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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 17 octobre 1995

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion 15443

PÉTITIONS

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

LE SÉNAT

LES MARCHÉS DE L'ÉTAT

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

    Projet de loi C-64. Reprise de l'étude de la motion de troisième lecture 15444
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 15447
    Mme Stewart (Brant) 15449

LA LOI DE 1984 SUR LA CONVENTION CANADA-ÉTATS-UNIS EN MATIÈRE D'IMPÔTS

    Projet de loi S-9. Étude à l'étape du rapport, avec des propositions d'amendement 15459

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

MOTIONS D'AMENDEMENT

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 15465
    Report du vote sur la motion no 1 15471
    Report du vote sur la motion 15472
    Report du vote sur la motion 15472

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

    Projet de loi C-90. Motion d'approbation 15472
    Adoption de la motion 15472
    Motion visant à la troisième lecture 15472

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE PRIX DU GOUVERNEUR GÉNÉRAL

LA PAUVRETÉ

SPORTS ILLUSTRATED

LES SOINS DE SANTÉ

MAY COHEN

ALICE E. TYLER

RUTH FLOWERS

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

CLAUDE BENNETT

SHEILA KINGHAM

MARTHE ASSELIN VAILLANCOURT

    Mme Ringuette-Maltais 15478

LA CAMPAGNE RÉFÉRENDAIRE

LA CAMPAGNE RÉFÉRENDAIRE

LA JUSTICE

LA CAMPAGNE RÉFÉRENDAIRE

LA CAMPAGNE RÉFÉRENDAIRE

QUESTIONS ORALES

LE CRTC

LES SOINS DE SANTÉ

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 15481
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 15481
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 15481
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 15481

L'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DE SOMALIE

LES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES

    Mme Gagnon (Québec) 15482
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 15482
    Mme Gagnon (Québec) 15482
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 15483

LA BASE DE CHILLIWACK

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 15483
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 15484

L'ÉCONOMIE QUÉBÉCOISE

LE PROJET DE LOI C-72

LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE

LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE

LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE

LES PRODUITS PHARMACEUTIQUES

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

LE DÉPÔT DE DOCUMENTS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

    Projet de loi C-90. Reprise de l'étude de la motion de troisième lecture 15488
    Report du vote sur la motion 15500

LA COMMISSION DU DROIT DU CANADA

    Projet de loi C-106. Motion de deuxième lecture 15500

LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

    Projet de loi C-64. Reprise de l'étude en troisième lecture 15503
    Adoption de la motion par 156 voix contre 41 15503
    Troisième lecture et adoption du projet de loi 15504

LA LOI DE 1984 SUR LA CONVENTION CANADA-ÉTATS-UNIS EN MATIÈRE D'IMPÔTS

    Projet de loi S-9. Reprise de l'étude à l'étape durapport 15504
    Rejet de la motion no 1 par 172 voix contre 12 15504
    Rejet de la motion no 2 par 170 voix contre 15 15506
    Motion d'approbation 15507
    Adoption de la motion par 179 voix contre 7 15507

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

    Projet de loi C-90. Motion de troisième lecture 15508
    Adoption de la motion par 125 voix contre 64 15508
    Troisième lecture et adoption du projet de loi 15509

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

CODE CANADIEN DU TRAVAIL

    Projet de loi C-317. Reprise de l'étude en deuxième lecture 15509

15443


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 17 octobre 1995


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à trois pétitions.

* * *

[Français]

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, en anglais et en français, le rapport de la 6e assemblée annuelle du Groupe interparlementaire Canada-Japon, tenue à Tokyo et à Osaka, du 9 au 16 septembre 1995.

[Traduction]

Le Japon est le partenaire commercial le plus important du Canada après les États-Unis. Le volume des échanges commerciaux a plus que doublé depuis 1985 et la composition des échanges est de plus en plus diversifiée.

En 1994, la valeur des exportations canadiennes vers le Japon a augmenté de 13 p. 100, passant à 9,5 milliards de dollars, une augmentation de plus de un milliard de dollars pour la deuxième année consécutive.

Sans tenir compte de l'impact de la libéralisation des marchés japonais et de la compétitivité canadienne accrue, la valeur des exportations canadiennes vers le Japon devrait grimper à 14 milliards de dollars en l'an 2002, soit une augmentation de 80 p. 100 par rapport aux niveaux de 1993.

(1005)

Durant leur visite au Japon, les membres de la délégation ont fait part des préoccupations du Canada à leurs homologues japonais auxquels ils ont également fait valoir l'excellence canadienne, ce qui devrait nous permettre d'accroître notre présence sur le marché japonais et, avec les milieux d'affaires canadiens, d'encourager un accroissement des échanges commerciaux avec le Japon.

* * *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, vous constaterez que l'ordre de la Chambre suivant fait l'objet d'un consentement unanime:

Que la première affaire à l'ordre du jour sous la rubrique Ordres émanant du gouvernement aujourd'hui soit la reprise du débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-64, Loi concernant l'équité en matière d'emploi, et qu'après deux heures additionnelles de débat ou avant si le débat prend fin, la question soit réputée avoir été mise aux voix de nouveau et un vote par appel nominal réputé demandé et différé jusqu'à plus tard aujourd'hui, à 17h00, à condition que la présidence ne puisse recevoir aucun amendement pendant les heures additionnelles de débat.
(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LA SOMATOTROPHINE BOVINE

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter ce matin et je suis heureux de le faire au nom des électeurs de Regina-Lumsden et de la région.

La première pétition est signée par un certain nombre de personnes qui craignent l'approbation de l'hormone de croissance synthétique, la somatotrophine bovine ou BST, qu'on injecte aux vaches pour augmenter la production de lait.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de prendre des mesures pour interdire l'entrée de la BST au Canada en imposant un moratoire, c'est-à-dire en interdisant l'utilisation et la vente de BST jusqu'en l'an 2000, le temps d'examiner en profondeur les aspects sanitaires et économiques de la question dans le cadre d'un examen public indépendant.

LE SÉNAT

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai une autre pétition à déposer concernant, cette fois, le Sénat du Canada. Elle est signée par de nombreux électeurs de Regina-Lumsden et d'autres secteurs de la Saskatchewan. Ces pétitionnaires sont passablement préoccupés par la somme d'argent provenant des contribuables qu'on consacre au Sénat, une chambre non élue qui n'a pas à rendre des comptes et qui coûte annuellement plus de 54 millions de dollars.

15444

Ils demandent au Parlement d'exhorter le gouvernement à abolir le Sénat, ce qui permettrait d'économiser cet argent et d'éliminer un organisme qui, fondamentalement, n'a pas d'utilité pour les Canadiens.

LES MARCHÉS DE L'ÉTAT

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je présente aujourd'hui une pétition signée par 26 personnes, qui fait suite à des propositions du ministère de la Défense pour modifier son processus d'appel d'offres. Les pétitionnaires croient que le processus actuel est juste et équitable et qu'il convient parfaitement à tous les déménageurs.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de régler la question et de s'opposer à toute proposition de modification du processus d'appel d'offres utilisé actuellement au ministère de la Défense nationale, et d'appuyer le système en vigueur actuellement pour tous les déménagements de personnel militaire.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


15444

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 16 octobre, de la motion: Que le projet de loi C-64, Loi concernant l'équité en matière d'emploi, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, des millions de travailleurs Canadiens se heurtent à des obstacles qui les empêchent d'être membres à part entière de la main-d'oeuvre active de ce pays. Par exemple, nombreuses sont les femmes qui demeurent prisonnières d'emplois mal payés ou à temps partiel. Et pourtant, en 1990, 55 p. 100 des baccalauréats universitaires étaient décernés à des femmes.

Des critères d'embauche injustes, des obstacles comportementaux et des pratiques inégales en ce qui concerne la formation et la promotion continuent à faire en sorte que les femmes, les personnes handicapées, les autochtones et les membres des minorités visibles ne sont pas traités sur un pied d'égalité dans le milieu de travail.

(1010)

Compte tenu de ces faits, personne ne peut mettre en doute, non seulement le bien-fondé de l'équité en matière d'emploi, mais aussi sa nécessité. Le sens des affaires devrait pousser les entreprises à prendre des mesures pour leur faciliter l'accès au marché international. Les membres des diverses communautés ethnoculturelles, qui ont des contacts dans leur pays d'origine dont ils connaissent la langue et la culture, peuvent jouer un rôle clé dans la pénétration de nouveaux marchés. Ils constituent un atout précieux pour leur employeur.

Je n'arrive pas à comprendre que le Parti réformiste se refuse à reconnaître l'utilité du projet de loi dont la Chambre est saisie. Mes collègues d'en face semblent prisonniers du passé. J'ai une nouvelle à leur apprendre: on ne peut revenir en arrière. Les années 50 sont révolues.

Le monde du travail a été entièrement restructuré; il est différent de tout ce que nous avons connu auparavant. Les changements technologiques se bousculent, les barrières commerciales s'effondrent, l'économie se mondialise et tout cela exige de nous une plus grande compétitivité.

L'économie du Canada, axée sur l'exportation, dépend énormément des ventes à l'étranger. Une présence plus marquée sur les marchés en développement, surtout ceux de l'Amérique latine et de l'Asie, modifiera encore davantage notre réalité économique.

Cette interdépendance accrue pose de nouveaux défis. Elle signifie que notre secteur des affaires doit comprendre la culture et le point de vue de nos nouveaux clients.

Une autre réalité de la vie canadienne est l'évolution du Canada à titre de société fondée sur la technologie. Les connaissances sont la clé de la prospérité future du pays et nos ressources humaines constituent notre actif le plus important.

Par conséquent, les politiques qui visent un meilleur développement de notre capital humain sont cruciales pour notre compétitivité. Comme on peut le voir, l'équité en matière d'emploi n'est pas une politique à craindre ou à éviter. C'est une politique qui permettra à notre société d'avancer et de tenir compte des talents et du potentiel de tous ses citoyens.

Il n'est donc pas surprenant que les entreprises canadiennes ayant déjà mis en oeuvre l'équité en matière d'emploi soient les défenseurs les plus convaincus de ce projet de loi. Elles ont fait l'expérience des nombreux avantages rattachés aux programmes d'équité. En instaurant une stratégie juste et efficace pour le développement des ressources humaines et un cadre de travail efficace, les employeurs peuvent avoir accès à un plus large éventail de compétences grâce auquel leur entreprise devient plus productive. En améliorant le milieu de travail, ils stabilisent leurs effectifs, rehaussent le moral des employés et accroissent leur productivité. Ils améliorent aussi leur image d'entreprise au sein de la collectivité.

Les employeurs ne peuvent exclure tout un vaste segment de personnes qualifiées s'ils veulent survivre et réussir dans un contexte d'économie mondiale. Les entreprises privées, où l'on trouve certains des dirigeants d'entreprises les plus progressistes, apprécient depuis longtemps la valeur qu'apporte l'équité en matière d'emploi.

Notre défi, dans le milieu de travail, est de répondre aux besoins variés de notre population active, très diversifiée, et de faire preuve de souplesse. Ces initiatives ne constituent absolument pas une menace pour les autres Canadiens.


15445

Le projet de loi C-64 ne vise pas à porter préjudice aux hommes blancs ni à les empêcher de gagner leur vie et de poursuivre une carrière. Il s'agit de créer une véritable égalité des chances au gouvernement fédéral, dans le secteur privé réglementé au niveau fédéral et parmi les entrepreneurs qui font des affaires avec le fédéral. Il reconnaît qu'avoir rendu illégale et inacceptable toute discrimination patente dans notre société était une étape critique pour atteindre notre objectif.

L'étape suivante est pour les employeurs et la société en général, de trouver un moyen de supprimer les obstacles cachés qui découragent les gens de poser leur candidature à des emplois ou qui les maintiennent dans certains ghettos professionnels.

Le projet de loi C-64 demande aux employeurs d'analyser leurs effectifs et leurs pratiques d'emploi sérieusement, de façon à déterminer et à éliminer les obstacles. Ils doivent ensuite fixer des objectifs d'embauche et de promotion de façon à améliorer l'accès des personnes qualifiées. Avec des outils appropriés et une stratégie convenable, ils arriveront à ces résultats.

Loin d'enlever quoi que ce soit à quiconque, l'équité en matière d'emploi propose à tous quelque chose qui a une valeur. Elle permet aux employeurs de bâtir une confiance et un dialogue améliorés avec leurs employés et avec les syndicats, passant ainsi de la sensibilisation à l'action.

Le rapport minoritaire du Parti réformiste montre que ce parti n'a pas vu le potentiel de la création d'une situation égale pour tous les Canadiens. Ce qu'il nous présente, c'est une opinion étroite de la discrimination et des exemples exotiques de politiques d'admission à l'université, dont la plupart ne sont même pas Canadiens.

(1015)

L'existence d'une discrimination systémique ne semble pas gêner le Parti réformiste. Il proclame hardiment que les employeurs canadiens ne font pas de discrimination de façon systémique. Contrairement à ce que disent les députés réformistes, avec leur confiance habituelle, c'est malheureusement un fait que la discrimination systémique fait toujours partie de notre vie quotidienne. Elle continue d'exister parce que les organismes s'en tiennent aux pratiques existantes qui comportent des obstacles pour certaines personnes.

De nombreuses compagnies et organisations, inspirées par la loi, ont choisi d'éliminer ces obstacles. La Banque Royale travaille avec les autochtones à améliorer le processus d'entrevue. Dans son rapport, elle nous fait partager sa philosophie en ce qui concerne ses activités: Elle explique que, compte tenu de la pénurie de main-d'oeuvre prévue à l'avenir et d'une population plus diversifiée, il est très important de prendre un bon départ avant que les problèmes de main-d'oeuvre ne se fassent sentir et qu'il faut avoir une main-d'oeuvre représentative pour servir une clientèle très diverse.

L'exemple de la Banque royale et celui d'autres organisations est précisément l'approche adoptée par le gouvernement fédéral dans le projet de loi C-64. Loin de diviser les gens, l'équité en matière d'emploi nous aide à forger un avenir plus équitable et à bâtir un pays meilleur encore. Il n'est pas question de culpabilité ni de punition et il ne s'agit pas non plus de supprimer les systèmes d'embauchage basés sur le mérite pour engager des personnes incompétentes. En fait, le projet de loi interdit les quotas. Il dit précisément que les employeurs ne sont pas tenus d'engager des travailleurs qui n'ont pas les compétences voulues. Ce projet de loi ne fait que confirmer le principe du mérite.

En éliminant les critères d'embauchage non pertinents, ne donne-t-on pas encore plus de poids au principe du mérite? Lorsqu'on s'assure que plus de gens ont la possibilité de postuler un emploi ou d'obtenir la formation voulue, cela ne vient-il pas appuyer encore davantage le principe du mérite?

Grâce au projet de loi C-64, le principe du mérite fonctionne mieux. On ouvre des portes qui sont fermées depuis beaucoup trop longtemps. Le fait que les groupes désignés sont sous-représentés et concentrés dans des emplois mal rémunérés est une réalité que les réformistes ne comprennent tout simplement pas. Depuis toujours, ces gens ont un taux de chômage plus élevé et des salaires moyens plus faibles. Ils ont également tendance à se retrouver surtout dans quelques groupes d'emploi.

Si les Canadiens devaient accepter la position du Parti réformiste sur cette question, ils devraient également accepter le fait que, pour une raison quelconque, les femmes, les autochtones, les membres des minorités visibles et les personnes handicapées choisissent d'être moins bien payés et d'avoir un taux de chômage plus élevé. Comme les Canadiens en général, nous savons que les autochtones, les membres des minorités visibles et les membres des autres groupes désignés veulent de bons emplois avec de bons salaires, tout comme les autres Canadiens. Les réformistes voudraient nous faire croire que ces gens aiment à être relégués dans les ghettos d'emplois mal rémunérés, et qu'ils sont heureux d'avoir un fort taux de chômage. Ce n'est pas le cas.

La réalité est toute simple. On peut voir notre société de façon très simpliste ou on peut essayer de faire tomber les barrières qui laissent, malheureusement, certaines personnes dans des situations dans lesquelles les réformistes ne voudraient certes pas se retrouver eux-mêmes. Cela montre bien leur hypocrisie.

(1020)

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir profiter de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de me prononcer sur le projet de loi C-64.

Le gouvernement aime parler du projet de loi C-64 en termes d'équité en matière d'emploi, mais il frémit devant des termes ou des expressions tels qu'action positive ou quotas, alors que cette mesure législative porte précisément sur les quotas et l'action positive. Comment pourrait-il en être autrement quand on sait que des objectifs quantifiés sont énoncés, que les employés sont tenus d'atteindre ces objectifs et que ceux n'y parviennent pas se voient infliger des amendes? Cette mesure législative porte sur des quotas, purement et simplement, tout comme elle est mauvaise, purement et simplement.

Le fondement même du projet de loi C-64 repose sur le concept qui veut que l'on doive corriger les erreurs historiques. Certes, le Canada a déjà connu la discrimination. Prenons l'exemple des femmes en sein de la GRC. Ce n'est qu'à partir de 1974 que les femmes ont pu s'engager à titre d'employé régulier dans la GRC, ce qui était évidemment discriminatoire. Les femmes nées avant les années 40 ont donc été victimes de discrimination parce qu'on leur a


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refusé le droit de s'engager dans la GRC. Voilà maintenant 21 ans que les femmes peuvent poser leur candidature à des postes d'employé régulier au sein de la GRC. Réussites et échecs ont alterné. Nous commençons à voir des femmes qui gravitent vers les grades d'officier breveté.

Si on laisse la nature suivre son cours, nous verrons les effectifs de la GRC changer radicalement au fur et à mesure que prendront leur retraite tous les hommes qui ont été embauchés à l'époque où une politique d'exclusivité leur était favorable. Mais cela ne suffit pas aux yeux du gouvernement, puisqu'il veut imposer dès maintenant des quotas grâce à cette mesure législative. Il ne tient pas compte du fait que les femmes sont moins portées que les hommes à voir dans le métier de policier une occupation souhaitable.

Le fait est que le métier de policier est un travail qui comporte des dangers. On peut tirer sur vous, vous donner un coup de poing au visage et se battre avec vous au moment de l'arrestation. Pour une raison étrange, ça ne plaît pas beaucoup à un grand nombre de femmes. J'ignore pourquoi il en est ainsi. Pour ma part, j'estime que si l'on doit passer ses vendredis soir à se battre avec des ivrognes, le salaire doit être conséquent, mais c'est une autre histoire.

Le fait est que, étant donné que le nombre de candidats de sexe masculin est bien supérieur à celui de l'autre sexe, il ne faut pas s'étonner qu'il y ait plus d'hommes que de femmes qui réunissent les conditions voulues. Il ne s'ensuit pas nécessairement qu'il n'y aura pas un bon nombre de femmes au sein d'un corps policier dont les critères d'embauche sont fondés exclusivement sur le principe du mérite. Je suis tout à fait convaincue que les meilleures candidates sont comparables aux meilleurs candidats. Or, ce projet de loi fait fi du principe de l'embauche au mérite. À cause de ce projet de loi, la GRC engagera des candidates moins qualifiées que des hommes, dont la candidature sera rejetée.

Le gouvernement dit que cette discrimination est justifiée, mais si nous examinons la situation de près, nous constatons que nous aurons un système où les femmes bénéficieront d'un avantage particulier parce que leur mère a fait l'objet d'une discrimination. Par ailleurs, le gouvernement souscrira à une discrimination sanctionnée par l'État et contre les hommes parce que leur père a bénéficié d'un avantage injuste il y a plus de 20 ans. Je présume que tout cela est logique aux yeux du gouvernement, mais cette situation ne me met certes pas très à l'aise. Le moins qu'on puisse dire, c'est que la logique compliquée qui sous-tend cet argument est étonnante.

Je demande au gouvernement: depuis quand une forme de discrimination peut-elle corriger des torts causés par une autre forme de discrimination? Des gens subissent déjà les conséquences de programmes d'équité en matière d'emploi, et ce projet de loi ne fera qu'empirer les choses. J'ai rencontré un certain nombre de jeunes hommes qui veulent devenir agents de police. Ils sont diplômés en criminologie et répondent à tous les autres critères. Cependant, parce qu'ils sont des hommes de race blanche, non seulement ne peuvent-ils pas être engagés, mais on leur a dit qu'ils ne devraient même pas perdre leur temps à poser leur candidature. Ces hommes n'ont jamais bénéficié d'avantages précis parce qu'ils sont des blancs de sexe masculin et, pourtant, le gouvernement estime qu'ils doivent être punis parce que, à un moment donné, les hommes de race blanche ont effectivement bénéficié d'un avantage injuste.

On devrait peut-être conseiller à ces jeunes hommes de se tourner plutôt vers la profession d'infirmier. En effet, comme cette profession a de tout temps été exercée par un nombre disproportionné de femmes, avec la nouvelle loi sur l'équité en matière d'emploi, beaucoup plus d'hommes y seront engagés parce qu'ils y sont sous-représentés. Vrai? Faux! Les hommes ne faisant pas partie des groupes désignés, ils ne méritent pas la protection qu'offre le projet de loi C-64. Même si les hommes ont de tout temps été sous-représentés dans la profession d'infirmier, tout comme les femmes le sont dans la police, on nous présente un projet de loi à sens unique, ce qui est, en soi, discriminatoire.

(1025)

N'est-ce pas ce que fait le projet de loi C-64: instaurer de la discrimination sanctionnée par l'État? Traitons les gens différemment selon leur sexe ou leur race. Pénalisons aujourd'hui les jeunes hommes blancs parce que, dans le passé, leurs pères ont peut-être bénéficié injustement d'avantages particuliers.

Nous savons tous qu'il est facile d'adopter des mesures législatives qui imposent des sacrifices aux autres, tout en épargnant les législateurs. Cela est ressorti clairement quand le gouvernement s'est penché sur la question de la pension des députés et c'est assez évident encore aujourd'hui. Le gouvernement impose volontiers des contingents aux autres, mais est-il prêt à respecter lui-même l'esprit de la mesure?

Quand on regarde la composition du cabinet, on constate que les hommes y sont fortement sur-représentés. Abstraction faite des secrétaires parlementaires, seulement quatre des 23 ministres en titre sont des femmes. Pour que le cabinet actuel soit représentatif de la population en général, il faudrait qu'il compte plus de femmes.

Je me demande bien qui sont les huit hommes blancs qui vont accepter de démissionner pour céder leur place à des femmes lorsque le gouvernement aura adopté le projet de loi C-64. Quels ministres sont prêts à sacrifier le supplément de 46 645 $ que leur procure leurs fonctions ministérielles? Qui sont ces huit ministres qui sont prêts à céder leur place comme ils demandent aux autres de le faire au nom de l'équité en matière d'emploi?

Je suis fière d'être membre d'un parti pour lequel tout ce qui compte quand on veut embaucher quelqu'un ou accorder des promotions, c'est que la personne la plus compétente obtienne le poste. Si ce principe était appliqué, je suis certaine que notre population active serait vraiment représentative de la mosaïque canadienne.

En tant que femme, je trouve très insultant que l'on laisse entendre que je ne peux pas faire concurrence à un homme sans ce genre de mesure législative spéciale. Je crois que ce que j'ai accompli dans ma vie, je le dois à mes capacités, pas au fait d'être femme. Je suis fière d'avoir été sur un pied d'égalité avec cinq hommes lors du congrès d'investiture réformiste dans ma circonscription et d'avoir été élue au premier tour de scrutin en raison de mes capacités, pas de mon sexe.


15447

Durant la campagne électorale, les candidats libéraux, conservateurs et néo-démocrates dans ma circonscription étaient tous des hommes. Même si je ne crois pas avoir gagné uniquement à cause de mon sexe, cela n'a jamais nui à ma campagne.

Il y a un certain nombre de Canadiens qui sont sexistes et racistes ou qui pratiquent d'autres formes de discrimination. Ils ne disparaîtront pas simplement parce que le projet de loi C-64 a été adopté. Si le gouvernement voulait s'attaquer au problème de la discrimination dans l'embauche ou la promotion dans la fonction publique, il lui suffisait de faire clairement comprendre que toute personne coupable de discrimination serait immédiatement renvoyée. Cette approche aurait donné les mêmes résultats sans instituer la discrimination sanctionnée par l'État qui résulte du projet de loi C-64.

Je ne peux appuyer aucune loi discriminatoire et raciste qui institutionnalise la notion voulant que certains Canadiens soient traités différemment en raison de leur sexe ou de leur race.

Je ne vais pas demander aux députés ministériels de voter contre le projet de loi C-64 parce que j'espère qu'ils auront à le défendre durant les prochaines élections fédérales, tout comme Lyn McLeod a dû défendre son soutien pour l'équité en matière d'emploi lors des récentes élections en Ontario. Comme le dit le vieux dicton, ceux qui oublient le passé sont condamnés à le répéter. Je suppose que les libéraux sont en train de nous dire qu'ils ont l'intention de suivre l'exemple des libéraux de l'Ontario durant les prochaines élections fédérales. Cela me convient parfaitement.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, j'avais une question à poser à la députée. J'éprouve un profond respect à l'égard de la députée de Surrey-White Rock-South Langley. Au début de ses observations, elle a dit que le projet de loi comportait des quotas et des objectifs numériques, ce qui m'a inquiété et m'a amené à consulter mon collège, le secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines.

(1030)

Il est essentiel que les députés et les Canadiens saisissent bien le libellé de l'article 6 du projet de loi C-64 parce que cet article démolit toute l'hypothèse sur laquelle repose le discours de la députée. Il est rédigé comme suit:

6. L'obligation de mise en oeuvre de l'équité en matière d'emploi n'oblige pas l'employeur:
a) à prendre des mesures susceptibles de lui causer un préjudice injustifié;
b) à engager ou promouvoir des personnes non qualifiées;
c) en ce qui concerne le secteur public, à engager ou promouvoir des personnes sans égard au mérite, dans les cas où la Loi sur l'emploi dans la fonction publique exige que la sélection soit faite au mérite;
d) à créer de nouveaux postes.
Sauf le respect que je dois à la députée de Surrey-White Rock-South Langley, je dois faire remarquer que tout son discours repose sur une hypothèse qui ne tient plus quand on lit le libellé exact. Il ne s'agit pas d'un discours écrit pour faire de la politique de bas étage. Les réformistes savent que, à l'heure actuelle, certains membres de la collectivité pensent qu'un projet de loi comme celui-ci vise à dire aux cadres supérieurs d'entreprises qu'ils doivent embaucher 15 personnes de tel ou tel pays et que 20 p. 100 de leur effectif doit être de telle couleur ou telle langue ou doit avoir tel ou tel handicap.

C'est ce que le Parti réformiste voudrait que l'on pense relativement à ce projet de loi. J'avoue bien franchement que je trouve cette attitude déplaisante. Je trouve cela déplaisant parce que, le premier jour de son arrivée à la Chambre des communes, le chef réformiste a déclaré que son parti n'était pas ici pour se faire du capital politique et que, s'il jugeait que le gouvernement prenait une bonne mesure, il n'allait pas faire de la politicaillerie et allait plutôt appuyer le gouvernement. Aujourd'hui nous avons un bel exemple des astuces employées par le Parti réformiste.

M. Epp: Il s'agit de principes solides.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Cela n'a rien à voir avec les principes. Je vais répéter le libellé de l'article 6 pour le bénéfice des Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Je vais même m'adresser à la personne qui me déteste le plus dans ma circonscription, le plus fervent partisan du Parti réformiste dans mon comté qui ne votera jamais pour moi. Je vais regarder cette personne dans les yeux et lui montrer l'article 6 du projet de loi:

6. L'obligation de mise en oeuvre de l'équité en matière d'emploi n'oblige pas l'employeur:
a) à prendre des mesures susceptibles de lui causer un préjudice injustifié;
Je suis un homme d'affaires, je viens du milieu des affaires. C'est tout ce qui m'intéresse comme homme d'affaires. Si je peux prouver que ma petite entreprise subira un préjudice injustifié, je suis satisfait.

(1035)

Je suis un partisan profondément convaincu de la politique de multiculturalisme du gouvernement. Je suis également un des rares partisans de la conception du Canada que Pierre Trudeau a proposée. Je vais expliquer à la Chambre pourquoi. Il était tellement en avance sur son temps, comme premier ministre, que le Parti réformiste n'arrive pas encore à le comprendre. En 1971, Pierre Trudeau a déclaré à la Chambre: «Nous allons adopter une politique de multiculturalisme afin qu'aucune culture ne soit considérée comme supérieure ou inférieure aux autres.» Le député est sûrement d'accord là-dessus.

Nous avons dépensé l'argent des contribuables pour inciter les immigrants, qu'ils viennent d'Allemagne, d'Italie ou d'Autriche, à conserver leur langue et leur culture d'origine. Aujourd'hui, au moment où le Canada devient un pays qui a des échanges avec le monde entier, l'un de nos grands avantages commerciaux est que nous avons des Canadiens qui ont conservé leur langue et leur culture et qui peuvent retourner dans leur pays d'origine ou celui de leurs parents et négocier des transactions.


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Voici un exemple concret. La semaine dernière, pendant le congé, j'ai passé quatre jours en Autriche avec mon ancien employeur, Frank Stronach, président de Magna International. Comme les députés le savent sans doute, il a passé beaucoup de temps dans son pays d'origine au cours des 18 derniers mois. C'est en partie à cause de notre fichu régime fiscal, un régime pourri. Le gouvernement devrait s'empresser de le modifier.

Je veux cependant en revenir à la notion de multiculturalisme. J'ai vu de mes propres yeux, la semaine dernière, Frank Stronach conclure des marchés sur la technologie canadienne dans le secteur de l'automobile. Il vendait cette technologie en Autriche. Nous pensons tous que les Européens ont beaucoup d'avance sur nous, mais nous nous trompons. La technologie de fabrication des automobiles est beaucoup plus avancée au Canada que dans de nombreuses régions de l'Europe. Il se trouvait donc là-bas avec des Canadiens pour faire des affaires. Comme il avait conservé sa langue et se sentait à l'aise dans son pays d'origine, il faisait partout des affaires. Le fait-il uniquement pour la communauté autrichienne? Non, il exporte des emplois canadiens, de la fabrication canadienne.

Voilà pourquoi cette notion de multiculturalisme me tient tant à coeur. J'y vois le plus grand point fort que possède le pays en matière de commerce extérieur. Et je me fiche complètement de ce qu'on peut dire de Pierre Trudeau en le traitant de centraliste. Je suis centraliste. On lui reproche d'avoir bâti un gouvernement national fort. Je trouve que notre gouvernement démantèle trop et trop vite.

La mesure à l'étude, c'est du multiculturalisme, phase II. Grâce à ce projet de loi sur l'équité en matière d'emploi, nous sensibilisons davantage nos communautés et spécialement nos communautés d'affaires qui ont bâti sur la politique de multiculturalisme. Les gens feraient mieux de se réveiller à cette réalité, car si nous pouvons avoir une organisation de l'entreprise qui soit sensible à toutes les cultures, à tous les peuples du monde, les chances de survie vont être beaucoup plus grandes que si nous vivions dans un cocon.

Le projet de loi comporte peut-être une ou deux imperfections mineures. J'affirme cependant à la Chambre que je l'appuie sans aucune difficulté. J'aurai encore moins de difficulté à faire du porte à porte pour le faire accepter. Je défie même n'importe quel député réformiste de passer avec moi d'une rue à l'autre. Il verra que la politique libérale finira par l'emporter si elle est bien expliquée sur la base des termes figurant dans la loi et non sur la base d'interprétations fantaisistes de dispositions peu importantes visant à faire croire que nous essayons de punir les hommes anglo-saxons. Le projet de loi n'a rien à voir avec cela.

(1040)

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté le discours du député. Il a défendu Pierre Trudeau en disant que cet ex-premier ministre était bien en avance sur son époque. Il n'y a pas si longtemps, je me suis rendu au sixième étage de cet immeuble pour jeter un coup d'oeil à la série de photos allant de Lester Bowles Pearson jusqu'à Kim Campbell. Je me suis alors dit que si l'on voulait illustrer le problème que connaît le Canada, il suffirait de prendre les photos de ces cinq premiers ministres, en commençant par celle de Lester Bowles Pearson et en mettant celle de M. Trudeau à la place prééminente qui lui revient. C'est là que réside le problème du Canada.

Je suis issu du milieu des affaires. Si je siège à la Chambre des communes, ce n'est pas parce je tenais à faire de la politique ou parce que je voulais venir à Ottawa pour faire partie de ce cirque. C'est tout simplement parce que les politiques et les mesures que le gouvernement canadien a adoptées au cours des 25 ou 30 dernières années m'ont irrité au point où je ne pouvais plus rester à la maison et assister au spectacle sans réagir.

Il y a au Canada un groupe élitiste qui croit savoir, mieux que quiconque, comment diriger le pays. Du haut de son piédestal, il veut nous dicter comment nous devons organiser nos vies et mener nos affaires. Voilà ce que le député prône.

Tout le concept de l'équité en matière d'emploi est répugnant. Ailleurs dans le monde, jamais ce concept n'a fonctionné lorsqu'il a été mis à essai. L'idée derrière l'équité en matière d'emploi est que nous devons aider ceux qui ne peuvent réussir par leurs propres moyens. Je ne connais rien de plus condescendant que cela. Si je faisais partie d'un des groupes minoritaires que ce projet de loi vise à aider, je trouverais cela extrêmement insultant. Non seulement cela, mais une mesure législative de ce genre crée dans notre société des divisions dont nous n'avons pas besoin. Elle relève de l'attitude du «nous contre eux».

Je ne sais pas combien de fois, en parcourant le Canada, j'ai entendu des gens se plaindre d'être des citoyens de seconde catégorie dans leur propre pays. C'est le genre de sentiment que suscite dans la population un projet de loi comme celui-ci. Les gens ont l'impression de ne plus pouvoir se sentir chez eux nulle part au Canada.

Si le député et les autres députés ministériels croient que ce projet de loi peut avoir l'appui des Canadiens, qu'ils en fassent l'objet d'un référendum pour voir si les Canadiens accepteraient ce genre de gestion descendante, cette attitude élitiste qui prétend dominer la société afin de l'améliorer.

Ces gens-là croient que le gouvernement a des solutions à offrir. De ce côté-ci, et certes au sein du Parti réformiste, la plupart des députés croient que le gouvernement crée des problèmes au lieu d'en résoudre. C'est pour cette raison que je suis ici. Le gouvernement m'a créé tellement de problèmes lorsque j'étais chef d'entreprise que j'ai fini par me lasser et par vendre mon entreprise. Le gouvernement ne résout rien; il crée des problèmes. C'est une attitude de ce genre et des projets de loi comme celui-ci qui entraînent davantage de problèmes pour les entreprises et les secteurs industriels canadiens.

Une fois que ce projet de loi aura été adopté, on verra la police des quotas aller inspecter les petites et grandes entreprises pour voir qui elles embauchent. Toute la notion voulant qu'on embauche et qu'on favorise l'avancement des plus méritants prend le bord. On va tenir compte du groupe défavorisé d'un candidat et du caractère multiculturel qu'il peut apporter à l'entreprise plutôt que de ses aptitudes, de ses possibilités et de son mérite.


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Ce projet de loi est absolument répugnant. Il est fondé sur une idéologie totalement dégoûtante. Je ne peux pas croire que les Canadiens et les Canadiennes d'âge adulte vont l'appuyer. Je ne crois certes pas qu'une vaste majorité de Canadiens d'un océan à l'autre va l'appuyer. Par conséquent, je vais voter contre et je suis persuadé que tout député qui réfléchit votera contre.

Mme Jane Stewart (Brant, Lib.): Monsieur le Président, c'est un véritable honneur que de participer au débat sur le projet de loi C-64, à titre de législatrice, certes, mais aussi d'intervenante qui, dans le secteur privé, a appliqué cette loi très efficacement. Je voudrais réitérer ce que mon collègue, le député de Broadview-Greenwood, a souligné. Cette loi, lorsqu'elle est pleinement utilisée, permet aux sociétés canadiennes d'être plus concurrentielles que toutes les autres entreprises du monde entier.

(1045)

Examinons la loi et voyons ce qu'elle demande réellement aux employeurs de faire. Premièrement, elle leur demande d'examiner les caractéristiques démographiques de la main-d'oeuvre autour de leur entreprise. Elle leur demande d'examiner le pourcentage d'hommes blancs non handicapés, de femmes, de personnes handicapées, de membres des minorités visibles et d'autochtones et de déterminer ensuite leur représentation au sein de leur effectif. Les employeurs qui évaluent la situation dans leur entreprise constatent presque toujours qu'elle est loin d'être représentative de la réalité à l'extérieur.

Devant un constat aussi clair, ils se demandent souvent comment ils peuvent servir leur clientèle efficacement alors qu'ils n'ont pas, dans leur effectif, d'employés issus des groupes ethniques ou en mesure de comprendre la clientèle d'un sexe en particulier.

Ils se disent alors qu'il y a du bon dans la loi et qu'ils doivent prendre des mesures. Ils se demandent comment ils ont pu laisser cette situation se produire, comment ils ont pu laisser leur effectif devenir aussi homogène et ce qui a pu, dans leur façon de faire des affaires, encourager cela.

Dans ce projet de loi, le gouvernement demande aux employeurs d'examiner les chiffres ainsi que la représentation et de se fixer leurs propres objectifs; il leur demande de se fixer non pas des contingents, mais des objectifs assortis de délais qui leur permettront d'opérer les changements nécessaires, de manière à rendre leur effectif plus représentatif de la société qui les entoure et de leur clientèle. Pour ce faire, la loi prévoit qu'il faut examiner les systèmes des ressources humaines de l'entreprise: comment les gens sont engagés, comment ils sont promus, comment ils sont recrutés, comment ils sont engagés et comment ils sont mis à la retraite.

Il est vraiment étonnant qu'en examinant de plus près les mécanismes internes, on constate malheureusement, et très souvent, des éléments de discrimination systémique. Je ne dis pas que cette discrimination est voulue. Personne ne veut faire de la discrimination. Avec le temps, les choses sont devenues partiellement systémiques.

Ce projet de loi nous invite à faire le point et à nous demander si c'est cela que nous voulons. Et la réponse est invariablement non.

Pour illustrer mon propos, je voudrais vous donner quelques exemples. Quand les gens décident d'engager un nouvel employé, ils pensent aux compétences, aux capacités et aux qualités requises pour le poste à combler. Cela peut prendre beaucoup de temps. Certaines entreprises ne prennent pas le temps de le faire, mais d'autres le font. Puis, durant les entrevues, ce sont parfois les qualités humaines qui nous convainquent d'engager tel ou tel candidat; c'est que nous avons tendance à engager les candidats qui nous ressemblent le plus.

Même si nous recherchons un candidat ayant fait des études particulières et possédant une expérience de travail et de vie donnée pour remplir efficacement les exigences du poste, il arrive, au cours des entrevues, que nous trouvions une personne qui, comme nous, aime jouer au golf, qui nous ressemble physiquement, qui va à la même église et qui, nous avons la certitude, s'intégrera sans problème. Tout d'un coup, c'est cette personne qui obtient le poste.

Nous devons reconnaître que les décisions relatives à l'engagement d'un candidat doivent être prises en fonction de ses connaissances, de ses qualités, bref, de sa compétence. Nous ne voulons pas ajouter des critères qui ne sont pas fondés. Quand les entreprises pensent à ce processus, elles présentent et préparent un processus de recrutement et d'entrevue plus efficace; elles obtiennent ainsi de meilleurs résultats.

Parlons de la publication des offres d'emploi. Par exemple, les grandes entreprises font souvent paraître leurs offres d'emploi dans le Globe and Mail. Elles savent que ce journal est lu par un certain type de lecteur. Pensent-elles faire paraître les offres d'emploi dans des journaux ethniques, comme le Teka de ma collectivité, qui s'adresse aux Six Nations, de manière à élargir la base et à accroître le nombre de personnes pouvant poser leur candidature?

Rien dans le projet de loi ne dit que l'entreprise doit engager tel type d'employé plutôt que le candidat le plus compétent, mais nous devons faire en sorte d'ouvrir le plus possible le processus pour qu'il s'adresse à tous les membres de la société.

(1050)

Lorsque les employeurs commencent à prendre conscience des répercussions de leurs décisions concernant le processus de recrutement, ils se rendent compte qu'ils sont involontairement sélectifs. Le système est alors devenu sélectif et il faut le changer. Pensons à l'information qui circule de bouche à oreille sur les postes vacants: le président en parle au vice-président qui, lui, en parle à sa soeur ou à d'autres proches, etc. C'est là un moyen très sélectif de trouver des candidats.

Les entreprises doivent utiliser tout un éventail de méthodes pour élargir leur bassin de candidatures, mais rien dans le projet de loi ne dit qu'une fois cela fait, elles doivent nécessairement choisir un membre d'un groupe désigné.

Nous avons commencé à analyser les systèmes d'emploi en commençant par le processus de recrutement. Nous examinons ensuite quelles sont les normes quotidiennes appliquées au sein de l'entreprise, ses activités et l'interaction entre les employés. Un élément très important qui ressort du projet de loi, c'est la recon-


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naissance qu'il faut accorder aux programmes favorables à l'instauration d'un milieu de travail sans harcèlement pour que les employés d'une entreprise puissent travailler efficacement ensemble. Ces employés comprennent leurs différences mutuelles. Ils savent qu'ils doivent se traiter les uns les autres avec respect et dignité.

L'une des choses les plus importantes que nous a enseignées cette mesure législative, qui n'a pas été élaborée à la hâte, mais avec patience, compréhension et réflexion sur plus de 20 ans, c'est que les programmes d'éradication du harcèlement en milieu de travail sont cruciaux.

L'autre chose qui ressort, et que j'ai vue s'imposer au sein des collectivités, c'est la valeur de la sensibilisation à la diversité culturelle, c'est-à-dire les programmes qui permettent de comprendre les différences sociales, économiques et ethniques entre les Canadiens. Lorsque nous prenons le temps de discuter de ces différences et de les comprendre, les barrières qui empêchaient les gens de travailler ensemble tombent soudainement et la valorisation de la capacité de jouir des différences, de célébrer la diversité et de comprendre différentes façons d'arriver à la même fin fait d'une entreprise une organisation forte et concurrentielle.

Nous disons tout d'abord de jeter un regard sur la démographie. Nous disons ensuite de jeter un regard sur l'entreprise pour voir s'il y a des pratiques systémiques qui empêchent d'embaucher des Canadiens de tous les groupes. Nous constatons que le projet de loi ne préconise pas de renoncer au principe du mérite, bien au contraire. Il préconise l'application juste et équitable de ce principe. Il dit aux entreprises de fonder leurs décisions sur la compétence, sur des exigences professionnelles véritables, sur les qualifications et les qualités, et non pas sur l'origine sociale des gens.

J'ai personnellement travaillé au sein d'une entreprise. Après environ deux ans, on a déterminé que j'avais peut-être le potentiel pour progresser et on m'a fait subir un test écrit. Le test n'avait rien à voir avec mes aptitudes en mathématiques ou mes aptitudes sur le plan des relations interpersonnelles. On m'a posé des questions sur mes parents. On m'a demandé si mon père était membre des Moose, si ma mère était membre de la UCW, combien il y avait d'enfants dans ma famille.

Cela s'est passé il n'y a pas très longtemps. J'ai pensé que c'étaient là les critères auxquels il fallait répondre pour avoir du succès au sein de cette organisation. Cette entreprise était en train de bâtir une structure homogène comprenant, aux échelons supérieurs, des hommes de race blanche physiquement aptes, issus de la même université et ayant obtenu le même diplôme. Grâce à la Loi sur l'équité en matière d'emploi, cette entreprise s'est rendu compte que de telles pratiques nuisaient à sa compétitivité et les a abolies.

Ce projet de loi ne vise pas à supprimer le principe du mérite ni à faire de la discrimination à rebours. Il vise à éliminer la discrimination et à voir à ce que tous les Canadiens aient des chances égales. C'est une importante mesure législative.

En tant que spécialiste des ressources humaines, je peux dire que, si une entreprise suit le modèle présenté dans la réglementation, elle aura un plan de ressources humaines très bon et très efficace. Tout est dans ce projet de loi. Franchement, ce que nous cherchons à faire ici, c'est traiter les personnes avec dignité et respect.

(1055)

Comme mon collègue de Broadview-Greenwood, je suis fière de prendre la parole à la Chambre pour appuyer le projet de loi C-64, qui montre que nous continuons à faire, lentement mais sûrement, les changements nécessaires pour que le milieu du travail au Canada, qui est le moteur de notre avenir, soit concurrentiel, juste et équitable.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, c'est pour moi un grand honneur que de participer à cet important débat.

Lorsque j'ai été élu député en 1993, je suis arrivé ici avec des idéaux très élevés. J'en suis venu à aimer cet endroit. Les députés peuvent, dans la plupart des cas, débattre librement d'idées et de notions qui marquent profondément notre société et qui ont un effet déterminant sur notre bien-être collectif.

Je tiens tout d'abord à dire que je ne remets pas en question ni ne juge les motifs profonds de certains députés d'en face. Ceux qui se sont prononcés en faveur du projet de loi C-64 l'ont fait, pour la plupart, en toute sincérité et je l'accepte. Je les invite aussi à reconnaître la sincérité des opinions que j'exprimerai.

Au lieu de nous abaisser à échanger des quolibets, examinons les projets de lois avec sincérité et ouverture d'esprit. Nous devrions avoir la liberté d'amender ces projets de loi pour qu'ils servent au mieux les intérêts de la population canadienne.

Je crois fermement que je ne fais pas que m'acquitter de mon rôle de député d'opposition lorsque je m'oppose à certains aspects des projets de loi. Dans tout projet de loi, il y a certains éléments qui méritent notre appui. En tant que député, et j'en ferais autant si je siégeais dans les banquettes ministérielles, si je relevais une lacune dans un projet de loi je m'y opposerais le plus énergiquement possible à la Chambre et j'exhorterais tous les députés à y apporter des amendements ou à le rejeter. Malheureusement, notre système parlementaire ne nous laisse pas cette possibilité et je le déplore. Les députés ministériels qui sont contre un projet de loi n'ont malheureusement pas la liberté d'exercer leur influence pour obtenir des amendements.

Je suis d'accord avec la prémisse selon laquelle les gens doivent tous être traités de façon égale. Les députés d'en face ont dit à maintes reprises que le projet de loi dont nous sommes saisis concerne l'égalité. En fait le mot «équité» est issu de la même que racine que le mot «égal» ou «égalité». Malheureusement, nous ne pouvons pas juger d'un livre par sa couverture. Or, le projet de loi à l'étude, que l'on dit être un projet de loi sur l'équité en matière d'emploi, ce qui sous-entend l'égalité en matière d'emploi, ne fait pas ce qu'on attend de lui. Il se trouve que le projet de loi qui parle d'égalité consacre en fait l'inégalité-ceci avec tout le respect que je dois à la Chambre.


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Je crois que les députés de l'autre côté ont raison de dire que certains ont fait l'objet de discrimination pour des motifs non valables fondés sur la race et sur le sexe. Quand j'étais jeune, on décourageait les hommes de devenir infirmiers. C'était une profession en grande partie réservée aux femmes. Il y avait un préjugé dans les différentes pratiques de recrutement.

Le fait est que chaque fois qu'il y a un poste à combler, certains principes discriminatoires sont appliqués. J'ai longtemps été en charge du recrutement là où je travaillais. C'est vrai. Parfois, nous avions 200 demandes d'emploi pour trois postes. Nous étions obligés d'appliquer certains critères pour décider qui aurait le poste et qui ne l'aurait pas. Je crois que j'ai toujours fait preuve d'honnêteté et d'intégrité. Je me suis toujours posé la question: Quelle est la personne la plus compétente pour ce poste?

(1100)

Je ne me suis jamais préoccupé de savoir de quel sexe était la personne. Ni de quelle race elle était. Je ne me suis pas attardé à la couleur de sa peau et-on peut aller vérifier-on verra que en tant qu'homme d'affaires ou que superviseur dans l'institut technique où j'ai travaillé, jamais il n'y a eu discrimination de ma part et que le principe essentiel en ce qui me concernait était de savoir qui était la personne la plus compétente pour un poste donné.

Faire intervenir ces divers éléments pour évaluer un candidat à un poste, c'est consacrer l'iniquité et l'inégalité. Que les ministériels y pensent bien. Ne l'oubliez pas! Ne vous laissez pas emporter par un projet de loi qui vous tient à coeur. Demandez-vous plutôt si ce projet de loi fait ce qu'on attend de lui.

Au tout début du texte, il est précisé que le projet de loi a pour objet de corriger les désavantages subis, dans le domaine de l'emploi, par les femmes, les autochtones, les personnes handicapées et les personnes qui font partie des minorités visibles.

J'aimerais souligner que je serais le premier à protester si une personne se voyait refuser un poste uniquement parce que cette personne est une femme ou encore uniquement parce que cette personne est autochtone. Je protesterais et ce avec vigueur. En fait, comme je l'ai déjà dit, les politiques d'embauche que j'appliquais moi-même par le passé et que je continue à appliquer en tant que député ne s'arrêtent pas à ce genre de choses; elles vont au-delà de ces détails.

On nous a longuement répété-le député de Greenwood a particulièrement insisté là-dessus-que le projet de loi n'impose pas de quotas et que les employeurs peuvent être exemptés. Il y est question de «préjudice injustifié» pour l'employeur. J'aimerais bien avoir une définition du mot «injustifié». C'est une notion tellement vague que cela ne veut rien dire. Il n'y a aucune raison pour qu'une personne se soumette à ce projet de loi si cela signifie qu'elle devra engager des gens qui n'ont pas la compétence requise, ou leur accorder une promotion.

Une bonne raison de rejeter globalement ce projet de loi, c'est qu'il présente deux idées contradictoires. Il affirme, d'une part, qu'il faut engager son personnel en fonction de la représentation de groupes désignés et, d'autre part, que ce n'est pas nécessaire puisqu'il faut d'abord considérer les compétences. Personne ne devrait avoir à engager des personnes non qualifiées.

Ce projet de loi pose donc un véritable dilemme. Ce problème est insoluble, parce qu'on est en présence de deux séries de critères complètement différentes.

Je conteste également l'affirmation du député, quand il dit que cette mesure ne fixe pas de quotas. On nous répète sans cesse que les affaires ne peuvent que s'améliorer après l'application de ce projet de loi. Je ne suis pas d'accord, pas du tout, parce que, à ma connaissance, il n'existe aucune loi, actuellement, au Canada, qui puisse nous empêcher d'engager la personne la plus qualifiée, même si elle est membre d'un groupe désigné. L'inexistence de ce projet de loi ne poserait donc aucune difficulté aux entreprises canadiennes.

Certains ont cité en exemple différentes entreprises du Canada qui font des efforts pour assurer une plus grande égalité en milieu de travail et pour éliminer les obstacles à l'embauche. Les employeurs le font parce que c'est une pratique rentable.

S'ils le font parce que c'est rentable, la mesure législative n'a pas sa raison d'être. Le seul effet qu'aurait cette loi, ce serait de compliquer les pratiques administratives et de diminuer ainsi, encore une fois, l'efficacité des entreprises et le bien-être des Canadiens, sur le plan économique. De quoi suis-je en train de parler? Je parle de ce que l'employeur doit faire en raison de cette loi. Veuillez noter que: «Il incombe à l'employeur d'analyser son effectif afin de mesurer la sous-représentation des membres des groupes désignés. Après avoir déterminé s'il y a sous-représentation dans ces groupes désignés, l'employeur doit étudier ses systèmes, règles et usages d'emploi afin de déterminer les obstacles en résultant pour les membres des groupes désignés. Seuls sont pris en compte [ . . . ] les salariés qui s'identifient auprès de l'employeur.»

(1105)

Je digresse, mais je dois dire que ce projet de loi a un défaut qui me suffit pour voter contre. Je prie les députés de la majorité de penser à ce pour quoi ils vont voter lorsqu'ils suivront les directives de leur parti, plus tard ce soir, et qu'ils se lèveront fidèlement pour appuyer le projet de loi. Regardez ce qu'il dit: «Seuls sont pris en compte [ . . . ]les salariés qui s'identifient auprès de l'employeur.» Autrement on ne les compte pas.

Prenons comme exemple un groupe qui représente 20 p. 100 de la population dans une région. Disons qu'une entreprise a 20 p. 100 d'employés de ce groupe dans son personnel. Toutefois, supposons qu'ils exercent leur droit constitutionnel de ne pas s'identifier. C'est dans le projet de loi, car autrement la nécessité de s'identifier aurait pu être jugée anticonstitutionnelle.

Disons que les 20 p. 100 d'employés de ce groupe qui travaillent pour cette entreprise exercent ce droit et ne s'identifient pas. Naturellement on ne peut pas les compter. Par conséquent, bien qu'ils occupent un cinquième des postes de l'entreprise, ils ne sont pas comptés. Lorsqu'un poste s'ouvre, vu que le groupe est sous-représenté d'après les relevés, on est obligé d'embaucher un autre membre de ce groupe.


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En ne s'identifiant pas, les membres d'un groupe peuvent créer un mouvement d'entraînement dans le milieu de travail et celui-ci pourrait finir par être entièrement doté de personnes du groupe, entraînant ainsi de la discrimination contre tous ceux qui n'en font pas partie. C'est un défaut très important de ce projet de loi.

Nous avons essayé d'y porter remède. Les réformistes ont présenté des amendements en comité à ce sujet mais, bien entendu, les libéraux les ont rejetés. Je suppose qu'ils ne voulaient pas porter un jugement personnel. Ceux qui leur disait comment voter ne pensaient guère non plus. C'est ce qui s'est produit.

Je demande à tous les Canadiens de se poser la question suivante: si le projet de loi est à ce point remarquable, s'il reflète la réalité des Canadiens et si les députés ministériels croient vraiment que tel est le cas, pourquoi avons-nous besoin de mesures de contrôle aussi radicales? Dans ce contexte, pourquoi un tel projet de loi est-il nécessaire?

Pourquoi avons-nous ici des dispositions stipulant que chaque employeur devra faire tous les efforts raisonnables pour mettre en oeuvre un plan d'équité en matière d'emploi et contrôler sa réalisation? Pourquoi le gouvernement exige-t-il que chaque employeur tienne des dossiers sur l'équité en matière d'emploi et qu'il présente un rapport annuel pour indiquer dans quelle mesure il respecte les quotas fixés?

Les députés ministériels n'aiment pas employer le mot quotas parce que, malheureusement, ce mot fait penser à gouvernement fort et imposant. Ils veulent bien imposer la mesure, mais ne veulent pas l'appeler par son nom, c'est-à-dire quotas.

Ils disent que le mot quotas n'est mentionné nulle part dans le projet de loi. En fait, il est question de proportions, mais les chiffres sont là. Puisque tel est le cas et puisque chaque entreprise doit présenter un rapport, elle devra indiquer aussi les échelles de traitement des employés dans les différents groupes. Les entreprises devront aussi indiquer combien d'employés ont été embauchés dans chacun des groupes. Il faut préciser que seuls seront pris en compte les employés qui accepteront d'être reconnus comme appartenant à un groupe désigné; par conséquent, l'employeur pourrait pratiquer l'équité en matière d'emploi et présenter des rapports indiquant qu'il n'atteint pas les objectifs fixés.

De toute façon, nous considérons ce projet de loi comme une mesure dictatoriale car, en bout de ligne . . .

Le vice-président: Je regrette d'interrompre le député, mais à cause d'une erreur de la présidence, il a déjà profité de cinq minutes de plus que le temps prévu.

(1110)

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui à propos de ce projet de loi.

Pour moi, ce projet de loi concernant l'équité en matière d'emploi est une loi sans respect pour les aptitudes et la sensibilité des Canadiens. Je prétends que cette loi perpétue plusieurs mythes, en particulier les suivants: il existe une discrimination systémique qui peut être éliminée par des mesures curatives systémiques; les torts du passé peuvent être redressés en pratiquant la discrimination proactive à rebours; on peut lutter contre le racisme en en pratiquant une forme beaucoup plus dangereuse; certains groupes ont besoin que le gouvernement leur donne une longueur d'avance alors qu'en fait tout ce qu'ils demandent c'est de participer à la course à armes égales.

Je m'oppose à ce projet de loi et à la politique d'action positive dont il fait la promotion dans toutes les activités du gouvernement en se servant de l'euphémisme «équité en matière d'emploi».

La députée de Brant a mentionné que le gouvernement demandait aux gens qui faisaient une demande d'emploi d'indiquer entre autres s'ils appartenaient à un club et quels étaient leurs antécédents. Elle s'est indignée de ce fait et je suis d'accord avec elle là-dessus.

Ce week-end, ma fille m'a montré une demande qu'elle faisait à l'université pour poursuivre ses études de troisième cycle. Le formulaire qu'elle devait remplir comportait une page où elle devait indiquer si elle était handicapée ou membre d'une communauté autochtone. Je suppose que c'était pour lui faciliter l'accès à un programme dans lequel on devrait également être admis en fonction de ses résultats universitaires et ses aptitudes. Tout comme elle s'est indignée qu'on lui ait posé une telle question, je m'indigne qu'on pose à ma fille des questions qui n'ont rien à voir avec le niveau universitaire requis pour entrer dans un établissement universitaire d'État.

C'est pourtant bien ce qui se passe dans de nombreux secteurs de la société. À un problème donné, on propose une solution qui ne va qu'aggraver les choses.

Je ne parle pas uniquement en tant que réformiste, mais également au nom de la vaste majorité des Canadiens qui, je le sais, partagent mon opinion, à savoir que les gens-y compris ma fille, moi-même et les députés de cette Chambre-veulent qu'on tienne compte de leurs aptitudes et de leurs qualités personnelles et non de la couleur de leur peau ou d'autres traits spécifiques.

En compagnie d'une de mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, j'ai participé aux travaux du Comité des droits de la personne et de la condition des personnes handicapées qui a étudié ce projet de loi et tenu des audiences à ce sujet. Nous avons proposé plus de 40 noms de personnes qui pourraient venir témoigner devant le comité. Nous avons proposé ces noms pour apporter un certain équilibre au débat. Nous estimions que ces personnes exprimeraient un point de vue majoritaire, l'opinion de la population, à bien des égards. Sur les 40 candidats que nous avons proposés, seulement quatre ont effectivement témoigné devant le comité. À la lecture du rapport concocté par le gouvernement, aucun d'entre eux n'a été entendu.

Au moment d'accéder au pouvoir, les libéraux ont lancé un vibrant appel en faveur d'un processus gouvernemental nouveau et plus transparent. Je voudrais toucher un mot là-dessus. Ils ont décidé de renvoyer ce projet de loi à notre comité avant l'étape de la deuxième lecture. Leur objectif, en réalité, et il s'est matérialisé à la fin de nos séances du printemps, c'était de soustraire le projet de loi à la consultation publique pour que retentisse ensuite cette affirmation orchestrée des grands concepts qui sous-tendent ce texte législatif.

Je me suis intéressée à bon nombre des témoins qui sont venus des quatre coins du Canada à la demande du gouvernement. Un des aspects intéressants que j'ai retenus, c'est que, lorsqu'on demandait à des représentants syndicaux de dire ce qu'ils pensaient de l'équité en matière d'emploi, ils étaient fortement en faveur de ce projet de


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loi. Ils souscrivaient aux propos du gouvernement. Quand on leur demandait où ils en étaient dans la réalisation des objectifs énoncés dans le projet de loi, il ressortait que leurs propres structures étaient la preuve même qu'ils ne prenaient pas la chose au sérieux. Le gouvernement était tout à fait disposé à appliquer cette mesure aux sociétés ou aux entreprises, mais pas à sa propre structure administrative où les personnes handicapées et les autochtones sont, de toute évidence, sous-représentés. D'une manière générale, les femmes ne s'en tiraient pas si mal dans la plupart de ces cas.

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J'ai le sentiment que certains programmes que propose le gouvernement sont essentiellement des instruments visant à permettre à ces groupes de faire valoir leurs intérêts. Par ailleurs, les groupes qui ont peut-être le plus besoin d'une intervention gouvernementale pour avoir droit à certains services sont rejetés ou négligés au profit d'autres groupes qui font plus de bruit.

Je voudrais m'attarder à un aspect de ce projet de loi qui n'a pas encore été abordé. Cela a trait à la récente expérience qu'il m'a été donné de vivre à la quatrième conférence mondiale qui a eu lieu à Beijing. Cela s'applique tout à fait à la notion d'équité en matière d'emploi. Notre gouvernement a signé la déclaration finale de cette conférence, qui était vraiment en faveur de l'action positive. À la lecture de ce document, il devient tout à fait évident qu'il s'agit d'un programme d'action positive auquel notre gouvernement a adhéré au nom des Canadiens dans le cadre du programme d'action.

Aux termes du programme de la Conférence de Beijing, tous les pays signataires s'engagent à mettre en oeuvre plus de 500 mesures d'ici l'an 2000. Au cours des cinq prochaines années, nous sommes censés prendre 500 mesures que personne ne connaît vraiment ici. Nous avons adhéré à ces mesures à l'autre bout du monde.

Je crois qu'à cette occasion le gouvernement n'a pas rendu des comptes comme il aurait dû le faire. Chose certaine, dans le monde entier et partout au Canada, la population rejette la notion d'équité en matière d'emploi, mais le gouvernement n'en fait rien, car il n'écoute pas la population. Il a plutôt étendu la portée de cette notion en allant signer un document en ce sens bien loin d'ici, sans rendre aucun compte.

Permettez-moi de vous lire un passage de ce programme d'action: «Mettre en oeuvre des programmes d'action positive et d'équité en matière d'emploi dans les secteurs privé et public et surveiller leur application pour s'attaquer à la discrimination systémique contre les femmes en milieu de travail, surtout les femmes handicapées, les femmes appartenant à des groupes défavorisés, en ce qui concerne l'emploi, l'embauche, le maintien en fonction, les promotions et la formation professionnelle offerte aux femmes dans tous les secteurs».

Nous examinons un projet de loi qui, selon moi, n'a pas l'appui des Canadiens. Le gouvernement a imposé ces dispositions non seulement au secteur public, mais également au secteur privé en signant un document international. Je ne suis même pas certaine que les Canadiens soient au courant. Il a agi sans débat sur cette question à la Chambre et, chose certaine, sans débat sur la décision de signer les documents venant des Nations Unies.

Déposera-t-on un jour à la Chambre le document de Beijing? Le gouvernement a souscrit, à l'étranger, à des mesures d'équité en matière d'emploi qui touchent les secteurs privé et public, mais aurons-nous l'occasion d'en discuter à la Chambre? On a signé un document document sans que les responsables de la condition féminine ou qui que ce soit ne nous explique ce qui a été fait au juste, alors qu'on n'aurait même pas dû signer ce document sans nous en parler. Ces gens ont des comptes à rendre. Je me demande s'ils vont au moins le reconnaître lorsqu'ils reviendront parmi nous.

Nous nous sommes engagés à faire appliquer un programme dynamique d'action positive. C'est un programme cadre visant tous les ministères fédéraux. Ce ne sont pas simplement une question intéressant les représentants de la condition féminine travaillant en collaboration avec des groupes d'intérêt. Le programme établi à la suite de notre signature de ce document touche tous les ministères fédéraux, dans tous les secteurs. On va voir toute la situation en fonction du sexe des intéressés, ce qui se reflétera dans ces programmes d'action positive et d'équité en matière d'emploi dans les secteurs public et privé.

Je suis sidérée d'entendre le gouvernement affirmer qu'il est ouvert à l'opinion des Canadiens, alors qu'il va signer en catimini, à l'autre bout du monde, des documents qui non seulement vont à l'encontre de la position de la population, mais au sujet desquels on ne rend également aucun compte à la Chambre. Je n'accepte pas que le gouvernement se targue d'agir de façon transparente et de tenir compte des souhaits des Canadiens.

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M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet de ce projet de loi. Au cours de la dernière session, ce projet de loi était un peu mon affaire. J'étais censé en piloter l'étude au comité, y proposer des amendements et ainsi de suite. J'estime donc que je devrais consacrer quelques instants à traiter du projet de loi et à expliquer pourquoi le Parti réformiste est d'avis qu'il doit s'y opposer dans sa forme actuelle.

Tout d'abord, je devrais parler un peu de tout le processus. Ce projet de loi est un de ceux qui avaient été renvoyés à un comité après la première lecture, prétendument pour encourager la tenue d'un débat, des propositions d'amendements et l'élaboration d'un projet de loi après l'étape de la première lecture au comité.

Je rappelle à la Chambre que, au cours de cette session, des choses presque sans précédent dans l'histoire de la Chambre se sont produites au comité. Le débat a été limité à seulement cinq minutes par article. Nous n'avons pas été autorisés à présenter des amendements parce qu'ils n'étaient pas rédigés dans les deux langues officielles, mais seulement en anglais. Certaines parties du projet de loi ont été adoptées sans la tenue d'un vote. C'était un vrai simulacre.

L'ironie dans tout cela, c'est que cette situation s'est produite au sein du comité des droits de la personne. L'expérience a laissé un goût très amer. J'en ai fait rapport à la Chambre à ce moment-là. Encore une fois, je tiens à souligner qu'il s'agit là d'une bien mauvaise façon de rédiger un projet de loi qui est très controversé.


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Je voudrais traiter de quelques aspects du projet de loi, puis parler brièvement de la solution de rechange que propose le Parti réformiste. Contrairement aux foutaises du parti d'en face, le Parti réformiste a effectivement des solutions à proposer à la situation sur laquelle le projet de loi est censé se pencher. Nous avons bel et bien des propositions à faire sur les pratiques d'engagement et sur des moyens d'encourager les employeurs à veiller à ce que leurs lieux de travail soient exempts de discrimination. Je voudrais aussi présenter ces propositions.

Je trouve curieux que le projet de loi ne compte pas le cabinet du premier ministre, par exemple, parmi ceux qui devront réaliser l'équité en matière d'emploi. Il est curieux que le plus haut cabinet du pays ne soit pas assujetti à l'équité en matière d'emploi. Pourquoi? Pourquoi tous les autres, les entreprises privées qui traitent avec le gouvernement fédéral, le gouvernement fédéral, les sociétés d'État, les forces armées, seront-ils assujettis à la loi, alors que le cabinet du premier ministre refuse de l'être? Pourquoi?

Je me rappelle avoir fait cette proposition au comité, mais les libéraux l'ont rejetée. Je trouve curieux que, lorsqu'il s'agit de leurs propres cabinets importants, ils ne soient pas disposés à se laisser assujettir à ce projet de loi sur l'équité en matière d'emploi. C'est une réflexion intéressante. Je me demande si le premier ministre pourrait expliquer à un moment donné pourquoi lui et son cabinet devraient être exempts.

Une récente controverse a éclaté au sujet de la base statistique autour de laquelle tourne toute cette affaire et des problèmes connexes. Lors du dernier recensement, 10 p. 100 des autochtones ont refusé d'être recensés. Ce n'est qu'un exemple de la façon dont la base statistique est souvent faussée lorsque la population active est censée refléter exactement la population dans son ensemble. Il est parfois impossible de connaître la vérité parce que les statistiques sont faussées.

Un autre point soulevé durant la période des questions il n'y a pas longtemps, c'est que près d'un million de personnes ont refusé d'indiquer leur origine ethnique lors du dernier recensement. Ces personnes ont dit: «Je veux être désigné comme Canadien et être traité comme tout le monde.» Bien sûr, les libéraux ne veulent rien savoir. Le prochain recensement fera en sorte que chacun devra indiquer la catégorie dans laquelle il se classe. On n'aura pas le droit de s'identifier comme Canadien. Il faudra indiquer un groupe ethnique quelconque. Quel dommage. Nous devrions mettre en valeur ce que nous avons en commun au lieu de creuser un fossé entre les gens.

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On a souvent entendu l'argument aujourd'hui que ce projet de loi ne porte pas sur les quotas, qu'il ne force pas les gens à employer un certain pourcentage de membres d'un certain sexe ou d'une minorité donnée. Ce n'est simplement pas vrai. Et si, par exemple, des témoins de la GRC venaient nous dire que, dans l'année qui vient, la GRC doit engager: 238 femmes, 238 membres de minorités visibles, et tant d'autochtones? Autrement dit, ils fourniraient des chiffres exacts. Quelle différence y a-t-il entre ces chiffres et un quota? Il n'y en a pas. Il s'agit de chiffres exacts devant permettre d'atteindre des objectifs numériques arbitrairement fixés par le gouvernement, et c'est dommage. Le gouvernement peut dire qu'il ne fixe pas de quotas, mais les chiffres nous prouvent le contraire, et c'est pourquoi nous nous opposons à ce projet de loi.

Les Canadiens sont contre ce projet de loi. En Colombie-Britannique, la région que je connais le mieux, seulement 11 p. 100 de la population disent appuyer ce projet de loi. Ces 11 p. 100 comprennent presque exactement la même proportion de membres des groupes désignés qui ne veulent pas être traités avec condescendance ou se faire dire qu'ils peuvent obtenir un emploi seulement parce que le gouvernement va leur faciliter la tâche. La plupart des gens, quel que soit le groupe auquel ils appartiennent, veulent simplement une chance. Ils veulent obtenir et garder un emploi en raison de leurs compétences et non parce que le gouvernement en a décidé ainsi.

Le processus d'auto-identification, qui est censé être volontaire, pose un important problème. Autrement dit, vous n'avez pas à vous identifier comme membre d'un groupe donné si vous ne le voulez pas. Du moins, c'est ce que le gouvernement voudrait vous faire croire. Le problème, c'est qu'on ne sait plus trop ce qui en est. Le ministère de la Défense nationale a distribué un questionnaire aux fins de l'équité en matière d'emploi. Dans la partie supérieure de la formule, vous devez inscrire votre nom, votre grade, votre numéro d'identification ou je ne sais trop quoi des forces armées. En tout petit, il est écrit que vous n'êtes pas obligé de remplir la deuxième partie, si vous ne le voulez pas.

On sait déjà quels sont les militaires qui sont prêts à coopérer avec le gouvernement et ceux qui ne le sont pas. Ce renseignement est déjà disponible. Si vous avez été un bon petit garçon ou une bonne petite fille et que vous avez fait ce qu'on vous a dit de faire, cela figure dans votre dossier. Si vous n'avez pas rempli la formule, cela aussi figure dans votre dossier. Autrement dit, vous ne faites pas preuve d'esprit de coopération si vous refusez de remplir la formule. Vous ne les avez pas aidés à faire ce qu'ils pensent être leur travail.

La ligne de démarcation entre cette déclaration volontaire et la déclaration obligatoire propre à certaines formes d'apartheids comme celle qui était pratiquée en Afrique du Sud n'est vraiment pas très claire. Elle devient très floue quand on force les gens à indiquer sur une demande d'emploi s'ils font partie d'une minorité visible ou les prie tout simplement de le faire. Il est difficile de croire qu'une telle chose soit même possible au Canada.

En poussant les choses à l'extrême, on fait comme à l'Université de Guelph, où, d'après des témoins qui ont comparu devant le comité, on a tracé une ligne au beau milieu du salon des étudiants, une section étant réservée aux membres des minorités visibles et l'autre à tous les étudiants qui ne font pas partie de cette catégorie. Voilà le genre d'attitude qu'une telle mesure encourage: «Vous ne devez pas vous considérer comme canadiens. En tant qu'employeur ou employé, n'allez pas penser que vous êtes une personne d'égale


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valeur et jouissant de droits égaux dans le monde. Considérez-vous d'abord et avant tout comme appartenant à tel ou tel groupe et divisez-vous en groupes. Divisez la main-d'oeuvre. Demandez à la personne qui travaille à côté de vous si elle a obtenu son poste parce qu'elle était la mieux qualifiée pour l'occuper.» C'est à souhaiter, mais est-ce le cas? C'est comme l'étudiant de Guelph qui disait: «Séparons les gens. Mettons tous les gens de couleur de ce côté et tous les blancs de l'autre.» Est-ce à cela que l'on va en venir? C'est ce à quoi mènent les mesures comme celle-ci.

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Le projet de loi à l'étude est du «fait à Ottawa». Je me demande si ses auteurs ont seulement jamais vu la côte ouest du pays. Je me demande s'ils ont jamais visité une région comme la région métropolitaine de Vancouver. Sont-ils déjà allés à Richmond ou à Abbotsford? Lorsque M. Spicer a comparu devant notre comité, je lui ai dit que s'il refusait d'embaucher des membres de minorités visibles, il ferait faillite. Il lui faudrait engager des membres de minorités visibles pour avoir les personnes les plus compétentes, sans quoi il ferait faillite. Le marché en déciderait. C'est une réalité en Colombie-Britannique.

J'ai dit à M. Spicer qu'une station radiophonique diffusait en langue hindi dans la vallée du bas Fraser. Selon les règlements du CRTC, combinés aux règles dont il est question ici et à celles de la bureaucratie, la station devra indiquer combien de membres de minorités visibles, de femmes ou de membres des autres groupes désignés font partie de son effectif. Cette station radiophonique répond aux besoins des gens de langue hindi qui résident dans la vallée du bas Fraser; leur nombre est assez important, ils sont plus de 100 000. Il serait ridicule de dire à la station qu'on l'encourage à embaucher un nombre X d'autochtones.

C'est le marché qui détermine les possibilités d'emploi. Ce que nous disons, c'est que la Commission canadienne des droits de la personne est là pour protéger la population contre la discrimination. C'est son travail et je l'encourage à le faire. Le gouvernement canadien pourrait jouer un rôle en faisant connaître les emplois disponibles correctement et sur une grande échelle; en mettant en oeuvre un système complet de prêts aux étudiants; en donnant à la population locale un accès à des études postsecondaires adaptées aux besoins, c'est-à-dire en ne leur refusant pas la possibilité de poursuivre leurs études; en effectuant des tests de placement objectifs; et en étant un employeur modèle pour ce qui est de l'accès à l'emploi et de l'adaptation raisonnable aux besoins des personnes handicapées.

Nous pouvons nous attaquer aux problèmes qui assaillent le Canada sans ce projet de loi, qui est mauvais. Il est inutile et coercitif, et je suis d'avis qu'il devrait être relégué aux oubliettes.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-64. J'avais préparé un discours il y a un certain temps, mais un grand nombre de points que je voulais aborder ont déjà été soulevés. Je veux néanmoins faire part de certaines observations à la Chambre.

L'objectif déclaré de cette loi est de réaliser l'égalité en milieu de travail et de corriger les désavantages subis par certains groupes. Tel est le but de cette mesure législative. Qui pourrait s'opposer à un tel objectif? Tous les députés de cette Chambre souhaiteraient corriger les situations injustes qui existent au sein de la société, notamment en milieu de travail. Aucun d'entre nous n'approuve la discrimination et n'est disposé à la tolérer en milieu de travail, que celle-ci soit liée à la race, au sexe ou à tout autre facteur. Compte tenu du problème que le gouvernement veut corriger, tous ici sont d'accord avec l'objectif déclaré de la loi.

Le projet de loi C-64 est une mesure oppressive qui est non seulement inutile dans la société actuelle, mais aussi très préjudiciable. Les dispositions de cette loi me préoccupent, tout comme un grand nombre de mes électeurs et d'autres Canadiens de toutes les régions du pays avec qui j'en ai discuté. Cette mesure préoccupe beaucoup de personnes. Des sondages ont évidemment révélé que des Canadiens d'un bout à l'autre du pays n'appuient pas le principe de l'équité en matière d'emploi ou de l'action positive, appelez-cela comme vous voudrez.

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Il existe deux écoles de pensée en ce qui a trait à l'équité en matière d'emploi. L'une porte que des programmes légiférés sont nécessaires pour corriger des injustices, en particulier celles qui existaient auparavant en milieu de travail. Les tenants de l'autre courant de pensée jugent que l'équité en matière d'emploi est un principe inadéquat parce qu'il prône l'embauche de personnes en fonction de caractéristiques personnelles, plutôt que du mérite. Ces deux écoles s'opposent.

Un troisième courant de pensée veut que, à une certaine époque, il fut nécessaire d'avoir des programmes légiférés d'action positive ou d'équité en matière d'emploi. Il fut un temps où de telles mesures étaient nécessaires, compte tenu de la discrimination qui s'exerçait en milieu de travail. Ce point de vue est partagé par un bien plus grand nombre de personnes que l'opinion selon laquelle le projet de loi à l'étude est une mesure nécessaire. Les conditions sont loin d'être ce qu'elles étaient dans le passé, et tant l'évidence empirique que des données solides confirment qu'il y a beaucoup moins de discrimination en milieu de travail maintenant que par le passé.

Encore une fois, il ne faut absolument pas tolérer la discrimination en milieu de travail. Je ne la tolère pas, et je pense qu'aucun député de cette Chambre ne la tolère non plus.

Je vais résumer en cinq points la position des réformistes sur cette question. Premièrement, tous les Canadiens sont égaux devant la loi et tous ont le droit de travailler dans un milieu exempt de discrimination. Je ne pense pas que personne à la Chambre ni, espérons-le, ailleurs dans le pays ne contestera ce principe.

Deuxièmement, le marché fournira des solutions pour assurer la représentativité du milieu de travail dans le secteur privé. Le député de Fraser Valley-Ouest, qui est intervenu avant moi, et d'autres de mes collègues qui ont déjà abordé cette question, ont fait valoir qu'une entreprise qui pratique une saine gestion des affaires embauchera les gens capables d'établir les meilleurs rapports avec ses


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clients. Cela, en soi, devrait assurer qu'on trouve des membres de toutes les minorités visibles dans le milieu de travail qui auront été embauchés d'une façon raisonnable et non pour respecter des quotas.

Troisièmement, le gouvernement a pour rôle d'assurer l'égalité des chances et non de déterminer l'égalité des résultats d'embauche dans le secteur public et hors du secteur public. L'égalité des chances, c'est du ressort du gouvernement, mais ce dernier ne peut assurer l'égalité des résultats et ne devrait pas essayer de le faire.

Le quatrième argument que le Parti réformiste fait valoir à l'égard de l'équité en matière d'emplois, c'est que le monde du travail devrait être libre d'obstacles arbitraires à l'embauche et à la promotion. Le mérite doit être le seul critère à retenir pour embaucher un employé. C'est ce que je crois, et les témoignages démontrent que la majorité des Canadiens le croient également. Cela voudrait dire que les Canadiens n'appuient pas le projet de loi C-64 sur l'équité en matière d'emploi.

Cinquièmement, le projet de loi est coercitif, discriminatoire en soi, inutile et onéreux, et devrait donc être abandonné. Non seulement devrait-on repousser le projet de loi C-64, et le vote de cet après-midi devrait le rejeter parce qu'il est mauvais, mais on devrait également mettre au rebut la loi antérieure sur l'équité en matière d'emploi.

Je félicite d'ailleurs le gouvernement de Mike Harris, en Ontario, d'avoir promis de faire exactement cela. J'espère sincèrement qu'il respectera sa promesse, et je crois qu'il le fera.

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Qu'est-ce que les divers groupes participant au monde du travail ont à dire à propos de l'équité en matière d'emploi? Tout d'abord, les employés qui savent que l'embauche dans leur entreprise respecte le principe de l'équité en matière d'emploi, quand ils vont travailler et voient dans leur milieu de travail un collègue appartenant à l'un des groupes désignés en vertu de la loi sur l'équité en matière d'emploi, ils se posent des questions. Ils se demandent si ce collègue a été embauché parce qu'il était le meilleur candidat et le mieux qualifié pour occuper l'emploi, ou s'il a été embauché pour respecter un quota établi dans le cadre d'un programme d'équité en matière d'emploi.

Quel genre de milieu de travail cela donne-t-il? Un milieu de travail pas sain du tout. Les autres employés se demanderont toujours si les membres des minorités visibles, par exemple, n'ont pas été engagés grâce à des contingents plutôt qu'à leur valeur personnelle. Ce n'est pas juste pour eux, et cela ne favorise guère un climat sain.

Quel est le point de vue des groupes qui doivent profiter des contingents prévus par ce projet de loi sur l'équité en matière d'emploi? Qu'en pensent les minorités visibles et les femmes, par exemple? Comment réagissent-ils au projet de loi? Je ne saurais pas donner de chiffres, mais bien des gens appartenant aux groupes désignés m'ont parlé, et ceux-là même que ce projet de loi doit aider me disent qu'ils ne veulent rien savoir de cette mesure pour deux raisons.

La première est qu'ils ont eux-mêmes des doutes et se demandent s'ils ont été engagés parce qu'ils étaient les plus compétents ou simplement parce qu'il fallait respecter un contingent. Les députés peuvent-ils imaginer les conséquences pour un employé qui est sur le marché du travail et se sent qualifié pour son poste, mais conserve toujours un doute: est-ce que j'ai été engagé à cause d'un contingent ou parce que j'étais le plus qualifié? Cela ne donne pas un climat sain pour cette personne non plus.

Que dire de l'autre groupe, de ceux qui ne peuvent prétendre à ces emplois parce qu'ils n'entrent dans aucune des catégories pour lesquelles des contingents sont prévus? Plusieurs personnes m'ont dit par exemple qu'elles ne prisaient pas beaucoup de ne pas même pouvoir postuler un emploi à la GRC. La GRC applique un régime d'équité en matière d'emploi depuis un certain temps. Pour les hommes de race blanche, c'est une perte de temps pure et simple que de présenter une demande à la GRC. Ce n'est qu'un exemple.

Comment ces exclus peuvent-ils se sentir? Ils éprouvent du ressentiment non seulement contre ceux qui ont instauré ces règles, mais aussi contre les groupes qui profitent des contingents. C'est regrettable. Regrettable et inacceptable. Il faut que ces choses-là cessent. Le climat n'est pas sain pour ces personnes. Bien entendu, elles n'arrivent pas à se faire une place dans ce milieu de travail.

Je connais bien une ou deux jeunes gens qui sont dans cette situation. Il m'a été donné de faire leur connaissance depuis que je m'occupe de politique, car ils sont venus m'expliquer qu'ils faisaient partie d'un groupe exclu. Ils sont en colère tous les deux-j'ai souvent discuté du problème avec eux-parce qu'ils voient se fermer devant eux les portes d'une carrière qu'ils voulaient. Ce sont des jeunes hommes de 25 ans. Ils voulaient entrer dans la GRC, et ils ont été écartés à cause des contingents. C'est regrettable. C'est condamnable et inacceptable.

Une autre groupe, sur le marché du travail, a à souffrir de ces contingents, celui des employeurs. D'autres députés de mon parti ont parlé de la question et montré clairement qu'il y avait bien des contingents. Les entreprises seront touchées par cette loi, tout comme ils ont souffert de l'ancienne loi sur l'équité en matière d'emploi. Quelle est leur réaction?

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J'ai discuté avec quelques entreprises de ma circonscription qui comptent, dans une certaine mesure, sur des marchés de l'État et qui ont été exclues par le passé, même avant le nouveau projet de loi, parce que leurs effectifs ne satisfaisaient pas aux critères imposés par le gouvernement fédéral. Comme ces entreprises ne respectaient pas les quotas, elles ne pouvaient obtenir des marchés du gouvernement.

Ces entreprises sont contrariées non seulement parce qu'elles ne peuvent pas obtenir les marchés de l'État, mais aussi parce qu'elles doivent engager des dépenses supplémentaires. Je ne parle pas ici de très grandes entreprises, mais elles sont considérées comme de grandes entreprises dans leur région. Elles doivent engager des frais pour embaucher une personne chargée d'évaluer les progrès réalisés et pour tenter d'embaucher des candidats qui leur permettront d'atteindre les quotas. Tout cela nuit également aux employeurs.


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J'ai revu toute la liste. À mon avis, tous ceux qui évoluent sur le marché du travail appartiennent à l'un ou l'autre de ces quatre groupes. En terminant, je voudrais poser une question aux membres du parti au pouvoir et aux députés de la loyale opposition, qui ne l'est pas tant que cela. Pourquoi appuieront-ils une mesure législative comme celle-ci quand aucun des groupes visés jugent qu'il s'agit d'un bon projet de loi? Pourquoi? Ils ne peuvent pas répondre de façon satisfaisante.

C'est malheureux, mais ils vont adopter le projet de loi. Le projet de loi sera adopté à cause du style dictatorial du gouvernement, j'en suis convaincu. Les députés n'oseront pas se prononcer contre la position du gouvernement. Nous adopterons donc un projet de loi que très peu de gens réclament.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, la première fois que j'ai lu le projet de loi C-64, je n'ai pas pu m'empêcher de me demander si George Orwell avait eu quelque chose à voir avec sa rédaction. Les gens qui ont lu Les animaux se souviendront pour la plupart de cette fameuse déclaration du porc que l'on cite tellement souvent: «Tous les animaux sont égaux, mais il y en a qui sont plus égaux que d'autres.»

Tel est le genre de chose que ce projet de loi va créer au Canada. Ce projet de loi n'a rien à voir avec l'égalité des chances. Il ne vise pas à faire que tous soient traités de la même façon, bien au contraire. Il vise à créer des divisions parmi les Canadiens, à répartir ceux-ci en diverses catégories. Ce n'est pas correct.

Depuis longtemps au Canada, la politique du secteur public consiste à embaucher et à promouvoir les gens selon leur mérite. C'est aussi, en général, la politique qui prévaut dans le secteur privé, car, comme l'a dit tout à l'heure un député, c'est courir à la faillite que de ne pas appliquer le principe du mérite dans l'embauche. Si le candidat méritant fait partie d'un des groupes désignés dans ce projet de loi, c'est manifestement la personne qu'il faut engager.

Ce projet de loi ne concerne pas tant l'égalité des personnes entre elles, mais la propension des libéraux à réglementer, à contrôler, à alourdir la bureaucratie et à ennuyer, en général, les gens. Pourquoi ne laisse-t-on pas les Canadiens tranquilles? Le Canada se porte très bien, merci. Les Canadiens sont fondamentalement de bonnes gens, des hommes et des femmes de bonne volonté. Nous sommes des amis. Nous formons effectivement une société multiraciale et cette société fonctionne. Pourquoi tourner le fer dans une plaie que le gouvernement se plaît à ouvrir lui-même? Cela n'a pas de sens.

Lorsque j'ai travaillé à l'étranger, tant dans le privé qu'aux Nations Unies, pendant plusieurs années, j'ai fait partie d'un grand nombre d'équipes techniques très compétentes et très motivées. Des équipes multiraciales. Ces équipes n'étaient pas composées de représentants de plusieurs groupes ethniques parce que quelqu'un en avait décidé ainsi. Elles l'étaient parce qu'on avait recruté les candidats pour ces postes partout dans le monde et qu'on avait retenu les meilleurs. Nous étions les meilleurs et fiers de l'être. Si ces groupes avaient été assujettis aux programmes d'action positive, je n'en aurais pas fait partie. Je serais parti, la tête basse, et je serais allé me cacher.

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C'est ce qui va se produire dans la société canadienne si l'action positive est mise en application. Nous nous retrouverons avec des gens très compétents qui appartiennent à des minorités et qui ont des emplois dans l'industrie privée ou dans la fonction publique, mais qui se sentent embarrassés, rabaissés et traités avec condescendance. On se demandera toujours s'ils ont obtenu leur emploi en raison de leurs compétences et de leurs aptitudes ou un peu pour remplir certains quotas. On se demandera s'ils ont été embauchés en raison de leur couleur, de leur race, de leur langue, de leur sexe et ainsi de suite. Le gouvernement n'a pas à intervenir en disant aux gens qui ils doivent embaucher ou non. C'est insultant. C'est mal.

J'ai probablement fait campagne en faveur de l'égalité des races bien avant que naissent la plupart des députés ici présents. Je me souviens que mes idées curieuses sur cette question m'ont occasionnellement attiré des bosses durant mon adolescence. Je trouve terriblement insultant que certains députés d'en face qui ont pris la parole plus tôt adoptent une attitude arrogante et suffisante envers mes collègues et moi et laissent entendre que, parce que nous nous opposons à leur projet de loi raciste, nous sommes racistes. Ils tournent la sociologie à leur avantage.

M. Benoit: C'est là la logique libérale.

M. Morrison: C'est en effet la logique libérale. En me rendant à la Chambre aujourd'hui, je n'avais pas l'intention de participer au débat sur ce projet de loi. J'ai toutefois dû prendre la parole parce que les propos de certains députés d'en face m'ont mis hors de moi. Je n'ai pas préparé de long discours, mais comme j'ai exposé mon point de vue, je vais maintenant me rasseoir.

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais ajouter un point dont je n'avais pas l'intention de parler. Je ne puis croire que le gouvernement fasse adopter à toute vapeur ce projet de loi d'une manière aussi intéressée et arrogante, prétendant qu'il ne s'intéresse qu'à l'équité et qu'il veut accorder à tous une chance égale. En fait, le projet de loi est si vicié que personne le moindrement intelligent et sensé ne l'appuierait.

Par contre, on accuse de racisme, de sexisme et d'insensibilité ceux qui n'appuient pas le projet de loi. C'est une honte pour la Chambre des communes qu'on ne puisse critiquer un projet de loi vicié, impraticable et mal conçu et qu'on fasse l'objet d'insultes, d'invectives et de railleries, que l'on voie ses propos déformés alors que la logique, la raison et la persuasion devraient prévaloir dans cette enceinte.

J'en appelle à tous les députés à mieux servir la population en examinant les problèmes avec logique et en fonction du bien-être du pays au lieu de lancer des invectives et de faire des procès d'intention. Nous savons que ce n'est pas comme ça qu'il faut faire pour doter le pays de bonnes lois.

Il y a sept raisons pour lesquelles le projet de loi ne devrait pas être adopté. Je voudrais les énumérer brièvement parce que les Canadiens qui nous regardent doivent savoir pourquoi ni leurs représentants élus ni eux ne doivent appuyer ce projet de loi. Les Canadiens doivent également se préoccuper au plus haut point de l'imposition de ce projet de loi par un gouvernement libéral qui agit de façon doctrinaire dans le seul but de montrer qu'il agit au lieu de faire ce qu'il convient pour le bien du pays.


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(1155)

La première raison devrait, à elle seule, être suffisante parce que le projet de loi institutionnalise en fait la discrimination. Comment peut-on appuyer une loi qui est discriminatoire envers des personnes sur le marché du travail du fait de leur race, de leur sexe ou de la couleur de leur peau?

Pourquoi, dans un pays comme le Canada que nous avons édifié en étant justes, ouverts et équitables envers tous, institutionnaliser un si terrible processus en vertu duquel les gens ne sont pas engagés en fonction de leur compétence, de leurs connaissances et des services qu'ils peuvent fournir aux autres, mais en fonction de la couleur de leur peau? C'est une aberration. Nous pouvons certes faire mieux.

Il ne faut pas encourager ou institutionnaliser la discrimination sous quelque forme que ce se soit, et c'est précisément ce que nous allons faire au moment du vote. Je n'arrive pas à croire que mes vis-à-vis imposeraient une telle chose à notre pays.

La deuxième des sept raisons, c'est que la mesure législative insulte les groupes désignés en supposant qu'ils n'ont pas les mêmes aptitudes que les autres. Pourquoi adopterions-nous une loi qui dit que certains Canadiens ne peuvent pas s'imposer par eux-mêmes, aussi allons-nous leur donner un atout de plus? Quelle insulte pour ces Canadiens de certains groupes de leur dire ainsi qu'ils n'ont pas le courage, l'intelligence, les aptitudes, la compétence et le mérite suffisants pour bâtir leur vie eux-mêmes sans que d'autres soient forcés de leur accorder un traitement particulier. Ce n'est pas ainsi que nous devrions faire les choses. Cela n'aidera en rien les membres des groupes désignés.

La troisième raison, c'est que ce genre de mesures législatives a plutôt pour effet de diviser que d'unir le pays. D'autres députés l'ont très bien expliqué et il faut que les Canadiens réfléchissent à cela. Plutôt que d'être un Canadien, d'être quelqu'un qui a des habiletés particulières, un bon employé, une personne ayant le sens de l'initiative, de la force de caractère et des aptitudes, les gens seront maintenant casés dans de petits groupes. Nous deviendrons une femme en milieu de travail. Nous serons une personne de couleur en milieu de travail. Nous serons un autochtone en milieu de travail. Nous ne serons plus un sacré bon employé. Ce n'est pas ainsi que l'on construit des entreprises fortes, que l'on bâtit un pays fort.

La quatrième raison, c'est que la mesure législative crée des obstacles injustes et peu souhaitables à la création d'emplois. Cette loi amènera des gens à conclure qu'ils n'ont pas besoin d'être particulièrement méritants puisque les employeurs devront les embaucher pour remplir les quotas qu'elle prévoit. Ils savent que l'entreprise ne peut pas se passer d'eux parce qu'elle doit avoir, au sein de son effectif, des représentants de certains groupes. Par conséquent, ces employés savent qu'ils n'ont pas à s'efforcer de faire le meilleur travail possible puisque l'employeur a besoin de leur présence de toute façon.

Ce projet de loi impose aussi toutes sortes de contraintes bureaucratiques et réglementaires aux entreprises, qui sont déjà surchargées par le rafistolage économique des gouvernements qui croient qu'ils savent mieux que quiconque comment gérer l'économie. Au lieu de cela, ils ne font qu'écraser les entreprises qui croulent sous le poids de leurs exigences excessives et de leur rafistolage social et économique.

Il est grand temps que nous mettions un terme à cela. Il est grand temps que nous laissions les entreprises créer des emplois pour nos jeunes. Il est grand temps que nous laissions les entreprises offrir leurs services de façon efficiente et efficace. Il est grand temps que nous cessions de laisser les gouvernements accabler les entreprises, même s'ils nous font croire qu'ils aident tout le monde. C'est l'une des raisons qui font que notre pays connaît des difficultés.

Une voix: Oh, oh!

Mme Ablonczy: Le député d'en face fait beaucoup de bruit. Or, il le sait pertinemment, puisqu'il a parlé de rendre les entreprises économiquement viables de nouveau. Il pourrait donc réfléchir à comment nous pouvons y arriver. Ce n'est certainement pas en imposant encore plus de contraintes bureaucratiques aux entreprises.

La cinquième raison, c'est que cette mesure législative force en quelque sorte les entreprises à collaborer avec les bureaucrates. C'est impensable! Nous avons vu, dans d'autres pays, des bureaucrates rendre la vie impossible aux dirigeants d'entreprise.

(1200)

Nous avons ici un autre cas où les entrepreneurs qui ne collaborent pas seront punis. Ils se feront harceler. Ils se verront imposer toutes sortes d'exigences et de restrictions, devront remplir encore plus de formulaires et se feront talonner par un bureaucrate zélé qui les empêchera de faire leur travail, soit diriger leur entreprise. Pourquoi imposer de telles contraintes aux habitants de notre pays?

La sixième raison, c'est que cette mesure législative viole le principe de la justice naturelle. Pour moi, c'est un point très important. Cette mesure législative dit que nous ne sommes pas tous égaux devant la loi, que, comme mon collègue l'a mentionné avant moi, certains d'entre nous sont plus égaux que d'autres. Cela va à l'encontre du principe démocratique fondamental selon lequel chacun a droit à un procès équitable. Au lieu de cela, nous avons un tribunal sur l'équité en matière d'emploi, qui est comme un tribunal irrégulier qui ne laisse aucune possibilité d'appel et qui n'a même pas de règles de droit fixes sur lesquelles fonder ses décisions. Aussi incroyable que cela puisse paraître, le projet de loi permet d'entrer dans les locaux d'une entreprise ou de consulter et de saisir les registres d'une entreprise pour assurer l'observation des dispositions de cette loi.

Enfin, je tiens à signaler que cette mesure législative a été étudiée à la hâte, et ce, sans raison. D'autres orateurs l'ont mentionné également. Le projet de loi n'a pas été étudié adéquatement en comité et n'a pas été suffisamment débattu à la Chambre. Ce n'est pas là la façon de doter notre pays de bonnes mesures législatives.

J'ai bien peur que mes efforts soient vains parce que nous savons que les huiles du Parti libéral ont dit à leur députés d'arrière-ban qu'ils doivent voter en faveur de cette mesure législative. J'exhorte les députés à faire changement et à rechercher les meilleures solutions possibles pour notre pays, au lieu de voter de façon instinctive, d'adopter une mauvaise loi et d'infliger tous les problèmes dont je viens de parler à notre pays qui en a déjà d'autres.


15459

Le vice-président: Puisqu'il n'y a plus de députés qui désirent prendre la parole au sujet du projet de loi, conformément à l'ordre adopté aujourd'hui, la question est mise aux voix, le vote est demandé et le vote par appel nominal est reporté à 17 heures aujourd'hui.

* * *

LA LOI DE 1984 SUR LA CONVENTION CANADA-ÉTATS-UNIS EN MATIÈRE D'IMPÔTS

La Chambre passe à l'étude du projet de loi S-9, Loi modifiant la Loi de 1984 sur la Convention Canada-États-Unis en matière d'impôts, dont un comité a fait rapport avec des propositions d'amendement.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le vice-président: Je vais rendre une décision au sujet de ce projet de loi.

[Français]

Il y a deux motions d'amendement inscrites au Feuilleton des Avis en ce qui concerne l'étape du rapport du projet de loi S-9, Loi modifiant la Loi de 1984 sur la Convention Canada-États-Unis en matière d'impôts.

[Traduction]

Les motions nos 1 et 2 seront regroupées pour les fins du débat et feront l'objet de votes séparés. Je soumets maintenant les motions nos 1 et 2 à la Chambre.

MOTIONS D'AMENDEMENT

M. George S. Baker (Gander-Grand Falls, Lib.) propose:

Motion no 1
Qu'on modifie le projet de loi S-9, à l'article 3:
a) par substitution, à la ligne 21, page 1, de ce qui suit:
«3.(1) La même loi est modifiée par adjonc-»; et
b) par adjonction, après la ligne 23, page 1, de ce qui suit:
«(2) La modifiaction à la Convention portée au paragraphe 1 de l'article 5 de l'annexe IV, qui figure à l'annexe de la présente loi, ne s'applique pas après l'an 2000.»
Motion no 2
Qu'on modifie le projet de loi S-9, à l'article 3:
a) par substitution, à la ligne 21, page 1, de ce qui suit:
«3.(1) La même loi est modifiée par adjonc-»; et
b) par adjonction, après la ligne 23, page 1, de ce qui suit:
«(2) Les avantages qui seraient autrement payables en vertu du paragraphe 4 de l'article 21 de l'annexe IV, qui figure en annexe à la présente loi, ne le sont pas si aucun impôt n'est payable au Canada en raison d'un bien ou d'un revenu imposé aux États-Unis.»
M. Baker: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Cela signifie-t-il que chaque député ne dispose que de dix minutes pour les deux propositions d'amendement dont la Chambre est saisie?

Le vice-président: C'est bien la décision de la présidence.

M. Baker: Monsieur le Président, je devrai donc traiter en dix minutes de deux questions, un énorme allégement fiscal de 50 p. 100 sur les profits des sociétés américaines qui font affaire au Canada.

Le vice-président: Compte tenu de ce que vient de dire le député, la Chambre consent-elle à l'unanimité à accorder vingt minutes au député?

Des voix: D'accord.

M. Baker: Je remercie les députés. Cela me soulage un peu. Je vais pouvoir me calmer pour essayer d'expliquer aux députés, aux Canadiens et aux membres du caucus libéral pourquoi je suis si rigoureusement opposé à ce projet de loi.

(1205)

Ce projet de loi du Sénat aura l'appui du Parti réformiste et du Bloc québécois. Ils représentent l'opposition officielle et la relève de l'opposition officielle.

M. Silye: Il a l'appui du gouvernement.

M. Baker: Le député réformiste dit que ce projet de loi a l'appui du gouvernement.

Lorsque le projet de loi a été examiné à l'étape de la deuxième lecture et au comité de la Chambre, le Bloc s'est prononcé en faveur de la mesure et a déclaré ceci: «Nous adorons ce projet de loi. Présentez-nous davantage de mesures législatives comme celle-ci qui accordent d'énormes allégements fiscaux aux compagnies américaines installées au Canada.»

Or, ce n'est pas tout ce que fait cette mesure. Le projet de loi accorde un crédit d'impôt à toute personne qui possède aux États-Unis des biens dont la valeur est estimée à plus de 600 000 $, qui décède et qui est assujettie à l'impôt sur les successions aux États-Unis. Dorénavant, les Canadiens devront payer le gouvernement américain pour le compte de cette personne.

Monsieur le Président, comme vous le savez, quand une personne meurt aux États-Unis, l'Internal Revenue Service vient évaluer les tableaux accrochés aux murs, la voiture, le garage, la cour arrière, les orangers et les pamplemoussiers. Ces gens évaluent absolument tout. Si la valeur des biens dépasse 600 000 $, il vous assomme avec ce qu'on appelle l'impôt sur les successions. Nous avions un impôt de ce genre au Canada avant 1971, mais pas de l'importance de celui qui existe aux États-Unis. Là-bas, la ponction fiscale habituelle équivaut à 54 p. 100 de tout ce qu'on possède au-delà de 600 000 $, y compris les actions et les obligations, même si elles ont été achetées par l'intermédiaire d'un courtier canadien.

Au Canada, nous avons des gains non réalisés au moment du décès, des gains en capital, mais c'est différent des impôts sur les successions. Personne ne vient examiner votre foyer. Si la maison vaut 20 millions de dollars, on n'en tient pas compte, parce que c'est votre résidence. Personne ne vérifie si vous avez une Rolls Royce de 100 000 $ dans l'entrée. Ce n'est pas considéré au Canada, parce que c'est un bien personnel utilisé pour usage personnel. C'est une forme d'imposition différente. Ce projet de loi du Sénat vous offre


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un crédit d'impôt qui n'est pas payé uniquement à même le Trésor. C'est l'ensemble des Canadiens qui paient. C'est une dépense fiscale. C'est cela qui ne marche pas.

Les gens se demandent où est allé l'argent au fil des ans. Pourquoi pouvions-nous nous payer les transferts aux provinces pour les soins de santé et l'éducation, il y a 20 ans, alors que nous ne le pouvons plus aujourd'hui? Depuis 1985, les vérificateurs généraux ont tous cité pour cause les dépenses fiscales. Ces dépenses auront pour effet de faire payer aux Canadiens l'impôt sur les biens transmis au décès, si le décès survient aux États-Unis. Les Canadiens paieront aux multinationales américaines installées chez nous une réduction de 50 p. 100 des impôts sur les bénéfices, sur les dividendes. Les Canadiens paieront la diminution d'impôt de 33,33 p. 100 sur les intérêts qui franchissent la frontière américaine. Ils paieront encore pour l'abolition des redevances sur presque tout, même sur les marques de commerce, qui seront divisées, chaque élément étant examiné séparément.

Permettez-moi de donner à la Chambre une idée du coût de cette mesure pour le Trésor fédéral.

(1210)

La personne responsable, le chef du service d'impôt international et sur les sociétés au ministère des Finances, a témoigné devant le comité du Sénat. On lui a demandé: «Pourquoi avez-vous besoin d'un impôt de 5 p. 100? Le projet de loi le réduit de 50 p. 100. Pourquoi ne pas réduire la retenue d'impôt de 100 p. 100? Pourquoi ne pas laisser les sociétés américaines empocher entièrement leurs bénéfices, sans aucune charge fiscale?» La personne chargée de l'impôt sur les sociétés au Canada a déclaré: «La principale raison, c'est l'argent. Je n'ai pas vérifié dernièrement, mais je crois que la somme perçue annuellement en retenues d'impôt représente environ 1,5 milliard de dollars. Ce serait certainement difficile de préconiser une mesure qui éliminerait complètement une telle source de financement.»

Que faire? Nous diminuons de 50 p. 100 la retenue à la source sur les dividendes des compagnies américaines installées au Canada et qui envoient leurs bénéfices aux États-Unis. Quel est l'incidence de cette mesure pour une entreprise canadienne qui essaye de demeurer concurrentielle? Il n'y a pas de mal à offrir un allégement fiscal de 50 p. 100 à Wal-Mart, mais pourquoi ne pas en faire autant pour l'entreprise canadienne à laquelle cette compagnie américaine fait concurrence?

Il est intéressant de voir dans quel sens va le courant. J'ai devant moi les témoignages reçus par le Comité des relations étrangères du Sénat américain, que préside Jesse Helms. On y parle du traité avec le Canada. Les États-Unis n'en aimaient pas les termes et, l'an dernier, après que le ministre des Finances l'ait eu signé à Washington, le Sénat américain l'a modifié. Le ministre des Finances a dû retourner à Washington en mars pour signer la version modifiée du protocole.

J'aimerais lire un passage du témoignage du secrétaire au Trésor chargé de la politique fiscale du gouvernement américain qui a déclaré: «Le protocole ramène de 15 à 10 p. 100 le taux de la retenue à la source sur les intérêts versés dans l'autre pays. Cette réduction profitera grandement aux bénéficiaires américains de paiements d'intérêts de source canadienne. Elle aura un effet moindre en ce qui concerne les intérêts versés des États-Unis au Canada du fait qu'en grande partie ce courant est déjà exempt d'impôt aux termes des dispositions du code relatives aux dividendes de portefeuille». Autrement dit, nous accordons un allégement fiscal de 33,3 p. 100 aux Américains alors que les Canadiens ne pourront profiter de la même mesure parce que le secrétaire au Trésor américain a dit qu'il existait déjà une exemption en vertu du code.

L'autre disposition porte sur les redevances. Voici ce qu'en dit l'hon. Cynthia Beerbower, secrétaire adjointe au Trésor chargée de la politique fiscale: «Être exempté de l'impôt sur les redevances c'est de l'argent en caisse. À l'heure actuelle nous payons des redevances au Canada. Étant donné le taux nul proposé dans le protocole, je n'arrive pas à croire qu'on ne fasse rien à ce sujet.»

Ensuite, il y a le point central, soit la somme de 1,5 milliard de dollars que le Trésor reçoit maintenant. Le Parti réformiste et le Bloc québécois appuient ce projet de loi du Sénat.

Robert Green, vice-président de la politique fiscale au National Foreign Trade Council Inc., 1914, un organisme qui représente 500 multinationales américaines faisant des affaires au Canada, a déclaré ce qui suit: «Le flux des investissements entre les deux pays est énorme et favorise les États-Unis. Nous investissons davantage là-bas qu'ils ne le font ici. La réduction des taux de retenue à la source sur les dividendes, qui passeront progressivement à 5 p. 100 en trois ans, représente un avantage considérable pour les États-Unis et pour les multinationales américaines qui font des affaires au Canada. Grâce aux taux réduits de retenues à la source, le montant net des gains rapatriés aux États-Unis augmentera considérablement.»

Il parle ensuite de la réduction des taux de retenue sur les redevances et déclare: «Les gains additionnels rapatriés profiteront considérablement aux États-Unis.»

Il ne subsiste aucun doute à ce sujet. Le milieu des affaires américain prétend qu'il pourra réaliser des gains au Canada et les rapatrier directement aux États-Unis.

(1215)

C'est ironique, monsieur le Président. Certains députés libéraux de l'arrière-ban s'opposent à tout ceci et les députés réformistes et bloquistes sont tout à fait d'accord. Quelle est l'origine de tout cela? Je vais vous le dire, monsieur le Président. En 1988, les États-Unis ont modifié leur fiscalité. Ils ont changé les règles de l'impôt sur les successions pour les étrangers. Ils ont déterminé que tout étranger possédant des biens aux États-Unis devrait payer un impôt sur les successions sur tout montant excédant 60 000 $, et non 600 000 $. Cela se passait en 1988.

D'après les faits, en 1988, le gouvernement canadien a mis une semaine à réagir. Il a alors envoyé une délégation à Washington et a dit: «Nous voulons délivrer les Canadiens de cet impôt qu'ils


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doivent payer aux États-Unis.» Voilà comment tout cela a commencé.

Les États-Unis ont répliqué: «Pour que nous accordions cette faveur aux Canadiens bien nantis, vous devez nous donner quelque chose en retour.» Les échanges étaient amorcés. Les négociations ont commencé en 1988. Voilà le début de l'histoire. Les pourparlers se poursuivent depuis lors. Le dossier comporte maintenant des dépenses fiscales que personne ne peut évaluer. Même Revenu Canada et le ministère des Finances disent qu'ils ne savent pas. . .

M. Silye: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Nous écoutons le député depuis dix minutes et, jusqu'à présent, je n'ai pas vu le rapport entre son discours et ses deux motions. Nous lui avons donné 20 minutes pour parler de ses motions. Je ne vois pas de lien avec l'une ou l'autre des motions et je ne vois pas pourquoi il recommande que ces motions soient adoptées.

Le vice-président: Je suis sûr que le député va en venir aux motions très rapidement.

M. Baker: Monsieur le Président, l'objet des motions, et c'est là où je voulais en venir, est celui-ci. En vertu de nos règles, nous n'avons pas le droit de modifier un traité fiscal. C'est dit clairement dans notre Règlement. Nous pouvons amender la mesure législative qui donne naissance au traité fiscal. Toutefois, un amendement à une telle mesure législative ne peut rien contenir de contraire au principe d'un article quelconque du traité fiscal.

Imaginez le pouvoir des comités américains. Ils peuvent modifier les traités. Notre ministre des Finances a dû retourner à Washington deux fois. Il a signé un traité qui a été modofié par la suite et il a dû retourner.

La Chambre des communes, en vertu de son Règlement, ne peut pas changer quoi que ce soit dans un traité. Les amendements que je propose ne sont contraires à aucun article. Le premier demande que les énormes dégrèvements fiscaux accordés aux multinationales américaines qui ont des activités au Canada se terminent en l'an 2000. C'est la motion no 1. Nous ne pouvons plus nous permettre de faire des cadeaux.

Nous sommes en train de réduire le nombre de fonctionnaires. C'est nécessaire. Nous sommes en train de réduire l'assurance-chômage. Nous réduisons ceci, nous réduisons cela, mais, en même temps, nous présentons ce nouvel ensemble de dépenses fiscales, de cadeaux.

Cela m'amène à la motion no 2, la partie qui traite des cadeaux. La motion no 2 a trait à la rétroactivité du crédit relatif à l'impôt sur les successions de personnes décédées depuis le 10 novembre 1988. Est-ce que vous voyez la signification de la date, monsieur le Président? Peut-être que quelqu'un de très riche est mort le 11 novembre 1988, je ne sais pas. Non, c'est la date à laquelle un protocole est entré en vigueur aux États-Unis pour réduire le maximum de 600 000 $ à 60 000 $.

En vertu de ce projet de loi, il y a des successions au Canada-cela a été vérifié pour moi et pour le comité par Revenu Canada-qui attendent l'entrée en vigueur de ce projet de loi. Maintenant, le gouvernement canadien devra rembourser le montant des impôts payés aux États-Unis sur ce que l'on avait imposé ici comme un revenu de source américaine.

(1220)

La population canadienne doit maintenant payer la note. On m'a raconté qu'à sa mort, un type détenait 20 millions de dollars aux États-Unis. Il a été très durement frappé par l'impôt sur les successions puisque, sur ce montant, huit millions de dollars ont dû être versés au Trésor américain. Il jouit d'un joli dégrèvement de la part du gouvernement américain, mais d'un meilleur encore de la part du gouvernement du Canada. Sa famille a dû se contenter de 12 millions de dollars. Désormais, les personnes qui ont reçu les biens de la succession pourront, grâce à ce projet de loi, facturer au gouvernement du Canada un montant supplémentaire variant entre cinq et six millions de dollars en l'espace d'une année.

Le deuxième amendement, qui est appuyé par le député de Broadview-Greenwood, prévoit que, puisque les délégations canadienne et américaine ont déclaré qu'il y avait réciprocité afin d'éliminer la double imposition, aucun dégrèvement n'est accordé en cas d'élimination de la double imposition. Cela n'annule aucunement la disposition. On dit simplement que, si quelqu'un ne paie pas d'impôt, le gouvernement du Canada n'a pas à lui accorder un dégrèvement.

En 1985, le vérificateur général a dit que le Parlement canadien lui faisait penser à un groupe d'ingénieurs automobiles s'évertuant à fabriquer une voiture qui soit plus efficace, qui brûle moins d'essence sans pour autant perdre de sa puissance. Il y voyait là une analogie avec le Parlement parce que nous nous évertuons à trouver des façons d'effectuer des compressions sans réduire pour autant les services offerts à la population canadienne. Il a dit que c'était là le problème.

Dans le cas des automobiles, lorsque les ingénieurs ont changé les moteurs pour qu'ils soient munis de quatre cylindres au lieu de huit ou de six et qu'ils y ont apporté toutes sortes de modifications pour économiser l'énergie, ils ont découvert en fin de compte que les automobiles consommaient autant d'essence qu'auparavant. Ils ignoraient quel était le problème, jusqu'à ce qu'ils examinent le dessous de l'automobile et découvrent une multitude de petits trous dans le réservoir à essence. Le vérificateur général a dit qu'il s'agissait là des dépenses fiscales du gouvernement du Canada.

Le gouvernement n'arrête pas de faire des coupes sombres. Il met à pied des gens qui ont des enfants à l'école ou à l'université et qui ignorent où ils trouveront l'argent pour payer la prochaine facture. Il modifie le régime d'assurance-chômage. Lorsqu'un producteur primaire qui travaille dans notre pays reçoit des prestations d'assurance-chômage dans le cadre de son revenu, il dit: «Nous allons supprimer cette assurance, car elle n'est pas censée servir à cela.» Cette personne est morte d'inquiétude aujourd'hui.

Pendant que nous faisons tout cela, nous examinons un projet de loi du Sénat qui procurera des recettes énormes à des gens très riches et nous disons aux multinationales que nous allons réduire leurs impôts de 50 p. 100.


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Nous ne ferons absolument rien pour les gens très pauvres. Nous ne ferons rien pour les sociétés canadiennes qui exercent leurs activités au Canada. C'est la raison pour laquelle j'estime que, lorsqu'on examine les projets de loi dont nous discutons, ce qui se passe réellement au sujet des recettes fiscales, c'est que nous prenons de l'argent aux pauvres pour le donner aux riches.

C'est l'envers de Robin des Bois. Il travaille maintenant pour les grandes sociétés qui représentent les multinationales aux États-Unis qui fonctionnent si bien dans notre pays, un pays qui, selon la Banque mondiale, se classe au deuxième rang parmi les pays riches parce qu'il possède des ressources.

Aujourd'hui, la Chambre des communes, de concert avec le Bloc et le Parti réformiste, qui appuient ce projet de loi à fond, ne fonctionne pas. Les Canadiens disent que nous devons changer les règles de procédure ou nous débarrasser des deux partis d'opposition.

(1225)

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ça me fait sourire d'avoir assisté à ce spectacle politique du député du Parti libéral. Évidemment, il a conclu avec un raisonnement un peu illogique en disant s'en prendre davantage aux partis de l'opposition qu'au gouvernement. Je lui rappellerai bien amicalement que s'il n'est pas d'accord, il n'a qu'à régler ses comptes avec ses propres collègues. C'est un projet de loi qui vient du gouvernement, formé de collègues du même parti que lui. Donc, ils se parleront entre eux et ils essaieront de s'entendre. J'ai même un peu de peine de les voir déchirés ainsi, ce matin. Cependant, je le rejoins sur un certain nombre de points, sur d'autres non, et je vais y venir.

Évidemment, son souci pour les démunis de notre société, on le partage. On est d'accord avec cela et j'espère, quand viendra le temps d'adopter la réforme d'assurance-chômage ou des choses comme ça, qu'il se lèvera de la même façon. Il me semble qu'il n'y avait qu'un député qui s'était opposé, la dernière fois. Je ne suis pas sûr de l'avoir entendu. Je ne suis pas sûr qu'il était présent. Bref, on regardera, la prochaine fois, et on verra où il sera, dans le débat qui s'en vient, notamment sur les coupures dans les paiements de transfert et ce qui se passe dans le domaine des programmes sociaux. On verra où il sera et on verra si son souci est réel ou s'il ne fait que de la politique spectacle ici, une fois de temps en temps, pour faire plaisir à ses électeurs et se faire élire dans son comté.

Ce que je veux dire sur ce projet de loi, c'est qu'il y a le fond et il y a la forme. Ce que le vérificateur général a dit au sujet des conventions fiscales, et ce à quoi nous souscrivons, c'est qu'il faudra effectivement, un jour, se donner un code de conduite quand vient le temps de signer des conventions fiscales avec d'autres pays. Parce qu'il arrive notamment des cas où il y a des déséquilibres majeurs entre les taux d'imposition du Canada et de l'autre pays signataire de la convention. Dans ces cas-là, il y a un problème évident et il faut s'assurer que, quand on signe ce genre d'ententes, cela ne se fasse pas au détriment de différentes transactions économiques qui font en sorte qu'on perd des revenus ici.

Dans le cas qui nous concerne, c'est une convention fiscale avec les États-Unis. Évidemment, on peut être contre si on veut, mais il faut le dire directement, si on est contre. On ne peut pas, en tout cas de notre point de vue, s'opposer à ce qui vise à favoriser au maximum les échanges économiques entre le Canada et les États-Unis.

Pendant longtemps, on a cru que nos marchés étaient Est-Ouest, au Canada, et de plus en plus, on voit que nos marchés sont Nord-Sud. Il y a beaucoup de potentiel de développement là. Je comprends qu'il reste des zones de résistance chez certains qui se sont opposés à l'entrée en vigueur du libre-échange et de ce qui en découle, mais il faut passer aux années 2000 et vers où on s'en va. Et c'est par là qu'on s'en va. Il faut être conséquent et être logique. Quand on accepte d'embarquer dans des choses comme le libre-échange, il faut vivre avec ce que cela implique. Il faut aussi vivre avec la réciprocité. Et là, j'en viens au contenu de ces amendements, lesquels m'apparaissent soit techniquement mal rédigés ou alors il y a un problème.

Évidemment, il y a le premier amendement. J'ai entendu le discours du député libéral qui s'en est pris, dans une envolée spectaculaire, à la réduction de 10 p. 100 à 5 p. 100 qu'il va y avoir sur le taux d'imposition. Pourtant, son amendement vise cela, à faire en sorte que ça ne s'appliquera pas après l'an 2000. Pourquoi avant? Pourquoi pas après? Pourquoi 2000? Pourquoi pas 2001? Pourquoi pas 2002? Il est très difficile de saisir le sens de son premier amendement et je n'ai trouvé personne qui a été capable de m'expliquer le sens réel et la portée de son premier amendement.

Évidemment, on ne peut pas être d'accord avec quelque chose qui est mal rédigé. On est contre ou on est pour. On n'est pas contre pendant quelques années et pour après. À un moment donné, il faut être logique.

Le deuxième amendement me fait penser à des gens qui sont en faveur du libre-échange, mais à sens unique. On est pour que les autres nous ouvrent leurs frontières, mais nous, on les fermerait. Mais là, c'est dans le domaine fiscal. On dit qu'il ne faudrait pas, nous, accorder ce remboursement rétroactif, si on veut. On ne devrait l'accorder que s'il y a eu des revenus imposables au Canada durant cette période. Il y a une contrepartie à cela aussi. Quel raisonnement applique-t-on pour l'inverse, pour les résidents américains avec des actifs qui étaient en sol canadien ou québécois?

Mais là, on ne trouve pas la contrepartie de cela. La contrepartie d'accepter le deuxième amendement veut dire de demander aux Américains de faire la même chose et de rouvrir la convention fiscale. C'est le sens de ce qu'ils souhaitent, je suppose, parce qu'il faut être conséquent avec ce que l'on propose. S'ils le font, ça m'étonne, parce que ce sont les mêmes gens qui font des discours ici et qui disent aux souverainistes: «Ah, que ce serait effrayant si vous votiez oui. Peut-être qu'il faudrait rouvrir l'ALENA.» Eux veulent rouvrir des conventions fiscales. Ils disaient en campagne électorale qu'ils voudraient rouvrir l'ALENA.


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(1230)

Je sens chez eux un profond désir de rouvrir toute cette dynamique des relations entre le Canada et les États-Unis. Bref, c'est leur droit, ce n'est pas un sentiment qui me paraît partagé par la majorité de la Chambre ni par la majorité de la population.

Oui, le souci pour les démunis, on l'a tous. Oui, sur l'avenir de nos programmes sociaux, on peut s'entendre sur le fait qu'il y a un sérieux débat à faire à ce sujet quant à la vision que propose le gouvernement actuel.

Mais là, il ne faut pas exagérer. Les chiffres qui ont été lancés par notre collègue sur les conséquences économiques de ces amendements ou ces motions sont nettement exagérés. On a parlé d'au-delà de centaines de millions de dollars. Moi j'ai lu ce qui s'est passé au comité, j'ai suivi cela et personne n'a pu arriver au même résultat et parler de centaines de millions de dollars qui étaient impliqués dans le présent cas.

Évidemment on peut lancer des chiffres n'importe comment, c'est facile, mais il faut les appuyer, il faut les justifier, il faut les documenter. Ce n'est pas vrai qu'on peut constamment lancer des chiffres à la population et dire: Oui, c'est ça, c'est n'importe quoi, n'importe comment. Il faut être plus sérieux, plus crédible que cela.

Dans ce sens-là on ne pourra pas appuyer ces amendements, ni la motion no 1, ni la motion no 2. La motion no 1 est mal rédigée, elle est complexe et non cohérente avec les propos mêmes du député, à mon point de vue. Le deuxième amendement ne comporte pas de contrepartie, pas de réciprocité. On ne peut pas être pour la vertu d'un côté, ne pas l'être de l'autre. Si on signe des conventions fiscales, il faut qu'il y ait de la réciprocité, et on n'y échappe pas. On ne retrouve rien dans la deuxième motion qui y fasse référence.

S'ils veulent renégocier toute la convention fiscale, libre à eux, c'est leur problème. Nous, ce qu'on voudrait davantage, et ce qu'on a toujours proposé, c'est d'aller dans le sens de ce que dit le vérificateur général. Il y a un certain nombre de conventions fiscales problématiques actuellement, à cause des différents taux d'imposition des pays. Dans ces cas-là il va falloir se donner un code de conduite pour l'adoption des conventions fiscales parce que ça va aller en croissant dans les prochaines années, avec les courants qui existent actuellement au point de vue économique.

Donc, il faudrait effectivement avoir un code de conduite plus serré quand on envoie des gens signer ce type de convention fiscale, au lieu de se retrouver devant des faits accomplis qu'on a de la difficulté à modifier par la suite.

Pour conclure, parce que je n'ai pas l'intention de parler plus longtemps sur le sujet, nous sommes en accord avec la convention fiscale. J'admets cependant que la dimension de rétroactivité nous agace aussi, que cela nous agace qu'on rétablisse ou qu'on compense rétroactivement.

Cela dit, les deux amendements ne corrigent pas cela, ni la première motion, ni la deuxième motion ne vont pas corriger cela. Elles ne corrigent pas parce qu'il n'y a pas, comme je le disais tantôt, de contrepartie ou de réciprocité de prévue dans les amendements. Quand viendra le moment de voter sur la convention fiscale en troisième lecture, il va falloir évaluer le projet de loi S-9 dans son ensemble. Dans son ensemble il nous apparaît important de continuer dans ce sens-là.

Il est sûr, je le répète, cet élément de rétroactivité nous agace. Mais bref, ce qui est suggéré là, concrètement, ne corrige pas cela de façon spécifique. Nous serons contre les deux amendements et nous serons pour le projet de loi S-9 en troisième lecture. Je suis sûr que le député va écouter son collègue, le secrétaire parlementaire qui va lui expliquer tout à l'heure les montants en jeu avec ce projet de loi, et que ce n'est pas de l'ampleur de ce qu'il a suggéré.

Cela me fait sourire de le voir s'en prendre au Bloc québécois dans ce débat. Il devrait davantage s'assurer que son parti politique qui forme le gouvernement ait un propre code de conduite dans l'adoption de conventions fiscales, qu'il fasse accepter cela par ses militants, éventuellement par le gouvernement, et là on va avancer. On ne pourra pas retourner en arrière pour modifier des choses qui sont signées et qui découlent de tout ce contexte nord-américain de libéralisation des échanges. On doit passer à des mesures logiques et conséquentes dans ce qu'on décide comme action, et c'est pour cela que le Bloc québécois va appuyer ce projet de loi, et va rejeter, comme l'a souvent fait le gouvernement et aussi le Parti réformiste, les deux motions suggérées.

[Traduction]

M. David Walker (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de parler des amendements présentés par le député de Gander-Grand Falls. Je voudrais formuler quelques observations au sujet des détails de ces amendements. Ces questions ont été abordées non seulement au Sénat, mais également au comité des finances de la Chambre des communes par des témoins représentant le ministère, notamment votre serviteur, qui les ont examinées point par point.

(1235)

Pour la gouverne des gens qui essaient de suivre la logique de ce projet de loi, je voudrais signaler que ce sont les modifications apportées au droit fiscal américain, en 1988, qui ont rendu ce protocole nécessaire. Une fois ces nouvelles dispositions en vigueur, le gouvernement canadien a dû réviser les accords fiscaux entre les deux pays.

Le député de Gander-Grand Falls a tenu à préciser que des témoins au Sénat américain et à la Chambre des représentants ont trouvé ce projet de loi très utile. Cela ne me surprend pas qu'une mesure législative soit bonne pour les deux parties et qu'il y a des gens, aux États-Unis, qui pensent qu'elle est avantageuse pour eux. C'est pourquoi le pays l'a adoptée. Je voudrais ajouter que notre ministère a adopté une position très ferme qui est également à l'avantage des Canadiens.


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Cette mesure aide non seulement les Canadiens nantis, ce qui est un fait, mais également un certain nombre de citoyens ordinaires qui ont une résidence secondaire aux États-Unis, même si elle est relativement modeste, ainsi que des sociétés menant des activités aux États-Unis.

Les États-Unis sont notre plus important partenaire commercial, non seulement pour nos entreprises, mais également pour chacun de nous. C'est le lieu de séjour le plus couru par les Canadiens. C'est l'endroit où beaucoup de familles font leurs placements secondaires les plus importants. Il faut faire bien attention de ne pas élaborer un régime fiscal en vase clos, en ignorant totalement ce qui arrive aux gens dans d'autres régimes. Ce qui arrive à de nombreux Canadiens aux États-Unis est une chose importante sur le plan fiscal. Il incombe à notre gouvernement d'offrir aux Américains des conditions égales et de faire tout en notre pouvoir pour les Canadiens.

Comme dans le cas de n'importe quel traité ou protocole, certaines dispositions satisfont davantage l'autre partie. Ou nous prenons des mesures pour satisfaire les Américains ou nous n'avons pas d'entente. Il serait stupide de penser que ce protocole ne répond à aucun des besoins des Américains. Il serait tout aussi stupide de croire que le gouvernement canadien n'a atteint aucun de ses objectifs.

En ce qui concerne la première motion, une bonne partie de nos principaux partenaires commerciaux a adopté le taux de retenue à la source de 5 p. 100 sur les dividendes directs. Entre les pays membres de la CEE, il n'y a pas de retenues de ce genre. Nous avons parfaitement le droit d'insister pour appliquer des taux plus élevés comme le prévoit l'amendement, mais nous devons être conscients du fait que nous serons alors moins en mesure d'attirer d'autres investissements et de conserver les investissements actuels, ce qui aura des répercussions négatives sur nos recettes.

Si on s'inquiète de la situation financière du gouvernement fédéral, on doit connaître les mesures fiscales qui risquent de déplaire aux contribuables et de les inciter à se lancer dans l'évasion fiscale. Les entreprises canadiennes qui essaient d'accéder à des marchés étrangers ou d'élargir leur accès seraient désavantagées face à la concurrence.

Mon deuxième point, c'est que la réduction temporaire du taux des retenues d'impôt, proposée dans l'amendement du député de Gander-Grand Falls, serait l'option la moins avantageuse. Premièrement, cela permettrait aux sociétés de retirer les gains antérieurs provenant des opérations canadiennes au taux réduit. En fait, la garantie de taux plus élevés dans l'avenir créerait un encouragement en ce sens. Deuxièmement, cela éliminerait la valeur de la réduction des taux encourageant les sociétés américaines à investir à long terme dans leurs opérations canadiennes. Autrement dit, il serait préférable de ne pas passer à 5 p. 100, au lieu d'appliquer le taux réduit pendant seulement quelques années.

Enfin, pour revenir à un argument déjà soulevé par l'auteur de la première motion, toute modification mettra le protocole en danger ou le sabordera, dans la mesure où il représente un accord entre deux parties qui ne peut être modifié sans l'accord des deux parties. Si nous faisons des changements de notre côté, il faut comprendre que nous devons notamment permettre aux membres de l'autre camp qui sont insatisfaits d'une partie ou d'une autre du protocole d'apporter les changements additionnels désirés. Nous ne pouvons choisir les modifications qui nous plaisent.

Le gouvernement s'oppose aussi à la deuxième motion présentée par le député. Pour situer les choses dans leur contexte, disons que les États-Unis sont tenus d'offrir la plupart des avantages de l'article concernant l'impôt sur les dettes. Plus précisément, les États-Unis doivent exempter les résidents canadiens de l'impôt sur les successions conformément à l'exemption de 600 000 dollars dont bénéficient les citoyens américains plutôt qu'à l'exemption actuelle de 60 000 dollars. Les États-Unis doivent défalquer l'impôt sur les gains en capital payé par les citoyens américains sur les biens situés au Canada de l'impôt américain payable par les citoyens américains à l'égard de ces biens canadiens.

La seule obligation réelle que cet article impose au Canada, c'est d'accorder un crédit réciproque pour la résidence propre. C'est-à-dire que les Canadiens qui possèdent des biens américains au moment de leur décès auront le droit de défalquer l'impôt successoral sur ces biens qu'ils doivent au gouvernement américain de leurs impôts canadiens sur les biens américains et les revenus de sources américaines.

(1240)

En conséquence, s'il n'y a pas d'impôt canadien à payer au départ, il ne semble y avoir aucun avantage que le Canada serait tenu d'accorder conformément à cet article. Si ce raisonnement est valable-et j'admets que les dispositions de la motion ne reflètent peut-être pas l'intention du député-, la motion n'apporte pas de changements substantiels et devrait être rejetée pour cette raison. Si, par contre, les députés croient que la motion aurait un impact substantiel, je réitérerais l'argument énoncé dans le troisième point concernant la première motion.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je me propose d'aborder les amendements que le député de Gander-Grand Falls, mais auparavant, j'aimerais faire observer qu'il a mis un fichu de bout de temps, dans son exposé de 20 minutes, à signaler, et encore de façon extrêmement partiale et théâtrale, que le Parti réformiste et le Bloc québécois appuient le projet de loi. Chaque fois qu'il a fait allusion à l'appui des partis d'opposition, il a délibérément, et de façon fort opportune, négligé de préciser que son gouvernement aussi est en faveur du projet de loi.

Le député peut ne pas être d'accord la position de son propre parti. C'est son droit, et je le respecte. Nous jugeons avantageux de laisser les membres d'un parti faire ressortir les aspects négatifs d'un projet de loi, surtout s'ils ont l'intime conviction que quelque chose cloche. Mais je suis déçu que le député soit allé jusqu'à donner à penser que son parti n'avait rien à voir avec le projet de loi. Je respecte le député, mais je dois dire que, de la façon dont il a


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formulé ses commentaires dans ce cas-ci, il a donné un peu trop dans le sectarisme politique.

Pour en revenir à mon propos, c'est-à-dire les deux amendements qu'il est proposé d'apporter au projet de loi, je suis d'accord avec ce que le député de Témiscamingue a dit. Il a raison. Ces deux amendements sont mal formulés et ils ne sont pas bien conçus non plus. Ils n'ont été mis sur la table que pour donner une occasion de plus au député de faire du boniment et de s'écouter parler.

Ce faisant, le député nous a cependant permis de constater que, si une mesure fait bénéficier les Canadiens d'allégements fiscaux ou leur procure quelque avantage, sous forme de réduction d'impôt, ou encore si elle règle un des problèmes que présente notre fiscalité en faisant disparaître la double imposition, le gouvernement libéral est contre. Le gouvernement libéral et le député sont contre.

Le député cherche à permettre au gouvernement de prendre le plus d'argent possible dans les poches de ceux qu'ils appelle les prétendus riches. Or, le mythe des personnes riches qui bénéficient d'une part démesurée des retombées liées à l'infrastructure est de la foutaise. Ce genre d'idéologie et d'attitude n'a pas sa place dans notre pays. C'est d'ailleurs pour cette raison que la tradition libérale est en train de mourir de sa belle mort.

C'est faire preuve de partialité que de n'aborder qu'un aspect de la question dans son discours, comme le député l'a fait, passant sous silence les avantages que présente le projet de loi ainsi que ses aspects positifs. Voilà comment les libéraux conçoivent l'argumentation. Je pense que les ministériels peuvent uniquement se défendre en faisant valoir un point de vue tendancieux et préjudiciable, au lieu de présenter les deux côtés de la médaille.

Ces deux amendements au projet de loi S-9 sont inadéquats parce que le député qui les propose et qui veut faire rejeter cette mesure législative ne reconnaît pas les réalités du climat économique actuel. L'économie mondiale exige que, dans la mesure du possible, tous soient assujettis aux mêmes règles et taux d'imposition, de façon à éviter la concurrence déloyale et à faire en sorte que les mouvements de capitaux n'avantagent pas un pays en particulier. Si le Canada ne suit pas le mouvement de mondialisation et n'adopte pas les taux d'imposition qui sont prévus dans les conventions et qui s'appliquent aux autres pays, nous allons être gravement pénalisés.

(1245)

Dans sa croisade visant à faire rejeter le projet de loi S-9 pour des motifs techniques, à savoir que celui-ci n'émane pas de la Chambre, le député de Gander-Grand Falls ne tient pas compte des merveilleux avantages qu'offre cette mesure législative.

Les députés d'en face m'ont mis au défi de faire valoir ces avantages. Cette mesure prévoit un allégement pour les résidents canadiens, relativement à l'impôt américain sur les biens transmis par décès. Cette disposition est extrêmement avantageuse pour tous les résidents de l'est du Canada qui ont des propriétés en Floride et qui, s'ils devaient vendre celles-ci, auraient actuellement à payer un impôt sur les biens transmis par décès sur toute somme au delà de 60 000 $. Dorénavant, cette limite sera fixée à 600 000 $. N'est-ce pas là un avantage pour les résidents Canadiens?

Pourtant, lorsque le député a pris la parole, il a donné l'impression qu'il s'agissait là d'une dépense fiscale à laquelle nous renoncions et dont les contribuables canadiens feront les frais. Cette mesure ne coûtera rien aux contribuables canadiens. Ce sont les contribuables américains qui en assumeront les frais. Le député a négligé de présenter ce côté-là de la médaille.

C'est ce à quoi je fais allusion quand je parle d'exposés équilibrés et représentatifs lorsque nous discutons de mesures législatives. Nous allons bientôt discuter d'une réforme fiscale complète et fondamentale pour notre pays. Ce dossier extrêmement important englobe des questions telles que l'impôt et les taux des deux côtés de la frontière, de nation à nation. Ce débat aura lieu dès qu'il sera question d'un impôt uniforme quelconque. Le député de Broadview-Greenwood en a proposé un, mais son parti a commodément décidé de ne pas en tenir compte, ce qui est bien typique des libéraux. Il a proposé une solution formidable à notre système complexe, mais les libéraux lui accordent peu de considération. J'ignore bien pourquoi, mais c'est un fait.

Lorsque le débat aura lieu, il y aura du pour et du contre. Aucune réforme fiscale, aucun régime fiscal, peu importe à quel point on le simplifie, ne répond à toutes les questions, ou ne solutionne tous les problèmes, et un débat est nécessaire. Il faut toujours examiner les deux côtés d'une proposition. C'est pourquoi je considère la tenue d'un débat nécessaire, surtout quand il est question d'un projet de loi d'imposition, d'une mesure qui porte atteinte à notre portefeuille, comme ce projet de loi le fait.

À titre de porte-parole de notre parti concernant ce sujet et ce projet de loi, j'entends recommander à notre caucus, qui sera libre d'accepter ou de rejeter ma recommandation. Nous verrons ce qui se passera en face au moment de se prononcer sur les amendements. Je recommanderai à notre parti de s'opposer aux deux amendements, parce qu'ils ne visent qu'à épater la galerie. Très mal rédigés, ils sont extrêmement difficiles à comprendre, sauf la motion no 1, que je comprends.

Comme le député bloquiste l'a fait remarquer, comment peut-on être d'accord pendant des années avec une idée et s'y opposer ensuite? Le secrétaire parlementaire du ministre des Finances a souligné clairement que le député ne comprend probablement pas lui-même l'incidence de sa motion. En entendant cela, je comprends que même le gouvernement libéral considère que c'est très mal rédigé.

Pour ces deux raisons, je recommanderai donc à mes collègues de rejeter les amendements. Quant au projet de loi S-9 même, je recommanderai à mon parti de l'appuyer. C'est tout ce que j'avais à dire sur le sujet.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je crois qu'il est de mon devoir de parler de ces amendements. Je le pense, parce que j'essaie depuis maintenant sept ans à la Chambre de susciter un débat au nom de mes électeurs et des électeurs de partout au Canada qui


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estiment que le régime fiscal actuel n'est pas équitable ni efficace et qu'il est complexe.

Cela fait des années que nous modifions la loi canadienne de l'impôt. Nous avons adopté des modifications aux modifications qui ont engendré une telle complexité que la plupart des avocats et des comptables fiscalistes, quand ils en parlent en privé, disent que notre loi actuelle de l'impôt est un désastre total.

(1250)

Après les dernières élections, quand le Parti réformiste a fait son entrée à la Chambre, j'espérais que nous puissions avoir un véritable débat solide sur une réforme globale de la fiscalité. D'accord, il faut bien deux ans pour se familiariser avec les usages de la Chambre. La plupart des députés réformistes admettront sans peine que gouverner un pays comme le nôtre est affaire complexe. Nous ne pouvons tout simplement venir ici et nous attendre, dès le premier jour, à ce que nos idées soient totalement comprises, car il y a toutes sortes de variables et de difficultés qui rendent difficile la mise en oeuvre d'un projet de loi par rapport à ce que nous pensions dans le secteur privé. J'ai certainement appris à mes dépens que cela est difficile. Je respecte le fait qu'il a fallu deux ans au Parti réformiste avant de s'engager dans le débat pour une réforme fiscale complète.

Je vais appuyer mon gouvernement touchant ce projet de loi. Jamais je ne voterais contre un projet de loi de finances, car il s'agit d'un cas où l'on fait confiance au gouvernement. Le député de Gander-Grand Falls et moi ne disons pas que nous voulons disputer des élections sur ce projet de loi. Nous essayons cependant d'illustrer ce que je dis à la Chambre depuis sept ans. La mesure à l'étude offre un autre exemple de la façon dont on peut proposer des modifications aux modifications à la loi de l'impôt.

Sans vouloir manquer de respect à personne, je dirais que 85 à 90 p. 100 des députés à la Chambre ne connaissent probablement pas toutes les conséquences du projet de loi. Nous nous attendons à ce que l'opposition trouve à redire à des projets de loi comme celui-ci. Je le dirai bien franchement, si j'étais dans l'opposition à l'heure actuelle, pendant que intervenais au cours du débat sur le projet de loi, j'aurais probablement fait bien davantage pression sur le gouvernement pour que nous engagions enfin le débat sur une réforme complète de la fiscalité. Mais non, les députés d'en face voulaient laisser passer le projet de loi.

Ce que je trouve à redire au projet de loi, c'est que nous effectuons une certaine réforme fiscale. Nous harmonisons notre régime avec celui des États-Unis. Le projet de loi à l'étude harmonise certains éléments de notre régime fiscal avec certains éléments du droit fiscal américain. Une disposition excellente du projet de loi nous permet, lorsque les Américains veulent modifier leur fiscalité, d'adapter rapidement la nôtre.

Songeons au débat qui se déroule aux États-Unis au sujet d'un impôt unique, d'un impôt uniforme et à tous les démocrates, républicains et indépendants qui parlent d'une réforme fiscale complète. Si la question finit par recevoir un traitement prioritaire aux États-Unis, j'espère que le Canada ne tardera pas à emboîter le pas. Nous allons réagir quasi instantanément. C'est un peu pour cette raison que nous adoptons ce projet de loi. Les Américains veulent que cela se fasse rapidement.

Voilà donc un aspect positif: nous agissons rapidement pour harmoniser notre régime. Là où le bât blesse, c'est qu'il s'agit d'une réforme fiscale pour l'élite seulement. Une réforme fiscale pour l'élite canadienne. J'éprouve un profond respect pour mon collègue de Winnipeg, le secrétaire parlementaire du ministre des Finances, et je vais l'appuyer dans l'étude de ce projet de loi. Toutefois, je ne qualifierais pas ceux qui ont une résidence en Floride de simples contribuables. Ils sont riches. Je considère les personnes qui ont des propriétés de 600 000 $ en Floride ou ailleurs aux États-Unis comme relativement prospères.

L'article XI du projet de loi me préoccupe aussi profondément. Essentiellement, lorsque le projet de loi sera adopté-et il le sera-il favorisera les Canadiens qui désirent envoyer leurs enfants à l'une des grandes universités américaines, comme Harvard, Yale, Cornell ou Rice. Je n'ai rien contre les grandes universités privées des États-Unis. Je suis fier des universités canadiennes, mais j'aurais aimé fréquenter la UCLA ou l'une des grandes universités privées des États-Unis. Il faut compter entre 25 000 $ et 30 000 $ par année, et cela pour quatre ou cinq ans. Aux termes du projet de loi, les Canadiens qui ont les moyens d'envoyer leurs enfants à ces grandes universités privées pourront obtenir un crédit d'impôt. J'ai bien du mal à accepter cela, puisque le projet de loi créera pour ainsi dire un marché pour les riches du Canada.

(1255)

Si j'étais président de l'université Notre Dame ou de l'un des grands établissements des États-Unis, je placerais des annonces dans toutes les universités du Canada. J'irais, par exemple, au Upper Canada College, situé dans ma circonscription, à Toronto, ou encore à l'école Bishop Strachan et je distribuerais des dépliants dans lesquels je dirais aux parents qu'ils obtiendraient un crédit d'impôt pour tout l'argent qu'ils dépenseront pour envoyer leur fils ou leur fille à une université américaine.

Nous avons écouté la députée de Yukon faire son discours hier soir. J'ai toujours eu beaucoup de respect pour la députée de Yukon depuis mon élection à la Chambre des communes il y a sept ans. Elle disait que nous étions ici pour défendre ceux qui ne pouvaient pas toujours parler pour eux-mêmes. Il est évident que les gens qui sont réellement capables de parler pour eux-mêmes ont la capacité de pousser la Chambre à adopter ce projet de loi pendant les deux premières années de notre mandat. En toute honnêteté, je crois qu'il s'agit d'une question de priorités, mais avec ce projet de loi, nous oublions quelque peu notre tradition libérale.

M. Morrison: Agissez selon votre conscience.

M. Silye: Vous allez voter pour le projet de loi.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Non, je ne voterai pas contre le gouvernement sur un projet de loi qui pourrait entraîner sa chute.

M. Silye: Cela ne fera pas tomber le gouvernement.

M. Mills (Broadview-Greenwood): Oui, le gouvernement pourrait tomber. C'est une question de principe. Il s'agit d'une mesure financière et, comme pour tout ce qui a trait à la confiance en notre gouvernement, je préférerais plutôt démissionner de mon parti. Voilà ce que l'opposition ne comprend pas.

J'ai l'impression-et cette observation n'a rien de sectaire-que les députés d'en face se sentent un peu coupables parce que, en tant que membres de la loyale opposition de Sa Majesté, il est de leur devoir de contester de temps à autre nos décisions. Ils ont complètement raté le bateau et n'ont pas su susciter à la Chambre un vif débat sur un projet de loi qui, à mon avis, comble les désirs de l'élite.


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M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que je prends ici la parole à l'appui des motions proposées par le député de Gander-Grand Falls. Il m'a toujours impressionné. Il est une des rares personnes qui disent toujours ce qu'elles pensent. Il fait ses devoirs. Il analyse bien les projets de loi avant de se prononcer pour ou contre. Il y a des députés qui se conduisent rarement comme cela, il me semble.

De quoi retourne ce projet de loi? De quoi retournent ces motions? Je dois retourner à Kamloops en fin de semaine. Chaque fois que j'y retourne et que je vais prendre un café, rue principale, les gens me demandent ce qui se passe à Ottawa, ce que fait le gouvernement, de quel projet de loi la Chambre est saisie, de quoi s'occupe le gouvernement, quelles sont les priorités du Parlement, et ainsi de suite. Il est notamment de mon devoir de leur donner une idée aussi exacte que possible des priorités du gouvernement. Ce que je leur dirai sur les nombreux défis que doit relever notre magnifique pays les laissera perplexes.

(1300)

En cette veille ou presque d'un référendum important sur l'avenir de notre pays, de terribles problèmes économiques, sociaux, culturels et environnementaux se posent aux Canadiens de tout le pays. Je devrai dire à mes électeurs que la priorité du gouvernement à l'heure actuelle est de présenter un projet de loi qui n'avantage que les familles très riches dans leur déclaration de revenus.

Pas plus tard que l'autre jour, les journaux de tout le Canada ont publié le rapport d'une importante étude indiquant que 75 p. 100 des Canadiens préfèrent régler leurs opérations commerciales en argent comptant pour ne pas avoir à payer d'impôt ni de taxe de vente ou autre. Autrement dit, 75 p. 100 des Canadiens participent sciemment et ouvertement à l'économie parallèle. Pourquoi? Parce qu'ils sont des fraudeurs de l'impôt et qu'ils se livrent à des activités illégales et immorales? Non. Ils le font parce qu'ils n'ont plus confiance dans le régime fiscal de notre pays. Ils voient que toutes sortes de gens ne paient pas leur juste part.

Il y a de petits investisseurs et de petits entrepreneurs qui tirent le diable par la queue en travaillant de 60 à 70 heures par semaine, pendant que les allégements fiscaux de toutes sortes vont aux grandes sociétés. Ils survivent à peine pendant que les allégements fiscaux sont accordés à certaines entreprises et à certains Canadiens, mais pas aux petites entreprises ni aux Canadiens ordinaires.

Or, que prévoit cette disposition fiscale? Je mets au défi quiconque de soutenir ici, après que j'en aurai terminé, qu'elle ne vise pas à favoriser les familles les plus riches de notre pays.

J'aimerais que mon collègue, le député de Broadview-Greenwood, vote différemment, mais au moins il défend ce à quoi il croit. On ne saurait en dire autant de la plupart des députés qui participent à ce débat. Pourquoi demande-t-on maintenant aux contribuables canadiens de subventionner les familles qui veulent faire instruire leurs garçons, leurs filles et leurs proches aux États-Unis? C'est cela qui est prévu. C'est ce que dit le député de Gander-Grand Falls. C'est ce que prévoit la disposition.

Ceux qui envoient leurs fils, leurs filles et d'autres membres de leur famille étudier dans des universités américaines n'auront même plus à se préoccuper des restrictions visant ces établissements. Des crédits d'impôt sont en effet offerts pour tout don fait à n'importe quel établissement collégial ou universitaire américain.

Pourquoi les contribuables canadiens qui se débattent tant bien que mal et les propriétaires de petites entreprises de notre pays devraient-ils subventionner les universités et collèges américains? Pourquoi des hommes et des femmes qui travaillent d'arrache-pied devraient-ils subventionner les universités et collèges américains? Même la réputation de ces établissements n'a aucune importance en l'occurrence. Il pourrait s'agir de collèges qui décernent des doctorats ou des diplômes de maîtrise pour quelques dollars seulement. Tout collège ou université des États-Unis peut recevoir des dons de Canadiens qui bénéficieront d'un crédit d'impôt à cet égard.

Mes amis du Parti réformiste auraient-ils l'obligeance de m'expliquer comment ils peuvent appuyer une disposition aussi inéquitable? Cela va être onéreux pour nous. Cela va dorénavant coûter aux contribuables canadiens des centaines de millions de dollars par année. Si notre pays nageait en pleine prospérité et que nous avions beaucoup d'argent en trop, nous pourrions envisager l'adoption d'une telle mesure. Mais j'aimerais que mes amis du Parti réformiste, qui nous rappellent régulièrement leurs inquiétudes au sujet du déficit et de la dette de notre pays, m'expliquent pourquoi ils appuient un projet de loi qui va coûter au Trésor public des centaines de millions de dollars chaque année.

J'ai écouté attentivement le débat. Je n'ai pu le suivre lorsque le projet de loi a été renvoyé au Sénat parce qu'il s'est déroulé si rapidement. Franchement, les choses vont à un train d'enfer à la Chambre. C'est une réforme fiscale pour les riches, pour l'élite du pays. Est-ce c'est notre priorité? Oui. S'agit-il d'une réforme fiscale globale? Non. Tous les Canadiens, hommes, femmes et enfants, souhaitent-ils une réforme fiscale globale? Oui. Que faisons-nous? Que fait le gouvernement? Il présente une réforme fiscale par l'entremise du Sénat qui aura pour effet d'harmoniser certaines structures fiscales des sociétés avec les États-Unis et se propose d'adopter des dispositions qui sont tout simplement stupéfiantes.

Je voudrais bien que nos amis d'en face nous disent, avant la fin du débat, pourquoi nous devons subventionner les collèges américains. Pourquoi les contribuables canadiens subventionnent-ils les universités américaines? Pourquoi considérons-nous comme une priorité à l'heure actuelle d'accorder des allégements fiscaux s'élevant à des centaines de millions de dollars aux plus riches familles du Canada?

(1305)

Mon collègue de la circonscription de Broadview-Greenwood, que je respecte beaucoup, veut savoir si c'est vraiment une priorité en ce moment que d'adopter une loi qui profitera à des gens qui ont des investissements de plus de 600 000 $ aux États-Unis. Je suppose que ces gens-là sont à plaindre. Si vous avez des investissements


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de plus de 600 000 $, les impôts pourraient être plus avantageux pour vous, mais combien de Canadiens ont pareils investissements aux États-Unis? Beaucoup de gens ont peut-être une maison de campagne ou un appartement en Floride ou en Californie ou ailleurs. Combien de gens possédant des biens immobiliers d'une valeur de 600 000 $ aux États-Unis ou ayant des investissements d'une valeur de 600 000 $ aux États-Unis s'inquiètent de leur situation financière aujourd'hui?

Je pose la question à mes collègues du Parti libéral: est-ce là votre priorité? Est-ce que ces gens sont les Canadiens dont vous voulez défendre les intérêts aujourd'hui? Et que faites-vous des gens qui font la queue dans les banques d'alimentation cet après-midi? Que faites-vous des parents seuls qui ont de la difficulté à joindre les deux bouts? Que faites-vous des exploitants de petites entreprises qui ont de la difficulté à subvenir aux besoins de leurs familles? Pourquoi ne présentez-vous pas des mesures législatives pour aider ces gens?

Je veux parler du deuxième amendement qui essaie d'apporter au moins un soupçon de crédibilité à ce débat. Comme mon collègue de Terre-Neuve l'a mentionné, ce n'est pas parfait, mais mieux vaut peu que rien du tout. L'amendement propose que cet allégement fiscal ne s'applique pas après l'an 2000. Je trouve cela un peu étrange, mais, au moins, cela ne prolongera pas au-delà de l'an 2000 cette bouffonnerie fiscale qui ne bénéficiera qu'à une poignée de Canadiens très riches.

Lorsque je retournerai à Kamloops plus tard cette semaine, je devrai expliquer aux habitants de Kamloops, aux gens d'affaires qui en arrachent, aux gens qui arrivent à peine à subvenir à leurs besoins et, malheureusement, au nombre croissant de chômeurs, que cette mesure législative est une priorité de cette législature et du gouvernement actuel. Pas étonnant qu'ils n'en reviennent pas et qu'ils disent que le Parlement a perdu tout contact avec la réalité, qu'il a une vision du monde réel s'apparentant à celle de Walt Disney.

J'ai hâte d'entendre ce que les autres participants à ce débat auront à dire, d'entendre pourquoi cette mesure législative est une priorité.

En terminant, je veux remercier mon ami de Gander-Grand Falls. Merci d'avoir osé proposer deux amendements qui injecteraient un peu de bon sens dans cette mesure législative et qui démontrent que certains de vos collègues, une poignée, sont dégoûtés eux aussi par le projet de loi.

Le vice-président: Je demande à nouveau aux députés de s'adresser à la présidence. Je me sens isolé et j'ai l'impression d'être exclu du débat.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, je prends quelques instants pour clarifier ce que je perçois comme étant des idées fausses. Peut-être même le député a-t-il tenté de présenter aux Canadiens certaines choses qui n'y sont pas comme faisant partie du projet de loi. Je trouve cela extrêmement injuste.

Nous parlons ici d'un projet de loi sur un protocole signé le 17 mars 1995, et qui vise à modifier la Convention Canada-États-Unis en matière d'impôts. Le but du projet de loi est de mettre en oeuvre ce protocole. Cela n'a rien à voir avec la volonté de donner plus d'argent aux riches, comme le prétend le député de Kamloops.

Une des dispositions du projet de loi vise à éliminer les retenues actuelles. Il s'applique aux personnes qui possèdent des propriétés aux États-Unis, par exemple, une résidence d'hiver en Floride. Un électeur de ma circonscription a porté à mon attention le cas d'un couple âgé qui possédait une maison mobile en Floride. L'un des conjoints est décédé. Je ne dirais pas que ce couple était riche. Les riches ne possèdent pas une maison mobile de 10 000 $ lorsqu'ils ont 70 ans.

(1310)

Je connais les chiffres. Je sais très bien quels chiffres sont donnés dans le projet de loi. Les limites actuelles couvriraient à peine une maison mobile, ses meubles et une voiture.

Une voix: Ce n'est pas vrai.

M. Boudria: Mon vis-à-vis dit que ce n'est pas vrai. C'est son opinion. J'attends avec impatience l'intervention qu'il veut apparemment faire en même temps que d'autres députés. Peut-être est-il pressé et ne veut-il pas attendre encore 10 minutes. Peut-être n'a-t-il rien d'important à dire. Quoi qu'il en soit, nous verrons dans 10 minutes ce qu'il a à dire.

En fait, nous tentons de modifier une convention fiscale entre deux pays. Aux termes de la convention, les dons faits par des Canadiens à des collèges et universités américains donneront droit au crédit d'impôt pour dons de charité, comme l'a dit le député. Il a cependant omis l'autre moitié de la phrase. En effet, les dons faits à des établissements d'enseignement postsecondaire au Canada donneront également droit au crédit d'impôt pour dons de charité pour les fins du calcul de la dette fiscale du donateur américain. Autrement dit, les gens qui le voudront pourront continuer de faire des dons à des universités, ce que tous reconnaîtront, je l'espère, comme quelque chose de légitime et de valable, et les Canadiens pourront faire des dons à des universités américaines, et je suis sûr qu'il y aura des donateurs canadiens. Étant donné que les États-Unis comptent une population au moins dix fois supérieure à la nôtre, je dirais qu'il y a de bonnes chances pour que l'inverse soit également vrai.

Le député de Kamloops a omis de le dire. Pourquoi? Parce qu'il n'a pas cru que ce serait utile au débat partisan qu'il souhaitait voir à la Chambre. Nous devons nous rappeler l'objet du projet de loi et aller au-delà de la rhétorique du député de Kamloops.


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Je demanderais au député néo-démocrate, qui il y a un instant ne pouvait pas attendre dix minutes pour participer au débat, de reconnaître que des Américains pourront faire des dons à des universités canadiennes afin que nous puissions tous comprendre. Le député pourrait peut-être nous dire s'il s'oppose à cette mesure, au moment même où nous cherchons des fonds pour nos établissements d'enseignement postsecondaire au Canada.

Je crois que ces protocoles d'impôt sont avantageux pour les résidents des deux pays. Le protocole devra être ratifié par les deux pays pour pouvoir entrer en vigueur. Il y a des gens qui depuis des années ont des retenues d'impôt qu'ils n'ont pu récupérer parce que le processus de ratification n'est pas terminé.

Allons-y et adoptons ce projet de loi. Que ces gens récupèrent leur argent qui leur permettra de faire le type d'investissement dont j'ai parlé à la Chambre il y a un moment.

Voyons les autres changements apportés à ce traité: une réduction bilatérale des retenues d'impôt sur les dividendes, les intérêts, les redevances, qui reflète les taux à présent acceptés et en vigueur entre la plupart des pays industrialisés-est-ce si terrible?; l'exonération totale des retenues d'impôt en ce qui concerne les droits à acquitter pour l'utilisation de la technologie-j'espère que nous ne sommes pas contre ça; allégement en ce qui concerne l'application de l'impôt américain sur les successions aux résidents canadiens-dont j'ai parlé plutôt; et l'exonération de l'impôt américain en ce qui concerne les intérêts générés par les REER, les FERR et le Régime de pensions du Canada-sommes-nous aussi contre ça? J'espère que non. C'est dans le projet de loi. Ne devrions-nous pas l'appuyer? À mon avis, nous devrions le faire.

Le projet de loi donne le droit d'effectuer des retenues d'impôt sur les pensions versées aux résidents américains au titre du RCP et de la SV. Le NPD est-il aussi contre ça? J'attends l'intervention du député d'en face, l'intervention qu'il était si impatient de faire il y a 10 minutes.

(1315)

Ce projet de loi prévoit en outre une assistance mutuelle en matière de perception des impôts dûs. Ne sommes-nous pas en faveur de percevoir les impôts impayés? Cela fait aussi partie du protocole. C'est ce que nous essayons de faire aujourd'hui. Le NPD est-il aussi contre ça? Je suppose qu'il l'est, autrement il appuierait ce projet de loi. Je suis impatient de voir comment les néo-démocrates vont finalement voter. J'attends avec impatience le débat à l'étape de la troisième lecture.

Enfin, ce projet de loi donne aux parties le droit de faire appel à une commission d'arbitrage pour régler les différends au cas où le autorités fiscales des deux pays n'arriveraient pas à s'entendre. En d'autres termes, ce projet de loi prévoit même un mécanisme de règlement des différends. À mon avis, cela en fait une bonne mesure législative, quoi qu'on puisse en dire. Cela en fait une mesure législative que nous devrions appuyer et adopter. J'attends avec impatience de voir ce que va faire le NPD, surtout après les observations du député de Kamloops.

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, je prends la parole pour marquer mon opposition au projet de loi S-9 et pour appuyer les amendements proposés par mon collègue d'en face, le député de Gander-Grand Falls.

Depuis 1988, les Américains exigent que tous ceux qui ne résident pas en permanence sur leur territoire versent un impôt de 55 p. 100 sur les successions pour tous les biens américains qui excèdent 60 000 $. Toutefois, l'entente soumise à la Chambre, qui n'est pas encore ratifiée, aura pour effet d'exonérer complètement les Canadiens de l'impôt américain sur les successions, s'ils possèdent moins de 600 000 $ de biens aux États-Unis. Cela signifie également que les Canadiens possédant plus de 600 000 $ de biens paieront l'impôt américain et auront le droit d'en réclamer ensuite une partie au Canada sous forme de crédit pour impôt étranger. Une exemption américaine de 600 000 $, c'est une exemption de 900 000 $ en argent canadien. Ce projet de loi fiscal aide les Canadiens très riches.

J'ai quelques commentaires à faire sur ce projet de loi. Les députés libéraux d'en face, et plus précisément le député de Glengarry-Prescott-Russell, parlent de l'importance de cette mesure pour l'éducation. C'est très curieux que ces mêmes libéraux exercent des compressions radicales dans nos systèmes de soins de santé et d'éducation par le truchement du budget explosif que nous subissons actuellement au Canada.

Ce budget fait du tort à notre système d'éducation, mais nous donnons aux plus riches la possibilité de faire des dons au système d'éducation américain et nous allons les subventionner avec l'argent des contribuables. Mon collègue, le député de Kamloops, a clairement expliqué et bien mis en valeur ce qui choquait les Canadiens dans la manière qu'a notre gouvernement de réduire le financement de l'éducation au Canada tout en donnant la possibilité aux Canadiens riches d'obtenir un crédit d'impôt pour avoir fait un don au système d'éducation américain.

Nous voyons maintenant dans l'intérêt de qui le gouvernement travaille à la Chambre des communes. Ce n'est pas pour les Canadiens moyens, ni pour les Canadiens en chômage et qui ont besoin d'assurance-chômage ou d'aide pour les soins et l'éducation. Tout cela n'est pas dans l'intérêt du gouvernement fédéral libéral. Ses intérêts reflètent ceux des personnes qui le nourrissent, celles qui font des contributions financières substantielles au Parti libéral, les très riches, les grandes sociétés, les familles riches dont les intérêts sont en tête de liste dans le programme de la Chambre des communes, parce que ce sont elles qui possèdent le Parti libéral, auquel elles versent des millions de dollars chaque année.

De ce fait, leur programme est le programme du Canada. Leur programme est d'accumuler plus de richesses. C'est le programme des riches, des particuliers et des familles qui détiennent les grandes sociétés de ce pays. Ils ont acheté le Parti libéral. Le projet de loi que le Parti libéral présente à la Chambre des communes les remercie de leur générosité au cours des dernières années. Toutefois, c'est


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la population canadienne qui va faire les frais de cette générosité du Parti libéral à l'égard de ses amis aisés.

Je pense que ce projet de loi S-9 est une honte totale pour le Parti libéral. Il devrait être gêné de nous présenter un tel projet de loi. J'espère qu'il se sent aussi mal à l'aise que certains de ses députés, lesquels semblent se rendre compte que ce projet de loi n'est pas une bonne priorité pour le Canada. Ce n'est pas non plus une bonne priorité pour la Chambre des communes.

(1320)

Que dire des agriculteurs? Nous sommes en train de donner aux familles riches un dégrèvement rétroactif à 1988, mais qu'en est-il des agriculteurs des Prairies? Qu'est-ce que le gouvernement a fait pour les agriculteurs? Il a éliminé le tarif du Nid-de-Corbeau, une subvention au transport, ce qui revient à empêcher 25 p. 100 de la population agricole du Canada de gagner sa vie dans l'agriculture. Pourtant, le gouvernement va donner aux très riches des centaines de millions de dollars supplémentaires. C'est une réforme fiscale de la pire espèce.

Pourquoi pas un système fiscal honnête qui persuaderait les Canadiens qui gagnent leur vie que le fardeau fiscal est partagé par les plus riches? Le gouvernement libéral ne donne pas cette assurance aux Canadiens ordinaires, à ceux qui travaillent et à ceux qui se cherchent un emploi.

Les députés libéraux pratiquent à merveille l'art du double langage lorsqu'ils abordent cette question. Le député de Gander-Grand Falls a particulièrement bien expliqué les dangers de cette mesure législative et sa faible priorité auprès du gouvernement libéral. Le Parti libéral agit souvent ainsi; lorsqu'un projet de loi est embarrassant, lorsqu'il risque de nuire à la majorité des Canadiens et de favoriser quelques bien nantis, le parti fait dire à quelques députés: «Cette mesure n'est pas valable, mais nous n'allons pas voter contre et nous n'allons pas déclarer publiquement que le projet de loi est mauvais; cependant, nous allons affirmer très clairement que nous ne sommes pas satisfaits de ce qui se passe.»

Il est temps que les Canadiens prennent conscience du fait que les députés du Parti libéral du Canada tiennent un double discours. Ils le font efficacement. Je veux qu'ils comprennent bien que les Canadiens ne l'accepteront plus.

Ce projet de loi n'est pas le premier à favoriser les riches. Dans son budget de février dernier, le gouvernement a abordé la question des fiducies familiales. Les fiducies familiales coûtent des millions et des millions de dollars chaque année aux contribuables Canadiens à cause du manque à gagner en recettes fiscales, soit des centaines de millions au cours des quatre ou cinq dernières années. Une fiducie familiale permet aux familles riches de mettre leurs revenus et leurs actifs à l'abri de l'impôt de Revenu Canada. Par conséquent, les familles riches ne contribuent pas équitablement aux recettes du pays.

Lors du dernier budget, les libéraux ont affirmé qu'ils régleraient la situation des fiducies familiales afin d'obtenir plus d'argent pour la population canadienne. Quand? En 1995? Non. En 1966? Non. En 1967? Encore non, car il faut un peu de temps pour régler ce genre de chose. Ils le feront peut-être en 1999, un an ou deux après les prochaines élections fédérales. Voilà à quel moment le Parti libéral s'attaquera à cette question. Il aide les familles et les sociétés les plus riches du Canada.

Les néo-démocrates sont entièrement opposés à ce genre de priorité alors qu'il existe de si nombreux chômeurs, que le régime d'assurance-chômage est attaqué de toutes parts, que le financement de l'éducation est réduit et que les soins de santé sont constamment menacés. Les néo-démocrates continueront de défendre les Canadiens ordinaires dans les dossiers de ce genre, notamment en ce qui concerne l'équité fiscale. Nous demandons au gouvernement de revoir le projet de loi, de le modifier, de le renvoyer au Sénat et d'aviser le Sénat que nous n'allons pas l'adopter.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président, je voulais prendre la parole aujourd'hui pour dire que je trouve tout ce débat tristement futile. J'abonde dans le sens du député de Kamloops. Il est pourtant bien rare qu'un député réformiste soit d'accord avec un député néo-démocrate.

C'est de questions plus pertinentes que nous devrions débattre, par exemple, d'une réforme fiscale en profondeur comme l'ont proposé le député de Broadview-Greenwood et le député réformiste de Calgary-Centre. Nous devrions proposer des mesures législatives offrant une protection adéquate, en particulier aux personnes âgées dans le cadre du RPC. Nous devrions réformer de façon réaliste le régime de soins de santé et rendre aux provinces leurs pouvoirs et une plus grande marge de manoeuvre fiscale. Si je regarde dans le Feuilleton, je vois que, outre ce projet de loi S-9 tristement futile, les autres initiatives ministérielles à l'ordre du jour sont: le projet de loi C-90, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise et la Loi sur l'accise, inscrit au nom du ministre des Finances; le projet de loi C-106, Loi concernant la Commission du droit du Canada, inscrit au nom du ministre de la Justice; et le projet de loi C-105, Loi mettant en oeuvre des conventions en matière d'impôts sur le revenu, inscrit au nom du ministre des Finances. Nous devrions nous occuper de projets de loi plus sérieux que ceux-là.

(1325)

C'est une journée des plus inhabituelle, mais je tiens à souligner, et en cela je m'associe sans réserve au député de Kamloops, que ce projet de loi, comme tous ceux qui nous sont proposés par le gouvernement, est tristement futile. Pourquoi ne pas proposer à cette Chambre des mesures significatives pour le peuple canadien?

M. Wayne Easter (Malpèque, Lib.): Monsieur le Président, je veux parler du projet de loi S-9 et m'attarder sur certaines de ses dispositions. Je tiens, tout d'abord, à féliciter mon collègue, le député de Gander-Grand Falls, pour avoir soulevé cette question importante d'un certain nombre de façons.


15471

Ce projet de loi renferme de bonnes dispositions, mais il y a deux ou trois questions qui m'inquiètent énormément. Il est important d'examiner et de signaler certaines de ces modifications, afin de pouvoir faire la distinction entre les questions qui posent des problèmes et les dispositions constructives.

L'entente apporte un certain nombre de modifications importantes à la convention précédente, notamment des réductions bilatérales dans les taux de retenue d'impôt sur les dividendes, les intérêts et les redevances pour refléter les taux actuellement en vigueur entre la plupart des pays industrialisés. C'est un des sujets qui me préoccupe.

Une exemption d'impôt complète sur les paiements pour l'usage de la technologie est une bonne chose, selon moi.

On vient vraiment en aide aux résidents canadiens en ce qui concerne l'application de l'impôt sur les successions perçu par les États-Unis, en faisant passer l'exemption maximale de 60 000 $ à entre 600 000 $ et 1,2 million de dollars américains.

Il est bon également, selon moi, qu'on élargisse l'exemption à l'égard de l'impôt américain aux revenus tirés de REER, de FERR et de régimes de pension canadiens.

On pourra dorénavant prélever des retenues sur les paiements au titre du Régime de pensions du Canada et de la sécurité de la vieillesse versés aux résidents américains. Par opposition, la convention de 1980 donnait seulement au pays de résidence le pouvoir d'imposer ces paiements.

Il y a deux autres points que je voudrais mentionner, notamment les dispositions sur l'aide mutuelle dans la perception des impôts dus par un citoyen d'un pays qui réside dans l'autre, ce qui favorisera la prévention de la fraude fiscale et de l'évasion fiscale. Il y a, enfin, le recours possible à l'arbitrage pour régler les différends lorsque les ministères du Revenu des deux pays ne peuvent s'entendre.

Je tiens à dire que ce projet de loi renferme d'excellentes dispositions, mais également des mesures qui devraient nous préoccuper. Je voudrais attirer votre attention sur mon principal sujet de préoccupation. Je suis tout à fait d'accord avec le député de Gander-Grand Falls sur ce point. Le député a soulevé cette question dans le cadre de son rappel au Règlement. Il a parlé d'une lettre en date du 17 juillet qui vient du ministre des Finances et qui appuie ces points. Je voudrais vous en citer un passage:

J'ignore sur quoi vous vous basez pour affirmer que les coûts reliés à la réduction des taux des retenues d'impôt sur certains dividendes s'élèveront à 250 millions de dollars par année. Les seules prévisions qui ont été faites établissent ce chiffre à 125 millions de dollars, en 1995-1996, et à 145 millions de dollars, en 1996-1997. Il est important de noter que ces chiffres ne tiennent pas compte des effets d'investissements accrus ni de la croissance des recettes fiscales qu'on peut prévoir à la suite des mesures que nous prenons pour faire en sorte que nos taux de retenues soient comparables à ceux de nos principaux partenaires commerciaux.
Voilà le coeur de la question. Pour moi, ces affirmations laissent entendre que ces dispositions offrent aux nantis des avantages dont j'ai raison de m'inquiéter. Pour parler franchement, une des préoccupations que j'ai au sujet du Parlement, c'est que je crois fermement qu'il faut avoir un bon gouvernement et une bonne opposition pour que le Parlement et le gouvernement fonctionnent bien.

(1330)

L'attitude des partis d'opposition au sujet des questions m'étonne et me rend parfois extrêmement furieux. Au cours des premières étapes du débat, ils négligent de souligner certains aspects pour que nous puissions les examiner assez tôt et tenter de trouver des solutions.

Le Parti réformiste est tout disposé à critiquer quelques-uns des programmes sociaux dans la région de l'Atlantique et à décrier le programme d'assurance-chômage. Cependant, nous avons ici un cas où des avantages sont accordés aux riches, mais les réformistes ne soufflent mot et appuient fortement cette mesure. Ils n'ont même pas soulevé ces aspects pendant le débat, comme un bon parti d'opposition aurait dû le faire.

En tant que ministériel, je suis assuré qu'on trouvera dans des mesures législatives à venir des moyens de faire contrepoids pour retourner une partie des recettes dans le régime fiscal, par le biais des REER, de l'impôt des sociétés ou d'une autre forme d'impôt. Comme le whip du gouvernement l'a dit dans son discours, il y a certainement des secteurs où nous pourrons récolter des recettes en raison de ce projet de loi, étant donné ses répercussions pour les résidents des États-Unis.

Nous devrons trouver à l'avenir un moyen de compenser les pertes de recettes fiscales découlant du renoncement à l'impôt sur les dividendes.

J'espère que le gouvernement examinera cette possibilité et je l'encourage à le faire.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Le vote porte sur la motion no 1. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Conformément au paragraphe 76(8), le vote par appel nominal sur la motion est reporté. Le vote suivant porte sur la motion no 2.

[Français]

Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.


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Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Conformément à l'article 76 du Règlement, le vote par appel nominal sur la motion dont la Chambre est maintenant saisie est différé.

[Traduction]

La Chambre passe maintenant au vote par appel nominal différé à l'étape du rapport du projet de loi dont la Chambre est maintenant saisie. Le premier vote portera sur la motion no 1.

Convoquez les députés.

(1335)

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

Le vice-président: Il a été proposé que le vote soit reporté à 17 heures aujourd'hui.

Des voix: D'accord.

* * *

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-90, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise et la Loi sur l'accise, dont un comité a fait rapport sans propositions d'amendement.

L'hon. Jon Gerrard (au nom du ministre des Finances) propose que le projet de loi soit agréé.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

Le vice-président: Je déclare la motion adoptée avec dissidence.

(La motion est adoptée.)

[Français]

Le vice-président: Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? Avec la permission de la Chambre, maintenant?

Des voix: D'accord.

L'hon. Jon Gerrard (au nom du ministre des Finances): propose que le projet de loi C-90 soit maintenant lu une troisième fois et adopté.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-90 renferme les dispositions législatives qui permettront la mise en oeuvre d'un certain nombre de modifications de la taxe d'accise annoncées plus tôt cette année.

La plupart de ces propositions sont liées aux modifications annoncées dans le Budget du 27 février 1995, y compris les modifications de la taxe de transport aérien, de la taxe d'accise sur l'essence, les exigences de marquage des produits du tabac destinés à la vente à l'Île-du-Prince-Édouard et les dispositions de saisie et d'avis de saisie relativement aux infractions à la Loi sur l'accise.

D'autres propositions concernent les modifications des taux de la taxe d'accise sur les produits du tabac destinés à la vente au Québec, en Ontario et à l'Île-du-Prince-Édouard. Ces modifications ont été annoncées en février et mars en même temps que les hausses de taxes provinciales sur le tabac.

[Traduction]

Je traiterai d'abord des principales mesures budgétaires que prévoit le projet de loi C-90. Premièrement, les changements proposés à la taxe sur le transport aérien permettront au gouvernement de récupérer une plus grande partie des coûts des services de transport aérien et des installations utilisées par les voyageurs.

Les modifications proposées à la Loi sur la taxe d'accise font passer de 50 $ à 55 $ la taxe maximale sur le transport aérien intérieur et transfrontalier à tarif supérieur et la taxe sur le transport aérien international acheté au Canada.

En outre, la taxe maximale sur le transport aérien transfrontalier qui est assujetti à la taxe américaine de 10 p. 100 sur le transport aérien et la taxe sur le transport aérien international acheté à l'étranger sont augmentées de 25 $ à 27,50 $.

Ces changements à la taxe sur le transport aérien, qui sont entrés en vigueur le 1er mai 1995, rapporteront des recettes additionnelles de 27 millions de dollars en 1995-1996 et de 33 millions de dollars en 1996-1997.

Deuxièmement, le projet de loi C-90 propose que le taux de la taxe d'accise sur l'essence soit haussé de 1,5 cents le litre à compter du 28 février 1995.

Dans le cadre d'un budget qui était presque totalement axé sur la réduction des dépenses gouvernementales et qui prévoyait des réductions des dépenses sept fois plus élevées que les augmentations d'impôt, ce qui a été, je le sais, chaleureusement accueilli par les députés réformistes, cette mesure est nécessaire pour générer 500 millions de dollars de plus par exercice afin que le gouvernement puisse atteindre les objectifs de réduction du déficit essentiels à une économie vigoureuse et croissante. Le ministre des Finances a répété à maintes reprises que le gouvernement se faisait un devoir d'atteindre les objectifs qu'il s'est fixés en matière de réduction du déficit et il ne manquera certes pas de réitérer cet engagement dans son prochain budget.

(1340)

Troisièmement, outre les changements concernant les taux de la taxe de transport aérien et de la taxe sur l'essence, le projet de loi C-90 promulgue les modifications apportées aux dispositions sur le marquage des produits de tabac destinés à la vente à l'Île-du-Prince--


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Édouard. Celles-ci visent à éliminer progressivement la vente de produits du tabac non marqués ou non ciblés dans cette province et à y autoriser la vente de produits estampillés pour la Nouvelle-Écosse.

Ce changement est apporté au barème de marquage des produits de tabac à la demande des deux provinces et il permettra de desservir le marché de l'Île-du-Prince-Édouard avec une efficacité accrue.

La dernière mesure budgétaire que l'on trouve dans le projet de loi C-90 se rapporte aux dispositions sur la saisie et les avis de saisie relativement aux infractions à la Loi sur l'accise.

Les modifications proposées viendront aplanir certaines difficulté d'application en permettant aux préposés d'exercer de façon discrétionnaire le pouvoir de saisir les véhicules, même s'ils sont toujours expressément tenus de faire leur possible pour qu'un avis de saisie soit envoyé aux tiers dont on connaît l'identité.

De plus, le projet de loi met en oeuvre d'importants changements apportés aux taux de la taxe d'accise sur les produits du tabac destinés à la vente au Québec, en Ontario et à l'Île-du-Prince-Édouard.

Comme tous les députés le savent, de légères augmentations de la taxe d'accise fédérale avaient été annoncées plus tôt dans le courant de l'année, en même temps que l'augmentation de la taxe provinciale sur le tabac dans ces trois provinces.

Il a été décidé de majorer ces taxes en raison du succès qu'a remporté jusqu'ici le plan national de lutte contre la contrebande, qui a freiné considérablement les activités de contrebande de tabac, de sorte que le marché intérieur appartient de nouveau aux grossistes et détaillants canadiens autorisés.

Au Québec et en Ontario, les taux de la taxe d'accise fédérale augmenteront de 60 cents la cartouche de 200 cigarettes, tandis qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, la taxe d'accise augmentera de 1 $ par cartouche de 200 cigarettes et de 32 cents le lot de 200 bâtonnets.

L'augmentation de la taxe d'accise sur les cigarettes destinées à la vente au Québec et en Ontario est en vigueur depuis le 18 février 1995, tandis que celle applicable aux cigarettes et aux bâtonnets de tabac destinés à la vente à l'Île-du-Prince-Édouard est entrée en vigueur le 1er avril 1995. Ces changements rapporteront au gouvernement fédéral des recettes supplémentaires de 65 millions de dollars par année.

En terminant, je veux souligner l'importance des dispositions du projet de loi C-90, nonobstant les remarques désinvoltes du député réformiste qui a dit plus tôt que les mesures prévues au menu législatif étaient sans importance.

Les changements proposés aux taux de la taxe sur le transport aérien et de la taxe d'accise sur l'essence représentent un volet important de l'engagement pris par le gouvernement d'insister davantage sur le recouvrement des coûts et la réduction du déficit.

Les amendements au système de marquage des produits du tabac assureront une efficience accrue dans la façon de desservir le marché de l'Île-du-Prince-Édouard, tandis que les amendements apportés aux dispositions de la Loi sur la taxe d'accise qui ont trait aux saisies et aux avis pertinents amélioreront l'application des mesures d'exécution.

Enfin, les changements aux taux de la taxe d'accise sur les produits du tabac destinés à être vendus au Québec, en Ontario et à l'Île-du-Prince-Édouard sont un premier pas important vers le rétablissement à long terme de taux uniformes de taxe d'accise fédérale pour les produits du tabac vendus n'importe où au Canada.

[Français]

J'exhorte mes collègues à adopter ce projet de loi sans délai.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi C-90 en arrive maintenant à sa troisième lecture. Nous avons déjà eu la chance d'exprimer notre position sur ce projet de loi en tant qu'opposition officielle à l'étape de la deuxième lecture et lors de l'étude en comité, particulièrement au Comité permanent des finances.

Évidemment, un certain nombre de mesures peuvent être positives, mais il y en a une qui nous agace particulièrement et qui est suffisamment forte pour que nous votions contre ce projet de loi. Il s'agit de celle qui vise à augmenter la taxation sur l'essence de 1,5c. le litre.

Je n'élaborerai pas très longtemps. Je veux simplement rappeler et situer un peu ce débat par rapport à celui qui a eu lieu lorsqu'on a discuté de la taxation sur les cigarettes.

(1345)

D'ailleurs, il y a des mesures dans le projet de loi actuel qui visent à un rééquilibrage progressif à la hausse de la taxation sur les produits du tabac. Évidemment, tous étaient conscients, lors de la diminution draconienne des taxes sur les produits du tabac, que cela visait à déstabiliser les réseaux de contrebande. Cependant, tous sont d'accord pour dire que le prix étant maintenant très accessible, cela pourrait avoir à long terme des effets catastrophiques sur la demande de ces produits. Plus le prix est bas, plus il est facile de vendre un produit.

Personne ne s'oppose à ce qu'il y ait un rééquilibrage. Cependant on ne doit pas tomber dans le panneau de le faire trop rapidement et de faire en sorte de permettre à ces réseaux de se restructurer et de reprendre le contrôle.

Cela dit, ça n'enlève pas le rôle et le mandat que le gouvernement a de faire surveiller, parce qu'il y a d'autres mesures que la taxation, pour faire en sorte d'arrêter les gens qui font de la contrebande de différents types de produits. Cela existe encore. Cela existe dans différents types de produits. Les mesures ne sont pas si rigoureuses à ce niveau-là. Il y a beaucoup d'efforts à faire pour améliorer la lutte à différents réseaux de contrebande.

En ce qui concerne la taxation sur l'essence, tout le monde sait que cela devient extrêmement irritant, cela devient facile pour le gouvernement, lorsqu'on a besoin de revenus rapides, de se servir de la taxation sur l'essence parce que ce sont des revenus instantanés; il s'agit de 500 millions de dollars que le ministre des Finances est allé chercher dans les poches du contribuable rapidement.

C'est difficile pour le consommateur de le voir, parce que lorsque le prix de l'essence augmente à la pompe, le consommateur ne sait pas trop si c'est à cause d'une hausse du prix du pétrole, si c'est à


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cause d'une hausse du profit fait par le détaillant, le fabricant ou autre, ou si c'est simplement que le gouvernement vient d'augmenter les taxes.

Contrairement à d'autres types de produits, lorsqu'on achète de l'essence, ce n'est pas écrit quelle place a la taxe dans le prix qu'on paie pour le litre d'essence. Heureusement, parce que les contribuables seraient encore plus en colère contre les différents gouvernements; ils se rappelleraient fréquemment de toutes les taxes qu'on va chercher sur les produits de l'essence.

Dans ce cas-là comme dans celui des produits du tabac, lorsqu'on tombe dans l'exagération, quand on vient à faire en sorte que le niveau de taxation dépasse un seuil de tolérance, un seuil d'acceptation, les contribuables décident de se retourner, se sentent légitimes de le faire, de se retourner vers les marchés de la contrebande. On peut déplorer cela, mais les contribuables ont le sentiment que c'est un geste légitime qu'ils font.

Il ne faut pas faire en sorte d'accentuer cette tendance, parce qu'on sait tous les problèmes qu'on a avec l'économie souterraine, l'économie au noir. À un moment donné, la taxation sur l'essence a atteint les limites de l'acceptable. On pense que toute hausse faite dans ce domaine ne va faire que contribuer à pousser les consommateurs vers une économie souterraine qui est très contreproductive pour tout le monde, autant pour les contribuables qui l'utilisent, parce qu'on se pénalise nous-mêmes. Si on a recours à l'économie au noir, sans s'en rendre compte, mais à long terme, cela a des effets sur tout le monde, y compris les gens qui pratiquent ce genre d'action. Il faut à un moment donné en tirer des leçons.

On ne semble pas avoir tiré de leçon de ce qui est arrivé dans le cas des produits du tabac. Dans un certain nombre de domaines, il existe encore un niveau très élevé de taxation sur ce type de produits.

Ce n'est pas anormal cependant que la taxation sur l'essence soit plus élevée que sur d'autres produits, parce qu'il y a des effets sur l'environnement, tout le monde le sait, et il faut faire en sorte que lorsqu'il y a, ce qu'on appelle en économie, des externalités causées par la consommation d'un bien, qu'on puisse faire payer par les utilisateurs le coût de ces externalités. Cependant, à un moment donné on n'est plus très sûr si on a dépassé ou pas ce seuil-là.

Essentiellement, notre désaccord est très grand sur cette mesure. On ne pense pas que c'était la voie et la solution pour le ministre des Finances d'augmenter cette taxation de 1,5 c. le litre encore, comme il l'a fait dans son dernier budget, et que c'est une mesure qui va grandement contribuer au redressement de notre économie. Tout le monde sait qu'il y a beaucoup de ménage à faire du côté des dépenses. Si le ministre des Finances manque d'imagination, on peut lui suggérer de se présenter rapidement au Comité des finances et on en discutera avec lui, ce qu'il a refusé de faire parce qu'il a peur de venir présenter son bilan financier avant le référendum. On le comprend.

S'il veut en débattre plus à fond, on l'invite, ce sera une occasion pour nous de le faire et on soulignera qu'il y a peut-être d'autres endroits où il devrait regarder quand vient le temps d'équilibrer ses dépenses que de constamment aller chercher davantage de revenus dans les poches des contribuables.

(1350)

Donc, essentiellement, nous allons nous opposer à l'adoption du projet de loi C-90 en troisième lecture et, comme je le dis, essentiellement pour cette mesure, parce qu'il y a d'autres mesures dont je n'ai pas parlé, mais dont on a pu parler en deuxième lecture ou en comité avec lesquelles nous sommes d'accord. Mais, sur ce point, nous sommes en désaccord majeur.

[Traduction]

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir pour faire valoir mon opposition au projet de loi C-90. C'est un projet de loi d'imposition et de taxation typique des libéraux. On remarque d'ailleurs à quel point les termes «libéraux» et «augmentation des impôts» vont bien ensemble. L'association coule de source.

La mesure dont nous sommes saisis a pour objet de modifier la Loi sur la taxe d'accise et la Loi sur l'accise, afin de permettre aux libéraux d'imposer la hausse de taxes prévue dans leur budget de février dernier. Monsieur le Président, je suis certain que vous conviendrez, avec tous les travailleurs, que nous n'avons pas besoin d'autres impôts en ce moment. Les Canadiens comptent probablement parmi les gens les plus taxés au monde et le gouvernement en place est décidé à ce que cette situation ne change guère.

Les impôts finissent par drainer notre économie. Les Canadiens en sont très conscients et s'inquiètent beaucoup de l'effet dévastateur que les taux d'imposition élevés exercent sur notre économie. Il y a deux facteurs qui subissent les effets nuisibles de l'imposition et qui représentent 90 p. 100 de notre capacité de nous doter d'une économie vigoureuse: la confiance des investisseurs et celle des consommateurs.

Les taux d'imposition élevés ont causé un climat d'incertitude chez les investisseurs, ceux qui créent des activités commerciales au Canada et voient à leur expansion, ceux qui créent des emplois et embauchent des Canadiens pour exploiter leurs usines et diriger leurs activités. À cause des taux d'imposition élevés, il n'y a tout simplement plus de certitude et, l'avenir étant incertain pour ces investisseurs, rien ne les incite à augmenter leurs investissements.

Le revenu disponible du travailleur moyen au Canada se situe probablement au taux le plus bas de l'histoire. Il n'y a aucune certitude que le revenu disponible ne continuera pas à baisser. Les consommateurs réduisent donc leurs dépenses, ce qui nuit à l'économie.

Les libéraux ne réagissent pas en dressant un plan pour freiner leurs dépenses, pour réduire leur déficit actif, pour accorder un allégement fiscal aux Canadiens, ce qui ferait plus que n'importe quelle autre mesure pour revigorer notre économie. Non. Le Parti libéral se refuse à ces solutions qui viennent spontanément. Il entend plutôt appliquer les hausses fiscales qu'il a annoncées dans

15475

son budget de février et nous demande maintenant de l'autoriser à le faire.

Avant les élections de 1993, le Parti réformiste avait prédit que, si les libéraux étaient élus et formaient le gouvernement, avec leurs calculs, les prévisions qu'ils ont présentées dans leur livre rouge concernant les finances, en une seule législature, cette 35e législature, ils augmenteraient la dette nationale de 100 milliards de dollars et feraient grimper les intérêts annuels sur cette dette de quelque 10 milliards de dollars. Nous avions bien dit 100 milliards et 10 milliards de dollars. Le Parti libéral est en plein dans le mille.

(1355)

À la fin de la 35e législature, notre dette nationale se sera accrue de 100 milliards de dollars, nos paiements d'intérêts sur la dette auront atteint 50 à 52 milliards de dollars environ, et tout cela parce que le gouvernement libéral n'a pas adopté ce que l'on pourrait considérer comme une solution inspirée par le bon sens à la crise financière au pays, c'est-à-dire réduire les taxes et impôts et réduire son déficit budgétaire. Les libéraux ont préféré augmenter les taxes. Le projet de loi C-90 les autorise par exemple à mettre en oeuvre une hausse de la taxe sur l'essence de 1,5c. le litre, ce qui aura pour effet d'alourdir de un demi-milliard de dollars le fardeau fiscal de la classe moyenne à elle seule.

Le gouvernement parle d'équité fiscale. Or, dans son dernier budget, il a augmenté les taxes de plus de un milliard de dollars. Si l'on examine les hausses de taxes imposées dans les deux derniers budgets, on constate que les libéraux les ont augmentées d'environ 2,5 milliards de dollars, à quoi s'ajoutent 500 millions de dollars en droits d'utilisation ou en taxes cachées.

Les Canadiens devraient pouvoir se réjouir de ce que ces taxes accrues aient servi à des fins utiles. Je voudrais donner quelques exemples de fins utiles aux yeux des libéraux. Le ministère américain de l'énergie-il s'agit d'une subvention insignifiante, mais on compte environ 5 000 de ces subventions, si je comprends bien-a reçu 35 000 $ du gouvernement canadien; les Métallurgistes unis d'Amérique ont reçu une subvention de 116 000 $ des contribuables canadiens, grâce au gouvernement libéral; le Feminist Literacy Workers Network a obtenu 57 000 $ des contribuables canadiens, grâce au gouvernement libéral; et en voici une bonne: la Fondation pour les arts dans les prisons a reçu 51 000 $ des contribuables canadiens, gracieuseté du Parti libéral. Ce ne sont là que quelques-unes des 5 000 ou 6 000 subventions qui sont ainsi distribuées.

Cet argent-là ne tombe pas miraculeusement du ciel. Il ne pousse pas dans les arbres, comme certains libéraux voudraient nous le faire croire. Cet argent vient des poches des Canadiens qui travaillent d'arrache-pied et qui comptent parmi les contribuables les plus lourdement imposés dans le monde.

On dit que le travailleur canadien moyen de la classe moyenne paie environ 63 p. 100 de son revenu brut en impôts et taxes de toutes sortes. Dans un pays aussi riche que le Canada, avec le potentiel et les possibilités que possède le Canada, il est absolument obscène que les travailleurs canadiens voient leur revenu brut aussi lourdement grevé de taxes et d'impôts.

Le Président: Le député aura bien sûr la parole, s'il le désire, après la période des questions.

Comme il est 14 heures, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés. La parole est au député de Dartmouth.

______________________________________________


15475

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE PRIX DU GOUVERNEUR GÉNÉRAL

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Monsieur le Président, c'est pour moi un grand plaisir de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour saluer la contribution d'une Canadienne exceptionnelle à l'évolution de notre société. Il s'agit de Carolyn Thomas, de ma circonscription.

Hier, Mme Thomas, de East Preston, a reçu pour 1995 le Prix du gouverneur général en commémoration de l'affaire «personne». Il s'agit d'un honneur très particulier à mes yeux, car je connais Mme Thomas et je travaille avec elle et son mari depuis mon élection à la Chambre, en 1988. Pendant toute cette période, j'ai observé chez elle un dévouement et une détermination presque sans pareils dans ma collectivité. Elle ne se préoccupe pas uniquement de la cause des femmes, mais aussi du mieux-être de sa communauté de Preston, la plus ancienne communauté noire de souche canadienne, et de l'ensemble de la société canadienne.

Outre son travail de toute une vie pour assurer l'égalité aux femmes, Mme Thomas a été une visionnaire dans sa lutte pour les droits de la personne et l'amélioration des relations interraciales. Elle a fondé la Commission des droits de la personne de la Nouvelle-Écosse et poursuit son travail avec cet organisme depuis plus de 23 ans.

J'invite mes collègues à la Chambre et les habitants de la belle ville de Dartmouth et. . .

* * *

[Français]

LA PAUVRETÉ

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, la journée internationale pour l'élimination de la pauvreté est l'occasion pour tous les Québécois et les Québécoises de prendre un moment pour réfléchir à la situation dramatique qui afflige plusieurs de nos concitoyens.

Près d'un million et demi de Québécois vivent sous le seuil de la pauvreté. Nous vivons dans la province qui est victime du taux de pauvreté le plus élevé au Canada et de loin. Malgré tous les efforts du gouvernement du Québec, un enfant québécois sur cinq fait partie d'une famille pauvre. Les aînés québécois sont toujours beaucoup plus pauvres que partout ailleurs au Canada. Nous sommes aux prises avec un problème criant qui nous interpelle de façon déchirante.


15476

Le Québec doit devenir souverain pour que son gouvernement dispose de tous les pouvoirs, afin de faire une lutte efficace à la pauvreté. C'est pour cela que les Québécois et les Québécoises voteront oui.

* * *

[Traduction]

SPORTS ILLUSTRATED

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, cette semaine, pour la première fois, des équipes canadiennes de la NBA ont joué leurs premières parties pour le plus grand plaisir de leurs partisans de tout le Canada. Quel paradoxe! Au moment où nous accueillons la NBA au Canada, nous fermons la porte à la plus grande revue de sports de l'Amérique du Nord, Sports Illustrated.

Essentiellement, le gouvernement a dit que Sports Illustrated ne pouvait pas publier une édition dédoublée au Canada parce que cette publication fait preuve d'une trop grande efficacité tant au niveau de la production que pour ce qui est d'attirer des lecteurs et, donc, de la publicité. Il faut à tout prix éviter ça. Il ne faudrait surtout pas qu'on aille croire que c'est bien d'être efficace et de réussir.

En interdisant Sports Illustrated au Canada, le gouvernement nous fait reculer de 200 ans. Alors que d'autres entreprises canadiennes du domaine des communications affrontent directement leurs concurrents étrangers, le secteur canadien des périodiques a adopté le même point de vue que la Bulgarie communiste.

Malheureusement, ce sont les publications canadiennes qui ont le plus à perdre. Si les publicitaires ne peuvent rejoindre leur marché par les revues, ils le feront par d'autres médias qui ne respectent pas la réglementation imposée par des responsables sentimentaux qui ont la nostalgie de l'époque d'avant le télégraphe.

* * *

LES SOINS DE SANTÉ

M. Bill Blaikie (Winnipeg Transcona, NPD): Monsieur le Président, le 2 avril 1984, au cours du débat de troisième lecture de la Loi canadienne sur la santé, je me réjouissais, en tant que porte-parole du NPD en matière de santé, de la tendance à supprimer le recours à la surfacturation et au ticket modérateur. J'ai aussi demandé au gouvernement libéral de l'époque, le tout premier gouvernement fédéral à avoir unilatéralement réduit les transferts fédéraux, de «renégocier avec les provinces leur partage du financement afin que nous ayons une véritable association financière en ce qui concerne l'assurance-maladie».

En proposant le nouveau transfert canadien pour la santé et les programmes sociaux et en réduisant ainsi les dépenses de 7 milliards de dollars, le gouvernement libéral impose une autre réduction unilatérale et mine davantage l'association en ce qui concerne l'assurance-maladie.

Régler le cas des cliniques privées, c'est une chose, mais lorsque le gouvernement décide de laisser le régime d'assurance-maladie mourir de faim, c'est un peu comme s'il décidait de rejeter le moucheron et d'avaler le chameau.

Dans le cas de l'assurance-maladie, les libéraux s'adonnent à une forme d'euthanasie passive qui satisfait les tenants de la droite qui préconisent plutôt l'aide au suicide et voudraient participer activement à la destruction complète du régime d'assurance-maladie.

* * *

MAY COHEN

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour saluer le docteur May Cohen, de Burlington, en Ontario, une ardente partisane de la santé des femmes et de l'égalité des sexes dans la profession médicale. Hier, cette dame a reçu le Prix du gouverneur général de 1995 en commémoration de l'affaire «personne».

À la fois médecin et chercheur ainsi qu'éducatrice et militante, May Cohen a souvent remis en question la façon dont le corps médical traite les problèmes de santé des femmes. En tant que bénévole et vice-doyenne des services de santé de la faculté des sciences de la santé de la McMaster University, elle s'est attaquée à une série impressionnante de questions, y compris l'égalité des sexes, le harcèlement sexuel, les agressions sexuelles que les médecins commettent contre leurs patientes, le rôle des femmes dans la profession médicale et l'incidence de la vie quotidienne sur la santé des femmes.

Je demande à mes collègues de se joindre à moi pour souligner les réalisations du docteur May Cohen et son extraordinaire dévouement à la santé des femmes. Ses parents et ses amis ont raison d'être fiers d'elle et moi de même.

* * *

ALICE E. TYLER

M. John Loney (Edmonton-Nord, Lib.): Monsieur le Président, à la veille de l'anniversaire de l'affaire «personne», j'ai l'honneur de rendre hommage à Alice E. Tyler, d'Edmonton, en Alberta, province où l'affaire «personne» a débuté.

Alice Tyler a fait des cinq célèbres championnes de l'affaire «personne» et de la promotion de leurs réalisations une partie importante de son oeuvre. Pour ses efforts, Alice Tyler est au nombre des récipiendaires pour 1995 du Prix du gouverneur général en commémoration de l'affaire «personne».

On peut voir les portraits des cinq célèbres protagonistes de l'affaire «personne» au Parlement albertain, au Palais de justice d'Edmonton et à la Bibliothèque d'Edmonton. Ils ont aussi été exposés ailleurs au Canada et à l'étranger.

(1405)

Elle a elle-même toujours été absolument convaincue des capacités des femmes. Durant ses 24 années de carrière en tant que directrice des arts dans une école secondaire, elle n'a cessé d'encourager les jeunes femmes à réaliser leur plein potentiel, en aidant beaucoup d'entre elles à choisir une carrière sérieuse.


15477

Pour les efforts exceptionnels qu'elle a déployés pour préserver l'héritage de l'affaire «personne», Alice E. Tyler est une des récipiendaires les plus méritantes du Prix du gouverneur général pour 1995.

* * *

RUTH FLOWERS

M. Fred Mifflin (Bonavista-Trinity-Conception, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à signaler la contribution particulière de Ruth Flowers, de Makkovik, au Labrador, une récipiendaire pour 1995 du Prix du gouverneur général en commémoration de l'affaire «personne».

Voix des femmes de sa collectivité, Ruth Flowers a cherché à protéger les femmes victimes de violence, à intéresser les femmes au développement économique de leur collectivité, et à préserver et promouvoir la culture traditionnelle des femmes inuit.

Ardente championne des droits des femmes, Ruth Flowers a été l'inspiratrice et la première présidente des Inuit Women of the Torngats. C'est sous sa direction que cette organisation a ouvert le premier refuge pour femmes battues de la côte nord du Labrador.

Pour son dévouement et les efforts désintéressés qu'elle a déployés pour le compte des femmes de la côte nord du Labrador, le gouvernement fédéral rend aujourd'hui hommage à Ruth Flowers en lui remettant le Prix du gouverneur général en commémoration de l'affaire «personne» pour 1995. Je demande à tous mes collègues de lui transmettre avec moi nos plus sincères félicitations.

* * *

[Français]

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, en provoquant la fermeture du Centre francophone de santé et de services communautaires du sud de l'Ontario, le gouvernement Harris vient de montrer ses vraies couleurs quant à ses intentions à l'égard des francophones de l'Ontario.

Pour les Franco-Ontariens, le message lancé est clair: si vous voulez vraiment obtenir des services en français, déménagez au Québec. Ce geste qui en dit long confirme malheureusement que la présence du Québec au sein du Canada n'empêche en rien des décisions qui bafouent les droits fondamentaux des francophones hors Québec.

Où est passé le député de Glengarry-Prescott-Russell, lui qui se dit le défenseur des droits des francophones? Pourquoi se cache-t-il lorsqu'il est temps d'agir? Il ne fait plus de doute, l'avenir de la francophonie en Amérique passe par la souveraineté du Québec.

[Traduction]

CLAUDE BENNETT

M. Bill Gilmour (Comox-Alberni, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre a récemment déclaré à la Chambre:

Tous les citoyens peuvent communiquer avec des ministères pour obtenir des renseignements. Cela fait partie de l'ouverture de notre gouvernement, qui est prêt à donner le plus de renseignements possible.
Pourquoi alors le gouvernement refuse-t-il d'accéder aux demandes d'information concernant l'indemnité de départ versée à Claude Bennett, l'ex-président de la SCHL? M. Bennett a accepté de se retirer en août dernier, après que le Cabinet eut, dans les coulisses, bonifié son indemnité de départ.

Il est temps que le gouvernement fasse la lumière sur ses ententes conclues dans les coulisses. Ou bien il fait preuve d'ouverture, comme le dit le premier ministre, ou bien la politique en la matière n'est pas transparente, comme l'a récemment mentionné le secrétaire parlementaire.

Bien que l'indemnité de départ de M. Bennett ait été payée à même les deniers publics, le gouvernement rejette les demandes visant à révéler les détails de l'entente. Pour l'ouverture du gouvernement, on repassera!

* * *

SHEILA KINGHAM

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est, Lib.): Monsieur le Président, au nom du gouvernement du Canada, j'ai l'honneur de rendre hommage à Sheila Kingham, de Victoria, en Colombie-Britannique, pour les nombreuses années qu'elle a consacrées à la cause des femmes en milieu rural. Aujourd'hui, Mme Kingham a reçu le Prix du gouverneur général en commémoration de l'affaire «personne».

L'oeuvre de Mme Kingham est imposante. Oratrice éloquente, elle a fait une multitude d'allocutions et de communications sur des sujets allant de la loi sur la protection des victimes de viol à la santé des femmes. Elle a donné des encouragements: cette grande partisane de l'action collective a aidé des femmes à s'organiser en lobby pour promouvoir l'égalité des sexes dans les domaines politique, social et économique.

[Français]

Mme Kingham a créé le poste de coordonnatrice aux questions rurales pour le Comité manitobain d'action sur la condition féminine et a collaboré à la création de la Coalition en faveur de l'égalité des droits constitutionnels pour le Manitoba de l'ouest, servant de caisse de résonance aux femmes en milieu rural en ce qui concerne la révision constitutionnelle.

J'encourage tous les députés à applaudir le choix de Mme Kingham comme récipiendaire du Prix du gouverneur général.


15478

MARTHE ASSELIN VAILLANCOURT

Mme Pierrette Ringuette-Maltais (Madawaska-Victoria, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à rendre hommage à Marthe Asselin Vaillancourt, de Jonquière, au Québec, l'une des récipiendaires du Prix du gouverneur général de 1995 en commémoration de l'affaire «personne».

Éducatrice, chargée de recherche et militante de base de longue date, Marthe Asselin Vaillancourt n'a jamais manqué d'améliorer la condition féminine.

(1410)

Au fil des ans, elle a donné diverses conférences sur le harcèlement sexuel, la pornographie, l'égalité devant l'emploi et la violence conjugale.

Au sein de sa collectivité, elle a été l'âme et l'artisane de l'établissement d'un centre d'accueil pour femmes, et de l'élaboration, de concert avec la police provinciale du Québec, d'un projet pilote pour la lutte contre la violence faite aux femmes. De cette dernière initiative est né le Centre d'aide aux victimes d'actes criminels de Chicoutimi, dont elle est la directrice à l'heure actuelle.

Elle a été coprésidente du Comité canadien de la violence faite aux femmes à l'échelle nationale, qui a réalisé la première étude nationale au monde sur ce grave problème social.

* * *

LA CAMPAGNE RÉFÉRENDAIRE

M. Mauril Bélanger (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le Président, les Québécoises et les Québécois seront privés d'assister à un débat télévisé entre les présidents du comité du oui et du comité du non, dans le cadre de l'actuelle campagne référendaire.

Le consortium formé de différents télédiffuseurs a annoncé que les délais requis pour l'organisation d'un tel événement ne peuvent être rencontrés et que, par conséquent, le débat n'aura pas lieu.

Malgré les appels répétés du camp du non en faveur de la tenue d'un tel débat, et malgré toutes les concessions qui ont été consenties, le camp du oui refuse toujours de débattre des questions de fond devant la population.

Après que le camp du oui ait réussi à faire avorter le débat télévisé, voici maintenant qu'il retire le chef du Bloc québécois de la Chambre des communes pour lui éviter d'avoir à défendre ses déclarations au sujet du projet de séparation.

Tout comme le camp séparatiste dit non aux débats et à la divulgation d'information, les Québécois et les Québécoises diront non le 30 octobre au projet séparatiste.

LA CAMPAGNE RÉFÉRENDAIRE

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, le chef de l'opposition officielle a eu l'occasion ce matin, en compagnie de Mme Françoise David, présidente de la Fédération des femmes du Québec, d'expliquer les propos qu'il a tenus en fin de semaine.

Pour le camp du changement, il est impératif d'aider les parents à concilier le travail et les responsabilités familiales. Il n'est pas question de pousser les familles à avoir plus d'enfants qu'ils n'en veulent.

Dans un Québec souverain, il est question de congés parentaux mieux rémunérés, d'accroissement des services à la petite enfance, d'accroissement des places en garderie, d'horaires de travail plus flexible.

Les femmes du Québec ne veulent pas servir de diversion. Les Québécoises et les Québécois veulent discuter du vrai débat, pas assister à une campagne de salissage contre un homme intègre qui n'a rien de raciste ni de sexiste.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, à maintes reprises à la Chambre, les réformistes ont essayé de faire comprendre au gouvernement libéral que les Canadiens veulent voir leur sécurité et celle de leur famille figurer à titre de priorité numéro un de notre système de justice.

Dans deux jours, jeudi soir, lors d'un rassemblement à l'auditorium municipal d'Oshawa, des centaines d'Ontariens viendront réitérer le message réformiste selon lequel les droits des citoyens respectueux des lois doivent avoir préséance sur ceux des criminels.

Le chef du Parti réformiste, Preston Manning, accompagné des porte-parole en matière de justice, les députés de Calgary-Nord-Est, de Crowfoot et de Wild Rose, exposera le plan clair et sensé que proposent les réformistes pour modifier rigoureusement et efficacement le système de justice du Canada.

Les Canadiens en ont assez de devoir vivre et envisager l'avenir en regardant derrière, par-dessus leurs épaules, plutôt que droit devant, en toute confiance.

Le Parti réformiste s'engage à adopter de solides mesures pour assurer un bel avenir à notre pays. J'invite tous les Canadiens à examiner ce que nous proposons et à nous donner leur appui.

15479

[Français]

LA CAMPAGNE RÉFÉRENDAIRE

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre péquiste s'est efforcé hier de tourner en dérision et minimiser l'importance que la population accorde aux propos du chef bloquiste concernant la faible natalité chez la race blanche au Québec.

Lorsque interrogé sur le sens de la déclaration de son collègue séparatiste, le chef du Parti québécois n'a rien trouvé d'autre à dire, et je le cite: «Comment voulez-vous qu'il appelle cela? La race pâle?».

Les femmes du Québec, qu'elles aient la peau blanche ou de couleur, sont au même titre que les hommes: des personnes qui seront appelées à se prononcer prochainement sur l'avenir du Québec.

La tendance du camp du oui à catégoriser ou à sectoriser les clientèles en fonction du sexe, de la langue et de la race ne correspond en rien aux valeurs de notre société.

Le 30 octobre prochain, les femmes et les hommes du Québec diront non à un projet qui cherche à les diviser.

* * *

(1415)

LA CAMPAGNE RÉFÉRENDAIRE

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, l'imagination des concepteurs de la publicité des séparatistes n'a pas de limites. En effet, hier, le comité du oui a fait paraître, dans certains quotidiens du Québec, une publicité reproduisant une page de journal remplie d'offres d'emplois portant comme titre: «C'est comme ça que nous voyons l'avenir».

Au nombre des offres d'emplois offertes dans la publicité du camp du oui, on retrouve, entre autres, les postes suivants: «Serveuse sexée demandée pour nouveau bar sur la rive sud; barmaid demandée avec expérience, belle apparence.» Une autre: «Devenez vendeuse de bas-culottes à domicile.» Ensuite: «Attention, resto-bar sexy désire jolie serveuse et barmaid sexy, belle personnalité. Tâches: déjeuner, dîner, gérant.» Ça, ce sont les tâches.

Alors, depuis hier, le camp du oui tente d'excuser les propos de son chef, mais ils ont beaucoup à faire. Et le 30 octobre prochain, les femmes du Québec diront non à tous ceux et celles qui tentent de déterminer leur avenir à leur place.


15479

QUESTIONS ORALES

[Français]

LE CRTC

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, vous me permettrez, en commençant, de déplorer les déclarations faites par le ministre des Affaires intergouvernementales qui a traité les souverainistes québécois, cet avant-midi, de racistes. Cela m'apparaît tout à fait inacceptable.

Ma question s'adresse au premier ministre. De plus en plus, les francophones voient leur langue et leur culture menacées au Canada. Le CRTC, dont l'une des missions est de préserver l'identité culturelle des francophones dans le secteur de la radiodiffusion, se voit forcé d'orienter ses décisions, comme ce fut le cas récemment dans la dérogation faite à Power DirecTv, au sujet de l'utilisation d'un satellite de transmission américain.

Alors que Power DirecTv est actuellement devant le CRTC pour l'obtention d'une licence de diffusion pour la télévision à la carte, quelles garanties les francophones du Québec et du reste du Canada ont-ils que la réglementation en vigueur au CRTC sera respectée cette fois-là, contrairement à ce qui s'est produit dans le récent dossier les impliquant avec le CRTC?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, ce qui importe, c'est la loi. Et la loi, c'est la Loi sur la radiodiffusion d'où émane le CRTC. Je suis très heureux que le CRTC écoute les représentations qu'on va lui faire sur le sujet que notre collègue a soulevé. C'est comme ça que fonctionne la loi et elle est là pour protéger le contenu canadien sur nos ondes.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, puisque le ministre est soudain sorti de sa torpeur et de son silence, on va l'interroger sur le CRTC.

Admettra-t-il que la demande de Power DirecTv à l'effet d'être autorisé à diffuser 63 canaux anglophones, dont 60 sont américains, et un seul canal francophone dans la télévision à la carte exposera le Canada et le Québec à devenir une simple extension du marché américain, ce qui serait extrêmement préjudiciable au fait français en Amérique?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, il est bien sûr clair que les intérêts, au Canada, peuvent présenter des demandes comme ils l'entendent, mais c'est le CRTC qui décide. Il décide en fonction d'une loi qui est la Loi sur la radiodiffusion, à laquelle j'ai fait allusion.

Lorsque le CRTC a pris une décision sur une licence, il y a un appel possible, qui est un appel au Cabinet. Voilà comment fonctionne la loi et elle fonctionne pour protéger précisément un bon contenu canadien.

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, dans un récent dossier, on s'en souviendra, alors que le ministre avait été bâillonné par le chef du gouvernement, la réglementation du CRTC avait été contournée, pour faire en sorte que Power DirecTv puisse obtenir une autorisation spéciale.


15480

(1420)

Ma question, que je pose au ministre, va exactement dans ce sens-là. Comment le ministre croit-il que les francophones du Québec et du Canada peuvent se sentir en sécurité en pensant que le fédéral va protéger le fait français et adéquatement leur identité culturelle dans le domaine de la radiodiffusion, quand on sait si bien que le fédéral, récemment, faisait un accroc à la réglementation du CRTC pour avantager Power DirecTv et que maintenant c'est cette même entreprise qui propose de servir à la carte 63 canaux anglophones, dont 60 américains, et un canal francophone? Comment les francophones peuvent-ils se trouver bien défendus par ce gouvernement?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, la question de notre collègue pourrait être valable si elle était fondée sur des faits, mais elle ne l'est pas. Le gouvernement fédéral n'a jamais violé la loi et n'a jamais donné des instructions au CRTC qui soient en contravention par rapport à la loi, au contraire.

Ce que nous avons voulu assurer, c'est qu'il n'y ait pas une pénétration au Canada qui nous vienne de satellites américains. C'est donc dans l'intention de bien protéger le contenu canadien que nous avons agi.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, les milieux culturels québécois se sont mobilisés hier pour demander au CRTC de ne pas compromettre l'équilibre linguistique actuel dans la radiodiffusion, notamment par l'octroi de licence à Power DirecTv. De son côté, le gouvernement fédéral prétend agir, toujours dans le cas de Power DirecTv, au nom de la libre concurrence. Ce nouvel épisode fait ressortir que le Québec n'a aucun contrôle sur son environnement audiovisuel.

Le premier ministre reconnaît-il que le projet de Power DirecTv compromettrait sérieusement l'équilibre linguistique du système québécois de radiodiffusion et qu'il risque, en conséquence, d'affaiblir l'identité culturelle des Québécois? Est-ce cela qu'on réserve aux Québécois le lendemain d'un non au référendum?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, le CRTC a reçu un certain nombre de demandes de licences. Il va suivre un processus qui est tout à fait naturel, c'est-à-dire de les écouter, d'écouter les commentaires de tout le monde-c'est pour cela qu'il y a cette procédure-de ceux qui seront d'accord, de ceux qui ne seront pas d'accord.

Le gouvernement n'interviendra pas dans ce débat puisque la loi l'interdit. Nous ne le ferons pas. Mais nous verrons à la fin du processus si la décision du CRTC est sage, et si elle ne l'était pas il est sûr qu'il y aura des intérêts qui viendront au gouvernement en appel, et à ce moment-là nous pourrons en juger. Laissons le processus se dérouler normalement et à ce moment-là nous aurons des réponses.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le ministre reconnaît que dans le cadre fédéral actuel, le Québec ne détient aucun pouvoir en matière de radiodiffusion lui permettant de protéger son identité culturelle contre l'invasion massive de nouveaux canaux de télévision de langue anglaise au Québec? N'est-ce pas là une autre bonne raison de voter oui au référendum?

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais que notre collègue puisse répondre aux questions que j'ai souvent posées à mes amis, tant du Bloc que du Parti québécois.

Comment pourraient-ils faire, en tant que pays séparé du Canada, pour que les émissions américaines débordant sur leurs frontières à travers des satellites puissent être arrêtées? Ils auraient besoin d'un mécanisme que nous avons en ce moment, qui est le mécanisme du CRTC et de la Loi sur la radiodiffusion.

Ils devraient donc être enchantés d'avoir ce mécanisme et voter non.

* * *

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, la Loi canadienne sur la santé ne permet pas aux cliniques privées d'offrir des services qui sont couverts par le régime d'assurance-maladie public. La plupart des Canadiens estiment qu'ils devraient avoir le choix si le régime d'assurance-maladie ne répond pas à leurs besoins.

(1425)

La ministre de la Santé acceptera-t-elle enfin de modifier la Loi canadienne sur la santé pour autoriser le recours à des cliniques privées?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, contrairement à l'opposition réformiste, nous avons tenu nos promesses du livre rouge. Nous avons dit que allions continuer d'appuyer les cinq principes de l'assurance-maladie parce que notre régime est l'une des principales raisons pour lesquelles c'est merveilleux d'être canadien.

Dans notre pays, monsieur le Président, nous avons un système qui assure des soins à tous, quelles que soient leurs ressources financières. Ce système doit être maintenu. Nous devons utiliser nos ressources le mieux possible pour avoir les meilleures technologies et les meilleurs médicaments afin de mieux traiter nos malades et de leur redonner la santé.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, j'ai de la difficulté à comprendre pourquoi les libéraux ne semblent pas s'inquiéter des listes d'attente.

Je connais une entreprise américaine qui vend maintenant de l'assurance-liste d'attente aux Canadiens. Si vous devez attendre plus de 45 jours, vous pouvez aller aux États-Unis. Les libéraux ne font pas que nous dire de se mettre en ligne et de la boucler, ils nous disent également d'aller voir ailleurs.

La ministre va-t-elle intervenir pour réduire les listes d'attente ou se contentera-t-elle de laisser les Canadiens se faire soigner aux États-Unis?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, s'il veut vraiment parler des listes d'attente, le Parti


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réformiste pourrait peut-être s'adresser aux 38 millions d'Américains qui n'ont pas d'assurance-maladie du tout.

Des voix: Bravo!

Mme Marleau: Monsieur le Président, dans un sondage réalisé l'an dernier, l'association des consommateurs de l'Alberta a constaté que les ophtalmologistes qui ne travaillent que dans les hôpitaux ont des listes d'attente de deux à cinq semaines pour des opérations, alors que ceux qui travaillent à la fois dans des cliniques privées et à l'hôpital peuvent opérer des patients d'établissements privés en deux ou quatre semaines, mais faire attendre jusqu'à 20 semaines les patients d'hôpitaux.

Les cliniques privées ne sont donc pas nécessairement la solution aux longues listes d'attente.

M. Grant Hill (Macleod, Réf.): Monsieur le Président, c'est un fait. Pour la chirurgie cardiaque non urgente, l'attente est de plus de deux ans au Manitoba; pour l'arthroplastie de la hanche, elle est de plus d'un an à l'Île-du-Prince-Édouard.

La ministre s'accroche à ses bureaucrates et à sa loi bien-aimée . . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: La parole est au député de Macleod.

M. Hill (Macleod): La ministre s'accroche à ses bureaucrates bien-aimés et à sa loi dépassée. Dans les années 90, cela signifie que l'assurance-maladie, c'est littéralement mauvais pour tout le monde.

La ministre placera-t-elle la santé devant la basse politique et les délais arbitraires, négociera-t-elle avec les provinces et réformera-t-elle la Loi canadienne sur la santé pour que nous n'ayons pas à choisir entre la mort sur une liste d'attente et le voyage dans un pays étranger?

(1430)

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je continuerai de travailler comme je le fais actuellement avec les représentants des gouvernements provinciaux pour décider de la forme que prendra le régime d'assurance-maladie dans l'avenir. Nous tenons également le forum national sur la santé et nous consulterons les Canadiens.

Toutefois, en ce qui concerne les listes d'attente dans notre pays, ce n'est pas en permettant aux riches de resquiller que nous allons raccourcir les listes d'attente. Cela ne fait que reléguer les autres un peu plus loin sur les listes.

* * *

[Français]

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Après deux ans de gouvernement libéral et 25 ans après l'adoption de la Loi sur les langues officielles, la situation des francophones hors Québec continue à se détériorer: le tiers d'entre eux parlent maintenant l'anglais à la maison. Le taux d'assimilation atteint même 75 p. 100 en Colombie-Britannique. On ne parle donc plus de un million, mais bien de 640 000 francophones hors Québec dont le français est encore la langue d'usage.

Le premier ministre admettra-t-il que les piètres résultats obtenus par la Loi sur les langues officielles constituent un échec de sa vision du Canada, puisqu'elle n'a pas su enrayer l'assimilation croissante des francophones hors Québec?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la revue L'Actualité notait récemment que de tous les pays du monde, c'est au Canada où le français a fait le plus de progrès dernièrement.

Je ne comprends pas l'honorable députée. Elle est prête à abandonner les francophones hors Québec. Elle est prête à abandonner le million de francophones qui vivent hors Québec.

Ils n'ont aucune considération parce qu'ils veulent se séparer du Canada. Eh bien nous, nous allons rester au Canada parce que nous voulons vraiment protéger ceux et celles qui ont vraiment du mérite à parler le français, les francophones hors Québec.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, je voudrais rappeler au premier ministre que c'est lui qui nous a séparés du Canada; ce n'est pas le Québec qui veut se séparer du Canada.

Deuxièmement, je veux lui rappeler aussi de consulter les données de Statistique Canada. Il y a un million de francophones, bien sûr, mais il y en a juste 640 000 qui utilisent la langue française à la maison, donc qui sont de langue française.

Une voix: Ils sont en assimilation.

Mme Tremblay: Ils sont assimilés.

M. Godin: Pouf!

Mme Tremblay: Pouf, les francophones!

Une voix: Pouf, les francophones!

Mme Tremblay: Alors, le premier ministre ne reconnaît-il pas que l'avenir de la francophonie en Amérique repose, bien au contraire, sur la souveraineté du Québec, puisque seul un Québec souverain constituera le point d'ancrage de tous les francophones qui trouveront en lui un véritable allié, tenace et solidaire, qui défendra partout leurs revendications les plus légitimes?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui même, le journal qui représente la voix des francophones hors Québec demande aux Québécois de voter non au référendum parce que l'avenir des francophones hors Québec passe par la Loi sur les langues officielles du Canada, par le fait qu'il y a un gouvernement ici au Canada, à Ottawa, qui a toujours défendu les francophones hors Québec.

Certains ont évidemment plus de difficultés que d'autres à garder leur langue française, mais ils veulent la garder. Et il n'y a pas que cela. Chaque année, 350 000 anglophones canadiens, parce qu'ils vivent au Canada avec des francophones, apprennent la langue française, ce qui améliore le nombre de francophones au Canada et dans le monde entier. Le fait que le français existe en Amérique et


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qu'il est vivant en Amérique, c'est parce que les francophones sont demeurés au Canada depuis la Confédération.

* * *

[Traduction]

L'ENQUÊTE SUR LES ÉVÉNEMENTS DE SOMALIE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, hier, les Canadiens ont été stupéfaits d'entendre le ministre de la Défense nationale admettre que la Loi sur la défense nationale empêchera de porter certaines accusations liées aux événements de Somalie à l'issue de l'enquête sur ces événements.

(1435)

Hier, le ministre de la Défense nationale a dit au Globe and Mail que des accusations pourraient être portées aux termes du Code criminel du Canada. Le président de la commission d'enquête a déclaré ceci: «La plupart des faits que nous étudions sont susceptibles de déboucher sur des constatations pouvant justifier des mesures disciplinaires plutôt que des accusations criminelles.» Plutôt que des accusations criminelles!

Le ministre reconnaît-il qu'il n'y aura pas de recours judiciaires pour certaines accusations lorsque l'enquête sur les événements de Somalie sera enfin terminée?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, j'ai répondu à cette question très clairement hier.

La Loi sur la défense nationale contient toutes les dispositions nécessaires pour que justice puisse être faite. Le gouvernement connaissait très bien les dispositions sur la prescription contenues dans la Loi sur la défense nationale au moment de convoquer la commission d'enquête. D'ailleurs, le juge qui préside cette commission, le juge Létourneau, connaît très bien ces dispositions puisqu'il est un ancien juge de la cour d'appel des cours martiales.

Il y a d'autres moyens de faire en sorte que justice soit rendue sur le plan administratif. Si le député craint que ces gens, s'ils sont identifiés, ne soient pas traduits devant les tribunaux ou reçoivent un traitement spécial, je peux le rassurer.

Les mesures qu'il faut prendre seront prises lorsque tous les éléments de preuves auront été regroupés. J'aimerais que le député laisse la commission poursuivre ses travaux pour que justice soit faite.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, le ministre sait très bien que je ne crains rien. Cependant, il devrait lui-même craindre que toute cette affaire soit bâclée.

La Loi sur la défense nationale prévoit une prescription de trois ans pour toutes les infractions sauf pour la mutinerie, la désertion, les absences non justifiées et les infractions passibles de la peine de mort. C'est tout.

Les Canadiens savent qu'un ensemble de lois distinct s'applique à nos militaires pour ce qui est des mesures disciplinaires et du commandement, et qu'il expire en mars 1996. Les Canadiens veulent savoir pourquoi le ministre a si mal géré ce dossier que l'on en est maintenant au point où il est impossible de faire appliquer des mesures disciplinaires ou d'imposer un commandement à nos forces armées.

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le député ne sait pas de quoi il parle. Il a soigneusement choisi les dispositions de la Loi sur la défense nationale qu'il cite. Il peut avoir l'assurance qu'il est possible de punir des coupables en passant par d'autres voies que des accusations criminelles. Il devrait relire la Loi sur la défense nationale et peut-être aussi demander conseil sur la façon de l'interpréter pour pouvoir poser des questions qui se tiennent, demain.

* * *

[Français]

LES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le premier ministre de la Saskatchewan, Roy Romanow, ce grand Canadien qui a participé à l'exclusion du Québec de la Constitution canadienne lors de la nuit des longs couteaux en 1982, a déclaré récemment que c'en était fini de la gestion scolaire française en Saskatchewan si le Québec votait oui.

Le premier ministre a-t-il l'intention de dénoncer ce chantage qui se fait sur le dos des communautés francophones, ou est-il d'accord avec son complice de 1982?

[Traduction]

Le Président: Chers collègues, cette question ne relève pas du premier ministre. Elle est irrecevable. Si le premier ministre veut y répondre, je vais lui permettre de le faire. Sinon, je vais passer à la prochaine question.

[Français]

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le meilleure façon de protéger le droit à l'éducation des francophones hors Québec-que nous avons inscrit dans la Constitution canadienne en 1982, ça n'existait pas avant-la meilleure façon de s'assurer que les écoles françaises à l'extérieur du Québec sont protégées par la Constitution adoptée par ce Parlement en 1982, alors que j'étais moi-même ministre de la Justice, c'est de rester au Canada. La meilleure garantie que les francophones possèdent, c'est de rester au Canada.

Quand je vois des députés francophones laisser tomber les francophones hors Québec, je trouve cela honteux, monsieur le Président.

(1440)

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, je demande au premier ministre s'il se dissocie des paroles du premier ministre de la Saskatchewan, Roy Romanow. C'est ce que je lui demande, et il défile la question.


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Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre de la Saskatchewan, comme les autres premiers ministres à ce moment-ci, dans le Canada, est obligé par la Constitution canadienne de protéger les écoles françaises hors Québec. Si le Québec se sépare du Canada. . .

Une voix: C'est du chantage!

M. Chrétien (Saint-Maurice): Ce n'est pas du chantage, c'est qu'il n'y aura qu'un million de francophones hors Québec et ils n'auront plus à ce moment-là le soutien des députés du Québec francophone, comme moi et les autres qui avons passé notre carrière à défendre les francophones hors Québec, ici à la Chambre des communes. Cela fait 32 ans que je fais ça. On a eu des résultats. Mais eux vont les laisser tomber, parce qu'ils veulent avoir des ambassadeurs du Québec en Cadillac à l'étranger.

* * *

[Traduction]

LA BASE DE CHILLIWACK

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, dans le budget de février, le ministre des Finances a annoncé la fermeture de la BFC Chilliwack, la seule base de la force terrestre en Colombie-Britannique. Pourtant, dans une note de service portant la mention «secret» et préparée pour la Défense nationale juste avant cette annonce, le Commandement de la Force terrestre a fait les observations suivantes: «Le Commandement de la Force terrestre a besoin d'une base pour appuyer ses opérations internes en Colombie-Britannique. Le CFT estime que Chilliwack est idéale pour ces opérations. On devrait s'opposer à la fermeture de la BFC Chilliwack et on devrait garder cette base.»

Pourquoi le ministre n'a-t-il pas tenu compte des conseils de ses propres adjoints en choisissant de fermer la seule base de la force terrestre en Colombie-Britannique, la BCF Chilliwack?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, au contraire, j'ai suivi les conseils de mes adjoints. C'est le ministère qui a recommandé le regroupement des effectifs de la force terrestre à Edmonton et la fermeture des bases à Chilliwack et à Calgary.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, dans une autre note de service obtenue en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, le brigadier-général Stephenson, directeur général du développement de la force terrestre, se demande si la fermeture de la base permettra de réaliser des économies, et le colonel Daigle, du Commandement de la Force terrestre, dit que le coût du déménagement de l'école de génie annulera à lui seul les économies découlant de la fermeture de la BFC Chilliwack.

Si le Commandement de la Force terrestre a dit qu'il avait besoin de la base pour des raisons militaires et si des experts ont dit que la fermeture de la base ne permettrait pas de réaliser des économies, le ministre a-t-il fermé la base pour des raisons de mauvaise gestion ou a-t-il simplement choisi de la déménager à Edmonton parce que ses voisins de banquette libéraux habitent là-bas?

Le Président: Chers collègues, je vous demanderais de ne pas faire de procès d'intentions. Je dirais que la première partie de la question est recevable, mais que la deuxième partie ne l'est pas. Si le ministre veut répondre à la première partie de la question, je lui donne la possibilité de le faire.

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, les députés d'en face font de la lecture sélective. Ils n'ont pas regardé tous les conseils donnés au sous-ministre et au chef d'état-major de la défense. Le fait est que la fermeture de la BFC Chilliwack nous permettra de réaliser des économies de 46 millions de dollars par année.

Je trouve cela plutôt étrange que les réformistes, qui demandent chaque jour au gouvernement de réduire les dépenses, s'opposent à des mesures visant à le faire lorsque cela les touche de trop près. «Pas dans ma cour.» Voilà ce que disent les réformistes.

* * *

[Français]

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre. En provoquant la fermeture du Centre francophone de santé et des services communautaires du sud de l'Ontario, le gouvernement Harris vient de montrer ses vraies couleurs. Pour les Franco-Ontariens, le message est clair: Si vous voulez avoir des services en français, déménagez au Québec.

Comment le premier ministre explique-t-il son silence complice à l'endroit de Mike Harris, quand celui-ci coupe dans les services aux francophones en Ontario?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas au courant de ce dossier. Je vais certainement m'en enquérir, parce que je suis intervenu, par exemple, pour l'école française de Kingston, avec des résultats, il y a très peu de temps. Je veux voir si c'est une raison valable. Mais je trouve absolument incroyable que, soudainement, à deux semaines du moment où ils veulent quitter le Canada, ils se soucient des francophones hors Québec, qui seront laissés à eux-mêmes si le Québec se sépare.

(1445)

Je sais que je peux rassurer les francophones hors Québec, ne vous inquiétez pas. Les Québécois-non pas le Parti québécois et le Bloc québécois-mais les Québécois ne laisseront jamais tomber les francophones hors Québec.

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, c'est tout de même incroyable. Le premier ministre qui se dit le défenseur des francophones hors Québec ferme les yeux sur le traitement qu'on fait aux francophones du sud de l'Ontario. Est-il en train de confirmer qu'il est tout à fait incapable de faire du Canada un endroit où les francophones sont traités équitablement partout?


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Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la députée s'applaudit elle-même, c'est très inusité. Cette conversion de la dernière heure me plaît. Elle me plaît, car cela me permet de dire encore une fois qu'il peut y avoir des problèmes, il y en a toujours eu, cela a toujours été difficile, mais une chose est claire, les francophones hors Québec. . .

Une voix: Il n'y en a plus!

Des voix: Oh, oh!

M. Chrétien (Saint-Maurice): Les députés francophones hors Québec pourraient-ils se lever en Chambre pour prouver qu'il y en a encore des francophones hors Québec?

Des voix: Bravo!

[Traduction]

Le Président: Je rappelle aux députés que je ne peux pas être mêlé à tout ça. J'agis comme arbitre, ici.

* * *

[Français]

L'ÉCONOMIE QUÉBÉCOISE

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires intergouvernementales.

Une récente analyse du Centre d'études stratégiques et internationales de Washington nous apprend qu'un Québec indépendant pourrait adhérer aux différents traités internationaux.

Le ministre peut-il nous expliquer les étapes et les démarches qu'un pays doit franchir avant de pouvoir adhérer à l'ALENA ainsi qu'à l'Organisation mondiale du commerce?

L'hon. Marcel Massé (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada, ministre des Affaires intergouvernementales et ministre chargé du Renouveau de la fonction publique, Lib.): Monsieur le Président, je peux citer certaines des conclusions et même produire le rapport. La principale conclusion de M. Roh est celle-ci: Un Québec indépendant n'aurait aucun droit automatique aux termes des accords commerciaux existants, dont l'ALENA, l'Accord sur l'Organisation mondiale du commerce et le Pacte de l'automobile. Il lui faudrait entamer des négociations pour accéder à ces accords.

Seconde conclusion: la loi américaine interdit au président des États-Unis d'accorder à un Québec indépendant les avantages commerciaux dont le Québec jouit en ce moment en faisant partie du Canada, tant que le Congrès n'aura pas approuvé et appliqué cette accession.

Ensuite, les négociations sur l'accession d'un Québec indépendant à l'OMC, l'ALENA et au Pacte de l'automobile s'avéreraient ardues. Les négociateurs américains sous la pression du Congrès et du secteur privé tenteraient d'obtenir des changements dans les secteurs névralgiques comme l'agriculture.

[Traduction]

LE PROJET DE LOI C-72

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, en adoptant rapidement le projet de loi C-72, la Chambre des communes dans son ensemble a montré qu'elle s'opposait à l'utilisation de l'intoxication volontaire comme moyen de défense.

(1450)

La décision de la Cour suprême d'entendre Alton Royer, qui a été reconnu coupable du meurtre d'un enfant, montre bien que ce tribunal, qui n'est pas élu, est passé outre à la volonté des membres élus du Parlement et de millions de Canadiens.

On nous a dit hier que le ministre de la Justice va demander l'autorisation d'intervenir dans cette affaire. Le ministre peut-il nous dire dans quel but?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement s'est réjoui de l'appui que tous les partis politiques ont donné au projet de loi C-72. On sait que ce projet de loi a modifié le droit pénal canadien en empêchant une personne accusée d'une infraction criminelle d'intention générale contre autrui d'invoquer son intoxication volontaire comme moyen de défense.

L'affaire à laquelle le député fait référence concerne des actes commis avant l'adoption du projet de loi C-72. Aussi, la Cour suprême entendra-t-elle l'appel à la lumière de la loi telle qu'elle était au moment ou les actes ont présumément été commis. Le projet de loi C-72 ne s'appliquera pas.

La responsabilité de la poursuite incombe évidemment au procureur général provincial. Toutefois, comme le secrétaire parlementaire l'a dit hier à la Chambre, nous envisageons de demander à la Cour suprême l'autorisation d'intervenir dans cette affaire. Le cas échéant, nous fournirions tout le soutien possible à la cour pour l'aider à rendre sa décision.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, puisque l'efficacité du projet de loi C-72 semble soulever des doutes, qu'entend faire le ministre pour s'assurer que l'intoxication volontaire extrême ne puisse pas être utilisée comme moyen de défense en pareils cas?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle au député que le projet de loi C-72, qui a été adopté par le Parlement et dont l'entrée en vigueur a été proclamée, fait maintenant partie des lois du pays.

Je me bornerai à rappeler qu'en droit pénal, les modifications ne sont pas rétroactives et qu'elles ne peuvent donc pas avoir d'effet sur une affaire survenue avant leur adoption. L'affaire dont parle le député sera jugée en fonction de la loi telle qu'elle était avant l'adoption du projet de loi C-72.


15485

Je puis cependant donner l'assurance au député que l'adoption du projet de loi C-72 a modifié le droit pénal au Canada puisque, depuis l'entrée en vigueur de cette mesure, une personne accusée d'un acte de violence ou d'une infraction criminelle d'intention générale ne peut plus invoquer l'intoxication volontaire comme moyen de défense pour échapper aux conséquences de ses actes.

* * *

[Français]

LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, je m'adresse au président du Conseil du Trésor.

La Loi sur les langues officielles reconnaît aux fonctionnaires d'Ottawa-Hull le droit de travailler dans leur langue. Pourtant, le commissaire aux langues officielles confirme, dans son dernier rapport, que seulement 11 p. 100 des fonctionnaires francophones rédigent habituellement en français, et que pour les trois quarts des francophones l'anglais demeure seule langue de communication avec leur patron et lors des réunions de travail.

Le président du Conseil du Trésor reconnaît-il que la politique fédérale en matière de langue de travail est un échec lamentable dans la région d'Ottawa-Hull et que c'est encore une fois les employés francophones qui en paient le prix?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, c'est un gouvernement libéral qui a adopté la Loi sur les langues officielles. C'est un gouvernement libéral qui a fait progresser la cause des langues officielles en permettant aux fonctionnaires fédéraux d'un bout à l'autre du Canada de parler la langue officielle de leur choix au travail.

Il y a encore du boulot à abattre. Récemment, nous avons publié une brochure, en collaboration avec le Commissaire aux langues officielles, pour encourager les gens à utiliser la langue officielle de leur choix dans leur milieu de travail au sein de la fonction publique fédérale. Nous continuerons à essayer d'améliorer les moyens offerts aux intéressés pour qu'ils puissent utiliser la langue de leur choix, parce que c'est un élément de la politique du gouvernement actuel.

[Français]

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, le choix est là, mais le choix se fait toujours du même côté.

Le président du Conseil du Trésor ne convient-il pas que les fonctionnaires fédéraux au Québec qui travaillent dans la région d'Ottawa-Hull sont traités par le fédéral comme des citoyens de deuxième classe et que seule la souveraineté du Québec pourrait faire du français une langue de travail dans les bureaux du gouvernement situés en Outaouais?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Certainement pas, monsieur le Président. Dans mon travail, j'entends constamment et tous les jours les deux langues officielles. Je suis sûr que c'est aussi le cas pour les autres ministériels.

(1455)

Nous continuerons à encourager les gens à utiliser la langue officielle de leur choix. Le gouvernement s'est engagé à le faire. C'est un engagement pris à l'endroit des Québécois, des habitants de tous les coins de notre pays et de tous les francophones du Canada.

* * *

LA STRATÉGIE DU POISSON DE FOND DE L'ATLANTIQUE

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et Océans. Les dépenses dans le cadre de la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique sont actuellement hors contrôle. Le ministère des Pêches et Océans a maintenant admis que le déficit, pour cette année seulement, sera de 105 millions de dollars.

La semaine dernière, le ministre annonçait que sa brillante solution était de prendre l'argent sur la portion du plan visant à réduire la capacité, qui est dotée de 300 millions de dollars. Est-ce que le ministre pourrait dire à la Chambre quelle proportion des 300 millions affectés à la réduction de la capacité sera détournée, et pourrait-il confirmer ce que de nombreux pêcheurs soupçonnent déjà, qu'il n'y aura plus de rachats de licences?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, la seule chose qui soit hors de contrôle, après seulement deux questions depuis qu'il est critique des pêches, c'est la crédibilité du député.

Ce que fait le gouvernement c'est consulter les organismes représentants les pêcheurs, notamment le Conseil canadien des exploitants pêcheurs qui représente les principaux syndicats et les principales associations de tout le Canada. Le rajustement qui a été fait jusqu'à présent, par le ministre du Développement des ressources humaines et le ministre des Pêches, à la stratégie du poisson de fond de l'Atlantique a été fait après consultation, un principe totalement étranger au Parti réformiste, auprès des représentants des syndicats de pêcheurs. Tout rajustement supplémentaire qui pourrait être nécessaire à l'avenir sera fait après le même genre de consultation.

Si le député désire refléter convenablement la réalité du Canada atlantique et les sérieux défis auxquels cette région est confrontée, il devrait au moins faire son travail de recherche.

M. Scott (Skeena): Jusqu'à présent, tout ce que le ministre a réussi à faire c'est détruire complètement tous les espoirs des Canadiens de l'Atlantique. Les réductions de capacité étaient censées résoudre les problèmes des pêcheurs de l'Atlantique, mais l'échec du gouvernement laisse les Canadiens de cette région sans


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le moindre espoir d'un avenir viable dans le secteur des pêches. Tout ce qu'ils peuvent espérer c'est que les chèques d'Ottawa ne cesseront. Ce n'est plus de l'espoir, c'est de la dépendance. Les Canadiens de la région Atlantique méritent mieux que cela.

Est-ce que le ministre est prêt à admettre que ses tentatives de réduction de la capacité ont été un échec total et qu'il a anéanti le dernier espoir des pêcheurs de l'Atlantique d'avoir un gagne-pain à l'avenir?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, le député me demande si nous sommes prêts à admettre que les Canadiens de l'Atlantique sont battus? Si nous accepterons la politique du Parti réformiste et si nous achèterons à tout le monde un aller simple pour Toronto? Si nous allons abandonner la région et la laisser dériver à son triste sort? Si nous allons supposer que tous les Canadiens de la région Atlantique sont des perdants? Si nous allons partir du principe qu'il n'y a plus d'avenir pour notre population? Certainement pas. Nous allons travailler à reconstruire la région.

* * *

[Français]

LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE

M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor. L'Alliance de la fonction publique du Canada a récemment eu des discussions, sans succès jusqu'à maintenant, dans le but d'en arriver à une entente avec le gouvernement du Québec pour faciliter l'embauche de 26 000 fonctionnaires fédéraux qui résident présentement dans l'Outaouais québécois, advenant que le Québec se sépare du Canada.

Monsieur le ministre, est-ce que ces promesses sont plutôt irréalistes et créent de faux espoirs, sachant fort bien que, sur le plan administratif, ce n'est pas réalisable?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Québec parle d'une fonction publique de 110 000 personnes pour servir une population de quelque 7 millions d'habitants, alors qu'une fois que nous aurons terminé la rationalisation en cours, il y aura 190 000 fonctionnaires fédéraux pour servir 28 millions de Canadiens.

Les chiffres ne cadrent pas. Les fonctionnaires fédéraux travaillant au Québec devraient se poser des questions sur la possibilité pour les séparatistes de tenir leur promesse à cet égard. Leurs chiffres sont tout simplement disproportionnés. Ils ne sont pas crédibles et les fonctionnaires fédéraux devraient se méfier des promesses de Gascon des séparatistes.

* * *

(1500)

LES PRODUITS PHARMACEUTIQUES

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Les médicaments d'ordonnance représentent 17 p. 100 des coûts des soins de santé. Les prix de ces médicaments ont augmenté de 13 p. 100 chaque année au cours des huit dernières années à cause du projet de loi C-91 auquel les libéraux s'étaient opposés lorsqu'ils formaient l'opposition.

Le gouvernement pourrait économiser des centaines de millions de dollars par année en faisant une seule chose, en abrogeant le projet de loi C-91 ou du moins en abrogeant la disposition sur l'injonction automatique dans les règlements sur les médicaments brevetés.

Pourquoi le gouvernement ne le fait-il pas? Est-ce parce que les fabricants de produits pharmaceutiques versent une contribution trop importante à la caisse du Parti libéral?

Le Président: La question n'est pas conforme au Règlement. Ceci met fin à la période des questions.

* * *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je désire souligner la présence à notre tribune de Son Excellence Nawab Mahammad Talpu, ministre de l'Agriculture du Pakistan.

Des voix: Bravo!

[Français]

Le Président: Je désire également souligner la présence à la tribune de Mme Marie-Noëlle Ande Koyara, ministre de la Promotion de la femme et de la Solidarité nationale de la République centrafricaine.

Des voix: Bravo!

* * *

[Traduction]

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais signaler à la Chambre le fait que l'étude du projet de loi C-64, Loi concernant l'équité en matière d'emploi, sur lequel nous nous prononcerons ce soir, est passée en cinq jours de séance consécutifs de l'étape du rapport à la fin de celle de la troisième lecture. Cela résulte d'une nouvelle procédure permettant de renvoyer le projet de loi à un comité dès après sa première lecture.

Je tiens cependant à faire remarquer à la Chambre qu'à cause de cette nouvelle procédure, que l'on a instituée pour les meilleures raisons du monde, il a été impossible pour certains députés comme moi, qui avaient de sérieuses réserves à l'égard du projet de loi à l'étape du rapport, d'obtenir des réponses à nos réserves en convoquant des témoins à comparaître devant le comité puisque le comité ne siège évidemment plus après l'étape du rapport.

Par conséquent, la vitesse avec laquelle on a étudié le projet de loi à la Chambre présente un problème pour les députés qui aimeraient que tous les projets de loi présentés à la Chambre y soient bien étudiés afin de pouvoir se prononcer sur ces projets de loi en disposant de toute l'information possible.


15487

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, les observations du député méritent qu'on y réponde. Je ne suis pas convaincu qu'il ait soulevé un rappel au Règlement valable, mais je soutiens qu'en ce qui concerne la procédure suivie pour l'étude de ce projet de loi et d'autres qui sont étudiés de la même façon, il est loisible aux députés d'assister aux séances du comité auquel le projet de loi a été renvoyé. Il leur est également loisible de proposer des amendements au projet de loi ici à la Chambre, à l'étape du rapport.

Nous avons eu un débat approfondi à l'étape du rapport, de même qu'à celle de la troisième lecture. Le débat de troisième lecture a même été prolongé jusqu'à aujourd'hui par consentement unanime parce que certains députés n'avaient apparemment pas eu l'occasion d'intervenir hier soir. Le gouvernement a été plein de sollicitude dans ses efforts pour assurer un débat équitable et raisonnable sur tous les aspects du projet de loi.

Je soutiens que la procédure suivie a été correcte et conforme aux règles. Si le député croit qu'il y avait le moindrement à redire à la procédure-bien que je ne l'aie pas entendu le dire dans ses observations-il lui suffira de bien examiner ce qui s'est passé au comité pour en arriver à la conclusion que son rappel n'est pas vraiment fondé en l'occurrence.

(1505)

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais traiter du rappel au Règlement qu'a fait le député de Hamilton-Wentworth. Nous avons déjà attiré l'attention de la Chambre sur le fait que le projet de loi, qui a été renvoyé au comité avant sa deuxième lecture, n'a pas été examiné convenablement par le comité et n'a pas pu être débattu suffisamment à la Chambre.

Une fois que le projet de loi est renvoyé au comité, il n'est pas présenté de nouveau à la Chambre pour une deuxième lecture, étape qui permet aux députés d'en faire un des examens les plus approfondis. Cette étape a disparu. Nous devons nous limiter à un débat de 180 minutes simplement pour décider du renvoi du projet de loi au comité, et non pour en examiner la teneur.

Lorsque nous avons accepté cette modification du Règlement, nous pensions que les travaux du comité pourraient alors prendre beaucoup plus d'importance. Cependant, ce qui s'est passé au comité, c'est que l'étude du projet de loi a été limitée à quelques secondes ou quelques minutes par article. On expédie les choses. Puis, sans qu'il y ait eu de deuxième lecture, nous sommes passés à l'étape de la troisième lecture, où le projet de loi a été approuvé en principe, et aucun autre amendement n'a pu être proposé par les députés.

Le Président: Il s'agit d'une nouvelle façon de procéder que la Chambre a adoptée. Si elle comporte des défauts, ils pourront probablement être examinés encore une fois par le comité.

Le député a fait valoir son point de vue. Je sais gré au secrétaire parlementaire et au député de Kindersley-Lloydminster de leurs interventions, mais il ne s'agit pas d'un rappel au Règlement.

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une question très sérieuse à soulever au sujet du comportement du député de Burnaby-Kingsway durant la période des questions, plus tôt aujourd'hui.

Ses interpellations sont excessives, odieuses et extrêmement . . .

Le Président: Chers collègues, je demande parfois à tous les députés d'être très prévenants envers leurs collègues lorsqu'ils posent des questions ou formulent des réponses.

Le député nous en donne un bon exemple. Je suis très conscient du problème qu'il soulève. Le fait de ne pas apprécier le comportement d'un député ne justifie pas nécessairement un rappel au Règlement. À mon avis, cela tient du débat.

Je crois que ce que le député voulait faire valoir, c'est que les députés devraient se respecter les uns les autres et écouter leurs collègues lorsqu'ils posent une question ou donnent une réponse. J'encouragerais tous les députés à respecter ce principe.

Je crois que l'intervention a été bien comprise. Les faits sont clairs, et je sais ce que prescrit le Règlement.

M. Epp: Je veux que tout le monde le sache, monsieur le Président.

Le Président: Je voudrais maintenant passer à autre chose.

[Français]

M. Mauril Bélanger (Ottawa-Vanier, Lib.): Monsieur le Président, lors de la période des questions, le président du Conseil privé et ministre des Affaires intergouvernementales a cité une analyse. Est-ce que le ministre a l'intention de déposer ce texte pour le bénéfice de tous les députés?

Le Président: Est-ce que le ministre . . . ? Alors, on pourrait aller le chercher?

[Traduction]

M. John Solomon (Regina-Lumsden, NPD): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement à propos d'un incident survenu durant la période des questions. Je veux parler plus particulièrement du fait que les médicaments d'ordonnance constituent 17 p. 100 des dépenses de santé.

(1510)

La question posée au gouvernement consistait à savoir pourquoi il n'abrogeait pas le projet de loi C-91. Je me suis peut-être trop étendu sur le sujet, mais j'essayais simplement de donner au ministre un éventail de réponses parmi lesquelles choisir.

Le Président: La présidence a statué sur l'admissibilité de la question. Durant la période des questions, je règle mes écouteurs au plus fort et j'essaie d'entendre tout ce que disent les députés.

Je ne pouvais pas voir où le député voulait en venir avec sa question. D'après ce que j'ai pu entendre et comprendre, il m'a semblé que la question était irrecevable.

15488

Le point que vient de soulever le député ne constitue pas un rappel au Règlement, mais s'il désire que nous en parlions plus longuement, je l'invite à venir me rencontrer à mon bureau.

LE DÉPÔT DE DOCUMENTS

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais avoir des précisions concernant le dernier dépôt de document. Lorsqu'un ministre doit déposer des documents, il peut le faire au cours de la période réservée aux affaires courantes.

Un ministériel de l'arrière-ban, le député d'Ottawa-Vanier, a demandé qu'un document soit déposé. Lorsque j'ai tenté de déposer un document la semaine dernière vous avez demandé le consentement unanime de la Chambre. Où est le problème?

Le Président: Il n'y a pas de problème. Ce qui se passe c'est que si un ministre cite un document à la Chambre, il peut être prié de déposer ce document.

Si un simple député comme vous ou moi, encore une fois si vous me permettez l'expression, cite un document à la Chambre, il faut le consentement unanime de celle-ci pour que le document soit déposé. Les règles sont très claires.

Avez-vous besoin d'autres précisions?

Mme Grey: Monsieur le Président, par conséquent, si un ministre cite un document, nous pouvons demander, voire exiger que ce document soit déposé. Le ministre a-t-il la possibilité de dire oui, non ou peut-être?

Le Président: La règle pertinente se trouve dans l'ouvrage de Beauchesne intitulé Jurisprudence parlementaire, 6e édition, page 158, commentaire 495(1), sous la rubrique «Documents cités»:

Il n'est pas permis à un ministre de lire ou de citer une dépêche ou autre document d'État qui n'a pas été soumis à la Chambre, à moins qu'il ne soit disposé à le déposer sur le bureau.
Dans ce cas-ci, le ministre a directement cité un document. On lui a demandé de déposer ce document sur le bureau. La Chambre a accepté le document. Telle est la règle.

______________________________________________


15488

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-90, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise et la Loi sur l'accise, soit lu pour la troisième fois et adopté.

Le Président: Avant cette intéressante période des questions, le député de Prince George-Bulkley Valley avait la parole. Il lui reste environ 30 minutes.

Des voix: Trente minutes?

Le Président: Voilà ce qui arrive quand on chahute.

M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.): Monsieur le Président, je vous remercie de m'accorder plus de temps. Mes collègues s'en réjouiront certainement.

Avant la période des questions, j'ai parlé des prodigalités des libéraux, de leur habitude de dépenser sans compter. J'ai fait remarquer que le département américain de l'Énergie avait reçu 35 000 $ du gouvernement libéral. Les Américains avaient vraiment besoin de cet argent. Les Métallurgistes unis d'Amérique ont reçu 116 000 $ du gouvernement libéral; la Fondation pour les arts dans les prisons, 51 000 $; enfin, le Feminist Literacy Workers Network, 57 000 $.

(1515)

Voilà où va l'argent des contribuables. Voilà en partie pourquoi les dépenses excédentaires dépassent le cap des 30 milliards de dollars par an. Pourquoi les libéraux continuent-ils d'agir ainsi? Pourquoi entretiennent-ils les habitudes du gouvernement conservateur précédent? Parce que tous les groupes d'intérêts spéciaux qui reçoivent des fonds année après année font constamment du lobbying à Ottawa auprès du gouvernement, communiquent avec lui, lui quémandent constamment de l'argent et n'hésitent pas à se montrer presque aussi désagréables que l'a été le député de Burnaby-Kingsway pendant la période des questions. Tous ces groupes d'intérêts spéciaux font la queue pour obtenir des faveurs du gouvernement libéral, pour bénéficier de ses largesses.

Pour pouvoir continuer ses prodigalités, que fait le gouvernement libéral? Il hausse simplement les impôts, comme il l'avait annoncé dans le budget de février, et il nous demande d'approuver le projet de loi C-90 qui lui permet d'augmenter la taxe sur l'essence d'un cent et demi le litre, afin de percevoir un ou deux milliards de dollars de plus. Ce manège n'a pas de fin. Les Canadiens en ont assez du déficit actif du gouvernement libéral et ils veulent y mettre un terme.

L'une après l'autre, des études ont montré que le déficit actif ne crée pas une économie vigoureuse. L'un après l'autre, les économistes nous ont averti que ce n'est pas en dépensant que nous sortirons de la récession. La seule façon d'y arriver, c'est de faire redémarrer l'économie, ce qui ne pourra se faire si nous augmentons les taux d'imposition des travailleurs et des entreprises du Canada. Il ne faut pas être un génie pour comprendre cela. Pourquoi les libéraux n'y arrivent-ils pas?

Si la plupart des économistes du monde entier approuvent la méthode préconisée par le Parti réformiste pour relancer l'économie canadienne et sortir le Canada de sa crise financière, c'est notamment que, lorsque nous, du Parti réformiste, parlons de responsabilité financière et de redressement de l'économie, nous sommes prêts à écrire noir sur blanc, en termes très clairs et très précis, comment nous nous y prendrions pour relancer l'économie, pour réduire les impôts et pour mettre fin aux folles dépenses sans que les Canadiens en pâtissent vraiment.


15489

Tous les jours, le gouvernement libéral nous accuse de vouloir réduire à néant tous les programmes dont bénéficient les Canadiens, les programmes que nous n'avons jamais eu les moyens de nous offrir et avec lesquels la bande d'en face-et les conservateurs avant elle-s'est fait élire.

Voici une opinion que je partage avec de nombreux économistes: la plus grande menace pour les programmes sociaux de notre pays réside dans les dépenses effrénées du gouvernement libéral. La plus grande menace pour les programmes sociaux de notre pays, soit l'assurance-maladie, l'éducation et toutes ces choses sur lesquelles les Canadiens ont appris à compter, ce n'est pas la responsabilité financière dont fait preuve de ce côté-ci le Parti réformiste, mais les grands dépensiers que sont les libéraux d'en face et qu'étaient avant eux les conservateurs.

Il est temps que le gouvernement se décide à relancer l'économie. Il est temps que le gouvernement réponde aux préoccupations des Canadiens concernant les taux d'imposition élevés en cours au Canada. Il est temps que le gouvernement prenne les mesures qui s'imposent pour vraiment créer des emplois durables au Canada et réduire un déficit excessif.

Je regrette de devoir le dire, mais je ne crois pas un instant que le gouvernement actuel se décidera vraiment à faire tout cela. Je me permets donc de lui proposer quelque chose. S'il n'est pas disposé à répondre aux préoccupations que nourrissent les Canadiens au sujet de l'économie, des emplois et des impôts, qu'il cède sa place à un parti qui saura le faire, à savoir, évidemment, le Parti réformiste du Canada.

(1520)

Malheureusement, les Canadiens vont devoir souffrir encore quelques années. J'aimerais qu'ils cessent de souffrir plus tôt, mais ils semblent condamnés à subir deux autres années de dépenses immodérées et de budgets déficitaires.

Je suis désolé. J'oubliais d'aborder une question. La députée de Beaver River m'a rappelé de ne jamais prendre la parole pour parler des dépenses immodérées du gouvernement libéral sans toucher un mot des pensions. Je remercie la députée de Beaver River d'avoir été là au bon moment.

Dans le cadre de cette législature, les réformistes ont agi de manière responsable en renonçant au régime de retraite dans une proportion de 98 p. 100 et en montrant aux Canadiens leur détermination personnelle de sérieusement réduire les dépenses. Nous voulons faire épargner aux contribuables canadiens quelque 35 millions de dollars en renonçant simplement au régime de retraite des députés.

Il est intéressant de souligner que 98 p. 100 des députés réformistes ont fait le bon choix, celui de renoncer au régime, alors que 98 p. 100 des députés libéraux ont malheureusement fait le mauvais, en décidant de continuer de s'en prévaloir. Quel genre de message cela envoie-t-il au contribuable canadien qui voit son revenu disponible diminuer de plus en plus chaque jour? Quel genre de message cela envoie-t-il au contribuable canadien moyen qui est accablé parce que son revenu brut fait l'objet d'un taux d'imposition de 63 p. 100? Cela lui indique-t-il que le gouvernement est prêt à s'attaquer sérieusement à la crise financière que nous vivons actuellement?

J'espère simplement que, avant la fin de la législature, la Chambre des communes verra le gouvernement libéral établir un plan net et précis afin de modifier les habitudes de dépenses qu'il a héritées des conservateurs, à qui elles avaient été transmises par les libéraux.

Le ministre des Finances a parlé d'objectifs, de cibles. Mais il préfère les cibles mouvantes. Il parle d'objectifs mobiles. Ils sont bien commodes, car, si on les rate, on peut toujours dire que c'est parce qu'ils bougent.

Le FMI, l'Institut C.D. Howe et presque tous les groupes de réflexion dans le domaine économique au Canada et beaucoup d'organismes américains n'ont pas mâché leurs mots. Ils ont dit au gouvernement canadien, au gouvernement libéral, qu'il faisait mieux de maîtriser ses dépenses et d'abaisser les impôts, sans quoi il serait dans le pétrin. J'espère que le message a été entendu.

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends part au débat sur le projet de loi C-90.

Certains députés ont laissé entendre que le projet de loi C-90 faisait partie de l'autre aspect de nos engagements budgétaires. Dans notre budget de 1995, il est dit que nous allons réduire les dépenses de sept dollars pour chaque dollar d'augmentation des recettes. Malheureusement, ce projet de loi traite de l'augmentation des recettes. Il va sans dire que la plupart des gens n'aiment pas les hausses d'impôt. En fait, personne n'aime cela.

Il est question, dans le projet de loi, d'une hausse du prix de l'essence de 1,5 cent le litre. Je pense que nous sommes assez grands pour admettre que cette hausse fera mal, notamment, aux vendeurs à commission ainsi qu'aux petites et moyennes entreprises qui utilisent de l'essence dans leurs activités. Mais il faut aussi se rendre compte également que le Canada jouit d'un des plus faibles prix de l'essence dans le monde entier. Nous sommes largement les bénéficiaires d'un programme de carburant très bon marché au Canada.

Je voudrais parler d'autres questions qui ont été soulevées par mes collègues réformistes aujourd'hui, lesquels se demandent quand nous allons maîtriser nos dépenses. Je ne sais pas où est le Parti réformiste depuis deux ans, mais il me semble que nous avons réduit considérablement nos dépenses, ne serait-ce que dans la fonction publique, où 45 000 postes seront supprimés. J'ai vu le ministère des Ressources naturelles réduit de moitié. Il y a eu le projet de loi sur la privatisation du CN. Il y a eu le projet de loi sur la participation du gouvernement dans Petro-Canada. Et le reste et le reste. Il y a eu des compressions de toutes sortes.

(1525)

Bien sûr, lorsqu'il faut couper, il faut le faire équitablement. Tout le processus d'examen des programmes visait à trouver, dans chaque ministère, où il était possible de couper sans porter atteinte à


15490

notre filet de sécurité sociale, qui est un élément très important de notre société.

Je suis très fier d'être membre d'un gouvernement qui s'y prend ainsi pour réduire le déficit et la dette. Je regarde certains de mes collègues, surtout ceux de l'Ontario, et, souvent, je me demande s'ils sont déjà passés par un processus de réflexion semblable et si nous nous étions bien occupés de certaines des personnes les plus vulnérables de notre société.

Il est intéressant de souligner que, il y a deux semaines seulement, le vérificateur général a déposé un rapport dans lequel il demandait si nous pouvions assumer la taille de la dette du Canada. Qu'est-ce que cela signifie? Disons que si nous administrons une entreprise, il peut arriver un point où la dette devient si grosse par rapport aux revenus que l'entreprise ne peut tout simplement plus continuer de fonctionner et devient insolvable. En fait, certaines personnes ont laissé entendre que, si nous appliquions ce test au pays, nous pourrions fort bien découvrir que le Canada est insolvable, qu'il est incapable de payer sa dette. Notre dette s'accroît à cause des taux d'intérêt, et tant que les taux d'intérêt resteront supérieurs au taux de croissance économique, la dette continuera de s'accumuler et nous devrons réduire encore davantage les dépenses publiques.

Certaines personnes pensent que nous sommes dans une impasse. Cependant, le gouvernement, particulièrement par l'entremise de son ministre des Finances, a mis en place un train de mesures afin de réduire le déficit à 3 p. 100 du produit intérieur brut. Ce n'est pas là une fin en soi. J'ai entendu le ministre dire et répéter que, grâce aux objectifs mobiles sur deux ans, nous continuerons de nous concentrer sur la réduction du déficit d'une année à l'autre, ce qui nous amènera à dépasser l'objectif de 3 p. 100 du PIB.

La Chambre est actuellement saisie d'un certain nombre de mesures fiscales. On a eu un débat intéressant sur le projet de loi S-9, qui porte sur la Convention Canada-États-Unis en matière d'impôts. Je ne veux pas parler de cette mesure législative puisque nous sommes en train de débattre le projet de loi C-90, mais certaines choses fort intéressantes sont ressorties de ce débat. Le député de Kamloops était surpris que le Parti réformiste ait accepté certains des aspects négatifs de la Convention Canada-États-Unis en matière d'impôts, soit les dispositions qui semblent aider les personnes à revenu élevé. Je me suis demandé pourquoi le député réagissait de la sorte parce qu'il semble aussi s'intéresser au concept d'une réforme fiscale, plus précisément à certaines propositions que le Parti réformiste a faites au sujet d'un impôt uniforme. Je remarque que le député doit participer à une conférence sur le sujet plus tard ce mois-ci.

Je veux parler de façon générale du concept de l'impôt uniforme. À mon avis, ce concept est aussi une forme de modification fiscale et représente une redistribution du fardeau fiscal au sein du régime fiscal canadien.

Beaucoup des propositions du Parti réformiste semblent simples à prime abord. Pourquoi n'avons-nous pas un régime simple? Pour beaucoup de Canadiens, le régime fiscal est complexe. Cela ne fait aucun doute. Je sais cependant que moins de 50 p. 100 des Canadiens ont besoin de l'aide de professionnels pour produire leur déclaration d'impôt. La personne moyenne peut encore produire sa déclaration d'impôt sans l'aide d'un comptable ou d'un fiscaliste. Les gens qui ont besoin d'aide sont habituellement ceux dont le revenu est élevé. Ils essaient de profiter de certains crédits d'impôts et de certains avantages fiscaux qu'offre le système.

(1530)

L'imposition est un élément de la politique budgétaire. Le gouvernement essaie de stimuler certains aspects de l'économie en ayant recours à des dispositions fiscales qui avantagent certains secteurs par rapport à d'autres. Les membres du Parti réformiste devraient être au courant de l'aide apportée dans l'Ouest au secteur du pétrole et du gaz grâce à certaines mesures comme les actions accréditives et autres types d'investissements qu'ont permis certaines incitations fiscales et qui ont encouragé la prospection.

Fait intéressant, l'idée d'un impôt uniforme est née en Angleterre. Au début, l'impôt uniforme était davantage considéré comme une mesure de redistribution du revenu. Il était considéré comme de l'argent repassant du gouvernement aux contribuables. Il s'agissait d'un impôt négatif sur le revenu. C'était une façon d'éliminer une multitude de programmes sociaux alors en place et de recourir au système fiscal pour distribuer ces ressources aux gens. Les gens dans la tranche de revenu inférieur étaient des bénéficiaires nets des ressources qui leur étaient allouées par le gouvernement et avaient un revenu annuel garanti ou quelque chose du genre. Bien sûr, les gens au-dessus d'une certaine moyenne étaient des contribuables nets.

Fait assez surprenant, la situation a sensiblement changé. D'après ce que j'ai entendu, cette formule est devenue très populaire aux États-Unis en particulier. Aujourd'hui, il n'est plus du tout question de redistribution de revenu. En fait, il est question d'uniformiser les taux d'imposition existants.

Au Canada, nous avons trois grands niveaux d'imposition. Un impôt uniforme éliminerait tout cela et établirait un seul niveau. Toutefois, si je comprends bien la proposition, cette formule permettrait aussi à certains, dans la plus faible tranche de revenus, d'être complètement exonérés d'impôt. Dans un sens, ce serait un régime à deux niveaux: certains ne paieraient pas d'impôt tandis que les autres paieraient tous une part égale. Il n'est pas nécessaire d'être un génie en arithmétique pour découvrir qui paiera l'impôt.

Certains aiment dire que si l'on retire tous les avantages et toutes les fioritures du système actuel, l'efficacité du régime serait tellement plus grande qu'on n'aurait pas besoin de modifier le niveau d'imposition. Ce niveau serait réduit et, une fois la poussière retombée, personne ne paierait davantage qu'avant. Certains paieraient un peu moins et tout le monde comprendrait mieux le système. Ce serait donc un système efficace.

Tous ces arguments sont très intéressants pour vendre le produit, mais ces promesses ne se réaliseraient pas. Ce n'est tout simple-


15491

ment pas vrai. Dans le moment, au Canada, 63 p. 100 de la somme totale versée en impôts provient de 30 p. 100 des contribuables, les 30 p. 100 les plus haut placés dans l'échelle des revenus. On voit tout de suite que nous avons un système progressif, c'est-à-dire que lorsqu'un personne gagne plus d'argent, elle paie plus d'impôts.

Certains députés diront qu'ils connaissent un millionnaire qui n'a rien versé au fisc, l'an dernier. Il existe de tels cas mais, dans les faits, c'est très rare. La vérité, c'est qu'on constate régulièrement-et je le répète parce que c'est significatif et que ça mérite d'être répété-que 63 p. 100 de l'ensemble de l'impôt payé au Canada est versé par les 30 p. 100 des contribuables qui gagnent le plus d'argent.

Que se passe-t-il si on uniformise les taux d'imposition? En gros, une seule chose, on va soustraire à l'obligation fiscale les 30 p 100 supérieurs, il n'est pas question des 20 p. 100 inférieurs qui ne payent pas d'impôts, et on va en faire porter le fardeau à la classe moyenne. Et tout le monde le sait, dans ce pays, la classe moyenne en a raz le bol de payer des impôts. Elle pense qu'elle en paye trop. C'est la classe moyenne, les familles à deux revenus qui vont faire les frais d'un impôt uniforme.

Le député de Kamloops était sidéré que le Parti réformiste soit en faveur de la Convention Canada-États-Unis en matière d'impôts et des faveurs accordées par ce traité aux personnes très riches. J'ose avancer que c'est ce même élément, ces mêmes personnes que représente ce parti, qui réclament un impôt uniforme.

(1535)

Ceux qui bénéficieraient d'un tel impôt seraient les très, très riches. Je ne suis pas le seul à le dire. Selon la revue U.S. Business News, les gens qui, aux États-Unis, gagnent plus de 200 000 $ s'en tireraient beaucoup mieux avec un impôt uniforme de 19 p. 100. D'après David Bond, économiste à la Hongkong Bank of Canada, un impôt uniforme aggraverait la disparité des revenus. La plupart des économistes qui, à travers le monde, ont étudié la question disent que l'impôt uniforme n'est pas viable principalement parce qu'il a pour effet d'augmenter les impôts de ceux qui sont le moins en mesure d'en payer.

Qu'est ce qui ne va pas dans le régime fiscal? Très souvent, les gens proposent des solutions qui ne visent pas les bons problèmes. Il est vrai que le régime fiscal canadien est très complexe. Est-il nécessaire que le système soit aussi complexe? Pas du tout. Nous pouvons le simplifier. Il suffirait, dans un premier temps, de ne plus le modifier toutes les semaines. Nous changeons au moins un aspect de notre régime fiscal chaque semaine. Ces changements constants créent une situation où personne ne comprend plus rien. Si nous imposions tout simplement un moratoire à tous les changements, peut-être arriverions- nous à comprendre quelque chose.

Quel est l'aspect le plus frustrant du régime fiscal? Ce n'est pas tant la production des déclarations que les taux d'imposition. Les Canadiens déplorent constamment l'existence de l'économie souterraine. Les gens exportent leur argent vers les îles Turks et Caicos, ou le paradis fiscal de leur choix, pour éviter de payer de l'impôt. Leur frustration ne vient pas du régime fiscal, mais plutôt des taux d'imposition et des montants que nous devons payer.

D'innombrables études internationales ont examiné les régimes où les impôts avaient été augmentés. Dans chaque cas, elles ont révélé un lien direct entre l'économie souterraine et l'évasion fiscale. La TPS est un autre symptôme de l'évasion fiscale. La difficulté réside dans le taux d'imposition. Le taux du Canada est le deuxième plus élevé parmi ceux de tous les pays de l'OCDE; il est légèrement inférieur à celui de la France. Lorsque les taux d'imposition atteignent des seuils aussi élevés que ceux que nous connaissons maintenant, on peut s'attendre à voir des cas d'évasion fiscale et d'évitement fiscal.

Une modification du système ne changera rien au fait que nous prélevons environ 123 milliards de recettes fiscales. Étant donné notre déficit et notre dette, nous ne pouvons pas changer cela pour le moment. Ce que nous visons, bien entendu, c'est un programme de réduction du déficit et de la dette qui nous permettra d'abaisser les taux d'imposition après l'an 2000. Cette diminution des taux d'impôt favoriserait une confiance accrue dans notre régime fiscal et corrigerait en partie la perte de recettes fiscales.

En fait, j'ai souvent été partisan de demander aux Turks et Caicos de devenir une de nos provinces. C'est un débat qui a eu lieu à la Chambre des communes, il y a quelques années. J'ai été aux Turks et Caicos et j'ai parlé à des gens de l'endroit. Je pense que ce serait une bonne chose, parce que nous pourrions profiter de toutes ces recettes fiscales qui se cachent là-bas.

Toute la question de la politique fiscale et monétaire est complexe, mais le régime fiscal reste un aspect très important de nos outils financiers susceptibles de stimuler divers aspects de notre économie. Un impôt uniforme éliminerait essentiellement ce genre d'approche manipulatrice de l'économie et forcerait le gouvernement à traiter tout le monde de la même façon.

Est-ce que le secteur forestier est identique au secteur automobile? Est-ce que les producteurs de blé de la Saskatchewan sont comme les producteurs de boeuf de l'Ontario? Je suppose que non. Je soupçonne que les industries de ce pays, comme le secteur pétrolier, l'exploration ou le secteur minier qui dépendent beaucoup des capitaux cherchent à tirer profit d'une dépréciation rapide, mais de façons différentes.

(1540)

Nous pouvons dire que nous ne voulons pas du secteur minier et, en fait, c'est ce qui se produit au Canada. Les industries minières vont s'installer dans le Sud. Elles disent qu'il y a trop d'entraves à leur établissement au Canada et qu'il est moins coûteux de partir au Chili. La cause est le régime fiscal. Nous devons nous rappeler comment elles ont été mises sur pied. Elles ont également obtenu d'énormes encouragements fiscaux pour lancer leurs activités. Il n'y a pas un pays au monde qui ne recourt pas à une forme ou une autre de favoritisme pour promouvoir certains secteurs.


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Aujourd'hui, nous voulons promouvoir notre secteur des sciences et de la technologie. Le gouvernement accorde actuellement des crédits d'impôt d'environ un milliard de dollars au titre des sciences. Bien entendu, ces crédits d'impôt visent à aider le Canada à participer à la révolution scientifique et technologique et les petites et moyennes entreprises à créer des emplois au Canada. Pour ma part, j'estime que ces crédits d'impôt au titre des sciences et de la technologie sont peu judicieux. Ils ne vont pas aux petites et moyennes entreprises qui en ont vraiment besoin. Une grande partie de ces dépenses sont affectées aux multinationales et aux grandes sociétés. Ces crédits ne permettent pas d'atteindre les résultats escomptés.

Nous devons donc débattre de ces questions à la Chambre. Nous devons modifier et améliorer notre régime fiscal pour qu'il soit dans l'intérêt de tous les Canadiens et qu'il permette de créer des emplois. Mais des solutions simples à des problèmes complexes ne suffiront pas.

Ce projet de loi, que j'appuie, bien sûr, est une mesure financière du gouvernement et un élément indispensable du budget de 1995. Je suis heureux de faire partie d'un gouvernement qui continue d'honorer l'engagement qu'il a pris de répondre aux objectifs qu'il s'est fixé dans ce budget.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais toucher un mot sur les observations formulées par le député de Durham, notamment sur les propos qu'il a tenus contre le principe d'un impôt uniforme. À en juger par ce qu'il a dit, je ne crois pas qu'il comprenne grand-chose à l'impôt uniforme. L'impôt uniforme est un moyen simple de faire en sorte le régime fiscal soit équitable pour tous les contribuables. Il renforcera considérablement les incitatifs à travailler, à investir et à épargner.

Le député a parlé du problème que connaît ce pays. Le problème national, c'est la dette et les impôts élevés. Cela n'a rien à voir avec le déficit. On peut faire face au déficit, il suffit de hausser les impôts et de réduire les dépenses, et le tour est joué. Le gouvernement affirme que le problème, c'est le déficit et qu'il va ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB. Le gouvernement ne fait qu'empirer le problème. Il agrandit le trou en augmentant la dette.

Ce qu'il faut faire, c'est scruter nos dépenses à la loupe et trouver des moyens de stimuler l'économie, de créer un régime fiscal qui soit favorable à la croissance, quelque chose qui va amener le gouvernement à nous laisser tranquilles, à cesser de puiser dans nos poches, afin que nous puissions jouir d'un meilleur revenu disponible.

J'en ai marre de voir les gouvernements se succéder sans rien modifier au régime fiscal, sous prétexte de réduire le déficit. Ce pays a besoin d'une réforme fiscale en profondeur. Tous les autres pays se préoccupent de leurs impôts élevés. Tous les autres pays agissent. Et le député de Durham, un ministériel, vient nous dire que c'est une solution simpliste.

Dans les mois qui viennent, tout au long de l'année, il aura l'occasion de se rendre compte que ce n'est pas une solution simpliste, qu'il s'agit au contraire d'une solution très complexe. Le simple impôt uniforme est moins simple qu'il n'y paraît. Le simple impôt uniforme n'est pas aussi simple à mettre en oeuvre que le laisse entendre, selon lui, le Parti réformiste. Il y a dans ce domaine bien des choses à discuter et à débattre. Incontestablement, si on élargit l'assiette fiscale, si on procède à une redistribution à cet égard, il est possible de réduire le taux. L'impôt uniforme fera disparaître tout ce dont a parlé le député, à savoir échappatoires fiscales, incitatifs et abris fiscaux.

Donc, on ne fera plus de distinction entre les recettes de l'industrie forestière ou celles de l'industrie pétrolière et gazière, entre le revenu des riches, celui de la classe moyenne et celui des moins bien nantis. Tout cela, c'est l'assiette fiscale. Nous voulons réduire les impôts au maximum. Nous voulons élargir l'assiette fiscale le plus possible, de façon que nous puissions faire baisser le taux maximum le plus possible. Voilà ce que nous entendons par équité.

Dans le cadre d'un taux uniforme, quelle que soit la forme qu'il prendrait, que ce soit un taux uniforme pur ou proportionnel, d'un taux à la Mills ou à la Hall-Rabushka, ou de tout autre type de taux uniforme, ce qu'il faut, c'est de protéger les gens à faible revenu, qui gagnent le salaire minimum ou à peu près. Nous ne voulons pas que ces gens paient de l'impôt. On va réduire ainsi les pressions exercées sur les programmes sociaux. Les gens à revenu moyen ne seront pas touchés. Leur situation demeurera pratiquement la même. Or, ils vont être heureux de savoir que, lorsqu'on aura fait disparaître les échappatoires fiscales, les encouragements et les abris fiscaux, les riches paieront davantage d'impôt, même si leur taux restera inférieur à ce qu'il est maintenant. C'est l'intérêt d'un taux uniforme et c'est pourquoi nous devrions envisager cette possibilité. Cela peut sembler une solution très simple, mais il n'en est rien.

(1545)

Un taux uniforme n'est pas aussi simple qu'il n'y paraît. C'est très complexe. En fait, il est très difficile et même plus difficile de mettre en oeuvre une chose simple qu'une chose compliquée.

Le ministre de la Justice a présenté le projet de loi sur le contrôle des armes à feu. Il s'agissait d'une mesure extrêmement complexe. C'était une mesure très détaillée, mais il l'a fait adopter sans problèmes. N'est-ce pas vrai, monsieur le Président?

Le taux uniforme va être une réforme fiscale extrêmement difficile à examiner. Je voudrais signaler maintenant que ce n'est pas aussi simple que cela. Je ne dis pas, au nom du Parti réformiste, qu'un taux uniforme est simple. Il s'agit simplement de simplifier le régime. C'est là l'avantage. Grâce à la simplification du régime fiscal, nous pourrons économiser des milliards de dollars de coûts d'observation.

Le député veut-il en savoir davantage, monsieur le Président? Le gouvernement n'aurait plus alors à essayer de procéder à la microgestion de l'économie. Il récompenserait l'initiative en laissant de 75 à 80 p. 100 de tous les dollars gagnés dans les poches des gens, plutôt que dans celles du gouvernement, ce qui est préférable.


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Le Président: Je suppose que le député de Durham voudrait répondre à cela.

M. Shepherd: Monsieur le Président, tout d'abord, j'ai remarqué que le député lisait un texte. Je devine qu'il s'agit de la bible du Parti réformiste. Je crois que les députés du parti de la réforme devraient d'abord examiner toute la structure fiscale canadienne.

Je n'arrivais pas à le croire lorsqu'il a dit que c'était une taxe difficile, une taxe complexe. Il a ensuite présenté une analyse si simple qu'il est difficile d'en parler ici. Je n'arrive pas à comprendre sa philosophie.

Je vais répéter une autre statistique, une statistique clé provenant de leur cher Fraser Institute: 63 p. 100 de tous les impôts payés au Canada sont payés par les 30 p. 100 de contribuables qui jouissent des revenus les plus élevés.

Peu importe les arguments du Parti réformiste, ses membres ne vont rien changer à cette statistique. Soyons réalistes. S'ils veulent épargner ceux qui touchent les plus petits revenus, nous comprenons cela.

Cela pose certains problèmes parce que les gens se verraient acculés à une montagne d'impôts. On empêcherait les gens pauvres de s'acquitter de leurs dettes et d'améliorer leur sort parce qu'ils n'auraient pas les moyens de s'en sortir. Dès qu'ils gagneraient un dollar de plus, ils se retrouveraient dans l'obligation de payer un taux d'impôt de 23 p. 100. C'est le genre de philosophie que préconise le Parti réformiste. Ils maintiendraient les pauvres dans la pauvreté et transféreraient le fardeau fiscal des gens très riches, que ce parti représente, aux gens qui ont revenus moyens.

Cela ne passera pas. Leur message ne passera ni dans l'Ouest ni ici.

Le président suppléant (M. Kilger): Je sais que le député de Durham vous adressait la parole par mon entremise.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-90, qui a précisément pour but de permettre au gouvernement de majorer les taux d'imposition déjà élevés que l'on fait payer aux contribuables canadiens.

Je n'en reviens pas, d'une fois à l'autre, du mépris dont le gouvernement fédéral fait preuve à l'égard de l'intelligence des Canadiens. Le projet de loi dont nous sommes saisis va carrément à l'encontre de l'engagement pris dans le livre rouge, le programme électoral du Parti libéral. De plus, les libéraux avaient promis aux Canadiens de ne pas majorer les impôts. Les compressions auxquelles il faudra s'astreindre tôt ou tard, peu importe le gouvernement au pouvoir, si l'on veut équilibrer notre budget s'inscrivent donc dans un contexte de malhonnêteté, de fausseté et de belles paroles.

Nous venons d'ailleurs d'entendre le meilleur exemple qu'il m'aie jamais été donné d'entendre de ces beaux discours qu'on nous sert tout le temps. Quand le député de Durham a pris la parole dans le cadre du débat sur le projet de loi C-90, cette mesure de majoration des taux d'impôt, il a dit que le problème n'était pas le régime fiscal, mais les taux d'impôt trop élevés, plus élevés que ceux de tous les pays de l'OCDE, sauf un. Cela ne l'empêche cependant pas d'accorder son appui à un projet de loi qui augmente encore plus les taux d'impôt. C'est ça le double langage dont je parle et que l'on nous tient si souvent.

(1550)

J'aimerais vous donner un ou deux autres exemples de manquement aux promesses faites dans le livre rouge. Durant la campagne électorale, les libéraux ont dit qu'ils pouvaient régler nos problèmes simplement en stimulant l'économie et en créant des emplois. Pas besoin de toucher aux programmes, ni de majorer les impôts. Ils ont dit qu'ils pouvaient régler nos problèmes en créant des emplois et en stimulant l'économie.

Après deux années de régime libéral et de multiples réductions de programmes et de services, il reste encore à voir la création d'emplois et l'essor économique régler nos problèmes. Nous rappelons presque quotidiennement au gouvernement que la TPS est une escroquerie. La vice-première ministre nous avait dit qu'elle démissionnerait dans l'année si la TPS n'était pas abolie. Pourtant, elle est encore là. Je l'ai aperçue à la Chambre aujourd'hui.

Le gouvernement tient ce genre de discours aux Canadiens en période électorale, sachant très bien que les questions à la mode amènent des votes. Les libéraux disent aux Canadiens ce qu'ils veulent entendre. Une fois au pouvoir, les libéraux ont renoncé à leurs engagements, en espérant que, d'ici les prochaines élections, les Canadiens auront oublié les promesses faites.

Le gouvernement a aussi fait preuve d'un manque d'honnêteté envers les fonctionnaires fédéraux lorsqu'il leur a dit qu'il ne ferait pas de compressions au sein de la fonction publique, que leurs emplois seraient protégés, qu'il allait respecter les dispositions des conventions qui ont trait à la sécurité d'emploi, et ainsi de suite. Après seulement deux années de régime libéral, 50 000 emplois sont en jeu dans la fonction publique. Qu'est-il advenu de la promesse faite à la fonction publique de notre pays? Il semble bien que le gouvernement ait aussi renoncé à cet engagement.

Le gouvernement avait aussi promis de maintenir le financement des programmes sociaux. Il avait dit qu'il ne couperait jamais comme le ferait le Parti réformiste. Le gouvernement allait protéger nos précieux programmes sociaux, ces programmes qui sont le tissu même de notre filet de sécurité sociale. Encore là, après seulement deux années au pouvoir, le gouvernement a fait des compressions beaucoup plus importantes que les mesures que nous proposions et que les libéraux dénonçaient à grands cris. Les mesures prises par le gouvernement ont été encore plus draconiennes que tout ce que le Parti réformiste a pu proposer. Si la compression de sept milliards dans les transferts accordés aux provinces au titre des dépenses sociales n'est pas une mesure excessive, je ne sais pas comment qualifier celle-ci.

Les Canadiens ne seront pas naïfs au point d'oublier tout cela avant les prochaines élections. Il va de soi que le Parti réformiste fera tout ce qu'il peut pour s'assurer que les Canadiens n'oublient pas ces engagements non respectés. Je suis convaincu qu'aux pro-


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chaines élections le gouvernement aura des comptes à rendre aux contribuables canadiens.

Les députés d'en face disent constamment qu'ils sont réceptifs, qu'ils sont sensibles, qu'ils ne sont pas durs et sans compassion comme les réformistes, qu'ils se préoccupent de la dimension humaine des problèmes. Je n'ai jamais entendu des propos aussi hypocrites. Les libéraux n'ont pas de leçon à donner en matière de compassion. Si je me suis tourné vers la profession que les gens tiennent peut-être le moins en estime-du moins à l'extérieur de cette Chambre-c'est précisément parce que je me préoccupe du sort des autres. Je me préoccupe beaucoup de l'incidence qu'auront les mesures prises par les gouvernements libéraux et conservateurs des 30 dernières années sur l'avenir de mes enfants et de mes petits-enfants. Ce n'est ni de la bienveillance ni de la compassion, mais bien de l'égoïsme. C'est la génération du moi qui dit que non seulement la prochaine génération, celle de nos enfants et petits-enfants, devra se débrouiller seule, mais que les trois ou quatre générations à venir devront payer pour son avidité. Ce n'est ni de la bienveillance ni de la compassion. C'est la génération du moi.

(1555)

Aujourd'hui nous débattons le projet de loi C-90 sur des hausses de taxes. Je voulais m'arrêter plus précisément sur l'augmentation de la taxe sur l'essence, qui est fixée à 1,5c. le litre. Depuis 30 ans, chaque fois que l'argent se fait plus rare, les gouvernements se tournent vers la vache à lait, c'est-à-dire les taxes sur l'alcool, les cigarettes et l'essence. Encore une fois, dans le dernier budget, c'est à l'essence que le gouvernement a pensé pour combler l'écart.

Nous avons entendu le ministre des Finances s'engager à établir un rapport entre les hausses de taxes et la réduction des dépenses, ce que nous n'avions jamais vu dans le livre rouge. Comme je l'ai mentionné précédemment, les libéraux ont promis dans le livre rouge de ne pas augmenter les impôts des Canadiens. Ils s'engagent maintenant à maintenir un équilibre entre les montants résultant des coupes et les montants provenant des hausses de taxes. À mon avis, c'est une grave violation d'une promesse électorale.

Il y a encore la TPS qui s'applique en sus de la hausse de la taxe sur l'essence de 1,5c. le litre. La TPS devait disparaître. Il y aurait donc une double hausse de la taxe sur l'essence.

Il est important que les députés regardent en arrière et voient à quel moment la taxe d'accise a été imposée sur l'essence. C'est en 1975, encore sous un gouvernement libéral, que la taxe d'accise a été imposée pour la première fois sur l'essence; c'était une taxe spéciale sur l'essence. C'était la première fois qu'on appliquait la taxe d'accise à l'essence, et ce devait être une taxe éphémère. Combien de fois avons-nous déjà entendu cela?

Il devait donc s'agir d'une taxe éphémère destinée à combler l'écart qui s'était creusé entre les paiement d'indemnisation des importateurs de pétrole et les recettes de la redevance d'exportation sur le pétrole. Ce système d'indemnisation était né à la suite de la décision de 1974 de maintenir les prix canadiens du pétrole à des niveaux inférieurs aux cours mondiaux.

Au fond, le gouvernement de l'époque avait adopté une politique de prix canadien du pétrole, en vertu de laquelle les recettes d'une taxe à l'exportation servaient à protéger les consommateurs de pétrole importé contre le plein impact du cours international. L'intention était sûrement noble. Cependant, comme nous le voyons si souvent en matière fiscale, les taxes qui devaient être éphémères, ou spéciales ou temporaires ont le don de devenir rapidement permanentes.

On n'a qu'à se rappeler l'imposition en 1917 d'un impôt temporaire sur le revenu des Canadiens pour voir ce qu'il en est advenu, et voir, de temporaire qu'il était, à quel point il est devenu complexe et coûteux.

La même chose se vérifie dans tous les sens à propos de la taxe d'accise sur les carburants. La taxe d'accise est restée, et les fins auxquelles devaient servir ses recettes ont certainement changé. La taxe ne sert plus à la fin à laquelle elle était initialement destinée. La taxe demeure cependant et continue d'augmenter de 2c., 1,5c. ou 1c. à chaque budget présenté depuis un certain nombre d'années. Elle a manifestement changé maintenant, pour devenir, de taxe spéciale destinée à une fin spéciale qu'elle était, une taxe générale source de recettes générales.

Au cours de la dernière session du Parlement, au Comité des ressources naturelles dont je fais maintenant partie, les membres néo-démocrates avaient présenté une proposition pour que le comité étudie l'établissement du prix de l'essence au Canada. Ils croyaient que c'était à cause d'un quelconque croque-mitaine que les prix de l'essence étaient si élevés au Canada alors qu'on enregistrait des surplus de pétrole sur le marché international et que les cours du pétrole brut étaient bas.

Point besoin d'être un génie pour comprendre le problème. De nombreuses études effectuées au fil des dernières années ont révélé que c'est le gouvernement qui est le croque-mitaine dans cette histoire. Si nous analysons le prix de l'essence à Vancouver, par exemple, où il s'établit à 59,6c. le litre, nous constatons que 28,9c. vont directement aux trésors provincial et fédéral. Il ne s'agit pas de redevances pétrolières ni d'impôt sur le revenu des sociétés. Il s'agit simplement de taxes sur l'essence dissimulées dans le prix de détail. Le reste du prix de l'essence sert à couvrir les coûts d'exploration, d'extraction, de raffinage et de commercialisation, tandis que le distributeur se contente de 3c. pour couvrir ses coûts d'exploitation et ses frais généraux.

(1600)

Nous pouvons multiplier les exemples. D'après les chiffres fournis par le service des statistiques du gouvernement, le prix de l'essence est de 52,3c. le litre à Calgary. Là-dessus, 22,4c. le litre vont directement aux gouvernements sous forme de taxes, ce qui ne laisse que 3,5c. le litre au commerçant pour couvrir ses frais, et le reste va à la prospection, au raffinage et à la commercialisation. J'ai une multitude d'exemples où les taxes représentent près de 50 p. 100 du coût de l'essence.

On continue de nous imposer ces augmentations de taxes sans que nous puissions rien dire. Comme ce sont des taxes cachées, il arrive souvent que le consommateur ne s'aperçoive pas des augmentations. Les fortes hausses du prix de l'essence que nous avons observées ces dernières années ne sont pas imputables à la collusion des pétrolières pour fixer les prix, mais aux gouvernements qui manquent toujours d'argent et exploitent toujours davantage cette source de recettes.


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Tous les députés peuvent en discuter avec leurs électeurs et leur demander quel pourcentage du prix de l'essence les taxes représentent. Je suis prêt à parier que bien peu de consommateurs le savent. Si nous devons continuer à taxer les Canadiens de la sorte, il est temps d'avoir au moins l'honnêteté d'être directs et de faire savoir aux contribuables où leur argent s'en va.

En étudiant ces niveaux d'imposition et leurs conséquences pour notre position face aux autres pays, il faut admettre, je crois, que ces hausses des taxes ont d'importants effets. L'essence constitue l'un de nos avantages concurrentiels naturels sur le marché mondial, et elle compense, dans l'acheminement de nos produits vers les marchés, l'énormité des distances et nos coûts de transport élevés.

Il faut absolument être en mesure de profiter des avantages que nous offre la nature pour contrebalancer certaines de nos faiblesses. L'avantage que nous procurent nos ressources naturelles s'effrite grandement du fait que les Américains peuvent venir au Canada acheter notre pétrole brut avec leur dollar qui vaut 1,30 $, importer le produit dans leur pays pour le raffiner et le vendre aux consommateurs pour environ la moitié du prix que nous devons payer au Canada. Ce n'est pas, à mon avis, ce que les Canadiens veulent. Je pense que le gouvernement ne veut pas non plus que le Canada devienne un simple exportateur de ressources naturelles brutes.

Ce n'est pas ainsi qu'on créera des emplois, qu'on accroîtra notre richesse et qu'on relancera l'économie. Le temps est venu d'appuyer les industries et les manufacturiers canadiens et de les laisser profiter de l'avantage que nous vaut l'abondance des ressources naturelles au Canada.

Le gouvernement préfère toutefois utiliser les méthodes habituelles pour amasser de l'argent et avoir recours encore une fois à sa vache à lait. Cette pauvre vache à lait donne tout ce qu'elle a et risque même fortement de mourir de mammite à force de surproduire.

(1605)

Je pourrais vous parler indéfiniment de l'iniquité des taxes et des impôts qui n'en finissent plus. Je crois que le gouvernement devrait sérieusement réfléchir aux répercussions des taxes et des impôts élevés sur notre économie et à l'incidence de la dette et du déficit sur notre pays.

Je demande au premier ministre et au ministre des Finances de tenir compte des paroles de F.J. Clark qui a dit: Un politicien ne pense qu'aux prochaines élections. Un homme d'État pense à la prochaine génération.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais présenter quelques observations sur le projet de loi C-90, qui émane du ministère des Finances et qui a été présenté par le ministre des Finances. Je voudrais revenir un instant sur ce que celui-ci a dit lorsqu'il a critiqué, en tant que député de l'opposition, le dernier budget du gouvernement précédent.

Je voudrais citer des déclarations qu'il a faites le 27 avril 1993 et qui figurent au hansard de cette date. Le ministre avait alors présenté l'observation suivante, notamment: «Les Canadiens ne veulent plus être inondés de nouvelles taxes en provenance d'Ottawa chaque printemps. Ils veulent que les gouvernements renoncent à leurs petits jeux politiques, car notre prospérité est compromise.»

Le projet de loi C-90 n'est rien de plus qu'une ponction fiscale. Il augmente les impôts en augmentant la taxe d'accise. Il vise à hausser la taxe sur l'essence. Il fait passer la taxe sur le transport aérien de 50 $ à 55 $. Il augmente la taxe sur les cigarettes. C'est bien simple: il s'attaque au portefeuille des Canadiens, tant à la pompe que dans les airs.

Cela bat donc en brèche l'observation que le ministre avait alors présentée. En tant que porte-parole de l'opposition en matière de finances, il avait dit que les Canadiens ne voulaient plus être inondés de nouvelles taxes chaque printemps. Toutefois, depuis deux printemps qu'il est en poste, les taxes ont fait un bond au Canada. Il ne s'en est jamais pris au portefeuille des Canadiens-et il mérite pour cela une certaine gratitude de notre part-mais il s'est attaqué à tout le reste. En fait, Revenu Canada arrive même à tirer par tous les moyens possibles davantage d'argent des entreprises et des particuliers dont il vérifie les comptes.

J'ai une deuxième citation à vous donner: «Les Canadiens ne veulent tout simplement plus des politiques économiques qui font fi des aspirations de la population et qui ne permettent pas de prendre des décisions pour l'avenir.» Le ministre croit-il que les Canadiens souhaitent voir à la pompe une hausse des taxes sur l'essence? Croit-il que les Canadiens veulent payer davantage de taxes sur les produits et services? Croit-il que les Canadiens veulent payer des taxes plus élevées à l'aéroport? Non, ils ne veulent pas cela.

Le ministre croit-il que les Canadiens souhaitent voir le gouvernement aggraver le problème de la dette? Il a acculé notre pays à la faillite en s'engageant à ramener le déficit à 3 p. 100 du PIB. Il ne réduira pas le déficit plus que cela? Il va continuer de nous enliser, plus lentement que les conservateurs, mais il va continuer de le faire. Croyait-il que les Canadiens souhaitaient ce genre de pays et pareille aggravation de la situation?

À titre de ministre des Finances, il a maintenant l'occasion de rectifier la situation et d'appliquer à la lettre ses idées. Il a la chance d'être aux commandes et de prendre les mesures qui s'imposent pour aider l'économie et la stimuler. Il dit que la solution réside dans la création d'emplois. Or, les gouvernements ne créent pas d'emplois. C'est le secteur privé qui crée la majorité des emplois, 85 p. 100 d'entre eux. Personne ne conteste cela. Il faut toutefois la confiance des consommateurs et des investisseurs pour créer des emplois.

En augmentant sans cesse les impôts, que ce soit par le biais des taxes d'accise, de l'impôt sur le revenu des particuliers ou des sociétés, des charges sociales ou des taxes foncières, le gouvernement porte atteinte à leur confiance et l'ébranle. En se contentant de faire de beaux discours à ce sujet, le ministre des Finances ne fait que jeter de la poudre aux yeux des Canadiens pour les duper. Il leur rend un très mauvais service en leur faisant croire qu'il est en train de régler le problème, alors qu'en fait il l'aggrave.

Je crois avoir déjà donné deux exemples où le ministre des Finances pourrait faire quelque chose pour résoudre des problèmes qu'il a lui-même dénoncés, mais où il ne fait rien. Il continue d'agir de la même façon. Il défend le statu quo. Au ministère des Finances, quelle que soit la personne qui occupe le poste de ministre, il semble qu'il n'y ait qu'une seule façon de faire. Cela doit changer.


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(1610)

J'ai une troisième citation du ministre des Finances: «La variabilité des modalités d'imposition selon les ordres de gouvernement s'est traduite par des distorsions économiques, des coûts de perception non rentables et inutiles ainsi que l'impression de plus en plus répandue que le régime fiscal est irrationnel et injuste. Les Canadiens sont disposés à payer leur juste part d'impôts. Ils s'opposent toutefois à la discrimination dont ils sont victimes au profit d'autres. Ils s'indignent lorsque les services auxquels ils s'attendent sont réduits et que leurs impôts augmentent. Les Canadiens ont vraiment l'impression que le système est corrompu.»

Si le ministre des Finances croyait vraiment à ce qu'il disait à l'époque, je voudrais lui rafraîchir la mémoire. S'il y croit encore aujourd'hui, il s'ensuit que nous devons vraiment réexaminer le régime fiscal dans son entier, nos méthodes de perception des impôts, nos objectifs, les activités visées et les coûts des programmes.

Nous devons séparer les dépenses fiscales et les dépenses directes. Très peu de députés savent exactement combien nous dépensons pour les garderies par l'entremise des quatre ou cinq programmes qui existent. Nous ne le savons pas parce que nous utilisons la Loi de l'impôt sur le revenu.

Si nous utilisions l'impôt sur le revenu uniquement pour la perception des impôts sans tenir compte des exemptions personnelles, après quoi nous pourrions décider d'aider divers groupes, les gens qui ne peuvent pas travailler, qui ne peuvent subvenir à leurs besoins, ou encore d'aider l'éducation ou les soins de santé, bref tous les programmes que nous voulons subventionner, ce serait bien. Nous devrions mettre cela dans les dépenses directes.

Ensuite, nous pourrions en fixer le taux pour percevoir l'argent qu'il faut pour ces programmes. La simplification permettra de réduire les coûts liés à l'application de la loi. La simplification réglera le problème dont il a parlé lorsqu'il était dans l'opposition, soit la complexité du régime fiscal, celui-là même qu'il défend maintenant depuis deux ans à son poste de ministre des Finances et auquel il a ajouté plus de 1 000 pages de clarifications, de décisions et de justifications pour aider les gens à mieux le comprendre.

Il a dit lui-même que le régime était illogique et injuste. En deux ans, il n'a rien fait d'autre que d'y apporter des modifications mineures, comme une hausse de la taxe d'accise par ci et autre chose par là. Il ne s'est pas attaqué au problème comme il aurait probablement pu et dû le faire.

Je voudrais bien qu'il passe de la parole aux actes, qu'il soit fidèle à sa croyance, à ses idées et à sa profonde conviction que le régime actuel est injuste. Je voudrais qu'il passe de la parole aux actes et qu'il permette au Comité permanent des finances d'étudier une réforme approfondie de notre régime fiscal.

Le temps est venu. S'il croit sincèrement ce qu'il a dit, je défie le ministre des Finances de lancer le débat, de permettre ce genre d'étude pour sortir du domaine des bureaucrates, échapper aux mains des sous-ministres qui veulent faire les choses comme ils l'entendent et uniquement comme ils l'entendent.

Remettons les choses entre les mains des députés qui peuvent participer aux travaux du Comité des finances et qui défendent la volonté et le point de vue de leurs électeurs.

Je suis convaincu que, s'il fait cela, il constatera que beaucoup de Canadiens souhaitent une réforme fiscale. Ils aimeraient que soit mis en place un système qu'ils sont en mesure de comprendre, un système où chaque contribuable peut remplir sa propre déclaration d'impôt, un système qui serait à nouveau équitable, un système où tous paieraient un impôt proportionnel après certaines exemptions. Selon un tel système, un contribuable gagnant 10 fois plus qu'un autre paierait 10 fois plus d'impôts.

Éliminez tous ces abris fiscaux et tous ces stimulants qui perturbent l'économie, qui permettent au gouvernement de manipuler et de diriger nos vies sociale et économique. Nous devons dissocier le régime fiscal de l'infrastructure sociale et économique.

Je regarde les déclarations que le ministre des Finances actuel a faites lorsqu'il était dans l'opposition parce que je fais partie du Comité des finances et que je suis porte-parole de mon parti pour les questions financières, ce qui m'oblige à trouver ce en quoi cet homme croit, ce pour quoi il s'est battu, pour connaître ses valeurs, ses buts et ses objectifs. Mais, maintenant qu'il est ministre des Finances, il n'agit pas selon ses propres convictions. Cela me dépasse.

(1615)

Pendant des années, des députés disent une chose et, lorsqu'ils sont élus, ils font autre chose. Je suis très déçu, comme mon collègue, que les libéraux aient déjà rompu environ 15 promesses contenues dans leur livre rouge. Ils disaient une chose pour se faire élire et, maintenant qu'ils sont élus, ils font exactement le contraire.

Nous les félicitons de ne pas avoir tenu certaines des promesses qu'ils ont faites parce que c'était aller dans la bonne direction. Nous savons qu'il faut comprimer les dépenses et qu'il faut réexaminer les programmes sociaux parce qu'ils comptent pour 67 p. 100 du budget. Nous comprenons cela. Nous espérons que le gouvernement nous écoutera et prendra les difficiles décisions qui doivent être prises.

D'autres réductions de dépenses peuvent encore être faites. Il serait très utile de frapper les subventions directes qui sont versées aux entreprises et aux particuliers et qui coûtent des milliards de dollars.

Le Canada, un pays de 27 millions d'habitants, doit supporter chaque année 12 milliards de dollars en coûts d'observation du régime fiscal, notamment pour payer les services des comptables, les vérifications, les coûts de fonctionnement de ministères comme Revenu Canada, Impôt; les Douanes, qui coûtent 2,2 milliards; le groupe de la TPS, qui coûte environ 500 millions; les avocats et les services de l'impôt. En tout, quelque 12 milliards de dollars doivent changer de mains pour la perception des impôts et l'interprétation de la loi de l'impôt.

Il suffirait de trois mois aux députés pour simplifier le régime fiscal, le rendre plus équitable et donner suite aux dénonciations du ministre des Finances qui, lorsqu'il était dans l'opposition, affirmait que le régime fiscal était illogique et injuste.


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Si le ministre veut un régime logique et équitable, pourquoi n'autorise-t-il pas le Comité permanent des finances à agir? Pourquoi ne permet-il pas à tous les députés de faire quelque chose? Le régime fiscal pourrait rapidement être remis en bon état, pour le bien de tous les Canadiens. Il serait beaucoup plus sensé de procéder de la sorte que de débattre de projets de loi et de sujets insignifiants comme nous le faisons présentement.

Je sais pourquoi le gouvernement croit devoir agir de la sorte. Aussi, je ne m'attarderai pas à cette question. Le gouvernement perd son temps à discuter de l'équité en matière d'emploi, par exemple, et à s'ingérer dans les salles de conférence des entreprises et dans les bureaux du secteur privé pour dire qui doit être embauché et pour surveiller l'application de ses décisions. Il ferait mieux de mettre en place un système qui donnerait davantage confiance aux gens, leur permettrait d'espérer dans l'avenir de leur pays et leur donnerait le sentiment que les politiciens, les dirigeants de ce pays veillent à leurs intérêts à long terme et non à court terme.

Nous avons un problème de déficit et d'endettement, mais la solution ne se trouve pas uniquement dans des réductions répétées des dépenses. Si c'est là notre seule solution, nous ne réglerons jamais le problème.

Dans leur souci de réduire leurs déficits, de trop nombreux gouvernements craignent d'examiner d'autres moyens d'aider les entreprises et de créer des emplois. Le gouvernement ne peut pas continuer à dépenser et stimuler l'économie par des subventions directes. Il doit mettre un terme à cette façon de faire. Nous devons examiner un système et une méthode qui évitent au gouvernement d'avoir à soutenir des personnes et des entreprises en grand nombre, à stimuler la création d'emplois et à financer la construction de patinoires pour le hockey. Il faut laisser plus d'argent aux entreprises. Je sais qu'il s'agit là d'un sujet délicat, monsieur le Président. Mes remarques ne visaient personne en particulier. Les joueurs de hockey ont ma sympathie et j'aime bien les voir jouer.

Cherchons plutôt une façon de donner les moyens de créer des emplois à ceux qui savent comment le faire. Laissons-les agir là où ils sont le plus compétents. À mon avis, le secteur privé est mieux à même de créer des emplois que le gouvernement et les politiciens.

Il a fallu une quinzaine d'années pour que tout le monde le comprenne. Je crois que tous les députés à la Chambre commencent à y croire. Je demande au ministre des Finances de se rappeller ce qu'il a dit il y a deux ans lorsqu'il était du côté de l'opposition et qu'il critiquait le dernier budget du gouvernement précédent. Aujourd'hui, je critique son budget et le projet de loi C-90. Je sais que presque toutes les dispositions ont déjà été mises en oeuvre. Je critique ce qu'il fait en tant que ministre des Finances de la même façon qu'il a critiqué M. Wilson et M. Mazankowski.

Le ministre des Finances a eu la possibilité de faire quelque chose à ce sujet. Il n'a rien fait. Il a laissé les choses comme elles étaient. Il a laissé la Loi de l'impôt sur le revenu telle quelle alors qu'elle devrait être examinée à fond et modifiée. Il nous faut une réforme fiscale en règle, qui réduise les taux marginaux. Le régime fiscal doit être équitable. Peu m'importe les moyens utilisés. Peu m'importe que ce soit au moyen d'un impôt uniforme ou pas. L'important est qu'on procède à une réforme fiscale pour alléger immédiatement les impôts pour les Canadiens-particuliers et entreprises.

(1620)

C'est ainsi que nous allons stimuler l'économie. C'est ainsi que nous allons créer un climat d'optimisme. C'est ainsi que nous allons garantir la sécurité d'emploi aux gens, qui se rendront à leur travail le matin sachant qu'ils auront un emploi à la fin du mois suivant. C'est ça qui fait défaut à présent.

Peu m'importe combien d'argent le gouvernement consacre à la création d'emplois, ça ne marchera pas. Cela ne fait qu'augmenter les dépenses. Cela accroîtra en fait les pressions en faveur de l'augmentation des impôts. Cela va totalement à l'opposé des convictions de ce gouvernement et du ministre des Finances.

Le projet de loi C-90 est une ponction fiscale. C'est le type même de chose auquel s'était opposé le ministre des Finances quand il était du côté de l'opposition. Il veut l'équité. L'équité consiste à réduire les impôts. Elle consiste à réduire les dépenses. À réduire la taille du gouvernement, à avoir un gouvernement moins lourd, qui met moins son nez partout. L'équité consiste à rendre les choses plus équitables pour les gens de toutes conditions, à leur donner espoir-pas à leur donner de faux espoirs, pas à leur dire comme il leur a dit, qu'importe ce qui arrive, nous parviendrons à l'objectif de 3 p. 100 du PIB. C'est faire un saut à la perche de six pouces. Ce n'est pas un objectif difficile à atteindre étant donné les dépenses de ce gouvernement.

Un autre inconvénient des taxes et des dépenses élevées, c'est que nous ne sommes plus compétitifs sur le marché mondial. Notre situation est déjà pire que celle des États-Unis. Regardez ce que gagnent les joueurs de hockey là-bas et ce qu'ils gagnent ici. Ils veulent tous être payés en dollars américains. Pourquoi? Parce que les taux d'imposition sont moins élevés aux États-Unis qu'au Canada. Aux États-Unis, on veut même ramener le taux à 17 p. 100. Les Américains sont compétitifs et leur système de marché libre a mieux fonctionné que le nôtre. Le gouvernement s'immisce trop dans l'économie de notre pays. Ce qu'il nous faut, c'est un gouvernement qui mette moins son nez partout et dont la participation soit moins directe. C'est ainsi que nous pourrons éliminer ce lourd fardeau fiscal. C'est le fait que les régimes fiscaux ne sont pas compétitifs qui poussent les gens à agir d'une façon qui nuit aux recettes de l'État.

Je mets le ministre des Finances au défi de remplir les trois promesses, de trouver une solution aux préoccupations qui étaient les siennes quand il était porte-parole de l'opposition pour les finances. Il avait alors dit qu'il y avait trois choses pour lesquelles il se battrait, trois choses dans lesquelles il croyait et qui, estimait-il, devaient être examinées. Je voudrais bien que le ministre des Finances mette en pratique ce qu'il prêche.

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté le député de Calgary-Centre avec beaucoup d'intérêt et de sympathie. Je suis de ceux qui croient que le régime fiscal est tellement désorganisé qu'on ne peut probablement pas le corriger et qu'il serait préférable d'adopter une méthode nouvelle et innovatrice pour les questions fiscales.

Le député a mentionné deux points très intéressants. Dans le premier cas, je crois qu'il peut s'agir d'un début de conversion du député réformiste au sujet des compressions, du moins je l'espère.


15498

En effet, durant toute la campagne électorale et au début de la présente législature, le mot «compression» était le seul que les députés d'en face avaient à la bouche. Les propos qu'a tenus le député aujourd'hui lui étaient probablement inspirés par son expérience en cette enceinte. Le député a compris la complexité de certains enjeux que nous ne sommes pas vraiment en mesure de comprendre durant la campagne électorale. En gros, il disait que les compressions n'étaient pas la solution.

Il faut bien sûr tout faire pour s'assurer de dépenser chaque dollar de la façon la plus prudente, la plus logique et la plus efficiente possible pour atteindre des objectifs précis que nous nous fixons en tant que gouvernement, en tant que Parlement et en tant que nation.

Pour ce qui est des revenus, je dois dire que je suis d'accord avec lui. Je suis de ceux qui croient, de ce côté-ci de la Chambre, que le régime fiscal est foncièrement injuste pour un grand nombre de personnes, même s'il est conçu pour être équitable. Je suis de ceux qui croient que chaque fois que nous modifions ce monstre que nous avons créé-notre gouvernement ou ceux qui nous ont précédés-en apportant des modifications par douzaines au système, nous ne faisons que réduire sa capacité d'atteindre ses objectifs.

Le député a parlé d'impôt unique. Il a parlé d'impôt uniforme. Je suis certainement d'accord pour dire que c'est l'orientation que nous devons prendre. Mon collègue de Broadview-Greenwood continue, comme il le faisait au cours de la dernière législature, à promouvoir l'application d'un système d'imposition différent. Il doit se sentir bien seul parfois. J'appuyais l'idée d'un tel système quand je siégeais dans l'opposition. J'ai aussi défendu ce système au cours de ma campagne électorale et je continuerai à le défendre de ce côté-ci de la Chambre.

(1625)

Le député a dit qu'il aimerait qu'on demande au Comité permanent des finances d'étudier la question. Pour ma part, je suis du genre à ne pas attendre qu'on me dise quoi faire. Si j'avais l'occasion de collaborer avec d'autres députés de cet endroit pour essayer de parvenir à un consensus entre partis, de part et d'autre de cette Chambre-bien que quelques pieds seulement nous séparent, on a parfois l'impression que ce sont des milles-je n'hésiterais pas un instant à relever le défi.

Le député ne devrait pas attendre que les mandarins des Finances, le gouvernement ou les dirigeants de son parti décident que le moment est venu pour les parlementaires de travailler ensemble, peu importe leur appartenance politique, afin de trouver des solutions. Nous connaissons tous les problèmes. En notre qualité respective d'opposition et de gouvernement, nous essayons tous de proposer les solutions que nous pensons être les plus susceptibles d'être adoptées.

Je mets le député au défi de travailler avec moi et les autres députés de ce côté-ci-je m'engage à faire de même-et d'étudier les diverses possibilités: réforme fiscale en profondeur, impôt unique, impôt uniforme; travaillons ensemble pour que ce défi s'adresse non seulement au gouvernement, mais à tous les parlementaires dans cette enceinte. Je suis prêt à y consacrer le temps qu'il faudra. Le député est-il lui aussi prêt à faire de même? Je crois que les Canadiens attendent des solutions de ce genre et qu'ils les veulent sans plus tarder.

M. Silye: Monsieur le Président, je désire remercier le député d'en face de ses remarques. J'accepte son offre et je déclare publiquement que je suis prêt à travailler avec n'importe quel député à la simplification de notre régime fiscal, je suis prêt à partager tous les points de vue que j'ai et à obtenir l'opinion de n'importe quel député sur la voie que nous devrions suivre. Le régime actuel n'est pas bon et il a besoin d'être modifié.

Je sais que ce qui inquiète le ministère des Finances c'est que la simplicité puisse conduire à des injustices. Le test de tout nouveau système c'est qu'il soit au moins aussi juste que l'ancien.

Je voudrais également faire remarquer au député que j'ai beaucoup parlé d'un impôt à taux fixe, d'un impôt uniforme avec le député de Broadview-Greenwood. En fait, c'est la lecture de son livre, il y a quatre ans, qui m'a conduit à m'intéresser au sujet. Je pense que beaucoup des problèmes qu'il faisait ressortir sont vrais. Ils étaient vrais à l'époque et ils le sont encore plus maintenant.

Je n'attends plus le Comité permanent des finances. Je profite des occasions qui me sont données de m'exprimer librement à la Chambre pour défier le ministre des Finances et essayer de rallier tous les comités. Même le ministère de l'Industrie devrait envisager cette question. C'est lui qui contrôle les entreprises. Le ministre est présent et il sait ce qui inquiète les entreprises. Qu'est-ce que l'on pourrait faire pour attirer de nouvelles entreprises dans ce pays? Ce n'est pas des impôts plus élevés qui vont réussir, mais bien des impôts plus faibles.

Nous présentons diverses solutions de remplacement aux propositions fiscales. Le député de Capilano-Howe Sound en présentera une également, le 31 octobre, au colloque de l'Institut Fraser, à Toronto. Le député de Broadview-Greenwood sera là et il présentera également sa proposition. Je pense qu'il y aura des représentants du gouvernement qui seront simplement en auditeurs et ne présenteront rien. Je pense que le Parti conservateur étudie également la possibilité d'un impôt à taux fixe. Il est important que nous fassions la promotion de cette idée, de façon à lancer la balle. En fin de compte, si l'on pouvait simplifier le régime fiscal, tous les Canadiens en profiteraient et c'est notre objectif.

En ce qui concerne ma conversion, je demanderais au député de ne pas entretenir trop d'espoir, parce que je ne suis pas encore converti. Je suis simplement las d'entendre parler sans cesse de compressions. Si le député ne pense pas que les compressions sont importantes, alors pourquoi son gouvernement a-t-il réduit le budget de sept milliards?

Lorsque nous avons fait campagne sur des compressions budgétaires, nous partions du principe que s'il fallait en faire, elles devraient être faites sagement et judicieusement, mais rapidement, parce qu'elles allaient être pénibles. Que l'on supprime un milliard, sept milliards ou dix milliards, nous mécontentons un certain nombre de groupes d'intérêts spéciaux et des récriminations sont à prévoir. C'est ce que l'on constate en Ontario en ce moment, en réponse à la réduction de 22 p. 100 des paiements d'assistance sociale. Tout ce qu'il suffisait de faire c'était de réduire les paiements d'aide sociale en Ontario au même niveau qu'ailleurs au pays. Voyez les manifestations de certains extrémistes à ce sujet.

Il faut réduire les dépenses. À notre avis, le gouvernement libéral ne l'a pas suffisamment fait. Il y a encore bien du superflu à supprimer dans certains secteurs où les subventions ne donnent pas de bons résultats. Le gouvernement refuse d'examiner ces secteurs.


15499

Les autres compressions de programmes qu'il a effectuées sont excellentes.

Le gouvernement coupe à certains endroits, puis il consacre de l'argent aux programmes d'infrastructures. On construit des patinoires à même les subventions aux entreprises pour le développement régional. Les subventions ne sont pas toujours perdues, mais elles le sont souvent. Le gouvernement n'a aucune raison de dépenser cet argent. Il faut mettre fin à tout cela. Si l'on accordait aux particuliers et aux entreprises l'équivalent des réductions d'impôt, je vous assure qu'ils réaliseraient beaucoup plus avec ces milliards de dollars que ce que le gouvernement arrive à faire. Voilà ce que je veux dire. Par conséquent, nous devons à la fois réduire les dépenses et revoir le régime fiscal. Nous pouvons en même temps accorder des allégements fiscaux. Voilà ce que je pense.

(1630)

Si nous voulons vraiment régler le problème du déficit, nous le pouvons. Il suffit de réduire les dépenses et d'augmenter les impôts et le tour est joué. Toutefois, cela est impossible. Nous devons donc oublier le déficit. Ce n'est pas le 3 p. 100 du PIB qui compte. Nous devons trouver le moyen de stimuler l'économie et d'instaurer un régime fiscal favorisant la croissance pour pouvoir ensuite réduire la dette grâce aux recettes fiscales supplémentaires. Voilà ce qui compte.

Je remercie le député de son aimable intervention.

M. George S. Baker (Gander-Grand Falls, Lib.): Monsieur le Président, j'ai bien aimé les propos du député. Par ailleurs, je ne suis pas sûr que la solution soit aussi simple qu'il le prétend.

Le taux d'impôt des sociétés s'élève à 38 p. 100 au Canada. Si on ajoute les impôts provinciaux, on obtient une moyenne de 43,4 p. 100. Aux États-Unis, le taux d'imposition est de 35 p. 100 à l'échelle nationale. Si on ajoute les impôts levés par les États, on obtient une moyenne de 40,3 p. 100. Au Japon, le taux d'imposition des sociétés n'a jamais été inférieur à 50 p. 100. En fait, ce taux est actuellement de 52,5 p. 100. On connaît également les taux d'imposition des sociétés en France et en Allemagne, les principaux partenaires commerciaux du monde industrialisé. En Allemagne, le taux varie entre 56 et 44 p. 100 et, en France, il se situe à 33 p. 100.

Le député propose une baisse substantielle de l'impôt des sociétés et un taux d'imposition unique. En fait, il a parlé d'étendre la mesure à l'impôt sur le revenu des particuliers. Il propose un simple impôt direct qui serait le même pour tous, indépendamment du revenu. J'aimerais savoir quelles déductions il accorderait éventuellement aux sociétés dans ce cas-là.

M. Silye: Monsieur le Président, le député a tout à fait raison de dire que l'impôt des sociétés est complexe au Canada, avec tous les impôts provinciaux et fédéraux. Cependant, je crois que dans le cadre d'une réforme du régime fiscal, on devrait imposer les entreprises et les particuliers au même taux, faire en sorte que le revenu des entreprises ou des particuliers ne soit imposé qu'une fois et s'assurer que le taux est basé sur les dépenses fédérales. Cependant, il faut placer les dépenses sous la rubrique des dépenses directes et non sous la rubrique des dépenses fiscales pour savoir exactement ce que ces programmes nous coûtent.

Lorsqu'il s'agit des sociétés directement, on peut envisager certaines déductions dans le cadre d'une réforme fiscale. Il faut prendre des décisions. À l'heure actuelle, nous traitons de la même façon les revenus d'entreprise et les revenus de placement. Dans le cadre du modèle Hall-Rabushka de taux uniforme d'imposition, les paiements d'intérêt reçus par les particuliers sont non imposables et non déductibles et tous les gains en capital et les dividendes sont payés au niveau des sociétés. Les sociétés finissent par payer davantage d'impôts, selon ce modèle.

Lorsque nous avons examiné cette question, nous avons constaté que, grâce à un régime d'impôt uniforme pur pour les sociétés, les salaires et avantages pourraient être déduits, à l'instar du coût des facteurs de production et du coût des ventes. Si on accordait aux sociétés une déduction de 100 p. 100 durant l'année d'acquisition aux fins de l'impôt et du bilan, les intéressés pourraient encore amortir cette somme. Cependant, même si on pouvait déduire les intérêts aux fins de l'impôt, cela ne ferait pas baisser les taux d'intérêt. En fait, il pourrait y avoir un taux de 20 p. 100 sans incidence sur les recettes.

Il serait probablement possible de se débarrasser de la TPS en ajoutant 4,5 p. 100 à cela. Avec un taux de 24 ou 25 p. 100, il n'y aurait plus de TPS. Tout un service disparaîtrait. On pourrait économiser alors un demi-milliard de dollars en frais de recouvrement. Les recettes fiscales provenant des sociétés seraient alors de cinq à six milliards de dollars supérieures à ce qu'elles sont maintenant.

Par contre, toutes les petites sociétés seraient traitées de la même façon, qu'il s'agisse de sociétés de fabrication ou de sociétés de haute technologie. Les entreprises de fabrication pourraient profiter d'un taux de 21 p. 100, au lieu des 38 p. 100 dont il parle.

Le petit impôt sur les entreprises cause un problème. Le député de Broadview-Greenwood a bien vu que beaucoup de groupes de pression s'étaient adressés à lui pour se plaindre du fait qu'on allait perdre cet impôt de 12 p. 100 sur les premiers 200 000 $. Si nous procédions à ce type de réforme fiscale et le soumettions à tout le monde, si nous disions aux gens que nous voulons parvenir à un régime équitable, mais que tous doivent faire leur part à cette fin, nous pourrions alors avoir un régime suffisamment simple pour qu'un plus grand nombre de personnes le comprennent. Le taux pourrait être assez bas pour que les gens ne travaillent pas au noir, mais quand même suffisamment élevé pour qu'on puisse percevoir pratiquement les recettes que nous souhaitons et dont nous avons besoin maintenant. Je n'accepte pas les affirmations des économistes qui prétendent qu'il faut procéder à une réforme sans incidence sur les recettes maintenant. Je crois que s'il nous manque un petit peu d'argent, nous le récupérerons grâce à la croissance de l'économie. Si on ajoute à cela des compressions de dépenses accrues, si on consacre l'argent aux entreprises, si on donne aux gens de l'argent pour lancer des entreprises, on va. . .

(1635)

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. C'est avec beaucoup d'hésitation que je dois interrompre la période réservée aux questions et observations. Le temps prévu est écoulé. Reprenons le débat.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.


15500

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. Kilger): Convoquez les députés.

Après l'appel du timbre:

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, le vote sur la question dont la Chambre est saisie est reporté à 17 heures aujourd'hui. Le timbre ne sonnera pas plus de 15 minutes.

* * *

LA COMMISSION DU DROIT DU CANADA

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) propose: Que le projet de loi C-106, Loi concernant la Commission du droit du Canada, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, je prends la parole pour traiter du projet de loi C-106. Permettez-moi de dire au départ que, en déposant ce projet de loi, le gouvernement honore un engagement qu'il a pris pendant la campagne électorale de 1993 et qui a été exprimé clairement dans le livre rouge, soit de rétablir l'important mécanisme de réforme du droit que le gouvernement précédent avait supprimé.

Ce projet de loi répond à cet engagement en créant un nouvel organisme qui sera connu sous le nom de Commission du droit du Canada et qui aura pour objet de surveiller constamment l'évolution du droit canadien, de conseiller le gouvernement et, bien sûr, le Parlement sur son amélioration et sa modernisation, et ce, d'une manière qui tienne compte de notre régime exceptionnel de droit bijuridique: la common law et le code civil.

[Français]

En résumé, cette commission jouera un rôle de premier plan pour ce qui est d'assumer la responsabilité commune à chaque génération de veiller à ce que le droit canadien réponde aux besoins et aux conditions de notre époque. Cette tâche est nettement plus difficile et complexe qu'elle ne l'était au début des années 1970, lorsque fut créée l'ancienne Commission de réforme du droit.

[Traduction]

Aujourd'hui, au milieu des années 90, nous sommes poussés par une vague de changement social, un changement qui fait intervenir la technologie et la vie sociale même. Dans certains secteurs, des lois sont devenues désuètes ou inadéquates. Dans d'autres, nous voyons des cas qui ne sont pas encore régis par une loi ou un précédent.

(1640)

Le gouvernement estime que nous avons besoin d'une commission du droit, une commission indépendante et objective, chargée de fournir au gouvernement des avis éclairés quant à la voie à suivre.

Notons l'accroissement du risque et de l'incidence des crimes économiques découlant de l'application des techniques informatiques aux marchés financiers, pour les virements de fonds d'une personne à l'autre et même d'un continent à un autre. Il y a aussi le flot ininterrompu de nouvelles questions touchant la commercialisation de la biotechnologie. Notons enfin les questions qui surgissent en raison de l'emploi généralisé de la nouvelle technologie de l'information, dont l'Internet, comme véhicule de propagande haineuse ou de pornographie.

D'autres questions se rapportent au fonctionnement du système de justice pénale proprement dit, notamment son efficacité et l'utilité d'assortir certaines infractions de peines d'emprisonnement plutôt que d'imposer d'autres sanctions.

[Français]

Pour aggraver la situation, ces questions surviennent à une époque marquée par de profonds bouleversements sociaux et politiques. À bien des égards, les Canadiens ont changé depuis 25 ans.

En effet, la Charte des droits et libertés a changé notre perception et la façon dont nous nous regardons les uns les autres. Les gens ne se contentent plus de laisser les affaires de l'État aux politiciens et aux fonctionnaires et le droit aux avocats. Ils insistent pour avoir leur mot à dire dans les décisions qui les concernent.

[Traduction]

Une autre chose a changé dans le contexte fiscal des années 90. En effet, il nous faut relever ces défis même si nos ressources financières sont beaucoup plus modestes qu'elles ne l'étaient. Chaque option et chaque décision doivent être mesurées non seulement à l'aune de l'efficacité théorique, mais aussi à celle des possibilités de réalisation sur le plan financier.

Par conséquent, le gouvernement ne propose pas, dans le projet de loi C-106, de faire renaître de ses cendres l'ancienne Commission de réforme du droit du Canada, mais plutôt d'instaurer une toute nouvelle institution, une institution qui sera chargée d'aborder des questions nouvelles de façon novatrice.

La commission du droit, telle qu'elle est envisagée dans le projet de loi C-106, sera d'abord et avant tout un organe indépendant et


15501

responsable, qui fonctionnera sans lien de dépendance avec le gouvernement et selon les modalités qui conviennent, compte tenu des défis et des contraintes de l'heure. c'est-à-dire qu'elle fonctionnera ouvertement. Elle fera de la réforme du droit un processus visible et compréhensible auquel non seulement les juristes professionnels mais aussi les Canadiens de tous les milieux pourront participer.

En outre, étant donné sa structure, la commission ne sera ni distante ni isolée. Enfin et surtout, elle s'attaquera à sa tâche en faisant bien attention aux coûts.

Les principes qui régiront la composition de la commission et guideront son travail sont énoncés dans le préambule du projet de loi C-106. La Chambre devrait savoir que ces principes n'ont pas été élaborés dans une tour d'ivoire. Ils découlent des consultations rigoureuses à l'échelle nationale qui ont précédé la rédaction du projet de loi et synthétisent les réflexions d'un grand nombre de disciplines, de secteurs et de groupes. Les Canadiens nous ont dit que le processus devait présenter ces caractéristiques pour pouvoir fonctionner efficacement.

Le premier principe est lié au but tacite de chaque aspect de ce travail, soit le maintien de la confiance dans notre système de justice et son fonctionnement. C'est pourquoi nous devons démocratiser et démystifier le processus d'élaboration et de modification des lois.

La commission doit être transparente et tenir compte des différents intérêts dans son travail. Le travail de la Commission de réforme du droit doit être ouvert à tous ceux qui veulent surveiller ce processus ou y participer. Les résultats de ce travail doivent pouvoir être inspectés par quiconque sous une forme accessible à tous.

(1645)

Le deuxième principe, c'est que la commission doit non seulement faire preuve de prévoyance mais aussi relever les défis de la réforme du droit en tenant compte de toutes ses aspects sociaux et économiques. Pour ce faire, la commission doit adopter une approche multidisciplinaire. Elle doit examiner les enjeux en faisant appel non seulement à son expertise juridique, ce qui est nécessaire, mais aussi à l'expérience et aux compétences de toutes les disciplines concernées, dont l'économique, la technologie, les sciences sociales et naturelles, et les services de police.

Le troisième principe, c'est que la commission devrait être réceptive et responsable. Plus précisément, elle devrait travailler en collaboration avec divers groupes intéressés, en particulier les milieux universitaires. Le droit n'est jamais statique, et c'est seulement ainsi que la commission peut rester à l'affût des changements sans fin destinés à éliminer les lacunes et le double emploi dans les programmes et à tirer le maximum des ressources limitées.

[Français]

Le quatrième principe aurait détonné dans un projet de loi rédigé il y a 25 ans, mais il semble tout à fait à sa place à notre époque.

Il s'agit pour la Commission d'employer la technologie de pointe chaque fois qu'elle le juge à propos dans l'accomplissement de ses tâches. La Commission doit tirer profit des méthodes et des instruments nouveaux, en particulier ceux qu'on retrouve dans la technologie de l'information. Sa réussite dans chacune de ses activités en dépend au même titre que sa capacité de partager le travail avec d'autres groupes et institutions et de fonctionner avec efficacité dans le cadre de son modeste budget.

[Traduction]

Selon le cinquième principe, il est primordial d'arriver à des solutions que nous pouvons nous payer. Dans ses délibérations, la commission doit donc toujours tenir compte des incidences sur les coûts et le financement. Cet aspect aussi est important dans les années 1990.

Voilà pour les cinq principes énoncés dans le préambule. Un sixième principe ne figure peut-être pas expressément dans le projet de loi, mais les députés constateront qu'il est formulé implicitement tout au long de la mesure. Il s'agit de la nécessité d'établir un équilibre, car la commission doit être indépendante du gouvernement pour prendre des décisions, mais elle doit rendre compte à la population des mesures qu'elle prend. Ce principe, ainsi que tous les autres d'ailleurs, sous-tend la structure de la commission, telle qu'elle est décrite à l'article 7 du projet de loi. Je m'arrête brièvement sur cette structure.

Le conseil exécutif de la Commission du droit est nommé par décret. Il comprend cinq membres, soit un président à plein temps et quatre commissaires à temps partiel venant de diverses disciplines. La taille de ce conseil présente l'équilibre nécessaire. Le nombre de membres est assez grand pour assurer la diversité, mais assez petit pour faciliter le processus décisionnel.

Le fait que quatre des cinq commissionnaires travaillent à temps partiel présente de nombreux avantages. D'abord, ces personnes ne risquent pas de s'isoler à l'extérieur de la région de la capitale nationale. Elles conservent leurs racines dans leurs propres collectivités et dans les secteurs qu'elles représentent, et leurs carrières ne sont pas interrompues. Il y a un autre avantage. Il est plus facile au gouvernement d'attirer des personnes ayant le calibre nécessaire pour garantir que la commission participe activement à la réforme du droit.

Ensuite, il y a un conseil consultatif formé de 25 membres représentant divers points de vue, diverses disciplines et divers milieux. Tous ces gens travaillent bénévolement, sauf que leurs dépenses sont remboursées. Cette disposition favorise l'indépendance du processus. Le conseil est nommé par la commission, et non par le gouvernement, et c'est la commission, et pas le gouvernement, qui est la cliente du conseil.

La troisième composante favorise elle aussi l'indépendance de l'ensemble. Il s'agit de groupes d'étude que la commission forme au besoin pour examiner des questions bien précises. Chaque groupe est dirigé par un des commissaires et les autres membres viennent de disciplines pertinentes ou de groupes intéressés. Par exemple, un groupe d'étude sur la biotechnologie pourrait inclure des


15502

représentants de l'industrie, des sciences de la santé, des groupes de consommateurs et des milieux juridiques.

(1650)

Le recours à ces groupes d'étude favorisera aussi la rentabilité du processus. Ces groupes seront temporaires plutôt que permanents. Ils seront mis sur pied de façon ponctuelle, à mesure que des problèmes se poseront. Ils s'acquitteront de leur mandat et seront ensuite dissous. Les membres de ces groupes fourniront ce service public de façon volontaire, sans rémunération.

Ce sont là les éléments de la Commission du droit du Canada, telle que proposée dans le projet de loi C-106. La structure est simple et économique. La commission sera desservie par un petit secrétariat comptant au maximum huit personnes. Au lieu d'avoir des employés permanents pour effectuer les études, la commission confiera les travaux de recherche à des contractuels de l'extérieur. De cette façon, nous éviterons de répéter les efforts des organismes de réforme provinciaux ou des universités. La commission fonctionnera donc d'une manière très économique.

L'ancienne Commission de réforme du droit abolie par le gouvernement précédent coûtait cinq millions de dollars par année, tandis que la commission proposée dans le projet de loi C-106 disposera d'un budget de trois millions. Cette somme proviendra intégralement de la réaffectation de fonds existants. J'ai confiance que la nouvelle commission pourra bien s'acquitter de son mandat, compte tenu de sa composition et de son approche fondée sur l'utilisation des nouvelles technologies, sur le partenariat et sur le recours à des conseillers et à des membres bénévoles au sein des groupes d'étude.

Cela m'amène à ma dernière observation. Le projet de loi confierait à la nouvelle commission la mission d'explorer et d'innover. Cette exigence est explicite dans l'article du projet de loi portant sur la mission, prévoyant que la commission aura notamment pour tâche d'élaborer de nouvelles perspectives et de nouveaux concepts juridiques.

Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire, entre autres choses, que la commission ne se sentira pas obligée de recommander comme solution à tous les problèmes une nouvelle loi ou même des modifications à la loi. Elle aura pour tâche d'examiner tout l'éventail des possibilités. Il est extrêmement important qu'elle le fasse. L'un des défis les plus urgents de la réforme du droit consiste à faire face au changement sans créer un marécage infranchissable de contentieux, d'administration et d'exécution de la loi.

Le système est maintenant presque surchargé. Un des principaux objectifs de la commission consistera non seulement à éviter d'accroître la charge de travail, mais aussi de l'alléger. Comme le prévoit l'article du projet de loi portant sur la mission, la commission aura également pour tâche «d'instituer des mesures qui rendent le système juridique plus efficace, plus économique et plus accessible.»

Quant à l'équilibre entre l'indépendance de la commission et l'obligation de rendre des comptes, les deux éléments sont évidemment indispensables: l'indépendance, parce que la valeur de la commission dépendra en grande partie de sa capacité à fournir au gouvernement des conseils éclairés et impartiaux sur les politiques et les programmes législatifs; et l'obligation de rendre des comptes, parce que la commission sera un organisme public au service des Canadiens et, en tant que tel, elle doit rendre compte de ses activités et de la qualité de son travail à la population et à ses représentants élus.

À mon avis, ces principes se reflètent dans les arrangements que décrit le projet de loi. La commission présentera ses rapports et ses recommandations au Parlement par l'intermédiaire du ministre de la Justice. Le ministre devra déposer au Parlement les rapports de la commission tels quels et intacts, et y répondre dans un délai prescrit. Par ailleurs, la responsabilité de la décision finale quant à leur disposition revient, comme il se doit, au gouvernement.

[Français]

Les députés constateront que l'équilibre est présent, non seulement dans la conception générale du projet de loi C-106, mais également dans ses détails. La section du projet de loi concernant la mission et les fonctions de la Commission en contient un exemple. La Commission établira son propre programme, mais elle consultera le ministre de la Justice avant d'y mettre la dernière main.

[Traduction]

Le ministre devra, quant à lui, consulter la commission avant de lui confier d'autres questions à étudier.

(1655)

Je le répète, le projet de loi a pour objet essentiel de faire appliquer une vaste approche intégrée à la réforme du droit canadien. Le droit est plus qu'un recueil de lois. C'est une entité vivante, une présence dans nos vies individuelles. Le droit constitue également l'infrastructure de nos vie sociale et économique. Vue dans ce contexte, la tâche de la réforme du droit s'inscrit dans le travail plus vaste d'édification du pays, d'avancement de notre bien-être individuel et collectif, de développement de l'harmonie sociale, d'amélioration de notre compétitivité, de notre niveau de vie, de notre qualité de vie et de nos relations mutuelles.

Au XVIIIe siècle, un juriste britannique, lord Mansfield, disait qu'à mesure que changent les usages de la société, la loi doit s'adapter à l'évolution des besoins de la collectivité. La tâche demeure la même à la fin du XXe siècle. Je soutiens que l'instrument dont le projet de loi C-106 propose la création nous aidera à faire face à ce défi constant.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de céder la parole à l'honorable députée de Saint-Hubert, puis-je suggérer à la Chambre qu'il est 17 heures?

Des voix: D'accord.


15503

LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 16 octobre, de la motion: Que le projet de loi C-64, Loi concernant l'équité en matière d'emploi, soit maintenant lu une troisième fois et adopté.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 17 heures, conformément à l'article 45(5) du Règlement, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-64, Loi concernant l'équité en matière d'emploi.

Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 349)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Althouse
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Baker
Bélair
Bélanger
Bellehumeur
Bellemare
Bernier (Beauce)
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blaikie
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brushett
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Caron
Catterall
Clancy
Cohen
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
de Savoye
DeVillers
Dhaliwal
Dromisky
Dubé
Duhamel
Dumas
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Fewchuk
Finlay
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gallaway
Gauthier
Gerrard
Gray (Windsor West/Ouest)
Grose
Guarnieri
Harb
Harper (Churchill)
Harvard
Hickey
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Jordan
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loney
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchi
Marleau
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLaughlin
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
Nunez
Nunziata
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Regan
Richardson

Rideout
Riis
Ringuette-Maltais
Robinson
Rock
Sauvageau
Serré
Sheridan
Simmons
Skoke
Solomon
Speller
St-Laurent
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Taylor
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Volpe
Walker
Wells
Whelan
Wood
Young
Zed -156

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Benoit
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast/Sud-Est)
Bryden
Chatters
Duncan
Epp
Frazer
Gilmour
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanrahan
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hoeppner
Jennings
Johnston
Kerpan
Mayfield
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Penson
Ramsay
Ringma
Schmidt
Scott (Skeena)
Silye
Solberg
Strahl
Wayne
Williams-41

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Anawak
Asselin
Bachand
Bakopanos
Barnes
Bélisle
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bouchard
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Canuel
Cauchon
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Dingwall
Discepola
Duceppe
Finestone
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Godfrey
Godin
Graham
Guay
Guimond
Jacob
Keyes
Lalonde
Langlois
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Lincoln
Loubier
MacAulay
Maclaren
Maheu
Marchand
Martin (Lasalle-Émard)
Ménard
Mercier
Ouellet
Pagtakhan
Paradis
Paré
Patry
Payne
Robillard
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
St. Denis


15504

(1725)

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi est lu pour la troisième fois et adopté.)

* * *

LA LOI DE 1984 SUR LA CONVENTION CANADA-ÉTATS-UNIS EN MATIÈRE D'IMPÔTS

La Chambre passe à l'étude du projet de loi S-9, Loi modifiant la Loi de 1984 sur la Convention Canada-États-Unis en matière d'impôts, dont le comité a fait rapport avec une proposition d'amendement.

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, la Chambre passe aux votes différés à l'étape du rapport sur le projet de loi S-9, Loi modifiant la Loi de 1984 sur la Convention Canada-États-Unis en matière d'impôts.

Le premier vote porte sur la motion no 1.

M. Boudria: Monsieur le Président, si vous consultiez la Chambre, vous pourriez constater qu'il y a consentement unanime. Il se peut qu'un ou deux députés souhaitent voter autrement, mais vous pourriez constater qu'il y a consentement pour appliquer les résultats du vote précédent à la motion dont la Chambre est maintenant saisie, et les députés libéraux voteront non sur cette motion.

M. Baker: Monsieur le Président, je n'accorderai certainement pas mon consentement pour voter comme les autres députés libéraux sur ce projet de loi. En fait, je ne voterai pas non plus comme les députés réformistes et bloquistes.

Le président suppléant (M. Kilger): Je voudrais que le député de Gander-Grand Falls précise sa pensée. Veut-il indiquer de quelle manière il entend voter ou refuse-t-il aussi le consentement unanime?

M. Baker: Monsieur le Président, étant donné que j'ai proposé la motion no 1, il est évident que je l'appuie.

Pour ce qui est de la motion no 2, il y a peut-être d'autres députés qui partagent mon point de vue sur les amendements que j'ai présentés. Je propose donc que le vote se déroule normalement.

Le président suppléant (M. Kilger): Il n'y a pas consentement unanime.

(La motion no 1, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 350)

POUR

Députés
Althouse
Baker
Blaikie
Caccia
Easter
McLaughlin
Nunziata
Riis
Robinson
Simmons
Solomon
Taylor-12

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Alcock
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bélair
Bélanger
Bellehumeur
Bellemare
Benoit
Bernier (Beauce)
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast/Sud-Est)
Brushett
Bryden
Calder
Campbell
Cannis
Caron
Catterall
Chatters
Cohen
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
de Savoye
DeVillers
Dhaliwal
Dubé
Duhamel
Dumas
Duncan
Dupuy
Eggleton
English
Epp
Fewchuk
Finlay
Fontana
Frazer
Fry
Gaffney
Gagliano
Gallaway
Gauthier
Gerrard
Gilmour
Gouk
Gray (Windsor West/Ouest)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Hanrahan
Harb
Harper (Churchill)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hoeppner
Hopkins
Iftody
Irwin
Jackson
Jennings
Johnston
Jordan
Kerpan
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loney
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchi
Marleau
Massé
Mayfield
McCormick
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Meredith
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Nault
Nunez
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Penson
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Ramsay
Regan
Rideout
Ringma
Rock
Sauvageau
Schmidt
Scott (Skeena)
Serré
Sheridan
Silye
Skoke
Solberg
Speller
St-Laurent
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Strahl
Szabo
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney


15505

Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Volpe
Walker
Wayne
Whelan
Williams
Wood
Young-172

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Anawak
Asselin
Bachand
Bakopanos
Barnes
Bélisle
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bouchard
Brien
Brown (Oakville-Milton)

(1735)

Le président suppléant (M. Kilger): Je déclare la motion no 1 rejetée.

[Français]

La prochaine mise aux voix porte sur la motion no 2.

M. Boudria: Monsieur le Président, si vous le demandiez, je crois que la Chambre accorderait le consentement unanime pour que le résultat du vote sur la motion no 1 soit également appliqué à la motion no 2.

M. Laurin: Monsieur le Président, les députés du Bloc québécois voteront non.

[Traduction]

M. Ringma: Tous les réformistes sensés voteront également contre la motion.

M. Solomon: Monsieur le Président, tous les députés néo-démocrates présents à la Chambre cet après-midi voteront en faveur de la motion.

Mme Wayne: Monsieur le Président, tous les députés progressistes-conservateurs voteront contre la motion.

M. Bhaduria: Monsieur le Président, je voterai contre la motion.

M. Baker: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suppose que vous m'inscrirez parmi ceux qui votent en faveur de la motion. C'est exactement ce que je souhaite et j'invite tous les députés qui le désirent à faire de même.

Le président suppléant (M. Kilger): En réponse à l'intervention du député de Gander-Grand Falls, je précise que le résultat du vote sur la motion no 1 s'appliquera à la motion no 2. Est-ce d'accord?

M. Ianno: Monsieur le Président, je voudrais voter à l'inverse de ce que j'ai fait au dernier vote.

Le président suppléant (M. Kilger): La présidence doit demander des précisions au député de Trinity-Spadina. Pourrait-il se montrer plus précis et dire s'il vote pour ou contre la motion?

M. Ianno: Je vote en faveur de l'amendement.

(1740)

Mme Grey: Monsieur le Président, je voudrais poser une question. Je sais qu'on applique le résultat du vote précédent afin de gagner du temps et c'est très bien ainsi. Je me pose cependant des questions au sujet des députés qui quittent la Chambre.

Des députés étaient ici pour le premier vote. Leur nom apparaîtra-t-il automatiquement dans les résultats des votes suivants? Qui sait qui a quitté la Chambre? Les députés peuvent-ils quitter après le premier vote et faire inscrire leur nom dans les résultats des votes tenus tout le reste de la soirée?

Le président suppléant (M. Kilger): En réponse à la députée de Beaver River, je lui signale que, à moins que la Chambre ait recours à un processus très clair, comme un vote par appel nominal, la présidence suppose que les députés restent à la Chambre pour les votes ultérieurs, dont les résultats s'appliqueraient.

M. Nunziata: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. C'est un principe fondamental à la Chambre-et vous êtes le gardien des principes de cette Chambre-que, pour que son vote sur une question donnée soit enregistré, un député doit être présent à la Chambre pour la tenue du vote.

Le député d'en face est-il en train de laisser entendre que certains députés ont quitté la Chambre?

Une voix: Tout à fait.

M. Nunziata: Je ne vois donc pas, monsieur le Président, comment vous pouvez appliquer à ce vote le résultat d'un vote antérieur si certains députés sont partis.

En faisant cela, vous établiriez un précédent malheureux qui ferait que, à l'avenir, lorsqu'on appliquera le résultat d'un vote à d'autres votes, tout député pourra quitter la Chambre après la tenue du premier vote en sachant que son vote sera repris pour toutes les autres questions mises aux voix à la Chambre.

Je vous demande de reconsidérer votre position à cet égard.


15506

M. Solomon: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement à ce même sujet. Je tiens à informer la présidence et la Chambre que lorsqu'on a proposé cet arrangement afin d'accélérer le vote, il était entendu que tous les députés resteraient à la Chambre jusqu'à la fin du vote.

Je conviens avec le député que cela constituerait un précédent, qui serait inopportun et inacceptable pour le caucus néo-démocrate.

M. Boudria: Monsieur le Président, je propose respectueusement que vous enregistriez le vote rangée par rangée, comme d'habitude, à l'étape du rapport de la motion no 2. Cela devrait relancer le vote.

Le président suppléant (M. Kilger): Je tiens à rétablir les faits, au cas où j'aurais induit un député en erreur. Je ne suis absolument pas en désaccord avec le député de York-Sud-Weston, le député de Regina-Lumsden ni aucun autre député pour ce qui est de la tradition de la Chambre. J'essayais seulement de mettre les choses au point en disant que la présidence suppose effectivement que les députés demeurent à la Chambre.

À moins que nous puissions confirmer clairement et définitivement l'absence d'un député, le mieux est manifestement de suivre le conseil du whip en chef du gouvernement et de mettre la motion no 2 aux voix.

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)

(Vote no 351)

POUR

Députés
Althouse
Baker
Blaikie
Caccia
Easter
Ianno
McLaughlin
Minna
Nunziata
Riis
Robinson
Simmons
Solomon
Taylor
Wells -15

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Adams
Alcock
Assadourian
Augustine
Bélair
Bélanger
Bellehumeur
Bellemare
Benoit
Bernier (Beauce)
Bertrand
Bethel
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast/Sud-Est)
Brushett
Bryden
Calder
Campbell
Cannis
Caron
Catterall
Chatters
Cohen
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
de Savoye
DeVillers
Dhaliwal
Dromisky
Dubé
Duhamel
Dumas
Duncan
Dupuy

Eggleton
English
Epp
Fewchuk
Finlay
Fontana
Frazer
Fry
Gaffney
Gagliano
Gallaway
Gauthier
Gerrard
Gilmour
Gouk
Gray (Windsor West/Ouest)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Hanrahan
Harb
Harper (Churchill)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hoeppner
Hopkins
Iftody
Irwin
Jackson
Jennings
Johnston
Jordan
Kerpan
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loney
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchi
Marleau
Mayfield
McCormick
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Meredith
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Nault
Nunez
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Penson
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Ramsay
Regan
Rideout
Ringma
Rock
Sauvageau
Schmidt
Scott (Skeena)
Serré
Sheridan
Silye
Skoke
Solberg
Speller
St-Laurent
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Strahl
Szabo
Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Volpe
Walker
Wayne
Whelan
Williams
Wood
Young-170

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Anawak
Asselin
Bachand
Bakopanos
Barnes
Bélisle
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bouchard
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Canuel
Cauchon
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral


15507

Daviault
Debien
Dingwall
Discepola
Duceppe
Finestone
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Godfrey
Godin
Graham
Guay
Guimond
Jacob
Keyes
Lalonde
Langlois
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Lincoln
Loubier
MacAulay
Maclaren
Maheu
Marchand
Martin (Lasalle-Émard)
Ménard
Mercier
Ouellet
Pagtakhan
Paradis
Paré
Patry
Payne
Robillard
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
St. Denis

(1750)

Le président suppléant (M. Kilger): Je déclare la motion no 2 rejetée.

L'hon. Douglas Peters (au nom du ministre des Finances) propose: Que le projet de loi modifié soit agréé.

Le président suppléant (M. Kilger): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. Kilger): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 352)

POUR

Députés
Abbott
Ablonczy
Adams
Alcock
Assadourian
Augustine
Bélair
Bélanger
Bellehumeur
Bellemare
Benoit
Bernier (Beauce)
Bertrand
Bethel
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast/Sud-Est)
Brushett
Bryden
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Caron
Catterall
Chatters
Cohen
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
de Savoye
DeVillers
Dhaliwal
Dromisky

Dubé
Duhamel
Dumas
Duncan
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Epp
Fewchuk
Finlay
Fontana
Frazer
Fry
Gaffney
Gagliano
Gallaway
Gauthier
Gerrard
Gilmour
Gouk
Gray (Windsor West/Ouest)
Grey (Beaver River)
Grose
Grubel
Guarnieri
Hanrahan
Harb
Harper (Churchill)
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Harvard
Hayes
Hermanson
Hickey
Hill (Macleod)
Hoeppner
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Jennings
Johnston
Jordan
Kerpan
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Lastewka
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loney
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchi
Marleau
Mayfield
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Meredith
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Minna
Mitchell
Morrison
Murphy
Murray
Nault
Nunez
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Penson
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Ramsay
Regan
Rideout
Ringma
Rock
Sauvageau
Schmidt
Scott (Skeena)
Serré
Sheridan
Silye
Skoke
Solberg
Speller
St-Laurent
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Strahl
Szabo
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Volpe
Walker
Wayne
Wells
Whelan
Williams
Wood
Young-179

CONTRE

Députés
Althouse
Blaikie
McLaughlin
Riis
Robinson
Solomon
Taylor-7


15508

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Anawak
Asselin
Bachand
Bakopanos
Barnes
Bélisle
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bouchard
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Canuel
Cauchon
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Dingwall
Discepola
Duceppe
Finestone
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Godfrey
Godin
Graham
Guay
Guimond
Jacob
Keyes
Lalonde
Langlois
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Lincoln
Loubier
MacAulay
Maclaren
Maheu
Marchand
Martin (Lasalle-Émard)
Ménard
Mercier
Ouellet
Pagtakhan
Paradis
Paré
Patry
Payne
Robillard
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
St. Denis

(1800)

Le président suppléant (M. Kilger): Je déclare la motion adoptée.

Quand le projet de loi sera-t-il lu pour la troisième fois? À la prochaine séance de la Chambre?

Des voix: D'accord.

* * *

LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-90, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise et la Loi sur l'accise, soit lu pour la troisième fois et adopté.

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 45 du Règlement, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-90, Loi modifiant la Loi sur la taxe d'accise et la Loi sur l'accise.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 353)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Assadourian
Augustine
Baker
Bélair
Bélanger
Bellemare
Bertrand
Bethel
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brushett
Bryden
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Clancy
Cohen
Collenette
Collins
Comuzzi
Copps
Cowling
Crawford
Culbert
DeVillers
Dhaliwal
Dromisky
Duhamel
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Fewchuk
Finlay
Fontana
Fry
Gaffney
Gagliano
Gallaway
Gerrard
Gray (Windsor West/Ouest)
Grose
Guarnieri
Harb
Harper (Churchill)
Harvard
Hickey
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jackson
Jordan
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Loney
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchi
Marleau
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
Nunziata
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Rock
Serré
Sheridan
Skoke
Speller
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Terrana
Thalheimer
Tobin
Torsney
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wells
Whelan
Wood
Young-125

CONTRE

Députés
Abbott
Ablonczy
Althouse
Bellehumeur
Benoit
Blaikie
Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton-Melville)
Bridgman
Brown (Calgary Southeast/Sud-Est)
Caron
Chatters
de Savoye
Dubé
Dumas
Duncan
Epp
Frazer
Gauthier
Gilmour
Gouk
Grey (Beaver River)
Grubel
Hanrahan
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hart
Hayes
Hermanson
Hill (Macleod)
Hoeppner
Jennings
Johnston
Kerpan
Landry
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Mayfield
McLaughlin
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Nunez
Penson
Picard (Drummond)
Ramsay
Riis
Ringma
Robinson
Sauvageau
Schmidt
Scott (Skeena)
Silye
Solberg
Solomon
St-Laurent
Strahl
Taylor
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Venne
Wayne
Williams-64

15509

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Anawak
Asselin
Bachand
Bakopanos
Barnes
Bélisle
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bertrand
Bouchard
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Canuel
Cauchon
Chamberlain
Chan
Chrétien (Frontenac)
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Dingwall
Discepola
Duceppe
Finestone
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Godfrey
Godin
Graham
Guay
Guimond
Jacob
Keyes
Lalonde
Langlois
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
Lefebvre
Lincoln
Loubier
MacAulay
Maclaren
Maheu
Marchand
Martin (Lasalle-Émard)
Ménard
Mercier
Ouellet
Pagtakhan
Paradis
Paré
Patry
Payne
Robillard
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
St. Denis

(1805)

Le président suppléant (M. Kilger): Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi est lu pour la troisième fois et adopté.)

Le président suppléant (M. Kilger): C'est ainsi que se terminent les votes pour ce soir.

Comme il est 18 h 10, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

______________________________________________


15509

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

CODE CANADIEN DU TRAVAIL

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 15 juin 1995, de la motion: Que le projet de loi C-317, Loi modifiant le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (briseurs de grève et services essentiels), soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent du développement des ressources humaines.

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens sur le projet de loi C-317 de mon collègue et ami de Manicouagan visant à modifier le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, c'est-à-dire la question des briseurs de grève et des services essentiels en cas de conflit de travail.

Je suis un peu étonné de devoir intervenir sur un projet de loi comme celui-là parce que, en 1995, il me semble évident qu'il devrait avoir été adopté depuis longtemps au palier fédéral.

L'histoire des relations de travail a été, plus souvent qu'autrement, une histoire de lutte et parfois, malheureusement, une histoire de violence. En étudiant l'histoire du syndicalisme, on s'aperçoit que les situations où la violence a pris place, que ce soit sur les lignes de piquetage ou à la suite de grèves, c'était lorsque l'employeur avait engagé des briseurs de grève, c'est-à-dire lorsqu'il avait remplacé ses employés légalement en grève par des gens qui devaient faire le même travail.

Une voix: Des scabs.

M. Caron: Comme mon collègue le dit, des scabs dans le langage populaire.

Il me semble qu'en 1995, il est évident que le Code canadien du travail devrait contenir une telle disposition qui permette d'harmoniser le processus de relations de travail dans des situations de grèves violentes, de façon à ce que les employés qui, momentanément, ont perdu leur travail, ne soient pas remplacés, ce qui ferait en sorte que la violence se développe sur les lignes de piquetage et qu'on en arrive à des situations vraiment déplorables.

Je vous avoue que je croyais que dans le Code canadien du travail, il y avait une telle disposition, car au Québec, c'est depuis 1978, si je ne me trompe pas, que le gouvernement du Québec a adopté une loi comme celle-là. Il est évident qu'à ce moment-là, les représentants des employeurs ont contesté la pertinence d'intervenir dans les relations de travail dans des situations de conflit comme celui-là, sous prétexte de laisser aux employeurs la liberté d'agir, de façon à faire fonctionner leur entreprise.

Je pense que la société québécoise de cette époque a pris une bonne décision en disant aux employeurs: «Messieurs, dans la société dans laquelle nous vivons, l'État a quand même la responsabilité d'encadrer, de faire en sorte que les situations potentiellement violentes soient bien balisées, de sorte que des conflits violents soient désamorcés sur les lignes de piquetage.» Au Québec, si ma mémoire m'est fidèle, je me souviens de deux conflits importants qui ont fait que des briseurs de grève ont été engagés par des compagnies et qu'on a eu des situations de violence sur les lignes de piquetage.

Je me souviens de la grève tristement célèbre des années 1960 dans une compagnie de Longueuil qui s'appelait la United Aircraft, où je me souviens très bien d'avoir vu au téléjournal des autobus barricadés, des autobus blindés faisant entrer dans les usines des personnes qui venaient remplacer les travailleurs qui étaient légalement sur les lignes de piquetage. Ce fut une situation violente et je pense que ce n'est pas au bénéfice de la société que des situations comme celle-là se perpétuent.

Il y a eu un autre cas aussi, qu'on appelait à l'époque le problème ou la grève des gars de Lapalme. Cette compagnie était reliée au ministère des Postes. Les employés étaient en grève et on avait remplacé, encore une fois, les travailleurs par des scabs, des briseurs de grève. Ce conflit a empoisonné les relations de travail au Québec pendant des mois et des mois. Il y a eu des manifestations d'appui, des pétitions ont été signées, de sorte que lorsque le gouvernement du Parti québécois a pris le pouvoir, en 1976, la réflexion était très avancée, ce qui a fait qu'une loi a été adoptée à ce moment-là, réglementant toute la question de l'embauche des briseurs de grève.

On notera qu'au Québec, depuis cette époque, il n'y a pas eu de conflits violents de l'ampleur de ceux des années 1960 et 1970. Les employeurs ont fini par comprendre, même s'ils ont longtemps contesté la loi. Ils devaient aller en Cour suprême et, si je me souviens bien, c'est dans les années 1980 que la cause a été retirée, les employeurs constatant qu'une situation meilleure avait été instaurée par l'adoption de cette loi.

Je suis très surpris qu'au niveau du Code canadien du travail, on n'ait pas suivi le gouvernement du Québec sur cette voie, d'autant plus que cela concerne un grand nombre d'employés au Québec. Il


15510

s'agit d'environ 200 000 travailleurs ou plus dans des sociétés de la Couronne, dans des sociétés qui sont régies par le Code canadien du travail, les fonctionnaires. Au Canada, ils sont plus d'un million. Alors, je pense que la Chambre des communes doit prendre ses responsabilités, constater qu'il y a un problème important et que ce problème doit être réglé le plus rapidement possible.

(1815)

Pourquoi le problème n'est-il pas réglé? Je pense qu'il y a deux sortes de raisons. La première est évidemment la négligence. Plusieurs questions ont été posées par l'opposition officielle à la ministre du Travail depuis son arrivée dans cette Chambre. On lui demandait si le gouvernement canadien allait présenter une loi. Elle a toujours donné des réponses évasives et quand les questions lui étaient posées par l'opposition officielle, c'était en référence à un conflit de travail qui, encore aujourd'hui, en 1995, a empoisonné les relations de travail dans une minoterie à Montréal. Les employés sont venus manifester devant le Parlement, ils sont venus nous entendre dans les tribunes de la Chambre. C'est un conflit qui s'est étendu très longuement.

Chose curieuse, c'est un conflit qui impliquait la même compagnie et les mêmes personnes qui étaient partie prenante du côté patronal lors d'un conflit qui, quelques années ou quelques mois avant l'adoption de la loi au Québec par le Parti québécois, avait forcé le gouvernement à prendre une action immédiate parce qu'il y avait eu mort d'homme. On avait, sur les lignes de piquetage, tiré sur quelqu'un et un travailleur était mort. À ce moment-là, le gouvernement avait pris ses responsabilités.

Aujourd'hui, on se rend compte que le gouvernement canadien, avec une ministre qui est arrivée de façon un peu curieuse et à laquelle on a transmis une mission plutôt vague. . .

M. Boudria: Elle a été élue.

M. Caron: Elle a été élue et on lui a trouvé un ministère. Mais cela aurait pu être le ministère du proche Nord canadien, il aurait pu s'agir du ministère de la pluie canadienne ou celui des montagnes Rocheuses. Tout ce qu'il fallait faire, c'était lui trouver un ministère, de façon à ce qu'elle ait une certaine crédibilité pour se promener au Québec et défendre l'option qu'elle défend actuellement.

Si je dis cela, ce n'est pas pour mépriser son travail, mais c'est simplement pour dire qu'elle n'a pas fait ce qu'elle avait à faire comme ministre du Travail. On n'a pas l'impression, dans ce cas-là, qu'il y a un ministre du Travail au Canada.

La deuxième raison qui fait que le gouvernement canadien diffère l'adoption d'une loi comme celle-là est une raison idéologique. Vous savez qu'une loi de ce type était en vigueur en Ontario. Si je ne me trompe pas, elle avait été adoptée par le gouvernement néo-démocrate. Et le nouveau gouvernement Harris-je dirais «à risques», mais c'est plutôt Harris-a annoncé que cette loi allait être abrogée.

Je n'ai pas entendu dire qu'en Ontario, comme au Québec, cette loi-là avait causé des problèmes. Elle est contestée pour une seule raison, c'est une raison idéologique, c'est-à-dire de laisser la liberté aux employeurs de faire ce qu'ils veulent avec leurs biens.

Je pensais que cette façon de voir était dépassée au Canada. Je pensais que l'État canadien avait pris un certain nombre de mesures de façon à encadrer l'action des employeurs, pour qu'il y ait un équilibre entre la loi du marché, la loi du plus fort, la loi de la jungle-on peut la qualifier de différentes façons-et les intérêts fondamentaux de la population. Je pense que dans cette situation, l'attitude qui a été prise par le gouvernement de l'Ontario est purement idéologique.

Il n'y a rien dans les relations de travail en Ontario, ces dernières années, qui a démontré que cette loi-là ne fonctionnait pas. Au contraire, au Québec, depuis 1978, on peut le dire, ça fait quand même 17 ans, c'est l'unanimité pour dire que cette loi fonctionne bien.

Même le Conseil du patronat du Québec a renoncé à la contester devant la Cour suprême à la fin des années 1980.

J'espère que cette Chambre va étudier attentivement le projet de loi présenté par notre collègue de Manicouagan et va, une fois pour toutes, régler, pour l'ensemble des travailleurs canadiens, et encore pour quelques mois sans doute pour les travailleurs québécois, ce problème qui est un problème criant et un problème de justice dans les relations de travail.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais dire que je suis heureux aujourd'hui de prendre la parole sur le projet de loi C-317. Malheureusement, les incidents qui se sont produits un peu plus tôt aujourd'hui font en sorte que ce n'est pas le cas.

(1820)

Aujourd'hui, je prendrai quelques minutes pour aborder ce sujet et ensuite m'adresser à la Chambre sur des sujets connexes. C'est en fait sur ces sujets bel et bien connexes, parce qu'ils se rapportent, dans une certaine mesure, à des propos qu'on a entendus aujourd'hui, que je veux passer un peu plus de temps.

Le projet de loi parrainé par le député de Manicouagan propose de modifier le Code canadien du travail sur les relations de travail dans la fonction publique. Le projet de loi tel que proposé en regard du Code canadien du travail est pertinent; malheureusement, je ne peux pas lui accorder mon appui. J'estime que les propositions ne peuvent être examinées indépendamment de l'approche générale des relations industrielles adoptée par l'administration fédérale.

[Traduction]

L'interdiction du recours aux travailleurs de remplacement et le maintien des services essentiels doit être étudiée dans le cadre de l'examen global du Code canadien du travail.

[Français]

Alors, ne modifier qu'un aspect du Code canadien du travail est tout à fait, je pense, la mauvaise façon de procéder parce que, dans tout ensemble de modifications aux lois de travail, un certain équilibre doit être gardé. Et je suis sûr que c'est ce que le gouvernement aura en vue lorsqu'il choisira d'apporter lui-même des modifications au Code canadien du travail à un moment donné.

M. Nunez: Quand? Quand?

M. Boudria: Le député d'en face me demande quand. Bien, sans doute que le Parlement canadien aura l'occasion à l'avenir, comme il l'a fait dans le passé, de continuer à améliorer toutes les lois au bénéfice de la société canadienne. Je félicite le député d'en face qui me demande «quand» de s'inquiéter de l'avenir du Canada, parce que je sais que lui et moi, lorsqu'on aura tranché ce dossier constitutionnel, dans quelques jours, et en votant non, pourrons tous les


15511

deux continuer ensuite à travailler à l'amélioration des lois à long terme. Donc au sujet de son inquiétude à savoir quand, je dirai au député de Bourassa qu'il aura beaucoup de temps à l'avenir pour continuer à se pencher sur ces dossiers parce que, dans deux semaines, le Québec fera toujours partie du Canada car il aura voté non en rejetant l'option séparatiste.

Justement, le député qui s'est adressé à la Chambre juste avant moi a parlé dans ses remarques de la ministre du Travail qui est arrivée à la Chambre de façon qu'il a qualifiée d'assez curieuse. J'ai chahuté respectueusement, tout en suivant le décorum de la Chambre. . .

M. Nunez: Comme souvent.

M. Boudria: . . .comme je le fais de temps à autre, que «la façon assez curieuse», c'était l'élection.

On l'a entendu à plus d'une reprise dans cette Chambre. On a même entendu un député du Bloc, il y a quelques semaines, dire au sujet de la ministre du Travail que, d'une façon, elle était moins légitime que d'autres députés du Québec parce que ses électeurs étaient des anglophones, étant donné qu'elle représentait Westmount. On se souvient de ces propos entendus en Chambre la semaine passée. Le député de Bourassa les a entendus comme moi. Il sait d'où ils viennent et il sait que ces propos ont été dits.

On a également entendu un député dire dans cette Chambre-non, c'était plutôt à l'extérieur de cette Chambre et rapporté par les médias-que, dans ce débat référendaire, ce devrait peut-être être seulement les soi-disant Québécois de souche qui abordent ce dossier. Là, je suis sûr que le député de Bourassa n'appuie pas cette théorie. D'ailleurs, je serais surpris qu'il l'ait appuyée.

M. St-Laurent: Peut-on revenir sur le projet de loi?

M. Boudria: Le député d'en face m'invite à revenir sur le projet de loi. Ce n'est pas moi qui ai fait allusion à la façon prétendument curieuse selon laquelle la ministre du Travail-et on parle de l'amendement au Code du travail-avait été élue.

On a entendu il y a quelques semaines, ou devrais-je dire il y a quelques mois, des remarques désobligeantes faites à l'endroit du député de Saint-Léonard, le secrétaire d'État aux Affaires parlementaires, justement parce qu'il représentait également une circonscription électorale composée grandement d'une ethnie différente de certains autres Canadiens et Canadiennes.

(1825)

Une voix: Quelle est la pertinence?

M. Boudria: Monsieur le Président, la pertinence, ce n'est pas moi qui l'ai invoquée. Un autre député de cette Chambre, il y a quelques minutes, a fait allusion à ce qu'il a qualifié de «situation assez curieuse». Je veux en parler encore un peu de cette situation curieuse, car aujourd'hui, il y a eu un représentant des médias qui a été la cible de certaines attaques que je qualifierais de virulentes.

Une journaliste bien connue de Radio-Canada, Joyce Napier, a aussi été insultée parce qu'on a prétendu, dans son cas je ne sais même pas si c'était vrai, que son accent n'était pas tout à fait semblable à celui des autres Québécois et Québécoises. Cette journaliste a été insultée de cette façon parce qu'un autre parlementaire, cette fois la députée de Rimouski-Témiscouata, a décidé que, non seulement les députés d'autres partis, non seulement certaines communautés culturelles devraient être victimes de telles attaques, mais maintenant les représentants des médias.

Est-ce que parce que la dame en question a un nom qui est, et je ne sais pas si c'est un nom anglais, irlandais ou écossais, mais toujours est-il n'avait pas un nom. . .

M. Dubé: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'écoute depuis quelques minutes les propos de l'honorable député et je ne crois pas qu'ils soient du tout pertinents au projet de loi C-317 qui porte sur les briseurs de grève.

Le président suppléant (M. Kilger): J'occupe le fauteuil depuis le début de l'étude des affaires émanant des députés et je me rappelle très bien que dans l'intervention d'un autre député, on a parlé du projet de loi, mais on a aussi parlé d'autre chose.

Par contre, le député de Glengarry-Prescott-Russell était certainement sur la bonne voie au début de son intervention.

Une voix: Au début, oui.

Une voix: Plus ou moins.

Le président suppléant (M. Kilger): Plus ou moins, mais j'ai l'impression que dans le peu de temps qu'il lui reste, il va certainement y revenir avant de terminer.

M. Boudria: Monsieur le Président, je veux seulement utiliser une autre citation pour faire le point et ensuite, je reviens au dossier principal.

La voici, cette citation. Elle se lit comme suit: «Le Canada a toujours protégé les francophones. Ils les ont toujours laissé s'assimiler. Rappelez-vous, si vous savez votre histoire un peu, avec votre accent et votre langue, peut-être vous n'étiez pas québécoise, hein, au début là, avez-vous étudié l'histoire du Québec?»

Maintenant, je reviens au dossier principal, mais je veux que la Chambre sache que de ma part en tout cas, ceux qui applaudissent les déclarations de la députée de Rimouski-Témiscouata, eux aussi devraient être condamnés comme elle pour le geste qu'elle a posé à l'endroit d'une autre personne, encore une fois, montrant l'intolérance des séparatistes. On l'a vu. On l'a vu encore par le chef de l'opposition et ses petits bébés blancs. On l'a vu dans d'autres déclarations. On l'a vu aujourd'hui et on le voit à nouveau par les applaudissements d'un autre député.

[Traduction]

En guise de conclusion, je dirai que nous n'avons pas l'intention d'appuyer le projet de loi.

[Français]

M. St-Laurent: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement.

On se donne la peine de rédiger des projets de loi parce qu'on croit sincèrement que la Chambre sert à quelque chose, et j'y crois encore aujourd'hui. Mais quand je vois le député de Glengarry-Prescott-Russell faire ce qu'il vient de faire pendant dix minutes, je commence à douter sérieusement du vrai rôle de cette Chambre.


15512

Le président suppléant (M. Kilger): Je dois dire que ce n'est pas un recours au Règlement. Je comprends quand même que la pertinence est toujours un sujet qui exige beaucoup de considération. C'est une grande flexibilité dans la Chambre, sans doute, autant d'un côté que de l'autre.

Maintenant, je demanderai simplement à l'honorable député de Glengarry-Prescott-Russell de bien vouloir terminer ses remarques.

M. Boudria: J'ai terminé, monsieur le Président.

(1830)

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, je vais m'efforcer d'être très pertinent à propos du projet de loi C-317 qui vise à modifier le Code canadien du travail. On peut lire à la page 1a du projet de loi-et là, je vais faire bien attention pour prendre mon temps, pour être certain que tout le monde comprend:

Ce projet de loi a pour but d'interdire l'embauche de personnes afin de remplacer des employés en grève ou en lock-out au sein d'un employeur visé au Code canadien du travail et les employés en grève dans la fonction publique fédérale.
C'est de cela que traite ce projet de loi, qui a été préparé par mon collègue de Manicouagan, avec beaucoup de sérieux, qui a fait une étude et qui fait une nouvelle tentative pour en quelque sorte rappeler à cette Chambre qu'elle devrait intervenir en cette matière. Ce projet de loi vise également à maintenir les services essentiels lors d'une grève ou d'un lock-out au sein d'une société d'État et dans la fonction publique fédérale.

Le projet de loi C-317 est une initiative du député de Manicouagan, dont je félicite à nouveau la perspicacité. Il a pu également réaliser cette initiative grâce à son vécu, étant lui-même un ancien travailleur. Ce projet de loi vise à étendre ce qu'on connaît déjà au Québec, mais il tente d'influencer ce Parlement, même si on est dans une période référendaire, parce qu'il y a encore beaucoup de dispositions fédérales du Code canadien du travail qui concernent les travailleurs québécois. Alors, c'est à ce titre qu'il avait présenté ce projet de loi.

Permettez-moi de vous rappeler que ce n'est pas la première fois qu'une initiative semblable est effectuée et qu'un projet de loi semblable est présenté en Chambre. Sans faire toute l'histoire, je peux rappeler à titre d'exemple que, en novembre 1992, le député conservateur d'Abitibi avait présenté le projet de loi C-376 qui avait essentiellement le même esprit que le paragraphe introductif de celui du député de Manicouagan.

Auparavant, durant la grève des postes, l'actuel député de Richelieu, qui était à ce moment-là député conservateur, s'était essayé par deux fois pour faire adopter un projet de loi antibriseurs de grève au sein des sociétés d'État. D'abord, en février 1988, avec le projet de loi C-282, et ensuite en avril 1989, avec le projet de loi C-201. Le vote sur ce projet de loi ne fut défait que par 18 voix, ce qui veut dire que, finalement, le député de Manicouagan est justifié, aujourd'hui, de revenir à la charge, parce qu'on a vu qu'il y a quand même un bon nombre de députés des différents partis de la Chambre à l'époque qui étaient d'accord.

Le Parti libéral, alors dans l'opposition, s'était montré favorable au projet de loi. Un bon nombre de gens élus au Parti libéral étaient, à ce moment-là, favorables au projet de loi. Si on remonte encore plus loin, notons que, en 1980, M. Ed Broadbent, alors chef du NPD, avait présenté un projet de loi antibriseurs de grève. Depuis ce temps, plusieurs syndicats ont demandé aux différents gouvernements fédéraux l'adoption d'une telle loi. Donc, ce n'est pas nouveau.

En octobre 1994, l'actuel ministre du Développement des ressources humaines promettait pour le printemps 1995 un projet de loi antibriseurs de grève. Par la suite, vous savez ce qui est arrivé, c'est qu'une partie des responsabilités du ministre du Développement des ressources humaines ont été attribuées à l'actuelle ministre du Travail qui, semble-t-il, est trop occupée par le référendum, puisqu'elle n'a pas encore déposé en Chambre une telle mesure. Pourtant, Mme la ministre du Travail en avait fait une priorité après sa nomination, en février 1995. Nous sommes en octobre, et rien n'a été fait.

Permettez-moi de rappeler que, au Québec, sur le plan de la législation québécoise, sur le plan du Code du travail en ce qui concerne les travailleurs québécois, on remonte jusqu'en 1977 pour voir qu'une loi provinciale antibriseurs de grève a été adoptée. Depuis ce temps, l'Ontario et la Colombie-Britannique ont adopté des mesures semblables.

(1835)

Le rôle préventif, dissuasif et indicatif de la loi québécoise a fait en sorte que la moyenne des conflits de travail a baissé de 35 p. 100 au Québec depuis 1979. Ce n'est pas rien, 35 p. 100 du nombre de conflits de travail.

Les partenaires du marché du travail québécois s'entendent sur les effets bénéfiques de la loi québécoise portant sur les briseurs de grève. Même le très fédéraliste et très pro-affaires, le Conseil du patronat du Québec, a abandonné ses actions en Cour suprême contre ces lois, disant que les relations de travail au Québec s'étaient améliorées depuis des années, depuis son adoption.

Mais voilà, comme vous le savez il y a un nouveau gouvernement en Ontario, et ce nouveau gouvernement de M. Mike Harris, plus près des compagnies que des travailleurs, a promis de démanteler la loi 40 d'ici la fin de l'année. Fait intéressant à noter, Chrysler Canada a conseillé publiquement au gouvernement Harris de ne pas procéder trop vite à ce changement et de mesurer la portée de cette action. La compagnie automobile craint qu'une action précipitée ne perturbe les relations de travail en Ontario. C'est très actuel, c'est en Ontario. La compagnie Chrysler, ce n'est pas n'importe qui, c'est immense, c'est une compagnie importante qui donne des avertissements au gouvernement de l'Ontario en lui disant: N'enlevez pas cela.

Au Québec, 10 p. 100 des travailleurs sont régis par le Code canadien du travail, soit plus ou moins 217 000 travailleurs.

Je vais vous parler maintenant d'un exemple de conflit de travail qui, au Québec, a perduré en raison de la non application de la loi québécoise sur les briseurs de grève. L'exemple en question est la Minoterie Ogilvie. Ogilvie transforme le grain, et dans la Constitu-


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tion, quelque part dans le droit constitutionnel canadien il est dit que le grain est de juridiction fédérale. Or, qu'est-il arrivé à Ogilvie? C'est qu'étant de juridiction fédérale, les dispositions de la loi antibriseurs de grève qui existe au Québec ne s'appliquent pas.

Ce conflit qui vient de se terminer tout récemment a duré et a duré, malgré des interventions. Je me rappelle, moi, député de Lévis, d'avoir souligné cela. Pourtant c'est à Montréal principalement, Ogilvie, mais il y a des effets un peu partout dans toutes les régions du Québec. Dans le fameux conflit du CN on avait dit à la ministre du Travail: Le même empressement que vous avez eu pour nommer un médiateur, vous ne semblez pas l'avoir dans le conflit des grains, dans le port de Montréal, concernant Ogilvie.

Les choses ont traîné en longueur, en longueur et en longueur, jusqu'à un règlement récent, mais cela a duré plusieurs mois, et si ma mémoire est bonne, c'est de l'ordre de 18 mois.

Qu'est-ce qu'ils demandaient les travailleurs d'Ogilvie? Quel était le sujet du conflit? En vérifiant, c'est que les employés en question ne voulaient que maintenir leurs conditions de travail, pas les améliorer, les maintenir. La compagnie, elle, voulait en quelque sorte revenir en arrière sur les conditions déjà convenues.

C'était normal, dans les circonstances que les employés fassent cela. Il n'y a pas beaucoup de monde, et j'inclurais même les députés d'en face et tous les députés de la Chambre des communes, qui voudrait revenir sur des conditions passées. C'était la situation.

Je pourrais parler d'un autre cas au Québec pour illustrer cela. Je viens du comté de Lévis. La compagnie MIL Davie qui est dans la construction maritime, parce que c'est de la construction maritime, relève du code québécois. La compagnie ne pourrait pas engager des briseurs de grève. Mais un petit chantier, par exemple celui des Méchins, qui lui fait de la réparation de bateaux, qui est dans un domaine très relié, et comme le fédéral a juridiction en matière de circulation maritime, voilà que le chantier des Méchins, lui, serait assujetti au code canadien, donc pas de loi antibriseurs de grève.

Ces chantiers, actuellement, sont invités à soumissionner pour les mêmes travaux, donc des chantiers qui ne sont pas soumis aux mêmes conditions, aux mêmes règles de négociation.

(1840)

Je voudrais utiliser la dernière minute qui m'est allouée pour dire-et cela peut paraître curieux de la part d'un député du Bloc québécois engagé dans la campagne référendaire actuelle de venir dire au gouvernement fédéral d'adopter une loi antibriseurs de grève-que si le vote s'avère positif, quand le Québec sera souverain, il fera bien ce qu'il veut. Oui, on pourrait voir cela.

Mais en même temps, comme les domaines d'intervention des travailleurs sont souvent des domaines interreliés et qu'on veut une économie ouverte, nous estimons qu'il serait souhaitable que notre futur voisin, le Canada, soit soumis aux mêmes conditions pour que les entreprises, on parle de libre-échange, soient soumises aux mêmes règles.

Ce serait normal et on souhaite que les gens d'en face appuient cette loi pour que, finalement, on ait, dans cette partie du continent nord-américain, les mêmes conditions à offrir aux gens qui travaillent dans tous les domaines, mais dans le domaine industriel surtout.

[Traduction]

M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire de la ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi que de prendre pour la première fois la parole dans mes fonctions de secrétaire parlementaire du ministre du Travail afin de dire quelques mots sur le projet de loi C-317.

Je voudrais remercier le député de Manicouagan d'avoir présenté cet important projet de loi. Le député propose de modifier le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. J'y vois deux objectifs très importants.

Le premier objectif consiste à interdire le recours aux travailleurs de remplacement en cas de grève ou de lock-out dans la fonction publique ou chez un employeur visé par le Code canadien du travail. Le deuxième objectif est de veiller à ce que les services essentiels soient maintenus en cas de grève ou de lock-out dans la fonction publique ou une société d'État.

Les questions soulevées dans le projet de loi sont difficiles et complexes. En fait, ce projet de loi traite des ressources pécuniaires des gens, de leur gagne-pain et de leurs droits. Pour quiconque connaît les relations de travail, il est certain que ce projet de loi influera aussi sur les progrès économiques et sociaux du Canada.

Ainsi, le projet de loi mérite d'être étudié. Toute décision relative à ces questions doit être étudiée avec soin. Le projet de loi C-317 propose de modifier la Partie I du Code canadien du travail. Cette partie du code vise à mettre en équilibre les pouvoirs des syndicats et des employeurs.

J'ai déjà été dirigeant syndical et je sais qu'il y a un équilibre délicat à maintenir pour entretenir le processus des négociations collectives. Par conséquent, je ne pense pas qu'il soit sage d'agir sur des éléments isolés sans penser aux répercussions que cela peut avoir sur l'ensemble du processus. J'insiste sur ce point.

Je suis convaincu que le député n'ignore pas qu'il n'y a pas eu d'examen complet des dispositions du Code canadien du travail régissant les relations de travail depuis plus de 20 ans. Les dernières modifications ont été apportées à ce code en 1972 et, avant cela, il faut remonter à 1948.

En 1972, les modifications portaient sur le processus d'accréditation, elles ajoutaient de nouvelles dispositions exigeant des négociations de bonne foi, elles élargissaient les dispositions sur les pratiques déloyales de travail et augmentaient les pouvoirs du Conseil canadien des relations de travail. Le plus important, à mon avis, surtout si l'on tient compte des structures économiques modernes, a été l'inclusion d'un article sur les progrès technologiques. Celui-ci exige que, à moins qu'il soit question de ce sujet dans une convention collective, l'employeur est tenu de donner un préavis de 90 jours avant l'introduction de toute nouvelle technologie susceptible d'avoir des répercussions sur les conditions de travail ou la


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sécurité d'emploi d'un nombre important d'employés. Ce préavis a été porté à 120 jours en 1984.

Après avoir reçu ce préavis, un syndicat peut demander au Conseil canadien des relations de travail la permission d'informer l'employeur de sa volonté de rouvrir la convention collective pour discuter de dispositions concernant les travailleurs touchés. Une fois qu'il a reçu l'avis du syndicat, l'employeur ne peut pas faire de changements technologiques jusqu'à ce que le conseil rejette la requête du syndicat, jusqu'à ce qu'il y ait une entente ou jusqu'à ce que les parties négocient et qu'une grève soit déclenchée.

Mais toutes ces modifications n'ont été faites qu'après des consultations poussées avec les syndicats et les employeurs et après des études approfondies. L'étude Freedman, menée dans les années 1960, a examiné l'impact de la technologie à CN Rail et a recommandé une formule pour aider les syndicats et la direction à résoudre les différends relatifs aux conséquences de la nouvelle technologie. Par ailleurs, en 1968, le groupe de travail Woods a examiné pratiquement tous les aspects des relations patronales-syndicales relevant du gouvernement fédéral. Il a fait faire un certain nombre d'études et a présenté plusieurs recommandations importantes au gouvernement.

(1845)

J'ai mentionné brièvement ce qui s'est fait dans le passé pour montrer que, au Canada, nous ne prenons pas les choses à la légère lorsqu'il est question de relations patronales-syndicales. Toute mesure mal concue prise à la hâte, même si l'intention est bonne, peut avoir des conséquences graves dans ce domaine.

Notre tradition veut que nous modifiions les lois relatives à la négociation collective seulement après mûre réflexion et après des consultations approfondies avec toutes les parties concernées. Nous avons été très bien servis par cette tradition. Elle nous a permis d'évoluer, du moins au niveau fédéral, et je ne passerai pas de commentaires sur les changements radicaux que nous avons vus en Ontario, ma province, au cours des cinq dernières années. Nous avons eu le NPD, qui était à un extrême, pendant un certain temps, et nous avons maintenant les conservateurs, qui semblent aller vers l'autre extrême. Ce genre de polarisation ne fait rien pour aider les relations patronales-syndicales dans notre pays. En fait, cela nuit aux gens dont le gagne-pain dépend de la négociation collective.

Depuis que les dernières modifications ont été apportées en 1972, une révolution s'est opérée dans le monde des relations industrielles. Le libre-échange, la déréglementation, les progrès technologiques rapides et la restructuration du milieu de travail sont tous des facteurs qui imposent de nouvelles exigences aux travailleurs et aux employeurs. Cela étant dit, je crois que nous avons besoin d'un examen exhaustif du Code canadien du travail, et non pas d'une mesure fragmentaire comme celle proposée ce soir.

En fait, la ministre du Travail a lancé un tel examen il n'y a pas longtemps. Nous examinons la situation dans son ensemble. Nous voulons améliorer le Code canadien du travail afin d'encourager la collaboration entre les syndicats et le patronat, de réduire les conflits malsains qui nuisent à la productivité et de voir à ce que les organismes administratifs suivent l'évolution constante du milieu des relations de travail et s'y adaptent.

Depuis l'hiver dernier, on tient des consultations approfondies avec les travailleurs, les employeurs et des tierces parties intéressées et compétentes. Beaucoup de questions sont à l'étude, y compris celles que le député propose de régler au moyen du projet de loi C-317. C'est une tâche difficile étant donné que les travailleurs et les employeurs ont des points de vue diamétralement opposés sur ces questions. Il y a, par exemple, la question des travailleurs suppléants. Permettez-moi de vous dire ce que Tom d'Aquino, que nous connaissons tous, pense de cette interdiction.

Tom d'Aquino écrit: «Nous modifierions radicalement le fragile équilibre qui a été créé au long des années entre le patronat et les travailleurs et les entreprises régies par des lois fédérales. Il en résulterait à coup sûr un renforcement de la position des syndicats ouvriers et un affaiblissement de celle du patronat, ce qui aurait des répercussions évidentes sur l'issue des négociations contractuelles privées. Une telle ingérence du gouvernement violerait les principes les plus fondamentaux d'équité et de fair play. Cette attitude aurait un effet extrêmement perturbateur et serait tout à fait incompatible avec notre économie de libre marché. Elle aurait également pour effet de violer le droit fondamental des individus de choisir où et quand travailler.»

On trouve à l'autre extrême Bob White, que nous connaissons aussi très bien. Il a déclaré que le CTC préconise fermement de limiter et même d'interdire le recours aux travailleurs suppléants, y compris les cadres.

Nous nous devons de concilier ces deux opinions très fermes et apparemment incompatibles. Ce ne sera pas facile, mais nous devons le faire.

En juin dernier, la ministre du Travail a créé un groupe de travail chargé d'effectuer un examen indépendant de la partie I du Code du travail et d'y recommander des changements. Je voudrais parler des questions et des domaines que ce groupe de travail examinera, et cela à l'intention des députés d'en face qui ont laissé entendre à la Chambre ce soir que la ministre du Travail n'a à peu près rien fait dans ce dossier et qu'elle s'est montrée hésitante à entreprendre les changements majeurs qui sont nécessaires pour notre économie et pour les relations de travail. L'examen sera terminé d'ici le 15 décembre. Je suis sûr que les membres du groupe de travail le feront de façon consciencieuse et approfondie.

(1850)

Les questions soumises au groupe de travail sont importantes et même fondamentales. Ce sont notamment les processus de conciliation et de médiation, dans le but de réduire les délais et d'encourager les règlements ainsi que les possibilités de faire intervenir d'autres méthodes de règlement des différends; l'appréciation des faits et la médiation spéciale; les procédures d'acquisition du droit de grève ou de lock-out ainsi que les droits des employés, des employeurs et des agents de négociation après le début d'une grève ou d'un lock-out. L'objet général du code sera examiné ainsi que les besoins en matière de comités des relations patronales-syndicales, les programmes de médiation préventive et l'arbitrage des griefs et l'arbitrage accéléré. La structure des unités de négociation, y compris les recommandations des commission d'enquête sur les relations du travail dans les ports de la côte ouest, feront l'objet des dispositions relatives à l'accréditation géographique. Finalement, la nécessité de créer d'autres procédures ou structures de négociation applicables aux relations de travail nouveau genre, comme dans le cas du


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télétravail, du travail à contrat et du travail occasionnel sera examinée.

Comme les députés peuvent le constater, le groupe de travail a du pain sur la planche-et ce n'était pas une liste exhaustive. Il y a beaucoup de choses à faire et nous n'avons pas beaucoup de temps. Ce n'est qu'ensuite que nous pourrons prendre des décisions éclairées sur les questions soulevées par le parti séparatiste d'en face et sur d'autres questions également, car nous aurons un tableau d'ensemble.

Pour tirer le meilleur parti possible de tout ce processus, nous devrons attendre que les études en cours soient terminées. Nous serons alors tous en mesure de prendre une décision éclairée. Le gouvernement définira alors sa position quant au type de mesure législative qu'il proposera à la Chambre.

Le gouvernement fédéral croit que c'est ainsi qu'il faut procéder. Nous avons présenté à la Chambre des propositions détaillées sur la gestion des relations de travail au lieu de régler un élément à la fois, comme l'aurait voulu le député d'en face.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer à ce débat sur le projet de loi C-317 qu'a présenté le député du Bloc et qui traite de l'embauche de personnes afin de remplacer les employés en grève ou en lock-out.

Le député bloquiste est en faveur d'interdire l'embauche de personnes pour remplacer les employés en grève ou en lock-out. Cela vient du fait que le Bloc est furieux de ce que les propriétaires américains de la compagnie montréalaise connue sous le nom Les Minoteries Ogilvie aient embauché des personnes pour remplacer les employés. Les minoteries relevant de la compétence fédérale et la loi provinciale interdisant l'embauche de personnes pour remplacer les employés n'ayant aucun effet sur cette compagnie, je comprends que les bloquistes estiment important de présenter cette mesure législative à la Chambre des communes afin que les députés l'examinent durant l'heure réservée aux affaires émanant des députés.

Cette proposition vient d'un membre d'un parti séparatiste qui veut retirer la province du Québec du Canada. À notre avis, les membres de ce parti ne se rendent pas compte des conséquences de leurs actes. Pas plus qu'il ne se rendent compte des conséquences de ce projet de loi. C'est un peu comme la diplomatie de la boîte à sable selon laquelle l'enfant qui se fâche avec ses camarades de jeu déclare: «Bon, si c'est comme ça, je prends mes jouets et je m'en vais jouer ailleurs. Personne n'a le droit de jouer avec mes jouets, je les emporte.»

En politique, lorsque nous traitons de mesures législatives, et dans les conflits de travail, nous pouvons voir au-delà de la diplomatie de la boîte à sable, parce que cette approche pour les conflits de travail et la législation du travail, particulièrement celle qui touche les travailleurs de remplacement, n'est pas la solution au problème mais, au contraire, quelque chose qui risque d'aggraver la situation.

Je ne vais pas débattre en détail des articles du projet de loi proposé par mon collègue. Je désire simplement jeter un coup d'oeil rapide aux conséquences des conflits de travail et proposer une façon peut-être plus constructive et plus positive de les résoudre qui ne consisterait pas à interdire les travailleurs de remplacement et à se lancer dans des batailles futiles entre les syndicats et les entreprises, où chacun doit prendre partie. En outre, je voudrais signaler à mon collègue du Bloc que cette approche de la législation du travail et des relations de travail va peut-être à l'encontre des intérêts politiques de son parti.

(1855)

Il suffit de jeter un coup d'oeil sur nos cousins politiques, les néo-démocrates, pour constater ce qu'il est advenu d'eux ces dernières années et ce qu'il leur est arrivé au cours de la fin de semaine. Ils ont toujours cherché à plaire à l'élite, aux dirigeants du mouvement syndical, persuadés que cela leur ouvrirait les portes du succès en politique. Même au cours de leur congrès à la direction qui a eu lieu en fin de semaine, j'ai été à même de constater le rôle important que le monde syndical jouait dans le choix du chef de leur parti. Leur position sur les questions touchant les relations patronales-syndicales les a conduits à leur déclin politique et a même entraîné une diminution de l'appui que leur manifestaient les syndiqués de la base.

J'avise donc mes collègues du Bloc québécois qu'il vaudrait peut-être mieux, pour leur bien-être en politique, ne pas s'engager dans ce genre de mesure législative.

Je voudrais traiter des relations de travail sur la côte ouest parce qu'elles ont des incidences sur mon coin de pays. L'ouest du Canada est une région importante. Je reconnais que, ces jours-ci, il est passablement question du Québec et de ses relations au sein du Canada. Je voudrais néanmoins toucher un mot sur la situation du travail et des travailleurs suppléants et, peut-être, sur un meilleur processus de résolution des conflits de travail dans le contexte de ma province, la Saskatchewan.

Depuis 1972, six conflits de travail touchant les ports de la côte ouest ont été réglés par une loi fédérale forçant le retour au travail. Deux autres conflits de travail ont été réglés de la même façon en 1988 et en 1991. Ils étaient directement liés aux conflits enregistrés dans la manutention du grain en Colombie-Britannique, malgré quelques différences.

Au cours de la 35e législature, deux conflits de travail sont survenuns dans les ports de la côte ouest et se sont soldés par des lois forçant le retour au travail. Il s'agit en l'occurrence de la Loi de 1994 sur les opérations portuaires de la côte ouest, soit le projet de loi C-10, et de la Loi de 1995 sur les opérations portuaires de la côte ouest, soit le projet de loi C-74. Elles portaient sur les conflits qui avaient éclaté en février 1994 et en mars 1995.

Voilà qui m'amène au principe qui sous-tend le droit de faire la grève, le droit de décider un lock-out et le droit de remplacer les travailleurs par des présumés briseurs de grève ou, au contraire, le droit de mettre en oeuvre une loi interdisant l'embauche de travailleurs suppléants.

La grève et le lock-out sont des outils efficaces dans l'arsenal des syndicats et de la direction. Ils s'en servent depuis longtemps pour parvenir à un règlement. Généralement, c'est la partie qui a le plus d'argent et qui est la plus déterminée à gagner qui va parvenir à un règlement plus satisfaisant pour elle. Nous respectons ce mécanisme. Si c'est la façon dont les syndicats et la direction veulent procéder, nous respectons leur choix. Ce n'est pas une approche


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marquée au coin de la maturité. Cependant, nous vivons dans un pays libre et il faut certes en tenir compte.

Dans le cas des ports de la côte ouest, cependant, les conflits de travail sont uniques pour deux raisons. Tout d'abord, parce que le gouvernement fédéral ne laisse pas les syndicats et la direction utiliser les outils à leur disposition au point d'en arriver à une interruption des activités, au recours à des briseurs de grève ou à la décision d'interdire ce type de recours. Il adopte des lois de retour au travail. Cela nous apprend qu'il y a une tierce partie innocente qui subit des répercussions sur le plan économique. Pour cette raison, on cherche désespérément à trouver une meilleure façon de régler les conflits de travail que la grève ou le lock-out, ce qui entraîne, par la suite, le recours à des briseurs de grève quand cela est permis.

Nous avons dit que ce qui fonctionnait, c'était le recours à l'arbitrage des propositions finales, le processus au sujet duquel la Chambre a légiféré. Je serais plus encouragé si mon collègue avait présenté un projet de loi montrant l'évolution des relations de travail jusqu'au recours à l'arbitrage des propositions finales, par exemple.

Le coût d'interruption des activités des ports de la côte ouest se chiffre à des centaines de millions de dollars. Les coûts directs du conflit de 1994 ont été supérieurs à 125 millions de dollars. Les coûts indirects de la perte de futurs contrats perdus se sont établils à plus de 250 millions de dollars. Selon le ministre du Développement des ressources humaines, les ventes de grain menacées pouvaient s'élever à 500 millions de dollars.

Après avoir signalé ces problèmes, nous n'avons pas laissé les gens le bec à l'eau. Nous avons décidé qu'il fallait prendre des mesures constructives à ce sujet. Nous avons proposé l'arbitrage des propositions finales, un processus qui a fait ses preuves. Ce n'est pas une toute nouvelle idée. En fait, on a légiféré à ce sujet.

(1900)

On pourrait peut-être étendre son rôle au-delà de certains services essentiels, comme les ports de la côte ouest et les chemins de fer nationaux. Il se peut que les syndicats et la direction puissent accepter cela plus facilement, plutôt que de décider d'avoir recours à la suppléance ou d'interdire ce recours.

Voici comment fonctionne l'arbitrage des propositions finales. Si, et seulement si, le syndicat et l'employeur ne peuvent s'entendre à la conclusion de la convention précédente, on met immédiatement en place les mesures suivantes sans qu'il n'y ait interruption des activités. S'il n'y a pas d'arrêt de travail, aucun travailleur suppléant n'est embauché, et ce problème est évité du même coup.

On demande au syndicat et à l'employeur de donner le nom d'une personne qu'ils recommanderaient tous deux comme arbitre. Le syndicat et l'employeur sont tenus de soumettre à l'arbitre une liste des questions sur lesquelles ils se sont entendus et une liste des points qui sont encore en litige. Pour ces derniers, chacune des parties doit faire une proposition finale de règlement; l'arbitre choisit ensuite entre la proposition finale du syndicat et celle de l'employeur. Si une partie ne fait pas de proposition finale, celle de l'autre partie est automatiquement acceptée, et la décision de l'arbitre lie les deux parties.

Voilà, selon nous, l'orientation que devraient prendre les relations syndicales-patronales. C'est ainsi qu'on règle de la façon la plus sage possible les conflits syndicaux-patronaux. Cela empêche l'embauche de travailleurs suppléants et, partant, nous évite d'avoir à interdire le recours à ces travailleurs. Cela empêche les arrêts de travail et les pertes salariales pour les travailleurs. Le processus de négociation collective reste en place. Il peut encore se dérouler en bonne et due forme. Les parties sont réunies pour résoudre leurs différends plus rapidement et d'une manière plus juste, équitable et harmonieuse.

Lorsqu'il présentera d'autres projets de loi à la Chambre, j'inviterais le député à considérer cela comme une troisième option peut-être supérieure aux autres déjà examinées.

[Français]

M. Benoît Serré (Timiskaming-French River, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais dire quelques mots au sujet du projet de loi C-317 déposé par le député de Manicouagan.

Dans le projet de loi en question, il est proposé de modifier le Code canadien du travail et la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

Le projet de loi a pour objet, dans un premier temps, d'interdire l'embauche de personnes afin de remplacer les employés des employeurs visés par le Code canadien du travail ou les employés de la fonction publique qui sont en grève ou en lock-out et, dans un deuxième temps, de voir à ce que soient maintenus les services essentiels lors d'une grève ou d'un lock-out au sein d'une société d'État ou dans la fonction publique fédérale.

Bien qu'il soit proposé dans ce projet de loi de modifier tant le Code canadien du travail que la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, je ne veux aujourd'hui vous parler que des changements qui toucheraient le Code canadien du travail.

Qui plus est, je veux mettre l'accent sur deux aspects très importants des relations du travail, à savoir le recours à des travailleurs de remplacement et le maintien des services essentiels en cas de grève ou de lock-out.

Ce n'est pas la première fois que ces questions sont soulevées à la Chambre des communes. À maintes reprises, les politiciens ont dû en débattre. Les représentants des groupes d'employeurs et des syndicats nous ont fait valoir leur point de vue avec beaucoup de vigueur. Et les spécialistes universitaires en matière de relations industrielles ont essayé de nous faire voir les conséquences des décisions que nous prendrions à ce sujet.

Les questions relatives aux travailleurs de remplacement et aux services essentiels ne sont pas faciles à résoudre car elles font intervenir le gagne-pain et les droits des citoyens ainsi que les attentes légitimes de la société. On nous demande à nous, représentants à la Chambre, de décider si le fait de restreindre les droits d'un groupe va dans le sens de l'intérêt du public. On nous demande aussi de trouver un juste équilibre entre les droits des employés et ceux des employeurs. Peu importe la décision que nous prendrons sur le

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plan législatif, un groupe se sentira lésé, estimant que l'on empiète sur ses droits et sur ceux de l'autre groupe.

Il est donc essentiel de ne pas porter un jugement hâtif sur ces questions. Comme je l'ai dit, les députés en ont discuté à maintes occasions. C'est tout à leur honneur de ne pas avoir agi de façon impulsive et décousue. Je pense toutefois que le projet de loi arrive trop tôt.

(1905)

Comme le député le sait sans doute, le gouvernement procède actuellement à un examen complet de la Partie I du Code canadien du travail. La Partie I définit le cadre des relations industrielles et établit les règles pour la conduite des négociations collectives dans les industries régies par les lois fédérales.

Elle s'applique à des secteurs comme le transport ferroviaire ou routier, les pipelines, le transport aérien, le transport maritime, le débardage, la manutention des grains, les banques et la radiodiffusion dans la mesure où il s'agit d'activités interprovinciales ou internationales. Certaines sociétés d'État comme la Société canadienne des postes sont aussi assujetties au Code.

Depuis plus de 20 ans, les dispositions du Code canadien du travail concernant les relations industrielles n'ont pas été revues. Cependant, le contexte dans lequel se déroulent les négociations collectives s'est considérablement modifié pendant cette période. En raison de la mondialisation, de la déréglementation, de l'évolution technologique et de la restructuration du milieu du travail, le système doit satisfaire à de nombreuses exigences.

Le gouvernement mène de vastes consultations auprès des organisations syndicales et patronales et du milieu universitaire. De nombreux citoyens touchés et intéressés ont aussi envoyé des lettres pour expliquer leur point de vue sur les relations du travail.

Le groupe d'étude examinant la Partie I du Code doit faire rapport au ministre du Travail d'ici le 15 décembre 1995. Certains aspects complexes et difficiles sont actuellement étudiés, notamment le recours à des travailleurs de remplacement dans le cas d'arrêts de travail légaux et la question des services essentiels. Ce sont là des dossiers très explosifs, en particulier celui des travailleurs de remplacement.

À l'heure actuelle, le Code canadien du travail n'interdit pas le recours à des travailleurs de remplacement, mais il offre une mesure de protection aux travailleurs en grève. Ainsi, l'employeur n'a pas le droit de prendre des mesures disciplinaires contre un employé qui participe à un arrêt de travail légal ou qui refuse de remplir les fonctions d'un autre employé qui, lui, participe à un arrêt de travail légal.

En outre, conformément aux règles du Conseil canadien des relations du travail, une fois la grève terminée, les employés ont le droit de reprendre leur emploi et ont préséance sur toute autre personne engagée pour les remplacer. Aux États-Unis, il n'y a aucune mesure de protection contre l'embauche de travailleurs de remplacement. En fait, les employeurs sont même autorisés à engager des travailleurs de remplacement permanents, bien que le président Clinton travaille à interdire cette pratique.

Ici, au Canada, quelques provinces se sont dotées d'une loi afin de restreindre le recours à des travailleurs de remplacement lors d'arrêts de travail légaux. Les tenants d'une mesure visant à interdire le recours à des travailleurs de remplacement sont d'avis qu'en cas d'impasse dans les négociations collectives, les problèmes économiques occasionnés par les deux parties motiveront celles-ci à faire des compromis.

Mais, quand un employeur continue d'exploiter son entreprise durant une grève parce qu'elle peut compter sur des travailleurs de remplacement, il n'est plus motivé à négocier. Les arrêts de travail se prolongent et la tension monte sur les lignes de piquetage.

Certains font valoir qu'au Québec, où il est interdit d'avoir recours à des travailleurs de remplacement depuis 1978, la violence sur les lignes de piquetage a été réduite. D'autres avancent que le recours aux travailleurs de remplacement envenime les relations patronales-syndicales et n'encourage pas les employés à devenir membres d'un syndicat, car sachant qu'ils peuvent être remplacés facilement pendant une grève, ils mettent en doute l'utilité d'être syndiqués. Cela est particulièrement vrai dans le cas des entreprises qui emploient des travailleurs non spécialisés, dont le revenu est faible.

À ceux qui prétendent que l'interdiction d'engager des travailleurs de remplacement ferait pencher la balance en faveur des travailleurs, les syndicalistes et d'autres personnes rétorquent que la mondialisation fait déjà pencher la balance du côté de l'employeur. Ceux qui ne sont pas en faveur de l'interdiction d'engager des travailleurs de remplacement disent que cela pourrait décourager les nouveaux investissements et inciter certaines entreprises à s'établir aux États-Unis, où il n'existe pas de législation en ce sens.

Les opposants à une telle législation soutiennent aussi que la plupart des entreprises qui relèvent de la compétence du fédéral sont des industries d'infrastructure. Donc, si elles sont forcées de cesser complètement leurs activités en raison de l'interdiction d'engager des travailleurs de remplacement, c'est toute l'économie qui en souffrira et il faudra avoir recours plus souvent aux lois forçant le retour au travail.

À ceux qui affirment que l'interdiction d'engager des travailleurs de remplacement permettrait de réduire la tension et la violence sur les lignes de piquetage, ceux qui s'opposent à cette interdiction répondent que la législation du travail n'est pas l'outil qui convient pour régler ce problème. Selon eux, le gouvernement devrait plutôt tourner son attention vers ceux qui posent de tels actes de violence.

C'est de toute évidence un problème très difficile à résoudre et il ne sera pas aisé de rapprocher les deux camps. Il est donc absolument essentiel de poursuivre le dialogue, les consultations, la recherche, la discussion et la réflexion.

Il faudrait permettre à l'examen exhaustif du Code qui a été entamé par le gouvernement de suivre son cours avant de soumettre des modifications à l'approbation de la Chambre.

La question des services essentiels est aussi très complexe. Définir ce que signifie exactement l'expression «services essentiels» n'est pas une mince tâche. Notre collègue, dans son projet de loi, semble faire un lien direct entre les services essentiels et les services offerts par les sociétés d'État. En conséquence, les dispositions concernant les services essentiels s'appliqueraient à une socié-

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té d'État, mais pas à une compagnie privée, même si l'une et l'autre offraient le même service.

En conclusion, je voudrais simplement rappeler qu'un examen approfondi du Code a été amorcé par le gouvernement fédéral et que les deux questions que notre collègue a portées à notre attention doivent être examinées dans le cadre de cet examen. Il serait donc prématuré d'adopter un projet de loi tel que celui-ci pendant que le Code est à l'étude.

Compte tenu de la complexité et l'importance des questions soulevées, il serait plus prudent d'attendre que l'examen du Code soit terminé.

Le président suppléant (M. Kilger): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée. Conformément à l'article 93 du Règlement, l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.

[Traduction]

Comme il est 19 h 13, la Chambre s'ajourne à demain, à14 heures, conformément à l'article 24 du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 13.)