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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 9 mars 1999

• 0907

[Français]

Le président (M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)): Bonjour et bienvenue. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous étudions la situation des dons d'organes et de tissus au Canada. Nous reprenons les témoignages.

Aujourd'hui, nous avons un témoin bien connu des membres du comité, M. Donald Langlais, qui est représentant d'une province francophone, malgré son nom. Il est directeur de Québec Transplant. Il y a également M. Richard Tremblay, le président de l'Association canadienne des dons d'organes. Chacun nous fera une présentation de cinq minutes. Je pense qu'ils traitent de deux thèmes différents, n'est-ce pas?

Nous avons aussi Mme Isabelle Gendron, directrice générale de la Fondation Diane Hébert et, enfin, du Centre des sciences de santé Queen Elizabeth II, Mme Mary Ellen Gurnham, directrice des soins infirmiers.

[Traduction]

Bonjour à tous.

Nous allons maintenant commencer, si vous le permettez, avec M. Donald Langlais, que le comité a déjà entendu. Ce matin, si je ne m'abuse, vous trouverez devant vous le rapport Gélineau, auquel M. Langlais a fait allusion la dernière fois. Vous l'avez sous les yeux. Il ne va pas le lire, mais il va s'y référer. Je crois que M. Tremblay a aussi contribué à ce rapport. Il y fera également allusion, mais pas au même titre.

À ceux qui n'ont jamais témoigné devant le comité, j'aimerais dire que vous avez cinq minutes pour faire votre exposé. Ne vous croyez pas obligés de lire exactement ce que vous avez préparé. Transmettez-nous votre message, et les députés vous poseront ensuite des questions et un dialogue s'ensuivra.

Monsieur Langlais.

• 0910

[Français]

M. Donald Langlais (directeur, Québec Transplant): Bonjour. Il est vrai que j'ai déjà témoigné devant le comité. Je me sens un peu plus à l'aise de vous rencontrer et de vous parler.

Je ne suivrai pas exactement le plan de travail; je vais vous en transmettre les grandes lignes. Dans le document qu'on vous a présenté, on a voulu reprendre les grands mandats ou les grandes préoccupations que vous aviez et vous indiquer les expériences sur lesquelles on travaille actuellement au Québec.

Québec Transplant a été créé après des organismes comme Métro-Transplantation et à la suite d'une étude d'un comité ministériel en 1991. Le rapport Gélineau, en 1997, a repris toutes la question du don d'organes au Québec.

Le point saillant du dernier rapport, c'est la nouvelle façon d'indiquer notre volonté d'être donneur d'organes, cela par un autocollant sur la carte d'assurance-maladie. Au Québec, dorénavant, c'est par un autocollant sur la carte d'assurance-maladie que l'on peut indiquer notre volonté. Cette carte est celle qu'on utilise quand on arrive au centre hospitalier.

On a sollicité la nomination de responsables intrahospitaliers dans chacun des centres hospitaliers.

Québec Transplant travaillait au niveau de la sensibilisation du grand public et s'en est retiré. Entre-temps, à la suite du rapport Gélineau, on a créé ce qu'on appelle aujourd'hui le groupe Info don d'organes auquel participent toutes les associations qui se consacrent à la cause du don d'organes, dont l'ACDO, la Fondation Diane Hébert et d'autres fondations.

Québec Transplant va maintenant orienter principalement ses fonctions sur la gestion de la liste unique de tous les patients en attente, la coordination de l'ensemble du processus du don d'organes, la formation et l'éducation du personnel infirmier, le suivi des résultats et, bien entendu, une bonne gestion.

Reprenons les documents que vous nous avez transmis. Je vais essayer de faire rapidement le tour de vos attentes pour vous montrer quelques exemples de travaux faits au Québec.

Concernant la sensibilisation et la connaissance du grand public face au don d'organes, on reconnaît que 80 p. 100 de la population est en accord sur le don d'organes. On veut vérifier si ce pourcentage est toujours juste, voir auprès de la population les craintes suscitées par tout le processus du don d'organes et, bien entendu, vulgariser ces notions-là. Toute la sensibilisation auprès du grand public est faite par IDO, mais Québec Transplant demeure près de cet organisme pour l'appuyer au niveau scientifique et technologique.

Concernant la sensibilisation et les connaissances des professionnels de la santé face au don d'organes, on constate de façon très claire que l'identification du donneur potentiel se fait au niveau du centre hospitalier. Certains professionnels de la santé croient encore qu'il y a une limite d'âge très précise pour le don d'organes et que le donneur doit être obligatoirement un traumatisé. On est surpris d'entendre des professionnels de la santé s'exprimer ainsi.

Les propositions sur lesquelles nous voulons travailler et qui appuient vos recommandations sont: appuyer la formation par l'éducation continue au niveau des professionnels de la santé; fixer des objectifs à chaque centre hospitalier; aller vers une recherche sur l'offre potentielle de donneurs; et sensibiliser le Conseil canadien d'agrément des services de santé à l'inscription du volet du don d'organes dans son mandat d'évaluation des centres hospitaliers.

Au Québec, dans chacun des centres hospitaliers, on a procédé à la nomination d'un responsable du recrutement des donneurs potentiels d'organes et de tissus. Actuellement, environ 80 p. 100 des gens ont procédé à cette nomination.

On travaille aussi au développement de ce qu'on appelle un outil de vigilance. On sait fort bien que les patients qui sont des donneurs potentiels se retrouvent principalement dans les unités comme l'urgence ou les soins intensifs. On veut développer un outil permettant tant au corps médical qu'au corps infirmier de vérifier et surveiller, quart après quart, si des gens ne présenteraient pas des conditions faisant d'eux des donneurs potentiels.

On négocie présentement l'octroi d'une recherche par sondage statistique visant à identifier le pourcentage de donneurs potentiels d'organes en relation avec le nombre de décès par année. Je voudrais souligner qu'il est très difficile pour les responsables nommés à l'intérieur des centres hospitaliers de travailler si on n'est pas capable de leur donner des objectifs à atteindre.

Assurer la formation du personnel infirmier est évidemment un des rôles de Québec Transplant.

Peu importe la façon dont la population indique sa volonté face au don d'organes, si les professionnels de la santé ne se sentent pas interpellés, tous nos efforts et ceux des groupes qui se consacrent à la cause peuvent demeurer vains. Il faut informer les professionnels, augmenter leurs connaissances et leur donner des défis.

• 0915

Vous avez aussi parlé de l'élaboration de normes nationales relatives à la sécurité, aux procédures et à l'issue des interventions.

Beaucoup de travaux ont déjà été entrepris, entre autres au niveau national. En mars 1998, on a distribué à chaque organisme responsable du dossier du don d'organes la quatrième version du Standard for Perfusable Organs: Canadian General Standard and Safety of Organs and Tissues for Transplantation. On voit que c'est une préoccupation et que cela évolue.

Chaque organisme responsable du prélèvement et de l'attribution doit utiliser des procédures qui lui sont propres pour éviter que tout risque éventuel ne soit transmis au receveur d'organes.

Les propositions que l'on veut faire à ce sujet sont les suivantes: que des standards nationaux soient rapidement mis en place et déposés; qu'il y ait, au niveau national, un organisme responsable du suivi épidémiologique des receveurs; et qu'il y ait poursuite de la recherche pour la mise au point d'analyses permettant de mettre en évidence toute maladie infectieuse à ne pas transmettre.

Au Québec, ce sera la Direction de la santé publique qui compilera ces données, et le Collège des médecins du Québec initiera tout un processus d'évaluation de la qualité de l'acte médical relatif au maintien du donneur et aux phénomènes de transplantation.

Pour conclure, voici nos constatations. Avec l'évolution de la technologie médicale, les listes d'attente pour la demande de greffons s'allongeront. La population en général semble d'accord sur une approche correctrice pour l'implantation d'organes sains et sécuritaires. Toute cette activité peut prendre son origine au niveau des centres hospitaliers.

Il faut donc assurer un processus sécuritaire, identifier des objectifs précis, trouver des moyens pour les évaluer et faire les suivis. Merci.

Le président: Merci, monsieur Langlais. Nous entendrons maintenant M. Tremblay.

M. Richard Tremblay (président, Association canadienne des dons d'organes): Monsieur le président, mesdames, messieurs, c'est avec grand plaisir que je vous rencontre ce matin pour vous expliquer l'historique de l'Association canadienne des dons d'organes, dont les activités ont débuté en décembre 1984 et qui pour mission la sensibilisation et l'assistance médicale sur le territoire québécois, ainsi que l'assistance médicale aux médecins en provenance d'autres provinces du Canada.

Depuis de nombreuses années, nous avons participé à plusieurs campagnes de sensibilisation pour la cause du don d'organes. Nous sommes allés de nouveau à l'échelle nationale avec la campagne D'un accord mutuel appuyés par notre partenaire financier, le Groupe La Mutuelle.

Nous avons mis en place, à Sherbrooke, une banque de conservation de coordonnées qui est la troisième au Québec. Nous avons implanté, à Sherbrooke, le premier héliport au Québec pour le transport des organes. Nous avons mis sur pied, en mars 1987, les 11 premières unités de transport d'urgence d'équipes médicales et de transport d'organes humains qui existent en Amérique du Nord. C'est unique et effectué par des policiers bénévoles de tout le Québec. Nous sommes près de 2 000 personnes à être disponibles au Québec jour et nuit, 24 heures par jour et sept jours par semaine, pour transporter les organes et les équipes médicales en provenance de tout le Québec, de London, du Nouveau-Brunswick, de Toronto et ainsi de suite. Ces équipes sont accueillies par les unités, transportées au centre de prélèvement et, par la suite, raccompagnées immédiatement.

Depuis mars 1987—nous fêtons notre anniversaire ce mois-ci—, nous avons fait plus de 5 000 transports à travers le Québec, ce qui représente 7 000 heures de conduite d'urgence, parcouru près d'un demi-million de kilomètres, transporté 2 000 organes à destination et effectué 3 000 assistances médicales à la grandeur du Québec. Au niveau des organes humains, nous avons transporté au-delà de 1 000 reins, 338 coeurs, 436 foies, 26 pancréas, 145 poumons et 443 autres organes.

Nous estimons que cette démarche a permis au système de santé québécois d'économiser et de protéger un budget d'environ 1,5 million de dollars, qui a été réinvesti dans les divers programmes de transplantation du Québec, ceci grâce à l'appui de nos bénévoles et de nos gens qui, 24 heures par jour, se sont donnés pour cette cause.

• 0920

Nous avons aussi, au cours des années, concentré notre mission sur la sensibilisation. Nous avons distribué des dizaines et des dizaines, sinon des centaines de milliers de cartes de don d'organes à travers le Québec et au Canada via notre partenaire national. Nous avons mobilisé les gens et tenté de démystifier le mieux que nous le pouvions cette cause extraordinaire.

Nous croyons, et les sondages nous le confirment—nous en avons joint une copie à la présentation d'aujourd'hui—, que la population du Québec et celle du Canada en général appuient cette démarche dans une proportion élevée. Je souscris évidemment aux propos de mon ami M. Langlais de Québec-Transplant. Au-delà de 80 p. 100 de la population est engagée envers cette grande cause. Selon ce même sondage, une proportion de 58 p. 100 des personnes appartenant à la société que nous avons fondée estiment que c'est une façon exceptionnelle de promouvoir la cause que de reconnaître ce don-là.

C'est pour cette raison qu'en 1994, notre organisme a établi le premier monument à la mémoire des donneurs d'organes du Québec et du Canada. Ce magnifique monument est situé à Sherbrooke. On trouve actuellement inscrits sur celui-ci plus de 600 noms de personnes décédées qui, à titre posthume, ont reçu le titre d'ambassadeurs de la santé de Son Excellence, le lieutenant-gouverneur du Québec. Une cérémonie civique a lieu une fois l'an à Sherbrooke pour honorer les familles et évidemment les donneurs.

C'est un événement rempli d'émotion, rempli de reconnaissance et de respect à l'égard de ces personnes et c'est, selon nous, une excellente façon de reconnaître ce geste civique, ce geste extraordinaire qui permet de transmettre la santé en héritage. Nous croyons que ce genre d'événement devrait être repris à une autre échelle, dans d'autres provinces, pour tenter de promouvoir d'une certaine façon la cause des dons d'organes et aussi reconnaître ce geste si généreux.

Dans les documents que j'ai transmis au comité, vous constaterez que sur la façade du monument, on peut lire: «En hommage aux donneurs d'organes.» Il y a une phrase extraordinaire qui se lit comme suit: «Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l'on aime.» Que dire de la personne qui donne son coeur à quelqu'un qu'elle ne connaît pas?

Monsieur le président, chers membres du comité, au nom de l'Association canadienne des dons d'organes, ce que je vous dis, et ce que nous tentons de transmettre humblement au comité, c'est que la population appuie la cause des dons d'organes. La population du Québec et du Canada croit en cette grande cause. Nous avons l'expertise partout au pays pour effectuer des transplantations. Le seul problème, c'est qu'il y a toujours une pénurie d'organes par rapport à la demande.

Nous appuyons tout à fait les propos de M. Langlais et croyons que le travail doit se faire au niveau hospitalier. À ce niveau, le travail sera d'autant plus facile que la population sera de plus en plus conscientisée face à cette démarche. Elle va même aller au devant du milieu médical pour dire que ses enfants, ses frères ou ses soeurs ont consenti à offrir leurs organes pour sauver quelqu'un.

Nous croyons que nous devons investir au niveau de la coordination, au niveau des centres hospitaliers du Québec et du Canada pour qu'on soit en mesure de répondre aux besoins urgents. Au moment où je vous parle, il y a des gens qui meurent partout au pays à cause d'un manque d'organes. Alors, j'ose espérer que des décisions vont très rapidement être prises pour aider cette grande cause le plus vite possible et pour que le don d'organes devienne aussi naturel que le don du sang.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Tremblay.

[Traduction]

Avant d'entendre les deux prochains témoins, j'aimerais informer les députés que nous n'avons pas la version traduite de leur exposé. J'ai les originaux sous les yeux, mais notre service de traduction n'a pas pu les traduire à temps. Je le dis à titre d'information pour nos collègues et pour les témoins.

• 0925

Les deux documents seront distribués aux députés aussitôt qu'ils auront été traduits. Donc, si les deux témoins pensent que nous suivons directement un texte écrit, soyez rassurés, nous sommes plutôt pendus à vos lèvres.

Les députés ont toutefois sous les yeux un document provenant de la Fondation Diane Hébert. Cet historique de la Fondation, dans les deux langues officielles, fait partie de votre trousse, mais Mme Isabelle Gendron ne s'en servira pas pour faire son exposé. Est-ce exact? Bon.

[Français]

Madame Gendron, la parole est à vous.

Mme Isabelle Gendron (directrice générale, Fondation Diane Hébert): Merci. Bonjour, monsieur le président, mesdames et messieurs.

Je suis venue aujourd'hui principalement pour parler de la Fondation Diane Hébert. Cette fondation est née de l'expérience de Mme Diane Hébert qui, à l'âge de 25 ans, a appris qu'elle allait mourir si elle ne recevait pas un coeur et des pouvons dans les meilleurs délais. Les programmes de transplantation n'en étaient alors qu'à leurs premiers balbutiements, et elle a dû se rendre aux États-Unis pour être opérée. Après avoir attendu près de deux ans en Californie, c'est finalement à Toronto qu'elle a reçu sa double transplantation. Elle a été la première Québécoise à s'inscrire à un tel projet, et son expérience a fait la une des journaux à plusieurs reprises.

C'est en vue d'aider d'autres personnes qui connaissent le même sort qu'elle a créé sa fondation. Les objectifs sont d'aider les personnes en attente de greffe ou celles qui en ont reçu une en les informant sur les programmes existants en leur fournissant gratuitement du matériel médical spécialisé, en apportant une aide financière à l'hébergement, en produisant un journal et, surtout, en sensibilisant la population aux dons d'organes.

Il y aura 14 ans cette année que Mme Hébert a reçu son don de vie. Elle est toujours en santé et toujours aussi reconnaissante envers la famille qui lui a permis de voir grandir sa fille.

Depuis ce temps, environ 5 700 Québécois ont reçu un don d'organes. La plupart sont encore en vie grâce aux médicaments antirejet qui ont été mis sur le marché.

Je ne veux pas répéter ce que mes confrères ont dit.

Le président: Ne vous inquiétez pas s'il y a de la répétition parce que les bonnes nouvelles sont toujours plaisantes à entendre.

Mme Isabelle Gendron: J'ai lu dans la documentation que j'ai reçue du Parlement qu'il y avait un projet en vue de créer un registre d'État pour les donneurs d'organes. Le don d'organes, c'est un testament qui se fait de façon délibérée. S'il faut qu'il soit consigné dans un registre d'État pour que ce soit valide, nous sommes d'accord qu'on procède de cette façon.

Il y a plusieurs Canadiens qui meurent en attendant que nous réagissions. La création d'une banque de données officielle pour identifier les donneurs permettrait à chaque Canadien de se manifester et d'établir des statistiques sur le nombre réel de donneurs. L'inscription volontaire apportera des certitudes aux intervenants quant au désir de chacun et permettra sûrement d'augmenter le nombre de donneurs. En faire l'essai serait le meilleur moyen de prendre le pouls de la population et permettrait l'évaluation des résultats. On ne perd rien à essayer, sinon quelques lignes sur un rapport d'impôt.

En terminant, je félicite les membres du comité de leur initiative visant à consolider la situation au Canada sur ce sujet d'envergure et à encourager les Canadiens à exercer leur droit de participer à ce don de vie.

Le président: Merci beaucoup.

[Traduction]

Nous allons maintenant passer la parole à Mary Ellen Gurnham, qui vient de Nouvelle-Écosse. Bienvenue à Ottawa. Vous pouvez commencer.

Mme Mary Ellen Gurnham (directrice des soins infirmiers, Centre des sciences de santé Queen Elizabeth II): Bonjour. Je vous remercie de votre invitation.

Je travaille à la banque régionale de transplantation d'organes, de moelle et de tissus au Centre des sciences de santé Queen Elizabeth II à Halifax. Je crois que notre situation est quelque peu unique, en ce sens que notre programme de transplantation d'organes, de cornées et de moelle est le seul dans la région de l'Atlantique. Notre banque de tissus est également l'une des plus complètes au Canada.

• 0930

J'ai structuré mon exposé de façon à parler de quelques-uns des facteurs qui se répercutent sur l'offre d'organes et de tissus ainsi que des recommandations qui, à notre avis, devraient aider à promouvoir notre cause.

Nous croyons que certaines pratiques utilisées par les hôpitaux pour identifier les donneurs sont inefficaces, et je pense que les intervenants précédents vous l'ont déjà dit. Cela est attribuable en partie aux professionnels de la santé qui hésitent beaucoup à en parler à la famille. La transition est très difficile à opérer. Vous avez soigné un patient et soutenu la famille tout en essayant de cerner le problème et d'offrir espoir et guérison. Il est difficile de faire la transition—de pressentir la famille, même lorsque vous croyez au principe du don d'organes et que ce don peut aider une famille en deuil.

C'est ce qu'a démontré une étude menée au Canada, aux Pays- Bas, en Espagne et au Royaume-Uni par le Partenariat pour le don d'organes, qui s'est penché sur les pratiques en vigueur dans les hôpitaux et le manque de suivi par le personnel hospitalier ainsi que sur l'aise avec laquelle le personnel consultait les familles au sujet du don d'organes.

Je crois que le problème vient de ce que les professionnels de la santé n'ont pas toutes les connaissances et le soutien voulus en ce qui concerne l'identification des donneurs, les critères à respecter et la gestion. Parfois, surtout dans les petits hôpitaux, des donneurs éventuels nous échappent à cause d'un manque de connaissances en matière de gestion des donneurs, ce qui est un processus très complexe.

On constate aussi l'absence d'un cadre de responsabilité et d'incitatifs en matière de dons d'organes. On manque de spécialistes spécialement formés pour exécuter les programmes de transplantation, notamment d'infirmières autorisées en soins intensifs et en soins péri-opératoires, de spécialistes des banques de tissus, de spécialistes de la gestion de l'information et dans certains cas de médecins et de chirurgiens. Il n'existe pas de base de données nationale ni de normes nationales. D'importants efforts ont toutefois été déployés pour élaborer des normes, mais celles-ci ne sont toujours pas en vigueur et il n'y a aucune garantie d'uniformité dans la mise en oeuvre des différents programmes.

On a déjà parlé de la reconnaissance à l'endroit des familles des donneurs, et je crois qu'il est également important de financer des programmes coordonnés de soutien à l'intention des familles des donneurs.

Nous recommandons entre autres d'investir à la source des dons d'organes, c'est-à-dire de donner des cours aux professionnels de la santé sur l'identification des donneurs, les critères à satisfaire et la gestion des donneurs. En Nouvelle-Écosse, en 1997, nous avons mené une campagne d'information concertée auprès du personnel des programmes de transplantations et des médecins, qui ont prononcé des conférences dans les hôpitaux de la province, ce qui a eu pour effet d'accroître considérablement le taux de dons d'organes. Cent trente-trois greffes de reins ont été réalisées la même année, dont 89 grâce à des reins prélevés sur des cadavres; 21 transplantations hépatiques et 11 transplantations cardiaques ont aussi été réalisées. Nous n'avons pas réussi à maintenir le rythme.

Nous avons également formulé des recommandations en matière de counselling et d'imitation de rôles pour aider le personnel à soutenir les familles en deuil, à leur proposer le don d'organes, et à procéder à l'évaluation socio-médicale essentielle, qui est très exhaustive et qui consiste entre autres à poser des questions très personnelles alors que les familles sont en deuil.

Nous avons aussi recommandé de nommer des médecins et des infirmières dans les hôpitaux communautaires secondaires et tertiaires qui feraient la promotion et rendraient compte des dons d'organes et de tissus. Ces personnes-ressources pourraient intervenir pour obtenir le consentement et procéder à l'examen socio-médical, de sorte que les familles pourraient traiter avec quelqu'un qui possède les connaissances, les dispositions et les compétences voulues pour faire ce travail.

Une autre recommandation consiste à mettre l'accent sur des stratégies de recrutement et de maintien en fonction d'infirmières de soins intensifs et de soins péri-opératoires, et sur le financement de programmes accrédités menant à un diplôme afin de former des coordonnateurs de greffes, des spécialistes de banques de tissus et d'autres professionnels dans les domaines des critères s'appliquant aux donneurs, de la gestion, du contrôle d'organes, du prélèvement de tissus et du traitement. Nous avons dû envoyer notre spécialiste de la banque de tissus aux États-Unis pour qu'il y suive des cours. Il n'y a aucun programme de ce genre au Canada, ni aucun programme qui mette l'accent sur le rôle des coordonnateurs de greffes. Tout cela se fait à l'interne, ce qui entraîne un manque d'uniformisation.

L'élaboration et la gestion de banques de données institutionnelles représentent un autre problème. Nous croyons qu'il faut instaurer des processus pour suivre et vérifier les taux de dons d'organes et de tissus possibles et réels à l'échelle des hôpitaux, de la province et du pays, et en rendre compte. Ces processus pourraient être intégrés au Conseil canadien d'agrément des services de santé et permettraient de rendre compte aux professionnels de la santé, aux administrateurs, aux conseils d'administration et aux gouvernements de l'efficacité des pratiques institutionnelles. Je doute que l'utilisation du taux de dons d'organes par million d'habitants reflète fidèlement la situation.

La création d'un registre national de donneurs permettrait de fournir des données utiles aux groupes cibles à des fins éducatives. Les professionnels de la santé qui proposent le don d'organes aux familles éprouvées pourraient se servir des renseignements contenus dans le registre si les coordonnateurs et les équipes du département d'urgence ou de soins intensifs y avaient accès en temps réel.

• 0935

Je ne crois pas qu'il faille se servir de ces renseignements pour passer outre aux souhaits de la famille. Toutefois, ces renseignements peuvent s'avérer utiles, puisque l'on peut prouver à la famille d'un patient qu'il a signé par exemple sa carte de don d'organes, car souvent les membres d'une famille ne discutent pas entre eux de ce genre de choses.

L'établissement d'une liste d'attente nationale en temps réel est nécessaire et permettrait de faciliter l'attribution des organes. Le coordonnateur canadien des dons d'organes doit veiller à ce que tous les organes prélevés soient inscrits dans le registre canadien, au moyen des ressources disponibles. S'il n'y a pas de liste d'attente nationale, le coordonnateur doit alors téléphoner à tous les centres canadiens. Cependant, il ne faut pas confondre la liste d'attente nationale et l'entente nationale de partage.

Il y a une entente nationale de partage entre les programmes de transplantation hépatique. Une entente tacite existe entre les programmes de transplantation cardiaque, mais il n'y a pas d'entente nationale. Il n'y en a aucune pour les reins. La plupart des programmes ne souscrivent pas au partage d'organes dans le cas des patients dont l'état est jugé urgent ou critique; cependant, comme les listes d'attente sont extrêmement longues dans les grandes provinces, les petits programmes seraient désavantagés si le partage s'étendait aux patients dont l'état n'est pas critique. Par exemple, si l'Ontario comptait 150 patients en attente d'une transplantation hépatique et que la Nouvelle-Écosse en comptait 20, l'Ontario figurerait évidemment plus souvent sur la liste d'attente. Est-ce qu'il faudrait obliger la Nouvelle-Écosse à envoyer des organes en Ontario? Est-ce que nous devrions être désavantagés parce que les listes d'attente sont plus longues en Ontario et les taux de dons d'organes plus faibles? Je crois qu'il faudrait redoubler d'efforts pour accroître les taux de dons, au lieu d'élargir les ententes de partage afin d'y inclure les patients peu prioritaires.

Il faut que les programmes remercient et soutiennent les familles des donneurs. Les familles des donneurs peuvent se révéler d'ardents défenseurs de la transplantation. À l'heure actuelle, les programmes remercient les familles par écrit. La Canadian Association of Transplantation soutient une initiative qui vise à remettre des médailles aux familles des donneurs. Cette initiative ne vise que les donneurs d'organes, et nous croyons qu'il conviendrait d'instaurer un programme national fédéral pour reconnaître les dons d'organes et de tissus.

À Halifax, de nombreuses manifestations de reconnaissance ont eu lieu. J'ai été renversée par l'importance qu'attachent à ces manifestations les familles des donneurs, et de voir qu'elles sont prêtes à parcourir de grandes distances pour y assister. Elles viennent de l'Île-du-Prince-Édouard, du Nouveau-Brunswick, du Cap- Breton et de Terre-Neuve. C'est très émouvant, mais je crois qu'on peut faire encore mieux. Nous n'avons pas les ressources nécessaires pour fournir un soutien continu aux familles en deuil, et je crois qu'il existe un besoin réel à cet égard.

Il n'est pas nécessaire d'accorder un financement fixe et distinct pour soutenir les activités de transplantation et le développement de technologies. En Nouvelle-Écosse, les crédits pour la transplantation font partie du budget général des hôpitaux. Surtout au Canada atlantique, je crois qu'il faut élaborer une approche régionale, interprovinciale en matière d'approvisionnement, de gestion et de prélèvement des organes, de sensibilisation du public et du personnel médical, d'assurance de la qualité, de transport des équipes et de partage des coûts entre les provinces. Nous entretenons de bonnes relations avec nos collègues au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve, mais il n'existe aucune structure au processus officiel. C'est une lacune que nous pouvons corriger, et nous avons déjà lancé des initiatives en ce sens.

Nous avons besoin de soutien et de fonds pour mettre en oeuvre des normes nationales ainsi qu'un processus agréé régissant les dons d'organes et de tissus de même que les transplantations. Le besoin d'instaurer des normes et un processus agréé est criant si l'on pense à la prolifération des banques de tissus et des centres de traitement privés canadiens et américains dans le réseau de la santé.

En terminant, je tiens à signaler que toutes les questions que j'ai soulevées sont importantes, mais ce qu'il faut retenir à mon avis, et mes collègues sont d'accord, c'est qu'il faut investir les ressources nécessaires pour former et sensibiliser les professionnels de la santé de première ligne afin de les préparer à traiter avec les familles des donneurs, ce qui va permettre d'accroître le taux de dons. Nous devons constamment sensibiliser le public aux dons d'organes.

Merci.

Le président: Merci, madame Gurnham.

Nous allons passer immédiatement aux questions de l'opposition, en commençant par M. Keith Martin.

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

Merci beaucoup d'avoir accepté de comparaître devant notre comité.

[Traduction]

Monsieur Tremblay, quelle idée merveilleuse d'honorer les donneurs en posant un geste à la fois poétique et émouvant. J'espère que le reste du pays pourra s'inspirer de ce que vous avez fait au Québec, dans l'esprit de ce qu'a mentionné Mme Gurnham. Je crois que cela serait tout à fait exceptionnel.

J'ai quelques questions. M. Tremblay ou M. Langlais a mentionné les autocollants que les Canadiens peuvent apposer sur leur carte d'assurance-maladie. Pouvez-vous nous dire dans quelle mesure les Canadiens ont vraiment l'occasion d'apposer ces autocollants sur leur carte?

• 0940

Deuxièmement, je me demande si vous êtes au courant de l'expérience qui a été menée à Philadelphie, dans la vallée du Delaware. Le taux de dons d'organes dépasse de loin celui enregistré en Espagne, et les États-Unis sont en voie d'adopter ce programme sur tout leur territoire. Je crois que cela serait très utile.

Ma question s'adresse à Mme Gurnham: êtes-vous au courant des problèmes liés à la sélection des donneurs éventuels, surtout dans le cas de la moelle?

Enfin, lorsque vous dites qu'il faudrait dans les hôpitaux des gens capables d'aborder les familles avec empathie, serait-il juste d'affirmer qu'il ne s'agit pas de nouveaux postes, mais de gens qui travaillent déjà dans les hôpitaux et qui ont reçu une formation additionnelle à cet égard?

Merci beaucoup.

Le président: À qui vouliez-vous adresser ces quatre questions?

M. Keith Martin: Comme je l'ai dit, la première question au sujet des autocollants sur les cartes d'assurance-maladie s'adresse à M. Tremblay ou à M. Langlais. Quant à la question sur l'expérience de Philadelphie, elle s'adresse à quiconque est au courant. Et la dernière question s'adresse à Mme Gurnham.

Le président: Je tiens à signaler aux témoins que s'ils manquent de temps pour répondre aux questions, je leur donnerai l'occasion de le faire un peu plus tard: donc ne vous sentez pas obligés de répondre à la hâte.

[Français]

Monsieur Tremblay.

M. Richard Tremblay: Monsieur le président, voici les autocollants que nous distribuons au Québec présentement et qui se collent sur la carte d'assurance-maladie. Ils connaissent un grand succès actuellement et permettent d'identifier rapidement la personne ayant autorisé le don d'organes. Au niveau du Québec, cela fonctionne très bien.

On insiste beaucoup auprès de la population pour que ceux qui apposent l'autocollant sur leur carte d'assurance-maladie en parlent, en discutent en famille, pour ainsi aviser leurs proches qu'ils désirent faire un don d'organes.

Vous avez peut-être d'autres commentaires.

Mme Isabelle Gendron: Monsieur le président, le dépliant montré par M. Tremblay est distribué systématiquement lors de chaque renouvellement de carte d'assurance-maladie au Québec. De plus, tous les membres d'Info don d'organes en distribuent. La Fondation Diane Hébert en distribue environ 100 000 par année, en plus de ce que distribuent l'ACDO et les autres organismes.

[Traduction]

Le président: Quel est le taux de retour? Vous en distribuez 100 000 par année, mais combien reviennent?

[Français]

M. Donald Langlais: Chaque individu au Québec reçoit ce document ou est invité à le signer. Il n'y a pas de formule de retour nous indiquant si les gens l'ont signé ou non. Nous ne tenons pas de comptabilité du type: j'en envoie 100 000 et on m'en renvoie 80 000 ou 20 000. On présume que les gens qui consentent au don d'organes apposeront leur signature. Le texte qui apparaît là en est tout de même un quasi judiciaire: «Je déclare vouloir faire don d'organes». C'est un quasi-testament qui a été analysé sur le plan juridique.

Pour répondre à votre question, la distribution est faite, mais on ne tient pas ce type de comptabilité.

Le président: Monsieur Tremblay.

M. Richard Tremblay: Pour compléter la réponse à la question de M. le député, sur le monument que vous voyez ici sont inscrits plus de 600 noms de Québécois et de Canadiens ayant fait un don d'organe. Cette cérémonie a lieu une fois par année, au mois de septembre, et regroupe entre 2 000 et 2 500 personnes. Elles reçoivent un parchemin des mains de Son Excellence, le lieutenant-gouverneur, qui veut ainsi rendre un hommage posthume aux donneurs. Cela est très bien perçu par la population, et surtout beaucoup apprécié par les familles.

Le président: Monsieur Tremblay, voulez-vous faire circuler votre document?

[Traduction]

Il reste environ une minute pour Mary Ellen Gurnham. Vouliez- vous répondre à la question au sujet de l'expérience de Philadelphie?

Mme Mary Ellen Gurnham: En fait, je ne connais pas l'expérience de Philadelphie, mais je connais le modèle qui est utilisé au Wisconsin. J'ignore s'il s'agit du même genre de processus.

• 0945

M. Keith Martin: Howard Nathan est celui qui pilote l'expérience. Il s'agit de l'expérience de la vallée du Delaware à Philadelphie.

Mme Mary Ellen Gurnham: Non, je suis désolée. Je ne suis pas au courant.

Le président: Ne s'agit-il pas de la moelle osseuse?

Mme Mary Ellen Gurnham: Au sujet des problèmes qu'éprouve la Société canadienne du sang...

M. Keith Martin: J'ai appris que quelques personnes avaient besoin de moelle, et que d'autres personnes s'étaient portées volontaires pour subir les tests nécessaires, mais que la Société canadienne du sang n'avait pas les fonds nécessaires pour effectuer ces tests.

Mme Mary Ellen Gurnham: Je ne suis pas au courant. Nous n'avons pas eu ce problème à Halifax.

M. Keith Martin: Merci.

[Français]

Le président: Madame Picard.

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Je suis très heureuse que vous ayez accepté de participer à l'étude du Comité de la santé sur le don d'organes. Rebonjour, monsieur Langlais; il me fait plaisir de vous revoir.

Quel est le lien entre l'Association canadienne des dons d'organes et Québec Transplant? Vous semblez être très bien implantés au Québec, mais avez-vous un rôle qui touche à d'autres provinces?

M. Richard Tremblay: Nous sommes très liés avec Québec Transplant. Pour le transport d'organes, nous recevons les appels du coordonnateur de Québec Transplant qui nous dit, par exemple, avoir besoin de cinq unités pour tel centre hospitalier, pour aller chercher telle ou telle autre équipe. Il faut une unité de transport d'organes par organe. Une unité doit donc aller à l'Institut de cardiologie pour chercher un coeur, une autre doit aller chercher le foie et une autre, les poumons; l'unité change pour chaque organe. Notre lien avec Québec Transplant est donc évident.

Nous avons implanté seulement au Québec ces 11 unités-là. Nous avons mentionné dans notre présentation espérer que ce genre d'intervention humanitaire soit implanté dans d'autres provinces du Canada. Nous croyons que cet engagement de la part des policiers—je suis moi-même policier—est assez exceptionnel, car ils sont disponibles 24 heures par jour, à l'année longue. Et je vous annonce, tout à fait en primeur parce que c'est connu depuis hier, que la Gendarmerie royale du Canada vient de s'associer à notre unité de Chicoutimi pour le transport d'organes.

Nous desservons tous les centres de prélèvement reconnus au Québec, de Chicoutimi en passant par Québec, Sherbrooke et Montréal. La Gendarmerie royale du Canada vient de s'associer avec nous et avec le corps policier de Chicoutimi pour desservir adéquatement cette grande région où nous manquions de bénévoles pour effectuer les nombreux transports.

Nous recevons donc les appels de Québec Transplant. J'ai moi-même été président de cette corporation. Nous sommes très bien implantés au Québec, et nous envisageons implanter ce genre d'activités dans d'autres provinces au cours des prochaines années.

Mme Pauline Picard: Vous devez avoir un centre administratif pour être capables de recevoir les demandes de Québec Transplant. De quelle façon êtes-vous soutenus financement?

M. Richard Tremblay: Nous sommes soutenus par des corporations et surtout par d'importantes levées de fonds. Nous avons également, comme je l'ai déjà mentionné, une aide importante de la part du Groupe La Mutuelle du Canada, qui nous permet de financer nos unités partout au Québec, ainsi que de la Fondation Canadian Tire du Québec.

Nous ne recevons aucune aide gouvernementale au Québec; nous autofinançons nos activités. Depuis 1987, nos camions sont sur la route jour et nuit, 24 heures par jour. Nous distribuons les unités aux corps policiers qui acceptent de les parrainer et nous défrayons le coût de l'essence, ce qui représente un achat d'environ 25 000 $ par année. Tout cela est financé par l'Association canadienne des dons d'organes. Les véhicules des unités sont des véhicules d'urgence de police, équipés de clignotants et de sirènes, qui nous permettent d'aller rapidement d'un point A à un point B, de faire les liaisons aéroportuaires d'un hôpital à l'autre et d'acheminer à bon port les organes et surtout les équipes médicales.

Mme Pauline Picard: Monsieur Langlais, est-ce que Québec Transplant et l'Association canadienne des dons d'organes sont nées à la suite à l'étude du ministère de la Santé du Québec? Avez-vous participé à l'étude et, si oui, avez-vous alors fait des recommandations?

• 0950

M. Donald Langlais: Je n'ai pas participé à l'étude de M. Gélineau. Il faut bien dire que Québec Transplant existait lorsque M. Gélineau a présenté son rapport. Fondamentalement, il y avait un problème au niveau de la transplantation d'organes au Québec. Le ministère a confié à M. Gélineau et à son équipe le soin de réaliser une étude sur l'ensemble de la situation au Québec et d'essayer de voir si on ne pouvait pas refaire certains alignements.

Comme je le disais tout à l'heure, la sensibilisation du grand public a davantage été confiée aux organismes comme l'ACDO, la Fondation Diane Hébert et d'autres. On a demandé à Québec Transplant de s'orienter davantage vers les éléments dont on parlait tout à l'heure, soit la formation et l'éducation du personnel intrahospitalier, entre autres, et de voir à assurer le lien avec les responsables du recrutement. Donc, dans ce sens-là, je n'ai pas participé à ces travaux. Je suis en quelque sorte la personne qui est en train de mettre en place tous ces éléments-là.

Mme Pauline Picard: D'accord.

M. Donald Langlais: Bien entendu, les fondations qui existent, soit la Fondation Diane Hébert, la Fondation des maladies du rein, l'ACDO et les autres sont des organismes qui se constitués lorsqu'ils ont constaté l'importance de tout ce qui touche les dons d'organes. Cela s'est fait à partir d'expériences comme celle de M. Tremblay, qui a pris cela à coeur à un moment donné et s'est dit qu'il fallait faire quelque chose.

Ils avaient des expertises intéressantes, comme celle d'être en mesure de transporter rapidement des organes au Québec, parce que c'est toujours une question de temps dans le cas d'une transplantation. C'était, à ce moment-là, une chose fort intéressante qui nous aidait énormément.

Mme Pauline Picard: D'accord.

Le président: Brièvement, monsieur Tremblay.

M. Richard Tremblay: Madame Picard, j'ai participé à la naissance de Québec Transplant et au Comité Gélineau. Québec Transplant était auparavant Métro-Transplantation. C'est devenu Québec Transplant avec le comité du Dr Roberto Iglesias qui avait été nommé à ce moment-là par le ministre de la Santé pour voir à la naissance de Québec Transplant.

Je veux vous mentionner que les organismes comme la Fondation Diane Hébert ont tous été entendus par le Comité Gélineau pour savoir quel était le problème. Nous considérions qu'il était tout à fait anormal, en 1984, lorsque nous avons mis sur pied l'association canadienne, que des organes humains se perdent littéralement dans les taxis ou les ambulances qui transportaient les chirurgiens. Imaginez-vous un médecin avec une équipe médicale, avec une petite glacière contenant un organe humain, qui devait se rendre rapidement d'un point A à un point B. Ce n'était vraiment pas bien organisé, et des policiers qui avaient l'expertise nécessaire pour le faire étaient disponibles.

[Traduction]

Le président: Mary Ellen Gurnham, vous avez dit au début de votre exposé que votre organisme des transplantations était le seul dans les provinces de l'Atlantique. Est-ce qu'il existe un réseau de prélèvements? J'ai probablement employé la mauvaise expression. Est-ce que les provinces de l'Atlantique disposent d'un système structuré comme celui qu'a décrit M. Tremblay? Est-ce qu'il existe quelque chose de semblable?

Mme Mary Ellen Gurnham: Non, rien de comparable. Nous utilisons beaucoup l'avion, pour dépêcher les équipes chargées de prélever les organes. Les transplantations sont toutes effectuées à Halifax, où les patients doivent se rendre. S'il s'agit d'une transplantation rénale, en général le patient a suffisamment de temps pour se rendre de la maison à l'hôpital. S'il s'agit d'une transplantation hépatique ou cardiaque, les patients se trouvent déjà à Halifax, et nous les prévenons au moyen d'une pagette. La plupart du temps, nous utilisons l'avion et l'ambulance pour transporter les équipes, mais ce n'est pas aussi coordonné qu'au Québec.

Le président: Pour transporter les équipes?

Mme Mary Ellen Gurnham: Oui, et les équipes ramènent les organes avec eux.

Le président: Ainsi, vous dépêchez des équipes à différents endroits dans les provinces de l'Atlantique, et vous transportez également les receveurs éventuels.

Mme Mary Ellen Gurnham: Oui.

Le président: Qui paie tous ces frais de transport?

Mme Mary Ellen Gurnham: Le transport des équipes est payé au moyen du budget général de l'hôpital. Le patient assume lui-même ses frais de déplacement.

Le président: D'accord, merci.

[Français]

M. Richard Tremblay: Monsieur le président, nous recevons régulièrement des médecins de Halifax, que nous accueillons à Québec, à l'aéroport Jean-Lesage, ou à Sherbrooke et à Montréal. Ce sont nos unités de transport d'organes, nos policiers, qui vont chercher les médecins qui viennent de Halifax pour les reconduire dans un centre hospitalier, les attendre et les ramener avec un organe donné pour qu'ils retournent en avion à Halifax.

• 0955

[Traduction]

Le président: Mais toute la coordination est assurée par les centres de transplantation. Donc il vous incomberait...

[Français]

M. Richard Tremblay: Nous ne fonctionnons toujours qu'avec Québec Transplant. La coordination se fait via Québec Transplant, qui assure pour sa part la coordination avec les gens de Halifax.

Le président: Merci.

Madame Caplan.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Je m'intéresse à la discussion dans les Maritimes au sujet du besoin de dresser une liste d'attente nationale, et sur le fonctionnement des ententes de partage. Un témoin de Halifax nous a dit que nous disposions déjà d'une liste d'attente nationale qui risque de disparaître. Est-ce que vous êtes au courant de la liste d'attente nationale qui existe en ce moment et des problèmes qui l'entourent?

Mme Mary Ellen Gurnham: Est-ce qu'il s'agit de la liste d'attente que MORE a dressée, pour les patients de priorité 3 et 4, les patients en état critique? Oui, je la connais.

Mme Elinor Caplan: Pouvez-vous nous donner votre point de vue sur la nature des problèmes?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je crois comprendre que les responsables de MORE ont dressé cette liste dans un élan de générosité et qu'ils ne sont plus disposés à la maintenir. Ils souhaitent établir une structure différente et obtenir différents types de soutien des autres programmes de transplantation afin de maintenir la liste. Voilà ce que je sais de la situation.

Mme Elinor Caplan: Lorsque vous parlez d'un élan de générosité, savez-vous depuis combien de temps cette liste existe?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je ne pourrais pas vous dire depuis combien de temps elle existe. Depuis plusieurs années. Mais d'après ce que je comprends, et je ne suis pas sur le terrain au jour le jour, le problème est que le maintien de cette liste est très coûteux et que MORE souhaitait instaurer un genre différent de processus.

Mme Elinor Caplan: Il s'agissait d'un processus de partage, en vertu duquel tous les centres partageaient les coûts connexes?

Mme Mary Ellen Gurnham: Oui.

Mme Elinor Caplan: Savez-vous si les autres centres voulaient participer au financement?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je pense que les autres centres n'étaient pas d'accord sur la marche à suivre ou sur les fonds nécessaires pour maintenir la liste.

Mme Elinor Caplan: Ma question est donc que si vous proposez la création de normes, d'ententes de partage et de listes d'attente nationales, proposez-vous que tout cela soit imposé, étant donné que les centres semblent avoir de la difficulté à s'entendre en ce moment? Comment proposez-vous que nous donnions suite à vos recommandations?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je crois qu'il existe déjà un processus qui a donné lieu à l'élaboration de normes nationales, et je crois que la plupart de ces normes ont été approuvées par les différents intervenants et comités.

Mme Elinor Caplan: Mais vous avez dit—et je l'ai noté—que ces normes n'étaient pas appliquées uniformément et qu'on n'en rendait pas compte.

Mme Mary Ellen Gurnham: Pas en ce moment, parce que...

Mme Elinor Caplan: Selon vous, comment devrions-nous procéder?

Mme Mary Ellen Gurnham: Ces normes ne sont pas encore appliquées.

Mme Elinor Caplan: Pourquoi?

Mme Mary Ellen Gurnham: Parce qu'il s'agit encore d'une ébauche.

Mme Elinor Caplan: Qui les rédige?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je sais qu'André LaPrairie pilote le processus, et que différents comités et sous-comités examinent les normes relatives à la transplantation d'organes en général, aux banques de tissus et au sang.

Mme Elinor Caplan: Suggérez-vous que la reddition de comptes se fasse au moyen d'un agrément?

Mme Mary Ellen Gurnham: Oui. Je crois qu'il faut instaurer un processus d'agrément des programmes de transplantation afin d'assurer l'uniformité des normes.

Mme Elinor Caplan: Y a-t-il une raison pour laquelle l'association d'agrément des hôpitaux ne pourrait pas le faire aujourd'hui? Savez-vous pourquoi cela n'a pas encore été fait?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je ne crois pas qu'on leur en ait fait la demande, et je ne pense pas, vu l'absence de normes nationales reconnues, que l'association ait à sa disposition des normes à suivre en la matière. Je crois comprendre que les comités qui se sont penchés sur les normes ont demandé à l'Association canadienne de normalisation de les aider à vérifier les normes.

Mme Elinor Caplan: Croyez-vous que tous les centres devraient être obligés de mettre leurs données en commun, et le cas échéant, qui s'occuperait de les disséminer?

Mme Mary Ellen Gurnham: Il est difficile d'établir une norme et une approche nationale sans créer une certaine obligation. En théorie, rien n'oblige les hôpitaux à se faire agréer par le Conseil canadien d'agrément des services de santé.

Mme Elinor Caplan: C'est ma prochaine question.

• 1000

Mme Mary Ellen Gurnham: Cependant, leur financement et leur capacité de conserver leur statut d'hôpital d'enseignement sont indirectement liés au fait qu'ils sont agréés. Il y a donc à mon avis d'autres moyens d'encourager la participation des programmes de transplantation. Je suppose que la majorité des programmes de transplantation—sinon la totalité—font partie d'hôpitaux d'enseignement et de programmes d'enseignement. Je crois qu'il existe déjà des mécanismes pour encourager les programmes à participer au processus.

Mme Elinor Caplan: Nous parlons donc d'encouragement, de modèle consensuel, par opposition à... Vous suggérez de ne rien imposer?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je ne crois pas que ce soit la méthode adoptée dans d'autres pratiques. Je serais étonnée s'il n'y avait aucune adhésion.

Mme Elinor Caplan: On a suggéré de créer une agence nationale.

Le président: Vous pourrez y revenir à la prochaine ronde.

Monsieur Langlais, est-ce que votre organisation fait partie de l'équipe à laquelle Mary Ellen Gurnham faisait allusion lorsqu'elle a parlé de l'élaboration de normes nationales?

[Français]

M. Donald Langlais: J'expliquais tout à l'heure, lors de ma présentation, que nous participions, comme chacun des programmes de transplantation au Canada, je crois, à des études comme Standard for Perfusable Organs: Canadian General Standard and Safety of Organs and Tissues for Transplantation. Il y a là l'élaboration de normes pour qu'on soit capable d'assurer la sécurité des greffons, dans le sens où ne veut pas transmettre à quelqu'un des maladies comme le VIH. Donc, des normes sont établies.

Mme Gurnham disait qu'on ne peut pas actuellement s'assurer que chacune des provinces ou chacun des programmes les applique de façon absolue. Quand on reçoit un organe de l'Ontario, on demande aux coordonnateurs des programmes de transplantation les données épidémiologiques, sérologiques et de typage. Au Québec, entre autres, on demande certains examens. Je ne peux toutefois pas être assuré que les mêmes examens se font dans les provinces Atlantiques ou ailleurs.

Je vous donne un exemple. Le p24 est un examen biochimique qui permet de voir si quelqu'un est un porteur potentiel du VIH. Au Québec, depuis deux ans, on le fait de façon automatique, que je sache. Il faudrait vérifier si on fait ce type d'examen dans chacun des programmes. C'est là qu'il y a le problème auquel madame faisait allusion, soit celui de s'assurer que les normes soient établies, applicables et appliquées par tout le monde. Cela nous permettrait vraiment d'assurer la qualité au niveau national en ce qui a trait aux organes qui peuvent être transportés d'une province à l'autre.

[Traduction]

Le président: Dans votre recommandation numéro quatre, à la page 26, le comité recommande que l'on confie à l'organisme d'approvisionnement en produits sanguins la responsabilité du contrôle de la qualité—la conservation et la distribution des tissus, à savoir notamment l'os, les valves cardiaques, les tissus oculaires et la peau. Est-ce que le comité a fait cette recommandation à cause de ce que vous avez dit au sujet du besoin de créer un système coordonné et d'établir ce genre de normes, que ce soit au moyen de l'agrément ou d'autres instruments, ou avez-vous envisagé d'autres façons de faire?

[Français]

M. Donald Langlais: Il n'y a aucune solution miracle à cela. Il s'agit surtout, lorsque les normes sont bien établies, de les appliquer et d'établir l'obligation, par un processus quelconque, par l'agrément ou autrement, de s'assurer que ces normes soient respectées. C'est cela qui est important. Comment le seront-elles? Est-ce que ce sera sur une base consensuelle? Je n'ai pas d'opinion à ce sujet.

[Traduction]

Le président: D'accord.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Merci, monsieur le président.

J'aimerais enchaîner sur les questions que Mme Elinor Caplan a posées. En fait, je vais aborder le sujet sous un angle différent et poser à Mme Gurnham une question sur les normes en général. Il semble que nous ayons, comme vous l'avez dit, des projets de normes. Tous les intervenants et les organismes intéressés y ont consacré beaucoup d'efforts. La Loi sur les aliments et drogues autorise actuellement le gouvernement à agir. Je ne vous demande pas pourquoi les hôpitaux et les autres organisations n'ont pas agi, mais pourquoi le gouvernement fédéral n'a-t-il rien fait?

• 1005

Mme Mary Ellen Gurnham: Je ne crois pas être en mesure de répondre à cette question. Toutefois, je crois que des mesures ont été prises dans le cadre de certains programmes. Nous avons tous pu consulter les projets de normes, et nous avons, au moins à Halifax, commencé à les appliquer et à prendre les mesures correctives nécessaires pour les respecter. Nous avons instauré un mécanisme exhaustif de sélection socio-médicale que nous appliquons à tous les donneurs d'organes et de tissus. Mais rien ne garantit, comme M. Langlais vient de le dire, que le même processus existe d'un bout à l'autre du pays. Je crois que c'est exactement ce que le processus d'agrément permettrait d'obtenir. Je pense que les cliniciens veulent garantir la sécurité des malades. Ils ont besoin de soutien et de ressources pour ce faire.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je vais enchaîner et m'adresser à M. Langlais. Dans votre rapport, vous parlez très clairement de normes nationales et vous réclamez l'élaboration et le dépôt immédiat de ces normes. Pourtant, il me semble que beaucoup de travail a été déjà fait, et cette question est à l'étude au comité, comme elle l'a été devant de nombreux autres comités. Que devons-nous faire pour nous assurer que des mesures concrètes sont prises à ce sujet dès que possible?

[Français]

M. Donald Langlais: J'espère qu'il ne faudra pas attendre qu'il y ait des accidents comme ceux vécus dans le cas du sang pour mettre de l'avant un ensemble des standards.

Au Québec, les standards sont respectés d'emblée et on fait un pas supplémentaire face à toute la question sociologique de la clientèle. Ainsi, on s'est aperçu que les gens qui avaient des tatouages pouvaient présenter certains dangers. On échange les expériences vécues au Québec avec les autres programmes. L'enjeu, lorsqu'on parle entre autres d'un questionnaire sociologique qu'on remet à la famille du donneur pour être certain qu'il ne présente pas de dangers particuliers, est de savoir si les autres programmes vont le mettre de l'avant. Est-ce qu'ils vont copier notre expérience parce qu'elle est positive? On ne le sait pas. C'est en ce sens qu'il faudrait trouver la bonne façon d'y arriver. Est-ce par l'accréditation des hôpitaux?

Au Québec, le Collège des médecins du Québec sera responsable de l'évaluation de la qualité de l'acte médical. Quand il fera les études des dossiers de transplantations et de prélèvements, il vérifiera si tous les éléments requis pour assurer la sécurité y sont présents, s'ils ont été bien administrés et si les bons résultats ont été obtenus, c'est-à-dire qu'on a procédé à la transplantation d'un organe qui pouvait l'être et qu'on n'a pas procédé à la transplantation d'un organe qui ne devait pas l'être.

Actuellement, chacun fait la vérification dans son milieu. Au Québec, c'est le Collège des médecins du Québec qui est responsable de cette qualité, et je crois qu'il forme un comité pour établir une évaluation par critères objectifs afin de s'assurer que tous les éléments soient dans le dossier.

Il faudrait qu'il y ait un endroit où tous s'accorderaient pour dire qu'on ne peut rien faire en bas de tel standard. Il y a un problème en ce sens au niveau national.

Il revient à chacun des programmes d'accepter ou non de mettre en application ces standards. Quel est le niveau le plus bas et quel est le plus élevé? Chacun des programmes y travaille.

[Traduction]

Le président: Avant de passer à la question suivante, je voudrais rappeler à tous les membres du comité que les leaders à la Chambre prévoient qu'un vote pourrait se tenir à tout moment à la Chambre. Nous allons sans doute être interrompus par la sonnerie d'appel. J'espère que cela ne vous dérangera pas. Ce sera un appel d'une demi-heure avant le vote, et nous avons convenu d'interrompre l'audience cinq minutes avant la fin de cette sonnerie d'une demi- heure, si elle commence pendant la présente séance.

Madame Minna.

Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Merci.

Nous avons parlé ce matin d'un régime d'agrément national. Nous avons parlé de normes nationales concernant la qualité des organes provenant d'une autre région du pays où il n'y aurait pas de registre national, etc., ainsi que des normes en cours de rédaction ou que l'on essaie de mettre en place. Il semble y avoir toutes sortes de choses qui se produisent dans les différentes régions du pays, à différents niveaux et dans différents domaines.

• 1010

Je voudrais poser deux questions. Tout d'abord, serait-il utile qu'un organisme, sans doute le gouvernement national, joue un rôle de coordination pour convoquer une tribune nationale réunissant tous les experts des différents domaines pour discuter de l'amorce d'un changement? Par ailleurs, si ce n'est pas là un rôle approprié pour le gouvernement fédéral, quel autre rôle pourrait-il jouer? Nous avons vu des gens qui se donnent beaucoup de mal dans l'ensemble du pays—c'est du moins l'impression que j'en ai. Aujourd'hui, notre comité permanent tient des audiences sur le même sujet.

À votre avis, quel rôle devrait jouer le gouvernement national? Deuxièmement, pensez-vous qu'une tribune nationale sur ce sujet ferait avancer les choses?

Le président: Vous pouvez tous répondre si vous voulez.

[Français]

M. Donald Langlais: Je crois que la création d'un forum ou de tout autre espace où tous les experts seraient présents pour assurer l'établissement des normes serait un pas fort intéressant. Comment le gouvernement fédéral pourrait-il faire cela? Je ne connais pas toute la structure du gouvernement fédéral, mais je pense qu'il y a à plusieurs endroits des instances où on peut établir des consensus. Il y a des instances où les gens se rencontrent pour établir et reconnaître l'ensemble de ces normes.

Regardons toute la question du sang. Actuellement, le Québec a Héma-Québec alors que le reste du Canada a un autre modèle de travail. Cependant, je suis convaincu qu'Héma-Québec et l'autre structure de gestion du sang ont les mêmes normes de qualité. Il est bien clair que demain matin, s'il se présentait des besoins particuliers au Québec, on procéderait de la même façon que dans le cas des dons d'organes. Il y a des organes qui nous proviennent des autres provinces, et les autres provinces reçoivent aussi du Québec des organes et même du sang.

Donc, il y a sûrement quelque part des espaces qui permettent la reconnaissance et l'établissement de normes. Est-ce qu'il y a lieu de formaliser cela dans une forme législative ou autre? Je ne le crois pas, parce que cela deviendrait très lourd, mais le gouvernement fédéral pourrait certainement aider, être un facilitateur et, s'il le faut, être un peu le leader à la base de tout cela. Par la suite, cependant, il devra laisser aux gens la responsabilité. De plus, comme Mme Gurnham le disait de façon claire tout à l'heure, il devra identifier les problèmes au niveau national. Si, quelque part au Québec, on a transmis un organe qui pourrait être contaminé et qu'on s'en aperçoit trois semaines plus tard, il faut qu'on puisse savoir qui l'a reçu et quelles en sont les conséquences. Il faut qu'il y ait tout de suite un lien de fonctionnement. Donc, quelque part, il y a des éléments comme ceux-là qui doivent être mis en place.

Le président: Monsieur Tremblay.

M. Richard Tremblay: J'appuie totalement la démarche de M. Langlais.

Le président: Madame Gendron.

Mme Isabelle Gendron: J'appuie également sa démarche. De toute façon, ce n'est pas à la Fondation Diane Hébert que nous nous occupons de cet aspect des dons d'organes au Québec.

[Traduction]

Le président: Madame Gurnham.

Mme Mary Ellen Gurnham: En ce qui concerne les normes, je vous propose de considérer ce qui a déjà été fait en matière d'élaboration des normes, car c'est à mon sens un travail considérable, qui a fait appel à de très nombreux intervenants de toutes les régions.

Je ne suis pas convaincue qu'une tribune nationale puisse faire progresser les choses, à moins que le processus d'élaboration des normes ait comporté des lacunes, auxquelles une tribune nationale pourrait remédier. À mon avis, le gouvernement fédéral pourrait intervenir utilement en créant une infrastructure de mise en oeuvre et de vérification des normes. On peut se mettre d'accord sur des normes, mais il faut ensuite les mettre en oeuvre et vérifier si les responsables des différents programmes les appliquent correctement.

Mme Maria Minna: Ou en fait, en venir à...

Mme Mary Ellen Gurnham: Ou confier aux organismes de santé actuels la mise en oeuvre des normes et leur vérification.

Je crois que le gouvernement fédéral devrait annoncer l'imposition des normes. C'est un rôle qu'il pourrait jouer, mais il doit aussi prévoir un processus de soutien. À mon avis, c'est dans ce domaine qu'il faut travailler actuellement.

Le président: Monsieur Elley.

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Encore une fois, soyez les bienvenus à notre comité. Nous apprécions beaucoup votre présence.

Les gens commencent à le savoir, mais j'ai une fille de huit ans qui est née avec un seul rein. Ce rein est malade. S'il continue à se détériorer, la seule opération qui pourra lui sauver la vie sera une greffe du rein. Par conséquent, mon intérêt pour cette question est loin d'être uniquement intellectuelle. C'est un enjeu considérable pour ma famille et pour ma fille.

• 1015

Je suis très contrarié d'entendre parler d'une autre consultation nationale. Nous avons déjà consulté ad nauseam sur toute cette question. Si l'on consulte encore, ce n'est pas la question qui risque d'en mourir, ce sera des personnes comme ma fille. Ne parlons plus de consultation nationale. Agissons pour résoudre le problème. Nous en parlons au niveau national depuis neuf ans, je crois.

Il me semble très simple de mettre en place des normes nationales qui existent déjà, ou que l'on peut élaborer. Nous avons les infrastructures nécessaires, ce sont nos hôpitaux et notre personnel médical. Où est le problème? Pourquoi est-ce qu'on continue d'en parler? Pourquoi ne passe-t-on pas à l'action? Nous savons que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer mais au niveau local, il faut passer à l'action.

Monsieur Langlais, je vois dans votre document que dans chaque centre hospitalier au Québec, une personne est désignée pour prendre en charge le recrutement des donneurs éventuels d'organes et de tissus. De nombreux témoins nous ont dit que c'était là le principal problème, car les solutions mises en oeuvre varient d'une région à l'autre, ce qui fait qu'on laisse passer certains donneurs, tout simplement parce qu'au niveau local, on n'a pas désigné les personnes qui pourraient intervenir délicatement auprès des membres de la famille pour exposer tous les bienfaits du don d'organes.

Monsieur Langlais, si un tel système existe au Québec, est-ce qu'il a fait augmenter le nombre des dons d'organes? Dans la négative, pour quelles raisons n'y a-t-il pas eu d'augmentation? Peut-être pouvez-vous répondre dès maintenant à cette question, mais j'en ai d'autres.

[Français]

M. Donald Langlais: Il faut bien se rappeler que la nomination de ces responsables ne remonte qu'à un an. On va donc voir l'expérience se développer ainsi que les résultats.

On a toutefois une expérience très particulière avec le centre de l'Université McGill, où une personne est payée à temps complet pour travailler dans ce domaine. Cette année, on a vu augmenter de façon importante les dons d'organes dans ce centre hospitalier. Comme je le disais à des personnes, il faut faire attention quand on regarde l'augmentation du nombre de donneurs. Quand on ne la regarde que sur une année, l'expérience n'est pas probante. Il faut examiner les chiffres de deux ou trois années.

Toutefois, cette année, on a essayé de bien identifier chacun des responsables et on les a sollicités dans le cadre de rencontres, et on peut dire que le Québec n'a jamais eu autant de donneurs. Est-ce qu'il y a un lien entre les deux? Encore une fois, je suis très prudent. Je pense qu'il va falloir attendre un an, deux ans ou même trois ans avant de vraiment en voir les effets.

Ce qui est clair, et le comité l'a sûrement entendu fréquemment, c'est que l'enjeu se situe dans les centres hospitaliers, où il faut nommer des responsables et élaborer des instruments de suivi du donneur potentiel, comme je le mentionnais précédemment. On devrait justement éviter de ne pas identifier les donneurs. Une fois qu'il sont identifiés, il y a tout un processus qui doit intervenir par la suite. J'oserais dire que la démarche des relations avec la famille exige aussi une expertise.

Québec Transplant peut aider l'ensemble des centres hospitaliers au Québec quand ils sont dans cette situation. Il faut être capable de bien composer avec la famille. Toutefois, je pense que la nomination de responsables, accompagnés d'un bon entourage, devrait avoir un effet sur le recrutement de donneurs potentiels. C'est une structure intéressante.

[Traduction]

Le président: Vous pourrez intervenir de nouveau, monsieur Elley.

Madame Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Parmi les témoignages les plus émouvants que nous ayons recueillis, il y a ceux des parents dont les enfants attendent une greffe d'organes. Je prends note des excellentes propositions qui nous ont été faites aujourd'hui, mais je considère qu'une campagne de sensibilisation est essentielle si l'on veut que les Canadiens se décident à se déclarer comme donneurs mais aussi qu'ils soient plus sensibles aux interventions dont ils peuvent faire l'objet dans des périodes de grand désarroi.

• 1020

On a fait quelques excellentes propositions. Je crois que le gouvernement national peut faire preuve d'initiative et formuler des propositions, mais il peut aussi se retirer, car il existe des organismes nationaux qui font un excellent travail. Est-ce que vous pourriez nous dire quel devrait être idéalement le rôle du gouvernement fédéral auprès de ces organismes qui, à mon avis, font déjà un excellent travail?

Le président: Nous allons commencer par Mary Ellen Gurnham.

Mme Mary Ellen Gurnham: Une première mesure consisterait à accorder un soutien au travail que font déjà ces organismes, en reconnaître la valeur et, éventuellement, à insister en permanence sur l'importance et la valeur des dons d'organes et de tissus.

Je reviens constamment sur le thème des dons de tissus, car je crois qu'on a tendance à l'oublier. Par exemple, nous avons à Halifax une liste d'attentes pour les greffes de cornée qui compte au moins 200 personnes. Nous ne pouvons pas obtenir les cornées disponibles parce que nous n'avons pas suffisamment de programmes hospitaliers. Il faut insister sur l'éducation du public, car je crois que les gens réagissent de façon très émotive lorsqu'il est question de signer leur carte de donneur.

Le financement sera toujours un sujet crucial dans l'organisation de cette campagne. Dans notre budget hospitalier, nous n'avons pas d'argent pour la sensibilisation du public. Nous en faisons grâce à des levées de fonds et à des dons de sociétés privées ou des sociétés avec lesquelles nous sommes en contact. Chaque année, pendant la semaine de la transplantation, le Groupe mutuel fait un excellent travail en publiant des communiqués sur nos différentes initiatives.

Le président: Nous sommes en train de dire que des intervenants précédents nous ont indiqué que certaines régions du Canada enregistrent actuellement un surplus de cornées. Or, vous nous parlez d'un déficit...

Mme Mary Ellen Gurnham: Dans le Canada atlantique, effectivement.

Le président: ...dans le Canada atlantique. Une certaine coordination serait sans doute utile. Je le dis sans ironie, mais comme tous les membres du comité, j'essaye de réfléchir au problème. On nous a parlé ici et là de surplus de tissus et d'organes, alors qu'ailleurs, on déplore un manque criant. Il y a au moins une province où l'on nous a dit qu'il fallait exporter certains organes au-delà des frontières du Canada, à cause d'un problème d'accès local aux listes d'attente.

Vous m'excuserez d'empiéter sur votre temps de parole, et je vous rajouterai l'équivalent, mais...

Mme Mary Ellen Gurnham: Si vous me permettez de parler des cornées, nous avons effectivement entendu parler d'un surplus de cornées au Québec, mais lorsque nous avons essayé de savoir ce qu'il en était, de façon à acheter des cornées que nous pourrions offrir à nos patients, nous avons constaté qu'on récupérait à des fins de recherche des cornées non conformes aux critères de transplantation. À l'issue de ces démarches, nous avons constaté que ce n'était pas un surplus réel. Mais cela nous ramène à la nécessité de l'uniformité des critères, et cetera.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Tremblay, voulez-vous répondre à Mme Redman?

[Français]

M. Richard Tremblay: Madame la députée, je suis tout à fait convaincu que la population canadienne a besoin qu'on poursuive nos campagnes de sensibilisation, et pas seulement pendant une semaine. Ce même Parlement a, en vertu de la Loi C-202 de décembre 1996, permis que la dernière semaine complète du mois d'avril soit consacrée au don d'organes. Parler du don d'organes pendant une seule semaine ne suffit pas. Il faut en parler régulièrement. Mon humble expérience me permet de dire que lorsque nous mettons sur pied des campagnes de sensibilisation pendant la semaine nationale ou pendant le mois, nous constatons une mobilisation extraordinaire de la part de la population. Est-ce une coïncidence? J'oeuvre depuis déjà 15 ans au niveau des dons d'organes et je constate qu'à chaque fois que nous intensifions nos campagnes de sensibilisation, il y a une mobilisation beaucoup plus marquée au sein de la population.

• 1025

Je reviens à la question de la reconnaissance. Je demeure tout à fait convaincu que cette reconnaissance doit exister et être maintenue.

Nous avons humblement mis sur pied un cénotaphe. Nous allons bientôt en avoir un deuxième au Québec. Nous allons encore avoir notre cérémonie. Je suis policier depuis déjà 27 ans et j'ai reçu des médailles, dans l'exercice de mes fonctions de policier, pour beaucoup moins que ce que ces donneurs d'organes ont fait. J'ai déjà fait la recommandation que les autorités canadiennes, par leur chancellerie, remettent, à titre posthume, une médaille à la famille de chaque donneur. Monsieur le président, vous seriez renversé de voir jusqu'à quel point cela aide ces familles à accepter leur deuil.

On n'accepte pas nécessairement le deuil dans l'heure qui suit le décès ou l'acceptation de la décision de prélever les organes. Pour les familles, le deuil dure souvent plus longtemps.

J'ai reçu des médailles pour beaucoup moins que cela et je pense que les autorités canadiennes devraient songer sérieusement à faire une médaille à la mémoire des donneurs d'organes, une médaille qui serait reconnue, qui serait officielle et qui permettrait aux familles d'être reconnues d'une façon officielle.

Dans ma carrière de policier, j'ai tout fait pour mériter une médaille parce que j'ai tenté de faire mon travail le mieux possible. Mais ces gens-là font un don tout à fait anonyme, un don pour lequel ils n'attendent rien, bien entendu. Ils donnent une partie d'eux-mêmes parce qu'ils n'en ont plus besoin. C'est le plus grand des dons, et je pense que cela doit être reconnu à un haut niveau.

On doit aussi poursuivre la sensibilisation, pas seulement une semaine par année, mais l'année durant, comme le disais précédemment, afin que le don d'organes devienne un réflexe naturel et que le processus devienne moins un compliqué, ce qui permettra de sauver des vies.

[Traduction]

Mme Karen Redman: J'en suis bien consciente, mais je rappelle qu'un médecin—je crois que c'était le Dr MacDonald à Halifax—nous a dit que nous n'atteignons pas les 40 p. 100 du modèle espagnol mais qu'en réalité, nous pouvons atteindre un très bon taux d'acquisition de donneurs à condition de solliciter les dons correctement. Je sais bien que le problème n'est pas simple; c'est une question de coordination et d'approche concertée. En tout cas, j'ai beaucoup apprécié les points de vue que vous nous avez soulignés aujourd'hui.

Le président: Monsieur Martin.

M. Keith Martin: Comme l'a dit mon collègue M. Elley, l'heure n'est plus à l'étude de la question. Le problème existe depuis longtemps. Plus on attend, plus il y aura de décès.

Je voudrais vous dire que le public est déjà favorable aux transplantations. Tous les sondages le prouvent et je pense qu'il faudra multiplier les possibilités de devenir donneurs d'organes.

Je voudrais dire à M. Tremblay qu'en ce qui concerne la carte... Je ne sais pas ce qui se passe au Québec, mais ma carte d'assurance-maladie reste dans mon portefeuille depuis 10 ans et elle a dû s'empoussiérer. Il faudrait que les gens aient plusieurs occasions successives de se déclarer donneur d'organes. J'aimerais avoir votre avis à ce sujet.

Deuxièmement, madame Gurnham, pour résoudre le problème des surplus dans certaines provinces et des déficits dans d'autres, on pourrait peut-être envisager une base de données nationale des donneurs d'organes.

Enfin, comme la greffe d'organe est une opération que la médecine maîtrise bien, le comité ne devrait pas perdre son temps à mettre les points sur les i pour ce qui est des normes nationales, mais prendre au lieu deux ou trois mesures très simples qui pourraient être mises en oeuvre dès demain et qui augmenteraient sensiblement le taux des dons d'organes dans notre pays.

Le président: J'ai l'impression que ce dernier argument n'était pas une question, monsieur Martin, et je vais donner directement la parole à M. Tremblay pour la réponse à votre première question, puis à Mme Gurnham pour la réponse à votre deuxième question.

[Français]

M. Richard Tremblay: Effectivement, il y en a beaucoup qui n'ont pas utilisé leur carte d'assurance-maladie depuis longtemps. C'est pour cette raison que je parlais précédemment d'une campagne de sensibilisation continue sur le don d'organes. Il faut que cela soit répété sans cesse et il faut insister auprès des familles pour qu'elles prennent une décision relative au don d'organes. C'est extrêmement important pour éviter qu'il y ait de la confusion et pour que le milieu hospitalier puisse intervenir rapidement lorsqu'on sort cette carte de don d'organes. C'est pour cette raison qu'il faut non seulement tenir quelques campagnes annuelles, mais aussi sensibiliser continuellement la population au don d'organes partout dans le pays.

• 1030

[Traduction]

Le président: Et sur la deuxième question?

M. Keith Martin: Je tiens juste à vous remercier, monsieur Tremblay, d'avoir insisté sur le fait que les gens qui signent leur carte doivent en parler à leur entourage. Merci.

Mme Mary Ellen Gurnham: Je crois que nous n'avons pas vraiment abordé le problème des dons de tissus, qui se pose notamment en ce qui concerne les cornées. Il faudrait absolument progresser sur le problème des tissus comme les os, la peau, les cornées et la moelle osseuse.

Il y a certainement moyen d'améliorer les choses si certaines régions du pays connaissent des surplus de cornées et que d'autres régions, qui en auraient besoin, ignorent ce surplus. Encore une fois, il faudrait construire une infrastructure qui permette le partage de l'information. Une base de données nationale à ce sujet serait sans doute utile. Tout dépend de la façon dont elle sera établie, tenue à jour et gérée. Mais je pense que nous n'avons pas véritablement réglé la question des dons de tissus et de leur distribution; il faut absolument s'en occuper.

Le président: Merci.

Monsieur Jackson.

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. Je n'ai qu'une question, sans doute pour le Dr Langlais, mais les autres invités pourront y répondre également.

À vous écouter, j'ai l'impression d'une certaine angoisse lorsque vous devez prélever les organes, ce qui exige un travail important et minutieux, car il faut respecter des délais impératifs, etc. Il faut également se préoccuper des patients; quelqu'un a parlé, je crois, des tatouages; le patient peut aussi avoir des malaises, et soudain, après tout ce travail, un patient va recevoir un organe et va se retrouver avec une autre maladie.

Y a-t-il lieu de craindre que vous n'ayez pas assez d'information lorsque vous prélevez un organe? Est-ce qu'on vérifie suffisamment que l'organe, provient d'une personne qui ne risque pas de transmettre une autre maladie?

Le président: Monsieur Langlais?

[Français]

M. Donald Langlais: Pour ce qui est de l'expérience qu'on a vécue au Québec, je peux vous assurer que nous respectons l'ensemble des normes que nous avons contribué à établir dans le cadre des comités nationaux. Je disais tout à l'heure qu'on allait même un peu plus loin en faisant des examens physiques, entre autres lorsque les personnes ont des tatouages. Nous faisons remplir un questionnaire sociologique aux proches du donneur potentiel pour nous assurer qu'il n'y a pas d'aspects de sa vie qui risqueraient de nous donner de l'information contradictoire. Donc, compte tenu des connaissances scientifiques actuelles, les prélèvements d'organes au Québec sont faits avec toute la sécurité possible.

On demandait aussi si toutes ces normes étaient respectées de la même façon dans chacune des autres provinces. Je crois que oui, mais je ne peux pas l'affirmer parce qu'il n'y a pas, quelque part, quelqu'un qui dit: Voici les normes minimales que tout le monde doit respecter.

Je suis convaincu qu'à Halifax ou en Ontario, dans le programme MORE, tous les examens nécessaires pour faire un prélèvement sécuritaire sont faits, mais encore une fois, je me fie à la bonne foi des gens, tout comme les gens de l'Ontario se disent qu'il est certain que les gens du Québec font du bon travail. Nous n'avons toutefois pas d'endroit où nous pouvons nous assurer que tout est fait de façon sécuritaire. Je peux dire que ce qu'on fait actuellement au Québec est très sécuritaire.

Je suis certain que Mme Gurnham va pouvoir dire la même chose, à savoir qu'il n'y a pas d'endroit où toute cette question du respect des normes est formalisée.

• 1035

[Traduction]

M. Ovid Jackson: On nous a dit que l'agrément apportait une solution. Y a-t-il d'autres organismes qui pourraient vous aider à faire en sorte que l'on ait non seulement une norme, mais que la norme soit en outre très élevée?

[Français]

M. Donald Langlais: Il se fait actuellement des travaux, et la communauté scientifique est présente à plusieurs endroits afin d'établir des normes et des procédures de prélèvement ou autres. Le gouvernement fédéral pourrait appuyer cette démarche d'une certaine manière, par un secrétariat ou autrement, pour s'assurer que ces comités puissent non seulement exister grâce à la bonne foi de tout le monde mais aussi avoir un endroit où on pourrait obtenir cette information rapidement, en téléphonant à un numéro unique. Ce serait beaucoup. Actuellement, la présidence de ces comités est parfois à Terre-Neuve, à Vancouver, au Québec ou en Ontario, et il n'y a pas de continuité. On n'a aucune assurance de continuité. Si on pouvait n'obtenir que cette continuité, ce serait déjà un grand pas.

[Traduction]

Le président: Monsieur Jackson, est-ce que c'est tout?

M. Ovid Jackson: Oui, merci, monsieur le président.

Le président: Madame Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: Je voudrais poser une question à Mme Gendron.

Plusieurs témoins sont venus nous dire que la signature du formulaire de consentement au don d'organes, par exemple sur un permis de conduire, ne constitue pas un choix éclairé. C'est très contesté par les familles puisqu'elles ne respectent pas nécessairement la signature de leur proche.

Selon votre expérience à la fondation, est-ce que l'autocollant qu'on appose actuellement au Québec sur la carte d'assurance-maladie et l'information qu'on met sur cet autocollant constituent un choix éclairé?

Mme Isabelle Gendron: Je ne saurais vous dire comment on fait l'identification d'un donneur dans les hôpitaux, mais d'après ce que j'entends dire, on demande généralement la permission de la famille avant de procéder. Dans le fond, l'autocollant que nous distribuons sert davantage à faire de la promotion et de la sensibilisation. Une signature sur l'autocollant apposé en arrière de la carte d'assurance-maladie est légalement recevable, mais dans les faits, je pense qu'on demande généralement aux plus proches parents de signer l'autorisation.

Dans le dépliant qu'on fait parvenir à chacun, on incite les Québécois à en parler à leurs plus proches parents pour que ces derniers soient au courant de leur décision dans une éventuelle situation de don d'organes.

Mme Pauline Picard: Si j'ai bien compris, dans l'information que vous envoyez, vous demandez à la personne qui appose sa signature sur l'autocollant à l'arrière de sa carte d'assurance-malade de demander à ses plus proches parents de signer aussi.

Mme Isabelle Gendron: Jusqu'au mois d'avril 1998, on distribuait des cartes de don d'organes. À l'époque, on devait identifier deux personnes qui étaient au courant de notre décision; il fallait donc leur en parler. En avril 1998, le ministère de la Santé et les membre d'Info don d'organes ont créé l'autocollant parce qu'on s'était aperçu que dans les faits, le personnel hospitalier avait déjà du mal à trouver la carte d'assurance-maladie et qu'il lui était encore plus difficile de se mettre à fouiller dans les effets personnels pour trouver la carte de don d'organes. Cette expérience n'a pas été concluante.

Mme Pauline Picard: La carte d'assurance-maladie est toujours là. Quand on va à l'hôpital ou chez le médecin, il faut la présenter. Il y a plein de gens autour de la personne qui peuvent voir qu'elle a apposé sa signature et souhaite faire un don d'organes. Les membres de la famille ne peuvent pas nier que la personne a apposé sa signature.

Mme Isabelle Gendron: C'est cela.

Le président: Monsieur Langlais.

• 1040

M. Donald Langlais: Je vais vous lire le texte qui est sur l'autocollant:

    À mon décès, je consens à ce qu'on prélève tous les organes pouvant servir à des greffes.

Cette formulation a vraiment une valeur quasi testamentaire. Je sais que Mme Gendron ne participe pas directement à cela, car c'est nous, à Québec Transplant, qui nous en occupons. On pourrait le faire de façon autonome et ne pas demander le consentement des proches puisque la personne a signé sa carte, ce qui est quasi testamentaire. Si on allait devant les tribunaux, on aurait probablement gain de cause.

Cependant, on ne le fait pas et on pose toujours des questions aux proches, même si la personne qui a signé a pris le temps d'aviser ses proches de sa décision, parce qu'il faut savoir si la personne était toujours prête à faire un don d'organes. Est-ce qu'elle aurait pu changer d'idée au cours des derniers mois?

Quand la question est bien posée et que la réalité des choses est bien expliquée, quand il y a une bonne équipe pour entourer la famille et l'aider à faire face aux divers aspects de la situation de mort cérébrale-là, il n'y a que de 10 à 15 p. 100 des gens qui refusent. Les autres acceptent. Mieux la famille est informée, plus les craintes associées à la reconnaissance de la mort cérébrale tombent et plus les familles donnent leur accord.

Donc, notre travail auprès de la famille est davantage associé à des éléments d'ordre social qu'à des éléments d'ordre légal. Les éléments sociaux n'ont pas une importante influence négative. Ce ne sont pas 50 p. 100 des gens qui refusent, mais plutôt 10 p. 100 des gens.

Mme Pauline Picard: Vous avez parlé tout à l'heure d'un formulaire sociologique que vous faites remplir aux familles.

M. Donald Langlais: Quand le coordonnateur de Québec Transplant est en fonction, il commence toujours par faire un ensemble de tests sérologiques, immunologiques et autres, mais il doit aussi poser des questions à la famille et remplir un questionnaire sociologique. On pose à la famille des questions très précises et très personnelles sur le donneur potentiel afin de voir s'il y a des éléments qui pourraient faire en sorte qu'il ne serait pas un donneur adéquat. C'est le coordonnateur de Québec Transplant qui pose les questions. D'autre part, on demande au médecin qui maintient la vie artificielle de faire un examen physique très précis. On parlait de tatouages parce que c'est quelque chose de très visible, mais on voudrait aussi savoir pourquoi quelqu'un se pique dans le creux du bras, par exemple. À ce moment-là, on demande à la famille si elle est au courant de cela. La famille peut dire, par exemple, que la personne a reçu tel médicament. C'est très important qu'on le sache.

Mme Pauline Picard: Merci.

[Traduction]

Le président: Madame Caplan.

Mme Elinor Caplan: Merci.

J'ai beaucoup apprécié les exposés de nos témoins d'aujourd'hui. Ils ont abordé différents sujets qui seront très utiles au comité lorsqu'il devra faire ses recommandations. Nos témoins d'aujourd'hui nous ont dit, comme d'autres, qu'il s'agit d'un domaine très complexe à cause de la compétence partagée. Je vois un certain nombre de têtes qui opinent.

On nous a parlé d'information du public. Dans le domaine de l'éducation du personnel, vous avez parlé de la nécessité de la formation continue des médecins et des infirmières, et j'ai dressé une liste de tous ceux qui peuvent intervenir dans le processus. J'aimerais que chacun d'entre vous me dise qui est principalement responsable de la formation continue des médecins et des infirmières. Je vais commencer au bas de ma liste.

Tous les médecins et les infirmières appartiennent à des associations professionnelles. Ils sont obligés d'adhérer à des collèges, des ordres professionnels et à des organismes d'agrément qui peuvent jouer un rôle disciplinaire. Lorsqu'ils travaillent dans un centre de transplantation, ils sont généralement affiliés à une université, comme vous l'avez dit. Ce sont des hôpitaux d'enseignement. L'université a un conseil d'administration. L'hôpital en a un également. Il y a aussi la province, qui finance les hôpitaux par l'intermédiaire des budgets globaux, puis enfin, le gouvernement fédéral.

• 1045

À votre avis, qui est responsable de la formation continue du personnel? Est-ce que dans ma liste, j'aurais oublié un élément important qui pourrait assumer cette responsabilité? Il me semble que le gouvernement fédéral est assez loin des préoccupations de formation continue, n'est-ce pas? S'il vous plaît, qui devrait s'en charger, à votre avis?

Le président: Nous allons commencer avec M. Langlais, et je vous demanderai d'être bref dans votre réponse. Allez-y.

[Français]

M. Donald Langlais: Je le croirais, ayant travaillé énormément dans les centres hospitaliers. La meilleure expérience et la meilleure formation s'acquièrent dans le milieu. C'est dans le milieu que les gens se responsabilisent. Le centre hospitalier universitaire, qui a pour vocation la recherche et l'enseignement, est un lieu à privilégier au niveau de l'enseignement.

Quand on monte dans la hiérarchie des responsabilités, on voit que le gouvernement a probablement un rôle de commitment à jouer. J'emploie le terme anglais parce que je l'aime bien. Le gouvernement doit dire à tout le monde qu'il reconnaît l'importance de cette stratégie et qu'il est prêt à aider sous une forme ou une autre. Je ne parle pas obligatoirement d'argent. Il peut s'agir d'autres formes d'aide. Toutefois, il y a quelque chose qui découle de cet engagement, bien que je pense que c'est à la base que l'enseignement va se faire.

En Espagne, c'est vraiment sur les lieux que la formation est donnée, soit dans les hôpitaux universitaires de formation. C'est là que la responsabilité...

[Traduction]

Mme Elinor Caplan: C'est la responsabilité des hôpitaux universitaires...

M. Donald Langlais: Oui.

Mme Elinor Caplan: ...et de leurs conseils d'administration de veiller à ce que le personnel soit bien formé, n'est-ce pas? Merci.

Y a-t-il d'autres opinions?

Le président: Madame Gurnham.

Mme Mary Ellen Gurnham: Je crois que la formation du personnel des hôpitaux universitaires relève de la responsabilité des hôpitaux et de leur conseil d'administration. Cependant, les donneurs ne sont pas tous dans des hôpitaux universitaires. Le problème, c'est que s'il y a un donneur tous les cinq ans au Centre communautaire de Neil's Harbour—je ne sais pas s'il y a encore un hôpital à cet endroit—il est à peu près impossible de maintenir le niveau d'expertise nécessaire. C'est pourquoi il faut trouver des personnes dans les hôpitaux communautaires secondaires et tertiaires qui pourront assumer cette responsabilité. Dans notre hôpital universitaire, nous avons un médecin qui est chargé de l'éducation du public et du personnel soignant dans le cadre du programme de transplantation, mais nous ne sommes présents que dans un seul centre. Nous essayons de rejoindre le reste de la province, mais cela ne suffit pas.

Mme Elinor Caplan: Est-ce bien le rôle des hôpitaux universitaires? N'est-ce pas plutôt le rôle du ministre de la Santé? Pensez-vous qu'un organisme national pourrait jouer ce rôle? Dans votre province, les ordres professionnels des personnes qui interviennent dans les transplantations doivent-ils veiller à ce que ces personnes soient à jour dans leurs connaissances?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je crois que ce rôle doit être partagé. Les universités peuvent l'assumer grâce aux programmes de formation continue des médecins et des infirmières. Le programme des transplantations doit y veiller. Cependant, nous avons besoin de soutien et de ressources supplémentaires, et c'est là que le gouvernement provincial devrait intervenir. Les autorités d'agrément devraient se charger des preuves des résultats de la formation continue dans le domaine des transplantations.

Mme Elinor Caplan: Vous pensez donc que les organismes d'agrément ont aussi un rôle à jouer, n'est-ce pas?

Mme Mary Ellen Gurnham: Oui, éventuellement.

Mme Elinor Caplan: Pour faire en sorte que la formation du personnel...

Le président: Nous allons passer à la question suivante.

Mme Elinor Caplan: Merci; tout cela est très utile.

Le président: Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, monsieur le président.

J'aimerais rester sur le sujet de la responsabilité et du rôle du gouvernement en matière de réglementation des dons et des greffes d'organes et de tissus.

Tout d'abord, je voudrais demander à tous nos invités s'ils ont reçu un exemplaire de la proposition cadre du gouvernement en matière de gestion du risque, daté de mai 1998. J'allais vous demander votre avis, si vous l'avez reçu. Il faudrait donc faire en sorte que tous les participants reçoivent un exemplaire de ce document, car il est important pour les travaux du comité et il pourrait nous aider à progresser.

• 1050

Je voudrais vous poser quelques questions à partir de ce document, et recueillir votre avis, si possible. Il me semble que...

Le président: Madame Wasylycia-Leis, est-ce que vous voulez que nos témoins le commentent maintenant, ou est-ce que vous leur demandez d'envoyer leur réponse au comité une fois qu'ils auront reçu le document?

Mme Judy Wasylycia-Leis: Ce sont deux choses différentes, monsieur le président. J'aimerais que nos invités d'aujourd'hui reçoivent un exemplaire de ce document et qu'ils nous envoient leurs commentaires par courrier. Mais je voudrais poser une question relative à ce document et à laquelle ils pourront peut-être répondre dès aujourd'hui.

D'autres intervenants nous ont dit que toute cette question de dons d'organes commence à prendre une tournure commerciale. Elle pourrait donner lieu à d'importantes opérations d'achat, de vente, d'échange et d'importation. Quel rôle le gouvernement pourrait-il jouer en ce qui concerne la réglementation des produits importés au Canada?

Ce document propose notamment que l'on procède comme on le fait actuellement pour les produits alimentaires, c'est-à-dire que l'on fixe des critères sur papier, et que les importateurs soient contraints de s'y conformer. C'est essentiellement une procédure d'approbation administrative, qui ne nécessite pas énormément de ressources pour l'inspection et la surveillance. On propose même qu'en cas d'urgence—et il s'agit d'un domaine où les urgences sont nombreuses—une procédure d'autorisation d'urgence puisse intervenir, auquel cas le gouvernement se dégage de toute responsabilité. Je trouve cette perspective préoccupante.

J'aimerais savoir si vous avez réfléchi à ces questions et j'aimerais connaître votre réaction initiale. Par ailleurs, j'attendrai vos commentaires écrits concernant le document.

Le président: Je ne sais pas si vous voulez essayer de répondre; allez-y, madame Gurnham.

Mme Mary Ellen Gurnham: Je ne pense pas pouvoir véritablement répondre à votre question avant d'y avoir réfléchi, mais je crois que le problème se pose davantage à propos des tissus que des organes.

Des banques américaines de tissus sont intervenues en Nouvelle-Écosse et dans la région de l'Atlantique. Elles peuvent offrir aux hôpitaux des choses que nous sommes dans l'impossibilité de leur fournir. Elles arrivent et fournissent aux hôpitaux toutes les ressources nécessaires au prélèvement des tissus, qui sont ensuite expédiés aux États-Unis pour transformation. Il est très peu probable qu'ils puissent revenir au Canada, parce que notre demande n'est pas aussi forte que la demande américaine. Notre programme a été sollicité par une banque américaine de tissus, et je suis allée solliciter notre gouvernement provincial, mais j'ai constaté qu'il n'y avait aucune politique concernant les initiatives de ce genre, que notre gouvernement soit ou non... personne n'avait jamais pensé à ce genre de possibilité.

Ce qui me préoccupe dans toute cette histoire, c'est le risque éventuel pour le bassin de donneurs, car la population ne fait pas la différence entre le don d'organes et le don de tissus, et si elle en vient à considérer que des tissus et des organes sont vendus à l'étranger, je pense que les gens seront beaucoup moins disposés à se déclarer donneurs d'organes.

Le problème est très complexe. Les États-Unis nous achètent beaucoup de tissus actuellement, à cause de l'offre et de la demande. Rien n'est prévu pour réglementer ce commerce, mais je crois qu'il faudrait le réglementer. À mon avis, c'est une réelle lacune.

Le président: Est-ce que quelqu'un d'autre veut répondre? Bien, merci.

Monsieur Elley.

M. Reed Elley: Merci beaucoup, monsieur le président.

Nos invités pourraient-ils m'aider quelques instants? Lorsqu'un patient arrive à l'hôpital pour une raison quelconque, s'il est donneur d'organes et s'il a signé un document quelconque indiquant qu'il était donneur d'organes, est-ce que cette indication apparaît automatiquement à son dossier?

Mme Mary Ellen Gurnham: Dans notre programme, oui.

M. Reed Elley: Bien. Et au Québec?

[Français]

M. Donald Langlais: On va le reconnaître par sa carte de santé. C'est sur la carte de santé que l'autocollant aura été posé. Si le patient évolue vers une situation où il s'approche de la mort cérébrale, quelqu'un voulant vérifier s'il est un donneur d'organes n'aura qu'à prendre la carte d'assurance-maladie et à regarder à l'endos de celle-ci. C'est aussi simple que ça.

• 1055

[Traduction]

Mme Reed Elley: C'est donc le cas en Nouvelle-Écosse...

Mme Mary Ellen Gurnham: C'est le cas au Centre des sciences de la santé Queen Elizabeth II.

M. Reed Elley: C'est donc ce qui se passe dans un hôpital de Nouvelle-Écosse. Ce n'est pas automatique au Québec et ce n'est sans doute pas le cas dans le reste du Canada, mais nous ne le savons pas.

Ne serait-il pas possible d'inscrire dans un registre national les noms de toutes les personnes qui ont signé une carte de dons d'organes? Toutes les provinces peuvent collaborer à l'entreprise, et tous les noms seraient versés dans un registre national. À chaque arrivée d'un patient à l'hôpital, quand on consulterait son dossier, un agent serait chargé de vérifier son nom ou son numéro d'identification pour voir s'il s'agit d'un donneur d'organes, et ce renseignement serait inscrit dans son dossier qui le suivrait dans tout le système hospitalier. Y a-t-il des commentaires?

[Français]

M. Donald Langlais: Je dirai encore une fois qu'il faut reconnaître ce qu'est un donneur d'organes; c'est quelqu'un qui est en mort cérébrale. On peut s'identifier en s'enregistrant dans un grand système, en signant la carte d'assurance-maladie ou de n'importe quelle autre façon. S'il n'y a pas quelque part une identification, face à la mort cérébrale de cet individu qui est un donneur potentiel, on n'aura pas de résultats. La clé de tout cela est de savoir qui est un donneur d'organes, de préciser cette situation-là et, par la suite, d'intervenir de façon positive. On va bien s'entendre. Au Québec, même si un donneur potentiel n'a pas apposé sa signature sur sa carte d'assurance-maladie, on demande aux proches s'ils sont d'accord ou non sur le don d'organes. On obtient de cette façon beaucoup de dons d'organes. Ce ne sont pas des gens qui se sont enregistrés d'une manière ou d'une autre, mais on obtient quand même des résultats.

Je ne pense pas que la façon de s'enregistrer change quelque chose. Il faut identifier les donneurs et procéder à l'ensemble de la démarche. C'est une opinion que...

[Traduction]

M. Reed Elley: J'essaye de voir en quoi vos commentaires pourraient aller à l'encontre de ma recommandation concernant un registre national.

[Français]

M. Donald Langlais: La question est utile dans le fond. Pourquoi avoir un registre national?

[Traduction]

M. Reed Elley: Je crois qu'il y a des candidats au don d'organes qui passent inaperçus, et qu'on ne retrouve plus. Nous essayons de resserrer le système au Canada de façon qu'on ne perde plus ces cas-là. Si personne, à l'hôpital, ne sait que ces gens sont des donneurs éventuels, rien ne se passera. Il faut donc trouver une solution.

Mme Gurnham veut-elle faire des commentaires?

Mme Mary Ellen Gurnham: Je crois qu'à moins d'avoir des agents dans les hôpitaux qui vont poser des questions, le fait que l'indication apparaisse au dossier n'y changera rien. En Nouvelle-Écosse, nous avons une marque d'identification du donneur sur la carte d'assurance-maladie, et je crois que d'ici l'an 2000, tous les gens qui ont une carte d'assurance-maladie auront la possibilité d'y inscrire leur choix.

Nous sommes en train d'établir un lien avec les hôpitaux grâce à MSI, de façon que nous puissions introduire les données. Je ne sais comment le système va marcher, car les liens ne sont pas encore établis. Avant de faire les dépenses d'infrastructure nécessaires à l'établissement d'un registre national, il serait peut-être utile d'évaluer l'efficacité des liens avec la base de données provinciale, mais je crois qu'il faut considérer deux éléments: il faut un système d'identification des donneurs, et il faut ensuite du personnel spécialisé en milieu hospitalier qui pourra poser les questions essentielles en temps opportun.

M. Reed Elley: Il faut faire attention à ne pas perdre de temps sur ce problème, car avec les moyens technologiques actuels, on devrait pouvoir accéder instantanément aux donneurs d'organes.

Le président: Merci, monsieur Elley.

Avant de terminer, je voudrais vous demander une précision. Peut-être ne devrais-je adresser ma question qu'à M. Langlais et à Mme Gurnham, mais je crois savoir que dans le système espagnol, il n'y a pas à proprement parler de registre. Le donneur potentiel est identifié une fois que la mort cérébrale a été prononcée ou une fois que les procédures hospitalières permettent de déclarer le décès, et à ce moment-là, la personne décédée devient un donneur potentiel.

Pourriez-vous me préciser ce qui se passe ici? Nous avons un donneur potentiel qui s'est auto-identifié en signant une carte ou quelque autre document, ou est-ce que son nom est inscrit au tableau après le décès?

• 1100

Mme Mary Ellen Gurnham: Nous posons la question lors de l'admission. Encore une fois, je crois que les pratiques ne sont pas toutes uniformes. Ensuite, nous vérifions les dossiers pour essayer de voir si nous avons bien repéré tous les donneurs.

Les choses se passent de différentes façons. Nous posons des questions lors de l'admission, nous en posons également lorsque la situation du patient évolue de telle façon qu'il va devenir un donneur potentiel.

Mme Elinor Caplan: Je voudrais poser une dernière courte question.

Le président: Elle devra être très courte.

Mme Elinor Caplan: Toujours à propos des vérifications, des rôles et des responsabilités, pensez-vous que le gouvernement provincial, par l'intermédiaire de la réglementation d'application des lois sur les hôpitaux publics, peut intervenir pour imposer des procédures en matière d'éducation, pour interroger les hôpitaux et leur demander de faire rapport, ou par l'intermédiaire de procédures d'agrément?

Mme Mary Ellen Gurnham: Oui. Ce qui manque actuellement, ce sont des rapports et des mécanismes de reddition des comptes.

Mme Elinor Caplan: Ainsi, les provinces pourraient en prendre l'initiative.

[Français]

M. Richard Tremblay: Monsieur le président, je m'attends à recevoir le document publié en mai 1998 dont Mme la députée parlait tout à l'heure.

N'ayant pas encore pris connaissance du document, le seul commentaire que je puisse faire là-dessus, c'est qu'il faut être extrêmement vigilant et prévoyant lorsqu'on parle de commercialisation d'organes ou de tissus. Si on n'a pas des contrôles très serrés dans cette optique, on peut nuire de façon irréversible à la cause du don d'organes. Il faut être extrêmement vigilant lorsqu'on parle de signes de dollars et de don d'organes. C'est inacceptable pour les familles. Vous comprendrez que j'ai hâte de prendre connaissance du document.

[Traduction]

Le président: Je vous accorde dix secondes pour votre conclusion.

Mme Mary Ellen Gurnham: En réponse à votre dernière question, je crois que l'agrément assurerait une plus grande uniformité à l'échelle nationale.

Le président: Au nom de tous les membres du comité, je tiens à remercier chacun d'entre vous d'avoir pris le temps de se déplacer pour venir nous informer. C'est Mme Gurnham qui a fait la plus grande distance, mais les autres se sont déplacés également. Je vous remercie très sincèrement d'avoir fait part de votre expérience et de vos connaissances aux membres du comité.

La séance est levée.