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AGRI Rapport du Comité

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ANNEXE C

Une critique technique du Système
d'assurance de la qualité (AQ) du blé dans
l'Ouest canadien

par

Julian Thomas
Applications génétiques — Centre de recherches
sur les céréales
195 Dafoe Road, Winnipeg (Manitoba)
Canada, R3T 2M9
12 juillet 2006


«  Le blé est composé à 14 % de protéines et à 86 % de politique.  »

Source inconnue



TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

LE SYSTÈME ACTUEL D'AQ ET LES ATTITUDES QU'IL FAUT CHANGER

NATURE DE LA CRITIQUE

HÉRITAGE DE LA DVG

RESTRICTIONS PHÉNOLOGIQUES DE LA DVG

LA DVG ET LES AUTRES CLASSES DU BLÉ

LES SOLUTIONS DE RECHANGE À LA DVG

LA DVG ET LE BLÉ DUR

L'EFFET GÉNÉRAL DE LA DVG SUR L'AMÉLIORATION GÉNÉTIQUE

LE COÛT DE LA DVG

TAILLE DES GRAINS ET MOUTURE

TENEUR EN PROTÉINES ET RENDEMENT

CRÉNEAUX D'UTILISATION FINALE ET SÉLECTION DU BLÉ

L'UTILISATION D'ENGRAIS ET LES PROTÉINES

CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS


Introduction

Comme le laisse entendre la citation sur la page couverture, il est difficile de rester froid par rapport au blé. En tant que jeune scientifique, je croyais qu'il était possible de séparer les questions politiques des questions techniques. Vingt-huit ans plus tard, je constate que l'opinion technique risque d'être traitée avec condescendance, ridiculisée, négligée, dénaturée ou même prise en considération selon l'opportunité du moment. C'est ainsi… Puisque ma position économique est indépendante des politiques du blé, il serait présomptueux d'appuyer une position politique. Néanmoins, je ne peux pas garder le silence. Je me sens libre d’expliquer ma vision du fonctionnement d’un point de vue technique à l’intention des personnes intéressées.

Je tiens pour acquis que l'industrie de la culture du blé dans l'Ouest canadien appartient aux fermiers spécialisés en culture du blé et que ces derniers ont le droit d'être informés et consultés sur les enjeux politiques qui affectent leurs intérêts. Un système viable et efficace d'assurance de la qualité (AQ) du blé de mouture serait un atout important qui les rendrait plus concurrentiels par rapport aux autres régions et pays qui vendent du blé de valeur meunière. Si l'on se donne pour mission de créer un système d'AQ du blé de valeur meunière, il serait évident (en tout cas, pour moi) que l'on s'attende à ce que notre système se conforme aux trois principes suivants :

  1. Le coût de l'assurance de qualité de n'importe quel produit ne devrait pas être imposé aux transactions qui n'en tirent aucun avantage.

  2. L'assurance de la qualité d'un produit ne devrait pas interdire le développement d'autres marchés ni l'adoption d'autres technologies inoffensives.

  3. Le système d'AQ devrait être rentable et refléter le comportement des marchés des clients.


Le système actuel d'AQ et les attitudes qu'il faut changer

Le système de classes et de catégories du blé est basé sur la distinction visuelle des grains (DVG) et sur le système d'inscription des cultivars. Dans le cas du blé, l'inscription des cultivars exige l'accord de la Commission canadienne des grains dans le cadre l'autorité de la Loi sur les grains du Canada et la commercialisation du produit est monopolisée par la Commission canadienne du blé. Les principes qui découlent de la Loi sur les grains et de la Loi sur la Commission du blé concordent et ils n'ont pas été remises en question depuis au moins 70 ans. Par conséquent, la plupart des producteurs ne sont pas au courant des pour et des contre des choix techniques importants que l'on fait à leur place et dont personne ne se sent obligé de les informer.

Ceux qui demandent que l'on apporte des changements au système actuel d'AQ risquent fort d'être étiquetés «  antiqualité  » et de voir leurs suggestions pratiques ou scientifiques rejetées dédaigneusement. Je suis contre cet étiquetage. Après une carrière dans la sélection du blé de mouture, je suis fier de la grande qualité des cultivars que j'ai inscrits et je souhaite voir cette valeur protégée par l'assurance de qualité. Toutefois, je trouve que les moyens employés actuellement pour assurer la qualité de la valeur meunière sont restrictifs sur le plan technique et que les effets négatifs dépassent les avantages de ce système d'AQ.

Il est certainement facile de critiquer un système qui doit recueillir et trier diverses productions en provenance de partout dans les Prairies, les expédier et les vendre à l'autre bout du monde pour ensuite compenser de façon précise, équitable et utile, à partir d'une multitude transactions, les producteurs qui ont contribué leurs grains. Il est difficile aussi de conseiller ceux qui ne ressentent pas le besoin d'écouter. En bout de ligne, tout change, et nous devons en faire autant.

Pour un producteur, les enjeux provoqués par le compromis des caractéristiques de ces variétés que l'on choisit pour lui ne sont pas insignifiants. La production du blé n'est pas du tout une abstraction. Les cultivateurs de blé génèrent environ 600 billions de grains de blé par année. Ces grains sont produits par de vraies plantes, qui consomment de vraies substances et qui sont régulièrement attaquées par des ennemis et des maladies bien réels. Il est évident que les variétés que l'on offre aux producteurs sont sous-optimales. Sinon, pourquoi investir dans la sélection des plantes? Néanmoins, lorsqu'on soumet une demande d'inscription, l'importance primordiale est toujours accordée à la satisfaction du système d'assurance de qualité actuel. Les considérations multidimensionnelles comme la résistance aux ennemis des cultures, le rendement et même le besoin d'un climat de recherche favorable à l'innovation sont présentes. Toutefois, elles sont généralement relayées au second plan, remises à plus tard, voire niées.


Nature de la critique

Cette critique traite principalement de trois caractéristiques réglementées : la distinction visuelle des grains (DVG), la teneur en protéines et la taille des grains. Dans le système d'AQ, on tient pour acquis qu’elles sont simplement héréditaires, comme pour toute autre caractéristique. Ce n’est certainement pas le cas. Elles sont toutes complexes et ont des effets secondaires sur la capacité des phytogénéticiens de développer et d'enregistrer de nouveaux cultivars comportant des améliorations génétiques essentielles, comme la résistance à la brûlure de l'épi causée par le fusarium, à la cécidomyie du blé, la résistance de la paille, la résistance au stress et la valeur optimisée sur le marché, ainsi que le développement de nouvelles sortes de blé pour répondre aux besoins changeants d'utilisation. Nous aborderons chaque caractéristique individuellement. En préparant cette thèse, j'ai essayé de poser des questions rigoureuses et de chercher des réponses de sens commun.


La distinction visuelle des grains (DVG) et le blé RPOC

Le rôle de base de la DVG dans le cadre du système actuel d'AQ est de séparer les grains RPOC des autres grains. Pour ce faire, il faut distinguer les cultivars eux-mêmes et être en mesure de repérer les faibles niveaux de mélanges. Ce degré de rigueur exige que les échantillons de grains de cultivars RPOC paraissent complètement uniformes et que les autres types de blé ne contiennent aucun grain de type RPOC, ou présentent de très faibles tolérances. Cette exigence de reconnaissabilité absolue met un lourd fardeau sur le développement de cultivar de blé pour des raisons qui sont reliées de manière précaire à la science conventionnelle des génétiques et de la sélection des plantes.


Héritage de la DVG

Selon le protocole établi par la Division de l'inspection pour déterminer l'acceptabilité de la DVG, les détails de la recherche (cultivars et emplacements) sont imprimés sur les enveloppes d’échantillons soumis. L'inspecteur a donc une certaine idée de la «  bonne  » réponse avant de même de procéder à l’évaluation. Pour cette raison, les évaluations par DVG ne peuvent pas être traitées comme des observations scientifiques impartiales; une analyse objective des caractères botaniques ou génétiques relativement à la DVG est donc impossible puisque les résultats des inspections contredisent toute explication génétique conventionnelle. Je concède que la DVG représente une méthode qui peut reconnaître et qui reconnaît de façon fiable les grains, mais l'exigence de fiabilité est tellement restreinte qu'elle permet très peu de génotypes. Prenons le cas du blé de force roux de printemps résistant à la brûlure de l'épi causée par le fusarium BW330 : 15 parties sur 16 de son ascendance viennent du RPOC, il est dérivé d'un mélange de deux variétés approuvées par DVG. Avant d'être soumise aux Essais coopératifs du blé panifiable du Centre, cette variété a été examinée en vue d'assurer une ressemblance au RPOC; lors de sa première inspection officielle, elle n'a pas satisfait aux exigences de DVG. Il y a plusieurs cas où les deux parents répondent aux normes de la DVG, mais où la descendance est officiellement jugée inacceptable. Par conséquent, la suggestion qu'un simple composant héréditaire explique l'acceptabilité par la DVG est difficile à croire. Dans son document de travail sur les avantages de la DVG, Brian Oleson a noté que la DVG n'est qu'un facteur parmi d'autres dont le phytogénéticien doit tenir compte dans sa progéniture. C'est le moins qu'on puisse dire! L'approbation par la DVG est un critère sine qua non de l'inscription, malgré le fait qu'elle est déterminée d'une manière qui se prête mal à l'analyse rationnelle. S'il existe une base génétique intelligible pour la DVG que l'on peut manipuler en tant que caractère objectif dans un programme de sélection, elle est certainement perdue dans le brouillard des conflits entre l'autorité légale et l'objectivité scientifique.


Restrictions phénologiques de la DVG

La diversité dans l'apparence du grain de blé commun est reliée à la taille du grain. Si les grains de blé sont tous petits, cela donne une impression d'uniformité. Si une variété a tendance à produire des grains variables ou plus gros en raison de conditions favorables, certains grains ne ressembleront plus au grain «  typique  » de cette variété et ressembleront plutôt à «  autre chose  ». Ceci entrave sérieusement la liberté des sélectionneurs du RPOC de favoriser les variétés à haut rendement. Puisque la corrélation entre le rendement du grain et sa taille est faible, à première vue, l'importance de la grosseur du grain n'est pas évidente. Toutefois, il n'y a pas de raison qu'une sélection de blé à faible rendement ne puisse pas produire de gros grains. Dans la mesure où nous nous intéressons uniquement à l'augmentation du rendement, les caractéristiques des blés à faible rendement ne sont pas pertinentes. Si, par contre, nous nous concentrons sur les variétés à rendement maximal, nous constaterons que sur 341 cultivars soumis aux Essais coopératifs du blé panifiable de l'Ouest, 31 ont affiché un rendement supérieur à 110 % du Neepawa (McCaig et DePauw; Revue canadienne de phytotechnie 75:387). Parmi ces cultivars, seulement deux variétés présentaient des grains plus petits que le Neepawa alors que 29 avaient des grains plus gros, et la plupart d'entre eux étaient nettement plus gros. La conclusion à en tirer est simple : si nous tenons à avoir des grains uniformes et des grains légèrement plus gros que le Neepawa (voir page 14), alors la plupart des variétés à haut rendement que nous pourrions découvrir seront éliminées aussi. Le problème n'est pas que les grains de nos variétés à haut rendement sont trop gros, mais bien qu'une variété de tous ces beaux grains, uniformes de type RPOC a un puits (endroit où le rendement est emmagasiné) qui ne réagit pas qui l’empêche de former de plus gros grains malgré toutes les conditions favorables. Grâce à la DVG, nous épargnons ces cultivars à l'heure actuelle. Ailleurs dans le monde, de nombreux cultivars modernes de blé ont maximisé sur le grain de 40 à 45 mg. Avec le RPOC, nous sommes limités à 35 mg et la DVG est un facteur contributif principal.


La DVG et les autres classes du blé

Le système de DVG suggéré pour séparer les classes non RPOC a été créé après avoir constaté que les échantillons du Norstar (RHOC), du Glenlea (EFEC) et du Biggar (PCP) peuvent, règle générale, être distingués du RPOC et l'un de l'autre. Avec le recul, il est évident qu'il était naïf d'espérer qu'une telle observation puisse être développée en un système d'identification de classes complexe et fiable. À l'origine, les échantillons du Norstar provenaient principalement du sud de l'Alberta, ceux du Glenlea du sud du Manitoba, alors que les échantillons du Biggar provenaient de Parkland. Par conséquent, la distinction était plus facile grâce à une distribution géographique évidente des trois (et seulement trois) cultivars différents. Avec la parution de nouveaux cultivars à la suite des programmes de sélection et leur dispersion dans des zones géographiques variées, la confusion entre les classes a été aussi inattendue qu’inévitable. Il y avait en réalité deux problèmes. D’abord, il y avait le risque qu'un pourcentage du grain «  RPOC  » soit mélangé avec les autres classes. Ensuite, il y avait le risque de confusion entre les classes des grains longs elles-mêmes (les grains de type «  PCP  » mélangés avec le blé d'hiver, par exemple). Après 25 années de frustration, le système par DVG pour la distinction entre les classes de «  grains longs  » vient d'être déclaré officiellement inactif.


La DVG «  simplifiée  »

La Commission des grains a suggéré une version «  simplifiée  » de la DVG qui retient uniquement la distinction entre le RPOC et les autres classes. Bien que cela semble une concession considérable, il ne s'agit pas d'une simplification du tout. La confusion entre le RHOC, le PCP et l'EFEC a été tacitement négligée pendant des années. À l’occasion, ces classes ont été commercialisées et vendues en tant que mélange! Le seul rôle important auquel on souhaite voir la DVG jouer est celui de distinguer les mélanges réels et apparents du RPOC et des autres classes. C’est la source de toutes les complications récentes au sujet des souches généalogiques. Le germoplasme résistant au froid qui affecte le blé d'hiver, que l'on trouve généralement sur le Norstar, semble être particulièrement porté à générer des mélanges parasites. Afin de tenter une mise en application même la DVG simplifiée, il faudra que le fonds génétique des variétés du RPOC demeure étroit et que la taille du grain des variétés du RPOC demeure petite. Le germoplasme du RHOC devrait probablement être retiré afin de produire un fonds génétique qui conserve un groupe plus distinct de formes de grains. Il s’agit là de restrictions très négatives. Puisque la taille des cultivars du RPOC grossit en raison de la poursuite de rendements plus élevés (p. ex., Superb, AC Intrepid et AC Cadillac), je prédis que même si rien d'autre ne change, ces blés RPOC à gros grains s'avéreront le cheval de Troie de la DVG. Bien que la distinction des cultivars actuels soit possible, celle de leur progéniture élite sera plus difficile en raison de leurs grains de plus en plus gros. Le résultat final : un accroissement soutenu du potentiel de confusion et un coût insupportable du maintien du progrès génétique des autres caractéristiques1.


Les solutions de rechange à la DVG

Le choix évident pour remplacer la DVG dans le cas du blé commun serait celui de livrer, d’emmagasiner et de vendre le blé par variété. Les coûts de ce système incluraient une trace documentaire de l'identité conservée et des tests génétiques afin de surveiller la conformité et de régler les différends.

Selon le document de travail de la Commission canadienne des grains (2003), le coût d'une Déclaration d'admissibilité de la variété (DAV) estimé variait entre 1,50 $ et 3,75 $ par tonne. Le contrôle rigoureux (3,75 $) serait probablement mis en application là où il serait le plus utile (p. ex., des catégories haut de gamme et à destination des marchés étrangers). Dans le cas de la vente de la semence, des marchés des aliments du bétail, de l'éthanol ou même de la mouture destinée aux marchés intérieurs, ces coûts seraient minimes, voire inexistants. Néanmoins, la perception dans l'industrie de manutention des grains est que la DAV ajoute un coût considérable au commerce du blé, ce qui joue en faveur de la DVG qui est plus «  efficace  » et plus «  économique  ». Nous examinerons la question du coût véritable de la DVG après avoir discuté de son effet probable sur la sélection du blé.


La DVG et le blé dur

Les tétraploïdes de qualité pastière sont faciles à distinguer par leurs grains de tous les autres types de blé (qui sont tous hexaploïdes). Quant à la distinction entre les tétraploïdes et les hexaploïdes, la DVG fonctionne très bien et ne coûte presque rien au programme de sélection. Le blé dur pourrait alors nous fournir l'occasion de calculer le coût de la DVG au sein du système canadien en comparant son taux de progrès technologique à celui du blé de printemps. La comparaison n'est pas rassurante.

 

Tableau 1. Personnel de sélection des plantes, aire de culture et rendement du blé dur comparativement au blé de printemps

 

 

 

Sélectionneurs de blé (PA)

Aire de culture (ha)

Rendement des variétés enregistrées*
(% de référence à long terme par année)

 

 

 

1971

2001

1971

2001

Source de données

De

À

Gain.année-1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Blé de printemps

8.5

8.5

7575

8197

WBWC (creux)

1902

1991

0.23 %

 

 

 

 

 

 

 

WBWC (plein)

1946

1992

0.39 %

 

 

 

 

 

 

 

CBWC

1902

1992

0.32 %

 

 

 

 

 

 

 

Moyenne

-

-

0.31 %

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Blé dur

2.5

1.5

997

2036

Coop. de blé dur

1963

1992

0.81%

 

 

*Le rendement a été annoncé par McCaig & Clarke (Revue canadienne de phytotechnie 75:55) et McCaig & DePauw (Revue canadienne de phytotechnie 75:387). Dans le deuxième document, les pentes du RPOC ont été calculées pour un sous-ensemble de cultivars affichant un rendement supérieur à la moyenne. Si cet emploi de données filtrées est rejeté comme étant arbitraire, les gains de rendement du RPOC sont alors surestimés. D'un autre côté, lorsqu'il y a une montée rapide d'une variété à rendement élevé comme l’AC Barrie, le taux de gain génétique dans la séquence des variétés sera inférieur à celui de l'amélioration génétique du grain, ce qui contribuerait à l'élimination en partie du retard accumulé quant à l'amélioration des grains.

Le tableau 1 (page 9) montre que la taux d'amélioration du rendement réalisé par le DAOC dépassent celui des génotypes du RPOC. Ceci est particulièrement étonnant lorsque nous tenons compte de l'investissement relativement petit consacré aux tétraploïdes. En fait, le blé dur n'a pas toujours été à l'abri des enjeux de la DVG. Selon Fred Townley-Smith, une condition voulant que les cultivars de blé dur ne peuvent pas ressembler au Pelissier ni au Golden Ball a été supprimée au début des années 1970. La croissance soutenue du rendement du blé dur à la même époque pourrait probablement être attribuée à l'assouplissement de la DVG au lancement de la sélection au Canada (réf. McCaig et Clarke 1995. Revue canadienne de phytotechnie 75:55).

Il est possible que tous les deux y fussent impliqués. De toute façon, pendant plus de 30 ans, la DVG n'a imposé aucune restriction sur la sélection de blé dur quant au choix des parents, à la marge de sélection requise pour les premières générations et à l'échec inattendu des essais avancés en raison de changements imprévisibles dans la forme et la taille. Dans les deux cas (RPOC et DAOC), l'amélioration des grains est sérieusement limitée par les exigences réglementaires sur le plan de la qualité et de la teneur en protéines. Les taux de rendement du blé affichés par d'autres pays sont comparables à ceux réalisés par le blé dur plutôt que ceux réalisés par le blé de printemps, ces derniers étant très bas, jusqu'à tout récemment. Tous ces éléments indiquent que la DVG est le facteur contraignant du rendement du RPOC.


L'effet général de la DVG sur l'amélioration génétique

Si la DVG a une incidence sur la phénologie du rendement en raison de son impact sur la distribution de la taille du grain, elle exerce aussi un effet négatif sur l'amélioration des caractéristiques qui ne sont que très peu connexes au développement du grain. Le simple argument suivant nous aidera à comprendre la base de l'effet général de la DVG sur l'amélioration du blé. Comme nous avons pu le constater dans le cas du BW330 (page 6, ligne 6), même une petite contribution génétique d'un parent introduit affectera sérieusement la capacité de la nouvelle variété à satisfaire aux normes de la DVG. La majorité des blés de partout dans le monde ne répondront pas aux normes de la DVG en tant que parent majeur, ou même mineur, dans le cadre d’un programme de sélection. Malgré cette difficulté, il n'existe pas d'autres bassins de diversité génétique dont nous pouvons nous servir pour améliorer nos cultivars. Par conséquent, en tant que matière pratique, l'ensemble complet des génotypes qui pourraient apporter les améliorations nécessaires en matière de résistance aux ennemis, de qualité et de propriétés agronomiques est beaucoup plus vaste que celui des génotypes qui possèdent tous ces avantages et qui, en même temps, satisfont aux normes de la DVG. En d'autres termes, la population des lignes avancées à partir desquelles les nouveaux cultivars peuvent être sélectionnés ne représente qu'une petite fraction de celle qui serait disponible sans la DVG. La seule option sans risque dont peut se prévaloir le phytogénéticien qui se trouve dans cette situation ridicule est de croiser et de rétrocroiser des parents canadiens ou du Dakota du Nord approuvés qui répondent aux normes de la DVG jusqu'à ce qu'un génotype acceptable du blé de force roux de printemps soit reconstitué. C'est ce conservatisme obligatoire qui engendre les taux faibles de rendement indiqués au Tableau 1. En réalité, aucun groupe de cultivars dans le monde entier n’est plus dépassé ou plus incestueusement interrelié que celui des variétés du RPOC. La DVG a une mainmise sur l'introduction de la résistance aux maladies, sur la diversité génétique générale et sur les taux de rendement de notre plus importante culture. Il semble évident que nous devrons abandonner la DVG tôt au tard. Reste à savoir quand… Les dépenses de la dernière chance des ressources limitées de la recherche afin de maintenir le progrès génétique pendant encore quelques années en présence de la DVG ne feront que retarder l'arrivée des nouveaux germoplasmes dont nous aurons besoin pour nous adapter à ce monde en évolution rapide.


Le coût de la DVG

La distinction visuelle des grains est perçue comme rentable, car elle ne coûte rien à personne. En fait, le coût de la DVG est substantiel et il est subi par deux groupes : le premier comprend les programmes de sélection des plantes où des lignes prometteuses développées à grand coût se font rejeter sans appel sur la base de jugements inattendus de la DVG; le deuxième, les producteurs, pour qui l'accès aux améliorations génétiques nécessaires pourrait être retardé pendant plusieurs années, voire pendant des décennies. Règle générale, dans la sélection du blé, toutes choses étant égales, si on sélectionne «  juste pour un autre gène  » amputera de moitié la taille effective du programme de sélection. Ajoutez encore un gène, et vous réduirez le programme de sélection au quart de sa taille effective originale. Imaginez maintenant une caractéristique complexe comme la DVG (beaucoup de gènes) dont la manipulation est accompagnée de corrélations défavorables et dont l'évaluation est assujettie à de soudaines inversions. On ne devrait pas prendre à la légère un tel ajout. Pour avoir une idée du rôle que le temps joue dans la sélection du blé, j'ai résumé l'histoire des dérivés clés du Tobari ’66 dans les programmes de sélection du RPOC depuis son introduction depuis le Mexique vers la fin des années 1960. Ce qui est le plus étonnant, c'est qu'aucune des variétés de cette séquence n’était vierge de défauts majeurs. L’AC Barrie, malgré ses nombreux mérites et son immense popularité, a une faible absorption d'eau et une résistance non durable à la rouille des feuilles. Chacun de ces problèmes aurait pu être réglé en faisant d'autres croisements, ou en conservant quelques-unes sélections sœurs de plus à partir desquelles on aurait pu choisir. À la lumière de tout cela, vous pouvez constater que le fait d'insister sur une caractéristique artificielle complexe difficile à comprendre, est d'une valeur commerciale douteuse, qui affecte négativement le rendement. Il y a donc fort à parier que cela signifie que la DVG est très contre-productive.

Tableau 2. dérivés clés du Tobari ’66

 

dans le germoplasme du RPOC

 

 

 

Année

 

 

 

Ligne

Entrée

Enregis-

Ascendance

Forces

Faiblesses

Tobari'66*

coop.

1966?

trement

-

 

Bonne paille, rouille des feuilles

Qualité, DVG,

BW15

1974

-

Manitou/Tobari'66

Rendement élevé

Trop dur

BW90

1983

-

BW15/BW38//BW40/RL4353

Rendement élevé

DVG, trop dur

Laura

1984

1986

BW15/BW517

Rendement élevé

Paille faible, sens. à la fusariose

ACBarrie

1991

1994

BW90//Neepawa/Columbus

Rendement élevé

Sensible à rouille des feuilles

ACCadillac

1993

1996

BW90*3/BW553

Rendement élevé

Paille faible

AC Elsa

1993

1996

BW90/Laura

Rendement élevé

Sens. à la fusariose

BW853

2005

-

AC Elsa/BW248

Rendement élevé, bonne paille

Trop dur

?

2012?

?

BW853/???

?

?

·     Bien qu'elle n'ait jamais fait l'objet d'un essai coopératif, cette ligne a été introduite par CIMMYT, du Mexique au Canada, probablement entre 1965 et 1968 où elle a été utilisée comme parent. BW15 a alors été croisée comme source d'amélioration de rendement pour engendrer BW90 et Laura. Cadillac et Barrie, proches parents de BW90, auraient probablement été impliqués dans des croisements ultérieurs, mais puisque la gradation en termes de variabilité globale était petite, ces lignes sont considérées équivalentes, et par conséquent, elles ne sont pas mentionnées.

La plupart des phytogénéticiens conviendront que la valeur ajoutée qui manque à notre ensemble actuel de cultivars en raison des restrictions imposées par la DVG dépasse largement les 3,75 $ par tonne de production. Généralement parlant, des caractéristiques comme la résistance aux ennemis des cultures et les propriétés agronomiques améliorées sont omises de la liste des avantages perdus en raison de la DVG dont fait mention l'étude des avantages d’Oleson qui avait déclaré que le déploiement de la résistance à la fusariose était «  légèrement  » retardé par la DVG. Cette conclusion a été basée sur le cas de HY644 dont l'enregistrement a été refusé en février 2001. Cette évaluation est maintenant dépassée. Depuis, trois lignes de «  RPOC  » hautement résistantes (BW330, BW346 et BW379) n'ont pas été admises au test de qualité parce qu'elles ne satisfaisaient pas aux normes de la DVG. À l'heure actuelle, contrairement à l'étude d’Oleson, la résistance à la fusariose est un excellent exemple d'amélioration qui s'impose d'urgence; le système d'AQ a décidé de la sacrifier dans le but de maintenir une DVG parfaite2. Sur le plan du rendement, l'étude des avantages d’Oleson a estimé une perte de 5 % provenant des contraintes imposées par la DVG à la sélection des plantes. Cette perte se traduit par un «  coût  » qui varie entre 7 $ et 12 $ par tonne si les prix se trouvent entre 140 $ et 240 $ la tonne. Le rendement perdu doit s'appliquer à toute la production du blé commun (c.-à-d., la semence, le blé fourrager et la production bas de gamme) plutôt qu’à la proportion qui représente un avantage (comme c’est le cas pour la DAV).

Si nous prenons au sérieux la perte de rendement de 5 % estimée par l'étude des avantages d’Oleson, cela signifierait que les retombées économiques négatives de la DVG dépassent celles de la DAV par un facteur de deux à huit fois. Puisque ce chiffre a été fondé sur plus qu'une simple supposition de la part de Barrie Campbell, il faudrait réexaminer cette question. Comment explique-t-on les taux grandement inférieurs estimés de l'amélioration du blé RPOC par rapport à ceux rapportés par d'autres scientifiques spécialisés dans le blé partout dans le monde n’est pas limpide alors qu’on obtient le même résultat en employant la même approche statistique de base? Il est juste d’affirmer que, de toute évidence, il y avait là une relation entre l'entretien de la résistance aux maladies et la qualité de l’utilisation finale. Maintenant, par contre, les données des expériences à long terme avec le RPOC et le DAOC semblent blâmer carrément la DVG et la phénologie du rendement. Si on prend au sérieux (et pourquoi ne le ferait-on pas?) les taux de gain dans ces deux classes, comme l’indiquent McCaig et ses collègues, la différence serait alors attribuée à la DVG (pourquoi ne serait-ce pas le cas?), alors le retard accumulé du RPOC par rapport au DAOC après trois décennies d'améliorations peut atteindre 15 %. S'il en est ainsi, alors le coût de la DVG pour le blé commun serait renversant. Puisque le RPOC représente la part du lion de la culture, le vrai coût peut raisonnablement être estimé en multipliant le retard du rendement (15 %) par la taille de la récolte (disons 14 000 000 tonnes) puis par un prix typique (disons 200 $ par tonne). Selon ces chiffres, le vrai coût de la DVG atteint les 420 millions de dollars par année, soit le revenu perdu par les cultivateurs de blé. Si cela est vrai, ce coût se poursuivra bien longtemps après la «  fin de la DVG  », jusqu’à ce que nous rattrapions le temps perdu pour l’amélioration des cultures. Le chiffre est tellement monstrueux que je m'attends à ce qu’il soit perçu dans l'incrédulité. Je ne prétends pas avoir fait appel à la prescience pour aboutir à ces conclusions; la plupart des analyses clés de cette critique ont été effectuées très récemment. Néanmoins, ce chiffre étant énorme, il serait, si je me trompe, facile de repérer l'erreur dans mon analyse.


Taille des grains et mouture

Plutôt, il a été mentionné que l'un des effets de la DVG est de contrôler sévèrement toute augmentation du poids du grain des variétés du RPOC. En même temps, dans le cadre de l'évaluation de la qualité, les nouveaux cultivars dont le grain est plus gros que la normale sont critiqués, voire rejetés, sous prétexte que cela en compliquerait le nettoyage et la mouture. Jusqu'à présent, cela n'a jamais été une question litigieuse, car la plupart des bons candidats, qui présentent de gros grains, sont éliminés par la DVG. Néanmoins, malgré le petit grain de la plupart des essais coopératifs, une analyse des données indique une pression croissante sur le poids du grain des variétés à haut rendement. Elle est suffisante pour que trois cultivars récents à haut rendement, notamment AC Cadillac, AC Intrepid et Superb, aient reçu des commentaires défavorables de la part du comité chargé de la qualité en raison de la taille du grain qui était légèrement supérieure à celle des cultivars existants. Il n'est pas surprenant que Superb, le plus gros des trois et celui qui a le plus haut rendement, rencontre des difficultés lors de la DVG. Le seuil de tolérance de grosseur par rapport aux cultivars typiques du RPOC est de 10 %. À partir de là, le grain risque d'attirer des commentaires défavorables. Le Neepawa (la référence à long terme) étant à 35 mg, cela signifierait une croissance de 3,5 mg. Il semble raisonnable d’affirmer que si l'on s'attend à ce que le blé produise un meilleur rendement, il faudrait lui permettre de former de plus gros grains, au moins d'une façon proportionnelle à l'augmentation de son rendement. Rendement accru de 10 % - croissance accrue de 10 % du grain : aucun inconvénient! Malgré cette approche qui tombe sous le sens, les comparaisons des tailles des grains sont toujours basées sur les références sans tenir compte du bien-fondé de l'entrée. Selon les données à long terme des Essais coopératifs du blé panifiable de l'Ouest, le diagramme ci-dessous calcule le risque d’obtenir une croissance de 10 % des grains, fonction du rendement observé pour cette ligne. Deux bases de calcul ont été employées : la première est la taille du grain exprimée en pourcentage par rapport au Neepawa. La seconde est aussi exprimée en pourcentage par rapport au Neepawa, mais elle est ajustée en fonction de la taille du rendement du blé. Manifestement, avec l'évaluation de la taille de grain, les variétés à haut rendement risquent d'être éliminées de façon arbitraire à un rythme accéléré lié à l'augmentation du rendement. Notre diagramme montre aussi qui si nous identifiions les blés avec des grains d'une grosseur non raisonnable après avoir ajusté l'augmentation de la taille du grain en fonction de l'augmentation du rendement, nous nous rendrons compte que le taux d'élimination selon la règle de 10 % ne dépend plus de l'augmentation du rendement de la ligne en question. À l'heure actuelle, l'évaluation de la taille de grain exerce une discrimination contre les blés qui affichent une percée en rendement non pas parce qu'ils ont des grains d'une grosseur non raisonnable disproportionnée à leur rendement amélioré, mais parce qu'ils ont un rendement élevé et produisent en moyenne de plus gros grains par nécessité. En termes simples, plus la percée en rendement est importante, plus il y a de risque que cette ligne soit éliminée. Si vous pensez que c'est aberrant, vous avez raison! Bienvenue dans le triangle des Bermudes!

Il est également pertinent de mentionner que les grains du RPOC sont traités par des meuniers partout dans le monde qui les mélangent avec des blés à plus gros grains, apparemment sans aucun problème. Logiquement, nous devons supposer que les meuniers du Canada qui ont un accès facile aux blés du RPOC à petits grains auraient davantage plus de raisons de s'inquiéter de la taille croissante des grains. Remarquablement, si ces préoccupations ont leur importance, les intérêts des meuniers du Canada par rapport à la taille du grain s'opposent à ceux du vaste marché étranger. Ne rendrions-nous pas service à nos clients principaux (les marchés étrangers) en augmentant la taille du grain aussi rapidement que possible afin de rattraper le retard par rapport aux autres composants importants que leurs blés contiennent probablement déjà?


Teneur en protéines et rendement

Dans le domaine de la sélection du blé, il est commun de croire que le rendement et la teneur en protéines sont corrélés négativement. On explique cet état des choses ainsi : puisque l'approvisionnement en azote est limité, la sélection d'une haute teneur en protéines identifiera des cultivars à faible rendement qui génèrent moins d'amidon pour diluer l'azote disponible. En fait, il s’agit là d’une simplification excessive. Une graine de blé a besoin d'un minimum d'azote afin de développer ses premières feuilles photosynthétiques et de produire des grains vigoureux. Après tout, il y a peu de chance qu'une culture de blé se remette et fournisse un bon rendement si au moment de son implantation, la semence souffrait d'une carence en azote. L'optimum agronomique quant à la teneur en azote dans la graine sera probablement près de celui affiché par les cultivars du printemps Canada Prairie (PCP) comme Biggar, AC Taber, AC Foremost et Genesis puisque ces variétés sont entrées dans le système canadien avec une forte tendance pour le rendement et une tendance relativement faible pour la teneur en protéines.

Au fur et à mesure que la teneur en protéines diminue, par rapport au niveau élevé trouvé dans les cultivars du blé roux de printemps de l'Ouest canadien (RPOC), nous retrouvons un ensemble de lignes où la pente du rapport négatif entre le rendement et la teneur en protéines est moins forte ou neutralisée, (comme dans le cas du blé extra fort de l'Ouest canadien et du printemps Canada Prairie). Ensuite, nous entrons dans une zone où la pente devient neutre ou positive (comme dans le cas du printemps Canada Prairie ou du tendre blanc de printemps). Les données relatives au rendement et à la teneur en protéines tirées des échantillons des éditions récentes (1995 — 2005) des essais coopératifs les plus diversifiés confirment notre soupçon que le rapport entre le rendement et la teneur en protéines est très curviligne. Le centre du nuage des observations du RPOC se situe à environ 1,5 % au-dessus de la teneur moyenne en protéines du PCP et de l'EFEC faisant partie du même essai (par définition, cette moyenne est de 0); le rendement a été normalisé en tant que pourcentage par rapport à la moyenne du PCP ou moins fréquemment des types de l'EFEC faisant partie du même essai (par définition, cette moyenne est de 100 %). À ce niveau de teneur en protéines, une tangente à la ligne de meilleure adaptation présente une pente d'environ 10 %. L'étude des avantages d’Oleson a aussi mentionné ce 10 % d'augmentation de teneur en protéines, mais elle a cité un manque de données de référence. Notre analyse3 appuie ce chiffre de 10 % tout en précisant la distinction évidente entre le rendement et la teneur en protéines parmi les différentes classes qui est en train de disparaître lentement. Quand les génotypes à haut rendement du RPOC (p. ex., Superb et Infinity) affichent sur le diagramme un bon rendement par rapport aux lignes du PCP et de l'EFEC, ils ne présentent pas un grand avantage sur le plan de la teneur en protéines; et les lignes du PCP et de l'EFEC à haute teneur en protéines (p. ex., 5701 PR) n'indiquent plus l'avantage en rendement auquel on s'attendait traditionnellement de la part des lignes du PCP.

Puisque la différence de prix entre les blés du PCP et du RPOC est plus prononcée que jamais malgré l'écart décroissant sur les plans du rendement et de la teneur en protéines, je conclus que toute stratégie d'amélioration des blés du PCP qui préfère la teneur en protéines au rendement est peu judicieuse.


Teneur en protéines et prix

S'il est vrai qu'il existe un rapport négatif dans les blés du RPOC entre le rendement et la teneur en protéines, la conclusion logique serait qu'il faudrait compter une gamme commerciale optimale des niveaux de protéines dans les variétés du RPOC que nous enregistrons. À ma connaissance, les limites et l'ampleur de cette gamme n'ont jamais été étudiées sérieusement. Une valeur moyenne raisonnable se situerait à une tangente où le rapport rendement et teneur en protéines indique la même pente que les primes moyennes fournies par le marché4. En fait, les primes de protéines sont plutôt variables. Au cours des quatre dernières années, elles ont fluctué entre 2 % et 6,5 %, pour une moyenne de 4 % (Tableau 3). Les primes des années précédentes avoisinaient 5 %. Ainsi, l'écart de prix (environ 5 %) semble osciller fortement, mais se situe en moyenne à la moitié de la valeur de l'écart de rendement (qui est d’environ 10 %). Une année où les primes sont basses indique-t-elle une offre excédentaire en blé à haute teneur en protéines? De même, est-il possible que l'écart entre le compromis de rendement et la prime moyenne de protéines indique que le Canada a un problème chronique d'offre excédentaire? J'admets que je n'ai pas de réponses à ces questions. Il paraît que les avantages commerciaux, comme la réputation d'une catégorie ou l'accès aux marchés, proviennent de la haute teneur en protéines intrinsèque. Je me pose alors la question suivante : comment pouvons-nous évaluer à quel point ces facteurs contrebalancent l'écart entre le compromis prix-protéines et rendement-protéines?

Tableau 3. Primes de protéines (% d'augmentation du prix pour une augmentation de 1 % en protéines*) Blé canadien par année et par catégorie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1RPOC

2RPOC

3RPOC

1DAOC

2DAOC

3DAOC

1RHOC

2RHOC

2005-2006

6.54 %

6.55 %

3.27 %

6.25 %

4.93 %

1.92 %

2.08 %

2.19 %

2004-2005

5.53 %

5.25 %

3.81 %

4.75 %

3.24 %

1.51 %

1.74 %

1.79 %

2004-2003

1.98 %

2.00 %

1.07 %

1.15 %

1.07 %

0.49 %

-

-

2003-2002

2.21 %

2.12 %

1.27 %

1.58 %

1.72 %

0.80 %

-

-

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Moyenne

4.07 %

3.98 %

2.36 %

3.43 %

2.74 %

1.18 %

1.91 %

1.99%

* Calculé en pourcentage du prix FAB au point milieu de la bande protéique

Italiques – Ces bandes protéiques ont une portée étroite avec des primes faibles, mais un prix de base relativement élevé. Puisqu'elles semblent représenter des petites catégories d’approvisionnement, elles peuvent ne pas être représentatives et on n’en tient donc pas compte.

Si les phytogénéticiens sont capricieusement portés à sous-estimer l'avantage commercial de l'augmentation marginale de la teneur en protéines, alors les commerçants seront, eux aussi, portés à ne pas tenir compte du rapport négatif qui existe entre le rendement et la teneur en protéines, et pour le moment, c'est leur préjugé qui compte. Le diagramme rendement-protéines (page 17) explique que l'intensité du compromis entre le rendement et la teneur en protéines est sensible aux petites variations de la teneur en protéines relative; par conséquent, une baisse de 0,75 % de la teneur moyenne en protéines placerait les rapports rendement-protéines et prix-protéines dans un équilibre approximatif. Est-il possible que les variétés à rendement élevé et à faible teneur en protéines augmentent en réalité la taille de la prime de protéines? Je ne sais pas. Je sais par contre que dans les pires situations, une gamme de variétés du RPOC à rendement et à teneur en protéines variés permettrait aux producteurs de varier leur culture en fonction des indices du marché. À l'heure actuelle, ils ont très peu de choix.


Créneaux d'utilisation finale et sélection du blé

Les marchés d'alimentation à créneaux ne conviennent pas comme objectif pour l'amélioration du blé. Cette conclusion est directement opposée aux idées préconçues. On accorde trop d’importance au besoin de l'amélioration génétique en fonction des créneaux, car ils ne durent pas. Si l'on identifie une variété de blé qui correspond aux besoins d'un créneau, il faut évidemment l'exploiter. Néanmoins, il faut résister à la tentation de faire d'un marché créneau la cible d'un programme de sélection même si la variété qui correspond à ce marché contient de sévères carences. Il y a de fortes chances que le créneau disparaisse avant même que l'on ait obtenu un retour sur l'investissement dans le cadre du programme. Prenons l'exemple de Glenlea comme blé de correction (fin des années 1970), blé tendre blanc de printemps (fin des années 1970 - début des années 1980), types Glenlea (encore!) pour pâte surgelée (début des années 1990). Ces trois marchés ont causé la création de programmes de sélection qui ont fini par être abandonnés lorsque les marchés ont disparu. Le blé tendre est maintenant réduit à 20 000 acres malgré les excellentes variétés; Bluesky, (un mauvais reliquat de l'affaire pourrie du «  blé de correction  ») était la variété EFEC la plus cultivée après Glenlea. Ce succès était un phénomène imprévisible puisqu'il a eu lieu au centre de l'Alberta longtemps après que le Bluesky a été enregistré quand la «  pâte surgelée  » a fait fureur dans l'Ouest et seulement après qu’Archer Daniels Midland a été convaincu que le Bluesky était «  égal au Glenlea  ». En guise de contexte, le Glenlea a un faible rendement en Alberta alors que Bluesky (sélectionné à Beaverlodge) affiche un faible rendement au Manitoba. Il y a de fortes chances que le blé dur extra fort disparaisse de la même manière.


L'utilisation d'engrais et les protéines

Les essais agronomiques indiquent aussi la prépondérance du rendement et la faible valorisation des protéines sur les marchés, car le retour économique sur l'engrais azoté est principalement causé par le rendement et par la teneur en protéines, au second plan. Il est probable que la sélection de cultivars à haut rendement encouragerait davantage l'utilisation de l'engrais azoté plutôt que la décourager, puisque ce genre de variétés réagit bien à ces substances.


Conclusions et recommandations

  1. La distinction visuelle des grains (DVG) et l'évaluation de la taille de grain ont des effets négatifs interreliés sur le taux de l'amélioration génétique du blé commun. Le revenu annuel perdu de cette manière a dépassé de loin le coût de la mise en application d'une Déclaration d'admissibilité de la variété et, selon une estimation rationnelle, il peut dépasser les 400 millions de $ par année (26 $ par tonne). La DVG et l'évaluation de la taille de grain devraient être abandonnées immédiatement.

  2. Les exigences au chapitre de protéines pour les cultivars du RPOC devraient être assouplies d'un demi-pour cent sous une norme convenable afin de permettre une approche de sélection axée sur le rendement et d'offrir aux producteurs une gamme de cultivars dont ils ont besoin pour profiter pleinement des indices du marché en ce qui a trait à la teneur en protéines. La déréglementation de la DVG et de la taille du grain et un certain assouplissement en matière de protéines ouvriront les portes vers une augmentation à long terme du rendement du RPOC de 15 %. Afin de maintenir la qualité, la rhéologie du RPOC devrait être évaluée en fonction de protéines constantes.

  3. La sélection du EFEC, du blé dur extra fort, du blé tendre blanc de printemps et du PCP rouge et blanc représente de mauvais investissements qu'il faudrait abandonner. Le blé blanc dur ne connaîtra pas de succès jusqu'à ce que le produit du rendement et du prix soit supérieur à celui des meilleures variétés du RPOC. Il s'agit d'un objectif atteignable, mais qui ne sera pas réalisé en vertu du présent système d'AQ. La sélection du blé d'hiver devrait être maintenue en tant que solution agronomique et de conservation du sol au lieu du RPOC. Les efforts de commercialisation pour le blé d'hiver de valeur meunière devraient examiner la quasi-équivalence de l’AC Tempest au RPOC.

  4. Les autres recherches sur le blé devraient se concentrer sur le haut rendement conjugué à la recherche sur les systèmes hybrides et apomictiques modernes en vue de capturer l'hétérosis et les utilisations industrielles écologiques, y compris les blés biomasses, à fibre et fourragers. La recherche sur le blé fourrager devrait examiner les caractères à rendement élevé de conversion et à débit d'alimentation faible en phosphate affectant l'effluent sur le terrain d'élevage.



1La DVG et l'innovation : le fardeau que même la DVG «  simplifiée  » met sur les classes actuelles s'impose aussi aux autres types de blé tels que les cultivars biomasses et ceux destinés à l'alimentation spécialisée. Au fur et à mesure que ces industries se développent et s'intègrent, elles auront des besoins en termes de qualité qui s'opposeront aux exigences de mouture (p. ex., faible teneur en phytate et grains extra durs du blé fourrager; ou faible teneur en protéines, haute teneur en amidon et grains tendres du blé «  biomasse  »). Si nous continuons à compter sur la DVG pour faire ces distinctions, nous entraverions l'innovation dont les répercussions sont inconnaissables (le but de la faible teneur en phytate dans le blé fourrager est de réduire le débit d'alimentation en phosphate chez les animaux et dans leur effluent et réduire, par conséquent, la pollution des eaux. La faible teneur en phytate dans l'alimentation humaine est considérée comme un facteur de risque de cancer du côlon chez les gens aux pays développés en raison de son influence positive sur la concentration des ions de fer et de zinc dans le tube digestif. Au Canada, le blé à faible teneur en phytate serait probablement éliminé. Paradoxalement, au tiers monde, les régimes à haute teneur en céréale sont associés aux carences en fer et en zinc qui se propageaient rapidement. On estime que ces carences sont causées par la séquestration du fer et du zinc par le phytate dans le tube digestif et elles sont identifiées comme la cause de cécité et d'arriération mentale chez des millions de personnes).
2On aurait une meilleure idée du système d'AQ on observant les pressions asymétriques exercées sur la distribution des variétés à la 49e Parallèle. Au nord de la frontière, les variétés américaines sont exclues du Canada par l'enregistrement et le système d'AQ qui sont les nôtres. Au sud e la frontière, les variétés canadiennes sont exclues des États-Unis en raison de leur mauvais rendement dans un marché libre en termes du grain et des variétés. Malgré que les moulins américains aient une préférence pour les variétés du RPOC, ils ne sont apparemment pas prêts à payer les fermiers locaux suffisamment pour les inciter à en produire. Les fermiers américains ne souffrent pas de xénophobie quand il s'agit de variétés de céréales canadiennes agronomiquement inférieures à la recherche d'un marché de haute qualité (comme l'affirme la popularité du Harrington), les avantages agronomiques des cultivars de blé américains l'emportent apparemment sur les avantages de qualité des variétés canadiennes dans un système de marché qui donne la priorité au rendement et au prix. Paradoxalement, le système d'AQ pourrait donner des résultats positifs aux États-Unis où nos variétés à haute teneur en protéines sont populaires chez les meuniers. Puisque le choix qui reste, autre que les ventes aux États-Unis, serait l'exportation outre-mer, une légère dépression du rendement chez les cultivars à haute teneur en protéines serait un petit prix à payer pour accéder à un marché voisin
3Il n'y a pas de variétés en commun entre le BTBP et les autres essais. Donc la teneur en protéines du BTBP a été ajustée à la baisse de 1 %, mais le rendement n'a pas été ajusté pour tenir compte de son état de faible teneur en protéines - haut rendement. Afin d'éviter toute partialité, les données sur le BTBP n'ont pas été utilisées dans l'établissement de la ligne.
4Une demande de renseignements adressée à la Commission canadienne du blé a fait le jour sur l'opinion que notre système fait l'envie du monde entier. Pour moi, cela signifie que «  nos clients aiment notre teneur en protéines  ». C'est exactement le cas! Qui a-t-il à ne pas aimer? La question est : pouvons-nous nous le permettre? Si je donne un sens littéral aux horaires des primes de protéines de la CCB que l'on ne doit pas posséder, alors que veulent-ils dire exactement? Comment pourrais-je autrement déterminer la valeur que le marché donne à la teneur en protéines?