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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 16 mars 1995

LE BUREAU DE RÉGIE INTERNE

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE SECRET DU PROCESSUS BUDGÉTAIRE-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

INDUSTRIE

LE PROJET DE LOI C-74

    Adoption de la motion 10574

PÉTITIONS

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 10574

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 10575

LA FISCALITÉ

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 10575

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 10575

LE SUICIDE ASSISTÉ

LES DROITS DES GRANDS-PARENTS

LES DROITS DE LA PERSONNE

LA FISCALITÉ

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

LA CRUAUTÉ ENVERS LES ANIMAUX

LE PRIX DES MÉDICAMENTS

LA LIBÉRATION CONDITIONNELLE

LE SÉNAT

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

QUESTIONS AU FEUILLETON

    Présentation et adoption de la motion 10576

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'ÉGALITÉ ÉCONOMIQUE DES FEMMES

    Mme Gagnon (Québec) 10577
    M. Chrétien (Frontenac) 10579
    M. Chrétien (Frontenac) 10584
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 10584
    Mme Brown (Oakville-Milton) 10588
    Mme Gagnon (Québec) 10595
    M. Leroux (Shefford) 10597
    M. Chrétien (Frontenac) 10603
    Mme Stewart (Brant) 10604
    Mme Gagnon (Québec) 10606

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE BUDGET

LA FISCALITÉ

L'UNIVERSITÉ MOUNT ALLISON

LES GARDERIES RURALES

LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 10607

CUBA

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

LA JUSTICE

LES PÊCHES

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

    Mme Ringuette-Maltais 10608

LE FORUM POUR JEUNES CANADIENS

LA SOUVERAINETÉ DU QUÉBEC

LE LIVRE ROUGE DU PARTI LIBÉRAL

LES ALLOCATIONS DE RETRAITE

LE CHEF DE L'ACTION DÉMOCRATIQUE DU QUÉBEC

LE PARTI CONSERVATEUR

QUESTIONS ORALES

LA SOUVERAINETÉ DU QUÉBEC

    M. Gauthier (Roberval) 10610
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10610
    M. Gauthier (Roberval) 10610
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10610
    M. Gauthier (Roberval) 10611
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10611

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

LES SOINS DE SANTÉ

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10611
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10612
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10612

LE CONSEIL CONSULTATIF SUR LE STATUT DE LA FEMME

    Mme Gagnon (Québec) 10612
    Mme Gagnon (Québec) 10612

LA DÉFENSE NATIONALE

LES DROITS DE LA PERSONNE

LES RELATIONS OUVRIÈRES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10614

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

LE GOUVERNEMENT DU CANADA

    M. Martin (LaSalle-Émard) 10615

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10615
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10615

LE IRVING WHALE

LE TARIF DU NID-DE-CORBEAU

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10616
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 10616

INTERNET

LE MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENT

LE BUDGET

    M. Martin (LaSalle-Émard) 10617

LE PROGRAMME ÉCOLE AVANT TOUT

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10617

L'ASSURANCE-SANTÉ

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 10617

L'ÉCONOMIE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 10618

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    M. Gauthier (Roberval) 10618

QUESTION DE PRIVILÈGE

L'HONORABLE VICE-PREMIÈRE MINISTRE ET MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT-LE RENFLOUAGE DU IRVING WHALE-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'ÉGALITÉ ÉCONOMIQUE DES FEMMES

    Reprise de l'étude de la motion 10619
    M. Gauthier (Roberval) 10619
    La présidente suppléante (Mme Maheu) 10619
    Mme Gagnon (Québec) 10625
    Mme Dalphond-Guiral 10628
    Mme Gagnon (Québec) 10630

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LOI FÉDÉRALE SUR L'AIDE FINANCIÈRE AUX ÉTUDIANTS

    Reprise de l'étude de la motion 10638
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 10638
    Report du vote sur la motion 10644

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    Suspension de la séance à 18 h 15 10644

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 21 h 14 10644

SANCTION ROYALE

    La présidente suppléante (Mme Maheu) 10644

10573


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 16 mars 1995


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

[Traduction]

LE BUREAU DE RÉGIE INTERNE

Le Président: J'ai l'honneur d'informer la Chambre que M. Jim Silye, député de la circonscription de Calgary-Centre, a été nommé membre du Bureau de régie interne en remplacement de M. Stephen Harper, député de Calgary-Ouest, aux fins et en vertu des dispositions du chapitre 42, premier supplément des Lois révisées du Canada de 1985, intitulé «Loi modifiant la Loi sur la Chambre des communes».

* * *

[Français]

QUESTION DE PRIVILÈGE

LE SECRET DU PROCESSUS BUDGÉTAIRE-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Chers collègues, je désire maintenant rendre une décision sur la question de privilège soulevée le vendredi 3 mars 1995 par l'honorable député de Sherbrooke, et au sujet de laquelle il avait donné avis la veille, juste après la période des questions. Je remercie l'honorable député d'avoir soulevé cette question, de même que le whip en chef du gouvernement et les honorables députés de Berthier-Montcalm, de Kindersley-Lloydminster et de Kingston et les Îles de leur contribution au débat. Je désire également remercier l'honorable député de Guelph-Wellington de son intervention sur cette question le 13 mars 1995.

[Traduction]

Dans sa question de privilège, le député de Sherbrooke soutient qu'il y a eu divulgation non autorisée du budget, avant sa présentation par le ministre des Finances, le 27 février 1995. Pour appuyer son affirmation, le député a attiré l'attention de la Chambre sur le numéro du 2 mars du Hill Times, et plus précisément sur un commentaire de la députée de Guelph-Wellington qui y figure. À la question: «Est-ce que le processus budgétaire est trop secret?», la député aurait répondu: «Je ne crois pas. Certains députés ont su à l'avance si des programmes de leur circonscription allaient faire l'objet d'importantes compressions. Ils l'ont demandé au caucus pour se préparer à répondre aux questions.» Le député de Sherbrooke a alors soutenu que, si certains députés ont reçu des renseignements confidentiels, secrets, avant le jour du budget, ce serait au détriment des autres députés et que cela entraverait l'exercice de leurs fonctions. Les députés de Berthier-Montcalm et de Kindersley-Lloydminster ont fait écho aux sentiments et aux préoccupations du député relativement au fait qu'un groupe de députés aurait reçu des renseignements qui n'étaient pas accessibles à d'autres députés.

[Français]

La question de procédure qui nous est soumise ne porte pas sur le secret budgétaire comme tel. Plusieurs députés ont cité le commentaire 31(5) de la sixième édition de Beauchesne pour soutenir leur prétention que le secret budgétaire est une convention politique et non un sujet qu'on peut soulever sous le couvert du privilège parlementaire. À vrai dire, plusieurs députés ont souligné que ce qui était vraiment en cause était le sous-entendu que certains députés, et je souligne le mot «députés», avaient eu connaissance à l'avance du contenu du Budget, et non les autres. Les questions que nous devons donc nous demander sont: à première vue, paraît-il y avoir eu atteinte aux droits de certains députés et, s'est-il produit quelque chose qui a entravé la capacité des députés d'exercer leurs fonctions de député?

[Traduction]

Comme je l'ai dit à de nombreuses occasions, nous avons une tradition à la Chambre qui nous commande d'accepter la parole d'un député comme vraie. Si l'on s'en tient aux observations de la députée de Guelph-Wellington rapportées dans le Hill Times, on pourrait être porté à admettre qu'il semblerait que certains députés ont reçu des renseignements confidentiels qui n'étaient pas accessibles à d'autres députés. Cependant, en fonction des commentaires de la députée de Guelph-Wellington le 13 mars 1995 et du texte de sa note dont le whip en chef a cité des passages et qu'il a, plus tard, déposée sur le bureau, je dois accepter que la députée de Guelph-Wellington parlait de l'annonce faite hors de la Chambre par le président du Conseil du Trésor le 21 février, au sujet des mesures de réduction de la fonction publique fédérale et non d'une divulgation prématurée du budget.


10574

[Français]

En conséquence, je ne puis conclure que des députés aient été de quelque façon gênés dans l'exercice de leurs fonctions parlementaires. Donc, je ne juge pas qu'il y ait à première vue une question de privilège.

Je remercie tous les honorables députés de leurs interventions.

_____________________________________________


10574

AFFAIRES COURANTES

(1010)

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 18 pétitions.

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

INDUSTRIE

M. Paul Zed (Fundy-Royal, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, les troisième et quatrième rapports du Comité permanent de l'industrie, conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 15 juin 1994.

Le comité a examiné le projet de loi C-43, Loi modifiant la Loi sur l'enregistrement des lobbyistes et d'autres lois en conséquence. Le comité a convenu de faire rapport du projet de loi avec des propositions d'amendement et de produire également un rapport expliquant les amendements proposés et les raisons pour lesquelles d'autres changements possibles ont été écartés.

Je voudrais faire remarquer que le troisième rapport, qui contient des explications et des recommandations supplémentaires, est une innovation en ce qui concerne l'examen des projets de loi par les comités. Le comité estime qu'un tel rapport est nécessaire étant donné que le projet de loi C-43 lui a été renvoyé avant l'étape de la deuxième lecture, ce qui élargissait considérablement la portée de l'examen qui a été entrepris.

Les 13 amendements proposés dans le quatrième rapport permettraient, de l'avis du comité, de renforcer substantiellement un projet de loi déjà satisfaisant.

Je voudrais remercier les membres du comité pour la coopération dont ils ont fait preuve afin de faire face aux nouvelles responsabilités que supposait l'examen du projet de loi avant l'étape de la deuxième lecture. Les résultats, je crois, sont éloquents et méritent d'être examinés sérieusement par les partis des deux côtés de la Chambre.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, à titre de porte-parole de l'opposition officielle pour le dossier des lobbyistes, il me fait plaisir de prendre la parole très succinctement après le dépôt du rapport majoritaire pour mentionner au Parlement que j'ai déposé, à même le rapport majoritaire, une opinion dissidente de ce projet de loi.

Avec tout ce que nous avons entendu relativement à la gestion des affaires de l'État, je pense qu'il fallait légiférer la profession des marchands d'influence, comme on les appelle dans le milieu. Il fallait faire une loi qui rétablirait un lien de confiance entre le gouvernement et la population.

J'ai cru, avec les engagements électoraux des libéraux contractés lors de la dernière campagne électorale, que la transparence serait imposée dans les coulisses de ce Parlement par l'intermédiaire de ce projet de loi. J'ai cru également, par l'intermédiaire de la nouvelle procédure parlementaire qui devait permettre des débats de fond, en plus de revaloriser le rôle des députés, que cela me permettrait de modifier le projet de loi C-43 en conformité avec les intérêts des contribuables. J'ai été berné comme bien d'autres. C'est un échec sur la procédure, c'est un échec sur la rédaction du projet de loi C-43 et c'est pourquoi j'ai présenté une opinion dissidente qui est annexée à ce rapport, pour notifier à la population ces deux échecs qui sont vraiment notoires dans le projet de loi.

* * *

[Traduction]

LE PROJET DE LOI C-74

L'hon. Alfonso Gagliano (secrétaire d'État (Affaires parlementaires) et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 56(1) du Règlement, je propose:

Que le jeudi 16 mars 1995, à la fin des délibérations prévues à l'article 38 du Règlement, la motion d'ajournement soit réputée avoir été retirée et que la séance soit suspendue jusqu'à ce que la présidence en signale la reprise aux seules fins de la sanction royale;
Que, de retour de la sanction royale, la Chambre s'ajourne immédiatement au jour de séance suivant, et
Pourvu que, si aucune sanction royale n'est intervenue avant 9 heures le vendredi 17 mars 1995, la Chambre se réunira à la seule fin d'être ajournée de nouveau à 10 heures ce même jour.
(1015)

Le vice-président: Que tous les députés qui s'opposent à cette motion veuillent bien se lever. Il en faut 25. Comme seuls deux députés sont debout, la motion est adoptée.

(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole pour présenter une autre pétition dans la foulée des mesures prises au nom des électeurs qui désirent empêcher la libération conditionnelle de Robert Paul Thompson.


10575

Les pétitionnaires que je représente veulent rendre les rues plus sûres pour la population. Ils sont contre la pratique actuelle de laisser des criminels violents sortir de prison avant d'avoir purgé toute leur peine.

Les pétitionnaires demandent qu'on rende les rues plus sûres pour les citoyens respectueux de la loi et les familles des victimes des meurtriers reconnus.

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Monsieur le Président, j'ai un certain nombre de pétitions à présenter.

Les deux premières portent sur la Commission canadienne du blé et demandent au Parlement de laisser à cette commission le monopole de la commercialisation du blé et de l'orge destinés à l'exportation.

L'autre pétition va plus loin en demandant qu'on étende le monopole de la Commission canadienne du blé à l'ensemble des céréales et des oléagineux.

Les pétitionnaires sont des électeurs de ma circonscription, Yorkton-Melville.

LA FISCALITÉ

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): J'ai ensuite un ensemble de 38 pétitions qui viennent encore une fois d'électeurs de ma circonscription, mais aussi d'autres circonscriptions de la Saskatchewan et des environs.

Les pétitionnaires affirment que le gouvernement de la Saskatchewan est sur le point d'équilibrer son budget, ce qui permettra aux contribuables de cette province de cesser enfin de payer de grosses factures d'impôt. C'est pourquoi ils demandent au Parlement de réduire les dépenses gouvernementales plutôt que de hausser les impôts.

LE CONTRÔLE DES ARMES À FEU

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Je présente enfin un ensemble de 28 pétitions signées par des habitants des régions d'Ottawa et de Toronto, de plusieurs autres régions en Ontario ainsi qu'en Saskatchewan et au Manitoba.

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'appuyer des mesures législatives prévoyant des peines sévères pour tous les criminels violents qui utilisent des armes pour commettre un crime, d'appuyer l'ajout au Code criminel de nouvelles dispositions sur le contrôle des armes à feu qui reconnaissent et protègent le droit de citoyens respectueux de la loi de posséder des armes à feu, enfin d'appuyer des mesures qui abrogeront ou modifieront les dispositions actuelles sur le contrôle des armes à feu qui n'ont pas amélioré la sécurité du public, qui ne sont pas rentables ou qui se sont avérées trop complexes, donc inefficaces ou inapplicables.

LE SUICIDE ASSISTÉ

M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur d'intervenir à la Chambre encore une fois, en conformité du paragraphe 30(6) du Règlement, pour présenter une pétition au nom des électeurs de la circonscription de Kent. Les pétitionnaires prient le Parlement de veiller à ce que les dispositions du Code criminel du Canada interdisant le suicide assisté soient appliquées rigoureusement et à ce que la loi ne fasse l'objet d'aucune modification ayant pour effet d'approuver ou de permettre l'aide ou l'encouragement au suicide et à l'euthanasie active ou passive.

LES DROITS DES GRANDS-PARENTS

M. Jim Peterson (Willowdale, Lib.): Monsieur le Président, voici une pétition venant d'électeurs de Willowdale qui demandent au Parlement de modifier la Loi sur le divorce afin d'y inclure des dispositions semblables à l'article 611 du Code civil du Québec, établissant que dans aucun cas un père ou une mère ne peuvent sans motifs graves faire obstacle aux relations personnelles de l'enfant avec ses grands-parents, et qu'à défaut d'accord entre les parties, les modalités de ces relations sont réglées par le tribunal. Les pétitionnaires demandent aussi de modifier la Loi sur le divorce pour qu'un grand-parent ayant accès à un enfant ait le droit de demander et de recevoir des renseignements sur la santé, l'éducation et le bien-être de l'enfant.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'ai le privilège de présenter trois pétitions différentes aujourd'hui.

La première porte sur le projet de loi C-41 et vient de résidents de ma circonscription et de la Colombie-Britannique. Les pétitionnaires demandent au Parlement de rejeter le projet de loi C-41 et l'article 718.2, tel qu'il est rédigé actuellement, car ils s'opposent à l'inclusion de l'expression non définie «orientation sexuelle» dans le projet de loi. Je souscris volontiers à cette demande.

(1020)

LA FISCALITÉ

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, la prochaine pétition m'a été envoyée par des pompiers volontaires de ma circonscription. Ils demandent au Parlement d'accepter que l'exemption fiscale pour leur matériel passe de 500 $ à 1 000 $. Je suis heureux d'appuyer aussi cette idée. Le montant de cette exemption n'a pas changé depuis des années.

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, la dernière pétition que j'ai le privilège de présenter a été signée par plus de 1 000 personnes de ma circonscription qui sont indignées par le meurtre de Melanie Carpenter, un drame qui est survenu, à mon grand regret, dans ma circonscription.

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'autoriser le recours aux ordonnances de détention postpénale et d'adopter le projet de loi C-240, qui limiterait la liberté accordée aux détenus à risques élevés. Si le Parlement donnait suite à cette pétition, des personnes innocentes comme Melanie Carpenter seraient encore en vie et auraient une existence plus agréable et des individus dangereux comme son meurtrier resteraient incarcérés.

Le vice-président: Le député n'était peut-être pas là hier lorsque le Président a invité les députés à ne pas dire s'ils partageaient ou non les vues exprimées dans les pétitions qu'ils présentent.


10576

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour présenter une pétition qui fait partie d'une autre plus vaste regroupant près de 64 000 signatures. Cette pétition comprend environ 18 000 signatures de citoyens de la circonscription d'Edmonton-Sud-Ouest et des environs qui demandent au Parlement de modifier et de renforcer la Loi sur les jeunes contrevenants de manière qu'elle décourage le comportement criminel chez les jeunes.

Bien des Canadiens d'un océan à l'autre estiment que la Loi sur les jeunes contrevenants n'atteint pas les objectifs pour lesquels elle a été établie. Ces 18 000 citoyens de notre pays demandent au Parlement du Canada de renforcer la Loi sur les jeunes contrevenants.

Il me fait plaisir de présenter cette pétition à la Chambre aujourd'hui.

LA CRUAUTÉ ENVERS LES ANIMAUX

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition à la Chambre des communes. Cette pétition renferme 8 000 signatures recueillies par des représentants de l'Animal Defence League of Canada.

Les pétitionnaires notent que les personnes trouvées coupables d'avoir sciemment maltraité et blessé un animal sont actuellement passibles d'une peine d'emprisonnement maximale de six mois et de l'interdiction d'être propriétaire d'un animal pendant deux ans ou d'une amende maximale de 2 000 $ ou des deux.

Les pétitionnaires notent aussi qu'en pratique, à leur connaissance, aucune peine maximale n'a jamais été infligée pour les pires infractions et déclarent qu'ils jugent inacceptable et révoltant que la loi ne traite pas les animaux comme il se doit.

Par conséquent, ils pressent le gouvernement du Canada d'adopter des peines plus sévères pour les infractions commises contre des animaux et de mettre sur pied un programme d'éducation pour aider les juges à comprendre l'aversion de la société pour les actes cruels contre les animaux, actes qu'elle condamne.

LE PRIX DES MÉDICAMENTS

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter aujourd'hui, conformément à l'article 36 du Règlement.

La première pétition porte sur la loi C-91, la loi sur les médicaments brevetés. Les pétitionnaires viennent de ma circonscription, Regina-Lumsden, en Saskatchewan, aussi bien que des localités de Saskatoon, Borden, Hafford, Speers et Nipawin.

Les pétitionnaires déplorent l'augmentation annuelle de 12 p. 100 du prix des médicaments brevetés depuis l'entrée en vigueur de la loi. Ils demandent l'abrogation de cette loi en raison du fardeau financier qu'elle représente pour eux et les régimes d'assurance-maladie du pays. Ils demandent à la Chambre des communes de le faire.

LA LIBÉRATION CONDITIONNELLE

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, ma deuxième pétition vient d'habitants des localités suivantes de la Saskatchewan: Kelliher, Silton, Watrous, Raymore, Punnichy, Ituna, Simpson et Foam Lake, notamment.

En vertu de l'article 745 du Code criminel du Canada, des meurtriers condamnés à vie sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans peuvent demander un examen de leur cas après 15 ans. Ces pétitionnaires pressent la Chambre des communes d'abroger l'article 745 du Code criminel du Canada.

LE SÉNAT

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, ma troisième et dernière pétition de ce matin a trait au Sénat.

Les pétitionnaires sont des habitants de la circonscription de Regina-Lumsden que je représente, ainsi que de Pilot Butte, en Saskatchewan. Étant donné que les coûts de fonctionnement du Sénat s'élèvent à environ 60 millions de dollars par an et que cette institution ne sert pas à grand-chose, les pétitionnaires demandent à la Chambre d'abroger les articles 41 et 42 de la Loi constitutionnelle, ce qui aurait pour effet d'abolir le Sénat.

(1025)

LA LOI SUR LES JEUNES CONTREVENANTS

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour présenter une pétition signée par 2 700 de mes électeurs et qui s'inscrit dans une pétition plus vaste qu'a suscitée le meurtre de Barb Denelesko.

Selon les pétitionnaires, les citoyens de toutes les régions du Canada exigent que des modifications soient apportées à la Loi sur les jeunes contrevenants. Ils souhaitent une loi assez sévère pour dissuader les jeunes de commettre des crimes et assez dure pour faire en sorte que justice soit vraiment rendue. Dans sa version actuelle, la Loi sur les jeunes contrevenants ne répond pas à ces objectifs. C'est pourquoi les pétitionnaires demandent au gouvernement du Canada d'examiner la Loi sur les jeunes contrevenants de 1992 et de la modifier en conséquence.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Les questions restent-elles au Feuilleton?

Des voix: D'accord.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je pense que vous constaterez qu'il y a unanimité sur la motion suivante. Je propose:

10577

Que, nonobstant tout ordre de la Chambre, tout vote par appel nominal devant être pris aujourd'hui, au cours la période réservée aux initiatives parlementaires, soit reporté au mardi 21 mars, à 17 h 30.
Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

_____________________________________________


10577

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'ÉGALITÉ ÉCONOMIQUE DES FEMMES

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) propose:

Que la Chambre condamne le gouvernement pour son insensibilité et son inaction face à l'adoption de mesures concrètes visant à favoriser l'égalité économique des femmes, dans les domaines de compétence fédérale.
-Monsieur le Président, la motion que j'ai aujourd'hui l'honneur de déposer se situe dans le prolongement de la Journée internationale des femmes.

Elle possède, à mon avis, un caractère d'urgence suscité par les actions actuelles du gouvernement. Ce texte se lit comme suit: «Que cette Chambre condamne le gouvernement pour son insensibilité et son inaction face à l'adoption de mesures concrètes visant à favoriser l'égalité économique des femmes, dans les domaines de compétence fédérale.»

J'aurais préféré ne pas avoir à déposer un tel texte devant cette Chambre, mais il a pour objectif de faire prendre conscience à mes collègues et à la population canadienne et québécoise que les belles paroles qu'on entend dans cette enceinte ne trouvent nullement écho auprès des décideurs politiques libéraux.

Il y a un an, je déposais une première motion dont le texte énonçait, dans un premier temps, l'importance de reconnaître le principe de l'égalité économique entre les femmes et les hommes et, deuxièmement, de mettre en place les mesures visant à assurer aux femmes l'équité dans l'emploi, les salaires et les conditions de vie. Fait inhabituel et remarquable, les membres du gouvernement ont voté en faveur de la motion de l'opposition officielle.

Force m'est de constater qu'ils s'étaient arrêtés au premier volet de la motion, sans jamais passer au deuxième. Comment expliquer autrement la situation actuelle avec les mêmes acteurs en place? Comment expliquer les récentes décisions de ce soi-disant gouvernement préoccupé par l'inégalité économique des femmes?

Comment expliquer, par exemple, qu'on maintienne les coupures décrétées par le précédent gouvernement dans les subventions aux organismes qui luttent pour la défense des droits des femmes, alors que le ministre des Finances, tentant de nous rassurer à ce sujet, déclarait juste avant le dernier budget: «Nous en sommes parfaitement conscients. On l'a démontré, dans le dernier Budget et nous avons l'intention de le démontrer dans le prochain.»

Je rappelle que le ministre parlait alors de l'importance du rôle joué par les organismes quant à la promotion des droits et l'amélioration des conditions de vie des femmes.

Comment expliquer la disparition de l'initiative de lutte à la violence familiale, qui prendra fin dans deux semaines, et dont les fonds servaient, entre autres, au financement de projets pilotes, à la recherche, à la sensibilisation et à l'éducation du public?

(1030)

Pourtant, la secrétaire d'État déclarait, le 3 mars dernier: «La violence faite aux femmes, le harcèlement sexuel, l'inégalité des chances d'emploi, les clivages salariaux, la discrimination sexuelle sont tous des problèmes auxquels il faut faire face et je me réjouis que notre gouvernement continue à aller de l'avant sur tous ces fronts.»

Tout le monde sait qu'on ne va malheureusement pas loin sans fonds. Comment expliquer l'orientation prise par le gouvernement et qui tend à relier la compensation financière due à une femme et le revenu de son conjoint? Ces deux tendances sont évidentes dans le projet de réforme de l'assurance-chômage et dans le projet de réforme des pensions de vieillesse. Pourtant, le ministre du Développement des ressources humaines déclarait, en octobre dernier: «Nous soumettons des propositions majeures concernant tout le problème du travail familial et la façon d'offrir aux personnes embauchées à temps partiel, qui sont en majorité des femmes, une certaine protection au titre de l'assurance-chômage et d'autres programmes de sécurité du revenu.»

Depuis quand l'égalité économique des femmes s'acquiert-elle via la dépendance face à un conjoint? Les femmes n'acceptent pas cette orientation, et avec raison. Comment expliquer l'absence totale de références aux services de garde à l'enfance dans le dernier Budget, alors que le même ministre déclarait à la même date: «Il est question, dans le Livre vert, de programmes importants de garde d'enfants et d'une stratégie nationale dont le financement irait chercher dans les 700 millions de dollars.» Où sont les budgets nécessaires à la création de nouvelles places en garderie? Où sont les transferts réclamés par le Québec pour développer son propre réseau? Comment expliquer le manque d'intérêt à finalement régler l'épineuse question de l'équité salariale dans la fonction publique, alors que ce dossier traîne devant les tribunaux depuis plusieurs années, privant des milliers de femmes des sommes qui leur sont dues?

Pourtant, le président du Conseil du Trésor affirmait, en juin dernier: «Nous sommes un employeur soucieux de l'équité salariale. Nous voulons résoudre ce problème aussi rapidement que possible, afin de pouvoir écourter ce très long processus judiciaire que le gouvernement précédent a mis en place.» Que de belles paroles! Comment expliquer l'infâme transfert perpétré par le ministre des Finances sur le dos des provinces, et qui aura comme conséquence inévitable soit la diminution des services de


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santé et d'éducation, des prestations d'aide sociale, soit une hausse d'impôt?

Pourtant, le ministre des Finances déclarait, le 8 février dernier: «Nous avons pleinement connaissance de la nécessité de traiter des besoins des femmes de façon tout à fait équitable.» Le ministre croit-il sincèrement que l'équité envers les femmes réside dans une diminution de leurs conditions de vie? Comment expliquer enfin la toute dernière trouvaille de la secrétaire d'État à la Condition féminine: l'abolition du Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme?

Cet organisme avait comme fonction principale la recherche et la diffusion d'information sur les problématiques touchant les femmes. Il jouait aussi le rôle de chien de garde du gouvernement, en analysant l'impact économique des actions et décisions gouvernementales sur les femmes. Pourtant, dans le même discours où elle annonçait l'abolition de l'organisme, la secrétaire d'État reprenait les propos du premier ministre: «Pour sa part, le gouvernement canadien relève le défi. L'égalité des femmes n'est pas du domaine des intérêts ou des droits spéciaux. C'est une question de justice sociale et économique. C'est une question de bon gouvernement.»

L'abolition du CCCSF n'est pas un geste de bon gouvernement qui aidera les femmes à relever le défi de l'égalité économique, bien au contraire. La situation économique des femmes ne s'améliore pas. Elles sont les premières victimes des coupures massives au sein de la fonction publique fédérale. Quarante-cinq mille emplois; on sait que ce sont les femmes qui vont écoper. Elles gagnent toujours seulement 72 p. 100 du salaire de leurs collègues masculins. En 1920, elles gagnaient 50 p. 100 du salaire de leur conjoint. Elles sont encore majoritairement les chefs de familles monoparentales, pauvres, mal logées, victimes de violence familiale. Les femmes attendent les mesures qui leur permettront enfin d'atteindre l'égalité économique à laquelle elles ont droit.

J'aimerais rappeler que l'an dernier, le 8 mars plus précisément, la secrétaire d'État déclarait: «Pour la première fois, nous avons un gouvernement qui se montre sensible aux répercussions différentes qu'ont les programmes et les politiques sur les femmes. C'est un gouvernement disposé à tenir compte de la question des sexes dans tous les changements proposés, qu'ils soient d'ordre financier, social, juridique.» À la lumière des décisions et des gestes posés, il apparaît au contraire évident que ce gouvernement est insensible à l'inégalité dont sont encore victimes les femmes canadiennes et québécoises. Il est de plus évident que ce gouvernement n'a aucune intention d'agir et de prendre les correctifs nécessaires.

(1035)

Il est évident que ce gouvernement mérite amplement les reproches vigoureux que lui adressent aujourd'hui les députés de l'opposition, au nom des Canadiens et des Québécois, des Canadiennes et des Québécoises. Il y a urgence d'agir et non de prononcer de belles paroles. «En route vers l'égalité» n'est-il pas le slogan adopté par le gouvernement canadien pour promouvoir le Sommet mondial sur les femmes qui aura lieu à Beijing, en septembre 1995? Je crois que ce gouvernement est bien mal parti. Il va plutôt aller se vanter de ce qu'il ne fait pas sur son propre terrain.

Le vice-président: Y a-t-il des questions ou des commentaires? Personne. Ai-je bien entendu que vous allez partager votre temps de parole? D'accord.

J'accorde la parole à l'honorable députée de Saint-Hubert.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, chaque fois qu'on parle de la situation de la femme, on sait très bien qu'on perd une grande partie de notre auditoire. Ce n'est pas parce que nous avons consacré trop de journées en cette Chambre à ce sujet, c'est tout simplement parce que beaucoup ne veulent pas entendre ce que l'on a à dire et surtout beaucoup ne veulent pas agir.

Je vais tout de même vous parler aujourd'hui de la situation de la femme, spécialement du vécu des femmes dans les professions juridiques. Au Québec, cela veut dire avocate ou notaire.

Je vais spécialement vous parler des avocates puisque chez les notaires, malheureusement, nous n'avons pas encore de comité créé spécialement pour savoir ce qui se passait chez les femmes notaires dans leur vécu, dans leur pratique quotidienne. Cependant, toutes ces statistiques du vécu des avocates nous ont été fournies par le Barreau du Québec.

Le vécu des femmes dans les professions juridiques est pareil à la situation qui prévaut dans les sphères d'activité où la femme est appelée à exercer un travail; évidemment, par travail, j'entends un travail à l'extérieur du domicile.

Si les femmes sont allées à l'extérieur et s'il y a eu une si grande ascension des femmes sur le marché du travail, on sait que ce fut causé en grande partie par des facteurs économiques et sociaux. De là la nécessité pour la femme de contribuer au revenu familial. Cela fut un des facteurs les plus déterminants.

En 1951, moins du quart de toutes les femmes au Canada faisaient partie de la population active. En 1991, 58 p. 100 de toutes les femmes adultes étaient sur le marché du travail. De loin l'augmentation la plus importante des taux de participation au marché du travail est survenue chez les mères de jeunes enfants, dont la majorité ont un emploi à plein temps.

Les femmes qui se dirigent, par nécessité ou par choix, vers la profession juridique sont confrontées à de nombreuses difficultés intrinsèques au domaine. Les rapports tordus souvent avec leurs confrères masculins, la sous-représentation à la magistrature et le nombre restreint de professeures dans nos facultés de droit ne sont que quelques-uns des symptômes d'une grave maladie qui perdure dans un monde prétendument à l'affût des injustices et des iniquités.

Les femmes font dorénavant partie de la population active, mais les juristes féminins forment une classe à part. Vis-à-vis de la population, nous avons l'air de privilégiées. Pourtant, pour devenir un disciple de Thémis, la femme doit faire face à un lot de difficultés qui sont non pas liées à son statut de juriste, mais à son statut de femme.

Le Comité du Barreau du Québec sur les femmes dans la profession, le comité dont je vous parlais tout à l'heure, s'est penché sérieusement sur les questions touchant les avocates. Malheureusement, la Chambre des notaires n'a pas le pendant. Donc, un sondage a été affectué au sein des avocates, dont les résultats ont été rendus publics en 1992. Ce sondage est très


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révélateur. Il illustre de façon claire les difficultés rencontrées comme femme et non seulement comme juriste.

Le sondage permet de conclure que la majorité, c'est-à-dire 71 p. 100 des avocates ont vécu, comme femme, des difficultés dans l'exercice de leur profession durant les cinq années précédant le sondage. Il est important de souligner que, pour la majorité des femmes, leur situation n'a pas changé pendant cette période, qu'il s'agisse de politiques d'embauche, de rapports avec les collègues masculins, avec les juges, avec la clientèle, des conditions parentales, des conditions de travail en général et de la progression de leur carrière. Somme toute, c'est la stagnation.

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La femme juriste pratique le droit des hommes. Nos lois et notre jurisprudence se conjugent au masculin. Lynn Smith, la doyenne de la faculté de droit de l'université de Colombie-Britannique a énoncé le problème avec clarté dans un article intitulé A system that's changing. Je me permets d'en citer un passage éloquent: «Les racines du système juridique actuel ont été implantées par les hommes. Élaborés à une époque où les femmes ne pouvaient ni voter, ni être élues, ni être avocates ou faire partie d'un jury, le droit visait à la protection des intérêts jugés importants par les hommes et à la conformité avec les réalités de leur vie en tant qu'hommes. Dans la mesure où le droit aurait pris les femmes en considération, les lois n'ont été adoptées que sous une perspective entièrement masculine.»

L'exemple le plus criant d'iniquité se trouve au sein de la magistrature à travers le pays. Les juges nommés par le fédéral, soit dans les cours supérieures des provinces, soit à la cour fédérale sont par une écrasante majorité des hommes. Au total, sur 950 juges fédéraux, 134 seulement sont des femmes.

Les juges, par l'interprétation qu'ils font des lois et le pouvoir moral qu'ils exercent, contribuent à façonner et à développer les valeurs fondamentales sur lesquelles se fonde la société. La magistrature se caractérise par une sous-représentation chronique des femmes. C'est-à-dire que 53 ans après leur accession à la pratique du droit, les femmes n'ont pas encore franchi le cap des 10 p. 100 au sein de l'ensemble de la magistrature québécoise regroupant les juridictions de la Cour d'appel du Québec, la Cour supérieure, la Cour du Québec et les cours municipales.

À la Cour supérieure du Québec, où les juges sont nommés par le ministre fédéral de la Justice, les femmes comptent pour 11,3 p. 100 de la magistrature en date du 1er mars 1995, soit 20 juges féminins sur 176.

La situation à travers le pays n'est guère plus reluisante. La Cour suprême du Canada ne compte que Mmes McLachlin et L'Heureux-Dubé sur un banc de neuf juges. Elles représentent 22,2 p. 100 des juges, alors que les femmes représentent 52 p. 100 de la population.

Au 1er mars 1995, la Cour fédérale et la Cour canadienne de l'impôt ne comptaient, en tout et pour tout, que 8 juges féminins sur 60, soit 10,3 p. 100 de la magistrature. Je pourrais continuer à élaborer comme cela pendant longtemps sur les statistiques déplorables de la magistrature canadienne, mais j'aurais l'impression de prêcher dans le désert.

Il n'en tient qu'au ministre de la Justice de nommer plus de femmes à la magistrature fédérale. Il se doit de réformer les pratiques de sélection douteuses où les candidates potentielles se doivent d'avoir un nombre impressionnant d'années de pratique en litige, quand on sait que la plupart de femmes ne peuvent envisager ce genre de pratique à cause de leurs obligations de mère. Cette exigence n'existe pas pour les nominations provinciales. L'on s'imagine difficilement une mère de famille en procès pendant trois semaines intenses. Pourtant, il est acceptable que le père puisse faire du litige et se consacre entièrement à sa pratique.

Le régime de travail des hommes varie peu malgré la présence et l'âge des enfants. Cependant, ce facteur influe sur l'horaire de travail des mères, surtout chez celles qui ont des enfants d'âge préscolaire. Peu importe leur profession, les mères de jeunes enfants sont les plus susceptibles de modifier leur horaire de travail.

Par exemple, 95 p. 100 des femmes qui occupent un poste professionnel, incluant les femmes dans notre système juridique, travaillent à plein temps, comparativement à 68 p. 100 des femmes ayant des enfants d'âge préscolaire et ayant un emploi semblable. Près du tiers des femmes qui ont des enfants d'âge préscolaire et un horaire de travail irrégulier ont indiqué qu'elles avaient choisi cet horaire de travail principalement pour s'occuper de leurs enfants.

Le processus de sélection occulte qui ne nous laisse pas savoir comment une candidate peut être choisie devrait être aboli. La transparence n'est pas un luxe, mais une nécessité.

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Si le processus était plus limpide, le ministre de la Justice ne pourrait plus se réfugier derrière des prétextes flous concernant le manque de candidats qualifiés. Si les exigences sont les mêmes pour les hommes que pour les femmes, l'on crée automatiquement des iniquités puisque l'exercice de la profession chez les femmes diffère en général de celui des hommes.

En traitant les deux sexes de la même façon, on crée des inégalités. Cette faible représentation des femmes parmi les juges est bien en-dessous de leur disponibilité, puisqu'elles forment actuellement au Québec près du cinquième des membres du Barreau admissibles à la magistrature, c'est-à-dire celles et ceux qui pratiquent le droit depuis au moins dix ans. En outre, l'arrivée plus sentie des femmes dans la profession juridique depuis le début des années 1980 annonce une augmentation rapide au cours des prochaines années du nombre de femmes admissibles à une nomination.

Je pose la question au ministre de la Justice: Verrons-nous augmenter la présence des femmes dans la magistrature dans la même proportion que parmi les membres les plus expérimentés du Barreau? Cela reste à voir.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, notre collègue de Saint-Hubert touche du doigt un problème épineux, et surtout un problème véridique.

Effectivement, au Québec, comme partout au Canada, on sent nettement une sous-représentation des femmes dans la magistrature. Je me rappelle très bien de la campagne électorale en 1984, où nos leaders des quatre partis fédéraux proposaient l'égalité des sexes. À la toute fin de leur mandat, lorsqu'on regarde les


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années qu'ils ont passées sur les banquettes du pouvoir, on constate que rien, ou presque rien ne s'est accompli.

Ma collègue de Saint-Hubert a posé une question au ministre de la Justice qui, évidemment, va s'abstenir de répondre. Moi, je demanderais à ma collègue de Saint-Hubert si, selon elle, il y a un vouloir du gouvernement fédéral d'arriver à une échéance raisonnable, à une équité dans les nominations aux postes de juge?

Mme Venne: Monsieur le Président, la réponse à mon collègue est simple, c'est non. Malheureusement, on n'a pas senti cela depuis que le nouveau gouvernement est en place, depuis que le gouvernement libéral est en place, soit depuis 1993, on n'a pas senti ce désir de nommer plus de femmes à la magistrature. On n'a d'ailleurs qu'à regarder les nominations qui ont été faites.

À ce sujet, je voudrais ajouter qu'on nous dit souvent que si les femmes ne sont pas là, si elles ne se présentent pas dans le système, c'est parce qu'elles ne veulent pas être élues députées, elles ne veulent pas participer aux conventions, aux mises en candidature.

Là-dessus, je répliquerai immédiatement que ce n'est pas que les femmes ne veulent pas participer, c'est tout simplement que les femmes ne veulent pas souvent entrer dans ce système qui a été établi par des hommes et pour des hommes. Les femmes ne sont pas habituées à se côtoyer, pour utiliser un euphémisme, et beaucoup plus à lutter entre elles pour obtenir un poste. Elles sont habituées à le faire par leurs compétences, tout simplement.

Quand il s'agit d'arriver dans une convention ou dans une assemblée de mise en candidature et qu'elles voient tout le monde se chamailler sur le parquet, elles sont complètement démunies. C'est pourquoi, souvent, on ne trouve pas les femmes en politique.

Je voulais ajouter simplement cet élément pour dire que c'est souvent pour cela qu'on n'a pas plus de femmes ici en Chambre, malheureusement.

[Traduction]

L'hon. Ethel Blondin-Andrew (secrétaire d'État (Formation et Jeunesse), Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier les députés de l'opposition d'avoir proposé ce débat. J'interviens aujourd'hui pour exprimer ma grande fierté à l'égard du bilan du gouvernement sur le chapitre de la promotion de la justice sociale et de l'égalité économique des femmes au Canada.

Je suis ravie de l'intérêt que manifeste ma collègue de l'opposition pour les questions d'égalité économique des femmes. En effet, à quoi le Canada pourrait-il attacher plus d'importance qu'au bien-être de plus de la moitié de sa population, soit 52 p. 100 je crois? Ce n'est que lorsque les femmes et nos familles prospéreront qu'on pourra parler de renouveau au Canada.

(1050)

Je suis heureuse de cette occasion qui m'est donnée de montrer à mes collègues qu'on peut compter sur le gouvernement fédéral pour tenir ses promesses. Comme nous nous y étions engagés, nous transformons notre pays pour le rendre plus fort sur le plan économique et plus équitable sur le plan social, ainsi que fier de la riche diversité de ses habitants.

Notre plan d'action pour le Canada établi dans notre livre Pour la création d'emplois-Pour la relance économique est solidement basé sur le principe qui préconise que gouverner, c'est répondre aux besoins des gens. La motion dont la Chambre est saisie soulève une question importante concernant le bilan du gouvernement sur les questions qui touchent la situation économique des femmes. Pour répondre brièvement, on peut dire que notre gouvernement fait beaucoup. Il a pris des engagements au cours de la dernière campagne électorale et il les respecte.

Dans les quelques minutes dont je dispose aujourd'hui, je voudrais parler des mesures que nous prenons dans le domaine important des programmes d'emploi. Je tiens à m'arrêter brièvement sur notre bilan en matière d'assurance-chômage et je veux vous parler également de garde d'enfants. Pour terminer, je formulerai quelques observations sur les modifications que le gouvernement propose d'apporter à la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Ce document a pour objectif de donner non seulement aux femmes, mais également aux handicapés, aux autochtones et aux minorités visibles, le pouvoir d'être maîtres de leur destin.

Tout d'abord, permettez-moi de placer cette question dans son contexte. C'est devenu un truisme que de dire que le meilleur programme social est un emploi. C'est là le point de vue que défendent des gens de droite autant que de gauche. Ainsi, plus de 400 000 personnes peuvent affirmer qu'elles ont participé au plus important programme social de tous, depuis l'arrivée au pouvoir de notre gouvernement, en octobre 1993. Tout porte à croire que cette situation va se poursuivre avec vigueur et qu'il s'agit surtout de bons emplois, d'emplois à temps plein. Les femmes réclament leur pleine part de cette croissance.

Je voudrais tout d'abord vous donner mon opinion personnelle sur ce que c'est que d'être une femme en général et ce que c'est que d'être une femme dans des milieux traditionnellement réservés aux hommes. Avant d'arriver à la politique, j'ai travaillé dans la fonction publique pendant de nombreuses années. Je n'ai jamais eu de problème à travailler avec des hommes, parce que c'étaient les personnes que j'étais le plus susceptible de côtoyer aux postes de haute direction que j'occupais. Cela m'a permis de bâtir des relations humaines qui ont engendré une certaine dynamique, de la collaboration et aussi une attitude positive face au travail d'équipe.

Cependant, les femmes sont les personnes qui ont exercé le plus d'influence sur moi, en tant que femme. Ma grand-mère était médecin. Elle était oratrice. C'était le pilier de la famille. C'était elle le chef, dans ma famille. Il y a beaucoup d'hommes forts dans ma famille, et c'est ce qui a amené les femmes de ma famille à être si fortes. Ces femmes cherchent toujours à accomplir de grandes choses, peu importe les situations qui se présentent.

L'autre femme qui a exercé le plus d'influence sur moi a été ma mère, ma belle-mère, qui m'a adoptée quand j'avais trois mois. Elle a su m'enseigner les bonnes choses. Les femmes ont toujours eu à se battre pour obtenir quoi que ce soit. Elles ont dû se battre âprement pour acquérir les pouvoirs qu'elles ont aujourd'hui. Les femmes sont vraiment à la base de leur succès.


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Les femmes représentent 52 p. 100 de la population et si jamais elles décident de se servir de cette force, de cet instrument de pouvoir, les gens verront vraiment tout ce dont elles sont capables.

J'ai voyagé partout dans le monde. J'ai vu comment fonctionnaient d'autres sociétés, d'autres groupes dans différents pays. Cela rejoint, en quelque sorte, ce que nous préconisons ici, au Canada. Notre parti prône l'idée de l'égalité des chances, une idée à laquelle je crois sincèrement. C'est très intéressant, quand on pense aux déclarations qu'ont faites, entre autres, des personnes comme Eleanor Roosevelt, femme d'un ancien président des États-Unis, qui a dit qu'aucune femme n'avait à se sentir inférieure, à moins de le vouloir. C'est ce que je ressens en tant que femme.

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J'estime que les femmes possèdent certains talents naturels, ce qui ne nous rend pas meilleures que les hommes, mais seulement aussi bonnes que nous pouvons l'être. Cela nous donne la capacité d'éduquer, de coopérer, d'avoir une certaine vision et de partager. Nous ne nous réservons pas ce pouvoir, nous le partageons. L'utilisation positive d'un pouvoir est une dynamique que les femmes apportent à la politique, aux affaires et au développement social. C'est un style différent. Il n'est pas meilleur. Il ne crée pas d'injustices. Il donne aux femmes des chances énormes de s'épanouir.

Songez à l'époque où les femmes au Canada ont obtenu le droit de vote, personne ne nous l'a donné. Nous n'aurions pas été des personnes à part entière si les femmes ne s'étaient pas battues. Ce sont les femmes qui ont lutté pour obtenir ce droit, pour obtenir cette reconnaissance. Nous avons mené de dures batailles. Il ne s'agit pas de batailles entre les sexes. Il s'agit de batailles pour la dignité humaine, de batailles pour que l'individu occupe dans la société une place où les droits humains et la dignité de la personne sont vraiment respectés. Le droit de travailler, le droit d'élever des enfants dans un environnement sain et propre, le droit de garder la tête haute sans un sentiment de honte ou de disgrâce, même s'il y a des problèmes, ce pays nous les garantit. C'est pour ce type de démocratie que des gens se battent, voire meurent dans certains pays.

Je viens d'une famille où les femmes jouent un rôle très important. Les hommes jouent aussi un rôle important dans leur propre domaine, mais aujourd'hui je parle des femmes. Je ne dis pas cela parce que cette journée nous est consacrée. En fait, tous les hommes ici pourraient avoir l'honneur d'être des membres honoraires de la société des femmes s'ils le voulaient.

La question du pouvoir économique est une dynamique différente. Beaucoup diraient que les affaires relèvent du monde des hommes. Les choses sont en train de changer. Nous ne sommes plus une société où les ménages ont un seul revenu. Aujourd'hui, les ménages ont deux revenus. Les gens travaillent, forment des partenariats et partagent. Les enfants dont on doit s'occuper et les forces de la concurrence ont une incidence sur la famille, la collectivité, les régions et le pays en général. Les femmes apportent une contribution importante à la société. Non seulement elles voient la nécessité de participer de façon positive à la société mais les hommes aussi reconnaissent les contributions des femmes. C'est nécessaire, absolument nécessaire.

Les femmes représentent 52 p. 100 de la population. J'étais à Copenhague. Pour moi, le pouvoir c'est aller de l'avant, avoir cette expérience humaine, comprendre les différences, apprendre à faire preuve de tolérance, apprendre à accepter les différences linguistiques, culturelles, sociales et économiques. Nous faisons tous partie du genre humain.

Le fait de rencontrer d'autres femmes m'a donné plus de force. J'ai eu la chance d'entendre des dirigeants, femmes et hommes, du monde entier. À l'occasion de la Journée internationale de la femme, on a beaucoup parlé du fait que, même si les femmes représentent 52 p. 100 de la population, elles constituent 70 p. 100 des pauvres du monde. Si 70 p. 100 des pauvres sont des femmes, il y a nécessairement aussi des enfants dans cette catégorie. Il y a plus de femmes que d'hommes qui sont chefs de ménage ou de famille.

Nous savons l'importance de donner plus de pouvoir aux femmes. Par exemple, quand le gouvernement comble des postes au sein des conseils et des commissions, il prend toujours garde d'équilibrer le nombre des femmes et des hommes qu'il nomme. C'est la même chose pour les membres du Cabinet, les membres du caucus et même pour les députés. Il existe un certain équilibre, et le premier ministre et le Cabinet sont absolument déterminés à le maintenir.

(1100)

Nous pouvons faire davantage, en nommant plus de femmes aux conseils les plus étroitement liés à l'économie et dans les institutions financières. Il y a des femmes qui ont les compétences nécessaires, qui ont de nombreuses années d'expérience. Je les ai rencontrées, comme d'autres députés l'ont fait. Ce sont des femmes qui ont beaucoup d'expérience et qui ont fait autant d'études qu'un homme peut en avoir fait. Elles ont non pas un diplôme, mais deux ou parfois trois. Il y en a qui ne sont pas seulement bilingues, mais polyglottes.

Ce sont des femmes qui ont toute une palette d'intérêts et de multiples talents qu'elles peuvent mettre à profit, non pas seulement au sein de leur famille, mais aussi dans leur milieu et dans tout le Canada. Il y a certainement quelque chose à faire pour que les femmes arrivent en haut de l'échelle en tant que partenaires des hommes. Ce n'est pas l'un ou l'autre. C'est toujours mieux lorsqu'ils travaillent en collaboration.

Comme je le disais plus tôt, le droit d'être reconnues comme des personnes ne nous pas été conféré par un groupe spécial d'hommes qui se sont dit: «Il est temps que nous en fassions des personnes.» Ce n'est pas comme ça que ça s'est passé. Ce sont les femmes qui ont mené le combat. Ce sont les femmes qui ont obtenu ce droit.

Chaque année, la journée commémorant l'affaire «Personne» est l'occasion d'émotions fortes lorsqu'on célèbre les réalisations de femmes remarquables qui, par leur exemple, contribuent non seulement à leur développement personnel, mais aussi à celui de leur collectivité, de leur pays et peut-être même, en quelque sorte, du monde.

Le droit de vote n'a pas été accordé aux femmes parce que quelqu'un en avait décidé ainsi. Il a été arraché à la force du poignet par des femmes qui y tenaient et qui se sont battues pour l'obtenir.


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Lorsqu'on voyage à travers le monde, on s'aperçoit que les droits démocratiques sont parmi les instruments les plus puissants. L'Afrique du Sud en est un exemple frappant. Le droit de vote, le droit d'assemblée, le droit de parole, le droit de mobilité sont des outils dont les femmes doivent se servir pour s'affirmer. Ils forment la base de l'autonomie économique des femmes, et à ce titre sont véritablement puissants.

À l'heure actuelle, le gouvernement est conscient du fait que la croissance économique en soi ne suffit pas. Les femmes continuent à être parquées dans des métiers traditionnellement féminins tels que l'enseignement, les soins infirmiers, le travail de bureau, les ventes et les services.

Il y a deux mois, j'ai eu le grand plaisir d'aller à Montréal dans une classe où on enseignait les maths et les sciences à un groupe de petites filles. En les regardant, je me suis dit: «Mon Dieu, j'aimerais les voir dans 20 ans, quand elles seront au secondaire ou à l'université.» J'ai dit à l'une d'elles: «Il y a un siège pour toi à la Chambre des communes.»

Une voix: Que le monde prenne garde!

Mme Blondin-Andrew: Que le monde prenne garde, en effet. Ces jeunes filles seront un facteur considérable, non seulement parce qu'elles assureront la promotion de toutes les femmes, mais aussi celle de l'ensemble du pays. Si nous utilisons ces 52 p. 100 des ressources à leur maximum, nous pouvons aider à réduire un grand nombre de problèmes sociaux. Nous pouvons aider à réduire un grand nombre des problèmes économiques des collectivités.

Dans ce pays, nous sommes très bons pour construire des infrastructures. Si nous avons besoin d'une route, nous la construisons. Si nous avons besoin d'un hôpital, nous le construisons. Si nous avons besoin d'une banque, nous la construisons. Si nous avons besoin d'un aéroport, nous le construisons. Mais il y a une chose qui est critique et qui ne s'est pas produite sous les gouvernements successifs, à quelque niveau que ce soit, et c'est la construction d'une base humaine solide, une infrastructure humaine solide, qui soit à la fois spirituelle, sociale, culturelle et linguistique et qui ferait que nos enfants restent à l'école au lieu de décrocher.

Toutefois, ce n'est pas toujours le résultat, car en vertu de cette voie de construction d'infrastructures que nous avons choisie, l'individu se sent impuissant. Je ne dis pas que nous ne devrions pas avoir d'infrastructures. Ce que je dis c'est que si nous en avons, elles doivent être à notre service. Elles doivent nous donner les résultats que nous attendons.

(1105)

Nous devrions produire. Nous avons des patinoires et des pistes de curling. Nous avons aussi d'autres genres d'institutions et d'infrastructures. Elles devraient produire de meilleurs athlètes. Elles devraient produire des enfants qui soient capables de se fixer des objectifs et de les atteindre, avec l'aide de leurs familles et de leurs instructeurs.

D'une façon ou d'une autre nous devons revenir aux éléments fondamentaux, lesquels consisteraient à construire des choses qui soient au service de la population, non seulement des femmes, mais de toute la population de ce pays. Si seulement nous en revenions aux éléments fondamentaux. Il faut se rendre compte que donner véritablement le pouvoir ce n'est pas le donner à un individu. Le vrai pouvoir est celui qui réside dans les familles, dans les enfants, dans nos collectivités et dans notre pays.

Un pays, ce n'est pas l'affaire d'une personne, mais bien d'une collectivité, de tous ses habitants, y compris ceux qui viennent d'ailleurs, de tous ceux qui sont toujours convaincus que le Canada est le meilleur endroit où vivre. Je le crois fermement.

Je ne cherche pas à faire l'autruche et à nier les problèmes. Bien sûr, nous éprouvons des problèmes, mais au moins nous avons le droit démocratique et l'égalité des chances pour pouvoir nous y attaquer et nous préparer de meilleurs lendemains, à nous et nos enfants.

Si le gouvernement se contentait de se fier au marché, comme certains députés le préconisent, la situation des femmes sur le marché du travail n'évoluerait guère. Notre gouvernement est convaincu de pouvoir faire davantage. Il reconnaît qu'il faut constamment aider les femmes à s'engager dans les nouveaux secteurs de croissance et que ses programmes et ses services peuvent les aider à atteindre cet objectif. C'est important en ce qui concerne les programmes d'emploi du gouvernement.

Les députés connaissent les nombreux programmes et services du ministère canadien du Développement des ressources humaines. La plupart d'entre nous avons certainement des centres d'Emploi Canada dans nos circonscriptions. Dans ces bureaux, on déploie des efforts véritables pour rejoindre les femmes, faciliter leur accès aux programmes et aux services, détruire les stéréotypes et abattre les barrières qui nuisent à la pleine participation des femmes.

Au cours du dernier exercice complet, 1993-1994, plus d'un quart de million de Canadiennes, soit 262 392, ont bénéficié des divers programmes et services de DRHC. C'était 28 555 participantes de plus qu'au cours de l'exercice précédent. C'est très important.

J'ai ici beaucoup de données techniques que je n'ai pas communiquées à la Chambre. Je voudrais toutefois que tous les députés sachent que la collaboration est indispensable. Il faut établir de vrais partenariats. Il faut compter sur une véritable dignité et le respect pour conférer un pouvoir réel à un individu, une collectivité, une famille, un pays. On peut y parvenir en reconnaissant et en respectant le pouvoir toujours plus grand des femmes.

[Français]

Mme Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma collègue, de l'autre côté de la Chambre a fait des commentaires intéressants. Elle a soulevé des questions concernant la condition féminine qui suscitent, en tout cas, un questionnement. Ce que je reproche à ma collègue, c'est le peu d'actions concrètes de son gouvernement.

À l'instar de ses collègues, députés et ministres, on fait état de situations, mais on n'en arrive pas à nous soumettre des actions concrètes, tels que les réseaux de garderies, les coupures aux organismes communautaires et organismes qui accordent de l'aide aux femmes, et sur, par exemple, le revenu familial pour les prestations d'assurance-chômage. Qu'est-ce que le gouvernement entend faire pour aider les femmes?

On fait des constats, on dit qu'on est conscients de la situation de la violence faite aux femmes, mais où s'en va le budget en ce qui a trait à la violence faite aux femmes? Dans deux semaines, il n'y aura plus de budget, et on sait très bien que le gouvernement n'a pas annoncé ses intentions. Pas plus tard qu'hier, ma collè-


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gue, la secrétaire d'État, annonçait en catimini, sans tambour ni trompette, sans consultation des groupes de femmes, de façon brutale et sauvage, qu'elle mettait la clé dans la porte du Conseil consultatif sur la situation de la femme. Elle disait, entre autres, que le Conseil avait été créé par un mouvement qui était dans l'enfance.

(1110)

Est-ce que ces propos nous démontrent que maintenant, le mouvement des femmes est rendu à maturité? Je ne le crois pas. Je pense qu'on a avancé, mais on n'en est pas rendu à maturité.

J'aimerais que ma collègue nous donne des indications précises. Moi aussi, je peux avoir des états d'âme sur la condition féminine. Moi aussi, j'ai eu à me faire une place pour venir siéger ici en Chambre et cela a été difficile. Très souvent, les structures sont difficiles à percer pour y arriver. Je suis d'accord là-dessus avec ma collègue d'en face, mais ce que je voudrais ce sont des faits concrets.

On sait très bien que toute l'étude du ministre Axworthy a été assez nébuleuse quant à la défense des droits et à la condition féminine. Il en va de même dans d'autres secteurs comme celui de la justice. J'aimerais qu'on me dise que le gouvernement entend faire telle ou telle chose, à telle date, à telle heure, qu'on va dépenser tant de millions. Avec les coupures que l'on vient d'effectuer, on va aller chercher 30 p. 100 au Conseil consultatif et on dit aux groupes de femmes: Maintenant vous êtes solides, vous êtes solidairement ancrées. Ce qui est dangereux, c'est que ce n'est pas vrai. Certains groupes sont peut-être solidairement ancrés, mais il y aura de la discrimination.

Comment la ministre responsable de la Condition féminine va-t-elle s'y prendre, comment va-t-elle dire qu'un groupe et non pas un autre pourra avoir une subvention? Comment cela va-t-il s'articuler? Il y a un vide et on nous laisse perplexes quant à leur volonté d'aider les femmes. Plus que jamais, en 1995, il va falloir aider les femmes parce qu'on est dans une crise économique importante, la violence augmente et il faut aider les femmes plus que jamais.

[Traduction]

Mme Blondin-Andrew: Monsieur le Président, je suis d'accord sur un point. Ils ne savent plus où ils en sont. Nous avons constaté que, lorsque l'opposition officielle aborde une question, que ce soit la condition féminine, l'emploi ou les soins aux enfants, elle ramène toujours le débat aux champs de compétence des provinces et au fait que nous devons discuter avec nos homologues provinciaux.

La députée me demande de lui donner des indications précises, de lui décrire certaines initiatives que nous avons prises. Pourtant, elle sait fort bien que nous n'avons pas eu l'occasion d'aborder avec les provinces certaines questions, comme celle des soins des enfants, qui préoccupent beaucoup le Québec.

Il n'y a pas de vide. Le gouvernement a entrepris un certain nombre d'initiatives. L'évaluation et l'examen des programmes en sont un exemple. Dans le cadre de cette étude, nous avons également analysé les programmes conçus à l'intention des femmes. Le changement n'est pas mauvais. Qu'y a-t-il de mal à apporter des changements au nom de l'efficacité et de l'efficience? C'est ce que réclame la population. Les Canadiens nous disent qu'ils ne se préoccupent pas tant de la somme d'argent à notre disposition que de l'utilisation que nous en faisons. Ils nous disent aussi que le changement n'est pas mauvais en soi. Apporter des changements au nom de l'efficacité et de l'efficience peut être utile à l'ensemble de la population, pas seulement aux femmes.

Il est vrai que nous fusionnons les programmes de condition féminine, mais nous le faisons dans le but d'éliminer le double emploi et le versement de subventions inutiles. Nous devons agir ainsi par mesure d'économie; nous voulons offrir des services à la population au lieu d'accroître la bureaucratie.

[Français]

Mme Gagnon: Monsieur le Président, il est vrai que nous demandons de l'argent, nous demandons qu'il y ait des transferts aux provinces pour que le Québec puisse enfin avoir les sommes d'argent nécessaires pour créer ses propres programmes. De là à dire que nous voulons que vous créiez les programmes, il y a une marge. Il ne faut pas non plus jouer avec les mots.

Je vais citer ma collègue, la secrétaire d'État qui disait, pas plus tard qu'hier qu'elle avait deux bonnes nouvelles. Les deux bonnes nouvelles sont de mauvaises nouvelles pour les provinces. Premièrement, il n'y a pas d'augmentation d'impôt. Qu'est-ce que cela veut dire? Ce sont les provinces qui auront à augmenter les impôts pour pouvoir remplir ce vide, afin de payer les programmes qui seront créés dans les différentes provinces.

Deuxièmement, on a éliminé les échappatoires fiscales, le Budget rend notre régime fiscal plus équitable. Quelles échappatoires fiscales? Celles des grandes entreprises, des fiducies familiales ou celles de la classe moyenne et des plus démunis? C'est la question que je pose à ma collègue.

(1115)

[Traduction]

Mme Blondin-Andrew: Monsieur le Président, je ne m'attendais nullement à ce que la députée et l'opposition avalisent et encensent le budget que nous avons présenté. Pas du tout.

Toutefois, la députée laisse entendre que, conformément à notre budget, les provinces n'ont aucune responsabilité. Je proteste. Le gouvernement de sa province s'apprête à présenter un budget qui aura des répercussions. On craint que ce budget n'apporte pas que de bonnes nouvelles.

Les temps sont durs et il faut prendre les mesures qui s'imposent pour assainir les finances publiques. Nous faisons ce que nous croyons faire de mieux, et nous laissons à d'autres le soin de faire ce que nous estimons qu'ils peuvent faire mieux que nous. Voilà comment nous menons nos affaires.

En matière fiscale, chaque ordre de gouvernement a des responsabilités à assumer. Je ne peux pas toutes les décrire, mais chaque ordre de gouvernement a manifestement les siennes. Nous avons assumé les nôtres et c'est maintenant au tour des provinces d'en faire autant.


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[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je voudrais interroger la ministre sur un autre aspect de son discours. Elle nous a dit que le Canada était le pays au monde où il faisait le mieux vivre et que tout le monde pouvait en profiter. Moi, j'ai une vision différente. C'est vrai que le Canada, globalement, dans les sociétés occidentales, se défend bien, mais il y a des groupes dans notre société qui sont plus en peine que d'autres et la responsabilité du gouvernement devrait viser à améliorer leur situation.

Je voudrais, en particulier, attirer votre attention sur les Amérindiens. Je me demande si, avec les constats au niveau du taux de suicide, du taux d'alcoolisme, des problèmes sociaux, la meilleure façon d'aider les femmes amérindiennes ne serait pas de revoir en détail la relation entre les peuples autochtones et le gouvernement fédéral et de réviser de fond en comble-ou de mettre de côté-la Loi sur les Indiens et d'établir, dans un avenir rapproché, une relation permettant de mettre fin à la façon honteuse dont le Canada a traité les peuples autochtones depuis le dernier siècle?

[Traduction]

Mme Blondin-Andrew: Monsieur le Président, je suis très étonnée d'entendre mon vis-à-vis parler des droits des peuples autochtones.

Tout le monde au Canada sait que je défends avec vigueur les droits des peuples autochtones. Je suis aussi très heureuse, comme le sont le reste du Canada et la Chambre des communes, de voir que le seul ministère dont le budget a augmenté, même si l'augmentation ne suffit pas compte tenu de l'accroissement de la demande et des besoins, est le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.

Je peux aussi dire, au nom du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, que nous nous réjouissons du vaste processus de transfert de responsabilités et de démantèlement du ministère qui est en cours. Il est clair qu'il se passe quelque chose. Par exemple, un accord a été signé avec le Manitoba. Ce n'est là qu'un exemple, mais des pouvoirs sont cédés aux autochtones par bien des canaux.

Le gouvernement possède toute une section qui s'occupe de l'autonomie administrative. D'importants accords globaux sur les revendications territoriales ont été signés avec des autochtones du Yukon, des Territoires du Nord-Ouest et du Québec. Ce sont là de vrais moyens de donner des pouvoirs aux autochtones mis en oeuvre par le gouvernement ainsi que par les gouvernements qui l'ont précédé.

Nous ne tournons pas le dos aux personnes les plus vulnérables, les plus menacées et les plus défavorisées. Nous sommes là pour nous en occuper.

Nous comprenons que nous pouvons faire les choses de façon beaucoup plus efficace et beaucoup plus efficiente. La population canadienne est d'accord et elle est prête. Je suis convaincue que le député reconnaîtra qu'en faisant cela, nous ne tournons pas le dos aux gens qui ont vraiment besoin de notre aide.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, je voudrais d'abord féliciter ma collègue de Québec d'avoir présenté ce matin, en cette Chambre, cette motion si intéressante. En relisant cette motion, il y a un passage qui m'a particulièrement plu. On y dit ici: «. . .l'inaction face à l'adoption de mesures concrètes visant à favoriser l'égalité économique des femmes, dans les domaines de compétence fédérale.»

Est-ce que la secrétaire d'État à la Formation et à la Jeunesse pourrait prendre l'engagement, en cette Chambre, ce matin, de défendre en haut lieu, dans son propre parti, que parmi les 45 000 postes qui seront coupés, d'ici les trois prochaines années, les femmes ne seront pas touchées plus dramatiquement que les hommes?

(1120)

Elle disait tout à l'heure que les femmes formaient 52 p. 100 de la société canadienne. Est-ce qu'on va se retrouver avec un taux supérieur à 52 p. 100, lorsqu'on mettra de côté les 45 000 personnes qui perdront leur emploi? Est-ce qu'on retrouvera parmi ces gens un nombre beaucoup plus élevé de femmes?

[Traduction]

L'hon. Ethel Blondin-Andrew (secrétaire d'État (Formation et Jeunesse), Lib.): Monsieur le Président, le président du Conseil du Trésor, qui est le ministre responsable, suit de très près la question des sexes dans les réductions de personnel qui auront lieu et il en tiendra compte. Je peux dire que je ne pourrais même pas tenter d'améliorer quoi que ce soit à l'excellent travail que fait ce ministre.

Je suis convaincue qu'il tient tout particulièrement compte du point de vue du gouvernement sur le rôle des femmes dans toutes les initiatives de l'État. Bien sûr, j'ai l'appui des femmes dans tous les domaines et non pas dans un seul, et c'est le cas de tous mes collègues, dont certains sont des hommes.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui pour parler de cette question. Je tiens à dire d'abord que, même si je ne suis pas totalement d'accord avec mes collègues du Bloc québécois, je crois qu'il est important que nous ayons tous l'occasion de participer à ce débat à la Chambre.

C'est grâce au débat et à la discussion que les idées se développent pour créer un climat plus propice, spécialement lorsqu'on examine l'évolution de toutes ces questions qui intéressent particulièrement les femmes à mesure que celles-ci deviennent des membres plus actifs de la société.

Je veux féliciter la secrétaire d'État chargée de la Formation et de la Jeunesse pour l'éloquence philosophique avec laquelle elle a abordé cette question. Mon approche sera quelque peu différente parce qu'on nous a demandé d'évaluer l'incidence du récent budget libéral sur l'ensemble de la société, ce qui, évidemment, comprend les femmes.


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À mon avis, on se sert depuis beaucoup trop longtemps de l'expression «questions féminines» pour promouvoir l'évaluation des questions relatives aux femmes. Cette vision étroite ne tient pas compte de la réalité économique et de l'effet ressenti non seulement par les femmes, mais aussi par les hommes, nos familles et la société canadienne en général.

Le budget libéral est un bon exemple d'une mesure qui ne fait pas de distinction en fonction de la race, de la religion, du sexe ni même de l'âge. Aujourd'hui, je vais parler de trois questions à l'égard desquelles le budget a un effet négatif en ce qui concerne les femmes. J'ai choisi d'être très précise. Je suis heureuse d'avoir pris cette décision parce que je me trouve ainsi à lancer un défi au gouvernement-pas nécessairement d'une façon négative-en l'invitant à réexaminer peut-être sa façon d'aborder beaucoup de ces questions.

Le premier point que je veux mettre en relief concerne les femmes et l'autonomie. Je parlerai par exemple d'un programme national de garderies, ce qui me permettra de dénoncer une autre promesse libérale non tenue et d'aborder ce thème selon la perspective réformiste. Le débat me donne ainsi une occasion que j'attendais depuis longtemps.

Le second point que j'aborderai tourne autour des chances offertes aux Canadiennes, et du soutien vide de substance accordé à cet égard par le budget libéral. Dans cette partie de mon intervention, je m'attacherai plus spécialement au ministère de la Condition féminine. Nous le savons, le concept de sociologie appliquée va à l'encontre du simple bon sens. Une tradition qui empêche de résoudre les problèmes des femmes avec une rapidité d'action n'a rien de solide.

J'aborderai en dernier lieu le thème de la productivité créatrice, c'est-à-dire les emplois. Ce thème a un air connu, n'est-ce pas? Les libéraux ont mis l'accent sur cet article de leur programme durant leur campagne électorale, mais ils l'ont abandonné en faveur d'un avantage plein de bon sens: le besoin de se faire aimer par un électorat de plus en plus exaspéré par une gesticulation politique qui ne fait rien d'autre qu'encourager la dépendance par le maintien du statu quo. Je parlerai donc des femmes en affaires dans cette partie de mon intervention.

(1125)

Étant donné la situation économique du Canada, le gouvernement n'a tout simplement pas les moyens de dépenser en matière de programmes sociaux. Or, le gouvernement actuel et le gouvernement précédent ont fait des promesses extravagantes aux Canadiens en s'engageant à mettre sur pied un réseau national de garderies. Pour des raisons financières, le gouvernement conservateur a abandonné sa promesse en 1992-1993, tandis que le gouvernement libéral a promis d'en établir un si l'économie redevient florissante.

En réalité, il est facile pour le gouvernement de continuer à faire des promesses qu'il ne peut pas tenir et qu'il n'a pas l'intention de tenir. Le Parti réformiste préfère ne pas faire de promesses à l'égard de politiques auxquelles il ne peut de façon réaliste espérer donner suite.

En matière de politique sociale, le Parti réformiste croit que c'est uniquement aux parents qu'il incombe de s'occuper des enfants, et que le gouvernement fédéral ne devrait pas empiéter sur cette responsabilité au moyen d'incitations économiques qui favorisent une forme de gardiennage plutôt qu'une autre, ni promouvoir les garderies subventionnées.

En préconisant un programme universel de garderies, le gouvernement libéral et le gouvernement conservateur précédent laissent tous deux entendre que la responsabilité de la garde de nos enfants incombe à l'État et non aux parents. Le Parti réformiste appuie uniquement un système qui garde l'État hors des foyers canadiens et qui conserve aux parents la liberté et la responsabilité de s'occuper de leurs enfants tout en fournissant une certaine forme d'aide uniquement aux parents et aux enfants qui en ont vraiment besoin.

Le gouvernement fédéral devrait s'occuper exclusivement des questions qui relèvent de sa compétence comme les questions budgétaires et monétaires. Les lourds impôts, le chômage et les taux d'intérêt élevés sont de loin les principales raisons pour lesquelles les Canadiens n'ont pas d'autre choix que de travailler tout en essayant d'assumer d'une manière équilibrée leurs responsabilités domestiques et le soin des enfants. Si le gouvernement équilibrait son budget, donnant ainsi aux Canadiens la marge de manoeuvre nécessaire pour équilibrer le leur, des possibilités s'offriraient non seulement aux parents canadiens, mais le nombre de mères seules et d'enfants vivant dans la pauvreté diminuerait.

Les problèmes financiers pèsent souvent lourd dans l'éclatement des familles et les divorces. En atténuant certaines de ces difficultés financières, le gouvernement renforcera indirectement la famille, c'est-à-dire le fondement économique et la ressource la plus précieuse de notre pays.

Le problème de la dette et du déficit canadiens prive le gouvernement fédéral de toute marge de manoeuvre par rapport aux recettes perdues et aux dépenses supplémentaires. Le gouvernement a les mains liées en ce qui concerne les nouveaux programmes ou les incitatifs devant permettre aux parents de choisir de rester à la maison ou d'aller travailler.

Le Parti réformiste croit qu'il faut prendre diverses mesures en attendant l'allégement à long terme du fardeau fiscal des Canadiens, et nous poursuivons nos efforts à ce chapitre, comme en témoigne le budget des contribuables que le Parti réformiste a proposé et qui prévoit une hausse du revenu dont disposent les ménages, ce qui laisse une liberté de choix pour les soins dispensés aux enfants.

Du point de vue fiscal, nous recommandons que le gouvernement supprime la déduction pour les frais de garde d'enfants, afin d'appliquer des règles uniformes pour les parents à la maison et ceux qui travaillent à l'extérieur. Le gouvernement devrait appliquer des mesures fiscales ne privilégiant pas indûment un mode de vie ou un type de famille par rapport à un autre.

Avant de faire cela, le gouvernement fédéral doit toutefois déterminer si, en vertu de ses responsabilités, il doit aller jusqu'à fournir des services de garde pour les enfants canadiens, car si l'on se fie aux dépenses qu'il engage actuellement, notamment pour le crédit d'impôt pour enfants, la déduction pour les frais de garde d'enfants, l'équivalent de l'exemption de marié(e), le crédit au titre de la TPS, les prestations de survivant du RPC, l'assurance-chômage, les prestations de maternité et parentales, l'aide sociale et les paiements de transfert aux provinces en vertu du RAPC, il joue effectivement un rôle dans le domaine des


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services de garde et, de manière directe, auprès des foyers canadiens.

Actuellement, le gouvernement n'a toutefois pas de pouvoir en ce domaine. La question des garderies relève d'abord et avant tout des provinces et des territoires. Alors que les provinces adoptent leurs lois à cet égard ainsi que la réglementation connexe concernant le nombre de gardiens par enfant, les conditions matérielles auxquelles doivent satisfaire les garderies, la formation requise, tous les critères importants, quoi, la réduction des paiements de transfert aux provinces devient une question d'autant plus épineuse. Comment le gouvernement peut-il justifier le délestage d'autres responsabilités au détriment des provinces, qui sont déjà à court d'argent?

(1130)

La proposition que j'ai présentée aurait pour effet d'accorder le même traitement aux parents qui travaillent et à ceux qui restent à la maison. En outre, elle aurait des répercussions bénéfiques d'une grande portée sur l'économie. En ce qui concerne les familles à un seul revenu, cela pourrait entraîner une hausse très marquée de la création d'emplois. En effet, les personnes qui quitteront la population active libéreront un emploi pour les chômeurs. Les parents qui choisiront de rester à la maison auront du temps à consacrer à du bénévolat dans des écoles, des hôpitaux ou des centres communautaires, atténuant du même coup les difficultés financières de ces institutions, qui sont financées par l'État. C'est une solution gagnante.

Nous nous portons à la défense de la famille, et ces mesures aideront les familles canadiennes à conserver leur rôle d'éléments essentiels de l'économie du pays. Ce sont des questions qui nous concernent tous, hommes et femmes. C'est un fait que la question des garderies et le choix entre travailler et rester à la maison touchent principalement les femmes.

Le budget libéral dénote un manque d'engagement et de compréhension de cette réalité fondamentale. La conception du Parti réformiste de la politique sociale globale comprend la décentralisation du pouvoir de dépenser aux niveaux de gouvernement les plus près de la population, un ensemble amélioré de normes nationales coopératives, l'habilitation des familles et des particuliers et le renforcement du secteur des organismes de charité.

J'estime que l'égalité complète en est venue à refléter les valeurs de base de ce que j'appelle le nouveau féminisme. Toute tentative en ce sens ne peut échapper au processus de sociologie appliquée conçu et subventionné par le ministère chargé de la Situation de la femme.

Le budget libéral n'a rien fait pour écarter une tradition qui perpétue une méthode dépassée de règlement des problèmes-examen, consultation, discussion-, qui fait qu'on tourne sans cesse en rond sans jamais aller nulle part. Les femmes veulent que le gouvernement passe à l'action sur ces questions, qui revêtent une si grande importance pour elles.

Quand le ministre des Finances a déposé son budget, il a annoncé qu'il transférait à la Situation de la femme un programme du Développement des ressources humaines destiné aux femmes. Quand il a pris cette mesure, il a transféré 11,3 millions de dollars à la Situation de la femme, 8,6 millions de dollars servant à des subventions directes à des groupes d'intérêts spéciaux, et 2,7 millions de dollars, à l'administration et à la répartition de ces subventions. Cela équivaut à une surcharge administrative de 30 p. 100. Aucune entreprise ne peut se permettre de fonctionner ainsi. Aucune famille canadienne ne peut se permettre de fonctionner ainsi. Aucun ménage du pays ne peut se permettre de fonctionner ainsi. Comment se fait-il que notre gouvernement le puisse?

Ce geste a été suivi cette semaine d'une autre annonce, cette fois-ci de la secrétaire d'État responsable de la Situation de la femme. Le 1er avril 1995, on démantèlera le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme. Or, le budget ne touche pas un mot de la fusion du CCCF et de Condition féminine Canada.

Pourtant, le secrétariat d'État a approuvé le budget des dépenses alloué au Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme; ce budget des dépenses a bel et bien été publié et diffusé. Il est maintenant inutile, car, à peine un mois plus tard, on annonçait l'élimination du conseil. Le secrétariat d'État a donc autorisé une dépense de plusieurs dizaines de milliers de dollars en honoraires de consultants pour la réalisation de la partie III du Budget des dépenses, tout en sachant que toutes les données qui y figuraient ne serviraient à rien. Tout cela est à présent inutile. Quel genre de leadership est-ce?

Non seulement un ministère a dissimulé des informations, mais on a gaspillé des fonds publics pour promouvoir un programme jusque-là inconnu et qui a trait au budget. Voilà le genre de politique qui amène les Canadiens à juger que les politiciens ne sont pas francs.

Au sujet du changement apporté au ministère en question, il convient de noter l'esquisse d'un pas dans la bonne direction en vue de la réduction de la taille du gouvernement. Je dois le reconnaître. Néanmoins, cette réduction des coûts n'est que symbolique. Une économie de un million de dollars face à une dette explosive n'est pas d'un grand réconfort pour les Canadiens qui aspirent à un meilleur climat financier.

(1135)

C'est l'abolition pure et simple du secrétariat d'État de la Situation de la femme qui s'impose. Je dis cela pour deux raisons. Cette mesure aurait pour effet de supprimer les stigmates des groupes d'intérêts spéciaux qui marquent les femmes désireuses d'introduire des changements positifs sur les plans social, économique et politique. Les Canadiens verraient cette mesure d'un bon oeil, au moment même où l'on s'efforce d'atteindre une véritable égalité sans qu'il soit nécessaire de financer ces groupes à coups de subventions. C'est une pratique qui sème la discorde entre eux et nous.

Le gouvernement sortirait enfin du cercle vicieux qui consiste à se lancer dans des études, des consultations et des discussions sans jamais passer à l'action. Les questions importantes pour les femmes seraient plus facilement et rapidement abordées, si elles étaient confiées aux divers ministères qui ont le pouvoir d'agir à leur sujet. Par exemple, la violence faite aux femmes pourrait relever du ministère de la Justice, le cancer du sein et la recherche dans ce domaine pourraient être confiés au ministère de la Santé et le ministère des Finances pourrait s'attaquer de façon


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réaliste au problème de la pauvreté des familles monoparentales, qui ont souvent pour chef la mère.

L'année dernière, dans son discours sur le budget, la secrétaire d'État a annoncé fièrement que le gouvernement reconnaissait les injustices de notre régime fiscal et de notre système de revenus, tous deux préjudiciables aux femmes. Elle a laissé entendre que le gouvernement procéderait à une étude, encore une autre étude, qui porterait sur certains points, comme le versement des pensions alimentaires aux femmes. Elle nous a donné à croire que le gouvernement améliorerait la situation.

Un an plus tard, absolument rien n'a été fait dans ce domaine. En fait, lorsque mon collègue de Calgary-Centre a présenté un projet de loi visant à corriger cette iniquité, le gouvernement libéral a refusé de l'appuyer.

On peut s'interroger sur l'esprit de parti qui règne à la Chambre, lorsqu'on voit comment sont traitées certaines propositions fiscales très sensées. Quelle est la position du gouvernement? Est-il prêt à défendre les intérêts des femmes uniquement pour se faire du capital politique?

Les femmes ont effectivement une grande influence, grâce à leurs efforts efficaces et non subventionnés par le gouvernement, grâce à leurs recours aux tribunaux et grâce aussi au simple exercice de leur droit de vote. Lorsque les fonctionnaires du gouvernement, les politiciens, les avocats et les juges voudront bien se ranger à leurs côtés, ils faciliteront le mouvement vers une puissante dynamique de changement. Dans toute recherche de solutions, le meilleur modèle est le partenariat entre les ressources publiques et privées. Par ressources, je n'entends pas ici uniquement les ressources financières. Les gouvernements ne peuvent agir seuls. Ils n'ont ni le savoir-faire ni l'argent nécessaires.

Ce dont je parle aujourd'hui a mis beaucoup de temps à se réaliser. En fait, nos filles, mes filles et mes petits-enfants, toutes des petites-filles je l'espère, considéreront les années antérieures à 1970 comme une époque moyenâgeuse. La violence des hommes au foyer passait sous silence. Les femmes divorcées n'avaient pas droit à une part du patrimoine familial. Les femmes enceintes subissaient la discrimination sur le marché du travail. Les bons avocats réussissaient encore à ridiculiser les causes de viol présentées devant les tribunaux et les femmes devaient, lorsqu'elles prononçaient leurs voeux de mariage, promettre d'aimer et de respecter leur époux et de lui obéir. En fait, il y a 27 ans, j'ai dit «obéir» sans même y penser. Les temps ont bien changé!

À cette époque, on voyait le monde à travers les yeux des hommes, depuis le langage qu'on utilisait jusqu'à la façon de traiter les questions soulevées alors, qui a influé grandement sur l'évolution des questions cruciales pour les femmes. Diverses causes concernant l'égalité des chances dans l'emploi, la pension alimentaire versée par le conjoint, des régimes de pensions équitables et l'équité salariale, les agressions sexuelles, le harcèlement sexuel, le viol, la discrimination contre les femmes enceintes et la violence faite aux femmes ont jalonné la route des femmes au cours de la dernière décennie. Des efforts remarquables, réalisés par des hommes et des femmes remarquables, ont radicalement changé notre conception du monde.

Les meilleurs modèles de changement reposent sur les partenariats qu'on trouve dans les secteur public et privé. Cela est encore plus évident lorsque nous discutons de la place qu'occupent les femmes dans l'entreprise. Les gouvernements offrent l'environnement propice à la prospérité des entreprises. Les gouvernements sont là pour s'occuper de l'élaboration des infrastructures, tandis que le secteur privé cherche à se développer sur un marché libre et concurrentiel.

Cela m'amène à mon propos sur les femmes dans l'entreprise. Les femmes se lancent en affaires à un rythme trois fois plus élevé que les hommes. Soixante-quinze pour cent d'entre elles le font au cours des années où elles élèvent leurs enfants, ce qui accroît le fardeau de la structure familiale. Comme la plupart des chefs de petite entreprise, ces femmes travaillent de longues heures, soit de 50 à 70 par semaine, et gagnent en moyenne moins de 30 000 $ par année.

(1140)

Je voudrais lancer un défi aux institutions gouvernementales qui font obstruction au phénomène des femmes entrepreneurs. Les emplois créés par des femmes qui sont propriétaires de petites entreprises ne constituent pas une mode, mais bien une tendance appelée à rester.

Cependant, les institutions financières exercent encore de la discrimination contre les femmes qui possèdent et exploitent une entreprise. Cette discrimination, qui a été expliquée dans une étude publiée la semaine dernière par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, revêt la forme de taux d'intérêt plus élevés et d'une proportion supérieure de rejet des demandes de financement pour les femmes que pour les hommes. On a découvert cette discrimination, bien que les données utilisées dans l'étude aient été les mêmes, hommes et femmes confondus.

Ces données étaient l'âge de l'entreprise, le secteur d'activité, le nombre d'employés, le volume des ventes et le nombre de gérants du crédit dans les institutions financières provinciales. Vues de l'extérieur, les règles du jeu semblent les mêmes pour les femmes.

Alors, quelle conclusion pouvons-nous tirer lorsque des femmes qui sont propriétaires d'entreprises et qui utilisent les mêmes paramètres que leurs homologues de sexe masculin se voient rejeter leurs demandes de financement ou sont obligées de payer des taux d'intérêt plus élevés pour livrer concurrence sur un marché dit équitable? Le coût du financement est donc inégal pour les hommes et les femmes qui possèdent et exploitent des entreprises. C'est le genre de choses qu'il faut contester et changer, car il ne s'agit absolument pas d'égalité.

Ce rapport a présenté, en conclusion, huit recommandations. Je trouve choquant que l'on suggère, dans ces recommandations, que les institutions financières devraient modifier leur approche dans le cas des femmes propriétaires d'entreprises, que les institutions financières devraient chercher à mieux comprendre la situation particulière des petites et des moyennes entreprises, et plus particulièrement des femmes propriétaires d'entreprises.

Ce genre de recommandations ne fait rien pour encourager nos institutions financières à prendre des décisions d'affaires responsables basées sur les compétences et le mérite. Même s'il reconnaît que les femmes propriétaires d'entreprises sont traitées injustement par nos institutions, le rapport conclut que c'est plus la faute des femmes que du parti pris contre elles.

Dans le discours du budget, le ministre des Finances a fait la déclaration suivante: «Il y a tellement de choses que nous aime-


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rions pouvoir faire pour les millions de Canadiens et Canadiennes qui se soucient bien peu des dividendes et des produits dérivés-et dont la seule préoccupation est de joindre les deux bouts.»

Il est temps que le gouvernement se demande comment joindre les deux bouts. Une dette qui nous paralyse et un déficit qui ne cesse d'augmenter nuisent à la croissance de notre pays et n'engendreront pas la prospérité. L'élimination des obstacles, grâce à une meilleure répartition des dollars d'impôt favorisant une moins grande dépendance sociale, et une main-d'oeuvre mieux formée, plus sûre d'elle, qui peut assumer plus de responsabilités, assureront un avenir prospère à tous, hommes et femmes.

Mme Bonnie Brown (Oakville-Milton, Lib.): Monsieur le Président, avant de poser ma question, je voudrais féliciter l'auteur de la motion, la députée de Québec.

La motion exprime ce que beaucoup d'entre nous ressentons, à savoir que nous voudrions faire davantage, à ce moment-ci de notre histoire, pour rehausser notre civilisation et la civilité dans notre pays et nous voudrions encourager les groupes de femmes qui ont fait preuve d'un dynamisme remarquable au fil des années et qui ont exigé plus d'équité à leur égard au sein de la société canadienne.

Je suis, de ce point de vue, assez d'accord avec ma collègue. Je tiens cependant à dire que le gouvernement, à qui il incombe d'équilibrer les finances publiques, a dû effectuer des compressions qui n'ont pas touché que les femmes, même si c'est là l'objet du débat actuel.

Les compressions frappent tout le monde, qu'il s'agisse d'entrepreneurs ou de groupes de femmes qui avaient l'habitude de recevoir leur subvention. Les uns et les autres risquent maintenant de s'en voir privés, ce qui ne veut cependant pas dire que nous renoncions à nos idéaux. La motion que nous a présentée la députée nous aide justement à garder nos idéaux au premier rang de nos préoccupations en cette période difficile.

(1145)

Quant à la députée de Calgary-Sud-Est, qui a pris la parole en dernier, j'ai de la difficulté à suivre son raisonnement. Elle parle des années 70 comme d'une période de noirceur pour les femmes. Ma collègue s'appuie sur des exemples convaincants pour démontrer que l'égalité des femmes était alors moins reconnue qu'aujourd'hui. Par ailleurs, elle semble approuver la disparition de Condition féminine Canada et elle suggère même, si j'ai bien compris, que le secrétariat d'État de la Situation de la femme soit aboli.

Selon la députée, la participation des femmes au sein de la société a-t-elle marqué des progrès ces dernières années, que ce soit dans la vie civile, dans les forces armées ou au Parlement? Comment les femmes ont-elles obtenu ce qu'elles ont en 1995? N'est-ce pas grâce à des groupes de femmes bénévoles, à des organisations de femmes financées par le gouvernement et aux gouvernements précédents qui ont accordé des budgets à Condition féminine Canada pour apporter les améliorations que les femmes jugeaient nécessaires à leur situation?

Mme Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question. Les femmes ont, sans aucun doute, fait des progrès très importants. Je crois, pour ma part, que, sans les efforts des féministes, si on veut utiliser ce terme, les gens ne seraient pas aussi sensibilisés à une bonne partie des questions dont j'ai parlé. Sans leur intervention, aucun changement ne se serait produit.

Nous entrons dans une nouvelle ère. Dans mon intervention, j'ai essayé de nous faire dépasser le stade du statu quo. En ce qui concerne ce que j'ai dit, je crois que c'est vraiment un défi pour le gouvernement de trouver des façons d'instaurer cette égalité sans y attacher de conditions.

Nous serons confrontés à une réalité économique qui fait que le gouvernement a très peu d'argent à dépenser et nous devrons commencer à compter davantage sur les groupes bénévoles dont ma collègue a parlé et sur les initiatives que j'ai mentionnées pour poursuivre cette évolution.

J'ai parlé d'initiatives efficaces et non subventionnées par le gouvernement, ainsi que de recours devant les tribunaux. J'ai dit que nous devions nous exprimer grâce à l'exercice de notre droit de vote, en élisant certaines personnes à la Chambre des communes. On peut espérer que les femmes et les hommes continueront de réclamer des changements et de profiter des chances qui s'offrent à nous sans avoir à dépendre autant des gouvernements pour financer ces initiatives. Le démantèlement du secrétariat d'État de la Situation de la femme a justement pour objectif de nous faire dépasser ce stade.

Le budget du gouvernement constituait un déplacement surprenant vers la droite. L'idéologie du libéralisme social semble changer. Je crois que nos vis-à-vis abordent les questions de façon plus pragmatique sur le plan économique. J'essaie de trouver de nouveaux moyens pour encourager les femmes, ainsi que les hommes, à avoir recours à d'autres solutions. Il ne faut plus s'en tenir au statu quo qui consiste à s'adresser peut-être au gouvernement pour obtenir davantage d'argent afin d'entreprendre un autre examen de politique dans le but de présenter un autre rapport auquel on ne donnera pratiquement pas suite.

Je remercie ma collègue pour ses questions et je serais très heureuse d'en discuter plus en profondeur avec elle à une autre occasion.

M. Tony Ianno (Trinity-Spadina, Lib.): Monsieur le Président, c'est très intéressant d'écouter la députée et de voir comment elle aborde le budget du gouvernement.

L'indépendance est très importante pour les femmes et pour tous les Canadiens. Ce budget constitue un premier pas dans ce sens. Les garderies sont un aspect important de tout cela. Comme la députée l'a signalé, ce n'est pas simplement une question de mode de vie, mais une nécessité pour les femmes seules surtout de retourner sur le marché du travail afin qu'elles retrouvent, ainsi que leur famille, toute leur dignité. Elles pourront alors servir de modèle pour leurs enfants. Elles seront en mesure de contribuer de façon très utile à l'essor de la société canadienne et leurs enfants auront l'indépendance voulue pour faire ce qu'ils souhaitent.

(1150)

Il est un point dont le ministre des Finances a parlé dans son budget concernant les petites entreprises. La députée a cité des statistiques relativement à l'augmentation du nombre de femmes d'affaires. C'est une chose dont nous devrions nous réjouir car cela va stimuler le pays, lui permettre de devenir autonome et de réduire la dette globale. Les petites entreprises qui veulent em-


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prunter de l'argent pour améliorer leur opérations et prendre de l'expansion doivent bien sûr s'adresser aux banques.

Comme le ministre l'a dit, nous devons amener les banques à étudier avec le gouvernement les moyens d'encourager les banques à consentir davantage de prêts aux petites entreprises. Étant donné que les petites entreprises dirigées par des femmes sont de plus en plus nombreuses, en leur donnant les outils dont elles ont besoin pour aider le pays à renforcer son économie nous ferions un pas dans la bonne direction.

Quant à la proportion que proposait le ministre, il ne faut pas oublier que moins du tiers des prêts consentis aux sociétés par certaines banques vont à des petites entreprises. Si, comme je l'ai recommandé, le gouvernement encourageait les banques à accorder aux petites entreprises au moins le tiers des sommes prêtées aux sociétés, les prêts aux petites entreprises passeraient de 33 à 49 milliards de dollars-une augmentation de 50 p. 100. Une telle mesure encouragerait les petites entreprises à prendre de l'expansion et donnerait aux femmes davantage d'outils pour faire mieux.

La députée ne convient-elle pas que c'est une bonne initiative de la part du ministre des Finances?

Mme Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

Le député pourra peut-être m'expliquer, à un moment donné, exactement ce qu'il entend par encouragement du gouvernement. Je ne suis pas sûre de comprendre ce qu'il entend par cela. Toutefois, je suis tout à fait d'accord pour que le gouvernement collabore avec les banques pour encourager la réalisation d'un plan d'action tel que le suggérait le député.

J'ai parlé de toute la question des prêts consentis à des femmes par des institutions financières. J'ai été renversée par le rapport de la Banque fédérale de développement, qui révèle l'apparente existence de préjugés sexistes face aux femmes, dans la distribution de capitaux devant leur permettre de créer des entreprises pouvant devenir florissantes. C'est surtout de cela que je voulais parler-cette préoccupation au sujet des préjugés sexistes. Il ne semble pas que les institutions financières traitent les femmes équitablement, d'après le rapport que je cite.

Nous, du Parti réformiste, encourageons et recommandons chaudement que les banques puissent se faire concurrence, tant pour le service à la clientèle que pour la qualité de leurs produits. Nous recommandons la nomination d'un protecteur du citoyen qui serait chargé de trancher des questions de ce genre. Ce serait un moyen de régler le problème sans que le gouvernement doive débourser encore davantage à cette fin.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je trouve intéressant de constater qu'il y a une espèce de consensus sur la pertinence de la motion présentée par la députée de Québec. Je ne dis pas qu'on s'entendra sur tous les mots ni que le gouvernement ou l'autre parti d'opposition seront entièrement d'accord, mais il semble exister une préoccupation commune face au traitement que l'on réservera aux femmes à l'avenir, avec les changements qui se produisent.

Je relis la motion:

Que la Chambre condamne le gouvernement pour son insensibilité et son inaction face à l'adoption de mesures concrètes visant à favoriser l'égalité économique des femmes, dans les domaines de compétence fédérale.
(1155)

Je pense que les mots clés, quant à moi, dans cette motion, sont l'adoption de mesures concrètes, parce que les politiques concernant la condition féminine et concernant les femmes font l'objet de beaucoup de discours depuis plusieurs années. Là, je pense qu'il faut juger les gouvernements sur les actes qu'ils posent dans ces secteurs.

J'ai un peu le goût de vous parler de la vraie vie. Prenons l'exemple de Marie-Hélène, pour ne pas la nommer, la situation actuelle d'une jeune étudiante qui entre à l'université. Elle va commencer, disons, en septembre prochain. Quelle est sa vision d'avenir comme femme? Comment entrevoit-elle son futur?

Eh bien présentement, dans la réforme des programmes sociaux, on entrevoit qu'elle va subir un endettement supérieur, un endettement majeur au cours des prochaines années. Si elle décide de mener des études universitaires, elle va se ramasser avec des dettes qui vont doubler ou tripler par rapport à celles qu'elle aurait à encourir présentement si elle menait ses études. Donc, cela a comme résultat que la jeune femme qui a le goût de faire carrière, qui regarde le futur qu'il y a devant elle va dire: «Eh bien, peut-être que je n'ai pas intérêt à aller jusqu'au maximum de mon potentiel à cause de l'endettement supérieur qu'on va me faire subir.»

Il est très étonnant qu'un gouvernement libéral ait ce type de choix, lui qui, dans les années 1960 à 1970, a essayé de mettre de l'avant des choses intéressantes en ce qui a trait à l'égalité des chances. Là, on est en train de retirer le tapis sous les pieds des personnes qui pourraient en profiter en leur disant: «Quand tu vas faire tes études, tu vas assumer beaucoup plus tes dettes.» Donc, cela aura comme conséquence que seulement les familles riches pourront envoyer leurs enfants à l'université, et on reviendra à une espèce de modèle qu'on retrouvait peut-être il y a 25 ou 30 ans et dont personne ne voulait, où il n'y a pas vraiment égalité des chances face aux études.

Donc, voilà un exemple d'une absence de mesures concrètes du gouvernement, une espèce de geste négatif qui va nous ramener à 20 ou 30 ans en arrière et qui peut inquiéter beaucoup les femmes.

Reprenons l'exemple de la même étudiante. Elle a complété ses études et elle a une idée de fonder une entreprise demain. Elle a décidé qu'elle voulait partir une entreprise dans le domaine des nouvelles technologies. Malheureusement, elle n'a pas d'assurance-chômage parce qu'elle n'a jamais travaillé un nombre de semaines suffisant pour être admissible à l'assurance-chômage, elle n'a pas d'aide sociale non plus parce que, possiblement, elle est la conjointe de quelqu'un qui a un travail. Eh bien, cette personne-là n'est admissible à aucun programme.


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Si on prend l'exemple d'une étudiante c'est que, dans la réalité, ce sont beaucoup plus souvent les femmes qui se ramassent dans ces situations. Donc, par des mesures que je dirais systémiques, qui sont contre-effectives, on crée une situation où les femmes en général qui veulent partir une entreprise vont avoir des conditions moins faciles que les hommes. Ce genre de situation est causé par l'inaction actuelle du gouvernement qui aurait pu, dans le présent Budget, poser de petits gestes significatifs pour permettre de contrer cet effet négatif.

Je continue mon exemple de l'avenir d'une jeune femme d'aujourd'hui qui envisage le futur et qui fait des projets en essayant de voir de quelle façon elle va s'organiser.

Quand elle avait lu le livre rouge du gouvernement libéral, pendant la campagne électorale, elle pouvait avoir espoir que, lorsqu'elle va décider de faire carrière, elle va bénéficier de services de garde adéquats pour les enfants qui vont faire qu'elle va pouvoir mener une carrère et, en même temps, assurer à ses enfants une éducation adéquate et un soutien adéquat dans leur développement. Par ce fait, je ne dis pas que les hommes n'ont pas de responsabilités par rapport à l'éducation des enfants, on en a autant que les femmes, c'est très évident, mais dans la réalité, dans la vraie vie, ce qui se passe sur le marché, c'est que souvent, on demande à nos femmes d'être ce qu'on appelle des superfemmes qui vont réussir à tout mener en même temps: la vie de famille, la vie professionnelle, la vie sociale; tout cela du même coup, sans nécessairement leur donner des formes d'aide.

Il y en aurait eu des mesures concrètes à mettre de l'avant parce que le gouvernement libéral avait promis, pendant la campagne électorale, que lorsque le Produit intérieur brut serait en hausse de 3 p. 100, eh bien, il réaliserait 60 000 places supplémentaires en garderie. Récemment, nous avons connu une hausse du Produit intérieur brut, mais on n'a aucune hausse du nombre de places en garderie pour les femmes, si ce n'est pour les femmes autochtones. Donc, il y a là un engagement qui est véhiculé dans la société québécoise et canadienne depuis très longtemps. C'est un engagement qui a été rejeté.

(1200)

C'est un engagement qui n'a pas été respecté par le gouvernement conservateur qui a précédé les libéraux. Ces derniers, qui se sont fait élire sur la promesse d'un changement, entre autres, dans ce domaine, font la même chose que les conservateurs. On peut voir pourquoi il y a encore des insatisfactions et pourquoi on peut dénoncer l'inaction du gouvernement face à l'adoption de mesures concrètes.

Donc, la jeune fille qui termine ses études, qui aura un endettement supérieur et à qui on annonce qu'au niveau de la garde de ses enfants, elle n'aura pas les services adéquats, toutes ces situations font en sorte qu'elle trouve qu'il n'y a pas eu d'amélioration de sa situation. Quand elle apprend en même temps qu'on va faire disparaître les organismes qui sont un peu les chiens de garde de la défense du statut de la femme, elle peut sûrement se poser de très grandes questions sur l'avenir. Cela, c'est l'exemple d'une jeune femme qui a du dynamisme, a le goût de développer des choses, qui s'en va quelque part.

Je vais vous donner un autre exemple aussi d'une femme qui a beaucoup de dynamisme, mais qui a peut-être moins de chance. Appelons-la Hélène pour la circonstance. Hélène vit à la maison, seule, chef de famille monoparentale, avec deux enfants, et elle doit consacrer 40, 50, 60 p. 100 de son revenu à l'habitation. Cette personne, quand on lui dit que le gouvernement veut combattre la pauvreté, la première chose à laquelle elle s'attend, c'est de pouvoir consacrer à son logement un montant raisonnable de ses revenus, quelque chose autour de 25 à 30 p. 100.

Mais, présentement, on consacre souvent 50 et 60 p. 100 de ses revenus pour se loger. Cela veut dire qu'avec un chèque d'aide sociale, quand vous consacrez déjà 50 ou 60 p. 100 de vos revenus au paiement du loyer, il faut que vous fassiez des miracles chaque semaine pour réussir à faire manger ces deux enfants-là correctement et qu'en bout de ligne, ils ne soient pas eux-mêmes dans un cercle vicieux qui va se perpétuer dans l'avenir et qui va en faire des enfants pauvres. Est-ce que le gouvernement libéral, suite à la tournée du Comité du développement des ressources humaines sur la réforme des programmes sociaux, n'aurait pas pu consacrer des sommes supplémentaires à l'aide directe au logement social?

Pas du tout. Au contraire. Dans un communiqué de presse du ministre responsable de la Société canadienne d'hypothèques et de logment daté du 28 février 1995, on annonce, comme cela, tout simplement-on n'a pas eu la même désinvolture que pour le Conseil consultatif canadien du statut de la femme, hier, pour lequel on a annoncé, tout simplement, en cours de débat, la disparition-mais dans un communiqué de presse, cela a un effet aussi caché, on annonce donc une diminution du budget global du logement social de 270 millions de dollars sur une période de trois ans. Quel message on donne à Hélène, dont je parlais tout à l'heure, qui, elle, a son logement, qui doit faire des miracles pour survivre, quand on lui annonce qu'il y aura une diminution de 270 millions dans le budget du logement social? Cela veut dire qu'il n'y a pas de lumière au bout du tunnel.

C'est cela qu'on veut dénoncer sous le régime du gouvernement actuel, son inaction face à des gestes concrets qui ne sont pas nécessairement une question de faire la charité, mais une question de placer ces gens en position de s'en sortir. Le même genre d'exemple vaut aussi pour l'espèce de volonté continuelle de calquer le modèle américain sur la façon dont on va aider les familles pauvres. On a une approche, ici, présentement, par le gouvernement, qui est de dire ce que les Américains ont fait, au fond. Ils disent: «On va aider les familles pauvres, mais en allant chercher l'argent qu'on donne actuellement à la classe moyenne.»

Savez-vous ce que cela a comme résultat? C'est qu'on aura de plus en plus de familles de la classe moyenne qui vont devenir des familles pauvres. Là, on va pouvoir se gargariser du fait qu'on leur envoie un chèque comme famille pauvre, alors que le modèle que l'on avait antérieurement au Canada et le modèle qui a fait ses preuves, c'est que la façon de combattre la pauvreté est de permettre aux gens qui sont juste au-dessus du seuil de la pauvreté de continuer à avoir espoir de s'en sortir et de donner


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aux familles pauvres les moyens de s'en sortir aussi. Mais, ce n'est pas de jouer au yo-yo, en faisant qu'on aide ceux qui sont plus démunis pour l'image publique, tout en enlevant l'aide à ceux de la classe moyenne qui vont se retrouver dans la classe pauvre.

Je pense que là, il y a un autre exemple de l'inaction du gouvernement actuel qu'il faut remettre en question. On donne l'ensemble de ces exemples et en contrepartie, je vais vous lire un extrait du discours du ministre du Développement des ressources humaines, qu'il a présenté au Sommet mondial pour le développement social, juste pour vous montrer la non-correspondance entre le discours et la réalité.

Le ministre du Développement des ressources humaines dit: «Il faudra de plus en plus faire reposer nos programmes sur des mesures concrètes de retour au travail, au lieu de s'en tenir uniquement au soutien du revenu.» Qu'y a-t-il comme mesures pour permettre aux femmes entrepreneures de prendre leur place sur le marché? Il n'y a rien qui correspond au débat que l'on présente à Copenhague.

(1205)

Deuxième exemple, on dit aussi qu'il faudrait offrir des services de garde abordables pour que les chefs de famille monoparentale, surtout les femmes, puissent travailler à l'extérieur. Comment un ministre peut-il faire un discours comme cela à Copenhague et, en contrepartie, être ministre dans un gouvernement qui nous présente un Budget comme celui qu'on connaît? Je pense que cela prouve que la motion de la députée de Québec est très pertinente et on espère recevoir du gouvernement l'attention nécessaire pour corriger ce qui représente des lacunes majeures du Budget actuel.

Mme Gagnon: Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour ses commentaires et la pertinence de ses propos. J'apprécie sa façon de proposer des solutions concrètes au gouvernement quant à l'égalité économique, l'équité en matière salariale et dans d'autres domaines, comme dans les services de garderie.

Le but de la motion est de faire parler le gouvernement, non pas sur des intentions, mais sur les actions concrètes qu'il pourrait prendre pour que la situation des femmes soit améliorée. J'aimerais rappeler une intervention de la secrétaire d'État qui dit que l'abolition du Conseil consultatif canadien sur la situation des femmes est un mouvement créé parce que les femmes avaient beaucoup à revendiquer.

Elle dit que depuis lors les femmes ont fait des progrès au gouvernement. C'est vrai, elles ont progressé, dans l'enseignement aussi, dans le monde des affaires, à l'université. Ce que je retiens de cela, c'est que ces femmes forment une élite, mais je me rends compte que toutes les femmes n'ont pas profité de la même chance en ce qui a trait à l'accès à ces réseaux plus traditionnellement occupés par des hommes.

J'aimerais que mon collègue puisse expliquer, encore une fois, de façon concrète comment le gouvernement se glorifie trop souvent d'actions orientées vers une clientèle plus élitiste et oublie les plus démunis, les femmes, les femmes monoparentales, les jeunes qui font face à un marché de l'emploi plus fermé. Comment le gouvernement pourrait-il agir de façon concrète?

On se vante de vouloir stimuler les entreprises menées par des femmes, mais là encore il s'agit d'une élite. Je ne nie pas cela, mais il y a un grand pourcentage de la population qui reste derrière, et je ne vois aucune action concrète de la part du gouvernement pour aider ces femmes.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, dans ma courte expérience de député, l'une des choses qui m'a le plus marqué c'est comment les mouvements de femmes, de ma circonscription et dans les autres régions, réussissaient à se débrouiller avec très peu. Avec des budgets très restreints, ils ont des idées originales, mettent en place des façons d'aider les femmes, les familles, de manière à produire des résultats concrets malgré le peu de moyens dont ils disposent.

Dans les solutions que je pourrais proposer, je pense qu'il faut d'abord écouter ces organismes, leur donner des moyens d'agir sans toujours être en état de crise. Il faudrait une planification de trois à cinq ans qui permettrait aux organismes qui représentent les femmes, qui contribuent au développement des objectifs des femmes de continuer leur travail.

(1210)

Lors des audiences du Comité du développement des ressources humaines, nous avons entendu les témoignages relatifs à des dizaines d'expériences vécues par les femmes un peu partout à travers le Canada qui veulent assurer un meilleur avenir à nos filles qui, aujourd'hui, ont cinq, dix ou quinze ans. Elles veulent que dans le monde de demain, dans 15 ou 20 ans, il ne soit plus nécessaire d'avoir des programmes particuliers parce qu'on aura donné à la base, à chacune des femmes, l'occasion de s'épanouir et des conditions de vie dans la société leur permettant d'avoir des chances égales avec les autres.

Je pense que le plus important, c'est de faire confiance aux femmes.

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, je serai naturellement en faveur de la motion déposée par la députée de Québec qui demande:

Que la Chambre condamne le gouvernement pour son insensibilité et son inaction face à l'adoption de mesures concrètes visant à favoriser l'égalité économique des femmes, dans les domaines de compétence fédérale.
Je dénonce donc l'insensibilité du gouvernement face à la situation des femmes. Je voudrais profiter de l'occasion pour traiter un volet, celui des pensions de vieillesse, et démontrer que le gouvernement actuel, avec toutes les actions qu'il a entreprises dans ce domaine, n'empêche pas que de plus en plus de femmes âgées soient en-dessous du seuil de pauvreté. Le Budget de 1995 sonne définitivement le glas de l'universalité des programmes sociaux, notamment des régimes publics de sécurité de la vieillesse.

À titre d'exemple, le plafonnement des versements de pension basés sur les revenus de l'année précédente met fin complètement à l'universalité. Même s'il y a peu de personnes âgées qui disposent de revenus annuels supérieurs à 53 000 $, il arrive souvent que les aînés non fortunés aient réalisé dans une année


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des revenus familiaux supérieurs, soit par la liquidation d'actifs qu'ils ont ramassés au fil des ans, soit par le retrait d'un REER, ou encore par le transfert de ceux-ci.

Cette mesure du Budget les affectera directement l'année suivante en diminuant les versements de la pension. On sait que depuis 1989, l'universalité des programmes de sécurité de la vieillesse auxquels les personnes âgées ont contribué est virtuellement abolie.

Je m'explique mal cet acharnement du gouvernement libéral à toujours attaquer cette tranche de la population qui, rappelons-le, a bâti ce pays. C'est la cible préférée que les libéraux s'acharnent à détruire en leur imposant, année après année, Budget après Budget, des mesures inacceptables, eux qui sont les plus démunis de notre société.

On se demande ensuite pourquoi la population du Québec veut se libérer de ce fédéralisme et devenir souverain. Les différents programmes de sécurité de la vieillesse, ainsi que le Supplément de revenu garanti sont les principales sources de revenu des personnes âgées de plus de 65 ans. Leur niveau de pauvreté, surtout chez les femmes, excède largement celui de la population en général.

Y a-t-il quelqu'un en cette Chambre qui ne sait pas que les personnes âgées sont désavantagées parce qu'elles ont des pensions et des revenus moins élevés, si elles n'ont pas travaillé hors du foyer? Et c'est le cas de nos mères.

Leur travail domestique n'est pas rémunéré ni pris en compte pour calculer leur pension de retraite. Leur seul revenu sera donc pour les années à venir le chèque de pension du Canada et ce, pour combien de temps encore?

(1215)

C'est une injustice que le gouvernement libéral réitère en nous indiquant que la pension de la sécurité de vieillesse serait versée en fonction du revenu familial. Cette mesure obligerait un grand nombre d'aînés, majoritairement des femmes, à lui remettre leur pension.

Selon la ministre québécoise de la Condition féminine, et je cite ses propos: «Voilà que les femmes retournent 50 ans en arrière. Alors qu'elles avaient réussi à se faire reconnaître dans la société un statut individuel, maintenant, au nom des compressions budgétaires, elles se voient obligées, rendues à la retraite, de se faire reconnaître en tenant compte du conjoint et du revenu familial.»

On a le droit de se demander quel virage le fédéral prend par rapport aux droits des femmes. Ma collègue du gouvernement du Québec a bien raison quand elle ajoute que l'introduction du principe du revenu familial vient modifier totalement le programme de sécurité du revenu à la retraite pour en faire un programme d'assistance sociale aux familles démunies en lieu et place d'un programme d'assurance.

Le Canada a pris des engagements publics très clairs en faveur de l'égalité des sexes, ainsi que des mesures statutaires pour atteindre cet objectif. Je me réfère ici au document canadien sur la violence faite aux femmes. Dans son plan d'action, à l'article E.61, on stipule que l'engagement du Canada est celui-ci, et je le cite: «Analyser toutes les modifications proposées au régime fiscal pour en dépister les effets discriminatoires ou négatifs envers les femmes.» Ce principe est maintenant sur une tablette.

L'article E.66, du même document, stipule, et je cite: «Relever et assurer l'indexation complète du seuil de récupération des prestations de sécurité de la vieillesse.» Encore une fois, le Canada n'a pas pris cet engagement.

L'engagement du Canada est très clair dans ce document. On devait prendre toutes les mesures requises, notamment législatives, pour modifier ou abolir les lois, règlements, coutumes et pratiques qui constituent de la discrimination envers les femmes. Est-ce que c'est ce que le gouvernement propose actuellement avec son Budget? Non. Il a balancé ces principes.

Le ministre des Finances balance du revers de la main des études qui ont coûté énormément d'argent aux contribuables et nie des principes fondamentaux au nom de la réduction du déficit. Au contraire, plutôt que d'avancer et de donner aux personnes âgées, principalement aux femmes, les moyens pour y arriver, on régresse de plus en plus avec ce Budget.

Soyons un peu sérieux. Je comprends fort bien que tout se paie et qu'il y a ici un prix à payer. Cependant, tournons-nous donc vers les banques, vers les paradis fiscaux, vers les fiducies familiales et laissons en paix nos personnes du troisième âge. Elles se sont saignées à blanc pour construire ce pays qui, aujourd'hui, les rejette. Est-ce cela le fédéralisme?

N'ont-elles pas assez donné en travaillant toute leur vie et en payant des impôts? Qui croyez-vous donc a rempli les coffres de l'État, sinon elles?

En conclusion, je voudrais vous rappeler que ce n'est pas la souveraineté du Québec qui menace le revenu des gens âgés. La menace sur les pensions de vieillesse vient du fédéral. C'est ça le prix à payer pour le statu quo, le prix à payer pour un non au prochain référendum.

Dans un Québec souverain, un titre comme celui invoqué au début de ce discours, c'est-à-dire l'insensibilité du gouvernement face à la situation de la femme ne trouvera pas preneur. Équité, sera notre discours.

(1220)

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je suis vraiment très surpris de la motion présentée par l'opposition. J'aurais aimé qu'il y ait un préambule à cette motion et qu'il se lise ainsi: Que cette Chambre félicite le gouvernement pour toutes les initiatives qu'il a prises jusqu'à présent sur le développement des opportunités pour les femmes.

Mon collègue oublie que dans notre Budget de 1994, on a confirmé notre engagement fédéral à fournir 100 millions de dollars au Programme de réparations d'urgence, on a également rétabli le Programme de contestation judiciaire qui finance les


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causes judiciaires fondées sur les dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés garantissant les droits à l'égalité.

Je veux souligner que ces programmes ont su développer la juridiction permettant une décision économique plus favorable pour les femmes. De plus, notre gouvernement a annoncé la création de la Fondation canadienne des relations raciales qui est une mesure très importante pour les femmes qui sont confrontées à la double discrimination du sexisme et du racisme.

Je peux vous citer au moins 15 ou 18 différentes initiatives que le gouvernement a prises jusqu'à date qui offrent des opportunités aux femmes canadiennes. Alors, je suis surpris de voir les partis d'opposition attaquer le gouvernement. J'aimerais dire à mes honorables collègues qu'après un an, on a fait des choses qui sont très favorables aux femmes comparativement à l'ancien gouvernement qui y a mis dix ans d'efforts. Je me demande pourquoi mon honorable collègue ne se lève pas pour féliciter le gouvernement.

M. Fillion: Monsieur le Président, il m'est très difficile de pouvoir féliciter le gouvernement, alors que l'on s'aperçoit que la condition de la femme diminue continuellement, que ce soit des jeunes femmes, des femmes d'âge moyen ou des personnes âgées dont la condition de vie se détériore constamment.

Nous n'avons qu'à penser, par exemple, au gel des prêts étudiants alloués aux jeunes pour leurs études. Tout à l'heure, on a démontré que ces jeunes-là allaient sortir de nos universités endettés par-dessus la tête. Voilà, ce que nous offre le Canada. On nous a également démontré parfaitement, chiffres à l'appui, qu'il n'y aurait plus de nouvelles places au niveau des garderies pour permettre aux femmes de retourner sur le marché du travail.

Voilà, encore une fois, ce que le gouvernement nous offre. Également, en aucun endroit est-il question d'apporter des correctifs aux logements sociaux. Coupures, coupures, coupures. Pour moi, c'est une honte. Dans le livre rouge qui, pour moi, est rendu noir, il n'y a absolument rien qui nous indique des mesures effectives pour la condition féminime.

Bien sûr, on peut dire que le gouvernement a tout de même une secrétaire d'État à la Condition féminine, mais, mis à part le titre, que lui reste-t-il, après avoir aboli le Conseil consultatif? Que lui reste-t-il? Elle n'a plus de budget, elle n'a plus rien à faire. Donc, éliminons ce titre-là, qui est beaucoup plus un titre pour donner «bonne bouche» au gouvernement fédéral que pour faire avancer la condition féminine.

[Traduction]

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole sur la motion d'aujourd'hui. Même si je dois dire en commençant que je n'appuie pas la motion qui a été présentée, je suis heureux que la députée de Québec l'ait présentée, car elle permettra de faire ressortir certaines des mesures positives que le gouvernement a prises depuis qu'il a été élu.

(1225)

Il est important que les particuliers et les parlementaires, ceux-là surtout, soient périodiquement forcés de penser aux questions comme l'égalité, que ce soit entre les sexes ou entre les personnes de race ou de couleur différentes, entre les immigrants et les Canadiens de deuxième et de troisième générations ou les autochtones.

Nous venons ici pour parler des questions du jour. Il est important que nous comprenions que, malheureusement, notre société ne peut pas prétendre pratiquer l'égalité dans tous les aspects de la vie canadienne. Il est regrettable que dans une société tolérante comme la nôtre, il y ait encore tant d'intolérance. Il est regrettable qu'une société aussi progressiste connaisse autant de bigoterie, d'isolationnisme et de haine à l'égard de ceux qui sont différents de nous, qui que nous soyons, d'ailleurs.

Il est important d'essayer de replacer ce débat dans son contexte. Le parti auquel j'appartiens a fait campagne pendant des années sur des plates-formes où figurait l'égalité. Je suppose que les résultats obtenus et la sincérité d'un parti ou d'une institution politique, celle du Parlement ou d'un gouvernement, la sincérité des déclarations, doivent être jugés en fonction des décisions qui ont été prises.

Les décisions que nous avons prises au cours des 18 derniers mois sont plutôt importantes. Cela ne veut pas dire que ce sont les seules actions nécessaires. Bien au contraire. Lorsqu'il est question de choses comme l'inégalité, la bigoterie et le racisme, il faut être constamment vigilant. Ces choses ont tendance à ressurgir et lorsqu'on fait un pas en avant, à moins d'être très, très vigilant, quelqu'un risque de nous faire reculer de deux ou trois pas.

J'ai l'impression que cette motion est en réaction à certaines des mesures budgétaires. J'ai également l'impression que certains s'inquiètent, sans doute à juste titre, des changements rendus nécessaires par les réalités financières telles que l'augmentation du déficit et de la dette ainsi que la nécessité d'essayer de relancer l'économie.

J'ai l'impression que la députée de Québec s'inquiète de la disparition du Conseil consultatif canadien du statut de la femme. Moi aussi cela m'a inquiété lorsqu'une telle possibilité est devenue le sujet d'un débat public et la source d'une grande consternation.

Je remarque que le gouvernement transfère à Condition féminine Canada le programme de promotion de la femme, qui faisait partie du ministère du Développement des ressources humaines. C'est une décision très significative de la part du gouvernement canadien et ce, pour deux raisons.

Sous les gouvernements précédents, lorsque nous pensions avoir de l'argent et que nous avons emprunté plus que ce que nous aurions dû, nous en avons souvent donné à des groupes d'intérêts spéciaux en leur disant: «Tenez, voilà de l'argent pour être la voix des femmes dans la société.» Si on y pense bien, c'était une chose terrible. Quels étaient les véritables motifs derrière ça? Était-ce de prétendre que les questions féminines ne méritaient pas la vigilance continue des parlementaires? Est-ce que cela voulait dire qu'elles devaient être reléguées à un échelon inférieur et devenir l'exclusivité d'un «groupe d'intérêt spécial»?


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J'ai toujours trouvé le financement public des groupes d'intérêts spéciaux très contestable. Le gouvernement me paie moi, en tant que parlementaire, pour défendre les intérêts de mes électeurs. Au fil des années, on en est venu à considérer comme une pratique acceptée que les parlementaires se cachent derrière le fait qu'il existe des groupes financés par les contribuables pour faire valoir et appuyer des intérêts que nous sommes censés défendre et protéger, en notre qualité de représentants du Parlement, des assemblées législatives ou des conseils municipaux partout au Canada.

À mon avis, le gouvernement actuel a pris d'excellentes initiatives pour promouvoir l'égalité, et pas seulement dans des domaines de compétence fédérale. Les gouvernements doivent donner l'exemple.

C'est une députée qui compte parmi les parlementaires les plus éloquents, les plus solides et les plus crédibles que le gouvernement a désignée comme secrétaire d'État chargée de la situation de la femme. Au cours des deux dernières législatures, c'est très difficile de trouver un député qui a fait valoir avec autant d'insistance, de conviction et de sincérité les préoccupations des femmes, au point de les rendre incontournables pour les gouvernements. Ce n'est certes pas un hasard si la députée de Mont-Royal est aujourd'hui secrétaire d'État chargée de la situation de la femme.

(1230)

La plupart des femmes, des Canadiens les plus activistes et les plus féministes, conviendront que le choix de la députée de Mont-Royal comme secrétaire d'État chargée de la situation de la femme a traduit le sérieux que le gouvernement accorde à cette question.

C'est ainsi qu'il y a eu notamment le projet de loi C-64 concernant la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Nous avons cherché à conforter cette loi, qui est une des mesures à l'égard desquelles je me suis montré extrêmement critique dans le passé. Avant de me prononcer, je vais d'abord voir l'effet réel des modifications que nous avons proposées récemment. C'est bien d'avoir un projet de loi, mais, pour que la mesure soit ensuite respectée, elle doit reposer sur des motifs très solides et prévoir des pouvoirs d'exécution, sans quoi elle n'est qu'une suite de mots sur du papier. Nous faisons néanmoins un pas dans la bonne direction.

Le budget de 1995 prévoit des mesures visant à faciliter l'accès aux capitaux des petites et moyennes entreprises. Tout le monde sait que 40 p. 100 des nouveaux entrepreneurs sont des femmes. Dès qu'on participe à la vie publique, surtout à titre de député, on sait généralement que les femmes sont deux fois plus désavantagées que les hommes quand elles se présentent à une banque ou une institution financière pour contracter un emprunt. Elles le sont parce qu'elles proposent la mise sur pied d'une petite entreprise et que les banques ne semblent pas très enclines à prêter de l'argent pour des petites entreprises. Il faudrait les punir, voire les condamner, car leur décision trahit une certaine part de sexisme, qui est généralisé sans être direct. Les femmes ne semblent pas avoir le même accès que les hommes à des capitaux.

Cependant, il ne faut pas s'arrêter là. L'une des mesures dont nous avons discuté au cours de la période préélectorale visait à créer des programmes spéciaux pour les femmes d'affaires. Le Comité de l'industrie s'est d'ailleurs penché sur cette question. Je sais que les membres de ce comité ont beaucoup de pain sur la planche, mais je les encourage à reconnaître le fait que les femmes d'affaires sont doublement défavorisées. Il faut s'employer à remplir rapidement l'une des promesses faites dans le livre rouge. Nous devons trouver des façons de fonder des instituts pour les femmes d'affaires et de veiller à ce que ces femmes aient véritablement accès à des fonds de roulement.

Tous ceux qui ont suivi la réforme de la politique sociale, tant ceux qui l'appuyaient que ceux qui s'y opposaient, savent que l'un des volets de cette réforme tendait à étudier la situation des femmes et des enfants qui vivent dans la pauvreté et à déterminer si les outils dont nous disposons actuellement, soit les programmes sociaux que nous avons, répondent vraiment aux besoins des femmes et des enfants pauvres.

Les propositions publiées dans le livre vert abordaient clairement cette question. Elles visaient à susciter au Canada un débat pour déterminer si les Canadiens ont les ressources, le courage et la prévoyance nécessaires pour modifier les programmes sociaux afin que certaines personnes délaissées, et plus particulièrement les mères chefs de famille et leurs enfants, ne soient plus condamnées à une vie d'enfer et de misère. J'espère que, au terme du débat sur le budget, certaines des bonnes mesures prévues dans le livre vert se concrétiseront et que nous serons vraiment en mesure d'adoucir le sort réservé aux femmes pauvres et à plus d'un million d'enfants qui vivent dans la pauvreté au Canada.

Nous avons également tenu un autre engagement pris dans le livre rouge, soit la création de la Fondation canadienne des relations raciales. Certains députés croient fermement qu'il s'agit là d'un véritable gaspillage d'argent. S'ils allaient seulement visiter n'importe quelle communauté minoritaire au Canada, une communauté noire ou une communauté d'immigrants, ils verraient que l'aiguillon du racisme est toujours présent au Canada et que sa piqûre est malheureusement tout aussi cuisante aujourd'hui qu'autrefois.

La Fondation des relations raciales que notre gouvernement a fondée vise à aider non seulement les minorités au Canada, mais aussi les femmes, qui sont triplement désavantagées dans notre pays. Au sein de la société canadienne, les femmes noires et les femmes autochtones sont parmi les plus grandes victimes de discrimination. La Fondation canadienne des relations raciales est un exemple bien concret de l'engagement du gouvernement à concentrer ses efforts et son attention sur la solution de ces problèmes bien réels.

Il y a d'autres choses que je tiens à signaler rapidement et, notamment, le groupe de travail sur la prostitution. Je ne peux songer à un crime plus violent et plus odieux contre les femmes que la prostitution. Notre gouvernement, par l'intermédiaire du ministre de la Justice, a fait savoir qu'il est disposé à prendre des mesures sévères et décisives pour mettre un terme à ce crime odieux contre la société, contre les femmes, contre nos filles et


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nos petites-filles. Nous sommes déterminés à faire quelque chose et des mesures sévères seront prises par le ministre ou par des gens comme moi, qui présenteront des projets de loi d'initiative parlementaire à la Chambre.

(1235)

À propos du projet de loi sur le contrôle des armes à feu, je mentionne que 50 p. 100 des femmes qui sont tuées le sont au cours de querelles domestiques et au moyen d'armes à feu qui sont dans la maison. Nous avons pris des mesures sévères et décisives.

Le présent débat ne devrait pas tenir seulement compte des questions financières, mais aussi des mentalités. Quand je balaie cette assemblée du regard et que je vois la qualité des députés en général et des femmes en particulier, je sais que nous avons fait du chemin, mais nous avons encore une grande distance à parcourir.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, je vois que mon collègue d'en face a fait aussi beaucoup de constats sur la condition féminine. Cependant, les mesures qu'il a annoncées sont surtout d'ordre social. Ce sont de très bonnes mesures mais, aujourd'hui, le but de la motion est de parler des mesures économiques qu'on entend prendre pour que les femmes puissent vivre de façon plus égalitaire.

Là-dessus, j'aimerais demander au député d'en face ce qu'il pense de l'amendement sur la réforme du Code du travail. Je sais qu'en 1993 les députés du Bloc québécois ont proposé un amendement pour harmoniser avec la Commission de la santé et de la sécurité du travail du Québec les sommes d'argent que l'on donne aux femmes quant à un retrait préventif lorsque la femme se trouve enceinte. Je sais que présentement un document interne circule où on ne fait aucunement cas de la motion proposée par les députés du Bloc québécois, alors que les députés libéraux l'avaient appuyée.

Aujourd'hui est une journée d'action, une journée où on demande au gouvernement de s'engager concrètement dans des mesures qui favoriseront les femmes. Dans ce dossier, on voit qu'il y a deux catégories d'employées féminines. Quand on travaille au gouvernement fédéral et qu'on se retrouve enceinte, le retrait préventif nous permet de gagner moins: au Québec, on reçoit 95 p. 100 du salaire, et au fédéral je pense que c'est 60 p. 100.

Comment se fait-il qu'on n'en tient pas compte cette fois-ci dans la réforme de ce projet sur le retrait préventif?

[Traduction]

M. MacDonald: Monsieur le Président, en bref, je dirai que j'ignore pourquoi on n'a pas accordé plus d'attention à la motion dont parle la députée. Je serai franc. Je ne connais pas tous les détails concernant la mesure législative québécoise dont elle parle.

Cependant, j'ai écouté attentivement et je peux dire à la députée de Québec que je la félicite d'avoir pris les moyens pour porter ces questions devant le Parlement du Canada. Et c'est bien ici l'endroit où il faut discuter de ces questions.

En étant à mon deuxième mandat, je peux également lui dire que beaucoup trop souvent, de bonnes propositions présentées par des députés de l'opposition sont rejetées et c'est très malheureux. Lorsque nous parlons de questions de justice et d'égalité, surtout lorsque ces questions touchent plus de 50 p. 100 de la population, il faut renoncer à l'esprit de parti. Lorsque de bonnes propositions sont faites, le gouvernement devrait les étudier.

J'attends avec impatience d'obtenir plus de renseignements sur la question. Si c'est une mesure progressive qui vise à accroître l'égalité des femmes, non seulement au Québec, mais partout au Canada, c'est une mesure que j'appuierai, peu importe la position officielle que pourrait adopter mon parti.

La députée de Québec a aussi dit que le débat portait sur l'égalité économique. En réalité, l'égalité sociale et l'égalité économique sont étroitement liées. On ne peut pas refuser la première et s'attendre à ce que la deuxième soit possible. Il est évident que le gouvernement fédéral et le Parlement doivent avancer sur deux fronts à la fois: adopter des lois et donner l'exemple pour que la société devienne véritablement égalitaire, tant sur le plan social que sur le plan économique. Nier l'égalité sur l'un de ces plans empêcherait l'égalité de se réaliser sur l'autre plan.

[Français]

Le vice-président: Il ne reste que 30 secondes à l'honorable députée de Québec si elle désire poser une autre question ou faire un commentaire.

Mme Gagnon (Québec): Effectivement, monsieur le Président, je suis d'accord avec le député d'en face que la réalité économique est liée aussi à une réalité sociale. Mais je soulignerai qu'on a réduit les budgets des organismes communautaires qui oeuvrent dans les différents milieux et qui mettent de l'avant des programmes sociaux pour aider les plus démunis de notre société.

(1240)

Je suis d'accord avec le député. Ce que je voudrais, c'est la mesure concrète sur le plan financier qui va sous-tendre aussi l'action communautaire sociale de ces organismes.

Pour la gouverne de mon collègue le député d'en face, j'aimerais lui dire qu'un document interne circule actuellement, portant sur le projet de la réforme du retrait préventif. On ne retrouve pas la motion qui avait été adoptée par les libéraux.

[Traduction]

M. MacDonald: Monsieur le Président, je remercie la députée pour son observation et elle peut avoir l'assurance que j'examinerai la question.

Dans la pratique, le meilleur moyen de parvenir à l'égalité, comme la députée de Western Arctic l'a dit, c'est d'avoir un emploi. Malheureusement, dans notre économie, les femmes n'ont pas la possibilité de réaliser leur plein potentiel. Ce n'est qu'en brisant les barrières que nous pourrons parvenir à une véritable égalité.


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J'aimerais travailler avec la députée de Québec. Je la félicite de soulever ces questions à la Chambre des communes avec autant de persévérance. Je suis convaincu qu'il y a d'autres députés, comme la députée d'Etobicoke-Lakeshore, qui travaille sans relâche pour les femmes des groupes minoritaires et l'ensemble des femmes, qui seraient prêts à travailler avec la députée de Québec pour arriver au but souhaité.

Mme Jean Augustine (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de confiance que je prends la parole pour répondre à la motion de la députée.

Je suis fière d'être membre d'un gouvernement et d'un parti qui a un bilan comme le nôtre, un bilan inégalé pour ce qui est d'être sensible aux problèmes des femmes et de prendre des mesures concrètes et pratiques pour promouvoir l'égalité économique des femmes. Je vais rester sur la question de notre histoire et de la réalité économique des femmes.

La force et la vitalité du mouvement féministe au Canada aujourd'hui remontent au moment de clarté et de pouvoir que nous avons vécu il y a 25 ans. L'occasion était le rapport historique publié en 1970 par la Commission royale d'enquête sur la situation de la femme.

À ce moment-là, les Canadiennes se sont rendu compte que l'égalité des chances était devenue possible. Ce n'était pas seulement grâce à un gouvernement libéral qui avait surmonté tous les obstacles pour établir cette commission royale d'enquête en 1967, mais aussi grâce à la volonté des femmes qui tenaient à faire de l'égalité une réalité. C'était aussi l'empressement avec lequel le gouvernement libéral a répondu, en 1970, aux recommandations de la commission royale d'enquête qui a inspiré les femmes à redoubler d'efforts pour faire avancer leur cause.

Je crois que la députée reconnaîtra que c'est un gouvernement libéral qui a nommé le premier ministre responsable de la Situation de la femme au Canada en 1971. C'est également un gouvernement libéral qui a établi le Bureau du coordonnateur de la situation de la femme en 1971, qui porte maintenant le nom de Situation de la femme Canada, principal organisme du gouvernement fédéral chargé de coordonner les politiques en matière d'égalité des femmes. C'est un gouvernement libéral qui a créé le Programme de promotion de la femme en 1973 pour fournir une aide financière et technique aux organisations féminines et autres groupes bénévoles qui travaillent pour promouvoir l'égalité des femmes. La députée connaît la riche histoire et le riche héritage des libéraux de même que leur engagement à l'égard des questions féminines.

Avec l'appui du gouvernement libéral, les femmes ont aujourd'hui réussi à rendre le monde du travail plus sensible aux besoins de la famille. Les femmes obtiennent le soutien dont elles ont besoin pour équilibrer leur travail et leurs responsabilités familiales à l'égard des jeunes enfants, des parents vieillissant ou des deux.

Aujourd'hui, avec l'appui du gouvernement libéral, les femmes ont également fait inscrire les questions de harcèlement sexuel, d'équité en matière d'emploi et le reste au programme d'action du monde du travail. Avec l'appui du gouvernement libéral, les femmes sont en train de convaincre d'autres secteurs de la société que ce genre de questions dans le domaine de l'emploi ne concernent pas uniquement les femmes. Ce sont des questions sociétales qui nous concernent tous, les hommes aussi bien que les femmes.

Avec le soutien du gouvernement libéral, un nombre record de femmes ont lancé leurs propres entreprises. Aujourd'hui, les femmes exploitent 39 p. 100 des petites entreprises au Canada. D'après le sondage le plus récent effectué par la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, les femmes chefs d'entreprise réussissent très bien.

Les PME constituent le principal moteur de notre économie, créant 85 p. 100 de tous les nouveaux emplois au Canada. Selon mes calculs, cela fait des femmes les principales protagonistes de la création d'emplois aujourd'hui au Canada.

(1245)

Il est particulièrement encourageant de constater le rôle de plus en plus dominant que jouent les jeunes femmes dans la création de nouvelles entreprises. Comme Le Devoir le faisait remarquer la semaine dernière, 51,4 p. 100 des propriétaires canadiens d'entreprises de moins de 25 ans sont des femmes. D'après les chiffres de 1991 compilés par la FCEI, cela se compare avantageusement au chiffre de 30,6 p. 100 pour 1981.

Voilà un bon résultat, qui témoigne éloquemment du soutien que notre gouvernement a accordé à la cause de l'égalité économique des femmes. Il s'agit là de la substance de la motion. Tout indique que la place de plus en plus grande que les femmes occupent dans le secteur de la petite entreprise s'avérera un facteur important de la croissance économique à venir de notre pays.

Je me réjouis de constater que le secteur de la petite entreprise a fait l'objet de plusieurs engagements importants qui ont été pris dans le budget du 27 février. Le ministre des Finances a déclaré que le gouvernement était résolu à éliminer les obstacles à la réussite des petites entreprises. Nous sommes également résolus à leur fournir une aide concrète pour leur permettre de survivre et de prospérer. Il est indispensable que les petites entreprises aient accès au financement dont elles ont besoin pour demeurer la principale source de création d'emplois.

Le gouvernement va en outre coopérer avec les banques au cours des prochains mois afin d'élaborer des points de référence applicables au financement de la petite entreprise. Nous allons tâcher de réunir des données solides sur le taux de réussite des entreprises appartenant à des femmes pour que les banques finissent par prendre conscience qu'il est logique, sur le simple plan commercial, d'ouvrir leurs portes et leurs coffres aux femmes.

Il a également été annoncé dans le budget que nous allions réduire substantiellement les subventions aux entreprises. Dans l'économie actuelle, les subventions ne sont pas un moyen rentable de créer des emplois, d'accroître la productivité et de stimuler la croissance. Personne n'en est plus conscient que les entreprises elles-mêmes.

Le gouvernement a décidé de se préoccuper en priorité des éléments qui sont le moteur de la croissance économique, c'est-à-dire les sciences, la technologie et le développement du commerce. En fait, le gouvernement s'efforce de mettre en place une politique propre à encourager et à récompenser l'innovation et la


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souplesse nécessaires pour exploiter les occasions qui surgissent sur le nouveau marché planétaire.

Le potentiel est là, indéniablement. Notre gouvernement en est conscient. Il sait aussi que les femmes ont l'imagination et la détermination voulues pour participer pleinement à une économie mondiale en croissance.

La députée a expliqué avec éloquence que nous ne réussissons pas à combler tous les besoins. Il importe de lui rappeler que le gouvernement et les députés ministériels sont conscients de ce qu'il faut faire, des progrès à accomplir pour répondre à tous les besoins, de manière à assurer la qualité de vie des femmes et des familles.

En ce qui concerne l'aspect économique, je crois qu'il faut rejeter la motion à l'étude. Le gouvernement libéral est parfaitement au courant des engagements à prendre à l'égard de la situation des femmes sur le plan économique.

[Français]

Mme Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, je suis d'accord avec ma collègue députée quand elle dit que les questions concernant la condition féminine en 1995 sont aussi des questions sociétales. Je suis d'accord avec elle. Cependant, n'est-il pas encore le lot, la responsabilité de plusieurs femmes d'aller chercher son enfant à la garderie, d'avoir à exécuter la double tâche à la maison?

Je demanderais à ma collègue députée si elle va pouvoir pousser le dossier des garderies à ses collègues députés, parce qu'on avait promis 50 000 places par année et on a un manque à gagner, au Québec, de 35 000 place en garderie.

(1250)

Est-ce que le transfert aux provinces va se faire? On a atteint le 3 p. 100 du PIB, il serait temps que le gouvernement libéral aille de l'avant avec cette promesse qui a été une promesse du livre rouge du gouvernement.

J'aimerais savoir si on peut compter sur notre collègue concernant cette question si épineuse pour les femmes. Sans garderies, les femmes ne pourront pas aller sur le marché du travail si le gouvernement tarde trop. On compte 2 millions de places en garderie dans tout le Canada, dont un manque à gagner de 35 000 au Québec.

Ce que nous voulons au Québec ce n'est pas que le gouvernement fédéral arrive avec ses normes nationales mais qu'il permette les transferts aux provinces pour que le gouvernement du Québec puisse répondre à une grande demande qui a été faite par les femmes du Québec.

D'ailleurs, lors des consultations sur l'avenir du Québec, plusieurs groupes de femmes ont demandé cette aide pour que les femmes puissent envahir le marché du travail.

[Traduction]

Mme Augustine: Monsieur le Président, je suis d'accord avec la députée d'en face pour dire que si l'on veut que les femmes participent pleinement à la vie économique du pays, il importe que nous commencions à tenir compte des problèmes liés au fait que les femmes s'occupent des enfants et des personnes âgées d'une manière particulière.

Il est également important de noter que nous avons pris des engagements, notamment en ce qui concerne l'augmentation du nombre de places de garderie lorsque nous atteindrons un pourcentage donné du PIB. Cette promesse existe toujours. Nous n'avons pas changé d'avis en ce qui touche nos engagements d'augmenter le nombre de places de garderie, d'assurer l'équité en matière d'emploi et une foule d'autres engagements pris envers les femmes.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, mon honorable collègue, qui est également secrétaire parlementaire du premier ministre est probablement au courant de nombreux dossiers, plus particulièrement ceux qui concernent la condition féminine. Un document circule actuellement quant à la réforme du Code du travail.

Je me rappelle que lors de la dernière réforme du Code du travail en mai 1992, si ma mémoire est bonne, j'avais proposé un amendement permettant que les femmes du Québec aient droit aux mêmes conditions. Que celles qui relèvent du code fédéral aient les mêmes conditions que celles relevant du code provincial quant au retrait préventif des femmes enceintes. Au Québec, c'est 95 p. 100 du salaire, au fédéral 60 p. 100.

Or, j'avais proposé un aménagement administratif, le fédéralisme flexible il va sans dire, et les libéraux, alors dans l'opposition, avaient appuyé cette proposition. Je demande donc à mon honorable collègue comment il se fait que cette proposition, maintenant qu'ils sont au pouvoir, ne se retrouve pas dans la réforme proposée du Code du travail que le gouvernement va présenter d'ici quelques semaines.

[Traduction]

Mme Augustine: Monsieur le Président, nous avons besoin de la collaboration des députés d'en face pour toute une série de choses. Tout comme le député demande notre collaboration en cette matière, nous devrions nous aussi lui demander la sienne pour ce que nous voulons faire.

La question de la situation de la femme n'en pas une qui n'intéresse que le Québec. Elle intéresse aussi les gens à l'extérieur du Québec. C'est une question qui intéresse toutes les femmes. Nous devons donc nous préoccuper de la situation de la femme au Canada, discuter de cette question et faire en sorte que les règlements, les politiques et les mesures en matière d'équité, entre autres choses, servent à assurer une qualité de vie à toutes les femmes du pays.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec la députée de Laurentides.

Se lever en cette Chambre est toujours un honneur, un privilège et un député doit toujours se rappeler que lorsqu'il le fait il représente les personnes qui l'ont élu.


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(1255)

Aujourd'hui, d'une façon très spécifique, je vais m'adresser à vous en pensant à 52 p. 100 de la population du comté de Shefford qui sont des femmes.

Le Budget 1995 du gouvernement fédéral, déposé par le ministre des Finances, est totalement passé à côté du contrat social qui lie le gouvernement et la majorité des contribuables québécois et canadiens. Le Budget présenté par mon collègue de LaSalle-Émard nie la réalité économique et sociale de la classe moyenne et des moins nantis de notre société.

Ce Budget désavoue le droit aux femmes à une société plus juste et équitable. En fait, ce Budget n'est que de la poudre aux yeux pour masquer les vrais problèmes de fond.

Ce Budget passe complètement à côté des mesures visant à assurer aux femmes l'équité dans l'emploi, l'égalité des salaires et l'amélioration de leurs conditions de vie. Paradoxalement, l'an dernier, les libéraux avaient voté en faveur de mesures plus justes et équitables. Aujourd'hui, ces promesses se sont envolées.

C'est justement dans les secteurs clés de la santé, de l'aide sociale et de l'éducation postsecondaire que le gouvernement libéral a décidé de sacrifier la chèvre, et cela, sans ménager le chou. Les premières victimes des coupures effectuées dans les transferts aux provinces seront les femmes et les enfants.

En balayant ses problèmes financiers dans la cour des provinces et du Québec, le gouvernement fédéral n'a pas tenu compte de l'impact de ses coupures sur les femmes.

De surcroît, Ottawa attaque les femmes du troisième âge sur un deuxième front en considérant à terme le montant de leur chèque de pension de vieillesse évalué en fonction du revenu de leur conjoint. Cette diminution s'ajoutera aussi à la réduction du crédit d'impôt en raison de l'âge décrétée l'an dernier.

Je regrette vivement que le gouvernement fédéral se soit déchargé sur le dos des provinces plutôt que d'éliminer les chevauchements et de s'attaquer aux abris fiscaux qui privent le gouvernement de centaines de millions de dollars chaque année.

Les priorités du gouvernement sont aux mauvais endroits et manquent de vision. On dirait qu'Ottawa est dirigé par un groupe de courtiers à la recherche d'une bonne affaire lucrative en spéculant sur des marchés à court terme avec l'argent des autres.

Je n'oserais dire que le métier de courtier est vilain, bien au contraire, mais ce n'est pas ce dont nous avons besoin ici à Ottawa. Nos dirigeants doivent être des personnes responsables, à l'écoute de la majorité des payeurs de taxes et de services qui en ont assez de se faire prendre pour le citron.

Prenons par exemple le Régime d'assistance publique du Canada, communément appelé le RAPC. Malgré les dispositions du régime d'aide concernant les services subventionnés de garde d'enfants, la pénurie de services adéquats et abordables demeure toujours un problème de taille pour un grand nombre de familles qui ont un ou plusieurs enfants.

Le manque de places en garderie est un sujet de préoccupation fondamental pour répondre aux besoins des parents à faible et à moyen revenu.

Voilà un constat marqué de préoccupation sociale profonde, mais si vous retrouvez ce même constat dans le livre rouge, le fameux livre rouge du Parti libéral, on pourrait être tenté de croire que c'est un plan d'action prévisible.

Ainsi, aux pages 35 et 36 du livre rouge, on peut lire, et je cite: «La garde d'enfants est d'une importance capitale car il faut faciliter la réinsertion professionnelle des parents de jeunes enfants. Selon des enquêtes menées récemment par le Conseil national du bien-être social, il faut le plus souvent deux revenus pour qu'une famille ait des ressources financières suffisantes. Un nombre croissant de familles ont besoin de deux revenus pour se donner un niveau de vie correct. Des services de garde de qualité, à la portée de toutes les bourses, peuvent faire pencher la balance pour les familles se situant entre le minimum vital et un niveau de vie moyen.»

(1300)

Cette citation-là est prise intégralement du livre rouge. La garde d'enfants bien assurée et à la portée de toutes les bourses est un avantage économique. Elle permet aux parents pauvres de réintégrer la vie professionnelle et de ne plus dépendre de l'aide sociale et des banques alimentaires. Elle crée aussi des emplois, notamment pour les femmes, à raison d'un poste, en moyenne, chaque fois que cinq enfants sont placés en garderie.

Alors toute cette notion libérale de service qui permet d'accéder à l'indépendance financière demeure à l'état d'intention et demeure lettre morte, sans adresse, tel de belles promesses électorales qu'on aura vite oubliées d'ici la prochaine campagne électorale.

Dans le livre rouge du gouvernement libéral, on peut lire qu'un gouvernement libéral créera 50 000 nouvelles places en garderie chaque année qui suivra une croissance économique de 3 p. 100. Or, on a atteint cette croissance économique cette année. Sachant que les garderies financées par l'État le sont pour la moitié par les pouvoirs publics fédéraux et pour l'autre moitié par les pouvoirs publics provinciaux, qu'advient-il des places en garderie promises lorsque le gouvernement libéral coupe 350 millions de dollars en transferts de paiement au Québec?

Qu'advient-il du financement fédéral de 40 p. 100 des frais pour les places supplémentaires en garderie, évalué à 120 millions de dollars pour 1995-1996, à 240 millions pour 1996-1997 et à 360 millions pour 1997-1998, pour un total de 720 millions sur trois ans? Ces chiffres sont tirés du livre rouge. Le livre rouge, la bible des libéraux, il y a longtemps qu'on n'en parle plus. Où sont passées les belles promesses des libéraux?

Parlons maintenant du logement social. Globalement, le Budget 1995-1996 a pour effet d'arrêter toute nouvelle initiative en matière de logement social. Étant donné qu'environ 17 p. 100 des ménages au Québec et 16 p. 100 des ménages locataires canadiens paient plus de 50 p. 100 de leur revenu en loyer, on comprend aisément que les besoins en matière de logement


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social soient énormes et que le pelletage que le gouvernement fédéral fait dans la cour des provinces aura des conséquences importantes à long terme. Les femmes, qui constituent une clientèle importante, soit 57 p. 100 qui occupent des logements sociaux, seront particulièrement touchées par ces coupures.

Le Budget 1995-1996 veut également dire que les 40 000 personnes inscrites sur la liste d'attente de la SCHL, la Société canadienne d'hypothèques et de logement, pour obtenir une unité coopérative, devront attendre des mois, voire des années, avant que des logements se libèrent. L'espoir que de nouveaux logements soient construits n'existe plus.

La SCHL fermera 20 succursales à travers le Canada. Au Québec, le bureau de Longueuil sera fermé, tandis que la permanence dans les bureaux de Sept-Îles, Rimouski, Val-d'Or et Trois-Rivières sera assurée par une seule personne qui travaillera chez-elle. Les désengagements successifs d'Ottawa démontrent bien les limites de la formule des ententes administratives entre Québec et Ottawa dans des situations de retrait unilatéral.

Le Québec est aujourd'hui pris au dépourvu par l'ampleur du désengagement financier d'Ottawa dans l'habitation sociale parce qu'il s'est placé à la remorque du gouvernement fédéral, fort de son pouvoir de principal bailleur de fonds de l'entente. Incapable de pallier le désengagement unilatéral d'Ottawa, le Québec est contraint de revoir sa programmation et d'annuler la réalisation de nouvelles unités de HLM pour lesquelles il s'était engagé auprès des municipalités.

En raison de son importante entraide communautaire et du faible coût du logement, l'habitation coopérative a fourni une option intéressante aux familles monoparentales dirigées principalement par des femmes.

(1305)

Cette entraide communautaire, y compris notamment la garde d'enfants, est un facteur important qui a contribué au taux de participation beaucoup plus élevé des familles monoparentales des coopératives à la main-d'oeuvre active. Si nous ne répondons. . .

Le vice-président: Malheureusement, le temps alloué au député est expiré. S'il y a consentement unanime, le député pourra continuer. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

M. Leroux (Shefford): Merci, monsieur le Président. Alors, je vais faire attention à ce que je vais dire pour conclure.

L'accès à un logement à prix abordable et de qualité est reconnu comme une condition préalable essentielle pour répondre à d'autres besoins tels que l'éducation, la santé, la productivité de la main-d'oeuvre et la sécurité sociale.

En cette période de compressions budgétaires, la société québécoise et canadienne accorde encore une priorité aux besoins de logement des Québécois et Canadiens défavorisés. Ce sont eux qui nous intéressent, ceux qui sont défavorisés. Le logement social a un rôle particulier à jouer pour répondre à ces besoins. Le gouvernement fédéral doit continuer d'accorder une priorité de premier ordre au financement du logement social. En maintenant ce programme comme priorité aujourd'hui, nous éviterons des coûts plus élevés dans d'autres domaines plus tard.

Le gouvernement n'a pas le droit de sacrifier tant de familles, de femmes et d'années d'efforts pour le maintien de la paix sociale dans une société qui se dit juste et équitable.

M. Mac Harb (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, on ne sait jamais quoi faire avec mes collègues du Bloc québécois. Parfois, ils veulent enlever des responsabilités au gouvernement fédéral pour les déléguer au gouvernement provincial et d'autres fois, ils veulent qu'on les laisse au fédéral.

Pour ce qui est du logement, il est bien clair que c'est un dossier qui est de la responsabilité des provinces, mais si mon collègue est en train de faire de la représentation pour que le gouvernement fédéral prenne plus de responsabilités que le provincial, je suis prêt à le faire avec lui, parce que je suis en accord avec le fait que le fédéral, bien souvent, fait mieux le travail que les provinces dans certains domaines.

Il a parlé des garderies. Je veux souligner à mon collègue qu'au printemps dernier, le gouvernement fédéral a annoncé la création d'un groupe de travail sur le traitement fiscal des pensions alimentaires pour les enfants. Ce groupe de travail, comme mon collègue le sait, était présidé par la secrétaire d'État responsable de la situation de la femme. Les représentants de ce groupe ont tenu une série de discussions publiques et ont traversé le pays d'un bout à l'autre pour demander l'avis des gouvernements provinciaux et territoriaux.

Je suis certain que si mon collègue accorde un peu plus de temps au gouvernement, on réussira à mettre en place un projet de loi répondant à ce besoin, mais il faut un peu de patience.

M. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, je dirais d'abord à mon collègue que ce que nous voulons le plus, nous, ici, ce qu'on est venu faire à Ottawa, c'est d'abord défendre les intérêts des Québécoises et des Québécois. C'est ce que nous faisons. Deuxièmement, nous aspirons à fonder notre propre pays. C'est dommage que le député n'ait pas compris cela.

Pour répondre à sa question, je me souviens que l'an passé, on parlait de la pauvreté des enfants. Mais, il faudrait comprendre que s'il y a des enfants qui sont pauvres, c'est parce qu'il y a des parents qui sont pauvres aussi. Les enfants ne sont pas là tout seuls à être pauvres! Donc, les personnes les plus pauvres de notre société, ce sont des femmes et c'est ce que je défends aujourd'hui, c'est ce que je dis.

Il s'agit donc d'abord souvent des familles monoparentales, où la femme a toute la responsabilité de l'éducation. Vous savez, quand un enfant est pauvre, il ne peut pas être performant à l'école. S'il n'a pas ce qu'il faut chez lui, il ne peut pas réussir et espérer s'en sortir. C'est ce qu'il est important de retenir.

(1310)

Vous savez, monsieur le Président, les libéraux, lorsqu'ils étaient de ce côté-ci de la Chambre, ils avaient de bons et beaux discours. Depuis qu'ils sont de l'autre côté-normalement un gouvernement élu se rassoit-ce que je trouve de ce parti et de ce gouvernement c'est qu'il n'est pas assis, il est couché par terre. Les libéraux devraient d'abord regarder leur politique sociale.


10600

On se rappelle de l'époque Trudeau, où on parlait de la société juste, une société extraordinaire. Je pense que les libéraux actuels ont mis tout cela de côté et sont pires que les conservateurs.

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de fierté, encore une fois, que j'interviens aujourd'hui dans le cadre de cette journée de l'opposition officielle dédiée exclusivement à la situation des femmes, et plus précisément sur l'égalité économique de celles-ci.

Pour une deuxième année consécutive, et je tiens à le souligner, le Bloc québécois, par la voie de la députée de Québec, dépose une motion «femme». Ces journées toutes spéciales sont essentielles puisqu'elles nous permettent de regarder spécifiquement la place que nous occupons dans cette société, et par ricochet, je l'espère grandement, de faire avancer notre cause.

La motion à l'étude aujourd'hui stipule, et je cite:

Que la Chambre condamne le gouvernement pour son insensibilité et son inaction face à l'adoption de mesures concrètes visant à favoriser l'égalité économique des femmes, dans les domaines de compétence fédérale.
D'entrée de jeu, j'ouvre une parenthèse pour dénoncer une récente décision des libéraux qui démontre parfaitement le bien-fondé de notre motion. Cette décision vient fusionner trois organismes «femmes» à compter du 1er avril prochain. En effet, notre chère secrétaire d'État à la Condition féminine a annoncé qu'elle mettra dans le même sac le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme, les programmes féminins du ministère du Développement des ressources humaines et Condition féminine Canada.

Cette annonce faite par une femme est très décevante. Elle dénote nettement un manque de sérieux et de respect envers les femmes. La secrétaire d'État devrait avoir honte et se cacher à la suite de cette décision.

En regroupant ces services sous le chapeau de Condition féminine Canada, le gouvernement libéral vient d'abolir le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme. En agissant ainsi, les libértaux donnent dans la centralisation à outrance, la seule façon de faire qu'ils connaissent.

En absorbant le CCCSF, le gouvernement enlève au milieu, enlève aux femmes, un organisme indépendant qui faisait recherche et éducation pour les femmes et non pour le gouvernement. L'indépendance de ce Conseil était primordiale pour réaliser son mandat. Le Conseil pouvait faire pression sur le gouvernement. Il pouvait le pointer du doigt et dénoncer son inaction dans les dossiers «femmes».

À partir du 1er avril, le gouvernement libéral, je dis bien libéral, se donne le plein contrôle sur cet organisme. On impose le bâillon aux femmes.

Le 1er avril sera un jour sombre pour les femmes. J'ose croire que les femmes du caucus libéral se tiendront debout et dénonceront à leur tour cette décision. La solidarité des femmes est à mon avis beaucoup plus cruciale que la solidarité de parti politique.

Je ferme la parenthèse sur cette décision que je qualifie d'anti-femme.

Parlons maintenant chômage chez les femmes. Les statistiques de février 1995 indiquent que 642 000 femmes sont en chômage au Canada, soit un taux de 9,5 p. 100. Au Québec, ce taux grimpe à 11,6 p. 100, ce qui représente 187 000 femmes. Je note aussi qu'au Québec, il y a 280 082 femmes bénéficiaires de l'aide sociale.

Que fait le gouvernement fédéral pour baisser le taux de chômage chez les femmes? Rien. Le fédéral est bien assis et laisse agir la reprise économique. Sa stratégie en est une de laisser faire.

Où sont les emplois tant promis par les libéraux? Où sont les programmes de formation et de recyclage pour les femmes? Où sont les services favorisant la présence des femmes sur le marché du travail? Rien de tout cela n'a été fait, tel que promis par les libéraux. La seule mesure que les libéraux disent grande créatrice d'emploi est le Programme des infrastructures qui devait créer 45 000 emplois temporaires sur une période de trois ans.

(1315)

Les libéraux se sont pété les bretelles avec ce programme supposément salvateur. Ils disaient que ce programme allait mettre au travail les travailleurs et les travailleuses.

Les résultats sont bien minces. Des jobs temporaires saisonniers. Un programme qui ne fait que donner du boulot précaire aux gens déjà sur le marché du travail, mais qui ne crée pas vraiment de nouveaux emplois pour les chômeurs et chômeuses.

Les chômeuses, elles, sont totalement oubliées dans ce programme. Les groupes de femmes avaient d'ailleurs demandé au ministre responsable d'édicter certaines règles qui auraient permis aux femmes d'occuper une part de ces emplois pour la majorité dits non traditionnels.

À ma connaissance, le ministre n'a pas répondu favorablement à cette demande pourtant très légitime.

Malgré toutes les promesses des libéraux, on vit encore la situation de femmes en chômage, qui travaillent par moments, qui vont sur des projets ou programmes, qui retournent en chômage, qui recueillent des prestations d'aide sociale. Des femmes qui sont prises dans ce système vicieux, qui ne leur permet jamais de s'en sortir définitivement.

L'administration fédérale n'aide pas ces femmes, bien pire, je crois sincèrement qu'elle leur nuit. Le système d'emploi, de formation, de recyclage et de chômage du fédéral n'est pas moderne, n'est pas flexible et n'a surtout pas beaucoup d'imagination. Les mêmes programmes, les mêmes services et conditions existent depuis des années, alors que le marché du travail est en continuel mouvement.

Les résultats de ce système figé dans le ciment sont désolants. Les femmes ne peuvent répondre rapidement et efficacement aux besoins du marché du travail.

J'aimerais vous faire part d'un cas bien concret qui démontre très bien l'inefficacité du système fédéral. Il y a quelques mois, je recevais à mon bureau de comté une femme monoparentale, prestataire d'assurance-chômage, un maigre 170 $ par semaine.


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Pour s'en sortir, cette femme désirait suivre un cours de bureautique offert par la commission scolaire de sa région. Ce fameux cours qui offrait des perspectives intéressantes de travail était d'une durée de 18 mois. Or, le fédéral ne paie pas pour des cours de 18 mois. Le fédéral exige en effet qu'un diplôme soit octroyé après 12 mois de cours, pour qu'il reconnaisse ce cours.

Résultat: cette femme a continué de retirer ses maigres prestations jusqu'à la dernière.

Arrivée à cette limite de prestations, elle s'est inscrite à un cours intitulé Initiation aux métiers non traditionnels. Dans ce cours se retrouvent 13 femmes désireuses de suivre une formation de 14 semaines qui aboutirait à du travail. À la lumière des informations que j'ai recueillies à date, puisque le cours se donne actuellement, il apparaît nettement que cela ne marche pas.

Les métiers non traditionnels ne courent pas les rues, et les occasions de travail en ce domaine, dans une région touristique comme la mienne, sont quasi inexistantes.

Alors pourquoi le fédéral donne-t-il ce cours? Pourquoi dépense-t-il des sommes d'argent pour rien? Le fédéral ne peut-il pas effectuer quelques études pour voir si le marché du travail de ma région est ouvert à ces femmes et si les occasions d'emploi existent? Sinon, à quoi bon diriger ces femmes dans ce système de formation?

Hélas, il semble qu'on donne ce cours pour tout bêtement donner un cours.

Et ces femmes, elles, constatent bien, après quelques semaines, qu'elles sont embarquées dans une barque qui les mènera nulle part. Pourtant, elles étaient prêtes à mettre des efforts et des énergies dans un cours qui leur ferait voir de la lumière au bout du tunnel, c'est-à-dire du travail.

Au lieu de cela, on leur offre un cours étrangement structuré. On leur parle d'estime de soi. On leur dit de se prendre en main, de foncer. À la limite, on leur met un miroir en face et on leur dit: «Regardez-vous. Vous ne travaillez pas et c'est de votre faute. Alors bougez-vous!»

Ces femmes ne veulent pas ce genre de thérapie. Ces femmes veulent du concret, du réel. Elles veulent apprendre des choses qui les mèneraient à un travail.

Comme je vois qu'il ne me reste qu'une minute, je passe à la conclusion assez rapidement.

Nous, les femmes, valons autant que les hommes. Notre société, notre mode de vie et nos valeurs ont fait que les femmes ne furent pas reconnues à leur juste valeur. Il est temps maintenant de corriger cette erreur, et ce, promptement.

À la lumière de certaines actions prises par le gouvernement libéral, il est clair que ce dernier n'est pas prêt à faire de grands pas dans cette direction. Malgré toutes ces promesses faites aux femmes dans plusieurs domaines, le fédéral affecte les femmes très durement. Ce qu'il nous annonce comme réforme du régime d'assurance-chômage et de pension de vieillesse n'est pas de bon augure.

J'invite donc toutes les femmes du Québec à dire non au régime fédéral de plus en plus menaçant.

(1320)

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, il y a quelques remarques que je trouve très drôles de la part de l'honorable députée d'en face.

Premièrement, elle parle de solidarité. Cela vient d'un parti qui ne veut quand même pas encourager la solidarité chez tous les Canadiens, y incluant les femmes. Deuxièmement, en ce qui concerne la solidarité, il y a de ce côté-ci de la Chambre toutes les femmes qui représentent le gouvernement. On a démontré quand même qu'on est ouverts à la solidarité en ce qui concerne notre position, car si on prend l'exemple du 8 mars dernier, on a quand même ouvert un débat à toutes les femmes des deux côtés de la Chambre.

Maintenant, je pose une question à l'honorable députée. Elle a donné l'exemple d'une femme qui était venue dans son bureau et qui ne pouvait suivre des programmes. N'est-elle pas au courant-car c'est justement ce qu'on propose dans le Budget- qu'il va y avoir des transferts aux provinces où celles-ci vont être elles-mêmes responsables pour ces programmes. Ce sont elles qui vont offrir ces programmes. C'est justement ce que son parti a demandé, et c'est justement ce que l'on fait. Les deux, nous savons que dès que les femmes pourront avoir l'égalité économique, elles pourront également l'obtenir dans toutes les autres choses. Mais je lui pose quand même la question: Est-elle d'accord en ce qui concerne les transferts?

Mme Guay: Monsieur le Président, quand on nous parle qu'on va nous transférer plus de pouvoir dans les provinces, pour qu'on puisse avoir des programmes faits à notre échelle et à nos besoins, il faudrait peut être qu'on pense aussi à nous envoyer les sous pour pouvoir faire ces programmes.

Ce qu'on se prépare à faire, ici au fédéral, c'est de nous transférer des pouvoirs-ce ne sont pas des pouvoirs-des responsabilités que l'on n'aura même pas les moyens de les appliquer. Je pense qu'il s'agit-là d'une très grande question, et c'est une grave problématique qui s'en vient dans les prochaines années. Imaginez-vous. Nous, au Québec, au moins, on est bien structurés, mais dans d'autres provinces, comme les petites, il va y avoir une grosse problématique.

Deuxièmement, quand vous me parlez de solidarité des femmes que vous ne pouvez pas compter sur nous, le Bloc québécois, je rappellerai à la députée que, l'année dernière, nous avons déposé un projet de loi sur l'assurance-chômage, pour les femmes-je ne sais pas si elle s'en rappelle-et que nous avions demandé la solidarité des femmes à cet effet-là pour cesser que l'on pénalise les femmes qui travaillent avec leur mari, à l'assurance-chômage. Ils ont voté contre, alors que nous avions fait ce projet de loi-là pour les femmes. On avait demandé une solidarité entre femmes. Je peux dire une chose: Tant que cette solidarité n'existera pas entre les femmes, à côté des partis politiques-et elle n'existe pas ici en cette Chambre en ce moment, mais pas du tout-on n'arrivera jamais nulle part, nous, les femmes. Pourtant, on forme 52 p. 100 de la population. Je pense qu'il était temps, et je n'ai aucune leçon à recevoir de la députée-qu'elle se prenne en main elle-même. Et quand elle voit un projet de loi


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passer sous son nez, comme on l'a eu ici, dans cette Chambre, la dernière fois, qu'elle y pense deux fois avant de voter contre.

Mme Bakopanos: Monsieur le Président, je travaille pour la solidarité de tous les Canadiens et, de ce côté-ci de la Chambre, on a démontré qu'on encourage quand même les femmes à se présenter et d'être élues en même temps. Regardons le nombre de femmes qu'il y a de l'autre côté de la Chambre des deux partis de l'opposition.

Mais, je veux poser une question. On parle de la solidarité des lois. Nous avons présenté un projet de loi qui a été déposé récemment, le projet de loi C-64, Loi sur l'égalité en matière d'emploi, qui a été proposé par ce gouvernement. Justement, on a également demandé l'appui de l'autre côté de la Chambre. Ce projet de loi va donner, à mon avis, plus de chances aux femmes d'avoir l'égalité économique. Et justement, pourquoi n'a-t-on pas eu l'appui de l'autre côté de la Chambre?

Mme Guay: Monsieur le Président, je pense que la députée fait erreur. Je veux lui présenter un projet de loi qui était strictement pour les femmes. Le projet de loi dont elle me parle, n'est pas une loi pour les femmes. C'est un projet de loi qui est très large et qui est très vaste. On n'appuiera pas un projet de loi juste parce que la députée me dit que c'est un projet de loi.

Le projet de loi dont nous parlions était strictement pour protéger les femmes et pour les aider. Alors, quand elle me parle de solidarité, là, je regrette, je ne suis pas d'accord avec elle. Quand elle me parle aussi de son parti politique où il y a un certain nombre de femmes et où ils ont encouragé les femmes, je peux dire qu'au Bloc québécois, nous, les femmes ont s'est battues, au même titre que les hommes, et je suis très contente d'être élue ici à la Chambre, et de ne pas avoir été nommée par mon chef, mais de m'être battue, d'avoir eu une convention comme tout le monde, et d'avoir gagné ma place ici aujourd'hui.

(1325)

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Monsieur le Président, d'abord je remercie mon amie, la députée du comté de Québec pour cette question qui est un sujet important et d'actualité. Sa motion dit:

Que la Chambre condamne le gouvernement pour son insensibilité et son inaction face à l'adoption de mesures concrètes visant à favoriser l'égalité économique des femmes, dans les domaines de compétence fédérale.
J'ai l'impression que ce n'est pas vrai.

[Traduction]

Je dirais au député de Frontenac que la motion nous permet de discuter d'une question importante, mais que son libellé est un peu malhonnête. En fait, je dirais carrément qu'il est inexact. J'aimerais donc, au cours des prochaines minutes, examiner notre dossier à ce chapitre, car cette affirmation est tout à fait inexacte. Je suis très heureux de participer au débat, car je suis vraiment fier des mesures que le gouvernement a prises pour favoriser la justice sociale et l'égalité économique des Canadiennes.

Je me réjouis que la députée ait présenté cette motion sur l'égalité économique des femmes, car qu'est-ce qui pourrait être plus important pour le Canada que le bien-être de plus de la moitié de sa population? La prospérité des Canadiennes et de nos familles est indispensable pour que la situation de notre pays se redresse vraiment.

La motion à l'étude soulève une importante question. Qu'a fait le gouvernement actuel pour résoudre des problèmes qui ont des répercussions sur la situation économique des femmes? On peut répondre succinctement que le gouvernement a fait énormément, en relativement peu de temps. Le gouvernement a pris des engagements durant la campagne électorale et il les respecte. Mais avant de parler des mesures particulières que le gouvernement a prises pour honorer ses engagements, j'aimerais examiner le contexte général.

C'est maintenant un truisme de dire que l'emploi est le meilleur gage de sécurité sociale qui soit. Des gens représentant aussi bien la droite que la gauche du spectre politique l'ont démontré. Par conséquent, plus de 400 000 personnes peuvent dire qu'elles ont bénéficié de la meilleure garantie de sécurité sociale possible depuis que le gouvernement actuel a été porté au pouvoir en octobre 1993. Il existe des preuves que de solides progrès ont été réalisés à ce chapitre et qu'ils continueront de se multiplier. D'excellents emplois ont été créés; il s'agit surtout d'emplois à plein temps, et les femmes veulent leur juste part du gâteau. Le gouvernement sait toutefois que la croissance économique, à elle seule, ne suffit pas.

Les femmes demeurent confinées dans les emplois traditionnellement féminins comme l'enseignement, le nursing, le travail de bureau, le secteur des ventes et celui des services. Si le gouvernement ne s'en remettait qu'aux forces du marché comme le préconisent certains à la Chambre, la situation de l'emploi ne progresserait que timidement et péniblement en ce qui concerne les femmes.

Le gouvernement peut faire mieux que cela. Nous devons faire mieux. Le gouvernement reconnaît qu'il doit constamment aider les femmes à se tourner vers de nouveaux secteurs d'emploi en pleine croissance. Il reconnaît que ses programmes et services peuvent nous rapprocher de cet objectif.

Il existe un certain nombre de projets fédéraux novateurs qui visent expressément à répondre aux besoins des femmes. Comme c'est la députée de Québec qui a présenté la motion dont nous sommes saisis, permettez-moi de parler brièvement de quelques projets à l'intention des femmes qui sont actuellement en cours dans sa province, le Québec.

Ainsi, depuis octobre dernier, un projet de formation en entreprenariat va bon train à Rimouski. Des femmes de tous les âges qui veulent lancer une entreprise reçoivent la formation nécessaire pour pouvoir créer de petites entreprises prospères. Le projet vise à répondre aux besoins de femmes sans source de revenu.

(1330)

Ce qui est tout aussi important, c'est l'équipe qui a mis ce projet sur pied. Le centre d'emploi de la localité, le cégep de Rimouski et le groupe Ficelles, dont l'objectif est d'assurer l'accès des femmes à des emplois, ont tous collaboré à la concrétisation de ce rêve. Cela coïncide avec nos efforts pour encourager le travail indépendant comme moyen d'accéder à l'autonomie financière.

Quelques projets ont vu le jour à Montréal. Dans le premier, des femmes au chômage reçoivent une formation dans les tech-


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nologies modernes et on leur offre une assistance pour qu'elles puissent réintégrer le marché du travail et trouver des emplois plus spécialisés. Dans l'autre, des immigrantes arrivées récemment à Montréal sont formées comme opératrices dans une usine de fabrication de fibre de verre.

Ce sont là des exemples qu'on trouve dans une province seulement. Il y en a bien d'autres au Québec et partout ailleurs dans le pays. Nos nouveaux programmes destinés aux jeunes visent eux aussi à répondre aux besoins des femmes. Le Service jeunesse Canada remporte un franc succès. Dans les projets pilotes-ceux où l'on a vérifié les concepts de Service jeunesse Canada-54 p. 100 des participants sont des femmes.

Certains projets portaient sur des questions qui intéressent particulièrement les femmes. Par exemple, le Bureau des services familiaux de Regina a mené un projet où l'on venait en aide à 10 jeunes mères célibataires.

Les programmes et les services d'emploi ne constituent qu'un aspect des efforts que nous déployons pour aider les femmes. Le programme d'assurance-chômage continue de jouer un rôle important à mesure que nous adoptons une politique de main-d'oeuvre plus active. Certains éléments de l'assurance-chômage comme les prestations de maternité et les prestations parentales répondent aux besoins des femmes qui sont sur le marché du travail.

Je dis aux députés de Yorkton-Melville et d'Edmonton-Sud-Ouest: en dépit des convictions que professe le Parti réformiste, il est important que nous ayons des mesures comme les prestations de maternité et les prestations parentales pour aider les femmes à s'adapter aux réalités du marché du travail.

Nous n'avons pas besoin de reculer bien loin dans le temps pour savoir comment on a adapté le programme d'assurance-chômage aux besoins des femmes. Il suffit de revenir à 1994. Cette année-là, le gouvernement a décidé de réduire les prestations d'assurance-chômage. Cependant, ce faisant, il a tenu compte de la situation des personnes à faible revenu. Près de 60 p. 100 des familles monoparentales ayant des enfants de moins de 18 ans touchent un revenu faible. Beaucoup trop de ces familles sont dirigées par des mères seules qui ont peine à joindre les deux bouts.

C'est cette situation qui a amené le gouvernement à adopter le taux spécial de 60 p. 100 pour les prestataires à faible revenu qui ont des personnes à leur charge. Cette année, les personnes qui reçoivent un salaire moyen d'au plus 408 $ par semaine, qui ont un conjoint qui reçoit la prestation fiscale pour enfants ou qui ont un enfant à charge ont droit à des prestations d'assurance-chômage majorées. Cette mesure revêt une grande importance pour la mère seule. Depuis la mise en oeuvre des taux majorés pour personnes à charge, plus de 192 000 personnes y ont droit. La plupart, soit 148 000, sont des femmes admissibles à ces taux majorés pour personnes à charge.

Le gouvernement reconnaît que les besoins des femmes en matière professionnelle vont au-delà des programmes et des services traditionnels, quels que soient leurs mérites. Comme l'Association nationale de la femme et du droit l'a déclaré l'année dernière devant le Comité permanent du développement des ressources humaines: «On reconnaît l'importance croissante des femmes au sein de la population active, sans reconnaître pour autant que les femmes ont des enfants et que ce sont les femmes qui sont surtout chargées de s'en occuper.»

Les garderies sont un aspect important. C'était là un des thèmes de notre parti pendant la campagne électorale de 1993. Nous devons nous y attaquer sur trois fronts distincts.

(1335)

Le gouvernement est en train de mettre sur pied son projet de garderies à l'intention des premières nations et des Inuit. Il s'agit, en l'occurrence, d'accroître le niveau des services au sein de ces collectivités, mais il y a tellement plus à faire. Un deuxième front axé sur la recherche et le développement contribuerait à nous renseigner davantage sur ce domaine essentiel que sont les garderies.

Je pourrais poursuivre encore longtemps. J'ai des pages et des pages de programmes que le gouvernement est à élaborer. La boucle n'est pas encore bouclée. Nous y travaillons, et je crois que, lorsque nous y serons parvenus, les femmes de notre pays, voire toute la population de notre pays, seront comblées.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, mon distingué collègue de Burin-Saint-Georges est un excellent parlementaire et il nous le prouve régulièrement lorsqu'il se lève en cette Chambre pour intervenir.

Ce que je déplore, c'est que son parti, et dans une certaine mesure mon collègue de Burin-Saint-Georges, tient un double langage. Je veux ici vous en donner une preuve, une preuve concernant la réforme du Code du travail sur le retrait préventif.

Vous n'êtes pas sans oublier, vous aussi monsieur le Président, que la plus grande richesse d'un pays est la cellule familiale. En mai 1994, le Bloc québécois a déposé en cette Chambre une motion, appuyée par le Parti libéral du Canada qui gouverne présentement, afin d'harmoniser avec la CSST du Québec à 95 p. 100 le salaire accordé aux femmes enceintes. Présentement il est de 60 p. 100.

Il y a également un document qui circule à l'heure actuelle sur la réforme du Code du travail et le Parti libéral du Canada ne fait pas mention de cette motion, qu'il appuyait pourtant en mai 1994, pour donner un avantage certain aux femmes enceintes qui devaient se prévaloir d'un retrait préventif pour, justement, rendre à terme cette grossesse, et ne pas altérer le foetus.

Le député de Burin-Saint-Georges est sûrement conscient, comme nous tous ici, que la cellule familiale, une femme, son mari, son conjoint, avec des enfants-l'union complète-seront ceux qui, demain, travailleront pour nous payer à nous, aujourd'hui, nos pensions. La richesse naturelle, présentement, est à la baisse.

On avait proposé une motion. Son parti l'avait appuyée et aujourd'hui le manque de courage, le double langage qu'on soulève aujourd'hui en cette Chambre, monsieur le Président! Malheureusement ce sera mon ami de Burin-Saint-Georges qui va écoper d'éclaircir la situation de son parti. J'espère, étant donné que c'est une motion concernant l'égalité des femmes, qu'il saura nous donner l'heure juste.


10604

[Traduction]

M. Simmons: Monsieur le Président, étant donné l'état boiteux de mon français ces jours-ci, je m'exprimerai dans une langue qui m'est plus familière. Je promets cependant au député de reprendre ma pratique du français que je néglige depuis longtemps.

Je le remercie de ses aimables paroles au sujet de mon discours. Je partage tout à fait son point de vue au sujet de l'importance de la famille. Il l'a dit dans des termes très éloquents, et je l'en félicite.

En ce qui concerne la motion dont il parlait, je dois avouer mon ignorance. Je ne m'en rappelle pas les détails et je ne prétendrai pas m'en souvenir. Mon collègue a cependant pointé du doigt, à juste titre, l'un des nombreux domaines où le gouvernement doit agir.

(1340)

J'ai toujours trouvé épouvantable que la rémunération soit fondée sur le sexe, c'est-à-dire que, à travail égal, les femmes ne reçoivent pas un salaire égal, une situation dont il existe des centaines d'exemples. J'ai aussi toujours trouvé navrant que les salaires varient selon les régions où l'on vit. On ne corrige pas une injustice par une autre. Nous devons remédier à ces disparités.

Par ailleurs, puisque nous débattons aujourd'hui les questions qui touchent les femmes, je dirai tout d'abord que je n'aime pas cette expression, car ces questions nous concernent tous. Je comprends néanmoins le sens qu'on lui prête.

Le député a soulevé un sujet qui me tient à coeur et que j'ai l'intention de continuer de défendre. L'inégalité de la rémunération est inadmissible et nous devons y remédier le plus tôt possible.

Mme Jane Stewart (Brant, LIB.): Monsieur le Président, même si je ne suis pas favorable à la teneur de la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui et qui a été présentée par la députée de Québec, j'apprécie le fait qu'elle nous donne la possibilité de discuter de cet aspect très important qu'est la qualité du lien que les Canadiennes ont avec l'infrastructure sociale et économique de notre société.

C'est une question extrêmement importante. Étant l'une des quelque 50 femmes députées, j'estime que je dois faire tout ce qui est en mon pouvoir pour encourager nos gouvernements et nos assemblées législatives à comprendre où se situe ce lien dans notre pays et à le renforcer.

Dans sa motion, la députée parle du lien économique, de l'aspect économique de la participation des femmes à la société canadienne. Je tiens à dire qu'il faut parler du soutien économique et du soutien social dont nous avons besoin, en tant que femmes, pour participer pleinement et entièrement à la société canadienne et lui permettre de s'améliorer grâce à nos compétences, à nos capacités et à nos qualités.

Pour comprendre le lien qui existe entre le développement économique et le développement social, je signale que j'ai eu l'occasion, en septembre dernier, en tant que membre de la délégation parlementaire à la Conférence des Nations Unies sur la population et le développement, de saisir les répercussions du développement sur la population.

Aux réunions préparatoires à la conférence du Caire, la délégation canadienne a fait de l'excellent travail pour favoriser la compréhension des répercussions que le développement a sur le contrôle démographique, pour faire comprendre, plus précisément, que, lorsqu'il est question de développement, il est question de développement économique et de développement social.

Les Canadiens ont joué un rôle très important pour aider le monde à comprendre que ce sont les liens forts que les femmes doivent avoir avec les aspects économiques et sociaux d'une société qui favoriseront le développement et la productivité d'un pays et qui permettront d'en arriver à un meilleur contrôle démographique.

À cette conférence, il a surtout été question du développement des pays en développement. J'ai parlé à des collègues du monde entier et j'ai constaté que le débat se poursuivait aussi dans tous les pays développés. Le Canada se situe à un autre niveau en raison du travail acharné et de la persévérance de nombreuses Canadiennes. Pensons seulement aux femmes qui, il n'y a pas si longtemps, ont fait tant d'efforts pour que nous soyons reconnues comme des personnes à part entière. Nous leur devons la position que nous occupons maintenant.

(1345)

Je pense à certaines de mes amies. Doris Anderson, qui a oeuvré à l'extérieur du secteur gouvernemental, au sein d'organisations non gouvernementales et comme éditrice d'un magazine féminin bien connu, a fait un travail considérable. Lucie Pépin, une amie et collègue, anciennement députée à la Chambre, a aussi vigoureusement défendu les causes des femmes. Toutes ces femmes ont fait avancer notre nation à un niveau très différent de celui des pays en développement.

Les conversations que nous avons eues au Caire portaient surtout sur la nécessité que les femmes s'engagent envers le développement social sur des points élémentaires liés à la santé, comme l'accès aux vaccins et aux médicaments contre le tétanos, la polio et la tuberculose et l'accès à l'eau potable. Les femmes dont il était question ont besoin avant tout de mesures d'hygiène et de santé élémentaires.

Les conversations concernant l'éducation portaient sur l'accès à l'école primaire. L'accès au soutien économique signifiait que nous parlions d'une notion aussi fondamentale que la possibilité pour la femme de travailler à l'extérieur des limites de ce que nous appelons la maison.

Les gens des nations développées, comme le Canada, parlent de réalités d'une tout autre nature et d'un tout autre niveau. Nous ne nous préoccupons plus des questions de santé élémentaires, mais plutôt de la recherche et des conséquences du cancer du sein et des maladies du coeur sur les femmes.

Lorsqu'on parle ici d'éducation, c'est pour encourager nos jeunes femmes à terminer leurs études secondaires et postsecondaires. Lorsqu'on songe aux autres aspects sociaux comme la sécurité et le confort, non seulement dans nos rues, mais aussi dans nos maisons, on tente de comprendre la violence familiale


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et de faire reconnaître qu'elle ne doit en aucun cas faire partie de notre société.

Lorsque nous pensons plus précisément à nos liens avec les leaders économiques, c'est l'accès au soutien financier pour les femmes que nous avons à l'esprit. Le gouvernement s'intéresse à tous ces dossiers et consacre des efforts à chacun. Lorsque le Bloc québécois affirme le contraire, il se trompe.

Pensons aux mesures que le ministre de la Justice a prises pour assurer une meilleure sécurité et confirmer aux femmes qu'elles peuvent trouver un appui au sein de notre société. Il a récemment déposé un projet de loi pour interdire l'utilisation de l'ivresse extrême comme défense, surtout dans les cas de viol. Étant donné l'importance des pensions alimentaires pour les parents seuls, qui sont souvent des femmes, le gouvernement va déposer des modifications législatives à cet égard dans un avenir rapproché.

Aujourd'hui, alors que nous discutons du projet de loi C-41 au comité, je vais déposer un amendement au projet de loi qui demandera, en vertu des dispositions portant sur le dédommagement, que les tribunaux se penchent sur la perte de revenu et de soutien qui peut se produire dans les cas de violence familiale. Il faudra reconnaître la nécessité de dédommager les femmes qui doivent quitter leur foyer à cause de ce type de violence et, de ce fait, subir éventuellement des coûts liés au transport, à l'hébergement, à la garde des enfants, aux médicaments, ainsi qu'aux soins dentaires. J'espère que les membres du Bloc siégeant au comité appuieront mon amendement.

Ce sont là les mesures que le gouvernement prend pour s'assurer que les femmes sont bien soutenues sur le plan social.

Je sais que la ministre de la Santé ne ménage pas ses efforts et qu'elle a mis en oeuvre un programme important qui a pour objectif de donner aux gens des collectivités autochtones un nouveau départ.

Lorsqu'on pense à l'enseignement, une question qui relève en grande partie de la compétence du gouvernement provincial, en tant que députés, surtout si nous sommes des femmes, nous avons un rôle important à jouer pour nous assurer qu'on encourage nos jeunes femmes à poursuivre leurs études aux niveaux secondaire, collégial et universitaire et à viser le plus haut possible pour ne pas être prisonnières de ghettos, d'emplois auxquels les femmes sont généralement confinées.

Un des aspects les plus importants de mon travail consiste à rencontrer de jeunes gens dans ma collectivité, dans les écoles publiques et les écoles secondaires, pour leur dire qu'il n'y a pas de limites aux aspirations des femmes dans notre pays.

(1350)

Tout récemment, j'ai assisté à une réunion du groupe «Les filles de l'invention», où des filles de septième année se sont réunies pendant deux jours pour parler de sciences et de recherche. Alors que nous discutions de modèles pour les femmes, je leur ai demandé si, en 1867, lorsqu'il était question de la Confédération, leurs grands-mères auraient voté en faveur du Canada ou contre la Confédération. Certaines m'ont répondu «pour» et d'autres «contre». Je leur ai demandé si elles savaient que leurs grands-mères ne pouvaient pas voter alors, qu'elles n'étaient même pas considérées comme des personnes. Elles ont affiché un air de surprise. Elles ne s'étaient pas rendu compte de cela.

J'ai alors compris que, à titre de députée, je devais m'employer à enrayer, dans une certaine mesure, l'optimisme et la naïveté, et qu'elles devaient savoir qu'elles font face à des restrictions en tant que femmes, mais qu'elles peuvent participer pleinement et équitablement à l'édification de notre société.

Sur le plan économique, il y a bien des choses que nous devons faire. Je me contenterai de dire que j'appuie énergiquement nos dispositions législatives sur l'équité en matière d'emploi, qui encouragent les entreprises canadiennes à reconnaître l'importance de pouvoir compter sur une vaste gamme de personnes dans leur organisation. Il ne s'agit pas de fixer des quotas, mais de reconnaître à leur juste valeur les compétences et les aptitudes que les personnes peuvent mettre au profit de leur milieu. Nous améliorons les dispositions législatives, et je souscris entièrement à cela.

Je constate que mon temps est écoulé. Il y a tellement de choses dont nous pouvons parler. Je remercie à nouveau la députée de nous avoir donné la possibilité de discuter de cette question et de partager nos idées sur ce sujet.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais demander à ma collègue, elle est probablement au courant, s'il y a une différence de traitement pour les femmes enceintes qui sont en situation de retrait préventif?

Le Bloc québécois avait proposé un amendement lors de la dernière refonte du Code du travail en 1992 prévoyant que le fédéral pouvait faire des ententes administratives avec toute province ayant un régime accordant des conditions supérieures à celles prévues au Code canadien du travail pour les femmes en situation de retrait préventif.

Le Parti libéral, qui formait l'opposition à ce moment-là, avait appuyé l'amendement proposé par le Bloc. Or, nous sommes à la veille d'une refonte du Code du travail. Un document circule du ministère du Travail et rien dans ce document ne prévoit de conditions permettant des ententes administratives entre le gouvernement fédéral et toute province, puisque c'était le sens de l'amendement, on ne parlait pas du Québec, on parlait de toute province, quelle qu'elle soit, ententes administratives dans le sens du fédéralisme flexible, j'imagine.

J'aimerais savoir si la députée s'engage à demander à son gouvernement d'inscrire des prescriptions concernant le retrait préventif des femmes enceintes, afin de conclure des ententes administratives avec toute province ayant un régime supérieur à celui prévu au Code canadien du travail, puisque celui-ci est inférieur, tout au moins dans le cas du Québec, à ce qui est prévu dans le Code du travail québécois. Est-elle d'accord avec une

10606

telle demande et va-t-elle faire des démarches auprès de la ministre du Travail de son gouvernement?

[Traduction]

Mme Stewart (Brant): Monsieur le Président, je ne suis pas parfaitement au fait de l'amendement dont le député parle. Je vais me renseigner sur la question.

Je reconnais que nous ne sommes pas arrivés au point où les femmes touchent le même salaire que les hommes pour un travail égal. Nous en sommes toutefois conscients, nous sommes déterminés à régler ce problème et nous nous y employons.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, j'aurais une question à poser à ma collègue députée. Je la voyais hier applaudir l'annonce faite par la secrétaire d'État à la Condition féminine quant à l'abolition du Conseil consultatif canadien sur la condition féminine.

J'aimerais demander à la députée comment elle voit le fait que des fonctionnaires assumeront et assureront la transparence dont le Conseil jouit, je pense, et comment peut-elle assurer que des fonctionnaires, dans les différentes politiques qui vont être mises de l'avant, comment le ministère en fait pourra-t-il être juge et partie? Qu'elle m'explique cela, parce que je pense que cela rendait la députée heureuse, hier à la Chambre.

(1355)

[Traduction]

Mme Stewart (Brant): Monsieur le Président, je connais un certain nombre de femmes qui, pendant de nombreuses années, ont fait partie du Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme et qui disent que nous avons reconnu le travail qu'elles ont accompli au fil des ans.

Je crois qu'il y a lieu de se réjouir de l'annonce faite par la ministre. Fondamentalement, elle aura pour effet de regrouper des efforts disparates déployés en vue d'améliorer la situation de la femme dans notre pays. En conjuguant nos efforts, nous pourrons progresser considérablement dans l'intérêt des femmes.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui sur la motion présentée par la députée de Québec. Je félicite la députée d'avoir présenté à la Chambre un bon sujet de discussion, à savoir la question de l'égalité. J'estime que c'est une question qui suscite beaucoup d'intérêt au Canada et qui préoccupe bien des gens.

L'un des enseignements de l'histoire, c'est que la lutte personnelle et le dépassement de soi vont de pair. En fait, je sais que c'est le cas pour beaucoup d'entre nous. La population canadienne croit parfois que les députés ne savent pas ce que c'est que d'avoir à lutter sur le plan personnel. D'après les conversations que j'ai eues avec mes collègues et selon ma propre expérience, je sais que nous avons tous des histoires à raconter au sujet de la lutte et des réalisations personnelles.

Il importe que nombre d'entre nous se rendent compte que ces questions n'intéressent pas seulement la Chambre, mais l'humanité tout entière, qui leur livre la lutte depuis de nombreuses années.

Je voudrais simplement faire part aux députés de mon expérience personnelle en ce domaine. Je suis l'aînée de sept enfants. Mes parents n'étaient pas riches. Je crois que l'adjectif pauvre serait sans doute plus juste. Si je voulais de l'argent, je devais le gagner. J'ai commencé à travailler très jeune l'été et les fins de semaine pour gagner de l'argent.

Le jour où je suis partie de chez moi à 18 ans, ma mère est rentrée à la maison avec mon plus jeune frère. La vie a donc continué à la maison après mon départ. Mes parents n'ont pu m'aider dans mes études. C'est grâce à mes seuls efforts que j'ai obtenu deux diplômes universitaires. J'ai également été veuve dans la trentaine. Mon mari est décédé très soudainement, me laissant toute seule pour subvenir aux besoins de la famille.

Je suis devenue avocate avant même l'existence de tout programme d'action positive visant à aider les femmes à accéder à l'égalité. Je connais bien des gens qui, comme moi, sont très fiers d'avoir réussi dans la vie grâce à leurs seuls efforts.

Le débat d'aujourd'hui porte sur les moyens à prendre pour obtenir les résultats que nous voulons dans la vie. . .

Le Président: La députée sait, évidemment, que tout de suite après la période des questions, nous reprendrons le débat et qu'elle aura de nouveau la parole.

Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5), la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés prévues à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


10606

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE BUDGET

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis animée par un sentiment à la fois de fierté et de consternation.

Je suis fière du ministre des Finances dont le dernier budget propose d'apporter à l'appareil gouvernemental les changements les plus profonds depuis la Seconde Guerre mondiale.

Je suis fière de faire partie d'un gouvernement qui a atteint et continuera d'atteindre les objectifs qu'il s'est fixés pour réduire le déficit et la dette, qui nous causent des torts considérables.

Je ressens cependant, depuis quelques semaines, un désarroi grandissant en voyant les députés du tiers parti refuser de se


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joindre à nous, sinon à contrecoeur, pour travailler dans l'intérêt de la prospérité future de ce magnifique pays.

Ils ont fait campagne en prônant un nouveau type de politique, différente de la politique traditionnelle sectaire et dogmatique. Dans ce cas, pourquoi refusent-ils de relever le défi qui nous est lancé?

Pourquoi leur chef s'est-il ouvert au dirigeant spirituel de la nouvelle droite politique aux États-Unis pour se laisser asservir à une doctrine barbare qui sabre dans les pensions des personnes âgées et institutionnalise les orphelins? Pourquoi le chef du tiers parti ne participe-t-il pas à la renaissance de notre pays, au lieu d'adhérer aux machinations de ce monstre du sud?

* * *

[Français]

LA FISCALITÉ

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, les contribuables québécois et canadiens ont perdu confiance dans le système fiscal canadien. L'économie souterraine prend de plus en plus d'ampleur. Les comptes d'impôt en souffrance dépassent 6 milliards de dollars et ceux de la TPS atteignent 1,3 milliard.

Enfin, le système fiscal est plein de trous. Les contribuables à revenu élevé et les grandes entreprises ont les moyens de se payer des experts en fiscalité leur permettant de profiter des failles du régime fiscal. Par exemple, ils peuvent profiter du fait que le Canada a signé au moins 16 conventions fiscales avec des pays considérés comme des paradis fiscaux. Chaque année, des dizaines de milliers d'entreprises rentables ne paient pas un sou d'impôt. Pendant ce temps, le ministre des Finances a préféré faire subir aux particuliers 65 p. 100 des hausses du taux d'impôt du dernier Budget et attend en 1999 pour agir dans le domaine du dossier des fiducies familiales.

Malgré cette situation, le ministre des Finances refuse toujours de procéder à une révision complète de la fiscalité qui viserait à éliminer les iniquités fiscales.

* * *

[Traduction]

L'UNIVERSITÉ MOUNT ALLISON

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, en 1991, l'Université Mount Allison, à Sackville au Nouveau-Brunswick, se trouvait dans un bourbier financier. Elle accusait un déficit de 2,5 millions de dollars et avait une dette de 10 millions. Comme le gouvernement fédéral, cet établissement devait assainir ses finances. Selon la revue Maclean's, le recteur en titre de l'université, M. Ian Newbould, aurait déclaré récemment que si l'université était une société, elle aurait été mise sous séquestre.

En un peu plus de trois ans, l'université a éliminé sa dette et a accumulé un surplus de 13 millions. Le recteur de cet établissement ne voulait visiblement pas se contenter de réduire son déficit, mais bien l'éliminer et faire disparaître complètement sa dette. Il y est parvenu en exerçant un contrôle éclairé des finances.

Le ministre des Finances, lui, s'attendait à des félicitations pour un déficit prévu de 25 milliards. Certaines provinces et universités, notamment Mount Allison, font maintenant figure de modèle national de responsabilité budgétaire. Le ministre des Finances devrait regarder de près la manière dont les finances sont gérées dans le vrai monde et se demander pourquoi il n'est pas à la hauteur du modèle canadien.

* * *

LES GARDERIES RURALES

Mme Marlene Cowling (Dauphin-Swan River, Lib.): Monsieur le Président, l'agriculture n'est pas une activité qui se déroule de neuf à cinq. Il faut se lever tôt le matin, se coucher tard le soir et travailler les fins de semaine, à des moments, donc, où la plupart des garderies ne sont pas en service. Les parents se voient donc obligés de laisser leurs enfants seuls à la maison ou de les amener avec eux pour effectuer des travaux avec des machines lourdes ou auprès du bétail.

Lorsqu'on examine les statistiques concernant les accidents mortels à la ferme, dans un cas sur six, la victime est un enfant. Environ 15 p. 100 des personnes hospitalisées à la suite d'un accident à la ferme sont des enfants âgés de moins de 16 ans.

La semaine dernière, c'était la Semaine nationale de la sécurité à la ferme. Je voudrais rendre hommage aux personnes et aux organismes qui sont en quête de formules de garderies en milieu rural qui soient souples, accessibles et abordables. Mentionnons, entre autres, la Coalition nationale des garderies rurales, l'Institut féminin et l'Institut de développement rural de Brandon, au Manitoba. Je les félicite pour leur dévouement envers la sécurité des enfants en milieu rural.

* * *

LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui au nom de nos amis et collègues de la fonction publique fédérale. Un grand nombre de personnes appartant à ce groupe professionnel s'engagent actuellement dans une ère de changement et de transition sans précédent. En tant que membres du corps administratif qu'est la Chambre, nous devons faire preuve de sensibilité, de compassion et d'humanité dans ces circonstances.

Nous avons beaucoup exigé de nos effectifs et nul doute qu'ils sauront relever le défi. Toutefois, il nous faut habiliter les décideurs sur place pour qu'ils puissent veiller à ce que l'on traite avec équité et dignité les personnes touchées par ces changements et que, dans chaque cas, l'on prenne la meilleure solution qui soit, compte tenu des besoins particuliers.

Ce sont les décideurs sur place qui sont les mieux à même de déterminer la meilleure façon d'introduire les changements que nous préconisons. Nous devons tous faire notre part. Je suis certain que le gouvernement honorera son engagement et qu'il fera preuve d'équité, de compassion et de flexibilité au niveau local pour le plus grand bien de nos effectifs et de notre pays.


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(1405)

CUBA

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, nous célébrons aujourd'hui le 50e anniversaire de relations diplomatiques ininterrompues entre le Canada et Cuba.

Nos deux pays conservent des rapports amicaux et divers sur le plan de la diplomatie, du commerce, des sciences, de la coopération économique et du tourisme. Dans le domaine des pêches, Cuba appuie les mesures que nous réclamons pour mettre un terme à la surpêche en haute mer.

Cuba est un pays en train de passer à une économie de marché et nous avons, avec lui, d'importants échanges commerciaux que nous devrions accroître. J'exhorte le ministre du Commerce international à rétablir la ligne de crédit de 30 millions de dollars accordée à Cuba pour que les entreprises canadiennes puissent profiter des nouveaux débouchés économiques qui s'ouvrent dans ce pays et accroître ainsi les échanges entre le Canada et Cuba.

* * *

[Français]

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, trois ans après que le vérificateur général ait attiré l'attention du gouvernement sur ce qu'il en coûte aux contribuables canadiens et québécois pour former un réserviste au sein des forces armées, soit 90 p. 100 du coût d'un soldat régulier, aucune mesure concrète n'a encore été prise pour éliminer ce gaspillage éhonté.

Or, la réserve canadienne, dont l'entraînement est inefficace et insuffisant, est la plus coûteuse au monde après celle de la Suisse, qui n'a pas d'armée. Elle coûtera cette année encore un milliard de dollars.

Il est quand même ironique que le gouvernement ait décidé de dissoudre en cachette le Conseil consultatif du statut de la femme pour économiser un maigre million de dollars, alors que le budget du ministère de la Défense nationale, qui s'élève à plus de 11 milliards de dollars, ait été coupé de moins de 5 p. 100 cette année.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, les habitants de Quesnel, en Colombie-Britannique, sont outrés par notre prétendu système de justice.

Dimanche dernier, les agents de la GRC de Quesnel ont arrêté un jeune homme de 19 ans qui, selon des témoins, avait entraîné une femme âgée dans sa chambre d'hôtel, lui avait mis un couteau sur la gorge et l'avait violée brutalement. Lorsque le mari de la victime est intervenu, le violeur l'a poursuivi dans le couloir et l'a menacé de son couteau. La collectivité espérait qu'on ferait justice.

La victime, qui était censée avoir atteint l'âge d'or, a subi un grave traumatisme et doit suivre une thérapie. Ce couple amoureux souffrira maintenant de la peur à jamais. Imaginez le choc qu'ont ressenti les habitants de Quesnel, lorsqu'ils ont vu que le violeur avait recouvré sa liberté en versant une simple petite caution de 1 000 $.

Les Canadiens méritent mieux. Pendant que nos criminels peuvent suivre gratuitement des cours au collège et traîner dans les rues, après avoir versé des cautions ridicules, des gens dont la vie est brisée doivent se débrouiller tout seuls. Entre-temps, la population continue de se demander si le système de justice est là pour les victimes ou pour les criminels.

Le ministre de la Justice va-t-il enfin cesser de consacrer du temps à ses projets favoris en pure perte et commencer à prendre des mesures concrètes pour que notre système de justice soit vraiment digne de ce nom?

* * *

LES PÊCHES

Mme Bonnie Hickey (St. John's-Est, Lib.): Monsieur le Président, il y a 50 000 personnes sans emploi au Canada atlantique à cause de l'effondrement des pêches. Ces 50 000 personnes se sont vues dans l'obligation de demander l'aide du gouvernement pour pouvoir donner à manger aux leurs.

Au cours de la campagne électorale, les libéraux se sont engagés à aider les pêcheurs, à régler le problème de la surpêche étrangère et à prendre des mesures pour préserver les stocks de poisson qui restent. La semaine dernière, le gouvernement a respecté cet engagement à la lettre.

Au nom des habitants de ma circonscription, je voudrais remercier le ministre des Pêches et des Océans d'avoir adopté une position ferme face à la surpêche étrangère et d'avoir fait en sorte que le turbot ne connaisse pas le même sort que la morue. Au cours de la semaine dernière, j'ai reçu des messages par télécopieur, des pétitions et des lettres d'appui au ministre des Pêches et des Océans. Cet appui était vraiment justifié.

Aujourd'hui, les navires étrangers ne pêchent plus aux extrémités des Grands Bancs et s'apprêtent à négocier des règles internationales plus strictes.

Je demande à tous les députés d'appuyer le ministre dans la lutte qu'il mène pour protéger et préserver les pêches canadiennes.

* * *

[Français]

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

Mme Pierrette Ringuette-Maltais (Madawaska-Victoria, Lib.): Monsieur le Président, la députée bloquiste de Rimouski-Témiscouata et critique du ministère du Patrimoine canadien s'est pavanée à travers le pays pour dire aux communautés francophones que le Bloc leur était solidaire.

Et voilà, mardi, le rideau est tombé sur sa mise en scène et elle accuse les francophones de ce pays d'être des vendus.


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Quelle honte. Quelle honte pour le Bloc d'avoir une parlementaire qui fait de telles accusations. Et quelle tricherie. Le Bloc se dévoile enfin vis-à-vis des communautés francophones.

Pourtant, lorsque Paul Piché et Laurence Jalbert, entre autres, ont signifié qu'ils étaient des séparatistes, tout en ayant été bénéficaires d'aide financière du Patrimoine canadien pour la production d'albums et de vidéoclips, est-ce que vous avez entendu les fédéralistes les insulter?

(1410)

Absolument pas et, justement, cela démontre bien l'ouverture d'esprit des fédéralistes et nous espérions que les bloquistes aient ce même respect pour l'opinion des autres.

Je demande, au nom de l'ensemble des francophones de ce pays, que la députée bloquiste retire, en cette Chambre, ses propos diffamatoires envers nous.

* * *

[Traduction]

LE FORUM POUR JEUNES CANADIENS

Mme Jean Augustine (Etobicoke-Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, hier soir, j'ai eu le plaisir de rencontrer plusieurs participants au Forum pour jeunes Canadiens. Ce forum annuel a encore une fois rassemblé des élèves du secondaire venus de toutes les régions du pays afin d'apprendre de première main comment fonctionne le Parlement fédéral.

Cette année, ma circonscription, Etobicoke-Lakeshore, a été représentée de façon très compétente par Melissa Jenkins de la Bishop Allen Academy et par Raphael Pacquing, de l'école secondaire Father John Redmond. Ces deux élèves sont venus à Ottawa pour échanger des idées et satisfaire leur curiosité à l'égard du processus gouvernemental, des médias et du rôle du gouvernement.

Je félicite tous ceux qui ont contribué au succès de ce forum pour leurs efforts. Puissent ces jeunes rentrer chez eux sachant que le gouvernement travaille avec beaucoup d'acharnement à léguer aux futures générations un pays plus solide et plus prospère.

* * *

[Français]

LA SOUVERAINETÉ DU QUÉBEC

M. Roger Pomerleau (Anjou-Rivière-des-Prairies, BQ): Monsieur le Président, l'élite intellectuelle du Canada anglais réunie hier à Toronto par l'Institut C.D. Howe, s'est payée une séance de défoulement anti-Québec tel qu'on en a rarement vu.

Ces grands démocrates gonflés à bloc du patriotisme Canadian ont proposé de faire souffrir les Québécois pour éviter un vote favorable à la souveraineté. Cette idée fut non seulement cautionnée mais enrichie par le politicologue Stéphane Dion qui affirme que «plus ça fera mal, plus l'appui à la souveraineté baissera».

Étant donné que Stéphane Dion est maintenant contractuel et conseiller du premier ministre du Canada, les Québécois comprennent que ces paroles représentent la position du gouvernement fédéral.

J'ai confiance que les Québécois, comme ils l'ont fait tout au long de leur histoire, se tiendront debout et affirmeront, à la face du monde, leur droit d'exister.

* * *

[Traduction]

LE LIVRE ROUGE DU PARTI LIBÉRAL

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président,

Le Parti libéral, s'il était élu,
nous sortirait de notre détresse.
Son engagement serait tenu,
Livre rouge aux mille promesses.
Le Parti libéral aux rênes du pouvoir,
le Parlement serait attentionné.
Il nourrissait tous nos espoirs:
programmes sociaux, vaches sacrées.
Puis, le budget a été déposé.
Entre promesse tenue et promesse rompue,
il n'y a que le poids de l'intégrité,
nous l'avons vu, nous l'avons su.
L'intégrité, qualité du meilleur aloi,
ne s'achète ni ne se vend, c'est son essence.
Les libéraux, donc, chacun pour soi
devront affronter leur conscience.
Mais un libéral à part, un seul, bouge,
il dit, paroles qui resteront fameuses:
Les libéraux, ce beau grand livre rouge,
ils l'ont passé à la déchiqueteuse.
Le Président: Je rappelle aux députés qu'ils ne doivent brandir ni objet ni document, et encore moins les déchirer, pendant leurs interventions.

* * *

LES ALLOCATIONS DE RETRAITE

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, des renseignements obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information révèlent que les sous-ministres fédéraux reçoivent des allocations spéciales de retraite pouvant atteindre 30 000 $ par année, en plus de leur pension normale.

Le document du Conseil du Trésor indique que cette prestation supplémentaire aux sous-ministres fédéraux est égale à 2 p. 100 de la moyenne du salaire des six meilleures années du pensionné. Cette prime est multipliée par le nombre d'années qu'un sous-ministre a travaillé jusqu'à un maximum de 10 ans. Le document déclare: «Il n'y a pas de période minimale d'admissibilité et on ne demande aucune contribution aux sous-ministres.»

Étant donné que le gouvernement vient d'annoncer la suppression de 45 000 emplois de fonctionnaires ainsi que des réductions importantes dans le domaine de l'agriculture et des programmes sociaux, est-ce que le ministre des Finances et le gouvernement libéral vont mettre fin immédiatement à cet avantage indu, ce parachute doré, offert aux sous-ministres déjà grassement payés, ou est-ce que les fonctionnaires les mieux payés vont continuer à être protégés, par les libéraux, des dures réalités que les autres Canadiens ayant un revenu inférieur doivent subir?

10610

(1415)

[Français]

LE CHEF DE L'ACTION DÉMOCRATIQUE DU QUÉBEC

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, le chef du parti Action démocratique du Québec a annoncé la participation de son parti aux commissions régionales en ces termes, et je le cite: «On ne peut que se réjouir de voir que nos conditions ont été acceptées. On est content d'avoir contribué à une amélioration du processus. Nous adoptons une approche constructive. On espère qu'un grand nombre de personnes participeront à la consultation.»

Trois mois plus tard, il déclarait et je le cite: «Je pense que ce n'est pas nécessairement clair dans l'esprit de tous les citoyens qui sont venus participer, parce que si les gens s'étaient fait dire au début de la consultation: «Vous venez perdre votre temps, tout est décidé d'avance», il n'y en a peut-être pas 55 000 qui seraient venus.» Le chef de l'Action démocratique connaît un réveil politique brutal. Il réalise, mais trop tard, qu'il a été victime de manipulation de la part du Parti québécois et du Bloc québécois.

* * *

[Traduction]

LE PARTI CONSERVATEUR

M. Jerry Pickard (Essex-Kent, Lib.): Monsieur le Président, quelle ne fut pas ma surprise de lire dans le Toronto Star que les conservateurs ontariens se servent des petites annonces pour recruter des candidats en vue des prochaines élections provinciales. Selon l'annonce placée dans au moins trois journaux ontariens, ils sont à la recherche de conservateurs doués de bon sens.

Depuis des mois, Mike Harris se promène à travers l'Ontario promettant de réduire l'impôt sur le revenu des particuliers de 30 p. 100, d'équilibrer le budget en quatre ans sans toucher à la police, à l'éducation ni aux soins de santé. On n'a pas besoin de beaucoup de bon sens pour s'apercevoir que mathématiquement, ce n'est pas possible.

Mark Mullins, l'expert en calcul de Mike Harris a dit: «Je ne suis pas membre du Parti conservateur. La dernière chose dont j'aie besoin c'est que quelqu'un dise de moi que je suis le gourou derrière ce train de mesures.»

Serait-ce possible que les politiques de Mike Harris soient tellement farfelues que les conservateurs doués de bon sens ne puissent les appuyer?


10610

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA SOUVERAINETÉ DU QUÉBEC

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, hier à Toronto, lors d'un forum organisé par l'Institut CD Howe auquel participait le président du Comité du non au Québec, M. Michel Bélanger, de même qu'un des conseillers constitutionnels du premier ministre, M. Stéphane Dion, ce dernier a affirmé que plus la situation économique se dégraderait, plus les Québécois changeront d'idée et rejetteront la souveraineté.

Ma question s'adresse au premier ministre. Comment le premier ministre peut-il accepter qu'un de ses conseillers constitutionnels, en l'occurrence M. Stéphane Dion, puisse affirmer et je le cite: «Plus ça fera mal, plus l'appui à la souveraineté baissera»?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, M. Dion n'est pas un conseiller constitutionnel. De plus, tout le monde sait que je ne passe pas beaucoup de temps à discuter de Constitution ces temps-ci. Je travaille à essayer de régler le problème de l'économie du Canada et du Québec.

Je me suis fait élire en disant aux gens que je ne voulais pas parler de Constitution. Je n'ai certainement pas mon conseiller sur la Constitution, je ne veux pas en parler. Il veut donner des conseils au Conseil privé sur d'autres choses, comme je l'ai vu dans le journal. Mais en ce qui me concerne, j'espère que la question sera posée clairement, très rapidement, afin qu'on arrête de parler de ce problème pour pouvoir s'occuper des vrais problèmes de la population.

J'ai lu cet article, on émettait des hypothèses sur ce que je devrais faire si le oui gagnait au Québec. On ne connaît pas la date du référendum, on ne connaît pas la question. Je suis convaincu qu'ils vont perdre, alors je ne suis pas pour perdre mon temps à parler de ça.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, c'est pour le moins étonnant que le premier ministre, qui dit ne pas s'intéresser aux questions constitutionnelles, ait fait allouer à son propre bureau quelque 7 millions de dollars supplémentaires pour mettre sur pied une unité opérationnelle en vue de parler de Constitution lors du référendum du Québec.

Des voix: Oh! Oh!

M. Gauthier: En lui posant ma deuxième question, je lui rappellerai simplement que M. Stéphane Dion est toujours sous contrat avec son bureau et cela, jusqu'au 31 mars prochain. J'espère qu'il sait au moins ce qui se passe dans son bureau.

Comment le premier ministre peut-il concilier les propos de son conseiller, M. Stéphane Dion, avec ses propres déclarations, à l'effet qu'il serait respectueux de la décision démocratique des Québécois, quant à leur avenir politique?


10611

(1420)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, on ne parle pas de Constitution à mon bureau, on parle de prendre les moyens d'empêcher la séparation. Ce n'est pas la même chose. Et pour empêcher la séparation, tout ce que l'on demande, c'est que le Bloc québécois et le Parti québécois se décident un jour, qu'ils posent une question claire et nette à la population: Voulez-vous vous séparer du Canada? Et les Québécois vont répondre: Non.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, puisque le premier ministre refuse de se dissocier des propos de M. Dion, je comprends donc qu'il les endosse.

Je lui pose la question suivante: Puisqu'il refuse de se dissocier publiquement des propos de Stéphane Dion, doit-on comprendre que la stratégie référendaire du premier ministre qui, en 1980, consistait à faire peur aux Québécois pour leur faire dire non, en 1995, consiste à leur faire mal pour leur faire dire non?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, au contraire, ce que nous faisons, c'est que nous disons aux Québécois qu'avec un très bon gouvernement fédéral, ils vont rester au Canada. C'est pourquoi nous avons déposé, par exemple, un budget qui a été très bien accueilli par les Québécois. Nous espérons que le gouvernement du Québec va arrêter de parler de séparation et de comités, pour s'occuper des vrais problèmes des Québécois: les problèmes économiques et la création d'emplois et qu'ils vont présenter, comme un gouvernement doit le faire, un budget à la population pour savoir quels sont les vrais problèmes des Québécois.

* * *

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Patrimoine.

L'opposition officielle a questionné le ministre du Patrimoine à plusieurs reprises pour connaître le véritable montant des coupures que subira Radio-Canada au cours des trois prochaines années. Le ministre niait encore, voilà 15 jours à peine, que les décisions relatives au financement de la Société avaient été arrêtées par le gouvernement.

Comment le ministre du Patrimoine concilie-t-il ses propos avec ceux de la vice-présidente de Radio-Canada, Mme Michèle Fortin, qui annonçait hier l'élimination de 750 postes au réseau français de Radio-Canada, afin de faire face aux coupures de 350 millions de dollars sur trois ans imposées par le ministre du Patrimoine?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'ai pris la peine de faire vérifier les renseignements auxquels notre collègue fait allusion. La Société Radio-Canada, et c'est ma source, n'a pas annoncé de coupures et je présume qu'elle n'a pas pris de décision sur des coupures de personnel et de mises à pied. Il est tout à fait naturel que Mme Fortin, lorsqu'elle rencontre des représentants des syndicats, leur fasse part de ses préoccupations. Mais il n'y a pas d'annonce faite par Radio-Canada sur des mises à pied.

M. Louis Plamondon (Richelieu, BQ): Monsieur le Président, lorsque mon professeur de philosophie posait une question intelligente et pertinente et qu'il recevait de la part de son étudiant une réponse avec aussi peu de contenu, il avait l'habitude de dire: «Il n'est pas donné aux cons d'apprécier les perles.»

Ma deuxième question. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Chers collègues, nous avons tous eu de bons professeurs quand nous étions étudiants, je ne crois pas qu'il faille toujours utiliser les même mots ici à la Chambre. Je demanderais à mon honorable collègue de bien vouloir, s'il vous plaît, retirer au moins cette dernière phrase.

M. Plamondon: Monsieur le Président, je réponds de bon gré à votre voeu et je retire mes paroles.

Ma deuxième question s'adresse toujours au même ministre. Comment explique-t-il l'importance des coupures attribuées au réseau français de Radio-Canada, compte tenu de ses performances qui lui permettent d'atteindre des parts de marché jusqu'à trois fois supérieures à celles qu'obtient le réseau anglais? Est-ce que la nouvelle politique culturelle du ministre est de pénaliser ceux qui réussissent?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je comprends que notre collègue n'aime pas ma réponse. Moi, je donne l'heure juste et la vérité que j'ai obtenue et confirmée de Radio-Canada, mais il ne veut pas l'entendre. Alors, moi aussi j'ai eu de bons maîtres et de bons professeurs. Mon grand-père, natif de Sainte-Flore au Québec, disait: «Lorsqu'on laisse sortir la moutonne de la grange, elle vient vous faire ses besoins sur le perron.»

Des voix: Oh, oh!

(1425)

Le Président: De Shakespeare au professeur, au grand-père, j'espère qu'on va parler pour soi-même.

* * *

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, hier soir, à Saskatoon, le premier ministre a fait plusieurs déclarations contradictoires au sujet du système national de soins de santé.

Il a dit que le gouvernement allait maintenir les normes actuelles de l'assurance-maladie, mais que les fonds fédéraux seraient liés à la croissance économique et chuteraient en tant que pourcentage du PIB.

Il sera impossible de maintenir les normes actuelles dans ces conditions, d'autant plus que l'OCDE estime que le coût des soins de santé au Canada va doubler au cours des 20 prochaines années.

Comment le premier ministre explique-t-il cette contradiction et comment maintiendra-t-on les normes actuelles en dépit de l'accroissement de la demande et de la réduction des fonds fédéraux?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, si le député avait lu tout mon discours, il saurait que les dépenses au chapitre des soins de santé ont cessé de croître ces deux dernières années et ont même déjà commencé à diminuer.


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La politique que nous sommes à mettre au point en collaboration avec les provinces donne vraiment les résultats escomptés, freine vraiment la croissance des dépenses. Grâce à une croissance économique de 4,5 p. 100 l'an dernier et de quelque 3 p. 100 cette année, nous allons éventuellement ramener le taux de croissance des dépenses de 10 p. 100 à 9 p. 100 environ, soit au taux où il se situait antérieurement.

Ce taux sera très compétitif. Cela prouve que nous pouvons avoir au Canada un système de soins de santé qui soit complet et universel et qui réponde aux cinq critères prévus dans la Loi canadienne sur la santé et cela, de façon à atteindre raisonnablement notre but. Mais nous allons garder l'assurance-maladie. Nous n'allons pas nous en débarrasser comme le propose le Parti réformiste.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, lorsque les coûts baissent, cela signifie que les normes ne sont pas respectées. Ça n'augure rien de bon.

Les spécialistes affirment que les coûts des soins de santé augmentent d'environ 50 p. 100, tandis que l'économie ne s'accroît que de 4 p. 100. Le gouvernement fédéral songe à réduire les subventions pour les faire passer de 10 à 8 p. 100 du PIB. Peu importe la façon dont vous analysez la situation, cela signifie moins de subventions fédérales pour le régime d'assurance-maladie.

J'ai pu constater la confusion qui régnait en Saskatchewan, lorsque les gouvernements disaient une chose, mais faisaient tout le contraire.

Le gouvernement songe-t-il à confier aux provinces le financement du régime d'assurance-maladie en plafonnant le Transfert social canadien?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous songeons à collaborer avec les provinces pour pouvoir contenir les coûts du régime d'assurance-maladie afin de continuer d'offrir à tous les Canadiens un régime universel de soins de santé gratuits.

Comme on l'a déjà dit, grâce à la collaboration entre le gouvernement du Canada et les provinces, les dépenses publiques au chapitre des soins de santé n'ont pas augmenté l'an dernier. Elles ont même commencé à diminuer. Si nous parvenons à nous astreindre à la discipline qui s'impose, nous pourrons ramener les coûts à 9 p. 100 du PIB et le Canada aura toujours le meilleur régime de soins de santé au monde.

Toutefois, contrairement aux Américains, nous ne tomberons pas dans le piège du système privé. Les Américains consacrent 15 p. 100 de leur PIB aux soins de santé. Au Canada, nous consacrons environ 10 p. 100 de notre PIB à offrir à la population un régime universel de soins de santé gratuits.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, nous devrions demander à un contribuable s'il pense que c'est gratuit.

Le premier ministre parle avec enthousiasme des normes nationales en matière de soins de santé qu'il veut maintenir. Permettez-moi de décrire au premier ministre ce qui se passe vraiment.

Au Manitoba, l'attente est de 61,7 semaines, soit plus d'un an, pour une arthroplastie de la hanche. La norme nationale est de 11,3 semaines. Qui parle de rendement? Respecte-t-on les engagements qui ont été pris? À quoi bon avoir des normes nationales si les provinces sont incapables de les respecter?

Le gouvernement est-il disposé à modifier la Loi canadienne sur la santé afin qu'elle traduise la réalité des années 90 et à donner aux provinces le pouvoir dont elles ont besoin pour offrir les services de santé et les financer?

(1430)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, certaines provinces ont malheureusement des difficultés. Le rendement n'est pas le même partout. Dans notre régime, les soins de santé. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Chrétien (Saint-Maurice): . . .sont gérés par les administrations provinciales. Si les Manitobains avaient un meilleur gouvernement provincial, ils feraient peut-être meilleure figure dans ce domaine.

* * *

[Français]

LE CONSEIL CONSULTATIF SUR LE STATUT DE LA FEMME

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

C'est en catimini que le gouvernement fédéral a décidé de dissoudre le Conseil consultatif sur le statut de la femme, un organisme qui s'est toujours distingué par son indépendance face au gouvernement et par l'importance de ses interventions pour l'avancement de la cause des femmes.

Comment le premier ministre justifie-t-il que, cette année, le gouvernement ait choisi de faire disparaître le Conseil consultatif sur le statut de la femme en refilant ses responsabilités aux organismes féminins déjà en difficulté?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, les conseils de femmes à travers le pays nous disaient qu'ils étaient en meilleur position pour livrer des analyses politiques que ceux qui sont nommés par arrêté en conseil.

On écoute le Parti québécois et le Bloc québécois dire que le Conseil consultatif sur le statut de la femme qui a été nommé par le gouvernement est moins objectif que des organismes comme le FRAPPE ou autres organismes qui ne travaillent pas directement en fonction d'un arrêté en conseil. C'est pour cela qu'on a changé le système.

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas l'avis des groupes de femmes du Québec. Ce n'est pas en tout cas l'écho que j'en ai eu hier.

Ma question complémentaire s'adresse encore au premier ministre. Comment le gouvernement peut-il prétendre que le Conseil consultatif sur le statut de la femme répondait à des besoins qui n'existent plus, alors que les femmes sont toujours les chefs de famille les plus pauvres au Canada, que pour un travail égal elles gagnent moins que les hommes, qu'elles sont


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les premières victimes de violence et qu'elles occupent toujours les emplois les plus précaires?

[Traduction]

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, ce que le gouvernement a décidé de faire, c'est d'abolir les nominations par décret qui sont souvent perçues comme du favoritisme.

La députée sait certainement que les membres du Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme étaient nommés par décret. Les groupements féminins d'un bout à l'autre du pays nous ont posé une question à laquelle nous avons répondu. La question était la suivante: Comment une personne qui est nommée au conseil consultatif par le gouvernement peut-elle être indépendante du gouvernement?

C'est pour cette raison que nous avons pris les fonds de recherche et les fonds qui servaient auparavant à financer les nominations par décret et que nous avons décidé de les réinvestir dans la recherche en les mettant à la disposition des groupements féminins d'un bout à l'autre du pays pour qu'ils puissent établir eux-mêmes leurs priorités au lieu que ce soit les personnes nommées par décret qui le fassent.

* * *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, le rapport Jeffries signalait de graves lacunes à la direction des Forces canadiennes. Ce fait n'est nulle part plus évident que lorsque le rapport déplore qu'on demande constamment aux militaires de «faire davantage avec moins».

Le général Jeffries a été franc et courageux en disant ce que le ministre semble enclin à passer sous silence, à savoir que lui et ses collaborateurs exigent une meilleure performance mais en donnant moins de ressources.

Le ministre reconnaîtra-t-il qu'il incombe au commandement, dont il fait lui aussi partie, d'établir les priorités et de prendre les engagements en fonction des ressources, et qu'on a manqué à cette responsabilité?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, après la période des questions d'hier, j'ai reçu copie de la note de service que le général Jeffries avait envoyée et je l'ai lue très attentivement. La plupart des observations contenues dans ce document sont équivalentes aux recommandations et au commentaire du Comité mixte spécial sur la politique de défense, dont le député a été un des signataires.

À la page 57 de son rapport, le comité parlementaire affirme que, si problème de moral il y a, ce n'est pas parce qu'il y a un manque de leadership. Le député veut maintenant nous faire croire que l'opinion qu'il partageait il y a quatre mois avec le reste des membres du comité a maintenant changé.

Il reste que le comité dont il a été un membre éminent a fait un grand nombre de recommandations, qui ont toutes été acceptées, et on étudie à fond toutes les questions que le général Jeffries a soulevées.

(1435)

M. Jack Frazer (Saanich-Les Îles-du-Golfe, Réf.): Monsieur le Président, je ne suis pas d'accord avec le ministre pour dire que toutes les recommandations ont été acceptées. Il y en a beaucoup qui n'ont pas été acceptées ou mises en oeuvre.

Le général Jeffries constate:

L'écart entre ce qui est nécessaire et ce qu'on a les moyens de faire est comblé par les troupes, des troupes auxquelles on demande de se déployer plus souvent, d'accomplir plus de tâches, de travailler plus longtemps, de courir plus de risques.
Il concluait que la capacité opérationnelle. . .

Le Président: À l'ordre. Je constate aujourd'hui que les questions sont un peu longues, tout comme les réponses. Le député aurait-il l'obligeance de poser tout de suite sa question?

M. Frazer: Monsieur le Président, après avoir reçu cet avis, est-ce que le ministre n'en tiendra aucun compte, comme il l'a fait dans le cas du Régiment aéroporté, ou agira-t-il dès maintenant pour éviter de se retrouver avec ce que le rapport décrit comme «une armée exsangue et des soldats épuisés»?

L'hon. David Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je ne veux pas abuser de la bienveillance de la Chambre en citant un autre passage de la même note de service, mais je me sens obligé de le faire.

Le général Jeffries y affirme qu'en dépit d'une longue liste de motifs d'insatisfaction, le moral demeure en bonne partie excellent. Il continue ensuite en embellissant. Cela me semble suffisant.

* * *

[Français]

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Le 18 janvier dernier, le ministre de la Justice, en réponse à une demande de son collègue du Québec, a refusé de criminaliser explicitement l'excision et les autres mutilations génitales, prétextant que les articles actuels du Code criminel canadien étaient suffisants.

Pourquoi le ministre de la Justice refuse-t-il de prévoir explicitement l'excision et les autres mutilations génitales dans le Code criminel canadien, comme le demande le ministre de la Justice du Québec, la Commission québécoise des droits de la personne et l'ensemble des intervenants du milieu?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais souligner d'abord que l'opinion sur cette question difficile n'est pas unanime. En fait, selon l'article publié dans Le Devoir d'aujourd'hui, le Conseil du statut de la femme du Québec ne partage pas nécessairement l'opinion du Conseil consultatif canadien sur le statut de la femme.

Il croit que la modification du Code criminel pourrait avoir comme effet d'encourager encore plus la clandestinité, et le gouvernement fédéral est d'accord. Nous favorisons plutôt les


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efforts de sensibilisation auprès des communautés qui ont une tradition d'excision et de mutilation.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre de la Justice peut-il encore prétendre que le Code criminel actuel est suffisant, alors que le gynécologue Claude Fortin affirme avoir dû pratiquer neuf interventions chirurgicales sur des femmes canadiennes pour traiter des mutilations génitales, et qu'aucune poursuite n'a été instituée envers ceux qui ont pratiqué ces actes de barbarie.

[Traduction]

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il y a moins de deux semaines, j'ai rencontré à Toronto le conseil consultatif mis sur pied par le procureur général de l'Ontario pour étudier précisément cette question.

Vingt-cinq femmes des collectivités les plus touchées sont en train de rédiger un rapport dans lequel elles formuleront des recommandations spécifiques sur la criminalisation. Leur opinion pour l'instant est que la solution ne consiste pas à modifier le Code criminel, car cela aurait pour effet de repousser cette pratique encore plus profondément dans la clandestinité, si bien qu'il nous serait plus difficile de punir ces actes lorsqu'ils sont révélés.

Je ne saurais trop insister sur la détermination du gouvernement à intenter des poursuites et à appliquer des sanctions lorsque ces actes criminels sont découverts. Je dois dire cependant que des personnes qui connaissent le problème à fond sont profondément convaincues que ce serait mal servir cette cause que de modifier le Code criminel comme il a été proposé.

* * *

LES RELATIONS OUVRIÈRES

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, durant la campagne électorale au Manitoba, le premier ministre a dit que le petit gars de Shawinigan défendrait les intérêts du petit Canadien.

Des voix: Bravo!

M. Hoeppner: Un électeur de ma circonscription a un chargement de graines de tournesol d'une valeur de 200 000 $ dont l'expédition est compromise à cause de la grève des débardeurs du port de Montréal.

(1440)

Maintenant qu'il est à la tête du pays, quelle mesure le premier ministre prendra-t-il, dans l'immédiat, pour assurer l'acheminement de ce produit à Halifax, de manière que ce petit producteur ne soit pas acculé à la faillite?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, hier, le Parlement a agi avec célérité à l'égard du port de Vancouver, qui était complètement paralysé.

À Montréal, le problème est d'une nature différente et ne nécessite pas l'adoption d'un projet de loi pour l'instant. La ministre du Travail étudie toutefois la question.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Cette réponse ne mettra pas du pain sur la table du petit producteur, monsieur le Président.

Les négociations dans le secteur ferroviaire sont vouées à l'échec. Encore une fois, les agriculteurs devront peut-être. . .

Le Président: Je demanderais aux députés, quand ils posent une question complémentaire, de limiter leur introduction à peut-être une phrase et de formuler tout de suite leur question.

M. Hoeppner: Le premier ministre demandera-t-il immédiatement la nomination d'un médiateur-arbitre dont la décision sera exécutoire, en dernier recours?

[Français]

L'hon. Lucienne Robillard (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, je pense qu'hier nous avons eu l'occasion d'expliquer très clairement la différence entre les conflits de travail que nous connaissons présentement. Nous avons solutionné hier, dans une première étape, avec l'aide d'ailleurs des partis de l'opposition, la situation dans les ports de la côte Ouest.

Concernant les chemins de fer, aujourd'hui même, les négociations se poursuivent avec Canadien Pacifique. Quant au port de Montréal, la situation est complètement différente et j'ai offert un médiateur aux deux parties.

Je l'ai dit hier et je le redis, chaque situation doit être évaluée à son mérite et on doit apporter des solutions en conséquence. Le but que nous visons comme gouvernement, c'est que les parties s'entendent entre elles pour négocier.

* * *

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Patrimoine canadien vient d'indiquer à la Chambre qu'il n'y a aucune coupure d'annoncée à Radio-Canada.

Le ministre du Patrimoine confirme-t-il sa réponse de tout à l'heure à l'effet qu'il n'y aura pas de coupures à Radio-Canada l'an prochain?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je trouve la logique de notre collègue très étonnante. Ce n'est pas du tout dire la même chose que de dire que je n'ai pas de confirmation qu'il y a des coupures et de dire qu'il n'y aura pas de coupures.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, ma seconde question, en toute logique: Comment le ministre du Patrimoine explique-t-il alors que Radio-Canada annonçait hier l'abolition de 750 postes sur la base, je suppose, d'une simple spéculation?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je veux bien croire que notre collègue soit discret, il n'a pas écouté ma dernière réponse. Mais


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j'ai déjà répondu à cette question il y a quelques minutes. J'ai expliqué qu'il y avait eu des conversations à l'intérieur de Radio-Canada mais qu'il n'y avait pas. . .

Dois-je sortir encore un proverbe pour faire tenir mes collègues en paix?

Des voix: Oui, le grand-père!

M. Dupuy: Mon grand-père, venant de Sainte-Flore. . .

Des voix: Ha! Ha!

* * *

[Traduction]

LE GOUVERNEMENT DU CANADA

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Je considère le budget et toutes les modifications qui en découlent comme un exercice nécessaire, mais risqué. Nous avons hérité d'un gouvernement affaibli par la dette et nous devons réduire davantage la taille de l'appareil gouvernemental pour éponger la dette.

Le ministre peut-il nous donner l'assurance que la cure d'amaigrissement de l'État et de ses programmes se traduira par le renforcement du gouvernement dans l'avenir?

(1445)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Absolument, monsieur le Président. En fait, je voudrais féliciter le député d'avoir formulé ainsi sa question. Nous avons tenté, dans le budget, de remédier à ces faiblesses de l'économie qui, autrement, est très forte.

Il en est résulté que nous avons augmenté considérablement l'équité du régime fiscal. Nous sommes en train de restructurer l'appareil gouvernemental pour le rendre plus petit et pour qu'il fonctionne plus intelligemment. Nous avons résolument amorcé la diminution du déficit. Nous avons reconduit nos objectifs en matière d'inflation. Nous avons accru la crédibilité du gouvernement. Pour la première fois, un gouvernement canadien a atteint ses objectifs, et nous avons commencé pour de bon à faire décroître le ratio de la dette par rapport au PIB.

* * *

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, mardi dernier, la Chambre a rejeté ma question concernant l'affaire Pérez, sous prétexte que celle-ci relevait de l'administration précédente.

Nous ne devons pas oublier qu'il s'agit de deux personnes qui siègent maintenant à l'autre endroit et du président de la Société canadienne des postes. La question est donc très actuelle.

Le gouvernement a promis transparence et honnêteté. Je ne parviens pas à comprendre pourquoi le premier ministre ne demande pas au conseiller en éthique de faire la lumière sur cette question. Pourquoi refuse-t-il de le faire?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce n'est pas le conseiller en éthique qui a compétence en ce domaine. Nous avions demandé à un comité de la Chambre d'examiner la question du lobbying et ainsi de suite. Ce comité a déposé aujourd'hui un rapport avec des propositions d'amendement. Nous demanderons à un autre comité de la Chambre d'étudier la question du code de conduite des députés et des sénateurs.

Les questions à ce sujet doivent être tranchées par les parlementaires eux-mêmes et non pas par le gouvernement, car elles touchent la conduite des sénateurs et des députés. Il n'appartient pas au gouvernement de dicter la conduite des parlementaires. Ces derniers sont assez sérieux et compétents pour établir leurs propres lignes directrices. Le député sera invité à participer aux travaux s'il a des opinions à formuler à ce sujet.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, c'est la troisième fois que nous demandons une réponse, une étude ou une enquête de la part du conseiller en éthique. La réponse est toujours la même: non, non et non.

Si le premier ministre fait appel au conseiller en éthique uniquement lorsque le dossier n'est pas trop délicat, qui fera enquête dans le cas des questions controversées comme celle-ci et quand le fera-t-on? Les Canadiens veulent voir clair dans toute cette affaire.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déclaré dès le début, cette situation s'est produite avant notre arrivée au pouvoir. J'ai dit aussi que la Chambre des communes avait été saisie de la question concernant la conduite des parlementaires. Nous allons demander à un comité de la Chambre de faire rapport à ce sujet. Le député pourra donc étudier le problème.

Le gouvernement d'aujourd'hui n'a pas à répondre d'événements qui se sont produits sous les administrations précédentes.

* * *

[Français]

LE IRVING WHALE

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de l'Environnement. La ministre nous affirmait hier, en parlant de la coque du Irving Whale, et je cite: «On a fait l'examen électronique au mois de juin dernier.» Pourtant, nos informations sont à l'effet que l'examen de juin dernier consistait en un balayage latéral au sonar. Cette inspection n'a permis de vérifier qu'une partie de la coque à l'aide d'un procédé imprécis, alors qu'une réelle inspection électronique aurait permis de vérifier la solidité des soudures et l'état des fêlures dans la structure de la barge.

La ministre va-t-elle se satisfaire d'une étude partielle qui ne permet pas de tirer des conclusions sur la solidité réelle de la coque, et est-elle prête à assumer la responsabilité d'un éventuel déversement, lors du renflouage?


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[Traduction]

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, avec le consentement de la Chambre, je voudrais déposer l'étude au sonar à balayage latéral du Irving Whale, qui a été menée entre le 12 et le 15 juin 1994.

Hier, la députée a prétendu qu'aucune étude n'avait été faite. C'est ainsi qu'à 17 h 30, hier toujours, nous avons envoyé une copie de l'étude à son bureau. Je voudrais lire à son intention un extrait de cette étude.

Le balayage latéral au sonar a été effectué par la sous-division de géologie marine environnementale du Centre géoscientifique de l'Atlantique de la Commission géologique du Canada, au moyen d'un sonar à balayage latéral Simrad MS992 à deux fréquences, soit 120 et 330 kilohertz, et d'un appareil GeoAcoustics SE880. . .
(1450)

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, encore une fois, on a déjà cette étude, on a déjà ce rapport et c'est un système qui est imprécis.

La ministre admettra-t-elle enfin qu'il existe une controverse entourant sa décision, alors que, contrairement à ce qu'elle prétend, plusieurs personnes parmi lesquelles quatre experts reconnus en sauvetage de navire et un conseiller scientifique de son propre ministère ont émis des doutes sérieux sur sa décision?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, c'est moi, hier, suite aux demandes des députés qui ont porté plusieurs accusations sans fondement jusqu'à date, qui lui ai fourni les données de l'examen fait pendant trois jours.

Je ne suis pas une scientifique, mais je me fie beaucoup plus aux relevés géologiques du Canada qu'aux politiques de la députée d'en face qui, à date, n'a lu aucun rapport, n'a accepté aucune analyse et a même refusé de lire les documents que j'ai fournis l'an dernier à la Chambre sur ce sujet.

* * *

[Traduction]

LE TARIF DU NID-DE-CORBEAU

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture pourrait-il expliquer au juste aux agriculteurs à qui les sommes versées à la suite de l'élimination de la subvention au titre de la Loi sur le transport du grain sont censées revenir? Est-ce aux propriétaires de terrains ou aux agriculteurs mêmes?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, en l'absence du ministre de l'Agriculture qui est actuellement dans l'Ouest pour s'entretenir précisément avec un large éventail d'organisations agricoles, je vais certes prendre les questions du député en note.

Les mesures annoncées dans le budget pour aider les agriculteurs à faire face à l'élimination progressive de la subvention accordée au titre de la LTGO ont pour objectif de veiller à ce qu'on puisse continuer d'investir dans le développement d'un nouveau secteur agricole dans l'Ouest du pays, pour qu'il soit en mesure de se diversifier et d'offrir davantage de produits à valeur ajoutée. C'est là le critère que le ministre de l'Agriculture utilisera et, comme toujours, il fera preuve de jugement et de gros bon sens.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, le 27 février 1995, dans le document publié par le ministère, on disait que l'argent versé dans le cadre des mesures transitoires irait aux propriétaires de terrains pour les dédommager de la baisse de valeur de leurs terrains.

Le lendemain, le ministre de l'Agriculture a déclaré qu'il n'avait rien contre le fait d'encourager les gouvernements provinciaux à verser cet argent aux agriculteurs locataires, plutôt.

Le ministre semble s'y perdre. Cet argent va-t-il servir à contrebalancer la perte de valeur des terrains ou l'accroissement des frais de transport? Les agriculteurs attendent une réponse à ce sujet.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, il me semble que la question du député est quelque peu confuse.

Comme je viens de l'expliquer, le ministre de l'Agriculture a précisé qu'il allait discuter de cette question avec un large éventail d'organisations agricoles, et c'est ce qu'il fait aujourd'hui. En ce qui concerne les réponses, il s'est exprimé très clairement.

Nous voulons nous assurer qu'on utilise les indemnités de la façon la plus efficace possible pour favoriser le développement et la réorganisation de l'agriculture de l'Ouest afin qu'elle puisse continuer à être un moteur important de la croissance économique dans cette région.

* * *

INTERNET

M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie. M. Ernst Zundel et d'autres individus, connus comme lui pour avoir nié l'holocauste nazi, ont l'intention d'utiliser la technologie Internet pour diffuser leur propagande.

Premièrement, quelles mesures réglementaires le ministre peut-il prendre pour empêcher la diffusion de propagande haineuse sur Internet et, deuxièmement, comment les auteurs de cette propagande peuvent-ils être obligés de rendre compte de leurs actes?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je tiens d'abord à dire que la propagande répandue par des individus comme Ernst Zundel n'est pas plus acceptable sur Internet que sur tout autre support.

L'existence même de ce genre d'information dans notre société est déplorable. Le Conseil consultatif de l'autoroute électronique examine actuellement la législation pour voir si elle permet


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de résoudre efficacement des problèmes comme celui qui met en cause Internet.

(1455)

Nous consulterons les fonctionnaires du ministère de la Justice, et je compte bien que leurs recommandations nous aideront à décider si des mesures législatives additionnelles sont nécessaires.

* * *

[Français]

LE MINISTÈRE DE L'ENVIRONNEMENT

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de l'Environnement.

À une question portant sur un terrain appartenant à la bande Squamish que loue le gouvernement fédéral à Vancouver, la ministre répondait le 14 décembre dernier, et je cite: «J'ai pris des dispositions pour informer la bande que les paiements devraient cesser à la fin de l'exercice en cours.»

La ministre peut-elle nous confirmer si les paiements pour la location de ce terrain qui a déjà coûté 26 millions de dollars aux contribuables canadiens ont effectivement cessé, tel qu'elle nous l'avait promis le 14 décembre dernier, puisque les fonctionnaires de son propre ministère affirment le contraire?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je peux assurer le député que nous avons informé la bande en question qu'on ne paierait plus un sou après l'année civile qui est dépassée, quand j'ai répondu à la question. Et notre position là-dessus est ferme.

* * *

[Traduction]

LE BUDGET

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, les comptables du Canada sont furieux. Le budget propose d'obliger tous les professionnels à déclarer leur revenu à la fin de décembre, au lieu de le faire à d'autres périodes de l'année. Les frais de comptabilité vont monter en flèche à cause des heures supplémentaires et du personnel additionnel qui seront nécessaires à la fin de l'année. Les professionnels vont devoir assumer ces frais supplémentaires.

Le ministre des Finances a-t-il consulté des comptables et des professionnels sur cette question?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, au cours de la dernière année, nous avons consulté de nombreux Canadiens sur toutes les questions que nous avons abordées dans le budget.

Le député sait sans doute que les professionnels avaient la possibilité de reporter d'une année complète la déclaration de revenus qui, autrement, auraient été imposables, ce qui leur donnait un avantage important par rapport aux autres Canadiens.

Toutefois, étant donné que le gouvernement s'est engagé à faire en sorte que le régime fiscal soit équitable et que tous les Canadiens paient leur juste part, nous avons mis fin à cette échappatoire.

Le Président: À partir de maintenant, les députés ne peuvent poser qu'une seule question. Le député de Sherbrooke a la parole.

* * *

[Français]

LE PROGRAMME ÉCOLE AVANT TOUT

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines ou à qui voudra bien répondre et concerne le programme d'emploi, c'est-à-dire le programme École avant tout, lancé il y a cinq ans, qui s'adressait aux jeunes qui poursuivaient leurs études et qui cherchaient à s'attaquer directement au problème du décrochage scolaire. Les groupes qui s'attardent à ce problème et qui cherchent à encourager les jeunes ont appris récemment que le programme ne serait pas continué.

J'aimerais savoir de la part du gouvernement s'il est vrai que le programme sera abandonné?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le ministre du Développement des ressources humaines vient de sortir de la Chambre. Il sera ici dans quelques minutes, peut-être qu'il pourra répondre à l'honorable député à 3 heures, sinon la prochaine fois que le député sera à la Chambre.

* * *

[Traduction]

L'ASSURANCE-SANTÉ

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre, qui se trouvait en Saskatchewan, hier, pour parler du régime d'assurance-santé.

En même temps, en Saskatchewan, des gens du milieu de l'assurance-santé, y compris l'ancien premier ministre Allan Blakeney, qui avaient participé, il y a plus de 30 ans, à la lutte pour l'adoption du régime d'assurance-santé, lançaient un cri d'alarme aux Canadiens. Notamment, M. Blakeney a dit que la suppression du financement de programmes précis en faveur de transferts globaux réduits, assortis de conditions minimales, donnera lieu à un régime d'assurance-santé disparate dans lequel les différentes provinces appliqueront des normes différentes.

Comment le gouvernement peut-il continuer de prétendre qu'il défend les principes du régime d'assurance-santé, alors que quatre des artisans de ce régime nous disent que ces réformes entraîneront un régime disparate?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, s'ils avaient attendu jusqu'à ce matin, ces


10618

quatre artisans, comme le député les a désignés, n'auraient pas été obligés de tenir une conférence de presse, car j'ai dit très clairement que le régime d'assurance-santé demeurera inchangé.

* * *

L'ÉCONOMIE

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

À la lumière des récents rapports de la presse nationale et internationale qui présentent l'économie canadienne sous un jour favorable, le ministre pourrait-il dire à la Chambre pourquoi les indicateurs économiques sont si bons?

(1500)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, comme la députée le sait sans aucun doute, puisqu'elle suit cette question de très près, la croissance du Canada augmente. Il est en tête du Groupe des Sept. Elle sait que notre bilan de productivité est remarquable et que notre inflation est très faible.

Elle fait sans doute référence à des indicateurs plus récents. Le fait est que l'indicateur avancé composite a augmenté de 0,5 p. 100 en février, après une hausse de 0,6 p. 100 en janvier. Elle faisait sans doute allusion au fait que nos livraisons de produits manufacturés ont augmenté de 28 p. 100 en janvier par rapport à l'année dernière.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, j'allais oublier cette question très importante. Je demande à l'honorable leader du gouvernement à la Chambre de nous faire état des travaux pour les prochains jours.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme on l'a déjà annoncé, vendredi sera une journée de l'opposition.

Lundi, la Chambre sera saisie du projet de loi C-73, Loi portant pouvoir d'emprunt, puis du projet de loi C-68 sur le contrôle des armes à feu. Mardi sera aussi une journée de l'opposition.

Mercredi, la Chambre passera à la deuxième lecture du projet de loi C-72, qui traite de l'intoxication volontaire, après quoi nous reprendrons l'ordre du jour de lundi au point où nous l'aurons laissé.

Jeudi sera un autre jour réservé à l'opposition. Ce sera le dernier de la présente période de crédits, ce qui signifie qu'à la fin de la journée, la Chambre devra mettre aux voix le dernier Budget des dépenses supplémentaire et les crédits provisoires.

Vendredi, nous commencerons la deuxième lecture du projet de loi de mise en oeuvre du budget que nous avions l'intention de présenter aujourd'hui mais que nous avons dû reporter pour des raisons techniques.

Je tiens à remercier les partis d'opposition pour la collaboration dont ils ont fait preuve dans la discussion et le vote d'hier soir sur le projet de loi de retour au travail qui doit permettre la reprise des activités dans le port de Vancouver. Nous avons beaucoup apprécié leur attitude.

* * *

[Français]

QUESTION DE PRIVILÈGE

L'HONORABLE VICE-PREMIÈRE MINISTRE ET MINISTRE DE L'ENVIRONNEMENT-LE RENFLOUAGE DU IRVING WHALE-DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le Président: Mes collègues, hier, le 15 mars, l'honorable chef de l'opposition a soulevé une question de privilège au sujet de l'échange de propos qui est survenu le 14 mars pendant la période des questions entre lui et la vice-première ministre et ministre de l'Environnement. Après avoir entendu les deux parties, la Présidence a promis d'examiner la situation de même que la transcription de l'échange original de propos et de rendre une réponse à la Chambre. Je suis maintenant prêt à rendre ma décision sur cette question.

[Traduction]

J'ai soigneusement examiné les commentaires des deux députés, et je les remercie de leurs interventions. En ce qui concerne la différence fondamentale d'opinion qui existe entre eux, je dois conclure qu'il s'agit d'un différend sur les faits ou sur l'interprétation des faits. En tant que tel, c'est une question de débat, et ce différend ne constitue pas, à première vue, une question de privilège.

Cependant, en examinant soigneusement la transcription de l'échange original de propos, la présidence a constaté des anomalies troublantes. Selon moi, ce sont ces anomalies qui indignent le chef de l'opposition et c'est à leur sujet que la présidence doit réagir et lui accorder réparation.

[Français]

Permettez-moi de repasser la suite des événements qui m'amènent à cette conclusion. L'échange original de propos a eu lieu le 14 mars en français. Il a été enregistré et transcrit; la transcription a été corrigée, et cette transcription corrigée a été, comme d'habitude, distribuée aux orateurs pour révision. Le bureau de la vice-première ministre a révisé la transcription, comme d'habitude, et soumis, comme il a le droit de le faire, deux propositions de changement aux «bleus». Cependant, de l'avis de la Présidence, ces changements n'auraient pas dû être acceptés, ni être imprimés dans le compte rendu officiel parce qu'ils constituent une différence substantielle par rapport aux paroles originales prononcées par l'honorable députée. Pour compliquer les choses davantage, ces changements apparaissent dans les Débats français, mais ne sont pas rendus dans la version anglaise, qui constitue plutôt une traduction littérale des mots prononcés originalement en français.

10619

(1505)

En conséquence, pour corriger ces anomalies, j'ai donné instruction à mes fonctionnaires d'imprimer un correctif dans les Débats d'aujourd'hui, de sorte que les versions anglaise et française de l'échange de propos du 14 mars correspondent fidèlement aux mots originalement prononcés par l'honorable vice-première ministre.

[Traduction]

J'ai demandé au greffier de la Chambre de veiller à ce que les réviseurs des Débats observent strictement les critères établis depuis longtemps quant aux changements qu'ils peuvent accepter lorsque les députés proposent des changements en retournant leurs bleus.

J'espère que cette mesure corrective mettra fin à l'incident.

_____________________________________________


10619

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ-L'ÉGALITÉ ÉCONOMIQUE DES FEMMES

La Chambre reprend l'étude de la motion.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Nous reprenons le débat avec l'honorable députée de Calgary-Nord.

Je demanderais à l'honorable député de Roberval de retirer ses paroles.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Madame la Présidente, je voudrais que vous me disiez ce que vous voulez que je retire. Je n'ai pas l'impression d'avoir fait d'intervention.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je peux vérifier les bleus, mais j'ai également entendu ici que vous avez employé un mot qu'on n'a pas l'habitude d'employer à la Chambre.

M. Gauthier: Madame la Présidente, je faisais simplement, complètement hors micro, référence à la vice-première ministre.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je peux vérifier les bleus. Si les mots n'apparaissent pas, je m'excuserai.

M. Gauthier: Madame la Présidente, je vous invite à regarder les bleus.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Madame la Présidente, lorsque vous examinerez les bleus des débats, j'aimerais peut-être souligner deux points que la Présidence voudra peut-être prendre en considération. Premièrement, lorsqu'un parlementaire dit d'un autre parlementaire qu'il ou qu'elle a, et je cite, «le droit de mentir», ça se réflète non seulement au parlementaire qui aurait, si cette affirmation s'avérait véridique, en fait, menti et, bien sûr, on n'a pas le droit d'accuser un parlementaire de le faire.

Mais dans un deuxième temps, ça remet en question la décision que venait de prendre, quelques instants auparavant, la Présidence, en ce qui a trait aux différends d'opinions qu'il y avait, parce qu'en disant qu'un autre parlementaire avait eu ce droit, soi-disant, de mentir, ça impute que le droit lui avait été donné par quelqu'un. En l'occurrence, la personne qui avait tranché la question était le Président de cette Chambre, donc c'est la décision du Président qui a été remise en question par l'honorable député d'en face.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Alors, effectivement, on va étudier les bleus et je vous reviens aussitôt qu'ils sont disponibles. Sur un rappel au Règlement, l'honorable whip de l'opposition.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Madame la Présidente, tant qu'à étudier les bleus, si vous pouvez étudier les bleus d'hier également, alors que la vice-première ministre affirmait n'avoir proposé aucune correction au hansard, ici même en cette Chambre, et cela n'apparaît pas aujourd'hui au hansard. Alors, j'imagine qu'on l'a très bien entendue, même que le ministre des Transports l'a appuyée et applaudie. Il y a des choses qui apparaissent aux bleus et d'autres qui n'apparaissent pas. Cela nous donne des fois les bleus, madame la Présidente.

(1510)

[Traduction]

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Madame la Présidente, c'est l'une des interventions les plus souvent interrompues qu'il m'ait jamais été donné de faire. Il y a en fait plus d'une heure que j'ai commencé et je n'ai encore parlé que deux minutes. Il est difficile de retrouver le fil de sa pensée quand on s'arrête et que l'on reprend de cette façon. Peut-être pourrais-je reprendre mon intervention au début et la terminer cette fois sans être interrompue.

L'histoire est faite de luttes personnelles menant au succès. Comme je l'ai dit plus tôt, quand j'ai commencé mon intervention, c'est vrai pour un grand nombre d'entre nous à la Chambre. Je connais un député de l'autre côté qui ne connaissait pas un mot d'anglais lorsqu'il est arrivé au Canada. Il a commencé comme serveur. Aujourd'hui, il est député. Des histoires semblables, il y en a beaucoup. J'ai exposé un peu plus tôt aux députés les obstacles que j'ai eus à surmonter personnellement.

Nous sommes nombreux dans ce pays à être devenus des membres actifs de la société, des gens d'affaires, des professionnels, qui aidons les autres à se construire une vie. Nous sommes nombreux à l'avoir fait avant l'existence des programmes d'action positive, avant que ne soit née l'idée de ces mouvements en vue d'assurer l'égalité.

Les Canadiens peuvent et veulent réussir par leurs propres moyens et veulent qu'on les juge sur leurs propres mérites. Il y a dans ce pays beaucoup de gens qui ont du mérite. Il y a beaucoup de héros méconnus. Nous ne les verrons pas dans les tribunes publiques. Ils ne seront pas décorés, mais ce sont des citoyens décents, honnêtes, travaillant dur, soucieux les uns des autres, qui vont bien au-delà de ce qu'exige le devoir pour apporter aide et encouragements aux autres. Nous devons commencer à juger le succès en fonction des normes sur lesquelles se fondent beaucoup de Canadiens pour se juger eux-mêmes. Beaucoup de Canadiens jugent leur succès en fonction de ce qu'ils ont été capables de donner en tant qu'individus, non pas en fonction de ce qu'ils ont réussi à avoir.


10620

Les Canadiens ont compris ce que la plupart de nous avons compris il y a longtemps, que la vie n'est pas juste. Il existe un proverbe qui dit plus ou moins ceci: Reconnaître que la vie est dure vous la rend plus facile. Pourtant, il y a toujours dans cette Chambre quelqu'un pour dire que nous devons faciliter la vie aux gens. Que nous devons leur rendre la vie plus équitable. Les Canadiens savent parfaitement que chacun est l'artisan de sa propre vie.

Nous parlons aujourd'hui de la notion d'égalité. Égalité signifie essentiellement justice et impartialité. C'est ce que dit le dictionnaire. Le gouvernement ne peut pas rendre la vie juste. Le Parlement ne peut créer l'égalité pas plus qu'il ne peut légiférer la bonté et la compassion.

L'ancien président américain Calvin Coolidge a déclaré ce qui suit: «La population ne peut s'attendre que le succès vienne de la loi. L'industrie, l'économie et la force morale ne découlent pas de la loi ou de la fermeté. Le rôle du gouvernement n'est pas de réduire l'effort. Il ne peut offrir de substitut aux valeurs du service. Bien sûr, il peut combler des lacunes et reconnaître un mérite extraordinaire. Les gens normaux doivent se prendre en charge. L'autonomie gouvernementale, c'est l'autosuffisance.»

Est-ce dire que l'injustice et la discrimination sont acceptables? Bien sûr que non. Ce n'est pas le gouvernement qui fait agir avec justice et impartialité. Nos actes résultent des décisions que nous prenons en tant qu'individus.

Le gouvernement, c'est nous, c'est une partie de nous. C'est ce que nous créons en tant que société. Dans une démocratie surtout, il reflète ce que nous voulons. C'est pourquoi nous choisissons des représentants à qui nous demandons de remplir nos souhaits. D'une certaine façon, certains pensent que le gouvernement devrait créer une éthique qui n'existerait pas sans cela.

(1515)

Il y a des choses que nous pouvons et devrions faire pour agir avec plus d'équité et d'impartialité. Nous devrions faire ces choses, mais il n'y a pas lieu de légiférer à cet égard.

Les Canadiens veulent qu'on les traite comme des individus. Nous sommes importants du seul fait de notre existence, et non de notre relation dans un groupe. Nous sommes importants comme individus, non pas à cause de notre appartenance à un sexe, de notre rang ou du pigment de notre peau. Ces choses importent peu.

Ce qui compte c'est ce que nous avons dans le coeur, ce dont nous sommes capables et l'effort que nous déployons pour réussir ce que nous jugeons important. Voilà ce qui compte. Nous devons nous rendre compte qu'il faut miser sur cette confiance en soi, sur ce désir d'exceller.

Au Canada, on semble penser qu'on nous doit quelque chose, que nous avons droit à des choses pour lesquelles nous nous battons depuis des siècles en tant qu'individus. Il nous les faut. Ce n'est ni pratique ni raisonnable. Cela va à l'encontre de toute l'expérience humaine.

Certains de ces principes ont été appliqués ailleurs dans le monde et, aux États-Unis, on a constaté l'échec de la tentative pour traiter avec une prétendue égalité les différents groupes. Les inconvénients se sont révélés nettement supérieurs aux avantages qu'on attendait de tels programmes. Ce n'est pas faute de bonnes intentions. C'est très bien. Nous voulons tous la justice. Nous voulons tous que les gens réalisent leur plein potentiel.

Je prétends que ce n'est pas quelque chose que l'on peut leur donner. C'est quelque chose que l'on ne peut obtenir qu'en travaillant. La façon de s'assurer que les gens aient les meilleures chances possibles d'atteindre leurs objectifs est de les traiter comme des personnes, de leur donner des chances égales, mais de les laisser atteindre par eux-mêmes les résultats qu'ils veulent.

Abraham Lincoln disait: «Si vous avez ce qu'il faut, le monde prendra ce que vous avez.» Je pense que c'est exact. Nous ne devons pas partager le monde en groupes. Nous devrions travailler ensemble en tant que membres actifs de la société, en tant que personnes ayant un potentiel à réaliser.

Il est important que chacun d'entre nous s'engage, dans ses relations avec les autres, à être juste et impartial, aussi bien en public qu'en privé. C'est quelque chose de nécessaire, mais qui n'a pas besoin de faire l'objet d'une loi. Ce n'est pas quelque chose qui nous est dû, mais une chose pour laquelle nous devons travailler et essayer d'obtenir par nous-mêmes. Cela ne peut pas être imposé par une loi. Je prétends qu'agir différemment c'est détruire, dans l'esprit des individus, ce que nous voulons avoir.

Je pense que nous applaudissons tous au principe de cette motion, que nous voulons l'égalité d'accès pour tous et que notre Charte des droits déclare que nous sommes tous égaux devant les lois de ce pays. Cependant, donner des privilèges spéciaux ou une aide spéciale à des groupes particuliers c'est leur refuser le droit d'atteindre leurs objectifs par leurs propres moyens et par leurs propres efforts. Nous ne devrions pas nous engager dans la voie que trace cette motion.

(1520)

Mme Maria Minna (Beaches-Woodbine, Lib.): Madame la Présidente, j'ai trouvé l'ensemble du discours de la députée intéressant. Elle a parlé d'individualisme, comme si nous étions seules et pouvions nous suffire à nous-mêmes.

J'ai l'impression qu'à son avis il n'y a jamais eu et il n'y a toujours pas de raison de s'inquiéter de racisme ni de sexisme dans ce pays. Il n'y a pas de stéréotypes concernant les personnes handicapées. Et pourtant, elle sait pertinemment que ces personnes ont comparu devant nous et nous ont dit que même pas 2 p. 100 d'entre elles avaient fait des études universitaires et qu'à peine 2 p. 100 avaient un emploi correct à cause des stéréotypes et du racisme. Et il ne s'agit là que des personnes handicapées physiquement. Je ne parle même pas des situations où le racisme entre en jeu.


10621

La députée a parlé d'individualisme et a dit que nous étions capables de nous prendre en main et de décider de notre avenir sans l'aide de lois ou de règlements spéciaux, ni d'ententes ou d'accords collectifs de quelque sorte que ce soit. Il fut un temps où cela était peut-être vrai. Mais je me souviens que c'était également l'époque où existaient par le monde l'esclavage et le travail des enfants que n'interdisait aucune loi. Je ne crois pas qu'elle suggère que nous retournions en arrière.

La députée oublie aussi que les femmes ont dû se battre pour être reconnues comme des personnes en vertu de la loi et pourquoi nous célébrons aujourd'hui la Journée de la personne. Aurions-nous oublié pourquoi nous avons dû nous battre pour obtenir le droit d'être considérées comme des personnes, des êtres humains à part entière? C'était il n'y a pas si longtemps et beaucoup de choses continuent à se passer.

Les journaux rapportaient dernièrement que les femmes d'affaires ont du mal à obtenir des prêts et qu'elles payent des intérêts plus élevés. Elles se prennent en main, mais ça n'a pas l'air de les aider. Être individualiste ne semble pas payant.

Il est vrai que nous avons une charte, mais pourquoi faut-il donc sans arrêt faire appel à la Cour suprême pour faire respecter les droits qu'elle nous accorde? Il ne suffit pas qu'ils soient inscrits dans la charte. Et comment sommes-nous parvenues à les obtenir? En nous battant avec acharnement parce que nous n'avions pas compris qu'ils n'étaient pas inclus dans le projet initial de la charte.

Comment la députée s'imagine-t-elle pouvoir se prendre en main en isolation des autres? Par osmose, chacune d'entre nous va faire exactement ce qu'il faut faire car c'est ce que nous voulons et que cela n'a encore jamais était fait.

Mme Ablonczy: Madame la Présidente, je crois qu'il est très important de comprendre que le fait que l'individu soit responsable de son propre avenir et de sa propre réussite ne signifie pas qu'il est isolé. Personne de sensé n'oserait laisser entendre qu'une société, avec tout ce que ce mot peut signifier, voudrait isoler qui que ce soit. Je ne me souviens pas d'avoir utilisé un mot pareil. Cependant, la députée a une telle peur de mettre une étiquette sur les gens et de les classer par groupes que dès que quelqu'un ose s'opposer à un tel concept, le mot isolement lui vient immédiatement à l'esprit.

Nous devons nous entraider. C'est là tout le but d'une société. Tout le monde a lu le poème intitulé Nul n'est une île. Nous savons que c'est vrai. Toutefois, ce qu'il est important de comprendre c'est que la lutte fait partie de l'expérience humaine.

Oui, les luttes dont la députée a parlé ont été importantes. Elles se poursuivent aujourd'hui et se poursuivront encore, mais ce qui importe c'est que nous devenions responsables de notre avenir. Si nous apportons aux gens ce qu'ils veulent sur un plateau d'argent, si nous leur donnons ce dont ils ont besoin, où est la réussite et où est le mérite? C'est un dû qui nous revient donc de droit. Nous n'avons pas à travailler pour l'obtenir.

On ne peut rien faire pour empêcher la discrimination bien que ce soit une chose terrible. Si j'avais été en vie à l'époque où les femmes n'avaient pas le droit de voter, j'aurais crié et revendiqué aussi fort et avec autant de passion que les autres. Cependant, ce n'est pas en faisant preuve de plus de discrimination que l'on va empêcher la discrimination, ce qui va exactement se produire si nous ne faisons pas attention.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Madame la Présidente, je suis de ceux qui croient que nous ne faisons pas assez de recherche au Canada-et probablement même dans le monde-sur des questions sociales comme la pauvreté, la discrimination raciale et d'autres sujets de cet ordre.

(1525)

Voici ce qui me préoccupe particulièrement: la députée croit-elle que nous fassions assez de recherche sur les questions sociales au Canada, y compris, bien sûr, les questions qui touchent directement les femmes, par rapport à l'ensemble de la société? Je pense en particulier au traitement égal pour un travail d'égale valeur. Faisons-nous assez de recherche sur d'autres questions particulièrement pertinentes pour les femmes, par exemple dans le domaine de la santé? Faisons-nous assez de recherche en vue de redresser certaines des injustices financières dont souffrent les femmes dans la société?

Mme Ablonczy: Madame la Présidente, ce que j'essaie de démontrer, c'est que tous les membres de la société sont également importants. Pourquoi isoler un groupe particulier en disant qu'il a besoin d'aide? Tous les membres de notre société ont besoin d'être traités avec justice et impartialité, et pas seulement certains d'entre eux. Il n'y a aucune raison de croire que certains d'entre nous mériteraient plus de justice et d'impartialité. Ça n'a tout simplement pas de bon sens.

Nous devons nous préoccuper les uns des autres. Nous devons nous entraider. À travers les siècles, les gens reconnus comme ayant une grande valeur, les citoyens solides que l'on respectait ont toujours été ceux qui prenaient soin des défavorisés, des pauvres, des nécessiteux, de ceux qui ne peuvent s'exprimer ou qui n'ont personne sur qui compter pour les défendre. Il faut qu'il continue d'en être ainsi.

La seule chose que j'essaie de démontrer, c'est qu'on ne peut pas légiférer cette forme d'entraide. Cette aide se pratique individuellement, en collaborant avec ses semblables, et non en créant un plan d'action qui garantirait les résultats. Il faut aider les gens à exploiter leurs possibilités, à mettre leurs qualités en valeur et leurs compétences à profit, à combler leurs aspirations. Il ne s'agit pas de le faire à leur place, mais de leur donner la chance de le faire.

Je pense qu'il faut bien nous entendre sur ces distinctions, parce que c'est un enjeu critique. Nous devons nous préoccuper du bien-être de nos semblables, et nous le faisons. Mais quelle est la meilleure façon d'aider les autres, leur faire des cadeaux ou leur donner la chance d'arriver eux-mêmes, à force d'acharnement et d'efforts, à accomplir ce qu'ils veulent dans la vie?

On illustre souvent ce principe en parlant du papillon qui se débat pour sortir de son cocon, ou du poussin qui s'agite pour


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briser sa coquille. C'est un processus qui est long et épuisant. Par contre, si l'on découpe le cocon ou si l'on casse l'oeuf, le petit être qui en sortira sera faible, parce qu'il n'aura pas eu à livrer cette lutte.

Nous devons nous entraider. Nous devons nous intéresser aux luttes des autres et nous assurer qu'elles se livrent dans un contexte juste et impartial, mais nous ne pouvons pas tout donner aux autres, s'ils peuvent être mieux servis par eux-mêmes. C'est là un élément très important dans le débat d'aujourd'hui. J'espère avoir aidé mon collègue à comprendre ce que je voulais dire.

Mme Judy Bethel (Edmonton-Est, Lib.): Madame la Présidente, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a fait paraître un communiqué hier, selon lequel 20 p. 100 plus de femmes que d'hommes étaient confrontées à un refus au moment d'une demande de prêt devant servir à lancer une petite entreprise. Le communiqué rapportait aussi qu'en affaires, les femmes payaient un taux supérieur au taux préférentiel qui dépassait de 1 p. 100 celui des hommes. Je voudrais que la députée explique comment, en tant que société, nous devrions nous attaquer à de telles injustices?

Mme Ablonczy: Madame la Présidente, c'est un point important. De prime abord, de telles statistiques semblent faire état d'une discrimination.

Il faut se poser la question suivante: Les banques, dont la raison d'être est de faire de l'argent, refusent-elles les demandes de prêt des femmes simplement parce qu'elles ne les aiment pas? Dans l'affirmative, il faut les punir. C'est stupide.

Quelle est la différence entre un homme ou une femme en affaires? Y a-t-il de bonnes raisons qui expliquent une telle décision? S'il existe une bonne raison commerciale, comme femme d'affaires, je vais m'assurer de calmer les inquiétudes de la banque, d'être admissible au prêt dont j'ai besoin et de répondre aux critères. En fait, je dois penser qu'on serait bien avisé de me prêter cet argent parce que je représente un bon risque. C'est le genre d'initiative dont nous avons besoin.

(1530)

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse de participer à la discussion d'aujourd'hui. Je suis ravie que les préoccupations de 52 p. 100 de notre population fassent l'objet d'un débat sérieux, fondé sur les considérations politiques de chacun.

La politique mène à de drôles d'alliances, si je peux m'exprimer ainsi. Chacun de nous a choisi le parti politique qui convenait le mieux à ses intérêts et à ses préoccupations. Notre vision de la vie se reflète peut-être dans le siège que nous occupons à la Chambre. Nous sommes témoins d'un débat très intéressant. La plupart des opinions exprimées correspondent aux valeurs qui me semblent importantes; certaines sont tout à fait scandaleuses et d'autres ne sont dictées que par la plus basse forme de sectarisme politique que je puisse imaginer.

Je trouve néanmoins qu'il est crucial d'aborder ce genre de question. Je suis très heureuse de traiter de la motion de l'opposition au sujet des mesures fédérales visant à favoriser l'égalité économique des femmes.

[Français]

Madame la Présidente, je veux remercier ma collègue pour sa motion. Elle demande à cette Chambre d'affirmer le principe qui me tient également à coeur, l'égalité économique entre les hommes et les femmes. Ce n'est pas facile d'y arriver, mais ça vaut la peine d'en discuter, surtout après l'allocation prononcée par l'honorable députée du Parti réformiste.

Notre gouvernement est fermement engagé à réaliser l'égalité des femmes. Il ne fait aucun doute que l'égalité des femmes, l'équité et la justice pour tous passe par l'indépendance économique.

Nous savons aussi que l'égalité économique est à la base même du bien-être des femmes et est la mesure de la situation de la femme dans notre société. Si on est bien nanti, si on a un bon job, comme on dit, on est mieux placé pour se protéger. Si on est au bas de l'échelle, si on est une femme divorcée, si on est dans une situation où nos parents ont vécu une vie de confrontation où il y avait des personnes battues, nous allons vivre une vie plutôt inconvenable. L'égalité n'est pas là. Je crois qu'il revient à la société d'essayer ensemble, hommes et femmes, de s'intéresser à ces questions qui sont d'une importance capitale pour tout le monde.

Les femmes, je crois, doivent pouvoir oeuvrer dans le monde du travail, recevoir un salaire égal pour des tâches comparables, et contribuer équitablement à notre richesse collective. Je dois vous avouer, en tant que mère de famille ayant eu des garçons, si j'avais eu des filles-je n'ai pas eu ce privilège-est-ce que je n'aurais pas voulu qu'elles aient le même traitement, la même égalité des chances que mes garçons, comme celles que je veux maintenant pour mes belles-filles? Si elles ont la même éducation, si elles ont la même compétence et si elles ont tous les acquis, pourquoi ne méritent-elles pas le même traitement? Je n'ai jamais compris pourquoi on ne peut assurer à nos garçons et à nos filles une vie équitable. Et cette vie équitable peut changer si on décide d'avoir des enfants, et cela il faut en tenir compte aussi.

Je trouve qu'il est très important de trouver une façon de s'assurer que la contribution équitable à notre richesse collective soit un atout pour tout le monde, pour tous les membres de notre société, tant pour les femmes que pour les hommes.

(1535)

[Traduction]

Je suis ravie de faire partie d'un gouvernement résolu à accélérer l'avancement de la cause des femmes sur le plan économique, non seulement sur le marché du travail, mais également à la maison, dans le cas des femmes qui décident de rester au foyer. Je suis fière d'avoir le privilège de servir mon pays aux côtés d'un premier ministre qui vise exactement le même objectif.

L'objectif du Parti libéral n'a pas changé. Les temps ont changé. Ce qui nous semblait nécessaire il y a de nombreuses


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années a changé en fonction de la réalité d'aujourd'hui, que ce soit la technologie, l'organisation de la société ou le rôle et la place des femmes.

Regardez autour de cette Chambre. Regardez le nombre de femmes qui sont parvenues à gagner leurs épaulettes au niveau politique, elles siègent ici.

Une voix: De leur propre initiative.

Mme Finestone: Pas de leur propre initiative, je le dis à ma collègue d'en face, mais grâce au travail d'un grand nombre de femmes comme moi et tant d'autres.

Le Parti libéral a promulgué la Loi sur les droits de la personne et la Charte canadienne des droits et libertés et a chargé une commission royale d'enquête de se pencher sur la question de l'égalité économique. Toutes ces structures sociales s'imposaient; ces structures législatives, ce mandat législatif, ces outils qui traduisent notre volonté d'assurer l'égalité des femmes n'existaient pas lorsque la Commission royale d'enquête sur la situation de la femme a tenu ses premières audiences.

J'ai comparu devant la Commission royale d'enquête sur le statut de la femme au sujet des garderies, des enfants à la clé, puis du rôle du bénévolat, des besoins des bénévoles et de la nécessité de recourir à du travail non rémunéré. Les femmes qui sont ici aujourd'hui ont bénéficié de nombreuses possibilités depuis l'affaire Lavallée et tout au long du développement de l'égalité des femmes.

Les femmes qui viennent dire ici aujourd'hui que nous n'avons pas à nous préoccuper de quoi que ce soit, que les femmes ne sont pas victimes de violence, que notre société n'a pas à s'occuper de cela, que notre ministre de la Justice ne devrait pas s'attaquer à nombre de ces problèmes, comme il le fait si bien, n'ont toujours pas compris que 52 p. 100 de la population canadienne ont besoin qu'on s'occupe de leurs problèmes. Il faut bien, au contraire, s'occuper de toutes ces questions.

J'ai cru qu'il valait la peine d'aborder un certain nombre de points qui ont été soulevés ce matin, en mon absence. Des responsabilités me retenaient ailleurs et je n'ai pas pu revenir à temps. Si j'ai bien compris ce qu'ont dit les députés réformistes concernant l'égalité des femmes et la consolidation de l'organisation fédérale pour les femmes, le gouvernement ne fait pas suffisamment pour promouvoir l'égalité des femmes. Ils nous ont qualifiées de groupe d'intérêt spécial. Ils ont parlé de nous comme d'un groupe particulier.

Très franchement, il se trouve que ce groupe particulier, ce genre féminin, ces femmes, ces épouses, ces mères, ces grands-mères forment 52 p. 100 de la population canadienne et non un groupe d'intérêt spécial. Le lobby des armes à feu constitue un groupe d'intérêt spécial. Les institutions financières représentent un groupe d'intérêt spécial. Mais les femmes ne forment certainement pas un groupe d'intérêt spécial. Elles font partie intégrante de la société canadienne. Il faut s'occuper de leurs préoccupations à la faveur de recherches, d'assemblées publiques, de débats parlementaires.

Si les députés se donnaient la peine de consulter leurs électeurs et électrices, ils découvriraient quelles sont les préoccupations des femmes, celles de leurs maris et celles de leurs enfants. Ils pourraient donner une image plus juste de la société et cesser de s'inquiéter de toutes les bizarreries d'une société juste où, à leur avis, il suffit, semble-t-il, de jeter tout le monde en prison et de détruire les clés.

Ils ont demandé au gouvernement de se retirer du champ des garderies. Bien sûr, les femmes devraient rester à la maison et s'occuper des enfants, mais si toutes les femmes qui travaillent restaient chez elles, plus de 20 p. 100 de la population canadienne vivrait sous le seuil de la pauvreté.

Ils ne veulent pas admettre que les femmes ne travaillent pas seulement parce qu'elles aiment cela ou parce qu'elles ont confiance en elles et veulent travailler, mais parce qu'elles doivent le faire pour éviter à leur famille de vivre dans la pauvreté. Mais n'attendez pas que le Parti réformiste comprenne cela un jour.

(1540)

Ils ont aussi allégué qu'il n'était pas nécessaire de prendre quelque mesure spéciale que ce soit. Ces mesures spéciales sont nécessaires pour plusieurs raisons et les Canadiennes peuvent avoir l'assurance que nous prendrons des mesures en leur faveur.

[Français]

J'aimerais maintenant parler un peu du projet de fusionnement que je viens de déposer et les démarches que le gouvernement a entreprises sur les trois regroupements qui desservent les intérêts des femmes parce que je pense qu'il est un peu malheureux que cela n'ait pas été bien compris. Peut-être que le parti de l'opposition, le Bloc, n'a pas eu la chance de lire attentivement le document que j'ai déposé et qu'ils n'ont peut-être pas eu le temps de lire ce que j'avais à dire à la Chambre des communes. À cet égard, je voulais porter à leur attention certaines réalités.

Par le truchement d'une recherche en profondeur entreprise par ce gouvernement pour nous assurer que c'est un gouvernement qui regarde les questions fiscales d'un oeil très attentif et qu'avec toutes sortes de nouvelles choses dans notre société, il faut aussi avec le déficit être bien prudent quant à la façon dont on gère notre société. Dans mon mandat sur la situation de la femme, j'ai regardé les trois grandes institutions et ce sont les institutions gouvernementales que je regardais. Cela n'a aucune relation avec le secteur privé et les organisations du secteur privé qui ont leurs problèmes particuliers. C'est un autre problème, ce n'est pas le problème que j'ai traité mais la façon dont j'ai traité leurs problèmes c'est pour m'assurer et c'est pour leur assurer un meilleur fonctionnement, un fonctionnement qui va s'occuper de leurs intérêts de la base jusqu'à la table des ministres, de la table des ministres directement à eux avec des données.

On a constaté qu'auparavant il y avait trois secteurs différents de gestion, trois niveaux différents de duplication, trois différents niveaux de gestion, et c'est pour rationaliser toutes ces ressources, pour concentrer nos efforts et pour renforcer notre capacité de nous faire avancer vers l'égalité que j'avais entrepris cette démarche.

Ce fusionnement créait un guichet unique qui éliminerait la confusion et permettrait un accès plus facile au gouvernement pour tous les regroupements. Cette initiative apporterait aussi un


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lien plus direct avec les organismes de femmes tant au niveau local, régional que national, de même avec les organismes non gouvernementaux et les universités. Ce qui est le plus important c'est que je garderais les 700 000, où le député du Bloc a été estomaqué, mais je veux que vous ayez la paix, ne vous inquiétez pas, les montants d'argent qui étaient alloués au Conseil consultatif pour la situation de la femme vont servir à la recherche par Condition féminine Canada et par les regroupements féminins, par les universités et par les organismes intéressés.

On va voir et on va consulter sur le mécanisme de répartition, mais les sommes d'argent utilisées pour la recherche indépendante seraient et sont visées, et c'est une promesse que j'ai faite hier. La recherche serait entreprise indépendamment du gouvernement et les données seraient publiées dans l'intérêt des femmes, pour les femmes, et la recherche ne serait pas touchée par le gouvernement.

J'avais besoin de cela. Croyez-vous que je vais enlever cela aux regroupements féminins? Non, c'est pour jouer à la petite politicaillerie que vous avez commencé cela. Je dois dire que ce mécanisme, pour ma part, serait bien plus efficace à ce moment-ci. Je trouve étrange que ma collègue de l'opposition critique le geste du gouvernement fédéral alors que la province de Québec a récemment restructuré son propre ministère de l'égalité des femmes et elle a été moins intéressée à le critiquer. Cela m'encourage qu'elle démontre un intérêt en profondeur de la situation de la condition féminine au Canada, et félicitations pour votre évolution, madame.

Je dois ajouter aussi qu'en clarifiant les points au sujet de la consolidation de Condition féminine Canada que ce soit net et clair que c'est dans le meilleur intérêt de servir les femmes.

(1545)

Je sais que certaines ont exprimé l'inquiétude qu'en intégrant le Conseil consultatif à mon ministère, cela signifie qu'essentiellement, le gouvernement se servirait lui-même. Loin de là! Moi, je ne serai pas ministre toute ma vie et j'ai travaillé trop longtemps pour couper l'herbe sous le pied des femmes, indépendamment du gouvernement. J'ai vécu dix ans de gouvernement de l'autre côté de cette Chambre pour savoir comment on peut tricher les femmes et tricher les intérêts. They are smoke and mirrors; ce sont des politiques qui ne nous ont pas bien servis. Et ce n'est pas ce qu'on fera de ce côté, en gouvernant.

Le gouvernement compte sur le public, sur les associations féminines, pour surveiller notre travail et nous faire part de leurs opinions sur notre performance. Je dois vous dire que j'ai voyagé, depuis ma nomination, j'ai rencontré plusieurs femmes partout au Canada, plus d'une centaine de regroupements. J'ai présidé le comité de travail sur la garde d'enfants. J'ai été à l'écoute, ce gouvernement est à l'écoute. Au Cabinet, on discute des intérêts de la femme et ça va continuer comme ça.

Nous avons un réseau maintenant très diversifié, très compétent de personnes qui peuvent venir témoigner devant nous, que ça soit sur les questions de la violence ou autre. Le ministre de la Justice et moi avons fait une table ronde à cet égard. Quarante groupes sont venus. Il y avait 70 personnes. On a défrayé le coût pour cette consultation, pas le Conseil consultatif.

Quand le ministre du Développement des ressources humaines a effectué ses consultations, on a convoqué un groupe de travail. Cela coûte de l'argent, oui, mais je le voulais. Quand il s'agissait du Budget, j'ai reçu le coup de téléphone pas plus tard que trois heures après le dépôt du Budget pour obtenir la permission d'effectuer une consultation partout au Canada.

Avec ce changement, on n'aura pas seulement un grand bureau ici à Ottawa, un bureau installé à Montréal et un bureau à Vancouver. Non. Les nominations de femmes nommées par le gouverneur en conseil, tout ça, c'est terminé. Ces bureaux seront fermés, mais dans chaque région du Canada, dans chaque grande ville, on a des femmes qui travaillent en lien étroit avec la population, des femmes qui savent qui devrait être financé et qui ne devrait pas l'être. Elles sont en mesure de faire des regroupements, ce qu'elles ont fait pour moi jusqu'à maintenant, pour que je puisse rencontrer les gens.

Je viens de rencontrer la Fédération des femmes du Québec, le RESO, la Coalition sous Charlotte Thibeault. Elles m'ont mentionné le fait qu'elles font la recherche sur les questions qu'elles apportent, mais elles ne sont pas impliquées dans la recherche et elles se plaignaient beaucoup sur la façon dont on faisait la recherche. Maintenant, j'ai dit que la recherche va être faite selon les besoins identifiés par les regroupements féminins et les universitaires et le choix de qui va le faire va être le leur et puis les résultats vont être publiés.

Cela ne vous va pas? Tant pis, parce que pour moi, c'est ainsi que cela doit fonctionner. En consultation avec les regroupements féminins, on va établir le processus. C'est ce que vous voudriez, mais moi, je sais que c'est la meilleure façon pour les femmes. Je trouve qu'en voyant le travail que les femmes ont effectué par le biais de leurs interventions pour la préparation pour Beijing, nous avons ici certains acquis, il y a encore beaucoup de problèmes, mais on a des acquis. Les femmes sur ce comité ont consulté 2 500 femmes à travers le Canada. Elles ont rédigé des réponses, elles ont aidé la condition féminine à améliorer le document de plan de travail.

Je trouve que notre lien, la coopération, la considération mutuelle qu'on a établis de plusieurs façons est dans l'intérêt de tout le monde.

(1550)

Comme ça, on va améliorer la recherche, on va améliorer la consultation. Ce sera bien plus direct. On aura un guichet unique, la recherche serait faite à l'extérieur, de façon indépendante, et tout ce qui concerne la bibliothèque, etc., sera étudiée aussi, ainsi que la distribution, parce qu'on va maintenant utiliser toutes sortes de nouvelles technologies. Les femmes sont assez avancées dans ce domaine.

Je sais que certaines personnes croient qu'on a coupé la voix d'une association féminine importante et qu'elle a été réduite au silence. Ce n'est pas vrai. Cette affirmation n'apporte que de la confusion. Cet organisme à qui on a fermé la boîte est subventionné à 100 p. 100 par le gouvernement fédéral.


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Le gouvernement fédéral va transférer à peu près 2 millions de dollars pour la condition féminine. Je trouve que c'est une très bonne démarche, et je suis très fière de ce qu'on vient de faire parce qu'il faut faire peau neuve, à un moment donné. Les années 1970 ne sont pas l'année 1995. Il était nécessaire d'examiner à la loupe ce qu'on faisait, et on a trouvé une meilleure façon de continuer, dans l'intérêt des femmes.

Madame la Présidente, je vous remercie et je reconnais encore l'importance du rôle de la femme. Notre formation politique va poursuivre, dans notre intérêt et dans l'intérêt des femmes. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette de devoir interrompre l'honorable ministre, mais son temps de parole est écoulé. Nous passons à la période de questions et commentaires.

J'accorde la parole à l'honorable député de Saint-Boniface.

M. Ronald J. Duhamel (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Madame la Présidente, j'ai bien écouté le discours que la ministre a prononcé et j'aimerais lui poser une question.

Je me rends compte, comme elle, que le gouvernement fait un nombre de choses pour les femmes dans notre société canadienne.

[Traduction]

Par exemple, nous avons un programme d'égalité de rémunération pour un travail d'égale valeur. Nous avons le projet de loi sur le contrôle des armes à feu, qui est appuyé par les femmes. Nous avons le programme de nutrition pour les femmes enceintes. Nous avons rétabli le programme de contestation judiciaire. Nous avons des centres d'excellence sur la santé des femmes et un certain nombre d'autres initiatives.

Il y a tout simplement une plus forte proportion de femmes qui sont pauvres, une plus forte proportion de femmes qui sont victimes de violence et une plus forte proportion de femmes qui sont des parents seuls. Les femmes gagnent encore moins que les hommes.

En dépit des diverses initiatives qui ont été entreprises par le gouvernement et à cause de certaines décisions qui ont été prises-ma collègue en a abordé une-sommes-nous certains de continuer à faire des progrès dans ces domaines?

J'ai essayé de poser une question au sujet de l'importance de la recherche dans ces domaines. J'admets que j'ai un parti pris. La recherche dans ces domaines est d'une importance critique si nous voulons être certains de continuer à progresser, car il y a de graves problèmes dans la société qui touchent les femmes de façon disproportionnée.

Mme Finestone: Madame la Présidente, je remercie mon collègue de sa question. Je suis allée à Winnipeg et j'ai rencontré des groupes de femmes de la région, aussi bien francophones qu'anglophones, de même que multiculturels. Je puis lui assurer que je suis plus que jamais convaincue que la recherche qu'il est nécessaire de faire est aussi bien proactive que réactive.

Dans le domaine de la recherche proactive d'aujourd'hui, que nous ne connaissions pas en 1972 lors de la création du conseil consultatif, il existe des chaires d'études féminines d'un bout à l'autre du pays. Les universités possèdent les moyens d'étudier bon nombre des problèmes comme ceux de la pauvreté et de l'inégalité dans le contexte de l'éducation et de la formation, toute la question de l'évolution des proportions entre hommes et femmes dans les diverses institutions et la nécessité de mieux refléter la diversité des Canadiens à la Chambre des communes.

Une université a effectué une étude sur l'intégration des femmes et des membres des minorités visibles sur le marché. Quand nous constatons la disparité, du moins une fois qu'elle est exposée en termes concrets grâce aux travaux de recherche effectués aussi bien à l'université qu'au CRSH, nous nous trouvons en mesure de la dénoncer et de modifier la politique du gouvernement.

J'ai écouté certaines des interventions des députés du Parti réformiste, dont je ne partage pas du tout l'opinion. Ils disent que l'État ne peut pas rendre la vie plus rose.

(1555)

Si la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante n'avait pas fait de recherches à ce sujet, saurions-nous que les femmes qui affichent d'excellents résultats en matière de création d'emplois dans les PME sont beaucoup plus efficaces et plus compétentes, ou que plus de 40 p. 100 des emplois sont créés par les petites entreprises dans lesquelles les femmes réussissent le mieux après cinq ans?

Cette recherche a été effectuée par le secteur privé, par la FCEI en l'occurrence, non par une université. Elle a révélé que malgré leur succès, 20 p. 100 plus de femmes que d'hommes se sont vu refuser des prêts à nos banques et autres institutions financières, et que lorsqu'elles en obtenaient, 95 p. 100 d'entre elles devaient payer des taux d'intérêt plus élevés et respecter des conditions plus sévères, notamment quant aux délais de remboursement.

Cette recherche s'est révélée extrêmement pertinente. Je suis très heureuse que le député ait posé la question. Ce que je viens de dire répond très bien à la question du député réformiste, qui demandait si nous devons encore faire des efforts pour assurer l'égalité des femmes en matière d'emploi et de rémunération. Nous devons effectivement parvenir à l'égalité économique. La question était très pertinente. J'en remercie beaucoup le député.

Il y a place pour la recherche à tous les niveaux: dans le secteur privé, dans le secteur public, et dans les universités qui possèdent de grandes compétences.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la Présidente, je désire poser une question à la secrétaire d'État à la Situation de la femme. Je comprends la nouvelle politique du gouvernement qui a fait qu'on a décidé hier après-midi qu'on pense que cela sera la meilleure façon de fonctionner.

Je ne pense pas qu'il y ait unanimité parmi les groupes de femmes et que cela ne soit pas aussi évident que tend à le proclamer la ministre. On s'inquiète du manque probablement de transparence qu'on aurait au sein de son propre ministère quand ces fonctionnaires auront à promouvoir les orientations du mi-


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nistère. Le rôle du Conseil consultatif canadien était de critiquer justement l'inertie du gouvernement et d'apporter des pistes de solutions quant aux différentes politiques du gouvernement en ce qui concerne la condition féminine.

Quand on pense, par exemple, aux garderies, on sait qu'on a atteint le 3 p. 100 du PIB, on avait promis 50 000 places en garderie. Cela ne vient pas du gouvernement. On parle de l'équité salariale où les femmes gagnent encore 72 p. 100 du salaire des hommes et aussi dans d'autres décisions qui tardent à venir du gouvernement. Je pense qu'aujourd'hui on a assez élaboré sur les différentes pistes de solutions que le gouvernement pourrait apporter ou adopter pour que la situation économique des femmes soit largement bonifiée.

Je m'inquiète justement du manque de transparence que cette nouvelle orientation pourrait prendre. Je m'inquiète aussi devant le choix qu'on aurait à faire.

La ministre a parlé hier, lors de son discours sur le Budget à la Chambre, de la capacité des groupes de femmes, que les différents organismes de groupes de femmes étaient très solides, très bien. Je pense qu'il y en a certains, mais il y en a d'autres qui ont moins de solidité. Comment ces groupes vont-ils faire et avoir la capacité d'analyse qui était offerte par le Conseil consultatif canadien?

Ces femmes qui vivent en région auront à négocier avec le gouvernement fédéral, auront à se déplacer, auront à négocier pour faire valoir leur priorité. Je peux bien penser que la ministre est très positive, mais je ne suis pas certaine qu'à long terme, on verra ce que cela donnera, mais je ne crois pas que ce sera vraiment une fin en soi que cette façon d'analyser.

Elle semblait dire que le mouvement des femmes était né à partir de préoccupations et qu'il était dans l'enfance quand on a créé le Conseil. Je dirai qu'on n'est pas rendu au point de la maturité, bien au contraire.

Les femmes en 1920 gagnaient 50 p. 100 du salaire des hommes, en 1995, elles gagnent maintenant 72 p. 100 du salaire des hommes. Donc, il y a un net recul.

(1600)

Devant la situation économique, on sait très bien que ce sont les femmes qui vont écoper. Je me faisais répondre par la vice-première ministre, cet après-midi, en Chambre, où j'avais une question sur justement la disparition de ce Conseil consultatif. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette de devoir interrompre l'honorable députée, mais son temps de parole est écoulé. J'accorde la parole à l'honorable secrétaire d'État, pour une brève réponse.

Mme Finestone: Madame la Présidente, je remercie ma collègue. Je sais qu'elle porte un intérêt très spécial à l'égard des femmes et je sais qu'elle parle avec son coeur et je la respecte à cet égard. Mais j'aimerais bien qu'elle réponde à un moment donné aux députés du Parti réformiste quand ils parlent en Chambre, parce que c'est dégueulasse ce que l'on entend d'eux autres, parfois, bien que je comprenne votre intérêt personnel au sujet des femmes.

Je dois vous dire qu'effectivement, le Conseil consultatif avait un rôle à jouer et il l'a bien joué. Peut-être même a-t-il été un peu mère-poule dans plusieurs de ses démarches. À mon avis, il a été le fondement de plusieurs activités et initiatives. Au cours des années, vous ne pouvez pas me dire que la Fédération des femmes du Québec, le Conseil national d'action sur la situation de la femme-que l'on confond dans la nomenclature, ça je le sais-le Conseil national des femmes et d'autres groupements, dont je pourrais vous nommer une douzaine d'organismes qui sont là, ne sont pas capables et ne font pas d'importantes démarches. Et nous allons nous assurer, avec la recherche indépendante, qu'ils vont choisir pour eux-mêmes, quelle sera leur priorité à l'égard de tous les regroupements féminins, et je n'interviendrai pas. Je pense que ça va être dans leur meilleur intérêt.

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Madame la Présidente, je suis heureuse de prendre part aujourd'hui sur la motion de ma collègue de Québec traitant de l'égalité économique des femmes. Malgré tout l'intérêt que suscite la condition de la femme au Canada et l'adoption d'un certain nombre de lois et politiques pour pallier l'inégalité dont elles sont victimes, il faut constater que la situation des femmes reste encore fort différente de celle des hommes, et qu'il reste encore beaucoup à faire avant que celles-ci jouissent des mêmes avantages.

À titre de députée de Drummond, je voudrais d'abord témoigner mon amitié et ma solidarité aux femmes de mon comté, et plus particulièrement à celles qui oeuvrent au sein des organismes travaillant au mieux-être des femmes du comté de Drummond. À titre de porte-parole de la santé, c'est également pour moi une occasion de signifier, à haute voix, l'urgence de mettre en place un système de santé adapté aux femmes.

Les moyens financiers consacrés à la recherche sur la santé des femmes sont encore très insuffisants. On note des lacunes dans la recherche du cancer du sein, la gynécologie et l'obstétrique, les maladies chroniques et dégénératives, la santé mentale, la violence, les maladies professionnelles, les besoins propres aux immigrantes, aux femmes d'origine ethnique, aux femmes autochtones, aux adolescentes, aux femmes âgées et j'en passe.

La ministre de la Santé nous disait au début de son mandat, il y a quinze mois, comment elle entendait faire la promotion de la santé des femmes. Elle exposait les programmes que son gouvernement entendait réaliser pour pallier le déséquilibre dont sont victimes les femmes dans le système de la santé. Pourtant, la réalité est tout autre.

Depuis l'arrivée au pouvoir de son gouvernement, les fonds destinés à la santé ne font que diminuer. Ce gouvernement a maintenu le gel des transferts de paiements aux provinces provoquant un manque d'argent destiné au système de santé régi par le Québec et les provinces. De plus, dans son dernier Budget, ce gouvernement va plus loin en effectuant des coupes de 70 millions de dollars dans le budget de son ministère de la Santé, qui voit ainsi son enveloppe générale fondre de 3,8 p. 100. Cependant, rien n'est fait pour pallier le déséquilibre dont sont victimes les femmes.


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Je vais vous parler du cancer du sein. Le Canada affiche le plus haut taux du cancer du sein au monde.

(1605)

Enfin, le nombre de cas reliés à cette terrible maladie n'a cessé d'augmenter depuis les années 1960. Chaque année, 15 000 nouveaux cas de cancer du sein sont découverts, 5 000 femmes en mourront cette année. C'est un décès toutes les deux heures.

Seulement au Québec, il s'agit de près de 1 500 Québécoises qui succomberont à cette terrible maladie. Chaque Canadienne et chaque Québécoise possèdent une chance sur dix de souffrir du cancer du sein durant sa vie.

Les résultats d'une enquête nationale, rendue publique jeudi dernier, révèlent justement que 41 p. 100 des Canadiennes et des Québécoises perçoivent le cancer du sein comme la principale menace pour leur vie.

Je crois qu'il est grand temps que l'on entreprenne de vaincre cette maladie. Pour ce faire, je pense qu'il faudrait adopter une stratégie de dépistage du cancer qui tiendrait compte autant des aspects génétiques que des aspects environnementaux.

C'est d'ailleurs ce qui ressortait du rapport final du Forum national sur la cancer du sein, déposé à l'automne dernier, auquel la ministre de la Santé participait et qui préconisait l'adoption immédiate de guides de pratique nationaux afin d'éclairer les médecins et encourager la recherche, la formation professionnelle. Sur ce point, à l'heure où on se parle, rien n'a encore été entrepris par le gouvernement en place.

Il y a aussi les maladies cardiaques. Les maladies cardiovasculaires représentent la plus grande cause de décès chez les femmes. En fait, 40 p. 100 des femmes mourront d'un arrêt cardiaque ou d'une complication cardiovasculaire. Malgré ces chiffres alarmants, le dernier Budget a provoqué des coupures dans le programme de stratégie de réduction de la demande de tabac.

L'enveloppe financière allouée à ce programme passe de 185 millions à 81 millions de dollars. C'est au bas mot 104 millions de dollars que l'on sabre du programme, alors que le nombre de fumeurs ne cesse d'augmenter, surtout les fumeuses. Et on sait que le tabagisme augmente les complications au niveau cardiovasculaire. Pourtant, on se rappellera que la ministre de la Santé avait fait du tabagisme son cheval de bataille.

Il y a aussi dans l'actualité, récemment, même aujourd'hui on en parlait, le terrible problème de la mutilation génitale qui fait des ravages dans plusieurs pays du monde et qui se pratique ici même dans notre société. On se demande ce qu'attend le gouvernement fédéral pour intervenir sur cette question cruciale.

Déjà le Québec donne l'exemple en annonçant son intention de criminaliser cet acte et d'entamer des poursuites contre les responsables de telles mutilations. Le gouvernement fédéral refuse toujours d'inscrire explicitement les mutilations génitales parmi les actes interdits par le Code criminel, malgré les demandes répétées de l'opposition officielle et du gouvernement du Québec en ce sens, et malgré que plusieurs pays européens et plusieurs États américains aient déjà entrepris de telles démarches.

À quand un véritable système de santé pour les femmes? Je me rappelle encore l'époque où les moyens de contraception étaient mal connus et difficiles d'accès, une époque où certaines maladies de femmes étaient perçues comme normales, faisant partie des conditions de femmes et de leurs malaises imaginaires, une époque où l'on recourait allégrement au couteau. On n'a qu'à penser à toutes les hystérectomies inutiles.

Bien sûr, vous me direz «les temps ont changé». De nos jours, les politiques élaborées soulignent l'importance de s'attaquer aux problèmes sociaux et économiques reconnus comme des déterminants majeurs de la santé. Mais comment ce discours se concrétise-t-il dans l'action? La situation des femmes, loin de s'améliorer, se détériore.

Voilà des années que les centres de santé de femmes du Québec répètent que les conditions sociales et économiques des femmes, leur pauvreté, l'accumulation de la double tâche, la violence et la discrimination sont autant de problèmes qui ne se régleront jamais par une pilule.

La solution pour les femmes, c'est d'enrayer la pauvreté parce qu'on établit un lien entre la pauvreté et la santé. Les gens à faible revenu-et c'est démontré partout, dans toutes les statistiques-sont plus souvent malades.

(1610)

En cette année de tolérance, la Journée internationale de la femme que l'on célébrait la semaine dernière nous interpelle en faveur d'un plus grand respect envers soi et envers les autres. Les femmes particulièrement ont su démontrer à travers les âges qu'elles avaient cette extraordinaire capacité de rassembler et de forger les consensus. Nos sociétés modernes, qui ne semblent plus vibrer qu'aux seules valeurs imposées par la globalisation des marchés économiques et culturels, ont plus que jamais besoin de l'implication médiatrice des femmes.

Au profit d'une outrageuse rentabilité, nos sociétés créent de plus en plus d'exclus et alimente la montée de plusieurs formes d'intégrisme. Les femmes, parce qu'elles y sont sensibles et parce qu'elles en sont capables, devront s'imposer pour lutter efficacement contre la pauvreté et la radicalisation.

Je termine cette allocution en m'adressant plus particulièrement aux Québécoises, à qui je voudrais livrer ce message. Dans quelques mois, nous aurons tous et toutes une décision cruciale à prendre, une décision dont les conséquences influenceront notre avenir. Mon souhait le plus cher serait de voir les femmes du Québec s'impliquer activement dans ce grand moment historique, car aucun pays ne peut être bâti sans la voix, la volonté et le consentement des femmes. Et le projet de société que l'on voit apparaître à l'horizon doit inclure nécessairement les Québécoises.

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Madame la Présidente, j'aimerais d'abord remercier la députée de voir d'un oeil ouvert le rôle que jouent les femmes dans la vie politique d'une société. On dit d'un homme, lorsqu'il fait de l'éducation, qu'il le fait pour lui-même; la femme, qu'elle le fait pour la famille, ce qui veut dire pour la société.


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Je suis persuadée que les femmes, quand elles verront ce qui se passe au Québec, s'impliqueront certainement afin de maintenir une qualité de vie convenable et un meilleur potentiel d'avenir si le Québec se séparait et devenait indépendant.

On a vécu ensemble, les femmes se respectent mutuellement, et déplacer les frontières n'aidera rien mais créera une situation où la pauvreté sera pire pour les femmes et leur famille.

J'aimerais poser une question à ma collègue. Quand elle dit qu'on doit prendre le pouls du Québec parce qu'il vient de statuer que la mutilation des organes génitaux féminins est un crime, est-ce qu'elle était absente de la Chambre lorsque le ministre de la Justice et moi-même avons statué que nos lois fédérales considèrent aussi cela comme un acte criminel? Si on nous soumet un cas, il sera jugé selon la loi du Canada, puisqu'il s'agit d'un acte criminel.

Je suis très contente de voir que la Cour du Québec ou plutôt la Commission des droits de la personne ait statué sur ce point. Je suis très fière de voir qu'ils considèrent du même oeil que nous ce que la loi du Canada statuait.

Il ne faut pas toute une recherche pour savoir que c'était contre les moeurs du Canada, que c'est inacceptable de mutiler les organes génitaux féminins et que ce n'est pas la façon dont on fonctionne ici, point à la ligne. Vous n'avez pas à dire si vous vivez au Québec ou en Ontario, pour toutes les femmes, qu'elles soient de la Nouvelle-Écosse ou de Terre-Neuve jusqu'à Vancouver, en Colombie-Britannique, cet acte de mutilation est inacceptable.

Je pose une deuxième question à l'honorable députée en ce qui a trait à la santé. Pour enrayer la pauvreté, on a entrepris certaines démarches en faveur des femmes enceintes. On a aussi entrepris des recherches sur le cancer du sein, sur les maladies de coeur chez les femmes et sur leur prévention. Je suis persuadée qu'avec son grand intérêt en la matière, si elle a d'autres idées à apporter à un moment ou à un autre, qu'elle va aider le Comité de la santé de la Chambre des communes en lui faisant part de ses observations, qui seront acceptées avec grâce.

Est-elle prête à nous apporter d'autres suggestions à cet égard?

(1615)

Mme Picard: Madame la Présidente, en ce qui concerne la mutilation des organes génitaux, ce que l'on constate, c'est qu'il n'est pas dit que c'est un acte criminel. Comment cela se fait-il qu'on retrouve encore, comme on l'a mentionné aujourd'hui, qu'un médecin ait été obligé de pratiquer des interventions chirurgicales sur des jeunes femmes. Comment cela se fait-il qu'on retrouve cela? Il a dû pratiquer neuf interventions chirurgicales. Quelles sont les mesures? Ces gens qui ont pratiqué cette barbarie chez ces jeunes femmes-là courent encore dans la nature. Cette pratique est dispensée un peu partout.

On arrive ici au Canada et personne ne sait que cet acte est criminel. Il faudrait le dire. Il faudrait le faire savoir. Il faut prendre des mesures pour contrer cette pratique. C'est chez nous au Canada. Il est incroyable qu'en 1995 on entende encore parler de ce genre de pratique. Un médecin de Toronto m'a dit: Vous savez, madame, j'ai régulièrement des appels téléphoniques où les femmes m'implorent pour que je fasse cette pratique, que j'intervienne pour mutiler les organes génitaux de leurs enfants. Il faut vraiment arriver soit à renforcer le Code actuellement en vigueur ou mettre d'autres mesures parce que c'est vraiment alarmant.

En ce qui concerne. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette d'interrompre l'honorable députée, mais malheureusement, son temps de parole est écoulé. L'honorable députée de Laval-Centre a la parole.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Madame la Présidente, les journées de l'opposition officielle sont dans cette Chambre des moments privilégiés puisqu'en permettant de poser au gouvernement les vrais problèmes, elles obligent les parlementaires à réfléchir à certains aspects d'une réalité incontournable.

La réalité dont nous traitons actuellement touche plus de 50 p. 100 de la population puisque, aujourd'hui, nous faisons le bilan de l'action ou plutôt de l'inaction de ce gouvernement à l'endroit des femmes.

Le 8 mars 1994, Journée internationale de la femme, le Bloc québécois déposait en Chambre, dans le cadre d'une journée de l'opposition, la motion suivante:

Que cette Chambre presse le gouvernement de reconnaître le principe de l'égalité économique entre les femmes et les hommes et de mettre en place les mesures visant à assurer aux femmes, dans les domaines de compétence fédérale, l'équité dans l'emploi, les salaires et les conditions de vie.
Qu'en est-il un an plus tard? Les femmes du Canada et les Québécoises posent le même verdict: Pour ce gouvernement, il y a loin de la coupe aux lèvres. Nulle trace dans le Budget déposé par le ministre des Finances d'application sérieuse du grand principe d'équité. C'est pourtant d'actions réelles que les femmes d'ici ont besoin.

Ce n'est donc pas sans raison que la critique de l'opposition officielle en matière de condition féminine a déposé une motion qui condamne le gouvernement fédéral pour son inaction dans ses domaines de compétence quant à l'adoption de mesures concrètes favorisant l'égalité économique des femmes.

Le Bloc québécois constate que le gouvernement libéral n'a pas respecté les engagements qu'il a pris en ce qui a trait à la recherche de l'équité à l'endroit des femmes. Il n'y a qu'à regarder ce qu'il en est dans plusieurs secteurs de préoccupation sociale, notamment les services de garde, le logement social et la lutte contre la violence envers les femmes.

La toute récente décision du gouvernement libéral de faire disparaître le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme illustre clairement le niveau de préoccupation du conseil des ministres à l'endroit des femmes.


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Il apparaît que ce gouvernemnet n'a plus envie d'entendre une voix indépendante du pouvoir politique être la porte-parole des revendications justifiées des femmes. La crédibilité du Conseil auprès des diverses organisations féminines était reconnue de tous: pas facile de faire face à sa conscience quand la volonté d'agir est absente.

Les activités de cet organisme seront, paraît-il, transférées auprès de Condition féminine Canada. Mais de quelles activités parle-t-on puisqu'on prévoit des coupures de près d'un million de dollars pour financer ces activités?

(1620)

Quant au programme de promotion de la femme, il sera également transféré à Condition féminine Canada, mais amputé d'une somme de près de 5 p. 100 de l'enveloppe budgétaire de ce programme. Cette diminution n'affectera pas, pour l'instant dit-on, les crédits alloués aux subventions des organismes bénévoles oeuvrant dans le secteur de la condition féminine. La question est de savoir combien de temps durera l'instant.

De tous les problèmes liés à la condition féminine, la violence à l'endroit des femmes est probablement le plus destructeur, tant au plan physique que psychologique et moral. Malgré les efforts déployés par les groupes oeuvrant contre la violence envers les femmes, les actes de violence ont connu une recrudescence inquiétante. Est-il possible de conjurer un tel fléau social avec pour toute arme des grands sentiments et des états d'âme? Non, madame la Présidente.

La violence résultant souvent de l'inégalité économique peut être battue en brèche si l'État assume son leadership auprès de la société, s'il priorise l'égalité comme objectif et canalise les ressources nécessaires pour y parvenir. Les gouvernements n'ont pas le droit de substituer la recherche de l'égalité économique des femmes aux aléas fiscaux et budgétaires. Agir de la sorte équivaut à cautionner l'inégalité économique.

La lutte contre la violence envers les femmes doit être plus que jamais une priorité. Est-il tolérable que cette violence soit, encore en 1995, présente dans le quotidien des femmes et des familles? Statistique Canada dévoilait, en janvier 1994, les résultats d'une vaste enquête réalisée auprès de 12 300 femmes. L'étude met en lumière des faits troublants.

On y constatait que 51 p. 100 des femmes avaient été victimes d'au moins un acte de violence physique ou sexuelle. Une fois sur cinq, les victimes ont subi des blessures. Des blessures graves nécessitant des soins médicaux ont été le fait d'une femme sur quatre. Dans 25 p. 100 des cas, l'époux ou le conjoint de fait était responsable de cette agression. Et chose encore plus grave, quatre fois sur dix, les enfants étaient témoins de cette violence.

Ces chiffres corroborent d'ailleurs les données statistiques que l'on retrouve dans un rapport publié en 1991 et intitulé La guerre aux femmes. Dans le cas d'agression physique, on constate qu'entre 63 p. 100 et 83 p. 100 des victimes connaissaient l'homme qui les a agressées. Une femme sur dix est battue par son conjoint et une victime d'agression attendra, en moyenne, d'être battue 30 fois avant d'appeler la police.

De son côté, le Conseil consultatif canadien sur le statut de la femme exposait des chiffres qui en disent long sur le traitement infligé aux femmes. Ainsi, une Canadienne sur quatre est victime d'exploitation sexuelle à un moment donné de sa vie. Dans la moitié de ces cas, ces femmes avaient moins de 17 ans.

Devant ce constat troublant, comment le gouvernement peut-il justifier de réduire son aide auprès des organismes oeuvrant contre la violence envers les femmes, alors que les besoins sont de plus en plus criants?

Les femmes ne pourront vivre en toute sécurité tant et aussi longtemps que l'égalité de fait entre les hommes et les femmes n'aura vu le jour. Combien d'injustices, d'iniquités, d'inégalités, de violence, les femmes du Canada et du Québec devront-elles encore endurer avant que le gouvernement ne s'engage à agir concrètement afin d'opérer ce changement social et économique nécessaire, l'égalité?

Le désengagement de l'État, le gouvernement libéral le prépare par ses mesures budgétaires actuelles concernant l'assurance-chômage, par sa volonté de sabrer dans les paiements de transfert aux provinces dans les domaines liés à la santé, l'éducation et aux services sociaux.

La soi-disant réforme des programmes sociaux reportée à 1997 annonce des jours bien sombres pour les jeunes, les chômeurs et les chômeuses, les personnes âgées et, bien entendu, les femmes.

(1625)

Car, à n'en point douter, ce sont les femmes qui seront les premières visées par la modification des critères d'accès au régime d'assurance-chômage, par l'évaluation du revenu familial notamment. On peut considérer que des femmes pourraient être ainsi exclues du régime à cause du salaire élevé de leur conjoint. Et qu'adviendra-t-il des autres prestations, en particulier celles de la sécurité de vieillesse?

La même logique semble s'appliquer, puisque le Budget du ministre des Finances entrouve une brèche dans la sécurité de la vieillesse. «Si votre revenu familial excède un certain seuil, madame, vous n'aurez plus droit à votre chèque mensuel!» Pour combien de femmes ce chèque constitue-t-il la preuve tangible d'une certaine autonomie économique, bien souvent la première qu'elles aient jamais eue? On ne peut nier que certaines facettes de la réalité des femmes ont été oubliées par les décideurs politiques. Mais un oubli peut se corriger, à la condition bien sûr que la volonté d'équité soit suffisamment grande pour nous faire admettre nos erreurs.

La sécurité et l'égalité économique des femmes n'est possible que dans la mesure où les femmes puissent obtenir leur indépendance économique. Cette indépendance économique passe par la création d'emplois durables, à temps plein et correctement rémunérés. Pourtant, en 1993, les femmes représentaient 69 p. 100 des travailleurs à temps partiel au Canada. C'est une proportion inacceptable. La précarité de l'emploi remplace la sécurité et l'égalité économique des femmes. C'est l'équité à rabais!

Plutôt que de compromettre les minces efforts déployés depuis plusieurs décennies pour tenter d'assurer aux femmes du Canada et du Québec cette égalité économique, le gouvernement


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devrait reconnaître que seul un virage sérieux dans les stratégies d'emploi pourra garantir aux femmes d'ici la sécurité économique essentielle à l'équilibre des individus, à la santé des familles, au respect des personnes. Ce gouvernement a encore beaucoup de pain sur la planche. La question est de savoir s'il aura le courage de mettre la main à la pâte.

L'hon. Sheila Finestone (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Madame la Présidente, j'aimerais apporter quelques remarques et certaines observations. À prime abord, ce n'est pas la crédibilité du Conseil consultatif qui est en cause, mais les coûts d'opération, les coûts de duplication. On parle d'un tiers du budget qui est utilisé pour payer trois personnes à temps plein, le président et les deux vice-présidents, et à temps partiel, auparavant les trente ordres en conseil. Je dois vous dire qu'un tiers, c'est trop, et le reste de cet argent qu'on va garder, qui sera gardé par le Conseil canadien, sera examiné et on étudiera la façon dont on va utiliser cet argent par une consultation auprès des femmes. Je crois que c'est une meilleure mesure pour assurer que beaucoup de questions que vous avez soulevées sur des points, des questions importantes, doivent avoir au moins une réponse de procédure. C'est une autre chose.

Pour terminer l'intervention de votre collègue sur les questions de la santé, avec l'autre fonction que j'ai, celle du multiculturalisme, il faut s'occuper de cette question haineuse et honteuse de la mutilation génitale en éduquant et non seulement en effectuant des démarches juridiques et criminelles. C'est par le biais de l'éducation qu'on approche les regroupements multiculturels, les communautés ethnoculturelles et on entreprend une éducation en profondeur et on est en train de réaliser un film pour les médecins, les infirmières, les familles et les centres, et j'espère que ça va les aider aussi.

Le dernier commentaire que j'aimerais porter à votre attention, c'est que ce n'est pas le Conseil consultatif qui a étudié toutes les questions et les données sur la violence que vous avez mentionnées à plusieurs reprises dans vos remarques. C'était la recherche faite par un groupe sur la violence nommé par le gouvernement et payé par lui. C'était aussi Statistique Canada qui a fait une recherche en profondeur, renommée mondialement, et sur la lutte de la loi criminelle, a regardé le traitement des femmes. Ce sont eux qui ont porté cela à notre attention.

(1630)

Et c'est moi, en tant que ministre de la Condition féminine qui a apporté ces données ici, avec mon équipe. Ne créez pas de confusion dans la société en général. Quel a été le rôle du Conseil consultatif sur la situation de la femme? Quel est le rôle de Condition féminine Canada que je préside? Quels sont les rôles des regroupements dans la société en général?

Je pense que cela pourrait clarifier les choses un peu plus pour que nous sachions, qu'en fin de compte, l'égalité des femmes va prendre forme. On sait qu'une économie forte et la participation de la femme est la clé de l'indépendance de la femme. L'indépendance de la femme est très importante. Ne croyez-vous pas, que si, dans l'avenir, on ne peut être traité de façon égale, qu'on n'a pas droit à un salaire égal, qu'on n'a pas la possibilité d'être égal dans la société, on pourrait subir de la violence?

Mme Dalphond-Guiral: Madame la Présidente, j'ai juste envie de faire un commentaire à l'honorable secrétaire d'État. Elle parle des coûts d'administration qui étaient très élevés et que des femmes étaient payées à un salaire exhorbitant. Quand des hommes, payés à des salaires importants, subiront-ils eux aussi des coupures?

On parle d'éducation et de communication. Je me demande, puisque l'honorable secrétaire d'État dit que la crédibilité du conseil était reconnue, si, effectivement, il y a eu un échange avec les membres du Conseil du statut de la femme pour voir avec elles, quelle serait la meilleure façon de réorganiser toute la situation concernant la femme.

Au niveau de l'équité, les femmes sont maltraitées. Il y a eu dans le Budget de 1994 tout ce projet d'infrastructures. J'aimerais bien connaître le nombre de femmes qui ont pu profiter des emplois liés au programme d'infrastructures? Et puis, même s'il y en avait eu, cela aurait encore été des emplois à temps partiel.

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Madame la Présidente, je remercie ma collègue d'avoir appuyé ma motion. Je la remercie d'avoir fait un survol des différents dossiers où le gouvernement est blâmé pour son inaction. Pour la création de garderies, il y a 35 000 $ au Québec; on dit qu'au Canada le besoin en garderies est évalué à 2 millions de dollars. Pour l'équité salariale, les femmes gagnent 72 p. 100 du salaire des hommes.

Je remercie ma collègue, et je voudrais lui demander si elle est en accord avec les propos de l'honorable secrétaire d'État lors du Budget débattu cette semaine. Elle disait que. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette de devoir vous interrompre. Le temps alloué est maintenant écoulé, je vous accorde 30 secondes pour répondre.

Mme Dalphond-Guiral: Madame la Présidente, j'ai juste un problème. «Elle disait que. . .» N'ayant pas la fin de la phrase, je ne peux pas répondre. Comme vous vouliez me donner un temps de réplique, permettez-lui donc de terminer.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je voudrais expliquer un peu ce qui arrive à l'honorable députée de Québec, car je vois qu'elle a été quelque peu dérangée. Quand l'opposition a la parole, je dois donner aux autres partis la chance de répondre. S'il n'y a pas d'autre député qui se lève pour prendre la parole, je peux reconnaître un de vos collègues.

Nous reprenons donc le débat.

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Madame la Présidente, j'aimerais au début féliciter la députée de Québec pour cette opportunité qu'elle a donnée aux élus de cette Chambre pour discuter d'un sujet très important et pertinent à mon avis.


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À titre de députée, j'aimerais souligner l'excellent travail de plusieurs organismes qui sont dans mon comté-des organismes non gouvernementaux évidemment-qui travaillent avec les femmes. Je l'ai fait justement lors d'un déjeuner, vendredi dernier, où je les ai invitées pour souligner notre marche vers l'égalité.

Comme on connaît le thème de la prochaine conférence mondiale des femmes sur l'égalité-en tout cas, on a eu une discussion rapide à ce sujet-j'aimerais les féliciter encore une fois, comme je l'ai fait lundi dernier.

La semaine dernière, lors de la Journée internationale de la femme, le premier ministre a résumé, de façon fort éloquente, le rôle et l'apport des femmes au Canada. Je crois, qu'il est important que tous les membres de cette Chambre, hommes ou femmes, connaissent l'essence de ce message.

(1635)

«Aujourd'hui, a déclaré le premier ministre, plus de femmes occupent un emploi dans un plus grand nombre de secteurs où elles exercent une plus grande influence décisionnelle qu'à tout autre moment de notre histoire. Et nous avons tout lieu de nous en réjouir. À mesure que nous nous rapprochons de la pleine égalité des sexes, nous renforçons notre société et ouvrons de nouveaux horizons dont tous les Canadiens et Canadiennes profitent. Au Canada, les femmes continuent de faire avancer la cause de l'égalité économique. Par leurs propres moyens et grâce à leurs aptitudes, les femmes aident à définir l'avenir de notre pays-pas seulement l'avenir d'une province, et cela, je l'ai ajouté moi-même. Pour sa part, le Canada relève le défi. L'égalité des femmes n'est pas du domaine des intérêts ou des droits spéciaux. C'est une question de justice sociale et économique. C'est une question de bon gouvernement.»

Ce message est une inspiration pour chacune et chacun d'entre nous. Il décrit le rôle et la contribution des femmes canadiennes dans leur juste perspective.

Il est indéniable que nous avons fait des progrès, à force de travail et souvent de courage. Mais les progrès ne sont pas seulement ceux des femmes, ils sont aussi ceux de notre société.

[Traduction]

C'est parce que les problèmes des femmes sont les problèmes de tout le monde. Ce sont des problèmes de société qui touchent tous les citoyens de notre pays.

Nous devons tourner le dos aux clichés de la guerre des sexes, dans laquelle les gains des femmes sont perçus comme des pertes pour les hommes. Nous devons accepter que, lorsque les femmes progressent vers l'égalité, tout le monde en bénéficie. C'est une simple question de calcul. Si les femmes, qui forment 52 p. 100 de la population, peuvent contribuer utilement à la vie de la société, c'est l'ensemble de la population qui en profite.

[Français]

Ce qui m'étonne, c'est la motion déposée ce matin par ma collègue du Bloc québécois. Visiblement, elle ne comprend pas que la meilleure façon d'aider les femmes, c'est d'abord et avant tout d'être un bon gouvernement.

Elle devrait savoir qu'en créant des emplois, 433 000 emplois en un an, le gouvernement canadien contribue concrètement à l'égalité économique des femmes. Elle devrait savoir qu'en mettant de l'ordre dans nos finances publiques, nous protégeons notre prospérité, nos programmes sociaux et notre qualité de vie. Cela profite autant aux femmes qu'aux hommes de ce pays.

[Traduction]

La motion à l'étude aujourd'hui parle de mesures concrètes. Voici quelques exemples de ces mesures adoptées par le gouvernement. Les programmes de formation professionnelle et d'alphabétisation donnent aux femmes les moyens de conquérir une plus grande indépendance économique. En alliant ces mesures à la création d'emplois, le gouvernement peut aider les femmes à se prévaloir d'un large éventail de choix dans leur vie professionnelle.

Nos initiatives en faveur des petites entreprises, notamment celles qui visent à leur donner plus facilement accès aux capitaux, aideront les femmes entrepreneurs à créer un climat plus propice à la création d'emplois tant pour les hommes que pour les femmes.

La Loi sur l'équité en matière d'emploi améliore les possibilités d'emploi pour les femmes. Service jeunesse Canada, nouvelle mesure stratégique, aide à redonner du travail aux jeunes des deux sexes qui ont quitté l'école et sont au chômage. Le programme d'infrastructure a permis de financer des projets comme la modernisation d'un centre pour les enfants, la construction de centres de santé communautaires, de bibliothèques, de garderies municipales et de refuges. Ce sont là autant de mesures très concrètes pour aider les femmes à obtenir l'égalité économique.

[Français]

Être un bon gouvernement, cela veut aussi dire ajuster ses structures pour les rendre plus simples et plus efficientes.

C'est pourquoi ma collègue, la secrétaire d'État à la Situation de la femme, a annoncé cette semaine le regroupement de trois organismes dédiés à la promotion de l'égalité des femmes.

Lors du processus d'examen des programmes, le gouvernement a analysé le rôle de Condition féminine Canada, le Programme de promotion de la femme de Développement des ressources humaines Canada et le Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme.

Il est apparu que les trois organismes font la promotion de l'égalité des femmes et, à divers degrés, font de la recherche et travaillent étroitement avec les groupes de femmes.

Le gouvernement en a donc conclu que la meilleure façon d'augmenter son efficacité était de consolider son action pour l'égalité des femmes au sein de Condition féminine Canada.

Le Programme de promotion de la femme sera donc transféré à Condition féminine Canada.

(1640)

Les fonctions de recherche, de communication et de l'information publique du Conseil consultatif seront intégrées aux opérations courantes de Condition féminine Canada. Ce transfert va nous permettre de mieux gérer les ressources et les coûts, d'éliminer les dédoublements et d'abolir les nominations politi-


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ques. Toutes des actions que le Bloc québécois nous dit souvent qu'il faut faire en tant que gouvernement.

Cela nous permettra aussi de créer un guichet unique de service; d'éliminer la confusion et de faciliter l'accès au gouvernement; d'améliorer les services de recherche, de communication et d'information publique; de renforcer les liens avec les groupes de femmes au niveau local, régional et national avec les ONG et les universités; d'assurer la disponibilité de fonds pour la recherche indépendante et de concentrer les efforts du gouvernement pour la promotion de l'égalité des femmes. Voilà des actions concrètes, pas juste des paroles. Voilà une série d'initiatives dynamiques et réalistes qui ajoutées les unes aux autres permettent aux femmes canadiennes de progresser constamment vers l'égalité sociale et économique.

Un autre façon dont j'aimerais souligner que ce gouvernement a tout de même pris des mesures c'est en élisant-et en nommant, selon les dires de l'opposition-des femmes qualifiées pour occuper des postes dans cette Chambre. Je crois que nous avons faits des progrès importants en élisant plus de femmes à cette Chambre. Cela est une façon parmi d'autres d'assurer que les femmes marchent vers l'égalité économique et sociale.

[Traduction]

Mme Maria Minna (Beaches-Woodbine, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais féliciter ma collègue de son excellent discours.

L'engagement de notre gouvernement envers les femmes est assez évident. Je crois du moins que le mien et celui de ma collègue le sont. Étant donné que nous parlons de l'égalité des femmes sur le plan économique, je voudrais que la députée réponde à la question suivante: Ne pense-t-elle pas que le problème de l'égalité des femmes sur le plan économique partout au Canada, et non pas seulement au Québec, serait réglé beaucoup plus rapidement si nous réglions le plus vite possible la question de la séparation, car cela nuit aux progrès économiques du pays tout entier et non pas seulement des femmes?

Mme Bakopanos: Madame la Présidente, je remercie la députée de sa question. Oui, assurément. Je m'occupe de la politique québécoise depuis 15 ans, et je ne vois pas comment les femmes pourraient faire des progrès si nous parlons constamment de séparation.

De ce côté-ci de la Chambre, nous avons souvent soutenu que la pire façon de faire avancer la cause des femmes était de parler de la destruction du pays et non de la question qui nous intéresse, à savoir garantir l'égalité sociale et économique aux femmes.

Il est bizarre que les députées d'en face parlent de solidarité entre femmes et qu'elles ne parlent jamais de solidarité entre tous les Canadiens. Nous devons commencer à nous unir et à faire front commun pour nous attaquer aux problèmes qui nous assaillent tous, hommes et femmes.

Les questions féminines n'intéressent pas seulement les femmes. Ce sont des questions qui intéressent la société tout entière. Nous devons donc travailler tous ensemble dans un Canada uni pour garantir les progrès des femmes sur les plans social et économique.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, j'ai été un peu surpris des remarques de certains députés durant la période des questions et observations, relativement à un rapport récent de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante. Ils laissaient entendre qu'il y a un parti pris fondé sur le sexe dans l'octroi des prêts.

Je connais un peu la méthode de sondage de la FCEI et je me demande si ces remarques sont justes ou si elles ne reflètent pas simplement la situation des répondants.

(1645)

J'aimerais faire consigner au compte rendu d'intéressantes données tirées d'un sondage national de Statistique Canada sur le financement des petites entreprises, sondage qui date de novembre 1994. Statistique Canada a constaté que 18 p. 100 des petites entreprises qui appartiennent à des hommes ont vu leur demande de financement refusée. Dans le cas des femmes propriétaires, la proportion est de 24 p. 100.

Statistique Canada explique que cette différence traduit peut-être une préférence des prêteurs pour certains types d'industrie plutôt qu'une discrimination fondée sur le sexe. Parmi les exemples présentés au sujet des catégories d'industries préférées, on dit que la plus forte proportion d'entreprises appartenant à des femmes fait partie de la catégorie des services professionnels et personnels. En fait, s'il y a une différence, elle s'explique davantage par le type d'entreprise que les femmes veulent lancer. Elle n'est pas fondée sur le sexe.

L'autre question concernait la différence fondée sur les taux d'intérêt. Les recherches ont révélé qu'il n'y avait pas de préférence fondée sur le sexe. Les décisions sont strictement fondées sur la solvabilité de l'entreprise.

Mme Bakopanos: Madame la Présidente, je me réjouis de cette question. Au moins, nous pouvons nous en tenir aux faits quant aux progrès réalisés par les femmes en matière d'égalité économique.

Je veux signaler au député que, selon Pierrette Leroux, la vice-présidente exécutive de la FCEI, il ne fait pas l'ombre d'un doute que les femmes sont pénalisées par les banques et les institutions financières. En fait, elle décrit cela comme du sexisme financier.

Comme le gouvernement actuel l'a dit, à moins que nous ne mettions de l'ordre dans nos finances, personne ne pourra bénéficier des ressources dont nous disposons, pas même les femmes. Pour ce qui est des taux d'intérêt, nous avons prouvé avec le budget que nous avons présenté que le Canada est sur la bonne voie, et les milieux économiques nous appuient. En continuant de mettre en oeuvre les mesures prévues dans le budget, nous espérons progresser davantage vers l'atteinte de l'objectif de l'égalité économique pour les femmes et tous les Canadiens.

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui


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pour réaffirmer la position du gouvernement. Nous sommes ici pour veiller à ce que tous les Canadiens, notamment les plus défavorisés, aient droit à l'égalité d'accès aux outils qui leur sont nécessaires pour mener une vie prospère. C'est pour cette raison que nous mettons tout en oeuvre pour assainir nos finances. Cependant, nous voulons agir de la façon la plus humaine possible.

Pour mener une vie saine sur le plan économique, les femmes et la population canadienne dans son ensemble doivent être en bonne santé. L'un ne va pas sans l'autre. Tout le monde le sait, à pauvreté égale, les femmes sont plus nombreuses que les hommes pauvres à être en mauvaise santé. La santé des femmes constitue une priorité pour notre gouvernement. Dans le livre rouge, nous avons promis d'intervenir pour améliorer la santé des femmes. Cette promesse, je suis résolue à la tenir. Les Canadiennes ne méritent rien de moins.

Les Canadiens sont fiers de leur régime de soins de santé que d'aucuns considèrent comme le meilleur au monde. Or, si on va au-delà des apparences, on a tôt fait de constater que tout le monde n'en profite pas également.

Les femmes sont les grandes dispensatrices de soins à la famille, aux amis et à la collectivité. Par contre, on néglige les facteurs indispensables à la santé de ces femmes.

L'approche traditionnelle de la santé des femmes était principalement axée sur les problèmes de reproduction. De toute évidence, il nous faut nous pencher sur la santé des femmes, mais pas seulement en fonction des hommes. L'espérance de vie ou l'absence de maladie ne sont pas des indicateurs de santé déterminants.

Nous devons nous demander pourquoi les femmes sont souvent traitées à mauvais escient dans notre système de soins de santé. Nous devons nous demander pourquoi on n'a pas pris en considération les effets particuliers des maladies chroniques sur les femmes, surtout à un âge avancé. Nous devons veiller à ce que les milieux scientifiques ne négligent plus les maladies propres aux femmes.

[Français]

Les praticiens de la santé et les décideurs reconnaissent toujours davantage que la santé des femmes fait partie du contexte social et économique de la vie quotidienne.

(1650)

On comprend de plus en plus que les déterminants de notre santé-nos expériences de vie individuelle et collective, à nous les femmes-nous sont propres.

On ne peut voir les femmes comme un groupe homogène. Notre santé est affectée par divers autres facteurs que le sexe, tels l'âge, la race, la condition sociale, l'éducation et, oui, le revenu.

Nous devons régler des questions de portée plus large: pauvreté, violence, racisme et une foule d'autres maux sont inextricablement liés à la santé et au bien-être des femmes. La bonne santé et le bien-être ne dépendent pas seulement, loin de là, des services de santé.

Les femmes ne cessent de répéter-et la société tout entière commence à s'en convaincre-que la santé doit faire l'objet de soins holistiques qui touchent à la fois notre bien-être émotif, spirituel, culturel et physique.

Pour améliorer la santé des femmes, nous devons remédier aux inégalités sociales et économiques qui freinent leur épanouissement.

Nous ne voulons pas de soins de santé impersonnels. Nous croyons que nous devrions disposer d'un système ancré dans la collectivité de soins continus dispensés par une vaste gamme d'auxiliaires et de professionnels de la santé. Entre autres, les sages-femmes et les infirmiers et infirmières peuvent souvent offrir aux femmes des soins de qualité qui répondent à leurs attentes.

[Traduction]

Nous souscrivons au principe de l'initiative personnelle dans le domaine des soins, reconnaissant que chacun sait ce qui est bon pour lui. De plus, nous estimons que chacun est en partie responsable de son bien-être.

Un grand nombre des dossiers que je traite sont très complexes et obligent à faire des choix très difficiles. L'un de ces dossiers névralgiques concerne le cancer du sein. Je dois avouer que les gouvernements précédents n'ont pas pris la chose bien au sérieux. C'est un domaine d'un intérêt particulier pour moi et je veux faire en sorte que les fonds nécessaires soient consacrés non seulement à la recherche en vue du traitement du cancer du sein, mais aussi à la diffusion de l'information et à la recherche sur les causes de cette terrible maladie.

Dans ses recommandations, le Forum national sur le cancer du sein insiste sur le rôle clé que les femmes doivent jouer dans le choix des soins et traitements et dans l'orientation de la recherche sur les causes de la maladie et sa prévention.

On estime que Santé Canada, les organisations non gouvernementales et l'industrie investiront environ 45 millions de dollars dans la recherche sur le cancer du sein au cours des prochaines années. Est-ce suffisant? Ce ne l'est jamais. Nous devrons poursuivre nos efforts en vue d'accroître l'intérêt pour cette très grave maladie qui affecte de nombreuses Canadiennes depuis de nombreuses années.

Il est indispensable de faire de la prévention et de lutter contre la violence avant de faire appel aux soins médicaux, si nous voulons protéger la santé et la sécurité et assurer l'égalité économique. C'est tout particulièrement vrai dans le cas de l'abus des intoxicants et de la violence sexuelle ou physique. C'est pourquoi la lutte contre la violence fondée sur le sexe constitue un aspect crucial d'un grand nombre de nos programmes.

[Français]

L'initiative concernant les femmes et le tabagisme, qui s'inscrit dans notre Stratégie de réduction de la demande de tabac, est un autre programme qui vise spécifiquement les femmes.

L'usage du tabac est la principale cause de décès prématuré chez les Canadiennes. Plus de 15 000 d'entre elles meurent chaque année des effets nocifs du tabac.


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Grâce à des programmes conçus spécifiquement pour les femmes, à des campagnes de sensibilisation et à la recherche, nous sommes maintenant en mesure d'aider un grand nombre de fumeuses à abandonner pour toujours l'usage du tabac.

C'est dans cet esprit que nous avons lancé le Programme de lutte contre le tabagisme et la promotion de saines habitudes de vie. Ce programme vise les femmes à revenu modeste, à faible niveau d'instruction, celles qui élèvent seules leurs enfants, les jeunes femmes et les femmes autochtones.

Tout investissement dans ces secteurs peut porter des fruits toute la vie, parfois dès la naissance.

[Traduction]

Nous sommes convaincus que la promotion de la santé et la prévention des maladies sont les meilleures garanties de santé à long terme. C'est pourquoi nous croyons préférable d'investir dans le Programme de nutrition prénatale, qui protège mieux la santé des mères et de leurs enfants, que dans des technologies de pointe héroïques pour sauver des nouveau-nés à risque.

(1655)

Nous partageons également les préoccupations concernant l'efficacité du matériel médical, ainsi que les conséquences morales, sociales et sanitaires des nouvelles techniques de reproduction. Ces techniques peuvent modifier radicalement la vie de nos enfants et des familles parce qu'elles ouvrent la porte à la technologie de la génétique.

L'expansion de notre conception de la santé, la réduction de notre dépendance à l'égard de la technologie, la réalisation de travaux qui font appel à une gamme plus variée de dispensateurs de soins de santé, la responsabilisation et le recours accru à la promotion, voilà des questions qui correspondent aux priorités que j'ai qualifiées d'essentielles au renouveau du système de santé au Canada et, en définitive, à notre bien-être collectif. Elles concernent tout particulièrement les femmes, mais elles ne leur sont pas exclusives. Ces questions sont la responsabilité de toute la société.

[Français]

La résolution de bon nombre de ces problèmes exige une réaction positive au changement. Je suis convaincue que la réforme du système de santé offre les meilleures chances de succès à cet égard. Il faut aussi s'assurer que dans les débats politiques, on se souvienne qu'on est ici pour servir le peuple, les hommes et les femmes, et non seulement les gouvernements.

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Madame la Présidente, je voudrais remercier la ministre de son beau discours. Je n'ai pas souvent eu la chance d'entendre la ministre prononcer d'aussi longs discours et je tiens à la féliciter. Son discours est plein de bonnes intentions, je vois qu'elle connaît bien son sujet.

Mon intervention n'est pas un reproche à quiconque. Avec les énoncés de politiques et malgré les belles intentions qu'on entend souvent de part et d'autre de cette Chambre, on voit malheureusement, du côté du parti au pouvoir, une espèce de distortion entre les interventions des personnes et l'action sur le terrain.

Cela fait plusieurs fois qu'on a une journée comme aujourd'hui où l'on discute de la condition des femmes. Je me souviens que le 6 décembre dernier était une de ces journées et les femmes du Parti libéral se sont jointes aux femmes du Bloc québécois pour dénoncer la situation parfois dramatique que vivent les femmes.

Sauf que dans la vie quotidienne et dans nos projets de loi, on semble oublier toutes ces belles promesses, ces grandes intentions, on balaie la pureté sous le tapis. C'est ainsi que les députés libéraux et les ministres-et possiblement Madame la ministre qui vient de parler, que j'estime et que je respecte beaucoup-ne s'opposent pas à des mesures comme celle contenue dans le Budget de l'an dernier qui assujettissait la femme au salaire de son mari pour avoir droit à l'assurance-chômage.

Lorsqu'on a proposé d'autres législations, qu'ont-ils fait? Se sont-ils battus pour les garderies? Je sais que ce sont tous de bonnes personnes et je les respecte, mais quand vient le temps de joindre le geste à la parole, l'action aux principes, ils font défaut. Malheureusement, à ce moment, ils se défilent souvent.

Je disais au départ que mon commentaire n'était pas une critique. Au contraire, j'espère que comme la ministre de la Santé, les femmes du Parti libéral seront capables de faire pression sur leurs collègues masculins, majoritaires, et essayer de leur faire prendre des actions en faveur des femmes.

Ne vous surprenez pas si c'est un homme qui vous le dit aujourd'hui. J'ai trois belles jeunes filles que j'adore tout autant que mon garçon et je vois que l'avenir qu'on leur prépare, le champ dans lequel elle devront évoluer n'est pas toujours à leur avantage.

Je ne demande pas de favoritisme pour les femmes. Je demande simplement qu'on les traite de la même façon qu'on traite les hommes et souvent comme on traite mieux les minorités. Nos femmes au Canada sont moins bien traitées que certaines minorités, je ne trouve pas ça correct.

Je remercie la ministre de son beau discours, on voit qu'elle connaît le sujet, qu'elle a de bonnes intentions. Ce que je lui demande, c'est entend-elle essayer de promouvoir ses idées au sein de sa propre députation?

(1700)

Mme Marleau: Madame la Présidente, je dois dire qu'il faut continuer à travailler ensemble, non seulement dans ce parti-ci parce que nous, on a à coeur la condition des femmes, la condition des minorités. Vous savez, il y a beaucoup de femmes qui font partie des minorités. Alors il faut savoir que c'est notre intention de faire notre grand possible, dans une situation économique encore assez grave, pour s'assurer que les dollars que nous avons vont directement aux personnes qui en ont le plus besoin. Ce sont des décisions qui sont quelquefois difficiles. On a des organismes qui font de bonnes choses, mais les dollars qu'on leur donne ne vont pas directement à ceux et celles qui en ont vraiment besoin.

On voit aujourd'hui un esprit de coopération quand on parle de la condition des femmes, surtout des femmes pauvres. Toutefois, je me demande, lorsque j'entends parler, et ce, depuis des années, des débats constitutionnels, des débats pour savoir quel palier de gouvernement devrait faire quoi et toutes sortes de commissions, et tout cela coûte très cher, je me demande, donc, si nous avions travaillé ensemble et ramasser tous ces dollars


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qu'on a dépensés depuis des années, et si on avait décidé ensemble que la meilleure chose à faire pour les gens au Canada, c'était de s'asseoir ensemble et voir à leur condition économique, imaginez ce qu'on aurait pu faire. On pourrait avoir un système de garderies national. On n'aurait pas besoin de se battre pour savoir si c'est une priorité provinciale, si c'est du domaine fédéral. Ce serait donc bien si on pouvait faire des choses comme celles-là.

Mais, comme on le sait, la réalité des faits, c'est que nous avons des gouvernements provinciaux qui ont certaines responsabilités qui leur tiennent à coeur. C'est à moi cela, n'y touche pas! Même si tu veux faire des bonnes choses, ne viens pas dans mon domaine. Cela cause des problèmes, des délais et des frustrations extrêmes, surtout pour cette ministre-ci qui sait que ce sont des questions très difficiles.

Quand on pense à ce qu'on pourrait faire si on investissait, premièrement, dans nos enfants et dans les enfants de 0 à 6 ans. Si on pouvait intervenir à ce niveau-là, on n'aurait pas besoin de bâtir des prisons comme on sera obligé de le faire parce qu'on ne peut pas se payer le loisir d'aider nos enfants. On va faire notre possible ici. Mais je demanderais à tous les gens qui ont à coeur nos enfants, nos femmes et l'avenir de notre pays, de se mettre ensemble et de travailler, et qu'on prenne les dollars qu'on a pour vraiment faire du bien pour le peuple canadien.

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Madame la Présidente, le 8 mars dernier, nous célébrions avec toutes nos soeurs et collègues du monde entier, la Journée internationale de la femme. Comme toutes les grandes fêtes que l'on commémore pendant un octave, qu'il me soit permis de dire que la nôtre ne fait pas exception à la règle.

Toutefois, je ne considère pas pour autant qu'une seule journée puisse nous permettre de témoigner que la partie est gagnée. Cette journée permet de faire une pause, d'engager une réflexion et de l'insérer dans le prolongement des démarches qui restent à faire. Au dernier jour de cet octave, c'est donc avec plaisir que je prends la parole en cette Chambre afin de souligner, d'une part, les gains importants que les femmes ont obtenus de dure lutte et d'autre part, les situer dans le contexte des actions et des démarches à venir, en particulier pour les Québécoises.

J'en profite également pour saluer tous les groupes de femmes de Laval qui oeuvrent au mieux-être de leurs concitoyens.

Nous devrons toujours nous rappeler que le courage, la détermination et le dévouement de celles qui nous ont précédées ne sont pas de vains mots. Ils ont été porteurs de changements fondamentaux dans l'ordre établi. Dans leurs démarches d'autonomie, ces femmes ont ouvert la porte à leurs filles vers l'accès à l'égalité des sexes, aux études supérieures, au droit de vote, au marché du travail et à l'indépendance financière, au pouvoir politique et au monde des affaires.

(1705)

Nous avons de plus assisté à plusieurs premières au cours des dernières années: première femme dans l'espace, première femme première ministre du Canada, première femme présidente de république, première femme juge à la Cour suprême, première femme à siéger à l'Académie française et j'en passe.

D'ailleurs, la déclaration du Sommet mondial pour le développement social tenu à Copenhague récemment confirme dix engagements, dont celui de, et je cite: «promouvoir le respect total de la dignité humaine et assurer l'égalité et l'équité entre femmes et hommes et reconnaître et renforcer la participation et le rôle des femmes, dans le cadre de la vie politique, civile, économique, sociale et culturelle, et au développement.»

Qu'en est-il maintenant? Aujourd'hui, les femmes se demandent collectivement: Où en sommes-nous rendues? Quelle a été la portée de nos actions? Quels seront les prochains enjeux? De par nos expériences personnelles, nous savons tous et toutes que des pas ont été franchis eu égard à l'obtention de nos droits. Toutefois, laisserons-nous l'arbre nous cacher la forêt?

Malgré les progrès, de sérieux écarts subsistent. En période de restrictions budgétaires, de chômage, les femmes et les gens plus démunis risquent de payer la note. Un fait demeure, cependant: la réalité des pratiques en milieu de travail, par exemple, fait en sorte que les femmes gagnent toujours 72 p. 100 du salaire des hommes, qu'elles sont majoritairement confinées dans des emplois peu rémunérateurs et précaires, que les services de garde sont inadéquats, qu'elles se retrouvent au troisième âge plus pauvres que les hommes, et la liste pourrait s'allonger.

Qu'en est-il maintenant au Québec? De nombreux députés du Bloc québécois ont parcouru les différentes régions du Québec au cours des dernières semaines, dans le cadre des Commissions régionales sur l'avenir du Québec. Comme vous le savez, les 18 commissions québécoises se sont soldées par un franc succès. Plus de 50 000 Québécoises et Québécois ont pris part à des discussions extrêmement productives lors de la plus vaste consultation populaire jamais tenue au Québec. Des gens de tous les âges et de tous les horizons ont pris la parole et sont venus nous dire ce qu'ils attendaient et espéraient d'un Québec souverain.

Les Québécois et les Québécoises ont fait la preuve, une fois de plus, qu'ils sont capables de s'écouter, de se comprendre et de s'entendre. Ils sont venus exprimer au gouvernement du Québec leur désir d'un Québec généreux, solidaire et responsable envers leurs femmes et leurs enfants, les travailleurs et travailleuses, leurs aînés, leurs jeunes. De nombreux groupes de femmes ont participé au débat. Je peux affirmer que leur façon de voir l'avenir du Québec ne correspond pas à celle de l'actuel gouvernement fédéral. Est-il possible que l'écart entre la réalité des Québécoises et la perception qu'en a le gouvernement fédéral soit aussi fort? En tous les cas, la secrétaire à la condition féminine et ses collègues québécois du Parti libéral du Canada ont manqué une belle occasion de reprendre contact avec la réalité des Québécoises.

Quoi qu'il en soit, puisque les députés libéraux étaient absents, je vais tenter de leur rappeler ce que les Québécoises ont exprimé. En premier lieu, faut-il le répéter, les groupes de femmes, comme elles l'avaient signalé lors des audiences de la commission Bélanger-Campeau, désirent des changements pro-


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fonds. Les femmes sont intervenues pour que cesse l'intervention du gouvernement fédéral dans les secteurs qui les touchent, notamment les conditions de travail, le droit de la famille, la sécurité du revenu, les services de garde, l'avortement.

La présence dans tous ces domaines, nous ont-elles dit, de deux paliers de gouvernement provoque des chevauchements administratifs, des dédoublements de programmes et de structures, une absence d'harmonie entre les politiques provinciales et fédérales, donc un gaspillage de fonds publics et l'incapacité pour le Québec de se donner une politique cohérente, en matière de condition féminine.

Des exemples, madame la Présidente? Le congé de maternité relève de la Loi sur les normes de travail, alors que la compensation du revenu est accordée en vertu de la Loi sur l'assurance-chômage, d'où la difficulté pour le Québec de se doter d'une politique cohérente de congés parentaux.

(1710)

Parlons du retrait préventif de la travailleuse enceinte ou qui allaite. Ces femmes sont reconnues au Québec en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité au travail, alors que les femmes à l'emploi du gouvernement fédéral et d'entreprises à charte fédérale sont régies par le Code du travail du Canada. Les indemnités ne sont pas comparables, créant ainsi deux catégories de travailleuses québécoises.

De plus, l'intervention fédérale dans le domaine de la famille accentue la double compétence en matière de droit familial. Le Parlement fédéral exerce une compétence en matière de mariage et de divorce; le Québec peut légiférer sur la célébration du mariage, les régimes matrimoniaux, l'adoption et la séparation de corps.

Comme le disait si bien le Conseil du statut de la femme: «Selon qu'elle se marie, se sépare ou divorce, elles sont soumises à des règles provinciales ou fédérales.» De plus, cette double compétence empêche le Québec de se doter d'un tribunal unifié de la famille.

Je pourrais continuer dans cette voie encore longtemps et vous parler des chevauchements dans les domaines de la sécurité du revenu, des services sociaux, des services de garde et de bien d'autres.

Ce sont toutes ces incohérences maintes fois dénoncées que les groupes de femmes sont venus discuter aux commissions régionales sur l'avenir du Québec.

Mes collègues sont intervenus toute la journée pour rappeler en cette Chambre l'inaction du gouvernement face à l'adoption de mesures concrètes pour favoriser l'égalité économique des femmes. Les députés du Bloc québécois ont de plus dénoncé les coupures draconiennes du dernier Budget fédéral et ont souligné que les femmes risquent d'être grandement touchées. Le gouvernement prétend qu'il n'a pas les moyens financiers pour prendre des actions favorisant l'égalité et l'équité, mais il ne fait rien pour mettre un terme au gaspillage, au dédoublement et aux incohérences entre les politiques fédérales et provinciales.

Le gouvernement fédéral nous fait la démonstration de son incapacité à répondre aux besoins pressants des Québécoises et à leurs demandes maintes fois réitérées. Le Québec, dans de nombreux domaines, comme je l'ai souligné, est déjà bien en avance. Il ne manque au Québec que tous ses outils pour aller plus loin, pour poursuivre un développement intégré.

«If you can't take the heat, get out of the kitchen», dit-on en langue anglaise. Les femmes le rappellent au gouvernement fédéral et l'invitent à laisser le Québec maître d'oeuvre et détenteur exclusif des pouvoirs dans les domaines liés à la condition de vie des femmes.

Pour toutes ces raisons, j'appuie entièrement la motion de ma collègue, la députée de Québec, et j'invite le gouvernement fédéral à se retirer dès maintenant de tous les champs de compétence provinciale.

[Traduction]

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Madame la Présidente, je remercie ma collègue pour ses commentaires. Je vais suivre son conseil et orienter le débat dans une direction quelque peu différente. Je lui demande de se rappeler à quel point la société québécoise d'il y a, disons 50 ans, était différente de celle d'aujourd'hui.

La société d'alors était absolument centrée sur l'église et la famille. En fait, durant la Seconde Guerre mondiale, la population francophone du Québec a remplacé la devise traditionnelle de la France-liberté et égalité-par la devise de la France de Vichy-travail, famille et patrie.

Après la Seconde Guerre mondiale, nous avons amorcé une période de grande libération sociale au Québec. Le Québec a fait, à cette époque, des progrès considérables qui ont permis aux Québécoises d'apporter une contribution remarquable à tout le pays, à l'économie et à la culture de notre pays, tant anglophone que francophone.

La députée n'est-elle pas d'avis que ce changement, cette transformation profonde qui s'est produite au Québec durant les années 50, est survenu non seulement grâce aux forces qui animaient la société québécoise d'alors, mais aussi grâce aux forces du Canada même? Je lui rappelle que le gouvernement fédéral a pris d'excellentes initiatives, surtout sous la direction de M. Pearson et de M. Louis St-Laurent, qui ont donné naissance à une société semblable à celle qu'elle souhaiterait pour le Québec.

(1715)

[Français]

Mme Debien: Madame la Présidente, je remercie le député de sa question. Effectivement, le Québec a beaucoup évolué depuis, en particulier, les années 1950 et 1960 dans le cadre de ce qu'on a appelé la «révolution tranquille».

Quand vous me dites qu'il y a eu des changements profonds, j'en suis, et vous associez ces changements profonds au fait qu'il y avait au Canada des forces de changement qui accompagnaient les forces de changement du Québec. J'aimerais peut-être poser, à mon tour, une question au député, je voudrais savoir lesquelles,


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puisqu'il ne les a pas mentionnées. C'est beau d'expliquer qu'il y a eu des forces de changement, encore faut-il savoir lesquelles.

Nous savons au Québec quelles ont été nos forces de changement et ce qui a contribué à ces forces. Il y en a eu aussi au Canada, nous l'admettons, sauf que j'aimerais savoir quelles sont les forces de changement que le Canada a pu faire jouer au Québec. Personnellement, je ne les vois pas. C'est peut-être une question que je vous retourne, monsieur le député.

[Traduction]

M. Bryden: Madame la Présidente, loin de moi l'idée de faire la leçon à la députée sur l'histoire du Québec, mais il ne fait aucun doute que dans les années 50 et les années 60, du temps des premiers ministres Louis Saint-Laurent et Pearson, le gouvernement fédéral a fait preuve d'une très grande ouverture. Je voudrais lui rappeler que, jusqu'à l'arrivée de M. Louis Saint-Laurent et de M. Pearson, puis de M. Trudeau et d'autres, le gouvernement fédéral était surtout composé d'anglophones.

Nous avons tenté, et nous y avons très bien réussi, de faire participer le Québec à la vie de tout le pays. Je pense que le Québec a fait une très grande contribution à la nation. Je suis surpris que la députée n'en soit pas consciente.

[Français]

Mme Debien: Madame la Présidente, je voudrais répondre au député qu'on n'a certainement pas eu les mêmes cours d'Histoire du Canada et du Québec.

[Traduction]

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole pendant quelques minutes, cet après-midi, sur cette motion de l'opposition. Au cours du débat de cet après-midi, alors que des députés de différents partis parlaient avec sincérité de la question des femmes, je me suis mis à y réfléchir en me fondant, comme tous les députés de la Chambre, sur mes expériences personnelles, sur mes expériences de vie.

J'ai pensé à ma mère. J'ai pensé à ma grand-mère qui était une épouse de guerre et qui, après la Première Guerre mondiale, avait quitté une vie aisée, en Écosse, pour venir vivre dans les Prairies, à Vulcan, en Alberta, dans une hutte de terre. J'ai pensé à ce par quoi elle était passée dans sa vie, alors qu'ils défrichaient les Prairies. J'ai pensé aux différences qui existaient entre sa situation et celle de ma mère, qui disait souvent que sa vie aurait peut-être été un peu plus facile si elle avait été un homme. Je pense que c'est parce qu'elle a fait, à l'époque, beaucoup de choses qui, normalement, n'étaient pas du ressort d'une femme. À vrai dire, elle n'aurait pas obtenu une très bonne note, sur une échelle de un à 10, pour son intérêt pour des tâches telles que laver les planchers ou faire la vaisselle.

(1720)

Elle a été la première femme photographe de la guilde des journalistes du Canada. Elle a eu une chronique dans les journaux pendant de nombreuses années. Je suis très fière d'elle. Elle a plus de 75 ans aujourd'hui. Elle avait toujours voulu écrire un livre, et elle l'a fait. Il est en train d'être publié.

Au cours de sa vie et au cours de la vie de nombreuses femmes et de nombreux hommes de cette Chambre, le rôle des femmes a considérablement changé dans notre société. La situation a beaucoup changé dans notre société à la suite de l'émancipation des hommes et des femmes. Il se peut que le plus grand changement qui ait eu lieu, du moins dans mon esprit, soit celui entre la génération de mes parents et la mienne, surtout sur le plan de la relation que nous avons avec nos filles.

La plupart des députés qui ont des filles s'attendent à ce que leurs enfants soient traités avec l'impartialité la plus totale, malgré leur sexe.

Ma femme et moi avons une fille qui est ingénieure. Elle est extrêmement compétente. Elle se fâchait chaque fois qu'un homme voulait lui ouvrir la porte, car elle pouvait le faire elle-même. Elle n'avait pas besoin que quiconque le fasse pour elle. Je lui ai dit qu'il lui fallait parfois être un peu plus affable, car la personne qui lui ouvre la porte essaie simplement d'être polie et ne veut en rien la rabaisser.

Une des choses qui manquent dans ce grand débat qui fait rage entre les hommes et les femmes, c'est peut-être la capacité, de temps à autre, de nous prendre moins au sérieux.

Nous changeons, en tant que peuple et nation, mais c'est une évolution et non une révolution. D'aucuns prétendent que l'évolution est préférable à la révolution.

À mon avis, ce débat aura été utile et le Bloc l'a lancé de bonne foi. Il convient de noter qu'il y a toutes sortes d'iniquités dans notre vie, pas simplement à l'égard des femmes qui, pour une raison ou pour une autre, ont peut-être le sentiment de ne pas se réaliser pleinement. Cela ne se limite pas non plus aux membres des minorités visibles qui croient être incapables de s'épanouir à cause de leurs origines ethniques. Ce sont des choses répréhensibles et il s'agit d'un système de valeurs que nous partageons tous.

Nous reconnaissons qu'on ne devrait pas empêcher des gens de réussir à cause d'une caractéristique physique, qu'il s'agisse du sexe féminin ou de la couleur de la peau, ou à cause d'une religion ou de n'importe quoi d'autre. Tout le monde croit que l'égalité des femmes est un droit dans une société libre. On mérite sa réussite. En tant que société, si nous nous assurons que tous les citoyens, hommes, femmes, jeunes et vieux, ont des chances égales, nous sommes alors sur la bonne voie.

Le défi consiste justement à garantir cette égalité des chances pour que les gens réussissent en fonction des efforts qu'ils déploient pour profiter des débouchés qui s'offrent à eux.

Je remercie la Chambre de m'avoir donné l'occasion de formuler ces quelques observations. Si certains de mes collègues veulent ajouter autre chose, je serais heureux qu'ils le fassent.

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L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, j'ai hâte de faire des observations dans ce débat, car toute la question de l'inégalité des femmes et de la violence faite aux femmes constitue un aspect très important des fonctions que, en ma qualité de ministre de la Justice, j'exerce au nom du gouvernement. Je suis heureux que la Chambre ait été saisie de cette question aujourd'hui. Je félicite les députés du Bloc de consacrer cette journée de l'opposition à un sujet aussi important.

(1725)

En guise d'observation, je voudrais que les députés comprennent bien que le gouvernement est très conscient du fait que les études qui ont été menées ces dernières années sur la violence faite aux femmes au Canada ont pratiquement toutes conclu que cette violence est directement liée à l'inégalité économique des femmes. Il est donc logique de penser que nous n'éliminerons pas la violence contre les femmes tant que nous ne nous attaquerons pas aux causes de cette inégalité. Cela tombe sous le sens.

Dans notre société, ce sont les femmes qui exécutent la majeure partie du travail non rémunéré, qu'il s'agisse de bénévolat ou de travail à la maison. Marilyn Waring, une économiste de la Nouvelle-Zélande qui a étudié ce phénomène, soutient d'une manière très persuasive que, tant que nous ne trouverons pas un moyen de recueillir des données de recensement pour évaluer le travail qu'accomplissent les femmes, nous n'aurons jamais une idée juste de la contribution qu'elles apportent à l'économie de notre société.

Nous devons également nous rappeler que les femmes assument une responsabilité disproportionnée en ce qui a trait au foyer et à la famille. Malgré les changements sociaux qui se sont opérés au cours des dernières décennies, ce sont surtout les femmes qui doivent se charger d'élever les enfants et de maintenir la stabilité du milieu familial. Elles en paient un prix énorme dans leurs aspirations professionnelles et dans leurs perspectives économiques et financières. Il s'agit souvent d'un prix injuste, qu'il est impossible de compenser. En outre, lorsque la famille éclate, elles doivent souvent affronter d'énormes difficultés financières.

Les femmes qui travaillent sont trop souvent confinées dans les ghettos des emplois traditionnellement féminins, notamment dans les emplois de bureau et les emplois de soutien secondaire, ce qui leur enlève la possibilité de réaliser pleinement leur potentiel. Selon les statisticiens, 80 p. 100 des emplois de bureau sont occupés par des femmes. Même lorsqu'elles travaillent à temps plein, les femmes gagnent 72 p. 100 du salaire des hommes qui travaillent à temps plein.

Et, de là, on peut faire un lien direct avec la violence. Les impératifs économiques contraignent les femmes et leurs enfants à rester avec des hommes qui leur font subir de mauvais traitements. Puisqu'elles se retrouvent dans une catégorie défavorisée au sein de la société, elles n'ont pas nécessairement accès aux services qui les aideraient à sortir de ces relations qui ont des conséquences tragiques pour elles et pour leurs enfants.

La gravité et l'ampleur de cette situation sont telles qu'il m'est impossible d'en dresser un portrait complet pendant les quelques minutes dont je dispose. En terminant, je tiens à dire que notre gouvernement est déterminé à faire tout son possible au cours du mandat que la population lui a confié pour régler les problèmes dont nous parlons aujourd'hui.

Un modeste premier pas consiste à faire mieux comprendre les questions à la population, à commencer à y trouver des ébauches de solutions et à transformer les attitudes des gens face à la violence et aux inégalités économiques dont les femmes sont victimes. Ainsi, tous ensemble, mieux au fait des enjeux et animés de la même détermination à agir, nous pourrions améliorer la condition des jeunes Canadiennes qui, bientôt, deviendront économiquement indépendantes.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 17 h 30, il est de mon devoir d'informer la Chambre que, conformément au paragraphe 81(19) du Règlement, les délibérations sur la motion à l'étude sont terminées.

La Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

_____________________________________________


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INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LOI FÉDÉRALE SUR L'AIDE FINANCIÈRE AUX ÉTUDIANTS

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 5 décembre 1994, de la motion.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville, Réf.): Madame la Présidente, j'ai le plaisir d'intervenir au sujet de la motion M-291 qui a été présentée par mon chef plus tôt cette année.

Aujourd'hui, je voudrais parler de l'éducation dans le cadre d'une nouvelle économie. Je n'entends pas me limiter aux détails du système de remboursement des prêts variant selon le revenu, car je voudrais traiter de toute la structure de la formation et de l'apprentissage dans la nouvelle donne économique, et de ce que cela signifie pour les jeunes Canadiens.

En novembre dernier, on pouvait lire dans le Journal Policy Options ce qui suit:

L'observation selon laquelle les universités canadiennes en 1993 traversent une crise grave est aujourd'hui très répandue. Personne n'en convient davantage que les administrateurs, les membres des facultés et les étudiants. La crainte due au sous-financement envahit tous les campus.
Il n'empêche que la demande en éducation supérieure monte en flèche. À Saskatoon et à Regina, près de ma circonscription, il est de plus en plus difficile d'être admis non seulement dans les universités, mais encore dans les collèges qui préparent les élèves à l'université. Des milliers d'étudiants voient leur demande refusée, ce qui est un reflet de notre économie en pleine ébullition.

Les ressources naturelles ont toujours été le principal actif de notre pays. Nous devons nos progrès sociaux et économiques aux


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fourrures de castor, au poisson, au bois, aux céréales, aux minerais, au gaz et au pétrole ainsi qu'à l'hydroélectricité.

Mais les temps changent. Nous transformons de plus en plus nos matières premières en produits manufacturés, des automobiles et motoneiges aux bâtonnets de poisson et frites congelées. Cela s'appelle la valeur ajoutée. Ceux qui veulent tirer profit de la nouvelle économie fondée sur l'information doivent avoir les connaissances et le savoir-faire requis pour pouvoir soutenir la concurrence partout dans le monde.

L'ancienne économie du Canada, une économie à forte intensité de main-d'oeuvre fondée sur les ressources naturelles et la fabrication de base, n'a plus les moyens de payer tout ce que nous voulons comme pays et n'est plus en mesure de créer les emplois dont nous avons besoin.

La situation n'est pas unique au Canada. Les autres pays industrialisés traversent eux aussi la plus importante mutation économique depuis la Révolution industrielle, soit le passage vers une économie fondée sur la connaissance où la matière grise de ses habitants est la plus grande ressource naturelle d'un pays.

Le gouvernement peut contribuer à développer la plus importante ressource naturelle du pays, à développer l'infrastructure intellectuelle du pays en aidant les jeunes à acquérir une bonne instruction. Il peut le faire directement de deux façons: investir des fonds publics dans l'éducation, en accordant, par exemple, des transferts en espèces sous forme de bons d'échange, et permettre aux Canadiens d'investir dans leurs études au moyen d'un régime amélioré de prêts aux étudiants.

Pour la première fois en 40 ans et seulement après que le Parti réformiste eut soulevé l'idée, les libéraux voient dans le remboursement des prêts variant selon le revenu une solution réaliste pour aider à financer l'enseignement postsecondaire.

Voyons les propositions du ministre du Développement des ressources humaines. Le document de travail sur la politique sociale des libéraux souligne que le financement des programmes établis est gelé au titre de l'éducation. Ce financement comprend 3,5 milliards de dollars en points d'impôt et 2,6 milliards de dollars en espèces. Le gouvernement dit que la valeur des points d'impôt augmentera parallèlement à la croissance économique et, à cause de cela, les transferts en espèces finiront par disparaître complètement dans 10 ans si rien n'est fait. Dans son document de travail, il propose la suppression immédiate des transferts en espèces et la mise en place d'un programme de prêts étudiants à remboursement relatif au revenu.

Il y a un certain temps, durant la période des questions, le ministre du Développement des ressources humaines a dit que la croissance et la valeur des points d'impôt représentaient une augmentation du financement au titre de l'éducation, mais ce n'est pas clairement le cas. La réalité, c'est que le coût de l'éducation augmentera probablement au moins aussi rapidement que la valeur des points d'impôt et peut-être même plus vite. Toutes choses étant égales, la suppression des transferts fédéraux en espèces représenterait une réduction des dépenses supérieure à 40 p. 100.

(1735)

Dernièrement, le gouvernement s'est rendu compte que le pays était confronté à un problème d'endettement. C'est encourageant, car les libéraux s'intéressent enfin au concept réformiste du remboursement des prêts en fonction du revenu. Il reste encore beaucoup de pain sur la planche. Le lourd fardeau de la dette qui pèse sur les Canadiens, notamment les jeunes, se fera encore davantage sentir dans les années à venir.

Qu'a-t-on fait pour nos jeunes récemment? Nos jeunes sont notre gage le plus précieux pour l'avenir de notre pays. C'est le discours que tiennent les politiciens chaque fois qu'ils se rendent à un campus ou à une école secondaire, ou qu'ils ont l'occasion de prendre la parole pour gagner le vote des jeunes. Je parle ainsi, les libéraux parlent ainsi et les bloquistes en font autant. Ce sont des mots.

Songeons un instant à ce que nous avons fait pour nos jeunes récemment. En contractant la dette nationale, nous avons privé la future génération, nos jeunes, de l'argent dont nous avons besoin pour payer ce que nous consommons aujourd'hui. Voilà ce que j'ai dit en parcourant le pays dans le cadre de l'examen de la réforme des programmes sociaux. Nous avons mis une énorme dette sur les épaules de nos jeunes.

Le gouvernement a dépensé des dollars fiscaux que nos petits-enfants n'ont même pas encore gagnés et ce n'est pas tout. En raison de notre forte dette et des taux élevés pratiqués au Canada, le gouvernement a favorisé l'effondrement du marché canadien de l'emploi. C'est ce qui explique qu'il y ait tant de jeunes diplômés qui sont réduits à travailler comme préposés aux hamburgers ou comme barmans.

La politique dépensière de notre gouvernement nuit aussi au financement de l'enseignement, ce qui entraîne une baisse de la qualité de l'enseignement et un accroissement des frais de scolarité. Récemment, le ministre du Développement des ressources humaines a proposé d'éliminer carrément les transferts en espèces au titre de l'enseignement. Il y a quelques mois à peine, des étudiants sont venus protester sur la colline du Parlement contre la hausse des frais de scolarité. Je le répète, on se contente de belles paroles.

Nous devons nous attaquer avec réalisme aux problèmes fondamentaux du système de prêts aux étudiants. Tout comme si les prestations d'assurance-chômage étaient réduites au niveau national, le nombre d'assistés sociaux augmenterait. Lorsque les transferts aux provinces au titre de l'enseignement postsecondaire ont diminué, les frais de scolarité ont augmenté et de plus en plus d'étudiants ont dû avoir recours à des prêts étudiants. Un nombre croissant d'entre eux n'ont pas remboursé, faute de pouvoir se trouver un emploi à leur sortie de l'université.

En 1992, les prêts non remboursés ont atteint des niveaux sans précédent. Cela s'appliquait à pratiquement un tiers des prêts en cours. À peine deux tiers de ceux qui en étaient rendus au stade du remboursement avaient commencé à faire leurs paiements. Depuis 1964, la valeur des prêts étudiants non remboursés s'est élevée à près de un milliard de dollars. On ignore au juste le véritable coût du système de prêts aux étudiants, car le gouvernement n'impose que des intérêts simples sur les prêts non remboursés.

Le système actuel pose un autre problème. Il place les étudiants dans une situation difficile. Selon le système actuel, les étudiants doivent commencer à rembourser leurs prêts huit mois


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après avoir obtenu leur diplôme, qu'ils aient un emploi ou non et que ce dernier soit payant ou non. Cela constitue un fardeau très lourd pour certains étudiants qui finissent par ne pas rembourser leurs prêts, ce qui entraîne des frais de recouvrement, la radiation de certains prêts et un accroissement général du coût pour le contribuable.

En vertu d'un système de remboursement des prêts variant selon le revenu, les étudiants commenceraient à rembourser leurs prêts seulement lorsqu'ils auraient trouvé un emploi leur rapportant un revenu minimal. Le gouvernement fédéral récupérerait les prêts étudiants par le truchement du régime d'impôt sur le revenu. Cela signifie que les étudiants auraient à préciser leur numéro d'assurance sociale sur leur formulaire de prêt d'études.

Si l'on donnait aux étudiants la possibilité de rembourser leurs prêts sur une plus longue période, grâce à l'argent qu'ils gagneront dans l'avenir, on pourrait augmenter les frais de scolarité pour que l'enseignement soit toujours de qualité supérieure et les étudiants auraient les moyens de payer ces frais de scolarité car ils disposeraient de plus de temps pour les rembourser.

Un programme de remboursement des prêts en fonction du revenu permettrait aussi une plus grande souplesse dans la structure des frais, dans les universités. Cela ferait intervenir davantage l'offre et la demande. Cela ferait disparaître de nos universités les cours non pertinents et inutiles, comme tout le monde le souhaite. Si les étudiants devaient payer, pour l'enseignement, quelque chose qui ressemble davantage à la valeur du marché, ils choisiraient leurs cours avec plus de minutie et les universités commenceraient à offrir des cours répondant aux demandes du marché.

J'espère que cela encouragera les parents et les grands-parents à déposer de l'argent dans un fonds de type REER pour leurs enfants et leurs petits-enfants, à cause des coûts très élevés que cela sous-entend.

(1740)

M. Tony Valeri (Lincoln, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureux de prendre aujourd'hui la parole à la Chambre sur cette motion de mon collègue.

Je sais que le député connaît la valeur des études, et je sais qu'il veut faire en sorte que tous les étudiants du Canada aient la chance de réaliser la carrière de leur choix. Je suis sûr que nous sommes tous d'accord là-dessus.

L'éducation est de compétence provinciale. Il en a toujours été ainsi, et il n'est pas question que ça change. Or, même sans contester cet acquis, le gouvernement fédéral reconnaît son rôle de contribuer à rendre le système d'éducation postsecondaire accessible à tous les Canadiens qui veulent faire des études.

Dans la conjoncture actuelle, le gouvernement agirait de façon irresponsable s'il refusait d'offrir de l'aide à l'éducation postsecondaire.

Je rappelle au chef du Parti réformiste que, quand le gouvernement a entrepris d'examiner notre régime de sécurité sociale, il a établi clairement dès le début qu'il faudrait assurer la meilleure utilisation possible de l'aide fédérale à l'éducation postsecondaire, étant donné les ressources limitées.

C'est encore vrai. Rien n'est changé à cet égard. Le budget propose de réunir en un seul bloc les transferts aux chapitres de la santé, de l'éducation postsecondaire et des services sociaux.

Reconnaissons simplement les faits-non seulement le fait que nous devons remplir le mandat de réduire le déficit que les Canadiens nous ont confié, mais aussi le fait que, dans le contexte des années 90, cette façon de faire sera beaucoup plus efficace. Les provinces pourront ainsi plus facilement administrer le financement des programmes sociaux que leur verse le gouvernement fédéral.

Le gouvernement subventionne également l'éducation postsecondaire dans le cadre du Programme canadien de prêts aux étudiants. Quand le gouvernement a adopté la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, en juin dernier, il a apporté des changements importants à ce programme de prêts.

La loi vise à aider les étudiants à terminer leurs études postsecondaires sans trop de difficultés et prévoit un régime de remboursement des prêts en fonction du revenu de l'emprunteur.

Mes collègues du Parti réformiste ont manifesté leur appui à cette mesure. Je ne comprends donc pas pourquoi ils présentent maintenant cet amendement.

Depuis l'adoption de cette loi, le gouvernement a consulté différents intéressés sur le principe du remboursement des prêts en fonction du revenu, et a constaté qu'il est encore très possible qu'on applique ce genre de mesure.

Dans son rapport à la Chambre, le Comité permanent du développement des ressources humaines a indiqué que la réforme du soutien fédéral à l'enseignement postsecondaire suscitait de vives inquiétudes dans les milieux de l'enseignement postsecondaire et que nombre d'éducateurs travaillant dans les collèges et les universités ont pris une part active aux audiences que le comité a tenues dans tout le pays.

Les conclusions du comité nous donnent une bonne idée de ce que souhaitent les Canadiens sur le plan du soutien fédéral à l'enseignement postsecondaire. Selon le rapport du comité, aucun gouvernement, compte tenu de sa situation financière, ne peut financer davantage l'enseignement supérieur au Canada.

Le comité le fait remarquer parce que le gouvernement songe à réformer ses programmes de soutien à l'enseignement postsecondaire au moment où notre système et nos établissements d'enseignement postsecondaire subissent déjà des pressions sans cesse croissantes, sur le plan financier et autres et qu'étant donné ces circonstances, le gouvernement doit veiller à ce que le peu de ressources que nous avons soit utilisé de façon aussi efficace et efficiente que possible.

Le comité fait remarquer que dans le débat sur l'avenir des contributions fédérales à l'enseignement postsecondaire, il est essentiel de souligner le pouvoir des provinces sur les politiques régissant les collèges et les universités. Il est important de rehausser la santé et la viabilité des collèges et universités sans interférer avec les responsabilités provinciales.

Le rapport du comité reflète l'opinion générale des Canadiens à l'égard de notre système d'enseignement postsecondaire. Je crois qu'il est raisonnable de conclure d'après les points de vue qu'ils ont exprimés qu'ils appuient en général la direction suivie par le gouvernement.


10641

La motion du député ne tient pas compte d'un autre aspect. Étant donné ce que je viens de mentionner à propos de la compétence des provinces en matière d'enseignement postsecondaire, le gouvernement fédéral-même s'il disposait de fonds illimités-ne peut pas dire aux provinces comment elles devraient utiliser les fonds qui leur sont versés au titre de l'enseignement postsecondaire.

Il n'existe aucun équivalent à la Loi canadienne sur la santé à cet égard. J'invite donc le député à faire connaître ses opinions sur la façon d'améliorer le système d'enseignement postsecondaire aux autorités provinciales en matière d'éducation.

Il peut avoir la certitude que nous serions heureux de recevoir l'appui des réformistes et des autres députés pour renforcer notre système d'enseignement postsecondaire.

Voici la nouvelle réalité. À compter de l'exercice 1996-1997, nous allons combiner les transferts actuellement effectués aux termes du Financement des programmes établis et du Régime d'assistance publique du Canada sous un seul programme appelé Transfert social canadien.

(1745)

Au cours de la première année, le TSC s'élèvera à 26,9 milliards de dollars. Il y aura donc une baisse de 2,5 milliards de dollars. Si nous tenons compte aussi du transfert de péréquation, le total des principaux transferts sera seulement de 4,4 p. 100 inférieur au total actuel. Cependant, par rapport au système actuellement en place, les coupes dans tous les autres secteurs des dépenses fédérales seront de 7,3 p. 100. En d'autres termes, le gouvernement fait précisément ce que les Canadiens ont demandé. Nous mettons de l'ordre dans les finances publiques.

Les paiements de péréquation ne sont pas visés par le budget. Par conséquent, les coupes totales imposées aux provinces les moins riches seront inférieures à la moyenne des coupes imposées à l'ensemble des provinces. Même si les conseils qui distribuent les subventions à la recherche feront leur part pour aider à atteindre les objectifs de réduction du déficit, les universités continueront de bénéficier de subventions à la recherche totalisant 900 millions de dollars dans les secteurs de la médecine, des sciences et de la technologie, des sciences sociales et des sciences humaines.

Le gouvernement apprécie le fait que le chef du Parti réformiste ait soulevé cette question aux fins de débat. Le député peut avoir l'assurance que le ministre Axworthy collaborera avec les provinces pour établir des principes et des objectifs communs aux fins du TSC.

L'enseignement postsecondaire ne perdra rien à cause de nous ou des provinces. Nous reconnaissons tous, comme le député d'ailleurs, que les collèges et les universités jouent un rôle essentiel pour former une main-d'oeuvre hautement spécialisée.

Je propose donc l'amendement ci-dessous à la motion:

Qu'on modifie la motion M-291 en supprimant tous les mots après le mot revenu.
J'invite les députés à appuyer l'amendement proposé, qui favoriserait la poursuite de l'étude sur la faisabilité du principe de remboursement des prêts variant selon le revenu dans le contexte plus large visant à aider les étudiants à faire face aux dettes qu'ils contractent en investissant dans leur propre avenir.

[Français]

M. André Caron (Jonquière, BQ): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que j'interviens sur la motion du député de Calgary-Sud-Ouest. Sa motion vise à modifier la Loi sur les prêts aux étudiants, de façon à y inclure un système de remboursement des prêts variant selon le revenu. Je suis conscient du fait que mon collègue du Parti libéral vient tout juste de présenter un amendement mais je pense que mon intervention portant sur la motion principale n'en sera pas changée pour autant parce que je crois que l'esprit de cet amendement vient rejoindre celui qui préside à la définition de la motion de l'honorable député de Calgary-Sud-Ouest.

Le député préconise un système de remboursement de prêts variant selon les revenus. On connaît le système actuel de remboursement de prêts, c'est-à-dire un système de prêts garantis par le gouvernement. L'étudiant, après quelques mois, à la fin de ses études, commence à rembourser son prêt à un rythme déterminé avec la banque et au taux d'intérêt usuel. Le député de Calgary-Sud-Ouest a fait mention dans sa première intervention qu'environ 20 p. 100 des étudiants éprouvaient des difficultés à rembourser leurs dettes dans le système actuel.

La proposition de notre honorable collègue du Parti réformiste lie le montant annuel et la durée du remboursement du prêt au revenu annuel de l'étudiant. Il ajoute aussi dans son discours que la perception de la dette se ferait par le biais de l'impôt sur le revenu.

(1750)

De prime abord, la proposition peut être séduisante en ce sens qu'on fait preuve d'une souplesse qui est, à mon sens, de bon aloi pour toute personne qui a des dettes. Je pense qu'il est important que le système soit assez souple pour tenir compte des situations particulières. D'ailleurs le Protecteur du citoyen du Québec, la semaine dernière, analysant la situation des jeunes qui ont des difficultés à rembourser leur prêt, notait qu'une des difficultés principales était que les banques, dans le règlement actuel de remboursement, n'avaient pas la souplesse nécessaire pour s'adapter aux besoins des jeunes, ce qui fait que plusieurs d'entre eux étaient acculés à se déclarer en faillite. Il est évident qu'il y a quand même des améliorations à apporter de ce côté.

La question de la collection des dettes à payer à partir du système d'impôt est aussi intéressante en ce sens qu'on sait qu'à peu près personne n'échappe à l'impôt. On s'assure de cette façon que les dettes encourues par les jeunes pour leurs études soient remboursées.

La séduction de cette proposition, quand on y réfléchit bien, n'est seulement qu'apparente. Il y a un certain nombre de faiblesses importantes. D'abord, on part du principe sous-entendu que les études sont la responsabilité des jeunes. Ce sont à eux à payer leurs études, soit en travaillant, soit en s'endettant. On passe dans l'autre univers, du chacun pour soi et de la loi de la jungle. La société ne se reconnaît de devoir envers personne et c'est l'individu de prendre ses responsabilités.

Le principe qui a présidé à la mise sur pied du système de prêts et bourses actuel au Canada n'était pas celui-là. On croyait que


10642

l'éducation est un droit et que la société devait aider le jeune à faire valoir ce droit. On présupposait aussi que l'éducation est un investissement social. Bien sûr, le jeune profite de l'instruction qu'il a acquise sur les bancs d'école. On n'a qu'à considérer les statistiques de placement et de chômage pour le vérifier. Il y a aussi tout l'enrichissement et la culture personnelle que le jeune a acquis et qui lui sera d'un grand secours tout au long de sa vie. Mais l'éducation des jeunes est aussi un investissement social. Les sociétés les plus riches et les plus avancées sur le plan social et économique sont celles où les jeunes sont les mieux instruits.

C'étaient les bases de notre système de prêts et bourses au Canada. Les gouvernements provinciaux et fédéral se sont impliqués dans un système de prêts et bourses en se fondant sur ces principes: que chaque jeune a droit à l'éducation et que l'éducation qu'il reçoit est un investissement social. C'est d'ailleurs pour cela que, dans la société canadienne, on a veillé à maintenir des frais de scolarité plutôt faibles par rapport à d'autres pays. C'est un choix social. C'est un choix que nous avons fait comme société parce que nous croyons que nos jeunes ont à s'instruire pour leur bénéfice personnel et le bénéfice de la société.

Pour cela, je ne peux appuyer la motion qui est devant nous parce que j'y décèle l'intention cachée de faire payer ses études à l'étudiant. On le voit d'ailleurs dans la partie de la motion que mon collègue du Parti libéral veut retrancher où il est question de diminution de coût pour le contribuable et d'intérêt composé. En lisant la motion présentée par le député Calgary-Sud-Ouest, on voit le souci d'épargner de l'argent au contribuable et le souci de voir à ce que l'État se retire le plus possible du financement des études.

(1755)

Cette proposition est à mon sens un danger pour les étudiants. Le danger, c'est l'endettement et l'endettement à long terme. Qu'on pense à un étudiant qui s'est endetté pour 15, 20, 25 000 $ pendant ses études. Si cet étudiant a le malheur d'avoir de la difficulté à trouver un emploi, si cet étudiant a le malheur d'être pauvre, il va être endetté longtemps. peut-être 10 ans, peut-être 15 ans, peut-être 20 ans. Il ne se sortira pas de cette dette, d'autant plus que notre honorable collègue du Parti réformiste propose qu'on applique sur sa dette un intérêt composé.

Pour nos jeunes, je pense que c'est le danger de l'endettement à long terme. C'est aussi une façon de nous forcer à accepter l'esprit qui présidait à la proposition de réforme du ministre Axworthy, c'est-à-dire de transférer le fardeau financier des études sur le dos des étudiants, en diminuant tout l'apport de l'État en bourses et en demandant aux étudiants de s'endetter pour leurs études.

Je pense qu'une proposition de ce genre peut avoir des effets dommageables sur la motivation de nos jeunes pour étudier. Mon expérience d'éducateur me dit qu'il est important que les jeunes soient soutenus dans leur désir de poursuivre leurs études et je pense que le fait d'instaurer un système de prêts et de bourses adéquat est important dans cette motivation. C'est pour cela que je suis contre la motion, parce qu'il s'agit, à mon sens, d'un endettement étalé, institutionnalisé pour nos jeunes, et que l'on ne tient pas compte dans cette motion de la nécessité de maintenir un système de bourses.

On ne tient pas compte non plus dans la motion, de la nécessité d'inciter, par des mesures intéressantes, nos jeunes à finir le plus rapidement possible leurs études, de façon à ce que les dépenses de l'État soient moindres. Il s'agit de finir les études sans les étirer. Des études qui prennent en trois ans, qu'on les finisse en trois ans et qu'on ne prenne pas quatre ans comme certains sont incités à le faire, parce qu'ils sont obligés de travailler pour payer leurs études.

Pour conclure, je pense que ce dont nos jeunes ont besoin à la sortie de l'école, c'est de trouver un emploi intéressant pour vivre et payer leurs dettes et non pas de se retrouver avec une dette étalée sur les 10 ou 15 années suivantes.

[Traduction]

M. McClelland: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je crois qu'il nous reste 10 minutes pour parler de la motion. Quarante minutes avaient été prévues.

Est-ce que je peux prendre la parole?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je dois maintenant m'occuper de l'amendement. La Chambre a entendu le libellé de l'amendement.

[Français]

M. Laurin: Madame la Présidente, est-ce qu'on pourrait connaître exactement ce qui se passe avec l'amendement à ce moment-ci? L'avez-vous mis aux voix?

La présidente suppléante (Mme Maheu): L'amendement que j'ai entre les mains est recevable. Je viens d'en faire la lecture et on l'ajoutera un peu plus tard.

M. Laurin: Est-ce que cet amendement est susceptible d'être mis aux voix?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Oui.

(1800)

[Traduction]

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, en tant que membre du gouvernement, je dois dire que la motion présentée par le chef du Parti réformiste me laisse perplexe.

Si l'on regarde les modifications que nous avons apportées à la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, on constate que nous avons prévu un système de remboursement des prêts fondé sur le revenu. Je souligne aux députés réformistes que l'alinéa 15o) de la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants prévoit le remboursement des prêts aux étudiants en fonction du revenu.


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Cela étant dit, le gouvernement profite de l'occasion pour rappeler à la Chambre que des milliers d'étudiants ont besoin d'aide financière tout de suite et qu'un certain nombre de mesures ont été prises en leur faveur.

Il convient de rappeler à la Chambre que le gouvernement, en adoptant la nouvelle Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, en juin dernier, a procédé à une réforme majeure du programme de prêts d'études. Nous voulons aider les jeunes à faire des études postsecondaires, tout en imposant un cadre financier responsable au programme de prêts. Certains éléments de la réforme entreront en vigueur au cours de l'année scolaire 1994-1995, et le reste, après la proclamation de la nouvelle loi.

Il convient de rappeler au chef du Parti réformiste et à tous les députés les mesures que le gouvernement a prises pour aider les étudiants à terminer leurs études afin qu'ils puissent apporter leur contribution à la société canadienne.

Le montant limite des prêts a été gelé pour une période de 10 ans, mais il a d'abord été augmenté. Le maximum hebdomadaire qui sera versé aux étudiants à temps plein est passé de 105 $ à 165 $, ce qui représente une augmentation d'environ 57 p. 100. Avec les majorations, les étudiants auront droit à un maximum de 5 610 $ par année scolaire plutôt qu'à 3 570 $. Nous avons aussi haussé le plafond des prêts aux étudiants à temps partiel en le faisant passer de 2 500 $ à 4 000 $. Ces étudiants n'auront plus à rembourser le capital sur leur prêt pendant qu'ils étudient. Les modifications donnent aux jeunes étudiants et aux étudiants adultes de meilleures chances de terminer leurs études.

Après consultation des provinces et des groupes d'étudiants, le gouvernement a décidé d'accorder des subventions spéciales aux étudiants handicapés. Il a réservé environ cinq millions de dollars pour ces subventions en 1994-1995. Elles seront aussi offertes l'an prochain.

Le gouvernement collabore également avec les provinces pour explorer des moyens pour que les étudiants qui doivent emprunter le plus ne soient pas écrasés sous le poids de dettes qu'ils ne peuvent rembourser. Ce faisant, le gouvernement souhaite fournir un encouragement au succès.

Les emprunteurs à faible revenu peuvent avoir droit à une exemption d'intérêts jusqu'à 18 mois après avoir terminé leurs études. Cela s'applique aux travailleurs dont le revenu est insuffisant pour leur permettre de faire leurs paiements mensuels de remboursement de prêts d'études. L'application de cette disposition est actuellement limitée aux emprunteurs qui sont en chômage ou qui souffrent d'une incapacité temporaire. Nous collaborons avec les provinces pour appliquer le Régime canadien de prêts aux étudiants avec plus d'uniformité et d'équité.

Les montants d'aide sont établis selon les besoins individuels des étudiants. Des changements visent à alléger le fardeau financier pour les familles à revenu faible et moyen dont les enfants méritent toutes les chances possibles de terminer leurs études. C'est ainsi qu'on a notamment révisé la table des contributions des parents afin d'alléger le fardeau financier des familles.

Au cours des cinq prochaines années, les étudiants bénéficieront de prêts et de bourses totalisant plus de six milliards de dollars. Il s'agit d'une augmentation de 2,5 milliards de dollars par rapport aux cinq dernières années. Cet investissement additionnel donnera à plus de 1,45 million d'étudiants l'accès à l'éducation postsecondaire au cours de cette même période, ce qui représente une augmentation d'environ 200 000 étudiants par rapport aux cinq dernières années.

(1805)

Ces nouvelles dispositions réduiront les cas de non-remboursement et donneront plus de flexibilité de remboursement aux étudiants en plus de réduire les coûts pour les contribuables canadiens. Les prêteurs auront maintenant plus d'incitations à fournir de meilleurs services et à offrir des conditions de remboursement établies en fonction du revenu.

Un régime plus équitable doit s'accompagner de mesures visant à réduire et à contrôler les cas de défaut de paiement. On révise à cette fin les critères d'admissibilité au programme afin de mettre l'accent sur les résultats. Bref, nous allons lier plus étroitement l'aide financière à la réussite scolaire des étudiants. Cela contribuera à faire en sorte que les étudiants qui ont besoin d'aide financière en reçoivent.

Par ailleurs, nous collaborons avec les provinces pour mettre au point des critères uniformes pour les établissements d'enseignement qui participent au Régime canadien de prêts aux étudiants. Cela contribuera également à faire en sorte que l'aide soit accordée à bon escient et que les coûts soient contrôlés.

Le gouvernement poursuit également des discussions avec les prêteurs à propos de nouveaux arrangements financiers. Il s'agit de fixer des conditions qui soient réalistes de sorte que les emprunteurs soient en mesure de rembourser leur prêt étudiant en fonction de leur revenu. Cela devrait contribuer à améliorer la situation touchant le non-remboursement des prêts, ce qui permettra de faire économiser aux contribuables canadiens l'argent qu'ils ont durement gagné.

Une des choses importantes que nous, les députés, devons faire, c'est d'établir un rapport entre les changements que nous apportons ici à la Chambre et la vie telle que vécue au niveau local et les véritables défis auxquels les Canadiens font face. Pour aider ceux qui suivent le débat à mieux comprendre les répercussions de cette mesure sur leur famille, leurs enfants et les étudiants, je voudrais donner quelques brèves illustrations du type de changement que nous avons proposé dans les mesures législatives déjà mentionnées.

Prenons l'exemple du cas de Danielle, inscrite à la Technical University of Nova Scotia, à Halifax. Elle vient d'une famille de quatre, dont le revenu annuel est de 44 000 $. Sa famille ne peut se permettre de contribuer à ses études supérieures, mais Danielle a pu travailler pendant l'été et elle a économisé environ 1 800 $.

On évalue à 7 400 $ les besoins de l'étudiante. Selon l'ancienne méthode d'évaluation, elle n'aurait eu droit qu'à une aide maximum de 2 600 $. Aux termes des nouvelles dispositions du Programme canadien de prêts aux étudiants, Danielle a maintenant droit à 60 p. 100 des besoins selon l'évaluation, soit 4 440 $. C'est là une augmentation de 1 840 $. Pour les 40 p. 100 qu'il

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lui reste à trouver, Danielle peut demander une aide supplémentaire à la province.

Prenons encore le cas de Greg, étudiant handicapé qui fréquente Guelph University. Greg vient de Vaughan, en Ontario, où sa famille a un revenu de 60 000 $. En travaillant l'été, Greg a pu amasser 2 700 $ pour ses études et ses parents peuvent lui donner 3 000 $. Il a donc des ressources financières de 5 700 $, et ses besoins sont évalués à 4 200 $.

Dans l'ancien régime, Greg n'aurait eu droit qu'à un montant bien maigre, 500 $, mais, dans le nouveau, lui donnant 60 p. 100 des besoins évalués, il aurait droit à un maximum de 2 520 $. De plus, comme Greg est handicapé, il a droit à une subvention spéciale d'un maximum de 3 000 $.

Ce sont là des changements constructifs qui, j'en suis sûr, amélioreront la qualité de vie de nombreux étudiants partout au Canada.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 18 h 10, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix la motion M-291 dont la Chambre est saisie.

M. McClelland: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. J'aimerais savoir si la Chambre donne son consentement unanime pour que je puisse parler de la motion quelques instants.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre a entendu la demande. Le député a-t-il son consentement unanime?

Des voix: D'accord.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député dispose de deux minutes.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Madame la Présidente et chers collègues, je vous remercie beaucoup. J'aimerais faire deux ou trois remarques que je considère très importantes au sujet de cette motion.

Je veux tout d'abord parler de l'amendement proposé à la motion. Puisqu'il semble très inoffensif et que presque tout le monde semble s'entendre sur cette question, nous trouvons pour le moins inopportun qu'il soit présenté aussi tard dans l'étude de cette motion. De toute façon, cette dernière ne lie absolument pas le gouvernement. Ce n'est qu'une motion.

Je veux aussi faire part de mes inquiétudes concernant le remboursement en fonction du revenu. Dans le Globe and Mail, on dit aujourd'hui que l'Alberta, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick ont décidé qu'elles ne pouvaient participer au projet de prêts à remboursement relatif au revenu dans sa forme actuelle. Par conséquent, même si le programme de prêts à remboursement variant selon le revenu est une excellente idée, il ne faut pas oublier de faire preuve de souplesse.

Comme mes collègues le savent, nous traversons une période très difficile financièrement. L'avenir de notre pays dépend de la capacité de nos jeunes de s'instruire et d'utiliser leur éducation comme tremplin dans l'avenir. Par conséquent, il est particulièrement important que nous nous montrions très souples et malléables dans l'examen du programme de remboursement des prêts variant selon le revenu s'il nous faut le modifier. Par exemple, on pourrait ne pas exiger d'intérêts; c'est une possibilité que nous devrions examiner.

J'invite mes collègues à prendre cela en considération.

La présidente suppléante (Mme Maheu): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le premier vote porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Maheu): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, le vote par appel nominal est reporté au mardi 21 mars 1995, à 17 h 30.

[Français]

SUSPENSION DE LA SÉANCE

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la séance est suspendue jusqu'à la convocation de la Présidence.

(La séance est suspendue à 18 h 15.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 21 h 14.

_____________________________________________

10644

LA SANCTION ROYALE

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): J'ai l'honneur d'informer la Chambre qu'une communication dont voici le texte a été reçue:

Résidence du Gouverneur général Ottawa

Le 16 mars 1995

Madame la Présidente,
J'ai l'honneur de vous aviser que l'honorable Beverley McLachlin, juge puîné de la Cour suprême du Canada, en sa qualité de Gouverneur général suppléant, se rendra à la Chambre du Sénat aujourd'hui, le 16 mars 1995, à 21 h 10, afin de donner la sanction royale à certains projets de loi.
Veuillez agréer, madame la Présidente, l'assurance de ma haute considération.
Le secrétaire du Gouverneur général,
Judith A. LaRocque

Le gentilhomme huissier de la verge noire apporte le message suivant:

10645

Madame la Présidente, c'est le désir de l'honorable suppléante de son Excellence le Gouverneur général que cette honorable Chambre se présente à elle immédiatement à la Chambre du Sénat.
En conséquence, la Présidente et les membres des Communes se rendent au Sénat.

(2125)

Et de retour:

La présidente suppléante (Mme Maheu): J'ai l'honneur d'informer la Chambre que lorsqu'elle s'est rendue au Sénat, il a plu au suppléant du Gouverneur général de donner, au nom de Sa Majesté, la sanction royale aux projets de loi suivants:

Projet de loi C-46, Loi constituant le ministère de l'Industrie et modifiant ou abrogeant certaines lois-Chapitre no 1.
Projet de loi C-74, Loi concernant la supervision du débardage et des opérations connexes dans les ports de la côte ouest-Chapitre no 2.
[Traduction]

Comme il est 21 h 30, en application de l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 21 h 30.)