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SRID Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 3 juin 2003




º 1610
V         Le président (M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.))
V         La sénatrice Mobina Jaffer (Colombie-Britannique, Lib.)

º 1615

º 1620

º 1625
V         Le président
V         M. John Deyell (directeur régional, Afrique de l'Est et de la Corne, Afrique et Moyen-Orient, Agence canadienne de développement international)
V         Le président
V         M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ)
V         Mme Anne-Marie Bourcier (directrice générale, Direction générale de l'Afrique, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international)

º 1630
V         La sénatrice Mobina Jaffer
V         M. Yves Rocheleau
V         La sénatrice Mobina Jaffer
V         Le président
V         Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.)

º 1635
V         Mme Anne-Marie Bourcier
V         Mme Colleen Beaumier
V         La sénatrice Mobina Jaffer
V         Mme Colleen Beaumier
V         La sénatrice Mobina Jaffer
V         Mme Anne-Marie Bourcier
V         Mme Colleen Beaumier
V         Mme Anne-Marie Bourcier
V         Mme Colleen Beaumier

º 1640
V         La sénatrice Mobina Jaffer
V         Mme Colleen Beaumier
V         M. John Deyell
V         Mme Colleen Beaumier
V         Le président
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)
V         La sénatrice Mobina Jaffer

º 1645
V         Mme Louise Marchand (directrice générale, Assistance humanitaire internationale, Direction générale des programmes multilatéraux, Agence canadienne de développement international)
V         Mme Alexa McDonough
V         La sénatrice Mobina Jaffer
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.)
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Alexa McDonough
V         La sénatrice Mobina Jaffer
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne)
V         Le président
V         M. Keith Martin
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président
V         M. Keith Martin

º 1650
V         Mme Louise Marchand
V         M. Keith Martin
V         Mme Louise Marchand
V         M. Keith Martin
V         Mme Louise Marchand
V         M. Keith Martin
V         M. James Lee (attaché de recherche auprès du comité)
V         Mme Louise Marchand
V         M. John Deyell
V         M. Keith Martin
V         M. John Deyell

º 1655
V         M. Keith Martin
V         M. John Deyell
V         Le président
V         Mme Alexa McDonough
V         M. Laird Hindle (chargé de dossier (Soudan), Direction de l'Afrique orientale et australe, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international)
V         Mme Alexa McDonough
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan

» 1700
V         Le président
V         Mme Alexa McDonough
V         Le président
V         M. Keith Martin
V         Le président
V         Mme Colleen Beaumier
V         M. Keith Martin
V         The Chair
V         M. Yves Rocheleau
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Mme Alexa McDonough

» 1705
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président
V         Mme Karen Kraft Sloan
V         Le président










CANADA

Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international


NUMÉRO 009 
l
2e SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 3 juin 2003

[Enregistrement électronique]

º  +(1610)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Irwin Cotler (Mont-Royal, Lib.)): Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, je vous souhaite la bienvenue à cette séance consacrée à l'étude des droits de la personne et du développement au Soudan.

    Comme on l'a déjà dit, le sujet de nos débats d'aujourd'hui témoigne de façon tragique du conflit civil le plus long en Afrique, sinon dans le monde. Il se traduit par des coûts stupéfiants et quasi- insupportables au plan humain pour les habitants du Soudan. Plus de 2 millions de personnes ont perdu la vie, plus de 4 millions ont été déplacées à l'intérieur du pays et plus de 500 000 Soudanais sont maintenant des réfugiés dans les pays avoisinants. Ce conflit a été qualifié de génocide par usure. Je ne dis là rien de nouveau et les témoins qui comparaissent devant nous sont parfaitement au courant de la situation.

    Heureusement, nous nous réunissons aujourd'hui après la prise de certaines mesures importantes depuis novembre 2002, y compris la signature de deux protocoles d'entente entre le gouvernement du Soudan et l'Armée populaire de libération du Soudan.

    Je suis ravi que nous puissions bénéficié de l'expertise de l'honorable sénatrice Mobina Jaffer, qui comparaît devant nous aujourd'hui, à propos de ce problème incontournable. Elle est l'envoyée spéciale du gouvernement et vient d'effectuer une visite qui l'a menée au Soudan et dans les pays avoisinants et durant laquelle elle a consulté des chefs d'État et autres intervenants à ce sujet.

    Nous recevons également Anne-Marie Bourcier, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Certains des témoins nous connaissent puisqu'ils ont participé à d'autres audiences. Nous sommes ravis de vous recevoir.

    Nous accueillons aussi Laird Hindle, chargé du dossier du Soudan, à la direction de l'Afrique orientale et australe. Nous vous souhaitons également la bienvenue.

    M. John Deyell, directeur régional, Afrique de l'Est et de la Corne, Afrique et Moyen-Orient, représente l'ACDI, tout comme Louise Marchand, directrice générale, assistance humanitaire internationale, Direction générale des programmes multilatéraux.

    Je crois avoir fait le tour des témoins et nous allons maintenant commencer par la sénatrice Jaffer.

    Merci.

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer (Colombie-Britannique, Lib.): Monsieur le président et honorables députés, il s'est passé beaucoup de choses dans le cadre du processus de paix au Soudan depuis la dernière présentation de ma prédécesseure, la sénatrice Lois Wilson, devant votre sous-comité.

    J'apprécie cette occasion de me présenter devant vous qui représentez un comité très influent, pour faire le point de la situation. Vous en savez probablement beaucoup plus que moi, si bien que je me considère véritablement privilégiée de comparaître devant vous.

    J'aimerais également officiellement dire que c'est pour moi un véritable privilège que de représenter notre pays dans cette région.

    Je voudrais aussi remercier la sénatrice Wilson pour son travail, compte tenu de ses responsabilités très importantes, qu'il me sera difficile d'assumer à sa place.

    Comme vous l'avez déjà dit, monsieur le président, les efforts en vue d'un règlement pacifique à la guerre civile qui fait rage au Soudan depuis si longtemps ont pris un tournant décisif en novembre 2002, à la faveur des négociations menées à Machakos, au Kenya, sous les auspices de l'Autorité intergouvernementale pour le développement.

    Le gouvernement soudanais et l'Armée populaire de libération du Soudan ont signé deux protocoles d'entente qui, entre autres, engagent les deux parties à négocier un règlement pacifique au conflit; permettent aux humanitaires d'accéder librement aux civils soudanais touchés par la guerre civile; prévoient la tenue d'élections générales d'ici les six prochaines années dans le nord et le sud du Soudan; engagent le Soudan à tenir dans six ans un référendum sur la sécession du sud.

    Cette entente semble tenir, ce qui présente l'avantage considérable que pour la première fois en bien des années, l'accès humanitaire au sud du pays n'est plus un problème majeur pour les organismes de secours dont les efforts sont coordonnés par l'Opération survie au Soudan de l'ONU. Ce n'est que depuis le mois dernier que le Nil est ouvert aux expéditions de fournitures humanitaires, ce qui a allégé le fardeau financier de la communauté des donateurs, qui, jusque-là, expédiait ses marchandises à grand frais par avion du Kenya.

    En ce moment, les pourparlers de paix portent sur un petit nombre des enjeux les plus complexes. Le plus épineux est le statut de trois régions contestées : les monts Nouba, le district entourant Abyei et l'État du Nil Bleu, administrées par le nord depuis l'époque coloniale, mais qui ont d'importantes populations d'allégeance sudiste. À titre d'information, j'aimerais souligner que c'est dans l'État du Nil Bleu qu'est concentré le gros des ressources pétrolières connues du Soudan.

    Les autres enjeux ont trait à la nature de l'éventuelle structure confédérale de partage du pouvoir anticipée par la plupart des observateurs, au partage du produit des ressources naturelles, y compris le pétrole, mais bien d'autres encore, ainsi qu'à la nature du cadre de sécurité du Soudan après le conflit.

    Les pourparlers de paix sont présidés par le Kenya sous les auspices de l'Autorité intergouvernementale pour le développement—sauf les discussions sur les territoires contestés qui, pour des raisons de compétence, sont parrainées par le Kenya sur une base bilatérale et qui bénéficient de la direction éclairée de l'ancien général Lazarus Sumbeiywo, autrefois chef d'état-major de l'armée kényane.

    Le dernier cycle de négociations a pris fin au début mai et doit reprendre à la fin juin. Le général Sumbeiywo entend alors s'attaquer aux difficiles questions encore en litige, et toutes les parties sont convenues de chercher à obtenir un règlement d'ici l'été.

    En janvier dernier, les combats ont repris entre les milices du sud du pays, et beaucoup ont craint que leur escalade ne mine les progrès réalisés dans le cadre des pourparlers de paix. Cela ne semble pas avoir été le cas. Le cycle de négociations de janvier 2003 s'est terminé le 7 février et a abouti à une entente sur le langage du partage des richesses et à un protocole d'entente sur le renforcement de l'accord de cessation des hostilités.

    Afin de prévenir les violations de l'entente, les parties ont donné leur accord de principe à la création d'une équipe internationale de vérification, qui sera formée à partir d'une équipe américaine de surveillance civile déjà présente sur le terrain. Lorsque j'étais dans la région, j'ai passé énormément de temps avec cette équipe et j'ai le plaisir de vous informer que le commandant en second, M. George, est un Canadien. L'équipe de vérification et de surveillance renforcée comprendra non seulement des Américains, mais aussi des représentants des autres membres de l'IGAD officiellement chargés d'observer les négociations de paix : le Royaume-Uni, la Norvège, l'Italie et l'Union africaine.

º  +-(1615)  

    Comme beaucoup d'entre vous le savez déjà, j'ai effectué une visite de grande envergure dans la région, en février et mars 2003, avec l'appui des fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères pour me familiariser avec les acteurs et les enjeux selon la perspective des intervenants sur le terrain. Le moment choisi pour cette visite était particulièrement opportun, car après quatre décennies de guerre, l'espoir d'en arriver à un règlement de paix cette année semble bien réel. C'est pourquoi le travail des parties en présence et des partisans du processus de paix au cours des semaines et des mois à venir sera déterminant, tant pour mettre officiellement fin aux hostilités que pour permettre à la paix de s'enraciner.

    En quatre semaines de déplacements dans quatre pays, j'ai eu plus de 80 entretiens portant spécifiquement sur le processus de paix au Soudan. J'ai rencontré des chefs d'État, des ministres des Affaires étrangères, les autres représentants pertinents des pays hôtes, les représentants des divers éléments du système de l'ONU, des groupes de femmes, des ONG, des dirigeants communautaires, la communauté diplomatique et les négociateurs du précaire et délicat processus de paix en cours de négociation au Kenya.

    J'ai aussi rencontré les principaux acteurs des pays les plus étroitement liés au processus : le Soudan, le Kenya, l'Ouganda et l'Égypte. Je suis très heureuse de vous informer que Marv Koop, originaire du Manitoba, travaille dans la région Abyei dans le cadre du PNUD afin de favoriser le processus de paix.

    J'ai également passé du temps dans le plus grand hôpital de campagne dans le nord du Kenya, à Lokichokio, et j'ai le plaisir de vous informer que cet hôpital est géré par une Canadienne et que l'on y retrouve plusieurs médecins et ingénieurs qui relèvent de la Croix Rouge. Je peux vous affirmer que c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai rencontré ces Canadiens qui travaillent dans la région, dans des situations parfois très difficiles.

    Si cette mission préliminaire dans la région a été aussi considérable, c'est qu'il était important pour le Canada d'asseoir sa crédibilité auprès d'un vaste éventail d'acteurs, que j'ai rencontrés en succession rapide pour ne pas sembler favoriser l'une ou l'autre partie aux négociations. Les résultats de cette mission devraient être utiles pour la politique canadienne et fourniront à la communauté internationale certains des renseignements dont elle aura besoin pour consolider la paix à venir au Soudan.

    J'ai également le très grand plaisir de vous dire que depuis mon retour, j'ai rencontré de nombreux membres de la société civile qui sont originaires du sud et du nord du Soudan. Il existe maintenant un groupe très fort de la société civile à Vancouver et, samedi, j'ai rencontré sur la Colline parlementaire près de 100 Soudanais qui ont créé une organisation nationale chargée d'examiner les questions de santé, d'éducation et du statut de la femme; il existe donc ici un groupe très fort susceptible de favoriser le processus de paix.

    Le Canada a manifestement contribué une valeur ajoutée au processus de paix, et il est clair que nous jouons un rôle vital qu'aucun autre pays ne joue pour le moment.

    J'ai constaté, durant mes entretiens, l'existence d'un consensus en faveur de la paix qui aboutira presque certainement à un règlement au cours de l'année. Cependant, un très grand nombre de personnes, à tous les niveaux, des ministres aux collectivités locales, pensent que ce règlement de paix sera imparfait, car il se négocie, nécessairement, au sein d'un groupe relativement fermé.

    Pendant que j'étais dans la région, j'ai également rencontré plusieurs groupes de femmes, et, avec les Pays-Bas, notre pays envisage la création d'une table de négociation de paix entre les femmes du nord et du sud dès que l'accord de paix sera signé.

    Pour que ce règlement de paix fonctionne, il est clair qu'il faudra que les participants au processus de coordination des donateurs forment un groupe plus hétérogène; grâce au ministère des Affaires étrangères et de l'ACDI, notre travail a déjà porté fruit à cet égard, avec la tenue d'une vaste réunion de donateurs aux Pays-Bas au début d'avril.

    Je suis très heureuse de vous informer que le Canada est reconnu pour ses compétences très particulières et pour sa contribution à valeur ajoutée; nous avons notamment joué un rôle très décisif qui a permis d'englober les femmes dans tous les aspects des négociations.

    Par ailleurs, lorsque j'étais dans la région, nous avons eu d'excellentes discussions avec Mme Garang et les chefs de l'APLS.

    Nous sommes parvenus à consolider bon nombre de ces gains avec la visite au Canada du ministre soudanais des Affaires étrangères, du 11 au 16 mai. Cette visite a été très utile pour le Canada, car elle nous a permis d'asseoir notre réputation d'interlocuteur fiable et considéré auprès des deux parties au conflit—rôle que nous avons cherché à jouer depuis le début de notre participation au processus de paix au Soudan, et que j'ai souligné durant ma mission dans la région et à la réunion de coordination sur le Soudan qui s'est tenue aux Pays-Bas.

º  +-(1620)  

    Cette dernière réunion a eu plusieurs effets importants. Le ministre Mustafa a publiquement engagé le Soudan à ratifier le traité d'Ottawa interdisant les mines terrestres antipersonnel. Le ministre Graham a eu des discussions très franches avec le ministre Mustafa sur les droits de la personne et l'importance du respect des droits de la personne par toutes les parties du Soudan pour assurer un soutien international continu après la signature de l'accord de paix. Ce message a été renforcé pendant toute la visite du ministre Mustafa, notamment lors d'une réunion au ministère des Affaires étrangères présidée par Droits et Démocratie de Montréal, à laquelle les principales ONG étaient présentes.

    Durant son entretien avec le ministre Mustafa, le premier ministre a pris l'engagement, au nom du Canada, de poursuivre sa participation au processus de paix et d'appuyer l'éventuel règlement de paix. À cette fin, nous avons eu des discussions de fond avec des groupes comme le Centre parlementaire.

    Je me permettrais d'ajouter, que 10 jours après la signature de l'accord de paix, des milliers de personnes du sud du Soudan arriveront à Khartoum. Nous nous tournons vers le Centre parlementaire pour savoir s'il pourrait fournir une trousse sur le fonctionnement du Parlement et sur les responsabilités des députés—ou quel que soit leur titre—de façon qu'ils puissent commencer à travailler. Nous avons également des discussions avec le Forum des fédérations pour décider des moyens par lesquels le Canada pourrait contribuer, grâce à ses compétences sur ces questions, à soutenir l'avènement et la consolidation de la paix au Soudan.

    Nous sommes encore très loin d'en avoir fini avec cette guerre, mais il y a eu beaucoup de progrès au cours de la dernière année. Je puis vous assurer que je ferai tout mon possible, avec l'appui du ministre des Affaires étrangères et de l'ACDI, pour maximiser les chances de succès de cet effort de paix si mérité par le peuple du Soudan, aux prises depuis quatre décennies avec une guerre qui a coûté littéralement des millions de vies.

    Merci beaucoup.

º  +-(1625)  

+-

    Le président: Merci, sénatrice Jaffer, pour cette déclaration très complète qui témoigne non seulement de vos déplacements dans la région, mais aussi de votre engagement au sujet de ces problèmes incontournables.

    Nous passons maintenant à M. John Deyell.

+-

    M. John Deyell (directeur régional, Afrique de l'Est et de la Corne, Afrique et Moyen-Orient, Agence canadienne de développement international): Monsieur le président, je ne suis pas venu avec un exposé, je suis simplement ici pour appuyer la sénatrice au cas où des précisions seraient nécessaires.

+-

    Le président: D'accord. Je vais simplement inviter les autres témoins à faire des déclarations liminaires, s'ils le souhaitent, avant de passer aux questions des membres de notre comité.

    S'il n'y a pas d'autres déclarations, nous pouvons commencer la période de questions.

[Français]

On commence par M. Rocheleau.

+-

    M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Merci, monsieur le président. Merci, madame Jaffer, de votre témoignage. Bonjour, monsieur Deyell.

    J'aurais deux questions. Vous dites, au dernier paragraphe de la deuxième page, que le Canada a manifestement contribué une valeur ajoutée au processus de paix. Par ailleurs, vous ne faites pas allusion, et peut-être pour cause, à un dossier qui a souvent été traité par mon collègue Svend Robinson, soit celui de la compagnie Talisman, qui faisait en sorte que le Canada était partie prenante au dossier.

    J'aimerais que vous nous disiez ce qui est advenu du dossier Talisman, vu qu'on n'y fait pas allusion. C'est ma première question.

    Deuxièmement, vous dites que dans le processus de paix, on engage le Soudan à tenir dans six ans un référendum sur la sécession du sud. J'aimerais que vous nous disiez en quoi il est justifié de tenir un référendum dans les six ans. Quelle est la problématique? Si cette éventuelle sécession se concrétisait, est-ce que, d'après vous, elle concourrait à la paix plutôt qu'être le ferment d'une nouvelle violence?

+-

    Mme Anne-Marie Bourcier (directrice générale, Direction générale de l'Afrique, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, monsieur Rocheleau. Pour ce qui est de votre question sur Talisman, je vous dirai que Talisman a été vendu ce printemps à des intérêts indiens. C'est une compagnie nationale de l'Inde qui a acheté la compagnie ou les intérêts qui étaient sur place.

    En ce qui concerne les membres du personnel de Talisman qui étaient au Soudan, ils se sont retirés du Soudan. Par contre, il y avait des activités communautaires de soutien au niveau des installations. Celles-ci ont été mises en concession et on peut vous assurer, en ce qui a trait entre autres aux dispositions qui étaient prises pour le soutien médical au niveau de la communauté, que cela continuera d'être assuré jusqu'en 2005.

    En ce qui a trait à votre deuxième question, la sénatrice va y répondre.

º  +-(1630)  

[Traduction]

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer: Je peux simplement vous dire que lorsque j'étais dans la région, j'ai vu certaines des installations construites par Talisman ainsi que les deux bureaux laissés par cette société dans le but d'assurer la poursuite du travail communautaire—qui n'a rien à voir avec des intérêts commerciaux—dans le domaine de l'éducation et des hôpitaux.

    Pour ce qui est des éventuels différends en cas de séparation du sud, j'espère vraiment que le Canada jouera un rôle important pour faire en sorte qu'au cours des six années qui vont s'écouler avant que la question de la séparation du sud ne se pose, les habitants du Soudan aient les moyens de prendre leurs propres décisions. Nous nous occupons entre autres de programmes à effet rapide, comme le déminage. C'est la raison pour laquelle nous avons été très heureux de voir que le traité d'Ottawa a été signé, ce qui permet aux agriculteurs de revenir dans la région et aux enfants de retourner à l'école.

    Ce que nous cherchons par ailleurs, c'est nous assurer que les gens reçoivent l'information sur ce qui se passe au niveau du processus de paix. Nous espérons pouvoir jouer un petit rôle dans le domaine d'installations radio, comme la radio de l'ONU qui existe en Somalie, et nous souhaitons également offrir des radios solaires, pour que les gens puissent recevoir de l'information dans leur propre langue, dans tout le sud, au sujet de ce qui se passe à propos du processus de paix.

    Le Canada et certains des autres pays peuvent faire en sorte que, au cours des six années qui vont s'écouler avant que les habitants du Soudan n'aient à décider s'ils optent pour la séparation, ils considèrent la paix comme quelque chose de précieux. Lorsque vous n'avez jamais connu la paix, vous ne pouvez pas savoir ce qu'elle représente. Selon nous, il sera très important que les pays donateurs travaillent ensemble pour faire en sorte que les gens comprennent que la paix est quelque chose de positif. «La paix par le développement» est l'un des slogans que l'on commence à voir un peu partout et c'est le défi que nous devons relever.

[Français]

+-

    M. Yves Rocheleau: Qu'est-ce qui pousse les gens du sud à vouloir s'interpeller eux-mêmes en termes de sécession? Est-ce que ce sont des groupes ethniques différents? Est-ce qu'ils parlent des langues différentes? Est-ce qu'ils sont différents des gens du nord, pour parler de sécession? Qu'adviendrait-il des puits de pétrole qui, semble-il, sont très importants dans le sud? À qui appartiendraient-ils? Qui en ferait la gestion?

[Traduction]

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer: Les gens qui vivent dans le Sud désirent poursuivre leur route séparément. Ils n'ont pas été gâtés par leur histoire, loin de là. Je viens de cette région. Je suis née en Ouganda, alors j'ai une idée du genre de pauvreté qui existe dans cette partie de l'Afrique, mais lorsque j'étais dans cette région, je dois dire que cela m'a changée complètement.

    Les plus pauvres d'entre les pauvres vivent dans le Sud. Pour vous donner une idée, à Rumbek, qui est un centre administratif civil, il n'y a pas même une seule route. Alors, les gens du Sud ont des préoccupations très légitimes. Ils estiment avoir été négligés et cela n'est pas le fait uniquement du gouvernement soudanais; même du temps où les Britanniques étaient au pouvoir, le Sud a été négligé. Alors les gens pensent que s'ils avaient l'autonomie gouvernementale, ils auraient une meilleure chance d'accéder au développement.

    Je pense qu'il s'agit d'une des raisons. Mais c'est comme un oignon: les raisons sont multiples. Il y a des raisons liées à la religion; il y a des raisons liées au développement; et il y a des raisons liées à la guerre. Ensuite, évidemment, le Sud n'est pas une unité, un groupe; il comprend de nombreux groupes ethniques ce qui complique les choses encore davantage. Si vous pelez l'oignon soudanais, vous constatez de très nombreuses couches qui expliquent pourquoi le Sud veut faire sécession.

    En ce qui concerne les réserves de pétrole, on peut dire qu'il s'agit là d'un des plus grands défis auxquels doit faire face le général Sumbeiywo dans le cadre des négociations bilatérales portant sur l'État du Nile Bleu, Abyei et les monts Nouba, car, comme je l'ai dit dans mon exposé, une bonne partie des réserves de pétrole se trouvent dans le Sud. Alors, cette question sera un défi.

+-

    Le président: Madame Beaumier.

+-

    Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Merci.

    Je regardais le mémoire qui a été préparé par les Affaires étrangères. On y dit que le Canada prend une part active par la voie des relations diplomatiques et des négociations, par des efforts de consolidation de la paix au niveau local et par l'aide humanitaire.

    Nous n'avons même pas d'ambassadeur sur place. Nous avions un des meilleurs ambassadeurs. Nick Coghlan était probablement le meilleur ambassadeur que nous avons eu en Colombie, je crois. Il a fait un travail vraiment extraordinaire. Il n'a même pas de statut là-bas. Comment le Canada peut-il prétendre avoir une influence auprès du gouvernement en place ou être en mesure de savoir ce qui se passe lorsque nous n'avons même pas de représentation dans ce pays?

    Nous avons un diplomate, mais il n'a pas de statut. Même les États-Unis ont un statut là-bas.

º  +-(1635)  

[Français]

+-

    Mme Anne-Marie Bourcier: Merci de votre question, madame.

    Notre ambassadrice au Soudan réside effectivement à Addis-Abeba, en Éthiopie. Par contre, elle a une accréditation très valable au Soudan et on a le plaisir d'avoir quelqu'un que vous reconnaissez, qui a beaucoup de talent, Nick Coghlan, qui est à Khartoum depuis quelques années, depuis que le ministre Axworthy a demandé l'ouverture de ce bureau à Khartoum pour être plus présent, pour exercer un dialogue politique avec les autorités en place.

    Alors, il exerce son rôle de conseiller politique auprès de notre ambassadrice. Il est présent, et nous reconnaissons qu'il est là à suivre l'évolution des négociations. Il nous fait rapport et peut servir de pont au travail qui est fait par nos envoyés spéciaux. Dans ce contexte-là, il a pu accompagner Mme la sénatrice dans son travail, qui a été fait, entre autre, au cours des derniers mois.

[Traduction]

+-

    Mme Colleen Beaumier: Absolument, c'est le point que je veux faire valoir. Ce que je veux dire, c'est qu'il peut accompagner la sénatrice, et il peut nous accompagner, mais il y a de nombreux endroits où nous sommes allés auxquels il n'aurait pas eu accès si nous n'étions pas allés dans ce pays à titre de parlementaires et, franchement, si la sénatrice n'avait pas voyagé à titre de sénatrice.

    Si nous avions sur place quelqu'un qui a un statut diplomatique, ces gens n'auraient pas besoin d'attendre que des Canadiens, qui sont sénateurs ou députés, viennent sur place pour pouvoir avoir accès à certaines de ces personnes. Je pense que c'est honteux.

    J'ai une autre question.

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer: Puis-je répondre?

    Vous avez tout à fait raison de dire que Nicholas Coghlan est un diplomate exceptionnel.

    Je peux vous dire que lorsque j'était dans la région, personne ne m'a dit qu'il ne pouvait pas aller partout. Il a été en mesure d'aller partout. En fait, un des moments dont j'ai été le plus fière d'être Canadienne, c'était lorsque les gens des organisations humanitaires, qui ont été détenus et qui ont subi un long procès, ont dit que seul le Canada s'est présenté tous les jours.

    Nick est très engagé.

+-

    Mme Colleen Beaumier: Oui. Je pense qu'il est merveilleux. Je pense seulement qu'il devrait avoir un statut plus important. Je pense qu'il devrait avoir un statut diplomatique, que nous devrions avoir un ambassadeur dans ce pays.

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer: Je suis heureuse de vous dire que nous avons maintenant un nouveau bureau mieux outillé. Je suis heureuse de vous dire que la question des ambassadeurs est maintenant à un niveau plus élevé que moi.

    Je peux vous dire qu'après votre départ, Nick a été en mesure d'obtenir beaucoup de ressources. Nous avons une ambassadrice exceptionnelle en Éthiopie qui est également accréditée au Soudan, qui joue également un rôle déterminant à l'heure actuelle.

+-

    Mme Anne-Marie Bourcier: Pour apporter une clarification, Nick Coghlan a un statut diplomatique. Il est conseiller et consul. Il est également responsable de notre bureau à Khartoum, qui représente notre ambassade canadienne.

+-

    Mme Colleen Beaumier: Bien. Je pense seulement que ce devrait être plus que cela.

    Ai-je été trop subtile pour vous?

+-

    Mme Anne-Marie Bourcier: Non.

+-

    Mme Colleen Beaumier: J'ai une autre question.

    Je crois que c'était en 1997 qu'ils ont eu leur « élection ». Peu après, le régime de Bashir est entré en contact avec l'ACDI. Ces gens ont fait appel à notre aide pour l'établissement de certaines infrastructures pour soutenir la démocratie et la primauté du droit dans ce pays. Nous leur avons tourné le dos sous prétexte que nous n'avions pas l'argent pour cela.

    Lorsqu'on sait que le Canada est reconnu pour avoir certains des meilleurs avocats de droit constitutionnel au monde et les meilleurs avocats dans le domaine des droits de la personne au monde, je me demande comment nous avons pu refuser notre aide. Pourrions-nous réévaluer la question ?

    Nous avons tendance à condamner la loi de la shari'a qui est en vigueur là-bas. Vous savez : les amputations et tout cela. Mais est-ce que nous envisagerions d'apporter notre aide si on nous la demandait de nouveau?

º  +-(1640)  

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer: Je suis très heureuse de vous dire que nous jouons un rôle déterminant dans le processus de paix. La plus grande partie des dépenses liées au processus de paix en cours au Kenya sont à la charge de l'ACDI. Nous avons mis à leur disposition un spécialiste en droit constitutionnel. Lorsque nous étions dans la région, l'ambassadrice a parlé personnellement au président pour lui dire que le Canada était prêt à accroître son aide.

    Lorsque j'ai rencontré le négociateur principal de l'APLS, je lui ai personnellement transmis le message que le Canada fournira de l'expertise. Nous attendons qu'ils nous disent ce dont ils ont besoin. Comme vous le savez, il n'est pas dans nos manières de leur faire accepter quelqu'un de force; nous attendons leur demande.

    Lorsque le ministre était ici, il a rencontré les gens du Centre parlementaire ainsi que M. Bob Rae pour savoir si nous pourrions les aider avec la question du fédéralisme. Nous avons certainement offert notre aide. Nous attendons maintenant de voir ce qu'ils veulent.

+-

    Mme Colleen Beaumier: Merci.

    Peut-être que M. Deyell aurait quelque chose à ajouter.

+-

    M. John Deyell: Je voulais simplement ajouter, en ce qui concerne votre proposition, qu'il n'y avait peut-être pas de modalités à ce moment-là pour répondre. Nous sommes certainement prêts à répondre à ce genre d'initiative maintenant. Elle cadre non seulement avec l'idée d'instaurer la paix, mais également avec celle de la consolider. C'est le genre de possibilités qui font l'objet d'une exploration à l'heure actuelle.

+-

    Mme Colleen Beaumier: Nous sommes maintenant plus riches et plus intelligents, n'est-ce pas?

+-

    Le président: Madame McDonough.

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Merci beaucoup d'avoir comparu. Je suis une remplaçante au sein du sous-comité, mais je suis membre du Comité des affaires étrangères et je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui.

    Sénatrice Jaffer, je ne veux pas aller trop loin dans mon interprétation, mais peut-être qu'en termes diplomatiques, vous avez indiqué dans le compte-rendu de votre voyage, et dans les conditions qui règnent actuellement au Soudan, que le règlement de paix est en voie de négociation, par nécessité, au sein d'un groupe relativement fermé de participants. Et je me demande si l'on ne doit pas comprendre par là, du moins en partie, que les femmes ne jouent pas un rôle particulièrement actif dans ce processus.

    Je sais qu'il s'agit d'une question qui vous tient beaucoup à coeur et j'admire votre travail en termes de participation ou de non-participation des femmes dans les questions de paix et de sécurité. Et, évidemment, la résolution 1325 du Conseil de sécurité, qui va beaucoup plus loin que la seule reconnaissance de l'état d'infériorité dans lequel sont maintenues les femmes dans beaucoup trop d'endroits dans le monde, a été très explicite quant à la nécessité de faire participer les femmes dans le processus d'établissement et de maintien de la paix en raison des répercussions disproportionnées des conflits sur les femmes et, également, parce qu'elles sont membres à part entière de la société.

    Je me demandais si vous ne pourriez pas nous dire un mot sur la condition des femmes, sur les possibilités d'une participation accrue des femmes et sur ce que le Canada pourrait faire pour promouvoir et accroître cette participation.

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer: Dans le Sud, les femmes vivent dans des conditions affreuses. Il n'y a rien dans cette région. Et comme vous pouvez l'imaginer, il y a de nombreuses veuves maintenant et les conditions sont misérables.

    Quant à la participation des femmes aux négociations de paix, il y a une femme au sein de l'APLS, et il n'y a pas de femme dans le camp du Nord. Il y a un symbole, mais personne à la table de négociation.

    J'ai parlé au ministre des Affaires étrangères au sujet de nos préoccupations à cet égard. Lorsque j'étais dans la région, j'ai rencontré de nombreux groupes de femmes et une des initiatives prises par le ministère des Affaires étrangères a été de créer une table de négociation de la paix regroupant des femmes du Nord et du Sud. J'ai rencontré les femmes du Nord et du Sud pour voir comment nous pourrions les amener à travailler ensemble. Lorsque j'ai rencontré certaines des femmes, elles étaient un peu méfiantes du fait que j'ai demandé aux deux parties de venir, mais je leur ai dit que nous croyons et je suis sûre qu'elles croient également que les femmes peuvent faire une différence. Alors, la réunion a commencé.

    Je suis très heureuse de vous dire que les Pays-Bas travaillent beaucoup avec les femmes et, lorsque j'étais dans la région, ils se sont montrés généreux en disant qu'ils voulaient que le Canada soit présent à la table; nous ne voulons pas vos ressources, mais nous pensons que si le Canada et les Pays-Bas s'unissent dans un partenariat et qu'ils travaillent avec les femmes, nous pouvons essayer de voir comment nous pourrions réaliser la paix.

    Comme je suis en contact constant avec le général Sumbeiywo, j'ai offert aux femmes, et aux organisations religieuses également, que s'il y a des choses précises qu'elles aimeraient voir dans le règlement de paix, elles pouvaient m'en faire part et le général m'a donné sa parole qu'il en parlerait. Cela ne signifie pas nécessairement qu'elles se retrouveront dans le règlement.

    Le général est au courant de nos préoccupations face à l'absence des femmes à la table de négociation, mais il s'agit d'un processus continu. Au fur et à mesure que s'accroîtra notre participation, j'ose espérer que vers la fin du processus, il y aura une plus grande participation des femmes.

º  +-(1645)  

+-

    Mme Louise Marchand (directrice générale, Assistance humanitaire internationale, Direction générale des programmes multilatéraux, Agence canadienne de développement international): Dans nos plans d'avenir en termes d'appui au processus de paix et, nous l'espérons, aux plans pour le règlement de paix, on peut dire que l'investissement dans le renforcement des capacités occupe une place centrale. Et nous nous sommes également engagés à concentrer notre attention sur les organisations féminines et sur la participation des femmes dans ce processus.

    Comme vous le savez peut-être, une politique importante à l'ACDI, c'est le respect de l'égalité des sexes et le traitement équitable des femmes. Alors, cette question est prise en considération.

+-

    Mme Alexa McDonough: Je me demande si vous ne pourriez pas nous dire s'il y a un certain scepticisme ou une certaine hostilité face à cette idée. Ou, y a-t-il chez les élites une certaine reconnaissance, même si c'est avec une certaine réticence, qu'il s'agit là d'une partie essentielle du processus de paix et du renforcement des capacités qui sera nécessaire pour maintenir le règlement de paix?

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer: Parfois j'ai eu l'impression qu'ils n'en avaient même pas parlé. Il était nécessaire d'avoir la participation des femmes et j'ai soulevé la question, particulièrement aux Pays-Bas, lorsque, dans le communiqué, le Canada a insisté pour que les questions liées aux genres, les questions liées aux femmes soient examinées. Par la suite, cette question a reçu beaucoup d'appui.

    Comme dans tous les pays, y compris le nôtre, nous devons parfois faire de la formation et de l'éducation. C'est la même chose au Soudan et c'est là, et je le pense vraiment, que le Canada peut jouer un rôle important en poussant dans le dos des gens, y compris de certains des autres pays donateurs, pour s'assurer que les femmes sont présentes à la table de négociation.

+-

    Le président: Karen.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan (York-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

    Avant que je pose ma question, nous attendions d'avoir le quorum, parce que j'avais une motion à présenter. Par respect pour les témoins, j'étais un peu préoccupée parce que vous avez dû attendre aussi longtemps.

    Je me demandais si nous ne pourrions pas passer à...

+-

    Le président: En fait, nous avons deux motions.

    J'avais l'intention d'attendre que les témoignages aient été entendus; et ensuite, nous en discuterons.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Alors, je peux encourager les membres du comité à rester sur place.

+-

    Le président: Oui, vous le pouvez.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Est-ce un problème, madame McDonough?

+-

    Mme Alexa McDonough: Je suis désolée de vous dire que je devrai partir à 17 heures. Ce n'est certainement pas parce que je veuille jouer les trouble-fêtes. Je sais que nous sommes tous pris dans cette course contre la montre.

+-

    La sénatrice Mobina Jaffer: Peut-être serait-il utile que nous prenions congé pour revenir dans cinq ou dix minutes.

+-

    Le président: Non. Il s'agit d'une discussion publique.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Il ne s'agit pas d'une question à discuter à huis clos; c'est une question publique.

    Alors, peut-on aller de l'avant?

+-

    M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Par respect pour nos témoins, peut-être pourrions-nous finir ce que nous avons normalement à faire et, ensuite, nous traiterons de la question qui préoccupe Mme Kraft Sloan.

+-

    Le président: Je pense que nous sommes rendus à vos questions et, ensuite, je pense que ce sera le tour de M. Martin; nous pourrons ensuite mettre fin aux questions et passer directement au rapport. Si la discussion doit durer plus de cinq ou dix minutes, je ne voudrais pas retenir tout le groupe de témoins. Peut-être pourrions-nous faire cela.

    Posez votre question, M. Martin posera la sienne et, ensuite, nous discuterons de votre motion.

+-

    M. Keith Martin: Cela prendra du temps. Cela prendra plus de cinq minutes.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Alors, je n'ai pas besoin de poser de question. Mme McDonough doit quitter à 17 heures.

+-

    Le président: Monsieur Martin.

+-

    M. Keith Martin: Merci beaucoup de votre présence ici aujourd'hui.

    Je tiens à vous remercier, sénatrice Jaffer, pour le travail difficile que vous avez fait sur cette question importante.

    Je dois dire, cependant, que le travail au Soudan a soulevé de sérieuses questions quant à la participation du Canada et de l'ACDI. On se demande combien d'argent a été dépensé, où cet argent a-t-il été dépensé et quels projets sont encouragés principalement.

    Il n'y a probablement pas suffisamment de temps pour que je puisse traiter toute cette question ici, mais peut-être auriez-vous l'obligeance de faire parvenir vos réponses au sous-comité. Combien d'argent l'ACDI dépense au Soudan et quels projets spécifiques sont financés? Et quel est l'état d'avancement de ces projets?

    Il y a un sentiment très fort que l'attention du Canada et du ministère a été centrée, pour dire franchement, sur la question de Talisman Energy. Nous avons complètement manqué le bateau pour ce qui est de traiter avec les principaux antagonistes dans cette situation profondément tragique. Il y a également l'idée très répandue sur le terrain que l'ACDI et notre gouvernement n'ont pas répondu aux attentes que nous avons créées et que nous n'avons pas rempli nos obligations.

    Peut-être pourriez-vous nous dire ce que l'ACDI a fait sur le terrain au Soudan et pourquoi il n'y a pas eu plus d'efforts pour essayer de traiter avec les antagonistes principaux dans le gouvernement du Soudan, à Khartoum, entre ces gens et les groupes de rebelles dans le Sud et également, pour tenter de résoudre la catastrophe humanitaire qui se produit là-bas et qu'à mon avis, nous avons ignorée.

    Merci.

º  +-(1650)  

+-

    Mme Louise Marchand: Je vais donner certaines informations et je vais demander à M. Deyell de parler d'un point de vue plus bilatéral.

    Pour ce qui est de l'aide humanitaire, vous le savez peut-être, mais nous serons heureux de vous fournir l'information complète sur les projets, et sur la question humanitaire et multilatérale et bilatérale, et sur les sommes qui ont été investies, etc.

    Depuis le début des années 90, nous avons fourni de l'aide humanitaire à hauteur de 110 millions de dollars. Il s'agit d'une aide sous forme de nourriture et sous d'autres formes. Et cette aide a été canalisée à travers les partenaires habituels, parmi lesquels figurent certaines ONG, les partenaires de l'ONU, la Croix-Rouge. Nous pouvons fournir les détails à cet égard. Alors, il s'agit de quelque chose d'assez substantiel.

    En ce qui concerne le processus d'instauration de la paix et des initiatives à cet égard, si vous connaissez le programme de l'ACDI, vous savez que les activités ont tendance à être à très petite échelle. Ce sont des activités à forte densité de main-d'oeuvre qui sont très exigeantes pour le personnel.

    Encore une fois, depuis 1999, nous avons financé des activités pour 1,28 million de dollars. Pour économiser du temps, je n'énumérerai pas toute la liste des activités, mais nous allons vous fournir cette information.

    Pour ce qui est du processus plus global d'instauration de la paix, nous avons également fourni, depuis 1999, 4 millions de dollars pour des activités à différentes échelles.

+-

    M. Keith Martin: Dans votre mémoire au comité, je crois que le problème soulevé n'avait pas tant à voir avec les engagements, mais avec la possibilité que cet argent n'ait pas été dépensé à bon escient.

    Par conséquent, quand vous reviendrez nous présenter les données, j'aimerais que vous expliquiez en détail aux membres du comité à quoi a servi cet argent et quels sont les objectifs de l'ACDI au Soudan. Je pense que cela aidera beaucoup de gens à mieux comprendre la situation.

+-

    Mme Louise Marchand: Vous voulez donc savoir où est allé l'argent, à quoi il a servi et quelles ont été les réalisations, n'est-ce pas?

+-

    M. Keith Martin: Oui, quels étaient vos objectifs, les avez-vous atteints, combien d'argent avez-vous dépensé sur le terrain et quels sont vos prochains objectifs pour le Soudan. Je pense que les gens qui ont connu cette catastrophe et qui s'y intéressent aimeraient vraiment le savoir de sorte que nous puissions travailler ensemble le plus efficacement possible.

+-

    Mme Louise Marchand: C'est la première fois que je comparais devant ce comité pour parler du Soudan. Avons-nous déjà fourni un rapport; voulez-vous une mise à jour? Pourriez-vous me dire de quoi il retourne exactement pour que je m'organise en conséquence?

+-

    M. Keith Martin: Je n'en sais trop rien.

+-

    M. James Lee (attaché de recherche auprès du comité): Oui, un rapport sur la question a été publié il y a au moins un an.

+-

    Mme Louise Marchand: Ainsi, très brièvement et sans entrer dans le détail, je dirais que le renforcement des capacités des partenaires canadiens intéressés à travailler au Soudan a aussi retenu l'attention, tout comme le programme de déminage. Je ne peux pas vous dire ce qui a été accompli, mais nous allons nous renseigner et vous informer.

    John, voudriez-vous ajouter quelque chose au sujet des accords bilatéraux?

+-

    M. John Deyell: Bien sûr. Nous pourrons probablement remettre au greffier demain ou après-demain les tableaux que vous nous demandez.

+-

    M. Keith Martin: Ce serait merveilleux.

+-

    M. John Deyell: Comme exemple de l'information disponible immédiatement, je donnerai au greffier une copie du tableau que j'ai en ma possession. L'objectif du projet est le renforcement des capacités des responsables traditionnels et des organisations de la société civile. Le projet s'intitule: «Instauration de la paix et apaisement du conflit à Wau». Les agences qui s'occupent de la mise en oeuvre de ce projet sont Care Canada, en collaboration avec Care Soudan; ce projet, prévu pour 2004, dispose d'un budget de 476 000 $.

    Nous faisons cela pour les activités passées, présentes et à venir approuvées; nous pouvons également l'indiquer dans une note d'information en expliquant les buts inhérents à nos interventions.

º  +-(1655)  

+-

    M. Keith Martin: Cela aidera certainement les membres de notre comité. Merci beaucoup.

+-

    M. John Deyell: Nous pouvons vous remettre le tout d'ici une semaine.

+-

    Le président: Je tiens à rappeler aux témoins, comme je le fais habituellement, que s'ils souhaitent, après avoir participé à une séance du comité, nous transmettre des informations à l'appui d'une discussion ou de certaines questions, nous serons heureux de les recevoir.

    Alexa.

+-

    Mme Alexa McDonough: J'aimerais poser une question brièvement. Vous avez rappelé aux membres du comité... je pense que vous l'avez fait. Je ne peux le retrouver maintenant, mais je suis sûre de vous avoir entendu dire aux membres du comité que le Canada a adopté il y a déjà plusieurs années une politique contre les ventes d'armes au Soudan. Pourriez-vous nous dire d'où viennent les armes que se procure ce pays et qui coûtent très cher en vies humaines?

+-

    M. Laird Hindle (chargé de dossier (Soudan), Direction de l'Afrique orientale et australe, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Il existe probablement deux grands groupes de fournisseurs d'armes au Soudan. Il y a d'un côté les organisations illicites. Beaucoup de ces armes ont été abandonnées lors de combats précédents, quelque part en Afrique, et ont pu facilement être transportées d'un conflit à un autre, d'une région du continent à une autre. C'est ce qui explique pourquoi beaucoup de ces armes se retrouvent au Soudan.

    Quantité d'armes que possède l'armée populaire de libération du Soudan ont été prises au gouvernement lors de raids dans différents entrepôts ou de sièges de villes. Beaucoup proviennent du commerce illicite ou parallèle. Quant aux armes que possède le gouvernement, elles ont été achetées pour la plupart sur le marché officiel. La majorité des fournisseurs sont—au moins d'après le registre des Nations Unies sur les armes conventionnelles—originaires de Russie, de Chine ou de Corée du Nord. Il n'y a là rien de surprenant et il faut également ajouter que le nord du Soudan a une importante capacité de production d'armes, mais beaucoup plus axée sur les armes légères. Il ne fabrique pas d'armes conventionnelles comme des tanks ou des missiles.

+-

    Mme Alexa McDonough: Merci.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Pouvons-nous discuter de la motion? Si les témoins veulent bien attendre un peu, je suis sûre que des membres du comité auront d'autres questions à leur poser. C'est un peu inhabituel, j'en conviens, mais Mme McDonough doit partir bientôt.

+-

    Le président: Non, c'est correct. Je sais que Mme McDonough doit nous quitter. Si les témoins n'y voient aucun inconvénient, nous allons passer à la discussion sur la motion, mais je ne sais pas combien de temps cela peut nous prendre.

    Par conséquent, avant de commencer, je tiens à vous remercier, chers témoins, d'avoir accepté de comparaître devant nous pour nous faire part de votre expérience et de vos connaissances pour les fins des protocoles d'entente. Merci aussi pour votre participation active, sénateur Jaffer.

    En fait, je me réjouis que le débat se soit centré sur les liens diplomatiques et humanitaires qu'entretient le Canada avec le Soudan. Qu'il s'agisse de sa participation au processus de paix, de l'aide humanitaire ou du partage de son expérience fondée sur une approche fédéraliste de la protection des droits de la personne, je crois que le gouvernement canadien s'implique de façon plus soutenue dans ce dossier. Comme vous l'avez fait remarquer à juste titre, sénateur Jaffer, la visite du ministre soudanais des Affaires étrangères et les rencontres avec des représentants du gouvernement et d'ONG y sont aussi pour quelque chose.

    Encore une fois, je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui nous transmettre vos connaissances et votre compréhension de cette région sensible et qui ne laisse personne indifférent. À ce propos, nous serons ravis de recevoir toute information supplémentaire que vous voudrez bien nous donner.

    Merci.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Je vous remercie.

    Monsieur le président...

+-

    Le président: Je voulais juste préciser que nous poursuivrons cette discussion en présence des représentants des ONG la semaine prochaine. Ceci marque le début d'un intérêt renouvelé pour la question soudanaise.

    Nous passons maintenant à l'examen de la motion de Karen Kraft Sloan.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Merci beaucoup, monsieur le président.

    J'aimerais attirer l'attention des membres du comité sur un communiqué de presse publié sur le site Web d'Amnistie internationale. Il est daté du 29 mai et dit:

Selon certaines informations qui nous sont parvenues ce week-end, les États-Unis envisageraient la construction d'une chambre d'exécution à Guantánamo. Bien que choquante, cette décision correspondrait à une proposition de l'administration Bush de faire juger certains ressortissants étrangers par des commissions militaires, des organes exécutifs ayant le pouvoir de prononcer des condamnations à mort. Les prisonniers déclarés coupables n'auraient pas le droit de faire appel. Aucun nom n'a été cité par le président Bush pour comparution devant ces commissions militaires, mais les préparatifs en vue de tels procès se poursuivent et des responsables sont en cours de recrutement.

    J'ai un autre article, tiré du Legal Times, qui dit:

Les avocats de la défense disent craindre que le Pentagone ne les empêche d'entrer en contact avec les détenus ou de se rendre à Guantánamo. «Le Pentagone a rendu pratiquement impossible pour n'importe quel avocat civil de s'occuper de l'un de ces cas»...

    Selon le règlement du département américain de la défense, les accusés appelés à comparaître devant des commissions militaires ont le droit d'obtenir gratuitement les services d'un avocat militaire et peuvent éventuellement demander à être défendus par un avocat civil sans que cela ne coûte quoi que ce soit au gouvernement. Toutefois, comme l'indique l'article dont je viens de vous lire l'extrait, ces avocats civils ne pourront entrer en communication avec les détenus. Par conséquent, monsieur le président, ces derniers se retrouveront dans une situation très difficile, particulièrement s'ils doivent subir ces soit-disant jugements, car ils risquent la peine capitale.

    Certains pays ont été autorisés à envoyer des délégations pour rendre visite à des prisonniers à Guantánamo. Parmi ces pays, il y a le Pakistan, l'Iran, l'Arabie saoudite, la Grande-Bretagne, la Russie, la France, le Koweit, le Yémen, la Suède et le Danemark. La semaine dernière, on s'est posé la question de savoir s'il était approprié que le Canada envoie également une délégation, mais tout ce que j'ai pu dire, c'est que d'autres pays l'ont fait.

    J'aimerais présenter cette motion. Je propose que le Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international demande au ministre des Affaires étrangères d'envoyer une délégation de parlementaires canadiens visiter le centre de détention de Guantánamo, à Cuba.

»  +-(1700)  

+-

    Le président: Avez-vous quelque chose à dire au sujet de la motion, Alexa?

+-

    Mme Alexa McDonough: Eh bien, j'y suis tout à fait favorable. Je ne sais pas s'il faut que quelqu'un l'appuie, mais je pense que c'est une initiative importante. Je crois que nous devons faire plus que de dire simplement que nous sommes contre les tribunaux militaires qui procèdent à des exécutions et refusent aux détenus les services d'un avocat. Voilà une initiative dont nous nous réjouissons au plus haut point et à laquelle je suis très favorable.

    Merci.

+-

    Le président: Monsieur  Martin.

+-

    M. Keith Martin: Après mon intervention, j'aimerais avoir l'opinion du président car il connaît ce dossier mieux que n'importe lequel d'entre nous.

    Karen, nous avons discuté de cette question. Même si je comprends bien ce que vous essayez de faire, à savoir garantir à ces personnes un jugement équitable, j'estime que par respect pour les États-Unis, il est important que nous prenions au préalable certaines mesures. Je pense que nous devons leur demander quel cadre juridique ils appliquent. Plutôt que d'aller là-bas directement, il faudrait d'abord demander à l'administration américaine sur quel cadre juridique elle se fonde pour juger ces prisonniers. Si l'information qu'elle nous fournit est inadéquate, alors nous adopterons votre motion.

    Mais je considère imprudent de faire le contraire. Je ne me prononcerai donc pas en faveur de l'adoption de la motion que vous proposez.

+-

    Le président: J'aimerais...

+-

    Mme Colleen Beaumier: Demandez le vote.

+-

    M. Keith Martin: J'aimerais avoir l'opinion du président sur toute cette question car...

[Français]

+-

    The Chair: Monsieur Rocheleau, est-ce que vous avez quelque chose à dire à cet égard?

+-

    M. Yves Rocheleau: Compte tenu des informations troublantes que nous donne notre collègue, je serais porté à voter en faveur de cette motion-là, sauf que je trouve intéressant le point de vue de M. Martin, soit d'avoir en préambule de meilleures informations sur ce qui amène les Américains à hypothétiquement agir de cette façon-là, afin d'assurer nos arrières.

    Mais au niveau du principe, je trouve très intéressant qu'on pense à une éventuelle délégation de députés qui iraient sur place.

[Traduction]

+-

    Le président: Il n'y a rien de plus à ajouter, par conséquent, nous allons passer directement au vote.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Oui.

    (La motion est adoptée)

+-

    Mme Alexa McDonough: Monsieur le président, peut-être que cela va sans dire, mais je trouve qu'il serait normal de faire quelques recherches pour savoir quel type de justice rend actuellement le tribunal militaire, si tant est que l'on puisse parler de justice; qu'en pensez-vous? Ce serait au comité de réaliser ce travail de fond et d'assurer le suivi.

»  -(1705)  

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur le président, si je puis me permettre d'intervenir très brièvement, je dirais que je suis absolument d'accord avec ce que vient de dire Mme McDonough en ce sens que cette initiative devrait faire partie du travail de préparation d'une délégation. J'aimerais également faire remarquer aux membres du comité que l'unité spéciale d'enquête du ministère de la Justice examine actuellement la situation et qu'elle a produit un rapport, publié la semaine dernière, au sujet des détenus incarcérés sur le territoire continental des États-Unis. D'après les conclusions de ce rapport, on a de très sérieux doutes quant au traitement juste et équitable de ces détenus. Cependant, je ne sais pas où en est leur enquête sur les prisonniers de Guantánamo.

    Mais le gouvernement américain l'a déjà fait et cela soulève de grandes préoccupations. La Haute Cour britannique a déjà exprimé ses craintes à ce sujet, tout comme un certain nombre d'agences de l'ONU.

    J'estime qu'on a donc déjà beaucoup travaillé sur les méthodes utilisées et qu'il existe énormément de documentation sur cette affaire.

    Merci.

+-

    Le président: Je ne voulais pas interrompre le vote, mais je pense que du point de vue de la procédure, nous risquons d'avoir inversé le processus étant donné qu'avant de déposer une motion, il vaux mieux avoir tous les éléments en mains. Mais ce qui compte, c'est la démarche, et je crois que lorsqu'on s'adressera au ministre, celui-ci aura pris connaissance de toutes les données et il pourra prendre les décisions qui s'imposent.

    Comme vous le savez, et comme je vous l'ai dit précédemment, le département américain de la justice, avec lequel j'ai été en contact—j'ai communiqué avec le bureau des enquêtes spéciales—, est en train de procéder à des enquêtes, non seulement sur le territoire continental des États-Unis, mais aussi à Guantánamo. Par conséquent, je ne pense pas que nous voudrions—pour employer un terme que nous n'aimons pas à l'égard des États-Unis—être indûment préventifs dans nos représentations, sans disposer au préalable de toutes les informations pertinentes.

    Ainsi, je considère que cette motion s'appliquera lorsque nous aurons davantage de données à notre disposition pour permettre au ministre de prendre des décisions éclairées.

+-

    Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur le président, puis-je faire un autre commentaire?

    J'ai écouté ce qu'avaient à dire les gens la semaine dernière, et la motion en soi semble un peu floue. Elle manque de précision et ne dit pas que nous envisageons de nous rendre là-bas en raison des problèmes entourant le processus judiciaire auquel sont soumis les prisonniers. Elle est restée vague précisément pour cette raison.

    Deuxièmement, sachez que j'ai entendu le président dire ce matin, devant le Comité des affaires étrangères, que lorsque nous avons présenté notre rapport, nous avons dit que c'était l'occasion de braquer les projecteurs sur un problème très important. Nous pouvons en faire autant dans ce cas-ci.

    Il est urgent d'agir et je ne crois pas qu'Amnistie internationale fasse de telles déclarations sans se fonder sur des faits avérés. D'ailleurs, elle a également produit un très important rapport la semaine dernière sur l'augmentation des cas de violation des droits de la personne dans les pays développés. Elle faisait précisément référence aux États-Unis et à la Grande-Bretagne à cause des méthodes que ces pays utilisent dans la guerre contre le terrorisme et aussi pour leur intervention en Irak.

    Je pense qu'il est important de dénoncer ces actes et je crois que si cette motion doit servir à quelque chose, c'est précisément à cela. Il se peut que certaines réponses soient rendues publiques, comme il se doit.

-

    Le président: J'ai toujours dit que faire toute la lumière sur les questions épineuses était ce qu'il y avait de plus salutaire, et c'est exactement à cela que doit servir cette motion. J'espère que nous aurons toutes les informations requises pour prendre les bonnes décisions. C'est tout ce que j'ai à dire.

    Merci. La séance est levée.