Monsieur le Président, je suis très reconnaissante d'avoir l'occasion de parler aujourd'hui de l'importance de la côte nord de la Colombie-Britannique et des raisons pour lesquelles nous cherchons à la protéger à l'aide du projet de loi C-48.
La zone visée par le moratoire sur les pétroliers s'étend de la frontière sud de l'Alaska jusqu'à la pointe de la Colombie-Britannique continentale, à l'extrémité nord de l'île de Vancouver, et elle englobe l'archipel Haida Gwaii.
Pour commencer, j'aimerais citer un document rédigé il y a huit ans:
Le projet de loi [...] interdirait la circulation des pétroliers transportant du brut dans les eaux intérieures qui entourent Haida Gwaii, des eaux dangereuses connues sous les noms d’entrée Dixon, de détroit d’Hécate et de bassin de la Reine-Charlotte. Il protégerait nos océans et nos communautés contre le risque de grands déversements d’hydrocarbures et favoriserait un développement économique durable, c.-à-d. soucieux des pêcheries et du tourisme de la Colombie-Britannique, deux secteurs en expansion.
[Le] projet de loi répond à l'appel clair des Britanno-Colombiens, [dont la majorité] sont favorables [...] à une interdiction permanente de la circulation des pétroliers le long de la côte nord de leur province. Les Premières nations, les municipalités et des milliers d’entreprises de la province dont la croissance et la durabilité sont tributaires de la santé de l’océan et de l’écosystème côtier réclament d’une seule voix une interdiction permanente.
En fait, le projet de loi ne vise pas les produits du gaz naturel et n'aura aucun effet sur les livraisons actuelles de condensat à Kitimat, en Colombie-Britannique. Les localités de la province vont continuer de recevoir leurs livraisons de carburant diesel et d’autres produits pétroliers, et le projet de loi ne changera rien aux livraisons actuelles ou à venir vers l’Asie et les États-Unis qui transitent par le port de Vancouver. Il n’empêchera pas non plus d’exporter plus de brut canadien pour répondre à la demande croissante du marché mondial. Enfin, il ne donne pas au Ministère de nouveaux pouvoirs de fermer d’autres régions d’expédition au Canada, car la Loi sur la marine marchande du Canada comporte déjà ces pouvoirs.
Le projet de loi tient compte du fait que les Canadiens veulent à la fois la protection de la faune et la prospérité. Nous pouvons leur procurer les deux si nous choisissons judicieusement où et comment procéder au développement.
Nous avons vu les répercussions environnementales, économiques et sociales désastreuses des catastrophes de l’Exxon Valdez et de BP [dans le golfe du Mexique]. Un gros déversement le long des côtes de la Colombie-Britannique mettrait des écosystèmes fragiles et leur faune en péril, appauvrirait les communautés et compromettrait beaucoup de nos [dizaines de milliers d']emplois côtiers. Le risque est tout simplement trop grand.
C'est un extrait d'une lettre envoyée à mes collègues lorsque j'ai présenté le projet de loi C-606 en 2010. Aujourd'hui, je suis vraiment reconnaissante au ministre des Transports d'avoir présenté le projet de loi C-48, car il accomplira exactement ce que je demandais dans mon projet de loi, le projet de loi C-606.
J'ai eu l'occasion de me rendre dans 15 municipalités le long de la côte et d'y tenir des séances où j'ai pu recueillir l'avis des membres de la collectivité, notamment des représentants des chambres de commerce, des peuples autochtones et du grand public. Le consensus évident qui se dégageait était que le nord de la côte du Pacifique revêt une énorme importance à l'échelle internationale et qu'il faut protéger cette région contre le risque d'un déversement de pétrole majeur.
J'ai parlé à des gens qui m'ont montré des photos d'eux-mêmes, bottes de caoutchouc aux pieds, en train d'enlever le pétrole dont des animaux marins et des berges étaient recouverts dans le golfe du Prince William, en Alaska, après le déversement par l'Exxon Valdez de 10,8 millions de gallons américains de pétrole, en 1989. Certains des écosystèmes touchés ne se sont jamais remis de ce déversement, qui a encore aujourd'hui des effets sur l'économie et l'environnement dans ces secteurs. Je pouvais facilement comprendre les inquiétudes des gens de la côte nord.
Je vais expliquer pourquoi cette région est unique, fragile même, et pourquoi j'ai écrit dans ma lettre que les gens de Colombie-Britannique considèrent que les bénéfices pour leur province ne valent pas qu'on prenne un si grand risque.
J'aimerais féliciter les groupes de défense de l’environnement qui ont sensibilisé la population au risque de déversement que représentent les pétroliers et l'oléoduc qu'on a proposé d'aménager sur la côte nord. Ce projet a été jugé inadmissible depuis par notre gouvernement. Je tiens également à remercier le premier ministre d'avoir reconnu que la côte nord du Pacifique n'était pas l'endroit indiqué pour autoriser des oléoducs et des pétroliers.
Je suis heureuse de dire que le moratoire relatif aux pétroliers sur la côte nord du Pacifique a fait partie de deux plateformes libérales, la première en 2011 et la deuxième en 2015: promesse faite, promesse tenue.
Les écosystèmes marins de la côte nord de la Colombie-Britannique sont uniques. Le littoral lui-même, avec ses falaises abruptes et ses anses, est caractérisé par une richesse écologique et une diversité d'espèces animales, sans compter ses fjords profonds et ses milliers d’îles. On trouve une prospérité et une diversité biologiques exceptionnelles dans les forêts pluviales, et c'est un environnement qui mérite d'être protégé.
Non seulement la côte nord est géographiquement complexe, mais elle appuie aussi un large éventail d'écosystèmes marins distincts. Ces écosystèmes fournissent des zones où les poissons peuvent frayer et se rassembler en bancs et sont importants pour une variété d'oiseaux et de mammifères marins et d'autres espèces marines, comme le rorqual à bosse et l'épaulard, sans parler de la riche flore de la région.
J'ai eu la chance de me rendre dans cette région lorsque j'étais ministre de l'Environnement de la Colombie-Britannique. J'ai passé une semaine à bord d'un bateau de l'administration des parcs de la Colombie-Britannique à explorer des anses et des littoraux isolés, où nous avons discuté avec des Autochtones de la région de la possibilité de créer une réserve et un parc provinciaux dans la forêt pluviale de Great Bear. J'ai aussi eu la chance de voir à quel point cette partie de la côte a été peu touchée par l'activité humaine. C'est essentiellement un écosystème intact, comme en fait foi la riche diversité dont je viens de parler.
Il était extrêmement important de protéger non seulement les milieux marins, mais aussi les milieux terrestres, où l'on proposait de faire passer un pipeline. Celui-ci devait traverser des centaines de cours d'eau pleins de poissons, dont des saumons. Il aurait traversé des étendues sauvages, des montagnes et des vallées, ainsi des forêts et des écosystèmes vierges, où il est presque impossible de faire de la randonnée, tant ils sont éloignés et sauvages — terme que j'utilise ici au sens technique. Ainsi donc, très peu de gens habitent dans ces vastes territoires vierges. Il est très important que les grizzlys et les autres animaux sauvages puissent vivre à l'écart de la civilisation humaine, qui nuit déjà à leur abondance dans d'autres régions de la province et du pays.
Dans la région côtière nordique, il y a encore du saumon dans les rivières, des arbres tricentenaires surplombent de vastes étendues et les proies et les prédateurs maintiennent l'équilibre délicat qui est nécessaire à l'épanouissement des écosystèmes. Le gouvernement est déterminé à préserver l'écosystème dynamique de la côte pour les générations à venir. L'écotourisme dans la région gagne en popularité chaque année, à mesure que les gens de partout dans le monde reconnaissent le caractère unique de la région à l'échelle internationale.
Le gouvernement reconnaît que des groupes autochtones vivent sur la côte nord depuis des millénaires et que leurs cultures et leurs économies sont encore fondées sur les riches écosystèmes environnants. Lorsque j'ai visité Haida Gwaii et la Réserve de parc national Gwaii Haanas en voilier, il y a quelques années, j'ai parlé à de nombreux autochtones de Haida Gwaii. Ils étaient tout à fait résolus à ne pas risquer un déversement de pétrole majeur dans leur précieuse région en raison de la circulation des pétroliers. Le moratoire est donc très important pour ces membres de la collectivité de Haida Gwaii.
Le projet de loi C-48 constitue une avancée importante de la part du gouvernement pour la protection environnementale de ces régions côtières immaculées d'une valeur inestimable.
Le ministre a également sillonné le pays afin de savoir ce que les gens pensent de ce projet. De Haida Gwaii à St. John's en passant par Iqaluit, il voulait entendre l'opinion des Canadiens à propos du moratoire sur les pétroliers et de l'amélioration de la sécurité maritime.
Le gouvernement a rencontré divers intervenants et organisations non gouvernementales, les représentants d'autres gouvernements et des groupes autochtones afin de solliciter leur point de vue. Je dois le dire: le ministre des Transports a vraiment pris le temps de bien consulter les Canadiens. Je n'ai pas pu faire un travail aussi exhaustif au sujet du projet de loi C-606, que j'ai présenté en 2010 et qui a été débattu en mars 2011, mais dans mon cas aussi, la majorité des personnes à qui j'avais alors parlé estimaient qu'il s'agissait d'une initiative importante. Le ministre a entendu des points de vue extrêmement variés, mais il en est toujours ressorti une chose: l'importance des mécanismes de protection environnementale.
Les localités côtières et les entreprises de partout au Canada ont compris que, pour protéger le mode de vie et le gagne-pain des gens qui vivent dans une région donnée, ses écosystèmes doivent être en bonne santé. Pour tout dire, il y a énormément d'activités économiques qui alimentent et soutiennent le cycle de vie économique de la côte nord du Pacifique. Les entreprises forestières, les minières, les pêcheurs et les installations de transformation et de mise en conserve du poisson y sont présents depuis plus d'une centaine d'années. Ces activités sont importantes et elles ont permis à de nombreuses localités côtières de se développer.
Je tiens à souligner que la Colombie-Britannique n'a ménagé aucun effort pour consulter les intéressés, qu'il s'agisse des groupes écologistes, des populations locales, des collectivités autochtones ou de l'industrie, de manière à ce que, dans la planification de l'aménagement du territoire, on sache à quels endroits les ressources terrestres et hydriques peuvent être exploitées plus intensément et à quels endroits elles doivent être mieux protégées. Cette province a trouvé le juste équilibre. On pourrait encore faire mieux, mais on a beaucoup mis l'accent sur une saine gestion des terres et des eaux en Colombie-Britannique depuis les années 1990. C'est notamment ce qu'a fait le gouvernement dont je faisais partie au début des années 2000.
Interdire une activité donnée, comme la construction d'un oléoduc ou le trafic de pétroliers dans une certaine zone, n'est pas quelque chose que le gouvernement fédéral actuel prend à la légère. Je souligne que le nombre d'emplois qui auraient été créés n'est pas énorme. La construction de l'oléoduc aurait créé des emplois, mais une fois les travaux terminés, le nombre d'emplois permanents aurait été bien moindre.
Le moratoire protégerait le gagne-pain des populations de la côte nord de la Colombie-Britannique en augmentant le degré de protection de l'environnement tout en permettant aux petits pétroliers de continuer d'approvisionner la population et les entreprises locales, ce qui est aussi une partie importante du projet de loi que j'ai proposé, le projet de loi C-606. Nous savons que ces populations et l'industrie ont besoin de recevoir par bateau des produits pétroliers qui leur sont essentiels pour vivre. C'est pourquoi le gouvernement continuera de permettre le transport d'hydrocarbures bruts ou persistants pourvu que le chargement ne dépasse pas 12 500 tonnes métriques.
Le moratoire protégerait le littoral nord, une région à l'écosystème fragile, y compris l'archipel Haida Gwaii, contre les accidents qui pourraient entraîner un déversement majeur de pétrole et perturber cette région fragile.
Nous savons que la plupart des habitants de cette région ne croient pas que le risque d'un déversement majeur comme ceux que nous avons déjà connus sur la côte Ouest en vaut la peine. Nous sommes conscients du fait que nos côtes ne seraient plus jamais pareilles si un incident de la sorte se produisait. Il y a beaucoup moins de services sur la côte nord pour prévenir un déversement, agir rapidement si un pétrolier se retrouve en difficulté et empêcher les dégâts.
Le moratoire relatif aux pétroliers ne dit pas tout sur les mesures que nous prenons pour protéger la côte ni sur l'approche de précaution que nous avons adoptée pour protéger le milieu marin de la région. Je tiens à mentionner le Plan de protection des océans, qui prévoit un autre ensemble de protections. Il s'agit d'une initiative de 1,5 milliard de dollars qui a fait l'objet d'importantes consultations. Je sais qu'on a demandé l'avis de beaucoup de députés du caucus du Pacifique, des députés de la Colombie-Britannique, quant à ce que devait contenir le Plan de protection des océans.
Cela nous permettra d’améliorer notre régime de prévention et d’intervention et de régler les problèmes environnementaux en cas d’accident maritime. Le plan de protection des océans supprimera la limite de responsabilité par rapport aux coûts de nettoyage en cas de déversement. Ainsi, la responsabilité sera illimitée. J’en viens maintenant aux petits navires. Mon collègue de Port Moody—Coquitlam a exprimé les inquiétudes que suscitent les petits navires assujettis à ce plafond. La responsabilité serait illimitée et le gouvernement imposerait une redevance sur le transport des hydrocarbures afin de financer les indemnisations et de les accélérer. Donc, les collectivités ne seraient plus forcées de payer la facture pour le nettoyage des petits déversements.
Dans le projet de loi, nous reconnaissons que lorsque l’équilibre délicat de la côte est menacé, cela perturbe les liens entre l’environnement et ses habitants. Cela ne concerne pas uniquement les collectivités côtières d'aujourd'hui. Cela concerne aussi les habitants qui y ont vécu pendant des milliers d’années. Par exemple, la Première Nation de Musqueam, qui vit sur une autre partie de la côte, sur la côte sud, occupe un territoire traditionnel depuis plus de 4 000 ans. Les liens historiques et culturels profonds noués avec la côte nord du Pacifique appuient des pratiques culturelles et des structures sociales, et c’est ce qui fait aussi qu’elles méritent d’être protégées.
Le moratoire sur les pétroliers n’est clairement qu’une initiative parmi d’autres de notre plan global destiné à protéger l’environnement marin, à commencer à rétablir certaines espèces affectées par les activités humaines au fil des ans, et à inverser les changements subis par nos océans tels que l’acidification et le réchauffement causé par les changements climatiques de même que le réchauffement des cours d’eau nécessaires au cycle du saumon. Il y a tant de choses à faire, mais il s’agit là d’une initiative essentielle pour la région clé de notre pays que constitue la côte nord du Pacifique.
J’espère que nous aurons l’appui de tous les députés présents pour faire adopter ce projet de loi et prendre ainsi une mesure importante pour protéger l’une des régions les plus diverses et les plus riches de toute la planète.