Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Desnethé—Missinippi—Rivière Churchill.
J'aimerais remercier le Président d'avoir permis la tenue de ce débat d'urgence. Cette question revêt une importance capitale pour l'ensemble du pays. En toute franchise, les choses n'auraient pas dû se dérouler ainsi. Nous savions depuis des mois que le pipeline Coastal GasLink représenterait un défi en Colombie-Britannique. Le gouvernement n'en a fait aucun cas. Les libéraux sont responsables de la crise qui sévit aujourd'hui parce qu'ils n'ont pas pris les devants dans ce dossier.
Que se passe-t-il dans tout le pays? Je pense que tous les députés conviennent que les manifestations constituent l'un de nos droits en tant que citoyens du pays. Même si les manifestants érigent parfois des barrages routiers ou d'autres choses du genre, nous les tolérons parce que nous savons que c'est important. Parfois, ils vont trop loin et ils bloquent l'accès à des infrastructures essentielles, ce qui est illégal, de toute évidence.
Quelles sont les répercussions de telles actions? Personne n'a vraiment parlé de l'impact de ces manifestations d'un océan à l'autre. Quelles sont les conséquences de ces barrages illégaux? Je ne parle pas ici de manifestations pacifiques, un droit dont jouissent tous les Canadiens, mais bien de barrages érigés sur notre réseau ferroviaire et d'autres actions de la sorte.
Il y a une pénurie d'aliments et de préparations pour nourrissons dans de plus en plus de magasins, car les produits ne peuvent pas être transportés à l'intérieur du pays. De nombreuses maisons sont chauffées au propane, et le propane est transporté par train. Le manque de propane a une incidence non seulement sur les résidences, mais aussi sur les maisons de retraite et les exploitations agricoles.
Le secteur forestier est en crise en Colombie-Britannique. L'industrie bat de l'aile. Or, voilà que le bois ne se rend pas de la forêt aux scieries, puis aux clients. Une industrie qui souffre déjà écope d'un autre coup dur.
À l'heure actuelle, 66 grands cargos attendent dans les eaux de la Colombie-Britannique. Cela coûte 425 millions de dollars par jour. C'est non négligeable! Les réseaux d'aqueduc n'auront pas le chlore dont ils ont besoin.
Pas plus tard qu'aujourd'hui, des manifestants ont bloqué le domicile du premier ministre de la Colombie-Britannique pour l'empêcher de se rendre à l'Assemblée législative. Des journalistes ont dû escalader les murs pour accéder à l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique et couvrir le discours du Trône.
De toute évidence, comme l'a reconnu le ministre des Transports aujourd'hui, nous sommes aux prises avec des actes dangereux, dont la destruction de nos chemins de fer. On m'apprend que des feux de signalisation ont été vandalisés et que des véhicules et des ponts ont été considérablement endommagés. Ce n'est pas banal.
Aujourd'hui, j'ai entendu le premier ministre n'admettre que du bout des lèvres ce qui se passe sur le terrain. C'est grave. Je n'ai jamais rien vu de pareil.
Une trentaine d'organismes canadiens, de la Chambre de commerce à l'industrie de l'aluminium en passant par le secteur des mines, ont publié une déclaration commune dont voici un extrait:
[...] ces barrages illégaux nuisent gravement à l'économie, compromettant d'innombrables emplois de la classe moyenne, dont beaucoup dans les industries dont les produits, les pièces et les ingrédients sont transportés par train. En plus de perturber les chaînes d'approvisionnement intérieure et mondiale, les barrages nuisent à la réputation du Canada à titre de partenaire fiable pour le commerce international. En outre, ils compromettent la sécurité publique en empêchant la distribution de produits essentiels tels que le chlore pour le traitement de l'eau et le propane pour chauffer les maisons [...].
Je vais faire part à la Chambre de ce que je sais du projet.
Le processus d'approbation a été très long. Le projet vise à construire un gazoduc d'environ 670 kilomètres qui achemine du gaz de la région de Dawson Creek vers une installation située près de Kitimat, en Colombie-Britannique, aux fins d'exportation. On considère qu'il offre non seulement des avantages économiques pour le Canada, mais aussi une occasion de réduire des émissions mondiales.
Nous savons que 20 chefs élus ont donné leur appui au projet. Je crois comprendre qu'un certain nombre de chefs héréditaires l'ont également appuyé. Le processus a inclus la consultation d'un certain nombre de communautés et les conseils élus ont soumis le projet à un référendum aux fins d'approbation. Ce ne sont pas seulement les chefs élus qui disent « oui ». De nombreuses communautés ont tenu un référendum.
De toute évidence, un groupe de chefs héréditaires s'y oppose. Cependant, un autre point important est que certains de ces chefs se sont portés candidats aux conseils élus et n'ont pas été élus.
Il y a eu un rassemblement à Prince George et j'ai écouté des intervenants wet'suwet'en — de Crystal Smith à l'aînée Elsie Tiljoe —parler à tour de rôle de l'importance de ce projet pour leur communauté.
Selon le processus interne lancé par la chef héréditaire Theresa Tait-Day, 85 % des Wet’suwet’en dans sa communauté approuvent le projet.
Je le répète, il est évident que des problèmes se profilaient à l'horizon depuis des mois, mais le gouvernement les a laissés s'amplifier au point de devenir une crise.
Maintenant, des groupes comme Extinction Rebellion et Justice climatique, entre autres, jouent un rôle central dans la contestation. De nombreuses personnes, y compris des Wet’suwet’en, ont qualifié ces groupes de personnes de l'extérieur qui profitent de la division au sein des communautés des Premières Nations dans l'espoir de semer le chaos. Je crois que, pour bon nombre de ces gens, il s'agit d'une répétition générale avant de bloquer les travaux de l'oléoduc Trans Mountain et de tout autre projet énergétique. Leur objectif n'est pas de s'attaquer aux graves problèmes de gouvernance des communautés des Premières Nations, mais bien de démanteler les infrastructures énergétiques dans tout le pays.
Ellis Ross, député provincial actuel et ancien membre d'un conseil de bande qui a pris part aux négociations entourant l'entente sur les retombées, a déclaré ceci: « À l'origine, c'est la Loi sur les Indiens qui nous opprimait, et nous avons fini par avoir le dessus. Maintenant, ce sont les ONG, voire les organismes autochtones, qui nous oppriment. Au milieu de toutes ces manœuvres et de cette politique, les Autochtones ordinaires restent pris avec leurs problèmes sociaux. »
Vernon Mitchell, membre de la nation des Wet'suwet'en, a déclaré ceci au sujet d'une partie des personnes qui s'opposent au projet: « Ils ne savent absolument rien de notre territoire, mais ils érigent quand même des barrages routiers... Ils nuisent à mon peuple et à mes enfants. »
À ce jour, le gouvernement s'est contenté d'ignorer le problème et de le pelleter dans la cour de la Colombie-Britannique. L'allocution livrée aujourd'hui par le premier ministre du Canada s'est révélée particulièrement décevante. On a entendu de belles paroles, mais il n'a pas été question d'un plan d'action concret. Aujourd'hui, le premier ministre Moe a demandé la tenue d'une conférence téléphonique avec tous les premiers ministres provinciaux après avoir constaté que le gouvernement ne faisait rien et renonçait à prendre ses responsabilités.
Malgré le discours du premier ministre sur la nécessité d'écouter différents points de vue, il n'y a manifestement qu'une seule perspective qui importe: la sienne. Il exclut du dialogue un grand nombre d'acteurs importants.
Le pays traverse une crise et se retrouve avec un problème de leadership. Le gouvernement actuel a laissé la situation se détériorer et se transformer en crise nationale. Il n'a que lui-même à blâmer.