Merci, monsieur le Président.
Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a proposé des amendements, que j'accepte humblement. Je crois comprendre que le gouvernement appuiera les amendements au projet de loi C-305 qui ont été adoptés, car ils s'inscrivent dans le droit fil de l'engagement officiel du gouvernement en matière de diversité et d'inclusion. Les amendements protégeraient des groupes supplémentaires et assureraient l'harmonisation avec les autres dispositions du Code criminel, en plus d'éviter le problème d'une portée trop vaste.
Je suis honoré d'avoir reçu l'appui de nombreux organismes religieux et communautaires de partout au pays. Des organismes représentant les confessions juive, islamique, sikhe, hindoue et chrétienne appuient massivement le projet de loi C-305, tout comme les groupes LGBTQ2. J'ai espoir que le projet de loi apportera une certaine tranquillité d'esprit en dissuadant fortement les gens de commettre de tels actes haineux.
Les crimes haineux se produisent dans les petites villes comme dans les grandes. Ils vont du simple graffiti au meurtre brutal. On les appelle crimes haineux, crimes motivés par les préjugés, crimes violant les droits civils, ou actes d'intimidation ethnique. Tous ces crimes sont commis en raison de la race, de la religion, de l'ethnicité, de l'orientation sexuelle ou contre d'autres groupes reconnus.
Le Canada est une nation inclusive. Nous accueillons des gens de partout dans le monde, quelles que soient leur race, leur religion, leur couleur ou leurs convictions. Peu importe l'origine, la nationalité ou les croyances d'une personne, celle-ci est traitée avec respect au Canada.
Même si le sectarisme existe depuis aussi longtemps que l'humanité elle-même, l'expression « crime haineux » est nouvelle, comme l'est aussi l'idée de réserver un traitement particulier aux infractions de ce type. Bien qu'on ait commencé à utiliser couramment l'expression « crime haineux » dans les années 1980, on s'en sert aussi souvent aujourd'hui pour décrire rétrospectivement des événements qui se sont produits avant cette époque. De la persécution des chrétiens par les Romains au massacre des Juifs par les nazis, des personnes et des gouvernements ont commis des crimes haineux bien avant que l'expression devienne monnaie courante.
Le Canada a connu des épisodes sombres, notamment: la taxe d'entrée imposée aux Chinois; l'internement des Canadiens d'origine ukrainienne, japonaise et italienne durant les Première et Seconde Guerres mondiales; le renvoi des bateaux transportant des réfugiés juifs et panjabis; nos propres antécédents en matière d'esclavage; les affiches disant qu'il était inutile que les Irlandais postulent un emploi; les endroits on l'on disait qu'on ne parlait pas français et où les francophones se faisaient dire « speak white »; la discrimination infligée aux Canadiens d'origine grecque et portugaise à Toronto et dans d'autres villes.
Les mêmes discours à l'origine de la politique d'immigration de tolérance zéro à l'égard des Juifs dans les années 1930 et 1940 sont utilisés aujourd'hui pour susciter des craintes à l'endroit des musulmans. La discrimination fondée sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre existe depuis très longtemps. Dans le Code criminel, à une certaine époque, les homosexuels ont été décrits comme des « psychopathes sexuels criminels » et des « délinquants sexuels dangereux ».
Dans les années 1960, la GRC s'est vu confier la responsabilité d'enquêter sur des personnes soupçonnées d'homosexualité. Cette discrimination existe encore dans la société canadienne.
Le projet de loi C-305 ne réglerait pas tous les problèmes de racisme et de discrimination, mais il contient des petites mesures importantes pour faire avancer la protection des plus vulnérables, renforcer le Code criminel et favoriser la dissuasion.
Aujourd'hui, je vais me reporter à un ouvrage de Phyllis Gerstenfeld intitulé Hate Crimes: Causes, Controls, and Controversies. Selon cette auteure, aux États-Unis, les crimes haineux ont commencé en 1977, lorsqu'un groupe néo-nazi appelé le National Socialist Party of America a voulu manifester devant la salle communautaire de Skokie, en Illinois, une localité qui comptait une très forte population juive, dont un bon nombre de survivants de l'Holocauste. L'Anti-Defamation League de B'nai B'rith, un groupe luttant contre l'antisémitisme et d'autres formes d'intolérance s'est particulièrement intéressé à la situation. Vivement préoccupé par la montée de l'antisémitisme et insatisfait des lois en vigueur à l'échelle fédérale et dans les États, ce groupe a rédigé une loi modèle contre l'intimidation fondée sur l'origine ethnique en 1981.
En collaboration avec quelques alliés, comme le National Gay and Lesbian Task Force, le National Institute Against Prejudice and Violence et le Southern Poverty Law Center, cet organisme a entrepris de faire pression sur les États pour qu'ils adoptent la loi. Lors de son adoption, la loi type comprenait quatre dispositions. La première, qui portait sur le vandalisme des institutions, concernait surtout les gens qui vandalisent des cimetières, des centres communautaires et des lieux de culte. Le projet de loi C-305 reprend cette idée en apportant des modifications au Code criminel.
Les méfaits haineux peuvent avoir des conséquences à long terme sur la collectivité. Selon une récente étude du ministère de la Justice, les crimes haineux sont des crimes perpétrés non seulement contre la personne, mais contre l'ensemble de la collectivité. L'étude cite David Matas, qui a dit que les gens vivent en collectivité et que leurs droits s'exercent dans la collectivité. On peut y lire ensuite ceci:
Dans le cas des crimes haineux, il faut tenir compte du fait que les répercussions sur la collectivité sont particulièrement dévastatrices, car ces crimes sont « des crimes à messages par lesquels l'agresseur avise les membres d'un certain groupe qu'ils sont méprisés, dépréciés ou jugés indésirables dans un quartier, une collectivité, une école ou un lieu de travail particulier ».
Il ne faut pas oublier, non plus, que ces crimes peuvent avoir pour conséquence que la victime rejette l'aspect d'elle-même qui a été ciblé ou qu'elle associe une part essentielle de son identité à la peur, à la perte et à la vulnérabilité.
Depuis la présentation de ce projet de loi, il y a huit mois, on a observé un grand nombre d'incidents à caractère haineux qui ont été très médiatisés. Ici même, à Ottawa, des actes motivés par la haine ont été commis contre des synagogues, un centre communautaire juif, la résidence privée d'un rabbin, des mosquées et une église. Il y a ensuite eu l'horrible fusillade dans une mosquée du Québec. Lorsque de tels incidents surviennent, il est important que nous les condamnions tous d'une seule voix.
L'objet du projet de loi respecte notre engagement à assurer la même protection et le même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, conformément à la Charte. De plus, le projet de loi C-305 fait clairement savoir que les crimes haineux ne seront pas tolérés au Canada. Il représenterait un grand pas vers l'objectif de faire de nos quartiers et de nos villes des endroits plus sûrs. Pensons au message clair que nous enverrions à tous les Canadiens: ce n'est pas seulement un petit groupe de personnes, mais bien tous les Canadiens qui peuvent se sentir plus en sécurité sachant que le Parlement a pris des mesures concrètes et rigoureuses pour les protéger.
Je remercie de nouveau tous les députés de leur appui soutenu au projet de loi C-305.