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PACP Rapport du Comité

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CHAPITRE 4, LA REDDITION DES COMPTES DES FONDATIONS DU RAPPORT DE FÉVRIER 2005 DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL DU CANADA

INTRODUCTION

Dans son rapport Le Point de février 2005, la vérificatrice générale Sheila Fraser a indiqué au Parlement que le gouvernement fédéral n’avait pas accompli de progrès satisfaisants pour ce qui est d’améliorer la reddition de comptes des fondations, un problème qu’elle avait examiné de manière approfondie pour la première fois en 2002, mais auquel le Bureau s’intéresse depuis au moins 1999.

Dans ce rapport, on a évalué les progrès accomplis par le gouvernement fédéral en fonction de trois volets principaux. Le premier volet a trait au fait que le BVG n’est toujours pas habilité à effectuer une vérification du rendement (VR) des fondations. Le deuxième a trait à l’absence de mécanismes de rajustement qui permettraient au gouvernement de modifier les mandats des fondations advenant une réorientation majeure de ses priorités. Le troisième avait trait à la reddition de comptes par le gouvernement au Parlement; on a constaté que, malgré certaines améliorations, d’autres mesures s’imposent.

Depuis la présentation du rapport de la vérificatrice générale en février 2005, le gouvernement fédéral a déposé des mesures législatives donnant suite à l’idée, affirmée depuis longtemps déjà par le Comité et le BVG, qu’il faut soumettre les fondations à des VR. Ainsi, l’attention du Comité s’est portée, premièrement, sur le débat entre le BVG et le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) concernant les fondations qu’il faut transformer en organismes sous le contrôle de l’État (au lieu d’organismes indépendants) et, deuxièmement, sur la nécessité d’un mécanisme de rajustement.

CONTEXTE

D’après une étude récente du ministère des Finances, le gouvernement a mis en place le système des fondations en 1997 pour se doter d’« autres modes de prestation des services » qui lui permettraient d’atteindre certains de ses objectifs en matière de politiques [1]. L’étude relève 15 fondations importantes, chacune ayant son mandat, sa structure et son cadre législatif [2]. La plupart des fondations sont issues de la Loi sur les corporations canadiennes, qui est la loi cadre de l’État pour la création d’organismes à but non lucratif. Toutefois, quatre des fondations importantes ont leur propre cadre législatif. Il s’agit de la Fondation canadienne de l’innovation, la Fondation canadienne des bourses d’études du millénaire, la Fondation canadienne pour l’appui technologique au développement durable et la Fondation Asie Pacifique du Canada.

LE DÉBAT SUR LE TRAITEMENT COMPTABLE DES ORGANISMES : SOUS LE CONTRÔLE DE L’ÉTAT OU INDÉPENDANTS?

Depuis au moins 1999, la principale préoccupation du Bureau du vérificateur général (BVG) est l’absence de mécanismes appropriés de reddition de comptes dans le système des fondations. Tel que signalé ci-dessus, la présentation récente de mesures législatives (examinées de manière détaillée ci après) semble avoir réorienté le débat vers une autre question : du point de vue comptable, les fondations sont-elles sous le contrôle de l’État ou indépendantes?

D’après le BVG, il ne faudrait consigner les transferts des fondations à titre de dépenses qu’une fois que les fonds sont remis aux bénéficiaires ultimes, et non au moment où ils sont versés dans les comptes des fondations. Cette autre démarche comptable, fondée sur le principe qu’au moins quelques-unes des fondations sont sous le contrôle de l’État du point de vue comptable, empêcherait les fondations d’accumuler d’importantes sommes d’argent dans des comptes qui ne sont pas assujettis à la surveillance du Parlement. En date du 31 mars 2004, il y avait quelque 7,6 milliards de dollars dans les comptes bancaires des fondations (sur un total de 9,1 milliards de dollars transférés depuis 1996-1997) [3].

De son côté, le gouvernement fédéral estime que les fondations sont des organismes indépendants sans but lucratif et devraient le demeurer. Du point de vue du gouvernement fédéral, une fondation autonome présente trois grands avantages. D’abord, une fondation peut atteindre de grands objectifs stratégiques sans nécessiter le genre d’engagement financier à long terme que suppose un nouveau programme du gouvernement imposé par la loi, telle l’assurance-emploi. Par conséquent, les fondations contribuent à maintenir une souplesse fiscale tout en évitant le genre de coûts structurels à long terme qui peuvent mener à des déficits budgétaires. Ensuite, l’autonomie des fondations facilite l’établissement de partenariats privé public ou de partenariats avec d’autres niveaux de gouvernement, permettant ainsi de recueillir des fonds additionnels à l’intention des récipiendaires concernés. Par exemple, on a signalé au Comité l’exemple de Génome Canada, une fondation qui a su tirer parti de son statut d’organisme indépendant pour obtenir des fonds additionnels du secteur privé. Enfin, le statut d’entité autonome aide à assurer aux récipiendaires un financement stable en mettant les décisions en matière de financement à l’abri de considérations purement politiques.

D’après le gouvernement fédéral, cette indépendance des fondations justifie également la pratique comptable qui consiste à traiter les transferts financiers comme des dépenses ponctuelles, une politique appuyée par le Secrétariat du Conseil du Trésor qui a exempté les transferts des fondations de sa Politique sur les paiements de transfert. Normalement, cette politique interdit le versement de sommes avant qu’elles ne soient requises [4].

Le Bureau du vérificateur général a fait part de ses préoccupations au sujet de cette exemption. Dans son rapport d’avril 2002 (paragraphe 1.116), le BVG a recommandé que le Secrétariat du Conseil du Trésor revoie son recours à de telles exemptions. Durant son témoignage devant le Comité le 13 avril 2005, Mme Fraser a ajouté que « le Secrétariat a indiqué qu’une revue de l’ensemble de la politique est prévue. Toutefois, on ne sait pas si cette revue portera aussi sur le recours aux exemptions ». Estimant qu’il faut effectuer une revue de ces exemptions, le Comité recommande :

RECOMMANDATION 1

Que le Secrétariat du Conseil du Trésor revoie son recours aux exemptions dans le cadre de sa Politique sur les paiements de transfert, particulièrement en ce qui concerne les fondations, et qu’il rende compte des résultats de cette revue au Parlement d’ici le 31 décembre 2005.

Au cours de l’audience tenue le 13 avril 2005 sur le chapitre 4, le contrôleur général Charles Antoine St Jean a indiqué au Comité les points sur lesquels porterait cette revue, signalant que le Secrétariat du Conseil du Trésor envisageait des moyens de « recourir moins souvent à l’avance de fonds (aux fondations) avant qu’ils ne soient requis », tout en consignant les transferts à titre de dépenses.

Compte tenu de la responsabilité du Parlement de surveiller les fonds publics, le Comité estime qu’il est important que le Parlement conserve la responsabilité ultime à l’égard de l’ensemble des dépenses gouvernementales, que ce soit par l’entremise de fondations ou de tout autre mécanisme de prestation de services. En conséquence, il recommande :

RECOMMANDATION 2

Que le contrôleur général demande l’approbation du Parlement pour tout nouveau mécanisme ou toute nouvelle politique visant le transfert de fonds à des fondations.

La vérificatrice générale Sheila Fraser a signalé au Comité que les positions prises dans le débat au sujet du statut des fondations, à savoir s’il s’agit d’organismes indépendants ou sous le contrôle de l’État, dépendent de l’interprétation des nouvelles lignes directrices comptables du Conseil sur la comptabilité dans le secteur public (CCSP). D’après ces lignes directrices, la notion de contrôle est définie comme étant « le pouvoir d’orienter les politiques financières d’un autre organisme de sorte que les activités de celui-ci procureront au gouvernement des avantages attendus ou l’exposeront à un risque de perte ». Les lignes directrices du CCSP donnent quelques indicateurs de contrôle; il s’agit notamment de déterminer si le gouvernement peut :

  • nommer ou retirer unilatéralement la majorité des administrateurs de l’organisation;

  • avoir accès aux fonds de l’organisation et en contrôler l’utilisation tout en étant responsable des pertes;

  • détenir la majorité des actions avec droit de vote;

  • dissoudre unilatéralement l’organisation et avoir ainsi accès à son actif et devenir responsable de ses dettes;

  • fixer ou modifier la mission ou le mandat de l’organisation;

  • restreindre l’aptitude de l’organisme à générer des recettes, notamment ses sources de recettes.

Dans le cas de certaines fondations, on constatera quelques-uns de ces indicateurs, mais pas tous. Comme l’a signalé Mme Fraser,

Il est clair que nous devons analyser chacune des fondations séparément parce que […] elles ne sont pas toutes pareilles. Dans certains cas, il est possible que la conclusion sera qu’il s’agit en fait d’un organisme indépendant et que le gouvernement fédéral ne contrôle pas ses politiques opérationnelles et financières. Dans une telle situation, au moment de la signature d’une entente, ou au moment où le paiement se fait, il s’agit clairement d’une dépense […]. Si on conclut que le gouvernement exerce un contrôle sur leurs politiques opérationnelles et financières […], alors la norme stipule que ces fondations doivent faire partie du périmètre comptable.

Tel que signalé dans le Sixième rapport sur les comptes publics de 2003 2004 (38e législature, 1re session) le Comité estime qu’il faut régler dans les meilleurs délais le débat au sujet du statut des fondations aux fins de la comptabilité. En conséquence, il recommande :

RECOMMANDATION 3

Que le contrôleur général, de concert avec le Bureau du vérificateur général, examine les 15 fondations importantes de façon à déterminer lesquelles sont des organismes indépendants et lesquelles sont sous le contrôle de l’État. Le contrôleur général devrait rendre compte de cet examen au Comité, au plus tard le 31 mars 2006. Dans son rapport, le contrôleur général devrait indiquer si le BVG souscrit à ses conclusions.

Mme Fraser a indiqué que, à son avis, la plupart des fondations dépendaient entièrement du financement fédéral et que, en outre, la création de ces fondations découlait d’ententes de financement qui stipulent « quels programmes, quels demandeurs, quelles modalités, comment on investit, qu’on ne peut emprunter de l’argent, qui précisent de manière détaillée ce qu’on est autorisé à faire, si bien qu’on se dit dans de telles situations, le gouvernement fédéral ne contrôle-t-il pas ces organismes? ». En réponse à une question d’un membre du Comité, Mme Fraser a également affirmé que, en principe du moins, le gouvernement fédéral pourrait être tenu de revoir ses bilans financiers, selon le résultat de la classification des fondations comme organismes indépendants ou contrôlés par l’État. En conséquence, le Comité recommande :

RECOMMANDATION 4

Que le Secrétariat du Conseil du Trésor analyse les répercussions sur les bilans financiers gouvernementaux de toute modification au statut indépendant des fondations. Il doit rendre compte du résultat de cette analyse au Comité des comptes publics au plus tard le 31 mars 2006.

[1] Il n’y a pas de consensus au sujet de la date exacte de la création de la première fondation. Par exemple, la Fondation Asie-Pacifique fut créée au moyen d’une loi en 1984. Il convient aussi de signaler que, vers le début des années 1990, il y a eu deux réorientations majeures des priorités stratégiques au gouvernement fédéral. La première est bien connue. En raison des préoccupations suscitées par les déficits fédéraux et la croissance de la dette, le gouvernement fédéral a réduit ses dépenses de programme, gelé les salaires des fonctionnaires, et mis en oeuvre un examen de ses programmes. Depuis, l’élaboration des politiques s’inscrit dans un cadre marqué par la volonté d’enchaîner une série de budgets équilibrés. La deuxième réorientation stratégique consistait en une tendance croissante à mettre en oeuvre de nouvelles politiques par l’entremise du régime fiscal (par exemple, la Prestation canadienne fiscale pour enfants, mise en place en 1992) ou d’institutions indépendantes de l’État (plutôt que par l’entremise des ministères ou des organismes gouvernementaux, le moyen habituel d’assurer des services). Le Secrétariat du Conseil du Trésor désigne ces institutions indépendantes sous le nom de « différents modes de prestation de services ».

[2] Ministère des finances, « Reddition de comptes des fondations », document d’information disponible sur Internet : http://www.fin.gc.ca/toce/2005/accfound-f.html. La liste des fondations abordées dans l’étude du ministère des Finances n’est pas exhaustive. L’étude ne signale pas explicitement les fondations suivantes : le Forum des fédérations; la Clayoquot Biosphere Trust Society; la Pacific Salmon Endowment Fund Society; l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques (Université de Moncton); la Fondation d’apprentissage du Collège Frontière; l’Institut canadien d’information sur la santé; Precarn Inc.; le Réseau canadien pour l’avancement de la recherche, de l’industrie et de l’enseignement; l’Institut canadien des recherches avancées; le Centre canadien d’apprentissage; les Académies canadiennes des sciences; la Fondation canadienne des jeunes entrepreneurs; et la Fondation Asie-Pacifique du Canada.

[3] L’Annexe A renferme une représentation graphique du débat au sujet du statut des fondations aux fins de leur traitement comptable (à savoir s’il s’agit d’organismes indépendants ou sous le contrôle de l’État).

[4] D’après la section 7, paragraphe 7.6.1, de la Politique sur les paiements de transfert : « Les paiements de transfert ne doivent pas être versés aux bénéficiaires avant que le besoin ne se manifeste; les paiements doivent concorder avec la période la plus rapprochée et la plus pratique des besoins de trésorerie ». Le paragraphe 7.6.8 de la Politique stipule que : « Les ministères doivent obtenir l'approbation du Conseil du Trésor pour toute exception à cette politique de gestion de la trésorerie. Des exceptions seront envisagées lorsque le ministère peut démontrer que les frais administratifs ajoutés en raison de paiements plus fréquents sont plus importants que les frais d'intérêt supplémentaires engagés par le gouvernement pour payer plus rapidement ou que la politique du gouvernement ou les objectifs du programme soient compromis ».