Merci.
Tout d'abord, bonjour à tous. Dans un sens, c'est un peu la semaine des anciens pour moi et pour ce comité. C'est la troisième fois que nous avons l'occasion de discuter de ce processus très important. Je regrette de ne pas être là en personne pour vous donner à tous une poignée de main d'adieu et peut-être un câlin, car je suis certaine que ce sera la dernière rencontre que nous aurons pendant ce mandat. Je tiens à vous dire à quel point j'ai apprécié l'occasion qui m'a été donnée de parler avec vous et d'entendre vos points de vue sur le travail du comité.
Au président, M. Anthony Housefather, aux vice-présidentes, l'honorable Lisa Raitt et Mme Tracey Ramsey, ainsi qu'aux membres du comité, je tiens à dire à quel point je suis heureuse de me retrouver devant vous. Le fait de présider ce comité a été un honneur pour moi.
Je dirais que la différence entre les travaux de ce comité et ceux des deux autres comités, c'est que...
nous avons travaillé presque toujours en français. Vous trouverez cela surprenant en m'entendant parler français. Même si je parle français comme une Vancouvéroise, c'était très important de le faire pour refléter la réalité: nous étions en train de choisir des candidats de la province de Québec.
Je vais parler un peu plus en français, sauf que je suis très fatiguée — je suis arrivée hier d'Afrique — et je ne veux pas vraiment...
massacrer la langue de Molière en vous faisant mon rapport.
En fait, nous avons fait la majeure partie de notre travail en français. C'est ce qui différait des dernières fois.
Comme je vous l'ai déjà dit au sujet des deux autres exercices, chaque fois que quelqu'un me dit « merci de votre bon travail en tant que présidente », je dis que les membres du comité m'ont rendu la tâche assez facile. Je pense que vous seriez très fiers et très heureux de voir l'incroyable professionnalisme et le dévouement dont les membres ont fait preuve pour servir les Canadiens d'un bout à l'autre du pays, et pas seulement les Canadiens du Québec. Mon objectif a toujours été de faire en sorte que chacun des membres du comité ait l'occasion de s'exprimer librement pour que nous puissions avoir un véritable échange d'idées et pour éviter la « pensée de groupe » et toute autre dynamique susceptible de nuire à la qualité des décisions. Je dois dire que nous avons réuni un groupe de Canadiens exceptionnels, des gens qui ont pris leur responsabilité très au sérieux. Comme je l'ai dit, cela m'a facilité la tâche. J'étais très fière de travailler avec eux. Sur le plan des compétences et du caractère, je n'ai que des éloges à leur faire.
Soit dit en passant, comme je l'ai vu dans les deux autres exemples, les deux membres du comité qui ne sont pas avocats ont souvent apporté une dimension très importante et une compréhension très claire de ce que le tribunal signifie pour la vie juridique de notre pays. Je les admire beaucoup.
Le processus de 2019 pour combler le siège laissé vacant a débuté le 18 avril. Les candidats devaient soumettre leur demande avant minuit, heure du Pacifique, le vendredi 17 mai. Ils ont donc eu quatre semaines pour ce faire. Je pense que nous devrions revenir là-dessus un instant. L'un des problèmes qui se posent à nous est le moment choisi pour la mise en branle de ce processus.
Sur les trois exemples ou les trois itérations du travail de ce comité, deux portaient sur le remplacement de juges qui ont pris une retraite anticipée. Pour remplacer la juge en chef, nous avions plus de temps, parce qu'il s'agissait d'un départ annoncé. Elle a pris sa retraite alors qu'elle était presque rendue à l'âge de la prendre. Je crois que l'un des problèmes sur lesquels j'aimerais revenir et faire quelques suggestions, c'est que lorsque les juges de la Cour suprême du Canada prennent une retraite anticipée, cela change le moment où il serait parfois plus commode ou approprié d'entreprendre le processus de recherche, surtout si nous voulons nous assurer que la cour a tous les juges qu'il lui faut au début d'une nouvelle saison de travail.
Les autres membres du comité consultatif n'ont été annoncés que le 15 mai, mais dès que le processus a été lancé et qu'on m'a confirmé comme nouvelle présidente, j'ai cherché à communiquer avec tous les organismes que nous avions contactés dans le passé afin de leur demander de parler à leurs membres au sujet de la nouvelle ouverture et d'encourager ces derniers à envisager la possibilité de poser leur candidature. Je n'ai pas attendu que les autres membres du comité soient nommés; j'ai entrepris ces démarches dès qu'on a confirmé ma nomination. J'aimerais formuler d'autres observations à l'égard de ce processus.
Vous savez bien entendu que je ne vais pas répéter cette exigence de la Loi sur la Cour suprême concernant la présence de trois juges versés dans le droit civil du Québec. La qualité des candidats était vraiment exceptionnelle. Il y en avait 12, ce qui était probablement un nombre tout à fait convenable. Je crois que nous en avons reçu 12 ou 14 pour le siège de l'Ouest.
Le premier siège que nous avons examiné avait beaucoup plus de candidats, parce qu'à l'origine, c'était censé être un concours national — et ce l'était. Parmi ces candidats, il n'y avait qu'une seule femme. Encore une fois, c'est une chose qui a déçu les membres du comité. Il n'y avait pas de candidats autochtones dans ce processus. Je pense que nous devrions parler de ce qu'il faudrait faire pour encourager une plus grande variété de Canadiens à présenter une demande. Je vais vous donner quelques-unes de mes réflexions sur les raisons pour lesquelles nous avons eu ces difficultés.
Les membres du comité consultatif se sont tout d'abord réunis par téléconférence. Nous nous sommes ensuite rencontrés à Ottawa entre le 27 mai et le 7 juin pour discuter de nos évaluations et procéder sur une base individuelle à l'identification et à l'examen des candidats en prévision de la rencontre subséquente. Nous voulions ainsi éviter la pensée de groupe, limiter l'influence des autres avant que chacun de nous ait l'occasion d'examiner les candidats de manière indépendante.
Mais avant cela, nous sommes allés à Ottawa le 21 mai pour rencontrer le juge en chef. Comme vous le savez, c'est notre tradition de rencontrer le juge en chef avant de nous mettre au travail. Bien entendu, c'était la première occasion que nous avions de rencontrer le nouveau juge en chef, M. Wagner. Comme lors des deux autres processus, nous avons constaté que cette rencontre nous a vraiment aidés à nous préparer à notre travail, puisque cela a été l'occasion de nous rafraîchir la mémoire au sujet de la réalité de la Cour suprême du Canada, de ce que l'on attendait de nous et de ce que nous devions rechercher dans nos échanges avec les candidats.
Lors de nos rencontres avec le juge en chef Wagner — il s'agissait de conversations confidentielles, mais je ne pense pas qu'il nous ait dit quoi que ce soit qu'il n'ait pas dit aux Canadiens en général —, je pense que ce qui était intéressant pour nous, c'est qu'il ait insisté sur l'importance de la collégialité. La même chose s'était passée lors de nos entretiens avec la juge en chef McLachlin. Nous voulons des juges qui ont de la rigueur et qui sont capables de s'exprimer, mais à la Cour suprême du Canada, la collégialité ne rime pas avec pensée de groupe. Il s'agit plutôt de la capacité d'essayer, dans la mesure du possible, de rendre des jugements — et de les expliquer clairement — qui tiennent lieu d'architecture au droit canadien et qui sont si importants pour les tribunaux inférieurs et les praticiens. Cette capacité de travailler avec le plus de clarté possible à l'élaboration des points de vue de la cour sur les questions en litige est un élément très important du tempérament d'un bon juge de la Cour suprême.
L'autre chose très intéressante dont nous a parlé le juge en chef Wagner, c'est le caractère tout à fait particulier de la Cour suprême du Canada, c'est-à-dire le fait qu'elle soit bilingue et bijuridique. Bien sûr, nous savions que l'une des exigences pour nos candidats était d'être fonctionnellement bilingues. La Loi sur la Cour suprême exige qu'il y ait trois juges du Québec formés en droit civil. Or, nous savons que la juge Martin a elle aussi une formation en la matière, de sorte que la capacité de la cour en ce qui a trait au droit civil est assurément bien établie. Le juge Wagner a fait un commentaire très intéressant sur le caractère unique que cela confère à notre Cour suprême et sur la façon dont d'autres tribunaux dans le monde considèrent nos jugements, à savoir que nos juges cumulent un ensemble très particulier de compétences. Je sais que de nombreux juges de common law aiment avoir l'occasion de se pencher sur le droit civil, car il s'agit souvent d'une façon différente d'arriver à la même réponse.
Cela plaçait notre travail dans un contexte particulier en ce sens que nous ne devions pas chercher seulement à satisfaire aux exigences de la Loi sur la Cour suprême. Nous travaillions à un exercice qui nous a aidés à définir notre tribunal de façon plus large dans le monde, à le définir comme étant une institution investie d'une compétence juridique extrêmement vaste. Je pense que cette idée nous a beaucoup inspirés. Bien sûr, les candidats que nous avons interviewés se sont montrés tout à fait remarquables à cet égard.
Après avoir rencontré le juge en chef et fait notre travail, nous avons présenté notre courte liste au premier ministre.
Je serai très heureuse de répondre à vos questions. Permettez-moi cependant une dernière observation. Je remarque que, depuis 2011, il y a eu neuf nominations à la Cour suprême, en comptant celle du juge Kasirer. Je me souviens de la première rencontre que nous avons eue avec la juge en chef McLachlin. Elle estimait que, pour un juge de la Cour suprême, la capacité de s'engager pendant, disons, 10 ans était quelque chose de très important, tout simplement parce qu'il faut du temps pour se mettre en train, atteindre sa vitesse de croisière et trouver sa voie, mais aussi parce que la continuité et l'absence de perturbations sont très importantes.
Toutefois, il ne fait aucun doute qu'il y a des raisons pour expliquer pourquoi les juges ne durent pas nécessairement tout ce temps à la Cour suprême.
Pour ce qui est d'obtenir la réponse la plus rapide possible de la part de candidats solides quant à la possibilité d'être considérés comme candidats à la cour lorsque des départs à la retraite ou à la retraite anticipée se présenteront, nous avons parlé d'un processus — et je serais très intéressée de savoir ce que pensent les membres du comité quant à cette façon de procéder — pour entamer une conversation en continu avec les membres de la magistrature canadienne dans toutes les provinces et les membres émérites de la profession au sujet de ce que signifie le fait de servir à la Cour suprême du Canada. Quelles sont certaines des nuances, quelles sont certaines des exigences? Je dis cela parce que c'est un travail très difficile.
Il ne s'agit pas seulement d'être un penseur juridique exceptionnel, mais aussi de déménager dans la région de la capitale nationale, à Ottawa. Et souvent, cela arrive à une étape de la vie où la carrière d'un conjoint peut être à son stade de développement le plus actif et le plus important, où les obligations familiales rendent les choses difficiles.
Je pense que le fait d'avoir une conversation plus soutenue avec les gens de la profession sur ce qu'il faut faire sur le terrain — pour mieux les renseigner sur ce que cela signifie réellement — pourrait d'abord et avant tout nous permettre d'encourager encore plus de gens à postuler. Je crois qu'une telle démarche pourrait permettre à certains candidats de surmonter les réserves qu'ils pourraient avoir quant à cette perspective. Je pense notamment aux femmes qui ont une famille et qui seraient susceptibles d'avoir un conjoint qui a aussi une carrière.
J'estime qu'une conversation en continu, par opposition à quelque chose que nous nous empressons de faire en raison d'un départ imminent et de la nécessité de recruter un nouveau candidat, pourrait être une façon d'améliorer la diversité des candidats.
Encore une fois, comme je l'ai dit, nous sollicitons effectivement un large éventail d'organisations d'avocats et de juges d'un peu partout au Canada. Je crois toutefois que cette conversation en continu est une chose que nous devrions envisager si nous voulons trouver des personnes issues de groupes sous-représentés, si nous voulons rendre la candidature à la Cour suprême du Canada moins intimidante et plus attrayante ou, à tout le moins, si nous voulons que les gens se fassent une idée plus claire et plus détaillée de ce dont il s'agit et qu'ils évitent de percevoir cette possibilité comme quelque chose de vraiment difficile. Nous devrions essayer d'arrimer leurs attentes à la réalité. Au risque de me répéter, je dis cela parce que nous avons un tribunal d'exception, un tribunal qui, dans un contexte international, est unique en son genre. Le travail qu'il fait est très apprécié. Nous voulons nous assurer qu'aucune personne — aucun homme, aucune femme, aucun membre d'un groupe ethnique ou d'un groupe identifiable au Canada — ne sera jamais découragée de poser sa candidature en raison d'un manque de confiance ou d'un manque de connaissances à propos de ce que cela pourrait signifier.
Je vais m'arrêter ici. Je serai ravie de répondre à vos questions. Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que votre comité, de m'avoir permis de m'adresser à vous depuis Vancouver. J'avais vraiment besoin de dormir hier soir.
Merci.