Passer au contenu
Début du contenu

Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
PDF

36e Législature, 1ère Session


HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 61

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 17 février 1998

VAFFAIRES COURANTES

. 1005

VLES NOMINATIONS PAR DÉCRET
VM. Ovid L. Jackson
VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Ovid L. Jackson
VDÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES
VM. Bernard Patry
VPÉTITIONS
VLe CRTC
VM. Lee Morrison
VLes agents de la sécurité publique
VM. Paul Szabo
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Ovid L. Jackson
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VProjet de loi C-4. Troisième lecture>
VL'hon. Ralph E. Goodale

. 1010

. 1015

. 1020

. 1025

. 1030

. 1035

VM. Jay Hill

. 1040

. 1045

. 1050

. 1055

VMotion

. 1100

VM. Leon E. Benoit

. 1105

. 1110

. 1115

. 1120

VM. Jean-Guy Chrétien

. 1125

. 1130

. 1135

. 1140

. 1145

VM. Dick Proctor

. 1150

. 1155

. 1200

VM. Garry Breitkreuz

. 1205

. 1210

VM. Jake E. Hoeppner
VM. Cliff Breitkreuz
VM. Wayne Easter
VM. Rick Borotsik

. 1215

. 1220

. 1225

. 1230

. 1235

VM. Wayne Easter

. 1240

VM. Jay Hill
VM. Joe McGuire

. 1245

. 1250

VM. Garry Breitkreuz

. 1255

VM. Roy Bailey

. 1300

VM. Wayne Easter
VM. Garry Breitkreuz
VM. Jake E. Hoeppner

. 1305

. 1310

VM. Wayne Easter

. 1315

VM. Jake E. Hoeppner
VM. Garry Breitkreuz

. 1320

. 1325

. 1330

VM. Paul Bonwick

. 1335

VM. Gerry Byrne

. 1340

. 1345

. 1350

VM. Garry Breitkreuz

. 1355

VM. Jake E. Hoeppner
VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER DE 1998
VM. George Proud

. 1400

VLE SÉNAT
VM. Inky Mark
VL'ALPHABÉTISATION
VM. Gurbax Singh Malhi
VL'UNITÉ NATIONALE
VMme Karen Redman
VLE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE
VM. Claude Drouin
VLE SÉNAT
VM. John Duncan

. 1405

VLE RENVOI À LA COUR SUPRÊME
VMme Christiane Gagnon
VL'UNITÉ NATIONALE
VM. Ted McWhinney
VLE RENVOI À LA COUR SUPRÊME
VMme Maud Debien
VLE FONDS TRANSITOIRE POUR LA CRÉATION D'EMPLOIS
VMme Eleni Bakopanos
VLA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VM. David Chatters

. 1410

VL'ÉCONOMIE
VMme Raymonde Folco
VLA DÉFENSE NATIONALE
VM. Gordon Earle
VMME MONIQUE VÉZINA
VM. Denis Coderre
VL'UNITÉ NATIONALE
VL'hon. Jean J. Charest

. 1415

VLA JUSTICE
VM. John Maloney
VQUESTIONS ORALES
VL'ÉCONOMIE
VM. Preston Manning
VL'hon. Paul Martin
VM. Preston Manning
VL'hon. Paul Martin
VM. Preston Manning
VL'hon. Paul Martin

. 1420

VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin
VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin
VLE RENVOI À LA COUR SUPRÊME
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Anne McLellan
VM. Gilles Duceppe

. 1425

VL'hon. Anne McLellan
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Stéphane Dion
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Anne McLellan
VLE MOYEN-ORIENT
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Lloyd Axworthy
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Lloyd Axworthy

. 1430

VLE RENVOI À LA COUR SUPRÊME
VL'hon. Jean J. Charest
VL'hon. Stéphane Dion
VL'hon. Jean J. Charest
VL'hon. Herb Gray
VM. Preston Manning
VL'hon. Stéphane Dion
VM. Preston Manning
VL'hon. Stéphane Dion
VM. Pierre Brien

. 1435

VL'hon. Stéphane Dion
VM. Pierre Brien
VL'hon. Stéphane Dion
VLE SÉNAT DU CANADA
VMme Deborah Grey
VL'hon. Herb Gray
VMme Deborah Grey
VL'hon. Herb Gray
VLE RENVOI À LA COUR SUPRÊME
VM. Michel Gauthier
VL'hon. Stéphane Dion

. 1440

VM. Michel Gauthier
VL'hon. Stéphane Dion
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VM. Mike Scott
VL'hon. Jane Stewart
VM. Mike Scott
VL'hon. Jane Stewart
VLE PROJET DE LOI C-28
VM. Yvan Loubier
VL'hon. Herb Gray
VL'EMPLOI
VM. Paul Bonwick
VL'hon. John Manley

. 1445

VLE REVENU NATIONAL
VM. Howard Hilstrom
VL'hon. Harbance Singh Dhaliwal
VLE RECENSEMENT
VM. Deepak Obhrai
VL'hon. John Manley
VLE COMMERCE
VMme Wendy Lill
VL'hon. Sergio Marchi
VLE PROJET DE LOI C-28
VM. Nelson Riis
VL'hon. Herb Gray

. 1450

VLE QUÉBEC
VL'hon. Jean J. Charest
VL'hon. Anne McLellan
VL'hon. Jean J. Charest
VL'hon. Anne McLellan
VLE CHANVRE
VM. John Finlay
VM. Joseph Volpe
VLA CANADIAN BLOOD BANK CORPORATION
VM. Rob Anders
VL'hon. Fred Mifflin

. 1455

VL'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT
VM. Benoît Sauvageau
VL'hon. Sergio Marchi
VLA DÉFENSE NATIONALE
VM. Peter Stoffer
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VLE QUÉBEC
VM. Rick Borotsik
VL'hon. Stéphane Dion
VLES SERVICES BANCAIRES
VM. Alex Shepherd
VL'hon. Jim Peterson

. 1500

VLE BUDGET
VM. Jim Abbott
VL'hon. Herb Gray
VPRÉSENCE À LA TRIBUNE
V>
VQUESTION DE PRIVILÈGE
VLa santé
VM. Greg Thompson

. 1505

VRECOURS AU RÈGLEMENT
VLa période des questions
VM. Monte Solberg
VL'hon. Don Boudria
VLa Chambre des communes
VM. Roy Bailey
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES

. 1510

VLA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VProjet de loi C-4. Troisième lecture
VM. Lee Morrison
VM. Gerry Byrne

. 1515

VM. Chris Axworthy

. 1520

. 1525

VM. Garry Breitkreuz

. 1530

VM. Roy Bailey
VM. Larry McCormick

. 1535

. 1540

VM. Garry Breitkreuz
VM. Jay Hill

. 1545

VL'hon. Ronald J. Duhamel

. 1550

VM. Cliff Breitkreuz

. 1555

VM. Roy Bailey

. 1600

. 1605

VM. Garry Breitkreuz

. 1610

VM. Jay Hill
VM. Cliff Breitkreuz

. 1615

. 1620

VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VM. Peter Adams
VMotion
VM. Peter Adams
Vmotion
VLA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ
VM. Gerry Byrne

. 1625

VM. John Harvard

. 1630

. 1635

VM. Ken Epp

. 1640

. 1645

VM. Jim Pankiw

. 1650

VM. Darrel Stinson
VM. Jay Hill

. 1655

VM. Allan Kerpan

. 1700

. 1705

VM. Rey D. Pagtakhan

. 1710

VM. Jim Pankiw
VM. Ken Epp

. 1715

. 1750

(Vote 87)

VRejet de la motion d'amendement

. 1800

(Vote 88)

V(La motion est adoptée.)
VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLE CODE CRIMINEL
VProjet de loi C-247. Deuxième lecture
VMme Pauline Picard

. 1805

. 1810

. 1815

. 1820

VMme Elinor Caplan

. 1825

. 1830

. 1835

VM. Maurice Vellacott

. 1840

VMme Judy Wasylycia-Leis

. 1845

. 1850

VM. Greg Thompson

. 1855

. 1900

VM. Joseph Volpe

. 1905

VMOTION D'AJOURNEMENT
VLes Airbus
VM. Peter MacKay

. 1910

VMme Eleni Bakopanos
VLes banques
VL'hon. Lorne Nystrom

. 1915

VM. Tony Valeri
VL'éducation
VMme Libby Davies

. 1920

VM. Robert D. Nault

. 1925

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 61


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 17 février 1998

La séance est ouverte à 10 heures.



Prière


AFFAIRES COURANTES

 

. 1005 +

[Traduction]

LES NOMINATIONS PAR DÉCRET

M. Ovid L. Jackson (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de déposer plusieurs décrets visant des nominations faites par le gouvernement.

*  *  *

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Ovid L. Jackson (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer la réponse du gouvernement à quelques pétitions.

*  *  *

[Français]

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

M. Bernard Patry (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, en vertu de l'article 34 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport de la section canadienne de l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française, ainsi que le rapport financier des réunions du bureau de l'AIPLF à Pointe-à-Pitre, Guadeloupe, les 14 et 15 décembre 1997.

*  *  *

[Traduction]

PÉTITIONS

LE CRTC

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée par des électeurs d'Eston, en Saskatchewan. Ils signalent à la Chambre le fait que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, le CRTC, a refusé d'accorder une licence à des radiodiffuseurs religieux, tout en en accordant une au canal pornographique Playboy.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de revoir le mandat du CRTC et de lui ordonner d'adopter une nouvelle politique concernant la délivrance de licences à des radiodiffuseurs religieux.

LES AGENTS DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition signée par un certain nombre de Canadiens dont des électeurs de Mississauga-Sud, la circonscription que je représente.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que nos policiers et nos pompiers risquent quotidiennement leur vie et que dans bien des cas, leur régime d'emploi ne paie pas une prestation de décès suffisante à leur famille lorsqu'ils sont tués dans l'exercice de leurs fonctions. En outre, lorsque l'un d'eux est tué dans l'exercice de ses fonctions, le public pleure sa mort et désire apporter un appui tangible aux membres survivants de sa famille pour l'aider à traverser une période difficile.

Les pétitionnaires exhortent donc le Parlement à établir un fonds d'indemnisation des agents de la sécurité publique en faveur des familles de policiers et de pompiers tués dans l'exercice de leurs fonctions.

*  *  *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Ovid L. Jackson (secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

 

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre des Ressources naturelles et ministre responsable de la Commission canadienne du blé, Lib.) propose: Que le projet de loi C-4, Loi modifiant la loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté.

—Monsieur le Président, je suis très heureux d'ouvrir le débat en troisième lecture du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé. Ce projet de loi apporte les modifications les plus importantes à la Commission canadienne du blé depuis plus de cinquante ans.

Le grand débat public sur la commercialisation du blé de l'Ouest a cours dans les prairies depuis au moins 25 ans, et même davantage selon certains. Le débat est devenu très animé au début de la décennie, après que le gouvernement Mulroney ait tenté de réduire le rôle de la commission par une bienveillante négligence, le sabotage et la réduction de son mandat, sans l'autorisation du Parlement et sans avoir suffisamment consulté les agriculteurs. Le gouvernement actuel a hérité de cette situation lorsqu'il est entré en fonctions en 1993.

 

. 1010 + -

Durant les 18 premiers mois de gouvernement, nous nous sommes employés à défendre l'industrie canadienne du grain contre les attaques injustifiées venant de l'autre côté de la frontière. À l'été 1995, nous avons créé le groupe d'experts en matière de commercialisation du grain de l'Ouest, afin de mieux orienter un débat beaucoup plus animé qu'éclairé qui avait cours au sujet de la commercialisation du grain des Prairies.

Ce fut le début d'un processus de consultation qui a probablement été le plus exhaustif et le plus épuisant de l'histoire de l'industrie du grain de l'Ouest. Cet exercice a été marqué par d'innombrables réunions, audiences, séminaires, sondages, groupes de réflexion, questionnaires, votes, brochures, pétitions, fac-similés, courriers électroniques, messages Internet, lettres personnelles et publiques et les appels téléphoniques traditionnels. Les gens ont pu participer en nombre sans précédent à ce processus de consultation public et transparent et des milliers l'ont fait.

Toutes les opinions que nous avons recueillies étaient valables, mais la plupart étaient contradictoires. Les intervenants de divers groupes d'agriculteurs qui ont participé le plus activement au débat ont exposé des points de vue diamétralement opposés, qui laissaient peu de place au consensus. Certains considéraient comme une camisole de force ce que d'autres défendaient au nom de la liberté de choix fondamentale en matière de commercialisation, et vice versa.

Les lobbyistes les plus radicaux ont tenté d'amener le gouvernement à n'écouter que leur point de vue et à rejeter tous les autres, un luxe que nous ne pouvions pas nous offrir.

Le projet de loi C-4 représente une tentative honnête pour trouver un terrain d'entente raisonnable. Il protège les éléments forts de notre système de commercialisation des grains. Des éléments forts comme la simple taille et la puissance commerciale pour tenir tête aux plus gros et aux plus durs dans 70 pays du monde et sortir gagnant pour le bien du Canada. Des éléments forts comme le fait d'être une entreprise de 6 milliards de dollars, le cinquième exportateur du Canada et la première entreprise au pays en termes de devises étrangères gagnées. Des éléments forts comme la possibilité de transformer nos 6 ou 7 p. 100 du blé et de l'orge du monde en une part de marché mondial qui approche des 20 p. 100. Des éléments forts comme notre réputation aux yeux de nos clients qui savent que nous sommes les meilleurs au monde en ce qui concerne la qualité intrinsèque, la propreté, la constance, l'appui technique, la fiabilité, l'exécution des contrats et le service à la clientèle. Des éléments forts comme des prix plus élevés confirmés sur de nombreux marchés, et des frais de fonctionnement pouvant descendre à 5 cents par boisseau.

De façon générale, la structure coûte moins par année que ce que la Commission canadienne du blé gagne annuellement en économie d'intérêts pour ses emprunts du fait de la qualité de sa cote de crédit.

Le projet de loi C-4 répond également à un désir très fort, chez les agriculteurs, de modernisation et de changement de la Commission canadienne du blé. Il démocratise l'administration de la commission. Il améliore la responsabilité. Il accroît la souplesse en créant plus d'options et en accélérant la circulation de l'argent. Finalement, il donne aux producteurs un plus grand contrôle sur ce que fait ou ne fait pas l'organisme de commercialisation.

C'est cela le projet de loi C-4. Il donne aux agriculteurs plus de contrôle qu'ils n'en ont jamais eu. Il fait suite à presque trois ans d'efforts sincères pour faire converger différents points de vue.

Le débat a été intense, ce qui n'est guère surprenant. Il est parfaitement normal que les agriculteurs et les organismes agricoles aient des opinions bien arrêtées en ce qui concerne la commercialisation des grains et qu'ils les expriment vigoureusement. C'est leur droit.

Ce qui est regrettable, c'est que des groupes de pression totalement étrangers au secteur aient essayé de pervertir le débat légitime sur le projet de loi C-4 au moyen d'une campagne de désinformation notoirement irresponsable. Le pire de ces groupes a été la National Citizens' Coalition un groupe de pression de nantis d'extrême droite sans liens avec l'agriculture, dirigé par un ancien réformiste, qui ne verrait pas la différence entre un boisseau d'orge et un seau de riz. Cette coalition a dépensé des dizaines de milliers de dollars pour diffuser de la propagande mensongère et trompeuse.

 

. 1015 + -

La dernière arme idéologique de la coalition a été une tentative absolument indécente d'établir un lien entre la Commission canadienne du blé et l'internement de Japonais au cours de la Seconde Guerre mondiale. Cette idée est du plus mauvais goût et révèle la véritable intention de la coalition, qui est également l'intention de tous ceux qui voudraient participer à sa croisade éhontée, commodément financée en secret pour détruire la Commission canadienne du blé et rien de moins.

La membres de la coalition semblent fiers de leur attitude foncièrement extrémiste et intolérante, et je n'ai nullement l'intention de donner foi à leurs allégations en y répondant.

Je veux me concentrer sur les questions légitimes posées par de véritables agriculteurs qui veulent savoir quelles seront pour eux les conséquences du projet de loi C-4. J'ai compilé ces questions. Il y en a une dizaine auxquelles je veux répondre en détail.

Question un: La Commission canadienne du blé rendra-t-elle davantage de comptes aux agriculteurs? La réponse est un oui retentissant.

Pour la première fois de son histoire, la Commission canadienne du blé sera dirigée par un conseil d'administration. Il y aura en tout 15 administrateurs, et les agriculteurs auront la haute main sur leur organisme de mise en marché puisqu'ils éliront directement 10 de ces administrateurs, soit une majorité des deux tiers. Les administrateurs élus défendront les points de vue des agriculteurs quand la commission aura des décisions à prendre. Ils devront rendre des comptes parce que, si les producteurs ne sont pas satisfaits du travail de la commission, ils pourront en changer les administrateurs aux élections ultérieures. Voilà ce que c'est que la démocratie.

Question deux: Les administrateurs auront-ils des pouvoirs véritables? Encore une fois, la réponse est oui.

Comme dans toute autre entreprise moderne, tous les pouvoirs de la commission seront entre les mains de ses administrateurs. Ils auront d'énormes responsabilités puisqu'ils auront la charge d'administrer une entreprise de 6 milliards de dollars. Les administrateurs choisiront un des leurs comme président du conseil. Ils détermineront le salaire des administrateurs, du président du conseil et du président de la commission. Ils contrôleront l'administration et l'orientation stratégique de la Commission canadienne du blé.

Si les administrateurs sont mécontents de l'une ou l'autre facette du fonctionnement de la commission, ils pourront faire les changements qui s'imposent, y compris l'adoption de nouveaux instruments de mise en marché plus souples, comme la vente au comptant, le versement accéléré de rajustements et le paiement forfaitaire anticipé des livraisons en commun. Les administrateurs seront responsables de tout cela. Ce seront eux qui prendront les décisions et non pas les énergumènes du Parti réformiste, qui disent n'importe quoi.

Question trois: Les administrateurs auront-ils accès à toute l'information existant sur la Commission canadienne du blé? Encore une fois, la réponse est oui.

Tous les membres du conseil d'administration auront plein accès à toutes les données concernant la Commission canadienne du blé, y compris mais pas uniquement les états financiers ayant fait l'objet d'une vérification complète. Ils pourront examiner les prix de vente, les bonifications et les frais de fonctionnement et vérifier si la CCB est bien gérée. Les administrateurs, qui posséderont une connaissance intime de la CCB et de ses concurrents sur le marché international, seront les mieux placés pour évaluer ceux des renseignements qui peuvent être rendus publics et ceux qui doivent rester confidentiels pour des raisons commerciales.

Question quatre: La Commission canadienne du blé est-elle sujette à une vérification complète, tout comme n'importe quelle société privée? La réponse est oui.

Le vérificateur extérieur qui a été choisi en bonne et due forme dans le secteur privé est le cabinet d'experts-comptables Deloitte & Touche, très respecté dans le milieu. Les états financiers entièrement vérifiés sont publiés dans chaque rapport annuel de la CCB. En outre, aux termes de la nouvelle loi, le conseil d'administration, contrôlé par les producteurs, aura le pouvoir de constituer son propre comité interne de vérification, tout comme n'importe quelle société privée.

Le Parti réformiste a affirmé que le vérificateur général devrait remplacer Deloitte & Touche comme vérificateur de la CCB. C'est une proposition étrange car une telle disposition lierait davantage la CCB au gouvernement, ce qui est absolument contraire au credo réformiste. Voyons pourquoi la CCB est vérifiée par un cabinet externe, privé et indépendant.

 

. 1020 + -

De toute évidence, la CCB est une entreprise commerciale. En tant que telle, il est raisonnable que ce soit une firme du secteur privé qui en fasse la vérification. De même, s'il est logique que le vérificateur général examine les comptes des ministères et organismes fédéraux qui dépensent les deniers publics qui leur ont été alloués par le Parlement, ce n'est pas le cas pour la Commission canadienne du blé qui, normalement, ne puise pas dans le Trésor public. Ses fonds proviennent de la vente du grain et cet argent appartient aux agriculteurs et non au gouvernement.

Par ailleurs, Deloitte & Touche applique à la Commission canadienne du blé les mêmes principes et les mêmes normes de vérification que le ferait le vérificateur général. Les rapports pertinents sont tout à fait publics. La Commission canadienne du blé divulgue davantage ses activités que n'importe lequel de ses pendants du secteur privé.

Tout cela étant dit, il suffit de lire le rapport présenté par le vérificateur général en ce qui concerne n'importe quel organisme gouvernemental et de le comparer au rapport soumis par Deloitte & Touche au sujet de la Commission canadienne du blé pour s'apercevoir que le certificat du vérificateur est pratiquement identique, mot pour mot.

Il n'en demeure pas moins qu'aux termes du nouveau régime de régie interne démocratique établi par le projet de loi C-4, si le nouveau conseil d'administration de la Commission canadienne du blé croit qu'on devrait modifier le mode de vérification ou faire appel à d'autres vérificateurs en ce qui concerne la Commission canadienne du blé, il peut formuler une recommandation en ce sens.

Il y a un autre dernier point révélateur. Si les députés de l'opposition craignaient vraiment que quelque chose cloche dans la vérification de la Commission canadienne du blé, ils ont tout à fait le pouvoir de demander au vérificateur, Deloitte & Touche, de comparaître devant le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes dans le cadre d'une audience en bonne et due forme. Ils peuvent peut procéder à leur propre enquête, en public, dès maintenant. Le comité détient ce pouvoir. Le fait que les députés de l'opposition n'aient jamais présenté de demande en ce sens montre au moins qu'ils ne sont pas vraiment intéressés à établir les faits ou à garantir une certaine probité. Ils cherchent simplement une autre excuse pour attaquer la Commission canadienne du blé.

Question cinq: Est-il nécessaire pour le gouvernement de nommer certains administrateurs et le président? La réponse est oui pour deux raisons.

Tout d'abord, les contribuables canadiens soutiennent la Commission canadienne du blé avec des garanties financières totalisant jusqu'à six milliards de dollars, cette somme couvrant non seulement les paiements initiaux et les ventes à crédit, mais également, contrairement à ce qui fait pour tout autre office de commercialisation, les emprunts commerciaux généraux de la Commission canadienne du blé. Ensuite, la Commission est chargée de délivrer tous les permis d'exportation de blé et d'orge pour tout le Canada, et pas simplement les Prairies. Ainsi, elle s'acquitte d'une fonction nationale.

Les administrateurs nommés, cinq au total, n'auront aucun pouvoir ou statut spécial. On va les choisir pour donner au conseil d'administration des compétences supplémentaires dont il ne disposerait peut-être pas à l'interne autrement. Les nominations de ce genre sont tout à fait courantes dans les secteurs public et privé. En fin de compte, les administrateurs nommés seront minoritaires, alors que les agriculteurs des Prairies auront une majorité des deux tiers au conseil d'administration.

Question six: Les administrateurs peuvent-ils bien faire savoir qu'ils désapprouvent un président? Là encore, la réponse est oui.

Le gouvernement ne peut nommer un président qu'après avoir consulté les administrateurs. Une fois le président nommé, les administrateurs peuvent régulièrement examiner son rendement et recommander sa révocation s'ils le jugent à propos. Enfin—et voilà la véritable massue—les administrateurs contrôlent également la rémunération du président.

Question sept: Cette nouvelle loi protège-t-elle les employés de la Commission canadienne du blé contre la responsabilité légale? La réponse est un non catégorique.

Personne n'est protégé contre le défaut d'assumer ses responsabilités. En fait, tous les administrateurs et les dirigeants de la Commission canadienne du blé seront tenus, aux termes d'une disposition explicite de la loi, d'agir avec intégrité et de bonne foi, avec le soin, la diligence et la compétence d'une personne avisée.

Au cas où des poursuites judiciaires seraient engagées contre eux, ils pourront demander à être indemnisés pour certains frais juridiques, à la seule condition qu'un tribunal soit convaincu, en dernière analyse, que la personne en question a agi avec intégrité et de bonne foi.

 

. 1025 + -

À cet égard, pour assurer la conformité avec les normes en vigueur dans le secteur privé, la Loi sur la Commission canadienne du blé reflétera les dispositions de la Loi sur les sociétés par actions qui régissent la conduite de sociétés privées dans ce domaine.

Question huit: La Commission canadienne du blé a-t-elle besoin d'un fonds de réserve? La réponse est oui.

Pour assurer une plus grande souplesse dans les modalités de paiement des agriculteurs pour leurs céréales et pour accélérer la circulation de l'argent, le conseil d'administration de la commission aura le pouvoir d'autoriser l'achat de blé ou d'orge au comptant; d'autoriser des ajustements en vue d'augmenter les versements initiaux dès que les conditions du marché le justifient et sans attendre l'approbation du gouvernement; et d'autoriser le recours à une option permettant aux agriculteurs d'obtenir des paiements anticipés avant la fin de la campagne agricole. Les administrateurs utiliseront ces nouvelles mesures de souplesse lorsqu'ils le jugeront avantageux pour les agriculteurs.

Cependant, comme dans le cas de toute nouvelle innovation, de nouveaux risques financiers pourraient surgir. De même qu'une police d'assurance sert de moyen de protection contre tout nouveau risque imprévu, les administrateurs doivent pouvoir constituer un fonds de réserve. La loi précisera que ce fonds ne pourra servir qu'aux trois fins susmentionnées. Il appartiendra ensuite au conseil d'administration, formé notamment d'une majorité de deux tiers des membres élus par les agriculteurs, de décider s'il faut créer un fonds de réserve, quand et comment. Quoi qu'il en soit, le gouvernement du Canada continuera de garantir les acomptes à la livraison versés par la CCB au début de la campagne agricole, ses ventes à crédit et ses emprunts généraux.

La neuvième question a trait aux exclusions. Les agriculteurs peuvent-ils faire exclure un produit agricole du champ de compétence de la CCB? La réponse prévue au projet de loi C-4 est oui.

La nouvelle loi comportera une clause d'exclusion permettant de soustraire, totalement ou partiellement, tout type, toute catégorie ou tout grade de blé ou d'orge de l'application de la compétence de la CCB. Pour déclencher le processus d'exclusion, il faudra d'abord que les administrateurs se prononcent en faveur du projet. Deuxièmement, pour des raisons de contrôle de la qualité, il faudra mettre un système en place afin de prévenir toute confusion du grain exclu avec le grain commercialisé par la CCB. Troisièmement, si les administrateurs considèrent le projet d'exclusion important, il faudra tenir un vote démocratique auprès des producteurs pour l'approuver.

La dixième question à trait à l'inclusion. Les agriculteurs peuvent-ils faire inclure un produit agricole dans le champ de compétence de la CCB? Là encore, la réponse prévue au projet de loi C-4 est oui.

Pour des raisons d'équité et d'équilibre, puisqu'elle comporte une clause d'exclusion, la nouvelle loi doit comporter également une clause d'inclusion. Le facteur décisif pour l'application des deux clauses sera lié à la décision majoritaire des véritables producteurs des grains en cause, exprimée par un vote démocratique pris auprès des producteurs. Ce sont eux qui auront le dernier mot.

L'existence d'une clause d'inclusion ne modifie pas, en soi, le mandat de la CCB. Elle institue simplement une procédure bien claire pour le modifier si, et uniquement si les producteurs eux-mêmes, non les politiciens ni les lobbyistes, estiment qu'une telle modification sert leurs intérêts supérieurs. On ne pourra se prévaloir de la clause d'inclusion que pour les grains qui correspondent actuellement à la définition de grain dans la loi actuelle sur la CCB.

Ni le gouvernement, ni la CCB, ni aucun groupe d'intérêts minoritaire ne pourra mettre ce processus en branle. Seuls les producteurs du grain en cause pourront le déclencher sous forme d'une demande écrite présentée par une association légitime dont les membres se recrutent uniquement chez les producteurs de ce grain.

La demande devra avoir fait l'objet d'une annonce publique prévoyant un délai d'au moins 120 jours pour laisser à la communauté agricole et à d'autres intéressés le temps de réagir. Le conseil d'administration de la CCB, formé notamment d'une majorité de deux tiers des membres élus par les agriculteurs, examinera ensuite la demande. Les administrateurs devront prendre en considération toutes les conséquences d'une telle mesure, dont les coûts de l'inclusion, les conséquences commerciales et les réactions qu'ils auront obtenues du public.

 

. 1030 + -

Si les administrateurs finissaient par accepter la demande d'inclusion, toute la question devrait alors être soumise à un vote démocratique pour permettre aux producteurs visés de prendre la décision finale. Tout le processus, du début à la fin, devrait être transparent et régi par les agriculteurs. Il ne sera pas régi par des politiciens comme ceux d'en face qui parlent à tort et à travers et font insulte à l'intelligence des agriculteurs. Le pouvoir ne serait pas entre les mains de personnes de ce genre, ni entre celles des politiciens, mais bien entre celles des agriculteurs qui ont la compétence nécessaire pour l'assumer.

En ce qui a trait à la clause d'inclusion, après toutes ces affirmations, le gouvernement et le ministre essaient encore une fois d'être aussi flexibles et accommodants que possible en préparant le projet de loi C-4 dans sa forme finale pour adoption par la Chambre.

La fin de semaine dernière, au cours de consultations supplémentaires après de représentants de l'industrie du canola, nous avons de nouveau pu constater les effets des clauses d'inclusion et d'exclusion et la perception juste ou erronée que ces clauses pourraient servir d'excuse à peine voilée par nos concurrents, les États-Unis par exemple, pour mener une forme de campagne de harcèlement commercial.

Les États-Unis ne seraient nullement justifiés de le faire, que ce soit au niveau juridique, économique ou de politique commerciale, mais leur conduite est souvent régie par des considérations politiques locales et internes. C'est ce qui inquiète les représentants de l'industrie canadienne du canola à propos de ces clauses, même s'ils reconnaissent qu'ils auraient le contrôle sur leur utilisation éventuelle.

Pour atténuer cette inquiétude, j'ai proposé hier certains derniers amendements au projet de loi C-4, de façon à enlever du texte préliminaire les dispositions qui traitent précisément des ajouts ou des retraits au mandat actuel de la Commission canadienne du blé. J'ai proposé de les remplacer par une disposition simple et explicite qui permettrait d'assurer qu'aucun ministre responsable de la Commission canadienne du blé ne puisse tenter de modifier le mandat de la Commission, dans un sens ou dans l'autre, sans avoir auparavant démocratiquement demandé l'avis des producteurs visés et consulté le nouveau conseil d'administration de la Commission.

Un tel amendement aurait permis de faire disparaître les clauses contestées, tout en respectant le principe fondamental du contrôle démocratique par les producteurs. Cependant, l'opposition n'a pas appuyé cette proposition. Elle a empêché cette modification. Le gouvernement a fait une offre et l'opposition a même refusé de mettre la question aux voix.

Que penser de l'opposition alors? Peut-on vraiment croire qu'elle s'intéresse aux changements constructifs? L'opposition est-elle vraiment intéressée par le fond du problème?

Des voix: Oh, oh!

M. Rob Anders: Nous n'aimons pas les dictateurs, ni ceux qui mettent les agriculteurs en prison. Voilà ce que nous n'aimons pas.

Le vice-président: J'invite les députés à faire preuve de modération. Le ministre est en train de faire un discours, et il me semblerait utile que tous les députés puissent entendre ce qu'il a à dire. Les interjections sont parfois si fortes que la présidence a du mal à entendre l'intervention du ministre. Je suis persuadé que tous les députés voudront prêter attention à ses propos.

L'hon. Ralph E. Goodale: Monsieur le Président, il faut que la Chambre sache que celui qui vocifère le plus fort dans le Parti réformiste a été un saboteur politique professionnel aux États-Unis et a été la honte non seulement de ce pays-là, mais aussi du nôtre. Il n'a pas modifié sa conduite. Il préfère toujours brouiller les cartes, lancer des injures et détourner l'attention des vrais enjeux au lieu d'en parler.

Je parlais de l'amendement que j'ai proposé hier et que l'opposition a repoussé. Elle a refusé l'occasion qui lui était clairement offerte d'apporter ce changement. Le gouvernement a fait une proposition, et l'opposition a même refusé que la Chambre se prononce.

Je repose la question. Qu'est-ce que cette attitude révèle? Les députés de l'opposition sont-ils vraiment intéressés par un changement constructif, par le fond du problème, ou ne cherchent-ils qu'à faire de la petite politique, comme leur comportement à la Chambre le montre, au détriment du gagne-pain des producteurs?

Leur comportement en dit long. Ils ont empêché la Chambre de se prononcer sur une disposition qui aurait garanti aux agriculteurs le droit de voter sur des changements fondamentaux dans leur système de commercialisation. Il est évident que l'opposition a du mal à accepter la démocratie.

 

. 1035 + -

Ce soir, le projet de loi C-4 sera enfin mis aux voix à l'étape de la troisième lecture. Son adoption marquera le début d'une ère de changement. Les grands thèmes du projet de loi sont la démocratie, la responsabilité, la souplesse et le renforcement des pouvoirs des agriculteurs.

Les producteurs vont prendre leur destinée en main. Ils auront le pouvoir de modifier leur organisme de commercialisation comme ils le jugeront bon. Je fais parfaitement confiance à leur bon jugement, et je sais qu'ils exerceront ce nouveau pouvoir avec détermination, sagesse et prudence, et que l'économie agricole de l'Ouest, à commencer par les agriculteurs eux-mêmes, s'en portera de mieux en mieux.

M. Jay Hill: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Dans son intervention, le ministre a prétendu que l'opposition officielle n'avait pas donné son accord. Je n'étais pas à la Chambre à ce moment-là, mais je crois comprendre...

Le vice-président: À l'ordre. Il s'agit d'un sujet de dissension. Le ministre a déclaré que l'opposition officielle a refusé de donner son consentement dans ce cas-ci. Si le député veut contester cette affirmation, je suis sûr qu'il aura amplement l'occasion de le faire pendant son discours.

Nous tenons actuellement un débat et je ne crois pas que l'objection du député constitue un recours au Règlement. Le député semble plutôt en désaccord avec la déclaration faite par le ministre. Il n'y a pas matière à un rappel au Règlement.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, je formule la même objection. Nous invoquons le Règlement pour demander au ministre de nommer qui s'est opposé à la motion, car ce n'est pas nous. Nous n'étions pas à la Chambre. Nous voulons savoir qui le ministre accuse au juste. En ce sens, notre rappel au Règlement est fondé.

Le vice-président: Je ferais respectueusement remarquer que l'objection n'est pas motivée. En général, lorsque la présidence met une motion aux voix et demande le consentement de la Chambre, le fait que certains députés donnent leur consentement et d'autres pas n'est pas consigné au compte rendu. Normalement, la présidence ne précise pas qu'elle entend tel ou tel député s'opposer à la motion. La présidence signale tout simplement qu'elle entend des députés exprimer leur opposition et qu'il n'y a pas, par conséquent, consentement de la Chambre.

Les députés peuvent, dans le cadre de leurs délibérations, faire des allégations ou des déclarations quant à l'identité des députés qui ont refusé de donner leur consentement. L'objection soulevée ne constitue pas un rappel au Règlement.

Le député peut ne pas être d'accord sur l'allégation qui a été faite, c'est normal et c'est matière à débat. Je propose respectueusement aux députés de reprendre le débat qui nous occupe aujourd'hui.

L'hon. Ralph E. Goodale: Monsieur le Président, je voudrais que les choses soient claires. Les députés de l'opposition officielle disent-ils aujourd'hui qu'ils sont prêts à accepter que la motion soit mise aux voix?

Le vice-président: Je ne suis pas sûr que les choses soient plus claires; le député de Yorkton—Melville demande-t-il la parole au sujet du recours au Règlement? Nous nous égarons un peu.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, de quelle motion est-il question? Le ministre n'a pas présenté de motion. C'est ridicule. Je n'ai rien vu de cela. Qu'on nous montre la motion!

Le vice-président: Je suis certain qu'il est possible de produire la motion et que les discussions peuvent se poursuivre en d'autres lieux.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Monsieur le Président, tout d'abord, je demande le consentement unanime de la Chambre pour partager le temps qui m'est accordé avec le député de Lakeland.

Le vice-président: La Chambre consent-elle à ce que le député de Prince George—Peace River partage son temps avec celui de Lakeland?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: Je suppose que le temps prévu sera partagé à parts égales, sans questions et observations?

M. Jay Hill: Je veux bien, monsieur le Président, et je remercie la Chambre d'accéder à ma demande. J'imagine que si les députés ont agi ainsi, c'est parce qu'ils ne veulent pas m'écouter pendant 40 ,minutes.

Je voudrais dissiper un risque de malentendu. Dans son exposé, le ministre a dit que certains participants au débat ne connaissent pas la différence entre un boisseau d'orge et un seau de riz.

 

. 1040 + -

Je reviens là-dessus parce que, dans ce débat, le problème vient en partie du fait que le Parti réformiste, c'est-à-dire l'opposition officielle, a fait, dès le début, l'objet d'allégations voulant que nous aurions pour mission de détruire la Commission canadienne du blé, que nous serions ses ennemis. Je voudrais prendre quelques minutes pour parler de cela.

Notre caucus compte maintenant 59 membres. Environ la moitié des membres, c'est-à-dire une trentaine d'entre eux, ont une expérience dans le domaine agricole. Ils ont grandi sur des fermes. Ils ont des amis et des parents qui pratiquent activement l'agriculture dans l'ouest du Canada. De ce nombre, au moins 15 à 20 membres pratiquaient activement l'agriculture avant d'être élus à cet endroit. Certains avaient de très importantes entreprises et exploitations agricoles commerciales.

Je deviens hors de moi quand j'entends des députés du parti ministériel nous accuser de n'avoir aucune crédibilité. Je deviens hors de moi lorsque j'entends dire que nous sommes les ennemis de la Commission canadienne du blé, que nous voulons détruire la Commission canadienne du blé. C'est le genre d'absurdités que nous écoutons chaque jour depuis un an et demi.

Je n'ai pas le temps de repasser les antécédents de chacun des députés, mais par respect pour eux, je vais quand même parler de quelques-uns d'entre eux.

Le député de Souris—Moose Mountain, une circonscription de la Saskatchewan, pour ceux qui regardent le débat à la télévision aujourd'hui et ne savent pas où elle se situe, est céréaliculteur depuis plus de 30 ans. Il possède 648 acres de terre cultivée, 320 acres de pâturage qu'il exploite lui-même et 320 acres de pâturage qu'il loue.

Le député de Lakeland, en Alberta, qui partagera son temps de parole avec moi ce matin, a grandi sur une ferme. Il est céréaliculteur depuis 28 ans. Il possède 1 000 acres de terre cultivée qu'il exploite maintenant en vertu d'une entente de métayage parce qu'il n'a plus le temps de travailler sur sa ferme à plein temps à cause de ses fonctions de député.

Le député de Yellowhead, en Alberta, a grandi sur une ferme et est céréaliculteur depuis 30 ans. Il possède 1 000 acres de terre cultivée et travaille encore sur sa ferme. Ses fils participent de plus en plus activement à l'entreprise familiale.

Le député de Yorkton—Melville, en Saskatchewan, qui a pris la parole il y a quelques instants, a grandi sur une ferme. Il est céréaliculteur depuis sept ans. Il possède 900 acres de terre cultivée et 100 acres de pâturage. Il loue actuellement sa ferme, mais l'habite encore.

Le député d'Athabasca, en Alberta, a grandi sur une ferme. Il est céréaliculteur et éleveur de bétail depuis 35 ans. Il possède 1 000 acres de terre cultivée et 500 acres de pâturage. Il loue sa ferme.

J'ai grandi sur une ferme en Colombie-Britannique, dans la région de Peace River. J'ai cultivé des céréales, de la graine de gazon et du colza à plein temps pendant 20 ans. Mes frères et moi possédons 3 000 acres. Nous avons élargi la ferme familiale au fil des années jusqu'à ce que nous ayons 3 000 acres de terre cultivée. J'ai récemment vendu ma part à mon frère, qui est encore agriculteur et exploite cette entreprise en Colombie-Britannique.

Le député de Selkirk—Interlake, au Manitoba, a grandi sur une ferme et élève du bétail depuis 30 ans. Il a 250 acres de terres cultivées et 3 800 acres de pâturages. Il s'occupe activement de son exploitation agricole, quand ses fonctions de député lui en laissent le temps.

Le député de Portage—Lisgar, au Manitoba, a grandi sur une ferme et, depuis 35 ans, il possède une exploitation agricole mixte. Il a 1 900 acres de terres en culture, 500 acres de pâturages et loue actuellement sa ferme à des membres de sa famille.

Le député de Wetaskiwin, en Alberta, a grandi sur une ferme et possède une exploitation de polyculture et d'élevage depuis 30 ans. Il a 850 acres de terres cultivées, 90 acres de pâturages et loue actuellement sa ferme sur la base d'une participation aux bénéfices.

Le député de Peace River, mon homologue de la région de Peace River en Alberta, a grandi sur une ferme et en exploite une depuis 30 ans. C'est un céréalier qui cultive 2 000 acres. Il s'occupe toujours activement d'exploitation agricole avec son fils. La liste est encore longue, mais j'ai choisi ces députés au hasard.

Au cours de l'étude à l'étape du rapport, on nous a accusés d'avoir dit que les gens d'en face ne devraient pas avoir le droit de parler. Nous les avons invités à intervenir. Ils n'ont pas voulu participer au débat. Seulement trois ou quatre d'entre eux se sont levés pendant toute l'étude des amendements à l'étape du rapport.

Nous n'avons pas déclaré que, du fait qu'ils venaient de Terre-Neuve ou du Nouveau-Brunswick, ou encore de Toronto, ils ne devaient pas prendre part au débat. Nous voulions seulement faire valoir que nous pouvions parler de cette question avec crédibilité. Voilà ce que nous voulions dire. Les députés réformistes s'intéressent vivement à ce dossier. Nous pouvons nous reporter à toute une expérience de vie quand nous parlons de la Commission canadienne du blé.

Nous invitons tous les députés, qu'ils soient pêcheurs, gens d'affaires, médecins, avocats ou chefs indiens, à participer au débat et à faire valoir leurs opinions. C'est la même chose que lorsque nous présentons nos opinions sur d'autres sujets que nous ne connaissons peut-être pas de première main.

 

. 1045 + -

Une voix: Oh, oh!

M. Jay Hill: Cependant, nous avons une certaine crédibilité sur le sujet dont nous discutons et, si le secrétaire parlementaire voulait bien se taire un instant, il apprendrait peut-être quelque chose.

Au cours d'une discussion sur le projet de loi, quelqu'un me disait récemment que le ministre s'occupait des producteurs de grain de l'ouest canadien comme Alan Eagleson s'est occupé des joueurs de hockey. Ce n'est pas moi qui l'ai dit, mais un Canadien de l'Ouest qui suit le débat depuis un an et demi.

J'aimerais faire un petit retour en arrière avec les députés et ceux qui suivent notre débat d'aujourd'hui avec beaucoup d'intérêt, notamment les agriculteurs de l'Ouest. Je ne crois pas qu'il sera inutile de faire ensemble ce petit voyage vers un sombre passé.

Pour beaucoup de réformistes, ce sera une histoire qu'ils connaissent trop bien. Ils écoutent les agriculteurs, les transformateurs et les autres acteurs de l'industrie du grain. Les réformistes sont très conscients du recul que le projet de loi fera subir à toute l'industrie.

Cependant, pour les Canadiens qui sont étrangers au débat, surtout ceux de l'Est qui ont la chance d'échapper aux pouvoirs tentaculaires de la Commission canadienne du blé, je dois faire ce rappel historique qui met en lumière le manque de responsabilisation, les déclarations trompeuses et l'arrogance du gouvernement actuel.

Je ne raconterai pas mon histoire en commençant par le début parce qu'il serait difficile de dire à quel moment au juste se situe ce début. Le mécontentement et la frustration couvent depuis de nombreuses années parmi les producteurs de grain de l'Ouest, qui sont contraints de vendre leur blé et leur orge par l'intermédiaire de la Commission canadienne du blé. Cet organisme a été créé en 1935 pour juguler l'inflation d'avant-guerre et il devait être temporaire. Ce n'est qu'en 1943, lorsque les agriculteurs ont refusé de vendre à la commission parce qu'ils obtenaient des prix beaucoup plus avantageux sur le marché libre, que le gouvernement a accordé un monopole à la commission. Celle-ci était donc à l'origine un genre d'organisme de contrôle de l'inflation en temps de guerre. C'est de là que vient le monopole.

Beaucoup d'agriculteurs estiment depuis longtemps qu'ils sont mieux préparés et mieux équipés pour vendre leur grain eux-mêmes, sans passer par la commission. Cela mis à part, beaucoup veulent tout simplement être libres de tenter leur chance et sont prêts à accepter les conséquences de leurs décisions.

Avec la commission du blé, les agriculteurs doivent remettre aveuglément le produit de leur labeur et accepter les paiements qui découlent des décisions de personnes nommées par le gouvernement qui n'ont aucun compte à rendre aux agriculteurs des Prairies.

Après tout, la Commission canadienne du blé n'est pas visée par la Loi sur l'accès à l'information ni par les vérifications du vérificateur général du Canada, comme le ministre lui-même l'a signalé au cours de son allocution. Ces deux mécanismes démocratiques existent pour tout autre organisme fédéral afin que les contribuables canadiens puissent exercer leur droit de contester l'utilisation de l'argent de leurs impôts. Dans le cas des producteurs de blé et d'orge de l'Ouest, il peut s'agir non seulement de l'argent de leurs impôts, mais encore de tout leur moyen d'existence.

La Commission canadienne du blé obtient-elle le meilleur prix pour les céréales des agriculteurs? La Commission canadienne du blé fonctionne-t-elle de façon responsable dans l'intérêt supérieur des agriculteurs et pour assurer la viabilité et la survie de l'industrie céréalière? La Commission canadienne du blé agit-elle de façon éthique dans ses activités nationales et internationales? La Commission canadienne du blé est-elle vraiment l'agent de commercialisation le plus rentable et le plus efficace pour le grain de l'ouest du Canada?

Ce sont des questions de ce genre que poserait et éluciderait le vérificateur général s'il avait pour tâche de vérifier la Commission canadienne du blé. Ce sont des questions simples et raisonnables pour lesquelles les actionnaires de toute autre organisation pourraient s'attendre à obtenir une réponse.

Cette absence totale d'obligation de rendre compte a poussé les agriculteurs à organiser des manifestations de masse et des actes de désobéissance civile. Des protestations plus graves ont pris des allures d'illégalité lorsque des agriculteurs ont pris des mesures désespérées pour transporter leur grain de l'autre côté de la frontière américaine afin d'obtenir des prix plus élevés. Au lieu de prendre des mesures pour remédier à ce différend, le gouvernement fédéral impose les amendes et les peines d'emprisonnement les plus sévères. Les céréaliculteurs de l'Ouest se retrouvent en prison avec les violeurs et les trafiquants de drogue. En fait, la situation est pire que cela. Les agriculteurs languissent en prison pendant que des violeurs reçoivent une condamnation conditionnelle et s'en sortent en faisant du service communautaire.

De l'autre côté de ce débat, il y a les céréaliculteurs qui sont satisfaits de la commercialisation de leur produit par la Commission canadienne du blé, et nous le reconnaissons. C'est leur droit plein et entier. Beaucoup d'agriculteurs sont satisfaits de ce qu'ils reçoivent de la Commission canadienne du blé pour leur grain. Ils apprécient la sécurité et ne veulent pas s'aventurer à commercialiser eux-mêmes leur grain. Ces producteurs sont alarmés par le lobbying des autres agriculteurs qui essaient d'obtenir le droit de commercialiser leur grain sans passer par la commission.

 

. 1050 + -

À cause de cela, il y a, dans l'ouest du Canada, un débat très vif et souvent passionné sur l'avenir de la CCB. Ce débat a créé des divisions dans des collectivités agricoles normalement très unies et même au sein des familles.

Il y a un point sur lequel toutes les parties s'entendent, et c'est qu'il faut absolument faire quelque chose. Cela veut dire que les deux côtés doivent faire des compromis et qu'on doit aussi examiner les autres facteurs qui entrent en ligne de compte au niveau national et au niveau international.

En 1994, les céréaliculteurs de l'Ouest ont cru qu'ils avaient aperçu un signe de leadership lorsque le ministre responsable de la Commission canadienne du blé, qui était le ministre de l'Agriculture de l'époque, a fait allusion publiquement à un examen général et à un processus de consultation pour essayer de trouver des solutions à cette controverse.

Ce n'était qu'un signe passager. Le ministre a hésité, a retardé, a promis et a trouvé des excuses jusqu'à ce qu'il annonce enfin, juste au moment où les agriculteurs commençaient à désespérer, l'établissement du groupe de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest en juillet 1995. L'attente fut très longue.

Dès le départ, certains ont mis en doute l'utilité de ce groupe de neuf personnes à cause du nombre important de membres qui devaient être nommés par le gouvernement. De plus, le groupe ne devait commencer son travail qu'en janvier 1996. Cependant, certains choix judicieux ont amené beaucoup de gens à dire que, malgré les critiques, l'établissement de ce groupe était une bonne idée. Cela voulait dire qu'on pouvait espérer des changements, même si cela venait près de deux ans après que le ministre avait promis d'agir.

Le groupe de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest ne devait pas faire rapport de ses conclusions avant juin 1996.

Le mandat du groupe était effectivement encourageant. Il devait examiner des questions comme le système de vente à guichet unique par rapport à un système mixte de mise en marché, la responsabilité de la CCB à l'égard des agriculteurs, et la planification réaliste compte tenu des pressions internationales, pour n'en nommer que quelques-unes.

Le groupe a tenu 15 ateliers à divers endroits au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta en janvier 1996. Il a tenu 13 jours d'audiences publiques, et 150 mémoires lui ont été présentés oralement ou par écrit.

Le 9 juillet 1996, le groupe de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest a publié ses recommandations sur la réforme de la Commission canadienne du blé. Les recommandations clés contenues dans le rapport portaient sur la question cruciale de la liberté de choisir et des pouvoirs de la CCB.

Le groupe a rejeté sans équivoque les propositions voulant que les pouvoirs actuels de la CCB soient maintenus et que sa compétence soit élargie. Il a rejeté ces propositions.

Il a demandé que les ventes à l'exportation d'orge fourragère soient exclues du monopole de la commission le plus rapidement possible. Le rapport recommandait d'offrir aux agriculteurs l'option de vendre au moins 25 p. 100 de leur production à l'extérieur du compte de mise en commun et de demander des avances en espèces à la commission.

Le rapport recommandait également de soustraire le grain organique à l'autorité de la commission et insistait sur la nécessité de ne pas étendre sa compétence aux autres grains, oléagineux ou cultures spéciales.

Ces recommandations avaient toutes un objectif commun: réduire le champ de compétence de la Commission canadienne du blé et ne lui permettre en aucun cas de s'ingérer dans la commercialisation d'autres grains.

Les réactions au rapport du groupe ont été plutôt positives. Les contestations judiciaires à l'endroit de la CCB étaient remises en question car beaucoup de gens s'attendaient, à tort comme les faits allaient le démontrer, que le ministre déposerait un projet de loi de mise en oeuvre des recommandations du groupe.

Depuis les élections de 1994, une des questions les plus importantes auxquelles le ministre ait été confronté concernait la demande d'un référendum pour déterminer si la CCB devait conserver son monopole sur la commercialisation de l'orge. Une fois de plus, fidèle à lui-même, le ministre a hésité, reporté, promis et fait des excuses.

La province de l'Alberta s'est lassée d'attendre que le ministre fédéral responsable de la Commission canadienne du blé passe aux actes. Le 6 décembre 1995, le gouvernement provincial tenait son propre référendum sur la CCB. Sur les 15 000 producteurs de grain albertains qui ont voté, 62 p. 100 ont opté pour la liberté de commercialiser eux-mêmes leur blé. Les deux tiers ont voté pour la liberté de vendre leur orge à l'acheteur de leur choix, dont la Commission canadienne du blé.

Les producteurs de grain de l'Alberta ont voté pour la liberté de choix et, ce faisant, pour la liberté de contrôler leur propre destinée.

Le bulletin de vote comportait deux questions claires. La question du libre choix était posée: les agriculteurs voulaient-ils vendre leur grain à l'acheteur de leur choix, y compris la Commission canadienne du blé? Une liste de choix, comprenant notamment le nom de la commission, était proposée.

Le ministre a continué d'atermoyer. Il a même tenté de dissuader le gouvernement albertain de tenir le référendum. Voici quelle a été la réaction du ministre aux résultats du référendum albertain. Elle n'est d'ailleurs pas surprenante. Le ministre a affirmé que les résultats étaient intéressants d'un point de vue purement théorique.

 

. 1055 + -

Je ne crois pas que les agriculteurs de l'Alberta qui ont pris le temps et fait l'effort de voter à ce référendum aient considéré que cet exercice démocratique était purement théorique. Si seulement l'élection du ministre à la Chambre des communes avait pu n'être que théorique, les producteurs de grains ne seraient peut-être pas en aussi mauvaise posture qu'ils ne le sont aujourd'hui.

Passons rapidement aux mois qui ont suivi la publication du rapport du groupe de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest. Dès le mois d'octobre, il est devenu évident que le ministre n'avait pas aimé ce qu'il avait entendu et qu'il avait l'intention d'ignorer une bonne partie des recommandations déposées. Le ministre se dit content d'avoir essayé, mais n'étant pas satisfait du résultat obtenu, il devait essayer autre chose qui lui donnerait davantage de contrôle sur les résultats. C'est ainsi qu'il a décidé de tenir le référendum tant attendu sur la Commission canadienne du blé.

Toutefois, le vote était restreint à la commercialisation de l'orge. De plus, la question était rédigée de façon à ce que la réponse obtenue soit celle que le ministre attendait. À l'encontre du référendum de l'Alberta, la consultation fédérale ne laissait que deux choix aux producteurs d'orge. Ils devraient se prononcer soit en faveur, soit contre la Commission canadienne du blé. L'orge serait sur la liste ou n'en ferait pas partie. Aucune solution intermédiaire n'était prévue. La question était simple, simple et trompeuse.

Le ministre et tous ceux qui s'intéressent de près ou de loin à l'industrie canadienne du grain savent bien qu'en posant la question de cette façon, on passait à côté de la vrai question. En réalité, la plupart des agriculteurs ne veulent pas voir la Commission canadienne du blé disparaître entièrement. Ils veulent seulement la disparition du monopole.

La question portant sur l'orge passait carrément à côté et a été au coeur de la controverse pendant plusieurs années. Elle n'était qu'un autre exemple du semblant de consultation auquel se livre le gouvernement.

Les résultats du vote sur l'orge ont été annoncés le 25 mars 1996. N'ayant aucune solution de rechange ni aucun choix, 62,9 p. 100 des agriculteurs ont voté pour le maintien de l'orge au sein de la Commission canadienne du blé. Peut-on imaginer quels auraient été les résultats si la question avait été posée correctement? S'ils s'étaient vu offrir plus d'options, beaucoup d'agriculteurs auraient aisément voté différemment. Une fois les résultats annoncés, les partisans de la Commission canadienne du blé espéraient qu'il y aurait une trêve dans le différend.

Cette trêve n'a pas eu lieu. Le mécontentement était encore plus exacerbé, en raison de l'injustice que constituait la question du ministre au sujet de l'orge. Tout espoir de régler la controverse au moyen des dispositions législatives dont on disposait s'est envolé en fumée lorsque, le 3 décembre 1996, le projet de loi C-72, qui modifiait la Loi sur la Commission canadienne du blé, a été présenté à la Chambre. Ce projet de loi était le prédécesseur de celui que nous débattons aujourd'hui, le projet de loi C-4. Aucune des recommandations du groupe de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest que j'ai mentionnées plus tôt ne figurait dans le projet de loi C-72.

Je constate qu'il ne me reste qu'une minute. Je pourrais discourir sans fin sur l'historique épouvantable du projet de loi C-4 et sur son élaboration. Cependant, au cours de cette dernière minute, je voudrais mentionner que le ministre aurait déclaré que nous, de ce côté-ci, avions présenté un amendement, à l'étape du rapport, pour que la Commission canadienne du blé fasse l'objet d'un examen par le vérificateur général du Canada.

Le ministre a toujours soutenu que le vérificateur actuel exerce exactement les mêmes fonctions que le vérificateur général du Canada. C'est tout simplement faux. Ce n'est pas exact. Compte tenu de cela, je voudrais proposer la motion suivante:  

    Qu'on modifie la motion en retranchant tous les mots suivant le mot «Que» et en les remplaçant par ce qui suit:

      «Le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, ne soit pas lu maintenant pour une troisième fois, mais soit renvoyé plutôt au Comité permanent de l'agriculture aux fins de réexamen de la disposition 8 à l'article 9 pour s'assurer que la Commission donne les précisions et fournit les renseignements exigés pour les fins de la vérification par le vérificateur général du Canada; et produit les documents et fournit les renseignements demandés en vertu de la Loi sur l'accès à l'information dans la mesure où les documents et les renseignements exigés ont été entre les mains de la Commission pendant au moins trois ans avant qu'elle ne reçoive cette requête, et que la Commission demeure une institution fédérale au sens de la Loi sur l'accès à l'information.»

Je crois que la motion est recevable. Si cette motion est adoptée et le projet de loi renvoyé au comité, l'honorable ministre pourra alors présenter tout amendement...

Le vice-président: Le temps de parole du député est écoulé.

 

. 1100 + -

Le débat porte sur l'amendement.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Réf.): Monsieur le président, je voudrais tout d'abord remercier les députés de tous les partis de me permettre de partager le temps de parole du député de Peace River, du côté de la Colombie-Britannique.

Toute mesure prise pour réformer la Commission canadienne du blé devrait être une bonne chose. Chose certaine, une réforme de ce genre s'impose. Je pense que tous les producteurs de grain de l'Ouest du pays seront d'accord là-dessus. Ils en sont tous conscients. Ils ont certes des points de vue différents sur le type de modifications nécessaires, mais toute mesure prise en ce sens sera une bonne chose.

Je vais essayer dans ce discours de répondre à la question de savoir si le projet de loi C-4 est vraiment la mesure législative dont on a besoin pour réformer comme il se doit la Commission canadienne du blé. Mon discours s'articulera autour de quatre questions. La première est: en quoi consiste le véritable débat? Sur quoi devrait porter le vrai débat en ce qui concerne la Commission canadienne du blé? La deuxième question porte sur l'opposition au projet de loi C-4 de la part des agriculteurs. En fait, ils s'élèvent contre toutes les dispositions du projet de loi C-4. Troisièmement, je veux parler de la façon dont le gouvernement a traité tout le processus de modification de la Commission canadienne du blé, plus particulièrement du projet de loi C-4 et du processus qui a conduit à cette mesure. Enfin, je vais me demander vers quoi nous nous en allons à partir de là.

Tous ceux qui croient que cette mesure législative va mettre un terme à la nécessité de modifier la Commission canadienne du blé sont tout à fait dans l'erreur. Le débat va être de plus en plus animé et va s'intensifier dans tout l'ouest du pays en particulier. Je crois qu'il gagnera ensuite le centre du Canada, quand les habitants de cette région se rendront compte de l'injustice faite aux producteurs de céréales de l'Ouest.

D'abord, quel est le véritable objet du débat? Il y a, en réalité, quatre grands points sur lesquels le débat devrait porter, concernant les changements apportés à la Commission du blé. Le premier point, c'est le monopole.

Comme l'a dit le député qui a pris la parole avant moi, il arrive souvent que les réformistes soient accusés d'être contre la commission. C'est totalement faux. Nous tentons désespérément de changer la commission du blé afin d'éviter qu'elle ne devienne complètement dépassée et qu'elle n'ait plus aucune valeur pour l'ensemble des agriculteurs de l'ouest du Canada.

 

. 1105 + -

La Commission du blé rend un service valable aux agriculteurs de l'Ouest. Je crois que tous les députés du Parti réformiste, et je ne peux l'affirmer au nom de chacun mais j'en ai parlé avec plusieurs d'entre eux, croient que la Commission du blé rend un service utile aux agriculteurs de l'Ouest. Ce n'est pas cela qui est en cause.

Le Parti réformiste essaie de changer la Commission du blé afin qu'elle devienne beaucoup plus utile aux agriculteurs canadiens, les vrais intéressés. Les agriculteurs de l'Ouest sont vraiment les seuls agriculteurs que la Loi sur la Commission canadienne du blé touche pour la peine. En fait, ce sont eux qui paient pour le fonctionnement de la Commission du blé.

Encore une fois, le véritable débat a trait au monopole de la Commission du blé. Il s'agit aussi de savoir si les administrateurs ont des comptes à rendre ou non. Il s'agit de savoir si la Commission du blé est ouverte ou non et de déterminer à qui appartient le grain en premier lieu. C'est la question fondamentale.

C'est d'ailleurs une question que posent de plus en plus d'agriculteurs de l'Ouest. À qui est le grain? Si, en réalité, c'est notre grain, pourquoi ne pouvons-nous pas le mettre en marché comme bon nous semble? Pour être clairs, disons que cela pourrait se faire tout en conservant à la Commission du blé un rôle très important dans la mise en marché du grain.

Prenons donc d'abord la question du monopole. Bien sûr, c'est probablement la question la plus importante en ce qui a trait à la Commission canadienne du blé. La plupart des agriculteurs de l'Ouest sont en faveur de la commission, mais, comme les sondages l'ont montré, la majorité d'entre eux ne sont pas favorables au monopole. En Alberta, le sondage sur la mise en marché de l'orge a révélé une majorité de 67 p. 100, c'est-à-dire des deux tiers des agriculteurs, qui sont contre le monopole. Dans le cas du blé, ce sont 62 p. 100 qui ne sont pas en faveur du monopole. Dans ma circonscription, c'est près de 90 p. 100 des agriculteurs qui sont contre le monopole. Donc, il ne s'agit pas de savoir si l'on appuie la Commission du blé ou non, mais plutôt si l'on veut donner le choix aux agriculteurs quant à la manière dont ils vendront leur grain.

Les deuxième et troisième points sur lesquels devrait vraiment porter le débat, à mon avis, sont l'obligation de rendre compte et la transparence. Il s'agit donc des deuxième et troisième points. En ce qui concerne l'obligation de rendre compte, le ministre a soutenu que cette mesure législative apporterait quelques améliorations au sein de la commission du blé. Peut-être bien que oui, peut-être bien que non.

Dans une certaine mesure, ça dépendra de ce que le conseil d'administration décidera et des personnes qui le composeront. Voilà une double question importante qui mérite qu'on s'y arrête: Qui aura le droit de vote, et comment les administrateurs seront-ils élus? Quoi qu'il en soit, l'obligation de rendre compte qui est faite dans ce projet de loi sera très ténue et, en tout cas, cela n'a rien à voir avec ce que les agriculteurs réclamaient.

Les agriculteurs ont réclamé plus de transparence au sein de la commission du blé. Cet aspect revêt une si grande importance à leur yeux qu'ils ont créé un regroupement, une coalition, phénomène rare dans le secteur agricole de l'Ouest, surtout chez les céréaliculteurs. Cette coalition a précisément pour objectif de rendre la commission du blé plus transparente et de renforcer son obligation de rendre compte.

C'est sur les deuxième et troisième points, l'obligation de rendre compte et la transparence, que devrait porter le débat concernant la commission du blé.

Quatrième point, il s'agit de savoir à qui appartient ce grain. Des groupements ont été créés pour s'occuper de ce dossier. Car c'est le droit de propriété qui est en cause ici. Je suis persuadé que d'autres députés voudront en toucher un mot au cours du débat.

Chose sûre, à tout le moins dans toute société démocratique, il est normal que le citoyen qui fabrique un produit de base ait le droit de vendre celui-ci comme il l'entend. Si on regarde la façon dont les marchés fonctionnent au Canada, en Amérique du Nord, un peu partout dans le monde, c'est le cas de la plupart des produits de base.

 

. 1110 + -

General Motors, Ford et les petites entreprises qui font affaire dans nos localités ont le droit de vendre leurs marchandises comme elles l'entendent sur le marché libre. Comment se fait-il que de tous les groupes, ce soit les producteurs de grains de l'Ouest, même pas de tout le pays mais bien ceux de l'Ouest, qui n'aient pas le droit de vendre leurs produits comme ils l'entendent? La réponse ne se trouve certainement pas dans le projet de loi.

Ce sont là des questions dont nous devrions débattre. Malheureusement, ce projet de loi n'apporte pas grand chose au débat à cet égard.

Je vais parler de l'opposition que cette mesure législative, dans sa totalité, suscite dans le monde agricole. Quiconque a suivi l'évolution de ce projet de loi et a reçu des lettres d'agriculteurs et de regroupements professionnels agricoles sait que tel est le cas. Chaque partie importante de ce projet de loi rencontre l'opposition d'au moins un regroupement, si ce n'est de plusieurs.

Une coalition a été formée strictement pour s'opposer au projet de loi C-4. Elle a concentré ses efforts sur la clause d'inclusion. Elle s'inquiète de ce que d'autres denrées telles que le canola et les pois, qui sont importantes pour ses membres, risquent de tomber sous le contrôle de la Commission canadienne du blé. Ces producteurs étaient tellement inquiets qu'ils ont formé une coalition. Ils ont mené une campagne de lobbying aussi vigoureuse que possible pour que soient rejetés la clause d'inclusion et d'autres changements proposés dans le projet de loi parce qu'ils estiment qu'ils vont à l'encontre du but visé et ne feraient qu'empirer les choses.

La liste des organisations membres de cette coalition est impressionnante. On y retrouve la Canadian Canola Growers Association, la Manitoba Canola Growers Association, la Flax Growers Western Canada, l'Alberta Winter Wheat Producers Association, la Western Barley Growers Association, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, la Saskatchewan Canola Growers Association, l'Alberta Canola Producers Commission, la Canadian Oilseed Processors Association, la bourse de Winnipeg et la Western Canadian Wheat Growers Association. Toutes des organisations ayant un poids considérable dans l'Ouest. L'enjeu était pour elles d'une importance telle qu'elles ont formé une coalition contre le projet de loi C-4.

En toute équité, je dois dire que la plupart de ces groupes s'opposent au monopole de la Commission canadienne du blé. Ils pensent que les agriculteurs devraient pouvoir choisir entre vendre par l'intermédiaire de la CCB ou vendre là où bon leur semble. C'est le fer de lance de leurs revendications depuis plusieurs années. Toutefois, l'opposition à ce projet de loi vient de partout.

Permettez-moi de rappeler trois courts passages d'une lettre du comité consultatif de la commission du blé, qui s'oppose aussi à ce projet de loi, même s'il est favorable à un monopole: «Nous sommes d'avis qu'un changement s'impose, mais que le projet de loi C-4 ferme la porte à des options et qu'il devrait être retiré.» Même le comité consultatif de la commission du blé demande le retrait du projet de loi. C'est dire à quel point il est mauvais. La lettre dit ensuite: «Le gouvernement a dépensé des millions de dollars pour en arriver aux modifications qu'il propose et qui nous apparaissent clairement de nature à détruire très rapidement la Commission canadienne du blé.» Voilà l'opinion du comité consultatif.

Le ministre veut-il détruire la commission du blé? Le ministre traite-t-il ce dossier de manière à détruire secrètement la commission? Ses façons de procéder et les recommandations que le comité et les témoins ont faites au comité montrent qu'il n'a rien compris du tout. Je me demande quelle était son intention. Monsieur le Président, vous pensez peut-être que je ne suis pas sincère, mais je le suis. Cette pensée m'a traversé l'esprit. Je peux me tromper, mais j'y ai pensé de même que de nombreux autres agriculteurs partout dans l'ouest du Canada.

Le dernier passage de la lettre du comité consultatif de la commission du blé porte sur l'élection des membres du conseil d'administration. Le ministre a soutenu que le conseil d'administration est une organisation très démocratique qui est tenue de rendre des comptes aux agriculteurs. «Je ne vois vraiment pas comment ce conseil d'administration élu peut placer le contrôle entre les mains des agriculteurs», a affirmé Wilfred Harder.

 

. 1115 + -

M. Harder, du conseil consultatif de la Commission canadienne du blé, a ajouté que le ministre pouvait à tout moment congédier cinq administrateurs, y compris le président, et que le Cabinet fédéral, au moyen d'un règlement, pouvait annuler toute politique établie par la commission. Il a ajouté que le comité avait également des réserves concernant les achats au comptant, les certificats de producteur négociables, la perte du statut d'organisme de la Couronne et l'établissement d'un fonds de réserve.

Ces questions sont vraiment au coeur du projet de loi C-4. Elles n'ont pas été soulevées par un des groupes qui veulent mettre fin au monopole, mais bien par le conseil consultatif de la Commission canadienne du blé, qui veut préserver le monopole.

Personnellement, j'ai une opinion très ferme au sujet du monopole de la commission. Je m'y oppose catégoriquement. Cette question me va droit au coeur, parce qu'elle touche mes électeurs. Je veux bien sûr parler de ma famille, mais aussi de mes amis et de mes voisins qui produisent des céréales. Je veux parler des milliers de gens de ma circonscription qui produisent des céréales, ainsi que de tous ceux qui, dans l'ouest du Canada, font ce métier.

Nous ne faisons pas que modifier certains aspects de leur vie, nous empiètons sur leur droit fondamental de commercialiser leur grain comme ils l'entendent. Nous parlons de leur gagne-pain.

Je pourrais vous parler des lettres que je reçois, j'en ai des piles qui viennent de groupes qui se sont prononcés contre ce projet de loi. Il y a les United Grain Growers, une société très importante de commercialisation de grain dans l'ouest du Canada; le Canadian Farm Enterprise Network; les Saskatchewan Canola Growers; les Western Stock Growers et d'autres. J'ai une pile de lettres, mais je n'ai pas le temps de les lire à la Chambre.

Une voix: Allez-y.

M. Leon E. Benoit: Un député voudrait que je le fasse. Ces lettres sont à la disposition de tous ceux qui veulent les lire.

L'opposition ne vient pas seulement de moi et de mes collègues réformistes. L'opposition ne vient pas seulement des groupes qui veulent mettre un terme au monopole de la commission et rendre l'appartenance facultative. L'opposition vient des agriculteurs et des groupes agricoles de tout l'ouest du Canada.

Une autre chose dont je voudrais parler, c'est la façon dont le gouvernement à procédé avec cette mesure. Il est important que tous les Canadiens, pas seulement les agriculteurs, sachent ce qui est arrivé à ce projet de loi.

En dépit de l'opposition de tous les groupes que j'ai mentionnés, en dépit de ce qu'a recommandé le groupe sur la commercialisation des grains, le gouvernement est résolu à faire adopter ce projet de loi. En fait, il a invoqué la clôture pour parvenir à ses fins. Nous n'avons qu'une journée pour en débattre en troisième lecture. Nous voterons sur cette mesure législative ce soir, et le gouvernement, avec sa majorité, en forcera l'adoption. Les ministériels se lèveront un après l'autre ce soir pour adopter le projet de loi.

Lorsque je verrai ces députés se lever un à un ce soir, je me demanderai quel impact l'adoption de ce projet de loi aura sur leur vie. Elle n'en aura aucun, du moins pas directement. Cependant, ce projet de loi aura un impact sur le gagne-pain des céréaliculteurs de l'ouest du Canada.

Comme l'orateur précédent l'a mentionné, une trentaine de députés réformistes ont des liens très étroits avec le secteur agricole. Beaucoup d'entre eux, comme moi, sont encore actifs dans ce domaine. Ma ferme est louée en vertu d'une entente de métayage. J'ai du blé et de l'orge à mettre en marché. Je suis limité par le monopole exercé par la commission, tout comme mes voisins et d'autres agriculteurs d'un bout à l'autre du pays.

Au nom de qui les députés d'en face se lèveront-ils un à un pour appuyer le projet de loi? Est-ce au nom des agriculteurs de l'ouest du Canada? Je ne crois pas. Ceux-ci ont exprimé leur opposition à ce projet de loi. Au nom de qui voteront-ils?

Compte tenu de la clause d'inclusion, ils voteront au nom du député de Malpèque, qui est la seule raison pour laquelle cette clause a été incluse dans le projet de loi. C'est une idée farfelue qui vient de lui. Son gouvernement a sauté sur cette idée et l'a intégrée dans ce projet de loi, qu'il fera adopter à la hâte malgré l'opposition générale exprimée par les habitants de l'ouest du Canada.

 

. 1120 + -

Le gouvernement a très mal géré ce dossier. Il n'a pas tenu compte des sondages, y compris d'un sondage en Saskatchewan montrant qu'il devrait mettre fin au monopole. Il a fait fi du processus démocratique. Il n'a pas tenu compte des mémoires présentés au comité. Le projet de loi aurait dû être abandonné il y a longtemps. Nous devrions recommencer à zéro.

Que faisons-nous maintenant? Ce projet de loi réglera-t-il enfin la question du monopole de la Commission canadienne du blé, de l'absence de responsabilité de la commission et de son manque de transparence? Et à qui le grain appartient-il? Ce projet de loi ne réglera rien de cela.

Le projet de loi a, d'une certaine façon, uni les agriculteurs qui se sont ralliés pour s'opposer au projet de loi C-4. Il a uni les agriculteurs, mais pas d'une façon positive.

Ce projet de loi continuera de creuser le fossé qui existe dans l'ouest du Canada entre les agriculteurs qui veulent que la commission exerce un monopole et ceux qui veulent une commission volontaire. Encore une fois, il ne s'agit pas ici de déterminer si on veut ou non une commission, mais bien quel genre de commission on veut. Ce projet de loi va créer encore plus de divisions chez les agriculteurs. Le débat sur cette question va s'intensifier. Le ministre subira encore plus de pressions et devra payer le prix politique pour avoir ainsi divisé les collectivités rurales dans l'ouest du pays. C'est malheureux.

Je suis impatient d'entendre les interventions des députés de tous les partis à la Chambre.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, si vous me le permettez, j'aimerais faire un bref historique sur la Commission canadienne du blé.

Tout d'abord, il faut se rappeler notre histoire du bon temps, et du temps très malheureux de la fameuse crise économique de 1929. Au milieu des années 1930, alors que les producteurs céréaliers de l'Ouest trimaient dur pour à peu près rien, qu'ils ne ramassaient que des miettes pour leurs ventes de grain, le gouvernement, à l'époque, a créé une commission pour organiser la mise en vente des grains de l'Ouest.

À l'époque, la Commission canadienne du blé était facultative. On n'avait pas inclus le monopole à l'intérieur de ladite Commission. Ce n'est qu'au milieu ou à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, en 1943, que le monopole a été inclus à l'intérieur de la Commission canadienne du blé.

Depuis, la Commission canadienne du blé n'a subi que de légères modifications. Et il y a déjà plus de deux ans, en cette Chambre, nous avons commencé l'étude d'un certain projet de loi, le projet de loi C-72, qui est mort au Feuilleton, parce que le gouvernement a décidé de déclencher des élections précipitées. Il s'est dépensé des centaines et des centaines de milliers de dollars pour étudier le projet de loi C-72, et la Chambre a dû recommencer avec le ministre des Ressources naturelles qui était, sous l'ancienne Législature, ministre de l'Agriculture et, à ce titre, responsable de la Commission canadienne du blé.

Maintenant qu'il occupe un autre fauteuil, le premier ministre lui a confié la responsabilité additionnelle de la Commission canadienne du blé, l'enlevant, par le fait même, au nouveau ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Pour quelle raison? Je laisse votre imagination en déduire.

Le ministre des Ressources naturelles, titulaire de la Commission canadienne du blé, a ressuscité le projet de loi C-72 en l'appelant, cette fois-là, le projet de loi C-4. C'est un projet de loi d'envergure, puisque cela touche la totalité des trois provinces de l'Ouest, le Manitoba, la Saskatchewan et l'Alberta, et une partie de la Colombie-Britannique.

 

. 1125 + -

C'est très important et étant donné que c'est important, ils imposent le bâillon. Nous ne sommes même pas en fin de session et le menu législatif de ce gouvernement libéral est très maigre. On n'a rien à se mettre sous la dent. Là, on avait le projet de loi C-4 qui est d'une certaine importance et vlan, on nous impose le bâillon. Le début de la troisième lecture à 10 heures et le vote à 17 h 30.

La Commission canadienne du blé, en vertu du projet de loi C-4, ne serait plus une société d'État conventionnelle. Autrement dit, ce serait un regroupement libre, un regroupement privé. Cependant, le gouvernement se garde bien le pied dans la porte. Il nous permettra d'élire démocratiquement 10 membres du conseil d'administration et lui, avec le gouverneur en conseil, procédera à cinq nominations. Mais attention, il procédera à la plus importante, celle du président-directeur général, qu'il pourra bien entendu révoquer.

Ces nominations, que je dénonce avec vigueur jour après jour à la Chambre, sont un cancer lorsqu'on en vient à procéder à des nominations aussi prestigieuses, aussi importantes, aussi lourdes de conséquences. On va faire du patronage et, lorsqu'on connaît bien le régime gouvernemental qui existe ici au Parlement, on peut d'ores et déjà prévoir qui sera nommé président-directeur général de la Commission canadienne du blé. Ce sera sûrement un rouge, qui sera très bien rémunéré et qui connaît très bien le ministre des Ressources naturelles.

Ce sera aussi pour libérer possiblement un comté, comme on a fait avec le comté de Beauce, ou pour récompenser certains députés de la Nouvelle-Écosse défaits lors des dernières élections générales, afin de leur donner quelque chose à se mettre dans la bouche et sur leurs toasts le matin. On les nommera, par exemple, au bureau du ministre des Ressources naturelles ou encore au bureau de Boston. Il y a bien sûr André Ouellet, qu'on a connu ici, et David Berger, qui est devenu évidemment ambassadeur du Canada en Israël.

Si c'est une société privée, si la Commission canadienne du blé est une société autonome, pourquoi nous imposer le président-directeur général, celui qui va gérer, à toutes fins utiles et en totalité, la Commission canadienne du blé? Pire que cela, étant donné que ce n'est plus une société d'État, notre bon vérificateur général, M. Denis Desautels, qui fait trembler le gouvernement au complet lorsqu'il présente son rapport, parce qu'avec son équipe très bien structurée, il peut analyser ce genre de société et également son fonctionnement pour voir si elle est vraiment efficace, si elle travaille pour les producteurs d'abord et avant tout, ou si elle travaille pour le profit de certains «patroneux», il ne pourra le faire dans ce cas-ci.

Non, ce sera Deloitte & Touche qui aura l'immense responsabilité de procéder à la vérification des livres de la Commission canadienne du blé. N'était-ce pas, de mémoire, cette même firme comptable qui a versé un bon paquet d'argent, lors des dernières élections générales, au Parti libéral du Canada? Est-ce que vous vous en rappelez? Deloitte & Touche, vérifiez donc.

Ce gouvernement nourrit bien ceux et celles qui lui sont reconnaissants. Nous, du Bloc québécois, par souci de transparence, souhaiterions que M. Denis Desautels, vérificateur général du Canada, ainsi que son équipe, procèdent et aillent fouiller les livres de la Commission canadienne du blé.

 

. 1130 + -

On connaît bien les chiffres, mais je rappelle qu'on aura, en 1998-1999, des ventes qui atteindront, et même dépasseront, les sept milliards de dollars. Une petite erreur de un millième de 1 p. 100 signifie des sommes très importantes. Si on désire travailler pour le bien des producteurs céréaliers, n'hésitons pas à bien voir à cette administration pour qu'elle soit la plus transparente possible.

Je me souviens qu'au printemps dernier, lorsque mon collègue et voisin, le député de Richmond—Arthabaska, pointait le premier ministre et le ministre des Ressources naturelles, ainsi que le ministre du Développement des ressources humaines, parce qu'il y avait un collecteur de fonds qui suivait le ministre, 15 jours plus tard, pour aller collecter. On peut le nommer, nous possédons l'immunité ici, M. Corbeil, si ma mémoire m'est fidèle, qui procédait à la collecte de fonds en suivant le ministre à la queue leu leu.

Par souci de transparence, n'ayons pas peur d'aller fouiller dans les livres, avec des personnes compétentes qui le feront à un coût inférieur à la firme Deloitte & Touche. Finalement, dans le même ordre d'idées, vu que ce n'est plus une société d'État régulière, on n'aura plus le droit, avec la fameuse Loi sur l'accès à l'information, de poser des questions. Les producteurs céréaliers n'auront pas le droit d'aller chercher des vices cachés, des résolutions ou des décisions qu'on aurait pu prendre en leur nom, mais qu'on ne pourra pas, à l'aide de la Commission d'accès à l'information, aller quérir.

Donc, dans le projet de loi C-4, la transparence est très, très basse, dans le fond de nos souliers.

Cela me rappelle, lorsque, dans l'Ouest canadien, on faisait bénéficier les gens—et mon collègue de Lévis me le rappelait à juste titre il y a quelques instants—de la fameuse Loi sur le transport du grain, communément appelée la loi du Nid-de-Corbeau. Cela nous coûtait, bon an mal an, près d'un milliard de dollars en subventions directes pour permettre le transport du grain.

Évidemment, certains avaient trouvé un truc assez facile, d'utiliser cette Loi sur le transport du grain à leurs fins personnelles, si bien que cela ne leur coûtait plus un cent. Même ils pouvaient en faire en faisant transiter les wagons qui venaient à Thunder Bay et retournaient à Vancouver avec le même blé.

On a donné près de trois milliards de dollars, sans imposition provinciale ou fédérale, aux producteurs céréaliers, puisqu'on abolissait un privilège qui, semble-t-il, leur était dû jusqu'à la fin des temps. Avec ces trois milliards de dollars—comme me l'a rappelé mon collègue de Lévis—certains producteurs ont diversifié leur production. Au lieu de payer pour transporter leur grain, ils se sont dit: «On va faire manger le grain sur place.»

Comme ils ne pouvaient pas produire de lait, puisque nous avons un régime contingenté, une forme de quota, qu'ils ne pouvaient pas produire de volaille, de poulets, et qu'ils ne pouvaient pas produire des oeufs avec les poules, qu'est-ce qu'ils ont produit qui n'est pas contingenté? Le porc.

Il y a eu un double résultat: à Brandon, on est en train de construire un abattoir, c'est épouvantable, où on pourrait abattre plus de 35 000 porcs par semaine. C'est une grosse année, 35 000 porcs par semaine, si vous multipliez cela par 52. C'est le premier résultat.

Le double résultat, c'est qu'aujourd'hui, le prix du porc, savez-vous où il est rendu? Il a «droppé», il a baissé. Nos producteurs de porc, au Québec, perdent de l'argent tous les jours, au moment où on se parle.

M. Antoine Dubé: En bas du prix coûtant.

M. Jean-Guy Chrétien: En bas du prix coûtant, bien sûr. On perd de l'argent pour chaque porc qui sort de la porcherie.

C'est cela, la gestion du gouvernement libéral du député de Saint-Maurice.

 

. 1135 + -

Mon distingué collègue du Parti réformiste qui m'a précédé disait, à juste titre, que le projet de loi C-4 est en train d'unir les producteurs céréaliers, pas en faveur du projet de loi C-4, mais bien contre le projet de loi C-4.

J'ai reçu des lettres par centaines. Encore hier soir, avant le vote, j'ai reçu des appels téléphoniques de la province du Manitoba, des producteurs céréaliers qui m'imploraient de voter contre le projet de loi C-4. Ils me disaient: «Essaie d'aller parler à quelques députés libéraux pour les inviter à s'abstenir, s'ils n'ont pas le courage de voter contre.» Et là, on apportait des arguments qui étaient différents, bien sûr, l'un de l'autre, mais qui, quand même, pouvaient réunir tous ces producteurs.

Si le ministre des Ressources naturelles, ministre responsable de la Commission canadienne du blé, a vraiment l'intention de travailler pour les producteurs, il devrait quitter Ottawa et aller se promener sur les fermes de l'Ouest, au Manitoba, en Alberta, en Saskatchewan, à Peace River. Il verrait ce que les producteurs pensent de son projet de loi. Il est déconnecté, ce ministre. Il est déconnecté de la réalité.

Pour certains, c'est l'inclusion. Pour d'autres, c'est l'exclusion. Pour d'autres encore, c'est le fonds de réserve. Pour certains, ce sont les nominations. Pour d'autres, ce sont les élections qu'on voudrait faire le plus rapidement possible, ne pas attendre.

J'en ai rarement vu qui étaient d'accord pour accepter le projet de loi tel qu'il nous est présenté. Si le bon ministre a l'idée de travailler pour les producteurs de grain, il devrait mettre un holà sur le projet de loi C-4, le retourner possiblement au Comité de l'agriculture et de l'agroalimentaire avec la ferme intention d'apporter des modifications majeures.

Je voudrais ici regarder quelques-unes des modifications que nous avions proposées, nous, du Bloc québécois. Tout d'abord, le président-directeur général sera nommé, et je vous ai fait part que c'est lui qui, à toutes fins utiles, dirigera la Commission canadienne du blé. Nous avions proposé que sa nomination transite devant le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. On l'a refusé. On l'a refusé, parce que le ministre a dit à ses députés, qui bien souvent viennent perdre leur temps au Comité: «Votez contre ça. Vous avez pas d'affaire là-dedans.»

Qui va procéder à la nomination? Le gouverneur en conseil. Qui est le gouverneur en conseil? Dans ce cas-ci, ce sera le ministre responsable qui va dire à ses chums là-bas au Conseil des ministres: «Vous allez nommer Mme ou M. X.» Le salaire sera de 144 000 $, plus les ceci, plus les cela. C'est quelque chose comme ça qui va se passer.

J'ai rencontré des collègues du Parti libéral qui siègent avec nous à ce comité et je leur demandais: «Pourquoi avez-vous voté contre? Vous ne travaillez pas pour vous. Pour une fois, le Comité de l'agriculture aurait eu un rôle. Vous vous seriez revalorisés.» De toute façon, c'est connu; sur tous les comités, le président est libéral. Il y a d'un côté huit libéraux, de l'autre côté, six députés de l'opposition, et parfois, l'opposition est divisée, puisqu'il y a quatre partis reconnus.

Donc, s'ils avaient eu un peu le courage de se tenir, ils auraient pu, de la même façon, nommer leur protégé, et au moins ainsi, on aurait pu poser des questions à ce dit protégé. J'ai même vu, lors de certaines nominations, qu'on avait choisi un individu qui ne connaissait rien, qui n'était même pas capable de différencier une gerbe de blé d'une gerbe d'avoine ou d'orge, et on le nommait à un poste aussi important que celui dont je vous parle. La condition préalable, c'était d'avoir la bonne couleur.

 

. 1140 + -

Je parle des «rouges», mais lorsque le Parti progressiste-conservateur a précédé le Parti libéral, ce ne fut guère mieux, on le sait très bien. Parlant de nominations, n'est-ce pas le Parti libéral qui a nommé le fameux sénateur Thompson? Il était bon à l'époque, il dirigeait le Parti libéral de l'Ontario. Il avait mené ses troupes à un désastre électoral. Pour le récompenser de son travail, on l'a nommé très jeune à l'autre Chambre avec un salaire de 64 400 $ et 10 100 $ d'allocations. Aujourd'hui, il est devenu le déshonneur de tous les sénateurs. On l'a expulsé du Parti libéral pour essayer de se redorer le blason. Là, on essaie, par différents stratagèmes, de l'expulser du Sénat.

Le premier ministre, lorsqu'on lui pose la question à la Chambre, nous dit qu'il faudrait changer la Constitution, puisqu'il est nommé jusqu'à 75 ans. Combien de mes électeurs me disaient: «Pourquoi vous n'abolissez pas le Sénat? Les 45 millions de dollars que nous pourrions économiser pourraient être utilisés pour les producteurs acéricoles qui ont vu leurs érablières détruites.»

J'avais aussi une autre proposition qui faisait état, celle-là, de l'accès à l'information à la Commission canadienne du blé. Je rappelle qu'il y aura des ventes, en 1998-1999, dépassant les sept milliards de dollars. Lorsqu'on parle de sept milliards de dollars, on dirait que c'est sept millions de dollars, ce n'est plus impressionnant. Sept milliards de dollars, c'est de l'argent. Il faut à tout prix que ces sept milliards de dollars soient administrés par et pour les producteurs de grain.

En 1935, lorsque nous avons créé la Commission canadienne du blé, c'était vrai, à l'époque, nous étions pris dans un système de faillites. Huit personnes sur dix perdaient leur ferme à l'époque. Certains mettaient le feu à leur récolte. Il était plus payant de mettre le feu à la récolte que de procéder à la récolte. On perdait moins d'argent en ne procédant pas à la récolte. Alors, la Commission canadienne du blé, à ce moment-là, a sorti du pétrin bon nombre de producteurs.

Aujourd'hui, et un de mes collègues le disait tout à l'heure, on place plusieurs producteurs en prison, puisque certains dérogent au monopole. On le sait—et le député de Trois-Rivières me le rappelait tout à l'heure—certains producteurs, à proximité des douanes américaines, avec leurs gros camions, vont livrer directement à des acheteurs du côté américain où ils obtiennent jusqu'à 12 p. 100 de plus en argent que ce que la Commission canadienne du blé peut leur offrir.

Lorsqu'on a la chance d'en prendre un, on l'accuse, il passe en cour, puisque la loi dit que c'est le monopole qui prévaut et qu'il ne peut pas le vendre ailleurs, et on l'envoie en prison. Évidemment, mon distingué collègue a possiblement exagéré lorsqu'il disait qu'on le mettait dans la même cellule qu'un violeur ou un toxicomane, que souvent ces violeurs et toxicomanes jouissaient d'une libération conditionnelle et que le producteur ne pouvait pas avoir des conditions aussi agréables.

En terminant, je vous annonce en primeur que, principalement dû au fait que le vérificateur général ne pourra aller faire la vérification des livres, on va confier cela à une firme privée de comptables. Ça sent mauvais, c'est inquiétant. En tout cas, il n'y a sûrement pas de transparence. On a un léger doute, vu que le producteur ou quelqu'un d'autre n'aura pas la possibilité d'aller vérifier les informations. Alors que l'intérêt public n'est pas respecté, il y a encore un léger doute.

 

. 1145 + -

Comme cela semble créer beaucoup d'incertitude et de mécontentement chez les producteurs de grain eux-mêmes, pour ces raisons, le Bloc québécois votera contre le projet de loi C-4 en troisième lecture.

[Traduction]

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-4 tendant à modifier la Commission canadienne du blé.

À l'issue du tout premier débat tenu à ce sujet en septembre dernier, le projet de loi a été renvoyé au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Nouvellement élu à la Chambre, j'étais optimiste et je croyais que nous serions en mesure de travailler en comité dans une atmosphère de collégialité afin d'apporter des améliorations au projet de loi. De toute évidence, cela n'a pas été le cas.

Dans l'ensemble, mon expérience au sein de ce comité a été décevante. Les libéraux qui siégeaient au comité n'étaient pas vraiment intéressés à négocier des compromis et ils ont précipité indûment les délibérations du comité. La preuve, comme je l'ai mentionné la semaine dernière à l'étape de la deuxième lecture, c'est que les partis de l'opposition ont été avisés, avant même que le représentant de la Commission canadienne du blé comparaisse devant le comité permanent, qu'ils devaient soumettre sans tarder leurs amendements à un dernier examen.

On avait clairement hâte d'en finir avec cette question. Voilà que le gouvernement impose l'attribution de temps, même si tout le monde sait que la nouvelle commission ne fera pas l'objet d'un vote avant la récolte, à l'automne.

Les néo-démocrates ont toujours appuyé la Commission canadienne du blé, parce que nous croyons qu'elle défend les intérêts des agriculteurs. Toutefois, nous croyons que le projet de loi C-4 contient de graves lacunes qui mineront la commission. Je tiens à préciser que notre caucus s'opposera au projet de loi C-4, parce que nous croyons qu'il est mal ficelé.

À notre avis, la question est de savoir si le projet de loi C-4 rendra la Commission canadienne du blé plus faible ou plus forte. Nous soutenons que, malheureusement, le projet de loi affaiblira la Commission canadienne du blé.

Comme je l'ai dit, nous avons essayé de résoudre le problème lors de l'étude en comité, mais les libéraux ont refusé. Nous n'avons donc d'autre choix que de nous opposer à cette mesure.

L'histoire a montré que la commission du blé a joui, pendant plus de six décennies, de l'appui massif des agriculteurs. Ce sont eux qui, en premier lieu, ont demandé la création de la Commission canadienne du blé. Ils l'ont appuyée pendant six décennies et ils lui accordent encore leur appui. La preuve, et elle est du domaine public, c'est qu'il y a à peine un an, les producteurs d'orge ont voté à 63 p. 100 en faveur d'une commercialisation de leur produit qui continuerait d'être assurée par la commission.

Voici la question qu'il convient de poser: Pourquoi les agriculteurs appuient-ils la commission du blé? C'est tout simplement parce que la CCB a 60 ans d'expérience sur les marchés internationaux et qu'elle est reconnue comme une des meilleures organisations de commercialisation du grain dans le monde entier. Les responsables du processus de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest ont demandé à des représentants de pays qui s'occupent de commercialisation du grain de classer ceux qu'ils estiment être les meilleurs exportateurs de grain. Il s'est avéré que la CCB du Canada se classe au premier rang de tous les organismes dans le monde parce qu'elle commercialise le blé de la meilleure qualité qui soit et au meilleur prix possible.

Les agriculteurs appuient donc, généralement parlant, la commission du blé. Les néo-démocrates l'appuient eux aussi. Le projet de loi C-4 est toutefois une mesure législative qui laisse à désirer et qui nuira à la Commission, et c'est pour cette raison que nous nous opposons aux modifications proposées.

En quoi le projet de loi C-4 nuira-t-il à la commission? Premièrement, il propose l'achat au comptant. Nous croyons que cela portera atteinte à l'un des piliers fondamentaux de la commission du blé et, partant, que cela minera la confiance que les agriculteurs ont en elle. La Commission canadienne du blé repose essentiellement sur trois piliers: la mise en commun des prix, les garanties gouvernementales et le guichet de vente unique. Nous croyons que deux d'entre eux sont menacés, soit la mise en commun des prix et les garanties gouvernementales. Si nous adoptions certaines des motions proposées par les réformistes, le troisième pilier, celui qui concerne le guichet de vente unique, disparaîtrait ou serait grandement limité lui aussi.

 

. 1150 + -

Aux termes du projet de loi C-4, la Commission pourra acheter des grains de n'importe qui, n'importe où, n'importe quand et à n'importe quel prix. Cela met fin à la pratique établie depuis longtemps qu'avait la Commission d'acheter le grain des agriculteurs à des prix annoncés et de distribuer équitablement les bénéfices à tous les agriculteurs.

Deuxièmement, le projet de loi C-4 prévoit l'établissement d'un fonds de réserve dont les contributions pourraient coûter jusqu'à 570 millions de dollars aux agriculteurs. Le fonds n'est pas nécessaire. Les agriculteurs n'ont pas les moyens d'y contribuer. Ils ne comprennent généralement pas qu'il aura des répercussions pour eux et ils vont sûrement être très mécontents quand ils en découvriront la nature.

Cette proposition relative au fonds de réserve découle de la disposition prévoyant l'achat de grain au comptant. Un fonds de réserve ne serait pas nécessaire si Ottawa continuait de fournir des garanties financières à la Commission comme il l'a toujours fait. Nous voulons que le gouvernement canadien continue de fournir à la Commission canadienne du blé des garanties allant au-delà des premiers achats au lieu de refiler la responsabilité aux agriculteurs. C'est là l'essentiel d'une proposition d'amendement du NPD qui a été rejetée hier soir par la majorité libérale silencieuse.

Il y a enfin la question de l'organisation sociale. Pendant 60 ans, la Commission canadienne du blé, en tant que société d'État, a accompli un travail remarquable pour les agriculteurs, mais le gouvernement propose maintenant de lui enlever son caractère de société d'État. Il prétend que le projet de loi C-4 donnera aux agriculteurs le contrôle des activités de la Commission.

Sur les 15 membres dont se composera son conseil d'administration, dix seront élus par les producteurs et cinq seront nommés par Ottawa. S'il faut qu'il y ait un conseil d'administration, nous ne voyons pas d'objection à ce que le gouvernement y nomme un certain nombre d'administrateurs. Comme le gouvernement fera face à des enjeux financiers considérables, il n'est que logique et raisonnable qu'il dispose d'un droit de regard sur les activités de la Commission. Cela aussi s'est reflété dans la façon dont nous avons voté hier soir.

Le ministre va cependant plus loin dans le projet de loi C-4 en conservant le pouvoir de nommer le président du conseil d'administration qui exercera en outre les fonctions de premier dirigeant de la Commission. Notre caucus s'oppose à cette disposition.

Il a été intéressant d'entendre le ministre chargé de la Commission canadienne du blé expliquer ce matin, en des termes élogieux, comment le projet de loi allait mettre les agriculteurs aux commandes. Nous croyons quant à nous que les agriculteurs, loin d'être aux commandes, seront relégués à un rôle secondaire.

Le projet de loi laisse au gouvernement un trop grand contrôle sur le conseil d'administration, qui devrait rendre ses comptes aux agriculteurs, et un contrôle trop étroit également sur les activités courantes de la commission.

Selon nous, le conseil d'administration devrait pouvoir choisir le président et directeur général, et nous avons exhorté le ministre à apporter cet amendement. Malheureusement, notre demande est restée lettre morte.

Si on veut que la commission ait un conseil d'administration, les élections doivent se dérouler dans un cadre d'équité, d'ouverture et de transparence. Il faudrait que ces élections soient menées par et pour les agriculteurs, sans ingérence aucune des grandes sociétés, ni de qui que ce soit d'autre, du reste.

Les amendements que nous avons proposés assureraient l'équité dans les élections, car chaque producteur n'aurait droit qu'à une seule voix. Des élections équitables, cela veut dire également qu'il faut limiter les dépenses électorales des candidats, comme cela se fait aux élections fédérales et provinciales, de façon que les particuliers ou les sociétés riches n'aient pas un avantage injuste.

La Commission canadienne du blé est une industrie de 6 milliards de dollars au Canada et certaines sociétés voudraient bien mettre la main dessus. Nous ne voulons pas qu'elles puisent dans leurs coffres bien garnis pour influencer de façon indue les élections au conseil d'administration.

Passons à la disposition qui permet d'assujettir de nouvelles productions à la compétence de la commission. Les agriculteurs sont généralement d'accord. Le projet de loi C-72 autorisait la Commission canadienne du blé à exclure des grains de son champ de compétence. Il n'est donc que juste et raisonnable que les producteurs puissent voter pour faire l'inverse. Tel grain serait assujetti à la compétence de la commission uniquement si les agriculteurs votent en ce sens. Ce serait démocratique. Notre caucus appuie fermement cette disposition, mais nous nous demandons avec inquiétude de quelle façon il sera décidé de tenir un vote.

 

. 1155 + -

Nous avons proposé cet amendement qui prévoit que le processus d'inclusion soit le même que celui qui vise à exclure une céréale, à savoir que le conseil d'administration de la commission du blé demande l'inclusion d'une céréale et que les agriculteurs, les producteurs de la céréale en question, votent sur cette inclusion. Ce sont là des propositions sensées et modérées qui contrastent vivement avec le venin qu'a répandu ces derniers mois la coalition contre le projet de loi C-4. J'y reviendrai dans quelques instants.

Les activités de cette coalition ne sont vraiment rien de plus qu'une attaque directe contre la Commission canadienne du blé, une tentative pour obtenir de façon détournée ce qu'on n'a pas pu obtenir ouvertement au cours du plébiscite sur l'orge de 1997. Une des grandes objections à la coalition contre le projet de loi C-4 est l'insistance pour que la disposition visant l'inclusion soit abandonnée.

Nous disons que le débat sur la commission du blé est un débat pour les agriculteurs et non pour la cupidité et l'intérêt personnel de l'entreprise. Nous demandons à ceux-là, y compris aux députés réformistes et au lobby agroalimentaire, pourquoi ils craignent qu'un producteur vote en faveur de l'inclusion d'une céréale. Pourquoi craignent-ils le vote des producteurs? Pourquoi ne pas laisser simplement les agriculteurs décider de ce qu'ils veulent inclure ou exclure?

Nous avons été quelque peu interloqués, hier, lorsque le ministre chargé de la commission du blé a manifesté un repentir de mourant, a proposé un amendement de la onzième heure qui supprimerait à la fois la disposition concernant l'inclusion et celle concernant l'exclusion. C'est exactement ce que la coalition contre le projet de loi C-4 a exigé. L'amendement aurait permis au ministre chargé de la commission du blé de choisir quand tenir un vote sur l'inclusion ou l'exclusion d'une céréale.

Nous avons dit non parce que nous croyons que l'intention de ce projet de loi est d'accorder davantage de pouvoir au conseil d'administration alors que la proposition du ministre responsable vise à lui redonner ce pouvoir. C'était une tentative pour reprendre le pouvoir du conseil d'administration avant même que celui-ci ne l'obtienne. Nous ne croyons pas en cela. Pas du tout. C'est pourquoi nous avons voté comme nous l'avons fait hier soir.

Nous croyons que l'on ne peut pas faire confiance aux libéraux au sujet de la Commission canadienne du blé. Le ministre chargé de la Commission canadienne du blé est celui-là même qui, au cours de la 35e législature, a réussi à supprimer le tarif du Nid-de-corbeau et cela, à grands frais pour les céréaliculteurs de l'Ouest. Il y en a qui croient sincèrement que le gouvernement va se servir du projet de loi C-4 pour privatiser un jour la commission du blé ou pour la faire disparaître complètement lors des futures séries de négociations commerciales. Nous croyons savoir que l'Organisation mondiale du commerce va entreprendre des délibérations à la fin de 1999.

Nous ne savons que trop bien que l'accord de libre-échange et l'ALENA ont restreint la capacité de nos gouvernements à agir dans l'intérêt national. Nous savons aussi que les États-Unis contestent régulièrement les activités de la commission du blé, sans parler des critiques qu'ils formulent à l'endroit d'autres organismes canadiens de commercialisation des produits agricoles. Nous nous attendons à ce que ces récriminations se poursuivent pendant les négociations de l'Organisation mondiale du commerce.

Examinons maintenant la position du Parti réformiste en ce qui concerne la Commission canadienne du blé. Nous soutenons que de nombreux députés réformistes ne cessent de se contredire. Ils affirment qu'ils appuient la commission du blé, et qu'ils appuient en même temps le double système de commercialisation.

J'ai écouté attentivement le député réformiste de Prince George—Peace River, qui a établi la position de son parti à ce sujet. Au tout début du discours qu'il a prononcé ce matin, il a déclaré que son parti ne s'oppose pas à la Commission canadienne du blé, puis il a ajouté que les Canadiens de l'est du pays échappaient au joug de la Commission canadienne du blé. Cela illustre bien le double langage que tiennent régulièrement les réformistes. Il ne fait aucun doute dans mon esprit que les réformistes aimeraient bien voir disparaître au plus tôt la Commission canadienne du blé.

Nous soutenons que le double système de commercialisation ne peut co-exister avec le système à guichet unique. Cela anéantirait rapidement la Commission canadienne du blé.

 

. 1200 + -

Il y a une chose dont les réformistes ne veulent jamais parler, c'est la décision rendue par le juge Muldoon, de l'Alberta, dans le cadre de la contestation en vertu de la charte, où l'on remettait en question le pouvoir de la commission d'agir comme seul organisme autorisé à vendre de l'orge. Le juge Muldoon a affirmé que le double système de commercialisation mènerait à la disparition de la commission du blé et ne serait qu'une simple transition vers un marché libre.

C'est la vérité, même si les réformistes refusent de l'admettre. Nous aimerions qu'ils élaborent à ce sujet. En fait, les réformistes sont fondamentalement contre la commission du blé et font tout en leur pouvoir pour l'attaquer, au moyen de leur politique aveugle et de leurs propos extrémistes.

Je voudrais maintenant aborder l'amendement des réformistes dont nous sommes censés débattre. Les réformistes affirment que la commission du blé est un organisme qui entretient l'obscurité et le secret parce que ses livres ne sont pas ouverts au vérificateur général et qu'elle échappe à la Loi sur l'accès à l'information.

Voyons un peu ce qu'il en est. La commission a un chiffre d'affaires annuel de six milliards de dollars. Le Parlement exige que la commission du blé fasse examiner ses livres une fois par année par un vérificateur indépendant. Ce vérificateur est Deloitte & Touche et, chaque année, il présente au Parlement un rapport qui peut être examiné et débattu. J'ai examiné le rapport annuel de Deloitte & Touche. Le dernier a été produit en 1996. Les vérificateurs y déclarent que la commission est en bonne santé.

Il est vrai que la commission échappe à la Loi sur l'accès à l'information. Nous avons examiné la question et nous sommes arrivés à la conclusion que cette exclusion était justifiée par la nécessité de protéger le caractère confidentiel des transactions commerciales de la commission avec ses clients. Si les clients, gros et petits, ne peuvent avoir l'assurance que leurs transactions avec la commission demeureront confidentielles, ils est clair qu'ils trouveront un autre fournisseur.

Il est intéressant de voir que les réformistes et les groupes qui prétendent que la commission du blé ne maximise pas les rendements obtenus pour les producteurs voudraient lui retirer les moyens dont elle dispose justement pour obtenir les prix les plus avantageux. Je suis convaincu que la Commission canadienne du blé rend mieux compte de ses activités que les autres organismes de commercialisation des grains qui existent actuellement au Canada.

Le NPD soutient que, par la voie des vérifications financières indépendantes dont les rapports sont du domaine public et sont déposés au Parlement, la Commission canadienne du blé rend des comptes à la population du Canada. La Commission canadienne du blé est beaucoup plus ouverte et soumise à beaucoup plus de vérifications que les sociétés qui financent le Parti réformiste ou la coalition contre le projet de loi C-4.

J'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les déclarations du beau parleur de Calgary-Ouest, qui est un ancien employé de la National Citizens Coalition. L'article 27 du règlement de cette coalition dit:

    Les membres représentant l'intérêt public ne sont pas autorisés à recevoir les avis de convocation ou à assister aux réunions des membres de la société et ne sont pas autorisés à voter lors de ces réunions.

Voilà pour l'ouverture, la transparence et la responsabilisation.

Les néo-démocrates ont toujours soutenu la Commission canadienne du blé. Nous croyons que cet organisme est dans l'intérêt des agriculteurs. Cependant, comme j'ai tenté de le démontrer, le projet de loi C-4 comporte de sérieux défauts. Il affaiblit l'un des trois piliers de la commission et il minera la confiance des agriculteurs envers cet organisme.

Notre caucus a voulu améliorer le projet de loi, mais la majorité très silencieuse du Parti libéral a rejeté toutes nos propositions d'amendement. C'est donc avec tristesse que nous nous opposons au projet de loi C-4.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir poser quelques questions au député de Palliser.

Le député a affirmé que les réformistes sont opposés à la Commission canadienne du blé. C'est visiblement faux. Il suffit de voir les amendements que j'ai proposés pour protéger la commission. Un de ces amendements permettrait aux agriculteurs qui le voudraient de se retirer de la Commission canadienne du blé pour une période de cinq ans et d'y revenir en présentant un préavis de deux ans.

 

. 1205 + -

Cette mesure mettrait la commission à l'abri de poursuites judiciaires, notamment les contestations actuelles sur les droits de propriété. Elle la protégerait également contre des accords internationaux qui la détruiraient. Ce que propose le ministre dans le projet de loi C-4 va précisément détruire la commission.

Le député de Palliser pourrait-il nous donner son avis au sujet de la proposition d'amendement qui permettrait aux producteurs de grain qui le veulent de se retirer de la commission et de ne pas lui vendre leur orge ou leur blé, ou même les deux cultures s'ils le désirent? Mon collègue voit-il cela comme un double système de commercialisation?

Comment réagirait-il si les agriculteurs se disaient favorables à cette option? Je pose la question parce que je représente une circonscription qui a déjà été représentée par un député néo-démocrate, mais qui l'a répudié à cause de cette question. Mes électeurs m'ont clairement indiqué leur point de vue sur cette question. Entre 83 p. 100 et 87 p. 100 d'entre eux appuient la proposition d'amendement, qui propose une solution de compromis entre le double système de commercialisation et le monopole qui existe présentement.

Il est donc visiblement faux d'affirmer, comme l'a fait le député de Palliser, que les réformistes sont contre la Commission canadienne du blé. Nous représentons les agriculteurs et nous défendons leur point de vue. Le gouvernement fait preuve d'arrogance lorsqu'il croit être le mieux placé pour protéger les intérêts des agriculteurs. Mon collègue se range du côté du gouvernement à ce sujet et il a tort. Que répond-il aux 83 p. 100 ou 87 p. 100 d'agriculteurs qui appuient l'option que je propose? Le gouvernement n'a-t-il pas l'obligation de concéder cette option?

Je veux aussi parler du droit de propriété. Le député a formulé des commentaires au sujet de la National Citizens' Coalition, et le ministre l'avait fait avant lui. Le ministre a dit que la coalition avait fait valoir que l'internement des Japonais, la confiscation de leurs biens et le reste, était un événement très comparable. Le ministre responsable de la Commission canadienne du blé a dit que c'était la coalition qui avait fait ce rapprochement, mais c'est faux. C'est le gouvernement lui-même qui a utilisé l'argument voulant que la confiscation des biens des Japonais ait été justifiée durant la guerre, tout comme il est maintenant justifié de faire confisquer les biens des agriculteurs par la Commission canadienne du blé.

Le député croit-il que les agriculteurs devraient remettre leurs produits à la commission, leur blé et leur orge, pour ensuite les racheter pour en avoir le contrôle? Croit-il que nous devrions renforcer le droit de propriété au Canada? Croit-il que c'est raisonnable que la commission puisse prendre ces produits que les agriculteurs ont récoltés à la sueur de leur front, pour lesquels ils ont couru des risques, et qu'elle les remette au gouvernement pour qu'il en fasse ce qu'il veut ou qu'elle les rachète au gouvernement? Le député est-il d'accord avec l'une ou l'autre de ces affirmations?

M. Dick Proctor: Monsieur le Président, le député de Yorkton—Melville demande ce que je pense des dispositions d'exclusion ou d'inclusion. Nous croyons fondamentalement que cela aboutirait très, très rapidement à un système de mise en marché mixte, ce dont j'ai parlé dans mon intervention.

C'est ce que le juge Muldoon, de l'Alberta, a dit. C'est de cela que le Parti réformiste refuse de discuter. Nous ne croyons pas que cette option soit réalisable.

M. Garry Breitkreuz: Et si les agriculteurs veulent cette option?

M. Dick Proctor: Il existe des dispositions d'inclusion et d'exclusion des grains. Si les agriculteurs veulent un tel système, comme le prétend le député de Yorkton—Melville, ils peuvent voter comme ils le désirent.

Pour ma part, je ne crois tout simplement pas à ces chiffres. Est-ce 83 p. 100 ou 87 p. 100 des agriculteurs qui appuient cette option? Est-ce 53 p. 100 ou 43 p. 100?

 

. 1210 + -

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, c'est un plaisir que d'écouter ce débat. Si le député de Palliser a tant de confiance dans les monopoles, pourquoi ne crée-t-il pas un monopole du logement en vertu duquel tout le monde habiterait dans des maisons du gouvernement et paierait son loyer au gouvernement?

C'est ce qui se faisait dans certains pays communistes. Est-ce que le député pense que c'est ce que nous devrions faire? Si un monopole est tellement bon pour un secteur, pourquoi ne pas en établir un dans tous les secteurs? Si c'est bon pour moi, ce devrait être bon pour le voisin. Qu'en pense le député?

Peut-être devrions-nous avoir un monopole de l'automobile. Le gouvernement serait propriétaire de toutes les voitures, comme cela se faisait en Union soviétique. Or, nous savons ce qui est arrivé là-bas. Les voitures sont toutes à la casse maintenant. C'était cela la qualité du monopole.

Pourquoi pas un monopole des services des avocats ou des enseignants? Pourquoi ne pas faire de ce pays une nation vraiment prospère comme certains des anciens pays communistes? N'occupent-ils pas une place de choix sur la scène internationale maintenant? Si ce n'était des capitalistes comme nous, ils seraient en train de mourir de faim en ce moment. Est-ce que c'est le système que veut le député?

M. Dick Proctor: Non, monsieur le Président.

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt certaines des observations plutôt absurdes du député de Palliser. Il disait que les députés réformistes essayaient de jouer sur deux tableaux. C'est absolument faux. Mon collègue l'a remis à l'heure à ce sujet.

Si le député de Palliser pense tellement de bien des monopoles, pourrait-il nous dire pourquoi le gouvernement NPD de la Saskatchewan a supprimé le monopole du porc, alors que nous continuons à nous accrocher au monopole du blé?

M. Dick Proctor: Monsieur le Président, on compare des pommes et des oranges. L'Alberta et le Manitoba s'étaient retirés quelque temps auparavant de l'entente de commercialisation du porc. Je ne fais pas partie du gouvernement de la Saskatchewan, mais je suis de son avis. Il était économiquement avantageux pour les producteurs de porcs de mettre fin aux activités de marketing du porc dans cette province.

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, j'ai à poser au député une question visant à éclairer le dernier point de l'argumentation. Le député d'en face dit que c'est essentiellement une proposition communiste et demande pourquoi on ne met pas tout entre les mains du gouvernement.

Qu'il s'agisse de la commercialisation du porc ou de la commercialisation des céréales, le député est-il d'accord pour dire que les producteurs ont manifesté clairement leur désir de commercialiser leur produit de cette manière? Ils l'ont montré maintes et maintes fois.

Tout cela n'est que de la poudre aux yeux. Les agriculteurs ont montré clairement maintes et maintes fois qu'ils veulent ce système de commercialisation, qu'ils veulent la Commission canadienne du blé, que c'est l'office de commercialisation suprême. Le député de Palliser est-il d'accord?

M. Dick Proctor: Absolument, monsieur le Président. C'était la portée de mes propos.

Pas plus tard que l'an dernier, les agriculteurs ont convenu qu'ils voulaient que la Commission canadienne du blé garde le pouvoir de commercialiser l'orge. S'ils décident un jour qu'ils ne veulent pas que la commission commercialise quoi que ce soit, ils auront le pouvoir de prendre démocratiquement une telle décision entre eux.

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, c'est avec plaisir et avec une vive inquiétude que je prends la parole à l'étape de la troisième lecture...

M. Jake E. Hoeppner: Avec plaisir? On nous a imposé la clôture.

M. Rick Borotsik: C'est avec une vive inquiétude que je me lève pour parler du projet de loi C-4, sans doute pour la dernière fois, à moins que le gouvernement dans sa sagesse ne permette qu'il soit renvoyé en comité pour qu'on en débatte encore.

 

. 1215 + -

Franchement, la mesure législative dont nous sommes saisis n'est pas ce que je considère, et un certain nombre de mes électeurs abondent dans ce sens, une bonne mesure législative réglant les problèmes de la Commission canadienne du blé. Je m'adresse à mes collègues libéraux et je les supplie de ne pas mettre fin au débat sur le projet de loi C-4.

J'aimerais soulever plusieurs questions dans plusieurs domaines. Tout d'abord, je ne suis pas producteur. Je ne suis pas agriculteur. Plusieurs membres de ma famille gagnent leur vie dans l'agriculture et certains produisent des quantités importantes de blé et d'autres denrées qui ne relèvent pas de la Commission canadienne du blé. Par ailleurs, je représente une localité qui, avec grande fierté, s'est donné le nom de Ville du blé. Elle porte ce nom depuis sa création en 1982. Le blé y est l'épine dorsale de l'économie, fait qui est reflété dans la Loi sur la Commission canadienne du blé.

J'aimerais parler de ma philosophie, de celle de mon parti et de la raison qui m'a poussé à me présenter sous sa bannière. Notre philosophie est assez simple.

Nous croyons à la libre entreprise. Nous croyons à la liberté de choix. Nous croyons au marché libre, comme l'a démontré la mesure législative entérinant l'ALENA proposée par le dernier gouvernement progressiste conservateur. Nous croyons en moins de gouvernement et moins de contrôle de l'État. Nous croyons à plus de liberté individuelle pour les citoyens et à une plus grande prise en charge des gens par eux-mêmes. Si je dis cela c'est que je peux établir un lien entre notre philosophie et celle des producteurs assujettis à la Commission canadienne du blé.

Pour la gouverne des gens qui nous écoutent, je voudrais faire une analogie. Cette question a entraîné beaucoup de hurlements, de gesticulations, de grincements de dents. Le fait est qu'elle est très importante pour les producteurs de l'ouest du pays. Je voudrais faire une comparaison au sujet de ce dont nous parlons dans le cas présent.

Un agriculteur, un producteur, peu importe comment on l'appelle, est, en fait, une petite entreprise. Dans bien des cas, ce n'est pas seulement une petite entreprise; c'est une grosse société. Ce producteur capitalise et achète des terrains d'une grande superficie dans certains cas, car il est évident que plus il a de terres, plus il peut produire. Cela exige des investissements importants.

Le producteur achète ensuite des intrants comme des pesticides, des herbicides, des semences et des engrais et il ensemence les terrains qu'il a achetés parfois pour des montants importants. Il prend ensuite soin de ses semences jusqu'à ce qu'elles grandissent et produisent et jusqu'à ce qu'on puisse procéder à une récolte. Il entrepose enfin le produit tiré de son travail.

Malheureusement, alors que cette récolte est stockée, s'il s'agit de blé ou d'orge, le producteur ne contrôle pas son produit et il n'en est pas propriétaire. Il est à la merci, malheureusement, de la Commission canadienne du blé. C'est elle qui lui dit à quel prix il peut vendre son produit et à qui il peut le vendre. En fait, il peut le vendre uniquement à la commission, un point c'est tout.

Lorsque le producteur ensemence ses champs, il reçoit un paiement initial basé sur les rentrées de fonds qu'il va obtenir au cours de la prochaine campagne agricole. Parfois, ces paiements initiaux changent et parfois non. Il s'agit d'ajustements. Le fait est qu'il ne peut vendre qu'à un seul acheteur, la Commission canadienne du blé. S'il ne lui vend pas ses produits, sa récolte va demeurer stockée à jamais ou jusqu'à ce qu'elle pourrisse, car il ne peut vendre à personne d'autre.

Je vais faire une analogie. Prenons le cas d'un fabricant en Ontario, au Manitoba, en Saskatchewan, au Nouveau-Brunswick ou à Terre-Neuve. Il fabrique un produit, contrôle les capitaux nécessaires à la production, contrôle les intrants et lorsqu'il a enfin le produit fini entre les mains, il peut le vendre à qui bon lui semble.

 

. 1220 + -

Si le prix de vente est inférieur au coût de production, le fabricant aura tôt fait de cesser de fabriquer ce produit. Si son produit ne trouve pas preneur au Canada, il peut le vendre sur les marchés internationaux. Il peut l'offrir aux États-Unis ou à l'Europe. Il est libre de vendre son produit à qui bon lui semble.

Bref, c'est ça, le libre-échange, c'est-à-dire la possibilité de faire des affaires avec quelqu'un de son choix. Malheureusement, de nos jours, le producteur de blé ou d'orge ne jouit pas de cette liberté.

Brossons un bref historique, car cela a son importance. Je vais maintenant exposer les grands principes qui sont en jeu dans le débat sur la Commission canadienne du blé. Il est indéniable que la Commission canadienne du blé est un excellent organisme. Son problème, c'est qu'elle n'est pas prête à affronter le XXIe siècle, pas plus d'ailleurs que le gouvernement n'est prêt à aborder le prochain millénaire. Voyons un peu l'histoire.

Il y a une raison à la création de la Commission canadienne du blé il y a de cela plusieurs années. Au début du siècle, beaucoup d'agriculteurs qui cultivaient le produit dont j'ai parlé estimaient ne pas obtenir un rendement équitable. Volontairement, et j'insiste sur ce mot, ils se sont regroupés, persuadés qu'ensemble ils pourraient vendre leur produit à un meilleur prix. Ils estimaient qu'en mettant ensemble leur produit ils le rendraient plus important et pourraient le vendre au meilleur prix.

C'est ce que l'on a fait, sur une base volontaire, au début des années 1920 et ça a donné le Saskatchewan Wheat Pool, l'Alberta Wheat Pool et le Manitoba Wheat Pool. Ça a fonctionné parce qu'ils considéraient que les grandes sociétés les exploitaient.

Malheureusement, en 1943, la vente du produit à un système centralisé est devenue obligatoire. Les producteurs n'avaient plus le choix de faire ce qu'ils voulaient. Auparavant, ils pouvaient décider de mettre leur récolte en commun avec les autres producteurs ou de la mettre eux-mêmes en marché. En 1943, pour toutes sortes de raisons, qui étaient probablement très bonnes à l'époque, la vente exclusive a été rendue obligatoire. Il ne faut pas se leurrer, cette décision était probablement tout à fait justifiée en 1943. Je n'y étais pas, en fait je n'étais pas même au monde. Toutefois, c'était probablement justifié et nécessaire à l'époque.

Une voix: Moi-même, je n'étais pas encore né non plus.

Une voix: Je l'étais.

M. Rick Borotsik: J'ai sûrement fait une erreur ici en révélant mon âge. En tout cas, je me suis laissé entraîner par mon discours.

En 1943, on a pris la bonne décision. Toutefois, entre 1943 et 1998, de nombreux changements sont survenus, non seulement au niveau des techniques agricoles, et je pourrais parler pendant cinq heures sur ce sujet, mais aussi au niveau de la commercialisation. La CCB n'a pas suivi le rythme.

Comme on l'a souligné plus tôt, nous reconnaissons qu'en 1943, la Commission canadienne du blé a fourni trois piliers importants aux agriculteurs canadiens. Tout d'abord, elle a mis au point un système de mise en commun par lequel tous les producteurs de blé, d'avoine et d'orge de l'époque pouvaient mettre leurs récoltes en commun pour les vendre à un guichet unique. La Commission a également offert une garantie gouvernementale. L'agriculteur pouvait compter sur un paiement initial et c'était là le montant le plus faible qu'il pouvait toucher pour ses récoltes. Il en tirait un montant moins élevé que ce qu'il aurait pu obtenir sur le marché, mais ce montant était garanti. Enfin, la Commission apportait l'idée de la coopérative à guichet unique. Les agriculteurs ne pouvaient plus vendre leurs récoltes à qui que ce soit d'autre; seul l'intermédiaire, personne physique ou morale, s'occupait de la mise en marché.

Ces piliers sont toujours en place, mais les temps ont changé. Cela me rappelle un adage que j'ai entendu à maintes reprises. Il vaut beaucoup mieux gérer le changement que de se faire gérer par le changement. Malheureusement, avec ce projet de loi, le gouvernement ne gère pas le changement. C'est le changement qui gère le gouvernement et cela ne marchera pas.

Je voudrais également parler de la démarche. Comme les députés le savent bien, je ne siège pas à la Chambre depuis longtemps. J'y suis depuis environ six ou sept mois. Le premier projet de loi qui a été présenté portait sur la Commission canadienne du blé, mon secteur de responsabilité en tant que porte-parole. Je voulais suivre la démarche qui a mené à l'élaboration de ce projet de loi.

Comme mon collègue du Nouveau Parti démocratique, j'étais peut-être quelque peu naïf, c'est le moins qu'on puisse dire, car je pensais très honnêtement que, sur la tribune qu'est le comité, nous pourrions exprimer nos opinions. Je pensais que le gouvernement fédéral écouterait des propositions bien conçues et logiques au sujet de ce projet de loi.

 

. 1225 + -

J'ai toujours dit que mes observations seraient constructives. Je vais présenter au gouvernement quelques propositions constructives en remplacement de ce qu'il a proposé.

À mon avis, la démarche qui a mené à l'élaboration de ce projet de loi était lacunaire. Après son étude à la Chambre, nous avons renvoyé le projet de loi C-4 au comité, où le ministre était censé écouter non seulement les gens qui présenteraient des exposés devant ce comité, mais aussi les autres membres du comité, notamment ceux de l'opposition. La démarche a eu lieu précipitamment. Elle s'est mal déroulée. Tous ceux qui nous ont parlé, les témoins, avaient des préoccupations, des opinions et des réserves à propos du projet de loi, mais aucune d'elles n'a été examinée, ni à l'étape de l'étude par le comité, ni lorsque ce projet de loi est revenu à la Chambre, ni à cette étape-ci, celle de la troisième lecture.

Les choses ne devraient pas se passer ainsi. Le comité me plaît. Il offre une occasion de partager des opinions non seulement avec les ministériels, mais aussi avec des députés de l'opposition. J'estime qu'il devrait être le lieu où nous pouvons régler nos divergences et proposer certaines solutions de rechange plus positives que celles qu'a présentées le gouvernement.

Personne n'a le monopole du meilleur projet de loi possible. Il y a toujours une possibilité d'apporter des améliorations, et nous avions cette possibilité. Nous l'avions grâce à certains amendements qui ont été proposés, mais, malheureusement, le gouvernement a refusé de saisir l'occasion.

Toujours à propos du processus, le projet de loi nous est ensuite revenu du comité. Nous avons demandé que le ministre responsable de la Commission canadienne du blé se présente de nouveau devant le comité afin que nous puissions lui dire ce que nous avions entendu. On nous a dit que le ministre ne pouvait pas s'y présenter et qu'il fallait que le projet de loi soit adopté, et tout de suite. Il fallait l'adopter avant le congé des Fêtes. Nous voici malheureusement en février. Il n'a pu être adopté avant Noël. Pourquoi n'avons-nous pas pu discuter de nouveau avec le ministre pour lui dire ce que nous avions entendu au cours des audiences du comité?

Pourquoi n'avons-nous pas pu entendre la Commission ontarienne du blé, une organisation parallèle? Elle aurait pu nous expliquer les bons et les mauvais côtés de cette organisation de sorte que nous puissions essayer d'en mettre les bons côtés en pratique dans l'organisation de la Commission canadienne du blé. Pourquoi n'avons-nous pas pu l'entendre? Parce que nous n'avons pas eu le temps de l'entendre au comité. Nous disposions d'un certain temps, mais le gouvernement n'a malheureusement pas voulu nous donner le temps de l'entendre.

Le projet de loi est donc revenu à la Chambre. Nous tenions là l'occasion d'en discuter avec les députés à la Chambre, aussi bien ceux du gouvernement que ceux de l'opposition, de même qu'avec le ministre, et de proposer des amendements au projet de loi. Il s'agissait de bons amendements dans certains cas et de moins bons dans d'autres.

Le gouvernement a jugé à un moment donné que le projet de loi C-4 suscitait trop de débats à la Chambre et a décidé d'imposer la clôture. «Clôture» n'est pas un bon mot; non, non, il ne s'agissait pas d'imposer la clôture au débat mais plutôt de limiter le temps qui lui était consacré. Je suis d'accord avec le gouvernement, il s'agit bien d'une attribution de temps, nous n'allons pas nous disputer sur le sens des mots. Voici cependant ce que cela revenait à dire de la part du gouvernement: «Nous ne voulons plus que vous parliez de ce projet de loi, parce que ce que vous dites ne nous plaît pas; d'ailleurs, nous nous moquons pas mal de ce que vous dites et nous allons mettre fin au débat.» Le gouvernement a donc mis un terme au débat.

Voilà le processus auquel j'ai eu l'occasion de prendre part pour la toute première fois. J'espère au-delà de toute espérance que nous ne suivrons pas le même processus la prochaine fois que le gouvernement nous saisira d'un projet de loi. J'espère que le processus sera beaucoup plus ouvert, beaucoup plus franc, et que nous aurons l'occasion de proposer ce que nous considérons comme de bons amendements, solides et bien conçus, à un projet de loi déficient.

Je passerai maintenant à certains des points qui continuent à nous préoccuper. J'ai également dit que le projet de loi comportait de très bonnes dispositions, et je le dis très sincèrement. Sous sa forme actuelle de gestion et de direction, la Commission canadienne du blé ne fonctionne pas bien. N'oublions pas que cette structure date de 1943 et qu'elle a sans doute besoin qu'on lui apporte des changements. Une haute direction formée de commissaires ne peut assurer une bonne gestion.

 

. 1230 + -

Tous ceux qui ont traité avec le secteur privé, avec l'entreprise privée, savent que la meilleure gestion, pour une société, c'est un seul chef de direction, directeur ou propriétaire. Au lieu que la direction soit assurée par plusieurs commissaires, et que jusqu'à cinq commissaires établissent les règles de la commission, le gouvernement a dit que la commission aura une seule personne pour tenir le rôle de chef de direction. Excellente idée. Malheureusement, il n'est pas allé assez loin, puisqu'il s'est réservé le droit de nommer ce chef de direction. C'est une erreur. Il y était presque, mais il n'est pas allé assez loin. Le chef de direction de la Commission canadienne du blé sera nommé par le gouvernement.

Qu'en est-il du conseil d'administration? Là encore, le gouvernement y était presque. Il a souligné avec force et passion que le conseil serait contrôlé par les agriculteurs, par les producteurs. C'est le conseil des agriculteurs-producteurs. Mais le gouvernement s'est contenté d'une demi-mesure. Le conseil compte 15 membres; 10 d'entre eux seront élus et cinq nommés par le gouvernement. S'il croit vraiment ce qu'il dit, les 15 membres devraient être élus, et le chef de direction devrait être choisi par le conseil. De la sorte, le conseil aurait été vraiment comptable aux producteurs qu'il est censé servir.

Il y a un amendement dont je n'arrive pas à croire que le gouvernement a pu le rejeter. Il est venu du Parti réformiste et de moi-même. Il disait simplement que la commission doit travailler pour les agriculteurs. Qu'elle est au service des producteurs. Le gouvernement l'a rejeté. La commission est au service de la commission elle-même, non des producteurs que, selon le gouvernement, elle représente. Je n'arrive pas à croire que le gouvernement a refusé l'amendement.

Parlons maintenant de comptes à rendre et d'accès à l'information. Si le gouvernement croit que la commission est au service des producteurs, pourquoi ceux-ci, les propriétaires, n'auraient-ils pas accès à leur commission? Qu'on leur donne l'accès à la commission, à ses livres et à ses transactions. Un rapport interne a été produit en 1992, il y a donc à peu près six ans. Les producteurs n'ont pas pu mettre la main dessus. Et si la commission ne travaillait pas dans l'intérêt supérieur des producteurs? Ils devraient avoir accès à cette information.

Nous parlons de choix. Des amendements qui ont été proposés auraient permis aux producteurs de participer au régime de la commission, de s'en retirer et de se protéger. Le gouvernement les a rejetés.

Le dernier point est celui qui me préoccupe le plus. Il s'agit de la disposition qui permet d'assujettir des grains à la compétence de la commission. Elle ne figurait pas dans le projet de loi C-72, présenté à la Chambre avant les dernières élections. Voilà qu'elle surgit tout à coup. Il fallait l'ajouter au projet de loi C-4. Cette disposition vise à confier d'autres produits à un organisme de commercialisation détenant un monopole. Je n'ai trouvé personne qui tienne à cette disposition. Personne n'a réclamé cette disposition. Je suis très déçu.

Nous discutons de la question depuis six mois. Je participe à des discussions depuis six mois et d'autres s'y intéressent depuis beaucoup plus longtemps. La disposition d'inclusion a toujours été contestée. Hier, trois heures avant le vote final sur les amendements, le ministre nous a dit que le gouvernement était prêt à discuter de quelques modifications mineures à cette disposition. Où étaient donc le ministre et le gouvernement il y a six mois, lorsque nous avons parlé de cette disposition? On ne peut plus rien faire trois heures avant le vote sur l'amendement.

Le seul moyen de trouver une solution logique et légitime serait de renvoyer le projet de loi au comité pour que nous y discutions de la clause d'inclusion. Nous pourrions discuter d'amendements acceptables à tous les partis.

Je vois que je n'ai plus de temps. Le processus a été très intéressant, pour ne pas dire plus. La mesure législative est intéressante. Elle sera adoptée plus tard aujourd'hui, mais, à mon avis, elle ne réglera pas le problème. Le gouvernement n'a pas su apporter les changements qu'il fallait.

 

. 1235 + -

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, le député vient de présenter une interprétation assez biaisée de l'histoire.

Je voudrais répondre à une question qu'il a soulevée à la fin de son discours. Il a demandé où était passé le gouvernement pendant les six derniers mois. Or, le gouvernement tient des consultations à ce sujet, il est à l'écoute des producteurs et il organise des rencontres avec ces derniers depuis 1993. J'ai participé aux dernières audiences que le comité a tenues dans l'ouest du Canada. C'est de là que sont issus certains des changements.

Le député de Brandon—Souris a commencé son discours en parlant de la libre entreprise. Il croit en la libre entreprise et en la liberté de choix. Permettez-moi de lui poser la question suivante: S'il croit en la liberté de choix, pourquoi s'oppose-t-il alors à la disposition concernant l'inclusion? Cette disposition donne aux producteurs un choix autre que le Winnipeg Commodity Exchange et le marché libre.

En réalité, la Commission canadienne du blé fait fonctionner le système de la libre entreprise à l'avantage des producteurs canadiens. Elle procède à des ventes en commun. Dans tout marché, c'est le vendeur au prix le moins élevé qui fixe le prix. La Commission canadienne du blé veille à ce que les producteurs canadiens ne soient pas en concurrence les uns avec les autres sur le marché international. Les producteurs reçoivent donc des bénéfices mis en commun et maximisés. Voilà une saine gestion de la commercialisation. Je suis surpris que les députés d'en face ne voient pas d'un bon oeil une excellente gestion.

Le député a aussi parlé de techniques de commercialisation que la Commission canadienne du blé n'a pas continué d'appliquer. Rien n'est plus éloigné de la vérité. Le député vit en Alberta, mais je me demande s'il s'est déjà rendu dans un des bureaux de la Commission canadienne du blé. On y voit ce qu'il y a de mieux en fait de commercialisation et de renseignements sur les marchés.

De multiples études ont été effectuées. Dans son rapport, la Commission canadienne du blé fait même état de recettes qu'elle a obtenues pour les producteurs de blé, par le biais des ventes en commun, recettes qui représentent 265 millions de dollars de plus que celles qui auraient été obtenues sur le marché libre. C'est là de l'excellente commercialisation. La commission met en application les techniques appropriées. Elle en déploie tout un arsenal pour commercialiser ses produits, pour découvrir ce que font ses clients et pour maximiser les recettes versées aux producteurs.

Le député ne croit-il pas que le projet de loi à l'étude, qui a été amélioré à la suite de consultations et de discussions, offre un choix en ce qui concerne aussi bien l'exclusion que l'inclusion de produits agricoles? Il offre la liberté de choix que le député dit défendre.

Le député ne croit-il pas également que le projet de loi rend les producteurs responsables de leur propre destin et de celui de leur industrie?

Voilà le genre d'améliorations qui sont issues des audiences du comité. Si l'on compare le projet de loi C-72 présenté à l'origine à la dernière version du projet de loi C-4, on constate que les producteurs sont maintenant responsables, ce qui n'était pas le cas auparavant. Le député n'est-il pas d'accord?

M. Rick Borotsik: Madame la Présidente, ces grandes déclarations étaient émaillées d'excellentes questions.

D'abord, je devrais souligner que le député est sans contredit le plus ardent défenseur non seulement de la Commission canadienne du blé, mais aussi, manifestement, de la vente par un monopole, de la vente à guichet unique et de la clause d'inclusion. Il est l'auteur de la clause d'inclusion qui figure dans le projet de loi C-4.

J'ai appris il y a longtemps que, sur le plan idéologique, je diverge d'opinion avec certaines personnes à propos de certaines questions. C'est le cas actuellement. J'ai appris que, bien que je fasse valoir mon opinion, je ne convaincrai jamais le député de s'y rallier, pas plus qu'il me convaincra, par ses arguments, de me rallier à son avis. Nous sommes donc d'accord pour être en désaccord.

Je vais répondre à ses questions. Oui, j'ai dit que le projet de loi C-4 a apporte à la Loi sur la Commission canadienne du blé des changements qui sont positifs. J'ai dit que la direction de la commission a été modifiée et que cette direction me plaît. Le fait que les producteurs pourront désormais bénéficier d'achats au comptant, par opposition à la mise en commun, est un changement positif, mais le gouvernement n'est pas allé assez loin. Il n'a pas géré le changement jusqu'au XXIe siècle.

Le député, qui veut probablement devenir ministre responsable de la Commission canadienne du blé, a parlé du meilleur distributeur qui ait jamais existé.

 

. 1240 + -

Si tel est le cas—c'est fort possible—pourquoi la Commission canadienne du blé craindrait-elle d'affronter la concurrence?

Si elle est le meilleur distributeur qui soit et si elle obtient le meilleur prix qui soit, chaque producteur continuera d'être son client. De quoi le député a-t-il peur? Si la commission est excellente à ce point, elle devrait pouvoir livrer concurrence.

J'ai fait une observation à la Chambre il n'y a pas longtemps. La même situation s'est produite avec d'autres services publics qui craignaient d'entrer en concurrence. Les services de téléphone, d'électricité et de gaz ont été ouverts à la concurrence. Ces services publics sont tout aussi excellents maintenant, sinon meilleurs, qu'ils ne l'étaient lorsqu'ils constituaient des monopoles.

Pourquoi la Commission canadienne du blé craint-elle la concurrence si elle est le meilleur distributeur de ce produit?

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je prends toujours plaisir à écouter le seul député conservateur de l'Ouest. C'est vraiment encourageant de voir qu'il essaie de convaincre ses collègues de l'Est de se rallier à la position du Parti réformiste en ce qui concerne la Commission canadienne du blé et nous appuyons certainement ses efforts à cet égard.

Ma question porte sur le fait que le ministre, comme le député l'a si bien dit, est arrivé à la Chambre avec un amendement de dernière minute. Il a eu un an et demi pour préparer cette mesure législative. Nous l'avons étudiée en comité. Nous avons tenu des audiences dans diverses régions du pays durant la dernière législature. Pourtant, le ministre arrive avec un amendement de dernière minute et accuse l'opposition de ne pas vouloir améliorer le projet de loi parce que certains députés de l'opposition n'ont pas voulu lui donner le consentement unanime pour qu'il présente son amendement.

Tout comme le député, j'ai eu un entretien avec le ministre quelques heures avant qu'il n'essaie de présenter son amendement de dernière minute à la Chambre. Le député a-t-il compris, comme moi, que cet amendement ne changerait pas le processus d'inclusion et d'exclusion comme tel, qu'il ne ferait que l'insérer dans une autre partie de la loi?

Deuxièmement, le cinquième parti appuiera-t-il mon amendement voulant que ce projet de loi soit renvoyé au comité? À ce moment-là, le ministre, comme tous les autres députés de la Chambre, aurait l'occasion de présenter tous les amendements qu'il veut, c'est-à-dire une fois que le projet de loi aurait été renvoyé au comité.

M. Rick Borotsik: Madame la Présidente, tout d'abord, je voudrais présenter aux députés réformistes certains de mes collègues du Canada atlantique. Le Parti réformiste n'a pas de représentants au Canada atlantique. Nous avons aussi un député en Ontario. Nous avons des représentants d'un bout à l'autre du Canada. Nous sommes un parti national. Je tenais d'abord à tirer cela au clair.

Deuxièmement, le député a demandé si nous appuierions l'amendement du Parti réformiste. Je lui ai déjà dit et je le dirai publiquement maintenant que nous allons effectivement appuyer l'amendement voulant que ce projet de loi soit renvoyé au comité pour la simple et bonne raison que le ministre a essayé de jouer avec la clause d'inclusion à la toute dernière minute.

Malheureusement, cet amendement n'apportait aucun changement important. Il ne faisait que transférer le point de déclenchement du processus d'inclusion d'un représentant d'un groupe de producteurs au ministre.

J'ai quand même une certaine confiance dans le ministre et je crois qu'il ne déclencherait pas le processus d'inclusion. Mais j'aurais de graves inquiétudes à ce que le ministre ait ce genre de pouvoir s'il fallait que certains députés d'en face deviennent un jour ministre responsable de la commission.

Je crois que le ministre est sur la bonne voie. Cette clause doit être réexaminée. La meilleure façon de faire cela, c'est de renvoyer le projet de loi au comité, et c'est pourquoi nous appuierons l'amendement du Parti réformiste.

M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Madame la Présidente, l'étude de ce projet de loi m'a permis, à moi aussi, de vivre une expérience très enrichissante et tout aussi intéressante que celle du député de Brandon—Souris, puisque nous avons tous deux commencé à nous intéresser à ce débat sur les changements à apporter à la commission du blé probablement deux ans après son début.

 

. 1245 + -

Les habitants de l'ouest du Canada ayant diverses opinions sur le rôle et les fonctions de la commission du blé, la mesure législative visait à apporter les bons changements qui satisferaient la plupart des producteurs concernés.

Comme l'ont mentionné d'autres députés avant moi, les agriculteurs de l'ouest du Canada ont besoin de tous les avantages que nous pouvons leur offrir pour relever les défis que pose une économie mondiale en pleine expansion. Nous avons entendu cela à maintes reprises. La Commission canadienne du blé leur offre des avantages qui font l'envie des agriculteurs des quatre coins du monde.

Les producteurs ont bien précisé qu'ils veulent préserver la Commission canadienne du blé, mais qu'ils veulent qu'elle devienne plus démocratique, plus sensible à leurs besoins et plus responsable. C'est exactement ce que prévoit la mesure législative. Elle maintiendra le système de commercialisation du grain à guichet unique, système qui permet à la commission d'exiger les meilleurs prix possibles auprès de ses clients du monde entier. Il s'agit d'ailleurs d'un système que la majorité des agriculteurs aiment et veulent conserver.

Le projet de loi modifierait de façon radicale la façon dont la commission du blé est gérée. Les agriculteurs auraient désormais le droit de diriger leur propre commission du blé. Le gouvernement serait toujours leur partenaire, mais il jouerait un rôle plus effacé au sein d'une nouvelle commission du blé modernisée.

Le projet de loi C-4 modifierait non seulement la haute direction, mais également la gestion de la commission du blé. Essentiellement, grâce au projet de loi C-4, les agriculteurs pourraient décider de leur propre avenir, en nommant la majorité des membres du conseil d'administration. Les administrateurs élus par les agriculteurs évalueraient le rendement de la Commission canadienne du blé et de ses cadres supérieurs. Ils seraient en mesure d'apporter des changements si le rendement ne correspondait pas à leurs attentes.

Les agriculteurs décideraient ainsi de leur sort, par l'intermédiaire d'un conseil d'administration qu'ils contrôleraient, grâce à leur majorité des deux tiers. Je ne connais rien de plus démocratique, transparent, équitable et approprié.

Si le projet de loi C-4 est adopté, l'avenir de la commission du blé ne sera pas déterminé par le gouvernement ni par les députés. Le projet de loi C-4 sera un soulagement pour les dizaines de milliers d'agriculteurs qui comptent sur la Commission canadienne du blé pour vivre. Ils méritent de pouvoir décider eux-mêmes de leur avenir.

Je souligne que le public est favorable au projet de loi. La mesure qui l'a précédé, le projet de loi C-72, a été longuement débattu. Le Comité de l'agriculture et de l'agroalimentaire a tenu environ 40 heures d'audiences à son sujet à Ottawa et, de façon plus intense, à Winnipeg, Regina, Saskatoon, Calgary et Grande Prairie. Le comité a entendu plus de 40 groupes et 40 personnes. Ce projet de loi soulève becaucoup plus d'appuis que de protestations.

Il y avait des problèmes. Le gouvernement a écouté et le comité a agi. Après les audiences, le comité permanent a proposé plus d'une vingtaine d'amendements au projet de loi C-72. Le projet de loi C-4 en tient compte.

Aux termes du projet de loi C-4, le système qui régit la Commission canadienne du blé, et qui suppose la nomination des commissaires par le gouvernement, disparaîtrait. Il serait remplacé par un conseil d'administration formé de 15 membres. La majorité des administrateurs, soit dix sur 15, seraient élus directement par les agriculteurs.

Est-ce qu'un député peut nommer une autre société de six milliards de dollars qui est gérée par un conseil d'administration dont les membres sont élus par les clients qu'ils servent? Le cas est unique et sans précédent.

Les administrateurs exerceraient des pouvoirs réels pour gérer toutes les activités commerciales d'une Commission canadienne du blé moderne. Ils pourraient examiner toutes les ventes et les données financières, sans exception. Ils pourraient choisir leur président, fixer leur propre rémunération ainsi que celle du leur président et du dirigeant et, si nécessaire, recommander le congédiement du président.

En tant que représentants élus par les agriculteurs, les administrateurs auraient à rendre des comptes à leurs électeurs, comme nous le faisons. Ils écouteraient les besoins des producteurs et y répondraient. Sinon, ils ne seraient vraisemblablement pas réélus. Voilà vraiment ce qu'est l'obligation de rendre compte.

Certains députés ont proposé que les agriculteurs élisent tous les membres de la Commission canadienne du blé au conseil d'administration. Ceux qui ont fait cette proposition citent habituellement l'exemple de la Commission ontarienne de commercialisation du blé dont le conseil est entièrement formé de membres élus. La question qui suit inévitablement est la suivante: Pourquoi ne pas faire la même chose dans le cas de la Commission canadienne du blé?

 

. 1250 + -

Il existe un certain nombre de bonnes raisons de traiter la Commission canadienne du blé différemment de l'Office de commercialisation des producteurs de blé de l'Ontario. L'office ontarien ne bénéficie pas des mêmes garanties gouvernementales que la commission. Le gouvernement ne garantit pas les emprunts de l'office ontarien, tandis qu'il fournit des garanties à l'égard des emprunts de plus de six milliards de dollars de la Commission canadienne du blé.

La situation diffère aussi en ce qui a trait aux garanties de crédits à l'exportation. L'office ontarien n'a pas son propre programme de crédits à l'exportation. Celui-ci obtient plutôt de tels crédits de la Société pour l'expansion des exportations, dont les membres du conseil d'administration sont tous nommés par le gouvernement.

La Commission canadienne du blé administre son propre programme de ventes de céréales à crédit, qui bénéficie d'une garantie gouvernementale. C'est là une autre raison pour laquelle le gouvernement nomme un certain nombre de directeurs du conseil d'administration de la commission.

Les décisions prises par la Commission canadienne du blé ont des répercussions financières beaucoup plus grandes que celles de l'office ontarien. L'Office de commercialisation des producteurs de blé de l'Ontario commercialise en moyenne 900 000 tonnes de blé par année, principalement au Canada et aux États-Unis, comparativement à une moyenne annuelle de 25 millions de tonnes de blé et d'orge, dans plus de 70 pays, dans le cas de la Commission canadienne du blé.

La commission continuerait d'exercer certains pouvoirs publics conférés par le Parlement, notamment la délivrance des licences d'exportation pour le blé et l'orge, partout au pays. L'office ontarien n'a pas de tels pouvoirs. En fait, celui-ci doit obtenir des licences d'exportation de la Commission canadienne du blé.

Le rôle du gouvernement à l'égard de la Commission canadienne du blé va changer, passant du paternalisme au partenariat. Le gouvernement s'engagera à offrir des garanties financières à la commission du blé. Comme ces garanties représentent des milliards de dollars, le gouvernement devra continuer de veiller à ce qu'elles ne deviennent pas un boulet pour le trésor public, question de prudence. >

Le gouvernement nommera cinq administrateurs mais ceux-ci constitueront la minorité. Bien entendu, c'est la majorité élue par les agriculteurs qui tiendra les rênes. Les agriculteurs représentés au sein de la Commission canadienne du blé ont demandé d'élargir les options en ce qui concerne la commercialisation du grain et les paiements. Je l'ai mentionné plus tôt, la Commission canadienne du blé est enviée de par le monde en raison de sa taille, de son influence et de ses réalisations. Bien évidement, cela ne fait pas l'affaire de nos concurrents. Sa forte popularité présente une menace pour eux.

Dernièrement, le gouverneur du Dakota du Nord a affirmé qu'il verrait d'un bon oeil que les agriculteurs des deux pays collaborent. Dans un premier temps, a-t-il proposé, les agriculteurs du Dakota du Nord devraient pouvoir vendre leur grain à la Commission canadienne du blé. Par ailleurs, les États-Unis s'en prennent à notre organisme.

Si elle ne rendait pas de précieux services aux agriculteurs canadiens, croyez-vous que le gouvernement américain se soucierait autant de la Commission canadienne du blé? Pas moi en tout cas.

Avec le projet de loi C-4, nous faisons ce qui s'impose. Nous faisons en sorte que la Commission canadienne du blé soit prête à aborder le nouveau millénaire et nous conférons aux agriculteurs le pouvoir de maîtriser leur avenir. Le projet de loi C-4 mérite l'appui unanime de la Chambre.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Madame la présidente, je voudrais poser deux questions très simples au président du comité de l'agriculture.

Combien d'opposition devrait-il y avoir au projet de loi C-4 avant que le gouvernement ne retire cette mesure et ne la renvoie au comité? Est-ce que l'opinion des producteurs des Prairies compte ou le gouvernement va-t-il simplement faire adopter cette mesure envers et contre tous?

Si je pose cette question, c'est que, par accident, l'adoption de cette mesure a été retardée par les vacances de Noël, ce qui m'a donné la chance d'aller consulter les producteurs de blé et d'orge. Ils m'ont fait clairement connaître leur position là-dessus. J'ai amplement de preuves, dont j'ai déjà parlé, qu'ils ne veulent manifestement pas du projet de loi C-4.

À quel point l'opposition devra-t-elle être importante avant que le gouvernement ne retire cette mesure? Est-il question d'une proportion de 35 p. 100 des agriculteurs? Est-il question de 50 p. 100? La proportion devra-t-elle être de 75 p. 100 ou de plus de 80 p. 100?

Si je pose cette dernière question, c'est que nous savons, d'après nos sondages, que plus de 80 p. 100 des intéressés s'y opposent. Nous avons vérifié auprès des gens qui sont pour ou contre la commission et ils ne veulent pas du projet de loi C-4.

Que souhaitent-ils? Ils veulent certains des amendements que nous avons présentés. Je sais comment ils se sentent, car je leur ai donné amplement l'occasion d'examiner ces amendements. Quatre-vingt-dix-sept pour cent de ces gens veulent un préambule au projet de loi et une modification du mandat de la commission. Hier, le gouvernement a rejeté les 48 amendements soumis.

 

. 1255 + -

Combien de producteurs voulaient une disposition leur permettant de se soustraire à l'application de la loi: 83 p. 100. Combien souhaitaient une mesure de temporisation et la possibilité pour le vérificateur général de procéder aux vérifications voulues: 86 p. 100. À quel point l'opposition doit-elle être forte?

La seconde question est liée à la première. Jusqu'à maintenant, le gouvernement n'a pas permis au vérificateur général de vérifier dans quelle mesure la commission respecte son mandat. Il continue de s'y opposer. Il dit que la commission a déjà un vérificateur pour vérifier ses livres. Le gouvernement sait fort bien, pourtant, que le vérificateur ne fait pas ce que fait le vérificateur général du Canada, c'est-à-dire voir dans quelle mesure la Commission canadienne du blé respecte son mandat.

Pour quelles raisons le gouvernement cache-t-il le fait que certains employés ont un salaire annuel de 120 800 $, 110 635 $, 119 113 $, 129 999 $, 115 000 $? Le vérificateur général du Canada exposerait ce genre de choses. Pourquoi le gouvernement cache-t-il ces renseignements aux agriculteurs?

M. Joe McGuire: Madame la Présidente, je dirais tout d'abord que lorsqu'on accuse le gouvernement de forcer l'adoption de cette mesure, ce n'est pas très crédible. Voilà trois ans que nous y travaillons. Toute bonne chose a une fin et, en l'occurrence, le débat sur la Commission canadienne du blé a suffisamment duré. Les agriculteurs des provinces de l'Ouest seront d'accord pour dire que ce débat dure depuis assez longtemps et qu'il est temps d'en finir, pour continuer à aller de l'avant.

Le contenu de ce projet de loi n'est pas gravé dans la pierre une fois pour toutes. S'il vient un moment où l'on constate que ces modifications ne fonctionnent pas, nous prendrons les mesures appropriées. Toutefois, pour le moment, accuser le gouvernement d'imposer indûment sa volonté c'est étirer un peu la vérité.

Si 10 des 15 membres du nouveau conseil d'administration veulent camoufler la vérité à leurs collègues agriculteurs, qui les ont élus, c'est leur problème. Si les céréaliculteurs canadiens, qui éliront la majorité des membres, ne sont pas satisfaits des procédures de vérification adoptées par les personnes embauchées par le conseil d'administration, je suis sûr que les membres du conseil en changeront et mettront en place des mesures plus acceptables pour leurs électeurs.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Madame la Présidente, j'ai une observation à faire au député d'en face. Mon collègue de Yorkton—Melville vous a donné des statistiques sur ce qui s'est passé pendant l'interruption de Noël, mais je peux aussi vous en donner qui sont similaires aux siennes. Ce n'est pas de la fabrication, c'est la vérité vraie.

Est-ce que le ministre se rend compte que tous les députés dont la majorité des électeurs sont dans des régions rurales productrices de céréales, à une exception près, voteront contre le projet de loi?

Est-ce que cela fait quelque chose au gouvernement que nous écoutions nos électeurs et que nous disions non? Nos électeurs disent non et le gouvernement n'écoute pas.

M. Joe McGuire: Madame la Présidente, je pense que le député oublie également que le ministre responsable de la Commission canadienne du blé habite aussi en Saskatchewan. Le député n'est pas le seul à être retourné chez lui pendant les vacances de Noël. Le ministre était dans la province et tâtait le pouls des producteurs de l'Ouest. Il est revenu et a présenté une branche d'olivier aux députés d'en face, mais ils l'ont tous rejetée. Ils n'envisageront aucune autre option que la destruction de la Commission canadienne du blé.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Questions et observations. Le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans.

 

. 1300 + -

M. Jay Hill: J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Le député qui vient de prendre la parole est un ministériel. Habituellement, les questions et les observations doivent venir de l'opposition.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): La règle veut habituellement que nous alternions.

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Madame la Présidente, à en juger par les questions que posent les députés d'en face, ils n'ont pas écouté ce qu'ont dit la présidence du comité et le député d'Egmont. Ils n'ont manifestement pas écouté. Si les grandes déclarations que font les députés d'en face dans ce débat sont les mêmes que celles qu'ils font aux producteurs, il n'est guère étonnant qu'ils soient déroutés.

Il se trouve que j'ai eu la chance de suivre ce débat au cours des premières audiences. Nous avons tenu des audiences dans l'ouest du Canada. J'ai été très chanceux d'y avoir assisté. Ce projet de loi, notamment la disposition d'inclusion, avait alors été appuyé par les Canadian Organic Certification Co-operatives, le Saskatchewan Catholic Rural Life Ministry, le Syndicat national des cultivateurs, le Comité consultatif de la Commission canadienne du blé, le Saskatchewan Women's Agriculture Network, la Pro-Canadian Wheat Board Campaign, la Sustainable Agricultural Association, le gouvernement de la Saskatchewan et une longue liste de personnes qui ont présenté des exposés en faveur de cette clause.

Ma question, car les députés d'en face n'écoutaient manifestement pas...

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): J'invoque le Règlement, madame la Présidente. Certains propos du député sont complètement erronés. Il est question du projet de loi C-4. Les groupes dont il parle n'appuient pas cette mesure. Le gouvernement de la Saskatchewan n'est pas en faveur du projet de loi C-4.

M. Wayne Easter: Le député ne m'a peut-être pas bien compris. Les groupes et les individus que j'ai mentionnés ont réclamé ou appuyé une disposition d'inclusion pendant les audiences du Comité de l'agriculture de la Chambre des communes. C'est de cela dont il est question.

Le député d'Egmont pourrait peut-être résumer ce qu'il a dit, en expliquant de nouveau, à l'intention de ceux qui ne l'ont pas entendu la première fois, pourquoi il estime que la commission aura davantage de comptes à rendre en vertu du nouveau système proposé dans le projet de loi C-4?

M. Joe McGuire: Madame la Présidente, je pense que les députés d'en face sont au courant des consultations qui ont eu lieu au sujet du projet de loi à l'étude. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a beaucoup d'opinions différentes qui ont été exprimées dans les provinces productrices de blé, sur la commission du blé et sur ce qu'il convient de faire ou non.

À mon avis, le ministre est arrivé à un juste équilibre en consultant et en écoutant ceux qui sont touchés par la commission du blé.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Madame la Présidente, la matinée a été très intéressante. J'aimerais annoncer que je partagerai le temps qui m'est alloué avec mon collègue de Yorkton—Melville.

J'ai entendu quelqu'un demander aujourd'hui pourquoi les agriculteurs n'étaient pas d'accord avec l'élection de dix administrateurs. Je vais expliquer pourquoi. Ils ont connu plus d'une douzaine de membres élus de conseils consultatifs et ces derniers n'ont jamais représenté les agriculteurs qui les avaient élus pour qu'ils travaillent pour eux et qu'ils essaient de promouvoir des projets qui permettraient à la commission d'être plus transparente dans ses opérations et plus responsable face aux agriculteurs.

Ils n'étaient même pas prêts à appuyer la commission lorsque les tribunaux ont décidé qu'elle n'avait pas le mandat de représenter les agriculteurs, mais plutôt le gouvernement.

 

. 1305 + -

Ce qui s'est passé dernièrement, c'est qu'il n'y a plus que les agriculteurs qui ne veulent plus de la commission. Les gens qui travaillent pour la commission ont peur de perdre leur emploi si elle ne devient pas plus transparente et responsable.

J'ai reçu la fin de semaine dernière un document de la commission du blé qui montre bien les poids morts que comporte son équipe de gestion. Sur 454 employés, il y en a 130 dont le titre a un rapport quelconque avec la gestion. Je peux en dresser la liste. Je peux tous les énumérer l'un après l'autre si les députés sont intéressés. Il y a 131 employés du niveau de gestion qui ont probablement droit à une pension assez élevée, plus une prime de départ. Si le député de Malpeque veut bien consulter le livre au chapitre de la rémunération, il y verra que le montant global des salaires s'élève à 21,991 millions de dollars. De ce montant, 5,139 millions sont consacrés aux avantages sociaux, par exemple l'assurance-emploi, la pension de retraite, l'assurance collective et les soins médicaux. Environ 24,5 p. 100 de la masse salariale de 21 millions de dollars couvre les avantages sociaux.

C'est même mieux que ce que touche un député libéral. Ces derniers devraient songer à se faire élire à la commission du blé. C'est là que se trouve l'argent. Les agriculteurs crèvent de faim, mais la commission du blé vit très bien. C'est pour cette raison que les agriculteurs en ont assez. C'est pour cette raison qu'ils veulent changer le système. Ce n'est pas le gouvernement qui le fera pour eux. Ils le feront eux-mêmes. Les agriculteurs l'ont déjà fait et ils le feront de nouveau.

Pourquoi les agriculteurs sont-ils si opposés à un système de commercialisation qui a bien fonctionné pour eux? À cause de tous les secrets et les soupçons qu'ils y retrouvent. Plus personne ne fait confiance à la commission du blé. Et pourquoi n'y fait-on plus confiance? En 1994, lorsque le blé a été contaminé par le fusarium dans le sud du Manitoba, la commission du blé a dit que nous ne pouvions vendre ce blé parce qu'il n'y avait pas de marché. Les agriculteurs pouvaient le jeter, le brûler ou en faire ce qu'ils voulaient.

David Sawatzky, lui, a trouvé un marché. Il a exporté ce blé et en a tiré je ne sais plus combien de millions de dollars. Qu'est-ce que la vente de ce blé sans valeur lui a valu? D'être jeté en prison. Qu'a-t-il fait? Il s'est mis à compulser les ouvrages de droit et à étudier le droit. Il a eu gain de cause. Mécontent, le gouvernement a interjeté appel. La décision en faveur de l'agriculteur a été maintenue. Voilà pourquoi les agriculteurs sont fâchés. Voilà pourquoi ils viendront à bout de ce système pourri, corrompu.

J'espère que je ne parle pas trop fort, car cela m'arrive lorsque je m'énerve. Le Président qui est maintenant au fauteuil a les nerfs plus solides, alors, je peux y aller. Monsieur le Président, vous pouvez vous tourner de ce côté-ci, car je sais que les libéraux n'ont pas l'oreille tellement fine, même s'il arrive parfois à la présidence d'entendre des choses qu'elle ne devrait pas, mais nous l'en excusons.

Cela n'était qu'un exemple. Permettez-moi de vous en donner un autre. Je veux parler d'Andy McMechan, un autre agriculteur qui a transporté par camion quelques millions de boisseaux de blé pourri victime du fusarium. Que lui a-t-on fait? Le ministre a modifié la Loi sur les douanes dès que Sawatzky a été déclaré innocent.

Une voix: Par décret.

M. Jake E. Hoeppner: Par décret. Qu'ont-ils fait? Ils lui ont confisqué des biens d'une valeur de plusieurs milliers de dollars. Ils lui ont saisi son camion. En 1995, ils se sont rendu compte tout d'un coup qu'ils n'arriveraient pas à bout de ce petit agriculteur. Alors, qu'ont-ils fait? Ils ont ordonné à la Société du crédit agricole de demander à un organisme de recouvrement de veiller à ce que l'agriculteur acquitte une facture de 27 $ qu'il devait depuis un an. Voilà comment le gouvernement libéral traite les agriculteurs.

Le vice-président: À l'ordre. Le secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans invoque le Règlement.

M. Wayne Easter: Monsieur le Président, le député fait une allégation très grave, lorsqu'il prétend que le gouvernement a demandé à la SCA d'envoyer une facture...

 

. 1310 + -

Le vice-président: C'est un sujet de discussion, il n'y a pas matière à faire un rappel au Règlement.

M. Jake E. Hoeppner: Si le député veut voir les documents, je peux les lui montrer. Ils sont dans mon bureau.

Quand la CCB n'a pas réussi à l'empêcher de cette façon, qu'a-t-elle fait? Elle l'a attrapé à la frontière avec sa vielle remorque pleine d'orge et son tracteur. Il avait besoin d'argent, alors il a chargé sa remorque et pris son tracteur. Quand il est revenu, le gouvernement lui a dit: «Vous n'avez pas le droit d'aller vendre votre orge aux États-Unis pour 6 $ alors que la Commission canadienne du blé vous en offre 2 $. C'est criminel.»

Les libéraux voulaient saisir son tracteur, mais il a dit: «Je suis désolé, j'ai besoin de la benne pour nourrir mon bétail, faute de quoi il mourra. Je ne peux pas tout faire avec une fourche.» Savez-vous, monsieur le Président, ce que le procureur de la Couronne a fait? Il a condamné cet homme à six mois de prison pour avoir emmené son tracteur chez lui pour nourrir ses bestiaux. Six mois de prison ferme.

Une voix: Ça ne s'est pas passé au Canada, quand même?

M. Jake E. Hoeppner: Oui, au Canada. C'est ça la Commission canadienne du blé. C'est ça le gouvernement libéral. C'est ça le Canada d'aujourd'hui.

Et qu'a fait le juge? Il lui a imposé une amende de 2 000 $, et le procureur a dit: «Attendez une minute, ce n'est pas assez sévère pour un criminel de cette espèce. Ça ne suffit pas, il faut qu'elle soit au moins de 20 000 $» et c'est ce qu'il a fait. Une amende comme ça, ça fait un agriculteur de moins.

C'est la raison pour laquelle les agriculteurs sont en colère aujourd'hui. Ils ne vont pas se laisser faire par une mesure législative de ce genre. Ils vont la modifier, ils vont obliger la Commission canadienne du blé à leur rendre des comptes, ils vont la rendre transparente.

Ce n'est pas la première fois que les agriculteurs sont obligés de prendre le taureau par les cornes, et ils vont le faire cette fois-ci encore. Il n'y a pas de règle, il n'y a pas de loi dans ce pays qui impose un traitement de ce genre. On laisse des violeurs et des assassins se promener librement dans les rues et on jette en prison un agriculteur pour avoir vendu sa récolte à un bon prix. C'est ça le Canada. C'est ça le gouvernement libéral.

Lorsqu'on demande au ministre d'ajouter au projet de loi un préambule qui dirait que la commission est responsable devant les agriculteurs et qu'elle doit vendre leur grain au meilleur prix possible, il refuse. Ce n'est pas de la vraie démocratie. Pourquoi le projet de loi n'énoncerait-il pas clairement ce qu'il doit faire pour les agriculteurs? Bien sûr que non! Je sais ce qu'il a fallu pour amener la commission a admettre qu'elle n'avait absolument aucune autorité, responsabilité ou obligation à l'endroit des agriculteurs. Ce projet de loi vise à protéger les intérêt du gouvernement et de la commission. Nous sommes saisis de ce projet de loi et les député peuvent le modifier, s'ils le veulent.

Nous pouvons tous, ce soir, défendre la démocratie et rejeter ce projet de loi, conformément au voeu de tous les agriculteurs de l'Ouest. Il faut déchirer ce projet de loi et recommencer à neuf, car il nous faut une commission qui soit responsable et travaille pour nous. Pas seulement pour nous, mais pour le Canada tout entier. Nous devons protéger la démocratie et les droits des particuliers.

Si ce projet de loi est adopté tel quel, il mettra en péril tous les systèmes de commercialisation et tous les REER. Il représente une menace pour tous les régimes de pensions, puisqu'il permettrait de tout confisquer.

J'espère que les libéraux prendront cette question à coeur et prouveront qu'ils travaillent pour le Canada. Il leur suffit de voter contre le gouvernement. Ainsi, ils passeraient à l'histoire, tout comme Andy McMechan, dont l'effigie sera probablement, un jour, gravée dans une sculpture de neige, car c'est un véritable héros, comme Louis Riel.

M. Wayne Easter (secrétaire parlementaire du ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, j'ai tenté d'invoquer le Règlement plus tôt et mon intervention était peut-être même irrecevable.

Je suis persuadé que le député a fait une allégation grave et injustifiée. Je ne doute pas qu'il lutte sincèrement pour la communauté agricole et qu'il reconnaisse des aspects très positifs à la Commission canadienne du blé. Il ne l'appuie probablement pas aussi fermement que moi, mais il sait qu'elle présente certains bons aspects.

 

. 1315 + -

Le député a cependant fait une allégation mensongère en accusant le gouvernement du Canada d'avoir demandé à la Société du crédit agricole, une société d'État qui possède son propre mandat, de mettre un agriculteur au pied du mur sur le plan financier. Je demande au député de déposer l'information, s'il en a, sur laquelle il a appuyé cette allégation. J'affirme qu'il a tout a fait tort.

Le député a soulevé la question des salaires. La Commission canadienne du blé représente une affaire de six milliards de dollars. Elle maximise le rendement pour les producteurs. Elle est le principal organisme de vente sur les marchés mondiaux pour le compte des producteurs. La commission est un modèle dont les autres secteurs devraient s'inspirer. J'aimerais que le député me dise quel serait, selon lui, le niveau acceptable des dépenses d'administration et des salaires des membres du conseil d'administration.

En 1995-1996, les dépenses d'administration des comptes de mise en commun de la Commission canadienne du blé ne représentaient que 0,7 p. 100 des ventes, qui se chiffraient à 5,8 milliards de dollars. Voilà une société gérée de façon très efficiente. Les chiffres avancés par le député concordent tout à fait avec le genre de discours propre au Parti réformiste.

Où devrait se situer le seuil d'efficience, selon le député?

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, je me ferai un plaisir de répondre à la première question, selon laquelle le gouvernement ne serait pas capable de faire ce que j'ai dit. J'irai un peu plus loin.

Quand j'ai demandé à la Chambre pourquoi le ministre pouvait jeter un agriculteur en prison pour avoir vendu son grain au meilleur prix alors qu'un autre avait été récompensé pour avoir obtenu 54 $ la tonne sans passer par le système de mise en commun, le ministre a dit qu'il ne savait pas ce que disait la Loi sur la Commission canadienne du blé. Il a dû demander à Richard Klassen, le commissaire de la commission en question, de l'interpréter. Et qu'est-ce que ce dernier a dit? Il a dit: «Nous n'avons pas le mandat de vendre le blé au meilleur prix possible. Les avantages de ce genre sont légaux si l'on ne passe pas par le système de mise en commun.»

Quand elle a examiné l'affaire, la GRC lui a donné raison. Que faire?

M. Wayne Easter: Lisez ce rapport.

M. Jake E. Hoeppner: Monsieur le Président, je peux lire tous les rapports qu'on voudra, n'empêche que les faits sont là.

Ce n'est pas tout. Quand les responsables des douanes et du revenu ont voulu confisquer 165 000 $ à cet agriculteur qui avait gagné 250 000 $ supplémentaires pour avoir vendu son grain sans passer par le système de mise en commun, celui-ci a déposé une plainte contre Douanes Canada et Revenu Canada, qui n'ont pas encore réagi. C'est révoltant. Ils ont admis qu'ils avaient tort.

Que fait le gouvernement? Il s'en prend à un agriculteur et le met aux arrêts tandis qu'il accorde 250 000 $ à un autre agriculteur pour avoir vendu son grain sans passer par le système de mise en commun. Le gouvernement travaille-t-il uniquement pour les riches, ou travaille-t-il aussi pour les familles d'agriculteurs qui essaient de subsister et de rester propriétaires de leurs terres? Comment veut-il qu'on lui présente les faits? Les faits sont clairs.

Selon ce livre, le fonctionnement de la commission représentait 42 millions de dollars. Qu'avons-nous perdu dans la mesure où nous voulons obtenir un prix raisonnable, si le juge affirme que nous n'avons pas le mandat de vendre au meilleur prix possible? M. McMechan pourrait avoir obtenu 6 $ s'il avait amené son orge à 25 milles de chez lui, mais il a obtenu 2 $ de la commission. Quels ont été ses frais de fonctionnement de la commission? Je ne crois pas qu'il ait touché tellement d'argent sur cette vente. Si je ne m'abuse, il a perdu sa ferme.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, je pourrais aussi bien être au Mexique. Je pourrais aussi bien aller trouver le sénateur qui est là-bas. Monsieur le Président, vous êtes le seul qui écoute vraiment ce que j'ai à dire. Le gouvernement n'écoute pas. Comme nous nous parlons essentiellement à nous-mêmes ici, je pourrais aussi bien être au Mexique. Cela serait tout aussi bien.

On a proposé d'apporter 48 amendements à ce projet de loi et aucun n'a été adopté. Cela veut beaucoup dire.

Le ministre a-t-il répondu à l'une ou l'autre de nos questions? A-t-il été ici pour suivre le débat et y a-t-il une de nos questions à laquelle il ait répondu? Pas une seule. J'ai donc opté pour d'autres avenues. Je lui ai adressé des lettres publiques auxquelles il n'a jamais répondu. Je pourrais tout aussi bien être au Mexique. Je travaille très fort depuis longtemps sur cette question.

 

. 1320 + -

M. Gerry Byrne: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Comme la présidence en conviendra, je crois qu'on n'est pas censé faire allusion à la présence ou à l'absence à la Chambre de députés.

Le vice-président: Le député a raison. Il ne convient pas de signaler la présence ou l'absence à la Chambre de députés. Le député a failli le faire mais, comme il a changé rapidement de sujet, je ne l'ai pas interrompu. Je sais qu'il ne recommencera pas.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, je regrette d'avoir signalé l'absence pratique du ministre.

J'ai demandé au ministre et au président du comité quelle opposition il faudrait au projet de loi pour que le gouvernement le retire. Je n'ai jamais reçu de réponse.

L'opposition des députés des trois provinces des Prairies est terrible. Je l'ai mentionné plusieurs fois. Je ne vais pas revenir là-dessus. Avant et pendant le congé de Noël, j'ai demandé aux agriculteurs ce qu'ils souhaitaient que nous fassions. Le ministre a donné l'impression que ce débat mettait en présence deux adversaires irréconciliables. C'est totalement faux. J'ai rencontré les agriculteurs et ils ont discuté de la question entre eux.

Ils en ont débattu et ils sont revenus me présenter leurs propositions. Les députés savent ce que j'ai fait de ces propositions. Il y a eu un véritable tohu-bohu à la Chambre quand j'ai voulu rédiger moi-même les amendements, au lieu d'en charger tout simplement les greffiers. J'ai donc demandé que les amendements soient rédigés formellement, ce que la majorité des agriculteurs ont accepté.

J'ai soumis ces amendements aux agriculteurs en leur demandant de les étudier pendant plusieurs semaines. Je le répète, les agriculteurs sont favorables à ces amendements qu'ils ont étudiés.

Ils veulent que le mandat du conseil consiste à maximiser les bénéfices plutôt que d'assurer une commercialisation ordonnée. Les agriculteurs ont donné leur appui à cet égard dans une proportion de 97 p. 100. Le ministre déclare que leurs opinions sont imprécises, qu'ils ne savent pas trop de quoi ils parlent et que ce ne sont que des agriculteurs des Prairies, après tout. Comme il faut être arrogant et antidémocratique pour ne pas tenir compte des demandes de ces agriculteurs. Ils étaient disposés à accepter une disposition prévoyant l'exclusion pour cinq ans. En fait, ils y étaient favorables dans une proportion de 83 p. 100.

Le ministre a déclaré que les deux parties ne parvenaient pas à s'entendre. Comment se fait-il que j'y sois parvenu? Étrange. J'ai pu y parvenir dans ma circonscription en menant de larges consultations. Comment se fait-il que, lorsque des agriculteurs ont demandé qu'un vérificateur général examine les livres de la commission, j'ai obtenu un appui de 86 p. 100?

Il y a quelque chose qui ne sonne pas juste, dans ce que dit le ministre. Il donne l'impression qu'il est impossible de concilier les deux parties alors que c'est faux, de toute évidence.

À quoi cela m'a-t-il servi de travailler fort et d'amener les agriculteurs à s'entendre? À quoi bon? À rien du tout. J'aurais aussi bien fait d'aller en vacances au Mexique, puisque le ministre ne veut rien entendre.

Le ministre chargé de la Commission canadienne du blé a dit que les agriculteurs ne pouvaient pas s'entendre. J'ai prouvé qu'il avait tort. Il refuse de dire qui l'appuie. À peu près personne. Voyez les faits. Les producteurs s'opposent, et ils ne sont pas les seuls. Des lettres ouvertes du comité consultatif de la Commission canadienne du blé ont paru dans tous les journaux des Prairies.

Ce comité élu par les producteurs s'oppose à cette mesure. Quel degré d'opposition faut-il donc? Voici des personnes informées, qui voient de l'intérieur ce qui se passe à la Commission canadienne du blé, et elles ne veulent rien savoir du projet de loi C-4. N'est-ce pas exécrable? Autant s'en aller en vacances au Mexique, puisque le gouvernement nous écoute si bien. C'est absolument ridicule.

J'aurais une intervention de 30 minutes à faire, mais le gouvernement me limite à dix. Je dois tout défiler rapidement.

 

. 1325 + -

M. Wayne Easter: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. C'est l'opposition qui a proposé de séparer le temps de parole en périodes de dix minutes. Ce n'est pas le gouvernement qui l'a proposé.

Le vice-président: Je ne doute pas que nous pourrions avoir une discussion intéressante sur la durée des discours. Cependant, le député a la parole, Je ne crois pas qu'il y ait matière à en appeler au Règlement. Cela pourrait cependant faire l'objet d'un débat.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, puis-je avoir plus de temps parce que j'ai été interrompu par des commentaires aussi frivoles?

Le vice-président: Oui.

M. Garry Breitkreuz: Merci.

Ce projet de loi créera encore plus d'injustices. C'est ce que j'essaie d'établir. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement ne croit pas les agriculteurs capables de prendre leurs propres décisions et de gérer leurs propres affaires.

Le ministre s'obstine à répéter que les amendements proposés compromettront l'existence de la Commission canadienne du blé. Si les agriculteurs qui devraient s'y soumettre veulent ces amendements, pourquoi le gouvernement ne les approuverait-il pas? C'est leur argent qui est en jeu. Ce sont leurs biens. S'agit-il oui ou non de leurs biens?

Cela m'amène au deuxième aspect de la question dont je voulais parler pendant le peu de temps que me laisse le gouvernement. À qui appartient le grain? Qui a décidé de le cultiver en assumant tous les risques que cela comporte?

Monsieur le Président, vous ne le savez peut-être pas, mais j'ai présenté un projet de loi visant à renforcer le droit de propriété. Je crois que c'est la question fondamentale et que c'est ce qui finira par détruire la commission si le projet de loi C-4 est adopté. Les agriculteurs en ont assez de devoir remettre leur grain à la Commission et de devoir le racheter s'ils veulent en disposer. On voit cela au Canada. Monsieur le Président, vous ne semblez pas convaincu de ce que je dis. Cela se voit au Canada. C'est vrai.

Les agriculteurs prennent tous les risques. Ils cultivent le grain, ils paient les intrants et, lorsqu'ils le récoltent, il ne leur appartient pas. Ils doivent le remettre à la commission s'il s'agit de blé ou d'orge et s'il a été cultivé dans l'une des trois provinces. S'il est cultivé en Saskatchewan, en Alberta ou au Manitoba, le grain n'appartient pas aux agriculteurs. S'il a été cultivé ailleurs, dans certaines régions de la Colombie-Britannique, par exemple, ils peuvent en être propriétaires. Dans d'autres régions, cependant, ils ne le peuvent pas.

Ils ne peuvent pas être propriétaires de leur propre grain. Ils doivent le remettre à la commission et, s'ils le veulent, ils doivent le racheter. Évidemment, ils ne peuvent pas le racheter au même prix. Ils doivent payer beaucoup plus cher parce que la commission ne veut pas qu'ils fassent des profits.

Selon l'alinéa 1a) de la Déclaration canadienne des droits, toutes les personnes, y compris les agriculteurs des Prairies, ont droit à la vie, à la liberté, à la sécurité de la personne ainsi qu'à la jouissance de [leurs] biens, et le droit de ne s'en voir privé que par l'application régulière de la loi. Le gouvernement enfreint ce droit. Il le nie aux agriculteurs. Il les prive de la jouissance de leurs biens.

Il ne s'agit pas uniquement du blé et de l'orge. Les terres sont dévaluées parce que les agriculteurs ne sont pas maîtres chez eux. Je ne me lancerai pas dans une explication compliquée, mais je dirai que l'agriculteur qui cultive sa terre mais ne peut pas retirer le maximum de ses cultures voit cette terre perdre de la valeur. On assiste à ce phénomène dans les Prairies aujourd'hui.

L'article 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme dit que toute personne, aussi bien seule qu'en collectivité, a droit à la propriété et ne peut pas en être arbitrairement privée. Le gouvernement fait fausse route lorsqu'il prive les agriculteurs de trois provinces seulement de leur propriété.

J'ai entendu des députés d'en face déclarer que ces agriculteurs n'avaient qu'à ne pas cultiver du blé et de l'orge. Quelle ignorance. Ils ne connaissent rien à l'économie des Prairies. Ils ne connaissent rien à la rotation des cultures. Ils ne connaissent rien aux options très limitées des agriculteurs. Le gouvernement retire à ces agriculteurs toutes les options qu'ils ont et celles qu'ils aimeraient avoir. Même les Nations Unies disent que cela est inacceptable. Il est déplorable de voir le gouvernement recourir à des avocats et invoquer ses pouvoirs pour nier les droits des agriculteurs de l'Ouest.

Durant cette dernière minute, je lance un appel aux Canadiens, à nos cousins des villes qui suivent ce débat; ils ne comprennent peut-être pas que certains producteurs des Prairies connaissent des problèmes et que le gouvernement passe outre à leurs objections. Ces agriculteurs ne réclament pas la séparation, ils ne disent pas qu'ils ne veulent plus faire partie du Canada. Tout ce qu'ils veulent, c'est avoir le contrôle sur leur propriété. Voilà ce qu'ils demandent.

J'exhorte les habitants de toutes les autres circonscriptions du Canada à écouter le débat d'aujourd'hui et à nous prêter main forte. Nous ne pouvons rien faire parce que nous n'avons pas de représentant au sein du gouvernement. Comme nous n'avons pas le pouvoir de modifier le projet de loi, nous appelons les Canadiens à l'aide.

 

. 1330 + -

J'ai tant d'autres choses à dire à propos de cette question du droit à la propriété. Pourrais-je avoir le consentement unanime pour terminer mon intervention? Je me rends bien compte que le gouvernement a imposé une limite de temps au débat.

Le vice-président: Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour conclure son intervention?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Le temps de parole du député est écoulé. Il aura l'occasion de répondre aux questions et de répliquer aux commentaires au cours de la période maintenant prévue à cet effet.

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Monsieur le Président, certaines remarques formulées ici aujourd'hui sont de grossières exagérations, des accusations non fondées et des fausses vérités. C'est incroyable.

J'ai entendu des déclarations selon lesquelles 97 p. 100 des agriculteurs récemment consultés veulent ceci, ou que 86 p. 100 d'entre eux veulent cela. Toutefois, les documents cités ne sont pas déposés à la Chambre. Certains se contentent de lancer des chiffres en l'air en disant qu'ils ont mené un sondage dans leur circonscription. Je peux vous dire que certains députés ne se préoccupent absolument pas de la véracité de leurs déclarations.

Certains ont dit des choses telles que le gouvernement a réduit mon temps de parole de 30 minutes à 10 minutes. La vérité c'est que le député a lui-même choisi de partager avec un autre réformiste la période de 20 minutes qui lui était accordée. Le gouvernement n'a rien à voir là-dedans. C'est le député lui-même qui a décidé de partager son temps. C'était là une déclaration, voire une accusation fausse.

Si le député fait de fausses accusations et déclarations à la Chambre au cours du débat sur l'important projet de loi C-4, qu'est-ce qu'il raconte à ses électeurs? Ceux-ci devraient-ils croire ce qu'il leur dit? Je ne crois pas. Les députés qui s'expriment dans cette Chambre devraient dire la vérité, envoyer des messages clairs, et non pas faire de fausses déclarations. Vous devriez avoir honte.

Le vice-président: Je rappelle au député qu'il doit évidemment s'adresser à la présidence. Je l'invite à se montrer très prudent dans son choix de mots. Je suis convaincu que tous les députés disent la vérité, du moins telle qu'ils la perçoivent.

M. Paul Bonwick: Monsieur le Président, je m'excuse de m'être adressé directement au député d'en face. J'imagine que le fait de voir certains déranger, rire et ne pas prendre au sérieux une mesure aussi importante que le projet de loi à l'étude me rend un peu émotif.

Nous discutons d'une industrie de six milliards de dollars. Elle est importante pour tous les Canadiens, et non pas seulement pour quelques réformistes qui ont une mémoire très sélective et qui s'imaginent qu'ils disent la vérité. J'invite les réformistes à faire un examen de conscience lorsqu'ils disent des faussetés, comme par exemple que le gouvernement a ordonné à la Société du crédit agricole d'effectuer une saisie ou de prendre des mesures judiciaires à l'endroit de quelqu'un. C'est absolument faux et les réformistes devraient avoir honte.

J'aimerais poser une question au député. Nous avons distribué plus de 200 000 questionnaires ou lettres d'information aux agriculteurs. Nous n'en avons pas envoyé 600 à un groupe précis ici ou 200 à quelques réformistes ailleurs. Selon les données les plus récentes, 1 200 agriculteurs s'opposent à certaines parties du projet de loi C-4.

Le député pourrait-il nous dire pourquoi moins de 1 p. 100 des 200 000 personnes interrogées ont eu une réaction négative? Pourrait-il expliquer comment il en est arrivé à un taux d'opposition de 97 p. 100 si les agriculteurs ne sont pas disposés à répondre au sondage?

M. Garry Breitkreuz: Une précision, je vous prie, monsieur le Président. Combien a-t-on reçu de réponses?

M. Paul Bonwick: Monsieur le Président, le député a peine à entendre la question à travers le chahut. Si on lui donnait la chance d'entendre clairement, il pourrait peut-être y répondre.

C'est une question assez simple. Moins de 1 p. 100 des répondants à notre dernier sondage ont dit non. Sur plus de 200 000 lettres, moins de 1 200 étaient farouchement opposées à l'idée. Si tel est le cas, pourquoi alors...

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, ce que je veux savoir c'est quel a été le taux de réponse aux 200 000 lettres qui ont été envoyées.

M. Paul Bonwick: Monsieur le Président, allons-nous nous renvoyer la balle comme ça longtemps? J'ai posé une question au député et...

Des voix: Oh, oh!

 

. 1335 + -

Le vice-président: Je crois que le député de Yorkton—Melville devra se satisfaire de la réponse à la question telle qu'il l'a comprise.

M. Garry Breitkreuz: J'ai touché à une corde sensible, monsieur le Président. Le député ne veut pas nous dire combien de réponses il a reçues. Il ne veut pas que nous connaissions le taux de réponse à ses 200 000 lettres.

Je vais vous dire ce qui est arrivé dans ma circonscription. Le député demande pourquoi je n'ai pas rendu ces renseignements publics. Or, ils ont été publiés dans les journaux.

M. Paul Bonwick: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Si j'ai invoqué le Règlement, et avec autant de force, c'est parce que le député fait de fausses déclarations à mon sujet.

Le vice-président: À l'ordre s'il vous plaît. Le débat s'est manifestement engagé dans une certaine mesure. Je ne crois pas qu'il y ait matière à invoquer le Règlement. On ne s'entend pas sur ce qui a été dit. Cela ne constitue pas un rappel au Règlement.

M. Garry Breitkreuz: Tout cela est très intéressant, monsieur le Président. Je me demande si le député ne serait pas avocat. Il dit que 1 200 agriculteurs sont contre le projet de loi C-4, mais il se garde bien de nous dire combien sont pour. Nous savons combien sont en faveur du projet de loi dans les Prairies.

À propos de son deuxième point, quand il a parlé d'une industrie de six milliards de dollars. Si tel est le cas, cela ne vaut-il pas la peine de continuer?

M. John Herron: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. La Chambre consentirait probablement à l'unanimité à ce que le député réponde à la question qui a été posée et indique le nombre de réponses qu'il a reçues.

Le vice-président: Je fais respectueusement remarquer qu'il n'est pas correct d'interrompre le député qui a la parole. S'il y a consentement unanime pour prolonger la période des questions et réponses, je suis prêt à le permettre. Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: Non.

Le vice-président: Le consentement est refusé.

M. Garry Breitkreuz: Monsieur le Président, le gouvernement s'oppose à ce que la période des questions soit prolongée afin de ne pas avoir à répondre à la question. Les ministériels n'ont rien déposé à la Chambre et ne nous ont pas dit combien de personnes ont accordé leur appui.

Deuxièmement, si nous sommes limités à dix minutes, c'est parce que le gouvernement a recours à la clôture. Le gouvernement est contre la tenue de débats libres. Il dit qu'il s'agit d'une industrie de 6 milliards de dollars. Si c'est vraiment le cas, pourquoi le gouvernement n'accepte-t-il pas d'en débattre?

Nous qui représentons les agriculteurs, les producteurs des Prairies, n'avons d'autre choix que de partager notre temps de parole pour pouvoir défendre nos électeurs, parce que le gouvernement limite la durée de nos interventions.

Le vice-président: Le Président va vous limiter encore davantage car nous devons poursuivre le débat.

M. Allan Kerpan: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Au cours des dernières minutes, le député d'en face nous a vraiment présenté des demi-informations sur un sujet essentiel pour le présent débat. Le député a demandé...

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît! Les questions, commentaires et divergences d'opinions en rapport avec ce qui se dit au cours des discussions ne sont pas rares à la Chambre, comme le député de Blackstrap le sait bien.

Je souligne aux députés qu'il n'est pas juste pour celui qui a la parole de l'interrompre par des rappels au Règlement qui n'en sont pas réellement. Cela coupe le fil des idées, même si celui qui interrompt n'est pas d'accord avec ce qui a été dit.

Dans les circonstances, nous reprenons le débat.

M. Gerry Byrne (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, je suis persuadé que tous les députés ici présents seront très attentifs à mes propos. Je sais qu'ils ont envie d'entendre les députés de la Chambre prononcer des paroles sensées. Je suis persuadé qu'il sera rafraîchissant pour eux d'entendre des paroles sensées pour une fois, parce qu'ils n'y sont pas habitués.

Je suis très heureux de prendre la parole en rapport avec le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé. Confrontés à une concurrence accrue sur des marchés en évolution et à l'importance des résultats nets, les producteurs de grains de l'Ouest canadien veulent des changements substantiels. Ils ont clairement affirmé qu'ils sont en faveur de la Commission canadienne du blé, mais ils aimeraient que cette dernière soit plus démocratique, plus souple et plus responsable.

Le gouvernement du Canada répond à cette demande. Le projet de loi C-4 présente les plus importantes modifications au système de commercialisation du blé qui aient été apportées depuis 50 ans. Permettez-moi de donner quelques précisions sur ces modifications.

Pour la première fois, les producteurs de grains de l'Ouest canadien seront responsables de la direction des opérations de la Commission canadienne du blé, une société de 6 milliards de dollars qui transige avec plus de 70 pays au monde, et qui représente l'un des dix plus grands exportateurs au Canada et le premier pourvoyeur net de devises étrangères.

 

. 1340 + -

Aux termes du projet de loi C-4, le système selon lequel la Commission canadienne du blé est actuellement dirigée par des administrateurs nommés par le gouvernement prendra fin. Il sera remplacé...

Le vice-président: Je suis désolé d'interrompre le député.

M. Lee Morrison: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Je pense que le secrétaire parlementaire s'est trompé de discours. Il est en train de lire celui que le ministre a fait ce matin.

Le vice-président: J'aimerais que le député se souvienne de ce qui a été dit au sujet des rappels au Règlement.

M. Gerry Byrne: Monsieur le Président, j'invoque la question de privilège et je demande à la présidence de se prononcer sur les manigances des députés réformistes. Nous essayons d'avoir un débat dans cette Chambre. Ils invoquent des articles du Règlement qui n'existent pas. Cela n'a rien à voir avec la procédure parlementaire.

Pourquoi les députés réformistes ne veulent-ils pas débattre ce projet de loi? Pourquoi se croient-ils obligés de chahuter? Pourquoi se croient-ils obligés d'interrompre les délibérations de la Chambre? Pourquoi se livrent-ils à des manoeuvres aussi frivoles qu'irresponsables? Ce discours est le mien.

Le vice-président: Nous l'écouterons dans un instant.

M. Cliff Breitkreuz: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. Ce projet de loi est très important pour le gouvernement, du moins c'est ce qu'il dit, et pourtant je ne vois que cinq ministériels dans la Chambre. Pourrait-on voir s'il y a quorum?

Le vice-président: Il y a clairement quorum. La présidence peut voir qu'il y a quorum. Le député sait pertinemment qu'il est contraire au Règlement de faire allusion aux députés qui sont absents ou présents.

On a fait beaucoup de rappels au Règlement sans fondement. La Chambre est saisie d'un projet de loi qui doit être débattu. Le secrétaire parlementaire a la parole et on devrait lui permettre de faire son discours.

M. Gerry Byrne: Monsieur le Président, je vous sais gré de vos efforts pour mettre un peu d'ordre dans la Chambre. C'est une tâche ardue.

Le Parti réformiste détient 57 sièges en face. Toutefois, seuls huit sont occupés en ce moment. On peut se demander si les réformistes sont vraiment au courant et s'ils trouvent ce projet de loi réellement important. Pour nous, il l'est.

Les membres du conseil d'administration, qui seront élus par les agriculteurs, devront rendre des comptes à leur électorat. Ils seront à l'écoute des besoins des producteurs et agiront en conséquence. Faute de quoi, ils ne seront probablement pas réélus. C'est un fait auquel les réformistes devraient faire attention car ils vont être confrontés à cette réalité.

C'est l'essence même de l'obligation de rendre compte. Les administrateurs auront le véritable pouvoir de gérer toutes les activités d'une toute nouvelle Commission canadienne du blé. Les administrateurs pourront examiner toutes les ventes et les données financières de la Commission canadienne du blé,sans exception. Ils pourront choisir leur président. Ils pourront fixer leur propre rémunération ainsi que celle du président du conseil et du premier dirigeant. Si nécessaire, ils pourront recommander le congédiement du premiser dirigeant. si jamais son travail est insatisfaisant.

Le rôle du gouvernement à l'égard des activités de la Commission canadienne du blé ne relèvera plus du paternalisme, mais plutôt du partenariat. Il continuera de fournir des garanties financières et de veiller à ce que ces garanties ne drainent pas le trésor public. Compte tenu de leur position sur les compressions budgétaires et l'obligation de rendre compte du gouvernement, les députés réformistes seront sûrement d'accord avec cela.

Les agriculteurs ont aussi demandé plus d'options concernant la manière dont le grain est vendu et payé. Grâce au projet de loi C-4, la Commission canadienne du blé disposera de moyens lui permettant de fonctionner avec plus de souplesse.

Sous réserve de l'approbation du nouveau conseil d'administration, qui sera formé en majorité d'agriculteurs et de producteurs, la Commission canadienne du blé pourra effectuer l'achat de blé ou d'orge au comptant, rajuster les versements initiaux dès que les conditions du marché le justifient, fermer et régler en tout temps des comptes de mise en commun, délivrer des certificats de producteur négociables, autoriser le versement anticipé des livraisons en commun, utiliser des instruments modernes de gestion des risques, rembourser aux producteurs des frais de stockage ou de transport, faciliter l'acheminement des livraisons vers les installations de stockage en commun et recevoir le grain en provenance d'élévateurs mobiles à la ferme.

Aux termes du projet de loi C-4, les agriculteurs pourront décider si leur grain peut être inclus ou exclu du mandat de la Commission canadienne du blé.

Je souligne que, si les agriculteurs veulent soustraire un grain du mandat existant de la Commission canadienne du blé, ils pourront le faire à trois conditions. Premièrement, les administrateurs le recommandent. Deuxièmement, la Commission canadienne du blé approuve un système de préservation de l'identité, afin de protéger les normes de qualité. Troisièmement, si l'exclusion est considérée importante par les administrateurs, les agriculteurs doivent voter pour l'approuver.

 

. 1345 + -

La clause sur l'exclusion est assortie d'une clause d'inclusion. Mais avant qu'un grain ne puisse être ajouté, il faut que certaines conditions soient remplies. Le gouvernement doit recevoir une demande écrite d'une association dont tous les membres doivent être des producteurs du grain en cause dans l'ensemble de la région désignée. Cette demande serait rendue publique. Les parties intéressées auraient 120 jours pour faire leurs observations au ministre responsable de la Commission canadienne du blé.

Alors, le conseil d'administration pourrait envisager d'inclure ce prouit. Si les producteurs du grain en cause sont d'accord, ils doivent se prononcer en faveur de son inclusion. Ce que je veux faire ressortir, c'est que ce sont les agriculteurs, et non les politiciens, qui décideront si le mandat de la Commission canadienne du blé en matière de commercialisation doit être étendu ou réduit.

Avec l'adoption du projet de loi C-4, l'avenir de la Commission canadienne du blé sera véritablement entre les mains des agriculteurs de l'Ouest. C'est pour cette raison que le projet de loi mérite l'appui total de tous les députés.

Je voudrais maintenant faire quelques observations sur une question qui a reçu passablement d'attention dans les médias. Il s'agit des demandes de certains groupes pour que la Commission canadienne du blé divulgue des renseignements détaillés sur ses opérations, et pour qu'elle soit soumise aux dispositions de la Loi sur l'accès à l'information.

À première vue, cela paraît une demande que pratiquement aucun Canadien n'aurait de difficulté à appuyer. Toutefois, si l'on regarde cela du point de vue de l'agriculteur, comme on devrait toujours le faire, on s'aperçoit qu'il y a plus dans cette question que le désir de faire la manchette des journaux, comme le fait le Parti réformiste. Je vais prendre les points un par un.

Tout d'abord, actuellement, la Commission canadienne du blé n'est pas visée par les dispositions de la Loi sur l'accès à l'information. Ce fait, le gouvernement ne le conteste aucunement. Je ferai observer que d'autres organismes tels que la Société pour l'expansion des exportations et la Société canadienne des postes, par exemple, ne sont pas davantage assujettis à la Loi sur l'accès à l'information. Qui plus est, les raisons de cet état de fait sont pertinentes et probantes, contrairement aux allégations que certains groupes ont faites dernièrement dans les médias.

La Commission canadienne du blé n'est pas prévue à l'annexe de la Loi sur l'accès à l'information, afin que ses activités et ses documents comptables ne fassent pas l'objet d'un accès à l'information et d'un examen très poussés, non pas de la part des agriculteurs bien sûr, mais de la part des sociétés céréalières du secteur privé qui lui livrent concurrence. Les informations qui sont entre les mains de concurrents peuvent être très dangereux. Alors que les informations qui sont entre les mains des agriculteurs, ce qui sera le cas quand les administrateurs de la commission seront nommés par ceux-ci, peuvent être d'une grande utilité. Voilà un changement qui est bien.

Cela ne veut pas dire que la Commission canadienne du blé travaille en vase clos. La Commission canadienne du blé fait l'objet d'une vérification annuelle effectuée par une des firmes comptables du secteur privé les plus respectées au pays. Cette exigence, elle a été imposée à la Commission canadienne du blé par le Parlement. Les états financiers vérifiés doivent être soumis au Parlement le 31 mars de chaque année.

On peut trouver les résultats de cette vérification dans le rapport annuel de la Commission canadienne du blé. Ce rapport n'a rien de secret. Il est rendu public et quiconque le demande peut en avoir un exemplaire sans difficulté. Ces états financiers vérifiés sont aussi transmis au vérificateur général du Canada.

Ces états financiers vérifiés ne fournissent pas le détail de la rémunération de chacun, mais on peut y trouver le montant global de la masse salariale. C'est conforme à la pratique généralement en cours dans les secteurs public et privé. De plus, grâce aux informations contenues dans le rapport annuel, les agriculteurs et les autres personnes intéressées peuvent déterminer la part que la masse salariale représente dans l'ensemble des frais de commercialisation de la Commission canadienne du blé.

La question de savoir si la rémunération des employés devrait être divulguée publiquement a été soulevée, non seulement en ce qui concerne la Commission canadienne du blé, mais également à propos de bien d'autres sociétés canadiennes et américaines. En tentant de résoudre cette question, il faut tenir compte du droit à la protection des renseignements personnels. Cependant, bien qu'aucun chiffre précis ne soit donné en ce qui a trait à la rémunération, les agriculteurs peuvent obtenir sur demande les échelles de traitement de tous les employés.

En outre, aux termes des dispositions du projet de loi C-4, les 15 membres du conseil d'administration auront un accès complet à toutes les données et à tous les chiffres de la Commission canadienne du blé. Forts de leur connaissance complète de la Commission canadienne du blé et de la façon dont elle soutient la concurrence à l'étranger, et compte tenu de l'intérêt des céréaliculteurs à obtenir des renseignements supplémentaires, les administrateurs seront les mieux en mesure d'évaluer les renseignements qui devraient être rendus publics et ceux qui devraient demeurer confidentiels pour des raisons commerciales.

Toute personne intéressée peut également obtenir une grande quantité de renseignements au sujet du rendement récent de la Commission canadienne du blé en assistant à la série annuelle de 12 réunions d'information que tient la Commission canadienne du blé dans tout l'ouest du Canada. Je remarque que la série de réunions de cette année a débuté le 19 janvier à Hussar, en Alberta, et s'est terminée le 5 février à Humboldt, en Saskatchewan.

 

. 1350 + -

Certains groupes ont déploré le fait que le Bureau du vérificateur général n'examinait pas les registres de la Commission canadienne du blé. Ces groupes voudraient nous faire croire que le gouvernement du Canada ou la Commission canadienne du blé tente de dissimuler quelque chose. Comme d'habitude, rien n'est plus éloigné de la vérité que les propos que tient le Parti réformiste.

Comme on l'a dit, à l'heure actuelle, la Commission canadienne du blé retient les services d'une firme indépendante de comptables agréés pour vérifier ses activités. Ainsi, la Commission canadienne du blé fait l'objet d'une vérification aussi rigoureuse que toute autre organisation commerciale, privée ou publique, et probablement plus rigoureuse que celle à laquelle le Parti réformiste est soumis en tant qu'institution et organisation nationale.

Il convient de noter que la vérification de la Commission canadienne du blé est effectuée en appliquant les mêmes normes établies par l'ordre des comptables, qui sont les mêmes critères utilisés par le vérificateur général dans son examen des comptes publics du Canada.

Plusieurs facteurs font qu'il est préférable de continuer de retenir les services d'une entreprise privée pour vérifier les activités de la commission.

Aux termes du projet de loi C-4, la commission cessera d'être mandataire de Sa Majesté et une société d'état, ce qui réduira ainsi la nécessité de faire appel aux services du vérificateur général dont le mandat traditionnel consiste à vérifier les institutions publiques.

Je signale aussi que la Commission canadienne du blé ne reçoit pas de crédits directs du Parlement. Les garanties d'emprunt offertes à la commission sont approuvées par le ministre des Finances et, de ce fait, vérifiées par le vérificateur général dans le cadre de la vérification des comptes du ministère des Finances. Ainsi, le vérificateur général est en mesure d'évaluer et de commenter toutes les répercussions actuelles ou possibles des activités de la commission sur le Trésor.

Certains utilisateurs du secteur privé des rapports financiers trouvent rassurant que les vérificateurs du secteur privé, contrairement à ceux du Bureau du vérificateur général, puissent être poursuivis aux termes de la loi pour négligence et faute professionnelle. Cette considération intéressera sûrement nos vis-à-vis qui veulent toujours s'assurer que les gens sont responsables de leurs actions en vertu de la loi.

Nos vis-à-vis ont laissé entendre que nous devions comprendre le processus de vérification. Il est évident qu'ils ne le comprennent pas. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, avons présenté une proposition, contrairement aux députés d'en face, qui n'ont présenté absolument aucune observation. Ils critiquent pour le plaisir de critiquer, comme les petits chiens jappent pour le plaisir de japper.

Faisons comparaître les vérificateurs de la Commission canadienne du blé devant le comité. Voyons de quoi ont l'air les comptables agréés qui vérifient les livres de la Commission canadienne du blé. Telle est notre proposition constructive à nous, de ce côté-ci de la Chambre. Parlons de la profession de comptable agréé. Parlons d'une organisation professionnelle et du magnifique travail que ces comptables accomplissent pour la Commission canadienne du blé.

Il vaut la peine d'entrer dans le vif du sujet au lieu de se contenter de critiquer sournoisement comme les petits chiens jappeurs que nous savons qu'ils sont. Nous sommes prêts à joindre l'acte à la parole. Mettons-nous au travail!

Le nouveau conseil d'administration serait en mesure d'enjoindre le vérificateur privé de la Commission canadienne du blé de mener des vérifications spéciales, tout comme peut le faire le vérificateur général. Il n'y aurait aucun avantage à ce que le vérificateur général fasse ce travail. Compte tenu de l'environnement commercial dans lequel fonctionne la Commission canadienne du blé, il vaut mieux que la vérification soit faite par un cabinet d'expert-comptables professionnels.

À bien y penser, la meilleure solution consiste à donner la responsabilité de rendre compte à un conseil composé d'une majorité d'agriculteurs démocratiquement élus.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Monsieur le Président, les agriculteurs commencent à être au courant de quelques-uns de ces salaires. Ils commencent à savoir que certaines de ces personnes touchent 120 800 $, 110 635 $, 119 000 $ et 113 000 $. Lorsque j'ai parcouru la liste, je n'en ai pas trouvé beaucoup qui touchaient moins de 50 000 $. La plupart recevaient plus de 60 000 $. L'agriculteur moyen gagne beaucoup moins que cela. Voilà ce qui préoccupe les agriculteurs. Ils veulent que le vérificateur général vérifie les livres.

Le député a-t-il vu l'information à laquelle son collègue a fait allusion lorsqu'il m'a interrogé, immédiatement avant son allocution? A-t-il vu cette information? Si cette information nous est dissimulée, pourquoi l'est-elle? Nous avons le droit de savoir.

 

. 1355 + -

Je voudrais faire valoir aussi ce point en terminant. Il y a un moyen de résoudre le dilemme dans lequel le gouvernement se trouve. Les députés ministériels disent que les amendements ne sont pas appuyés, qu'il n'y a pas d'opposition au projet de loi C-4.

Mettez le projet de loi C-4 à l'épreuve. Soumettez-le aux agriculteurs. Laissez-les voter là-dessus. Rien ne presse. Les administrateurs ne seront pas nommés avant l'automne. Appuyez l'amendement réformiste et laissez les agriculteurs dire directement au gouvernement ce qu'ils pensent du projet de loi C-4. Pourquoi pas? N'est-ce pas la chose à faire? Cela les concerne.

M. Gerry Byrne: Monsieur le Président, le ministre responsable de la commission canadienne du blé a envoyé 200 000 lettres. Je ne les ai pas toutes signées, mais j'ai certainement obtenu une bonne analyse en profondeur des résultats. On m'a soigneusement mis au courant.

Je veux revenir sur certaines observations du député. Il a cité des chiffres, 87 p. 100 et 92 p. 100. Des chiffres ont été lancés à tort et à travers.

Je me souviens que, il n'y a pas très longtemps, le leader adjoint du Parti réformiste, je crois, a pris la parole à la Chambre pour dire, en substance, que les sondages d'opinion publique devaient être faits de façon scientifique, avec grand soin, et qu'il fallait qu'on en rende compte et qu'on fasse connaître les résultats.

Les députés d'en face nous ont cité des chiffres à n'en plus finir. Ils ne peuvent même pas en expliquer le sens. Ils n'ont déposé aucun document.

Je pourrais affirmer ici que j'ai vu 101 p. 100 de toutes les lettres envoyées par les agriculteurs. La vérité, c'est que je n'en ai vu que 100 p. 100.

M. Jake E. Hoeppner (Portage—Lisgar, Réf.): Monsieur le Président, j'ai participé à une assemblée à Weyburn. Je pense que c'était le 20 janvier. Le livre des invités comptait quelque 600 signatures, tous des agriculteurs j'imagine.

On a demandé à cette assemblée combien de personnes appuieraient le principe de la vente à guichet unique. Des 600 et quelques personnes, pas une n'a levé la main. Quand on a demandé combien d'agriculteurs voulaient un système mixte, 85 à 90 p. 100 des mains se sont levées. Je ne dis pas qu'il n'y avait pas une ou deux personnes, ou peut-être même une douzaine, qui étaient favorables au guichet unique. Ces gens ont hésité à lever la main. Toutefois, dans l'ensemble, c'était selon moi un assez bon sondage.

Quand je suis allé en Alberta, la même chose s'est produite dans toutes les assemblées. De 75 à 80 p. 100 des gens voulaient avoir le choix. Si ce n'est pas là un bon sondage, je ne vois pas ce que je pourrais faire de plus.

Les intéressés étaient là en personne. Ils ont pris la peine de sortir de chez eux pour venir faire part de leurs idées et lever la main, le moment venu. C'est la même chose que nous faisons ici, quand nous nous levons à la Chambre. Selon moi, cela correspond à un sondage assez valable.

M. Gerry Byrne: Monsieur le Président, que ceux qui croient que les réformistes ne représentent pas le point de vue de leurs électeurs lèvent la main. Je suis sûr qu'ils seraient très nombreux à lever la main.

Franchement, nous devons avoir recours à des sondages scientifiques. Nous jouissons de la majorité à la Chambre. Il faut nous demander s'il est raisonnable de tenir une vote à main levée sur une question particulière et aussi complexe que celle qui est à l'étude aujourd'hui.

Le Président: J'informe mes collègues qu'il est 14 heures et il reste encore quelques minutes pour les questions et les observations. Nous y reviendrons dès la fin de la période des questions. Pour l'instant, nous passons aux déclarations de députés.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES JEUX OLYMPIQUES D'HIVER DE 1998

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Monsieur le Président, au cours du week-end, l'un des athlètes les plus connus et les plus admirés de l'Île-du-Prince-Édouard a décroché l'or à Nagano, au Japon.

Dave MacEachern, Eli comme on l'appelle à l'Île, et son co-équipier, Pierre Lueders, d'Edmonton, ont inscrit leur nom dans l'histoire lorsqu'ils se sont classés au premier rang, ex aequo avec l'équipe italienne, à l'épreuve du bob à deux. Au bout de quatre courses, les deux équipes avaient enregistré exactement le même temps cumulatif. Même s'il est rare que deux équipes finissent à égalité, le phénomène s'était déjà produit.

 

. 1400 + -

Toutefois, les Canadiens comprennent bien toute l'importance que revêt cette médaille. Il s'agit de la première médaille d'or que remportent les bobbeurs canadiens en 34 ans et Eli est le premier habitant de l'Île-du-Prince-Édouard à remporter une médaille d'or olympique.

Pour vous montrer à quel point la population de l'Île-du-Prince-Édouard appuie ses athlètes, je rappelle que, la semaine dernière, plus de 17 000 habitants de l'Île ont signé un document de 400 pages, qui a été transmis par télécopieur à Dave, à Nagano.

Au nom de tous les habitants de l'Île-du-Prince-Édouard, je félicite Eli pour son exploit extraordinaire. J'en profite aussi pour lui souhaiter, à lui et à ses co-équipiers, bonne chance à l'épreuve de bob à quatre, qui devrait avoir lieu plus tard au courant de la semaine. Bravo, Dave.

*  *  *

LE SÉNAT

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Monsieur le Président, un membre de la Chambre haute a déclaré, immédiatement après sa nomination, que la réforme du Sénat serait sa grande priorité. Il s'agit du sénateur Carstairs, ex-chef du Parti libéral du Manitoba, qui a affirmé: «Je crois que le Sénat devrait être une institution dont les membres sont élus.» Elle a reproché à M. Mulroney d'avoir nommé, en 1993, un de ses solliciteurs de fonds.

Nous espérons que le sénateur Carstairs adoptera une position raisonnée et insistera pour passer à l'histoire en tant que dernier sénateur manitobain à avoir été nommé et non élu. Nous espérons que le sénateur Carstairs fera tout en son pouvoir pour réformer la Chambre haute et qu'elle insistera pour que le Manitoba élise un sénateur dès qu'un poste s'ouvrira.

Un poste deviendra vacant le 6 mai 1998, date à laquelle son collègue conservateur devrait prendre sa retraite.

*  *  *

L'ALPHABÉTISATION

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton, Lib.): Monsieur le Président, jeudi prochain sera la journée de l'alphabétisation et le Canada a un défi énorme à relever à ce chapitre.

Selon une récente enquête internationale concernant le niveau d'alphabétisation des adultes, près de la moitié de la population adulte canadienne, soit environ 10 millions de personnes âgées de 16 ans et plus, se situe au deux niveaux d'alphabétisation les plus faibles mentionnés dans l'enquête.

Dans la pratique, ces personnes ont probablement beaucoup de difficulté à se débrouiller dans notre société fondée sur la connaissance. Comment une personne qui éprouve de la difficulté à lire peut-elle aider ses enfants à faire leurs travaux scolaires? Comment les gens qui peuvent difficilement lire et écrire peuvent-ils trouver de bons emplois?

J'invite les députés à prendre le problème de l'analphabétisme très au sérieux. Notre économie, nos enfants et l'avenir de notre pays dépendent de notre capacité à relever le niveau d'alphabétisation.

*  *  *

L'UNITÉ NATIONALE

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, au coeur même de la tempête de verglas et de la dévastation qu'elle a causée, nous avons pu voir des choses d'une grande beauté. D'un bout à l'autre de notre magnifique pays, les Canadiens ont fait preuve d'un sens poussé de la communauté.

On sait l'importance que les médias accordent présentement à la question de l'unité nationale. Aussi, il est important que les Canadiens et les Québécois envisagent l'avenir de leur pays en gardant présents à l'esprit les belles choses qu'ils ont accomplies durant la tempête de verglas.

Dans l'intérêt de l'unité nationale, tous les Canadiens, les électeurs de Kitchener-Centre en Ontario, les résidents de la Colombie-Britannique, du Manitoba et de Terre-Neuve, doivent tendre la main aux Québécois et créer des liens personnels comme ils l'ont fait durant la tempête de verglas.

Nous ne pouvons pas concevoir l'avenir de notre pays comme un choc de titans ou comme une lutte féroce entre gouvernements. Nous ne devons pas en faire l'enjeu d'une lutte politique, comme le voudraient certains.

Cette question est l'affaire du peuple canadien.

*  *  *

[Français]

LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais faire écho, devant les députés de cette Chambre, à une excellente nouvelle pour la région de la Beauce.

En effet, le 30 janvier dernier, l'honorable secrétaire d'État responsable du Bureau fédéral de développement régional a annoncé l'octroi d'une contribution remboursable de 360 000 $ à la société Metubec Inc. de Saint-Jules de Beauce.

Cet investissement du gouvernement du Canada permettra d'implanter la seule usine automatisée spécialisée dans la fabrication de manches en métal au Canada. L'entreprise utilisera une technologie de pointe développée en Italie.

Notre gouvernement, par le biais du Fonds Gatiq-Technorégion Québec—Chaudière-Appalaches, est fier de s'associer à ce projet qui, en plus d'être innovateur, entraînera la création d'une quinzaine d'emplois à Saint-Jules.

Voilà un autre excellent exemple de l'importance que nous accordons au développement économique des régions du Québec au Canada.

Félicitations aux deux principaux promoteurs, Marcel Paré et René Beaupré.

*  *  *

[Traduction]

LE SÉNAT

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Réf.): Monsieur le Président, j'ai procédé à un test au hasard en Colombie-Britannique: la plupart des gens réussissent à nommer un seul de nos six sénateurs, Pat Carney.

Il va sans dire que, s'ils avaient à affronter l'électorat, cinq de nos six sénateurs feraient mieux de ne pas se présenter. Nous risquons d'être la seule démocratie occidentale à entrer en somnambule dans le XXIe siècle sans avoir de Sénat élu.

 

. 1405 + -

J'ai passé récemment quelque temps avec des sénateurs et des membres du Congrès américain. Ils ont manifesté beaucoup d'intérêt pour le fonctionnement du Parlement canadien et pour certaines des réformes démocratiques que préconise le Parti réformiste.

J'avais une réponse toute simple à donner à leurs questions au sujet du Sénat canadien. Les Canadiens comprennent qu'aux États-Unis, si l'on veut devenir sénateur, il faut remporter les élections, alors qu'au Canada, il faut les perdre.

Quand le gouvernement va-t-il modifier cette institution dysfonctionnelle?

*  *  *

[Français]

LE RENVOI À LA COUR SUPRÊME

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, aujourd'hui, les artistes québécois ont signifié à la Cour suprême du Canada le refus du peuple du Québec d'être soumis à un jugement basé sur la Loi constitutionnelle de 1982, loi jamais reconnue par l'Assemblée nationale du Québec.

Parce que les artistes tiennent aux valeurs démocratiques, ils ont maintenu leur liberté de penser et de créer, malgré le désir de la ministre du Patrimoine de les utiliser comme porte-étendards du drapeau canadien.

C'est donc avec fierté que je cite un extrait d'un texte récent de Pierre Graveline: «Puisque notre existence et notre liberté sont encore une fois contestées par le gouvernement canadien, nous affirmons aujourd'hui avec force que les Québécois et Québécoises constituent un peuple libre qui dispose d'un droit légitime à l'autodétermination qu'aucun tribunal ne saurait lui arracher. Notre destin n'appartient qu'à nous-mêmes. Ce n'est pas à la Cour suprême, mais à nous, et à nous seuls, de décider de notre avenir.»

*  *  *

[Traduction]

L'UNITÉ NATIONALE

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, le comité chargé d'étudier la question de l'unité nationale en Colombie-Britannique, constitué par le premier ministre Glen Clark qui y avait notamment nommé des députés des trois partis fédéraux détenant un siège en Colombie-Britannique, vient de faire rapport sur les audiences qu'il a tenues à l'échelle de la province sur la déclaration de Calgary que neuf premiers ministres provinciaux ont adoptée récemment.

Le comité a constaté que les Britanno-Colombiens, dans une très grande majorité, appuient la reconnaissance dans la Constitution du statut du droit civil français et de la langue et de la culture françaises au Québec. Il en découlait logiquement et inévitablement que les Britanno-Colombiens sont également favorables, dans une tout aussi grande majorité, à la reconnaissance dans la Constitution du caractère unique de la société québécoise au sein de notre système fédéral.

Les Britanno-Colombiens ont accepté le caractère unique de la société québécoise sans exiger en retour qu'on fasse droit à la moindre revendication constitutionnelle historique spéciale de la Colombie-Britannique. Ils ont fait un geste unilatéral de bonne volonté envers le Québec en exprimant ainsi leur foi en l'avenir d'une société canadienne pluraliste au sein d'un système fédéral canadien pluraliste.

Après 30 ans, il serait peut-être temps de clore le dossier constitutionnel.

*  *  *

[Français]

LE RENVOI À LA COUR SUPRÊME

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, hier, en un geste unanime pour proclamer haut et fort leur fierté et leur profonde appartenance au sol québécois, des hommes et des femmes venus de toutes les régions du Québec ont réaffirmé devant la Cour suprême que seul le peuple québécois a le droit de décider de son avenir.

Lundi, des Québécoises et des Québécois de tous âges ont réitéré leur désaccord et déclaré illégitime et non avenue toute tentative de soumettre la volonté souveraine d'un peuple à celle d'une cour de justice.

Les démocrates du Québec, souverainistes et fédéralistes, tous partis confondus, appellent à la mobilisation contre cette attaque sans précédent des institutions démocratiques québécoises contre l'utilisation politique et partisane de la Cour suprême.

À la croisée des chemins, la voie est claire: le peuple du Québec prendra la route tracée par la démocratie et par elle seule.

*  *  *

LE FONDS TRANSITOIRE POUR LA CRÉATION D'EMPLOIS

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, Montréal a grandement souffert, en particulier au niveau économique, suite à l'instabilité politique et économique causée par la propagande du gouvernement séparatiste au Québec.

Afin d'aider les petites et moyennes entreprises, le gouvernement fédéral a mis en place le Fonds transitoire pour la création d'emplois.

[Traduction]

Depuis septembre, ce fonds a permis de créer 366 nouveaux emplois et de distribuer 1,5 millions de dollars entre plusieurs entreprises textiles de la circonscription d'Ahuntsic, dont Tricot Giorgio, Tricot Terrytex et Christina Canada, qui ont utilisé cet argent pour acquérir du nouveau matériel à la fine pointe de la technologie et exporter leurs produits vers de nouveaux marchés.

[Français]

Voici un autre bon exemple de l'importance que ce gouvernement accorde à la création d'emplois et au développement d'une économie dynamique à Montréal.

*  *  *

[Traduction]

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, c'est vraiment un triste jour pour les agriculteurs de l'ouest du Canada. Aujourd'hui, le gouvernement met un terme au débat sur les modifications proposées à la Commission canadienne du blé en se prévalant d'une motion d'attribution de temps. Pire encore, malgré les preuves nombreuses et facilement vérifiables qui montrent que le gouvernement s'est longtemps servi de la commission comme instrument de promotion de sa politique étrangère, ce qui a coûté des milliards de dollars aux producteurs céréaliers canadiens, les avocats de la commission du blé ont même osé faire valoir devant les tribunaux que celle-ci n'avait aucune obligation envers les agriculteurs des Prairies.

 

. 1410 + -

Malgré cela, le ministre de l'Agriculture et celui qui est responsable de la commission du blé ont rejeté, hier soir, un amendement proposant que la responsabilité légale première de la commission du blé soit d'agir dans l'intérêt des producteurs de blé et d'orge.

Si l'on met de côté tous les autres arguments, n'est-il pas raisonnable que les producteurs de grain puissent s'attendre à ce que leur agent de commercialisation agisse principalement dans leur intérêt? C'est vraiment un triste jour pour la démocratie et les droits de propriété.

*  *  *

[Français]

L'ÉCONOMIE

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, notre premier ministre a lancé un vibrant appel ce midi, devant les membres du Canadian Club, à la population canadienne en l'invitant à le suivre dans les futurs défis économiques qui seront cruciaux à l'aube des années 2000. Ces défis consisteront à assurer une croissance économique soutenue, comme nous le faisons depuis 1993, pour nos enfants et les générations à venir. C'est cela, avoir une vision.

Faire preuve de vision, comme pour la plupart des Canadiens, c'est tirer profit de cette incroyable chance que nous avons de vivre au Canada. Le premier ministre a pris l'engagement aujourd'hui de contribuer à offrir cette chance aux jeunes Canadiens et Canadiennes et à participer à l'amélioration de notre qualité de vie.

Notre gouvernement, c'est celui des solutions aux problèmes qui se présentent à nous. Les souverainistes auraient beaucoup à apprendre de ce discours marqué au coin du bon sens et des réalités de notre pays.

*  *  *

[Traduction]

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le gouvernement a procédé à une rationalisation de l'effectif du ministère de la Défense nationale qui a durement frappé les employés civils et militaires. Depuis 1993, l'effectif civil s'est vu retirer plus de 11 000 employés.

La menace qui pèse maintenant sur les employés du MDN vient de la prestation de rechange des services (PRS) proposée par le gouvernement, laquelle servira à supprimer encore 3 800 postes, ce qui se traduira par 600 à 800 pertes d'emplois dans la seule région de Halifax.

Le gouvernement fait valoir que la PRS permettra de trouver des travailleurs qui peuvent fournir des services de soutien à meilleur prix. Cependant, lorsque les employés civils de la Défense ont proposé une solution avantageuse par rapport aux soumissions que des entreprises du secteur privé ont présentées aux termes de la PRS, le gouvernement a modifié les règles en faveur des grandes sociétés. Quel est l'objectif réel en l'occurrence: des forces armées efficaces ou privatisées?

Les effets dévastateurs de la PRS sont flagrants à la BFC Goose Bay de Terre-Neuve, où les services de soutien ont été récemment privatisés au profit d'une société étrangère qui sabre actuellement les emplois et qui réduit de 20 à 30 p. 100 les salaires de ceux qui subsistent. Les répercussions sur la collectivité sont terribles, tout le monde, des travailleurs du MDN aux responsables de la chambre de commerce locale, étant unanime à dénoncer l'accord de privatisation.

*  *  *

[Français]

MME MONIQUE VÉZINA

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Monsieur le Président, il y a parmi les séparatistes des gens qui changent de bord avec les années. Ils appellent cela du cheminement, sauf que, dans certains cas, le jeu est un peu gros.

Par exemple, l'ancienne ministre du gouvernement conservateur de M. Brian Mulroney, l'amie du chef actuel des conservateurs, Mme Monique Vézina, déclarait, hier, que jamais elle n'avait été fédéraliste. Alors, que faisait-elle au sein du gouvernement conservateur? Que faisait-elle dans un parti qui se promettait de ramener le Québec dans la famille constitutionnelle dans l'honneur, comme le disait l'ancien premier ministre Mulroney? Mme Vézina était-elle séparatiste lorsqu'elle représentait le gouvernement conservateur dans le cadre de ses fonctions à l'étranger?

C'est cela la coalition séparatiste composée de personnes qui tenteront de faire oublier leur passé pour afficher leur option de séparer le Québec du reste du Canada. Si c'est cela, la démocratie, je préfère de loin l'engagement de personnes qui s'affichent franchement, de façon cohérente, avec ce qu'elles ont accompli tout au long de leur vie...

Le Président: La parole est maintenant à l'honorable député de Sherbrooke.

*  *  *

[Traduction]

L'UNITÉ NATIONALE

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, l'objet de mon intervention est le renvoi à la Cour suprême.

Je me suis opposé à cette initiative pour les raisons suivantes. Tout parti politique national et son chef à la Chambre reconnaissent que l'avenir du Canada relève en fin de compte d'une décision politique. Le jugement d'un tribunal ne saurait remplacer la volonté commune des Canadiens de vivre ensemble et de partager une même destinée.

Il ne faut pas se faire d'illusion au sujet des conséquences ultimes de cette stratégie. Les séparatistes ont toute raison de se réjouir, car ce renvoi maintient leur cause au centre des préoccupations nationales. Le débat porte maintenant sur la manière dont le pays peut se disloquer et non sur les moyens d'en améliorer le fonctionnement.

Tout au long de ma vie politique, mes luttes ont été inspirées par ma foi dans le Canada. Les Canadiens méritent des dirigeants qui savent voir au-delà de l'horizon immédiat et cherchent à faire ce qui est bien au lieu de céder à la facilité. Je ne renoncerai jamais à me battre pour le Canada.

*  *  *

 

. 1415 + -

LA JUSTICE

M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Monsieur le Président, je félicite la Cour d'appel de l'Ontario de la perspicacité dont elle a fait preuve dans sa décision sur la protection des victimes de viol, cette disposition qui dit que «non, c'est non».

Lorsque les nouvelles modifications sur la protection des victimes de viol ont été proposées, les avocats de la défense et les défenseurs des libertés civiles ont prédit que les nouvelles règles seraient jugées inconstitutionnelles.

Ces règles limitent la latitude laissée aux avocats de la défense pour interroger les personnes qui ont porté une plainte d'agression sexuelle sur leur vie sexuelle antérieure, même avec le prévenu.

La Cour d'appel de l'Ontario vient de rendre une décision d'une grande importance, disant que les dispositions sur la protection des victimes de viol ne va pas à l'encontre de la Charte canadienne des droits et libertés.

À propos de la constitutionnalité de la nouvelle disposition, les trois juges ont décidé: «L'admission en preuve de faits concernant la vie sexuelle antérieure du plaignant ou de la plaignante brime nettement le droit à la protection de la vie privée, droit qui doit être protégé dans toute la mesure du possible, tout en préservant le droit du prévenu à une défense complète.»

Cette décision constitue un précédent solide et sensé. Elle crée une excellente jurisprudence.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

L'ÉCONOMIE

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, plus tôt aujourd'hui, le premier ministre a annoncé qu'une bonne partie de l'excédent serait investie dans son fonds des bourses d'études du millénaire, qui est plein de belles promesses, mais qui ne remplacera pas les 7 milliards de dollars que les libéraux ont retranchés des transferts aux provinces au titre des soins de santé et de l'éducation. Cela n'aidera pas les diplômés de cette année qui termineront leurs études avec 30 000 $ de dettes. Cela n'aidera pas les 17 p. 100 de nos jeunes qui sont actuellement sans emploi.

Au lieu de mettre en place une mesure palliative comme ce fonds du millénaire, pourquoi le gouvernement ne récompense-t-il pas les Canadiens en réduisant les impôts, la vraie façon d'assurer à tous un avenir plus prometteur?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, j'ai de la difficulté à comprendre pourquoi le chef de l'opposition serait contre la création d'un fonds du millénaire. Y a-t-il une meilleure façon, comme l'a dit le premier ministre à la Chambre, de célébrer le millénaire que d'investir dans l'éducation des jeunes Canadiens, d'investir dans leur avenir, d'investir dans la capacité intellectuelle de notre pays afin de pouvoir réussir dans l'économie moderne?

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, je suis surpris que l'aspirant premier ministre défende le discours du premier ministre alors qu'il n'y était pas du tout question de réduction de la dette ou des impôts.

Si le premier ministre veut aider les enfants de Brandon, comme il le dit, pourquoi accable-t-il chaque enfant d'une dette de 20 000 $ dès sa naissance?

Si le premier ministre veut aider la mère seule à Brandon, pourquoi lui fait-il payer 1 300 $ d'impôt chaque année?

Au lieu de sortir son chéquier, pourquoi le gouvernement ne récompense-t-il pas les Canadiens en réduisant la dette et les impôts?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a souvent parlé de la nécessité de réduire la dette et les impôts.

La différence entre le premier ministre et le chef du Parti réformiste, c'est que le premier ministre est aussi capable de parler de notre vision, du genre de pays que nous voulons bâtir. Il est capable de parler des besoins des jeunes et des personnes âgées.

Le Canada n'est pas simplement un bilan financier. Il se compose d'êtres humains qui croient dans leur pays. C'est ce dont le premier ministre a parlé.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, voilà le problème: le premier ministre ne fait que parler. Il ne fait rien d'autre.

Depuis que les libéraux sont arrivés au pouvoir, le salaire net de la famille canadienne moyenne a chuté de 3 000 $. Les frais de scolarité ont augmenté de 45 p. 100 pour les étudiants dont le gouvernement se préoccupe si passionnément. La dette des étudiants a triplé, et le chômage chez les jeunes atteint des niveaux records.

Au lieu de créer un autre palliatif à des fins publicitaires, pourquoi le premier ministre ne stabilise-t-il pas les transferts au titre des soins de santé et de l'éducation et ne donne-t-il pas aux Canadiens une réduction de la dette et des impôts?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a hérité d'un déficit de 42 milliards de dollars. Ce déficit est maintenant à la baisse.

Le premier ministre a hérité d'un pays où les taux d'intérêt étaient supérieurs de 200 à 300 points de base à ceux en vigueur aux États-Unis, et ils sont maintenant inférieurs de 200 points de base à ces taux.

Le premier ministre a hérité d'un pays où la productivité était à la baisse, et elle est maintenant à la hausse.

Si le chef du Parti réformiste veut parler de réduction d'impôts, pourquoi est-il prêt à réduire les impôts et, pour compenser, à sabrer dans des programmes comme les soins de santé, l'éducation, les pensions de vieillesse et les paiements de péréquation? Pourquoi le chef du Parti réformiste est-il prêt à réduire les impôts des riches aux dépens...

 

. 1420 + -

Le Président: Le député de Medicine Hat.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, cette réponse était un tantinet ironique de la part du ministre des Finances qui a réduit les transferts au titre des soins de santé de 35 p. 100, soit de sept milliards de dollars.

Le discours prébudgétaire d'aujourd'hui a appris aux Canadiens qu'ils pouvaient s'attendre à un beau petit rien tout-nu en fait d'allégements fiscaux dans le budget de la semaine prochaine. Rien du tout, pas un mot sur les allégements fiscaux ou la réduction de la dette.

Pourquoi le gouvernement tient-il tant à refaire les erreurs des 30 dernières années, à continuer de dépenser de façon inconsidérée et à enfoncer davantage les Canadiens dans les dettes?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, c'est la version réformiste du Grand jeu.

Le député peut avoir l'assurance que nous allons continuer dans la direction où nous nous sommes lancés en 1994. Nous allons réduire le déficit et la dette. Nous allons réduire les impôts et nous allons investir dans l'avenir des Canadiens parce que c'est ce que les Canadiens attendent de leur gouvernement.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre a été très clair aujourd'hui: l'avenir ce sont de nouveaux programmes fédéraux qui engloutissent les fonds. C'est sa vision du Canada. Il a été très clair dans son discours d'aujourd'hui.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Les libéraux envisagent-ils d'augmenter beaucoup les impôts des Canadiens? Le gouvernement croit-il que les familles canadiennes doivent nécessairement verser chaque année 6 000 $ en impôts pour payer l'intérêt sur la dette nationale? Est-il normal que notre revenu disponible ait chuté de 3 000 $ depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux? Est-ce là la vision des libéraux pour le Canada? Est-ce tout ce que les libéraux savent faire?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, lorsque les Canadiens liront le discours du premier ministre, ils comprendront de quoi il parle et ils comprendront contre quoi s'élève le Parti réformiste.

Ils verront que les réformistes s'opposent à des investissements dans les jeunes Canadiens, à de grands projets nationaux, au positionnement du Canada dans l'économie moderne, au renforcement de l'économie canadienne en prévision de la mondialisation de l'économie. Mais nous sommes là et nous veillons au grain.

Pourquoi le Parti réformiste est-il convaincu que la seule responsabilité d'un gouvernement c'est de réduire la dette? Ce parti ne comprend-il pas qu'il existe aussi un déficit humain et que notre gouvernement va éliminer ce déficit-là aussi?

*  *  *

[Français]

LE RENVOI À LA COUR SUPRÊME

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement s'embourbe de plus en plus avec le renvoi à la Cour suprême, la ministre de la Justice ayant exprimé une position tout à fait contraire à celle du procureur du gouvernement, Me Yves Fortier.

La ministre de la Justice peut-elle nous dire quelle est au juste la véritable position du gouvernement dans ce renvoi, celle qu'elle a exprimée et qui est reprise dans le Toronto Star d'hier, ou encore celle défendue par Yves Fortier, toujours hier, devant la Cour suprême?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la cause est entendue aujourd'hui. Par conséquent, nous devrions éviter d'en discuter, puisque la question ne doit pas être débattue à l'extérieur de la cour.

Toutefois, je tiens à préciser que le gouvernement du Canada estime avoir posé trois questions fondamentales. Hier, M. Fortier a fait valoir que la cour devrait répondre à ces trois questions. Il se pourrait fort bien que d'autres questions soient soulevées éventuellement, mais la cour n'en est pas saisie actuellement. Je suis tout à fait d'accord avec...

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, voilà que la ministre nous dit qu'on ne devrait pas en parler, mais elle en parle. Elle en a parlé, il y a deux secondes, elle en parle au Toronto Star. Donc, tant qu'à en parler, on va en parler.

La ministre de la Justice a déclaré que la souveraineté du Québec créait une situation tellement particulière que la Constitution ne serait d'aucun secours.

 

. 1425 + -

Comment peut-elle concilier cette déclaration avec la position de Me Fortier à l'effet que le Québec doit être soumis à la Constitution canadienne pour accéder à la souveraineté parce que, paraît-il, Me Fortier parle en son nom?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, ce que M. Fortier a dit hier au nom du gouvernement du Canada est tout à fait conforme à ce que moi et certains de mes collègues avons dit.

Nous avons toujours fait valoir qu'il faut agir dans le respect de la primauté du droit. C'est ce que M. Fortier a dit hier et c'est que le gouvernement va faire.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, la ministre ne voit pas de contradictions? Je vais lui en donner une autre contradiction.

Comment la ministre de la Justice peut-elle affirmer que la Cour devrait se prononcer sur les droits des autochtones, en cas de sécession, alors que son propre procureur, Me Yves Fortier, a justement et explicitement demandé, hier, à la Cour de ne pas se prononcer sur le droit des autochtones dans le contexte de la sécession du Québec?

Ce n'est pas une contradiction, ça, madame?

Le Président: Mes collègues, il faut toujours adresser vos questions à la Présidence.

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, une sécession pose énormément de questions légales. Il y a la question autochtone, envers laquelle le gouvernement du Canada a une responsabilité fiduciaire, il y a la question des territoires, il y a la question de la Charte des droits, et caetera, et caetera.

Le gouvernement du Canada a posé les questions qui lui apparaissaient les plus fondamentales touchant le caractère légal ou non d'une déclaration unilatérale d'indépendance, et c'est à cette question que nous invitons la Cour de répondre.

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement d'en face a tout un problème sur les bras. La ministre, par ses déclarations, contredit non seulement son procureur, mais aussi «M. Canada», le ministre des Affaires intergouvernementales.

Comment la ministre peut-elle expliquer que, selon elle, la Constitution ne serait d'aucun secours advenant un oui à la souveraineté du Québec, alors que le ministre des Affaires intergouvernementales s'évertue, depuis des lustres, à affirmer que le départ du Québec est subordonné aux termes de la Constitution de 1982?

Ce n'est pas une autre contradiction, ça?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de préciser aux députés d'en face qu'il n'y a absolument aucune contradiction entre la position du ministre des Affaires intergouvernementales et la mienne, ni entre ce que nous croyons et ce que font valoir nos avocats devant la Cour suprême.

Je tiens à ce que tous les députés comprennent clairement que la position fondamentale du gouvernement est qu'il faut agir dans le respect de la primauté du droit et dans le respect de la loi.

*  *  *

LE MOYEN-ORIENT

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, le représentant des États-Unis au Conseil de sécurité a refusé de donner son aval à la mission diplomatique à Bagdad du secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan.

Le ministre des Affaires extérieures pourrait-il s'assurer que le premier ministre décroche le téléphone immédiatement pour demander au président Clinton d'éliminer les obstacles américains à la mission diplomatique onusienne ayant pour objet de permettre la reprise des inspections des armes et d'empêcher les frappes aériennes contre l'Irak?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'informer la Chambre que, au cours des trois ou quatre derniers jours, le premier ministre a fait plusieurs appels téléphoniques. J'ai eu un certain nombre de contacts avec d'autres ministres et avec mes homologues. Un mouvement en faveur d'initiatives en provenance des Nations Unies est en train de se dessiner.

Le secrétaire général a pris en main une série de propositions. Le Canada et d'autres pays travaillent en étroite collaboration avec lui. Au lieu de poser des questions mal informées sur la situation, la députée ferait mieux d'appuyer les initiatives diplomatiques en cours.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, c'est justement ce que nous avons demandé aux États-Unis, mais ils s'opposent à ces initiatives.

D'anciens alliés importants des États-Unis, Bahreïn, le Qatar et Oman ont emboîté le pas à l'Arabie saoudite et déclaré leurs terrains d'aviation interdits aux forces américaines.

Est-ce que cette décision va pousser le gouvernement à repenser son appui par trop hâtif aux bombardements? Est-ce que le premier ministre va appeler le président Clinton pour lui demander de lever le veto américain qui entrave la mission du secrétaire général en Irak?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, la députée n'est pas bien informée. Les pays du golfe comme Oman et Bahreïn ont offert leur appui aux forces de la coalition.

 

. 1430 + -

De même, les Pays-Bas, la République tchèque, la Pologne et le Danemark ont tous dit qu'ils étaient prêts à appuyer les efforts pour empêcher Saddam Hussein de se servir de ses armes de destruction massive, ce qui pourrait réellement mettre en danger la sécurité du monde entier.

*  *  *

[Français]

LE RENVOI À LA COUR SUPRÊME

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, comme le premier ministre a cédé ses responsabilités à la Cour suprême et aux juges de la Cour suprême pour ce qui est de l'unité du Canada, j'aimerais savoir aujourd'hui si le premier ministre et le gouvernement ont l'intention de demander aux juges de la Cour suprême d'aller faire campagne si jamais, par malheur, il devait y avoir un autre référendum.

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le chef conservateur a dit à plusieurs reprises qu'en situation ambiguë, les gouvernements du Canada et des autres provinces auraient sans doute le devoir de ne pas faire perdre le Canada aux Québécois. C'est tout à fait contradictoire avec ce que disent le Bloc québécois et le premier ministre du Québec qui prétendent qu'ils ont le droit d'autoproclamer le Québec comme un État indépendant.

Il y a une question de droit fondamentale. Il s'agit de savoir qui, du chef conservateur et du Bloc québécois, a raison d'un point de vue légal.

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Justement, monsieur le Président, la question n'est pas légale, elle est politique.

[Traduction]

Je veux donner au gouvernement l'occasion de faire part de ses projets aux Canadiens. Aujourd'hui j'aimerais que le gouvernement me dise sans ambages ce qu'il a l'intention de faire une fois que la Cour suprême aura rendu son jugement? Quelle sera la prochaine étape?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je puis dire une chose à la Chambre des communes. Contrairement au chef du Parti conservateur, nous ne ferons pas campagne aux côtés de Monique Vézina avec laquelle il a siégé à la Chambre des communes pendant neuf ans en dépit du fait qu'elle n'était pas fédéraliste.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, le Bloc québécois et le Parti conservateur fédéral tiennent le même discours au sujet du renvoi à la Cour suprême. Ils soutiennent tous deux que la primauté du droit n'intervient pas quand il s'agit de trancher la question de la sécession du Québec, que seule la volonté démocratique du peuple québécois compte.

Si le gouvernement est d'avis qu'il faut respecter et la primauté du droit et la volonté démocratique dans cette affaire, répondra-t-il à une question? Comment pense-t-il qu'il faudrait respecter la volonté démocratique des Québécois?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, on l'a dit et répété à maintes reprises, il faudra que les Québécois fassent clairement savoir qu'ils ne veulent plus être Canadiens.

Nous pensons que les Québécois ne diraient jamais cela, à moins que la question ou le processus ne soient pas clairs. Nous voulons nous assurer que cela ne sera pas le cas.

M. Preston Manning (chef de l'opposition, Réf.): Monsieur le Président, dans son plaidoyer devant la Cour suprême, le gouvernement fédéral explique clairement ce qu'il entend par primauté du droit en l'espèce, mais la position du premier ministre est loin d'être aussi claire et ferme en ce qui concerne le respect de la volonté démocratique des Québécois par le gouvernement fédéral. C'est faire le jeu des séparatistes et de leurs nouveaux amis.

Si le gouvernement fédéral respecte la volonté démocratique, cela veut-il dire que, si la majorité des Québécois votaient oui à une question juste dans le cadre d'un processus équitable, il respecterait cette décision? Ou est-ce que cela veut dire autre chose?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, si la question était très claire et la majorité bien claire aussi, la séparation aurait lieu au terme de négociations en bonne et due forme menées dans la légalité.

Nous ne croyons pas que tel sera le cas. Nous croyons fermement que les Québécois et les autres Canadiens resteront unis.

[Français]

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Justice.

Hier, la ministre disait qu'advenant un oui à la souveraineté, nous aurions affaire à des circonstances tellement extraordinaires qu'elles ne sauraient être accommodées par le cadre constitutionnel. Or, Yves Fortier plaide le contraire.

Elle disait aussi, à propos des autochtones, que la Cour devrait se prononcer sur leur droit à la sécession, alors qu'Yves Fortier plaide exactement le contraire.

Ma question est très simple: Où Me Fortier prend-il son mandat?

 

. 1435 + -

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a beaucoup d'enjeux très graves qui sont posés par la menace de sécession, énormément d'enjeux, dont la question autochtone, dont les déclarations de mon vis-à-vis, le ministre Brassard, qui a dit qu'il utiliserait la force policière pour retenir des populations dans le Québec indépendant, contre leur gré. Ces questions sont graves.

Mais la première question, et la plus essentielle, est celle-ci: Est-ce que, oui ou non, le gouvernement péquiste a un droit de s'autoproclamer gouvernement d'un État indépendant? Nous croyons que non. Le chef conservateur dit que c'est un trou noir. Mais on verra bien ce que la Cour dira.

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, ma question supplémentaire s'adresse à la ministre de la Justice.

Quand elle déclare que le cadre constitutionnel actuel ne saurait accommoder une circonstance telle la souveraineté du Québec, si elle pense vraiment ce qu'elle dit, qu'est-ce que le gouvernement fait devant la Cour suprême?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada a dit à plusieurs reprises que le but du renvoi n'est pas de retenir les Québécois dans le Canada contre leur gré, et que si une sécession devait se négocier, elle pouvait se faire dans le cadre légal.

Hier, mon vis-à-vis, M. Brassard, a encore dit que le droit international lui donnait le droit de s'autoproclamer gouvernement d'un État. Il s'agit de savoir si c'est vrai ou si c'est faux. Si c'est une théorie fausse, nous l'apprendrons tous, y compris le chef conservateur qui saura que ce n'est pas un trou noir. Le droit international ne donne pas le droit à la sécession en démocratie.

*  *  *

[Traduction]

LE SÉNAT DU CANADA

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, aujourd'hui, Jim Brown, député à l'Assemblée législative de l'Ontario, a présenté un projet de loi qui amènerait la démocratie dans le Sénat décrépit du Canada. La loi de l'Ontario sur la sélection des sénateurs permettrait aux citoyens de cette province de choisir leurs sénateurs par scrutin démocratique. Ce serait un excellent projet du millénaire qui ferait entrer le Sénat dans le XXIe siècle.

Le premier ministre honorerait-il le choix de l'Ontario pour remplacer le sénateur Andrew Thompson par un sénateur élu?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il sera intéressant de voir ce qui arrivera au projet de loi de M. Brown. La députée a dit qu'il avait simplement été présenté. Aura-t-il l'appui du gouvernement conservateur de l'Ontario? Périra-t-il au Feuilleton? Nous ne savons pas.

Je tiens à dire que le premier ministre doit respecter certaines responsabilités constitutionnelles. Tant que la Constitution n'aura pas été modifiée, c'est la position.

Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Réf.): Monsieur le Président, le ministre dit que le projet de loi pourrait mourir au Feuilleton. Nous n'avons pas notre mot à dire sur ce qui se passe à l'Assemblée législative de l'Ontario, mais nous pouvons parler de ce qui se passe ici. Qu'il meure ou non, c'est une question que nous sommes en droit de nous poser.

Le premier ministre a indiqué qu'il aimerait beaucoup se débarrasser du sénateur Andrew Thompson, mais il a aussi donné un million d'excuses pour défendre cette même personne.

Lorsque les Ontariens choisiront d'élire un sénateur, est-ce que le gouvernement et le premier ministre le nommeront au Sénat ou bien continueront-ils à parler de feu l'Accord de Charlottetown?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsque le gouvernement proposera une modification pour créer un Sénat élu, élu véritablement par la population, est-ce que le Parti réformiste votera contre, comme il l'a fait pour les modifications contenues dans l'Accord de Charlottetown?

*  *  *

[Français]

LE RENVOI À LA COUR SUPRÊME

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Affaires intergouvernementales a l'air d'aimer répondre aux questions des autres. On va voir s'il répond aux siennes.

Le gouvernement s'embourbe de plus en plus dans les contradictions. Non seulement la ministre de la Justice ne s'entend pas avec son procureur, ni avec son collègue des Affaires intergouvernementales, mais en plus, celui-ci ne s'entend pas avec le premier ministre.

La semaine dernière, il prétendait que les États agissaient toujours à l'intérieur des règles du droit. Comment explique-t-il que son premier ministre, en 1970, alors qu'il était ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, a agi unilatéralement pour...

Le Président: Je regrette d'interrompre le député. Le ministre des Affaires intergouvernementales a la parole.

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le droit international peut reconnaître les actions des gouvernements qui sont innovatrices, lorsque les États les jugent avantageuses et bien.

Mais lorsqu'il s'agit d'une déclaration unilatérale d'indépendance, cela a été tenté à plusieurs reprises partout dans le monde, et presque toujours, les États ont répondu que ce n'était pas quelque chose qu'ils auraient envie d'encourager, et ce n'est pas entré dans le droit international, à notre avis, hormis les situations coloniales.

 

. 1440 + -

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, c'est inquiétant de l'entendre parler de droit international parce que, dans ce gouvernement-là, la ministre de la Justice ne s'entend pas avec son procureur, la ministre de la Justice ne s'entend pas avec le ministre des Affaires intergouvernementales et le ministre des Affaires intergouvernementales ne s'entend pas avec le premier ministre.

Est-ce qu'il ne croit pas qu'il devrait faire un effort de clarté pour le bien de tout le monde au lieu de semer la confusion?

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, mon homologue du gouvernement du Québec, le ministre Brassard, a déclaré hier: «La démarche québécoise d'accession à la souveraineté s'inscrit dans le droit des peuples à disposer de leur avenir, tel que le reconnaît la communauté internationale. Elle se situe donc en dehors du cadre constitutionnel canadien.»

C'est là une théorie juridique. Est-elle vraie? Est-elle fausse? Nous soumettons cette opinion juridique à l'avis de la Cour.

*  *  *

[Traduction]

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, pour nous, la saga continue au ministère des Affaires indiennes. J'ai en ma possession une note interne dans laquelle un haut fonctionnaire du ministère donne pour instructions à quelqu'un de ne pas divulguer un renseignement demandé en vertu de la Loi sur l'accès à l'information parce que cela pourrait embarrasser le ministère. Un renseignement demandé en vertu de la Loi sur l'accès à l'information et refusé parce que cela pourrait embarrasser le ministère.

La ministre des Affaires indiennes reconnaît-elle que nous avons affaire ici à une véritable dissimulation?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit à plusieurs reprises à la Chambre, nous nous employons très activement à aller au fond de la question pour ce qui est d'une certaine lettre et l'accès à l'information.

Au terme de l'enquête que j'ai demandée, on me fera des recommandations non seulement au sujet de la lettre en question mais également au sujet d'autres procédures et politiques en vigueur au sein du ministère. Nous mettrons ensuite ces recommandations en pratique.

M. Mike Scott (Skeena, Réf.): Monsieur le Président, très bientôt cet enquêteur devra y consacrer tout son temps.

Permettez-moi de lire un extrait de cette note interne: «On soupçonne que la personne qui a demandé ces renseignements compte les utiliser pour embarrasser soit le chef et le conseil de la Première nation de Gull Bay, soit le ministère, ou les deux. Il est recommandé de faire preuve d'une grande diligence et de bien examiner les renseignements demandés avant de les divulguer.»

Comment peut-avoir confiance dans l'enquête qui a été rendue nécessaire par suite de l'atteinte aux droits à la vie privée de Bruce Starlight, alors que nous avons les preuves qu'il y a eu dissimulation?

L'hon. Jane Stewart (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai dit maintes et maintes fois, je prends ces questions très au sérieux. C'est pourquoi j'ai demandé à un enquêteur de l'extérieur de se pencher sur la question de l'accès à l'information et le caractère confidentiel des lettres.

J'aimerais que l'opposition laisse le processus suivre son cours et nous laisse prendre connaissance des faits et des recommandations de l'enquêteur.

*  *  *

[Français]

LE PROJET DE LOI C-28

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, ce matin, le conseiller en éthique du gouvernement a reconnu que c'est le ministre des Finances qui a effectivement parrainé le projet de loi C-28 et il a ajouté que les mesures visant à écarter tout soupçon d'apparence de conflit d'intérêts n'ont pas été appliquées, ce qui contredit le premier ministre et le vice-premier ministre.

Puisque le conseiller en éthique vient de démolir le principal argument de défense du ministre des Finances, le premier ministre maintient-il toujours aussi catégoriquement qu'il n'y a pas apparence de conflit d'intérêts dans l'affaire de l'armateur législateur?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai personnellement parlé au conseiller en éthique, M. Wilson, juste avant la période des questions orales. Il m'a informé qu'il n'y a aucun conflit d'intérêts et, en conséquence, il n'y a aucune apparence de conflit d'intérêts.

*  *  *

[Traduction]

L'EMPLOI

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Notre gouvernement a fait des progrès importants dans sa lutte contre le chômage dans notre pays. Toutefois, il y a encore un bon nombre des habitants de ma circonscription de Simcoe—Grey qui ne réussissent toujours pas à trouver de l'emploi. J'aimerais que le ministre nous explique quelle stratégie il compte utiliser pour s'assurer que l'on continue de réduire le chômage, en particulier dans les régions rurales du Canada et dans la circonscription de Simcoe—Grey.

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, la possibilité d'encourager la croissance économique et la création d'emplois dans les communautés rurales et éloignées reste une question d'accès, d'accès au financement. Nous avons fait de grands progrès grâce aux modifications que nous avons apportées au niveau de la Banque de développement du Canada et de la Société du crédit agricole, en permettant l'accès à des marchés au moyen de tout un réseau d'accords commerciaux internationaux, ainsi que grâce à Équipe Canada et à l'accès à la technologie.

 

. 1445 + -

Dans des communautés aussi différentes et aussi éloignées que Otterville, en Ontario, Montague, dans l'Île-du-Prince-Édouard ou même Rankin Inlet, dans les Territoires du Nord-Ouest, le Programme d'accès communautaire a permis à ces collectivités de se raccorder à l'autoroute de l'information et de profiter des chances de croissance économique et de création d'emploi.

*  *  *

LE REVENU NATIONAL

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Réf.): Monsieur le Président, le ministre du Revenu national a nié hier que les déclarations de revenus de John Thiessen avaient été communiquées sans autorisation. J'ai en main une lettre de la GRC confirmant que Revenu Canada a été mis au courant de cette fuite.

Le ministre a-t-il besoin d'une preuve plus probante ou nous dira-t-il en vertu de quelle autorisation les déclarations de John Thiessen ont été rendues publiques.

L'hon. Harbance Singh Dhaliwal (ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai souligné hier, les renseignements fiscaux confidentiels ne peuvent être communiqués à l'extérieur de Revenu Canada sans l'autorisation du client ou de la Loi.

La question à laquelle le député fait référence a trait à la Société d'assurance publique du Manitoba. L'an dernier, nous avons étudié précisément cette question et nous avons éclairci toute ambiguïté qu'il pourrait y avoir eu dans ce dossier.

*  *  *

LE RECENSEMENT

M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Réf.): Monsieur le Président, il y a deux ans, Statistique Canada a demandé aux Canadiens qui ils étaient. Dans le choix de réponses proposé, le mot Canadien ne figurait nulle part. C'est rassurant de constater que plus de 8,6 millions de personnes ont défié les fonctionnaires de Statistique Canada en écrivant qu'ils étaient d'origine canadienne. C'est tout à leur honneur.

Le gouvernement cessera-t-il d'effectuer des sondages qui divisent les Canadiens en catégories raciales?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je remarque que, selon les résultats publiés récemment, presque toutes les personnes qui se sont dites d'origine canadienne avaient l'anglais ou le français comme langue maternelle et étaient nées au Canada.

Je signale au député que l'information que Statistique Canada essaie d'obtenir est importante parce qu'elle sert de base à l'élaboration des politiques. Ma réponse n'intéresse peut-être pas les députés, mais je pense que l'information qu'on recueille au moyen du recensement devrait les intéresser.

*  *  *

LE COMMERCE

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, le 12 février, j'ai demandé au ministre du Commerce international si j'avais raison de dire l'avoir entendu affirmer que, si la culture n'était pas entièrement exclue de l'AMI, il allait quitter la table, ce à quoi il a répondu: «Vous avez tout à fait raison.» Le jour suivant, il a dit au Centre de droit et politique commerciale que, si la culture n'était pas totalement exclue, ils allaient demander une clause de réserve particulière à notre pays.

Je pose de nouveau la question au ministre. Est-il vraiment partisan d'une exclusion totale ou, selon la situation politique, partisan d'une clause de réserve? Les Canadiens veulent le savoir.

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): De toute évidence, le Nouveau Parti démocratique est mêlé, monsieur le Président. Ce que j'ai dit à la députée, c'est que nous préférerions que la culture canadienne soit exclue de l'AMI. Un grand nombre de pays seraient d'ailleurs d'accord avec nous là-dessus. Si elle était sur la table, nous allions demander une exemption.

Ce que la députée ne comprend pas, c'est que ce sera la même chose pour la culture canadienne. Qu'on ait une exemption particulière à un pays ou que la question soit exclue, dans les deux cas l'AMI n'aura absolument aucune influence sur le plan de la culture.

*  *  *

LE PROJET DE LOI C-28

M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Avant que le vice-premier ministre n'en dise beaucoup plus au sujet des délibérations du comité des finances ce matin, il devrait savoir que le conseiller en éthique a signalé au comité qu'on n'avait pas suivi dans ce cas-ci les procédures internes appliquées normalement lorsque les intérêts du ministre des Finances dans des entreprises sont en jeu.

Ainsi, je voudrais poser la question suivante au ministre des Finances. Étant donné que le projet de loi C-28 renferme des dispositions qui pourraient très bien avoir des répercussions financières directes sur son importante société de portefeuille, croit-il qu'il convenait qu'il présente cette mesure législative, qu'il a parrainée plutôt que la confier à un autre ministre?

L'hon. Herb Gray (Windsor-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le conseiller en éthique a précisé très clairement que les accusations portées contre le ministre des Finances étaient sans fondement. Ainsi, le ministre des Finances n'est pas en conflit d'intérêts et il n'y a pas non plus apparence de conflit d'intérêts.

 

. 1450 + -

Il est très intéressant que le député ne pose pas de questions au sujet des impôts. Il n'en pose pas non plus sur le chômage ou sur la dette. Le porte-parole du NPD souscrit, c'est évident, à la politique du ministre des Finances si on en juge par la question même qu'il a posée aujourd'hui.

*  *  *

LE QUÉBEC

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, au cours de la fin de semaine, la ministre de la Justice a accordé plusieurs entrevues. Elle a notamment déclaré, en parlant de la sécession du Québec, qu'on devrait probablement reconnaître la nature extraordinaire de cette question et établir le processus qui serait suivi à ce moment-là. Est-ce là la position du gouvernement?

L'hon. Anne McLellan (Edmonton-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je veux clarifier les choses une fois de plus pour la gouverne des députés. La position du gouvernement est claire. Le principe fondamental de la primauté du droit va s'appliquer à toute sécession.

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, je suis heureux que la ministre ait déclaré cela, car cela m'amène à ma prochaine question.

Dans la même entrevue, la ministre a déclaré que ce scénario n'était pas prévu dans le cadre constitutionnel actuel.

Je voudrais savoir deux choses. Est-ce la position du gouvernement? Dans l'affirmative, pourquoi renvoyer alors cette question à la Cour suprême?

L'hon. Anne McLellan (Edmonton-Ouest, Lib.): Monsieur le président, comme le député le sait probablement, la primauté du droit est un principe fondamental qui figure dans le préambule de la Constitution du Canada.

La position du gouvernement a toujours été claire tout au cours de cette procédure de renvoi. La primauté du droit est un principe fondamental sur lequel seront basés tous les processus à l'avenir. Nous croyons que toute sécession à l'avenir doit être fondée sur le respect de la primauté du droit.

*  *  *

LE CHANVRE

M. John Finlay (Oxford, Lib.): Monsieur le Président, les agriculteurs du sud-ouest de l'Ontario attendent depuis des années la prise de règlements autorisant la culture du chanvre industriel. Pourquoi le ministre hésite-t-il? Les agriculteurs peuvent-ils espérer pouvoir commencer à cultiver du chanvre industriel au printemps?

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le député est au courant que plusieurs de ses collègues de ce côté-ci de la Chambre ont communiqué avec le ministre relativement à cette question l'an dernier. Ils ont demandé au ministre de prendre des règlements régissant la culture commerciale du chanvre. Le ministre les a écoutés et il a ordonné à son ministère d'agir le plus rapidement possible afin d'élaborer des règlements pertinents.

Un comité interparlementaire a été mis sur pied et a proposé des règlements. Je suis heureux d'informer la Chambre que ces règlements ont été publiés dans la Gazette du Canada, le 27 décembre 1997. Depuis, des rencontres ont eu lieu, notamment...

Le Président: La parole est au député de Calgary-Ouest.

*  *  *

LA CANADIAN BLOOD BANK CORPORATION

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, l'Agence de promotion économique du Canada atlantique est au coeur d'un autre scandale. La Canadian Blood Bank Corporation a reçu plus d'un million de dollars de l'APECA et du MDRH. Cet argent a servi à acheter des montres Rolex et des voitures de luxe aux dirigeants de la CBBC. Voilà maintenant que la corporation est en train de couler, que ses dirigeants ont démissionné et que les contribuables en font les frais.

Que compte faire le ministre pour récupérer l'argent des contribuables?

L'hon. Fred Mifflin (ministre des Anciens combattants et secrétaire d'État (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): Monsieur le Président, j'ai de la difficulté à comprendre la position du Parti réformiste, particulièrement en ce qui a trait à l'APECA. Je sais que les réformistes s'opposent à la Stratégie du poisson de fond de l'Atlantique, la LSPA, et je sais qu'ils s'opposent aussi au programme des infrastructures. J'en conclus que le député n'aime pas la LSPA. Il n'aime pas le programme des infrastructures, et il semble qu'il n'aime pas non plus l'APECA.

Permettez-moi de dire à la Chambre ce qu'un des députés réformistes a dit. Il n'y a pas très longtemps, le député de Medicine Hat, qui était alors en visite dans les Maritimes, a dit ce qui suit relativement aux programmes dans le cadre de l'APECA: «Dépenser de l'argent de cette façon aidera les Canadiens de la région atlantique beaucoup mieux que toute autre initiative.»

*  *  *

 

. 1455 + -

[Français]

L'ACCORD MULTILATÉRAL SUR L'INVESTISSEMENT

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, on va essayer de dissiper un peu la confusion.

Le 12 février dernier, le ministre du Commerce international assurait cette Chambre que sans clause d'exemption culturelle, le Canada ne signerait pas l'AMI. Or, voilà que le lendemain matin, le même ministre mentionnait que cette clause est préférable, mais que si ce n'est pas possible, le Canada se contentera de formuler quelques réserves.

Ma question est très simple: Comment se retrouver dans le discours du ministre? Est-ce que la clause d'exemption culturelle est, oui ou non, une condition essentielle à la signature de l'accord?

[Traduction]

L'hon. Sergio Marchi (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, la réponse est oui. Il n'y a pas de confusion. La position canadienne est que la culture ne doit même pas faire l'objet de négociations. Un certain nombre de pays appuient cette position.

Si des pays souhaitent que la culture soit incluse, le Canada et ceux qui appuient sa position ont dit qu'ils auraient recours à une exemption s'appliquant à certains pays précis. Par conséquent, la clause d'exemption culturelle tient toujours. Même si nous préférerions que la culture canadienne ne fasse même pas l'objet de discussions, le résultat serait le même pour ce qui est de la culture canadienne. Elle ne serait pas touchée.

*  *  *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Peter Stoffer (Sackville—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

M. Mac Campbell, ancien directeur général des systèmes d'examen de la gestion à la BFC Goose Bay, a accepté une indemnité de fin d'emploi et travaille maintenant pour SERCO, l'entreprise britannique qui a décroché le contrat de prestation de rechange des services. Il semble que certains s'enrichissent, contrairement aux travailleurs qui sont sur la première ligne à Goose Bay et qui subiront une baisse de leur salaire, qui passera de 13 $ à juste un peu plus de 6 $.

Le gouvernement va-t-il admettre aujourd'hui que les économies réalisées grâce à la prestation de rechange des services se font sur le dos des Canadiens ordinaires? Admettra-t-il que les politiques des libéraux n'ouvrent des possibilités que pour les partisans de ces politiques?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, de toute évidence, la réponse est non. Toute cette affaire m'étonne beaucoup. Pendant des années, le NPD a préconisé des coupes dans les dépenses de la Défense. Voici une occasion de faire économiser 20 millions de dollars par an aux contribuables et le NPD demande que le Ministère augmente ses dépenses au lieu de les comprimer.

Nous voulons économiser les fonds publics et fournir aux militaires canadiens des services de soutien d'une manière plus efficace et efficiente, tout en traitant nos employés de façon équitable et humaine. C'est ce que nous allons faire.

*  *  *

LE QUÉBEC

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, hier le premier ministre a dit qu'il ne voulait pas décider de l'avenir du Canada sur un coup de dé. Pourtant, c'est précisément ce qu'a fait son gouvernement en 1995. Le premier ministre et ses conseillers ont dressé un plan de dernière minute qui a échoué.

Chaque jour, nous étudions des questions importantes à la Chambre. La plus importante dont nous sommes saisis à l'heure actuelle porte sur l'avenir du Canada. C'est mon pays.

Une fois que les opinions juridiques seront données, quel plan le gouvernement a-t-il mis en place pour que nous puissions survivre en tant que pays?

[Français]

L'hon. Stéphane Dion (président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, le chef conservateur a déclaré, le 29 janvier 1996, en anglais bien sûr, et je le cite:

[Traduction]

«Si les séparatistes ont le droit de s'opposer, ils ne peuvent nier ce droit aux autres. Il est loin d'être clair que le Québec ne peut être divisé. Les cris et les inuit auraient une très bonne cause.»

Le député parle-t-il de la cause juridique ou de la cause politique de l'anarchie? Des précisions s'imposent.

*  *  *

LES SERVICES BANCAIRES

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État chargé des Institutions financières internationales.

Conformément à l'annonce que l'organisation President's Choice a faite à cet égard, la chaîne de magasins Loblaws fournira des services financiers d'un bout à l'autre du pays. Quelle assurance le secrétaire d'État peut-il donner que ces changements dans le domaine des services bancaires serviront au mieux les intérêts de tous les Canadiens?

L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de Durham non seulement d'avoir posé cette question mais aussi de donner le ton à la Chambre en ce qui a trait aux questions d'ordre économique et financier.

Le fait que des banques n'imposent pas de frais de service, permettent de faire des chèques sans frais et facilitent l'accès à leurs services est certes une bonne chose pour le Canada. Une concurrence accrue donne plus de choix aux consommateurs. Notre gouvernement continuera d'encourager l'innovation et de favoriser une concurrence accrue dans la prestation de services financiers aux Canadiens.

*  *  *

 

. 1500 + -

LE BUDGET

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Réf.): Monsieur le Président, le ministre des Finances a dit qu'il n'annoncerait pas avant le jour de la présentation du budget si les Canadiens auront un budget équilibré. La ministre du Patrimoine a déjà annoncé la reconduction pour un an, au coût de 100 millions de dollars, du fonds de production d'émissions pour la câblodistribution, mais le ministre, lui, refuse de dire quoi que ce soit à propos du système de santé, de la recherche et du développement et de la réduction des impôts.

Comment se fait-il qu'on trouve plus important d'annoncer cette mesure plutôt que de parler de la santé des Canadiens...

Le Président: Le vice-premier ministre.

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, on ne faisait qu'annoncer la reconduction d'une mesure déjà existante.

Le député me donne l'occasion de lui rappeler, à lui et à la Chambre, que le ministre des Finances a parlé dans son dernier budget et encore par la suite des réductions d'impôt accordées aux étudiants de niveau postsecondaire et à leurs parents, des réductions d'impôt accordées aux handicapés et de sommes additionnelles investies dans le système de santé.

Le député vit dans un état d'ignorance aveugle s'il refuse de reconnaître ce que nous avons déjà fait pour réduire les impôts. Il a peur d'imaginer les mesures constructives...

Le Président: Voilà, chers collègues, qui met fin à la période des questions.

*  *  *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de la ministre du Bien-être social et du Développement social de l'Afrique du Sud, Mme Geraldine Fraser-Moleketi.

Des Voix: Bravo!

*  *  *

QUESTION DE PRIVILÈGE

Le Président: Je vais entendre le député de Charlotte soulever la question de privilège. Puis, les députés de Medicine Hat et de Calgary-Ouest auront la parole pour invoquer le Règlement.

LA SANTÉ

M. Greg Thompson (Charlotte, PC): Monsieur le Président, je soulève la question de privilège à l'égard du ministre de la Santé. Le ministre refuse de fournir de l'information aux députés et notamment à moi-même, qui suis le porte-parole progressiste conservateur en matière de santé.

Je crois parler aussi au nom des porte-parole des autres partis en matière de santé.

Ce que je veux dire, en fait, c'est que tous les ministres fournissent couramment de l'information aux porte-parole des partis de l'opposition qui la leur demandent afin de bien remplir leurs fonctions de porte-parole.

Monsieur le Président, vous savez que la Chambre doit pouvoir compter sur la meilleure information possible et on nous refuse une partie de cette information. Par exemple, le ministre de la Santé a un budget de 1,5 milliard de dollars. Il a 6 400 employés pour lui fournir la meilleure information possible. Il ne fournit pas cette information aux porte-parole des partis de l'opposition.

 

. 1505 + -

Je songe notamment aux coupures de journaux que les fonctionnaires de son ministère recueillent chaque jour d'un océan à l'autre. On a toujours eu la courtoisie de nous fournir tous les jours ces coupures de journaux pour que nous puissions jouer notre rôle de porte-parole en matière de santé.

Je tiens à citer certains passages de Beauchesne qui concernent exactement le point que je veux faire valoir. Au chapitre 2, intitulé: «Le privilège», on peut lire ceci:

    Les privilèges du Parlement sont ceux qui sont «absolument indispensables à l'exercice régulier de ses pouvoirs». Ils sont départis à chacun des députés, parce que la Chambre serait dans l'incapacité de fonctionner si elle ne pouvait disposer librement de leurs services, et à chacune des Chambres pour la protection de ses membres et la défense de son autorité et de sa dignité propres.

Le Président: Si je comprends bien, les documents auxquels vous faites allusion sont des coupures tirées de journaux qui sont publiés dans tout le Canada. Peut-être les ministres fournissaient-ils autrefois ces coupures à titre gracieux, mais cela ne constitue pas une question de privilège à la Chambre. J'ose croire que le ministre prendra note de l'affaire. Il pourrait fournir cette information si cela peut permettre d'épargner de l'argent.

J'ai horreur de proposer d'autres moyens de faire les choses, mais le député pourrait envisager de faire porter une question à cet égard au Feuilleton. Voilà pour cette question de privilège.

*  *  *

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, pendant la période des questions, le ministre des Anciens combattants a cité un document dont il m'a attribué la paternité. Je ne sais rien de ce document. Le ministre pourrait-il le déposer afin que je puisse le consulter et savoir ce qu'il citait au juste?

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, d'après ce que j'ai compris, le ministre a fait allusion à un document, mais n'en a pas cité directement un passage. Selon notre Règlement, lorsqu'un ministre cite un document, il est tenu de le déposer. S'il a lu un document qui était autre chose que ses notes d'information, je veillerai à ce que le document soit déposé. Il ne faut pas toutefois qu'il s'agisse des notes d'information que le Cabinet fournit aux ministres.

Le Président: Nous attendrons de voir ce que dira le ministre.

LA CHAMBRE DES COMMUNES

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Monsieur le Président, hier, pendant mon absence, des accusations tout à fait fausses ont été portées contre moi à la Chambre. Un député néo-démocrate m'a accusé d'avoir fait partie du gouvernement de Grant Devine. C'est tout à fait faux. Le député devrait s'expliquer à la Chambre et me faire des excuses.

Le Président: Le député doit pourtant savoir que c'est là un sujet de débat. Je suis heureux qu'il ait fait savoir à la Chambre qu'il n'a pas fait partie du gouvernement Devine. Cela devrait suffire à rétablir les faits.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

 

. 1510 + -

[Traduction]

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté; ainsi que de l'amendement.

M. Lee Morrison (Cypress Hills—Grasslands, Réf.): Madame la Présidente, le secrétaire parlementaire devrait commencer par lire la Loi sur l'accès à l'information avant d'en parler à la Chambre. Il devrait savoir que toute information délicate du point de vue commercial, quel que soit le ministère ou l'organisme visé, est une information privilégiée et protégée. Si l'on présente une demande d'accès à l'information et qu'elle comporte un aspect directement commercial, on obtiendra une liasse de feuilles blanches ou de feuilles desquelles certaines informations ont été effacées. J'en ai fait l'expérience à maintes occasions, et le secrétaire parlementaire devrait donc se renseigner.

Pour ce qui est des consultations dont on fait l'éloge et de l'appui que les agriculteurs sont censés accorder au projet de loi C-4, je tiens à dire au secrétaire parlementaire que j'ai assisté à une réunion de céréaliers et que les participants à cette réunion étaient presque tous de fervents défenseurs de la Commission canadienne du blé.

Lors de cette rencontre, quelqu'un a présenté une motion invitant le gouvernement à retirer le projet de loi C-4, motion qui a été adoptée à l'unanimité. Il y a donc quelque chose qui cloche en l'occurrence. D'ailleurs, l'auteur de la motion—ce n'est pas lui qui l'a proposée—était notre représentant local au sein du conseil consultatif. Qu'on ne vienne donc pas me dire que le ministre a l'appui des producteurs ou des défenseurs de la commission du blé. Il n'en est rien.

M. Gerry Byrne (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Madame la Présidente, en ce qui concerne la Loi sur l'accès à l'information et la divulgation de documents, il est important que tous les producteurs et que l'ensemble des Canadiens comprennent bien, et c'est ce qui se produit lorsqu'on leur présente des arguments qui se tiennent, que les producteurs ne priseraient guère que des acheteurs étrangers, des intérêts étrangers, des concurrents étrangers et des sociétés étrangères aient accès à des informations extrêmement délicates, susceptibles d'avoir des répercussions négatives sur la capacité de la Commission canadienne du blé de commercialiser leurs céréales à l'étranger.

C'est exactement ce que les réformistes demandent dans l'intérêt de nos concurrents. Ils ne le demandent pas dans l'intérêt des Canadiens. Ils veulent, dans l'intérêt des concurrents de la Commission canadienne du blé, que celle-ci rende ses livres publics, de sorte que nos concurrents puissent obtenir toute l'information dont ils ont besoin pour venir à bout des producteurs de blé canadiens. Je trouve cela inacceptable. Nous protégerons la Commission canadienne du blé. Nous protégerons les producteurs canadiens et, sincèrement, nous aurons un milieu plus concurrentiel.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député de Yorkton—Melville invoque le Règlement.

M. Garry Breitkreuz: Madame la Présidente, c'est une esquive. Ce n'est pas ce que les agriculteurs ont demandé. Ils veulent une Commission canadienne du blé qui rende des comptes, qui permette au vérificateur général d'examiner ses livres. Le ministre déforme...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il n'y a pas matière à invoquer le Règlement. Je vous prie de conclure rapidement.

M. Gerry Byrne: Madame la Présidente, je vais reprendre. Cela me donne l'occasion de réitérer ce que le projet de loi C-4 propose pour la Commission canadienne du blé. Il s'agit d'un groupe de dix administrateurs élus qui sera placé à la tête de la commission. Ce sont les producteurs qui sont majoritaires, pas les membres nommés par le pouvoir politique, comme le voudraient les députés d'en face, je pense. Ils veulent que la commission soit contrôlée par des politiciens. Nous voulons laisser les commandes aux producteurs. Voilà la position du gouvernement.

 

. 1515 + -

M. Chris Axworthy (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre de nouveau la parole au sujet du projet de loi C-4 sur la Commission canadienne du blé. Comme les députés le savent, le Nouveau Parti démocratique est toujours le seul parti représenté à la Chambre à continuer d'appuyer à 100 p. 100 la commission et les agriculteurs qui sont en faveur de celle-ci, c'est-à-dire la majorité des agriculteurs, contrairement à ce que laisse entendre le Parti réformiste.

Le plébiscite sur l'orge a révélé que 63 p. 100 des agriculteurs sont en faveur de la commission dans ce cas. Nous savons que les agriculteurs à qui on posera la question se diront en faveur de la Commission canadienne du blé, et cela parce qu'ils sont des agents économiques rationnels. Ils sont en faveur de la commission parce qu'elle les traite bien. En effet, elle leur rapporte chaque année un dividende. Parce que la commission leur est profitable, les agriculteurs appuient la commission.

Il s'en trouvera, bien sûr, pour faire fi du bon sens commun et prétendre vouloir profiter du libre marché, qui leur sera moins profitable que la commission. Il faut évidemment pas faire grand cas des personnes qui n'ont pas un comportement rationnel dans ce domaine. Le Parti réformiste, lui, préfère faire grand cas des quelques agriculteurs qui font fi du bon sens commun, de la réalité et du fait de la Commission canadienne du blé a été très profitable aux agriculteurs. Il veut détruire une institution qui a été d'une importance critique pour l'agriculture en Saskatchewan et dans le reste des Prairies et qui continue de l'être pour les exploitations agricoles, pour les agriculteurs et pour leurs familles partout dans l'ouest canadien.

Comme on peut le voir, le Parti réformiste fait régulièrement passer l'idéologie avant le bon sens et avant le bien des agriculteurs, mais les agriculteurs n'en ont que faire. Comme nous le savons, et contrairement à ce que veut ou à ce que dit le Parti réformiste, les agriculteurs des Prairies appuient la commission quand on leur donne l'occasion d'exprimer leur opinion.

Interrogés au sujet de l'orge et de la commission, 63 p. 100 des producteurs ont donné leur appui. Le Parti réformiste n'aime pas cette proportion et n'est pas prêt à l'accepter. Mais, à vrai dire, les agriculteurs ont donné leur appui à la commission lors du plébiscite parce que la commission a un rôle à jouer. Et chaque fois qu'on leur pose la question, ils répondent toujours de la même façon.

Ils l'appuient parce qu'elle réalise des centaines de millions de dollars de recettes pour eux chaque année. D'importante études faites par les meilleurs économistes en agriculture ici et aux États-Unis indiquent que, lorsque c'est la commission qui vend le blé, les recettes des producteurs s'élèvent à 265 millions de dollars de plus par année que s'il était vendu sur le marché libre.

Pourquoi le Parti réformiste s'opposerait-il à ce que les agriculteurs fassent 265 millions de dollars de plus par année? Parce que les réformistes, étant des idéologues et des néo-conservateurs, veulent enrichir les courtiers en grains qui les appuient si bien financièrement et dans les arguments qu'ils présentent à l'égard de la commission. Les réformistes préférent enrichir les courtiers plutôt que les agriculteurs. On sait que la commission redistribue ses profits aux agriculteurs.

La situation est la même dans le cas de l'orge. Des études indiquent que les producteurs reçoivent 72 millions de dollars de plus avec la commission. Mais le Parti réformiste, qui s'oppose à tout programme gouvernemental efficace, s'oppose aussi à ce que les producteurs d'orge fassent 72 millions de dollars de plus par année.

Quand une idéologie est dépassée, vaut mieux la rejeter. Il est temps de rejeter cette idéologie des réformistes.

Le projet de loi C-4 comporte des lacunes. Nous savons, tout comme les agriculteurs, qu'on ne peut pas laisser la commission du blé entre les mains du gouvernement libéral. C'est ce que révèlent les importantes lacunes du projet de loi C-4, qui justifient les préoccupations des agriculteurs.

 

. 1520 + -

Le projet de loi C-4 propose des achats de blé au comptant. Il s'agit là d'un problème majeur qui minera la confiance des agriculteurs dans la Commission. Pour ce qui est du fonds de réserve, pourquoi le gouvernement veut-il faire des retenues d'environ 575 millions de dollars auprès des producteurs?

Le gouvernement libéral n'aurait pas besoin de telles retenues s'il soutenait la Commission comme le gouvernement fédéral est censé le faire.

Que dire du contrôle? Certains agriculteurs seront élus membres du conseil d'administration, c'est vrai. Pourtant, c'est le gouvernement qui choisira le dirigeant, un personnage clé, ce qui diminuera de beaucoup le contrôle que les agriculteurs pourront exercer.

Je me dois également de signaler un point que j'ai oublié d'inclure quand je discutais du soutien de la Commission. Non seulement les producteurs expriment-ils leur soutien de la Commission quand la question leur est posée dans le cadre d'un plébiscite, mais quand vient le temps de choisir des membres les membres du comité consultatif de la Commission, il choisissent surtout des agriculteurs qui lui sont favorables.

Autrement dit, chaque fois qu'on leur a demandé leur avis, les agriculteurs se sont prononcés en faveur de la Commission canadienne du blé. Le Parti réformiste agit tout simplement contre ses électeurs quand il exprime le désir de détruire ce qui, disons-le, assure aux agriculteurs des profits additionnels tous les ans.

Et la disposition d'inclusion, qu'en est-il? Le Parti réformiste parle constamment de démocratie. Quoi de plus démocratique que de demander l'avis des producteurs sur l'inclusion d'un grain, d'une denrée dans les compétences de la Commission? Qu'y a-t-il d'inquiétant, si les producteurs en décident librement?

Pourquoi les réformistes ne seraient-ils pas en faveur d'un processus décisionnel aussi démocratique, alors qu'ils ne cessent de parler de démocratie en rapport avec la commission du blé en général?

Commençons par examiner qui pourrait vouloir se débarrasser de la commission du blé. Ce ne sont pas les agriculteurs, comme je l'ai déjà dit, parce qu'ils ont toujours appuyé la commission. C'est plutôt le genre de personnes, le genre de grosses entreprises, le genre d'intérêts anti-agriculteurs qui appuient le Parti réformiste dans toutes ses entreprises.

La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, la bourse de commerce de Winnipeg, Cargill, le genre de corporations qui auraient avantage à ce que les agriculteurs n'aient pas l'appui de la commission du blé.

Il est temps que le Parti réformiste mette son idéologie de côté. Il est temps que ces organisations agro-alimentaires mettent leurs intérêts personnels de côté et laissent une chance aux agriculteurs pour une fois.

Nous savons depuis toujours que les réformistes et les conservateurs sont fondamentalement contre la commission du blé et qu'ils feront tout en leur pouvoir pour attaquer la commission et sa crédibilité. Ils feront tout pour accroître le pouvoir lucratif des marchands privés de céréales et de ceux qui s'opposent aux intérêts des agriculteurs.

Nous savons même qu'ils sont prêts à dire que les agriculteurs sont contre la commission du blé quand en fait ils l'appuient. Les réformistes ne laissent rien au hasard. Ils sont même prêts à affirmer que le noir est blanc si cela sert leurs idéologies.

M. Jake E. Hoeppner: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Le député de Saskatoon—Rosetown—Biggar laisse entendre que nous avons déposé le projet de loi C-4. Il s'agit plutôt d'un projet de loi d'initiative gouvernementale et c'est de cela qu'il devrait discuter.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Ce n'est pas un rappel au Règlement.

M. Chris Axworthy: Madame la Présidente, je suis heureux de constater que certains réformistes écoutent. C'est dommage qu'ils ne changent pas d'avis à ce sujet. Comme je l'ai mentionné, le bon sens est une denrée plutôt rare chez les députés réformistes.

Les adversaires chercheront à faire valoir qu'un double système de commercialisation ne signifie pas la fin du système de vente à guichet unique ni la fin de la commission du blé. Non seulement le juge Muldoon, mais également bien d'autres, tous ceux en fait qui examinent la chose sérieusement, sont à même de constater que cela se traduirait par le début du démantèlement de la commission.

Il s'agit là d'une autre tactique chère aux réformistes. Cela n'a rien à voir avec une volonté d'instaurer un double système de commercialisation. Ce n'est qu'une étape. Ils veulent se débarrasser de la commission du blé et, pour eux, tous les moyens sont bons pour arriver à leurs fins. Je constate qu'on ne peut pas non plus faire confiance aux libéraux en ce qui concerne la commission du blé. Il y a belle lurette que le gouvernement n'a pas levé le petit doigt pour les agriculteurs.

 

. 1525 + -

Il a été question des réunions de producteurs. Une d'elles a eu lieu à Rosetown, dans ma circonscription. D'après l'expérience passée, on aurait pu croire que les producteurs n'allaient pas appuyer la commission du blé, même s'ils ont voté affirmativement en très grand nombre lors du plébiscite sur l'orge. Or, les gens de la place ont été étonnés de constater qu'aucun participant ne s'est prononcé contre la commission du blé.

Certes, le projet de loi C-4 n'est pas sans poser de problèmes, mais ils sont beaucoup moins graves que ceux qui découleraient des positions adoptées par les réformistes et les conservateurs et qui mèneraient tout droit au démantèlement de la commission. Nous devons nous pencher sérieusement sur les propositions de modification qui ont été formulées. Nous devons veiller à ce que la commission puisse continuer d'appuyer les agriculteurs dans l'avenir.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Madame la Présidente, j'ai suivi le dernier discours avec grand intérêt. Pendant la campagne, le député avait déclaré que si son parti faisait élire des députés, il forcerait le gouvernement à rendre des comptes. Or, tous les discours que le député et ses collègues néodémocrates ont prononcés à la Chambre faisaient référence au Parti réformiste. Les néodémocrates analysent constamment les politiques réformistes.

Le député pourrait-il expliquer pourquoi il n'a pas parlé du projet de loi C-4 présentement à l'étude? Il devrait reconnaître que les agriculteurs appuient la Commission canadienne du blé, mais que plus de 80 p. 100 d'entre eux s'opposent au projet de loi C-4. Le député n'a mentionné à aucun moment dans son discours que la population de la Saskatchewan et les agriculteurs de sa circonscription sont contre le projet de loi C-4. Il n'a aucunement fait état de leur point de vue à ce sujet. Je pourrais lui donner de nombreux articles du Western Producer à lire. Ils ont été rédigés par de francs supporters de la Commission canadienne du blé, qui voudraient que la commission rende compte de sa gestion, améliore son rendement, fournisse plus de renseignements et fasse preuve d'une plus grande transparence.

Je ne comprends pas pourquoi les députés néodémocrates n'expriment pas le point de vue de leurs électeurs. La commission devrait rendre des comptes et les députés du NPD devraient rendre compte à leurs électeurs.

Quelle est la position du député au sujet du projet de loi C-4?

M. Chris Axworthy: Madame la Présidente, le Nouveau Parti démocratique s'est toujours opposé aux mesures présentées par le gouvernement libéral lorsqu'il ne les jugeait pas valables pour les Canadiens. Nous n'avons jamais hésité à critiquer le gouvernement sur de nombreux sujets. L'AMI en est un exemple. Mon parti est le seul qui continue de s'intéresser à cette question.

Le Parti réformiste a applaudi la décision des libéraux de porter un autre dur coup aux emplois des Canadiens et à l'économie canadienne.

La position du Nouveau Parti démocratique et mon propre point de vue au sujet du projet de loi C-4 sont très clairs. Je m'oppose au projet de loi C-4 pour les raisons que j'ai énoncées dans mon discours et pour celles que mes collègues ont eux-mêmes invoquées. Ce qui me distingue du député de Yorkton—Melville, c'est que, contrairement à lui, j'appuie la Commission canadienne du blé.

M. Garry Breitkreuz: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. J'ai dit à plusieurs reprises dans mon discours que je suis favorable à la Commission canadienne du blé et tous les amendements que nous avons proposés au projet de loi vont en ce sens.

M. Chris Axworthy: Madame la Présidente, les agriculteurs de l'Ouest savent à quoi s'en tenir au sujet de la position du député de Yorkton—Melville.

 

. 1530 + -

M. Gerry Byrne: Madame la Présidente, j'invoque la question de privilège.

Pour faciliter la conduite des affaires de la Chambre, pourrais-je demander que les députés citent l'article exact du Règlement qu'ils invoquent pour faire un rappel au Règlement?

Nous sommes en train de faire un débat. Il est très important que tous les députés aient l'occasion d'y participer. J'estime que les députés en sont empêchés par les tactiques frivoles et insensées des réformistes qui nous font inutilement perdre du temps.

Si les députés pouvaient tout simplement préciser l'article exact qu'ils invoquent pour faire un rappel au Règlement, cela faciliterait le débat.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je prends note de votre remarque.

M. Garry Breitkreuz: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Si le député invoque la question de privilège, j'ai quelque chose à dire à ce sujet.

Pour quel motif invoque-t-il la question de privilège et quelle édition du Beauchesne...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il n'est pas question de privilège pour le moment.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Madame la Présidente, en écoutant le député du parti à ma gauche, à l'extrême gauche, je n'ai pu m'empêcher de penser combien son parti est vexé d'avoir perdu l'électorat rural dans la Saskatchewan. L'électorat rural l'a complètement abandonné, y compris le député.

C'est une journée de deuil pour les habitants des Prairies. L'adoption de ce projet de loi les inquiète tout autant que ce qui se passe à la Cour suprême cet après-midi. Ils craignent l'adoption du projet de loi.

Si le projet de loi est adopté ce soir, je porterai un brassard noir car il signera l'arrêt de mort de nombreuses industries en Saskatchewan et je voudrai qu'on le sache.

Le député a parlé d'une étude entreprise par la Commission canadienne du blé indiquant que la majorité des agriculteurs gagnaient davantage en vendant leur récolte à la commission. Devait-on s'attendre à une réponse différente?

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je suis désolée, mais le temps de parole du député est expiré.

M. Chris Axworthy: Madame la Présidente, je ne vois pas en quoi les craintes du député sont fondées à la suite du plébiscite sur l'orge et des études effectuées par des économistes réputés qui appuient la Commission canadienne du blé.

Des économistes agricoles ont examiné la question. À la suite d'études effectuées dans toutes les Prairies et évaluées par des pairs, ils ont conclu à de multiples reprises que la Commission canadienne du blé était bonne pour les agriculteurs. Pourquoi le député n'accepte-t-il pas ce verdict?

M. Larry McCormick (Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, Lib.): Madame la présidente, je suis heureux de parler du projet de loi C-4. Les modifications qu'il renferme sont basées sur près de trois ans de consultations et de discussions intensives avec les producteurs de grain de l'ouest du pays pour déterminer le type d'office de commercialisation du grain qu'ils souhaitaient.

Les céréaliers de l'Ouest ont demandé à conserver la Commission canadienne du blé, mais ils veulent également une commission plus démocratique, qui rende davantage de comptes et réponde davantage à leurs besoins. Ils souhaitent vraiment pouvoir la contrôler pour faire en sorte qu'elle réponde à leurs besoins. C'est, en fait, ce que les modifications proposées dans le projet de loi C-4 prévoient.

Elles donneraient aux producteurs plus de pouvoir qu'ils n'en ont jamais eu tout au cours des 63 ans d'histoire de la Commission canadienne du blé. Les modifications proposées moderniseraient l'administration de la commission. On ferait en sorte qu'elle ait davantage de comptes à rendre aux producteurs en créant un conseil d'administration dont la majorité des membres seraient élus par les producteurs eux-mêmes. Les modifications proposées en matière de commercialisation donneraient aux agriculteurs les outils et le pouvoir nécessaires pour établir la structure de commercialisation de la commission afin de répondre à leurs besoins actuels et futurs.

 

. 1535 + -

Je voudrais répondre à certaines des questions qui ont été soulevées et, ce faisant, écarter certaines idées fausses qui entourent le projet de loi C-4 et ses modifications proposées à la commission.

Certains agriculteurs se demandent s'ils auront davantage de contrôle aux termes du nouveau régime de régie interne. La réponse est oui. En effet, le conseil d'administration de 15 membres sera formé de dix administrateurs élus par les producteurs et de cinq administrateurs nommés par le gouvernement fédéral. Fondamentalement, les administrateurs élus par les agriculteurs seront deux fois plus nombreux. Ils contrôleront en fait les orientations stratégiques de la nouvelle commission et pourront tenir compte du point de vue et des besoins des agriculteurs dans toutes les futures décisions en matière d'exploitation et de commercialisation.

Ces administrateurs élus ne pourront être renvoyés par le ministre responsable de la commission. Seuls leurs électeurs pourront les mettre à la porte à la suite d'autres élections.

Aux termes du projet de loi C-4, tous les administrateurs auront le droit de se faire communiquer tous les faits et les chiffres concernant le fonctionnement de la commission. Ils pourront examiner les prix de vente des grains, les bonifications obtenues, ainsi que tous les frais d'exploitation, et déterminer si la commission est vraiment efficace.

Connaissant la CCB et la concurrence mondiale, les administrateurs seraient les mieux placés pour déterminer quels renseignements devraient être rendus publics et lesquels, pour des raisons commerciales, devraient rester confidentiels.

Pourquoi le conseil n'est-il pas entièrement élu? En vertu de la mesure proposée, le gouvernement continuera d'avoir un engagement financier important à l'égard de la Commission canadienne du blé. Le gouvernement continuera à garantir le paiement initial effectué par la commission, de même que ses emprunts et ses ventes à crédit en vertu du programme des ventes de grains à crédit.

Ce sont de très bonnes raisons pour que le gouvernement continue de jouer un rôle en nommant certains des administrateurs. De plus, la CCB a des responsabilités qui touchent les affaires publiques. Par exemple, la CCB est chargée de délivrer les licences d'exportation de blé et d'orge pour tout le Canada, pas seulement les Prairies.

J'ai entendu des gens demander pourquoi la Commission canadienne du blé n'est-elle pas légalement forcée d'obtenir le meilleur prix pour le blé des agriculteurs. La commission a pour principe de chercher à obtenir le meilleur prix possible. Cependant, il serait difficile d'en faire l'objectif forcé de la société.

Étant donné que la CCB cherche à obtenir le meilleur prix pour les producteurs dont les revenus sont mis en commun, il serait pratiquement toujours possible, après coup, de montrer que des prix plus élevés auraient pu être obtenus par certains producteurs si des décisions commerciales différentes avaient été prises. Par conséquent, obliger légalement la CCB à obtenir les meilleur prix pour les produits de chaque producteur individuel entraînerait d'innombrables poursuites judiciaires contre les décisions de la commission.

Pour l'avenir, le conseil d'administration serait responsable de la bonne gestion du programme de ventes et devrait s'assurer que la commission fonctionne dans l'intérêt des producteurs. Il me semble qu'il vaudrait mieux procéder de cette façon que de l'obliger en vertu de la loi.

Pourquoi la Commission canadienne du blé a-t-elle besoin d'un fonds de réserve et à quoi servirait cet argent? Un fonds de réserve serait constitué pour permettre à la CCB de rajuster les paiements versés initialement durant la campagne agricole. Elle pourrait le faire de son propre chef sans attendre l'approbation du gouvernement pour compenser d'éventuelles pertes lors de ventes au comptant. Cela lui permettrait aussi d'effectuer le paiement forfaitaire anticipé de livraisons en commun.

Le fonds de réserve permettrait à la CCB de rajuster les paiements initiaux et de faire en sorte que les agriculteurs reçoivent plus rapidement leur argent. Compte tenu des paiements initiaux qui ont été rajustés dans le passé, les risques inhérents à cette procédure seraient infimes et compensés par les avantages qui s'ensuivraient pour les agriculteurs. Il appartiendrait au conseil d'administration, dont les deux tiers des membres seraient élus par les producteurs, de déterminer si la création d'un fonds de réserve est justifiée ainsi que les modalités et le moment de sa création. Les députés d'opposition demandent pourquoi le vérificateur général du Canada n'examine pas les livres de la commission.

Actuellement, la Commission canadienne du blé confie sa vérification à un cabinet de comptables agréés indépendants. Avec ses comptes de mise en commun, la CCB administre l'argent des agriculteurs, et non les affectations du gouvernement. Par conséquent, il a toujours été très sensé qu'un vérificateur du secteur privé, plutôt que le vérificateur général, vérifie les livres de la commission.

En vertu du projet de loi C-4, la CCB cesserait d'être un agent de Sa Majesté et une société d'État pour devenir une société d'économie mixte. Il y a donc encore moins de raisons de soumettre ses livres au vérificateur général.

 

. 1540 + -

Finalement, certains utilisateurs de rapports financiers du secteur privé sont rassurés par cette procédure, compte tenu que les vérificateurs du secteur privé, contrairement au vérificateur général, doivent répondre de leurs négligences et autres fautes professionnelles en vertu de la loi.

Les modifications proposées dans le projet de loi C-4 sont équilibrées et équitables. Le gouvernement se rend compte qu'elles ne peuvent satisfaire toutes les parties, parce que le débat entre les producteurs céréaliers de l'Ouest aurait certainement été fortement polarisé à cet égard. Le gouvernement a néanmoins l'impression que les modifications proposées offriraient aux agriculteurs les instruments et les pouvoirs qu'ils souhaitent donner à la CCB de façon qu'elle puisse répondre aux besoins des agriculteurs, tant aujourd'hui que dans les années à venir.

Je partage mon temps de parole avec le député de Saint-Boniface.

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Madame la Présidente, le député d'en face a soulevé un certain nombre de points au sujet de l'élection des administrateurs. Le projet de loi C-4 prévoit que dix administrateurs soient élus par les agriculteurs, et cinq par les producteurs.

Le député en question vient de l'Ontario. L'équivalent ontarien de la Commission canadienne du blé est dirigé à 100 p. 100 par les agriculteurs. Pourquoi deux poids, deux mesures dans ce cas? Je ne pose pas vraiment la question; je l'ai déjà posée.

Il a parlé d'un permis d'exportation. A-t-il jamais vu ce permis? Celui auquel il fait allusion, sur lequel la Commission canadienne du blé a un veto, contient un espace en blanc. Si l'on écrit trois mots clés dans cet espace, il est interdit au producteur d'exporter son grain. Quels sont ces trois mots? Je me demande si le député les connaît. Il y a trois mots. Si l'on écrit Alberta, Saskatchewan ou Alberta dans cet espace, le producteur n'a aucun contrôle sur son grain. Il n'en est pas le propriétaire.

Le député est ontarien. Si l'on écrit Ontario dans l'espace en blanc, on s'occupe de votre grain, et gratuitement par-dessus le marché. Les agriculteurs ontariens peuvent vendre leur grain parce qu'ils en sont propriétaires.

Que pense le député de la formule dont il parlait? Pense-t-il qu'un tel permis d'exportation assure l'égalité de tous les agriculteurs canadiens? Est-ce juste? Comment représente-t-il ses électeurs en appuyant le projet de loi C-4? Je sais que les agriculteurs des Prairies considèrent la Commission canadienne du blé comme un gros organisme gouvernemental contrôlé par Ottawa.

M. Larry McCormick: Madame la Présidente, je remercie mon collègue d'en face pour sa question. Au début de mon intervention, un de mes amis réformistes—un bon ami et un homme très bien—m'a demandé si j'avais jamais manutentionné du blé, si j'avais travaillé dans une exploitation de blé. J'ai sûrement moissonné autant de blé et même plus que bon nombre de réformistes. Voilà ce que je voulais dire en réponse à ses questions.

Le député de Yorkton a parlé du conseil d'administration de la commission. Il l'a comparé à son équivalent ontarien. Il existe une différence entre la commission ontarienne et celle de l'ouest canadien.

La commission de commercialisation du blé des producteurs de l'Ontario commercialise tous les ans quelque 9 000 tonnes de blé, surtout au Canada et aux États-Unis. La Commission canadienne du blé, quant à elle, commercialise en moyenne 25 millions de tonnes de blé et d'orge par année dans plus de 70 pays. Il convient de noter que les décisions de la Commission canadienne du blé ont des incidences financières sans commune mesure avec celles des décisions de la commission ontarienne.

En fin de compte, le pouvoir décisionnel est mis entre les mains des administrateurs, 10 de ces 15 administrateurs étant élus par les producteurs, et une proportion de 2 pour 1 constitue une majorité raisonnable.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Madame la Présidente, le député a fait allusion aux licences d'exportation et au processus de délivrance de permis. Je ne sais pas qui a rédigé son discours, mais il est évident que cette personne ne connaît rien là-dedans. Le député n'a pas répondu à la question de mon collègue à ce sujet.

Ma question a trait à un autre point.

 

. 1545 + -

M. Larry McCormick: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Je vais profiter de l'occasion pour apprendre quelque chose sur le fonctionnement de la Chambre. Je n'essaie pas de gagner du temps. Madame la Présidente, vous pouvez ajouter le temps utilisé.

Le député qui vient de s'exprimer a dit que je n'avais pas répondu à la question. Madame la Présidente, je vous demande de vérifier le nombre de questions posées par les députés d'en face qui ont reçu une réponse. Je serais très heureux de discuter de n'importe quelle partie du projet de loi, mais je ne peux accepter cela de...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): J'invite le député de Prince George—Peace River à poser sa question.

M. Jay Hill: Madame la Présidente, de toute évidence le député est sur la défensive, et il a bien raison de l'être, parce qu'il n'a pas répondu à la question. Il n'avait aucune intention d'y répondre.

J'en arrive à ma question, parce que le temps presse. Le député et moi siégeons tous deux au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Le député était présent pendant la très courte période accordée au comité pour étudier le projet de loi C-4. Je lui demande, à titre de membre du comité, de fournir une liste des témoins entendus par le comité qui ont appuyé le projet de loi C-4 et la clause d'inclusion.

M. Larry McCormick: Madame la Présidente, je remercie le député de sa question, parce que j'étais très préoccupé par ce point.

Je voulais m'assurer que mes collègues et mes amis dans l'Ouest canadien étaient bien représentés, et non pas seulement par le Parti réformiste. Je me suis rendu au bureau du ministre et au bureau des dossiers, et j'ai constaté que plus de cent mille lettres avaient été envoyées aux producteurs et que seulement quelques centaines d'entre eux y avaient répondu. J'ai parlé à des gens de l'Ouest. Ceux-ci ne sont pas tous représentés par des réformistes. J'aimerais présenter les faits.

[Français]

L'hon. Ronald J. Duhamel (secrétaire d'État (Sciences, Recherche et Développement)(Diversification de l'économie de l'Ouest canadien), Lib.): Madame la Présidente, je vous remercie de l'occasion qui m'est offerte de me prononcer en faveur du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence.

Le projet de loi C-4 est innovateur et changera fondamentalement la relation entre les producteurs de grain de l'Ouest et leur organisme de commercialisation à guichet unique, la Commission canadienne du blé.

Ce projet de loi, qui découle de consultations intensives et de grande envergure, attribuera aux producteurs de grain un pouvoir sans précédent. Ils pourront non seulement diriger les activités de la Commission canadienne du blé, mais aussi déterminer la portée de son rôle futur sur leur vie. Sous l'égide des producteurs qu'elle dessert, la CCB sera plus ouverte, plus responsable et plus attentive aux besoins des producteurs au chapitre de la commercialisation.

En vertu du projet de loi C-4, la CCB sera dirigée non pas, comme c'est le cas à l'heure actuelle, par des commissaires nommés par le gouvernement, mais bien par un conseil d'administration. Au moins 10 des 15 administrateurs seront élus directement par les agriculteurs de l'Ouest. Puisque le gouvernement continuera de consentir une aide financière importante à la Commission canadienne du blé, il nommera quatre administrateurs minoritaires et le président.

Toutefois, à la lumière du fait qu'il s'agit d'un partenariat entre le gouvernement et les agriculteurs de l'Ouest, les administrateurs fixeront le salaire du président et seront habilités à évaluer son rendement et à recommander, le cas échéant, son renvoi. Les administrateurs auront le plein contrôle des activités de la Commission canadienne du blé.

 

. 1550 + -

Ils auront accès à toutes les données relatives aux ventes et aux renseignements financiers concernant la CCB. De plus, c'est le conseil d'administration, dont les deux tiers des membres seront élus par les agriculteurs, qui évaluera quels renseignements ne peuvent être divulgués publiquement pour des raisons de confidentialité commerciale.

Le projet de loi C-4 offrira aussi au conseil d'administration de la Commission canadienne du blé la possibilité de recourir à de nouveaux outils de commercialisation. Par exemple, on pourrait utiliser ces outils pour offrir aux agriculteurs de nouveaux modes de paiement pour leur grain et pour accélérer les mouvements de fonds.

Par exemple, la Commission canadienne du blé pourrait prendre les mesures suivantes: s'acheter du blé et/ou de l'orge, avec de l'argent comptant; augmenter rapidement, au besoin, les paiements initiaux, sans avoir à obtenir l'approbation du gouvernement, comme c'est le cas à l'heure actuelle; et permettre aux agriculteurs de se faire payer pour leur participation et une mise en commun avant la fin d'une campagne agricole.

Certaines personnes ont dit craindre que l'achat au comptant ne mine la Commission canadienne du blé. Toutefois, on doit se rappeler que le recours à ces outils relève du conseil d'administration qui est contrôlé par des producteurs, ce qui constitue un mécanisme de sûreté.

En vertu des dispositions d'exclusion et d'inclusion du projet de loi C-4, un processus démocratique accorde aux agriculteurs le plein pouvoir en ce qui concerne les produits que la Commission canadienne du blé choisit de commercialiser. La disposition d'exclusion permettrait que tout type ou toute catégorie de blé ou d'orge soit retiré, en tout ou en partie, de la compétence de la CCB. Toute exclusion devrait être appuyée par le conseil d'administration et faire l'objet de mesures visant à garantir que le grain ne serait pas mêlé au grain commercialisé par la CCB.

Si les administrateurs considèrent que l'exclusion est significative, l'exclusion devrait aussi être approuvée par des producteurs à l'occasion d'un vote démocratique.

Sous le régime du projet de loi C-4, le conseil d'administration, contrôlé par les producteurs, pourrait recourir à de nombreuses innovations en matière de commercialisation, que les groupes d'agriculteurs ont examinées au cours des dernières années, notamment la mise en commun volontaire.

L'inclusion d'un grain dans le mandat de la Commission ne serait même pas envisagée sans la demande écrite d'un organisme légitime, dont l'ensemble des membres sont des producteurs du grain en question.

Lorsque le conseil d'administration aura examiné et approuvé l'inclusion d'un grain dans le mandat de la CCB, la question devrait aussi être soumise aux agriculteurs à l'occasion d'un vote démocratique.

Comme je l'ai déjà mentionné, le projet de loi C-4 découle de consultations étendues, menées aux quatre coins de l'Ouest canadien. Même si une grande majorité des agriculteurs se sont clairement dits en faveur de la Commission canadienne du blé, ils veulent néanmoins qu'elle soit plus accessible et plus ouverte, et qu'elle soit davantage comptable aux agriculteurs. Le projet de loi C-4 accède en tous points à cette demande.

Le gouvernement a hâte de mettre la Commission canadienne du blé entre les mains des agriculteurs.

Pour toutes ces raisons, je demande à tous les députés de la Chambre d'appuyer le projet de loi C-4.

[Traduction]

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Madame la Présidente, je suis certain que le député du Manitoba qui vient de prendre la parole est au courant de l'énorme diversification de l'économie qui a eu lieu dans les Prairies, et probablement dans tout le pays, au cours des 20 dernières années ou plus. Le plus récent exemple que je connaisse est la production, en Alberta, de foin destiné à l'exportation, plus précisément la phléole des prés et la luzerne. Une énorme quantité de produits sont expédiés dans le monde entier, de l'autre côté du Pacifique, au Japon, à Taïwan et au Moyen-Orient, de même qu'aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Afrique du Nord.

 

. 1555 + -

Le canola est, bien sûr, un autre produit que le député connaît davantage. Au cours des quelque 20 dernières années, le canola est vraiment entré dans les produits canadiens ensemencés au printemps. Il s'agit d'un produit important pour de nombreux producteurs de l'ouest du Canada.

Les pois et les lentilles sont des légumineuses à grain. Des progrès énormes ont également été réalisés dans la production de ces cultures. L'avoine en est une autre. Lorsque l'avoine a été retirée de la compétence de la Commission canadienne du blé, elle a été transformée et expédiée comme avoine pour poney partout dans le monde, surtout à partir de l'Alberta.

Lorsque la réglementation a été supprimée, les exportations de boeuf sont montées en flèche. Dans ma province, l'Alberta, plus de 50 p. 100 du boeuf canadien est exporté vers le sud, peu importe qu'il soit vivant ou en boîte. Ce secteur a connu une croissance énorme.

Les produits du porc ont connu la même croissance, surtout lorsque les offices de commercialisation ont été supprimés. Des exploitations de porc dans toutes les provinces de l'Ouest tirent parti de ce secteur.

Il y a également le blé. La production dans ces secteurs a augmenté à un rythme phénoménal au cours des dernières années. Ils ne sont pas contrôlés et ne sont pas assujettis à la commission, notamment à la Commission canadienne du blé en ce qui concerne les céréales. Cependant, qu'est-il advenu du blé? La déclaration qui suit vient de la Commission canadienne du blé. Ses prévisions sur 10 ans au sujet des exportations de blé montrent que la part du marché diminuera.

Permettez-moi de lire exactement la position de la Commission canadienne du blé ou celle du Canada au sujet de l'augmentation des exportations de blé. Les exportations de blé de l'Argentine croîtront de 67 p. 100 au cours des 10 prochaines années. Les exportations australiennes de blé affichent une hausse de 39 p. 100 et celles de l'Union européenne, une hausse de 25 p. 100. Où se situe le Canada? Le Canada affiche une hausse de 15 p. 100, se situant loin derrière la plupart des grands pays exportateurs de blé.

Comment le député explique-t-il que les cultures dont ne s'occupe pas la Commission canadienne du blé sont prospères alors que celles dont elle s'occupe, le blé notamment, affichent un sombre bilan. Comment le député explique-t-il cela?

[Français]

L'hon. Ronald J. Duhamel: Madame la Présidente, j'apprécie la question de mon collègue. Tout d'abord, il a évidemment une connaissance assez approfondie. Pendant que je l'écoutais, il a fait un bon nombre de commentaires que j'ai trouvé très utiles. Je voudrais répondre de cette façon-ci.

[Traduction]

C'est plutôt intéressant, car mon collègue, qui connaît manifestement très bien ce secteur, tombe dans le piège de croire que c'est tout de suite la faute de la Commission canadienne des grains si les taux bruts canadiens dans certains secteurs se comparent défavorablement à ceux d'autres pays. Cela ne tient tout bonnement pas.

Une des raisons pour lesquelles nous avons tenu à faire ceci, je le répète, c'est que les producteurs voulaient avoir le contrôle, décider et réaliser cette vision. Ils voulaient mettre au point de nouveaux instruments afin de pouvoir innover et d'accroître leurs ventes. Toutefois, je n'accepte pas la prémisse selon laquelle la Commission canadienne des grains est responsable des statistiques citées. Cela n'a tout simplement pas de sens, comme le reconnaîtra mon collègue après mûre réflexion.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Madame la Présidente, il est très intéressant de voir en ce jour, qui est un triste jour, je le répète, pour l'Ouest du Canada et surtout pour la commission du blé elle-même, que nous ne nous occupons pas de cet instrument, de cette loi et de cette possibilité qui est la nôtre de satisfaire les exigences de l'Ouest nouveau. Le même vieux monopole et la même vieille loi qui fait des Canadiens de l'Ouest des coupeurs de bois et des porteurs d'eau sont encore là.

 

. 1600 + -

C'est un bien triste jour pour la commission du blé. Il n'y a aucun changement fondamental. Le projet de loi sera adopté dans sa forme actuelle, ce qui signifie que la commission se détruira elle-même. Cela ne fait aucun doute.

Lorsque la commission du blé a mené un sondage pour savoir comment elle se débrouillait, on lui a dit qu'elle s'en sortait très bien. C'était le 5 février. D'après un ancien professeur d'agriculture et d'économie à l'Université du Manitoba, il ne fait aucun doute que les producteurs encaisseraient davantage d'argent dans un système de double commercialisation.

Pourquoi n'écoute-ton jamais les économistes de l'extérieur de la commission du blé?

Le même type a ajouté ceci: «Il y a un prix mondial, et je ne crois pas que la commission obtienne un prix plus élevé, mais je pense que l'arrangement actuel est très efficace.»

Dans leurs discours, tous mes collègues réformistes ont tenté de défendre les principes fondamentaux de la commission du blé. Les députés d'en face sont tellement obsédés par l'idée de destruction qu'ils refusent de prendre en considération une seule proposition d'amendement.

C'est un triste jour pour nos agriculteurs. Bon nombre de nos jeunes agriculteurs veulent créer leur propre entreprise pour pouvoir utiliser les produits céréaliers dont la commission a actuellement le monopole. Ils ne pourront lancer pareille entreprise dans les Prairies aux termes de l'accord actuel.

Je partagerai le temps qui m'est accordé avec le député de Yellowhead, mais j'aurais une autre observation à faire.

Dans ma circonscription, trois grands projets sont en cours. Je veux parler du plus important. Il y a un groupe d'agriculteurs qui cultivent le meilleur blé dur du monde. Naturellement, c'est avec le meilleur blé dur qu'on fabrique les meilleures pâtes. Ces agriculteurs ont personnellement investi des milliers de dollars pour mener un sondage concernant la réouverture d'un coopérative actuellement fermée. Ces producteurs veulent pouvoir cultiver leur blé dur et le livrer à leur usine. Ils ne pourront toutefois le faire parce que la tentaculaire commission du blé fédérale estime que pareille usine devrait se trouver ici, dans l'est du Canada, et qu'elle ne leur donnera pas le feu vert.

J'espère que les gens de ma circonscription verront comment se déroule le vote sur ce projet de loi ce soir. Si le projet de loi est adopté et que la commission conserve son monopole légal actuel, elle devra bientôt dire à ces agriculteurs qu'ils ne peuvent agir ainsi parce que leur gain ne leur appartient pas. C'est d'un ridicule consommé. C'est terrible de faire cela.

Je veux que ces députés me disent, et disent aux électeurs de ma circonscription, Souris—Moose Mountain, que ces agriculteurs ne peuvent se lancer en affaires et cultiver leur propre grain. Laissons-les répondre à cela. Laissons-les dire aux gens pourquoi, lorsqu'ils souhaitent moudre du grain cultivé selon des méthodes biologiques, la commission du blé intervient pour s'y opposer et expliquer ses quatre volontés. En Saskatchewan, nous ne pouvons même pas avoir un petit moulin qui se chargerait de transformer en farine le grain cultivé selon des méthodes biologiques sans que la commission du blé n'intervienne.

Nous sommes en 1998. Le moment est venu pour les députés d'en face de libérer l'Ouest, de laisser les gens y faire ce qui se fait dans l'est du Canada, de les laisser créer leurs propres usines pour transformer ce qu'ils cultivent.

Le gouvernement devrait avoir honte d'empêcher l'implantation d'industries dans ma circonscription. Si le gouvernement fait cela, il n'entendra pas seulement parler du représentant des électeurs de ma circonscription à la Chambre.

C'est une honte absolue. Cette façon de faire est tout à fait dépassée. Nous devrions rejeter le projet de loi et enjoindre au gouvernement de refaire ses devoirs et de l'adapter à 1998.

 

. 1605 + -

M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Réf.): Madame la Présidente, j'ai fait une observation. Bien des députés d'en face ont omis de répondre à nos questions. Il y a environ deux jours, nous avons posé une question au sujet du premier dirigeant de la Commission canadienne du blé.

Parmi les gens qui suivent le débat, nombreux sont ceux qui ne se rendent probablement pas compte que, aux termes du projet de loi C-4, le ministre conserve le pouvoir de diriger la commission et accroît même ce pouvoir. La nomination la plus importante, celle du premier dirigeant de la commission, relève toujours de lui. Le ministre a donc le pouvoir de nommer cette personne. Cela confère au premier dirigeant le pouvoir de prendre quotidiennement des décisions relatives aux activités de la commission sur lesquelles les agriculteurs n'ont pas droit de regard.

La Commission canadienne du blé n'est pas le plus gros problème des agriculteurs. Ceux-ci ont d'énormes problèmes à cause du système de transport et du fardeau fiscal très lourd que leur impose le gouvernement. Les agriculteurs paient des sommes excessives en impôts. C'est effroyable.

Pour ce qui est des problèmes que pose le transport, le premier dirigeant de la commission peut continuer de déterminer où le grain sera expédié. À l'heure actuelle, les agriculteurs de ma circonscription sont très mécontents de la Commission canadienne du blé, qui les oblige à expédier leur grain en l'acheminant vers Thunder Bay et Vancouver. Ils pourraient très bien économiser de 25 $ à 30 $ la tonne en passant par Churchill. Toutefois, les gens à la commission du blé leur font toujours savoir que, pour une raison ou une autre, ils ne peuvent pas expédier leurs céréales à Churchill. Le gouvernement affirme donner le pouvoir aux agriculteurs, mais il refuse de leur dire pourquoi ils ne peuvent pas nommer le premier dirigeant de la commission, qui leur serait directement redevable.

Le député a-t-il des observations à faire sur ce que je viens de dire? Il s'agit d'une question extrêmement importante que le gouvernement a laissée sans réponse. Les gens d'en face ne se précipitent pas pour répondre à la question, parce qu'ils ne savent pas quoi dire. Comme à toutes les autres questions que nous avons posées, ils ne savent pas quoi répondre.

M. Rey D. Pagtakhan: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Le député a fait une déclaration qui est erronée. Je signale que, à l'article 3.1 du projet de loi, il est bien dit que le premier dirigeant assure la direction et la gestion des activités, sous réserve des résolutions du conseil.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je suis désolée, mais cette intervention relève plutôt du débat.

M. Garry Breitkreuz: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. J'ai dit que le ministre avait le pouvoir de nommer le premier dirigeant de la commission. Le député a dit quelque chose de complètement différent. J'ai affirmé que c'est le ministre qui a le pouvoir de nommer le premier dirigeant de la commission et il est...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Nous sommes à la période réservée aux questions et observations, et la question s'adresse au député de Souris—Moose Mountain.

M. Roy Bailey: Madame la Présidente, le député a parfaitement raison. Il est exact que, de temps à autre, le premier dirigeant de la commission du blé et la commission décident de la destination des wagons et de l'allotissement pour tout l'ouest du Canada. Le céréaliculteur n'a rien à dire sur la destination de son produit ni sur le port où il sera acheminé, c'est la commission du blé qui prend ces décisions.

Avec la nouvelle structure en place dans la région de la baie d'Hudson, nous avons maintenant l'occasion de doubler ou tripler la quantité de grain en partance. On m'a dit qu'il était possible de remplir les silos là-bas à un prix moins élevé qu'à Montréal, Saint John et Halifax. Si c'est moins cher, c'est là qu'il faut aller. Il faut saisir chaque occasion de faire économiser un dollar à l'agriculteur de l'ouest du Canada. C'est lui qui doit recevoir l'argent, et non la Commission canadienne du blé. La commission ne devrait pas toucher un cent, si elle n'agit pas dans le meilleur intérêt de l'agriculteur en maximisant le rendement, ce qui ne figure pas dans son mandat.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il reste 25 secondes pour une question très brève.

 

. 1610 + -

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Madame la Présidente, 25 secondes, est-ce que cela comprend le temps pris par les libéraux pour faire un recours au Règlement qui n'en était pas un?

Le député pourrait-il décrire les mesures qu'il a prises pour bien connaître les opinions de ses électeurs, les céréaliculteurs de sa circonscription qui seront touchés par le projet de loi?

M. Roy Bailey: Madame la Présidente, je répondrai à la question du député en rappelant que, pour qu'une industrie des Prairies devienne rentable, elle doit d'abord éviter de devoir payer le taux de fret, en n'utilisant pas de fret, de même que les frais de manutention, en n'ayant pas besoin de manutention.

Le Saskatchewan Wheat Pool a vite appris qu'il lui fallait échapper au long bras de la commission du blé. Si les industries doivent prendre de l'expansion dans les Prairies, la commission du blé doit le reconnaître et laisser les agriculteurs établir leur propre industrie.

M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Madame la Présidente, mon collègue qui vient tout juste d'intervenir a dit que l'adoption assurée du projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé, marque un bien triste jour pour les Prairies. Et il a raison, bien sûr.

Au cours de la 35e législature, nous avons eu le projet de loi C-68, sur le contrôle des armes à feu. Son adoption a marqué un bien triste jour également, surtout pour l'ouest du Canada. Bien sûr, nous savons où en est maintenant cette loi, étant donné que quatre ou cinq gouvernements provinciaux ont l'intention d'intenter des poursuites judiciaires contre le gouvernement fédéral.

Déjà, alors que le mandat du gouvernement actuel n'a même pas encore un an, nous avons le projet de loi C-4, qui se révélera pour le moins désastreux pour beaucoup de producteurs de l'Ouest, car il va leur causer du tort.

Je voudrais citer un bref extrait d'une chronique publiée dans le Western Producer. Voici ce que son auteur, le révérend J.A. Davidson, écrivait en citant un passage de la pièce The Cocktail Party, de T.S. Elliott:

    La moitié du tort causé dans le monde est attribuable à des gens qui veulent se sentir importants.

Puis, bien sûr, Reilly, qui est le psychiatre de la pièce—et j'imagine Reilly qui exerce déjà son rôle de psychiatre et le ministre responsable de la Commission du blé couché sur le divan—explique ces propos:

    Ils ne veulent pas causer du tort—cela ne les intéresse pas. Ou bien ils ne s'en rendent tout simplement pas compte, ou bien ils le justifient parce qu'ils sont absorbés par l'effort incessant qu'ils déploient pour avoir une bonne opinion d'eux-mêmes.

Beaucoup de gens causent du tort. Et quel tort causera l'adoption du projet de loi C-4, modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé? Cela causera du tort à plusieurs égards. En fait, les agriculteurs de l'Ouest ont subi des torts dès 1943, lorsque la Commission canadienne du blé est devenue un monopole.

Bien sûr, cette affaire remonte plus loin en arrière. La Commission canadienne du blé a en fait été instituée en 1935, mais elle a eu un caractère volontaire jusqu'à 1943, lorsque le gouvernement a invoqué la Loi sur les mesures de guerre et a fait de la Commission un monopole dans l'Ouest. Voici ce qui s'est produit il y a déjà plus de 50 ans. Le gouvernement canadien a conclu une entente avec la Grande-Bretagne—c'était durant la guerre—pour lui vendre 600 millions de boisseaux de blé à un prix préétabli pour livraison au cours d'une période de quatre ans. Ces 600 millions de boisseaux de blé ont tous été vendus à la Grande-Bretagne à un prix inférieur à celui du marché. Le prix était inférieur de 1 $ à 1,50 $ au prix du marché. Cet écart de 1 $ à 1,50 $ a fini par représenter au bout de quatre ans une perte cumulative de près d'un milliard de dollars, en dollars de la fin des années 1940, pour les agriculteurs de l'Ouest à cause du monopole qu'exerçait la Commission canadienne du blé.

 

. 1615 + -

Imaginez ce que cela représenterait aujourd'hui. Des dizaines de milliards de dollars perdus pour l'économie des Prairies à cause d'un gouvernement assoiffé de contrôle, à Ottawa. Mais les choses ne s'arrêtent pas là.

Des économistes ont dit que, tout au long de l'histoire de la commission, c'est-à-dire sur 30, 40, 50 ans, en plus des quatre années dont je viens de parler, les agriculteurs canadiens ont perdu en moyenne un dollar le boisseau sur tout le grain vendu pendant toutes ces années. Et, bien sûr, nous ne pouvons pas voir les livres. Il est tellement ridicule que nous ne puissions pas savoir à quoi nous en tenir au juste, parce que la Commission canadienne du blé se complaît dans le secret. Personne ne peut savoir. Elle agit dans le secret, et le projet de loi n'y change rien. Elle est encore contrôlée par le ministre et le conseil exécutif.

En 30 ou 40 ans, au rythme de centaines de millions de boisseaux par année, à un dollar le boisseau, le gouvernement centraliste d'Ottawa a arraché des milliards de dollars à l'économie des Prairies. Imaginez où en seraient les provinces de l'Ouest si tout cet argent avait pu être réinvesti dans la région. Imaginez.

Voilà comment les agriculteurs ont subi ces pertes. Environ un dollar le boisseau pendant toutes ces années. Les choses iront mal aussi sur le plan de la démocratie. Le fonctionnement de la commission n'aura rien de démocratique et, qui plus est, les autres provinces seront tenues de respecter la Loi sur la Commission canadienne du blé.

L'Alberta a choisi le système à double mise en marché plutôt que la commission. On ne peut pas faire ce choix. Même si l'Alberta a voté ainsi, nous ne le pouvons pas, à cause de la Loi sur la Commission canadienne du blé. Ce n'est pas démocratique, quel que soit le point de vue où l'on se place. Quoi que dise le projet de loi, ce sera aussi peu démocratique qu'avant.

La loi restera antidémocratique malgré les modifications et, bien entendu, malgré nos amendements puisqu'ils ont été rejetés. Le gouvernement n'a accepté aucun de nos amendements. Il les a rejetés en bloc. C'est une honte.

Il a déjà porté préjudice à un certain nombre d'agriculteurs de l'Ouest. Il en a fait des criminels. La loi a fait d'eux des criminels, et cela ne va probablement pas changer, d'après moi. Il y a déjà eu 219 accusations portées contre des producteurs de grain de l'Ouest. Quel est leur crime? Ils ont dû violer la femme de leur voisin, par exemple. Ou bien ils ont volé, ou tué. Ils ont dû faire quelque chose de semblable pour être ainsi inculpés, et jetés en prison les fers aux pieds.

Mais qu'ont-ils donc fait pour mériter d'aller en prison? Quelque chose de tout à fait impardonnable. Ils ont vendu leur grain aux Américains. Les agriculteurs des Prairies ne peuvent pas vendre leur grain aux Américains; c'est inacceptable. Les Américains paient moins d'impôts. On ne peut pas vendre son grain dans un pays comme cela, un système capitaliste où il n'y a aucune entrave à la circulation du grain. Évidemment, les agriculteurs américains ne peuvent pas vendre leur grain ici, mais ils peuvent le vendre partout dans le monde.

Nos agriculteurs sont poursuivis pour avoir enfreint une loi très embrouillée. Certains sont poursuivis, d'autres ne le sont pas. Certains sont condamnés. Dans certains cas, il y a sursis. On se demande vraiment où tout cela nous mènera. J'ai déjà dit que le projet de loi C-4 dissuadera nos jeunes de devenir agriculteurs dans l'ouest du Canada.

Pourquoi les jeunes se lanceraient-ils dans la production du blé ou de l'orge? Même après avoir investi tout leur argent pour acheter de l'engrais, des semences, des machines, des terres, après avoir travaillé dur pour semer et, bien sûr, pour récolter, c'est le gouvernement qui aura le contrôle de leur récolte.

Leur récolte ne leur appartient même pas, en réalité. S'ils veulent exporter du blé de mouture, ce blé n'est même pas à eux, mais bien au gouvernement.

 

. 1620 + -

Pourquoi devraient-ils se diriger dans le seul secteur de notre économie où les producteurs ne peuvent pas décider où ils vendront leur produit? C'est une honte. C'est un jour triste pour les agriculteurs de l'ouest du Canada.

J'ai déjà mentionné que cela nuira à l'économie de l'Ouest à cause de la diversification qui ne se fera pas dans le secteur de la transformation du blé. Si les gens qui veulent transformer le blé doivent d'abord l'acheter, le vendre à la Commission canadienne du blé, puis le racheter à un prix plus élevé, ils perdent déjà là une bonne partie de leur profit.

Ce projet de loi devrait être retiré. J'exhorte les députés d'en face à ne pas l'appuyer lorsque nous voterons ce soir.

*  *  *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Après des discussions entre les partis, je crois que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour l'adoption de deux motions. Je proposerai la première et nous verrons si elle est adoptée. Je présenterai ensuite la seconde.

La première a trait aux dates des congrès nationaux de partis politiques présents à la Chambre. Je propose:  

    Que la Chambre ne siège pas le vendredi 27 février 1998, le vendredi 20 mars 1998 et le vendredi 29 mai 1998, et que, conformément à l'article 28 du Règlement, elle soit réputée avoir siégé et s'être ajournée le 27 février 1998.

(La motion est adoptée.)

M. Peter Adams (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la Présidente, la deuxième motion a trait aux affaires de la Chambre et à la représentation des partis d'opposition. Je propose:  

    Que, le mercredi 18 février 1998, la Chambre siège jusqu'à 20 h 30, étant entendu que l'étude des initiatives parlementaires débutera à 19 h 30, qu'il n'y aura aucune délibération conformément à l'article 38 du Règlement et que tout vote par appel nominal demandé ce jour-là conformément à l'article 81 du Règlement sera reporté après la période consacrée aux initiatives ministérielles, le lundi 23 février 1998.

(La motion est adoptée.)

*  *  *

LA LOI SUR LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé et d'autres lois en conséquence, soit lu pour la troisième fois et adopté; ainsi que de l'amendement.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Questions et observations. Le secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles.

M. Gerry Byrne (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Madame la Présidente, nos vis-à-vis ont soulevé plusieurs questions qui méritent que l'on y revienne.

Les réformistes ont notamment fait valoir que l'existence d'un guichet de vente unique n'avait aucun avantage net. Il est clair que, dans d'autres industries et d'autres secteurs agricoles, les producteurs ont retiré des avantages dépassant toutes leurs espérances après la suspension de la gestion de l'offre et d'autres règlements. Au moment de la déréglementation, par exemple dans l'industrie du porc, qui a déjà été mentionnée, les producteurs ont réalisé des profits encore jamais atteints et pour ainsi dire incroyables. <

Il faut souligner le fait que le parti Réformiste veut que l'on passe à un système où tout est axé sur le marché, un système qui ferait concurrence à la commission du blé, qui ferait concurrence aussi au secteur privé et qui fonctionnerait presque en parallèle au secteur privé. En d'autres mots, tout le monde pourrait vendre partout.

C'est bien cette question qu'on m'a posée dans la circonscription de Saskatoon—Humboldt récemment. Cette remarque aurait dû être adressée au parti Réformiste. On a dit que la Commission canadienne du blé et les producteurs bénéficiaient des garanties financières offertes par le gouvernement.

Ces gens comprenaient que les agriculteurs et les producteurs bénéficiaient des garanties financières offertes par le gouvernement. Ces garanties s'appliquent en ce moment aux paiements initiaux, aux ventes de grains à crédit et aux emprunts généraux de la Commission canadienne du blé.

 

. 1625 + -

Le parti Réformiste veut voir que la Commission canadienne du blé soutienne la concurrence du secteur privé. Il veut voir la commission agir comme si elle était dans le secteur privé et que les producteurs fassent entièrement concurrence au secteur privé.

Voici la question qu'on m'a posée et que je pose maintenant au député. Le parti Réformiste trouve-t-il juste qu'un organisme qui bénéficie de garanties spéciales du gouvernement soit en concurrence avec des compagnies du secteur privé qui mettent en jeu leurs propres fonds ou préférerait-il mettre fin aux garanties dont profitent la Commission canadienne du blé et les producteurs?

La question est précise, j'apprécierais bien une réponse aussi précise. Le parti Réformiste veut-il voir fonctionner la Commission canadienne du blé comme une entreprise du secteur privé sans l'avantage de la concurrence déloyale qu'offrent les garanties du gouvernement fédéral, ou appuie-t-il la Commission canadienne du blé et la position prise par le gouvernement?

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député de Yellowhead n'est pas présent pour répondre à la question. Donc, nous reprenons le débat.

M. Gerry Byrne: J'ai pris le temps de poser une question au député qui a parlé avant moi en prenant le temps de la Chambre. Ne pourrais-je...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Nous reprenons le débat.

M. John Harvard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-4.

J'ai écouté attentivement le député du Parti réformiste de l'Alberta, le dernier intervenant de l'opposition officielle. En l'écoutant, j'espérais sincèrement qu'aucun garçon ni aucune fille ne l'écoutait. Je dis cela parce que je pense que des jeunes qui auraient écouté les discours des députés réformistes en seraient venus à la conclusion que l'on peut déformer la vérité, que l'on peut tordre les faits, qu'en matière de débat parlementaire on peut tout dire, qu'il n'y a pas de règles, pas d'honneur.

Ils ne veulent pas écouter le débat. Je n'ai jamais vu un parti politique avoir aussi peur de la vérité. Ils tremblent dans leurs bottes chaque fois qu'un député de la majorité prend la parole.

Le député de l'Alberta mentionnait qu'à une époque, à la fin des années trente et dans les années quarante, la Commission canadienne du blé n'avait pas de position de monopole, y adhérait qui voulait. Il a essayé de donner l'impression que c'est devenu un monopole parce que c'était le désir du gouvernement de l'heure.

La réalité, c'est que dès le début les agriculteurs des Prairies voulaient un monopole. Ils voulaient un guichet de vente unique. La vérité, c'est que le gouvernement libéral de l'époque hésitait beaucoup à créer autre chose qu'une commission à laquelle l'adhésion serait volontaire. Ce n'est que dans les années 1950 que l'on en est venu à la situation actuelle.

Le sentiment et l'opinion des agriculteurs des Prairies n'ont guère changé. Ils ne voulaient pas d'une commission à option à cette époque, et ils n'en veulent toujours pas, en dépit de ce qu'affirme le Parti réformiste.

Le député réformiste qui a parlé il y a quelques minutes disait que la commission n'est pas démocratique et que ce qu'elle ferait en vertu du projet de loi C-4 serait imposé aux agriculteurs des Prairies contre leur gré.

 

. 1630 + -

Qu'en est-il? Le fait est que le projet de loi C-4 enlève beaucoup d'attributions du gouvernement pour les mettre entre les mains des agriculteur. Cela se fera surtout par l'entremise d'un conseil d'administration, dont la majorité des membres seront élus par les producteurs. Le conseil d'administration sera composé de 15 membres, dont 10 seront élus par les agriculteurs et 5 seront nommés par le gouvernement.

Un député réformiste vient de dire tout à fait le contraire. Voilà pourquoi je suis inquiet pour les jeunes qui nous écoutent peut-être en ce moment. Je ne veux pas que ceux qui nous écoutent, surtout les jeunes, aient l'impression qu'un parti de l'opposition peut dire n'importe quoi dans cette Chambre. On ne peut pas agir ainsi si l'on veut s'en tenir aux principes d'éthique. Si vous voulez dire la vérité, vous devez vous en tenir aux faits.

Je voudrais discuter brièvement d'autres points. L'opposition officielle, le Parti réformiste en l'occurrence, ainsi que d'autres groupes qui s'opposent au projet de loi C-4, ont accusé le gouvernement fédéral de ne pas avoir tenu compte du groupe de travail sur la commercialisation du grain de l'Ouest et de ses recommandations. Ils ont accusé le gouvernement de ne pas écouter l'organisme qu'il avait mis sur pied. Ce n'est manifestement pas le cas. Je vais essayer de m'en tenir aux faits.

Je vais montrer dans quelle mesure le projet de loi C-4 reflète les recommandations du groupe de travail sur la commercialisation du grain de l'Ouest. Je me demande si les réformistes aimeraient qu'on leur donne des faits. Nous verrons bien s'ils veulent écouter les faits.

Il convient de noter que dans la présentation de ses recommandations, le groupe de commercialisation du grain a déclaré que ces modifications voulaient faire de cette loi une loi davantage habilitante, pour donner au ministre responsable plus de pouvoirs d'apporter des modifications par règlement, plutôt que d'avoir à soumettre la loi au Parlement à chaque occasion à des fins de modification. C'est la première leçon pour le Parti réformiste. Il est clair que ce principe est inclus dans le projet de loi C-4.

De nombreux aspects du projet de loi, comme les modes de paiement plus souples pour les agriculteurs, permettraient à la commission de faire bien des choses qu'elle est incapable de faire à l'heure actuelle. Cependant, la décision d'offrir ou non ces nouveaux services incomberait comme il se doit, aux administrateurs dont la majorité seraient nommés par les agriculteurs. Je veux rappeler aux députés réformistes, s'ils n'ont pas lu le projet de loi C-4, que nous allons avoir un conseil d'administration contrôlé de façon démocratique.

M. Ken Epp: N'induisez pas les enfants en erreur maintenant, John.

M. John Harvard: Les réformistes ne veulent pas écouter. Je sais que les faits les agacent vraiment. Lorsqu'on est prisonnier d'une idéologie, il est extrêmement difficile d'écouter les faits. Si mes vis-à-vis voulaient bien mettre de côté leur idéologie pendant cinq minutes, nous pourrions en finir.

Pour ce qui est des recommandations précises que le groupe d'étude a faites au sujet de la Commission canadienne du blé, la première portait sur la réforme de l'organisation sociale de la Commission canadienne du blé en fonction d'un certain nombre de lignes directrices.

Il est évident que le projet de loi C-4 restructurera la commission, la transformera d'une société d'état gérée par cinq administrateurs nommés en une entreprise mixte dont la majorité des membres du conseil d'administration seraient nommés par les agriculteurs. J'y reviendrai plus en détail lorsque je parlerai des recommandations précises du groupe.

La deuxième recommandation du groupe d'étude visait à permettre à la Commission canadienne du blé d'acheter des céréales au comptant. Cette recommandation se retrouve dans le projet de loi C-4. La troisième recommandation visait à permettre à la commission de rembourser aux agriculteurs leurs frais d'entreposage et de transport des céréales. Cela aussi figure dans le projet de loi C-4.

Nous essayons juste d'apprendre à ces petits enfants une chose ou deux. Je sais que c'est très difficile pour les réformistes. C'est très difficile, mais nous, de ce côté-ci, n'abandonnerons pas.

La quatrième recommandation visait à permettre de livrer du blé aux installations de stockage en copropriété des agriculteurs sans égard aux quotas ou aux contrats de livraison. Cela figure aussi dans le projet de loi C-4.

 

. 1635 + -

La cinquième recommandation tendait à permettre à la commission d'acheter du grain provenant d'autres sources que d'un silo ou un wagon. Cela est prévu dans le projet de loi C-4.

Ce ne sont que de simples faits que nous voulons transmettre pour voir si nous pouvons aider ces pauvres petits députés réformistes.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. J'ai fait des efforts pour me retenir. Le député persiste à abaisser d'autres députés. En agissant de la sorte, il enfreint les règles parlementaires et porte atteinte au décorum. Je voudrais que vous lui demandiez de retirer les propos négatifs qu'ils a tenus et de nous traiter comme les adultes que nous sommes.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je m'efforcerai de suivre le débat plus attentivement. Pour l'instant, je vais vérifier les bleus.

[Français] [Traduction]

M. John Harvard: Madame la Présidente, je vais tenter de m'en tenir aux faits. Je sais que cela trouble les réformistes. Aussi je vais m'en tenir aux faits.

La sixième recommandation visait à permettre de fermer les comptes pour une période de mise en commun ou de faire des paiements après la fin de cette période. Cela figure dans le projet de loi C-4. C'est un autre fait.

La septième recommandation visait à permettre d'attribuer des certificats négociables aux producteurs. Je signale encore une fois au Parti réformiste que cela figure dans le projet de loi C-4, même si je sais que les réformistes ont de la difficulté à écouter.

La huitième recommandation visait à établir clairement le pouvoir de la Commission d'utiliser des instruments de gestion du risque, dont les prix à terme et les enchères en traitant avec les agriculteurs et avec les clients. Cela figure dans le projet de loi C-4. Voilà une autre donnée factuelle pour les réformistes, bien qu'ils aient de la difficulté à absorber les faits.

Les recommandations que le Comité d'étude de la commercialisation du grain de l'Ouest a faites concernant les pouvoirs de la Commission canadienne du blé se retrouvent toutes dans le projet de loi C-4.

Le comité recommandait que la commission soit dirigée par un conseil d'administration composé d'au moins 11 et d'au plus 15 membres élus et nommés. Il recommandait en outre que le conseil se compose d'une majorité d'agriculteurs, d'un minimum de trois représentants du monde des affaires et d'un minimum de deux représentants du gouvernement fédéral.

Je dirais que le projet de loi C-4 suit ces recommandations d'assez près. Il y aura 15 administrateurs, dont une majorité, les deux tiers, seront élus par les agriculteurs. Rien dans le projet de loi n'oblige à nommer des représentants du secteur du grain au conseil d'administration et un certain nombre d'organismes ont exprimé des inquiétudes à l'idée que des personnes ayant des intérêts financiers dans le commerce du grain pourraient siéger au conseil d'administration. Le gouvernement nommera cinq administrateurs qui pourront venir de l'industrie, du secteur financier, du monde universitaire ou d'autres horizons.

Selon une autre recommandation du groupe de commercialisation au sujet de la direction de la Commission, cette dernière devait avoir une structure moderne avec à sa tête un premier dirigeant qui serait embauché, qui aurait la responsabilité des activités générales de la Commission canadienne du blé et qui rendrait des comptes au conseil par l'intermédiaire du président du conseil. Cette recommandation a été en grande partie mise en oeuvre dans le projet de loi C-4, qui prévoit que le premier dirigeant assurera la direction des activités générales de la Commission et que le conseil d'administration aura un président à sa tête. La seule différence, c'est qu'un des membres du conseil agira comme premier dirigeant.

Le groupe de commercialisation recommandait également d'assurer une transition rapide et en douceur vers la nouvelle structure de direction. Il recommandait que les premiers membres du conseil d'administration soient nommés.

 

. 1640 + -

On a donné suite à cette recommandation dans le projet de loi C-72, mais celui-ci n'ayant pas été adopté, on a décidé que, pour tenir l'engagement consistant à mettre en place, avant la fin de 1998, un conseil d'administration composé de membres élus, le projet de loi C-4 abolirait le conseil provisoire dont tous les membres auraient été nommés. Cette modification figurant dans le projet de loi C-4 a été bien accueillie.

Selon une autre recommandation, le comité consultatif de la Commission canadienne du blé continuerait de fonctionner jusqu'à ce que tous les agriculteurs membres du conseil d'administration soient élus. Le projet de loi C-4 prévoit que le comité consultatif de la Commission canadienne du blé restera en place jusqu'à la fin de son mandat, dont l'expiration est prévue au moment où les nouveaux membres du conseil d'administration seront prêts à entrer en fonction.

Enfin, on avait recommandé la mise en place d'un mécanisme pour que la Commission canadienne du blé établisse un capital de base. Le projet de loi C-4 va en partie dans le sens de cette recommandation, puisqu'il renferme une disposition prévoyant un fonds de réserve se limitant à trois fins. Ce fonds ne peut servir aux fins d'investissement dans des immobilisations, mais le fonds de réserve répond partiellement à cette recommandation.

Si nous regardons objectivement les 13 recommandations qui ont été faites par le groupe de consultation sur la Commission canadienne du blé, nous constatons que le projet de loi les applique telles quelles dans certains cas et presque entièrement dans les autres cas. C'est la vérité pure et simple. Je mets le Parti réformiste au défi de réfuter ces faits.

Les recommandations du groupe de consultation qui ne se retrouvent pas dans le projet de loi C-4 concernent entre autres, la vente de l'orge fourragère sur le marché libre, sans exclure la Commission canadienne du blé, alors que l'orge de brasserie ne serait vendue que par l'intermédiaire de la commission. Une autre recommandation qui n'a pas été suivie voulait que les variétés de blé non enregistrées ne relèvent pas de la Commission canadienne du blé.

Il n'a pas été donné suite à ces recommandations dans le projet de loi C-4. Le gouvernement a estimé qu'elles n'étaient pas applicables. En fait, le groupe de consultation lui-même avait des réserves sur la possibilité de mettre en oeuvre sa recommandation sur l'orge. Le projet de loi C-4 est le mécanisme qui permet aux agriculteurs de décider eux-mêmes, en choisissant ceux qu'ils élisent au conseil d'administration ou, dans certains cas, au moyen d'un vote, dans quelle mesure le blé et l'orge devraient être vendus par la Commission canadienne du blé ou sur le marché libre, avec ou sans la participation de la commission.

Une disposition du projet de loi prévoit aussi un processus pour que les agriculteurs ajoutent l'avoine, le canola, le lin et le seigle à la responsabilité de la commission, avec ou sans disposition sur le contrôle des exportations.

Résumons tout cela. Pour ce qui est de l'organisation et des instruments opérationnels de la Commission canadienne du blé, le projet de loi C-4 suit de très près les recommandations du groupe de consultation. Pour ce qui est des recommandations du groupe de consultation sur la commercialisation du blé et de l'orge, le projet de loi met en place un processus démocratique complet permettant aux agriculteurs d'en décider eux-mêmes et j'insiste sur ce dernier point. J'insiste sur le terme «eux-mêmes».

Comme les députés peuvent le constater, contrairement à ce que l'opposition officielle a prétendu, nous avons suivi de très près les recommandations du groupe de consultation sur la commercialisation du grain de l'Ouest.

Madame la Présidente, combien de temps me reste-t-il?

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il vous reste trois minutes.

Une voix: Vous avez terminé.

M. John Harvard: Le Parti réformiste est reparti. Ils ont beaucoup de mal à écouter, n'est-ce pas?

Je tiens à rendre hommage à tous les agriculteurs des Prairies qui ont participé à ce débat au sujet de la transformation de la Commission canadienne du blé.

Les agriculteurs des Prairies sont des gens très démocratiques. Ils prennent leur entreprise et la Commission canadienne du blé très au sérieux. Ils prennent le gouvernement et la politique au sérieux. Ils ont apporté une contribution énorme au débat qui se déroule depuis très longtemps. Je voudrais rendre hommage à tous les agriculteurs qui ont travaillé très fort pour tenter d'améliorer ce projet de loi autant que possible et qui nous ont fait part de leurs opinions.

 

. 1645 + -

Je sais que je vais donner le coup de grâce au Parti réformiste, mais je voudrais rendre hommage au ministre responsable de la Commission canadienne du blé. S'il y a un ministre qui a travaillé plus fort et qui a écouté davantage les personnes intéressées, je voudrais savoir qui c'est. Le ministre a fait des pieds et des mains pour trouver un terrain d'entente, un équilibre et un compromis afin que les aspirations et les désirs de tous soient reflétés dans ce projet de loi. Le ministre a accompli un travail magnifique.

Soyons tout à fait francs. Si l'on est en marge de ce débat, si l'on est un fanatique, on ne va pas apprécier le dur travail qu'a accompli le ministre.

Je sais que la plupart des agriculteurs des Prairies sont de bonne foi. Ce sont des gens modérés. Ils font partie de la société ordinaire. Ce qu'ils veulent, c'est un projet de loi qui puisse fonctionner. Ils veulent un projet de loi qui fonctionne. Ils ne s'attendent pas à ce qu'il renferme absolument tout ce qu'ils désirent. C'est tout simplement impossible dans le monde où nous vivons.

Nous devons faire exception du Parti réformiste, car ses membres vivent dans une sorte de rêve idéologique.

Je voulais consigner ces observations au compte rendu pour rectifier les faits.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Pictou—Antigonish—Guysborough, Les Airbus; l'honorable député de Qu'Appelle, Les banques; et l'honorable député de Vancouver-Est, L'éducation.

[Traduction]

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Madame la Présidente, je vais en venir à ma question dans quelques instants. Je voudrais d'abord faire observer qu'en raison du refus du gouvernement de corriger sa situation monopolistique, la Commission canadienne du blé ne pourra pas encore être confrontée à une concurrence quelconque. Si bien qu'elle ne pourra pas encore vendre le grain des agriculteurs au meilleur prix. Les agriculteurs canadiens devront encore accepter que leur grain soit vendu à un prix bien inférieur à ceux des marchés internationaux.

J'ai grandi à la ferme. Et si j'ai choisi une autre occupation que l'agriculture, c'est tout simplement parce que ce n'est pas rentable à la ferme. J'ai dû embrasser une autre carrière uniquement pour des raisons économiques, parce que la Commission canadienne du blé a maintenu les agriculteurs dans la pauvreté en ne vendant pas leur grain au juste prix.

Je suis indigné quand j'entends des politiciens de l'Est et des avocats d'Ottawa expliquer à ma famille, à mes amis, à mes voisins et à mes électeurs comment ils devraient s'y prendre pour commercialiser leur grain. À les écouter, il faut accepter un prix inférieur à celui du marché parce que tel est leur bon plaisir. Cette mesure ne s'applique pas à l'Ontario. Elle ne s'applique pas non plus à leurs électeurs, mais seulement aux gens de l'Ouest qui n'ont qu'à obéir à leurs diktats.

Comment peuvent-ils avoir l'audace et le mépris d'imposer ce projet de loi aux agriculteurs de l'Ouest?

M. John Harvard: Madame la Présidente, je me ferai un plaisir de répondre à cette question.

Tout d'abord, je veux rappeler au député de Saskatoon—en fait, d'où qu'il soit...

Des voix: Oh, oh!

M. John Harvard: C'est un jeu qui se joue à deux. Si le député s'imagine qu'il peut venir dire aux Canadiens de l'Est qu'ils sont trop loin de la région en cause pour discuter de la Commission du blé, il peut y en avoir d'autres qui disent aux députés du Parti réformiste que, parce qu'ils sont de la Saskatchewan, de l'Alberta ou du Manitoba, et en raison d'une disposition quelconque sur le lieu de résidence, ils ne peuvent pas prendre la parole. Je pense que les députés du Parti réformiste en seraient offusqués, et ils auraient bien raison.

 

. 1650 + -

À la Chambre, nous avons tous les mêmes droits. Il n'y a pas de disposition sur le lieu de résidence. Nous ne disons pas aux députés de l'Ouest qu'ils ne peuvent pas prendre la parole sur un problème propre au Québec ou aux Maritimes. Nous ne disons pas non plus à ceux de l'est du Canada qu'ils ne peuvent pas parler des questions agricoles inhérentes à l'Ouest. Le Parti réformiste ne comprend tout simplement pas.

Je vais répondre à la question du député concernant le monopole. Le député semblait vouloir dire que nous n'avions rien fait à cet égard. J'ai autre chose à dire au Parti réformiste. Nous avons fait quelque chose. Nous avons maintenu le monopole, parce que les agriculteurs des Prairies veulent un guichet de vente unique. Ils veulent un organisme de mise en marché. Ils veulent que la Commission canadienne du blé vende leur grain. Pourquoi? Parce que la Commission canadienne du blé a prouvé à maintes reprises qu'elle est la meilleure sur le marché pour faire ce travail. Personne ne peut y toucher. On l'a bien vu.

Si les députés du Parti réformiste disent que nous n'avons rien fait au sujet du monopole, je leur réponds que nous avons fait quelque chose. Nous avons fait ce qu'il fallait, parce que les agriculteurs veulent un guichet de vente unique. S'ils le veulent, c'est ce qu'ils auront, parce qu'ils le méritent.

M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Réf.): Madame la Présidente, après avoir écouté l'intervention du député d'en face, je comprends parfaitement pourquoi les gens de l'Ouest ont donné à la Chambre des communes, à Ottawa, le nom de capitale de la foutaise. Elle porte bien son nom.

Le député a beaucoup parlé de démocratie. Il a utilisé le mot démocratie dans son discours. À mon sens, qui dit démocratie dit avoir le droit de choisir. Or, le projet de loi C-4 ne nous donne pas le droit de choisir.

J'ai une question très précise à poser au député. Quelle garantie les agriculteurs des Prairies ont-ils que les administrateurs nommés par le gouvernement auront de l'expérience en agriculture ou en commercialisation? Quelle garantie trouve-t-on dans le projet de loi C-4 à ce sujet?

M. John Harvard: Madame la Présidente, voilà une jolie question, venant du Parti réformiste. Il a probablement dépassé le but qu'il visait, mais la question est quand même bonne.

La réponse va comme ceci. Nous faisons confiance aux agriculteurs. Ils connaissent leur affaire. Ils savent qui choisir pour les représenter, qui saura le mieux défendre leurs intérêts. Et je ne doute pas, même pour un instant, qu'ils enverront des personnes hors pair défendre leurs intérêts au conseil d'administration de la commission.

Le Parti réformiste a des députés en Saskatchewan. J'imagine que certains de ces députés ont entendu parler du Saskatchewan Wheat Pool, un syndicat du blé de la Saskatchewan qui connaît pas mal de succès. Le député n'est-il pas de cet avis? Comment ce syndicat est-il organisé? Il est formé d'agriculteurs qui siègent au conseil suivant un système de délégation et de sélection. Ils font du très bon travail. À preuve, la croissance qu'a connu le Saskatchewan Wheat Pool. Une belle réussite.

Si des agriculteurs savent très bien défendre les intérêts des agriculteurs au sein du conseil d'administration du Saskatchewan Wheat Pool, j'imagine qu'il peuvent faire tout aussi bien, voire mieux, à la Commission canadienne du blé.

Il faut faire confiance aux agriculteurs dans toute cette affaire. Ils ont un jugement sûr, ce qui ne semble pas être le cas des réformistes.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Réf.): Madame la Présidente, la chose la plus exacte qu'a dite le député de Charleswood—Assiniboine au cours de ses divagations des 20 dernières minutes, c'est que nous devrions désormais nous en tenir aux faits.

 

. 1655 + -

Je voudrais lui poser une question que j'ai posée à son collègue de Hastings—Frontenac—Lennox and Addington, plus tôt au cours du débat. Ma question était précise et il est très simple d'y répondre.

Le député est secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture. Il siège parfois au comité permanent, tout comme moi. Si je ne m'abuse, il était présent pendant la plupart des témoignages qui ont été présentés au cours de la période raccourcie où le comité a été saisi du projet de loi C-4. Je voudrais savoir combien de témoins le comité permanent a entendus et lesquels ont appuyé le projet de loi C-4. Combien de groupes d'agriculteurs ont comparu?

Ensuite, étant donné la grande confiance qu'il fait à l'agriculteur canadien, comme moi, surtout du fait que j'ai été agriculteur pendant une vingtaine d'années, est-ce que le député accepterait que les agriculteurs décident du sort du projet de loi C-4 en répondant à une question directe posée dans le cadre d'un plébiscite?

M. John Harvard: Madame la Présidente, pour ce qui est du plébiscite, il n'y a pas si longtemps—environ un an, je crois—un plébiscite a eu lieu dans les Prairies concernant l'orge, et le résultat en a été positif. Les agriculteurs voulaient que l'orge continue de relever de la compétence de la commission, ce que le Parti réformiste ne souhaitait pas.

Le député de Prince George a mentionné que je siège au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Je suis là tout le temps, pas seulement de temps à autre. Je suis un membre à part entière du comité. Il n'existe pas de membre à temps partiel du Comité de l'agriculture.

Le député demande combien, dans les groupes qui ont comparu devant nous, contestaient le projet de loi et combien l'appuyaient. Est-ce bien là la question?

M. Jay Hill: Combien l'appuyaient.

M. John Harvard: Quiconque connaît la façon de faire des comités sait pertinemment que ce sont les organisations qui contestent un projet de loi qui se manifestent d'abord. Ce sont celles qu'on entend plus que toute autre. Les organisations et les particuliers—dans ce cas-ci, les agriculteurs—qui approuvent le projet de loi ou qui n'ont que de petites réserves à son sujet ne cherchent pas à comparaître devant le comité. Donc, oui, nous avons entendu un certain nombre d'organisations qui sont préoccupées par la prétendue disposition d'exclusion.

M. Allan Kerpan (Blackstrap, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir participer, quoique, à une date tardive, au débat sur le projet de loi C-4. J'ai quelques observations à faire. Je voudrais informer la présidence que je partagerai le temps qui m'est accordé aujourd'hui avec le député d'Elk Island.

Je vais amorcer et conclure mon discours en parlant de deux choses que mon collègue, le député de Prince George—Peace River, a mentionnées il y a quelques minutes. Si le gouvernement est convaincu que les agriculteurs appuient le projet de loi C-4, pourquoi ne leur pose-t-il pas la question directement et simplement dans le cadre d'un référendum dont les résultats seraient exécutoires? C'est clair et net.

Ces derniers mois, j'ai parlé du projet de loi C-4 avec des agriculteurs et des représentants d'associations agricoles. Or, ce projet de loi ne trouve grâce aux yeux de personne, quel que soit leur camp. Ceux qui sont fermement en faveur de monopoles confiés à des guichets uniques n'aiment pas le projet de loi, pas plus que ceux qui voudraient pouvoir choisir un double système de commercialisation ou tout autre système.

Il arrive qu'un projet de loi ne plaise à personne, et c'est ce qui se produit dans le cas du projet de loi C-68. Le gouvernement dit aux Canadiens de l'Ouest que, s'ils se comportent bien et font ce qu'on leur demande, tout ira bien. Or, cela ne fonctionne pas ainsi. C'est impossible. Le gouvernement a fait preuve de la même arrogance lorsqu'il a présenté le projet de loi C-68 lors de la dernière législature.

Je me souviens du jour de juin 1996 où nous avons tenu un débat sur la commission du blé, ici même, à la Chambre, lors de la dernière législature. J'ai regardé en face, et nous avons compté 15 avocats libéraux du côté du parti ministériel et 12 agriculteurs réformistes qui étaient présents à la Chambre à ce moment-là. J'ai trouvé paradoxal que 15 avocats dont la majorité n'avaient jamais mis les pieds dans une exploitation agricole de la Saskatchewan disent aux agriculteurs de cette province, du Manitoba et de l'Alberta comment ils devraient fonctionner. Je ne comprends pas ce genre de raisonnement. Je ne peux pas l'accepter.

 

. 1700 + -

Je ne vois dans ce projet de loi que des modifications de pure forme à la commission du blé. Je crois que le ministre sait très bien que, à moins qu'il ne fasse certains changements, la commission se détruira de l'intérieur plutôt qu'elle ne sera détruite de l'extérieur. Il sait que les agriculteurs et les associations d'agriculteurs exercent d'énormes pressions sur la Commission canadienne du blé, pourtant il n'a pas su quelles mesures prendre. Il avait une excellente chance de proposer des modifications qui auraient plu aux agriculteurs, mais il a manqué le coche.

Les deux choses que j'entends le plus souvent des agriculteurs c'est d'abord qu'ils aimeraient pouvoir examiner les livres de la Commission canadienne du blé et ensuite qu'ils aimeraient élire tous les administrateurs de cet organisme. C'est pourtant simple.

Si on prenait ces deux mesures fondamentales, beaucoup de pression serait relâchée, c'est indéniable.

Le projet de loi C-4 nous renvoie tout autant aux droits fondamentaux des Canadiens qu'au droit de vendre le grain. Je l'ai déjà dit, nous avons vu depuis quelques années que le gouvernement libéral était incapable de reconnaître les droits fondamentaux des Canadiens dans bien des secteurs.

Le droit du Québec de décider de son propre avenir a été porté devant la Cour suprême du Canada. Notre gouvernement est incapable de reconnaître les besoins des Canadiens, le droit des Québécois de disposer d'eux-mêmes, le droit de propriété, que j'ai déjà mentionné, le projet de loi C-16, le droit de posséder une arme, le droit de vendre le blé que vous cultivez vous-même au prix le plus avantageux pour vous.

Au cours de la dernière législature, un homme s'est présenté un jour à mon bureau de circonscription, Moose Jaw—Lake Centre. Il m'a dit qu'il avait environ 10 000 boisseaux de blé dur dans sa cour. Il pouvait transporter ce blé aux États-Unis et le vendre 8 $ le boisseau. Au Canada, il n'y avait pas de débouchés. Il m'a demandé ce qu'il devait faire, ajoutant qu'il était au bord de la faillite et que s'il ne vendait pas son blé il perdrait probablement son exploitation agricole. Il m'a demandé s'il devait aller vendre son blé aux États-Unis.

Que pouvait donc répondre un homme sensé à cet agriculteur? La seule réponse, c'était qu'il devait faire ce qui était à son avis la meilleure chose pour lui. Personne ne peut contester cela. Je ne sais pas du tout ce qu'il a fait, mais si j'avais été à sa place, j'aurais transporté ce blé aux États-Unis pour sauver mon entreprise. C'est ce que j'aurais fait.

Je voudrais maintenant parler un peu de l'arrogance du gouvernement actuel. En suivant le débat d'aujourd'hui, j'ai entendu dire que les agriculteurs appuyaient le projet de loi C-4. Je voudrais demander au gouvernement combien de députés libéraux sont allés en Saskatchewan, combien d'entre eux sont allés dans les localités de Dundurn, Val Marie ou Smuts pour demander aux agriculteurs ce qu'ils pensent du projet de loi C-4.

Je ne me souviens pas qu'un seul député libéral soit allé en Saskatchewan. Évidemment, il ne faut pas oublier qu'il y a très peu de députés libéraux dans cette province. Le secrétaire parlementaire a dit qu'il croyait que les agriculteurs étaient des gens assez intelligents. Ils le sont effectivement. Ils se sont débarrassés de quatre députés libéraux aux dernières élections. Oui, je crois qu'ils sont relativement intelligents.

Comment les libéraux peuvent-ils affirmer que les agriculteurs appuient ce projet de loi lorsqu'ils n'ont même pas écouté ce que les agriculteurs de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba avaient à dire à ce sujet? On ne peut pas avoir un consensus si on n'écoute pas ce que les gens ont à dire. Les libéraux n'ont pas écouté. Ils ont pris les recommandations du comité consultatif et ont mis en place des demi-mesures dans bien des cas. Le ministre a dit que le gouvernement avait donné suite à toutes les recommandations.

Il y en a une que je veux mentionner. Le comité consultatif a recommandé que les agriculteurs aient le droit de vendre une certaine partie de leur grain sans passer par la commission. Je ne me souviens pas d'avoir entendu le ministre dire que le gouvernement avait donné suite à cette recommandation. Peut-être n'étais-je pas à ma place à ce moment-là, mais je ne crois pas qu'il l'ait mentionné.

Finalement, c'est une question de droits, une question de démocratie, une question qui concerne la capacité du gouvernement libéral actuel, ou de tout autre gouvernement, d'écouter les gens, de laisser les agriculteurs décider eux-mêmes comment ils veulent gérer leur entreprise, en respectant certaines règles évidemment.

Si on regarde la situation du secteur agricole en Saskatchewan, le gouvernement provincial néo-démocrate dira que tout est merveilleux.

 

. 1705 + -

C'est loin d'être la vérité. Le fait est que 3 500 producteurs de ma province ont des retards dans leurs paiements à la Saskatchewan Crop Insurance Corporation. Il y aura probablement cette année, parmi les agriculteurs, plus de faillites qu'au cours de deux ou trois dernières années prises ensemble. L'agriculture est au bord de la catastrophe, en Saskatchewan.

L'une de ces préoccupations est la Commission canadienne du blé, et le transport en est une autre. Nous avons des problèmes. Si seulement le gouvernement prenait le temps d'écouter ce que disent les agriculteurs, nous éviterions certains de ces problèmes. Le gouvernement libéral est responsable de certaines des faillites qui se sont produites en Saskatchewan ou finiront par s'y produire. Indirectement, il en a la responsabilité. C'est une honte.

Je vais conclure en disant que, si le gouvernement a tellement foi dans le projet de loi C-4, et s'il croit qu'une forte majorité des agriculteurs de l'Ouest qui sont soumis au régime de la Commission canadienne du blé appuient cette mesure, comme la plupart des députés ministériels le disent, qu'il agisse en conséquence. Mettons le projet de loi C-4 à l'épreuve en tenant à son sujet un référendum chez les agriculteurs. Monsieur le Président, si le résultat est favorable au projet de loi, je respecterai cette décision.

Le Président: Questions et observations? Je vois deux députés se lever. Ils se partageront le temps prévu.

M. Rey D. Pagtakhan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'une question est à l'étude au Parlement, qui se compose de députés élus, venant de toutes les régions, avec le mandat de débattre les problèmes, et que les députés réformistes renoncent soudain à cette responsabilité en demandant une élection ou un référendum, cela me laisse perplexe.

Nous avons reçu le mandat de débattre les problèmes. Dans son ouvrage intitulé Habits of the Heart, Robert Bellah distingue trois types de politique. Il parle de politique de la collectivité, lorsqu'il y a consensus. Cela sera difficile à trouver à la Chambre. Le deuxième type est la politique de l'intérêt; par définition, il y a des intérêts concurrents et parfois en conflit. Mais le Parlement doit gouverner, il doit prendre des décisions au lieu de s'en remettre à un autre processus long et coûteux.

Je demande au Parti réformiste de faire connaître sa décision et de voter, mais d'accepter la politique de la nation et celle de la majorité. En démocratie, lorsque la majorité à la Chambre se prononce, le sort en est jeté. On n'a pas à s'en remettre à un autre processus électoral.

M. Allan Kerpan: Monsieur le Président, après l'intervention du député, je suis presque en mesure de dire que je n'ai plus qu'à conclure ma plaidoirie. C'est exactement ce que je dis. Il faudrait avoir un processus complètement démocratique grâce auquel les gens qui sont le plus touchés par ce projet de loi auront l'occasion de prendre une décision.

Le député d'en face rappelait que nous sommes tous élus d'un bout à l'autre du pays pour prendre ces décisions. Il a raison. Quand la Chambre est saisie d'un projet de loi sur les pêches dans la région de l'Atlantique, je n'ai pas beaucoup de compétence à ce sujet. J'aime bien aller à la pêche, mais là se limite ma compétence en la matière. Je ne suis pas du genre à intervenir pour dire que les gens de Terre-Neuve devraient faire telle ou telle chose, car je n'ai aucune idée de ce que les pêcheurs de Terre-Neuve peuvent penser.

En revanche, il n'y a absolument aucun doute qu'un député qui n'est probablement jamais allé dans le centre de la Saskatchewan n'est pas du tout autorisé à dire: Voici ce que je veux que l'agriculteur Jones, de Kedleston, en Saskatchewan, fasse, parce que c'est pour son bien. Ce n'est pas parce que ce député est mauvais, c'est parce qu'il n'a aucune compétence en la matière. Il lui est absolument impossible de connaître les problèmes auxquels l'agriculteur du centre de la Saskatchewan fait face.

Le Président: Le député de Saskatoon—Humboldt a une minute.

 

. 1710 + -

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Réf.): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au député de Blackstrap.

Qu'est-ce qu'il peut dire à ses électeurs, ou aux agriculteurs qu'il représente? Comment leur explique-t-il que le projet de loi C-4 s'appliquera uniquement aux agriculteurs de la Saskatchewan, de l'Alberta et du Manitoba, que les contraintes que leur impose le projet de loi ne concernent pas les agriculteurs des autres provinces? Comment fait-il pour leur expliquer ça?

M. Allan Kerpan: Monsieur le Président, le député de Saskatoon—Humboldt pose une très bonne question.

Ce que je dis aux résidents de ma circonscription et aux agriculteurs à qui je parle à chaque jour, c'est qu'on se trouve en face d'une situation très inhabituelle, en ce sens que trois provinces des Prairies sont assujetties à des règles différentes—imposées par le gouvernement fédéral—de celles qui s'appliquent aux agriculteurs des autres provinces.

Je pense que cette situation explique en partie la frustration des agriculteurs de l'Ouest. Ceux-ci voient que leurs vis-à-vis ontariens ne sont pas assujettis aux mêmes règles. En fait, la Commission canadienne du blé ne devrait pas porter ce nom. Elle devrait plutôt s'appeler la «Commission canadienne du blé de l'Ouest», parce que celle-ci ne s'applique réellement qu'aux provinces de l'Ouest. Cette situation explique en partie leur frustration.

Comme je l'ai mentionné dans mon discours, si des changements majeurs ne sont pas apportés à la commission, ce ne sont pas les agriculteurs, le Parti réformiste ou l'association des producteurs céréaliers qui vont éroder et détruire la CCB. C'est la commission elle-même qui va se détruire.

M. Ken Epp (Elk Island, Réf.): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi que de me lever à la Chambre des communes, à Ottawa, dans la capitale nationale, et de prendre la parole au nom des agriculteurs.

Je viens de la ferme. Mes grands-parents des deux côtés de la famille étaient des pionniers dans l'Ouest. Ils ont défriché des terres et se sont lancés dans l'agriculture. Aujourd'hui encore, mon père, qui a maintenant autour de 85 ans, ne peut quitter la ferme. Lorsque vient le temps des semences et des récoltes, il faut absolument qu'il aille voir ce qui se passe.

L'agriculture c'est quelque chose que l'on a dans le sang. Une fois que vous avez fait de la culture céréalière, que vous avez produit des denrées, non seulement pour nourrir les Canadiens mais les gens du monde entier, cette activité devient beaucoup plus qu'un simple emploi pour assurer sa subsistance. L'agriculture est un grand service que l'on fournit à l'humanité.

Mon frère, qui a pris la relève et qui exploite la ferme familiale, m'a appris la patience et la persévérance, tout comme mon père, qui était agriculteur pendant la crise des années 30. Je me souviens d'un collant que mon frère avait apposé sur le pare-chocs de sa camionnette, qui disait quelque chose de très approprié. On pouvait y lire ceci: Quand on se plaint des agriculteurs, il ne faut pas parler la bouche pleine.

Je crois que cela est très important parce que ce sont les agriculteurs qui produisent nos aliments et que, sans nourriture, nous ne pouvons pas survivre. De plus, sans denrées alimentaires à exporter, l'économie de notre pays prendrait un dur coup parce qu'une énorme partie de notre production est destinée à l'exportation.

C'est un grand honneur pour moi de parler au nom des agriculteurs non seulement parce que je viens d'une famille agricole, mais aussi parce que je représente une circonscription rurale de l'Alberta qui compte beaucoup d'agriculteurs. Pour moi, la liberté de ces agriculteurs de gérer leurs affaires est l'essence même de ce débat.

Nous connaissons tous les conditions difficiles dans lesquelles les agriculteurs travaillent. Ils sont à la merci du temps et des caprices du gouvernement. Ils ont des coûts élevés à assumer pour les machines et les divers intrants. Je trouve que c'est une insulte que de leur enlever la liberté fondamentale de vendre eux-mêmes leur propre produit.

Je sais que je dois être bref à cause du peu de temps dont je dispose. En conclusion, je veux citer un extrait d'un ouvrage intitulé De la démocratie en Amérique écrit par A. de Tocqueville, un grand philosophe. C'est une citation qui m'est venue à l'esprit et que j'ai cherchée cet après-midi parce que je voulais la lire à la Chambre. Je cite:

      ...après avoir réussi à saisir de sa main puissante chaque membre de la collectivité et à en faire ce qu'il veut, le pouvoir suprême étend son bras sur l'ensemble de la collectivité. Il couvre la surface de la société d'un réseau de règles compliquées, détaillées et uniformes que même les esprits les plus originaux et les caractères les plus énergiques ne peuvent pénétrer pour s'élever au-dessus de la foule. La volonté de l'homme n'est pas anéantie, mais bien ramollie, pliée et guidée; les hommes sont rarement forcés d'agir, mais sont constamment limités dans leurs actions. Un tel pouvoir ne détruit pas, mais il empêche l'existence; il ne tyrannise pas, mais il réduit, affaiblit, éteint et abrutit un peuple, jusqu'à ce que chaque nation ne soit plus rien qu'un troupeau d'animaux timides et obéissants dont le gouvernement est le berger.

 

. 1715 + -

Monsieur le Président, je ne vais pas continuer jusqu'à la fin de la citation. Je dirai seulement, en conclusion, que je ne veux pas vivre dans ce genre de Canada. Je ne veux pas vivre dans un pays où un gouvernement autocratique distant dicte aux gens ce qu'ils peuvent faire et ce qu'ils ne peuvent pas faire. Je veux vivre dans une démocratie où les règles reflètent la volonté du peuple.

C'est pourquoi je prie instamment tous les députés de voter en faveur de l'amendement dont nous sommes saisis, qui veut que nous retardions un peu l'adoption de ce projet de loi pendant que nous l'examinons de façon plus approfondie et que nous y apportons les améliorations nécessaires.

[Français]

Le Président: Comme il est 17 h 15, conformément à l'ordre adopté le jeudi 12 février 1998, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé sur la motion à l'étape de la troisième lecture du projet de loi C-4.

La mise aux voix porte sur l'amendement.

[Traduction]

En ce qui concerne le nouveau renvoi du projet de loi, le député de Prince George—Peace River propose:

    Qu'on modifie la motion en retranchant tous les mots suivant le mot «Que» et en les remplaçant par ce qui suit:

    «le projet de loi C-4, Loi modifiant la Loi sur la Commission canadienne du blé...

Est-ce que cela suffit?

Des voix: Non.

Le Président: Non.

      ...et d'autres lois en conséquence, ne soit pas maintenant lu une troisième fois mais qu'il soit renvoyé au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire afin qu'il réexamine l'article 9, dans le cadre de l'article 8, afin de s'assurer que la Commission fait les mentions requises et fournit les renseignements demandés aux fins d'une vérification par le Vérificateur général, et fournit les documents et renseignements demandés en vertu de la Loi sur l'accès à l'information dans la mesure où ces documents et renseignements sont traités par la Commission ou en relèvent depuis au moins trois ans le jour où la demande est reçue par la Commission, et que la Commission continue à constituer une institution fédérale au sens de la Loi sur l'accès à l'information».

Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le Président: Convoquez les députés.

 

. 1750 + -

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)

Vote no 87

POUR

Députés

Abbott Ablonczy Alarie Anders
Asselin Bachand (Richmond – Arthabaska) Bachand (Saint - Jean) Bailey
Bellehumeur Benoit Bergeron Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok)
Bernier (Tobique – Mactaquac) Bigras Borotsik Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton – Melville) Brien Brison Cadman
Casson Chatters Cummins Dalphond - Guiral
Debien Desrochers Doyle Dubé (Lévis)
Dubé (Madawaska – Restigouche) Duceppe Dumas Duncan
Epp Forseth Fournier Gagnon
Gauthier Girard - Bujold Godin (Châteauguay) Goldring
Gouk Grewal Grey (Edmonton North) Guimond
Hart Harvey Herron Hill (Macleod)
Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom Hoeppner Johnston
Jones Keddy (South Shore) Kenney (Calgary - Sud - Est) Kerpan
Laurin Lebel Lefebvre Loubier
Lowther Lunn MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) Manning
Marchand Mark Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) Matthews
McNally Mercier Meredith Mills (Red Deer)
Morrison Obhrai Pankiw Penson
Perron Picard (Drummond) Plamondon Power
Price Ramsay Reynolds Ritz
Rocheleau Sauvageau Schmidt Scott (Skeena)
Solberg St - Hilaire Stinson St - Jacques
Strahl Thompson (Charlotte) Tremblay (Lac - Saint - Jean) Turp
Vellacott Wayne White (Langley – Abbotsford) Williams – 100


CONTRE

Députés

Adams Alcock Anderson Assad
Assadourian Augustine Axworthy (Saskatoon – Rosetown – Biggar) Axworthy (Winnipeg South Centre)
Baker Bakopanos Barnes Beaumier
Bélair Bélanger Bellemare Bennett
Bevilacqua Blaikie Blondin - Andrew Bonin
Bonwick Boudria Brown Bryden
Bulte Byrne Caccia Calder
Caplan Carroll Catterall Cauchon
Chamberlain Chan Charbonneau Clouthier
Coderre Cohen Collenette Comuzzi
Cullen Davies DeVillers Dhaliwal
Dion Discepola Dockrill Dromisky
Drouin Duhamel Earle Easter
Eggleton Finlay Folco Fontana
Fry Gagliano Gallaway Godfrey
Godin (Acadie – Bathurst) Goodale Gray (Windsor West) Grose
Guarnieri Harb Harvard Hubbard
Ianno Iftody Jackson Jennings
Jordan Karetak - Lindell Karygiannis Keyes
Kilger (Stormont – Dundas) Kilgour (Edmonton Southeast) Knutson Kraft Sloan
Laliberte Lastewka Lavigne Lee
Leung Lincoln MacAulay Mahoney
Malhi Maloney Mancini Manley
Marchi Marleau Massé McCormick
McDonough McGuire McKay (Scarborough East) McLellan (Edmonton West)
McTeague McWhinney Mifflin Milliken
Mills (Broadview – Greenwood) Minna Mitchell Murray
Myers Nault Nystrom O'Brien (London – Fanshawe)
O'Reilly Pagtakhan Paradis Patry
Peric Peterson Pettigrew Phinney
Pickard (Kent – Essex) Pillitteri Pratt Proctor
Proud Provenzano Redman Reed
Riis Robillard Saada Scott (Fredericton)
Serré Shepherd Solomon Speller
St. Denis Steckle Stewart (Brant) Stewart (Northumberland)
St - Julien Stoffer Szabo Thibeault
Torsney Ur Valeri Vanclief
Vautour Volpe Wappel Wasylycia - Leis
Whelan Wilfert – 154


«PAIRÉS»

Députés

Bradshaw Cannis Chrétien (Frontenac – Mégantic) Copps
Crête de Savoye Finestone Guay
Lalonde Marceau Ménard O'Brien (Labrador)
Parrish Rock Stewart (Brant) Telegdi
Tremblay (Rimouski – Mitis) Venne


 

Le Président: Je déclare la motion d'amendement rejetée.

La question suivante porte sur la motion principale. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

 

. 1800 + -

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

Vote no 88

POUR

Députés

Adams Alcock Anderson Assad
Assadourian Augustine Axworthy (Winnipeg South Centre) Baker
Bakopanos Barnes Beaumier Bélair
Bélanger Bellemare Bennett Bevilacqua
Blondin - Andrew Bonin Bonwick Boudria
Brown Bryden Bulte Byrne
Caccia Calder Caplan Carroll
Catterall Cauchon Chamberlain Chan
Charbonneau Clouthier Coderre Cohen
Collenette Comuzzi Cullen DeVillers
Dhaliwal Dion Discepola Dromisky
Drouin Duhamel Easter Eggleton
Finlay Folco Fontana Fry
Gagliano Gallaway Godfrey Goodale
Gray (Windsor West) Grose Guarnieri Harb
Harvard Hubbard Ianno Iftody
Jackson Jennings Jordan Karetak - Lindell
Karygiannis Keyes Kilger (Stormont – Dundas) Kilgour (Edmonton Southeast)
Knutson Kraft Sloan Lastewka Lavigne
Lee Leung Lincoln MacAulay
Mahoney Malhi Maloney Manley
Marchi Marleau Massé McCormick
McGuire McKay (Scarborough East) McLellan (Edmonton West) McTeague
McWhinney Mifflin Milliken Mills (Broadview – Greenwood)
Minna Mitchell Murray Myers
Nault O'Brien (London – Fanshawe) O'Reilly Pagtakhan
Paradis Patry Peric Peterson
Pettigrew Phinney Pickard (Kent – Essex) Pillitteri
Pratt Proud Provenzano Redman
Reed Robillard Saada Scott (Fredericton)
Serré Shepherd Speller St. Denis
Steckle Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) St - Julien
Szabo Thibeault Torsney Ur
Valeri Vanclief Volpe Wappel
Whelan Wilfert – 138


CONTRE

Députés

Abbott Ablonczy Alarie Anders
Asselin Axworthy (Saskatoon – Rosetown – Biggar) Bachand (Richmond – Arthabaska) Bachand (Saint - Jean)
Bailey Bellehumeur Benoit Bergeron
Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) Bernier (Tobique – Mactaquac) Bigras Blaikie
Borotsik Breitkreuz (Yellowhead) Breitkreuz (Yorkton – Melville) Brien
Brison Cadman Casson Chatters
Cummins Dalphond - Guiral Davies Debien
Desrochers Dockrill Doyle Dubé (Lévis)
Dubé (Madawaska – Restigouche) Duceppe Dumas Duncan
Earle Epp Forseth Fournier
Gagnon Gauthier Girard - Bujold Godin (Acadie – Bathurst)
Godin (Châteauguay) Goldring Gouk Grewal
Grey (Edmonton North) Guimond Hart Harvey
Herron Hill (Macleod) Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom
Hoeppner Johnston Jones Keddy (South Shore)
Kenney (Calgary - Sud - Est) Kerpan Laliberte Laurin
Lebel Lefebvre Loubier Lowther
Lunn MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) Mancini Manning
Marchand Mark Martin (Esquimalt – Juan de Fuca) Matthews
McDonough McNally Mercier Meredith
Mills (Red Deer) Morrison Nystrom Obhrai
Pankiw Penson Perron Picard (Drummond)
Plamondon Power Price Proctor
Ramsay Reynolds Riis Ritz
Rocheleau Sauvageau Schmidt Scott (Skeena)
Solberg Solomon St - Hilaire Stinson
St - Jacques Stoffer Strahl Thompson (Charlotte)
Tremblay (Lac - Saint - Jean) Turp Vautour Vellacott
Wasylycia - Leis Wayne White (Langley – Abbotsford) Williams – 116


«PAIRÉS»

Députés

Bradshaw Cannis Chrétien (Frontenac – Mégantic) Copps
Crête de Savoye Finestone Guay
Lalonde Marceau Ménard O'Brien (Labrador)
Parrish Rock Stewart (Brant) Telegdi
Tremblay (Rimouski – Mitis) Venne


 

Le Président: Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)

Le Président: La Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LE CODE CRIMINEL

 

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) propose: Que le projet de loi C-247, Loi modifiant le Code criminel (manipulation génétique), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

—Madame la Présidente, on m'a signalé que je disposais de 15 minutes pour faire mon exposé, et qu'à la fin, je pourrais prendre cinq minutes de plus. J'aimerais savoir si je puis utiliser ces 20 minutes tout de suite, car je les prendrais immédiatement.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Non. Vous disposez de 15 minutes maintenant, et 5 minutes seulement...

Une voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): En effet, on me dit que la députée de Drummond peut prendre les 20 minutes qui lui sont allouées tout de suite. Mais avant qu'elle ne débute, j'aimerais lui demander qui appuie sa motion.

Mme Pauline Picard: La députée de Laval—Centre, Mme Madeleine Dalphond-Guiral, appuie la motion.

Je suis heureuse d'intervenir sur le projet de loi C-247 qui vise à modifier le Code criminel. Il s'agit ici de manipulation génétique, mais, plus précisément, le projet de loi a pour but d'interdire, en vertu du Code criminel, le clonage humain.

 

. 1805 + -

Je suis d'autant plus fière que je suis la marraine du projet de loi C-247. J'aimerais aussi remercier ma collègue de Laval-Centre pour son appui dans ce dossier.

Avant de commencer, j'aimerais vous lire un éditorial écrit par Mme Ginette Gagnon, du Nouvelliste, qui dit ceci:

    Il y a moins d'un an, le monde stupéfait apprenait qu'un chercheur écossais venait de faire naître le premier animal adulte cloné, la célèbre brebis Dolly. Il apparaissait impensable qu'on puisse étendre ces manipulations génétiques à l'espèce humaine. Or, un physicien américain de Chicago, le docteur Richard Seed, veut défier la morale scientifique en ouvrant un laboratoire de clonage humain. Le docteur, qu'on dit fou, aura toutes les chances de mettre son projet à exécution si la communauté internationale ne se mobilise pas pour condamner, mais surtout pour interdire formellement cette pratique partout dans le monde.

Le 27 février, la revue scientifique Nature a publié aussi un rapport de recherche où les auteurs de l'article décrivent comment l'équipe de chercheurs a réussi, pour une première fois dans l'histoire, à produire un agneau en santé à partir d'une cellule mammaire prélevée sur un mouton adulte. C'était une première. Le principal point qui était retenu était non pas la naissance de la brebis elle-même qui s'appelle Dolly, mais l'idée que le clonage humain pourrait être possible.

Je voudrais définir pour l'information de la population ce qu'est un clone. Selon la définition populaire, c'est «un organisme, une personne, un animal ou une plante qui est la copie identique ou presque identique d'un autre organisme en apparence ou en fonction». Au niveau biologique, on dit ceci: «On parle d'une population d'organismes, de cellules ou de molécules d'ADN génétiquement identiques résultant de la reproduction de manière asexuée d'un seul et unique géniteur.»

Alors, peu de temps après l'annonce du clonage de Dolly, on apprenait justement que des scientifiques de l'Oregon avaient alors cloné deux singes à partir de cellules embryonnaires, une première chez les primates. D'une façon ou d'une autre, peu importe les techniques utilisées, on peut très bien concevoir à ce moment-ci qu'avec les développements rapides des dernières années, le clonage humain peut être une chose commune avant la fin du siècle.

Donc, les inquiétudes au sujet des tentatives de clonage d'êtres humains sont tout à fait justifiées et ce, même si personne n'a encore offert une seule raison acceptable, sur le plan éthique, de pratiquer ce genre de manipulation. C'est dans ce contexte que je présente le projet de loi C-247.

Ce faisant, je n'ai pas la prétention de mettre un terme au débat sur les techniques de reproduction médicalement assistées. Bien au contraire, je suis consciente que le projet de loi C-247 n'apporte pas une réponse globale à toutes les questions, et c'est voulu. En fait, s'il est une leçon que l'on peut retenir des témoignages entendus lors de l'étude en comité du projet de loi C-47 qui traitait des nouvelles techniques de reproduction en général, c'est justement qu'on ne peut mettre toutes les techniques dans le même panier et prétendre les réglementer comme un tout. Chaque pratique a ses particularités et pose des questions, des réflexions qui ne sont pas les mêmes et nécessitent des actions de différents ordres.

Je voudrais faire un historique de ce qui s'est passé au Canada par rapport aux nouvelles technologies de reproduction. La première enquête gouvernementale sur les nouvelles techniques de reproduction a été instaurée en 1989 avec la Commission Baird. Cette commission avait pour mandat: «de faire enquête [...] sur les progrès actuels et prévisibles de la science et de la médecine en matière de techniques de reproduction, et sur le plan des répercussions pour la santé et la recherche et de leurs conséquences morales, sociales, économiques et juridiques, ainsi que pour le grand public, et de recommander les politiques et les mesures protectrices à adopter.»

 

. 1810 + -

Après quatre années d'études, l'audition de 40 000 témoins et une facture de 28 millions de dollars, la Commission Baird a déposé son rapport en novembre 1993. Les principales conclusions et recommandations reprennent les grandes lignes des enquêtes qui se sont tenues à l'étranger sur ce sujet, notamment le rapport Warlock, produit dès 1980 par la Grande-Bretagne.

Le gouvernement fédéral a tardé à agir à la suite du dépôt du rapport, préférant étendre les consultations, notamment auprès des gouvernements provinciaux, ce que n'avait pas fait la Commission Baird. Le Bloc québécois a posé de nombreuses questions à la Chambre afin de forcer le dépôt du projet de loi qui criminaliserait certaines des pratiques liées aux nouvelles technologies de reproduction.

Ce n'est qu'en juillet 1995 que le gouvernement a finalement posé un acte concret en instaurant un moratoire volontaire qui interdit neuf techniques de reproduction, dont le clonage des embryons humains.

Le Bloc québécois, de même que plusieurs éditorialistes, d'anciens commissaires de la Commission Baird, dont Patricia Baird, des médias, des groupes d'intérêt comme des groupes de femmes, des groupes religieux, ont critiqué le caractère volontaire du moratoire, puisque certains médecins et cliniques continuent d'offrir des techniques interdites par ce moratoire.

Le gouvernement fédéral a alors annoncé, en janvier 1996, la création d'un comité consultatif provisoire dont le mandat est de veiller à faire appliquer le moratoire, de suivre l'évolution des nouvelles technologies de reproduction et de conseiller le ministre.

Le moratoire, qui n'est que volontaire, n'a cependant pas été appliqué. À titre d'exemple, mentionnons le cas d'annonces publiées dans le journal Varsity de l'Université de Toronto qui offraient l'achat d'ovules à des jeunes femmes pour des couples infertiles.

Également, notons que certains établissements continuent de payer les donneurs de sperme, et que des médecins affirment toujours se faire demander, par certaines patientes, des prélèvements de sperme sur le cadavre de leur époux décédé.

Le 14 juin 1996, le ministre fédéral de la Santé de l'époque, M. David Dingwall, a déposé le projet de loi C-47, de même qu'un exposé des principes qui énonçaient la politique globale proposée par le gouvernement fédéral sur la gestion des NTR. Le projet de loi C-47 reprenait les techniques interdites par le moratoire, en plus d'en ajouter certaines autres. Cependant, il faut bien comprendre qu'on ne criminalisait pas en vertu du Code criminel, et qu'en conséquence, l'application de cette loi n'aurait pas relevé des autorités provinciales.

La deuxième phase que le gouvernement fédéral espérait accomplir consistait à amender le projet de loi C-47 pour y inclure un cadre réglementaire touchant l'ensemble des techniques de reproduction et de manipulation génétique.

Une agence nationale de contrôle et de surveillance des nouvelles technologies de reproduction aurait veillé à l'application de la loi, à l'octroi de permis, à l'inspection des cliniques et au respect des règlements. L'organisme aurait aussi eu pour fonction de surveiller l'évolution des NTR et de conseiller le ministre fédéral de la Santé en cette matière.

Le Bloc québécois, malgré son approbation au principe du projet de loi C-47, s'était vivement opposé à la création d'une nouvelle agence nationale, déplorant le fait qu'on ne criminalisait pas en vertu du Code criminel.

Lors des audiences du Comité permanent de la santé, les témoins ont émis plusieurs réserves quant au contenu du projet de loi C-47: trop restrictif, ton négatif, frein à la recherche, enlève à des couples infertiles la seule option qui leur restait pour avoir un enfant.

La remarque la plus courante des témoins soulevait le fait qu'il n'est pas approprié de légiférer les activités de procréation assistée et les technologies génétiques dans un même cadre. Ce sont des domaines différents qui demandent un encadrement distinct. Mais malgré tous ces désaccords, il existait un consensus, à savoir, la nécessité de prendre, dans les plus brefs délais, les mesures nécessaires pour interdire le clonage humain.

 

. 1815 + -

Sur ce point particulier, tout le monde s'entend pour dire qu'il n'existe à ce jour aucune justification suffisante pour permettre qu'on clone des humains, et ce, peu importe le procédé utilisé.

En avril dernier, le déclenchement des élections fédérales a fait en sorte que le projet de loi C-47 est mort au Feuilleton, alors qu'il était sur le point de revenir à la Chambre pour son étude en troisième lecture. Il y a de bonnes raisons de croire que le gouvernement n'était pas triste de voir ce projet de loi tomber.

En effet, les nombreuses critiques soulevées par la communauté scientifique à l'égard de plusieurs dispositions du projet fédéral, critiques portant sur le fond et l'esprit même du projet, faisaient en sorte que le gouvernement aurait dû y apporter des changements significatifs.

La mort du projet de loi C-47 a notamment fait en sorte que toutes les recherches et l'expérimentation qui ont cours au Canada se font actuellement sous le coup, encore, du moratoire volontaire mis en place par la ministre de la Santé de l'époque, Mme Marleau, en juillet 1995. Ai-je besoin de dire qu'il y a urgence.

Dans son rapport final, la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction concluait, et je cite: «Nous avons jugé que certaines activités sont tellement contraires aux valeurs chères à la population canadienne et à la Commission, qu'elles peuvent nuire à un tel point aux intérêts des particuliers de la société, qu'il est impérieux que le gouvernement fédéral prononce contre elles des interdictions assorties de peines au criminel.»

Au nombre de ces activités, mentionnons la recherche sur les zygotes ou embryons humains liés à l'octogénaire, le clonage, les hybrides animaux et humains, le transfert de zygotes à d'autres espèces, et j'en passe.

Bien que les membres de la communauté internationale semblent unanimes dans leur opposition à toute forme de clonage humain, les inquiétudes sur d'éventuelles tentatives de clonage humain sont justifiées. Personne n'a encore pu justifier qu'on s'adonne à cette pratique sans poser de graves problèmes éthiques. La communauté scientifique et même les chercheurs qui ont réussi le clonage de Dolly ont affirmé n'avoir aucune intention de procéder à d'éventuelles tentatives de clonage humain.

Toutefois, on trouve plusieurs supporters du clonage d'animaux. Selon certains, il serait envisageable de créer des lignées d'animaux capables de secréter dans leur lait de grandes quantités de protéines utiles pour le traitement de maladies chez les humains. Les expériences comme celle ayant mené à la création de Dolly pourraient aussi aider les chercheurs à mieux comprendre la reproduction humaine et les maladies héréditaires, comme le cancer.

Un article du projet de loi C-47 interdisait le clonage humain. C'est cet article qui est repris dans le projet de loi C-247. Il a l'avantage de criminaliser le clonage humain, sans pour autant interdire la recherche scientifique dans le domaine de la génétique, recherche qui peut être bénéfique à plusieurs niveaux.

Le principal article du projet de loi C-247 se lit comme suit:

    1. Le Code criminel est modifié par adjonction, après l'article 286, de ce qui suit:

    286.1 (1) Nul ne peut sciemment:

      a) manipuler un ovule, un zygote ou un embryon en vue d'obtenir un zygote ou un embryon ayant un patrimoine génétique identique à celui d'un zygote, d'un embryon, d'un foetus, ou d'un être humain—vivant ou non—, ou implanter un zygote ou un embryon ainsi obtenu dans le corps d'une femme;

      b) modifier la structure génétique d'un ovule, du sperme humain, d'un zygote ou d'un embryon, si cette structure modifiée est susceptible d'être transmise aux générations futures.

    (2) Il est interdit d'offrir d'accomplir tout acte visé au paragraphe (1).

    (3) Il est interdit d'offrir de rétribuer une personne pour qu'elle accomplisse tout acte visé au paragraphe (1).

 

. 1820 + -

Puisque toutes les techniques connues et imaginables de clonage nécessiteront toujours soit du sperme, soit un ovule humain, ou les deux, le fait d'interdire la modification de leur structure génétique et leur manipulation, toujours en vue de perpétuer des caractéristiques génétiques chez d'autres foetus ou embryons, ferme la porte dès le début du processus de manipulation menant au clonage humain.

Dans le projet de loi, on retrouve les articles 2 et 3 qui étendent aussi les peines à toute personne qui offrirait ou demanderait qu'on procède délibérément à des expériences de clonage humain. On ferme donc aussi et ainsi la porte aux chercheurs de ce monde, comme Richard Seed, qui seraient tentés de venir offrir leurs services au Canada et à ceux qui seraient tentés de les solliciter.

Le Bloc québécois a demandé à plusieurs reprises une intervention du gouvernement fédéral, afin qu'il interdise ces pratiques liées aux nouvelles technologies de reproduction. Plusieurs questions ont été posées à la Chambre afin de presser le gouvernement d'agir.

Nous avons aussi émis deux communiqués de presse dans lesquels nous demandions la criminalisation du commerce des ovules, des embryons et des tissus foetaux. En mai 1994, le ministre Allan Rock a déclaré que le projet de loi devait être déposé à l'automne 1994. Le moratoire volontaire très limité n'est venu qu'à l'été 1995, et le projet de loi C-47, qui ne fait que transposer le moratoire en une loi, a été déposé en juin 1996. Nous sommes en février 1998. Rien n'a encore été fait et c'est très inquiétant.

En dernier lieu, et à un autre niveau, il faut souligner que les nouvelles technologies de reproduction soulèvent une problématique extrêmement grave et préoccupante pour l'avenir même de notre société telle que nous la connaissons.

En effet, alors que le taux de natalité est en chute libre, on constate par ailleurs que le domaine de la médecine génétique et des NTR évolue à un rythme effréné. L'utilisation de ces techniques bouscule nos valeurs, car elle concerne la définition même des bases de notre société à savoir, notre descendance.

Au sein même de la communauté médicale, les intervenants ne s'entendent pas sur les limites qui devraient s'imposer ou non. Au sein de la population en général, celle-ci est encore plus confuse en raison du manque de connaissance et d'information.

Je cite Louise Vandelac, une sociologue et spécialiste en la matière. À ce sujet, elle écrivait:

    On laisse ainsi, par ignorance, indifférence, naïveté ou défaitisme, aux prétendus spécialistes ce qui, depuis l'aube des temps, assure la suite du monde et la trame des rapports familiaux et sociaux: l'engendrement, la filiation et leur évolution, alors même que l'enjeu n'est rien de moins que celui de notre propre mutation et celle de l'humanité.

En effet, comment réagir à la «dématernisation» de la procréation? Où devons-nous arrêter les manipulations génétiques que certains voudraient utiliser pour enrayer les maladies particulières, mais que d'autres voudraient utiliser pour améliorer l'espèce humaine?

J'en arrive à ma conclusion. Je voudrais simplement citer ce que dit le fameux scientifique qui veut ouvrir des cliniques de clonage humain. C'est une phrase qui me préoccupe au plus haut point: «Cloner et reprogrammer l'ADN est le premier vrai pas qui permettrait à l'homme de ne faire qu'un avec Dieu.»

Si ce n'est pas se prendre pour Dieu, je ne sais pas ce que c'est. Je demande donc à tous les élus de cette Chambre de bien vouloir appuyer le projet de loi C-247. Il en va de notre société.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse de participer au débat d'aujourd'hui.

 

. 1825 + -

Je veux d'abord dire, en ce qui a trait aux défis que posent les progrès technologiques, particulièrement dans le secteur de la santé, qu'il convient de se demander si le seul fait de pouvoir faire quelque chose nous autorise à faire cette chose ou à permettre qu'elle soit faite.

C'est la question que nous, députés fédéraux, devons nous poser. C'est aussi une question sur laquelle je me suis penchée lorsque je siégeais au niveau provincial. J'ai eu l'honneur de déposer et de faire adopter à l'assemblée législative de l'Ontario la Loi sur les établissements de santé autonomes.

La plupart des députés ici n'ont probablement jamais entendu parler de cette mesure. Toutefois, l'une des raisons liées à l'intérêt public qui a motivé le dépôt de cette loi est qu'il se passait bien des choses à l'extérieur des hôpitaux en Ontario, sans que l'on ait la même assurance de qualité et la même responsabilité que dans les hôpitaux.

Il en était ainsi parce que la technologie permettait dorénavant de faire dans les bureaux de médecin et les cliniques externes des choses qui, traditionnellement, avaient toujours dû être faites dans les hôpitaux.

La loi en question visait à mettre en place une réglementation qui garantirait la sécurité du public et l'assurance de la qualité en ce qui a trait aux nouvelles technologies qui permettaient de faire certaines choses ailleurs qu'en milieu hospitalier.

Les techniques de reproduction, notamment la fécondation in vitro, sont au nombre de ces nouvelles technologies. À mon grand désarroi, une fois la mesure législative adoptée, le gouvernement néo-démocrate avait décidé de ne plus assurer la fécondation in vitro.

La Loi sur les établissements de santé autonomes ne s'applique, évidemment, qu'aux services assurés.

Il existe donc une situation en Ontario et dans la plupart des provinces à travers le Canada où on voit toutes les variantes éthiques et morales du clonage, de la présélection du sexe, de la manipulation génétique, de l'utilisation d'embryons et de sperme à des fins de recherche, des banques de sperme. Toute cette activité sans le moindre cadre réglementaire.

Les provinces pourraient prendre certaines mesures si elles voulaient régler la question, en ce qui concerne les services non assurés. Elles pourraient établir des cadres réglementaires pour entamer le processus.

Je crois qu'au niveau fédéral on a la responsabilité d'étudier ces nouvelles questions. On a déjà beaucoup fait, à ce propos. On a présenté des projets de loi. Le ministre fédéral de la Santé se propose de présenter une mesure législative sur de nombreuses questions, notamment celle du clonage que la députée a soulevée aujourd'hui. J'estime que la députée a rendu un grand service à la Chambre en nous permettant de lancer ce débat.

J'aimerais dire que je ne crois pas qu'on devrait permettre le clonage au Canada. Il existe un moratoire efficace et volontaire contre l'utilisation d'un bon nombre de ces technologies. Les experts dans le domaine ont convenu de ne pas utiliser ces technologies sans cadre réglementaire bien défini. Ils n'ont pas manqué à leur promesse et je doute qu'ils le fassent, car ils savent qu'un projet de loi sera présenté sous peu.

Je dirais à la députée et à tous ceux qui, comme moi, s'intéressent à ce sujet, que ce n'est pas le Code criminel mais plutôt la législation sur la santé qui devrait s'appliquer, parce qu'il s'agit d'une question de politique en santé. C'est une question de santé.

Ceci dit, j'aimerais faire valoir les considérations juridiques qui s'appliquent à cette sorte de technologie.

On place dans une éprouvette des spermatozoïdes et un ovule qui serviront à produire un embryon qui se transformera en foetus qui pourrait devenir un bébé, une personne. Cela soulève la question suivante: Qui est le parent? Quels seraient les droits de cet enfant par rapport à la succession?

 

. 1830 + -

On ne parle pas ici seulement de ce que l'on pourrait fabriquer dans une boîte de Petri ou un incubateur. On parle de toute la question de la mère porteuse. Dans ce cas, on prélève un oeuf d'un donneur, le sperme d'un autre donneur et l'on implante le zygote ainsi conçu dans le sein d'une mère porteuse. Dieu sait ce qui nous attend. On dit que ce serait possible de l'implanter dans le sein d'un homme. Une mère porteuse pourrait donc être un homme. Cela semble impossible? Ce serait de la science-fiction? Compte tenu de l'évolution rapide de la technologie, rien n'est impossible.

Nous devons prendre conscience des enjeux qui nous attendent pour protéger nos enfants à l'avenir. Ce sont là des enjeux d'ordre sociétal qui doivent être traités dans une large perspective.

La question de la sélection du sexe de l'enfant a été traitée dans un projet de loi antérieur à celui-ci, le projet de loi C-47. Celui-ci stipulait très clairement que cette pratique était interdite au Canada, ce que j'approuve, sauf pour de très bonnes raisons médicales. Quelques exceptions et raisons valables y étaient précisées.

Je sais que, dans certaines cultures, on préfère avoir des enfants d'un sexe plutôt que de l'autre. Je trouve personnellement choquant qu'on puisse vouloir un bébé taillé sur mesure et qu'on en détermine d'avance le sexe. Non seulement cette pratique déséquilibrerait les lois de la nature, mais nous pourrions même avoir de graves problèmes démographiques sur cette planète, si elle devenait la norme. C'est pourquoi je tiens à exprimer mon inquiétude.

La thérapie génique doit aussi être soumise à une réglementation rigoureuse. Un jour, dans ce monde où nous vivons, il se pourrait que nous ayons la possibilité d'éliminer une maladie par la thérapie génique. Nous pourrons peut-être un jour vaincre les cancers. Nous pourrons peut-être guérir des maladies héréditaires, grâce à la thérapie génique.

Ce sont des débats que nous devons avoir, et nous pouvons le faire dans un cadre bien réglementé. Nous devons discuter de ces questions dans le contexte approprié, parce que, quand nous discutons de ces enjeux, nous mettons aussi en cause nos valeurs et nos croyances. Nous aimons à croire que nos valeurs et nos croyances sont bien canadiennes, mais nous savons bien que nous ne pouvons pas nous entendre sur tout.

La considération première, dans l'élaboration de la politique gouvernementale, doit être la protection des plus vulnérables et la protection de nos enfants pour l'avenir.

Le précédent projet de loi traitait aussi de la question de la recherche. Quel genre de recherche allons-nous permettre au moyen des embryons qu'on aura produits en trop à la suite du croisement en laboratoire d'ovules et de spermatozoïdes provenant des banques?

Je crois que nous sommes tous d'accord pour interdire qu'on porte un enfant en échange d'argent. Nous devons interdire que quiconque s'enrichisse grâce au trafic d'ovules ou de sperme. Nous devons établir très clairement que le clonage n'a pas sa place dans la société canadienne.

Nous avons besoin d'une loi complète. Je sais que le gouvernement entend présenter, dans un avenir très rapproché, on peut l'espérer, une mesure législative qui va accroître le bien-être des Canadiens en leur permettant de faire des choix quant à l'utilisation des techniques de reproduction et des manipulations génétiques. C'est tout à fait pertinent.

De nombreux couples désespèrent d'avoir un enfant. Nous devons comprendre que les gens veulent avoir accès a cette technologie, mais cela doit se faire dans de bonnes conditions. Ces gens doivent savoir que leur liberté de choix ne leur permettra pas de faire quoi que ce soit qui est contraire à l'éthique ou dangereux pour leur santé ou celle de leurs enfants.

Je veux, plus particulièrement, que les femmes aient des renseignements au sujet du type de résultats qu'elles peuvent attendre de l'utilisation de cette technologie. Nous savons que, dans certains cas, ces résultats sont douteux. Il faut parvenir à un équilibre pour protéger les intérêts des femmes et des enfants.

 

. 1835 + -

J'attends avec impatience la présentation de la mesure législative pertinente. Je tiens à remercier notre collègue d'avoir soulevé ce débat à la Chambre, et je suis heureuse d'avoir eu l'occasion d'y participer.

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.): Madame la présidente, j'ai le privilège de parler de ce projet de loi ce soir, et je remercie ma collègue de l'avoir présenté. J'ai le privilège de siéger avec elle au Comité de la santé, à l'instar de certains de nos vis-à-vis, et je porte donc un très grand intérêt à la question dont nous sommes saisis.

Certains vont minimiser les dangers du clonage humain, mais je pense que des préoccupations tout à fait légitimes ont déjà été exprimées. Je suis généralement d'accord avec ce projet de loi, mais je voudrais également proposer certains ajouts qui, selon moi, renforceraient le projet de loi présenté. Une fois de plus, je félicite Mme Picard, la députée de Drummond, d'avoir présenté ce projet de loi à la Chambre de cette question ce soir.

Certains minimisent les dangers du clonage humain. Ils disent que les êtres humains manipulent déjà l'ordre naturel des choses et que le clonage humain n'a rien de différent à cet égard. D'aucuns affirment également que le clonage humain conduirait simplement à la création de vrais jumeaux qui n'auraient tout simplement pas le même âge et qu'il n'y a pas de quoi en faire un drame.

D'autres disent que le clone différerait du sujet initial à cause de l'environnement.

De vrais jumeaux ne sont pas, en fait, identiques à tous les égards. D'autres facteurs, comme l'environnement, l'expérience de vie et certains choix qu'ils font conduisent à la création d'une personne différente avec le temps. Cependant, les dangers sont quand même réels. Je voudrais passer rapidement en revue certains des risques pour la santé associés au clonage.

Un clone pourrait être plus faible, puisque le clonage se fait par reproduction asexuelle. Les clones ne bénéficieraient pas de la combinaison de gènes consécutive à la reproduction sexuelle. La reproduction par liaison sexuelle confère des forces nouvelles, l'une des plus importantes étant la résistance à la maladie, si importante à la survie de la race humaine. Le clonage pourrait également être utilisé pour créer délibérément un individu dont le système immunitaire serait affaibli, ce qui serait une pratique répréhensible, à mon avis.

Donc, le clone, du fait qu'il ne bénéficierait pas des avantages de la combinaison génétique qui confère la force et, notamment, la résistance à des maladies nouvelles, pourrait être un individu plus faible. Le risque de vieillissement prématuré constitue un autre risque du clonage. La personne issue du clonage est un «nouveau-né», mais les chromosomes des cellules ayant servi à la créer proviennent d'un adulte. Ces cellules seraient donc déjà aussi vieilles que leur donneur. C'est pourquoi certains de ceux qui oeuvrent dans ce domaine craignent que les personnes créées au moyen de cette technique pourraient vieillir plus rapidement et être prématurément victimes des maladies débilitantes propres aux personnes âgées.

De plus, toujours sur le plan de la santé, la méthode du tâtonnement, caractérisée par des réussites et des échecs, comporte aussi le risque de créer des êtres bizarres. La technologie utilisée pour créer Dolly est loin d'être parfaite. L'équipe de scientifiques britanniques qui l'a créée a dû faire plusieurs centaines de tentatives avant de réussir. Même si la technique peut être perfectionnée sur des mammifères non humains, les caractéristiques propres aux cellules humaines obligeraient les scientifiques à faire d'innombrables tentatives. On peut toujours perfectionner la technique du clonage chez des mammifères non humains, mais ce serait différent quand viendrait le temps de l'appliquer au clonage d'êtres humains.

Par ailleurs, il y a des risques psychologiques et émotionnels considérables dans le domaine du clonage humain. Je suis d'avis que le clonage créerait un sens véritablement pervers de propriété chez les deux personnes.

D'abord chez la personne qui déciderait de faire un clone, que cette personne soit le donneur ou non. On peut supposer qu'il y aurait des raisons bien particulières pour décider de cloner un enfant. Dès le départ on considérerait sans doute que cet enfant existe dans un but précis. Habituellement, cette raison serait que l'on souhaite que l'enfant succède à l'adulte cloné.

Deuxièmement, chez le clone qui s'estimerait un peu dans l'obligation d'atteindre l'objectif pour lequel il a été cloné. Ce serait une forme de psychologie perverse comportant des risques émotionnels pour le clone également. Il y aurait donc ce genre d'attentes. Par exemple, un parent pourrait désirer un enfant avec un avenir précis, capable de devenir un super athlète, une vedette de cinéma ou autre chose. Ce ne serait pas sain pour l'enfant. Nous avons lu à ce sujet et nous connaissons certaines des conséquences dévastatrices de telles attentes, et elles seraient encore beaucoup plus graves si les attentes étaient le motif même de la création du clone.

 

. 1840 + -

Supposons que l'on clone un grand athlète pour en avoir un autre, un Wayne Gretzky par exemple. Est-ce qu'un être humain doit rester libre de poursuivre la carrière de son choix, en musique ou ailleurs, ou peut-on accepter qu'il soit poussé dans une certaine direction par des parents qui n'ont procédé au clonage que dans un but précis?

Supposons que des parents décident de cloner un de leurs enfants, malade en phase terminale. Cet enfant s'éteindrait et un clone viendrait remplacer le disparu. Cet enfant cloné se sentirait dans l'obligation d'agir, de se comporter et de parler comme le prédécesseur, en tant que remplaçant de l'enfant décédé. Cela l'amènerait à grandir dans un milieu cruel et destructeur.

Nous avons donc brièvement mentionné ce soir certains des risques émotionnels et psychologiques du clonage.

Si le clonage devenait légal, l'eugénique, que nous rejetons tous, et la discrimination deviendraient inévitables. C'est un autre problème du clonage humain. Il n'y a pas moyen de réglementer les motivations ou de déceler le manque de sincérité dans les motifs invoqués.

J'appuie l'intention de ce projet de loi visant à interdire le clonage. C'est une bonne mesure qui nous conduirait à un débat sur l'interdiction totale du clonage humain. À ce jour, 19 pays européens ont signé un traité anticlonage. Les politiciens américains proposent également une interdiction permanente du clonage.

Je voudrais établir clairement que ce projet de loi ne s'étend pas au cas où la technologie de l'analyse de l'ADN humaine puisse servir à reproduire des animaux possédant des traits humains. Cette question devra être débattue beaucoup en détail ou faire l'objet d'un autre projet de loi. Il ne suffit pas d'interdire le clonage humain. Il nous faut élaborer des règlements précis à appliquer dans ce secteur en pleine expansion, dans ce domaine de pointe.

Je voudrais faire une suggestion constructive à l'adresse de la députée de Drummond et des autres députés qui s'apprêtent à se prononcer sur ce projet de loi. Nous devrions également punir ceux qui ne tiennent pas compte de la loi. Et pas nous contenter d'une petite tape sur les doigts. Pour moi et d'autres de la Chambre, une amende pourrait faire l'affaire, mais pas pour certains.

PPL Therapeutics, l'entreprise qui a produit Dolly, anticipe pour elle seule un marché d'un milliard de dollars au cours de la prochaine décennie. Pour des sociétés qui font ce genre de chiffre d'affaires, des amendes de l'ordre de plusieurs centaines de milliers de dollars équivaudraient à peine à une amende pour infraction de stationnement. À notre avis, une amende ne suffit pas. Si les sociétés se mettent à générer des milliards de dollars comme le prévoit cette entreprise, je crois que ce n'est pas des peines financières qui les dissuaderont.

La menace d'une lourde peine d'emprisonnement devrait faire réfléchir ceux qui sont tentés de passer outre à l'interdiction du clonage. Si ce projet de loi est adopté, le comité de la justice devrait être chargé de fixer une peine d'emprisonnement adéquate pour ceux qui ne respectent pas l'interdiction du clonage humain.

Moyennant ces suggestions constructives, je suis disposé à appuyer en principe le projet de loi. Je vais tenter de convaincre mes collègues et d'autres d'en faire autant. Je remercie encore une fois la députée d'avoir faut inscrire ce projet de loi à l'ordre du jour.

[Français]

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Madame la Présidente, c'est pour moi un plaisir de participer à ce débat, et je voudrais offrir mon appui à la motion de la députée de Drummond qui vise à interdire le clonage humain.

[Traduction]

Pour les parlementaires qui ne savent pas où donner de la tête tant leurs tâches sont exigentes et variées, l'idée du clonage humain peut être quelque peu séduisante.

 

. 1845 + -

Combien d'entre nous se sont dits: si seulement j'avais un clone? Je sais que mes deux jeunes fils, Joe et Nick, aimeraient que je puisse être à deux places en même temps. Cela m'aiderait également à répondre à mes électeurs qui se demandent, quand je suis à Ottawa, pourquoi je ne suis pas à Winnipeg et, quand je suis à Winnipeg, pourquoi je ne suis pas à Ottawa.

Par contre, l'idée qu'il puisse y avoir deux copies conformes de moi-même ou encore deux copies conformes de qui que ce soit a de quoi faire peur. Pouvez-vous vous imaginer ce que donnerait le clonage du ministre des Finances? Contrairement à ce qu'on entend dans la publicité sur une gomme à mâcher, on ne doublerait pas notre plaisir, mais on doublerait les réductions et on doublerait les épreuves que nous subissons.

Que deviendrait le monde si l'on était en mesure de cloner les deux chefs de l'opposition? Le monde est-il assez grand pour tous les accueillir? Que voudrait dire alors l'expression «tenir un double langage»? Qu'est-ce que tout cela signifierait?

Pour poursuivre dans cet ordre d'idées, permettez-moi de vous citer un extrait d'un article rédigé par Patricia Williams et publié il y a quelques jours dans le Citizen. L'auteur écrit:

    Imaginez ce que le monde de la mode pourrait faire avec un clone au corps parfait. Comme on l'a fait avec Barbie, on pourrait créer des êtres à qui les vêtements iraient comme un gant. Mozart? Son code génétique nous vaudrait un peu plus de codas. Bill Gates et Donald Trump? Ils seraient légion.

    Il faudrait aussi cloner plus d'avocats dans un monde où des organes compatibles pourraient être «cultivés». Les «droits d'exploitation» feraient-ils l'objet de présomptions de garde ou de propriété dans les nouveaux procès auxquels donnerait lieu cette nouvelle réalité micro-territoriale? J'ai payé pour cet enfant, c'est mon code génétique, donnez-moi ce rein immédiatement.

Il pourrait être intéressant d'approfondir cette discussion, de poursuivre ce jeu imaginaire et de continuer de méditer sur les possibilités du clonage, si ce n'était que cette question est en train de devenir très importante et très grave, comme l'a souligné la députée de Drummond.

Les idées qui n'appartenaient autrefois qu'au domaine de la science fiction font de plus en plus partie de l'actualité. Ce n'est pas du tout une question frivole. C'est loin d'être une fantaisie tirée d'une technologie abracadabrante. On l'a d'ailleurs bien précisé il y a plusieurs années.

On a souligné que cette question revient assez souvent en Chambre depuis de nombreuses années. Avec la création de la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction il y a environ 10 ans ou même plus et le dépôt du rapport final en 1993, le gouvernement s'est penché sur la question du clonage des embryons humains. Ce n'est pas une question nouvelle.

Ce qu'on cherche à savoir aujourd'hui, c'est pourquoi les choses traînent en longueur et pourquoi le Canada a pris un tel retard? La question a été portée à l'attention de la Chambre par de récents développements. Sans parler de la fameuse brebis: nous avons tous entendu des histoires sur Dolly la brebis.

Cela présente un sérieux problème, tout particulièrement si l'on tient compte du fait qu'avant le clonage de la brebis en 1993, il y avait eu d'importants développements: des chercheurs de Washington avaient annoncé qu'ils avaient réussi le clonage d'embryons humains en séparant les cellules d'un embryon parent. Les pays ont alors réagi en interdisant le clonage humain par séparation des embryons. Personne, à l'époque, n'avait même rêvé de cloner une cellule humaine adulte. C'était impensable.

Nous savons aujourd'hui, grâce aux découvertes scientifiques dans le domaine, que nous avons affaire à une question très importante.

 

. 1850 + -

Le temps file. Aujourd'hui, la députée libérale de Thornhill a parlé de la question générale dont nous sommes saisis comme s'il s'agissait de quelque chose de nouveau. En fait, nous avons déjà discuté de cette question à la Chambre à maintes occasions.

Nous n'avons pas à réinventer la roue ni à recommencer à nous demander si cette question devrait relever du Code criminel ou être assujettie à d'autres dispositions législatives distinctes. En fait, à la lumière de vastes consultations menées auprès des Canadiens d'un océan à l'autre, la Chambre a déjà reconnu que nous avons besoin d'une loi à ce sujet. Il nous faut interdire le clonage humain.

Je veux aujourd'hui demander au gouvernement libéral de présenter le plus rapidement possible une nouvelle version du projet de loi C-47 qui avait fait l'objet d'un débat et de discussions approfondis à la Chambre.

Ce projet de loi comportait peut-être des lacunes. Nous avons toutefois eu du temps pour résoudre ces problèmes. Le ministre de la Santé ne devrait pas esquiver les questions importantes dont nous sommes saisis. Il devrait rapidement établir sa position, veiller à ce que les organisations de femmes de partout au Canada soient informées de toutes les modifications proposées et présenter sans tarder un nouveau projet de loi. Nous ne pouvons pas nous permettre de ne rien faire dans ce dossier.

À cause du clonage d'une brebis et des répercussions de la déclaration et des prétentions du Dr Seed aux États-Unis, de nombreux pays ont pris des mesures dernièrement. Dix neuf-pays de l'Union européenne ont proposé d'interdire officiellement le clonage humain. Je pense qu'encore une fois le Canada tarde à légiférer.

Nous tardons à nous pencher sur des questions très graves. J'espère que nous pourrons agir immédiatement en profitant de l'occasion que nous donne la députée de Drummond de débattre du problème, vu qu'il semble se dégager un large consensus à la Chambre en faveur d'une loi interdisant carrément le clonage humain.

De nombreuses questions se posent. Puisons dans les conseils que nous avons reçus de la commission royale, dans ceux qui nous ont été donnés au sujet du projet de loi C-47, et proposons une vaste loi sur les technologies de reproduction dès que possible. Le cadre est en place. Les principes généraux ont été énoncés. Nous devons maintenant agir.

Je conclus en disant que, si nous nous inspirons de la documentation qui nous a été procurée sur le projet de loi C-47, nous aurons une régime de gestion complet qui pourra nous guider, face à ce problème particulier et pour l'ensemble des problèmes de techniques de reproduction.

Cette loi reposait sur trois importants principes, ou facteurs, qui doivent être pris en compte. Il faut repousser la menace contre la dignité humaine, écarter les risques pour la santé et la sécurité humaines, et régler les autres problèmes sociaux et moraux graves.

Notre approche consiste à faire face aux dangers de la commercialisation de la reproduction humaine, notamment pour les femmes et les enfants. Enfin, nous devons tenir compte des intérêts supérieurs des enfants touchés par ces technologies et transactions. Nous avons les fondements. Agissons.

M. Greg Thompson (Charlotte, PC): Madame la Présidente, la journée a été intéressante. Un peu plus tôt aujourd'hui, j'ai invoqué la question de privilège. Pour m'y préparer, j'ai feuilleté les débats des années précédentes. Je suis remonté jusqu'à 1980 pour faire ma recherche. J'ai retrouvé le nom de personnes avec qui j'ai siégé à la Chambre il y a plusieurs années. Je ne pense pas que dans leurs rêves les plus fous, ils aient pu imaginer que nous débattrions un jour un sujet comme celui-ci. Je ne pense pas qu'ils auraient cru que les sciences et la technologie évolueraient aussi rapidement que ces dernières années. Toutefois, c'est bien de cela qu'il s'agit.

 

. 1855 + -

J'ai écouté les députés de Thornhill et de Winnipeg-Centre-Nord parler des changements importants qui sont en train de révolutionner la société à un rythme tel que nous n'arrivons pas à suivre.

Si on remonte ne serait-ce que quelques années en arrière, qui aurait pu imaginer que l'on puisse manipuler des ovules et des spermatozoïdes pour créer une vie nouvelle à l'extérieur du corps d'une femme? C'était inimaginable.

Nous le savons maintenant, les enfants peuvent naître de femmes qui ne sont pas leurs mères génétiques. Le diagnostic prénatal qui permet de détecter les troubles génétiques et autres anomalies de l'embryon ou du foetus avant la naissance constitue un autre exemple de l'évolution des sciences et de la technologie.

C'est le genre de choses qui nous préoccupent: des changements importants, l'évolution de la technologie qui pose des questions éthiques et morales très pointues.

Le gouvernement dont je faisais partie en 1989 avait mis sur pied une Commission royale d'enquête sur les nouvelles technologies de reproduction, et ce, en réponse aux préoccupations mentionnées par certains députés à la Chambre ce soir. Cette commission, créée en 1989, avait pour mandat d'étudier certaines de ces questions. Le gouvernement a donné suite à ses recommandations en présentant le projet de loi C-47.

Comme on l'a déjà dit, le projet de loi C-47 est mort au Feuilleton quand les élections ont été déclenchées au printemps dernier. La députée du Québec qui a présenté le projet de loi C-247 l'a fait en réponse à la mort du projet de loi C-47. Il ne fait aucun doute qu'il existe de nombreuses similitudes entre les deux projets de loi. Cette mesure législative est hautement technique. En toute honnêteté, je doute que les trois courtes heures qui ont été allouées à ce projet de loi d'initiative parlementaire soient suffisantes pour en faire une analyse sérieuse.

Des gens de partout au Canada ont exprimé des inquiétudes à l'égard de ce projet de loi. La commission a fait rapport et formulé des recommandations surtout fondées sur les renseignements recueillis au fil des ans auprès de Canadiens d'un bout à l'autre du pays, dont un grand nombre étaient de toute évidence des spécialistes.

Nous voudrions que ce projet de loi traite de la protection concernant le choix du sexe à des fins non médicales. Nous voudrions voir des restrictions frappant l'achat et la vente d'ovules, de sperme et d'embryons, incluant leur échange contre des biens, des services ou d'autres avantages, mais excluant les frais de récupération encourus aux fins de collecte, d'entreposage et de distribution d'ovules, de sperme et d'embryons pour une personne qui n'est pas médecin. Cette interdiction devrait être appliquée pendant un certain délai, afin de faciliter le passage du système commercial actuel à un système altruiste. Nous devrions aussi nous pencher sur l'altération génétique germinale; sur l'exogénèse, qui permet de préserver un embryon dans un utérus artificiel; sur la protection et le soin à accorder au clonage d'embryons humains; sur l'hybridation entre des humains et des animaux, dont le député réformiste vient de parler; sur la récupération de sperme ou d'ovules dans un cadavre ou un foetus aux fins de fertilisation et d'implantation; et sur la recherche supposant la maturation de sperme ou d'ovules à l'extérieur du corps humain.

 

. 1900 + -

Le député de Thornhill a fait allusion au moratoire qui est imposé depuis un certain nombre d'années. Il a fallu beaucoup de bonne volonté et de bonne foi pour que ce moratoire soit efficace, mais nous souhaiterions qu'y soient ajoutées des interdictions, notamment en ce qui concerne le transfert d'embryons entre des êtres humains et d'autres espèces; l'emploi de sperme, d'ovules ou d'embryons humains à des fins de reproduction humaine ou de recherche médicale sans le consentement éclairé des donneurs; les recherches effectuées sur des embryons humains plus de 14 jours après la conception; la création d'embryons uniquement à des fins de recherche; et l'offre—aussi inconcevable que cela puisse paraître, cela pourrait arriver—de fournir des services interdits ou de payer pour les obtenir.

Je pense qu'il devrait en outre y avoir un mode de gestion ou un organisme, ou élément, de réglementation. Cela devrait faire l'objet d'un projet de loi qui serait soumis à la Chambre. Malheureusement, il n'en est pas question dans le projet de loi C-247.

Nous aimerions, dans le fond, que soit présenté un projet de loi qui tienne compte de presque tous les points qui ont été soulevés ici. Aucun de nous ne prendra position contre le député qui a présenté la motion d'initiative parlementaire. Je pense qu'un débat s'impose. Il faudrait débattre cette question à la Chambre. Il est temps de forcer le ministre à concrétiser son désir, j'allais dire sa promesse, de présenter une mesure législative que nous, de ce côté-ci de la Chambre, pourrions appuyer.

Nous disons au ministre que nous attendons de lui une mesure législative pour combler le vide laissé par le projet de loi C-47 qui est mort au Feuilleton l'an dernier. Nous demandons aussi les quelques ajouts que je viens de mentionner. Il s'agit d'un débat qui mérite d'avoir lieu. C'est un débat qui ne doit pas être confiné à la Chambre des communes. Il faudra donner la parole aux spécialistes des domaines touchés, qui sont à l'avant-garde de la technologie, une technologie qui évolue tellement vite que beaucoup de choses ont déjà changé en 12 mois.

Je crois que nous devons avoir la possibilité de discuter de la question, mais, le plus important, c'est qu'il faut que le comité et la Chambre des communes puissent entendre des spécialistes pour bien cerner toutes les questions qui se posent.

Nous espérons que le ministre présentera à nouveau un projet de loi, qu'il laissera la Chambre en discuter et que nous entendrons les meilleurs témoins que nous pourrons trouver au Canada pour discuter d'une question qui est, à mon sens, une des plus importantes pour le Canada en ce moment.

[Français]

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, est-ce qu'il me reste plus de deux minutes?

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Il vous reste précisément deux minutes.

[Traduction]

M. Joseph Volpe: Tout d'abord, j'ai très bien suivi le débat de ce soir. Je l'ai suivi du hall de la Chambre. Je suis très heureux de constater que des députés de tous les partis s'intéressent aussi vivement au sujet.

La députée de Drummond, qui faisait partie du comité qui a étudié le projet de loi C-47 lors de la dernière législature, a accompli tâche très utile en présentant son projet de loi à la Chambre des communes parce qu'elle a réussi à susciter l'intérêt de tous les députés pour la question. Qui plus est, ce sujet est déjà à l'ordre du jour du ministre et de son ministère.

 

. 1905 + -

En examinant la question et les principes connexes, aussi bien dans son projet de loi que dans le projet de loi C-47 qui l'avait précédé au cours de la dernière législature, je puis dire que tous les députés à la Chambre de même, bien sûr, que le ministre et le ministère tiennent à ce qu'on remette à l'étude le projet de loi qui n'avait pas réussi à franchir toutes les étapes du processus législatif lors de la dernière législature. Cela permettrait de prendre en considération en même temps toutes les modifications auxquelles on a pu songer entre temps.

La députée de Drummond a présenté son projet de loi afin d'apporter une modification au Code criminel, mais elle reconnaîtra bien sûr, comme elle l'a fait aujourd'hui et auparavant, qu'il s'agit d'un problème de société et de santé extrêmement important.

On le considérera comme un problème qui concerne essentiellement la santé des Canadiens en général, comme le faisait d'ailleurs le projet de loi C-47, qui concernait plus particulièrement les femmes et les enfants.

La députée a rendu un grand service à la Chambre en faisant en sorte que ceux d'entre nous qui ne connaissent pas bien la question puissent revoir le projet de loi et en examiner les principes et les diverses dispositions. J'espère que les députés feront montre d'autant de coopération que ce soir lorsque le projet de loi sera présenté de nouveau à la Chambre.

Je remercie tous les députés qui sont intervenus dans le débat.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Thibeault): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée, et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.



MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LES AIRBUS

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, le 17 novembre 1997, j'ai demandé au gouvernement, compte tenu des millions de dollars et des excuses penaudes que le gouvernement libéral a dû présenter, qui au juste était responsable du scandale de l'affaire des Airbus. Scandale est le mot juste.

J'ai également demandé au gouvernement quand il retirera les accusations non fondées qu'il a portées dans les lettres qu'il a adressées aux autorités suisses. On dirait que, lorsqu'ils sont confrontés à la réalité et se rendent compte qu'ils ont fait quelque chose de complètement condamnable, et à un coût énorme pour les contribuables canadiens—inutile de dire que ce n'était pas la première fois et que ce ne sera pas la dernière—les libéraux refusent de répondre aux questions, et je songe par exemple au dossier des hélicoptères.

Les Canadiens le savent bien pourtant. Ils savent que l'affaire des Airbus a été une vengeance politique exercée par les libéraux contre un homme dont ils volent les idées et les programmes depuis qu'ils ont été portés au pouvoir en 1993. Je songe en l'occurrence au libre-échange et à la TPS.

Les Canadiens méritent qu'on leur réponde quand une affaire de maquignonnage leur coûte des millions de dollars. L'ancien premier ministre a été décrit faussement et avec insouciance comme un criminel dans un document canadien adressé à un État étranger, une accusation que Radio-Canada et la GRC ont gobée complètement.

Le gouvernement s'est fié à la prose fictive de Stevie Cameron et du mystérieux M. Pelossi. Le gouvernement fédéral a admis que les conclusions n'étaient pas fondées, s'est excusé auprès de M. Mulroney et a réglé ses honoraires d'avocat.

Et pourtant, la lettre dans laquelle on l'accuse à tort circule toujours et le gouvernement refuse de la retirer de la circulation. Par-dessus le marché, la GRC dit qu'elle enquête toujours, de plus en plus même, aussi incroyable que cela puisse paraître.

Est-ce que cela relève vraiment de la tradition des enquêtes criminelles? Y a-t-il la moindre possibilité d'une déclaration de culpabilité? Quels sont les motifs raisonnables et probables que cela mène seulement à une accusation?

En novembre dernier, beaucoup de journalistes ont dit qu'il s'agissait d'une attaque personnelle exceptionnellement cruelle du gouvernement contre M. Mulroney. C'est triste, mais ce n'est qu'une partie du scandale continu.

Le caporal Mike Niedubek, de la GRC, est sorti de l'ombre, en novembre dernier, et a dit quelque chose que l'on savait déjà, à savoir que toute l'affaire était hautement politique et que la GRC était priée de couvrir une erreur gouvernementale.

Le bouc émissaire désigné, le sergent d'état-major Fiegenwald, a mystérieusement disparu de la scène, ce qu'a dit regretter l'ancien ministre de la Justice.

L'histoire se répète encore. Le gouvernement est aux prises avec une question très importante concernant directement l'intégrité et la reddition de comptes. On parle beaucoup, mais on n'agit pas.

Je voudrais poser des questions très importantes auxquelles il faudrait répondre. Quels membres du Cabinet étaient au courant de l'affaire et sont responsables de ce scandale? Pourquoi le gouvernement lutte-t-il tellement à la Cour suprême pour garder le pouvoir anonyme et arbitraire pour appliquer outremer des mandats de perquisition contre des Canadiens et cela, sans un examen judiciaire, ce sur quoi deux tribunaux se sont déjà prononcés?

Quand le gouvernement retirera-t-il de la circulation la lettre contenant les allégations qu'il a déjà reconnues fausses? Pourquoi la GRC mène-t-elle encore cette enquête contrariée, futile et non fondée?

 

. 1910 + -

Et puis, combien de ressources supplémentaires—en argent et en effectifs—seront englouties dans cette chasse aux sorcières grotesque? Qui parle au nom des Canadiens dans cette affaire? Quand l'enquête tournera court, sans apporter de conclusions définitives, qui paiera les pots cassés?

Si une enquête est vraiment en cours, pourquoi M. Mulroney n'a-t-il jamais été interrogé?

Le gouvernement fera-t-il ce qui s'impose, c'est-à-dire aller au fond de cette sordide affaire en ordonnant une enquête publique sur le scandale des Airbus? Si le premier ministre et l'actuel ministre de la Santé n'ont pas trempé dans cette affaire, ils n'ont rien à craindre. Ce n'est qu'alors que les Canadiens pourront enfin connaître la vérité.

Voici ma question: De quoi le gouvernement a-t-il peur? Si le premier ministre et son gouvernement ont vraiment à coeur notre réputation de pays juste et démocratique, ils devraient ordonner une enquête publique et y comparaître comme témoins.

Mme Eleni Bakopanos (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la Présidente, c'est pour moi un plaisir d'aider une fois de plus le député à mettre les choses au point dans cette affaire et de le mettre au courant du système d'entraide internationale dans les affaires juridiques et criminelles.

Les forces de police doivent suivre un processus clairement établi pour demander l'aide d'un autre pays dans le cadre d'une enquête.

Quand un corps policier mène une enquête qui le conduit à l'étranger, il doit faire sa demande par l'intermédiaire du groupe d'entraide internationale, au ministère de la Justice.

Ce groupe est un organisme canadien qui centralise les demandes d'aide à d'autres pays ou en provenance d'autres pays. La principale préoccupation du groupe est de s'assurer que les demandes d'aide respectent les prescriptions de la loi du pays qui les recevra ou, dans le cas des demandes qui sont faites au Canada, qu'elles sont conformes aux prescription de la loi canadienne.

[Français]

Dans l'affaire Airbus, le groupe d'entraide internationale a envoyé une demande d'entraide judiciaire aux autorités suisses au nom de la GRC. La GRC était et est responsable de cette enquête. Il a toujours été clair pour les autorités canadiennes, comme pour les autorités suisses, que dans la demande d'entraide judiciaire, il y avait des allégations qui faisaient l'objet même de l'enquête policière.

Pour que cela soit parfaitement clair, ce point a été réitéré à plusieurs reprises. Néanmoins, certaines tournures de phrase laissaient, à tort, entendre qu'on en était arrivé à la conclusion qu'il y avait eu, en quelque sorte, malversation.

Le gouvernement du Canada a fait des excuses à cet égard et a conclu une entente hors cour avec M. Mulroney.

[Traduction]

En outre, des modifications ont été apportées en novembre 1995 au processus d'entraide juridique pour que cela ne se reproduise pas. Par exemple, dorénavant, un avocat du groupe d'entraide internationale examinera toutes les demandes pour s'assurer qu'elles ne contiennent pas de conclusions et qu'elles demeurent strictement au niveau de l'enquête.

Je le répète, le règlement conclu entre les deux parties en janvier 1997 mentionne clairement que le ton de la lettre était inapproprié. Il est spécifié que la lettre fait partie...

La présidente suppléante (Mme Thibeault): La parole est au député de Qu'Appelle.

LES BANQUES

L'hon. Lorne Nystrom (Qu'Appelle, NPD): Madame la Présidente, le 22 octobre j'ai posé une question au ministre des Finances concernant les frais bancaires et lui demandant s'il travaillerait à obtenir leur réduction pour les Canadiens ordinaires.

Depuis cette époque nous avons eu pas mal de nouveau. Il y a eu des rapports disant que les frais étaient excessifs. Nous savons tous qu'ils sont très régressifs. Ils frappent tous les Canadiens de la même façon. Que vous soyez riche ou pauvre, vous payez la même chose pour une transaction. C'est pour cela que les frais bancaires devraient être étudiés, non pas par le ministre des Finances, mais par un comité de la Chambre des communes où siégeraient des représentants des cinq partis élus par la population du Canada.

Ces frais de service sont de nature régressive. Les Canadiens devraient pouvoir faire un certain nombre de transactions sans frais, comme c'est le cas dans certains États américains. Au bout de huit, neuf ou dix transactions, la banque pourrait alors commencer à imposer des frais. Un service aussi élémentaire représenterait une mesure plus progressiste.

Depuis, il s'est produit naturellement un certain nombre de choses. Les banques ont rendu publics leurs bénéfices. L'an dernier, elles ont enregistré les bénéfices les plus élevés de leur histoire. Leurs bénéfices s'élevaient à 7,5 milliards de dollars. C'est effectivement une somme considérable. Les banques peuvent sûrement se permettre de réduire leurs frais de service pour les gens ordinaires et les pauvres. Elles n'ont aucune excuse de ne pas le faire.

Il est intéressant de voir nos vis-à-vis défendre les grandes banques plutôt que de les inviter à réduire leurs frais de service.

Depuis, on a appris que la plus importante banque du Canada, la Banque Royale, et la troisième banque en importance, la Banque de Montréal, entendaient se fusionner. Il s'agit de la plus grande fusion d'entreprises proposée dans notre histoire. Les deux banques ont une valeur d'environ 40 milliards de dollars sur le marché. Elles gèrent un actif de plus de 450 milliards de dollars. Pourtant, le ministre des Finances n'acceptera pas avant l'automne la demande des Canadiens ou du Parlement du Canada visant la formation d'un comité parlementaire chargé d'examiner la fusion proposée. C'est vraiment scandaleux. Les Canadiens ont le droit de décider si cette fusion doit se faire ou non.

 

. 1915 + -

Si la fusion se réalise, elle déclenchera une réaction en chaîne, de sorte qu'il y aura d'autres fusions, non seulement de banques, mais d'institutions financières, y compris dans l'industrie de l'assurance. La voie sera libre pour laisser entrer les banques étrangères au Canada. Si nos banques s'établissent à l'étranger, nos portes seront aussi ouvertes pour que des banques étrangères s'installent au Canada. Nous aurons un jour à faire face à une prise de contrôle du système bancaire canadien par des intérêts étrangers et à l'implantation de supermarchés de la finance dans ce pays.

C'est pour cette raison que nous devons constituer un comité parlementaire qui pourrait tenir des audiences sur cette fusion, un comité parlementaire qui se déplacerait au pays pour permettre aux Canadiens de faire connaître leur opinion. J'espère qu'une fois que nous aurons amorcé ce processus, nous pourrons convaincre le ministre des Finances d'arrêter cette fusion. Elle ne devrait pas avoir lieu. Ce n'est pas bon pour le Canada. Ce n'est pas bon pour l'avenir de notre pays. Nous devons pouvoir compter sur une tribune publique pour convaincre le ministre des Finances que c'est ce que pensent les Canadiens.

Dans mes commentaires, je voulais combiner la question de la fusion et celle des frais bancaires. Nous devons pouvoir compter sur un comité parlementaire muni des pouvoirs nécessaires pour se déplacer d'un bout à l'autre du pays, pour entendre des témoins, pour citer les banques à comparaître, pour fournir une tribune aux citoyens ordinaires et pour transmettre ces audiences à la télévision. C'est ça la démocratie parlementaire. Il devrait revenir aux représentants élus par le peuple de prendre des décisions très importantes. Le ministre des Finances ne devrait pas le faire seul.

Le gouvernement doit approuver la méga-fusion. Le Bureau de la concurrence doit approuver la méga-fusion. On doit émettre un nouveau permis aux banques. Mais tout cela ne peut être fait qu'avec l'approbation du Parlement du Canada, au cours d'un processus transparent, ouvert et démocratique. C'est ce que je demande à la Chambre ce soir.

M. Tony Valeri (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Madame la Présidente, le gouvernement est conscient de la nécessité, pour les Canadiens, d'avoir accès à une vaste gamme de services à des coûts abordables. En général, le gouvernement ne réglemente pas les prix que les institutions financières demandent pour leurs services. Nous croyons que les consommateurs sont mieux servis par un environnement qui oblige les institutions financières à se livrer concurrence et permet aux consommateurs d'avoir accès à suffisamment d'information pour pouvoir faire des choix éclairés.

C'est pourquoi nous favorisons la divulgation claire et continuelle de tous les renseignements concernant les services et les frais de service. Cela contribue à donner plus de poids aux dispositions législatives qui obligent les institutions financières à divulguer l'information concernant leurs tarifs à l'ouverture d'un compte de dépôt et lorsque les tarifs sont modifiés.

Les consommateurs peuvent ainsi choisir les comptes ou produits qui conviennent le mieux à leurs besoins. Il existe un certain nombre de fournisseurs de services financiers concurrents, notamment les banques étrangères au Canada, les sociétés de fiducie et les associations coopératives de crédit. Ces institutions offrent une grande variété de comptes, allant du service très simple à peu de frais jusqu'aux services de choix très spécialisés.

Toutefois, le gouvernement reconnaît que les consommateurs ont parfois de la difficulté à comparer les frais de service des différentes institutions. C'est pourquoi nous travaillons de concert avec les banques et avec Industrie Canada pour simplifier le système d'imposition de frais et assurer une meilleure diffusion de l'information à ce sujet. Le gouvernement continue à s'intéresser à la question pour voir s'il y aurait d'autres domaines où il pourrait aider les consommateurs.

Le groupe de travail sur l'avenir des services financiers au Canada examinera aussi la question des intérêts versés aux utilisateurs de services financiers. Il doit présenter son rapport au gouvernement à l'automne 1998. À ce moment-là, le gouvernement chargera un comité parlementaire de consulter les Canadiens. Contrairement à ce que voudrait le NPD, nous ne permettrons pas aux banques de fixer le programme du gouvernement. Les mesures envisagées à cet égard ne dépendent que de nous. Avec notre gouvernement, il n'y a pas de risque que la modernisation des banques en vienne à vouloir dire qu'on approuve automatiquement les fusions. Si ce n'était que du NPD, ce serait le cas.

Comme le ministre l'a dit à plusieurs reprises, nous consulterons les Canadiens en temps opportun, et nous serons très intéressés à entendre ce que le député aura à dire à ce moment-là.

L'ÉDUCATION

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Madame la présidente, les problèmes de financement touchant nos collèges et nos universités menacent de plus en plus de jeunes tous les jours. Les droits de scolarité augmentent et le financement fédéral diminue. Les établissements d'enseignement postsecondaire du pays deviennent de plus en plus des établissements pour les riches et les privilégiés.

Les répercussions des compressions fédérales dans le domaine de l'enseignement postsecondaire sont très claires. Des réductions des transferts fédéraux de plus de 2,29 milliards de dollars depuis 1993 ont entraîné une augmentation des droits de scolarité de 240 p. 100 au cours des 10 dernières années.

 

. 1920 + -

La dette moyenne des étudiants est maintenant de 25 000 $. En 1980, Statistique Canada signalait que les droits de scolarité représentaient 13 p. 100 du fonds général de fonctionnement des universités. En 1995-1996, les droits de scolarité représentaient en moyenne, près de 30 p. 100 du fonds général de fonctionnement et la proportion montait jusqu'à 40 p. 100 pour les universités de la Nouvelle-Écosse.

L'accès à l'enseignement postsecondaire est gravement menacé et il est évident que le gouvernement libéral a une large part de responsabilité.

Il est vraiment scandaleux d'entendre les voeux pieux exprimés par le gouvernement libéral alors que de plus en plus d'étudiants tombent dans la pauvreté. La journée nationale d'action organisée récemment par la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants a montré clairement ce que pensent vraiment les étudiants de l'hypocrisie et des compressions.

Lors d'un sondage effectuée auprès des étudiants du secondaire dans les Maritimes, 40 p. 100 de ceux qui prévoyaient ne pas aller à l'université ont dit que c'était parce qu'ils n'en avaient pas les moyens.

On commence par dire aux jeunes à quel point il est important d'acquérir une formation postsecondaire, puis on les écrase sous des coûts d'éducation et une dette énormes. D'après la FCEE, les hausses de frais de scolarité constituent maintenant l'une des principales causes de l'inflation. Quelle est la réaction du gouvernement? Il nous annonce la création d'un fonds de bourses d'études du millénaire. C'est un nom bien séduisant, mais cela n'aide pas les étudiants qui avaient désespérément besoin d'aide hier. Ils ne peuvent pas attendre à l'an 2000 pour se conformer au calendrier politique du premier ministre.

Nous, du NPD, croyons que des changements urgents s'imposent dès maintenant pour remédier à la crise du financement des études postsecondaires. L'accessibilité doit être un nouveau critère national en enseignement supérieur. Les principes d'accessibilité et d'abordabilité doivent guider les réformes. L'aide aux étudiants doit être fondée sur le besoin plutôt que sur le mérite. Un régime national de subventions pour l'enseignement postsecondaire doit être une priorité, de même que le blocage des frais de scolarité.

Le gouvernement libéral reconnaîtra-t-il que le fonds du millénaire est un exercice politique peu judicieux? Nous n'avons pas besoin d'un autre programme de bourses d'études. Ce qu'il faut aux étudiants, c'est un programme national de subventions qui soit fonction des besoins financiers.

Je mets à nouveau le gouvernement fédéral au défi d'emboîter le pas à la Colombie-Britannique et de décréter un blocage national des frais de scolarité. C'est possible s'il y a la volonté et l'engagement politiques de rendre l'enseignement postsecondaire abordable et accessible. Les étudiants ne méritent pas moins. La dette étudiante doit être réduite et les frais de scolarité bloqués et il faut lancer un programme national de subventions. Le gouvernement a-t-il le courage de vraiment prendre la part des jeunes et d'avancer le principe que l'éducation postsecondaire est un droit et non un privilège réservé à ceux qui peuvent se la payer?

M. Robert D. Nault (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, je vais commencer par rappeler, comme je l'ai fait à un certain nombre de reprises, que l'éducation, y compris l'établissement des droits de scolarité, est du ressort des provinces.

Le gouvernement du Canada ne peut pas intervenir directement dans ce domaine. Cela ne veut pas dire qu'il n'est pas conscient des difficultés financières des étudiants. Il en est conscient, et il agit. Le gouvernement du Canada a écouté les préoccupations des jeunes qui s'inquiètent des perspectives d'emploi et de leur niveau d'endettement.

Le gouvernement du Canada non seulement soutient l'enseignement postsecondaire par des transferts financiers, mais verse aussi 1,4 milliard de dollars à 340 000 étudiants de ce niveau grâce à son programme de prêts étudiants.

Quant à l'endettement des étudiants, le gouvernement a pris des mesures importantes dans le dernier budget pour alléger cette charge. La période d'exemption d'intérêt a été prolongée, pour passer de 18 à 30 mois. Les crédits à l'éducation ont été accrus. La contribution maximale à un régime enregistré d'épargne-études est passée de 2 000 $ à 4 000 $, ce qui aidera les parents à économiser pour payer les études de leurs enfants.

Les étudiants qui veulent poursuivre des carrières en recherche au Canada pourront le faire plus facilement grâce à la création de la Fondation canadienne pour l'innovation, qui sera dotée de 800 millions de dollars.

Dans le discours du Trône, le gouvernement a également promis de continuer de réduire les obstacles qui empêchent les jeunes de faire des études postsecondaires. Le Programme canadien de prêts aux étudiants sera modifié, les étudiants ayant des personnes à charge recevront une aide plus généreuse, de nouvelles bourses seront accordées pour encourager l'excellence et pour aider les Canadiens à faible et à moyen revenu à faire des études universitaires ou collégiales.

Mardi, le budget sera présenté aux Canadiens. Il est évident que nous n'aurions pas parlé de façons d'aider les étudiants dans le discours du Trône si nous n'avions pas eu sincèrement l'intention de les aider. Le député devrait attendre à mardi de voir ce que le gouvernement fera.

 

. 1925 + -

[Français]

La présidente suppléante (Mme Thibeault): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 14 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 25.)