Passer au contenu
Début du contenu

ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 058 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 14 février 2023

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Bienvenue à la 58e réunion du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes.

[Français]

     La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adopté le jeudi 23 juin 2022. Par conséquent, les membres du Comité peuvent y participer en personne ou à distance au moyen de l'application Zoom.
    En cas de difficulté technique, avertissez-moi immédiatement. Veuillez noter qu'il est possible que la réunion doive être suspendue quelque temps afin que l'on s'assure que tous les députés peuvent participer pleinement aux délibérations.

[Traduction]

    Conformément à l'alinéa 108(3)h) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mercredi 30 novembre 2022, nous reprenons l'étude de la troisième édition du Code de déontologie des lobbyistes.

[Français]

    Nous avons un témoin, M. Conacher, qui utilise Zoom aujourd'hui.
    Tous les tests ont-ils été faits par M. Conacher?
    D'accord, merci.

[Traduction]

    Je vous présente les témoins qui comparaîtront aujourd'hui. À titre personnel, nous recevons M. Scott Thurlow, avocat et conseiller en matière de législation. Du Congrès du travail du Canada, nous accueillons Mme Siobhán Vipond, vice-présidente exécutive, de même M. Mike Luff, représentant national au Département de l'action politique. Enfin, M. Duff Conacher témoignera par Zoom au nom de Démocratie en surveillance, dont il est un cofondateur.
    Vous disposez chacun de cinq minutes pour nous présenter votre déclaration liminaire.
    Monsieur Thurlow, vous serez le premier. Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Bonjour. Je m'appelle Scott Thurlow et je suis avocat à Ottawa. Je conseille les personnes inscrites au registre en vertu de la Loi sur le lobbying relativement à leurs obligations. Je suis moi-même inscrit au registre.
    Avant d'entrer dans le vif du sujet, permettez-moi de faire remarquer que cette réunion sur un sujet qui me passionne énormément se tient paradoxalement le jour de la Saint-Valentin. J'en profite aussi pour souhaiter joyeux anniversaire à mon épouse.
    Une voix: Bien joué!
    Des députés: Ha, ha!
    M. W. Scott Thurlow: Merci de me fournir cette excuse.

  (1535)  

    Si vous essayez de faire mal paraître la présidence, monsieur Thurlow, c'est réussi. Merci.
    J'aimerais inviter le Comité à considérer deux éléments importants dans son étude du Code de déontologie que propose la commissaire au lobbying. Premièrement, je vous demande de réfléchir aux incidences du Code proposé sur les droits garantis par la Charte canadienne des droits et libertés et à la manière dont il peut influencer la participation des électeurs au processus démocratique. Deuxièmement, il faut établir si les atteintes potentielles aux droits garantis par la Charte contribueront à l'objectif premier de la législation, soit la création d'un registre des lobbyistes accessible au public et transparent.
    L'interdiction pour quelqu'un qui s'est engagé dans des activités politiques de faire du lobbying auprès d'un titulaire de charge publique représente une atteinte a posteriori aux droits à la liberté de se réunir avec des personnes qui partagent les mêmes idées, de s'exprimer librement, de militer dans le cadre d'une campagne, de partager des idées politiques, ainsi qu'au droit démocratique de participer à des élections ou, comme l'a exprimé la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Figueroa c. Canada, à la capacité de participer « utilement » au processus démocratique.
    Vous êtes des représentants élus et j'aimerais vous rappeler ce que vos bénévoles font pour vous. Ce sont eux qui conduisent les gens aux bureaux de scrutin quand ils ne peuvent pas s'y rendre par eux-mêmes. Ils leur rappellent où et quand aller voter. Ils s'assurent que les électeurs sont inscrits sur les listes et aident ceux qui ne le sont pas à le faire. Ils observent le dépouillement des votes et veillent au respect du choix exprimé démocratiquement par les électeurs. Autrement dit, ils soutiennent, protègent et défendent notre démocratie. Au nom de quelle logique voudrions-nous dissuader même un seul Canadien de faire ce travail? Même si l'interdiction prévue au Code proposé dure seulement une année, il s'agirait d'une atteinte a posteriori à ces droits.
    L'unique directive judiciaire qui a été donnée concernant les activités politiques inacceptables porte sur l'organisation par une personne inscrite d'une activité de financement au profit d'une personne qui est la cible de son lobbying. Le critère de démarcation est clair: des dizaines de milliers de dollars peuvent être en jeu et la réélection d'un candidat peut dépendre des fonds amassés. Nos amis de Démocratie en surveillance ont intenté cette poursuite il y a quelques années. La preuve n'a jamais été faite que les activités politiques ordinaires, peu importe leur proximité avec le candidat, atteignent ce niveau ou même qu'elles s'en approchent.
    Une personne raisonnable, peu importe qu'elle connaisse ou non le processus réglementaire, peut-elle sincèrement penser que faire du porte‑à‑porte pour un candidat politique est si important qu'il risque d'y avoir une tension entre l'obligation du titulaire de charge publique à l'égard d'un bénévole et sa capacité de remplir les devoirs de cette charge? Vous êtes des représentants élus. Je me fie à votre bon jugement quant à ce qui vous influence ou non. Je ne crois pas que beaucoup de personnes raisonnables considèrent que le fait de frapper aux portes crée cette tension.
    Il convient de souligner que le Code proposé exclut les contributions des particuliers ne dépassant pas le plafond imposé par la Loi électorale du Canada. Ce plafond est fixé à 1 650 $ par année, mais un lobbyiste enregistré ne peut pas offrir des boissons de 40 $ deux fois dans la même année. Une de ces deux choses est interdite dans le Code, et c'est celle qui coûte le moins cher.
    Est‑ce parce que le Parlement fixe les limites? Est‑ce parce qu'il existe des limites raisonnables dans une société libre et démocratique? Quand le Parlement envisage ce genre de changements, le débat constitutionnel change de ton. Si le Parlement veut restreindre les activités des électeurs, c'est à eux qu'il devra rendre des comptes.
    En conclusion, j'aimerais que les membres du Comité se demandent sincèrement s'il est judicieux d'interdire à des gens qui ont donné de leur temps pour les faire élire de venir discuter avec eux de politiques publiques. Si je me fonde sur le préambule de la Loi, j'en dégage deux piliers: le système d'enregistrement des lobbyistes rémunérés ne devrait pas nuire à la liberté d'accès au gouvernement, et cette liberté d'accès est une question importante d'intérêt public. Interdire à un électeur de communiquer avec quelqu'un est incompatible avec ces dispositions.
    Je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Thurlow.
    Je souligne, pour la gouverne des témoins, la présence de quelques remplaçants au sein du Comité. M. Dalton remplace M. Gourde, et M. Zuberi ainsi que Mme Vandenbeld se sont aussi joints à nous. Bienvenue au Comité.
    Je cède maintenant la parole à Mme Vipond.
    Vous disposez de cinq minutes pour présenter votre déclaration au Comité.
    Merci. Bonjour, monsieur le président, distingués membres du Comité.
    Je m'appelle Siobhán Vipond, et je suis la vice-présidente exécutive du Congrès du travail du Canada, le CTC. Nous sommes la plus importante centrale syndicale au Canada. Le CTC intervient dans des dossiers d'intérêt national au nom de travailleurs canadiens de partout au pays.
    Nous appuyons les objectifs du Code, qui vise à assurer que les lobbyistes adhèrent à des normes élevées de transparence, de respect des institutions gouvernementales, d'intégrité et d'honnêteté. Nous appuyons également l'objectif de la commissaire de proposer un Code qui est le plus clair possible pour que les lobbyistes comprennent bien leurs obligations, et qui favorise aussi la pratique transparente et éthique du lobbying auprès des titulaires de charge publique. Cependant, nous avons de sérieuses réserves concernant deux règles du Code actualisé qui vont non seulement compromettre ma capacité de m'acquitter de mes fonctions à titre de représentante syndicale élue, mais aussi la vôtre à titre de représentants élus.
    Premièrement, nous avons des réserves au sujet de la règle 6 pour ce qui concerne le travail politique. Cette règle limite les activités de lobbying de nos membres qui ont pris part à des activités politiques dans le cadre d'une campagne électorale. Nous trouvons très inquiétant que le Code actualisé impose une période de restriction de 24 mois à nos membres qui ont accompli un travail stratégique, d'une forte visibilité ou important pour un candidat ou un parti politique au cours d'une campagne. Nos membres sont aussi soumis à une période de restriction de 12 mois si, durant une campagne, ils ont fait du porte‑à‑porte, la collecte de dons, la distribution de matériel de campagne, ou s'ils ont aidé à la coordination logistique du bureau de campagne et d'événements.
    Il est difficile de voir comment on pourrait considérer que ce type d'activités de campagne crée un sentiment d'obligation d'un représentant élu à l'égard d'un lobbyiste. Nous croyons fermement que cette règle enfreint le droit de nos membres de participer au processus démocratique en vertu de la Charte. Plus précisément, la violation du droit à la libre expression garanti à l'alinéa (2)b) de la Charte n'est pas justifiée au sens de l'article premier.
    J'ai été élue pour représenter nos membres, et un aspect essentiel de mon travail consiste à vous rencontrer pour discuter de leurs priorités. Cela dit, j'aime aussi travailler bénévolement pour soutenir la campagne électorale de bons candidats. Cette règle me force à choisir entre les deux, c'est‑à‑dire faire mon travail de représentante des membres de mon syndicat ou faire du bénévolat dans le cadre d'une campagne électorale. C'est complètement déraisonnable et injuste.
    Nous avons aussi de sérieuses réserves concernant la règle 4, qui porte sur les marques d'hospitalité. Le Code actualisé prévoit une limite de 40 $ par fonctionnaire pour l'hospitalité à chaque réunion, journée de lobbying, événement ou réception, jusqu'à concurrence de 80 $ par année. Pour beaucoup de syndicats, d'associations, d'organismes de bienfaisance ou d'une autre nature qui ont de multiples collaborations avec des titulaires de charge publique au cours d'une année, cette règle risque de limiter grandement leur capacité, voire de les empêcher d'organiser des réceptions, des repas, ou même d'offrir du café lors d'une réunion.
    Tout d'abord, nous pensons qu'il n'est pas raisonnable de considérer qu'une marque d'hospitalité normale comme servir du café, du jus, du vin ou du fromage au cours d'un événement en personne puisse créer un sentiment d'obligation de la part d'un titulaire de charge publique. Par conséquent, nous estimons que c'est un seuil injustifié.
    Ensuite, ce seuil va miner le débat démocratique, et il va aussi nuire au travail des titulaires de charge publique comme vous en limitant le nombre d'événements d'un organisme auxquels ils pourront participer. Si un titulaire de charge publique participe à deux événements tenus par notre organisme en janvier et que la limite annuelle de 80 $ est atteinte, il devra attendre l'année suivante pour assister à une autre activité où des marques d'hospitalité sont offertes. Cette règle du Code va beaucoup trop loin. Le seuil de 80 $ qui est imposé pour les marques d'hospitalité va vous empêcher de bien faire votre travail en limitant vos interactions avec les électeurs et les parties prenantes que vous représentez.
    De plus, cette règle est tout à fait inapplicable pour des organismes comme le nôtre. Il serait impossible pour nous de faire le suivi du seuil des marques d'hospitalité pour chaque titulaire de charge publique. Nous en rencontrons des centaines au cours d'une année. C'est parfaitement impensable pour nous de faire le suivi de ce que consomme un titulaire de charge publique à chaque événement et de nous assurer qu'il ne participe à aucune autre activité une fois que la limite de 80 $ sera atteinte.
    C'est aussi ridicule de nous demander de faire appliquer cette règle. Sommes-nous censés aviser la ministre des Finances qu'elle ne pourra pas prendre un café ou un bagel à la prochaine réunion parce qu'elle a atteint la limite pour les marques d'hospitalité?
    La limite de faible valeur pour les marques d'hospitalité est injustifiée, irréaliste et inapplicable. Il faut la supprimer du Code. Les titulaires de charge publique sont déjà tenus de respecter les règles en matière de déclaration de la Loi sur les conflits d'intérêts. Les organismes comme le nôtre devraient pouvoir offrir les marques d'hospitalité que les titulaires d'une charge publique sont en mesure d'accepter.
    En conclusion, nous estimons que les règles 6 et 4 du Code actualisé vont nuire à ma capacité d'accomplir mon travail, et qu'elles vous empêcheront aussi de faire le vôtre efficacement parce qu'elles vont restreindre les échanges que nous pourrons avoir au bénéfice des personnes que nous représentons. Nous vous demandons instamment de tenir compte de ces questions préoccupantes dans l'avis que vous soumettrez à la commissaire au sujet du Code actualisé.
    Encore une fois, merci de nous avoir donné l'occasion de prendre la parole. Je répondrai volontiers à vos questions.

  (1540)  

    Merci, madame Vipond.
    Merci à vous deux d'avoir pris moins de temps que prévu. Nous pourrons vous poser beaucoup plus de questions.
    Monsieur Conacher, vous disposez de cinq minutes, pour nous présenter votre déclaration.
    Je remercie le Comité de m'avoir invité à prendre la parole sur un sujet de la plus haute importance, qui met en jeu certaines des règles parmi les plus essentielles pour protéger notre démocratie et l'intégrité du gouvernement fédéral.
    Je représente une coalition de 27 groupes de citoyens qui ensemble comptent 1,5 million de membres. Tous ces citoyens s'opposent aux parties du Code proposé par la commissaire qui modifient les règles d'une manière qui encouragera des pratiques corrompues d'échanges de faveurs entre les lobbyistes et les politiciens.
    Démocratie en surveillance a déjà soumis trois mémoires au Comité et trois mémoires à la commissaire. Je vais vous transmettre un autre mémoire qui donnera des précisions sur mon allocution.
    En premier lieu, je vous demanderais de réinviter la commissaire avant d'aller plus loin. Un des mémoires soumis par Démocratie en surveillance contient une liste de 10 questions importantes que le Comité doit poser à la commissaire concernant les répercussions de ces règles. Quand elle a comparu le 3 février, seulement une de ces 10 questions lui a été posée. Les véritables enjeux sont balayés sous le tapis.
    Je vais parler brièvement de la règle sur les cadeaux et l'hospitalité parce qu'elle est largement mal comprise, y compris par les témoins aujourd'hui. La commissaire à l'éthique a dit clairement et publiquement que les députés ne peuvent pas accepter des cadeaux ou de marques d'hospitalité pour une valeur annuelle de plus de 30 $ de la part d'une personne qui tente de les influencer, qu'elle soit ou non enregistrée à titre de lobbyiste. C'est la limite qui a été fixée. Peu importe les modifications apportées au code des lobbyistes, la commissaire à l'éthique a fixé la limite à 30 $, c'est tout.
    Au cours des 5 dernières années, la moyenne des dons versés par les Canadiens à un parti politique est de 75 $. Le plafond annuel a été fixé à 80 $ pour une bonne raison. C'est la contribution individuelle que les électeurs canadiens ont les moyens de faire. Là encore, la réforme du Code n'y changera rien. La commissaire à l'éthique continuera de vous dire que vous ne pouvez pas accepter des cadeaux qui valent plus de 30 $.
    Même les petits cadeaux peuvent influencer une personne. Des tests effectués par des psychologues cliniciens auprès de dizaines de milliers de personnes dans le monde ont montré que pour influencer la décision de quelqu'un, il faut lui faire une faveur ou lui donner un cadeau, et que même un petit cadeau aura cet effet. Si vous, à titre de députés, prétendez le contraire, c'est comme si vous nous disiez que vous n'êtes pas des humains. Ces tests ont été effectués dans toutes sortes de cultures à l'échelle de la planète et les résultats sont toujours les mêmes: la meilleure façon d'influencer quelqu'un est de lui donner un cadeau ou de lui faire une faveur. Même un petit cadeau créera le sentiment d'être redevable.
    J'attire maintenant votre attention sur un autre élément beaucoup plus important, soit les périodes de restriction prévues dans la règle 6 et la définition de « tout autre travail politique » dans les annexes du nouveau Code.
    Selon la règle en vigueur, une personne qui accomplit un travail politique important, y compris des activités de financement, doit ensuite s'abstenir pendant quatre ans. La commissaire propose ni plus ni moins de saboter cette règle en permettant aux lobbyistes, pourvu qu'ils ne s'adonnent pas à ce travail tout à fait à temps plein et qu'ils n'aient pas d'interactions fréquentes ou étendues avec un fonctionnaire ou un représentant de parti, de les autoriser à recueillir des fonds illimités pour le compte d'un politicien ou d'un parti auprès de qui il fait du lobbying. C'est un exemple parmi tant d'autres de ce que permettra la définition actuelle de « tout autre travail politique ».
    C'est une énorme faille. En 30 ans, c'est une des pires invitations à la corruption que j'ai vues de la part de quelqu'un qui soi-disant est là pour assurer la bonne gouvernance démocratique. Et croyez-moi, j'ai vu très souvent des chiens de garde laisser des gens s'en tirer à bon compte même s'ils avaient clairement commis un acte répréhensible.
    Cela donnera le champ libre au lobbying contraire à l'éthique et aux échanges de faveurs qui corrompent la politique américaine. Tous nos processus d'élaboration des politiques seront corrompus si on permet aux lobbyistes de recueillir des fonds, de faire campagne pour vous et de vous offrir d'autres faveurs pour vous acheter et influencer vos processus décisionnels et d'élaboration de politiques. C'est un recul de 25 ans, qui nous ramène en 1997, avant l'existence d'un code. C'est tout à fait contraire à toutes les normes de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, et à toutes les autres normes internationales.
    La commissaire a fait une déclaration très douteuse comme quoi l'interdiction actuelle de faire du lobbying pendant quatre ans après des activités politiques viole le droit à la liberté d'expression garanti par la Charte. Elle se fonde sur l'avis d'un seul cabinet d'avocats, Goldblatt Partners, à qui elle a octroyé un contrat à fournisseur unique de dizaines de milliers de dollars, selon ce que nous en savons, ce qui en soi est assez douteux.
    La Cour suprême du Canada et d'autres tribunaux canadiens ont tranché sans équivoque et à maintes reprises que les droits garantis par la Charte peuvent intégralement et légitimement être restreints pour protéger l'intégrité du gouvernement. Par conséquent, la période de restriction actuelle de quatre ans est tout à fait compatible avec la Charte.
    Le Comité doit intimer à la commissaire de communiquer l'avis émanant de Goldblatt Partners. Il est impensable d'aller de l'avant dans ce processus sur la foi de l'avis secret d'un cabinet d'avocats.
    Le Code que propose la commissaire pose un autre problème de taille en omettant de préciser les règles dans le cas d'un lobbyiste qui travaille au siège de campagne d'un parti politique, ou qui fait campagne ou recueille des fonds pour le compte d'un parti politique entre deux campagnes électorales. Le nouveau Code ne précise pas auprès de qui il lui serait interdit de faire du lobbying. L'interdiction touchera‑t‑elle uniquement le chef d'un parti politique, ou l'ensemble des membres?
    Le troisième problème vient de ce qu'en sabotant les règles du Code d'une manière qui donnera toute latitude aux lobbyistes pour faire des faveurs aux ministres, aux députés et aux sénateurs, la commissaire risque aussi de saboter les règles de déontologie auxquelles ils sont tenus.

  (1545)  

    Comment? Toutes ces règles de déontologie sont chapeautées par la règle générale qui interdit de favoriser indûment les intérêts d'une autre personne ou d'une entité. Il serait bien entendu inapproprié de la part d'un ministre, d'un député ou d'un sénateur de favoriser indûment les intérêts d'un lobbyiste qui a recueilli des fonds pour son compte ou qui lui a accordé un autre type de faveur, mais si le Code modifié considère que c'est approprié, ce ne sera plus considéré comme inapproprié de la part d'un ministre ou d'un député d'agir de la sorte.
    Monsieur Conacher, vos cinq minutes sont écoulées. Je vous ai accordé un peu plus de temps, mais je vous prierais de conclure rapidement.
    J'aurais une dernière chose à ajouter.
    Si vous ne rejetez pas les nouvelles règles contraires à l'éthique que propose la commissaire, ou si vous gardez le silence, vous allez tout simplement permettre que le processus décisionnel soit corrompu.
    En ce jour de la Saint-Valentin, je vais conclure en vous demandant de donner la preuve de votre détermination et de votre engagement à assurer la prise de décisions politiques conformes à l'éthique en rejetant la proposition de la commissaire, qui ouvre la voie aux tractations avec des lobbyistes afin de protéger les intérêts privés des plus nantis. Ce genre de tractations permettraient à des lobbyistes influents d'acheter vos faveurs en menant pour vous des collectes de fonds, des activités de campagne et en vous offrant d'autres faveurs. Ces tractations vont corrompre votre…

  (1550)  

    Merci, monsieur Conacher.
    Nous allons entamer la première série de questions. Vous pourrez peut-être avoir la chance de poursuivre, monsieur Conacher.
    Monsieur Barrett, vous disposez de six minutes pour poser vos questions.
    Merci aux témoins de comparaître aujourd'hui.
    Monsieur le président, pour commencer, j'aimerais parler de nouvelles publiées aujourd'hui par le Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique. Le commissaire a annoncé sa démission.
    Je serai heureux de consacrer une partie de mon temps pour en parler, monsieur le président.
    Allez‑y.
    Je vais prendre quelques instants pour commenter les circonstances qui ont mené le commissaire à se retirer avant la fin de son mandat. Il souffre de problèmes de santé persistants. Je sais que les dernières années ont été éprouvantes pour tout le monde. C'est une période qui a été difficile. Les horaires de travail changeants… Il dirige un Commissariat qui compte beaucoup d'employés et il a dû s'adapter à tous ces changements. Je souligne également que les députés et les titulaires de charge publique désignés l'ont tenu passablement occupé ces dernières années.
    Je voudrais citer rapidement un extrait de l'annonce du commissaire:
Je crois fermement que le fait de sensibiliser les administrées, les administrés et le public à l'importance d'éviter les conflits d'intérêts peut contribuer à faire renaître la confiance de la population canadienne envers les agentes et agents publics et les institutions qu'ils représentent, et, au bout du compte, envers notre démocratie.
    Je tiens à souligner le travail accompli par le commissaire au cours de son mandat. Je sais que mes collègues du Comité se joignent à moi pour lui souhaiter nos vœux de bonne santé et la meilleure des chances dans ses projets.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais maintenant poser mes questions, en commençant avec M. Conacher.
    Je voudrais revenir au passage de l'annonce du commissaire sortant que je viens de citer. Il parle de la confiance des Canadiens à l'égard des institutions publiques.
    D'après vous, de quelle manière les modifications proposées influeront-elles sur la confiance des Canadiens à l'égard des institutions publiques?
    Il serait difficile de faire pire. Selon plusieurs sondages effectués depuis quelques années, seulement de 10 à 20 % des Canadiens font confiance aux politiciens. Ils pensent que vous voulez protéger les élites et que leurs préoccupations ne vous intéressent pas.
    Ce qui est proposé, essentiellement, c'est de légaliser la corruption, de permettre aux lobbyistes de vous acheter lors des élections en vous accordant des faveurs, de faire campagne à des niveaux très élevés presque à temps plein, de recueillir des fonds illimités pour vous et votre parti puis, immédiatement après, de faire du lobbying pour vous influencer. Il n'y aura pas de période de restriction d'une année ou deux.
    C'est une lacune énorme dans la version préliminaire du Code. Si les activités ne sont pas menées à temps plein ou presque à temps plein, et s'il n'y a pas d'interactions fréquentes et étendues avec un candidat ou un élu, le lobbyiste pourra reprendre son travail dès le lendemain. Entre deux campagnes électorales, il peut amasser des dizaines de milliers de dollars pour le compte d'un ministre ou de son parti et continuer son lobbying auprès de lui. Il n'y a aucune interruption.
    C'est le meilleur moyen d'importer ici les pratiques corrompues qui gangrènent la politique américaine. C'est la mesure la plus propice à la corruption qu'une soi-disant gardienne de la bonne gouvernance ait proposée en 30 ans. La corruption gagnera tous les processus d'élaboration des politiques qui ont des conséquences pour 35 millions de Canadiens. Les Canadiens auront une très bonne raison de prendre le Parlement d'assaut. C'est systémique…
    J'invoque le Règlement.
    Nous avons un rappel au Règlement.
    J'invite M. Conacher à choisir judicieusement ses mots et à bien peser ses propos. Personnellement, à titre de président, je considère que l'expression « prendre le Parlement d'assaut » est très déplacée. Je comprends l'analogie, mais je vous demanderais de choisir judicieusement vos mots, monsieur Conacher.
    Monsieur Green, est‑ce que cela vous convient?
    Tout à fait, monsieur le président. Merci.
    Monsieur Barrett, je vous redonne la parole. J'ai stoppé le chronomètre.
    Je vais poursuivre avec mes questions, monsieur le président. Merci beaucoup.
    Je m'adresse maintenant aux témoins dans la salle. Quand vous faites campagne pour quelqu'un à qui vous avez accès ensuite en tant que lobbyiste, ou dans un rôle de lobbying, quelles sont les incidences?
    Selon vous, où se trouve l'équilibre entre la nécessité d'éviter la perception qu'un accès indu ou injuste a été accordé et la contribution à la campagne d'un bon candidat si cette personne a par la suite accès au candidat élu et devient dans certains cas un conseiller privé?
    J'aimerais vous entendre en premier, monsieur Thurlow.

  (1555)  

    En fait, ce sont deux questions. Premièrement, il faut se demander si cela se passe dans la réalité. À part quelques anecdotes par‑ci par‑là… Jamais personne ne m'a dit que quelque chose contraire à l'éthique se produisait, que le nom du responsable était X ou Y, et que le défi…
    La deuxième question concerne la différence entre l'hameçon et le chalut, pour ainsi dire. Si nous parlons du directeur de campagne, c'est un rôle influent, tout à fait, mais le Code proposé s'applique à tout le monde, comme un chalutier. Il faut être précis…
    C'est intéressant. L'édition précédente du Code de déontologie, celle qui est en vigueur, vise plus précisément ces rôles importants et centraux. Ce qui est en jeu n'est pas vraiment l'accès au candidat, mais plutôt qui fait ce travail d'une manière qui profitera vraiment au candidat et qui va au‑delà de la simple participation publique.
    J'arrive au bout de mon temps, mais je souligne que ce que vous venez de dire montre bien l'importance d'être le plus clair possible. Une des choses que j'ai entendues de la part des lobbyistes enregistrés est qu'ils aimeraient avoir des règles claires sur ce qui leur est permis en période électorale et sur leur rôle.
    Êtes-vous d'accord que l'efficacité passe obligatoirement par une clarté absolue?
    Absolument. Le Code proposé donne une liste d'activités similaires ou de choses qui devraient être envisagées d'une certaine façon. La précision est à la base des lois, et non les généralités. Le conseil que je vous donnerais… Les listes trop longues et trop vagues génèrent de la confusion.
    Monsieur Thurlow, monsieur Barrett, merci.
    Madame Hepfner, vous êtes la suivante. Vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président. Merci également à nos témoins de prendre part à nos discussions sur le Code.
    Par votre intermédiaire, monsieur le président, j'aimerais adresser ma première question à M. Thurlow.
    Si j'ai bien compris, vous craignez que le nouveau Code va restreindre considérablement l'accès au processus démocratique. Nous voulons que les gens participent à ce processus. Les bénévoles ne nous aident pas seulement à nous faire élire. Le bénévolat existe pour que les gens puissent s'engager, faire partie intégrante du système. Il faut encourager le bénévolat.
    Si je vous entends bien, vous pensez que le Code va imposer des limites aux gens, qu'il va les empêcher de participer au processus. Est‑ce que je me trompe?
    J'aborderais la question sous un autre angle. Des lobbyistes enregistrés actuellement ont déclaré sans équivoque qu'ils ne participeraient plus au processus démocratique sous le régime du Code proposé. Ce serait dommage.
    Tout le monde pourra participer au processus démocratique. Je vais pouvoir faire du bénévolat dans l'équipe d'un candidat local si je veux, mais ma capacité d'interagir à titre professionnel avec le gouvernement lui-même, pas seulement avec cette personne, sera limitée.
    On pourrait faire valoir que cette limitation est une atteinte à la liberté de travailler au Canada qui est prévue à l'article 6. Je n'ai jamais entendu personne invoquer cet argument, mais nous avons des tribunaux et j'aimerais avoir leurs points de vue.
    Pouvez-vous nous parler du moment où le Code a été créé? Quelle était l'intention du Parlement quand il a créé le Code de déontologie des lobbyistes?
    C'est une excellente question.
    Si vous vous reportez aux dispositions habilitantes de la Loi, elles visent à assurer des pratiques de lobbying éthiques et transparentes, qui se déroulent dans un cadre qui permet de rendre des comptes publiquement. Certains aspects du code proposé sont très sensés. Je pense entre autres à l'obligation de confidentialité à l'égard de leurs clients, à l'honnêteté et à l'utilisation des renseignements reçus dans les discussions sur la réglementation.
    Il s'agit d'un code de déontologie fondé sur des principes qui s'appliquent aux activités visées par la Loi sur le lobbying. Je dirais que le rôle de la commissaire englobe ce qui se passe au moment de l'enregistrement et après. Il n'a rien à voir avec ce qui se produit avant l'enregistrement.

  (1600)  

    C'est intéressant.
    Je crois qu'à peu près 6 500 lobbyistes sont inscrits au Registre, y compris des organismes. Beaucoup de monde serait visé. On ne parle pas d'une poignée de personnes.
    C'est un grand nombre de personnes, en effet. Je n'ose même pas imaginer combien de membres compte votre organisme. Ce n'est pas seulement un droit garanti à une personne par la Charte qui est en jeu, mais l'atteinte potentielle aux droits de plusieurs milliers de personnes. De toute façon, même si une seule personne était touchée, selon la manière dont la Charte s'applique… Il s'agit d'une charte des droits et des libertés individuelles.
    Je me tourne vers vous, madame Vipond. Devant le Comité, la commissaire a soutenu que les nouvelles règles seront plus équitables pour les lobbyistes. Selon elle, l'accès sera le même, peu importe qu'une personne ait un compte bancaire bien garni ou non.
    Que pensez-vous de cet argument?
    Je vais mettre mon chapeau de militante syndicale. Quand je m'adresse à des dirigeants ou à des représentants élus comme vous, ce n'est jamais dans l'idée de vous acheter. Avec mes collègues, nous présentons ce que nos membres souhaiteraient voir dans la législation, avec des faits à l'appui, et nous comptons sur vous pour prendre en considération les demandes de vos électeurs et faire en sorte que la législation reflète au mieux leur volonté.
    Quand on nous prête l'intention de vouloir vous acheter, on déforme le problème. La transparence et l'honnêteté sont primordiales, mais limiter notre capacité de représenter nos membres et notre droit de participer activement à notre démocratie en distribuant des brochures, en faisant du porte-à-porte ou que sais‑je, ce que selon moi nous devrions encourager… Tout cela va limiter notre capacité de représenter nos membres et de nous présenter aux élections dans nos syndicats, et surtout ceux de la fonction publique fédérale.
    C'est ce qui nous fait dire que c'est exagéré. Il y aura trop de contraintes et nos droits de travailler et de représenter les membres de nos syndicats seront vraiment menacés.
    Les députés gagnent près de 190 000 $, et encore plus s'ils ont d'autres charges au sein du Parlement. Pensez-vous que le grand public croit vraiment que nous pouvons être influencés si on nous offre quelque chose d'une valeur annuelle de 40 ou de 80 $ pendant les réceptions où nous rencontrons des lobbyistes?
    Je dirais que c'est un de ces cas où on se dit qu'il y a sûrement autre chose derrière ce qui est écrit. Si vous avez déjà organisé un événement dans un hôtel ou ailleurs, vous savez que 40 $ pour le café du petit-déjeuner… Je ne crois pas que c'était l'intention, et c'est pourquoi nous voulons attirer l'attention sur ce point. C'est tout à fait ridicule. L'autre chose, c'est que le texte tel qu'il est rédigé nous donne la responsabilité de surveiller ce que vous faites. Ce n'est pas à nous de faire ce travail. Vous avez vos propres règles et vous devez les respecter. Ce sont ces règles qui vous obligent à bien faire votre travail de titulaires d'une charge publique.
    Nous demander de vous surveiller si vous participez à une réception avec nos membres sous prétexte qu'il y a un risque… Si c'était vrai, nous aurions certainement réussi à faire adopter toutes les lois du travail auxquelles nous rêvons pour le Canada.
    Très juste.
    Il me reste très peu de temps. Merci beaucoup.
    Merci, madame Hepfner.

[Français]

     Notre prochain intervenant est M. Villemure.
    Monsieur Villemure, vous disposez de six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Conacher, mes commentaires vont d'abord s'adresser à vous.
    Avant de faire de la politique, j'ai travaillé 25 ans comme éthicien auprès de gouvernements. En plus de proposer de prendre d'assaut le Parlement, vous avez eu des paroles quand même très dures.
    Premièrement, croyez-vous que tout don, toute contribution ou toute association implique nécessairement qu'on soit redevable?
    Deuxièmement, croyez-vous que le fait d'être redevable est négatif?

[Traduction]

    Tous les dons impliquent qu'une personne est redevable… Je suis désolé, mais j'écoute la traduction et je n'ai pas très bien compris.
    Me demandez-vous si les dons impliquent d'être redevable ou si les dons impliquent qu'il y a une influence indue?

[Français]

    Monsieur Villemure, j'arrête votre temps de parole si vous voulez poser une autre fois votre question.
    Est-ce que toute implication, toute association ou tout don, fait de quelque manière que ce soit, signifie nécessairement que vous êtes redevable?

[Traduction]

    Oui, si on en croit tous les tests menés par des psychologues cliniciens auprès de dizaines de milliers de personnes de diverses cultures à l'échelle mondiale. Traitez votre prochain comme vous voulez être traité vous-même. C'est la règle d'or. Les petits cadeaux ont de l'influence. Le test a été fait auprès de dizaines de milliers de personnes.
    Par conséquent, que faut‑il faire pour que le système soit égalitaire au sens où l'entend la Cour suprême du Canada? Un des grands principes consiste à offrir des chances réellement égales de participer à tous les processus politiques et de les influencer. Il faut plafonner le don que peut faire une personne qui peut verser plus qu'une personne moyenne. Le don moyen aux partis politiques au cours des 5 dernières années a été de 75 $. Les Canadiens ont déclaré que c'est le meilleur indicateur de ce que les gens peuvent se permettre.

  (1605)  

[Français]

    Dans une question...

[Traduction]

    Si on permet des dons plus élevés, les mieux nantis pourront verser plus que le citoyen moyen.
    Monsieur Conacher, je sais que ce n'est pas toujours facile dans Zoom, mais M. Villemure aimerait reposer une question.
    Monsieur Villemure, vous avez la parole.

[Français]

    Il semble y avoir beaucoup de préjugés qui impliquent que vous n'êtes pas très en faveur du lobbying. Vous pouvez répondre par un oui ou un non.

[Traduction]

    Nous sommes en faveur du lobbying éthique. Les 27 groupes de citoyens qui ont demandé des modifications ont proposé une solution de rechange raisonnable. Ils ont proposé que la participation significative à des activités politiques ou de financement soit suivie d'une longue période de restriction. Cela dit, la participation limitée à des activités de porte-à-porte et de bénévolat ne devrait pas donner lieu à une période de restriction.
    C'est une solution de rechange raisonnable qui préservera l'intégrité du gouvernement, qui empêchera les activités de lobbying contraires à l'éthique et qui créera un système égalitaire. Ce système reposera sur le principe d'un électeur, un vote, qui est fondamental en démocratie et qui empêche tout particulier, lobbyiste ou groupe de lobbyistes d'avoir plus d'influence qu'un électeur moyen.
    Tout autre système serait contraire à l'éthique et au principe fondamental d'un électeur, un vote parce qu'il permettrait aux mieux nantis de faire primer leurs intérêts et d'exercer une plus grande influence parce qu'ils peuvent donner davantage et parce qu'ils sont ici, à Ottawa, et vous offrent des repas bien arrosés et d'autres faveurs.
    Allez‑y, monsieur Villemure.

[Français]

    Monsieur Conacher, je crois que nous avons des versions différentes de la description d'une activité éthique. Je vous remercie néanmoins.
    Madame Vipond, M. Conacher nous parle de quatre ans. Vous nous parlez de 12 mois. Convainquez-moi.

[Traduction]

    Nous examinons la proposition et nous considérons qu'une période de deux années pour les échelons supérieurs serait raisonnable puisque nous passerions de quatre à deux ans. Nous pensons toutefois qu'il est exagéré d'inclure tous les autres postes.
    La démocratie exige un engagement. C'est plus que d'aller voter le jour du scrutin. Elle exige de discuter avec les élus. L'aspect le plus intéressant du porte-à-porte est la possibilité de discuter avec des gens qui ne pensent pas comme nous. Il est possible de discuter des problèmes, et des gens qui appuient de bons candidats… C'est ce qu'ils devraient faire.
    Les limites qui empêchent des gens de faire du lobbying parce qu'ils participent au processus démocratique nous apparaissent comme une très mauvaise idée.
    Il est proposé d'imposer une période de deux années pour les niveaux supérieurs… Nous sommes d'accord si les niveaux inférieurs sont exclus de l'interdiction en matière de lobbying. C'est ce que dit essentiellement la Loi sur le lobbying. C'est essentiel pour nous permettre d'essayer de convaincre les élus de faire les changements importants demandés par les travailleurs.

[Français]

    Quels seraient les dangers de mettre votre position en application?

[Traduction]

    Comme des règles sont en place, je ne crois pas qu'il y aurait un danger.
    Nous comprenons les enjeux, et nous sommes d'accord pour qu'il y ait un examen de la mesure afin d'assurer qu'elle s'applique aux personnes concernées. Nous pensons que les deux règles dont nous avons parlé ratissent trop large et qu'elles vont nuire à notre travail. Je pense particulièrement aux leaders du mouvement syndical qui ont été élus pour représenter leurs membres.
    C'est pour cette raison que nous espérons que dans les avis qui seront donnés, il sera question de ces deux règles qui n'apporteront rien de positif, bien au contraire. En fait, elles risquent plutôt de soulever des questions constitutionnelles.

[Français]

    D'accord.
    Sur les règles 4 et 6, vous vous êtes exprimée amplement.
    Y a-t-il d'autres parties qui posent problème? Si oui, quelles seraient vos suggestions?

[Traduction]

    Pour l'instant, rien d'autre ne nous pose problème. Nous sommes ici seulement pour demander que les règles 4 et 6 soient révisées. À notre avis, un contrôle pour assurer que les règles sont appliquées de manière éthique… Cela nous conviendrait.

[Français]

    Vous savez sûrement qu'on peut se conformer à une règle tout en étant non éthique.

[Traduction]

    Oui, je le sais, mais je fais confiance aux gens. Je pense qu'ils participent au processus pour les bonnes raisons.
    Il faut des règles. On ne peut pas tout permettre, mais il ne faut pas non plus restreindre les droits constitutionnels.

[Français]

    Merci beaucoup.

  (1610)  

[Traduction]

    Merci, monsieur Villemure.
    Monsieur Green, vous avez six minutes.
    Merci.
     Bienvenue à tous nos invités. C'est formidable de voir ces visages familiers et nos amis du Congrès du travail ici. Je vous remercie de vous joindre à nous aujourd'hui.
     Je dois vous avouer que je suis un peu partagé sur cette question particulière. Je vais déclarer mon parti pris en disant que je ne considère pas le Congrès du travail comme un lobbyiste dans le même sens du terme que le secteur privé, les scénarios de type à but lucratif et donnant-donnant. Je ne considère pas que les travailleurs et les citoyens qui nous élisent pour que nous nous battions pour eux sont les mêmes que les lobbyistes professionnels dont le seul objectif est d'avoir des clients et d'amasser de l'argent.
    Ma première question s'adresse à Mme Vipond. Considérez-vous que tous les genres de lobbying sont les mêmes ou, faudrait‑il envisager un moyen — ou peut-être une précision, comme l'a suggéré notre ami M. Thurlow — qui permettrait de faire la distinction entre les différents genres de lobbying?
    Oui, je suis d'accord avec vous pour dire que les lobbyistes ne sont pas tous les mêmes. Je suis ici parce qu'il y a environ trois millions de travailleurs qui soutiennent le CTC, mais la réalité est que le registre des lobbyistes m'attribue le qualificatif de lobbyiste. Cela signifie que je suis couverte par ces règles, mais cela ne nie pas mes droits et le rôle que je joue dans le mouvement syndical.
    À l'heure actuelle, ces règles s'appliquent à nous. Si telle n'était pas l'intention, quelqu'un doit retourner en arrière et les changer.
    La réalité est que ces règles sont explicites. Nous les connaissons parce que nous les suivons. J'espère que notre témoignage montre sans équivoque que nous serons emportés par elles. Si ce n'était pas voulu, je pense que c'est quelque chose que vous devez prendre en compte.
     De notre point de vue, bien sûr, tous les lobbyistes ne sont pas les mêmes, mais les règles sont établies et nous devons les suivre.
    J'ai deux ou trois choses à dire à propos des remarques de M. Conacher sur le financement à l'américaine. Je déteste cette notion de Citizens United et cette notion de liberté qui ferait d'une société une personne et lui permettrait d'agir et de fouler aux pieds, par son accès au capital, les systèmes démocratiques. Je considère que c'est un avertissement important.
    En étudiant la question, avez-vous réfléchi à la façon dont une subvention plus importante par vote pourrait permettre d'uniformiser les règles du jeu comme le souhaitent certains des détracteurs de ce texte législatif? Y avez-vous pensé?
    Je ne pense pas que ce soit exactement la façon dont vous le dites.
     Nous l'avons examiné pour voir ce qu'il allait signifier pour notre organisation, et je pense que vous connaissez bien le type de travail que nous faisons.
     Le terme « lobbyiste » peut être utilisé comme un gros mot, pour être tout à fait honnête. Il peut être utilisé pour rejeter vos idées, mais ce n'est pas pour cela que nous sommes ici. Nous ne pensons pas que tout ce que dit la règle 4 ou la règle 6 améliorera ce qui doit être amélioré en matière de transparence et d'efficacité. C'est pourquoi nous pensons vraiment qu'il faut y prêter attention.
     Monsieur Conacher, vous avez entendu ma question sur les subventions par vote.
     J'aimerais vivement que l'argent soit retiré de la politique. Je ne crois pas que tous les lobbyistes soient égaux. Je suis d'avis qu'il existe un secteur du lobbying — une industrie du lobbying. Il suffit de regarder les questions cruciales concernant l'assurance-médicaments, les subventions au pétrole et au gaz, ou toute une série de questions. Les gens qui se présentent sont ceux qui ont les poches les plus profondes. Ils se présentent le plus souvent.
     À votre avis, le retour à une saine subvention par vote dans le cadre du financement public au sein de nos systèmes électoraux aidera‑t‑il à éviter certaines des critiques que vous avez soulevées ici aujourd'hui en ce qui concerne les scénarios à l'américaine, à la Citizens United?
    Non.
     Je veux dire que cela contribuerait à rendre notre système de financement politique plus démocratique, mais notre système de lobbying serait toujours contraire à l'éthique si ces règles sont appliquées telles qu'elles sont formulées à l'heure actuelle.
     Je ne suis pas sûr des commentaires du Congrès aujourd'hui, parce qu'ils...
    Monsieur Conacher, je reprends mon temps de parole, monsieur. Je vous remercie beaucoup.
     Je vais cependant vous dire, pour votre gouverne, que j'aimerais beaucoup obtenir la divulgation de Goldblatt. Je sais qu'il y a pour le Comité un équilibre à trouver entre la protection de ce qui devrait être un agent indépendant du Parlement et nos privilèges parlementaires qui nous permettent de demander des documents.
    Dans l'intérêt de ce comité — je le dis tout de suite, monsieur Conacher, pour que vous sachiez que je l'approuve — j'encouragerais l'agent à réfléchir à la question pour que nous puissions examiner ce document afin de mieux comprendre ce sur quoi il fonde sa revendication au titre de la Charte. J'examinerai cette question ultérieurement.
    Pour terminer ma dernière série de questions, je vais revenir au Congrès du travail.
    Dans son témoignage devant le Comité, la commissaire au lobbying a déclaré qu'elle ne savait pas quelle serait la solution idéale en ce qui concerne les règles relatives à l'hospitalité, mais qu'elle serait heureuse d'entendre les solutions que le Comité pourrait proposer.
     Quelles solutions proposez-vous?

  (1615)  

    La solution que nous vous présentons est la règle existante. C'est que vous devez vous surveiller vous-même et vous savez quelle est la limite. Nous n'essayons pas de savoir ce que vous consommez lors de différents événements. Nous n'essayons pas de savoir si vous pouvez venir ou non.
     Ce ne sont pas des événements extravagants, mais ils ont un coût, donc nous pensons que la responsabilité devrait vous incomber. C'est ce que nous proposons.
    Merci.
    Merci, monsieur Green.
     Je m'excuse; je voulais éclaircir quelque chose avec la greffière.
     Nous allons passer à notre deuxième série de questions, en commençant par M. Kurek.
     Vous avez cinq minutes, monsieur.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
     Merci aux témoins de participer à ce qui est une discussion importante. Je pense que tout le monde s'entend pour dire qu'en ce qui concerne tout lobbying, nous avons besoin d'un système qui est responsable et transparent pour qu'en fin de compte les Canadiens puissent avoir confiance dans le processus. Comme on l'a dit, il y a eu une érosion de la confiance envers le processus, et on pourrait certainement se lancer dans de longs débats politiques à ce sujet.
     J'aimerais parler en particulier du Code de déontologie des lobbyistes, alors je vais faire le tour de la salle et poser des questions sur le processus de consultation. La commissaire a beaucoup parlé de ce processus de consultation. Je demande à chaque personne si elle peut, en 15 secondes, nous parler de son expérience des consultations de la commissaire.
     Je vais commencer par le Congrès du travail du Canada.
    Tout d'abord, je dirais que les consultations ont été appropriées, à notre avis. Je pense qu'il y a eu trois séries de consultations au total. Il n'y a eu aucun obstacle à la présentation de mémoires ou d'exposés.
     La seule chose qui était frustrante, c'est que lorsque le Code a été mis à jour, il n'y avait aucune raison ou justification pour cette mise à jour. Nous ne connaissions pas sa justification pour un grand nombre de ces changements avant sa comparution devant vous la semaine dernière.
    Je vous remercie.
     Monsieur Thurlow, voulez-vous faire un commentaire?
    Bien sûr. C'était certainement une consultation solide, de la même façon que ma fille de 10 ans essaie de me consulter lorsqu'elle veut rester debout un peu plus tard. Nous n'avons pas obtenu ce que nous voulions, mais cela ne veut pas dire que la consultation n'était pas solide.
     Des voix: Oh, oh!
     M. W. Scott Thurlow: Cela dit, je pense que la condition préalable qui sous-tendait la consultation, à savoir que les règles sur les contributions politiques à ces candidats prêtaient à confusion, a été en quelque sorte bouleversée, pour utiliser le mot juste, parce que c'est plus compliqué maintenant qu'au début.
    Monsieur Conacher, vous avez 15 à 20 secondes.
    La commissaire a dit, lorsqu'elle a témoigné devant vous, qu'elle a écouté tout le monde et qu'elle a soigneusement élaboré ces règles en tenant compte de ce qu'elle a entendu. Elle ne nous a pas écoutés, ni la quinzaine d'autres groupes qui lui ont envoyé des lettres en juin dernier pour lui demander de prolonger la période de réflexion pour les activités politiques importantes. Elle l'a ramenée à zéro. Ce n'est pas un équilibre que de passer de quatre à zéro.
     Cela permettra à tout le monde — les lobbyistes — de faire à peu près tout ce qu'ils veulent, sauf travailler à plein temps dans les salles de crise des campagnes électorales, faire du lobbying en même temps et recueillir un montant illimité d'argent pour eux pendant qu'ils font du lobbying.
     Non, elle ne nous a pas du tout écoutés, même si elle a pris beaucoup de temps.
    D'accord. Je vous remercie pour cela.
     Je vais refaire le tour de la salle. Je veux demander aux témoins s'ils peuvent citer des exemples où l'on peut dire: « C'est là le problème », et des exemples précis, si possible, pour dire: « Voici un exemple de lobbying illégal et voici la solution. »
     Je dispose d'environ trois minutes et demie, alors limitez-les à...
    Pardon?
    Je suis désolé. C'est une minute et demie, alors limitez-vous à 30 secondes, s'il vous plaît, si vous le pouvez.
    Je suis attentif, monsieur Kurek.
    Je vais commencer par le Congrès du travail du Canada: exemples et solutions en 30 secondes.
    Absolument. Je pense que c'est comme mon collègue M. Luff l'a dit. Nous ignorons ce qui motivait ces changements, et je n'ai pas d'exemples de cas où un tel lobbying illégal a eu lieu.

  (1620)  

    Ensuite, c'est M. Thurlow.
    Nous avons un registre public dans lequel toutes les communications sont déclarées. Quiconque sait utiliser Google peut faire un rapprochement entre ces communications avec les dons politiques. Ces dons politiques peuvent vous dire quel accès s'est produit.
     Les contributions des entreprises sont illégales au Canada depuis les années Chrétien, alors je ne sais pas vraiment quelles sont les contributions secrètes des entreprises. De telles contributions sont illégales.
    Monsieur Conacher, pouvez-vous nous donner des exemples de lobbying illégal?
    Eh bien, la commissaire a transmis 11 cas à la GRC. Selon elle, la GRC a procédé à une inculpation récemment, le 3 février. Il y a cinq autres cas que la GRC lui a renvoyés. Il y en a cinq autres, je suppose, sur lesquels la GRC enquête toujours.
     Je ne suis pas sûr de ce dont parle M. Thurlow. Il y a d'énormes échappatoires dans la Loi sur le lobbying. On peut faire du lobbying en secret très facilement si l'on veut. Il suffit de concevoir le contrat d'une certaine manière ou de consacrer moins de 20 % de son temps au lobbying.
     En ce qui concerne le cas auquel M. Thurlow a fait référence tout à l'heure — que nous avons gagné en 2009 — d'un lobbyiste qui a recueilli 70 000 $ pour un ministre au moyen de lobbying, c'était illégal au titre de l'ancien Code. Le nouveau Code rendrait ça légal. C'est de la corruption légalisée. Ce sont des pots-de-vin légalisés. C'est ce qu'il faut changer en modifiant la règle 6 et la définition d'« autre travail politique ».
    D'accord. Merci, monsieur Kurek.
     Merci, monsieur Conacher.
     Nous passons maintenant à M. Bains.
     Vous disposez de cinq minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins de se joindre à nous aujourd'hui.
     Ma première question s'adresse à M. Thurlow.
     Dans votre correspondance au Comité, vous avez indiqué que « la majorité des éléments de la consultation sur le Code de déontologie ne relèvent pas de l'autorité législative du commissaire en vertu de l'article 10.2 de la Loi sur le lobbying ».
     Pouvez-vous expliquer en détail ce que vous entendez par cette déclaration?
    Je suis heureux de le faire. Merci beaucoup pour la question.
     L'article 10.2(1) de la Loi sur le lobbying dit expressément: « Le commissaire élabore un code de déontologie des lobbyistes portant sur toutes les activités visées aux paragraphes 5(1) et 7(1). » Dès lors que vous recevez un paiement pour tenter d'influencer la politique publique, c'est à cela que s'applique le Code de déontologie. Il ne s'applique pas aux choses qui se sont produites auparavant.
     Or, ni le paragraphe 5(1) ni le paragraphe 7(1) ne mentionnent les activités politiques des lobbyistes. Le langage clair de la loi limite l'autorité à l'acte d'enregistrement et aux communications qui donnent lieu à ces enregistrements, et non à toute activité qui se produit avant que ces communications soient envisagées.
     Bien.
     Quelle est la conséquence d'une période de restriction de 10 ans pour le personnel exonéré?
    Une période de 10 ans? Wow, c'est deux élections. Non....
    Une voix: Je ne crois pas.
     M. W. Scott Thurlow: Très bien.
     Encore une fois, il y a une sorte de tiraillement entre tous ces différents niveaux d'interdiction des lobbys et des périodes de restriction. Je pense que les seules périodes de restriction pour lesquelles il existe un véritable pouvoir légal sont celles qui s'appliquent aux titulaires de charges publiques qui quittent leur poste et retournent ensuite dans le secteur privé. Ce sont ceux que le Parlement visait.
     Il est important d'utiliser le Parlement comme point de référence ici parce que le Parlement est un acteur constitutionnel réel et qu'il peut délibérer d'une manière qui équilibre ces droits tout à fait différente de celle d'un agent du Parlement, par exemple. Indépendamment de la consultation, lorsque le Parlement adopte un vote, chaque personne qui a voté dans un sens ou dans l'autre doit retourner dans sa circonscription et défendre cette action.
    Bien.
    Je vais m'adresser aux représentants du Congrès du travail du Canada.
     Dans vos commentaires sur l'ébauche révisée du Code, vous vous êtes opposés au règlement sur le travail politique qui restreint la liberté fondamentale. Ce travail sous-entend une interaction fréquente ou étendue avec le candidat ou le fonctionnaire, ou est effectué à plein temps. Craignez-vous que cela puisse s'appliquer à des pratiques banales ou courantes comme le porte-à-porte ou la pose de pancartes?
    Oui, absolument.
     Je crois que la pose de pancartes était exclue, si je me souviens bien. Mais oui, qu'il s'agisse de distribuer des dépliants, de frapper aux portes, de téléphoner, de participer à une campagne, c'est une de nos grandes préoccupations parce que nous encourageons nos membres à côtoyer les candidats qu'ils aiment et à s'engager auprès d'eux.

  (1625)  

    Je l'ai ici. C'est « distribuer ou diffuser du matériel pour des campagnes ». Cela inclut les pancartes, n'est‑ce pas?
    Oui.
     De combien de temps est‑ce que je dispose, monsieur le président?
    Vous avez une minute et demie, monsieur Bains.
    Bien.
     Je vais revenir à M. Thurlow.
     Avez-vous...? En ce qui concerne la limite annuelle proposée de 80 $ pour les marques d'hospitalité, quel genre de fardeau administratif pensez-vous que cela imposerait aux organisations qui organisent des événements pour les parlementaires?
    Encore une fois, vous êtes tous des représentants élus. Vous savez ce qui vous influencera et ce qui ne vous influencera pas. Je sais que vos calendriers Outlook ressemblent à un arc-en-ciel de couleurs parce que vous avez tellement de réunions. Si vous n'aviez pas de nourriture à ces réceptions, vous ne mangeriez probablement pas, ce qui... Ce n'est pas bien.
     Ce que je vous dirais, c'est que ce montant de 80 $ est un peu aléatoire. Je ne suis pas sûr qu'il y a un lien rationnel entre ce montant et la contribution moyenne, comme l'affirme M. Conacher. Je ne sais pas pourquoi ils ont choisi 80 $, mais M. Conacher a raison quand il dit que le commissaire aux conflits d'intérêts a un chiffre différent. Ce n'est pas bien. Nous devons en choisir un et nous y tenir.
    D'accord. Merci.
     Ce sont toutes les questions que j'ai à poser.
    Merci, monsieur Bains.

[Français]

     Monsieur Villemure, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Thurlow, j'avais deux questions à vous poser, et nous avons peu de temps.
    J'aimerais entendre votre opinion. Comment se fait-il que McKinsey ait pu se soustraire à l'obligation de s'enregistrer comme lobbyiste?

[Traduction]

    La loi est très précise, tant au paragraphe 5(1) pour les organisations qu'au paragraphe 7(1) pour les lobbyistes-conseils.
     C'est la première asymétrie pour les lobbyistes, monsieur Green, soit dit en passant. Nous les traitons différemment. Ils doivent influencer la politique publique. Ils doivent s'attaquer à un projet de loi ou proposer un projet de loi. C'est un test très précis.
     Si le Parlement veut modifier ce critère pour englober le travail qui est fait ici, c'est un excellent et robuste débat que je vous encourage à tenir, mais ce n'est pas ce que dit la loi actuellement.

[Français]

    Autrement dit, il y avait de l'espace entre les lignes et on est tombé entre les deux, quelque part.
    Ne croyez-vous pas que la Loi sur le lobbying devrait être révisée? On parle du Code de déontologie des lobbyistes, mais le lobbying est quand même subordonné à la Loi. Croyez-vous qu'il est temps de reviser la loi qui ne l'a pas été depuis deux cycles?

[Traduction]

    Encore une fois, je ne vais pas vous dire ce que vous devriez ou ne devriez pas modifier — j'ai une longue liste —, mais il y a des aspects de la loi qui pourraient certainement bénéficier de quelques changements, et notamment les dispositions relatives aux titulaires d'une charge publique désignée. Le pouvoir discrétionnaire d'un commissaire au lobbying de limiter une interdiction de lobbying doit, je pense, être un peu élargi.
     Je pense que nous sommes d'accord pour dire que si le premier ministre a une interdiction de cinq ans, un jeune de 22 ans qui travaille pour le ministre des Sports n'a probablement pas besoin d'une interdiction de cinq ans. Je vois là une certaine asymétrie. À l'heure actuelle, il y a un effet de chalutier et tous ceux qui occupent l'une de ces fonctions particulières sont logés à la même enseigne.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Finalement, en quelques mots, dites-moi quelle serait votre recommandation pour augmenter la confiance de la population envers les lobbyistes.

[Traduction]

    Envoyez-leur une télécarte et je leur parlerai.
     Sérieusement, le système que nous avons est tout à fait sous-estimé. Nous avons un système accessible au public. N'importe qui dans le monde peut aller sur Google et trouver quand un lobbyiste particulier a parlé avec quelqu'un d'un sujet particulier. C'est très facilement utilisable. Je pense qu'il y a six ou sept journalistes qui ont fait carrière en écrivant des articles sur qui fait du lobbying auprès de qui et quand. Je crois que c'est une chose dont nous pouvons être très fiers. En ce qui concerne la capacité des personnes de voir ce qui se passe, je pense que c'est spectaculaire.
     M. Conacher affirme que toutes sortes de lobbying secret peuvent avoir lieu. Ce serait une infraction criminelle, si cela se produisait. Je ne pense pas que les Canadiens ont peur des infractions criminelles. Je donne des conseils à beaucoup de gens. Je leur dis: « Enregistrez-vous. Vous n'avez rien à cacher. » C'est un registre public. L'objectif de la Loi sur le lobbying est de mettre en lumière cette activité afin que les Canadiens puissent décider d'eux-mêmes si c'est une bonne idée ou non.

  (1630)  

    Je vous remercie.
     Merci, monsieur Thurlow.

[Français]

    Peut-être M. Green veut-il partager son temps de parole avec vous, monsieur Villemure.

[Traduction]

C'est à cause de ce qui s'est passé. Non, je plaisante. Après ce qui s'est passé l'autre jour, j'ai pensé que peut-être...
    C'est la nouvelle coalition. Il y a une nouvelle coalition en ville.
    Monsieur Green, vous avez deux minutes et demie.
    Merci beaucoup.
     Monsieur Conacher, je vais vous poser une question. Je vais vous demander d'être bref et d'aller droit au but.
    Dans le monde, quel pays a le modèle d'excellence? Vers quel pays devrions-nous nous tourner pour inspirer notre législation idéale sur le lobbying?
    Le Canada est en retard à la fois sur...
    C'est une question très précise. Quel est le pays qui a le mieux réussi au monde? Connaissez-vous cette réponse? Vers qui devrions-nous nous tourner?
    Non. Il n'y a pas un seul pays qui réunit tous les critères en matière d'éthique et de transparence.
    D'accord, je vais transmettre le message.
     Merci, monsieur Conacher. Je vous remercie de votre temps.
     Monsieur Thurlow, je vais vous poser cette question. Y a‑t‑il un modèle d'excellence dont nous devrions nous inspirer et qui a ce dont vous parliez dans votre déclaration préliminaire, c'est-à-dire la capacité de préciser des lignes directrices claires aux Canadiens et à toute personne oeuvrant dans ce domaine?
    En ce qui concerne la loi, le modèle d'excellence est le Canada.
    Pensez-vous honnêtement que...
    Je pense honnêtement que c'est le cas.
     Il y a peut-être quelques programmes d'État ou de province dans le monde qui sont un peu plus précis. Il y a quelques programmes municipaux qui...
    Je suis un peu incrédule. Vous pensez que les lois sur le lobbying que nous avons sont un modèle d'excellence dans le monde entier. Est‑ce là ce que vous dites?
    Dites-moi laquelle est la meilleure et je...
    Eh bien, je parle simplement de...
    Toronto. Toronto est meilleur.
    Toronto n'est pas un pays.
    Bien, monsieur...
    J'ai un rappel au Règlement.
    Ce n'est pas utile, monsieur Conacher, quand vous interrompez mes interventions. Ce n'est pas utile, du tout. Vous êtes ici en tant qu'invité du Comité.
    Comme le Comité le sait, je fais généralement preuve de beaucoup d'indulgence, en ce qui concerne les interactions. De nombreux présidents de comité demandent que les gens s'adressent les uns aux autres par l'intermédiaire de la présidence. J'autorise une grande partie de ces échanges transversaux, mais nous devons veiller à ne pas nous interrompre mutuellement. S'il y a une question à poser à une personne, posez‑la à cette personne. Je m'attends, en tant que président, à ce que la personne réponde directement à la question.
     Monsieur Green, j'ai arrêté votre temps de parole. Veuillez poursuivre.
    Merci.
    Merci beaucoup.
     Ma dernière question s'adresse au Congrès.
     Nous avons entendu dire qu'il est très difficile d'être mis dans le même panier que tout le monde. Compte tenu de la façon dont vous abordez les marques d'hospitalité, avez-vous des remarques finales à faire sur la prise en compte des millions de membres que vous représentez dans tout le pays?
     Si vous tenez compte de ce que nous proposons en ce qui concerne les règles 4 et 6, vous ne perdez pas l'essence des changements proposés devant vous — la transparence et l'efficacité. Les règles 4 et 6 ont un impact négatif, alors nous vous demandons d'y remédier, puis de laisser le reste, parce qu'il fonctionne comme il le faut, je pense, et nous permettra de représenter les travailleurs qui nous font confiance pour parler aux représentants élus.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Green.
    L'intervenant suivant est M. Dalton.
     Vous avez cinq minutes, monsieur Dalton.
     Merci à tous les témoins pour leurs remarques.
     Je fais suite aux remarques de M. Green en vous posant une question, monsieur Conacher.
     Il a parlé d'un modèle d'excellence. Vous avez mentionné que nous ne répondons à aucune des normes de l'OCDE — ou plutôt que nous prenons du retard par rapport à ces autres pays.
     Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet, s'il vous plaît?
    Nous n'avons pas pris du retard sur tous les pays. Les États-Unis ont une loi plus rigoureuse en matière de divulgation et l'OCDE a des normes d'éthique plus rigoureuses qui visent tant le lobbying que les conflits d'intérêts. Le Canada ne respecte ni l'un ni l'autre de ces aspects.
     Toronto et le Québec exigent que le lobbying bénévole soit enregistré. Il n'est pas nécessaire d'être rémunéré. Cela permet d'attraper beaucoup de gens: des dirigeants d'entreprise à la retraite qui font un peu de lobbying pour leur ancienne entreprise, et des membres de conseils d'administration qui font du lobbying pour leurs organisations. Il peut s'agir de lobbyistes très puissants, car ils ont peut-être été lobbyistes pendant longtemps, lorsqu'ils étaient employés ou PDG, et ils connaissent tous les politiciens. En quelques minutes, ils peuvent passer un appel influent. C'est ce qui se passe à Toronto et au Québec.
     Ils sont meilleurs, et les États-Unis sont meilleurs. Ils exigent la divulgation des sommes consacrées au lobbying. Les normes de l'OCDE sont plus élevées que tout autre pays. Elles ont été exposées dans plusieurs rapports. Je vous soumettrai des liens vers ces rapports dans le document que je vous présenterai.
     Nous sommes loin derrière le modèle d'excellence. [Inaudible], le lobbying contraire à l'éthique est très facile à faire et légal.

  (1635)  

     Encore une fois, pour vous, monsieur Conacher, quelles mesures positives voyez-vous dans ce code proposé?
    La règle sur les cadeaux précise le montant en dollars, mais, encore une fois, le commissaire à l'éthique et la commissaire au lobbying l'ont déjà établi, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de l'énoncer dans le Code. Cela a déjà été établi dans les lignes directrices et les déclarations des deux commissaires.
     Par ailleurs, c'est vider les règles de leur substance. Comme je l'ai mentionné, il sera légal pour les lobbyistes de recueillir des dizaines de milliers de dollars pour un ministre auprès duquel ils font du lobbying. À l'heure actuelle, c'est illégal. Il s'agit là d'un démantèlement des règles — passer d'une période de restriction de quatre ans à zéro pour ce type d'activité.
     La période de restriction d'un an prévue dans ce code ne s'applique pas à ce que les représentants du Congrès du travail du Canada ont dit vouloir faire. Il faudrait que vous fassiez toutes ces choses, c'est-à-dire du démarchage, du porte-à-porte et de la distribution de dépliants et de brochures, presque à temps plein ou avec une interaction fréquente ou étendue avec le candidat ou le représentant du parti, pour que vous soyez écarté pendant un an. Si vous ne le faites pas presque à plein temps et n'avez pas cette interaction, vous pouvez faire du lobbying tout de suite après avoir fini le porte-à-porte. Il n'y a rien que cette règle vous empêche de faire.
     Je ne comprends pas pourquoi ils ont un problème avec la règle 6 et la définition d'« autre travail politique ». Cela ne les empêche pas de faire tout ce dont ils ont parlé aujourd'hui...
    Merci.
    ... et ne les empêche pas de représenter leurs membres. Allez‑y et faites du lobbying. Mais ne les invitez pas à dîner et ne leur faites pas de faveurs, parce que c'est contraire à l'éthique.
    Je vous remercie.
     Madame Vipond, nous passons de quatre ans à deux ans, mais vous avez dit que cela ne vous convenait pas du tout.
     Pouvez-vous nous dire pourquoi? J'aurais pensé que vous seriez plutôt heureuse. Quels sont les grands changements qui vous déplaisent? Pensez-vous que les règles sont totalement vidées de leur substance... que ce qui se faisait avant est totalement différent de ce qui se fait maintenant?
    Non, une période de deux ans est préférable. Ce qui nous préoccupe le plus, c'est ce seuil plus bas, qui englobe en fait presque toute forme de participation à ce genre de processus électoral en tant que bénévole. C'est ce qui nous préoccupe le plus, avec cette période de restriction de 12 mois.
     Si l'on passe à deux ans, je pense que cela fonctionnera mieux, mais il est vrai que de nombreuses personnes sont concernées. Je dirais que, si je mets des dépliants dans une boîte aux lettres, vous ne ferez pas les changements dont j'ai besoin. Il ne suffit pas de mettre ça dans le même sac que le fait de donner des dizaines de milliers de dollars de manière illégale. Ce n'est pas la même chose.
    Vous avez également fait de bons commentaires sur la limite de 40 et 80 $ par an. Que proposez-vous? Vous proposez également de l'augmenter chaque année, car je sais que la législation évolue et que cela peut changer.
     Dans le domaine du vin et des repas, cela peut coûter très cher. Je sais que nous avons, en tant que députés, une limite de dépenses pour un repas si l'on participe à un événement, donc il y a des limites que nous avons aussi.
     Pouvez-vous commenter cela? Je sais que M. Thurlow a dit qu'il ne devrait pas y avoir de limites. Peut-être que j'ai mal compris. Quelles devraient être les limites et que devrait‑on mettre dans le Code à ce sujet?
    J'ai besoin d'une réponse très rapide à ce sujet, car nous avons dépassé le temps imparti. Vous n'avez pas plus de 10 secondes.
    Je pense que vous avez répondu à la question, à savoir qu'il y a déjà une limite. C'est à vous de dire que vous devez divulguer tout ce qui dépasse 200 $. Cela devrait rester en place. Ce n'est pas à nous qu'il incombe de surveiller ce que vous consommez lors d'événements, de ces repas. C'est pourquoi nous pensons qu'il ne devrait pas y avoir de limite dans ces règles. Vous êtes déjà couverts par des règles, et nous devrions être en mesure d'organiser des événements où vous participez comme vous le pouvez selon vos règles.
    Je vais m'arrêter là.
     Je suis désolé, monsieur Thurlow.
     Madame Saks, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à tous nos témoins d'aujourd'hui. Ce fut vraiment un débat et un va-et-vient fascinants.
     Je vais commencer par vous, monsieur Thurlow, et par un de vos gazouillis:
Plutôt que de traiter de problèmes hypothétiques, pourquoi ne pas nous concentrer sur les questions constitutionnelles qui se posent carrément au Parlement à la suite des changements proposés au code du lobbying?
Je n'aime pas non plus traiter des problèmes hypothétiques, alors entrons dans le vif du sujet, car nous avons contourné la Charte. J'aimerais creuser un peu, si possible.
    Tout d'abord, je suis heureux d'avoir un suiveur. C'est spectaculaire.
    Des députés: Oh, oh!
     M. W. Scott Thurlow: M. Conacher a proposé ces hypothèses. Il pense que ces choses pourraient se produire. Il n'a fourni aucune preuve que cela est arrivé.
     Nous savons qu'il y a des gens qui ont dit qu'ils n'iront pas frapper aux portes parce qu'ils pensent que cela limitera leur capacité d'être un lobbyiste à l'avenir.
     Ce qui est pire et plus pernicieux, c'est que même s'ils ne le font pas tous les jours, comme l'a affirmé M. Conacher — bien que nous ayons sous les yeux le Code qui dit quelque chose d'un peu différent — ils peuvent vouloir le faire juste un week-end, mais ils peuvent recevoir un appel téléphonique au milieu de la nuit de l'enquêteur disant que quelqu'un s'est plaint. Puis l'enquête a lieu, le rapport est déposé au Parlement et leur réputation est ruinée à jamais.
    D'accord, je vais creuser un peu plus. Dans vos propos au cours de votre témoignage aujourd'hui, vous avez mentionné la précision du langage pour garantir une transparence éthique.
     Par exemple, nous parlons de la commissaire au lobbying et de sa capacité à déterminer ce qu'est une période de restriction appropriée personne par personne. Vous avez parlé de l'impact de l'effet de chalutier. Comment pouvons-nous être plus précis ou faire pression pour que la formulation soit plus précise, disons par exemple, sur le plan des bénévoles?
    Je pense que, tout d'abord, nous ne devrions pas fournir une longue liste d'exemples de choses dont nous avons parlé de façon anecdotique et qui constituent un engagement politique réel et élémentaire. Si le critère est que vous ne devriez pas faire de lobbying auprès des personnes qui vous doivent leur travail, nous savons quelles sont ces règles. C'est le directeur de campagne. C'est la personne qui pilote l'avion. Ce sont les tournées des premiers ministres, les tournées des dirigeants, par exemple. Il y a un impact très différent et une exposition très différente, non pas pour une seule personne, mais pour toute l'équipe.
     Je pense que la règle 8 initiale d'il y a 12 ans était beaucoup plus facile à comprendre que ce que nous avons deux versions plus tard. Ironiquement, elle a été éclaircie à deux reprises pour la rendre plus facile à comprendre.

  (1640)  

    Nous devrions donc nous appuyer sur la formulation précise antérieure.
     Je vais passer maintenant au CTC, à Mme Vipond et à M. Luff.
     Nous avons vu lors de la dernière élection municipale à Toronto que la participation électorale était à son niveau le plus bas. Il en a été de même pour les élections provinciales en Ontario. Comme nos collègues le savent, la participation électorale a également été faible en 2021 dans tout le pays.
     Quel est l'impact lorsque nous examinons quelque chose comme l'effet de chalutier sur les bénévoles et le relâchement dont vous avez parlé avec vos 3,5 millions de membres partout au pays? Allons-nous rendre moins accessible aux personnes la possibilité de prendre part au processus démocratique, et quel risque cela fait‑il peser sur la représentation globale de notre citoyenneté et de ses droits?
    Je conviens que la participation est extrêmement importante. Vous avez raison de dire que nous assistons à un refroidissement, où les gens ne participent pas parce qu'ils pensent qu'ils n'ont pas d'influence sur la politique. C'est quelque chose que nous prenons très au sérieux lorsque nous parlons à nos membres, car de la même manière qu'ils votent dans le cas de leurs conventions collectives, nous avons besoin qu'ils participent à cela, qu'ils participent à la politique afin que leur voix soit entendue.
     Je ne pense pas que ce que nous avons devant nous va changer la participation des gens, sauf pour dire que si cela est adopté, lorsque nous parlons des règles 4 et 6, nos membres seront peut-être perplexes. S'ils envisagent de se présenter à des postes de direction comme le mien, ils ne pourront pas participer à ces activités politiques bénévoles parce qu'on nous dit que nous devons choisir entre les deux. C'est injuste. Les gens devraient être autorisés à participer à la politique. C'est notre démocratie.
    Bien.
     Je vais me pencher à nouveau sur la question. Nous avons parlé de modèle d'excellence. Plutôt que de parler de modèle d'excellence, comment nous mesurons-nous par rapport aux autres pays? Avez-vous des idées à ce sujet?
    Cela dépend de vos critères. M. Conacher a tout à fait raison lorsqu'il dit que le système américain a des lois différentes et plus strictes en matière de divulgation. Leur système de lobbying est géré par l'IRS. Ils disposent d'un ensemble de ressources différent de celui du commissariat au lobbying, qui compte, je crois, 30 employés. Je ne me souviens pas exactement de ce que c'est.
     La raison pour laquelle il y a une divulgation publique aux États-Unis est en partie due au fait que l'IRS reçoit leurs déclarations de revenus et peut dire à quoi ils dépensent leur argent. Au moyen des lois, ils ont décidé que les Américains ont le droit de savoir qui dépense des kilmillions de dollars. Au Canada, nous ne les laissons tout simplement pas contribuer à l'argent. Ce sont les particuliers canadiens qui font ces contributions, pas les grandes entreprises.
     Pour ceux d'entre vous que l'aspect Citizens United inquiète, ce n'est pas le cas ici, je peux vous l'assurer. Nos plafonds de contribution sont très bas comparativement. En fait, aux États-Unis, en vertu de Citizens United, ils n'existent pas.
    Merci, monsieur Thurlow.
     Mme Ya'ara Saks: Merci, monsieur le président.
     Le président: Merci, madame Saks.
     Je conviens avec Mme Saks que la discussion d'aujourd'hui a été fascinante.
    Nous allons entreprendre notre prochaine série de questions, en commençant par M. Kurek, pour cinq minutes.
     Allez‑y, monsieur.

  (1645)  

     Merci, monsieur le président.
     Oui, cela a été fascinant.
    Ce que je trouve particulièrement intéressant, ce sont les différents points de vue représentés ici, mais je pense qu'on s'entend sur la nécessité de la précision et sur la nécessité des règles. Dans le cas des lobbyistes, et certainement en tant que député et dans mon travail avec le commissaire à l'éthique sur toutes les divulgations et autres que les députés doivent faire, la précision est absolument fondamentale.
     Dans les quelque quatre minutes et demie dont je dispose, j'aimerais donner l'occasion à tous les témoins — et je vais procéder dans le même ordre que tout à l'heure — de proposer peut-être un libellé sur ce que devrait être cette précision que vous recherchez.
     Je vais commencer par le CTC.
    C'est ce que nous vous avons présenté. J'aimerais également parler d'expressions comme « fréquentes et étendues » — et l'un des témoins a dit exactement comment il interprète cela. Si notre activité politique est « fréquente et étendue », qu'est‑ce que cela signifie? Cela signifie‑t‑il deux fois en un week-end? Cela signifie‑t‑il lors des deux dernières élections? C'est très difficile à interpréter. Comme l'a dit M. Thurlow, tant qu'il n'y a pas de plainte, ce ne sera pas mis à l'épreuve. C'est alors que nous ne savons pas ce que nous sommes censés faire, car nous voulons nous conformer à ces règles.
    Bien.
     Monsieur Thurlow, vous avez la parole.
    Je vais inverser la question et dire que la Cour suprême du Canada dit que vous et moi avons le droit de participer concrètement au processus démocratique. Dans le cas de M. Figueroa, c'était un communiste, et il ne recevait pas beaucoup d'argent — oui, je me doutais bien que c'était ce qui arriverait...
     Des voix: Oh, oh!
     M. W. Scott Thurlow: Il n'obtenait pas d'argent au titre de la subvention par vote en raison des règles qui s'appliquaient au nombre de partis qui devaient être déposés. Il a donc fait valoir son droit constitutionnel en vertu de l'article 3 et a dit que l'argent est ce qui va vous permettre de participer concrètement au processus en en apprenant davantage sur son parti, le Parti communiste du Canada. Cette participation concrète sera différente pour chaque Canadien jusqu'à ce que vous leur disiez ce qu'ils ne peuvent pas faire. Ce code de conduite dit précisément au Canada ce qu'il ne peut pas faire. Je pense que cela viole à la fois la lettre et l'esprit de l'article 3.
    Merci, monsieur Thurlow.
     Monsieur Conacher, nous avons parlé de précision. Avez-vous des suggestions quant à ce que devrait être la précision?
    La précision est présente dans la règle sur les cadeaux et l'hospitalité, et c'est très bien. En ce qui concerne la règle 6 et la définition d'« autre travail politique », oui, les termes doivent être définis. Ils ne devraient pas être laissés tels quels, car ils vont permettre une collecte de fonds illimitée par du lobbying. Que signifie « presque à plein temps »? Que signifie « interaction fréquente et/ou étendue »?
    La règle pour les activités politiques de faible niveau devrait être que vous êtes autorisé à faire du porte-à-porte et à distribuer des dépliants quelques fois pendant une campagne électorale sans être interdit de lobbying par la suite. Pour les collectes de fonds, si vous en faites, vous devriez être exclu pendant quatre ans. Si vous travaillez dans un bureau de campagne, vous devriez être exclu des activités de niveau inférieur jusqu'aux élections suivantes, et des activités de niveau supérieur pendant encore plus longtemps.
     C'est la façon d'assurer l'égalité des chances pour une participation et une influence égales et concrètes, comme l'a dit la Cour suprême du Canada. Il ne s'agit pas seulement d'une participation significative, mais d'une chance égale pour tous, pour chaque citoyen, de participer et d'avoir un même degré d'influence. C'est une personne, un vote, et aucune personne n'est autorisée à en faire plus qu'une autre si elle essaie d'exercer une influence. C'est pourquoi il y a une période de restriction qui dure au moins jusqu'aux élections suivantes...
    Merci.
    ... pour toute campagne importante et toute collecte de fonds.
     J'ai encore une question que j'espère pouvoir poser. Il me reste environ une minute.
     Cela concerne toute la conversation autour du personnel ministériel et la période de restriction par rapport à... vous savez, le premier ministre pendant cinq ans ou un faible employé. Vous pourriez peut-être prendre 10 secondes chacun pour répondre à cette question, en commençant par le CTC. En ce qui concerne la précision, avez-vous des recommandations sur ce qu'elle devrait être?
    Pas pour l'instant. Je peux céder la parole à M. Thurlow.
    Je me contenterais d'utiliser les éléments que nous utilisons actuellement pour les distinguer, comme leur rang — EX‑4, ‑5, ‑6 ou autre —, leur salaire et leur durée de service. À l'heure actuelle, la plupart des titulaires de charge publique désignés sont interdits de lobbying plus longtemps que la durée de leur service. Cela me semble un peu excessif.
    Très bien.
     Il vous reste environ 10 secondes, monsieur Conacher.
    Parlez-vous de la période de restriction prévue par la loi?

  (1650)  

    Oui.
     On devrait utiliser une échelle mobile. Elle devrait être basée sur le pouvoir que vous avez exercé et elle devrait varier selon la personne auprès de laquelle vous pouvez faire du lobbying. Vous pourriez être un employé de bas niveau et un ami proche du premier ministre. Que vous soyez de bas niveau n'a pas vraiment d'importance. C'est [difficultés techniques] et cela devrait être basé sur les relations et personnalisé au cas par cas, avec une échelle mobile de un à cinq ans.
    Merci, messieurs Conacher et Kurek.
     Monsieur Zuberi, c’est votre tour pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je remercie les témoins de leur présence.
     M. Conacher nous a présenté une analyse vraiment intéressante, et un peu choquante à mon avis, selon laquelle la version actuelle permet de faire des dons essentiellement illimités à un représentant élu.
     Monsieur Thurlow, êtes-vous d'accord avec cette analyse? En tant qu'avocat, êtes-vous d'accord avec cette analyse de la version actuelle du Code?
    Non.
    Sur ce point, quelle est votre interprétation? Je comprends qu'il est normal que les opinions diffèrent, mais j'aimerais avoir votre avis. Quelle est votre position sur cette question?
    Je pense que la Cour d’appel fédérale a atteint un très bon équilibre dans l'affaire Démocratie en surveillance c. Campbell. Les commissaires subséquents ont élargi l’application de cette décision.
     Je pense que la meilleure approche en la matière est que le Parlement établisse les limites et qu’il dise que les contributions électorales des particuliers « doivent » être limitées à 1 650 $. Il n'y a pas de marge de manoeuvre. C'est la limite.
    Je dirais que le problème que cela pose est que 1 650 $ aujourd'hui n’égale pas 1 650 $ demain.
    C'est pourquoi il y a une variable d'ajustement à l'inflation dans la Loi électorale du Canada qui le prévoit. Avant, c'était 1 500 $. Maintenant, c'est un peu plus.
    Exactement.
     M. Green a soulevé un point intéressant, à savoir que dans le passé, la subvention dépendait du nombre de voix.
     Monsieur Thurlow, à votre avis, si l'on rétablissait cette subvention, pensez-vous que cela contribuerait à atténuer certaines préoccupations dont nous parlons en ce qui concerne le lobbying?
    Je ne sais pas si cela réglera le problème du lobbying, mais je suis sûr que cela influera sur la possibilité de participer concrètement au processus électoral. C'était une décision politique. Les points de vue diffèrent sur la façon dont le financement public devrait se faire. Si vous faites une contribution, vous avez droit à un reçu pour impôt. Ces subventions par voix ne sont pas forcément versées de la même façon aux mêmes partis, parce qu’une masse critique entre en jeu.
     Même le pauvre M. Figueroa, pour qui un certain nombre de voix seulement serait pris en compte aux fins de la subvention, ne pourrait pas acheter une publicité dans le Edmonton Journal avec cet argent, parce qu'elle ne serait tout simplement pas suffisante, même si le Fort Saskatchewan Pennysaver pourrait quand même lui vendre une publicité.
     La subvention par voix a un effet égalisateur, mais néanmoins, considérant comment l'argent est dépensé au cours d’une élection, vous obtenez beaucoup plus de valeur lorsque vous pouvez cumuler cet argent et faire de meilleurs achats publicitaires.
    Je dirais que la subvention par voix permet de reconstituer un trésor de guerre, ce qui est nécessaire lors d’une élection. Ainsi, il n'est pas nécessaire de chercher autant à le renflouer s'il y a une subvention par voix.
     J'aimerais entendre les représentants du CTC. Quel est votre avis sur ce point précis?
    Oui, je pense que vous avez tout à fait raison. Nous sommes d'accord pour dire qu'il est tout à fait logique de sortir les gros intérêts financiers de la politique. C'est pour cela que le financement est individuel. Cette subvention irait dans ce sens.
     Par contre, cette subvention ne supprimerait pas le besoin de bénévoles. Les élections nécessiteraient toujours des bénévoles. On aura toujours besoin de bénévoles pour répondre au téléphone, frapper aux portes, etc. Cela signifie que ces règles auraient encore un effet négatif sur des personnes comme moi et d'autres dirigeants du mouvement syndical, qui devraient choisir entre représenter leurs membres et être bénévoles lors d’élections.
    Comme le CTC fait du lobbying, ne pensez-vous pas que ceux qui sont officiellement des lobbyistes au sein du CTC pourraient simplement se retirer, ne pas se mêler des élections, et que le reste du groupe s’en mêlerait? N'est‑ce pas là une façon de contourner votre préoccupation?
    Je ne pense pas que la Constitution devrait être contournée. Je pense qu'elle couvre tout le monde.
     Oui, je suis ici pour vous parler et vous raconter des histoires personnelles sur ce que cela signifierait pour moi, mais je ne suis pas la seule concernée. Beaucoup de personnes occupent des fonctions dans le mouvement syndical et veulent aussi participer à la vie politique. Je pense que dire que ces personnes ne sont pas autorisées à exercer leur droit constitutionnel de faire les deux pose vraiment un problème. Nous vous suggérons ici de ne pas vider la Constitution de sa substance au point de ne pas avoir de règles efficaces en matière de lobbying au Canada.
     Je pense que ce que nous vous suggérons nous permettrait de garantir que nous ne pénalisons pas ceux qui, comme moi, veulent participer au processus politique, mais qui veulent aussi représenter les membres et obtenir de bonnes lois pour les travailleurs.

  (1655)  

    Merci.
    Merci, monsieur Zuberi.
    Monsieur le président, je tiens simplement à vous signaler que je vais céder mes deux minutes et demie à M. Villemure tandis que nous poursuivons notre travail, notre bonne coopération.
    Je ne vous ai pas forcé la main, n'est‑ce pas, monsieur Green?
     C'est comme ce que M. Thurlow a fait le jour de la Saint-Valentin.

[Français]

    Monsieur Villemure, vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup également, monsieur Green.
    Monsieur Conacher, vous avez émis des propositions dont certaines, je crois, sont radicales. Néanmoins, votre opinion m'intéresse.
    Sans aller dans les extrêmes — vous savez, la révision en question n'ira probablement pas dans les extrêmes —, quelles seraient les absolues nécessités qu'il faudrait intégrer dans le Code en question?

[Traduction]

    Eh bien, en ce qui concerne d'autres changements au Code en vigueur, si vous participez à une campagne importante ou à toute collecte de fonds, vous devez rester à l’écart après la prochaine élection pour respecter la période de restriction de cinq ans après avoir quitté la vie publique avant de devenir un lobbyiste inscrit. En tant que lobbyiste, si vous participez à une campagne importante ou à toute collecte de fonds qui donne l’apparence d'un conflit d'intérêts, vous devez rester à l’écart des élections suivantes. C'est ce que prévoit la règle actuelle.
     Il n'y a aucune raison de la changer, à moins que vous ne vouliez permettre une généralisation du lobbying contraire à l'éthique. Il n'y a rien dans la proposition actuelle à propos de la règle 6, ou dans notre proposition, qui est de permettre une activité politique de faible niveau, soit un peu de démarchage et de bénévolat pendant les campagnes électorales sans période de restriction… Cela permettrait à chacun de participer un peu, autant qu'un électeur moyen le fait, mais pas plus, car si vous en faites plus, alors vous achetez de l'influence et cela devient contraire à l'éthique.

[Français]

    Croyez-vous que ces dispositions vont, en quelque sorte, permettre d'empêcher le lobbying secret, comme vous l'appelez?

[Traduction]

    Non. Le lobbying secret ne prendra fin que lorsque la loi sera modifiée pour supprimer toutes les nombreuses échappatoires qui le permettent.
     M. Thurlow a dit plus tôt qu’il serait illégal pour quelqu'un de faire du lobbying secret. Ce n'est pas vrai du tout. Si vous n'êtes pas payé pour faire du lobbying, alors vous n'avez pas à vous inscrire. Si vous faites du lobbying à propos de l'application de la loi et du lobbying auprès de l’organisme qui applique la loi, vous n'avez pas à vous inscrire. Si vous êtes l’employé d'une entreprise et que vous faites du lobbying pendant moins de 20 % de votre temps, alors vous n'êtes pas inscrit au registre. Vous pouvez violer le code des lobbyistes autant que vous voulez, car il ne s'applique pas à vous.
     Les échappatoires sont énormes. Si vous faites du lobbying pour obtenir des contrats, comme vous l'avez demandé plus tôt, vous n'avez pas besoin de vous inscrire. Je ne comprends pas très bien ce qu'il veut dire quand il dit que le lobbying secret est illégal. Le lobbying secret est légal à bien des égards. Il est très facile pour un lobbyiste contractuel ou un lobbyiste consultant de dire simplement: « Inscrivez dans mon contrat que je suis payé pour vous donner des conseils stratégiques, mais que je fais du lobbying sans frais ». Vous ne pourrez alors jamais être poursuivi, car vous n'êtes pas payé pour faire du lobbying. Les échappatoires sont énormes, et il faut les éliminer pour mettre fin au lobbying secret.
     Le Code doit être renforcé pour mettre fin au lobbying contraire à l’éthique.

[Français]

     C'est très intéressant, d'ailleurs.
    Dites-moi, si on n'arrive pas à mettre en œuvre toutes les recommandations qui vous feraient dire qu'il s'agit d'un lobbying « éthique », est-ce que le lobbying en question sera alors illégitime?

[Traduction]

    Oui, si cette règle est maintenue et que d’autres activités politiques sont maintenues telles quelles, je crois que cela viole les droits garantis par la Charte de 17,2 millions d'électeurs canadiens qui ne sont pas des lobbyistes rémunérés. Conformément à plusieurs arrêts de la Cour suprême, ils ont droit à la démocratie, à un bon gouvernement démocratique et à la confiance dans l'apparence d'intégrité de tout processus politique. C'est ce que la Cour suprême a dit.
     Pourquoi quelqu'un aurait‑il confiance si vous permettez aux lobbyistes de faire des collectes…? Il ne s’agit pas de dons, contrairement à la façon dont le député précédent a présenté mon affirmation, en disant que quelqu'un pourrait donner des milliers de dollars à quelqu'un. Bien sûr, Scott Thurlow ne serait pas d'accord avec cela, mais ce n'est pas ce que j'ai dit.
     J'ai dit que si la règle 6 et d'autres définitions de l’activité politique sont adoptées telles quelles, quelqu'un pourra recueillir des dizaines de milliers de dollars pour un ministre du Cabinet ou le parti du ministre auprès duquel il fait du lobbying, et faire du lobbying auprès d’eux en même temps.
     Pourquoi un membre du public aurait‑il confiance dans l'élaboration des politiques à l’échelle fédérale si cette activité est légale?

  (1700)  

[Français]

     C'est très intéressant. Merci.
    Je vais retourner à la première question que je vous ai posée plus tôt parce que votre réponse me titille vraiment.
    Selon vous, chaque élément que quelqu'un peut recevoir le rend automatiquement redevable, qu'il s'agisse d'une invitation à une soirée où il y avait un repas ou quoi que ce soit d'autre. Il est redevable, c'est automatique.
    Est-ce bien cela?

[Traduction]

    Oui, des psychologues cliniciens ont testé des dizaines de milliers de personnes dans le monde entier et tous les humains sont influencés par des cadeaux ou des faveurs. Si quelqu'un vous fait une faveur, vous vous sentez obligé, inconsciemment en fait, de lui rendre la pareille.
     Des médecins ont reçu des échantillons gratuits de médicaments de sociétés pharmaceutiques. Les médecins n'ont pas utilisé les échantillons gratuits, ils les ont donnés à leurs patients. Cela ne représente pas une économie pour le médecin. Cela n'apporte rien au médecin en réalité. Les médecins ont été étudiés et ils ont tous dit que ces échantillons gratuits n'avaient modifié en rien leur façon de prescrire des médicaments.
     En réalité, cette pratique les a tous affectés. Elle a modifié leurs façons de prescrire. Ils se sont mis à prescrire les médicaments dont ils avaient reçu des échantillons gratuits, même si les échantillons gratuits ne leur avaient rien apporté.

[Français]

    Croyez-vous qu'une autre étude...
    ... puisse dire le contraire absolu?

[Traduction]

    Les petits cadeaux ont une influence.
    Comme je l'ai dit, des psychologues cliniciens ont étudié la question. Lisez Dan Ariely ou Robert Cialdini, le gourou de l'influence. Le premier moyen d’influencer quelqu'un est de lui rendre service ou de lui faire un cadeau.
     Voilà pourquoi, lorsque vous êtes au restaurant, votre serveur vous donne des menthes. Cela augmente le pourboire que vous lui donnez, en moyenne. Voilà pourquoi toutes sortes de gens envoient des enveloppes contenant des aimants à frigo gratuits. Ils vous ont donné quelque chose et vous sentez que vous devez donner quelque chose en retour, alors vous faites un don.
    Merci.
    Ça fonctionne parce que c'est ce que font les humains: « Fais à autrui ce que tu voudrais qu'il te fasse ». C'est la règle d'or. Elle fonctionne partout.
    Merci, monsieur Conacher.
    Merci, monsieur Villemure.
     Monsieur Barrett, vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     J’aimerais prendre la première partie de mon temps de parole pour donner avis d'une motion. Je ne propose pas une motion.
     Je ne vais pas partager mon temps, monsieur Villemure.
     Je la soumettrai dans les deux langues officielles, même si je sais que l’interprétation la saisira. La motion est la suivante: « Que le Comité consacre l'une de ses dernières séances dans le cadre de son étude des systèmes d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels pour entendre les témoins énumérés ci‑dessous au sujet des frais d'hôtel atteignant 6 000 $ par nuit associés au voyage du premier ministre à Londres en septembre 2022, qui ont été rendus publics en vertu d’une demande d'accès à l'information; que les témoins suivants soient convoqués: [l'honorable] Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères; Frédéric Huot-Bolduc, Affaires mondiales; Davon Singh, Affaires mondiales; et Jason Kung, Affaires mondiales. »
     Je peux la transmettre à la greffière pour faciliter la distribution.
    Merci, monsieur Barrett.
     Pour préciser, vous donnez avis de cette motion.
    C'est exact. Je ne la propose pas.
    Merci.
     Allez‑y. Il vous reste trois minutes et 50 secondes.
    Je veux revenir sur la question de l'argent en politique. C'est vraiment important, car je pense que la perception devient la réalité pour beaucoup de gens.
     Monsieur Thurlow, vous avez parlé de la limite de contribution annuelle pour les particuliers. Elle est maintenant de 1 700 $. Elle a été rajustée le 1er janvier, après avoir augmenté d'un gros 25 $ par rapport à l'année précédente.
     Ce chiffre est fixé, et la même loi dans laquelle il a été fixé interdisait les dons des entreprises. Nous avons vu des sociétés qui invitaient leurs employés à faire des dons à des entités politiques, puis les remboursaient, une pratique qui a donné lieu à des accords de conformité ou à des accusations criminelles. Ce sont les deux options possibles. Votre entreprise prend alors le risque d’entacher sa réputation et en accepte les conséquences.
     Monsieur Thurlow, pensez-vous que le cadre actuel relatif à ce plafond des contributions personnelles et la conséquence d'accusations criminelles ou potentiellement d’un accord de conformité avec Élections Canada offrent des niveaux de transparence suffisants?

  (1705)  

    Je pense que les accusations criminelles sont assez graves.
    Oui.
    Ce que le commissaire aux élections fédérales choisit de faire pour appliquer la loi et la décision de renvoyer ou non une affaire au responsable de l’application de la loi s’inscrit dans une discussion administrative qui lui appartient. Est‑ce que je pense qu'une liste publique de donateurs, une liste dont chacun de vous aurait copie pour les partis, serait un élément de la transparence à laquelle nous aspirons pour que nous sachions qui donne quoi? Tout à fait.
     Je n'ai pas d'opinion sur la meilleure façon de faire respecter la limite en droit pénal.
    Oui.
    Mais si vous mettez dans la balance le fait que les contributions doivent être rendues publiques et que nous avons un registre public des lobbyistes, puis que nous devons dresser la liste de toutes les communications que nous avons avec les titulaires d'une charge publique désignés, je pense qu’il est possible de tracer ces lignes, et les Canadiens peuvent le faire assurément.
    Bien sûr.
     Il me reste un peu moins de [difficultés techniques], alors j'aimerais demander aux deux organisations représentées ici si elles pensent qu'il serait utile d'harmoniser le chiffre utilisé dans le Code régissant les conflits d'intérêts des députés, soit la limite de 200 $ pour les cadeaux, et le montant pour une réception — pas pour un cadeau, mais pour l’accueil — et si cela rendrait les choses plus claires pour le grand public, pour les titulaires d'une charge publique, pour les députés et pour les lobbyistes.
    Veuillez répondre brièvement.
     Je peux me lancer si vous voulez.
    L'harmonisation a du sens, mais vous ne tenez pas compte du fardeau de la déclaration et de la surveillance, ainsi que de l'administration qui s'y rattache. Nous avions 400 militants à Ottawa la semaine dernière, et nous sommes vraiment fiers qu'ils aient pu s’entretenir avec leurs élus. L'idée qu’il nous faudrait courir après les gens pour savoir que ce qu'ils consomment représente un fardeau très lourd. Il est plus logique que le système reste tel qu'il est, c'est-à-dire que vous devez vous contrôler. Ensuite, le processus entre en jeu si vous ne produisez pas de déclaration conformément aux règles.
    Nous pourrons peut-être y revenir au prochain tour.
    Bien sûr.
    Voilà qui conclut le temps de parole de M. Barrett.
     Madame Vandenbeld, vous disposez de cinq minutes. Allez‑y, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
     C'est merveilleux d'être de retour au sein de ce comité dont j'ai fait partie lors d'une législature précédente.
     Monsieur Thurlow, j'ai été très inquiète lorsque vous avez parlé d'une limite post factum à la liberté de réunion, à la liberté d'expression et aux libertés démocratiques garanties par la Charte des droits. À mon sens, ces libertés sont fondamentales dans notre démocratie.
    Par exemple, je sais que si le Parlement devait adopter une loi qui porte atteinte aux droits démocratiques, aux droits garantis par l'article 2 de la Charte, il y aurait un recours devant les tribunaux. Toutefois, lorsqu’il s’agit d’un code et d’un haut fonctionnaire du Parlement, quel recours y a‑t‑il si les droits d’une personne sont violés?
    C'est la question à un million de dollars.
     Le code de conduite n'est pas un texte de loi. Il n'y a pas de risque lié à la violation du code de conduite, si ce n'est le risque pour la réputation en cas d’enquête et de rapport. Nous pourrions demander une injonction ou présenter une requête en vertu des Règles de la Cour fédérale pour dire que ce texte viole la Charte, mais les coûts sont considérables et il n'y a aucune garantie que la requête soit même entendue, parce qu’il ne s’agit pas d’un texte de loi.
     Le problème avec les droits garantis par la Charte, c'est qu'ils doivent être compromis et, comme je l’ai dit clairement dans mon témoignage précédent, il est question autant du principe que de la nature même de la restriction. Mon droit démocratique n'est pas restreint. Il s'agit de ce qui se passe une fois que j’ai exercé mon droit démocratique. Cela va m'encourager à ne pas le faire, en vertu de l’article 3, ou des alinéas 2b) ou d).
    Essentiellement, c'est pourquoi vous avez dit que cela s’applique ex post facto.
     Le fait est que j'avais 200 ou 300 bénévoles lors de ma dernière campagne. Je vis à Ottawa. Quelques-uns de ces jeunes gens pourraient ensuite obtenir un emploi dans l'une des entreprises de la ville. Est‑ce que cela n'établit pas deux normes différentes, alors que 199 de mes 200 bénévoles peuvent venir à ma rencontre du vendredi et me dire ce qu'ils pensent du plus récent projet de loi, mais cet autre bénévole ne peut pas le faire? Cela n'établit‑il pas deux normes différentes pour les personnes qui... parce que tous ceux qui le souhaitent peuvent être bénévoles dans le cadre d’une campagne? Ce n'est pas un travail exclusif que seules certaines personnes peuvent faire.
     Qu’en pensez-vous?

  (1710)  

    Je suis tout à fait d'accord avec votre position et je vais aller un peu plus loin.
     Qu’arrive‑t‑il si vous faites tout ce merveilleux travail de démarchage et que vous recevez une offre d'emploi? Ces jeunes gens, qui ont été politiquement actifs, ont rencontré d'autres personnes au cours de la campagne. Ils pourraient ne pas être autorisés à accepter cet emploi, maintenant. Je pense que c'est un exemple « rare », mais il entre dans le calcul des jeunes lorsqu'ils commencent à s’engager intensément dans ces campagnes.
     Je pense que vous avez raison. Il y a là une asymétrie potentielle. Vous voulez aussi communiquer avec vos concitoyens. Le critère se transforme en paiement.
     Cela nous ramène au lobbying bénévole dont M. Conacher parlait. Le lobbying bénévole n’existe pas. Le lobbying bénévole, c’est la liberté d’expression. Un cadre retraité qui n'est pas payé pour ce qu'il fait prête son savoir-faire. Il n'en tire aucun avantage. S'il est rémunéré, il en tire un avantage. Nous pouvons le prouver ou l’établir. Avez-vous reçu un chèque pour faire ce travail? Si oui, c'est la raison d’être du lien de paiement dans la loi. Nous pouvons effectivement prouver qu'ils le font.
    On pourrait parler de « défense des intérêts », si ce n'est pas rémunéré.
     Cela m’inquiète beaucoup, car nous assistons à un déclin de la participation à la vie politique.
     Avant de faire de la politique, j'ai fait beaucoup de travail à l'échelle internationale pour le développement démocratique. Une chose pour laquelle le Canada était connu, en tant que pratique exemplaire à l’échelle mondiale, surtout pour le financement politique... Nous avons délaissé les limites, car il y a toujours des échappatoires et des façons de contourner les limites codifiées. En fait de pratiques exemplaires à l’échelle mondiale, le passage à la transparence permet au public de voir ce qui se passe. Cela devient alors de l'autorégulation.
     Vous avez mentionné quelque chose de similaire. Je ne verrais pas d'inconvénient à ce que d'autres intervenants mettent leur grain de sel aussi, mais monsieur Thurlow...
    Le soleil est le meilleur remède.
    Nous avons entendu cela.
    Je crois qu'il est vraiment important qu’on le sache, mais nous devons être très inquiets de la possibilité que des personnes soient visées et ne soient pas autorisées à participer.
     Si les normes existent et que les gens doivent les respecter, chaque fois que quelqu'un dit que quelque chose s'est produit et que quelqu'un s'est fait prendre, cela signifie essentiellement que ces règles fonctionnaient, car nous savons que cela se produit. La plupart d'entre nous ont accès à Google pour trouver cette information.
    Monsieur Thurlow, vous avez dit que la crainte d'une enquête a également un effet dissuasif...
    Madame Vandenbeld, votre temps est écoulé.
     Je vous remercie.
     Il nous reste un tour de table. Nous avons deux interventions de cinq minutes pour les conservateurs et les libéraux, puis de deux minutes et demie pour MM. Villemure et Green.
     Je crois que c’est le tour de M. Dalton, pour cinq minutes.
     Allez‑y, monsieur Dalton.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais revenir sur un commentaire que vous avez fait, monsieur Thurlow, à savoir que ce code n’a pas vraiment de mordant. En fait, le commissaire a dit la même chose. Il se limite à une atteinte à la réputation.
     Les membres n’apprécieront peut-être pas tous mon commentaire, mais lorsque vous avez un premier ministre qui a commis trois infractions au code d'éthique, à l'éthique, et lorsque nous constatons toutes sortes de violations, les membres du grand public mélangent tout, de sorte qu'il y a une réelle détérioration du respect du public envers les politiciens, ce qui est bien mérité, je pense, en ce qui concerne les politiciens, d'après ce que nous voyons dans ce gouvernement.
     Il est évident que nous devons relever la barre. Cela commence par le sommet. Malheureusement, il y a un échec au sommet, et cela se répercute sur toute la ligne.
    Pouvez-vous me donner quelques exemples de violations, jusqu'à présent, qui pourraient justifier ce code? Pouvez-vous nous donner des exemples de ce que nous avons vu? Je lance la question aussi à M. Conacher, ou à tout autre intervenant.
    Je crois que M. Carson a été condamné en vertu de la loi.
     Je comprends votre frustration. Je pense que je répondrai à votre question en disant qu’une atteinte à la réputation de personnes dont le métier est de défendre les droits est accablante. Il leur sera impossible de gagner leur vie. Il leur sera impossible de faire ce qu’elles veulent faire. Si vous êtes avocat et qu’on vous déclare coupable d’une infraction, pourquoi quelqu'un d'autre retiendrait‑il vos services pour faire ce travail?
     Je pense que l'absence d'enquêtes n'est pas forcément la preuve de l’existence d’un problème. Des dossiers ont été transmis à la GRC. Des rapports ont effectivement été déposés au Parlement.
     C’est à vous de me le dire, vous êtes l'élu. Si vous saviez qu'une personne a enfreint le Code de déontologie des lobbyistes, seriez-vous prêt à faire inscrire votre nom au registre public comme ayant rencontré cette personne?

  (1715)  

    L'ancienne commissaire au lobbying, Karen Shepherd, qui avait l'habitude de divulguer dans un tableau les cas qui lui étaient soumis, a déclaré plus de 100 lobbyistes coupables d'avoir enfreint le Code des lobbyistes, mais elle n’a rien fait. Elle n'a pas déposé de rapport au Parlement. Elle les a laissés s'en tirer en leur demandant d'écrire un essai et, par conséquent, elle ne les a pas nommés. Plus d'une centaine de lobbyistes ont violé le Code, certains d'entre eux qui font probablement encore du lobbying. Ils n'ont jamais été nommés. Personne ne le sait.
     En ce qui concerne la nouvelle commissaire, elle ne publie pas les résumés de ses décisions sur les questions sur lesquelles elle a enquêté. Elle dissimule cette information. Elle a supprimé l'ancien tableau que l'ancienne commissaire, Karen Shepherd, publiait. Nous ne pouvons même pas dire si elle fait correctement son travail et si elle laisse tout le monde s'en sortir même s'ils ont violé le Code. Nous ne savons même pas combien d’affaires il y a.
     Leurs mesures d’exécution sont plutôt faibles. Ils suivent les médias. Ils n'exigent pas que les communications des ministres leur soient divulguées afin qu'ils puissent déterminer si des gens qui ne devraient pas faire de lobbying en font. Ils ne font pas vraiment de vérifications. Ils ne l'ont jamais fait. Vous avez probablement une chance sur mille de vous faire prendre si vous enfreignez les règles, mais nous ne le savons pas vraiment, car l'actuelle commissaire Bélanger garde tout secret.
    Merci pour ce commentaire.
     Encore une fois, monsieur Conacher, vous avez parlé d'une échelle mobile, une suggestion très intéressante. Est‑ce gérable d’y aller au cas par cas et de passer d’un à cinq ans? Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
     Je vais peut-être demander aussi à Mme Vipond de nous dire ce qu'elle pense d'une échelle mobile, si c’est possible.
    Je dois respecter le temps imparti. Il vous reste une minute.
    D'accord.
     Vous disposez de 30 secondes chacun.
    Oui. Il faut que ce soit gérable pour être juste. Ce serait un fardeau administratif pour la commissaire, mais la période de restriction générale de cinq ans a été étendue à tous les députés et à leur personnel en raison du scandale impliquant un ancien député en 2010. Elle n'aurait pas dû être étendue à tout le monde à titre de règle générale de cinq ans. Cela n'a pas de sens. C'est injuste.
     Une échelle mobile serait juste. Cela demanderait beaucoup de travail, mais ce serait juste. Les gens devraient avoir le droit de devenir lobbyistes s'ils n'ont pas fait grand-chose... s'ils ont été députés d'arrière-ban et n'ont siégé à aucun comité, ou s'ils ont travaillé de façon temporaire à un niveau subalterne, sans être connus de qui que ce soit au sein du gouvernement.
    C'est formidable. Merci beaucoup.
     Il ne me reste que quelques instants, madame Vipond.
    La solution universelle ne fonctionne pas ici. Une échelle mobile serait tout à fait justifiée. Il n'est pas nécessaire d’y aller au cas par cas. On pourrait le faire catégorie par catégorie. Tout le monde a ce genre d'accès, en fonction de la durée de service, etc. Cela rendrait les choses plus équitables pour ceux qui cherchent un emploi après leur passage au sein du gouvernement.
    Je vous remercie.
    Merci.
    Madame Saks, allez‑y pour cinq minutes.
    Je cède mon temps de parole à Mme Vandenbeld.
    Oh, c'est le tour de Mme Vandenbeld. Je suis désolé; c'est mon erreur.
    Vous voyez, maintenant que je fais de nouveau partie de ce comité, je ne peux plus m'arrêter.
     Je vous remercie.
     J'aimerais revenir sur ma dernière question. Monsieur Thurlow, vous avez dit qu’une personne qui ferait du démarchage deux ou trois fois seulement ne serait pas visée par cette restriction, mais comme celle‑ci est vague, il pourrait se dire soudainement: « Eh bien, peut-être qu’elle me vise », ou pire encore, cette personne pourrait faire l'objet d'une enquête.
     Je repense à ce jeune de 22 ans qui a travaillé sur ma campagne. Il s'intéressait à la politique et a suivi des cours de sciences politiques. Puis, au bout d'un an environ, il a reçu une offre de l'une des entreprises locales de relations gouvernementale. Il est ravi, mais il finit par faire l'objet d'une enquête parce qu’une personne s'est plainte de l’avoir vu faire une fois du porte-à-porte pour moi, un an auparavant. Ce jeune doit alors répondre à des questions, il doit peut-être prendre un avocat et son nom risque d'être traîné dans la boue. L'employeur fait marche arrière et dit: « Oh non. Une enquête est en cours. Je ne vais pas l’embaucher. Nous te rappellerons dans trois mois. »
     Est‑ce de cela qu'il s'agit? Est‑ce la situation à laquelle nous sommes confrontés? Pour ma part, cela aurait un effet de dissuasion énorme chez beaucoup de jeunes gens qui s'intéressent à la politique et qui veulent une carrière dans laquelle ils font une différence en politique, soit en tant qu’élus, soit dans le domaine des relations gouvernementales.
     J'aimerais demander à M. Thurlow de répondre en premier, puis je céderai la parole à M. Luff et à Mme Vipond.

  (1720)  

    Je connais de première main des exemples concrets où c'est exactement ce qui s'est passé, où des gens voulaient participer et ont choisi de ne pas le faire par crainte que cela leur coûte cher plus tard.
     L'inverse se produit également. Cela limite aussi les compétences que les fonctionnaires sont en mesure de recruter. Ne pensez pas seulement à la personne qui agit comme lobbyiste; pensez à celle que nous voulons attirer dans la fonction publique. Qui voulons-nous voir apprendre à devenir des politiciens et qui voulons-nous voir devenir des politiciens?
     Ce sont des compétences qui s'acquièrent sur le terrain.
    Allez‑y, madame Vipond.
     Oui, tout à fait. Nous savons que l'effet de dissuasion peut se produire. Cela peut être le cas non seulement des personnes qui sont inquiètes. Parfois, c'est parce qu'elles ne connaissent pas les règles, et quelqu'un leur a dit que cela pouvait arriver, alors c'est simplement plus facile de ne pas participer. Le danger est bien réel.
     Pour nous, dans le mouvement syndical, nous voulons aussi que les personnes qui souhaitent s’engager dans leur syndicat y soient actives. L’effet de dissuasion s’exercera aussi dans cette situation. C'est terrifiant, pour être tout à fait honnête, car cela ne devrait pas entrer en jeu dans la décision des gens de participer ou non.
     L'effet de dissuasion est effectivement un danger dans ce contexte.
    Nous examinons la question du point de vue de l'avantage que représente pour le politicien la présence de bénévoles dans une campagne.
     J'ai vu des jeunes gens grandir énormément et acquérir des compétences. J'ai commencé à faire du bénévolat dans des campagnes à l'âge de 15 ans. Je pense que les compétences que j'ai acquises alors expliquent en partie pourquoi je suis toujours en politique aujourd'hui.
     Quel effet cela aurait‑il d'empêcher des gens de bénéficier de ces avantages de travailler à une campagne, la camaraderie, le sentiment d’être utile, les compétences et l'expérience? Quel effet cela aurait‑il sur notre système démocratique?
     Allez‑y, monsieur Thurlow.
    Eh bien, des gens le feront, quel qu’en soit le coût, et que Dieu les bénisse. Des gens choisiront de ne pas le faire.
    Je m'inquiète davantage pour l'électeur marginal, la personne qui n'est pas aussi susceptible de participer, la personne qui a besoin qu'on la conduise au bureau de scrutin, la personne qui n'est pas inscrite, mais qui est légalement autorisée à l'être.
    Ce sont ces bénévoles qui, si cinq d'entre eux décident de ne pas s’engager, combien de personnes ne seront pas inscrites sur les listes en conséquence? Les bénévoles sont les scrutateurs qui s'assurent que les votes sont dûment comptabilisés. Ont-ils accès au candidat? Bien sûr. C'est un travail important. Nous avons besoin de ces scrutateurs pour nous assurer que la démocratie fonctionne comme nous l'espérons.
    Oui, être bénévole dans des campagnes signifie beaucoup de choses différentes pour beaucoup de personnes différentes. Parfois, cela fait partie du parcours vers le type de travail qu'elles feront plus tard. Parfois, il s'agit simplement d'acquérir de nouvelles compétences et de nouer de nouvelles relations dans leur milieu. J'ai rencontré des néo-Canadiens qui faisaient du bénévolat. C'est une excellente idée. Ils sont simplement intéressés et veulent en savoir plus.
     Je pense que nous devrions avoir peur de cet effet de dissuasion, parce que, mon Dieu, cela va les priver de toute une série d'autres possibilités. Notre démocratie dépend de la participation des gens à toutes ces activités. Nous ne devrions pas y mettre des obstacles.
    Alors, comment pouvons-nous corriger cette situation?
    Je dirais...
    Donnez une réponse très brève, s'il vous plaît.
    Je reviendrais à notre ancien code. Devrions-nous avoir une disposition sur les conflits d'intérêts? Tout à fait. Devrions-nous prendre un texte, l'élargir et ajouter des pages et des pages d'exemples, d'exclusions et de restrictions différentes? Cela ne fait qu'ajouter à la confusion.
    Merci, monsieur Thurlow et madame Vandenbeld.

[Français]

     Je donne maintenant la parole à M. Villemure, pour deux minutes et demie.
    Nous vous écoutons, monsieur Villemure.
    Merci, monsieur le président.
    Toutes les discussions que nous avons eues aujourd'hui ont comme fondement le fait que la confiance n'est pas au rendez-vous. Il y a un cynisme envers la classe politique et il y a un cynisme envers certaines activités, comme celles du lobbyisme, par exemple.
    Quand on ne fait pas confiance à un appareil, on finit par développer de la méfiance. La méfiance, c'est ce que nous entendons aujourd'hui, derrière les opinions qui sont très opposées.
    La prochaine étape, c'est la défiance. La défiance, c'est le rejet du système. Il est certain que, ce que nous cherchons à éviter ici, c'est le rejet du système; nous cherchons donc à restaurer la confiance.
    On sous-estime souvent l'importance de la confiance dans la société. On croit que cela va de soi et que cela doit être ainsi. On a tendance à normaliser la confiance en mettant des codes en place.
    On ne rend pas les gens bons par décret. Le Code de déontologie des lobbyistes sera un instrument de la confiance, mais il ne peut pas être le seul instrument. Une volonté doit être démontrée. Plus tôt, M. Dalton parlait de dirigeants ou du premier ministre. Oui, le poisson pourrit par la tête, c'est Confucius qui le disait. Je pense que, tous ensemble, nous devons avoir cette volonté de restaurer la confiance, d'aller chercher ce qui est juste au-delà du Code. Parce que, le Code, c'est bien. M. Thurlow nous a indiqué de nombreuses façons dont on pouvait le contourner. Parfois, on est conforme et on demeure injuste.
    Je crois que nous devrions tous travailler vers une restauration de la confiance. Nous en serions tous gagnants.

  (1725)  

    Je vous remercie, monsieur Villemure, de votre déclaration.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous disposez de deux minutes et demie pour conclure cette discussion.
    D'accord, je vais faire un nouvel essai.
     Monsieur Conacher, dans votre intervention, je pense que vous avez soulevé un point important concernant la divulgation proactive des mécanismes de déclaration des enquêtes. Je veux vous laisser un peu de temps pour nous faire part de vos réflexions sur des façons dont nous pourrions améliorer la divulgation proactive des enquêtes ou des résultats. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Bien sûr.
     Le Parlement enfreint la Loi sur le lobbying en omettant de renvoyer à ce comité ou à un autre comité l'examen de la Loi sur le lobbying au cours des 10 dernières années. Il aurait dû le faire deux fois. La Loi devrait être révisée, et l'un des éléments à inclure est que la commissaire au lobbying soit tenue de publier un résumé public de chaque examen ou enquête sur toute situation ou plainte dont elle est saisie. Si elle déclare la personne non coupable, il ne serait pas nécessaire de l'identifier, mais nous saurions au moins si elle fait son travail, et le résumé révélerait quand la situation est survenue, quand la plainte a été reçue, quand l'enquête a commencé, quand elle a pris fin, quelle en a été la conclusion et ce que la commissaire a fait.
     Nous serions informés, comme quand Karen Shepherd était commissaire. Elle a déclaré plus de 100 lobbyistes coupables d'avoir enfreint le Code des lobbyistes, et elle les a laissés s’en tirer en secret sans en identifier aucun et sans déposer de rapport au Parlement, de sorte que nous ne savons toujours pas de qui il s’agit, ces 100 lobbyistes qui continuent probablement à faire du lobbying sans respecter l'éthique.
    J’ai peu de temps, monsieur.
     À votre avis, quelles sanctions ou quelles mesures de conformité seraient justifiées après coup, si quelqu'un est reconnu coupable?
    D'avoir enfreint le Code de déontologie des lobbyistes?
    Exactement.
    Des sanctions administratives pécuniaires devraient être mises en place, comme l'a fait le commissaire aux élections fédérales. La commissaire au lobbying les a réclamées. Ces sanctions devraient être infligées selon une échelle mobile, et je crois au concept de la capacité de payer, donc elles devraient être plus salées si votre revenu est plus élevé. De plus en plus d'universitaires plaident pour cette solution aux États-Unis, une solution qui a été mise en oeuvre dans certains endroits. La sanction devrait avoir la même signification pour chacun, et cela signifie que si votre revenu est plus élevé, la sanction qui vous est infligée devrait être plus élevée parce que vous pouvez vous permettre de payer plus.
    Dans le cas d'une société, la sanction devrait également être adaptée à sa taille.
    Oui, si vous voulez décourager les violations, la sanction doit avoir un sens.
    Je suis d'accord.
     Vous avez recommandé que des mesures de conformité soient ajoutées à la fin du projet de la règle 2.2 de manière à exiger la divulgation de renseignements confidentiels sous forme d’un dossier versé aux autorités compétentes.
     Avez-vous des recommandations concernant les mesures de conformité à l'égard des renseignements confidentiels qui ont été reçus sous d’autres formes que des documents gouvernementaux?
    Il devrait y avoir une divulgation du fait que des hauts fonctionnaires ont divulgué des renseignements à quelqu'un d'extérieur au gouvernement. En réalité, ce sont eux qui sont censés défendre la confiance du public et respecter la confidentialité de l'information, ils devraient donc payer la sanction la plus élevée.
     Si quelqu'un utilise ensuite ces renseignements pour ses activités de lobbying, la sanction devrait également être très élevée, car il s'agit essentiellement d'un système de « copinage », de personnes de l'intérieur qui vous font des faveurs en secret. La sanction devrait être très élevée parce qu'il est si facile de le dissimuler. Si vous vous faites prendre — et les chances sont grandes que vous ne vous fassiez jamais prendre — vous devriez vraiment payer une sanction très salée en conséquence.
    Merci, monsieur Conacher.
     Cela met fin à notre série de questions.
     J'ai deux choses à mentionner, mais d'abord, je veux poser une question.
     Le Comité s'est engagé auprès de la commissaire au lobbying à lui fournir des renseignements sur la base des témoignages qu’il a reçus.
     Je vais poser la question aux trois témoins, très rapidement. Parmi l’information que vous nous avez fournie aujourd'hui, y aurait‑il quelque chose de nouveau pour la commissaire au lobbying? Nonobstant le fait qu'elle n'était peut-être pas d'accord avec ce que vous proposez ou qu'elle ne l'a pas inscrit dans le Code de déontologie des lobbyistes, nous avez-vous fourni aujourd’hui de nouveaux renseignements que vous n’avez pas déjà fournis à la commissaire au lobbying?
     Le CTC peut répondre en premier.

  (1730)  

    Non. Nous sommes venus aujourd'hui avec ce que nous avons déjà présenté.
    Monsieur Thurlow, vous avez la parole.
    Oui, peut-être dans les échanges avec les intervenants, mais pas dans mon nouveau témoignage.
    Monsieur Conacher, vous avez la parole.
    Oui. Dans mes observations, j'exposerai les arrêts de la Cour suprême, montrant que si le Code est adopté tel quel, il violera la Charte. La période de restriction actuelle de quatre ans ne viole pas du tout la Charte. Elle est tout à fait conforme aux arrêts de la Cour suprême et aux décisions d'autres tribunaux canadiens.
    Je vous remercie.
    Au bénéfice du Comité, nous avons reçu une lettre de la commissaire au lobbying. La plupart d'entre vous l'ont reçue, ou elle se trouve dans votre reliure numérique. Elle porte sur sa décision de ne pas publier l'avis juridique qu'elle a reçu. Je sais que M. Green y a fait référence plus tôt, donc nous n’obtiendrons pas cet avis juridique.
    Dommage.
     Des voix: Oh, oh!
    Il y a un micro ouvert.
    J'invoque le Règlement, monsieur le président, en rappelant qu’il s'agissait d'une demande. Je veux respecter l'indépendance de la fonction, mais quelle est la jurisprudence sur le pouvoir suprême de notre comité de demander des documents? Elle a refusé une demande verbale. Il y a toujours la possibilité de présenter une motion, puis de permettre à la commissaire d'expliquer à la Chambre des communes pourquoi cela ne relève pas de notre compétence.
     Je pense que nous conserverons cette option. J'espère que nous pourrons être pleinement informés. Si des gens invoquent la Charte — c’est une allégation assez importante en ce qui concerne un avis juridique — je pense qu'il serait dans l'intérêt de ce comité, et dans l'intérêt général du public, que le grand public ait accès à cet avis juridique.
     Quoi qu'il en soit, je vais conserver ce droit parlementaire de présenter une motion au moment opportun.
    Parfait. J’en ai parlé plus tôt pour informer le Comité d’un élément dont vous êtes probablement au courant. Il y aura peut-être une motion, ou le Comité devra peut-être prendre une quelconque mesure. Je vais consulter la greffière pour déterminer la meilleure façon de procéder à cet égard, puis j'en informerai le Comité.
    Nous avons une autre réunion dans le cadre de cette étude vendredi, alors nous pourrons peut-être en disposer à ce moment‑là. D'accord? Je voulais simplement que ce soit clair pour tous.
     Je tiens à remercier tous les témoins d'être venus aujourd'hui. Ce fut effectivement une discussion fascinante. Les divergences d'opinions aident le Comité. Je tiens également à remercier nos analystes et notre greffière d’avoir préparé nos travaux aujourd'hui.
     Au nom des Canadiens, je remercie tous nos témoins.
     La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU