Passer au contenu
Début du contenu

PACP Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

LA GOUVERNANCE DANS LA FONCTION PUBLIQUE
DU CANADA : OBLIGATION MINISTÉRIELLE DE RENDRE
DES COMPTES

LES SOUS-MINISTRES DÉTIENNENT CERTAINS POUVOIRS LÉGISLATIFS PROPRES

En tant qu’administrateurs en chef des ministères, les sous-ministres se voient déléguer certains pouvoirs, tout en étant investis en propre d’autres pouvoirs. Parmi les principaux documents habilitants, il y a la Loi sur la gestion des finances publiques (LGFP) qui confère directement aux sous ministres d’importants pouvoirs, comme le signale le Bureau du Conseil privé :

Les pouvoirs et responsabilités qui sont spécifiquement attribués aux sous-ministres en matière de gestion financière dans le cadre de la [Loi sur la gestion des finances publiques] comprennent :

  • Au début de chaque exercice ou à tout autre moment fixé par le Conseil du Trésor, préparer une répartition du crédit ou du poste en affectation (paragraphe 31(1));
  • Veiller, grâce à la mise en œuvre d’un système adéquat de contrôles et de vérifications, à ce que les affectations prévues dans une répartition approuvée par le Conseil du Trésor ne soient pas dépassées (paragraphe 31(3));
  • Établir des méthodes de contrôle et de comptabilisation des engagements financiers imputables sur le crédit ou le poste visé (paragraphe 32(2));
  • Fournir les attestations nécessaires aux paiements (article 34); et
  • Tenir de bons inventaires des biens publics placés sous la responsabilité de son ministère et se conformer aux règlements du Conseil du Trésor régissant la garde et le contrôle de ces biens. (article 62) [4].

Les sous-ministres exercent également d’autres pouvoirs directement attribués, outre ceux définis dans la LGFP. Comme le signale encore une fois le Bureau du Conseil privé :

Les responsabilités portant sur la gestion du personnel dans la fonction publique, dont les nominations, les relations entre l’employeur et les employés et l’organisation des ministères sont attribuées directement à l’administrateur général plutôt qu’au ministre [5].

Outre ces responsabilités, les sous-ministres exercent des pouvoirs législatifs propres en vertu de la Loi sur les langues officielles.

Il convient de noter également qu’un nombre important de politiques du Conseil du Trésor, y compris la Politique sur la vérification interne, investissent directement les sous ministres de responsabilités. En règle générale, lorsque le Comité recommande que le Secrétariat du Conseil du Trésor mette à exécution ses politiques, la réponse est que les sous-ministres — et non le Secrétariat — assument individuellement au sein de leur ministère la responsabilité de la mise en œuvre des politiques et lignes directrices des organismes centraux.

Ces observations suggèrent la question suivante : quels comptes les sous ministres sont ils tenus de rendre pour l’exercice des pouvoirs qui leur sont exclusifs? Le Bureau du Conseil privé offre une réponse :

Les sous-ministres et d’autres fonctionnaires se présentent devant les comités du Parlement au nom de leur ministre afin de répondre aux questions sur le rendement de leur ministère ou de fournir à cet égard des renseignements que le ministre ne pourrait raisonnablement fournir lui-même en raison de certains détails ou du niveau de complexité [6].

Les Canadiens qui ont suivi le travail d’enquête du Comité sur le Programme des commandites sauront que la vérificatrice générale et le Comité ont fortement critiqué le fait que le directeur exécutif de la Direction générale des services de coordination des communications (M. Guité) certifiait couramment des contrats pour paiement, indiquant que les services avaient été rendus, et ce même en l’absence de toute preuve tangible. Par cette certification, M. Guité exerçait en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques (article 34) un pouvoir qui lui était délégué par le sous-ministre. Par ailleurs, la création de la DGSCC, la décision de ne pas retirer les activités d’approvisionnement à cette dernière pour les remettre aux services réguliers du Ministère ainsi que la promotion de M. Guité au niveau EX et à un poste de sous ministre adjoint sont des mesures qui ont toutes été prises sous l’autorité du sous ministre — et pourtant, M. Quail a déclaré dans son témoignage qu’elles l’avaient été sur l’ordre du ministre. De son côté, l’ex-ministre Gagliano s’est à maintes reprises attribué le mérite de mesures correctives tout en ne cessant de blâmer les fonctionnaires pour les erreurs de gestion, ou bien il a fait valoir qu’il n’était simplement pas au courant d’actes répréhensibles parce que les fonctionnaires ne l’en avaient pas informé [7].

À cause de la façon dont le Bureau du Conseil privé interprète et applique la doctrine de l’obligation ministérielle de rendre des comptes, toutefois, il y avait de la confusion quant à savoir qui devrait assumer la responsabilité ultime — et donc rendre compte — de la façon dont ces pouvoirs sont exercés. Au cours de sa première comparution devant le Comité, le Pr Franks a indiqué que « les sous ministres doivent rendre des comptes au gouvernement — c’est à dire aux ministres, au premier ministre et au Conseil du Trésor, mais pas au Parlement — des fonctions de gestion cruciales qui leur sont confiées en exclusivité par la loi ». (43:1115) [*] De l’avis du Comité, cet arrangement constitue une lacune majeure en ce sens que la personne chargée de gérer les ressources humaines et financières du ministère et d’exercer les pouvoirs législatifs connexes (le sous-ministre) n’a pas à rendre de comptes à la source ultime de ces pouvoirs et de l’approbation des crédits ministériels annuels — le Parlement du Canada.


* Témoignages 37e législature, 3e session.

[4] Bureau du Conseil privé, Guide du sous-ministre, p. 9 10.

[5] Ibid., p. 10.

[6] Ibid., p. 15. Italique ajouté.

[7] Voir le témoignage cité dans le Neuvième rapport du Comité, 38e législature, 1re session.