Passer au contenu
Début du contenu

PACP Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

Le Chapitre 7, La gestion des services de laboratoire judiciaire - Gendarmerie Royale du Canada du Rapport de mai 2007 du vérificateur général du Canada

INTRODUCTION

Les Services de laboratoire judiciaire (SLJ) de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) fournissent des services d’analyse judiciaire pour les affaires criminelles aux forces de l’ordre au Canada, dont les corps policiers canadiens, les avocats de la Couronne et d’autres organismes fédéraux, provinciaux et municipaux. Les SLJ offrent toute une gamme de services nationaux de laboratoire judiciaire dans six villes du Canada, dans des disciplines comme la biologie (analyse de l’ADN), la toxicologie (détection de toxines présentes dans le corps), les armes à feu, la recherche d’éléments de preuve (analyse de diverses substances), les contrefaçons et l’examen des documents. 

La vérificatrice générale a procédé à une vérification des SLJ de la GRC à la demande du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes.  Ce dernier avait entendu des témoignages contradictoires sur le rendement des SLJ en 2004 et 2005 et lui avait demandé de les vérifier. 

Les vérificateurs ont constaté plusieurs carences dans les services offerts par les SLJ à leurs clients. Par exemple, les SLJ ont généralement du mal à respecter leurs propres objectifs en ce qui a trait au temps d’exécution des services qui leur sont demandés. La vérification a fait ressortir certaines lacunes au chapitre de la gestion de la qualité, eu égard notamment aux résultats d’analyses de laboratoire. On a aussi découvert que la GRC ne donne pas suffisamment la possibilité à ses clients — corps policiers et procureurs de la Couronne — d'influer sur le mode de fonctionnement des SLJ. Les clients n’ont guère la possibilité, par exemple, de négocier les délais d’exécution de leurs demandes de service. La vérification a révélé également que, même si les SLJ ont maintenant les moyens de recueillir des données sur la fiabilité de l’information et qu’ils ont amélioré leur capacité à fournir des rapports sur leur rendement, la GRC néglige toujours de faire rapport à ses clients et au Parlement sur le rendement de ses SLJ.

Le Comité s’est réuni le 28 mai 2007 pour discuter de la vérification effectuée par le Bureau du vérificateur général sur la gestion des services de laboratoire judiciaire de la GRC.  Le Comité a rencontré la vérificatrice générale du Canada, Sheila Fraser, ainsi qu’une des directrices de son bureau, Shelley Trevetahn.  Il a aussi entendu les témoins suivants de la GRC : la commissaire d’alors, Beverly Busson; le sous-commissaire aux Services nationaux de police, Peter D. Martin; le directeur général de la Police scientifique et du Service de l’identité judiciaire, Joe Buckle; et le directeur des Services de la biologie, John Bowen.

CONTEXTE

Les SLJ n’en étaient pas à une première vérification de la part du Bureau du vérificateur général, lequel s’était déjà penché en 1990 sur les services offerts par la GRC à d’autres organismes d’application de la loi et avait fait des recommandations précises concernant les laboratoires judiciaires et la communication de l’information au Parlement[1].

En 1990, les vérificateurs avaient constaté la nécessité d’améliorer la gestion du rendement des SLJ. Ils avaient recommandé que les SLJ améliorent leur approche en matière d’évaluation du rendement en se servant d’une unité de mesure appropriée, en enregistrant les données quotidiennement et en établissant des normes exactes.   Les SLJ étaient d’accord avec cette recommandation et ont dit qu’ils réévalueraient leur système dans le cadre d’une étude de leur système de gestion de l’information.

En 2000, les vérificateurs ont revu le chapitre du rapport de vérification de 1990 sur les services offerts à d’autres organismes d’application de la loi et fait des recommandations précises concernant les laboratoires judiciaires et la communication de l’information au Parlement [2]. Les vérificateurs ont exprimé des critiques passablement acerbes à l’égard de plusieurs points, dont le manque de justification du nombre et de l’emplacement des laboratoires judiciaires de la GRC et l’absence de normes de rendement claires et mesurables.

Le Comité permanent des comptes publics a publié un rapport sur le rapport de 2000 du vérificateur général concernant les laboratoires de la GRC [3].  Il y recommandait, entre autres choses, que la GRC élabore et mette en œuvre une série d’indicateurs et de normes de rendement et commence à inclure de l’information sur la gestion financière et le rendement de ses laboratoires judiciaires dans ses rapports ministériels sur le rendement. La GRC était d’accord aussi bien avec les recommandations faites en 2000 par le vérificateur général qu’avec celles du Comité permanent des comptes publics. 

PLAN D’ACTION

Puisque des lacunes au chapitre des expertises judiciaires peuvent permettre à des criminels de se promener en liberté et entraîner l’incarcération de personnes innocentes, et vu les problèmes survenus dernièrement dans d’autres laboratoires judiciaires, le Comité trouve tout à fait inacceptable qu’il ait fallu trois vérifications du Bureau du vérificateur général du Canada et un rapport du Comité avant d’obtenir un engagement ferme de la part de la GRC à régler les problèmes qui persistent au sein des SLJ.  La GRC a cependant présenté au Comité un plan d’action détaillé précisant ce qu’elle entendait faire en réponse aux recommandations des vérificateurs.  Le Plan d’action des Services de laboratoire judiciaire offre une analyse du contexte ainsi qu’une analyse de la situation commentée par les vérificateurs [4]. Il décrit également la façon dont la GRC mettra en pratique les recommandations de la vérificatrice générale, en plus de fournir un calendrier d’exécution. 

Le Comité se réjouit de voir que la GRC prend au sérieux les conclusions de cette vérification. Le Plan d’action de la GRC répond effectivement à bon nombre de ses préoccupations concernant la gestion des SLJ, dont l’arriéré et l’assurance de la qualité. La GRC s’y engage également, comme le Comité le demande depuis longtemps, à inclure plus d’information pertinente sur le rendement dans ses rapports ministériels sur le rendement. Pour faire en sorte que la GRC donne vraiment suite aux recommandations faites dans la dernière vérification et mette en œuvre le Plan d’action des SLJ, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 1
Que, d’ici le 30 septembre 2008, la Gendarmerie royale du Canada présente au Comité des comptes publics un compte rendu de la mise en application du Plan d’action des Services de laboratoire judiciaire.

COMMUNICATION D’INFORMATION AU PARLEMENT

Les vérificateurs ont souligné que la GRC avait adopté un nouveau système de gestion de l’information sur les laboratoires en 2003, ce qui avait augmenté la fiabilité de l’ information et amélioré la capacité de fournir de l’information sur le rendement.  Ils ont cependant fait remarquer que la GRC ne rend toujours pas compte du rendement de ses SLJ à ses clients ni au Parlement. En 2001, elle avait pourtant accepté, sur la recommandation du Comité des comptes publics de la Chambre des communes, d’inclure de l’information sur la gestion financière et le rendement de ses laboratoires judiciaires dans ses rapports annuels sur le rendement (RAR), et ce, à compter de la période se terminant le 31 mars 2002. Le RAR pour 2001-2002 renfermait effectivement des données sur le rendement des SLJ, mais celui de l’année suivante en contenait très peu et les RAR qui ont été présentés depuis n’en contenaient aucune.  Puisque le rendement des SLJ ne fait l’objet d’aucun autre rapport, on peut dire que l’on dispose de très peu d’information sur le rendement des SLJ en dehors de ces services.

Comme l’a fait observer la vérificatrice générale dans sa déclaration préliminaire devant le Comité : « [à] l’heure actuelle, la GRC ne respecte pas son engagement de rendre compte au Parlement de son rendement [5]  ».  La commissaire Busson était d’accord avec les propos de la vérificatrice, et elle a indiqué que, grâce au Plan d’action des Services de laboratoire judiciaire, la GRC s’assurera d’« inclure des renseignements sur le rendement plus pertinents dans ses comptes rendus au Parlement (p. ex., ses RMR et ses RPP)[6] ».  Le Comité a toujours soutenu que le Parlement doit être tenu informé du fonctionnement des ministères et organismes fédéraux, ce qui explique sa déception en ce qui concerne le contenu des RMR de la GRC. Très soucieux de voir si la GRC respectera son engagement d’améliorer ses comptes rendus au Parlement, que ce soit par l’entremise des rapports sur les plans et les priorités, des rapports ministériels sur le rendement ou des rapports annuels sur le rendement des SLJ qu’elle vient de promettre, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 2
Que les rapports ministériels sur le rendement de la Gendarmerie royale du Canada, à commencer par celui de 2007-2008, renferment, à l’intention des parlementaires, l’information pertinente nécessaire sur le rendement des Services de laboratoire judiciaire.   

ARRIÉRÉ

La vérification des SLJ de la GRC par le Bureau du vérificateur général faisait suite à un certain nombre de témoignages controversés livrés par des membres de la GRC devant un autre comité parlementaire. La vérificatrice générale a dénombré trois occasions séparées au cours desquelles des membres de la GRC ont présenté un témoignage trompeur au comité devant lequel ils comparaissaient [7]. Elle a expliqué au Comité « qu’il y avait au minimum une possibilité que les membres du comité (de la justice et des droits de la personne) n’aient pas saisi certaines nuances [8] ». On a imputé les témoignages contradictoires à une interprétation différente du terme « arriéré », de la part de la vérificatrice générale et de la GRC. 

Les SLJ entendent par arriéré « les dossiers où les organismes clients n’ont pas encore soumis une demande d’analyse aux SLJ[9]  ». Autrement dit, la GRC considérait essentiellement l’arriéré comme une demande en attente. Or, pour la vérificatrice générale, l’arriéré désignait « les cas en cours qui n’ont pas été traités dans un délai de 30 jours », c’est-à-dire le délai d’exécution original des demandes de service courantes faites à la GRC. Cependant, au moment de la vérification, la GRC avait accepté la définition d’arriéré de la vérificatrice générale et reconnu qu’il y avait bel et bien un arriéré lorsqu’un témoignage contradictoire à cet effet a été présenté au Comité de la justice. Le Comité était heureux que la commissaire Busson ait décidé de lui envoyer une lettre lui expliquant les raisons du témoignage contradictoire. Il se félicite également de l’assurance donnée par cette dernière que la GRC n’a jamais eu l’intention de tromper le Comité de la justice dans ses audiences en 2004 et 2005 [10].

Les SLJ utilisent deux termes pour parler de la ponctualité de leurs services. Le premier est « délais d’exécution cibles », qui désigne le nombre de jours au bout duquel on doit avoir répondu à la demande de service. Au moment de la vérification, la politique des SLJ prévoyait un délai d’exécution de 15 jours pour les demandes urgentes et de 30 jours pour les demandes courantes. Cependant, les vérificateurs ont indiqué qu’en 2005-2006, les SLJ avaient respecté les délais d’exécution cibles pour seulement 10 p. 100 des demandes de service en biologie et 55 p. 100 des demandes en toxicologie [11]. Le second terme utilisé est « échéance prévue », qui désigne la quantité de temps réelle qu’il faut pour exécuter une demande de service courante. Comme il est indiqué dans le rapport de vérification, l’échéance prévue pour certaines demandes courantes d’analyse d’ADN était de 180 jours, ce qui, a fait remarquer le Comité, était beaucoup plus long que le délai d’exécution cible de 30 jours. En outre, le Comité a appris que les échéances prévues pour répondre à des demandes de service étaient facultatives et qu’elles pouvaient varier selon la somme de travail à accomplir[12].

Le Comité a trouvé réconfortant de lire dans le Plan d’action des SLJ que ceux-ci ne se fieraient plus aux échéances prévues comme moyen de mesure du respect des délais d’exécution des demandes de service, et qu’ils sont en voie d’implanter un Système de priorisation des dossiers opérationnels (SPDO) qui classe les dossiers en trois catégories et établit de nouveaux délais d’exécution pour chacune de ces catégories : 45 à 60 jours pour les cas de meurtre, 90 jours pour les délits sexuels et 90 jours ou plus pour les crimes contre la personne et les infractions contre les biens. Le Comité ne sait pas encore exactement à partir de quand le délai est calculé. Est-ce à partir du moment où l’on reçoit la demande de service ou de celui où on commence à la traiter? En outre, le Comité a remarqué que les délais d’exécution des demandes dans chacune des catégories n’avaient pas encore été confirmés, si bien qu’ils pourraient encore varier considérablement. Bien qu’encouragé par l’abandon de la notion d’échéances prévues, le Comité craint encore que les délais d’exécution prévus dans le SPDO ne finissent par devenir trop flexibles pour avoir une utilité quelconque. Voilà pourquoi il recommande :

Recommandation 3
Que la Gendarmerie royale du Canada définisse le « délai d’exécution  » comme étant le temps qu’il faut pour traiter une demande depuis sa réception jusqu’au moment où il en est fait rapport au client.
Recommandation 4
Que la Gendarmerie royale du Canada confirme les délais d’exécution de chaque catégorie de dossiers dans le Système de priorisation des dossiers opérationnels (SPDO) et, d’ici le 30  septembre 2008, indique au Comité des comptes publics les délais d’exécution cibles qu’elle a fini par fixer.

Comme il est expliqué précédemment, le Comité croit fermement que les parlementaires devraient être tenus au courant de ce qui se passe dans les ministères et organismes au moyen des rapports ministériels sur le rendement. Puisque les SLJ n’ont plus la même définition d’un arriéré et qu’ils disposent maintenant du SPDO, il est très important que la GRC rende compte de l’arriéré des SLJ. Le Comité recommande donc :

Recommandation 5
Que la Gendarmerie royale du Canada fournisse des comptes rendus détaillés des délais d’exécution réels des demandes de service faites aux Services de laboratoire judiciaire, par rapport aux délais d’exécution cibles, dans ses rapports ministériels sur le rendement, et ce, dès le rapport de 2007-2008.

CONCLUSION

On ne doit pas sous-estimer l’importance des Services de laboratoire judiciaire dans notre système de justice pénale. La mise en application des recommandations de la vérificatrice générale aura pour effet d’améliorer le rendement des Services de laboratoire judiciaire de la GRC et d’accroître l’efficacité et la fiabilité de l’appareil judiciaire. Le Comité souscrit à toutes les recommandations de la vérificatrice générale et trouve, comme elle, qu’il est important que la GRC mette en place un plan d’action en vue de corriger certaines lacunes ou d’apaiser certaines inquiétudes qui sont apparues au cours de la vérification effectuée par son bureau.

La réunion du Comité sur les Services de laboratoire judiciaire a eu lieu au beau milieu des audiences sur l’administration des régimes de retraite et d’assurances de la GRC. Tant dans le dossier de la mauvaise administration des régimes de retraite et d’assurances que dans celui des problèmes constatés aux SLJ, la GRC avait fait taire les employés qui avaient exprimé des inquiétudes. En outre, l’état-major de la GRC avait assuré dans les deux cas qu’il n’y avait pas de problèmes, malgré les preuves du contraire. Les parallèles entre les deux cas étaient inquiétants.  Le Comité espère maintenant que la GRC, en se dotant d’un nouveau style de gestion, pourra régler efficacement à l’interne ce genre de problèmes.  Il trouve encourageante la réaction de la GRC à la vérification de ses Services de laboratoire judiciaire par le Bureau du vérificateur général et il a bien hâte de voir les fruits des changements promis par la GRC.

[1]
Bureau du vérificateur général du Canada, Rapport de 1990, chapitre 27, « La Gendarmerie royale du Canada – Services de soutien offerts aux organismes canadiens chargés de l’application de la loi ».
[2]
Bureau du vérificateur général du Canada, Rapport d’avril 2000, chapitre 7, « Gendarmerie royale du Canada – Les services offerts aux responsables de l’application de la loi ».
[3]
Comité permanent des comptes publics, Rapport 17 – Gendarmerie royale du Canada  -- Services offerts aux responsables de l’application de la loi, présenté à la Chambre des communes le 5 octobre 2000.
[4]
Gendarmerie royale du Canada, Plan d’action des Services de laboratoire judiciaire, 1er mai 2007, présenté au Comité permanent des comptes publics le 28 mai 2007.  
[5]
Délibérations, Comité permanent des comptes publics de la Chambre des communes, 39e législature, 1re session, Réunion 59, 1535.
[6]
Gendarmerie royale du Canada, Plan d’action des Services de laboratoire judiciaire, 1er mai 2007, présenté au Comité permanent des comptes publics le 28 mai 2007.  [traduction]
[7]
Bureau du vérificateur général, Rapport de la vérificatrice générale du Canada, mai 2007, chapitre 7, « La gestion des Services de laboratoire judiciaire, Gendarmerie royale du Canada », pièce 7.11.
[8]
Réunion 59, 1605.
[9]
Lettre de la commissaire Beverley Busson envoyée au Comité permanent des comptes publics le 24 mai 2007. [traduction]
[10]
Ibid.
[11]
Bureau du vérificateur général, Rapport de la vérificatrice générale du Canada, mai 2007, chapitre 7, « La gestion des Services de laboratoire judiciaire, Gendarmerie royale du Canada », paragraphes 7.22 à 7.24.
[12]
Réunion 59, 1715.