:
Je vous souhaite tous la bienvenue à la 27
e réunion du Comité permanent de la condition féminine. Je déclare la séance ouverte.
Avant de commencer, j'aimerais féliciter tout le monde. Aujourd'hui marque la fin de nos travaux sur la condition féminine de la session en cours ainsi que le dépôt du rapport sur la violence entre partenaires intimes. Je remercie Mme Sihdu qui s'est chargée du rapport. Par ailleurs, le projet de loi a été déposé. Je vous félicite tous de votre collaboration.
Aujourd'hui, nous revenons à une autre étude très importante.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le mardi 1er février, le Comité poursuit son étude sur l'exploitation des ressources et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones.
La réunion a lieu aujourd'hui en format hybride.
Conformément à l'ordre de la Chambre des communes du 25 novembre 2021, les personnes peuvent être présentes dans la salle ou participer en distanciel au moyen de l'application Zoom. Aux termes de la directive du Bureau de régie interne émise le 10 mars 2022, toutes les personnes présentes dans la salle doivent porter le masque, à moins d'être assises à leur place pendant les délibérations.
J'ai quelques rappels à faire à l'intention des témoins et des membres.
Veuillez attendre que je vous appelle avant de prendre la parole. Les participants en distanciel doivent cliquer sur l'icône du microphone pour l'allumer et doivent l'éteindre lorsqu'ils n'ont pas la parole. Un service d'interprétation sera offert et vous pouvez choisir le canal du parquet, de l'anglais ou du français indiqué au bas de l'écran. Les personnes présentes dans la salle peuvent se servir de l'oreillette et choisir le canal désiré. Je vous rappelle tous que vos interventions doivent être adressées à la présidence.
J'aimerais maintenant présenter nos témoins.
Nous entendrons à titre personnel l'honorable Michèle Audette, sénatrice et ex‑commissaire de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Jennifer Brazeau représentera le Regroupement des centres d'amitié autochtones du Québec. Kimberley Zinck parlera au nom du ministère des Ressources naturelles et est la directrice générale de la réconciliation.
Le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile est représenté par Christine Moran, sous-ministre adjointe, Secrétariat aux affaires autochtones, Mélanie Larocque, directrice générale, Développement de programme et affaires intergouvernementales, Direction générale de la prévention du crime, et Michelle Van De Bogart, directrice générale, Application de la loi et des stratégies frontalières.
Patricia Brady et Brent Parker sont respectivement la vice-présidente et le directeur général des Relations extérieures et des politiques stratégiques de l'Agence canadienne d'évaluation d'impact.
Nous avons beaucoup de pain sur la planche aujourd'hui. Les témoins auront cinq minutes pour faire leur déclaration. Je vous ferai signe lorsqu'il vous restera une minute de temps de parole. Il se peut que je vous accorde 10 secondes de plus, mais comme nous avons un groupe de témoins extraordinaire aujourd'hui, nous voulons nous assurer que chaque témoin aura la possibilité de faire sa déclaration et que tous les intervenants pourront poser leurs questions également.
Au tour maintenant du premier témoin, l'honorable sénatrice Michèle Audette, qui s'exprime à titre personnel.
:
[
La témoin s'exprime en innu ainsi qu’il suit:]
Kuei! Nutim etashiek,tshipushukat Tshipushukatitunau.Niminueniten ute a taian
[Les propos en innu sont traduits ainsi:]
Bonjour. Je vous salue tous. Je suis heureuse d’être ici.
[Français]
Je remercie grandement la nation anishinabe de m'accueillir tous les jours sur son territoire et de me permettre de poursuivre tous les jours ce portage qui est cher à mon cœur et à mon esprit.
Je remercie toutes les personnes ici, de même que celles qui participent à la réunion de façon virtuelle à partir des territoires autochtones où elles se trouvent, de prendre part à cet exercice très important et urgent. Cette étude sur la montée de la violence faite aux femmes et aux filles autochtones au Canada dans le cadre de l'exploitation des ressources reflète aussi les appels à la justice 13.4 et 13.5 de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Alors, vous comprendrez d'entrée de jeu pourquoi il était primordial que je sois ici.
En toute sincérité, je vous avoue mon impatience et ma désolation devant le peu d'information qu'on reçoit sur la mise en œuvre des appels à la justice et de toutes les propositions que contenait le rapport déposé le 3 juin 2019. Récemment, on célébrait le troisième anniversaire du dépôt de ce rapport ainsi que le premier anniversaire du Plan d’action national pour les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones disparues et assassinées. Or, comme vous l'avez toutes et tous remarqué, le constat après la lecture du rapport d'avancement du plan d'action national, c'est que bien peu de choses ont été mises en œuvre. Cela démontre l'importance d'une étude comme celle entreprise par votre comité.
Ce qui me tient le plus à cœur, c'est toute la question des mécanismes de coordination, la mise sur pied d'un numéro d'urgence national, l'établissement d'un revenu minimum garanti et la mise en place de services de soutien disponibles 24 heures sur 24 pour les personnes vulnérables ou en danger. Il manque beaucoup de services de ce genre un peu partout au Canada.
Je cite le Globe and Mail:
[Traduction]
Presque deux ans après l'annonce faite par le gouvernement libéral concernant un fonds de 724,1 millions de dollars destiné à appuyer les femmes et les filles autochtones victimes de violence fondée sur le sexe, l'argent demeure largement intouché, selon les chiffres fournis par le gouvernement au 31 mai.
Plus de la moitié du fonds était destinée à la construction d'au moins 38 nouveaux refuges et 50 maisons de transition au Canada, mais aucune somme n'a été attribuée. Les 304,1 millions de dollars restants devaient servir au fonctionnement des nouveaux refuges ainsi qu'à des activités de prévention de la violence. Vu l'absence de travaux de construction, rien n'a été dépensé au titre du fonctionnement, alors que le gouvernement a dépensé 12,6 millions de dollars sur des activités de prévention, ce qui représente moins que 2 % du fonds total.
[Français]
Alors, comme je l'ai mentionné maintes fois, tous les appels à la justice sont importants, mais on doit pousser à l'avant-plan l'appel à la justice 1.7, qui demande la création d'un poste d'ombudsman national et d'un tribunal national en matière de droits des Autochtones et de droits de la personne, ainsi que l'appel à la justice 1.10, à propos des rapports qui doivent être faits. Comme on a pu le constater avant-hier, la transparence et la reddition de comptes quant à l'état des travaux sont primordiales. Alors, j'espère que vous allez aussi tenir compte de ces appels à la justice.
En 2022, beaucoup trop de femmes et de filles autochtones se sentent en danger et moins en sécurité. Comme vous le voyez, les données parlent d'elles-mêmes. Le mois dernier, en l'espace de deux semaines, trois femmes autochtones ont été assassinées sur votre territoire, madame Gazan. Maintenant, on comprend que c'est plus que cela. Pour moi, c'est une situation urgente et inacceptable sur laquelle tout le monde doit se pencher. Bien sûr, chaque fois que nous entendons de tristes nouvelles comme celles-là, nous pensons aux familles et nous leur envoyons tout l'amour possible, ainsi que nos condoléances.
Il faut aussi protéger les droits de la personne et les droits des femmes. On doit mettre en place des mécanismes de protection qui, en fonction des lois et des règlements, prévoient des sanctions sévères. Je cite en exemple l'amende de 15 millions de dollars que vient de se faire imposer ArcelorMittal, une compagnie minière reconnue coupable d'infractions environnementales. Imaginez ce que ce serait si nous mettions en place des mécanismes semblables pour protéger les femmes autochtones. C'est l'exemple le plus récent et le plus frappant, et je tenais à vous en faire part aujourd'hui.
Au-delà des sévices physiques et sexuels, l'exploitation des ressources a des conséquences dans tous les azimuts sur les femmes autochtones, et sur les femmes en général. Je vous dirais qu'il est important de lier cette question à la relation spirituelle, physique et mentale que nous avons avec l'eau, la nature, la flore, les animaux et tout ce que la nature et le territoire nous permettent d'honorer. La santé holistique et la santé environnementale en subissent aussi les conséquences.
En conclusion, peu importe où nous sommes sur ce grand territoire, nous avons tous et toutes la responsabilité d'honorer les vérités des femmes et des jeunes filles ainsi que, bien sûr, des survivantes et des familles qui ont pris la parole lors des enquêtes.
Je vous souhaite une bonne étude. J'ai hâte de voir vos recommandations.
:
[
La témoin s'exprime en anishinaabemowin ainsi qu'il suit:]
Kwe kakina.
[Les propos en anishinaabemowin sont traduits ainsi:]
Bonjour à tous.
[Traduction]
Je m'appelle Jennifer Brazeau. Je suis la directrice générale du Centre d'amitié autochtone de Lanaudière. Je vous parle aujourd'hui au nom du Regroupement des centres d'amitié autochtones du Québec, une association provinciale qui milite depuis plus de 45 ans pour défendre les droits et les intérêts des peuples autochtones dans les centres urbains, tout en appuyant la prestation de services de première ligne dans les centres d'amitié autochtones.
Le Québec compte 10 centres d'amitié ainsi qu'un guichet de service. Les centres d'amitié offrent des services aux personnes autochtones qui vivent ou qui sont de passage dans les centres urbains de Chibougamau, Joliette, La Tuque, Maniwaki, Val-d'Or, Montréal, Québec, Senneterre, Sept-Îles et Trois-Rivières. Il y a également un guichet de service à Shawinigan.
Je représente aussi la province du Québec au sein de l'Association nationale des centres d'amitié au sein de son conseil d'administration. Plus de 100 centres d'amitié offrent leurs services aux personnes autochtones vivant dans des centres urbains canadiens. Le RCAAQ et l'ANCA constituent le plus grand réseau de service aux personnes autochtones en milieu urbain.
Le mouvement des centres d'amitié œuvre depuis plusieurs décennies afin de soutenir les personnes autochtones qui cherchent à améliorer leur qualité de vie. Nous aidons aussi les personnes autochtones à se retrouver dans les divers systèmes du gouvernement en offrant des services qui font le lien entre le centre d'amitié et les services publics dans chacune de nos régions. Lorsque le système ne répond pas aux besoins des personnes autochtones dans les centres urbains, les centres d'amitié proposent de l'aide. Nous sommes là pour soutenir les gens, mais surtout, nous offrons un milieu sûr, à l'abri des jugements.
Au cours des dernières décennies, le RCAAQ a témoigné et participé dans le cadre de diverses commissions et enquêtes, commissions parlementaires, rapports et dépositions, et a aidé à formuler des recommandations et appels à l'action. Nous avons proposé des solutions novatrices aux questions soulevées par le gouvernement, les Canadiens et nos membres. Nous avons travaillé d'arrache-pied, sans renier notre histoire, sans effacer les traumatismes que nos membres ont subis et surtout, sans oublier les tragédies qui ont lieu actuellement, même en 2022.
Nous n'oublierons jamais. C'est la raison pour laquelle nous voulons briser le cycle de l'indifférence et de la violence en offrant des mesures et des solutions concrètes aux personnes autochtones et en créant des partenariats au moyen de nos réseaux. Il existe une barrière culturelle tenace qui a une incidence dévastatrice sur nos gens à la suite des nombreuses décennies durant lesquelles les personnes autochtones ont été contraintes au statu quo. Nous savons tous qu'elles affichent des taux plus élevés de criminalisation et de victimisation. Les droits individuels et collectifs des peuples autochtones ne sont pas respectés et les femmes autochtones subissent souvent de plein fouet la violence coloniale.
Je pourrais vous parler longuement des statistiques sur la violence dirigée contre les femmes autochtones. Vous entendrez d'autres experts à ce sujet. J'aimerais vous expliquer comment cette violence est ancrée dans la culture canadienne de génocide en raison de l'exploitation de nos territoires, et que cela a une incidence sur la façon dont les femmes autochtones se perçoivent, et la façon dont leurs corps sont exploités par les systèmes découlant du racisme systémique, du déplacement continu des peuples autochtones de leur territoire, de l'impossibilité de participer aux activités culturelles dans leurs territoires et de l'activité des sociétés minières qui sont surreprésentées au Canada. Nous devons prendre le temps de réfléchir et de nous demander pourquoi le Canada compte tant de sociétés minières. Est-ce un réflexe systémique dans la façon dont les Canadiens exploitent nos territoires? Ces sociétés s'implantent dans d'autres pays, où elles continuent d'exploiter les ressources et de perpétuer le cycle de violence et de traumatisme dans d'autres pays.
Nous devons vous dire que lorsque nous, les femmes autochtones, voyons ces sociétés arriver et détruire les espaces naturels, avec lesquels nous entretenons des liens culturels serrés, lorsque les sociétés exploitent la nature qui nous entoure, cela a une incidence profonde sur nous, parce qu’à ce moment-là, nos corps et nos personnes sont également exploités. Avec l'arrivée des sociétés minières, on constate une hausse de la violence associée aux allées et venues des travailleurs. Les femmes autochtones fuient leurs communautés et tentent de trouver un refuge dans les villes, où elles se livrent parfois à l'automédication et doivent ensuite vendre leurs propres corps pour se prévaloir de services.
Merci.
Je me nomme Kimberley Zinck et je suis la directrice générale de la mise en oeuvre de la réconciliation à Ressources naturelles Canada. Je me joins à vous aujourd’hui depuis le territoire traditionnel et non cédé des peuples algonquin et anichinabé.
Je suis heureuse de contribuer à l’étude du Comité sur l’exploitation des ressources et la violence faite aux femmes et aux filles autochtones. J’aimerais vous décrire la façon dont le ministère change sa façon de travailler en intégrant les perspectives des Autochtones dans son travail ainsi que les occasions qui s'offrent à eux.
En 2021, nous avons fusionné le Bureau de gestion des grands projets avec le secteur des affaires autochtones et de la réconciliation et, en mars dernier, les aînés avec lesquels nous collaborons nous ont donné le nom de « Nòkwewashk », un mot algonquin signifiant « herbe sacrée ». Il semble que nous soyons parmi les premiers organismes au sein du gouvernement canadien à adopter un nom autochtone dont le sens aura une incidence sur notre travail.
L’image de l’herbe sacrée tressée nous rappelle le lien entre la terre, les ressources et les personnes.
[Français]
Notre travail repose sur les relations avec les peuples autochtones, la réconciliation économique et l'innovation en matière de réglementation.
C'est dans cet esprit que je me présente devant vous aujourd'hui.
[Traduction]
Nous reconnaissons que la discrimination et la violence dont sont victimes les femmes et les filles autochtones, ainsi que les personnes 2ELGBTQQIA+, sont le résultat de lois et de politiques racistes, sexistes et coloniales appliquées depuis des générations.
C’est pourquoi nous travaillons en partenariat avec le ministère de la Justice à l’élaboration du plan d’action relatif à la Loi sur la Déclaration des Nations unies pour mettre en œuvre le Plan d’action national visant à mettre fin à la violence sexiste et la voie fédérale pour traiter la question des femmes, des filles autochtones et des personnes 2ELGBTQQIA+ disparues et assassinées.
Les peuples autochtones sont les gardiens, les détenteurs de droits et, dans de nombreux cas, les détenteurs de titres de propriété de terres qui sont exploitées. Les appels à la justice nous indiquent qu’il faut en faire plus pour comprendre les répercussions de l’exploitation des ressources sur les femmes et les filles autochtones et garantir aux peuples autochtones un accès équitable aux retombées économiques.
[Français]
En travaillant avec des organisations de femmes autochtones comme Pauktuutit, nous contribuons à assurer la sécurité et le bien-être des femmes inuites dans l'industrie de l'extraction des ressources.
Nous ouvrons la voie au Canada dans la compagne mondiale Parité d'ici 30, qui vise à assurer l'égalité des salaires, du leadership et des possibilités aux femmes dans le secteur de l'énergie propre.
[Traduction]
Grâce à nos programmes et à notre gouvernance, nous veillons à ce que les points de vue des peuples autochtones soient pris en compte, respectés et représentés tout au long du cycle de vie des projets et à ce que les peuples autochtones tirent économiquement profit de l’exploitation des ressources.
Le programme de Partenariats pour les ressources naturelles autochtones accroît la participation des communautés et des organisations au développement des grandes infrastructures des ressources naturelles. Depuis 2019, nous avons financé, à hauteur de 18 millions de dollars, 69 projets d’initiative autochtone pour offrir aux femmes autochtones, par exemple, de la formation en gestion et en leadership dans le secteur pétrolier et gazier.
Nous travaillons directement avec les communautés par l’intermédiaire du Comité consultatif et de surveillance autochtone pour le projet d’agrandissement de Trans Mountain afin d’aborder les répercussions de l’aménagement de camps de travail temporaires et de l’afflux de travailleurs.
L’industrie minière entretient des relations profondes et de longue date avec les communautés autochtones. La Stratégie canadienne sur les minéraux critiques assurera le respect des droits autochtones et des droits issus de traités, ainsi qu’un engagement, un partenariat et une collaboration significatifs avec les peuples autochtones.
En travaillant avec des organisations de l’industrie, telles que l’Association minière du Canada, nous contribuons à favoriser la sensibilisation et les compétences interculturelles, ainsi qu’une formation sur les droits de la personne et la lutte contre le racisme.
En conclusion, en reconnaissant les erreurs du passé et en changeant notre façon de travailler aujourd’hui, nous façonnons la manière dont nous prenons soin de la terre, des ressources et des peuples autochtones.
[Français]
Merci. Meegwetch. Thank you.
Je vous remercie de m'avoir accordé ce temps. Vos questions et vos commentaires sont les bienvenus.
:
Merci, madame la présidente, de m'avoir donné l'occasion de vous parler aujourd'hui.
Comme vous l'avez dit, je m'appelle Christine Moran, et je suis la sous-ministre adjointe du Secrétariat aux affaires autochtones de Sécurité publique Canada. Je suis accompagnée de ma collègue, Michelle Van De Bogart, directrice générale de l'application de la loi, et de Mélanie Larocque, directrice générale du développement de programmes et des affaires intergouvernementales. Je vais faire une déclaration liminaire au nom du ministère et nous serons heureuses de répondre à vos questions.
Sécurité publique Canada est un partenaire dans l'avancement de la voie fédérale concernant les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones disparues et assassinées, un élément clé du plan d'action national 2021 plus vaste qui a été élaboré conjointement avec des partenaires autochtones et les gouvernements provinciaux et territoriaux.
La voie fédérale est organisée selon quatre thèmes, les contributions de Sécurité publique Canada s'inscrivant principalement dans les thèmes de sûreté et sécurité des personnes et de justice.
La collaboration avec les communautés autochtones, les provinces et les territoires, la police et d'autres organisations est essentielle pour élaborer des approches de la sécurité communautaire plus adaptées à la culture et à la société.
Le budget 2021 prévoyait 861 millions de dollars sur cinq ans, à partir de 2021‑2022, et 145 millions de dollars en permanence, pour soutenir des services de police et de sécurité communautaire adaptés à la culture dans les communautés autochtones. Cela comprend le financement de l'élaboration conjointe d'une loi fédérale sur les services de police des Premières Nations. Des séances de mobilisation virtuelles avec les Premières Nations ont eu lieu pour soutenir cet objectif et un rapport « Ce que nous avons entendu » sera rendu public.
Bien que les efforts visant à élaborer conjointement une législation fédérale pour les services de police des Premières Nations soient en cours, nous consultons aussi les groupes inuits et métis pour mieux comprendre et identifier leurs priorités uniques en matière de services de police et de sécurité communautaire.
Nous améliorons également les services de la GRC financés par le Programme des services de police des Premières Nations et des Inuits, ce qui accroît l'accès à des services de police spécialisés et adaptés à la culture dans les régions souvent touchées par l'exploitation des ressources naturelles, y compris les territoires.
En plus de nos investissements dans la police autochtone, le budget 2021 a annoncé jusqu'à 64,6 millions de dollars sur cinq ans, et 18,1 millions de dollars en permanence, pour améliorer les stratégies de prévention du crime et les services de sécurité communautaire dirigés par des Autochtones, notamment par le biais de l'Initiative en matière de planification de la sécurité des collectivités autochtones, l'IPSCA.
L'objectif de l'IPSCA, créé en 2010, est de soutenir directement la guérison de la communauté autochtone par le biais d'un processus communautaire facilité qui vise à résoudre de multiples problèmes de sécurité et de bien-être, tels que déterminés par la communauté à l'aide d'un processus de plan de sécurité communautaire. Les plans reflètent les défis de sécurité de la communauté, ses forces, ses ressources et ses objectifs.
En outre, l'IPSCA coordonne au sein du gouvernement, avec les partenaires provinciaux et territoriaux, les administrations et services municipaux locaux, et les partenaires de l'industrie pour traiter les questions soulevées dans les plans de sécurité. Par exemple, Sécurité publique, Ressources naturelles Canada et Trans Mountain Corporation ont récemment collaboré pour aider les communautés autochtones à atténuer les risques posés par la proximité des chantiers de l'industrie par rapport à leurs communautés, y compris les impacts sur les femmes et les filles autochtones.
Je sais que vous avez déjà entendu des témoignages sur les camps transitoires d'exploitation des ressources naturelles et sur le lien évident entre ces camps et la violence sexuelle à l'égard des femmes et des filles autochtones, y compris la traite des personnes.
La traite des personnes constitue un crime complexe et hautement sexiste, dont les causes profondes sont la pauvreté, le sexe, le racisme, l'inégalité des salaires, le manque d'éducation et de possibilités d'emploi — et nous savons que les populations autochtones en sont victimes de manière disproportionnée. En septembre 2019, le a lancé la Stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes, qui regroupe les efforts fédéraux dans un seul cadre stratégique. La stratégie nationale repose sur les piliers internationalement reconnus que sont la prévention, la protection, les poursuites judiciaires et les partenariats, et ajoute un nouveau pilier, l'autonomisation, qui vise à renforcer le soutien aux victimes touchées par ce crime.
Dans le cadre de la Stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes, le gouvernement du Canada a investi jusqu'à 22,4 millions de dollars dans des organisations qui s'efforcent de prévenir la traite des personnes et de soutenir les populations à risque et les survivants. La moitié de ces organisations sont au service des autochtones, et 10 d'entre elles sont dirigées par des Autochtones. Ces projets ont amélioré et continuent d'améliorer l'accès aux services et aux aides pour les victimes et les survivants, sensibilisent les jeunes à risque à la traite des personnes, et développent des idées technologiques innovantes pour lutter contre la traite des personnes.
Il est essentiel de sensibiliser les Canadiens à la traite des personnes. La Sécurité publique a lancé une campagne de sensibilisation intitulée « La traite des personnes : ce n'est pas ce qu'on croit » pour informer le public, en particulier les jeunes et les parents, sur la traite des personnes, qui comprenait des groupes de discussion spécifiques aux Autochtones. Nous travaillons également à l'élaboration et au soutien de directives et d'outils de formation destinés aux prestataires de services de première ligne, y compris des directives spécifiques pour soutenir les survivants autochtones.
Grâce à ces efforts, Sécurité publique Canada travaille avec les survivants, les communautés, les organisations et les services de police autochtones pour renforcer la sécurité des femmes et des filles autochtones.
Mme Van De Bogart, Mme Larocque et moi ferons un plaisir de répondre à vos questions.
Merci beaucoup, madame la présidente.
:
Merci, madame la présidente.
Bonjour. Je m'appelle Patricia Brady et je suis vice-présidente des Relations extérieures et politiques stratégiques à l'Agence d'évaluation d'impact du Canada. Je suis accompagnée aujourd'hui de mon collègue, Brent Parker, qui est directeur général des politiques stratégiques à l'Agence.
Nous sommes tous les deux reconnaissants de pouvoir nous joindre au Comité depuis Ottawa, le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anichinabé.
[Français]
Nous vous remercions de nous donner l'occasion de contribuer à l'étude du Comité sur la violence faite aux femmes et aux filles autochtones dans le contexte de l'exploitation des ressources.
L'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a mis en lumière la portée et l'ampleur dévastatrices de ce problème et a fourni des orientations pour s'y attaquer. L'Agence d'évaluation d'impact du Canada, dans son rôle de responsable des évaluations fédérales des grands projets, est déterminée à se pencher sur les appels à la justice qui touchent ses travaux et y travaille activement.
[Traduction]
L'Agence canadienne d'évaluation d'impact se charge de l'évaluation de grands projets, comme certaines grandes mines, certaines grandes installations pétrolières et certains grands barrages, pour établir leurs impacts positifs et négatifs sur le plan environnemental, économique, social et sanitaire. Elle soutient ainsi ainsi que la gouverneure en conseil dans la prise de décisions relatives à ces projets. Les évaluations déterminent à l'avance les meilleures façons d'éviter ou de réduire les répercussions négatives d'un projet. Elles cherchent aussi à trouver des façons d'améliorer les aspects positifs d'un projet en ce qui a trait aux résultats sanitaires, sociaux et économiques.
La Loi sur l'évaluation d'impact, qui est entrée en vigueur en août 2019, a remplacé la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale de 2012. Elle régit notre travail et comprend d'importantes dispositions et étapes de processus qui se rapportent au mandat du Comité. Je vais maintenant les énumérer.
Premièrement, le préambule de la Loi sur l'évaluation d'impact comprend l'engagement du gouvernement du Canada à promouvoir la réconciliation, pour mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et pour s'assurer que les droits des peuples autochtones sont respectés tout au long des évaluations fédérales des impacts.
Deuxièmement, pour ce qui est des évaluations et de la prise de décisions, la Loi exige que les répercussions d'un projet sur les droits des peuples autochtones et ses effets sur leurs conditions sanitaires, sociales et économiques soient prises en considération. Selon la Loi, le savoir autochtone doit être pris en considération. Les évaluations stratégiques et régionales doivent également tenir compte des connaissances des femmes autochtones. Nous devons rendre compte publiquement de la façon dont ces connaissances sont prises en considération tout en protégeant les connaissances confidentielles.
La Loi exige également une analyse comparative entre les sexes plus, ou ACS+, pour comprendre les répercussions disproportionnées que les grands projets ont sur divers sous-groupes de personnes. Pour appuyer cette exigence, nous comptons sur l'expertise et les conseils de Femmes et Égalités des genres Canada. L'application d'ACS+ signifie que les répercussions disproportionnées, y compris les conséquences sur les droits des femmes autochtones et sur leur sécurité, ainsi que les mesures d'atténuation seront répertoriées à l'avance. Le décideur doit tenir compte de ces effets disproportionnés et de ces mesures d'atténuation.
Pour faciliter une participation concrète au processus d'évaluation, nous exigeons qu'un plan de mobilisation et de partenariat avec les Autochtones soit élaboré dès le début du processus afin de contribuer à orienter l'évaluation. L'Agence dispose aussi d'un programme de maintien des capacités qui offre une aide financière aux groupes autochtones pour qu'ils soient préparés à participer aux processus d'évaluation de manière générale ainsi qu'un programme de financement pour faciliter la participation à des évaluations de projets précis.
Pour chaque projet évalué, des lignes directrices individualisées relatives à l'étude d'impact sont émises par l'Agence. Jusqu'à maintenant, les projets ont inclus une exigence de prendre en compte les risques à la sécurité des femmes autochtones. L'Agence dispose d'une orientation sur l'ACS+ dans les évaluations d'impact, laquelle comprend un renvoi particulier vers les appels à la justice 13.1 à 13.5 pour guider les travaux des promoteurs.
Le processus exige aussi que le promoteur atténue les effets négatifs dans la mesure du possible. Si le projet va de l'avant, ces mesures d'atténuation sont ajoutées comme conditions exigées par la Loi dans la déclaration de décision émise par le ministre, et le promoteur doit s'y conformer. Cela comprend des mesures pour contribuer à la protection des femmes autochtones.
[Français]
Finalement, dans le but d'améliorer nos processus, au cours des dernières années, nous avons travaillé activement avec des partenaires tels que l'Association des femmes autochtones du Canada pour mieux comprendre les enjeux et renforcer l'évaluation d'impact pour les femmes autochtones.
L'Agence a aussi financé des recherches sur l'analyse comparative entre les sexes et l'évaluation d'impact, y compris des rapports sur les répercussions particulières des grands projets sur les femmes et les filles autochtones.
Je vous remercie de nous avoir donné cette occasion de contribuer aux travaux importants du Comité.
[Traduction]
Merci.
:
Merci, madame la présidente.
Je remercie grandement toutes les personnes ici de leurs témoignages et de leur leadership dans le domaine. Je pourrais passer beaucoup de temps avec chacun des témoins, mais je n'ai malheureusement que six minutes et Mme la présidente ma ramènerait à l'ordre si je dépassais mon temps de parole.
Ma première question s'adresse à la sénatrice Audette.
Je vous remercie grandement de votre leadership à l'égard de la communauté autochtone et de votre travail à titre de commissaire de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées. Je vous remercie également de vos commentaires sur le fait que nous devons faire mieux et que nous devons continuer nos revendications.
J'aimerais vous demander d'exposer votre pensée plus en détail. Vous avez terminé votre présentation en disant que vous aviez hâte de voir nos recommandations. Comme vous avez beaucoup d'expérience dans le domaine, j'aimerais vraiment entendre vos recommandations quant au sujet d'étude qui est devant nous, soit la violence faite aux femmes et aux filles autochtones dans le contexte de l'exploitation des ressources.
Madame la sénatrice, pouvez-vous donner quelques recommandations précises au Comité?
Notre comité travaille très bien ensemble. Nous travaillons de façon non partisane et nous voulons trouver des solutions.
:
Merci beaucoup de votre question.
C'est le principe de la tolérance zéro qui doit s'appliquer envers toute forme de violence, qu'il s'agisse de violence sexuelle, de violence physique, de discrimination ou de racisme. C'est à vous d'élaborer les libellés en conséquence.
Par contre, rappelons-nous qu'il ne faut pas aborder de façon isolée la question de l'exploitation des ressources et des droits des femmes autochtones. Il faut aussi penser à la relation avec le territoire, l'environnement, et ainsi de suite. Tous ces aspects sont interreliés.
Rappelons-nous aussi que nous avons ici des députés qui représentent des territoires et des régions où se fait de l'exploitation minière, et c'est une question qui implique les gouvernements provinciaux et territoriaux. L'exercice doit se faire également avec ceux et celles qui semblent donner des choses sans nécessairement écouter nos voix sur le territoire.
Lorsqu'on parle de sécurité, assurons-nous que les mécanismes ou les espaces prévus pour dénoncer une situation de violence sont connus et qu'ils sont encadrés par des gens ayant une expertise. Je vais terminer brièvement par cette recommandation extrêmement importante: la présence d'une personne autochtone ne suffit pas pour assurer la légitimité d'un mécanisme. Pour leur part, les institutions canadiennes ont une panoplie d'experts pour défendre leurs intérêts. Il est important de faire appel à des femmes qui ont vécu diverses situations ou qui ont des connaissances approfondies des questions autochtones.
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Merci beaucoup de poser la question.
On en fait énormément au sein de l'organisation pour promouvoir la diversité et l'inclusion, en particulier en matière d'embauche et pour assurer une représentation des voix autochtones à nos propres tables.
Dans mes observations liminaires, j'ai parlé du changement que nous avons apporté en tant qu'organisation en fusionnant le Bureau de gestion des grands projets avec le service chargé des affaires autochtones et de la réconciliation. Ce faisant, nous apportons le point de vue autochtone dans tout ce que nous faisons. Nous nous organisons pour travailler avec des partenaires partout dans la famille libérale pour donner suite à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones et à la Voie fédérale.
Nous avons un réseau d'employés autochtones, par exemple, et nous avons à l'organisation des responsables de l'équité, de la diversité et de l'inclusion. Il ne s'agit là que du travail que nous faisons à l'interne, et cela n'est pas dans un seul secteur du ministère, mais dans tous les secteurs.
:
Merci beaucoup, madame la présidente.
Comme l'ont fait mes collègues, je remercie à mon tour les témoins qui comparaissent aujourd'hui afin de nous parler de cette question.
L'actualité récente nous rappelle que, derrière les statistiques et les chiffres qui démontrent certains effets disproportionnés sur les femmes autochtones, il y a des visages, des vécus et des histoires tristes. Pour toutes ces raisons, nous devons nous pencher sur ce problème et travailler ensemble afin de trouver des solutions.
Ma première question s'adresse à la sénatrice Audette.
Vous avez parlé des sommes qui avaient été promises pour mettre en application les recommandations. J'aimerais que vous nous en parliez davantage. Ce sont quand même d'énormes sommes qui sont retenues actuellement. Quelles sont les répercussions lorsqu'on retient ces sommes? On promet de l'argent, mais encore faut-il qu'il se rende sur le terrain, si l'on veut réussir à concrétiser différents projets. J'aimerais vous entendre nous expliquer un peu plus pourquoi il est important que l'argent se rende sur le terrain.
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Je vous remercie de cette importante question, madame la députée.
Quant à la façon d'investir et de dépenser l'argent, le Canada a suivi pendant longtemps des critères qui étaient d'une complexité rigide pour les organisations sur le terrain, notamment celles qui étaient petites ou qui étaient situées loin des grands centres urbains et qui, par conséquent, n'avaient pas accès à des consultants et des experts capables de rédiger des projets en fonction de la culture fédérale. La COVID‑19 est venue briser tout cela. On a été capable de sauver des vies, d'accompagner des personnes, d'être créatif et d'être en action plutôt qu'en réaction.
Ici, on parle d'une crise nationale, d'une tragédie nationale. Des femmes autochtones disparaissent ou meurent chaque semaine au Canada. Pourtant, on réalise que les règles et les façons de rédiger des projets restent aussi rigides qu'avant. Comment dire à des femmes qui sauvent des vies sur le terrain qu'elles doivent se conformer aux critères établis par tel ou tel programme du gouvernement fédéral?
Pour ce qui est des investissements dans les infrastructures afin de construire des bâtiments et des espaces, par exemple, ou de rénover ou construire des maisons pour protéger des femmes, il est compréhensible qu'on ne dépense pas tout de suite tous les fonds. Par contre, je ne comprends pas qu'on ait de la difficulté à recevoir du financement pour certaines initiatives hallucinantes qui sauvent des vies ou qui accompagnent des personnes. C'est plutôt le gouvernement qui devrait répondre à cette question.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Ma première question est pour Mme Zinck du ministère des Ressources naturelles.
Vous avez dit que votre ministère s'efforce d'intégrer des points de vue autochtones dans son remaniement, mais voici le problème. Au cours de la dernière législature, le gouvernement a adopté le projet de loi pour procéder à la mise en œuvre complète et à l'adoption de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, et nous devons donc aller au‑delà des points de vue afin d'obtenir un consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Je veux définir cela pour vous: « donné librement » signifie sans coercition ni intimidation; « préalable » signifie avant l'élaboration; et « en connaissance de cause » signifie qu'il faut savoir ce qui est élaboré et en connaître les conséquences. C'est seulement lorsque ces trois éléments sont réunis qu'on peut parler de consentement.
Je vais vous donner un exemple. Dans le territoire des Wet'suwet'en, la Gendarmerie royale du Canada, la GRC, s'est présentée avec une hache, une tronçonneuse et un chien d'attaque et a défoncé la porte de femmes non armées sur leur territoire non cédé. Pensez-vous, oui ou non, que ce geste est conforme au consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause, pour revenir à l'absence de coercition et d'intimidation?
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Je vous remercie beaucoup de votre question.
Je peux vous informer que c'est une activité à laquelle nous travaillons en ce moment. Un contrat a été attribué, et nous nous employons à rédiger les directives elles-mêmes.
Vous avez mentionné que l'initiative vise à former des personnes qui sont membres du secteur ou qui exploitent des entreprises. Nous nous concentrons sur quatre domaines clés. Dans le secteur de l'accueil, nous nous concentrons sur des personnes comme les employés de la réception ou ceux qui nettoient les chambres d'hôtel. Dans les centres de santé, nous nous concentrons sur les infirmiers, car nous savons que de nombreuses personnes victimes de la traite des personnes entrent dans le système de santé par les urgences. Du point de vue des transports, nous nous concentrons sur le secteur de l'aviation. Le dernier secteur que nous ciblons est celui des travailleurs étrangers. Comme nous le savons, même si la plupart des victimes de la traite des personnes le sont à des fins d'exploitation sexuelle, la traite des personnes exploite également des travailleurs.
Ce que je peux vous dire, c'est que ces travaux sont bien avancés.
La dernière chose que j'aimerais ajouter, c'est que les documents liés aux outils seront orientés par des survivants de l'exploitation sexuelle et de l'exploitation des travailleurs au Canada.
En ce qui concerne au moins les programmes des services de police des Premières Nations et des Inuits, nous recueillons des données. Une corrélation est établie entre une partie de ces données et des données externes. Ce que je peux vous dire, c'est que nous savons, grâce à notre propre collecte de données, que les membres des communautés qui disposent d'un service de police géré par leur communauté se sentent beaucoup plus en sécurité et se sentent plus à l'aise d'interagir avec la police.
Le centre national autochtone sur l'information et la gouvernance a indiqué que plus de 30 % des membres des communautés disposant d'une force de police gérée par leur communauté déclarent se sentir en sécurité, alors que moins de 10 % de ceux qui ne disposent pas d'une force de police gérée par leur communauté déclarent se sentir en sécurité. C'est un facteur important, et c'est un chiffre très important pour nous.
Grâce à notre propre suivi, nous constatons également que lorsque nous investissons dans des services de police communautaires dans des communautés des Premières Nations, nous obtenons de meilleurs résultats.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
J'allais m'essuyer les yeux. Je me rends compte que le débat d'aujourd'hui me rend particulièrement émotive. C'est la dernière fois de la session que le Comité permanent de la condition féminine se réunit. De mon côté, cette session a été marquée par la naissance de ma première petite fille. Quand on parle de violence envers les femmes, cela me touche particulièrement, en ce moment. Je suis désolée, je suis un peu émotive aujourd'hui.
Au sujet de la violence envers les femmes, je me demande comment on peut accroître le sentiment de confiance chez les femmes dans les communautés. Il s'agit d'un facteur déterminant, qui peut amener ces femmes à dénoncer certaines situations. C'est ce que je disais à la fin de mon premier tour de parole.
Madame Brady, vous avez abordé cette question rapidement. J'aimerais que vous me disiez ce qu'on pourrait faire de plus, présentement, pour accroître ce sentiment de sécurité.
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Merci beaucoup de cette importante question, madame la députée.
Nous avons entendu des initiatives de la part des membres du gouvernement. Or, les initiatives vont de pair avec une volonté politique ou une couleur politique. Le jour où nous aurons nos propres gouvernements autonomes, ce sera une autre réponse.
Avant que nous n'en arrivions là, le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires ont des responsabilités. Il faut changer la culture et les façons de faire au sein du gouvernement. S'il n'y a pas de lois qui imposent une reddition de comptes, une transparence et des formes de pénalités pour assurer le respect des droits de la personne, notamment en matière de santé publique, de santé individuelle et de sécurité, et que ces droits sont pris en compte seulement dans des initiatives ponctuelles, on va malheureusement faire le même constat l'année prochaine et dans 10 ans.
On ne connaît pas les lois et on ne les voit pas. Il faut qu'elles aient du mordant, pour que ce soit la tolérance zéro à l'égard de toute forme de violence.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
J'aimerais qu'on s'intéresse davantage aux entreprises qui font de l'exploitation de ressources sur le territoire, qui ont d'ailleurs tous les permis pour le faire, et qui accueillent des employés venant de loin, pour de courtes périodes à la fois. Ces hommes vont donc travailler pour ces entreprises, repartent et reviennent plus tard, de l'argent plein les poches, bien sûr. On connaît la suite. J'aimerais qu'on s'intéresse à la responsabilité de ces entreprises.
Madame Zinck, vous travaillez au ministère des Ressources naturelles. Mme Audette parlait des lois et du besoin de changer les mentalités. Du côté du gouvernement, mais en particulier de votre ministère, quels sont les liens avec les entreprises? Avez-vous une certaine poigne? Êtes-vous en mesure de faire un suivi auprès des entreprises, de leur imposer des choses ou de vous assurer qu'elles sont de bonnes entreprises citoyennes, qu'elles assument adéquatement leurs responsabilités, qu'elles appliquent la tolérance zéro à l'égard de la violence faite aux femmes qui vivent dans le milieu où les entreprises sont installées, que leurs employés en sont bien informés et qu'ils connaissent les conséquences qu'ils encourent?
Pouvez-vous me répondre rapidement, s'il vous plaît?
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Je vous remercie de la question.
Oui, j'ai abordé les mesures d'atténuation.
Tout d'abord, comme je l'ai mentionné, l'analyse ACS+ représente maintenant un élément obligatoire dans les évaluations d'impact. Les projets relevant du système fédéral devront faire l'objet d'une analyse ACS+. Les promoteurs seront tenus de prendre l'enjeu en considération et de l'étudier à l'avance, ce qui comprend des mesures d'atténuation.
Aucun projet n'a encore été assujetti à la nouvelle loi, mais nous nous attendons à ce que les conditions contraignantes puissent comprendre des mesures de sécurité pour les sites physiques, des programmes d'appui aux employés, des politiques et des conditions d'emploi relatives au harcèlement ou à la lutte au harcèlement, des programmes de sensibilisation et de l'appui pour des infrastructures communautaires sociales. Ces conditions sont contraignantes et font l'objet d'une surveillance et d'une application en vertu de la loi.
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Madame la sénatrice et madame Brazeau, je vous invite également à répondre et à nous donner votre point de vue.
J'ai vu votre réaction à la proposition de Mme Vien. Encore une fois, cela revient à l'importance d'avoir une forme de concertation. C'est d'ailleurs une caractéristique qu'on retrouve beaucoup dans le monde communautaire et qui nous vient des communautés autochtones, qui se concertent et qui dialoguent. C'est peut-être une piste de solution.
Sur la question des armes à feu, nous avons suggéré la mise sur pied d'une escouade mixte pour travailler sur les problèmes de violence. On pourrait élargir l'idée de façon à travailler aussi sur la violence envers les femmes, qu'elles peuvent même subir dans le contexte de l'exploitation des ressources.
Madame la sénatrice, je sais que vous avez déjà réagi à cette proposition au sujet d'une meilleure concertation.
Madame Brazeau, je ne sais pas si vous avez quelque chose à ajouter.
Il y a une autre question que j'aimerais aborder. Elle s'adresse aux gens des ministères, mais Mmes Brazeau et Audette peuvent également se prononcer si elles en ont envie.
Beaucoup des projets d'exploitation des ressources se situent dans des communautés éloignées et isolées. Il a également été question des milieux isolés lors d'une précédente étude du Comité permanent de la condition féminine qui portait sur la violence entre partenaires intimes. Nous en avions également parlé au courant de la dernière législature, alors que nous faisions une étude sur la différence dans l'offre de services aux femmes en milieu rural et en milieu urbain. Le sujet a donc déjà été abordé dans plusieurs autres études.
J'invite n'importe lequel des représentants des ministères qui sont présents à répondre à ma question, qui porte sur l'accès aux ressources d'aide et d'accompagnement pour les femmes victimes de violence et habitant en région éloignée. Le fait que ces entreprises se trouvent souvent sur des territoires éloignés des grands centres crée de l'isolement, un facteur aggravant.
Ces communautés ont-elles des besoins particuliers? Comment le gouvernement répond-il à ce problème bien réel?
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Merci beaucoup, madame la députée.
Je ne considère pas les dossiers et les sujets qui touchent les premiers peuples comme étant strictement des questions autochtones. Ce sont des questions transversales qui nous concernent ou qui nous touchent au même titre que dans le cas d'une personne du Québec ou des Territoires du Nord‑Ouest.
Il faut avoir des espaces indépendants et sécuritaires, regroupant une multitude d'expertises et d'expériences humaines, scientifiques et théoriques, qui permettront d'assurer que la vérité est toujours maintenue. Je répète que les appels à la justice sont des impératifs juridiques. S'il y a une injustice, on va la dénoncer à l'endroit convenu et on sait qu'elle va être traitée correctement et respectueusement et qu'elle va influencer les politiques, les lois ou la façon de faire au Canada.
Pour sa part, l'approche par initiative ou par projet ne fonctionne pas, comme on l'a vu au fil des décennies.
Si ces espaces que j'ai mentionnés, qu'il s'agisse d'un bureau d'ombudsman ou d'un comité, ont la capacité et le droit de faire rapport au Parlement, cela vous aidera aussi, que vous soyez dans l'opposition ou au pouvoir, à honorer les changements demandés depuis trop longtemps. Tant qu'on n'aura pas cela, madame Gazan, j'en ferai mon « caribou de bataille ».
[Traduction]
C'est une expression en français.
Des voix: Ha, ha!
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J'apprends le français. Je fais de mon mieux.
Ma prochaine question s'adresse à Mme Brazeau.
Je sais que vous avez un peu parlé de votre centre et de ses activités, mais des témoins nous ont fait part des obstacles et des traumatismes auxquels sont confrontées les femmes autochtones et les personnes 2ELGTBQQIA+ lorsqu'elles rapportent la violence subie à cause des « campements d'hommes. » Toutefois, même quand les survivantes se font entendre et signalent la violence, elles subissent des torts et de la violence supplémentaires aux mains des forces policières. Je sais que je remets constamment le sujet des services policiers sur le tapis: le volet triste de cette réalité est que même les systèmes qui sont censés nous protéger nous maltraitent, alors vers qui devons-nous nous tourner?
L'enquête nationale nous a aussi appris que de nombreuses femmes autochtones de Val‑d'Or se sont fait gravement maltraiter par la Sûreté du Québec. En raison de l'extrême violence qu'ont vécue les femmes qui habitaient les communautés avoisinantes, l'ancien premier ministre Philippe Couillard a fait ajouter un complément à l'enquête. Il importe de préciser que la situation n'est pas propre au Québec. Le rapport de la Saskatchewan a fait état des mêmes problèmes. Le problème existe partout au pays.
Avez-vous des recommandations pour que nous veillions non seulement à nous attaquer à la violence dans les sites d'extraction de ressources et les communautés voisines, mais aussi à empêcher que les survivants qui dénoncent la violence ne souffrent pas davantage aux mains des policiers?
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Je crois que nous avons un grand nombre de recommandations qui ont déjà été transmises lors de l'enquête sur les femmes autochtones disparues et assassinées.
Au Québec, une commission du nom de « Commission Viens » s'est aussi tenue: à la suite des événements à Val‑d'Or, elle a mené une enquête sur la relation entre les peuples autochtones et les services publics impliqués. La Commission a formulé de nombreuses recommandations.
Je crois que c'est un problème de taille auquel nous devons nous attaquer parce que les femmes autochtones manquent de confiance à l'égard des policiers et des services policiers. Je le constate quand des victimes qui viennent à notre centre ne veulent pas porter plainte aux forces policières. Bien souvent, elles ne trouvent tout d'abord pas qu'elles sont prises au sérieux; puis, elles craignent de se faire elles-mêmes incriminer si elles s'adressent aux forces de l'ordre. De plus, comme vous l'avez dit, les victimes ont dans certains cas subi de la violence aux mains de policiers par le passé. Les femmes autochtones se heurtent à différents obstacles les empêchant d'interagir avec les forces policières.
Une mesure que nous pouvons prendre est de nous assurer que les femmes qui portent plainte à la police sont accompagnées. Je sais que de nombreuses règles différentes régissent le degré d'accompagnement duquel une femme peut se prévaloir lorsqu'elle porte plainte, et je crois que nous devons les examiner. Il existe souvent des systèmes empêchant maintenant les femmes qui déposent une plainte de violence à caractère sexuel d'être accompagnées d'un intervenant de crainte que le témoignage s'en retrouve nuancé. Toutefois, on doit se rappeler qu'une femme ne peut témoigner si elle est anxieuse et ne se sent pas en sécurité.
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Merci, madame la présidente.
Pour ma dernière minute, j'aimerais commencer avec Mme Van De Bogart.
Premièrement, je tiens à remercier tous les témoins de leur présence.
Merci, sénatrice Audette, pour votre travail et votre présence avec nous aujourd'hui.
Ma première question s'adresse à Mme Larocque. Madame Van De Bogart, vous pourrez y répondre également.
Nous savons que les collectivités autochtones ont grand besoin de services de santé et de services sociaux appropriés. Vous avez dit que, pour accroître la sensibilisation, la participation des ONG était nécessaire. Quel type de campagne de sensibilisation est en cours? Pouvez-vous nous en parler?
Nous avons une campagne de sensibilisation en vertu de la stratégie nationale. Il faut que les gens comprennent ce qu'est la traite des personnes pour pouvoir s'y attaquer. Nous avons une stratégie de sensibilisation nationale destinée aux jeunes et aux parents, pour les aider à mieux comprendre le problème.
Nous sommes aussi allés un peu plus loin, en créant des outils pour les fournisseurs de l'industrie. Comme je l'ai dit, le secteur de la santé en fait partie. Nous allons fournir ces outils pour aider les gens à comprendre la situation. Par exemple, les infirmières pourront mieux percevoir certains signes de la traite des personnes. Si elles pensent qu'une personne en est victime, elles sauront ce qu'elles peuvent faire, qui informer et comment intervenir. Notre approche comporte plusieurs volets, notamment la sensibilisation à l'échelle nationale, que nous allons réaliser par divers moyens, mais nous allons aussi nous centrer sur la sensibilisation à l'égard de cette question en particulier.
Nous savons que les ONG rencontrent aussi de nombreuses victimes ou survivantes de la traite des personnes, et la mobilisation des intervenants nous a permis d'apprendre qu'on ne peut adopter une approche universelle. Nous devons accueillir et appuyer les collectivités qui aident ces personnes.
C'est pourquoi nous avons financé 20 programmes communautaires. Ces programmes reposent sur deux pilliers de la mobilisation: l'aide aux victimes et aux survivantes, pour qu'elles reprennent le contrôle de leur vie et retrouvent leur indépendance, par l'entremise d'une approche axée sur les victimes; et la prévention, pour cibler les jeunes à risque d'être victimes de la traite de personnes.
Parmi ces 20 programmes, 15 sont destinés aux collectivités autochtones et deux sont gérés par des Autochtones. J'espère avoir répondu à votre question.
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Merci beaucoup, madame la présidente.
Sénatrice Audette, cela a été un plaisir de vous recevoir.
Madame Zinck, madame Moran, madame Van De Bogart, madame Brady et monsieur Parker, merci beaucoup d'avoir été parmi nous.
Merci également à vous, madame Brazeau. À l'été 2020, je devais aller visiter un centre d'amitié autochtone, puis la COVID‑19 est arrivée. J'espère que nous aurons l'occasion de nous reprendre.
Dans le cadre de cette étude, nous avons vu qu'il y avait de l'argent, mais qu'il était retenu en ce moment à Ottawa. Il y a des appels à l'action, qui sont connus, mais ils ne sont pas tous mis en application. Nous avons l'analyse comparative entre les sexes plus, un outil qui pourrait aider à mesurer les répercussions disproportionnées des projets d'exploitation de ressources naturelles sur les femmes et les filles autochtones. Finalement, nous avons déjà plusieurs choses en place. Il y a des solutions qui sont connues. Je fais partie du Groupe parlementaire multipartite de lutte contre l’esclavage moderne et la traite des personnes, alors je peux en témoigner.
Compte tenu de tout ce que nous savons déjà, qu'est-ce qui manque et qui pourrait faire l'objet d'une recommandation dans notre rapport, afin que ce soit encore plus constructif?
Les intervenants qui le veulent peuvent prendre quelques secondes pour répondre.
Sénatrice Audette, je crois que vous percevez ma frustration. Il est difficile de continuer à regarder les femmes autochtones subir de la violence, des mains mêmes des systèmes qui sont en place pour les protéger. Il est difficile de bâtir des relations avec des fusils, comme nous le voyons dans les médias.
En entrevue pour Al Jazeera, vous avez dit que nous ne pouvions plus continuer de cette façon et que si les Canadiens, les politiciens et les industries acceptaient de vous inclure, de vous parler, de créer un climat de confiance vous permettant d'être entendues, alors nous pourrions commencer à rétablir l'équilibre.
Pourriez-vous nous parler des façons de créer un climat de confiance permettant les échanges et la création de relations entre les femmes et les filles autochtones, les personnes 2SLGBTQQIA+, le gouvernement et les industries?
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Nous n'avons plus de temps, mais c'était une excellente façon de terminer la réunion.
Merci beaucoup, sénatrice Audette.
Je tiens à remercier tous nos témoins.
Sénatrice Audette, madame Brazeau, madame Zinck, madame Moran, madame Larocque, madame Van De Bogart, madame Brady et monsieur Parker, merci beaucoup de vous être joints à nous aujourd'hui, et merci pour vos témoignages.
J'ai pris quelques notes, puisque nous tenions aujourd'hui la toute dernière réunion de la session et que nous nous reverrons à la reprise des travaux. Merci à tous pour cette excellente session printanière.
Qu'est‑ce que j'ai pris en note...?
J'ai noté: « Excellent travail » pour commencer.
Je tiens à remercier les interprètes et les traducteurs et bien sûr, Mme Annett et Mme Montpetit, tout le personnel d'accueil et bien sûr, notre greffière, qui nous garde toujours sur la bonne voie.
Merci à tous pour cette excellente session. Je vous souhaite un très bel été.
Si vous voulez activer vos microphones pour nous dire au revoir, vous pouvez le faire.
Avec l'approbation de tous les membres du Comité, je vais mettre fin à la réunion.
Une députée: Merci, madame la présidente.