FINA Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FINANCE
COMITÉ PERMANENT DES FINANCES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le lundi 27 octobre 1997
Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et je vous souhaite à tous un bon retour. Comme vous le savez, le Comité des finances tient ses consultations prébudgétaires conformément à l'article 83.1 du Règlement.
Nous avons sillonné le pays et obtenu les opinions de centaines de milliers de Canadiens. Nous avons reçu certaines propositions assez intéressantes et je suis certain que ce sera la même chose cet après-midi lorsque nous entendrons un certain nombre de témoins.
Nous commencerons par le représentant du Centre canadien de philanthropie, M. Patrick Johnston, président et directeur général. Monsieur Johnston, vous êtes le bienvenu.
M. Patrick Johnston (président et directeur général, Centre canadien de philanthropie): Merci beaucoup, monsieur le président. Je tiens à vous remercier de nous avoir invités une fois de plus. Nous avons rencontré le comité il y a un an à peine, mais je vois quelques nouveaux visages. Nous tenons à vous remercier de nous avoir invités et nous vous adressons nos voeux de succès.
J'ai remis au greffier un mémoire assez bref de même qu'un résumé d'une page de l'exposé que je vais vous faire. Ce sera assez court.
Tout d'abord, nous apprécions les mesures importantes incluses dans les trois derniers budgets fédéraux qui inciteront davantage de Canadiens, ou du moins certains d'entre eux, à donner davantage aux organismes de bienfaisance. Nous sommes conscients de l'importance d'un certain nombre de ces mesures. Nous tenons également à vous remercier. Souvent des organismes qui comparaissent devant vous peuvent vous sembler ingrats, mais je tiens à vous dire merci. Nous apprécions ce qui a été fait et nous en sommes reconnaissants.
Il y a toutefois deux questions qui restent en suspens depuis le budget fédéral de février 1997 et j'en parlerai brièvement. Il s'agit d'abord de la résolution 21.
Je crois que vous en avez entendu parler à des audiences antérieures et que d'autres témoins en ont fait mention. Nous tenons également à exprimer de sérieuses réserves au sujet de la résolution 21. Vous en avez sans doute entendu assez et certaines personnes autour de cette table peuvent fournir plus de précisions quant à cette résolution. Nous voulons simplement, au nom du Centre canadien de philanthropie, exprimer de sérieuses réserves et de sérieuses inquiétudes au sujet de cette mesure. Nous suggérons au comité de songer sérieusement à recommander le retrait de la résolution 21.
• 1535
La deuxième question en suspens est une mesure que nous étions
un certain nombre à appuyer, à savoir la réduction de l'impôt sur
les gains en capital pour les dons d'actifs donnant lieu à une
plus-value. Néanmoins, le budget de février comportait une
disposition de temporisation. Cette mesure expirera dans cinq ans,
mais avant qu'elle n'expire, le budget laisse entendre qu'une
analyse sera faite pour déterminer si elle s'est traduite par une
croissance des dons et si l'ensemble du secteur caritatif en a
bénéficié équitablement.
Pour le moment, la façon dont cette mesure sera évaluée soulève un certain nombre de questions. Comment saurons-nous s'il y a eu ou non une croissance des dons? Comment saurons-nous si tout le secteur caritatif en a profité équitablement?
Nous croyons important de clarifier cette question. Le secteur caritatif et le secteur bénévole doivent également savoir comment l'évaluation sera faite, qui en sera chargé et comment nous en connaîtrons les résultats. Nous espérons donc que le comité songera également à clarifier la question pour ce qui est de la clause de temporisation de cette disposition.
Nous apprécions vivement les mesures incluses dans le dernier budget et ceux d'avant, mais nous suggérons au comité d'envisager des améliorations supplémentaires, surtout en faveur des donateurs à revenu modeste.
La plupart des mesures prévues dans les budgets précédents vont surtout profiter aux Canadiens à revenu élevé. J'ignore ce que vous en pensez, mais je connais relativement peu de gens qui peuvent donner chaque année 20 p. 100, et encore moins 75 p. 100 de leur revenu annuel à des oeuvres de bienfaisance.
Cette mesure n'avantage donc qu'en principe les donateurs à revenu modeste. Elle avantage surtout les Canadiens qui se situent en haut de l'échelle des revenus. Nous apprécions ces dispositions, mais nous croyons qu'un grand nombre de contribuables à revenu modeste, de donateurs à revenu modeste pourraient, si on les y incitait davantage, faire des dons encore plus importants aux organismes de bienfaisance.
Une idée qui vous a été mentionnée, je crois, au cours de cette série d'audiences et qui a déjà été présentée par le passé, est celle de l'incitation à donner plus. Cette idée apparaissait dans plusieurs mémoires présentés au comité l'année dernière. Le comité l'a d'ailleurs appuyée dans son rapport de l'année dernière. C'est un concept assez simple. Il s'agit d'accorder des incitatifs fiscaux supplémentaires aux personnes qui ont donné davantage aux organismes de bienfaisance qu'elles ne l'avaient fait par le passé.
Nous savons que cela pose certains problèmes pratiques et que le ministère des Finances et Revenu Canada ont émis des réserves au sujet de cette mesure. Nous sommes prêts à en discuter avec les autorités de ces deux ministères pour voir comment résoudre certains de ces problèmes. Mais nous croyons important d'apporter des améliorations supplémentaires qui avantageront les donateurs à revenu modeste.
Pour terminer, j'ajouterais simplement qu'à notre avis des incitatifs accrus pour les donateurs à revenu modeste régleront directement plusieurs des questions que les membres du comité sont chargés de résoudre. Nous voyons là un investissement stratégique important qui sera très profitable dans la mesure où les incitatifs fiscaux supplémentaires aux donateurs à revenu modeste se traduiront par une croissance des dons. Cela veut dire que toutes les organisations communautaires du pays recevront plus d'argent et que la croissance de leurs dépenses se traduira par un plus grand nombre d'emplois dans les localités des quatre coins du Canada.
Pour conclure, j'inviterais simplement le comité à envisager, une fois de plus, des améliorations supplémentaires qui avantageront particulièrement les donateurs à revenu modeste.
Le président: Merci, monsieur Johnston.
Nous allons maintenant passer à la représentante de Fondations communautaires du Canada, Mme Monica Patten, directrice générale. Vous êtes la bienvenue.
Mme Monica Patten (directrice générale, Fondations communautaires du Canada): Merci. Je me réjouis d'être ici. Merci de votre invitation.
Pour commencer, je voudrais vous parler un peu de notre organisme. Je dois d'abord vous dire qu'il y a 80 fondations communautaires réparties dans les villes grandes et petites du pays, qui ont toutes pour rôle de constituer des fonds de dotation grâce à l'argent collecté auprès des donateurs, d'accorder des subventions pour tout un éventail d'activités et d'apporter leur leadership aux collectivités locales de diverses façons. Le montant total investi dans des fonds de dotation en 1996 se chiffrait à 800 millions de dollars dont les intérêts ont permis d'accorder des subventions d'une valeur de 45 millions de dollars à plus de 2 000 organismes de bienfaisance. Plus de 2 000 bénévoles ont mis leurs talents et leur énergie au service des principales fondations communautaires et des milliers de donateurs ont apporté des contributions financières très généreuses.
Fondations communautaires du Canada a bénéficié des changements récemment apportés aux incitatifs fiscaux à l'intention des donateurs. Nous nous joignons aux autres membres de notre secteur pour remercier le gouvernement des changements de ces dernières années. Par exemple, je sais que des nouveaux dons d'une valeur d'au moins 10 millions de dollars ont été faits, rien que ces dernières semaines, à la suite des dispositions mises en place l'an passé à l'égard des gains en capital. Je sais que plusieurs autres dons seront faits bientôt. Il faut continuer à favoriser les dons importants des Canadiens qui ont la chance d'être riches. En même temps, notre organisme partage avec les autres organismes du secteur caritatif le désir d'attirer un éventail plus vaste de donateurs, y compris les personnes qui disposent d'un revenu plus modeste.
Compte tenu des compressions gouvernementales importantes qui ont touché le secteur caritatif et bénévole et donc un grand nombre de Canadiens, il est plus important que jamais de favoriser les dons de charité. Comme je l'ai déjà dit, nous apprécions les mesures qui ont été prises dans ce but. Mais nous vous exhortons à retirer la résolution 21 qui faisait partie du budget de 1997, une résolution qui dissuade de faire don d'actions d'entreprises privées dont l'actif des donateurs est souvent constitué. Une autre proposition que nous vous recommandons d'adopter est la mise en place d'incitatifs pour inviter les donateurs à revenu modeste à donner davantage.
Fondations communautaires du Canada se joint à ses collègues, y compris ceux qui siègent avec nous à la table ronde du secteur bénévole pour vous demander d'accéder sérieusement et rapidement à ces deux demandes. Nous vous offrons notre assistance technique et nous comptons profiter des bonnes relations que nous avons déjà établies avec le ministère des Finances et Revenu Canada pour faire avancer les choses.
J'aimerais aborder sous un autre angle certaines des questions clés que le comité a posées. Tous les dons de charité que notre secteur peut recevoir ne compenseront pas les effets des compressions gouvernementales que nous connaissons tous depuis quelques années. Les demandes émanant des organismes de bienfaisance ont augmenté énormément au cours des années 90 et témoignent des efforts requis, non pas pour améliorer, mais simplement pour maintenir une certaine qualité de vie dans toutes les collectivités. Nous exhortons le gouvernement à rétablir son aide financière, en soutenant, sur le plan des programmes et de l'infrastructure, les organismes qui fournissent des services, en accordant directement des services et une aide aux enfants et aux familles, aux marginaux et aux nouveaux arrivants et en veillant à assurer une bonne protection sociale à tous les Canadiens.
Notre secteur, le secteur caritatif et bénévole dont nous sommes un élément dynamique, peut jouer un rôle utile en s'attaquant aux problèmes d'aujourd'hui et en assurant un avenir prometteur à tous les Canadiens. Nous pouvons apporter notre leadership en mobilisant les collectivités pour résoudre les problèmes. Nous pouvons lever des fonds pour répondre aux besoins des collectivités. Nous pouvons fournir des possibilités d'emploi, de stage, de mentorat, d'échange, de formation et de perfectionnement aux jeunes Canadiens. En fait, nous nous efforçons de faire toutes ces choses.
Mais nous ne pouvons pas les faire seuls. Nous devons coopérer avec vous et le secteur privé. Nous devons trouver des moyens de rencontrer régulièrement les décideurs politiques. Nous avons besoin d'incitatifs fiscaux supplémentaires pour inciter les gens à donner aux organismes de bienfaisance. Nous avons besoin d'aide sur le plan de l'infrastructure afin de pouvoir faire notre part pour la formation et l'emploi de la main-d'oeuvre canadienne. Si ces possibilités sont données à notre secteur, nous pourrons jouer un rôle dans l'édification du capital social, des compétences, de la confiance, de l'engagement et des connaissances qui nous conduiront vers un nouveau millénaire prospère.
• 1545
Je vous demande de recommander au ministre un budget qui
augmentera les incitatifs fiscaux pour les dons de charité, qui
annulera les compressions à l'égard de tous les programmes auxquels
les Canadiens tiennent beaucoup et qui établira des mesures pour
accroître la capacité du secteur bénévole, qui joue déjà un rôle
important, à recruter les Canadiens qui cherchent à acquérir les
compétences et les connaissances qui sont la clé de notre avenir.
Je vous remercie de m'avoir permis d'exprimer ces opinions.
Le président: Merci beaucoup, madame Patten.
Nous passons maintenant au représentant de la Canadian Association of Gift Planners, David Boyd-Thomas, directeur général. Vous êtes le bienvenu.
M. David Boyd-Thomas (directeur général, Canadian Association of Gift Planners): Merci beaucoup, monsieur le président et membres du Comité permanent des finances de la Chambre des communes.
Notre association regroupe plus de 700 professionnels en dons planifiés des quatre coins du pays qui travaillent pour des organismes de bienfaisance ou dans des professions connexes du droit successoral et du droit fiscal. Autrement dit, il s'agit d'assureurs-vie, de personnes qui offrent des rentes, de même que de comptables qui offrent leurs services aux Canadiens qui font des dons de charité à des organismes des diverses régions du pays. Notre association vient de célébrer son cinquième anniversaire. Elle est encore jeune, mais elle a déjà témoigné devant votre comité au cours des deux dernières années. Nous nous réjouissons particulièrement d'être invités à participer à ce processus d'élaboration de nouveaux incitatifs dont tous les Canadiens bénéficieront.
Comme les deux premiers témoins l'ont déjà mentionné et comme on vous l'a dit d'un bout à l'autre du pays, nous sommes ici cet après-midi pour soulever une question qui a causé du tort—et c'est sans doute le moins qu'on puisse dire—à notre profession et aux Canadiens. Il s'agit plus précisément de la résolution 21 déposée dans le cadre du budget fédéral du 18 février 1997. Elle a ensuite été présentée de nouveau à la Chambre des communes dans l'avant- projet de loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu que le ministère des Finances a publié le 31 juillet.
Lors des discussions qui ont suivi le budget, la Canadian Association of Gift Planners a travaillé avec votre comité, mais également avec des représentants du ministère des Finances au sujet de la résolution 21 et des modifications qui ont été déposées par la suite. Nous nous opposons fondamentalement à ces dispositions parce qu'elles proposent un régime fiscal injuste pour les dons de charité que les Canadiens font à des oeuvres de bienfaisance canadiennes et pour les nombreuses raisons que ma collègue de Fondations communautaires du Canada vient de vous énoncer. Nous voulons surtout parler des restrictions qui interdisent les dons d'actions et de valeurs non inscrites à la cote. Cela vise les Canadiens, et plus particulièrement les chefs d'entreprise, qui se sont bâti un avoir au Canada, qui ont apporté leur contribution à l'économie, mais dont l'actif est constitué d'actions et de titres de sociétés privées.
À l'heure actuelle, si ces Canadiens veulent faire un don de charité à l'un des organismes de bienfaisance enregistrés au Canada, les dispositions prévues par le ministère des Finances les en empêchent. Ce n'est certainement pas juste ou équitable étant donné que les Canadiens qui détiennent des titres inscrits à la cote bénéficient, ce dont nous nous réjouissons, de nouvelles concessions sous la forme d'une réduction du taux d'inclusion des gains en capital.
Encore une fois, cette proposition nous paraît dangereuse en ce sens qu'elle fait deux poids deux mesures. Je ne saurais trop souligner l'importance que cette question revêt pour tous nos membres du pays avec qui nous avons communiqué l'été dernier.
Nous avons consulté les organismes philanthropiques des diverses régions. Comme l'a décrit un de nos collègues, ces changements se traduisent par une «paralysie des donateurs». Les importants donateurs sont paralysés, car leurs conseillers ne peuvent pas leur recommander d'accorder ces dons.
Nous en avons constaté les effets à Centraide, à Toronto. Un don de 200 000 $ qui devait permettre de créer un fonds de dotation pour les organismes de services en ressources humaines de Toronto a été suspendu. Je viens d'apprendre, la semaine dernière, je crois, lorsque Centraide est allée s'informer, que ce don avait été totalement annulé.
En Alberta, le problème se pose également pour l'Université de Calgary. Un donateur a annulé un don qui devait doter une chaire en sciences humaines à l'Université de Calgary.
Une importante fondation caritative privée de Toronto doit actuellement réduire ses subventions aux petits organismes même si sa mission consiste à soutenir les oeuvres de bienfaisance qui ne reçoivent pas normalement l'aide de donateurs. Elle aussi connaît des problèmes parce que son fondateur, celui qui l'a créée il y a des années, ne peut plus apporter à sa fondation les actifs supplémentaires qui lui permettraient de faire ces dons.
• 1550
Comme vous le voyez, nous constatons de plus en plus de cas de
ce genre d'un bout à l'autre du pays et nous exhortons vivement le
comité à recommander dans son rapport de retirer cette disposition
qui a été présentée par le ministère des Finances et, si possible,
de tenir davantage de consultations avec le secteur caritatif.
Je terminerai en disant que, d'après nos discussions avec le ministère, nous connaissons certaines des raisons pour lesquelles cette disposition a été incluse. C'est parce que le gouvernement du Canada a eu connaissance de certains abus relativement à un très petit nombre de dons.
Le secteur caritatif est entièrement d'accord avec le gouvernement pour ce qui est de sa réglementation, et nous appliquons nous-mêmes des normes de déontologie et de rendement et nous procédons à notre autoévaluation. Nous nous engageons à travailler avec le ministère des Finances et tout autre service gouvernemental ainsi que les législateurs pour faciliter la mise en place de mesures justes et équitables pour régir ces pratiques.
C'est tout ce que j'avais à dire. Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Boyd-Thomas.
Nous recevons maintenant les représentants des Amputés de guerre du Canada, M. Cliff Chadderton, directeur général, et Brian Forbes, solliciteur. Vous êtes les bienvenus.
M. H. Clifford Chadderton (directeur général, Les Amputés de guerre du Canada): Merci, monsieur le président et membres du comité. Bien entendu, nous apprécions votre invitation et nous voudrions faire quelques observations du point de vue d'un organisme de charité établi de longue date, si je puis dire.
Je dois préciser que la première invitation que j'ai reçue nous demandait de formuler des observations sur le processus de réduction du déficit et des priorités, et j'avais donc préparé un mémoire sur ce sujet avant de partir pour Winnipeg. Quand je suis rentré ce matin, nous avions reçu une lettre de votre comité qui, selon moi, semblait modifier un peu l'objectif, car vous demandiez notre avis sur les facteurs de prudence pour le budget de 1998, les changements au régime fiscal et les possibilités d'emploi.
Bien entendu, nous sommes prêts à discuter de ces objectifs, mais je voudrais d'abord en profiter pour passer rapidement en revue les notes que j'avais préparées au départ.
Je soulignerai donc que notre opinion au sujet du processus de réduction du déficit et de la fixation des priorités du gouvernement se fonde sur nos antécédents et notre expérience au sein de la structure économique canadienne et que c'est là le point de vue d'un organisme caritatif qui est très actif depuis plus de 50 ans.
Je tiens également à bien préciser que les opinions que nous exprimons ne s'appliquent peut-être pas à d'autres organismes de bienfaisance canadiens du fait que nous entrons dans une catégorie quelque peu différente. Tout d'abord, notre action est unique puisque notre objectif est d'apporter de l'aide à trois groupes d'amputés qui sont les amputés de guerre, les amputés civils, c'est-à-dire les civils âgés de plus de 18 ans amputés pour une raison autre que la guerre, et les enfants amputés.
En ce qui concerne la politique du gouvernement en matière de réduction du déficit, elle a certainement eu des conséquences sur le fonctionnement de notre organisme. En effet, nous sommes toujours partis du principe que nos programmes et services sont destinés à répondre à des besoins auxquels aucun pouvoir public ne répond, ceux des Canadiens amputés. Nous avons constaté que la réduction récente du financement fédéral et provincial, et parfois même municipal, s'est traduite par une croissance de la demande de services. Je dois dire que nous sommes prêts à l'accepter et que nous avons pris longuement la peine d'expliquer notre position au public. Si notre bilan est révélateur, le public semble d'accord.
Le public semble d'accord pour dire que s'il existe une lacune—ou si le gouvernement se désiste—elle peut être comblée par un organisme de charité et les dons que nous avons reçus du public montrent certainement que celui-ci ne voit pas d'objection à donner de l'argent à un organisme qui comble cette lacune.
• 1555
Dans le cadre de notre champ de responsabilité, nous pouvons
dire si le gouvernement fédéral a lieu d'être vigilant quant aux
conséquences de ses politiques de dépenses sur la santé des
Canadiens. Il s'agit certainement d'une question très importante.
Nous pouvons tous constater certaines conséquences.
Nous avons parfois l'impression que les compressions des dépenses publiques, à n'importe quel niveau gouvernemental, ont des effets négatifs, mais d'un autre côté il y a aussi certains abus ou malentendus et nous croyons donc qu'il faut accepter ces compressions. Certaines d'entre elles s'attaquent à ce qu'on pourrait qualifier de gaspillage.
Bien entendu, la plupart des organismes de bienfaisance, ceux auxquels je suis associé, s'occupent des défavorisés et de personnes qui font les frais des décisions gouvernementales. Nous devons donc établir un juste équilibre entre le financement qui devrait être accordé par le gouvernement et celui qui devrait venir des organismes caritatifs.
En dernier lieu, personne ne peut vraiment se plaindre d'une réduction du gaspillage ou des dédoublements ou d'une augmentation de l'efficacité. Nous sommes entièrement d'accord sur le fait que le gouvernement doit équilibrer son budget, mais à long terme, si ce budget est équilibré, notre organisme et de nombreuses autres oeuvres de bienfaisance constateront que le public sera mieux en mesure de répondre à leurs appels.
Si vous me permettez d'aborder un autre sujet, qui n'est pas inscrit à l'ordre du jour, mais dont les gens s'attendent sans doute à ce que je parle, je surveille également ce qui se passe au gouvernement en ce qui concerne les Affaires des anciens combattants. Je passerai en revue très brièvement les dispositions prises par le ministère des Affaires des anciens combattants pour réduire ses dépenses.
Premièrement, tout cela a été fait en consultant les organismes qui représentent les anciens combattants.
L'examen du programme de médicaments a révélé que de nombreux anciens combattants se faisaient avoir. On leur prescrivait trop de médicaments, des médicaments dont ils n'avaient pas besoin. Le ministère devait donc intervenir pour dire si vous avez droit à ces médicaments et si vous en avez besoin, très bien, mais il y a des abus.
Même chose pour les soins dentaires et les soins de la vue pour lesquels il y a eu des abus.
Tous les organismes représentants les anciens combattants ont donc dû dire au ministère qu'ils reconnaissaient effectivement que certaines compressions s'imposaient absolument. Mais nous en avons également profité pour souligner que ces compressions ne devaient pas aller trop loin.
Croyez-le ou non, pour ce qui est des chaussures... Je voudrais citer au comité un exemple concret. Un médecin vous rédigeait une ordonnance et un ancien combattant qui avait des problèmes avec ses pieds pouvait aller s'acheter une paire d'Adidas à 300 $. Le ministère a mis un terme à ce genre d'excès, mais nous étions certainement d'accord.
Pour ce qui est de l'équipement spécial, des fauteuils élévateurs automoteurs, tout le matériel de ce genre...
Enfin, le Fonds du souvenir sert à financer les enterrements. Cela donnait lieu à des abus incroyables. Le ministère des Affaires des anciens combattants a consulté les organisations d'anciens combattants et a dit qu'un retour au bon sens s'imposait. Tout cela résulte non pas de résolutions renvoyées à votre comité, mais des efforts que déploie le gouvernement pour équilibrer le budget.
Je peux seulement parler au nom de deux groupes, les amputés de guerre et les anciens combattants et je peux dire que personne n'a été lésé, en tout cas jusqu'ici. On a mis fin à une bonne partie de ce qu'on pourrait appeler des abus ou des dépenses inutiles, mais je ne pense pas que qui que ce soit en ait été lésé.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Chadderton.
Nous passons maintenant au représentant de Centraide, son président, David Armour. Vous êtes le bienvenu.
M. David Armour (président, Centraide du Canada): Merci beaucoup. C'est avec plaisir que je suis de retour, cette année, devant votre comité. Il est très intéressant de revenir ici plusieurs années de suite et de constater des changements et des améliorations. Cela montre que le gouvernement fédéral est conscient du rôle crucial que le secteur bénévole joue dans la société et de l'importance des changements que nous connaissons.
Nous sommes littéralement en train de réécrire le contrat social qui définit le rôle du gouvernement, le rôle du secteur bénévole, le rôle du secteur privé, le rôle des syndicats dans l'édification d'une société démocratique, l'édification de collectivités soucieuses du bien-être de leurs membres et en fait, un mouvement vers la justice sociale, ce que nous visons tous. Nous nous rendons compte, comme vous-mêmes j'en suis sûr, que l'électeur est aussi le contribuable, le donateur, le bénévole et que nous travaillons tous pour la communauté canadienne.
Il est très agréable d'être ici. Je vous parle en tant que président de Centraide du Canada, un réseau de 122 bureaux locaux autonomes de Centraide qui, dans chaque collectivité, répond aux besoins, regroupe les ressources, lève des fonds et finance les services de santé et les services sociaux du secteur bénévole.
Je vous parle également à titre de membre de la table ronde du secteur bénévole. C'est une organisation qui a déjà témoigné devant votre comité par le passé et qui comprend dix regroupements nationaux dont le Centre canadien de philanthropie, Fondations communautaires du Canada, Centraide du Canada et d'autres organismes qui cherchent à renforcer le dialogue avec le gouvernement fédéral.
En réponse aux deux séries de questions qui nous ont été posées, je dirais d'abord que nous n'avons pas d'opinion à formuler quant au remboursement de la dette par opposition à l'augmentation des dépenses de programmes. Néanmoins, s'il est possible de consacrer de l'argent aux programmes, nous demandons énergiquement au gouvernement d'accroître le financement d'un certain nombre de programmes.
Nous vous parlons en tant que source conjointe de financement et non pas en tant que bénéficiaires. Avec les 260 millions de dollars que nous levons à l'échelle du pays, nous finançons 4 000 organismes membres, plus 10 000 autres à qui nous remettons les sommes versées à leur intention par les donateurs. Nous finançons donc ces organismes en même temps que le gouvernement.
De nombreux organismes ont besoin de fonds, certainement dans le secteur où nous travaillons, dans les services de santé et les services sociaux bénévoles, mais en tant que membres de la table ronde du secteur bénévole, je dirais que partout, en cette période de changements considérables, le bénévolat aide les Canadiens à rendre leurs collectivités plus humaines et à s'acquitter de leurs responsabilités.
Deuxièmement, en ce qui concerne le financement, vous nous aiderez en continuant à engager les ressources dont Revenu Canada a besoin pour participer avec nous à l'examen de l'imputabilité dans notre secteur. Comme vous le savez, nous avons créé une nouvelle commission, le groupe de la table ronde du secteur bénévole sur l'imputabilité et la gestion, qui est présidé par Ed Broadbent.
À nos yeux, il ne s'agit pas de resserrer la réglementation, mais plutôt d'examiner l'évolution de l'imputabilité compte tenu des changements, d'assurer une transparence et une reddition des comptes tant vis-à-vis du public que des donateurs et des bénévoles et c'est une chose que nous pouvons faire en collaboration avec Revenu Canada.
Pour ce qui est des investissements stratégiques et de la fiscalité, j'ajouterais une chose aux deux dernières suggestions que vous ont déjà faites un certain nombre de personnes. L'une d'elles consiste à favoriser la philanthropie de la part des sociétés privées, par tous les moyens possibles et l'une des solutions que vous avez déjà entendues consiste à retirer la résolution 21 afin de la soumettre à un examen plus approfondi.
La deuxième consiste à mettre en place le crédit incitatif que notre groupe a proposé l'année dernière. Nous savons que cela soulève des préoccupations et ces propositions posent certainement des problèmes administratifs, mais nous sommes prêts à chercher un moyen d'y remédier ou même de formuler une autre proposition qui poursuivra le même but et répondra aux mêmes besoins.
La troisième solution, si je puis en glisser une troisième, serait de continuer à chercher des moyens d'augmenter les dons modestes faits par les donateurs à revenu modeste. Il est important d'accroître les dons à tous les niveaux. Oui, cela peut se révéler coûteux pour le gouvernement fédéral qui renoncera à des recettes fiscales, mais si nous pouvons inciter le donateur moyen à accroître son don moyen, cela se traduira par une participation beaucoup plus importante des Canadiens dans le secteur bénévole.
Comme nous jugeons très important d'accroître notre capacité à faire face aux changements, nous abordons la question des crédits d'impôt pour dons de charité dans cette perspective. Que peut faire le gouvernement fédéral en plus de financer directement certains éléments du secteur caritatif pour accroître notre capacité d'adaptation?
• 1605
Sur ce dernier point, quant à savoir ce que le gouvernement
peut faire pour que l'économie offre un vaste éventail de
possibilités d'emplois aux Canadiens, je tiens à souligner qu'il ne
faut pas oublier le secteur caritatif. Nous représentons un élément
important de l'économie. Nous représentons une composante
importante de la population active et nous représentons également
un grand potentiel de création d'emplois.
Quand le gouvernement fédéral examine la création d'emplois dans le secteur privé et dans le secteur public, lorsqu'il considère la formation, la recherche et la technologie, il ne doit pas oublier le secteur bénévole. Nous pouvons jouer un rôle très important. Tout comme nous collaborons avec les syndicats, le patronat, la petite entreprise et le gouvernement, nous pouvons également être des partenaires sur le plan de la création d'emplois.
Je sais qu'au cours de l'année à venir un certain nombre d'organismes viendront soumettre au gouvernement fédéral des propositions précises pour la création d'emplois, mais je dirais simplement qu'il ne faut pas considérer la création d'emplois dans un secteur plutôt que dans un autre. Cela doit viser tous les secteurs.
Merci beaucoup.
Le président: Merci, monsieur Armour.
Nous allons maintenant passer au président de la Conference for Advanced Life Underwriters, M. William J. Strain. Vous êtes le bienvenu.
M. William J. Strain (président, Imposition, Conference for Advanced Life Underwriters): Merci, monsieur le président. Bon après-midi à tous. C'est pour moi un plaisir que de me joindre à vous.
Notre organisme est affilié à l'Association des assureurs-vie du Canada. L'AAVC est une association sans but lucratif constituée en 1906 qui a établi un programme de perfectionnement professionnel et un programme de déontologie très complets à l'intention de ses 17 500 membres répartis dans l'ensemble du pays. Ses membres vendent de l'assurance de personnes, des rentes, des régimes de retraite, des régimes enregistrés d'épargne-retraite et des FERR.
Conference for Advanced Life Underwriting, CALU, a été constituée en 1991 pour offrir des services aux membres de l'AAVC qui se spécialisent dans la planification financière personnelle, la planification de la succession d'entreprise et la planification successorale et dont la clientèle est constituée en grande partie de propriétaires d'entreprises familiales et d'actionnaires de sociétés privées. Les membres de CALU travaillent en collaboration étroite avec leurs clients et les oeuvres caritatives publiques et privées pour organiser et financer leurs activités philanthropiques.
C'est à ce titre que nous venons aujourd'hui appuyer ceux qui ont exprimé des préoccupations, surtout au sujet des répercussions de la résolution 21. C'est en grande partie grâce aux efforts déployés par votre comité que le gouvernement a adopté, dans ses budgets de 1996 et 1997, des initiatives visant à inciter tous les Canadiens à faire des dons de charité. La communauté caritative et les membres de CALU apprécient certainement ces initiatives.
Néanmoins, les dispositions anti-évitement proposées dans la résolution 21 du budget de 1997 et maintenant révisées dans l'avant-projet de loi que le gouvernement a publié le 31 juillet vont dans le sens opposé. Si elles sont adoptées, elles élimineront pratiquement tous les dons de titres de sociétés privées. Ces nouvelles règles vont sérieusement compromettre la capacité des organismes de bienfaisance publics et privés de lever les capitaux dont on a désespérément besoin pour établir et maintenir des programmes sociaux et culturels à long terme qui seront bénéfiques pour tous les Canadiens.
Nous comprenons, nous aussi, dans quel but le gouvernement propose des dispositions anti-évitement, mais si ces dispositions sont adoptées sous leur forme actuelle, elles élimineront tout allégement fiscal pour les dons de titres de société privée qui sont faits à des organismes de bienfaisance publics ou privés si le donateur est actionnaire de la société et s'il a des liens de dépendance avec celle-ci. De plus, ces dispositions seront punitives dans bien des cas du fait qu'elles imposeront un fardeau fiscal très lourd au donateur qui décidera de faire don de titres à un organisme caritatif. Le fait de refuser tout allégement fiscal pour les dons de titres de sociétés privées qui ont un lien de dépendance avec le donateur, quelle que soit la qualité du titre ou sa valeur constitue, à notre avis, une réaction excessive face au risque d'abus.
Pour vous donner un exemple des répercussions que ces dispositions pourraient avoir, contrairement à celles qui s'appliquent aux actions de sociétés publiques, nous avons inclus dans la documentation que nous avons remise aujourd'hui au comité un bref exemple montrant la différence de traitement. Lorsque les membres du comité auront l'occasion d'y jeter un coup d'oeil, ils verront que l'exemple porte sur le don d'une action d'une valeur de 1 million de dollars qui coûte au donateur 0,5 million. S'il s'agit d'une action d'une société privée qui est donnée à un organisme de charité public ou privé, le donateur devra un peu moins de 200 000 $ d'impôt. Par contre, si le donateur est actionnaire d'une société publique et s'il fait don d'actions d'une société publique, il bénéficiera d'un dégrèvement d'impôt d'un peu plus de 400 000 $, ce qui représente une différence énorme.
• 1610
À notre avis, un processus d'évaluation crédible représente la
solution pour résoudre le problème que pose l'octroi d'un
allégement d'impôt pour les dons d'actions de sociétés privées.
C'est pourquoi en coopération avec la table ronde du secteur
bénévole, la Canadian Association of Gift Planners et divers autres
organismes, nous avons proposé au ministère des Finances un
processus d'évaluation comportant quatre éléments qui apportera au
gouvernement les garanties dont il a besoin pour s'assurer que des
crédits d'impôt sont accordés uniquement pour la valeur réelle des
dons faits aux organismes de bienfaisance. Le Canadian Institute of
Business Valuators a examiné ces propositions et les a approuvées
comme il l'a fait savoir au ministère des Finances.
Le secteur caritatif a besoin de capitaux qui produiront des revenus stables et prévisibles pour soutenir ses programmes à long terme. Les placements à long terme dans des titres de sociétés privées qui soutiennent un organisme de bienfaisance, directement ou indirectement par l'entremise de leurs actionnaires, sont l'instrument de financement idéal à cette fin. Nous exhortons le comité à recommander au ministre des Finances d'annuler les règles anti-évitement proposées dans la résolution 21.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Strain.
Nous allons maintenant passer au dernier témoignage de la journée, celui de M. Drache, de Drache, Burke-Robertson, Buchmayer.
Monsieur, vous êtes le bienvenu.
M. Arthur Drache (C.R., Drache, Burke-Robertson, Buchmayer): Merci, monsieur le président. Je dois dire que je représente également la section caritative de l'Association du Barreau canadien qui m'a demandé, il y a quelques semaines, de présenter un mémoire à votre comité.
Je suis d'accord avec à peu près tout ce que j'ai entendu jusqu'ici aujourd'hui au sujet de la résolution 21. J'en parlerai dans une optique assez particulière en ce sens que, lorsque je travaillais au ministère des Finances, c'est moi qui ai rédigé le projet de loi concernant l'imposition des organismes de bienfaisance. Je ne voudrais pas que qui que ce soit ici pense que ces problèmes viennent d'être inventés. Nous nous sommes penchés sur ce qu'on appelle maintenant les auto-prêts, les actions de sociétés privées, les placements non admissibles, et les questions de cette nature.
Nous nous sommes penchés sur toutes ces questions à l'époque— c'était vers 1975-1976—et nous avons alors décidé que le plus important était d'assurer un mouvement de revenus premièrement vers les fondations philanthropiques et, deuxièmement, de ces fondations vers les bénéficiaires. Voilà pourquoi nous avons mis au point une formule suivant laquelle chaque année, un montant minimum de revenus doit être transféré des fondations caritatives vers les oeuvres de bienfaisance. Et voilà pourquoi nous avons ajouté à la loi l'article 189 disant que lorsqu'un don d'actions ou de créances d'une société privée est fait à un organisme de bienfaisance, qu'il s'agisse d'une fondation privée ou publique, la société émettrice des actions ou de la créance doit faire un paiement minimum à la fondation.
Personnellement, je crois que rien n'a changé si ce n'est que, du jour au lendemain, le ministère des Finances a décidé, sans consulter qui que ce soit, que le critère serait le capital. Ce n'est pas souhaitable. Personnellement, je pense que cette approche a des effets destructeurs sur les organismes caritatifs, sur tous ceux qui comptent sur des dons importants. Il serait plus logique de réexaminer l'article 189 qui exige que certains niveaux de paiement soient faits aux détenteurs d'actions et de créances de sociétés privées et peut-être de le renforcer si vous craignez que la valeur réelle des dons soit trop faible.
• 1615
Wolfe Goodman, l'un des avocats les plus éminents du pays, du
cabinet Goodman et Carr, de Toronto, a préparé une proposition très
détaillée sur le sujet et l'a envoyée au ministère des Finances. Il
a reçu, en retour, une lettre brusque, une sorte de lettre
circulaire où on lui disait merci, mais en refusant de l'écouter.
Telle a été la réaction que nous avons obtenue, pour la plupart, du
ministère des Finances qui a été poli, mais qui n'a rien voulu
entendre.
À part le fait que la résolution 21 est mauvaise, selon moi, si nous partons du principe qu'elle sera maintenue de toute façon, il y a au moins deux choses qu'il faut examiner. La première est la question des sociétés de portefeuille. Une proportion importante des actions de sociétés publiques sont détenues par l'entremise de sociétés privées.
Récemment, j'ai été en contact avec une personne qui a l'intention de faire un don très important. Ce monsieur possède 27 p. 100 des actions d'une société publique inscrite à la Bourse de Toronto. La totalité de ces actions sont détenues dans une société privée. C'est ainsi que les gens détiennent des actions de sociétés publiques. C'est ce qui se passe en réalité. Ce monsieur s'aperçoit que même s'il désire faire don d'actions d'une société publique, comme ces actions sont détenues dans sa société de portefeuille, il lui est impossible de le faire. C'est donc un problème qu'il faut résoudre.
D'autre part, ce à quoi Bill Strain a fait allusion et qui, il faut bien le dire, est absolument révoltant est que si vous donnez des actions, vous n'avez pas droit à une déduction à moins que ces actions ne soient vendues dans les cinq ans. Et si elles ne sont pas vendues—et le donateur n'a pas son mot à dire à ce sujet—vous payez l'impôt sur les gains en capital.
Cela me paraît tout à fait révoltant. Si je n'obtiens pas de déduction, il faudrait au moins changer les règles afin que je n'aie pas à payer l'impôt sur les gains en capital sur des actions que j'ai données. Mais c'est précisément ce que prévoit l'avant- projet de loi.
Je voudrais aborder très brièvement une ou deux autres questions. Je suis d'accord avec ceux qui ont dit qu'il fallait faire quelque chose pour le petit donateur. J'ai toujours pensé que le crédit incitatif était une bonne idée. Les explications données par le ministère des Finances et Revenu Canada quant à savoir que c'est trop difficile à administrer, et ainsi de suite, n'ont aucune crédibilité à mes yeux. Si vous voulez le faire, faites-le, un point c'est tout. Ne dites pas que c'est trop difficile.
Si l'on craint que les gens ne donnent rien pendant plusieurs années et fassent ensuite un don important, ce problème regarde le secteur caritatif. Si ce dernier est prêt à courir ce risque, le gouvernement devrait être disposé à en faire autant.
Chaque année, au moment des déclarations d'impôt, lorsque quelqu'un conseille aux conjoints de regrouper leurs dons et de réclamer une seule déduction afin d'atteindre le seuil fixé, personne ne proteste. C'est ainsi que cela se passe.
Les objections émises par le ministère des Finances et Revenu Canada au sujet du crédit incitatif ne sont donc pas très convaincantes à mes yeux, étant donné que je me suis déjà penché sur ce genre de questions par le passé, que j'ai participé à la rédaction de la loi, etc.
J'ai un document d'une page que j'ai remis au greffier. Il y a quatre questions techniques que je voudrais mentionner, une à la fois.
Tout d'abord, il faudrait éliminer la retenue d'impôt sur les dons provenant des REER et des FERR. Cette question a été signalée à l'attention du comité l'année dernière.
Je pense que pour simplifier les choses, il faudrait fixer un taux officiel d'actualisation pour les fiducies de rentes avec réversion sur une oeuvre de bienfaisance et les rentes aux fins de bienfaisance. Cette question a été portée à l'attention du comité l'année dernière.
• 1620
Il faudrait modifier la loi pour permettre aux fondations
publiques d'émettre des rentes aux fins de bienfaisance. Cela pose
un problème technique. Je crois qu'il faudrait modifier la loi.
Une question qui n'a pas encore été soulevée, mais à laquelle je tiens beaucoup, c'est que les appels concernant l'inscription et la radiation des organismes de bienfaisance devraient être entendus par la Cour canadienne de l'impôt. À l'heure actuelle, c'est la Cour d'appel fédérale qui entend le premier appel. Il est impossible d'interjeter appel contre un refus d'inscription ou une radiation à moins de disposer de 50 000 $ à 100 000 $ pour payer les frais d'avocat alors que tous les autres contribuables ont le droit d'être entendus par la Cour de l'impôt. C'est une chose que le comité pourrait examiner.
Une dernière question exige que nous fassions un peu d'histoire, mais c'est un sujet qui me tient à coeur. Je crois que nous devrions examiner quels sont les organismes qui obtiennent un traitement fiscal préférentiel. Cet examen avait été promis par le ministre des Finances, M. Benson, dans son budget de 1971. Cela remonte à 26 ans et rien ne s'est passé. Peut-être est-il temps que quelqu'un réexamine ce dossier.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Drache.
Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par M. Harris.
M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins pour leurs excellents exposés d'aujourd'hui. Ils étaient tout à fait compréhensibles.
J'ai une question à poser. Mais je voudrais d'abord faire une observation.
Je suis un ardent partisan du bénévolat et des levées de fonds dans le secteur privé. Je crois que les organismes de bienfaisance ont un rôle énorme à jouer dans les collectivités, d'autant plus que le gouvernement a dû se retirer en grande partie pour assainir ses propres finances. Je sais qu'un grand nombre de mes collègues ont travaillé auprès d'organismes de bienfaisance et le font encore et qu'ils se rendent compte de leur importance. Le rôle du gouvernement consiste, selon moi, à créer un climat qui amènera les gens à donner en leur accordant des incitatifs fiscaux de même qu'en instaurant une bonne réglementation.
Aujourd'hui, vous nous avez fait à peu près tous les mêmes recommandations à l'égard des dons de charité. Si le gouvernement suivait la plupart de vos recommandations en ce qui concerne la résolution 21, les incitatifs fiscaux pour les donateurs à revenu modeste, etc., de quelle façon cela changerait-il votre capacité de lever des fonds? Verriez-vous toutes sortes de nouvelles possibilités s'ouvrir à vous? Les résultats seraient-ils spectaculaires si le gouvernement prenait certaines des mesures dont vous avez parlé aujourd'hui?
Le président: Monsieur Armour, de Centraide.
M. David Armour: Comme vous avez abordé la question dans le contexte des compressions budgétaires... Les compressions sont tellement considérables à tous les niveaux qu'il ne s'agit pas de compenser, mais d'accroître la capacité de notre secteur et de lui permettre de mieux remplir son rôle. Comme on le dit dans la tradition juive, si vous sauvez ne serait-ce qu'une seule vie, c'est comme si vous aviez sauvé le monde entier. Chaque petite chose que nous pouvons faire a des effets positifs. Chaque donateur supplémentaire que nous pouvons inciter à donner, chaque bénévole de plus que nous pourrons recruter sera utile.
Chacune de ces mesures, en tout cas celles qui augmenteront le nombre de donateurs moyens... Si nous trouvions un moyen spectaculaire d'accroître le nombre de donateurs à revenu modeste, que tous les organismes de bienfaisance pourraient utiliser et faire connaître, le niveau général des dons s'en trouverait augmenté. Des mesures plus précises s'adressant aux donateurs importants se répercuteraient sur certains organismes plus que sur d'autres.
Nous tenons à dire aujourd'hui que nous apprécions ce qui a été fait depuis trois ans, mais il ne faut pas s'arrêter là. Continuons ensemble, cherchons des solutions s'adressant au public canadien... Nous pouvons augmenter les dons de charité par tous les moyens possibles.
• 1625
Je pense à ce qu'a dit Patrick, au sujet de la mesure qui
comporte une disposition de temporisation. Cherchons ensemble des
moyens d'évaluer l'efficacité de ces méthodes. Il se peut que des
méthodes que nous mettons au point avec les meilleures intentions
du monde se révèlent inefficaces quelques années plus tard. Alors
trouvons-en d'autres. Cela exige un travail continu.
Le président: Merci, monsieur Armour.
Monsieur Riis.
M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): David, vous avez mentionné le secteur bénévole à propos des emplois. C'est un concept intéressant. Pourriez-vous nous en dire un peu plus et nous parler des moyens d'encourager le donateur modeste. Avez-vous des suggestions particulières à formuler?
D'autre part, pourriez-vous nous en dire plus sur la recommandation Benson, s'il vous plaît.
M. David Armour: Certainement.
Pour ce qui est des emplois dans le secteur bénévole, ce secteur représente une proportion assez importante de la population active du Canada. Si vous comptez les hôpitaux et les universités du secteur caritatif, cela représente une proportion importante, à peu près 9 p. 100, de la main-d'oeuvre.
Si nous prenons l'évolution de la société, le fait que la création d'emplois se fait non plus dans les grandes entreprises de fabrication, mais dans des petites entreprises, 50 p. 100 des organismes du secteur bénévole sont de petite taille et ont un budget inférieur à 50 000 $. Il y a là une capacité formidable de création d'emplois. Les grandes organisations ont des moyens de formation et de recherche. Nous voudrions que la technologie ne soit pas orientée vers le secteur privé comme tel, mais plutôt vers les emplois tant du secteur privé que du secteur bénévole. Tout ce que le gouvernement peut faire pour créer des emplois devrait également s'appliquer à nous.
Pour ce qui est de savoir quelles suggestions précises nous pouvons faire, nous y travaillons. Nous allons présenter des propositions précises aux divers niveaux de gouvernement, en collaboration avec le Regroupement des organisations nationales bénévoles, Fondations communautaires, le Centre de philanthropie et Centraide. Un certain nombre d'entre nous prépare actuellement des propositions pour la création d'emplois.
Mais en attendant, chaque fois que vous examinez ces questions, faites-nous participer. En effet, il ressort de ce que dit Drucker ou de tout ouvrage sur l'évolution de l'économie et du marché du travail, que l'action s'oriente vers le secteur caritatif. C'est là qu'est l'action, c'est là que l'on résout les problèmes de la collectivité et qu'on s'efforce d'améliorer les conditions de vie.
Il y a des tas d'exemples de gens qui ont perdu leur emploi et qui font du bénévolat, qui reçoivent une formation, qui ont accès à des organismes auxquels ils n'auraient pas accès autrement, par l'entremise du secteur bénévole et qui deviennent ainsi beaucoup plus employables dans la nouvelle économie. Mais nous pouvons également faire les choses de façon plus officielle.
Merci de votre question.
M. Arthur Drache: En ce qui concerne la proposition Benson, elle figurait dans l'exposé budgétaire de juin 1971, celui qui annonçait les réformes fiscales de 1972 qui faisaient suite au rapport Carter. À l'époque, les seules dispositions concernant les organismes de bienfaisance étaient que le plafond des dons passait de 10 p. 100 du revenu à 20 p. 100 du revenu.
Le gouvernement lançait alors le concept de l'association athlétique amateur enregistrée. Il se préparait pour les Jeux olympiques de 1976 et il voulait trouver un moyen de financer le sport amateur au plus haut niveau. Le sport amateur n'étant pas une activité philanthropique, le gouvernement a instauré une disposition particulière.
À l'époque, M. Benson a dit reconnaître que la définition classique de la philanthropie, celle dont Revenu Canada s'était servi pour l'enregistrement des organismes de bienfaisance, était sans doute tout à fait périmée—c'était en 1971—et il promettait que le gouvernement adapterait cette définition aux années 70. Nous sommes maintenant à la fin des années 90 et rien ne s'est passé.
Il n'y a eu aucun changement sur ce plan, mais vous avez des organismes qui se livrent à des activités généralement jugées utiles et souhaitables pour la société, mais qui ne sont toujours pas reconnus comme des organismes de bienfaisance.
Par exemple, vous venez de soulever la question de la création d'emplois. Aux États-Unis, un domaine important, celui du développement économique communautaire, consiste à investir des fonds de démarrage dans des collectivités à faible revenu dans l'espoir de produire des entreprises privées, davantage d'emplois, etc., dans les régions où le taux de chômage est élevé. À l'heure actuelle, Revenu Canada ne considère pas qu'il s'agit d'une activité caritative, même si l'ensemble de la société pense probablement que c'est une bonne idée.
• 1630
S'il ne s'agit pas d'activités caritatives, les fondations ne
peuvent pas donner d'argent aux organismes qui s'y livrent. Mais la
situation est bizarre. Une importante fondation américaine investit
20 millions de dollars dans un projet de Winnipeg pour promouvoir
le développement économique communautaire, mais aucun particulier
ou organisme de bienfaisance canadien ne peut contribuer à ce
projet, car c'est considéré comme une activité caritative aux
États-Unis, mais pas au Canada.
On parle de la définition de la bienfaisance. Au lieu de parler d'oeuvres de bienfaisance, je préfère parler d'organismes qui reçoivent un traitement fiscal préférentiel, car c'est une terminologie lourde de sens. Mais c'est un sujet qu'il faudrait sérieusement examiner au niveau fédéral.
Le président: Merci, monsieur Drache.
Monsieur Jones.
M. Jim Jones (Markham, PC): J'ai seulement une ou deux questions à poser. Tout d'abord, avez-vous de la difficulté à recruter des bénévoles et croyez-vous nécessaire d'accorder des crédits d'impôt aux bénévoles?
Je crois qu'Arthur a soulevé la question des dons en nature— je ne sais pas exactement de quelle nature—à des organismes de bienfaisance en disant que s'ils ne sont pas vendus au bout de cinq ans, le donateur est assujetti à l'impôt sur les gains en capital. Pourriez-vous fournir d'autres précisions?
M. Arthur Drache: Si vous me permettez de commencer par cette dernière question, tout cela découle de la résolution 21. Quand l'avant-projet de loi a été publié à la fin juillet, il apportait certaines modifications à la Loi de l'impôt sur le revenu. Le gouvernement disait que si vous donnez à un organisme de bienfaisance des actions d'une société privée—celles que vous n'avez pas le droit de donner—vous obtenez une déduction uniquement lorsque l'organisme de bienfaisance les vend, et il faut que ce soit fait dans les cinq ans suivant le don. Voilà d'où vient la question des cinq ans.
Selon la règle générale de la Loi de l'impôt sur le revenu, si vous donnez un bien qui a augmenté de valeur, que ce soit à votre enfant, à une oeuvre ou à qui que ce soit, ce bien est réputé avoir été vendu à sa juste valeur marchande et fait donc l'objet d'un gain en capital. L'avant-projet de loi porte que l'impôt sur ce gain en capital sera différé jusqu'à ce que l'oeuvre de bienfaisance se défasse du don.
Mais si l'organisme de bienfaisance ne vend pas ces actions au cours de la période de cinq ans qui été fixée, il se passe deux choses. Premièrement, vous perdez toute chance d'obtenir un allégement fiscal à l'égard de ce don, ce qui constitue clairement la politique du ministère des Finances. Et deuxièmement, le bien est réputé avoir été vendu à sa juste valeur marchande. La période maximum qui vous est accordée est de cinq ans. Revenu Canada essaie de la faire concorder avec le don. Si l'actif n'est jamais vendu, la disposition entre en jeu et on considère que vous avez vendu ces actions à leur juste valeur marchande.
Au bout de cinq ans, si l'organisme de bienfaisance ne s'est pas défait des actions, vous n'avez droit à aucune déduction d'impôt et par-dessus le marché on considère que vous les avez cédées à leur juste valeur marchande, et non pas gratuitement. Vous vous retrouvez donc avec un impôt sur les gains en capital. Voilà ce dont il s'agit.
Le président: Merci.
Quelqu'un d'autre a-t-il un commentaire à ajouter? Monsieur Johnston suivi de Mme Patten.
M. Patrick Johnston: Si vous me permettez de répondre à la question de M. Jones concernant le bénévolat, on peut sans doute dire que la plupart des organismes de bienfaisance et des organismes bénévoles ont de plus en plus de mal à recruter des bénévoles. Mais ce n'est pas vraiment parce que les gens ne sont pas désireux de faire du bénévolat. C'est surtout à cause du manque de temps. Nous menons tous une vie de plus en plus stressante et il nous arrive de ne tout simplement pas avoir le temps de faire ce que nous voudrions. Comme il y a beaucoup plus de familles à deux revenus, cela veut dire que, par le passé, il y a 30, 40 ou 50 ans, il y avait une personne à la maison qui pouvait consacrer beaucoup plus de temps au bénévolat. C'est un défi important. Voilà pourquoi nous travaillons en collaboration plus étroite avec les employeurs pour inciter les employés à faire du bénévolat pendant la journée, par exemple.
• 1635
Une enquête importante, qui doit être réalisée le mois
prochain et qui est financée par plusieurs ministères fédéraux,
nous fournira les meilleurs renseignements sur les dons et le
bénévolat que nous ayons obtenus depuis dix ans au Canada. Par
conséquent, si vous me reposez la question dans six mois, j'aurai
davantage de précisions à vous fournir. Nous constaterons
probablement que moins de gens font du bénévolat et que c'est en
partie parce que l'un des postes qui disparaît en premier dans un
grand nombre d'organismes de bienfaisance est celui de
coordonnateur des bénévoles. Dans un organisme important qui compte
des centaines et des centaines de bénévoles, il s'agit d'une
fonction assez complexe que vous devez souvent confier à du
personnel rémunéré.
Si vous éliminez ces postes de coordonnateurs des bénévoles, le nombre de personnes que vous pouvez mobiliser pour faire du bénévolat va probablement diminuer. Nous savons qu'il y a une réduction du nombre de coordonnateurs des bénévoles.
Enfin, pour ce qui est d'un crédit d'impôt pour les bénévoles, on ne s'entend pas à dire, dans notre secteur, si c'est une bonne idée ou non. Certaines personnes pensent que oui. D'autres disent que ce ne serait plus vraiment du bénévolat. Le bénévolat doit être fait sans qu'on en attende un avantage personnel.
Le président: Merci. Madame Patten.
Mme Monica Patten: Il m'a ôté les mots de la bouche. C'est exactement ce que j'allais dire. Merci.
Le président: Monsieur Armour.
M. David Armour: J'ajouterais simplement une chose. J'ai toujours pensé que les bénévoles se lançaient dans le bénévolat pour susciter des changements par l'entremise d'organismes de bienfaisance ou encore d'organismes communautaires ou artistiques. C'est toujours très vrai, mais Patrick a certainement raison pour ce qui est de certains aspects de l'évolution de la main-d'oeuvre.
À une conférence que Bénévoles Canada a récemment organisée à Winnipeg sur le bénévolat, nous avons constaté deux choses. Premièrement, les coordonnateurs des bénévoles sont les premiers à voir leur poste éliminé. Les bénévoles veulent être bien soutenus, bien orientés, bien formés et être en mesure de faire leur travail. Ils veulent que l'organisation emploie leur temps à bon escient et leur rende des comptes.
Une autre chose que nous constatons sur le plan de l'infrastructure communautaire, c'est qu'un des premiers organismes à perdre un certain nombre de sources de financement est le bureau des bénévoles. Pourtant, ce bureau est un élément de l'infrastructure tout aussi important pour soutenir tous les organismes bénévoles que l'est le coordonnateur des bénévoles au sein d'un organisme.
Nous croyons que ce sont là des choses qui seront très importantes pour nous au cours des quelques années à venir afin que nous ayons l'infrastructure voulue pour que les gens qui veulent faire du bénévolat sachent où s'adresser et soient bien traités.
Le président: Merci, monsieur Armour. Nous passons maintenant à Mme Torsney.
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci. Pour revenir sur cette dernière question, je sais que dans la région d'Hamilton- Burlington, Centraide a fait appel aux très nombreux retraités, présidents de sociétés et autres qui sont à la recherche de quelque chose à faire et qui jouent un rôle très actif au sein de Centraide. Ces personnes contribuent à l'évolution du réservoir de bénévoles et je suis certaine qu'elles veulent toutes être bien traitées lorsqu'elles frappent à votre porte.
Madame Patten, les représentants de Fondations communautaires au Manitoba nous ont dit que Revenu Canada leur faisait des difficultés pour l'établissement de fondations. Le financement de démarrage posait un problème et ils avaient du mal à travailler avec Revenu Canada. Votre exposé n'en faisait pas mention. Est-ce un phénomène que vous constatez au niveau national ou est-ce propre au Manitoba?
Mme Monica Patten: Il s'agit sans doute d'une situation particulière dont s'est plainte une fondation privée. Il s'agit d'une fondation privée qui désire soutenir la croissance des fondations communautaires. Je ne peux donc pas faire d'autres commentaires quant à sa position.
Mme Paddy Torsney: Vous avez parfaitement raison. C'était le cas.
Monsieur Strain, pourriez-vous nous fournir des explications au sujet de ce merveilleux diagramme que vous nous avez présenté. Je suis nouvelle au comité et j'essaie de voir comment vous arrivez au chiffre de 406 250 $.
M. William J. Strain: Je me ferai un plaisir de vous l'expliquer. Cela nous ramène aux questions qu'Arthur a soulevées et ce diagramme en est l'illustration numérique.
• 1640
Tout d'abord, dans la colonne de la société privée, vous avez
des actions d'une société privée dont la juste valeur marchande est
de 1 million de dollars et cela coûte au donateur un demi-million
de dollars. Au moment du don, si l'organisme de charité ne vend pas
ces titres et ne les transforme pas en espèces au cours d'une
période de cinq ans, le donateur sera assujetti à l'impôt sur les
gains en capital. On considérera qu'il a vendu ces actions sur le
marché libre pour 1 million de dollars et qu'il a réalisé un gain
de 500 000 $, dont 75 p. 100 seront imposables à 50 p. 100. Cela va
lui coûter 187 500 $ d'impôt.
Si nous passons aux actions d'une société publique, on considère que le même gain en capital est réalisé, soit un gain d'un demi-million de dollars, mais il y a deux différences très importantes. En raison des mesures que prévoyait le budget de 1997, l'impôt sur les gains en capital sera réduit de moitié pour les dons d'actions de sociétés publiques. L'impôt à payer tombera donc de 187 500 $ à 93 750 $. Par-dessus le marché, le donateur recevra un crédit d'impôt pour la totalité de la valeur de 1 million de dollars. Avec un taux d'imposition de 50 p. 100, cela donne un crédit d'impôt d'un demi-million de dollars, moins les 93 750 $ d'impôt à payer sur le gain en capital, ce qui donne un bénéfice net ou un allégement d'impôt net au donateur de 406 250 $.
Mme Paddy Torsney: Merci beaucoup. Je n'ai qu'une brève question à poser.
Nous avons beaucoup parlé de répartir les dons entre les petits donateurs. Avez-vous des chiffres à ce sujet, monsieur Johnston? Combien d'argent pourriez-vous lever ainsi? Ou encore, combien cela coûterait-il au gouvernement?
M. Patrick Johnston: Pour répondre à votre question, madame Torsney, je ne pense pas qu'il y ait eu d'étude détaillée à ce sujet, mais je suppose que le ministère des Finances a établi des modèles économétriques internes qui nous donneraient une idée de la situation. Tout dépend du montant de l'incitatif supplémentaire que vous accordez, s'il s'agit de 30 p. 100, 35 p. 100 ou 40 p. 100 du seuil. Je n'ai pas vu, et nous n'avons pas pu faire d'analyse détaillée des répercussions exactes. Dans un certain sens, c'est sans doute ce qui inquiète le ministère des Finances.
En fait, il s'agit de quelque chose de nouveau. Le Canada est sans doute le seul pays qui ait même pensé à une mesure de ce genre. Il semble être le seul au monde pour le moment et c'est sans doute pourquoi on hésite un peu à innover. Cela dit, les gens du ministère des Finances et de Revenu Canada pourraient certainement concevoir un mécanisme qui assurerait une certaine protection, ne serait-ce qu'en fonction du nombre total de gens qui bénéficieraient de cette mesure et des répercussions totales sur le trésor fédéral.
Mme Paddy Torsney: Merci.
Le président: Merci, monsieur Johnston.
Nous allons passer à M. Szabo.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.
La résolution 21 est un sujet qui a été abordé à de nombreuses reprises à ce comité. Il s'agit de voir comment donner des actions et des titres de sociétés privées à des organismes de bienfaisance qui les liquideront de façon à disposer de fonds pour se livrer à leurs activités caritatives. Si vous divisez cela en deux éléments, vous avez d'une part la vente ou la liquidation ultime de ces titres et, d'autre part, l'utilisation des fonds et le reçu qui s'y rapporte. Il est certain que la résolution 21 répondait à des abus réels ou perçus.
Je constate que dans son mémoire, M. Johnston laisse entendre que d'autres experts ont suggéré plusieurs solutions moins intrusives. J'ai l'impression qu'en fin de compte cela dépend toujours de la liquidation ultime de ces actions ou créances. Pourriez-vous nous dire comment procéder à l'égard de la liquidation ultime. Si la société ne peut pas s'en charger elle- même dans un délai raisonnable, comment pouvons-nous raisonnablement nous attendre à ce qu'un organisme de charité soit mieux en mesure de le faire?
M. Patrick Johnston: Si vous le permettez, monsieur le président, je voudrais demander à M. Strain de répondre à cette question. Il est beaucoup plus expert que moi.
M. William J. Strain: Merci. Avec plaisir.
Je ne suis pas d'accord avec votre entrée en matière, car à mon avis c'est l'établissement de fonds de dotation qui représente le plus gros potentiel de dons pour ce qui est des titres de société privée. Les fonds de dotation sont les capitaux que l'organisme de charité place afin d'obtenir un apport de revenu régulier sous la forme d'intérêts ou de dividendes pour financer ses activités de façon permanente.
C'est là que le don de titres de sociétés privées commençait à avoir des répercussions réelles étant donné que davantage d'organismes de bienfaisance du pays se sont tournés vers les dons planifiés et les dons de dotation plutôt que les campagnes annuelles de levées de fonds.
Il est très important qu'un organisme de charité puisse détenir ces titres en sachant qu'ils représentent un apport annuel régulier de dividendes ou d'intérêts. Par exemple, lorsque nous travaillons avec des organismes de bienfaisance et des donateurs à l'établissement de programmes de donation, nous prévoyons un contrat d'assurance-vie pour qu'au décès du donateur, l'assurance permette de liquider le placement et de rembourser la créance ou les titres, mais en reconnaissant également que l'organisme de bienfaisance peut tout aussi bien, sinon plus probablement, réinvestir ces fonds dans d'autres placements à long terme qui rapporteront un revenu régulier.
Je pense que les fonds de dotation sont les plus compromis.
M. Paul Szabo: Néanmoins, pour ce qui est de l'autre élément, l'évaluation...
M. William J. Strain: Exactement.
M. Paul Szabo: ... sert-elle à émettre un reçu d'impôt qui peut être utilisé immédiatement? Est-ce sur ce plan que l'on craint surtout des abus?
M. William J. Strain: Je crois que oui. Voilà pourquoi nous avons proposé ce processus d'évaluation à quatre volets au ministère des Finances. Il s'agit d'établir un processus d'évaluation pour les titres de sociétés privées qui apportera les garanties nécessaires pour s'assurer que les valeurs attribuées à ces titres correspondent à la juste valeur marchande. On donne même au gouvernement l'occasion d'examiner rétrospectivement si certains événements ont réduit la valeur de ces titres, en tenant compte du fait que Revenu Canada applique un impôt sur les gains en capital au donateur des titres en se basant sur cette même valeur marchande. Cela remplit les deux objectifs.
Le président: Monsieur Bryden.
M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Merci, monsieur le président. C'est un plaisir que de participer aux travaux du comité sur cette question.
Je voudrais, pour commencer, dire à M. Drache que j'apprécie ce qu'il a dit quant à la nécessité de réexaminer les organismes exonérés d'impôt. Je voudrais ajouter quelque chose à ce qu'il a déclaré, monsieur le président.
La définition des oeuvres de bienfaisance donnée dans la loi vient de la loi élisabéthaine de 1901 et n'a pas été révisée depuis, si ce n'est par l'interprétation des tribunaux. Par conséquent, si j'ai bien compris, M. Drache estime que nous ferions un grand pas en avant en procédant à une réforme du secteur caritatif et que nous améliorerions énormément la situation simplement en redéfinissant ce qu'est un organisme de bienfaisance.
C'est ce que j'ai compris.
Deuxièmement, j'ai entendu plusieurs observations quant à la confiance du public et à la nécessité, pour les organismes de bienfaisance, de gagner cette confiance et d'amener ainsi le public à donner plus. Nous serons sans doute tous d'accord là-dessus.
Je dirais toutefois qu'en ce qui concerne les sociétés inscrites à la cote ou les ministères gouvernementaux, la confiance du public... Bien entendu, nous parlons du fait que le gouvernement se décharge d'un tas de services sur les organismes de bienfaisance. La confiance que le public a pour les sociétés cotées en bourse et les ministères gouvernementaux s'appuie sur la législation, comme vous en conviendrez sans doute. Les ministères sont assujettis à la Loi sur la gestion des finances publiques et diverses autres lois et ils doivent rendre des comptes aux comités parlementaires et aux autres autorités compétentes. Les sociétés cotées en bourse sont tenues, par la loi, d'avoir le même niveau d'imputabilité et de transparence.
• 1650
Je ne reviendrai pas sur cette question car vous savez tous,
je pense, que les organismes de bienfaisance ne sont pas visés,
jusqu'ici, par ce genre de législation. Il y a eu une évolution des
règlements administrés par Revenu Canada et très peu de
dispositions législatives se rapportent aux organismes de
bienfaisance.
Je voudrais donc demander le soutien de chacun d'entre vous. Comme vous le savez, je m'intéresse beaucoup au secteur caritatif et je crois que l'avenir des Canadiens dans le besoin repose en grande partie sur la façon dont les organismes de bienfaisance se conduisent, car c'est un secteur énorme et qui a des répercussions considérables sur la société.
Notre comité est très puissant et si vous vouliez lui faire une recommandation sur laquelle vous seriez tous d'accord, je pense que nous pourrions la transmettre.
Comme je crois se dégager un consensus parmi vous, d'après ce que vous avez dit, je voudrais vous soumettre une recommandation que vous pourriez peut-être appuyer. Laissez-moi seulement la lire et je pourrai ensuite la répéter. J'y ai réfléchi pendant un certain temps.
Je me demande si vous seriez d'accord pour faire au comité ce genre de recommandation: que le gouvernement songe à légiférer pour moderniser les définitions des organismes de bienfaisance et les organismes sans but lucratif—c'est ce qu'a dit M. Drache—et mettre en place des mécanismes d'imputabilité équivalents à ceux qui s'appliquent aux sociétés cotées en bourse et aux ministères gouvernementaux.
Voulez-vous que je répète? Je vais demander à chacun de vous ce qu'il en pense.
M. Arthur Drache: Répétez la deuxième partie.
M. John Bryden: D'accord, la deuxième partie de la recommandation propose d'établir des mécanismes d'imputabilité équivalents à ceux qui s'appliquent aux sociétés cotées en bourse et aux ministères du gouvernement.
Je commencerai par Monica en demandant simplement de me dire si vous êtes d'accord en principe ou non. Si vous n'êtes pas d'accord, peut-être pourriez-vous indiquer pourquoi.
Le président: Un instant, madame Patten.
Que demandez-vous exactement...
M. John Bryden: Je leur demande simplement s'ils appuieraient ce genre de recommandation en principe.
Le président: Croyez-vous qu'il soit équitable de le faire maintenant? Vous venez de parler quatre minutes...
M. John Bryden: Bien, je vais leur poser la question.
Est-ce équitable? Si vous croyez que non...
Le président: Vraiment, monsieur Bryden, je ne pense pas que ce soit équitable pour le moment.
Mme Monica Patten: Il m'a demandé ce que j'en pensais.
M. John Bryden: D'accord, pourquoi ne disent-ils pas ce qu'ils en pensent?
Le président: Bien entendu, vous pouvez le faire. Allez-y.
M. David Armour: Avec plaisir. Tout d'abord, cela viendrait pratiquement à tirer des conclusions alors que vous venez tout juste de constituer un groupe pour étudier la question.
En tant que membres de la table ronde du secteur bénévole, nous venons de constituer un groupe de Canadiens éminents présidé par Ed Broadbent pour examiner la question de l'imputabilité et indiquer les meilleures façons de l'assurer. L'une des conclusions auxquelles ce groupe pourrait arriver est que l'imputabilité doit être la même que pour le secteur privé ou le gouvernement. Par conséquent, ce serait couper l'herbe sous les pieds d'un groupe indépendant que nous avons mis sur pied pour examiner la question. Si nous vous disons qu'une solution est la bonne, ce serait nous éloigner du processus que nous avons déjà entamé.
L'imputabilité revêt une importance cruciale à nos yeux. La participation des bénévoles et des donateurs en dépend. Mais je dois également souligner clairement que nos sondages d'opinion, tout comme les vôtres j'en suis sûr, montrent que les principaux organismes du secteur bénévole sont en tête de liste pour ce qui est de la confiance du public, que les Canadiens considèrent qu'ils servent bien leurs intérêts au niveau des collectivités, contrairement à d'autres éléments de la société qui sont régis par toutes sortes de lois. Le fait que l'imputabilité soit régie par des lois n'entraîne donc pas nécessairement la confiance du public. Nous acceptons l'imputabilité et voilà pourquoi la table ronde du secteur bénévole a constitué collectivement ce groupe.
J'apprécie vraiment le travail qu'accomplit John Bryden dans ce domaine et les questions qu'il porte à l'attention du public canadien. Je suis certain que ce groupe voudra le rencontrer, entendre ses préoccupations dans le cadre de ses audiences et de ses conclusions. Mais il serait prématuré de notre part de tirer la conclusion qu'il nous demande de tirer alors que nous venons de constituer, il y a deux semaines à peine, un groupe de Canadiens éminents pour étudier toute la question. Mais j'apprécie que vous l'ayez soulevée ici.
Le président: Monsieur Bryden, avez-vous une autre question?
M. John Bryden: Oui. Quelqu'un ne pourrait-il pas au moins me donner une opinion quant à savoir s'il serait souhaitable d'avoir des normes législatives d'imputabilité pour les organismes sans but lucratif? Cela s'applique à toutes les autres institutions qui se servent de l'argent que les contribuables confient au trésor public. Cela s'applique aussi bien aux sociétés cotées en bourse qu'aux ministères gouvernementaux, alors pourquoi pas aux organismes de bienfaisance?
Il ne s'agit pas d'attendre 18 mois les résultats de la table ronde. Monsieur Armour, vous avez dit que M. Broadbent n'allait pas se pencher sur la législation, mais sur les problèmes en général. Vous avez dit qu'il n'y aurait pas plus de réglementation. Néanmoins, pour ce qui est des ministères du gouvernement, les députés les obligent à rendre des comptes dans le cadre de comités comme celui-ci. C'est un processus très utile pour la collectivité. Pour les sociétés cotées en bourse, il y a également des mécanismes de réglementation.
Il n'y a rien de tel pour les organismes de bienfaisance ou sans but lucratif. Je vous pose donc à nouveau la question: pourriez-vous au moins reconnaître qu'en principe ce serait une bonne idée que d'examiner une législation s'appliquant aux organismes de bienfaisance? Définissez cette législation comme vous le voudrez, mais il n'est certainement pas nécessaire d'attendre 18 mois que M. Broadbent présente son rapport. Vous travaillez dans ce milieu depuis longtemps.
M. Clifford Chadderton: Premièrement, monsieur le président, mesdames et messieurs, nous venons de faire l'objet d'une vérification majeure qui a été effectuée par le ministère des Approvisionnements et Services. Les résultats ont été communiqués à Revenu Canada. C'était une expérience très intéressante. J'ai le plaisir de dire que nous en sommes sortis blancs comme neige, mais nous trouvions qu'il y avait trop d'organismes de bienfaisance dans notre secteur.
J'ai maintenu des relations très étroites avec les médias. On me pose un tas de questions à ce sujet. Comme M. Bryden l'a laissé entendre, si le gouvernement n'agit pas bientôt, je pense que nous allons tous en pâtir, et je suis le directeur de cet organisme depuis plus de 50 ans. Il est trop facile à l'heure actuelle de faire enregistrer un organisme de charité.
La menace de vérification de Revenu Canada est une bonne chose, mais il ressort des discussions que j'ai eues avec les vérificateurs du ministère des Approvisionnements et des Services, que le gouvernement n'a pas le personnel ou les moyens nécessaires pour faire des vérifications auprès des petits organismes qui nous font une très mauvaise réputation.
Au risque de déplaire à certains, j'ai eu certaines inquiétudes à l'idée qu'une enquête indépendante ou une étude soit menée sous la direction de M. Broadbent. Je me demande si le public ne va pas se dire, à tort ou à raison, que ce genre d'étude manque un peu d'objectivité.
D'autre part, je me demande si ce n'est pas pour le gouvernement un moyen de se désister. Le gouvernement n'ignore pas—car vous recevez certainement les mêmes coupures de presse que moi—que le public est très inquiet.
Je ne parle pas seulement de la Fondation Quimby. Je veux parler de tout notre secteur qui comprend 27 000 organismes. Les gens se demandent d'abord comment ils ont été enregistrés et, deuxièmement, s'ils font l'objet d'une surveillance ou d'une vérification adéquate.
Tant que le public s'inquiétera... Nous sommes tous conscients du risque de lassitude des donateurs et il faudrait faire quelque chose, et cela assez rapidement, pour montrer au public que quelqu'un surveille la situation. Il faut que ce soit le gouvernement, car c'est lui qui donne à un organisme de bienfaisance le droit d'exister et de recevoir des dons.
Pour conclure, vous parlez de l'émission de reçus pour les petits dons. Je crois être bien placé pour en parler.
• 1700
Nous avons des donateurs importants, mais notre don moyen se
situe sans doute aux alentours de 10 $. Si quelqu'un s'imagine que
ces donateurs ne tiennent pas à recevoir de reçu d'impôt, je peux
vous assurer le contraire et je pourrais vous montrer notre banque
de données à ce sujet. S'il est possible d'offrir un allégement
d'impôt plus raisonnable ou plus avantageux pour les petits dons,
cela nous aiderait tous.
Je terminerai sur une dernière chose. Quand M. Bryden a présenté son rapport et quand... je ne citerai pas le nom de l'auteur, mais quand son ouvrage a été publié l'année dernière... À notre service de porte-clés de Toronto, il y a environ 27 personnes handicapées qui reçoivent les plaintes du public au sujet des organismes de bienfaisance. Le téléphone n'a pas cessé de sonner pendant deux à trois mois et j'ai d'ailleurs écrit à M. Bryden à ce sujet. Les gens nous demandaient: si je fais un don à votre organisme, y aura-t-il une vérification adéquate? Bien entendu, j'ignore ce que font les autres organismes, mais nous avons un état financier consolidé que nous envoyons immédiatement.
Quand ce livre est sorti et quand le rapport de M. Bryden a été publié, les inquiétudes du public m'ont fait peur, je l'avoue, de même que la réaction des médias qui m'ont téléphoné pour me demander si je pouvais assurer au public que notre organisme était irréprochable. De vives inquiétudes règnent dans l'esprit du public et des médias. Il faut faire quelque chose et c'est au gouvernement de le faire.
Le président: Monsieur Drache.
M. Arthur Drache: J'aurais une ou deux choses à dire à ce sujet. Premièrement, le système actuel est tout simplement ridicule. La situation est exactement la même qu'il s'agisse de l'Université de Toronto ou de l'église du coin. Elles ont la même obligation de déposer leurs états financiers, même si leur clientèle est totalement différente.
D'autre part, un grand nombre d'organismes de bienfaisance enregistrés sont supervisés par d'autres gouvernements provinciaux. Prenez les hôpitaux, par exemple, ou encore les universités, et ainsi de suite. Si vous prenez le modèle anglais, la Commission des oeuvres de bienfaisance, vous constaterez que les églises n'en font pas partie. On ne s'en occupe pas parce qu'elles sont supervisées par les autorités ecclésiastiques. Les hôpitaux ne sont pas visés non plus, pas plus que les universités. Tous ces organismes échappent à la réglementation parce qu'il y a d'autres modes de supervision.
Deuxièmement, le formulaire de rapport T3010 est en place depuis 20 ans, mais ce n'est qu'une farce. Personne n'y comprend rien.
Samedi, j'ai lu dans le Globe and Mail que l'excuse invoquée par Maclean's pour avoir publié des renseignements erronés sur un certain nombre de gros organismes de bienfaisance très réputés était que ses journalistes ne pouvaient pas comprendre les T3010. Walter Stewart a écrit un ouvrage à partir de la T3010, il s'est fait poursuivre et son éditeur a retiré le livre des librairies. Le fait est que les renseignements publics sont tels que personne n'y comprend rien. C'est ridicule.
Mon opinion—et j'ai écrit sur le sujet—est qu'il faut revoir entièrement la supervision. Il faut commencer par soustraire toute cette question à l'autorité de Revenu Canada. Cet organisme n'est pas celui qui devrait s'occuper des organismes de bienfaisance au niveau national. Il s'agit d'un percepteur d'impôt. Sa position est celle d'un percepteur. Il faudrait plutôt avoir un organisme indépendant comme la Commission des oeuvres de bienfaisance.
Je ne pense pas que vous pourrez remédier à cette situation— et il y a des problèmes légitimes—au moyen de la Loi de l'impôt sur le revenu. Vous ne la réglerez pas non plus en envoyant davantage de gens de Revenu Canada vérifier les organismes de bienfaisance. Il faut adopter une stratégie totalement différente.
Si on nous demandait de voter sur la proposition de M. Bryden, je voterais non, non pas parce que l'idée d'imputabilité n'a rien de raisonnable, mais parce que c'est trop général. C'est un sujet que le gouvernement devrait examiner de très près. Mais je suis absolument certain que Revenu Canada n'est pas l'organisme compétent pour superviser les oeuvres de bienfaisance. Il ne l'a jamais été et ne le sera sans doute jamais.
Le président: Monsieur Strain.
M. William J. Strain: Je voudrais faire une ou deux remarques au sujet de cette question.
La première concerne les conseils que nous donnons aux donateurs. On peut dire que ces derniers exigent que les organismes de bienfaisance à qui ils donnent rendent des comptes. L'imputabilité est une question très importante. Je me réjouis de l'établissement d'un groupe de travail présidé par Ed Broadbent qui examinera cette question. La solution consiste-t-elle à légiférer? Je ne suis certainement pas prêt à l'affirmer avant que la question n'ait été examinée à fond.
Je dirais au comité que la réglementation des sociétés cotées en bourse ne s'est pas révélée très efficace récemment si l'on voit ce qu'il est advenu des actions dans des mines d'or d'Extrême- Orient d'une entreprise tristement célèbre dont je ne citerai pas le nom. La législation n'est pas la solution en soi, mais l'imputabilité est certainement exigée, tant par le donateur que par le grand public. Il faudrait attendre de voir les résultats de l'examen que le groupe de travail fera de la question.
Le président: Avez-vous d'autres questions?
Au nom du comité, je voudrais vous adresser nos remerciements les plus sincères pour cette table ronde très intéressante. Vous avez soulevé d'excellentes questions à propos des sujets que nous devons étudier. Nous allons examiner très sérieusement ce que vous avez dit à propos de la résolution 21.
Encore une fois, nous tenons à vous remercier, car votre groupe a déjà largement contribué aux consultations prébudgétaires et vous avez vu les fruits de votre travail apparaître dans les budgets. Soyez certains qu'un grand nombre des questions soulevées aujourd'hui seront reflétées dans notre rapport au ministre des Finances. Merci beaucoup.
Je rappelle aux membres du comité que nous nous réunirons, demain matin, dans la salle 237-C, de 9 heures à midi, puis de 12 h 30 à 14 heures pour les consultations prébudgétaires. De 15h 30 à 18 heures, nous nous réunirons dans la pièce 269 de l'édifice de l'Ouest, également pour les consultations prébudgétaires. Dans la même salle, nous entendrons le ministre Martin et le ministre Pettigrew au sujet du RPC, le projet de loi C-2, à 18 heures.
La séance est levée.