Passer au contenu
Début du contenu;
TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 4 mars 1997

.1531

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous sommes ici pour examiner l'article 14 de la Loi de 1992 modifiant la Loi sur les brevets.

Premièrement, nous allons régler des questions administratives en attendant le ministre.

Monsieur le secrétaire parlementaire.

M. Bodnar (Saskatoon - Dundurn): Monsieur le président, je propose que le comité retienne les services d'Alan Alenxandroff à titre de conseiller, à compter du 4 mars 1997 jusqu'au 30 avril 1997, pour l'aider dans son examen de l'article 14 de la Loi sur les brevets.

M. Lastewka (St. Catharines): J'appuie la motion.

M. Schmidt (Okanagan-Centre): Quelles sont les fonctions de cette personne?

Le président: Comme nous en avons discuté lors de la réunion du comité directeur, ses fonctions consistent à nous aider avec les questions de nature commerciale et à nous donner des conseils.

M. Schmidt: Il s'agit donc d'une personne ressource?

Le président: Oui, pour l'ensemble du comité. Cette personne sera prête à vous rencontrer la semaine prochaine.

La motion est adoptée

Le président: Mesdames et messieurs, je sais qu'il y a des gens ici qui aimeraient savoir quels témoins nous entendrons. Nous en discuterons avec les partis d'opposition. Nous avons une liste d'environ 150 organismes et particuliers qui ont demandé à comparaître. Le comité a l'intention d'être aussi souple que possible. Nous discuterons entre nous de la façon de procéder.

Il a été convenu avec tous les membres du comité que nous commencerions à entendre des témoins la semaine prochaine, ce qui signifie qu'à compter de cette semaine-là, il nous faudra le quorum nécessaire pour entendre des témoins, c'est-à-dire que nous n'aurons pas besoin du comité au complet.

Deuxièmement, toutes les motions que les députés de la majorité ou de l'opposition voudront proposer pendant que nous entendrons les témoins devront d'abord faire l'objet d'une discussion avec le président.

Je tiens à remercier les membres du comité d'être ici et d'être arrivés de façon à ce que nous puissions commencer à l'heure. Au nom du Comité permanent de l'industrie, je souhaite la bienvenue à l'honorable David Dingwall, ministre de la Santé. C'est sa deuxième comparution devant le comité au sujet de cette étude très importante. Nous apprécions les efforts déployés par les membres de son ministère pour participer à cette étude.

Je crois, monsieur le ministre, que vous avez une brève déclaration à faire. Dans 45 minutes environ, vous devrez vous rendre à votre prochain rendez-vous. Vos fonctionnaires resteront ici pour répondre à nos questions.

Notre comité doit siéger de 15 h 30 à 18 h 30, puis nous prendrons une pause avant de continuer avec les fonctionnaires du ministère de la Santé à 19 h 00.

Encore une fois, je vous remercie beaucoup. Vous avez maintenant la parole.

.1535

L'honorable David C. Dingwall (ministre de la Santé): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je suis accompagné aujourd'hui de mes collègues André Juneau, sous-ministre adjoint, Direction des politiques et de la consultation, et de Dann Michols, directeur général de la Direction des médicaments. Vous entendrez ces personnes plus tard au cours notre exposé. Je suis persuadé qu'au cours de la période des questions, ils voudront répondre à vos interventions.

Monsieur le président, je suis heureux d'être ici. Comme vous l'avez dit, c'est ma deuxième comparution devant le comité. Je tiens à dire tout d'abord que, lorsque le projet de loi C-91 a été adopté en février 1993, je craignais fort, comme bien d'autres, qu'il ait pour effet d'augmenter le coût des médicaments, tant pour les gouvernements que pour les particuliers.

Permettez-moi de préciser que ce gouvernement est déterminé à faire en sorte que les Canadiens puissent se procurer des médicaments brevetés à un prix qui n'est pas excessif. Le gouvernement croit aussi que l'essor de l'industrie pharmaceutique canadienne peut avoir des retombées favorables sur notre économie et sur la santé des Canadiens. En outre, il n'est pas sans savoir qu'à titre de membre de l'ALENA, et de l'Organisation mondiale du commerce, le Canada doit appliquer, au chapitre de la protection des médicaments par brevet, une politique conforme aux normes internationales concernant les droits de propriété intellectuelle. Le rôle du comité consiste à déterminer dans quelle mesure le projet de loi C-91 répond aux exigences de la politique de la santé et de la politique de l'industrie et du commerce.

J'aimerais, pour ma part, bien préciser les responsabilités que j'assume dans le cadre de cette loi, à titre de ministre de la Santé, en faisant ressortir certaines questions qu'elle soulève sur le plan de la santé.

Le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, soit le CEPMB, rend compte au Parlement par l'entremise du ministre de la Santé. Il réglemente le prix des médicaments brevetés et veille à ce qu'il ne soit pas excessif. Le président du conseil d'examen, le Dr Robert Elgie, vous fournira des éléments d'information sur l'efficacité des mesures prises par le Conseil en vue de contrôler les coûts des médicaments brevetés, lorsqu'il se présentera plus tard devant le comité.

Comme vous le savez, le CEPMB est un organisme quasi-judiciaire indépendant. Chaque année, il soumet au Parlement un rapport sur l'évolution du prix des médicaments au Canada, sur l'état de l'industrie pharmaceutique et sur les sommes investies par l'industrie des médicaments d'origine dans la R-D en regard des ventes réalisées.

Le Conseil incite les fabricants à se conformer volontairement à la loi, mais il est également doté de pouvoirs de redressement importants. Ainsi, il peut exiger la diminution des prix jugés excessifs. Il peut aussi rendre des ordonnances d'imposition pour contrebalancer les revenus excessifs tirés de la vente d'un médicament à un prix excessif. Le CEPMB a exercé un droit de regard sur les prix de lancement des nouveaux médicaments et a réussi à faire en sorte que la hausse du prix des produits brevetés demeure bien en deçà du taux de l'inflation.

Depuis qu'il a été créé en 1987, le prix des médicaments brevetés a augmenté en moyenne de1,6 p. 100, alors que la hausse moyenne de l'indice des prix à la consommation s'élevait à 3,1 p. 100 au cours de la même période. Ces chiffres montrent que le Conseil est parvenu à contrôler les prix des médicaments brevetés - et je dis bien «brevetés», monsieur le président - en tenant compte des critères fixés par le Parlement. Selon un rapport rendu public récemment par le CEPMB, le gouvernement fédéral a permis aux consommateurs de réaliser des économies s'établissant entre 846 millions et 1,1 milliard de dollars en 1995 seulement.

L'autre rôle que je dois assumer dans le cadre de la Loi sur les brevets concerne l'application, par le ministère de la Santé, du Règlement sur les médicaments brevetés, communément appelé l'article 55.2 de la loi. Mon collègue, M. Manley vous en a parlé dans le détail.

Ce règlement expose les conditions que doit remplir un fabricant de médicaments pour recevoir l'avis de conformité dont il a besoin afin de mettre sur le marché un produit générique. Mon collègue, le ministre de l'Industrie, a déjà apporté des éléments d'information au sujet de ce règlement et de son fonctionnement.

Outre ces responsabilités très précises, je m'emploie à maintenir et à améliorer le système canadien de soins de santé. Or, les médicaments font partie de ce système.

À l'heure actuelle, monsieur le président, les médicaments partagent le deuxième rang avec les médecins parmi les postes de dépenses de notre système de soins de santé, après les hôpitaux. Ils sont de toute évidence un élément crucial du système.

.1540

Je remets au comité un document qui fournit des données factuelles sur l'ensemble des dépenses relatives aux médicaments, en plus d'informations complémentaires sur les facteurs qui influencent le coût des médicaments: le prix des médicaments et aussi, en effet, leur utilisation.

Le document met à jour les prévisions budgétaires de Santé Canada jusqu'en 1996 et tient compte de toutes les dépenses pharmaceutiques. Auparavant, nos prévisions excluaient du total du budget pharmaceutique, les dépenses liées aux médicaments administrés dans les hôpitaux. Toutefois, si l'on veut bien comprendre le rôle des médicaments dans l'ensemble du système de santé, il faut avoir une vision globale de la situation et regrouper toutes les dépenses relatives aux médicaments.

Si l'on fait exception du cas récent des établissements d'hébergement, où l'on a investi massivement au cours des deux dernières années, les dépenses liées aux produits pharmaceutiques au Canada ont augmenté plus rapidement que toute autre dépense de santé au Canada. Cependant, des facteurs tels que le contrôle exercé par le Conseil, ont eu pour effet de freiner considérablement cette augmentation, dont le taux annuel moyen a été ramené de 13 p. 100, monsieur le président, pour la période de 1976 à 1992 à 2,7 p. 100 en 1996.

Il est toutefois peu probable que le coût des produits pharmaceutiques cesse d'augmenter. Et si l'on veut comprendre la raison d'être de ce phénomène, il suffit d'examiner les deux facteurs qui influent sur ces coûts: l'utilisation des médicaments et les prix des médicaments.

Voyons le cas des personnes âgées, qui représentent actuellement environ 12 p. 100 de la population, mais qui consomment de 20 p. 100 à 40 p. 100 de l'ensemble des médicaments prescrits. Avec l'âge - et nous vieillirons tous, monsieur le président, nous en sommes certains - les gens sont plus prédisposés à présenter des problèmes de santé chroniques contre lesquels les médicaments peuvent s'avérer très efficaces. Si l'on se fie à l'évolution des tendances démographiques, on peut prévoir une utilisation accrue des médicaments, ce qui augmentera le coût global des médicaments.

Un autre phénomène concernant l'utilisation mérite d'être signalé, à savoir que les gens ont tendance à privilégier les traitements pharmacologiques par rapport à d'autres types de traitement, comme la chirurgie. Et je pense que nous voudrons y réfléchir un moment, monsieur le président. En 1997, il est généralement reconnu - et courant dans certaines circonstances - que les médicaments constituent un bon substitut, si l'on veut, à la chirurgie pour certaines personnes. Il s'agit généralement d'une option moins coûteuse, mais comme elle permet de réduire les coûts liés aux services hospitaliers et à la rémunération des médecins, elle se traduit par une augmentation des coûts des médicaments. Un autre facteur influera sur le coût global des médicaments, à savoir la tendance à abandonner des produits qui existent depuis longtemps et qui sont moins coûteux au profit de produits plus récents et plus chers, qui pourraient avoir un effet thérapeutique accru.

Le coût global des médicaments dépend d'un autre facteur, le prix des produits. Il serait tentant d'imputer aux produits brevetés la responsabilité des coûts élevés des médicaments, alors qu'en fait, ces produits ne constituent qu'une partie du marché des médicaments. Bien qu'ils représentent un marché important, ils n'en constituent pas la totalité. Les produits brevetés représentaient 44 p. 100 des ventes des entreprises pharmaceutiques en 1995. Le prix des médicaments non brevetés, les marges bénéficiaires appliquées aux produits de gros et de détail, les frais d'exécution des ordonnances sont tous des facteurs qui influent sur les coûts globaux des médicaments et je ne pense pas, monsieur le président, que nous devrions perdre ces faits de vue.

Il est évident que si nous voulons conserver le système de santé dont la qualité et le coût sont tant appréciés de la population, nous ne pouvons nous permettre de faire abstraction de la question du coût des médicaments. Il est aussi évident, cependant, que si le projet de loi C-91 a eu un impact sur le coût des médicaments dans la mesure où il retarde l'accès à des produits génériques moins coûteux, il ne s'agit pas de l'unique facteur en cause. Comme je viens de le souligner, le prix imposé par le fabricant d'un médicament breveté n'est qu'un des nombreux facteurs pouvant entraîner une hausse des coûts des médicaments.

Les provinces, qui subventionnent toutes les coûts des médicaments, ne serait-ce que dans le cas des personnes âgées et des bénéficiaires de l'aide sociale, sont les premières à vouloir réduire le budget qu'elles affectent aux médicaments. Dans cette optique, elles ont exigé l'utilisation de produits génériques de remplacement; elles ont dressé des listes de médicaments qui peuvent donner droit à un remboursement et elles appliquent des critères très stricts lorsqu'il s'agit d'intégrer de nouveaux produits à la liste; elles ont plafonné le prix qu'elles sont prêtes à rembourser et les quantités de médicaments prescrits admissibles à un remboursement; elles ont négocié les frais maximums applicables à l'exécution des ordonnances et elles ont encouragé la délivrance de médicaments en grandes quantités afin de réduire ces frais.

.1545

Monsieur le président, la question de l'utilisation appropriée et inappropriée des médicaments intéresse aussi bien le gouvernement fédéral que les provinces. Il ressort d'une étude réalisée en 1995 qu'au-delà des coûts des médicaments proprement dits, le mauvais usage des produits pharmaceutiques coûte au système de santé une somme variant de 3,5 à 4,5 milliards de dollars par an, en frais d'hospitalisation, en consultations médicales et en analyses de laboratoire. On estime que les personnes âgées utilisent entre 18 p. 100 et 50 p. 100 de leurs médicaments d'une manière inappropriée. Au fur et à mesure que notre population vieillira, cette question deviendra plus préoccupante tant pour des raisons de santé que pour des raisons économiques. Si l'on veut réduire le coût des médicaments, il est essentiel d'informer les médecins au sujet de thérapies de remplacement moins coûteuses et d'enseigner aux patients à utiliser correctement les médicaments.

Il est important de contenir l'augmentation des coûts des médicaments parce que, contrairement à d'autres éléments du système de santé, une partie importante du coût des médicaments est payée par le secteur privé, c'est-à-dire près des deux tiers en 1996. Les employeurs canadiens sont préoccupés par l'incidence de l'augmentation des coûts des médicaments sur leurs régimes d'avantages sociaux avec raison. Pour de nombreuses sociétés, l'achat de médicaments peut représenter entre deux tiers et trois quarts des demandes de remboursement effectuées au titre de leur régime de soins médicaux. Leurs dépenses par personne au titre des médicaments ont augmenté de plus de 26 p. 10 entre 1990 et 1994. Les entreprises du secteur privé savent que le coût élevé des médicaments nuira à leur compétitivité. Il nuit à leur capacité de croître, de créer des emplois et de contribuer aux recettes de l'État par les impôts qu'elles paient.

L'importance du coût des médicaments tant pour le système de santé publique que pour le secteur privé a encouragé le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces et des territoires à coopérer pour s'attaquer sérieusement à cette question. Trois groupes de travail fédéraux-provinciaux- territoriaux ont été mis sur pied dans cette perspective. Le premier se penche sur les prix; le second, sur l'utilisation, la commercialisation, l'éducation du public et le gaspillage; le troisième, sur la R-D. Leurs travaux permettront aux responsables fédéraux, provinciaux et territoriaux d'étudier les questions liées à l'utilisation et aux coûts des médicaments de manière concertée et efficace.

La question de la R-D est tout aussi compliquée que celle des coûts des médicaments. En s'alignant sur les mesures prises par d'autres pays industrialisés pour protéger par brevet les produits pharmaceutiques, le gouvernement canadien a contribué à stimuler la concurrence entre les pays, incitant ainsi les sociétés à investir dans la R-D au Canada. De leur côté, les titulaires de brevets ont bien accueilli ces changements. Selon le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, ils ont investi 624 millions de dollars en R-D en 1995, ce qui correspond à 11,8 p. 100 de leur chiffre de ventes. Ces mesures ont également stimulé le secteur biopharmaceutique, qui compte maintenant environ 64 entreprises et emploie près de 4 000 personnes, y compris 1 600 chercheurs. L'objectif visé est de trouver des traitements nouveaux et, espérons-le, plus efficaces, qui comportent moins d'effets secondaires. Autrement dit, la R-D intéresse au premier chef la santé des Canadiens et l'ensemble du système de soins de santé.

La R-D a aussi des retombées favorables sur l'économie. Elle crée des emplois, non seulement pour les chercheurs, mais aussi pour ceux qui s'occupent de la fabrication, de l'emballage et de la commercialisation des nouveaux médicaments, bref, de toutes les étapes qui doivent être franchies avant d'offrir un produit au consommateur. Il ne faudrait pas sous-estimer les effets bénéfiques indirects que peut avoir la sécurité économique sur la santé des Canadiens. En améliorant la santé, on allège le fardeau du système de soins de santé. C'est un fait que l'on ne peut pas se permettre d'oublier.

Chose certaine, la tâche de votre comité n'est guère aisée. Le gouvernement tient à ce que les Canadiens aient la possibilité d'exprimer leur opinion et votre mandat consiste à les écouter.

Pour conclure, monsieur le président, je peux personnellement attester de la profonde sagesse et de la grande expérience des nombreux intervenants qui prendront la parole devant vous, et je vous incite vivement à tirer le meilleur parti possible de leurs témoignages. Ces personnes, j'en suis convaincu, vous rappelleront que les questions liées à l'utilisation et aux coûts des médicaments au Canada sont extrêmement complexes et ne sauraient se résumer aux simples paramètres du projet de loi C-91. J'espère, monsieur le président, que les membres du comité et vous-même prêterez une oreille attentive aux témoignages des ministres de la Santé provinciaux qui comparaîtront devant votre comité pour donner leur avis sur le projet de loi, mais que vous essaierez également de leur faire dire les mesures qu'ils prennent dans leurs provinces respectives relativement aux prix et à l'utilisation des médicaments ainsi qu'à toutes les autres questions dont j'ai parlé.

.1550

Autre question tout aussi importante, monsieur le président, j'espère que vous donnerez aux personnes âgées et aux divers groupes qui les représentent dans notre pays la possibilité de vous présenter leur point de vue sur des questions qui leur tiennent à coeur, et notamment le prix des médicaments et diverses autres choses, qu'il s'agisse des frais d'ordonnance, de la couleur et de la forme des emballages, ou de toute une foule de questions en rapport avec le projet de loi à l'étude.

Je vais déposer le document dont j'ai parlé et je tiens également à en déposer un autre. Il s'agit d'un document de travail dont j'ai discuté avec les provinces en avril 1996 et qui porte sur les pouvoirs du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés. Ce document s'intitule «Interdélégation de pouvoirs dans le domaine des médicaments non brevetés».

Le CEPMB n'a compétence qu'à l'égard des médicaments brevetés, lesquels comptent pour44 p. 100 - et seulement 44 p. 100 - de l'ensemble des médicaments. Le Conseil n'est pas habilité à examiner le cas des médicaments non brevetés. Il n'a pas ce pouvoir.

Les membres du comité jugeront peut-être opportun d'envisager sérieusement la possibilité d'accorder ces pouvoirs supplémentaires au Conseil d'examen. Comment pouvons-nous savoir quel est le prix au Canada des médicaments de marque et des médicaments génériques? Ce genre d'information est utile, à mon avis. Le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés est bien placé pour assumer cette responsabilité.

J'ai présenté aux provinces une disposition en vertu de laquelle elles délégueraient au Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés le pouvoir d'examiner le coût des médicaments sur leurs territoires respectifs, qu'il s'agisse de la province de la Colombie-Britannique, de la Saskatchewan ou de l'Ontario; cela nous permettrait d'avoir une idée d'ensemble du prix des médicaments au lieu de lire toutes sortes d'allégations dans les journaux sans avoir une idée exacte des chiffres réels.

Je dépose donc pour le comité des exemplaires du document que j'ai remis aux provinces. C'est un peu différent. Il ne s'agit pas d'une délégation de pouvoirs aux provinces par le gouvernement fédéral. Mais puisque les provinces se préoccupent tant du prix des médicaments, j'ai pensé qu'il serait tout à fait logique qu'elles permettent au Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés de se pencher sur cette question.

Voilà qui conclut mon exposé, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre. Nous avons écouté avec un intérêt particulier la fin de vos observations où vous nous donnez des idées sur la façon de procéder et sur les questions à poser.

[Français]

Je pense que M. Brien a des questions. Je lui accorde dix minutes.

M. Brien (Témiscamingue): Je commencerai par la dernière partie de votre exposé, monsieur le ministre. Il y a un aspect inquiétant dont nous devons discuter davantage.

Vous parlez de surveiller le prix des médicaments génériques. Lorsque vous parlez de délégation de pouvoirs des provinces au gouvernement fédéral, il faudrait d'abord s'assurer de leur consentement. Certaines choses nous reviennent à la mémoire. Quand on laisse le fédéral entrer dans un secteur, on ne sait jamais quand il va en sortir ni comment. L'impôt en est un bel exemple: le fédéral est entré dans ce domaine et y est toujours resté. Nous aurons à creuser davantage cette question avec des représentants provinciaux pour voir leurs positions. Je me fie davantage à leurs porte-parole pour connaître le fond de leur pensée.

Monsieur le ministre, vous êtes membre du gouvernement. L'échéancier de travail est pour moi quelque chose d'important. Entendez-vous réagir, faire des commentaires et faire connaître les intentions gouvernementales en réponse au rapport avant l'échéance de la prochaine campagne électorale? Les citoyens connaîtront-ils la réaction du gouvernement au rapport avant les élections?

[Traduction]

M. Dingwall: Monsieur le président, je remercie mon collègue de sa question. Je ne sais pas si j'ai bien saisi le fond de la première question, mais l'interdélégation de pouvoirs d'un palier de gouvernement à un autre n'a rien d'extraordinaire en soi. Ce qui serait extraordinaire en l'occurrence, c'est que ce genre de chose ne se fasse pas.

.1555

Je m'explique: d'un bout à l'autre de notre pays, nous avons entendu dire que les médicaments sont l'une des principales causes de la hausse du coût de notre système de soins de santé. Si c'est le cas - et je crois les provinces lorsqu'elles viennent expliquer leur situation - j'espère que ces dernières voudront profiter de cette occasion, à moins bien sûr qu'elles ne souhaitent faire la même chose de leur côté, dédoublant ainsi les efforts et l'expertise du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés dans leurs territoires respectifs.

Si elles souhaitent ce dédoublement, c'est très bien, mais il importe que tous les Canadiens connaissent ces prix, qu'il s'agisse des médicaments génériques ou de marque, ou encore des frais d'ordonnance qu'ils sont tenus de payer.

J'ai soulevé la question avec les provinces. Lorsque les responsables provinciaux comparaîtront devant votre comité, vous pourrez le faire également. Je pense que les responsables de la Colombie-Britannique seront ici bientôt. Ils répondront peut-être à vos questions à ce sujet.

Je tiens à dire à mon collègue, dont l'argument est très pertinent, que je suis d'accord avec lui. Il me faudra obtenir le consentement des provinces. Toutefois, comme ces dernières ont dit que cette question revêt la plus haute importance, il me paraît tout à fait logique qu'elles soient prêtes à déléguer des pouvoirs au Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés pour qu'il élargisse son mandat et détermine les prix...

Quant à une réponse aux recommandations que votre comité fera au ministre de l'Industrie ou à moi, ainsi qu'à l'ensemble du gouvernement, je ne cherche pas à noyer le poisson ou à éluder le problème, mais croyez-moi, je n'ai pas la moindre idée de la date des prochaines élections. Selon certaines spéculations, celles-ci pourraient avoir lieu à la fin de 1998, ou même plus tard encore. Certains ont laissé entendre qu'elles seraient peut-être déclenchées en 1997.

Je n'en sais rien. Tout ce que je sais, c'est que nous comptons sur votre comité pour faire des recommandations concrètes au gouvernement. Je peux vous donner l'assurance que tous les paliers de gouvernement leur accorderont l'attention qu'elles méritent. Des déclarations seront faites par la suite.

[Français]

M. Brien: Il y a d'autres dossiers, monsieur le ministre, pour lesquels vous n'avez pas eu peur de vous engager à respecter un échéancier, notamment en vue de l'adoption d'une loi avant les élections, quitte à inviter les gens à voter contre votre gouvernement. Je ne sais pas si ça vous dit quelque chose, mais on jase un peu ces temps-ci. J'aimerais connaître votre position puisque vous êtes responsable de ce ministère.

Vous savez qu'un des enjeux repose sur les comparaisons internationales. Quand on regarde la protection commerciale du brevet, on constate, peu importe les débats sur les chiffres, que nous sommes un peu inférieurs à nos compétiteurs. On parle ici de quelques années de moins de protection effective que dans les pays européens ou aux États-Unis. On remet souvent en question le processus d'homologation des médicaments, cela à deux niveaux. D'une part, il y a la lenteur, même si on doit avouer qu'il y a eu des améliorations depuis quelques années. D'autre part, il y a le fait qu'on n'accorde pas une compensation pour le temps que perd le gouvernement lorsqu'on lui demande d'approuver le brevet d'un médicament. D'autres pays accordent une prolongation du brevet pour compenser tout l'aspect relié à l'intervention gouvernementale en vue d'approuver le médicament.

Est-ce qu'une telle prolongation vous apparaît envisageable et disposez-vous de mécanismes pour améliorer encore la rapidité d'approbation des brevets?

[Traduction]

M. Dingwall: Là encore, monsieur le président, il s'agit d'une question de fond. En réalité, lorsqu'on passe en revue l'historique non seulement de ce projet de loi mais de toute la question des droits de propriété intellectuelle, même si certains pensent que le Canada devrait faire des pieds de nez à la communauté mondiale et à l'Organisation mondiale du commerce dans ce domaine, je ne pense pas que ce soit une bonne idée parce que ce n'est pas ce que les Canadiens attendent de nous. À mon avis, les Canadiens comptent sur nous pour collaborer avec les organisations internationales. Je sais que mon collègue et ami le ministre du Commerce international connaît à fond ce dossier.

.1600

Le Canada ne saurait s'écarter de ses engagements internationaux, qu'il s'agisse de l'ALENA ou de l'Organisation mondiale du commerce. C'est là un facteur très important. En outre, nous ne pouvons nier que le système de licences obligatoires a eu un effet très favorable sur l'économie de notre pays, en aidant à l'expansion des produits génériques. L'idéal est de parvenir à un équilibre, afin de permettre à ces deux catégories de produits de coexister en prospérant sur le marché qu'elles desservent.

En tant que ministre de la Santé, je pense que nous devrions faire de notre mieux pour maintenir un niveau raisonnable de dépenses en médicaments, mais nous ne pouvons rompre nos engagements envers l'Organisation mondiale du commerce ou envers l'ALENA, quel que soit parfois notre désir de le faire. Il va falloir nous accommoder du régime qui est le nôtre, nous en accommoder et l'appliquer, mais le comité aurait bien des moyens de faire des recommandations qui profiteraient à la fois à la santé publique et à la R-D de ce secteur.

[Français]

M. Brien: Je reviendrai plus tard sur l'homologation parce que j'aurai des questions plus précises.

Vous êtes aussi responsable de ce qui s'appelle la réglementation de liaison. Si un fabricant d'un médicament d'origine s'oppose à un fabricant de produits génériques dans un délai de 45 jours, il faut toute une bataille juridique pour obtenir l'avis de conformité. Nous avons une réglementation particulière ici, au niveau du règlement de liaison, tandis que dans plusieurs autres pays, on fonctionne par injonction interlocutoire si jamais il y a une violation de brevet.

Il y a des rumeurs, comme il en court souvent dans ce Parlement-ci, qui disent que le gouvernement a créé un groupe de travail regroupant votre ministère, celui de l'Industrie et celui de la Justice en vue d'examiner des solutions de rechange au règlement de liaison, de voir s'il n'y a pas des mécanismes plus efficaces ou aussi efficaces qui permettraient d'assurer une protection de l'esprit de la Loi sur les brevets tout en invoquant des mécanismes judiciaires différents.

Est-ce le cas? Si oui, il serait peut-être intéressant que les membres de ce comité soient informés de ces travaux.

[Traduction]

M. Dingwall: Je ne connais pas de comité au sein du ministère de la Santé, ni de personnes associées au comité d'un autre ministère qui procèdent à l'examen de cette question, mais si l'honorable député juge qu'il serait important de constituer un comité de fonctionnaires du ministère pour l'examiner, je serais tout à fait disposé à envisager cette possibilité.

Quant à l'avis de conformité et aux règlements qui s'y rapportent, le paragraphe 55(2) de la loi, si je ne me trompe, je voudrais souligner le fait que ces règlements ont été formulés, pour l'essentiel, par le ministère de l'Industrie et confiés au ministère de la Santé aux fins d'administration, et c'est ce que nous faisons actuellement. J'ai mon opinion sur ces règlements, opinion dont je suis disposé à faire part au comité, s'il le souhaite.

Le président: Monsieur Hill.

M. Hill (Macleod): Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre.

J'ai entendu tant le ministre de l'Industrie que vous-même affirmer que l'ALENA et l'OMC ont effectivement ligoté ce comité. Pourriez-vous nous dire à quel moment vous vous êtes rendu compte que ces vastes obligations internationales ont réduit à néant la position libérale dans l'opposition ainsi que la vôtre?

M. Dingwall: Tout d'abord, je ne suis pas du tout d'accord avec votre affirmation selon laquelle, que ce soit dans l'opposition ou au gouvernement, mes positions sont réduites à néant. Le fait est qu'il faut se montrer réaliste. Quand j'étais dans l'opposition, j'étais contre ce projet de loi, en me fondant sur l'information dont je disposais à l'époque.

Mais le Canada est devenu signataire de l'Organisation mondiale du commerce et de l'ALENA. Ce serait beau de pouvoir jouer la politique de l'autruche et de faire fi de la collectivité internationale, mais en 1997 une telle action est impossible.

.1605

Quant aux détails du sujet dont vous parliez, voilà presque un an et un mois que je suis ministre de la Santé. La première question dont j'ai eu à traiter, en janvier, c'était les amendements au projet de loi sur l'ALENA, afin que ceux-ci soient tous deux incorporés à l'ALENA, et obtenir des amendements du Mexique et des États-Unis afin d'assurer la protection de notre régime de soins de santé.

Si vous voulez demander au ministre Manley et au ministre du Commerce international de comparaître, je suis certain qu'ils pourront vous donner tous les détails concernant cette affaire, les motifs qui nous y ont poussés et toutes les autres questions sur lesquelles vous voudriez avoir des éclaircissements.

Le président: Monsieur Hill.

M. Hill: Ce que disent beaucoup de commentateurs, c'est qu'actuellement les lois, quand elles sont présentées par le gouvernement, ne sont souvent qu'un cadre que les règlements viennent compléter. Le projet de loi C-8, la Loi sur le tabac ainsi que celle sur les technologies de reproduction correspondent à cette idée.

J'ai essayé par tous les moyens de faire examiner les règlements par un groupe parlementaire comme ce comité, et nous y voici aujourd'hui, à examiner tant la loi que les règlements. Ce comité fait donc ce que j'espérais voir faire pour beaucoup de projets de loi.

On m'a dit que telle n'est pas la voie parlementaire, que ce procédé usurpe, en quelque sorte, le pouvoir du Parlement. Qu'en pensez-vous? À mon avis, ce comité accomplit oeuvre importante en examinant les deux conjointement.

M. Dingwall: En ce qui concerne l'examen de la loi, le Parlement devrait exercer son pouvoir et son influence sur les lois qu'il juge appropriées, quand il le juge approprié. Quant à cette loi en particulier, la révision de la loi avait été prévue par les statuts et c'est en exécution de cela que nous sommes ici.

Je n'ai pas d'objection théorique aux comités parlementaires. Après tout, nous sommes des législateurs qui examinons non seulement la loi, mais les règlements et leur efficacité. Mais ce que je voudrais nous voir éviter, c'est l'abus de ce processus. Il convient d'accorder à une loi une certaine période pour permettre...

Quant au fond de votre question, à savoir si je suis d'accord sur la révision à la fois d'un projet de loi et des règlements corrélatifs, je répondrai par l'affirmative. C'est une chose qui me paraît bonne.

M. Hill: Très bien.

Lorsque le CEPMB impose une pénalité, c'est Revenu Canada qui reçoit cet argent. Le CEPMB encourt certains frais, mais ce n'est pas lui qui a été lésé par le laboratoire pharmaceutique qui a fait payer un prix excessif. Pensez-vous que le Trésor devrait conserver ces fonds?

M. Dingwall: Pas dans tous les cas. Il est curieux que vous ayez soulevé cette question. Pas plus tard que le mois dernier - si je ne me trompe - le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés a versé aux provinces plus de 10 millions de dollars, à titre d'observance volontaire, à cause des recettes accumulées par le Trésor fédéral. Nous allouons, en quelque sorte, aux administrations provinciales une partie des recettes perçues par le Trésor fédéral.

Cela suffit-il aux provinces? Ma réponse est évidente, mais pour répondre à votre question, nous essayons de redistribuer des fonds quand la loi le stipule.

M. Hill: Je vous ai entendu dire que le prix des médicaments brevetés était resté, au cours des dernières années dans notre pays, inférieur à l'indice des prix à la consommation, et ce depuis l'intervention du CEPMB. Mais l'autre jour encore, dans mon bureau, j'ai reçu, pour mes employés, un avis du syndicat de la fonction publique concernant le régime, avis selon lequel des changements considérables s'imposaient à la façon dont le régime couvrirait les frais des employés si ceux-ci tombaient malades. Il y était dit, entre autres, que le problème était dû à une rapide augmentation du coût des médicaments.

.1610

Si les médicaments brevetés ne constituent donc pas le problème, d'où vient celui-ci?

M. Dingwall: Je vous répondrai tout d'abord que j'ai fait cette déclaration, pour montrer que les prix des médicaments brevetés sont inférieurs au coût de l'IPC. Beaucoup de gens restent incrédules, mais c'est la vérité, fondée sur la meilleure information dont je dispose en tant que ministre, et que je reçois du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, à savoir que ces laboratoires pharmaceutiques n'ont pas augmenté le prix de leurs médicaments.

C'est la raison pour laquelle - vous en conviendrez sans doute - il est grand temps que notre pays examine non seulement le prix des médicaments brevetés, mais également celui des médicaments non brevetés.

Je voudrais que les personnes âgées viennent vous dire ce qu'elles payent pour les médicaments qui ne sont pas vendus sur ordonnance et qui, dans bien des cas, leur sont nécessaires, à savoir les médicaments génériques et les médicaments de marque. Il serait bon d'obtenir ce genre d'information, afin que nous sachions pour quels produits se font les dépenses et quels sont les prix exigés.

Mais à moins qu'on ne nous apporte des preuves contraires, d'après les témoignages que nous avons et qui nous sont fournis par le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, les prix sont restés en dessous de l'IPC.

Le président: Monsieur MacDonald.

M. MacDonald (Dartmouth): Je vous remercie, monsieur le ministre.

Le projet de loi C-91, à savoir la protection des médicaments brevetés, a fait à plusieurs reprises l'objet de nombreux débats publics.

Ces débats continuent pour les raisons que vous mentionnez: les Canadiens tiennent à ce que leur régime de soins de santé reste abordable; or les produits pharmaceutiques ou les médicaments d'ordonnance absorbent une part de plus en plus grande des dépenses pour les soins de santé. Le moment est donc bien choisi pour venir nous exposer certaines de vos idées sur les mesures qui pourraient être prises.

Il y a deux questions que j'aimerais soulever avec vous, monsieur le ministre: l'une traite du CEPMB. Je voudrais que vous ou vos fonctionnaires me communiquiez certaines informations et fassiez aussi certains commentaires.

L'une de mes craintes qui n'est pas encore dissipée - , ce n'est pas que le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés ne soit pas en mesure de réglementer l'augmentation du coût des médicaments d'ordonnance, mais qu'il ne soit pas en mesure d'évaluer correctement si le prix d'un médicament correspond vraiment à son coût. Si un médicament breveté est commercialisé au Canada 50 p. 100 plus cher que ce qui devrait être son prix, il est facile au laboratoire de conserver les augmentations en dessous du coût de la vie.

Je me suis toujours posé des questions sur le prix raisonnable de mise sur le marché d'un médicament. J'aimerais demander aux fonctionnaires - car c'est peut-être une question d'ordre technique - comment le CEPMB procède: est-ce qu'il examine le cas des pays de l'OCDE pour voir quelle est la moyenne sur le prix d'introduction, ou bien les pays du G-7?

S'il s'agit des pays du G-7, pour ce qui est du prix moyen d'introduction d'un médicament, vous constaterez qu'il est plus élevé qu'il ne le serait si on prend le cas des pays de l'OCDE. J'essaie simplement de comprendre comment le CEPMB procède, comment il décide de ce qui constitue un prix raisonnable et acceptable de mise sur le marché d'un nouveau médicament?

M. Dingwall: Monsieur le président, les prix d'introduction et les pouvoirs du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés de les évaluer sont basés sur un panier «unique» permettant une comparaison internationale. Les fonctionnaires qui comparaîtront plus tard pourront donner plus de détails. On tient également compte de la catégorie dans laquelle se trouvent ces médicaments. Le Conseil a donc le pouvoir de faire cela.

.1615

Mais le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés peut également choisir la composition de ce panier. Le panier unique auquel il se rapporte au niveau international peut donc être changé. Le Conseil peut faire des recommandations, aux fins d'évaluation, sur ce genre de changement. Mais vous avez tout à fait raison de dire que le prix d'introduction est essentiel pour ce qui s'en suivra.

M. MacDonald: Serait-il juste de dire, monsieur le ministre, que quand nous entendrons les représentants du CEPMB - avec lesquels j'ai bien l'intention de continuer à poser ce genre de questions - ce sont là des questions sur lesquelles on devrait demander conseil au comité: existerait-il de meilleures méthodes ou des comparaisons internationales plus appropriées pour le prix, à la mise en marché des médicaments? Est-ce là le genre de conseil que vous aimeriez recevoir de nous?

M. Dingwall: En raison de l'importance de la fixation des prix - le prix de mise en marché est essentiel dans tout ce processus - j'espère que le comité, en examinant cette question, formulera des recommandations sur ce point, recommandations que le gouvernement s'empressera d'examiner.

M. MacDonald: Monsieur le ministre, j'ai été agréablement surpris d'entendre vos commentaires, tout à l'heure, à propos des lettres que vous avez envoyées aux provinces pour que le CEPMB se voie déléguer, par les provinces, les pouvoirs d'examiner, d'une façon générale, le prix des médicaments d'ordonnance. C'est là une nouvelle très réjouissante.

Comme vous le disiez, il ne s'agit pas simplement de médicaments brevetés ou non brevetés, ou des médicaments génériques mais, d'une façon générale de médicaments d'ordonnance. Les consommateurs devraient avoir le droit... C'est ce qu'on appelle aux États-Unis, la persuasion morale. Même si nous ne pouvons réglementer le prix, le CEPMB pourrait peut-être, en faisant rapport sur les prix, exercer une influence modératrice sur le marché.

M. Dingwall: Certainement. Si les consommateurs, médecins et politiciens étaient au courant de ce que les consommateurs doivent payer en médicaments, et à qui ça rapporte, et où est-ce qu'on en est, cela permettrait peut-être un débat mieux informé, amènerait, en dernier ressort, des changements en politique publique et modifierait le comportement d'achat des consommateurs canadiens.

Nous allons bien devoir procéder, à un certain moment, à l'examen du prix des médicaments. Notre régime de soins de santé, pour l'exercice financier actuel, coûte 75,2 milliards, dont 10,8 milliards pour les médicaments, ce qui représente 14,4 p. 100 des dépenses totales. C'est là une somme faramineuse, et nous devrions comprendre quels sont les coûts, les divers prix imposés et la direction qu'ils prennent.

M. MacDonald: L'autre question que je voulais vous poser, monsieur le ministre, porte sur les règlements d'avis de conformité, les règlements de liaison, qui m'inquiètent beaucoup. Mon inquiétude date du temps où les règlements du projet de loi C-91 ont été promulgués, et je n'ai rien vu qui me rassure.

Comme tout le monde le sait, l'une des façons de faire baisser le prix des médicaments d'ordonnance, c'est la concurrence, mais nous devons également respecter les droits des titulaires de brevets à l'exclusivité du marché pendant une certaine période.

Certains disent que l'article 55.2, le règlement concernant l'avis de conformité, peut être exploité par un certain laboratoire pour tenir la concurrence à l'écart du marché pendant une période plus longue que ne l'autoriserait le brevet.

Prenons un cas précis: lorsqu'un laboratoire de produits génériques dépose une allégation, le titulaire du brevet entame immédiatement une poursuite en justice, qui déclenche automatiquement une injonction de 30 mois, sous réserve d'un examen par la Cour fédérale. Pendant ces 30 mois le concurrent est tenu à l'écart du marché, et dans un cas précis c'est pendant 45 mois, en raison de certaines complications techniques et juridiques; je crois qu'il s'agit du Lovastatin.

Pouvez-vous me dire ce que vous pensez de cet alinéa 55.2? Y aurait-il matière à amendement? Est-ce qu'il fonctionne de façon satisfaisante? Avez-vous des propositions sur la façon d'en améliorer le fonctionnement si celui-ci laisse effectivement à désirer?

.1620

M. Dingwall: Il me semblerait bon que le comité soit saisi de ce règlement d'avis de conformité, comme l'a dit M. Hill dans son intervention, ainsi que M. MacDonald. Examinez l'historique de ces règlements, qui ont été introduits sans période effective de consultation. C'est une question qui mérite toute l'attention du comité.

Certains diront que l'avis de conformité permet, en fait, une injonction de facto qui peut atteindre jusqu'à 30 mois; il n'en est pas ainsi dans tous les cas, mais c'est ce que soutiennent un grand nombre.

Le problème avec les règlements, c'est qu'ils ne font pas grand-chose en faveur des produits génériques et qu'ils ne font pas grand-chose en faveur des produits de marque. J'aimerais savoir ce que le comité en pense.

Vous entendrez des témoins qui, j'en suis sûr, éplucheront chaque aspect de ces règlements, et ce que nous devons viser en élaborant des politiques, c'est, dans une certaine mesure, la certitude. Il n'est guère à l'avantage du secteur pharmaceutique de devoir aller tous les deux jours au tribunal pour essayer de se défendre contre une attaque ou d'en appuyer une. Cela ne me paraît pas très... j'hésite à employer le mot «sain» - ce serait peut-être déplacé - mais cela ne me paraît pas de l'intérêt de ce secteur, et c'est également contraire à l'efficacité publique.

En raison de l'origine de ces avis de conformité, ce comité devrait examiner de très près le but visé par ceux-ci, le rôle que ces avis de conformité jouent dans tout ce secteur des médicaments brevetés.

M. MacDonald: Puis-je dire un mot?

Le président: Oui, très vite.

M. MacDonald: Monsieur le ministre, êtes-vous en faveur de la création, en consultation avec les provinces, d'un formulaire national qui permettrait aux programmes d'assurance-médicaments de tout le Canada d'acheter en gros, et d'obtenir ainsi les meilleurs prix possible pour les consommateurs et pour les contribuables? À votre avis, est-ce une possibilité pour le gouvernement fédéral, est-ce une chose que l'on envisage?

M. Dingwall: J'apprécie cette question, car le forum national sur la santé a recueilli des informations particulièrement intéressantes à ce sujet, des informations que les décisionnaires publics auraient tout intérêt à prendre en considération.

Depuis que je suis ministre de la Santé au niveau fédéral, s'il y a une chose que j'ai pu constater, c'est à quel point les divers domaines de compétence sont souvent ignorants de ce qui se passe chez le voisin. Je ne veux pas dire que les provinces ne savent pas ce qui se fait en Saskatchewan ou ce qui se fait au Manitoba, etc., mais tout comme les provinces, nous avons de bonnes raisons de regarder ce qui se fait dans la province voisine, et d'en tirer des leçons.

Si nous réussissons à regrouper nos ressources et à mettre en place un programme national d'assurance-médicaments, et ce sont les conclusions du forum national, cela nous permettra de réaliser, à la fois à court et à long terme, d'énormes économies dans le secteur de la santé. Vous n'avez qu'à penser aux possibilités offertes par les achats de gros. En soi... Avec un tel système, ce ne serait plus les compagnies qui feraient leurs conditions aux gouvernements, ce serait les gouvernements qui feraient leurs conditions aux compagnies. Dans certains cas, cela se fait déjà. L'Ontario a déjà une position assez solide, à cause de sa taille, mais pour les petites provinces comme la Saskatchewan, la Nouvelle-Écosse, et d'autres, c'est très difficile.

Nous espérons pouvoir mettre d'accord les divers intéressés. Je suis prêt à dépenser de l'argent pour mettre au point un modèle. Je ne sais pas quel est le meilleur modèle possible, et je mentirais au comité et aux Canadiens en leur disant que je sais quel est le meilleur modèle possible pour un programme national d'assurance-médicaments. Toutefois, nous devons rassembler les divers intéressés, c'est-à-dire le secteur privé, les fabricants de médicaments génériques, les fabricants de médicaments de marque et les provinces, pour que tous ensemble, nous puissions étudier les modalités d'un élargissement de notre système d'assurance-santé.

Le président: Merci beaucoup.

Est-ce que le ministre dispose de quelques minutes encore?

[Français]

Avez-vous le temps de répondre à une autre question?

M. Dingwall: Oui, certainement.

[Traduction]

Le président: Monsieur Ménard, vous avez une ou deux questions?

[Français]

M. Ménard (Hochelaga - Maisonneuve): Oui, monsieur le président. Je serais tellement triste que le ministre s'en aille. Je vais essayer d'être fin avec lui parce qu'il a eu la vie dure à la période des questions orales. Je le trouve pas mal plus raisonnable quand il parle de l'industrie pharmaceutique que quand il parle du tabac. Mais ça, c'est une autre question.

.1625

Je poserai trois questions au ministre. Mon collègue a fait allusion à la question de l'homologation. Vous savez que nous nous sommes penchés sur cette question dans d'autres comités, dont le Sous-comité sur le VIH/sida. Comme nous tous, vous savez que le processus d'homologation au Canada n'est pas tout à fait concurrentiel, si je puis ainsi dire, par rapport à ce qui se fait aux États-Unis. Un certain nombre de facteurs peuvent peut-être expliquer cette situation. Bien sûr, il y a une question de ressources. On ne saurait comparer les ressources que le Canada accorde à la direction générale de la protection de la santé et les ressources dont dispose la FDA. J'aimerais connaître votre opinion à cet égard.

Avez-vous, dans le cadre de vos fonctions ou au sein de de votre ministère, étudié un certain nombre de méthodes qui vous permettraient de faire un travail plus diligent au niveau de l'homologation? Vous savez qu'on peut prendre jusqu'à trois ans et demi et qu'on s'est retrouvés dans une situation paradoxale. Je vous rappellerai peut-être un mauvais souvenir en vous parlant du 3TC, qui a été découvert par une compagnie québécoise, mais d'abord mis sur le marché aux États-Unis où il était plus avantageux de le faire au niveau du processus d'homologation. On a fait diligence dans ce procédé.

Seriez-vous en faveur de mécanismes d'homologation conjoints entre les États-Unis et le Canada et de vous inspirer de ce qui se fait par exemple dans la Communauté économique européenne? C'était ma première question.

Je vais déposer mes trois questions, monsieur le président, puisque je crains que vous ne me coupiez la parole. Vous serez peut-être plus gêné de la couper au ministre.

J'ai déposé un projet de loi privé dont je suis très fier. Je serais très honoré d'avoir votre appui. Ce projet de loi concerne un élément extrêmement important, soit l'accès humanitaire aux médicaments.

Vous savez que dans les compagnies pharmaceutiques, c'est un peu comme au gouvernement: le pire côtoie le meilleur. Certaines compagnies pharmaceutiques donnent un accès humanitaire aux médicaments et sont extrêmement généreuses. Quand je parle d'accès humanitaire, je songe à des traitements qui ne sont pas homologués, mais dont un médecin a raison de penser qu'ils pourraient sauver la vie de nos concitoyens. Certaines compagnies pharmaceutiques, dans le cadre de leurs cliniques ou d'un programme de distribution d'urgence...

Le président: Monsieur Ménard, voulez-vous une réponse, oui ou non?

M. Ménard: Oui, monsieur le président. Est-ce que vous seriez favorable à ce qu'on ait un mécanisme, comme le prévoit mon projet de loi, pour donner plus de pouvoirs au Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés en vue de forcer les compagnies pharmaceutiques à donner un accès humanitaire aux médicaments?

[Traduction]

M. Dingwall: Voilà deux excellentes questions.

En ce qui concerne le projet de loi d'initiative privée, le député a de bonnes raisons d'être fier de son projet de loi. Je tiens à lui dire qu'il y a beaucoup de dispositions dans ce projet de loi d'initiative privée qui me plaisent beaucoup. Il doit d'ailleurs savoir que nous sommes actuellement en train d'étudier toute cette question, et nous espérons, le moment venu, prendre une décision qu'il sera en mesure d'approuver.

En ce qui concerne la délivrance de licences, c'est une question à laquelle je me suis beaucoup intéressé. Le système canadien est excellent, mais je pense qu'il peut être amélioré. Le comité pourrait réfléchir à la question, se demander s'il convient de mettre en place un mécanisme de recouvrement total des coûts, ce qui existe déjà en Grande-Bretagne où les compagnies qui souhaitent mettre un médicament sur le marché... C'est un système très efficace, un système de qualité qui règle bien des problèmes à la fois sur les plans de la santé et de la sécurité.

Ici au Canada, nous avons un système mixte, et les coûts d'approbation des médicaments sont couverts en partie grâce au recouvrement des coûts et en partie par l'État. Toutefois, je suis tout à fait prêt à étudier cette autre démarche, à condition bien sûr qu'on préserve toutes les sauvegardes en ce qui concerne la sécurité et l'efficacité.

En ce qui concerne les demandes d'homologation conjointe, c'est peut-être une chose à envisager. Je ne suis toujours pas convaincu que c'est la meilleure solution. Toutefois, comme vous le savez probablement, grâce à plusieurs technologies nouvelles, il est devenu possible de déposer ou de soumettre quelque chose presque simultanément ici et dans d'autres juridictions du monde. Ainsi, nous pourrions être propriétaires d'un brevet et avoir la possibilité de prendre une décision du moment voulu.

.1630

Pour l'instant, je ne suis pas convaincu, mais je suis prêt à entendre des conseils ou des suggestions à la fois au sujet du renouvellement des licences et au sujet des demandes conjointes.

Le président: Monsieur Schmidt, avez-vous des questions pour terminer?

M. Schmidt: Monsieur le ministre, vous avez peut-être déjà répondu à cette question. J'ai trouvé votre dernière observation particulièrement intrigante, vous avez parlé d'étendre les pouvoirs du CEPMB. C'est une position qui s'écarte tout à fait de celle que vous aviez lorsque vous siégiez de l'autre côté de la Chambre. Pouvez-vous m'expliquer la raison de ce changement?

M. Dingwall: Oui. Si la situation a changé, c'est que le Canada fait maintenant partie de l'Organisation mondiale du commerce, ce que vous savez peut-être. Le Canada fait maintenant partie de l'ALENA. Le Canada fait partie intégrante de l'Accord de libre-échange. Tous ces développements internationaux, des ententes qui ont été signées par le Canada, font que nous ne pouvons pas nous enterrer la tête dans le sable. Nous ne pouvons pas faire de pied de nez à ces organismes commerciaux internationaux. Il serait à mon avis important d'envisager d'étendre les pouvoirs du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés pour lui permettre de recueillir des informations supplémentaires sur les prix, sur l'établissement des prix, ce qui pourrait avoir un effet très positif sur le débat actuel.

M. Schmidt: C'est particulièrement intéressant, parce que dans les deux cas, à l'époque où vous n'étiez pas au pouvoir... Je pensais que cela avait peut-être quelque chose à voir avec le fait que vous aviez déménagé d'un côté de la Chambre à l'autre côté, car j'ai remarqué également qu'à l'époque vous étiez aussi contre l'Accord de libre-échange nord-américain. Je trouve cela fascinant. Je ne conteste pas ce que vous dites, soit dit en passant, mais ce changement de position me paraît fascinant. À quel moment avez-vous...?

M. Dingwall: Monsieur le président, est-ce que l'honorable député veut dire que ceux d'entre nous qui participent à la vie et à la politique publiques de ce pays, que ce soit sur la scène provinciale ou fédérale, ne devraient jamais, au grand jamais, changer d'avis? Si c'est bien ce que veut dire l'honorable député...

M. Schmidt: Non, je crois qu'il faut vous féliciter d'avoir changé d'avis.

M. Dingwall: ... je suis certain qu'il a choisi le bon parti politique.

Le président: Non, il vous fait un compliment. Il trouve que vous êtes fascinant.

Des voix: Oh, oh!

M. Schmidt: Et je viens de vous féliciter d'avoir changé d'avis. C'est une bonne chose, monsieur le ministre.

M. Dingwall: Monsieur le président, je peux encore répondre à une question du Nouveau Parti démocratique.

Le président: Monsieur Solomon.

M. Solomon (Regina - Lumsden): Merci, monsieur le président, et monsieur le ministre. J'apprécie beaucoup.

J'ai une observation à faire; en Saskatchewan, nous avons eu l'occasion de constater que l'adoption des projets de loi C-87 et C-91 avait eu un résultat très net: le coût des médicaments brevetés sur ordonnance est aujourd'hui beaucoup plus élevé que le coût des médicaments génériques, et cela a coûté très cher à notre régime d'assurance-médicaments.

Je vais vous citer un exemple: lorsque le projet de loi C-91 a été introduit, il a eu pour effet de retarder la mise en marché du médicament Énalapril jusqu'à l'année 2007. L'Énalapril était un médicament générique. C'est un médicament prescrit couramment dans le cas d'affections cardiaques. À cause de ce délai, lorsque l'Énalapril est devenu disponible, dans la seule province de la Saskatchewan où il y a un million de personnes, cela a permis de réaliser des économies de 2 millions de dollars, et cela pour une seule année, du simple fait que ce médicament générique faisait partie du formulaire pharmaceutique.

Dans le régime d'assurance-médicaments de la Saskatchewan, il y a de nombreux autres exemples qui prouvent que cette Loi sur les brevets a eu le résultat très net de faire augmenter le coût des médicaments, si bien qu'aujourd'hui, il ne reste pratiquement rien du programme d'assurance-médicaments sur ordonnance en Saskatchewan.

Cela étant dit - je sais que M. Schmidt a fait remarquer que vous aviez changé d'avis depuis l'époque où vous étiez dans l'opposition, ce que personne n'ignore - monsieur le ministre, vous apparteniez également au gouvernement qui, après son élection, a signé certaines de ces ententes commerciales. Dans ces conditions, étant donné que lorsque vous étiez dans l'opposition, avant 1993, vous aviez des opinions très arrêtées au sujet du projet de loi C-91, étant donné que vous avez participé à la signature de ces ententes, et que vous avez eu l'occasion d'apporter des amendements à la Chambre des communes dans d'autres domaines, des modifications aux ententes avec d'autres pays, je me demande pourquoi vous n'avez pas essayé d'adopter des amendements pour tenter d'adoucir les répercussions en refusant la concurrence de certaines compagnies de médicaments génériques au Canada.

M. Dingwall: Monsieur le président, la mémoire sélective des députés du Parti néo-démocrate m'impressionne toujours beaucoup. Toutefois, je tiens à remercier mon collègue pour cette question. Ce serait vraiment très agréable si le Canada pouvait faire fi de l'Organisation mondiale du commerce, mais si c'est vraiment l'opinion du chef du Parti néo-démocrate, mon collègue, je pense qu'il devrait le dire. Si c'est vraiment votre position, elle est diamétralement opposée à celle de mon parti. En effet, nous pensons que le Canada ne peut pas exister en vase clos. Nous pensons que le Canada ne peut pas se moquer des accords internationaux.

.1635

Ce que je peux avoir dit ou non au Cabinet restera dans les documents du Cabinet. Cela dit, c'est induire en erreur le comité que de prétendre que nous avons signé des accords internationaux sans nous inquiéter de leurs répercussions sur l'ensemble du Canada, sans chercher à les comprendre.

J'aimerais bien que mon collègue réfléchisse à une chose, pense-t-il que ses amis de la Colombie-Britannique et ses amis de la Saskatchewan, tous ces gens qui s'inquiètent tellement du prix des médicaments, pourraient venir devant ce comité et expliquer pour quelles raisons ils veulent que nous nous lancions dans un examen approfondi non seulement des médicaments brevetés, mais également des médicaments non brevetés, un examen approfondi du coût de ces médicaments et tout ce que cette situation signifie pour le public canadien.

Je suis heureux que l'honorable député possède ces informations, ou du moins qu'il fasse allusion à ces informations qu'il possède, et je suis certain qu'il me les fera parvenir à moi et à mes collaborateurs pour que nous puissions y réfléchir. Cela dit, j'espère que mon collègue qui représente le Parti néo-démocrate demandera à ces divers gouvernements de s'associer à un mouvement pour étendre les pouvoirs du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, pour que ce Conseil puisse examiner la totalité du problème posé par le coût des médicaments dans ce pays. J'espère que vous pourrez faire cela également.

Le président: Merci beaucoup.

Encore une fois, monsieur le ministre, nous avons beaucoup apprécié votre visite. Vos collaborateurs vont rester, et nous devons aller voter à 17 h 15. Je demanderais donc aux députés qui ont d'autres questions à poser, de poser des questions très concises.

Avant que certains d'entre vous ne partent, je tiens à présenter des excuses pour l'exiguïté de cette pièce. Lorsque le comité ne se réunit pas à l'heure habituelle, il est difficile de trouver une salle. Nous essayons de faire de la place pour le plus grand nombre de personnes possible, et je crois que plus tard nous réussirons à avoir des salles plus grandes.

À ce sujet, si vous vérifiez votre calendrier, vous verrez que l'heure de la réunion de jeudi a changé, et au lieu d'avoir lieu le matin, elle aura lieu à 15 h 15 dans une salle plus grande. Si les témoins de l'Association canadienne de l'industrie du médicament peuvent confirmer qu'ils pourront venir dans l'après-midi, nous l'annoncerons le plus tôt possible.

Poursuivons. Nous allons reprendre les questions et je donne la parole à M. Lastewka.

M. Lastewka: Merci, monsieur le président. Maintenant que le ministre est parti, je suis un peu coincé, mais peut-être les gens du ministère pourront-ils répondre.

J'aimerais parler des groupes de travail fédéral et provinciaux qui ont été mis sur pied. Est-ce que toutes les provinces et les deux territoires participent à ces groupes de travail? Quand vous parlez d'étudier les prix, est-ce que cela signifie les prix à partir du début de la recherche et jusqu'au moment où le produit est vendu au consommateur? Quand ces groupes de travail auront-ils terminé leurs travaux? Serait-il possible de les convoquer?

Je pourrais poser tout de suite ma question suivante. Le ministre a fait une observation au sujet du coût total des médicaments. Je crois l'avoir entendu parler de 10,8 milliards de dollars. Vous me reprendrez si je me trompe. Il a dit que les produits pharmaceutiques mal utilisés coûtaient au système de santé entre 3,5 milliards de dollars et 4,5 milliards de dollars. Est-ce que cela signifie qu'on utilise mal - je ne sais pas si gaspillage est le bon mot - qu'on utilise à mauvais escient environ 35 p. 100 du coût des médicaments au Canada?

Le président: Je vous adresse les questions, monsieur Juneau, et vous pouvez désigner qui vous voulez pour répondre.

M. André Juneau (sous-ministre adjoint, Direction générale des politiques et de la consultation, ministère de la Santé): Merci, monsieur le président.

Pour répondre à la question au sujet des groupes de travail, ils sont dirigés par un comité fédéral-provincial de fonctionnaires dont je suis membre et qui regroupe des représentants de toutes les provinces et des territoires. Nous avons créé des groupes de travail, et les provinces ont décidé d'y siéger ou pas, mais toutes les provinces et le gouvernement fédéral sont membres du comité mère.

.1640

Pour répondre plus précisément à votre question, nous examinons en assez grand détail, avec les provinces, toutes les questions concernant les prix.

Il va sans dire que puisque les groupes de travail ont été créés à la suite d'une réunion des ministres fédéral et provinciaux présidée par le ministre l'année dernière, les groupes de travail vont faire rapport aux sous-ministres et ensuite aux ministres. Ensuite, le ministre pourra communiquer certaines des conclusions au comité. C'est à lui de décider comment il veut le faire.

M. Lastewka: Quand est-ce qu'on fera rapport?

M. Juneau: On présentera un rapport intérimaire aux ministres lors de leur prochaine réunion, qui se tient en septembre normalement. Entre-temps, des rapports périodiques seront présentés aux sous-ministres et aux ministres.

Vous avez posé une question au sujet des 10,8 milliards de dollars. Le chiffre est exact. Selon nos évaluations, c'est ce que les Canadiens ont dépensé pour acheter des médicaments en 1996.

L'autre question portait sur l'utilisation inappropriée des médicaments. Je crois que vous faites allusion à quelque chose que le ministre a dit dans son discours. Il a parlé des coûts que représente pour le système de soins de santé l'utilisation inappropriée des médicaments. Le chiffre ne représente pas une partie des dépenses pour les médicaments, mais plutôt pour le système dans son ensemble.

M. Lastewka: Pouvez-vous nous en dire davantage au sujet de l'utilisation inappropriée des médicaments? Pouvez-vous nous donner des exemples?

M. Juneau: Le document que nous avons déposé donne la référence à l'étude que nous citions. Les groupes de travail, comme vous le savez, étudient cette question, mais nous pensons aux cas où il y a de multiples ordonnances, ou à ceux où les gens ne prennent pas les médicaments qu'on leur a recommandés. Les groupes de travail examinent plusieurs questions.

M. Lastewka: Merci, monsieur le président.

[Français]

Le président: Monsieur Brien.

M. Brien: J'aimerais qu'on revienne un peu sur les règlements de liaison. Le ministre a clairement exprimé plus tôt son souhait qu'on analyse des solutions de rechange ou qu'à tout le moins on regarde de très près le mécanisme actuel.

J'ai posé une question que je vous pose à nouveau, bien qu'un peu différemment. On a sûrement examiné des solutions de rechange puisque nous avons pour objectif de nous assurer que la protection qu'accorde la loi soit mise en vigueur le plus efficacement possible.

Est-ce que vous avez regardé des solutions de rechange aux règlements de liaison actuels? Si oui, quelles sont-elles et est-ce que vous pouvez nous en parler?

[Traduction]

Le président: Monsieur Michols.

M. Dann M. Michols (directeur général, Direction des médicaments, Direction de la protection de la santé, ministère de la Santé): À Santé Canada, nous sommes responsables de l'administration des règlements qui découlent du projet de loi C-91 et de la Loi sur les brevets. Les règlements visent à s'assurer qu'on n'abuse pas des dispositions concernant l'exploitation d'un brevet avant son expiration. Nous n'avons pas examiné les solutions de rechange aux règlements actuels. Le ministre estime, je crois, que le comité pourrait examiner des solutions de rechange possibles.

[Français]

M. Brien: Je veux m'assurer d'avoir bien compris. J'aimerais savoir ce qui arriverait si on apportait des modifications à la réglementation de liaison. À l'heure actuelle, on permet aux fabricants de produits génériques de fabriquer des médicaments avant la date d'expiration du brevet et de les mettre sur le marché dès le lendemain de cette date. En fin de compte, toute la réglementation vise à s'assurer que les produits génériques ne se trouveront pas sur le marché avant l'expiration du brevet.

.1645

En contrepartie, si on apporte des modifications qui permettront de faire plus tôt la fabrication du produit générique sans le mettre en marché, devra-t-on aussi faire des modifications en conséquence? Il y a un lien très étroit entre les deux.

[Traduction]

Le président: Monsieur Michols.

M. Michols: Il y a un lien très étroit entre les deux. Nos règlements sont uniques au monde précisément parce qu'on permet aux fabricants de produits génériques d'exploiter le brevet. Si vous examiniez la possibilité de modifier les règlements, il faudrait envisager également la création d'un mécanisme qui garantirait la protection du brevet.

[Français]

M. Brien: Je voudrais revenir sur l'homologation à laquelle on a fait allusion à quelques reprises plus tôt. À l'heure actuelle, estimez-vous être compétitifs par rapport à nos compétiteurs internationaux, tels les pays du G-7, les pays européens et les États-Unis? Croyez-vous que l'approbation des médicaments ici, au Canada, répond à ces critères de compétitivité par rapport à nos concurrents?

[Traduction]

M. Michols: Je remercie le député de sa question, car elle me permet de vous parler du document qui vient d'être distribué aux membres du comité, par rapport, je pense à la question posée, plus tôt par M. Ménard quant au délai nécessaire pour faire approuver un médicament par le processus réglementaire canadien.

Les six pages que nous vous avons distribuées, dont la première s'intitule «Programme des médicaments», visent à expliquer le processus d'examen des médicaments, et à vous donner des mesures de rendement et les délais réels du régime canadien à la suite des modifications importantes que nous avons faites l'an dernier. Une des feuilles s'intitule «Objectifs de rendement». Nous trouvons certainement que ces objectifs sont compétitifs par rapport aux objectifs que nous nous fixons dans le cas des différents processus d'examen. Vous trouverez dans ce document une comparaison avec nos principaux partenaires commerciaux: les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Australie.

Sur une des feuilles, on compare, pour plusieurs pays, les délais de traitement de nouvelles substances actives, c'est-à-dire les principales présentations de nouveaux médicaments que nous approuvons pour une année donnée. Nous sommes particulièrement fiers de nos délais d'examen au Canada. Ils figurent sur un graphique. Même si la charge de travail, c'est-à-dire le nombre de présentations d'un nouveau médicament, a presque doublé ces trois dernières années, nous avons réduit de moitié le délai de traitement. Il y a aussi une feuille sur l'accumulation depuis quatre ans des présentations à examiner.

Bref, la réponse à votre question, selon nous, les agents de réglementation, c'est que oui, nous estimons soutenir la comparaison avec nos pairs dans le monde pour ce qui est de la réglementation des médicaments, même si nous sommes désavantagés du côté des ressources.

Le président: Monsieur Murray, s'il vous plaît.

M. Murray (Lanark - Carleton): Monsieur le président, dans son discours, le ministre a dit qu'il examinait un certain nombre de questions concernant l'utilisation des médicaments. Il a dit qu'il y a une tendance qui consiste à utiliser des médicaments, qui coûtent moins cher en général, plutôt que d'autres traitements, comme les interventions chirurgicales. Est-ce que cette tendance s'accroît rapidement?

M. Juneau: Malheureusement, au Canada, nous n'avons pas une bonne base de données complètes sur l'utilisation des médicaments. J'espère que les groupes de travail, dont on a parlé plus tôt, et les autres mécanismes trouveront une solution à ce problème, entre autres. Nous avons pas mal de preuves fragmentaires - et le ministre y a fait allusion - mais nous ne connaissons pas la réponse globale à votre question.

Il est probablement juste de dire que la tendance est comme vous l'avez décrite. C'est ce que le ministre a dit. Je peux vous donner des exemples de cette tendance. Un médicament mis en marché dans les années 80 a réduit le taux de rejet des organes greffés. Il va sans dire que cela est avantageux pour le malade, car, dans ce cas, l'utilisation des médicaments réduit le recours à la dialyse. Donc, le médicament nous permet de faire des économies. Mais nous n'avons pas de données complètes.

.1650

M. Murray: M. Lastewka a déjà posé la question, mais moi aussi j'ai été étonné par les chiffres concernant l'utilisation inappropriée des médicaments - une somme entre 3,5 et 4,5 milliards de dollars est énorme. Le ministre a également dit que jusqu'à 50 p. 100 des personnes âgées font une utilisation inappropriée de leurs médicaments.

Apprendre aux médecins comment faire les bonnes ordonnances réglera le problème en grande partie. Je crois savoir que les fabricants de produits pharmaceutiques consacrent déjà beaucoup de temps à former les médecins. Il faut que le coût de cette formation se reflète tôt ou tard dans le coût des produits pharmaceutiques.

Le gouvernement estime-t-il qu'il incombe aux fabricants de produits pharmaceutiques, les producteurs, de former les professionnels des soins de santé pour qu'ils utilisent adéquatement les médicaments? Le problème est-il bien là? Avez-vous des suggestions à nous faire?

Le président: Monsieur Juneau.

M. Juneau: Selon moi, la question que vous soulevez demande la participation de beaucoup d'intervenants. Les fabricants de produits pharmaceutiques, les associations professionnelles dans le domaine des soins de santé, les gouvernements, les organisations de consommateurs, les consommateurs eux-mêmes - beaucoup d'intervenants ont une responsabilité dans ce domaine. Je ne voudrais pas l'attribuer qu'à un seul des intervenants.

M. Murray: Pensez-vous que l'Association médicale canadienne serait d'accord avec les chiffres, que la plupart des médecins seraient au courant de ces chiffres et conviendraient qu'ils sont exacts?

M. Juneau: Je pense qu'il vaudrait mieux poser la question à l'Association médicale canadienne. Pour avoir parlé de ces questions avec des représentants de l'Association médicale canadienne, je sais qu'ils s'y intéressent beaucoup. Ils y ont réfléchi. Je sais qu'ils ont des opinions sur ces questions, mais il vaudrait mieux leur poser la question directement.

M. Murray: C'est tout pour le moment.

[Français]

Le président: Monsieur Ménard,

[Traduction]

suivi de M. Volpe.

[Français]

M. Ménard: Merci, monsieur le président. Je sais que vous allez être gentil avec moi; moi aussi, je le serai d'ailleurs.

J'aimerais qu'on quantifie un peu le processus d'homologation. Au-delà de ce qu'on peut en dire, vous comprenez que ce sera une variable qui nous suivra tout au long de ces débats. Je crois que le sous-ministre était également venu comparaître devant mon sous-comité sur le VIH/sida. Je sais qu'il existe un processus fast track en vertu duquel il est possible d'aller un peu plus vite et grâce auquel on réussit, à mon avis, à être concurrentiel. À l'exception de ce processus, est-ce que vous maintenez que la façon dont le Canada fait les choses entre le moment où on dépose des monographies et le moment où on émet un avis de conformité en fait un pays concurrentiel?

Regardons les chiffres qui figurent au tableau que vous nous avez distribué, monsieur le sous-ministre, et dont la version française s'intitule «Comparaisons internationales». J'y lis qu'au Canada, le délai d'examen total réel dans le processus normal est de 531 jours. Dois-je comprendre qu'aux États-Unis, pour un processus comparable, le délai d'approbation est de 483 jours, qu'au Royaume-Un il est de 547 jours et qu'en Australie il est de 507 jours? Est-ce la lecture qu'il faut faire du tableau?

[Traduction]

M. Michols: Oui, c'est exact. Les chiffres que vous mentionnez sont les délais moyens d'examen dans une année donnée pour toute la gamme des produits. Il existe au Canada un processus d'homologation accéléré que nous utilisons si la présentation pour un produit donné respecte certains critères assez clairs: il faut que le médicament soit une nouvelle découverte et qu'il n'existe pas d'autres traitements. Dans le cas de certains médicaments, nous avons réussi à traiter la présentation dans environ 100 à 140 jours, grâce au processus accéléré.

Les chiffres que vous avez sont des moyennes, et comprennent le délai qui s'écoule s'il faut demander au fabricant de nous fournir des renseignements supplémentaires.

[Français]

M. Ménard: Alors que nous parlons du processus d'homologation, vous vous faites fort de nous dire qu'on est à peu près concurrentiels. Je crois comprendre que de toute façon un remaniement du processus s'en vient et que quelques modifications ont déjà été apportées à la suite du rapport de Denis Gagnon, Working in Partnerships: Drug Review for the Future, publié en 1992.

Je voudrais vous poser une autre question sur un sujet un peu différent.

.1655

Êtes-vous d'accord avec un certain nombre d'activistes qui prétendent qu'une des particularités du Canada au chapitre des essais cliniques, c'est qu'à l'instant où on se parle, la plupart des essais conduits sont dictés directement par les compagnies pharmaceutiques, parce que le gouvernement ne finance pas véritablement ces essais?

Par exemple, dans le cadre de la stratégie canadienne de lutte contre le sida, on réserve 3,3 millions de dollars pour une infrastructure de recherche. Cette infrastructure de recherche est un facteur concurrentiel qui fait qu'un certain nombre d'industries pharmaceutiques conduisent des essais cliniques ici.

Mais essentiellement, le gouvernement ne fait que peu de recherche concernant les essais cliniques. C'est entre les mains de l'industrie pharmaceutique, avec ce que ça comporte d'avantages et d'inconvénients. Est-ce que vous êtes d'accord sur une telle affirmation?

[Traduction]

Le président: Monsieur Michols.

M. Michols: Je suis d'accord pour dire que la source principale de financement des essais cliniques au Canada, c'est l'industrie pharmaceutique, oui.

[Français]

M. Ménard: Vous arrive-t-il de vous en inquiéter? Monsieur le président, c'est une bonne question. Il y a un suspense qui s'établit.

Le président: Toutes vos questions sont très bonnes.

M. Ménard: Monsieur le président, vous êtes gentil.

Le président: Mais c'est la dernière.

[Traduction]

M. Michols: Je ne suis pas sûr, en tant que responsable de la réglementation...

[Français]

M. Ménard: Ne soyez pas timide.

[Traduction]

M. Michols: ... et du processus d'homologation des médicaments au Canada, que ce soit quelque chose dont je dois me préoccuper. Ce cas particulier ne relève pas de l'agence de réglementation.

[Français]

M. Ménard: [Inaudible - La rédactrice]

Le président: Une autre fois, monsieur Ménard.

[Traduction]

Monsieur Volpe, s'il vous plaît.

M. Volpe (Eglinton - Lawrence): Merci, monsieur le président.

Je veux revenir à deux thèmes: d'abord le ministre a suggéré que le comité examine les règlements de liaison; deuxièmement, vous avez dit il y a quelques minutes que d'après vous, votre rôle consiste à veiller à la bonne application des règlements pour empêcher les fabricants de produits génériques d'exploiter abusivement les brevets. J'aimerais que vous développiez votre pensée. Je crois comprendre qu'un titulaire de brevet a les droits et les recours suivants: s'il estime qu'il y a eu contrefaçon du brevet, il peut entamer une poursuite. Et si le tribunal juge qu'il y a eu contrefaçon, une injonction sera émise, et des dommages-intérêts et des dépens seront accordés, n'est-ce pas suffisant?

M. Michols: Lorsque le gouvernement de l'époque a examiné le projet de loi C-91 et mis en place tous les mécanismes qui en résultaient, il a examiné les mesures de redressement par voie d'injonction appliquées avant l'adoption du projet de loi C-91. Je présume qu'il a jugé qu'elles n'étaient pas suffisantes, parce qu'il a présenté les règlements.

M. Volpe: Je veux aller un peu plus loin et faire un lien avec une question soulevée un peu plus tôt par un de mes collègues. Certains pensent que les règlements permettent peut-être de prolonger la durée du brevet de 30 mois. Dans votre exposé, vous avez fait ressortir un cas où la prolongation est maintenant de 40 mois. Êtes-vous d'accord avec l'opinion de certains? Si votre réponse est négative, pourquoi pas?

M. Michols: En tant qu'administrateur des règlements, j'estime que c'est le fabricant des produits génériques qui décide en grande mesure de l'échéancier. La période de 30 mois intervient après qu'un fabricant innovateur a entamé une poursuite en contrefaçon possible contre le fabricant des produits génériques. Le fabricant innovateur peut prendre cette décision seulement après avoir reçu l'avis d'allégation de la part du fabricant de produits génériques concernant la présentation qu'entend faire le fabricant. Donc c'est au fabricant des produits génériques de déterminer quand il signifiera l'avis d'allégation. Le fabricant de produits génériques décide du moment de la signification.

.1700

Si l'avis d'allégation est signifié avant l'expiration du brevet, possiblement 30 mois avant l'expiration du brevet, cela, en soi, n'entraînera pas une prolongation de la durée du brevet, car nous avons le pouvoir d'émettre un avis de conformité si nous décidons que le produit générique en mérite un. Nous avons le pouvoir de l'émettre 30 mois après le début de la poursuite, si le tribunal n'a pas pris de décision. Donc le moment où la période de 30 mois intervient dépend de la date à laquelle l'avis d'allégation est signifié au titulaire du brevet, et de la décision du titulaire d'entamer ou non une poursuite en contrefaçon.

M. Volpe: Mais il pourrait y avoir essentiellement prolongement de facto du brevet.

M. Michols: Il y aurait prolongement de facto du brevet si le fabricant du médicament générique décidait de signifier l'avis d'allégation longtemps après les 30 mois.

M. Volpe: J'aimerais revenir aux mots «exploiter abusivement», que vous avez employés il y a quelques minutes. D'après votre expérience, ou au moins d'après votre expérience avec les projets de loi C-22 et C-91, y a-t-il eu des cas d'exploitation abusive de brevet par des titulaires de brevet?

M. Michols: Me demandez-vous si depuis que les règlements pris en vertu du projet de loi C-91 existent - parce que c'est la période qui s'applique aux règlements - un titulaire de brevet a «abusé» du processus? D'après ce que je comprends, parmi les cas pour lesquels les tribunaux ont tranché, 30 à 35 p. 100 des cas ont été tranchés en faveur du fabricant générique, tandis que 60 à 65 p. 100 l'étaient en faveur du fabricant innovateur. Donc, je dirais pour simplifier que oui, dans 30 p. 100 des cas, le tribunal a cru croyait que le procès intenté par le fabricant innovateur n'était pas justifié et que le fabricant générique avait raison, mais que dans 60 p. 100 des cas, il a donné raison au fabricant innovateur. C'est la seule façon dont je pourrais déterminer s'il y a eu «exploitation abusive».

Le président: Merci beaucoup pour des questions très intéressantes.

Monsieur Schmidt.

M. Schmidt: Merci, monsieur le président.

J'ai deux questions ou plutôt un intérêt dans deux domaines particuliers. Le premier porte sur le travail effectué soit par les fabricants génériques ou les fabricants de marque sur l'utilisation ou l'emploi des médicaments dans le traitement des maladies. Que font ces compagnies dans ce domaine précis?

M. Michols: Je pense que les innovateurs et les fabricants génériques font beaucoup de travail. Je dirais que la question devrait plutôt être adressée aux représentants de ces deux industries lorsqu'ils viendront témoigner.

M. Schmidt: Ma question suivante porte sur la recherche qu'effectuent ces compagnies. Elle est reliée à ma première question. La recherche que les fabricants de marque ont dit qu'ils feraient à cause du projet de loi C-91 en 1992 devait être effectuée en y consacrant le produit de 10 p. 100 des ventes. Quelle partie de ces 10 p. 100 est vraiment utilisée pour la recherche qui est innovatrice et quelle partie l'est pour les essais cliniques qui, en fait, sont nécessaires afin de respecter les critères du ministère de la Santé en matière de licence?

M. Juneau: Monsieur le président, je suggérerais que vous posiez ces questions aux représentants du Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, qui font rapport sur ces chiffres.

M. Schmidt: Vous ne le savez pas?

M. Juneau: Je peux vous dire ce que j'ai entendu des sociétés, mais je ne suis pas la source de renseignements pour ce genre de choses.

M. Schmidt: C'est très intéressant, parce qu'une des choses qui ont été dites est que les chiffres que vous acceptez, que le ministre accepte - et il en a parlé il y a à peine une demi-heure - sont des chiffres qui viennent de ces gens. Je crois qu'un montant de 628 millions de dollars a été mentionné. De ces 628 millions de dollars...

Je conviens que suivant le mécanisme, les compagnies fournissent ces chiffres. Êtes-vous en train de dire que vous n'êtes pas tout à fait à l'aise avec ces chiffres?

M. Juneau: Non, je ne dis pas cela.

M. Schmidt: Alors pourquoi ne le savez-vous pas?

M. Juneau: Le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés a le mandat de fournir ces chiffres. Je pense donc que si vous voulez avoir un avis expert, vous auriez pu leur poser la question.

.1705

On pourrait aussi avoir une discussion sur la nature de la recherche pour déterminer si elle est innovatrice ou si elle sert les fins des essais cliniques. J'ai compris qu'il y en a qui pensent qu'entre 20 et 30 p. 100 de la recherche citée est de la recherche de base, mais là encore, la recherche innovatrice peut être interprétée de façon différente.

M. Schmidt: Monsieur le président, j'aimerais poursuivre dans la même veine que M. Volpe. Il est allé loin avec les questions qui m'intéressaient moi aussi, mais je pense qu'il y a un aspect qu'il n'a pas eu le temps de couvrir. S'il en avait eu l'occasion, il l'aurait fait. La question porte sur la période de 30 mois de l'avis d'allégation.

En tant que responsable de la réglementation, n'avez-vous pas le pouvoir de prolonger cette période si une décision n'est pas prise?

M. Michols: Non. Seuls les tribunaux ont l'autorité de prolonger cette période de 30 mois.

M. Schmidt: Un tribunal peut le faire. D'accord.

M. Michols: Nous avons très peu de pouvoir discrétionnaire au niveau de l'administration de ces périodes.

M. Schmidt: Est-ce que le tribunal peut les prolonger indéfiniment?

M. Michols: Le tribunal peut revoir les pétitions de l'une ou l'autre partie et peut décider de prolonger la période s'il le veut.

M. Schmidt: Est-ce qu'il y a une limite à cette prolongation?

M. Michols: Il ne semble pas y en avoir. La référence, plus tôt, au cas qui dure depuis maintenant 40, 42 ou 43 mois confirme une décision du tribunal de prolonger cette période de 30 mois et un appel visant à refuser cette prolongation. Donc, aucune jurisprudence ne permet de déterminer s'il y a une limite ou non.

M. Schmidt: Au cours de cette période, les fabricants de produits génériques ne peuvent pas vendre le médicament, mais les fabricants d'un médicament d'origine peuvent le faire.

M. Michols: Oui, le fabricant du médicament d'origine détient le brevet. Le produit est sur le marché...

M. Schmidt: Tirons les choses au clair.

M. Michols: C'est vrai.

M. Schmidt: D'accord.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Schmidt.

[Français]

Monsieur Patry.

M. Patry (Pierrefonds - Dollard): J'aurais une dernière question relative aux avis d'allégation. Il semble qu'un fabricant de médicaments génériques a adopté une pratique selon laquelle il fait émettre plusieurs avis d'allégation, jusqu'à cinq avis pour le même produit.

D'après vous, le fait de remettre plusieurs avis d'allégation se situe-t-il dans l'esprit du législateur, lorsqu'il a conçu la loi en 1993, où est-ce qu'on se dirige, si on n'y est pas déjà, vers un abus de procédure de part et d'autre?

[Traduction]

M. Michols: À mon avis, les règlements prévoient ce processus, donc il serait légitime.

M. Patry: Mais, à votre avis, est-ce qu'il y a un certain abus de la part de l'une ou l'autre partie - du fabricant d'un produit générique ou du fabricant d'un médicament d'origine - ou est-ce que nous devrions chercher une autre solution?

M. Michols: À mon avis, les deux parties utilisent la loi et les règlements pour maximiser les effets. Et comme l'indique le nombre de litiges devant les tribunaux... J'espère que lors de ses délibérations, ce comité pourra fournir des conseils sur la mise en application de ces règlements et peut-être différents mécanismes ou des recommandations sur des mécanismes, qui diffèrent de ceux qui sont utilisés dans les litiges actuels.

M. Patry: Merci.

[Français]

Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur Lastewka, avez-vous une dernière question?

M. Lastewka: J'aimerais examiner le résumé des cas de conformité que vous avez présentés. Ou est-ce que nous l'avons obtenu de quelqu'un d'autre?

M. Michols: Ce n'est pas mon...

Le président: Je ne pense pas qu'il ait été présenté par ces...

M. Lastewka: D'accord. Je vais retirer ma question, monsieur le président.

Le président: J'aimerais remercier M. Michols et M. Juneau, nos témoins, d'avoir accepté de rester et de répondre à nos questions. Je pense que vous avez abordé des aspects intéressants pour les membres du comité.

J'aimerais que les membres du comité prêtent une attention toute particulière à ces changements. Au lieu d'entendre notre prochain témoin, nous allons lever la séance maintenant. Le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés comparaîtra dès que le vote sera terminé. Je prévois de recommencer à 18 heures dans la salle 253-D, Édifice du Centre, à côté de la Chambre. La séance sera télévisée.

.1710

Si le comité est d'accord, nous allons passer une heure et demi avec ce groupe et ensuite nous passerons à la Coalition canadienne de la santé.

Si les représentants de la Coalition canadienne de la santé sont ici maintenant, vous comparaîtrez entre 19 h 30 et 19 h 45, selon l'heure à laquelle le vote se terminera pour nous. Le vote commence à 17 h 30.

Les spectateurs pourraient peut-être prendre une pause et manger un sandwich. Pour les membres du comité, qui n'auront pas eu de pause, nous aurons des sandwichs vers 19 h 30.

La séance est levée. Nous reprendrons après le vote.

Retourner à la page principale du Comité

;