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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 19 septembre 1995

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LES EXPLOSIFS

    Projet de loi C-71. Motion visant à la deuxième lecture 14571

LA LOI SUR LE VÉRIFICTEUR GÉNÉRAL

    Projet de loi C-83. Reprise de l'étude de la motion dedeuxième lecture 14582
    M. Chrétien (Frontenac) 14594
    Report du vote sur la motion 14598

LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

    Projet de loi C-94. Reprise de l'étude de la motionportant deuxième lecture 14598
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 14601
    M. Speaker (Lethbridge) 14602

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES ÉLECTIONS AU NOUVEAU-BRUNSWICK

    M. Scott (Fredericton-York-Sunbury) 14604

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

LA PEINE CAPITALE

    M. White (North Vancouver) 14604

LE PROGRAMME D'INDEMNISATION AU TITRE DUNID-DE-CORBEAU

LES CANADIAN COUNTRY MUSIC AWARDS

LE DÉCÈS DE M. WALTER ALBERT TOBIN

LES MINES TERRESTRES

    Mme Stewart (Brant) 14605

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

LE DÉPUTÉ DE BROME-MISSISQUOI

    M. Leroux (Richmond-Wolfe) 14606

LA CULTURE

JOHN ET JESSE DAVIDSON

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

    Mme Dalphond-Guiral 14607

LES COMITÉS PERMANENTS

LES ÉTUDES COMMANDÉES PAR LE GOUVERNEMENT DU QUÉBEC

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

QUESTIONS ORALES

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14608
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14608
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14608
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14609
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14609
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14609
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14610
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14610
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 14610
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 14610

L'ÉCONOMIE

    M. Harper (Calgary-Ouest) 14611
    M. Martin (LaSalle-Émard) 14611
    M. Harper (Calgary-Ouest) 14611
    M. Martin (LaSalle-Émard) 14611
    M. Martin (LaSalle-Émard) 14611
    M. Martin (LaSalle-Émard) 14612

LA SANTÉ

LES PROGRAMMES SOCIAUX

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 14612
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 14613

L'ÉTUDE COMMANDÉE À L'ÉCONOMISTE GEORGES MATHEWS

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 14614
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 14614

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 14614
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 14614
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 14614
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 14614

LA PROSTITUTION JUVÉNILE

LES SOINS DE SANTÉ

    M. Martin (LaSalle-Émard) 14615

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS ORALES

DEMANDE DE RETRAIT DE LA MOTION M-208

    Retrait de la motion 14616

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

    Projet de loi C-94. Reprise de l'étude de la motionde deuxième lecture 14616
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 14623

AFFAIRES COURANTES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion d'approbation du 85e rapport 14623
    Adoption de la motion 14623
    Adoption de la motion 14623

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

    Projet de loi C-94. Reprise de l'étude de la motionde deuxième lecture 14624
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 14624

LA LOI SUR LE VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

    Projet de loi C-83. Reprise de l'étude de la motionportant deuxième lecture 14634
    Adoption de la motion par 183 voix contre 48 14635
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projetde loi et renvoi à un comité 14635

14571


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 19 septembre 1995

La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 76 pétitions.

* * *

[Traduction]

PÉTITIONS

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Tom Wappel (Scarborough-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui plusieurs pétitions représentant plus de 2 500 signatures recueillies dans tout le Canada, mais principalement auprès de résidents de la province de l'Ontario.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne ou la Charte des droits et libertés d'une manière qui tendrait à laisser entendre que la société approuve les relations entre personnes de même sexe, ou l'homosexualité, et de ne pas modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne en y insérant l'expression non définie «orientation sexuelle» parmi les motifs de distinction illicite.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Français]

LOI SUR LES EXPLOSIFS

L'hon. Douglas Peters (au nom de la ministre des Ressources naturelles) propose que le projet de loi C-71, tendant à modifier la Loi sur les explosifs, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. George S. Rideout (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, je me présente aujourd'hui devant vous pour appuyer le projet de loi C-71, qui vient amender la Loi sur les explosifs.

[Traduction]

La Loi sur les explosifs, qui a pour but d'assurer la sécurité du public et des travailleurs, règle la composition, la qualité et la nature des explosifs de même que la fabrication, l'importation, la vente, l'achat, la possession et le stockage des explosifs.

[Français]

L'amendement à la Loi sur les explosifs est important pour un certain nombre d'excellentes raisons.

(1005)

[Traduction]

Premièrement, il n'existe, à l'heure actuelle, aucun moyen de détecter les explosifs plastiques dans les aéroports. Ce projet de loi propose le marquage des explosifs plastiques grâce à l'incorporation d'un additif chimique décelable au moyen des appareils de détection installés dans les aéroports internationaux au Canada afin de parer à la menace du terrorisme.

Deuxièmement, les modifications proposées permettront au Canada d'être l'une des premières nations à ratifier une convention internationale sur le marquage des explosifs plastiques, conclue à la demande des Nations Unies et coordonnée par l'Organisation de l'aviation civile internationale. Cette convention a été signée en mars 1991 par 40 pays. Quatorze pays l'ont déjà ratifiée. Cinq de ces pays, à savoir la Norvège, l'Espagne, la Suisse, la Slovaquie et la République tchèque, sont des États qui fabriquent des explosifs plastiques.

Troisièmement, étant donné que le Canada est un leader mondial dans le domaine de la technologie de la détection de vapeurs, les fabricants canadiens d'équipement pourront tirer parti, pour leurs


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produits, des débouchés qui s'offriront sur le marché international à mesure que de plus en plus de pays ratifieront la convention.

Quatrièmement, Ressources naturelles Canada, qui conserve le pouvoir d'inspecter et d'approuver la fabrication, la distribution et le stockage des explosifs au Canada, sera responsable de l'application des mesures de marquage des explosifs plastiques après la proclamation de cette modification à la loi.

Je voudrais vous expliquer les raisons de cette mesure un peu plus en détail. Les députés se souviennent certainement des événements tragiques entourant l'écrasement de deux avions commerciaux à cause de l'explosion à leur bord de bombes fabriquées avec des explosifs plastiques. Le premier cas est celui du vol 103 de la Pan-Am, en provenance de Londres, qui a explosé au-dessus de la petite ville de Lockerbie, en Écosse. Le deuxième, c'est le vol 772 de l'UTA qui s'est écrasé au Niger, en Afrique. Au total, 442 personnes ont péri dans ces deux attentats.

Ensuite, il y a eu, on s'en souvient, les tragédies d'Air India qui ont frappé deux avions 747 ayant commencé leur voyage au Canada. L'un s'est écrasé dans l'océan Atlantique au sud de la République d'Irlande, alors que l'autre a pu, par miracle, se poser à l'aéroport international Narita de Tokyo, au Japon, avant qu'une bombe fabriquée avec des explosifs plastiques n'explose dans la zone de manutention des bagages de l'aéroport. Cette bombe a tué au moins deux bagagistes innocents.

Bien que la cause du premier accident d'Air India n'ait jamais pu être établie avec certitude, on soupçonne fortement qu'elle est le résultat de l'explosion d'un dispositif fabriqué avec des plastiques. De toute façon, les explosifs plastiques sont l'arme de choix des terroristes, tant pour faire exploser des avions que pour s'attaquer à d'autres cibles, comme des édifices publics, étant donné que ce type d'explosif est peu encombrant, puissant, stable, malléable et, surtout, difficile à détecter.

Il est fort probable que si les explosifs plastiques avaient été marqués avec une substance décelable dans les aéroports, on aurait pu éviter les deux tragédies d'Air India. Une fois les plastiques marqués, les terroristes ne pourront plus procéder à des attaques au Canada en utilisant des explosifs plastiques.

C'est pour cette raison qu'un effort international en vue de marquer les explosifs plastiques pour pouvoir les détecter a été lancé par l'Organisation des Nations Unies et coordonné par l'Organisation de l'aviation civile internationale. La convention internationale qui en est résultée exige le marquage des explosifs plastiques pour améliorer leur détectabilité. En même temps, la convention exige le contrôle de l'importation, de l'exportation, de la possession et du transfert des explosifs plastiques marqués et la destruction de la plupart des explosifs plastiques non marqués.

En mars 1991, plus de 70 États et six organisations ont participé à une conférence diplomatique qui a abouti à l'adoption par consensus de la Convention sur le marquage des explosifs plastiques pour des raisons de détection. Le Canada est cosignataire de cette convention, avec 40 autres États.

Les principaux éléments établis dans cette convention prévoient ceci: seuls les explosifs plastiques, tels que définis dans la convention, doivent être marqués; les stocks d'explosifs plastiques non marqués, d'usage commercial, doivent être détruits dans un délai de trois ans; une commission technique internationale doit être mise sur pied et chargée d'évaluer les progrès technologiques dans le domaine des explosifs; la participation canadienne à une telle commission n'engendrera pas de dépenses importantes; la convention entrera en vigueur lorsque 35 États, dont cinq États producteurs, l'auront ratifiée. Le Canada est l'un des États producteurs et, comme je le disais, nous serons parmi les premiers du monde à ratifier cette importante convention.

C'est évident que le projet de loi proposé respecte les dispositions de la convention. L'adoption de cette modification de la Loi sur les explosifs assure la ratification officielle, par le Canada, de cet accord international d'importance.

(1010)

Le projet de loi C-71 précise que la Direction des explosifs, de Ressources naturelles Canada, s'occupera de la mise en oeuvre des dispositions de la convention. Au Canada, les explosifs plastiques sont fabriqués par l'entreprise privée.

À la suite de l'adoption du projet de loi C-71, les inspecteurs en explosifs de Ressources naturelles Canada, qui, au nom de la ministre, délivrent les permis aux entreprises privées de fabrication d'explosifs, n'autoriseront plus la fabrication d'explosifs plastiques non marqués.

Toujours au nom de la ministre, les inspecteurs refuseront également de délivrer des permis d'importation ou d'exportation concernant des explosifs plastiques non marqués. Les inspecteurs pourront prélever des échantillons d'explosifs pour vérifier s'ils sont marqués et pourront saisir et détruire les chargements et les stocks qui n'auront pas été marqués, ou toutes quantités d'explosifs abandonnés et non marqués.

La Direction des explosifs est la mieux placée pour déterminer l'emplacement d'explosifs plastiques non marqués et pour en assurer le contrôle grâce à un système rigoureux d'émission de permis qui sera renforcé par des inspections régulières de conformité. Le règlement exigera que tout changement de propriétaire soit signalé à l'avance et que cette notification soit accompagnée d'une description détaillée du transfert physique.

Les forces armées ont convenu qu'elles pouvaient, sauf en cas d'urgence, respecter tous les termes de la convention. Les stocks d'explosifs plastiques non marqués seront incorporés aux munitions ou utilisés en priorité à l'occasion de manoeuvres.

Selon Transports Canada, qui est responsable du fonctionnement du matériel de détection dans les aéroports canadiens, la technologie actuelle permet de détecter les explosifs plastiques marqués.

En outre, on prévoit que l'augmentation des coûts de production qu'occasionnera la décision de marquer les explosifs plastiques sera négligeable. D'ailleurs, l'industrie a participé à la mise au point de substances pour marquer les explosifs en vue de leur détection. Par conséquent, l'industrie admet que l'augmentation des coûts de production n'aura guère de conséquences. J'ajouterais que l'indus-


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trie, les services de police canadiens et les forces armées ont été consultés tout au long de l'élaboration de ce projet de loi modificatif.

Les Forces canadiennes sont le plus gros consommateur d'explosifs plastiques dans notre pays. L'industrie de la construction utilise relativement peu d'explosifs plastiques dans la démolition de gros édifices. Étant donné le nombre relativement peu élevé de consommateurs, il sera facile de contrôler l'application de la loi modifiée, une fois celle-ci promulguée.

Bien que nos forces armées aient un approvisionnement de dix ans en explosifs plastiques non marqués, la Convention sur le marquage des explosifs plastiques prévoit une période de grâce de 15 ans durant laquelle les nations ratifiant cette convention pourront utiliser ou détruire leurs explosifs plastiques non marqués.

En outre, étant donné le faible volume d'explosifs plastiques, comparativement au volume d'explosifs industriels ordinaires, l'application des dispositions modifiées proposées et le prolongement de la convention internationale ne seront pas vraiment problématiques et n'entraîneront pas de coûts importants pour les organismes de réglementation.

Enfin, je désire souligner que la position du Canada, à titre de chef de file dans la mise au point de technologies de détection des vapeurs, sera renforcée par la ratification de cette convention internationale.

Pour tout dire, il est presque certain que les fabricants canadiens de matériel réussiront à pénétrer davantage les marchés étrangers. Par conséquent, l'adoption des modifications proposées pourrait stimuler la création d'emplois et contribuer à la croissance économique du Canada.

[Français]

En conclusion, cet amendement à la Loi sur les explosifs démontre clairement la volonté du gouvernement du Canada de bien gouverner. Nous sommes déterminés à faire notre part pour la santé et la sécurité des passagers sur les avions qui volent dans ce pays et à collaborer avec nos partenaires du monde entier pour faire tout en notre pouvoir pour contrer la menace terroriste dans nos cieux et dans ceux des autres pays.

[Traduction]

L'adoption de cette modification permettra au Canada de ratifier une convention internationale importante, qui transmet un message clair aux groupes terroristes en leur signalant que les explosifs plastiques seront dorénavant détectés par des appareils installés dans les aéroports.

En outre, en ratifiant la convention, le Canada témoignera de son leadership au sein des nations signataires et encouragera les autres à suivre son exemple. Le Canada contribuera aussi à la mise au point de substances destinées au marquage des explosifs plastiques à des fins de détection.

À mesure que d'autres pays ratifieront la convention, les fabricants canadiens de matériel de détection des vapeurs pourront profiter de possibilités extrêmement intéressantes pour faire des affaires.

(1015)

Par conséquent, la modification qu'il est proposé d'apporter à la Loi sur les explosifs contribuera à la réalisation de deux objectifs principaux du gouvernement fédéral, soit la création d'emplois et la croissance économique du Canada. En l'adoptant, nous protégerons également la santé et la sécurité de tous les Canadiens.

Je prie donc la Chambre d'adopter ce projet de loi avec célérité.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les propos tenus par le secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles. Il est bien sûr que le Bloc québécois est d'accord avec le projet de loi C-71, Loi modifiant la Loi sur les explosifs, sauf que j'ai quand même beaucoup de questions à lui poser.

Je dois avouer que j'ai été surpris lorsque j'ai vu apparaître à l'ordre du jour des travaux de la Chambre le projet de loi C-71, Loi modifiant la Loi sur les explosifs. J'ai été également surpris, non pas par le projet de loi lui-même, quoique l'on puisse aisément se poser des questions à ce sujet, mais par le retard, par le temps qu'a mis le gouvernement à réagir. Il faut se rappeler que ce projet de loi donne suite à la Convention de Montréal, signée en 1991. La Convention de Montréal a été produite le 1er mars 1991, lors de la rencontre de l'Organisation de l'aviation civile internationale.

Il a donc fallu cinq ans, à un mois près, puisque ce projet de loi a été déposé en première lecture le 24 février dernier. Il a donc fallu, dis-je, cinq ans au gouvernement pour produire un projet de loi de quelques pages seulement, deux pages et demie. Ce qu'il nous laisse comme impression, c'est que ce gouvernement est un fort mauvais élève. Il a attendu, comme certains élèves, quelques-uns seulement, il a attendu la dernière minute, la dernière seconde même, pour faire ses devoirs. Et là, pour se donner une bonne image sur le plan international, il a décidé après cinq ans de rendre la Loi canadienne sur les explosifs conforme aux dispositions de la Convention de Montréal.

Ce que cela laisse comme impression, c'est que ce gouvernement ne fait pas preuve d'efficacité. Ce que cela laisse comme impression, c'est que ce gouvernement n'est pas efficace, pas plus que celui qui l'a précédé d'ailleurs et qu'on a mis joyeusement à la porte.

On le constate, ce gouvernement n'est pas efficace. Malheureusement, les suites à donner à la Convention de Montréal n'est pas le seul domaine où le gouvernement fait preuve de très peu d'efficacité.

Le taux de chômage au pays est toujours très élevé malgré les promesses et engagements faits en campagne électorale. Les régions du Québec et du Canada sont toujours en grande difficulté malgré les promesses répétées. Ce gouvernement nous affirme tous les jours qu'il se préoccupe d'économie et le pays va de mal en pis.


14574

Par la présentation du projet de loi C-71, le gouvernement souhaite faire croire aux citoyens et citoyennes qu'il porte beaucoup d'attention aux problèmes de l'utilisation des explosifs à des fins criminelles. Si c'était cela, ce serait merveilleux.

Cela nous amène cependant à nous demander quels sont les objectifs de ce projet de loi. Je dis bien les objectifs de ce projet de loi et non ceux du gouvernement, parce qu'à mon avis, il faut faire une distinction entre les objectifs du projet de loi et ceux du gouvernement.

Officiellement, la Loi sur les explosifs vise à assurer la sécurité du public et des travailleurs, et cela est très bien. Elle régit également la composition, la qualité et les caractéristiques des explosifs, de même que leur fabrication, leur importation, leur vente, leur achat, leur détention et leur entreposage.

(1020)

Sa portée s'étend même aux pièces pyrotechniques, communément appelées feux d'artifice. La loi impose le marquage de la plupart des explosifs plastiques, afin de les détecter. Elle interdit la fabrication, l'entreposage, la détention, le transport, l'importation, l'exportation des explosifs plastiques non marqués.

Cette loi vise également à contrôler la prolifération des explosifs plastiques utilisés dans des attentats terroristes. Cette loi prévoit des exceptions entre autres pour fins de recherche et d'utilisation policière et militaire. Ce sont là les objectifs officiels. Toutefois, en tout premier lieu, nous pouvons aisément nous questionner sur l'efficacité d'un tel projet de loi.

Il faut d'abord se rappeler que la Convention de Montréal n'a même pas pu entrer en vigueur parce qu'il n'y avait pas assez de signataires. Alors, à quoi servira de marquer nos explosifs si nous sommes pratiquement les seuls à le faire? Bien sûr, on peut toujours dire qu'il faut donner l'exemple. Le Canada a toujours été bien bon pour donner l'exemple mais, lorsqu'il est confronté à la réalité, c'est tout une autre affaire.

Le Canada est un pays pacifique, mais il est aussi un grand producteur d'équipement militaire et d'explosifs. Je voudrais bien croire que, grâce à ce projet de loi, nous pourrons régler le problème du terrorisme international et que des attentats comme ceux d'Air India ou comme ceux que vit la France ne se reproduiront plus jamais. Mais je ne puis en être convaincu, parce que ce ne sont pas tous les pays du monde qui sont membres de l'Organisation de l'aviation civile internationale.

Ce sont encore moins les pays fournisseurs d'armes et d'explosifs aux terroristes qui signeront une telle convention. Ils n'adopteront certainement pas de projets de loi semblables. S'ils le font, ils continueront d'agir de façon hypocrite. Ils continueront de fabriquer des explosifs non marqués, ils continueront de vendre armes et munitions sur le marché international.

Le véritable objectif du gouvernement est donc de sauver les apparences, de faire croire aux citoyennes, aux citoyens québécois et canadiens qu'elles et qu'ils seront mieux protégés. En somme, on tente, en adoptant ce projet de loi, de nous montrer meilleurs que les autres alors que, en réalité, entre la théorie et la pratique, il y a une très grande marge. Le véritable objectif du gouvernement est de se donner l'impression qu'il fait son travail au pays et sur le plan international. Il pourra ainsi se péter les bretelles publiquement, tout en sachant très bien que le problème ne sera en aucune façon réglé et qu'en aucun temps la sécurité des citoyens et des citoyennes ne sera augmentée.

Nous avons d'ailleurs en face de nous un gouvernement qui crée depuis toujours des illusions: illusion de sécurité; illusion d'une meilleure performance de l'économie; illusion de s'attaquer à la dette; illusion d'une plus grande justice sociale, etc. Nous allons donc marquer nos explosifs. Nous ne pouvons être contre la vertu. Et à partir de ce moment où des explosifs seront marqués au Canada et qu'ils pourraient être détectés, les terroristes auront une peur bleue de les acheter ici, sûrement. Ils n'oseront plus commettre d'attentats au Canada. Les terroristes n'oseront plus emprunter nos avions et nos aéroports. C'est du moins ce que voudrait nous faire croire le gouvernement.

Soyons honnêtes avec les citoyens et les citoyennes du Québec et du Canada. Disons-leur que c'est en réalité pour se donner bonne conscience que nous adoptons ce projet de loi. Que feront les terroristes lorsque nos explosifs seront marqués? Vous le savez très bien, ils iront en acheter ailleurs où ils ne seront pas marqués.

(1025)

Une question qui nous vient immédiatement à l'esprit est: Qui vend les explosifs aux terroristes? À ce sujet, le gouvernement fédéral ne peut nous donner aucune réponse. Par contre, ce que nous savons, c'est que le Canada est une porte d'entrée facile empruntée par bien des organisations criminelles qui souhaitent s'établir en Amérique du Nord. C'est le cas des organisations reliées à la drogue, entre autres. Ce fait est reconnu dans le monde entier. Le Canada a les plus grandes difficultés du monde à juguler le trafic de la drogue sur son propre territoire.

Le Canada a eu et a toujours beaucoup de difficulté à contrôler le trafic d'alcool, de tabac, de cigarettes de contrebande. On tente maintenant de nous faire croire que l'on réussira, grâce à ce projet de loi, à contrôler le trafic des explosifs.

Remarquez que je le souhaite, et je serais l'homme le plus heureux au monde si cela pouvait arriver. Mais je ne suis pas naïf au point de penser que tout à coup, grâce à ce projet de loi, j'aurai en face de moi un gouvernement efficace comme jamais. Parce qu'une fois ce projet de loi adopté, sa mise en pratique pose de sérieux problèmes. Ce n'est pas très compliqué de marquer des explosifs. Nous avons évidemment la technologie, mais avons-nous partout sur le territoire des installations nous permettant de détecter des explosifs marqués? Qu'est-ce que cela va donner de marquer des explosifs si on ne les contrôle pas?

Nos frontières sont-elles assez étanches pour empêcher le trafic des explosifs? Ce gouvernement va-t-il investir assez pour s'assurer que cette loi sera réellement mise en pratique? J'en doute.

Il est bien beau d'avoir de bonnes intentions, mais encore faut-il les mettre en pratique. Le gouvernement devra répondre à toutes ces questions s'il veut que nous le prenions au sérieux.

Nous sommes favorables au marquage des explosifs si cela peut vraiment changer quelque chose. J'attends encore toutefois la preuve que le marquage aura un effet quelconque sur le terrorisme international.


14575

Ce projet de loi prévoit des exceptions dont je n'ai pas encore parlé. Ces exceptions sont de taille et ont pour effet de miner de façon importante toute la crédibilité de ce projet de loi. Tout le monde sait que le Canada est un pays producteur d'armes et d'explosifs. Le projet de loi prévoit que les explosifs destinés à des fins de recherche policière ou militaire ne seront pas marqués.

On comprend facilement pourquoi. Il est clair que si vous partez en guerre et que l'ennemi peut détecter vos explosifs, vous perdez énormément de votre efficacité. Je comprends cela. Mais ces exceptions, disons nécessaires, rendent cette loi pratiquement caduque.

Elles ont pour effet d'indiquer aux terroristes internationaux des endroits où ils pourront acheter des explosifs non marqués et comme nous ne marquerons pas les explosifs destinés à la recherche, à des fins policières ou militaires, on peut affirmer que ce projet de loi ne touchera qu'une faible partie des explosifs utilisés au pays.

On aura beau affirmer que nous pratiquerons un contrôle sévère sur les explosifs non marqués destinés aux chercheurs, aux policiers et aux militaires, encore là, il ne faut pas se faire d'illusions. Tout le monde sait que même dans les endroits réputés les plus sécuritaires, il y a toujours une fuite quelque part. Il faut aussi ajouter que la frontière canadienne est à beaucoup de points de vue une passoire véritable. Comme dans d'autres domaines, ce gouvernement coupe dans les contrôles frontaliers et les contrôles aéroportuaires.

(1030)

Alors même si on marque des explosifs, si on coupe encore dans les services, cela n'aura pas servi à beaucoup de choses. Nous avons eu et nous avons presque quotidiennement de bons exemples de la perméabilité de la frontière canadienne, et cela, dû à l'incurie de ce gouvernement.

Le Canada vit actuellement des problèmes sérieux avec quelques communautés amérindiennes fort bien armées. Quelques individus parmi ces communautés sont presque aussi bien armés que l'armée canadienne elle-même, certainement mieux que la police. Nous avons vécu ce genre de problème au Québec, malheureusement. On peut se poser la question: Où ces individus se sont-ils procuré des armes, munitions et explosifs? Ces armes, munitions et explosifs viennent-ils de chez nous où ont-ils été importés?

Par ailleurs, la région de Montréal vit actuellement une véritable guerre entre les gangs organisés de motards. Eux aussi sont bien armés, vous le savez. Où ces motards se sont-ils procuré armes, munitions et explosifs? Ce gouvernement peut-il répondre à cette question?

Ils ont ainsi fait la démonstration que les contrôles canadiens ne sont pas très efficaces, vous le remarquerez. Ils ont fait la démonstration que ce supposé grand pays, où les citoyens et citoyennes auraient, semble-t-il, une qualité de vie remarquable, se nourrit de beaucoup d'illusions.

Il est faux de prétendre que ce projet de loi augmentera la sécurité des citoyens et des citoyennes. C'est vrai que le gouvernement doit légiférer. Il a été constitué aux fins de régir la vie de notre société. Mais encore faut-il qu'il se donne les moyens de mettre en pratique les lois qu'il adopte. À quoi sert d'adopter des lois si nous sommes incapables de les appliquer.

Au lieu de tenter de se donner bonne conscience, comme le fait ce gouvernement, et bonne apparence sur le plan international et de répéter sans cesse que le Canada est l'un des pays les mieux cotés au monde, ce gouvernement devrait véritablement travailler sur le plan national afin de tenter de corriger certaines injustices.

En dehors des groupes criminels organisés, l'utilisation d'explosifs, au Québec comme au Canada, à des fins autres que ce pourquoi ils sont destinés n'est pas forcément évidente, et ce n'est pas forcément fréquent non plus.

En plus de voter une loi sur le marquage des explosifs, ne serait-il pas souhaitable que ce gouvernement prenne les moyens de combattre les gangs organisés, qu'il se donne les moyens de contrôler le plus possible la circulation de terroristes sur son territoire et qu'il renforce les contrôles aux frontières, aussi bien que dans les ports et les aéroports, une surveillance plus efficace?

Un grand nombre de citoyens et de citoyennes réclament maintenant une loi antigang. On le sait, ce sont eux qui utilisent des explosifs à des fins criminelles. Ce serait cent fois plus efficace d'avoir une telle loi que de marquer nos explosifs.

Le Canada a peut-être déjà eu une certaine crédibilité sur le plan international. L'adoption du projet de loi C-71 par le gouvernement tente de rehausser cette crédibilité qui, par les temps qui courent, est fortement à la baisse.

Le problème amérindien enlève beaucoup de crédibilité à ce Canada.

Les déclarations du premier ministre qui laisse sous-entendre qu'il ne respectera pas le choix des 7 millions de Québécois et de Québécoises lors du prochain référendum laissent croire que ce gouvernement n'a pas beaucoup de respect pour la démocratie. En réalité, ce gouvernement adopte un projet de loi sur le marquage des explosifs uniquement pour se donner l'illusion qu'il respecte ses engagements. Il le propose, cinq ans après la Convention de Montréal, alors qu'il aurait pu le faire bien avant.

On peut mettre en doute l'efficacité d'une telle loi. Croit-on vraiment que les Québécoises et les Québécois, que les Canadiens et les Canadiennes seront dupes? Sur le plan international, le concert des nations sera-t-il dupe? Le terrorisme international sera-t-il effrayé par cette nouvelle mesure? Permettez-moi d'en douter.

(1035)

Je serais particulièrement content si ce gouvernement respectait réellement la démocratie et s'engageait à reconnaître les résultats du prochain référendum québécois. Je serais particulièrement heureux si ce gouvernement respectait un autre de ses engagements et créait réellement de l'emploi. Je serais tout à fait satisfait si ce gouvernement me prouvait qu'il réussira à combattre la dette de tous en respectant les plus démunis de ce pays.


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Je serais satisfait si le Canada retrouvait une certaine crédibilité sur le plan international autrement qu'en posant des gestes de dernière minute pour se donner bonne conscience, comme le gouvernement actuel le fait en proposant ce projet de loi. Car, contrairement à ce que pensent certains députés de ce gouvernement et certains extrémistes canadiens, nous du Bloc québécois ne souhaitons pas de mal aux Canadiens, nous souhaitons simplement nous donner un pays qui respectera son pays voisin.

L'attitude du gouvernement actuel à l'égard du trafic des explosifs au Canada et à l'égard des engagements pris lors de la rencontre de l'Organisation de l'aviation civile internationale à Montréal démontre à la face de tous que nous n'avons, en face de nous, qu'une image et que la réalité est toute autre lorsqu'il est question de gérer un pays.

Pour le citoyen ou pour la citoyenne ordinaire vivant dans les petites villes ou dans les paroisses de mon comté, de ma région, l'adoption d'un tel projet de loi, qui ne sert pratiquement qu'à sauver la face du gouvernement sur le plan international, est quand même un peu ridicule. Ces citoyens et ces citoyennes ont vraiment l'impression que le gouvernement perd son temps, qu'il ferait mieux de s'attaquer aux problèmes majeurs auxquels ils et elles doivent faire face tous les jours: le problème de gagner honorablement leur vie; celui de mettre du pain et du beurre sur la table, ce que répète tous les jours M. le premier ministre; celui de faire fonctionner leur petite ou moyenne entreprise; celui de vivre en sécurité chez eux et de vivre en paix.

Marquez les explosifs que vous fabriquez tant que vous voudrez, diront ces citoyens et citoyennes, mais si vous ne corrigez pas les injustices sociales, si vous ne prenez pas les véritables moyens pour combattre la violence, les gangs organisés et le terrorisme, vous donnez des coups d'épée dans l'eau. Je suis convaincu que c'est ce que je vais entendre à mon retour dans mon comté et je ne pourrai qu'être d'accord avec ces citoyens et citoyennes de mon comté.

Je souhaite ardemment que ce gouvernement fasse preuve d'un peu plus de sérieux et qu'il agisse non pas uniquement pour se donner bonne conscience parce que, jusqu'à maintenant, même si nous sommes d'accord avec ce projet de loi, nous nous posons de nombreuses questions à son sujet. Est-il là simplement pour que le gouvernement puisse se péter les bretelles sur le plan international et sur le plan national ou si c'est véritablement un projet de loi qui aura des suites parce qu'on s'en donnera les moyens?

[Traduction]

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis particulière heureux de prendre la parole à ce sujet, car il s'agit du premier projet de loi sur lequel j'ai le plaisir de me prononcer en ma nouvelle qualité de porte-parole en matière de ressources naturelles. Avant d'invoquer les raisons qui nous amènent à souscrire à cette mesure législative, j'aimerais faire quelques observations d'ordre général concernant le ministère.

Je tiens tout d'abord à faire savoir à la ministre des Ressources naturelles qu'au cours des déplacements que j'ai effectués un peu partout au pays cet été, en quête de renseignements sur le bilan du ministère, combien l'industrie et les milieux provinciaux qui s'intéressent aux ressources naturelles accueillent favorablement son programme et qu'à bien des égards elle semble aller dans la bonne direction. Elle a travaillé d'arrache-pied. Je pense qu'elle veut vraiment réduire la taille de son ministère et se retirer des secteurs qui traditionnellement et de par la Constitution sont considérés comme étant de compétence provinciale. Tant et aussi longtemps qu'elle continuera sur sa lancée, elle bénéficiera à coup sûr de mon appui dans son effort pour mettre fin à l'intervention du gouvernement fédéral dans ces secteurs, permettant ainsi aux gouvernements provinciaux de remplir leur mandat en la matière.

L'industrie des ressources naturelles est extrêmement importante au Canada. Les secteurs de l'énergie, des mines et des forêts représentent environ 13 p. 100 de notre PIB et 39 p. 100 de nos exportations. La ministre doit donc s'occuper d'une importante ressource. Les secteurs des mines, des forêts, du pétrole et du gaz naturel emploient à eux seuls près de deux millions de personnes au Canada, ce qui fait encore ressortir l'importance du ministère.

(1040)

Il convient de noter que selon le nouveau système dont nous avons entendu parler l'autre jour, soit le nouveau système de classement des pays à l'échelle mondiale, le Canada occupe le deuxième rang pour ce qui est de ses richesses, lesquelles reposent en grande partie sur ses ressources naturelles. Or, il est évidemment très important que nous soyons de bons intendants de nos richesses, que nous fassions en sorte que nos ressources naturelles soient bien gérées et que nous veillions à ce que ces richesses profitent durablement aux Canadiens.

C'est donc un privilège d'assumer les fonctions de porte-parole dans un secteur aussi crucial. Je rappelle à la ministre que je l'appuierai tant et aussi longtemps qu'elle continuera sur sa lancée.

Il convient de noter également que les mesures que le gouvernement a prises en matière de ressources naturelles correspondent presque exactement à ce que nous proposions lors de la dernière campagne électorale. Ainsi, nous avons dit que faute d'être prudents, nous pourrions avoir une taxe sur les hydrocarbures au Canada. On n'a pas prévu une taxe de ce genre dans le dernier budget, et j'ignore au juste pourquoi. C'était une bonne chose pour l'industrie.

La ministre a également pris des mesures pour vendre les actions du gouvernement dans Petro-Canada, chose que nous réclamons depuis des années. C'est certes une chose qui se fait attendre depuis longtemps. J'ai fait part de mes réserves au sujet du processus de sélection des maisons de courtage, mais à part cela, nous nous réjouissons de la privatisation de Petro-Canada. Il est regrettable que le coût pour le contribuable canadien soit probablement de l'ordre de 20 milliards de dollars. Par conséquent, les 2 milliards de dollars que rapportera cette vente constitueront une mince consolation pour les contribuables qui devront sortir de leur poche environ 1 480 $ chacun. Quoi qu'il en soit, c'était certes une mesure constructive.

Autre signe encourageant, la ministre a garanti que le gouvernement allait se retirer des mégaprojets. Là encore, le Parti réformiste prône cela depuis des années. Nous ne participerons plus au projet Hibernia après cette année, ce qui est une autre excellente chose. Il est intéressant de constater que toutes les choses pour lesquelles je voudrais féliciter la ministre sont certes toutes des mesures que nous avons proposées avant et durant la dernière campagne électorale.


14577

Je suis ici ce matin pour parler du projet de loi C-71, Loi modifiant la Loi sur les explosifs, qui donnera au Canada la possibilité d'adhérer officiellement à la convention internationale sur le marquage des explosifs plastiques et en feuilles aux fins de détection.

Cette convention a pour but de s'assurer que les autorités policières peuvent détecter le plus d'explosifs plastiques possible, surtout aux aéroports, dans le but de contrer le terrorisme. C'est vraiment un projet de loi antiterroriste et mes collègues et moi-même sommes d'accord avec son objet.

Après la tragédie d'Air India et l'attentat à la bombe contre un avion de Pam Am au-dessus de Lockerbie, en Écosse, en 1989, les Nations Unies ont adopté deux résolutions distinctes. L'une venait du Conseil de sécurité et l'autre de l'Assemblée générale. Ces résolutions exhortaient l'Organisation de l'aviation civile internationale, qui est un autre organisme des Nations Unies, à intensifier ses travaux sur l'établissement d'un régime international pour le marquage des explosifs plastiques aux fins de détection. La convention que j'ai mentionnée découle de ces résolutions. Elle a été présentée à Montréal en 1991 et 100 pays l'ont signée. Même si le Canada l'a signée à l'époque, il n'avait pas la compétence légale de la ratifier. Le projet de loi dont nous parlons aujourd'hui donnera au Canada la compétence et le pouvoir de la ratifier officiellement.

Depuis quatre ans, on consulte l'industrie et on cherche à mettre au point un marqueur chimique approprié, chose qui a maintenant été faite par des laboratoires au New Jersey. Le temps est venu de ratifier cette convention.

Malheureusement, la convention n'entrera en vigueur que lorsque 35 pays l'auront ratifié. Au moins cinq d'entre eux doivent être des pays producteurs d'explosifs plastiques. Je crois savoir que cinq pays producteurs l'ont déjà ratifiée, dont la Slovaquie, la Suisse, la Norvège, la République tchèque et l'Espagne. Le Canada sera le sixième pays producteur à la ratifier. Cela signifie toujours que seulement 13 pays, y compris le Canada, auront légalement ratifié la convention, ce qui est loin des 35 pays qu'il faut pour la mettre en oeuvre.

(1045)

L'efficacité de la convention, une fois qu'elle sera enfin mise en oeuvre, suscite des doutes. Je crains qu'elle ne contribue simplement qu'à l'expansion du marché noir des explosifs plastiques non marqués qui seront encore en circulation. Elle risque également de renforcer le réseau de groupes terroristes qui continueront de communiquer entre eux et ce, peut-être de façon plus régulière, pour s'approvisionner en explosifs plastiques non identifiables.

Cependant, je conviens que le terroriste ordinaire, si je peux qualifier un tel individu d'ordinaire, qui n'a pas de contacts internationaux, aura plus de mal à obtenir du matériel qui échappera aux dispositifs de détection. Par conséquent, la convention est une bonne chose. Je recommande à mes collègues de voter en sa faveur.

Curieusement, bien que les États-Unis aient signé la convention, ils n'ont pas encore présenté une mesure législative pour la ratifier. Nous nous sommes entretenus, à Washington, avec l'organisme de l'industrie des explosifs appelé l'Institut des fabricants d'explosifs. Ses représentants disent qu'ils appuient la convention et que l'Administration fédérale de l'aviation, un organisme en vue en Amérique, déposera peut-être sous peu une mesure législative pour la ratifier. Cependant, rien ne s'est passé jusqu'ici pour que cela se réalise.

Nous n'avons pas été témoins depuis longtemps d'un cas comme l'incident de Lockerbie ou l'explosion d'Air India. Par conséquent, l'urgence s'est un peu estompée et la question est probablement devenue une priorité politique moins importante, du moins aux États-Unis. J'espère qu'il ne faudra pas une autre tragédie pour ramener cette question sur la scène mondiale.

Cependant, la convention n'est pas en vigueur actuellement et, par conséquent, elle manque vraiment de pertinence. Tant que les États-Unis ne l'auront pas reconnue, les autres principaux participants ne feront rien pour la ratifier.

La modification proposée à notre propre loi, que nous débattons ce matin, manquera de pertinence tant que nous ne prendrons aucune mesure politique pour inviter la participation des États-Unis. D'ici là, rien ne se fera et, partout dans le monde, les voyageurs aériens seront privés des avantages que devrait produire le marquage des explosifs plastiques.

J'invite aujourd'hui la ministre des Ressources naturelles à aborder cette question au niveau politique et à communiquer avec son homologue américain pour qu'il accélère les travaux à cet égard et presse les États-Unis de prendre des mesures pour ratifier officiellement la convention afin que nous puissions étouffer le terrorisme comme nous devrions le faire.

La ministre a fait preuve de leadership. J'ai mentionné certaines des mesures positives qu'elle a prises au sein de son ministère. Je lui demande de traduire ses paroles en action sur l'échiquier politique international et de montrer la voie à nos amis américains en les invitant à ratifier la convention dans les plus brefs délais.

J'aurais quelques observations pertinentes à faire concernant d'autres questions liées à la Loi sur les explosifs. Permettez-moi d'abord de donner à ceux qui nous écoutent quelques détails sur les explosifs au Canada, avant de traiter du projet de loi même.

Voyons un peu quelle est la situation concernant les explosifs au Canada. Il y a une centaine de fabricants d'explosifs titulaires de licences, mais un seul qui fabrique des explosifs plastiques. Ce fabricant est établi au Québec et produit des explosifs plastiques uniquement sur demande, surtout des charges de destruction à des fins militaires. Nous ne parlons pas ici d'un grand marché d'explosifs plastiques ni d'ailleurs d'un problème grave qu'ils pourraient soulever au Canada.

Nos 100 producteurs d'explosifs conventionnels au Canada sont servis par une direction au sein du ministère fédéral des Ressources naturelles comptant une trentaine d'employés et cinq bureaux régionaux, dont celui qui est situé rue Hasting ouest à Vancouver.


14578

J'ai moi-même eu affaire à la direction des explosifs au cours de ma carrière antérieure d'entrepreneur en exploitation forestière et en construction de routes. Il est certain qu'en Colombie-Britannique, on ne peut pas se livrer un tant soit peu à ce genre d'activité sans avoir beaucoup à manipuler des explosifs. J'ai donc déjà subi des examens et obtenu mon certificat de boutefeu afin de pouvoir manipuler ainsi des explosifs. Nous n'avons cependant jamais vraiment eu de gros problème d'usage abusif d'explosifs au Canada. Nous avons toujours pu nous compter chanceux à cet égard et j'espère que cela continuera.

Il y a cependant un problème qui semble devenir de plus en plus grave dans une des régions du pays, c'est-à-dire à Montréal, depuis que les Hell's Angels ont décidé de faire du grabuge. Les Canadiens se préoccupent en effet de ces guerres que se livrent des gangs de motards à Montréal et qui frappent des voitures, des enfants, des restaurants, des passants et quelquefois un membre des gangs de motards, et il y a lieu de craindre le recours aux explosifs dans les activités terroristes. Selon les autorités policières, cela pourrait n'être qu'un début.

(1050)

Les Hell's Angels constituent le gang de motards le plus puissant et le plus riche dans le monde et ils s'efforcent de resserrer leur emprise sur le trafic de la drogue, la prostitution et le trafic d'armes à feu partout au Canada. Ils semblent avoir choisi les explosifs comme méthode anonyme de prédilection pour supprimer leurs rivaux.

À mesure que les services policiers se mettront à surveiller de plus en plus près ces groupes, ces derniers seront peut-être amenés à recourir à des méthodes plus discrètes. Il est toujours possible que les explosifs plastiques qui ne sont pas utilisés actuellement à ces fins servent à perpétrer des actes terroristes et que des personnes innocentes continuent à en être victimes.

On m'a assuré que les explosifs plastiques n'avaient encore été utilisés jusqu'ici dans aucune des explosions survenues à Montréal, lesquelles ont été causées uniquement par des explosifs qu'il est plus facile de trouver dans les chantiers de construction ou qui servent à des fins d'exploitation minière et de construction de routes.

Mais qui sait quand un gang de motards pourra charger d'explosifs plastiques un véhicule de transport en commun et tuer beaucoup plus de personnes innocentes? Des explosifs plastiques marqués à l'aide d'un agent de détection chimique rendraient pareille chose beaucoup plus difficile et pourraient même dissuader les criminels de les utiliser. Voilà pourquoi le projet de loi C-71 est une mesure positive. Même s'il pourrait n'avoir qu'un effet très négligeable sur ce marché, il représente du moins une mesure positive qui mérite d'être appuyée.

J'ai également des inquiétudes à l'égard des explosifs conventionnels. Le dernier cas connu est encore une fois survenu à Montréal, et cela n'a rien à voir avec le problème de santé et de sécurité des travailleurs auquel la loi fédérale sur les explosifs vise à remédier. C'est un problème de sécurité. Ce sont les mêmes bandes de motards qui font les fiers en tuant des innocents de 11 ans.

D'où viennent les explosifs utilisés par les motards? Chose curieuse, le Québec est la province qui a le régime de sécurité le plus strict dans tout le pays. Il a été mis en place après la crise du FLQ, il y a des années. Or, il semble impossible de retrouver l'origine des explosifs.

Je tiens à signaler à la Chambre que, lors de ces attentats à la bombe, tous les explosifs n'ont pas toujours fonctionné correctement. Dans un cas, la police a récupéré plusieurs bâtons qui n'ont pas explosé. Pourquoi a-t-on été incapable de remonter jusqu'à celui qui a vendu les explosifs au départ, de savoir qui a vendu ces explosifs à qui et de mettre la main au collet de ces voleurs et de ces trafiquants du marché noir? Il doit bien y avoir quelqu'un qui est actuellement autorisé à conserver et à utiliser des explosifs et qui les vend à ces bandes sur le marché noir. Mais nous n'arrivons pas à remonter la filière. Les boîtes sont marquées à l'usine, mais les bâtons ou les cartouches ne le sont pas. Il serait extrêmement long de le faire, et cette solution est probablement beaucoup trop coûteuse pour être envisageable.

Il y a peut-être une solution. Elle a été avancée par l'American Institute of Makers of Explosives, organisme représentant les fabricants d'explosifs aux États-Unis. Cette solution pourrait aider le Canada à contrer ce problème de sécurité de plus en plus grave. Elle n'exigerait pas de modifications législatives, mais seulement un changement dans le règlement d'application.

L'American Institute of Makers of Explosives réclame une étude sur une proposition qui consisterait à ajouter de minuscules paillettes de plastique et de métal dans l'explosif même. Un code de couleurs permettrait d'identifier le fabricant. Après une explosion, les enquêteurs examineraient les paillettes dans les débris et pourraient retrouver l'origine de l'explosif.

J'ai en main une description de l'étude proposée. Selon l'institut, cette étude permettrait d'établir si sa proposition est rentable ou même souhaitable. L'étude servirait au moins à déterminer si nous devrions utiliser ces types de marques identifiables en plastique et en métal.

L'institut préconise la réalisation d'une étude objective où l'on insérerait ces pièces dans les explosifs pour évaluer l'efficacité de cet outil destiné aux forces de l'ordre. Il veut savoir si la présence de ces paillettes aura un effet nocif pour l'environnement. Il se demande si le procédé sera efficace et si l'on pourra retrouver les auteurs d'un nombre important d'attentats à la bombe. Aux États-Unis, il y a eu 2 300 attentats à la bombe l'an dernier, mais les criminels n'ont utilisé des explosifs de grande puissance en vente dans le commerce que dans 36 cas. L'institut veut également savoir le coût.

Pour élucider toutes ces questions, l'institut est disposé à participer à une étude visant à déterminer si le procédé proposé contribuera à empêcher certains événements, comme les attentats à la bombe de Montréal. En tout cas, ce procédé permettra certainement de déceler le lieu de fabrication et de vente des explosifs.

(1055)

Cette étude mérite d'être appuyée. On nous propose un procédé adéquat pour établir l'origine des explosifs. J'espère que le gouvernement canadien participera à l'étude de l'Institut des fabricants d'explosifs afin de déterminer si le procédé peut être appliqué au Canada.


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En sachant que l'origine des explosifs peut être établie, les personnes malhonnêtes pourraient être dissuadées de vendre des explosifs sur le marché noir. Lorsqu'elles vendent des explosifs, elles doivent se rendre compte qu'elles collaborent à des meurtres et à des actes de violence. Pour l'instant, elles agissent à leur guise sans être punies, car l'origine des explosifs ne peut être décelée.

J'ai déclaré un peu plus tôt que j'appuyais cette modification à la loi, mais je dois mentionner, étant donné les autres affirmations que j'ai faites et les quelques observations négatives que j'ai formulées au sujet de ce projet de loi, notamment en ce qui concerne son opportunité, qu'il ne s'agit que d'une mesure législative mineure. Je l'ai dit et je le répète, nous appuierons le projet de loi.

La Chambre pourrait être saisie de toute une série de questions très graves, certaines ayant trait aux groupes de motards, d'autres, à la justice pénale, et devrait être disposée à les régler aussi rapidement que ce projet de loi.

Au cours de mes nombreux déplacements cet été, les gens m'ont parlé d'une multitude de problèmes, surtout dans le domaine criminel, qui sont beaucoup plus importants que ce projet de loi antiterroriste. Si le gouvernement acceptait d'écouter la population, nous pourrions régler ces problèmes et ainsi accorder plus d'importance aux droits des citoyens respectueux de la loi qu'à ceux des criminels.

Je voudrais bien aujourd'hui que, après ceci, nous consacrions du temps à un projet de loi crucial et extrêmement important qui vise à modifier, par exemple, la Loi sur les jeunes contrevenants, ou à des projets de loi cruciaux comme une loi avec effet impératif qui autoriserait la tenue d'un référendum national sur la peine capitale. Voilà des mesures substantielles qui, aux yeux de la population, donneraient au Canada un système plus sûr, un système dans lequel je puisse avoir confiance.

Le projet de loi antiterroriste dont nous sommes saisis aujourd'hui ne touche qu'un tout petit nombre de gens. Il y a de nombreuses autres questions que nous pourrions et devrions traiter au plus vite afin de rétablir la confiance des gens dans le système judiciaire. Je ne vois certes rien de tel dans le Feuilleton et c'est bien regrettable.

Permettez-moi de récapituler. Je demande aujourd'hui à la ministre de communiquer avec son homologue américain et d'exhorter le gouvernement américain à ratifier la convention, de telle sorte que notre modification législative soit vraiment pertinente dans le monde.

Je la presse aussi de participer à l'étude proposée par l'Institut américain des fabricants d'explosifs, qui examine l'opportunité de placer des puces identifiables dans les explosifs de telle sorte qu'on puisse retrouver l'origine de ces derniers en cas d'usage criminel, un problème qui semble de plus en plus grave.

Pendant longtemps, nous avons pu nous payer le luxe de nous concentrer sur la santé et la sécurité des travailleurs avec la Loi sur les explosifs. Ce sont là des questions importantes et elles représentent le plus gros de mon expérience personnelle en ce qui concerne la Loi sur les explosifs.

Le jour viendra bientôt, je crois, où le gouvernement fédéral devra s'occuper de renforcer la sécurité de tous les Canadiens par une meilleure identification de l'origine des charges d'explosifs. Nous devrions avoir au moins cerné les options possibles et les classer selon un ordre de priorité au cas où nous décidions de recourir sur une plus grande échelle à la possibilité de retrouver l'origine des explosifs.

Je répète que j'appuie le projet de loi C-71. Je ne crois pas qu'il fera des miracles, mais l'intention n'en demeure pas moins bonne et je l'appouve. Je ne vois pas pourquoi on abuserait davantage du temps de la Chambre à cet égard.

Il y a peut-être même consentement unanime pour passer directement à l'étude en comité plénier et pour adopter ce projet de loi au plus vite, de façon à pouvoir passer aux questions plus importantes que j'ai signalées tout à l'heure. Si le gouvernement veut proposer de passer à l'étude en comité plénier, j'appuierai sa motion.

Le vice-président: Nous passons maintenant aux interventions de 20 minutes.

M. Joe Fontana (secrétaire parlementaire du ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de son offre. Je crois que le secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources naturelles prendra sa suggestion en considération et qu'il y aura peut-être une façon d'accélérer l'étude du projet de loi. Je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-71, qui concerne le marquage des explosifs aux fins de leur détection.

(1100)

Je félicite le secrétaire parlementaire et député de Moncton de l'excellent discours qu'il a prononcé ce matin pour souligner l'urgence d'adopter une mesure législative importante qui a une incidence sur la sécurité des Canadiens et qui nous permettra, espérons-le, de décourager les terroristes d'utiliser des explosifs plastiques pour porter atteinte au tissu social et à la sécurité de notre pays.

Des terroristes dans le monde entier ont parfois utilisé des explosifs plastiques contre des avions civils. La longue liste des actes terroristes qui ont détruit des avions et tué leurs innocents passagers au moyen d'explosifs plastiques est en effet terrible.

Malheureusement, dans le monde dans lequel nous vivons, il y a encore des éléments dangereux et incertains, et les conditions sont réunies pour que des gens décident de se faire justice eux-mêmes et causent pareilles tragédies et souffrances. Le Canada et tous les pays qui partagent les mêmes idées doivent demeurer vigilants pour minimiser les risques que ces actes de destruction surviennent à l'intérieur de leurs frontières ou qu'ils soient perpétrés contre leur population.

Le projet de loi dont nous sommes saisis ne peut, à ce jour, régler les problèmes qui donnent naissance au terrorisme dans le monde


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entier. Il peut toutefois nous permettre d'ajouter une brique au mur que les gouvernements sont en train d'ériger pour réduire la capacité des terroristes d'agir contre les intérêts pacifiques des États et de leur population.

Comme mon collègue l'a expliqué si clairement, ce projet de loi vise à garantir qu'un marqueur soit inclus dans les explosifs plastiques. Cette mesure aura pour effet d'accroître infiniment la capacité de détection de ces explosifs à l'aide du bon équipement. C'est une étape essentielle dans le développement d'un système qui permettra au Canada de réagir efficacement aux menaces terroristes de sabotage à l'aide d'explosifs plastiques.

Nous devrions également être fiers que le Canada ait joué un rôle central dans l'élaboration d'un cadre international pour le marquage et le contrôle des explosifs plastiques. Les scientifiques et experts techniques canadiens ont été des chefs de file dans le règlement des problèmes techniques liés à l'ajout d'additifs dans les explosifs afin de rendre ceux-ci détectables sans nuire de quelque manière que ce soit à la fonction essentielle des explosifs légaux, ni diminuer leur sécurité ou leur caractère acceptable pour l'environnement.

Tant le gouvernement que l'industrie canadienne des explosifs reconnaissent que le Canada doit continuer d'être à l'avant-garde des pays développés dans la lutte contre le terrorisme. L'adoption de ce projet de loi montrera clairement aux autres pays, y compris les États-Unis, que nous sommes déterminés à améliorer les moyens de lutte contre le terrorisme et que nous prenons des mesures efficaces pour y parvenir le plus rapidement possible.

Nous devons toujours rester conscients que ce projet de loi ne constitue pas l'aboutissement d'un processus, mais plutôt une étape qu'il faut franchir pour veiller à ce que le Canada et les autres pays demeurent vigilants dans la lutte contre les saboteurs en puissance.

En conséquence de cette mesure, le gouvernement est fort conscient que la capacité de fabriquer des explosifs facilement détectables va de pair avec l'exigence d'avoir le bon équipement au bon endroit pour détecter les activités terroristes. La triste histoire du terrorisme montre clairement que l'industrie aérienne a été la cible de pareilles activités. Nous sommes convaincus que le matériel actuellement en place dans les aéroports suffit amplement compte tenu des menaces et des risques qui existent au Canada.

Les députés et toute la population peuvent avoir l'assurance que, aujourd'hui, nous sommes capables de détecter les explosifs plastiques. Cela ne signifie pas que le gouvernement est satisfait du niveau actuel de la sécurité aérienne, loin de là. Transports Canada examine constamment son système de sécurité aérienne pour s'assurer qu'il est toujours adapté à la situation de l'heure, c'est-à-dire qu'il tient compte de toute nouvelle menace pouvant surgir.

Conscient de l'amélioration de la sécurité pouvant découler du projet de loi qui rendra les explosifs plus facilement détectables, et conscient aussi des progrès constants des techniques de détection, le ministère des Transports du Canada entreprendra bientôt, en collaboration avec l'industrie et d'autres ministères touchés, un examen approfondi de sa stratégie de déploiement du matériel dans les aéroports. Lorsque cet examen sera terminé, le ministre des Transports étudiera les raffinements pouvant être apportés à cette stratégie pour que le Canada demeure à la fine pointe des méthodes de lutte contre le terrorisme, peu importe quand et où il se manifeste.

(1105)

Ce projet de loi constitue une arme essentielle de notre arsenal de lutte contre le fléau terroriste. Il a été élaboré en étroite collaboration avec de nombreux ministères et il est tout à fait cohérent avec les critères généraux suivis par beaucoup de pays. Les principes que le sous-tendent ont été approuvés par l'industrie concernée.

La démarche collective suivie devrait suffire à convaincre les plus sceptiques que le Canada est déterminé à combattre le terrorisme. J'invite tous les députés à prouver leur engagement personnel en faveur de l'atteinte de l'objectif visé en votant en faveur du projet de loi.

M. George S. Rideout (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, je veux d'abord féliciter le secrétaire parlementaire pour son excellent discours et lui poser une question sur le rôle de Transports Canada dans la détection des explosifs. Je voudrais qu'il nous dise si ce projet de loi aidera le ministère à réglementer ce secteur.

Nous avons entendu divers députés ce matin parler d'un certain nombre de choses qui n'ont rien à voir avec ce que nous essayons de faire ici, c'est-à-dire simplement détecter des explosifs plastiques qui seraient transportés par avion. Le ministère des Transports a certainement un rôle à jouer à cet égard. Le secrétaire parlementaire pourrait peut-être faire quelques remarques à ce sujet.

M. Fontana: Monsieur le Président, même si j'ai mentionné, dans mon discours, que Transports Canada estime que cette mesure législative est absolument nécessaire, je tiens à assurer à mes collègues à la Chambre, ainsi qu'à tous les Canadiens, que Transports Canada a déjà la capacité et l'équipement qu'il faut pour détecter les explosifs plastiques dans nos aéroports.

Nous continuerons d'apporter à notre régime de sécurité aéroportuaire toutes les améliorations qui s'imposent afin d'assurer aux Canadiens qui fréquentent nos aéroports que nous sommes capables de détecter ces explosifs plastiques.

Il est important que tous les pays du monde ratifient la convention. Nos frontières sont ouvertes, et le Canada a des liens avec tous les autres pays, tant sur le plan commercial que sur le plan touristique. Il est important que le Canada joue un rôle de chef de file dans ce domaine et adopte cette mesure législative en espérant ainsi encourager les autres pays à lui emboîter le pas.


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Pour répondre à la question du secrétaire parlementaire, je veux que les Canadiens sachent que Transports Canada a l'équipement et l'expertise qu'il faut pour détecter tout explosif plastique dans nos aéroports.

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, au nom du caucus du Nouveau parti démocratique, je voudrais dire quelques mots au sujet du projet de loi C-71, Loi modifiant la Loi sur les explosifs.

La Loi sur les explosifs, qui a pour objet d'assurer la sécurité du public et des travailleurs, régit la composition, la qualité et la nature des explosifs, ainsi que la fabrication, l'importation, la vente, l'achat, la possession et le stockage de ces substances. La loi régit également les pièces pyrotechniques. Le gouvernement estime que le projet de loi modificatif est nécessaire afin d'exiger l'introduction d'un additif détectable dans les explosifs plastiques. Le projet de loi permet également de prendre des règlements pour assurer le contrôle des explosifs non marqués.

Le gouvernement croit être ainsi en mesure de faire échec au terrorisme et permettre au Canada de ratifier une convention de l'Organisation de l'aviation civile internationale sur le marquage des explosifs plastiques à des fins de détection.

Les principales dispositions du projet de loi rendent obligatoire le marquage des explosifs plastiques pour en permettre la détection et interdisent la fabrication, le stockage, la possession, la cession, le transport, l'importation et l'exportation d'explosifs plastiques non marqués, sauf dans les cas où la convention le permet ou en raison d'impératifs militaires. Le projet de loi autorise également le gouverneur en conseil à réglementer la possession, la cession et l'élimination d'explosifs plastiques non marqués.

(1110)

Les néo-démocrates appuient toute mesure qui contribue à réduire la criminalité, enrayer le terrorisme ou assurer une plus grande sécurité aux Canadiens, à tous ceux que cette expression englobe.

Le projet de loi, bien qu'il ne soit pas venu aussi rapidement que nous l'aurions souhaité, constitue un premier pas efficace dans la lutte contre la criminalité et le terrorisme. Le Nouveau Parti démocratique craint cependant que ce projet de loi ministériel n'arrive un peu tard.

Nous avons d'autres réserves au sujet de cette mesure. D'abord, en juin 1989, le Conseil de sécurité des Nations Unies a demandé à l'Organisation de l'aviation civile internationale d'intensifier ses travaux de conception d'un régime international qui assurerait le marquage des explosifs plastiques ou en feuilles aux fins de détection. La même année, en décembre 1989, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté la même résolution. Nous sommes maintenant en 1995, et le gouvernement entreprend de présenter ce projet de loi pour donner suite à la convention.

J'ai entendu le secrétaire parlementaire dire à la Chambre que c'était là faire preuve de leadership. Je m'interroge sur la franchise et la fermeté de ce leadership, surtout que le Canada a eu cinq ou six ans pour présenter cette mesure à la Chambre des communes. Le gouvernement respecte tout juste les exigences de la convention. Pourquoi ne pas prendre l'initiative d'imposer des restrictions encore plus sévères sur l'achat d'explosifs, pour la sécurité des Canadiens? Pourquoi le gouvernement ne fait-il pas en sorte qu'il soit encore plus difficile d'acheter des explosifs, par exemple?

Nous avons assisté à un interminable débat lors de l'étude du projet de loi sur le contrôle et l'enregistrement des armes à feu. Que faisait le gouvernement, par exemple, dans le cas d'un fabricant d'explosifs, à Valleyfield, au Québec? Il ne fait rien de précis pour qu'il devienne plus difficile d'acheter des bombes.

Quand on voit le gouvernement ne rien faire de plus que ne l'exige la convention, on a un petit indice du piètre pouvoir de leadership de notre gouvernement. Pourquoi ne pas aller au-delà de la convention et entreprendre de présenter une réglementation compliquant la procédure d'achat d'explosifs plastiques et de bombes, pour les Canadiens et pour les acheteurs étrangers? Le gouvernement aurait pu faire un peu plus.

Par ailleurs, le gouvernement a-t-il vérifié s'il existait de nouvelles technologies qui permettent, ou qui permettraient un jour, de détecter les explosifs plastiques déjà existants? Au cours des derniers mois, le monde a assisté à la naissance d'une multitude de nouvelles capacités informatiques. Différentes compagnies sortent de nouvelles technologies toutes les semaines, pas seulement des sociétés d'informatique, mais des compagnies spécialisées dans la technologie. Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas entrepris avec les entreprises du secteur privé de mettre au point une technologie qui permettrait de déceler les explosifs plastiques maintenant au lieu d'attendre que 35 autres pays signent cette convention et, espérons-le, s'attaquent à ce problème au cours des quinze prochaines années?

J'estime qu'attendre 15 ans pour s'attaquer à ce problème, c'est un peu long. En 15 ans, beaucoup de gens et beaucoup d'organisations peuvent acheter des explosifs et s'en servir pour nuire notamment à la population canadienne.

Que fait le gouvernement à cet égard? Pourquoi n'a-t-il pas fait preuve de leadership-comme il l'appelle-et entrepris de veiller à renforcer la sécurité au lieu de se contenter de satisfaire aux exigences d'une convention internationale qui n'entrera pas en vigueur avant 10 ou 15 ans, ou Dieu sait combien d'années.

Je me demande en quoi ce projet de loi va contribuer à réduire le terrorisme au Canada, par exemple dans le cas de Montréal où les bandes de motards s'entretuent à l'aide de bombes, peut-être pas des explosifs plastiques, mais de la dynamite et d'autres explosifs. Que fait le gouvernement pour renforcer la sécurité dans les collectivités, pour renforcer la sécurité à Montréal, pour s'attaquer à ce très grave problème au Québec?


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Je vais dire aux députés et aux Canadiens ce qu'il fait. Pas beaucoup. Le ministre de la Justice s'est rendu à Montréal pour s'entretenir avec le maire de cette ville des mesures législatives anti-gangs que celui-ci a demandé au gouvernement fédéral de mettre en place. Qu'a fait le ministre de la Justice? Il a écouté le maire, s'est offert un agréable petit voyage, a bien déjeuné mais ne va rien faire à ce sujet parce que d'autres questions plus importantes comme le contrôle et l'enregistrement des armes à feu créent toutes sortes de problèmes. Il ne va rien faire au sujet des bombes. Nous laisserons les bombes aux bandes de toutes sortes et nous laisserons les fabricants d'explosifs continuer à fabriquer ces engins et à les vendre dans les collectivités du pays, de sorte que les gens pourront les utiliser pour s'entre-tuer et tuer aussi des innocents en plus grand nombre qu'ils ne pourraient le faire au moyen de fusils à long canon.

(1115)

Je me demande ce que fait le gouvernement pour régler ce problème à Montréal. Je partage les inquiétudes des députés, surtout ceux du Québec, qui désirent ardemment que ce problème se règle. Ce projet de loi ne fera rien en ce sens et je regrette ce qui se produit.

Je ne consacrerai pas beaucoup de temps à ce projet de loi car, comme je l'ai dit, c'est un bon début. Une autre chose m'inquiète; le secrétaire parlementaire de la ministre des Ressources naturelles a déclaré que les militaires avaient assez d'explosifs plastiques pour dix ans.

Les Canadiens se demandent ce qui adviendra de ce stock d'explosifs plastiques si le présent projet de loi est adopté. Les militaires vont-ils utiliser les explosifs tels quels, sans agent de détection? Le gouvernement exigera-t-il que les militaires détruisent les explosifs non marqués et achètent des explosifs préparés selon la nouvelle formule et donc détectables?

Voilà autant de questions auxquelles le gouvernement devra répondre. Je suppose que les Canadiens aiment bien se demander pour quelle raison les militaires possèdent des explosifs plastiques en quantité suffisante pour dix ans. Prévoient-ils que des événements terribles dans le monde obligeront le Canada à utiliser ces explosifs?

Le gouvernement devra répondre à ces questions. Le projet de loi ne renferme aucune disposition visant l'utilisation des explosifs plastiques dans des situations d'urgence par les militaires. J'aimerais savoir ce qu'entend le gouvernement par «utilisation d'urgence d'explosifs plastiques» par les forces armées et en quoi cela pourrait les soustraire aux dispositions de la convention. Est-ce que cela signifie que, dans chaque pays du monde, les forces armées y échappent également? Ou est-ce seulement le cas des Forces canadiennes? Dans l'affirmative, leur système d'entreposage des explosifs plastiques est-il sûr, de façon à ce que, s'ils ne sont pas détectables, ils soient au moins entreposés en toute sécurité et ne servent qu'à des fins militaires?

Quel genre de restrictions, quel genre de règlements, quel genre de systèmes d'enregistrement existe-t-il pour les explosifs plastiques utilisés par les forces armées?

Bref, ce projet de loi nous inquiète beaucoup. C'est un bon premier pas. Mais, vu l'ampleur du problème, il n'est pas un pas suffisant. Je pense que les choses ne vont pas assez vite. Si le gouvernement canadien est sincère, outre ce projet de loi, il adoptera un plan d'action pour contacter les autres pays cosignataires de la convention afin de les convaincre de prendre toutes mesures législatives nécessaires, dans les plus brefs délais, afin que nous puissions régler ce problème très rapidement et non dans 15 ans.

Je demanderais au gouvernement, lorsqu'il prendra l'initiative de contacter ces autres gouvernements, de la façon la plus officielle, de s'assurer que la convention est signée par le nombre minimum requis de pays pour qu'elle soit efficace à l'échelle internationale.

Les néo-démocrates appuient le principe de ce projet de loi. Si nous obtenons une réponse précise et satisfaisante à certaines de nos questions, nous voterons en faveur du projet de loi. J'attends avec impatience qu'il soit renvoyé en comité afin que nous puissions poser ces questions en plus grand détail.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée, et le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

* * *

(1120)

LA LOI SUR LE VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 18 septembre, de la motion: Que le projet de loi C-83, Loi modifiant la Loi sur le vérificateur général, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis particulièrement heureux de pouvoir prendre la parole pour appuyer le projet de loi C-83.

Il est intitulé: «Loi modifiant la Loi sur le vérificateur général». Il semble bien difficile de s'enthousiasmer au sujet d'un projet de loi avec un titre comme celui-là. Pourtant, je devrais expliquer que c'est une mesure législative conçue pour tenir un engagement de notre livre rouge, appuyé par tous les environnementalistes et tous les gens d'affaires qui se soucient de l'environnement pendant et pris durant la campagne électorale. L'engagement était de nommer une personne responsable des questions environnementales au gouvernement fédéral.


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Je voudrais lire l'engagement contenu dans le livre rouge avant de passer aux modalités du projet de loi C-83. Le livre rouge disait que le gouvernement:

. . . désignera un commissaire à l'environnement qui sera comptable envers le Parlement et disposera de pouvoirs semblables à ceux du vérificateur général. Le commissaire à l'environnement rendrait ses conclusions, tous les ans, sur l'adaptation des programmes et de l'effort financier au respect de l'environnement ainsi que sur l'application et le bon respect des lois environnementales. Les particuliers pourraient demander au commissaire d'ouvrir une enquête lorsque les lois ou les politiques de l'environnement ne sont pas respectées.
Le projet de loi C-83 est la réalisation de cette promesse que nous avons faite dans notre livre rouge. Il traite de la nomination d'un commissaire au développement durable.

Au gouvernement, en affaires et dans la vie quotidienne, le développement durable est simplement une question de bon sens. Par développement durable on entend le fait pour les êtres humains de vivre sur la planète d'une manière qui conserve autour d'eux un environnement sain.

Il est illogique, et pratiquement immoral, de penser que nous pouvons vivre sur cette planète, faire nos affaires ou gouverner sans prendre en considération la santé à long terme de notre environnement. Si nous ne le faisons pas, un jour ou l'autre ces mauvaises politiques finiront par nous retomber dessus. Notre santé personnelle en souffrira, de même que celle de nos enfants et de leurs enfants.

Le développement durable qui est mentionné dans notre promesse est simplement une façon logique de vivre sur la planète, une façon logique de faire nos affaires et une façon logique d'administrer le pays.

Je suis ravi de voir le projet de loi C-83 à la Chambre. Son objectif est de créer le poste de commissaire à l'environnement et au développement durable au sein du bureau du vérificateur général. Je dois expliquer cela parce que l'engagement de notre livre rouge dit simplement que nous désignerons un commissaire à l'environnement.

Lorsque le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a procédé à des audiences publiques il a constaté que l'idée d'un protecteur de l'environnement au gouvernement fédéral avait l'appui d'une grande majorité des gens. On a beaucoup discuté de la forme que ce poste pourrait prendre et des pouvoirs que la personne ou son bureau devrait avoir. Certains estimaient que ce devait être un service séparé que l'on appellerait le vérificateur général à l'environnement. Ce bureau assumera des fonctions très semblables à celles du bureau du vérificateur général, qui est en quelque sorte le «chien de garde» du gouvernement.

On était également d'avis qu'il fallait un commissaire. Il y a certaines administrations qui sont dotées d'un commissaire à l'environnement qui, non seulement assume les fonctions de surveillance qui sont celles du vérificateur général vis-à-vis des pratiques du gouvernement fédéral, mais également se veut le porte-parole des simples citoyens lorsque le gouvernement doit intervenir dans les questions touchant l'environnement et le développement durable.

(1125)

À mon avis, en présentant le projet de loi C-83, nous allons au-delà de notre promesse de nous doter d'un commissaire à l'environnement. En effet, nous créons le poste de commissaire à l'environnement et au développement durable qui relèvera du bureau du vérificateur général.

Il convient de noter que nous plaçons l'environnement sur un pied d'égalité avec nos dossiers prioritaires, telle l'efficacité gouvernementale.

En vertu du projet de loi C-83, nous créerons un poste de commissaire qui témoignera du sérieux avec lequel le gouvernement entend jouer un rôle moteur en matière d'environnement et de développement durable. Ce commissaire sera chargé de surveiller les mesures d'écologisation mises en oeuvre le gouvernement.

Ce commissaire sera à la disposition de la population et devra rendre compte au Parlement. En procédant à cette nomination, le gouvernement se rend imputable de son bilan environnemental. En outre, étant donné que le gouvernement fédéral constitue une organisation vaste et puissante-trop au goût de certains-, ce commissaire sera à même de favoriser le développement durable non seulement au sein de l'appareil gouvernemental, mais également dans toutes les structures de la société, par son exemple et de bien d'autres façons.

Ce commissaire sera le bras droit du vérificateur général pour toutes les questions touchant l'environnement et le développement durable. En plus d'aider le vérificateur général dans ces domaines très spéciaux et importants, le commissaire surveillera la situation et fera rapport au Parlement tous les ans sur la façon dont tous les ministères mettent en oeuvre leur stratégie de développement durable et les ministres répondent aux pétitions venant de la population sur des questions environnementales.

Lorsque j'ai lu ce projet de loi, j'ai également été intéressé par quelque chose d'autre qui est, en fait, différent de l'idée que je m'étais faite de ce commissaire à l'environnement et au développement durable, de ce chien de garde, selon ce que l'on en disait dans le livre rouge. Je veux parler plus précisément de la nomination du commissaire. Monsieur le Président, pour être honnête avec vous, j'ai participé, dans une certaine mesure, à l'élaboration de certaines dispositions du livre rouge et je n'avais pas beaucoup réfléchi à cela. Je n'avais pas pensé comment on pouvait nommer une personne indépendante du gouvernement, capable de le critiquer.

Dans le cas présent, il est intéressant de noter que le projet de loi dont nous sommes saisis prévoit que c'est le vérificateur général, qui est déjà bien accepté comme fonctionnaire indépendant, qui sera chargé d'effectuer cette nomination. J'apprécie que cela ne se fasse pas par décret. Ce ne sera pas le premier ministre qui effectuera cette nomination, mais bien le vérificateur général qui devra trouver une personne indépendante pour occuper le poste de commissaire à l'environnement et au développement durable, chose que j'apprécie. Cela cadre bien avec le principe déjà existant qui a, selon moi,


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l'appui de la population en général, de l'indépendance du Bureau du vérificateur général. Il est très important que ce commissaire soit indépendant et soit perçu comme indépendant du gouvernement. Ainsi, je me réjouis du fait qu'on procède à cette nomination de cette façon-là.

J'ai dit plus tôt qu'on avait notamment proposé que cet organisme de surveillance soit un bureau distinct, comme celui du vérificateur général. Par contre, dans ce projet de loi, il fera partie du Bureau du vérificateur général lui-même. Quels sont les avantages de cela? Monsieur le Président, étant donné que vous lisez les rapports du vérificateur général d'un bout à l'autre lorsqu'ils sont soumis chaque année, vous savez que le vérificateur général se fait déjà un devoir de faire rapport sur les questions environnementales. Ce n'est pas quelque chose dont le vérificateur général fait abstraction. En un sens, cette fonction existe déjà et nous la renforçons par la nomination d'un commissaire qui travaillera de concert avec le vérificateur général.

(1130)

Contrairement à certaines autres personnes nommées au bureau du vérificateur général, le commissaire sera nommé en raison de ses compétences dans le domaine de l'environnement et du développement durable. Cela diffère beaucoup de la situation actuelle, où le bureau du vérificateur général a naturellement besoin de comptables et de personnes qui peuvent lire les états financiers. Tout ceci est très important.

Il y aura un expert qui pourra conseiller le vérificateur général sur les aspects du gouvernement qui concernent l'environnement et le développement durable. Cette fonction renforcera le bureau du vérificateur général et donnera au commissaire une assise solide pour mener ses travaux.

Le fait que le vérificateur général soit déjà réputé et respecté pour son indépendance constitue un autre avantage. Par conséquent, au lieu d'être obligé de consacrer beaucoup de temps à se tailler une réputation et à montrer très clairement qu'il est indépendant du gouvernement, le nouveau commissaire travaillera dès le départ dans un bureau respecté et indépendant, ce qui, à mon avis, est bénéfique.

Il y a aussi, bien sûr, un avantage financier. Nous avons déjà un bureau du vérificateur général et les services de soutien et autres qu'on y trouve sont efficaces, ce qui répond à nos préoccupations actuelles au sujet d'un gouvernement efficace et économique.

Il y a également quelques autres avantages. D'abord, en travaillant au bureau du vérificateur général, le commissaire a l'avantage immédiat de partager les feux des projecteurs qui sont braqués sur le rapport annuel du vérificateur général.

Une façon dont fonctionne le bureau du vérificateur général, et je crois que les ministères se sentent paranoïaques à ce sujet, c'est qu'il se sert de la publicité autour de la publication du rapport du vérificateur général pour assurer la mise en oeuvre des recommandations qui s'en dégagent. Le rapport se trouve donc effectivement sous les feux des projecteurs.

Comme les députés, les médias attendent maintenant chaque année le rapport du vérificateur général. Lorsque les scandales arrivent, ils sont étalés au grand jour, ce qui est une façon dont notre système fonctionne pour se purifier et devenir plus efficace. En intégrant le poste de commissaire au bureau du vérificateur général, nous partageons tout de suite les feux des projecteurs qui sont braqués sur les questions d'environnement et de développement durable. Cela me plaît.

L'autre raison pour laquelle cette intégration me plaît a un lien avec ce que j'ai tenté de dire au départ à propos du développement durable. L'environnement et le développement durable ne sont pas des sujets indépendants du gouvernement. Ils ne sont pas indépendants de la façon dont nous menons notre vie quotidienne ni de la manière dont nous faisons des affaires. Comme j'ai tenté de l'expliquer au début, si nous mettons de côté le principe de la durabilité de la planète, c'est la planète qui nous détruira. Je doute que la planète soit menacée, ce sont plutôt les êtres humains qui le sont.

En intégrant le poste de commissaire au développement durable et à l'environnement au bureau du vérificateur général, je pense que nous voulons faire comprendre que nous reconnaissons que les affaires, l'environnement et le développement durable sont une seule et même chose. Désormais, les fonctions de notre vérificateur général engloberont automatiquement l'environnement et le développement durable.

J'ai signalé que le livre rouge contenait une recommandation sur les pétitions que les Canadiens pouvaient adresser au gouvernement pour lui faire part de leurs préoccupations environnementales. Je suis heureux de constater que, selon le projet de loi, le commissaire doit donner suite aux pétitions reçues par tous les ministères concernant des questions environnementales. Cela signifie que quelqu'un veillera aux intérêts des Canadiens qui communiquent avec les ministres.

J'aime à penser que la plupart des ministères prennent les pétitions au sérieux. Avec ce projet de loi, le commissaire reverra toutes les réponses que les ministres donnent aux pétitions touchant l'environnement. Je suis d'avis que cela augmentera l'influence que peut avoir la population sur le gouvernement dans un domaine que je considère très important.

Les ministres disposeront d'un délai 120 jours pour répondre aux pétitions et des prolongations ne sont prévues que dans des circonstances exceptionnelles. Le commissaire verra à ce que les ministres répondent. Je considère cela très important.

(1135)

Un autre élément inclus dans le mandat du nouveau commissaire, c'est que les ministères de notre gouvernement sont tenus d'élaborer leurs propres plans de développement durable. Pour ce faire, ils


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disposent d'un délai précis et, une fois les plans dressés, ils doivent les mettre à jour tous les trois ans.

Je sais que les ministères reçoivent des cabinets des ministres des directives de ce genre sur toute une gamme de sujets et on peut se demander ce qui arrive étant donné la taille gigantesque de l'organisation. Cependant, le commissaire doit examiner tous les plans touchant l'environnement et le développement durable qui relèvent de chaque ministère. Le commissaire doit établir un rapport annuel à propos de ces plans. La mesure à l'étude introduit donc dans le système fondamental de gouvernement un système d'autocontrôle assurant que l'on tiendra compte des facteurs environnementaux dans le contexte du développement durable à l'égard de tout ce que nous entreprenons.

Je sais que ce n'est pas facile. En période de difficultés économiques, nous avons tendance à oublier les questions d'ordre environnemental et la santé de la population de même que les effets qu'un environnement pollué peut avoir sur nous. Lorsque la ministre a présenté hier le projet de loi, elle a mentionné certaines des initiatives qui ont été prises. Il s'agit d'initiatives qui aideront le commissaire à veiller à ce que ces mesures soient mises en oeuvre de façon adéquate.

Au ministère de l'Environnement, nous avons déjà mis en application des politiques d'approvisionnement soucieuses de l'environnement, qui mettent l'accent sur la réduction du volume d'achat, la réutilisation du matériel et l'achat de produits sans danger pour l'environnement. On peut considérer comme très important le fait que nous avons annoncé cette politique et que nous avons créé un poste de surveillant en matière environnementale chargé de veiller à la mise en oeuvre des plans d'action.

Nous gérons déjà le parc automobile du ministère de l'Environnement de manière à réduire les émissions de 30 p. 100 d'ici l'an 2000. Dans tous les bureaux du ministère, on a déjà pris pour objectif de réduire le gaspillage à zéro. Nous améliorons l'efficacité énergétique dans tous les immeubles d'Environnement Canada et nous y économisons l'eau au moyen de vérifications de la consommation d'eau. Voilà quelques exemples de ce que fait un ministère. Voilà le genre d'initiatives que le nouveau commissaire à l'environnement et au développement durable aura à surveiller.

Pour résumer, le projet de loi C-83 confie exclusivement au bureau du vérificateur général les responsabilités en matière d'environnement et de développement durable et le personnel chargé de les exercer. Le commissaire nous permettra de jouer un rôle de premier plan dans un large éventail de domaines où il s'agit d'écologiser le gouvernement et de pratiquer des méthodes de gouverner favorables au développement durable. Le commissaire surveillera continuellement tous les ministères et veillera à ce qu'ils rendent des comptes. Le projet de loi permettra aux Canadiens de communiquer beaucoup plus facilement au gouvernement leurs préoccupations en matière environnementale.

Plus particulièrement, le commissaire intégrera les considérations d'ordre environnemental dans les activités normales de gouvernement. Voilà ce que c'est que le gouvernement favorable au développement durable. Je félicite la ministre de l'Environnement de son projet de loi et je compte bien le voir mettre en oeuvre rapidement.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, mon collègue fait preuve d'une certaine naïveté dans son discours. Je comprends la création du poste de commissaire à l'environnement, et d'ailleurs, on est d'accord avec le projet de loi, mais cela ne réglera pas tous les problèmes environnementaux.

J'écoutais son discours tantôt, et c'est comme si ce commissaire devait venir régler tous les problèmes existant au sein des ministères et au sein du Canada, et je ne pense pas que c'est ce qui va se produire.

(1140)

J'aimerais faire un petit commentaire sur le rôle du commissaire à l'environnement et, entre autres, sur sa nomination.

Nous souhaitons sincèrement que ce commissaire soit nommé d'une façon non partisane et non politique. Dans le dossier de l'environnement, je pense que la ministre a pris des décisions politiques plutôt que des décisions environnementales. Entre autres, le dossier du Irving Whale, est, par lui-même, un grand scandale.

J'aimerais demander à mon collègue si, à son avis, le commissaire à l'environnement et au développement durable devrait avoir tous les pouvoirs pour renverser une décision comme celle qu'on a vécue dans le dossier de l'Irving Whale, alors qu'on sait très bien que, de toute façon, les environnementalistes étaient contre cette décision. J'aimerais connaître son opinion. Est-ce que ce commissaire ne devrait pas avoir tous les pouvoirs pour qu'il puisse agir très rapidement afin de pouvoir justement renverser une décision comme celle qu'on a vécue cette été?

M. Adams: Monsieur le Président, je remercie la députée du Bloc québécois de sa question.

[Traduction]

Pour ce qui est du premier point soulevé par la députée, je suis désolé si, emporté par l'enthousiasme, j'ai dit qu'une mesure comme celle-là pouvait résoudre tous les problèmes. Nous savons tous qu'il n'y a de panacée dans aucun domaine.

Je suis convaincu que ce n'est pas une simple décision ponctuelle. Le nouveau mécanisme agira à l'intérieur du gouvernement jour après jour, année après année, pendant des dizaines d'années et plus longtemps encore, j'espère. Il exercera une influence constante et provoquera des changements qui seront extrêmement durables. Je comprends le point de vue de la députée, et je la prie de m'excuser si j'ai donné l'impression que cette solution réglerait tous les problèmes.

Quant aux modalités de nomination, j'ai expliqué que l'idée me plaisait que le commissaire ne soit pas nommé par décret, mais par le vérificateur général. Celui-ci peut agir en toute indépendance. Il ne fait pas de politique. Je crois que la nomination sera dénuée de tout esprit de parti. Comme je l'ai dit au cours de mes observations, cette idée me plaît.


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Quant au pouvoir d'annuler une décision, je ne crois pas que le vérificateur général, qui surveille toutes les activités du gouvernement, doive avoir le pouvoir d'intervenir, qu'il doive avoir des pouvoirs draconiens pour s'ingérer dans le fonctionnement général des gouvernements. Il doit avoir tous les pouvoirs possibles pour réclamer des changements, mais je ne crois pas que nous puissions donner à un organisme de surveillance la possibilité de faire obstacle aux gouvernements ou de modifier ses décisions sur un point donné.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, ma question au député sera brève et succincte.

Les chiens de garde du gouvernement ont prouvé par le passé qu'ils pouvaient être très dociles et suivre les directives du gouvernement. Le gouvernement entend-il proposer un nouveau concept d'organisme de surveillance ou est-ce simplement sa façon de régir l'étude des questions environnementales?

M. Adams: Monsieur le Président, je suis vraiment secoué par cette question, surtout dans le cadre de ce débat. Le député aurait peut-être des exemples précis à nous donner. Prétend-il que le vérificateur général s'est fait très docile lorsqu'il a eu à traiter avec le gouvernement actuel et les gouvernements précédents?

Je crois que le député devrait retirer les paroles qu'il a prononcées à l'endroit de la personne qui occupe actuellement le poste de vérificateur général et à l'endroit du bureau du vérificateur général. Il peut critiquer la façon dont les opérations d'un bureau sont gérées. Il peut critiquer les opinions formulées par le bureau en question et des choses comme cela. Je sais que le député n'a pas mentionné le vérificateur général, et c'est peut-être l'explication qu'il fournira, mais le débat porte sur les fonctions du vérificateur général. Quelle calomnie à l'endroit du vérificateur général!

J'ai reconnu que ces bureaux ne trouvent pas la solution à tous nos problèmes. Cependant, il me faut croire que le vérificateur général est indépendant, honnête et efficace. Je sais que le vérificateur général ne peut guérir tous les maux qui affligent le gouvernement.

J'espère que le député retirera ses paroles, monsieur le Président.

(1145)

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, je me permettrai seulement de clarifier le point qu'a fait valoir le député de Peterborough.

Ce qu'il dit, c'est qu'il est arrivé maintes et maintes fois à la Chambre, et même dans une législature après l'autre, que le vérificateur général présente un rapport caustique sur le fonctionnement des ministères fédéraux et que ces rapports soient complètement laissés de côté par le gouvernement du jour.

À moins que le gouvernement libéral ne soit vraiment déterminé à reconnaître, à respecter et à appliquer les recommandations et les conclusions du vérificateur général, on aura beau nommer un million de chiens de garde pour le surveiller et un million de vérificateurs généraux pour le tenir à l'oeil que cela ne donnera rien. Si le gouvernement continue à ne pas donner suite aux rapports, à quoi cela sert-il? Voilà.

Quelles garanties la Chambre et les Canadiens ont-ils que la nomination de cet autre commissaire sera efficace, que le gouvernement donnera suite à ses recommandations, rapports et critiques?

Jamais, jusqu'à maintenant, le gouvernement n'a pris de véritables décisions par suite des rapports du vérificateur général. Quelles garanties avons-nous qu'il le fera désormais?

M. Adams: Monsieur le Président, je remercie le député de Prince George-Bulkley Valley pour ses observations et son éclaircissement. Contrairement à ce que peut en penser son collègue, j'accepte et ne reçois pas cela comme un affront.

La Chambre, y compris le député d'en face, a le devoir de veiller à ce que les gouvernements successifs respectent leurs engagements. Dans le cas qui nous occupe, j'ai signalé la politique environnementale que le gouvernement actuel a mise en vigueur. Nous débattons ici d'une promesse que les libéraux ont faite au cours de la campagne électorale et qu'il est en train de tenir. Voilà un exemple qui montre que l'on fait quelque chose.

Lorsque le commissaire commencera à faire rapport et que le député d'en face recevra cette nouvelle information sur ce qui se passe au gouvernement, le député d'en face s'en servira pour pousser le gouvernement du jour, celui-ci ou un autre, à être aussi efficace que possible sur le plan de l'environnement.

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de participer aujourd'hui à l'étude en deuxième lecture du projet de loi C-83, mesure législative qui modifie la Loi sur le vérificateur général afin d'établir un bureau chargé de contrôler et de vérifier le travail effectué dans les ministères, aux fins du développement durable.

Je suis heureux de participer au débat sur ce projet de loi, car il concerne un sujet qui me tient à coeur. Lors de la dernière législature, j'avais présenté une motion d'initiative parlementaire demandant au gouvernement de créer un bureau du vérificateur général de l'environnement. À l'époque, cette idée avait récolté beaucoup d'appuis auprès de tous les partis politiques, d'organismes environnementaux et de simples citoyens. Je faisais aussi partie du comité de l'environnement, l'an dernier, lorsque celui-ci a étudié l'idée de créer ce genre de bureau et qu'il a présenté un rapport à ce sujet.

Ce rapport, rendu public en mai 1994, a examiné la nécessité d'une vérification environnementale et conclu que le Canada avait non seulement besoin d'un vérificateur, mais aussi d'un commissaire à l'environnement et au développement durable.

Comme l'a mentionné le comité dans son rapport, presque tous les témoins ont dit que l'examen indépendant des politiques constituait actuellement la principale lacune du cadre auquel doit se conformer le gouvernement pour rendre compte de ses efforts en matière de développement durable.

La plupart des témoins ont dit qu'il fallait plus qu'une fonction de vérification. François Bregha, président de Resource Futures International, a dit qu'une fonction d'évaluation des politiques était nécessaire parce qu'actuellement, nous n'avons pas les critères


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voulus pour mesurer nos progrès en matière de développement durable.

Bill Andrews, directeur exécutif de la West Coast Environmental Law Association a abondé dans le même sens et déclaré ceci: «Ce qui manque, c'est une fonction d'analyse des politiques indépendante, qui permettrait, en cas de gros problèmes dans les décisions politiques prises, d'être assuré que ces problèmes seront portés à l'attention du grand public.»

Le comité a aussi recommandé que le bureau du commissaire soit institué au moyen d'un nouveau projet de loi distinct et non d'une simple modification à la Loi sur le vérificateur général.

(1150)

Comme Paul Muldoon, qui a été membre du groupe de travail sur la Déclaration des droits de la personne de l'Ontario, l'a dit, une loi distincte est nécessaire parce que les rôles, les fonctions, le mandat, la portée et les pouvoirs doivent être tout à fait clairs pour le public, le gouvernement et les groupes touchés.

Hélas, comme c'est le cas dans bien de ce que fait le gouvernement, sa réponse aux sages recommandations du comité et des témoins qui ont comparu devant ce dernier est loin d'être satisfaisante. Le projet de loi C-83, comme nous le verrons quand nous l'étudierons, a peu à voir avec le développement durable et ne constitue pas ce dont le Canada a désespérément besoin aujourd'hui.

À la fin de la deuxième lecture, le projet de loi sera renvoyé, pour l'étude article par article, au même comité de l'environnement qui a rédigé le rapport initial. J'espère que les autres membres du comité vont s'attaquer durement au projet de loi C-83 et défendre leur rapport. Nul doute que le comité ne peut pas passer sous silence le fait qu'en rédigeant le projet de loi C-83, la ministre de l'Environnement a écarté 11 des 17 recommandations que renferme ce volumineux rapport.

Par ailleurs, il importe de ne pas oublier que les témoins ont, l'un après l'autre, dit au comité que la vérification environnementale ne serait pas suffisamment proactive.

Art Hanson, président et directeur général de l'Institut international du développement durable, a dit au comité que la vérification de l'application des politiques en vigueur n'informe guère sur la nécessité de nouvelles politiques.

Kenny Blacksmith, grand chef adjoint, Grand conseil des cris, abondait dans le même sens: «Il vaudrait mieux ne pas avoir de commissaire du tout plutôt que d'en avoir un dont le mandat est restreint au point où il ne peut influer sur la nature de la politique, la mise en oeuvre, la teneur et l'interprétation des lois environnementales.»

Comme je l'ai mentionné à la Chambre hier, Helen Hugues, la commissaire à l'environnement de la Nouvelle-Zélande, a déclaré qu'elle aurait beaucoup de difficulté à exercer son mandat si elle n'était pas en mesure d'examiner la politique de l'État.

Ainsi que ces témoins l'ont fait valoir, nous avons besoin d'un commissaire qui soit en mesure d'adopter une démarche prospective pour l'évaluation de l'efficacité des politiques, des lois, des règlements et des programmes en matière de développement durable. Le projet de loi C-83, plutôt que d'offrir une analyse indépendante des politiques, crée une fonction de vérification qui servira à savoir si les programmes sont mis en oeuvre efficacement et si les ministères atteignent les objectifs de leurs propres plans de développement durable.

À toutes fins utiles, et j'en suis sincèrement convaincu, c'est là un rôle dont les ministères et le vérificateur général pourraient très bien s'acquitter dès maintenant. Rien dans le projet de loi C-83 ne pourrait pas être fait même sans son adoption.

Si nous parlons de faire des vérifications environnementales vraiment efficaces c'est une autre paire de manches. Il s'agirait en ce cas d'examiner les politiques et les objectifs qui régissent les ministères et leurs programmes et de dire si ces politiques et objectifs conviennent en l'occurrence ou s'ils sont souhaitables.

Le mandat proposé par le ministre pour le nouveau commissaire est tourné vers le passé. On demande au commissaire d'étudier le passé et de nous dire où nous nous sommes trompés. J'ai déjà travaillé sur la question et la conclusion, c'est que les fonctions jugées nécessaires, et appuyées par les Canadiens et par le comité, sont plus dynamiques. Selon le modèle souhaitable, le commissaire serait tourné vers l'avenir et nous guiderait dans l'élaboration des politiques et des programmes pour que les Canadiens, par leurs efforts et leurs activités, puissent vivre une vie riche et garantir la pérennité de nos activités sur la terre.

Il est capital que notre génération fasse de la terre un meilleur endroit pour la prochaine génération. Cela signifie que nous devons changer notre façon de faire bien des choses. Il est évident que nous pouvons tirer des leçons du passé, d'où l'importance de la fonction de vérification que le projet de loi confierait au bureau du vérificateur général. Je ne dis pas que nous devrions jeter le projet de loi à la poubelle et conserver la statu quo, car ce serait encore pire. Je dis qu'il ne suffit tout simplement pas de savoir que nous avons fait quelque chose de mal quelque part.

(1155)

Plus que toute autre chose, il est important que le Canada dispose d'un moyen de promouvoir les principes du développement durable dans toutes nos activités. Cela signifie que nous devons déterminer comment bien faire une chose, puis orienter l'action gouvernementale dans le sens voulu. Nous n'arrivons jamais nulle part si nous ne faisons que regarder en arrière et dresser la liste des erreurs que nous avons commises. Il nous faut un plan et une vision pour tracer l'itinéraire qui nous mènera au but clairement visé.

Le projet de loi C-83 ne nous aidera pas à atteindre les buts du Canada dans le domaine environnemental et en matière de dévelop-


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pement durable. Il ne nous donne pas les outils dont nous avons besoin pour évaluer nos politiques avant qu'elles soient déjà la cause de dommages.

Il y a beaucoup de travail à faire dans ce domaine. Après avoir examiné cette question, le Comité de l'environnement a dit que le nouveau bureau du commissaire devrait avoir de nombreuses fonctions. Je vais décrire quelques-unes de ces fonctions telles qu'elles sont énoncées dans le rapport du comité.

Le commissaire devrait évaluer l'ensemble des politiques, lois, règlements, programmes et lignes directrices du gouvernement fédéral afin de déterminer ceux qui favorisent la progression du Canada vers le développement durable et ceux qui y nuisent, et faire des recommandations en conséquence.

Le commissaire devrait examiner l'ensemble des politiques, lois, règlements, programmes et lignes directrices du gouvernement fédéral afin de déterminer la mesure dans laquelle elles sont conformes aux engagements internationaux du Canada dans le domaine du développement durable, notamment ceux prévus dans les protocoles, traités et conventions. Nous connaissons l'importance de cette dernière fonction relativement aux derniers accords que le Canada a signés, particulièrement ceux conclus à Rio de Janeiro en 1992-on pense tout de suite à Action 21-et tous les autres engagements que le Canada a pris envers la communauté internationale.

À cet égard, Bill Andrews, que j'ai cité plus tôt, a dit au comité que nous avons une lacune flagrante pour ce qui est d'évaluer la mesure dans laquelle nous respectons nos engagements internationaux.

Le comité a également recommandé que le commissaire soit chargé d'encourager la consultation et la collaboration entre les gouvernements fédéral et provinciaux dans le domaine du développement durable, d'assurer la liaison avec les gouvernements, les organismes non gouvernementaux et les autres intéressés, ainsi que de suivre l'évolution des concepts, pratiques et technologies liés au développement durable et de présenter des rapports à ce sujet. Le comité a aussi recommandé que le gouvernement prêche par l'exemple afin de faire comprendre aux Canadiens à quel point le développement durable s'impose.

Ce sont là certaines des nombreuses fonctions recommandées par le Comité de l'environnement il y a seulement un an, recommandations que sont prêts à défendre tous les membres du comité qui ont débattu ces questions avant que le rapport ne soit rédigé.

Malheureusement, on n'a pas tenu compte de ces recommandations dans le projet de loi C-83, qui donne plutôt au commissaire la fonction suivante, et je cite le paragraphe 23(1) du projet de loi:

Le commissaire effectue les examens et enquêtes qu'il juge nécessaires pour a) contrôler la mesure dans laquelle chaque ministère de la catégorie I a réalisé les objectifs prévus par sa stratégie de développement durable et mis en oeuvre les plans d'action de celle-ci.
Quelle approche différente! Le comité, qui a étudié cette question de façon approfondie, dit que, pour faire un travail efficace, ce bureau doit exercer de nombreuses fonctions importantes, et la ministre de l'Environnement répond en disant, dans le projet de loi C-83, qu'il suffit de contrôler la mesure dans laquelle les ministères ont atteint les objectifs qu'ils ont eux-mêmes fixés dans cette optique.

Ces stratégies de développement durable n'ont pas à être déposées avant deux ans. De plus, le projet de loi permet même aux ministères de réviser ces stratégies seulement trois ans plus tard. Aux termes du projet de loi C-83, le nouveau vérificateur n'aura même pas de plan d'action à contrôler pendant les deux premières années de son mandat. Aucun des plans du gouvernement, comme je le disais plus tôt et comme l'a expliqué le comité, ne pourra faire l'objet d'un examen pendant cette période.

Tous les plans rédigés par les ministères pendant ces deux années seront récents. Tout cela me semble un peu ridicule.

Un autre article du projet de loi mérite notre attention. Nous devrions tous opposer une objection de principe à cette disposition qui oblige les ministères à répondre aux pétitions émanant du public au sujet de questions environnementales. Si le projet de loi C-83 est adopté sans modification, toute pétition publique demandant une enquête au sujet d'une plainte reçue par le bureau du vérificateur général doit être transmise au ministère compétent, qui doit l'examiner, faire rapport et donner une réponse dans les quatre mois. Cela signifie évidemment que tout ministère qui voudra justifier ses actes plutôt que d'en faire l'examen aura toute liberté de le faire.

(1200)

Il faudrait plutôt créer une fonction d'ombudsman pour permettre aux membres du public de présenter des pétitions au commissaire en vue d'obtenir la tenue d'une enquête spéciale lorsqu'ils estiment que les politiques ou les lois environnementales ne sont pas appliquées ou sont violées. C'est ce que la ministre avait prévu dans le mandat initial donné au comité. Il ne suffit pas de fournir des réponses polies à des questions environnementales sérieuses.

Le projet de loi contient aussi une disposition qui permet au ministre d'informer l'auteur d'une pétition qu'il n'est pas en mesure d'y répondre dans un délai de quatre mois. Aussi, j'aimerais que tous les ministériels, et en particulier ceux qui ont fait partie du comité, m'expliquent où cela nous conduit. Combien de temps un ministère peut-il prendre pour répondre à une pétition?

Si je parle en détail de cet aspect, c'est en raison du récent jugement concernant la décision du gouvernement de renflouer le Irving Whale au large des côtes de l'île du Prince-Edouard. On sait que l'évaluation environnementale n'avait pas tenu compte de la présence de BPC dans le système de chauffage du bâtiment.

Le tribunal a confirmé la pétition des citoyens et rejeté la défense du gouvernement. Si les Canadiens préoccupés comme moi par l'environnement veulent une loi vraiment musclée, il faut que ce


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bureau d'enquête et de contrôle chargé de protéger nos intérêts à long terme soit réellement indépendant et fasse vraiment appliquer la loi. Rien dans le projet de loi C-83 ne prévoit cela.

Il y a beaucoup d'autres preuves, notamment l'effondrement de l'industrie de la pêche sur la côte est, montrant que nous avons besoin d'un commissaire à l'environnement vraiment indépendant. Du fait qu'il ne contient pas de recommandation en ce sens, le rapport du comité de l'environnement ne va pas assez loin. Ce rôle d'enquête dont il n'est fait mention nulle part est un aspect important du problème dont nous sommes saisis aujourd'hui alors que nous examinons le projet de loi C-83 et devrait être pris en considération avant que le comité n'examine la question une seconde fois.

Pour conclure, je voudrais, à l'appui de mon argument selon lequel le projet de loi C-83 est inadéquat et devrait être remplacé par une nouvelle mesure législative, citer brièvement, comme je l'ai fait hier durant la période des observations et des questions, le président du comité de l'environnement, le député de Davenport, qui a déjà largement contribué au débat. La citation est tirée de la préface du rapport du Comité, rédigé par le président il y a un an:

Au cours de la campagne électorale de 1993, tous les grands partis ont réaffirmé leur appui au développement durable. Le parti gouvernemental actuel a, pour sa part, pris plusieurs engagements explicites en faveur de l'adoption de politiques en ce sens.
[ . . . ] Après de longues délibérations, le Comité a conclu que la façon la plus pratique d'implanter ces fonctions serait de mettre sur pied un Bureau du commissaire à l'environnement et au développement durable, tout en élargissant le rôle du Bureau du vérificateur général.
[ . . . ] Le Comité estime que la création d'un tel poste s'impose d'urgence, à la fois pour répondre à la demande du gouvernement et pour accentuer le mouvement en faveur du développement durable.
Le député de Davenport pense manifestement comme moi que le Canada a besoin d'amorcer le mouvement en faveur du développement durable à la première occasion possible et non pas dans deux ans comme le laisse entendre le projet de loi C-83.

Le député de Davenport et président du comité a reconnu que son propre parti a fondé sa campagne électorale sur un tel programme. Il affirme clairement que, pour remplir ces promesses électorales, il faudrait au moins créer un nouveau bureau investi de nouvelles fonctions.

Si l'on adopte le projet de loi C-83, il semble évident, à moi comme aux Canadiens qui suivent le débat, que les libéraux ont manqué à une autre de leurs promesses en matière d'environnement. Plus important encore, le gouvernement a de nouveau négligé de considérer les besoins de notre planète et sa capacité de soutenir la vie.

À notre époque où le budget du ministère de l'Environnement est réduit de 30 à 40 p. 100 et que le gouvernement semble chancelant dans sa résolution de protéger l'environnement, la nomination d'un commissaire travaillant pour le vérificateur général n'est pas nécessairement ce qu'il nous faut. Cette solution aux besoins à long terme du Canada, en ce qui a trait au développement durable, n'est pas assez énergique.

(1205)

Hier, après avoir écouté plusieurs discours à la Chambre sur cette question, j'ai posé des questions à quelques ministériels. J'ai été sidéré de constater que pas un seul des députés libéraux membres du comité de l'environnement qui ont pris la parole n'a défendu le rapport. Alors qu'ils ont travaillé si fort l'année dernière à écouter tant de témoins parler de la nécessité d'avoir un commissaire à l'environnement qui soit indépendant et qui ait l'initiative d'enquête, pas un seul d'entre eux n'a défendu le rapport du comité à la Chambre, un rapport que pourtant ils ont appuyé par leur signature.

Le comité de l'environnement vient de terminer la rédaction d'un rapport fondamental sur l'examen de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Ses membres y ont consacré des milliers d'heures. Ils ont produit un rapport que, selon moi, la plupart des députés approuveraient. Les recommandations du comité ont été bien reçues par les groupements d'écologistes partout au Canada.

Je crains fort que ces députés, qui ne prennent pas la peine de défendre leur propre rapport demandant la création d'un poste de vérificateur à l'environnement, ne défendront pas davantage cet important rapport sur l'examen de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement lorsque le gouvernement y répondra dans cinq ou six semaines. J'espère que, lorsque le gouvernement répondra au rapport, les députés qui ont travaillé si fort à l'examen de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement seront prêts à défendre les intérêts du comité, ceux des témoins qu'il a entendus, ainsi que les recommandations du rapport.

Monsieur le Président, je vous remercie de m'avoir permis de prendre la parole aujourd'hui sur cette question importante. J'ai hâte de voir les conclusions du comité, lorsqu'il aura terminé l'étude article par article du projet de loi C-83.

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur le Président, le dernier intervenant parlait de la nécessité pour le commissaire à l'environnement d'être indépendant et d'avoir suffisamment de pouvoir. Je suis d'accord avec cela.

Pour faire suite aux observations du dernier intervenant libéral, qui essayait de nous prouver que le vérificateur général était intègre, je dirais que je trouve curieux que, d'une part, il défende l'intégrité du vérificateur général alors que, d'autre part, son parti ne tient aucun compte de la plus grande partie de ce que recommande le vérificateur général.

Pour replacer dans un certain contexte ce que je disais au sujet du fait que ces chiens de garde ne soient en réalité que des toutous de salon, je voudrais le détourner du vérificateur général et l'amener à considérer le conseiller en éthique. Il est absolument inutile de nommer quelqu'un si c'est pour qu'il fasse tout ce que le gouvernement lui dit ou si c'est pour ne tenir aucun compte de ses recommandations.

Le dernier intervenant a clarifié cette question. Si nous devons avoir un commissaire quelconque ou un chien de garde particulier, si l'on peut utiliser ce mot, il faut que ce soit quelqu'un qui ait à la


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fois l'indépendance et l'autorité nécessaires pour que ce qu'il préconise soit mis en oeuvre.

M. Taylor: Monsieur le Président, le député ne s'adressait pas vraiment à moi lorsqu'il a posé la question, il réagissait plutôt à un point soulevé plus tôt aujourd'hui à la Chambre. Toutefois, je veux aussi commenter brièvement les déclarations faites par le vérificateur général devant le Comité permanent de l'environnement et du développement durable durant les travaux sur cette importante question.

Il vaut la peine de répéter, comme l'a mentionné le député de Davenport hier, que le vérificateur général lui-même a indiqué au comité que le gouvernement demandait à son bureau d'exécuter certaines tâches entièrement étrangères à son mandat. Ce mandat en est clairement un de vérification des programmes du gouvernement. La vérification ne peut porter que sur des fonctions déjà établies et inscrites dans les objectifs du gouvernement. Si ces objectifs sont fautifs, le vérificateur général n'est pas en mesure de faire des commentaires à ce sujet. Il semble évident que ces règles s'appliquent à tout poste et à tout employé de ce bureau, y compris le nouveau commissaire à l'environnement.

(1210)

Il est fort possible qu'en réponse au projet de loi C-83 le vérificateur général accepte volontiers d'assumer les nouvelles responsabilités, mais nous ne devons pas oublier qu'une partie du mandat qu'on veut lui confier dépasse largement les possibilités de son bureau.

En analysant le projet de loi C-83, il importe de reconnaître que le vérificateur général remplit une fonction essentielle, mais que pour assurer le développement durable, nous devons faire appel à d'autres services que le sien. L'année dernière, le comité de l'environnement et du développement durable était d'avis que nous avions besoin d'un service dont le rôle irait bien au-delà de celui du vérificateur général; je suis surpris que les membres du comité n'aient pas défendu leur propre rapport.

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole à la Chambre pour commenter le projet de loi C-83. Cela fait plus d'un an que le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a entrepris d'examiner l'engagement pris par le gouvernement de créer un poste qui soit, pour l'environnement, l'équivalent de celui du vérificateur général. Cet engagement clé pris par les libéraux en 1993 pendant la campagne électorale, tel qu'énoncé dans le livre rouge, est également un engagement envers les Canadiens. Cette idée, qui fait l'objet de nombreux débats et discussions depuis des années, correspond également à un souhait du public.

Le message qui nous parvient des différentes parties intéressées est indubitablement qu'il y a au Canada un besoin criant de leadership en ce qui concerne la transition vers un développement durable. Depuis plus d'une décennie, nous explorons le concept, nous en examinons les implications et nous étudions les mesures à prendre. Le moment est maintenant venu de passer à l'action et pour ce faire, il nous faut prendre des décisions audacieuses et déterminantes. Le projet de loi C-83 ouvre la voie.

On nous a également dit que c'était du gouvernement fédéral que devait venir l'exemple. Ce dernier est la plus grosse entreprise du Canada; ses faits et gestes ont des répercussions immenses sur l'ensemble de la société. Cela est vrai non seulement des politiques, des programmes et des règlements fédéraux touchant des secteurs variés, mais aussi de la façon dont le gouvernement du Canada fonctionne. Le gouvernement fédéral doit rendre compte publiquement des progrès accomplis qui nous rapprochent d'un développement durable et de l'adoption de politiques durables. Les politiques durables ne sont pas seulement responsables du point de vue financier et économique, mais plus spécifiquement sur le plan environnemental.

Par ailleurs, le gouvernement doit déterminer si les initiatives existantes ne sont pas autant d'obstacles au développement durable. Il doit chercher à atteindre ses objectifs actuels dans le respect des principes du développement durable. Nous devons intégrer le coût de la protection de l'environnement à ce qu'il en coûte pour faire des affaires au Canada de nos jours.

Je sais que, en préparant son rapport, le comité a pris soin d'accorder une attention aux messages transmis par les intéressés. Le bureau du vérificateur général a beaucoup de poids et c'est la raison pour laquelle, en préparant ces modifications qu'apporte le projet de loi à la Loi sur le vérificateur général, nous créons un poste de commissaire qui fait partie et relève du bureau du vérificateur général. Le bureau du vérificateur général est indépendant du gouvernement et est très respecté par la population du Canada. Il a de solides connaissances qui peuvent être immédiatement mises à profit. Il a la structure voulue pour amener les autorités à rendre des comptes à la population. Pour toutes ces raisons, il peut grandement améliorer la vérification de la performance du gouvernement dans le domaine de l'environnement.

En outre, en confiant à ce bureau des responsabilités environnementales précises, nous pouvons faire en sorte que les questions d'environnement et de développement durable soient solidement et directement intégrées aux considérations d'ordre économique. C'est ce type d'intégration qu'exige le développement durable. Le bureau du commissaire du vérificateur général est un bureau qui fera preuve de leadership. Il mettra le Canada au premier rang sur la voie du développement durable.

(1215)

D'abord, les modifications créent un poste de commissaire à l'environnement et au développement durable. Ce fonctionnaire travaillera en étroite collaboration avec le vérificateur général du Canada sur les questions liées à l'environnement et au développement durable et lui fera directement rapport.

La poursuite des travaux est une priorité. Peu importe ce qu'il adviendra du poste de vérificateur général, il y aurait une continuité et le poste de commissaire à l'environnement et au développement durable serait garanti. Ce faisant, nous garantissons que ce commis-


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saire veillera à l'application de toutes les modifications contenues dans ce projet de loi et s'assurera de la durabilité de l'environnement dans l'intérêt du Canada.

D'autres dispositions du projet de loi prévoient un leadership accru en ce qui concerne le passage à cette politique de développement durable. On exige que dans les deux ans, tous les ministères fédéraux établissent des stratégies de développement durable destinées à obtenir des résultats bien précis. Il s'agit pour eux de se fixer des objectifs et de préciser des mesures qu'ils vont prendre pour les réaliser.

Ces stratégies faciliteront le passage à une politique de développement durable dans le cadre des programmes des ministères, ainsi que dans leurs autres modes d'exploitation des immeubles et installations. Il s'agit d'un moyen de contrôle, de surveillance, de tous les ministères fédéraux.

Les ministères vont élaborer, de façon transparente, leurs stratégies avec l'aide d'intéressés de l'extérieur, comme la table ronde nationale sur l'environnement et l'économie. Nous allons faire participer au processus les écologistes, les secteurs public et privé, ainsi que tous les citoyens afin qu'ils aient la possibilité de se faire entendre et d'exprimer leur point de vue sur les mesures que le Canada devrait prendre pour conserver un environnement durable, assurer un développement économique durable.

On va également établir des points de référence en fonction desquels on pourra mesurer les résultats obtenus par le gouvernement. Le commissaire et le vérificateur général seront ainsi en mesure d'effectuer leur travail de façon efficace et indépendante.

De plus, tous les trois ans, tous les ministères doivent mettre à jour leur stratégie de développement durable et le ministre compétent est tenu de déposer cette nouvelle stratégie devant le Parlement du Canada. On s'assure ainsi que les stratégies sont mises à jour continuellement, en fonction des nouvelles technologies et de l'évolution de la situation dans tout le pays.

Ce matin, on a soulevé la question des comptes à rendre à la population. En vertu des modifications proposées, le gouvernement devra rendre davantage de comptes dans le cadre du passage à une politique de développement durable. Le commissaire est chargé de soumettre chaque année un rapport à la Chambre sur les questions touchant les aspects environnementaux du développement durable qu'il juge importantes. Je crois qu'en vertu de cette disposition, il est libre d'examiner n'importe quelle question, dans n'importe quel ministère, ainsi que d'effectuer des évaluations et de faire rapport là-dessus s'il le juge bon.

Le rapport mettra l'accent sur le bilan environnemental de tous les ministères fédéraux. En d'autres termes, il faudra rendre compte dans quelle mesure le ministère a mis en oeuvre son plan d'action et dans quelle mesure il a atteint ses objectifs en matière de développement durable.

En outre, le rapport devra mentionner le nombre et l'objet des pétitions relatives aux questions environnementales que les ministres ont reçues, ainsi que l'état du dossier. Permettez-moi de lire un extrait du projet de loi à cet égard. Ainsi, le public aura l'occasion de présenter une pétition; cela sera à la portée de tout citoyen qui se donne la peine de recueillir les signatures d'autres personnes intéressées.

(1220)

C'est le commissaire qui recevra la pétition. Elle sera ensuite transmise au ministre compétent du ministère concerné. Celui-ci sera tenu d'en informer la Chambre dans les 15 jours suivant sa réception et de faire connaître sa réponse dans les quatre mois qui suivent. Le ministre pourra prolonger ce délai en avisant le pétitionnaire et le vérificateur général qu'il sera impossible de s'y conformer.

Il y a donc une échéance à respecter dans le traitement de la pétition. Le commissaire, le ministre et le ministère concernés ont ainsi l'obligation de rendre compte au pétitionnaire. Ils s'acquittent de cette obligation au nom du gouvernement qui a présenté le projet de loi C-83.

La tâche de désigner le commissaire à l'environnement et au développement durable incombera au vérificateur général. Grâce à cette disposition, le commissaire jouira d'une parfaite indépendance vis-à-vis le gouvernement du Canada. De plus, il possédera la crédibilité et la responsabilité nécessaires à l'exercice de ses fonctions.

Le troisième message formulé par les intervenants quand on a sollicité leur avis au sujet de ce projet de loi a fait ressortir la nécessité de vérifier si les mesures gouvernementales, nouvelles et actuelles, favorisent bel et bien le développement durable. Le gouvernement est déjà intervenu dans ce domaine et il appartiendra au vérificateur général et au commissaire d'établir son bilan en la matière.

En novembre dernier, le groupe de travail sur les instruments économiques et les obstacles à de saines pratiques environnementales a soumis son rapport. Celui-ci formule des recommandations au ministre des Finances et à la ministre de l'Environnement. Elles ont trait à la marche à suivre au moment de procéder à la révision des politiques actuelles pour vérifier qu'elles ne gênent en rien notre stratégie de développement durable. Ils recommandent de revoir les politiques existantes pour voir si elles ne créent des osbtacles à la promotion de l'environnement durable. Il s'agira de revoir certaines politiques et mesures législatives qui pourraient être désuètes et qui risquent de limiter, voire d'empêcher le développement durable dans une économie intégrée. Ils ont également fourni des conseils sur la façon de prévenir à l'avenir la création inutile d'obstacles.

Selon la promesse du budget, les ministres répondront au groupe de travail dans les mois qui viennent. Encore une fois, le gouverne-


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ment doit rendre compte aux Canadiens d'une politique financière durable, d'une économie durable et d'un environnement durable.

Je répète qu'en rédigeant leurs stratégies de développement durable, les ministères fédéraux doivent se montrer ouverts, honnêtes et responsables. Ils doivent faire participer les Canadiens, les intéressés et les environnementalistes.

Dans la partie III de leur budget des dépenses qui paraît chaque année, les ministères doivent encore faire état de leur progrès à l'égard du développement durable et indiquer le nombre, le type et l'état d'avancement des évaluations environnementales qu'ils mènent.

Il faut faire plus pour intégrer l'environnement dans les facteurs à considérer lors de la prise des décisions. Une troisième composante de la réponse du gouvernement est l'engagement de prendre d'autres mesures pour tenir compte de l'environnement dans le processus décisionnel de chaque ministère du gouvernement.

Le groupe de travail devait définir les obstacles qui s'opposent à de saines pratiques environnementales. Le gouvernement a donné suite aux recommandations à court terme qu'il a faites dans son dernier budget. Nous sommes en train de rédiger une réponse officielle au rapport du groupe de travail, notamment à ses recommandations à long terme. Nous y indiquerons les plans qu'entend adopter le gouvernement pour mettre en oeuvre des instruments économiques et pour définir les obstacles à ces pratiques qui sont présents dans les politiques gouvernementales actuelles. Le commissaire jouera un rôle très important en tenant ce gouvernement et ceux qui le suivront responsables des efforts déployés à cet égard.

Ces mesures jointes à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale feront beaucoup pour intégrer les considérations environnementales dans presque toutes les décisions du gouvernement fédéral.

(1225)

Il se produit tellement de nouveaux développements dans la région de l'Atlantique, qu'il s'agisse de l'implantation de grandes usines de pâte à papier, d'exploitations forestières ou du transport de produits chimiques et autres qui pourraient nuire à notre environnement en cas de problèmes ou d'accidents. Nous avons d'ailleurs parlé ce matin du problème de l'Irving Whale.

Le projet de loi se révélera un atout formidable. Les citoyens auront l'occasion d'adresser des pétitions au commissaire ou au ministre à la tête d'un ministère pour faire évaluer et juger en toute objectivité ce qui est économiquement réalisable, ce qui est favorable au développement durable et ce qui servira notre pays à long terme.

Notre gouvernement s'est engagé résolument à ne pas adopter de solutions faciles à court terme, et à promouvoir le développement durable. Cela fait partie de notre politique et de notre philosophie. Dans tout ce que nous faisons, nous allons bâtir pour la génération à venir.

Le rapport Brundtland, intitulé « Notre avenir à tous », décrit en termes techniques ce que signifie le développement durable. J'ai étudié la question dans mes travaux universitaires au niveau de la maîtrise. Nous avons aujourd'hui envers la société mondiale le devoir d'agir de façon responsable tout particulièrement ici en tant que législateurs, sans parler de notre devoir de citoyen.

Nous sommes les gardiens de notre environnement, de notre planète, durant une brève période de temps seulement. Nous avons durant cette période le grave devoir d'agir de façon responsable. Nous devrions tirer de l'environnement et de l'économie uniquement ce qu'il nous faut pour répondre à nos besoins actuels, de sorte que nous ne bâtissions pas notre économie sur la cupidité, mais sur nos besoins. C'est ainsi que nous pourrons laisser quelque chose pour les membres de la génération suivante, de sorte qu'ils puissent eux aussi tirer leur subsistance de l'environnement, de toutes les merveilleuses et formidables richesses naturelles dont notre grand pays, le Canada, a heureusement été comblé.

Je dirai donc en terminant que les modifications que nous proposons d'apporter à la Loi sur le vérificateur général s'inscrivent dans le cadre du vaste effort que je viens de décrire. Elles constituent un élément fondamental et essentiel de ce qu'est aujourd'hui la philosophie du gouvernement du Canada. Ces modifications changeront radicalement la façon dont le gouvernement fédéral et les ministères fédéraux exercent leurs activités.

Cela constituera un progrès important en faisant du développement durable une réalité pour notre pays. Cela constituera également un progrès important aux yeux du monde, qui considérera le Canada comme un pays qui se préoccupe également de l'économie et de l'environnement et qui sait les intégrer en un seul tout.

[Français]

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, c'est un plaisir d'avoir l'occasion de prendre la parole et d'appuyer le projet de loi qui est maintenant devant la Chambre.

La Loi modifiant la Loi sur le vérificateur général prévoira la nomination d'un commissaire à l'environnement et au développement durable qui se rapportera au vérificateur général et qui aidera celui-ci à avoir une vue d'ensemble de toutes les activités et opérations du gouvernement fédéral reliées à l'environnement et au développement durable.

Le projet de loi C-83 exigera aussi que tous les ministères du gouvernement fédéral élaborent des stratégies en matière de développement durable et la dépose à la Chambre des communes.

(1230)

[Traduction]

Le projet de loi semble particulièrement pertinent, après la publication d'un rapport de la Banque mondiale, cette semaine, sur la richesse des nations. Le Canada se classe au deuxième rang. Ce n'est pas ce que nous avons l'habitude d'entendre à propos de notre


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économie. Nous avons l'habitude de figurer bien plus bas, selon les anciennes conceptions de la richesse des nations, fondées sur le revenu, l'investissement et d'autres éléments mesurables en fonction de la circulation monétaire dans l'économie.

Pour publier son classement de la semaine dernière, la Banque mondiale a utilisé un système de mesure qui tient compte, entre autres facteurs, de la richesse découlant des ressources naturelles des pays. D'après cette mesure, le gros de la richesse du Canada tient à ses ressources naturelles. Par conséquent, notre capacité de bâtir une économie saine dépend donc de l'utilisation que nous ferons de ces ressources. Nous devons adopter un mode de développement durable.

La nouvelle formule utilisée par la Banque mondiale va à l'encontre des méthodes classiques. Elle va au-delà des mesures normales de la richesse utilisées jusqu'à maintenant. On commence à évaluer la richesse selon une norme qui est fondée sur le développement durable à long terme.

C'est pourquoi les mesures que nous prenons pour gérer nos ressources naturelles, les utiliser de manière à laisser aux générations à venir de quoi bâtir leur propre prospérité ne sont pas simplement une question de bien-être économique, mais une question de survie. Cette évolution confère peut-être une nouvelle pertinence au projet de loi à l'étude. Nous pouvons le considérer à la lumière des richesses de notre territoire, de nos forêts, des ressources du sous-sol, de la qualité de notre eau et, enfin, de notre qualité de vie.

Nous avons eu un rappel saisissant cette année: si nous ne gérons pas correctement ces ressources, si nous ne considérons pas ces cadeaux comme une richesse qui doit faire vivre les générations futures tant dans notre pays que dans le reste du monde, la situation sera dramatique. Les stocks de morue qui ont été une source de revenu et une ressource importante pour le Canada et d'autres pays pendant des générations sont presque entièrement disparus. Personne ne sait vraiment si ces stocks se reconstitueront un jour.

La Banque mondiale commence à reconnaître que la richesse des nations doit être évaluée différemment et que la valeur des ressources dont nous disposons et l'utilisation que nous en faisons représentent un facteur clé de notre prospérité actuelle et future. L'épuisement des ressources entraîne, en fait, la diminution de notre richesse.

Je voudrais vous donner un autre exemple pour expliquer très concrètement ce qui clochait dans l'ancien système et pourquoi nous devons modifier notre façon de voir les choses.

Dans le cadre de l'ancien système, la marée noire déversée par l'Exxon Valdez a eu des répercussions sensationnelles sur notre économie. Elle a fait grimper considérablement notre PIB, grâce aux millions de dollars qui ont été dépensés en honoraires d'avocats et en frais de nettoyage. Dans l'ancien système, le déversement a été favorable à notre économie. Vous ne trouverez personne à la Chambre qui voudra affirmer qu'un déversement de pétrole dans un océan est favorable à notre pays.

(1235)

Permettez-moi maintenant d'aborder le projet de loi dont nous sommes saisis et de montrer à quel point il est compatible avec le concept du développement durable. Aux termes de cette mesure, le gouvernement doit examiner toutes ses politiques, ses dépenses, ses activités, ses opérations et tous ses programmes pour en déterminer les répercussions sur l'environnement. Chaque ministre doit étudier chacun des aspects de son ministère et déposer une stratégie pour veiller à ce que les activités, les programmes et les politiques de son ministère respectent l'environnement, à l'échelle de la planète, sur lequel reposent non seulement notre prospérité économique, mais notre survie.

Le projet de loi prévoit la nomination d'un commissaire à l'environnement chargé de surveiller les répercussions environnementales et les effets sur le développement durable de l'ensemble des politiques, mesures législatives et programmes, non seulement des nouveaux, mais aussi de ceux qui sont déjà en vigueur.

Le projet de loi établit une nouvelle façon pour le gouvernement de rendre des comptes à la population. Au fil des ans, les pays du monde entier ont appris que la surveillance qu'exerce la population sur leurs décisions détermine à quel point ils agissent de façon responsable. L'une des grandes conclusions qu'ont tirée les participants au Sommet de la Terre, tenu à Rio, il y a un ou deux ans, est la suivante: la transparence, la surveillance publique et l'obligation de rendre des comptes des gouvernements sont des éléments essentiels à la réalisation du plan d'action que tous les pays participants ont approuvé à cette très importante conférence mondiale.

Le rapport de la Banque mondiale précise bien que le Canada, en tant que l'un des pays les plus riches, grâce essentiellement à ses ressources naturelles tout à fait remarquables, a également le plus à perdre s'il n'agit pas de façon à préserver l'environnement. Si le gouvernement ne crée pas une société de ce genre, non seulement par ses actions, mais encore dans son partenariat avec le secteur privé et en informant et motivant les Canadiens à faire aussi leur part pour préserver l'environnement, alors nous sommes tous perdants. Le Canada est perdant. Dans la mesure où un pays, quel qu'il soit, n'assume pas ses responsabilités pour un développement durable, le monde entier et les générations futures sont perdants.

[Français]

Je dois, avant de terminer ce matin, dire que je trouve la position du Bloc sur ce projet de loi un peu difficile à comprendre. Personnellement, je me souviens très bien de la période où l'actuel leader du Bloc était ministre de l'Environnement dans cette Chambre et au sein du gouvernement. Je me souviens très bien de son engagement envers l'environnement et envers la responsabilité du gouvernement de prendre des mesures pour protéger l'environnement.

Je me souviens aussi que c'est le Bloc qui a soumis à la Chambre un rapport minoritaire dans lequel il a proposé exactement ce qui constitue le sujet de ce projet de loi, c'est-à-dire que le gouvernement établisse à même le bureau du vérificateur général le poste de commissaire à l'environnement et au développement durable, au lieu d'établir un bureau séparé, un bureau qui serait une nouvelle création.


14594

(1240)

[Traduction]

J'ai du mal à comprendre aujourd'hui pourquoi les bloquistes contestent ce projet de loi qui vise à faire exactement ce qu'ils ont eux-mêmes proposé à la Chambre des communes et au gouvernement.

[Français]

Il me semble que c'est un recul de leur position et de la position personnelle du chef de l'opposition officielle, en faveur de la protection de l'environnement, en faveur du développement durable et en faveur de la responsabilité du gouvernement d'assumer un rôle de leadership dans ces domaines.

[Traduction]

Le Canada s'enorgueillit à juste titre du rôle de chef de file mondial qu'il joue à l'égard de beaucoup de ces problèmes environnementaux importants, surtout pour ce qui concerne le réchauffement de la planète.

On peut croire qu'il s'agit ici d'un simple projet de loi administratif qui concerne le gouvernement fédéral et la façon dont il mène ses affaires et dont les ministères sont administrés au quotidien. J'estime que son incidence est beaucoup plus grande que cela. Il témoigne, de la part du gouvernement, du leadership dont le Canada a toujours fait preuve en rapport avec ces questions très importantes. Il témoigne du même genre d'autorité dont le précédent Parlement a fait preuve en mettant en oeuvre le programme La colline verte parce qu'il croyait que nous, parlementaires fédéraux, devions d'abord et avant tout assumer nos responsabilités, personnellement et sérieusement.

Toutefois, le projet de loi fait plus que cela. Il s'attaque à des problèmes clés avec lesquels le monde entier est aujourd'hui aux prises. Ces problèmes étaient encore bien au coeur de la conférence des Nations Unies à Beijing, qui a pris fin la semaine dernière. Les préoccupations des femmes des pays en voie de développement à l'égard de choses que nous tenons pour acquises, tels les besoins fondamentaux en matière de santé, le besoin de protection et un environnement sûr pour elles et pour leurs enfants, étaient au premier rang à l'ordre du jour.

Quatorze millions d'enfants meurent encore chaque jour dans le monde de la diarrhée, soit 40 000 enfants par jour rien que parce qu'ils n'ont pas accès à de l'eau potable. Voilà pourquoi il importe de prendre des mesures en tant que pays et en tant que grand acteur au sein de la collectivité mondiale pour s'assurer que le gouvernement et nous, parlementaires, préservons en priorité la salubrité de ce monde que nous allons léguer aux générations futures.

[Français]

Monsieur le Président, c'est donc un privilège de voir ce projet de loi déposé en Chambre et d'avoir l'occasion de l'appuyer.

[Traduction]

J'exhorte tous les députés à appuyer ce projet de loi, à nous laisser accomplir cet important travail qui consiste à s'assurer que tout ce que le gouvernement fait participe à la préservation de l'environnement, dans le cadre de notre devoir mondial.

(1245)

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, ma collègue d'Ottawa-Ouest qui vient d'intervenir sur le projet de loi C-83 manquait, je pense, d'éclaircissements. Lorsqu'elle a affirmé, en prémisse, qu'elle s'interrogeait sur les intentions de l'opposition officielle, soit celles du Bloc québécois, concernant la création du poste de commissaire à l'environnement et au développement durable, je voudrais lui rappeler que, hier, vers 13 h 50, je déclarais de mon fauteuil à la Chambre des communes, et je vais le citer lentement pour qu'elle entende très bien: «Monsieur le Président, l'opposition officielle n'a pas l'intention, du moins pour le moment, de contester le contenu du mandat que la ministre entend confier au commissaire à l'environnement. Cependant, nous déplorons le fait que celui-ci n'aura, en fin de compte, qu'un simple pouvoir de suggestion.»

Alors, si elle avait été attentive comme je l'ai été tout à l'heure en l'écoutant, elle aurait sûrement découvert que le Bloc québécois n'a pas l'intention de s'opposer à la nomination d'un commissaire à l'environnement et au développement durable mais, au contraire, il veut qu'on lui donne des pouvoirs et non seulement qu'il puisse faire des suggestions, comme le vérificateur général le fait présentement.

Le vérificateur général, après les Fêtes, présentera encore cette année son rapport. On va se péter les bretelles, nous, de l'opposition. On relèvera pour tous nos contribuables canadiens les horreurs de ce gouvernement. La première semaine, on en parlera très abondamment, la deuxième, presque pas et la troisième, on l'aura oublié.

Ma collègue d'Ottawa-Ouest parlait des générations à venir. Je voudrais lui rappeler qu'il gît présentement au fond du golfe, ici, entre les Îles-de-la-Madeleine et l'Île-du-Prince-Édouard-et on en a fêté le 25e anniversaire la semaine dernière-une barge remplie de bunker C. En plus, on a annoncé, à la fin juin, qu'en plus du bunker C, il y a une quantité importante d'huile contaminée aux BPC. En 1970, c'était le Parti libéral qui était au pouvoir. Il l'a été de 1970 à 1984, donc, pour 14 ans. Ça fera deux ans dans trois semaines que vous êtes là et rien n'a été fait.

Vous faites des discours, des discours, mais vous n'agissez pas! Il est beau de parler des générations à venir, de dire que chaque citoyen canadien est milliardaire. C'est beau à dire, mais ce sont des paroles vides de sens. Si ma collègue veut être plus riche, je lui suggère d'acheter des parts de Québécois ou de Canadiens qui seraient intéressés à vendre leur part à un prix très raisonnable.


14595

En terminant, je souhaiterais que ma collègue d'Ottawa-Ouest fasse des pressions sur la ministre de l'Environnement pour que le commissaire à l'environnement et au développement durable n'ait pas seulement un pouvoir de suggestion, mais qu'il ait un pouvoir avec des dents, afin qu'il puisse avoir la possibilité de contraindre et d'obliger le gouvernement, les ministères, à respecter l'environnement et le développement durable, avec lesquels certains députés du gouvernement libéral se gargarisent présentement.

Je me rappelle du Plan d'action Saint-Laurent, Phases 1 et 2, où on devait dépolluer le fleuve Saint-Laurent. J'écoutais encore, la semaine dernière, un reportage où on capturait des poissons et où on analysait leur chair. C'est pire! C'est pire!

M. Lincoln: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il faudrait laisser du temps à ma collègue pour répondre, parce que le temps est presque écoulé. Il est en train de faire une péroraison qui prendra tout le temps et ma collègue n'aura pas le temps de répondre à sa litanie de malheurs.

Le vice-président: La Présidence accorde chaque fois le même temps au député qui pose la question et au député qui répond.

(1250)

M. Chrétien (Frontenac): Monsieur le Président, vous savez que c'est une tactique du député de Lachine-Lac-Saint-Louis de distraire l'opposition. On dirait qu'on veut bâillonner l'opposition officielle, ces temps-ci. On a peur d'entendre ce que nos concitoyens nous rapportent dans chacune de nos circonscriptions.

J'étais à dire que le Plan d'action Saint-Laurent pour dépolluer le fleuve Saint-Laurent et, pis encore, ce gouvernement, écoutez bien cela, sur un budget de 19,2 millions de dollars, a pris 6 millions de dollars pour faire des études sur la décontamination du fleuve, mais on a fait ces études, tenez-vous bien, à Miramichi, au Nouveau-Brunswick, à plusieurs milliers de kilomètres du fleuve Saint-Laurent. Où est la logique?

J'aimerais entendre ma collègue d'Ottawa-Ouest sur l'effet autre que celui de suggérer le commissaire à l'environnement cela aura.

Mme Catterall: Monsieur le Président, d'abord, j'aimerais souligner à mon collègue de l'autre côté de la Chambre que le chef du Bloc, lorsqu'il était ministre de l'Environnement, avait alors la responsabilité d'agir concernant le Irving Whale et il n'a rien fait.

Personnellement, j'ai posé des questions précises en cette Chambre, mais le gouvernement de l'époque, dont le chef du Bloc était membre, soit ministre de l'Environnement, n'a rien fait concernant le Irving Whale. La ministre du gouvernement actuel est la première à avoir le courage de prendre des décisions concernant le Irving Whale, de prendre action pour renflouer le Irving Whale.

Nous savons, et mon collègue d'en face le comprend également, qu'il y a des problèmes et des dangers si le projet n'est pas fait avec beaucoup de soins.

J'aimerais vous répondre également concernant les responsabilités du vérificateur général. Peut-être que le Bloc aimerait un système de gouvernement où la seule manière de progresser serait de forcer des gens à avoir recours aux tribunaux du pays pour forcer des actions. Nous préférons un système où les ministères, qui sont responsables devant cette Chambre, devant le premier ministre et devant le peuple du Canada, sont responsables de faire ce qu'ils peuvent, ce qu'ils doivent dans leur propre ministère et d'assurer que toutes les actions de leur ministère sont conformes au principe du développement durable et de la protection de l'environnement.

(1255)

Si le Bloc croit que le commissaire à l'environnement n'aura aucun pouvoir, c'est parce qu'il ne croit au pouvoir du public. L'obligation de ce commissaire sera d'informer cette Chambre et le public, et de rendre responsables nous les députés, nous le gouvernement, nos ministères, nos ministres. C'est cela la force dans une démocratie qui est efficace.

[Traduction]

M. Harbance Singh Dhaliwal (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je prends la parole dans ce débat sur le projet de loi C-83, une très importante mesure législative. Je voudrais en parler au nom de mes électeurs de Vancouver-Sud pour qui cette question revêt une très grande importance.

L'environnement est une question sur laquelle j'ai beaucoup appris récemment. Ce sont mes enfants qui m'en ont appris le plus à ce sujet. En effet, nos trois enfants nous ont appris beaucoup de choses, à ma femme et à moi, que nous ne savions pas en matière d'environnement. C'est très important parce que les jeunes sont souvent à l'avant-garde de bien des manières, mais nous ne leur accordons pas l'attention qu'ils méritent. Nous pouvons apprendre des plus jeunes générations, comme j'ai moi-même appris des choses sur l'environnement grâce à mes enfants.

Je tiens à parler de l'environnement parce que nous avons appris en histoire économique que la prospérité est étroitement liée à notre respect pour l'environnement. L'histoire regorge d'exemples où les civilisations qui ne respectent pas l'environnement détruisent leur propre société. Il existe de nombreux exemples de sociétés qui ont déboisé leur habitat à la recherche de combustible et ont provoqué, par conséquent, de l'érosion, nuisant du même coup à l'agriculture. Ces sociétés-là ont ainsi détruit une ressource essentielle à leur survie.

Le projet de loi est une mesure qui figure dans le livre rouge. Le gouvernement libéral a dit que l'environnement et l'économie allaient désormais de pair, que notre prospérité économique future était très importante. Nous tenons à préserver cette prospérité économique. Nous tenons à préserver et à respecter aussi l'environnement.


14596

C'est pourquoi il très important que les initiatives du gouvernement soient examinées par un commissaire à l'environnement et que le gouvernement tienne compte du facteur écologique dans ses décisions. Le projet de loi C-83 montre aux Canadiens que le gouvernement libéral est sérieux quand il parle d'environnement et de développement durable.

Nous utilisons assez souvent l'expression «développement durable». C'est une expression assez largement et sagement utilisée. Nous devrions élaborer une définition de ce qu'il faut entendre par développement durable. Pour mes collègues à la Chambre et le public qui nous regarde, le développement durable est une forme de développement qui ne diminue pas le niveau de vie ou la qualité de vie des générations à venir; c'est une forme de développement qui n'enlève rien aux générations à venir.

À bien des égards, nous avons déjà failli à la tâche. Nous avons privé les générations à venir de choses qui nous ont été léguées. Par exemple, on prévient souvent les parents de ne pas laisser les enfants jouer dehors entre certaines heures du jour en raison des effets néfastes que peut avoir l'amincissement de la couche d'ozone sur leur santé. Je me souviens que lorsque j'étais enfant, nous n'entendions jamais de tels avertissements. Nous n'avions pas à nous protéger, mais nos enfants le doivent. Nous avons déjà privé les prochaines générations de quelque chose parce que, pour avoir un niveau de vie plus élevé tout de suite, nous leur avons enlevé des plaisirs comme la simple possibilité de jouer dehors en toute quiétude entre certaines heures du jour.

(1300)

Nous avons encore beaucoup à faire, mais le projet de loi est un début et le développement durable consiste à ne rien enlever aux prochaines générations, voire à leur donner davantage. Nous voulons que les prochaines générations aient plus que nous, aujourd'hui. J'espère que nous pouvons adopter cela comme philosophie. Nous ne sommes que les gardiens des ressources que nous devons léguer à nos enfants, au moins dans l'état où nous les avons reçues et, ce qui serait mieux, dans un meilleur état.

J'ai vécu une expérience intéressante. Une personne qui donne souvent des conférences sur l'environnement a dessiné une ligne de temps partant des débuts de la vie végétale et animale jusqu'à l'apparition des êtres humains. C'était intéressant parce que sur cette très longue ligne, la présence de l'humanité sur la terre n'occupait qu'un tout petit point.

Certains animaux existent depuis aussi longtemps que 400 millions d'années tandis que l'humanité n'existe que depuis un à trois millions d'années. Si nous détruisons notre environnement et rendons la vie impossible aux prochaines générations, nous n'aurons été qu'une très brève parenthèse dans l'histoire de la vie animale sur la terre. Ce conférencier m'a vraiment ouvert les yeux en m'amenant à me rendre compte que nous sommes sur terre depuis si peu de temps, mais que nous avons déjà fait tant de dommages. Nous avons beaucoup à faire pour être certains de demeurer sur cette ligne de temps pendant encore longtemps. Cela ne sera possible que si nous respectons notre environnement.

Avec le projet de loi C-83, les effets des programmes et des activités du gouvernement sur l'environnement, ainsi que sur l'économie, seront suivis de très près. Les Canadiens attendent du gouvernement qu'il donne l'exemple dans la mise en application des principes du développement durable. En faisant preuve de leadership, le gouvernement fédéral peut aider à convertir toute la société canadienne aux principes du développement durable. C'est à cela que se ramène le projet de loi C-83.

La réponse du gouvernement au rapport du comité mettait l'accent sur l'intégration des questions environnementales au processus décisionnel fédéral. Le gouvernement a déjà pris un certain nombre d'initiatives pour donner suite à ce rapport. Mentionnons, entre autres, la promulgation de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, les mesures prises pour rendre le gouvernement plus écologique, la mise sur pied du groupe de travail sur les instruments économiques et les obstacles aux bonnes pratiques environnementales, et les mesures prises dans le dernier budget fédéral pour donner suite aux premières recommandations du groupe de travail.

Le projet de loi C-83 intègre de façon explicite l'environnement et le développement durable dans la Loi sur le vérificateur général. Cela est très important, car nous ne voulons pas d'un commissaire qui n'ait pas de poids. Nous voulons un commissaire qui a le bras long, et c'est pourquoi je félicite la ministre de l'Environnement d'avoir créé ce poste en vertu de la Loi sur le vérificateur général. Cela donnera au vérificateur général le mandat clair d'ajouter les effets environnementaux aux autres critères, soit l'économie, l'efficacité et l'efficience, qu'il utilise pour déterminer les observations qu'il portera à l'attention de la Chambre des communes.

(1305)

Comme je l'ai dit plus tôt, le projet de loi C-83 aidera le gouvernement fédéral à jouer un rôle de leader dans la progression vers le développement durable. Ces modifications favoriseront activement le développement durable dans tous les ministères fédéraux en obligeant les ministres à déposer à la Chambre des stratégies de développement durable dans lesquelles sont énoncés les objectifs et plans d'action de leurs ministères à cet égard. Les ministères seront tenus de réviser ces stratégies tous les trois ans, et les ministres devront déposer les stratégies révisées à la Chambre.

Le projet de loi C-83 autorisera aussi le vérificateur général à transmettre au ministre compétent toute pétition qu'il reçoit du public sur une question environnementale, et le ministre devra y répondre dans un délai prescrit.

Les modifications que je viens de mentionner sont importantes. Toutefois, cette mesure législative va beaucoup plus loin que cela. Le projet de loi C-83 prévoit également la nomination d'un commissaire à l'environnement et au développement durable qui sera vraiment indépendant. Le commissaire fera partie du bureau du vérificateur général. Il sera nommé par le vérificateur général et relèvera directement de ce dernier, qu'il appuiera dans toutes ses fonctions liées à l'environnement et au développement durable.


14597

Le comité avait recommandé la création d'un bureau distinct pour le commissaire à l'environnement. Cependant, le commissaire pourra travailler efficacement au sein du bureau du vérificateur général, car c'est un bureau qui est très respecté. Ce bureau a le bras long, comme je l'ai dit plus tôt, et il a déjà l'expertise nécessaire pour commencer à mettre ces modifications en oeuvre immédiatement.

Il s'ensuit également que les questions touchant l'environnement et le développement durable seront intégrées aux facteurs économiques dans les fonctions du bureau, comme ce doit être le cas dans un monde soucieux de développement durable.

Le commissaire devra également aider le vérificateur général à remplir ses fonctions en matière d'environnement et de développement durable. Le commissaire contrôlera les progrès réalisés par les ministères dans le domaine du développement durable et en fera rapport à la Chambre des communes. Il examinera les stratégies de développement durable des ministères, contrôlera la mise en oeuvre de leurs plans d'action et le niveau de réalisation de leurs objectifs. Le projet de loi oblige également le commissaire à présenter à la Chambre des communes un rapport annuel sur tout sujet relié aux aspects environnementaux du développement durable qu'il juge digne d'attention, notamment le degré de mise en oeuvre des plans d'action et de réalisation des objectifs, ainsi que sur le nombre, l'objet et l'état d'avancement des pétitions reçues par les ministres.

Ces modifications revêtent une importance historique et sont sans précédent. Elles auront des répercussions considérables sur la manière de fonctionner du gouvernement. Elles font en sorte que, peu importe qui sera le vérificateur général en titre, l'environnement et le développement durable conserveront une importance considérable dans la population active. Les modifications assurent la présence d'un leadership dans le domaine du développement durable par la manière proactive dont elles favorisent et rendent opérationnel le développement durable dans les ministères fédéraux et dans tous les principaux secteurs économiques au Canada. Le gouvernement devra rendre pleinement compte à la population de son leadership et des progrès accomplis sur le plan du développement durable.

Je suis heureux de voir que, au cours de l'année qui s'est écoulée, le gouvernement a fait une promesse dans le livre rouge et qu'il a engagé le Parlement et la population canadienne à réaliser cette promesse et même à aller plus loin encore.

Toutefois, nos efforts en vue de faire du développement durable une réalité n'en sont toutefois qu'à leurs débuts. Le projet de loi fera des ministères, au cours des mois et des années à venir, des intervenants dynamiques dans le développement et la mise en oeuvre des stratégies de développement durable.

Des députés d'en face ont dit que nous n'étions pas allés assez loin. Je tiens à leur dire que ce projet de loi constitue un premier pas décisif parce qu'il reconnaît à quel point l'environnement est important. Il en reconnaît l'importance pour les générations qui suivront et pour notre prospérité économique future. Il ne servirait à rien de jouir aujourd'hui d'une prospérité économique considérable si les générations futures devaient en être privées.

(1310)

Nous devons faire en sorte de protéger le monde pour les générations à venir et de nous assurer un environnement vivable, un environnement où l'on trouve de l'eau pure et de l'air pur. Nous devons faire en sorte que nos décisions, en tant que gouvernement, garantissent la réalisation d'un développement durable et maintiennent notre qualité de vie pour les générations futures sans que ce soit au détriment de certaines couches de la société.

Nous savons que, parfois, dans certains pays en développement où l'on ne respecte pas l'environnement et où il n'y a pas d'eau potable, ce sont les pauvres, et surtout les femmes, qui en paient le prix, lorsqu'elles doivent marcher deux milles pour aller en chercher. Des enfants meurent faute d'avoir de l'eau potable.

Nous avons déjà fait beaucoup de chemin, et je suis sûr que mes collègues et le ministre de l'Environnement continueront leur bon travail sur ces questions. C'est très important pour moi et pour mes électeurs. C'est un enjeu très important pour l'Ouest, et je suis reconnaissant d'avoir pu prendre la parole au nom des électeurs de Vancouver-Sud.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de faire quelques observations sur les déclarations du député de Vancouver-Sud.

Je pense que tous les Canadiens reconnaissent la nécessité de prêter une grande attention à ce qui se passe dans l'environnement et il est certain que le développement durable est un facteur important.

Le député d'en face mentionnait que ce projet de loi, le projet de loi C-83, contenait des modifications qui sont sans précédent au Parlement pour s'occuper de l'environnement. Comme je le disais plus tôt, il y a maintenant des années que le vérificateur général existe et qu'il examine le fonctionnement du gouvernement et critique ses façons de faire.

Rapport après rapport, le vérificateur général critique les différents ministères, fait des recommandations, mais ces rapports aboutissent sur des étagères et ramassent la poussière.

C'est une chose que de constituer une commission, un organisme ou de nommer un particulier pour examiner de façon indépendante la façon dont le gouvernement gère ses affaires. C'est une chose que de produire des rapports, de faire des recommandations, des observations particulièrement claires, de présenter des demandes de compte, tout cela c'est une chose. Une autre, tout à fait différente, c'est que le gouvernement suive ces recommandations. Le gouvernement n'a jamais démontré un enthousiasme délirant pour les recommandations et les critiques du vérificateur général. Nous n'avons pas vu beaucoup de résultats au cours des années. Le présent gouvernement n'a certainement rien fait pour mettre fin à cette longue histoire de négligence du rapport du vérificateur général.

Je reconnais que le projet de loi C-83 contient certaines modifications qui sont sans précédent au Parlement dans le domaine de la protection de l'environnement, mais j'aimerais suggérer au gouvernement qu'il prenne d'autres mesures sans précédent en cessant de


14598

ne faire aucun cas des rapports du vérificateur général et en commençant à mettre ces recommandations en oeuvre. Ce serait une innovation sans précédent si le gouvernement arrêtait de ne tenir aucun compte des recommandations du vérificateur général et commençait à les mettre en oeuvre.

Je vais laisser le député avec cette pensée et je suis persuadé qu'il voudra me donner l'assurance que, quelles que soient les critiques et les recommandations de ce nouveau commissaire, le gouvernement agira dans le sens que cette personne préconisera.

(1315)

M. Dhaliwal: Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention et de sa question.

Je tiens à le rassurer que, en tant que gouvernement, nous ne créerions pas un tel poste de commissaire sans en prendre l'entière responsabilité et sans nous assurer que les rapports publiés par ce dernier sont pris très au sérieux et que nous y répondons.

Il arrive très souvent que le vérificateur général fasse part de ses préoccupations à la Chambre. Et bien souvent, j'ai vu le ministre ou le ministère intéressé réagir très rapidement et faire savoir au vérificateur que ses observations étaient prises très au sérieux. J'ai vu des députés d'en face se lever et citer le vérificateur général. De toute évidence, eux aussi le prennent très au sérieux. Je sais que tous les députés prennent ces questions très au sérieux et qu'ils en font état à la Chambre.

Les exemples abondent pour prouver que les gouvernements réagissent, prennent les mesures nécessaires et font enquête lorsque le vérificateur général leur signale quelque chose; lorsqu'ils le peuvent et lorsque cela est souhaitable, ils rectifient la situation. Que le député se rassure, c'est bien ainsi que le gouvernement entend continuer de réagir aux rapports qui seront publiés.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques observations.

D'abord, le député a parlé pendant longtemps de l'eau et de la nécessité de prendre conscience de l'importance de ne pas polluer cette ressource. Cela va de soi, mais on ne perd rien à le répéter. Je me demande si le député est au courant du projet d'assainissement du fleuve Fraser, des efforts de Finn Donnelly de la Colombie-Britannique, qui a entrepris de parcourir à la nage tout le fleuve Fraser afin de sensibiliser la population à la nécessité de dépolluer ce qui constitue le principal cours d'eau de cette province.

Deuxièmement, il parle de développement durable. À son avis, sur quelle côte de la Colombie-Britannique le ministère des Pêches et des Océans a-t-il le mieux réussi dans ses initiatives de développement durable concernant les pêches, la côte ouest ou la côte est?

M. Dhaliwal: Monsieur le Président, comme l'a dit le député de Fraser Valley-Est, l'eau non polluée est un bien essentiel. Nous avons pu le lire récemment dans le rapport de la Banque mondiale, l'eau saine sera une ressource très importante pour les habitants de la planète.

Je tiens aussi à rendre hommage à ce jeune homme qui parcourt à la nage le fleuve Fraser sur toute sa longueur afin de sensibiliser les gens à la nécessité de ne pas polluer les plans d'eau. Il importe de retenir que, lorsqu'une ressource comme l'eau est polluée, il est très coûteux de l'assainir et de la remettre en bon état. Il est beaucoup plus facile de prévenir la pollution avant qu'elle ne se produise.

En ma qualité de secrétaire parlementaire, je suis heureux d'avoir beaucoup appris au sujet du développement durable et de l'interdépendance entre les ressources. Notre écosystème est tellement vulnérable aux changements et il reste en grande partie encore mystérieux à nos yeux. Nous ne comprenons pas, par exemple, quel est l'effet de la température de l'eau sur les poissons. Nous ne comprenons pas l'interdépendance entre les diverses composantes de l'écosystème. Nous avons encore beaucoup à apprendre. Nous devons faire davantage pour les générations futures.

Je ferai tout ce que je peux pour favoriser le développement durable et veiller à ce que nous ne fassions rien qui pourrait nuire aux générations futures. J'essaierai d'atteindre cet objectif dans toute la mesure de mes capacités.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

(1320)

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: À la demande du whip adjoint du gouvernement, le vote est reporté à 17 h 30.

* * *

LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 19 juin, de la motion: Que le projet de loi C-94, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse, soit lu pour la deuxième fois et renvoyée à un comité.

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, si le gouvernement fédéral se voit offrir l'occasion de protéger les emplois, de sauvegarder l'environnement, de protéger les consommateurs et de maintenir le Canada à la fine pointe de la technologie automobile, doit-il la saisir? Mais comment donc! Bien sûr que nous saisirons l'occasion d'appuyer la technologie qui nous aide à améliorer notre économie d'essence et à atteindre nos objectifs au chapitre du changement climatique. Bien sûr que nous allons tout mettre en


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oeuvre pour réduire la pollution atmosphérique et le smog. C'est pourquoi nous avons pris des mesures pour supprimer le MMT de l'essence sans plomb canadien et c'est pourquoi je suis heureuse aujourd'hui de me prononcer en faveur du projet de loi C-94, Loi sur les additifs à base de manganèse.

[Français]

Ce projet de loi interdira l'importation et le commerce interprovincial du MMT, un additif du carburant à base de manganèse fabriqué aux États-Unis. Le projet de loi proposé s'appliquera 60 jours après avoir reçu la sanction. Le Canada, actuellement, est le seul pays au monde où le MMT est encore utilisé dans l'essence sans plomb. Même en Bulgarie, on a fait des études et on a décidé de ne pas l'utiliser. Les États-Unis l'ont banni en 1968 de leur essence sans plomb. La Bulgarie et l'Argentine sont les seuls autres pays manifestant quelque intérêt que ce soit pour son utilisation. Mais finalement, comme je l'ai dit, la Bulgarie a décidé de ne pas l'utiliser.

Pourquoi le MMT n'est-il pas utilisé par davantage de pays? Parce que le MMT entrave le fonctionnement du dispositif antipollution que l'on trouve dans les voitures et les camions d'aujourd'hui.

[Traduction]

Mon ministère a reçu et examiné d'innombrables études concernant les effets du MMT sur ce matériel. J'ai moi-même vu ces études des sociétés Ford, Chrysler, General Motors, Toyota, Honda, Subaru, Nissan, Mazda, Mercedes, BMW, Volkswagen, Volvo, Saab, Lada, Jaguar, Land Rover et Hyundai. Ces études distinctes mènent toutes à la même conclusion: le MMT nuit aux systèmes de diagnostic intégrés où l'on trouve des dispositifs antipollution. Ces systèmes sont extrêmement importants pour l'environnement.

Il suffit de se rendre dans le lower mainland de la Colombie-Britannique pour savoir que nous avons vraiment besoin d'une loi rigoureuse sur les émissions provenant des véhicules automobiles. Le MMT empêche d'obtenir le genre d'émissions non polluées que recherchent les gouvernements de toutes les régions du pays.

Ces systèmes de diagnostic intégrés sont cruciaux pour l'assainissement de l'environnement. Ils sont chargés de surveiller les dispositifs antipollution d'un véhicule et d'informer son conducteur lorsque l'un d'eux est défectueux. Ils font en sorte que les moteurs moins polluants qui sortent des chaînes de montage fonctionnent comme ils le devraient. Ils font en sorte que les automobiles soient bien entretenues, ce qui réduit les émissions provenant des tuyaux d'échappement et permet d'économiser de l'essence.

Il suffit d'acheter une nouvelle voiture pour savoir que les modèles de cette année, comme ceux qui sortiront l'année prochaine et les années suivantes, sont considérablement améliorés en fait de niveaux d'émissions, d'économie d'essence et de dispositifs antipollution. Il faudrait permettre aux automobiles de fonctionner non seulement dans l'intérêt de leurs conducteurs, mais surtout pour éviter la pollution atmosphérique dans nos villes.

(1325)

Il s'agit d'une technologie fondamentale. Il faut lui donner la chance de donner les résultats escomptés. Avec ce projet de loi, nous nous assurons de pouvoir nous servir de la technologie antipollution moderne dans les villes canadiennes, villes qui ont beaucoup souffert, l'été dernier, du smog causé par le trop grand nombre d'automobiles qui obstruaient les artères de nos villes.

[Français]

Ce gouvernement ne permettra pas que le MMT empêche l'industrie automobile canadienne de concevoir des véhicules beaucoup moins polluants. L'environnement du Canada et les consommateurs canadiens ont le droit d'avoir le meilleur dispositif antipollution possible.

Le gouvernement fédéral attendait depuis 1985 que les industries automobiles et pétrolières se mettent ensemble pour trouver une solution à ce problème identifié par le gouvernement déjà il y a dix ans passés. J'exhortais personnellement les deux industries de se mettre ensemble et trouver une solution. J'ai même offert aux compagnies qui fabriquent le MMT, qu'ils donnent le choix aux consommateurs, qu'il y ait au moins une pompe sans MMT, et ils ont refusé carrément, absolument. Il n'ont pas d'intérêt pour le consommateur, il n'ont pas d'intérêt antipollution, ils n'ont que l'intérêt pour un produit polluant importé des États-Unis, qui n'est même pas utilisé aux États-Unis parce qu'on n'a pas le droit, depuis 1978, de s'en servir aux États-Unis. Mais là, on doit l'accepter chez nous. Comment ça?

[Traduction]

Je veux le répéter, car je crois que c'est important dans le cadre de ce débat. Nous attendons depuis dix ans que les importateurs de ce produit trouvent une solution commune de concert avec les fabricants d'automobiles. Nous ne sommes pas intéressés à trouver des solutions législatives à tous les problèmes des consommateurs.

J'ai moi-même offert, dans le cadre de rencontres personnelles avec les importateurs de ce produit, que dans chaque station-service, il y ait au moins une pompe pour l'essence sans MMT. Je les ai invités à donner le choix aux consommateurs. Ils ont refusé. Ils ont rejeté catégoriquement cette idée, malgré toutes les études effectuées à ce sujet. Je crois qu'aux dernières nouvelles, 17 sociétés fabriquant ou vendant au Canada des automobiles ont demandé de l'essence sans MMT. Il semble que les consommateurs soient victimes d'une immense conspiration.

Monsieur le Président, comment pensez-vous que les consommateurs canadiens se sentent lorsqu'ils savent qu'il est 17 fois plus fréquent au Canada qu'aux États-Unis que les bougies ne fonctionnent pas? Pourquoi? Pour quelles raisons pensez-vous que dans le manuel de Toyota, on nous met en garde contre l'utilisation de l'essence avec MMT. En fait, les nouveaux manuels avertiront les propriétaires qu'ils risquent de ne plus pouvoir profiter des avantages de la garantie s'ils utilisent de l'essence avec du MMT. Comment se fait-il que les fabricants d'automobiles au Canada ont laissé entendre que faute de progrès au sujet du MMT, ils risquent d'être forcés d'ajouter jusqu'à 3 000 $ au prix d'une nouvelle automobile vendue au Canada par rapport à son prix de vente aux États-Unis,


14600

alors que la seule différence réside dans la présence de MMT dans l'essence?

Pour une raison quelconque, malgré les offres directes faites par le gouvernement fédéral aux importateurs de ce produit pour trouver un produit de remplacement, ils ne cessent de refuser. Dix ans d'attente pour une solution, ça suffit. Étant donné que les nouvelles exigences en matière d'émissions des automobiles devraient être établies sous peu, nous devons agir rapidement. En fait, au moment où nous nous parlons, certains modèles 1996 qui sortent des usines n'ont pas de module de diagnostic, car pour le moment, les sociétés ne peuvent garantir le fonctionnement de ce module tant qu'il y aura du MMT dans l'essence.

[Français]

Même alors, j'ai reculé, j'ai donné une échéance aux compagnies pour résoudre le problème au mois de décembre dernier. Mais ils n'en étaient pas capables. J'ai reculé l'échéance jusqu'au mois de février, mais pour une raison quelconque les compagnies qui étaient en train d'importer de l'éthyle ne pouvaient pas trouver d'autre moyen que de le forcer à tous les niveaux pétroliers.

(1330)

Encore une fois, on attendait. Eh bien, l'attente de dix ans a assez duré. Il est temps que le gouvernement passe à l'action en faveur des consommateurs, en faveur de la technologie antipollution et surtout, en faveur de l'environnement.

[Traduction]

Si nous n'agissons pas, nos programmes de réduction des émissions des véhicules seront menacés. Nous risquons de ne pas atteindre de grandes réductions en ce qui concerne le smog, le monoxyde de carbone et les hydrocarbures.

Si nous ne réagissons pas maintenant, les consommateurs ne pourront profiter de systèmes antipollution à la fine pointe de la technologie, car ils n'ont pas accès à l'essence sans MMT. Faute de prendre des mesures maintenant, les fabricants d'automobiles déconnecteront les systèmes de diagnostic sur les modèles 1996, du fait des dommages causés par le MMT.

À l'heure actuelle, la société General Motors sort de ses usines des automobiles sur lesquelles les modules de diagnostic sont débranchés. Les fabricants ne sont plus disposés à assumer les risques accrus en matière de garantie que font peser les dommages causés par le MMT aux systèmes antipollution.

Au bout du compte, c'est le consommateur canadien, le contribuable ou le propriétaire d'automobile, qui paye davantage, étant donné que l'entretien des autos au Canada est plus coûteux à cause de la présence de MMT. Nous sommes opposés à cela. Nous ne permettrons pas que notre technologie de pointe soit menacée.

Cette substance n'est pas fabriquée au Canada, elle vient des États-Unis, qui l'ont interdite il y a presque 20 ans. Les Américains la produisent, mais comme ils ne peuvent l'utiliser dans leur pays, ils l'exportent au Canada, dernier bastion du MMT. Nous ne permettrons pas que les consommateurs canadiens se fassent avoir comme cela.

Des voix: Bravo!

Mme Copps: L'équipement antipollution ne doit pas être moins efficace au Canada qu'il ne l'est aux États-Unis et la compétitivité de notre industrie automobile ne doit pas être menacée. Nous ne permettrons pas que les investissements et les milliers d'emplois qui en dépendent soient menacés au Canada.

[Français]

Bien résoudre la question du MMT aura des effets écologiques positifs de par l'utilisation des techniques de contrôle des émissions les plus sophistiquées. De plus, cela permettra aux Canadiens et aux Canadiennes de bénéficier de la même garantie que les propriétaires d'automobiles aux États-Unis. Résoudre le problème du MMT garantira par ailleurs que les programmes canadiens de contrôle d'émissions de véhicules automobiles ne divergent pas des programmes américains. Cela signifie que la population canadienne continuera de bénéficier des avantages économiques et techniques dérivés d'un parc automobile nord-américain harmonisé.

Cela signifie aussi que le secteur industriel automobile canadien, que ce soit au Québec, en Ontario ou ailleurs, gardera sa compétitivité.

[Traduction]

Soyons clairs. La lutte contre la pollution due aux véhicules motorisés n'est plus seulement la responsabilité d'une seule industrie, que ce soit l'industrie automobile ou pétrolière, ou du gouvernement. Le progrès réalisé à cet égard exige des efforts de tous les Canadiens.

L'industrie pétrolière a besoin de progresser pour améliorer la composition et les caractéristiques des combustibles consommés par ces moteurs. L'industrie automobile a besoin de faire des progrès en matière de techniques de contrôle des émissions des véhicules, comme celles des systèmes de diagnostic de bord.

[Français]

Quant au gouvernement, il doit passer à l'action pour réduire la pollution causée par les véhicules. C'est le genre d'action que nous avons entreprise avec le projet de loi C-94 et le genre d'action que nous entreprenons lorsque nous mettons en place une stratégie globale du contrôle des émissions de véhicules automobiles qui comprend notamment l'adoption de normes plus rigoureuses en matière de systèmes d'échappement des véhicules.

Pour répondre à ces normes, nous comptons sur les techniques sophistiquées de contrôle d'émissions et sur les carburants qu'elles requièrent. Nous avons besoin de nouvelles technologies. Nous avons besoin de réduire le smog ainsi que les émissions d'oxyde de carbone et d'hydrocarbures. Il nous faut réduire ce genre d'émissions qui ont un effet majeur négatif sur la qualité de l'air en milieu urbain, ainsi que sur l'effet de serre sur le climat. Ce gouvernement prend au sérieux ses responsabilités en matière de changements climatiques.

(1335)

[Traduction]

Il est exact que les températures augmentent avec la hausse des émissions de carbone. Il est exact que le gaz carbonique a atteint des concentrations de 25 p. 100 supérieures à celles qui ont pu se


14601

produire au cours des 220 000 ans de l'histoire de l'atmosphère. Il est exact que la moyenne des températures terrestres aujourd'hui dépasse de quatre à six degrés celle de la dernière époque glaciaire.

Le député de l'Assemblée législative de l'Île-du-Prince-Édouard qui est présent à la tribune aujourd'hui connaît sûrement les profondes répercussions de notre indifférence face au changement climatique que subissent nos régions côtières, y compris la vallée du bas Fraser de la Colombie-Britannique et l'Île-du-Prince-Édouard. Il est exact que, si nous ne prenons aucune mesure, la moyenne des températures terrestres augmentera encore de 1,5 à 4,5 degrés au cours du prochain demi-siècle.

En d'autres termes, nos enfants pourraient être confrontés à un réchauffement de la planète comparable à celui qui a déclenché la fin de l'époque glaciaire. Ils pourraient faire face au genre de réchauffement de la planète capable de faire monter le niveau de la mer, de dessécher les forêts, de transformer les terres arables en désert et de faire disparaître des localités et même des pays entiers dans certains cas.

Le changement climatique ne ressemble pas aux autres problèmes environnementaux. Il n'est pas possible d'agir après coup. Dans le cas du changement climatique, si nous attendons que le problème nous submerge, si nous ne tenons pas compte des preuves scientifiques qui s'accumulent plus durement, plus rapidement et plus solidement que jamais auparavant, il sera trop tard. Dans le cas du changement climatique, la solution réside dans la prévention. Par mesure de prévention, il faut fabriquer les produits de façon plus écologique, avoir accès à des automobiles moins polluantes, consommer moins d'énergie grâce par exemple à des systèmes de diagnostic de bord qui peuvent nous prévenir en cas de mauvais fonctionnement de nos systèmes ou quand notre convertisseur n'est pas aussi efficace qu'il le devrait. Il faut aussi consommer moins d'énergie, conserver nos ressources naturelles et mettre au point et en application les toutes dernières technologies vertes comme les technologies de réduction des émissions dans les voitures et les camions d'aujourd'hui.

La mesure dont la Chambre est saisie n'est qu'une modeste mesure dans notre campagne en faveur d'un environnement meilleur. Elle est favorable à l'environnement, favorable aux consommateurs et favorable à la création d'emplois. Dix-huit des fabricants d'automobiles du Canada estiment que nous faisons ce qui s'impose. Les Canadiens pensent eux aussi que nous faisons ce qui s'impose.

Le MMT ne peut plus faire obstacle aux progrès que nous continuons de réaliser pour réduire les émissions des véhicules automobiles, compte tenu de la nécessité incessante de protéger l'environnement.

Il nous faut protéger les emplois canadiens. Il nous faut protéger les investissements canadiens dans la technologie de pointe. Il nous faut protéger les ressources financières des consommateurs canadiens. Et, par dessus tout, il nous faut protéger l'air que nous respirons. Faisons donc du Canada le dernier pays au monde à avoir finalement mis fin à l'utilisation du MMT dans l'essence sans plomb.

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je félicite la vice-première ministre de son engagement à l'égard de l'environnement et de ce qu'elle a dit aujourd'hui. Je voudrais rappeler quelques faits dont elle n'a pas parlé dans son discours.

Si le MMT était retiré de l'essence, la teneur en oxyde d'azote augmenterait de 20 p. 100 dans notre environnement. Or, ce gaz contribue pour beaucoup à la formation du smog.

La vice-première ministre présente une foule d'études. Or, elles ont toutes été faites par des fabricants de voitures. Je voudrais lui signaler des études publiées récemment par l'EPA, selon lesquelles le MMT n'endommage aucunement les dispositifs des voitures.

Comme la vice-première ministre peut-elle justifier la suppression du MMT dans l'essence si les émissions d'oxyde d'azote augmenteraient ainsi de 20 p. 100? Va-t-elle commander une étude indépendante sur la question du MMT pour savoir une fois pour toutes s'il est dommageable pour les ordinateurs des voitures et nocif pour l'être humain?

(1340)

Mme Copps: Monsieur le Président, dans le préambule à sa question, le député laisse entendre que ces 17 compagnies d'automobiles ont en quelque sorte intérêt à détruire le marché du MMT. Les seules études qui, à ma connaissance, appuient le MMT sont pondues en quantité et à toute vitesse par la compagnie qui importe le produit, la même compagnie qui, j'en suis persuadée, a fourni au député les données sur la contribution du MMT à la protection de l'environnement.

Si le député veut replacer les choses dans leur contexte, il saura que la suppression du MMT peut améliorer jusqu'à 600 p. 100 la qualité des émissions des voitures, notamment en permettant que les systèmes diagnostiques de bord des voitures neuves fonctionnent. Le MMT ne contribuera pas à la protection de l'environnement. Sa présence nuira à l'environnement.

Les compagnies Toyota, Ford, GM et Saab sont des entreprises concurrentes. Elles ne forment pas une collusion. Pour quelque raison bizarre, 18 sociétés automobiles, autant productrices qu'importatrices, ont mené des études indépendantes qui ont permis de cerner une seule variable entre l'essence canadienne et l'essence américaine qui contribue au taux de défaillance des systèmes diagnostiques de bord. Cette variable unique, c'est le MMT. Ces mêmes compagnies ont fourni au ministère des rapports d'études qui montrent que le taux de défaillance des bougies d'allumage est 17 fois plus élevé au Canada qu'aux États-Unis.

Les consommateurs du sud-ouest de la Colombie-Britannique devraient-ils changer 17 fois de bougies? Monsieur le Président, si ce produit est aussi fantastique que le prétend la société Ethyl, pourquoi cette société n'offre-t-elle pas le choix aux consommateurs, comme le lui demande le gouvernement? Pourquoi les producteurs de l'ICPP ne laissent-ils pas le choix aux gens? Si ce produit est tellement fantastique, pourquoi ne pas laisser les consommateurs décider? Et pourquoi ont-ils rejeté l'offre que je leur ai faite en personne d'avoir, dans toutes les stations-services du Canada, une seule pompe à essence libre de MMT? Si leur produit


14602

est si extraordinaire, pourquoi le Canada est-il maintenant le seul pays au monde à permettre son utilisation?

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, j'ai bien apprécié certaines des observations faites par la vice-première ministre. Je me demande si la vice-première ministre aurait l'obligeance de déposer certaines des études qu'elle a citées aujourd'hui et qu'elle a tenues dans ses mains devant la Chambre. Aurait-elle l'obligeance de déposer ces documents afin que nous puissions les examiner?

Mme Copps: Monsieur le Président, les auteurs ont partagé ces études. Le député n'est pas sans savoir que, lorsque les fabricants évaluent leurs automobiles, les résultats de leurs travaux sont évidemment très confidentiels. Comme je l'avais promis, les fabricants en question ont rencontré des représentants de l'ICPP, au cours d'une réunion privée organisée par mon ministère, et en ont profité pour examiner chacune de ces études.

Malheureusement, l'ICPP qui avait promis de garder le secret n'a pas respecté son engagement et les études ont été remises à certaines personnes. Des renseignements confidentiels que tous les fabricants automobiles cherchent à protéger lorsqu'ils effectuent des essais sur leurs propres véhicules ont donc été divulgués.

Je peux fournir au député des analyses de la documentation qui a été examinée par l'ICPP. Je peux lui fournir des avis généraux formulés par des représentants de l'industrie. Je ne peux pas lui fournir les études individuelles qui ont été remises à l'ICPP et qui ont été divulguées, contrairement aux termes d'un accord conclu avec mon cabinet.

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, je remercie la ministre de l'Environnement des efforts qu'elle faits aujourd'hui.

Je crois que la majorité des députés appuient le projet de loi dont nous sommes actuellement saisis. Je félicite la ministre d'avoir présenté cette mesure législative. Par ailleurs, elle sait sûrement qu'on peut réaliser une bonne partie de ce qu'elle dit au sujet de l'environnement, des carburants et de la nécessité d'adopter une approche proactive et de se tourner vers l'avenir en appuyant les additifs à base d'éthanol.

(1345)

Dans l'ouest du Canada, bien des gens participent à des projets de mise en valeur de l'éthanol, non seulement pour aider à protéger l'environnement, mais aussi pour faciliter le développement économique dans les régions ayant besoin d'aide à ce chapitre. Je me demande si la ministre peut aujourd'hui annoncer son appui et son engagement envers les additifs à base d'éthanol et dire ce qu'elle peut faire pour les Canadiens de l'Ouest.

Mme Copps: Monsieur le Président, lorsque nous avons déposé le projet de loi exigeant que 75 p. 100 de tous les nouveaux véhicules du gouvernement fédéral utilisent des carburants de remplacement, c'était en partie pour essayer d'encourager ce marché. Le parc automobile du gouvernement fédéral comprend actuellement 25 000 véhicules. Si nous tenons compte du nombre de voitures des sociétés d'État, il y a 39 000 véhicules sur les routes en raison des activités du gouvernement fédéral. Nous exigeons que75 p. 100 de ceux-ci utilisent des carburants de remplacement d'ici cinq ans.

Nous croyons créer ainsi le genre de créneau commercial qui deviendra, nous l'espérons, un catalyseur incitant le secteur privé à développer davantage le secteur des carburants de remplacement. Nous n'avons pas exigé l'emploi d'un carburant en particulier, mais l'éthanol est un produit de remplacement qui peut actuellement être intégré aux émissions des véhicules. C'est une solution de remplacement très intéressante.

Nous avons essayé de créer une demande pour que les consommateurs se tournent massivement vers les carburants de remplacement, ce qui aidera une industrie plutôt jeune. Comme le député le sait, l'éthanol peut actuellement être mélangé dans une proportion de 10 p. 100, et toute nouvelle conversion sera bénéfique pour les ressources naturelles et pour le réchauffement des températures actuellement constaté à l'échelle de la planète.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir intervenir dans ce débat, d'autant plus que j'ai profité de l'été pour faire de la recherche et que je connais maintenant mieux cette question.

J'ai été assez abasourdi en écoutant le discours passionné de la ministre de l'Environnement. Je n'ai pu m'empêcher de penser qu'elle n'était qu'une marionnette dont les fils étaient tirés par les puissants du pays.

À ma connaissance, ce projet de loi a été déposé à la Chambre aujourd'hui parce que l'Association des fabricants de véhicules à moteur est d'avis que le MMT a pour effet de faire allumer les voyants des systèmes de diagnostic à bord des voitures même s'il n'y a aucune défectuosité. Je crois savoir que l'association a, en somme, dit à la ministre qu'elle devait interdire le MMT au Canada, à défaut de quoi l'association ferait débrancher les systèmes de diagnostic à bord des voitures destinées au Canada, augmenterait le coût de la garantie des voitures ou raccourcirait la durée de la garantie. L'AFVM soutient également que le MMT provoque des ratés d'allumage de certaines bougies.

Je n'arrive pas à comprendre, compte tenu des nombreuses études qui ont été faites sur cette question, notamment aux États-Unis où le produit est interdit depuis 18 ans mais où il sera de nouveau autorisé à la fin de l'année, pourquoi la ministre a accepté sans poser de questions la position de l'AFVM.

En outre, les partisans de ce projet de loi prétendent que l'interdiction du MMT aura pour effet de réduire la pollution et les risques pour la santé humaine. Parmi d'autres justifications de l'interdiction du MMT, citons la nécessité de l'uniformité dans la composition de l'essence en Amérique du Nord. Je voudrais aborder brièvement toutes ces questions dans mon intervention à la Chambre aujourd'hui, mais, ce qui importe le plus, je voudrais montrer comment l'interdiction du MMT peut nuire au marché canadien.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais souligner que plusieurs de mes collègues réformistes et moi avons rencontré des représentants des deux parties, l'Association des fabricants des véhicules à moteur et Ethyl Corporation, ce que n'a pas fait la ministre. En effet, celle-ci a systématiquement refusé de rencontrer


14603

les deux parties, s'étant contenté de recueillir uniquement le point de vue de l'Association des fabricants de véhicules à moteur. Je ne crois pas que vous puissiez vous faire une opinion nuancée de la question sans avoir entendu les deux camps exposer leurs arguments.

(1350)

Après l'avoir fait, j'ai acquis la conviction profonde que ni les menaces sur la santé ou l'environnement ni aucune raison technique ne justifiait l'interdiction du MMT au Canada. Ce produit est utilisé au Canada depuis 1977. Il a été utilisé aux États-Unis jusqu'en 1970, lorsqu'il a été interdit en raison des dispositions de la loi sur la qualité de l'air qui exigeaient que tout additif à l'essence n'étant pas très semblable à cette dernière soit officiellement certifié après qu'il ait été prouvé que cet additif était compatible avec les systèmes d'échappement des véhicules.

La société qui fabrique le MMT, Ethyl Corporation, a soumis l'additif à des tests très poussés et, en décembre 1993, l'agence américaine de protection de l'environnement a conclu que le MMT n'entraînerait aucune défaillance des dispositifs anti-pollution.

Contrairement à la déclaration faite par la ministre le 5 mai 1995, la cour d'appel des États-Unis a ordonné, le 14 avril 1995, à l'agence de protection de l'environnement d'approuver le produit d'Ethyl Corporation. La ministre connaissait très bien cette décision.

En décembre 1993, après une longue série de tests l'agence de protection de l'environnement a conclu que le MMT ne provoquerait aucune défaillance des dispositifs anti-pollution, y compris des diagnostiqueurs de bord. L'agence puis, plus tard, la cour d'appel des États-Unis, n'ont pas retenu les craintes exprimées par les constructeurs américains d'automobiles au sujet des dommages que le MMT pourrait causer aux diagnostiqueurs de bord.

Les constructeurs d'automobiles des États-Unis ont éprouvé de graves difficultés lorsqu'ils ont voulu faire certifier ces diagnostiqueurs aux États-Unis, où le MMT n'est pas actuellement ajouté à l'essence sans plomb. L'agence de protection de l'environnement et le conseil des ressources atmosphériques de la Californie ont récemment modifié leur réglementation pour permettre la certification de véhicules qui ne sont pas conformes aux exigences rattachées au diagnostiqueur de bord II.

L'agence de protection de l'environnement a déclaré au registraire fédéral que les constructeurs d'automobiles éprouvaient de la difficulté à respecter toutes les exigences avec leur diagnostiqueur de bord et que ces difficultés n'auraient vraisemblablement pas encore été surmontées pour les modèles 1996-1997.

Au Canada, la Motor Vehicle Manufacturers Association attribue apparemment les difficultés du diagnostiqueur II au MMT. Les membres de cette association ont fait du lobbying auprès du gouvernement canadien, menaçant de débrancher les systèmes diagnostiqueurs de bord et de faire payer la note aux consommateurs si le gouvernement n'adopte pas une mesure législative interdisant le MMT.

Le gouvernement canadien semble avoir répondu à ces menaces sans tenir compte du fait que les fabricants d'automobiles ne se sont pas conformés aux normes relatives aux systèmes diagnostiqueurs de bord de catégorie II aux États-Unis pour la plupart des nouveaux modèles.

De plus, je voudrais savoir si la ministre peut expliquer pourquoi elle a dit que, si les fabricants d'automobiles mettaient leurs menaces à exécution et débranchaient les systèmes diagnostiqueurs de bord, les émissions des véhicules seraient dix fois plus élevées. Cette fausse affirmation révèle une mauvaise compréhension des questions techniques en cause et fait ressortir le besoin d'une évaluation technique indépendante des affirmations faites par l'Association des fabricants de véhicules à moteur.

Les systèmes diagnostiqueurs de bord ne réduisent pas les émissions des véhicules. Ce sont simplement des systèmes de surveillance conçus pour aviser le conducteur lorsque l'équipement de contrôle des émissions est défectueux. L'enlèvement ou, plus vraisemblablement, le débranchement des systèmes diagnostiqueurs de bord ne servirait qu'à empêcher le voyant indiquant une défectuosité de s'allumer. Aucun équipement de contrôle des émissions ne serait enlevé.

Sur la question des bougies d'allumage, la ministre de l'Environnement a cité certaines plaintes pour justifier son projet de loi visant à interdire le MMT. Cependant, elle a négligé de mentionner que les plaintes des fabricants d'automobiles portaient principalement sur un type de bougie à électrodes au platine utilisée surtout dans une version d'un moteur de marque GM. Ce fabricant a cessé d'utiliser ce type de bougie, ce qui laisse entendre que les problèmes étaient liés à la conception de la bougie elle-même et non au MMT.

Aucun lien causal n'a été établi entre le MMT et les problèmes de bougies. À ma connaissance, les données relatives aux garanties n'ont jamais été rendues publiques.

(1355)

J'ai appris que, pour mieux évaluer la validité des préoccupations exprimées par GM, des essais indépendants ont été effectués dans le Southwest Research Institute à San Antonio, au Texas. Pour ces essais, on s'est servi des bougies longue durée à électrodes de platine utilisées dans toutes les voitures Chevrolet Cavalier 1994 équipées d'un moteur de 2,2 litres. L'étude entreprise par General Motors Corporation aux États-Unis visait à déterminer la différence entre les bougies neuves, les bougies défectueuses et les bougies usagées qui n'avaient causé aucun problème.

Les bougies étaient activées par une alimentation dont l'intensité était accrue progressivement. On mesurait le courant de fuite jusqu'au moment de l'étincelle, et on filmait le tout pour voir si l'arc se produisait entre les électrodes ou entre l'électrode et le culot.

Le programme d'essai des bougies a démontré que l'utilisation du MMT n'est pas en cause dans les problèmes constatés au sujet des bougies. Afin de satisfaire aux exigences de la Clean Air Act américaine concernant la réintroduction du MMT et des essences sans plomb aux États-Unis, la Ethyl Corportion m'a informé qu'elle

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avait procédé à la batterie de tests la plus complète jamais entreprise au sujet d'un additif de l'essence.

Le programme d'essai, qui a été conçu avec l'aide de l'Environmental Protection Agency des États-Unis et des fabricants d'autos américains, visait à évaluer et documenter le rendement du MMT dans les émissions d'échappement d'automobiles et à évaluer les effets qu'aurait sur la qualité de l'air l'utilisation de MMT dans l'essence aux États-Unis.

Le programme initial d'évaluation des émissions de MMT comportait 48 automobiles. Ces véhicules, qui ont parcouru plus de 3 millions de milles, constituaient un vaste échantillonnage des automobiles conduits en Amérique du Nord. La moitié des véhicules utilisaient de l'essence avec additif et l'autre moitié, de l'essence sans additif.

Les émissions d'échappement faisaient l'objet d'une vérification tous les 5 000 milles. Les essais ont démontré hors de tout doute que l'utilisation de MMT réduit la quantité d'oxyde d'azote d'environ 20 p. 100. Je souligne en passant que l'EPA a participé à l'élaboration des protocoles d'essai. En outre, des organisations indépendantes chargées d'analyser les données provenant des essais ont utilisé des méthodes comparables à celles utilisées par l'EPA.

Je voudrais aussi parler des risques pour la santé liés à l'utilisation du MMT. Le 6 décembre 1994, Santé Canada a publié les résultats d'un rapport d'évaluation indépendant concernant les risques. L'étude, intitulée «Risk Assessment for the Combustion Products of MMT in Gazoline», mettait l'accent sur les nouvelles études épidémiologiques et les risques au Canada.

L'étude de Santé Canada a révélé que l'utilisation de MMT dans l'essence ne pose de risque à la santé dans aucun segment de la population. Ce rapport dit en particulier que les émissions de manganèse provenant de la combustion du MMT dans les véhicules à moteur à essence ne pénètrent pas l'atmosphère en quantités ou dans des conditions telles qu'elles peuvent créer un risque pour la santé. Il conclut également qu'il n'y a pas de lien entre les niveaux de manganèse inhalable en suspension et les ventes ou l'utilisation du MMT dans l'essence sans plomb, que cette question soit examinée par région ou par saison.

Le 25 avril 1995, le ministre de l'Industrie a déclaré qu'il est crucial d'avoir sur le marché nord-américain des normes uniformes en ce qui concerne l'essence. Le ministre de l'Industrie faisait référence au fait qu'à l'époque, le MMT n'était pas utilisé aux États-Unis mais l'était au Canada et qu'il était important que le même type d'essence . . .

Le Président: J'interromps le député auquel je repasserai bien sûr la parole tout de suite après la période des questions. Comme il est 14 heures, conformément au paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre procède maintenant aux déclarations des députés conformément à l'article 31 du Règlement.


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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES ÉLECTIONS AU NOUVEAU-BRUNSWICK

M. Andy Scott (Fredericton-York-Sunbury, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais féliciter le Parti libéral du Nouveau-Brunswick et le premier ministre Frank McKenna pour leur victoire décisive au scrutin, le 11 septembre. Les habitants du Nouveau-Brunswick ont réaffirmé leur engagement à l'égard de la vision du gouvernement provincial en ce qui concerne la croissance de l'emploi.

L'ancien parti de l'opposition officielle, le Confederation of Regions Party, s'oppose au bilinguisme au Canada et au Nouveau-Brunswick. Il est important de noter qu'il a été complètement exclu de l'Assemblée législative. Dans ma propre circonscription, cinq ténors de ce parti à l'Assemblée législative ont été battus et un seul a fini au deuxième rang. C'est un message pour dire aux habitants du Nouveau-Brunswick que les deux communautés linguistiques font partie intégrante de notre province et de notre pays. Je félicite les habitants de Fredericton et du Nouveau-Brunswick d'avoir défendu leur vision d'une société équitable et tolérante.

Encore une fois, je félicite le Parti libéral et M. McKenna pour leur victoire.

* * *

[Français]

LA RÉFORME DES PROGRAMMES SOCIAUX

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, les étudiants tiendront demain une manifestation dans toutes les régions du Québec afin de protester contre les coupures effectuées dans les programmes sociaux et l'attitude intransigeante du gouvernement fédéral vis-à-vis les demandes unanimes et légitimes de l'Assemblée nationale du Québec.

Les compressions budgétaires effectuées par le gouvernement fédéral auront des répercussions catastrophiques sur le fardeau fiscal des provinces et le premier ministre se garde bien de le reconnaître. Les coupures aux transferts sociaux effectuées par son gouvernement plongent les provinces et les étudiants dans l'impasse. Elles contraignent, d'une part, les provinces à décréter une hausse sans précédent des frais de scolarité et, d'autre part, à augmenter de façon incontrôlable l'endettement contracté par les étudiants.

Après toutes ces cachotteries et ces astuces pour masquer les conséquences de sa réforme, comment les Québécois et les Québécoises pourraient-ils faire confiance au premier ministre du Canada?

* * *

[Traduction]

LA PEINE CAPITALE

M. Ted White (North Vancouver, Réf.): Monsieur le Président, depuis 1970, 89 p. 100 des députés conservateurs et environ 81 p.


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100 des députés travaillistes au Royaume-Uni ont voté au moins une fois à l'encontre des ordres du whip. Ce vote libre a mené au rejet de certains projets de loi gouvernementaux impopulaires mais n'a jamais entraîné la chute du gouvernement. Au Royaume-Uni, les députés ont le courage de défendre et de représenter leurs électeurs parce que les avantages d'agir ainsi l'emportent de loin sur les inconvénients d'une sanction de la part du whip.

Mercredi, la Chambre examinera ma motion demandant au gouvernement de tenir un référendum à caractère exécutoire sur la peine capitale en même temps que les prochaines élections. Je vais demander aux députés de faire de ma motion une mesure devant être mise aux voix et de l'appuyer afin que ceux qui paient nos salaires puissent avoir leur mot à dire sur cette question des plus importante.

Montrons à nos électeurs que nous sommes prêts à les représenter et à le faire dans l'esprit d'une véritable démocratie.

* * *

LE PROGRAMME D'INDEMNISATION AU TITRE DU NID-DE-CORBEAU

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture doit reconsidérer au moins une décision que lui et son ministère ont prise au sujet du programme d'indemnisation faisant suite à l'élimination de la subvention du Nid-de-Corbeau.

Les agriculteurs des Prairies, en particulier ceux du nord-ouest de la Saskatchewan qui ont produit des cultures fourragères en 1994 en alternance avec la culture de céréales ont été déclarés n'avoir pas droit à une indemnisation pour les terres ensemencées pour la production de cultures fourragères. Tout l'été, j'ai reçu des appels et des lettres de producteurs pris dans cette situation injuste. Tout récemment, j'ai reçu des lettres de municipalités rurales demandant que l'on remédie à cette situation injuste étant donné que la valeur des terres consacrées à la culture fourragère va baisser autant que celle des terres cultivées.

Avant de prendre cette décision, le ministre de l'Agriculture a déclaré avoir consulté la Saskatchewan Association of Rural Municipalities et attacher de l'importance à son opinion. J'espère qu'il continue de le faire et qu'il reconsidérera sa décision de façon à ce que les producteurs qui gèrent leurs terres de façon adéquate ne soient pas trop pénalisés du fait de cette situation malheureuse et injuste.

* * *

LES CANADIAN COUNTRY MUSIC AWARDS

M. Peter Thalheimer (Timmins-Chapleau, Lib.): Monsieur le Président, Shania Twain, l'une des nombreuses célébrités musicales de ma circonscription de Timmins-Chapleau, a remporté un immense succès, hier soir, à la remise des prix de la musique country, les Canadian Country Music Awards. On lui a décerné, entre autres, le prix de la meilleure interprète féminine et du meilleur album de l'année.

Shania, qui a travaillé très fort pour en arriver là, ne se repose pas pour autant sur ses lauriers. Elle est sans conteste l'étoile montante de la musique country. Lors de l'une de ses apparitions sur le podium pour recevoir un de ses nombreux prix, elle a remercié sa ville natale de Timmins.

À mon tour, j'aimerais remercier Shania, sa famille, ses amis, ses professeurs et ses voisins, qui tous peuvent être très fiers du succès qu'elle a remporté hier soir. J'aimerais également féliciter tous les autres finalistes. Un tel défilé de talents canadiens me rend fier non seulement d'être de Timmins, mais aussi d'être Canadien.

Je demande à tous les députés de se joindre à moi pour féliciter Shania et les autres finalistes canadiens.

* * *

LE DÉCÈS DE M. WALTER ALBERT TOBIN

Mme Bonnie Hickey (St. John's-Est, Lib.): Monsieur le Président, hier on enterrait un citoyen distingué de Terre-Neuve, décédé vendredi. M. Albert Tobin, âgé de 97 ans, était ancien combattant de la Première Guerre mondiale et dernier survivant de la bataille de Beaumont Hamel.

Il n'avait que 17 ans lorsqu'il s'est engagé. Il ne pouvait pas savoir que le 1er juillet 1916, son régiment, le Royal Newfoundland Regiment, serait décimé à Beaumont Hamel. Près de 300 soldats furent tués ou portés disparus; 386 furent blessés. Le lendemain matin, seuls 68 répondirent à l'appel. M. Tobin était de ce nombre. Bien que blessé, il retourna au front après avoir été soigné.

(1405)

Récemment, je m'étais entretenue avec M. Tobin lors d'une cérémonie en l'honneur des anciens combattants, à Saint John's. Ce fut pour moi un honneur de rencontrer un homme d'un si grand courage et d'une telle stature.

Aujourd'hui, les anciens combattants de la Première Guerre mondiale sont moins de 2 300. Alors que nous pleurons la mort de M. Tobin, nous ferions bien de les écouter, de nous inspirer de leur sagesse et de tirer les leçons de leur expérience. Nous devrions profiter de cette occasion pour dire toute notre gratitude et toute notre fierté à ces hommes et à ces femmes qui ont si bien servi notre pays.

* * *

LES MINES TERRESTRES

Mme Jane Stewart (Brant, Lib.): Monsieur le Président, je suis revenue depuis peu d'un voyage qui m'a amenée d'abord au Cambodge, puis à Gifu, au Japon, où se tenait la deuxième conférence mondiale des parlementaires, sous les auspices des Nations Unies.

Je veux une fois de plus porter à l'attention de la Chambre l'importante question des mines terrestres. Le Cambodge a vraiment acquis plus de stabilité politique et économique, mais les habitants des régions rurales du nord-ouest subissent encore les répercussions de la guerre avec les Khmers rouges. J'ai rencontré des gens qui avaient été déplacés dans une autre région du pays et qui ne peuvent rentrer chez eux, leurs champs étant bourrés de mines. On voit encore un défilé constant d'hommes, de femmes et d'enfants entrer à l'hôpital pour des blessures graves et invalidantes causées par l'explosion de mines. Nous savons que le déminage ne sera pas terminé avant des générations à cause de la lenteur du processus.


14606

À Gifu, les parlementaires du monde ont voté à l'unanimité pour la mise en branle d'une campagne active visant à faire interdire la fabrication, le déploiement et l'utilisation de mines terrestres. Je demande à la Chambre d'envisager de faire la même chose.

* * *

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris, Lib.): Monsieur le Président, tous les Canadiens, y compris les habitants de ma circonscription, sont inquiets face à la tenue du référendum au Québec. À leur avis, tous les Canadiens ont maintenant le devoir de faire connaître les avantages du Canada. Tous les représentants élus des Canadiens qui tiennent à leur pays doivent aussi faire montre d'un leadership calme et compétent.

Toute le monde semble comprendre cela, sauf le Parti réformiste. Je suis attristé et déçu de voir à quel point ce parti agit de façon irresponsable. Plutôt que de prendre la défense du Canada, le Parti réformiste semble vouloir contribuer au succès des séparatistes.

De quel côté se situent les réformistes? Souhaitent-ils secrètement que les Québécois votent oui? S'ils veulent voir les Québécois voter pour le Canada, comme c'est le cas de tous les fédéralistes, j'espère qu'ils feront montre d'un leadership positif qui aidera les gens du Québec à choisir le Canada.

Les habitants de Brandon-Souris et moi-même sommes heureux d'avoir le premier ministre Chrétien, avec son leadership solide et intelligent, pour défendre les intérêts du Canada, plutôt que le Parti réformiste, qui exploite la situation de façon irresponsable.

* * *

[Français]

LE DÉPUTÉ DE BROME-MISSISQUOI

M. Gaston Leroux (Richmond-Wolfe, BQ): Monsieur le Président, les Canadiennes et les Canadiens ont pu découvrir une nouvelle facette de l'ignorance de certains fédéralistes en entendant les propos tenus hier en cette Chambre par le député de Brome-Missisquoi.

Le message publicitaire sur la drogue réalisé par le CLSC de Matane et diffusé par Radio-Canada dans l'est du Québec a été retiré des ondes parce qu'il ne respectait pas la réglementation de la SRC car le nom de l'auteur du message n'était pas connu.

Une fois la correction apportée, le message a de nouveau été diffusé et l'est toujours. Visiblement, le député de Brome-Missisquoi nage dans l'ignorance. Il aurait mieux valu qu'il s'abstienne de parler d'un dossier qu'il ne connaissait pas.

Non à la drogue est une excellente décision, surtout quand on s'apprête à dire oui à notre avenir.

[Traduction]

LA CULTURE

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, vendredi dernier, le ministre du Patrimoine canadien a prononcé ce qui, selon lui, devait être une allocution visionnaire sur l'avenir de la culture canadienne. Par gentillesse, je dirai simplement que ce ne fut pas aussi visionnaire que prévu.

Son allocution ressemblait plutôt à une crise de colère, pleine de contradictions et de doléances contre les méchants américains. Le sous-thème de ce discours était que nous ne sommes pas responsables puisque nous sommes tous des victimes.

Étant donné la concurrence mondiale, l'industrie culturelle canadienne doit tirer le meilleur parti des marchés financiers américains. Nous avons besoin de concurrence, de partenaires internationaux et de nouveaux marchés. Les subventions et le protectionnisme ne produiront que des guerres commerciales et des entreprises faibles et inefficaces; elles feront disparaître les choix et les valeurs que les Canadiens méritent.

Effectivement, le changement fait peur parfois, mais le ministre devrait arrêter de se plaindre et laisser la place aux autres. Alors même qu'il présentait son allocution, des personnes et des entreprises du secteur privé canadien exploraient de nouvelles avenues et, sans l'aide du gouvernement, faisait connaître la culture canadienne au monde entier et la faisait avancer vers le XXIe siècle.

* * *

(1410)

JOHN ET JESSE DAVIDSON

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, demain deux habitants spéciaux de ma circonscription, leur famille, leurs amis, leurs sympathisants et, je l'espère, beaucoup de députés, parcourront les derniers kilomètres d'un courageux voyage.

Le voyage de Jesse a commencé le 20 mai, lorsque John Davidson a commencé la traversée de l'Ontario en poussant son fils, Jesse, pour sensibiliser les gens à la recherche génétique et récolter des fonds. Jesse, 15 ans, atteint de la dystrophie musculaire de Duchenne, est en chaise roulante. Ensemble, ils ont vu la beauté de notre province et les visages et les coeurs de sa population. Pour ceux qui ont fait un bout de route avec John et Jesse, ces derniers mois, l'expérience forçait à l'humilité.

La recherche médicale profitera de ce voyage de 3 300 kilomètres. À ce jour, les fonds récoltés dépassent 700 000 $. Je pense que grâce à John et Jesse, l'été de 95 aura témoigné de l'amour et du dévouement de la famille Davidson.

Félicitations et bravo.


14607

[Français]

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

M. Bernard Patry (Pierrefonds-Dollard, Lib.): Monsieur le Président, le chef de l'opposition officielle se surprend que la population s'interroge sur la validité de la démarche référendaire.

Cette résistance est essentiellement due au fait que les trois chefs séparatistes ont choisi de ne pas respecter leurs promesses d'une question claire et simple.

Le chef du Bloc québécois se souvient-il qu'il a déclaré, le 19 octobre 1994, dans le cadre d'un discours, et je le cite: «Une question simple sera posée aux Québécois, dans le style suivant: voulez-vous que le Québec devienne un pays souverain? Oui ou non.»

Plutôt que de respecter cette promesse, le chef bloquiste a préféré mettre en application ce qu'il condamnait, et je cite ses propres paroles: «[ . . . ] en posant une question tellement subtile, tellement «smarte», qu'à la fin, on ne sait plus ce qu'elle veut dire [ . . . ]on tombe dans le ridicule.»

* * *

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre déclarait hier qu'il reconnaîtra ou ne reconnaîtra pas le référendum québécois, dépendant de son résultat. Si le non l'emporte, la réponse est claire; mais si le oui gagne, il envisage de tenir un référendum fédéral. Ce nouveau concept de démocratie à géométrie variable est scandaleux et doit être dénoncé par tous ceux qui respectent la démocratie.

Selon les propos tenus par Mme Lysianne Gagnon dans le journal La Presse, et je cite: «M. Parizeau peut se féliciter à bon droit d'avoir tenu ses promesses. Il s'était engagé à soumettre une question claire. Promesse tenue.»

On voit que le premier ministre fédéral est déconnecté de la réalité québécoise. Même les fédéralistes québécois reconnaissent la légitimité du résultat du référendum. Mais qui peut s'étonner d'un raisonnement aussi douteux, puisqu'il vient de l'artisan du coup de force de 1982 et du fossoyeur de Meech?

* * *

[Traduction]

LES COMITÉS PERMANENTS

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, un député libéral de l'arrière-ban n'a pas beaucoup d'occasions de prendre des décisions qui influent sur la direction et l'atmosphère d'une session parlementaire. Ils se trouvent pourtant devant une de ces occasions, maintenant qu'ils doivent élire les dirigeants des comités permanents de la Chambre des communes.

L'an dernier, les députés de l'arrière-ban ont suivi les directives de leur whip et accordé la vice-présidence de chaque comité au Bloc québécois. Si, une fois de plus, ils donnent aux députés du Bloc tous les postes de vice-présidents, les députés de l'arrière-ban récompenseront des gens qui sont résolus à détruire ce pays. Par contre, s'ils permettent à la véritable opposition nationale de Sa Majesté, le Parti réformiste, d'avoir sa juste part du travail des comités, ils enverront à tous les citoyens le message que la Chambre est résolue à promouvoir des leaders de toutes les provinces et de toutes les régions qui veulent participer à la construction d'un Canada renouvelé et uni.

La décision appartient aux députés de l'arrière-ban. Vont-ils suivre les ordres de leur whip ou vont-ils faire ce qui est juste?

* * *

(1415)

[Français]

LES ÉTUDES COMMANDÉES PAR LE GOUVERNEMENT DU QUÉBEC

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, le 2 septembre 1994, le premier ministre du Québec s'interrogeait à haute voix sur de prétendues études que le gouvernement précédent aurait cachées aux citoyens du Québec. Il déclarait au Journal de Montréal, et je cite: «Ces études existent, elles ont été commandées par Robert Bourassa. S'il ne les dévoile pas d'ici le 12 septembre, il y aura des conclusions à tirer sur la franchise de ces gens-là.»

Un an plus tard et après que le ministre délégué à la Restructuration ait dilapidé des millions de dollars en études rose bonbon, voici que le gouvernement péquiste se retrouve à son tour confronté à des études cachées qu'il refuse de rendre publiques parce qu'elles ne servent pas sa propagande séparatiste. Le premier ministre péquiste peut-il enfin se décider à rendre publiques toutes les études que les Québécois ont payées à même leurs taxes et cesser de cacher la vérité sur les véritables coûts de la séparation? Ça coûte cher, la séparation, et les Québécois diront non à la dilapidation des fonds publics pour assouvir l'ego des Lisette, Jacques, Mario et Lucien.

* * *

[Traduction]

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Chers collègues, je vais faire une légère entorse à nos habitudes pour vous signaler dès maintenant la présence à la tribune du gouverneur de la région de Tula, en Russie, M. Nicolaï Sevryugin.

Des voix: Bravo!

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14608

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE RÉFÉRENDUM QUÉBÉCOIS

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le brouillard s'est épaissi, hier, sur les intentions réelles du premier ministre, à la suite des déclarations qu'il a faites en cette Chambre. D'une part, quand il parle en français, il entretient l'ambiguïté sur la reconnaissance d'un oui; d'autre part, quand il répond en anglais, il laisse clairement entendre qu'il rejettera un oui des Québécois.

Puisque l'avenir même du Canada et du Québec est en cause dans cette affaire, la population est en droit d'exiger du premier ministre qu'il adopte la même position pour tous et l'exprime de façon claire.

Ma question s'adresse au premier ministre. Va-t-il, comme l'a fait hier le Parti réformiste, respecter la tradition démocratique canadienne et reconnaître la validité d'un oui comme d'un non à la question référendaire québécoise?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce que j'ai dit hier en anglais a été traduit en français et vous n'avez qu'à lire le hansard. On a un système: si je parle en français, c'est traduit en anglais, si je parle en anglais, c'est traduit en français. J'ai dit la même chose.

D'ailleurs, peut-être que je pourrais expliquer au chef de l'opposition ceci. Je voudrais lui citer un document du gouvernement de M. Lévesque, qu'il connaît bien, M. Lévesque. En 1977, dans un document qui s'intitulait: La consultation populaire au Québec, on disait: «Les référendums auraient un caractère consultatif.» Je suis d'accord. Le document dit: «La première loi contraignante de la vie politique en démocratie est celle de la majorité clairement exprimée.» Je suis d'accord. Et le document continue: «Ce caractère consultatif des référendums . . . », on aurait dû écrire référenda, en tout cas, « . . . fait qu'il serait inutile d'inclure dans la loi des dispositions spéciales à l'égard de la majorité requise ou du taux nécessaire de participation.»

C'est un système consultatif tel que reconnu par M. René Lévesque et son gouvernement, en 1977. Aujourd'hui, on a une question confuse et ambiguë et on me pose une question à savoir si on allait reconnaître un vote par une voix de majorité seulement. Comme disait si bien M. Johnson hier, on n'est pas pour faire la séparation du Canada à la suite d'un recomptage judiciaire.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre vient de citer M. René Lévesque. Je dois dire, et il s'en rappellera lui-même, que M. Lévesque, au lendemain du référendum de 1980, a accepté le verdict de la population. Il n'a pas considéré que c'était une simple consultation, un simple point de vue, il a accepté et s'est soumis, alors que le premier ministre lui-même a renié les engagements qu'il avait contractés pour arracher un non aux Québécois en 1980.

Des voix: Voilà!

Des voix: Bravo!

M. Bouchard: Nous avons tous noté que le premier ministre tente de réduire à une simple consultation sans conséquence, le référendum qui est en cours. Je lui demande de nous confirmer, ainsi qu'il l'avait également évoqué lui-même, hier, dans une de ses réponses, s'il est vrai qu'il s'apprête à tenir un référendum fédéral pour contraindre le oui québécois?

(1420)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai même pas à songer à cela, parce que nous allons dire au Québec que ce que propose le chef de l'opposition, c'est la séparation du Québec du reste du Canada. Ils vont voter pour demeurer à l'intérieur du Canada. Si la question avait été claire, le chef du chef de l'opposition avait dit ceci durant l'élection: «Voulez-vous que le Québec devienne un pays souverain à telle date?» Il avait dit que ce serait la question.

Par contre, quand le chef de l'opposition a réalisé qu'il ne pouvait pas gagner, il a dit: «On va fabriquer une question gagnante.» Est-ce que c'est cela le respect de la démocratie, fabriquer une question gagnante parce qu'on ne peut pas convaincre les Québécois de quitter le Canada?

J'ai une grande confiance au jugement des Québécois. Ils vont rester au Canada et la question du chef de l'opposition est doublement hypothétique.

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre continue de se cantonner dans la confusion et l'ambiguïté. Il refuse de nous dire clairement s'il va, oui ou non, se sentir lié par les résultats du référendum. Il refuse d'écarter le spectre d'un référendum revanche de la part du gouvernement fédéral.

Je lui demande à tout le moins de soulever un coin du voile et de faire la lumière sur ce qui suit: Est-ce qu'il ne reconnaît pas l'illégitimité de tout référendum fédéral visant à court-circuiter la décision démocratique du peuple québécois sur son avenir politique?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, est-ce que le chef de l'opposition est en train de dire que lorsque les Québécois ont voté contre la proposition de Charlottetown qui aurait accordé la société distincte aux Québécois-le chef de l'opposition a lui-même voté contre cela-le référendum était légitime parce que tout le peuple a été consulté? L'avenir du Canada n'est pas seulement l'affaire d'un groupe de citoyens. Cela a aussi des conséquences pour tous les Canadiens.

Je dois dire que je n'ai même pas à penser à tenir un référendum national comme le Parlement nous y autorise, parce que les gens du Québec vont comprendre que les séparatistes essaient de cacher la vérité. Le chef du chef de l'opposition refuse de déposer des


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documents payés par les contribuables parce que ces documents vont prouver clairement qu'ils essaient de cacher la vérité aux Québécois, parce qu'ils savent très bien que les Québécois veulent demeurer au Canada.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, on peut apprécier les manoeuvres de diversion que tente le premier ministre pour éviter de répondre à la vraie question que lui pose le chef de l'opposition et que lui posent tous les Québécois depuis deux jours par notre entremise. Je vais essayer d'obtenir une réponse une autre fois.

Il se fait le champion de l'ambiguïté, tenant un discours nuancé, selon qu'il parle dans une langue ou dans l'autre. Ou encore, le premier ministre laisse planer des doutes quant à la tenue d'un second référendum possible. Ce n'est jamais clair quand il répond. Je vais lui poser la question encore une fois. Je vais lui donner une chance de répondre clairement.

Le premier ministre du Canada ne réalise-t-il pas que par ses déclarations ambiguës, il sème lui-même la confusion sur toute cette question et réalise-t-il que son rôle de premier ministre l'oblige au contraire à se montrer démocrate, responsable face au choix des Québécois et à le dire très clairement, sans équivoque?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la réponse est non.

Je tiens à remercier le député de m'avoir reproché d'être trop nuancé. C'est la première fois que cela m'arrive dans ma vie, alors je suis très content. Pour moi, mon devoir est clair. Je n'ai pas de leçon à recevoir du député de Roberval quant à mon devoir. Je comprends très bien mon devoir. J'ai été élu pour administrer ce pays, pour donner un bon gouvernement aux Canadiens, pour créer des emplois, pour rendre ce pays encore meilleur. Et une condition essentielle pour y parvenir, c'est de s'assurer que le Canada demeure un pays uni.

(1425)

C'est ce que je vais faire pendant les 40 prochains jours avec M. Johnson, à Québec, pour faire mon devoir de premier ministre de garder ce pays uni pour l'avenir.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, s'il est vrai qu'être nuancé est une qualité, de nuancer son discours selon la langue qu'on utilise est un vilain défaut.

En parlant justement de M. Daniel Johnson, président du Comité du non, il a refusé ce matin de réitérer à l'Assemblée nationale l'engagement qu'il avait pourtant pris la semaine dernière de respecter le oui du Québec.

Faut-il comprendre que le premier ministre du Canada vient de rappeler à l'ordre le président du Comité du non au Québec, comme il l'a fait la semaine dernière pour sa ministre du Travail? Est-ce qu'il a utilisé le même procédé?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, M. Johnson comprend très bien le débat à l'heure actuelle. Il l'a dit, on n'est pas pour séparer un pays à la suite d'un recomptage judiciaire à savoir s'il y a un vote de plus ou non. D'ailleurs, c'est M. Lévesque lui-même et son gouvernement qui ont établi clairement les règles pour que dans une situation comme celle-là, il faut avoir une majorité clairement exprimée. Ce sont les paroles de celui que le chef de l'opposition voudrait remplacer. Il l'admire et il l'adore, dit-il tout le temps. Alors je ne fais que respecter les principes démocratiques mis de l'avant par M. Lévesque. Et M. Johnson l'a dit également: La démocratie commence par l'honnêteté vis-à-vis des citoyens et en leur posant une question claire et nette.

Je défie encore l'opposition, je défie le chef de l'opposition d'appeler M. Parizeau. Comme il reste encore une journée de débat à l'Assemblée nationale, qu'il change donc la question pour une question claire: voulez-vous vous séparer du Canada en date de telle date? Et ils auront une réponse claire et nette; les Québécois vont dire: Nous restons au Canada. Ça, c'est clair.

[Traduction]

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre, à bon droit, a accusé les séparatistes d'édulcorer et d'embrouiller la question référendaire dans une vaine tentative pour obtenir un oui. C'est évidemment la stratégie des séparatistes, et nous la dénonçons et la déplorons. Toutefois, le premier ministre donne des indications contradictoires sur la signification d'un oui, ce qui fait du tort à la cause fédéraliste.

La semaine dernière, le premier ministre a dit qu'un vote affirmatif était un billet aller seulement vers la séparation. Hier, par contre, il a laissé entendre au cours de la période des questions que cet aller simple comprenait peut-être le billet de retour.

Le premier ministre est-il prêt à dire tout à fait clairement aux Québécois qu'un oui mènera à la séparation et non pas à de nouvelles négociations avec le gouvernement fédéral?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai toujours dit que l'objectif du Parti québécois et du Bloc québécois était de séparer le Québec du Canada. Cela me paraît clair.

Je suis très déçu que le chef du Parti réformiste essaie, dans une situation comme celle-ci, de se définir une position différente. Je voudrais lui dire que, comme Canadiens, nous devons être unis pour faire en sorte que le Québec continue de faire partie du Canada.

Des voix: Bravo!

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, depuis 25 ans, je parcours les grandes étendues de l'ouest du Canada, à essayer de bâtir un meilleur . . .

Des voix: Bravo!

(1430)

M. Manning: Si le premier ministre veut parler de la loyauté des députés envers le Canada, qu'il s'adresse au chef de l'opposition, et non au chef du Parti réformiste. La différence, c'est que mon engagement envers le fédéralisme est à la fois une question de coeur et de raison. Ma raison me dit . . .


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Le Président: J'ai un peu de mal à entendre.

M. Manning: Monsieur le Président, je suis attaché au fédéralisme par la raison et par le coeur. Ma raison me dit que la seule manière, pour le Canada, de perdre le référendum, c'est que des Québécois pensent pouvoir voter en faveur de la séparation tout en échappant aux conséquences de ce vote. Ils pensent pouvoir voter pour la séparation et continuer à profiter des avantages du fédéralisme. C'est pourquoi nous demandons au premier ministre de dire clairement qu'un oui entraînera la séparation et que seul le non permettra de maintenir le fédéralisme.

Je pose de nouveau ma question avec sincérité au premier ministre. Nous ne jouons pas. Pourquoi hésite-t-il tellement à faire nettement cette distinction?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, depuis 32 ans, je me suis rendu dans tous les coins du Canada et j'ai partout tenu le même discours sur notre grand pays. Je suis allé au Québec, et je suis allé dans l'Ouest, en Alberta et en Colombie-Britannique. C'est mon devoir de dire ce que j'ai dit. Ils veulent provoquer la séparation, mais n'ont pas assez d'honnêteté intellectuelle pour poser une question claire. Voilà ce que je dois leur dire.

Dans un pays comme le nôtre, il serait irresponsable de reconnaître qu'une simple majorité, à un moment donné, permet de disloquer le pays. Même dans le Parti réformiste, comme un journaliste l'écrivait ce matin, il faut l'appui des deux tiers des membres pour modifier la constitution.

Je ne vais donc pas scinder le pays à cause d'un vote. Ce ne serait pas vraiment démocratique. La vraie démocratie consiste à convaincre la population qu'elle peut se prononcer clairement; c'est ce que nous faisons.

C'est pourquoi nous disons aux Québécois que ces gens-là veulent se séparer, mais qu'ils ne réussiront pas, parce que c'est notre devoir collectif de dire à tous les Québécois que ce qui est proposé, le virage, le mirage et ainsi de suite, ne marchera pas. Ils ne réussiront pas à leurrer les Québécois, car les Québécois sauront, lorsqu'ils iront voter, dans 39 jours, qu'ils ne veulent pas se séparer. Ils resteront dans le Canada parce que c'est leur destinée, leur avenir et leur volonté.

(1435)

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, nous réclamons une réponse ferme, mais nous ne sommes pas encore arrivés à l'obtenir.

Le 12 septembre, la ministre fédérale de l'unité a déclaré: «Les Québécois ont le droit de s'exprimer quant à l'avenir du Québec à l'intérieur du Canada. Nous sommes dans un pays démocratique, et nous respecterons le vote.» Le même jour, Daniel Johnson, chef des forces du non au Québec, à qui on demandait s'il accepterait un vote de 50 p. 100 plus une voix, a répondu: «Oui, tout le monde devra accepter le résultat.»

La ministre fédérale de l'unité et le chef des forces du non au Québec ont tenté d'être plus clairs que le premier ministre sur la signification d'un oui.

Au nom de l'unité nationale, nous ne sommes pas en désaccord sur les objectifs, mais, pour dissiper toute ambiguïté, le premier ministre va-t-il se rallier à la ministre de l'unité et au chef des forces du non au Québec en disant qu'il est d'accord avec eux sur la signification d'un oui?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il est très regrettable de constater que le chef du Parti réformiste pose exactement les mêmes questions que le Bloc québécois.

J'ai toujours dit que la ministre avait répondu très clairement hier, que nous voulons une question claire sur la séparation. Mais la question proposée n'est pas une question claire sur la séparation. C'est une question embrouillée que nous dénonçons. Je dois dire, en entendant cette question embrouillée de la part du chef du Parti réformiste disant que, à cause d'un vote, nous allons laisser le Canada se disloquer, que c'est un bien triste jour pour les Canadiens de l'Ouest.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Travail, responsable du non.

Hier en cette Chambre, la ministre du Travail a tenté de justifier sa volte-face relativement au respect du résultat du référendum en prétendant que la question était ambiguë.

Le 12 septembre dernier, quand elle a déclaré qu'elle respecterait le verdict des Québécois et des Québécoises lors du référendum, la ministre du Travail reconnaît-elle qu'elle connaissait déjà, à ce moment-là, la question référendaire et ce, depuis plusieurs jours?

L'hon. Lucienne Robillard (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, la députée de Rimouski-Témiscouata n'a sûrement pas suivi les déclarations que j'ai faites dans son propre comté. J'étais dans le Bas-Saint-Laurent le lendemain même où la question a été déposée à l'Assemblée nationale du Québec et dès ce moment-là, j'ai dit que nous avions affaire à une question qui était ambiguë et je le maintiens aujourd'hui. C'est la raison pour laquelle la Coalition du non travaillera très fort pendant cette campagne référendaire pour rendre l'enjeu clair aux Québécois, l'enjeu de la séparation du Québec.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, la ministre du Travail admettra-t-elle que c'est par malhonnêteté intellectuelle qu'elle refuse maintenant d'admettre que c'est suite à une réprimande du premier ministre qu'elle a révisé sa position quant au respect du résultat du référendum?

Le Président: Mes chers collègues, aujourd'hui, nous avons utilisé l'expression «honnêteté intellectuelle».

M. Bouchard: Le même mot que le premier ministre.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Nous utilisons maintenant «malhonnêteté intellectuelle». Je vous demanderais, mes chers


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collègues, d'être très judicieux dans le choix de vos mots. Ce sont des choses très, très importantes, je le sais, mais je demanderais à tous les députés, s'il vous plaît, d'utiliser les mots d'une façon très judicieuse.

L'hon. Lucienne Robillard (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais demander qui a la maladie de la cachette? On veut cacher l'enjeu fondamental de ce référendum, qui est la séparation du Québec. On veut cacher les conséquences de ce référendum, si jamais il y a un oui, les conséquences sur le plan économique d'abord, sur le plan politique, sur le plan juridique.

(1440)

En plus, on veut cacher des études qui seraient défavorables à l'option du Parti québécois et du Bloc québécois. Qui est démocrate dans ce pays?

* * *

[Traduction]

L'ÉCONOMIE

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le gouvernement prétend avoir hâte de s'attaquer aux autres questions qui se posent au Parlement et les contribuables canadiens d'un bout à l'autre du pays s'inquiètent de leur sécurité économique, quel que soit le résultat du référendum au Québec.

Le ministre des Finances peut-il nous donner une date précise pour la présentation de son exposé financier de l'automne et nous dire si cet exposé va inclure une date d'échéance pour l'élimination du déficit fédéral?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, pour répondre aux questions dans l'ordre inverse, nous allons procéder comme nous l'avons déclaré, soit en fonction d'objectifs sur deux ans, pour que, dans le cadre du prochain budget, nous puissions établir un objectif pour l'année suivant 1996-1997.

Nous serons heureux, à ce moment-là, d'établir cet objectif, étant donné que ce sera la quatrième année d'affilée que notre gouvernement atteindra son objectif de réduction du déficit.

En ce qui concerne l'exposé de l'automne, nous entendons procéder exactement de la même façon que l'année dernière. À un certain moment, après le début du processus de consultation, lorsque cela s'imposera et qu'il y aura eu suffisamment de consultations pour que le gouvernement réagisse, je serai alors très heureux d'intervenir.

Il y a une distinction importante entre cette année et l'année dernière. L'année dernière, il était extrêmement important d'établir très clairement l'orientation que le gouvernement entendait prendre. Cette orientation s'est vraiment révélée être la bonne. Cette année, je vais donc confirmer cette orientation.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, nous avons eu tout l'été pour régler cette question, et je suis surpris que nous n'ayons toujours pas une date précise pour la présentation d'un exposé économique et financier.

[Français]

Ma question supplémentaire s'adresse au même ministre. Parmi les onze gouvernements au Canada, le gouvernement péquiste et le gouvernement fédéral sont les seuls qui n'ont pas d'engagement de livrer un budget équilibré. Pourquoi le ministre des Finances a-t-il poursuivi la politique fiscale du gouvernement séparatiste en évitant de s'engager à une date limite pour un budget équilibré?

[Traduction]

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Le député n'a aucune honte. Ses alliés rient.

Nous avons précisé très clairement qu'il ne convenait pas d'agir comme le gouvernement précédent pour lequel le député a déjà travaillé et qui n'a jamais atteint ses objectifs de réduction du déficit. Il ne s'agit pas simplement d'établir des objectifs quinquennaux, des objectifs à long terme dont on ne tient plus compte après les élections et qu'on ne réalise jamais.

Nous croyons que nous devons nous assurer la confiance des Canadiens. C'est ce que nous faisons en établissant des objectifs clairs et en les atteignant. Et c'est ce que nous allons continuer de faire.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, alors que l'opposition officielle ne fait que cela depuis deux ans, le premier ministre se découvrait hier un goût soudain de parler des vrais problèmes: de création d'emplois, de croissance économique, de finances publiques. Cependant, son ministre des Finances ne partage pas ce même goût, puisqu'il ne participera pas aux travaux du Comité des finances précédant la consultation prébudgétaire avant la tenue du référendum québécois.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Comment explique-t-il sa décision de ne pas lancer lui-même les consultations prébudgétaires qui débutent aujourd'hui et d'attendre seulement en novembre pour comparaître au Comité des finances?

[Traduction]

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, ce n'est qu'une simple coïncidence si le Parti réformiste et le chef de l'Opposition posent exactement les mêmes questions à propos de l'unité nationale, mais maintenant qu'ils posent les mêmes questions au sujet des finances du pays, je dois avouer que je me demande pourquoi nous avons besoin de ces deux partis. Peut-être qu'un seul ferait l'affaire ou qu'un service de recherche pour les deux suffirait.

Des voix: Bravo!


14612

(1445)

[Français]

En tout cas, monsieur le Président, je vais vous le dire. Nous avons l'intention de suivre exactement le même échéancier que l'année dernière. J'ai comparu devant le Comité des finances vers le 17 octobre, soit après le dépôt des états financiers. Toutefois, ceux de l'an passé ne sont pas encore prêts. Il y a eu quatre ou cinq présentations d'autres groupes devant le Comité des finances. J'ai certainement l'intention de m'y présenter lorsqu'il sera possible de faire des projections sur les taux d'intérêt et de croissance qui seront valables. Je veux que la présentation du ministère des Finances soit valable pour les députés, et en temps et lieu, je vais le faire.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, si on lance un processus de consultation prébudgétaire, le ministre doit être là pour imprégner la direction à cette consultation. Et l'année passée, il a imprégné la direction à la consultation budgétaire. Alors pourquoi son bureau répond, à l'heure actuelle, qu'il sera là uniquement du 1er au 4 novembre? Est-ce que c'est parce qu'il veut cacher des choses aux Québécois qui s'apprêtent à prendre une décision sur leur avenir, qu'il veut cacher aussi son incompétence, puisque, depuis novembre 1994, il n'y a eu aucune création nette d'emplois et la croissance économique est à zéro?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, la raison pour laquelle j'ai comparu le 17 octobre de l'année dernière, soit un peu plus tôt que prévu, c'était pour établir clairement la ligne directrice du gouvernement en termes économiques. Cette année, je viens de le dire, il est de notre intention de le confirmer.

Maintenant, je dois dire que je suis très content de m'apercevoir que le député de Saint-Hyacinthe attend mes directives. J'avais plutôt l'impression qu'il attendait toujours les directives . . .

* * *

[Traduction]

LA SANTÉ

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, le 15 octobre est l'échéance que le gouvernement a fixée aux provinces en ce qui concrne les cliniques médicales semi-privées. Le premier ministre sait-il que ce décret touchera non seulement l'Alberta, mais aussi les soins de santé de haute qualité et les choix offerts en Ontario et au Québec?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, la ministre fédérale de la Santé rencontre en ce moment même ses homologues de toutes les provinces, sauf de l'Alberta, pour examiner leur proposition dans laquelle ils ont convenu, lors d'une réunion tenue en septembre 1994, «de prendre toutes les mesures nécessaires pour réglementer l'établissement de cliniques privées au Canada».

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, des cliniques de ce genre, par exemple MédiClub, à Montréal, et IVF Canada, à Toronto, ne pourraient plus continuer de fonctionner telles qu'elles existent en ce moment. Le premier ministre est-il attaché avec tellement de passion à une loi dépassée qu'il est prêt à retirer des fonds et à réduire les choix offerts aux Canadiens d'un bout à l'autre du pays sur le plan des soins de qualité?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le fait est que le régime de santé canadien, qui compte un seul niveau, coûte 25 p. 100 moins cher que le régime américain et il est universel. Aux États-Unis, ce pays champion des cliniques privées, les services coûtent 25 p. 100 plus cher et 30 millions d'Américains n'ont aucune assurance médicale.

* * *

[Français]

LES PROGRAMMES SOCIAUX

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Hier en cette Chambre, le premier ministre affirmait que sa seule priorité était de s'occuper des vrais problèmes. Comment le premier ministre explique-t-il alors que son gouvernement ait reporté après le référendum toutes les réformes importantes touchant le monde ordinaire, les personnes âgées, les chômeurs, les pauvres et les familles? Est-ce que c'est ça parler des vrais problèmes?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est plutôt le contraire.

(1450)

Si la députée avait pris le temps de regarder de plus près les initiatives prises ces derniers mois, elle saurait que nous avons réussi à mettre en oeuvre un nouveau programme d'aide destiné à 300 000 étudiants qui auront maintenant droit, pour la première fois, à des prêts et bourses, y compris de nouvelles bourses à l'intention des étudiants du Québec.

Grâce à un autre nouveau programme, près de 25 000 jeunes pourront prendre part, dans le cadre de diverses initiatives du secteur privé, à une série de programmes d'apprentissage visant à faciliter la période de transition entre les études et le marché du travail.

Nous avons établi un tout nouveau système, à l'échelle nationale, qui nous permettra d'annoncer aux personnes âgées que leur demande de prestations de retraite sera traitée en l'espace d'une demi-journée, alors qu'il fallait compter huit jours avant, et que ce service sera offert dans près de 700 centres.

Si la députée s'était employée plus activement à regarder ce qui ce passe vraiment dans notre pays, au lieu de faire campagne en faveur du séparatisme, elle aurait vu que nous améliorons le sort des Canadiens.


14613

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, nous avons regardé attentivement. Nous avons vu que le Québec a le championnat de la pauvreté et qu'il n'y a rien de sérieux qui a été fait.

S'il a décidé de reporter à plus tard les réformes annoncées, le premier ministre admettra-t-il que c'est pour cacher les mauvaises nouvelles aux Québécoises et aux Québécois jusqu'après le référendum?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, une fois de plus, c'est la preuve que, au lieu de regarder attentivement les importantes initiatives qui ont été prises cet été, la député s'est livrée à ses activités politiques.

Si elle était mieux informée, elle saurait que, cet été même, nous avons conclu un accord avec le gouvernement du Québec et affecté ainsi un montant d'environ 80 millions de dollars au programme d'aide aux mères seules qui sont pauvres pour leur permettre de poursuivre des études de façon à pouvoir toucher un supplément de revenu et à veiller au mieux-être de leurs enfants. Voilà comment nous luttons contre la pauvreté au Québec.

* * *

[Français]

L'ÉTUDE COMMANDÉE À L'ÉCONOMISTE GEORGES MATHEWS

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, en parlant de cachettes, le ministre québécois délégué à la Restructuration prétend que l'étude préparée par Georges Mathews de l'Institut national de recherche scientifique comportait de nombreux vices méthodologiques et que c'est pour cette raison qu'elle n'a pas été rendue publique encore. L'auteur prétend également qu'il a été victime de la censure publique.

Je demande au ministre des Affaires intergouvernementales s'il peut nous expliquer en quoi cette étude de M. Mathews est si embarrassante pour le gouvernement du Québec?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, la première raison pour laquelle l'étude Mathews, qui a été cachée par le gouvernement du Québec, est embarrassante pour le Parti québécois, c'est qu'elle révèle que les Québécois ont payé, dans les dernières années, 21 p. 100 des recettes fédérales mais qu'ils ont reçu 24 p. 100 des dépenses fédérales totales, ce qui contredit clairement la position qui a été indiquée par le Parti québécois et par le Bloc québécois.

Deuxièmement, l'étude montre que le déficit qui résulterait de la transition serait un déficit beaucoup plus élevé que celui indiqué par les études précédentes. Le gouvernement du Parti québécois a toujours essayé de cacher les coûts de la transition et cette étude les révèle.

* * *

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, les résidants de Bosanquet, à Ipperwash, sont victimes d'une occupation illégale. La ville se sent trahie par le gouvernement fédéral et demande que les lois canadiennes soient appliquées. La ville a publié un communiqué hier à l'intention du gouvernement fédéral et elle examine les options qui s'offrent à elle sur le plan juridique.

Pourquoi les ministres fédéraux s'entêtent-ils à refuser de rencontrer les représentants de la ville?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est bon d'être de retour. Je ne m'attendais pas à recevoir des félicitations de la part du Parti réformiste, mais, depuis trois semaines, même les réformistes pourraient admettre que nous savons traiter direc

(1455)

Je suis allé à Ipperwash, alors que, franchement, tout le monde m'avait dit de ne pas y aller parce c'était dangereux. J'y ai trouvé des chefs spirituels et des gens qui attendaient le Parti libéral, qui voulaient du leadership. Je regrette que le Parti réformiste n'ait pu venir.

À Ipperwash, nous avons un accord en suspens depuis 1942. Il est à peu près temps de le mettre en oeuvre. Les gens ont attendu. Nous avons accepté d'aller de l'avant. Nous aurons un négociateur crédible là-bas. Il rencontrera les représentants des premières nations et, selon toute vraisemblance, ceux de la ville.

M. John Duncan (North Island-Powell River, Réf.): Monsieur le Président, tout le monde convient que le transfert du camp d'Ipperwash s'effectuera sans difficulté. Là n'est pas la question.

Le ministre des Affaires indiennes a déclaré qu'il ne s'impliquerait pas dans une situation s'il y a des activités illégales. Ceux qui n'ont absolument pas participé au processus, ce sont les résidants de la ville qui auront à composer avec les conséquences.

Hier, le ministre de la Défense nationale a déclaré que la négociation était préférable à l'application de la loi. Pourquoi le gouvernement s'oppose-t-il de façon aussi évidente à faire observer les lois canadiennes? Pourquoi avoir deux poids deux mesures?

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, même le député se rend bien compte que nous avons affaire à des émotions et à des griefs bien enracinés. Au camp d'Ipperwash, j'ai pensé qu'il était préférable que les premières nations assurent l'ordre et ce sont leurs membres qui gardent la paix.

Notre politique, c'est l'espoir. Nous ne réussissons pas toujours parce qu'il nous est impossible de faire tout ce que nous voulons


14614

accomplir. Avec leur politique du désespoir, les réformistes prouvent quotidiennement qu'ils atteignent leurs buts.

* * *

[Français]

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Récemment, les représentants de diverses associations étudiantes ont écrit au premier ministre pour lui faire part de leurs inquiétudes quant aux conséquences de la réforme Axworthy sur la hausse des frais de scolarité et l'endettement des étudiants.

Comment le premier ministre explique-t-il son refus de répondre aux étudiants qui lui ont demandé de reconsidérer la décision de couper massivement dans la contribution fédérale au financement de l'éducation collégiale et universitaire?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député se trompe malheureusement un peu dans ses calculs. En réalité, le gouvernement fédéral augmentera cette année de 20 millions de dollars son transfert au Québec aux fins de l'éducation. Entre temps, le gouvernement du Québec aura réduit son budget de l'éducation de 200 millions de dollars.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais faire remarquer au ministre du Développement des ressources humaines que je n'ai mentionné aucun chiffre.

Ma question s'adresse encore au premier ministre. Puisqu'hier le premier ministre a dit qu'il voulait parler des vrais problèmes, est-ce qu'il est conscient aujourd'hui qu'en refusant de répondre aux étudiants et en maintenant sa décision de couper les paiements de transfert, il est en train d'en créer tout un problème pour les étudiants?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en tant que premier ministre, je suis très, très satisfait de la réponse donnée par le ministre responsable.

* * *

[Traduction]

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le Régime de pensions du Canada est un véritable gâchis financier. Le 2 février dernier, le directeur général de la politique à DRHC a adressé à l'actuaire en chef du Canada une note dans laquelle il affirmait que le programme de prestations d'invalidité du Régime de pensions du Canada était en bonne santé financière. Or, une note d'information interne de DRHC datée du 23 février révèle qu'un analyste principal en matière de politiques contredit directement ce jugement.

Comment le ministre peut-il expliquer cette contradiction?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je commencerai par féliciter la députée de Calgary-Sud-Est qui s'est vu confier la fonction très importante de commentatrice des questions relatives aux programmes sociaux de notre pays. Je suis convaincu qu'elle fera des suggestions constructives au fil des mois à venir, ce qui constituera un changement bienvenu par rapport à ce que nous avons entendu jusqu'à présent de la part des députés de son parti.

(1500)

Je voudrais tout d'abord trasmettre à la députée une observation ou un conseil. Il est malheureux que la députée s'exprime comme elle l'a fait en disant que «le Régime de pensions du Canada traverse une crise ou est en train de s'effondrer», d'après les propos que lui prêtaient les médias il y a quelques semaines.

Le Régime de pensions du Canada n'est pas du tout en train de s'effondrer. En fait, il procure des pensions très sûres pour tous les Canadiens. Nous y apporterons des modifications, comme nous sommes tenus de le faire à tous les cinq ans. Le ministre des Finances se réunira avec ses homologues pour en discuter, car il s'agit d'un régime par impartition.

Nous devrons examiner le financement du programme pour nous assurer de sa solidité pour les générations à venir. Voici la position du gouvernement: Nous voulons maintenir un régime de pensions du Canada durable, et nous comptons bien le faire.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'apprécie les observations du ministre, mais j'aimerais bien qu'il réponde à la question que je lui ai posée à propos de la contradiction relevée entre les deux documents que j'ai mentionnés.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, la députée devrait s'habituer au fait que toutes sortes de documents étranges et bizarres circuleront dans ce domaine. Je lui demanderais simplement de vérifier auprès de moi pour s'assurer de leur authenticité ou de leur sérieux.

Si elle ne trouve pas ces documents intéressants, elle pourrait les comparer à un document produit par son propre parti où il était question de privatiser le Régime de pensions du Canada, ce qui aurait pour effet de réduire le montant des prestations pour 1,6 million de personnes âgées.

Nous aimerions vérifier à ce sujet avant qu'elle ne publie un tel document.

* * *

LA PROSTITUTION JUVÉNILE

Mme Judy Bethel (Edmonton-Est, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

La prostitution de rue a des répercussions dévastatrices sur les jeunes qui fréquentent les secteurs touchés et tous ceux qui y vivent.


14615

Au cours du forum sur la prostitution de rue que nous avons organisé dans Edmonton-Est, la vaste majorité des participants ont conclu qu'il fallait imposer des peines plus sévères aux proxénètes et aux clients qui exploitent nos enfants et nos jeunes.

Quelles mesures le ministre prendra-t-il pour protéger les victimes de la prostitution et quand entend-il agir?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, pendant l'été, j'ai entre autres rencontré des agents de police de sept villes canadiennes et j'ai patrouillé avec eux, la nuit, pour découvrir leur perspective du système de justice pénale.

J'ai pu constater notamment les ravages que cause la prostitution de rue et les tragédies que vivent les jeunes exploités qui se livrent à la prostitution. Cela n'a fait qu'intensifier l'engagement que j'ai pris pour lutter contre la prostitution juvénile.

Je signale à la députée qu'Edmonton est l'une des villes que j'ai visitées. Le corps policier d'Edmonton est l'une des forces qui a eu la gentillesse de me laisser accompagner ses agents dans leurs déplacements.

Je veux dire à la députée que le gouvernement est en train de rédiger un projet de loi. Nous prévoyons être en mesure, plus tard cette année, de proposer des modifications au Code criminel afin de lutter plus particulièrement contre la prostitution juvénile.

Je fais remarquer également à la députée que nous avons distribué aux provinces un énoncé des choix possibles décrivant d'autres mesures à envisager. Au moins trois provinces n'ont pas terminé leurs consultations internes, et nous attendons leur avis avant de prendre une décision.

* * *

LES SOINS DE SANTÉ

L'hon. Audrey McLaughlin (Yukon, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Beaucoup de choses divisent notre pays à l'heure actuelle mais, s'il en est une qui unit les Canadiens, c'est la croyance dans un système national de soins de santé.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Les ministres de la santé de tout le Canada sont en réunion ces jours-ci et je voudrais savoir quel message le ministre des Finances a demandé à la ministre de la Santé de faire passer à cette réunion en ce qui concerne l'engagement du gouvernement fédéral d'assurer un financement stable de nos soins de santé.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec), Lib.): Monsieur le Président, dans le budget que nous avons présenté en février dernier, nous avons déclaré catégoriquement que les principes de la Loi canadienne sur la santé étaient ici pour rester, qu'ils avaient été conçus par un gouvernement libéral, qu'ils faisaient partie de notre meilleur patrimoine et que nous les soutiendrions à fond.

Ultérieurement, le premier ministre, la ministre de la Santé et moi-même avons déclaré que, dans le cadre des dernières négociations sur le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, nous allions finalement stabiliser les impôts à un niveau qui nous permettra de préserver le système de soins de santé tant que durera le Canada.

* * *

(1505)

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Chers collègues, nous avons aujourd'hui des invités plutôt spéciaux. Conformément à l'initiative que j'ai prise au cours de la dernière session, j'invite, en votre nom, d'éminents Canadiens à venir se joindre à nous. Aujourd'hui, nous recevons cinq personnes que notre revue nationale, la revue Maclean's, place à son tableau d'honneur.

Je vous demanderais de bien vouloir garder vos applaudissements pour plus tard. Je vais vous présenter les cinq récipiendaires, dont nous sommes à raison tous fiers, compte tenu de leurs réalisations. Ensuite, je vous saurai gré de vous joindre à moi pour leur rendre hommage au nom des Canadiens.

Je vous demanderais de saluer à la tribune le Dr Adolfo de Bold, dont les recherches ont mené à la découverte d'une substance liée à la prévention de l'hypertension; le très honorable Brian Dickson, que nous sommes nombreux à avoir connu pendant bien des années, qui a été juge en chef du Canada de 1984 à 1990; le colonel Don Ethell, le Casque bleu le plus décoré du Canada; M. Bill Kelly, un de nos grands négociateurs de conventions collectives; et M. Arnold MacAuley, un spécialiste de la recherche et du sauvetage. Tels sont nos éminents Canadiens.

Des voix: Bravo!

* * *

[Français]

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS ORALES

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, il est précisé dans notre Règlement que les questions qui peuvent être posées durant la période des questions doivent être-et c'est écrit très clairement-en rapport avec les responsabilités gouvernementales, les responsabilités ministérielles.

Ma question est la suivante: Comment peut-on accepter que le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes se fasse poser, par son collègue libéral de Vaudreuil, une question sur une responsabilité qui ne relève nullement ni de lui ni du gouvernement, mais plutôt sur un document qui a été déposé à un autre gouvernement? Comment peut-on accepter que le ministre se fasse poser une question et puisse y répondre pendant plus de deux minutes, alors que cela n'a rien à voir avec ses compétences?

Le Président: Chers collègues, comme vous le savez, les questions ont été posées par un de nos collègues, et c'est à eux de poser les questions. Je vais revoir le hansard d'aujourd'hui. Oui le député

14616

a raison; les questions qui sont posées aux membres du gouvernement doivent relever de leur compétence administrative. Je vais revoir cela et je reviendrai avec une réponse en temps et lieu.

DEMANDE DE RETRAIT DE LA MOTION M-208

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, si vous le demandez, vous obtiendrez sûrement le consentement unanime de cette Chambre à l'effet de retirer de l'ordre de priorité des affaires émanant des députés ma motion M-208.

(1510)

Le Président: Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est retirée.)

* * *

[Traduction]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour que soit annulée ce soir l'heure réservée aux initiatives parlementaires, mais pour que tous les articles conservent leur rang dans la liste de priorité afin que nous puissions commencer avec le premier article demain.

Le Président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

Le Président: Ceci met fin à la période des questions.

______________________________________________


14616

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-94, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.

Le président suppléant (M. Kilger): Il reste au député d'Athabasca environ huit minutes du temps d'intervention qui lui est imparti.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, avant d'être interrompu par la période des questions, j'ai posé des questions importantes sur la position que l'Association des fabricants de véhicules à moteur a fait valoir par le truchement de la ministre de l'Environnement.

Pour faire suite à mes propos de tout à l'heure, je voudrais souligner certaines difficultés auxquelles les Canadiens seront confrontés si le projet de loi est adopté et entre en vigueur.

Le ministre de l'Industrie a déclaré, le 25 avril dernier, qu'il était capital d'uniformiser la composition des divers types d'essence en Amérique du Nord parce que nous vivons tous dans un seul grand marché nord-américain. J'espère qu'il n'a pas changé d'idée et qu'il croit toujours qu'il est essentiel de garantir cette uniformité des normes, d'autant plus que la Cour d'appel des États-Unis a ordonné à l'Environmental Protection Agency d'accorder une dispense à la compagnie Ethyl, pavant ainsi la voie à l'utilisation du MMT dans l'essence sans plomb aux États-Unis. En fait, plusieurs raffineurs aux États-Unis ont avisé par écrit les autorités de leur intention d'utiliser le MMT dans la composition de l'essence.

Au nom de l'uniformité des additifs à l'essence utilisés en Amérique du Nord, il faudrait maintenant que le Canada autorise le MMT plutôt que de l'interdire. Le ministre ne croit sûrement pas qu'il n'est plus aussi capital de maintenir l'uniformité des normes.

En outre, l'industrie du raffinage a soulevé un certain nombre d'objections contre cette initiative, soit que, fondamentalement, elle aura pour effets d'accroître les coûts des raffineurs et d'augmenter les émissions des raffineries. Selon une étude réalisée par T.J. McCann & Associates Limited de Calgary en 1995, l'interdiction du MMT dans les types d'essence vendus au Canada hausserait de façon marquée le coût du raffinage et de la préparation de l'essence et rendrait encore plus strict le processus de raffinage pour la production de carburants plus propres, ce qui se traduirait par une augmentation des émissions des raffineries et une plus grande consommation de pétrole.

La ministre de l'Environnement a fait grand cas de la nécessité de maîtriser la pollution au Canada. L'étude de la maison T.J. McCann & Associates, de Calgary, et de la société Environ International Limited, de la Californie, montre quelle serait l'augmentation probable des émissions d'oxyde d'azote si le MMT était interdit. Les tests ont eu pour base le même critère qu'utilise Environnement Canada, les données Mobile 5-C et celles des essais sur le parc automobile de la société Ethyl. Les auteurs de l'étude ont conclu que l'interdiction du MMT aurait pour effet d'accroître les émissions d'oxyde d'azote du parc automobile, les faisant passer de 32 000 à 50 000 tonnes d'ici l'an 2000, soit l'équivalent de l'ajout de plus d'un million de voitures sur les routes canadiennes.

(1515)

En mai dernier, Environ California a conclu que, dans leur étude, Environnement Canada et McCann avaient sous-évalué l'augmentation annuelle du nombre de tonnes d'oxyde d'azote émis dans l'atmosphère après le retrait du MMT. Environ California a relevé qu'Environnement Canada avait utilisé erronément le programme-machine 5C qui sert à calculer les facteurs d'émissions polluantes et a conclu que l'augmentation des émissions d'oxyde d'azote qui résulterait de l'élimination du MMT se situerait entre 49 000 et 62 000 tonnes.

En termes clairs, ces études signifient que l'élimination du MMT ferait augmenter le taux d'émission d'oxyde d'azote des automobiles d'un pourcentage pouvant atteindre 20 p. 100. Je n'arrive pas à croire que la ministre canadienne de l'Environnement présente un


14617

projet de loi qui aura pour effet de faire augmenter la pollution au Canada.

Presque toutes les provinces du Canada s'opposent à cette initiative de la ministre de l'Environnement. Pour être bref, je me contenterai de me reporter à la position de l'Alberta. Je cite Ty Lund, ministre provincial de la protection de l'environnement, qui déclarait:

Il n'a pas été établi que l'élimination du MMT de l'essence aurait des effets positifs nets sur l'environnement.
L'Alberta préconise un processus d'arbitrage dont le résultat serait liant pour régler le différend de façon juste et opportune. Un groupe formé de représentants de tous les intervenants devrait être formé pour examiner le mérite écologique et économique du MMT, ce qui apporterait une réponse crédible à la question de la compatibilité de l'additif et des véhicules à moteur.
De plus, l'Alberta craint que les mesures du gouvernement fédéral concernant le commerce interprovincial du MMT aillent à l'encontre du chapitre sur l'énergie de l'ébauche d'accord sur le commerce international. On lit au paragraphe 1 de l'article 1209 que les parties ne peuvent interdire ou limiter l'accès de leurs marchés au pétrole ou aux produits pétroliers. Nous avons compris que l'accord fédéral-provincial visait à éliminer les obstacles au commerce interprovincial des produits pétroliers.
Des objections semblables ont été formulées par la Saskatchewan, la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick.

Lorsque nous examinons tous les éléments de preuve disponibles d'un oeil impartial, nous ne pouvons pas faire autrement que conclure que les arguments et la position de la Canadian Automobile Manufacturers Association ne sont pas à toute épreuve.

D'après ces informations, au lieu d'adopter ce projet de loi, le gouvernement devrait simplement demander, s'il y a encore le moindre doute-et il y a certainement encore un doute dans mon esprit-qu'une étude indépendante soit effectuée en vue de déterminer exactement quel est l'effet du MMT dans l'essence au Canada.

La ministre dit que de nombreuses études ont été faites au Canada à ce sujet, mais ces études viennent toutes de l'Association des fabricants de véhicules à moteur, qui a refusé de les rendre publiques ou encore c'est la ministre qui a refusé de les déposer à la Chambre afin que nous puissions tous y jeter un coup d'oeil pour décider s'il s'agit vraiment d'études légitimes contenant des preuves valables.

Non seulement je défie le ministre de l'Industrie de rejeter ce projet de loi, mais je défie aussi la seule représentante de l'Alberta au Cabinet, la ministre des Ressources naturelles, qui dit appuyer l'industrie et la position de l'Alberta, de se lever à la Chambre pour voter contre cette mesure législative.

Je suis déçu que la ministre de l'Environnement du Canada n'ait pas voulu examiner les deux côtés de la question. Elle a simplement choisi, en bonne marionnette politique qu'elle est, de défendre la cause de l'Association des fabricants de véhicules à moteur au lieu de tenir compte des intérêts de tous les Canadiens.

(1520)

M. Clifford Lincoln (secrétaire parlementaire de la vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, le député a dit que la ministre était une marionnette politique de l'association des fabricants d'automobiles. C'est une très grave accusation. Contrairement à ce que mon collègue a déclaré dans son discours, est-il au courant que la ministre a rencontré à deux reprises, précisément à ce sujet, des représentants de l'Association canadienne des producteurs pétroliers à titre de représentants directs de la compagnie Ethyl, et qu'à deux reprises ils ont pris l'avion de la compagnie pour venir rencontrer la ministre?

Le député est-il au courant que la ministre a rencontré des représentants de l'ACPP à au moins quatre ou cinq reprises? Je ne crois pas que mon collègue soit juste envers la ministre lorsqu'il affirme qu'elle n'a jamais accordé d'audience à la compagnie Ethyl ou à ses représentants. C'est complètement faux.

Si c'est là l'information que vous avez, je vous recommande de mieux vous renseigner. Je ne crois pas que la ministre soit du genre à être la marionnette politique de quiconque je connais.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de laisser le député répondre, je rappelle aux députés des deux côtés de la Chambre qu'ils doivent s'adresser à la présidence et non pas directement à leurs collègues.

M. Chatters: Monsieur le Président, la compagnie Ethyl, qui est l'un des intéressés dans ce dossier, l'autre étant la Canadian Automobile Manufacturers Association, m'a informé que la ministre de l'Environnement avait refusé de rencontrer ses représentants. C'est l'information que j'ai reçue.

M. Lincoln: Monsieur le Président, le député devrait peut-être, puisqu'il semble entretenir des liens étroits avec la société Ethyl, lui demander de corriger cette déclaration erronée. La ministre m'a assuré personnellement qu'elle avait rencontré à deux reprises l'ICPP au nom de la société Ethyl pour discuter de cette importante question.

M. Chatters: Monsieur le Président, la question n'est pas de savoir qui a rencontré qui et au nom de qui, mais plutôt de savoir si les deux parties ont eu l'occasion de s'entretenir directement avec la ministre de la question qui nous intéresse et si elles ont eu d'égales possibilités de produire des études impartiales et indépendantes à ce sujet, ce qui n'a pas été le cas au Canada.

La question a été étudiée à outrance aux États-Unis. La conclusion de la U.S. Environmental Protection Agency est que le MMT n'a aucun effet nuisible sur l'environnent, la santé, sur l'équipement informatique à bord des voitures. Ces résultats devraient à tout le moins semer un doute dans l'esprit de la ministre de l'Environnement et du secrétaire parlementaire quant à la validité de la preuve fournie par l'association de constructeurs d'automobiles, preuve qu'ils ont refusée de fournir au public.

Le moins que nous puissions faire est de permettre la tenue au Canada d'une étude indépendante-indépendante des deux parties intéressées-sur cette question et de prendre une décision sur la base de cette preuve impartiale et indépendante. Je ne pense pas qu'il s'agisse là d'une demande déraisonnable.


14618

M. Julian Reed (Halton-Peel, Lib.): Monsieur le Président, mon collègue d'Athabasca a d'abord fait ce qu'on pourrait appeler une accusation assez peu judicieuse. Il a laissé entendre que le gouvernement succombait aux pressions des grandes puissances, ou des grandes entreprises, ou de ceux qui brassent de grosses affaires au pays.

Je l'ai écouté attentivement quand il a expliqué qu'il serait sage de continuer à utiliser ce produit américain, et je me suis demandé d'où il tirait cette information et toutes les données qu'il rapportait à la Chambre.

(1525)

La première des trois questions que je veux poser, c'est qui le pousse à agir ainsi? Qui l'encourage à défendre un produit et à présenter ses propres chiffres, surtout quand on sait qu'un produit substitut parfaitement valable et fabriqué au Canada est disponible chez nous?

Aucune raffinerie ne se sentirait menacée d'avoir à utiliser un composé oxygéné comme l'ETBE, ou l'éthanol ou quoi que ce soit d'autre, en remplacement du MMT. Certaines raffineries ont déjà pris les devants et entrepris de faire le changement. Le député a laissé entendre que, selon les raffineries, les rejets seraient plus importants. Peut-il me dire si toutes les raffineries disent la même chose? Certaines sont vraiment plus avancées que d'autres à cet égard.

Il a parlé des oxydes d'azote en tant que polluants. Les NO*inx sont des polluants dont les quantités augmentent si l'on n'utilise pas de MMT ou si l'on ajoute un oxydant, mais la question est, augmentent par rapport à quoi? Quel est le point de référence pour les polluants?

Même si on a eu une augmentation de 150 p. 100, cela peut-être encore extrêmement faible. Comment peut-on comparer une augmentation aussi faible des émissions d'oxydes d'azote à la diminution de toutes les autres émissions lorsque l'on se débarrasse du MMT?

Il n'est peut-être pas honnête de ma part de demander au député de nous fournir des statistiques, mais je voudrais mettre au compte rendu que les nox même si ce sont des polluants, ne sont pas l'élément principal. Il y a d'autres choses.

Pour ce qui est de l'appui que donne la ministre à l'industrie, je dirais que l'industrie pétrolière a été bien appuyée, merci. On a fait grand cas de cet appui.

M. Chatters: Monsieur le Président, le député d'en face jette un peu de lumière sur la mystérieuse position de la ministre et du gouvernement dans ce dossier.

Je pensais que le problème était lié au matériel diagnostique de bord et à la protection de l'environnement. Il soulève la question de trouver un moyen de forcer les raffineries à utiliser un produit canadien au lieu d'en importer un des États-Unis. La position prise par le gouvernement dans ce dossier aurait-elle quelque chose à voir avec cela? D'aucuns trouveront intéressant qu'étant donné l'accord de libre-change avec les États-Unis, il ait choisi cette option. À ma connaissance, cet aspect ne faisait pas partie du problème.

Les personnes qui me poussent à agir dans ce dossier sont mes électeurs et le public canadien qui est en train de se faire avoir, d'être victime d'une fraude pour ainsi dire, parce que la ministre de l'Environnement et le gouvernement refusent de faire faire une étude indépendante de la question, ce qui permettrait de recueillir une information indépendante et impartiale, mais choisissent plutôt d'accepter comme argent comptant tous les renseignements fournis par l'unique partie concernée dans cette affaire.

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, il y a environ deux heures, la ministre de l'Environnement a indiqué à la Chambre qu'elle avait rencontré les représentants de l'industrie et elle a parlé des offres qu'elle leur avait faites durant la période qui a précédé la présentation de ce projet de loi. Le député était-il présent à la Chambre lors de l'intervention de la ministre?

M. Chatters: Monsieur le Président, bien sûr que j'étais présent. J'ai questionné la sincérité de la proposition de la ministre de rencontrer toutes les parties en cause dans ce dossier. Ce n'est pas ce que j'avais compris. J'ai soulevé cette question et je crois qu'elle est valide. Selon mes informations, la ministre a constamment refusé de rencontrer les . . .

(1530)

Une voix: Oh, oh!

M. Chatters: J'ai entendu les propos de la ministre et j'ai questionné la validité de cette remarque. Je crois que ma question est légitime et je continuerai de la poser.

La ministre a aussi soulevé de nombreux autres points. Je pourrais relever celui de la défaillance des bougies d'allumage. La ministre a parlé avec émotion en affirmant que les Canadiens doivent changer leurs bougies d'allumage 17 fois plus souvent que les Américains. Cependant, les conclusions d'une étude indépendante, valide et vérifiable révèlent que ceci est totalement faux, qu'une bougie d'allumage en particulier a fait défaut 17 fois plus souvent que les autres, simplement à cause d'un vice de fabrication et que cette bougie a donné les mêmes résultats avec ou sans MMT. L'effet de ce produit est donc nul selon cette étude.

Qu'est-ce que je fais ici si je n'ai pas le droit de questionner la validité des commentaires de la ministre? Je crois que ma question était valide et raisonnable et je continuerai de la poser.

[Français]

M. Clifford Lincoln (secrétaire parlementaire de la vice-première ministre et ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de conviction que j'appuie le projet de loi C-94 sur l'abolition du MMT dans l'essence, lequel nous nous servons, comme Canadiens, tous les jours.

Pour moi, ce n'est pas une question d'appuyer un genre de production ou un autre. Ce n'est pas une question d'appuyer un manufacturier ou un autre.

[Traduction]

Je ne défends pas le secteur automobile ni la société Ethyl. Ce n'est pas à moi de le faire. J'attache beaucoup d'importance à l'environnement. Je l'ai toujours fait et je suis persuadé que grâce à ce projet de loi, on pourra, dans une large mesure, résoudre un problème environnemental très important relié à l'essence dans nos automobiles.


14619

Pour moi, c'est une question de prévention de la pollution. Je suis convaincu et ce n'est pas parce que je crois en Toyota, General Motors ou toute autre société. Ce n'est pas ce qui me préoccupe.

Malheureusement, il y a de plus en plus d'automobiles sur la route. Je souhaiterais que nous ayons des automobiles qui utilisent l'éthanol, l'électricité et l'hydrogène plutôt que l'essence, mais nous sommes confrontés à cette réalité. Tant que nous aurons des automobiles, la seule façon de s'assurer qu'elles causent le moins de tort possible à l'environnement, est de veiller, tout d'abord, qu'elles soient munies de la technologie de pointe et qu'elles soient inspectées et entretenues comme il se doit.

C'est pourquoi toutes les provinces du pays ont un service d'inspection et d'entretien qui assure que les conducteurs d'automobiles, surtout de vieilles automobiles, se rendent dans des stations d'inspection où on vérifie que ces automobiles sont sûres et non dommageables pour l'environnement. Si on veut installer une nouvelle technologie à bord des automobiles, c'est pour prévenir les dommages, pour s'assurer qu'il est moins nécessaire d'avoir recours aux services de stations d'inspection et d'entretien, les systèmes installés à bord des automobiles avertissant les conducteurs de tout problème.

Je suis maintenant persuadé que le MMT n'aide pas les systèmes. Le fait est que les fabricants au Canada ont déclaré que si nous continuions d'utiliser le MMT, ils ne pourraient plus installer les systèmes de diagnostic les plus perfectionnés dans ces automobiles. Ce n'est pas une hypothèse, mais un fait.

Si nous attachons de l'importance à l'environnement et si nous voulons agir de façon préventive, nous devons prendre des décisions favorables au meilleur système sur les plans environnemental et technologique.

(1535)

En prenant des mesures pour interdire le MMT, paradoxalement, nous harmonisons nos normes avec celles des États-Unis. Le député qui m'a précédé a soutenu que nous devrions faire exactement le contraire. Il a fait allusion aux nombreuses poursuites-dont plusieurs fructueuses-que la société Ethyl a engagées devant les tribunaux américains pour obliger l'EPA à autoriser de nouveau l'emploi du MMT dans l'essence.

Je vais corriger le député car l'EPA n'a pas encore acquiescé. Contrairement aux dires du député, au mois d'août 1994, Mme Carol Browner, l'administratrice de l'EPA, l'agence américaine de protection de l'environnement, a fait savoir que son organisme était préoccupé par les répercussions possibles des émissions de manganèse sur la santé publique, en raison notamment de l'exposition massive des Américains aux émissions des voitures.

Au terme d'une évaluation des risques que peuvent présenter les émissions de manganèse, l'EPA a établi que d'importantes questions à égard restaient sans réponse et que des études sur les ennuis de santé et les expositions à l'inhalation de ces émissions s'imposent.

L'EPA a déclaré ceci: «Malgré les poursuites de la société Ethyl, nous voulons qu'une évaluation des risques pour la santé soit faite avant d'autoriser l'emploi du MMT.»

[Français]

Il y a quelque temps de cela, le Comité permanent de l'environnement et du développement durable tenait des audiences environnementales où un de nos anciens collègues, M. Ralph Ferguson, ex-député, était justement venu témoigner sur la question du MMT. Il avait soulevé bien des points relatifs à la santé. Je sais qu'on nous dira que Santé Canada a décidé que le MMT ne présente pas de problème significatif pour la santé. C'est leur décision. Tout de même, beaucoup d'experts disent que nous devrions faire bien attention. Je voudrais citer des propos tenus lors de cette audience sur l'environnement, où M. Ferguson a parlé d'une audience qu'avait tenue l'EPA américain le 22 juin 1990. Mme Ellen Silbergeld de l'Université du Maryland et du Environmental Defence Fund a témoigné ainsi:

[Traduction]

«Comme le plomb, le manganèse est une toxine à effet cumulatif en ce sens que son absorption, sa rétention ainsi que son degré de toxicité s'accroissent avec le temps.»

[Français]

Elle citait aussi les célèbres scientifiques canadiens spécialisés en neurotoxicité, le Dr John Donaldson, le Dr Frank Labella et d'autres qui ont fait des expériences à l'Université du Manitoba sur la question du manganèse. À cette même audience de l'EPA à Washington, le Dr Donaldson disait ce qui suit:

[Traduction]

«Je crois que le manganèse est effectivement une toxine qui s'accumule avec l'âge et que c'est la réponse à donner au manganèse qui a la capacité de produire biochimiquement, pathologiquement et cliniquement les symptômes qui sont très semblables, mais non identiques, à la maladie de Parkinson.»

[Français]

Plus tard, le Comité sur la santé et l'environnement à la Chambre des représentants des États-Unis a témoigné devant l'EPA. Et le représentant de ce comité disait ceci:

[Traduction]

«Comme le plomb, le manganèse est non seulement neurotoxique, mais c'est aussi un élément chimique qui ne se dégrade ni ne perd de sa force avec le temps. Ainsi, le manganèse libéré dans l'environnement au cours d'une année, en raison de l'utilisation du MMT, s'ajoute à tout le MMT qui se libérera l'année suivante et toutes les années ultérieures.»

[Français]

L'Université de Pittsburgh, la Western Psychiatric Institute and Clinic, dans un rapport à l'EPA, disait ceci:

(1540)

[Traduction]

L'annexe de 15 pages jointe à la demande de dispense présentée par la société Ethyl, qui porte sur les questions de santé, ne mentionne aucunement les nouvelles propriétés toxiques du manganèse, pas plus qu'elle ne traite des risques extrêmement élevés que présentent


14620

les composés de manganèse alcalin pour la santé du cerveau. Ce document ne peut être considéré comme un argument plausible à l'appui de cette demande. Il est incomplet, partial et tendancieux.

[Français]

C'est pourquoi, du reste, l'administratrice de l'EPA, Mme Carol Browner, aussi récemment qu'en juin 1994, disait: «Il y a beaucoup de questions sur la santé qui restent sans réponse et nous avons besoin de faire des évaluations additionnelles avant de sanctionner le MMT.»

Donc, il y a des problèmes potentiels. Je ne dis pas que c'est peut-être prouvé à 100 p. 100 ou à 50 p. 100, mais si nous pensons que le système, le principe précautionnel est une base même de l'environnement et de la santé, nous devons faire bien attention. Si nous croyons vraiment aux changements climatiques et que les automobiles au Canada sont les plus grands producteurs d'émissions nocives dans l'air, en fait c'est le cas.

Une récente étude de tous les sous-ministres de l'Environnement du Canada a conclu que les automobiles sont le plus gros producteur d'émissions atmosphériques nocives. En fait, les chiffres sont assez frappants. Pour les automobiles à essence et à diesel, elles produisent 60 p. 100 de monoxyde de carbone. Elles produisent des émissions de nitrate d'oxyde de 35 p. 100, le smog, et des émissions d'hydrocarbure de 25 p. 100. Je sais qu'on va nous dire que le MMT réduit les émissions de nitrate d'oxyde.

[Traduction]

Comme l'a dit très récemment ma collègue dans une réponse à une question du Parti réformiste, sur quoi l'on se fonde-t-on pour dire cela? En fait, au ministère de l'Environnement, nos études indiquent que le chiffre auquel on est arrivé et qu'on utilise au sujet des véhicules d'essai de la société Ethyl se trouve réduit à un facteur totalement négligeable lorsqu'on l'explique en termes de ratio réel pour tous les véhicules au Canada.

Les avantages de l'utilisation de systèmes de diagnostic intégrés dans les nouveaux véhicules sont tellement plus considérables par rapport à cela que les bénéfices environnementaux l'emportent de loin sur tout inconvénient causé par le retrait du MMT.

Nous débattons cette question depuis 10 ans, depuis 1986. Contrairement à ce que le député réformiste vient d'affirmer, la ministre ne s'est pas contentée de rencontrer les deux parties, elle a communiqué directement avec la société Ethyl à deux reprises à ce sujet et, comme elle l'a rapporté dernièrement à la Chambre, elle a offert à Ethyl Corporation le compromis suivant: « Je ne proposerai aucune mesure législative si vous acceptez de produire un mélange de carburant sans MMT, pour que le consommateur puisse faire son propre choix. » La société a refusé ce compromis équitable et honnête, afin de ne pas donner de choix au consommateur.

Les députés qui ne voient pas le bien-fondé du projet de loi C-94 devraient m'expliquer comment il se fait que les pays qui protègent l'environnement, qui sont des leaders en ce domaine, soit les Pays-Bas, la Suède, la Norvège, le Danemark, la Finlande, l'Allemagne et le Japon, n'utilisent pas de MMT. Comment se fait-il que, dans le monde entier, c'est uniquement au Canada qu'on utilise le MMT? Tout le monde se trompe, sauf nous? L'ironie, c'est que nous ne le produisons même pas nous-mêmes. Les Américains le fabriquent, mais ne l'utilisent pas. Toutefois, nous importons le produit américain et l'utilisons chez nous, peu importe si le reste du monde n'en veut absolument pas.

(1545)

Le Parti réformiste propose que nous imitions les Américains, pour que le MMT soit utilisé à la fois au Canada et aux États-Unis. Or, l'EPA se bat avec acharnement depuis 18 ans pour interdire le MMT. Si les Américains sont confrontés à la possibilité que le MMT soit remis sur le marché, c'est uniquement parce que la société Ethyl intente constamment des poursuites.

La société Ethyl se préoccupe-t-elle de l'environnement? Pas du tout. Elle se préoccupe de ses profits, de son existence et du marché canadien, le seul où elle peut écouler le MMT. Si ce produit était si bon, les Hollandais, les Français, les Allemands, les Finlandais et les Japonais en achèteraient pour mettre dans leurs voitures. Mais ils n'en achètent pas une goutte. Pourquoi devrions-nous nous laisser berner?

Au lieu de défendre la société Ethyl et le MMT, le temps est venu, comme le disait si clairement mon collègue de London, de nous servir de notre talent, de notre matière grise et de nos ressources incroyables et d'utiliser des produits sans danger pour l'environnement. Il existe déjà des additifs très intéressants. Nous pourrions utiliser de l'éthanol dans l'essence dès demain matin; ce serait plus efficace que le MMT et complètement écologique. Le temps est venu de commencer à utiliser des voitures fonctionnant à l'éthanol, à l'électricité et à l'hydrogène. Je ne plains pas la société Ethyl qui défend le MMT et qui retourne à l'époque des dinosaures. Je veux, quant à moi, me tourner vers l'avenir.

Le projet de loi C-94 nous montre nos habitudes que nous devrons modifier. Il oblige tous les Canadiens à envisager une nouvelle façon de faire et à rejeter les préceptes d'une grande société qui ne pense qu'aux profits et ne se préoccupe aucunement des consommateurs ou de l'environnement.

Je suis environnementaliste. Tout ce qui me préoccupe, c'est la qualité de la vie, les risques possibles à la santé et la moindre petite possibilité que la santé de mes concitoyens soit menacée. J'ai lu ces documents et ils prouvent que ces produits comportent d'énormes risques pour la santé. De nombreuses universités et de nombreux médecins de grande réputation nous ont mis en garde, comme ils l'ont fait, dans le cas du plomb, il y a de nombreuses années, sans que nous les écoutions.

À la lumière des arguments que j'ai entendus et des preuves que j'ai lues, je dis qu'il faut adopter le projet de loi C-94, qu'il faut changer nos habitudes, utiliser des essences plus propres, des essences de la nouvelle génération, comme l'essence à l'éthanol, ou d'autres formes d'énergie, telles que l'électricité et l'halogène. Soyons plus propres et plus écologiques. Que la priorité soit accordée à l'environnement et que l'industrie automobile et la société Ethyl deviennent les cadets de nos soucis. Leur sort m'est égal.

Aux consommateurs canadiens, je dis que le projet de loi C-94 représente le premier pas dans la bonne direction et j'espère que tous les députés l'approuveront.


14621

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Monsieur le Président, on est très conscients de ce côté-ci de la Chambre que le MMT soit un produit qui, en tout cas, dans certains documents on nous dit qu'il est polluant et qu'il est dangereux, dans d'autres, on nous dit aussi que la preuve n'a pas été faite que c'est un produit dangereux pour la santé.

Lorsque le député de Lachine-Lac-Saint-Louis parle de la compagnie Ethyl de cette façon, elle a quand même fait faire des études pendant des années sur le MMT. Alors je pense qu'il n'est pas nécessaire de démolir une compagnie qui, quand même, a fait ses devoirs. Et si elle a gagné certaines causes devant les tribunaux, c'est parce que ses devoirs étaient bien faits.

Deuxièmement, dans le dossier du MMT, ce qui est inquiétant, c'est que le marché américain, les États-Unis, peuvent réintroduire ce produit.

(1550)

Je ne dis pas qu'ils vont le faire, mais en ce moment, on pense à le réintroduire sur le marché américain. Ce qui m'inquiète, c'est simplement que nos compagnies canadiennes, nos pétrolières entre autres, doivent faire des transformations très importantes et très coûteuses pour ne plus utiliser ce produit-là.

Comme vous le savez, on est d'accord avec le projet de loi C-94, mais je me pose quand même la question et je la pose à mon collègue d'en face: Est-ce vraiment la bonne décision? Est-ce qu'on doit adopter ce projet de loi très rapidement, de cette façon-là, avant de savoir ce que les États-Unis vont vraiment faire?

Il ne faut pas oublier qu'on fait partie de l'Amérique du Nord. Si on adopte un projet de loi comme le C-94 et que dans deux ans, on se rende compte qu'aux États-Unis, on réutilise le MMT, alors que nous, au Canada, on a demandé à nos pétrolières de tout transformer pour faire face à un nouveau projet de loi, et que dans deux ans, on leur dit qu'il n'y a plus de problème, on va réintroduire le MMT. Je ne suis pas convaincue que le MMT est dangereux pour la santé. J'ai vu des études, Ethyl Canada nous a remis leurs études et on a discuté aussi avec l'EPA.

On nous a dit que les preuves ne sont pas faites que ce produit est vraiment nocif. Oui, c'est vrai qu'il faut être avant-gardiste, oui, c'est vrai qu'il faut se développer sur le plan environnemental, dans le développement durable. On est tout à fait d'accord avec cela. Mais il reste à connaître la décision des États-Unis, je pense que ça va être important et ça va être capital pour la décision que nous prendrons, nous au Canada, dans ce dossier-là.

M. Lincoln: Monsieur le Président, je pense que les points soulevés par ma collègue de Laurentides sont très constructifs et je les accepte d'emblée dans cet esprit. Il est sûr que ce sont des questions importantes à décider.

Après avoir bien cherché dans tous les coins, nous avons décidé de présenter le projet de C-94. Ce qui nous a poussés en avant est ceci: Il est sûr que les États-Unis examinent la question du MMT à la suite de beaucoup d'appels en cours de Ethyl Corporation. Mais l'EPA le fait à reculons. Il est clair que l'administratrice de l'EPA, jusqu'à juin 1994, se battait très ferme, mais en fait, ils demandent toujours des études, des évaluations sur la santé.

Il se pourrait que les États-Unis réintroduisent le MMT et que cela devienne légal. C'est très possible. Mais en même temps, nous, comme Canadiens, nous avons à poser des gestes qui en même temps pourront, par leur effet même, peut-être influencer nos voisins du Sud.

Aujourd'hui, on fait partie de l'ALENA. L'ALENA inclut le Mexique et je pense que devons poser des gestes par rapport à leur valeur intrinsèque. Nous pensons que le Canada, aujourd'hui, pourrait ajouter de l'éthanol à son essence. Mon collègue a fait un travail extraordinaire sur l'éthanol. Aujourd'hui, nous avons une industrie de l'éthanol dans l'est du Canada. Nous en avons dans l'Ouest. Les États-Unis se dirigent maintenant, à cause de la législation, dans la production massive de l'éthanol. Ils veulent, je pense, qu'en l'an 2000, 10 p. 100 de l'industrie du pétrole soit éthanolée.

Il me semble qu'il faut commencer à nous forcer la main pour aller chercher des additifs qui sont plus performants environnementalement. Je sais qu'il y a des débats qui ont lieu d'un côté et de l'autre par rapport au MMT.

Je pense que le poids de l'évidence est en faveur d'une nouvelle façon de faire, d'une essence sans MMT. Ce qui me frappe le plus, c'est que des pays que nous respectons le plus pour leur qualité environnementale, comme les Pays-Bas, l'Allemagne, la Finlande, les pays nordiques, aucun d'entre eux ne se sert de MMT.

Si demain matin, un de ces pays prenait le MMT, j'y penserais à deux fois. Si les États-Unis avaient adopté le MMT à cause de sa qualité environnementale, j'y aurais pensé deux fois. Mais l'EPA ne l'accepte pas parce qu'elle le veut, l'EPA l'accepte parce que c'est une décision légale. Je crois qu'on doit aller de l'avant avec le projet de loi C-94.

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, il me semble que cette question n'est pas tellement différente de la question du conseiller en éthique. Il doit y avoir une certaine distance entre la personne qui rend un jugement et les personnes directement en cause.

(1555)

Il me semble que nous avons ici deux études produites et distribuées par les principales parties au différend. Personnellement, j'estime que nous avons de sérieuses raisons de douter de la validité de la preuve.

Pour en venir à un plan plus personnel, je fais moi-même la plupart des travaux mécaniques. J'ai toujours pour principe d'épargner un dollar ou deux. Le samedi, je change moi-même mes bougies d'allumage.

Il n'y a pas longtemps, je les ai ôtées pour les remplacer car ma voiture marquait déjà 75 000 kilomètres au compteur et je n'y avais jamais touché. Je me suis dit qu'il allait de soi qu'il était temps de les changer. Je les ai ôtées. Elles étaient presque en aussi bon état que si elles avaient été neuves. Je les ai nettoyées, j'ai rajusté l'écart de leurs électrodes, je les ai remises en place et je ne les ai finalement remplacées qu'au bout de 100 000 kilomètres.


14622

Ces études veulent nous faire croire que les bougies tombent en panne 17 fois plus souvent quand on utilise du MMT. Je vis dans un environnement où, à ma connaissance, l'essence contient du MMT. Si vraiment le MMT cause des pannes de bougies, alors ou bien je suis l'objet d'un miracle ou bien il ne faut pas se fier aux études.

J'ai tendance à croire que ce sont les études qui ne sont pas fiables car j'ai beaucoup de relations et j'ai parlé à beaucoup de personnes et aucune ne s'est plainte d'une diminution de la durée des bougies. Il s'agit d'un échantillon de je ne sais combien de milliers de personnes. Je suis sûr que si ce que dit l'étude était vrai, j'en aurais entendu parler en tant que député représentant Elk Island.

Si nous ne pouvons pas nous fier à cette étude en ce qui concerne les bougies, pourquoi devrions-nous nous y fier lorsqu'elle veut nous faire croire que c'est très nuisible à l'environnement et que ça présente tous ces autres dangers? Peut-être bien que oui, peut-être bien que non.

Pour ma part, je ne crois pas qu'on doive faire confiance à cette étude et c'est pourquoi nous devons demander à un organisme réellement indépendant, fiable et digne de confiance, d'évaluer les avantages et les inconvénients de l'utilisation du MMT. Qu'on nous dise la vérité au lieu de nous énumérer tout un tas de causes et d'effets qui peuvent ou non être fondés sur la vérité.

J'aimerais connaître la réponse du député et qu'il nous dise aussi si le gouvernement est réticent à soumettre cette question à une étude vraiment indépendante.

M. Lincoln: Monsieur le Président, j'ai toujours pensé que, sur des questions de ce genre, le gouvernement était là pour prendre une décision après avoir examiné les deux côtés de la médaille.

On a l'impression que seule la situation de l'industrie automobile a été examinée, mais ce n'est pas le cas. J'ai des lettres du sous-ministre. La ministre de l'Environnement a fait des études complètes, impartiales et objectives. Elle a notamment proposé à la société Ethyl de ne pas avoir recours à une loi, disant qu'elle préférerait parvenir à un compromis entre les deux groupes industriels visés. Elle a offert à Ethyl de produire un type d'essence sans MMT pour laisser les consommateurs comparer et décider.

C'est juste. C'est objectif. C'est impartial. C'est un fait. Je sais que la ministre a fait cette offre. Je sais que la société Ethyl a rejeté l'offre parce qu'elle a déjà un marché solidement établi pour le MMT et qu'elle ne veut pas y renoncer. C'est un monopole.

Si le Canada rejetait le MMT, cette substance ne serait plus vendue nulle part dans le monde. C'est un fait. Comme je le disais, si le MMT est si bon pour les voitures, pourquoi tous les pays du monde aussi industrialisés que nous le sommes n'en font-ils pas usage également? Je trouve cela très curieux. Je suis convaincu que la mesure que nous adoptons aujourd'hui est avantageuse pour l'environnement.

(1600)

Le président suppléant (M. Kilger): Il ne reste plus beaucoup de temps, mais je sais que le député de Mackenzie a demandé la parole. Je vous demanderais d'être aussi brefs que possible dans la question comme dans la réponse.

M. Vic Althouse (Mackenzie, NPD): Monsieur le Président, depuis un certain nombre d'années, j'essaie d'obtenir, avec l'ancien député de London, Ralph Ferguson, que l'on accepte mieux et utilise davantage l'éthanol à la place du MMT comme additif antidétonant.

Je crois que nous avons failli sinon adopté ici, au cours de la dernière législature, une motion d'initiative parlementaire visant à accepter l'éthanol comme substitut du MMT. On favorisait beaucoup alors le remplacement du MMT par un autre produit pour nombre des raisons que le secrétaire parlementaire nous a exposées aujourd'hui.

Nous n'étions pas au courant, à l'époque, du fait que l'EPA exigeait un examen de toute la question du MMT par suite de la décision du tribunal. Toutefois, ce que nous essayions notamment de faire valoir à l'époque, du point de vue de la production agricole, c'était que l'éthanol constituait un excellent substitut. Il était renouvelable et il y avait alors un excédent de céréales-la base de l'éthanol-à très bon marché.

Le ministre pourrait-il nous dire où en est l'économie de la production d'éthanol? Je sais qu'un des plus grands producteurs d'éthanol est installé dans ma circonscription. Il s'inquiète quelque peu de la hausse soudaine du coût des matières premières. Le prix des céréales a plus que doublé depuis que Ralph Ferguson a présenté son projet de loi.

Est-ce que ce changement va modifier substantiellement le prix de l'essence, car l'éthanol pourra coûter plus cher que le MMT? Quel sera le coût économique d'un tel changement? Le ministère de l'Environnement a-t-il vérifié le nouveau coût de l'éthanol, compte tenu du fait que le coût de la matière première dans la production de l'éthanol, à savoir les céréales, a au moins doublé au cours des trois ou quatre dernières années?

M. Lincoln: Monsieur le Président, je n'ai pas ces données en main pour l'instant. Je sais que le ministère et d'autres, y compris plusieurs députés, ont fait des études approfondies sur l'éthanol et sur son coût comme additif. Je m'engage à mettre les données que nous avons à la disposition du député le plus tôt possible.

[Français]

M. Milliken: Monsieur le Président, je crois que vous obtiendrez le consentement unanime de la Chambre pour que nous puissions revenir à la présentation de rapports de comités.

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre a entendu la motion de l'honorable secrétaire parlementaire. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Non.

14623

[Traduction]

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole dans ce débat sur le projet de loi C-94, qui vise à interdire le commerce interprovincial et l'importation du MMT.

C'est un projet de loi fascinant en raison de la duplicité qui a marqué son élaboration. Le MMT, ou méthylcyclopentadiényl manganèse tricarbonyle, est un additif susceptible d'améliorer l'indice d'octane, que l'on ajoute à l'essence sans plomb. Il réduit les émissions d'oxyde d'azote et fait en sorte que l'essence se consume plus proprement.

Une fois émis dans l'atmosphère, les oxydes nitreux sont une des principales causes du smog, lequel est à l'origine de problèmes respiratoires chez un grand nombre d'habitants de notre pays, dont les personnes souffrant d'asthme et de maladies respiratoires obstructives chroniques.

La ministre a tenté d'interdire le MMT, mais a constaté qu'elle ne pouvait le faire. Il est prouvé que le MMT ne représente pas un risque pour la santé des gens. Qu'a-t-elle fait? Elle a contourné la difficulté en présentant ce projet de loi qui interdit le commerce du MMT, ce qui constitue en pratique une interdiction de cette substance au Canada.

(1605)

Santé Canada a fait la preuve que le MMT était une substance absolument inoffensive pour la population du pays. Il n'y a donc aucun fondement scientifique pour l'interdiction du MMT au Canada.

Examinons donc pourquoi la ministre a présenté ce projet de loi. Avant le dépôt de ce dernier, le MMT était produit par Ethyl Corporation. L'Association des fabricants de véhicules à moteur a prétendu que le MMT détruisait les ordinateurs de diagnostic des voitures, ce qui est sans doute très important pour faire en sorte que les voitures polluent moins et que nous jouissions tous d'un environnement plus sain. Personne n'est contre ce genre d'ordinateur de bord.

Cependant, nous avons, d'une part, les fabricants de voitures qui prétendent que le MMT détruit leurs ordinateurs de bord et, d'autre part, une société, Ethyl Corporation, qui soutient le contraire en se fondant sur des études faites par un organisme environnemental indépendant. Contrairement à ce qu'affirme la vice-première ministre, ces études ont prouvé, de manière concluante, que le MMT n'avait aucun effet sur les ordinateurs de bord. Malgré tout, la ministre est allée de l'avant avec l'interdiction.

Nous voyons clairement que ce n'est pas un projet de loi environnemental. Comme je l'ai déjà dit, Santé Canada a même fait la preuve que le MMT n'a pas été nuisible à la santé des Canadiens. Cela a été prouvé.

M. Milliken: Monsieur le Président, excusez-moi d'interrompre le député, mais je crois qu'il y a consentement unanime pour que je présente sur-le-champ des motions plutôt urgentes puisque des comités attendent qu'elles soient adoptées.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


14623

AFFAIRES COURANTES

[Français]

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 85e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste des membres du Comité permanent de l'environnement et du développement durable, ainsi que la liste des membres associés des comités.

[Traduction]

Si la Chambre y consent, je voudrais proposer l'adoption immédiate de la motion.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce qu'il y a consentement unanime?

Des voix: D'accord.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je propose, appuyé par le whip en chef du gouvernement, que le 85e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre présenté à la Chambre aujourd'hui soit adopté.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

M. Milliken: Monsieur le Président, je propose que les noms des députés suivants soient ajoutés à la liste des membres associés du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre: MM. Proud, Richardson et Solomon, ainsi que Mme Ur.

Puisque j'ai la parole, je tiens à remercier le député qui parlait tout à l'heure ainsi que tous les autres députés qui ont accepté que l'on règle ces affaires cet après-midi même.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

> 14624


14624

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-94, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, ce projet de loi présenté par la ministre de l'Environnement n'a vraiment rien à voir avec l'environnement. Il a été prouvé que le MMT n'est pas nuisible pour la santé des Canadiens. Dans son communiqué de presse, la vice-première ministre parlait de notre engagement à l'égard de la protection de l'environnement. Cette mesure législative n'a rien à voir avec la protection de l'environnement, mais elle a tout à voir avec la protection d'une industrie, soit l'industrie automobile.

(1610)

Il convient de signaler que, avant que ce projet de loi ne soit présenté, Ethyl Corporation et l'Association des fabricants de véhicules à moteur avaient entrepris des négociations pour régler ce problème à l'extérieur de la Chambre. Une décision était sur le point d'être prise. Puis, la ministre s'est engagée à légiférer à cet égard, et les fabricants d'automobiles, sachant que la réponse serait en leur faveur, ont évidemment abandonné leur démarche. Bien sûr, ce projet de loi brouille les cartes au lieu de régler un problème. C'est malheureux. Nous ne gaspillerions pas le temps de la Chambre à étudier ce projet de loi si nous avions laissé la nature suivre son cours.

Ce que nous avons demandé, c'est qu'une troisième partie indépendante soit mandatée pour examiner la question du MMT et déterminer d'abord si le MMT endommage les dispositifs de bord. Dans l'affirmative, deux possibilités s'offrent à nous. Nous pouvons chercher une solution de rechange au MMT ou nous pouvons changer les dispositifs de bord et négocier une entente avec le secteur privé.

La ministre a mentionné dans son discours ce matin que le MMT a été interdit partout dans le monde et que le Canada est le seul pays à l'utiliser encore. Je tiens à lui signaler que, l'an dernier, une cour d'appel de district aux États-Unis a dit que le MMT pouvait encore être utilisé dans ce pays. Par conséquent, pendant que nous nous préparons à interdire le MMT, les États-Unis ont décidé d'en permettre l'utilisation. Pourquoi agissons-nous ainsi?

Le ministre de l'Industrie veut simplement que nous ayons un seul type d'essence pour tout le continent. Alors pourquoi nous dirigeons-nous vers un différent type d'essence alors que les États-Unis essaient de retourner à l'essence contenant du MMT?

Cela montre qu'il y a eu abus de pouvoir. En favorisant un groupe, soit l'association des fabricants d'automobiles, le gouvernement a fait preuve de fumisterie législative et a agi de façon répréhensible.

J'espère que la vice-première ministre fera preuve de maturité en demandant la tenue d'une étude indépendante, comme l'a fait le député d'Elk Island. Cette étude fournirait les réponses que nous attendons et elle servirait bien la population canadienne et la cause de l'environnement. Il est essentiel que nous obtenions ces réponses, non seulement pour les Canadiens mais aussi dans l'intérêt de l'environnement.

Si nous éliminons le MMT, la ministre doit élaborer un nouveau plan. Elle doit savoir que la quantité d'oxyde d'azote contenue dans les émissions des automobiles pourrait augmenter de plus de 20 p. 100, et contribuerait ainsi à accroître grandement les risques pour la santé des Canadiens. J'ai vu de nombreuses personnes souffrant de maladies pulmonaires et je crois qu'une telle situation serait grandement injuste.

La ministre a également parlé de la possibilité d'utiliser deux types d'essence au Canada. Je trouve cela tout à fait fantaisiste. Pourquoi ne pas avoir une seule essence, la meilleure et la moins polluante, que nous pourrions utiliser de façon responsable et à un moindre coût? Ce serait équitable pour les deux parties: les fabricants d'automobiles et les compagnies pétrolières.

Nous devons unir nos efforts dans ce dossier car il ne s'agit pas ici d'opposer une partie à l'autre, mais bien de servir les intérêts de tous les Canadiens.

Je suis également convaincu que les nouvelles technologies peuvent jouer un rôle très utile dans le domaine des transports. Des progrès fascinants ont été réalisés pour rendre les automobiles et autres types de véhicules moins polluants, mais la plupart de ces technologies n'ont pas été mises de l'avant de façon assez dynamique. Je crois que nous devrions prendre l'initiative et faire connaître ces très importantes découvertes. Il incombe à la Chambre des communes de s'assurer que ces découvertes, tant au Canada qu'à l'étranger, soient connues et de permettre à tous les Canadiens d'y avoir accès.

(1615)

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais remercier le député d'Esquimalt-Juan de Fuca de ses observations.

J'aimerais savoir ce qu'ils pensent d'une ou deux suggestions que nous avons faites. À son avis, à quoi servirait une étude complètement indépendante entreprise par un organisme indépendant tel que le Conseil national de recherches, par exemple, pour voir, indépendamment des fabricants automobiles ou de la société Ethyl Corporation, si le MMT est effectivement inoffensif? Ne serait-ce pas utile? Ne serait-il pas utile d'entreprendre une étude complètement indépendante et, dans l'affirmative, le Conseil national de recherches ne serait-il pas l'organisme tout indiqué?

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je m'excuse de m'être levé trop tôt, mais la question de mon ami est tellement bonne que je n'ai pas pu m'en empêcher.


14625

Pour faire écho aux propos de mon collègue, le député d'Elk Island, je dirai que la raison pour laquelle nous réclamons une étude indépendante est que la vice-première ministre a produit un tas de documents, tous publiés par l'Association des fabricants automobiles. Cette association est une partie extrêmement intéressée dans tout ce débat. En fait, elle représente un côté de la discussion.

Ce que nous pouvons faire est de déterminer si les études invoquées sont en fait légitimes, fiables et scientifiquement valables. Si elles le sont, nous devons alors les croire. Mais si, au contraire, elles ne le sont pas, il faudra qu'une tierce partie entreprenne une étude indépendante. Nous ne pouvons permettre qu'un député ou un groupe si intimement lié aux intérêts en cause-en fait, l'un des protagonistes dans ce débat-décide ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas. C'est pourquoi, nous, les membres de ce parti, réclamons un examen indépendant, fait par un groupe indépendant. Le Conseil national de recherches ou un quelconque autre groupe serait sans doute tout indiqué. La chose importante à ne pas oublier est que ce doit être un organisme indépendant qui ne soit intimement associé ni à la société Ethyl Corporation ni à l'Association des fabricants automobiles.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je pose la question parce que personne de l'autre côté ne l'a posée. À mon avis, le point est important.

Après toutes les discussions sur l'usage de l'éthanol au lieu du MMT et écartant l'argument concernant l'impact environnemental de chacun, je voudrais que mon collègue dise à la Chambre pourquoi le gouvernement ne choisit pas d'interdire le MMT et de favoriser l'éthanol comme additif antidétonant, puisque les deux produits sont également efficaces.

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question fort intéressante au sujet de l'éthanol.

L'éthanol est un additif très important, mais malheureusement, il faut une subvention gouvernementale de huit cents le litre environ pour mettre ce produit sur le marché. Ceci représenterait un coût énorme pour le gouvernement et en ces temps de restrictions financières, nous ne préconisons aucunement que le gouvernement investisse d'autres sommes dans ce produit. Son utilisation coûterait des milliards de dollars.

Ce parti a toujours incité et encouragé les scientifiques et les chercheurs du pays à trouver des façons plus rentables de fabriquer de l'éthanol et d'autres additifs afin que les automobiles puissent brûler le carburant de façon moins polluante.

(1620)

Nous avons toujours défendu avec vigueur le secteur de la recherche et du développement car c'est l'un des piliers de la compétitivité du pays dans les futurs créneaux économiques où les emplois seront rémunérateurs et durables.

J'exhorte le gouvernement à continuer de soutenir le secteur de la recherche et du développement qui réalise des merveilles au Canada. Nous ne devons pas perdre de vue le fait que ce secteur est un pilier qui assurera notre compétitivité économique à l'avenir.

M. Julian Reed (Halton-Peel, Lib.): Monsieur le Président, je suis toujours stupéfait de voir combien certaines choses ont la vie dure. Nous avons sur le marché un produit pour lequel on s'est aperçu, il y a presque vingt ans, qu'il y avait des problèmes. Il y a presque dix ans que le ministère de l'Environnement a découvert ce fait. Maintenant, nous avons une solution.

Je ne blâme pas ceux qui ont des intérêts et qui les défendent, mais le fait est qu'il a fallu longtemps pour que la réalité s'impose enfin.

Je voudrais revenir un peu en arrière sur l'histoire des additifs des carburants. En 1928 environ, on a découvert que le plomb tétra-éthyle, ajouté à l'essence, améliorait l'indice d'octane et assurait une certaine lubrification de la partie supérieure des cylindres. On a appelé ce composé, fabriqué par la Ethyl Corporation, un additif antidétonant. En même temps, un autre groupe de scientifiques et de chimistes distingués lançaient l'idée d'utiliser de l'éthanol dans l'essence. D'ailleurs, Henry Ford était un ardent défenseur de l'éthanol. Son premier modèle T fonctionnait à l'éthanol pur.

Le débat a fait rage pendant toutes les années trente et, finalement, c'est le plomb qui l'a emporté sur l'éthanol. C'est une histoire intéressante parce que selon les renseignements dont je dispose, la Du Pont Corporation possédait et contrôlait la Ethyl Corporation of America et également 24 p. 100 des actions de la General Motors. Pas surprenant que la General Motors se soit faite l'avocat du plomb. En 1929, Ford a cessé de mettre des buses supplémentaires sur ses carburateurs pour qu'ils puissent fonctionner à l'éthanol. Ce n'est pas la seule histoire du genre que l'on trouve dans ce domaine.

Lorsque j'étais jeune, on utilisait des composés à l'arsenic pour tuer les ravageurs des pommes et des pommiers. On a découvert, alors que j'étais adolescent, que l'arsenic était un métal lourd et que ce n'était pas très bon d'en répandre sur les arbres et le sol. Alors que j'arrivais au collège d'agriculture, on trouvait une solution au problème, les composés à base de mercure. Ceux-ci représentaient à l'époque la solution idéale. Il n'a pas fallu bien longtemps, beaucoup trop à mon avis cependant, pour que l'industrie s'aperçoive que les produits utilisés dans ce domaine devaient aussi être biodégradables et donc capables de retourner à la terre d'où ils venaient. C'est un peu la même découverte que l'on fait en ce qui concerne les additifs de l'essence.

C'est ainsi que le plomb est disparu. On s'est aperçu que le plomb n'était pas réellement ce que l'on voulait dans notre environnement en quantité croissante. Lorsque le gouvernement a décidé de se débarrasser du plomb comme additif, on a trouvé un produit de remplacement miracle, un dérivé organique d'un autre métal lourd, le manganèse. Le nom du composé utilisé comprend un certain nombre de termes très longs que je ne suis pas prêt à répéter.

(1625)

Pendant près d'une génération, nous avons constaté que cela n'allait pas sans difficultés. Chacune des deux parties intéressées a sa version des faits, mais nous savons que, quel que soit l'argument


14626

qui prévaut, il existe un meilleur produit de remplacement. Il y a un produit de remplacement.

Contrairement à ce que disait mon collègue d'Athabasca, ce n'était pas parce que le gouvernement pensait que l'éthanol pouvait être produit au Canada qu'il était favorable à son utilisation. Pour moi, ça l'était parce que j'estime qu'une industrie canadienne de l'éthanol rendrait de grands services à l'agriculture canadienne.

Depuis que le gouvernement a lancé cette modeste initiative il y a environ un an, en Ontario seulement quelque 300 millions de dollars ont été investis dans la production d'éthanol. Si le Canada remplaçait le MTT par l'éthanol dans une proportion de 10 p. 100, il faudrait multiplier par dix le montant qui est actuellement investi dans ce secteur en Ontario pour répondre à ce besoin. On mesure toute l'importance de ce potentiel.

Le coût de l'éthanol s'est accru et c'est un argument très valable. Il en est ainsi parce que le coût du grain augmente à l'heure actuelle et que, bien sûr, c'est le grain est cyclique par nature.

La réponse est double. Premièrement, le coût du grain n'est pas l'unique facteur qui détermine le coût de production de l'éthanol. Il y a les sous-produits. Si on fabrique de l'éthanol à partir de blé ou de gluten, par exemple, il s'agit là de produits importants, qui jouent un rôle important dans l'économie de l'industrie de l'éthanol. Si on fabrique l'éthanol à partir de maïs, d'huile de maïs, de drêche de distillerie, d'ingrédients solubles de distillerie, etc., encore là il s'agit de sous-produits très importants et dont il faut tenir compte dans le calcul du coût.

L'autre partie de l'équation n'est pas seulement 8c., soit la taxe d'accise qui était imposée sur l'éthanol. Le coût de tout carburant n'est pas seulement son coût direct. Le coût d'une pelletée de charbon n'est pas seulement 30c. ou un dollar. Il faut regarder le coût dans son ensemble. Combien coûtent les répercussions sur l'environnement? On peut maintenant calculer le coût de choses de ce genre. Je crois avoir vu un jour le mot «monétiser». Alors, lorsque des émissions sont libérées dans l'environnement, elles ont des répercussions qui ont un coût réel.

Lorsque nous parlons de substituer l'éthanol au MMT dans l'essence, le coût réel de l'éthanol proprement dit n'est pas son vrai coût. L'injection de MMT et son coût ne sont pas le vrai coût. Son coût dans son ensemble est réellement important dans ce cas-ci.

Nous avons un produit comme l'éthanol qui se traduira par certaines réductions positives des émissions. Je songe ici aux émissions de monoxyde de carbone et de bioxyde de carbone. On prétend que les émissions de monoxyde de carbone sont réduites d'environ 20 p. 100 ou 25 p. 100 et les émissions de bioxyde de carbone, d'environ 15 p. 100.

Puis nous arrivons au coût de l'oxyde d'azote, qui a tendance à compenser cela dans une certaine mesure. Je vous implore de regarder les chiffres lorsque nous examinons les émissions, car les émissions d'oxyde nitreux sont les plus faibles de toutes. Elles sont infimes. Si on augmentait les émissions d'oxyde d'azote de 150 p. 100, elles seraient toujours pratiquement nulles, mais ce sont les seules émissions qui augmentent dans tout ce scénario.

On a parlé de chercher un seul type d'essence. J'ignore comment on évalue cela au juste. À l'heure actuelle, il y a sur le marché environ quatre types d'essence. La plupart sont basés sur l'indice d'octane. L'un d'eux est fondé sur l'utilisation de l'éthanol comme additif, ce qui suscite de plus en plus d'intérêt. On utilise de plus en plus ce type d'essence. Il y a deux ans environ, il y avait 50 stations vendant de l'essence contenant de l'éthanol. À l'heure actuelle, leur nombre est passé à 500 et on s'attend à ce qu'il soit de 5 000 d'ici à deux ans.

(1630)

Les compagnies pétrolières ne devraient absolument pas craindre d'améliorer leur produit grâce à l'éthanol plutôt qu'au MMT. Le type de matière première qu'elles produisent est quelque peu différent. La pression de vapeur des deux produits diffère, mais la différence s'arrête là. Les compagnies pétrolières devraient faire un geste sur le plan des relations publiques et être en mesure de dire qu'elles déploient les efforts qui s'imposent pour améliorer leur produit. Ainsi, on aurait un produit plus sûr en utilisant l'éthanol plutôt que le MMT.

Je le répète, je ne reproche pas à la société Ethyl Corporation de vouloir protéger son territoire, mais une des choses que je voudrais dire à une société comme celle-là, c'est qu'on doit, à un moment donné, mettre le passé de côté et se tourner vers l'avenir. Si j'étais cette société à l'heure actuelle, j'envisagerais très sérieusement de produire de l'éthanol, de l'ETBE ou un autre produit du genre pour moderniser mes opérations.

On ne peut passer toute sa vie à essayer de s'accrocher au passé. En fait, certaines raffineries sont déjà passées à l'éthanol. J'ignore si mon collègue de l'Athabasca achète son essence dans des stations Mohawk, mais ces stations ont adopté ce type d'essence il y a un certain temps et en ont fait la promotion en Ontario.

La société Sunoco raffine de l'essence renfermant de l'éthanol. Elle le fait, car elle considère que c'est bon pour ses affaires. Je pense qu'au Canada, on devrait voir les choses ainsi.

Nous commençons à utiliser les céréales pour produire de l'éthanol, ce qui favorise l'agriculture. Ce type de production sera assurément d'une très grande importance. Avec l'évolution de la technologie, de la science et de la R-D, il est à prévoir que le processus de production fasse bientôt appel aux déchets cellulosiques, la sciure ou les déchets de bois, entre autres. La technique est connue. Elle est appliquée commercialement en France, bien qu'elle ne soit pas encore concurrentielle. Quand elle deviendra concurrentielle au Canada, elle soutiendra probablement mieux la concurrence que l'éthanol produit à partir de céréales. C'est une question de quelques années à peine.

Toute la question se résume à savoir si nous voulons aller vers quelque chose de mieux et mettre de côté une substance que nous utilisons depuis près de deux décennies. À ce que je sache, le Canada est le seul pays qui utilise encore le MMT à l'heure actuelle.


14627

Même la petite Bulgarie a songé à utiliser le MMT et, pour une raison ou une autre, elle y a renoncé. Nous avons toutes les raisons d'aller de l'avant avec le monde moderne et de laisser les choses évoluer.

L'industrie automobile a ses propres raisons. Que toutes les études commandées par les constructeurs automobiles soient exactes ou non, il est remarquable qu'elles arrivent toutes à la même conclusion, même si elles ont été menées de façon indépendante. Cette constatation est très intéressante en ce qui concerne le dispositif antipollution, ou celui qui mesure les émissions pour déterminer si le dispositif antipollution fonctionne bien ou non. Les Canadiens méritent d'avoir le dispositif antipollution le plus perfectionné qui soit dans leurs automobiles. Je doute que nous voulions celui qui se classe en deuxième, afin de pouvoir continuer à importer ce produit de manganèse pour notre essence.

(1635)

Je propose humblement que nous nous tournions résolument vers l'avenir.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, j'ai trouvé l'intervention intéressante.

Je serais certainement d'accord avec les conclusions du députés si on était en présence de règles du jeu équitables. Si des études indépendantes pouvaient me démontrer sérieusement que le MMT est nuisible pour l'environnement et que l'éthanol pourrait être produit de façon concurrentielle au MMT sans subvention de l'État et que l'industrie pourrait se défendre toute seule, son argumentation me paraîtrait réaliste. Dans ce cas-là, nous devrions sûrement aller de l'avant. Or, c'est exactement le contraire qui est vrai.

Le fait est que la production d'éthanol n'est pas, dans l'état actuel de la technologie, une industrie rentable. Elle le deviendra peut-être un jour, et ce sera tant mieux. Par ailleurs, il n'a certes pas été prouvé que le MMT était nuisible pour l'environnement. Les innombrables études effectuées par l'agence américaine de protection de l'environnement ont révélé que le produit n'était pas nuisible. Au Canada, la ministre de la Santé affirme qu'il n'est pas nuisible pour la santé des Canadiens. En fait, interdire ce produit aurait pour effet de hausser les taux d'oxyde d'azote. Son interdiction exigerait des processus supplémentaires de raffinage pour obtenir une essence d'un taux d'octane équivalent, et les raffineries se trouveraient à augmenter substantiellement les émissions de CO2 et de benzène.

Il est donc faux de prétendre que le MMT est un produit désuet qu'il faut interdire parce qu'il est très nuisible pour l'environnement et qu'il faut dépenser l'argent des contribuables pour subventionner la production d'éthanol. J'invite le député à répliquer à cela.

M. Reed: Monsieur le Président, l'un des collègues du député recommandait d'attendre que les États-Unis prennent une décision finale au sujet de l'avenir du MMT. Je lui signale tout simplement que les États-Unis accordent une réduction de taxe sur l'essence à l'éthanol qui est deux fois supérieure à ce qu'elle est au Canada. Les États-Unis encouragent la production de l'essence à l'éthanol.

Je rappelle également au député que 39 villes américaines ont ordonné l'utilisation de l'essence à l'éthanol pour des raisons environnementales. Leur problème tenait à ce qu'on appelle l'ozone troposphérique.

Ma collègue, la vice-première ministre, a parlé de l'ozone troposphérique. Certains croient que l'ozone troposphérique ne pose aucun problème au Canada. Si l'on exprime les émissions d'ozone en fonction de la superficie du Canada, il est vrai que l'ozone ne pose pas de problème. Pourtant, la région métropolitaine de Toronto, la vallée de l'Outaouais, Montréal, Vancouver et le sud-ouest de l'Ontario sont aux prises avec un véritable problème. Cet été, l'état de la couche d'ozone a posé un grave problème, car des avertissements sont restés en vigueur pendant un certain nombre de semaines. L'année précédente, nous avions eu des avertissements pendant seulement deux semaines, je crois.

Un État peut avoir de bonnes raisons d'encourager une industrie. Dans ce cas-ci, l'appui de l'État s'est traduit non pas par une subvention, mais par l'abolition de la taxe d'accise. On peut longuement discuter de sémantique, mais, peu importe comment vous voyez les choses, le pays le plus industrialisé au monde a cru bon de promouvoir l'éthanol cette année. En 1995, 45 nouvelles usines d'éthanol sont en construction aux États-Unis, et ce, pour une seule raison: les Américains veulent de l'éthanol comme additif. À l'heure actuelle, 8 p. 100 de toutes les essences consommées aux États-Unis contiennent de l'éthanol. C'est assez considérable, étant donné que l'éthanol n'est utilisé que depuis quelques années.

(1640)

Une voix: Ils vont revenir au MMT.

M. Reed: Nous ne savons pas si les États-Unis vont approuver le retour du MMT sur leur marché ou non, mais il reste que l'éthanol est un produit supérieur, nonobstant le fait qu'il sera produit en grande quantité au Canada. Je ne crois pas que les agriculteurs canadiens accepteraient facilement d'écarter cette possibilité et de dire que l'utilisation continue du MMT leur nuira. Ils veulent de l'essence à l'éthanol. Dans le sud-ouest de l'Ontario, les agriculteurs réclament de l'essence à l'éthanol à des fournisseurs qui, en temps normal, n'en vendent pas du tout.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, comme le député le dit lui-même, il n'y a rien de mal à donner un coup de pouce à un secteur industriel. Cela constitue le fond même du projet de loi. Le projet de loi n'a rien à voir avec l'environnement et tout à voir avec l'industrie.

Si le gouvernement veut interdire à tout prix le MMT, pourquoi ne pas le dire tout de suite? Si c'est cela l'objectif, qu'on le fasse. Ce qui ennuie nombre d'entre nous, c'est qu'on le fait sous le prétexte d'assainir l'environnement. C'est l'excuse qu'on donne. Il n'y a évidemment aucune raison médicale d'interdire le trafic frontalier de MMT. Je souhaiterais que le gouvernement ait l'honnêteté d'avouer qu'il a décidé de le faire parce qu'il veut le faire. Au moins, ce serait honnête, sinon prudent.


14628

Par exemple, pourquoi les sociétés Ford et GM ne signalent-elles pas du tout, à l'égard de leurs modèles 1996, l'incidence du MMT sur les ordinateurs de bord?

Cela n'a rien à voir avec l'environnement. Cela a à voir avec la décision du gouvernement d'interdire ce produit pour des raisons que la vice-première ministre est à peu près seule à connaître. Ce n'est pas une question de santé. Il ne s'agit pas d'arsenic, comme dans l'exemple qu'on a donné tout à l'heure. Le gouvernement a pris cette décision pour des raisons autres que la protection de l'environnement. Il s'agit vraiment d'une question industrielle. Si le gouvernement veut faire la promotion de l'éthanol, comme le signale le député, le ministre de l'Industrie pourrait alors s'en occuper. Je ne comprends pas que la ministre de l'Environnement se mêle de cette question qui n'a rien à voir avec l'environnement ni la santé.

M. Reed: Monsieur le Président, l'argument voulant qu'il s'agisse d'une question d'intérêt économique ou industriel est de moi. C'est un argument que j'ai défendu fièrement à la Chambre parce que je crois que la conversion à l'éthanol donnera un coup de pouce à l'agriculture et à l'économie du pays.

La décision prise par la ministre de l'Environnement s'appuie, tout d'abord, sur les données de l'expérience aux États-Unis. Pourquoi l'agence américaine de protection de l'environnement ordonnerait-elle d'utiliser de l'essence à l'éthanol dans 39 villes? Nous avons accumulé une foule de données démontrant qu'aux États-Unis, du moins, on croyait qu'il y avait un problème. Le problème se posait au pays longtemps avant que le gouvernement actuel n'arrive au pouvoir.

Il existe des données permettant de croire le contraire et qui pourraient s'avérer ou non valables, mais où arrêter le processus d'étude? Tout pourrait être étudié davantage. Comme je crois qu'on a fait beaucoup d'études indépendantes, je me demande quelle étude indépendante le député jugerait acceptable.

Une voix: Mais vous n'en ferez pas une seule.

M. Reed: Non, et vous savez pourquoi.

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Le député de Halton-Peel m'a déjà fait remarquer que sa place était assez éloignée du fauteuil de la présidence, mais je me trouve à égale distance et je ne voudrais pas qu'on m'oublie. Je prierais donc tous les députés de faire leurs interventions en s'adressant à la présidence.

M. Reed: Je vous fais mes excuses, monsieur le Président. On a terriblement tendance à se laisser emporter à ce bout-ci de la Chambre. Je devrai porter des lunettes plus fortes.

(1645)

J'espère avoir répondu à la question aussi bien que possible. Il a été prouvé que ce produit était une source légitime d'inquiétude. Les fabricants d'automobiles, qui ont avoué ne pas révéler leurs sources pour des raisons de secret des affaires, ont contribué à établir la preuve. Il semble que la déclaration de la vice-première ministre ait fait l'objet d'une fuite. Cela nous a cependant permis de dire: «Voilà la preuve telle que nous la connaissons et nous devrions prendre telle mesure afin de dépolluer l'atmosphère.»

Le président suppléant (M. Kilger): Avant que nous reprenions le débat, je voudrais signaler à la Chambre que cinq heures se sont écoulées depuis le début de l'étude en deuxième lecture. Nous passerons maintenant à la prochaine étape du débat qui consiste en des interventions de dix minutes sans questions ni observations.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je suis certaine que mes collègues seront très tristes d'apprendre que je ne dispose que de dix minutes, mais je vais essayer de présenter mes observations dans ce délai.

Je sais que de nombreux Canadiens suivent les travaux de la Chambre des communes, aussi curieux que cela puisse paraître, et j'aimerais leur rappeler que nous étudions actuellement le projet de loi C-94. Cette mesure législative s'intitule Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse. Ce titre ne semble peut-être pas très passionnant. Il semble s'agir d'une question assez inoffensive, de routine et liée à la réglementation. Le projet de loi soulève toutefois des questions dont les Canadiens doivent être informés, et nous, de ce côté-ci de la Chambre, faisons de notre mieux pour poser ces questions et pour les placer au coeur d'un débat public.

La substance à base de manganèse, dont il est fondamentalement question dans le projet de loi, s'appelle le MMT. MMT est l'abréviation d'un long nom scientifique que probablement aucun de nous ne peut ou ne veut prononcer. Il s'agit, en réalité, d'un additif susceptible d'améliorer les indices d'octane dans l'essence sans plomb. Nous savons tous que la plupart de nos véhicules fonctionnent à l'essence sans plomb et nous voulons tous rouler le plus longtemps possible sur un plein d'essence parce que cela nous fait faire de légères économies. C'est pourquoi tous les Canadiens devraient s'intéresser à tout produit pouvant améliorer l'indice d'octane dans l'essence, ce que fait le MMT.

Cependant, la ministre de l'Environnement veut maintenant interdire l'importation de ce produit au Canada et empêcher qu'il soit vendu comme un produit ordinaire d'une province à l'autre. Le traitement de ce produit redoutable ne manque pas d'étonner. D'où vient cette soudaine préoccupation de la part de la ministre de l'Environnement au sujet du MMT, cet additif améliorant l'indice d'octane? Est-ce parce que le MMT est non sécuritaire ou dangereux? Dans l'affirmative, nous voudrions certainement le savoir. Nous ne voulons pas qu'il flotte dans l'air ou nous coule entre les doigts lorsque nous faisons le plein.

Le fait est que le MMT n'est absolument pas dangereux. La ministre ne va pas l'interdire carrément. Elle ne va même pas l'étiqueter comme produit dangereux. Étant donné que le produit ne sera pas interdit parce qu'il est jugé non sécuritaire ou étiqueté comme tel, on se demande bien ce que la ministre de l'Environnement vient faire dans ce dossier. C'est bien étrange.

Si le produit a été jugé non sécuritaire ou s'il cause des blessures, pourquoi alors autoriser sa distribution aux consommateurs. S'il est vraiment dangereux, pourquoi ce produit n'est-il pas interdit?


14629

En vertu de ce projet de loi, le MMT peut toujours être fabriqué au Canada. Un fabricant donné pourrait produire du MMT dans toutes les provinces sans enfreindre la loi parce que le projet de loi C-94 ne fait qu'interdire le commerce interprovincial ou l'importation de cette substance.

La question évidente qu'on doit poser est: pourquoi présenter un tel projet de loi? Le député d'en face vient de parler longuement de l'éthane. La conclusion que l'on devrait peut-être en tirer, c'est que le MMT est interdit afin de favoriser les producteurs d'éthane au détriment des fabricants de MMT. Je ne sais pas. Nous n'avons pas obtenu de réponses à ces questions. Il n'en reste pas moins que ce projet de loi est bien curieux parce que rien ne prouve que la substance en cause est un risque pour la santé des Canadiens.

La ministre de l'Environnement doit certes s'inquiéter des polluants et des substances dangereuses pour l'environnement, mais le MMT ne représente aucun danger. Il n'y a rien dont on ait prouvé le danger pour notre santé. Cela n'a pas seulement été démontré par des études américaines que l'on pourrait, j'imagine, écarter, mais par une étude réalisé par Santé Canada en 1994, donc relativement récente, qui a constaté que le MMT ne menaçait pas la santé des Canadiens.

(1650)

Mais que se passe-t-il donc? À notre avis, la ministre de l'Environnement a entraîné le gouvernement dans une dispute entre les fabricants du MMT et les constructeurs d'automobiles des États-Unis. Ces derniers possèdent des usines et fournissent des emplois au Canada. Certains de ces emplois sont très près d'Ottawa.

Comme il a été dit, le MMT dans l'essence sans plomb provoquerait une défaillance du diagnostiqueur de bord de nos automobiles modernes. Donc, les constructeurs d'automobiles veulent faire interdire le MMT. Ils sont plutôt avares de précisions lorsqu'il s'agit des données sur lesquelles ils fondent leurs allégations. En fait, ils semblent vouloir les garder secrètes. Mais il y a eu quelques fuites. Par conséquent, en raison de quelques allégations et de quelques données coulées, nous nous hâtons de nous porter à la défense des diagnostiqueurs de bord. À mon sens, ce n'est pas vraiment là le travail d'une ministre de l'Environnement grassement rémunérée.

Les éléments de preuve sont lacunaires, inconcluants et, bien sûr, les fabricants de MMT ont produit des preuves établissant que leur produit n'est pas dangereux et ne cause pas le problème qu'on lui reproche. Non seulement il ne nuit pas à l'environnement ni aux Canadiens, mais il ne nuit même pas à nos automobiles ou à nos diagnostiqueurs de bord.

Pourtant, ces preuves ne suffisent pas. Les constructeurs d'automobiles prétendent avoir un sérieux problème. Une des parties affirme: «Nous avons un problème et vous en êtes la cause.» L'autre réplique: «Non, notre produit ne cause pas ce problème. Commandons une étude scientifique à des spécialistes que nous respectons tous les deux, qui ont des compétences que nous reconnaissons tous les deux et vidons la question.»

Mais avant même que cette suggestion très sensée soit suivie, avant même que les spécialistes puissent être convoqués, la ministre intervient et dit: «Non, je prendrai le parti des constructeurs d'automobiles et je déclarerai que le MMT doit être interdit», pour des raisons pas très précises et, en tout cas, pas très convaincantes. Nous dénonçons cette façon de faire.

Nous reconnaissons, comme certains de nos vis-à-vis l'ont déclaré, que les Canadiens en ont assez des problèmes étudiés sans fin. Mais voyons la situation telle qu'elle est. La question a-t-elle été soumise à d'interminables études? Nous avons entendu des arguments très vagues et peu convaincants de la part des fabricants d'automobiles. Nous avons également entendu des allégations de la part des représentants de l'industrie qui produit le MMT. Nous n'avons aucun rapport indépendant, à part Santé Canada qui dit que cette substance n'est pas dommageable pour la santé. Je ne dirais pas qu'on a étudié la question à mort. Ce projet de loi a été présenté à l'aveuglette, sans avoir fait l'objet d'une réflexion suffisante et sans que le bien-fondé en ait été prouvé. Nous nous opposons à cela. À notre avis, ce n'est pas de cette façon qu'un gouvernement devrait gérer les affaires du pays, et ce n'est pas de cette façon que les décisions devraient être prises. De plus, nous ne pensons certainement pas que c'est là un domaine dans lequel la ministre de l'Environnement devrait intervenir.

En fait, dans une décision rendue aux États-Unis en juin, on en est venu à la conclusion que les résultats des études faites dans ce pays sur l'impact du MMT n'étaient pas concluants. On peut supposer qu'il y a là-bas certains experts dont l'opinion mérite d'être écoutée. Il a donc été décidé que la substance ne devait pas être interdite. D'autres ont fait allusion au fait que cela veut probablement dire qu'on approuvera de nouveau l'utilisation du MMT comme additif antidétonant dans l'essence sans plomb aux États-Unis.

Tout cela signifie que la ministre de l'Environnement prend des mesures non justifiées à l'égard d'une question qui aurait dû être réglée, qui aurait pu être réglée et qui aurait effectivement été réglée par les parties concernées.

On se préoccupe beaucoup des conséquences de cette mesure législative, qui revêt une importance énorme pour les deux secteurs, soit les fabricants d'automobiles et les fabricants de MMT.

(1655)

De plus, les provinces ont exprimé des préoccupations légitimes à cet égard. L'Ontario, l'Alberta, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse ont dit craindre que toute substance utilisée pour remplacer le MMT nuise à la qualité de l'air dans nos localités.

Monsieur le Président, je voudrais proposer une motion. Je propose:

Que le projet de loi C-94, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse, ne soit

14630

pas maintenant lu une deuxième fois, mais que l'ordre soit révoqué, le projet de loiretiré et l'objet déféré au Comité permanent de l'industrie.
Le président suppléant (M. Kilger): L'amendement est recevable.

M. Ovid L. Jackson (Bruce-Grey, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais prendre la parole au sujet de l'amendement proposé par la députée de Calgary-Nord.

Une des choses qui m'inquiètent dans cette Chambre c'est la façon dont de nombreux députés se disent experts dans des domaines dont ils ignorent tout.

Le Parti réformiste dit qu'il veut abaisser les impôts, réduire le déficit, et ainsi de suite. Les réformistes nous demandent de nous adresser au Conseil national de recherches, d'embaucher un groupe de scientifiques pour le compte de la compagnie Ethyl afin qu'ils fassent tout le travail qu'il y a à faire. Nous avons une longue liste de fabricants d'automobiles: BMW, Volkswagen, Volvo, Saab, Lada, Jaguar, Land Rover, Mercedez Benz, et bien d'autres encore.

Je vais expliquer comment fonctionne une automobile. Nous parlons aujourd'hui d'un additif antidétonant. La détermination de l'indice d'octane est une unité de mesure créée par l'industrie automobile pour connaître le comportement de divers carburants. En laboratoire, on utilise un moteur à ratio de compression variable dans lequel on introduit diverses substances, comme de l'essence, des additifs stoechiométriques et autres. Lorsque le moteur se met à cogner, ce qu'il ne fait pas lorsqu'il est à 100 p. 100, on réduit la quantité d'antidétonant contenu dans l'essence.

Pourquoi fait-on cela? Parce qu'on veut que le processus de combustion soit prévisible. Monsieur le Président, si vous avez déjà conduit une auto, vous aurez peut-être été témoin, après avoir coupé le contact, de ce qu'on appelle l'auto-allumage. Ce phénomène se produit lorsque l'essence atteint un ratio de compression tellement élevé qu'elle explose spontanément. Ce n'est évidemment pas souhaitable. L'allumage doit se produire lorsqu'on met le contact et cesser dès que le contact est coupé.

L'équipement de diagnostic perfectionné dont les voitures modernes sont pourvues, notamment les soupapes de recyclage des gaz de carter, le dispositif de recyclage des gaz d'échappement, le convertisseur catalytique, une chambre de combustion de conception sophistiquée et des thermostats plus puissants pour permettre d'atteindre des températures plus élevées, permet d'obtenir un mélange stoechiométrique de quatorze livres d'air par livre d'essence.

(1700)

Nous voulons que ces conditions soient constantes. Nous voulons une bonne vaporisation dans la chambre de combustion, un certain degré de turbulence et de la prévisibilité pour que, lorsque l'essence explose, à un moment précis du cycle, lorsque le piston descend à un certain angle, la pression maximum s'exerce.

On y parvient au moyen d'un antidétonant. Si on frappe avec un marteau sur une voiture moderne, et si on se sert de la lampe stroboscopique, on peut voir que l'étincelle retarde.

Ces voitures sont très délicates. Par conséquent, il faut installer sur les voitures des dispositifs de diagnostic. Ces dispositifs permettent d'ajuster avec précision le processus de combustion du début à la fin pour que les contaminants rejetés ne polluent pas l'air.

Voilà dans quel sens vont les efforts de la ministre de l'Environnement. Elle a dit que, si nos voitures n'étaient pas dotées de ces dispositifs de diagnostic disponibles aux États-Unis, les Canadiens auraient un produit inférieur à celui proposé aux consommateurs américains. Nous fabriquerions au Canada des voitures pour les exporter aux États-Unis tout en continuant à nous servir de voitures à la technologie dépassée.

Toutes les études des fabricants de voitures concluent que le MMT perturbe le fonctionnement des dispositifs de diagnostic et déclenche les voyants avertisseurs. Les fabricants doivent donc examiner les voitures qui sont garanties, et cela fait grimper le coût de la voiture.

Nous sommes censés être en mesure de parcourir bien au-delà de 100 000 kilomètres avec notre voiture sans que ces pièces ne soient remplacées et sans qu'il y ait encrassement du très compliqué convertisseur catalytique à trois voies.

Qu'a fait le gouvernement du Canada? La ministre de l'Environnement a enjoint les fabricants et la société Ethyl de régler le problème, ce qu'ils n'ont pu faire.

Si la société Ethyl est si convaincue que son produit est bon, qu'elle prenne le risque. Ne nous demandez pas d'avoir recours aux services de notre Conseil national de recherches et de nos chercheurs pour prouver que leur produit est bon ou mauvais. Qu'ils effectuent des essais sur leurs voitures types et qu'ils prouvent l'efficacité de leur produit. L'argument selon lequel un procès est en cours aux États-Unis ne tient pas, puisque les Américains n'utilisent pas le MMT depuis 17 ans.

Il y a encore une interdiction. On ne peut pas acheter légalement du MMT aux États-Unis, et la Environmental Protection Agency a dit qu'il fallait soumettre cette substance à des tests qui sont si importants pour la protection de l'environnement, des tests que doivent subir tous les additifs soumis à certaines restrictions.

Il faut analyser les émissions d'hydrocarbures, les émissions d'oxyde d'azote et ainsi de suite et s'assurer qu'elles sont à un niveau acceptable.

Nous avons ici une industrie automobile dont nous utilisons 10 p. 100 de la production et dont nous en exportons 17 p. 100. Il est important de prendre une décision avant la sortie des nouveaux modèles. La ministre devait agir et elle l'a fait.


14631

Je ne vois pas pourquoi certains de mes collègues auprès de qui Ethyl Corporation fait du lobbying essaient de dire au gouvernement que nous devrions dépenser plus d'argent.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur la motion de ma collègue visant à renvoyer le projet de loi C-94 au Comité permanent de l'industrie.

Pendant le débat d'aujourd'hui, nous avons clairement établi que la décision du gouvernement d'interdire le MMT n'est pas du tout motivée par des considérations liées à l'environnement, mais une décision prise par l'une des plus politiques de nos ministres, la ministre de l'Environnement.

Il est intéressant de se rappeler qu'il y a des années, elle a fait la manchette en sautant par-dessus une table pour affronter un ministre conservateur. Peut-être juge-t-elle ne pas avoir été assez vue aux nouvelles dernièrement et présente-t-elle le projet de loi C-94 pour tenter de faire croire qu'elle s'occupe de l'environnement? Il est évident que ce projet de loi est purement politique.

Le projet de loi C-94 interdirait l'importation et le commerce interprovincial du MMT. Il est intéressant de voir que les libéraux n'ont aucune raison écologique d'interdire ce produit. C'est pourquoi ils ne peuvent pas l'interdire. Ils peuvent tout simplement en interdire le commerce interprovincial, ce qui, bien sûr, a le même effet.

Il est honteux que le gouvernement n'avoue pas franchement vouloir interdire le produit pour les fins de sa politique de diversification ou quelque chose du genre. Ce serait honnête. Aucune considération d'ordre environnemental n'entre en ligne de compte.

(1705)

Il a été intéressant, aujourd'hui, d'entendre la ministre de l'Environnement citer de larges extraits de tous les rapports qu'elle a consultés, mais qu'elle ne déposera pas à la Chambre des communes. Tous ces rapports sont classifiés ou secrets, ou quoi encore.

Si elle pouvait consentir à la tenue d'une étude indépendante ou déposer les études qu'elle cite pour que tout le monde puisse en prendre connaissance, nous croirions peut-être à la pureté de ses intentions. Dans l'état actuel des choses, comme elle ne veut pas déposer son rapport ni commander une étude indépendante, on peut se demander si la ministre est sincère sur l'impact qu'aurait cette mesure sur l'environnement, surtout quand on sait ce qui ressort des autres études sur les déclarations de l'EPA, aux États-Unis, qui affirme que le MMT n'est absolument pas en cause si les véhicules ne respectent pas les normes établies par la loi américaine contre la pollution de l'air.

En passant, cette loi américaine est beaucoup plus sévère que la nôtre. C'est malheureux que la ministre cherche à se faire du capital politique avec cette mesure. Ce n'est vraiment pas à son avantage d'insister pour faire passer cette idée, plutôt que de la soumettre au Comité de l'industrie, qui pourrait l'étudier convenablement et nous dire, preuves scientifiques à l'appui, si le MMT est bon ou mauvais.

Le 30 novembre 1993, l'EPA déterminait que le MMT ne provoquait pas de pannes du dispositif antipollution sur les voitures et, le 14 avril 1995, les tribunaux ordonnaient à l'EPA de suspendre temporairement l'interdiction d'utiliser du MMT afin de permettre à une société privée d'en vendre à nouveau. L'EPA qui, je pense, n'est à la solde de personne, a dit qu'il n'y avait aucune raison d'interdire le MMT et qu'elle allait en permettre à nouveau l'utilisation aux États-Unis.

Les États-Unis sont sur le point d'autoriser à nouveau l'ajout de MMT dans l'essence, au moment même où le Canada essaie de le proscrire.

L'Institut canadien des produits pétroliers a déclaré que ses industries continueraient à utiliser le MMT, à moins qu'on ne lui présente des preuves concluantes que cet additif est nocif pour l'environnement ou qu'il cause le mauvais fonctionnement du système diagnostiqueur de bord.

Il est disposé à prendre les mesures qui s'imposent si de telles preuves existent, ce qui n'est pas le cas. En fait, l'inverse est vrai. En décembre 1944, Santé Canada publiait une étude affirmant que le MMT ne représentait aucun danger pour la santé. Par conséquent, la ministre ne peut l'interdire. Tout ce qu'elle peut faire, c'est d'en interdire le transport.

Pour améliorer l'indice d'octane de l'essence, il faudra que les raffineries trouvent autre chose. Mais quoi? Des suggestions ont été faites des deux côtés et l'un des produits de remplacement pourrait être un additif au nom imprononçable appelé MTBE; la substitution coûtera, au départ, quelque 50 millions de dollars auxquels s'ajouteront 25 millions de dollars par an. Ce n'est pas rien.

Bien sûr, c'est le consommateur qui absorbera cette augmentation du coût de production lorsqu'il fera le plein. La ministre de l'Environnement devrait ajouter qu'elle est aussi ministre de l'essence, non seulement à cause de la nature politique de ses commentaires, mais aussi parce qu'elle contribuera largement à l'augmentation du prix de l'essence si ce projet de loi est adopté.

Détail plus ironique encore, la nouvelle substance qui remplacera le MMT est plus polluante, tandis que celle que la ministre veut interdire est sans danger selon Santé Canada. Les fonctionnaires d'Environnement Canada affirment eux-mêmes que l'interdiction du MMT fera grimper de 20 p. 100 l'émission d'oxyde d'azote. L'oxyde d'azote est ce qui fait augmenter la quantité d'ozone au niveau du sol et qui rend la vie un peu plus difficile aux gens qui souffrent de troubles pulmonaires.

La ministre de l'Environnement, que nous appelons aussi ministre de l'essence, pourrait devenir ministre des affections pulmonaires. Ceci fait ressortir non seulement sa tendance à faire des commentaires irréfléchis, mais aussi le fait qu'elle contribue à aggraver un problème de pollution atmosphérique déjà assez sérieux au Canada.

Si l'interdiction du MMT nuit aux gens et à l'environnement et si l'EPA américain a déterminé que l'utilisation du MMT n'endommageait pas les systèmes d'échappement, quelle motivation a poussé la ministre à présenter ce projet de loi?

Il me semble évident que la motivation est purement politique. Je me demande si ce projet de loi n'est pas le fruit des efforts de lobbying des puissants constructeurs d'automobiles. La ministre est-elle si faible qu'elle cède aux pressions d'un groupe puissant du


14632

centre du Canada, même si, selon son propre ministère, rien ne prouve que cette substance cause de véritables dommages?

(1710)

La ministre devrait se souvenir qu'elle a des responsabilités nationales, qu'elle est censée prendre en considération l'ensemble du pays et que toutes les parties du Canada seront touchées par ses décisions.

Nous savons tous que les raffineries sont situées principalement dans l'ouest du Canada et que, par conséquent, c'est cette partie du pays qui supportera l'essentiel des coûts. Par contre, les grands constructeurs automobiles sont situés à proximité de la circonscription de la ministre et ils n'auront plus besoin de consacrer du temps et de l'argent à essayer de savoir ce qui ne va pas avec leurs ordinateurs de bord. Ils n'auront plus à justifier leur opposition au MMT par des considérations scientifiques ou techniques, il leur a suffi de faire assez de lobbying pour obtenir l'appui de la ministre. Ils semblent avoir réussi.

Je me demande ce que la ministre des Ressources naturelles pense de ce projet de loi. J'ai mentionné plus tôt aujourd'hui, sur un sujet différent, que j'avais été parmi les premiers à applaudir la ministre des Ressources naturelles lorsqu'elle a pris la défense de l'industrie et lorsqu'elle a pris des décisions basées sur des preuves scientifiques sérieuses. Toutefois je me demande quelle est son opinion sur cette question. J'aimerais bien lui demander si elle est d'accord avec le but de ce projet de loi et si elle est prête à brader l'industrie qu'elle représente, de sorte que la ministre des problèmes de gaz et de poumons puisse protéger son terrain politique. La ministre défend-elle réellement son industrie à la table du Cabinet ou a-t-elle perdu face aux poids lourds politiques qui sont de l'autre côté de la table?

J'attends que la ministre des Ressources naturelles fasse état de son point de vue sur ce projet de loi. Je voudrais bien qu'elle se prononce et qu'elle nous dise pourquoi elle estime, sur une base scientifique, que l'on devrait interdire le MMT. Je voudrais aussi qu'elle appuie la ministre de l'Environnement sans réserve ou qu'elle s'oppose à elle sur cette question.

J'espère que la ministre des Ressources naturelles entend représenter tous les producteurs de ce pays, pas seulement les constructeurs d'automobiles, mais également les représentants de l'industrie extractive qui demandent, à l'instar du ministre de l'Environnement de l'Alberta, que l'on fasse la preuve qu'il faut interdire le MMT.

Le communiqué que j'ai en ma possession cite une firme de courtage respectée dans le monde entier, Solomon Brothers, qui est à même d'effectuer des recherches approfondies dans ce secteur. On y dit ce qui suit au sujet des décisions de l'EPA aux États-Unis:

Nous continuons de croire fermement que la primauté du droit l'emportera dans cette affaire-à propos des décisions de l'EPA, l'agence américaine de protection de l'environnement-et non pas une quelconque position de principe bâclée de l'EPA. En d'autres termes, l'emploi de MMT sera de nouveau autorisé d'ici la fin de l'année.
La firme emploie le mot «bâclée». Nous pourrions également l'appliquer au projet de loi C-94. C'est une tentative politique bâclée pour apaiser certains groupes que je n'arrive pas à identifier clairement. La ministre de l'Environnement semble disposée à renoncer à sa mission qui est de protéger l'environnement dans l'intérêt de tous les Canadiens à partir de données techniques et scientifiques.

Il est paradoxe qu'au moment même où les États-Unis va de l'avant dans ce dossier, le Canada fait carrément marche arrière. J'inviterais la ministre de l'Environnement à faire marche arrière autrement, à prendre la décision qu'elle sait être la bonne, c'est-à-dire renvoyer ce projet de loi au Comité de l'industrie où l'on pourra procéder à une étude approfondie et tenir des audiences afin d'aboutir à une conclusion scientifique définitive.

[Français]

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Madame la Présidente, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi C-94, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse et, plus particulièrement, sur la motion qui est devant cette Chambre à l'heure actuelle, l'amendement de la députée de Calgary-Nord, qui vise à reporter le débat.

Je pense qu'il est important que nous puissions immédiatement continuer le débat qui est engagé. Les questions d'environnement, on ne peut pas les reporter indéfiniment. On ne peut pas remettre aux calendes grecques des questions aussi cruciales pour notre avenir que l'environnement. Mais avant de parler particulièrement de cette remise à l'avenir de cette question cruciale, j'aimerais dire quelques mots sur certaines questions générales en environnement qui méritent notre attention.

Nous avons étudié ce matin dans cette Chambre la Loi visant à modifier la Loi sur le vérificateur général afin de doter le vérificateur général d'un commissaire à l'environnement et au développement durable, et en vertu de laquelle les ministères devront élaborer des stratégies et aussi les déposer en Chambre.

(1715)

Quand on parle d'environnement, c'est toujours un peu moins tangible que des sujets comme les finances, le revenu ou la gestion quotidienne. J'ai siégé au Comité des comptes publics où le vérificateur général vient nous expliquer ou questionner la gestion régulière des différents ministères du gouvernement. Mais quand on parle d'environnement, je pense que c'est important que le gouvernement ait ce souci de l'environnement, de notre futur à tous, Québécois et Canadiens.

L'environnement est un sujet qui n'a pas de frontières. C'est un sujet qui s'étend. J'ai des exemples qui me viennent à l'esprit présentement. Il y a, dans mon comté, un lac international, deux d'ailleurs, le lac Memphrémagog et le lac Champlain, où on a des problèmes d'environnement avec nos voisins les Américains.

C'est là qu'on voit qu'on ne peut pas, à cause des frontières, régler la totalité des problèmes. Il faut s'entendre avec nos voisins.


14633

Cet été, j'ai participé à des réunions avec nos voisins du Vermont, avec des gens de Washington pour régler un problème d'environnement sur le lac Champlain. Je pense que c'est important entre voisins de faire en sorte de se comprendre et de faire en sorte que les générations futures, d'un côté ou de l'autre de la frontière, du côté américain ou canadien, puissent s'entendre dans le futur.

Dans ce sens-là, je pense qu'il n'y a pas lieu non plus de multiplier les frontières en matière d'environnement. Qu'il s'agisse de l'ALENA, qu'il s'agisse de l'Organisation mondiale du commerce, nous sommes dans un contexte économique ouvert et pour l'environnement, il doit en être ainsi.

Quand on regarde ce projet de loi, je pense qu'on doit faire un pas en avant, mais pas dans six mois. Il y a assez d'études et je pense que le gouvernement doit aller de l'avant avec ce projet de loi.

Je vous parlais plus tôt de l'importance de l'environnement dans notre pays. J'aimerais mentionner d'autres expériences que j'ai vécues au cours de l'été. On a vu cette magnifique collaboration entre le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et les municipalités un peu partout au Canada. Ici, je fais référence au programme des infrastructures qui a servi en matière environnementale au Québec. On est allé chercher des fonds pour ce programme des infrastructures dans certains endroits pour faire en sorte qu'une usine de traitement des eaux puisse être construite. Dans plusieurs domaines, le programme des infrastructures a été utile pour faire avancer des projets environnementaux.

Je reviens sur l'importance des décisions qui doivent être prises aujourd'hui, pas demain, aujourd'hui pour régler le futur. Vous savez qu'aujourd'hui, quand on prend une décision environnementale, ordinairement, cela coûte quelques sous, mais il vaut peut-être mieux payer aujourd'hui que d'avoir à se faire reprocher par les générations futures de n'avoir pas bougé assez vite en matière environnementale.

C'est important pour la sécurité. On voit la couche d'ozone, on voit aussi tous les problèmes des lacs et des rivières, les problèmes de pollution. Bougeons immédiatement. Et c'est ce que le gouvernement veut faire, bouger immédiatement, de façon à ce que nos générations futures puissent vivre en toute sécurité.

Aussi il faut voir ce que cela apporte sur le plan commercial, sur le plan de l'industrie. On bouge immédiatement et ça force l'industrie, ça incite l'industrie à développer de nouvelles technologies, à développer de nouveaux produits, à fabriquer, à exporter. Je pense que le domaine de l'environnement, autant pour nos bureaux d'ingénieurs, un peu partout au Canada, que pour nos industriels, pour ceux qui fabriquent, pour nos exportateurs, enfin pour tout le monde, c'est un domaine prometteur pour le futur. Dans ce sens-là, pour revenir à la motion proprement dite, je pense que nous ne devrions pas permettre que le débat s'étire, nous devrions immédiatement nous pencher sur ce projet de loi.

Je parlais tantôt des débats de ce matin sur la Loi sur le vérificateur général et son nouveau commissaire à l'environnement et au développement durable.

(1720)

Je pense qu'on voit, avec cette loi qui régit le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse, que le gouvernement est un bon gouvernement. C'est un programme de bon gouvernement. C'est un programme qui fait réaliser aux gens que la sécurité environnementale, c'est important. C'est important pour les gens d'aujourd'hui, c'est important pour tous ceux qui sont là, c'est important aussi pour les générations de demain. Ça, ça règle les vrais problèmes, peut-être pas des questions hypothétiques comme à savoir où sera la frontière, etc. On est ensemble, au Canada, on se penche tous ensemble sur les solutions aux vrais problèmes des Canadiens, et c'est ce qui est important.

Il y a eu, en matière environnementale, cette collaboration, la collaboration entre le gouvernement canadien et les diverses provinces. Pour n'en mentionner que deux, sous le gouvernement québécois précédent, le gouvernement libéral, le ministre de l'Environnement de l'époque, Pierre Paradis, avec l'actuel ministre de l'Environnement du Canada, Mme Copps, ont signé des ententes. Le Plan Saint-Laurent, par exemple, qui s'appelle Vision 2000, ou l'entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement d'Ottawa sur le Saint-Laurent. Mais le Saint-Laurent, il part des Grands Lacs. Tout est interrelié. Alors, ces ententes sont extrêmement bénéfiques pour le Québec, pour le Canada, pour les générations présentes et les générations à venir. Et c'est ça qui est important, cette collaboration entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

En dix mois, on a eu une deuxième entente, l'entente avec les papetières, entente entre le gouvernement du Québec et le gouvernement d'Ottawa. Extraordinaire! On n'a pas beaucoup d'ententes en matière environnementale depuis l'arrivée d'un gouvernement séparatiste, mais il y a eu entente, oui, entre le Québec et Ottawa, en matière environnementale. Je pense que ce projet de loi de la ministre de l'Environnement m'inspire la fierté d'être Canadien, de cette société de générosité et de partage, d'ouverture et de sécurité.

On vit à l'intérieur d'un système qui évolue. Laissons le système évoluer. Faisons en sorte qu'il y ait de nouvelles ententes, de nouveaux partages. Le Canada, d'après un rapport de l'ONU, est au premier rang au niveau de la qualité de vie, et est au deuxième rang d'après un rapport de la Banque mondiale, publié hier, comme étant le deuxième pays le plus riche au monde. Alors, faisons en sorte que, dans l'avenir, ce pays continue aussi à avancer positivement dans les dossiers concernant l'environnement, comme nous l'avons fait et comme nous allons continuer à le faire.

[Traduction]

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux d'avoir l'occasion de parler de la motion visant à modifier le projet de loi C-94, loi ayant pour objectif d'interdire l'importation de MMT.

Ma collègue, la députée de Calgary-Nord, propose de retirer le projet de loi C-94 à l'étape de la deuxième lecture et de renvoyer la question au Comité permanent de l'industrie. J'appuie cette motion, car lorsque nous examinerons les faits, nous nous apercevrons très clairement que l'interdiction du MMT est manifestement une question industrielle et non environnementale.


14634

Ce projet de loi tourne autour d'un conflit industriel, un conflit entre l'Association des fabricants de véhicules à moteur, l'AFVM, et l'Institut canadien des produits pétroliers, l'ICPP, qu'on devrait renvoyer au Comité permanent de l'industrie.

La ministre de l'Environnement essaie de faire franchir toutes les étapes rapidement au projet de loi C-94 à la Chambre, pour des motifs environnementaux, mais il n'y a aucune preuve impartiale pour appuyer sa façon de procéder ou ses prétentions environnementales. C'est pourquoi nous discutons d'une interdiction interprovinciale du MMT, par opposition à des préoccupations environnementales.

Je m'inquiète de voir qu'après avoir examiné le projet de loi proposé, le C-94, ainsi que les preuves scientifiques, pour peu qu'il y en ait, en faveur de ce projet de loi ou contre ce dernier, je me pose toujours la même question: Pourquoi le gouvernement propose-t-il d'interdire le MMT?

Au cours de la dernière session, j'ai demandé à la Chambre d'exposer les faits qui justifient le projet de loi proposé. J'attends encore qu'on me transmette ces faits, ce qui m'amène à me poser les mêmes questions et à tirer les mêmes conclusions. La décision de la ministre d'interdire le MMT est purement politique. Le fait est que cette décision est influencée par l'Association des fabricants de véhicules à moteur.

(1725)

L'association veut que la ministre interdise le MMT, car elle prétend que le MMT cause des problèmes aux systèmes de diagnostic de bord des automobiles. Cependant, cette affirmation pose un problème. Les fabricants d'automobiles éprouvent les mêmes difficultés aux États-Unis où le MMT n'est pas utilisé à l'heure actuelle. Étant donné ce fait et en l'absence de preuves impartiales, il est difficile de comprendre comment les problèmes de matériel peuvent être attribuables à la présence de MMT dans l'essence canadienne. Nous avons deux cas différents.

Il y a beaucoup de choses qui ne sont pas logiques dans ce projet de loi. Par exemple, il est difficile de comprendre pourquoi le gouvernement propose d'interdire une substance, alors que la recherche a montré que le retrait du MMT augmentera de jusqu'à20 p. 100 les émissions des véhicules qui entraînent la formation de brumard et une mauvaise qualité de l'air.

Au cours de la dernière décennie, les Canadiens se sont efforcés de réduire les émissions d'oxyde d'azote pour respecter les engagements nationaux et internationaux visant à améliorer la qualité de l'air. Nous sommes parvenus à bloquer les émissions de NOx aux niveaux de 1987, et nous nous sommes engagés à le faire auprès de l'OCDE, mais pouvons-nous maintenant nous permettre de songer à accroître les émissions de NOx de 50 000 à 60 000 tonnes par année? C'est ce qui se passera si on retire le MMT de l'essence.

Le gouvernement n'a pas encore dit quel produit remplacera le MMT dans l'essence. Le MMT est le seul additif scientifiquement éprouvé qui réduit les émissions de NOx. Des carburants de remplacement comme l'éthanol bénéficient également de l'ajout de MMT, de sorte que son retrait se répercutera également sur le rendement de ces carburants. Sans le MMT, l'éthanol libère du NOx dans l'atmosphère, mais lorsqu'on ajoute du MMT dans une essence contenant 10 p. 100 d'éthanol, on réduit de 30 p. 100 les émissions de NOx.

En outre, la ministre n'a pas parlé des répercussions de l'interdiction du MMT pour la santé. La pollution atmosphérique peut menacer la santé publique et accroître les coûts de la santé. Le NOx est un des facteurs qui contribuent le plus à l'apparition du smog dans les villes. Des essais scientifiques ont démontré que, sans le MMT, les émissions de NOx dépasseront les niveaux actuels de 20 p. 100. Cela signifie une production supplémentaire annuelle de NOx qui équivaudrait à ajouter un million d'automobiles sur nos routes.

Pourtant, malgré les éléments de preuve en ce qui concerne l'environnement et la santé, la ministre de l'Environnement se fait toujours l'écho des préoccupations de l'AFVM selon lesquelles le MMT dans l'essence canadienne cause des problèmes pour les systèmes de diagnostic intégrés qu'on trouve dans les nouveaux modèles de voitures américaines. La ministre soutient qu'elle veut interdire le MMT pour que les consommateurs n'aient pas à verser au moins 3 000 $ de plus l'an prochain pour leurs automobiles. Toutefois, il n'existe aucune preuve scientifique à l'appui d'une telle déclaration. Cette déclaration vient d'un organisme équivalent au MVMA (Motor Vehicle Manufacturers Association) aux États-Unis et la cour d'appel américaine a jugé qu'elle était absolument non fondée. De plus, les constructeurs automobiles éprouvent exactement le même problème avec les dispositifs antipollution de bord aux États-Unis, où le MMT n'est même pas utilisé à l'heure actuelle. Le MMT ne peut donc pas être la cause des défaillances.

La ministre de l'Environnement a aussi déclaré que, si les constructeurs automobiles mettaient leurs menaces à exécution et retiraient les dispositifs antipollution, les émissions seraient dix fois plus importantes. Le dispositif antipollution ne réduit pas les émissions. Il assure un contrôle et, au moyen d'un voyant sur le tableau de bord, informe le conducteur d'une défaillance qui risque d'augmenter les émissions. Le fait de retirer ou de déconnecter le dispositif empêcherait le mauvais fonctionnement d'un voyant sur le tableau de bord, mais ne produirait aucune augmentation directe des émissions.

Ce qui m'inquiète c'est que la ministre ne semble pas comprendre le fonctionnement du dispositif antipollution, ce qui était surtout apparent lorsqu'elle l'a invoqué comme étant l'une des principales raisons pour interdire le MMT. La ministre de l'Environnement a aussi indiqué qu'elle avait reçu des études du MVMA, qui indiquent que le MMT cause des défaillances. Je trouve cela très intéressant parce que, si ces études existent, je me demande pourquoi GM a annoncé récemment son intention d'effectuer des tests aux États-Unis pour déterminer les effets du MMT sur les dispositifs de bord.

* * *

LA LOI SUR LE VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-83, Loi modifiant la Loi sur le vérificateur général, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est17 h 30, conformément à l'alinéa 45(5)a) du Règlement, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé à l'étape de

14635

la deuxième lecture du projet de loi C-83, Loi modifiant la Loi sur le vérificateur général.

Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 332)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Anawak
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Asselin
Augustine
Bachand
Barnes
Beaumier
Bélair
Bélanger
Bélisle
Bellehumeur
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Bodnar
Bonin
Bouchard
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Caccia
Calder
Campbell
Canuel
Caron
Catterall
Chamberlain
Chrétien (Frontenac)
Chrétien (Saint-Maurice)
Clancy
Cohen
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Crawford
Crête
Culbert
Dalphond-Guiral
Daviault
de Savoye
Debien
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Dubé
Duceppe
Dumas
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Fewchuk
Fillion
Finlay
Flis
Fontana
Gaffney
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier
Godin
Graham
Gray (Windsor West/Ouest)
Guarnieri
Guay
Guimond
Harb
Harvard
Hickey
Hopkins
Hubbard
Ianno
Irwin
Jackson
Jordan
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lebel
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Leblanc (Longueuil)
Lee
Lefebvre
Lincoln
Loubier
MacAulay
MacDonald
Maclaren
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchand
Marchi
Martin (Lasalle-Émard)
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McWhinney
Ménard
Mercier
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
Nunez
Nunziata
O'Brien
Pagtakhan
Paradis
Paré
Parrish
Patry
Payne
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)

Pillitteri
Pomerleau
Proud
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Rocheleau
Rock
Rompkey
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Shepherd
Sheridan
Skoke
Speller
St-Laurent
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Tremblay (Rosemont)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Volpe
Wappel
Wells
Whelan
Wood
Young
Zed-183

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Althouse
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Benoit
Blaikie
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast/Sud-Est)
Chatters
Cummins
de Jong
Duncan
Epp
Frazer
Gilmour
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanger
Harper (Calgary West/Ouest)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hoeppner
Jennings
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
Mayfield
McClelland (Edmonton Southwest/Sud-Ouest)
Meredith
Morrison
Penson
Ramsay
Ringma
Schmidt
Silye
Solberg
Solomon
Speaker
Stinson
Strahl
Taylor
Wayne
White (Fraser Valley West/Ouest)
Williams-48

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Blondin-Andrew
Dromisky
Duhamel
Fry
Jacob
Lalonde
Langlois
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Robillard

[Français]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je déclare la motion adoptée. En conséquence, ce projet de loi est renvoyé au Comité permanent de l'environnement et du développement durable.

(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé à un comité.)

14636

[Traduction]

M. Milliken: Madame la Présidente, je crois qu'il y a consentement unanime pour dire qu'il est 18 h 30.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est18 h 30, la Chambre s'ajourne à 14 heures, demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 17 h 59.)