propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Madame la Présidente, je dédie mon projet de loi à Me François L'Heureux, qui était plus qu'un simple mentor, mais comme un second père pour moi.
J'ai eu la chance inouïe qu'il fasse partie de ma vie. Les moments que nous avons partagés font partie des plus mémorables de mon existence. Il était un juriste exceptionnel. Il a toujours défendu ses causes avec passion et conviction.
Sa disparition est une énorme perte sur tous les plans. Il était respecté et admiré de tous. Il était attentif aux besoins de chacun. Son amitié est le plus beau cadeau que la vie pouvait offrir à celles et ceux qui le connaissaient et le comprenaient.
[Traduction]
Je pensais qu'il serait toujours là, mais il nous a quittés il y a quelques semaines. Depuis, je réalise chaque jour à mon réveil que je vis dans un monde sans Me L'Heureux, un monde qui a pourtant besoin de plus de gens comme lui. C'était un homme audacieux et courageux et il était toujours prêt à défendre les droits de la personne et à combattre l'oppression. Il n'avait peur de rien. À mon humble avis, il était plus grand que nature. C'était un grand homme parmi les hommes.
Il avait aussi une grande sensibilité et un grand cœur. Il se souciait de tous ceux qui l'entouraient, et il faisait tout en son pouvoir pour qu'ils soient bien. Il était homme altruiste, honorable et très intelligent. Il avait un esprit pénétrant et réfléchi et il se démarquait par sa grande classe. Il m'a prodigué de précieux conseils sur tous les aspects de ma vie. Il incarnait quelque chose de différent pour chaque personne qui le côtoyait. Cependant, tous s'accordent pour dire qu'il ne refusait jamais d'aider son prochain quand on le lui demandait.
[Français]
Jamais je n'aurais imaginé qu'il ne puisse pas être présent au débat sur mon projet de loi. Il a toujours été là pour moi, pour m'encourager ou me prodiguer des conseils dans les périodes difficiles, tel un ange gardien. Je garderai en moi nos souvenirs en commun, ses paroles de sagesse et d'amour.
Chaque fois qu'il mettait fin à une conversation, il disait: « OK, les amis, je dois y aller. » Je lui répondais: « Bisous, Me L'Heureux, on vous aime. » On l'aimera toujours.
C'est avec beaucoup d'émotion que je présente à la Chambre aujourd'hui le projet de loi
Le texte modifiera le Code criminel afin qu'un juge, avant de rendre une ordonnance de mise en liberté à l'égard d'un prévenu inculpé d'une infraction contre son partenaire intime, puisse considérer s'il est souhaitable pour la sécurité de toute personne d'imposer au prévenu, comme condition dans l'ordonnance, de porter un dispositif de surveillance à distance.
Le texte apportera également un changement à la Loi sur les juges pour prévoir la tenue de colloques sur des questions liées à la violence entre partenaires intimes et au contrôle coercitif en vue de la formation continue des juges.
[Traduction]
Je remercie les députées d' et d' du travail qu'elles ont accompli avec la Dre Kagan et maître Viater pour donner une voix à Keira. Grâce à tous ces efforts combinés, nous contribuerons à prévenir des gestes aussi horribles à l'avenir. J'apprécie sincèrement leur soutien et tous les efforts qu'ils ont déployés pour que l'on prenne au sérieux la violence familiale sous toutes ses formes tout au long du processus judiciaire.
Les deux initiatives proposées dans le projet de loi se complètent mutuellement et sont appuyées par des statistiques et des études qui montrent qu'il faut en faire davantage pour mettre fin aux féminicides, aux filicides et à la violence familiale, des crimes dont le nombre semble augmenter chaque année, en particulier au cours des deux dernières années de pandémie. Dans son édition du 6 décembre 2021, le Journal de l'Association médicale canadienne, dans un article intitulé « Le rôle des médecins dans la prévention des féminicides au Canada », rapporte des conclusions stupéfiantes. On peut y lire:
Au Canada, une femme est assassinée tous les 2,5 jours — de 144 à 178 féminicides ont été commis chaque année entre 2015 et 2019 —, et en 2021, la tendance s’est accentuée [...] Parmi les femmes assassinées, 50 % l’ont été par leur conjoint et 26 % par un membre de leur famille. La fin d’une relation n’annule pas le risque de décès auquel une femme est exposée: de 20 % à 22 % des féminicides ont été perpétrés par d’ex-conjoints au cours des 18 mois suivant la séparation.
Les femmes comptent pour 80 % des cas déclarés de violence conjugale et le phénomène touche tous les groupes d'âge, toutes les races ou ethnicités et toutes les classes socio-économiques. Les femmes les plus à risque sont jeunes (15–24 ans), immigrantes, réfugiées, autochtones ou vivant avec un handicap. En outre, les données sur les féminicides au Canada montrent une tendance alarmante chez les femmes autochtones vivant en zone non urbaine. De 2016 à 2019, les femmes vivant en zone non urbaine ont représenté 42 % des féminicides au Canada, alors que seulement 16 % de la population canadienne vit à l'extérieur des villes, et le quart de toutes les femmes assassinées au Canada sont autochtones.
En outre, les comportements violents et agressifs à l'endroit des conjointes ne sont pas toujours suffisamment pris en compte pour modifier les décisions du Tribunal de la famille au Canada, par exemple, dans les cas de garde d'enfants.
[Français]
Cette dernière partie me fait penser au destin tragique de la petite Keira Kagan, qui a perdu la vie aux mains de son père dans ce qui était vraisemblablement un meurtre-suicide. Pourtant, les indices étaient là.
La Dre Kagan-Viater et son conjoint, Me Philip Viater, consacrent beaucoup de leur temps à mettre en œuvre des efforts remarquables afin d'éviter à d'autres familles la peine immense de perdre un enfant dans de telles circonstances, ce que les mots ne suffisent pas pour décrire.
À leurs yeux, une formation continue sur la violence familiale et le contrôle coercitif, qui serait disponibles aux juges qui ont le mandat de trancher les affaires de garde d'enfants et de droit d'accès, sera un pas en avant pour mieux protéger les enfants des parents violents et abusifs, ainsi que leurs parents victimes de cette violence.
Je partage entièrement leur point de vue. En tant qu'avocate ayant pratiqué le droit de la famille et le droit criminel et pénal, j'ai constaté à quel point les méandres de la violence conjugale s'imbriquent de façon sournoise dans toutes les sphères de la vie de la victime, laissant même des cicatrices profondes sur les enfants témoins ou victimes eux-mêmes de cette violence.
L'abus est parfois silencieux et prend la forme du contrôle coercitif alors que d'autres fois il laisse des traces physiques. Dans beaucoup de cas, la victime est de plus en plus dépourvue de ses moyens et devient méconnaissable aux yeux de son entourage.
Il s'agit d'un phénomène extrêmement complexe et, plus le temps passe, plus on se rend compte que la violence contre un partenaire intime et ses enfants peut prendre de nombreuses formes et se manifester de diverses façons.
C'est pour cela que les intervenants dans ce genre de cas, soit les juges, les avocats, les médecins, les travailleurs sociaux, les forces de l'ordre et ainsi de suite, doivent être au parfum des nouveaux développements et trouvailles scientifiques quant aux phénomènes de violence conjugale et ses répercussions.
[Traduction]
En Espagne, où on exerçait une surveillance électronique pour les cas de violence familiale, on a observé que 45 femmes avaient été tuées par leur conjoint, et ce nombre était de 72 en 2004.
Les résultats d'un projet pilote réalisé en Australie indiquent que la surveillance électronique a contribué à réduire les incidents à haut risque de 82 %. Il arrive souvent que les victimes de violence conjugale ne dénoncent pas leur agresseur pour diverses raisons, comme la conviction qu'elles ne seront pas crues par le système, la honte, la crainte de conséquences pour elles-mêmes ou pour leurs enfants, l'anxiété financière, et cetera.
Cependant, des signes révélateurs sont habituellement présents dans de telles circonstances. C'est pourquoi les gens qui interagissent avec les victimes de cette forme de violence devraient avoir ou acquérir la capacité de détecter les signes malgré le silence ou l'absence de dénonciation. Les juges jouent un rôle central dans notre société. Ils sont les gardiens de la démocratie, des droits constitutionnels et des droits de la personne.
Ils ont parfois la lourde tâche de se prononcer sur des cas complexes, ce qui peut avoir des conséquences à très long terme dans la vie des gens. Voilà pourquoi il est essentiel que la magistrature ait accès à de la formation complète sur les questions complexes et évolutives, comme la violence familiale et le contrôle coercitif, de sorte que ses décisions mènent aux meilleurs résultats possible.
Notre mode de vie évolue. En y pensant bien, nos interactions ont changé avec la COVID‑19, et il ne s'agit que des deux dernières années. La règle de droit doit suivre ces changements et être adaptée à cette période difficile. Comme on a pu le constater durant l'année de pandémie de 2021, le taux de féminicides a augmenté encore plus qu'au cours des années précédentes. Nous ne pouvons pas ignorer ces statistiques parfois terrifiantes qui donnent à réfléchir.
Un article publié dans le numéro du 21 décembre 2021 du Lawyer's Daily traite d'une vaste étude menée par Jean-Pierre Guay et Francis Fortin, deux professeurs de criminologie de l'Université de Montréal que le gouvernement du Québec a mandatés pour étudier l'utilisation des dispositifs de localisation électroniques. Cette étude a démontré que ces dispositifs rehaussent le sentiment de sécurité des personnes plaignantes et leur donnent un sentiment de pouvoir et d'autonomie en plus de permettre de « mieux cibler et d'optimiser l'intervention policière ».
Autrement dit, l'utilisation de la surveillance électronique permet de sauver des vies. Je pense que nous convenons tous que rien ne compte plus en ce bas monde que la préservation de la vie humaine. C'est exactement ce que propose le projet de loi que je présente.
[Français]
J’ai été secouée par l’histoire de Mme Khaoula Grissa qui a échappé de peu à la mort en décembre 2019. Son ex-conjoint s’était introduit chez elle et l’attendait pour la violer et la tuer. Pourtant, cette brave dame avait tout fait pour éviter cela en changeant d’appartement et de voiture. Elle savait très bien de quoi son ex-conjoint était capable. Par le passé, il avait enfreint des interdictions de l’approcher, et les policiers lui avaient dit qu’ils l’avaient à l’œil. Cela ne l’a pas empêché de se présenter chez elle en toute impunité. Elle a eu la chance de se sauver en s’enfermant dans la salle de bain avec sa jeune fille de 2 ans, mais pas avant d’avoir été violée par cet homme. De nombreuses autres victimes ont perdu la vie aux mains de leur partenaire intime.
Mme Grissa a dit sans retenue que le système l’a laissée tomber et qu’elle vit avec les séquelles de cette journée d’horreur gravée à jamais dans sa mémoire.
[Traduction]
Mon projet de loi ne réglera pas le problème de la violence familiale et de ses conséquences dévastatrices. Cependant, j'ai l'intime conviction, à l'instar de ceux qui m'ont aidé à la préparer, qu'il offrira une solution pour mieux protéger les victimes de violence familiale.
[Français]
J'invite donc mes chers collègues à joindre leur voix à la mienne et à reconnaître l'utilité et l'importance de ce projet de loi en votant en sa faveur.
:
Madame la Présidente, je veux remercier la députée de de présenter ce projet de loi. Je veux la remercier de ses efforts visant à corriger une injustice de notre système judiciaire avec son projet de loi, qui fera en sorte de renseigner les juges sur la violence familiale et le contrôle coercitif. Par-dessus tout, je veux lui dire qu'elle peut compter sur l'appui de la députée de et des députés de ce côté-ci de la Chambre.
Je veux raconter l'histoire de Keira, de sa mère Jennifer, de son beau-père Philip et de son petit frère. Je veux raconter l'histoire de sa famille, de ses amis et de sa collectivité. Je veux raconter l'histoire du plaidoyer de Jennifer et de Philip pour la sécurité de Keira face au contrôle coercitif et à l'abus bien documentés et démontrés dans le système judiciaire.
Keira était une brillante, exubérante et belle petite fille de quatre ans dont la famille vivait à Thornhill et dont la vie a été volée par un père colérique qui s'est ôté la vie et a emporté celle de Keira il y a à peine plus de deux ans. Keira devrait être en train de jouer avec ses amis. Elle devrait être en train de rendre ses parents fiers. Elle devrait être en train de protéger son petit frère. Tout ce qui s'est passé aurait pu être évité. Keira devrait avoir sept ans aujourd'hui. Au lieu de cela, Keira est une statistique dans un système judiciaire défaillant qui l'a laissée tomber. Sa vie est réduite à un numéro de dossier d'un tribunal qui ne savait pas par où prendre le problème. Elle était tellement plus que cela. Elle était une fille, une petite-fille, une grande sœur, une amie et une voisine. Elle était tellement de choses. Elle était un monde de lumière, et sa mort était parfaitement évitable.
Je ne peux même pas imaginer la tristesse et la souffrance de la famille Kagan. La mère de Keira, Jenn, et son beau-père, Phil, en plus d'être des parents occupés — exerçant respectivement les professions de médecin et d'avocat —, sont devenus des militants à temps plein qui œuvrent à faire changer l'appareil judiciaire en sensibilisant les juges à la violence domestique et au contrôle coercitif. Voilà le type d'histoire à l'origine de ce projet de loi. Même si rien ne ramènera leur enfant, ils montent au front pour faire en sorte que ce qui est arrivé à Keira n'arrive jamais à un autre enfant dans ce pays. C'est une énorme responsabilité.
Le combat que mènent les victimes de violence familiale pour se protéger et protéger leurs enfants est une réalité pétrifiante. Les parents comptent sur les tribunaux de la famille pour protéger leurs enfants. Ils aimeraient croire que les décideurs du système judiciaire fondent leurs décisions sur des connaissances et une formation appropriées. Jamais Jenn et Phil n'auraient dû avoir à supplier les juges pour leur montrer ce qu'ils avaient besoin de voir.
Une personne qui souhaite devenir médiateur agréé dans cette province doit suivre une formation obligatoire de 21 heures sur la violence familiale et la renouveler tous les ans pendant cinq ans, mais pas un juge. Si les juges étaient adéquatement formés pour comprendre à quoi ressemble une situation de violence familiale, s'ils savaient quels signes surveiller, ils auraient été adéquatement outillés pour faire en sorte que la vie de Keira soit épargnée.
L'appel à l'action de Jenn en tant que mère a résonné dans ma ville de même que partout au pays. Jenn et Phil ont fait le travail, et il appartient maintenant aux députés de leur montrer que les efforts qu'ils ont déployés et le courage dont ils ont fait preuve en racontant leur histoire seront l'héritage du parcours douloureux qui les a marqués à jamais. Cette tragédie aurait entièrement pu être évitée.
Je parle aux parents de Keira souvent. Je parle encore plus souvent avec des amis que nous avons en commun, des amis dont les enfants aimaient Keira. Je veux donner une idée à mes collègues de l'onde de choc qu'a eue la mort de Keira sur ses amis.
Zach, qui a 7 ans, a dit: « Je m'ennuie vraiment beaucoup de Keira. J'aimerais qu'elle soit encore en vie et je suis très triste qu'elle soit morte. Elle aimait beaucoup jouer avec des chiens. J'aimais me promener avec elle et visiter des endroits amusants. J'aimais manger avec elle et j'aimais faire toutes sortes de choses avec elle. Je m'ennuie d'elle tous les jours. »
Ben, qui a 9 ans, a dit: « Keira était comme une petite cousine pour moi. Elle agissait toujours comme si elle était à la fois une petite fille et un petit garçon, ce qui était très cool. Nous allions nager et nous faisions beaucoup de choses amusantes. Nous faisions beaucoup de bruit dans le corridor de son condo. Elle était drôle, pleine d'entrain et amusante. Je m'ennuie vraiment de Keira. »
Taylor a 7 ans. Elle dit qu'elle aimerait pouvoir aller jouer avec Keira et qu'elle sait qu'elles auraient été meilleures amies. Elle a demandé si elle pouvait célébrer l'anniversaire de Keira et que sa mère et elle avaient préparé un petit gâteau pour Keira.
Ce ne sont que quelques exemples d'une collectivité qui a été touchée par ce fléau. Les enfants de 7 ans ou de 9 ans ne devraient pas à avoir à composer avec la mort d'un ami. Ce décès aurait pu être évité. Keira devrait être là pour fêter son septième anniversaire.
Il y a encore tellement de Canadiens victimes de violence à la maison, que cette violence vienne d'un parent ou d'un partenaire. La violence familiale laisse des traces. Elle brise des vies. Elle réduit les victimes au silence. Les enfants ne sont pas qu'exposés à la violence familiale. Ils en sont également les victimes. Ceux qui le sont se retrouvent plus souvent avec des problèmes de santé mentale, de dépression, d'attaques de panique et de troubles alimentaires, entre autres.
Depuis longtemps, bien avant que je sois élue, les députés de mon parti ont soutenu les recommandations qui demandent l'ajout de termes comme « contrôle coercitif » dans le Code criminel. Je suis très heureuse que le projet de loi à l'étude comprenne ce terme. Cependant, je n'ai jamais cru que c'était suffisant. Je crois que ce projet de loi est un premier pas pour éviter que l'injustice vécue par cette petite fille se répète. Il aidera les nombreuses autres victimes de violence conjugale à s'en sortir. Nous avons le pouvoir de changer les choses.
Bien que j'appuie le projet de loi, je crois aussi qu'il est nécessaire d'imposer des peines sévères aux personnes qui agressent leur conjoint ou leur partenaire, tout en permettant plus facilement aux victimes d'échapper à leur agresseur et de rebâtir leur vie. Il faut apporter d'autres modifications au Code criminel afin que les voies de fait soient considérées comme une circonstance aggravante pour la détermination de la peine. Des peines minimales obligatoires de deux ans devraient également être imposées. J'espère que cette discussion constitue le point de départ d'une réforme plus vaste et indispensable visant à protéger les victimes comme Keira.
Je pense que les députés se souviendront que, en 2017, l'honorable Rona Ambrose a présenté un projet de loi à la Chambre qui exigeait que les juges suivent une formation sur le traitement des cas d'agression sexuelle. Ce projet de loi a fini par devenir loi, et il devrait en être de même pour le projet de loi dont nous sommes saisis.
Hier, la mère de Keira m'a fait part d'une conversation avec sa fille dont elle se souvient avec affection. Jenn avait dit à la blague que si Keira n'arrêtait de mal se conduire, elle la ramènerait au magasin de bébés. Sans hésiter, la fillette exubérante de 4 ans a répondu qu'elle ramènerait sa mère au magasin d'adultes.
Nous devrions prêter la plus grande attention à la réplique de Keira, parce que si nous ignorons l'avertissement clair qui nous est adressé, si nous hésitons à faire ce qui s'impose, si nous laissons la violence conjugale sévir avec impunité sans tout faire pour la contrer, et si nous laissons un autre enfant mourir sans raison, nous devrions tous être ramenés au magasin d'adultes. Ce décès aurait pu être évité. Keira devrait être là pour fêter son septième anniversaire.
Je conclus là-dessus, car à mon avis, nous pouvons nous assurer d'avoir les outils nécessaires pour empêcher cette situation de se reproduire. Je crois que nous pouvons le faire et que nous devrions agir maintenant.
Il y a eu consultations entre les partis et vous constaterez qu'il y a consentement unanime à l'égard de la motion suivante:
Que, nonobstant tout article du Règlement ou usage habituel de la Chambre, à l'expiration du temps prévu pour les affaires émanant des députés plus tard aujourd'hui, le projet de loi C‑233, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur les juges (violence contre un partenaire intime) soit réputé lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent de la condition féminine.
:
Madame la Présidente, en tant que porte‑parole du Bloc québécois pour la condition féminine et vice‑présidente du Comité permanent de la condition féminine, je prends la parole aujourd'hui sur le projet de loi , dont le texte modifie le Code criminel afin que les juges aient l'obligation, avant de rendre une ordonnance de mise en liberté à l'égard d'un prévenu inculpé d'une infraction contre son partenaire intime, de considérer s'il est souhaitable pour la sécurité de toute personne d'imposer au prévenu, comme condition dans l'ordonnance, de porter un dispositif de surveillance à distance.
Le texte modifie aussi la Loi sur les juges pour prévoir la tenue de colloques sur les questions liées à la violence entre partenaires intimes et au contrôle coercitif en vue de la formation continue des juges.
Puisque nous venons tout juste de terminer une étude sur cette question en comité, et avec toute la sensibilité et les avancées faites dans ce dossier au Québec, j'apporte ma modeste contribution à ce débat.
J'annonce d'entrée de jeu que le Bloc québécois votera en faveur du projet de loi C‑233. Je suis également bien contente de voir que mon comité va pouvoir se pencher rapidement sur ce projet de loi.
Mon discours abordera pour commencer ce qui a déjà été voté au Québec, suivi d'un rappel de l'importance de la formation des intervenants qui travaillent avec les victimes. Je terminerai en parlant davantage du contrôle coercitif dans ce débat.
Tout d'abord, les modifications proposées au Code criminel relativement au dispositif de surveillance à distance vont dans le sens de la législation adoptée par Québec. En effet, la loi 24 de l'Assemblée nationale, qui modifie le système correctionnel du Québec, prévoit le pouvoir d'exiger qu'une personne contrevenante soit liée à un dispositif permettant de savoir où elle se trouve. Cette loi est entrée en vigueur le 18 mars 2022.
L'utilisation du bracelet anti rapprochement concerne ici les délinquants sexuels graves, condamnés à une peine de plus de deux ans et qui vont la purger dans un établissement carcéral fédéral. C'est de cela qu'on parle aujourd'hui. Les peines de moins de deux ans sont purgées dans des établissements gérés par Québec. Le fédéral n'avait pas le choix et devait suivre, surtout que les bracelets anti rapprochement sont déjà utilisés ailleurs, comme en Espagne et en France.
Le gouvernement Legault a annoncé le recours à ces bracelets dans un bouquet de 14 nouvelles mesures pour contrer la violence entre partenaires intimes.
Selon les conclusions d'une étude commandée par le ministère de la Sécurité publique du Québec, le bracelet anti rapprochement permet d'augmenter le sentiment de sécurité des victimes, leur qualité de vie, une réduction des épisodes de non‑respect d'un engagement et une adhésion plus importante des auteurs d'infractions aux mesures de traitement dans la communauté.
Le bracelet ne permet pas à lui seul de réduire l'incidence de la violence conjugale, bien qu'il soit un outil prometteur. Son utilisation doit donc s'insérer dans un ensemble de mesures qui visent à aider à la fois les victimes et les auteurs de cette violence. En aucune circonstance, ce bracelet ne devrait être un incitatif à diminuer le financement d'autres mesures visant à réduire la violence conjugale. Ces mesures d'aide et de soutien sont gérées par le gouvernement du Québec et les fonds nécessaires à leur mise en œuvre doivent continuer à lui être transférés.
C'est d'ailleurs ce qu'a dit le Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, qui a rappelé que l'utilisation du bracelet affecte également la victime, puisqu'elle doit elle aussi le porter afin qu'on puisse la localiser et intervenir en cas de rapprochement.
Si le port de cet outil augmente généralement le sentiment de sécurité, il peut avoir pour effet d'accroître l'hypervigilance chez les victimes. C'est pourquoi il sera essentiel que les femmes concernées soient dirigées vers les ressources spécialisées afin de leur offrir un accompagnement tout au long du processus. Cela illustre encore une fois l'importance de maintenir, je dirais même d'accroître, le financement pour contrer la violence entre partenaires intimes.
Sur l'importance de l'utilisation du bracelet, Mme Lemeltier précise qu'on peut penser que la violence conjugale s'arrête au moment où la femme quitte le domicile conjugal, mais ce n'est pas le cas. La violence prend plutôt une autre forme, que l'on appelle la violence conjugale postséparation. Cette forme de violence peut se traduire par plusieurs gestes, notamment le harcèlement sur les réseaux sociaux, le fait de continuer d'exercer un contrôle financier, de garder les documents d'immigration de la femme ou de refuser la supervision des droits d'accès, laquelle permet d'assurer également la sécurité des enfants.
Le contrôle se poursuit et s'accentue au fil du temps. Le moment qui suit la séparation est le plus dangereux pour les femmes et pour les enfants. II faut aussi noter que le dispositif qu'est le bracelet anti rapprochement ne peut être plus fiable que le réseau cellulaire sur lequel il s'appuie. Au Québec, mais aussi ailleurs au Canada, la fiabilité du réseau et la grandeur du territoire couvert par les services policiers peuvent représenter des défis de taille dans l'implantation et l'utilisation de tels dispositifs.
Deuxièmement, les modifications proposées à la Loi sur les juges sont en conformité avec les positions du Bloc québécois, dans la mesure où elles servent à accroître la protection des plaignantes et des plaignants. Cette question de la sécurité des victimes est cruciale. Ici, la modification vise à étendre la formation des juges en matière d'agressions sexuelles en y ajoutant la notion de contrôle coercitif, de sorte qu'ils aient une compréhension plus approfondie lorsqu'il s'agit de violence entre partenaires intimes. On est en droit de croire qu'une meilleure compréhension de la part des juges améliorera la protection et la sécurité des victimes de violence de la part d'un partenaire intime. C’est une notion que j’ai tenu à ajouter dans notre étude en comité.
Je remercie une fois de plus Myrabelle Poulin, une militante qui m’a sensibilisée au contrôle coercitif, parce que la violence, ce n’est pas toujours frappant, mais cela fait toujours mal.
Ma formation politique accueille toute mesure qui vise à augmenter la sécurité des partenaires victimes de violence conjugale et déplore du fait même toute violence entre partenaires intimes dont les victimes sont le plus souvent des femmes. Nous sommes solidaires de la lutte contre la violence conjugale et contre les féminicides qui ont connu une triste et inacceptable recrudescence durant cette pandémie. Je tiens à réitérer toutes mes condoléances aux proches de ces trop nombreuses victimes.
Nous souhaitons également la tenue d’une commission d’enquête sur la prévention, l’encadrement législatif et la coercition des violences familiales qualifiées de crimes d’honneur. De plus, nous exigeons que le fédéral contribue financièrement aux efforts du gouvernement du Québec en matière de prévention de la violence. Durant la campagne électorale de 2021, le Bloc québécois a soutenu que les fonds pour la lutte contre la violence conjugale devraient être puisés à même les transferts canadiens en matière de santé dont l’augmentation de 28 milliards de dollars devrait être immédiate.
Je tiens d’ailleurs à saluer le travail des organismes qui bénéficient de ces transferts comme le CALACS en cette Semaine de l’action bénévole. Des investissements à long terme permettront aussi un changement générationnel qui est essentiel dans cette lutte. Mme Sabrina Lemeltier, présidente de l’Alliance des maisons d’hébergement de 2e étape pour femmes et enfants victimes de violence conjugale a également illustré l’importance du maintien de ce financement par ses propos tenus au Comité permanent de la condition féminine.
Au Québec, juste avant la pandémie, le rapport d'un comité d’experts sur l’accompagnement des victimes d’agression sexuelle et de violence conjugale intitulé « Rebâtir la confiance » a été déposé. Ce rapport, ce n’est pas rien. Il contient 190 recommandations audacieuses qui permettent enfin de mettre en place un filet de sécurité. On y parle d’un continuum de services. Il est extrêmement important de souligner que les victimes ont besoin d’être accompagnées à toutes les étapes.
Je tiens ici à saluer particulièrement la députée de Joliette, Véronique Hivon, qui a collaboré à l’élaboration de ce comité transpartisan tout comme à celui sur le droit de mourir dans la dignité et qui a annoncé qu’elle ne se représenterait pas à la prochaine élection au Québec.
Les procès touchant aux crimes de nature sexuelle sont très influencés par la formation et la compétence des juges. Il va de soi que cette formation continue des juges sur le droit relatif aux agressions sexuelles peut être actualisée. Le Bloc québécois appuie ce type de projet sans équivoque depuis que le sujet a été abordé à la Chambre en 2020.
Les modifications apportées au Code criminel et à la Loi sur les juges qui portent sur la formation continue des juges et qui visent à accroître la confiance du public dans le système de justice pénale ont force de loi. Elles sont entrées en vigueur le 6 mai 2021.
Ce projet de loi respecte aussi une récente recommandation du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Dans son rapport publié le 6 avril 2022 et intitulé « La pandémie de l’ombre: mettre fin aux comportements coercitifs et contrôlants dans les relations intimes », le Comité recommande « [q]ue le gouvernement fédéral engage un dialogue avec les gouvernements provinciaux et territoriaux [et du Québec] ainsi que d’autres intervenants touchés pour promouvoir et financer une campagne pour sensibiliser le public aux comportements coercitifs et contrôlants et offrir une formation sur la dynamique de ces comportements aux acteurs du système judiciaire, notamment les corps policiers, les avocats et les juges. La formation doit être adaptée aux traumatismes vécus, intégrer les perspectives intersectionnelles et être accompagnée d’outils et de politiques pour appuyer les interventions à cet égard. »
D’ailleurs, au Comité permanent de la condition féminine, Mme Pamela Cross du Luke’s Place Support and Resource Centre for Women and Children a rappelé que « [t]ant que les intervenants des systèmes de justice criminelle et de droit de la famille ne saisiront pas complètement la réalité de la violence familiale et à quel point elle est répandue, et tant qu’ils ne comprendront pas qu’elle ne se termine pas avec la séparation, que beaucoup de pères [...] utilisent leurs enfants et en font des armes pour s’en prendre à leur partenaire, les refuges canadiens continueront de refuser chaque année 500 femmes et leurs enfants et ces femmes et leurs enfants continueront de mourir [...] »
En conclusion, à la lumière de cette avancée progressiste au Québec avec le premier projet pilote de tribunal spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale, le Bloc québécois ne peut qu’être en faveur d’une meilleure formation des juges et d'une formation plus complète. Nous avons encore l’impression que le Québec a un pas d'avance sur Ottawa, mais nous nous ne pouvons que saluer toutes les avancées qui visent à mieux protéger et mieux traiter les victimes de violence par un partenaire intime, afin que cessent ces terribles et trop nombreux féminicides. En tant que nouvelle maman d’une petite Naomie, cette phrase prend tout son sens: pas une de plus.
:
Madame la Présidente, je suis reconnaissante d'avoir l'occasion de prendre la parole aujourd'hui pour faire part de mes observations concernant ce projet de loi très important. J'aimerais d'abord remercier la députée de d'avoir présenté ce projet de loi, qui aurait dû être présenté il y a bien longtemps. Le fait que la Chambre l'étudie maintenant témoigne des efforts déployés par la députée, de sa compréhension de la condition féminine au Canada et de sa défense de l'intérêt des femmes.
J'aimerais également saisir l'occasion pour exprimer mon appui à l'égard de ce projet de loi. Les néo-démocrates cherchent toujours des moyens de faire plus pour soutenir les femmes, protéger les femmes et les enfants de la violence familiale et de la violence contre un partenaire intime et appuyer les réformes du système judiciaire qui s'imposent. Les néo-démocrates continueront de réclamer auprès du gouvernement libéral la prise de mesures supplémentaires et l'investissement de fonds supplémentaires afin d'éliminer la violence fondée sur le sexe. En outre, en tant que porte-parole du Nouveau Parti démocratique pour les affaires étrangères, j'exercerai assurément des pressions pour que le gouvernement consacre également plus de fonds, offre plus de soutien et prenne plus de mesures afin de soutenir les femmes et les filles à l'étranger.
Ce projet de loi constitue une importante avancée. Cette avancée était nécessaire. Il s'agit notamment d'une réforme judiciaire qui amènera un meilleur soutien et une meilleure protection des victimes. Je crois que tous les députés doivent tenter de s'imaginer ce que ce doit être de vivre dans une relation de coercition ou de violence et d'être assujettis à la peur et aux traumatismes. Il est très important que les parlementaires et les législateurs y réfléchissent dans le cadre de leur travail.
Les parlementaires n'ont pas de tâche plus importante que celle de protéger les femmes et les enfants. Je sais que la violence contre des partenaires intimes ne cible pas que les femmes, mais ce sont surtout elles qui en sont victimes. Je crois que nous conviendrons tous que la violence contre les femmes a atteint le stade de crise au Canada. Il s'agit d'une autre crise nationale.
Avant la COVID‑19, dans l'ensemble, une femme sur trois avait déjà été victime de violence commise par un partenaire intime. Nous savons que la violence contre un partenaire intime survient dans les ménages à faible revenu et qu'elle est plus fréquente dans les foyers autochtones. Nous savons que la COVID‑19 a provoqué une explosion de la violence fondée sur le sexe. Dans les six premiers mois de 2021, 92 femmes et filles ont été assassinées au Canada. Face à cette montée de violence, le Comité permanent de la condition féminine a récemment entrepris une étude sur la violence commise à l'égard d'un partenaire intime.
J'aimerais donner aux députés un aperçu de la situation en Alberta également. Un Albertain sur trois sera victime de violence familiale au cours de sa vie, et l'écrasante majorité de ces victimes sont des femmes. À Calgary, la Sagesse Domestic Violence Prevention Society a dû accroître ses services, la demande ayant augmenté de plus de 100 % entre 2019 et 2021. En fait, comme l'a déclaré Andrea Silverstone, la directrice générale de l'organisme:
Après chaque catastrophe naturelle que nous avons connue en Alberta, que ce soit des inondations ou des incendies, le taux de violence familiale a augmenté et n'a plus jamais baissé.
Les effets de la COVID sur la violence familiale et l'augmentation du taux de violence vont perdurer pendant une période de deux à cinq ans, voire plus longtemps, en raison des problèmes d'emploi et de stress économique, qui sont également des facteurs contributifs et qui, nous le savons, ne sont toujours pas résolus et vont probablement empirer avant de s'améliorer.
Le nombre de victimes de violence familiale au Canada a augmenté de 13,5 % de 2019 à 2020, selon les renseignements fournis par le service de police d'Edmonton, mais l'augmentation observée pendant la pandémie de COVID est un phénomène mondial. Nous savons que les femmes et les filles du monde entier ressentiront les répercussions de la COVID de manière disproportionnée.
J'ai mentionné plus tôt aujourd'hui que je suis très fière du fait que notre pays est l'un des premiers à avoir adopté une politique d'aide internationale féministe. Je suis très fière d'avoir pu contribuer à l'élaboration de cette politique avant de devenir députée. J'attends avec impatience le jour où le gouvernement présentera sa politique étrangère féministe. Je pense qu'il est important, lorsque nous envisageons de soutenir les femmes et les filles dans le monde, que ce ne soit pas une question de développement, mais une question de diplomatie, de défense. Je ne peux penser à un seul ministère au sein du gouvernement qui n'ait pas besoin d'un point de vue féministe.
Une des façons d'en faire plus pour protéger les femmes et les filles au Canada et dans le monde, c'est de prévoir du financement prévisible et ciblé qui permettra de nous assurer que ces ressources sont en place. Un geste important que nous pouvons faire pour protéger les femmes et les filles au Canada, c'est de tenir compte des 231 appels à l'action que renferme le rapport de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.
Nous avons vu la feuille de route que la commission a élaborée pour nous. Elle nous y décrit en détail les choses qui doivent être faites, et nous pourrions déjà être à l'œuvre. Il s'agirait de soutien supplémentaire. Toutefois, le projet de loi propose plutôt de mettre en place des éléments qui fourniront un niveau de sécurité supplémentaire dont ont besoin les femmes qui subissent de la violence conjugale.
Je pense que tous les députés à la Chambre sont d'accord pour dire que ce projet de loi constitue un grand pas en avant. Nous avons hâte de le renvoyer au comité et de le voir franchir toutes les étapes du processus législatif jusqu'à la sanction royale. Comme en témoigne le consentement unanime de tout à l'heure, cette initiative est importante pour nous tous.
Lors de l'étude de ce projet de loi et d'autres projets de loi futurs destinés à améliorer les soutiens aux femmes et aux filles, il faudrait se pencher sur des initiatives telles que des logements et des refuges à cadre peu restrictif afin que davantage de femmes puissent trouver un refuge, du repos, et être en sécurité avec leurs enfants, à l'abri d'un partenaire intime violent.
Nous pouvons veiller à ce que les juges bénéficient de meilleurs soutiens en matière de formation. Ce projet de loi est une excellente mesure pour la formation des juges, mais comme on a pu le constater ailleurs au pays, certains juges ne comprennent pas ce qu'est la violence entre partenaires intimes, ils ne comprennent pas la notion de coercition et ils ne savent donc pas comment réagir lorsqu'ils doivent traiter une affaire de ce genre.
Il y en a justement une à Lethbridge, dans le Sud de l'Alberta, en ce moment. Une mère n'a pas vu son enfant depuis plus d'un an. Ils ont été séparés. Même s'il fait l'objet de sept chefs d'accusation — possession d'arme, menaces de mort, harcèlement criminel et harcèlement, entre autres choses —, on a confié la garde de l'enfant au père, qui n'a pas respecté la loi en n'accordant pas la garde partagée à la mère. Il s'agit d'un cas où le juge de la Cour du banc de la reine ne semble pas considérer que cet homme pose un risque. C'est pourquoi je trouve que la formation des juges est d'une importance capitale.
Je vais conclure en remerciant une fois de plus la députée d'avoir présenté cette mesure législative. J'ai été touchée par son intervention plus tôt aujourd'hui et j'appuie totalement sa démarche. Le NPD appuiera ce projet de loi. Je tiens aussi à transmettre mes condoléances à toutes les personnes pour qui cette mesure arrive trop tard.
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Madame la Présidente, c'est un grand jour aujourd'hui, car nous amorçons le débat sur cet important projet de loi. J'aimerais d'abord remercier la députée de non seulement pour avoir présenté le projet de loi , mais aussi pour son ardeur et sa détermination à enrayer la violence fondée sur le sexe. Je tiens aussi à remercier les députées de et d' pour leur appui. Finalement, je remercie tout spécialement le et son équipe pour leur collaboration empreinte d'empathie et leurs précieux conseils dans ce dossier crucial.
Le projet de loi prévoit l'amélioration de la formation continue des juges sur les questions relatives à la violence entre partenaires intimes et au contrôle coercitif. Il prévoit aussi une modification au Code criminel pour imposer le port d'un dispositif de surveillance à distance.
Le projet de loi occupe une place spéciale dans mon cœur en raison d'une jeune fille, Keira Kagan. En réalité, on appelle ce projet de loi la « loi de Keira », en sa mémoire. Keira a perdu la vie il y a deux ans à la suite d'un acte de vengeance de son père. Je ne peux imaginer la douleur que doit ressentir chaque jour Jennifer, la mère de Keira. Pourtant, Jennifer est devenue une source d'inspiration et elle réclame des changements dans le système judiciaire afin de former les juges sur les questions de violence familiale et de contrôle coercitif.
Les enfants ne sont pas seulement témoins de la violence familiale: ils la subissent aussi. Il arrive, dans les pires cas, qu'un enfant soit tué par un parent violent. Le père de Keira s'était déjà montré violent envers une partenaire intime, mais le juge n'en a pas tenu compte et lui a tout de même donné le droit de voir Keira sans supervision. Keira est maintenant morte. Cet exemple crève-cœur montre qu'il est absolument essentiel de sensibiliser les juges à la violence contre un partenaire intime et aux effets qu'elle a sur les enfants. Dans le cas de Keira, le juge était un avocat spécialisé en droit du travail avant d'être nommé à la magistrature. On pourrait croire que les juges qui traitent des affaires où il est question de violence familiale et de contrôle coercitif disposent d'une formation spécialisée ou d'une expertise dans ce domaine, mais ce n'est pas le cas. En fait, on n'exige pas de formation officielle pour traiter ces cas.
Darian Henderson-Bellman, une jeune femme de la région d'Halton, a été tuée par son ancien amoureux, violent, en 2020. Il bénéficiait d'une liberté provisoire par voie judiciaire en lien avec des allégations d'incidents de violence familiale. Le meurtre de Darian aurait peut-être pu être évité si un juge avait exigé que son agresseur porte un dispositif de surveillance à distance pendant sa liberté provisoire.
Le projet de loi ajoute au Code criminel le recours possible à un dispositif de surveillance à distance, notamment dans le contexte d'une liberté provisoire par voie judiciaire, une situation qui relève de l'article 515 du Code criminel. Ce mécanisme contribuerait à assurer la sécurité des plaignants et plaignantes dans les affaires de violence contre un partenaire intime, ainsi que celle de leurs enfants.
Avec le projet de loi , nous voulons lancer un mouvement qui va au-delà du gouvernement fédéral et susciter des conversations partout au pays. Dans Oakville-Nord-Burlington, l'organisme Halton Women’s Place a défendu avec ardeur la loi de Keira et il sensibilise la région au sujet des effets sur les enfants du contrôle coercitif et de la violence entre partenaires intimes. Laurie Hepburn, directrice générale d'Halton Women’s Place, et son équipe travaillent avec Hébergement femmes Canada, en communiquant avec les refuges pour femmes dans toutes les provinces, afin de faire connaître l'importance de la loi de Keira.
Sonia Robinson, une habitante de ma circonscription, a été tellement touchée par l'histoire de Jennifer qu'elle a lancé une pétition demandant à la Chambre des communes d'adopter le projet de loi . À ce jour, la pétition a recueilli plus de 4 000 signatures. C'est là un autre exemple concret de l'impact qu'a eu l'histoire de Jennifer et de Keira sur les Canadiens. Je presse tous les gens à l'écoute aujourd'hui de signer la pétition et je remercie Sonia de ses efforts.
Récemment, la mairesse de Burlington Marianne Meed Ward a appris l'existence de la loi de Keira et, pour l'appuyer, a présenté une motion au conseil de Burlington qui a été adoptée à l'unanimité. Le conseil régional d'Halton et la Ville de Vaughan ont aussi adopté la même motion à l'unanimité, et je sais que d'autres municipalités travaillent activement sur des motions exprimant leur appui.
Rien de cela n'aurait été possible sans le travail assidu et le dévouement de la mère et du beau-père de Keira, la Dre Jennifer Kagan et Philip Viater. Jennifer et Phil ont consacré leur vie à la sensibilisation au contrôle coercitif et à la violence contre un partenaire intime. Ils ont veillé à ce que Keira Kagan ne soit jamais oubliée. Jennifer et Philip rencontrent régulièrement les députés de partout au Canada. Grâce à leur travail, j'ai pu collaborer avec mes collègues d'en face sur cet important dossier non partisan. Je tiens à remercier tout particulièrement la et la présidente du Comité permanent de la condition féminine, la députée d', de leur soutien et de leur aide.
Ce matin, quand je me suis réveillée, le soleil brillait plus fort qu'il ne l'avait fait depuis des semaines. Je pense que c'est la lumière de Keira qui nous éclaire, la lumière d'un ange dont l'héritage peut véritablement changer le monde. Nous le devons à Keira, à Jennifer et à Philip d'adopter le projet de loi . Ce faisant, nous permettrons à Keira de vraiment changer le monde, ce qu'elle a toujours voulu faire.