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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 27 janvier 1994

AFFAIRES COURANTES

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion 451

PÉTITIONS

LES CARTES DE TUEURS EN SÉRIE

LES GARDERIES

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

    Reprise de l'étude de la motion 452
    M. Leblanc (Longueuil) 454
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 455
    M. Leroux (Shefford) 460
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 461

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES INTERVENTIONS DES DÉPUTÉS

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

    Le vice-président (M. Kilger) 462

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

    M. Bernier (Gaspé) 462
    M. Leblanc (Longueuil) 465
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 468
    M. Hill (Macleod) 472

AFFAIRES COURANTES

AIR CANADA

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

    reprise de l'étude 476
    M. Leblanc (Longueuil) 478
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 480
    M. Harper (Calgary-Ouest) 483
    M. Mills (Broadview-Greenwood) 484

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LA JUSTICE

LE DÉCÈS DE M. GÉRARD PARIZEAU

LA PETITE ENTREPRISE

LE MAINTIEN DE LA PAIX

LE DÉBAT SUR LES ESSAIS DU MISSILE DE CROISIÈRE

LE LABORATOIRE DE FRACTIONNEMENT DU SANG

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

L'AGRICULTURE

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

LA LOI SUR LES LANGUES OFFICIELLES

LA BIÈRE À TENEUR ÉLEVÉE EN ALCOOL

L'ENVIRONNEMENT

LA JUSTICE

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 487

LA SOCIÉTÉ MAGNA INTERNATIONAL

    M. Mills (Broadview-Greenwood) 487

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

LA CONTREBANDE DU TABAC

    M. Bernier (Beauce) 488

QUESTIONS ORALES

LES COMMUNAUTÉS AUTOCHTONES

LA DÉFENSE NATIONALE

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

    M. Martin (LaSalle-Émard) 490
    M. Martin (LaSalle-Émard) 490
    M. Martin (LaSalle-Émard) 490

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

L'ORGANISATION MARITIME INTERNATIONALE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 491
    M. Martin (LaSalle-Émard) 491

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

    M. Harper (Simcoe-Centre) 492
    M. Harper (Simcoe-Centre) 492 M. Collenette 492

L'IMMIGRATION

LA YOUGOSLAVIE

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURE

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

LE PROJET KEMANO

LE TRAIN À GRANDE VITESSE

LA JUSTICE

PORT GRANBY

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

    Reprise de l'étude 496
    M. White (Fraser Valley-Ouest) 501
    M. Breitkreuz (Yorkton-Melville) 538
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 551

451


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 27 janvier 1994


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, il y a eu des discussions entre les partis, et je crois que vous obtiendrez le consentement unanime pour la motion suivante:

(1005)

[Traduction]

Que l'heure ordinaire de l'ajournement quotidien soit reportée à 22h00 aujourd'hui et que, au cours de cette prolongation de séance, aucune motion dilatoire ne soit acceptée par la Présidence ou l'absence de quorum ne puisse lui être signalée; et
que, si le vendredi 28 janvier 1994, à la fin du débat sur la motion pour l'Adresse en réponse au discours du Trône, un vote par appel nominal est demandé et exigé, un tel vote soit différé jusqu'au mardi 1er février 1994, à 18h00, nonobstant les dispositions de l'article 45(6) du Règlement.
Le Président: Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime pour proposer la motion?

Des voix: D'accord.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, effectivement, nous avons accordé notre consentement, et je voudrais souligner que c'est peut-être un précédent que l'on a créé en tenant le vote le mardi soir. J'espère que l'on pourra discuter de cette question lors de la réforme parlementaire afin que les votes soient concentrés les mardis, mercredis et jeudis, pour faire en sorte que les députés puissent travailler le vendredi ou le lundi dans leur comté, ce qui rendrait la tâche de tous les députés beaucoup plus facile à exécuter.

[Traduction]

Le Président: Avons-nous le consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Le Président: Les députés ont entendu le texte de la motion. Plaît-il à la Chambre de l'adopter?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

* * *

PÉTITIONS

LES CARTES DE TUEURS EN SÉRIE

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter ce matin une pétition signée par des résidents de ma circonscription, Leeds-Grenville. J'ai noté que les signataires vivent dans des endroits comme North Augusta, Addison et Spencerville.

Les pétitionnaires se déclarent horrifiés de l'augmentation des crimes violents au Canada. Ils demandent de modifier les lois afin d'interdire l'importation, la distribution et la vente de ce qu'on appelle les «cartes de tueurs».

Les pétitionnaires voudraient qu'on informe tous les fabricants de ces cartes qu'elles seront stoppées à la frontière pour être détruites. Ils voudraient qu'on dise cela aux fabricants avant qu'ils essayent de les exporter au Canada.

LES GARDERIES

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface): Monsieur le Président, je voudrais présenter une pétition. Les pétitionnaires signalent que les familles à un seul revenu dont les enfants ont des besoins spéciaux devraient pouvoir déduire leurs frais de garde dans le calcul de leur impôt sur le revenu. À leur avis, ces familles subissent une discrimination lorsque l'un des parents décide de demeurer à la maison avec les enfants.

Les pétitionnaires mentionnent que ces familles doivent souvent assumer de lourdes dépenses pour suivre les conseils de leur médecin et placer leur progéniture dans des garderies aptes à s'occuper d'enfants ayant des besoins spéciaux puisque les frais exigés sont les mêmes pour les familles disposant d'un ou de deux revenus.

Les pétitionnaires estiment que cette politique est discriminatoire et injuste. Ils demandent donc qu'elle soit revue et que des mesures soient incluses dans le prochain budget si possible.

452


452

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1010)

[Français]

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 24 janvier, de la motion: Qu'une Adresse soit présentée à Son Excellence le Gouverneur général en réponse au discours qu'il a prononcé à l'ouverture de la session.

L'hon. Michel Dupuy (ministre du Patrimoine canadien): Monsier le Président, le discours du Trône comprend un paragraphe consacré à la culture, au patrimoine et à l'identité canadienne. Ce paragraphe indique que le gouvernement prendra l'initiative de présenter certaines mesures qui contribueront au renforcement de ces valeurs nationales essentielles.

On peut se demander comment un paragraphe aussi modeste peut répondre aux défis que pose un ministère aussi étendu que celui que j'ai l'honneur de diriger. Aussi, quelques mots d'explication sur ce ministère semblent justifiés en ce début de session parlementaire.

La dénomination du ministère du Patrimoine canadien pose d'emblée un problème de définition. Qu'entend-on par «patrimoine canadien»? Et comment peut-on justifier le regroupement au sein d'un même ministère de composantes aussi variées que les communications, la condition féminine, les industries culturelles, les langues officielles et patrimoniales, le multiculturalisme, les parcs et les sites d'intérêt national, le protocole d'État et le sport amateur?

Si l'on redonne au terme de «patrimoine» son acception la plus large, soit l'ensemble des biens mis en commun qui font que chacun de nous se reconnaît en tant qu'individu appartenant à un groupe, voire un pays, on comprend la pertinence d'une telle appellation.

[Traduction]

De nos jours, on ne peut plus limiter le patrimoine à l'héritage du passé. Bien plus qu'une simple collection des traces laissées par l'histoire, le patrimoine d'un pays est d'abord et avant tout la manifestation des liens qui unissent les membres d'une collectivité et de son caractère distinct au sein de l'environnement planétaire. Ce concept est donc intimement lié à la question de l'identité du pays.

Si on adopte cette perspective, il est plus facile de comprendre pourquoi le ministère du Patrimoine canadien chapeaute un si large éventail d'activités.

[Français]

J'y vois en gros trois grands réseaux qui visent un même objectif. Premièrement, la gestion de notre patrimoine naturel et matériel que constituent nos parcs nationaux, nos monuments historiques et nos canaux de nature patrimoniale.

Deuxièmement, la gestion de programmes qui protègent les langues officielles, qui valorisent la condition féminine et les sports amateurs et qui assurent d'autres apports culturels propres à enrichir notre société.

Troisièmement, la gestion du développement culturel au Canada et des moyens de communication dont l'importance est capitale, non seulement pour assurer notre originalité, mais aussi pour servir de puissants instruments de développement économique.

J'aimerais revenir plus en détail sur chacun de ces trois grands réseaux. Notre patrimoine se présente d'abord comme une collection de lieux chargés d'histoire et constituée de 36 parcs nationaux, de 750 sites historiques et neuf canaux répartis sur l'ensemble du territoire canadien. Il s'agit d'un secteur économique important qui génère des recettes annuelles de plus d'un milliard de dollars et qui emploie environ 30 000 Canadiens.

C'est donc un secteur qui se trouve au coeur de notre industrie touristique et qui fait l'envie de la communauté internationale, car nous sommes à l'avant-garde de ce qu'on pourrait appeler l'écotourisme. Un chiffre témoigne à lui seul de la popularité de ces lieux auprès de la population et des touristes. En 1992, quelque 27 millions de personnes ont visité les parcs et les sites d'intérêt national.

(1015)

Ceux-ci se trouvent bien sûr associés à la beauté de notre pays dans l'imaginaire collectif. Mais ils bénéficient également de l'intérêt de plus en plus important que les sociétés occidentales accordent à la qualité de l'environnement. Aussi, j'estime qu'ils devront répondre aux principes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

[Traduction]

Il faudra faire des choix et toutes les parties, y compris le gouvernement fédéral, les provinces, les municipalités et les territoires, devront travailler conjointement à cet égard. Par exemple, nous souhaitons poursuivre notre objectif qui consiste à créer des parcs terrestres et marins dans toutes nos différentes régions écologiques. Nous voulons également augmenter le nombre des lieux historiques qui doivent permettre de témoigner de toutes les facettes de notre histoire.

À cet égard, j'encouragerais la découverte de nouveaux aspects de notre histoire collective, comme ceux qui se rapportent aux femmes et aux autochtones. Mais il ne faut pas oublier les graves restrictions financières qui se présentent à nous.

[Français]

Sans doute, un certain recours à l'autofinancement pourrait ouvrir des perspectives intéressantes, mais il faut éviter les


453

contrecoups causés par un excès de commercialisation. Mon rôle consistera ici à veiller à l'intégrité écologique et commémorative de ce volet important de notre patrimoine, tout en autorisant judicieusement sa mise en valeur.

[Traduction]

Je souhaite faire part de ce que je pense des avantages que présente une société diversifiée comme la nôtre.

L'histoire de notre pays est étroitement liée à des vagues successives d'immigrants et à l'interaction entre les nouveaux arrivés et la société en place. La manière dont les immigrants s'adaptent à la façon de vivre des Canadiens sera toujours un facteur important du développement de l'identité canadienne.

Le défi à relever consiste à chercher la façon d'intégrer ces diverses cultures à nos cultures existantes, sans pour autant les fusionner dans un seul moule et par là même les assimiler pour qu'elles n'existent plus en tant que telles. Nous devons favoriser l'épanouissement d'une identité complètement canadienne qui servirait de point de ralliement aux diverses cultures et qui permettrait de bâtir une société fondée sur le consensus et la continuité de notre histoire.

Voyons les choses en face. La coexistence de cultures de par le monde est l'un des plus grands défis que doive relever l'humanité au cours des dernières années du XXe siècle. Tous les jours, nous entendons parler de racisme ou d'ostracisme, ces deux réalités étant exacerbées par les moments difficiles que nous traversons. Il s'agit d'un phénomène mondial auquel le Canada ne peut pas se soustraire. Il nous faut considérer les dangers inhérents à l'égocentrisme. Nous devons nous rendre compte de l'avantage que le Canada peut retirer de la diversité culturelle de notre société.

Dans un monde de plus en plus axé sur la mondialisation de l'économie et de la culture, notre diversité pourrait être à notre avantage, alors que nous nous efforçons de conserver la place que nous occupons au sein de la communauté internationale.

[Français]

Mais encore faut-il contrer cette vague d'incompréhension qui déferle sur les pays occidentaux par une meilleure information sur les mérites de la diversité culturelle. Peut-être faudrait-il commencer chez les très jeunes et explorer, de concert avec les gouvernements provinciaux qui ont la responsabilité de l'éducation, de nouvelles possibilités de réagir contre la violence injustifiée qu'entraîne parfois la peur de l'autre.

La création d'une fondation sur les relations raciales pourra justement servir à jeter un nouvel éclairage sur la productivité des échanges entre les différentes ethnies qui composent notre population, les anciennes comme les nouvelles, et à rallier les forces vives du multiculturalisme autour d'une identité culturelle spécifiquement canadienne. Peut-être y aura-t-il lieu aussi de mieux utiliser des rencontres telles que les Jeux du Canada, pour en faire une véritable expérience de la diversité canadienne, qui intégrerait également la composante culturelle.

(1020)

J'en profite pour souligner que des athlètes de tous les coins du Canada se préparent à participer bientôt aux Jeux olympiques d'hiver de Lillehammer. Je suis certain que chacun d'entre nous partage leur joie de représenter leur pays à un événement d'aussi grande envergure. Je leur souhaite bien sûr, en votre nom et au mien, les meilleures chances de succès.

J'ajoute qu'à mon avis, la préservation et la promotion de nos langues officielles ne font pas du Canada une tour de Babel. Gardons la liberté individuelle d'utiliser la langue de notre choix, mais sachons reconnaître que les langues anglaise et française nous donnent accès à deux des plus grandes sources de culture universelle. Elles font partie de notre patrimoine national que le gouvernement se doit de maintenir et de faire fructifier.

Quelques réflexions, enfin, sur la politique culturelle. La culture n'est pas une abstraction, pas plus qu'elle n'est une parade décorative. Elle est avant tout un point de vue sur le monde et une manifestation de notre civilisation. Nulle identité sans culture, et c'est ce que reconnaît d'ailleurs le programme d'action du Parti libéral qui indique et je cite: «La culture est l'essence même de l'identité nationale. Elle est à la base de la souveraineté et de la fierté de notre pays.»

Notons qu'à l'heure de la mondialisation des échanges et de l'explosion des technologies de l'information, nos ressources culturelles sont devenues de puissants instruments de développement économique. Ainsi en 1992, le total de la contribution du secteur culturel au produit intérieur brut était de l'ordre de 22 milliards de dollars. Ce secteur employait près d'un demi-million de personnes, ce qui représente un taux de croissance de l'emploi d'environ 21 p. 100 pour la période de 1987 à 1992.

[Traduction]

Aussi impressionnant que cet essor puisse être, les problèmes auxquels font face nos industries culturelles n'en existent pas moins. Ces dernières n'ont accès ni aux capitaux ni aux débouchés dont elles ont besoin pour soutenir la concurrence ici avec les majors de la culture de masse et surtout avec nos voisins du Sud, je veux parler des États-Unis. C'est la raison pour laquelle je crois que le Canada a tout intérêt à conserver sa liberté d'action sous le parapluie d'accords internationaux qui nous lient aux États-Unis, au Mexique et à nos partenaires du GATT. Nous avons remporté la victoire à cet égard et nous pouvons maintenant élaborer de nouvelles politiques de pointe.

Par le passé, nous avons adopté un plan d'action pour stimuler la production, en sommes arrivés à un meilleur équilibre avec les produits étrangers et avons pavé la voie à une plus grande créativité de la part de nos artistes. Nous avons accompli de grands progrès. Je ne crois pas néanmoins que nos programmes traditionnels suffiront à eux seuls à relever les défis que soulèvent la mondialisation des cultures, les restrictions financières et la révolution des communications. Nous serons encore appelés à adapter nos politiques et à être innovateurs.

[Français]

Nos politiques nouvelles auront toujours pour objectif de stimuler la production, la commercialisation et la distribution de notre produit culturel au pays et à l'étranger. Ainsi, nous préparons des mesures législatives qui devraient permettre à nos auteurs, à nos producteurs et à nos interprètes de vivre décemment de leur métier.


454

Je souhaite mettre à jour la Loi sur le droit d'auteur, de façon à tenir compte des nouvelles technologies qui ont modifié les modes de distribution des produits culturels et à reconnaître les droits des créateurs. Il importe également, à mon avis, d'en venir à une meilleure diversification des sources de financement pour nos industries culturelles. Un meilleur plan de commercialisation de notre production culturelle à l'échelle internationale s'impose.

Le marché canadien en plus d'être constitué de deux groupes linguistiques est trop étroit pour assurer la survie et l'épanouissement de nos producteurs et de nos créateurs. Un marché culturel global est en train de voir le jour et le Canada doit y faire valoir sa production originale dont la réputation internationale est déjà établie.

(1025)

Je rappellerai ici que le ministère du Patrimoine a aussi pour mandat de voir à la participation canadienne aux expositions internationales. J'ai été ravi d'apprendre que la dernière prestation canadienne de ce genre, qui a eu lieu l'an dernier à Taejon, en Corée du Sud, s'est révélée des plus fructueuses, dans la mesure où le Canada a misé pour la première fois sur le partenariat économique.

Par ailleurs, l'évolution de la société nous incite aujourd'hui à revoir le fonctionnement et le mandat de nos grandes institutions culturelles. Parmi celles-ci, la radiodiffusion est sans conteste l'instrument culturel le plus populaire et le plus puissant. Plus de 99 p. 100 des Canadiens et des Canadiennes possèdent une radio; 99 p. 100, un téléviseur; plus de 75 p. 100, un magnétoscope. C'est dire l'immense pouvoir dont dispose ces médias.

Dans cette optique, il importe que la Société Radio-Canada trouve sa juste place en tant que radiodiffuseur public et qu'un mode de financement mieux adapté à la situation actuelle soit mis en oeuvre.

Le gouvernement annoncera sous peu la nomination du nouveau président de la Société Radio-Canada.

[Traduction]

L'engagement qu'a pris le gouvernement d'adopter une stratégie relative à une superautoroute de l'information est un signe prometteur pour nos industries culturelles. La superautoroute de l'information sera plus qu'une infrastructure technologique. Elle constituera pour les Canadiens un outil puissant qui nous permettra de distribuer nos produits culturels plus efficacement et de les rendre accessibles à tous les Canadiens.

Il va sans dire que cette initiative cadrera avec notre politique culturelle. Je m'attaquerai bientôt à ce projet avec mon collègue, le ministre de l'Industrie.

[Français]

Tout aussi important par rapport à la création est le Conseil des Arts du Canada. Avant d'être consommables et exportables, les produits culturels sont d'abord l'oeuvre de créateurs et de créatrices; les industries culturelles elles-mêmes ne sauraient se passer d'eux.

Le rôle du Conseil des Arts consiste justement à offrir un apport aux créateurs qui amorcent une oeuvre ou lorsqu'ils se livrent à l'expérimentation. Le Conseil des Arts procure également aux arts de la scène, théâtres, ballets et grands orchestres, un fonds de stabilisation financière. Il importe donc de maximiser l'efficacité de cet organisme essentiel à la promotion de la création au Canada.

Je soulignerai ici que, face à cette tendance au globalisme qui caractérise cette fin de millénaire, la notion d'identité et le sentiment d'appartenance reposent plus que jamais sur les créateurs et les créatrices.

[Traduction]

Il est clair que le mandat du ministère du Patrimoine est exigeant et qu'il se trouve au centre même des principaux problèmes qui se posent aujourd'hui dans notre pays.

C'est maintenant plus que jamais qu'il faut considérer la complexité culturelle du Canada non comme un problème mais comme un atout en ces temps où notre ouverture au reste du monde revêt autant d'importance que la protection de notre propre identité.

Qu'il s'agisse de nos sites historiques, de nos parcs nationaux, des réalisations de nos athlètes, de l'influence de nos artistes, de la diversité de notre population ou du succès de nos industries et de nos institutions culturelles, tout concourt à mettre en lumière notre volonté d'exceller en tant que peuple.

[Français]

J'entends miser sur ces immenses richesses et plus particulièrement sur notre jeune génération pour assurer à notre pays une place enviable à l'aube du troisième millénaire.

On aura compris que, loin de ne s'occuper que du passé, le ministère du Patrimoine canadien est orienté vers l'avenir. Il se trouve au centre des grands défis qui se posent à nos sociétés d'aujourd'hui.

C'est avec confiance que j'invite tous les Canadiens et Canadiennes à relever ces défis afin de permettre à notre pays de progresser dans le monde de demain.

(1030)

M. Nic Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, tout d'abord, je tiens à féliciter le député et ministre pour son élection à Laval-Ouest. Cette fois, il a eu plus de chance qu'en 1988, alors qu'il était mon adversaire à Longueuil. Il me fait plaisir de lui poser quelques questions, suivant ses responsabilités comme ministre du Patrimoine canadien.

Il a parlé du multiculturalisme, mais il semblerait que ce ne fut pas nécessairement un succès, car on a plutôt créé des ghettos entre les cultures au lieu de faire la promotion de l'intégrité des citoyens. On sait que cela prend à peu près le double du temps, au Canada, pour intégrer les nouveaux arrivants par rapport aux États-Unis.

Alors, définitivement, il y a un problème majeur au niveau du multiculturalisme. Je sais qu'à Montréal actuellement, il y a des conflits entre différentes cultures et j'ai l'impression, et certains experts également, que le multiculturalisme a créé des ghettos au lieu d'aider l'intégration. C'est mon premier commentaire.


455

Deuxièmement, vous avez parlé des créateurs et du droit d'auteur. Je pense que la loi canadienne ne protège pas suffisamment les droits des auteurs et des créateurs. Si on veut permettre à nos créateurs d'en faire davantage, il faut d'abord protéger ce qu'ils créent pour en faire la promotion et c'est de cette façon qu'on va amérilorer la productivité afin de créer de nouveaux produits, au niveau culturel et économique.

J'en viens maintenant aux parcs nationaux. Depuis longtemps, on sait que le Québec revendique l'équité vis-à-vis des parcs nationaux. Nous n'obtenons pas une part équitable, et de loin, en ce qui concerne les parcs. Chaque fois que le Québec demande de nouveaux parcs, il semble toujours y avoir beaucoup de difficultés. Pourtant, nous avons de grands territoires dans lesquels on pourrait y faire d'excellents parcs, mais on n'y arrive jamais.

Je me demande quel est le problème qui existe et est-ce que le ministre fera les efforts nécessaires pour faire en sorte qu'on puisse, au Québec, obtenir une part équitable au niveau des parcs nationaux?

M. Dupuy: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de Longueuil de ses félicitations. Je suis enchanté que nous puissions reprendre un dialogue.

Sur le multiculturalisme, fondamentalement, je suis d'accord avec lui. Je crois que le multiculturalisme, la politique du gouvernement, ne doit pas créer des ghettos. Elle ne doit pas fragmenter notre pays. Elle doit essayer essentiellement d'utiliser ses apports extrêmement riches, extrêmement précieux, pour forger une grande culture canadienne, mais cette culture canadienne ne sera pas uniforme. Si l'on regarde ce qui se passe dans le monde, ce sont les pays qui réussissent à concilier les accords divers qui réussissent le mieux à progresser.

En ce qui regarde les droits d'auteurs, je suis également d'accord avec le député de Longueuil. Je crois que la loi existante est un peu périmée. Elle n'a pas suivi l'évolution des technologies et, c'est précisément pour cela que j'annonçais ce matin que nous avons l'intention de procéder à des amendements à notre législation sur les droits d'auteurs.

Finalement, il mentionnait les parcs nationaux. Oui, bien sûr que le Québec a des zones de nature et des zones écologiques remarquables, et c'est notre souhait de développer des parcs nationaux au Québec. Peut-être ce qui a un peu freiné le développement de ces parcs, c'est qu'il existe une législation au Québec qui ne permet pas au gouvernement du Québec de céder des parcelles de territoire à la juridiction fédérale. Alors donc, tout ce que nous faisons au Québec est en coopération avec le gouvernement du Québec. Comme on le sait, lorsqu'il y a deux gouvernements qui doivent négocier pour faire avancer un dossier, ce dossier progresse généralement un peu moins vite.

(1035)

C'est donc la raison principale pour laquelle le progrès des projets de parcs au Québec n'a pas avancé peut-être aussi vite que le souhaiterait le député de Longueuil.

Je peux lui dire par contre qu'il y a un parc marin, par exemple, que nous sommes en train de développer dans l'embouchure du Saguenay, qui sera un modèle non seulement de cette coopération entre les deux niveaux de gouvernement, mais également un modèle de protection écologique dans le monde.

[Traduction]

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter l'honorable ministre pour son allocution.

Dans certaines régions du Canada aujourd'hui, les gens pensent que la politique du gouvernement en matière de bilinguisme officiel est coûteuse et inutile. À la lumière des observations faites par l'honorable ministre, j'aimerais lui demander s'il connaît les coûts réels du programme du bilinguisme officiel. J'aimerais également qu'il dise si, à son avis, une autre forme de bilinguisme régional serait plus efficace que le bilinguisme universel de notre pays.

M. Dupuy: Monsieur le Président, je suis bien entendu au courant du coût. Nous aurons l'occasion plus tard au cours de l'année de nous pencher sur le budget, de discuter des chiffres et de les examiner de près.

À mon sens, le modèle canadien, si je puis ainsi le nommer, est très valable. J'ai déjà vécu et travaillé dans un autre pays, la Belgique. J'ai pu voir jusqu'à quel point la division, la frontière linguistique entre deux groupes linguistiques, est à l'origine de nombreux problèmes.

Le bilinguisme au Canada ne consiste pas, à mon sens, à forcer chaque Canadien à être bilingue. C'est une question de choix personnel. Par contre, ceux qui veulent pouvoir utiliser leur langue au Canada devraient, je pense, en avoir la possibilité.

Si nous partons de ce principe et si nous l'acceptons, la question que mon collègue soulève vise en fait la façon dont on concilie un tel principe avec un honnête contrôle des dépenses. Je serais heureux de pouvoir en débattre avec lui dans le contexte du budget.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, la question que je souhaite poser au ministre porte sur la définition d'un Canada multiculturel. Il me semble quelque peu contradictoire de dire que, sous le régime actuel, les immigrants sont intégrés dans la société canadienne.

À mon sens, intégration signifie qu'un immigrant embrasserait la façon de vivre et la culture canadiennes, tout en étant libre de préserver sa propre culture; mais, en même temps, s'il choisit de fonctionner ainsi, il devrait le faire à ses frais ou sur son temps, sans bénéficier de l'aide du gouvernement.

Le multiculturalisme, tel qu'il est actuellement appliqué, souligne les différences et tend à séparer les diverses communautés ethniques, lesquelles encore sont financées par le gouvernement fédéral. J'aimerais que le ministre m'explique exactement ce qu'il veut dire par intégration. Il me semble qu'il y a un problème


456

au sujet de la définition. Il faudrait établir une distinction entre multiculturalisme et intégration.

M. Dupuy: Monsieur le Président, nous devons bien entendu avoir une idée claire de la distinction qu'il faut faire entre intégration et assimilation. Dans l'allocution que j'ai prononcée plus tôt, j'abordais surtout la question de l'assimilation.

À mon avis, intégration signifie que les gens nouvellement arrivés ici doivent pouvoir devenir complètement opérationnels dans notre société. C'est ce qu'ils souhaitent et c'est ce qui convient probablement le mieux à la collectivité existante, puisqu'ils deviennent des membres actifs et productifs de cette société. Si nous ne voulons pas parvenir à ce résultat par l'assimilation, il nous faut trouver des moyens de permettre aux immigrants de contribuer à notre société, tout en préservant leurs valeurs intrinsèques.

(1040)

Ce n'est bien sûr pas facile. Toutefois, je pense qu'il s'agit d'une responsabilité nationale. Nous ne pouvons pas laisser chacun se débrouiller tout seul.

Nous avons pu voir comment l'attitude d'autres gouvernements crée des difficultés et plus précisément des ghettos, ainsi que nous en parlions plus tôt. L'intégration est un objectif qu'il est souhaitable d'atteindre, dans la mesure où c'est ainsi que nous la comprenons. L'intégration doit être appuyée par le gouvernement. Je doute que l'assimilation soit réalisable dans notre société d'aujourd'hui. La liberté en général et les libertés personnelles dont nous jouissons sont trop importantes pour que nous acceptions d'être complètement assimilés et façonnés sur un même modèle.

Il s'agit d'une responsabilité nationale. Par ailleurs, nous faisons preuve d'humanité envers ceux qui souhaitent conserver des valeurs culturelles qui leur sont propres.

[Français]

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke): Monsieur le Président, permettez-moi d'abord de vous féliciter pour votre nomination au poste que vous occupez et vous dire à quel point on vous souhaite beaucoup de succès dans l'excercice de vos fonctions. Le fait que vous soyez là où vous êtes témoigne de l'admiration et de l'estime qu'ont pour vous les députés de cette Chambre.

En réponse au discours du Trône, je ne voudrais surtout pas manquer l'occasion de remercier les électeurs et électrices de la circonscription de Sherbrooke qui, pour une troisième fois, m'ont fait confiance et qui l'ont fait, avouons-le, dans des circonstances où ce n'était peut-être pas évident. J'ai été élu pour la première fois en 1984, alors que la vague et le vent m'arrivaient dans le dos; et cette fois j'ai été réélu alors que le vent arrivait dans le sens inverse.

Pour ceux et celles qui arrivent ici pour la première fois-mon collègue de Beauséjour sait exactement de quoi je parle-, il faut avoir vécu les deux expériences pour apprécier pleinement les privilèges, les droits qui nous sont accordés à titre de députés dans cette Chambre.

Alors à ces gens-là de Sherbrooke, pour qui j'ai une très grande affection et pour qui je travaille sans relâche, je veux d'abord leur dire merci.

[Traduction]

Je parle aussi au nom d'un parti politique qui, avant le 25 octobre, occupait une autre place dans cette Chambre. Des députés ont peut-être remarqué que notre situation était bien différente.

Je veux en parler bien ouvertement parce qu'il est important pour nous de reconnaître l'ampleur de la défaite. Le 25 octobre, beaucoup de Canadiens ont voté avec la ferme intention de renverser le gouvernement et le parti politique au pouvoir depuis neuf ans.

Je n'ai pas besoin d'expliquer que les Canadiens se sont prononcés avec beaucoup de détermination et sans équivoque. Si bien que, malgré le fait que nous avons obtenu 16 p. 100 du vote exprimé, notre parti ne compte plus aujourd'hui que deux députés à la Chambre.

Je n'ai rien à redire à cela. Les mêmes règles étaient en vigueur avant la campagne. Nous ne les avions pas contestées alors et je ne vais pas le faire maintenant. Contre toute attente, notre situation nous a aussi rendu une certaine forme de liberté.

Je suis le premier à admettre que notre avenir est tributaire de ce que nous allons en faire en tant que force politique de notre pays et en tant que la force politique fondatrice du Canada.

C'est maintenant à nous, progressistes conservateurs du Canada, de nous montrer à la hauteur des grandes espérances que les Canadiens ont mises en nous. C'est à nous de reconstruire notre parti pour présenter, d'ici la prochaine campagne électorale, une formation nationale- j'insiste sur le mot «nationale»-en mesure de remplacer le parti au pouvoir.

Je sais pertinemment, d'après ce que m'ont dit des Canadiens, progressistes conservateurs ou non, issus de toutes les régions du pays, qu'il est très important d'avoir un parti national en mesure de remplacer le parti au pouvoir. Les Canadiens se préoccupent de la vision du pays qu'ont leurs concitoyens et c'est une question qui me tient beaucoup à coeur.

(1045)

C'est donc dire que notre parti continuera de faire valoir les principes qu'il a toujours défendus, notamment le conservatisme budgétaire. Il veut que notre pays puisse encore avoir des programmes sociaux, une conscience sociale solide et une vision souple du fédéralisme. Nous pensons que c'est éminemment important pour notre pays. Nous avons prouvé au cours des neuf dernières années que nous étions capables, sur le plan du fédéralisme, de gouverner le pays de façon à répondre aux besoins de ses différentes régions.

Notre façon de gouverner n'était pas parfaite, loin de là. Je tiens à le préciser, et prétendre le contraire irait à l'encontre de l'opinion de la plupart des Canadiens, mais nos réalisations sont


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réelles et beaucoup d'entre elles pourront servir au nouveau gouvernement.

Je dois admettre que le discours du Trône me laisse des impressions contradictoires et qu'il m'a quelque peu surpris.

Je veux d'abord féliciter les députés d'en face de leur victoire aux dernières élections, en particulier le premier ministre. Nos idées diffèrent sur bien des questions mais, au-delà de ces divergences, je pense que beaucoup de Canadiens admirent et respectent le fait qu'il a tenu bon dans l'adversité et a réussi à gagner la confiance de la population. Je lui adresse mes sincères félicitations. Sur le plan personnel, je crois que c'est une grande réussite.

La lecture de son discours du Trône me laisse des impressions contradictoires pour les raisons suivantes. Le discours traite de beaucoup de questions laissées en plan par notre gouvernement et qui ne soulevaient pas tellement l'enthousiasme des libéraux quand ils se trouvaient de ce côté-ci de la Chambre.

J'ai des impressions contradictoires quand je lis par exemple ce que déclare le gouvernement au septième paragraphe du discours: «Pour que ce plan d'action puisse se réaliser, il est essentiel que les institutions politiques soient intègres et jouissent de la confiance du public.» Au paragraphe suivant, il ajoute: «Mes ministres mettront tout en oeuvre pour que ceux et celles qui exercent le pouvoir au nom des Canadiens fassent preuve d'intégrité, d'honnêteté et d'ouverture.»

La Chambre vient à peine de commencer ses travaux que déjà cet engagement est mis à rude épreuve. Comme nous l'avons appris ici, le ministre des Affaires intergouvernementales a soulevé la controverse pour avoir utilisé les services d'aviation du gouvernement. Maintenant, nous apprenons que le ministre du Commerce international est dans l'embarras à cause d'une activité de levée de fonds et de la façon dont elle est présentée. Nous savons aussi qu'un autre membre du caucus de ce parti a été sur la sellette à cause de gestes accomplis dans le passé.

Je ne porte aucun jugement sur eux, mais n'est-il pas étonnant de pouvoir, une dizaine de jours après le début des travaux, citer trois situations gênantes pour les libéraux, et de lire ce qui est annoncé aux septième et huitième paragraphes du discours du Trône?

Je ne porte pas de jugement, mais soyons bien clairs. N'est-il pas bien différent d'être assis en face que de ce côté-ci de la Chambre? Je vois des députés d'en face me faire signe que oui de la tête. Ça l'est en effet.

J'espère que les Canadiens qui vont suivre les faits et gestes du présent gouvernement verront l'ancien gouvernement sous un jour différent. Je ne suis pas pressé à ce sujet. Je sais que le temps arrangera bien des choses.

Permettez-moi de passer en revue les propositions du discours. À la deuxième page, il est question du lobbying. Dans un discours qu'elle a prononcé le 9 août, la première ministre alors en fonction, la très honorable Kim Campbell, a promis exactement ce qui est proposé ici, une loi sur l'enregistrement des lobbyistes. Comment pourrais-je m'opposer à toute mesure dans ce domaine?

Au paragraphe qui suit, il est question de la crédibilité du Parlement et de la réforme de celui-ci. Dans le même discours du 9 août, la même première ministre avait aussi pris des engagements au sujet d'une réforme parlementaire et avait énuméré avec force détails ce qu'il fallait changer. Le gouvernement n'a pas encore exposé en détail les changements qu'il compte apporter dans ce domaine, mais je suis impatient de l'apprendre pour pouvoir y donner mon accord.

La troisième mesure proposée touche la réforme du régime de retraite des députés. Ne savions-nous pas que, le 9 août, l'ancienne première ministre a pris le même engagement, allant même un peu plus loin en promettant de réformer le régime de retraite pour mettre fin au cumul de pension et aussi au versement de la pension avant l'âge de 55 ans? Nous attendrons donc de voir ce que le nouveau gouvernement propose à ce chapitre.

(1050)

À la même page du discours du Trône, on fait allusion aux petites entreprises et au fonds d'investissement canadien. Dans un discours prononcé le 27 août, la première ministre de l'époque a aussi annoncé la création d'un fonds de capital de risque.

[Français]

Ce capital de risque avait été annoncé le 27 août par le gouvernement précédent, et mis en place. On avait de plus changé la Loi sur les prêts aux petites entreprises à ce moment-là.

[Traduction]

Il y a un paragraphe du discours du Trône qui m'a vraiment plu, c'est celui qui porte sur le commerce. Je sais que mon collègue du NPD va l'aimer parce qu'il a son opinion à ce sujet et je ne crois pas qu'il l'ait changé. Le député n'a pas changée d'avis, n'est-ce pas au sujet de l'ALENA?

M. Riis: Pas du tout.

M. Charest: Le NPD n'a pas changé d'avis au sujet de l'ALENA. Le paragraphe en question est le suivant: «La création d'emplois et la croissance économique exigent aussi que les entreprises canadiennes, petites et moyennes surtout, adoptent une attitude plus dynamique afin de tirer davantage parti des marchés étrangers.» Je sais que mon collègue ne sera pas d'accord avec cela. En fait, Mike Wilson a souvent fait ce genre de déclaration. Voici le reste: «L'aboutissement des négociations de l'Uruguay Round dans le cadre du GATT et la mise en oeuvre de l'ALENA donneront aux entreprises canadiennes un meilleur accès aux marchés mondiaux et le gouvernement entend les aider à multiplier les exportations.» Eh bien! Voilà le discours typique


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des conservateurs au cours des neuf années pendant lesquelles j'ai siégé ici dans cette Chambre et il nous est maintenant resservi tel quel par le nouveau gouvernement.

Que doit-on dire à toutes ces personnes qui ont entendu les candidats libéraux et néo-démocrates leur déclarer qu'ils étaient opposés à l'ALENA, qu'ils renégocieraient cet accord et qu'ils le changeraient? Eh bien, mesdames et messieurs, ce n'étaient que des blagues. En fait, ils ont adopté l'ALENA en n'y apportant absolument aucun changement. Pas un paragraphe, pas un mot, pas une seule virgule n'a été changé dans la loi adoptée ici à la Chambre. Le nouveau gouvernement libéral l'a adopté dans sa totalité.

Puis-je m'opposer à cela? Non, je ne le peux vraiment pas. J'appuie le gouvernement dans sa conversion sur son chemin de Damas. Ce que je trouve extraordinaire, c'est le peu de temps qu'il lui a fallu pour se convertir. Quelle prouesse! Après avoir combattu cette idée pendant des années ici à la Chambre. Certains députés n'étaient pas ici à l'époque, mais je peux en témoigner puisque je me trouvais de ce côté-là. Ils ont réellement combattu cette mesure. Il y a eu des cris. Cette conversion est réellement miraculeuse. Combien de temps cela leur a-t-il pris? Dix jours, 20 jours? L'ALENA était devenu la plus grande invention après le pain tranché. Cette conversion tient vraiment du miracle.

Je veux toutefois être honnête ici. Mes collègues du NPD, même si je ne partage pas leur point de vue, n'ont pas changé d'avis eux. Ils ont été cohérents. Je suis désolé de ne pouvoir en dire autant du gouvernement.

Le discours parle aussi de commerce intérieur. Eh bien, le commerce intérieur constitue une question importante. Je souhaite bonne chance au gouvernement parce qu'il faut qu'on reconnaisse que nous avons nettement un meilleur dossier dans le commerce avec les autres pays que dans le commerce à l'intérieur de nos frontières. Cela n'a aucun sens parce que ce sont les Canadiens qui doivent, au bout de la ligne, payer la note pour ces obstacles déraisonnables et injustes au commerce intérieur.

Le nouveau gouvernement propose aussi de s'attaquer à ce problème dans le discours du Trône. Cela correspond tout à fait à l'engagement que nous avions pris au cours de la campagne électorale de poursuivre le travail entrepris par le gouvernement précédent et de compléter les négociations au sein d'un comité des ministres du commerce intérieur, de manière à éliminer les obstacles commerciaux et à libéraliser les mouvements de biens, de services, de personnes et de capitaux à l'intérieur du Canada d'ici le 30 juin 1994.

J'ai été enchanté d'entendre le ministre de l'Industrie rappeler cet engagement et le reprendre à son compte après une rencontre avec ses collègues. Je pense que c'est une bonne idée. J'étais d'accord avec cette mesure lorsque nous étions au gouvernement et je le suis toujours.

Pour revenir au commerce, on fait aussi mention du bassin du Pacifique et de l'Amérique latine. Nous avions annoncé que nous allions établir une fondation pour ces deux régions. C'est encore la même chose.

Et c'est pareil pour le reste. Nous avions aussi annoncé des changements à la Loi sur les jeunes contrevenants.

Voici un autre paragraphe très intéressant: «Un centre d'excellence sera établi afin que l'on accorde à la santé des femmes l'attention qu'elle mérite.» Je suis certain qu'un grand nombre de députés du Parti réformiste seront d'accord, entièrement d'accord avec cette mesure.

M. Riis: Qui a rédigé ce discours du Trône?

(1055)

M. Charest: Je soupconne les fonctionnaires qui ont écrit nos discours du Trône d'avoir donné leurs notes au nouveau gouvernement. Il n'y a rien d'étonnant car, le 23 août 1993, la ministre de la Santé du gouvernement précédent annonçait la création d'un bureau sur la santé des femmes. Cette déclaration a été faite avant la campagne électorale. On retrouve maintenant le même engagement. Je ne peux m'opposer à cela.

Le dernier point auquel j'aimerais faire référence concerne le chevauchement gouvernemental. Encore une fois, le même engagement avait été pris le 2 septembre 1993.

Je ne contredirai certainement pas le gouvernement sur ces points. Je l'appuierai. L'ALENA, le GATT, l'Amérique latine, le bassin du Pacifique, allons-y! Je serai heureux d'appuyer le gouvernement.

Une voix: En quoi le présent gouvernement se différencie-t-il du vôtre?

M. Charest: Là où nous ne sommes plus d'accord, c'est en ce qui a trait aux questions clés. Par exemple, comment peut-on créer des emplois au Canada? C'est là un sujet que le gouvernement a abordé durant sa campagne. À ce chapitre, le discours du Trône est assez décevant. Où est la substance? Je me pose sérieusement la question.

Le gouvernement semblait avoir pris des engagements relativement au programme d'infrastructure. Il devait construire des égouts et des routes. On constate maintenant que l'argent servira à construire des centres de congrès. Je ne vois rien là de repréhensible, mais les municipalités souhaitaient utiliser cet argent pour des égouts et des routes.

Qui exactement prendra les décisions, et quel sera le processus? Y aura-t-il un programme d'infrastructure ou non? S'agira-t-il plutôt d'une caisse noire comme semble le laisser croire la note de service secrète que j'ai rendue publique il y a deux jours et dans laquelle les deux ministres des Travaux publics et du Développement des ressources humaines se chamaillaient non seulement pour le contrôle direct du programme, comme l'indique la note que le greffier du Conseil privé a envoyée au premier ministre, mais aussi pour le contrôle de tous les projets au niveau fédéral.

Une question a été posée à ce sujet hier à la Chambre et le premier ministre n'y a pas répondu. Nous savons qu'ils sont respectivement responsables de l'APECA et de la diversification de l'économie de l'Ouest. Le greffier du Conseil privé n'a pas besoin d'écrire au premier ministre pour lui demander s'ils sont responsables de ces secteurs. Ils le savent et nous le savons. Il écrivait au premier ministre parce qu'il a jugé que la question était assez importante pour lui demander si leur mandat incluait le contrôle de tous les projets fédéraux. Nous ne savons toujours pas si c'est le ministre néo-écossais qui décidera si le Nouveau-Brunswick aura cet argent pour tel ou tel projet, non seulement


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pour le programme d'infrastructure mais pour les autres programmes.

Je dois admettre que je suis d'accord avec certains points du discours, mais il y a un écart entre ce qui s'est dit durant la campagne et ce qui semble se produire derrière des portes closes depuis l'élection du présent gouvernement.

Le discours me réservait quelques déceptions. On n'y faisait peu mention de l'agriculture. Je m'inquiète également du sort réservé aux ressources naturelles. Je crains beaucoup que le gouvernement n'impose une taxe sur les produits pétroliers ou les hydrocarbures. Il pourrait être tentant d'emprunter cette voie, mais il ne faut pas oublier que, dans ce pays, nous taxons déjà ces ressources. Toute velléité de ce genre devrait faire l'objet de sérieuses réflexions.

En ce qui concerne le déficit et la dette, on ne retrouve qu'une déclaration générale. J'imagine que nous devrons tous attendre le dépôt du budget pour connaître les intentions du gouvernement. De la façon dont celui-ci dissimule les chiffres, ce que je sais et ce que je peux dire, c'est qu'il n'a jusqu'à maintenant pas été très ouvert. Il semble bien évident que le gouvernement a l'intention d'augmenter le déficit de cette année, de gonfler les chiffres pour faire porter l'odieux au gouvernement précédent et pour mieux paraître. Cette intention est bien évidente.

Je demande aux députés de réfléchir quelques secondes et de présumer que la situation correspond à ce que décrit le gouvernement. Ce n'est pas la première fois que notre pays se retrouve dans une telle situation. Je me rappelle que nous avons vécu une expérience semblable quand nous étions au pouvoir. Qu'avons-nous fait? Nous avons imposé un gel des dépenses pour le reste de l'année financière. C'est ce que nous avons fait. Pourquoi le gouvernement actuel n'a-t-il pas gelé les dépenses sinon parce qu'il voulait gonfler les chiffres pour des raisons politiques?

Qu'en est-il des intérêts des Canadiens? Qu'en est-il des intérêts des contribuables?

[Français]

Je vois le député de Chicoutimi ici; où est l'intérêt des citoyens de Chicoutimi dans tout cela, si le gouvernement laisse aller le déficit comme il le fait au lieu d'imposer un gel sur les dépenses, comme on l'a fait? Ce n'est pas nouveau, je n'invente rien.

(1100)

Ne vous en faites pas, il n'y a pas de nouvelles théories là-dedans. C'est fort simple, le gouvernement dit: «On gèle les dépenses à partir d'aujourd'hui, pour le reste de l'année financière, au lieu de laisser le déficit grimper à un chiffre faramineux.» Mais ils ne l'ont pas fait, monsieur le Président, et savez-vous pourquoi? Ils ne l'ont pas fait, pour des raisons politiques.

Monsieur le Président, je vous vois me faire signe qu'il me reste environ une minute. J'aimerais, avec votre permission et le consentement de la Chambre, finir mes commentaires rapidement, pour éviter de manquer quelques remarques importantes, et après cela je serai très heureux de répondre aux questions et commentaires. Alors avec votre consentement, je prendrai cinq autres minutes pour parler de quelques autres sujets.

Le président suppléant (M. Kilger): Je devrai demander le consentement unanime. Y a-t-il consentement?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

M. Charest: Nos amis du Bloc et du Parti réformiste refusent, ils sont consistants. Alors je vais prendre la minute qui me reste pour terminer mes commentaires et vous dire très rapidement que je suis inquiet de la tournure des événements pour ce qui est de cette Chambre, du fait que l'on ait mis l'accent sur le point de vue régional. Selon le résultat de l'élection, démocratiquement, les Canadiens ont fait ce choix-là.

On a un parti de l'opposition officielle dévoué à briser le pays. Ils ont le droit de présenter ce point de vue, je n'ai rien à dire là-dessus. De l'autre côté, il y a les députés du Parti réformiste qui, je pense, eux aussi aussi, légitimement, présentent un point de vue qui ne représente pas non plus un point de vue national. D'ailleurs, ils n'ont pas présenté de candidats partout au Canada aux dernières élections.

Et en face d'eux, le gouvernement semble vouloir laisser aller les événements. Cela m'inquiète. Je pense que, dans ce pays et dans ce Parlement, nous devons aborder franchement cet enjeu de notre avenir et je pense que notre devoir consiste à mettre davantage en valeur ce que nous avons en commun-c'est cela un pays-au lieu d'exercer ou de présenter un point de vue plus étroit qui a tendance à blâmer les autres pour tout ce qui va mal.

Cela, c'est un nationalisme avec lequel je ne suis pas d'accord. C'est plutôt étroit et réducteur et cela ne correspond pas à ma propre vision de ce que doit être notre pays qui, je pense, a beaucoup besoin de retrouver ce sens, le sens de son avenir et un projet commun.

Au cours des années à venir, je lutterai pour préserver l'intégrité de ce pays et mettre en valeur ce que nous avons justement en commun.

[Traduction]

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter le rigolo de Sherbrooke de nous avoir donné un spectacle aussi divertissant. Le Parti progressiste-conservateur a vraiment raté son coup en juin dernier en ne le choisissant pas pour chef. Ses membres ont à coup sûr commis l'erreur la plus monumentale de leur vie car l'histoire témoignera du fait que notre Sherbrookois est maintenant chef dans l'opposition, chef du défunt Parti progressiste-conservateur.

Je dis «opposition», car il se considère comme l'opposition officielle. Le député devrait reconnaître avec la jovialité qu'on lui connaît qu'il n'est désormais le chef d'absolument rien. Il faut reconnaître qu'il est un amuseur-né.


460

[Français]

Il parle des citoyens canadiens. Pendant cinq ans, j'ai entendu le député de Sherbrooke, anciennement ministre de ceci, de cela, de ceci et de cela, nous parler de la grande entreprise canadienne sans jamais mentionner les Canadiens. Aujourd'hui, il parle des Canadiens.

Je sais que le député est un «grassrooter». Tout à coup il va recommencer à zéro, donc, il va faire du porte à porte, et je le félicite pour son porte à porte. C'est la façon de commencer. Peut-être que dans 25 ou 30 ans le Parti conservateur deviendra le parti de l'oppositon officielle.

Mon point n'est pas tellement de répondre au député de Sherbrooke qui s'est donné des permissions, qui a semblé changer les règles du jeu tout à coup. J'ai toujours eu l'impression, depuis les cinq années que je suis ici, qu'on ne pose pas des questions directement aux autres députés en Chambre, mais qu'on pose des questions en s'adressant à la Présidence. Les règles de la Chambre semblent avoir changé. J'aimerais faire un commentaire sur le Règlement de la Chambre. Suite au discours du ministre du Patrimoine, vous avez accordé la parole à des députés de l'opposition.

(1105)

Le président suppléant (M. Kilger): J'aimerais simplement dire au député de Carleton-Gloucester que s'il désire invoquer le Règlement, je lui donnerai la parole après la période de questions et commentaires.

Il semblerait que le député de Sherbrooke ait suscité beaucoup d'intérêt avec son discours. Pour permettre aux députés des deux côtés de la Chambre de commenter son discours ou de lui poser des questions, je demanderais la collaboration du député de Carleton-Gloucester de s'en tenir au discours et ensuite on pourra certainement discuter de l'autre question qu'il voudra peut-être soulever.

M. Bellemare: Monsieur le Président, c'est entendu, dès que la période de questions et commentaires sera terminée, je vous avise que j'invoquerai le Règlement.

Pour revenir à notre comédien de Sherbrooke, j'aimerais lui dire qu'entre le nouveau gouvernement et l'ancien gouvernement dont il faisait partie, la différence est celle-ci: il y a les grands parleurs et les petits faiseurs. Le député de Sherbrooke est devenu un grand parleur.

Le député de Sherbrooke-pour qui j'ai beaucoup d'affection et d'admiration-s'est beaucoup amélioré. J'aurais voulu l'entendre parler ainsi, à la défense des biens des citoyens, durant les cinq dernières années. Je le félicite de son discours, il a enfin vu la lumière. Enfin, il parle des gens de Sherbrooke, de Chicoutimi. Il n'a pas mentionné les gens de la capitale, mais il a parlé des gens de l'Ouest et ceux du Parti réformiste. Il a fait allusion au Bloc et à tous les Canadiens en général. Mais il a oublié de nous dire qu'il demandait l'absolution pour son grand péché-commis dans l'autre monde pendant neuf ans-d'avoir été le porte-parole de la grande industrie et non celui des citoyens canadiens.

M. Charest: Monsieur le Président, permettez-moi de retourner le compliment à mon ami de Carleton-Gloucester, que je connais bien, et lui dire à quel point j'ai une grande affection pour lui. J'espère qu'elle sera un peu moins brutale que celle qu'il me porte.

Je veux bien que le député nous fasse des reproches. Je pense, si je me rappelle bien le 25 octobre dernier, que les Canadiens ont posé leur jugement. Ce fut un jugement assez sévère. Je ne sais pas pour combien de temps encore l'honorable député a l'intention d'y revenir et de frapper sur ce clou-là. Il reste à la Chambre deux députés du Parti progressiste-conservateur. Mais le député ressent le besoin aujourd'hui de se lever à nouveau et de frapper encore. Que voulez-vous, c'est la nature humaine.

Tout ce que je peux lui dire, c'est que j'ai vu moi aussi ce sentiment-là. Cela frise presque le mépris quand le député me dit que je suis leader de rien. Je l'ai bien entendu. C'est son point de vue, mais il y a quand même 16 p. 100 de la population canadienne qui ne serait peut-être pas d'accord avec lui. Je n'ai pas de leçon à prendre de mon collègue sur le porte à porte ou sur la confiance que m'accordent les gens. J'aimerais lui rappeler où il se trouve; il se trouve dans un Parlement où chacun s'est fait élire chez soi. Je me suis fait élire dans mon comté. Je m'en remets au bon jugement des gens de mon comté qui m'ont élu. Je les laisserai parler, eux. Si vous pensez que ma présence en cet endroit vaut moins que la vôtre, ceci est votre jugement à vous.

Si c'est là le sentiment et l'attitude que vous démontrerez pendant la période que vous passerez au gouvernement, eh bien, bonne chance! J'ai vu cela autrefois et j'ai vu aussi les résultats que cela amenait de temps en temps.

M. Jean H. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention le discours de l'ancien vice-premier ministre du Canada. Évidemment, il nous a dit que dans cette Chambre ou dans ce Parlement, c'était bonnet blanc, blanc bonnet.

(1110)

En effet, lors de la dernière élection, les Canadiens ont élu un nouveau gouvernement, et majoritairement l'Ontario fait partie de ce gouvernement-là. Heureusement pour le Canada et pour les parties du Canada. Au Québec, on avait un autre choix et la majorité a voté pour le Bloc québécois. La même chose s'est produite dans l'Ouest où on a élu majoritairement des députés du Parti réformiste.

Je pense qu'il faut laisser la chance au gouvernement de faire ses preuves. Il devra très bientôt s'attaquer à la création d'emplois et à la diminution du déficit, on en convient. Il est vrai que le précédent gouvernement nous a démontré clairement, hors de tout doute, qu'il était incapable de régler les grands problèmes de l'heure au Canada, et les Canadiens lui ont fait clairement savoir ce qu'ils pensaient de lui.

Des voix: Bravo!


461

M. Leroux (Shefford): Monsieur le Président, je pense qu'il faut être sérieux dans cette enceinte, et même si mon honorable collègue de Sherbrooke s'est levé, comme il en a le droit, pour s'adresser à cette Chambre, son discours me faisait penser à la mort du cygne, ou peut-être l'agonie du cygne, en tout cas il faudrait voir. Quant à nous, au Québec, nous avions un choix et la majorité s'en est prévalu.

M. Charest: Monsieur le Président, c'est toujours réconfortant de voir que, dans notre démocratie, les gens ont des choix et qu'ils peuvent les exercer librement, pour différentes raisons soit dit en passant. Certains prétendent, à l'intérieur de vos rangs, que vous êtes élus pour faire l'indépendance du Québec; d'autres vous diront que votre mandat était peut-être un peu plus large et que plusieurs personnes qui ont voté pour le député de Shefford voulaient aussi un changement de gouvernement. Il est difficile de juger tout cela après coup, mais on verra et le temps jugera.

Je désire remercier le député de Shefford pour ses conseils. On en a grandement besoin, il vient juste d'arriver ici. J'ai déjà été élu, comme lui, avec le vent dans le dos et avec le bénéfice d'une vague; lorsqu'on arrive ici dans ces circonstances, on est toujours pleins de confiance et très heureux. Je peux dire au député de Shefford, pour ce que ça vaut, puisque je ne semble pas avoir le bénéfice de sa grande expérience, s'il nous annonce la fin, le chant du cygne aujourd'hui, qu'il doit savoir des choses que j'ignore. Il doit avoir une grande expérience parlementaire pour pouvoir nous dire cela, je le présume, car je ne le connais pas assez pour le savoir.

Ce que je sais et ce que je peux dire au député de Shefford, en toute humilité, c'est que le député de Sherbrooke s'est fait élire comme lui, avec le bénéfice d'une vague dans le dos, et le député de Sherbrooke s'est aussi fait élire avec la vague arrivant dans le sens contraire. Peut-être que lorsqu'il aura vécu les deux expériences, il pourra aussi partager avec nous le bénéfice de ses commentaires et de sa grande sagesse.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Il nous reste peu de temps et j'aimerais la collaboration des députés.

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, je serai très bref, bien sûr. Comme le député le sait j'ai beaucoup d'affection pour le député de Sherbrooke.

Je me demandais simplement, au moment où il récitait sa litanie de toutes les initiatives auxquelles il a souscrit pour appuyer le gouvernement, s'il se présentait en quelque sorte prématurément le rameau d'olivier à la main et s'il songeait peut-être à venir gonfler nos rangs.

Le président suppléant (M. Kilger): Une courte réponse du député de Sherbrooke.

M. Charest: Monsieur le Président, je suis un peu étonné d'entendre ces propos. J'ai beaucoup d'amitié pour mon collègue de Broadview-Greenwood, mais je crois que ce serait plutôt l'inverse qui se produirait. Nous pourrions former le gouvernement assez vite et continuer sur notre lancée. J'espère siéger avec le député de Broadview-Greenwood au sein d'un nouveau gouvernement progressiste conservateur. Qui sait?

Le député de Broadview-Greenwood sait bien que j'ai déjà siégé de ce côté-là pendant un certain temps. Je me demande si, depuis qu'il siège de ce côté de la Chambre, il n'a pas changé légèrement de point de vue, par exemple en ce qui concerne les levées de fonds ou d'autres questions.

Hier, j'ai entendu le premier ministre donner une très bonne explication sur l'utilisation des avions du gouvernement. Pourquoi n'a-t-il pas donné la même explication lorsqu'il siégeait dans l'opposition? Je me fais une fête de travailler avec lui au cours de cette législature.

* * *

(1115)

RECOURS AU RÈGLEMENT

LES INTERVENTIONS DES DÉPUTÉS

M. Eugène Bellemare (Carleton-Gloucester): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'ai été extrêmement déçu, il y a quelque temps, que vous ne m'ayez pas permis d'intervenir après le ministre du Patrimoine canadien. Depuis que je siège à la Chambre, et même avant, lorsque j'en suivais les travaux, j'ai remarqué que selon l'usage, lorsqu'un député termine une intervention, le Président accorde la parole à un député d'un autre parti.

Je comprends très bien que lorsqu'un député ministériel intervient, surtout s'il s'agit d'un ministre, les convenances parlementaires veulent qu'il reçoive les commentaires ou questions de députés des partis de l'opposition.

Pourtant, lorsqu'un député ministériel désire faire des observations et poser des questions au ministre, il est toujours autorisé à le faire. Un député ministériel a parfaitement le droit de ne pas être d'accord avec un ministre. Il peut aussi vouloir ajouter quelque chose à ce que le ministre a dit. Il peut vouloir dire quelque chose au sujet de sa circonscription. Il peut vouloir interroger le ministre.

Sommes-nous en train de changer les usages de la Chambre, notamment celui selon lequel lorsqu'un député termine une intervention, les partis ont à tour de rôle la parole, ce qui permet à tous les députés de s'exprimer devant la plus haute cour du pays?

Je vous supplie, monsieur le Président, de ne pas mettre fin à cet excellent usage. Les deux, trois, quatre ou cinq partis présents à la Chambre doivent pouvoir intervenir à tour de rôle par la bouche de leurs députés. Les députés ministériels ne devraient pas être muselés comme s'ils étaient des députés ordinaires. Peut-être y a-t-il sur ce point une pratique nouvelle que je ne connaîtrais pas.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le président suppléant (M. Kilger): Je remercie le député de Carleton-Gloucester d'avoir invoqué le Règlement à ce sujet aussi tôt dans la 35e législature. Je vais lui citer deux précédents


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qui éclaireront tout le monde, et moi le premier, même si j'assume en ce moment la présidence.

Je voudrais d'abord renvoyer le député au Règlement annoté de la Chambre des communes, à la page 144. On peut y lire ce qui suit:

Au cours de cette période, on doit accorder la préférence aux députés des partis autres que celui de l'orateur initial, mais non exclusivement à ces députés. On ne peut proposer aucun amendement à un projet de loi. . .
Et ainsi de suite. En fait, lorsque j'ai fait mon choix des députés qui pourraient poser des questions et faire des observations après l'intervention du ministre du Patrimoine canadien, je me suis largement inspiré du texte du Règlement annoté, car ma connaissance de la procédure est limitée.

À ce même sujet, j'ai également appris que l'on donne maintenant plus de latitude aux députés des deux côtés de la Chambre et surtout à ceux du côté ministériel lorsque, comme dans le cas présent, c'est un ministre qui est l'orateur initial.

Je voudrais maintenant signaler au député ce qu'on peut lire dans la livraison du 17 janvier 1983 du hansard. Je cite:

La présidence veille autant que faire se peut à donner la priorité aux députés représentant des partis autres que celui du député qui vient de parler. Toutefois, lorsqu'un ministre vient de prononcer un discours, les simples députés du côté ministériel auront aussi le droit de poser des questions.
Le problème déploré par le député de Carleton-Gloucester prend effectivement une importance particulière du fait, comme je l'ai dit, qu'il a été soulevé au tout début de la législature. Je l'en remercie, parce qu'en le faisant, il a sensibilisé encore plus la présidence à la procédure régissant cet aspect de nos travaux. À l'avenir, nous nous efforcerons de l'appliquer de façon plus juste.

Je remercie le député de Carleton-Gloucester de son intervention.

M. Bellemare: Monsieur le Président, je comprends que vous vous inspiriez de débats antérieurs. Cependant, lorsque vous avez parlé d'accorder la préférence aux députés des partis autres que celui de l'orateur initial, je ne vous ai pas entendu prononcer les mots «exclusivement» ou «doit». J'ai entendu ce que j'interprète comme des mots du genre «peut» et «pratique courante et bons usages».

(1120)

Je vous sais grandement gré de l'effort que vous avez déployé en vérifiant ce que devrait être la pratique courante. Je vous dis aussi respectueusement que je respecte le fait que votre nomination est toute récente et que je respecte votre position.

Toutefois, vous venez tout juste de me dire, monsieur le Président, que j'avais raison mais que «malheureusement, monsieur le député de Carleton-Gloucester, vous avez eu l'occasion de faire valoir votre point; même si vous avez raison, asseyez-vous, nous allons passer à quelque question dont nous sommes censés traiter aujourd'hui.»

Comme je n'ai pas été pendu vu que la peine capitale n'existe plus, que je suis toujours vivant et me tiens debout dans cette Chambre, le Président me donnera peut-être, pour racheter son erreur ou peu importe comment on pourrait appeler cela, 60 secondes pour m'adresser au ministre.

Je crois qu'il serait juste de me permettre en tant que député d'arrière-banc, après qu'un ministre a parlé, de faire des observations qui toucheraient ma circonscription.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous avons entendu la requête du député de Carleton-Gloucester et je reconnais humblement à l'occasion de ma première présence en tant que Président m'être trompé, n'étant pas au fait de toutes les règles et procédures de cette Chambre.

Je demande à la Chambre si elle consentirait à autoriser le député de Carleton-Gloucester à s'exprimer comme il le demande.

M. Nelson Riis (Kamloops): Monsieur le Président, je ne vois aucun obstacle à laisser 60 secondes à mon collègue pour dire ce qu'il a à dire, mais je crois qu'il veut simplement exprimer la frustration qu'il ressent du fait qu'on ne lui offre pas beaucoup d'occasions d'intervenir à la Chambre. Je suis convaincu que nous partageons tous le même sentiment.

Le Règlement nous limite à des questions et des observations d'au plus 10 minutes et vous remarquerez, monsieur le Président, qu'à la fin de cette période il reste presque toujours inévitablement quatre ou cinq députés debout.

Je veux simplement dire que je respecte la frustration que ressent mon collègue, mais je veux simplement lui rappeler qu'il en va probablement de même pour nous la majeure partie du temps, mais que nous sommes limités par le Règlement. S'il ressent le besoin de dire absolument quelque chose maintenant et qu'il a besoin de 60 secondes, je consentirais certainement à lui accorder le temps qu'il demande.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous n'avons pas le consentement unanime de la Chambre. Nous reprenons donc le débat.

* * *

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Qu'une Adresse soit présentée à son Excellence le Gouverneur général en réponse au discours qu'il a prononcé à l'ouverture de la session.

M. Yvan Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, je suis un nouveau député. J'ai eu la chance d'écouter le discours du député de Sherbrooke et je dois reconnaître que je suis un tribun peut-être moins expérimenté que lui, mais que je n'en aurai peut-être pas moins le caractère enflammé. Une locution latine m'est venue à l'esprit, malgré que je ne sois pas un grand fervent du latin, pour résumer ce que j'ai entendu, et qui va ainsi asinus asinum fricat. Ceci signifie pour moi, nouveau député, de m'attendre à des joutes oratoires assez virulentes de temps à autre dans cette Chambre.

Puisque je prends la parole après le député de Sherbrooke et que celui-ci a fait état de vague de front et de vague dans le dos, étant issu d'un comté maritime, je vais donc débuter mon discours sur la même lancée, en rappelant que le député de Gaspé ici présent a continué, contrairement à son parti, à voguer sur la


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vague que le peuple québécois avait adressée à son parti en 1984. En 1984, nous avions parlé du beau risque, et en 1988 on parlait du retour dans l'honneur et l'enthousiasme. Alors le comté de Gaspé a continué sur cette vague, et peut-être que le Parti conservateur ne l'a pas écouté.

(1125)

Alors, moi, membre du Bloc québécois, j'entends continuer à exprimer ce que les gens du comté de Gaspé et ce que la population du Québec a exprimé lors des dernières élections fédérales.

C'est donc un honneur pour moi de représenter les citoyennes et les citoyens du grand comté de Gaspé. C'est l'un des comtés les plus beaux au Québec. N'en déplaise à mes confrères et à mes consoeurs de la Chambre, c'est le plus beau. Le comté de Gaspé est tellement un beau bijou que le Parti libéral, au début des années 1970, a décidé de faire le parc national Forillon, sur le nez de notre Gaspésie.

C'est dans le dossier du parc Forillon que celui qui est aujourd'hui devenu premier ministre du Canada a fait ses premières armes contre le Québec. En 1972, le député de Shawinigan exprimait sa joie d'avoir passé par-dessus la tête du gouvernement Bourassa pour créer le parc Forillon, et je cite ses paroles à l'époque: «J'ai utilisé ce parc pour briser les reins du Québec et sachez-le, j'en suis fier!» Le nouveau premier ministre commençait bien sa carrière.

Nous avons un dicton, chez nous, qui dit ceci: «Nous pouvons sortir un Gaspésien de la Gaspésie, mais jamais sortir la Gaspésie d'un Gaspésien.» Pour les Gaspésiens, une expropriation, ça forge le caractère. Comme le veut la devise du Québec, les Gaspésiens se souviennent.

Ce comté de tradition maritime s'est développé en bonne partie grâce à la pêche à la morue. La gestion fédérale, centralisatrice de cette ressource marine, tout comme dans le cas du parc Forillon, nous laisse un goût amer. Cette gestion imposée fait fi des initiatives locales pour remédier aux problèmes de l'indutrie. En effet, ce n'est pas la première fois, ce n'est pas la première crise que l'industrie des pêches traverse.

Au début des années 1970, les stocks de morue se sont retrouvés à peu près dans le même état qu'aujourd'hui, mais la débrouillardise des pêcheurs de l'époque les a amenés à se tourner vers d'autres pêches. Au début de 1970, ils se sont tournés, les pêcheurs de morue n'ayant plus de morue, vers la pêche au crabe. Ce n'était pas le Klondike à l'époque; maintenant, oui.

Un peu plus tard, vers les années 1976, ce fut au tour de la pêche au sébaste, dans le golfe Saint-Laurent, de décliner. Les sébastiers sont devenus alors des crevettiers, parce que la crevette n'était pas connue. Leur débrouillardise leur a permis de passer à travers une crise.

J'en déduis que ces communautés maritimes ont une capacité d'adaptation lorsqu'elles ont la latitude d'interagir. Elles savent signaler la présence d'autres espèces non prisées qui peuvent être commercialisées. Mais pour cela, il faut des canaux de communication rapides entre les décideurs et les gens, les pêcheurs qui sont sur la ligne de front. Cette capacité de rétroaction, le Québec l'a perdue sous le gouvernement libéral, en 1982, par le rapatriement de la juridiction des pêcheries.

Alors, il est grand temps que le gouvernement fédéral s'ouvre les yeux. En 1986, ce mode de rétroaction aurait permis aux pêcheurs côtiers de morue, ayant remarqué le déclin de celle-ci, de s'ajuster. Pendant que les stocks de morue sont en déclin, d'autres espèces, jugées à tort indésirables, auraient dû être valorisées.

Le problème, c'est bien plus que l'épuisement des stocks déclaré par le ministère. C'est toute la structure de l'industrie qui doit être repensée. Plutôt que de s'attaquer aux changements structurels nécessaires pour réagir aux variations cycliques des stocks de poisson, le discours du Trône cherche encore des coupables à la disparition de ce stock.

(1130)

Pour relancer l'économie, l'État doit se donner des orientations quant à l'avenir de l'industrie de la pêche. Pour cela, j'aborderai deux aspects importants, l'exploitation de la ressource et la protection des travailleurs.

La pêche à la morue est plus vieille que le Canada. Depuis, le début de la pêche, l'exploitation du poisson se fait en fonction des moyens de conservation que l'on connaissait. À l'origine, nous faisions de la morue salée et séchée. Avec l'arrivée de l'électricité et des congélateurs, nous avons fait des blocs de morues congelées. Et nous en sommes encore là, avant que le ministre ferme le robinet.

Ces types d'exploitation ont engendré l'établissement d'une norme, une norme implicite, quant à la longueur du poisson pêché. Pour atteindre ces normes faites pour une industrie spécialisée, les pêcheurs ont dû rejeter à l'eau du poisson non désirable, uniquement à cause de sa longueur.

La restructuration de l'industrie des pêches-pardon-la révolution dans l'industries des pêches n'a pas été abordée dans le discours du Trône.

Malgré des décennies d'intervention fédérale, la structure de l'industrie des pêches est encore à l'école primaire. Qu'est-ce que le gouvernement compte faire pour lui faire gravir les échelons qui l'amèneront au stade universitaire?

L'université, c'est le haut de gamme. Il ne faut plus oeuvrer uniquement dans le marché de masse traditionnel, mais plutôt rechercher de nouveaux créneaux de marché, tels les poissons frais et les espèces sous-utilisées. Il nous faut donc soutenir les communautés maritimes pour qu'elles soient en mesure d'attein-


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dre ces nouveaux standards. Il faut leur permettre de faire plus d'argent en pêchant moins de poissons.

Pour atteindre cet objectif, le gouvernement devrait appliquer les fonctions d'entreprises à l'industrie de la pêche, c'est-à-dire rapprocher la fonction vente de la fonction capture.

Si toutes les étapes de la chaîne industrielle sont respectées, les pêcheurs seront en mesure de vendre tout ce qu'ils capturent. Présentement, ils dépendent d'usines sur-spécialisées et leur capture est donc sur-spécialisée.

Par le passé, le gouvernement a misé uniquement sur l'exploitation de la ressource naturelle. Aujourd'hui, nous devons miser sur les ressources humaines, sur la matière grise des gens des communautés pour faire plus d'argent tout en étant plus respectueux de la ressource marine. Les gens connaissent les problèmes et ils ont des solutions à apporter. Le gouvervenement est-il prêt à soutenir leurs efforts?

Les communautés ont besoin de mesures concrètes, comme celles que le Bloc a présentées lors de la campagne électorale et je vais les citer: la création de halles de débarquement qui avaient pour but de regrouper les espèces sous-utilisées, et d'autre part, favoriser la vente de poissons refusés par les usines traditionnelles.

La deuxième mesure proposée par le Bloc, la création d'une plaque tournante provinciale pour assurer la logistique de transport vers les divers marchés, parce que cela sera nouveau.

Et le troisième point, je vais le mentionner, mais je vais en reparler un peu plus tard, le rapatriement aux provinces de la gestion des permis de pêche.

Ainsi, au lieu d'envisager l'avenir, le gouvernement a mis en place des programmes à courte vue qui n'ont pas répondu aux problèmes existants. Pendant ce temps, la situation se détériore et les travailleurs se retrouvent sans emploi.

(1135)

Le gouvernement leur propose des programmes de formation vides de sens. Plutôt que d'obliger les travailleurs à se plier en quatre pour répondre aux exigences de ces programmes, il faudrait être à l'écoute du monde, tenir compte de leurs goûts et de leurs aptitudes. Il faut miser sur le vécu des gens et les aider à concrétiser leurs idées. C'est à Ottawa de comprendre la mentalité des gens, pas l'inverse. Comme je le disais dans ma campagne électorale, à un problème local, il existe une solution locale. Les vraies solutions ne viendront pas d'Ottawa.

Cependant, une période de transition est nécessaire pour relancer l'industrie. Faute d'avoir laissé la situation s'aggraver au fil du temps, le gouvernement, s'il veut être responsable, devra soutenir les gens maintenant sans emploi. L'actuel ministre des Pêches a déjà fait un effort pour simplifier et faciliter l'accès aux programmes d'aide aux travailleurs de l'industrie. C'est un pas dans la bonne direction.

Cependant, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Ventre affamé n'a pas d'oreille. Tout au long de cette période de transition, le gouvernement doit s'assurer qu'il y ait du pain et du beurre sur la table des gens concernés. Ce n'est pas la faute des citoyens et des citoyennes des communautés maritimes si le gouvernement fédéral précédent a préféré gaspiller les deniers publics plutôt que d'investir dans des projets créateurs d'emplois. Les communautés maritimes sont en état de choc. Ce n'est pas le temps de les laisser tomber et de forcer leurs membres à se trouver un emploi dans un domaine qui ne correspond pas à leurs goûts et aptitudes.

De père en fils, de mère en fille, les citoyens et citoyennes des communautés maritimes se sont transmis les procédés de la pêche et n'ont pas eu besoin de changer leurs façons de faire.

Comme l'a dit Maurice Joncas, poète gaspésien, qui résumait la vie de ces gens-là:

Barques de pêche en été
Hache et godin durant l'hiver
Bonheur et joie bien calculés
C'était un peu leur univers
Ce poème est extrait de la chanson Les expropriés de Forillon. Je trouvais qu'elle collait bien à la situation des communautés dont l'univers est aujourd'hui bousculé à cause d'erreurs de gestion du fédéral. Pour elles, la vie ne sera plus jamais pareille. Elles doivent se réinventer une façon de vivre. Mais tout cela ne peut se faire d'un coup de baguette magique, et le gouvernement devra respecter le rythme d'adaptation de ces communautés. Cette révolution exige que les différents paliers de gouvernements mettent à la disposition des communautés maritimes des outils de développement nouveaux.

Ces outils devront permettre aux communautés maritimes de faire un inventaire des ressources humaines et des ressources naturelles présentes dans leur milieu, car trop de fois l'État fédéral a agi de façon unilatérale.

Cette fois-ci, ce n'est pas le temps de se péter les bretelles pour vanter les mérites du fédéralisme. Il faut vraiment coopérer et s'assurer que les communautés maritimes se sentent partie prenante de ce grand changement, leur changement. Aller à l'encontre de ces élans serait irresponsable.

L'effondrement honteux des stocks de poissons de l'Atlantique est la conséquence directe de l'intervention du fédéral dans le domaine des pêches. Le gouvernement libéral n'est pas sans tache à ce sujet-là. Au début des années 1980, les libéraux ont lancé la vague de subventions de construction de bateaux. Ces subventions atteignaient parfois jusqu'à 60 p. 100 de la valeur des bateaux. Elles ont donc contribué à la situation de surcapacité. Au lieu de diversifier l'industrie, le gouvernement fédéral à


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l'époque-on va maintenant voir ce qu'il va faire-a accentué la problème.

(1140)

De leur côté, les gouvernements provinciaux n'ont eu d'autre choix que d'aider l'industrie de la transformation à s'adapter à l'augmentation du volume des prises. Des investissements ont été réalisés par les provinces alors que la ressource, pierre angulaire de cette industrie, leur échappait.

Une politique industrielle valable en matière de pêcherie ne pourra être cohérente que si les provinces partagent la gestion de la ressource. La vulnérabilité du Québec et des autres provinces dans le secteur des pêcheries tient au fait que les pouvoirs les plus déterminants en la matière sont détenus par le gouvernement fédéral.

Sur la question de la gestion de la pêche, le Québec et Terre-Neuve se ressemblent peut-être plus qu'on ne le pense. Mais au Québec, on dit que Terre-Neuve est plus séparatiste que nous! En effet, dans le cadre de la réforme-la recherche qui a eu lieu l'année dernière-du ministère des Pêches et Océans, ils ont demandé la gestion exclusive de la ressource et des permis pour les pêches limitrophes.

Je serais en faveur du rapatriement de la gestion des permis par les provinces. Toutefois, puisque les stocks de poissons sont migratoires, les provinces ne peuvent prétendre à une gestion exclusive. Si la province de Terre-Neuve croit que le fédéral gère la ressource de façon inadéquate, nous espérons qu'elle nous appuiera pour obtenir la cogestion par les provinces. En faisant cela, la gestion de la ressource sera plus efficace, et donc plus apte à assurer la pérennité de la ressource.

Toutefois, un Québec souverain, siégeant au sein de l'OPANO, l'Organisation des pêcheries de l'Atlantique nord-ouest, pourrait plus rapidement atteindre un niveau de gestion rationnel. Un Québec souverain déterminerait le total des prises admissibles, au même titre que les autres États souverains. Il redistribuerait aussi sa quote-part par l'émission de permis de pêche québécois.

Cette façon de faire permettrait au Québec d'exprimer ses opinions comme peuple au niveau international et de gérer conjointement sa biomasse comme il l'entend, sans l'intermédiaire du fédéral.

Ce discours se veut un plaidoyer pour le gros bon sens, un plaidoyer pour le respect des communautés maritimes et de leurs provinces respectives. L'orateur ici présent a toujours recherché l'équité. Mes propos ne sont pas basés sur des intérêts à court terme, mais sur des intérêts visant à contrer la centralisation canadienne responsable de l'effondrement de nos stocks de poisson.

C'est donc avec un profond respect des parties concernées que je soumets ma vision à cette Chambre. C'est ce qui constitue ma réponse au discours du Trône qui, à mon avis, n'a rien compris aux problèmes que vivent les communautés maritimes canadiennes et québécoises.

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, je demanderais le consentement unanime afin que la Chambre puisse poursuivre ses travaux pendant l'heure du lunch, entre 13 heures et 14 heures.

Je vous demanderais également de faire en sorte que la déclaration ministérielle prévue ce matin ait lieu entre deux discours, afin de ne pas interrompre l'un ou l'autre des orateurs.

Le président suppléant (M. Kilger): Je vais commencer par la demande de consentement unanime pour poursuivre les travaux de cette Chambre pendant l'heure du lunch. La Chambre consent-elle à poursuivre ses travaux pendant l'heure du lunch?

[Traduction]

Y a-t-il consentement unanime pour que nous poursuivions les travaux pendant l'heure du dîner, entre 13 et 14 heures?

(1145)

Des voix: D'accord.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Sur le deuxième point de l'honorable député, je vais m'assurer auprès les greffiers que nous sommes en règle et nous aviserons.

M. Nic Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, je tiens à féliciter et à saluer le grand député de Gaspé, un député dévoué qui a démontré un grand intérêt pour les citoyens de la Gaspésie.

Dans son discours, il n'a pas fait que des critiques négatives. Au contraire, il a proposé plusieurs solutions pour le bien-être de la population gaspésienne, particulièrement au niveau de la pêche. Il a aussi dit clairement que, si le Québec avait pleine juridiction en matière de pêches, on ne serait pas dans un marasme aussi épouvantable que celui que vivent actuellement les gens de la Gaspésie. Comme il l'a si bien dit, la Gaspésie est probablement la plus belle région du Québec. C'est un petit peu froid, mais il n'en reste pas moins que c'est une très belle région que j'ai eu l'occasion de visiter pas plus tard que l'année dernière.

Monsieur le député de Gaspé, c'est avec beaucoup d'intérêt que j'ai écouté votre discours. Je vous en félicite et vous encourage à continuer votre bon travail.

M. Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, je remercie mon confrère de Longueuil pour ses propos. Vous allez souvent m'entendre parler dans cette Chambre pour défendre les intérêts des pêcheurs, ceux des pêcheurs québécois, mais aussi ceux des pêcheurs en général. Ma devise est celle-ci: lorsqu'on veut être équitable et faire preuve de fair play, comme on disait dans mon ancien métier, pour défendre comme il le faut notre coin de pays et les gens qu'on représente, on doit déterminer notre juste quote-part de la ressource et être respectueux de nos confrères d'en face pour obtenir des règlements et des ententes administra-


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tives qui permettent l'harmonie à long terme pour le bien des communautés et pour le bien de la ressource.

C'est dans cet esprit que je tends la main aujourd'hui aux députés d'en face. Je leur demande de bien vouloir travailler avec moi, de ne pas prendre mes propos à la légère et de ne pas rejeter mes propositions sous prétexte que je suis un souverainiste. Je voudrais leur rappeler que je ne suis pas raciste mais souverainiste et que je veux le bien de la communauté des pêcheurs. J'ai tenu, dans mon discours, à bien faire comprendre au gouvernement que si l'on entend faire porter le chapeau aux communautés qui n'ont rien demandé de ce qui se passe actuellement, les députés d'en face et les ministres me retrouveront sur leur chemin et connaîtront à ce moment-là mon caractère et mon sang chaud de Gaspésien.

[Traduction]

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter le député de Gaspé pour son premier discours devant la Chambre. J'ai noté ses inquiétudes au sujet du sort de ses électeurs, en particulier en ce qui touche au poisson et au fait qu'ils vivent de la mer.

Il a aussi mentionné que le fait que la province de Québec participe au processus de détermination des solutions possibles au manque de poisson, et de morue en particulier, dans la région de l'Atlantique pourrait permettre d'atténuer les problèmes de ses électeurs.

Je ne crois pas que le fait que la province de Québec participe à la renégociation de la répartition des quotas de pêche pourrait permettre d'augmenter de quelque façon la quantité de poisson pouvant être pêchée. Par conséquent, propose-t-il que la province de Québec reçoive une plus grande part des quotas disponibles ou pense-t-il à une autre solution que nous ne connaissons pas et qui pourrait permettre de pêcher davantage de poisson et d'accroître ainsi la prospérité économique de tous les pêcheurs de la côte atlantique?

(1150)

[Français]

M. Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, je remercie le député de St-Albert de sa question. Les propos que j'ai tenus tout à l'heure ne vont pas dans le sens que le Québec pourrait inventer du poisson à l'heure actuelle. Ce que j'ai voulu dire, c'est que par le passé, parce que nous avions le droit de cogérer la ressource, il nous était possible de gérer la ressource au Québec. Le processus de rétroaction, lorsqu'arrive un problème dans un domaine aussi compliqué que sont les pêches, a été fait beaucoup plus rapidement.

Alors, dans ce sens-là, je comprends que tous les Canadiens, y compris les Québécois, doivent se serrer la ceinture et participer à la reconstruction du stock. Dans le discours que j'ai prononcé, je veux inviter le gouvernement à ne pas répéter les erreurs. Un homme grandit lorsqu'il apprend de ses erreurs et je crois qu'on pourrait être plus grands. Je pense que le gouvernement fédéral en a fait beaucoup par le passé, mais je voudrais qu'on tire expérience de ces erreurs-là.

Alors, dans ce sens-là, s'il y avait une cogestion, l'harmonisation des politiques industrielles des pêcheries, de chacune des provinces, ne s'en sentirait que mieux. Présentement, on profite du fait que c'est le fédéral qui prend la décision et chacun va tirer la manche de l'oncle premier ministre pour avoir sa petite part. Alors, que si on était assis autour de la table, en collégialité, et en se respectant mutuellement, on arriverait à une harmonie pour le bien-être des ressources, parce qu'il faut toujours se rappeler qu'il y a des gens qui dépendent de ce poisson-là. Ils en dépendent pour leur survie à eux, pour leur nourriture, pour leur mode de vie et aussi pour leur gagne-pain, parce que l'industrie canadienne, ainsi que l'industrie québécoise du poisson, c'est une industrie à l'exportation. Alors, on se doit de ménager cette ressource car c'est le grenier. Je demande que l'on puisse travailler en collégialité.

Reconnaître que je mesure 5 pieds 10 pouces et que je suis souverainiste est une chose, mais qu'on puisse s'entendre sur la gestion du poisson serait beaucoup apprécié et j'espère qu'à la fin, on puisse en arriver à cela.

[Traduction]

M. John Cummins (Delta): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter le député de Gaspé pour le ton constructif de son discours. Je lui signale qu'il va sans dire que le gouvernement fédéral a mal géré les pêches de la côte est.

Le député semble indiquer que la solution au problème des pêches de la côte est réside dans le transfert du pouvoir des pêches aux provinces. Ce transfert, au lieu d'être une solution, n'aurait-il pas plutôt pour effet d'aggraver le problème et de créer d'interminables querelles entre les provinces?

[Français]

M. Bernier (Gaspé): Monsieur le Président, lorsqu'on veut rechercher des solutions à un problème, est-ce qu'on doit avoir peur d'afficher ses idées? Est-ce qu'on doit avoir peur que cela relance des querelles? Je ne vous ai pas parlé sur le ton de la chicane et de la querelle; je vous ai lancé une invitation à la collégialité pour le mieux-être de l'industrie et le mieux-être de la répartition de la ressource, pour y assurer sa pérennité.

Or, je ne m'attends pas à ce que cela déclenche des chicanes constitutionnelles. Si jamais ça doit en faire, je suis le type d'individu qui, lorsque rendu à la rivière, la traverse. Je me sens assez grand et assez fort, avec tous les collègues ici, pour être capable de faire face à cette chose-là. Mais cependant, ce n'était pas le sens de mes propos ce matin.

Je crois savoir que le comté de Delta se trouve en Colombie-Britannique, monsieur le Président. Je tiens donc à saluer les gens de la Colombie-Britannique et à m'excuser, peut-être, de ne pas leur avoir adressé quelques mots en termes de pêcherie dans leur secteur.

(1155)

J'ai tenu ce matin à exprimer ma position et aussi à adresser une réponse au discours du Trône. Alors, dans le discours du Trône, il y avait beaucoup de lacunes. On a fait état de deux choses, c'est-à-dire trouver un coupable pour l'effondrement des stocks et ensuite, donner un programme d'aide d'urgence aux pêcheurs de l'Atlantique qui sont, eux, présentement, gravement touchés.


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Mais, j'aimerais rassurer mon collègue, député de la Colombie-Britannique, que lorsque mon anglais se sera un peu plus amélioré, j'entends me rendre en Colombie-Britannique et aller rencontrer les groupes de pêcheurs là-bas.

[Traduction]

Mme Jane Stewart (Brant): Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur et un privilège de prendre la parole en tant que nouvelle députée de la circonscription de Brant et de participer au débat sur le discours du Trône.

Avant de formuler mes observations à ce sujet, j'aimerais remercier la population de la circonscription de Brant de m'avoir élue pour la représenter à la Chambre des communes. J'aimerais aussi remercier mon précédesseur, M. Derek Blackburn, de sa contribution à la Chambre et dans ma circonscription. Je lui souhaite beaucoup de succès dans ses nouvelles fonctions à la Commission de l'immigration et je le remercie d'avoir accepté cette fonction avant le déclenchement des élections fédérales de 1993. C'est une nomination politique de l'ancien gouvernement que je ne contesterai sûrement pas.

Monsieur le Président, je tiens à vous saluer et à vous féliciter d'avoir été nommé à la présidence et, au nom des habitants de Brant, je tiens à féliciter le Président pour son élection. J'ai parfaitement confiance en lui et sais qu'il saura maintenir l'ordre à la Chambre. Je lui donne mon appui et ma coopération à cet égard.

J'aimerais faire part de plusieurs choses à la Chambre ce matin. Tout d'abord, j'aimerais que tous sachent pourquoi j'appuie si fortement le discours du Trône, tel que nous l'a présenté le gouverneur général à l'ouverture de la 35e législature qui marquera notre histoire.

Ensuite, j'aimerais proposer une idée au gouvernement. Ce n'est pas une idée nouvelle, mais c'en est une qui, si elle est adoptée de manière plus générale, nous aidera à apporter de véritables changements au gouvernement.

Pourquoi donc est-ce que j'appuie si fortement le programme qui nous a été présenté dans le discours du Trône? Eh bien, en un mot, c'est parce qu'il est pratique. Les habitants de Brant en ont assez des discours vides. Ils ne veulent pas d'absurdités. Ils veulent que l'on aborde les défis qui se présentent à nous de façon sensée. Or, c'est exactement ce que nous trouvons dans le discours du Trône.

Prenons, par exemple, le programme d'infrastructure. C'est un programme que les municipalités de tout le pays peuvent utiliser. Ma circonscription de Brant est un mélange harmonieux de zones rurales et urbaines. Les cantons de Brantford et de South Dumfries s'enorgueillissent d'une partie des terres agricoles les plus fertiles et les plus productives de l'Ontario et sont parsemés de magnifiques villages historiques comme Glen Morris, Mount Pleasant, Harrisburg et ma propre collectivité, celle à laquelle appartient ma famille depuis plus de six générations, le village de St. George.

Nous avons besoin d'un meilleur réseau routier pour que nos résidents ruraux puissent se rendre dans ces villages ainsi que dans nos centres urbains, la ville de Paris et celle de Brantford. Paris est une ville merveilleuse, située entre les rivières Nith et Grande. Ses quartiers résidentiels ont besoin de nouveaux égouts. La ville de Brantford, d'autre part, a besoin d'appui pour améliorer sa décharge, ses usines d'épuration des eaux et ses routes si elle veut avoir accès au développement économique dont nous avons grandement besoin. Le programme d'infrastructure est donc logique. Il est pratique pour les habitants de ma circonscription et je suis sûre qu'on penserait qu'il l'est également pour vos électeurs.

Il suffit d'observer la façon dont le gouvernement envisage les petites et moyennes entreprises pour se rendre compte qu'il met de l'avant une autre série de stratégies pratiques. Dans ma circonscription, nous dépendons depuis toujours de la fabrication lourde de la machinerie et de l'équipement agricole. Des sociétés comme Cockshutt, puis White, Massey-Harris, puis Massey-Ferguson ont employé les habitants de Brant.

Il n'y a pas très longtemps, la ville de Brant pouvait s'enorgueillir d'offrir 5 000 des emplois les plus rémunérateurs dans le secteur de la fabrication en Amérique du Nord. Or, ces emplois sont tous disparus. Les entreprises ont toutes fermé leurs portes et, comme dans bien d'autres collectivités, nous essayons maintenant de rebâtir notre économie. Nous savons fort bien que, pour y parvenir, nous devons compter sur les petites et moyennes entreprises. Dans ma circonscription, les employeurs veulent faire comprendre au gouvernement qu'ils ont besoin d'un meilleur accès à des capitaux. Ils demandent aussi une réduction de la paperasse gouvernementale. Nous devons les aider si nous voulons bâtir une économie locale et former des grappes industrielles.

(1200)

Comme dernier exemple du sens pratique du gouvernement, prenons la façon dont il s'y prend à l'égard des jeunes et de l'emploi chez les jeunes. Là encore, il propose deux programmes fort réalistes. Il y a notamment le programme d'apprentissage. C'est une stratégie très importante pour nous, parce que nous devons permettre le passage efficace des jeunes de l'école au milieu du travail.

Les députés seront peut-être intéressés d'apprendre que la ville de Brantford, qui compte tout de même plus de 100 000 habitants, ne possède pas le moindre établissement d'enseignement postsecondaire, ce qui est vraiment un désavantage. Cela signifie que l'éducation permanente ne fait vraiment pas partie de nos vies. Cela explique aussi la difficulté que nous avons à attirer de nouveaux investissements pour des projets de haute technologie.

Quand on pense au programme d'apprentissage, on imagine qu'il y aura des occasions de créer un partenariat entre le secteur privé et le gouvernement, peut-être en vue d'établir des instituts techniques, ce qui serait un apport additionnel. Bien sûr, Brantford est l'emplacement idéal pour un institut de ce genre.

Il est ensuite question d'un Service jeunesse et je vous dirai que mes électeurs se sont montrés très favorables à une telle proposition au cours de la campagne. D'ailleurs, ma circonscription compte un certain nombre d'organisations qui pourraient


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offrir des possibilités à nos jeunes. Une de nos principales richesses naturelles est la rivière Grande. C'est un large cours d'eau qui coule tranquillement au beau milieu de ma circonscription. Le comité Brant Waterways pourrait certainement offrir des emplois liés à l'environnement et ainsi aider nos jeunes à vivre cette première expérience de travail si déterminante.

Dans ma circonscription, il y a aussi une collectivité d'adultes dynamiques, qui pourraient mettre en place des services d'aide entre les générations concernant l'emploi, la formation et l'expérience. Dans nos écoles, il faut qu'il y ait des jeunes qui aident les plus jeunes à apprendre à lire, à écrire, à faire des mathématiques et à améliorer leurs connaissances en informatique.

Quand je lis le discours du Trône, je vois toutes sortes de possibilités qu'en tant que députée, je peux offrir à mes électeurs pour les aider à améliorer la situation et à bâtir notre économie locale.

Toutefois, il y a une idée qui ne figure pas dans le discours du Trône et que je voudrais proposer à l'attention du gouvernement, soit celle de la décentralisation du gouvernement. Pourquoi ne pas déplacer certains organismes publics, secrétariats d'État et ministères, des grands centres urbains comme Ottawa et Toronto vers des petites villes, telles celles de ma circonscription?

Mes électeurs sont entièrement en faveur de cette idée. En fait, on nous avait promis de déménager le ministère provincial des Services informatiques et de Télécommunications dans notre circonscription au début de 1993. Cela avait beaucoup de bon sens, car Brantfort est la ville du téléphone. C'est là qu'Alexander Graham Bell a réussi la première communication téléphonique interurbaine, entre Brantford et Paris.

Cette possibilité nous enthousiasmait et nous comptions qu'elle se réaliserait. Malheureusement, après les élections, le nouveau gouvernement a décidé d'annuler ce programme. Il s'en est suivi pour ma collectivité une dépression non seulement économique, mais sociale.

La décentralisation est une idée intéressante. Elle n'est pas nouvelle, mais elle peut nous aider à satisfaire un certain nombre de nos priorités. Elle peut contribuer à aplanir les inégalités économiques d'un bout à l'autre de notre pays et à améliorer le bien-être physique et social des Canadiens. C'est une stratégie qu'on peut adopter pour rationaliser la fonction publique et promouvoir la démocratie de participation, mais elle nous obligerait certes à faire des pas de géant dans la mise au point et l'utilisation de l'autoroute électronique.

Que le gouvernement opte pour la stratégie de la décentralisation seul ou de concert avec les gouvernements provinciaux afin de réduire le dédoublement des services gouvernementaux ou encore, de façon nouvelle et innovatrice, en collaborant avec le secteur privé pour l'impartition des modèles et des concepts, je crois que l'idée de la décentralisation gouvernementale est la solution de l'heure. J'encourage tous les ministres à l'envisager dans la gestion de leurs ministères respectifs. Si les possibilités sont là, surtout dans les secteurs des télécommunications, de l'agriculture et de l'environnement, par exemple, j'espère qu'ils songeront à la circonscription de Brant.

(1205)

Je suis contente d'avoir pu vous parler de la circonscription que je représente ici et d'avoir pu vous exposer les raisons pour lesquelles j'appuie vigoureusement le programme d'action qui nous a été présenté dans le discours du Trône.

Je demande à tous les députés de voter en faveur de la motion à l'étude, soit la motion qui a été proposée par mon collègue, le député de Bruce-Grey, et appuyée par ma collègue, la députée de Madawaska-Victoria.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je tiens à féliciter la députée de Brantford. Je suis passé dans sa collectivité à de nombreuses reprises. C'est effectivement une très belle collectivité.

Je voudrais obtenir des précisions de la députée sur le programme d'infrastructure qu'elle appuie de façon si inconditionnelle. Quels effets de ce programme, selon la députée, se feront sentir à plus long terme dans sa collectivité? Est-ce la note que les contribuables devront payer aux gouvernements municipaux, provinciaux et fédéral ou est-ce que ce sont les emplois à court terme qui seront créés?

Mme Stewart (Brant): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.

À mon sens, les projets d'infrastructure n'ont pas uniquement une valeur à court terme. Bien sûr, dans ma collectivité on a très hâte que les travaux débutent parce que nous avons besoin de nouveaux emplois.

Lors des discussions que j'ai eues avec les représentants des municipalités de Brant, il est ressorti que tous s'attendent à ce que ces projets débouchent sur des possibilités à plus long terme. Brantford, Paris, South Dumphries et le comté de Brantford en profiteront.

J'ai été très encouragée par toute l'énergie que les conseils municipaux ont décidé de consacrer au programme. Ils croient avoir l'argent et disent qu'ils peuvent réaménager leurs budgets en fonction des projets.

Je n'hésite pas du tout à appuyer le programme et à recommander à toutes les municipalités d'y participer.

M. Harold Culbert (Carleton-Charlotte): Monsieur le Président, je veux moi aussi féliciter la députée pour son excellent discours. J'ai été extrêmement impressionné.

Je voudrais ajouter quelques mots à une des choses qu'elle a dites vers la fin de son intervention. Elle a parlé de la décentralisation de nombreux bureaux fédéraux dans tout le Canada. Je suppose que c'est ce dont elle parlait.

Je voudrais savoir si la députée envisageait cette décentralisation uniquement après une étude des coûts et des avantages du déménagement des bureaux qui seraient visés.


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Mme Stewart (Brant): Monsieur le Président, il est clair que tous les services ne peuvent pas être déplacés. Il ne fait aucun doute que nous devons étudier les coûts et les avantages des déménagements, mais il nous faut penser à long terme.

Les déménagements associés à une restructuration et à une réorganisation de certains organismes et ministères coûteraient quelque chose, mais à long terme, cette décentralisation aurait de grands avantages. Tout le pays en bénéficierait. J'ai donné plusieurs raisons qui expliquent l'importance de la décentralisation.

Je ne voudrais pas que le député me comprenne mal. Certaines raisons justifient le maintien, dans leur forme centralisée, de nombreux ministères.

Lorsque je pense à la nécessité de stabiliser l'économie de certaines régions du Canada, de ma région et surtout de l'Est, je pense aussi à tout l'argent que nous y injectons en assurance-chômage et en prestations d'aide sociale. Peut-être notre aide devrait-elle également prendre la forme d'emplois gouvernementaux?

(1210)

[Français]

M. Nick Discepola (Vaudreuil): Monsieur le Président, je suis heureux de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui d'appuyer le discours du Trône et d'expliquer comment le gouvernement entend consacrer ses fonds et son énergie quant à l'avenir de nos jeunes.

Mais avant, permettez-moi de remercier les centaines de bénévoles et la population de Vaudreuil qui m'ont confié le mandat d'être leur porte-parole auprès de cette vénérable institution qu'est la Chambre des communes. C'est avec fierté, sérieux et intégrité que je les représenterai pour défendre nos objectifs collectifs.

[Traduction]

Je veux remercier mes amis et concitoyens de Kirkland, choisie parmi les dix meilleures villes du Canada, de la confiance qu'ils m'ont témoignée et de l'appui qu'ils m'ont donné au cours des dix dernières années. Ce fut pour moi un honneur de vous servir à titre de conseiller municipal et de maire. Je suis maintenant fier de vous inclure dans ma nouvelle famille, celle de la circonscription de Vaudreuil, où j'espère vous servir avec autant de dévouement.

Je veux aussi exprimer mon amour et ma gratitude à mon épouse, Mary Alice, et à nos quatre enfants, Lisa, Laura, Michèle et Marco, pour leur patience et leur appui inconditionnel. Ils ont été pour moi une véritable source d'inspiration. Je remercie aussi mes parents, Domenico et Immacolata, de m'avoir montré l'importance de l'éducation et des valeurs familiales.

[Français]

Et à vous, monsieur le premier ministre, permettez-moi de vous exprimer toute mon admiration pour avoir su imposer une ligne de conduite à l'intention des politiciens afin de restaurer leur image. Votre intégrité à toute épreuve est, pour nous tous, un exemple à suivre et je vous en remercie.

Quant à vous, monsieur le Président, je vous offre mes plus sincères félicitations dans l'exercice de votre nouvelle fonction.

En tant que Québécois, je n'ai jamais ressenti la moindre limite, la moindre restriction quant aux possibilités qui s'offraient à moi et aux membres de ma famille. Il y a 37 ans, 4 frères Discepola quittaient leur village natal de Volturara Irpina, dans la région de Campagna, en Italie, pour s'installer au Canada avec leur famille. Ils ont réalisé leur rêve.

Leurs enfants sont aujourd'hui juges, médecin, professeurs, ingénieurs et comptables. Il y en a même un dans le tas qui s'est égaré, il est député à la Chambre des communes. Je ne connais aucun endroit dans le monde, aucune nation, aucun pays où cela aurait été possible.

Dans la circonscription de Vaudreuil, nous avons de nombreuses préoccupations et plusieurs priorités. Mais si j'ai choisi, pour ma première intervention en Chambre, de parler du programme du gouvernement quant à l'avenir de nos jeunes, c'est que, comme vous, comme chaque Québécois, comme chaque Canadien, je m'inquiète pour l'avenir de mes enfants et celui de leurs enfants.

Je suis heureux de pouvoir expliquer aujourd'hui ce que le gouvernement entend faire pour assurer l'avenir de nos jeunes.

Le Canada est fier de pouvoir offrir à ses jeunes un cadre de vie et de croissance formidable. Ils jouissent d'une existence qui fait l'envie du monde entier. Tout comme les générations précédentes, ces jeunes recherchent des emplois enrichissants, un niveau de vie confortable et une vie familiale satisfaisante. Les idéaux des jeunes ne semblent pas avoir changé au fil du temps, même si le contexte dans lequel ils évoluent s'est profondément modifié.

[Traduction]

La récession, le taux de chômage élevé chez les jeunes et le climat d'incertitude qui règne aujourd'hui sur le marché du travail mettent une pression énorme sur nos jeunes, une pression que les Canadiens plus âgés n'ont jamais eu à subir.

Aujourd'hui, un diplômé du secondaire qui choisit de ne pas poursuivre ses études hypothèque sérieusement son avenir. Dans les années 1990, 60 p. 100 des emplois disponibles nécessiteront une 12e année ou plus. Il est évident que nos jeunes ne sont pas suffisamment bien préparés pour entrer sur le marché du travail. Leur manque de compétence aura des conséquences sociales et économiques énormes pour nous tous.

[Français]

Les sciences et les mathématiques sont les deux moteurs de l'innovation et du progrès qui détermineront notre survie à l'ère technologique. D'après des études internationales, les élèves canadiens du secondaire se situent à peine dans la moyenne pour ce qui est de leurs résultats en sciences. Comparativement aux autres pays de l'OCDE, le Canada compte une faible proportion


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de diplômés en sciences et en génie. Il ne fait aucun doute qu'il nous faut améliorer notre performance. Au seuil du XXIe siècle, le Canada doit trouver le moyen d'accroître la compétitivité de sa main-d'oeuvre. Nous croyons que la collaboration des gouvernements, des provinces, du patronat et des syndicats, et ce, à tous les niveaux, nous permettra de trouver des solutions susceptibles de répondre aux besoins en ressources humaines de notre pays.

(1215)

Le Canada consacre plus de 55 milliards de dollars par année à l'éducation et à la formation. De ce montant, 13 milliards de dollars proviennent du gouvernement fédéral, ce qui représente 7,4 p. 100 de notre Produit intérieur brut. Cela nous classe bon premier parmi les pays de l'OCDE.

Le gouvernement actuel est non seulement déterminé à promouvoir l'enseignement et l'acquisition du savoir, mais il tient aussi à ce que les jeunes reçoivent la meilleure formation possible pour les emplois de l'avenir.

Malgré le chômage qui sévit actuellement chez les jeunes, il y a encore des employeurs qui ont de la difficulté à trouver une main-d'oeuvre qualifiée. À l'heure actuelle, il y a un sérieux écart entre l'école et le monde du travail. Avec l'émergence des nouvelles technologies, la formation dans les métiers traditionnels est dépassée. Pourtant, de nombreux jeunes continuent d'opter pour des métiers qui sont saturés au détriment d'autres plus en demande.

En outre, dans la nouvelle économie, on manque de programmes de formation pour les professions émergentes qui offrent de bonnes possibilités d'emploi, comme par exemple la technologie de l'information et les télécommunications.

Il faut que les gouvernements, les syndicats et les chefs d'entreprise unissent leurs efforts pour revitaliser notre système de formation et créer de nouvelles possibilités d'apprentissage mieux adaptées aux nouveaux secteurs de l'économie en pleine croissance.

La récession porte actuellement un dur coup aux aspirations de nos jeunes. Voilà qu'après des années d'études et de travail à temps partiel, ils sont diplômés, mais en chômage.

Nous devons trouver de meilleures solutions. Il est évident que le filet de sauvetage qu'est la sécurité sociale dans notre pays, sous sa forme actuelle, est loin d'aider ou d'encourager les jeunes à s'intégrer au marché du travail et à y développer leur plein potentiel.

L'honorable ministre du Développement des ressources humaines consultera la population canadienne et travaillera avec les provinces afin que tous ensemble nous puissions adapter les programmes sociaux aux réalités des années 1990. Notre système de sécurité sociale fait l'envie du monde entier. Mais sa survie et son efficacité reposent sur sa capacité d'adaptation au nouveau contexte de travail.

Une des options sur laquelle se penche actuellement le gouvernement consiste à développer des programmes de formation meilleurs et plus nombreux, axés sur l'emploi, pour faciliter l'insertion des jeunes au marché du travail et leur permettre d'acquérir des compétences exigées par les employeurs.

Comme deuxième option, le gouvernemnt s'applique actuellement à mettre sur pied un programme qui permettra aux jeunes de servir leur collectivité. Il s'est engagé, en mettant sur pied le Service jeunesse, à donner à des jeunes chômeurs et chômeuses l'occasion d'acquérir de l'expérience.

Le Service jeunesse vise non seulement à améliorer la qualité de vie dans nos collectivités, mais également à redonner aux jeunes l'espoir et le sentiment d'avoir accompli quelque chose. En participant au Service jeunesse, les jeunes de 25 ans et moins auront ainsi à leur crédit une expérience de travail, une longueur d'avance sur le marché et, peut-être bien, la possibilité de briser le cercle vicieux de la dépendance sociale qui détruit les ambitions et gaspille les talents.

Le ministre du Développement des ressources humaines est déterminé à améliorer le Programme canadien de prêts aux étudiants. Il étudiera la possibilité de le modifier pour augmenter l'aide à court terme et consultera les provinces et les autres intéressés.

Le gouvernement veut aussi soutenir davantage l'alternance travail-études qu'il voit comme un moyen pour les étudiants, les provinces, les syndicats et les entreprises de travailler ensemble à bâtir une main-d'oeuvre hautement compétente.

(1220)

L'avenir du Canada repose sur les jeunes auxquels on aura donné la possibilité de devenir des adultes productifs. Dans la poursuite de cet objectif, le gouvernement fédéral appuiera vigoureusement, en tant qu'intervenant, les programmes d'acquisition du savoir qui permettront aux jeunes d'obtenir de bons emplois, bien rémunérés, et d'envisager l'avenir avec optimisme.

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières): Monsieur le Président, je voudrais remercier et féliciter mon collègue de Vaudreuil pour son exposé. On sent chez lui une intense préoccupation pour la question des jeunes et notamment la question de la formation professionnelle. Je voudrais lui demander en toute honnêteté et courage de sa part, connaissant son allégeance politique, à quelle enseigne il se loge malgré tout, comme Québécois, dans le dossier de la formation professionnelle?

Quand on sait que, s'il y a un dossier où il y a unanimité dans ce Québec trituré d'aujourd'hui, c'est bien celui de la formation professionnelle, quand on sait que le Conseil du patronat, la CSN, la FTQ, le gouvernement du Québec sont d'accord, et que peut-être seulement le Parti libéral du Canada n'est pas d'accord sur le fait que tout le champ de juridiction de la formation professionnelle soit enfin rapatrié par une instance, c'est-à-dire le gouvernement du Québec avec tous ses collaborateurs naturels que sont le syndicat et le patronat, à quelle place le député de


471

Vaudreuil, sensible qu'il est, on l'a vu, à toute la question des jeunes et de la formation professionnelle, loge-t-il?

M. Discepola: Monsieur le Président, tout d'abord, je pense que notre gouvernement a clairement dit que nous avons l'intention de réviser toute la question des programmes sociaux, incluant la formation professionnelle.

En ce qui me concerne, comme député de Vaudreuil, je pense que l'intérêt de tous les Québécois, de tous les Canadiens, c'est de bien structurer les futurs programmes et de s'assurer qu'ils répondent clairement aux besoins de toute la population.

Je pense que c'est clair aussi que notre gouvernement n'a pas dit clairement être contre la main-d'oeuvre et la formation: on a dit qu'on n'est pas prêt à signer l'entente à l'heure actuelle. On veut réviser les programmes et bientôt, je pense, vous allez avoir la réponse que vous aimeriez avoir.

[Traduction]

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, le député a dit que nos programmes sociaux faisaient l'envie du monde entier, mais il me semble qu'ils ont à bien des égards contribué à compromettre la viabilité économique de notre pays. Maintenant que notre dette a franchi le cap des 500 milliards de dollars, je trouve qu'il est grand temps de réévaluer nos programmes sociaux pour les axer uniquement sur ceux qui en ont besoin plutôt que sur ceux qui touchent des prestations parce qu'ils appartiennent à un groupe particulier.

Le député a également parlé de l'alternance travail-études. Un de mes électeurs m'a fait part il y a quelques semaines d'une situation qu'on observe dans le cadre de la formation de la main-d'oeuvre où l'on verse des prestations d'assurance-chômage aux participants au programme de formation en apprentissage pendant qu'ils fréquentent l'école. Cela semble être une bonne initiative, mais on refuse l'assurance-chômage à ceux qui fréquentent l'université pendant une plus longue période.

On me faisait remarquer que nous avons dans un cas un participant à un programme de formation qui a un emploi assuré parce qu'il bénéficie d'un congé de son employeur, et qui a droit de toucher des prestations d'assurance-chômage. Par contre, le jeune qui fréquente l'université doit se battre pour trouver un emploi d'été afin d'être en mesure de poursuivre ses études.

Il me semble y avoir une énorme divergence d'attitudes à l'égard de deux types différents de formation. Je pense qu'il faut encourager la formation universitaire dans toute la mesure du possible. Comment le député et son gouvernement proposent-ils de faire en sorte que l'argent soit disponible pour encourager et motiver les étudiants et financer les études dont nous avons un si grand besoin au Canada?

M. Discepola: Monsieur le Président, je suis absolument d'accord avec ce que dit le député. À propos des programmes de formation de la jeunesse et à propos d'expérience, j'exploite une petite entreprise d'informatique où j'ai pu embaucher des jeunes étudiants diplômés du cégep, qui constitue un programme de formation de base pré-universitaire.

Je dois dire qu'en embauchant ces jeunes étudiants, j'ai pu, à une échelle bien modeste, leur donner cette expérience qui fait tellement défaut quand on cherche à trouver un emploi permanent.

(1225)

Ces programmes représentent l'initiative que notre ministre, Lloyd Axworthy, cherche à mettre en oeuvre. D'après mes deux filles qui fréquentent le cégep, une fois qu'elles auront leur diplôme d'études collégiales, elles ne pourront se placer nulle part. Notre gouvernement se doit de répondre aux besoins des jeunes qui peuvent se résumer à ceci: «Donnez-moi les moyens d'acquérir de l'expérience et je vous montrerai ce qu'un jeune est capable de faire.» C'est ce que j'ai fait pour mon propre compte et c'est ce que nous devons faire pour nos jeunes.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi): Monsieur le Président, je voudrais féliciter les deux derniers intervenants du côté du gouvernement, les honorables députés de Brant et de Vaudreuil, qui ont eu des mots très justes vis-à-vis de l'emploi des jeunes. Ces deux députés nous ont dit qu'ils étaient prêts à faire bien des pas et entreprendre bien des discussions pour permettrer à nos jeunes de travailler, et je les en félicite.

Par contre, j'ai trouvé la réponse du député de Vaudreuil très évasive sur la question posée par mon collègue du Bloc québécois concernant la décentralisation de la formation professionnelle au Québec. J'ai cru percevoir dans sa réponse qu'il n'était pas prêt à transférer au gouvernement du Québec toute cette responsabilité-là alors qu'on sait très bien que ceux qui connaissent le mieux les besoins des jeunes, ce sont ceux qui en sont le plus près. En tant qu'enseignant, je dois dire que si l'on veut offrir aux jeunes un cadre de vie intéressant, de l'emploi durable, on doit les rapprocher des centres de décision que sont les écoles, ou encore du gouvernement qui connaît le mieux les besoins.

[Traduction]

M. Discepola: Encore une fois, l'important pour les jeunes aujourd'hui, c'est d'acquérir la formation dont ils ont si désespérément besoin. Il ne m'appartient pas vraiment en tant que député de décider qui va fournir ce service. Il incombe plutôt à notre gouvernement de voir à la prestation de ce service, au coût le plus rentable possible, de manière à répondre aux aspirations des jeunes d'aujourd'hui. Il ne s'agit pas d'entreprendre un autre débat d'ordre quasi constitutionnel pour savoir qui a compétence pour faire quoi.


472

M. Grant Hill (Macleod): Monsieur le Président, je vais parler aujourd'hui des aspects du discours du Trône qui concernent la santé.

Mais permettez-moi d'abord de faire comme tous les nouveaux venus à la Chambre et de remercier les électeurs de la circonscription de Macleod de m'avoir élu pour faire partie de cette auguste institution. La circonscription de Macleod est située dans le sud-ouest de l'Alberta et elle s'étend de Calgary jusqu'à la frontière des États-Unis, des montagnes jusqu'à loin dans la région céréalière. Des gens merveilleux y vivent, et j'entends bien les représenter de mon mieux.

Je veux aussi remercier ma femme Sue et mes enfants de leur soutien et du sacrifice qu'ils font en acceptant ma présence ici.

Je félicite par ailleurs le Président du travail qu'il effectue au fauteuil et je tiens à l'assurer de mon entière collaboration.

Je veux enfin remercier les députés qui se sont fait élire à la Chambre, car à mon avis, il faut féliciter chacun d'eux de servir notre pays en participant à la vie publique canadienne.

Je suis un nouveau venu à Ottawa. À mon arrivée dans la capitale fédérale, j'ai remarqué l'indicatif d'appel de l'aéroport d'Ottawa, YOW. Je ne sais pas ce que cela signifie en français, mais en anglais, YOW a une connotation intéressante. Je vous laisse imaginer ce que l'indicatif d'appel de l'aéroport d'Ottawa évoque pour moi.

(1230)

Que prévoit le discours du Trône au chapitre de la santé? Il est question à quatre reprises de la santé dans le discours du Trône. Premièrement, il y est fait état de l'attachement profond du gouvernement à la Loi canadienne sur la santé et de son opposition à toute mesure susceptible d'y porter atteinte; deuxièmement, du forum national sur le renouveau du régime de soins de santé au Canada que présidera le premier ministre; troisièmement, de la création d'un centre d'excellence lié à la santé des femmes; et quatrièmement, d'un programme de nutrition prénatale pour les femmes à faible revenu. Je félicite le gouvernement du Canada de ces quatre énoncés.

Mais le régime se porte-t-il mal? Est-il en difficulté et faut-il effectivement le réformer?

Permettez-moi de rappeler quelques données sur le régime de soins de santé du Canada. Premièrement, le Canada dépense plus pour ses soins de santé que n'importe quel autre pays, exception faite des États-Unis. Nous dépensons plus de 60 milliards de dollars par année pour notre régime de soins de santé. Pourtant, notre population est en moins bonne santé que celle de bien d'autres pays qui dépensent moins. Dans les statistiques sur l'espérance de vie, la mortalité et la morbidité périnatales, le Canada n'occupe pas le rang le plus enviable. Nous entendons parler presque tous les jours de fermeture de lits, de mises à pied dans les hôpitaux, de listes d'attente sans cesse plus longues pour les interventions chirurgicales d'urgence.

Voici un autre donnée intéressante. En 1992, notre pays avait perdu 689 médecins de très grande compétence, qui ont choisi d'émigrer. C'est à peu près l'équivalent de la promotion de cinq facultés de médecine. Le Canada ne devrait pas perdre ces ressources.

Je n'ai que quelques minutes, mais je voudrais donner mon opinion sur ce qui ne va pas dans notre régime de soins médicaux. Le Canada est plongé, à cause de sa dette, dans une crise qui menace tous ses programmes sociaux. Ceux-ci sont vraiment en péril parce que nos frais d'intérêt s'élèvent à plus de 30 milliards et qu'aucune amélioration n'est en vue.

Il y a dans les soins de santé bien des problèmes internes dont je pourrais parler, mais ces problèmes relèvent avant tout des provinces. Je les laisse donc de côté pour parler de ce que nous pouvons et devons faire au niveau fédéral.

La Loi canadienne sur la santé repose sur cinq principes: universalité, transférabilité, accessibilité, services médicaux de base complets et administration publique de ces services. Je souligne qu'il s'agit des services de base.

Au début du programme, le régime de financement des programmes établis remettait aux provinces la moitié de leurs dépenses au titre des services médicaux. Cette participation a peu à peu diminué, au point que les transferts fédéraux en espèces ne représentent plus en moyenne que 29 p. 100 des dépenses. Il faut mettre un frein à cette baisse.

Les réformistes disent au gouvernement que le premier problème à régler, dans les services de santé, c'est la baisse des transferts. C'est au niveau fédéral qu'il faut agir. Il faut que la valeur réelle des transferts soit bloquée.

En deuxième lieu, j'ai parlé des services médicaux nécessaires. Par services nécessaires, j'entends ceux dont la population a vraiment besoin. Je suis d'avis que le gouvernement fédéral devrait prendre position et établir des normes nationales en matière de soins de santé, des normes nationales qui détermineraient ce qui est nécessaire et ce qui ne l'est pas.

Voici, à mon sens, des services qui ne sont pas nécessaires pour l'assurance-maladie universelle: l'inversion d'une vasectomie, la chirurgie plastique, les circoncisions ordinaires, l'enlèvement des tatouages et j'en passe.

Enfin, il est une autre question qui mérite, à mon point de vue, d'être examinée par le gouvernement, soit la question des fautes professionnelles médicales. Au début de ma carrière, les primes pour fautes professionnelles s'élevaient à 300 $. Maintenant, elles sont de 3 400 $. Rien ne fait augmenter autant les coûts de la santé que la menace de poursuites. Il arrive souvent qu'on demande des tests, des radiographies comme mesures de prudence.

(1235)

À mon avis, c'est là que le gouvernement fédéral devrait intervenir. Pour ma part, je suis en faveur de l'indemnisation sans égard à la responsabilité dans le domaine médical, car un tel système nous ferait économiser des milliards de dollars.


473

La vraie menace qui pèse sur nos programmes sociaux est la crise de la dette et du déficit. Si nous continuons de faire comme si le problème n'existait pas, nous allons finir par subir le même sort que la Nouvelle-Zélande. Ayant refusé de reconnaître le problème, ce pays s'est retrouvé du jour au lendemain sans régime d'assurance-maladie. Il doit maintenant faire de la réclame sur ses ambulances pour payer l'essence.

C'est à mon sens une question qui devrait être non partisane, qui devrait transcender toutes les lignes de parti. Les Canadiens tiennent à l'assurance-maladie, tout comme le Parti réformiste et le député de Mcleod.

Tout juste avant de prendre mon siège à la Chambre, j'ai mis au monde par césarienne un bébé de 6 livres 15 onces, Zachary David Birney. Rien ne me rend plus heureux que de tenir un nouveau-né dans mes mains pour le laver et le remettre à un père rayonnant. Cependant, cet enfant doit au Trésor fédéral plus de 17 400 $. Cette dette est injuste. Cette hypothèque sur son avenir est immorale. Les députés sont les gardiens de la dette. Je dédie mon travail à la Chambre à la santé physique et financière de tous les enfants comme Zachary David Birney.

Le président suppléant (M. Kilger): Par souci d'équité pour le député de Macleod, j'ai simplement dit qu'il lui restait environ une minute. Si vous voulez utiliser la minute qui reste pour faire des observations, je serai heureux de vous accorder la parole. Autrement, nous allons passer à la ronde de cinq minutes de questions et de commentaires.

M. Jim Jordan (Leeds-Grenville): Monsieur le Président, je félicite mon collègue de Macleod de son premier discours à la Chambre. Je crois savoir qu'il est un chirurgien de grand renom.

J'étais très curieux de l'entendre parler de la saignée que le Canada connaît dans la profession médicale. Avec les années, c'est ainsi que 600, 700 ou 800 personnes, dont nous avions financé la formation, sont parties.

Le député voit-il une solution simple à ce problème? Pour quelles raisons des professionnels canadiens très qualifiés nous quittent-ils pour aller s'installer dans un pays voisin? Je suis sûr que le député de Macleod s'est lui aussi posé la question. Je me suis interrogé là-dessus. Bien entendu, certains d'entre eux reviennent. Mais comment se fait-il qu'ils aient d'abord décidé d'aller à l'étranger? En sont-ils venus à être déçus après un certain temps? Qu'est-ce qui les a ramenés au Canada? Que pourrions-nous modifier dans notre système pour les décourager d'aller voir ailleurs? Nous ne les payons pas assez? Je n'en sais rien. C'est précisément pourquoi je pose la question.

Le député de Macleod, en tant que professionnel, en tant que médecin, pourrait peut-être donner son interprétation des faits. C'est un problème de taille, car le Canada perd ainsi des gens très qualifiés, très spécialisés et qui nous ont coûté fort cher.

M. Hill (Macleod): Monsieur le Président, je suis honoré qu'on dise de moi que je suis un chirurgien de renom. Si je le suis, c'est peut-être uniquement dans mon for intérieur.

Le député demande ce qui explique cette énorme saignée dans les ressources médicales au Canada, un phénomène qui s'amplifie. Les statistiques que j'ai fournies sont tout à fait alarmantes. Le phénomène s'amplifie effectivement, comme en témoignent les chiffres alarmants que j'ai cités. Le nombre le plus élevé de départs a été atteint en 1992.

(1240)

La plupart de mes collègues qui vont à l'étranger sont animés par trois motifs. Le premier est d'ordre financier. On paie davantage aux États-Unis. Le deuxième motif invoqué, c'est l'ingérence de la bureaucratie dans leurs affaires. La médecine et la bureaucratie ne font pas bon ménage. Le troisième motif tourne autour de la liberté, du fardeau fiscal et quoi encore.

Les causes principales se ramènent donc à une question d'argent. Quant à la position sociale du médecin au Canada, elle est demeurée pratiquement inchangée, si bien que ce n'est pas de ce côté-là qu'il faut chercher. Je ne possède pas la réponse à ce problème particulier. Tout ce que je dis, c'est qu'il est très important de protéger le milieu de la profession médicale et, pour ma part, j'espère pouvoir faire quelque chose à cet égard à la Chambre.

[Français]

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi): Monsieur le Président, je dois féliciter l'honorable député pour la qualité de son messsage concernant la santé. Nous savons que la santé, c'est très important. Mais, pour conserver une bonne santé, il nous faut offrir des conditions favorables. Il nous faut donc conserver nos programmes sociaux.

Ce que j'ai apprécié du discours de l'honorable député, c'est qu'il suggérait au gouvernement de geler les paiements de transfert aux provinces. J'en suis, et même un peu plus, non seulement les geler mais essayer de trouver, à l'intérieur d'autres dépenses gouvernementales, des sommes supplémentaires.

Je demanderais à l'honorable député si, en plus du domaine de la santé, il inscrit également celui du logement social. Nous savons que des personnes mal logées risquent de se retrouver en mauvaise santé et de coûter énormément cher à l'État. Les mal-logés, nous les retrouvons normalement dans des familles ou dans des situations où ce sont des femmes qui sont le principal soutien financier d'une famille. Donc à ce moment-là même les enfants subissent les sévices et risquent d'être malades. Donc je demanderais à l'honorable député si, pour sa part, la question du logement social est également aussi importante que celle de la santé, pour pouvoir conserver la santé des Canadiens et des Canadiennes?

[Traduction]

M. Hill (Macleod): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question.

J'ai dit que les Canadiens accordaient la plus grande priorité aux soins de santé. Et je n'invente rien. Des études ont confirmé que les Canadiens n'accordent pas autant d'importance au logement social qu'aux soins de santé, et c'est pourquoi je passerai plus rapidement sur cette question.


474

Puisque l'on parle ici de réduire les dépenses du gouvernement, je tiens à rappeler que les réformistes sont très prudents sur le plan financier. Nous examinons tous les secteurs où des réductions peuvent être effectuées. En réduisant les dépenses dans certains secteurs, nous pouvons consacrer plus de fonds aux secteurs prioritaires. C'est pourquoi je ne mettrais pas les deux sur le même pied.

Le président suppléant (M. Kilger): Je crois comprendre qu'il y a eu des discussions entre les partis concernant une déclaration faite par le ministre des Transports. Le secrétaire d'État responsable des Affaires parlementaires voudrait-il éclairer la présidence à ce sujet?

M. John Cummins (Delta): Monsieur le Président, je traiterai aujourd'hui des questions concernant la pêche, mais je voudrais tout d'abord remercier les électeurs de Delta de m'avoir fait l'honneur et accordé le privilège de les représenter comme député. Je voudrais particulièrement remercier les gens qui ont travaillé avec acharnement pour me faire élire. Tous les députés conviendront sûrement qu'aucun de nous ne serait ici si ce n'était de l'amour, de la patience et du soutien de nos familles, et j'en suis réellement reconnaissant.

Je voudrais remercier ma femme, Sue, mes belles-filles, Kristi et Erin, et, surtout, ma petite Carolyn. Elle ne me parle pas au téléphone ces jours-ci. Elle ne semble pas comprendre pourquoi je dois m'absenter si souvent.

(1245)

Quant à mon fils aîné, Martin, que j'ai si mal conseillé pendant 24 ans, il est un être bon et raisonnable dont je suis très fier et que je remercie de son appui.

Je serais négligent si je ne remerciais pas également mon père, John Cummins, et ma regrettée mère. La vie est un peu plus facile lorsqu'on peut dire avec fierté: «Voici ma mère, voici mon père», ce que j'ai moi-même pu faire. Mes parents ont fait de leur mieux pour que mon frère, Mike, mes soeurs, Colleen et Joan, et moi puissions avoir ce dont ils n'ont fait que rêver.

Nous, à la Chambre, devrions consacrer notre énergie à faire en sorte que tous les parents du Canada puissent offrir à chacun de leurs enfants la possibilité de réaliser ses rêves.

Personnellement, je crois qu'en bâtissant un Canada meilleur, nous ne devrions pas relâcher les efforts que nous faisons dans le domaine de la recherche médicale. Ayant perdu des êtres chers à cause du cancer et de la maladie de Lou Gehrig, je crois que, peu importe les difficultés, nous devons toujours consacrer les fonds nécessaires à la découverte de remèdes qui feraient disparaître des maladies comme celles-là.

Permettez-moi également d'en profiter pour féliciter tous les députés de leur élection. Je voudrais partager trois réflexions avec eux. Tout d'abord, rappelez-vous qui vous êtes. Ensuite, rappelez-vous pourquoi vous êtes ici. Enfin, et surtout, rappelez-vous qui vous a envoyé ici.

Je représente les habitants de la circonscription fédérale de Delta, qui comprend la municipalité de Delta et une petite partie de la municipalité voisine de Surrey. Ma circonscription est une belle région bordée au nord par le bras sud du fleuve Fraser et à l'ouest par le détroit de Géorgie.

À Delta, aujourd'hui, il fait environ huit degrés. C'est ce qui explique en partie que je vais quitter un peu plus tard dans la journée.

Si j'ai été élu, c'est pour plusieurs raisons. Mise à part ma popularité, les habitants de Delta appuient les orientations de mon parti qu'ils estiment raisonnables, souhaitables et, en fait, nécessaires. Mon parti a proposé une réforme du Parlement, dont un Sénat élu, égal et efficace. Je suis sûr que les gens ont voté pour nous parce que nous voulons changer le régime de pension absolument extravagant des députés.

Ils ont appuyé le plan de réduction du déficit proposé par mon parti, ainsi que son appel en faveur de la réforme du système judiciaire. Beaucoup de gens, à Delta, ont voté pour nous parce que nous voulons le maintien de deux compagnies aériennes viables dans notre pays. Un grand nombre d'électeurs nous ont appuyés parce que nous nous soucions de l'avenir des pêches sur la côte ouest.

Les produits des pêches du Pacifique représentent 25 p. 100 de la valeur totale des produits canadiens du poisson. Selon les critères utilisés, la pêche est la troisième ou la quatrième industrie de la Colombie-Britannique. Bien que plus de la moitié des emplois dans l'industrie de la transformation du poisson soient concentrés en Colombie-Britannique dans la région de Vancouver, l'industrie de la pêche représente une partie de l'activité économique locale relativement plus importante à Prince Rupert, Port Hardy, Ucluelet, Tofino et dans d'autres localités côtières.

Nous trouvons encourageantes les mesures prises jusqu'ici par le ministre des Pêches et des Océans. Nous approuvons sa décision de rompre les négociations sur le projet de traité concernant le saumon du Pacifique. Nous avons, par cette prise de position, fait savoir aux Américains que nous ne sommes pas prêts à continuer de payer la facture pour la conservation, la mise en valeur et la gestion des stocks canadiens au profit des pêcheurs américains.

Le ministre des Pêches et des Océans a annoncé dernièrement son intention de présenter un projet de loi visant à étendre la compétence du Canada aux extrémités des Grands Bancs. À notre avis, l'article 116 de la Convention du droit de la mer de 1982 confère au ministre, enfin nous confère, le droit de faire appliquer nos règlements en matière halieutique aux limites du plateau continental.

Nous sommes très heureux de voir que le ministre fait bien comprendre aux membres de la Communauté européenne que le Canada n'a plus l'intention de laisser les chalutiers étrangers piller nos stocks.

Le ministre a décidé d'adopter la ligne dure. Il peut compter sur notre appui, au cas où il déciderait de prendre des mesures plus sévères.

Ceux qui douteraient de notre détermination devraient se méfier.

475

Nous, de ce côté-ci de la Chambre, sommes en faveur d'un Canada où chacun, quelles que soient sa race, sa langue, ses croyances et sa culture, a droit à un traitement égal en vertu de la Constitution et du droit.

(1250)

La stratégie des pêches autochtones, imposée sur les deux côtes par le précédent gouvernement, est un exemple du contraire. La décision Sparrow de la Cour suprême n'exigeait pas la création d'un secteur distinct pour la pêche commerciale faite par les autochtones, comme certains voudraient nous le faire croire.

De plus, en juin dernier, la Cour d'appel de Colombie-Britannique a jugé qu'il n'y avait pas de droits ancestraux justifiant des pêches commerciales autochtones. On peut donc se demander pourquoi cette politique injuste et discriminatoire a été imposée au secteur de la pêche commerciale en 1992, cinq mois seulement après que le ministre des Pêches, M. Crosbie, eut déclaré qu'il ne commercialiserait jamais les pêches vivrières autochtones sur le Fraser.

Est-ce à cause des négociations constitutionnelles qui se déroulaient alors? Les pêches étaient-elles la carotte qui inciterait les chefs autochtones à abandonner leur demande de société distincte? Cette stratégie a-t-elle été mise en place simplement pour obtenir l'appui des autochtones à ce qui s'est appelé ensuite l'accord de Charlottetown? On peut se le demander.

Ce secteur distinct de la pêche commerciale autochtone a été créé en dépit du fait que les autochtones ne représentent que 3 à 4 p. 100 de la population de Colombie-Britannique. Maintenant, ils possèdent de 20 à 25 p. 100 de toutes les licences de pêche commerciales dans la province et leur part des prises commerciales est de 25 à 30 p. 100.

Poursuivre cette politique mal pensée ne fera qu'accentuer le clivage entre les Canadiens. Elle ne permettra d'atteindre aucun des objectifs annoncés.

En 1969, le gouvernement Trudeau, dans un livre blanc, se faisait l'écho d'un principe énoncé dans le célèbre arrêt Brown contre Kansas City School Board qui mettait fin à la discrimination officielle contre les noirs dans les écoles américaines.

L'arrêt disait: «Les écoles ne peuvent pas être séparées et égales. Si elles sont séparées, elles sont de ce fait même inégales.»

Je prie le premier ministre de faire preuve de la perspicacité et de la sagesse dont il a témoigné lorsqu'il était ministre des Affaires indiennes et responsable de ce livre blanc, et de mettre un terme à cette stratégie des pêches autochtones.

Sur un autre sujet, nous appuyons entièrement les efforts du gouvernement pour remettre au travail les milliers de pêcheurs de la côte est. Nous connaissons la gravité du problème et nous prions le gouvernement d'écouter les personnes touchées, celles qui pêchent et qui connaissent la situation. Elles ont des connaissances et une expérience utiles qui serviraient au ministre pour toute décision future.

Enfin, nous nous rendons parfaitement compte que le poste de ministre des Pêches, actuellement, n'est pas une sinécure. En fait, certains vont jusqu'à dire que c'est une punition. Ayant passé quelque temps avec le nouveau ministre, je suis convaincu qu'il n'a rien fait pour mériter une punition, et il semble bien avoir à coeur les intérêts des pêcheurs et des Canadiens.

Nous ne serons pas toujours d'accord avec le gouvernement ou avec le ministre des Pêches, mais je peux vous garantir que, alors, nous le ferons savoir. Chaque fois que nous serons d'accord, même si c'est sur un point controversé, nous l'appuierons sans réserves.

[Français]

M. Robichaud: Monsieur le Président, suite à des consultations qui ont été tenues avec les partis d'opposition, je pense qu'il y aurait disposition pour revenir à la rubrique déclarations de ministres afin de permettre au ministre des Transports de faire une courte déclaration importante.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime pour revenir aux déclarations de ministres?

Des voix: D'accord.

_____________________________________________


475

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

AIR CANADA

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, j'aimerais remercier mes collègues de tous les côtés de la Chambre pour leur consentement unanime à ce que je fasse la présente annonce.

J'annonce aujourd'hui que, comme ministre des Transports, j'ai l'intention de désigner Air Canada comme second transporteur vers le Japon, après la conclusion des négociations avec le gouvernement japonais. En vertu de l'entente actuelle de service aérien entre le Canada et le Japon, le Canada peut désigner plus d'un transporteur pour desservir le Japon. Nous avons fait savoir au gouvernement japonais que nous voulons reprendre les négociations aussitôt que possible.

(1255)

[Français]

Le 1er septembre 1994, un nouvel aéroport ouvrira ses portes à Osaka, le plus important marché du transport aérien au Japon après celui de Tokyo. Avec une population de plus de 20 millions d'habitants, la région d'Osaka offre des possibilités importantes aux transporteurs canadiens sur le marché asiatique.

Plusieurs créneaux intéressants d'atterrissage et de décollage ont été provisoirement réservés pour le Canada à l'aéroport Kansai. Le gouvernement fédéral doit maintenant agir rapide-

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ment pour finaliser les détails d'une entente qui permettrait l'exploitation de ces créneaux lucratifs.

Le marché japonais du transport aérien est considérable et profitable. Il est dans le meilleur intérêt du Canada que nos deux principaux transporteurs y assurent une présence. Les lignes aériennes Canadien international continueront d'avoir un accès exclusif au marché japonais le plus important qu'est Tokyo.

[Traduction]

Air Canada a déclaré hier son engagement clair et non équivoque que tout litige qui empêche les Lignes aériennes Canadien International de conclure une entente avec AMR Corporation sera interrompu immédiatement. L'annonce d'Air Canada est importante pour le rétablissement de la stabilité de l'industrie du transport aérien.

La décision d'aujourd'hui est difficile à accepter pour les Lignes aériennes Canadien International. Néanmoins, je m'attends à une nouvelle ère pour cette industrie.

Notre gouvernement veut une industrie du transport aérien viable et compétitive. Les deux plus importantes compagnies aériennes du Canada peuvent maintenant vaquer à leurs affaires. Elles sont toutes les deux en mesure de faire face à l'avenir en toute confiance.

Je ne pourrais laisser passer cette occasion sans remercier Rhys Eyton, des Lignes aériennes Canadien International, et Hollis Harris, d'Air Canada, qui ont dû faire preuve de courage pour qu'on arrive à résoudre le problème qui hantait l'industrie canadienne du transport aérien depuis déjà trop longtemps.

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de poursuivre, je voudrais aviser les députés que, puisque nous sommes revenus à la période des déclarations de ministres, j'accorderai à un porte-parole du Bloc québécois et à un porte-parole du Parti réformiste une période d'une durée égale à celle de l'intervention du ministre.

[Français]

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans): Monsieur le Président, comme plusieurs Québécois et Canadiens, hier, j'étais très heureux de l'annonce par les médias de la fin du conflit entre les compagnies aériennes Air Canada et Canadien international. Cette nouvelle laisse entrevoir la lumière au bout du tunnel pour le bien des deux transporteurs aériens et de leurs employés.

Je me réjouis encore une fois à la suite de la déclaration du ministre des Transports d'autoriser l'accès d'Air Canada à l'aéroport d'Osaka. Par contre, étant donné que cet aéroport ne constitue pas une plaque tournante pour le marché japonais, l'opposition officielle aurait souhaité que le gouvernement mette un terme à l'exclusivité dont jouissent les lignes aériennes Canadien international à l'aéroport de Tokyo.

Il est primordial de promouvoir la concurrence pour le bénéfice des consommateurs, particulièrement sur un marché en expansion comme celui de Tokyo.

Nous espérons que le gouvernement saura reconnaître les besoins d'Air Canada et que ces derniers seront pris en compte lors des discussions bilatérales que le gouvernement compte amorcer pour régler le dossier de Hong Kong et de la Chine dans un proche avenir, cela pour assurer de nombreux emplois au Québec et au Canada.

[Traduction]

M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke): Monsieur le Président, l'abandon des poursuites judiciaires est une très bonne chose pour l'industrie aérienne et les voyageurs canadiens. Sans oublier que le gouvernement ne voit certainement pas d'un mauvais oeil la fin de ce litige auquel il ne tenait pas à être mêlé davantage. Ceci dit, je pense que le gouvernement n'est pas pour rien dans la décision d'Air Canada d'abandonner toutes poursuites judiciaires.

Je suis convaincu que l'annonce faite par le ministre des Transports est le résultat d'une entente conclue uniquement entre son ministère et Air Canada. J'ai de nombreuses réserves lorsque ce genre d'accord intervient sans que tous les principaux joueurs aient eu leur mot à dire. Il semble que le marché soit conclu. Je ne suis pas sûr que ce soit dans le meilleur intérêt de l'aviation canadienne, mais c'est chose faite.

(1300)

Maintenant qu'Air Canada a mis fin au litige qui l'opposait à Canadien, les deux compagnies vont pouvoir se consacrer à bâtir leur avenir, en faisant concurrence aux transporteurs étrangers au lieu de se faire mutuellement concurrence. Air Canada détient une partie importante des marchés européen et américain, alors que Canadien a toujours occupé une place importante en Orient. Cet équilibre est maintenant rompu.

Le ministre peut-il confirmer qu'il n'ira pas plus loin et qu'il n'y aura pas d'autres arrangements pour céder Hong Kong et la République populaire de Chine à Air Canada? Un marché a déjà été conclu. Il est maintenant temps que le gouvernement arrête de manipuler les choses et qu'il laisse les forces du marché faire leur oeuvre.

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476

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Qu'une Adresse soit présentée à Son Excellence le Gouvernement général en réponse au discours qu'elle a prononcé à l'ouverture de la session.

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole et j'en profite pour vous féliciter pour votre nomination à la présidence de la Chambre.

Je tiens tout d'abord à remercier mes électeurs de la circonscription de Brandon-Souris qui m'ont fait l'insigne plaisir de me permettre de les servir à la Chambre des communes. Je félicite également tous les députés élus aux dernières élections.

Sur le plan personnel, je tiens à remercier sincèrement mon épouse, Karen, qui se trouve à Virden au Manitoba, ainsi que mes filles, Corleen, qui se trouve à Edmonton, en Alberta, Richelle, qui réside à Victoria, en Colombie-Britannique, et Lindsey qui vit à Winnipeg, au Manitoba, et qui m'ont toutes apporté un soutien indéfectible. Comme on peut le voir, ma famille est bien


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représentée par le système multipartite à la Chambre des communes.

Comme la plupart de mes collègues, je ne siégerais pas à la Chambre sans l'équipe dynamique et efficace qui m'a appuyé pendant la campagne électorale. J'offre mes salutations et mes remerciements à tous les membres de cette équipe, qui sont trop nombreux pour que je puisse les nommer individuellement.

Je viens de la circonscription de Brandon-Souris, nichée dans un coin de l'extrême sud-ouest du Manitoba. La plupart de mes dévoués supporters n'auraient jamais espéré vivre assez longtemps pour voir s'évanouir le soutien politique dont jouissaient deux de mes prédécesseurs, soit M. Walter Dinsdale, qui a représenté la circonscription pendant plus de 30 ans, et M. Lee Clark, qui a été député pendant près de neuf ans, jusqu'à la 34e législature inclusivement.

La colonisation de ma circonscription a débuté dans les années 1880, alors que le Canadien Pacifique fondait un chapelet de villes dans le sud du Manitoba. À des intervalles de 16 milles environ, les villes, à peu près toutes semblables, se sont multipliées; ce sont Brandon, Kemnay, Alexander, Oak Lake, Virden et Elkhorn à l'extrémité nord, et Crystal City, Killarney, Bossevain, Deloraine et Melita dans le sud.

Comme je le disais plus tôt, le plan des villes était en général calqué sur le système de relevé du CPR, qui couvrait un mille carré et comptait 18 pâtés d'habitations au mille. Les élévateurs à grain et les hangars abritant le bois d'oeuvre occupaient un côté de la voie ferrée et le secteur résidentiel, l'autre. Les champs de foire et les parcs à bestiaux étaient situés aux extrémités de ces hameaux et les écoles étaient établies plusieurs pâtés de maisons derrière afin de ne pas déranger les écoliers ou mettre leur sécurité en danger.

Les colons étaient en grande partie de souches française, belge, écossaise, irlandaise et anglaise, ces trois derniers groupes étant les plus nombreux. C'étaient des agriculteurs chevronnés de l'Ontario qui possédaient des capitaux et de l'équipement, une bonne éducation et beaucoup de confiance en soi. Ils ont rapidement dominé la vie politique, économique et sociale de la province et, au dire de certains, leur prédominance perdure.

Ma circonscription est d'environ 100 kilomètres carrés. Elle compte à peu près 70 000 habitants, dont 45 000 à Brandon et entre 25 000 et 30 000 à l'extérieur de la ville. Ma circonscription n'échappe pas aux problèmes de chômage, de la récession, des coûts élevés et de la faiblesse des prix; son économie et sa population rurale sont en régression. Comme la plupart des Canadiens des régions rurales, nous envisageons l'avenir avec optimisme et comptons sur le nouveau gouvernement qui s'est engagé à relancer l'économie et à revitaliser les éléments qui sont à la base de notre qualité de vie, soit les emplois, les routes, la technologie, l'éducation, l'intégrité personnelle et la sécurité sociale.

(1305)

La circonscription compte de nombreuses composantes importantes des Forces canadiennes, dont la BFC Shilo, le quartier général du Régiment royal de l'artillerie canadienne et le meilleur polygone de tir au Canada. Shilo est la septième ville du Manitoba en population et arrive au quatrième rang pour le nombre d'emplois. Pour vous donner une idée du large éventail d'activités de cette ville, disons que c'est de là que partent les forces de maintien de la paix de Chypre, les collaborateurs de l'IRCHA et l'augmentation des forces de l'ONU dans l'ancienne Yougoslavie. Shilo compte aussi un centre de formation où passent annuellement 5 000 membres des blindés d'un allié de l'OTAN, la République fédérale d'Allemagne.

À Brandon-Souris se trouvent deux collectivités autochtones, les bandes indiennes de Sioux Valley et d'Oak Lake. Toutes deux sont en bonne voie d'assumer plus de responsabilités dans le processus d'autonomie gouvernementale.

À l'extrémité sud de la circonscription, à dix milles au sud de Boissevain, se trouve le Jardin international de la paix. Ce parc spacieux qui comporte un centre récréatif est dédié aux relations pacifiques entre le Canada et les États-Unis. Il est situé en plein sur la plus longue frontière non gardée du monde.

L'Université de Brandon est un autre élément important de la circonscription et une institution de grande qualité. Je suis fier de dire que c'est mon alma mater. L'université assure un enseignement et des services sociaux depuis plus de 100 ans. Elle compte un digne représentant à la Chambre dans la personne de l'honorable Stanley Knowles, notre chancelier émérite.

C'est aussi l'université d'attache des Bobcats, qui ont remporté trois fois le championnat de basket-ball universitaire. L'université publie le Canadian Journal of Native Studies et on y offre aussi le nouveau programme de partenariat innovateur en éducation et en administration des affaires.

La revue Maclean's situe Brandon parmi les dix meilleures villes où vivre. Je crois que cette désignation s'applique également aux autres localités que j'ai mentionnées.

Voici les questions qui préoccupent le plus les électeurs de Brandon-Souris.

L'agricuture est la principale industrie du Manitoba et elle s'est grandement diversifiée sur le plan de la production à valeur ajoutée. L'idée de donner plus ou moins de pouvoir à la commission du blé et de donner plus de latitude dans l'exploitation de nouveaux créneaux du marché suscite des opinions bien arrêtées.

Chaque ville ou village de Brandon-Souris a toute une liste de projets d'infrastructure indispensables à la relance de notre économie rurale. La ville de Brandon propose des projets de construction d'un pont, de constitution d'un réservoir et de lutte contre les inondations, dont elle a grandement besoin. Les régions rurales de la circonscription ont également des projets d'infrastructure précis à présenter.

L'infrastructure des communications et des transports fera augmenter les possibilités d'emplois et permettra aux Canadiens des régions rurales d'être concurrentiels à l'échelle internationale tout en travaillant chez eux. Brandon-Souris est la seule circonscription du Manitoba qui ait du pétrole. Cette ressource naturelle est un élément important de notre économie locale, particulièrement dans ma ville, Virden.

Les électeurs de Brandon-Souris demandent aussi qu'on établisse une base solide pour l'industrie du tourisme, en misant sur les attraits naturels de la région et sur des manifestations sportives de classe internationale. D'ailleurs, j'ai l'honneur de souligner qu'au cours de la présente législature, Brandon-Sou-


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ris sera l'hôte des compétitions nationales et mondiales de curling ainsi que du championnat mondial de baseball junior.

En ce qui concerne les transports, l'absence de service aérien et de service Via Rail préoccupe tous les électeurs des régions rurales et urbaines de Brandon-Souris. Nous devons nous efforcer de rétablir les liens qui ont initialement servi à unir le Canada. Un autre élément du problème réside dans le coût élevé du transport du grain de l'Ouest.

La situation qui règne dans les services postaux, et ses conséquences sur les Canadiens des régions rurales, surtout les plus âgés, est une question qu'il faudrait analyser avant d'effectuer d'autres réductions.

J'arrive à la Chambre après avoir passé 33 ans dans l'enseignement, en général au niveau secondaire, et j'éprouve beaucoup d'empathie et de respect pour les étudiants canadiens. Je leur promets de faire des efforts en vue d'établir un programme de bourses et de prêts aux étudiants; cette question ne figure pas dans la politique du gouvernement à l'heure actuelle.

(1310)

Père de trois filles formidables dont je suis fier, je suis et je resterai à l'écoute des questions féminines concernant l'emploi, la santé et l'équité.

En tant qu'ancien éducateur, je suis toujours disposé à visiter des écoles. Le 6 janvier dernier, je me suis rendu au collège de Virden pour y rencontrer une classe de 9e année. Par la suite, j'ai reçu une lettre d'une élève de cette classe, Leslie Bunn, qui décrit un peu ce que je pense de mon rôle de député et du travail que je fais pour améliorer le sort des étudiants:

Monsieur McKinnon,
Quand vous être venu dans ma classe, jeudi dernier, vous avez répondu aux nombreuses questions que je vous ai posées sur votre rôle de député. Vous m'avez appris des choses importantes sur vos fonctions.
Je me suis rendu compte qu'il n'est pas si facile d'être député. Il faut quitter souvent sa famille, voyager beaucoup et participer à des réunions tôt le matin; c'est un programme difficile à suivre. J'ai donc pensé que si jamais j'allais en politique, je n'aurais pas la tâche facile.
Vous nous avez dit combien d'argent vous faites et j'ai trouvé que c'était beaucoup. Vous avez ensuite expliqué les sacrifices que vous devez faire et, même si je trouvais toujours que c'était beaucoup d'argent, cela me paraissait moins pire. J'ai aussi pensé que si j'allais en politique, je serais bien payée, mais que ce ne serait pas déraisonnable.
Pour quelqu'un qui vit près d'Ottawa, ce n'est pas si mal, mais cela doit être épouvantable de vivre, par exemple, en Colombie-Britannique, parce qu'on doit constamment faire l'aller-retour.
Même s'il faut faire bien des sacrifices, je pense que j'aimerais devenir députée.
Merci.
Leslie Bunn, Virden, Manitoba.
Monsieur le Président, je suis fier de représenter les électeurs de Brandon-Souris et de travailler à assurer la dignité des Canadiens de régions rurales. Mes électeurs m'ont demandé, en tant que premier député libéral depuis 42 ans, de les représenter à la Chambre des communes, de faire partie de l'équipe des libéraux, d'aider à solutionner les problèmes causés par huit ans d'une politique économique désastreuse.

Mes électeurs veulent être inclus dans la nouvelle vision du Canada, celle qui englobe la vaste mosaïque qu'est le Canada aujourd'hui, la vision d'un développement régional équitable, d'une intégrité retrouvée au sein du gouvernement et d'un renouveau sur le plan de l'économie et de la sécurité sociale, enfin, une vision d'un Canada solide, bref, une vision libérale du Canada.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil): Monsieur le Président, le député de la circonscription de Brandon-Souris, au Manitoba, a parlé particulièrement des infrastructures. J'aimerais lui poser une question, à savoir: Est-ce qu'il ne trouve pas ça un peu trop lourd le fait que les gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux soient ensemble pour décider quelles sont les priorités d'un projet d'infrastructures, c'est-à-dire des rues, des égouts, des petits ponts? Ne trouve-t-il pas ça un peu trop lourd comme gestion de voir des fonctionnaires à Ottawa, des fonctionnaires aux niveaux provincial et municipal s'asseoir ensemble pour décider d'un petit projet? Il me semble que ça ne va pas dans l'esprit selon lequel il faut gérer efficacement les choses.

On sait que le pays a une dette épouvantable, qui dépasse le cap des 500 milliards de dollars, et on voit le gouvernement fédéral entrer dans un projet qui sera d'autant plus lourd à gérer, ce qui va faire en sorte qu'un grand pourcentage des dépenses seront faites pour la gestion, et que souvent il y aura de l'inefficacité.

Je me demande, comme on l'a demandé au Québec, en tout cas, comment est-ce qu'il voit le fait que le gouvernement fédéral devrait donner l'argent aux provinces, et comme ce sont les provinces qui sont un peu les pairs des municipalités, elles devraient décider elles-mêmes avec ces municipalités quelles sont les priorités, décider des projets qu'elles devraient faire ensemble, sans que le gouvernement fédéral ne se mette le nez là-dedans et amplifie la gestion et les dépenses de gestion de ces projets d'infrastructures.

[Traduction]

M. McKinnon: Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question sur l'infrastructure. Dans mon préambule, je n'ai pas parlé de mon expérience personnelle. J'ai été maire de ma localité, une petite ville de 3 000 habitants. J'ai donc une certaine expérience en la matière.

(1315)

Je voudrais signaler à mon collègue que mon expérience m'a appris premièrement que les municipalités auraient beaucoup de mal toutes seules à réaliser certains projets. L'aide financière que leur accorde les niveaux supérieurs de gouvernement rend bon nombre de leurs projets plus viables.

Deuxièmement, il y aura toujours des frais de gestion, peu importe qui est chargé de l'administration du projet. Contrairement à ce que certains peuvent penser, je ne crois pas qu'il serait préférable de remettre l'argent aux niveaux inférieurs de gouvernement tout en leur donnant carte blanche. Les intérêts de notre


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pays seraient mieux servis, à mon avis, si l'administration et l'approbation des projets étaient uniformisées.

M. John Williams (St-Albert): Monsieur le Président, je veux d'abord féliciter le député de Brandon-Souris pour sa première allocution à la Chambre. C'était un excellent discours.

Dans le cours de ses observations, il nous a exposé sa vision libérale du Canada, qui repose entre autres choses sur l'égalité et le développement régional.

J'espère que c'est involontaire, mais il a oublié notamment de dire que le Canada est un pays de petites et de moyennes entreprises et que celles-ci sont le moteur de la croissance. C'est l'esprit d'entreprise et le capitalisme qui ont fait du Canada ce qu'il est aujourd'hui. Il faut reconnaître que les entreprises, petites et moyennes, sont le moteur de la croissance. Ce sont elles, beaucoup plus que des programmes comme celui des infrastructures, qui vont créer des emplois.

Le député de Brandon-Souris reconnaît-il que ce sont le capitalisme et l'esprit d'entreprise qui, plus que le programme libéral de modernisation des infrastructures, sont créateurs d'emplois au Canada?

M. McKinnon: Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour sa question. Oui, je le reconnais et je crois aussi que notre pays ne peut que bénéficier du fait que le gouvernement et la petite entreprise collaborent à la réalisation de certains projets. Je suis entièrement d'accord pour dire que la petite entreprise est le moteur de la création d'emplois.

M. Derek Lee (Scarborough-Rouge River): Comme d'autres députés, je veux féliciter le Président qui est actuellement au fauteuil pour sa nomination. Je veux également féliciter notre Président pour son élection. Je sais qu'il nous servira très bien.

Il convient également que je remercie les forces politiques qui ont permis ma réélection comme député de Scarborough-Rouge River. Je veux remercier tous ceux qui ont participé au processus, notamment ceux qui ont généreusement consacré temps et énergie à ma campagne. Je tiens également à mentionner tous les autres candidats et tous ceux qui ont travaillé pour eux en soulignant que je tire fierté de notre système politique qui fonctionne très bien.

Dans un discours du Trône, un gouvernement tente de présenter son programme législatif et ses grands objectifs en espérant qu'ils reflètent les attentes de l'électorat.

En ce début de législature, il n'y a aucune raison que le programme législatif du gouvernement et son discours du Trône ne reflètent pas les attentes de l'électorat. Le chef du parti, le premier ministre, et tous les députés du côté ministériel arpentaient encore les rues des villes canadiennes et rencontraient les Canadiens il y a tout juste quelques semaines. Nous n'aurions aucune excuse si nous ne savions pas ce qu'ils veulent. J'imagine qu'il serait juste de dire que le gouvernement dont je fais partie n'aurait pas d'excuse s'il n'avait pas un plan de travail raisonnable.

(1320)

Je m'efforcerai aujourd'hui de mettre en relation le contenu du discours du Trône et les questions qui m'ont été soumises pendant la campagne électorale par les électeurs de ma circonscription. Je suis heureux de pouvoir dire que presque toutes ces questions sont abordées dans le discours du Trône. Je prendrai quelques minutes pour développer ce point.

La première question, et la plus pressante, que m'ont soumise les électeurs de Scarborough-Rouge River, c'est celle de l'emploi et de l'économie. Cette question se retrouve clairement au coeur du discours du Trône et, comme nous le verrons au cours des prochaines semaines, c'est autour de l'emploi et de l'économie que s'articulera l'essentiel du programme législatif et des interventions du gouvernement.

Notre économie a été durement frappée par une récession vers 1990. De plus, l'adaptation au régime de libre-échange a aussi eu ses répercussions. Nous savions que les conséquences seraient lourdes. Elles ont peut-être été plus lourdes que prévu, mais nous avons pu faire les rajustements nécessaires. Nous aurons peut-être encore des durs coups à absorber, mais je crois que le pire est passé.

Deuxièmement, pendant un certain temps, sous le gouvernement précédent, la politique monétaire de la Banque du Canada était axée sur l'inflation zéro. Cet objectif n'a cependant pas été atteint; en fait, on n'a jamais même pu espérer l'atteindre.

En visant l'inflation zéro, la Banque du Canada a causé un ralentissement encore plus prononcé de notre économie. Cette politique monétaire a coûté cher aux Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

En 1994, on a observé un changement. La situation s'est beaucoup améliorée en ce qui concerne les principes économiques de base. Le taux d'inflation est bas, de même que les taux d'intérêt. Pour ce qui est de notre adaptation au libre-échange, le pire est passé, du moins je l'espère. Les conséquences néfastes de cette adaptation sont compensées par tous les nouveaux débouchés que nous offrent l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis et l'Accord de libre-échange nord-américain.

Mes électeurs attendent impatiemment les nouveaux emplois que la relance économique nous apportera. Aucun gouvernement ne peut vraiment contrôler l'économie parce que beaucoup de forces du secteur privé agissent sur elle.

Il est clair que mes électeurs jugeront le gouvernement d'après la façon dont il réussira à favoriser la croissance économique au Canada dans les mois qui viennent. Ils attendent et surveillent attentivement. Je crois que mon gouvernement saura faire ce qu'il faut, en laissant les forces économiques en jeu faire le reste.


480

Mon gouvernement est déjà allé de l'avant avec un programme d'infrastructure, le Programme d'aide à la rénovation résidentielle. Nous n'avons pas encore mis sur pied le Service jeunesse, mais cela devrait se faire sous peu.

À moyen terme, nous verrons à stimuler le secteur de la petite et de la moyenne entreprise. Nous voulons faciliter l'accès au capital. J'étais heureux de voir la réaction positive des banques et des médias ces derniers jours.

En mai dernier, lorsque nous formions l'opposition officielle, notre caucus a rencontré les banques. Je crois qu'elles savent ce qui les attend. Elles devront servir les petites et moyennes entreprises, comme elles essaient de le faire depuis un siècle, mais elles devront le faire mieux qu'avant. Si elles n'y arrivent pas sans donner de raisons précises-je ne suis qu'un simple député d'arrière-ban ici-les Canadiens et le gouvernement devront prendre les mesures qui s'imposent et voir à ce que les petites et moyennes entreprises aient les moyens financiers dont elles ont besoin pour prospérer.

Nous voulons que les petites entreprises aient plus facilement accès la technologie et qu'elles participent davantage à la recherche et au développement. Nous voulons aussi réduire le fardeau de la réglementation. Je sais que nous pouvons réaliser des progrès importants dans la poursuite de ces objectifs et connaître du succès.

Le deuxième grand point concerne le déficit et le régime fiscal. Je n'ai pas à expliquer l'importance de cette question. Tous les députés savent exactement ce dont il s'agit: une dette d'environ 500 milliards de dollars et un déficit qui dépasse largement les 40 millions de dollars.

(1325)

Notre gouvernement et le ministre des Finances se sont engagés à redresser la situation. D'autres ministres ont essayé de le faire dans le passé, mais je crois que les Canadiens et nous avons maintenant la conviction que nous ne pouvons plus nous permettre d'échouer. Nous devons absolument prendre la situation en main.

Nous devons réduire nos dépenses d'une manière stratégique. Nous devons accroître nos recettes sans créer de nouveaux impôts. Tout ce que nous pouvons faire pour les accroître, c'est relancer l'économie. Ces deux aspects sont étroitement liés.

Nous pouvons aussi accroître un peu nos recettes en réduisant ce que l'on appelle les dépenses fiscales, c'est-à-dire les déductions prévues aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu. Nous nous sommes engagés à atteindre ces objectifs.

La troisième question importante concerne la criminalité et la sécurité publique. Je tiens à souligner, et je suis certain que d'autres députés l'ont remarqué, qu'il est fait mention de cette importante question principalement urbaine à relativement peu d'endroits dans le discours du Trône, mais qu'il en est toutefois clairement fait mention. Mon gouvernement s'est engagé à prendre des mesures pour favoriser la sécurité publique et la prévention du crime.

Cette simple phrase ne traduit pas bien toute l'ampleur du problème. Nous devons faire en sorte que les gens aient moins peur. Nous devons aussi reconnaître que le crime est comme une pénalité qui est imposée à notre société parce qu'elle ne gère pas effectivement ses ressources humaines; nous avons des idées pour résoudre ces problèmes.

La dernière question concernait les niveaux d'immigration. Le Parlement devra en discuter. Je ne sais pas quand aura lieu le débat à ce sujet, mais je puis vous assurer, monsieur le Président, que certains de mes collègues et moi voudrons y participer.

Je suis fier de représenter ici mes électeurs. Je suis impatient de travailler en collaboration avec mes collègues des deux côtés de la Chambre afin d'accomplir ces objectifs et tous ceux que les Canadiens nous ont demandé de réaliser durant cette 35e législature.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, je félicite le député de l'intéressante intervention qu'il a faite aujourd'hui. C'est avec un peu d'inquiétude cependant que je note le manque de précisions de ses propos touchant la criminalité.

Lors de notre campagne électorale, nous avions un programme de mesures très précises à proposer pour lutter contre la criminalité, portant notamment sur le système de justice pénale et la Commission des libérations conditionnelles. Nous avons encore observé ces deux derniers jours certains problèmes très graves à cet égard.

Je demanderais au député de bien vouloir avoir l'obligeance de me dire sur quels points en particulier son gouvernement a l'intention de proposer des changements au cours de la 35e législature.

M. Lee: Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question. Il est parfaitement raisonnable de sa part de chercher à obtenir une liste bien établie de mesures précises que l'on pourrait mettre en oeuvre pour améliorer la situation en matière de sécurité publique et de criminalité.

Elle a déjà mentionné quelques points chauds, si je puis m'exprimer ainsi. Je m'empresse de reconnaître que le discours du Trône abordait la question en termes très généraux, et j'ai lu une phrase qui recouvre peut-être deux pages de mesures particulières. Il n'est pas possible de faire entrer dans un discours du Trône tous les détails qu'on pourrait vouloir mentionner.

Je constate cependant qu'il reste encore à s'occuper de tout le domaine de la détermination de la peine au moyen d'une loi fédérale. Il n'y a jamais eu de codification des peines au Canada. Cela reste encore à faire. Nous avons été saisis d'un projet de loi en ce sens lors de la dernière législature. Il y a cependant eu consensus pour en abandonner l'étude, car les députés des deux côtés de la Chambre ne le trouvaient ni bon ni efficace.

(1330)

Je m'attends à ce nous soyons saisis assez tôt d'un projet de loi touchant la détermination de la peine. Je m'attends également à ce qu'on nous saisisse d'un projet de loi tendant à modifier certaines dispositions de la Loi sur les jeunes contrevenants. Certains de ces points ont fait l'objet de débats publics, je pense même qu'ils ont tous été abordés en public. Il reste cependant à voir le texte que proposera le ministre de la Justice. J'espère que la députée dressera sa propre liste pour la soumettre immédiatement au ministre de la Justice.


481

Des changements s'imposent à la Loi sur la libération conditionnelle ainsi qu'à la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Il y a des modifications très précises à apporter dans ce domaine. La plupart ont trait à l'imputabilité.

Il y a eu une rencontre très intéressante lors de la dernière législature entre le président sortant de la Commission nationale des libérations conditionnelles et les membres du Comité de la justice. Cette rencontre a été très utile. Il fallait que le président obtienne la permission du ministre pour se présenter à cette rencontre et nous dire personnellement ce qu'il fallait faire à son avis pour que les commissaires s'acquittent mieux de leur tâche à la Commission des libérations conditionnelles. Il nous a parlé très franchement durant cette réunion à huis clos, mais tout ce qu'il a dit a été noté.

Nous avons discuté de la Loi sur les jeunes contrevenants ainsi que de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition. Il faut réformer certains éléments du Code criminel. Nous commençons tout juste à nous occuper de prévention stratégique à long terme de la criminalité. Il faut malheureusement un peu d'argent pour intervenir dans ce domaine, mais il s'agit d'un investissement à long terme, fait sur une base à long terme, pour faire de tout le monde des membres à part entière de la société et réduire les tendances à enfreindre la loi.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie): Monsieur le Président, le discours du Trône soulève la question de l'emploi de façon très vague. Le gouvernement nous précise également ne pas vouloir débattre de la question constitutionnelle, et encore moins proposer des avenues de solution. Notre parti, au contraire, soulève cette question de façon constante à la Chambre des communes. Nous le ferons parce que cette question est au coeur de tous les débats portant sur toutes les questions.

On ne peut parler sérieusement du problème de l'emploi sans se demander qui a le pouvoir d'agir, qui contrôle les leviers politiques et économiques permettant de s'attaquer au chômage. Le chômage est le principal problème, non seulement de mon comté, mais aussi de toute la région de Montréal.

Les libéraux nous diront qu'il faut tasser la question constitutionnelle si l'on veut développer Montréal, si l'on veut relancer Montréal. Pourtant, les dirigeants de la ville de Montréal faisaient le constat suivant, lors des audiences de la Commission Bélanger-Campeau, et je cite: «Non seulement le statu quo constitutionnel est-il périmé, il s'est disqualifié de lui-même, non seulement pour le Québec, mais pour le reste du Canada.» Les autorités de la ville de Montréal faisaient ce constat parce que, disaient-ils, et je cite encore: «Montréal parvient difficilement à trouver, dans le cadre politique actuel, les leviers qui lui permettraient de contribuer, comme elle en est capable, au développement du Québec et du Canada».

La ville de Montréal proposait donc l'adoption d'une politique nationale pour le Québec. Cette politique nationale québécoise exigeait le rapatriement de presque tous les champs de compétence du Québec. Deux solutions étaient alors possibles: le fédéralisme pronfondément renouvelé ou la souveraineté du Québec. La preuve est maintenant faite que le fédéralisme canadien ne peut être renouvelé. Quant au statu quo, il est dommageable pour Montréal, nous en convenons avec les autorités de la ville. Et l'incertitude, le refus de décider est la pire des choses pour les investisseurs et pour l'économie en général. «Les choix du Québec seront ceux de Montréal», précisait le mémoire de la ville. Or, le Québec n'a plus qu'un choix, la souveraineté et l'avenir de Montréal en dépend.

(1335)

Il faut parler d'avenir et transformer la situation actuelle. Il faut rappeler que Montréal était la métropole du Canada, le centre industriel du Canada, le centre financier du Canada, le centre bancaire du Canada.

Aujourd'hui, Montréal est la capitale de la pauvreté au Canada. Trente pour cent des familles montréalaises vivent sous le seuil de la pauvreté. Cela est inacceptable. Est-ce dire que d'ici à ce que les Québécois et les Québécoises décident démocratiquement de se donner un pays, il n'y a rien à faire? Ce n'est pas ce que nous croyons, nous, du Bloc québécois, mais il est intéressant de constater que cela semble être l'orientation du gouvernement.

Pourtant, les libéraux, du temps où ils étaient dans l'opposition, étaient fort volubiles et se portaient à la défense des citoyens de Montréal. J'en veux pour preuve leur dénonciation de la Loi C-113 sur l'assurance-chômage.

Les députés libéraux de Montréal nous disaient alors, avec raison d'ailleurs, que les effets combinés de la réforme de l'assurance-chômage de 1990 et de celle de 1993 coûteraient, en cinq ans, près de 490 millions de dollars aux prestataires d'assurance-chômage de la région de Montréal. Et, ajoutaient-ils, cela ne tenait pas compte de l'effet des hausses de cotisations passées et à venir.

Une fois au pouvoir, que font-ils? Ils s'empressent de hausser les cotisations sans annuler les mesures antisociales du précédent gouvernement. Blanc bonnet et bonnet blanc. N'oublions pas non plus que ces 490 millions de dollars non versés aux prestataires constituent autant d'argent qui ne peut être réinjecté dans l'économie montréalaise.

Le ministre du Développement des ressources humaines nous a dit que d'ici deux ans, tous les programmes sociaux seront revus. Les hommes et les femmes qui vivent dans la pauvreté à Montréal ne peuvent attendre deux ans. C'est actuellement qu'ils ont besoin d'aide et c'est aujourd'hui qu'ils exigent des solutions. Des solutions, il y en a et les libéraux les connaissent.

Pensons au PATA, le Programme d'aide aux travailleurs âgés, programme qui s'adresse à ces travailleurs âgés victimes de licenciements collectifs et de fermetures d'usines. Ceux et celles de Montréal, pour y avoir accès, doivent travailler dans des entreprises où il y a plus de 100 employés. Pourquoi ce critère n'est-il pas de 20 employés comme dans la très grande majorité des régions? C'est pourtant ce qu'exigaient les libéraux, version opposition.


482

Que font donc les libéraux, version gouvernement, sinon poursuivre la politique des conservateurs? Ce n'est pas dans le discours du Trône que nous trouvons les solutions. C'est bien plutôt dans certaines interventions des libéraux du temps de l'opposition.

Pensons au logement social. Combien de fois n'ai-je entendu les députés libéraux de la région de Montréal dénoncer la décision des conservateurs de couper court à toutes les subventions dans le domaine du logement social? Or, quelles mesures trouvons-nous dans le discours du Trône à cet effet? Pourtant, l'absence de mesures à cet égard fait en sorte que tous les projets de logement social de la ville de Montréal sont mis en péril.

Je pense également aux en-lieu de taxe que le gouvernement fédéral a gelés l'an dernier. La Communauté urbaine de Montréal a dénoncé cette situation, et les libéraux, version opposition, l'ont dénoncée aussi, car cela représente un manque à gagner de près de 10 millions de dollars pour les contribuables de la Communauté urbaine de Montréal. Que proposent les libéraux, version pouvoir? Rien. Pourtant, n'est-ce pas là un bien mauvais exemple à donner à l'ensemble des contribuables? Comment un mauvais payeur peut-il exiger des contribuables que ces derniers agissent en bons citoyens? N'est-ce pas là également une décision facile à prendre? N'est-ce pas une mesure qui n'exige aucune réforme constitutionnelle?

(1340)

Ce gouvernement est-il conscient que, pour citer le ministre des Finances et député de LaSalle-Émard, circonscription dans la ville de Montréal: «Montréal, en tant que coeur économique et moteur de développement important, doit être relancé. Sinon, ajoute-t-il, son déclin économique sera également celui du Québec.»

Est-ce en restant silencieux sur le projet de TGV qu'on va relancer Montréal? Pourtant, ce projet permettait au Québec et au Canada de prendre une longueur d'avance sur le plan de cette nouvelle technologie. N'oublions pas que le marché nord-américain du train à grande vitesse est évalué à plus de 200 milliards de dollars pour les 20 prochaines années. Cela signifie des retombées prévisibles de 120 000 années-personnes dans des secteurs industriels d'importance stratégique. N'est-ce pas là une mesure intelligente pour lutter contre le chômage, car ce sont là des emplois durables et de haute technologie? Cela signifie également des recettes fiscales de l'ordre de 1,8 milliard pour la période de construction seulement. N'est-ce pas là une façon de réduire le déficit en augmentant les revenus fiscaux, plutôt que de ne s'attaquer qu'aux plus démunis de la société? À cela, ajoutons des retombées économiques indirectes pour le corridor Québec-Windsor, dans le domaine des services, du commerce, et bien sûr, du tourisme. Ce type de transport, faut-il le préciser, offre des coûts plus avantageux que ceux offerts par le transport aérien conventionnel tout en respectant l'environnement.

Faudrait-il faire d'autres consultations que les nombreuses études déjà faites, lesquelles concluent toutes à la rentabilité de ce projet. Car, semble-il, ce gouvernement est en voie de tomber dans la «consultationnite» aiguë, maladie dont le gouvernement conservateur était déjà atteint et porteur. Le syndrome Spicer, après avoir atteint les conservateurs est en train de s'attaquer aux libéraux. Pourtant, le projet de TGV répond à tous les critères nécessaires à une relance économique véritable, axée sur l'avenir.

Il en est de même pour la question de la reconversion militaire. Nous convenons tous que la situation internationale n'est plus la même. La Guerre froide est terminée. Le rôle de l'armée canadienne doit être revu. Le Bloc québécois a proposé de réduire de 25 p. 100 le budget du ministère de la Défense nationale. Cependant, cette mesure doit être accompagnée d'une politique de reconversion de l'industrie militaire, comme l'a fait le président Clinton, aux États-Unis, et comme le font la France et la Grande-Bretagne, par exemple. Alors la question de la reconversion de l'industrie militaire concerne directement Montréal, car Montréal est un centre majeur sur le plan de la production de matériel de défense. Montréal a, de plus, développé une dépendance de plus en plus grande envers les contrats du ministère de la Défense nationale.

Précisons, cependant, que le Québec n'a jamais reçu une part équitable sur le plan des dépenses en achat d'équipements, en paiement de salaires et en entretien de bases militaires. Le gouvernement a certes pris une bonne décision en annulant le contrat des hélicoptères. On doit cesser de dépenser inutilement de l'argent, que ce soit au Québec ou ailleurs. Cependant, le Bloc québécois a exigé et exige toujours que le gouvernement compense l'annulation de ce contrat par l'injection des mêmes sommes d'argent dans le domaine de la reconversion militaire et dans des projets de haute technologie, deux domaines créateurs d'emplois durables. Montréal ne peut se permettre de voir disparaître des emplois d'avenir parce que l'industrie militaire périclite. Le gouvernement doit proposer à cette Chambre un plan de reconversion industrielle, comme il l'a promis durant la dernière campagne électorale.

(1345)

Je veux soulever un autre exemple des effets pernicieux du fédéralisme canadien sur le développement de Montréal: celui de la Commission de coopération environnementale de l'ALENA. Montréal, faut-il le préciser, a acquis par ses institutions universitaires un savoir-faire important dans le domaine de l'environnement. Rapellons l'entente sur la couche d'ozone, ou encore le rôle du maire de Montréal lors du Sommet de Rio. Or la ministre de l'Environnement hésite, tergiverse et crée un comité, encore un, plutôt que de prendre la bonne décision et d'implanter ce centre à Montréal. Verrons-nous la répétition de la décision idiote, qui fut celle d'implanter le siège social du Réseau canadien des centres de toxicologie à Guelph, en Ontario, alors que la masse critique du savoir en ce domaine se situe à Montréal. C'est le même genre de décision que celle qui fut prise dans le cas du centre bancaire. Les gens d'affaires de Montréal avaient prévu un Centre bancaire international à Montréal. Or le fédéral a décidé bien sûr qu'il y en aurait un, mais un également à Toronto, et un autre à Vancouver. En bout de ligne, un centre avec trois épicentres. C'est un peu la traduction géométrique du fédéralisme canadien: un centre, avec trois épicentres, il faut le faire. Les


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centres bancaires ne fonctionnent pas, ni à Vancouver, ni à Toronto, ni à Montréal.

En somme, rien dans ce discours ne répond aux besoins de Montréal si ce n'est le projet d'infrastructures, dans la mesure toutefois, et cela est important, où le gouvernement du Québec parvient à une entente avec Ottawa sur la question majeure de la maîtrise d'oeuvre. Or, à ce jour, aucune entente n'est survenue entre Québec et Ottawa, alors que les ententes se multiplient entre les capitales provinciales à l'extérieur du Québec et Ottawa. Mais ce seul projet ne saurait imprégner une direction permettant à Montréal de sortir du cycle infernal du chômage. Il faut plus, il faut faire mieux. Cela est impossible si nous n'avons pas les moyens de transformer la société québécoise, d'une part, et la société canadienne, d'autre part.

Je conclus sur ce constat commun de 1992-et c'est très rare les constats communs en politique au Canada-mais les libéraux, les réformistes, les bloquistes et deux partis alors reconnus qu'étaient le NPD et le Parti conservateur, s'entendaient tous pour dire à la veille de l'entente de Charlottetown: Les structures politiques canadiennes ne permettent pas au Canada de faire face aux défis économiques de notre monde contemporain. Et j'ajouterais, elles ne permettent pas au Québec non plus d'y faire face. Tout le monde s'entendait là-dessus. Les réponses diffèrent cependant. Charlottetown nous a démontré que les réponses se situent aux antipodes. Le Canada a refusé l'entente de Charlottetown, parce que trop pour le Québec; le Québec a refusé cette même entente, parce que pas assez pour le Québec. Mais le constat demeure. Nous avons toujours les mêmes structures. C'est le statu quo constitutionnel. Et pas plus qu'en 1992 ne sommes-nous prêts à faire face à ces défis économiques de notre monde contemporain. Et c'est cela que nous allons expliquer tout au long de cette session.

[Traduction]

M. Barry Campbell (St. Paul's): Monsieur le Président, le député de Laurier-Sainte-Marie a parlé des centres bancaires internationaux et soutenu que la désignation d'autres villes du pays comme centres de ce genre a contribué aux problèmes de Montréal et du secteur des services financiers.

Je tiens à faire remarquer que la ville de Toronto n'est pas reconnue comme centre bancaire international. Par conséquent, la cause des problèmes que connaît Montréal n'est pas la dé-signation de Toronto comme centre bancaire international.

En second lieu, je ne puis m'empêcher de déceler un illogisme dans sa tirade historique. D'abord, le député dit se préoccuper beaucoup du déclin économique de Montréal, ce dont tous les députés citadins s'inquiètent. Les villes sont au coeur même de l'économie du pays. Nous déplorons tous le déclin économique de nos villes.

Cependant, il est illogique de croire, comme le député, que les disputes constitutionnelles, la reprise des discussions et même l'élection des bloquistes ne sont pas de nature à faire fuir les investisseurs.

(1350)

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, de deux choses l'une. Les libéraux, avant le projet d'entente de 1992, avaient une position qui ne se tenait pas parce que votre chef, votre parti disait: «Les structures politiques du Canada ne permettent pas de faire face au défi économique actuel.»

Or, si, aujourd'hui, on nous dit qu'il n'y a pas à changer les structures pour faire face à ce défi, de deux choses l'une: vous disiez vrai en 1992 et vous ne dites plus vrai aujourd'hui, ou vous mentiez en 1992 et vous dites la vérité aujourd'hui. C'est l'un ou l'autre, mais ça ne peut pas être les deux. C'est évident!

Or, il nous semble qu'il y a deux grands courants dans le monde: un qui voit des peuples et des nations se donner des pays, et ces mêmes pays contribuer entre eux. C'est ça qui empêche aujourd'hui le Canada et le Québec de fonctionner. Les Canadiens veulent un État central fort, avec des normes nationales, une plus grande présence des régions dans l'État central. C'est la demande du Sénat triple E. Le Canada en a besoin, sauf que le Québec ne se sent pas à l'aise dans ça, sauf que le Québec ne fonctionnera jamais dans ça, sauf que le Québec n'acceptera jamais ça, et que vous ne l'aurez jamais, tant et aussi longtemps qu'on va être là.

On vous empêche de fonctionner, vous nous empêchez de fonctionner, alors qu'on devrait penser à des ententes qui vont dans le sens de Maastricht; faut-il le rappeler?

Moi, quand on me cite la Communauté économique européenne, je suis entièrement d'accord, mais j'aimerais entendre le premier ministre se rendre à Westminster et déclarer aux Britanniques que l'avenir, c'est un fédéralisme à la canadienne et que la Grande-Bretagne ne sera plus souveraine d'ici environ dix ans. J'aimerais l'entendre tenir le même discours à l'Assemblée nationale française ou encore au Bundestag et dire que l'Allemagne, dans le fond, d'ici dix ans, ne sera plus un pays souverain. «Just you try!», puis-je dire!

Moi, je vous dis que l'avenir, c'est justement des ententes comme Maastricht.

M. Stephen Harper (Calgary-Ouest): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de Laurier-Sainte-Marie de son discours. Je l'ai rencontré il y a plus de deux ans, après sa première élection, et, jusqu'à maintenant, nous avons vécu une bonne expérience, je pense, à travailler ensemble au Conseil de la régie interne.

[Traduction]

Le député occupe un poste de premier plan dans son parti et il a fait quelques allusions dans son discours qui ressemblaient aux propos de son chef.


484

Je voudrais lui demander de clarifier quelques questions au nom de son parti. Je voudrais bien m'adresser à son chef, mais le Règlement ne me le permet pas.

En premier lieu, à l'instar de son chef, le député a déclaré que le fédéralisme ne fonctionnait pas. Or, le Parlement est une institution fédérale. Étant donné que le député estime que le fédéralisme ne fonctionne pas, peut-il nous dire si son parti et lui considèrent comme une obligation inhérente au poste de député de faire de leur mieux pour que le Parlement et le régime fédéral fonctionnent?

En deuxième lieu, je voudrais qu'il nous dise quelle est sa position sur l'avenir du débat constitutionnel qui pourrait se tenir au Québec. Il a dit que le débat porterait sur le choix entre l'indépendance et le statu quo que représente la situation constitutionnelle actuelle.

Si un référendum comme celui-là était rejeté par la population québécoise, pousserait-il son argument jusqu'au bout en interprétant ce rejet comme l'acceptation du rôle du Québec au sein du Canada et des accords constitutionnels de 1982?

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, moi aussi, j'ai appris à travailler en compagnie de l'honorable député et, effectivement, je pense qu'on peut collaborer à beaucoup de choses.

Nous voulons faire en sorte que ce Parlement fonctionne le mieux possible. On a fait des suggestions à cet effet, et je pense que l'on vient de créer avec ces élections, pour la première fois dans l'histoire de ce pays, un véritable dialogue, parce qu'un dialogue ne peut pas être basé sur autre chose que la vérité.

(1355)

Je ne dis pas que tous les Québécois et Québécoises sont souverainistes, mais je dis que cela existe. Pour la première fois, on peut en débattre ici. Je pense que c'est nouveau pour les Canadiens et Canadiennes d'entendre ici ce discours. Cela permet de situer le débat à son véritable niveau, de le faire correctement. En ce sens, une telle contribution, avec un meilleur fonctionnement de ce Parlement, amène en fin de compte une meilleure attitude face aux problèmes politiques que l'on rencontre. Cela ne signifie pas pour autant que cela permettra au fédéralisme de mieux fonctionner. Comme je l'ai dit, je crois, le fédéralisme n'est pas mauvais en soi, mais l'arrangement fédéral que nous avons dans le cadre politique actuel est inconciliable avec les besoins du peuple canadien et du peuple québécois.

Nous devons évoluer vers un cadre politique et économique qui lie la souveraineté des pays et des marchés économiques communs, comme on le voit en Europe et comme on le verra, j'en suis convaincu, avec l'ALENA qui s'agrandira, qui ne se limitera plus au Mexique et aux États-Unis, mais qui englobera d'ici 10, 15 ou 20 ans l'ensemble des pays d'Amérique centrale et d'Amérique latine. C'est vers cela qu'il faut aller.

On a aussi demandé ce que nous ferons si le référendum est rejeté. Je vous réponds: Que ferez-vous lorsque le référendum sera passé?

Des voix: Bravo!

[Traduction]

M. Dennis J. Mills (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement les observations du député et je reconnais qu'il a des motifs légitimes pour être mécontent du fonctionnement de notre structure politique. Que ce soit chez lui ou chez moi, les chômeurs et les enfants qui n'ont pas de quoi manger ont tous les mêmes réactions. Il est sûrement d'accord là-dessus.

Mais si nous nous attaquons de façon constructive à certains des problèmes dont il a parlé et si nous élaborons des normes nationales dans les services de santé, l'éducation et la formation pour que tous les Québécois en profitent comme tous les autres Canadiens, continuera-t-il de soutenir, malgré ces correctifs, qu'il doit quitter le Canada?

[Français]

M. Duceppe: Monsieur le Président, quand on parle de ces normes nationales, pour que vous compreniez bien ce que le Québec ressent face au Canada, il faut vous dire au départ que notre projet de société, que le pays que l'on veut ne sera en aucune façon supérieur ou inférieur au Canada; il sera juste différent.

Pour bien comprendre comment nous réagissons face aux normes nationales, demandez-vous pourquoi vous avez des normes nationales différentes de celles des Américains. Vous me répondrez: Parce que nous sommes Canadiens, parce que notre souveraineté nationale nous importe, parce que nous avons des valeurs différentes; pas supérieures ou inférieures à celles des Américains, mais just plain different. C'est la même chose pour le Québec.

Des voix: Bravo!

[Traduction]

M. Jack Frazer (Saanish-Les Îles-du-Golfe): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt les propos du député de Laurier-Sainte-Marie, qui préconise une réduction de 25 p. 100 du budget de la défense.

Le député est sûrement conscient que, ces vingt dernières années, seul le Luxembourg a fait à la défense une contribution, par habitant, inférieure à la nôtre. En fait, il est reconnu au sein de l'OTAN et dans d'autres organismes que nous sommes très négligents dans notre participation à la défense.

Au cours des quatre prochaines années, des réductions de 6 milliards de dollars dans le budget de la défense ont déjà été annoncées. Je le demande au député, est-il réaliste et raisonnable de proposer une réduction de 25 p. 100 dans le budget des Forces canadiennes, alors que nous ne savons pas encore vraiment ce que nous allons leur demander de faire? Ne conviendrait-il pas

485

mieux d'attendre les résultats de l'examen de la politique de défense avant d'arrêter le budget?

[Français]

M. Duceppe: Évidemment, nous voulons revoir tout le rôle de l'armée canadienne avant d'opérer ces coupures de 25 p. 100.

Ce n'est pas un exercice comptable pur et simple. Bien sûr, il faut réfléchir avant d'agir. Cependant, je vous dirai qu'on en arrivera à cette conclusion. Il faut se fixer comme objectif de couper 25 p. 100; autrement, on va multiplier les cas de pertes d'emplois liés à la défense nationale parce que le marché de l'armement périclite à travers le monde. C'est exactement ce qu'a fait Bill Clinton, aux États-Unis. Il a coupé au ministère de la Défense d'une façon incroyable, mais tout en créant un fonds de reconversion industrielle de l'ordre de 29 milliards de dollars. C'est ce que font la France et la Grande-Bretagne. Rappelons-nous que 50 p. 100 et plus de nos exportations d'armes fabriquées ici étaient destinés au marché américain. Dans la mesure où ils ont coupé leurs dépenses, bien sûr, en vertu du secret d'État lié à la défense nationale, ils vont acheter chez eux, et c'est fort normal. On ne peut pas les blâmer. Or, c'est le chômage ici. Si on n'agit pas en ne coupant pas, on va accroître le chômage. C'est exactement à l'opposé de ce à quoi veut en arriver mon honorable collègue.

[Traduction]

Le Président: Comme il est 14 heures et en application du paragraphe 30(5) du Règlement, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés conformément à l'article 31 du Règlement.

_____________________________________________


485

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LA JUSTICE

M. John Harvard (Winnipeg St. James): Monsieur le Président, un procès s'est déroulé dans le plus grand secret à Brampton, en Ontario, le mois dernier. Nous savons que celui qui a présidé le procès, le juge John Webber, a ordonné le huis clos et a mis sous scellés les dossiers de l'instruction à la demande de l'accusé qui estimait que sa famille serait menacée si certains renseignements étaient rendus publics. Nous n'en savons pas plus.

Voyons maintenant ce que le public ignore. Les Canadiens ignorent le nom de l'accusé, l'accusation portée contre lui et la sentence prononcée contre lui. Comme le Globe and Mail le faisait remarquer, nous ne connaissons pas les éléments de preuve présentés, les témoignages entendus, pas plus d'ailleurs que le motif invoqué par l'accusé pour réclamer le secret, les arguments défavorables et les raisons qui ont amené le juge à acquiescer.

Trop, c'est trop! Certes, je comprends que le Code criminel prévoit des cas où il y a lieu d'interdire la publication de certains éléments de preuve, mais de là à ordonner qu'un procès se déroule intégralement à huis clos, n'y a-t-il pas une marge? Je trouve cela inacceptable! C'est malheureux, mais cela soulève des soupçons à l'égard du système judiciaire.

Les Canadiens méritent de connaître toute la vérité.

[Français]

LE DÉCÈS DE M. GÉRARD PARIZEAU

M. Benoît Sauvageau (Terrebonne): Monsieur le Président, en mon nom personnel et au nom du caucus du Bloc québécois, j'aimerais offrir mes plus sincères sympathies à M. Jacques Parizeau, chef du Parti québécois et député de l'Assomption, dans ma circonscription, ainsi qu'à sa famille, à la suite du décès de son père, M. Gérard Parizeau.

M. Parizeau père a eu une carrière bien remplie. Il a été un modèle de fierté, de loyauté et d'intégrité. En plus d'oeuvrer dans le domaine de l'assurance, il fut professeur à l'École des hautes études commerciales pendant près de 40 ans. Il a aussi écrit plusieurs ouvrages sur la société canadienne-française.

Son implication dans la société lui a valu d'être élu membre de la Société royale du Canada, fait Chevalier de la Légion d'honneur et Grand officier de l'Ordre national du Québec. Ces marques de reconnaissance témoignent de l'importance de sa contribution à l'essor de la société québécoise.

En terminant, nous réitérons nos condoléances à la famille Parizeau et lui transmettons nos voeux d'encouragement dans ces moments difficiles.

* * *

[Traduction]

LA PETITE ENTREPRISE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt): Monsieur le Président, je me lève au nom des petits entrepreneurs d'Okanagan-Similkameen-Merritt. Ils sont tenus de passer des heures et des heures pour s'acquitter de tâches administratives que le gouvernement leur impose.

Avant même l'imposition de la TPS, plus de 60 p. 100 des petits entrepreneurs canadiens consacrent jusqu'à dix heures par semaine à l'application des directives gouvernementales. Ce temps serait mieux utilisé à vendre des produits ou des services. L'introduction de la TPS n'a fait qu'aggraver encore la situation.

Le gouvernement a promis d'examiner l'impact des règlements et de la paperasserie sur le petite entreprise, ainsi que sa capacité d'y faire face. Le gouvernement et la fonction publique doivent être à la hauteur de leur réputation. Ils doivent servir les Canadiens en éliminant tous les règlements inutiles ou redondants.

Faisons en sorte que les règlements nécessaires posent le moins d'ennuis possible aux entreprises qui doivent les appliquer. À mon avis, voilà des mesures qui rehausseront la confiance de la population dans le gouvernement et donneront à la petite entreprise la chance de faire ce qu'elle sait faire le mieux: créer des emplois.

* * *

LE MAINTIEN DE LA PAIX

M. Larry McCormick (Hastings-Frontenac-Lennox and Addington): Monsieur le Président, je voudrais féliciter tous les députés des observations réfléchies qu'ils ont faites à l'occasion du débat historique de mardi sur le rôle du Canada dans le maintien de la paix.


486

Les décisions que nous prenons sur l'avenir du maintien de la paix en Bosnie ne peuvent être dissociées de la question plus vaste qu'est l'avenir général du Canada dans le maintien de la paix au niveau international.

(1405)

Comme beaucoup de mes électeurs et de nombreux Canadiens, je suis en faveur des opérations de maintien de la paix dirigées par les Nations Unies. Le maintien de la paix est crucial pour la sécurité internationale. Nous devons donc réexaminer et repenser notre participation actuelle aux opérations en Bosnie-Herzégovine. À mon avis, il n'y a pas une seule et bonne réponse. Il n'y a que des options à peser et que des bons choix à faire.

J'ai la conviction que le gouvernement a pleinement l'intention de faire les bons choix. Je le remercie de ses efforts sincères pour étudier toutes les options et toutes les opinions présentées à la Chambre au cours de ce débat historique.

* * *

LE DÉBAT SUR LES ESSAIS DU MISSILE DE CROISIÈRE

M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud): Monsieur le Président, je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur un appel téléphonique que j'ai reçu hier soir d'un jeune homme de ma circonscription, un certain M. Don Shay.

Don est apparemment un mordu de la chaîne parlementaire. Il m'a téléphoné pour me dire que depuis qu'il regardait cette chaîne, c'était la première fois qu'il avait l'impression d'apprendre quelque chose.

Il m'a prié de féliciter le premier ministre, le chef de l'opposition, le chef du troisième parti et tous les députés à la Chambre de leur débat très instructif. Il espère voir plus de débats de ce genre à la Chambre.

* * *

LE LABORATOIRE DE FRACTIONNEMENT DU SANG

Mme Mary Clancy (Halifax): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour dire que j'approuve sans réserve le projet d'aménagement en Nouvelle-Écosse d'un laboratoire de la Croix-Rouge pour le fractionnement du sang.

Actuellement, 96 p. 100 des produits de sang fractionné qu'utilisent 300 000 Canadiens proviennent de l'étranger. Ce qui nous rend vulnérables aux normes de sécurité étrangères, aux pénuries internationales, aux restrictions en matière d'exportation et à la fluctuation du change.

Ce laboratoire présentera sur le plan de la santé d'importants avantages pour tous les Canadiens. Il leur garantira des produits plus sûrs et moins chers et il fera économiser au système de santé canadien jusqu'à 575 millions de dollars au cours de la prochaine décennie.

Non seulement ça, ce laboratoire procurera d'importants avantages économiques à la Nouvelle-Écosse. Il entraînera pour la région de l'Atlantique de grandes retombées économiques qui devraient se chiffrer à 11 milliards de dollars au cours des dix prochaines années, sans compter qu'il entraînera la création de plus de 400 emplois dans le secteur de la haute technologie.

Ce projet est un pas important si nous voulons parvenir à l'autosuffisance sur le chapitre des produits du sang, ce qui est jugé indispensable par l'Organisation mondiale de la santé.

Les habitants de la Nouvelle-Écosse et tous les Canadiens devraient tous pouvoir profiter des avantages que procure un laboratoire canadien de fractionnement du sang.

* * *

[Français]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup): Monsieur le Président, j'invite le vérificateur général du Canada à se pencher, en 1994, lors de la vérification des activités de la Société canadienne des postes, sur la pertinence des dépenses en publicité et en frais de commandite et sur les modes de détermination des contrats de cette société.

Cette vérification devrait aussi nous permettre de mieux évaluer l'efficacité de la politique de privatisation de la Société canadienne des postes, basée uniquement sur l'âge de retraite du maître de poste et non sur l'achalandage du bureau de poste concerné.

Finalement, le vérificateur pourrait nous faire connaître son évaluation de l'impact d'une telle politique sur le développement local de nos communautés rurales.

* * *

[Traduction]

L'AGRICULTURE

M. Leon E. Benoit (Végréville): Monsieur le Président, je me fais aujourd'hui le porte-parole des agriculteurs qui réclament des programmes tenant compte tant de leurs intérêts que de ceux des consommateurs et des contribuables.

Les réformistes ont l'intention de préconiser les changements suivants dans le secteur de l'agriculture:

Le regroupement en trois programmes de plus d'une douzaine de programmes non coordonnés, la création d'un programme d'adaptation pour tenir compte de la distorsion du commerce, la mise en place d'un programme de stabilisation du revenu agricole et l'amélioration du programme d'assurance-récolte;

La réforme du réseau de transport pour que les produits puissent être acheminés par n'importe quel itinéraire et n'importe quel moyen transport, quelle que soit l'étape de transformation à laquelle ils sont rendus;

Une plus grande participation du secteur privé à la recherche, à l'éducation et à la formation professionnelle;

L'utilisation plus judicieuse des fonds destinés à la recherche pour que se réalisent les objectifs fixés par les agriculteurs et l'agro-industrie;

L'amélioration des règlements concernant la sécurité, la concurrence loyale et le règlement des différends.

Ces changements, entre autres, offriront de meilleures perspectives d'avenir aux agriculteurs.


487

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, au cours de la dernière législature, on a vivement critiqué les modifications apportées par les conservateurs à la Loi sur l'assurance-chômage parce qu'elles prévoyaient que les personnes qui devaient quitter leur emploi pour des motifs sérieux, mais non considérés comme valables, au sens de la loi, n'avaient pas droit à des prestations d'assurance-chômage.

Encore aujourd'hui, je rencontre des personnes qui, ayant dû quitter leur emploi pour cause d'exploitation ou de harcèlement, se voient encore refuser des prestations. Ces personnes n'avaient d'autre choix que de continuer à travailler comme des esclaves.

Étant donné qu'à l'époque, notre parti s'était farouchement opposé à ces modifications qu'il jugeait trop dures et exagérées, je presserais le gouvernement de proposer des modifications le plus tôt possible pour corriger cette injustice.

* * *

LA LOI SUR LES LANGUES OFFICIELLES

M. Jean-Robert Gauthier (Ottawa-Vanier): Monsieur le Président, l'année 1994 marque le 25e anniversaire de l'adoption, par la Chambre, de la première Loi sur les langues officielles du Canada. Au cours des neuf années de règne du gouvernement conservateur, nous avons assisté à une baisse d'intérêt et à un affaiblissement de l'engagement à l'égard des langues officielles. Trop peu de Canadiens savent exactement de quoi il retourne.

(1410)

Il faudrait entreprendre une étude sérieuse pour déterminer si la Loi sur les langues officielles atteint le but visé. Il faudrait, dans le cadre de cette étude, examiner notamment les institutions fédérales, les tribunaux, l'éducation, la formation et le développement, les minorités linguistiques, la culture, la région de la capitale nationale et les organismes bénévoles.

J'espère que le gouvernement appuiera la proposition d'examen de la mise en oeuvre de cette loi afin que le Canada puisse prendre des mesures pour améliorer la situation.

* * *

LA BIÈRE À TENEUR ÉLEVÉE EN ALCOOL

Mme Beryl Gaffney (Nepean): Monsieur le Président, le 14 décembre 1993, la ville de Nepean a adopté une résolution appuyant l'imposition de prix et de méthodes de marketing limitatifs aux bières à teneur élevée en alcool.

La Fondation de recherches sur les blessures de la route au Canada, l'association Mothers Against Drunk Driving, la Fondation de la recherche sur la toxicomanie et l'Association médicale canadienne ont toutes manifesté leur opposition aux bières à teneur élevée en alcool.

La recherche montre que chez un jeune de 19 ans, deux consommations en une heure produisent en moyenne un taux d'alcoolémie suffisamment élevé pour qu'il ne puisse pas conduire sans violer les dispositions du Code criminel.

Je demande au gouvernement fédéral d'affirmer à la Chambre qu'il faut une réglementation appropriée pour les bières à teneur élevée en alcool.

* * *

[Français]

L'ENVIRONNEMENT

M. François Langlois (Bellechasse): Monsieur le Président, j'attire l'attention de la Chambre et de la ministre de l'Environnement sur la nécessité de doter la flotte canadienne d'un navire équipé du matériel pertinent à une intervention rapide et efficace en cas d'accident écologique dans le fleuve ou le golfe Saint-Laurent.

Il est bien connu que le Québec serait totalement désarmé pour faire face à une catastrophe écologique qui aurait des effets désastreux sur l'écosystème du Saint-Laurent.

Ce type de navire répondrait donc à un réel besoin en plus d'aider l'industrie de la construction maritime.

Étant député de Bellechasse, je sais que plusieurs de mes électeurs, travaillant à la MIL Davie de Lévis, attendent une décision rapide à ce sujet.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, les gens de Fraser Valley-Ouest et d'autres circonscriptions au Canada sont préoccupés par la sécurité des personnes dans la rue. C'est particulièrement inquiétant quand les criminels s'en tirent grâce aux failles du système et qu'ils recouvrent leur entière liberté pour des raisons administratives.

Michael Lawrence Drake a été reconnu coupable d'avoir molesté une jeune fille, à Bellingham, dans l'État de Washington, en 1992. Il circule maintenant librement dans les rues du Grand Vancouver, tandis que l'enquête du service d'immigration est suspendue. Cet homme est né aux États-Unis et a le statut de résident au Canada, mais il n'est pas Canadien.

Je demande aux députés de faire des démarches pour obtenir que la police de notre pays ait le pouvoir de garder en détention les gens comme cet homme et que les tribunaux aient le pouvoir de les expulser sur-le-champ.

La réforme de notre régime de justice pénale est l'un des principaux objectifs du Parti réformiste. J'espère que le gouvernement en fera aussi l'un de ses grands objectifs, afin que nous sachions que nos familles sont en sécurité dans nos villes.

* * *

LA SOCIÉTÉ MAGNA INTERNATIONAL

M. Dennis J. Mills (Broadview-Greenwood): Monsieur le Président, j'invoque l'article 31 du Règlement pour clarifier et confirmer le soutien que j'accorde sans réserves au projet de développement de 200 millions de dollars soumis par la Société Magna International.

488

Le projet, qui prévoit la construction d'un centre de recherches et de formation de classe internationale, créera immédiatement 1 100 emplois à Aurora, en Ontario, et 10 000 emplois indirects dans l'ensemble de l'économie du sud de l'Ontario.

Je précise à l'intention des autorités municipales et régionales que ce projet permettra de réaliser des investissements massifs dans l'infrastructure sans puiser dans la bourse des contribuables.

Compte tenu des investissements massifs que le projet permettra d'effectuer dans la région du Grand Toronto, et considérant que le projet devra être déplacé, en partie ou en totalité, vers les États-Unis s'il n'est pas approuvé, il importe de régler rapidement toutes les questions touchant la planification et l'environnement.

J'exhorte les autorités provinciales, régionales et municipales à examiner le projet comme il se doit et sans perdre de temps.

* * *

[Français]

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, notre pays est aux prises avec un problème sérieux de contrebande. À titre de non-fumeur, je suis, en principe, d'accord sur les taxes élevées pour qu'elles puissent, en général, prévenir et avoir un effet dissuasif sur la consommation de tabac par les jeunes.

Cependant, la réalité aujourd'hui au Canada est tout à fait différente. À peu près toute jeune personne peut acheter des cigarettes bon marché, voire illégalement, à cause de la contrebande dans notre pays. Qui plus est, cette même contrebande permet à ces mêmes jeunes de participer et même de récolter des profits d'un système d'illégalité contrôlé par les indésirables, la pègre de notre société. Nous n'avons plus de choix, monsieur le Président, nous devons mettre fin à cette illégalité par une baisse, aussi temporaire soit-elle, des taxes sur le tabac. Nous devons tous travailler de concert pour remettre de l'ordre dans le système afin de faire respecter nos lois dans ce pays.

* * *

(1415)

LA CONTREBANDE DU TABAC

M. Gilles Bernier (Beauce): Monsieur le Président, lors du dernier Parlement, je me suis levé en cette Chambre à trois reprises pour dénoncer cette injustice flagrante de «deux poids, deux mesures», ce laxisme de mon gouvernement à l'époque et de celui du Québec, dans la triste aventure de la contrebande du tabac, où on a fermé les yeux durant des années en laissant la mafia s'enrichir au détriment de l'honnête population.

J'ai toujours dit et je le répète aujourd'hui, comme seul député élu indépendant au Canada, c'est la diminution des taxes qui réglera le problème de la contrebande. C'est l'appétit vorace des gouvernements qui a fait de nos concitoyens des contrebandiers, des criminels et des hors-la-loi.

Aujourd'hui, on pourrait poser des questions comme celle-ci: Qui protège qui au gouvernement et à la police? Quels fonctionnaires, quels politiciens ou quels organisateurs en retireraient des avantages pécuniaires pour afficher une si sordide tolérance? On en est au stade de ces questions, monsieur le Président.

_____________________________________________


488

QUESTIONS ORALES

[Français]

LES COMMUNAUTÉS AUTOCHTONES

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, en l'absence du premier ministre, ma question s'adresse au ministre des Affaires indiennes. Il y a un an, les images de six jeunes Innus respirant des vapeurs d'essence ont soulevé la tristesse et l'indignation de l'opinion publique, ainsi alertée sur les conditions de vie inhumaines des habitants autochtones de Davis Inlet. Or, un an plus tard, rien n'a changé. Les mêmes problèmes de drogue et de suicide perdurent, ainsi qu'en atteste un reportage télévisé hier soir à l'émission Le Point de Radio-Canada. À cette émission, nous avons vu également que les conditions de vie sont également très difficiles dans une autre communauté autochtone, au Québec, cette fois-ci, au Lac Simon.

La question que je pose au ministre est la suivante: Est-ce qu'il ne convient pas que le gouvernement, s'il veut assumer adéquatement ses responsabilités fiduciaires envers ces populations, doit agir par une stratégie concertée afin de mettre fin à cette situation de misère indigne et indécente des communautés autochtones du Canada, dont celles en particulier de Davis Inlet et du Lac Simon?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, je suis tout à fait d'accord. Lorsqu'il faisait partie d'un gouvernement antérieur, l'actuel chef de l'opposition officielle avait dépensé 1,7 million de dollars pour envoyer ces enfants à Poundmaker, et sur les 17 enfants qui y sont allés, 16 se retrouvent aujourd'hui en difficulté. Cette mesure s'est donc révélée inefficace.

Nous sommes retournés sur place afin de travailler avec les dirigeants de l'endroit. Comme je l'ai dit la semaine dernière, trois membres de notre personnel y travaillent activement et nous espérons pouvoir mettre en place un ensemble de solutions quelque temps en mars.

Je ne crois pas qu'il existe de solution miracle, et le député est sûrement du même avis. Il nous incombe cependant d'être présents sur place et de faire ce que nous pouvons pour soulager les personnes touchées, voir à leur santé, à leur logement et essayer de trouver une solution pragmatique et graduelle au problème.

[Français]

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, je désire poser une question supplémentaire au ministre des Affaires indiennes. En réponse à une question du député de Saint-Jean cette semaine, le ministre a déclaré qu'il s'apprêtait à faire une proposition aux gens de Davis Inlet, une proposition qui porterait sur les questions de justice et de santé, et qu'il a lui-même qualifiée d'acceptable. Est-ce que le ministre ne reconnaît pas que la gravité du problème s'accroît singulièrement,


489

puisque, au même moment, les agents de la GRC se voient refuser l'accès à Davis Inlet pour enquêter sur des cas d'agressions sexuelles et de violence faites à des femmes et à des enfants?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Après le premier incident, à la suite duquel je me suis rendu dans la région, les dirigeants ont changé de position et ont invité la GRC à se rendre sur place. La gendarmerie s'y est rendue, a pris les prisonniers en charge et a quitté l'endroit. Je crois que la situation est bien meilleure maintenant qu'elle ne l'était lorsque j'y suis allé. Les dirigeants de cette communauté veulent maintenant collaborer avec la GRC, avec le gouvernement de Terre-Neuve et avec mon ministère. Je crois qu'ensemble nous pourrons trouver des solutions.

(1420)

L'hon. Lucien Bouchard (chef de l'opposition): Monsieur le Président, le ministre aurait dû regarder l'émission de télévision hier soir. Il devrait demander à son personnel de la lui faire voir car la situation là-bas est vraiment terrible. Personne ne peut regarder un tel reportage sans éprouver de la tristesse au sujet de la condition de ces gens, qui vivent au Canada.

Je voudrais demander au ministre s'il est prêt à accéder à la requête des Innus de Davis Inlet, qui veulent quitter l'île et retourner vivre sur leurs territoires de chasse au Labrador.

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien): Monsieur le Président, j'ai entendu parler d'un montant aussi farfelu que 80 millions de dollars. J'ai demandé qu'on me fournisse les vrais chiffres. Je suis disposé à permettre ce déménagement, mais je tiens à m'assurer que cela puisse se faire dans les limites de notre budget. Le chef de l'opposition est certainement conscient des contraintes budgétaires auxquelles nous sommes confrontés. J'ai un budget et je dois m'y restreindre.

Je souhaite vraiment que ce déménagement puisse se faire, mais j'espère que nous pourrons y arriver en respectant les contraintes budgétaires du gouvernement, car nous accusons un lourd déficit.

* * *

[Français]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, ma question porte sur les incidents survenus vendredi dernier à Kanesatake, et au sujet desquels le ministre de la Défense nationale change constamment de version. Il a d'abord déclaré que la Sûreté du Québec faisait enquête, ce qui s'est avéré inexact. Il a dit par la suite qu'on l'avait informé que la Sûreté du Québec faisait enquête, ce qui s'est également avéré inexact. Enfin hier, il a dit qu'il n'avait pas eu le temps de demander à la Sûreté du Québec de faire enquête.

Le ministre peut-il nous dire si oui ou non quelqu'un fait enquête au sujet des événements de Kanesatake? Et dans l'affirmative, est-ce que le ministre s'engage à déposer devant cette Chambre le rapport, une fois l'enquête complétée?

[Traduction]

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants)): Monsieur le Président, le député ne sait peut-être pas que le chef de la bande en cause dans l'incident d'Oka, le chef Peltier, a donné une conférence de presse il y a peu de temps. À cette occasion, il a déclaré d'abord qu'il était entièrement satisfait des explications du ministère de la Défense.

Deuxièmement, il a affirmé que cette affaire était terminée selon lui et troisièmement-on peut songer à ce que j'ai dit l'autre jour au sujet des députés d'en face qui envenimaient la situation-le chef a accusé les membres du Bloc québécois d'envenimer délibérément la situation afin de servir leurs propres fins politiques au Québec. C'est scandaleux. Le député devrait avoir honte d'une telle action.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, le ministre ne comprend-il pas que son premier devoir est de satisfaire aux questions de cette Chambre au sein de laquelle il siège en tant que représentant élu, plutôt que de satisfaire aux désirs de certaines personnes dans la société, notamment ceux qui peuvent être impliqués dans un dossier.

Des voix: Oh, oh!

M. Gauthier (Roberval): La vérité fait mal aux gens d'en face.

Le ministre pourrait-il dire si le mystérieux signal qui été perçu par les Forces canadiennes pouvait provenir d'un avion servant à la contrebande de cigarettes ou au trafic d'armes? Est-ce que le ministre peut nous fournir des renseignements à ce sujet?

[Traduction]

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants)): Monsieur le Président, ma première obligation est de répondre aux questions légitimes posées à la Chambre et de faire connaître la vérité. Le chef de bande a véritablement fait les déclarations que je viens de citer.

Je trouve cela un peu ironique car, il y a quelques jours à peine, le député défendait les autochtones d'Oka et voilà maintenant qu'il s'en prend à eux. Il pourrait être plus conséquent.

* * *

LES DÉPENSES DU GOUVERNEMENT

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. La semaine dernière, le Parti réformiste a proposé qu'on impose un plafond aux dépenses de l'État de façon à les réduire, l'an prochain, de 6 p. 100 seulement. Hier, le ministre a qualifié cette proposition de sauvage.

Ce week-end, le ministre assistera a une conférence prébudgétaire à Calgary où les entreprises exploitantes de ressources ont dû réduire leurs effectifs de 10, 15 ou 20 p. 100 pour demeurer compétitives.


490

(1425)

Le ministre peut-il dire à la Chambre comment il a l'intention d'expliquer aux employés de ces entreprises et à leurs investisseurs pourquoi le gouvernement fédéral ne peut pas réduire ses dépenses ne serait-ce que de 6 p. 100, préférant plutôt élargir son assiette fiscale?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, lorsque j'ai parlé d'acte de sauvagerie hier, je ne faisais pas uniquement allusion à la motion soumise à la Chambre mais également au programme présenté par le Parti réformiste pendant les élections. En effet, il y faisait une série de recommandations concernant les pensions de retraite qui, selon lui, toucheraient les ménages ayant un revenu supérieur à 54 000 dollars, mais qui, en réalité, s'appliquaient aux ménages ayant un revenu inférieur à 35 000 dollars.

Pour ce qui est de notre réticence à réduire les dépenses, ce n'est certainement pas le cas. Nous désirons le faire et nous allons le faire; mais c'est justement parce que le sort des travailleurs mis à pied nous tient à coeur que nous ne procéderons pas comme le voudrait le Parti réformiste.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire pour le ministre des Finances au sujet justement de l'aide aux travailleurs.

Selon une publication récente de son propre ministère, intitulée Les défis économiques du Canada, la dette publique totale du Canada par rapport au PIB est plus élevée que celle de nos principaux partenaires commerciaux.

Ce week-end, le ministre va se faire dire que les impôts que doivent payer les exportateurs canadiens au titre du service de la dette, qui sont plus élevés que ceux de leurs concurrents, représentent déjà un handicap responsable de la disparition d'emplois dans le secteur de l'exportation. Le ministre convient-il que tel est bien le cas, et si oui, peut-il expliquer comment élargir davantage l'assiette fiscale pourra bien stimuler la création d'emplois dans le secteur de l'exportation?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, l'élargissement de l'assiette fiscale et l'élimination des échappatoires visent simplement à rendre le régime fiscal plus juste; les Canadiens seront alors plus disposés à l'accepter. Tel est notre but.

Pour ce qui est des exportations, nous avons dit sans ambages dans le livre rouge que le but ultime de tout gouvernement, et particulièrement de celui-ci, doit être la réduction des impôts. Mais dans notre parti, nous nous inquiétons, tout comme prétend le faire le Parti réformiste, de l'état des finances publiques de ce pays. Nous savons également que si nous ne nous attaquons pas au déficit, nous ne pourrons faire baisser les taux d'intérêt. Et si nos taux d'intérêt ne baissent pas, notre économie ne sera pas compétitive. Si le député veut que je lui donne un cours sur le déficit, je suis prêt à le faire.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest): Monsieur le Président, j'ai une autre question supplémentaire pour le ministre des Finances, afin qu'il clarifie sa position.

Au Canada, les compagnies aériennes versent près de 20 p. 100 de leur revenu brut au gouvernement sous forme de charges et d'impôts directs alors que ce pourcentage n'est que de 10 p. 100 pour les transporteurs américains. Le ministre des Finances est-il prêt à reconnaître que l'importance de ces charges et de ces impôts est responsable de la disparition d'emplois dans l'industrie du transport aérien et peut-il à nouveau expliquer comment élargir l'assiette fiscale pourra bien améliorer la situation de l'emploi dans ce secteur ou dans n'importe quel autre?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, il s'agit d'équité; il s'agit de faire en sorte qu'un groupe de Canadiens ne soit pas plus favorisé par le système et les services offerts par l'État que les autres. Nous essayons de rendre le système plus juste, ce qui est crucial.

Je n'arrive pas à comprendre pourquoi le parti d'en face s'oppose à cette bienveillante équité, mais nous continuerons quand même sur cette même voie en dépit de ses objectifs.

Pour ce qui est de la compétitivité de notre système, il ne fait aucun doute qu'avec les taux d'intérêt que le pays a dû subir au cours des cinq dernières années, il y a eu beaucoup d'injustice comme peuvent en témoigner nos compagnies aériennes et nos agriculteurs. Ces derniers ont payé le prix fort pour leur engrais. C'est pour corriger tout cela que les Canadiens nous ont mis au pouvoir.

* * *

[Français]

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, ma question s'adresse au solliciteur général. Hier, pour justifier la lenteur de la GRC à porter des accusations contre les contrebandiers de cigarettes, le premier ministre a dit que la Gendarmerie n'avait pas amassé suffisamment de preuves pour agir. Je cite le premier ministre: «Lorsqu'ils ont des accusations valables devant eux, les policiers agissent immédiatement, comme c'est leur devoir de le faire.»

Comment se fait-il que la GRC n'ait pas encore suffisamment de preuves pour porter des accusations, alors que chaque soir, à la télévision, on nous montre des images de contrebandiers en pleine action?

(1430)

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, c'est la GRC, en consultation avec les avocats de la Couronne, qui décide du moment où il existe assez d'éléments de preuve, non seulement pour porter des accusations, mais aussi faire en sorte que ces accusations aboutissent à des condamnations.


491

Je ne crois pas que c'est à moi d'intervenir dans ces décisions opérationnelles de la police. Dans le passé, les tribunaux ont exigé plus que des reportages télévisés en soirée pour fonder leurs conclusions de culpabilité.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm): Monsieur le Président, depuis le temps que ça dure, le solliciteur général peut-il nous dire franchement et honnêtement ici, en Chambre, pourquoi les médias, eux, sont capables d'accumuler ces dites preuves là, sont capables de nous montrer des images en direct, alors que la GRC, avec les moyens qu'ils ont, n'est pas capable de nous faire cette démonstration-là et de poursuivre les vrais criminels dans ces cas-là?

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, les médias jouent un rôle très utile au Canada, mais leurs reportages ne sont pas des éléments de preuve pouvant servir de fondement à des accusations ni, après un procès où le fardeau de la preuve incombe à la Couronne, de fondement à des condamnations.

Je vais signaler à la GRC la proposition du député et je suis convaincu que les policiers en tiendront compte pour accomplir le travail pour lequel ils sont réputés partout dans le monde.

* * *

L'ORGANISATION MARITIME INTERNATIONALE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, en l'absence du ministre des Affaires étrangères, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Je voudrais simplement mentionner en guise d'introduction qu'une leçon donnée par un ministre libéral des finances sur la façon de réduire le déficit équivaut à une leçon donnée par un pyromane sur la façon de lutter contre les incendies.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: À l'ordre. Je suis certain que le député voudra modifier sa déclaration, notamment l'allusion au pyromane.

M. Strahl: Oui, monsieur le Président.

Au cours des quatre dernières années, le gouvernement a versé une allocation de logement de plus de 400 000 $ à un fonctionnaire des Nations Unies qui travaille pour l'Organisation maritime internationale. Dans les derniers jours de son mandat, le gouvernement conservateur a convenu de verser un montant maximal de 12 000 $ par mois au cours des quatre prochaines années, soit un total de 580 000 $, à titre d'allocation de logement au même fonctionnaire.

Je pose la question au ministre des Finances: À une époque où des milliers de Canadiens sont sans logis, le gouvernement libéral va-t-il annuler la décision des conservateurs d'accorder à ce fonctionnaire des Nations Unies l'équivalent d'environ 500 000 $?

M. Tobin: Honte aux conservateurs.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, ce n'est pas drôle de rater son introduction.

Je prends note de la question et j'en discuterai certainement avec le ministre des Affaires étrangères. Je tiens toutefois à dire au député que nous avons la ferme intention d'annuler un bon nombre des décisions prises par les conservateurs.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, je pense bien que tous les Canadiens, et comme nous de ce côté-ci de la Chambre, ont été soulagés lorsque le gouvernement a déclaré récemment qu'il envisageait d'éliminer la pratique du cumul de pension et de traitement.

Est-ce que le gouvernement entend aussi éliminer cet exemple de triple cumul?

Le Président: Je ne suis pas certain à qui s'adresse votre question.

M. Tobin: À M. Ray Speaker.

M. Marchi: Laissez Ray répondre.

Le Président: À l'ordre. Je saurais gré au député de répéter sa question.

M. Strahl: Je vais m'exprimer plus lentement. Le gouvernement va-t-il prendre des mesures pour éliminer cet exemple de triple cumul aux dépens des contribuables?

Le Président: Je pense que la question s'adresse au ministre des Finances.

(1435)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec)): Monsieur le Président, mon collègue, le solliciteur général, m'assure que nous allons certainement nous occuper de cette affaire et je pense que ma première intervention répond à la question posée.

* * *

[Français]

LA CONTREBANDE DE CIGARETTES

Mme Pauline Picard (Drummond): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Santé.

Le premier ministre a déclaré hier qu'il était prêt à envisager de baisser, unilatéralement s'il le faut, les taxes sur le tabac afin de mettre fin aux problèmes de contrebande qui sévissent actuellement au Québec et en Ontario, et le ministre des Finances a indiqué qu'une baisse des taxes aidera à mettre fin à la contrebande.

La ministre partage-t-elle l'opinion de son premier ministre et de son ministre des Finances sur la nécessité de baisser les taxes sur le tabac?

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, mon premier devoir est de voir à la santé des Canadiens et des Canadiennes. Le problème de la contrebande est aussi un problème de santé.


492

Vous savez que tous les jours, environ 300 enfants commencent à fumer. Il y a aussi chaque année 40 000 décès attribuables au tabagisme au Canada. Donc, pour moi, il est absolument essentiel de convaincre tous les Canadiens de cesser de fumer.

Mme Picard: Monsieur le Président, si je comprends bien, madame la ministre est d'accord pour le maintien des taxes. Comme elle n'est pas d'accord avec le gouvernement, comment compte-elle enrayer la recrudescence de l'usage du tabac chez les jeunes à cause du fléau de la contrebande?

[Traduction]

L'hon. Diane Marleau (ministre de la Santé): Monsieur le Président, le problème de la contrebande de cigarettes nous préoccupe beaucoup.

Le gouvernement et moi-même, en tant que ministre de la Santé, sommes très préoccupés par le danger que présente le tabac pour la santé des Canadiens. Non seulement de jeunes enfants commencent à fumer tous les jours, mais la vente de cigarettes sur le marché noir nous prive des recettes fiscales nécessaires pour financer le système des soins de santé. Et, croyez-moi, nous avons besoin de tous les dollars qu'on peut amasser pour résoudre les problèmes causés par le tabagisme.

* * *

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Le 25 janvier, le ministre a dit à la Chambre qu'il cherchait à obtenir des éclaircissements sur la contradiction qui existe entre les principes comptables de son ministère et ceux du vérificateur général. Toujours le 25 janvier, à une question concernant la responsabilité des fonctionnaires de son ministère, le ministre a répondu ceci:

Ce n'est pas à moi que cette question devrait être posée, mais au gouvernement. Je ne sais pas qui pourrait y répondre.
Le ministre dit qu'il n'est pas responsable des mesures qui sont prises par les fonctionnaires de son ministère. Dans cette optique, le ministre peut-il expliquer à la Chambre sa notion de responsabilité ministérielle?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants)): Monsieur le Président, le député reconnaîtra que, compte tenu de la façon dont son collègue a formulé sa question supplémentaire, il était difficile de comprendre où il voulait en venir. Personne ne conteste le fait que les fonctionnaires font manifestement rapport à leurs maîtres politiques élus que sont les députés ministériels.

En ce qui concerne plus particulièrement la question même des coûts, je sais que le député voudrait savoir pourquoi le ministère de la Défense nationale et le vérificateur général n'arrivent pas aux mêmes chiffres. Avec la permission de la Chambre, je publierai notre rapport au début de la semaine prochaine et je le déposerai à la Chambre de sorte que tous puissent prendre connaissance de la démarche du ministère de la Défense nationale. Nous n'avons rien à cacher.

M. Ed Harper (Simcoe-Centre): Ma question supplémentaire s'adresse aussi au ministre de la Défense nationale.

Ce n'est qu'hier que le premier ministre a expliqué à la Chambre que les chiffres du vérificateur général sont parfois trompeurs.

(1440)

Le ministre croit-il que le vérificateur général a encore induit la Chambre en erreur dans ce cas-ci?

L'hon. David Michael Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants)): Monsieur le Président, le premier ministre parlait de la contradiction qui existe entre ce que nous estimons être des relevés de coût exacts et l'évaluation qu'en fait le vérificateur général, et je crois qu'il a expliqué en termes très clairs nos méthodes comptables respectives.

Nous avons parfaitement le droit, en tant que députés ministériels, de ne pas être d'accord avec qui que ce soit sur des méthodes comptables.

* * *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration.

L'enquête menée par le professeur James Hathaway, de Toronto, portant sur la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, commandée par son propre ministère, a conclu cette semaine que le ministre abdique ses responsabilités, que la commission fait fi des règles les plus élémentaires de justice envers les réfugiés et que des commissaires incompétents ont rendu des décisions douteuses pour des raisons discutables.

Qu'est-ce que le ministre attend pour réformer la commission et lui redonner sa crédibilité? Et qu'entend-il faire concrètement concernant les décisions déjà rendues par ces commissaires incompétents?

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.

Vers la fin de 1993, nous avons eu l'occasion d'effectuer nos premières nominations à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Nous voulions veiller à ce que le gouvernement tienne promesse et rétablisse l'intégrité et la compétence qui faisaient défaut non seulement au gouvernement, mais également aux conseils et commissions relevant de sa compétence.


493

Nous avons donc nommé 33 membres à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, nominations qui furent très bien accueillies un peu partout au pays. En fait, le député a lui-même admis que le gouvernement était sur la bonne voie et cherchait à améliorer la commission.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa): Monsieur le Président, alors que la presse soulevait aujourd'hui que la commission constitue un repaire privilégié de patronage et d'incompétence, le ministre peut-il prendre l'engagement ferme que le processus d'embauche et les nominations se feront dorénavant selon des critères de compétence plutôt que selon l'affiliation politique des postulants?

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration): Monsieur le Président, je viens juste de dire que le député, tout comme le Parti réformiste du Canada, avait applaudi aux premières nominations que nous avons effectuées.

En ce qui concerne les nominations à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, nous avons mis sur pied un processus de consultation sans précédent. Nous avons consulté des organisations non gouvernementales et des avocats de tous les coins du pays. Nous avons consulté des défenseurs de la cause des immigrants et des réfugiés.

Avant même que le rapport Hathaway ne soit déposé à la Chambre cette semaine, mes collègues et moi-même, en tant que ministre, avons proposé d'établir un système de consultation dans le but notamment de créer des comités de Canadiens intéressés qui proviendraient de tous les milieux et qui seraient chargés d'examiner les candidatures en profondeur et de recommander la nomination des candidats aptes, à leur avis, à remplir les fonctions et l'important mandat confiés aux membres de la Commission d'immigration et du statut de réfugié.

Le député devrait faire une distinction entre les nominations effectuées au mois de décembre et celles effectuées au cours des neuf années de règne du gouvernement conservateur.

* * *

LA YOUGOSLAVIE

M. David Berger (Saint-Henri-Westmount): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires étrangères.

Je crois que les Canadiens aimeraient qu'à côté de notre rôle militaire dans l'ancienne Yougoslavie, nous apportions une contribution aux efforts visant à trouver un règlement négocié au conflit.

Le ministre peut-il me dire si le gouvernement prévoit jouer un rôle plus actif du côté diplomatique? Comme contribution aux négociations, serait-il prêt à envisager de réunir des Canadiens compétents pour rechercher des moyens de mettre fin au conflit dans l'ex-Yougoslavie?

L'hon. André Ouellet (ministre des Affaires étrangères): Monsieur le Président, je remercie le député pour ses questions et pour ses intéressantes suggestions.

En plus de l'énorme contribution des Forces canadiennes sur place et de l'aide humanitaire que nous accordons à l'ancienne Yougoslavie, nous devrions envisager de lancer une initiative diplomatique.

(1445)

J'ai communiqué avec notre ambassadeur à Genève et, après le débat que nous avons eu à la Chambre des communes, je lui ai fait part du sentiment général, à savoir que toutes les voies doivent être explorées pour apporter la paix dans la région.

Quant à la suggestion de retenir les services de Canadiens renommés pour nous conseiller et nous seconder, je rappelle à la Chambre qu'un comité parlementaire sera formé pour étudier notre politique étrangère. Les membres de ce comité feront leur travail selon les règles traditionnelles, et le comité pourra entendre des témoins. Mais de plus, conformément aux engagements que nous avons pris dans notre livre rouge, nous tiendrons un colloque national de deux jours à la fin de mars prochain pour évaluer notre politique étrangère.

C'est dans un tel contexte que la population de tout le Canada pourrait être invitée à participer et à donner son avis.

* * *

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Monte Solberg (Medicine Hat): Monsieur le Président, les entreprises et les travailleurs en ont assez de ces constantes hausses des cotisations d'assurance-chômage. Ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

Le ministre acceptera-t-il de céder la gestion du programme d'assurance-chômage aux entreprises et aux travailleurs qui le financent?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, comme le député le sait, le ministre du Développement des ressources humaines, est actuellement en route pour Winnipeg en vue de participer à d'autres discussions dans le cadre d'un réexamen complet du régime d'assurance-chômage. Ce réexamen de la politique sociale tient compte de toutes les options.

Je suis certaine qu'il serait très heureux de connaître le point de vue du député et des autres députés sur ces importantes questions.

M. Monte Solberg (Medicine Hat): Monsieur le Président, j'ai une question supplémentaire à poser à la ministre. Elle sait fort bien que les charges sociales nuisent à la capacité des entreprises de créer des emplois.

La ministre peut-elle dire à la Chambre quels groupes de travailleurs et d'entreprises ont été consultés au sujet de la taxe de formation de 1 p. 100 que le gouvernement songe à imposer, selon le premier ministre et le ministre du Développement des ressources humaines?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, je rappelle au député


494

que certaines obligations légales ont été établies sous le gouvernement précédent.

Le gouvernement actuel a pris des mesures à court terme en vue de geler les cotisations des employeurs au régime d'assurance-chômage. À moyen terme, nous procéderons à un examen complet du régime, examen auquel le député est évidemment invité à participer.

Nous comptons sur sa participation ainsi que sur celle de tous les Canadiens. D'ailleurs, c'est justement pour entreprendre ce processus de consultation à l'extérieur d'Ottawa que mon collègue est parti pour Winnipeg il y a à peine dix minutes.

* * *

[Français]

LE PROGRAMME D'INFRASTRUCTURE

M. Gérard Asselin (Charlevoix): Monsieur le Président, ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrasctructure. À ce jour, le gouvernement du Canada a conclu des ententes avec les gouvernements de six provinces, notamment l'Île-du-Prince-Édouard, la Saskatchewan, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, et plus récemment l'Ontario. Alors que le Québec a déjà reçu une première contribution du gouvernement fédéral avec l'annonce de la construction du nouveau Palais des congrès à Québec, on ne peut que s'étonner de l'absence d'une entente concrète avec le Québec.

Ma question est la suivante: est-il possible que l'entente que tout le monde attend au Québec soit retardée parce que le gouvernement fédéral ne veut pas reconnaître la véritable maîtrise d'oeuvre du Québec dans ce dossier et que le gouvernement fédéral veut à tout prix avoir son mot à dire dans la sélection des projets?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): Tout d'abord, monsieur le Président, lorsque tous les premiers ministres provinciaux se sont réunis ici lors de la conférence des premiers ministres du 21 décembre, ils ont tous donné leur accord de principe au programme. Le Québec est donc partie prenante au programme.

Nous tâchons à l'heure actuelle d'établir la version définitive du texte de l'accord-cadre. Dès que ce sera fait, nous ratifierons l'accord.

Tout se passe bien à cet égard. En fait, je vois dans Le Soleil d'aujourd'hui que l'honorable André Bourbeau se serait dit très satisfait. Il s'agit du ministre responsable du programme au sein du gouvernement du Québec, qui se dit très satisfait du programme. Nous aussi.

(1450)

[Français]

M. Gérard Asselin (Charlevoix): Monsieur le Président, je désire poser une question complémentaire au ministre responsable de l'Infrastructure.

Le ministre peut-il nous dire s'il est possible que la signature avec le Québec soit retardée parce qu'Ottawa serait plutôt réticent à accorder une véritable maîtrise d'oeuvre au Québec et qu'il serait prêt à avoir son mot à dire dans le choix des projets du Québec?

[Traduction]

L'hon. Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure): La réponse est tout simplement non, monsieur le Président.

* * *

L'AÉROPORT INTERNATIONAL PEARSON

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre qui répond aujourd'hui au nom du premier ministre.

Dans sa livraison du 24 janvier, le magazine Maclean's mentionne que le premier ministre a retenu les services de Robert Wright, un avocat de Toronto qui a aussi été son principal solliciteur de fonds lors du congrès à la direction du Parti libéral de 1984; celui-ci a été chargé de négocier l'annulation du contrat relatif à la privatisation de deux aérogares à l'aéroport international Pearson.

Le ministre peut-il expliquer à la Chambre pourquoi le premier ministre a confié à un des solliciteurs de fonds du Parti libéral la tâche de négocier l'annulation d'une entente qu'il a dénoncée durant la campagne électorale parce qu'elle mettait en cause un solliciteur de fonds conservateur?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, je m'étonne que le député ne comprenne pas que l'annulation du contrat lié à l'aéroport Pearson et les négociations entreprises au sujet de l'indemnisation à verser puissent être confiées à un avocat d'expérience comme celui que j'ai désigné à titre de ministre des Transports.

M. Wright a déjà été président de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario et c'est un juriste éminent. Je suis certain qu'il examinera la question de l'indemnisation à verser par suite de l'annulation du contrat concernant l'aéroport Pearson avec le sérieux, les compétences et le professionnalisme qu'on lui connaît.

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, étant un nouveau venu à Ottawa, je reconnais que je ne suis pas habitué aux usages concernant les solliciteurs de fonds. Le ministre pourrait-il m'expliquer en quoi la nomination de solliciteurs de fonds libéraux est moralement plus acceptable que celle de solliciteurs conservateurs?

Le Président: Je crois que la discussion s'engage sur des terrains quelque peu différents. Je permettrai au ministre de répondre à la question s'il le désire.

Je demanderais toutefois aux députés d'éviter de prêter des intentions autant que possible. Le ministre veut peut-être répondre?

L'hon. Douglas Young (ministre des Transports): Monsieur le Président, il semble que le député mette en doute l'intégrité de M. Robert Wright et je trouve cela totalement inacceptable. La réputation de cet homme est sans tache.

En fait, lorsqu'il aura passé un peu de temps ici, le député se rendra compte que le premier ministre a beaucoup d'amis au Canada.


495

LE PROJET KEMANO

Mme Anna Terrana (Vancouver-Est): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des Océans.

Un grand nombre de mes électeurs, dont des représentants de groupes écologistes et des premières nations, m'ont fait part de leurs préoccupations au sujet de l'achèvement du projet Kemano.

Cette semaine, le ministre des Pêches et des Océans a laissé entendre qu'il serait peut-être en mesure de nous dire quand et comment le gouvernement entendait honorer les engagements du premier ministre et participer à l'examen que fait la British Columbia Utilities Commission sur l'achèvement du projet Kemano.

Le ministre peut-il nous faire part de quelques détails aujourd'hui? Sinon, quand pourra-t-il le faire?

L'hon. Brian Tobin (ministre des Pêches et des Océans): Monsieur le Président, je remercie la députée de sa question, qui me fournit l'occasion d'annoncer, au nom du gouvernement, qu'il a été décidé aujourd'hui de participer à l'examen qu'effectue la British Columbia Utilities Commission sur l'achèvement du projet Kemano.

Conformément aux engagements que le premier ministre a pris pendant la campagne électorale envers les citoyens de la Colombie-Britannique, des groupes autochtones et des groupes écologistes, le gouvernement fournira des documents et de l'information et il autorisera des fonctionnaires et des scientifiques à témoigner aux audiences.

(1455)

Il est dans l'intérêt du gouvernement de veiller à ce que soient prises en considération toutes les opinions sur les questions techniques litigieuses qui sont en cause. Nous allons collaborer sans réserve pour nous conformer aux engagements pris par le premier ministre.

* * *

[Français]

LE TRAIN À GRANDE VITESSE

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans): Monsieur le Président, en 1991, le Groupe de travail sur le train rapide Québec-Ontario a reconnu la pertinence de l'implantation d'un train rapide dans le corridor Québec-Windsor. Le Groupe a réalisé une étude de préfaisabilité des plus complètes qui énumère les multiples retombées économiques liées au projet.

Le chef de cabinet de l'actuel premier ministre et ex-maire de Québec, M. Jean Pelletier, était le cosignataire de ce rapport. De plus, le Groupe a procédé à une vaste consultation publique au cours de laquelle la population a rappelé la nécessité de rendre les villes du corridor plus efficaces si on veut qu'elles réussissent dans un marché compétitif.

Ma question s'adresse à la vice-première ministre. Cette dernière pourrait-elle m'indiquer ce qu'elle préfère: dépenser l'argent des contribuables pour procéder à l'abandon de tronçons de voie ferrée, ou un projet innovateur, créateur d'emplois, jobs, jobs, jobs, qui augmenterait nos exportations technologiques vers les États-Unis?

L'hon. Sheila Copps (Vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Quand on parle de jobs, jobs, jobs, on se souvient de l'ancienne déclaration de l'ami de M. Bouchard. Le Parti libéral va travailler avec le secteur privé, tel qu'on l'a préconisé dans l'étude à laquelle il fait allusion. Il s'agit d'améliorer le système de transport en commun, justement pour développer la haute technologie au Canada pour les Canadiens, mais aussi pour maintenir une infrastructure qui va donner à notre économie la possibilité de s'épanouir. Nous travaillons à plusieurs mesures, y compris la proposition mise de l'avant par le Comité bipartite. Je suis certaine que le Bloc québécois, lorsqu'on aura la chance de débattre de nos priorités budgétaires, pourra indiquer si, oui ou non, c'est sa priorité pour ce budget.

M. Guimond: Monsieur le Président, dois-je comprendre que, lorsque la vice-première ministre a appelé l'honorable chef de l'opposition par son nom, c'était tout simplement un oubli?

Le Président: À l'ordre! Oui, je demanderais à tous les députés de procéder ainsi, si c'est possible. Je sais que nous sommes en début de session, mais si nous pouvions nous référer aux gens en utilisant le nom de leur circonscription, ce serait préférable. J'encourage tous les députés à le faire si c'est possible. Je cède la parole à l'honorable député de Beauport-Montmorency-Orléans.

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans): La réponse de la vice-première ministre signifie donc qu'elle n'appuie pas les déclarations du ministre des Transports qui disait la semaine dernière que l'implantation d'un TGV ne faisait pas partie de ses priorités.

L'hon. Sheila Copps (Vice-première ministre et ministre de l'Environnement): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada tient fortement à collaborer avec le secteur privé dans tout aspect du transport qui peut aider l'infrastructure et la haute technologie. Il est évident que nous vivons une crise budgétaire, à laquelle son ami, le député de Saint-Jean, a fait allusion à maintes reprises dans cette Chambre. Il est aussi évident que le mois prochain, quand le ministre des Finances aura la possibilité de dévoiler ses priorités budgétaires, le député aura la chance de voir si on est capables à la fois de créer des emplois et de remplir nos responsabilités budgétaires. C'est un équilibre difficile à obtenir, mais nous sommes convaincus que le transport en commun à long terme est un but pour ce pays, aussi bien pour l'économie du Québec que pour celle du Canada.

496

[Traduction]

LA JUSTICE

Mme Val Meredith (Surrey-White Rock-South Langley): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.

Mardi après-midi, dans un tribunal de Vancouver, Dale John Hicks a été reconnu coupable du meurtre de Caren Rainey et de Laurie Wood.

L'accusation était ramenée de meurtre au deuxième degré à un simple homicide involontaire. La raison invoquée pour ce changement était que l'accusé n'avait pas manifesté l'intention de tuer les deux femmes, mais seulement de les agresser. Leur mort brutale-l'une a reçu 17 coups de couteau-était imputable, selon le tribunal, non à Hicks mais à la cocaïne qu'il avait consommée.

(1500)

Au nom des familles des deux victimes et de millions d'autres Canadiens, je voudrais savoir si le ministre est prêt à modifier la loi pour que la consommation de drogues ne constitue pas une excuse pour la perpétration de meurtres.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je dois dire que je ne connais pas très bien l'affaire à laquelle la députée fait allusion. Je vais donc me renseigner avant de commenter. Si la députée veut que je fasse des observations sur cette affaire, je serai heureux de le faire dès que j'aurai eu l'occasion de l'examiner en détail.

Quant à la question plus globale qui est de savoir si on peut tenir compte de la consommation de drogues dans la détermination du degré de culpabilité ou de la nature de l'accusation, je dirai simplement que le Code criminel et les recours actuels de la défense dans des procès criminels prévoient, depuis les débuts de notre système judiciaire, que les tribunaux doivent tenir compte de toutes les circonstances, y compris la question de savoir si l'accusé a agi sous l'influence d'une substance donnée.

C'est une question complexe qui ne peut être traitée dans une brève réponse. J'assure à la députée qu'une fois que je connaîtrai mieux les détails de l'affaire en cause je serai heureux d'en discuter davantage avec elle.

* * *

PORT GRANBY

M. Alex Shepherd (Durham): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Ressources naturelles.

Il y a, dans la circonscription de Durham, un endroit que l'on appelle la décharge nucléaire de Port Granby, à quelque 100 verges seulement du lac Ontario. Elle contient des résidus laissés par l'ancienne Eldorado nucléaire, une société d'État.

Bien que l'on ait déjà fait 16 millions de dollars de travaux, aux frais des contribuables, des produits continuent à être entraînés dans le lac Ontario. Qu'est-ce que la ministre entend faire pour lever cette menace pour notre communauté et l'ensemble des Grands Lacs?

L'hon. Anne McLellan (ministre des Ressources naturelles): Monsieur le Président, je reconnais l'importance, pour les habitants de Port Granby, de la question que vient de poser le député de Durham.

Il est certain que nous devons trouver un emplacement permanent pour les résidus à faible radioactivité dont parlait mon collègue. Nous avons un groupe de travail indépendant qui essaie, en consultation avec les communautés touchées, de trouver un emplacement permanent acceptable. Une fois qu'un emplacement aura été trouvé nous commencerons le nettoyage de la décharge de Port Granby.

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Michel Gauthier (Roberval): Monsieur le Président, tel que prévu à notre Règlement, j'aimerais que le leader du gouvernement nous indique les travaux que nous aurons à effectuer à la Chambre d'ici la fin de la semaine et pour la semaine prochaine, s'il vous plaît.

[Traduction]

L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada): Monsieur le Président, aujourd'hui, nous poursuivrons le débat sur l'Adresse en réponse au discours du Trône. Comme nous le savons, la Chambre siégera jusqu'à 22 heures ce soir. Ce débat se poursuivra demain également.

S'il y a lieu de mettre la motion aux voix, le vote se déroulera, si besoin est, à 18 heures mardi prochain. Lundi, la Chambre sera appelée à examiner la motion du ministre du Développement des ressources humaines qui prévoit l'établissement du calendrier d'étude des programmes sociaux par un comité. Le libellé de cette motion figurera dans le Feuilleton des avis ce soir. Mardi, nous aurons un débat spécial préalable au budget pour que les députés puissent exprimer leur opinion sur ce que celui-ci devrait contenir.

Enfin, mercredi, selon nos consultations avec les autres partis sur cette question, nous pourrions débattre d'une motion sur la réforme parlementaire.

_____________________________________________


496

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LE DISCOURS DU TRÔNE

REPRISE DU DÉBAT SUR L'ADRESSE EN RÉPONSE

La Chambre reprend l'étude de la motion: Qu'une Adresse soit présentée à Son Excellence le Gouverneur général en réponse au discours qu'elle a prononcé à l'ouverture de la session.


497

M. Derek Wells (South Shore): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à vous féliciter pour votre élection à la présidence. Dans vos observations préliminaires, vous avez cité Disraeli. Je sais que vos observations reflètent le sentiment que partagent un grand nombre des nouveaux députés à la Chambre.

(1505)

Je sais que nous sommes tous animés des meilleures intentions et j'espère qu'ensemble, à l'aide de vos conseils, monsieur le Président, nous parviendrons à redonner de la dignité et du respect tant à la politique qu'aux politiciens. Je songe également à votre conseil: rappelons-nous que nous ne sommes pas ici en raison de nos qualités, bien qu'elles y soient sûrement pour quelque chose, mais parce que des hommes et des femmes libres ont eu confiance en nous et ont cru dans les principes énoncés pendant la campagne électorale. Je vous suis reconnaissant de ces observations.

Le Président: À l'ordre. Je prierais les députés qui veulent discuter entre eux d'aller le faire derrière les rideaux.

Est-ce là le premier discours du député?

M. Wells: Oui.

Le Président: Je vous souhaite bonne chance.

M. Wells: Monsieur le Président, j'espère que tous les députés se souviendront de vos commentaires. Il va de soi que nous devons tous faire de notre mieux et oeuvrer au rétablissement du respect et de la dignité, sans quoi, aux prochaines élections, il y aura encore un nombre record de nouveaux visages à la Chambre.

Je félicite tous les députés de leur élection à la Chambre. Je suis persuadé que, comme dans mon cas, c'est pour eux un honneur et un privilège de représenter leurs électeurs et de formuler leurs préoccupations devant cette assemblée. J'ai bien hâte de collaborer avec les députés de toute allégeance politique au cours des quatre prochaines années.

Je remercie les gens de South Shore, en Nouvelle-Écosse, de la confiance qu'ils m'ont accordée le 25 octobre. À l'instar de bien d'autres, ma circonscription était représentée par un autre parti depuis belle lurette. En fait, le dernier libéral à avoir représenté South Shore au Parlement est le regretté Robert Winters qui a servi la région pour la dernière fois en 1957.

Je ne prétends pas être un autre Robert Winters, mais je peux donner aux électeurs de South Shore l'assurance que je vais tous les représenter de mon mieux et que je vais tenir les engagements que je leur ai réitérés à maintes reprises au cours du laborieux processus d'investiture et de la campagne électorale.

La circonscription de South Shore est l'une des plus grandes circonscriptions côtières du Canada. C'est là que vivent le plus de pêcheurs au Canada. En 1992, il y avait dans cette seule circonscription 5 000 pêcheurs actifs et 126 usines de transformation autorisées. La valeur du total annuel des prises voisine les 200 millions de dollars, ce qui représente une valeur marchande d'environ 375 millions de dollars.

Ma circonscription est formée de trois comtés dotés d'une industrie primaire. Le comté de Shelburne est la capitale canadienne de la pêche. Le comté de Queens est la capitale forestière du Canada. Enfin, le comté de Lunenburg passe pour la capitale canadienne de l'arbre de Noël. Avec toutes ces capitales, on pourrait presque dire que South Shore est la capitale des capitales du Canada.

Ma circonscription va de Hubbards, à l'est, jusqu'à Charlesville, 150 milles plus loin, à l'ouest. Elle pénètre dans les terres, à partir de l'océan Atlantique, sur une distance de 50 milles jusqu'aux collectivités de New Ross et de New Germany, dans le comté de Lunenburg, de Caledonia et de Greenfield, dans le comté de Queens, et, de là, jusqu'à Upper Ohio, dans le comté de Shelburne. Ses baies regroupent des milliers d'îles qui vont d'East Ironbound et Tancook, à l'est, jusqu'à l'île Seal et l'île Cap-de-Sable, à l'ouest.

Les villes historiques de Lunenburg, baie Mahone, Bridgewater, Liverpool, Shelburne, Lockeport et Clark's Harbour sont toutes situées dans la circonscription de South Shore, tout comme plusieurs petits villages pittoresques, tels Chester, où j'habite, Blandford, New Ross, Riverport, Port-Mouton, East Green Harbour et Barrington Passage. Je pourrais vous en nommer bien d'autres, si j'en avais le temps.

Je me souviens encore de ce vendredi matin, dix jours avant les dernières élections, où le premier ministre a visité la ville historique de Lunenburg, qui abrite le Bluenose, le Bounty et le Musée des pêches de l'Atlantique. Les habitants de South Shore ont été extrêmement honorés de cette visite du premier ministre, et je suis certain que beaucoup d'entre eux ont été touchés par son honnêteté et son côté très humain.

À m'entendre ainsi nommer ces villes et ces villages, on aura sûrement deviné que le tourisme joue un rôle important dans la vie des habitants de ma circonscription. Nous devons continuer à promouvoir le tourisme, car il redonne vie aux collectivités dévastées par le ralentissement des activités dans le secteur de la pêche. Le tourisme rapporte plus de cent millions de dollars par an et fournit des emplois à des milliers d'habitants de South Shore. C'est une industrie qui peut et doit jouer un rôle de premier plan dans la relance économique que nous souhaitons tous.

(1510)

Comme je l'ai dit, l'économie de ma circonscription repose principalement sur les matières premières. Les habitants de ma circonscription sont très préoccupés et très affectés par le ralentissement des activités dans le secteur de la pêche, par les problèmes qui sont survenus dans le secteur forestier, surtout dans l'industrie des pâtes et papiers, ainsi que par les problèmes et l'incertitude dans le secteur agricole.

Je crois personnellement que la pêche peut retrouver un certain essor si nous savons nous adapter au changement. J'ai confiance, et je sais que j'ai raison d'avoir confiance, en l'actuel ministre des Pêches. Je me réjouis du fait qu'il soit disposé à écouter nos revendications et qu'il soit assez courageux pour y donner suite. En faisant passer les intérêts de la collectivité avant


498

ceux des particuliers, nous pourrons trouver des solutions pratiques.

L'une des premières choses que nous devrions faire, c'est de restreindre la pêche étrangère aux extrémités des Grands Bancs. Je dois dire que je trouve encourageantes les remarques faites tout à l'heure par le Parti réformiste qui a déclaré son intention d'appuyer les mesures que le Parti libéral pourra prendre à cet égard.

Pour ce qui est du secteur forestier, je fais confiance à la ministre des Ressources naturelles. C'est en sa présence, ainsi que celle du premier ministre et d'un des habitants de ma circonscription, M. Rick Lord, président de l'Association canadienne des producteurs d'arbres de Noël, que j'ai offert en cadeau un arbre de Noël à l'Hôpital pour enfants de l'est de l'Ontario.

La ministre est au courant de ce que représentent les forêts dans ma circonscription. C'est un secteur qui regroupe 270 compagnies employant directement ou indirectement 5 000 personnes et plus. Rien que dans ma circonscription, la valeur annuelle de toutes les exportations de produits forestiers dépasse les 150 millions de dollars. La ministre sait sans nul doute combien la reconduction des accords fédéraux-provinciaux en matière forestière est importante pour la viabilité et la gestion des ressources forestières dans l'avenir.

Cependant, il n'existe pas d'emplois pour tout le monde dans cette industrie qui repose sur des matières premières. Nombreuses sont les personnes qui comptent sur les avantages que peut procurer le programme d'infrastructure récemment mis en place par le ministre responsable des infrastructures. Les douze municipalités qui forment ma circonscription se sont réjouies de l'introduction de ce programme. Non seulement ce programme est nécessaire, mais le principe sur lequel il repose, à savoir que tous les ordres de gouvernement peuvent travailler ensemble dans une perspective commune et avantageuse, est bon. J'espère sincèrement que c'est un signe positif des changements à venir.

Il y a beaucoup de questions et de problèmes à examiner. Heureusement, nous avons quatre ans pour le faire. Je voudrais tout de même aborder un autre problème. Il s'agit d'un problème dont je n'ai cessé de parler pendant la campagne électorale et depuis mon élection. Je veux parler de l'avenir des jeunes dans notre pays.

Au fil des ans, outre mes responsabilités familiales et professionnelles, j'ai consacré une partie de mon énergie aux jeunes des collectivités de South Shore. J'ai beaucoup aimé travailler avec eux et j'en ai été largement récompensé quand je vois toute l'expérience que ça m'a apportée.

Je suis attristé de constater qu'il y a tant de jeunes gens inquiets et préoccupés dans notre société. Leurs problèmes ont été éclipsés par ceux de notre génération. Ils ont été oubliés. Leur vie est difficile, leur avenir incertain. Nous devrions tous être conscients du fait que les temps qui changent, la situation économique et les sombres perspectives d'avenir qui les attendent les ont sérieusement ébranlés.

Ils ont parfois du mal à trouver quoi faire de leur temps. Il ne reste plus grand-chose des passe-temps simples de jadis. Personnellement, je sais que je n'ai jamais eu à me mesurer aux jeux vidéo qui envahissent la vie des jeunes aujourd'hui. Jamais, je n'ai eu pour me distraire à consommer de la drogue ou de l'alcool, ou encore à rester oisif.

De nos jours, l'éducation permanente est encore plus nécessaire qu'avant. Les emplois sont plus rares, les coûts plus élevés. Et que dire donc de relever la concurrence sur le marché mondial? Pour eux, ce n'est pas une tâche facile.

Où donc peuvent-ils trouver espoir? C'est dans la foi que nous avons en eux qu'ils trouvent l'espoir. Le Parti libéral a prouvé qu'il croyait en la jeunesse canadienne pendant la campagne électorale en lançant l'idée du Service jeunesse et du programme d'apprentissage. Je suis heureux que ces initiatives aient été confirmées par le discours du Trône.

Le Service jeunesse donnera à nos jeunes l'occasion de contribuer de façon constructive à leur pays tout en acquérant de l'expérience et de la confiance en eux et en perfectionnant leurs aptitudes. Le programme d'apprentissage donnera aux jeunes les qualifications requises pour réussir dans les secteurs économiques en expansion, établira des liens solides entre l'école et le milieu du travail et fera de cette option un choix de carrière valable.

Pour terminer, j'aimerais souligner que j'appuie entièrement ce programme présenté dans le livre Pour la création d'emplois-Pour la relance économique. Le gouvernement, dont je suis fier de faire partie, a été élu pour mettre ce programme en oeuvre et le discours du Trône confirme les intentions du gouvernement à ce propos.

(1515)

M. Jim Silye (Calgary-Centre): Monsieur le Président, ma question s'adresse au député de South Shore. Avant tout, je tiens à le féliciter pour son premier discours à la Chambre.

Le député nous dit que sa circonscription constitue un carrefour de l'industrie d'exploitation de ressources premières, surtout en foresterie. Il nous apprend que plus de 270 sociétés forestières y emploient 5 000 personnes. Quand ces entreprises rasent la forêt, sont-elles tenues de remplacer les arbres à intervalles réguliers durant leur contrat ou est-ce comme pour certaines autres entreprises canadiennes, qui peuvent attendre à leurs tout derniers jours d'activité pour le faire et qui réussissent ainsi à contourner cette obligation?

M. Wells: Monsieur le Président, beaucoup d'activités de reforestation ont cours dans ma province et dans ma circonscription. Chez les travailleurs de l'industrie forestière, les opinions varient à savoir s'il faut laisser faire la nature ou lui venir en aide. Si la coupe est faite dans les règles et qu'on laisse suffisamment d'arbres, la nature fera son oeuvre et la reproduction se fera normalement.

L'approvisionnement en bois et en fibres de bois est suffisant et pourrait peut-être suffire à une autre grande industrie. Ce qui est certain, c'est qu'actuellement, nos forêts sont assez bien gérées et il n'y a pas à s'inquiéter au sujet des réserves de bois ou de fibres de bois.

M. Ron MacDonald (Dartmouth): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député de South Shore. Je suis très heureux d'avoir pour collègue à la Chambre ce compatriote de Nouvelle-Écosse. Je connais le député depuis bien des années. Je pense que


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sa région a fait le bon choix en l'envoyant comme représentant à la Chambre des communes. Personnellement, je suis heureux de voir un de mes amis remplir la noble charge de député de South Shore.

Le député vient de l'une des plus belles régions du Canada. Pourrait-il nous parler de quelques-uns des beaux coins de sa circonscription et des événements particuliers qui attendent les touristes visitant sa région? Il pourrait en informer les députés et les gens qui assistent à notre débat. Le tourisme est une industrie importante de la circonscription de South Shore. Il pourrait nous donner un aperçu de ce qu'on peut y faire et lancer une invitation que certains pourraient s'empresser d'accepter. Il aurait peut-être le bonheur de les rencontrer cet été.

Le président suppléant (M. Kilger): Je ne doute pas que la circonscription du député soit bien telle que la décrit le député de Dartmouth. Je serais même très surpris que le député de South Shore ait suffisamment de temps-il lui reste environ une minute-pour rendre justice à la beauté de sa circonscription. Aucun député ne pourrait répondre convenablement à une telle demande. Je suis sûr que le député fera de son mieux pour nous en donner un aperçu très rapidement.

M. Wells: Monsieur le Président, je suppose que le plus grand risque, quand on a une minute pour traiter d'un tel sujet, c'est de passer sous silence des éléments importants.

Une campagne électorale menée en plein été m'a permis d'apprendre rapidement que, dans ma circonscription, qui fait 150 milles de longueur sur 50 milles de largeur, on peut visiter plusieurs expositions, de la grande foire de Bridgewater jusqu'à l'exposition sur la pêche, à Lunenburg, sans oublier celles de Barrington et de Shelburne. Les activités sont nombreuses, trop pour que je puisse les énumérer, qu'on pense au festival de folklore de Lunenburg ou à la semaine de courses de Chester.

South Shore n'est peut-être pas le haut lieu du tourisme estival en Nouvelle-Écosse. Je risquerais d'offenser d'autres députés de notre province si j'affirmais cela, mais les touristes y affluent sans aucun doute et un grand nombre d'activités très populaires les y attendent-de plus en plus, d'ailleurs.

Je remercie le député de m'avoir posé cette question. J'espère avoir un jour l'occasion d'en dire davantage au sujet des principaux événements qui sont organisés dans ma circonscription.

Mme Roseanne Skoke (Central Nova): Monsieur le Président, la population de Central Nova m'a autorisée à défendre ses intérêts nombreux et urgents à la Chambre des communes. C'est avec courage, détermination et intégrité que j'entends intervenir pour assurer la protection et la sauvegarde des familles, leur rendre leur droit de travailler dans la fierté et la dignité et faire en sorte que notre pays demeure uni, indépendant et libre.

En m'élisant au Parlement, la population de Central Nova m'a accordé à la fois l'honneur le plus élevé et sa confiance. Je prie Dieu de m'accorder la sagesse, la connaissance et la compréhension nécessaires pour m'acquitter de mes fonctions dans la justice, l'intégrité et l'équité.

(1520)

Les habitants de Central Nova ne doivent pas être sous-estimés. Ils connaissent les questions, voient les problèmes, éprouvent chagrin, souffrance et anxiété. Ils ont subi directement les effets sociaux et économiques dévastateurs des politiques et décisions gouvernementales. Beaucoup sont chômeurs, d'autres sont ce que j'appelle des travailleurs pauvres.

Le discours du Trône et les mesures et programmes qui y sont annoncés sont une source d'espoir pour la population de Central Nova. Certaines mesures ont déjà été mises en oeuvre dans ma circonscription, notamment le programme d'infrastructure municipale. La population met son espoir dans la création d'emplois et de nouveaux débouchés. Cet espoir trouve sa source dans le discours du Trône et dans les mesures annoncées dans le livre rouge intitulé: Pour la création d'emplois, Pour la relance économique.

Au chapitre du chômage, des emplois sont perdus ou menacés chaque jour. La lutte au chômage, la sécurité d'emploi et la création d'emplois doivent être et seront les priorités du gouvernement actuel. Le chômage est le fléau de l'humanité. Il prive les individus de leur dignité et comporte des effets dévastateurs pour la communauté et l'ensemble de la nation.

Les effets du chômage peuvent briser des familles, engendrer la violence familiale, le suicide, l'alcoolisme et la toxicomanie, entraîner un accroissement de la criminalité, créer des problèmes financiers et affectifs insurmontables et provoquer la dépendance envers l'aide sociale. Le chômage a des effets incalculables. Le coût que la société et les contribuables doivent supporter pour fournir des services de soutien aux familles en rupture est exhorbitant, de même que le prix que doivent payer les familles elles-mêmes.

Je suis fier de représenter la circonscription de Central Nova, qui est connue pour être le coeur industriel de la Nouvelle-Écosse. Ma propre ville de Stellarton a, de fait, été le berceau de la révolution industrielle au Canada. Cette révolution industrielle est survenue grâce à la découverte des machines à vapeur et à l'exploitation d'un filon de charbon de 40 pieds d'épaisseur à Stellarton. La puissance thermique fut utilisée par l'industrie dans Central Nova, notamment pour la construction navale, dans les aciéries et les scieries et les chemins de fer.

C'est à Stellarton que le premier chemin de fer en acier a été construit au Canada et il existe encore aujourd'hui.

Le premier voilier de fer jamais construit au Canada le fut à New Glasgow, une ville de Central Nova.

L'exploitation du dépôt de charbon de Pictou a donné naissance à un centre industriel dans la ville de New Glasgow. En 1883, on y inaugurait la première véritable aciérie du Canada. Il reste encore aujourd'hui la Maritime Steel et la fonderie de New Glasgow.

C'est à Trenton qu'ils ont fabriqué le premier acier jamais produit au pays. Depuis lors, on dit que la ville de Trenton, dans la circonscription de Central Nova, est le berceau de l'acier au Canada. À une certaine époque, l'usine s'appelait la Trenton


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Works et on y fabriquait des véhicules ferroviaires; elle existe encore, sous le nom de Lavalin.

Westville, ville houillère, fut constituée en septembre 1884 et fut peu à peu connue comme la ville la plus accueillante. L'extraction du charbon y avait commencé en 1865. Alors que cette ville célèbre cette année son centenaire officiel, elle a trouvé une autre façon d'exploiter ses mines de charbon; elle produit de l'énergie géothermique à partir de l'eau chaude des galeries inondées des mines abandonnées.

Pictou est une ville historique de Central Nova qui possède le plus beau port de tout le nord de la Nouvelle-Écosse. Les Écossais ont commencé à immigrer à Pictou en juillet 1773 et le centre économique des débuts, était axé sur la mer. La construction navale, était et demeure, avec les entreprises Pictou Industries, au coeur de l'économie de Pictou.

Géographiquement, Pictou est formée de Pictou-est et de Pictou-ouest. Elle est située sur la rive nord, où règnent l'industrie polyvalente des pêcheries et l'agriculture.

Il y a aussi l'industrie de la pêche, sur la côte est, dans le comté de Halifax. Le long de ce littoral, la nature a gardé toute sa beauté, le paysage marin est magnifique et les gens y sont les plus chaleureux que vous ayez jamais rencontrés.

L'industrie de la pêche de Central Nova traverse une crise qui produit des effets dévastateurs sur nos gens et menace leur subsistance sur la cote nord comme sur la côte est.

Nous avons aussi une bande de Micmacs à Pictou Landing où environ 420 personnes vivent sur 250 acres de terrain. Même si la région autour de Pictou a été colonisée par les Micmacs il y a des milliers d'années, le statut officiel de terre de réserve leur a été accordé il y a un peu plus de 100 ans seulement. L'éducation et le chômage élevé constituent des sujets de préoccupation, et la nation micmac voit d'un bon oeil le principe d'autonomie gouvernementale.

(1525)

Il est intéressant de noter qu'à Central Nova, le berceau de la révolution industrielle en Nouvelle-Écosse, il faille maintenant se préparer pour la révolution technologique. Il faut absolument que nous soyons forts en sciences et en technologie. Pour survivre à cette révolution technologique, il va falloir être instruit, car l'oppression subie par notre peuple s'explique en partie par l'absence d'éducation de qualité et d'enseignement de la lecture et de l'écriture pour nos jeunes comme pour la main-d'oeuvre.

Je sais que l'éducation est un domaine de compétence provinciale, mais je tiens à rappeler au gouvernement fédéral qu'il a, à mon avis, un grand rôle à jouer quand il s'agit d'introduire les changements nécessaires pour que soit offerte une éducation de qualité pour le bien de l'ensemble des Canadiens.

Les jeunes Canadiens n'ont ni emploi, ni espoir. Le Programme de formation de jeunes apprentis ainsi que le Service jeunesse sont deux programmes gouvernementaux qui devraient leur redonner de l'espoir.

En 17 années de pratique du droit, j'ai été à même de constater l'oppression, la manipulation et le mauvais traitement découlant de l'abus de pouvoir et d'une mauvaise utilisation des systèmes gouvernementaux que trop de gens ont subis.

Le gouvernement ne fonctionne pas comme il le devrait. Une réforme des trois organes du gouvernement-le législatif, l'exécutif et le judiciaire-s'impose pour que tous les Canadiens soient traités de façon juste et équitable.

En ce qui concerne l'organe législatif du gouvernement, il est temps que nous, en tant que législateurs, réintroduisions la responsabilité et la moralité dans la loi. La loi et la moralité vont de pair; elles sont indissociables.

En ce qui concerne l'organe exécutif du gouvernement, qui est chargé d'administrer la loi, le temps est venu de rogner un peu les ailes de la bureaucratie et d'exiger qu'elle soit davantage comptable de ses décisions et attitudes qui touchent les Canadiens.

En ce qui concerne l'organe judiciaire du gouvernement, qui est chargé d'interpréter et d'appliquer la loi, le temps est venu de songer à élire les juges. Il serait temps que la population élise les personnes dont elles doivent parfois subir les décisions.

Enfin, l'investissement le plus rentable que nous puissions faire comme pays est le soutien de ses éléments constituants qui nous fournissent le potentiel humain nécessaire pour que tout le reste marche. Le noyau familial est une institution fondamentale, le fondement solide sur lequel nos ancêtres ont bâti notre beau pays. Il convient que le gouvernement fasse de la protection de la famille, de la vie familiale et des valeurs familiales une des ses priorités. La vie commence dans la famille. La vie commence au moment de la conception et finit quand survient la mort naturelle. La famille nourrit notre raison de vivre, notre volonté de travailler et notre désir de prospérer.

Dans les débats sur des questions politiques, économiques et juridiques, l'usage veut qu'on parle plus couramment de droits individuels et d'État que de la famille. C'est dommage, et il faudrait remédier à cette lacune, car la famille est ce qu'il a de plus fondamental dans notre vie.

N'oublions pas que le Canada a été créé pour le bien des familles, et pas l'inverse. Quand les familles prospèrent, ainsi en est-il du Canada. Quand les familles sont solides et unies, ainsi en est-il du Canada.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter ma collègue de Central Nova pour son excellent discours, particulièrement émouvant, particulièrement humain aussi. Il est rare que dans cette Chambre on ait droit à cette approche humaniste-là. J'aurais quand même une question à lui poser puisqu'elle vient d'une région-ressource: la


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circonscription de Central Nova. Et, de la façon dont elle l'a présentée, c'est une région à forte domination d'activité de pêche et agricole.

J'aimerais demander à ma collègue comment elle peut se sentir bien dans un parti, le Parti libéral du Canada, qui, lors des négociations multilatérales du GATT, a laissé tomber un des piliers de l'agriculture canadienne, en particulier dans le secteur agricole, ainsi que dans le secteur laitier fortement présent dans la circonscription de Central Nova, comment elle peut vivre à l'aise dans ce parti qui a sacrifié une bonne partie des protections, un pilier important, du moins pour l'industrie laitière canadienne, et qui se fait remarquer aussi par son incurie, sa difficulté à prendre une décision dans le dossier des pêches maritimes.

(1530)

[Traduction]

Mme Skoke: Monsieur le Président, le député saura que je suis très bien au sein du Parti libéral et que je m'y sens très à l'aise. Je suis entièrement d'accord avec la philosophie et les principes du Parti libéral, dont le but consiste à assurer que tous les Canadiens bénéficient d'un traitement juste et équitable; c'est précisément pour cela que j'ai choisi le Parti libéral.

Quant aux questions relatives à l'agriculture et aux pêches, je suis convaincue que notre parti fera tout ce qu'il peut, compte tenu des contraintes qui lui sont imposées, pour que les producteurs laitiers et les pêcheurs ne soient pas laissés pour compte.

Je suis aussi honorée de pouvoir collaborer avec les ministres afin de garantir que l'on s'occupe de mes électeurs relativement à ces questions.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, moi aussi, je voudrais féliciter la députée de Central Nova. Ayant grandi en Nouvelle-Écosse, j'ai souvent parcouru les régions qu'elle représente. C'est vraiment magnifique là-bas.

La députée a parlé en termes fort honnêtes et sincères du chômage qui sévit dans sa circonscription. Or, cela fait des décennies que le chômage est un problème dans les Maritimes, et dans sa circonscription. À mon avis, le programme des infrastructures signifie que les électeurs de ce coin de pays devront assumer une autre hausse d'impôts, tant au niveau fédéral que provincial et municipal. À lui seul, ce programme ne réglera pas le problème du chômage et la formation en soi n'améliorera pas la situation, du moins elle ne la corrigera pas.

Je me demande si la députée pourrait expliquer quelle nouvelle industrie serait susceptible de renverser la vapeur. Quels changements pourrait-elle proposer pour aider les électeurs de Central Nova, outre le programme des infrastructures et celui de la formation?

Mme Skoke: Monsieur le Président, je remercie le député pour sa question.

J'ai exposé ma position quand, d'un bout à l'autre de mon discours, j'ai parlé de l'oppression de notre population. Le député a parfaitement raison de rappeler que, dans les Maritimes, dans les provinces atlantiques, les habitants ont peut-être été au chômage plus souvent qu'ailleurs au Canada. Je considère qu'il s'agit là d'une forme d'oppression.

Le problème est extrêmement grave et la solution, d'après moi, réside dans l'instruction. Bien qu'il s'agisse d'un domaine de compétence provinciale, je crois que le gouvernement fédéral doit assurer la qualité de l'enseignement, pour le bien de l'industrie, des sciences, de la technologie et du commerce, ainsi que pour le bien de tous les Canadiens, il doit donc intervenir à cet égard.

Si nos gens, nos jeunes et nos travailleurs, ont à se chercher de l'emploi, peu importe que ce soit dans le domaine des pêches ou dans un autre domaine, ils n'auront pas la tâche facile s'ils manquent d'instruction-je parle ici des connaissances élémentaires qui permettent de lire et d'écrire.

Une façon d'opprimer les habitants d'un pays, c'est de faire en sorte qu'ils ne puissent ni lire ni écrire, de sorte qu'ils ne peuvent pas comprendre ce qui se passe et qu'on peut continuer à les manipuler et à leur faire miroiter de faux programmes.

La solution pour le gouvernement consiste à se pencher sur toute la question de l'instruction. Il n'en coûte pas plus cher d'instruire sa population. Ce qu'il faut, c'est de l'ingéniosité et des connaissances élémentaires, et je crois qu'il est temps que nous revenions aux fondements de notre système d'éducation.

M. Jim Abbott (Kootenay-Est): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui à titre de représentant de la circonscription de Kootenay-Est.

Lors des élections du 25 octobre dernier, les résidents de ma circonscription ont fait confiance au programme que moi-même et le Parti réformiste allions présenter au Parlement du Canada. Mon discours d'aujourd'hui s'adresse en fait à mes électeurs. Son titre pourrait être Exigez moins.

Il est essentiel, dans ma circonscription ainsi que dans tout le Canada, que les citoyens donnent des directives claires à leurs représentants à tous les paliers de gouvernement.

(1535)

Les décisions politiques ne sont pas prises en vase clos. Les décisions liées à l'engagement de fonds publics, à la prestation de services et à l'octroi d'avantages sociaux à la population sont prises en fonction des exigences formulées par les citoyens ordinaires. Tout politicien qui veut être élu ou réélu doit se montrer réceptif et c'est pourquoi je dis à mes électeurs qu'il faut demander moins.

Suite à mon élection, je me suis fixé deux priorités immédiates. La première consiste à établir des lignes de communication avec mes électeurs, tandis que la seconde consiste à m'attaquer aux questions liées à l'exploitation minière et à leurs répercussions pour mes électeurs de Elk Valley.

Elk Valley, qui est située à l'est de Cranbrook, est une magnifique région de montagnes, où se trouve un territoire skiable à Fernie, dans les districts de Sparwood et d'Elkford. Aucune région du Canada n'a subi un préjudice aussi grave que Elk Valley par suite de mesures fiscales malavisées, de ponctions flagrantes de recettes fiscales et de surréglementation.


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Le taux de chômage à cet endroit est de 30 p. 100. Depuis environ deux ans, un nombre important de mines ont fermé leurs portes, de sorte qu'environ 2 000 personnes se sont retrouvées au chômage, ce qui a considérablement nui à l'activité commerciale de la région.

Il est intéressant de constater que le titre d'un article paru récemment dans le Bulletin de Kimberley disait: «Cominco est contrariée par le taux d'imposition municipal». La compagnie minière se plaignait du fait que le taux d'impôt pour les grandes industries à Kimberley était 69 p. 100 plus élevé que celui de Cranbrook. Lorsqu'il a justifié la décision de sa ville, le maire de Kimberley a reconnu que Cominco devait payer des taxes élevées, mais a ajouté que le taux d'impôt était justifié. Le maire a précisé que la compagnie minière s'en était bien tirée sur le plan fiscal, puisqu'elle n'a commencé à payer des impôts qu'en 1968, lorsque la propriété de la Cominco s'est retrouvée dans les limites de la ville. Et le maire d'ajouter: «C'est à ce moment que Cominco a commencé à fermer des usines et à licencier des travailleurs.»

Je ne critique pas les propos du maire de Kimberley. Je dis simplement que cette déclaration reflète fidèlement ce qui se passe lorsqu'une industrie doit payer des impôts. Lorsque ces impôts augmentent, le nombre d'emplois et d'industries diminue.

Les capitaux nécessaires à l'exploitation minière sont en train d'être investis à l'extérieur du pays. Le Chili est l'un des plus grands bénéficiaires de cet exode. Le taux d'imposition effectif dans ce pays est de 15 p. 100. Par ailleurs, le Mexique et la Papouasie-Nouvelle-Guinée ont un taux d'impôt minier de 35 p. 100. Aux Philippines, et même aux États-Unis, ce taux est de 38 p. 100, tandis qu'en Colombie-Britannique les sociétés minières doivent payer un taux de 50 p. 100. Je parle ici de l'exploitation des mines de métaux.

Dans le cas de l'industrie de la houille, il est difficile de croire qu'entre 1987 et 1991, au cours d'une période de quatre années, l'industrie du charbon en Colombie-Britannique a versé 454 millions de dollars, soit près d'un demi-milliard de dollars, en impôts directs, tandis que le rendement net de cette industrie n'a été que de 8 millions de dollars.

La population doit exiger moins du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux, des districts régionaux, des villes et municipalités, et même des conseils scolaires parce que, à mon avis, les impôts tuent l'emploi.

Par exemple, les taux d'impôts fonciers exigés des exploitants de mines de charbon sont trois plus élevés que les taux s'appliquant aux résidences. Ces impôts servent à payer les services municipaux. Le ministère de l'Environnement de la Colombie-Britannique a rendu une décision portant que la région du Kootenay-Est doit mettre en oeuvre un programme d'élimination des déchets solides. En langage clair, les déchets solides ce sont les rebuts des gens.

Ce programme coûte annuellement 3,2 millions de dollars. La part combinée de ces coûts assumée par les districts de Sparwood et d'Elkford serait de l'ordre de 940 000 $ par année. Or, les sociétés d'exploitation de mines de charbon dans ces municipalités auraient à payer 717 000 $ de cette somme.

Hier, Fording Coal annonçait qu'après une diminution de 4 p. 100 du prix de vente de son charbon de première qualité au Japon en 1993, la compagnie devait composer avec une diminution supplémentaire de 8 p. 100 de son prix de vente en 1994. Aussi souhaitable soit-il, le programme de gestion des déchets solides privera les producteurs de charbon d'une somme supplémentaire de 700 000 $, et ce au moment même où les prix baissent sur le marché mondial.

Les citoyens doivent exiger moins de leurs gouvernements, autrement, nous continuerons d'être les témoins de faillites, de pertes d'emplois et peut-être même de la désintégration totale de l'industrie du charbon d'exportation en Colombie-Britannique.

La région du Kootenay-Est n'est pas la seule aux prises avec ce problème. Le charbon doit être transporté des mines de ma circonscription jusqu'aux ports.

(1540)

Nos services de transport vers la côte sont de niveau international. L'atelier de réparation des wagons à charbon située à Golden est munie d'appareils ultramodernes. La compagnie de chemins de fer et ses travailleurs, tout comme les travailleurs du charbon, font tout leur possible pour être efficaces. Cependant, toutes les taxes et tous les impôts qui leur sont imposés vont finir par les achever.

En 1981, le prix de vente du charbon atteignait environ 67 $ la tonne. En 1991, il avait chuté pour s'établir à 60 $ la tonne. Toutefois, si l'on convertit les données de 1981 en dollars de 1991, on constate que le prix de 67 $ la tonne en 1981 était devenu 35 $ en 1991.

Les compagnies ont bien réagi et, avec le soutien de leurs employés, elles ont diminué leurs frais d'exploitation, qui sont passés de 41 $ à 22 $ la tonne, ou, encore une fois en dollars réels, à 13 $ la tonne.

Autrement dit, tous les efforts déployés ont permis de réduire les frais d'exploitation et de diminuer considérablement, soit de 70 p. 100, les dépenses d'investissement depuis 1981. Les travailleurs de l'industrie houillère et des services de transport ont manifesté énormément de détermination dans leur tentative de réduire les frais, pendant que les dirigeants politiques, devant les demandes pour des services supplémentaires et d'autres prestations sociales que lui formulaient les Canadiens, se devaient d'accroître les taxes et les impôts et d'effectuer de véritables ponctions fiscales à un rythme alarmant.

Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, certains ponts érigés par les compagnies de chemins de fer pour traverser les canyons et les montagnes entre Elk Valley et Roberts Bank rapportent chacun des dizaines de milliers de dollars en taxes de toutes sortes. Pour un pont considéré comme une amélioration, la compagnie de chemins de fer doit verser plus de 100 000 $ en taxe chaque année, simplement parce qu'il y a un canyon et qu'elle doit le traverser pour livrer le charbon à ses clients.

Au niveau fédéral, la taxe sur le carburant diesel que consomment les compagnies de chemins de fer empêche les producteurs de charbon de la Colombie-Britannique d'expédier en Ontario du charbon brûlant sans résidus. Le produit de cette taxe sur le carburant diesel que paient les compagnies de chemins de fer sert


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à construire des routes. Cela est tout à fait irréaliste et injuste: on taxe un mode de transport pour en financer un autre.

Sur la côte, au terminal de Roberts Bank, les frais de chargement du charbon destiné à l'exportation à bord des navires ont triplé au cours des dix dernières années, et les autorités du port de Vancouver, qui relèvent du gouvernement fédéral, sont directement responsables de ces frais qui continuent de croître à un taux de 10 p. 100 par année. Et pourtant, les prix du charbon continuent de chuter.

Pourtant, hier, j'ai vu dans un journal une manchette qui m'a frappé: «Selon le ministre des Finances, on pourrait imposer plus de taxes et d'impôts au Canada». Ce n'est pas vrai. Les taxes et les impôts font disparaître des emplois.

Si les libéraux se demandent pourquoi les Canadiens de l'Ouest sont crispés à l'idée qu'on impose une taxe sur les hydrocarbures, qu'ils considèrent seulement ce qu'a donné le Programme énergétique national, qui n'était qu'une ponction fiscale à peine déguisée, imposée à l'Ouest par le centre du Canada, dont nous subissons encore le contrecoup.

En Colombie-Britannique, les mines de charbon sont assujetties à des taxes plus élevées que les mines métalliques. Il semblerait que cela soit simplement une relique de l'époque honnie du Programme énergétique national qu'avait imposé l'ancien gouvernement libéral.

Le fait est que nos mines de charbon approvisionnent les marchés internationaux et que l'industrie sidérurgique japonaise va perdre trois milliards de dollars américains au cours du présent exercice. Il y a toujours un excédent de charbon à coke sur les marchés internationaux. Telle est la réalité que nous, Canadiens, devons affronter. Je répète donc à mes électeurs que nous, Canadiens, devons exiger de nos politiciens moins de services et de droits si nous ne voulons pas que nos emplois disparaissent sous le poids des impôts.

Aux membres de nos conseils scolaires, aux maires et aux conseillers de nos villes et villages, aux directeurs régionaux, aux députés provinciaux, Corky Evans et Jim Doyle, à l'honorable ministre des Mines, Ann Edwards, je dis que nous devons être prêts à réduire les coûts de fonctionnement du gouvernement si nous ne voulons pas que nos emplois disparaissent sous le poids des impôts.

Je mets les députés fédéraux au défi d'accepter, à l'instar des députés réformistes, une réduction de salaire de 10 p. 100, non pas parce qu'ils le méritent, mais bien pour montrer l'exemple. Ce n'est qu'en exigeant moins que nous obtiendrons plus, soit davantage d'emplois, de sécurité et d'avenir pour nous-mêmes et pour nos enfants.

(1545)

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot): Monsieur le Président, je remercie mon collègue du Parti réformiste pour son excellent discours avec des idées sur la fiscalité que je ne puis partager mais que je respecte. C'est justement au niveau des idées sur la fiscalité que j'aimerais faire un commentaire et aussi poser une question.

Depuis le début de la campagne électorale et depuis le début de nos activités dans cette Chambre, j'entends les députés du Parti réformiste parler de coupure uniforme de 10 p. 100, de 12 p. 100 ou de 15 p. 100, selon des députés du Parti réformiste, parce qu'ils n'ont pas, si j'ai bien compris, de ligne de parti unique à cet égard. Je me demande ce qui motive, quelle est la logique derrière une demande de coupure sombre comme celle-là, de coupure unilatérale de cette sorte. Je me demande si les gens du Parti réformiste n'auraient pas d'autres idées qui s'appelleraient, par exemple, élargir l'assiette fiscale de façon à rétablir l'équité dans la fiscalité canadienne.

Je m'explique. En 1991, on disait que chez les très riches contribuables, dont certains se retrouvent probablement dans la circonscription de mon collègue, les très riches contribuables avaient payé un taux effectif d'imposition d'à peu près 18 p. 100, alors que le taux de base était de 29 p. 100. D'autres statistiques nous disent que des fuites de capitaux de très grandes entreprises canadiennes existent aussi, ce qui fait que les profits de ces entreprises canadiennes-de très grosses, on ne parle pas de PME, on ne parle pas de TPE, de très petites entreprises, on parle de très grandes entreprises, très profitables tous les ans-sont transférés dans des paradis fiscaux, sans qu'elles paient un cent d'impôt, mais par contre leurs pertes peuvent être enregistrées à l'étranger sur le marché canadien, de façon à avoir des déductions fiscales pour ces mêmes pertes-là. Je me demande s'il n'y aurait pas des milliards à aller chercher en élargissant l'assiette fiscale. Je pense qu'on commence à comprendre un peu plus vers quoi on va aller au niveau du budget, s'il n'y a pas moyen d'aller chercher une juste part chez ces entreprises et les très riches contribuables, de façon à rencontrer exactement les objectifs dont vous faites mention depuis le début des travaux de cette Chambre.

Il est évident, monsieur le Président, et mon commentaire s'arrête là, qu'il y a un contrôle effectif des dépenses à avoir. Le vérificateur général a d'ailleurs fait mention d'un certain laxisme budgétaire lors du dépôt de son dernier rapport. Mais proposer des coupures sombres, unilatéralement, vous ne pensez pas que cela peut risquer de toucher les contribuables les plus démunis ou les contribuables à revenu moyen qui sont déjà étranglés par une fiscalité qui est devenue insupportable depuis 1984 en particulier? Je pose la question au député.

[Traduction]

M. Abbott: Monsieur le Président, je suis content qu'on me pose la question, car cela me donne l'occasion de parler un peu de la confusion à laquelle le député fait allusion.

On semble avoir du mal à mettre la main sur les documents que nous avons publiés au cours de la campagne électorale. Je me ferai un plaisir de les remettre à tout député qui en fera la demande. Nous n'y parlons pas de réductions uniformes de 10, 12 ou 15 p. 100 ni de réductions indirectes.

Nous parlons de nous assurer au moyen de réductions sélectives de pouvoir aider justement les gens auxquels le député fait allusion à la fin de sa question, à savoir les plus défavorisés de notre société.

Si nous ne disposons pas des fonds nécessaires, ce sera vraiment les plus démunis qui en pâtiront le plus. Nous avons donc mis au point un programme très précis que je me ferai un plaisir d'exposer.

Jetons un coup d'oeil sur le principe général que d'autres députés réformistes ont fait valoir clairement au cours du présent débat, à savoir que, pour chaque dollar que le gouvernement dépense, 25c. vont au service de la dette qui découle d'une


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surdépense. Cet argent est dépensé. Il n'y a aucun moyen de le récupérer.

Même si l'on supprimait le coût de fonctionnement du gouvernement, congédiait tous les députés, se défaisait de tous les fonctionnaires et fermait complètement boutique, cela n'effacerait pas la surdépense du gouvernement.

(1550)

Je dirai aux membres du Bloc québécois qu'on ne peut préserver les programmes sociaux, comme ils proposent de le faire, que si l'on est prêt à prendre des mesures sélectives pour s'assurer que les plus nécessiteux sont protégés.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia): Monsieur le Président, un ancien député m'avait dit que je prononcerais probablement mon premier discours à la Chambre devant une salle presque vide. Je ne l'ai pas cru. On doit se sentir comme moi aujourd'hui lorsque l'on prend la parole devant une salle de partisans néo-démocrates pendant une campagne électorale.

Je veux tout d'abord vous féliciter pour votre nomination. Je félicite également tous les autres députés élus à la Chambre. J'espère de tout coeur qu'en dépit du gouffre idéologique qui sépare certains députés, nous réussirons à discuter des problèmes, des problèmes presque insurmontables, auxquels nous sommes confrontés.

Je tiens à remercier sincèrement les gens qui m'ont élu, les habitants de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia. Je n'ai fait que deux promesses électorales: représenter fidèlement les électeurs de ma circonscription et exprimer leur point de vue à la Chambre, et travailler en prenant tous les moyens à ma disposition pour rétablir un sain climat financier au Canada.

Swift Current-Maple Creek-Assiniboia est une circonscription rurale de l'Ouest et la majorité des électeurs y tirent leur subsistance de la terre. Ils sont agriculteurs, éleveurs, mineurs de charbon et travailleurs du secteur pétrolier, soit le genre de personnes que les élites politiques, culturelles et journalistiques rejettent parfois en les traitant de «rednecks». J'ai moi-même été traité de redneck et c'est une étiquette que je porte avec beaucoup de fierté.

Qu'est-ce qu'un redneck? En clair, un redneck, c'est quelqu'un qui n'appartient pas aux bons clubs et qui ne souscrit pas aux doctrines sociales et politiques en vogue. Nous, les rednecks, croyons à l'idée de service au public, nous croyons que les gouvernements, les fonctionnaires, les politiciens et les partis politiques existent pour servir le peuple et pas l'inverse. Nous croyons que les droits individuels sont sacrés, qu'ils priment les droits collectifs et que, de plus, vous ne pouvez pas protéger et élargir les droits de certains groupes au détriment d'autres groupes. Les droits sont indivisibles.

Nous croyons aux vertus du dur labeur et de l'initiative personnelle. Nous croyons fortement que ceux qui produisent la véritable richesse ont le droit de conserver une portion raisonnable des fruits de leur labeur, que leur niveau de vie ne devrait pas être inférieur à celui des multitudes de non-productifs dont le percepteur de taxes les oblige à porter le fardeau.

Les taxes sont tellement élevées au Canada que les travailleurs commencent à avoir de la difficulté à faire la distinction entre un percepteur et un voleur de grand chemin.

Nous croyons à l'entraide communautaire. Ce type d'entraide a rendu la vie possible dans nos collectivités bien avant que le gouvernement n'étende ses tentacules pour venir nous étrangler il y a environ deux générations. Les voisins aident les voisins.

Nous parlons un anglais simple et direct. Entre amis et entre voisins, il n'est pas du tout rare, même encore aujourd'hui, d'entendre des phrases comme «affaire conclue» ou «cela ne te regarde pas».

J'ai exposé ma philosophie. Je crois qu'elle est assez représentative de celle des gens qui m'ont élu. Cependant, il y a quelques personnes, très peu, à Swift Current-Maple Creek-Assiniboia qui sont aussi «politiquement corrects» que peut souhaiter l'être un député et je ne dois jamais oublier que mon devoir est de les représenter eux aussi.

L'avenir du Canada semble plus sombre qu'il ne l'a jamais été depuis la Seconde Guerre mondiale. Le précédent gouvernement nous a laissé en héritage une dette, un déficit et un pays divisé, c'est pourquoi le Parti progressiste-conservateur a été rayé de la carte, ce qu'il n'avait que mérité. Cependant, nous ne devons jamais oublier, ni laisser le gouvernement oublier, que les problèmes trouvent leur origine sous les gouvernements libéraux des années 1970. Même s'il n'en est pas à l'origine, le Parti conservateur n'a fait que les nourrir et les aggraver.

(1555)

Ainsi, lorsque je pense que nous avons 177 députés libéraux devant nous, cela me fait frémir un peu, mais je me rappelle alors que plus de la moitié d'entre eux sont comme moi. Ce sont des nouveaux venus à la Chambre et ils ne sont aucunement responsables du désastre des années Trudeau. Je m'attends, avec optimisme, à ce que beaucoup d'entre eux aient des idées toutes nouvelles à nous proposer. Ce ne sont pas eux qui ont rédigé le discours du Trône, qui manque certainement de nouvelles idées et qui ne propose aucune mesure sérieuse en vue de maîtriser le déficit, mais ces lacunes seront peut-être comblées lorsque le gouvernement présentera son premier budget.

Si le gouvernement a vraiment l'intention de s'attaquer au déficit, je prie pour que son arme de choix soit un couteau pour couper dans les dépenses et non un fusil pour aller chercher encore plus d'argent dans les poches des contribuables.

Ne pouvant plus compter sur son économie agricole, la circonscription de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia dépend beaucoup de la production de combustibles pour sa survie. Nous avons plusieurs petits champs de pétrole, un peu de gaz naturel et l'une des plus importantes mines de charbon du pays.


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Depuis plus de trois ans, les politiciens fédéraux, y compris certains membres du gouvernement actuel, parlent d'imposer une taxe sur les combustibles fossiles, qui serait habilement déguisée en taxe écologique.

Selon une étude que le gouvernement a fait faire l'an dernier, une taxe sur les combustibles fossiles assez élevée pour empêcher l'utilisation de ces combustibles aurait un effet néfaste sur presque toutes les mesures de l'activité économique, y compris le produit intérieur brut, le niveau des investissements industriels, l'indice des prix à la consommation et le taux de chômage.

Tout ce dont les agriculteurs en difficulté de la Saskatchewan ont besoin, c'est une autre taxe sur les combustibles. À cause de toutes ces taxes, notamment une taxe fédérale de 12 cents le litre, le pétrole produit et raffiné à Regina se vend déjà un tiers moins cher au Montana, à 50 milles de chez moi.

J'ai parlé de notre mine de charbon. Toute sa production annuelle, soit 3,6 millions de tonnes métriques, est vendue à un seul client, la centrale électrique de Poplar River à Coronach. Une taxe sur ce charbon augmenterait le coût de l'électricité pour les consommateurs non seulement de la circonscription de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, mais de toutes les régions de la Saskatchewan.

Par contre, cela n'aurait presque aucun effet sur le coût de l'électricité au Québec, où elle vient principalement des centrales hydroélectriques, et en Ontario, où elle est produite en majeure partie par les centrales nucléaires. C'est le fantôme du programme énergétique national qui revient, enveloppé cette fois dans la couverture verte de l'environmentalisme.

Je n'ai pas la berlue. C'est peut-être un cauchemar, mais je n'ai pas la berlue. Les rumeurs d'une taxe sur les combustibles fossiles persistent et elles sont tout à fait compatibles avec les propos que tenait le ministre des Finances lorsqu'il siégeait de ce côté-ci de la Chambre.

Le deuxième cauchemar de l'industrie énergétique, qui touche davantage l'Alberta que ma conscription, c'est que le gouvernement compte limiter les exportations de gaz naturel, étouffant ainsi le secteur le plus vigoureux de l'économie canadienne, mais créant du même coup un excédent qui fera baisser les prix en Ontario et au Québec, là où sont la majorité des votes.

En terminant, je tiens à réitérer la position de mon parti, qui est convaincu que le moyen le plus efficace de réduire le déficit est de couper dans les dépenses et non de hausser les impôts. Durant la campagne électorale, le Parti réformiste a fait deux douzaines de propositions visant à réduire le déficit. Il ne fait pas de doute que bon nombre d'entre elles seraient inacceptables pour le gouvernement du point de vue idéologique, mais certainement pas toutes.

Le 25 octobre dernier, les Canadiens ont demandé clairement qu'on change de cap. Le gouvernement a reçu un mandat clair et il est obligé de passer aux actes. S'il choisit la voie la plus facile, celle qui a été suivie au cours des 20 dernières années, et que notre pays finit par s'effondrer malgré son énorme potentiel, les Canadiens ne lui pardonneront jamais cette erreur.

(1600)

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les propos du député. Ils m'ont aidé à comprendre bien des choses. Je dois cependant dire également que je fais partie de ces nouveaux libéraux dont le député a parlé dans son intervention. Il y a par ailleurs certaines choses que je ne comprends pas très bien, et j'espère que le député pourra me donner des précisions.

Je n'ai pas cessé d'entendre toute la journée de la bouche d'autres députés du Parti réformiste que ce parti semble opposé universellement à toute hausse d'impôt. Le parti propose en fait, comme l'a dit le député, de diminuer les impôts. On trouve juxtaposée à ce thème constant l'idée que les députés devraient accepter une réduction de 10 p. 100 de leur traitement. Je trouve cette juxtaposition très intéressante.

Voici la question que je veux poser au député. Quand on examine ces deux propositions ensemble, faut-il comprendre que le député et le parti auquel il appartient préconiseraient d'imposer une surtaxe de 10 p. 100 à tous ceux qui gagnent 60 000 $ et plus?

M. Morrison: Monsieur le Président, je remercie le député de sa question. La réponse est non, évidemment non. Nous ne préconisons ni n'approuvons quelque hausse d'impôt que ce soit pour qui que ce soit.

À propos des députés, dont je suis, qui acceptent une réduction de traitement de 10 p. 100, nous avons pris cette initiative pour donner l'exemple au gouvernement et l'inciter à réduire les dépenses. Voilà ce que nous ne cessons de répéter: il faut réduire les dépenses.

M. Harvard: Dites la vérité, vous ne l'avez pas tous acceptée.

M. Morrison: À ma connaissance, nous l'avons tous acceptée, mais vous parlez. . .

M. Harvard: Je veux simplement que vous disiez la vérité. Vous adoptez ici une attitude tellement moralisatrice. . .

Le président suppléant (M. Kilger): Je sais que le débat d'aujourd'hui suscite beaucoup d'intérêt et qu'on défend des points de vue bien tranchés de part et d'autre de la Chambre, mais je tiens à rappeler aux députés de bien vouloir adresser leurs paroles à la présidence.

M. Morrison: Monsieur le Président, je crois que la coutume à la Chambre veut qu'on n'accuse pas d'autres députés de ne pas dire la vérité. N'est-ce pas exact?

M. Harvard: Je vous ai demandé de dire la vérité.

Le président suppléant (M. Kilger): Oui, la tradition à la Chambre veut qu'on se considère les uns les autres comme ce que nous sommes bien sûr, d'honorables députés.

M. Morrison: Monsieur le Président, si le député veut se donner la peine de venir vérifier mes livres, il verra que j'ai effectivement accepté cette réduction. . .

M. Harvard: Je n'ai pas dit le contraire.

M. Morrison: . . . et quant aux autres députés de mon parti, je n'ai pas vérifié leurs livres, mais à ma connaissance, ils l'ont acceptée. C'est tout ce que je sais. Si le député est au courant de quelque chose d'autre, il devrait me le dire.


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Est-ce qu'il y avait une question à ce sujet ou ne s'agissait-il que d'une interruption? Il n'y avait apparemment pas de question.

Le président suppléant (M. Kilger): La question ou l'observation venait initialement du député de Hamilton-Wentworth.

Il reste quelques minutes dans la période réservée aux questions et observations. La parole est au député de Durham.

M. Alex Shepherd (Durham): Monsieur le Président, l'exposé du député de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia était très intéressant.

Le député a parlé de la structure de la dette de notre pays. Je tiens à signaler que, au Canada, la dette de la Saskatchewan est l'une des plus élevées par habitant et que, à ma connaissance, les libéraux ne sont en rien responsables de cette situation.

Par ailleurs, je suis très conscient de la nécessité de réduire les dépenses et je crois que tous les Canadiens s'entendent là-dessus. Je remarque toutefois que nos dépenses les plus importantes à l'heure actuelle concernent les subventions aux céréaliculteurs. J'aimerais connaître l'opinion du député sur cette question.

M. Morrison: Monsieur le Président, je remercie le député de ses observations. Le Parti réformiste a dit clairement qu'il souhaitait la suppression progressive de l'ensemble des subventions dans tous les secteurs de l'économie, y compris celui de la céréaliculture, à condition que cela se fasse progressivement, mais systématiquement. Presque tous les Canadiens -et probablement moi aussi, si je me reporte suffisamment loin en arrière -ont déjà reçu une subvention. Je crois d'ailleurs que la plupart des députés fédéraux qui ont des intérêts dans des entreprises privées bénéficient d'une subvention sous une forme ou une autre. Nous nous opposons à cela.

Une voix: Parlez pour vous.

(1605)

M. Morrison: S'il y réfléchit bien, le député se rendra compte que nous sommes tous corrompus malgré nous, parce que le système fait en sorte que nous le soyons. Un monstre a été créé.

Des voix: Oh, oh!

M. Rideout: Demandez-lui de se rétracter. C'est une honte!

Le président suppléant (M. Kilger): Je suis désolé, je n'ai pas entendu ce qu'a dit le député de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia. J'inviterais tous les députés à se montrer coopératifs et à invoquer le Règlement s'ils veulent prendre la parole.

Le temps est écoulé.

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester): Monsieur le Président, c'est pour moi un honneur de prendre la parole au nom de mes concitoyens de Cumberland-Colchester.

L'histoire de ma circonscription est intimement liée à celle du Canada. En effet, deux des Pères de la Confédération sont originaires de Cumberland-Colchester, sir Charles Tupper et sir Adams George Archibald, dont le premier a été brièvement premier ministre du Canada. C'est aussi chez moi, à Truro, qu'est né un éminent Canadien, Robert Stanfield.

Au cours des deux conflits mondiaux, beaucoup de jeunes gens de ma circonscription ont servi sous les drapeaux et nombre d'entre eux sont tombés au champ d'honneur. Bien des anciens combattants savent que les Highlanders ont pris part à cet assaut historique qui a marqué le début de la libération de l'Europe occidentale, il y a un demi-siècle. Fort Cumberland, premier lieu historique que, arrivant du Nouveau-Brunswick, on voit en Nouvelle-Écosse, a été témoin de nombreux affrontements. Les premiers ont mis aux prises les Micmacs et les colons britanniques. Le traité de 1752 a enfin instauré la paix, et l'une des principales localités micmacs de la Nouvelle-Écosse, Millbrook, est située tout près de Truro.

En 1755, les Acadiens, premiers colons européens de Cumberland-Colchester, ont été déportés parce qu'ils refusaient de prêter allégeance à la Couronne britannique pendant la guerre de Sept Ans qui l'opposait à la France. Certaines familles acadiennes, à force de persévérance, ont fini par revenir chez elles. Beaucoup de leurs descendants cultivent aujourd'hui la terre dans le bassin Minas, autour des localités de Joggins et Minudie. Les fameux aboiteaux que les ancêtres du XVIIe siècle ont bâtis pour gagner sur la mer des marécages salés sont toujours en place aujourd'hui, protégeant les terres agricoles des incursions de la mer. Un peu plus de 20 ans plus tard, de nouveaux troubles éclataient à Fort Cumberland: le colonel Jonathan Eddy, de l'armée continentale, essayait, au nom de la révolution américaine, de fomenter la révolte parmi les colons originaires de Nouvelle-Angleterre qui avaient remplacé les Acadiens. S'il avait réussi, ce qui aurait fort bien pu arriver, le Canada serait aujourd'hui privé de sa côte atlantique.

Cumberland-Colchester compte aussi beaucoup de Noirs qui ont derrière eux une longue et riche histoire. Certains de leurs ancêtres, hommes libres venus de Jamaïque, ont aidé à bâtir la citadelle de Halifax. Ce sont ceux que l'histoire a appelés les Maroons. D'autres, des loyalistes, sont arrivés plus tard et puis d'autres encore ont suivi, esclaves fugitifs venus par le «chemin de fer» clandestin. Comme Truro est devenue un important noeud ferroviaire, beaucoup de noirs s'y sont installés se mettant aux services des compagnies ferroviaires.

En parcourant ma circonscription, depuis les localités côtières de Pugwash, Wallace, Parrsboro et Advocate jusqu'aux centres plus importants que sont Springhill, Truro et Amherst, on remarque que le paysage est aussi divers que les habitants qui l'animent. Cette riche histoire trouve son expression dans la culture des habitants et la beauté du paysage. C'est ce pays et ces gens que j'aime tellement. Je remercie du fond du coeur chacun d'eux, que j'ai l'honneur de représenter dans cette Chambre magnifique.

Pour beaucoup de mes électeurs, les dix dernières années ont été les plus cruelles qu'ils aient jamais vécues. Ils ont vu s'effri-


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ter continuellement les services de l'État qui répondent aux besoins fondamentaux des ruraux. Partout au Canada, des petites localités en proie aux difficultés économiques luttent pour conserver leur bureau de poste, leurs banques, leurs chemins de fer, leurs services d'autobus.

Il ne faut pas oublier que, lorsque nos localités rurales disparaissent, bon nombre de leurs habitants se retrouvent dans les villes, sans logement, dans des conditions pathétiques. Toutes les statistiques montrent qu'il coûte moins cher de vivre à la campagne. Ce que le gouvernement doit faire, c'est assurer un niveau de services minimum pour garantir la survie du Canada rural.

(1610)

Le bureau de poste est probablement le seul établissement fédéral visible pour les Canadiens qui vivent à la campagne. Si vous privez ces gens-là de leur bureau de poste, comme Postes Canada l'a fait dans plus de 1 400 petites localités, y compris sept dans ma circonscription, c'est comme si vous leur disiez qu'ils ne comptent pas vraiment.

J'ai été frappée par les propos du gouverneur général la semaine dernière quand il a dit qu'il était essentiel que la population fasse confiance au gouvernement pour que ce dernier puisse réaliser son programme. Je me réjouis que le gouvernement soit déterminé à maintenir le service postal rural, comme je me suis battue pour sauver le bureau de poste de Truro et redonner sa dignité au Canada rural.

Mes électeurs de Cumberland-Colchester sont très sensibles à tout ce qui menace leurs principes et leurs valeurs. Jusqu'à tout récemment, ils vivaient dans des localités où personne ne verrouille ses portes, où les actes de vandalisme, le vol, les meurtres et les agressions sont très rares. Hélas, ce n'est plus le cas.

Ils se préoccupent surtout de la Loi sur les jeunes contrevenants. Nombre d'entre eux estiment que cette loi est inefficace, qu'elle n'a aucun effet dissuasif et qu'elle ne réhabilite pas les contrevenants. Par-dessus tout, ils sont d'avis que la loi devrait être modifiée pour accorder une vraie justice aux victimes.

En 1989, la famille et les amis d'Andrea Rogers ont fondé une section de la Citizens United for Safety and Justice à Truro. Leur objectif principal est de veiller à ce que la sécurité des enfants et de tous les citoyens canadiens innocents l'emporte sur les droits des criminels.

Un chauffard a tué Andrea Rogers à North Vancouver. Une fois capturé et trouvé coupable, le chauffard, qui était un jeune contrevenant, a été condamné avec sursis à 100 heures de travail communautaire et à une année de probation en plus de perdre son permis de conduire pour deux ans.

Je voudrais remercier les parents d'Andrea Rogers, Citizens United for Peace and Justice et la section de Truro de la Fédération canadienne des femmes diplômées d'universités des modifications qu'ils ont proposées à la Loi sur les jeunes contrevenants. Je tiens à les assurer que je les ai présentées au ministre de la Justice et que je les défendrai vigoureusement à la Chambre.

Je veux que nous respections l'engagement que nous avons pris pendant la campagne relativement à un meilleur contrôle des armes à feu. Nous devons consulter de très près les provinces et respecter les groupes de tireurs sportifs afin de pouvoir désarmer les criminels et les irresponsables sans porter préjudice aux propriétaires d'armes à feu responsables et respectueux des lois.

J'applaudis donc à l'intention du gouvernement de rétablir la Commission de réforme du droit. J'espère aussi qu'il remplira sa promesse de consulter largement le public sur la détermination des peines, les libérations conditionnelles et d'autres questions de justice pénale.

La région de l'Atlantique est perçue comme une région où les difficultés économiques sont profondément enracinées alors que nous avons des milliers de petites entreprises prospères et que nous comptons parmi nous nombre de familles ayant réussi dans les affaires, comme les Sobey, les McCain et les Irving. Notre problème n'est donc pas un manque d'esprit d'entreprise, mais plutôt un manque de capitaux.

Paradoxalement, la région de l'Atlantique génère un capital considérable sous forme d'épargne, de cotisations de retraite et d'investissements. Mais, hélas, tout cet argent est placé ailleurs. C'est pourquoi j'applaudis à l'engagement que le gouvernement a pris de travailler avec les établissements financiers nationaux pour accroître l'accès des petites entreprises aux capitaux et stimuler la création d'emplois.

J'applaudis à la proposition du discours du Trône de favoriser la formation d'un partenariat technologique entre nos universités et établissements de recherche, d'une part, et le secteur privé, d'autre part. Dans ma circonscription, le Nova Scotia Agricultural College le fait depuis un certain temps. Cet établissement a mis son expertise au service non seulement des agriculteurs et des entreprises de transformation alimentaire de la région de l'Atlantique, mais encore des pays en voie de développement et des pays de l'Europe de l'Est.

Le baccalauréat en agronomie du Nova Scotia Agricultural College est largement reconnu. De plus, le collège propose maintenant un nouveau programme d'aquaculture. Je félicite le personnel du collège d'avoir eu la prévoyance de reconnaître qu'en raison du déclin constant de la pêche marine, la région de l'Atlantique pourrait saisir l'occasion qui s'offre à elle de se tailler une place dans l'aquaculture, qui devrait d'ici l'an 2000 fournir un quart de la production de poisson. Je félicite également le personnel du collège d'avoir créé de nouveaux programmes pour nos jeunes dans un domaine appelé à fournir de vrais emplois. Le projet d'aquaculture va tellement dans le sens de l'engagement du gouvernement qui veut encourager la formation et la mise au point de nouvelles technologies que je voudrais dire devant tous que je l'approuve et demander à mes collègues d'en faire autant.

(1615)

Les agriculteurs de Cumberland-Colchester acceptent de bonne grâce que les nouvelles règles du GATT signifient qu'ils vont ultimement devoir changer les structures de marketing selon lesquelles ils ont fonctionné jusqu'à présent. Les pêcheurs de homard de la côte nord savent qu'ils doivent pêcher de plus gros homards s'ils veulent que la pêche au homard reste viable.


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Les proporiétaires de terres à bois savent qu'ils ne peuvent raisonnablement espérer avoir une nouvelle entente fédérale-provinciale de mise en valeur des forêts comme celle qu'ils ont à présent.

Venant des milieux d'affaires, j'ai toujours tendance à faire un parallèle entre le gouvernement et l'entreprise. Tout comme l'entreprise doit être à l'écoute du client, le gouvernement doit être à l'écoute du public qu'il est censé servir. Tout comme une entreprise doit avoir des employés qualifiés, le gouvernement doit être composé de gens intègres. Enfin, tout comme la confiance de l'employé est essentielle au succès de l'entreprise, la confiance de l'électorat est capitale pour le succès de notre gouvernement.

C'est une période on ne peut plus passionnante pour un député. Je félicite le premier ministre de planifier de tels débats entre les partis avant de prendre des décisions. Cette semaine, il y a eu un débat sur les essais des missiles de croisière et un autre sur le maintien de la paix. La semaine prochaine, ce sera le débat précédant la présentation du budget. Si nous restons fidèles au principe que la politique économique doit venir appuyer la politique environnementale et la politique sociale, la tenue de débats transparents sur les dépenses publiques nous aidera assurément à gagner la confiance de l'électorat.

[Français]

M. René Canuel (Matapédia-Matane): Monsieur le Président, je félicite ma collègue. Elle a parlé du monde rural. Elle semble très attachée aux petites paroisses. Elle a parlé également des bureaux de poste. Il est vrai que les bureaux de poste d'une petite paroisse sont drôlement importants.

Dans ma circonscription, nous avons le Ralliement populaire; auparavant, nous avions eu Opération dignité, justement pour sauvegarder des petites paroisses parce que tant vaut la paroisse, dit-on, tant vaut la ville! Quand des petites paroisses ne seront plus, des petites villes disparaîtront.

C'est un écho pour moi, ce que ma collègue députée a dit, et qu'elle soit assurée qu'en moi elle trouvera un associé.

Maintenant, en ce qui concerne les bureaux de poste, un de mes commettants m'a appelé pour me dire que des comptoirs postaux s'ouvraient encore. Bien qu'on ne ferme pas le bureau de poste comme tel puisqu'un moratoire est ou sera decrété, je demande à madame la députée s'il est vrai, s'il est possible qu'il y ait des comptoirs postaux qui ouvrent en parallèle?

[Traduction]

Mme Brushett: Je remercie le député de sa question. Un peu partout dans notre pays, les Canadiens s'inquiètent au sujet de la disparition des bureaux de poste ruraux. Notre gouvernement a eu pour mandat de mettre fin au processus de fermeture des bureaux de poste. On se rappellera que, peu après l'élection de notre gouvernement, le ministre des Travaux publics a interrompu la fermeture des bureaux de poste. Notre mandat est de faire en sorte que ce gel soit maintenu jusqu'à ce que nous ayons examiné toute la question du rétablissement des services dans les bureaux de poste ruraux de l'ensemble du Canada.

M. Jack Ramsay (Crowfoot): Monsieur le Président, je tiens à mon tour à féliciter la députée de son discours que je qualifierais d'excellent. Je veux la rassurer et lui dire qu'elle aura beaucoup d'appui pour ce qu'elle a dit au caucus du Parti réformiste.

(1620)

J'ai cru pendant un certain temps que la réforme qui s'étend à tout le pays ne s'arrête pas aux plates-bandes du Parti réformiste du Canada.

Je voudrais demander à la députée si elle ne voudrait pas utiliser le temps dont elle dispose pour expliciter davantage sa pensée sur deux thèmes qu'elle a abordés, soit celui de la Loi sur les jeunes contrevenants et celui de la loi relative au contrôle des armes à feu. Aurait-elle l'obligeance de nous préciser dans quel sens elle souhaite que ces deux lois soient modifiées.

Mme Brushett: Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention. J'en retiens surtout l'idée que la question des bureaux de poste doit transcender les lignes partisanes et celle que les partis ont convenu d'être une ligne de conduite commune, à savoir la promesse de desservir les Canadiens vivant en région rurale puisqu'ils constituent la pierre angulaire de notre pays.

En ce qui concerne la Loi sur les jeunes contrevenants et les mesures législatives portant sur le contrôle des armes à feu, les électeurs de ma circonscription ont exprimé leurs points de vue. Il y a le cas de la jeune fille dont les parents demeurent dans ma circonscription. Étudiant à l'université, à Vancouver, elle a été frappée et tuée par un jeune contrevenant. Comme je l'ai dit précédemment, on exerce très peu de représailles pour ce genre d'infraction.

De nombreuses recommandations m'ont été faites en ce qui concerne la Loi sur les jeunes contrevenants et les mesures législatives ayant trait aux armes à feu. Sans vouloir trop entrer dans les détails, disons que je vais les présenter au ministre de la Justice et que j'interviendrai à la Chambre, lorsque ces questions seront débattues, pour bien faire comprendre que le but ultime de l'exercice est de rendre justice, de prendre en compte la victime, d'assurer la réhabilitation du jeune contrevenant, plutôt que de le laisser moisir en prison, tout en lui infligeant une peine qui corresponde à la gravité de son crime.

Pour ce qui est du contrôle des armes à feu, sans être pour l'interdiction totale, nous souhaitons que les contrevenants soient punis plus sévèrement, plutôt que de supprimer carrément toutes les armes à feu.

[Français]

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert): Monsieur le Président, le discours du Trône a malheureusement passé sous silence deux sujets particulièrement importants. Mais, avant de les aborder, permettez-moi de m'adresser d'abord aux électeurs de mon comté pour les remercier de leur appui majoritaire à l'option de la souveraineté du Québec.

Les électeurs de Saint-Hubert ont ratifié sans équivoque le geste que je posais le 12 août 1991 quand j'ai joint le Bloc québécois. La population a aussi endossé ma décision dans une


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proportion de 56,6 p. 100 et m'a donné une majorité de 15 000 voix sur mon adversaire libéral.

Le comté de Saint-Hubert est un centre aéroportuaire et aérotechnique de pointe. Campé sur la rive sud de Montréal, majoritairement francophone à 84 p. 100, il regroupe les villes de Saint-Hubert, de Lemoyne, d'une partie de Longueuil, de la ville de Greenfield Park où se trouve concentrée une population anglophone dynamique.

C'est d'abord la voix de chacun de mes électeurs que je désire faire entendre dans ma réponse à ce discours du Trône. Ce discours soulève la déception universelle par la pauvreté des solutions économiques qu'il a annoncées et par l'absence de messages clairs pour les sans-emploi et les citoyens à faible revenu.

Dans son adresse, le chef de l'opposition a dénoncé l'absence de vision de ce gouvernement incapable de redonner au pays l'espoir d'une véritable relance économique.

D'autres avant moi ont déjà fait l'inventaire des profondes interrogations que laisse le discours du Trône dans les secteurs de l'économie, de la fiscalité et des finances publiques.

J'interviens, pour ma part, sur deux questions que pose la conscience nationale et sur lesquelles ce gouvernement ne semble avoir aucune position prévisible. En même temps que les préoccupations économiques nous tenaillent, les questions sociales sont également pressantes.

Alors que les populations du Canada et du Québec réclament impatiemment l'intervention radicale de l'État à l'égard de la criminalité, le discours du Trône déçoit amèrement par ses silences sur l'urgente nécesssité d'un véritable contrôle des armes à feu. La législation actuelle, même récemment améliorée, oblige à des correctifs pour la réalisation de ses objectifs.

(1625)

Nous avons entendu dans ce discours la proclamation de bonnes intentions, mais quelles seront les mesures positives et concrètes destinées à favoriser la sécurité publique et la prévention du crime, tel que mentionné dans le fameux discours, qu'on nous promet sans les identifier?

Les drames familiaux impliquant des carabines, des pistolets et des revolvers s'accumulent. Les femmes sont encore les victimes les plus fréquentes des agressions meurtrières avec des armes dont la possession est prohibée ou restreinte. L'arme de poing est encore un mode privilégié du suicide. Tous s'accordent pour dire que les amendements apportés par le projet de loi C-17 sur le contrôle des armes à feu marquaient un pas dans la bonne direction, mais les Canadiens et les Québécoises et Québécois vous disent que ce n'est pas assez.

Malgré les nouveaux règlements qui favorisent un filtrage plus sévère à l'acquisition des armes à feu, il demeure troublant que des armes semi-automatiques ne soient pas encore interdites aux civils. La plupart des armes à feu circulent toujours librement, sans enregistrement, et la possession des pistolets et des revolvers n'est restreinte qu'aux formalités d'un certificat gratuit.

Un sondage Angus Reid des 15 et 16 septembre 1993 démontrait le vaste appui populaire à l'enregistrement de toutes les armes à feu: 86 p. 100 de l'ensemble des Canadiens, dont 91 p. 100 des Québécois, le réclament, alors que 70 p. 100 des Canadiens, dont 79 p. 100 des Québécois, veulent l'interdiction pure et simple des armes d'assaut et des armes de poing.

Où lit-on dans le discours du Trône la volonté du gouvernement de répondre à ces attentes urgentes et d'apaiser les inquiétudes des citoyens de toutes les provinces? Nous savons tous que les priorités législatives de cette Chambre sont d'ordre économique en cette période extrêmement difficile pour les Canadiens et les Québécois. Toutefois, la lutte à la criminalité devrait s'imposer en tête de liste des préoccupations majeures du gouvernement, surtout et justement à cause des tensions sociales et des drames personnels liés à la situation économique.

Même avec les derniers amendements au Code criminel, la procédure d'acquisition d'une arme à feu demeure simple et d'un coût symbolique. Cette Chambre devrait intervenir courageusement, au-delà des enjeux partisans, et donner aux Canadiens la protection qu'ils espèrent. On évalue qu'actuellement, plus de six millions d'armes de poing circulent au Canada. Belle statistique.

Il nous faut un système universel d'enregistrement de toutes les armes à feu, une réglementation sur la vente, l'échange et la revente, et une véritable politique d'encadrement des vendeurs qui devraient payer des droits de licence pour financer les programmes de contrôle. Il faut limiter l'acquisition des armes à autorisation restreinte par l'obligation d'obtenir des permis annuels que paieraient les utilisateurs de ce genre d'armes.

Il faut soumettre l'achat des munitions à un permis d'acquisition. Il faut permettre à tous les citoyens de s'opposer facilement à toutes les demandes de permis d'acquisition ou de port d'armes en les avisant de l'intention des requérants par la publication au préalable d'un avis de la demande dans les journaux, comme c'est le cas pour plusieurs catégories de permis, par exemple pour la vente d'alcool.

Il faut prohiber toutes les armes automatiques et semi-automatiques, imposer des sentences minimales sévères aux citoyens coupables de possession illégale d'armes à feu et donner aux registraires locaux les pouvoirs d'enquête obligatoire. Il faut enfin, et surtout, hausser immédiatement le coût des permis pour que les provinces bénéficient de budgets plus importants d'application de ces contrôles, sans lesquels les meilleures lois demeureront sur la tablette des pieuses intentions.

Si toutes ces mesures étaient en place, je suis persuadée que le vérificateur général n'aurait pas fait les commentaires sur la contrebande des armes à feu que nous avons lus dans son rapport.

(1630)

Nos voisins américains constatent maintenant avec stupeur que la loi du Far West a produit une société armée, défensive et criminalisée, plutôt que d'assurer la légitime défense des honnêtes citoyens.


510

On ne le dira jamais assez: en deux ans, les armes à feu ont tué en sol américain plus de citoyens que la guerre du Vietnam n'a coûté en pertes de vie.

Aux États-Unis, sous la pression de la sinistre statistique annuelle de 24 000 homicides par revolvers et pistolets, l'administration Clinton s'apprête maintenant à passer de nouvelles réglementations de filtrage de la mise en marché des armes. Les homicides et les décès causés par les armes à feu au Canada n'ont pas atteint l'ampleur de l'hécatombe américaine, mais encore chaque année, 1 400 Canadiens sont tués par une arme à feu.

Je crois que, même avec ses criantes imperfections, notre système de contrôle des armes à feu, opposé à la libre circulation à l'américaine, fait toute la différence lorsqu'on mesure la qualité de vie dans les villes canadiennes; il a contribué plus que d'autres facteurs à renforcer le tissu social du Canada. Et même si une seule vie était sauvée parce qu'un individu violent, irresponsable ou désespéré n'aurait pu se procurer une arme à feu, nous aurions atteint notre objectif. J'en ai pour preuve additionnelle un rapport de la Direction générale de la recherche et de la statistique du ministère de la Justice, produit en juillet 1992, qui établit une nette corrélation entre la quantité d'armes à feu en circulation et le taux de suicide par 100 000 habitants au Canada.

Selon les auteurs de ce rapport, depuis l'instauration des mesures législatives et réglementaires de contrôle des armes à feu en 1977, le taux de suicide a très sensiblement chuté. Nous avons sous la main d'innombrables rapports et mémoires qui établissent un lien direct entre la possession d'une arme à feu et son utilisation à des fins illégitimes, dont résultent des pertes de vie humaine. Le ministère de la Justice a tous ces rapports.

Il faut maintenant dépasser l'étape des rapports qui se répètent dans l'unanimité sur la nécessité de contrôles plus sévères. Il faut légiférer pour la protection de la démocratie. Nous devons protéger notre démocratie, monsieur le Président, cette démocratie qui ne repose pas sur la force des armes, mais sur la volonté populaire seule par laquelle nous sommes réunis dans ce Parlement pour exprimer nos différences de façon civilisée.

Par ailleurs, une autre question sociale moins actuelle mais tout aussi pertinente a été soulevée par la production, quelques jours après les dernières élections, du rapport d'une commission royale formée à l'improviste par la précédente administration. Comment l'actuel gouvernement peut-il ignorer totalement les nombreuses critiques du public à la suite du rapport Baird, déposé par la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction?

Nous avons tous constaté que le mandat de cette commission n'a abouti qu'à un rapport périmé, au surplus largement dénoncé dans ses conclusions. Nous aurions au moins aimé entendre de ce gouvernement s'il est vrai que les contrôles budgétaires figurent encore en tête de liste de ses préoccupations, une déclaration de principe sur l'inutilité de dépenses publiques consacrées à de telles commissions royales.

Le discours du Trône nous annonce quelques programmes de nutrition prénatale à l'intention des femmes enceintes à faible revenu. Mais a-t-on entendu la moindre allusion à une politique globale sur la fertilité qui pourrait s'inspirer ou se démarquer de la conclusion du rapport?

Positivement, cette commission qui a déposé son rapport avec deux années de retard a pourtant appelé l'attention sur des faits contemporains et mis en garde contre les abus commerciaux de la grande industrie, et les pratiques dangereuses sur lesquelles nous devons immédiatement intervenir. Sous d'autres aspects, ce rapport propose de véritables empiètements sur les juridictions provinciales dans les secteurs de la santé. La création d'une agence fédérale chargée d'occuper tout le champ de la réglementation des techniques de reproduction tomberait comme un pavé dans la mare constitutionnelle.

(1635)

Selon nous, ce rapport imparfait, produit au coût prohibitif de 28 millions de dollars, en ces années de drame économique, est déjà dépassé par les nouvelles données scientifiques.

Ce gouvernement n'a pas encore dénoncé le rapport Baird. Il y a tout lieu de croire qu'il cautionne la pratique des précédentes administrations, qui ont préféré pousser sous le tapis d'une commmission royale le règlement des questions urgentes que posaient les situations nouvelles vécues par notre société.

L'infertilité est un drame pour plusieurs femmes et pour les couples qu'elle affecte. C'est un drame qu'on vit différemment d'une province à l'autre, et d'un milieu social à l'autre. C'est un drame actuel que l'industrie et ses puissants lobbys tentent de récupérer sur des objectifs qui n'ont rien à voir avec la légitime aspiration des humains à se reproduire dans la dignité et le respect de la personne.

Nous croyons que le gouvernement doit intervenir rapidement pour éviter de légiférer plus tard sur le fait accompli. Sur ces questions et sur toutes les autres préoccupations sociales, économiques et politiques des Canadiens, nous attendions des indices, des messages et des preuves de volonté radicale d'intervention de l'État. Mais, en toute déférence pour tous les députés de ce Parlement, je vous prie de noter ma profonde insatisfaction devant l'abdication du parti ministériel sur ses responsabilités sociales, sa fatigue prématurée lorsqu'il est confronté au drame des finances publiques et son évidente absence de perspective sur l'ensemble des attentes des citoyens du Canada et de ses régions.

[Traduction]

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, j'ai une question à poser à la députée. Je voudrais l'interroger au sujet de sa proposition concernant l'enregistrement des armes à feu. Je conviens qu'il y a lieu de modifier la loi sur les armes à feu, mais la députée se rend-elle compte de ce qu'elle demande au gouvernement de faire ? Ne sait-elle pas que d'autres pays ont déjà pris des mesures de ce genre? Je songe, entre autres, à la Nouvelle-Zélande, où le processus d'enregistrement s'est complètement écroulé, ce qui a coûté des millions de dollars aux contribuables et entraîné un problème de logistique insurmontable.

La députée pourrait-elle dire à la Chambre de quelles études elle s'inspire pour étayer son opinion qu'il faudrait enregistrer toutes les armes à feu? Soyons réalistes! Il s'agit là d'une tâche impossible! Et puis, cette mesure ne violerait-elle pas le droit à la propriété?


511

[Français]

Mme Venne: Monsieur le Président, vous-même faisiez partie du comité sur les armes à feu lorsque nous avons discuté de l'enregistrement des armes à feu. La position des pro-armes était toujours qu'on ne pouvait enregistrer toutes les armes à feu parce que c'était trop coûteux. Par contre, j'ai des armes à feu chez moi, donc je peux vous dire comment je les ai achetées. Munie bien sûr de mon certificat d'acquisition d'armes à feu, je suis allée chez un armurier pour me procurer l'arme en question. Ce dernier a enregistré immédiatement mon numéro de certificat d'acquisition d'armes à feu dans un registre, de même que la description de l'arme. Pourquoi à ce moment-là ne pourrait-il pas tout simplement le faire grâce à un réseau électronique qui serait relié à travers le Canada, ou simplement par province, car on pourrait le faire aussi par province ou, si on préfère, faire un duplicata qui pourrait être acheminé grâce à un réseau central où toutes les armes pourraient être enregistrées. Ce n'est pas coûteux. Chaque fois qu'on nous a dit qu'un système électronique serait très coûteux, je regrette, mais ce genre d'argument n'a jamais passé la rampe car il est tout à fait faussé à la base.

[Traduction]

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, pour revenir aux observations de la députée, je viens de la Saskatchewan, où les habitants tiennent beaucoup à leur indépendance et n'aiment pas que le gouvernement s'ingère dans la plupart de leurs affaires, dont leurs impôts, mais je n'insisterai pas là-dessus.

(1640)

Étant donné que la plupart des décès au Canada sont causés par des accidents de la route, et non par les armes à feu, et qu'un grand nombre des blessures sont causées par des couteaux, et non par les armes à feu, ne passons-nous pas à côté du vrai problème en essayant de contrôler davantage l'utilisation des armes à feu? Ce n'est certainement pas en renforçant la loi qu'on réduira bien plus le taux de crimes commis avec des armes à feu.

[Français]

Mme Venne: L'honorable député a commencé son intervention en disant qu'on ne parlait pas de taxation. Je n'ai pas parlé de taxation. J'ai parlé de permis et de l'achat de permis. C'est-à-dire qu'on dit toujours que l'utilisateur doit payer. Présentement, on permet aux gens d'avoir des armes. Ils n'ont qu'à payer 50 $ pour un petit certificat d'acquisition d'armes à feu qui dure cinq ans et avec lequel on peut acheter un nombre illimité d'armes. C'est un peu exagéré pour les gens de la population en général qui doivent finalement payer pour ceux qui veulent s'acheter des armes à feu.

Les permis de transport et de possession d'armes à feu, ou tous les autres permis qui peuvent aller avec les armes à feu, sont tous gratuits, sauf ce petit certificat pour les armes à utilisation restreinte que l'on doit payer. Pour le reste, tout est gratuit.

Pourquoi les utilisateurs d'armes à feu ne paieraient-ils pas leurs permis, et ce de façon convenable? Un prix symbolique de 50 $ pour cinq ans, c'est totalement ridicule.

Le député a exprimé une autre réserve en disant que les couteaux ou les armes blanches causaient plus de morts que les pistolets ou les armes à feu. J'aimerais vraiment voir les statistiques à cet effet, car ce n'est pas ce qu'on a entendu au comité qui a étudié cette question.

[Traduction]

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia): Monsieur le Président, les commentaires de la députée de Saint-Hubert sur la facilité avec laquelle on peut obtenir une autorisation d'acquisition d'armes à feu en vertu de la loi m'ont vivement intéressé.

La difficulté d'obtenir une autorisation d'acquisition d'armes à feu et le délai qui entoure la délivrance de cette autorisation constituent le problème dont on me parle le plus souvent. C'est à ce sujet que je reçois le plus de plaintes. C'est plus que je n'en reçois au sujet de l'assurance-chômage, de l'impôt sur le revenu ou de tous les autres problèmes réunis. Il faut, croyez-le ou non, jusqu'à cinq mois avant d'obtenir une autorisation d'acquisition d'armes à feu quand cela est censé prendre seulement 28 jours. Aux personnes qui téléphonent pour s'informer des raisons de ce retard, les autorités répondent simplement qu'il y a un arriéré de demandes et qu'elles ne peuvent aller plus vite.

L'autre problème qui risque de se poser bientôt est celui des épreuves qu'une personne doit subir pour être reconnue apte à posséder une autorisation d'acquisition d'armes à feu.

La plupart des habitants de ma région possèdent des armes à feu. Certains en possèdent même depuis qu'ils ont environ 12 ans. Ils savent donc très bien comment se servir de ces armes. Pourtant, avant de pouvoir obtenir une nouvelle autorisation d'acquisition d'armes à feu, ils devront maintenant aller voir un fonctionnaire qui s'y connaît probablement moins qu'eux en armes à feu et suivre un cours parrainé par le gouvernement qui leur coûtera quelques centaines de dollars. C'est absolument ridicule!

Quand j'entends dire que cette nouvelle mesure législative est efficace, mon petit doigt me fait en douter sérieusement.

L'autre point dont je voudrais parler est peut-être un peu plus philosophique. La députée a une idée bien précise, d'ailleurs très répandue dans ce pays, surtout dans les zones urbaines, des restrictions que l'on devrait imposer à la possession d'armes à feu par les simples citoyens.

J'ai passé de nombreuses années dans des pays du tiers monde. Dans ces pays, les seules personnes qui possèdent des armes à feu ou qui peuvent facilement obtenir la permission d'en avoir sont les criminels et les agents de l'État. Il est parfois difficile de faire la distinction entre les deux, mais c'est ainsi.

(1645)

Je préfère de loin vivre en liberté dans un pays où il n'y a pas de dictateur ayant la main haute sur tout que de vivre dans un de ces paradis pacifiques comme ceux où j'ai vécu et où le simple


512

citoyen se voit refuser ce droit le plus fondamental qu'est celui de posséder des armes pour se défendre et défendre sa famille.

M. Harvard: Vous devriez peut-être déménager dans l'est de Los Angeles.

[Français]

Mme Venne: Monsieur le Président, mon collègue a certainement le sens de l'humour développé, mais j'aimerais vous parler du fameux délai de 28 jours.

Présentement, au Québec, le délai est passablement respecté. Comme notre député vient de la Saskatchewan, à ce moment-là, je pense qu'il va falloir qu'il fasse des pressions dans son coin. Mais dans ma province, en tout cas, ça va très bien.

Pour ce qui est du certificat de maniement d'armes à feu, au Québec, nous avons un certificat de chasseur. Pour aller à la chasse, on doit être muni de ce certificat, lequel est valide pendant deux ans. Donc, nous avons encore là une différence, si on peut dire, entre la Saskatchewan et chez nous. Il semble que dans sa province, ils n'ont pas besoin de certificat de chasseur puisque, comme il l'a mentionné, les gens vont à la chasse depuis des années sans avoir jamais suivi de cours de maniement d'armes à feu. Chez nous, pour obtenir le certificat, il faut suivre un cours en maniement d'armes à feu.

En terminant, je lui dirai que malheureusement, il y a de grandes distinctions à faire entre sa province et la nôtre et la façon dont les lois sont appliquées.

[Traduction]

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord): Monsieur le Président, je voudrais dire d'abord que je partage les sentiments déjà exprimés par mes collègues, qui vous ont félicité de votre nomination.

Le nouveau gouvernement fait face à un certain nombre de défis de taille, le moindre n'étant pas de donner aux Canadiens une raison de croire dans le dévouement, la persévérance et le bon jugement de leurs élus.

Nous sommes tous ici parce que les électeurs de notre circonscription ont estimé que nous étions les plus réceptifs à leurs inquiétudes, à leurs besoins et à leurs demandes. Cependant, nous sommes plus que des individus, nous sommes plus aussi qu'une communauté d'individus, nous sommes la voix collective de nos électeurs et nous devons concilier leurs opinions concurrentes et parfois divergentes.

Le but de la Chambre des communes n'est pas de servir les intérêts égoïstes d'une personne ou d'une province au détriment des autres. Son but est d'améliorer le bien-être et la prospérité de tout le pays et donc de tous les Canadiens.

De ce côté, nous avons été élus pour réaliser la vision des libéraux telle qu'elle a été exposée dans notre plate-forme électorale, dans notre livre rouge.

Chaque jour, dans ma circonscription de Winnipeg-Nord, je parle à des personnes honnêtes et travailleuses qui ne demandent pas mieux que de faire confiance à des politiciens honnêtes et travailleurs eux aussi. Pendant cinq longues années, de 1988, date de ma première élection, à l'automne dernier, j'ai eu peur.

Peur que 1,6 million de Canadiens en chômage ne trouvent jamais de travail. Peur que les défavorisés, particulièrement les enfants, continuent à dépendre de l'aide sociale. Peur que les personnes malades ou âgées, que tous les Canadiens même, continuent de souffrir des conséquences des menaces contre le système de santé et de l'incertitude qui va de pair. J'avais peur que les minorités, fussent-elles de race, de couleur, de religion ou d'autre chose, continuent de faire face à un traitement injuste et à de la discrimination au travail.

Peur que les infrastructures des villes et des villages continuent de se détériorer, privées de l'aide du gouvernement fédéral. Peur que la sécurité des personnes et des biens continue d'être menacée. Peur que l'honnêteté et l'intégrité du gouvernement ne soient disparues à jamais. Peur, enfin, que le Canada ne ferme sa porte aux immigrants.

(1650)

Enfin, et ce n'était certainement pas la moindre de mes craintes, j'avais peur que mon pays d'adoption, le foyer de 27 millions de Canadiens, ne soit sur le point de s'effondrer. Néanmoins, j'espérais toujours que mes craintes ne se matérialisent pas.

Maintenant, je sais qu'il y a de l'espoir pour ce grand pays. J'ai maintenant confiance, parce que le nouveau gouvernement a déjà pris des mesures pour restaurer l'intégrité en rejetant beaucoup de privilèges non indispensables dont jouissaient les parlementaires pendant leur mandat de serviteur de l'État.

J'ai confiance parce que chaque parti politique représenté ici a déjà déclaré qu'il s'engageait à consulter le public sur toute une gamme de questions d'une grande importance nationale.

J'ai confiance parce que le ministre des Finances a déjà respecté son engagement en s'adressant aux gens d'un bout à l'autre du pays afin d'élaborer un budget fédéral raisonnable et qui tienne compte des besoins de la population. Je suis certain que le ministre continuera, durant les quelques jours qui restent avant la présentation du budget, à consulter des Canadiens de tous les milieux.

Nous ne devons jamais oublier que chaque décision budgétaire prise ici à Ottawa a un effet direct sur le porte-monnaie, le carnet de banque et le budget quotidien de chacun des habitants des circonscriptions comme la vôtre et la mienne.

J'ai confiance parce que ce gouvernement a promptement annulé l'entente douteuse qui aurait mené à la privatisation de certaines parties de l'aéroport international Pearson.

J'ai confiance parce que ce gouvernement n'est pas du genre à permettre à son chef de se promener en Porsche ou en avion de luxe de 53 millions de dollars, alors que bon nombre de Canadiens doivent se serrer la ceinture pour joindre les deux bouts à la fin du mois.

J'ai confiance parce que ce gouvernement a déjà lancé son programme d'infrastructure.


513

Les mesures prises en quelques jours depuis le début du mandat des libéraux me donnent bon espoir. Mais ce qui m'assure que nous sommes sur la voie de la reprise, ce sont nos plans à court terme, nos politiques, nos idéaux et nos projets pour les prochaines années.

Je suis convaincu parce que nous nous sommes engagés à aider et à appuyer les petites et moyennes entreprises, celles-là mêmes qui créeront les emplois à long terme au pays. Je suis convaincu parce que nos plans visant à donner du travail à nos jeunes seront réalistes, car nous créerons le Service jeunesse et le programme national d'apprentissage. Je suis rassuré car ce gouvernement comprend qu'il est important d'investir dans ses forces vives.

À des degrés différents, les Canadiens se définissent par rapport à leur travail. Lorsqu'ils sont sans travail, leur amour-propre en souffre, leur dignité en souffre et leurs relations avec les autres en souffre.

Je suis rassuré de savoir que notre système de soins de santé restera universel et gratuit pour tous. Je suis rassuré parce que le discours du Trône confirme la tenue d'un forum national sur la santé. En fait, les projets sont déjà en cours pour créer une centre d'excellence sur la santé des femmes et mettre sur pied un programme de nutrition prénatale.

Il n'y a pas si longtemps, en cette même enceinte, tremblant de colère, j'ai pris la parole au nom de l'un de mes électeurs pour demander si le gouvernement d'alors était totalement dénué de coeur. Je suis heureux de pouvoir dire aujourd'hui, avec beaucoup de fierté, que le gouvernement actuel a un grand coeur.

Pour la première fois depuis longtemps, nous parlons le même langage que ceux que nous représentons. Bref, nous avons des moyens réalistes et plausibles de mettre nos idéaux en pratique.

Nous sommes aussi extrêmement conscients du fait que porter toute son attention sur une seule et même question va à l'encontre du but recherché. L'économie, la politique sociale, l'environnement et autres sont des dossiers interdépendants.

Monsieur le Président, je sais que vous partagez le désir qui m'anime de voir ce Parlement prendre le virage historique que mérite notre grand pays. J'ai commencé par parler de la tâche énorme qui attendait le gouvernement.

(1655)

Je vous fait part des craintes de toutes sortes qui m'ont assailli durant les cinq premières années où j'ai siégé à la Chambre. Comment se fait-il donc que, après seulement un court laps de temps au sein du gouvernement, je sois plein de confiance et d'assurance?

J'ai vu ce que nous avions réalisé jusqu'à maintenant. Je sais que nous réaliserons nos promesses et que nous dissiperons ainsi les craintes des Canadiens. Nous leur donnerons des emplois, réformerons les institutions, stabiliserons la situation et finalement, maîtriserons le déficit.

Les Canadiens vont continuer à nous donner leur appui comme ils ont permis à 177 députés libéraux d'accéder à un siège à la Chambre des communes, en octobre 1993. J'espère que les gens de Winnipeg-Nord et de partout au Canada sentent que de grands changements se préparent.

Au cours des quatre prochaines années, on verra prendre forme un nouveau genre de gouvernement, une nouvelle sorte de leadership, dans un nouveau Canada uni, fort et prospère-un gouvernement qui travaille pour tous les Canadiens et qui prépare le Canada du XXIe siècle.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly): Monsieur le Président, c'est la première fois que j'ai l'occasion de prendre la parole en cette Chambre. Je suis député de la circonscription de Chambly. Pour ceux qui l'ignorent encore, cette circonscription se situe sur la rive sud de Montréal, entre les monts Saint-Bruno et Beloeil, le long de la rivière Richelieu, rivière qui prend sa source dans le lac Champlain pour aller se jeter dans le Saint-Laurent.

J'écoutais mon collègue de Winnipeg-Nord. Bien sûr, son discours est dans la pure tradition de son parti. Je constate également que mon honorable confrère a été presque traumatisé par la législature antérieure, dont il a eu le plaisir de faire partie en tant que député de l'opposition.

L'honorable député de la ciconscription de Winnipeg-Nord nous parle d'un Canada nouveau. J'aimerais lui demander des précisions sur un certain paragraphe du discours du Trône, et je cite:

Le gouvernement travaillera énergiquement pour que le fédéralisme réponde aux besoins des Canadiens, conscient toutefois que le bon fonctionnement du Canada est la responsabilité de chacun. Il s'efforcera de clarifier le rôle du gouvernement fédéral par rapport aux autres ordres de gouvernement, d'éliminer le double emploi et les chevauchements, et de rechercher les moyens de fournir à la population des services qui répondent à ses besoins réels et de tirer le meilleur profit possible de l'argent des contribuables.
Si j'avais fait lecture de ce paragraphe-là à l'extérieur de cette enceinte, j'aurais pu croire, et à bon droit, je crois, qu'il avait été écrit par le chef de mon parti. Mais il vient du parti au pouvoir. C'est apparemment un résumé de leur livre rouge. Comment l'honorable député peut-il concilier sa vision du Canada, dont il faisait état tantôt, et cette vision de son parti d'un renouvellement du Canada?

[Traduction]

M. Pagtakhan: Monsieur le Président, je remercie le député pour ses questions, auxquelles je suis très heureux de répondre.

Ma vision du Canada, telle que je viens de vous la décrire, est certainement celle que nous, les libéraux, avons véhiculée dans toutes les régions, au fil de nos déplacements. Nous voulons bâtir un Canada qui soit le même pour tous les Canadiens, quelle que soit leur race, leur couleur, leur origine ou la région qu'ils habitent. Que les Canadiens soient nés ici ou qu'ils soient venus de l'étranger, nous sommes tous égaux et nous devons pouvoir profiter des avantages inhérents à notre nation. Le fédéralisme


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doit répondre aux besoins des Canadiens. Autrement dit, nous devons conserver les institutions fédérales.

(1700)

Les institutions ne sont pas seulement les édifices qui les abritent. Quand je parle d'institutions, je parle aussi des programmes existants, comme l'assurance-maladie. Pour moi et pour le Parti libéral, c'est le genre d'institution qui doit continuer à servir tous les Canadiens, quelle que soit leur origine et, je précise, sans ticket modérateur.

Pour ce qui est de savoir comment nous pouvons éviter le chevauchement de compétences, je mentionne seulement que le gouvernement a déjà annoncé un plan d'élimination des barrières commerciales-qui, dans un sens, favorisent cet état de choses-ainsi qu'un plan d'élimination des doubles emplois pour laisser une chance aux petites et moyennes entreprises de se lancer dans la course et de prospérer.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada): Monsieur le Président, je me permets de me joindre à tous ceux qui vous ont déjà félicité à l'occasion de votre nomination. J'aimerais ajouter que même si vous n'êtes en fonction que depuis quelques jours, vous savez, par votre leadership, aider les députés à atteindre des objectifs que nous poursuivons tous, c'est-à-dire faire de la Chambre un lieu où règne la courtoisie et le respect du décorum, afin de mieux servir la population.

Je suis très fier de représenter la circonscription d'Etobicoke-Centre à la Chambre des communes. Diversifiée et dynamique, ma circonscription a des besoins et des atouts très semblables à ceux du Canada en ces temps difficiles. Durant la campagne électorale j'ai eu l'occasion, à l'instar de bon nombre de mes collègues, de me rendre dans plus de 30 000 foyers d'Etobicoke-Centre et une des choses que j'ai pu y constater est que les Canadiens, où qu'ils soient, accordent une grande importance aux questions qui concernent la justice. C'est pour moi un grand privilège que de siéger à la Chambre des communes, non seulement comme député, mais aussi comme responsable du dossier justice au sein du Cabinet.

On dit de la justice qu'elle est la première des vertus sociales. Quand il n'y a pas de justice, tout le reste semble artificiel, mais lorsqu'elle règne, la justice favorise l'éclosion de ce qu'il y a de meilleur en nous.

[Français]

En ma qualité de ministre de la Justice du Canada, je suis pleinement conscient de mon devoir d'ouvrir la marche dans l'élaboration de politiques et de propositions qui renforceront un système de justice qui, sans l'ombre d'un doute, figure parmi les meilleurs, les plus souples et les plus équitables du monde.

Les Canadiens se sont donné un système de justice bijuridique et bilingue que la communauté internationale considère comme un modèle de tolérance, d'intégrité et d'ouverture. Même si deux systèmes juridiques distincts se développent, en même temps, au Canada, ils servent à faire avancer une seule idée: la primauté du droit.

[Traduction]

Au cours des dix dernières semaines, je me suis efforcé, avec le personnel du ministère de la Justice et mes collègues, d'établir les priorités immédiates de mon ministère.

Je voudrais ici exposer à la Chambre, du moins en termes généraux, les questions qui nous paraissent les plus urgentes.

Ces dernières semaines j'ai également eu l'occasion de rencontrer des députés des partis de l'opposition pour discuter de leurs points de vue sur les questions relatives à la justice. Je me suis rendu compte qu'ils ont des opinions intéressantes et j'ai hâte de travailler avec eux car nous partageons, en matière de justice, des objectifs communs, en ce qui a trait au service à la population. Nous voulons en effet faire en sorte que le Canada ait le système juridique le plus équitable et le plus efficace possible. Je respecte les opinions de mes collègues et, comme je le disais, j'ai hâte de travailler avec eux.

(1705)

Le programme que je vais décrire aujourd'hui comporte essentiellement trois volets: premièrement, des mesures visant à contrer la violence et à prévenir la criminalité; deuxièmement, des propositions visant à faire en sorte que la loi favorise l'égalité dans la diversité et assure à tous un accès égal à la justice; et, troisièmement, la modernisation de notre législation de manière à la rendre conforme aux valeurs actuelles et adaptée aux défis de notre époque marquée par le changement.

Je me permets de rappeler une évidence, à savoir que nous ne pourrons pas réaliser de véritables progrès dans le domaine de la justice sans la collaboration de nos homologues provinciaux et territoriaux, puisqu'une bonne partie de notre programme englobe des champs de compétence partagée. Il faut une véritable collaboration. Nous ne pouvons réussir en travaillant de façon isolée. De concert avec mes homologues provinciaux, je poursuivrai les objectifs que je vais énoncer aujourd'hui.

Permettez-moi d'abord de m'arrêter aux mesures pour lutter contre la violence et pour prévenir le crime. Dans le discours du Trône, nous nous engageons à favoriser la sécurité publique et la prévention du crime. Les Canadiens sont bien déterminés à préserver la paix, l'ordre et la sécurité dans leurs collectivités; ce sont les valeurs de leur société. En effet, une des principales caractéristiques de notre pays, c'est notre sens de l'ordre et du civisme. Pourtant, dans notre société qui abhorre le crime et la violence, nous craignons de plus en plus pour la sécurité et la paix dans nos collectivités, parce que nous avons l'impression qu'à bien des égards, elles sont menacées par des crimes, surtout des crimes violents.

Le temps est venu pour nous de déclarer haut et fort que nous ne tolérerons pas la violence sous quelque forme que ce soit. Nous ne l'accepterons de la part d'aucune personne, d'aucun groupe, peu importe l'âge. Pourtant, notre réaction face aux problèmes relatifs au crime et à la violence doit aussi tenir compte de ces mêmes valeurs que nous cherchons à préserver. Nous ne devons pas simplement devenir rigoureux, même s'il nous faudra parfois recourir à des mesures sévères. Nous devons découvrir les causes du crime et y remédier, puis mettre l'accent sur la réhabilitation, sur le traitement approprié.


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D'ailleurs, plusieurs études approfondies réalisées ces derniers temps ont insisté en termes clairs pour que le Canada élabore une stratégie nationale uniforme en matière de prévention du crime.

[Français]

L'an dernier, le Comité permanent de la justice et du solliciteur général invitait le gouvernement fédéral à jouer le rôle de chef de file et lui recommandait d'élaborer, de concert avec les provinces, les territoires et les municipalités, une stratégie nationale de prévention du crime.

Le Comité consultatif spécial sur une stratégie canadienne sur la sécurité communautaire et la prévention du crime formulait la même recommandation. La prévention du crime doit tenir compte des causes profondes de la criminalité: la pauvreté, l'exploitation sexuelle des enfants, les dysfonctionnements de la famille, les inégalités raciales et l'inefficacité ou les sous-financements des services sociaux.

Notre gouvernement est résolu à élaborer une stratégie intégrée de prévention du crime. De concert avec les autres paliers de gouvernement, la police, les groupes de victimes et les organismes communautaires, nous chercherons en priorité à examiner et à éliminer les causes profondes du comportement criminel.

[Traduction]

Nous allons créer un conseil national pour la prévention du crime. Nous lui demanderons de se réunir dans les plus brefs délais pour commencer à élaborer une stratégie nationale détaillée sur la prévention du crime, qui comprendra des mesures concrètes à l'échelle de la collectivité. Nous tiendrons de vastes consultations au sujet de son mandat. Nous veillerons à ce que ce ne soit pas qu'une façade. Nous voulons que cet organisme joue un rôle significatif et nous saurons gré aux députés de tous les partis de nous faire part de leurs opinions à ce sujet.

(1710)

Passons maintenant à un autre aspect de la lutte contre les crimes violents. Notre gouvernement est disposé à apaiser de façon franche et ouverte les vives inquiétudes que suscitent la Loi sur les jeunes contrevenants et son application dans le cas de crimes violents.

Nous présenterons bientôt un projet de loi donnant suite à l'engagement que nous avons pris pendant la campagne électorale d'apporter certaines modifications bien précises à la loi, notamment en ce qui concerne la détermination de peines plus sévères dans le cas de certains crimes violents, la diffusion de renseignements sur les jeunes contrevenants à ceux qui en ont besoin pour des motifs de sécurité, la création de la catégorie des jeunes contrevenants dangereux devant s'appliquer à de jeunes récidivistes violents, la modification des dispositions régissant le transfert des jeunes contrevenants d'un tribunal de la jeunesse à un tribunal pour adultes et les mesures à prendre pour offrir de la thérapie aux jeunes contrevenants qui en ont besoin.

J'ai aussi l'intention de soumettre simultanément la Loi sur les jeunes contrevenants à un examen public approfondi afin de déterminer si elle continue de bien servir la justice au Canada. En ce qui concerne la Loi sur les jeunes contrevenants, les Canadiens doivent être convaincus qu'il y a un juste équilibre entre la protection de la population et la reconnaissance des besoins spéciaux des jeunes contrevenants ayant affaire au système de justice pénale.

Fidèles à l'engagement que nous avons pris pendant la campagne électorale, celui d'établir un processus de consultation, nous ferons participer le Parlement à cette étude. Dans le cadre de l'examen de l'ensemble de la loi, nous tiendrons compte des nombreux mémoires utiles que des participants au processus de consultation publique ont fait parvenir à mon ministère ces derniers mois.

De plus, nous prouverons que le Canada ne tolérera plus la manipulation et l'exploitation des jeunes Canadiens auxquelles se livrent des adultes à des fins criminelles. Pour ce faire, nous encouragerons les responsables de l'application de la loi à avoir davantage recours aux dispositions actuelles du Code criminel qui rendent coupable quiconque incite d'autres individus à commettre un crime.

Toujours en ce qui a trait à la violence criminelle, je tiens à dire aux députés que nous prendrons des mesures au cours de la présente session pour régler le problème de la libération des détenus à risque élevé qui ont fini de purger leur peine.

Compte tenu des impératifs de la Charte des droits et des libertés, nous allons nous arranger pour que la société puisse se protéger contre des individus qu'il serait peut-être dangereux de libérer. Dans bien des cas, cette question intéresse à la fois le système pénal et le régime des soins de santé. C'est pourquoi il est essentiel de mettre au point des solutions en collaboration encore une fois avec nos homologues provinciaux. Nous allons donc les consulter à cette fin.

Le gouvernement va se pencher sur le grave problème de la violence faite aux femmes et aux enfants, y compris la violence familiale, en le considérant non pas comme un problème de femmes, mais comme un problème de justice. Nous savons que la violence faite aux femmes est liée au fait que les femmes ne sont pas sur un pied d'égalité avec les hommes au plan économique. De concert notamment avec la secrétaire d'État chargée de la Situation de la femme, je vais mettre au point et appliquer des mesures visant à promouvoir l'égalité et la sécurité des femmes, tant dans leurs foyers que dans les endroits publics.

Dans la ligne de cet engagement et en tant que ministre de la Justice, je vais apporter, de concert avec mes collègues fédéraux, provinciaux et territoriaux, les modifications qui s'imposent au système judiciaire. Nous allons parrainer des programmes publics de sensibilisation de la population à la violence faite aux femmes. Nous allons accroître le financement des maisons de transition qui accueillent les victimes de violence familiale. Nous allons modifier le caractère et l'incidence des ordonnances de bonne conduite et mieux protéger les conjoints de personnes violentes. En collaboration avec nos collègues du ministère des Ressources humaines, nous allons nous assurer que les ordonnances de pension alimentaire pour enfants sont respectées.

(1715)

Il est illogique qu'un gouvernement confronté à de sérieux déficits ait à payer chaque année des sommes astronomiques à des familles monoparentales, surtout dirigés par des femmes, lorsque des ordonnances de tribunaux leur accordent des pensions alimentaires, mais que celles-ci ne sont pas versées. Nous sommes déterminés à trouver le moyen d'obliger les personnes


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sous le coup d'une ordonnance d'un tribunal à payer ce qu'elles doivent.

Enfin, le gouvernement prendra les mesures que de larges segments de notre société attendent pour imposer un contrôle plus strict des armes à feu au Canada. Nous respecterons l'engagement que nous avons pris pendant la campagne électorale.

[Français]

Avec d'autres ministères, nous nous attaquerons à la contrebande des armes illégales au Canada. Nous verrons à ce que de meilleures statistiques soient obtenues sur l'utilisation des armes à des fins criminelles. Nous examinerons d'un oeil critique la liste des armes prohibées pour déterminer s'il y a lieu de l'allonger. Nous renforcerons la législation actuelle qui prévoit une infraction distincte pour l'utilisation d'une arme à des fins criminelles. Mais nous n'oublierons pas pour autant l'opinion des propriétaires légitimes d'armes à feu qui doivent maintenant se soumettre à certaines obligations pour les acquérir.

Nous examinerons les types d'armes vendus au Canada et envisagerons des mesures afin de nous assurer que des armes ne se retrouvent pas entre des mains criminelles ou inaptes.

[Traduction]

La deuxième grande catégorie dont je veux parler nous renvoie à l'égalité devant la loi. L'accès égal aux tribunaux et le traitement égal de tous par le système judiciaire constituent des principes fondamentaux de la société canadienne, une société de plus en plus diversifiée. Cependant, les preuves s'accumulent pour établir que notre système judiciaire n'est pas à la hauteur des normes élevées exigées des Canadiens.

Des études récentes faites par des autorités en la matière ont démontré que les hommes et les femmes n'étaient pas égaux devant le système de justice canadien. Le gouvernement est déterminé à s'attaquer à la discrimination fondée sur le sexe, tant dans le système judiciaire que dans l'ensemble de la société.

[Français]

Le ministère de la Justice a donné suite aux recommandations du groupe de travail dirigé par Mme Bertha Wilson. D'ailleurs, il a déjà reçu un rapport interne complet sur les mesures à prendre pour effacer les inégalités systémiques et particulières dans sa propre organisation.

[Traduction]

Je suis convaincu que tous les députés conviendront avec moi qu'un système judiciaire fort et indépendant est une caractéristique fondamentale d'une société libre. Les Canadiens sont fiers à juste titre du haut calibre de nos juges. Je recommanderai personnellement au Cabinet des candidatures dont la compétence et le mérite garantiront le maintien de la grande confiance que les Canadiens éprouvent pour le système de justice au Canada.

La recherche de moyens pour que les besoins des autochtones en matière de justice soient mieux reconnus constitue un autre élément important de notre approche à l'égalité devant la loi dans un Canada diversifié. En général, les Canadiens nous disent que notre système de justice, en dépit de ses grandes qualités, pourrait mieux fonctionner. Ils ont raison.

Les peuples autochtones, notamment, affirment que maintenant, le système juridique est davantage axé sur la procédure que sur la justice. Dans une certaine mesure, ils ont raison. Dans beaucoup de collectivités autochtones, il existe une grande volonté de tenter de faire quelque chose pour changer la situation. Les autochtones veulent établir de nouveaux rapports avec le système judiciaire. Le changement sera graduel et difficile, mais nous avons l'obligation de ne pas laisser passer cette possibilité de changement. Nous devons travailler en étroite collaboration avec nos collègues des provinces et des territoires et avec les dirigeants autochtones, avec leurs collectivités ainsi qu'avec tous les autres autochtones qui sont prêts à améliorer l'administration de la justice.

(1720)

Un autre aspect du principe d'égalité devant la loi au Canada a trait à la Loi canadienne sur les droits de la personne. L'engagement que le premier ministre a pris pendant la campagne électorale a été réitéré dans le discours du Trône. Nous allons proposer des modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne. Ces modifications auront entre autres pour effet d'ajouter l'orientation sexuelle à la liste des motifs de distinction illicite.

La Chambre s'est engagée à faire respecter ce principe depuis plusieurs années, et les gouvernements successifs ont exprimé l'intention de proposer cette modification. Notre gouvernement le fera, non pas seulement pour respecter un engagement, mais parce qu'il s'agit d'une question de justice fondamentale.

Je voudrais passer brièvement en revue certaines mesures que nous avons l'intention de prendre à l'égard des crimes motivés par la haine. Nous ferons savoir bien clairement que de tels crimes ne seront pas tolérés. Nous allons présenter une mesure législative stipulant que l'on devra considérer comme une circonstance aggravante la motivation reposant sur la haine quand il s'agit de déterminer la peine à imposer dans le cas de certains actes criminels.

Nous proposerons également des modifications au système de justice pénale qui aideront les personnes infirmes à participer pleinement sur une base d'égalité.

Je passe maintenant au troisième élément général figurant au programme touchant la justice pour l'année à venir, à savoir la modernisation de la loi.

[Français]

Nous déposerons bientôt un projet de loi ayant pour but de rétablir la Commission de réforme du droit. Nous avons la chance de reconstituer une commission qui remplira un but utile en tant qu'organisme indépendant et qui attirera l'attention sur les changements à apporter aux lois canadiennes. La commission


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que nous proposons aura un nouveau mandat et une nouvelle structure.

[Traduction]

Un sous-comité du Comité permanent de la justice a publié l'année dernière un rapport touchant la recodification du Code criminel. Nous allons en examiner les recommandations et nous entreprendrons une évaluation de la question de savoir si le code actuel sert bien les intérêts de la justice pénale à notre ère moderne.

Nous allons également présenter une mesure législative portant sur la section du droit pénal touchant la détermination de la peine. Cette mesure énoncera clairement les objectifs de la détermination de la peine, prévoira une gamme complète de peines de remplacement, fera ressortir qu'il est préférable d'imposer des peines non privatives de liberté pour des crimes commis sans violence et prévoira un éventail de sanctions intermédiaires là où elles sont appropriées.

Le programme que j'ai décrit très brièvement cet après-midi est vaste et ambitieux. Il est néanmoins également clair que les problèmes auxquels nous cherchons à remédier sont urgents et importants. Je suis impatient de travailler avec mes collègues du Cabinet et avec mes collègues des deux côtés de la Chambre des communes pour relever les défis que présente ce programme. Ce faisant, nous nous engageons à nouveau à respecter ce qui doit constituer notre objectif ultime dans l'administration de la justice, c'est-à-dire assurer et maintenir le système de justice le plus équitable et le plus efficace pour le Canada et pour les Canadiens.

Le président suppléant (M. Kilger): Je remarque que de nombreux députés veulent prendre la parole. Je rappelle à tous que nous passons maintenant à une période de questions et réponses de dix minutes. Plus les questions seront brèves, plus il y aura de députés qui pourront parler.

[Français]

M. Bernard St-Laurent (Manicouagan): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice. Elle sera courte, naturellement.

Le ministre vient de mentionner la formation d'un comité national de prévention du crime, au cours de son énoncé. Comme on le sait, souvent ces comités sont formés de hauts spécialistes, avec des rapports qui prennent énormément de temps à arriver, si bien que lorsque les rapports sont produits, finalement, on en est rendu à ne faire que constater l'état des résultats.

J'aimerais connaître, et c'est ma question finalement, la composition de ce fameux comité?

(1725)

Est-ce que le ministre entend tenir compte, dans la composition de ce comité, de certains nouveaux éléments qui n'ont peut-être jamais été apportés dans ce genre de comités? J'entends entre autres, par exemple, la présence de certaines personnes qui vivent de par leur travail avec des gens qui sont criminalisés, hautement criminalisés d'ailleurs! À titre d'exemple, si le comité était naturellement composé de certaines personnes que l'on peut considérer comme des habituels dans un tel comité, des avocats, des professionnels qui offrent des services au Service correctionnel, mais peut-être aussi de gens qui vivent avec les criminels chaque jour, et je pense à des agents du Service correctionnel qui oeuvrent tout près des gens qui effectuent des crimes et qui en purgent les peines.

Je sais par expérience qu'à l'intérieur de ces institutions, on est un peu muselé par le secret professionnel. Je comprends que c'est tout à fait naturel parce qu'il est tout à fait normal de ne pas divulguer tout ce qui s'y passe. Ce n'est pas toujours joli et ce n'est pas non plus nécessaire que M. et Mme Tout-le-monde en prennent connaissance. Mais ces gens-là, qui vivent et qui regardent vivre ces gens qui ont besoin d'aide, ne nous le cachons pas, sont souvent oubliés dans un premier temps, mais sont peut-être les mieux placés pour apporter une aide, peut-être plus simple, une solution un peu plus pragmatique dans ce fameux comité.

Donc, je réitère ma question au ministre. A-t-il déjà pensé à la composition comme telle de ce comité? Quelle en est la composition?

[Traduction]

M. Rock: Monsieur le Président, la question du député est très pertinente. Pour être efficace et atteindre les objectifs que j'ai mentionnés, le comité ne pourra pas être composé de spécialistes qui sont coupés de la réalité et qui mettront beaucoup de temps à produire un rapport au lieu de simplement examiner la question et de rédiger leurs conclusions. Il faut que le gouvernement soit près des gens, qu'il soit pratique et qu'il aide les communautés à prendre des mesures concrètes.

Je suis conscient des dangers que le député a signalés. Nous ne pouvons confier au comité un mandat qui l'obligera à poursuivre éternellement ses travaux sans jamais rien réaliser de concret.

Je signale au député que, dans la semaine ou les jours qui viennent, mon ministère enverra à des dizaines de personnes et d'organismes de toutes les régions du Canada un document de travail incluant bon nombre des questions qu'il a soulevées. Mon collègue a parlé de la structure, de la composition et du mandat du comité.

Avant de mettre celui-ci sur pied, nous consulterons les corps policiers, les groupes communautaires, les autres ordres de gouvernement et, comme l'a proposé le député, des personnes ayant une expérience pratique. Les suggestions du député seront aussi les bienvenues. Je lui enverrai d'ailleurs une copie du document de travail. Nous tiendrons compte de ses suggestions lorsque nous formerons le comité.

M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est): Monsieur le Président, je tiens à remercier le ministre de la considération qu'il m'a manifestée lorsque nous nous sommes rencontrés pour la première fois et avons échangé quelques idées. Je le remercie également de ne pas exclure la présentation de mémoires au sujet de la Loi sur les jeunes contrevenants. Je crois que les Canadiens veulent faire connaître leur opinion sur cette loi.

Ma question porte sur le programme de prévention du crime. Je suis au courant du document dont il parle et de l'orientation de


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ce programme. N'a-t-il pas été appuyé par tous les partis l'an dernier?

(1730)

Il semble cependant y avoir une question qui n'est pas assez approfondie dans le rapport. Je crois qu'elle préoccupe un grand nombre de Canadiens. En tout cas, des milliers de mes électeurs et, je le crois, des centaines de milliers d'autres Canadiens souhaitent que les peines soient à la mesure des crimes commis. En fait, ils veulent, selon moi, que ce principe retrouve sa place dans le système.

Le ministre donnera-t-il satisfaction aux Canadiens, qui souhaitent que le gouvernement adopte cette position?

M. Rock: Monsieur le Président, pour répondre au député de Calgary-Nord-Est, je vais d'abord revenir sur la recommandation de l'an dernier. Le Comité Horner, composé de représentants de tous les partis à la Chambre, a fait des recherches poussées et tenu de longues audiences sur tout le domaine de la prévention du crime. À l'unanimité, le comité a recommandé, entre autres choses, l'adoption d'une stratégie nationale et la mise sur pied d'un conseil national. Nous donnons suite aux recommandations d'un comité formé de tous les partis et aux avis recueillis auprès d'autres sources, comme je l'ai expliqué.

Quant aux peines, c'est justement le rôle du système judiciaire de les fixer en fonction de la gravité du crime. Mais il y a là souvent de la subjectivité. On peut ne pas être d'accord pour dire que telle peine prononcée tel jour pour tel crime est la bonne.

J'ajoute que j'ai relu récemment une étude rédigée par un criminologue de renom, Anthony Dube, et qui rend compte d'un projet de recherche. Il s'agissait d'étudier les réactions du public aux peines imposées pour des crimes spécifiques, tout d'abord à partir d'un article de journal, et ensuite après avoir renseigné les gens sur tous les faits soumis au juge qui avait fixé la peine.

M. Dube a remarqué que, lorsque les gens prennent connaissance de la peine dans les journaux, un certain pourcentage d'entre eux se disent qu'elle est bien légère, auprès de la gravité du crime, mais que, lorsqu'ils sont mis au courant de tous les faits présentés au juge qui a effectivement pris la décision, le pourcentage d'approbation augmente considérablement, au point qu'il y a presque unanimité.

La leçon à tirer, c'est qu'il est souvent trompeur et parfois dangereux de se faire une idée sur le bien-fondé d'une peine à partir d'un bref article ou d'un reportage télévisé. Assurément, nous voulons un système judiciaire dans lequel des juges compétents, à la lumière de tous les faits présentés selon un système accusatoire, évaluent les peines en respectant les principes appropriés au tribunal où la cause a été entendue.

Je ne cherche pas à éluder la question du député de Calgary-Nord-Est. Je vais y répondre carrément en répétant que nous envisageons de présenter un projet de loi sur la détermination de la peine. Je serai heureux de voir ce qu'il en pensera et, pendant les audiences du comité qui étudiera le projet de loi, il aura certainement l'occasion de s'expliquer plus longuement.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est): Monsieur le Président, en guise d'introduction à mon premier discours à la Chambre, je voudrais remercier les électeurs de Fraser Valley-Est de me faire confiance. Je m'efforcerai de mériter leur confiance dans les mois et les années à venir.

Je tiens également à remercier ma famille de son appui indéfectible et des sacrifices qu'elle fait pour moi. Si, comme bien des gens disent, un pays tire sa force des familles qui le composent, alors, en cette Année internationale de la famille, nous devons souligner l'importance de la famille nucléaire dans notre propre pays. Quant à ma famille, composée de Deb, de Karina, de Mark, de Loni et de Kyla, elle peut avoir l'assurance que c'est toujours l'année de la famille pour moi.

J'ai trouvé fort intéressants les discours que j'ai entendus au cours du présent débat. Pour chacun des députés, c'est sa circonscription qui est la plus belle, celle qui représente ce qu'il y a de mieux au Canada. Tous ces discours viennent du coeur, et il est de bon augure pour l'avenir de notre pays qu'ils soulignent les aspects positifs qui nous caractérisent en tant que Canadiens.

À titre de Canadien fier de représenter une région non moins fière, je remplirai mon mandat de député de l'opposition d'une manière positive et constructive.

(1735)

Je suis d'une circonscription qui a déjà beaucoup contribué au mode de vie canadien et qui n'a pas fini de montrer la voie à suivre dans ce domaine. Nous pouvons tous être fiers du 1er Régiment de génie de la Base des Forces canadiennes Chilliwack, un régiment qui nous a si bien représentés en Croatie. Au cours du débat de mardi sur notre rôle dans le maintien de la paix, il m'est arrivé à plusieurs reprises d'avoir une pensée pour les soldats du 1 RG et leurs familles, alors qu'ils se préparaient à retourner dans cette région très dangereuse. Nous les saluons tous.

Je suis intarissable quand il s'agit de vanter ma circonscription. Notre industrie forestière génère des emplois depuis un siècle et offre encore d'intéressantes perspectives d'avenir. Il y a de tout dans ce qu'on appelle le pays de l'arc-en-ciel, en raison des couleurs dont la nature pare la région: des fermes, des fleurs, de hauts sommets, des sources chaudes et quoi encore. Le tourisme, la pêche, le golf, des paysages d'une beauté incomparable et du temps chaud toute l'année font de Fraser Valley-Est un des lieux où il fait bon vivre, travailler et se détendre au Canada. Tous les députés sont invités à se rendre en Colombie-Britannique pour constater de visu.


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Je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur une question qui préoccupe beaucoup les habitants de Colombie-Britannique qui résident dans la magnifique vallée du Fraser.

La plupart des Canadiens peuvent se réjouir de la récente conclusion de l'accord du GATT. Le Parti réformiste est d'avis que la prospérité future du Canada dépend en grande partie de la sécurité de nos marchés d'exportation. Nous félicitons le gouvernement libéral de ce qu'il a fait jusqu'ici pour assurer cet accès. Les consommateurs et les producteurs de céréales de l'Ouest seront les grands bénéficiaires. L'abaissement des barrières à l'importation permettra à nos produits de qualité de pénétrer davantage les marchés internationaux.

Cependant, tout arrangement fait des gagnants et des perdants. Je veux exprimer l'inquiétude de mes électeurs dans les secteurs avicole et laitier, en particulier. Ils ont été les perdants à la table des négociations du GATT. Cet accord les a laissés pour compte et incertains de leur avenir. Un grand nombre de ces rudes travailleurs ont investi beaucoup d'argent dans des terres, des bâtiments, du matériel et du bétail. La plupart ont acheté à fort prix le droit de production agricole. Or, la valeur de leurs quotas risque désormais de diminuer considérablement. Cela dépendra de la réaction des Américains aux tarifs proposés par les Canadiens.

Qu'arrivera-t-il si les États-Unis invoquent l'ALENA pour contester nos tarifs et qu'ils obtiennent gain de cause? C'est ce qu'ils tenteront de faire. La semaine dernière, à la Chambre, le ministre de l'Agriculture nous a promis que tout irait bien. Pourtant, ces promesses sonnent creux par rapport aux émouvantes promesses électorales que nous a faites le nouveau gouvernement lorsqu'il s'est engagé à faire des pieds et des mains pour défendre ses agriculteurs dans les négociations du GATT. Un poète a dit un jour qu'une promesse était une dette impayée. Beaucoup d'agriculteurs s'attendent à ce que le gouvernement remplisse la promesse qu'il leur a faite pendant la campagne électorale de leur garantir un avenir sûr. Bon nombre d'entre eux craignent que le manque de vision d'hier et des voeux pieux aujourd'hui ne conduisent leur système à la catastrophe demain.

Au Canada, il ne s'agit là pas seulement d'un système, mais d'une industrie de huit milliards de dollars par année. Cette industrie est un mode de vie pour 100 000 familles que le marché mondial risque de dépouiller complètement. Elles ont l'impression que le gouvernement les a entièrement dépossédées en consacrant trop de temps à promouvoir son programme d'infrastructure tant vanté, mais pas assez à s'occuper des entreprises essentielles qui produisent de la richesse dans notre pays.

Le gouvernement libéral a-t-il un plan pour l'agriculture? Encore la semaine dernière, nous ne savions toujours pas qui, dans le caucus du Parti libéral, serait membre du comité de l'agriculture. Il est inquiétant de penser que non seulement le ministre n'a pas répondu à une simple demande de renseignements qui lui a été présentée il y a un mois, mais qu'il n'en a pas accusé réception. Pire encore, des fonctionnaires du ministère de l'Agriculture auraient admis qu'il n'existe aucun plan d'urgence en cas de réduction des tarifs canadiens à la suite d'une décision rendue en vertu de l'ALENA.

Le Parti réformiste a un plan détaillé depuis maintenant plus de trois ans. Permettez-moi de faire part à la Chambre de seulement quelques-uns des principes de notre programme agricole qui devraient guider le gouvernement dans les mois à venir.

Le premier est simple: il faut que les choses se fassent de façon ordonnée. Malgré tous ses défauts, le système de gestion de l'offre garantissait une production stable et ordonnée. Le gouvernement doit maintenant veiller à ce que la transition entre le régime de gestion de l'offre et un marché libre se fasse d'une manière ordonnée. En raison des longs cycles de rendement agricole et du remplacement du bétail, il est indispensable pour l'agriculteur que le gouvernement fasse preuve de prévisibilité.

Le discours du Trône réitérait le deuxième principe important: «Les entreprises canadiennes auront un meilleur accès aux marchés mondiaux et le gouvernement entend les aider à multiplier les exportations.» L'accès aux marchés étant la clé de notre prospérité, nous souhaitons que les négociations du GATT se terminent avec succès. Ce dont nous n'avons pas besoin, c'est d'un autre palier de tracasseries administratives qui fasse obstacle à cet objectif. Que les entreprises dynamiques trouvent de nouveaux débouchés et mettent au point de nouveaux produits à valeur ajoutée.

Le troisième et dernier principe est le plus important. Bien que, il y a quelques mois, le gouvernement libéral ait vaguement exprimé l'intention de réduire les coûts des intrants agricoles, la Chambre remarquera que Preston Manning avait prononcé un discours-programme sur ce sujet il y a plus de trois ans. Le coût des intrants, particulièrement celui qui résulte d'une imposition excessive, est un domaine sur lequel le Canada peut influer.

(1740)

Nous pouvons espérer qu'un jour le gouvernement aidera l'industrie en éliminant les barrières au commerce interprovincial-les accords récents sont un pas dans la bonne direction-et en éliminant les règlements périmés qui gênent nos producteurs et leur imposent des contraintes qui n'existent pas chez nos voisins du sud, et que le jour viendra où la situation sera la même des deux côtés de la frontière et où l'industrie canadienne pourra enfin marquer des points.

Nos agriculteurs sont parmi les plus efficaces au monde, mais mêmes les meilleurs d'entre eux ne peuvent surmonter le handicap de niveaux d'imposition et de coûts de production bien plus élevés qu'aux États-Unis. Une situation égale ne sera jamais possible tant que le Canada n'aura pas réduit ses dépenses suffisamment pour pouvoir diminuer l'imposition de tous les Canadiens et donc des agriculteurs. Nos producteurs peuvent faire le travail, mais le gouvernement doit leur procurer l'outil qui les rendra compétitifs.

Le Parti réformiste en parle depuis des années, et les offices de commercialisation, les agriculteurs et les petites entreprises de ma circonscription sont d'accord là-dessus. Ils ont maintes et maintes fois demandé aux gouvernements de tous les niveaux de réduire les impôts et de diminuer les tracasseries administratives qui gênent la croissance-c'est-à-dire de ne pas prendre dans leur poche et de les laisser tranquilles-pour qu'ils puissent faire ce qu'ils font le mieux, soit créer des emplois, exporter et apporter la richesse à ma circonscription, à la Colombie-Britannique et à tout le Canada.

Voilà des années que l'on parle de tout cela, mais rien n'a encore été fait. Les libéraux ont une majorité à la Chambre, mais il reste à voir s'ils feront quelque chose qui irait dans ce sens. Je


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rappelle au ministre que les Canadiens ne sauraient se contenter plus longtemps de vains mots. Ils jugeront ce gouvernement et tous les autres sur leur performance.

Au cours des deux dernières années, nous avons invité à maintes reprises les dirigeants des autres partis à discuter de cette importante question. Nous leur avons souvent demandé de nous faire part de leurs idées pour aider notre industrie à faire des projets d'avenir. Ils n'ont jamais répondu à ces invitations. Nous comprenons pourquoi aujourd'hui. Ils n'avaient tout simplement pas d'idées. Le parti qui formait l'opposition hier et qui est au pouvoir aujourd'hui n'a pas pris le temps d'élaborer une politique agricole réfléchie.

Pour terminer, le livre rouge du Parti libéral, qui compte pourtant plus de cent pages, ne renferme que quatre phrases sur le programme agricole. Quatre phrases, en tout et pour tout. Le mot «agriculture» ne figurait même pas dans le discours du Trône. Tout comme les agriculteurs, j'espère seulement que cela ne reflète pas la priorité que le gouvernement accorde au ministère de l'Agriculture.

C'est vraiment dommage, parce que faire preuve de leader-ship, c'est essentiellement fixer des objectifs généraux en tenant compte des avis de tous les intéressés, publier un programme détaillé pour la réalisation de ces objectifs et tout faire pour que ce programme se réalise. Même si nous pouvons faire concurrence aux plus grands producteurs du monde, nous ne pourrons jamais l'emporter sans une politique bien définie.

Si le GATT et l'ALENA doivent être la nouvelle bible des agriculteurs au cours des prochaines années, il leur faudra l'équipement nécessaire. Or, seuls la stabilité, des impôts moins élevés, une paperasserie administrative moins lourde et une chance de s'implanter sur le marché permettront à notre industrie, dont l'industrie agricole de Fraser Valley-Est, d'entrer de plain-pied dans le XXIe siècle.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, j'ai beaucoup apprécié les remarques du député de Fraser Valley-Est. Je les ai trouvées très édifiantes.

Venant d'une circonscription composée essentiellement de villes et de banlieues, je peux difficilement prétendre avoir, sur la question du GATT et de l'agriculture, l'expérience qui est manifestement la sienne. Néanmoins, je dois dire que certaines de ses remarques ne correspondent pas tout à fait à mon interprétation de cette question. Il me semble qu'il confond la crème glacée et le yaourt avec les autres produits laitiers.

Si je comprends bien, la question en jeu, au cours des négociations du GATT, à Genève, était de savoir si on allait sacrifier le projet d'accord du GATT dans son ensemble ou protéger les offices de commercialisation. Que je sache, une entente plaçant essentiellement des droits de douane sur la plupart des produits de la volaille et des produits laitiers a été conclue, mais doit encore être ratifiée.

(1745)

Ce qui s'est passé, c'est que les conclusions tirées, il y a quelques années, par le groupe d'experts du GATT chargé d'examiner la question de la crème glacée et du yaourt avaient été défavorables. Les Américains contestent à présent les droits de douane que nous voulons appliquer à la crème glacée et au yaourt. C'est là, je crois, toute la question. Peut-être le député est-il au courant de certains faits que j'ignore? D'après ce que j'ai lu, il semblerait que le GATT l'emporte sur l'ALENA pour toutes les catégories de produits de la volaille et de produits laitiers auxquels s'appliquent ces droits de douane, à l'exception de la crème glacée et du yaourt.

Étant donné ce qu'il propose, le député veut-il dire que le Parti réformiste aurait sacrifié l'accord du GATT pour protéger les offices de commercialisation? Car c'était là le choix devant lequel nous étions placés. Est-là ce que veut dire le député de Fraser Valley-Est?

M. Strahl: Monsieur le Président, certains des arguments du député sont valables en ce sens que nous avons depuis longtemps, depuis plusieurs années, reconnu comme inévitables les négociations du GATT et la décision concernant l'article XI(2)c). Le Parti réformiste n'a jamais remis cela en question. En fait, nous avons fait campagne là-dessus et avons été vertement critiqués par le Parti libéral qui disait que cela ne se produirait jamais, que l'article XI(2)c) était à toute épreuve.

Voilà à quoi je pense lorsque je dis que les choses doivent se faire de façon ordonnée. Les agriculteurs étaient, et sont encore, prêts à accepter les règlements de tarification proposés par le GATT. Toutefois, depuis le 29 décembre, je demande à chaque semaine au ministre de l'Agriculture une opinion juridique sur les motifs qui lui permettent de croire que les décisions du GATT auront préséance sur l'ALENA, étant donné que les Américains affirment le contraire. Je n'ai encore reçu aucune réponse à ce sujet.

Cela accentue l'indécision et l'incertitude au sein de la communauté agricole qui ne demande rien d'autre que cette stabilité. Les agriculteurs veulent bien respecter les nouvelles règles, mais à condition de savoir ce qu'elles sont.

Il y a deux ans déjà, nous avions dit qu'il fallait parachever les négociations du GATT et négocier une protection tarifaire appropriée pour nos agriculteurs. À notre avis, si nous l'avions fait à cette époque, alors que nous avions encore un certain pouvoir de négociation, nous aurions pu en arriver à une entente favorable pour les agriculteurs canadiens, une entente négociée et non obtenue devant les tribunaux.

Je ne conteste pas l'issue des négociations du GATT, je dis simplement qu'il aurait fallu mieux les planifier; même aujourd'hui, si l'on peut garantir à nos agriculteurs que les résultats de ces négociations seront mis en oeuvre, que le GATT aura préséance sur l'ALENA, ils auront confiance, ils investiront, ils s'engageront dans les exportations qui engendrent la prospérité pour cette industrie.

M. John Duncan (North Island-Powell River): Monsieur le Président, il y a lieu de faire nos remerciements. Nous avons à la Chambre une nouvelle présidence. J'espère que c'est le signe que nous entamons une ère nouvelle à la Chambre des communes.


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Je profite de l'occasion pour remercier les électeurs de North Island-Powell River, qui m'ont confié le mandat de les représenter à la Chambre. Ma circonscription couvre la moitié nord de l'ÎLE de Vancouver et la moitié de la côte de Colombie-Britannique. Dans cette région vaste et diversifiée, la population est répartie également entre l'île de Vancouver et la côte adjacente. La circonscription vit de ses ressources naturelles.

Mes électeurs ont très souvent l'impression marquée que les décisions du gouvernement ne tiennent aucun compte de leurs intérêts. Je me ferai donc un devoir de faire connaître régulièrement leurs préoccupations à la Chambre des communes. Je m'engage aussi à partager avec la Chambre des communes une partie de leurs idées constructives sur la façon d'améliorer le niveau de vie dans leur circonscription et ailleurs au Canada.

North Island-Powell River compte plusieurs groupes autochtones progressistes, dont la culture traditionnelle est encore bien vivante. La bande indienne Sechelt a pris l'initiative de négocier pour son compte l'unique loi qui doit remplacer la Loi sur les Indiens, de sorte qu'elle fonctionne à la façon d'un gouvernement municipal depuis 1986.

(1750)

Mon discours portera essentiellement sur les affaires autochtones. En tant que porte-parole du Parti réformiste pour les affaires autochtones, j'entends discuter de l'actuelle politique fédérale concernant les peuples autochtones au Canada, plus précisément ceux de la Colombie-Britannique.

La Colombie-Britannique se trouve dans une situation unique. On y compte 15 traités, dont 14 portent sur le sud de l'île de Vancouver et un sur le nord-est de la province. La Colombie-Britannique compte cependant une majorité d'autochtones non régie par des traités et une partie importante de l'ensemble des autochtones vivant au Canada.

En général, les relations entre autochtones et non-autochtones sont empreintes de bonne volonté. Nous voulons tous que les autochtones jouissent d'un niveau de vie, d'une qualité de vie et de possibilités comparables à ceux des autres Canadiens. On reconnaît généralement que l'autonomie politique est indispensable pour créer un climat de stabilité propice aux investissements et à l'unité dans la population autochtone en général.

Le gouvernement fédéral est le principal responsable et mandataire des affaires autochtones et il est indispensable que sa politique unisse la population autochtone.

Le gouvernement s'est engagé à démanteler le ministère des Affaires indiennes, à un rythme convenu avec les premières nations. Le gouvernement a reconnu la nécessité de remplacer l'actuel ministère par un système de responsabilité fondé sur l'autonomie politique. L'attribution aux réserves d'un statut municipal à charte fédérale, comme dans le cas de la bande Sechelt, constitue un moyen efficace de doter les bandes indiennes de la base économique dont elles ont besoin pour administrer leurs affaires.

Je crois que le temps est venu d'avoir des opinions nouvelles. Certaines mesures récentes du gouvernement fédéral ont engendré la division au lieu de favoriser l'unité, et j'aimerais proposer une nouvelle optique.

La stratégie de pêche autochtone établie par le ministère des Pêches et des Océans est l'un des domaines qui doivent faire l'objet d'une révision générale. Jusqu'en 1992, l'industrie de la pêche commerciale en Colombie-Britannique embauchait sans discrimination et comptait 25 p. 100 d'autochtones. En outre, l'ancienne pêche de subsistance des autochtones est demeurée intacte.

La stratégie de pêche autochtone du gouvernement fédéral, mise en oeuvre il y a deux ans, a créé une industrie de la pêche commerciale autochtone basée sur la race. Ce projet pilote d'une durée de deux ans comporte des ententes, appliquées dans le cadre de la stratégie de pêche autochtone, qui arriveront à échéance le 31 mars 1994. La mise en oeuvre de ces ententes a été une source de profonde division dans l'industrie et dans la société et elle n'a pas favorisé une gestion de conservation. En 1993, plusieurs décisions rendues par la Cour d'appel de la Colombie-Britannique ont rejeté la nécessité d'une industrie de pêche commerciale autochtone distincte. La révision de la stratégie de pêche autochtone promise par le ministère des Pêches et des Océans pour le printemps prochain devra être caractérisée par la transparence et la sensibilité aux conflits engendrés par les ententes.

Nous recommandons d'éviter le conflit et de tracer une nouvelle orientation pour l'importante industrie de la pêche, en axant la stratégie de pêche autochtone sur la pêche sportive et la mise en valeur des pêcheries. Aucune nouvelle entente de pêche commerciale ne devrait être négociée dans le cadre de la stratégie de pêche autochtone.

On a beaucoup discuté récemment de la terminologie et du droit inhérent à l'autonomie politique. Selon moi, le terme «inhérent» peut signifier que les mesures législatives fédérales et provinciales ne s'appliqueraient pas aux peuples autochtones sans leur autorisation. Je crois aussi qu'il pourrait servir de fondement à des revendications de souveraineté internationale indiquant que les gouvernements autochtones peuvent se soustraire à toutes les lois fédérales et provinciales. C'est inacceptable pour la majorité des Canadiens.

(1755)

Nous sommes d'avis que l'autonomie des autochtones signifie qu'il faut arriver par la négociation à un certain assemblage de lois fédérales, provinciales et autochtones. Cet assemblage, quel qu'il soit, doit s'insérer dans la structure de l'ensemble de la société canadienne.

Les habitants de la Colombie-Britannique veulent régler les revendications territoriales qui sont en suspens, pour que le climat d'investissement s'améliore et pour que les individus, les entreprises, les gouvernements et les groupes autochtones puissent aller de l'avant avec confiance. La Commission d'étude des traités de la Colombie-Britannique, qui a été formée récemment et qui se compose de représentants des gouvernements fédéral et provincial ainsi que des premières nations, a commencé ses travaux puisqu'elle a déjà reçu 38 propositions de la part de bandes de la Colombie-Britannique. La commission exercera une influence positive sur les négociations, mais il y a de graves lacunes. Pour combler ces lacunes, j'ai des recommandations à faire au sujet des mesures provisoires, des droits des tiers et de la transparence.

Les mesures provisoires ayant trait aux ressources qui ont récemment été négociées entre la province et les groupes autoch-


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tones minent la compétence du fédéral sur les questions autochtones et rendent les négociations moins urgentes. Le gouvernement fédéral a intérêt à remettre en question le mandat de la province de négocier ces accords sans la participation du fédéral.

Les droits des tiers ne seront pas négociés. Le principe invoqué pour s'opposer à leur négociation est sans fondement, puisqu'ils veulent aussi dénouer l'impasse actuelle. Ils veulent faire avancer le processus plutôt que de le retarder. Toute la question du mandat du gouvernement serait beaucoup plus limpide si les tiers étaient représentés.

D'une façon générale, la population s'interroge de plus en plus sur le processus de négociation. La décision d'inviter les tiers à participer est audacieuse de la part des intéressés, mais elle est indispensable pour en arriver à un consensus.

En théorie, je pense, et c'est ce que la jurisprudence porte à croire, que, à cause de la relation fiduciaire de nos gouvernements fédéral et provincial, ils se trouvent en conflit d'intérêts en négociant avec les premières nations, sauf si les tiers sont présents à la table. Il est probable que tout cela aboutisse à des procès.

En terminant, je demande de nouvelles orientations concernant les questions autochtones. Les habitants de la Colombie-Britannique veulent mettre un terme au climat d'incertitude, de secret et de dissension. Pour cela, il faut adopter les mesures que j'ai présentées.

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo): Monsieur le Président, à l'occasion de mon premier discours dans cette Chambre, je veux féliciter le Président d'avoir été élu à un poste aussi prestigieux, et je veux vous féliciter vous aussi de votre nomination à une fonction tout aussi prestigieuse.

Je veux aussi remercier le motionnaire et le comotionnaire du discours du Trône, de même que les électeurs de Perth-Wellington-Waterloo qui m'ont élu. Je tiens à leur dire que je vais m'efforcer de les représenter et de les servir de mon mieux.

Je m'en voudrais de ne pas remercier aussi ma femme et ma famille de leur appui sans réserve tout au long de la campagne.

(1800)

La circonscription de Perth-Wellington-Waterloo est située dans la région fertile du sud-ouest de l'Ontario. Cette région est tellement belle et fertile qu'on se croirait dans le jardin d'Éden. C'est la première circonscription au Canada en ce qui a trait à la production laitière et porcine, et la deuxième pour ce qui est des fèves blanches et de la culture mixte. Si cette région est aussi productive, c'est en raison des efforts et de l'efficacité de ses agriculteurs, que je félicite ici pour leur contribution à la prospérité de notre pays.

Depuis la conclusion des négociations du GATT, j'ai reçu plusieurs centaines d'appels de producteurs laitiers, d'aviculteurs, et d'ovoculteurs, qui craignent pour leur survie par suite du retrait de l'article XI du GATT. Je tiens à dire aux agriculteurs canadiens de ces secteurs de la gestion de l'offre que le gouvernement libéral à Ottawa s'est engagé à protéger les exploitations agricoles familiales, ainsi que le secteur de l'agriculture et le système de la gestion de l'offre au Canada.

Les modernes industries de produits automobiles de Stratford, St. Mary's, Mitchell, Listowel et New Hamburg forment collectivement le principal employeur dans la circonscription de Perth-Wellington-Waterloo. Le succès de cette industrie est lié à la présence d'une main-d'oeuvre qualifiée et travailleuse. Le niveau de compétence de cette main-d'oeuvre a été maintenu grâce à l'engagement pris, tant par les employeurs que les travailleurs, d'améliorer leur formation et leurs compétences, de façon à fournir la meilleure qualité de produits aux consommateurs.

En terminant, je me dois de mentionner la plus célèbre attraction de ma circonscription, à savoir le festival de Shakespeare à Stratford, qui est la manifestation du genre la plus célèbre en Amérique du Nord. À cette occasion, des représentations sont données sur trois scènes dans la ville de Stratford, qui est renommée pour ses espaces verts, ses boutiques et ses restaurants. Je suis fier de vivre à Stratford, berceau du théâtre national d'expression anglaise du Canada et joyau du sud-ouest de l'Ontario. Il s'agit ici d'un véritable succès culturel: un théâtre qui satisfait aux normes artistiques les plus élevées tout en attirant chaque année des milliers de visiteurs qui injectent des millions de dollars dans l'économie régionale. Au nom du théâtre, j'invite tous les députés à visiter Stratford et à assister gratuitement à l'une de ses représentations.

Nous, libéraux, avons remporté les élections fédérales d'octobre 1993 parce que nous avons offert aux Canadiens une vision d'espoir en matière de création d'emplois et de climat économique amélioré pour les petites et moyennes entreprises. Je puis vous assurer que mes électeurs appuient les propositions contenues dans le discours du Trône, celles notamment qui visent à encourager les institutions financières à mettre davantage de capitaux à la disposition des petites et moyennes entreprises. Les consultations que des députés ministériels ont eues avec des directeurs de banques ont déjà commencé à porter fruit.

La création du Fonds d'investissement canadien aidera les entreprises de technologie de pointe à obtenir les capitaux dont elles ont besoin à long terme.

Nous, libéraux, allons créer un réseau technologique canadien afin de faciliter la dissémination de l'information sur les nouveautés technologiques et d'aider encore davantage ces entreprises. Le gouvernement va encourager la création d'un partenariat entre les universités, les instituts de recherches et l'entreprise privée du Canada afin de stimuler les activités de recherche et de développement dont les entrepreneurs ont besoin pour lancer leurs entreprises. Ce partenariat aidera les petits entrepreneurs à se tenir à la fine pointe des nouvelles techniques et de l'information essentielle au succès à long terme de leur entreprise.

Nous, libéraux, reconnaissons que le gouvernement compte sur l'entreprise privée pour être le moteur de la croissance économique et de la création d'emplois et fait souvent lui-même office de catalyseur dans ces domaines. Nous espérons que le Programme d'aide à la rénovation résidentielle incitera les propriétaires à rénover leur maison, ce qui stimulera l'industrie du bâtiment qui traverse actuellement une période de léthargie.


523

Toutefois, nous croyons aussi que le gouvernement peut créer d'importants programmes, comme le Service jeunesse, pour redonner de l'espoir et du travail à un certain nombre de jeunes Canadiens. Grâce à ce programme, des milliers de jeunes Canadiens dynamiques accéderont au marché du travail en participant à des projets communautaires et environnementaux fort louables.

Les gouvernements d'un peu partout dans le monde savent que leur main-d'oeuvre doit avant tout posséder une formation solide si elle veut soutenir la concurrence sur le marché mondial.

(1805)

Nous, libéraux, proposons d'améliorer la formation professionnelle afin de faciliter l'entrée sur le marché du travail. Malgré le taux de chômage élevé, des sociétés en pleine croissance, oeuvrant notamment dans les domaines des télécommunications, de l'information et de la science de l'environnement, ont du mal à combler des milliers de postes, faute de main-d'oeuvre qualifiée. Nous ne pouvons tolérer ainsi le gaspillage de l'énergie, du talent et de l'éducation des milliers de jeunes chômeurs.

Nous collaborerons avec les provinces et le secteur privé pour créer un programme national d'apprentissage. Ce programme servira à établir des normes nationales en matière d'apprentissage et à concevoir de nouveaux programmes pour les secteurs économiques en plein essor. Tous ces programmes sont nécessaires. Il serait intolérable de maintenir le statu quo.

Tout comme le but de la politique économique du Parti libéral est d'assurer la croissance économique du Canada, le but de notre politique sociale est d'assurer le bien-être des Canadiens. Le changement, cette force constante et souvent perturbatrice dans notre société moderne, a rendu lourds et redondants certains éléments de notre filet de sécurité sociale. Le rôle du gouvernement est de concevoir des mesures législatives pertinentes qui répondent aux besoins actuels de la population.

Les planificateurs sociaux, qui font preuve de prévoyance dans la conception des mesures législatives, verront à ce que celles-ci soient modifiées au besoin après un certain temps. Nous, les libéraux, nous sommes engagés à mener une importante étude sur le système de sécurité sociale.

Nous examinerons aussi, avec la collaboration des gouvernements provinciaux et des Canadiens, qui seront consultés, notre régime de soins de santé tant vanté. Le forum national sur la santé sera présidé par le premier ministre, le très honorable Jean Chrétien. Nous, libéraux, assurons aux Canadiens que notre gouvernement continuera de respecter les principes exposés dans la Loi canadienne sur la santé, y compris le rejet de toute forme de ticket modérateur.

L'an dernier, en parcourant la circonscription de Perth-Wellington-Waterloo, ce qui me décourageait le plus, c'était d'entendre les gens, à l'entrée des usines et des exploitations agricoles, dire qu'ils n'attendaient plus rien du gouvernement. Beaucoup d'autres étaient simplement fâchés contre les politiciens qui, selon eux, étaient malhonnêtes ou insensibles à leurs besoins.

Il doit y avoir une bonne raison pour que les Canadiens soient aussi avides d'honnêteté et d'intégrité de la part du gouvernement, pour qu'ils réclament tous justice. Je crois que, pour un trop grand nombre de Canadiens, le rêve canadien est devenu le cauchemar canadien. Ils ont peur de perdre leur emploi, leur filet de sécurité sociale, leur identité culturelle et l'intégrité de leur environnement naturel. Nous, libéraux, avons promis de refaire du gouvernement fédéral du Canada un gouvernement honnête et intègre, et nous devons tenir notre promesse.

En conclusion, nous, libéraux, croyons que l'essence même d'une société civilisée est l'intérêt mutuel, la tolérance et la collaboration. Nous croyons que les Canadiens sont aujourd'hui prêts à se serrer les coudes, à travailler ensemble, à faire des sacrifices dans leur intérêt et dans l'intérêt du Canada.

Nous, libéraux, croyons que la politique du gouvernement exposée dans le discours du Trône trace le chemin que les législateurs et les Canadiens devront suivre pour mener à bien leur mission commune. Il lance un message d'espoir grâce à ses nombreuses initiatives visant à créer de l'emploi et à stimuler l'économie. Il donne le coup d'envoi de réformes qui rendront l'administration gouvernementale plus transparente et responsable. Enfin, il est tourné vers l'avenir puisqu'il établit des structures visant à examiner et à améliorer notre système de sécurité sociale, et c'est exactement ce dont le Canada et les Canadiens ont besoin aujourd'hui.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): J'aimerais faire quelques commentaires, monsieur le Président. Le député a commencé son discours en rappelant que le Parti libéral a été élu parce qu'il a présenté aux Canadiens une vision d'espoir. C'est en partie vrai, je pense, mais comme l'espoir ne se manifeste pas d'une façon très claire et transparente dans le discours du Trône, j'ai peur que les Canadiens déchantent assez rapidement.

(1810)

En effet, dans le discours du Trône, il n'y a pas d'éléments véritablement majeurs. Il y a des projets très généraux, de bonnes intentions y sont alignées, mais il y a peu d'éléments concrets.

Il faut toujours se rappeler que, tant que le gouvernement n'aura pas résolument entrepris de régler toute la question des déficits budgétaires et de la dette, toute reprise économique sera un petit peu artificielle. Le poids de la dette et le poids du déficit sont très lourds pour les entreprises. Une quantité beaucoup trop grande de ressources est drainée vers ce poids absolument épouvantable que constitue la dette.

D'autre part, le député a parlé un peu d'une espèce d'innovation dans le domaine de la technologie. Je pense que c'est important. On a déjà noté dans cette Chambre que l'investissement canadien dans le domaine de la recherche et développement est nettement inférieur à celui d'autres pays. Notre investissement est de l'ordre de 1,40 p. 100 du produit intérieur brut, alors que des pays comme l'Allemagne, le Japon et les États-Unis inves-


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tissent deux fois plus dans la technologie. C'est cela qui est créateur d'emplois. Il n'y a à peu près rien dans le discours du Trône qui soit porteur d'espoir dans ce domaine-là.

Le député a aussi parlé de la rénovation domiciliaire et de l'industrie de la construction. Au Québec, on est aux prises avec un problème extrêmement important de travail au noir. C'est toujours relié au même problème, celui des impôts et des taxes qui sont trop élevés. Tant que le gouvernement n'aura pas donné un signal clair à cet égard, il sera toujours très artificiel de penser que l'industrie de la construction et de la rénovation va repartir.

J'ai un dernier commentaire en ce qui a trait aux normes nationales dans le domaine de l'apprentissage. Tout nous porte à croire que tant le Parti libéral que le Parti progressiste-conservateur n'apprennent pas de leurs erreurs et de leurs bêtises. Les normes nationales sont une entrave importante au développement de chacune des régions. Le gouvernement fédéral a la manie de dicter des normes nationales, de donner au départ des subventions pour accompagner ces normes-là et ensuite de se retirer. Cela entraîne la conséquence qu'on connaît: les provinces se retrouvent avec des difficultés financières. C'est le gouvernement fédéral qui crée les problèmes. Je rappelle que la formation professionnelle est une compétence provinciale et que le gouvernement fédéral n'a rien à foutre dans ce secteur d'activité. Les députés du Bloc québécois, conformément à la pensée des Québécois et des Québécoises, vont revendiquer une pleine maîtrise d'oeuvre dans ce domaine-là.

[Traduction]

M. Richardson: Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir été si attentif pendant mon discours. Il m'a aidé à me rappeler ce que j'ai dit.

Je voudrais revenir à une ou deux choses au sujet de l'espoir. Nous avons tous grand besoin d'espoir, que ce soit dans le parti du député ou dans le mien. Chaque printemps, tous les agriculteurs ont de l'espoir.

Le discours du Trône contient les graines qui germeront pour donner tout ce que j'ai mentionné et que vous avez rappelé. Il n'y avait rien de tangible, mais il y avait ces graines qui ont été répandues sur la terre et, dans les bonnes conditions, dans le bon environnement, elles germeront, pousseront et porteront des fruits.

(1815)

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord): Monsieur le Président et chers collègues de la Chambre des communes, j'ai l'immense privilège de prendre la parole à l'occasion du débat en réponse au discours du Trône qui fait état des priorités du gouvernement pour la première session de la 35e législature.

Je veux d'entrée de jeu remercier les électeurs de la circonscription de Simcoe-Nord qui m'ont confié la responsabilité de défendre leurs intérêts à Ottawa. Je veux aussi remercier ma femme, mes proches et les centaines de bénévoles sans l'aide desquels je ne serais pas ici aujourd'hui.

[Français]

En octobre dernier, les Canadiens et les Canadiennes ont fait clairement savoir que les politiques de l'ancien gouvernement et la façon dont les choses se passent à Ottawa devaient changer.

Je suis heureux de constater que ce discours du Trône reflète les promesses de renouveau qui sont incluses sur la plate-forme électorale du Parti libéral. En tant que député de cette Chambre, j'aurai le plaisir d'appuyer ces politiques.

[Traduction]

Les participants à cette 35e législature devront déployer tous les efforts possibles pour que les Canadiens regagnent confiance dans le gouvernement fédéral. Les députés doivent pouvoir participer pleinement à l'élaboration des lois et des mesures d'intérêt public. Lors de la dernière campagne électorale, à maintes reprises, j'ai dit ceci: «Il faut acheminer le message de la circonscription de Simcoe-Nord à Ottawa, et non pas celui d'Ottawa à la circonscription de Simcoe-Nord.» J'ai pris cet engagement et je suis déterminé à le respecter.

Je me réjouis des mesures que le gouvernement a l'intention de prendre pour accroître la crédibilité du Parlement, mais cela ne suffit pas. J'estime qu'il incombe à chaque député de faire tout son possible pour regagner la confiance des électeurs et les encourager à participer au processus. À cette fin, je compte donc mettre sur pied des comités consultatifs locaux au sein de ma circonscription. Ces comités me conseilleront et m'aideront à bien comprendre les diverses préoccupations de mes électeurs.

Depuis les élections, j'ai rencontré de nombreuses personnes représentant la petite entreprise, le secteur agricole, des groupes environnementaux, des conseils municipaux et des organismes à vocation culturelle.

Leur participation à ces comités consultatifs me sera indispensable et m'aidera énormément à livrer au Parlement le message de mes électeurs.

[Français]

Il est essentiel que le gouvernement s'attaque au développement économique et aux problèmes du chômage le plus vite possible. En aidant des petites et moyennes entreprises à obtenir le capital dont elles ont besoin pour grandir, en créant le Service jeunesse, en aidant à développer un réseau technologique canadien et en rebâtissant nos infrastructures, le Canada sera sur la bonne piste pour une relance économique forte.

[Traduction]

C'est dans la circonscription de Simcoe-Nord que sera construit, dans les mois à venir, l'institut de recherche et de développement industriels. Grâce à cet institut, la technologie canadienne liée à la fabrication de moules et de matrices d'outils sera parmi les meilleures du monde, ce qui aura de nombreuses retombées sur l'économie canadienne. L'institut est un bel exemple du partenariat qui peut exister entre l'industrie, le milieu universitaire et le gouvernement et dont il est fait mention dans le discours du Trône.


525

Nous devons continuer d'appuyer l'industrie agricole, le pivot de l'économie dans de nombreuses régions du Canada. La proclamation récente de l'ALENA et les modifications qui découleront de l'accord du GATT ont vivement inquiété les agriculteurs canadiens dernièrement. Il est très important que le gouvernement continue d'épauler notre industrie agricole avec tous les moyens à sa disposition.

[Français]

On peut facilement constater que les Canadiens et les Canadiennes ont l'impression qu'ils paient beaucoup trop de taxes et que leur argent est gaspillé à tous les paliers de gouvernement. Le rapport du vérificateur général, qui fut déposé à la Chambre la semaine dernière, ne fait rien pour apaiser ces inquiétudes.

Les gens espèrent que notre nouveau gouvernement va améliorer les choses: il ne faut surtout pas les laisser tomber. Déjà, on sent que le gouvernement tente de régler les problèmes de chevauchements avec les provinces et qu'il veut mettre fin à la TPS.

(1820)

Cependant, il n'est pas suffisant de faire quelques modifications ici et là. Les Canadiens et les Canadiennes s'attendent à un examen complet du système de taxation et de ses injustices. Notre gouvernement doit s'assurer que dorénavant nous paierons tous notre juste part de taxes, riches ou pauvres, corporations ou particuliers.

[Traduction]

Les Canadiens exigent des changements importants, mais ils font savoir également qu'ils n'accepteront pas un affaiblissement de notre important filet de sécurité sociale, et notamment de l'assurance-maladie.

Je suis convaincu que le gouvernement comprend que nous faisons face à un problème de recettes, non à un problème de dépenses.

Il est évident qu'on ne peut résoudre les difficultés financières de notre pays sans d'abord nous attaquer au taux intolérablement élevé du chômage au Canada, de sorte que les victimes de la récession puissent contribuer à l'assiette fiscale. Nous avons besoin de plus de gens qui paient des impôts, et non de gens qui paient plus d'impôt.

Le gouvernement doit également s'attaquer aux sources de pertes de recettes comme l'exonération d'impôt des gains en capital, les règles relatives aux fiducies familiales et les échappatoires fiscales liées aux filiales étrangères de sociétés canadiennes.

Il est évident que nous devons nous attaquer au déficit, mais il faut le faire en augmentant les recettes et en supprimant les dépenses inutiles, non en sabrant dans les programmes sociaux.

La population autochtone du Canada a été négligée beaucoup trop longtemps, et c'est avec un vif enthousiasme que je vois le gouvernement fédéral entamer ses discussions touchant l'autonomie gouvernementale des autochtones. L'issue de ces discussions revêtira une importance particulière pour les membres de la bande des Saulteux de Beausoleil et ceux de la bande indienne de Rama, toutes deux établies dans ma circonscription.

[Français]

Bien que l'anglais soit la langue d'usage de la majorité des personnes de ma circonscription, il y existe une importante communauté francophone dont la langue et la culture continuent de grandir. Je crois sincèrement que, si le Québec décide de quitter le Canada, la culture et la langue françaises à l'extérieur du Québec seront en grand danger de disparaître. Il y a approximativement un million de francophones à l'extérieur du Québec. Étant un de ces francophones qui ne résident pas au Québec, je suis fier de me considérer Canadien et je n'ai pas peur de dire que le fédéralisme sert bien toutes les régions de ce pays. Je demande donc à nos confrères et consoeurs du Bloc québécois de ne pas nous abandonner.

[Traduction]

Les Canadiens veulent que le gouvernement s'attelle à la tâche pour faire du Canada un pays où il fait encore mieux vivre. Notre travail doit se concentrer sur la création d'emplois et la croissance économique, non sur les disputes constitutionnelles. Nous devons réduire le déficit et la dette.

Il est vrai que nous disposons de moins de ressources avec lesquelles travailler, mais comme l'a dit ma collègue de Madawaska-Victoria, un gouvernement maigre n'a pas à être un gouvernement mesquin.

En terminant, je m'engage à bien représenter mes électeurs et à travailler dans un esprit de collaboration avec tous les députés à la Chambre pour assurer au pays un gouvernement responsable et qui sache rendre des comptes.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, j'aimerais remercier de ses propos mon collègue de Simcoe-Nord, que je connais très bien d'ailleurs. Ses propos étaient fort intéressants, mais j'ai accroché sur un élément qu'il a soulevé dans son discours: si le Québec se sépare, dit-il, on assistera à la disparition du français hors Québec. Il sait très bien que la langue française n'est pas très forte hors Québec. La ville qu'il habite actuellement est un exemple parfait de ce qui arrive aux francophones hors Québec, au Canada.

(1825)

Les droits ne sont pas respectés. Les écoles qui avaient été promises aux francophones ne sont pas accordées. La gestion du système scolaire n'est pas accordée. Il y a plusieurs choses que les francophones hors Québec n'ont pas. L'honorable député est sûrement au courant de tout cela.

J'aimerais terminer sur un commentaire. D'après moi, la raison principale pour laquelle le Québec doit accéder à la souveraineté, c'est justement pour faire en sorte que la culture française survive en Amérique du Nord.

M. DeVillers: Monsieur le Président, je m'attendais à une telle question de la part de l'honorable député de Québec-Est. Je ne peux pas dire que les francophones hors Québec n'éprouvent pas de difficulté à faire respecter leurs droits actuellement, mais à Penetanguishene, dans le comté de Simcoe-Nord, nous avons une école française pour laquelle on s'est battu. On a finalement eu notre école française. Je crois qu'on peut faire respecter nos droits du moment qu'on a la volonté de les faire respecter.


526

[Traduction]

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth): Monsieur le Président, je voudrais dire quelques mots en tant que député du sud de l'Ontario, une région très anglophone.

En fin de compte, est-ce vraiment une question de langue ou d'autres points que nous pourrions avoir en commun? Je voudrais très brièvement relater une anecdote pour le bénéfice des députés du Bloc.

Il y a une quinzaine d'années, alors que j'étais reporter pour un journal du sud de l'Ontario, il est arrivé au Québec une tragédie dont certains députés du Bloc se souviendront. Il s'agit du glissement de terrain à Saint-Jean-Vianney, dans la région du Lac-Saint-Jean.

Comme j'étais le seul reporter du journal à parler un peu français, vraiment très peu je dois dire, j'ai été envoyé dans la région pour faire un reportage un an après le glissement de terrain. Je dois dire que j'ai eu énormément de difficulté à communiquer avec mon français rudimentaire parce que l'accent du Lac-Saint-Jean était très différent de ce que j'avais appris à l'école.

Je dois vous dire aussi que j'ai trouvé les gens fort sympathiques. Ils m'ont conduit à leur club local qui était en fait une salle des Odd Fellows. Je me suis donc senti comme chez moi. Je dois le dire. Grâce à l'aide d'une personne venant du nord de l'Ontario, j'ai réussi à communiquer avec les gens de la place. Cette personne traduisait mon mauvais français en français québécois, ce qui m'a été très utile parce que mon anglais n'était pas très bon non plus, je l'avoue.

En somme, ce que je veux dire c'est qu'en dépit des problèmes de langue, je me suis senti chez moi dans cette petite salle des Odd Fellows. Ensuite, nous sommes allés au bar de l'autre côté de la rue.

Comme tout journaliste de l'époque, ma boisson favorite était le scotch. Pour prouver qu'on était vraiment journaliste, il fallait boire du scotch. J'ai donc commandé un scotch dans ce bar. Le barman m'a répondu qu'il n'avait pas de scotch, mais seulement du rye, ce qui faisait très bien mon affaire. Voilà un autre point que nous avons en commun.

Au cours de mon enquête sur le glissement de terrain, j'ai appris que la plupart des gens à Saint-Jean-Vianney suivaient le match de hockey à la télé avant la catastrophe. Je me sentais encore chez moi.

[Français]

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est): Monsieur le Président, c'est un grand honneur pour moi de prononcer mon premier discours ici, à la Chambre des communes, et de parler d'agriculture, parce que j'ai l'honneur d'être porte-parole officiel en matière d'agriculture et d'agro-alimentaire. J'en suis très heureux parce que je sais que l'agriculture est un domaine extrêmement important. C'étaient d'ailleurs les remarques que l'honorable député de Simcoe-Nord avait faites et avec lesquelles je suis tout à fait d'accord, soit que l'agriculture est l'épine dorsale de plusieurs régions au Canada. L'agriculture est une belle industrie; c'est une industrie importante au Canada. Malheureusement, les Canadiens ne s'aperçoivent pas à quel point l'agriculture est importante.

(1830)

Il faut dire qu'il y a peut-être environ 200 000 producteurs au Canada, représentant un revenu brut d'environ 23 milliards, ce qui est considérable. Il y a presque 2 millions d'emplois en agriculture, directs et indirects, au Canada. Si j'avais le temps de parler de l'agriculture très longuement, j'aurais beaucoup à dire sur le potentiel de création d'emplois. Je n'en n'aurai pas l'occasion ce soir, mais il y a un potentiel considérable de création d'emplois dans le domaine de l'agriculture.

L'agriculture au Canada est tellement importante que, quand on associe la production agricole sur la ferme et toute la chaîne agro-alimentaire au Canada à l'agriculture, elle constitue l'industrie la plus importante. Elle est plus importante que l'industrie automobile, la dépassant de 8 milliards. Quand je dis «toute la chaîne agro-alimentaire», je parle de tous les intervenants, tous les distributeurs, tous les manufacturiers, tout ce qui implique l'agro-alimentaire au Canada. Ce sont 38 milliards au Canada, par année, en PIB; au Québec, cela représente 4 milliards de plus que l'industrie du papier.

Donc, l'agriculture est quand même un domaine d'une très grande importance, d'un grand intérêt. C'est sans doute la raison pour laquelle la salle est remplie ce soir, pour écouter mon discours sur l'agriculture. C'est également une industrie avant-gardiste au Canada. Il faut souligner ce fait. On peut même faire un peu l'histoire de l'agriculture pour dire que c'est peut-être une des industries qui a été à la base même de l'union, le développement du Canada. Ce fut aussi l'industrie qui a contribué un peu à l'image du Canada comme étant the bread basket of the world. Mais aujourd'hui, en 1994, c'est devenu aussi une industrie très évoluée, très avant-gardiste. Dans certains secteurs, on peut en nommer plusieurs, comme le grain de l'Ouest et la viande rouge par exemple, on est le numéro un au monde; et surtout dans le domaine de la production laitière, on est très important au Canada. On a une industrie hautement perfectionnée, il y a des progrès technologiques considérables qui sont faits. Même que, sur la scène internationale, on exporte pour environ 85 millions de matériel génétique, c'est-à-dire des vaches, comme les Holstein par exemple, pour la reproduction.

Sans vouloir trop aller dans les détails, je soutiens donc que l'agriculture est une industrie très importante au point de vue économique et au point de vue technologique et connaissances de pointe, de haut de gamme. Nous sommes parmi les premiers au monde.

Un des problèmes et même le premier, c'est que, malheureusement, les gens méprisent, négligent l'agriculture. Ce n'est pas à la mode. L'agriculture est mal comprise peut-être. Pour plusieurs, l'agriculutre est du folklore. On considère encore les agriculteurs comme des producteurs de patates. On ne ne s'imagine pas à quel point être agriculteur, aujourd'hui, c'est compliqué. Ça prend beaucoup de technologie, beaucoup de connaissances; il faut connaître la machinerie; il faut connaître les herbicides, les pesticides et les engrais; il faut connaître les


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animaux, la construction et un tas de choses. Il faut être spécialisé et polyvalent.

(1835)

Le problème aussi, c'est que cette population agricole, même si elle est très importante par sa production totale et son expertise, est très minime. Elle représente environ 3 p. 100 de la population canadienne. Cela cependant crée un autre problème: les gouvernements négligent l'agriculture.

J'ai l'impression que d'une façon générale les consommateurs considèrent les aliments comme un acquis au Canada, comme si ça allait de soi. On ne prend pas le temps d'apprécier la grande importance de cette industrie pour le pays. D'ailleurs, ma collègue d'Essex-Windsor avait dit, il y a quelques jours, qu'un pays qui ne peut pas fournir sa nourriture à son peuple n'est pas un pays qui se respecte, tellement c'est important. C'est la base.

L'autre problème, encore une fois, c'est le fait que la presse au Canada ne s'intéresse pas beaucoup à l'agriculture, parce que ce n'est pas à la mode. La presse se préoccupe essentiellement des problèmes urbains et non pas des problèmes ruraux. Donc, l'agriculture est beaucoup négligée. Par conséquent, elle est également négligée par les gouvernements. Ça, c'est évident. Mon Dieu que c'est évident!

Si on regarde dans le discours du Trône, il n'y a pas un seul mot sur l'agriculture. Il est évident qu'on néglige d'en parler. Il y a quinze ans, j'ai travaillé pour Eugene Whelan, qui était alors ministre de l'Agriculture dans le Cabinet de Pierre Elliott Trudeau. Cela a été pour moi la plus grande découverte que j'ai jamais faite au sujet de l'agriculture. M. Whelan, lui, grand ministre comme il était, peut-être le ministre de l'Agriculture le plus important de toute l'histoire du Canada, sans doute, avait une difficulté immense à convaincre ses collègues de l'importance de l'agriculture. D'ailleurs, le Cabinet de M. Trudeau faisait zéro, et je dis bien zéro, pour aider l'agriculture. On faisait le minimum, un certain minimum.

J'ai d'ailleurs un peu l'impression qu'on n'a pas vraiment évolué depuis, même si on a changé de gouvernement. On est passé au Parti conservateur et on se retrouve maintenant avec un gouvernement libéral, avec un premier ministre qui était lui aussi membre de ce même Cabinet.

M. Trudeau lui-même méprisait ouvertement l'agriculture. Je me souviens très bien qu'une fois où nous étions à Winnipeg, alors qu'il y avait une crise dans l'Ouest sur l'exportation du grain, les agriculteurs étaient massés devant M. Trudeau; le grain ne sortait pas et ils ont dit: Qu'est-ce que tu vas faire pour nous aider? Je cite les mots de M. Trudeau: «Sell your own goddam grain.»

Tout cela pour dire que M. Trudeau, le premier ministre, n'avait aucune patience pour les questions agricoles, et je pense que le premier ministre actuel a un peu la même optique de négliger l'agriculture, j'ose même dire de ne pas la comprendre. Tout récemment, il y a eu les négociations du GATT qui ont influencé de façon très importante tout un secteur agricole au Québec et en Ontario, dont la gestion de l'offre, et dans ce système agricole qui affecte la production laitière et agricole, il y a des quotas. Les négociations du GATT remettaient en question la valeur des quotas.

En passant, les quotas constituent environ les deux tiers de la valeur d'une ferme. On avait posé la question au premier ministre du Canada, à savoir si les fermiers qui seraient perdants à cause des effets néfastes du GATT recevraient une compensation. Le premier ministre a dit: Non, pas question, parce qu'ils n'ont pas payé leurs quotas. La citation exacte, c'est: «Pas de compensation pour les producteurs car ils n'ont pas acheté leurs quotas».

(1840)

C'est la citation exacte de ce que le premier ministre a déclaré en entrevue en français, dans Le Droit. En passant, cette déclaration n'a pas été rapportée dans la presse anglophone canadienne. J'ai remarqué ce petit fait-là parce que c'est important, et je vous le dis: cela a été rapporté seulement en français. Il est évident que le premier ministre se trompait concernant les quotas. On sait très bien que les agriculteurs ont payé leurs quotas et les ont payés cher. C'est d'ailleurs la base même des emprunts qu'ils font et la base de leur crédit. C'est la base de beaucoup de choses très importantes pour les agriculteurs.

La conséquence de tous ces éléments-là, que je souligne très rapidement, c'est qu'au fond, ce gouvernement souffre d'une absence de politique constructive et positive dans le domaine agricole. Il n'a pas de vision agricole. Le Canada n'a jamais eu de vision agricole constructive. Ce qu'on a comme politique agricole, c'est un bouche-trou. C'est une politique qui s'établit toujours en réaction aux Américains, aux réactions aux influences internationales.

On n'a pas d'initiative au Canada. On ne fait que réagir. Les faits actuels, les faits récents au GATT et les ententes qui sont en train d'être négociées avec les Américains sont la preuve flagrante de ce manque de vision agricole au Canada. Cela prouve qu'on ne fait que réagir. En ce moment, on est dans une situation compliquée et inquiétante pour les agriculteurs, non seulement les agriculteurs de l'Est, mais également les agriculteurs de l'Ouest. Dans l'Ouest, on a une production de blé qui n'est pas égalée dans aucun autre pays au monde. Dans l'Ouest, on a une production de blé dur et d'autres productions très importantes, et les Américains veulent limiter les exportations de blé vers les États-Unis. Il est vrai que les exportations ont augmenté considérablement depuis l'année dernière et les années précédentes. C'est un produit très important pour l'Ouest, et les Américains veulent limiter cette exportation.

Au fond, les Américains n'ont pas raison de limiter cette exportation. On a signé une entente de libre-échange avec les Américains. La base de cette entente-là, c'est l'échange avec les Américains, et les Américains veulent maintenant jouer mauvais jeu. Ils veulent maintenant forcer le Canada à limiter ses exportations. Le Canada est à genoux encore une fois, comme d'habitude. Nous ne pouvons pas, avec le ministre de l'Agriculture, faire valoir nos droits, nos acquis. Cela nous revient. Dans l'Ouest, on devrait pouvoir exporter les quantités de blé qu'on veut aux


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États-Unis selon l'ALENA, selon l'Accord de libre-échange avec les États-Unis.

Voici un autre exemple du phénomène d'un gouvernement qui est à genoux, qui est toujours en train de s'écrouler, qui n'est pas capable de se défendre contre les Américains ou contre les événements internationaux. Au GATT, on a perdu un grand pouvoir de dévelopement agricole. On a perdu le contrôle sur un système agricole qui était peut-être l'un des meilleurs au monde. Dans les négociations du GATT, on a voulu renforcer l'article XI. Vous serez tous d'accord avec moi que le système de gestion de l'offre au Canada était le meilleur au monde. Il était sans aucun doute le meilleur au monde. C'est un système qui ne faisait pas de surproduction ou de dumping, qui contrôlait donc tous les facteurs. En fait, c'était un modèle pour le monde.

(1845)

On a dû sacrifier ce beau système dans lequel on avait investi beaucoup d'efforts et d'argent pour plaire à d'autres pays. Si le Canada avait voulu se défendre adéquatement, il aurait pu faire renforcer l'article XI. L'honorable député reconnaîtra que même les États-Unis et bien d'autres pays ont obtenu toutes sortes d'exceptions au GATT. Le Canada aurait pu faire renforcer l'article XI, mais il ne l'a pas obtenu. Le Canada s'est «effoiré» là-dedans, faisant croire aux gens qu'on était isolés et qu'on n'avait pas de base pour se défendre. Au fond, si le Canada avait voulu vraiment défendre la gestion de l'offre, il aurait pu le faire. Au fond, il ne voulait pas le faire. Maintenant, le fait qu'on a perdu l'article XI renforcé nous crée un autre problème en agriculture, un problème encore pire que celui que l'on connaît.

Cet autre problème est le résultat du manque de fermeté dans les négociations au GATT. Pour protéger notre système d'offre dans les secteurs contingentés, on a de la difficulté à maintenir le taux de tarification qui est censé être établi pour protéger la gestion de l'offre. Pour maintenir le système en place pendant au moins quelques années afin de protéger les agriculteurs et de leur permettre de se réadapter au monde nouveau et au commerce international, le moins que l'on puisse faire, c'est maintenir un mur de tarification suffisamment élevé pour permettre aux agriculteurs de se réadapter. C'est normal. L'agriculture, ce n'est pas comme une manufacture de jouets. On ne ferme pas. On ne change pas du jour au lendemain quand on à affaire à des animaux vivants. Il faut planifier pour des années à l'avance.

Le problème qui s'est créé, c'est que ce mur de tarification qui devait protéger la gestion de l'offre pendant au moins quelques années commence déjà à s'effriter. Déjà! L'encre n'est même pas sèche sur l'entente que le gouvernement, encore une fois, s'écroule devant les promesses faites aux agriculteurs. Le ministre de l'Agriculture avait promis à répétition aux agriculteurs du Canada qu'il allait tout faire pour protéger l'article XI. Il ne l'a pas fait. Ensuite, le ministre de l'Agriculture a dit: Je vais tout faire pour faire en sorte que le mur de tarification soit suffisamment élevé pour maintenir le système d'offre au Canada. Il a dit cela il y a cinq semaines, et déjà on est en négociation avec les Américains pour éliminer la tarification sur des produits agricoles importants, dont la crème glacée et le yogourt.

Je pourrais parler pendant encore 20 minutes, mais je vais tirer au moins une conclusion.

[Traduction]

Même s'il est un avocat très poli qui parle bien et non un agriculteur, je commence à croire que le ministre de l'Agriculture du Canada est plutôt mou parce que, comme ses prédécesseurs, il est incapable de dire non aux Américains. Il est incapable de prendre position et de défendre nos droits et nos privilèges que nous avons acquis de haute lutte dans les négociations avec les États-Unis et d'autres pays. Nous avons un ministre qui, hélas, met en danger bien des forces de l'agriculture canadienne à cause de sa faiblesse, ce qui est fort regrettable.

[Français]

Je pense qu'il y a beaucoup de belles choses à dire sur l'agriculture, mais ce sera fait à un autre moment.

(1850)

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell): Monsieur le Président, je voudrais poser une question à mon collègue, il a sans doute vu qu'à peu près tout le monde voulait l'interroger sur ces propos et la plupart des Canadiens qui regardaient la télévision vont comprendre pourquoi. Inutile de dire que son message était, c'est le moins qu'on puisse dire, assez mélangé: la confusion régnait.

Le député a parlé tantôt des droits des francophones hors Québec, j'en suis un. Je l'ai entendu parler, au début de sa présentation, et ensuite, bien sûr, il a parlé d'agriculture.

J'aimerais lui poser une question au sujet des francophones hors Québec, parce que j'en suis un et que 500 000 francophones vivent en Ontario. Si j'ai bien compris la position du Bloc québécois telle qu'énoncée il y a une vingtaine de minutes, cela marchait à peu près comme ceci: le Québec devrait se séparer parce que les droits des francophones en Ontario n'ont pas été suffisamment respectés. Je dois dire que j'ai un peu de difficulté avec cette proposition-là.

Comment respecterait-on davantage, dans un Québec souverain, les droits des francophones en Ontario? Comment cela améliorerait-il le sort des Franco-Ontariens?

Dans un deuxième temps, le député pourrait peut-être nous expliquer si, non, j'arrête là et je laisse mes collègues poser d'autres questions.

M. Marchand: Monsieur le Président, mon honorable collègue m'accuse d'avoir été confus. C'est bien lui qui a été confus parce que, moi, je n'ai pas parlé des droits des Franco-Ontariens.


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Dans mon discours, c'est l'agriculture, et je suis un peu peiné qu'il n'ait pas posé de question sur ce sujet fort intéressant.

Cependant, sur la question des Franco-Ontariens, j'ai beaucoup de choses à dire. C'est vrai que je suis natif de l'Ontario, c'est vrai aussi que, moi, je pense qu'effectivement la souveraineté du Québec est nécessaire pour préserver l'avenir de la langue française en Amérique du Nord. C'est certain, dans mon esprit, c'est sûr.

Ce n'est pas parce que le Québec veut rejeter les francophones hors Québec, cela est sûr aussi. Le Québec ne veut pas rejeter les francophones hors Québec. C'est tout simplement parce que dans le fond, l'honorable député l'a sûrement vécu, au Canada anglais, au Canada, toute l'histoire en est une d'assimilation des francophones.

Toute l'histoire du Canada n'est, ni plus, ni moins, qu'une tentative d'assimilation des francophones et cela remonte au début du pays. Cela passe par lord Durham et ainsi de suite.

Dans l'Ouest, on a passé toutes sortes de lois, au début du siècle, pour éliminer le français. En Ontario, dans ma propre province, on a interdit le français pendant 40 ans. Et il y a même des provinces anglophones qui, actuellement, aujourd'hui, malgré des jugements de la Cour suprême du Canada, ne respectent pas les droits acquis des francophones.

Il y a eu plusieurs décisions de la Cour suprême du Canada disant que l'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba avaient tort et ne respectaient pas les droits acquis des francophones. Encore aujourd'hui, on ne respecte pas cette décision-là.

Je veux dire à mon honorable collègue que si au Québec on n'avait pas respecté les droits constitutionnels de la minorité anglaise, le lendemain, il y aurait eu un tollé. Cependant, pour le reste du Canada, mépriser les droits des francophones, cela va de soi.

L'assimilation des francophones est un gros problème et la souveraineté du Québec, d'après moi, va régler cette question-là, au moins pour les francophones du Québec. Cela garantira la survie du français en Amérique du Nord. Je pense sincèrement que cela donnera un espoir, un nouvel espoir aux francophones hors Québec.

(1855)

[Traduction]

M. Bob Speller (Haldimand-Norfolk): Monsieur le Président, je vais laisser la question en français au député.

Je veux lui poser une question à propos de l'agriculture, car ses propos sur le ministre de l'Agriculture et sur les mesures prises par le Parti libéral à l'égard de la gestion de l'offre m'ont étonné.

Comme le député le sait pertinemment, lorsque son chef était de ce côté-ci de la Chambre, représentant le Parti conservateur, c'est son parti et son chef qui disaient alors aux agriculteurs canadiens qu'ils allaient les protéger, tant dans le cadre de l'ALENA qu'au GATT. Son chef n'était pas honnête envers les agriculteurs canadiens puisque ce que le gouvernement précédent disait au GATT et dans les tribunes internationales était différent de ce qu'il disait à nos agriculteurs.

Je suis quelque peu surpris. Pourtant, le député est le porte-parole de son parti pour les questions d'agriculture. Je suis surpris du fait que, pendant que nous négociions des arrangements avec des représentants du monde entier, le Bloc se soit tenu coi. Au cours de la première semaine, durant la période des questions, aucun député de ce parti n'a interrogé le ministre de l'Agriculture sur ce dossier très important, sur cet enjeu capital pour les agriculteurs canadiens. Et je veux parler de la crème glacée et du yogourt.

J'aimerais donc que le député qui est critique du Bloc pour les questions agricoles explique pourquoi, quand son chef était de ce côté-ci de la Chambre, il tenait aux agriculteurs canadiens des propos différents de ceux qu'il tient maintenant qu'il est de ce côté-là.

[Français]

M. Marchand: Monsieur le Président, l'honorable député n'était peut-être pas à la Chambre lundi dernier, alors qu'on a justement posé une question à ce sujet.

[Traduction]

Lundi dernier, nous avons posé une question ayant trait à l'agriculture, notamment la crème glacée et le yogourt. Le député n'était peut-être pas là.

M. Speller: J'étais là. C'était une semaine plus tard.

M. Marchand: Une semaine plus tard que quoi?

M. Speller: Que la rentrée de la Chambre.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Je demanderais aux intervenants de bien vouloir faire leurs commentaires par l'intermédiaire de la Présidence.

M. Marchand: Je m'excuse, monsieur le Président. On peut mettre cela sur le compte de l'inexpérience.

[Traduction]

La seule raison pour laquelle cette question a été posée lundi dernier, c'est que les négociations sont toujours en cours et que nous voulions la poser au bon moment.

En outre, les critiques alléguant que les conservateurs n'ont pas fait leur travail sont des coups bas. Il est bien facile de dire que c'est la faute des conservateurs et qu'ils n'ont pas fait leur travail. Ce ne sont là que des coups bas.

M. Morris Bodnar (Saskatoon-Dundurn): Monsieur le Président, le député a cité certains propos de l'ancien premier ministre Trudeau qui aurait dit qu'il ne vendrait pas nos sacrées céréales.

La déclaration qu'il a attribuée à l'ancien premier ministre n'est pas exacte. Il avait plutôt dit: «Pourquoi devrais-je vendre votre blé?» Il s'est ensuite apprêté à répondre et a dit à l'agriculteur de l'Ouest pourquoi il vendrait son blé. Je le sais parce que j'y étais.


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Le député a mentionné que le ministre de l'Agriculture était un avocat et non un agriculteur. Je suis avocat, moi aussi. J'ai également été élevé dans une ferme et je possède des terres. Le ministre de l'Agriculture, le député de Regina-Wascana, a lui aussi été élevé dans une ferme. Il comprend les pratiques agricoles en Saskatchewan. Il comprend l'industrie agricole au Canada.

Le député a également fait des commentaires sur les raisons pour lesquelles nous ne pouvons pas vendre toutes les céréales que nous voulons juste de l'autre côté de la frontière, aux États-Unis. C'est à cause de l'ALENA et du GATT, mais surtout de l'ALENA. Les États-Unis sont des exportateurs de céréales, sauf pour un produit spécial, le blé dur. Autrement, ils en exportent. Il y a un État américain qui a produit plus de blé que le Canada tout entier.

(1900)

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire): Monsieur le Président, je suis extrêmement fière de parler aujourd'hui pour la première fois au nom des habitants de ma circonscription, Windsor-Sainte-Claire.

Je voudrais tout d'abord vous féliciter, Monsieur, de votre nomination au poste de Président et féliciter également de leur élection tous les députés. Je voudrais aussi remercier les gens qui ont travaillé pour moi et les électeurs de Windsor-Sainte-Claire qui m'ont fait confiance. Je les remercie sincèrement de m'avoir donné la chance de les représenter à la Chambre.

La circonscription de Windsor-Sainte-Claire est située dans le sud de l'Ontario, sur les rives de la rivière Détroit et du lac Sainte-Claire. Le lac Sainte-Claire est le plus petit des Grands Lacs du Canada. Windsor-Sainte-Claire regroupe trois collectivités: certaines parties de l'est de Windsor, toute la ville de Tecumseh et tout le village de St. Clair Beach.

Ma circonscription est une circonscription urbaine, mais sa situation géographique en fait l'un des centres de sports nautiques les plus importants du monde. Il y a, dans cette partie des Grands Lacs, plus d'embarcations de plaisance par habitant que nulle part ailleurs et la pêche au doré bat tous les records.

Le président du Windsor Yacht Club m'a dit que, cet été, la grande course de yachting qui se tient dans le cadre de la Coupe du Canada aura lieu sur le lac Sainte-Claire. Le Windsor Yacht Club accueillera les représentants canadiens qui tenteront de ramener la Coupe au Canada.

Le festival du maïs de Tecumseh se déroule chaque année à la fin d'août. Cet événement exceptionnel attire à Tecumseh près d'un quart de million de personnes pour une fin de semaine où l'on mange et l'on s'amuse. Tecumseh est une ville historique très animée où les gens se sentent très proches les uns des autres.

St. Clair Beach est un village pittoresque situé complètement à l'est de ma circonscription. C'est là qu'habite un grand athlète canadien, Chris Lori, capitaine de l'équipe nationale olympique de bobsleigh. Tous les habitants de St. Clair Beach seront rivés au petit écran quand Chris Lori et ses coéquipiers représenteront le Canada à Lillehammer, le mois prochain. Je pense que St. Clair Beach ne tardera pas à avoir sa médaille d'or olympique.

Windsor-Sainte-Claire est aussi une circonscription industrielle. Bon nombre d'entreprises industrielles ont leur siège à Windsor, qui est d'ailleurs connue comme la ville de l'automobile au Canada. On y retrouve notamment les trois grands: Chrysler, Ford et General Motors. D'autres industries s'y sont également établies.

On ne peut parler des industries de Windsor-Sainte-Claire sans mentionner l'une de nos plus anciennes entreprises, la distillerie Hiram Walker, qui se trouve dans la partie de Walkerville située à Windsor. Hiram Walker's fabrique, bien entendu, le fameux whisky Canadian Club.

Windsor-Sainte-Claire est également le lieu d'origine d'un Canadien très célèbre qui a un jour siégé à la Chambre. C'est en toute modestie que je succède ici à ce grand homme d'État canadien qu'était feu l'honorable Paul Martin père, surnommé chez lui à Oom Paulà, puisqu'il a été l'artisan de nombreux aspects de notre filet de sécurité social actuel. Il était assis ici, en tant que député libéral de ce qui était anciennement Essex-Est et qui devait devenir des années plus tard Windsor-Walkerville, avant de s'appeler aujourd'hui Windsor-Sainte-Claire.

Paul et Nell Martin ont fait une contribution généreuse à la vie de notre circonscription et au pays en général. C'est vraiment un legs fantastique, et j'espère bien me montrer à la hauteur.

Monsieur le Président, si vous avez l'occasion, vous ou d'autres députés, de visiter notre circonscription, Windsor-Sainte-Claire, vous roulerez vraisemblablement le long de Riverside Drive, qui traverse nos trois municipalités. Vous pourrez alors voir, pas très loin, vers le nord, notre grand voisin, les États-Unis d'Amérique. La Position géographique unique de Windsor fait que la ville de Detroit, au Michigan, et ses banlieues de l'est se trouvent, en réalité, situées au nord de Windsor.

Également du fait de notre position géographique unique, nous vivons à Windsor-Sainte-Claire dans l'ombre de ce grand pays, si proche que certains habitants de ma circonscription vont régulièrement déjeuner aux États-Unis. Cela fait partie du charme et des avantages de notre région, mais ça peut aussi être un gros inconvénient.

(1905)

Sous le gouvernement des conservateurs, nous avons, pendant neuf ans, souvent eu l'impression à Windsor-Sainte-Claire que, pour l'ancien gouvernement, le Canada s'arrêtait quelque part à l'est de notre ville, sur l'autoroute 401. Or, ça ne nous a pas arrêtés, ça ne nous a pas empêchés de rester des Canadiens extrêmement fiers de leur héritage.


531

Dans ma circonscription, nous avons beaucoup souffert de la politique de l'ancien gouvernement, mais nous nous sommes rebiffés. Nous nous sommes battus contre les mesures financières qui encourageaient la fermeture de nos usines. Nous avons lutté contre les mesures fiscales qui encourageaient les gens à aller faire leurs achats de l'autre côté de la frontière. Nous nous sommes opposés à la politique culturelle qui a donné lieu, notamment, à la fermeture de notre seule station de télévision, la station CBET de la SRC, le canal 9.

Les Canadiens ont découvert Windsor en décembre 1990, lorsque 10 000 habitants de notre circonscription se sont rassemblés au bord de la rivière pour manifester contre ces mesures. Ils ont de nouveau protesté, en 1993, en accordant aux libéraux une majorité écrasante.

Ils ont voté libéral parce qu'ils avaient lu le livre rouge et qu'ils avaient compris que c'était un plan pratique et prometteur. Ils savent que le premier ministre est un homme de parole et que son gouvernement, notre gouvernement, agira comme promis. Ils savent aussi qu'ils peuvent être sûrs que nous veillerons sur leurs intérêts.

Très prochainement, la ville de Windsor va se lancer dans une grande aventure, elle va abriter le premier casino de l'Ontario. Le dernier gouvernement fédéral a refusé de reconnaître qu'il avait un rôle à jouer pour que le projet de casino soit un succès, tandis que notre gouvernement a agi rapidement pour s'assurer que l'on anticipe les besoins de la communauté et que l'on puisse continuer à les satisfaire.

Les municipalités de notre région sont heureuses du programme des infrastructures qui va entrer en oeuvre très rapidement. La région de Windsor-Sainte-Claire est prête à profiter de ces nouveaux emplois et de cette injection d'argent dans nos collectivités, qui les rendront plus agréables à vivre et feront qu'il sera plus facile d'y gagner sa vie.

Windsor-Sainte-Claire veut le genre de gouvernement que propose ce côté de la Chambre. Elle veut un gouvernement qui comprend la nécessité de la croissance économique pour s'attaquer au déficit. Elle veut un gouvernement qui se préoccupe de la qualité de vie de ses citoyens et qui gouverne de façon juste et pratique tout en faisant preuve de compassion.

Voilà les qualités que désire la circonscription de Windsor-Sainte-Claire, des qualités qui ont été exposées par le gouvernement dans son discours du Trône de la semaine dernière. C'est pour cela que j'invite la Chambre, tous les députés, à voter en faveur de la motion du député de Bruce-Grey, appuyée par la députée de Madawaska-Victoria.

Mme Elsie Wayne (Saint John): Monsieur le Président, la députée vient de mentionner, dans sa réponse au discours du Trône, que le gouvernement libéral se préoccupe du bien-être des gens et qu'il tient à faire ce qui est bon pour eux. Il veut instaurer des programmes qui viendront en aide à la population. J'ai une seule question à poser à la députée.

Le programme permettant aux Canadiens d'utiliser leur REER pour acheter une maison a permis à plus de 200 000 Canadiens de devenir propriétaires. La construction de ces 200 000 maisons a créé de nombreux emplois, non seulement sur les chantiers mais aussi dans d'autres secteurs comme les forêts, le meuble et les appareils ménagers. Je sais que vous comprenez ce phénomène de retombées, qui s'est produit sans qu'on retire un sou du Trésor public.

Voici donc la question que je vous pose, ma chère. Excusez-moi, monsieur le Président, je voulais dire à la députée. Peut-elle s'engager à tenter de convaincre le gouvernement de prolonger ce programme au-delà de la date limite prévue du 1er mars?

Mme Cohen: Monsieur le Président, j'apprécie les qualificatifs affectueux que la moitié du caucus conservateur réserve à mon endroit. Pour une simple députée libérale, cela me semble être une bonne fortune inhabituelle.

Je dois dire qu'il serait plus pertinent de poser cette question au ministre des Finances, mais je suis heureuse d'y répondre en son absence.

Je puis vous dire que le gouvernement est très préoccupé par le programme fiscal du Canada et le fardeau fiscal des Canadiens. Au cours des neuf dernières années, nous avons vu les impôts devenir de plus en plus injustes. Les impôts étaient de plus en plus lourds pour ceux dont la députée vient de parler, c'est-à-dire pour la classe moyenne, pour les travailleurs de notre pays désireux de s'acheter une maison. Ces impôts ont causé beaucoup de problèmes dans ma circonscription. Leur injustice intrinsèque a causé des pertes d'emplois et d'autres répercussions néfastes.

(1910)

Je suis sûre que le ministre des Finances et ses collaborateurs étudient actuellement la question des REER et d'autres programmes du genre. On sait qu'il a mené une vaste consultation à ce sujet. D'après moi, toutes les mesures que le ministre des Finances prendra pour rendre le régime fiscal de l'ancien gouvernement conservateur plus juste à l'endroit des Canadiens créeront de l'emploi dans Windsor-Sainte-Claire, dans Saint John et dans le reste du Canada.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, une partie de l'intervention de la députée de Windsor-Sainte-Claire, portant sur l'importance de l'industrie de l'automobile dans sa circonscription, me fournit l'occasion de rappeler que l'industrie de l'automobile en Ontario occupe une place extrêmement importante, par rapport à la même industrie au Québec. Au Québec, l'industrie de l'automobile ne représente que 7 ou 8 p. 100 de toutes les automobiles assemblées au Canada.

À ce moment-là, ce coin de pays a sûrement connu un essor économique extrêmement grand relié entre autres à l'industrie de l'automobile. La circonscription de Windsor, durant la dernière récession, et je ne m'en réjouis pas, au contraire, a découvert, je pense, à ce moment-là, pour des villes moins bien nanties au plan économique, ce que représente une période de difficultés économiques. Le fait que ce coin de pays-là, cette partie de l'Ontario a vécu cette difficulté permettra peut-être à l'Ontario d'être un petit plus sensible aux réalités d'autres provinces canadiennes.

Je termine par une question. Il y a un assez large consensus qui s'établit et qui reconnaît que la politique monétaire du gouvernement conservateur a été en partie responsable de la période difficile dans laquelle nous sommes encore au plan économique.


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J'ai de la misère à comprendre cependant, en ce qui a trait à la région de Windsor-Sainte-Claire, qui a été un peu victime des conséquences de la politique monétaire, comment il se fait que le gouvernement libéral, finalement, ait embauché comme gouverneur de la Banque du Canada l'adjoint du gouverneur précédent. J'ai de la misère à concilier cela parce qu'il me semble que les problèmes qu'ils ont vécus vont peut-être se reproduire, car ce sont les mêmes personnages ou la même mentalité qui va présider aux destinées de la politique monétaire du Canada.

[Traduction]

Mme Cohen: Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole encore une fois, même si mes questions concernent plutôt le ministre des Finances. En réponse aux observations faites par le député, je puis dire que la circonscription de Windsor-Sainte-Claire a souffert des politiques de l'ancien gouvernement conservateur durant la récession. Toutefois ma circonscription et l'ensemble de la région ont réussi à survivre en dépit de ces politiques. Cela s'explique en partie par la vision des autorités locales et de la population qui ont pris conscience de la nécessité de diversifier l'économie et d'oeuvrer dans d'autres domaines d'activité.

La nomination d'un nouveau gouverneur à la Banque du Canada ne modifiera sans doute pas sensiblement la situation qui prévaut actuellement dans notre localité. Toutefois, l'attitude du nouveau gouvernement y fera quelque chose et contribuera à créer une croissance qui sera, à mon avis, sans précédent dans l'histoire de ma localité.

M. Wayne Easter (Malpèque): Monsieur le Président, comme c'est mon premier discours à la Chambre, je voudrais féliciter le Président pour son élection ainsi que ses adjoints pour leur nomination.

(1915)

Votre travail, monsieur le Président, est très important et je crois qu'il le sera encore plus au cours de cette 35e législature, parce que le Canada est à un carrefour. Étant donné le mélange des partis et l'humeur la population, la présidence sera très importante pour équilibrer les débats et maintenir l'ordre.

J'avoue que je suis un peu intimidé de prendre la parole à la Chambre et, en toute franchise, cela m'étonne. Je m'explique. Honnêtement, je vous dirai que je ne pensais pas me trouver ici parce qu'il y a à peine 15 mois, j'étais désenchanté de la Chambre des communes, du gouvernement en place et de la bureaucratie ministérielle.

J'étais complètement désillusionné face au processus, à la Chambre des communes et au gouvernement, parce que je venais de passer neuf ans à comparaître devant des comités pour faire valoir le point de vue de notre organisation; j'en avais conclu que c'était une perte de temps et que j'avais crié dans le désert. Les parlementaires d'expérience parlent de «cet endroit» et j'avais l'impression que cet endroit avait perdu contact avec la population qu'il devait servir. L'élection de tant de nouveaux députés et d'un gouvernement libéral qui a défini son plan d'orientation dans son livre rouge traduit bien cela.

Cependant, au cours de cette législature, nous devons nous assurer que les Canadiens se réfèrent à cet endroit en disant «notre endroit». Ce doit être notre responsabilité, peu importe notre allégeance, que nous soyons de l'Île-du-Prince-Édouard, notre île d'émeraude, du Québec ou de la Saskatchewan. C'est dans cet endroit que doit retentir la voix du Canada et des Canadiens.

Comme je l'ai dit il y a quelques instants, cela ne s'est certainement pas produit au cours des neuf dernières années. Le discours du Trône parle de donner «aux députés l'occasion de participer plus étroitement à l'élaboration des politiques gouvernementales et des lois». Cette nouvelle volonté de donner à tous la possibilité de s'exprimer et de se faire entendre constitue peut-être l'un des changements les plus importants qui puissent être apportés. Cette mesure très importante permettra aux simples députés d'avoir leur mot à dire à la Chambre des communes et de s'exprimer au nom des électeurs qu'ils représentent et, par conséquent, au nom du pays tout entier.

Il va de soi que dans ce contexte, certaines choses vont changer. Je songe par exemple aux débats. Nous avons déjà été à même de constater des changements à la Chambre. La démocratie doit s'exercer par l'entremise de tels débats au terme desquels la meilleure solution est retenue.

Je voudrais prendre un instant pour remercier très sincèrement les électeurs de Malpèque qui m'ont donné la chance de les représenter ici. Ma circonscription s'étend de Summerside, dans l'Île-du-Prince-Édouard, jusqu'à la localité de Marshfield, en contournant toutefois Charlottetown. L'agriculture, surtout, mais aussi la pêche et le tourisme sont les principales industries dans ma circonscription, qui compte aussi de nombreuses petites entreprises, mais aussi deux importantes usines de transformation de la pomme de terre. J'ajoute qu'étant donné que nous sommes des insulaires, nous devons beaucoup compter sur les exportations, qu'il s'agisse des pommes de terre ou d'autres produits cultivés dans l'île.

L'Île-du-Prince-Édouard est fondamentalement une collectivité de collectivités et sa population croit fermement à l'esprit communautaire et à l'entraide, surtout en période difficile. Je pense qu'il convient de le signaler au reste du Canada.

Mon expérience personnelle est quelque peu unique, en ce sens que je parcours le pays depuis 20 ans, dont les dix dernières en qualité de président du Syndicat national des cultivateurs. J'aimerais tellement que chaque Canadien ait la possibilité de vivre cette expérience. Nous avons beaucoup tendance à critiquer notre propre pays. J'ai vécu environ la moitié de ma vie en Saskatchewan et j'ai beaucoup voyagé. J'ai vu tout le potentiel que possède notre pays et qu'il pourra réaliser s'il reste uni. À l'étranger, les gens se demandent pourquoi les Canadiens se disputent entre eux. Nous devrions exploiter toutes les ressour-


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ces, tout le territoire et toute la main-d'oeuvre dont nous disposons pour bâtir notre pays.

(1920)

Le discours du Trône cherchait à nous inciter à exploiter les possibilités que nous offre notre pays. Il est vrai que nous avons de nombreux défis à relever. Depuis son élection, c'est-à-dire depuis trois mois, le gouvernement a tenu bon nombre de ses promesses. La semaine dernière, on a annoncé dans ma province la création d'un programme d'infrastructure de 36 millions de dollars. Ce programme servira à financer d'importants projets d'infrastructure et à créer des emplois directs et indirects. Le ministre des Pêches et des Océans a déclaré qu'il offrira de l'aide aux pêcheurs en difficulté à cause de la crise qui frappe le secteur de la pêche à la morue.

J'admets, cependant, que l'administration des neuf dernières années nous a laissé de grands défis à relever. Le gouvernement actuel est partie à l'ALENA et au GATT, et je partage les inquiétudes de nombreux Canadiens au sujet de ces deux ententes. Avec ces ententes qui portent vraiment atteinte à notre souveraineté, je me demande si nous aurons réellement le droit de gouverner ou si nous devrons nous contenter d'agir à titre d'administrateurs des diverses ententes commerciales. Je sais que le premier ministre a déjà abordé la question et qu'il a pris l'engagement, en son nom et au nom du gouvernement canadien, de veiller à ce que les accords commerciaux protègent toujours les intérêts des Canadiens. Voilà l'objectif que nous visons, l'engagement que nous prenons.

Je tiens à m'insurger ici en faux contre l'observation qu'a faite tout à l'heure l'intervenant du Bloc québécois, soit l'avant-dernier intervenant. Il a dit que le ministre de l'Agriculture était en train de négocier la suppression des tarifs douaniers. C'est faux. Le ministre de l'Agriculture est en train de négocier, dans l'intérêt des producteurs laitiers du Canada, le maintien de tarifs douaniers élevés afin que l'on puisse mettre en valeur et protéger le système de gestion des approvisionnements. Notre gouvernement est déterminé à aider le secteur agricole. Il est résolu à protéger le système de gestion des approvisionnements et la Commission canadienne du blé, et je crois qu'il offre une vision d'espoir pour l'avenir.

Bref, ce sera tout un défi, en ces temps difficiles, de réaliser le programme exposé dans le livre rouge. Le discours du Trône et les progrès déjà réalisés constituent un début prometteur. J'insiste sur le fait que c'est en donnant le pouvoir aux députés, comme le prévoit le discours du Trône, que l'on va rétablir la démocratie dans notre pays, que l'on permettra à tout le monde de s'exprimer et que l'on défendra certes les intérêts du peuple.

M. Jerry Pickard (Essex-Kent): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au député qui vient de prononcer un excellent discours. Il a tenté de dissiper les principales préoccupations dont nous entendons parler au sujet du GATT et des négociations où le ministre a défendu avec succès les intérêts de la communauté agricole du Canada.

Je voudrais demander au député ce qu'il pense de la tâche très difficile dont le ministre a hérité en se présentant aux discussions du GATT en érigeant ces barrières tarifaires pour que la majeure partie de notre production agricole soit raisonnablement protégée par un système de gestion de l'offre. Croyez-vous que notre système de gestion de l'offre sera assez stable et représente un pas dans la bonne direction?

Je crois que c'est une question que beaucoup d'agriculteurs se posent. Il ne fait aucun doute que le ministre a eu une réaction allant dans le sens souhaité. Je me demande ce que le député a à dire à ce propos.

(1925)

M. Easter: Monsieur le Président, il est évident que dans les négociations du GATT, le gouvernement préconisait le maintien et le renforcement de l'article XI(ii)(c). Finalement, cela a été impossible. Nous avons donc décidé d'agir sur les droits de douane et nous les avons fixés suffisamment haut pour protéger notre secteur de la gestion de l'offre.

L'accord n'entre pas en vigueur avant juillet ou août 1995, ce qui nous donne un peu de temps pour rencontrer les groupes des secteurs visés par la gestion de l'offre et d'autres groupes afin de mettre au point un système garantissant la croissance et la prospérité du secteur agricole. Je crois, et le gouvernement croit, que le système de gestion de l'offre canadien est un modèle pour le monde, car il permet de vendre un produit de haute qualité aux consommateurs et il garantit la sécurité de l'approvisionnement en nourriture.

Dans ses discussions avec le secrétaire à l'Agriculture des États-Unis, le ministre de l'Agriculture est déterminé à atteindre les objectifs que nous avons énoncés pendant la campagne électorale, à savoir protéger et renforcer le système de gestion de l'offre. La tâche n'est pas facile. Nous nous retrouvons dans des négociations où le gouvernement qui nous a précédés avait déjà cédé beaucoup.

Ces négociations sont difficiles, mais je crois que le ministre de l'Agriculture aura le dessus et que le système de gestion de l'offre survivra.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, je ferai un tout petit commentaire parce que je n'ai pas bien compris. Le député a fait allusion aux propos de M. Marchand qui aurait dit que le ministre de l'Agriculture négociait la disparition des tarifs. Je ne pense pas que le député de Québec-Est, le critique de l'opposition officielle, ait fait cette déclaration. Je pense que le député de Québec-Est a dit que le ministre de l'Agriculture se trouve présentement dans une négociation avec les États-Unis; cette négociation porte sur la disparition des tarifs. S'il y a quelqu'un qui tente de les faire disparaître, je ne pense pas que ce soit le Canada, mais plutôt les États-Unis. Mais cela n'empêche pas que le Canada est aux prises avec ce premier problème à peine cinq semaines après les accords du GATT.

[Traduction]

M. Easter: Monsieur le Président, je suis d'accord avec la dernière partie de ce qu'a dit le député. Il ne fait aucun doute


534

qu'on pourra lire ce qui a été dit au compte rendu. J'ai pris en note que le ministre a été accusé de négocier l'élimination des droits de douane.

C'est tout à fait le contraire de ce que veut faire le ministre de l'Agriculture. J'insiste. Le ministre a entrepris des négociations sérieuses avec le secrétaire à l'Agriculture des États-Unis et il s'efforce d'obtenir une entente permettant de garder les droits de douane élevés, ce qui est notre droit en vertu du GATT. C'est exactement ce que nous voulons. Le ministre veut que ces droits de douane restent suffisamment élevés pour que notre système de gestion de l'offre puisse demeurer intact et soit protégé.

M. John Solomon (Regina-Lumsden): Monsieur le Président, c'est la première occasion que j'ai de prendre la parole à la Chambre des communes et je veux d'abord vous féliciter pour votre nomination et féliciter aussi tous les députés qui ont été élus pour la première fois à la Chambre des communes. C'est très excitant comme travail.

Je veux aussi profiter de l'occasion pour rendre hommage à l'ancien député de Regina-Lumsden, M. Les Benjamin, qui a servi ses électeurs et son pays pendant 25 ans. Il a très bien défendu les intérêts des habitants de la Saskatchewan et de tous les Canadiens, particulièrement sur des questions telles que la Commission canadienne du blé, le tarif du Nid-de-Corbeau et le transport ferroviaire. C'est avec beaucoup de tristesse que j'informe la Chambre qu'il est maintenant à l'hôpital. Il est très malade, mais on m'a dit que son moral est très bon. Au nom des électeurs de Regina-Lumsden, je veux lui rendre hommage pour avoir si bien servi son pays.

Je représente un district qui comprend la ville de Regina, capitale de la Saskatchewan. C'est une région principalement urbaine à laquelle on a rattaché des secteurs ruraux dont Lumsden, Regina Beach, Grand Coulee, Pense et toutes les exploitations agricoles situées sur ce territoire. Il y a aussi, dans notre circonscription, un important producteur d'acier et de tuyaux. Il s'agit de la société Ipsco, qui emploie un nombre considérable de travailleurs et qui contribue largement à la vie économique de Regina et de toute la Saskatchewan.

(1930)

Je voudrais aussi remercier les familles et les électeurs de Regina-Lumsden, qui m'ont fait confiance et qui m'ont donné leur appui durant les derniers mois, particulièrement durant la campagne électorale. C'est un honneur pour moi de les représenter, et je suis fier de parler en leur nom à la Chambre des communes. Je me suis engagé à ne ménager aucun effort pour transmettre leur message au Parlement et pour exprimer leurs priorités en leur nom.

Leurs priorités sont celles de la majorité des Canadiens. Ils veulent un gouvernement transparent et honnête qui rend compte de ses actions. Ils veulent un gouvernement qui fait tout ce qui est en son pouvoir pour créer des emplois et renforcer notre économie. Les électeurs de ma circonscription, comme je crois ceux des autres régions canadiennes, veulent une politique fiscale plus juste et des programmes sociaux répondant aux besoins de la population. Je travaillerai sans relâche pour faire en sorte que les priorités des électeurs de la circonscription de Regina-Lumsden soient aussi celles du gouvernement et de l'actuelle législature.

Le discours du Trône dont nous sommes saisis est l'un des plus courts qui aient jamais été prononcés; sa lecture prend 17 minutes si on lit très lentement. Les Canadiens sont perplexes; ils se demandent si cela veut dire que le gouvernement préfère taire ce qu'il fera ensuite ou s'il l'ignore complètement. C'est probablement là le problème et cela m'inquiète.

Le nouveau gouvernement est aux prises avec un grave problème de chômage au Canada. Plus de deux millions de Canadiens sont sans emploi. Le chômage atteint des niveaux sans précédent, encore plus catastrophiques qu'au moment de la crise des années 30. Le sous-emploi est généralisé, et c'est le gouvernement précédent qui doit être pointé du doigt dans une large mesure. Le gouvernement conservateur précédent a décidé de procéder à une déréglementation dans l'industrie, ce qui a entraîné des pertes d'emplois. Il a opté pour une politique des taux d'intérêt élevés. Il a annulé la taxe sur les ventes des fabricants. Il a instauré la TPS et adopté, sur le plan monétaire, des mesures qui ont incité les entreprises à transférer leurs emplois à l'étranger.

Le gouvernement précédent a aussi décidé de ratifier l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis et l'Accord de libre-échange nord-américain; les libéraux qui s'opposaient fermement à ces deux accords lorsqu'ils étaient dans l'opposition se sont empressés d'y souscrire aussitôt portés au pouvoir. Non seulement l'ALE et l'ALENA ont coûté aux Canadiens la perte de centaines de milliers d'emploi, mais ils ont aussi réduit la capacité de notre pays de prendre, à titre d'État souverain, les décisions ayant des répercussions sur nos vies.

Quand on examine certaines des politiques du gouvernement précédent, on est bien forcé de conclure qu'elles ne visaient qu'à servir les intérêts des grandes sociétés et à leur permettre de faire leurs choix économiques sans contribuer équitablement à notre économie. Ce programme conservateur a fait augmenter les bénéfices des sociétés, créé un chômage élevé, fait grimper les déficits et la dette publique et a compromis notre aptitude à fournir à notre population des emplois et des programmes sociaux convenables.

Mais quelle est la solution à ces graves problèmes dont souffre notre pays? À en juger par le discours du Trône, la réponse du gouvernement libéral semble être qu'il ne le sait pas. Mais les Canadiens feraient mieux de bien se tenir, car on dirait que le problème du chômage et le programme favorable aux entreprises vont subsister. Il faudrait que les libéraux donnent la priorité dans leur programme aux personnes plutôt qu'aux riches sociétés et aux riches familles du pays.

Il me semble que le gouvernement a déjà manifesté son manque d'intérêt pour les emplois en reculant sur l'ALENA et en changeant d'avis sur l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis qui a miné notre bien-être économique et affaibli tout particulièrement notre secteur manufacturier.

Dans leur discours du Trône, les libéraux se sont dérobés à leur promesse de créer des emplois en n'annonçant pas de programme


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d'apprentissage. Quatre cent mille jeunes chômeurs canadiens d'un bout à l'autre du pays ont désespérément besoin d'un programme d'apprentissage. Cela veut-il dire que la promesse libérale en matière de formation professionnelle pour ces jeunes Canadiens a été oubliée? Elle est peut-être oubliée par les libéraux, mais non par les néo-démocrates ni par les 400 000 jeunes chômeurs canadiens.

(1935)

On ne parle pas de créer des emplois en agriculture. En fait, il n'est même pas question d'agriculture dans ce discours du Trône. Voilà une omission incroyable, compte tenu des décisions prises récemment à Paris dans le cadre du GATT. Étant donné que le ministre de l'Agriculture, le député de Regina-Wascana, a travaillé avec tant d'acharnement au Cabinet en faveur des agriculteurs de tout le pays, il semble incroyable qu'il ne soit pas question d'agriculture après tout le travail qu'il y a consacré.

On n'y parle pas non plus du secteur des ressources naturelles. C'est un secteur qui a contribué à bâtir le pays. Or, il n'en a absolument pas été question dans le discours du Trône. Il est clair qu'on n'a pas tenu compte de l'ouest du pays dans le discours du Trône, mais aussi que les Canadiens de partout, aussi bien les chômeurs que ceux qui ploient sous des impôts excessifs, ont eux aussi été laissés pour compte.

Dans ce discours, on fait état d'une refonte du régime de sécurité sociale, mais on garde sous silence une des dernières lois adoptées par le Parlement, le projet de loi C-91, qui accorde un brevet d'une durée maximale de 20 ans à quelques médicaments prescrits et garantit aux fabricants de médicaments des prix monopolistiques ainsi que des profits substantiels aux frais des Canadiens.

Les médicaments prescrits coûtent plus cher au Canada que partout ailleurs à cause de cette loi. Pourtant, le gouvernement libéral ne semble pas avoir l'intention de l'abroger. En abrogeant la loi C-91, on réduirait le fardeau financier des gens qui ont besoin de médicaments prescrits et des régimes provinciaux de remboursement de médicaments, qui subissent d'énormes tensions à l'heure actuelle.

En outre, l'abrogation de cette loi dévastatrice stimulerait la création d'emplois dans le secteur des médicaments génériques canadien. Tant que cette loi restera en vigueur, la vie des Canadiens continuera d'être menacée.

Depuis que cette loi a été sanctionnée, le coût des médicaments prescrits a monté en flèche au Canada. Les gens qui prennent des médicaments prescrits sont forcés de choisir entre acheter des médicaments dont ils ont besoin pour vivre ou des aliments pour se nourrir. C'est le cas notamment de gens à revenu fixe ou faible de ma circonscription.

Nous ne pouvons permettre que cette loi monopolistique, qui autorise les compagnies pharmaceutiques internationales à fixer les prix à leur guise sans aucune concurrence, continue de faire du tort aux gens qui ont le plus besoin de médicaments. La loi C-91 doit être abrogée immédiatement.

Nous, du Nouveau Parti démocratique, applaudissons à la reconnaissance du gouvernement dans le discours du Trône que dans certains pays «la démocratie est menacée et son avenir est menacé». Le Canada aussi est menacé; c'est le cas notamment des Canadiens qui sont sans emploi ou qui craignent de le perdre. Les Canadiens craignent aussi de perdre leurs programmes sociaux qui leur assurent une certaine sécurité.

Mon parti, le Nouveau Parti démocratique, a toujours appuyé fermement les initiatives qui favorisent et renforcent les régimes démocratiques et servent la cause de la paix. Nous, néo-démocrates, sommes également des nationalistes canadiens. Nous ne croyons pas au nationalisme régional ou ethnique. Nous croyons que ces manifestations de nationalisme nuisent à l'unité canadienne. Nous sommes profondément convaincus que le gouvernement doit faire contrepoids au pouvoir économique pour veiller à ce que les programmes soient équitables pour tous.

Nous avons toujours préconisé un gouvernement central fort, mais il doit être à l'écoute de notre temps. Nous croyons que le gouvernement excelle lorsque les citoyens ont du travail. Si les citoyens sont réduits à l'oisiveté, la démocratie est menacée.

Il est difficile de parler d'unité nationale lorsque les gens sont au chômage ou sous-employés. Lorsque les premières nécessités de la vie font défaut, la démocratie est toujours menacée.

Je préviens le gouvernement: le NPD ne va pas accepter que la question nationale soit remise à l'ordre du jour tant que les chômeurs n'auront pas retrouvé du travail. Ce sont là les questions qui comptent pour nous et pour tous les Canadiens.

J'espère que le gouvernement va s'inspirer de la citation suivante, que j'emprunte à quelqu'un qui parlait de l'organisation du gouvernement et de la mise en oeuvre d'un programme pour rebâtir notre pays. Cette personne a dit: «Ce qui témoigne de la valeur de notre société démocratique, ce n'est pas que nous ajoutions à l'abondance des nantis, mais que nous donnions assez à ceux qui ont trop peu.»

(1940)

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement l'intervention du député qui représente ici le Nouveau Parti démocratique. J'ai surtout accroché sur une phrase quand il a parlé de régionalisme. Il s'est aussi prononcé en faveur d'un gouvernement central fort.

Je voudrais rappeler aux autres députés qu'un représentant du NPD a été élu une seule fois dans l'histoire du Québec, lors d'une élection partielle. Devant l'insensibilité de son parti, ce député-là ne s'est pas représenté aux dernières élections générales. Je pense qu'il valait la peine de signaler ce fait pour montrer l'insensibilité d'un parti qui se dit démocratique à l'égard des gens de tous les coins du pays, en particulier à l'égard des gens du Québec. Je pense que la population les a jugés là-dessus.


536

[Traduction]

M. Solomon: Monsieur le Président, j'ai raté la fin de la question du député. Je lui serais reconnaissant de bien vouloir répéter.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Je demanderais au député de Lévis de bien vouloir répéter brièvement son commentaire et sa question pour que le député de Régina-Lumsden puisse répliquer.

M. Dubé: Cela me donne plus de temps, et je vous en remercie. Essentiellement, je disais qu'au Québec, il n'est arrivé qu'une seule fois qu'un député du NPD soit élu. C'était le député de Chambly qui a été élu dans le cadre d'une élection partielle. Malgré son dévouement, son dynamisme et son potentiel personnel, il a décidé de ne pas se représenter à l'élection générale. De notre point de vue, c'était justement à cause de l'insensibilité de son parti vis-à-vis de ce qui se passait au Québec.

Prenant acte du résultat des élections démocratiques du 25 octobre dernier, son parti veut-il réviser sa position face à l'optique d'un gouvernement central fort?

[Traduction]

M. Solomon: Monsieur le Président, la question du député est, à mon sens, très importante. Le Nouveau Parti démocratique croit en la démocratie. Nous avons participé à une campagne électorale, nous avions des candidats dans toutes les circonscriptions et nous proposions un programme d'emploi qui, selon nous, avait toutes les chances de donner de bons résultats. Ce programme d'emploi a plu à beaucoup de gens et a été très populaire. Il a été si populaire, à vrai dire, que le Parti libéral a pris le document, l'a recouvert d'une jaquette rouge et en a fait la promotion, comme s'il s'était agi d'un train de mesures de son cru. Malheureusement, il a connu plus de succès que nous.

Certes, le député a raison, je ne suis pas un expert du Québec. Cependant, en tant que parti, nous croyons vraiment en l'efficacité du gouvernement. Les libéraux et les conservateurs mènent des campagnes avec pour slogan l'inefficacité du gouvernement. Élisez-nous et nous vous le démontrerons.

Nous croyons que le gouvernement accomplit quand même des choses. Par contre, si les démocrates étaient au pouvoir, vous verriez! En Saskatchewan, où ça a été le cas pendant 36 des 50 dernières années, un grand nombre de programmes qui sont maintenant appliqués à l'ensemble du Canada, dont l'assurance-maladie, pour ne citer que celui-là, y ont été adoptés. Si nous ne croyions pas en l'efficacité du gouvernement, nous ne nous porterions probablement pas candidats, ce que nous faisons dans l'espoir de former le gouvernement, un gouvernement qui sera au service de la population dont il tire son pouvoir de gouverner.

Je crois beaucoup dans la fonction publique. Je crois que tous ceux qui siègent dans cette enceinte, au Parlement, sont arrivés avec des intentions honorables. Je le crois vraiment. Je pense que nous voulons tous que la situation de notre pays soit bien meilleure au bout de quatre ans qu'elle ne l'était à notre arrivée ici.

Je crois encore que le gouvernement doit être investi de certains pouvoirs, exercer une certaine influence et posséder certains instruments économiques, surtout quand les temps sont difficiles. Quand l'économie est en mauvaise posture, en très mauvaise posture, et que les emplois font défaut, il est très important que les gouvernements fassent preuve d'initiative et se servent des instruments économiques dont est doté tout gouvernement central pour créer des emplois dans tout le pays. Enfin, je crois aussi beaucoup dans un gouvernement central fort. Cette idée n'est peut-être pas aussi comprise que nous le souhaiterions à l'échelle nationale. Voilà pourquoi j'en ai touché un mot ce soir. Je remercie beaucoup le député de sa question.

(1945)

M. Jack Hoeppner (Lisgar-Marquette): Monsieur le Président, je voudrais saisir cette occasion pour vous féliciter de votre nomination. J'en profite également pour féliciter mes collègues de leur élection ou de leur réélection. Je voudrais remercier particulièrement mes électeurs de Lisgar-Marquette, qui ont placé leur confiance en moi pour que je les représente au cours de cette 35e législature. J'ai également une dette de reconnaissance envers ma bonne épouse, Fran, qui m'honore de son soutien et de son amitié depuis 32 ans.

La circonscription de Lisgar-Marquette est une région très diversifiée. L'agriculture y est l'industrie principale. Nous cultivons de tout: des légumes tels que des pommes de terre, des oignons et des carottes destinés à la vente, ainsi que des fruits, entre autres des pommes et des bleuets. Nous produisons également des céréales secondaires, en plus de récoltes spéciales comme des lentilles, des betteraves et de la moutarde blanche, de même que des plantes oléagineuses telles que du colza canola, du tournesol et du lin. Nous avons également des producteurs de boeuf, de lait, d'oeufs et de volaille.

Nous fabriquons également toutes sortes de produits, dont de petites machines agricoles, des remorques de céréales et des véhicules de tourisme.

Les paysages magnifiques abondent aussi à Lisgar-Marquette. Nous sommes chanceux d'avoir la vallée Pembina, qui offre des activités de loisir en abondance. Des terres fertiles de la vallée de la rivière Rouge au désert splendide et exceptionnel de la forêt d'épinettes à Glenboro, Lisgar-Marquette est vraiment un endroit remarquable où vivre.

Les électeurs de Lisgar-Marquette m'ont chargé d'un message clair: que la Chambre des communes redevienne la voix de la population et que politiciens et fonctionnaires soient responsables devant les contribuables canadiens.

Les habitants de Lisgar-Marquette sont très inquiets de la situation financière et politique de notre pays, ainsi que du moral de la population. Le pays que nos ancêtres ont mis cent ans à bâtir a été tellement mal géré par les gouvernements libéral et conservateur ces vingt dernières années qu'il court tout droit à la faillite. Les travailleurs ordinaires ont sans cesse augmenté la production, de sorte que notre pays n'a pas connu, dans le secteur manufacturier, de déficit commercial au cours de ces deux dernières décennies. Alors que nous traversions l'une des périodes les plus productives de notre histoire, l'élite de notre pays non seulement n'a pas su gérer l'économie, mais a hypothéqué l'avenir de nos enfants et de nos petits-enfants.


537

Il est très triste, il est inacceptable de voir, à Noël, deux millions de Canadiens dépendre des banques d'alimentation. Or, c'est la conséquence directe d'un quart de siècle de malaise politique.

Au Manitoba, une enquête récente a fait ressortir que 20 p. 100 des enfants d'âge scolaire allaient à l'école le ventre vide. Selon un rapport de l'UNICEF, le Canada est l'un des pays industrialisés où le taux de pauvreté chez les enfants est le plus élevé. En 1989, la Chambre a adopté une résolution par laquelle le Canada s'engageait à éliminer la pauvreté chez les enfants d'ici l'an 2000. En fait, plus de 1,2 million d'enfants canadiens vivaient dans la pauvreté en 1991, une augmentation de 30 p. 100 sur deux ans du nombre de jeunes âgés de moins de 18 ans dont la famille peut à peine subvenir à ses besoins essentiels.

Étant donné que 1991 et 1992 étaient des années de récession, on peut raisonnablement présumer que ce taux est encore plus élevé aujourd'hui. Les enseignants le voient. La police le voit. Les tribunaux le voient. Ceux de nous qui osons regarder autour de nous le voient. La pauvreté est la conséquence de la mauvaise gestion de l'économie par les gouvernements. C'est elle qui fait de nos enfants des enfants défavorisés, apathiques, souvent sans avenir, et qui fait éclater les familles canadiennes. Le coût pour notre pays est inestimable.

L'électorat nous a confié, à nous réformistes, le mandat de rationaliser les dépenses du gouvernement et de réduire le déficit. Nous sommes d'autant plus motivés à le faire qu'il en va de l'avenir de notre ressource la plus importante, nos enfants. C'est au nom des générations futures que le Parti réformiste a accepté de revoir certaines des politiques qui ont privé le Canada de la prospérité qu'il mérite et qui ont compromis l'avenir de nos enfants.

(1950)

Ce n'est qu'en changeant d'attitude que nous pourrons construire ce nouveau Canada pour les générations à venir. Imaginez une réforme fiscale où les fonds publics seraient considérés par les gouvernements non pas comme des fonds à dépenser trop souvent à tort et à travers, mais comme des fonds placés en fiducie.

Autrement dit, et je parle ici en tant qu'agriculteur, je ne trouve pas juste qu'un banquier puisse dire à des agriculteurs qu'ils devront payer des taux d'intérêt plus élevés parce que leurs produits sont écoulés à bas prix sur le marché, à un prix qu'ils ne peuvent aucunement contrôler.

Parallèlement, par suite des mauvais investissements effectués par les banques à l'étranger dans des projets comme le Canary Wharf, ils devront payer aux banques des commissions et des intérêts encore plus élevés pour compenser la mauvaise gestion financière des richesses du pays. Où est la justice dans ce type de raisonnement? Comment nos jeunes peuvent-ils voir là un avenir prometteur?

Le premier ministre a dit l'autre jour que les salaires des députés étaient encore largement inférieurs à ceux des joueurs de hockey professionnels. Les joueurs de hockey sont payés pour leur performance. Quelle note donnerions-nous aux députés pour leur performance des deux dernières décennies? Les députés se sont frayé un chemin jusqu'au portefeuille des contribuables. Résultat: des impôts qui grugent près de la moitié de leurs chèques de paie. Un agriculteur ou un homme d'affaires qui se serait constamment endetté, année après année, pendant un quart de siècle aurait fait faillite depuis longtemps et n'aurait pas été récompensé par d'aussi généreuses pensions.

Je n'ai jamais ensemencé au printemps un champ qui n'allait pas produire une récolte exceptionnelle. En tant que nouveau politicien, j'espère que cette 35e législature sera caractérisée par une série exceptionnelle de changements positifs. Si ces changements ne surviennent pas au cours de l'actuelle législature, il y a 52 députés réformistes très compétents qui sont bien déterminés à les apporter au cours de la 36e législature, quand ils siégeront de l'autre côté de la Chambre.

L'esprit réformiste est né à Beaver River, s'est répandu en Ontario et continuera de s'étendre tant qu'il n'aura pas atteint la côte est de Terre-Neuve. Ce n'est qu'en apportant des réformes politiques, financières et judiciaires qu'on pourra assurer l'avenir de ce magnifique pays qui est le nôtre, qu'on pourra offrir un avenir intéressant à nos enfants.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, je félicite le député de nous avoi fait part de ses préoccupations à l'égard de la jeunesse. Moi-même, à titre de critique à la jeunesse au sein de mon parti, toute la problématique, comme le nombre important de 2 millions et quelques milliers de jeunes qui vivent dans des conditions de pauvreté me préoccupe et il est extrêmement important de rappeler ce fait.

D'autre part, un peu plus loin dans son discours, mon honorable collègue citait, comme correctif à cette situation, l'abaissemement de taxes. Mais nulle part n'a-t-il fait mention de programmes qui pourraient aider à lutter contre cette pauvreté, notammment au niveau des jeunes. Pourrait-il nous parler de cet aspect?

[Traduction]

M. Hoeppner: Monsieur le Président, je partage les sentiments du député en ce qui concerne la pauvreté chez les enfants.

Pendant que j'étais agriculteur, j'ai vu les taux d'intérêt atteindre 24 p. 100 et conduire à la ruine des centaines, voire des milliers d'exploitants agricoles. Aujourd'hui ces anciens agriculteurs ont des emplois en ville ou travaillent à l'extérieur à temps partiel, pour joindre les deux bouts, s'ils ont pu conserver leurs terres. Lorsque l'on constate, en lisant les statistiques, que plus de 50 p. 100 des revenus agricoles nets, aujourd'hui, proviennent d'emplois extérieurs on peut comprendre pourquoi il y a tant de jeunes familles, petites ou grandes, qui sont dans la détresse.

(1955)

Je pense qu'il est très important que l'on corrige cette situation sinon il n'y aura aucun avenir pour ce pays, que l'on se débarrasse du déficit ou non.

Mme Elsie Wayne (Saint John): Monsieur le Président, je voudrais demander au député de Lisgar-Marquette si son parti, le Parti réformiste, a examiné le discours du Trône pour voir quelle proportion est constituée de projets en cours ou d'initiatives recommandées ou adoptées par le précédent gouvernement.


538

M. Hoeppner: Monsieur le Président, je ne sais s'il y en avait beaucoup d'adoptées. On dit à la campagne que les bonnes intentions, ça nourrit personne, pourtant, c'est à peu près tout ce que j'ai vu jusqu'à présent dans cette Chambre. C'est à peu près tout ce que les agriculteurs et les chômeurs ont obtenu de la dernière législature.

Je pense que nous voulons des gestes et non plus de bons mots et de bonnes intentions.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton-Melville): Permettez-moi de vous féliciter, monsieur le Président, pour votre élection et votre nomination, et de féliciter aussi le premier ministre et tous les députés élus à la Chambre.

Je m'engage à appuyer toutes les réformes valables proposées par le gouvernement et à condamner les politiques ou projets de loi qui n'auront pas l'appui de la majorité des Canadiens ou des électeurs de ma circonscription.

J'ai vécu dans plusieurs pays et je reviens toujours à Yorkton-Melville, au coeur des prairies canadiennes.

Chaque député prétend représenter la plus belle circonscription du pays, c'est ce dont il a été le plus souvent question à la Chambre. Lorsque tous les problèmes plus urgents auront été réglés, je propose qu'on fasse un débat d'une journée pour enfin trancher cette question.

Les électeurs de Yorkton-Melville méritent des remerciements spéciaux car ils ont participé au processus démocratique et m'ont choisi comme leur serviteur. Je m'engage à faire valoir fidèlement à Ottawa les opinions des gens de ma circonscription, peu importe pour quel parti ou quel candidat ils ont voté. Je suis leur porte-parole, et je ferai entendre leur voix dans cette Chambre.

J'ai réservé mes remerciements les plus chers pour la fin; ils vont, bien sûr, à mon épouse Lydia, à ma famille et à mes amis. Sans leur appui, je ne serais pas ici.

Le discours du Trône parlait amplement de la nécessité d'une réforme du système de sécurité sociale. Malheureusement, depuis quelques années, nos filets de sécurité, comme on les appelle, recueillent plus de gens que les filets de pêche ne rapportent de morues à Terre-Neuve. En fait, en plus des 1,6 million de chômeurs, il y a 869 000 travailleurs découragés qui ont cessé de chercher de l'emploi. Et comme si de telles données n'étaient pas assez décourageantes, on pouvait lire dans le Globe and Mail de la semaine dernière que le tiers des travailleurs canadiens sont coincés dans des emplois précaires. Résultat: l'assurance-chômage coûte maintenant près de 20 milliards de dollars par année aux employeurs, travailleurs et contribuables.

Entre 1972 et 1992, le nombre de bénéficiaires de l'aide sociale a plus que doublé, passant à 2,7 millions de personnes. En 1992-1993, le gouvernement fédéral a déboursé 7,3 milliards de dollars à ce chapitre et les contribuables sont de nouveau mis à contribution pour permettre aux gouvernements provinciaux et municipaux de payer leur part. Ces statistiques sont la preuve indéniable d'une économie faible.

À Terre-Neuve, il semble que les seuls filets qui soient remplis sont les filets de sécurité. C'est le système et non pas les gens qu'il faut blâmer.

Le rapport du Economic Recovery Commission, publié récemment, recommande de remplacer l'assurance-chômage et l'aide sociale par un régime de supplément du revenu qui permettrait de diriger plus de 85 p. 100 de l'argent actuellement dépensé dans ces programmes aux habitants de Terre-Neuve qui en ont le plus besoin.

Le rapport est une condamnation de l'actuel système de sécurité sociale. Le rapport indique, à la page 6, que dans l'ensemble le système actuel a engendré un niveau de dépendance excessif qui est injuste pour les cotisants à la caisse d'assurance-chômage et qui, à la lumière des récentes restrictions budgétaires, n'est pas viable.

(2000)

En Saskatchewan, les filets de sécurité sont aussi remplis à ras bord. Au cours des 20 dernières années, les sommes affectées aux programmes d'aide sociale se sont multipliées par sept. En 1991-1992, on comptait 28 000 prestataires, dont 47 p. 100 étaient considérés comme tout à fait aptes au travail. Les contribuables ne seraient pas aussi mécontents qu'ils le sont s'ils savaient que l'argent dépensé permettait de résoudre le problème, mais ce n'est pas le cas.

Que ce soit à Cornerbrook, Terre-Neuve ou à Yorkton, Saskatchewan, le système ne se porte pas bien et va de plus en plus mal.

Je tiens à féliciter le gouvernement qui a promis d'annoncer un plan d'action en vue d'une réforme en profondeur du système de sécurité sociale d'ici deux ans, et de consulter les Canadiens à ce sujet.

Je voudrais aussi féliciter les gouvernements provinciaux qui ont pris l'initiative de la réforme de la sécurité du revenu, en particulier les provinces du Nouveau-Brunswick, de Terre-Neuve et de l'Alberta. L'époque où chacun protégeait son petit territoire est depuis longtemps révolue et le temps est venu de passer aux véritables innovations et aux solutions sensées. Non seulement les Canadiens attendent que nous agissions en ce sens mais ils le méritent.

Nous trouvons encourageante la promesse du gouvernement de tenir des consultations au cours des deux prochaines années, mais nous sommes surpris du manque d'information au sujet de l'orientation qu'il entend donner à la modernisation et à la restructuration du système. Les Canadiens veulent être directement consultés mais ils veulent aussi que nous fassions preuve de leadership au moment où nous entamons ce qui semble être une révision en profondeur de l'appareil de sécurité sociale.

Le plan d'action du gouvernement devra passer plusieurs épreuves avant d'avoir prouvé son efficacité. Premièrement, pourrons-nous payer nos programmes sociaux, ou allons-nous continuer à endetter nos enfants?

Deuxièmement, le régime d'assurance-chômage redeviendra-t-il un véritable programme d'assurance?


539

La troisième épreuve sera, dans le cadre de la restructuration du gouvernement, de corriger les faiblesses signalées par la Economic Recovery Commission de Terre-Neuve.

La quatrième épreuve est le facteur temps. Compte tenu de notre déficit de 45 milliards de dollars, pour cette année, et de notre dette d'un demi-billion, pourquoi faut-il que le processus prenne deux ans, alors qu'on possède tellement d'analyses et de réactions du public sur la question?

Le programme du Parti réformiste nous offre des conseils, des lignes directrices et des idées venant des électeurs. Le principe 10 de la constitution du Parti réformiste établit ceci: «Nous croyons que les Canadiens ont, personnellement et collectivement, la responsabilité de s'occuper et de prendre soin de ceux qui sont incapables de subvenir à leurs propres besoins.» On lit aussi dans notre programme que le gouvernement devrait d'abord mettre au point un régime de sécurité sociale complet, conçu pour les familles ou les ménages, administré à partir des recettes fiscales. En fait, ce régime pourrait remplacer tous les autres.

Notre programme propose ensuite d'étudier toutes les possibilités, y compris l'établissement d'un revenu annuel garanti, d'un fonds de valeurs mobilières et d'un impôt négatif sur le revenu, pour n'en nommer que quelques-unes.

Ensuite, on peut concevoir divers programmes destinés à encourager les familles, les collectivités, les organisations non gouvernementales et le secteur privé à assumer leurs responsabilités dans le domaine des services sociaux.

Il importe aussi de concevoir les services sociaux de façon qu'ils servent ceux qui en ont le plus besoin.

Enfin, assurons-nous que le financement de nos programmes sociaux pourra être maintenu à long terme.

Pour terminer, je prie tous les députés et les partis de coopérer et de collaborer à la réforme de nos filets de sécurité sociale. N'oublions pas qu'un filet a deux usages: il peut arrêter quelqu'un dans sa chute, mais il peut aussi emprisonner ses victimes. Tâchons de libérer ceux qui sont pris dans nos filets de sécurité sociale.

En 1989, un rapport du Conseil économique du Canada disait: «Nous devons transformer nos filets de sécurité en trampolines. Les gens ont besoin de travail, et non d'aide sociale, et c'est aussi ce qu'ils veulent. Les gens ont besoin de formation et de cours de recyclage pour survivre dans notre économie mondiale, et c'est aussi ce qu'ils veulent.»

Mme Judith Maxwell, l'ancienne présidente du Conseil économique du Canada, aurait déclaré la semaine dernière: «Des mesures pour favoriser l'acquisition de compétences et la mobilité pourraient servir de tremplin permettant aux gens d'échapper aux emplois incertains et peu payants. Il faut montrer aux travailleurs canadiens à emprunter la nouvelle superautoroute de l'information pour arriver à leurs fins.»

(2005)

Je crois également que les Canadiens ont le droit de vivre là où ils le veulent dans ce grand pays qui est le nôtre, mais ils n'ont pas le droit d'être à la charge de l'État de façon permanente. Il faut que nous introduisions dans le système des incitatifs pour que les gens ne comptent que sur eux et non sur le gouvernement.

Aidons les gens à s'aider eux-mêmes. Éliminons le double emploi dans les bureaucraties fédérale et provinciale. Aidons ceux qui en ont le plus besoin. Assurons-nous que nos dépenses sociales sont un investissement dans l'avenir. Et par-dessus tout, montrons aux électeurs que leurs impôts sont dépensés à bon escient.

J'exhorte la Chambre à appuyer le recours à des votes libres, de façon à ce que les députés puissent exprimer les désirs de leurs électeurs. J'exhorte tous les députés à appuyer toutes les motions présentées à la Chambre en vue de réduire le fardeau fiscal de tous les Canadiens.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, j'aimerais commenter les propos du député de Yorkton-Melville. Je conçois qu'il puisse être possible de revoir certains éléments des programmes sociaux et des programmes de soins de santé au Canada. Cependant, le faire en attaquant l'assurance-chômage et les prestataires d'aide sociale, c'est un peu présumer que les responsables de la situation économique actuelle au Canada et de la situation des finances publiques sont les plus démunis de la société. Or, on sait qu'il n'en est rien. Le système maintient des abus, et on en a énuméré un certain nombre encore cette semaine. On a parlé des abris fiscaux qui sont généralisés et des fiducies familiales qui sont exemptes d'impôt. On pourrait également remettre en question les 12 milliards de dollars que le Canada a investis dans la défense nationale. On a donné un exemple très concret cette semaine. Une question a été posée justement par le chef du Parti réformiste: comment se fait-il que le gouverneur général du Canada ne paie pas d'impôt, alors que son salaire est de l'ordre de 97 000 $? Ça paraît bien quand on pose ce genre de question, mais du même coup, on dénonce les programmes sociaux comme étant les responsables de la situation économique actuelle. Cela n'a aucun sens. Les Canadiens doivent être davantage sensibilisés à la nécessité d'être compatissants à l'endroit des personnes les plus faibles. Qu'il y ait des abus, je suis d'accord. Il y en a sans doute, et il faut les éliminer, mais de grâce, ne sacrifions pas ce qui fait l'envie du Canada.

Cette semaine, on nous a dit que le coût des soins de santé au Canada représentait 7 ou 8 p. 100 du PIB, alors qu'aux États-Unis, ce coût est de l'ordre de l2 ou 15 p. 100. Ce n'est pas vrai que ce régime coûte cher. Ce qui est vrai, c'est que la dette publique coûte cher, trop cher, et que c'est elle qui est responsable de la nécessité apparente de couper dans les programmes sociaux. C'est la partie la plus facile à couper, parce qu'on coupe chez les faibles.

[Traduction]

M. Breitkreuz (Yorkton-Melville): Monsieur le Président, je ne sais si c'était une question ou une déclaration. J'aimerais relever une observation faite par le député.

C'est justement parce que nous avons de la compassion pour les pauvres, les démunis, les membres de la société les moins nantis, que nous devons remanier ces programmes, car nous ne pouvons pas nous permettre de continuer à accroître le déficit et la dette au point où tout le système s'effondrera et nous nous retrouverons sans rien.


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Il faut que nous remaniions ces programmes, que nous les adaptions aux besoins des Canadiens. Tel est le point de vue que je défends. C'est précisément pour essayer de protéger ce secteur de la société qui, autrement, ne le sera plus, que nous devons essayer de faire quelque chose.

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester): Monsieur le Président, je félicite le député de Yorkton-Melville qui vient de prononcer son premier discours qui était éloquent.

Ma question concerne le Livre bleu. Je voudrais que le député donne un peu plus d'explications sur l'impôt négatif sur le revenu et la gestion financière et fiscale.

(2010)

M. Breitkreuz (Yorkton-Melville): Il me faudrait un peu plus de temps pour expliquer davantage l'impôt négatif sur le revenu. Au fond, l'exemple suivant peut faire l'affaire: si une personne gagne moins qu'un revenu donné, on ne prélèvera pas d'impôt, mais elle recevra un certain pourcentage. Je dois d'abord préciser que le but consiste à créer un incitatif pour que les gens travaillent et gagnent de l'argent. Il ne faut pas que, du moment où ils gagnent un salaire, on les pénalise en retranchant ce salaire de leurs prestations de sécurité sociale ou du Régime d'assistance publique du Canada.

C'est le but de l'impôt négatif sur le revenu. Il y aura un seuil au-dessous duquel la personne reçoit un certain pourcentage, mais du moment que son salaire dépasserait ce seuil, on commencerait à prélever de l'impôt. Ce serait un façon d'intégrer dans le système un incitatif pour que les gens cherchent du travail, mais sans les pénaliser lorsqu'ils en trouvent.

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce): Monsieur le Président, avant et durant la campagne électorale, nous, libéraux, et plusieurs autres partis aussi, avons reproché aux conservateurs d'avoir fait exploser le chômage et d'avoir adopté une politique insuffisante de réduction de la dette. Nous avons dit que leur obsession de l'inflation et des dépenses publiques avait plongé le pays dans la récession, provoqué un nombre record de faillites, fait grimper le chômage à 11 p. 100 et fait tripler la dette nationale.

Nous avons fait valoir qu'il fallait supprimer le gaspillage et réduire certaines dépenses stériles, mais qu'il fallait surtout créer des emplois et stimuler la croissance économique.

La politique des conservateurs a entraîné une perte d'emplois, une réduction des recettes fiscales, un plus grand recours à l'assistance sociale et à l'assurance-chômage, et une hausse du déficit.

Conformément au programme du Parti libéral, les Canadiens vont retourner au travail, les entreprises vont réaliser des bénéfices, particuliers et sociétés vont payer des impôts, on aura moins recours à l'assurance-chômage et à l'assistance sociale, certaines sociétés ne seront pas renflouées et le déficit diminuera.

Dans son discours du Trône, le gouvernement libéral s'est engagé à réaliser les objectifs suivants, et je cite: «Le gouvernement attache la plus haute importance à la création d'emplois et à la croissance économique à court et à long terme.»

Nous avons promis de mettre en oeuvre le programme de modernisation des infrastructures municipales; de rétablir le Programme d'aide à la rénovation résidentielle, qui vise à rénover nos vieilles habitations et à améliorer notre banque de logements tout en créant des emplois; de créer un Service jeunesse pour aider les jeunes à faire la transition entre l'école et le travail; de mettre davantage de capitaux à la disposition de la petite entreprise; de créer le Fonds d'investissement canadien afin de stimuler l'avancement de la technologie; de promouvoir les activités de recherche et de développement; et d'améliorer les programmes de formation et de recyclage.

Ce ne sont là que quelques-unes des promesses du discours du Trône. Au cours du présent débat, les divers ministres ont expliqué plus en détail certains de ces programmes.

Je suis un chaud partisan de la formation, du recyclage, des études supérieures et de l'éducation permanente, mais je ne crois pas que ces programmes réussiront à eux seuls à résoudre le problème du chômage. On a proposé de consacrer une plus grande proportion de la caisse de l'assurance-chômage à la formation, mais il ne faut pas oublier qu'un nombre considérable de chômeurs canadiens sont déjà très bien formés. Leur problème, ce n'est pas qu'ils manquent de formation, mais qu'il n'y a pas suffisamment d'emplois.

En outre, il faut s'assurer que les programmes de formation sont adaptés aux véritables problèmes économiques de notre pays. Trop souvent, d'une part, on forme des gens pour des métiers qui ne sont plus en demande dans l'entreprise privée et, d'autre part, on n'offre pas de cours pour les métiers qui le sont. J'ai eu trop souvent l'occasion d'observer cette situation dans ma propre ville, à Montréal, où des gens s'inscrivent à des cours de formation et ne réussissent pas à trouver des emplois par la suite. Par contre, les employeurs sont à la recherche de gens qu'ils pourraient former, car il n'y a pas de formation offerte dans leur domaine.

(2015)

De toute façon, je me réjouis de l'examen des programmes de soutien du revenu et de la sécurité sociale qui a été annoncé dans le discours du Trône et qui devrait être dirigé par le ministre du Développement des ressources humaines. D'ailleurs, je crois que cette proposition fera l'objet du débat de lundi prochain.

Je voudrais maintenant aborder certaines critiques formulées à l'endroit du programme économique du gouvernement qui vise à créer des emplois et à stimuler la croissance. Premièrement, certains ont prétendu pendant la campagne électorale et prétendent encore aujourd'hui que le programme d'infrastructure ne servira qu'à boucher les trous dans les rues et ne créera aucun emploi permanent.

Je tiens à dire avant tout que ce programme reçoit l'appui de toutes les provinces et de la grande majorité des municipalités. Il ne servira pas qu'à boucher les trous dans les rues, ce qui corres-


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pond à une perception très simpliste d'un programme très important.

Le ministre ainsi que le premier ministre ont déclaré qu'ils donneraient au mot infrastructure une interprétation très large. Ainsi, il s'appliquera aux chemins, aux routes, aux ports, aux aéroports, aux systèmes d'égout, aux services de transport en commun, aux systèmes de communications, aux installations de traitement des eaux, aux ponts, etc. Ces travaux publics créeront des emplois directs et indirects pendant leur réalisation. Les emplois indirects sont associés bien sûr à la production des matériaux de construction et de tous les matériaux nécessaires à la rénovation et à la construction des infrastructures. Ces travaux créeront aussi, dans les villes et villages ainsi mieux pourvus, un climat plus attrayant pour les investisseurs privés.

Un climat plus sain favorise l'activité touristique, l'essor des entreprises et la croissance économique. En rénovant ainsi nos infrastructures, nous contribuerons à rétablir la confiance, élément essentiel pour stimuler l'investissement et la croissance.

Une autre critique a été formulée par certains députés à la Chambre, dont plusieurs députés du Parti réformiste, et notamment le chef du Parti réformiste qui a profité de la toute première période de questions orales de la présente législature pour poser au premier ministre une question. Il s'agit d'une question qui lui avait été envoyée par M. Dean Eyre, d'Ottawa, et je cite cet extrait du hansard:

Le gouvernement a l'intention de consacrer six milliards de dollars au programme d'infrastructure et de créer 65 000 emplois. A-t-il calculé combien d'emplois auraient pu être créés si on avait simplement réduit de ce montant les impôts des particuliers, des propriétaires fonciers et des petites entreprises?
Pour commencer, comme je l'ai dit il y a quelques minutes, toutes nos villes et nos provinces ont besoin de moderniser leur infrastructure pour bien fonctionner et pour attirer les investisseurs du secteur privé. Nous avons besoin de routes, de chemins de fer, de canaux. Nous avons besoin de la voie maritime du Saint-Laurent, ce grand projet d'infrastructure qui remonte à il y a longtemps déjà et qui est très près de la circonscription du député. Nous avons besoin d'aéroports, de réseaux téléphoniques et de réseaux de télécommunications. Nous avons besoin d'écoles, d'universités, de systèmes judiciaires et de services de police, éléments qui font tous partie de l'infrastructure dans son sens large. Si nous n'élargissons pas et ne modernisons pas notre infrastructure, nous deviendrons vite un pays de troisième ordre.

Comme je l'ai dit plus tôt, non seulement nous créons des emplois directs et indirects en élargissant et en modernisant notre infrastructure, mais cela nous permet aussi d'attirer les investisseurs, ce qui crée encore plus d'emplois.

Toutefois, dans la question posée par le chef du Parti réformiste au nom de M. Eyre, on suppose que, si nous rendions 6 milliards de dollars aux contribuables, nous aurions encore plus d'emplois. Cela n'est certainement pas garanti. Par contre, toute société doit se doter de l'infrastructure essentielle pour pouvoir fonctionner comme un État moderne.

(2020)

Nous ne sommes pas du tout certains de ce qui se passerait si nous rendions ces 6 milliards de dollars aux contribuables canadiens. Je tiens à dire clairement que, d'une part, je crois qu'il doit nous rester un très fort pourcentage de notre revenu à dépenser comme bon nous semble en tant qu'individus et en tant que consommateurs, mais, d'autre part, en tant que société, nous devons nous assurer que nous avons le capital social qui fait de nous un État moderne.

Si nous rendions cet argent aux contribuables, certains d'entre eux pourraient en dépenser une forte proportion à l'étranger comme consommateurs ou comme investisseurs. D'autres pourraient en dépenser la totalité pour acheter des biens de consommation. D'autres encore pourraient le dépenser pour acheter des cigarettes illégales ou d'autres genres de produits illégaux, de la drogue et ainsi de suite. D'autres encore pourraient le cacher dans leur tiroir ou dans leur bas de laine. Il y aurait sans doute certains investissements privés si cet argent était rendu aux contribuables.

Cependant, rien ne garantirait qu'il serait investi dans des emplois, alors que la société, par l'intermédiaire de son gouvernement, peut garantir que cet argent sert à mettre en place l'infrastructure de base qui attirera les entreprises et qui, à la longue, mettra plus d'argent dans les poches des Canadiens.

Nous, les députés du Parti libéral, sommes en faveur d'une économie mixte. Ce sont des économies mixtes qui ont amené les plus grandes ères de propérité au Canada, aux États-Unis et en Europe. L'expérience a prouvé que les extrêmes ne fonctionnent pas aussi bien, qu'il s'agisse d'économies socialistes ou d'économies libérales.

Voilà le message que renferme le discours du Trône. Les emplois et la croissance économique sont nos plus grandes priorités, et nous croyons que le gouvernement du Canada et les provinces ont un rôle important à jouer, de concert avec les entreprises et les travailleurs, dans la réalisation de ces objectifs.

M. Jack E. Hoeppner (Lisgar-Marquette): Monsieur le Président, je me demande si le député de Notre-Dame-de-Grâce se souvient du début des années 1980, lorsque nous avons connu des taux d'intérêt atteignant les 24 p. 100 en raison de l'incurie du gouvernement dont il faisait partie. Ce même gouvernement nous a aussi imposé une politique des transports qui a résulté en l'élimination de milliers de milles de voies ferrées. Il a mis des milliers d'agriculteurs en faillite. Il a fermé des puits de pétrole.

Je me demande comment il se fait que tout à coup les infrastructures lui tiennent tant à coeur. Aurait-il l'obligeance de m'expliquer?

M. Allmand: Monsieur le Président, je me souviens très bien des années 1980 et des années 1970, 1960 et 1950 aussi. Il est un peu simpliste d'attribuer entièrement au gouvernement la responsabilité des taux d'intérêt des années 1980. Les taux d'intérêt étaient élevés dans beaucoup de pays occidentaux à cette époque. C'était immédiatement après la crise du pétrole provoquée par l'OPEP. Beaucoup d'autres pressions sont entrées en jeu, ce qui a


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contraint tous les gouvernements à lutter contre des taux d'intérêt élevés et contre les conditions que l'on sait.

Si le député veut parler des gouvernements libéraux, je me souviens de l'époque Pearson, au début des années 1960, lorsque le taux de chômage s'est établi à 2 ou 3 p. 100 pendant quatre années consécutives. J'étais étudiant et je me souviens aussi de l'époque Saint-Laurent, lorsque nous avons connu de cinq à six ans de plein emploi. Je peux me souvenir de l'époque Trudeau où le taux de chômage moyen était de cinq à sept pour cent.

Ce que je veux dire, c'est que le gouvernement a un rôle à jouer dans l'économie. Je ne suis pas un socialiste. Je ne crois pas à l'économie contrôlée des socialistes, mais je ne crois pas non plus aux méthodes des Reagan, Thatcher et Mulroney qui consistaient à se retirer en espérant que tout irait bien.

Je crois que les gouvernements ont un rôle à jouer auprès des syndicats et des employeurs, et lorsque le Canada a eu des gouvernements qui jouaient ce rôle, nous avons connu les plus belles périodes de prospérité de notre histoire. C'est d'ailleurs grâce à eux que le Canada est devenu une grande nation.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert): Monsieur le Président, j'ai été heureux d'entendre le député de Notre-Dame-de-Grâce rappeller que le phénomème des prestataires d'aide sociale et d'assurance-chômage est lié à un taux de chômage trop élevé. Au fond, il s'agit d'un manque d'emplois. Je pense ne pas déformer sa pensée quand je dis cela. Il y a effectivement un manque d'emplois, et ceux qui sont au chômage ne le sont pas nécessairement à cause d'un manque de formation. Je pense que c'est à juste titre qu'il a avancé cette chose-là.

(2025)

Étant d'une circonscription où on retrouve l'Université Laval, une institution vieille de quelques siècles, qui reçoit aujourd'hui plus de 35 000 étudiants, je suis sensible à cette réalité-là.

J'ai une question à poser au député de Notre-Dame-de-Grâce. Croit-il que le partage de l'emploi pourrait, au cours des prochaines années, être une façon efficace de sortir du chômage et de l'aide sociale pour les jeunes qui ont de la formation, qui sont remplis de dynamisme et qui n'ont simplement pas d'emploi? Croit-il qu'un meilleur partage de ce qu'on a serait une solution?

[Traduction]

M. Allmand: Monsieur le Président, voilà une proposition très intéressante qu'on examine très attentivement à l'heure actuelle dans de nombreux pays du monde, c'est-à-dire la possibilité de partager plus équitablement notre emploi entre diverses personnes. Par exemple, dans plusieurs pays d'Europe actuellement, on discute d'une semaine de travail ou d'une journée de travail moins longue, de sorte qu'on puisse partager l'emploi de façon plus équitable entre un plus grand nombre de personnes.

Il faut nous rendre compte qu'à notre époque moderne, la production est assurée en grande partie par la technologie, les machines et les robots, et non simplement par des travailleurs suant sang et eau, mais plutôt par l'utilisation de leur cerveau, de leur intelligence, de leur imagination et de leur formation avancée.

Voilà ce qui va arriver. Il y aura un plus grand partage du travail et il existe de nombreux moyens pour y parvenir. J'espère que ce sera l'une des possibilités qu'examinera le comité des ressources humaines qu'on établira ici à la Chambre d'ici une ou deux semaines; il s'agira de réfléchir à une meilleure distribution du travail et à une meilleure conception du soutien du revenu et de la sécurité sociale.

Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain): Monsieur le Président, permettez-moi de vous féliciter de vos nouvelles fonctions à la Chambre. Vous pourrez, de même que vos suppléants, compter sur mon entière collaboration, comme j'ai pu, ces dernières années compter sur votre amitié. Alors que vous présiderez nos débats animés dans les années à venir, j'espère que nous nous souviendrons tous de la chance que nous avons de vivre dans une démocratie où les débats animés sont non seulement autorisés, mais également encouragés.

Permettez-moi aussi de souhaiter la bienvenue aux 205 nouveaux députés.

[Français]

Comme le premier ministre l'a mentionné la semaine dernière, ce nombre sans précédent de nouveaux députés apporte une extraordinaire énergie de renouveau à la Chambre des communes.

[Traduction]

Je tiens par-dessus tout à remercier les électeurs de la circonscription de Hamilton Mountain de l'honneur qu'ils m'ont fait en me choisissant à nouveau pour les représenter au Parlement. Je ferai de mon mieux pour être digne de leur confiance.

La question de la confiance est en effet fondamentale dans le discours du Trône. Je me souviens fort bien que, durant la campagne électorale, le premier ministre est venu à Hamilton avec en main son désormais célèbre livre rouge intitulé Pour la création d'emplois, Pour la relance économique: Le plan d'action libéral pour le Canada. Le premier ministre a promis que s'ils étaient portés au pouvoir, les libéraux mettraient en application les mesures proposées dans leur livre rouge. Avec ce discours du Trône, le premier ministre a tenu parole. Il n'a pas trahi la confiance que lui ont témoignée les électeurs.

Je suis vraiment étonnée d'entendre les députés de l'opposition se plaindre de ce que le discours du Trône n'est qu'une reformulation de nos promesses électorales. Ils devraient en fait se réjouir que le premier ministre respecte ses promesses. Ils devraient être très heureux que le premier ministre honore les engagements qu'il a pris envers les Canadiens.

Depuis le jour de son assermentation, le premier ministre a tenu parole. Voyons ce qu'il a fait au cours des deux premiers mois de son mandat. Le premier ministre a dit qu'il annulerait le contrat de 5,8 milliards de dollars lié aux hélicoptères et il l'a fait. Il a dit qu'il réduirait comme jamais la taille du Cabinet et il l'a fait. Il a promis de réduire les budgets des cabinets de ministres et il l'a fait. Le premier ministre a dit qu'il sabrerait les


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dépenses du Parlement et il a déjà pratiqué des compressions de 5 millions de dollars à ce chapitre. Le premier ministre a enrayé le coûteux processus de privatisation de l'aéroport Pearson. Il met un terme aux dépenses excessives outre-mer en intégrant nos ambassades à celles de l'Australie. Il a nommé un nouveau gouverneur de la Banque du Canada. Il réexamine actuellement le régime de pensions des parlementaires. Il veut vendre l'Airbus qui servait au transport du premier ministre.

(2030)

À la Chambre, nous avons été témoins de changements importants durant les trois premières semaines de la première session de la 35e législature. Avant de présenter des projets de loi, le gouvernement a permis la tenue de débats auxquels nous avons tous pu participer. Nous avons discuté du maintien de la paix et des armes nucléaires et, la semaine prochaine, nous débattrons de la politique sociale. Nous pourrons aussi, et cela constitue une première, participer à un débat prébudgétaire.

Ce sont là de grandes réalisations, mais ce qui importe surtout, c'est que le gouvernement a déjà modifié considérablement la politique de relance de l'économie canadienne. Cette nouvelle approche économique aura des répercussions très concrètes sur ma circonscription et sur ma ville, celle de Hamilton.

Le gouvernement met en oeuvre un programme national d'infrastructure. Il signera des ententes avec toutes les provinces, et il suffira de quelques semaines pour que soient mis en oeuvre des programmes qui redonneront du travail aux Canadiens.

À l'occasion de la première période des questions de cette nouvelle législature, le premier ministre a souligné l'appui qu'il a reçu du maire de Hamilton, relativement au programme d'infrastructure. De nouveaux projets municipaux sont synonymes de nouveaux emplois dans le secteur de la construction, lesquels sont à leur tour synonymes de nouveaux emplois dans l'industrie sidérurgique. Voilà ce que veulent les Canadiens et les citoyens de Hamilton et voilà ce que le gouvernement leur offre.

Les Canadiens n'attendent pas de miracles du gouvernement, mais ils veulent avoir un espoir réaliste, des politiques réalistes pour créer des emplois. C'est pourquoi le programme d'infra-structure est si important. Il donnera un coup de pouce, au moment où cela compte le plus, pour faire redémarrer l'économie.

Cette même approche saine est au centre de la politique commerciale du gouvernement. Le premier ministre a dit qu'il ne mettrait l'ALENA en oeuvre que si les États-Unis et le Mexique acceptaient de négocier les questions des subventions, du dumping et des droits compensateurs. Le nouveau gouvernement a obtenu cet engagement.

Les nouveaux groupes de travail de l'ALENA chargés d'étudier le dumping et les subventions sont une mesure de première importance pour mettre un frein aux tactiques américaines de harcèlement contre les exportations canadiennes. La tâche ne sera pas facile, mais il est très important de souligner que le gouvernement a fait accepter aux États-Unis un délai de deux ans pour le règlement de ces questions cruciales.

Ces nouveaux groupes de travail sont particulièrement importants pour Hamilton, parce que, ces dernières années, il y a eu plus de mesures américaines prises contre l'acier que contre tout autre produit d'exportation. Un autre avantage est que le Mexique sera partie à ces négociations. C'est un progrès important quand on sait que l'acier canadien fait face en ce moment à quatre mesures commerciales distinctes au Mexique.

Je ne prétends pas que le gouvernement a résolu tous les problèmes du Canada en deux mois, mais il a pris des mesures importantes et agi promptement pour donner suite à ses promesses électorales. La création d'emplois et l'intégrité du gouvernement, voilà les engagements du premier ministre, et il les honore. Mais il reste beaucoup à faire.

Il faut faciliter aux petites entreprises l'accès aux capitaux, éliminer les barrières commerciales entre les provinces, créer un fonds d'investissement pour soutenir les entreprises dans les techniques de pointe. Nous devons alléger le fardeau de la réglementation pour les entreprises, réduire le déficit au moyen d'autres mesures de création d'emplois à long terme, protéger et renforcer nos services de santé, rendre nos quartiers et nos rues plus sûrs, créer le Service jeunesse. Il faut certainement remplacer la TPS.

(2035)

Nous ne pouvons tout faire en même temps, mais nous pouvons et devons prendre les mesures nécessaires pour que chaque Canadien puisse se réaliser pleinement. Nous pouvons et nous devons traiter tous les Canadiens avec dignité, équité, compassion. Nous pouvons et devons veiller à ce que le Canada soit concurrentiel, tolérant, indépendant, fier.

[Français]

Il y a beaucoup de travail à faire au Parlement. Au cours des deux derniers mois, ainsi que lors du discours du Trône, le premier ministre a démontré ses qualités de leadership.

[Traduction]

Comme je l'ai dit au début, nous avons une chance extraordinaire de vivre dans une démocratie où les débats animés sont permis. J'espère que nous ne perdrons pas de vue, au cours de ces débats, que nous sommes ici pour représenter les Canadiens qui comptent que nous ferons passer avant tout la création d'emplois et l'intégrité. J'ai hâte de travailler avec tous les autres députés pour atteindre ces objectifs.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Monsieur le Président, j'aimerais féliciter et remercier ma collègue pour sa présentation. J'aimerais lui dire que je partage avec elle une préoccupation essentielle, à savoir la sidérurgie. Dans mon comté, j'ai également une importante industrie sidérurgique. Sur le territoire de ma circonscription, il y a deux grandes aciéries, Sidbec-Dosco et Stelco McMaster.

J'ai été presque ému en voyant l'enthousiasme et la fébrilité de ma collègue à l'égard des réalisations du gouvernement et du premier ministre jusqu'à présent. Elle nous en a décrit quelques-unes, notamment, en tout premier lieu, la réduction du budget de la Chambre des communes.


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Dois-je rappeler à mon honorable collègue que la Chambre des communes jouit théoriquement d'une indépendance tout à fait totale à l'égard du gouvernement et que ce n'est donc pas le gouvernement qui a réduit le budget de la Chambre, mais les partis qui y sont représentés. Les membres de cette Chambre ont eux-mêmes réduit le budget de la Chambre, à l'invitation du premier ministre évidemment, mais il a bien fallu que les partis y consentent. Je dois dire que le Bloc québécois n'a pas manqué de faire sa part dans la réduction du budget de la Chambre des communes.

D'autre part, elle nous a parlé des débats auxquels nous avons participé mardi et mercredi sur la présence des Casques bleus candiens en Bosnie-Herzégovine et en Croatie et sur les essais des missiles de croisière en territoire canadien.

Je voudrais rappeler également à ma collègue qu'hier, on a critiqué le fait que ces débats aient lieu avant que le gouvernement fasse connaître ses orientations en matière de défense. Donc, on intervenait hier sur quelque chose qui risque de changer d'un jour à l'autre si le gouvernement décide de nous annoncer des orientations différentes. Je pense que le débat était tout à fait à propos, évidemment, mais qu'il n'a pas eu lieu au bon moment.

Elle nous a également parlé de toutes sortes de prétendues réalisations sur lesquelles je ne reviendrai pas. J'aimerais plutôt insister sur les non-réalisations ou plutôt sur les échecs du gouvernement jusqu'à présent. Est-ce que mon honorable collègue a oublié que le gouvernement a lamentablement échoué sur la question du libre-échange, par exemple? Il nous avait dit durant la campagne électorale qu'il ne mettrait en oeuvre l'accord de libre-échange que s'il obtenait un certain nombre de garanties sur l'environnement et les ressources et que si on lui fournissait une définition de ce que sont les subventions. Il n'a obtenu aucune de ces garanties et aucune de ces définitions avant la mise en oeuvre de l'accord de libre-échange.

De la même façon, en ce qui concerne le GATT, le gouvernement s'est lamentablement écrasé et a échoué sur la protection de l'article XI qui a tant d'importance pour les agriculteurs. J'imagine que ma collègue n'a pas beaucoup d'agriculteurs dans sa circonscription. Sur ce point, il y a une petite différence entre nous parce que, chez moi, il y en a quelques-uns, et même beaucoup. On est un peu déçu de la performance gouvernementale à ce chapitre.

En terminant, j'aimerais demander à ma collègue, puisqu'elle parlait des réalisations du gouvernement, si on devra attendre encore bien longtemps avant que le gouvernement nous montre quelque réalisation que ce soit, d'abord en ce qui concerne la contrebande des cigarettes et ensuite en ce qui concerne l'équité fiscale.

Est-ce qu'on pourrait avoir des réponses sur ces réalisations qu'on attend toujours de la part du gouvernement?

(2040)

[Traduction]

Mme Phinney: Je remercie le député de ses bons mots. Je ne pense pas que nous aurons à attendre longtemps avant que de nombreuses décisions soient prises. Avec l'aide de tous les Canadiens, le gouvernement va régler les problèmes qui sont actuellement à l'étude.

La plupart des ministres ont déjà dit à la Chambre qu'ils veulent rendre plus transparent le processus de décision, qu'ils veulent mettre en oeuvre les changements proposés par la population et par tous les députés.

Le député a une aciérie dans sa localité et j'espère qu'il va participer davantage aux travaux de la Chambre en devenant membre du caucus de l'acier.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond): Monsieur le Président, j'aimerais d'abord profiter de l'occasion qui m'est offerte pour saluer et remercier les gens du comté de Drummond pour la confiance qu'ils m'accordent et pour souligner que j'accomplirai mon mandat au meilleur de mes connaissances et avec le plus grand dévouement.

Ce que j'ai entendu mardi dernier au Sénat ne constitue d'aucune façon le projet vigoureux que les Québécois et les Québécoises, les Canadiens et les Canadiennes, étaient en droit de s'attendre pour retrouver un sentiment d'espoir et de confiance en l'avenir. Conséquemment, je désire transmettre à cette Chambre et au gouvernement mes préoccupations et celles de mes collègues concernant le discours du Trône, et plus particulièrement en ce qui concerne le système de soins de santé.

Hélas, la pauvreté du contenu du discours du Trône en cette matière génère davantage d'appréhensions que d'espoirs. Car nos concitoyens et concitoyennes attendent des solutions aux problèmes reliés à la détérioration de nos soins de santé telles la fermeture de lits d'hôpitaux, la congestion des salles d'urgence, l'augmentation du prix des médicaments, et j'en passe. J'en prends pour exemple la situation de crise aiguë qui prévaut à l'Hôpital Sainte-Croix de Drummondville dans mon comté. Faute d'un financement adéquat, confronté à des compressions budgétaires majeures, il en résulte des équipements désuets, un manque de spécialistes, des fermetures fréquentes de services, des gardes interrompues, des transferts de malades. Autant de situations qui rendent la vie difficile au personnel et aux patients. Quels espoirs nous livre le discours du Trône pour contrer ces situations inacceptables? Trop peu, faut-il le constater, monsieur le Président.

Parlons tout d'abord des paiements de transfert fédéraux et du financement des programmes établis. D'entrée de jeu, nous reconnaissons que les engagements du ministre des Finances concernant la bonification quinquennale des paiements de péréquation sont certes un réconfort pour l'ensemble des provinces.

Mais il ne faut pas confondre les paiements de péréquation avec les paiements de transfert. Dès 1986, le gouvernement précédent, critiqué à maintes reprises par le premier ministre actuel, commençait le processus de réduction des transferts fédéraux au titre de financement de programmes établis. Les conservateurs annonçaient en 1987 que les provinces canadiennes et le Québec auraient 270 millions de dollars en moins pour financer la santé et l'enseignement postsecondaire.

Pire encore, les conservateurs annonçaient en février 1991 que les paiements de transfert per capita pour le financement des programmes établis seraient gelés jusqu'à 1994-1995. Toutes ces mesures ont été appliquées unilatéralement, c'est-à-dire


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sans le consentement ni du Québec ni des autres provinces, alors qu'une entente avait pourtant été formellement conclue entre les parties en 1977. C'est ainsi que de 1978 à 1993 la contribution du gouvernement fédéral aux programmes de soins de santé et d'éducation postsecondaire du Québec a chuté de 47 p. 100 à 34 p. 100.

Or, nous savons tous que lorsque les paiements de transfert sont réduits, ce sont surtout les provinces moins bien nanties qui en souffrent. Ce dont nous parlons, c'est d'équité pour les provinces et le Québec. Une politique de gel des transferts fédéraux au titre du financement des programmes établis est donc en soi une menace grave aux principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé.

(2045)

C'est pour ces raisons que l'opposition officielle entend faire la promotion de la révision des modalités des paiements de transfert dans le respect de la capacité financière du Québec, des provinces et du Canada.

Il faut aussi souligner le fait qu'en même temps que le gouvernement fédéral se désengageait du financement de ce programme, les provinces et le Québec étaient confrontés à une augmentation des coûts de santé. Cette croissance est due à plusieurs facteurs tels le vieillissement démographique, l'apparition d'une technologie médicale avancée et coûteuse et la hausse des prix des produits pharmaceutiques.

Les contribuables québécois et canadiens confient au gouvernement fédéral des sommes importantes dont une portion a toujours été destinée aux soins de santé en vertu de l'entente de 1977. Le problème, c'est que depuis 10 ans, le gouvernement fédéral ne retourne plus aux provinces et au Québec la portion due, et détourne donc des fonds destinés à la santé. En lieu et place, ce qu'il transfère au Québec et aux provinces, c'est son déficit, conséquence de l'incapacité du précédent gouvernement à contrôler ses dépenses. On parle ici d'une réduction de près d'un tiers des paiements de transfert. Ceci a eu des conséquences importantes sur la santé financière du Québec et des provinces. Or, si le présent gouvernement libéral procédait à un simple gel du montant de paiements de transfert, cela équivaudrait dans les faits à une réduction équivalente à l'inflation.

Le gouvernement fédéral amplifierait, pour le Québec et les provinces, les choix déjà difficiles qu'il devra faire pour combler leur manque à gagner et diminuer leur fardeau fiscal. Une amélioration de l'efficience étant peu possible à court terme, le Québec et les provinces seraient alors placés devant deux options aussi regrettables l'une que l'autre, soit réduire la quantité, voire la qualité des services, soit s'endetter davantage. Dans un cas comme dans l'autre, nous n'apprendrons rien à qui que ce soit en disant que ce sont encore et toujours les plus démunis qui en souffriront davantage.

Je me permets de faire remarquer à cette Chambre que ni le Québec ni les provinces ne demandent en cette matière la charité. Ils ne font qu'exiger l'argent qui leur est dû en vertu d'une entente, rappelons-le, formellement conclue.

Par ailleurs, nous nous interrogeons sur le bien-fondé, voire la légitimité du gouvernement fédéral à imposer aux provinces le maintien des façons de faire en matière d'assurance-santé, après que le gouvernement conservateur ait renié systématiquement dans ses neuf années de pouvoir ses engagements financiers en ce qui concerne les paiements de transfert.

En conséquence, les provinces et le Québec ont, bien malgré eux, été amenés à proposer diverses mesures soi-disant palliatives au cours des dernières années. Mentionnons le ticket modérateur, l'impôt service, la tarification avec franchise, et j'en passe. Toutes ces alternatives ont une chose en commun. Elles font brèche dans l'accessibilité des soins et des services de santé.

Le gouvernement fédéral doit être sensible et surtout conscient qu'en augmentant le fardeau fiscal du Québec et des provinces, un système à deux vitesses verrait le jour: d'un côté, ceux avec les moyens d'accéder aux soins et aux services de santé, et de l'autre, les démunis, ceux dont les moyens les amèneraient à retarder, voire même à se priver des soins nécessaires.

Nous croyons dans les grands principes de l'universalité, de l'intégralité, de l'accessibilité, de la transférabilité et de l'administration publique. Ce que nous contestons, c'est que ces grands principes soient sérieusement menacés dans toutes les provinces et au Québec par l'incapacité même du gouvernement fédéral à respecter ses engagements.

(2050)

Mes collègues de la Chambre constatent, tout comme moi, que c'est toujours le même contribuable qui, dans chaque province et au Québec, paye la note. En matière de paiements de transfert, l'argent du contribuable est perçu par le gouvernement fédéral, puis transféré au gouvernement de la province du contribuable. L'argent du contribuable prend un billet aller-retour vers Ottawa.

Mais ce billet aller-retour a un prix. À Ottawa, la bureaucratie prélève son écot. Par voie de conséquence, il y a une portion de l'argent du contribuable qui ne fait pas le voyage de retour. Cette portion demeure ici pour nourrir l'appétit de l'appareil gouvernemental fédéral.

Le ministre des Finances déclarait la semaine dernière qu'il ne fallait pas attendre quelque générosité que ce soit lors de la renégociation des paiements de transfert dont l'accord vient à terme l'an prochain.

Une question se pose donc: ne serait-il pas plus économique, et surtout plus rassurant, que le contribuable remette directement à son gouvernement provincial l'argent de son impôt destiné aux soins de santé, éliminant l'intermédiaire fédéral, les coûts supplémentaires et surtout le risque que le gouvernement fédéral confisque cet argent pour réduire son déficit?

Étant donné que le gouvernement fédéral n'a pas su tenir ses engagements dans le passé, nous sommes convaincus que la population canadienne serait mieux servie en matière de soins de santé si les provinces, et le Québec, prenaient les choses en mains et veillaient chez elles à l'application des principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé.

Ce faisant, la charge bureaucratique serait significativement réduite, la maîtrise d'oeuvre serait plus proche du terrain où elle doit s'exercer et son adaptation à son contexte et à ses ressources particulières bénéficierait d'une souplesse appropriée et efficace à court terme. De plus, cela mettrait un terme à cette continuelle


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épée de Damoclès qui ne cesse de s'abattre sur le Québec et sur les provinces à chaque nouveau budget fédéral.

La santé est aussi affaire de prévention. Un gramme de prévention, comme chacun le sait, vaut un kilo de soins, si bons soient-ils. C'est donc dire qu'en matière de prévention, toute réduction budgétaire qui ne pourrait être compensée sur-le-champ par une amélioration équivalente de l'efficience des programmes touchés se traduira par une hausse des coûts supérieure à l'économie escomptée.

La meilleure politique de prévention en matière de santé consiste à améliorer la condition socio-économique de la population québécoise et canadienne. La situation économique précaire qui prévaut au Québec et dans l'ensemble du Canada peut entraîner des conséquences néfastes pour une partie importante des citoyens.

De Saint-Jean à Victoria, plusieurs femmes, hommes, jeunes ou moins jeunes vivent dans des conditions socio-économiques qui ne favorisent pas le plein développement de leurs capacités. Dans chacun des comtés que nous représentons toutes et tous en cette Chambre, plusieurs familles vivent sous le seuil de la pauvreté et réussissent difficilement à assumer leurs besoins nécessaires de subsistance.

Les femmes enceintes ont de la difficulté à se nourrir convenablement, ce qui empêche le développement normal du foetus. Plusieurs bébés naissants sont de petit poids et doivent recevoir des soins prolongés à l'hôpital. D'autres souffrent de maladies causées par les carences alimentaires de la mère, ce qui nécessite des traitements échelonnés sur plusieurs années. Les programmes de nutrition prénatale énoncés dans le discours du Trône devront livrer une solution réelle à ce problème important.

On constate même que des enfants d'âge scolaire ne peuvent manger à leur faim parce que le réfrigérateur est presque vide en fin de mois. Ces enfants accumulent les échecs, ce qui les amème à quitter l'école sans diplôme. Nous devons faire quelque chose pour ces enfants.

Les individus qui ne peuvent se loger adéquatement se retrouvent dans une situation des plus déplorables. Comme le soulignait la politique de la santé et du bien-être publiée en 1992 par le gouvernement du Québec, la vie dans un logement détérioré, mal chauffé, mal aéré affecte particulièrement la santé des enfants et des personnes âgées.

(2055)

Or, le problème du logement social est des plus sérieux dans toutes les provinces et au Québec. Cette conjoncture ne peut perdurer.

Un des meilleurs moyens de diminuer les coûts de santé est donc de permettre à toutes et à tous de vivre convenablement dans la dignité. C'est par l'accès à un travail décent qu'il sera possible d'améliorer cette situation.

Par ailleurs, et quoique nous soyons d'accord avec les efforts du ministère de la Santé pour réduire le tabagisme, nous déplorons vivement le programme d'augmentation des taxes à cette fin mis en place par le précédent gouvernement. Ce programme constitue un désastre qui a généré quatre effets pervers de taille.

D'abord, un réseau de contrebande et de marché noir s'est constitué, entraînant des problèmes d'illégalité et de criminalité aussi incontrôlables qu'inutiles. Ensuite, les établissements commerciaux ont vu toutes leurs ventes chuter, entraînant une baisse marquée de leurs profits. Par voie de conséquence, les revenus fiscaux ont évidemment diminué de façon draconienne. Enfin, à la fois malheureusement et ironiquement, l'avènement du marché noir, non seulement a contrecarré la réduction escomptée du tabagisme, mais a aussi entraîné une recrudescence de la consommation chez les jeunes gens, attirés vers la cigarette en raison même de son aspect de fruit de contrebande.

Il est vraiment honteux que cette Chambre ait créé de toutes pièces une crise aussi grave qu'inutile alors qu'il y a tellement de vrais problèmes auxquels il presse d'apporter une solution. Nous demandons donc au nouveau gouvernement de réduire énergiquement les taxes sur le tabac.

Le discours du Trône affirme en moins de deux lignes qu'un centre d'excellence sera établi afin que l'on accorde à la santé des femmes toute l'attention qu'elle mérite. Certes, ce projet est tout à fait louable, mais aura-t-il comme objectif de mettre en pratique un véritable programme de soutien, de recherche et d'intervention sur la santé des femmes, ou restera-t-il un simple centre de documentation comme semblait le laisser sous-entendre le programme du gouvernement libéral?

Quels seront les moyens financiers consacrés à la recherche sur la santé des femmes? On note des lacunes dans la recherche sur le cancer du sein, la gynécologie et l'obstétrique, les maladies chroniques et dégénératives, la santé mentale, la violence et les maladies professionnelles. Si c'est la situation socio-économique des femmes qui détermine leurs besoins en matière de santé, quelles sont les mesures concrètes pour enrayer ces tristes conditions? Il est urgent d'agir et d'agir au coeur du problème. Les femmes sont pauvres, et c'est de là que proviennent plusieurs de leurs problèmes de santé.

Qui n'a pas un frère, une soeur, un ou une ami aux prises avec un problème de toxicomanie ou d'alcoolisme? Nous enjoignons le gouvernement d'accorder un appui tout particulier aux organismes qui oeuvrent à la désintoxication et à la réhabilitation de ceux et celles affectés par ce fléau.

Le discours du Trône annonce la tenue d'un forum national sur la santé en vue de susciter un débat sur le renouveau du régime des soins de santé. Nous ne pouvons que féliciter le gouvernement pour cette initiative, mais en même temps, nous ne pouvons nous empêcher de craindre que ce genre d'exercice tarde à débuter, prenne un temps trop long, coûte trop cher et livre un rapport qui finira sur les tablettes. Le Bloc québécois dénoncera vigoureusement toute attitude qui amènera cet effort à se terminer en queue de poisson.

Le Bloc québécois veillera également à ce que le gouvernement n'utilise pas le forum pour justifier des changements unilatéraux dans les paiements de transfert qui iraient à l'encontre des intérêts du Québec et des provinces. En effet, le Bloc québécois aura pour mandat de s'assurer que les plus démunis n'auront pas


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à souffrir des modifications apportées dans le cadre de la politique d'assainissement des finances publiques.

C'est pourquoi, comme l'ont souligné certains de mes collègues, nous voulons absolument que le gouvernement forme un comité de la Chambre dont le mandat sera d'examiner chaque poste budgétaire afin d'éliminer les dépenses inutiles et frivoles.

(2100)

En conclusion, monsieur le Président, la santé de la population québécoise et canadienne exige du gouvernement qu'il assure au Québec et aux provinces leur juste part de l'argent que versent les contribuables à cette fin et l'intégralité des services dont les populations du Québec et des provinces ont un vital besoin.

L'opposition officielle entend donc intervenir utilement et au besoin, aussi énergiquement qu'il sera requis, pour que chaque citoyen et chaque citoyenne du Québec et des provinces soient assurés des soins et des services de santé, dont ils/elles ont besoin.

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes): Monsieur le Président, je dois féliciter l'honorable députée de Drummond pour son premier discours à la Chambre. Évidemment, elle a des idées qu'elle veut exprimer, lesquelles m'intéressent.

J'aimerais, pour commencer, faire un commentaire. C'est à son chef qu'elles devraient poser les questions soulevées dans son discours puisque, comme elle le sait, c'est l'ancien gouvernement du Canada duquel il était membre qui a imposé presque toutes ces coupures, causant ainsi toutes ces difficultés aux personnes partout au Canada. Il a maintes fois appuyé ce gouvernement à la Chambre, comme beaucoup de ses collègues d'ailleurs. C'est donc à eux qu'elle devrait poser des questions, et non pas au gouvernement actuel, étant donné les difficultés qui existent dans notre pays en ce moment.

Elle a également soulevé la question de la taxe sur les produits du tabac. Qu'a-t-elle l'intention de faire à ce sujet? Est-ce qu'elle voudrait continuer avec la taxe comme maintenant, sans revenus? Ou est-ce qu'elle voudrait changer la taxe pour une autre? L'ancien gouvernement a essayé autre chose. Il a proposé une taxe à l'exportation sur les produits du tabac. Mais des difficultés ont surgi et ce gouvernement a dû retirer cette taxe. Que voudrait-elle faire maintenant? Une nouvelle taxe, l'abandon de la taxe, ou quoi encore? Elle n'est pas très précise. J'aimerais entendre sa réponse.

Mme Picard: Monsieur le Président, je remercie mon collègue d'en face pour ses propos. J'aimerais lui dire que ce que le Bloc québécois demande, c'est d'enrayer la taxe fédérale actuelle sur les cigarettes, de l'enlever, de l'éliminer, parce que c'est vraiment ce qui occasionne actuellement le marché noir. C'est la seule solution pour enrayer la criminalité qui perdure actuellement.

[Traduction]

M. Wayne Easter (Malpèque): Monsieur le Président, je conviens avec la députée que la condition socio-économique est un facteur extrêmement important pour les soins de santé. C'est aussi mon avis. Le ministre du Développement des ressources humaines est sûrement à la recherche de moyens pour bonifier le filet de sécurité sociale et faire le meilleur usage possible de chaque dollar dépensé.

Parmi les remarques de ma collègue, j'en ai trouvé une assez bizarre. Il s'agit du passage où il est dit qu'un billet aller-retour vers Ottawa a un prix. Je pense que c'est une allusion aux déplacements des députés et d'autres personnes qui viennent à Ottawa et y laissent des dollars, d'où une perte.

(2105)

Cela laisse sous-entendre qu'Ottawa, c'est le Canada anglais et qu'il en résulte une perte pour tous les contribuables canadiens. Je suis bien loin d'être un fana de la bureaucratie, je la scrute d'un oeil critique et je suis persuadé qu'il y a bien des améliorations à y apporter.

Je me demande si la députée a jamais songé aux retombées économiques que la présence du gouvernement central, c'est-à-dire le Parlement et tous les ministères, fait jaillir sur Hull et aux pertes que cela occasionnerait si le Bloc québécois parvenait à réaliser son désir de se séparer du Canada. A-t-elle songé aux pertes que subiraient Hull et le Québec si la séparation devenait réalité?

[Français]

Mme Picard: Monsieur le Président, j'aimerais dire à mon collègue qu'il n'a pas du tout compris mes propos quand j'ai parlé du billet aller-retour. Comme vous le savez, les soins de santé sont aussi payés par le contribuable, par les provinces dont le Québec. Le contribuable envoie des sous au fédéral pour payer les soins de santé. Le fédéral gère; le ministère de la Santé administre et livre de l'argent pour payer l'assurance-santé. Mais ce n'est pas la charité que le gouvernement fédéral fait au contribuable. Ce dernier paie sa part. Je dis que lorsque l'argent qui provient du contribuable va à la province et que la province renvoie ici l'impôt des gens pour payer ces soins, tout cela coûte très cher à administrer. On prend notre écot, on prend notre argent, et ensuite on renvoie de l'argent aux provinces pour que celles-ci administrent leurs programmes de santé.

L'administration au fédéral est la partie qui coûte cher. Si le contribuable donnait son argent à sa province pour que celle-ci administre elle-même ses soins de santé, cela coûterait moins cher et on ne se retrouverait pas devant un déficit comme celui qu'on vit actuellement dans les hôpitaux. C'est ce que je voulais dire.

M. Stéphane Bergeron (Verchères): Si vous me le permettez, monsieur le Président, j'aimerais dans un premier temps faire un commentaire sur la présentation qui vient d'être faite par ma collègue de Drummond que je tiens d'ailleurs à féliciter pour son excellent exposé.

J'aimerais d'abord dire que j'approuve entièrement l'idée qu'elle émet, à savoir que les provinces devraient prélever chez elles et garder chez elles les montants dont elles ont besoin pour faire fonctionner leur régime de soins de santé. Cependant, nous savons très bien que, dans le système qui est le nôtre, c'est presque impensable. Donc, on doit s'assurer que les transferts aux provinces ne soient pas touchés de façon à ce que les provinces puissent continuer à assurer les services qu'elles doivent offrir à leurs citoyens en matière de soins de santé. Je rappellerai à mes collègues d'en face que le premier ministre avait pris


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l'engagement au cours de la campagne électorale de ne pas toucher aux transferts aux provinces.

Ma collègue a adéquatement et très judicieusement fait ressortir les deux effets pervers d'une éventuelle réduction des paiements de transfert aux provinces sur la santé. D'abord, cela entraîne sans aucun doute une réduction des services. Comme elle l'a si brillamment démontré, ce sont les plus démunis de la société qui risquent d'être affectés négativement par une telle mesure puisqu'ils n'ont pas les moyens de défrayer les tickets modérateurs ou les impôts-santé qui pourraient être imposés par la province si jamais les paiements de transfert étaient réduits. Ils seraient amenés, comme elle le soulignait si bien, à reporter leurs consultations médicales ou tout simplement à ne pas consulter.

D'autre part, comme je le soulignais également, cela risque d'entraîner une augmentation du fardeau fiscal des mêmes contribuables. Si le gouvernement fédéral réduit ses transferts aux provinces, on peut penser qu'il ne réduira pas pour autant son taux d'imposition. Par conséquent, ce sont les provinces qui vont devoir assumer les coûts additionnels, soit en augmentant elles-mêmes leurs recettes fiscales, soit en demandant aux citoyens et aux citoyennes une plus grande contribution au régime de soins de santé. Une telle situation fait ressortir l'autre effet pervers dont je parlais tout à l'heure. Alors, on a affaire un peu à un cercle vicieux: augmentation du fardeau fiscal des contribuables dans un sens, et diminution du service de l'autre côté. Je pense donc que les effets pervers sont trop importants pour qu'on puisse se permettre une réduction des paiements de transfert aux provinces.

(2110)

D'autre part, j'aimerais souligner, et je serai bref, monsieur le Président, que le premier ministre s'était engagé à ne pas couper dans les paiements de transfert aux provinces, bien entendu. Mais il faudrait faire attention à ce que le gouvernement ne soit pas tenté de laisser stagner les transferts aux provinces au même montant, sans les indexer, ce qui équivaudrait, à plus ou moins long terme, à une coupure, dans les faits. Il faudrait que le gouvernement soit conséquent avec l'engagement qu'il a pris durant la campagne électorale et qu'il indexe les transferts aux provinces par rapport à l'augmentation de l'indice des prix à la consommation.

[Traduction]

M. Harry Verran (South West Nova): Monsieur le Président, je voudrais vous féliciter de votre nomination au poste de vice-président. Vos conseils et vos qualités de chef seront appréciés par tous les députés à la Chambre.

Je suis heureux, en cette première session de la 35e législature, de pouvoir prendre la parole en tant que représentant dûment élu de la circonscription de South West Nova. Les habitants de South West Nova m'ont grandement honoré en m'élisant pour les représenter à la Chambre et faire valoir leurs intérêts auprès du gouvernement.

Les Canadiens ont donné au premier ministre et à l'actuel gouvernement le mandat clair de mettre en oeuvre les programmes présentés dans le désormais célèbre livre rouge.

La circonscription de South West Nova est située dans la partie sud-ouest de la Nouvelle-Écosse. Elle a été auparavant représentée pendant de nombreuses années par Coline Campbell. Coline ne s'est pas présentée aux dernières élections. J'en profite ici pour lui adresser et adresser à son époux, Ron, tous mes voeux de santé pour l'avenir.

South West Nova est une circonscription dont l'histoire, très riche, remonte à 1604, année de l'arrivée de Champlain. Sa population se compose d'autochtones de différentes cultures, d'anglophones et de francophones. En fait, les Acadiens de South West Nova ont célébré avec fierté le 225e anniversaire de cette localité l'an dernier. Les activités se sont principalement déroulées autour de l'Université St. Anne à Church Point, dans le district de Clare. Cette petite université a la réputation d'offrir le meilleur programme d'immersion du pays.

Je tiens à souligner mon intention de conserver des liens étroits avec les habitants de ma circonscription et de les servir de mon mieux.

Pendant des générations, notre population a vécu des ressources naturelles, de la mer, de la terre et des forêts. Cependant, ces dernières années, elle a eu du mal à vivre de ces ressources. L'industrie de la pêche est paralysée principalement à cause d'une mauvaise gestion.

Nos pêcheurs de poisson de fond n'ont pas leurs pareils dans notre pays et ont collaboré avec la direction pour aider à préserver ce secteur. Or, le ministre des Pêches et des Océans les a remerciés de leur collaboration en réduisant leurs quotas au milieu de la saison, ce qui a entraîné de grandes pertes monétaires pour ceux qui avaient acheté des quotas et qui a causé une réduction de leurs prises de 40 p. 100.

Ces pêcheurs ont été trahis et ont perdu toute confiance dans le ministère des Pêches. Nos pêcheurs veulent une meilleure gestion de l'industrie de la pêche, où la justice et l'équité doivent régner. Les pêcheurs de South West Nova veulent travailler et veulent pêcher.

(2115)

Récemment, j'ai eu l'honneur de rencontrer le ministre des Pêches et des Océans et de lui faire part de mes préoccupations au sujet de ces pêcheurs de South West Nova. Je suis heureux que le ministre m'ait dit et ait dit au sous-ministre que lui aussi voulait que sa politique sur la pêche soit empreinte d'équité, de sorte que les travailleurs de l'industrie puissent regagner cette confiance perdue.

Les pêcheurs veulent collaborer, mais insistent pour apporter une certaine contribution au processus décisionnel. Je suis heureux qu'à une réunion avec le ministre des Pêches, aujourd'hui même, il ait réitéré son engagement à rencontrer les pêcheurs de South West Nova dans un avenir très rapproché. Je ferai signe au ministre lorsque ce moment sera arrivé.

Dans l'industrie forestière, notre circonscription connaît également certains problèmes. Les petits propriétaires de terre à bois ont beaucoup de mal à essayer de se maintenir à flot. Autrefois, quand un petit propriétaire de terre à bois était en


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difficulté, il pouvait aller couper un peu de bois pour le vendre aux habitants du coin. Aujourd'hui, le règlement le lui interdit. Il ne peut même pas faire ça pour donner à manger à sa famille. Il est temps de reconnaître le problème et de nous efforcer d'y remédier.

Pour ce qui est de l'exploitation minière, les seules activités étaient concentrées autour de la mine d'étain du comté de Yarmouth. Cette mine a dû être fermée par suite de la baisse des cours mondiaux de l'étain. Résultat, 400 personnes de plus se trouvent sans travail. Cela, conjugué à la fermeture de l'usine de textile de Yarmouth, a laissé la ville et la région avec plus de 600 chômeurs supplémentaires. Les habitants de Yarmouth, d'Argile et de Clare s'efforcent ensemble d'attirer de nouvelles entreprises et de nouvelles industries dans la région. Ils ont grandement besoin de cette aide gouvernementale.

À Bridgetown, une ville très sympathique, l'une des deux principales industries a dû fermer ses portes, faisant perdre leur emploi à de nombreuses personnes. Les habitants de Bridgetown n'abandonneront pas. Ils continueront de faire tout pour attirer de nouvelles entreprises.

Dans ma circonscription, l'agriculture survit assez bien, même si l'exploitation agricole familiale est en voie de disparition et, avec elle, la possibilité pour les jeunes gens et les jeunes femmes de vivre et de travailler chez eux. À cause de cette situation, nous devons trouver d'autres moyens d'assurer des emplois stables à nos enfants, grâce, par exemple, à la création de petites entreprises.

Les petites entreprises de South West Nova ont donné des emplois à un grand nombre des habitants de cette circonscription, mais ont toujours dépendu en grande partie de la demande de matières premières. Une baisse de la demande de matières premières signifie automatiquement le déclin de ces petites entreprises. Une situation à laquelle nous sommes actuellement confrontés.

Le gouvernement doit s'intéresser de près aux régions rurales et aux petites localités de notre pays. Il doit encourager les petites entreprises. Nous devons créer le climat économique qui fera que les gens risqueront leur temps et leurs capitaux.

Enfin, il y a la question de la base des Forces canadiennes Cornwallis, qui me tient à coeur. En effet, du temps où j'étais jeune marin, j'ai servi à la BFC Cornwallis et pour moi, cet endroit évoque toujours beaucoup de bons souvenirs. Depuis plus de 50 ans, plus exactement depuis 1949, cette base est installée dans la circonscription de South West Nova; c'est le seul centre d'entraînement des nouvelles recrues de langue anglaise pour l'ensemble du Canada.

En décembre, j'ai eu l'occasion de rencontrer le ministre de la Défense à ce sujet. J'ai retracé l'histoire de la base de Cornwallis en tant que centre d'entraînement des recrues et je lui ai parlé d'un projet tout récent concernant l'entraînement au maintien de la paix. Je lui ai expliqué que ce projet avait été entièrement conçu dans ma circonscription de South West Nova, par les gens de Cornwallis et des environs.

Je lui ai dit tout le travail, le temps, les recherches et l'argent que la communauté a investis dans ce projet. Je l'ai averti que ce projet était le nôtre et que nous serions très fâchés si les militaires essayaient de s'en emparer et de le réaliser dans une autre région du pays.

(2120)

J'ai expliqué au ministre la nécessité de concilier les recommandations des militaires et les préoccupations des habitants de Cornwallis et des environs.

Le ministre de la Défense nationale a appris de ma bouche la position exacte des gens de South West Nova sur la question de Cornwallis. J'espère que le ministre tiendra compte de l'opinion des habitants du lieu lorsqu'il prendra la décision finale.

Avant de conclure, j'aimerais ajouter que la ressource la plus importante de ce pays est la jeunesse. Étant père de 7 enfants et grand-père de 25, j'ai de graves inquiétudes. Je suis heureux que notre gouvernement soit en train de mettre sur pied le Service jeunesse, qui permettra de remettre les jeunes Canadiens au travail.

Pour terminer, j'aimerais dire qu'avant de venir à la Chambre, je me suis engagé auprès de mes électeurs à me battre avec toute l'énergie dont je suis capable pour m'assurer que leurs intérêts soient bien servis. À ces fins, je leur promets d'être accessible et de leur rendre des comptes.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le député de South West Nova. Je lui fais confiance sur la description de la problématique de son comté. Il parlait de réduction de quotas, de la pêche, des activités minières qui sont en difficulté, du textile et enfin de la décroissance de l'agriculture, ainsi que des petites et moyennes entreprises qui seraient aussi en difficulté.

Il a parlé de tous ces problèmes, mais je n'ai pas senti dans son discours des solutions à ces problèmes. Ce qui m'a semblé être une description qui pourrait s'appliquer à plusieurs régions ou sous-régions, à travers le Canada. C'est un problème finalement, à mon avis, qui résulte en partie de l'éloignement du gouvernement central pour ces régions.

Comme je suis critique à la jeunesse et qu'il a ouvert une certaine porte sur le programme du Service jeunesse, je voudrais juste attirer son attention, à tout le moins sur les modalités qui ont été jusque là exprimées lors des consultations auprès des organismes responsables, et lui demander si, par exemple, il trouve qu'un montant de 61 $ par semaine, pour des jeunes, serait une solution économique pour sa région?

[Traduction]

M. Verran: Monsieur le Président, je remercie le député d'avoir posé cette question.

Nous avons probablement des régions rurales semblables, au Québec et en Nouvelle-Écosse. Je trouve en effet que, pour certaines choses, le gouvernement est trop centralisé. Certains bureaux devraient être installés dans les régions où s'exercent les activités qu'ils sont chargés d'administrer.


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Pour ce qui est des jeunes, je crois que le député m'a entendu dire que je m'intéresse de près aux jeunes, parce que j'ai moi-même de nombreux petits-enfants. Pour le moment, je sais que le ministre a bien travaillé et qu'il est en train d'organiser un programme de formation destiné aux jeunes.

Dans une large mesure, ce programme représenterait un avantage incomparable par rapport à ce qui existait dans le passé. Au tout début, le programme peut ne pas être très complet, mais ce sera certainement un bon départ. Je suis sûr qu'il se diversifiera avec le temps et qu'il favorisera la prospérité de nos jeunes.

M. Jerry Pickard (Essex-Kent): Monsieur le Président, permettez-moi de vous féliciter pour votre nomination à la présidence.

Je sais que vos électeurs de Stormont-Dundas sont très fiers des efforts que vous avez consacrés, depuis que vous êtes à la Chambre des communes, à leurs causes et à la solution de leurs problèmes. Je suis convaincu que vous poursuivrez ces efforts, mais vos électeurs peuvent maintenant être fiers aussi du leadership que vous exercerez à la Chambre. Je vous en félicite. Un député a plaisanté plus tôt en faisant allusion à la plus belle circonscription du pays. À mes yeux, la question ne se pose même pas; la plus belle est celle qui conquiert votre coeur et dans mon cas, c'est Essex-Kent. Essex-Kent est la circonscription la plus méridionale du Canada. Elle occupe le sud-ouest de l'Ontario, une région rurale et agricole, parsemée de petites villes.

(2125)

L'inquiétude est énorme dans les régions rurales du Canada; on y est très préoccupé par l'agriculture et les problèmes de cette industrie. En fait, c'est à peu près la seule industrie qui soit à la merci du climat et du temps qu'il fait, de forces extérieures que ni les gouvernements ni qui que ce soit ne peuvent maîtriser. Par conséquent, elle traverse parfois des périodes très difficiles, même si les agriculteurs disposent de la meilleure technologie possible. Même les meilleurs producteurs connaissent des périodes plus rudes.

La semaine dernière, nous avons eu du froid intense dans notre circonscription et une grande part de la production de fruits tendres est maintenant menacée à cause du gel. Voilà la réalité de l'agriculture; elle n'est pas protégée contre les éléments. Il faut donc que les gouvernements analysent très attentivement l'économie d'une grande part des régions rurales du Canada.

Il est certain que dans Essex-Kent, les gens sont dynamiques, ils travaillent fort, ils sont instruits, ils font de leur mieux pour réaliser tout leur potentiel et saisir toutes les occasions. Mais ils ont parfois besoin d'aide de la part du gouvernement. À mon avis, l'appui du gouvernement est une préoccupation constante des agriculteurs à l'heure actuelle et on devrait veiller à ce que leurs voix soient entendues et à ce qu'ils soient bien représentés.

Je crois que le gouvernement libéral fera droit à ces attentes et à celles qui ont été énoncées pendant la campagne électorale.

On a fait référence au livre rouge à d'innombrables reprises au Canada. Cet ouvrage n'est pas né spontanément en période d'élection. Sa publication a été précédée de trois années de consultations, de dur labeur, de tables rondes et d'efforts qui ont abouti à la politique et aux énoncés qu'il contient.

Nous avons tenté d'énoncer en 125 pages les préoccupations et bon nombre des solutions que les Canadiens attendaient d'un gouvernement libéral. Il ne fait aucun doute qu'à mesure que les Canadiens prenaient connaissance du contenu du livre rouge, ils étaient heureux des solutions proposées par le gouvernement libéral. C'est la raison pour laquelle le caucus libéral, qui forme le gouvernement, compte actuellement 176 députés.

Le discours du Trône reprend fidèlement le contenu du livre rouge mis au point pendant la campagne électorale. Il contient sans aucun doute l'ébauche de la voie que nous devons suivre. Le discours du Trône n'est pas un long énoncé politique de 50, 60 ou 80 pages, mais un document raisonnablement court, concis, qui reflète fidèlement le contenu du livre rouge et énonce les promesses et préoccupations formulées par le gouvernement libéral. Il est important que les gouvernements aillent de l'avant.

La principale préoccupation dont on ait parlé dans ma circonscription et dont les collègues à qui j'ai parlé d'un bout à l'autre du pays ont également pu prendre connaissance est la création d'emplois. Nous estimons que le gouvernement a pris la direction qui conduit à la création d'emplois. Le programme d'infrastructure national mis en place vise à permettre à chaque localité au Canada de recevoir une aide immédiate du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux et des gouvernements municipaux, afin de créer de nouveaux emplois dans leurs régions respectives.

Chaque député verra dans sa circonscription des programmes de mise en oeuvre de la nouvelle politique de création d'emplois. Je suis convaincu que lorsqu'on a publié dans ma circonscription, il y a deux jours, les montants qui seraient mis à la disposition des localités afin de stimuler et de lancer des programmes de création d'emplois, et de créer ultimement des emplois à plus long terme, la population a éprouvé beaucoup de satisfaction. La communication que j'ai reçue, il y a à peine deux jours, fait état d'une réaction extrêmement positive partout dans ma circonscription.

(2130)

Le Programme national d'apprentissage, qui doit aider les chômeurs à se recycler et à se perfectionner, est là. C'est un moyen stratégique pour que les Canadiens possèdent les compétences dont les entreprises ont besoin. Il est très important que les entreprises, les gouvernements et les travailleurs se donnent la main pour qu'il y ait une création d'emplois et du recyclage, car ce sont ces mêmes entreprises, gouvernements et travailleurs


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qui en bénéficieront; en fait, c'est tout le Canada qui en bénéficiera.

Voilà le genre de résultats que produisent les programmes nationaux d'apprentissage.

On créera un Service jeunesse pour faire entrer nos jeunes sur le marché du travail. Les jeunes, dont 19 p. 100 sont actuellement au chômage, doivent dénicher un premier emploi, ils doivent établir des curriculum vitae. Ils pourront y parvenir, grâce à ce Service jeunesse. Étant donné le taux de chômage élevé, il est merveilleux de penser qu'on leur donnera cette possibilité et de constater que le gouvernement adopte des lignes directrices pour garantir la mise sur pied du Service jeunesse.

Les entreprises ont toujours beaucoup de difficulté à obtenir des capitaux lorsque les temps sont durs. C'est une des plaintes que des entreprises m'ont formulées. Le gouvernement fera tout son possible pour garantir que des capitaux soient disponibles à des fins d'expansion, d'amélioration ainsi que d'exploitation courante.

Je pense qu'il est aussi important de se rendre compte qu'une des principales plaintes des entreprises, c'est la quantité énorme d'écritures administratives qui leur est imposée. En effet, la paperasse ne cesse d'augmenter. Notre gouvernement veut créer des programmes visant à réduire le fardeau administratif et à fournir, par tous les moyens possibles, du soutien aux entreprises. Son initiative réjouira tous les gens d'affaires du pays.

Enfin, il importe de mentionner que le fonds d'investissement canadien viendra en aide aux industries de pointe. Nous savons que les emplois de demain seront créés si nous appuyons le développement des technologies de pointe et allons de l'avant à mesure que de nouveaux horizons s'ouvrent.

La dette et le déficit inquètent les Canadiens de toutes les régions du pays. Le Parti réformiste a beaucoup parlé de la dette et du déficit. Le premier ministre ne s'est pas contenté d'en parler, il a pris des mesures concrètes et importantes qui touchent sa propre vie.

En décidant de voyager en Chevrolet plutôt qu'en limousine, il envoie un message très clair aux Canadiens. Le premier ministre a réduit son personnel de soutien, vendu l'Airbus, nommé un Cabinet réduit, entrepris par l'intermédiaire du ministre des Finances des consultations publiques sur le budget, et il parle maintenant de restructurer certaines mesures fiscales, de supprimer les services gouvernementaux qui font double emploi, d'annuler le contrat des hélicoptères, toutes mesures dont nous pouvons être très fiers. Ce sont des mesures qui vont améliorer la situation financière de notre pays et qui vont aussi redonner confiance aux Canadiens en leur montrant que notre gouvernement est déterminé à s'engager dans la bonne direction.

L'intégrité était une préoccupation souvent exprimée par mes électeurs. Il nous faudra certes réaliser une réforme parlementaire considérable pour arriver à rehausser la crédibilité du Parlement canadien. On n'améliore pas son image en faisant des promesses, mais en passant à l'action. Je crois que la nomination d'un conseiller chargé de l'éthique afin, sinon de mettre fin au démarchage, du moins d'assurer une plus grande transparence des rapports entre le gouvernement et les lobbyistes, est extrêmement importante.

Nous savons aussi qu'en élargissant les débats à la Chambre des communes, on donnera aux députés l'occasion de participer plus étroitement à l'élaboration des politiques gouvernementales et des lois. Cela permet aux députés de mieux faire valoir leur point de vue sur les dossiers de l'heure.

(2135)

Nous avons eu le débat sur le maintien de la paix, celui sur les missiles de croisière et nous aurons un débat prébudgétaire où les députés pourront exprimer leur point de vue avant qu'une motion soit présentée et que personne ne puisse plus y rien changer.

La modification des structures des comités est aussi très importante pour la Chambre des communes. Lorsque je pense aux suggestions qui ont été faites au sujet des finances publiques et du fonctionnement du gouvernement, et lorsque je pense aux défis auxquels est confronté le gouvernement, je crois que l'on peut s'attendre à des consultations publiques, que les députés auront davantage l'occasion d'exprimer leurs préoccupations, et que nous aurons un gouvernement beaucoup plus représentatif des Canadiens.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est): Monsieur le Président, j'ai écouté avec grand intérêt ce que le député avait à dire, particulièrement vers la fin de ses remarques.

Par votre intermédiaire, monsieur le Président, je veux féliciter le député de son discours. Je crois qu'il a parlé du fond de son coeur et avec beaucoup d'éloquence. C'est merveilleux d'être capable de parler à la Chambre sans devoir constamment se reporter à ses notes. Je reconnais que je n'en suis pas encore là.

Le député a dit quelque chose que j'aimerais clarifier dans mon esprit. Lorsqu'il a parlé d'améliorer son image, il a dit: «On améliore son image en passant à l'action.»

Je voudrais que le député me donne son opinion au sujet du mécanisme de révocation des députés proposé par notre caucus. Selon lui, comment pourrions-nous mettre en place un tel mécanisme?

M. Pickard: Monsieur le Président, cette remarque tombe à point nommé.

Les Canadiens n'ont pas gardé du gouvernement précédent le souvenir d'un gouvernement très ouvert. Nous n'avons certainement pas appuyé les politiques qui ont été proposées ici au fil des ans. Les Canadiens se sont sentis laissés pour compte. Même s'ils s'opposaient à de nombreux projets, le gouvernement n'a jamais accordé à leur opinion toute l'attention qu'elle méritait.

Contrairement à nos prédécesseurs, nous avons consulté les Canadiens pendant trois ans. Nous leur avons demandé ce qui les préoccupait. Nous avons essayé de faire des tables rondes et de l'ouverture d'esprit une règle de conduite. C'est pour cette raison que nous avons publié un livre rouge très concis.


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Il importe de souligner que le gouvernement élargit maintenant les débats à la Chambre des communes de manière à permettre aux députés de faire part des préoccupations de leurs électeurs avant que le projet de loi soit rédigé et qu'ils en soient saisis. C'est tout à fait nouveau de pouvoir exprimer ici les préoccupations de ses électeurs et de pouvoir préalablement faire ses observations.

Je ne suis pas en faveur des mesures préconisées par le Parti réformiste. Je crois aux orientations que nous préconisons, soit l'ouverture d'esprit et la consultation avant l'adoption de mesures. C'est extrêmement important. Cela confère au député plus de pouvoir à la Chambre et cela permet à ses électeurs d'exprimer leur opinion avant le dépôt d'un projet de loi.

M. Paul Forseth (New Westminster-Burnaby): Monsieur le Président, je ressens comme un privilège de prendre la parole pour la première fois à la Chambre pour y prononcer mon premier discours.

Je voudrais exprimer ma gratitude aux électeurs de New Westminster-Burnaby qui m'ont choisi le 25 octobre 1993 pour les représenter à la Chambre des communes. M. McVey, qui m'enseignait à l'école primaire, doit sourire aujourd'hui.

(2140)

New Westminster est l'ancienne capitale de la Colombie-Britannique. La ville a en fait reçu ce nom de la reine elle-même. On l'appelle maintenant avec fierté la ville royale. La ville de Burnaby constitue une grande agglomération urbaine, résidentielle, s'étalant entre Vancouver et New Westminster.

Établie sur les rives du fleuve Fraser, New Westminster a été témoin de beaucoup d'événements historiques, dont la ruée vers l'or de 1858 et le terrible incendie qui en a malheureusement détruit le centre-ville. Ces dernières années, elle est devenue un centre de transformation des produits forestiers. Avec la perspective de l'étalement urbain, l'importance géographique de New Westminster s'est trouvée éclipsée, mais maintenant, la revitalisation des quais et les liaisons par aérotrain suscitent une très forte croissance de la ville.

New Westminster est fière de son histoire, depuis les premiers jours de la province jusqu'à sa renaissance comme centre important en Colombie-Britannique. La ville de Burnaby a connu une formidable croissance surtout avec l'apparition de Metrotown, avec un mélange agréable de parcs, de centres de loisirs et de bibliothèques.

Je me réjouis de pouvoir dire que tandis qu'Ottawa est couverte de neige et grelotte aujourd'hui sous un froid polaire, les pelouses sont vertes dans ma circonscription et les fleurs commencent à apparaître. Même si nous n'avons pas vu tomber de neige cette année dans ma circonscription, je tiens à dire qu'il ne pleut pas tous les jours dans New Westminster-Burnaby.

Tout comme dans d'autres villes, les problèmes de la sécurité publique dans les rues et de l'exercice équitable du système judiciaire pour rendre justice aux victimes et imposer un juste châtiment aux délinquants continuent de couver.

Pour focaliser mes observations, je voulais commenter un paragraphe du discours du Trône où il est question de la sécurité publique et de la prévention du crime. En écoutant le discours du Trône, c'est avec un mélange de stupéfaction et d'incrédulité que j'ai constaté que les priorités étaient mal placées. Une question qui se pose partout au Canada est celle de la Loi sur les jeunes contrevenants. Pourtant, elle n'est même pas mentionnée dans le discours du Trône.

Dans New Westminster-Burnaby, on n'a pas réclamé à grands cris des modifications à la Loi sur les droits de la personne ou le rétablissement du programme de contestation judiciaire. Il a fallu que nous interrogions le ministre pour qu'il parle de la Loi sur les jeunes contrevenants. Ces dernières heures, le ministre de la Justice a indiqué une certaine orientation, mais sans grande précision.

Soyons clairs. Les gens de ma circonscription s'indignent des déficits, du gaspillage éhonté auquel se livre le gouvernement, du manque de leadership en matière financière. Mais s'il est une loi qui a mauvaise réputation, c'est bien la Loi sur les jeunes contrevenants.

Comme spécialiste du droit pénal, j'ai pris part aux consultations nationales qui ont abouti à la loi adoptée dans les derniers jours de l'ancien gouvernement libéral. Je me rappelle qu'en 1984 le gouvernement de l'époque parlait à profusion de l'efficacité du compromis réalisé avec les provinces. Mais je me rappelle aussi que d'autres faisaient valoir que c'était une loi viciée.

Le verdict de ma collectivité est tombé. La loi a très peu d'appuis. En fait, je ne connais aucun policier qui l'appuie. La loi est maintenant en vigueur depuis 10 ans et, pendant ce temps, bien peu l'ont défendue.

Cette loi viciée a été portée devant les tribunaux à maintes reprises pour y être clarifiée. Elle a également été modifiée à quelques reprises par les conservateurs. Cependant, la Loi sur les jeunes contrevenants reste encore la loi la plus abhorrée du public.

Le titre de la Loi sur les jeunes contrevenants dit à qui la loi s'adresse. En tant que professionnel à qui il revient d'appliquer la loi, j'estime que la Loi sur les jeunes contrevenants devrait s'appliquer aux jeunes contrevenants et non aux jeunes adultes.

Si le ministre de la Justice ne touche pas à la loi et à ses dispositions confuses, il pourrait au moins faire quelque chose pour changer l'attitude des gens face aux jeunes contrevenants. Au paragraphe 2(1), sous la définition de «jeune», il pourrait substituer le chiffre 10 au chiffre 12, et le chiffre 16 au chiffre 18. Deux chiffres seulement.


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Le gouvernement pourrait changer uniquement ces deux chiffres au début de la loi, ce qui modifierait fondamentalement l'administration de la justice au Canada. Mais je doute qu'il ait ce courage. Le discours du Trône montre que ses priorités sont mal placées. Dans ses réponses jusqu'à maintenant, le ministre indique qu'il ne ferait que certaines modifications de forme.

Cependant, la population n'a jamais accepté la portée de cette loi. Je reçois également des appels sur ce que le gouvernement veut vraiment dire quand il énonce dans le discours du Trône que «des modifications à la Loi canadienne sur les droits de la personne seront proposées». Il y a quelques articles de journaux, mais c'est à peu près tout.

(2145)

Où est le mandat politique pour ce faire? À ma connaissance, il n'en est nullement question dans l'infâme livre rouge des libéraux. D'où cela vient-il? De la gauche, peut-être? Où est le mandat politique qui permettrait de modifier fondamentalement la façon dont les Canadiens se définissent eux-mêmes? S'il est une bombe à retardement dans le discours du Trône, c'est bien celle-là.

Je demanderais au gouvernement de se montrer ouvert et de sonder la population à ce sujet. Les conséquences d'une telle mesure pour les politiques, Revenu Canada, les programmes de sécurité sociale, les compagnies d'assurances, les régimes de retraite et les conventions collectives sont énormes.

Le gouvernement veut peut-être garder ses intentions cachées jusqu'à la dernière minute. Je le mets au défi de nous les exposer dès maintenant et, si cela provoque une controverse nationale, eh bien soit. J'estime tout simplement que ce programme ne correspond pas du tout aux attentes de ma collectivité. Ça soulève la question de savoir quel groupe d'intérêt spécial a l'attention du gouvernement.

Au cours de notre campagne électorale, nous avons demandé aux gens ce qu'ils voulaient. Dans ma collectivité, il est clair que les gens veulent avant tout une réforme fiscale. Sur le plan judiciaire, ce qui les préoccupe surtout, c'est la Loi sur les jeunes contrevenants, et non la Loi canadienne sur les droits de la personne ou le Programme de contestation judiciaire.

Je rappelle au gouvernement qu'il doit faire attention à ce que les gens veulent, et non pas à ce qu'il pense que les gens ont besoin ou veulent. Plus précisément, les gens veulent que soit d'abord déposé avant tout un projet de loi modifiant la Loi sur les jeunes contrevenants, qui ne soit pas superficiel et qui réponde aux préoccupations que je viens d'exposer.

Je désire, par ailleurs, féliciter le gouvernement d'avoir permis un débat libre sur le maintien de la paix et sur les essais du missile de croisière. Je suis convaincu que les divers états d'esprit de la population étaient exprimés par les députés au grand dam des médias qui semblaient préférer l'ancienne version qui consistait à publier un énoncé de principe bien ficelé précisant la position gouvernementale du moment.

Le dossier de la réforme fiscale a été abordé et son étude se poursuit. Pour l'instant, on n'en est encore qu'au stade de la discussion, comme en témoigne la conduite de certains ministres qui n'ont pas encore compris le message sur les modalités d'utilisation des avions gouvernementaux. Il semble bien que le Code criminel fera l'objet d'un débat.

Il reste cependant la réforme parlementaire. Je le répète, je trouve encourageante l'ouverture d'esprit manifestée dans les débats engagés jusqu'ici. Néanmoins, je me demande si le premier ministre ne pourrait pas aller un peu plus loin en déclarant à la Chambre qu'aux yeux du gouvernement, le rejet d'une motion présentée par lui, y compris celui d'une mesure financière, ne constituera une expression de défiance que si le vote est immédiatement suivi de l'adoption d'une motion de censure en bonne et due forme.

Les Canadiens pourront enfin exaucer leurs voeux de se faire entendre sur des questions qui modifient en profondeur la façon dont ils se définissent. Le référendum a été le point tournant, mais le droit criminel constitue également un élément important.

Cependant, l'air frais dont nous avons un besoin encore plus grand que les 199 nouveaux députés, dont nous apprécions la présence à la Chambre des communes, c'est un changement d'attitude de la part d'un seul homme, le premier ministre. Il peut rassembler le courage qu'il faut pour nous propulser dans une nouvelle ère de démocratie. Comme le premier ministre souhaite laisser sa marque dans l'histoire du Canada, je crois que c'est sur ce plan-là qu'il peut y réussir.

Il ne s'agit pas là d'une question stratégique d'appui du caucus ou de préoccupations d'initiés. Il y a de nombreuses années, le premier ministre de la Grande-Bretagne avait fait valoir ces mêmes arguments dans sa répugnance à abolir l'esclavage. Ce changement était indiqué-autrefois comme aujourd'hui-, les gens étaient prêts à cela, mais le désir d'avoir un caucus uni et des magouilles parlementaires ont retardé pendant trop longtemps une mesure que ce pays réclamait. À mon avis, les Canadiens veulent que le premier ministre prenne cette mesure pour les libérer de l'esclavage de la solidarité du caucus. Cette seule mesure pourrait rendre la Chambre plus pertinente aux yeux de ceux qui nous y ont envoyés.

En conclusion, je m'engage à collaborer lors de l'examen des projets de loi et à en faire une critique constructive. Le plus souvent, je garderai pour moi mes opinions personnelles, je prêterai grande attention aux désirs de mes électeurs, et j'essaierai de représenter le spectre politique le plus vaste possible. Cette Chambre n'appartient pas aux parlementaires mais au peuple. Je m'engage à me comporter en fonction de ce fait car je suis convaincu qu'en fin de compte, si on dit l'entière vérité aux gens, un consensus émerge qui est plus raisonnable que tout ce qu'un technocrate aurait pu concevoir.

Enfin, lorsque le gouvernement présentera son programme législatif, qu'il laisse les gens s'exprimer et nous nous serons acquittés de notre devoir. Si le gouvernement tient compte des idées issues de la base, il ne peut se tromper. Prêchez par l'exemple et les sacrifices et vous aurez la nation derrière vous.

Le président suppléant (M. Kilger): J'aurais quelque chose à proposer à la Chambre. Nous allons bientôt ajourner, à 22 heures. Le député d'Elk Island aimerait prendre la parole. Si la

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Chambre consentait à renoncer aux cinq minutes réservées à la période des questions et observations après l'intervention du député de New Westminster-Burnaby, je pourrais immédiatement donner la parole au député d'Elk Island avant l'ajournement. Y a-t-il consentement?

(2150)

Des voix: D'accord.

M. Ken Epp (Elk Island): Monsieur le Président, conformément à l'usage, je vous félicite d'avoir accédé à la présidence et je tiens à vous assurer de mon respect et de ma collaboration. Je considère comme un grand privilège d'avoir été choisi par les électeurs d'Elk Island pour les servir au Parlement.

Comme l'ont fait avant moi la plupart des autres députés, je remercie les nombreuses personnes qui ont voté pour moi et qui m'ont aidé à obtenir cet honneur. Je tiens en particulier à remercier mon épouse Betty et ma famille pour les sacrifices dont ils ont fait preuve, pour leur soutien et leur confiance.

La circonscription d'Elk Island, située immédiatement à l'est d'Edmonton, en Alberta, est connue pour son parc national Elk Island, exploité par Parcs Canada.

La circonscription compte environ 85 000 habitants, dont une bonne partie vit à la campagne et sur les fermes. La population oeuvre dans les usines, l'industrie chimique et l'agriculture. On compte également de nombreuses petites sociétés et autres genres d'entreprises qui contribuent à l'activité économique et au bien-être de la communauté et du Canada. Une bonne partie de la population travaille aussi dans la ville d'Edmonton.

Je suis heureux et reconnaissant d'être Canadien. Je me souviens que lorsque j'étais jeune, mes parents et grands-parents, qui étaient immigrants, parlaient avec leurs amis des épreuves et de l'absence de libertés qui les avaient poussés à émigrer vers ce qu'est le Canada, pays d'espoir.

Plus récemment, mon fils Brent a travaillé comme bénévole dans une agence d'aide dans des pays comme le Soudan, le Kenya, la Somalie, la Bosnie et la Croatie, où il a aidé des personnes très éprouvées par la guerre. Nous avons été profondément émus lorsqu'il nous a parlé d'enfants, de jeunes, de femmes et d'hommes qui mouraient de faim ou subissaient d'intenses souffrances à cause du manque d'humanité et de l'agressivité d'aut

Je voudrais faire mon discours dans cette optique. J'entends profiter de la qualité de vie dont nous bénéficions au Canada pour travailler à faire en sorte que nous ne perdions pas les libertés et les privilèges que nous avons. J'espère aussi que nous pourrons continuer de partager notre richesse avec les nombreux infortunés de notre monde éprouvé, et que nous continuerons de les aider.

On aura peut-être l'impression que je me plains quand j'attire l'attention sur les lacunes des anciens gouvernements. C'est que je crains beaucoup que nous ne perdions tout ce que nous donne notre merveilleux pays à cause de la mauvaise gestion des gouvernements des 30 dernières années.

Il me semble indéniable que les politiques mises en oeuvre par les libéraux et les conservateurs dans le passé nous ont rendus esclaves de la dette et j'espère que le nouveau gouvernement aura la capacité et la volonté politiques de commencer à changer les choses.

Souvenons-nous qu'aucun pays au monde n'est autant favorisé que le Canada. Nous sommes les heureux héritiers d'un riche patrimoine de ressources naturelles: poissons, forêts, immenses champs de céréales, pétrole, gaz et eau en abondance, paysages spectaculaires qui attirent les touristes de partout vers notre magnifique pays, de Terre-Neuve à la Colombie-Britannique et jusque dans le Grand Nord.

Je pourrais continuer ainsi et ajouter en plus l'incommensurable richesse que constitue notre population. Nous sommes tous des immigrants, même ceux que nous appelons avec fierté les autochtones. À l'origine, les premières nations qui sont arrivées ici venaient d'une autre partie de la planète. Puis il y eut, bien sûr, les Français et les Anglais, mais aussi les Scandinaves, les Orientaux, les Européens et les Africains. La liste est trop longue, j'arrête ici. Au fil des ans, nous avons vécu ensemble dans l'harmonie et la coopération.

Monsieur le Président, vous ne pouvez savoir à quel point ça me blesse d'entendre parler ceux qui souhaitent la division de ce pays. Si le Canada n'est pas assez grand pour nous tous, comment pouvons-nous espérer que les autres nations du monde cessent de s'affronter et de se faire la guerre?

J'aimerais faire comprendre à mes amis qui siègent ici, près de moi, à quel point nous souhaitons qu'ils changent d'idée et ne quittent pas le Canada, à quel point nous aimerions qu'ils donnent encore une chance à ce remarquable pays, à quel point nous voulons qu'ils cessent de dire «le Canada et le Québec» et qu'ils disent plutôt «le Québec et les autres provinces du Canada».

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Pourraient-ils envisager de faire ce que nous avons fait dans l'Ouest? Durant des années et des années, la Constitution nous a coûté beaucoup plus d'argent qu'elle ne nous en a rapporté. Pourtant, durant toutes ces années, nous avons pratiqué ce que bon nombre d'entre nous ont appris au catéchisme, soit le partage et le rejet de l'égoïsme. Nous avons appris à donner sans attendre de récompense.

Par contre, je dois être honnête. Notre patience a souvent été mise à l'épreuve et nous avons bien hâte au jour où toutes les provinces seront capables de se débrouiller seules et de réduire leur dépendance envers les autres. C'est très encourageant de voir que d'autres pratiquent aussi la générosité et le partage. Nous souhaitons ardemment que tous les Canadiens et toutes les provinces vivent dans la paix et l'harmonie, en partenaires égaux au sein de la Confédération.

C'est volontairement que j'ai fait cette petite digression par rapport à la question de la dette. J'ai pensé que ce serait une bonne idée de souligner les avantages dont nous bénéficions, mais revenons au problème de la dette galopante. Comment est-il possible qu'avec autant de richesses naturelles et humaines, les gouvernements précédents aient réussi à nous enliser aussi profondément dans les dettes? Est-il même encore permis d'espérer?

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Le gouvernement propose, dans son discours du Trône, d'emprunter davantage pour créer de l'emploi. Il dira qu'il n'emprunte pas davantage, qu'il ne fait que dépenser l'argent qu'il a économisé en annulant l'achat d'hélicoptères ou autrement, mais le fait est qu'on prévoit encore un déficit de taille pour le prochain exercice. Cela veut dire que tout ce qu'on fera, on le fera avec de l'argent emprunté.

Il est évident que la population de notre grand pays, dans un esprit de sagesse collective, réclame de plus en plus que nous vivions selon nos moyens. J'aurais aimé savoir comment expliquer tout cela de façon tellement vibrante et convaincante que le gouvernement majoritaire d'en face en aurait modifié ses politiques fiscales, pour tenir compte des faits que je présente.

J'ai été élu en grande partie grâce à l'engagement qu'a pris le Parti réformiste de réduire le déficit et la dette. Dans ma circonscription, il y a cinq électeurs qui ont voté pour le programme de restrictions financières du Parti réformiste contre deux électeurs qui ont choisi le programme des libéraux, qui prévoit emprunter encore pour dépenser davantage. Même en Ontario, où le gouvernement a remporté un nombre écrasant de sièges, près de un million de personnes se sont prononcées en faveur des restrictions financières.

J'aurais été tellement satisfait si nous avions eu au moins un engagement de la part du gouvernement d'établir par écrit des buts réalistes et de limiter les dépenses. Il est peu probable qu'on puisse un jour atteindre un objectif quand on ne veut même pas en parler.

Au cours de la campagne, un fait m'a grandement impressionné. Nous n'avons pas le moindre mécanisme pour vraiment contrôler les dépenses. Nous n'avons aucun moyen de garantir que les souhaits de nos électeurs, des contribuables, sont inscrits dans l'ordre des travaux du gouvernement pour qu'on y donne suite. J'apprécie la nouvelle transparence du gouvernement. Il rompt avec la tradition en organisant des débats sur diverses questions, dont le budget, avant que les décisions ne soient prises.

Toutefois, nous n'aurons pas véritablement la liberté d'exprimer l'opinion des électeurs que nous représentons tant que nous n'aurons pas des votes libres, même sur le budget. Cela ne sera possible que lorsque l'on aura accepté que le rejet d'un projet de loi ne signifie pas automatiquement la défaite du gouvernement. Si l'on doit voter oui, même lorsqu'on est en désaccord, alors on n'a pas vraiment de choix.

Je demande respectueusement, mais sérieusement, au gouvernement qu'il donne aux députés des deux côtés, les représentants démocratiquement élus de la nation, la liberté de renvoyer le budget aux fonctionnaires s'il n'est pas assez bon. Qu'ils l'améliorent et qu'il ne soit adopté que lorsque la majorité des membres de cette assemblée l'auront trouvé acceptable en l'absence de toute pression.

Je termine mon discours par une promesse, non seulement à la Chambre, mais également aux habitants d'Elk Island qui m'ont élu et aux autres Canadiens qui s'attendent à ce que le Parlement fasse preuve de leadership. Je ferai tout mon possible pour contribuer à instaurer la responsabilité financière dans cet endroit. J'exercerai toute l'influence possible pour changer la façon dont fonctionne le Parlement, de sorte qu'il devienne un endroit meilleur et plus démocratique.

Nous aurons ainsi, je pense, un pays meilleur. Non seulement nous jouirons d'une plus grande prospérité et d'un mieux-être, mais nous aurons également la liberté et la capacité d'aider davantage les autres.

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il est 22 heures, conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 22 heures.)