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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 052 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 6 mars 2015

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Chers collègues, laissons aux représentants des médias le temps de quitter la pièce, avec les caméras et appareils photo.
    Bienvenue à 52e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Je souhaite la bienvenue à mes collègues qui reviennent de leurs circonscriptions. Et c'est, bien sûr, avec plaisir que nous accueillons le commissaire Paulson.
    Voici qui aidera mes collègues à comprendre: le mardi 3 mars, en soirée, le commissaire Paulson m'a demandé de convoquer le comité pour le vendredi 6 mars, à 11 heures, pendant une heure, pour présentation publique, puis discussion, d'une vidéo reliée à l'attentat terroriste survenu ici le 22 octobre. Comme une demande en ce sens avait été faite, à la faveur d'une motion adoptée par le comité, au début de la matinée de mercredi, j'ai envoyé, après une courte discussion avec le greffier du comité, un avis de convocation à la séance. J'ajoute, bien sûr, pour ceux que cela pourrait intéresser, qu'une motion semblable avait été adoptée au Sénat.
    Aujourd'hui, nous accorderons une quinzaine de minutes au commissaire Paulson pour qu'il fasse un exposé et des observations et qu'il fasse voir une vidéo. Le reste de l'heure sera consacrée à l'habituelle période de questions: une première série d'interventions d'une durée de sept minutes chacune, réparties de la façon qu'auront décidée les membres du comité, puis des interventions de cinq minutes chacune jusqu'à la fin de l'heure.
    À noter également que, conformément à la demande du commissaire Paulson et, aussi, à la motion originelle, la séance est publique et sera télévisée. Bien sûr, cela se passe sur le réseau de diffusion de la Chambre des communes. C'est de l'information destinée à tous.
    Je cède maintenant la parole au commissaire Paulson pour qu'il nous livre son exposé.
    Encore une fois, monsieur le commissaire, soyez le bienvenu.

  (1105)  

[Français]

     Merci, monsieur le président et membres du comité.

[Traduction]

    En réponse à votre demande, je suis ici, ce matin, pour vous dévoiler la vidéo liée à l'attentat du 22 octobre 2014. Nous avons saisi cette pièce à conviction dans le cellulaire trouvé dans la voiture conduite par Michael Zehaf-Bibeau après qu'il a abattu le caporal Cirillo, avant de prendre d'assaut le Parlement, armé d'un fusil. Nous connaissons tous la suite: il a été abattu à son tour par les membres valeureux de la GRC et du personnel de la sécurité du Parlement, y compris par le sergent d'armes qui s'est lancé à sa poursuite à l'intérieur de l'immeuble.
    J'aimerais aussi faire le point, pour le Parlement et, par votre entremise, pour l'ensemble des Canadiens, sur notre enquête sur cet attentat sans précédent contre le Parlement.
    Tout d'abord, je tiens à préciser que la GRC mène une enquête criminelle en vue de déterminer si quelqu'un a aidé, conseillé ou encouragé M. Zehaf-Bibeau à commettre ses crimes, lui a facilité la tâche ou comploté avec lui dans ce but.
    Je tiens également à dire que si M. Zehaf-Bibeau n'avait pas été tué, mais plutôt mis en détention, nous aurions porté contre lui des accusations de terrorisme. La définition d'« activité terroriste » est prévue à l'alinéa 83.01 (1)b) du Code criminel. Selon les preuves recueillies, la GRC estime que M. Zehaf-Bibeau était un terroriste.

[Français]

     Si quelqu'un l'a aidé, conseillé ou encouragé à perpétrer ses crimes, ou a comploté avec lui à cette fin, une telle personne serait aussi, à notre avis, un ou une terroriste. Si des preuves existaient en ce sens, la GRC porterait des accusations de terrorisme contre une telle personne.

[Traduction]

    Il n'est pas pertinent pour nous ou pour notre enquête de savoir quel genre de terroriste était M. Zehaf-Bibeau, ni s'il était particulièrement intelligent, habile, discipliné ou influent. Tout s'articule autour des éléments de preuve recueillis et de leur pertinence en regard de la loi: que faisait-il et pourquoi?
    Il n'est pas dans les habitudes de la GRC, et ce ne devrait pas l'être non plus, de parler en public des preuves ou de la façon dont elle les recueille pendant une enquête en cours. La GRC tient à son autonomie dans la conduite de ses activités et elle la défend scrupuleusement. J'entends dévier légèrement de ce protocole dans ce cas-ci, par égard pour la demande de votre comité et pour le vif intérêt public que cette affaire suscite.
    Quelques mots, à présent, sur cette vidéo et ce qui explique tout le temps pris depuis octobre 2014. J'ai pris connaissance de l'existence de la vidéo lorsqu'on m'a avisé de sa découverte durant l'expertise judiciaire du cellulaire saisi dans le véhicule du suspect. C'était le dimanche suivant l'attentat. J'ai alors demandé qu'un communiqué soit diffusé le jour-même. J'estimais qu'en annonçant l'existence de la vidéo, pendant que nous en faisions l'examen, nous éviterions d'être accusés d'avoir caché l'existence de cette pièce à conviction.
    Il s'est ensuivi des discussions animées à la GRC sur la valeur probante et l'utilité opérationnelle de cette vidéo. Il nous fallait aussi bien considérer l'éventuel impact de sa diffusion publique non seulement sur l'enquête, mais aussi sur les autres. D'un autre côté, la vidéo pouvait servir à radicaliser des individus, voire susciter d'autres actes de violence.
    Nous avons pris en compte le risque que la vidéo soit utilisée par des éléments terroristes et leurs sympathisants pour faciliter le recrutement, le financement et l'exécution d'attentats. Ce dernier aspect continue de nous préoccuper, mais, honnêtement, il ne nous revient pas de trancher. Comme un de nos agents me l'a fait remarquer: « Si nous ne le faisons pas, qui d'autre le fera? C'est nous qui avons la vidéo en main. » La question est pertinente.
    Il ne fait aucun doute que la vidéo est un élément de preuve. Mais une preuve de quel acte criminel? Il reviendra à un tribunal compétent de la soupeser et de l'évaluer. Nous n'en sommes pas encore là, pour le moment. La question qui se pose à la GRC, c'est de savoir comment maximiser l'utilité de cette vidéo dans une éventuelle instance criminelle.
    À l'origine, j'étais enclin à diffuser la vidéo intégralement, mais les responsables opérationnels de l'enquête m'ont convaincu de ne pas le faire. Aujourd'hui, au moment de vous la montrer, je dois préciser que ce n'est pas de la version intégrale. On en a retranché 18 secondes, soit 13 au début et 5 à la fin.
    Je suis convaincu des motifs opérationnels raisonnables de ces coupures; et vous voudrez certainement les comprendre aussi. Malheureusement, pour les mêmes raisons que nous avons coupé la vidéo, je ne peux pas vous donner aujourd'hui les raisons pour lesquelles nous l'avons fait.
    Je sais aussi pertinemment que le gouvernement présente de nouvelles dispositions législatives pour renforcer la lutte contre le terrorisme. La diffusion de cette vidéo pourrait paraître une tentative d'influer sur cette démarche. Je tiens à vous assurer que ce n'est nullement mon intention. La vidéo parle d'elle-même.

  (1110)  

[Français]

    Je sais aussi pertinemment que le gouvernement présente de nouvelles dispositions législatives pour renforcer la lutte contre le terrorisme. La diffusion de cette vidéo pourrait paraître comme une tentative d'influencer cette démarche. Je tiens à vous assurer que ce n'est pas mon intention. La vidéo parle d'elle-même.

[Traduction]

    Vous devez comprendre que je dispose d'enquêteurs et d'experts chevronnés qui travaillent sans relâche pour mener à bien ce dossier, et il est dans l'intérêt collectif de les laisser faire le travail dans lequel ils excellent: enquêter.
    Grâce aux équipes intégrées de la sécurité nationale, la GRC compte plus de 130 enquêteurs et employés qui se consacrent à plein temps à cette affaire. Nous avons interviewé plus de 400 personnes: ses fréquentations en Colombie-Britannique, les passagers de l'autocar Greyhound qu'il a pris et les personnes qui l'ont vu au refuge pour sans-abri à Ottawa.
    Nous savons désormais que M. Zehaf-Bibeau, dans les dernières années de sa vie, alors qu'il habitait dans le Lower Mainland, en Colombie-Britannique, et durant un bref séjour en Alberta, a adhéré de plus en plus à l'idéologie terroriste.
    Nous savons qu'en août 2014, il a fait une demande de passeport à un bureau de Vancouver où il a appris par la suite qu'on n'accéderait pas immédiatement à sa demande et que celle-ci ferait l'objet d'un examen approfondi. Entre le 23 septembre et le 2 octobre, M. Zehaf-Bibeau a entrepris de se rendre à Ottawa, d'abord en auto-stop, puis en autocar Greyhound. Pendant au moins une étape du trajet, il a dit à d'autres passagers qu'il se rendait à Ottawa dans le but d'obtenir un passeport.
    Nous savons aujourd'hui que deux heures après son arrivée à Ottawa, M. Zehaf-Bibeau s'est présenté à l'ambassade de Libye pour renouveler son passeport libyen, qui avait expiré. Il avait la double nationalité. On lui a dit que sa demande serait envoyée en Libye en raison d'incohérences dans ses pièces d'identité. Le processus devait prendre de trois à quatre semaines.
    Deux jours plus tard, le 4 octobre, des caméras de surveillance sur la Colline du Parlement ont capté des images de M. Zehaf-Bibeau alors qu'il participait à une visite guidée de l'édifice du Centre. D'après notre examen de la vidéo et nos entretiens avec des gens présents sur la Colline ce jour-là, rien dans cette visite ou sa présence n'aurait pu éveiller les soupçons des agents de la GRC affectés à la Colline ou d'autres agents de sécurité.
    Durant son séjour à Ottawa, M. Zehaf-Bibeau a utilisé des postes Internet et des téléphones publics à divers endroits de la ville. Nous savons que c'était pour garder contact avec des personnes de la région et en Colombie-Britannique. Nous avons pu établir l'identité de certaines d'entre elles et nous poursuivons ce volet de notre enquête.
    Nous avons une idée complète de ses finances et des dépenses qu'il a faites avant l'attaque. Dans les jours précédant le 22 octobre, M. Zehaf-Bibeau s'est occupé de s'acheter une voiture. Le 21 octobre, il a conclu la transaction en payant argent comptant. Après avoir pris possession de la voiture, il s'est rendu à Mont-Tremblant visiter un membre de sa famille. On l'a alors vu en possession d'un long couteau.
    Très tôt, le lendemain, le 22 octobre, des témoins l'ont vu déposer un fusil dans le coffre de sa voiture. Quelques heures plus tard, il abattait le caporal Cirillo, retournait à sa voiture et prenait d'assaut le Parlement. Je vous ai raconté comment il s'était approché de l'immeuble.
    Nous n'avons pas encore été en mesure de confirmer les origines du fusil. Nous publions une photo de l'arme, qui semble unique, dans l'espoir que quelqu'un la reconnaîtra. Je peux confirmer toutefois qu'il avait le long couteau attaché au poignet lorsqu'il a été abattu. Nous n'avons pas trouvé d'autres fusils ni d'autres armes dans sa voiture, parmi ses effets personnels ni dans les lieux où nous savons qu'il s'est rendu dans les heures précédant l'attentat.
    On m'a aussi avisé qu'il a été atteint à plusieurs reprises, mais combien de fois exactement, je ne saurais dire, puisque je l'ignore. Nous attendons les constatations détaillées de la Police provinciale de l'Ontario, la PPO, qui s'est chargée de mener l'enquête indépendante sur la fusillade survenue à l'intérieur du Parlement. La vidéo de l'intérieur du Parlement fait partie de ce champ d'enquête. C'est la PPO qui l'a.
    Je peux aussi confirmer que le dépistage toxicologique effectué sur le cadavre de M. Zehaf-Bibeau s'est révélé négatif, tant pour la présence de drogue que d'alcool. Nous n'avons pas relevé de signe de consommation de drogue ni d'alcool dans la période précédant l'attentat.
    C'est durant la perquisition de sa voiture, après l'attentat, que nous avons découvert le cellulaire de M. Zehaf-Bibeau. Notre expertise judiciaire, menée sur-le-champ, a mis au jour la vidéo.
    Nous avons été en mesure de déterminer l'heure et l'endroit exacts où M. Zehaf-Bibeau a procédé à son enregistrement. Comme vous le verrez dans un instant, M. Zehaf-Bibeau s'est filmé dans sa voiture, avec son cellulaire, immédiatement avant l'attentat perpétré au Monument commémoratif de guerre du Canada. Nous avons établi que cela s'est fait pendant qu'il était garé dans un terrain de stationnement situé près du 464, rue Metcalfe. Il fixe directement la caméra, il semble très lucide et très déterminé et il expose ses motifs pour l'attentat à venir.
    La qualité de l'enregistrement sonore n'est pas parfaite, mais elle est suffisante pour que l'on comprenne ce qu'il dit. J'ai pour vous la transcription, en anglais et en français, de son message.

  (1115)  

[Français]

     Je suis à votre disposition pour répondre à vos questions, mais compte tenu de l'enquête qui est toujours en cours, il y a certaines informations que je ne pourrai pas partager.

[Traduction]

    Voici la vidéo.
    [Présentation audiovisuelle]
    Voilà qui termine mon exposé, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur le commissaire.
    Commençons la période de questions.
    Je cède la parole pendant sept minutes à la secrétaire parlementaire, Mme James.
    Partagez-vous votre temps de parole?

  (1120)  

    Je le prendrai probablement au complet, monsieur le président.
    Merci, monsieur le commissaire, d'être ici. Je tiens seulement à dire que nous reconnaissons et respectons l'autonomie de la GRC et l'indépendance de l'enquête en cours sur cette affaire.
    Je dois vous avouer que j'ai presque besoin de reprendre mon souffle après avoir vu cette vidéo et lu la transcription. C'était plutôt troublant.
    Je tiens à revenir aux attaques contre nos soldats, à Saint-Jean-sur-Richelieu, et, le 22 octobre, au Monument commémoratif de guerre du Canada, puis ici même, au Parlement, ce dont nous avons été les témoins.
    Il ne s'agissait pas d'attaques au hasard contre un particulier ou un lieu de travail, mais contre notre sécurité nationale et les lieux où, ici, s'exerce le pouvoir. La différence est nette.
    Je suis heureuse que, dans votre exposé, vous ayez expressément mentionné que c'était une attaque terroriste. Vous l'avez dit peu après les événements et vous l'avez répété ici.
    À l'intention de tous les membres du comité ici présents et des téléspectateurs, je fais remarquer que vous connaissez très bien le Code criminel. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez fait allusion à la définition de « terrorisme » à son alinéa 83.01 (1) b), mais je voudrais en lire la teneur:
    
b) soit un acte — action ou omission, commise au Canada ou à l'étranger:

(i) d'une part, commis à la fois:

(A) au nom — exclusivement ou non — d'un but, d'un objectif ou d'une cause de nature politique, religieuse ou idéologique,

(B) en vue — exclusivement ou non — d'intimider tout ou partie de la population quant à sa sécurité, entre autres sur le plan économique, ou de contraindre une personne, un gouvernement ou une organisation nationale ou internationale à accomplir un acte ou à s'en abstenir, que la personne, la population, le gouvernement ou l'organisation soit ou non au Canada,

(ii) d'autre part, qui intentionnellement, selon le cas:

(A) cause des blessures graves à une personne ou la mort de celle-ci, par l'usage de la violence,

(B) met en danger la vie d'une personne,

(C) compromet gravement la santé ou la sécurité de tout ou partie de la population.
    D'après votre témoignage, la vidéo que nous venons de visionner et la transcription, il s'agissait du meurtre barbare d'un soldat canadien non armé, une attaque contre la représentation même du Canada, son gouvernement. Manifestement, ce que nous avons vu, ce jour-là, entre dans la définition de « terrorisme ».
    Pouvez-vous confirmer que cette définition s'applique très nettement à ce dont nous avons été les témoins, ici, le 22 octobre?
    Monsieur le président, je répondrai ce qui suit. Dans le cadre de nos enquêtes, nous recueillons des preuves. Comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, nous les confrontons à la loi. Il me semble que cela correspond parfaitement à ces critères.
    Récemment, un certain nombre d'attaques se sont produites un peu partout dans le monde, à Copenhague, Paris, Sydney et, bien sûr, le 22 octobre et deux jours avant, ici même, en territoire canadien. Elles se ressemblaient toutes beaucoup, peu importe le pays où elles ont eu lieu. Elles étaient très visiblement motivées par la religion, par des croyances contraires à celles que nous partageons ici au Canada: la transparence et la tolérance.
    Cette vidéo, la transcription et votre témoignage montrent clairement un lien entre toutes ces attaques. Pourriez-vous, s'il vous plaît, dire ce que vous en pensez?
    Merci pour votre question.
    Dans le langage ordinaire de la police, « lien » évoque une connaissance, des relations et des rapports directs. En ce sens, ce lien n'existe pas, mais, manifestement, quant à l'essence de votre question sur les motifs et l'idéologie sous-jacente, ces attaques semblent procéder des mêmes motifs.
    Merci. Je ne faisais pas allusion à des personnes qui auraient peut-être été en rapport les unes avec les autres. Je suis donc heureuse de cette mise au point et de cette mise en relief des motifs.
    Comm. Bob Paulson: Oh! Veuillez me pardonner.
    Mme Roxanne James: J'ai peut-être utilisé le mauvais terme. Et je vous suis reconnaissante de la rectification. Merci beaucoup.
    Je pense que nous devons poser une question, après avoir vu cela, sachant que beaucoup de personnes auraient quitté le Canada pour l'étranger, peut-être pour se se livrer au terrorisme et se mettre au service de l'État islamique en Irak ou au Levant. Puis-je vous demander si la GRC, en général, a accru sa vigilance?

  (1125)  

    Oui, absolument. Évidemment, comme nous l'avons dit plus tôt, nous sommes en état d'alerte accru face au risque que représentent ces individus identifiés comme étant des voyageurs ou des personnes à risque élevé dans le cadre de nos efforts de lutte contre le terrorisme.
    Comme je l'ai dit, je n'ai jamais vu un degré d'alerte aussi élevé que dans le cadre de ces activités. Nous avons amélioré nos pratiques afin de mieux gérer ces cibles, mais il s'agit d'un réalignement sans précédent de nos ressources pour répondre à cette menace.
    Dans votre déclaration, vous avez indiqué qu'aucune trace de drogue ou d'alcool n'avait été retrouvée dans l'analyse toxicologique effectuée sur le corps de M. Zehaf-Bibeau. Par conséquent, est-il juste de dire qu'il n'était pas sous l'influence de quoi que ce soit au moment de commettre ces actes?
    Pour poursuivre en utilisant le langage policier, sachez qu'aucune des substances intoxicantes que nous recherchions n'ont été détectées. On parle ici d'alcool, de drogues courantes, de stimulants à base d'opiacés, etc. Évidemment, les résultats sont limités par la portée de l'analyse toxicologique.
    Merci beaucoup, madame James.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Garrison.
    Merci beaucoup, monsieur Paulson, d'être ici aujourd'hui.
    Cette vidéo donne froid dans le dos. Je comprends les raisons pour lesquelles on ne la montre pas dans toute son intégralité. J'espère que ce sera possible à un moment donné.
    Cette vidéo me rappelle évidemment le décès de Nathan Cirillo, qui demeurera à jamais gravé dans nos coeurs. Elle me rappelle également qu'au lendemain de l'incident, les parlementaires étaient de retour à la Chambre pour y siéger afin de montrer au monde entier que nous n'allions pas nous laisser intimider par cet événement ou celui ayant entraîné la mort de Patrice Vincent à Saint-Jean-sur-Richelieu.
    Nous avons bien hâte de voir le rapport final. En tant qu'ancien membre d'une commission de police, je sais qu'on ne peut jamais demander à la police à quel moment on pourra avoir le rapport; il sera terminé lorsqu'il sera terminé.
    J'ai deux questions à vous poser.
    Dans votre déclaration, vous avez parlé des ressources et du grand nombre de personnes qui travaillent dans ce dossier. J'aimerais vous interroger sur une déclaration que vous avez faite devant le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale et de la défense le 27 octobre dernier. Vous avez indiqué que vous avez dû affecter 300 ressources à la sécurité nationale en provenance d'autres secteurs de service de police. Cela nous amène donc à nous demander si vous avez suffisamment de ressources pour composer avec la nature des menaces actuelles. Avez-vous quelque chose à dire là-dessus?
    La réponse à votre question est oui, nous avons suffisamment de ressources pour contrer la menace qui pèse sur nous tous, mais comme je l'ai dit dans mon témoignage devant le comité sénatorial, nous avons dû transférer plus de 600 équivalents temps plein d'autres secteurs de responsabilité fédérale aux activités de lutte contre le terrorisme.
    Comme je l'ai dit, c'est une question d'établissement de priorités. Nous avons suffisamment de gens qui travaillent sur ces enquêtes, mais ils ne font pas ce qu'ils sont censés faire.
    Pourriez-vous nous donner une idée de la provenance de ces ressources? Autrement dit, quels sont les secteurs touchés par cette lutte contre le terrorisme?
    Bien sûr. Nous transférons nos ressources fédérales, que ce soit dans les secteurs du crime organisé, des stupéfiants, de l'intégrité financière, bref, le mandat fédéral. Je dois dire aussi que nous comptons sur d'excellents partenariats que nous avons établis avec les forces policières de partout au pays. Nous avons aussi 60 personnes environ qui nous ont été acheminées d'autres services policiers. Certains services de police municipaux n'ont pas hésité à nous épauler dans le cadre de cette initiative. Je pense que c'est un phénomène qui touche tous les services de police à l'échelle du pays.
    C'est la réponse courte.

  (1130)  

    Ma deuxième question porte sur les programmes de lutte contre la radicalisation. Vous avez dit dans votre déclaration que M. Zehaf-Bibeau avait été influencé par l'idéologie extrémiste.
    Je m'interroge sur la stratégie anti-radicalisation de la GRC qui, selon certains, a été mise de côté pendant très longtemps. Pourriez-vous nous parler des progrès qui ont été réalisés à ce jour au chapitre de la lutte contre la radicalisation?
    Je ne crois pas qu'il soit juste de dire que la stratégie a été mise de côté.
    Tout d'abord, sachez qu'en vertu de notre mandat, établi par la Loi sur la GRC, nous devons, d'une part, identifier et appréhender les délinquants, et d'autre part, prévenir la criminalité. À cet égard, nous avons, et ce, depuis toujours, une solide approche en matière de prévention de la criminalité. C'est peut-être banal à dire, mais si on arrive à prévenir le crime, on mène moins d'enquêtes. Autrement, cela devient très complexe, et il faut consacrer énormément de ressources à ces enquêtes sur la criminalité.
    Cela dit, comme je l'ai dit au comité à plusieurs reprises, nous avons abordé certains aspects de notre régime de prévention du terrorisme, que ce soit nos agents d'information, nos programmes d'intervention communautaire ou l'application d'une approche centrale pour faire face aux risques, parce que ce ne sont pas tous les délinquants ni tous les individus qui démontrent la nécessité d'une intervention ou d'une action de prévention.
    Dans le cadre de la désignation des individus à haut risque, nous avons mis en place un système qui permet d'identifier chaque personne. Si ces suspects présentent un risque, notre principale responsabilité étant d'assurer la sécurité des Canadiens, nous mettons en oeuvre des mesures d'enquête. Différents types d'interventions judiciaires — par exemple, un engagement de ne pas troubler l'ordre public — contribuent à atténuer la menace. Si nous jugeons qu'il est bon d'intervenir auprès d'une personne, nous misons sur les ressources déjà existantes au sein de nombreuses communautés et nous essayons de mobiliser les membres de la famille et de faire appel à des conseillers, aux autorités religieuses et à d'autres personnes susceptibles de dissuader l'individu de choisir la voie de la radicalisation.
    Merci.
    Je pense que je vais céder ma dernière minute à Mme Doré Lefebvre.

[Français]

     Merci, monsieur le président et monsieur Garrison.
    Monsieur Paulson, je vous remercie de votre présence à ce comité. Je crois qu'il est important que nous fassions un retour sur les événements qui ont eu lieu le 22 octobre.
    Je vais vous poser une brève question sur un aspect particulier et j'espère que vous pourrez en parler. Je sais que vous êtes en train de mener une enquête, mais pouvez-vous me dire si M. Zehaf-Bibeau avait un historique de maladie mentale? Vous penchez-vous sur cet aspect dans votre enquête sur ce qui est arrivé le 22 octobre?
     Je vous remercie de votre question.
    Nous considérons tous les aspects de sa vie. Nous n'avons pas remarqué qu'il vivait des défis particuliers liés à la santé mentale. Je sais qu'il y a eu des interventions.

[Traduction]

    Néanmoins, les preuves que nous avons recueillies ne révèlent pas que M. Zehaf-Bibeau souffrait d'un trouble de santé mentale. Comme je l'ai dit au début, il a peut-être des antécédents de problèmes de santé mentale, mais ce n'est pas quelque chose qu'on cherche à approfondir ici.
    Merci, madame Doré Lefebvre.
    Monsieur Norlock, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le commissaire, je vous remercie, vous et vos membres pour l'excellent travail que vous accomplissez au nom des Canadiens.
    Je sais que mes amis d'en face aiment bien parler des procédures, mais ils n'abordent pas les véritables questions, c'est-à-dire l'augmentation alarmante des activités terroristes au Canada. Je sais que vous et vos membres avez de grandes responsabilités, dont celle d'assurer la sécurité des citoyens canadiens.
    À ce stade-ci de l'enquête, selon vous, sur les 400 personnes que vous avez interrogées, y en a-t-il qui ont suivi les conseils des forces policières, des organismes d'application de la loi de partout au Canada et des députés comme moi, c'est-à-dire qui ont communiqué avec les autorités locales après avoir vu quelque chose d'anormal ou quelqu'un affichant un comportement de type terroriste ou suspect. Sans compromettre l'enquête, pourriez-vous nous dire si cela s'est produit?

  (1135)  

    Merci pour votre question.
    Je dirais que certains comportements auraient dû être signalés aux autorités compétentes, donc oui, je pense qu'il y a eu des occasions où des proches de M. Zehaf-Bibeau auraient pu signaler son comportement aux autorités. Ce qu'il faut comprendre aussi, c'est que notre enquête active ne se résume pas à retracer les activités et déplacements de M. Zehaf-Bibeau. Il s'agit de déterminer qui aurait pu apporter une contribution active à sa radicalisation. Cela permet en quelque sorte d'encadrer l'enquête, et notre enquête porte actuellement sur les personnes qui auraient pu contribuer à ses crimes.
    Serait-il juste de dire que vous et les membres de la GRC, ainsi que d'autres organismes d'application de la loi, invitez les Canadiens qui entendent ou voient quelque chose de suspect à ne pas craindre d'être critiqués par les autorités locales d'application de loi et, en fait, à leur transmettre toute information qui pourrait permettre de déjouer des actes terroristes comme ceux du 22 octobre?
    Absolument. Je pense que j'irais même plus loin encore pour rassurer les gens, surtout les proches des personnes dont le comportement est suspect, car je crois qu'il y a une certaine confusion qui entoure ces situations. Je vais faire un parallèle avec la drogue. Lorsque des parents réalisent que leur enfant consomme de la drogue, ils sont souvent réticents à communiquer avec les autorités ou les ressources communautaires pour aller chercher de l'aide et dissuader leur enfant d'en prendre, de peur qu'il se retrouve derrière les barreaux. Ce sentiment est très présent dans certaines collectivités, particulièrement dans le cadre des activités de lutte au terrorisme que nous entreprenons. Nous essayons d'avoir une certaine crédibilité et d'établir des relations positives avec les membres des collectivités afin qu'ils sachent qu'en intervenant tôt et en tirant profit des ressources, nous pouvons empêcher de tels événements de se produire, parce que les attaques dont nous avons été témoins sont inacceptables.
    Serait-il juste de dire que lorsqu'on signale ce type de comportement, on peut éviter à une personne de se retrouver en prison, étant donné qu'elle est en quelque sorte prise en charge?
    Absolument.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais céder le reste de mon temps à M. Falk.
    Le président: Vous disposez de deux minutes et demie, monsieur Falk.
    Merci, monsieur le commissaire, de votre présence aujourd'hui.
    Selon les renseignements que nous avons obtenus dans cette vidéo, diriez-vous que M. Zehaf-Bibeau s'affiliait clairement à des organisations terroristes connues?
    Je pense qu'il s'identifiait comme faisant partie du mouvement des moudjahidines.
    Et il a affirmé qu'il allait commettre un acte terroriste?
    Oui, il a dit qu'il allait s'en prendre à des soldats.
    J'étais dans cette pièce avec mes collègues ce jour-là, et cet événement est très réel. Il restera à tout jamais gravé dans ma mémoire. Je le vois également comme un acte terroriste.
    Dans votre témoignage, monsieur, vous avez dit qu'il avait fait une demande de passeport à Vancouver, mais que le document ne lui avait pas encore été délivré, car une enquête était en cours à son sujet. Il s'était ensuite rendu à Ottawa et, en l'espace de quelques heures, il était à l'ambassade de la Libye pour y présenter une autre demande. Encore une fois, on lui a répondu qu'il y avait des incohérences et que, par conséquent, il faudrait prévoir un certain délai.
    Dans des cas comme celui-là, où une personne se voit refuser un passeport, y a-t-il des mécanismes en place qui permettent de communiquer cette information aux organismes d'application de la loi ou à la GRC?

  (1140)  

    Oui. Nous avons formé une équipe permanente avec d'autres organisations — comme le Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, l'Agence des services frontaliers du Canada, ou ASFC, l'armée de temps à autre, Citoyenneté et Immigration Canada, ou CIC, et Passeport Canada — pour faire exactement ce que vous dites, car nous sommes conscients que la frustration de l'individu à l'égard des responsables des passeports a ici été un facteur aggravant ou déclencheur. Lorsque nous nous trouvons devant un individu à haut risque et lui annonçons que son passeport sera confisqué, cette décision a été prise par le centre d'opérations conjointes en tenant compte du bien-fondé et de la légalité des mesures que nous souhaitons prendre, mais aussi de l'incidence du geste sur les autres enquêtes et procédures. C'est ce que nous appelons le mécanisme de réduction des conflits: si nous confisquons le passeport d'un individu, nous devons évaluer cette personne et sa réaction possible, et être prêts à intercepter toute réponse négative, quelle qu'elle soit. Il s'agit d'un système d'évaluation complexe et perfectionné.
    Monsieur Easter, la parole est à vous.
    Monsieur le commissaire, je vous remercie de comparaître et de nous avoir montré la vidéo.
    Elle évoque chez moi et chez d'autres de fort tristes souvenirs du jour où cet acte de terrorisme ou de violence a été commis.
    Je dois admettre d'emblée être un peu inquiet que la vidéo ne soit pas complète et que 18 secondes en aient été retranchées — et il est à votre honneur de l'avoir dit. J'ai écouté votre explication.
    Je pense que cette troncature suscitera la méfiance puisque certains voudront savoir ce qui a été supprimé et pourquoi. Je me demandais si vous pouviez nous expliquer, sans nuire à l'enquête, pourquoi cette partie de la vidéo a été retirée. Pouvez-vous nous en dire plus que ce que vous avez écrit?
    Ce que j'ai dit, c'est que c'était le fruit de décisions ou de raisons opérationnelles judicieuses.
    Dans cette affaire et dans d'autres cas, le défi consiste notamment à préserver l'intégrité du processus d'enquête. Ce n'est pas parce que nous souhaitons faire des cachotteries. Mais nous devons rendre des comptes sur absolument tout, y compris la façon dont nous nous sommes comportés, dont nous avons réalisé nos enquêtes, dont nous avons agi, et dont nous démontrons l'irréprochabilité de la preuve que nous soumettons.
    Croyez-moi, nous avons poussé le raisonnement. Comme je l'ai dit, j'étais initialement déterminé à diffuser la vidéo au complet, mais les décideurs opérationnels ont commencé à me questionner, comme je le fais avec eux, sur les raisons pour lesquelles je voudrais la diffuser ou non; nous procédons ainsi dans d'autres affaires aussi. Les raisons sont là, et j'espère qu'il sera possible de les examiner.
    Je ne remets nullement en question votre jugement. Nous comprenons. Je ne fais que soulever la question.
    Le système canadien d'alerte au terrorisme fonctionne très différemment de celui des Américains, qui utilisent notamment un code de couleurs. J'ai toujours soutenu que les représentants du gouvernement et les forces policières doivent dire aux Canadiens d'être vigilants en prenant garde de ne pas alimenter la peur. Dans la vidéo, Zehaf-Bibeau dit ceci: « C'est donc pour venger les moudjahidines du monde entier. » Il ajoute: « ... nous n'arrêterons pas jusqu'à ce que vous décidiez d'être un pays paisible et de rester chez vous... », et ainsi de suite. Ce sont des propos très graves.
    Pouvez-vous nous dire où se situe le niveau de menace terroriste au Canada comparativement aux dernières années? Le projet de loi C-51 s'en vient. Je pense que nous devons être parfaitement honnêtes envers les Canadiens à propos des craintes, sans toutefois exagérer la menace et prétendre qu'un terroriste se cache à chaque détour.
    Pouvez-vous nous donner une idée de la menace?

  (1145)  

    Officiellement, le Centre intégré d'évaluation du terrorisme et le SCRS estiment que notre niveau de menace est modéré, une information qui a été diffusée et comprise à grande échelle. Le niveau est donc plus élevé qu'il ne l'était auparavant.
    Comme je l'ai dit en réponse à certaines questions ou peut-être en exposé, je n'ai jamais vu à l'échelle nationale autant d'enquêtes antiterroristes être menées à ce rythme qu'au cours de la dernière année. La progression a été constante. J'ai fait ce que j'appelle à la blague une erreur de débutant en vous donnant le nombre de voyageurs à haut risque que nous surveillons, et il y a eu de nombreuses questions à ce sujet. Je doute que divulguer un chiffre ne soit utile. Je vous dirai simplement que la tendance est à la hausse. Nous avions déjà affecté 300 membres du personnel provenant d'autres secteurs aux activités de lutte contre le terrorisme, et nous venons d'en transférer plus de 600.
    Voilà qui m'amène à aborder un sujet qui est selon moi particulièrement préoccupant aussi, à savoir les ressources opérationnelles humaines et technologiques de la GRC, du SCRS et d'autres services qui sont nécessaires pour faire ce qu'on vous demande. Adopter une loi sans allouer de ressources ne suffira pas.
    Le Budget principal des dépenses qui a été déposé récemment montre que le budget de la GRC a diminué de 132 millions de dollars en 2014-2015 par rapport à l'exercice précédent. En réponse à la question de M. Garrison, vous avez parlé de l'affectation de ressources aux activités de lutte contre le terrorisme.
    Il va sans dire que la GRC aimerait toujours recevoir plus d'argent, et je suis persuadé que d'autres organismes aussi. Toutefois, y a-t-il une inquiétude grandissante sur le plan opérationnel que les ressources ne soient pas affectées aux forces policières, à la GRC et aux organismes de sécurité à l'échelle fédérale pour accomplir le travail qui vous est demandé?
    Je pense que tout dépend de ce que vous avez dit en dernier lieu sur le travail qu'on nous demande d'accomplir.
    Comme je l'ai dit en réponse à la question de M. Garrison, nous controns la menace terroriste à l'aide des ressources d'autres secteurs. La GRC en est rendue au point où elle peut être très transparente et précise pour en démontrer les conséquences. En ville, la GRC a la mauvaise réputation d'avoir des crédits en excédent et de ne pas dépenser l'ensemble de son budget. Je vous dis solennellement que nous aurons cette année 0,5 % de crédits non utilisés, ce que certains pourraient considérer comme une mauvaise gestion. Quoi qu'il en soit, tout notre argent est dépensé. Je suis ravi, ou plutôt satisfait de réaffecter des ressources dans le but de contrer la plus grande menace. Je ne crois toutefois pas que nous puissions maintenir les programmes des autres secteurs si nous puisons dans ces ressources pour lutter contre le terrorisme.

  (1150)  

    Merci beaucoup, monsieur le commissaire.
    Monsieur Garrison.
    Encore une fois, je suis ravi que vous soyez parmi nous aujourd'hui, monsieur Paulson.
    Je pense que notre devoir de parlementaires est maintenant d'essayer de tirer des leçons de cette tragédie, et de déterminer ce que nous pouvons faire afin d'assurer la sécurité des Canadiens. Si j'ai bien compris, vous avez dit en exposé avoir suffisamment d'information pour accuser M. Zehaf-Bibeau de terrorisme, et que la loi actuelle aurait suffi.
    Je n'ai pas employé ces mots, mais je pense avoir parlé d'accusations, alors de ce point de vue...
    En vertu de la législation actuelle, vous n'auriez eu aucun mal à porter des accusations à la suite de l'événement, n'est-ce pas?
    Non. Compte tenu des preuves que nous avons accumulées à ce jour, je n'aurais aucun mal à accuser l'individu de l'acte terroriste dont j'ai parlé.
    Merci.
    Vous dites qu'il y a encore des enquêtes sur des individus qui pourraient avoir apporté une contribution à la tragédie ou aux actes, et je comprends.
    Avez-vous rencontré des obstacles législatifs ou légaux dans le cadre de votre enquête?
    Vous savez, l'enquête et la présentation de preuves dans un contexte criminel sont très complexes et difficiles, et...
    Non, je n'ai rencontré aucun obstacle législatif.
    Je tourne autour du pot, mais voici ce que je veux dire. Permettez-moi de prendre l'exemple de l'affaire récente à Montréal concernant un engagement à ne pas troubler l'ordre public. Il est bien connu qu'un jeune homme a été traduit devant les tribunaux pour signer un tel engagement. Il s'agit du niveau d'intervention de l'État le plus bas à l'égard de la liberté d'une personne, et la décision doit être fondée sur des éléments tangibles et clairs, comme la crainte qu'un individu commette un acte répréhensible.
    Pour illustrer brièvement mon propos, nous avons exposé notre cause, et le procureur général a donné son accord. Nous avons amené l'individu devant les tribunaux, mais l'affaire a été repoussée d'un mois. Dans ce milieu et dans le cadre que je gère, nous pensions pouvoir atténuer le danger que cet individu pose, selon nous, en lui faisant signer un engagement à ne pas troubler l'ordre public, mais nous n'avons pas obtenu cette signature. Il reste un mois avant qu'il soit décidé si un tel engagement sera signé. Qu'allons-nous faire de cet individu pendant un mois? S'il pose un geste que nous craignons, qui sera responsable? Ce sera moi.
    Ce que je veux dire, c'est que même si la loi actuelle et le projet de loi sont convenables — le projet de loi sera utile —, je pense que notre pays doit bien franchement revoir sa gestion des tribunaux.
    Dans cette affaire, est-ce que les ressources du tribunal entrent en ligne de compte?
    Je l'ignore. Je ne sais pas ce qui pose problème.
    L'individu a été emmené devant les tribunaux par la Couronne, mais l'affaire a été repoussée d'un mois. La décision ne semble pas être raisonnable et correspondre à ce que nous tentons de faire.
    Mais à votre connaissance, le problème n'avait rien à voir avec la capacité d'obtenir un engagement à ne pas troubler l'ordre public. Il est donc attribuable au fonctionnement des tribunaux.
    Je l'ignore.
    Bien.
    Puisqu'il ne me reste qu'une minute, je vais vous poser une question à propos de la demande de passeport de M. Zehaf-Bibeau dont vous avez parlé. Y a-t-il eu des problèmes d'échange d'information à ce sujet de la part de Passeport Canada ou de la GRC?
    Non.
    Je pense que vous avez dit dans certains reportages médiatiques — je suis persuadé que vous devrez peut-être y apporter des correctifs, comme nous le faisons souvent — que M. Zehaf-Bibeau était apparemment venu à Ottawa pour son passeport. Certains ont ensuite repris l'information en disant que la tragédie était son plan B. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet?
    Je doute que nous ayons suffisamment de preuves pour tirer cette conclusion. Je crois encore qu'il est raisonnable d'imaginer qu'au moment où il a eu du mal à obtenir son passeport à Vancouver... je ne suis pas dans sa tête. Des preuves laissent entendre qu'il venait à Ottawa pour obtenir son passeport et qu'il était prêt à faire valoir son point de vue aux autorités concernées.
    Merci beaucoup, monsieur Garrison.
    Madame Ablonczy, allez-y s'il vous plaît.

  (1155)  

    De toute évidence, la diffusion de la vidéo aujourd'hui a ravivé des souvenirs chargés d'émotion, pas uniquement chez ceux d'entre nous qui étaient ici, mais aussi dans l'ensemble de la population, qui est scandalisée par ce qui s'est passé au sein du berceau même de notre Parlement et de notre gouvernement. Je suis fière de dire que la tragédie a renforcé la détermination des Canadiens à repousser et à lutter contre ce genre de terrorisme.
     Vous avez dit que le terroriste était en communication avec des individus à Ottawa et en Colombie-Britannique, et que vous avez pu identifier certains d'entre eux. Le terroriste emploie lui-même le « nous » dans la vidéo lorsqu'il parle de vengeance, et il laisse entendre que le Canada serait en quelque sorte responsable. J'imagine que c'est également le cas de pays comme la France, le Danemark et l'Australie, qui ont aussi été la cible d'attaques terroristes du genre tout récemment. Ma question est la suivante: quelle est la taille du réseau qui était impliqué dans l'attaque du Parlement?
    Eh bien, c'est difficile à évaluer. D'une part, je dirais que l'ensemble du mouvement djihadiste est une sorte d'état d'esprit inspirant qui attire ces individus et contribue à leur développement. Je suis également persuadé que Zehaf-Bibeau n'en est pas venu seul à cet acte. Je pense que le mouvement représente le vaste réseau, si je peux m'exprimer ainsi, et que certains individus au sein du mouvement sont plus étroitement liés et peuvent influencer des personnes comme Zehaf-Bibeau et d'autres.
    Avez-vous pu identifier d'autres individus au coeur de cet acte terroriste et établir un lien catégorique avec la tragédie?
    Eh bien, non, puisque nous n'avons encore porté aucune accusation. L'objectif de l'enquête est de faire exactement ce que vous demandez.
    J'imagine que nous avons hâte de faire toute la lumière sur cette affaire, de savoir exactement qui y a participé et de connaître l'ampleur de la planification.
    Eh bien, j'espère que nous pourrons vous fournir des réponses.
    L'hon. Diane Ablonczy: Je l'espère aussi.
    Comm. Bob Paulson: C'est une dure bataille.
    Je vais laisser la parole à mon collègue, M. Zimmer.
    Je vous remercie encore une fois d'être venu, monsieur le commissaire.
    Je vais revenir sur une chose que vous avez dite. Serait-il juste d'affirmer que la loi n'est utile que si les tribunaux la respectent?
    Oui, évidemment.
    J'ai une autre question. J'imagine que j'emboîte le pas à mes collègues en disant qu'il est intéressant de se trouver dans la salle même où, à quelques pieds seulement, l'individu a fait irruption en faisant feu. Il est intéressant d'être dans cette même salle et d'examiner l'envers de la médaille. Il est également une bonne chose à bien des égards que nous soyons de retour.
    Je voulais faire une déclaration ou poser une question au nom des Canadiens. Le terrorisme représente-t-il un danger immédiat pour la société canadienne? Qu'en pensez-vous? Quel terme emploieriez-vous à cet effet?
    Encore une fois, nous voulons assurer la sécurité de nos citoyens, comme vous venez de le dire. C'est aussi notre souhait, mais nous voulons vivre dans une société libre. J'ai des enfants et, à l'instar de la plupart des parents, je veux qu'ils vivent heureux. Que diriez-vous aujourd'hui aux Canadiens?
    Ce que je dis, c'est que la menace est grandissante. Les gens n'ont pas à avoir peur, mais ils doivent être interpellés et prendre conscience de la réalité. Je pense que ce sont les mots que j'emploierais.
    Il ne faut pas se leurrer: la présence est grandissante non seulement au Canada, mais chez la plupart de nos alliés aussi, et elle atteint un seuil qui est difficile à gérer pour nous tous.
    Merci.
    Notre temps est écoulé.
    Au nom de l'ensemble du comité, je remercie infiniment le commissaire Paulson d'être venu répondre à nos questions aujourd'hui, mais aussi d'avoir présenté la vidéo.
    J'aimerais remercier les membres du comité de leur présence.
    Nous avons également bénéficié d'une grande attention médiatique. Je tiens à remercier les médias d'avoir été aussi courtois et respecteux, et d'avoir essayé de collaborer avec nous alors que nous sommes devant ce que bien des gens considèrent être un des plus grands défis de notre génération. Je vous remercie infiniment.
    La séance est levée.
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