Merci beaucoup, monsieur le président.
Cela me fait plaisir de pouvoir m'adresser au Comité aujourd'hui parce que mon parti n'a pas souvent l'occasion de le faire. Je sais que mon collègue en avait long à dire et je le remercie personnellement de me permettre d'intervenir à mon tour.
Les députés de mon parti n'ont pas très souvent l'occasion d'intervenir. En fait, notre temps de parole est extrêmement réduit en comité, pour ne pas dire nul. La seule exception à cela fut quand le Comité spécial sur la réforme électorale a permis au Bloc québécois d'y siéger. Outre ce comité, depuis la dernière législature, nous n'avons pu siéger à aucun comité. Cela représente un problème important pour nous, parce que chaque fois qu'un projet de loi est soumis et que nous avons des points à faire valoir, nous ne sommes pas en mesure de le faire ni de suggérer des amendements. Il arrive que nous puissions le faire, mais très fréquemment, nous n'arrivons pas à le faire comme nous le voudrions.
Tout cela cause des problèmes particuliers. Nous sommes des députés au même titre que tous les autres députés à la Chambre des communes, c'est-à-dire que nous avons été élus par les citoyens de notre circonscription. Il y a 11 députés dans cette situation à la Chambre des communes. Non, nous sommes maintenant 12 députés puisqu'un ancien député libéral siège maintenant comme député indépendant.
Nous avons reçu des gens de notre circonscription le même mandat que les autres députés ont reçu des leurs, qui est de les représenter à la Chambre des communes. C'est une injustice parce que nous ne sommes pas en mesure de représenter ces citoyens comme les autres députés le font.
C'est quelque chose sur lequel le Comité devrait se pencher, pour faire en sorte que ce soit pris en compte dans d'éventuelles modifications au Règlement. Il faut que les députés puissent faire valoir leurs points de vue dans tous les comités de la Chambre, et pas seulement dans ceux qui traitent du Règlement de la Chambre et des changements aux règles démocratiques s'appliquant aux comités.
Les règles démocratiques ont été discutées précédemment dans le cadre du comité qui s'est penché sur le changement du mode de scrutin. J'ai apprécié le fait qu'on nous ait manifesté une ouverture et qu'on nous ait permis de prendre la parole pour faire valoir nos points de vue. À mon sens, c'était essentiel. Quand on change les règles de notre démocratie et que des gens ne sont pas invités autour de la table, c'est un déni de démocratie parce que ces gens font partie du processus démocratique.
Dans le cas qui nous concerne, c'est un peu la même chose puisqu'il est question de changements à apporter au Règlement de la Chambre des communes. Il est évident que ce règlement est un élément essentiel du fonctionnement du Parlement. À partir du moment où on change la vie des parlementaires, il est important qu'on entende ce que tous les parlementaires ont à dire à ce sujet. À ce titre, j'apprécie que le Comité nous donne la parole, mais je pense que de nous donner la parole seulement en cette occasion n'est pas suffisant. Il faudrait aussi nous donner la parole à d'autres occasions, en fait, dans l'ensemble des comités.
Je ne pense pas pour autant qu'on devrait instituer une pratique consistant à affecter automatiquement un député à un comité. Nous sommes 10 députés indépendants, puisque vous ne voulez pas nous reconnaître en tant que députés du Bloc québécois. Comme il y a plus que 10 comités, le nombre de députés de notre parti ne nous permettrait pas d'assister à tous les comités. Néanmoins, il faut regarder la possibilité, pour les députés considérés comme indépendants, d'assister à ces comités, peu importe lequel, et d'y participer de manière concrète, qu'il y ait un seul ou 11 députés indépendants élus à la Chambre des communes. C'est un élément essentiel qui permettrait à tout le monde de participer à la vie démocratique parlementaire.
Je suis persuadé que les partis considérés comme indépendants pourraient s'entendre pour décider qui prendrait la place de députés indépendants un jour donné. À titre d'exemple, je suis persuadé que la députée de Saanich—Gulf Islands serait assidue au Comité permanent de l'environnement et du développement durable. Je suis persuadé qu'elle nous laisserait souvent sa place dans d'autres comités. Quand nous aurions des interventions à faire dans des comités qui l'intéressent personnellement, il n'y aurait pas de problème non plus. Je pense que ce serait un élément positif.
Ce serait d'autant plus souhaitable qu'en démocratie, on parle de multiplication des points de vue. Le fait d'avoir le point de vue de tous les partis est encore plus intéressant pour la Chambre et pour l'ensemble des députés.
Nous avons chacun reçu à nos bureaux un document qui a été rendu public. Il s'agit d'un document d'orientation du gouvernement décrivant les changements qu'il souhaite apporter.
Un de ces changements consiste à siéger quatre jours par semaine plutôt que cinq. C'est une avenue intéressante à explorer, mais elle comporte de nombreux risques.
D'abord, il est important que chaque député puisse passer du temps dans sa circonscription, mais il doit aussi en passer suffisamment sur la Colline. Si on décide de siéger quatre jours par semaine, par exemple, cela veut-il dire que les députés considérés comme indépendants vont voir le nombre de leurs questions diminuer? En ce moment, chaque député indépendant a le droit de poser une question par semaine. Le Bloc québécois a 10 députés et il a donc droit à 10 questions par semaine. Ayant un seul député, le Parti vert n'a droit qu'à une question par semaine. Il ne faudrait pas que ces députés perdent la possibilité de poser leurs questions. Déjà qu'ils ne peuvent poser que très peu de questions, ils pourraient en poser encore moins. À mon sens, le système actuel est déjà complètement dysfonctionnel. En ce qui concerne les questions, ce n'est pas normal que les partis ne soient pas reconnus à moins de 12 députés. Qu'ils aient dix, cinq, quatre, deux ou un député, les partis devraient être reconnus.
Dans le document d'orientation qui nous a été remis, il y est beaucoup fait référence à Londres. On donne l'exemple du Parlement britannique qui ne siège pas toujours cinq jours par semaine et où le premier ministre ne siège qu'une fois par semaine pour répondre aux questions, comme ce qui est proposé dans le document d'orientation. Cependant, à Londres, les partis comptant deux députés et plus sont reconnus, alors qu'ici, cela en prend 12 pour qu'ils le soient. En Grande-Bretagne, la population est de 60 millions d'habitants et celle du Canada, de 35 millions. Si on utilise un facteur d'équivalence en termes de millions d'habitants, un parti devrait être reconnu à partir d'un seul député. Si on utilise la pure équivalence du fonctionnement du Parlement britannique, c'est ce qu'il faut faire.
Je ne trouve pas normal que les députés n'aient pas les mêmes ressources. Être reconnu, cela veut dire poser davantage de questions. Dans une période des questions où une centaine de questions et plus peuvent être posées, le parti qui n'est pas en mesure de poser des questions ne peut même pas être inscrit à l'ordre du jour et commenter ce qui se passe un jour donné. C'est absolument essentiel que tous les partis politiques puissent intervenir tous les jours sur des enjeux névralgiques. Il se passe des choses dans la société et quand les députés de ces partis ne peuvent pas être entendus, on n'entend pas du tout leurs points de vue.
Le changement consistant à siéger quatre jours par semaine sous-entend qu'il y aurait plus de semaines où l'on siégerait pour compenser et pour garder le nombre d'heures où le gouvernement siège. C'est quelque chose qu'on peut examiner, mais nous nous demandons ce qu'il adviendrait des semaines de relâche. Cela veut-il dire que les semaines de relâche parlementaire disparaîtraient? Est-ce que nous siégerions plus souvent? Tous les députés doivent avoir du temps pour passer dans leurs circonscriptions, surtout celles dont le territoire est très grand.
Il faut aussi penser aux dates importantes. Il arrive que la date du 24 juin soit un jour de séance de la Chambre, ce que nous trouvons complètement inconcevable comme députés du Québec. Le 24 juin est la fête nationale du Québec et c'est une journée extrêmement importante pour les Québécois. Tous les citoyens québécois s'attendent à voir leur député dans leur circonscription, à le rencontrer, à fêter avec lui et à partager ce moment important. Pour nous, il serait essentiel que la date du 24 juin soit libérée, afin que les députés québécois puissent aller dans leurs circonscriptions. Je suis persuadé que les députés québécois des autres partis seront du même avis. Pour tout le monde au Québec, la fête nationale est une date très importante.
Dans le même document d'orientation, il est question de donner la possibilité aux députés indépendants de siéger aux comités. Cela nous réjouit, mais sachez que siéger aux comités demande aux députés d'y consacrer du temps de préparation. Lorsque ces députés considérés comme indépendants sont invités à des comités, ce temps est exigeant. On dit souvent que le temps, c'est de l'argent. Ces députés ont besoin de ressources financières supplémentaires, car ils n'ont pas assez de moyens actuellement pour se préparer à assister aux comités. Le fait d'assister à des comités entraîne des responsabilités supplémentaires et des ressources financières doivent absolument être accordées en conséquence.
Si jamais il y a une réforme qui permet aux députés indépendants de siéger à des comités ou, encore, à des partis d'être reconnus à différents degrés — par exemple, reconnaître un groupe parlementaire sans reconnaître un parti ou reconnaître des partis à partir d'un plus petit seuil minimal —, il faudrait que les budgets soient également disponibles à partir d'un seuil plus bas. Ce n'est pas vrai que les députés seront en mesure de prendre une plus grande charge de travail sans avoir les ressources financières pour accomplir ce travail. Je pense qu'il s'agit de l'élément le plus important dont nous vous faisons part aujourd'hui: avoir des ressources financières supplémentaires est essentiel.
En ce moment, nos députés au Bloc québécois doivent réduire leurs ressources destinées à leurs bureaux de circonscription pour être en mesure de faire un peu de travail parlementaire. Cela fait en sorte qu'ils ne sont pas sur un pied d'égalité avec les autres députés des partis reconnus. Tous les députés doivent être en mesure de servir leurs citoyens dans leur circonscription sans avoir à amputer leur budget de circonscription pour faire du travail parlementaire. Ce qui se passe en ce moment est très difficile pour nos députés. Je pense que c'est important que tout le monde soit capable de donner un service qui a du sens dans la circonscription et sur la Colline, et ce, tant en ce qui a trait aux cas (ou dossiers) de circonscription qu'aux travaux parlementaires.
Dans le document, il y a aussi un point qui parle du vote électronique. Nous regardons cela avec un certain intérêt. Toutefois, il semble y avoir une certaine ambiguïté quant à savoir comment s'appliquerait ce vote électronique. Il est écrit que les députés pourraient continuer de travailler dans leur circonscription tout en effectuant un vote électronique ou en continuant de travailler à la Chambre. Nous nous demandons de quelle façon des mesures de sécurité pourraient être mises en place pour que le député qui se trouve dans sa circonscription puisse avoir le bon contexte lui permettant de voter pour ou contre un projet de loi. Comment pourrait-on faire pour s'assurer que le vote du député est fait par le vrai député? Par exemple, ce n'est pas normal que quelqu'un en déplacement vote sans qu'on puisse vérifier son identité. Je pense que les systèmes de sécurité doivent être bien fiables. Il nous faut vraiment la preuve que ce serait concret et efficace.
Qu'on le veuille ou non, il y a une histoire qui explique la façon dont nous votons en ce moment. L'histoire derrière la manière dont le vote se fait présentement est un symbole important pour beaucoup de gens. Si un changement est apporté à la façon de voter, je pense qu'il serait important qu'à certaines occasions importantes, comme un vote sur le discours du Trône, sur le budget ou sur d'autres éléments comme ceux-là, il soit permis de voter de façon traditionnelle. Cela fait partie de la tradition et de l'histoire, tout comme l'habillement des pages, du Président de la Chambre ou de certains fonctionnaires. Le vote de façon traditionnelle devrait continuer de pouvoir se faire à certaines occasions importantes.
Nous n'avons pas terminé de nous faire une idée sur le fait de siéger quatre jours par semaine, mais nous manifestons une ouverture à cet égard, tout comme sur le fait de voter de façon électronique. Je pense que c'est important d'en parler et que c'est une bonne idée de soumettre cette idée à ce comité pour en discuter, aujourd'hui.
Il y a toutefois quelque chose qui nous inquiète dans le document présenté. C'est au sujet de l'attribution de temps. Il semble y avoir une possibilité pour le gouvernement de recourir plus facilement à des attributions de temps, c'est-à-dire de faire en sorte que la Chambre soit forcée de se positionner sur certains enjeux et de couper court aux débats qui ont lieu, tant à la Chambre que dans les comités. Nous avons une inquiétude par rapport à cela parce que, selon la manière dont les choses fonctionnent présentement, il y a énormément de projets de loi sur lesquels nous ne sommes même pas en mesure de prendre position ou de débattre à la Chambre. Cela est également un problème.
Dans d'autres parlements du monde, je pense à l'Assemblée nationale du Québec par exemple, à partir du moment où il y a un seul député qui veut prendre la parole, il a le droit de le faire. Il peut s'exprimer sur tous les projets de loi qui sont présentés et sur tout ce qui est discuté.
Nous ne trouvons pas normal de ne pas être en mesure de nous exprimer. S'il y a un projet de loi qui est déposé, c'est important que tous les députés soient entendus. À 10 députés, ce n'est pas vrai que nous formons un groupe au nombre insuffisant pour être en mesure de nous exprimer. Il y a des groupes parlementaires composés de 12 députés. Avec deux députés additionnels, ils sont en mesure de s'exprimer sur l'ensemble des sujets alors que nous, avec 10 députés, nous ne le sommes pas. Il y a quelque chose qui ne fonctionne tout simplement pas dans cette façon de faire, en ce moment. C'est important que des modifications soient apportées à ce sujet. S'il est plus facile de recourir à des attributions de temps, nous craignons que celui nuise aux députés qui, comme nous, ont déjà de la difficulté à faire valoir leur point de vue dans le cadre des débats.
Traditionnellement, nous avons toujours voté contre ces attributions de temps parce que nous trouvons que c'est une façon pour le gouvernement de couper court aux débats.
Nous trouvons que couper court aux débats est dangereux. En effet, il est important que les députés soient en mesure de faire valoir leurs points de vue. Il y a 338 députés à la Chambre des communes et je pense que si 338 personnes prennent la parole sur un projet de loi, ce n'est peut-être pas la fin du monde. Il est même intéressant de prendre connaissance de la vision de chacun des députés à la Chambre sur chacun des projets de loi.
Vous savez, certains proviennent peut-être du même parti, mais cela ne veut pas dire qu'ils ont le même point de vue; les gens votent avant tout pour un député. C'est ainsi que fonctionne notre système et il est important qu'on le reconnaisse encore aujourd'hui.