'examen des programmes et des organismes, nous allions sous peu présenter d'autres réformes à la Chambre des communes.

Le député pourra tenir compte de ces réalisations pour évaluer notre performance.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Monsieur le Président, si le ministre n'approuve pas ces propositions, peut-il s'engager à ne pas refaire l'an prochain des dépenses comme celles qui suivent: des meubles pour son ami, Michael Schelew, 100 000 $; un cadeau de départ de 100 000 $ pour M. Schelew lorsque celui-ci a dû démissionner; un voyage de 25 000 $ dans l'île de Vancouver pour des hauts fonctionnaires; des signets ministériels d'une valeur de 2 000 $. . .

Le Président: Chers collègues, ces questions multiples compliquent la tâche de la présidence pendant la période des questions. Quand les questions se rapportent à l'administration d'un ministère, j'en tiens compte, bien sûr, mais quand elles sont très précises, j'invite les députés à les inscrire au Feuilleton.

Le ministre de l'Immigration peut répondre aux deux premières questions.

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, en entendant ces paroles dites pour amuser la galerie, on ne peut que comparer l'esprit qui sous-tend ces questions sur le dossier important de l'immigration avec les discours du premier ministre et du gouverneur général hier, qui étaient empreints d'un esprit généreux,


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du genre de vision qu'il faut pour bâtir un pays comme le Canada, un pays construit à la fois par de nouveaux arrivants et par des gens qui étaient ici depuis longtemps.

* * *

[Français]

LA LUTTE CONTRE LE SIDA

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

(1445)

La ministre de la Santé est visiblement dépassée par les événements et refuse obstinément d'assumer ses responsabilités dans le dossier du SIDA. Cette ministre fait preuve d'une incompétence renversante, en faisant étalage de sa totale incompréhension face à ce que vivent les personnes atteintes de cette terrible maladie.

Comment la ministre de la Santé explique-t-elle qu'à deux semaines du dépôt du budget fédéral, une somme de 1,1 million de dollars devant servir à la lutte contre le SIDA est toujours inutilisée et que la ministre, après dix mois d'attente, refuse toujours d'affecter ces sommes pour permettre aux personnes atteintes et aux intervenants communautaires d'obtenir de l'aide?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je m'excuse, mais s'il y a quelqu'un qui est dépassé, c'est le député, parce que ça fait maintenant plusieurs fois que j'explique comment on dépense l'argent qu'on a mis de côté pour le SIDA. Nous avons, dans la deuxième phase de la stratégie nationale, 40,7 millions de dollars qui sont dépensés chaque année, directement pour des programmes d'aide et des programmes de recherche, pour lutter contre le SIDA.

De plus, le Conseil de recherches médicales dépense deux millions de dollars chaque année, dans des programmes de recherche. L'ACDI dépense aussi de l'argent au plan international.

M. Réal Ménard (Hochelaga-Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, comment la ministre peut-elle se lever en Chambre et comment la ministre peut-elle justifier que sept projets communautaires sont en attente à son bureau, alors qu'ils ont été approuvés par ses fonctionnaires? La ministre peut-elle nous dire si oui ou non, elle va venir en aide aux groupes communautaires et autoriser ces projets qui sont en attente de sa signature depuis le mois d'octobre?

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, de nombreux projets de mon ministère font l'objet d'un examen, beaucoup plus que les sept qui ont été mentionnés aujourd'hui.

Le défi que nous avons à relever consiste à dépenser chaque dollar de façon efficace. C'est ce que nous faisons et ce que nous continuerons de faire. Les bons projets seront subventionnés.

LES FORCES CANADIENNES

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

À plusieurs reprises, le ministre a déclaré à la Chambre qu'il se préoccupait grandement de la santé et du bien-être des soldats canadiens. Le ministre est-il au courant que des membres des Forces canadiennes se plaignent de certains malaises qu'on appelle parfois le syndrome de la guerre du Golfe?

Le ministre peut-il informer la Chambre des mesures qui sont prises pour donner suite à ces plaintes et assurer l'avenir et le bien-être des membres des Forces canadiennes?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, ce problème nous préoccupe depuis déjà quelque temps.

Jusqu'à maintenant, il a été impossible d'établir un rapport clair entre certains symptômes dont souffrent les gens et leur participation à la guerre du Golfe. Un registre a été créé au ministère des Affaires des anciens combattants. Le Centre médical de la Défense nationale a ouvert une clinique spéciale pour traiter ces patients. Un protocole a été établi afin d'informer tout le personnel médical des Forces armées canadiennes de la façon dont ils doivent traiter ce genre de cas lorsqu'il en voit et le chef du Service de santé des Forces armées canadiennes a écrit à tous les soldats qui ont participé à cette guerre pour vérifier si les symptômes éprouvés dans certains cas sont répandus ou non.

Nous n'avons pas encore été en mesure d'établir un rapport précis, pas plus que les autorités américaines et britanniques qui avaient également envoyé des troupes dans la région du Golfe. Nous voulons toutefois faire la lumière sur cette affaire et nous prenons au moins ces mesures pour tenter de régler ce problème très grave.

* * *

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'ai ici un rapport produit il y a plus d'un an par le ministère qui relève du ministre du Développement des ressources humaines. Ce rapport révèle que le régime d'assurance-chômage est tellement mal conçu que le taux de chômage pourrait être inférieur de 0,5 à 1,5 p. 100 à ce qu'il est actuellement.

Le ministère admet qu'une réforme du régime d'assurance-chômage s'impose. Le ministre a eu plus d'un an pour agir, mais il n'a rien fait. Quand se décidera-t-il enfin à prendre des mesures concrètes?

(1450)

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je saurais gré au député d'avoir la courtoisie de nous dire exactement de quel rapport il s'agit. Je serais heureux d'y jeter un coup d'oeil.


9423

Comme le député le sait certainement-j'espère que cela ne le surprendra pas trop-le comité vient de terminer d'importantes consultations publiques sur le régime d'assurance-chômage, consultations qui ont duré quatre mois et à la suite desquelles des députés, y compris certains de ses collègues, ont fait des recommandations. En fait, je crois qu'il faisait lui-même partie du comité. S'il avait tous ces renseignements à sa disposition, pourquoi ne s'en est-il pas servi à ce moment-là?

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, je crois que nous sommes aux prises avec un gouvernement qui utilise la consultation comme excuse pour son inaction. Voilà ce qui se passe. Ce rapport est accessible.

Le Président: Je demanderais au député de ne pas brandir d'objets. S'il s'agit du rapport dont il parle, je lui demanderais de le déposer sur son pupitre et de poser sa question. On ne doit pas brandir d'objets à la Chambre.

M. Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, les contribuables canadiens en ont assez des gens qui abusent de nos programmes sociaux, mais ce n'est rien à côté de ce qu'ils ressentent à l'égard des politiciens qui ne font rien. Le ministre est déterminé à élargir ses programmes, mais il semble incapable de les améliorer.

Le ministre admettra-t-il enfin que ce sont en réalité ces gros programmes gouvernementaux qui sont la cause profonde du problème?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, pour en revenir aux propos plutôt fougueux du député, hier, après la période des questions, je me suis donné la peine de réexaminer très attentivement les recommandations faites par le Parti réformiste dans son rapport.

Après les avoir bien lues, j'en suis venu à la conclusion que j'étais entièrement d'accord avec sa collègue, la députée de Calgary-Nord, qui a dit que ces recommandations n'étaient pas le fruit d'une profonde réflexion, qu'elles avaient été imprimées à la hâte et que personne ne devrait les prendre au sérieux. Cela s'applique certainement à l'ensemble de la position du Parti réformiste sur la réforme sociale.

* * *

[Français]

LE TRANSPORT AÉRIEN

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

Récemment, le ministre des Transports annonçait sa politique sur l'attribution de nouvelles routes internationales aux transporteurs aériens. Cette politique aura pour conséquence d'avantager Canadien International en lui accordant un quasi-monopole sur les routes du Pacifique en écartant Air Canada de ce marché lucratif.

Le ministre des Transports ne convient-il pas qu'en refusant à Air Canada l'accès au marché de Hong Kong et de la Chine, il prive aussi les Canadiens de l'avantage considérable qu'ils pourraient retirer de la concurrence entre les deux transporteurs?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, Air Canada est évidemment intéressé à se voir octroyer la route de Hong Kong. Cependant, comme vous le savez très bien, pendant l'année 1994, nous avons ouvert le Japon à Air Canada avec l'attribution d'une route à Osaka au nouvel aéroport de Kansai. Je voudrais rassurer mon honorable collègue que les choses vont quand même assez bien. Air Canada embauchera plus de 350 agents de bord et rappellera une centaine de pilotes. Ce n'est quand même pas si mal.

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre des Transports peut-il expliquer, après le dossier Gemini et la garantie de prêt de 50 millions de dollars accordée à Canadien International, qu'encore une fois une décision du gouvernement fédéral favorise le transporteur Canadien International au détriment d'Air Canada? Comment peut-il nous expliquer cela?

[Traduction]

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je sais que le député fait des efforts, mais je tiens à faire remarquer que nous devons être très prudents lorsqu'il s'agit des itinéraires internationaux et voir ce qui a été fait et quand. Le gouvernement actuel n'a jamais accordé une garantie de 50 millions de dollars aux Lignes aériennes Canadien international.

(1455)

En dépit de ce que tente de faire croire le député à la Chambre aujourd'hui, je tiens à citer à nouveau ceci: «Sous le régime de la politique actuelle sur les itinéraires internationaux, Air Canada vient d'annoncer qu'elle accroîtra de 18 p. 100 la capacité de ses vols internationaux.»

Si le député prenait la peine de s'informer sur la situation d'Air Canada et de Canadien international à la même époque l'an dernier, il verrait tout le chemin parcouru.

* * *

LES FORCES CANADIENNES

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Le ministre a promis de faire entreprendre une enquête sur les incidents entourant la mission du régiment aéroporté en Somalie après que les procédures d'appel seront terminées. Il semble qu'une bonne part des ennuis du régiment aéroporté soit attribuable à la dégradation de la structure de commandement.

Le ministre pourrait-il au moins lancer la procédure d'enquête en nommant les membres de la commission d'enquête de sorte que cette dernière puisse agir sans retard après les procédures d'appel?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le député n'a manifestement pas écouté ce que j'ai déjà


9424

annoncé à la Chambre. L'enquête débutera non pas après les procédures d'appel, mais après les procédures initiales, en cour martiale. Cela devrait se faire vers la mi-mars.

Une fois que les procédures judiciaires seront terminées, le député pourra alors connaître le nom des membres de la commission d'enquête et leur mandat. Je suis convaincu qu'il sera parfaitement satisfait quand il en prendra connaissance, ce qui devrait arriver peu après que les procédures judiciaires seront terminées.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, je suggérais simplement d'agir rapidement et de nommer au moins les membres de la commission d'enquête afin qu'il n'y ait pas de retard après la fin des procédures.

Le moral des Forces armées canadiennes est sérieusement menacé, comme le ministre s'en rend sans doute compte. Nous avons entendu parler de problèmes comme les ennuis du régiment aéroporté, les marins assistés sociaux, le logement subventionné, les voyages de golf pour les généraux, et maintenant les réductions dans le soutien sanitaire pour les casques bleus canadiens en Croatie dont on a fait état aujourd'hui.

Comment peut-on espérer que les troupes aient confiance en leurs commandants tandis que ces problèmes accablants pour le moral demeurent non résolus?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, pour une question tendancieuse, c'en est toute une. Le député a réuni dans une seule question tout ce qu'il a pu entendre de négatif ces derniers temps à propos des Forces armées. Je ne peux vraiment pas répondre de façon détaillée à tout ce qu'il évoque ici, car je n'aurais pas terminé avant 15 h 30.

À propos de la commission d'enquête, elle entrera en activité dès que les procédures en cour martiale seront terminées. Quant aux autres questions que le député a évoquées, j'y ai répondu publiquement et je puis lui fournir des réponses détaillées.

Je ferai cependant remarquer une chose. Nous avons tous le devoir, en tant que politiciens, d'assurer la tenue d'un débat adéquat, informé et raisonné à propos de nos institutions, quelles qu'elles soient, afin de ne pas saper le moral d'institutions comme les Forces armées.

* * *

LES PESTICIDES

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Monsieur le Président, pendant des années, les maraîchers canadiens ont voulu être à armes égales pour livrer concurrence aux producteurs américains.

Le livre rouge promettait d'améliorer le régime de réglementation des pesticides. Que voudra dire cette réglementation des pesticides pour les agriculteurs canadiens et plus particulièrement pour les horticulteurs?

M. Lyle Vanclief (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de Niagara Falls de son intérêt constant pour cette question.

Le gouvernement annoncera aujourd'hui, nous en sommes très heureux, un nouveau régime de réglementation qui sera du ressort de la ministre de la Santé.

Notre régime actuel est déjà l'un des plus rigoureux du monde, mais nous allons l'améliorer encore pour que les horticulteurs, les exploitants forestiers et tous les Canadiens puissent avoir accès aux produits dans des conditions d'efficacité, de rentabilité et de compétitivité, et dans le respect de l'environnement. Ce sera dans l'intérêt de tout le monde.

* * *

LA TRANSCANADIENNE

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports.

J'ai appris que le nouveau plan concernant la transcanadienne au Nouveau-Brunswick est sur le bureau du premier ministre de la province et que celui-ci négocie actuellement avec les autorités fédérales leur participation financière au projet.

(1500)

D'après le plan proposé, la transcanadienne ne passerait pas par le grand centre industriel de la province, la ville de Saint John. J'ai appris que cela coûterait plus d'un milliard de dollars pour la faire passer par là.

Il y a une autre route, la route actuelle. . .

Le Président: Je prierais la députée de formuler sa question.

Mme Wayne: Le ministre des Transports confirmera-t-il à la Chambre que son gouvernement ne participera pas à un accord de cofinancement des travaux de construction de la route transcanadienne, qui coûteront un milliard de dollars, alors que la route actuelle peut être aménagée pour 200 millions de dollars, ce qui garantirait que les trois principales villes, c'est-à-dire Saint John, Fredericton et Moncton, soient traitées également et reliées à la frontière américaine par une route à quatre voies à partir de St. Stephen?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question, car je sais que c'est peut-être l'une des dernières qu'elle pose à la Chambre. J'ai entendu dire qu'elle envisage de succéder à Dennis Cochrane comme chef du Parti conservateur du Nouveau-Brunswick; le caucus conservateur à la Chambre se trouverait d'un seul coup réduit de 50 p. 100.

Je tiens à apporter une précision. Comme la députée le sait sûrement, la construction de routes au Nouveau-Brunswick, comme partout ailleurs au Canada, relève de la compétence provinciale. Si le gouvernement du Canada peut participer au projet, il essaiera certainement de le faire.

Quant au tracé de la route en question, puisqu'il s'agit d'une question relevant de la compétence de la province, c'est avec le premier ministre McKenna que la députée devrait négocier cela, dans l'exercice de ses nouvelles fonctions à l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick.


9425

RECOURS AU RÈGLEMENT

CERTAINS PROPOS TENUS AU COURS DE LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, pendant la période des questions, le ministre des Affairtes indiennes a fait des déclarations au sujet de mon comportement selon lesquelles, en ma qualité de député, j'aurais exclu les autochtones de ma circonscription des consultations publiques que j'ai tenues.

Cela est totalement faux et je vous saurai gré de bien vouloir demander au ministre de retirer ses paroles.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai invoqué le Règlement sur le même sujet.

Je voudrais corriger une erreur d'ordre géographique que j'ai faite. Il y a deux, parfois trois, porte-parole du Parti réformiste qui sont dans la même région, à savoir le député de Prince George-Bulkley Valley et le député de Skeena. Les deux circonscriptions sont contiguës. La circonscription du premier compte 11 premières nations, et celle de second, 23, soit 30 p. 100 de la population.

Il s'est tenu une réunion ayant pour thème «La parole est aux gens». Une tribune a été formée et des invitations ont été lancées. Cependant, aucune invitation n'a été adressée aux peuples autochtones de la circonscription et aucun autochtone n'a été invité à faire partie de la tribune.

Il s'agissait de la circonscription de Prince George-Bulkley Valley et non de celle de Skeena. Je m'excuse de cette erreur, mais non pas du point que j'ai fait valoir.

Le Président: J'espère que la question a été clarifiée. C'était une erreur d'ordre géographique. C'est ce à quoi le député faisait allusion.

M. Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, le ministre a dit que j'avais tenu une réunion dans ma circonscription. S'il examinait les faits, il constaterait que j'ai organisé non pas une, mais plusieurs réunions dans ma circonscription et que j'ai personnellement invité. . .

Le Président: Passons maintenant à la question habituelle du jeudi.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais demander à mon honorable collègue leader du gouvernement à la Chambre de nous faire état des travaux pour la prochaine semaine.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous avons l'intention, cet après-midi, de poursuivre l'étude de la motion sur le 51e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre qui traite de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales.

Nous reprendrons ensuite l'étude, en deuxième lecture, du projet de loi C-65, Loi portant réorganisation et dissolution de certains organismes fédéraux. Nous étudierons aussi, en deuxième lecture, le projet de loi C-67, Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), et le projet de loi C-61, Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d'agriculture et d'agroalimentaire.

(1505)

Vendredi, nous passerons à l'étape du rapport du projet de loi C-37, Loi modifiant la Loi sur les jeunes contrevenants et le Code criminel. Lundi, nous en serons à l'étape du rapport du projet de loi C-59, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu et, si possible, nous passerons à la troisième lecture. Si nous terminons cette étude, nous reviendrons, au besoin, à l'étude du projet de loi C-37 ou, le cas échéant, à la liste d'aujourd'hui, au point où nous en serons au moment de l'ajournement de ce soir.

Mardi et mercredi prochains seront réservés à l'opposition.

Enfin, je consulterai mes collègues d'en face au début de la semaine prochaine pour établir l'ordre du jour de jeudi et vendredi.

* * *

QUESTION DE PRIVILÈGE

LES QUESTIONS AU FEUILLETON-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Je suis maintenant prêt à rendre ma décision au sujet de l'affaire soulevée par le député de Delta, les 13 et 15 décembre 1994, au sujet de la réponse et de la réponse complémentaire du ministre des Pêches et des Océans à la question no 82 inscrite au Feuilleton. Je remercie le député pour son exposé écrit très détaillé du 1er février 1995, qui a éclairé les observations qu'il avait faites à la Chambre.

Je désire affirmer dès le départ qu'après avoir examiné tout ce qui a été dit à la Chambre ainsi que les réponses à la question parues aux Débats, je suis toujours d'avis et je répète que la question de privilège n'est pas fondée à première vue.

[Français]

Avant d'expliquer ma décision, je désire attirer l'attention des députés sur les commentaires 31(1) et 31(2) de la sixième édition de Beauchesne, qui sont ainsi formulés:

(1) Un différend entre deux députés sur des allégations de fait ne remplit pas les conditions qui en feraient une atteinte au privilège.
(2) Le fait, pour un ministre, de ne pas répondre à une question ne saurait fonder une question de privilège.
[Traduction]

Bien que j'aie conclu que la question de privilège n'est pas, à première vue, fondée, je profite de l'occasion pour faire quelques observations sur cette question à l'intention du député et de la Chambre. Le commentaire 403 de la sixième édition de Beauchesne se lit comme suit:


9426

La Chambre reconnaît deux grandes catégories de questions: les question orales, qui, selon le Règlement, portent sur des sujets urgents, et les questions par écrit, qui servent à demander aux ministres des renseignements détaillés.
J'insiste sur la dernière phrase parce que l'objet des questions écrites devrait être de demander et d'obtenir des réponses détaillées et précises à des questions soigneusement rédigées.

Dans son exposé, le député de Delta affirme que les députés s'attendent à ce que les réponses aux questions inscrites au Feuilleton soient exactes et bien motivées. Il souligne que la question posée était de celles qui exigent un examen détaillé de la part du gouvernement et qu'il y voulait une réponse détaillée. Il a aussi soutenu qu'il est du devoir du gouvernement de fournir des renseignements exacts non seulement à celui qui pose la question, mais aussi à la Chambre. Sur ce point le député a absolument raison.

[Français]

Le libellé de l'article 39 du Règlement nous renseigne davantage sur la nature de cette sorte de questions. Il énonce, entre autres, que les députés peuvent poser des questions aux ministres, mais qu'«il est cependant irrégulier, en posant des questions de ce genre ou en y répondant, d'avancer des arguments ou des opinions, ou d'énoncer des faits, autres que ceux qui sont indispensables pour expliquer la question ou la réponse. Il y est répondu sans discussion du sujet ainsi visé.» Parce que les questions inscrites au Feuilleton n'ont pas pour objet de susciter un débat, la règle interdit la mention d'opinions et d'arguments, qui sont la source même des débats.

[Traduction]

Le Greffier de la Chambre, agissant au nom du Président, a les pleins pouvoirs pour veiller à ce que l'on inscrive au Feuilleton des Avis des questions cohérentes et concises, conformément aux coutumes de la Chambre.

(1510)

Comme le signalait le président Fraser dans une décision du 2 octobre 1991, à la page 3147 des Débats, les questions sont examinées afin de déterminer si elles sont conformes à certaines exigences de fond et de forme avant d'être inscrites au Feuilleton des Avis. Pour aider les députés ainsi que le Greffier et son équipe à s'assurer que les questions à inscrire au Feuilleton sont formulées convenablement, le commentaire no 428 de la sixième édition de Beauchesne dresse une longue liste d'interdictions qui s'appliquent aux questions écrites. Il incombe toutefois au député qui soumet une question à inscrire au Feuilleton des Avis de veiller à ce qu'elle soit soigneusement formulée pour susciter les renseignements recherchés. Il n'y a toutefois pas de disposition équivalente du Règlement de la Chambre qui permettrait au Président de réviser les réponses du gouvernement aux questions posées.

En l'espèce, nous sommes en présence d'un problème d'interprétation de la formulation de la question inscrite au Feuilleton. Le député de Delta attendait une réponse précise, ce qui n'est pas le cas de la réponse déposée au nom du ministre. En effet, le député soutient que la réponse écrite contient des renseignements erronés. Il affirme qu'il a trouvé des contradictions entre la réponse du ministre et les renseignements figurant dans des documents obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information. Le ministre affirme quant à lui que tout a été mis en oeuvre pour répondre à la question posée par le député de Delta.

Je rappelle aux députés que la tradition veut que ce qui se dit à la Chambre ou est porté au compte rendu est tenu pour vrai. Comme mon prédécesseur, Madame le président Jeanne Sauvé, l'a si bien dit, le 28 février 1983, à la page 23278 des Débats, il n'appartient pas à la présidence «de déterminer si le contenu des documents déposés à la Chambre est exact ou non».

[Français]

Joseph Maingot, dans son ouvrage intitulé Le privilège parlementaire au Canada, à la page 237, résume bien la situation dans laquelle le Président se trouve dans un tel cas. Il écrit qu'avant que le Président ne décide si la question de privilège semble fondée à première vue, dans le cas où il y a controverse sur les faits, il faut, et je cite: «qu'une personne investie de puissance publique telle qu'un ministre de la Couronne, un fonctionnaire d'un ministère, ou un organisme gouvernemental, admette qu'un député a été délibérément induit en erreur, ou reconnaisse des faits qui conduisent naturellement à cette conclusion et [. . .]qu'il existe un lien direct entre l'information trompeuse et les délibérations du Parlement. . .»

[Traduction]

Ce n'est pas la première fois qu'il s'élève une controverse au sujet des réponses données aux questions inscrites au Feuilleton ou du contenu de documents déposés par des ministres. Qu'il me suffise de renvoyer les députés à trois décisions: la première ayant été rendue le 8 février 1983 et figurant aux pages 23278 et 23279 des Débats; la deuxième, le 21 février 1990, à la page 8618, et la troisième, le 15 mai 1991, à la page 100. Je dois cependant souligner que dans aucun de ces cas la question de privilège n'a été jugée fondée à première vue. Comme l'indiquait le président Fraser dans la décision du 15 mai 1991:

La députée a soulevé[. . .] une question qui n'a rien d'inhabituel. Elle n'est pas satisfaite de la réponse donnée. Pour la présidence, le problème en pareil cas vient toujours des énormes différences d'interprétation des réponses données. [. . .]Il ne s'agit pas d'une question de privilège, mais d'un désaccord sur certains faits et réponses.
Ce précédent s'applique à l'affaire qui nous occupe.

Les questions inscrites au Feuilleton sont des outils très importants, mis à la disposition des députés. Comme je l'ai mentionné plus tôt, elles ont pour but de demander, dans une forme précise et détaillée, des renseignements précis et détaillés qui permettront aux députés de remplir leurs fonctions. Il incombe à tous ceux qui participent à ce processus, comme demandeurs ou comme fournisseurs de renseignements, c'est-à-dire les députés qui formulent les questions, les fonctionnaires de la Chambre qui les examinent, les personnes qui préparent les réponses et les ministres de la Couronne qui déposent les réponses en Chambre, de veiller à ce que tout soit fait pour que ces échanges demeurent aussi fructueux et utiles que possible.

9427

Je remercie les honorables députés qui sont intervenus sur ce sujet.

_____________________________________________


9427

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1515)

[Traduction]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

La Chambre reprend l'étude de la motion.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui pour discuter du rapport sur le remaniement électoral qu'a présenté le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

Je tiens à féliciter le comité pour son rapport très sérieux. Si j'ai bien compris, ce rapport conclut en substance que six nouvelles circonscriptions électorales devraient être créées au Canada.

J'ai eu l'honneur de comparaître devant le comité le 24 juin 1994. L'opinion que j'avais à ce moment-là rejoint beaucoup celle que j'ai aujourd'hui. En un mot, les habitants de ma circonscription, et les Canadiens en général, ne veulent pas qu'on augmente encore le nombre de représentants à la Chambre des communes du Canada.

Du côté de l'industrie, les mots à la mode aujourd'hui sont la rationalisation, une rentabilité et une efficacité accrues. Nous réexaminons actuellement la fonction publique pour trouver des moyens de la rendre plus efficace, compte tenu de ses effectifs. Nous avons imposé un gel des emplois dans la fonction publique pour en réduire la taille et améliorer son efficacité. De nos jours, le nombre ne fait pas forcément la qualité.

Je songe ici à une vieille blague que les Canadiens lancent souvent pendant les campagnes électorales: heureusement, les Canadiens n'en ont pas pour leur argent avec le gouvernement. C'est une mauvaise blague, mais ce sont les contribuables qui en font les frais.

De nos jours, nous avons à notre disposition les télécommunications et toutes sortes de moyens de communication pour avoir accès à notre circonscription et aux électeurs canadiens. Je suis devenu un fervent utilisateur de l'autoroute électronique, l'Internet. Je peux me rendre à mon bureau cet après-midi et transmettre un message dans tout le Canada. Ce sont des services efficaces comme ceux-là dont nous devons doter l'administration publique et la Chambre des communes.

Mon personnel passe environ 80 p. 100 de son temps dans ma circonscription à traiter avec quelque 10 p. 100 de la population. De toute évidence, les députés peuvent augmenter la taille de leur circonscription et le nombre d'électeurs avec lesquels ils font affaire, sans pour autant accroître le coût de leurs activités.

Prenons par exemple ma circonscription, Durham, qui compte un certain nombre d'élus à d'autres institutions politiques. En plus de moi-même, il y a un sénateur. Il y a cinq députés à l'Assemblée législative de l'Ontario. Nous avons un gouvernement régional formé de 32 membres, ainsi que 66 maires et conseillers. Il s'agit, bien entendu, de se demander si ce type de gouvernement donne une meilleure démocratie représentative au Canada. Qu'en est-il dans d'autres pays?

Comme je l'ai mentionné dans les instances que j'ai présentées au comité en juin, pour être justes, il faut se comparer à nos voisins du Sud, les Américains. En 1911, il y a 84 ans, pratiquement un siècle, les États-Unis ont plafonné leur système de démocratie représentative en prévoyant un Congrès formé de 435 représentants et de 100 sénateurs.

Au Canada, il y a un représentant fédéral pour 75 000 personnes. Aux États-Unis, la proportion est de un pour 465 000 personnes. Les Américains administrent ce système quasiment comme nous le faisons nous-mêmes. Tous les dix ans, ils organisent un recensement et procèdent à un remaniement dans le système. Certains États obtiennent davantage de représentants et d'autres moins en fonction de la croissance de leur population.

(1520)

Si nous maintenons notre formule arithmétique actuelle, il est évident que la Chambre va bientôt se retrouver quelque part dans la rivière des Outaouais. Nous avons, au Canada, la moitié plus de représentants qu'aux États-Unis, alors que la population américaine est dix fois supérieure à la nôtre.

À la page 4 du rapport, on dit qu'il est impossible, à ce stade-ci, de plafonner ou de réduire la représentation à la Chambre des communes. À la page 5, on précise qu'une modification importante du processus électoral entraînerait un changement trop radical.

Je pensais que, en tant que députés, nous étions ici pour prendre des décisions et que nous étions payés pour cela. Nous disons peut-être que nous ne pouvons pas prendre des décisions et que nous avons besoin de plus de députés pour les prendre pour nous. J'ignore si c'est ce que nous essayons de faire comprendre ici. Je ne crois pas que les Canadiens souhaitent une représentation accrue.

Il y a principalement deux sujets de préoccupation. Le premier, qui a été exposé par certains de mes collègues réformistes, réside dans la réduction du nombre de députés au Parlement fédéral. Le second, c'est une proposition soumise par le comité qui souhaite foncièrement accroître le nombre de députés de six.

Je voudrais soumettre une solution intermédiaire bien meilleure, selon moi. Elle reflète la recherche constante de compromis au Canada. Je reconnais également, comme on l'a mentionné dans le rapport du comité même, qu'on est confronté à un problème à cause de la clause de droits acquis signée en 1986 avec un certain nombre de provinces. Cette clause précise qu'aucune province ne peut avoir un nombre de sièges inférieur à celui 1986. Il est clair qu'on doit renégocier cette entente. En fait, il


9428

faudrait que l'accord soit réexaminé immédiatement et pas plus tard.

On m'a dit que six députés de plus pourraient coûter jusqu'à six millions de dollars de plus. Ce qui ne veut pas nécessairement dire que chacun reçoit un million de dollars, mais, si l'on tient compte des dédoublements de services, de personnel, etc., il en résulte une hausse considérable de coûts. Mes électeurs et moi sommes d'ardents partisans de la réduction du coût de gouverner.

Le problème se réduit essentiellement à une question mathématique. Malheureusement, les mathématiques semblent être le point faible des députés. J'ai effectué dans mon bureau ce matin un calcul fondé sur le nombre actuel de sièges. J'ai déduit du nombre de sièges et de la population totale les sièges et la population des provinces ayant déjà atteint la représentation minimale en vertu des clauses sénatoriales. J'ai également soustrait de ce nombre les 75 sièges que compte actuellement la province de Québec. D'après cette formule mathématique, les 75 sièges du Québec correspondent, grosso modo, aux 25 p. 100 de la population canadienne qui vivent au Québec.

En définitive, les résultats seraient les suivants: la province de l'Alberta gagnerait un siège et la Colombie-Britannique deux; la province du Manitoba en perdrait trois, l'Ontario en gagnerait six et la Saskatchewan perdrait quatre sièges. Le Nouveau-Brunswick conserverait le même nombre de sièges tandis que Terre-Neuve en perdrait un. Les Territoires du Nord-Ouest verraient leur représentation inchangée puisqu'ils sont déjà au niveau de représentation sénatoriale minimum. La Nouvelle-Écosse perdrait un siège, tandis que l'île-du-Prince-Édouard, le Québec et le Yukon conserveraient leur représentation actuelle. Le nombre total de sièges est de 275, soit la taille actuelle de la Chambre.

On ne constate aucune déviation par rapport aux statistiques démographiques. Si on se fonde sur les résultats du recensement de 1991, la déviation dans ces provinces ne dépasse pas 1 p. 100 de la population totale du Canada. Autrement dit, il s'agit essentiellement de la représentation d'après la population, ce que nous tentons de réaliser.

(1525)

Je n'ai pas examiné la question de la répartition à l'intérieur des limites territoriales des provinces, c'est-à-dire les écarts entre les régions rurales et urbaines. Je présume que nous pouvons suivre les directives du rapport, en utilisant une commission de délimitation des circonscriptions électorales de concert avec les provinces.

Enfin, il m'apparaît évident que les Canadiens ne souhaitent pas, pour l'instant, un accroissement de la taille de la Chambre des communes. Je crois que nous devrions peut-être réexaminer la question et essayer de renégocier la clause de droits acquis.

Je me suis rendu compte qu'il y a trop de décideurs et pas suffisamment de décisions. Prenons une décision maintenant au lieu de la laisser à nos successeurs au Parlement.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, je voudrais demander au député de préciser sa pensée sur ce qu'il vient d'énoncer au sujet de la renégociation des clauses de droits acquis de la Constitution de 1867. J'aimerais bien qu'il m'explique ce qu'il a à l'esprit lorsqu'il conclut sur ce thème.

[Traduction]

M. Shepherd: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Je ne faisais pas allusion à la Loi constitutionnelle, mais bien à un accord distinct qui, si j'ai bonne mémoire, remonte à 1987. En effet, il s'agit d'un accord assez récent qui a été conclu avec certaines provinces et qui prévoit essentiellement que, à partir de 1987, elles ne devraient pas subir de réduction du nombre de leurs députés. Donc, il ne s'agit pas d'une disposition de la Loi constitutionnelle, mais, semble-t-il, d'un accord distinct qui a été conclu avec certaines provinces et selon lequel le nombre de leurs députés ne sera jamais inférieur à celui qu'elles avaient en 1987. Ce n'est pas un amendement constitutionnel.

[Français]

M. Lebel: Monsieur le Président, j'aimerais demander au député de préciser à quelle loi il réfère, si ce n'est pas l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867. J'aimerais savoir en vertu de quelle loi ceci nous a été donné. Je le demande en toute déférence pour mon collègue du Parti libéral. J'ignorais, jusqu'à maintenant, l'existence d'une telle loi.

[Traduction]

M. Shepherd: Monsieur le Président, j'ai simplement lu le rapport du comité où l'on peut lire à la page 7: «. . .des questions telles que la clause sénatoriale et la clause de droits acquis selon laquelle nulle province ne peut avoir moins de députés qu'elle n'en possédait en 1986.» C'est dans le rapport rendu public par le comité. C'est essentiellement son propos. Il est évident qu'il s'agit d'une clause de droits acquis applicable à partir de 1986.

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de dire que j'appuie la motion du gouvernement visant l'adoption du 51e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre.

Je tiens à souligner que le projet de loi qui figure dans le rapport dont nous sommes saisis est le résultat de l'utilisation, pour la première fois, de la nouvelle procédure du Règlement de la Chambre des communes qui prévoit que l'on peut charger un comité d'élaborer et de déposer un projet de loi. Les paragraphes 68(4) à 68(8), qui ont été approuvés par la Chambre le 7 février 1994, énoncent le processus que les comités doivent suivre pour rédiger une mesure législative.

Le 19 avril 1994, la Chambre des communes a adopté la motion suivante:

Que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre soit chargé, conformément à l'article 68(5) du Règlement, d'élaborer et de déposer un

9429

projet de loi sur le mode de révision des limites des circonscriptions électorales pour la Chambre des communes suivi par les commissions de délimitation des circonscriptions électorales, et que, en élaborant le projet de loi, le comité soit chargé d'étudier, entre autres, le fonctionnement général de la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales au cours des trente dernières années, notamment:
a) en évaluant s'il devrait y avoir une augmentation continuelle du nombre de députés à la Chambre des communes après chaque recensement, comme le prévoit actuellement l'article 51 de la Loi constitutionnelle;
b) en examinant la pertinence de l'actuel mode de sélection des membres des commissions de délimitation des circonscriptions électorales;
c) en examinant les règles régissant les commissions de délimitation des circonscriptions électorales ainsi que leurs pouvoirs et méthodes de procédure, notamment si ces commissions devraient commencer leurs travaux en faisant dès le départ les modifications nécessaires devant être apportées aux limites des circonscriptions électorales existantes partout où c'est possible;
d) en examinant le moment et la nature de la participation du public et de la Chambre des communes aux travaux des commissions de délimitation des circonscriptions électorales;
Que le comité soit habilité à se déplacer au Canada et à entendre des témoins au moyen de téléconférences; et
Que le comité fasse rapport au plus tard le 16 décembre 1994.
(1530)

Le comité a fait rapport de cette question à la Chambre le 25 novembre 1994, lors du dépôt par le président du 51e rapport du comité à la Chambre. En tant que nouveau député à la Chambre, je suis ravi quant à moi que les comités aient maintenant le pouvoir d'élaborer et de proposer entre autres des mesures législatives de ce genre.

Je voudrais remercier le directeur général des élections du Canada, M. Jean-Pierre Kinsgley, son personnel, le personnel du comité, tous les témoins qui ont comparu devant le comité et mes collègues à la Chambre pour leur expertise et leurs conseils qui ont été d'une aide précieuse aux membres du comité dans l'examen des questions complexes et délicates qui leur étaient soumises.

Pour en venir maintenant à ces questions, le rapport dit, et je cite: «Plusieurs des membres du comité en sont venus, à regret, à la conclusion qu'il serait impossible, pour le moment, de plafonner ou de réduire la représentation à la Chambre des communes[. . .]». L'une des principales raisons invoquées pour cette conclusion, qui semble aller à l'encontre des instructions que le comité a reçues de la Chambre, est que. . .

M. Hermanson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis désolé d'avoir à interrompre le député, mais j'ai l'impression qu'il arbore l'insigne du candidat libéral dans Ottawa-Vanier. Je sais que le candidat réformiste lui donne du fil à retordre. Mais je préférerais qu'il s'en tienne au Règlement de la Chambre.

Le président suppléant (M. Kilger): Veuillez excuser ma mauvaise vue. Si effectivement le député de Peterborough arborait un tel insigne. . . mais je vois qu'il l'a enlevé. Nous le remercions de sa collaboration et lui rendons la parole.

M. Adams: Monsieur le Président, je présente mes excuses au député ainsi qu'aux députés d'en face. J'ai fait du porte-à-porte ce matin et j'ai oublié de me changer avant de venir. Je m'en excuse.

Il n'est pas possible pour le moment d'imposer un plafond ou de réduire le nombre des députés. Les députés de cette Chambre sont parvenus à la conclusion que pour ce faire, il faudrait que toutes les provinces acceptent qu'on modifie l'article 51 de la Loi constitutionnelle de 1867 afin d'éliminer la règle de la représentation proportionnelle des provinces, ainsi que l'article 51A de cette même loi pour éliminer la clause dite de «représentation sénatoriale» selon laquelle une province doit toujours avoir un nombre de députés non inférieur au nombre de sénateurs représentant cette province.

Tout plafond ou toute réduction pénaliserait injustement les provinces en expansion, à moins d'abolir les garanties constitutionnelles assurant la représentation disproportionnée des provinces moins peuplées ou dont la population diminue. Abolir ces garanties pourrait avoir comme conséquence pour ces provinces et pour les vastes régions rurales peu peuplées du Canada, y compris le Nord, une perte de représentation aussi soudaine que dramatique.

La décision du comité signifie que le compromis auquel on est parvenu pour calculer le nombre de sièges à la Chambre des communes s'appliquera à la redistribution de ces derniers en utilisant les résultats du recensement de 1991. Étant donné l'augmentation globale de la population du Canada, il semblerait que la légère augmentation, qui fera passer le nombre de sièges de 295 à 301, soit raisonnable. Sur les six nouveaux sièges, deux iront à la Colombie-Britannique, province qui enregistre une croissance très rapide, et quatre à l'Ontario, province très peuplée.

(1535)

Le comité ne recommande aucune modification de la structure des commissions de délimitation des circonscriptions électorales. Le président de chaque commission doit être nommé par le juge en chef de la province en question et les deux autres membres, par le président de la Chambre des communes, comme c'était le cas dans le passé.

Cependant, le projet de loi rédigé par le comité prévoit que le président de la Chambre fasse paraître l'appel de candidatures et l'avis des nominations qu'il propose. Avant de proposer une nomination, le président de la Chambre tient toute une série de consultations. Il dépose la liste des candidats à la Chambre des communes, où une procédure exigera qu'au moins 20 députés demandent la mise aux voix des nominations envisagées. Faute d'une motion d'opposition, la nomination devient définitive après dix jours de séance. J'approuve en tous points la transparence du processus de nomination que recommande le comité.


9430

Quant aux pouvoirs, méthodes et travaux de la commission fédérale de délimitation des circonscriptions électorales, il faut souligner qu'un des principaux motifs de la suspension du processus de redistribution l'an dernier et de l'approbation de l'ordre de renvoi du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, c'est que les Canadiens, y compris un grand nombre de mes électeurs, avaient été exclus du processus.

De nombreux Canadiens ont été surpris d'apprendre tout à coup les modifications d'envergure qu'on proposait d'apporter aux limites des circonscriptions électorales, sans même qu'ils aient eu leur mot à dire. C'était certainement le cas dans ma circonscription de Peterborough.

Les recommandations contenues dans le rapport dont nous discutons en ce moment visent à offrir aux Canadiens une pleine participation à un processus amélioré de remaniement des circonscriptions électorales fondé sur le recensement de 1991. Je vous énumère quelques recommandations de ce rapport.

Pour que la population soit mieux informée dès le départ du processus de remaniement électoral, les commissions de délimitation des circonscriptions électorales devront «fournir des renseignements sur le processus de remaniement, des données du recensement pour la province, et faire une déclaration de portée générale sur la méthode de révision qu'elle compte utiliser. Les parties intéressées auront alors 30 jours pour faire des observations sur l'ensemble des paramètres du processus».

Les commissions devront préparer trois dessins et cartes indiquant différentes façons possibles de délimiter les circonscriptions plutôt qu'une seule, comme c'était le cas auparavant.

Une disposition prévoit également une deuxième série d'audiences publiques sur les limites recommandées par une commission si les modifications résultant de la première série d'audiences publiques sont majeures. Cette deuxième série d'audiences pourrait être tenue si une commission ou le directeur général des élections la juge utile.

Les députés seront intéressés de savoir que, à l'avenir, ils seront sur le même pied que tous les autres Canadiens face aux propositions des commissions puisque les commissions ne seront plus tenues de déposer ces proportions devant la Chambre des communes pour débat et étude par un comité parlementaire.

Le délai entre la promulgation d'une ordonnance de représentation fondée sur le rapport final des commissions et son entrée en vigueur sera ramené de douze à sept mois. Ce délai donne à Élections Canada, aux directeurs de scrutin et aux organisations politiques le temps de réorganiser leurs activités en fonction des nouvelles circonscriptions électorales.

Pour ce qui est du découpage comme tel des circonscriptions électorales pendant le remaniement, je suis particulièrement en faveur de la recommandation du comité qui a trait aux facteurs que les commissions de délimitation des circonscriptions électorales doivent prendre en considération. Je fais ici allusion à la communauté d'intérêts, aux dimensions pas trop vastes des circonscriptions situées dans des régions rurales ou septentrionales peu densément peuplées, ainsi que de la probabilité d'un accroissement substantiel de la population d'une circonscription au cours des cinq années suivantes.

Les commissions ne devront recommander de changements aux limites des circonscriptions électorales que lorsque ces facteurs prennent une importance suffisante pour les justifier.

La communauté d'intérêts est définie plus clairement dans le projet de loi préparé par le comité.

(1540)

Le paragraphe 19(4) dit que l'expression «communauté d'intérêts» s'entend notamment des facteurs touchant l'économie, les limites existantes ou traditionnelles des circonscriptions électorales, le caractère urbain ou rural d'un territoire, les limites des municipalités et des réserves indiennes, les limites naturelles et l'accès aux moyens de communications et de transports.

Dans ma circonscription, le canton d'Innesmore et la première nation de Curve Lake se sont trouvés nettement désavantagés parce que la communauté d'intérêts n'était pas définie de cette façon la dernière fois qu'on a tenté de réviser les limites de cette circonscription.

Ces dispositions obligeraient les commissions de délimitation des circonscriptions électorales à tenir compte des facteurs précisés, ce qui devrait conduire à l'établissement de limites plus raisonnables et acceptables.

Pour minimiser les effets que les changements démographiques enregistrés lors des grands recensements décennaux, ceux des années qui se terminent par le chiffre 1 (1991, 2001, etc.), pourraient avoir sur les limites des circonscriptions électorales, le comité recommande qu'on redécoupe les circonscriptions électorales à l'intérieur des provinces d'après les résultats des recensements quinquennaux, ceux des années qui se terminent par le chiffre 6 (1996, 2006, etc.). Dans ces cas, même s'il pouvait y avoir un redécoupage à l'intérieur d'une province, le nombre de circonscriptions électorales dans cette province ne changerait pas.

Par ailleurs, pour minimiser les effets possibles des changements démographiques enregistrés lors des grands recensements décennaux, le comité recommande également qu'aucune commission de délimitation des circonscriptions électorales ne soit établie lorsqu'il n'y a pas eu de changements démographiques importants. Aucune commission ne serait établie si le nombre de circonscriptions électorales auquel une province a droit reste inchangé à la suite du recensement décennal et si aucune des


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circonscriptions électorales existantes n'a une population supérieure ou inférieure de plus de 25 p. 100 au quotient provincial.

Dans le cas du recensement quinquennal, une commission ne serait établie que si l'écart par rapport au quotient provincial excède 25 p. 100 dans plus de 10 p. 100 des circonscriptions électorales d'une province.

Je sais que tout cela est très clair pour vous, monsieur le Président, mais je voudrais ajouter un mot d'explication. Le comité n'a pas recommandé de modifier l'écart de 25 p. 100 qui est permis par rapport au quotient de la province, c'est-à-dire la moyenne idéale du nombre d'électeurs par circonscription, moyenne calculée d'après le recensement décennal, mais il a recommandé l'élimination de la disposition autorisant un écart encore plus grand dans des circonstances exceptionnelles.

Le comité admet que des circonstances exceptionnelles peuvent se présenter et recommande donc que les circonscriptions dont la population s'éloigne de plus de 25 p. 100 de la moyenne figurent dans une annexe de la loi que seul le Parlement pourra modifier. Les circonscriptions exceptionnelles figureront dans une liste distincte que seule une loi du Parlement pourra modifier.

Il est essentiel que le remaniement des circonscriptions soit terminé à temps pour que les prochaines élections fédérales, normalement en 1997 ou 1998, se tiennent au moyen d'une nouvelle carte électorale qui reflète fidèlement la répartition de la population, établie à partir du recensement décennal de 1991.

Ce serait une injustice flagrante, envers les électeurs de régions où la population a beaucoup changé, que les élections se fassent selon les circonscriptions actuelles, qui ont été établies à partir du recensement de 1981.

Je suis heureux de participer à ce débat, et je me ferai un plaisir de répondre aux questions ou d'avoir des échanges avec d'autres députés.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, j'ai trouvé fort intéressant le discours du député.

Comme le député le sait, la population du Canada s'élevait à environ 20 millions de personnes en 1967, l'année du centenaire du pays. Nous étions fiers d'avoir atteint ce chiffre-là. Près de 30 ans plus tard, notre population est d'environ 30 millions d'âmes.

(1545)

Notre population s'est accrue de 10 millions de personnes en 30 ans. Du recensement décennal de 1991 au recensement décennal de 2001, notre population pourrait fort bien s'accroître de 3 millions de personnes. Ce n'est qu'une hypothèse certes, mais une hypothèse très vraisemblable.

À l'heure actuelle, il y a un député pour 100 000 habitants. Il s'ensuit que d'ici l'an 2000 peut-être il nous faudra 12, 24, voire 30 députés de plus, si nous ne limitons pas leur nombre.

Le député peut-il appuyer ce projet de loi qui ne règle pas ce problème urgent?

M. Adams: Monsieur le Président, je remercie le député de ses remarques. Il sait sûrement que l'une des raisons pour lesquelles on discute autant de la question de la délimitation des circonscriptions électorales à comparer à d'autres pays, c'est parce que, comme il l'a signalé, notre pays est jeune et qu'il continuera donc sa croissance.

On discutera toujours de la taille adéquate des circonscriptions dans un pays comme celui-ci. Comme le député le sait par expérience vu la province qu'il représente, il y a un autre problème, celui des vastes étendues que bien des gens des villes croient désertes, mais qui sont habitées à part entière par des autochtones et d'autres Canadiens, même s'ils sont en très petits nombres.

Il nous faut constamment nous demander comment ces gens devraient être représentés par rapport aux habitants de très grandes villes comme Vancouver, Toronto, Montréal, etc. Ce sera toujours un sujet de discussion.

La mesure proposée en l'occurrence est un compromis raisonnable. Elle prévoit, pour les 10 ou 15 prochaines années, un rajustement de quelques sièges à la Chambre des communes, et ce, pour qu'on tienne compte de l'énorme croissance de la Colombie-Britannique et de la croissance continue de l'Ontario.

Il y a une autre chose que j'aimerais ajouter. Le député a parlé de 1967. Les communications et la façon dont nous, y compris le député, représentons nos circonscriptions sont d'autres facteurs à prendre en considération.

Comme le député le sait, il fut un temps où les élus de l'Ouest venaient tous ici et passaient l'hiver à Ottawa. Ils faisaient de leur mieux pour représenter la population de l'Ouest, même sans téléphone.

Le député voyage en avion. Quant à moi, je conduis trois heures et demie pour me rendre dans ma circonscription une ou deux fois par semaine. Je fais des appels téléphoniques tous les jours. J'ai un télécopieur. Je bénéficie du courrier électronique. Le député fait des hypothèses, mais il se peut fort bien que, dans 20 ans, les députés fédéraux puissent représenter un plus grand nombre d'électeurs encore plus efficacement que nous, en raison de l'évolution des communications.

Je suis certain que les députés se pencheront alors sur cette question et que, comme nous, ils modifieront les dispositions législatives pour les adapter aux temps modernes.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je suis certes d'accord avec mon collègue de Peterborough. En fait, je l'accueillerais avec plaisir en Saskatchewan pour lui montrer à quel point nous sommes en mesure de bien servir nos électeurs, compte tenu de la technologie que nous avons à notre disposition.

Nous sommes confrontés à ce problème immédiat d'expansion de la Chambre des communes. Le député pourrait-il nous dire où nous allons mettre ces nouveaux sièges? Allons-nous les installer au milieu de la Chambre ou dans les tribunes, derrière les rideaux? Nous avons des questions constitutionnelles à régler.


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Dans certains cas, la Chambre des communes pourra le faire. Nous n'avons pas besoin de l'accord des provinces. C'est là un problème immédiat.

Si nous attendons dix ans, nous ne ferons qu'exacerber le problème et nous devrons, du coup, trouver de la place pour 30 ou 40 sièges de plus dans cette enceinte. Allons-nous rénover notre institution? Quelle est la solution de mon collègue?

M. Adams: Monsieur le Président, je tiens à dire que je ne vois pas cette question de représentation sous l'angle des sièges et des meubles. Si je jugeais nécessaire de m'emparer du Sénat, par exemple, ce qui ne serait peut-être pas une mauvaise idée, je le ferais, car on y trouve beaucoup de sièges.

Dans le cas qui nous occupe, il est question de six sièges de plus. Je suis tout à fait persuadé qu'il est possible de trouver l'espace voulu et je pense que nous pourrions en dénicher davantage. J'affirme encore que le problème dont nous sommes saisis ne touche pas les sièges en soi. Il s'agit plutôt de savoir si, à notre époque moderne, une augmentation de six du nombre de députés est utile pour mieux servir les Canadiens.

(1550)

Le député a raison. Je m'attends à ce que notre pays connaisse une croissance phénoménale au cours des prochaines décennies et à ce que le Parlement de l'époque s'attaque à la situation à ce moment-là. Pour l'instant, nous essayons de faire face à une croissance sur 10, 15 ou 20 ans, et je pense que l'ajout de six sièges dans les deux provinces que j'ai mentionnées constitue un compromis raisonnable.

Les propositions qui nous sont soumises viennent d'un comité permanent de la Chambre. Elles n'ont pas été présentées par le gouvernement, comme cela était le cas dans le passé, et nous devrions respecter nos collègues des comités permanents qui se sont penchés sur cette question pendant un certain nombre de semaines et de mois.

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir dire quelques mots aujourd'hui au sujet du rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre et de la requête du gouvernement qui nous demande d'adopter ce rapport portant sur le système de révision des limites des circonscriptions électorales.

J'ai quelques commentaires à faire sur le rapport et le processus même, mais je veux dire, tout d'abord, que je trouve fort intéressant de voir que les députés, surtout les ministériels, sont bien pressés de débattre de cette question, alors que nous vivons à une époque où le chômage est endémique au Canada, où la mondialisation menace la souveraineté économique des gouvernements et où la pauvreté cause la maladie et le manque d'éducation dans notre pays.

Il y a divers points, notamment la direction des affaires mondiales, dont la Chambre devrait s'occuper en priorité pour que les gens du pays trouvent de l'emploi, qu'ils atteignent une certaine qualité de vie, qu'ils parviennent à s'instruire et à faire instruire leurs enfants, pour que l'on puisse remédier au stress de la pauvreté et du chômage, qui, dans une certaine mesure, engendrent la criminalité et l'insécurité dans notre société.

La question à l'étude a une certaine importance en soi, mais si je siégeais de l'autre côté de la Chambre aujourd'hui, je veillerais à ce que la priorité soit accordée à ces éléments qui influent directement sur la qualité de vie des gens de notre pays.

Toutefois, nous sommes saisis de ce projet de loi et nous devons, par conséquent, participer à l'étude des questions qui nous sont présentées. À cet égard, j'avoue faire face à un certain dilemme. D'une part, je suis d'accord avec ceux de mes collègues qui ont pris la parole aujourd'hui contre l'adoption de cette motion, car je crois que l'exercice entrepris par le gouvernement perturbe gravement un processus qui fonctionnait et que nous aurions pu modifier non pas en le bouleversant, mais en y ajoutant des choses.

D'autre part, je souscris à de nombreux éléments du rapport du comité parce que je crois qu'ils permettront d'améliorer le processus de délimitation dans l'avenir. Toutefois, tout en prenant la parole et conscient que je devrai voter sous peu, je préfère voter contre l'adoption du rapport simplement parce que le gouvernement a interrompu le processus de façon inopportune, et dans ce qui semble être, comme le disait quelqu'un avant moi, un reflex de panique qui s'est produit lorsque les députés libéraux ont constaté que la nouvelle délimitation des circonscriptions électorales ne faisait pas leur affaire.

(1555)

Certes, j'ai quelques sujets d'inquiétude à l'égard des nouvelles limites des circonscriptions de ma province. J'en toucherai peut-être un mot en conclusion.

Néanmoins, les arguments invoqués en réaction à une carte qui été tracée ou aux lignes arbitraires qui ont été tracées sur une carte ne constituent pas, à mon avis, une raison suffisante pour interrompre le processus, faire fi du travail accompli et passer sous silence les règlements déjà existants.

Un certain nombre de choses ont été dites aujourd'hui. J'ai prêté une oreille assez attentive au débat. J'admets un certain nombre de choses qui ont été dites au sujet du nombre de députés à la Chambre des comnunes. Même s'ils ne figurent pas dans ce rapport, certains éléments méritent réflexion, à mon avis.

Le comité avait notamment pour mandat d'examiner la possibilité de limiter le nombre de députés, voire de réduire le nombre de députés à la Chambre des communes. D'après les propos du président du comité et à la lecture du rapport, je crois comprendre que le comité, non pas dans sa totalité, mais en majorité,


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estime qu'il n'était pas possible alors de se prononcer sur le plafonnement.

Natif de la Saskatchewan, je suis d'avis qu'il est parfois nécessaire de réduire le nombre de personnes qui représentent la population. Par ailleurs, étant donné que nous siégeons à l'assemblée législative fédérale et qu'il y a des choses plus concrètes à réaliser que le plafonnement du nombre de députés, nous nous devons d'envisager le processus plus globalement, sans nous limiter à cet aspect.

Si j'ai mentionné que je suis natif de la Saskatchewan, c'est parce que je suis fier du gouvernement de ma province, le gouvernement du Nouveau Parti démocratique, qui, une fois élu, a mis en branle un processus visant à réduire le nombre de députés à l'assemblée législative provinciale. Plus tôt aujourd'hui, un de mes collègues de la Saskatchewan a dit que la province avait procédé ainsi.

Les gens de la Saskatchewan ont réagi favorablement à la décision de réduire le nombre de sièges à l'assemblée législative de la province. Lors de mes déplacements dans ma circonscription et ailleurs en Saskatchewan, j'ai constaté que ce n'est pas le nombre qui préoccupe les gens, mais bien la représentation. Ce qu'ils veulent surtout, c'est qu'on les écoute et qu'on réponde à leurs besoins.

Évidemment, certains ont soulevé la question du coût, mais selon mon estimation, diriger un gouvernement ne coûte pas cher comparativement à ce qu'il en coûte pour assurer des services et appliquer des décisions gouvernementales. Ainsi, les habitants de notre province et du reste du Canada réagiront favorablement à un gouvernement ou à un parti politique qui est disposé à les écouter et à bien répondre à leurs besoins.

Les habitants et le gouvernement de la Saskatchewan ont jugé qu'il était possible de réduire le nombre de sièges. Ils ont appuyé ce concept. Contrairement à ce que les ministériels ont dit aujourd'hui, je pense que les habitants de la Saskatchewan comprendraient aussi que si l'on décidait de limiter le nombre de sièges à la Chambre, leur province aurait un plus petit nombre de députés, donc moins de personnes pour les représenter à Ottawa.

J'ai dit tout à l'heure qu'il fallait prendre cela dans un contexte plus large. La formule de la représentation d'après la population que l'on utilise dans notre pays signifie que certaines régions, certaines provinces, certains territoires reçoivent moins d'attention en raison du nombre de personnes qui peuvent voter sur les questions. Par conséquent, il faut voir la réforme ou la reconstruction du Parlement comme un tout, il ne faut pas voir seulement la Chambre des communes.

(1600)

Si l'on réforme la Chambre des communes pour qu'il y ait une représentation selon la population, je dis sans réserves que je veux que cela se fasse conjointement ou parallèlement à une réforme de l'autre Chambre du Parlement. En même temps que l'on redistribue ou réduit les sièges à la Chambre des communes, il faut mettre sur pied un Sénat élu et responsable qui représenterait l'intérêt des régions et des territoires.

Même si je pense que cette Chambre peut, et devrait, débattre de la possibilité de réduire le nombre de sièges qu'il y a ici, je pense aussi que, à l'avenir, le comité devra considérer que cela ne peut se faire isolément, car alors la population de la Saskatchewan et d'autres provinces pourrait voir sa représentation réduite, ce qui justifierait qu'elle se plaigne d'un gouvernement national qui n'écoute pas les griefs que la population de l'Ouest entretient depuis longtemps au sujet du manque de considération de la Chambre des communes à leur égard, vu que les projets de loi sont approuvés par les parties les plus peuplées du pays.

Je voudrais parler d'un certain nombre de choses qui sont dans le rapport et qui auront des conséquences positives, des choses qui correspondent à mon sentiment au sujet de la façon de procéder aux révisions des limites de circonscriptions. Dans les remarques d'introduction qu'il a faites plus tôt à propos de ce projet de loi, le président du comité, le député de Kingston et les Îles, a dit que le système posait un certain nombre de problèmes que le comité essayait de corriger.

L'un des problèmes dont il a parlé est que les projets de cartes électorales sont soumis sans préavis et sans que le public ait pu se faire entendre. Il a parlé des commissions qui actuellement ne sont pas tenues de justifier leurs décisions. Il a parlé également du manque d'uniformisation, c'est-à-dire que différentes décisions sont prises par différentes commissions dans différentes provinces, ce qui donne tout un ensemble de raisons pour justifier les cartes établies par les commissions dans différentes parties du pays.

Il nous a dit que certaines commissions apportaient des changements apparemment inutiles aux cartes électorales alors qu'il y avait très peu de raisons de les changer. Il nous a ensuite parlé de la taille de la Chambre et de l'augmentation du nombre de sièges. Ce sont ces problèmes auxquels le comité a voulu s'attaquer.

À cet égard, je voudrais dire un mot au sujet du processus. Le président du comité a absolument raison lorsqu'il dit que le public n'a accès au rapport de la commission qu'une fois que la plus grande partie du travail a été faite. Le public voit une seule carte, une révision des limites de la circonscription électorale fondée sur la façon dont les commissaires estiment que la carte devrait être tracée.

La carte proposée est présentée à l'électorat comme un fait accompli et le public doit faire des efforts considérables, souvent avec l'aide des députés qui le représentent, pour trouver une bonne raison de modifier les cartes présentées par les commissions.

(1605)

Je pense que le comité a fait du bon travail en demandant qu'un avis public soit émis pour annoncer le début du processus et qu'on exige des commissions qu'elles produisent trois cartes et qu'elles justifient leurs décisions dans chaque cas. Cette façon


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de faire aidera beaucoup à corriger un grave problème inhérent à la procédure actuelle.

En Saskatchewan, ma circonscription-The Battlefords-Meadow Lake-disparaît pratiquement sur la nouvelle carte proposée par les commissaires de notre province. Si j'acceptais le raisonnement ou la justification des commissaires, je n'aurais aucune réticence à voir disparaître ma circonscription. Je n'aurais plus qu'à prendre la décision à savoir si je me présente de nouveau dans une autre circonscription.

Toutefois, dans l'état actuel des choses, il est impossible de contester la décision des commissaires de réviser les limites électorales de la façon dont ils l'ont fait. En Saskatchewan, comme il n'y avait pas de nouveau siège à attribuer, les commissaires ont décidé de redessiner la carte électorale en accordant un siège de plus aux deux grands centres, Saskatoon et Regina. Chacune de ces régions est actuellement partagée en trois circonscriptions. Les commissaires préconisaient donc qu'on accorde un quatrième siège à ces deux grands centres. Saskatoon et Regina seraient donc divisées en parties urbaines et rurales. Il a fallu refouler toutes les circonscriptions rurales entourant Regina et Saskatoon, en les repoussant un peu vers le nord et vers le sud, et même supprimer complètement deux d'entre elles. Par conséquent, la circonscription de The Battlefords-Meadow Lake a presque entièrement disparu, de même que la circonscription de Mackenzie.

Pour pouvoir débattre du remaniement des limites des circonscriptions électorales, il faudrait revoir toute la carte électorale de la Saskatchewan et examiner les arguments avancés à l'origine par les commissaires. Si nous avions l'occasion de discuter de cette question à l'avance, nous aurions peut-être l'impression de participer plus activement au processus. En fait, nous pourrions peut-être même contribuer bien davantage au processus.

Même si les gens de la Saskatchewan s'attendent dans l'ensemble à ce que les limites des circonscriptions électorales soient remaniées, je tiens à signaler que, selon les recommandations contenues dans le rapport dont nous sommes saisis-et corrigez-moi si j'ai tort, si un nouveau projet de loi n'est pas adopté d'ici la fin de juin, les circonscriptions électorales ne seront pas remaniées. Par contre, si le nouveau projet de loi est adopté d'ici la fin de juin, de nouvelles commissions pourraient être créées aux termes des nouvelles règles que nous étudions aujourd'hui. Par conséquent, les habitants de la Saskatchewan devront attendre jusqu'à la fin du mois de juin avant de savoir si les limites des circonscriptions électorales fédérales au sein de leur province seront révisées.

Je ne crois pas que les changements proposés dans ce projet de loi justifient la suspension du processus actuel et je suis tout à fait disposé à respecter les nouvelles limites des circonscriptions électorales dans ma province.

(1610)

J'ai une dernière observation à faire. En effet, je tiens à féliciter la Commission de délimitation des circonscriptions électorales pour la province de la Saskatchewan, qui siège à l'heure actuelle pour une seule raison. Elle a créé une circonscription septentrionale complètement indépendante d'un centre urbain. Je lui ai reproché et lui reproche encore aujourd'hui, pour terminer, d'avoir créé cette circonscription en repoussant au Sud les limites de la ville de Prince-Albert. Elle a dû pour cela utiliser le quotient disponible afin de sortir le centre urbain de Prince-Albert de cette circonscription.

Il en est résulté une circonscription septentrionale comptant un bon nombre d'exploitations agricoles et de municipalités rurales qui n'a absolument rien en commun avec les villages du Nord ni les localités métisses et autochtones.

Je félicite le comité d'avoir apporté certains changements. Je dénonce le processus gouvernemental qui a été utilisé ici et je suis certes impatient de voir ce qui arrivera dans les prochains mois à cet égard.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt mon collègue de Saskatchewan, le député de The Battlefords-Meadow Lake. J'accepte la majorité de ses observations.

Il a commencé par dire que cette question revêtait probablement une faible priorité aux yeux des Canadiens, étant donné l'état de notre économie et les inquiétudes que nous inspire la situation de l'emploi. J'ajouterais à cela les inquiétudes suscitées par les déficits et les impôts élevés. Lui et moi reconnaissons cependant que cette question est venue sur le tapis à la Chambre des communes à cause des intérêts personnels des politiciens.

Je l'ai également entendu dire qu'il s'opposerait à cette proposition en s'appuyant sur le principe qu'il s'agissait d'ingérence dans un domaine où nulle ingérence ne s'imposait. Je suis d'accord avec lui à cet égard.

Le député a dit que si l'on plafonnait ou réduisait le nombre des sièges à la Chambre des communes, la Saskatchewan aurait moins de sièges que les 14 qu'elle a présentement. Je crois que le député et moi sommes à peu près du même âge; je ne sais pas qui est le plus vieux de nous deux. Quoi qu'il en soit, quand j'étais jeune, la province avait environ 21 sièges si je me rappelle bien. Elle n'en a maintenant plus que 14 et je pense bien qu'elle conservera ce nombre minimum à moins de changements à la Constitution.

Je ne sais pas très bien quel était le nombre des sièges dont l'Ontario disposait à l'époque où nous en avions 21, mais je sais que c'était moins que les 99 qu'elle a présentement. Comme nous le sremaniées.avons, ce nombre devrait maintenant passer à 103 en vertu de la nouvelle proposition.

Si nous ne faisons rien, la Saskatchewan en restera à 14, tandis que l'Ontario pourrait voir le nombre de ses sièges grimper à 115 ou 120 d'après des projections à long terme. La Saskatchewan perd de l'influence à tous les égards, du moins si on en juge par son nombre de sièges aux Communes.

Le député a signalé, avec raison, que la solution consistait à réformer le Sénat. C'est avec plaisir que j'ai entendu cette réflexion, car je croyais que les députés fédéraux du NPD préconisaient l'abolition du Sénat. Je sais que les députés provinciaux, notamment les porte-parole néo-démocrates dans l'Ouest, ont appuyé l'idée du Sénat triple-E.


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Je me demande si le député est en faveur d'une réforme dans ce sens, s'il est en faveur d'un Sénat qui, loin d'être aboli, serait élu, aurait une représentation égale de toutes les provinces et disposerait de pouvoirs suffisants pour être efficace. Cela donnerait un certain poids à des provinces comme la Saskatchewan qui, selon les scénarios passé ou actuel, que la loi à l'étude s'applique ou que le statu quo soit maintenu, ne pourront que perdre de l'influence aux Communes.

M. Taylor: Monsieur le Président, je remercie le député de Kindersley-Lloydminster de me donner l'occasion d'expliquer la position du NPD en ce qui touche le Sénat. Certes, il arrive souvent qu'on nous pose des questions à ce sujet parce qu'il semble y avoir une contradiction, alors qu'il n'y en a pas en réalité.

Les néo-démocrates, moi y compris, ont toujours demandé, et continuent de le faire, que le Sénat soit aboli parce que les sénateurs ne sont pas élus et n'ont pas de comptes à rendre. Le fait que la Chambre haute elle-même n'ait pas assumé toutes ses responsabilités au cours de son histoire, à une ou deux exceptions près, nous porte à croire que le Sénat devrait être aboli s'il reste dans sa forme actuelle.

(1615)

Cependant, l'abolition du Sénat, dans sa forme actuelle, n'exclut pas l'établissement d'une autre Chambre haute qui aurait un nouveau mandat, dont les membres seraient élus par la population, qui représenterait les provinces, les territoires ou les régions, selon la définition qu'on lui donnera, et qui disposerait de pouvoirs réels.

La clé de tout cela, c'est la capacité du Sénat de répondre à ces questions. L'efficacité du Sénat est une très importante composante de tout l'ensemble.

En réponse au député de Kindersley-Lloydminster et à tous les autres qui s'interrogent sur cette position, je dirai que nous croyons fermement à la transformation du Sénat en une Chambre dont les membres seraient élus par la population et seraient comptables à elle.

M. Hermanson: Monsieur le Président, je n'essaie pas de monopoliser le temps. J'ai effectivement une brève observation à faire. J'inviterais le député à s'assurer que ses collègues, notamment les députés fédéraux de l'Ontario, indiquent clairement aux Canadiens qu'ils ne tiennent pas des propos ambigus lorsqu'ils laissent entendre dans certaines régions du pays qu'ils aboliraient le Sénat et le remplacerait par un Sénat réformé et, dans d'autres, qu'ils l'aboliraient sans le remplacer. Je voudrais bien entendre les réactions du premier ministre de l'Ontario et des représentants fédéraux du parti au pouvoir en Ontario, par exemple.

M. Taylor: Monsieur le Président, je serais très heureux d'encourager mes collègues du parti, un peu partout dans le pays. Je ne peux m'empêcher de penser que je serais très reconnaissant si le premier ministre de l'Ontario écoutait tout ce que j'aurais à lui dire.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à lundi, à l'heure habituelle de l'ajournement. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

M. Boudria: Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a unanimité pour reporter le vote non pas à lundi, à l'heure de l'ajournement, mais à mardi, 17 h 30.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

* * *

LOI SUR L'ORGANISATION DU GOUVERNEMENT (ORGANISMES FÉDÉRAUX)

La Chambre reprend l'étude, interrompue le mercredi 8 février, de la motion: Que le projet de loi C-65, Loi portant réorganisation et dissolution de certains organismes fédéraux, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

(1620)

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.


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Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Convoquez les députés.

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45(5)a) du Règlement, le vote par appel nominal sur la question dont la Chambre est maintenant saisie est différé jusqu'à lundi, à l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien, alors que la sonnerie d'appel se fera entendre pendant au plus 15 minutes.

[Traduction]

M. Boudria: Monsieur le Président, je crois que la Chambre consentirait à l'unanimité à ce que l'on reporte ce vote à 17 h 30, mardi.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu la suggestion. Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

* * *

LOI SUR LE TRIBUNAL DES ANCIENS COMBATTANTS (RÉVISION ET APPEL)

L'hon. Lawrence MacAulay (au nom du ministre de la Défense nationale, Lib.) propose: Que le projet de loi C-67, Loi constituant le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), modifiant la Loi sur les pensions et d'autres lois en conséquence et abrogeant la Loi sur le Tribunal d'appel des anciens combattants, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, je suis heureux d'entreprendre aujourd'hui le débat en deuxième lecture sur le projet de loi C-67, Loi constituant le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), modifiant la Loi sur les pensions et d'autres lois en conséquence et abrogeant la Loi sur le Tribunal d'appel des anciens combattants.

Le projet de loi est clair et ses objectifs sont simples. Nous voulons rationaliser le processus de demande de pension des anciens combattants et le processus décisionnel afin d'améliorer le service aux anciens combattants canadiens.

Le projet de loi n'apporte aucune modification aux avantages dont jouissent à présent les anciens combattants et il ne restreint pas non plus leur droit à un processus d'appel complet et à une aide juridique gratuite.

Les anciens combattants font face à de longs retards, parfois même à de très longs retards, lorsqu'ils demandent une pension. Nous savons que le processus complexe actuellement en place est cause de la majorité de ces retards. Nous voulons simplifier ce processus pour que les anciens combattants reçoivent leurs prestations le plus rapidement possible.

Comme la plupart des députés le savent, des pensions sont accordées aux anciens combattants en guise de compensation à l'égard de blessures et d'invalidités liées au service. Les civils qui ont travaillé à l'appui des forces armées pendant la guerre peuvent également avoir droit aux prestations de pension.

Des pensions supplémentaires peuvent aussi être accordées au conjoint d'un ancien combattant et aux enfants à sa charge. Des pensions de survivant sont payables au conjoint d'un pensionné décédé.

La mesure législative touchera donc beaucoup de personnes: des anciens combattants, leurs conjoints, les personnes à leur charge et d'autres encore. Le Canada compte plus d'un demi-million d'anciens combattants et, à l'heure actuelle, environ 150 000 anciens combattants et survivants reçoivent des pensions d'invalidité. Nous recevons environ 13 000 nouvelles demandes par année! C'est beaucoup. Les anciens combattants canadiens présentent encore des demandes de prestations en très grand nombre.

(1625)

Certains députés se demandent peut-être pourquoi nous recevons autant de demandes près de cinquante ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale. C'est tout simplement parce que ce n'est qu'aujourd'hui que les blessures subies au combat il y a cinquante ans font sentir leurs effets dans la vie des anciens combattants. Les vieilles blessures de guerre ont des effets plus évidents, plus douloureux et plus difficiles à supporter. Nombre d'anciens combattants décident finalement de demander de l'aide.

Ces anciens combattants sont maintenant arrivés à une époque de leur vie où les prestations qui sont accordées à l'égard des invalidités résultant du sacrifice qu'ils ont consenti pour le Canada il y a tant d'années peuvent faire une énorme différence dans leur vie. Ils en ont besoin. C'est pourquoi nous traitons tant de demandes.

Nous avons également constaté qu'il faut plus de temps qu'autrefois pour traiter beaucoup de ces demandes. Nombre d'entre elles passent par le processus d'appel parce que, au cours des années qui ont immédiatement suivi le service dans les forces armées, il était plus facile, dans la plupart des cas, d'établir un lien entre le service et l'invalidité résultante. Plus le temps passe, plus il est difficile d'établir ce lien.

Je tiens à préciser que le premier avantage que nous accordons aux anciens combattants, c'est le bénéfice du doute. S'il subsiste un doute sur le bien-fondé d'une demande, la question est tranchée en faveur du requérant. Notre système est conçu de manière à aider les anciens combattants en leur offrant toute l'assistance voulue dans la préparation de leur première demande et cela ne changera pas.

Le processus d'étude des demandes de pensions d'invalidité a été conçu de manière à être équitable, mais pas de manière à être rapide. Aujourd'hui, la moyenne d'âge des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale est de 73 ans, aussi ne peuvent-ils plus se permettre d'attendre longtemps.

Dans le système actuel, un ancien combattant qui obtient une pension peut attendre en moyenne jusqu'à dix-huit mois avant


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de recevoir son premier chèque de pension. Un an et demi. Ce n'est certainement pas acceptable. Lorsqu'une demande est rejetée et que l'appel est retenu, l'ancien combattant peut attendre jusqu'à trois ans. Ce n'est certainement pas acceptable.

Ces retards ne sont pas imputables aux personnes qui travaillent dans le cadre de ce processus, mais bien au processus lui-même. Nous savons que le seul moyen de réduire les retards est de rationaliser l'ensemble du système.

Les gouvernements ont déjà tenté d'améliorer le processus en apportant de petits changements ici et là. Dans certains cas, ces petits changements ont aidé les anciens combattants mais, dans d'autres cas, il n'ont fait que compliquer davantage le processus. Ajoutez à cela l'augmentation du nombre de demandes présentées en première instance et vous avez une situation tout simplement inacceptable qui doit changer à tout prix.

La plupart des anciens combattants sont arrivés à un tournant de leur vie où ils veulent profiter des avantages que leur offrent ces pensions. Et ils le méritent bien. D'autres s'en servent pour obtenir les services médicaux dont ils ont besoin. Et ils le méritent bien.

Au cours de la dernière année, nous avons marqué de nombreux événements importants qui ont mené à la fin de la Seconde Guerre mondiale dans le cadre d'un programme dont je suis particulièrement fier, le programme Le Canada se souvient. Ce programme vise à sensibiliser les Canadiens et les gens d'autres pays au courage, au dévouement et au sacrifice dont nos anciens combattants ont fait preuve pour nous et pour la démocratie.

Les Canadiens tiennent à ce que les anciens combattants soient traités équitablement. Ils tiennent à ce que nous fassions ce qu'il faut et ils tiennent à ce que nous le fassions bien. Nos anciens combattants le méritent. C'est pourquoi nous voulons améliorer le processus des pensions au moyen de projet de loi que nous étudions aujourd'hui.

(1630)

Dans le moment, un ancien combattant présente directement sa demande à la Commission canadienne des pensions ou communique avec le ministère ou l'une des organisations qui agira en son nom. Certains anciens combattants s'adressent à des organisations comme la Légion royale canadienne ou les Amputés de guerre du Canada. D'autres font appel au Bureau de services juridiques des pensions qui s'occupe maintenant de la plupart des demandes de pension. Toutefois, dès le moment où l'ancien combattant présente une demande, le processus laisse présumer qu'il y a litige.

Ce n'était évidemment pas l'intention, mais en offrant des services juridiques à ce moment-là, nous donnons l'impression que nous allons contester la demande. Ce n'est pas ce que nous voulons, ce n'est pas ce que veulent les Canadiens et ce n'est certainement pas ce que veulent nos anciens combattants.

Les anciens combattants canadiens ne devraient pas avoir besoin d'aide juridique pour présenter une demande de pension. Et ils n'auront pas besoin de cette aide après l'adoption de ce projet de loi. C'est dans le processus d'appel qu'ils ont besoin de conseils juridiques.

Les avocats du Bureau de services juridiques des pensions sont extrêmement compétents. Ils continueront de travailler fort pour les anciens combattants canadiens, mais au moment où leur compétence est nécessaire. Pourquoi affecter des avocats hautement qualifiés à la préparation méticuleuse d'une demande qui ne sera pas contestée de toute façon?

À l'heure actuelle, le ministère reçoit la demande au nom de la Commission canadienne des pensions et voit à la préparation d'un résumé médical et d'un avis médical. On examine ensuite le degré d'invalidité, puis on recommande le montant de l'évaluation. Dans de nombreux cas, il est évident que l'on approuvera la demande, mais le ministère ne peut pas l'approuver. Il doit la transmettre à la Commission canadienne des pensions. La CCP doit décider de deux choses: le droit à une pension et l'évaluation. D'abord, le droit à une pension. Le requérant possède-t-il les états de service nécessaires? La blessure ou l'affection résulte-t-elle du service? Et il faut passer ensuite à l'évaluation. Celle-ci se fonde sur le degré d'invalidité et il s'agit de décider du montant de la pension à payer.

La Commission canadienne des pensions rend donc une décision sur deux questions, soit le droit à une pension et l'évaluation, et transmet ensuite cette décision au ministère, qui en avise l'ancien combattant et émet le chèque ou un paiement.

Si la Commission canadienne des pensions décide que le requérant n'a pas droit à une pension, le requérant peut en appeler à un comité d'examen. Si la commission décide que le requérant a droit à une pension, mais que le requérant se déclare insatisfait du montant de la compensation, il peut en appeler à un comité d'évaluation.

Les comités d'examen et d'évaluation sont tous deux constitués de membres de la Commission canadienne des pensions. Si le requérant n'est pas satisfait de ces deux décisions, il peut encore interjeter appel. La cause est alors présentée au Tribunal d'appel des anciens combattants.

Finalement une décision est rendue à savoir si la pension d'invalidité est accordée et, dans l'affirmative, quel en est le montant. Ces renseignements sont transmis au ministère, qui enclenche la procédure de versement du premier chèque à l'ancien combattant.

C'est donc, en résumé, le sytème actuel. Quatre organismes du gouvernement sont en cause: le Bureau de services juridiques des pensions, qui donne l'aide juridique gratuite aux anciens combattants lorsqu'ils présentent une demande; Anciens Combattants Canada, qui voit à la pratique des examens médicaux, prépare les résumés et les avis médicaux, et exécute le travail administratif, y compris la recherche et la préparation du dossier, la communication avec le client, le calcul et le versement des paiements; la Commission canadienne des pensions, qui rend les premières décisions et qui entend les appels de première instance; et le Tribunal d'appel des anciens combattants, qui entend les appels de dernière instance.

(1635)

Ce système ne laisse rien au hasard. Ce système est juste. Mais ce système n'est pas rapide. Il peut s'écouler trois ans entre le jour où l'ancien combattant présente sa demande et celui où il reçoit son premier chèque. Et il est certain que les anciens


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combattants méritent mieux que ça. Nous examinions des moyens d'accélérer le système depuis déjà quelque temps.

En 1992, Anciens Combattants Canada a commencé à évaluer le processus. Le printemps suivant, nous consultions les principales organisations d'anciens combattants, les syndicats, les employés et d'autres intervenants. L'évaluation a donné lieu à 55 recommandations sur les moyens d'améliorer le processus des pensions. Nous avons appliqué toutes celles que nous pouvions mettre en oeuvre.

Le temps est maintenant venu de mettre en oeuvre les recommandations qui exigent une intervention législative, soit les recommandations à long terme qui rationalisent le processus d'appel.

Le projet de loi qui nous est proposé permettra d'agir dans trois semaines. Premièrement, Anciens Combattants Canada, le ministère, rendra les décisions au premier niveau. Dans plusieurs cas, les employés d'Anciens Combattants Canada pourront conseiller et aider les anciens combattants à préparer leurs demandes de pension chez eux, dans leurs localités.

Deuxièmement, le Bureau de services juridiques des pensions sera intégré au ministère des Anciens combattants. Le bureau ne s'occupera plus des premières demandes. Donc les avocats du bureau se concentreront à aider les anciens combattants dans le processus d'appel.

Troisièmement, le projet de loi concerne les organismes d'appel. Comme je l'ai dit, la Commission canadienne des pensions entend les premières demandes. Donc si le ministère doit maintenant s'occuper des premières demandes, la Commission canadienne des pensions ne traitera que les appels et elle aura le même mandat que le Tribunal d'appel des anciens combattants. Donc le projet de loi a pour effet de fusionner ces deux organismes en un seul. La Commission canadienne des pensions et le Tribunal d'appel des anciens combattants seront fusionnés en un seul organisme-le Tribunal des anciens combattants-qui entendra les appels de première instance et, s'il est nécessaire, de dernière instance.

Je veux souligner que nous maintenons deux niveaux d'appel. Toutefois, il y aura plus de souplesse dans le nouveau système. Les membres du tribunal ne seront pas restreints à un seul niveau d'appel, ce qui signifie que nous pourrons utiliser le temps des membres du tribunal avec le maximum d'efficacité.

Certains membres du nouveau tribunal seront déployés dans tout le pays pour entendre les premiers appels. Si l'ancien combattant désire poursuivre sa cause, le dernier appel sera entendu par d'autres membres du même tribunal. Nous accélérerons aussi le processus d'appel en combinant les compétences des deux anciens organismes et en concentrant leur travail uniquement sur les appels, et non sur les premières demandes.

Il convient de souligner une constante importante de ces mesures. Nous maintiendrons tous les avantages et les droits d'appel des anciens combattants. Les décisions seront encore fondées sur le principe que l'on accorde le bénéfice du doute aux anciens combattants. Et nous continuerons d'offrir deux niveaux d'appel.

Le gouvernement du Canada consacre environ 1,1 milliard de dollars aux pensions d'invalidité. Rien dans les modifications proposées ne touchera les sommes que les anciens combattants reçoivent.

Notre seul objectif est de faire en sorte que l'on traite plus rapidement les demandes des anciens combattants. Et je suis convaincu que les députés conviennent que les anciens combattants le méritent. Je sais que nous reconnaissons tous la dette que les Canadiens ont contractée envers les anciens combattants. Les anciens combattants méritent leurs pensions d'invalidité, et c'est maintenant le moment où nombre d'anciens combattants en ont le plus besoin.

J'espère que les députés des deux côtés de la Chambre se joindront à moi pour appuyer le projet de loi parce que nous avons maintenant l'occasion, ensemble, d'aider davantage ceux qui ont si bien servi notre pays. Nos anciens combattants le méritent certainement.

(1640)

[Français]

M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, c'est avec fierté et honneur que je prends la parole aujourd'hui au nom du Bloc québécois à l'occasion du débat en deuxième lecture du projet de loi C-67. Ce projet de loi intéresse au plus haut point les anciens combattants. Je viens d'entendre le secrétaire d'État, et je partage avec lui cette volonté de soutenir notre reconnaissance à l'endroit de tous ceux qui ont contribué à éloigner la guerre, à maintenir la paix, et qui contribuent encore à enrichir notre société par leurs actions communautaires.

Nous devons beaucoup aux anciens combattants, et c'est la raison pour laquelle nous souhaitons, de tous les partis, améliorer leurs conditions de vie. Le Canada n'a d'ailleurs pas manqué à son obligation en établissant et en maintenant depuis toujours des ressources en faveur des anciens combattants.

Ces ressources se sont structurées davantage à la suite de la Première Guerre mondiale. Un système de pensions est né, des pensions attribuées selon des critères d'invalidité, par une commission indépendante. Il n'a pas fallu attendre longtemps, toutefois, pour que des critiques se fassent entendre.

La principale critique qui perdure jusqu'à aujourd'hui concerne surtout les délais qui prévalent dans le système d'attribution des pensions. On a beaucoup étudié cette question au cours des années 1980. Le vérificateur général du Canada, au chapitre 13 de son rapport, en 1986, établit le délai moyen à 13,2 mois. Ce délai est critiqué à cette époque. Le vérificateur suggère alors une augmentation de l'efficience, notamment par l'automatisation du processus et l'informatisation des fichiers, lesquelles mesures pourraient hausser de 25 p. 100 la productivité, estime-t-on.

En 1987, une réforme législative concernant le tribunal d'appel des anciens combattants entraîne un flot d'optimisme. Le ministre des Affaires des anciens combattants à l'époque profite de l'occasion pour affirmer sa confiance à l'égard du traitement des demandes de pension. Il dit en Chambre, le 26 juin 1987, et je cite: «Les députés n'ignorent pas les progrès importants réalisés dans l'accélération de l'étude des dossiers de pensions d'invalidité. Depuis deux ans et demi, le temps nécessaire à l'étude de


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ces dossiers a été réduit de plus de moitié. Par ailleurs, il y a maintenant un pourcentage bien supérieur des décisions qui sont favorables à l'ancien combattant.»

Le ministre conservateur, l'honorable George Hees, va d'ailleurs beaucoup plus loin, et je poursuis la citation: «Ces résultats très favorables ont été obtenus malgré une augmentation de près de 100 p. 100 des dossiers. C'est une véritable performance pour un service que de doubler sa charge de travail tout en réduisant de plus de moitié son temps d'exécution.»

Face à une telle exclamation, toutes les oppositions ont applaudi. Même le vérificateur général du Canada, dans son rapport de 1988, estime que le suivi accordé à son examen de 1986 est adéquat. Il mentionne que, et je cite: «Le ministère a agi de façon positive après avoir pris une décision au sujet de la meilleure manière d'agir dans chaque cas.»

Pourtant, tout ce vent d'optimisme nous laisse aujourd'hui sceptique, lorsque l'on songe que selon les plus récentes études, le délai moyen d'une demande initiale était, en 1992, de 18 mois jusqu'aux premières décisions. On a cru en une amélioration, mais ce n'était pas vraiment le cas. Pour un ancien combattant qui est de plus en plus âgé, ce délai est inconcevable et intolérable.

Plusieurs facteurs expliquent cette progression des délais. De nombreuses études ont identifié le déménagement du ministère à Charlottetown, en 1984, comme l'une des causes importantes. La plus récente de ces études, produite à la demande du ministère en 1993, explique d'ailleurs fort bien le contexte de ces délais et de ces arriérés accumulés.

(1645)

Je me permets ici d'en citer un extrait à partir de son volume 4: «Le déménagement à Charlottetown a donné lieu à une importante perte de la mémoire de l'organisation et d'habileté technique. Par conséquent, du moins en partie, on a ajouté des procédures et des étapes de contrôle de la qualité supplémentaire pour s'assurer que les employés qui ne connaissaient pas très bien le processus ou qui n'avaient pas été entièrement formés ne commettaient pas d'erreur grave. Avec le temps, un certain nombre de ces mesures de contrôle et procédures supplémentaires ont pris racine, et par conséquent, le traitement des demandes est aujourd'hui en grande partie séquentiel, manuel et inutilement long.»

Un autre facteur important mérite aussi d'être retenu. De 1982 à 1990, soit pendant neuf années consécutives, le nombre de premières demandes a augmenté de façon constante et régulière. La progression est de près de 1 000 premières demandes de plus chaque année en moyenne au cours de ces huit années. Le nombre de premières demandes passe graduellement de 5 300 en 1982 à 14 100 en 1990.

Tous conviendront qu'un système d'attribution de pensions, aussi performant puisse-t-il être, lorsqu'il passe de 5 300 premières demandes en 1982 à 14 100 premières demandes en 1990, ce système subit des contraintes qui peuvent aller au-delà de ses capacités de départ. À cause de ces facteurs, les délais sont donc importants et les anciens combattants ont de moins en moins le temps d'attendre.

Nous sommes donc en faveur de l'objectif fondamental du gouvernement lorsqu'il vise la diminution des délais et l'accélération du processus. Cet objectif doit demeurer au-dessus de toutes les autres préoccupations.

L'opposition officielle s'interroge toutefois sur les moyens qui sont proposés par le gouvernement pour atteindre ce nécessaire objectif. Le projet de loi propose de fusionner la Commission canadienne des pensions en attribuant d'un côté ses fonctions et pouvoirs au ministre pour tout le volet des premières demandes, et de l'autre côté, tout son personnel et ses mandats de révision au tribunal d'appel.

Dans le même souffle, le gouvernement rapatrie le Bureau de service juridique des pensions sous le ministère et retire le droit aux anciens combattants qui font une première demande d'y recourir.

Permettez-moi de reprendre les éléments qui fondent ce projet de loi en commençant par examiner comment il dispose de la Commission canadienne des pensions. Le ministère propose en quelque sorte de mettre fin à la Commission canadienne des pensions. Cette mesure est justifiée par le ministère de la manière suivante: On a constaté que les décisions favorables produites par la Commission canadienne des pensions en première instance correspondaient aux recommandations favorables émises par les services de consultation médicale.

Le ministère s'est donc dit: Pourquoi existe-t-il une commission indépendante qui ne fait que sanctionner les recommandations produites par les services du ministère? Il a donc eu l'idée d'éliminer cette commission en faveur d'une première décision au niveau du ministère et d'affecter les ressources de cette commission au tribunal pour les révisions et les appels, de façon à éliminer les délais substantiels.

Nous nous inquiétons d'une mesure semblable. Pour la première fois depuis que le système d'attribution des pensions existe, les premières décisions sont assujetties au pouvoir ministériel. Nous comprenons que cette mesure vise à rapprocher la prise de décision vers les intervenants de la base. Toutefois, cette mesure qui doit se faire sous l'autorité ministérielle se devra d'appliquer le principe d'impartialité à cette étape. Certes, la possibilité de traiter plus immédiatement les premières demandes passe par l'ouverture du processus décisionnel à ceux qui font le travail.

L'autre élément important de ce projet de loi est le transfert du Bureau de service juridique des pensions de son statut d'organisme indépendant à celui d'une instance parmi les autres au sein du ministère des Anciens combattants. Ce projet de transfert remet en question les orientations que les gouvernements ont toujours respectées depuis 1971, l'année où ce bureau fut précisément placé à l'extérieur du ministère pour des fins de transparence.

Nous souhaitons que cette transparence demeure intacte pour les anciens combattants qui font une première demande, ces personnes âgées dont les états de service remontent à plusieurs années, alors que bien des choses se sont passées et bien des lois ont inévitablement changé. Nous souhaitons ardemment que le retrait de cette étape puisse aider l'ancien combattant à voir son dossier mieux acheminé dans les méandres du ministère. Le rapport du sous-comité sénatorial, présidé par l'honorable Jack


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Marshall à l'automne dernier, fait d'ailleurs état du scepticisme que l'on peut entretenir à l'égard de cette mesure.

(1650)

Le ministère entend donc réserver les services juridiques à toutes les causes entendues au-delà des premières décisions. D'une certaine manière, c'est dire qu'un ancien combattant a besoin d'aide juridique uniquement lorsqu'il doit aller en révision ou en appel lorsque les décisions, même favorables, ne le satisfont pas. C'est une hypothèse à examiner.

On se demande pourquoi il est nécessaire de rapatrier les services juridiques au sein du ministère. Bien entendu, si cette mesure diminue les délais envers les demandes de l'ancien combattant, nous l'approuvons d'emblée. Il faudra toutefois demeurer vigilant dans l'application de cette mesure.

Le Bloc québécois souhaite ardemment que les anciens combattants puissent voir le traitement de leurs demandes accéléré au sein de structures empreintes d'équité, de transparence et de justice. Depuis plusieurs années, une foule de suggestions sont parvenues à divers niveaux afin d'améliorer le système d'attribution des pensions. Nous prendrons avantage ici à nous rappeler quelques-unes de ces suggestions, à l'aide notamment de l'étude d'évaluation des pensions d'invalidité terminée en 1993 pour le compte du ministère.

Cette étude a impliqué la Direction générale des services organisationnels ainsi que deux firmes de consultants: Coopers et Lybrand et Deloitte et Touche. C'est cette dernière entreprise qui a traité des questions relatives au processus des pensions.

En examinant son rapport contenu au volume 4 de cette étude d'évaluation, on note d'abord l'importance des mesures de contrôle et des procédures supplémentaires qui causent des délais indus. On retrouvait en 1992 ces mesures et ces procédures au sein même du ministère, au secteur des services aux anciens combattants, à la Direction générale des prestations, à la Direction des services de consultation médicale, dans les bureaux du district, au soutien des décisions et des prestations à caractère non médical, à la Planification des programmes et services de pensions, au Service de distribution des pensions, à la Section des recherches sur les demandes à caractère médical, à la Section des normes et opérations, à la Section des prestations supplémentaires, à la Section de l'administration.

Vous énumérer une telle nomenclature, c'est une manière de vous illustrer toute la complexité du système. Imaginez que chacune des demandes de pension, qui se traduisent chacune par un dossier spécifique, soit obligée de traverser chacune de ces instances, chacune contenant plusieurs points de contrôle des dossiers. Voilà un facteur majeur des délais indus. C'est pourquoi cette étude, parmi ses recommandations, préconisait une réduction substantielle des points de contrôle au sein du ministère.

L'étude du ministère laisse entendre dans ce rapport de 1993 que les points de contrôle font la poule et l'oeuf avec un climat de méfiance qui prévaut au sein des instances et entre les instances. La méfiance engendre des contrôles additionnels, des contrôles qui ajoutent au climat de méfiance, et ainsi de suite. Je ne sais pas si cette vision du système d'attribution des pensions correspond à celle des intervenants sur le terrain, mais ce climat de méfiance pourrait contribuer à compartimenter les secteurs et les activités. La solution serait donc de défaire cette situation, en décloisonnant les activités nécessaires dans le processus. Le projet de loi semble cadrer avec les recommandations de cette étude.

Il est malheureux de constater, à l'instar de l'étude, que beaucoup d'initiatives visant l'amélioration du système n'avaient pas trouvé le chemin de la réalisation. La firme Deloitte et Touche notait d'ailleurs qu'au cours de son séjour à Charlottetown, elle a littéralement été inondée de suggestions d'améliorations valables, qui avaient été soumises à l'interne, sans que l'on y donne suite. Voilà du personnel de la base, qui y allait d'initiatives, du personnel rempli de l'espoir d'aider à améliorer la qualité et le rendement du service. Pour du personnel vivant dans un climat de méfiance, voilà un comportement plutôt étrange.

(1655)

Toujours est-il que ces suggestions, dont plusieurs ressemblaient à d'autres avenues envisagées depuis des années par divers rapports, se représentaient ainsi, et je cite: «Fusion des processus de détermination du droit à pension et d'évaluation; une seule copie des documents portant sur le service pour répondre à tous les besoins; participation accrue des conseillers régionaux dans le processus d'étude de la demande; et exiger du demandeur qu'il présente un rapport de diagnostic et d'examen médical de son médecin, au moment de soumettre sa demande.» Voilà des suggestions qui permettraient assurément la réduction des délais.

Finalement, l'étude d'évaluation des pensions d'invalidité des anciens combattants a produit sept recommandations principales. La seule recommandation qui semble correspondre au projet de loi est la troisième, qui se lit comme suit: «Le ministère et la Commission canadienne des pensions devraient rationaliser le processus décisionnel en combinant les éléments droits à pension et évaluation, en réduisant le nombre de contrôle de la qualité et de contrôle du processus et en transférant la responsabilité des premières décisions au groupe des conseillers médicaux des pensions.»

Toutes ces mesures, qui visent à améliorer le processus d'attribution des pensions, remettent-elles en question le principe de l'indépendance du processus à l'endroit du pouvoir ministériel? L'étude d'évaluation des pensions menée pour le compte du ministère, en 1992, ne serait pas restée lettre morte. Au cours des exercices 1992-1993 et 1993-1994, plusieurs changements ont été apportés au processus des pensions. Selon le budget des dépenses, ces changements auraient contribué à simplifier les opérations et à réduire les délais d'exécution.

Bon nombre des modifications proposées seraient déjà en place. Selon le budget des dépenses de 1994-1995, et je cite: «Une des améliorations les plus importantes est la modification des procédures internes, grâce à laquelle la Commission canadienne des pensions peut maintenant rendre une décision sur l'admissibilité et l'évaluation en même temps. On prévoit que cette nouvelle procédure, mise en place en mai 1993, va permettre de réduire de quatre mois le délai de traitement d'une première demande.»

Le ministère aurait donc fait ses classes. Nous sommes en 1995 et nous ne pouvons donc plus dire que le délai moyen des premières demandes est de 18 mois. Des améliorations substantielles seraient en cours de réalisation. En 1993, on aurait remanié le système d'enregistrement des demandes de prestations pour raison médicale. En mars 1994, un nouveau système d'information sur les pensions et l'état des pensions aurait été mis en place. L'informatique aurait enfin rejoint les besoins des anciens


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combattants. Je me permets encore une citation du budget des dépenses de 1994-1995: «Parmi les nouvelles procédures qui ont permis d'améliorer le service, notons l'envoi des décisions favorables concernant l'évaluation et les octrois spéciaux, simultanément avec les paiements et les lettres de promulgation. Les délais moyens sont ainsi réduits d'environ 40 jours pour les décisions favorables concernant l'évaluation, et d'environ 45 jours pour les octrois spéciaux.»

Le travail sur la réduction des délais et des arriérés est donc présentement en cours. Tout cela est de bon augure, même s'il doit toujours y avoir une place pour l'amélioration. Espérons que le projet de loi est dans ce cadre une initiative heureuse pour d'autres améliorations du système. Nous savons que tout délai est un délai indu pour les anciens combattants. C'est dans cette perspective que le travail de l'honorable ex-sénateur Marshall a été effectué, au début de l'automne dernier.

Dans le rapport du sous-comité sénatorial qu'il a présidé, on trouve une section fort intéressante, intitulée: En quoi consiste le système et comment l'améliorer. Dans cette section, on trouve dix recommandations, toutes très pratiques, les recommandations 32 à 41. Ces recommandations pour améliorer le système dans ses délais et dans ses arriérés sont bien terre à terre. On recommande et je cite: «Que les demandes de documents sur les états de service soient envoyées par un moyen électronique à la section de la documentation externe et que les documents soient fournis gratuitement aux associations d'anciens combattants qui administrent un bureau d'entraide.»

(1700)

S'il faut en croire le travail effectué par le ministère depuis deux ans en vue d'améliorer les délais, cette recommandation devrait trouver son application sans difficulté. Et puis, nous sommes à l'heure de l'autoroute informatique.

Je poursuis la citation des recommandations 32 à 41: «Que les pages de la copie des documents sur les états de service soient numérotées pour faciliter le travail des rédacteurs de précis qui joindront à la demande de pension leurs propres extraits de ces documents, sans rien dactylographier, à la demande de pension et enverront le tout à la Direction des services de consultation médicale pour obtenir son avis; que cette documentation à laquelle sera jointe une copie de la décision de la Commission serve d'énoncé de cas à l'étape du processus, soit celle de l'audience.»

Peut-on imaginer qu'il en soit autrement? De pareils exemples de solutions démontrent que parmi les causes qui expliquent les délais et les arriérés, la forme des structures en place y joue pour peu. Les délais et les arriérés sont beaucoup plus la conséquence de manières de faire qui résistent aux volontés de changement semble-t-il.

La résistance au bénéfice du doute en faveur de l'ancien combattant, qui semble perdurer au sein de la Commission canadienne des pensions, a d'ailleurs entraîné la recommandation suivante du rapport Marshall, et je cite: «Que la Commission canadienne des pensions fasse des efforts sérieux pour accorder le bénéfice du doute au premier palier de décision, conformément à la Loi sur les pensions.»

Nous avons le goût d'accorder le bénéfice du doute à de nouveaux services, de nouvelles instances qui pourraient mieux appliquer le bénéfice du doute aux anciens combattants.

Le rapport du sous-comité sénatorial a aussi produit une recommandation afin d'accélérer les évaluations, et je cite: «Que les médecins principaux de district rendent la décision sur les évaluations au niveau du district; que les médecins principaux de district évaluent les affections faisant l'objet d'une demande au premier stade de la préparation des demandes de pension; que les médecins principaux de district se fient aux rapports préparés par des spécialistes des affections ouvrant droit à pension, de façon que le dossier de leurs patients, qui sont d'anciens combattants, puissent faire l'objet d'une évaluation.»

Voilà des recommandations qui concordent avec des objectifs souhaitables et modernes de déconcentration et de décentralisation dans le processus et avec les intentions du ministère.

Pour en finir avec mes exemples de mesures concrètes, le sous-comité sénatorial s'est prononcé concernant la prise de décision et la promulgation des pensions d'invalidité, et je cite : «Que toutes les décisions entièrement favorables rendues par la Commission canadienne des pensions et le Tribunal d'appel des anciens combattants (. . .) aient de préférence une longueur de moins d'une page et que les décisions défavorables ou en partie favorables portent uniquement sur les raisons pour lesquelles la demande ou l'appel a été rejeté.»

Voilà des mesures susceptibles d'améliorer les délais et les arriérés. Il faudra vérifier comment de telles mesures trouveront leur application, si ce n'est déjà fait. Le Bloc québécois s'engage à veiller aux transformations pour rendre le système encore plus performant.

La réduction des délais et des arriérés est surtout de l'ordre de l'administratif: la structure du programme, le ministère, les organismes, les règlements, les procédures, les mesures de contrôle. C'est de tout cela dont il s'agit, soit la manière précise à partir de laquelle un service public s'accomplit.

Or, l'ordre administratif doit reposer sur des principes. Dans le cas du système d'attribution des pensions pour les anciens combattants, des principes ont été établis et respectés. Ces principes sont: l'équité, l'impartialité, l'uniformité et les droits acquis.

La proposition législative du gouvernement se résume très clairement par trois éléments contenus au document d'information concernant la réforme du processus des pensions, et je cite: «Délégation au ministère du processus relatif aux premières décisions; concentration du travail du bureau de services juridiques des pensions sur la préparation des appels; fusion de la Commission canadienne des pensions et du Tribunal d'appel des anciens combattants.»


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(1705)

Cette mesure législative remet-elle en question les principes fondamentaux du système des pensions? C'est notre inquiétude et l'objet de notre attention.

Nous sommes d'accord avec les objectifs louables de la réduction des délais et des arriérés dans le système d'attribution des pensions d'invalidité pour les anciens combattants.

Néanmoins, avant de nous prononcer définitivement sur ce présent projet de loi, nous porterons une attention à ce que les anciens combattants, les organismes qui les représentent, ainsi que les instances publiques qui sont touchées par ce projet de réforme, ont à dire concernant le projet de loi C-67. Notre plus grand souci est d'offrir une écoute attentive et respectueuse des positions qu'ils soutiendront et, dans la limite des convergences possibles, nous accorder avec ce qu'ils souhaitent pour leur avenir.

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la question qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir: l'honorable député de Louis-Hébert-La visite du président américain.

[Traduction]

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour me prononcer sur le projet de loi C-67, au nom du Parti réformiste. Après avoir lu le texte une première fois, réexaminé, relu et réexaminé encore une fois, j'ai pensé qu'il fallait concrétiser l'expression «anciens combattants», lui donner un visage en quelque sorte. Je n'ai pas eu à aller bien loin pour trouver des représentants de ce groupe d'hommes et de femmes.

En réalité, même ici, à la Chambre, nous voyons souvent des préposés au service d'ordre vaquer à leurs occupations, la poitrine ornée, dans bien des cas, de médailles des campagnes de jadis. Il est bon de savoir que ces gens-là ont servi notre pays de la sorte.

Dans la localité de Summerland que j'habite, dans la région d'Okanagan, j'ai regardé autour de moi pour voir si ma communauté ne compterait pas quelques anciens combattants. Encore une fois, je n'ai pas eu à aller bien loin. Je me suis souvenu de Steve Dudson, un monsieur qui a été président national de la Légion royale canadienne ici, à Ottawa, et qui est encore très actif au sein de la filiale de Summerland.

D'autres noms me sont venus à l'esprit. Comme M. Ed Lanfdale qui a fait la Première Guerre mondiale et qui est un membre très actif du Club Kiwanis de Summerland, participant à toutes sortes d'activités de collecte de fonds au profit d'organisations et de groupes méritants de la région d'Okanagan. C'est aussi le cas de Don Bowen. Je ne peux pas oublier Don Bowen parce qu'il était sous mon commandement au sein de l'escadron de cadets de Summerland. Il a participé à la guerre de Corée et porte encore aujourd'hui un uniforme. Il rend service à sa communauté en collaborant au programme des cadets de Summerland.

Je me suis ensuite tourné vers ma famille où j'ai eu tôt fait de trouver des anciens combattants. J'ai retracé mes grands-pères qui ont tous les deux servi durant la Seconde Guerre mondiale, un oncle qui a servi en Corée et plusieurs autres membres de ma famille, certains éloignés, et ayant pour noms Donnan, Killipf et McFadzen. Ce sont toutes des personnes de ma parenté qui ont servi leur pays et qui sont d'anciens combattants.

Je suis très fier d'elles car aujourd'hui encore, il y a une chose qu'elles semblent toujours avoir en commun: même si nous ne sommes pas menacés pas la guerre, elles continuent toutes de servir notre pays. Je suis très fier, en tant que Canadien, de savoir que les anciens combattants qui ont déjà servi notre pays continuent encore de le servir aujourd'hui, d'une manière ou d'une autre.

Il est vraiment navrant de voir la situation dans laquelle se trouvent aujourd'hui les anciens combattants et leur famille. Des dizaines de milliers d'hommes et de femmes ont risqué leur vie pour notre pays. Pourtant, quand, devenus vieux, ils ont demandé une pension d'invalidité au ministère des Anciens combattants, ils se sont vu plongés dans un véritable cauchemar bureaucratique. Bon nombre d'entre eux sont morts avant d'avoir pu se sortir de ce bourbier et d'avoir été indemnisés adéquatement. Les anciens combattants doivent se demander pourquoi le pays qu'ils ont servi aussi courageusement les méprise tant aujourd'hui.

Je voudrais que tous les députés de la Chambre écoutent attentivement les chiffres suivants. En moyenne, on met de 18 à 20 mois à répondre aux anciens combattants qui présentent une demande de prestations. Il s'agit ici de la première étape. Étant donné que l'on applique mal la disposition sur le bénéfice du doute, seulement 30 p. 100 des demandes sont acceptées. Cela signifie une attente de presque deux ans pour des anciens combattants qui ont, en moyenne, 73 ans à l'heure actuelle.

(1710)

Suivant les conseils de leur avocat, bon nombre d'entre eux portent leur cause en appel. Cela peut prendre jusqu'à trois ans avant qu'elle ne soit entendue. Soixante-dix pour cent des anciens combattants qui vont en appel finissent par recevoir des prestations, et bon nombre d'entre eux ne peuvent recevoir qu'une partie des prestations auxquelles ils ont droit. Cette situation est inacceptable.

Nous faisons attendre des anciens combattants âgés près de cinq ans avant de leur accorder des prestations. À l'heure actuelle, il y a un arriéré de 12 500 demandes, et on s'attend à ce que 10 000 autres anciens combattants présentent une demande de prestations cette année.

Après avoir été réprimandé par le Sous-comité des affaires des anciens combattants, le gouvernement a promis d'agir au nom des anciens combattants pour remédier à cette situation honteuse. Le projet de loi C-67 est sa réponse.

On m'a dit que le projet de loi visait principalement à réduire de moitié la période d'attente applicable aux demandes de pensions d'invalidité des anciens combattants, sans que leurs avantages ou leurs droits d'appel n'en soient touchés. Le ministre et


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le sous-ministre m'ont donné l'assurance que le ministère atteindrait les objectifs annoncés en deux ans.

La principale question que je me pose est de savoir si l'objectif peut être atteint, sans que cela ne nuise aux droits et aux avantages des anciens combattants.

Depuis plus d'un mois maintenant, je discute du projet de loi. J'ai consulté de nombreux anciens combattants et des organisations d'anciens combattants. Après un examen attentif de la question, et dans le meilleur intérêt de tous les anciens combattants canadiens, je dois m'opposer au projet de loi C-67. Ce projet de loi porte atteinte aux droits et avantages des anciens combattants.

Le gouvernement libéral prétend qu'il se préoccupe des meilleurs intérêts des anciens combattants, mais le projet de loi a été rédigé et approuvé par le Cabinet, sans que les organisations d'anciens combattants ne soient consultées. Cette absence de consultation auprès des organisations de base est particulièrement inquiétante. En effet, après que le Cabinet eut donné son approbation, le gouvernement a d'abord informé les groupes qui étaient favorables au projet.

Le Conseil national des anciens combattants du Canada a été informé du projet du ministère en mars 1994, tandis que les anciens combattants de la Légion royale canadienne, des forces armées, de la marine et de l'aviation n'ont pas été consultés avant l'été 1994. Comment expliquer cet écart inacceptable?

Je trouve également troublant que le projet de loi C-67 ne résulte pas des opinions formulées par les anciens combattants, mais de l'avis de deux sociétés de conseil en gestion. L'absence de consultation des organisations de base d'anciens combattants est évidente d'un bout à l'autre du projet de loi.

Je trouve très inquiétant que le projet de loi C-67 supprime le droit des anciens combattants de faire traiter leurs demandes en première instance par le Bureau de services juridiques des pensions. À l'heure actuelle, la demande faite par chaque ancien combattant est traitée par un avocat formé et indépendant. En outre, chaque ancien combattant est protégé par le secret professionnel des avocats. Il sera fréquemment question de ce secret dans mon discours, car j'y accorde une grande importance.

Le gouvernement affirme toutefois que le traitement des demandes en première instance par le bureau prend trop de temps et expliquerait la période d'attente de 18 à 20 mois. Or, on trouve à la page 55 du rapport «Fidèles à la parole donnée: d'hier à demain», une explication des délais. Dans son rapport, le Sénat signale que le traitement d'une demande en première instance au ministère des Affaires des anciens combattants exige entre 11 et 13 mois, comparativement à cinq mois seulement au bureau.

Les vérifications que j'ai moi-même effectuées m'ont révélé que, dans la plupart des cas, le délai de traitement au bureau est de deux mois. Il y a également lieu de se demander pourquoi, si le bureau prend trop de temps à préparer ses cas, 70 p. 100 des demandes sont rejetées en première instance.

(1715)

Le fait qu'on ne puisse plus compter dorénavant sur le Bureau de services juridiques des pensions pour intervenir au premier niveau est inquiétant pour un certain nombre de raisons. Tout d'abord, les anciens combattants dépendent maintenant du ministère pour préparer leur cas, alors que c'est le ministère qui rend la décision au premier palier. C'est non seulement une situation de conflit d'intérêts, mais cela enlève à ces anciens combattants le droit d'invoquer le secret professionnel des avocats. On ne peut sous-estimer l'importance de ce secret.

Dans le rapport du Sous-comité des affaires des anciens combattants intitulé Fidèles à la parole donnée: d'hier à demain, Mme F. L. Crummer, un témoin qui se bat depuis six ans avec le ministère, défend avec beaucoup d'éloquence la nécessité de préserver le secret professionnel des avocats. Elle dit ceci:

Un facteur important dont il faut tenir compte, c'est la moyenne d'âge et le niveau d'instruction des clients servis par le Bureau et le fait qu'ils ne savent rien ou presque rien du fonctionnement du système. C'est leur avocat qui est leur lien avec ce système et c'est en lui qu'ils mettent toute leur confiance.
Les rapports privilégiés avocat-client sont l'un des points forts du Bureau et de la Loi sur les pensions. C'est la base sur laquelle repose la confiance des clients dans leur défenseur.
Elle ajoute:

Des modifications en ce sens pourraient compromettre, voire détruire la confiance du client non seulement en son avocat, mais envers le système lui-même. [. . .]J'ai aussi l'infime conviction qu'aucune modification ne devrait non plus être apportée à l'article 19 de la loi qui établit l'indépendance du Bureau de services juridiques des pensions. Le Bureau doit conserver cette indépendance vis-à-vis du ministère pour pouvoir servir adéquatement les anciens combattants et les personnes à leur charge.
Je voudrais rappeler à la Chambre que je souhaite principalement accélérer le processus sans rien enlever à nos anciens combattants.

Ce que je crains également au sujet de la décision de ne plus donner la possibilité aux anciens combattants d'avoir recours au bureau au premier niveau, c'est que les anciens combattants traiteront directement avec le ministère dont les employés sont bien connus pour ne pas avoir la meilleure attitude. M. Cliff Chadderton, président du Conseil national des associations d'anciens combattants, a déclaré récemment ce qui suit:

Les problèmes reliés à l'ancienne loi étaient, selon nous, largement attribuables à l'attitude, au manque de connaissances ou peut-être à l'incompétence des fonctionnaires. En d'autres termes, quel que soit le cadre de la nouvelle loi, les résultats dépendront de la façon dont elle sera administrée. [. . .]La capacité de réduire les retards dans le règlement des demandes dépendra de la volonté de l'administration d'assurer le bon fonctionnement du système.
Sachant qu'il y a un problème d'attitude au sein du ministère, je trouve incompréhensible que ce dernier estime pouvoir offrir aux anciens combattants un service meilleur que le Bureau des services juridiques des pensions. Au premier palier, les anciens combattants risquent de se trouver confrontés à un agent indifférent ou incompétent n'ayant pas envie de leur dire comment procéder pour obtenir les prestations auxquelles ils ont droit, à moins qu'il ne soit lui-même pas au courant.


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J'ai également peur qu'on n'informe pas les anciens combattants qu'ils ont le droit de faire appel des décisions du ministère. Même si les agents ont les meilleures intention au monde, je ne suis pas sûr du tout qu'ils soient capables de remplir les demandes aussi bien que le Bureau de services juridiques des pensions.

Examinons la situation de plus près à l'aide d'exemples précis. Une personne de 73 ans arrive au ministère des Anciens combattants et, alors qu'elle avait l'habitude d'aller au Bureau, s'approche du comptoir. On me dit que la surdité est un des motifs principaux de demande de pension d'invalidité. Voici donc cette personne de 73 ans qui s'approche du comptoir et à qui l'on demande de remplir un formulaire de 10 pages- j'ai moi-même vu l'ébauche de ce formulaire de demande-qui est non seulement long mais aussi compliqué. La plupart des anciens combattants âgés, qui trouvent déjà extrêmement stressant d'avoir affaire à la bureaucratie, le trouveront beaucoup trop difficile à remplir.

Étant donné que cet ancien combattant se fera aider par un agent du ministère qui n'est pas tenu au même secret professionnel qu'un avocat, je crains que la demande ne constitue une sorte de piège pour l'ancien combattant qui risque de donner par erreur des renseignements inexacts qui seront ensuite consignés dans son dossier. On verrait alors un nombre impressionnant de demandes rejetées au premier palier.

(1720)

À mon avis, le fait que le bureau n'intervienne plus au premier palier entraînera une autre difficulté. Le projet de loi C-67 aura pour effet de compliquer les démarches administratives et de donner au ministre des pouvoirs accrus pouvant servir à influencer les affaires internes du ministère. Selon ces propositions, le ministre risque d'avoir une influence excessive sur le processus décisionnel, sur la qualité du service ou sur le taux d'acceptation.

Il est probable que les employés du ministère reçoivent des directives les empêchant d'encourager les anciens combattants à réclamer les prestations et les services auxquels ils ont droit. En outre, ils se sentiront obligés de participer à l'exercice de compression budgétaire, et une remarque anodine du ministre pourrait avoir une incidence sur la manière dont le personnel traite les anciens combattants.

Je voudrais rappeler à la Chambre que mon premier souci est de veiller à accélérer le processus sans rien ôter aux anciens combattants. Compte tenu du taux de rejet qui est de 70 p. 100 et de la période d'attente qui va de 18 à 20 mois, je ne suis pas certain que le fait que le bureau ne s'occupe plus de l'examen des demandes au premier palier accélère le processus et améliore le taux d'acceptation. En fait, ce manque de continuité nuira à la défense.

Actuellement, un avocat-conseil du bureau s'occupe des demandes depuis le premier palier jusqu'aux stades de la révision et de l'appel, ce qui permet de s'assurer qu'il connaît bien le fond du dossier de son client. En vertu du système proposé, l'agent chargé d'examiner les demandes de pensions n'aura plus mandat d'intervenir dans l'affaire au-delà du premier palier.

Celle-ci sera renvoyée à un avocat-conseil du bureau qui, à ce stade, ne connaît pas le dossier, ce qui a mon avis, entraînera d'autres retards. L'avocat ne sera en mesure de conseiller correctement l'ancien combattant sur le bien-fondé de son appel qu'après avoir pris le temps d'examiner sa demande. D'importantes questions se posent alors:

Premièrement, comment les anciens combattants peuvent-ils être sûrs que l'avocat-conseil agit pour leur compte et que les renseignements qu'il lui fournit à titre confidentiel ne seront pas utilisés contre eux au moment où le ministère rendra sa décision?

Deuxièmement, qui exactement prendra la décision au premier palier et comment la personne en question sera-t-elle formée?

Troisièmement, comment le fait que le Bureau de services juridiques des pensions ne s'occupe plus de l'examen des demandes au premier palier va-t-il permettre d'accélérer le processus quand on sait qu'actuellement, l'examen initial de la demande au niveau du bureau n'est responsable que d'une partie infime des délais? Les délais, c'est au ministère qu'il y en a et non pas au bureau.

Quatrièmement, le rejet rapide des demandes au premier palier ne va-t-il pas créer plus d'encombrements au niveau de l'appel?

Enfin, cinquièmement, vu que le gouvernement promet de réduire de moitié les cas en attente en deux ans, où exactement seront les gains promis de temps et d'argent?

Un deuxième aspect de cette mesure législative qui m'inquiète est la proposition de rattachement au ministère du Bureau de services juridiques des pensions. Là encore, je crains les risques de conflit d'intérêts en raison de l'absence du secret professionnel de l'avocat.

Le bureau étant limité à l'audition des appels et appartenant au ministère ne serait plus en mesure de fournir les avis objectifs et indépendants qu'il donne actuellement en connaissance de cause. En tant qu'employés du ministère, les membres du bureau pourraient devenir partie à toute mesure de réduction des frais ou d'imposition de quotas que le ministre pourrait demander, vu qu'ils relèveraient maintenant de gestionnaires du ministère auxquels ils devraient rendre des comptes. Je ne vois pas comment cela pourrait contribuer à mieux servir les anciens combattants.

Un troisième aspect qui m'inquiète est la fusion de la Commission canadienne des pensions et du Tribunal d'appel des anciens combattants. D'après les recherches que j'ai pu faire, la commission des pensions à une vue beaucoup plus restrictive de ce qu'est une invalidité que le tribunal d'appel. Toutefois, tant qu'ils agissent indépendamment, il en résulte un certain équilibre.

Si on fusionne les deux organismes, la politique plus libérale du tribunal d'appel pourrait se trouver resserrée, ce qui nuirait aux droits et prestations des anciens combattants. C'est quelque chose que ni moi ni le Parti réformiste ne saurions accepter.

En plus, je crains que le nouveau Tribunal des anciens combattants (révision et appel) n'examine pas les mérites de chaque cas, mais se contente de déterminer si le ministère a suivi la politique et la procédure établies. Du coup, on porterait atteinte aux droits et aux avantages des anciens combattants.


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Un quatrième sujet de préoccupation est l'idée que le comité de révision, le comité d'appel et le ministre puissent, de leur propre chef, en vertu des articles 23, 32 et 82 respectivement, réexaminer une décision qu'ils ont rendue, puis l'annuler ou la modifier, s'ils constatent que les conclusions sur les faits ou l'interprétation du droit étaient erronées.

Il s'agit d'un pouvoir sans précédent. En cour, on ne peut pas être jugé deux fois pour le même crime après avoir entendu sa sentence. Ce n'est pas légal. Je me demande même si c'est conforme à la constitution.

Lors de notre entretien sur le projet de loi, le sous-ministre m'a assuré qu'il n'y avait pas lieu de s'en faire avec les conflits d'intérêts, le secret professionnel de l'avocat ou la mentalité des employés du ministère. Il a soutenu que les anciens combattants auraient le bénéfice du doute à toutes les étapes du processus de prise de décision.

Comment être sûr que le ministère leur laissera le bénéfice du doute, si cela n'a pas été l'usage jusqu'ici? Les arbitres avaient le bénéfice du doute en vertu de la Loi sur les pensions et de la Loi sur le Tribunal d'appel des anciens combattants afin que ces derniers aient une meilleure chance d'être admis rapidement.

Les commissaires et les membres du Tribunal d'appel des anciens combattants étaient expressément tenus par la loi de pencher pour le requérant. Pourtant, dans la pratique, il n'en est pas ainsi. Le rapport du Sous-comité des affaires des anciens combattants signale qu'au lieu de laisser le bénéfice du doute, la commission a adopté sans discussion l'avis des services de consultation médicale en matière de pensions.

Qu'est-ce qui nous dit que le ministère laissera effectivement le bénéfice du doute aux anciens combattants? Pas étonnant que le Bureau de services juridiques des pensions exagère dans la préparation des causes.

En guise de conclusion, je rappelle qu'aux termes de la Loi sur les pensions, le Canada et les Canadiens sont légalement tenus de verser les indemnités d'invalidité ou de décès ayant trait au service militaire. Outre cette obligation légale, nous avons l'obligation morale de fournir une aide sûre et rapide aux anciens combattants.

Je comprends que le gouvernement veuille faire adopter ce projet de loi à toute vapeur. Or, j'ai de nombreuses réserves quant à l'effet de cette mesure.

C'est aussi le cas de la Légion royale canadienne, qui représente 240 000 anciens combattants. L'autre jour, son président national m'a fait parvenir une lettre faisant état de nombreuses préoccupations. Il y déclare ce qui suit: «La Légion royale canadienne est d'avis qu'il est de la plus haute importance pour le comité parlementaire d'étudier et de calmer ces préoccupations avant d'approuver le projet de loi. En même temps, nous reconnaissons qu'il faut agir vite. La Légion royale canadienne est disposée à collaborer au processus.»

En terminant, je voudrais citer encore une fois le document Fidèles à la parole donnée: d'hier à demain. Je tiens à féliciter les membres du comité, en particulier l'honorable Jack Marshall, qui a pris sa retraite récemment. Ce document est le fruit d'excellents travaux.

À la page 94, on signale que le premier ministre Robert Borden définissait les obligations du Canada à l'égard des anciens combattants, dans un discours aux soldats qui se préparaient à participer à la bataille du Plateau de Vimy, en 1917.

Voici ce qu'il a dit: «Le gouvernement et le pays considéreront comme leur premier devoir de témoigner à ceux qui reviendront toute la gratitude qu'ils méritent pour la valeur inestimable de ces services; et je vous assure qu'aucun homme, qu'il rentre au pays ou qu'il reste dans les Flandres, n'aura jamais à reprocher au gouvernement d'avoir manqué à sa parole envers ceux qui auront vaincu et ceux qui seront morts.»

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Convoquez les députés

Après l'appel du timbre:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à lundi, à l'heure habituelle de l'ajournement. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Vous constaterez qu'il y a unanimité pour que le vote soit reporté du lundi, à l'heure de l'ajournement, au mardi, à 17 h 30.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

9446

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 h 30, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


9446

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LOI SUR L'INTÉRÊT

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ) propose: Que le projet de loi C-273, Loi modifiant la Loi sur l'intérêt, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, c'est déçu, pour ne pas dire outré, que je prends la parole sur le projet de loi C-273 intitulé Loi modifiant la Loi sur l'intérêt. Pour comprendre ma frustration, j'expose en quelles circonstances j'ai été sensibilisé à l'inefficacité de la Loi sur l'intérêt.

Je suis notaire de profession. J'ai, au cours des ans, officié au moins 5 000 transactions immobilières, soit de vente ou de financement. Au cours des années 1981 et 1982, une montée verticale des taux d'intérêt prenait par surprise les débiteurs hypothécaires qui se virent forcer de renouveler leurs prêts hypothécaires à des taux de 18, 19, 20 p. 100, et j'ai même vu une hypothèque de second rang se renégocier à 24,41 p. 100.

Lors du rétablissement de taux un peu plus civilisés, un peu plus normaux, ces contribuables, de toutes allégeances politiques, je le dis en passant, tentèrent de renégocier leur hypothèque afin de jouir de cette baisse soudaine des taux. Les prêteurs hypothécaires, avec raison je crois, arguaient qu'ils avaient dû eux-mêmes emprunter sur dépôt à terme à des taux très élevés.

Leur argumentaire avait eu un écho favorable auprès du ministre des Finances d'alors, un ministre du Parti libéral. Je cite Marc Lalonde, qui était alors ministre des Finances, en 1983, qui disait, à cette époque-là: «. . .que les banques avaient dû emprunter à un taux élevé, et que de changer les règles du jeu en cours de route pouvait les placer dans une situation embarrassante.» Je l'ai compris, et je pense que les membres de la Chambre des communes, à l'époque, l'ont compris.

Est-ce que je pourrais demander au Président de bien vouloir faire taire nos amis du Parti réformiste?

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Je sollicite votre collaboration pendant que le député à la parole. Si des discussions sont nécessaires, je vous saurais gré de les tenir à l'extérieur de la Chambre, derrière les rideaux ou dans les couloirs.

[Français]

M. Lebel: La crise des taux d'intérêt de 1981-1982 avait fait très mal aux petits propriétaires d'immeubles à revenu ainsi qu'aux propriétaires d'immeubles résidentiels.

(1735)

Certains avaient dû emprunter, toujours à des taux élevés, sur d'autres actifs qu'ils possédaient, les sommes nécessaires à combler le déficit que leur imposait cette hausse soudaine des taux d'intérêt. Je me souviens, pour ma part, que lors d'une transaction immobilière impliquant deux immeubles locatifs de douze logements, j'ai vu un vendeur, déjà pris à la gorge par son créancier hypothécaire, une banque, une des six soeurs, comme on dit, verser 56 000 $ à la valeur d'alors, à titre de pénalité d'intérêt pour bris d'hypothèque. Aux États-Unis, la loi fédérale sur l'habitation stipule qu'aucune pénalité n'est exigible pour bris d'hypothèque et pourtant, là-bas, l'économie semble aller bien.

Devant le tollé que soulevaient ces abus, le ministre des Finances avait invité les banquiers à s'autodiscipliner et à faire preuve d'humanisme à l'endroit de leurs débiteurs hypothécaires. Quel angélisme de la part d'un ministre! Les contribuables ont quand même fait preuve de compréhension et, comme c'est toujours le cas, ont été modérés face à ce problème et, par le manque de volonté politique des libéraux d'alors, comme toujours, ont payé seuls cette incurie.

Depuis ce temps, les taux d'intérêt se sont civilisés, quoique récemment, à cause, prétend-on, de la déconfiture de la devise mexicaine, ils aient eu tendance à augmenter. Quand, récemment, les taux d'intérêt ont chuté à 5,25, 5,5 p. 100 l'an, c'était alors le temps d'agir pour le parti au pouvoir. La situation prévalant en 1982-1983 s'était dissipée. Donc, il n'était plus question de prendre les banques par surprise, maintenant. Les banques, l'été passé encore, prenaient sur dépôt à terme, payaient 2, 2,5, 3 p. 100 et prêtaient à 5, 5,25, 5,5 p. 100.

Vous savez, monsieur le Président, qu'il y a 2 500 000 Canadiens qui sont aux prises avec une hypothèque, actuellement, au Canada. Ils sont pris à la gorge par les institutions financières et par le marché, pas juste les institutions financières, mais par les fluctuations du marché. Cela devient inquiétant et cela affecte notre économie et de façon pas toujours prévisible, mais bien sensible, quand même.

Outré, monsieur le Président? Oui, et voilà pourquoi. Les projets de loi émanant des députés sont d'abord tirés au sort. Le projet de loi sous étude, le projet de loi C-273, que l'on étudie aujourd'hui, a franchi cette étape. Après celle-ci, le projet de loi émanant d'un député est référé à un sous-comité des affaires émanant des députés, où siègent une majorité de libéraux et de réformistes, avec un député de la formation politique que je représente.

Ce comité doit décider si le projet de loi fera l'objet d'un simple débat d'une heure, comme c'est le cas actuellement, ou s'il sera votable. Si on choisit le débat d'une heure, au bout d'une heure, tout tombe à l'eau, on n'en discute plus, on renvoie ça aux oubliettes. Si, par contre, ce comité choisit de le rendre votable, alors là, les parties peuvent s'exprimer dessus, en débattre et après trois heures de discussion, passer le projet de loi du député au vote.

Bien sûr, lorsque dans le comité, la majorité des membres craignent qu'un projet de loi émanant d'un député ait des chances d'être adopté et de devenir une loi, les membres en évaluent


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l'impact sur leurs commettants, sur leurs partisans, sur leurs supporters et aussi, bien sûr, bailleurs de fonds. Alors, là, ou bien on l'envoie au débat de trois heures ou bien on le réfère au débat d'une heure comme celui qu'on tient actuellement.

Inutile de faire de dessin. Le présent projet de loi, s'il était adopté, ferait perdre aux banques des montants énormes qu'ils perçoivent actuellement en pénalités.

(1740)

Ces pauvres banques déclaraient globalement un bénéfice de 4,3 milliards de dollars en novembre dernier, à la fin de leur exercice financier, après avoir, bien sûr, prélevé toutes les réserves pour créances douteuses et avoir retenu les impôts payables; 4,3 milliard de dollars, pauvres elles.

Pourquoi le sous-comité d'examen des projets de loi émanant des députés, où le contrôle est exercé par nos amis d'en face et nos amis d'à côté, s'est-il opposé à ce que le présent projet de loi soit votable? Serait-ce que la majorité des six soeurs, les grosses banques à charte, ont donné en moyenne, chacune, 250 000 $ au Parti libéral du Canada lors de la dernière campagne électorale? Il est permis de penser que tel est le cas.

Ce comité obscur n'a nullement considéré l'intérêt du contribuable canadien dans sa prise de décision, mais exclusivement ceux de ses bailleurs de fonds. Voilà le résultat de la politicaillerie dans l'art de laquelle sont passés maîtres les libéraux.

Les réformistes apprennent vite également, puisqu'ils visent à former le prochain gouvernement. Dieu m'en garde! Aux contribuables canadiens, je souligne la leçon qu'il y a dans tout cela: voilà ce qui arrive quand un vote nous est acquis, vous êtes les derniers considérés.

Je voudrais mettre les députés qui forment la majorité sur ce triste comité en garde contre leur attitude dans le présent dossier, puisque je me propose de faire parvenir à tous les journaux régionaux et nationaux circulant dans leur circonscription, copie du hansard du présent débat, auxquels ils devront tous et chacun expliquer pourquoi ils ont refusé le vote sur le présent projet de loi.

Je reviens à ce projet de loi et je vois tout de suite la réaction de mes collègues d'en face qui prétendront qu'une telle mesure serait susceptible de nuire à certains investissements. Qu'on me permette d'en douter, et voici pourquoi.

Actuellement, un prêt consenti pour plus de cinq ans peut, lui, être remboursé par anticipation pourvu qu'on y ajoute au capital et aux intérêts dus, une somme équivalent à trois mois d'intérêt, pour les prêts de plus de cinq ans. Pourtant, la Banque de Montréal, depuis quelques années, fait des prêts de sept ans et même plus.

L'argument voulant qu'une telle procédure fasse en premier lieu perdre des revenus à ceux qui placent à long terme leurs économies auprès des institutions bancaires, ne tient pas lui non plus. Si les gens veulent placer de l'argent à un taux assez élevé, aussi concurrentiel que celui des banques entre elles, ils peuvent toujours acheter des obligations d'épargne du Canada, des obligations d'épargne du Québec, de l'Ontario et d'ailleurs, des obligations des municipalités, qui toutes n'ont pas la fâcheuse tendance de rembourser leurs dettes avant échéance. Donc ces gens-là recevraient quand même les intérêts auxquels ils sont en droit de s'attendre.

La Loi sur la protection du consommateur qui est entrée en vigueur au Québec, je crois, en 1976-1977, stipule à l'article 93, concernant les consommateurs-on ne parle pas des prêts hypothécaires, cela ne s'applique pas parce que la Loi sur l'intérêt est de compétence fédérale-la Loi sur la protection du consommateur, au Québec, interdit, selon l'article 93, à tout créancier d'exiger plus que ce qui lui est dû au jour du paiement.

Donc, il n'y a pas de pénalité si tu paies ta télévision ou ton automobile avant le temps, pourvu que tu ne sois pas un commerçant, parce que la Loi sur la protection du consommateur s'applique aux individus. Cela n'a pas empêché les compagnies de finances, les commerçants du Québec de faire des affaires. Ce qui les a plus ralentis, c'est possiblement l'impact négatif que la mesure de la Loi sur l'intérêt a sur l'économie au Canada en général.

Lorsque des gens qui pourraient par ailleurs se financer sont pris dans un entonnoir qui les force à se rendre au terme d'une hypothèque ou à payer des montants astronomiques, j'ai l'impression que ça peut nuire à l'économie d'une province ou d'un pays.

(1745)

En 1976, le Parti libéral, les ancêtres de ceux qui sont de l'autre côté, par l'entremise de l'honorable Anthony Abbott, avait déposé le projet de loi C-16. Ce projet de loi «visait à assurer» et son titre était Loi visant à assurer la protection des emprunteurs et déposants et ayant pour objet de réglementer l'intérêt sur les créances judiciaires et d'abroger la Loi sur l'intérêt. Cette loi n'a d'ailleurs pas été touchée au Canada depuis 1867, sauf à quelques reprises, pour y inclure les Territoires du Nord-Ouest et du Yukon, mais elle n'a pas été modifiée substantiellement depuis 1867. Ce projet de loi, qui est probablement mort à la suite des pressions des lobbies, des grosses banques ou de je ne sais qui, se proposait d'annuler ou d'abroger la Loi sur l'intérêt.

À son article 15 d'alors, on y lisait: «L'emprunteur qui rembourse par anticipation tout ou partie du principal dû au terme d'un prêt hypothécaire visé au paragraphe précédent n'est pas tenu de payer, sur le remboursement anticipé, l'excédent de la pénalité prévue par accord-c'est-à-dire dans le contrat-constatant le prêt sur le moins élevé des frais de crédit exigibles pour une période de trois mois ou des frais de crédit qui restent à courir jusqu'à la fin du prêt.»

Autrement dit, c'était le plus bas des deux; maximum trois mois d'intérêt ou moins que cela, si c'était ce qui restait effectivement à courir en frais d'intérêt. Et cela, c'était calculé sur le remboursement anticipé au taux des frais de crédit applicables au prêt.

Au moment où j'ai déposé mon projet de loi, je ne savais pas qu'en 1976, on avait déposé ce projet de loi. C'est au cours de mes recherches que je l'ai trouvé. Et il n'émane pas du Crédit social du Canada ni du parti de l'amour infini ou de la méditation transcendentale, il vient du Parti libéral, la gang d'en face. Pourquoi ont-ils renié leurs principes? Que s'est-il passé depuis


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ce temps-là dans ce parti? Est-ce la contamination du Parti réformiste? Je sais qu'ils sont contre.

Pourtant, si certains ont été pénalisés au Canada par les mesures de la Loi sur l'intérêt, ce sont les fermiers de l'Ouest. Les fermiers de l'Ouest, on le sait, attendent des entrées d'argent importantes. Est-ce lors de la vente de leurs récoltes ou grâce à leurs assurances de toutes sortes ou de la stabilisation? Je ne le sais pas. Mais le fait est qu'ils doivent parfois attendre un certain temps avant de recevoir de l'argent. Entre-temps, ils sont obligés de couvrir par garantie hypothécaire ou par emprunt hypothécaire. Finalement, comme ils ont besoin d'argent pour un certain temps, ils en empruntent des banques.

Ce sont peut-être eux qui ont été parmi les plus pénalisés au Canada à cause de l'importance des montants d'emprunt qu'ils font régulièrement et presque annuellement, en attendant que les sommes qui leur sont dues leur soient payées.

Je suis déçu parce que je pensais sincèrement, politicailleries mises à part, que ce projet de loi visait à protéger, pour une fois-ce qui n'est pas beaucoup, une seule fois-les petits épargants, les petits qui ont des difficultés de paiement d'hypothèque. Je pensais que, spontanément, les membres de cette Chambre, de quelque parti qu'ils soient, auraient vu l'intérêt des petits, de ceux qui leur ont permis d'être assis en face. Mais encore une fois, ils se sont laissé avoir par les gros lobbies, les gros monopoles, les pressions des gros groupes que leur disent: «Écoutez, mes 4,3 milliards, je ne veux pas les perdre.»

On dit dans des coupures de journaux que ce sera probablement encore pire l'année prochaine à cause du redressement de l'économie. Ce sera peut-être plus de 4,3 milliards de bénéfices nets. Il est bien sûr qu'ensemble, ils sont capables de donner 1 million, 1,5 million ou 2 millions au parti qui leur promet de ne pas toucher à la Loi sur l'intérêt, de ne pas leur faire perdre des montants astronomiques en pénalités, tels ceux qu'ils ont perdus, j'estime, sans droit.

Je voulais également déposer ce projet de loi pour mes électeurs du comté de Chambly avec qui, pendant 15 ans, j'ai oeuvré comme notaire à faire des transactions, des hypothèques. J'en ai vu sortir de mon bureau la larme à l'oeil. J'ai vu des gens qui n'étaient plus capables de payer venir porter la clé sur mon bureau et dire: «Tu la donneras au gérant de la banque; je m'en vais à loyer à Montréal parce que je n'arrive plus à payer.» J'ai vu cela, en 1982 et 1983. Cela m'a fait mal au coeur.

(1750)

Lorsque j'ai décidé de me lancer en politique, c'était une des promesses que j'avais faites aux gens de Chambly d'essayer d'influencer le gouvernement pour faire modifier cette loi qui me semblait inhumaine, comme l'avait dit M. Lalonde, le ministre des Finances à cette époque, et qui avait demandé aux banques de s'autodiscipliner. C'est un peu comme demander au renard, qui a pénétré dans le poulailler, de manger moins de poules. C'est comme confier la banque de sang à Dracula. C'est à peu près la même chose.

Au moins, je dis aux gens de Chambly, j'ai essayé. Vous en avez la preuve, ceux qui me voient, j'ai essayé de faire modifier des choses. Je suis déçu, cela n'a pas passé. Cela n'a pas passé à cause de l'ignorance, le goût de ne rien faire de certains de mes collègues, malheureusement, plutôt ceux du parti au pouvoir. Je leur dis qu'on ne lâchera pas et qu'on va quand même essayer, peut-être dans des moments où ils vont être moins chatouilleux face à leurs commettants corporatifs que sont les banques, peut-être lors d'une seconde tentative, à un moment donné, de revenir avec un projet de loi semblable.

[Traduction]

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, malheureusement, le député de Chambly nuit beaucoup à l'étude de son projet de loi d'initiative parlementaire en avançant un argument extraordinaire et même ridicule, à savoir que son projet de loi ne fait pas l'objet d'un débat de trois heures à la Chambre des communes parce que sa mesure législative visant à modifier la Loi sur l'intérêt pourrait mettre les libéraux dans l'embarras.

Je rappelle à mon vis-à-vis que les députés libéraux de l'arrière-ban ne sont pas sans réfléchir et que certains ont présenté des projets de loi d'initiative parlementaire qui allaient vraiment à l'encontre des propositions faites par certains ministres. Ces projets de loi ont quand même fait l'objet d'un débat de trois heures et ont été mis aux voix. Si ma mémoire est fidèle, le dernier projet de loi du genre, le projet de loi C-226 visant à abroger l'article 745 du Code criminel, a été débattu pendant trois heures et adopté à l'étape de la deuxième lecture par les députés.

Pour revenir à la mesure dont nous sommes saisis aujourd'hui, je suis très heureux d'avoir l'honneur de traiter du projet de loi C-273 visant à modifier la Loi sur l'intérêt. Permettez-moi tout d'abord de féliciter le député de Chambly pour le bel effort qu'il fait au nom des Canadiens ayant contracté une hypothèque.

Le projet de loi dont nous sommes saisis prévoit la modification de l'article 10 de la Loi sur l'intérêt. En réalité, il ne fait que remplacer les mots «cinq ans» par les mots «douze mois» à deux endroits dans cet article.

À première vue, ce changement peut paraître mineur, mais je crains qu'il puisse avoir des conséquences très graves. Je crains que cette mesure qui semble favorable au consommateur puisse, dans les faits, lui faire du tort. Si le projet de loi est adopté, les Canadiens pourraient avoir plus de mal à négocier un prêt hypothécaire, les taux hypothécaires pourraient augmenter et les emprunteurs et épargnants canadiens pourraient avoir moins d'instruments financiers à leur disposition.

Je tiens à expliquer à mon collègue d'en face pourquoi une modification aussi simple risque d'avoir des conséquences néfastes. Le problème, c'est que ce projet de loi pourrait malencontreusement ralentir l'influx de fonds sur le marché hypothécaire en accroissant les risques associés au financement hypothécaire. Les députés se rappelleront peut-être que l'article 10 de la Loi sur l'intérêt prévoit une amende équivalant à trois mois d'intérêt dans les cas de paiement anticipé du capital dû après cinq ans sur les prêts hypothécaires ordinaires d'une durée supérieure à cinq ans.


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Le projet de loi à l'étude étendrait cette amende de trois mois d'intérêt au paiement anticipé du capital dû après seulement un an sur les prêts hypothécaires d'une durée supérieure à un an.

Comme les députés et, franchement, bien des Canadiens ne l'ignorent pas, les prêts hypothécaires à long terme ne sont pas chose courante au Canada. La grande majorité des prêts hypothécaires sont ici accordés pour tout au plus cinq ans.

(1755)

On peut se demander pourquoi il n'existe pas de financement à long terme. Malheureusement, la disposition de l'article 10 de la Loi sur l'intérêt prévoyant une amende à verser en cas de paiement anticipé y est pour beaucoup. Cela a été reconnu par des associations de consommateurs, des institutions financières ainsi que les secteurs de la construction et de l'immobilier.

Voici que le projet de loi C-273 à l'étude aujourd'hui ajouterait aux problèmes posés par le financement hypothécaire d'une durée déterminée au lieu de les résoudre, car il risque de donner des résultats similaires sur le marché des prêts hypothécaires à durée moyenne. Les amendes pour paiement anticipé des prêts hypothécaires de courte et moyenne durée sont habituellement calculées en fonction de la formule de la valeur actuelle qui compense le prêteur pour toute différence de taux qui s'appliquerait. Ce qui pourrait être supérieur ou inférieur à l'amende de trois mois prévue dans le projet de loi.

Il faut reconnaître les répercussions possibles d'un tel problème. La nervosité que causerait de telles pertes ferait qu'il y aurait non seulement moins de prêts hypothécaires, mais aussi moins de CPG de durée moyenne. À son tour, le marché hypothécaire réduit et moins efficace qui découlerait de cela aurait des répercussions néfastes sur les secteurs de la construction et de l'immobilier.

Je me permets d'insister. Je comprends que ce projet de loi part de bonnes intentions, qu'il a été déposé en tenant compte du bien-être des consommateurs. Toutefois, avant de renvoyer le projet de loi C-273 au comité, les députés devraient songer aux conséquences imprévues mais néfastes qu'il risque d'avoir.

En résumé, ces conséquences sont les suivantes: une réduction des options offertes aux consommateurs canadiens en tant qu'emprunteurs hypothécaires et épargnants; une hausse du coût du financement hypothécaire; une réduction du nombre des hypothèques de moyenne durée et ses conséquences néfastes pour les secteurs de la construction et de l'immobilier.

Toutefois, en présentant ce projet de loi, le député de Chambly fait ressortir la nécessité de trouver un moyen de permettre aux consommateurs canadiens de faire des paiements anticipés sur leurs hypothèques d'une façon qui soit juste et équitable.

Je crois savoir que des hauts fonctionnaires se penchent sur cette question. Il se peut donc que nous y revenions très bientôt.

[Français]

M. Lebel: Monsieur le Président, est-ce que je peux répondre à sa question?

Le président suppléant (M. Kilger): Durant l'heure réservée aux initiatives parlementaires, il n'y a pas de période de questions et commentaires. Celui qui présente le projet de loi en Chambre dispose de 20 minutes, ensuite les autres intervenants ont dix minutes, sans questions et commentaires.

[Traduction]

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je tiens moi aussi à féliciter le député de Chambly quant à l'intention de son projet de loi. Il ne fait aucun doute qu'il a bon coeur.

Beaucoup parmi les députés à la Chambre et la plupart des Canadiens ont ressenti le choc de la hausse croissante des taux d'intérêt il y a une dizaine d'années. Cela a certes été mon cas. Malheureusement, bien que le projet de loi procède d'une noble intention, quand on va au-delà de l'intention pour voir quelles en seraient les répercussions et ce qui se passerait sur le marché, on constate que les résultats ne seraient pas aussi nobles.

Avant de dire ce que je pense vraiment de la mesure à l'étude, je voudrais répliquer à deux ou trois observations que le député de Chambly a glissées dans le débat. Il y a d'abord l'idée qu'il ne vaut en quelque sorte jamais la peine de faire quoi que ce soit, en ce sens que le projet de loi ne fera pas l'objet d'un vote.

Je crois que nous serons saisis d'une trentaine de ces mesures d'initiative parlementaire. De ce nombre, six ou huit, je crois, feront l'objet d'un vote. Pour décider si un projet de loi fera ou non l'objet d'un vote, on en examine la teneur à la lumière de toutes les autres mesures d'initiative parlementaire.

Elles sont parfois jugées déficientes, et parfois non. La mesure d'initiative parlementaire que j'avais proposée n'a pas été jugée digne de faire l'objet d'un vote. J'en ai été mécontent, mais c'est la vie! Nous devons en tirer notre parti. Il a par ailleurs laissé entendre que puisque les banques réalisent d'énormes bénéfices, il faudrait y changer quelque chose. Les banques font des profits gigantesques et par conséquent personne n'aime les banques. Je n'aime pas plus les banques que quiconque, mais elles font partie de la réalité. Elles sont un mal nécessaire.

(1800)

Les banques ont vu augmenter leurs impôts d'environ 40 p. 100 ces dernières années. En fait, elles paient une part passablement élevée de leurs bénéfices en impôts.

Comme nous le savons tous, les banques ont augmenté leurs frais pour tous les services qu'elles offrent car elles tâchent également d'échapper au caractère cyclique du recouvrement de tous leurs coûts d'exploitation par les intérêts qu'elles exigent.

Toute la question de la rentabilité des banques dans ce débat est bien discutable. Elle n'a aucun rapport avec l'objet du débat. La réalité, c'est que la banque s'engage par contrat à prêter de l'argent à un client et que ce dernier s'engage par contrat à le lui rembourser.

Si quelqu'un veut et peut rembourser un prêt avant l'échéance pour quelque raison que ce soit, il serait bien que le prêteur puisse lui faciliter la chose. Il faut toutefois se rappeler que le nombre de personnes qui aimeraient renégocier leurs prêts lorsque les taux d'intérêt baissent ne correspond probablement pas au nombre de personnes qui voudraient faire de même lorsque


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les taux d'intérêt augmentent. En fait, je n'ai jamais entendu parler de quelqu'un qui soit allé à la banque et qui ait dit ceci: «Je crois comprendre que les taux d'intérêt ont augmenté. Je veux donc renégocier mon prêt pour pouvoir payer davantage.»

Un contrat, c'est un contrat. Lorsque des gens font des dépôts et qu'ils achètent des certificats portant intérêt à la banque, celle-ci consent généralement des prêts équivalant à la valeur de ces dépôts.

Nous devrions peut-être laisser au marché le soin de décider. Si c'est dans l'intérêt de la banque-et certaines le font-de veiller à ce que ses clients aient suffisamment de souplesse par rapport à leur prêt hypothécaire, la banque pourrait annoncer qu'elle sera disposée, après un an, à laisser quelqu'un rompre son contrat de prêt hypothécaire, moyennant le paiement de trois mois d'intérêt.

La plupart des banques offrent des hypothèques remboursables par anticipation ainsi que des hypothèques fermées d'un an, de six ans, de cinq ans et de dix ans. L'Association des constructeurs d'habitations aimerait bien voir des hypothèques à beaucoup plus long terme, de sorte que les gens puissent compter sur un taux fixe pour une longue période, et peut-être même jusqu'au remboursement complet de l'hypothèque. Cela se fait aux États-unis. Ainsi, quand quelqu'un achète une maison, il connaît le montant des versements qu'il devra faire, depuis le premier paiement jusqu'au dernier. De cette façon, les propriétaires ne peuvent perdre leur maison à cause des caprices des taux d'intérêt. Mais c'est là une autre histoire et un autre débat.

Il y a des établissements de crédit qui, aujourd'hui même, au Canada, consentiront des hypothèques entièrement remboursables par anticipation qui permettront aux gens de les rembourser avant l'échéance sans avoir à payer de pénalité.

Nous devrions laisser ces décisions aux forces naturelles de la concurrence sur un marché sain. Le Parlement a bien d'autres chats à fouetter. Nous devrions laisser le secteur privé faire son travail et ne pas mêler davantage le gouvernement du Canada ou tout autre gouvernement à une question qui devrait relever du secteur privé. Nous devrions nous retirer de ce dossier, pas nous en mêler.

Le député de Chambly a présenté à la Chambre une motion s'inspirant de bonnes intentions, mais elle concerne un sujet où nous risquons peut-être de nous enliser. Je suis d'avis que si on se penche là-dessus, et le Parlement doit absolument faire quelque chose à ce sujet, on constatera que lorsqu'une institution prêteuse, une banque fait un prêt hypothécaire et s'attend à un écart de 3 p. 100 entre ce qu'elle paie à son prêteur et ce que son emprunteur lui paie, son bénéfice est compris dans ces 3 p. 100.

(1805)

Les banques pourraient songer à renoncer à leur partie du bénéfice. Mais il faut qu'elles rentrent dans leurs frais.

Ce débat devient bien complexe. Ou plutôt, mes explications le deviennent. Ce n'est pas vraiment à nous de décider ce que les banques devraient faire et comment elles devraient le faire. C'est le marché libre, ouvert, concurrentiel qui doit le faire.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir d'appuyer mon collègue à cet égard et je ferais remarquer au député du Parti réformiste qu'il s'agit d'une loi qui consiste à protéger les consommateurs privés et non pas des sociétés emprunteuses. Si j'ai bien compris le projet de loi, il ne s'adresse pas aux sociétés qui empruntent, mais aux emprunteurs privés.

Comme on sait que les institutions financières, bien organisées avec leurs experts, peuvent assez facilement voir venir les hauts et les bas des taux d'intérêt, ils peuvent prévoir et en profiter davantage qu'un simple citoyen qui doit gagner sa vie quotidiennement. Ce dernier n'a pas les ressources nécessaires pour juger à quel moment il doit, soit racheter son hypothèque ou en prendre une nouvelle, et pour combien de temps il doit la prendre, etc.

C'est pour ces raisons que la flexibilité que demande le député de Chambly de pouvoir rembourser son hypothèque et la renouveler à un taux plus bas permettrait justement à ces citoyens ordinaires, dont c'est souvent la seule économie, une hypothèque sur leur résidence de la conserver. Ils peuvent emprunter, sur l'hypothèque, une certaine somme dans le but de se faire un certain capital et dans le but aussi, bien sûr, de pouvoir parfois se créer une retraite lorsqu'ils atteindront un certain âge.

C'est pour ces raisons que souvent dans le passé, comme le député de Chambly l'a dit, on a vu des citoyens perdre des sommes énormes, principalement en raison du fait que nous vivons, au Canada, un problème majeur. Par exemple, dans les années 1975, nous avions des taux d'intérêt raisonnables de 7, 8, 9 p. 100. Dans les années 1981, 1982, 1983, les taux d'intérêt sont montés jusqu'à 20 p. 100 et par la suite, ils ont baissé à 7, 8, 9 p. 100, pour redescendre à 6 p. 100 en 1994. L'an dernier, le taux était de 6 p. 100 pour une hypothèque et maintenant, c'est rendu à 11 ou 12 p. 100.

Vous vous imaginez cette variation de taux d'intérêt que nous vivons. Je n'ai pas fait d'analyses approfondies à savoir dans d'autres pays comment cela fonctionne, mais je sais qu'aux États-Unis, on peut emprunter une hypothèque, encore aujourd'hui, pour trente ans, à un taux beaucoup plus bas que ce que nous payons ici. Alors, cette stabilité fait en sorte que les gens qui sont des salariés et qui ont des salaires plutôt stables, sont capables d'établir un budget plus équilibré. Alors qu'ici, avec cette variation des taux d'intérêt, ça fait en sorte que les gens sont toujours incertains à cause de cette instabilité des taux d'intérêt.

Alors, si on donnait plus d'occasions aux individus, parce qu'on parle toujours des hypothèques des individus, si on donnait aux individus l'occasion au moins de mieux gérer et de gérer plus facilement leurs intérêts hypothécaires, à ce moment-là, ça permettrait, j'en suis assuré, à des gens de mieux gérer leur portefeuille et de vivre avec plus de certitude, de faire plus de transactions et d'aider l'économie à mieux se développer. Je pense que c'est dans cet esprit que le député de Chambly a

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présenté ce projet de loi qui m'apparaît important, mais malheureusement, il semblerait qu'on boycotte son projet de loi.

Il me semble qu'on aurait dû prendre plus de temps pour en discuter et faire en sorte qu'on puisse améliorer certaines garanties aux individus.

Encore une fois je le répète, les institutions financières sont très bien organisées, elles ont leurs experts pour évaluer les tendances, les hauts et les bas des taux d'intérêt, mais les pauvres individus qui doivent gagner leur vie tous les jours n'ont pas les ressources nécessaires pour le faire. C'est sur cet aspect-là que j'appuie le projet de loi de mon collègue de Chambly.

[Traduction]

SUSPENSION DE LA SÉANCE

Mme Catterall: Monsieur le Président, vous trouverez peut-être qu'il y a consentement unanime à ce que la séance soit suspendue à l'appel de la présidence et que le débat sur la motion d'ajournement commence à l'heure habituelle, soit à 18 h 30.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il n'y a plus de député pour prendre la parole et que la motion n'a pas été choisie pour faire l'objet d'un vote, la période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est rayé du Feuilleton, conformément à l'article 96 du Règlement.

[Traduction]

Je vois que le député de Louis-Hébert est présent. Dès que nous pourrons entendre le représentent du gouvernement, la séance pourrait reprendre avant l'heure normale de 18 h 30.

Plaît-il à la Chambre de suspendre la séance jusqu'à l'appel de la présidence?

Des voix: D'accord.

(La séance est suspendue à 18 h 12.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

(La séance reprend à 18 h 17.)

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MOTION D'AJOURNEMENT

[Français]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA VISITE DU PRÉSIDENT AMÉRICAIN

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, je me dois d'intervenir en cette Chambre afin de permettre au secrétaire d'État de donner quelques éclaircissements sur une réponse que le premier ministre a fournie à une question que je lui ai posée lundi dernier.

Je demandais alors au premier ministre quelle règle coutumière, parlementaire ou de droit, lui avait fait dire que le très honorable chef de l'opposition officielle ne pouvait pas rencontrer le président américain lors de sa prochaine visite à Ottawa, à la fin de février. Je lui demandais également s'il trouvait normal qu'un premier ministre canadien dicte sa conduite au président des États-Unis.

Au lieu de répondre à ma question, et incapable de s'excuser pour sa réaction émotive, partisane et maladroite faite à l'extérieur de la Chambre, le premier ministre s'est plutôt perdu en explications bizarres et confuses où il parlait de la lettre que le chef de l'oppositon a fait parvenir à M. Clinton pour solliciter une entrevue avec lui.

Finalement, il a dit que puisque la lettre était adressée à M. Clinton, seul ce dernier pouvait y répondre. Ce qu'on doit comprendre de cette partie de sa réponse, c'est qu'il a été incapable de faire une distinction entre une lettre qui lui est adressée et une copie de lettre qui lui est acheminée par courtoisie.

Aussi, le premier ministre a versé dans le vaudeville et dans l'insolite, me rappelant que rencontrer un chef de l'opposition n'est pas une tradition universelle et que, lui, lorsqu'il était chef de l'opposition, ne s'était pas toujours prévalu de cette prérogative.

D'ailleurs, me rappela-t-il, le président des États-Unis, M. Zedillo, n'avait pas rencontré le chef de l'opposition lors de sa visite en décembre dernier. Il faudrait rappeler au premier ministre que M. Zedillo est le président du Mexique.

En somme, mis à part son diagnostic médical pitoyable sur l'état de santé du très honorable chef de l'opposition officielle, qui ferait rougir Hippocrate, le premier ministre n'a pas du tout répondu à ma question. Sur quoi s'était-il basé pour affirmer que le député de Lac-Saint-Jean ne pourrait rencontrer le président américain?

Bref, après avoir si maladroitement évité de répondre à ma première question, le premier ministre n'a pas plus répondu à ma seconde. Je rappelle cette question: «Maintenant qu'il reconnaît que le chef du Bloc québécois a le droit de rencontrer le chef d'État américain, le premier ministre prend-il l'engagement qu'il ne se livrera à aucune pression ou manoeuvre de coulisse pour tenter de dissuader le président américain de rencontrer le chef de l'opposition officielle?»

Le premier ministre s'étant borné à répondre, et je cite:

. . .la lettre du président Clinton, normalement, devrait venir de Washington, non pas d'Ottawa.
Vous comprendrez qu'il ne s'agit là d'aucun engagement à ne pas exercer de pression. Au contraire. Que signifie dans sa réponse le mot «normalement». N'indique-t-il pas clairement au contraire que le premier ministre se garde la possibilité de tenter de dicter la réponse qui viendra de Washington? Le premier ministre est passé maître dans l'art d'esquiver les questions, on l'a vu encore en cette circonstance.

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[Traduction]

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je donnerai une réponse brève et claire, tout en fournissant quelques informations.

Le premier ministre a répondu à cette question à la Chambre hier après-midi. La visite du président Clinton à Ottawa est un événement important pour les relations canado-américaines. Le gouvernement attend avec une grande impatience la première visite officielle du président Clinton au Canada.

Le président arrivera le 23 février au matin et partira l'après-midi du vendredi 24 février. Sont au programme une rencontre avec notre nouveau gouverneur général, une visite au Parlement, des rencontres avec le premier ministre et des ministres.

Le chef du Bloc québécois a demandé à rencontrer personnellement le président des États-Unis pendant sa visite à Ottawa. Ainsi que le premier ministre l'a dit lundi en réponse à cette question, c'est aux États-Unis d'autoriser une telle rencontre.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément au paragraphe 38(5) du Règlement, la motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée.

En conséquence, la Chambre s'ajourne jusqu'à 10 heures demain, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 22.)