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LANG Rapport du Comité

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

En 1969, le Parlement adoptait la première Loi sur les langues officielles qui proclamait l’égalité du français et de l’anglais et assurait aux citoyens canadiens la disponibilité des services fédéraux en anglais et en français à la grandeur du pays. Plus de 35 ans plus tard, force est de constater que des progrès ont été réalisés en matière de bilinguisme dans la fonction publique fédérale. En 1974, 38 164 des 182 789 (21 %) postes de la fonction publique fédérale étaient désignés bilingues1. Trente ans plus tard, ce chiffre a presque doublé : 64 938 des 166 679 postes de la fonction publique fédérale, soit 39 %, étaient désormais des postes désignés bilingues2. Dans la même veine, à peine 70 % des titulaires de postes bilingues satisfaisaient aux exigences linguistiques de leur poste en 1978 et 27 % étaient exemptés d’y satisfaire. En 2003-2004, c’est désormais 85 % des employés qui satisfaisaient aux exigences linguistiques (bilingues) de leur poste et 8 % qui étaient exemptés. Sur le plan de la représentation des francophones et des anglophones dans les institutions fédérales, la fonction publique fédérale est plus représentative des deux groupes linguistiques qu’il y a 35 ans et «  reflète assez bien leur présence dans la société canadienne3  » comme l’affirmait la commissaire aux langues officielles dans son dernier rapport annuel 2003-2004.

Malgré tout, le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes a constaté dans le cadre de ses travaux que la pleine mise en œuvre du programme des langues officielles au sein de la fonction publique fédérale demeure un idéal à atteindre. Notre étude est axée sur six sujets qui ont fait l’objet de discussions répétées lors de nos travaux. À la section 1, nous nous pencherons sur la question de la langue de travail au sein de l’appareil fédéral. Nous en profiterons pour discuter du déménagement du siège social de la Commission canadienne du tourisme (CCT) et des incidences de cette réorganisation administrative sur les droits linguistiques des employés fédéraux, tels que prévus à la partie V de la Loi sur les langues officielles. À la section 2, nous faisons le point sur les services de formation linguistique offerts dans la fonction publique fédérale. À la section 3, il sera question des tests de connaissances linguistiques que la Commission de la fonction publique (CFP) fait passer aux employés fédéraux. À la section 4, nous ferons quelques commentaires sur la dotation des postes bilingues et du Décret d’exclusion sur les langues officielles (DELO) qui fait présentement l’objet d’un examen par la CFP. Dans la section 5, il sera question du renforcement des exigences linguistiques pour les membres du groupe de direction. Enfin, dans la section 6, nous traiterons de la prime au bilinguisme et de sa pertinence, 28 ans après son instauration en 1977.

Le Comité aimerait en profiter pour remercier les témoins qui ont participé à nos travaux et qui ont soumis plusieurs idées pour améliorer le programme des langues officielles au sein de la fonction publique fédérale. Leur aide fut précieuse. De notre côté, nous ne prétendons pas avoir couvert tous les enjeux relatifs au bilinguisme dans la fonction publique fédérale; nous espérons toutefois que notre travail stimulera la réflexion sur ces questions.

1.         LA LANGUE DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE

La partie V de la LLO de 1988 énonce que le français et l’anglais sont les langues de travail des institutions fédérales et qu’il incombe à celles-ci de veiller à ce que dans les régions désignées bilingues, les fonctionnaires fédéraux puissent travailler dans la langue officielle de leur choix, sous certaines conditions. En résumé, ces régions bilingues sont les secteurs du nord et de l’est de l’Ontario, la région de la capitale nationale (RCN), Montréal, certaines parties des Cantons de l’Est, de la Gaspésie et de l’ouest du Québec, ainsi que toute la province du Nouveau-Brunswick.

Nos travaux ont permis de constater qu’il semble y avoir encore beaucoup de travail à faire avant d’en arriver à une fonction publique fédérale où les deux langues officielles sont à égalité dans le milieu de travail. Il y a un consensus général sur le fait que le français est sous-utilisé comme langue de travail, notamment dans la RCN. L’Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada (AGRHFPC), chargée de l’application générale du programme des langues officielles de la fonction publique fédérale, reconnaît qu’il «  faut opérer un changement culturel au sein de la fonction publique4.  » De son côté, l’Alliance de la Fonction publique du Canada (AFPC) souligne que la possibilité de travailler en français dans la RCN n’est pas encore un fait acquis et que les gestionnaires doivent agir comme des agents de transformation dans ce domaine :

Je dirai qu’il est fréquent que les membres que nous représentons nous disent qu’ils ne peuvent pas parler français dans leur milieu de travail, dans la région de la capitale nationale. C’est simple, ils parlent anglais, c’est tout, c’est la langue de travail. Cela n’aide pas à changer la culture. On dit qu’on ne peut pas imposer une langue de travail, mais je suis en désaccord. Le gestionnaire, à quelque niveau que ce soit, peut décider que, dorénavant, les gens devront respecter la langue de chacun5.

L’Institut professionnel de la fonction publique du Canada (IPFP) tient essentiellement les mêmes propos que l’AFPC et insiste également sur l’importance «  que la culture change de façon positive6  ». Plusieurs des témoins que nous avons entendus affirment que ce sont les membres du groupe de direction qui sont les mieux placés pour être ces agents de changement. Les personnes qui occupent les postes dans les hautes sphères de la fonction publique fédérale doivent faire preuve de leadership, en exerçant une influence du haut vers le bas en matière de langue de travail. La commissaire aux langues officielles met l’accent sur la nécessité d’un tel «  leadership qui vient d’en haut7  » et d’une plus grande sensibilisation «  des gestionnaires à leurs responsabilités8  » en matière de langue de travail. Dans une étude rendue public en mars 2004 qui portait sur la langue de travail dans la fonction publique fédérale, le Commissariat aux langues officielles définit le leadership comme l’aptitude à produire un changement :

Le leadership suppose de faire part de la vision à toutes les parties en cause, de sorte qu’elles la comprennent et y croient. Il procure également un environnement qui inspirera et motivera les gens à surmonter les obstacles qui pourraient survenir en cours de route9.

            L’Association professionnelle des cadres supérieurs de la fonction publique du Canada (APEX), qui représente la moitié des cadres de la fonction publique du Canada, reconnaît d’emblée que les membres des sphères supérieures de la haute fonction publique ont un rôle particulier à jouer dans ce domaine :

L’APEX est d’avis que les leaders de la fonction publique, soit les sous-ministres et les sous-ministres délégués — et nous incluons aussi les chefs d’organismes — doivent prêcher par l’exemple et qu’ils doivent donc avoir un niveau de bilinguisme fonctionnel. Ils doivent également être tenus responsables de donner le ton dans le milieu de travail...10

            Cette déclaration est d’autant plus révélatrice que les quatre cadres francophones membres de l’APEX qui témoignaient devant notre comité ont affirmé ouvertement qu’ils n’utilisaient le français que 5 à 10 % du temps dans leur propre milieu de travail11.

Le Comité est convaincu que l’engagement de la haute fonction publique constitue une condition indispensable à l’implantation de milieux de travail propices à une utilisation plus grande du français dans la fonction publique fédérale. Pour cela, le leadership doit être au rendez-vous. Ce «  changement de culture  » réclamé par plusieurs témoins, n’est pas un objectif facile à atteindre, qui se réalise en imposant des règlements contraignants ou des directives sévères. On arrive à un changement de culture en autant que tous et chacun fassent preuve d’ouverture d’esprit et que les personnes en position d’autorité exercent leur influence :

RECOMMANDATION 1

Le Comité recommande que les personnes nouvellement nommées à des postes de direction suivent une séance formelle d’information donnée par l’École de la fonction publique du Canada, en collaboration avec le Commissariat aux langues officielles, sur l’importance de créer et de maintenir un milieu de travail propice à l’usage effectif des deux langues officielles.

RECOMMANDATION 2

Le Comité recommande que l’AGRHFPC élabore un mécanisme de vérification approprié afin de s’assurer que la fonction publique fédérale constitue un milieu de travail propice à l’usage effectif des deux langues officielles, et qu’elle en fasse état dans son rapport annuel au Parlement.

            Les outils administratifs et législatifs sont sans équivoque : une nouvelle Politique sur la langue de travail est entrée en vigueur le 1er avril 2004 et les dispositions de la LLO en matière de langue de travail énonce les droits des employés fédéraux. Il reste à pouvoir compter sur un leadership renouvelé de la haute gestion pour une application pleine et entière.

1.1   Enjeu récent : le déménagement du siège social de la Commission canadienne du tourisme (CCT)

Le 1 avril dernier, le gouvernement du Canada, annonçait le déménagement du siège de la CCT de Ottawa à Vancouver. Le communiqué de presse émis par le gouvernement indique «  que le déménagement du siège social de la CCT à Vancouver vise à promouvoir une fonction publique qui s’appuie sur les talents et l’engagement des Canadiens de toutes les régions12.  » L’augmentation prévue du tourisme en provenance de l’Asie-Pacifique ainsi que la tenue des Jeux olympiques et paralympiques d’hiver en 2010 à Whistler et à Vancouver expliquent également ce déménagement. Lors de sa comparution du 7 avril dernier, la commissaire aux langues officielles a exprimé des craintes quant aux répercussions sur les droits linguistiques qu’aura cette décision sur les employés de la CCT. Le déménagement du siège social de la CCT dans une région qui n’est pas désignée bilingue aux fins de la langue de travail pourrait avoir des répercussions négatives pour la moitié des employés de la CCT qui sont francophones — bien que les francophones de la Colombie-Britannique constituent une communauté vibrante, desservie par un réseau associatif dynamique dans la presque totalité de la province13Quelques jours plus tard, la commissaire aux langues officielles a demandé l’adoption d’un décret qui maintiendrait l’intégralité des droits linguistiques des employés de la CCT même si le siège social ne se trouvait pas dans la RCN14. Cette problématique entourant le déménagement de la CCT démontre à elle seule comment une transformation gouvernementale peut avoir des effets inattendus sur les droits linguistiques des uns ou des autres. En 1999, un groupe de travail présidé par le recteur de l’Université de Moncton, Yvon Fontaine, faisait rapport sur les effets négatifs de certaines transformations gouvernementales comme les privatisations ou les transferts de pouvoirs aux provinces sur le service au public, la langue de travail, la participation équitable et le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire15. Six ans plus tard, les conclusions du Rapport Fontaine sont toujours d’actualité et il nous apparaît essentiel que le gouvernement évalue méticuleusement les incidences sur les langues officielles des réorganisations administratives similaires à celle qui a été décidée dans le cas de la CCT :

RECOMMANDATION 3

Le Comité recommande au gouvernement fédéral de faire en sorte qu’il n’y ait pas de  répercussion négative sur le service au public dans la langue officielle du client, sur la langue de travail des employés fédéraux ainsi que sur le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, lorsqu’il y a des réorganisations administratives majeures, telles que le déplacement de sièges sociaux d’institutions ou d’organismes fédéraux.

RECOMMANDATION 4

Le Comité recommande au gouverneur en conseil d’adopter un décret qui garantit aux employés fédéraux le droit de travailler dans la langue officielle de leur choix, lorsque le siège social d’une institution fédérale est déménagé dans une région qui n’est pas désignée bilingue pour la langue de travail.

            Cette recommandation n’est ni plus ni moins qu’un rappel des obligations que le gouvernement fédéral s’est lui même donné au cours des années. Par exemple, l’Annexe C de la Politique sur les différents modes de prestation de service16 de 2002 énonce clairement les principes directeurs qui doivent être respectés en matière de langues officielles lorsque le gouvernement diversifie les moyens grâce auxquels il offre des services à la population. Ajoutons que le cadre d’imputabilité du Plan d’action pour les langues officielles (mars 2003) est venu rappeler les responsabilités du gouvernement du Canada en cette matière17.

2.         LE PROGRAMME DE FORMATION LINGUISTIQUE DE LA FONCTION PUBLIQUE FÉDÉRALE

Depuis 1964, le gouvernement fédéral offre la possibilité à ses employés d’avoir accès à de la formation linguistique pendant les heures de service. La formation linguistique est offerte aux fonctionnaires unilingues ainsi qu’aux personnes venant de l’extérieur de la fonction publique qui sont nommées à des postes bilingues et qui ne satisfont pas aux exigences linguistiques de leur poste au moment de leur nomination.

Pendant de nombreuses années, la formation linguistique était sous la responsabilité de la CFP. Elle relève depuis peu de l’École de la fonction publique du Canada. Ce transfert de responsabilités s’est fait à la fin de 2003, quelques mois après l’annonce du Plan d’action pour les langues officielles. Dans le Plan d’action, le gouvernement du Canada a demandé à la CFP de favoriser le recrutement de candidats déjà bilingues, d’offrir un meilleur accès à des cours de langues en début de carrière pour les fonctionnaires qui ne sont pas encore bilingues et d’accentuer les efforts dans le domaine de la rétention et de l’amélioration des compétences linguistiques. La CFP prévoit dépenser 38,6  millions de dollars dans les cinq prochaines années pour atteindre ces objectifs.

La présidente de l’AGRHFPC, Michelle Chartrand, a affirmé lors de son passage devant le Comité que «  tout le système de formation linguistique avait vieilli et avait besoin d’être modernisé. Il est désuet. Ce qui correspondait aux besoins il y a 30 ans doit être modernisé18.  » L’intérêt du Comité pour les questions relatives à la formation linguistique origine d’une étude produite par Jim Mitchell portant sur les services de formation linguistique au sein de l’appareil fédéral. Lorsqu’il est venu témoigner lors de notre première réunion publique en 2005, M. Mitchell a posé un constat similaire à celui de Mme Chartrand :

Notre système de formation linguistique est coûteux, inefficace et rigide. Il ne permet pas aux gens d’atteindre réellement un niveau de bilinguisme fonctionnel ni de s’impliquer personnellement de façon suivie dans la maîtrise de leur seconde langue officielle. Un trop grand nombre de ceux qui abandonnent la formation linguistique perdent rapidement le niveau de maîtrise qu’ils avaient acquis. Ils sont trop nombreux à éprouver de l’amertume envers la langue seconde à la suite de mois de formation linguistique aboutissant à des échecs répétés au test19.

            Les points soulevés par M. Mitchell sont sérieux et le Comité estime qu’il est nécessaire de s’y attarder. Deux enjeux ont retenu notre attention : le problème des listes d’attente et la demande exprimée par certains témoins d’augmenter les dépenses dans le programme de formation linguistique.

2.1   Les listes d’attente et les dépenses en matière de formation linguistique

Plusieurs témoins ont fait état des délais existants avant d’être admis à un cours de langue. Selon l’IPFP, l’École de la fonction publique du Canada ne suffit pas à la demande actuellement. C’est pour cette raison qu’il y aurait plusieurs centaines d’employés en attente de recevoir une formation linguistique20. Il semble que l’entrée en vigueur en 1998 de la Politique concernant les exigences linguistiques pour les membres du groupe de la direction, est à l’origine de la non-disponibilité de la formation linguistique pour certaines catégories d’employés :

La majorité de ceux qui ont soulevé des problèmes relatifs aux langues officielles étaient des personnes qui n’avaient pas accès à la formation linguistique. On nous a dit (…) que la majorité des fonds avait été affectée à la formation d’employés de la catégorie EX, étant donné que ces derniers se devaient de maîtriser les habiletés requises dans la deuxième langue à l’intérieur d’échéances très précises21.

            L’AFPC partage la même position que l’IPFP. Elle prétend que les investissements de 38,6 millions de dollars du Plan d’action pour les langues officielles servent «  principalement aux gestionnaires et non pas aux travailleurs et aux travailleuses de la base qui pourraient apprendre l’autre langue officielle22.  » Année après année, il nous semble que les problèmes d’accessibilité seront de moins en moins acceptables dans la mesure où le Plan d’action pour les langues officielles visait à les résoudre. Il est essentiel que le gouvernement s’assure que tous les employés francophones et anglophones, peu importe leurs groupes professionnels, aient accès à des cours de langue de qualité, à l’intérieur d’un échéancier réduit.

RECOMMANDATION 5

Le Comité recommande que l’École de la fonction publique du Canada fasse la promotion de ses services de formation linguistique et qu’ils soient accessibles à tous les employés fédéraux à l’intérieur d’un échéancier raisonnable, sans restriction aucune envers des groupes d’employés en particulier.

            Toutefois, nous estimons que la mise en œuvre intégrale du programme des langues officielles au sein de la fonction publique fédérale ne doit pas reposer uniquement sur les épaules de l’employeur.  Les employés eux-mêmes doivent se responsabiliser et intégrer la formation linguistique dans leur plan d’action d’apprentissage et de perfectionnement professionnel, comme l’a rappelé l’AGRHFPC23 et l’APEX24 dans leur témoignage. 

Lors de nos travaux, nous avons essayé d’en savoir plus sur le rendement du programme de formation linguistique et des résultats atteints au cours des années. L’étude de M. Jim Mitchell, bien qu’intéressante, ne constitue pas une recherche approfondie sur la question mais plutôt le point de vue d’un individu basé sur un échantillon de 20  personnes, comme l’a avoué lui-même l’auteur :

Ce n’est pas une étude de recherche, ni une étude scientifique, ni un sondage d’opinions de toute une gamme de fonctionnaires. Il s’agit plutôt, comme le titre l’indique, d’une proposition cohérente qui donne aux lecteurs une vision de la formation linguistique dans la fonction publique pour l’avenir. Ce sont les idées d’une seule personne, moi-même25.

            Pour l’instant, il est prématuré de proposer une vision d’avenir si nous n’avons pas un portrait plus détaillé du rendement de l’actuel programme de formation linguistique. Les données sur les services de formation linguistiques offerts par le gouvernement fédéral sont plutôt parcellaires. Par exemple, les rapports annuels de l’AGRHFPC ou de la CFP sont silencieux sur le nombre d’employés ayant suivi une formation linguistique, sur ceux qui ont atteint le niveau de compétence demandé dans la langue seconde à la suite de cette formation ou bien le nombre d’heures de formation linguistique nécessaires pour y arriver. Nous croyons qu’il est nécessaire d’identifier avec précision les raisons qui expliquent les listes d’attentes. Nous demandons à l’AGRHFPC de mener une étude détaillée en colligeant notamment des données à partir des indicateurs que le Conseil du Trésor a lui-même élaboré dans sa Directive sur la formation linguistique et le maintien de l’acquis26 entrée en vigueur le 1er avril  2004 :

RECOMMANDATION 6

Le Comité recommande au gouvernement fédéral de résoudre le problème des listes d’attente qui réduisent l’accessibilité aux services de formation linguistique.

            Plusieurs de nos témoins ont prétendu que le manque d’argent est à l’origine des listes d’attente pour la formation linguistique et qu’il était nécessaire d’augmenter les dépenses dans ce secteur pour les résorber. C’est le point de vue exprimé notamment par l’APEX27, l’AFPC28 et l’IPFP29. L’auteur d’une étude sur la formation linguistique, Jim Mitchell, a toutefois avancé la position contraire en soutenant que le programme de formation linguistique pourrait être «  moins coûteux tout en répondant davantage aux besoins des étudiants30.  » Suite à ces positions variées, le Comité s’est posé plusieurs questions :

 Est-ce que de nouveaux fonds devraient effectivement être investis dans le programme de formation linguistique? 
 Est-ce que les écoles de langues du secteur privé sont mieux placées pour répondre à la demande actuelle? 
 Est-ce que les fonds supplémentaires accordés dans le cadre du Plan d’action pour les langues officielles permettront de réduire les listes d’attente actuelles? 

            Le Comité n’est pas en mesure de répondre à ces questions en ce moment. Il peut difficilement se prononcer dans la mesure où l’AGRHFPC a fait savoir au Comité qu’elle ne connaissait pas les dépenses annuelles affectées au programme de formation linguistique depuis 1999. Jusqu’en 1998-1999, les rapports annuels sur les langues officielles du Secrétariat du Conseil du Trésor fournissaient ce type d’information31. En 1999, le Conseil du Trésor a cessé de colliger ce genre de données dans son système central de données sur le nombre d’heures de formation linguistique. Cette information devrait être à nouveau disponible en 2004-2005 selon la réponse fournie au Comité par l’AGRHFPC à une demande du Service de recherche et d’information de la Bibliothèque du Parlement (voir annexe B).

Données non disponibles depuis 1999

Tableau 1 : Évolution des coûts des services de formation linguistique, 1991-1999 (en millions de dollars)

Source :     Secrétariat du Conseil du Trésor, Rapports annuels sur les langues officielles, 1991 à 1999.

            Le Comité n’est pas le premier à vouloir comptabiliser ces coûts. L’APEX a affirmé ne pas «  connaître les statistiques32  » à ce sujet et l’IPFP a distribué un questionnaire à 24 ministères et agences afin d’obtenir des données quantitatives et qualitatives sur le programme de formation linguistique. L’organisation syndicale a éprouvé les mêmes difficultés que le Comité comme sa présidente l’a elle-même expliqué lors de la réunion du 24 mars dernier :

Certains ministères ont précisé qu’ils n’avaient pas la capacité nécessaire pour compter le nombre d’employés suivant une formation linguistique, ni déterminer combien d’employés suivaient des cours à temps partiel ou bien après leurs heures de travail. Le même raisonnement s’applique au suivi des budgets affectés à la formation linguistique33.

            Nous croyons que la formation linguistique est la clé de voûte dans l’établissement d’une véritable fonction publique bilingue, tant au niveau de la langue de service que de la langue de travail.  Aussi, avant de nous prononcer sur l’injection de fonds nouveaux dans ce secteur, le Comité préfère avoir en main toutes les informations nécessaires pour qu’il puisse juger si ce programme fonctionne dans des conditions d’efficacité réelles. Il est nécessaire d’évaluer le rendement et la qualité des services de formation linguistiques en fonction des sommes qui y sont injectées. Compte tenu de l’investissement de deniers publics que suppose la formation linguistique, nous demandons que l’AGRHFPC collige de nouveau ce genre de données, dans un esprit de reddition de comptes accrue au Parlement.

RECOMMANDATION 7

Le Comité recommande à l’AGRHFPC de fournir les données nécessaires en matière de services de formation linguistique, tant ceux offerts par des fournisseurs publics que privés, et qu’elle en fasse état dans son rapport annuel sur les langues officielles déposé au Parlement, comme le faisait le Conseil du Trésor jusqu’en 1999. Les ministères et les organismes doivent notamment fournir à l’AGRHFPC l’information financière et non financière nécessaire pour permettre des analyses en fonction des résultats réels ou attendus.

RECOMMANDATION 8

Le Comité recommande que toutes les institutions et organismes fédéraux réservent des fonds spécifiques (fonds dédiés) pour la formation linguistique et qu’un poste budgétaire distinct soit identifié pour les dépenses encourues dans ce domaine.

            Nous rappelons que l’absence de telles données va à l’encontre des recommandations de la commissaire aux langues officielles qui, dans son dernier rapport annuel, rappelait qu’une gouvernance efficiente des langues officielles nécessitait « une solide responsabilisation individuelle et institutionnelle — des champions de la cause — un ressourcement adéquat et une reddition de comptes transparente et détaillée34.  » Lorsque davantage de données seront disponibles à ce sujet, le Comité sera mieux en mesure de déterminer s’il est nécessaire de recommander l’ajout de fonds nouveaux dans les services de formation linguistiques de la fonction publique fédérale. Le Comité entend s’intéresser de nouveau à la question des services de formation linguistique dans les années à venir. Il sera nécessaire d’évaluer si les investissements prévus dans le Plan d’action pour les langues officielles ont vraiment permis de corriger le problème des listes d’attente.

3.         L’EXAMEN DES CONNAISSANCES LINGUISTIQUES PAR LA COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE

La CFP établit les normes qui définissent le niveau de compétence de chacun des trois niveaux, soit A (capacité minimale), B (capacité intermédiaire) et C (capacité supérieure), pour chacune des aptitudes linguistiques suivantes: la compréhension de l’écrit, l’expression écrite et l’interaction orale. Toutefois, ce sont les administrateurs généraux de chacune des institutions fédérales qui déterminent l’exigence linguistique des postes au sein de leur organisation. Si un poste est désigné bilingue, le gestionnaire établit le niveau de compétence linguistique requis en utilisant les cotes A, B et C définies précédemment. La CFP est chargée d’évaluer la compétence en langue seconde des candidats, et c’est ici qu’entre en jeu l’examen des connaissances linguistiques.

Le 30 novembre 2004, la présidente de la CFP, Maria Barrados, a expliqué aux membres du Comité que l’organisme dont elle est à la tête avait reçu des plaintes, en particulier de la part de cadres en stage de formation linguistique; qui estimaient «  que le test d’interaction orale en français était devenu plus difficile, qu’il était très stressant, que le délai d’attente pour subir le test était trop long et que les responsables de l’enseignement et ceux de l’administration des tests se contredisaient relativement aux critères d’évaluation35.  » Le taux de réussite au test d’interaction orale en français aurait chuté de façon importante au cours des dernières années. Dans le cas du niveau C, «  le taux de succès est passé de 51 % en 2001-2002 à 33 % en 2003-200436.  » À l’inverse, 82 % des francophones réussissent du premier coup le test d’interaction orale en anglais pour l’obtention du même niveau. Ce déclin au niveau du taux de réussite au test d’interaction orale en français coïncide avec la décision du Conseil du Trésor d’accroître le nombre de postes de cadre de direction exigeant le niveau CBC et d’établir la date butoir du 31 mars 2003 comme date à laquelle les titulaires d’un tel poste devaient avoir obtenu ce niveau. À l’évidence, ces résultats reflètent des problèmes au niveau des tests de compétence en français langue seconde ou de la formation linguistique, qui pourraient avoir des répercussions sur l’accès équitable aux emplois chez les anglophones. Il est clair que ces résultats ne sont pas satisfaisants et que la CFP devra suivre cette situation de près dans les années à venir. Il faut s’assurer que la Commission définisse convenablement le niveau des connaissances de l’autre langue et fasse passer des tests appropriés de langue seconde sans pour autant abaisser les exigences linguistiques des postes bilingues.

RECOMMANDATION 9

Le Comité recommande à la Commission de la fonction publique d’identifier les causes qui expliquent le taux élevé d’échec aux tests d’évaluation linguistiques du français langue seconde en ce qui a trait à la communication orale et qu’elle soumette au Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes un plan de redressement pour remédier à la situation.

4.         LA DOTATION DES POSTES BILINGUES

Il y a quatre critères linguistiques pour évaluer les postes dans la fonction publique :

 bilingue : poste dont l’ensemble ou une partie des fonctions doivent être exercées en français et en anglais;  
 anglais essentiel : poste dont toutes les fonctions doivent être exercées en anglais; 
 français essentiel : poste dont toutes les fonctions doivent être exercées en français;  
 anglais ou français essentiel (poste réversible) : poste dont toutes les fonctions peuvent être exercées en anglais ou en français indifféremment.  

En 2003-2004, la répartition des postes de la fonction publique selon l’exigence linguistique se faisait de la façon suivante :

Billingues

Anglais

Français essentiel

Anglais ou français essentiel

Dossiers incomplets

Total

39 %

50 %

5 %

6 %

0 %

100 %

64 938

83 354

8 010

9 009

368

165 679

Source :     AGRHFPC, Rapport annuel sur les langues officielles 2003-2004, p. 46.

            C’est à l’administrateur général du ministère ou de l’agence de définir les exigences linguistiques des postes à pourvoir. La dotation non impérative est la mesure prise pour nommer à un poste bilingue un candidat ou une candidate qui ne satisfait pas aux exigences linguistiques, mais qui est admissible à la formation linguistique ou exempté de satisfaire aux exigences du poste. Par exemple, un poste qui est ouvert aux candidats du public n’a pas besoin d’être doté de façon impérative, ce qui permet à un candidat qui ne connaît pas la deuxième langue de disposer de deux ans pour satisfaire à l’exigence linguistique demandée. À l’inverse, la dotation impérative veut dire qu’il est obligatoire de nommer à un poste bilingue une personne qui satisfait aux exigences linguistiques du poste au moment de sa nomination.

Lors de la réunion du 9 décembre 2004, la présidente de l’AGRHFPC, Michelle Chartrand, a fait état des nouvelles politiques qui sont entrées en vigueur le 1eravril 2004 et qui renforcent la dotation impérative dans les cas de postes bilingues : «  Plus on utilisera la dotation impérative en tant que norme, moins le recours au DELO sera utilisé37.  »

            Le Comité accueille favorablement la promulgation de ces nouvelles politiques, qui ne peuvent que renforcer les capacités bilingues de la fonction publique fédérale.  Toutefois, le Comité estime qu’il est important que les administrateurs responsables de la dotation dans les institutions fédérales fassent preuve de circonspection et de jugement lorsque vient le temps de déterminer les exigences linguistiques d’un poste.  Les administrateurs doivent s’assurer qu’un poste à être doté requiert objectivement l’utilisation des deux langues officielles pour accomplir les tâches demandées. 

4.1   Le décret d’exclusion sur les langues officielles

La Loi sur l’emploi dans la fonction publique définit la compétence linguistique comme une qualification au même titre que l’expérience, la formation et les autres types de qualités. Lorsqu’une un administrateur général juge qu’un poste bilingue n’exige pas immédiatement d’un titulaire d’avoir la connaissance des deux langues officielles, il est possible de recourir au Décret d’exclusion sur les langues officielles (DELO) dans la fonction publique pour permettre à une personne unilingue d’être nommée au poste à certaines conditions. Le DELO permet d’exempter pendant deux ans les personnes qui remplissent les conditions suivantes :

 elles acceptent de suivre de la formation linguistique;  
 elles démontrent qu’elles ont le potentiel voulu pour atteindre le niveau de compétence linguistique requis, ce qui est actuellement évalué à l’aide de tests diagnostiques;  
 elles conviennent que, si elles n’atteignent pas ce niveau à la fin de leur période d’exemption, elles seront nommées ou mutées à un autre poste pour lequel elles satisfont à toutes les exigences, y compris les connaissances linguistiques.  

            Lors de sa comparution en novembre dernier, la CFP a admis que le recours au DELO par les administrateurs généraux n’avait «  pas été suffisamment contrôlé38  » et que ses modalités d’application «  n’auraient pas toujours été respectées39.  » Pour remédier à la situation, la CFP procède actuellement à une évaluation du recours au DELO. Le Comité s’attend à ce que le DELO soit utilisé avec une certaine réserve par les institutions fédérales.  Il s’agit d’une mesure d’exception, qui ne doit pas servir de mécanisme pour contourner la Loi et entraîner des effets négatifs sur la qualité des services offerts en français et en anglais.  Aussi, nous incitons les administrateurs généraux chargés de la dotation des postes bilingues à recourir à d’autres options avant de recourir au DELO, notamment en élargissant la zone de recrutement des candidats.

RECOMMANDATION 10

Le Comité recommande à la CFP de s’assurer que l’utilisation du DELO soit une mesure d’exception et, si des institutions et organismes fédéraux y ont recours, que la CFP s’assure que le droit du public d’être servi dans la langue officielle de son choix est protégé.

RECOMMANDATION 11

Le Comité recommande aux institutions et organismes fédéraux d’élargir la zone géographique de sélection des candidats lorsque vient le temps de doter des postes bilingues, avant de recourir au DELO.

RECOMMANDATION 12

Le Comité demande à la CFP de faire rapport sur l’utilisation du DELO dans son rapport annuel au Parlement.

5.         LE RENFORCEMENT DES EXIGENCES LINGUISTIQUES POUR LES MEMBRES DU GROUPE DE DIRECTION

Le 1er mai 1998, le Conseil du Trésor promulguait la Politique concernant les exigences linguistiques pour les membres du groupe de la direction. Avec l’entrée en vigueur de cette politique, les représentants de la haute direction dans la fonction publique devaient répondre aux exigences linguistiques de leur poste (niveau C-B-C)40 avant le 31 mars 2003. Depuis avril 2005, la dotation est désormais impérative pour les postes bilingues de la fonction publique du niveau EX-03 et elle le deviendra pour les EX-02 en 2007 dans les régions désignées bilingues aux fins de la langue de travail et dans les régions unilingues si les fonctions du poste incluent la supervision de titulaires de postes bilingues dans une région bilingue. Avec les années, la dotation impérative est devenue possible pour les représentants de la haute direction dans la fonction publique parce que les candidats sont majoritairement des fonctionnaires de carrière qui ont acquis, avec les années, les compétences linguistiques exigées par le gouvernement.

Dans le cadre de son témoignage, l’APEX a affirmé qu’elle avait généralement bien accueilli le renforcement des exigences linguistiques pour les membres du groupe de la direction. Toutefois, l’organisme exprime des préoccupations « quant au bilinguisme exigé pour les sous-ministres des régions unilingues (EX-04 et EX-05). Il serait difficile pour eux de maintenir leur seconde langue officielle dans un environnement où ils ne l’utilisent pas41.  » Le Comité est en désaccord avec l’APEX sur cette question. Les sous-ministres ont un impact sur la création d’un milieu de travail qui favorise l’utilisation des deux langues officielles. Ces sous-ministres constituent des modèles, qui doivent refléter l’image d’une fonction publique où les deux langues officielles sont valorisées. Aussi, le Comité est d’avis que, de par leurs fonctions, ils doivent avoir une bonne maîtrise du français et de l’anglais, à un niveau comparable sinon supérieur à celui qui est exigé des autres cadres de la fonction publique (EX-02 et EX-03). Nous comprenons difficilement comment les plus hauts fonctionnaires accèdent aux échelons supérieurs de la haute fonction publique sans avoir une connaissance adéquate de la seconde langue officielle. D’autre part, dans la mesure où les EX-3 constituent le groupe de relève le plus important à fournir des candidats aux postes de sous-ministres adjoints, il est primordial qu’ils en viennent à apprendre une seconde langue officielle.

RECOMMANDATION 13

Le Comité recommande au Bureau du conseil privé d’exiger que les personnes nommées à des postes de sous-ministre satisfassent aux exigences CBC42 dans la seconde langue officielle.

            L’apprentissage des deux langues officielles doit faire partie du plan de formation professionnelle des employés fédéraux qui envisagent d’occuper les échelons supérieurs de la fonction publique fédérale. Le message doit être sans équivoque. L’accès aux échelons supérieurs de la fonction publique fédérale n’est possible que dans la mesure où les candidats ont une maîtrise supérieure des deux langues officielles. Leurs fonctions les amèneront à diriger des employés des deux groupes linguistiques et à communiquer avec d’autres employés fédéraux à travers le pays. Les employés de la haute gestion servent d’exemple aux autres catégories d’employés.

6.         LA PRIME AU BILINGUISME

Un employé du gouvernement fédéral qui occupe un poste identifié bilingue et qui satisfait aux exigences linguistiques de son poste est admissible à recevoir une prime au bilinguisme. Cette prime consiste en un paiement annuel fixe de 800 $, réparti sur 12 mois et versé de la même façon que le traitement régulier. Cette prime a été instaurée en 1977 et devait être une mesure temporaire pour inciter l’apprentissage d’une seconde langue officielle. Notons qu’en 2003-2004, le gouvernement a dépensé 63,6 millions de dollars pour la prime au bilinguisme et elle est en hausse constante depuis 1998-1999 (Tableau 2)

Tableau 2 : Évolution des coûts de la prime au bilinguisme, 1995 à 2004 (en millions de dollars)

Source :     Conseil du Trésor, Rapports annuels sur les langues officielles de 1995 à 1998 et demande du Service de recherche et d’information de la Bibliothèque du Parlement auprès de l’AGRHFP. (Réponse en date du 8 février 2005)

L’APEX n’est pas en faveur du maintien de cette prime et pense que l’argent pourrait être mieux utilisé s’il était investi dans la formation linguistique :

Selon nous, si on mettait de côté la prime au bilinguisme et si on investissait pour offrir de la formation continue aux jeunes dans la vingtaine ou la trentaine, au moment où ils entrent à la fonction publique, on finirait par avoir un bassin de population bilingue dans la fonction publique qui serait à un, deux, et trois niveaux de poste cadres. À ce moment-là, la dotation impérative ne semblerait pas une marche trop haute; ce serait quelque chose de tout à fait naturel43.

            La position des organisations syndicales est à l’opposé. Lors de sa comparution, la présidente de l’AFPC, Nycole Turmel a réitéré la position de son organisme, c’est-à-dire que la prime au bilinguisme devait être maintenue «  et reconnue comme un revenu dont on tiendrait compte lors du calcul de la pension44.  » L’IPFP va plus loin en prétendant qu’une hausse de la prime au bilinguisme constituerait un incitatif pour encourager les employés fédéraux à apprendre une seconde langue officielle :

La prime au bilinguisme doit être plus qu’un paiement symbolique; elle doit véritablement refléter la valeur de cette compétence supplémentaire et du service rendu. Pour ce faire, il faut revoir la prime au bilinguisme désuète de 800 dollars par année qui ne reflète pas la réalité du marché d’aujourd’hui. (…) L’Institut s’oppose vivement à toute tentative unilatérale de l’employeur de changer la prime au bilinguisme ou de prendre en compte les coûts du bilinguisme officiel à la table de négociation.45

            Tous les commissaires aux langues officielles ont demandé l’abolition de cette prime depuis 1980. En 2002-2003, la présidente du Conseil du Trésor, Lucienne Robillard, mentionnait dans son rapport annuel sur les langues officielles que le gouvernement s’interrogeait «  sur la pertinence de cette prime46.  »

            Tout comme d’autres avant nous, le Comité n’est pas certain qu’il y ait une corrélation claire entre la prime au bilinguisme et l’augmentation de la capacité bilingue de la fonction publique fédérale. Toutefois, le Comité estime que le bilinguisme est une compétence particulière qui doit être rétribuée à sa juste valeur.  Nous croyons qu’il serait plus approprié de tenir compte de cette qualification dans le traitement salarial des employés fédéraux.  Cette bonification salariale reposerait sur un processus d’évaluation, qui confirmerait que les bénéficiaires maintiennent tout au long de leur carrière une connaissance adéquate de la langue seconde, soit par le biais d’une attestation venant d’un superviseur immédiat ou par le biais d’un test linguistique périodique.

RECOMMANDATION 14

Le Comité recommande au Conseil du Trésor que la prime au bilinguisme soit abolie et que la connaissance des deux langues officielles soit une compétence professionnelle reflétée dans le traitement salarial des employés fédéraux.

CONCLUSION

Le gouvernement du Canada, par l’entremise du Plan d’action pour les langues officielles, investira 64,6 millions de dollars de fonds nouveaux sur cinq ans pour créer une fonction publique exemplaire en termes de langues officielles. Le Comité sera très vigilant dans les années à venir pour s’assurer que ces investissements produisent les résultats attendus. À la suite de nos travaux, nous avons constaté qu’il existe encore des points faibles et des éléments à améliorer. L’anglais est encore dominant comme langue de travail même dans les régions désignées bilingues et dans la RCN et un leadership des membres du groupe de direction est nécessaire pour amener un changement de paradigme. Le leadership doit venir des échelons supérieurs de la fonction publique fédérale et, à ce sujet, nous nous attendons à ce que les sous-ministres soient assujettis aux mêmes exigences de bilinguisme que les autres cadres. En ce qui a trait aux services de formation linguistique, les listes d’attente découragent l’accessibilité et il est nécessaire d’identifier les causes pour les résorber. Par ailleurs, la reddition de comptes est déficiente en matière de formation linguistique et les ministères fédéraux devront être plus transparents dans ce domaine. Enfin, nous recommandons que la prime au bilinguisme soit éliminée et que le traitement salarial des employés fédéraux bilingues soit ajusté en conséquence.



1 Conseil du Trésor, Les langues officielles dans les institutions fédérales, Rapport annuel 1990-1991, ministère des Approvisionnements et services Canada, p. 35.
2 Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada, Rapport annuel sur les langues officielles 2003-2004, p. 46.
3 Commissaire aux langues officielles, Rapport annuel 2003-2004, ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux Canada 2004, p. 46.
4 Témoignages, Comité permanent des langues officielles, réunion no 11, 38e législature, 1re session, 9 décembre 2004 (1025).
5 Ibid, réunion no 16, 38e législature, 1re session, 10 février 2005 (0955).
6 Ibid., réunion no 23, 38e législature, 1re session, 24 mars 2005 (0930).
7 Ibid,, réunion no 19, 38e législature, 1re session, 24 février 2005 (0925).
8 Ibid.
9 Commissariat aux langues officielles, De la parole aux gestes : la langue de travail au sein de la fonction publique fédérale, mars 2004, p. 10.
10Témoignages, Comité permanent des langues officielles, réunion no 14, 38e législature, 1re session, 3 février 2005, (0905).
11Ibid., (1020).
12Voir les communiqués de presse d’Industrie Canada : www.ic.gc.ca.
13Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, Profil de la communauté francophone de la Colombie-Britannique (2e édition), mars 2004, p. 11.
14Témoignages, Comité permanent de l’industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie, réunion no 29, 38e législature, 1re session, 11 avril 2005 (1655).
15Groupe de travail sur les transformations gouvernementales et les langues officielles, Maintenir le cap : la dualité linguistique au défi des transformations gouvernementales, Ottawa, janvier 1999 (communément appelé le Rapport Fontaine).
16Secrétariat du Conseil du Trésor, Politique sur les différents modes de prestation de services, 2002, (http://www.tbs-sct.gc.ca/pubs_pol/opepubs/tb_b4/asd-dmps1_f.asp#_Toc921243).
17Gouvernement du Canada, Le prochain acte : un nouvel élan pour la dualité linguistique canadienne. Le plan d’action pour les langues officielles, 2003, p. 67-76.
18Témoignages, Comité permanent des langues officielles, réunion no 11, 38e législature, 1re session, 9 décembre 2005 (1025).
19Ibid., réunion no 13, 38e législature, 1re session, 1 février 2005 (0905).
20Ibid., réunion no 23, 38e législature, 1re session, 24 mars 2005,(0915).
21Ibid., (0925).
22Ibid., réunion no 16, 38e législature, 1re session, 10 février 2005 (0940).
23Ibid., réunion no 11, 38e législature, 1re session, 9 décembre 2004 (1000).
24Ibid., réunion no 14, 38e législature, 1re session, 3 février 2005 (1025).
25Ibid., réunion no 13, 38e législature, 1re session, 1 février 2005 (0935).
26Ces indicateurs sont énumérés à l’annexe A.
27Témoignages, Comité permanent des langues officielles, réunion no 14, 38e législature, 1re session, 3 février 2005 (0905).
28Ibid., réunion no 16, 38e législature, 1re session, 10 février 2005 (0940).
29Ibid., réunion no 23, 38e législature, 1re session, 24 mars 2005 (0950).
30Ibid., réunion no 13, 38e législature, 1re session, 1 février 2005 (0935).
31Notons qu’il n’est plus possible également de connaître les heures de formation, le système central de données sur le nombre d’heures de formation linguistique ayant été éliminé en 1996-1997.
32Témoignages, Comité permanent des langues officielles, réunion no 14, 38e législature, 1re session, 3 février 2005 (0935).
33Ibid., réunion no 23, 38e législature, 1re session, 24 mars 2005 (0915).
34Commissaire aux langues officielles, Rapport annuel 2003-2004, ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux Canada 2004, p. 97. (souligné par nous)
35Témoignages, Comité permanent des langues officielles, réunion no 8, 38e législature, 1re session, 30 novembre 2004 (0910).
36Ibid.
37Ibid., réunion no 11, 38e législature, 1re session, 9 décembre 2004 (1010).
38Ibid., réunion no 8, 38e législature, 1re session, 30 novembre 2004 (0915).
39Ibid.
40C-B-C signifie : le niveau «  C  » (supérieur) pour la compréhension écrite, le niveau «  B  » (intermédiaire) pour l’expression écrite et le niveau «  C  » (supérieur) pour l’interaction orale.
41Présentation au Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes par l’APEX, Ottawa, 3 février 2005.
42CBC signifie : le niveau C (supérieur) pour la compréhension écrite, le niveau B (intermédiaire) pour l’expression écrite et le niveau C (supérieur) pour l’interaction orale.
43Témoignages, Comité permanent des langues officielles, réunion no 14, 38e législature, 1re session, 3 février 2005 (1025).
44Ibid., réunion no 16, 38e législature, 1re session, 10 février 2005 (1020).
45Ibid., réunion no 23, 38e législature, 1re session, 24 mars 2005 (0915).
46Secrétariat du Conseil du Trésor, Rapport annuel 2002-2003 sur les langues officielles, p. 44.