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FEWO Rapport du Comité

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Chapitre 4 : Le troisième pilier du système
de revenu de retraite — Épargne-retraite assortie d’une aide fiscale

Le troisième pilier du système de revenu de retraite est l’épargne privée assortie d’une aide fiscale, qui est rendue possible par les REER et les RPA offerts par l’employeur. Un représentant du ministère des Finances a dit au Comité :

Ces régimes permettent de combler l'écart entre les régimes publics de pensions et les objectifs des Canadiens et des Canadiennes en matière de revenu de retraite. Le report de l'impôt sur les RPA et les REER constitue un avantage précieux qui incite et aide les Canadiens et Canadiennes à épargner en vue de la retraite. De plus, il permet aux particuliers d'accroître leurs économies plus rapidement que s'ils investissaient hors des régimes enregistrés. Les limites des cotisations et des prestations des RPA et des REER sont fixées de manière à permettre à la plupart des contribuables d'accumuler suffisamment d'épargnes au cours d'une carrière de 35 années pour bénéficier d'un revenu de retraite équivalent à 70 p. 100 de leurs gains préalables à la retraite.
Les limites des RPA et des REER sont intégrées et fournissent aux Canadiens et aux Canadiennes des possibilités d'épargnes comparables, qu'ils choisissent d'investir dans un RPA, dans un REER ou dans une combinaison des deux[30].

A. Épargne en vue de la retraite

Le Comité a appris que les prestations viagères provenant des deux premiers piliers du système de revenu de retraite atteignent 15 000 à 20 000 $ par année. Cependant, comme le lui a indiqué M. James Pierlot, conseiller principal, Towers Perrin : « Dans la plupart des régions canadiennes, un revenu annuel de 15 000 à 20 000 $ ne suffit pas à assurer une retraite confortable[31]. » La plupart des Canadiens, a-t-on dit au Comité, épargnent trop peu, trop tard.

Le gouvernement fédéral offre des encouragements fiscaux à l’épargne, sous forme de mécanismes tels que les REER. Or, selon ce que le Comité a entendu, la plupart des Canadiens ne tirent pas pleinement parti de ce mécanisme. M. Pierlot s’est fait l’écho de plusieurs témoins lorsqu’il a dit au Comité : « Les Canadiennes épargnent moins que les Canadiens, même si elles devraient épargner plus. Elles ne peuvent pas accumuler autant d'argent que les hommes, proportionnellement. Cela signifie que les femmes sont plus susceptibles de connaître la pauvreté à la retraite que les hommes[32]. » Comme les revenus des femmes sont inférieurs, il leur est difficile d’économiser de l’argent par elles-mêmes en vue de leur retraite. D’après Monica Townson, « [t]out cela influencera, bien entendu, les montants que les femmes peuvent s'attendre à toucher à leur départ de la population active[33] ».

Le Comité a demandé aux témoins si, à leur avis, une meilleure éducation financière permettrait à plus de Canadiens d’épargner pour la retraite. La plupart des témoins ont reconnu l’importance de l’éducation financière. M. Terence Yuen, économiste principal, Canadian Research and Innovation Centre, Watson Wyatt Worldwide, a signalé que contrairement au Canada certains pays, dont le Royaume-Uni et l’Australie, ont un volet obligatoire d’éducation financière dans leurs programmes d’études. Le Comité est d’avis que l’éducation financière peut aider les Canadiens à mieux comprendre ce que sera leur revenu à la retraire et, par conséquent, à faire des choix plus éclairés en matière de planification financière. Elle peut améliorer la connaissance des questions financières et encourager à l’épargne. Le Comité exhorte le gouvernement à envisager des moyens efficaces d’encourager les Canadiens à épargner en vue de leur retraite.

Même s’ils jugent importante l’éducation financière, la majorité des témoins ne pensent pas qu’elle est particulièrement efficace en soi. M. Edward Whitehouse, chef de l’Analyse des politiques de pensions, Division des politiques sociales, OCDE, a mentionné que :

[…] la documentation qui porte sur l'économie comportementale — discipline très en vogue ces jours-ci qui traite de la façon dont les gens prennent des décisions dans ce domaine — révèle que même les gens pleinement informés qui possèdent toutes les connaissances nécessaires en matière de finance font néanmoins tous les mauvais choix. Il y a une longue liste de termes techniques, comme « aversion à la perte myope », et ce genre de choses, qui donnent à penser que les gens ne font pas des choix financiers rationnels[34].

Des témoins ont dit qu’il est difficile de prendre des décisions financières éclairées en vue de la retraite. Ils ont fait observer que, si les participants à un régime de pensions à prestations déterminées n’ont pas en général à prendre des décisions complexes en matière de placement, ceux qui se fient à l’épargne privée, en revanche, ont besoin d’avoir des connaissances beaucoup plus poussées pour faire des choix éclairés et gérer le risque. Mme Nathalie Joncas, de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), a émis l’opinion suivante :

Pendant la crise économique, on a bien vu que même les plus grands gestionnaires avaient beaucoup de difficulté à traverser cette crise. Comment demander à monsieur et à madame, peu importe leur âge, de faire cette planification, cette gestion?
La planification de la retraite doit nécessairement passer par une collectivisation[35].

Le mémoire présenté par Towers Perrin fait ressortir ce qui peut aller mal avec les régimes à cotisations déterminées et les REER :

      • Épuiser ses économies avant la fin de sa vie;
      • Perdre ses économies en raison de mauvaises décisions de placement;
      • Devoir puiser dans son épargne-retraite lorsque les marchés connaissent des difficultés;
      • Ne pas avoir épargné suffisamment pour maintenir le niveau de vie souhaité et
      • Avoir des dépenses plus élevées que prévu[36]

Le représentant de Towers Perrin a déploré que les Canadiens n’épargnent pas assez, n’investissent pas correctement et continuent de faire des placements à risque élevé une fois à la retraite. La plupart des témoins ont dit que l’éducation financière peut remédier en partie à cette situation, mais qu’il faut prendre davantage de mesures proactives pour faciliter l’épargne en vue de la retraite. M. Edward Whitehouse, de l’OCDE, a mis en relief l’importance de bonnes stratégies de placement par défaut. Comme nous le verrons au chapitre 5, diverses mesures qui visent l’établissement de stratégies par défaut sont présentement à l’étude au Canada.

B. Régimes enregistrés d’épargne-retraite (REER)

Les femmes puisent dans les REER une part croissante de leur revenu de retraite. Ressources humaines et Développement des compétences Canada a signalé que la proportion de leur revenu tiré des REER est passée de 11,6 % en 1990 à 27,3 % en 2005. Le Comité a aussi été informé que les cotisations aux REER sont en hausse depuis les années 1980 tant pour les femmes que pour les hommes :

La proportion de femmes âgées de 35 à 39 ans qui cotisent s'est haussée pour passer de 9 p. 100 en 1981 à 31 p. 100 en 2001. Au cours de la même période, la proportion d'hommes âgés de 35 à 39 ans qui cotisent s'est haussée et est passée de 21 p. 100 à 38 p. 100. Bien qu'il subsiste un écart entre les hommes et les femmes, celui-ci s'est considérablement rétréci au fil du temps[37].

Des témoins ont dit au Comité que la plupart des Canadiens versent moins d’argent dans leur REER que le montant auquel ils ont droit. Selon des représentants du ministère des Finances, plus de 90 % des travailleurs à faible ou moyen revenu ont des droits de cotisation inutilisés. C’est même le cas chez une bonne proportion des travailleurs à revenu élevé. Par exemple, 70 % des personnes qui gagnent plus de 125 000 $ n’utilisent pas pleinement leurs droits de cotisation.

Tout en insistant sur l’importance de l’épargne-retraite, un certain nombre de témoins ont signalé que le mécanisme des REER soulève des problèmes. M. Pierlot, de Towers Perrin, a résumé ces problèmes comme suit :

La plupart des gens ne peuvent pas l'utiliser; ils déboursent des frais très élevés; lorsqu'ils reprennent une carrière après avoir passé une période à s'occuper d'un enfant ou je ne sais quoi, ils ne peuvent pas épargner assez d'argent; s'ils ont perdu de l'argent à cause des marchés, ils ne peuvent pas élever le montant de leurs cotisations pour se rattraper[38].

Le nouveau Compte d’épargne libre d’impôt, même s’il n’a pas été conçu précisément pour la retraite, pourrait servir en partie à cette fin. Comme l’a indiqué le Comité au chapitre 2, les personnes à faible revenu admissibles au SRG sont fortement pénalisées si elles retirent de l’argent d’un REER. Le Comité se réjouit de voir que le Compte d’épargne libre d’impôt offre aux personnes à faible revenu un instrument d’épargne où elles pourront puiser sans devoir subir une baisse de leurs prestations du SRG.

Reconnaissant que l’espérance moyenne de vie des Canadiens augmente, le Comité recommande :

Recommandation 5

Que le gouvernement explore la possibilité de permettre le retrait plus progressif des montants du Fonds enregistré de revenu de retraite (FERR).

C. Régimes de pensions agréés offerts par l’employeur (RPA).

Les deux principaux types de RPA sont les régimes à prestations déterminées (RPD) et les régimes à cotisations déterminées (RCD).

Les régimes à prestations déterminées définissent soit le montant des prestations que recevront les participants, soit le mode de calcul de ces prestations (en fonction de facteurs comme l’âge, la rémunération et les années de service du participant).
En revanche, les régimes à cotisations déterminées fixent à l’avance la cotisation patronale, qui représente habituellement un pourcentage de la rémunération et est destinée aux participants visés. La pension reçue par le bénéficiaire de ce type de régime dépend en partie du rendement obtenu sur les placements.

Les régimes à prestations déterminées offrent des rentes viagères prévisibles, généralement établies en fonction des années de service et correspondant à un pourcentage fixe du salaire. Bien que souhaitables pour les salariés, ils sont complexes et risqués pour les employeurs, surtout dans le contexte économique des dernières années. Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 6 :

Que le gouvernement adopte dans les plus brefs délais une loi sur la protection des régimes de retraite sous juridiction fédérale afin d’éviter que les prestataires ne subissent des réductions de leurs prestations pour les retraités ou futurs retraités.

Des témoins ont dit avoir constaté un recul des régimes à prestations déterminées, surtout dans le secteur privé. Selon un témoin de Ressources humaines et Développement des compétences Canada, « la protection des RPD a diminué, passant de 43,5 % en 1979 à 30,6 % en 2006, alors que les RCD se sont accrus, pour passer de 2,4 % en 1979 à 6 % en 2006. En 2006, 32,3 % des femmes dans la population active souscrivaient à un RPD comparativement à 29,1 % des hommes[39]. »

L’écart entre la proportion des femmes et la proportion des hommes qui participent à des RPA s’est rétréci, mais cette situation est principalement attribuable au fait que la protection chez les hommes a largement diminué. Un témoin de Ressources humaines et Développement des compétences Canada a fait observer que la proportion des hommes qui participaient à un régime de pensions agréé est passée de 52 % en 1979 à 37,5 % en 2006[40]. Pendant cette période, la protection des femmes a progressé légèrement, passant de 36,1 % à 38,9 %. En 2007, le taux de protection des femmes a dépassé celui des hommes. Les femmes rattrapent aussi les hommes pour ce qui est de la durée de la période de cotisation. Le Comité a été informé que « d'ici 2017, 33 % des femmes âgées de 65 ans auront cotisé à un RPA pendant au moins 15 ans comparativement à 36 % des hommes[41] ».

M. Terence Yuen, économiste principal, Watson Wyatt Worldwide, a donné l’explication suivante : « Cette tendance est imputable à la participation accrue des femmes sur le marché du travail et aux modifications apportées aux lois régissant les pensions qui ont obligé les employeurs disposant de régimes de pensions à inclure les travailleurs à temps partiel[42]. »

Toutefois, comme l’illustre le tableau ci-dessous, les femmes qui bénéficient d’un régime de pensions au Canada continuent de gagner moins que les hommes en moyenne. Étant donné que les prestations de retraite sont généralement proportionnelles à la rémunération, il est probable que les femmes continueront d’obtenir moins que les hommes du régime de leur employeur. 

Déclarants de 25 à 54 ans : Répartition en fonction des gains et du pourcentage des participants à un régime dans les groupes de gains, Canada 2006

 

Femmes

   

Hommes

 
 

Répartition dans

% des participants

 

Répartition dans

% des participants

 

les groupes

à un régime dans

 

les groupes

à un régime dans

Gains

de gains (%)

les groupes de gains

 

de gains (%)

les groupes de gains

Moins de 10 000 $*

32,4 %

4,4 %

 

18,9 %

2,9 %

10 000 $ à 19 999 $

14,6 %

17,5 %

 

10,0 %

9,6 %

20 000 $ à 29 999 $

13,6 %

33,3 %

 

10,5 %

18,3 %

30 000 $ à 39 999 $

12,7 %

50,2 %

 

11,9 %

30,8 %

40 000 $ à 49 999 $

9,3 %

63,2 %

 

11,3 %

44,5 %

50 000 $ à 59 999 $

6,0 %

69,9 %

 

9,4 %

55,0 %

60 000 $ à 69 999 $

4,2 %

74,6 %

 

7,6 %

61,8 %

70 000 $ à 79 999 $

2,9 %

76,8 %

 

5,7 %

65,6 %

80 000 $ à 99 999 $

2,5 %

71,0 %

 

6,8 %

65,8 %

100 000 $ à 119 999 $

0,9 %

59,0 %

 

3,1 %

60,1 %

120 000 $ ou plus

1,2 %

44,1 %

 

4,7 %

44,9 %

Total**

100,0 %

   

100,0 %

 

Source : Statistique Canada, Fichier de données administratives longitudinales.

L’Alliance de la fonction publique du Canada a signalé que les femmes qui prennent leur retraite de la fonction publique fédérale avec une pleine pension reçoivent presque autant que les hommes, soit 97,7 %. Cela est attribuable aux « avantages dont jouissent les femmes comme cotisantes au régime, y compris la possibilité d’accumuler, sous réserve de certaines conditions, du service ouvrant droit à pension lorsqu’elles sont en congé non payé pour obligations familiales, de maternité, parental ou pour réinstallation d’un conjoint[43] » et aux mesures qui permettent aux employés à temps partiel de cotiser à un régime de pensions.

Le taux de protection des femmes est grandement influencé par le secteur public. M. Terence Yuen a dit au Comité que, si l’on exclut le secteur public pour se concentrer sur le secteur privé, le taux de protection des femmes, 23 %, reste considérablement inférieur à celui des hommes, 32 %[44]. Cette situation s’explique en partie par le fait que « dans le secteur privé, les femmes ont tendance à travailler davantage dans le secteur des services, constitué de nombreuses petites entreprises sans régime de pensions. En revanche, une grande proportion d'hommes travaillent dans le secteur de production des biens, où les entreprises sont en général plus grandes et davantage syndiquées. Par conséquent, elles sont plus susceptibles d'offrir des régimes de pension à leurs employés[45]. »

Ces différences montrent qu’il importe de réfléchir aux moyens d’accroître le taux de protection dans les petites et moyennes entreprises du secteur des services et aux types de régimes qui avantageraient le plus les travailleurs atypiques et à temps partiel. Les témoins ont proposé différents moyens d’atteindre les objectifs souhaités, ce que présente le chapitre 5.



[30]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 3 novembre 2009 (M. Chris Forbes, directeur général, Relations fédérales-provinciales et politique sociale, ministère des Finances).

[31]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 5 novembre 2009 (M. James Pierlot, conseiller principal, Towers Perrin).

[32]   Ibid.

[33]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 19 novembre 2009 (Mme Monica Townson, conseillère et associée en recherche, Centre canadien de politiques alternatives).

[34]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 5 novembre 2009 (M. Edward Whitehouse, chef, Analyse des politiques de pensions, Division des politiques sociales, Organisation de coopération et de développement économiques).

[35]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 19 novembre 2009 (Mme Nathalie Joncas, actuaire, Confédération des syndicats nationaux (CSN)).

[36]   Towers Perrin, Mémoire, 4 novembre 2009, p. 28.

[37]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 6 octobre 2009 (M. Thomas Shepherd, directeur, Division de la retraite et du vieillissement, Ressources humaines et Développement des compétences Canada).

[38]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 5 novembre 2009 (M. James Pierlot, conseiller principal, Towers Perrin).

[39]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 6 octobre 2009 (M. Thomas Shepherd, directeur, Division de la retraite et du vieillissement, Ressources humaines et Développement des compétences Canada).

[40]   Ibid.

[41]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 6 octobre 2009 (M. Thomas Shepherd, directeur, Division de la retraite et du vieillissement, Ressources humaines et Développement des compétences Canada).

[42]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 17 novembre 2009 (M. Terence Yuen, économiste principal, Canadian Research and Innovation Centre, Watson Wyatt Worldwide).

[43]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 1er décembre 2009 (Mme Patty Ducharme, vice-présidente exécutive nationale, Bureau de l’exécutif, Alliance de la fonction publique du Canada). [traduction]

[44]   Témoignages, 2e session, 40e législature, 17 novembre 2009 (M. Terence Yuen, économiste principal, Canadian Research and Innovation Centre, Watson Wyatt Worldwide).

[45]   Ibid.