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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 102 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 9 avril 2024

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Français]

     Je déclare maintenant la séance ouverte.
    Je vous souhaite la bienvenue à la 102e réunion du Comité permanent de l'environnement et du développement durable. Conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 14 février 2024, le Comité entreprend son étude du projet de loi C‑317, Loi prévoyant l'élaboration d'une stratégie nationale sur la prévention des inondations et des sécheresses.
    C'est ma première expérience à la présidence de ce comité. J'aimerais souhaiter la bienvenue à M. Patzer, qui remplace M. Mazier pour quelques minutes, ce dernier étant en Chambre et revenant bientôt. Je lui céderai alors aussitôt cette place avec grand bonheur.
    Je dois rappeler que la réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre adoptée le 15 juin 2023. Pour garantir le bon déroulement de la réunion, je rappelle certaines consignes. Je pense que témoins et députés connaissent maintenant bien l'application Zoom, et savent comment obtenir l'interprétation et qu'ils doivent lever la main pour demander la parole. Tous les tests de son ont été faits, comme convenu.
    Je cède donc la parole à un illustre membre de ce comité, M. Francis Scarpaleggia, député de Lac-Saint-Louis et, surtout, parrain du projet de loi C‑317, que nous étudions aujourd'hui.
    Monsieur Scarpaleggia, vous avez la parole pour 10 minutes.
    Merci, madame la présidente.

[Traduction]

     Tout d'abord, je tiens à remercier M. John Pomeroy de comparaître avec moi.
     M. Pomeroy est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en ressources d'eau et en changement climatique. C'est lui qui est à l'origine du projet de loi à l'étude. Il m'a aidé à le rédiger et il m'a appris patiemment bien des choses sur la prévision des inondations et des sécheresses.
    Aujourd'hui, cependant, je vais m'intéresser surtout à la prévision des inondations par souci de simplicité, mais je sais que M. Pomeroy ne demanderait pas mieux que de répondre à des questions sur les sécheresses au Canada et l'art de les prévoir.

[Français]

    Je vous demanderais de bien vouloir retourner un peu dans le passé, à l'école secondaire, lorsque nous tracions des graphiques à deux dimensions. Il y avait l'axe vertical et l'axe horizontal, qui sont tous deux utilisés dans le processus de prévision des inondations.

  (1535)  

[Traduction]

    J'appellerai l'axe des x ou la dimension des x le processus descendant de la prévision des inondations. Ce processus, c'est celui des prévisions météorologiques. Il va de haut en bas. Ce n'est pas particulièrement démocratique, mais c'est la technologie qui impose cette façon de faire en météorologie. Les images proviennent de satellites. Elles constituent la base des prévisions météorologiques essentielles à la prévision des inondations et des sécheresses.

[Français]

    Quand il s'agit des prévisions météorologiques, c'est la technologie qui dicte ce processus de haut vers le bas. Les prévisions météorologiques sont effectuées par le Service météorologique du Canada, dont les installations principales, le Centre météorologique canadien, sont situées dans un édifice bien ordinaire dans la ville de Dorval, sur l'île de Montréal, en bordure de l'autoroute 40. Cet édifice est coiffé d'un bouquet d'antennes paraboliques. Si jamais vous passez dans ce coin-là, vous allez certainement voir toutes ces antennes paraboliques sur le toit, et vous pourriez facilement vous tromper et croire que c'est un bar sportif, ayant besoin de toutes ces antennes pour capter les signaux de divers matchs.
    L'axe horizontal, c'est le processus collaboratif qui fait appel aux provinces et aux territoires. Pour bien prévoir les inondations, il faut plus que prévoir la météo. Il faut des données sur les niveaux et les débits d'eau dans les cours d'eau, les lacs, les rivières et les ruisseaux. La collecte de ces données demande forcément la participation de ceux qui se trouvent plus proches de ces phénomènes sur le terrain, c'est-à-dire les gens des provinces et des territoires.

[Traduction]

     Les données sur le niveau et le débit de l'eau sont recueillies par des jauges et des stations situées dans des plans d'eau partout au Canada, des plans d'eau qui relèvent de la compétence des provinces et des territoires. Comme nous le savons, les ressources en eau appartiennent aux provinces et aux territoires. Il s'agit d'un programme fédéral-provincial de collaboration et de financement conjoint appelé les Services hydrologiques nationaux.
    Nous savons tous que les changements climatiques rendent les inondations et les sécheresses plus fréquentes et plus intenses. Nous avons donc besoin d'un système de prévision des crues plus précis et plus précoce pour que les collectivités puissent mieux se préparer aux inondations et mieux se protéger contre elles.
    Heureusement, les méthodes et technologies de prévision des inondations évoluent rapidement. La technologie nous permet maintenant d'élaborer des modèles plus perfectionnés qui couvrent de plus vastes zones géographiques et auxquels nous pouvons associer des probabilités de risque d'inondation. Comme ces modèles couvrent des zones plus vastes, une collaboration plus poussée s'impose entre les administrations — entre les provinces et entre les provinces et le gouvernement fédéral — parce que, comme je l'ai dit au tout début, le gouvernement fédéral est responsable des prévisions météorologiques et a à l'interne des capacités qui sont importantes pour la prévision des crues: mesure des débits et des niveaux d'eau, etc. Il s'agit d'un processus de collaboration auquel participent les gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral.
    Étant donné que les modèles s'appliquent à des régions plus vastes, il faut mobiliser une plus grande puissance informatique pour faire tourner des modèles dynamiques complexes. Il faut donc des superordinateurs. Ils sont nécessaires pour ce genre de prévisions probabilistes complexes à grande échelle.
    Cette collaboration qui existe déjà présente de nombreux avantages. Il y a bien des avantages à ce que les prévisionnistes des inondations travaillent ensemble. Comme M. Pomeroy l'a signalé, même si certains modélisateurs au Canada prédisent des inondations majeures chaque année, d'autres ne sont peut-être pas appelés à en prédire une seule au cours de leur carrière. Ainsi, une approche de collaboration nationale créerait des occasions de mise en commun d'expériences et de perfectionnement professionnel entre les prévisionnistes des inondations des différentes provinces. Il y a déjà une communauté de prévisionnistes qui se réunissent pour discuter des pratiques exemplaires, mais nous avons besoin d'une structure plus officielle et permanente pour tirer parti des connaissances en matière de prévision des inondations des administrations de tout le Canada et pour mieux aller de l'avant ensemble.
    Certains diront que cette structure existe déjà à Environnement et Changement climatique Canada et que le ministère participe déjà à la prévision des inondations. Malgré tout, pour citer M. Pomeroy, « ECCC n'a pas établi de service national de prévisions hydrologiques. Il a mis en place dans une partie du pays un système fédéral de prévision du débit des rivières qui est exploratoire et relève d'une approche descendante. Il n'y a aucune participation des provinces et des territoires. »
    On ne trouve nulle part dans le mandat fondamental officiel du Service météorologique du Canada l'obligation de collaborer avec les provinces et les territoires à la prévision des inondations et des sécheresses. Nous sommes en train d'élaborer un système fédéral de prévision du débit des cours d'eau, et non un système coopératif de prévision des crues de portée nationale. Il y a une différence.
    Pour l'heure, les modèles de débit des cours d'eau du Service météorologique du Canada aident à prédire le volume d'eau qui traverse une zone donnée selon différents scénarios météorologiques. Ces renseignements sont utiles pour prendre des décisions sur l'irrigation et la production d'hydroélectricité. Des modèles de débit de cours d'eau sont également utilisés pour améliorer les prévisions météorologiques. Par exemple, si le Centre météorologique canadien prévoit que des cours d'eau auront un fort débit parce que l'humidité du sol dans un bassin est élevée, ce qui entraîne un ruissellement plus important parce que le sol n'absorbe pas la pluie, cela indiquera une plus grande évaporation prévue au sol. L'évaporation, à son tour, influence la dynamique atmosphérique. Avec des niveaux élevés d'humidité et d'évaporation au sol, l'énergie et l'eau dans l'atmosphère sont plus importantes. Cela influe sur la météo et les prévisions météorologiques.

  (1540)  

[Français]

     Cependant, pour prévoir les inondations avec encore plus de précision, il nous faut une approche beaucoup plus nuancée et faire appel à des données locales.

[Traduction]

     Une véritable prévision des crues apporte un surplus de complexité, car il faut tenir compte de l'humidité du sol, de la saturation des nappes phréatiques, de l'état des glaciers et du manteau neigeux, de la topologie du réseau fluvial, des points de rétrécissement des rivières et de l'érosion des berges. Il faut également tenir compte des décisions humaines sur la gestion des barrages et des réservoirs .
    Au Canada, la prévision des inondations est d'autant plus compliquée qu'il s'agit d'un pays septentrional qui a des régions montagneuses et beaucoup de glace. Les embâcles peuvent faire monter le niveau de l'eau de plusieurs mètres au‑dessus de la normale. Cela ne se produit pas seulement pendant la débâcle printanière de la couverture de glace; cela peut aussi se produire pendant les périodes de gel automnal et de fonte au milieu de l'hiver.
    Un autre facteur qui a une incidence sur le risque d'inondation et qui a été souligné récemment par M. Pomeroy, ce sont les feux de forêt, dont nous avons été témoins ces dernières années. Les feux de forêt détruisent le couvert forestier, ce qui entraîne une accumulation de neige beaucoup plus dense au sol. La perte de la canopée se traduit également par une diminution de l'ombre et une lumière solaire plus directe qui frappe la neige et la fait fondre plus rapidement. Il en résulte un ruissellement printanier plus rapide et plus fort et un plus grand risque d'inondation en aval.

[Français]

     Le but de ce projet de loi n'est pas de réinventer la roue. Il s'agit plutôt d'inciter le gouvernement fédéral à s'adapter, à mieux composer avec les plus récents développements scientifiques et les méthodes de prévision des inondations et des sécheresses, à un moment où ces sinistres surviennent plus fréquemment et de manière plus intense en lien avec les changements climatiques.

[Traduction]

    En Europe, nous constatons que même les États indépendants peuvent s'entendre sur des objectifs communs afin de prévoir les inondations avec exactitude à l'échelle continentale.
     Selon M. Pomeroy, et je suis sûr qu'il vous en parlera davantage, le prototype européen de prévision des inondations...

[Français]

    Monsieur Scarpaleggia, je suis désolée, mais votre temps est écoulé.
    Je n'arrive pas à le croire, mais d'accord. Je vais laisser M. Pomeroy parler plus tard de ce qui s'est fait en Europe et indiquer à quel point c'était pertinent pour le Canada.
    Merci beaucoup, monsieur Scarpaleggia.
    Monsieur Pomeroy, je vous souhaite la bienvenue au Comité pour une deuxième fois. Je rappelle au Comité que vous êtes titulaire de la Chaire de recherche du Canada en ressources d’eau et en changement climatique de l'Université de la Saskatchewan. La parole est à vous pour cinq minutes.

[Traduction]

    Il y a 11 ans, mes idées sur ce qui allait aboutir au projet de loi ont commencé à prendre forme lorsqu'il a plu pendant trois jours et demi sur les montagnes à l'ouest de Calgary, en Alberta, à la fin de juin 2013. Deux cent cinquante millimètres de pluie sont tombés sur une couche de neige tardive, provoquant une inondation. Nous avions sur le terrain 15 personnes venant de l'Université de la Saskatchewan, dont plusieurs professeurs qui étaient des collègues. Ce que nous avons constaté est absolument incroyable. Ces inondations ont pris naissance dans les montagnes, et elles se sont déplacées rapidement vers Canmore, High River et enfin Calgary. Ce que nous n'avons pas vu à temps, même après le début des évacuations à Canmore... Quand donc est venu pour toute la province l'avertissement qu'une inondation massive était imminente? L'inondation a fait quatre victimes et provoqué des dommages de plus de 5 milliards de dollars dans la région. À l'époque, c'était la catastrophe naturelle la plus coûteuse de l'histoire du Canada.
    Près d'un an et un mois plus tard, en Saskatchewan, où il n'y avait eu que des inondations dues à la fonte des neiges depuis la création de la province, en 1905, la pluie a commencé à tomber. Dans l'Est de la Saskatchewan, plus de 200 millimètres de pluie ont causé des crues dans des bassins qui n'avaient jamais été inondés que par la fonte des neiges, à un moment de l'année où les ruisseaux sont normalement à sec et où les agriculteurs travaillent à leurs cultures et vaquent à leurs autres occupations. Là encore, les capacités de la province ont été débordées, car elles étaient conçues pour les inondations causées par la fonte des neiges, ce pour quoi il suffit de faire les plans en fonction de l'enneigement.
    Ce sont des leçons incroyables. Nous devions mieux comprendre la prévision des inondations au Canada.
    L'autre leçon, comme M. Scarpaleggia l'a dit, vient du Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme. En 2013, il utilisait un produit expérimental qui donnait une estimation raisonnable de l'ampleur de l'inondation de Calgary 10 jours avant qu'elle ne survienne. Il n'a pas fait profiter les Canadiens de ce produit. Il n'était qu'expérimental, mais il a montré ce qui était possible et nous a révélé ce que les Canadiens pourraient faire s'ils mobilisaient leurs technologies et travaillaient ensemble, à l'échelle nationale, pour s'attaquer à ce problème extrêmement ardu.
    Depuis, les dommages causés par les inondations et les sécheresses ont augmenté considérablement au Canada, et on s'attend à ce qu'ils s'aggravent encore à cause des conditions météorologiques extrêmes, des afflux d'eau, des changements climatiques, de la croissance des collectivités et de l'augmentation de la production agricole et industrielle. Les plaines inondables sont en croissance, les sécheresses s'intensifient et de nombreuses exploitations agricoles et industries locales sont touchées. En 2022, les auteurs du rapport Aquanomics ont estimé que, jusqu'en 2050, la perte de PIB au Canada attribuable aux sécheresses, inondations et tempêtes s'élèvera à 174 milliards de dollars. Les chercheurs du programme Global Water Futures, que je dirige, estiment que les dommages causés par ces phénomènes depuis l'an 2000 ont dépassé les 40 milliards de dollars seulement jusqu'à l'an dernier. La situation empire.
    Comment s'attaquer à ce problème au Canada? Chez nous, les prévisions se font dans un cadre fragmenté. Nous avons des systèmes provinciaux et territoriaux élaborés de bas en haut, qui répondent aux besoins locaux, et un système fédéral qui va dans le sens inverse, à partir du système de prévisions météorologiques, comme je l'ai dit. Aucun des deux n'est interopérable ni ne répond à tous les besoins actuels du pays. Cette approche fragmentée a ralenti l'adoption de nouvelles technologies et méthodes par les provinces et limité l'adoption du système fédéral plus avancé. Nous souhaitons nous doter de cadres de modélisation communs, d'approches communes et de systèmes de prévision coordonnés, et nous en avons besoin. C'est ce que font des pays comme les États-Unis. C'est ce que fait l'Europe. C'est ce que font d'autres grands pays.
    À Global Water Futures, nous avons mis sur pied, avec l'aide d'Environnement Canada, un projet pilote de prévisions pour le Yukon. Nous avons mis au point un système de prévision à la fine pointe de la technologie pour le bassin du fleuve Yukon et nous l'avons transféré au gouvernement du territoire pour qu'il puisse élaborer ses prévisions opérationnelles. À cause des défis techniques liés à l'exploitation d'un système informatique hydrologique aussi complexe, nous exploitons le système pour le gouvernement du Yukon depuis 2018. N'oubliez pas que le Yukon ne compte que 40 000 habitants. Jusqu'à maintenant, il n'a pas l'expertise technique nécessaire pour gérer tout seul un tel système. Un système coopératif fédéral-provincial-territorial pourrait faire en sorte que les ressources et les technologies soient disponibles pour appuyer les prévisions opérationnelles de systèmes élaborés conjointement.
     J'ai quelques recommandations à formuler sur la façon dont nous pourrions nous donner un cadre plus cohérent de prévision des inondations et des sécheresses au Canada.
    Premièrement, le cadre devrait permettre de coordonner les efforts locaux, régionaux, fédéraux et internationaux — il ne faut pas oublier que nous partageons des bassins hydrographiques avec les États-Unis — et rendre possibles des progrès scientifiques et technologiques de pointe en matière de prévisions.

  (1545)  

     Le cadre national devrait être élaboré conjointement avec une approche descendante et ascendante afin de tenir compte des réalités locales et de renforcer la crédibilité et la confiance entre les universitaires, les utilisateurs et les responsables gouvernementaux des politiques et des pratiques...

[Français]

     Monsieur Pomeroy, je dois malheureusement vous interrompre, mais vous aurez l'occasion de compléter vos recommandations en répondant aux questions des députés.
    Je cède maintenant la présidence à M. Mazier.

  (1550)  

[Traduction]

    Nous allons passer aux questions.
    Monsieur Leslie, vous avez six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d'avoir proposé le projet de loi. Je représente le Manitoba, où nous sommes exposés aux inondations depuis des siècles, mais elles s'aggravent depuis quelque temps à cause, notamment, de certains de nos voisins et de changements dans l'utilisation des terres. J'ai récemment eu l'occasion de m'entretenir avec des représentants du Centre de prévision des régimes fluviaux du Manitoba afin de mieux comprendre comment nous pourrions bénéficier d'un service national de prévision, parce que, de toute évidence, nous voulons contrôler les débits d'eau, contenir les eaux et atténuer les crues. Je ne dis pas que cette conversation a soulevé des préoccupations, mais j'espère obtenir des éclaircissements.
    Je m'adresse d'abord au parrain du projet de loi, mais peut-être que M. Pomeroy pourrait l'aider à répondre.
    Une de mes préoccupations est que, si nous avons un service fédéral, il pourrait y avoir de la confusion avec les données produites par la province. Particulièrement au Manitoba, qui est un chef de file en ce domaine, nous comptons sur ces prévisions d'inondation. Y aurait‑il deux sources d'information, ou s'agirait‑il d'un organisme fédéral national qui échangerait les renseignements avec la province pour qu'elle diffuse les prévisions? Ce qui est inquiétant, c'est que si on a deux ensembles différents de renseignements sur les prévisions, ils pourraient ne pas concorder, ce qui occasionnerait des difficultés auxquelles vous avez déjà fait allusion.
    La question s'adresse à moi?
    À quiconque est le mieux placé pour répondre.
    Je vais laisse à M. Pomeroy le soin de répondre, mais je m'attends à ce que la coordination empêche ce genre de chevauchement. Une partie de l'objectif est de rationaliser, de renforcer et d'améliorer le système de prévision des inondations et des sécheresses.
    D'après ce que je comprends, cette nouvelle structure préviendrait toute confusion. Est‑ce exact?
    Oui.
    À la lumière de nos échanges avec les prévisionnistes provinciaux et le gouvernement fédéral, nous pensons que la meilleure solution est de faire en sorte que les modèles informatiques haut de gamme, extrêmement complexes, soient gérés par le gouvernement fédéral et reliés aux prévisions météorologiques, mais ensuite adaptés aux besoins des provinces, afin qu'elles puissent publier des prévisions qui constitueraient une source unique d'information faisant autorité.
    Il est également tenu compte des multiples extrants du modèle. N'oubliez pas que rien n'empêche Google ou d'autres de faire la même chose. Nous pouvons recevoir beaucoup de prévisions différentes, ce qui ajoute à la confusion. L'idée est d'assurer une coordination pour qu'une source fasse autorité. C'est l'option que nous retenons.
    En ce moment, les techniques statistiques utilisés en hydrologie par les provinces et les territoires sont-elles harmonisées? Sommes-nous actuellement sur la même longueur d'onde, ou serait‑il nécessaire, par l'entremise de cet organisme, que les provinces utilisent les mêmes méthodes statistiques?
    En 2019, avec l'aide d'Environnement Canada, nous avons convoqué une réunion des 13 groupes de prévision territoriaux et provinciaux. Ils ne s'étaient jamais rencontrés auparavant. Nous avons créé une communauté de pratique informelle pour mettre divers éléments en commun. Ils réinventaient la roue chacun de leur côté, et tous disaient ne pas avoir les ressources nécessaires pour y arriver.
    Il y a beaucoup à gagner à travailler ensemble. C'est peut-être là qu'une initiative fédérale peut faciliter les choses. Une grande partie de l'activité sera provinciale, mais il y a d'énormes différences entre les provinces. Nous avons de grandes provinces riches dotées de systèmes assez avancés tandis que des provinces et territoires plus petits utilisent des feuilles de calcul Excel. Les capacités actuelles sont très variables.
    J'ai appris en discutant avec les prévisionnistes de ma province que les systèmes sont assez perfectionnés dans les zones densément peuplées. Par contre, les zones septentrionales et éloignées n'ont pas la même technologie. La solution proposée ici est-elle un moyen de combler ces lacunes afin qu'un plus grand nombre de communautés autochtones du Nord et éloignées puissent avoir accès à des prévisions de même qualité?
    Oui. L'objectif serait de faire des prévisions à l'échelle continentale pour que même les régions vraiment éloignées du Nord aient ce genre d'information.
    Je dirai aussi que le système peut prédire bien des choses, y compris l'humidité du sol, la probabilité d'incendies de forêt causées par l'hygrométrie de l'humus et divers aspects de la sécheresse. Un seul système peut avoir de multiples objectifs et prévoir notamment le risque de sécheresse et de feux de forêt, ce qui pourrait être très avantageux.

  (1555)  

    Comment cette information serait-elle communiquée? Vous avez fait valoir un bon point. Si nous pouvions mieux comprendre et atténuer les feux de forêt, comment cette information serait-elle communiquée par l'entremise du service national de prévisions, du Service canadien des forêts ou de tout autre organisme compétent?
    À l'heure actuelle, les données du système fédéral ne sont communiquées qu'à quelques utilisateurs choisis. Ce n'est pas un système public. Un système coopératif pourrait, avec l'apport et l'accord des provinces, se prêter à des échanges plus larges. L'essentiel est d'éviter la confusion au sujet de la nature des risques, mais aussi de maximiser la communication des renseignements à échanger.
    Devrions-nous nous attendre à ce que le centre national de prévisions utilise la cartographie des inondations LIDAR pour les zones à risque élevé, ou pensez-vous que cela dépasserait la portée du projet?
    Il a été montré qu'il vaut mieux établir au niveau local le routage hydraulique qui est habituellement calculé à l'aide de la cartographie des inondations LIDAR, notamment là où les collectivités et les gouvernements provinciaux ont une expertise extraordinaire. Leurs rôles sont très importants à cet égard.
    C'est évidemment l'une des difficultés que présente la prévision des changements climatiques et de leurs répercussions. Ce qui est peut-être plus facilement accessible, ce sont les changements apportés à l'utilisation des terres au fil des ans, mais il s'agit aussi d'une information qui est conservée et connue à l'échelle locale. À votre avis, comment les provinces et les municipalités pourraient-elles collaborer avec le centre national pour essayer de communiquer une partie de cette information afin que vous ayez les meilleures hypothèses dans votre modélisation?
    Avec une bonne communauté de pratique et un système partagé qui est vraiment fédéral-provincial, cette information sera intégrée au modèle national.
     Par exemple, nous avons étudié les répercussions du drainage des terres humides sur les changements hydrologiques dans les Prairies. Nous avons mis au point des algorithmes qui font maintenant partie d'un modèle fédéral appelé MESH, qui peut suivre l'évolution de la situation au fil du temps et conclure par exemple: « À mesure que les terres humides seront drainées, il y aura un changement dans la probabilité d'inondation au fil du temps. »
     Vouliez-vous qu'un document soit déposé, monsieur Leslie? Non. D'accord.
    Les six prochaines minutes reviennent à M. van Koeverden.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui, monsieur Pomeroy et monsieur Scarpaleggia. Merci d'avoir présenté ce projet de loi très important.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Pomeroy. Il me semble que les inondations, les sécheresses et les catastrophes de cet ordre liées aux phénomènes météorologiques extrêmes sont de plus en plus fréquents par les temps qui courent. Il semble que cette impression soit attribuable en grande partie à un cycle de nouvelles de 24 heures et à une sensibilisation accrue à ces questions, mais est‑il juste de laisser entendre que les dommages matériels et les catastrophes naturelles de cette ampleur — inondations, sécheresses et conditions météorologiques extrêmes sur la côte — sont de plus en plus fréquents?
    Il est certain que les indemnisations déboursées à cause de ces catastrophes ont augmenté de façon frappante. Ces incidents ont causé des dommages d'environ 1 milliard de dollars, de la Confédération jusqu'à l'an 2000. Nous estimons que ce montant se situe aux environs de 40 milliards de dollars pendant la période écoulée depuis l'an 2000. L'augmentation est de taille.
     Dans certains bassins, la fréquence et l'ampleur des inondations ont augmenté, tandis que dans d'autres, elles surviennent à des moments différents, mais il y a maintenant des preuves à l'échelle mondiale que la fréquence et la récurrence des sécheresses augmentent. De plus, il y a un rapport direct entre l'intensité des précipitations et les températures de l'air. À mesure que la température de l'air augmente, les tempêtes deviennent plus intenses. C'est ce qui ressort des calculs et des observations dans le monde entier.
     C'est ce que nous constatons. Nous observons ces changements. Ce que je veux dire, c'est que les régions qui avaient l'habitude d'avoir des inondations à cause de la fonte des neiges en ont maintenant à cause de la pluie ou de la pluie qui tombe sur la neige. C'est un vrai problème pour nous, Canadiens: il y a des inondations d'un type qui ne nous est pas familier. Toutes nos conceptions d'ingénierie remontent à plus d'un siècle, au climat qui régnait au XXe siècle, et nous avons maintenant de conceptions nouvelles fondées sur ce qui va venir.
    Merci.
    À l'heure actuelle, il se passe des choses bizarres dans le bassin hydrographique de la région de Halton, parce qu'il n'y a pas de fonte des neiges. Il y a eu beaucoup de pluie récemment, mais la situation est très différente dans les ruisseaux et les rivières.
     Je suis très préoccupé par les répercussions que cela aura sur notre cartographie des inondations. Elle ne changera pas forcément à cause des changements de conditions météorologiques. Est‑il important que les responsables de la protection de la nature de l'Ontario retournent à la planche à dessin et revoient une partie de la cartographie des inondations, ou les facteurs en cause sont-ils toujours strictement le relief du terrain et la proximité des cours d'eau, des ruisseaux et des rivières?

  (1600)  

     La capacité de calculer les futures plaines inondables a été mise en place. Mes collègues de Global Water Futures et moi avons produit un document qui décrit la technique appliquée à la rivière Bow, en amont de Calgary, en réaction aux crues, pour voir comment la fréquence des inondations changera d'ici la fin du siècle.
    Il est maintenant possible de faire la même chose pour l'ensemble du Canada. Il suffit de s'y mettre.
     Si la fréquence des inondations est à la hausse, l'ampleur de la destruction augmente certainement, vu ce que nous avons construit dans les zones inondables. C'est peut-être un avertissement pour l'avenir. Autrement, les destructions seront de plus en plus importantes.
    Quelle est la cause? Quels facteurs peuvent expliquer l'augmentation de la fréquence des inondations?
    Parfois l'augmentation de la fréquence et de la récurrence des inondations est attribuable aux aménagements. Nos collectivités aiment vraiment construire dans les plaines inondables parce que ces terrains sont les plus recherchés. On aime avoir une maison près d'un lac ou d'une rivière.
    Il y a aussi le fait que les caractéristiques des tempêtes évoluent. Elles aujourd'hui beaucoup plus souvent groupées qu'auparavant. Il y a plus de tempêtes qui durent plusieurs jours, sont plus intenses, apportent plus de pluie et, parfois, font tomber de la pluie sur la neige au sol, selon l'altitude. Tous ces facteurs se conjuguent pour transformer les régimes d'inondation au Canada.
    La fonte des glaciers cause même des inondations. L'inondation de pointe à Whitehorse, au Yukon, qui s'est produite en 2021, a commencé par le dôme de chaleur qui s'est produit cette année‑là. Le glacier Llewellyn et des couverts neigeux dans les montagnes au‑dessus de Whitehorse se sont mis à fondre rapidement. C'était du jamais vu. Voilà ce qui se produit maintenant.
    Compte tenu de toutes ces réalités actuelles et de ce que nous pouvons faire pour atténuer certains phénomènes destructeurs ou du moins leurs répercussions, comment une stratégie nationale aidera‑t‑elle à fournir des prévisions et des renseignements plus rapides et plus sûrs?
    Il y a un certain nombre de choses. La première, c'est qu'avec des prévisions préalables suffisantes, chacun peut prendre ses dispositions. Les sinistrés peuvent monter ce qui se trouve au sous-sol. Ils peuvent évacuer la zone. Ils peuvent sécuriser leurs entreprises. Ils peuvent protéger leurs fermes. Ils peuvent faire bien des choses. Un préavis de quelques jours donne le temps de mettre en place beaucoup de sacs de sable. Les organismes provinciaux peuvent abaisser le niveau des réservoirs qui pourront ensuite recueillir l'eau des crues.
    De plus, de meilleures prévisions rendent possible une meilleure cartographie des plaines inondables et aident l'industrie de l'assurance à établir des coûts fiables et adaptés pour l'assurance contre les inondations à l'échelle du pays en lui fournissant les meilleures données scientifiques. Les collectivités, les provinces et les territoires peuvent planifier les aménagements futurs afin d'éviter des coûts excessifs par la suite.
    Les renseignements peuvent servir à prévoir l'approvisionnement en eau, à planifier l'expansion des surfaces irriguées, à rétablir les fonctions naturelles des rivières, des terres humides, des deltas, et ainsi de suite. Il y a une multitude de choses. L'hydroélectricité est aussi un enjeu de taille.
    Merci, monsieur Pomeroy.
    Merci, monsieur van Koeverden.
    Madame Pauzé, vous avez six minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    On sait que quatre ministères sont concernés. Je pense que c'est à l'article 3 du projet de loi. Il y a le ministère de l'Environnement, en collaboration avec le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, le ministère des Ressources naturelles et le ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile.
    Dans la stratégie détaillée à l'article 3, on parle de nouveaux investissements, de la mise en place d'un répertoire des biens et des infrastructures, de l'établissement d'un système national collaboratif et de la création d'un service national de prévisions hydrologiques.
    C'est là où je veux en venir. Pourquoi ne pas réexaminer d'abord l'ensemble du Service météorologique du Canada? Pourquoi créer une autre structure? Est-ce qu'il y a un avantage à créer une autre structure plutôt que réunir les représentants concernés à la même table pour revoir la façon de fournir le service?
     Comme nous l'avons indiqué au départ, le Centre météorologique canadien fonctionne selon un modèle du haut vers le bas. Autrement dit, il n'y a pas de collaboration. Nous croyons que le nouveau système devrait être plus collaboratif, en plus d'être bien structuré. Le projet de loi C‑317 est un projet de loi structurant.
    Pour être collaboratif, il faudrait se baser sur les Services hydrologiques nationaux, au sein desquels les provinces et le fédéral collaborent et partagent les coûts.
    Le but, c'est de changer la façon de penser quant à cette question, afin d'avoir le meilleur des deux mondes. Comme je l'ai dit au départ, on utilise une approche verticale. On ne peut pas changer le fait que les prévisions météorologiques nous parviennent des satellites. Qu'on le veuille ou non, c'est ainsi que ça fonctionne. C'est centralisé et ça va du haut vers le bas. Cependant, il faut aussi une collaboration horizontale entre les instances locales, provinciales et territoriales, pour avoir le meilleur des deux mondes. Les éléments sont probablement déjà en place, pour la plupart, mais, pour l'instant, on travaille de manière trop informelle.
    Comme je l'ai dit, le projet de loi est structurant. Tout ce que nous demandons au gouvernement fédéral, c'est de soumettre une proposition. Celle-ci pourrait être modifiée, mais, pour aller de l'avant, il faudrait avoir une bonne proposition.

  (1605)  

    Comme on le sait, les ministères, entre autres, travaillent souvent isolément, malheureusement, et n'ont pas l'habitude de collaborer. Cependant, il est possible, à mon avis, de développer cette habitude. Il me semble que les pouvoirs publics effectuent déjà une partie du travail prévu au projet de loi C‑317.
    Le projet de loi apporte-t-il vraiment une amélioration? L'élaboration d'une stratégie nationale sur la prévision des inondations et des sécheresses permettrait-elle vraiment d'améliorer l'action publique actuelle? On sait que les stratégies nationales sont un outil populaire chez les libéraux.
    Je vais donner un exemple: le Québec a le Plan de protection du territoire face aux inondations. Les autres provinces doivent avoir mis autre chose sur pied, mais je ne sais pas de quoi il s'agit. En quoi le projet de loi permettra-t-il d'améliorer la situation actuelle? Les pouvoirs publics du Québec, des provinces et des territoires ont déjà des responsabilités.
    Dans ce domaine, les connaissances avancent assez rapidement.
    Le but de la collaboration est d'échanger les meilleures pratiques et connaissances. Comme M. Pomeroy l'a indiqué, certaines provinces ont plusieurs ressources. Elles ont de grandes capacités et beaucoup d'expertise, mais il y a d'autres provinces qui en ont moins. Or, dans le modèle fédéral, il y a toujours des provinces qui ont besoin d'un plus grand coup de main que d'autres. Le système permet à tout le monde de travailler ensemble.
    Les connaissances évoluent tellement rapidement que même les provinces qui ont une forte capacité en la matière pourraient tirer profit de l'échange des connaissances et des meilleures pratiques. Il s'agit d'un domaine très dynamique qui évolue rapidement. Je crois que tout le monde pourrait tirer avantage de la collaboration.
    Pouvez-vous nous assurer que la loi que prévoit créer le projet de loi répond à un besoin réel et ne se contente pas de nommer différemment des activités que le gouvernement exécute déjà?
    Tout à l'heure, vous avez dit qu'au moins quatre ministères fédéraux travaillaient isolément. Cette stratégie va les pousser à travailler ensemble et à mieux travailler ensemble, afin d'avoir un système un peu plus unifié.

[Traduction]

    Les six minutes sont presque écoulées.
    Madame Collins, vous avez six minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Je remercie le député d'avoir présenté cet important projet de loi.
    Merci à M. Pomeroy d'être venu témoigner et merci à lui de tout son travail.
    Nous savons que des phénomènes météorologiques inédits ont touché les Canadiens. Autrefois, nous redoutions un avenir effrayant, mais maintenant, c'est notre présent qui suscite la frayeur. En Colombie-Britannique, nous avons des sécheresses qui durent plusieurs années, en même temps que des inondations extrêmes et des évacuations.
    Le préambule du projet de loi dit « qu'un nombre grandissant de collectivités et de secteurs économiques, notamment l'agriculture, sont touchés de manière disproportionnée par l'expansion des plaines inondables et l'intensification des sécheresses ». Rien de plus vrai. Nous savons également que de nombreuses communautés autochtones sont beaucoup plus exposées au risque d'urgences liées à la météo.
    À votre avis, comment les gouvernements pourraient-ils collaborer avec les communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis pour appliquer ce genre de politique et veiller à ce qu'elles assument la direction d'une partie du travail?

  (1610)  

    Après quelques observations préliminaires, je vais céder la parole à M. Pomeroy.
    Si j'ai bien compris, la stratégie ferait participer tout le monde aux discussions. Elle tirerait parti de l'apport de tous les intervenants, y compris les provinces, les territoires, l'industrie, les Premières Nations et les Métis. Ensuite, il s'agit de voir comment traduire au mieux les connaissances prédictives pour aider les communautés sur le terrain qui se préparent à affronter les catastrophes naturelles.
    Est‑ce une bonne façon de voir les choses? Je suis sûr que vous pouvez apporter d'autres nuances, monsieur Pomeroy.
    C'est un début.
    Le programme Global Water Futures a permis de constater que, presque nulle part au Canada, il n'y a des points de prévision des inondations en territoire des Premières Nations ou en territoire autochtone. Nous les installons dans les grandes villes. C'est là que se trouvent les instruments de mesure et les points de prédiction. Voici un progrès facile à réaliser: se donner les moyens de prédire les inondations directement dans les réserves.
    Deuxièmement, il faut tenir compte des connaissances des Autochtones. Nous l'avons fait pour des projets conjoints. Pendant longtemps, il n'y a peut-être pas eu d'instruments de mesure dans les réserves, mais on y garde depuis longtemps le souvenir du moment où des inondations ont eu lieu, de la façon dont les choses se sont passées et ainsi de suite. Nous utilisons ces connaissances pour vérifier nos prédictions et nous assurer qu'elles sont réalistes.
    L'autre chose, c'est que, dans le cas des inondations, nous avons tendance à mettre l'accent sur les dommages économiques. Ils se sont élevés à 6 milliards de dollars à Calgary. Nous ne parlons pas tant de la souffrance humaine. La souffrance est souvent beaucoup plus profonde dans les communautés les plus vulnérables et les plus pauvres. Certains, au Manitoba et ailleurs au Canada, ont été évacués pendant de longues périodes à cause des inondations. Ils ne retournent pas dans leurs collectivités. C'est profondément destructeur pour l'ensemble de la société. Nous devons mieux tenir compte de ces problèmes.
    Merci beaucoup.
    Les répercussions sur les agriculteurs sont profondes, car les sécheresses et les crues entraînent des coûts économiques et humains. Je suis curieuse. Pouvez-vous nous parler de façon plus générale de notre système alimentaire et des répercussions des crues et des sécheresses sur la production alimentaire au Canada?
    La récente sécheresse a eu un impact incroyable sur l'agriculture. De nombreux éleveurs du Sud-Ouest des Prairies ont réduit leur cheptel. Même chose en Colombie-Britannique et ailleurs. Dans la région du Triangle de Palliser, dans le Sud-Ouest de la Saskatchewan et le Sud de l'Alberta, les agriculteurs qui exploitent des terres arides ont des campagnes désastreuses depuis des années. L'irrigation a été introduite dans cette région. Un des districts d'irrigation vient d'annoncer qu'il recevra la moitié de son allocation normale d'eau parce que, cette année, on prévoit que l'eau de fonte des neiges dans les Rocheuses sera insuffisante.
    Les effets sur la production vivrière sont nombreux. Il y a eu au Manitoba bien des années d'inondations où certaines cultures ont été impossibles. Dans certaines provinces, il est parfois arrivé que des inondations touchent certaines régions et exploitations et que des sécheresses en touchent d'autres. L'assurance-récolte compense, mais les indemnisations sont calculées sur des moyennes. À long terme, les sécheresses et les inondations font diminuer les indemnisations, et c'est le reste de la société qui finit par accorder d'importantes subventions. Tout cela finit par devenir intenable si nous ne faisons rien.
    Si les prévisions donnaient aux agriculteurs des renseignements fiables sur les risques de sécheresse dès janvier, ils pourraient planifier les semailles et le choix de cultures. Le district d'irrigation pourrait mieux gérer ses interventions. Nous pourrions en tirer d'énormes avantages économiques et un avantage sur le plan de la sécurité alimentaire. C'est ce que je souhaite voir à l'avenir.
     Merci beaucoup.
    Monsieur Scarpaleggia, en tant que député ministériel, je suis certain que vous avez discuté avec le ministre de l'Environnement de l'importance de la sécurité de l'approvisionnement en eau douce, des inondations et des sécheresses. Pourquoi pensez-vous que le ministre n'a pas encore mis en place cette stratégie? Cela fait maintenant huit ans.

  (1615)  

    Je sais qu'il est très favorable au projet de loi. Je lui en ai parlé.
    Comme je l'ai dit au début, ECCC s'intéresse à des éléments du système que nous essayons de créer. Le gouvernement devrait travailler plus rapidement et de façon plus large avec les provinces, les territoires, les Premières Nations, l'industrie et ainsi de suite. Ce devrait être une priorité, et le projet de loi vise à montrer que nous devons avancer un peu plus rapidement. La bureaucratie fédérale a fait un certain travail et poursuit ses efforts. Du travail a été fait. Il y a peut-être une certaine incohérence, mais il se fait quelque chose. Comme M. Pomeroy l'a dit, il y a eu des réunions, mais elles ne sont pas vraiment officielles. L'action est plutôt ponctuelle. Donc...
    Je suis désolé de vous interrompre. J'ai été enchanté que vous parliez d'agriculture.
    Nous passons au deuxième tour. M. Kram d'abord. Cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Scarpaleggia, je suis heureux de vous voir parmi les témoins.
    Monsieur Pomeroy, je vous remercie également de vous être joint à nous.
    Tous reconnaissent qu'il est intéressant d'avoir une meilleure prévision des sécheresses et des inondations. Nous devons aussi admettre qu'il est important de bien gérer les deniers publics. Pouvez-vous nous donner une idée de ce que tout ce système et ce programme coûteront tant pour le fonctionnement, chaque année, que pour la mise en place initiale.
    Je l'ignore parce que je ne fais pas partie du gouvernement et que je n'ai pas accès à l'information qu'il doit avoir — ou pas — sur ce genre de question.
    Le projet de loi ne vise pas à exercer des pressions, mais plutôt à inciter le gouvernement à recueillir ces renseignements et à estimer à quoi ressemblerait un tel système et combien il coûterait. Il pourra alors décider s'il estime que cela en vaut la peine ou non.
    Mon rôle est vraiment d'essayer d'accélérer un peu les choses.
    Je ne sais pas. Je n'ai pas la capacité de chiffrer un système aussi incroyablement complexe. J'ai une certaine compréhension de la situation, mais elle est loin d'être comparable à celle de M. Pomeroy.
    Je vais poser la même question à M. Pomeroy.
    Si vous n'avez pas les chiffres exacts, avez-vous une estimation générale ou un chiffre approximatif?
    Nous n'avons pas évalué les coûts. J'ai l'impression que les doubles emplois qui existent en ce moment disparaîtraient.
    À l'heure actuelle, nous avons 13 systèmes qui se chevauchent d'un bout à l'autre du pays, sans aucune aide pour certains éléments fondamentaux. Chacun de ces systèmes deviendrait plus efficace. Les coûts pourraient diminuer au niveau provincial. Au niveau fédéral, nous avons un système en place; il s'agit d'assurer la coordination pour constituer un système national.
    Nous pourrions aussi tirer des avantages d'un système national. En effet, les Américains ont ce qu'on appelle le Cooperative Institute for Research to Operations in Hydrology. Ils ont injecté, en dollars canadiens, 489 millions de dollars sur cinq ans dans ce projet. Ils s'inspirent largement des modèles canadiens que nous avons élaborés grâce à Global Water Futures, qui ne sont pas encore en service au Canada, mais qui le seront aux États-Unis, y compris pour tous nos bassins hydrographiques communs.
    Si nous avons un système qui peut tirer profit de ce qui est créé sur le continent, alors nous pouvons agir de façon très efficace, je pense.
    Puis‑je ajouter quelque chose?
    J'ai vraiment l'impression, compte tenu des chiffres que nous avons entendus au sujet du coût des catastrophes naturelles ces derniers temps, que les avantages l'emporteraient largement sur les coûts. Il ne faut pas l'oublier.
    D'accord.
    Selon son site Web, Ressources naturelles Canada a lancé à la fin de l'année dernière, je crois, le Programme d'identification et de cartographie des aléas d'inondation. Voici une brève citation tirée du site Web: « Le gouvernement du Canada investit plus de 227 millions de dollars dans l’actuel Programme d’identification et de cartographie des aléas d’inondation [...]  afin de mettre à jour et d’approfondir ses capacités de cartographie des inondations. [...] Ressources naturelles Canada dirige [ce programme] en partenariat avec Environnement et Changement climatique Canada et Sécurité publique Canada. »
    Pouvez-vous nous donner une idée de la façon dont l'initiative proposée dans le projet de loi C‑317 s'harmonisera avec les initiatives en cours à Ressources naturelles Canada?

  (1620)  

     Avant de céder la parole à M. Pomeroy, je dirais que je soupçonne qu'un système national perfectionné de prévision des crues améliorerait simplement l'exactitude de la cartographie réalisée par RNCan, mais je ne sais pas si c'est une bonne façon de voir les choses.
    À propos du programme de Ressources naturelles Canada, je dois dire que j'ai reçu des fonds destinés à l'Université de la Saskatchewan et que nos collègues de l'Université de Calgary, de l'Université Laval et de l'Université McMaster en ont reçu également. Nous utilisons les modèles que nous avons élaborés avec Environnement Canada à cette fin.
     Nous essayons de coordonner les activités du côté universitaire, et nous obtenons un certain soutien à cet égard, mais un processus plus officiel serait très utile, parce que RNCan devrait absolument bénéficier du programme national de prévision pour la cartographie des plaines inondables. Certains s'attaquent à ce problème, mais les efforts sont ponctuels et hésitants, je dirais.
    Monsieur le président, combien de temps me reste-t‑il?
    Vous avez terminé.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Monsieur Longfield, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Mme Pauzé a aussi fait un excellent travail. La séance est placée sous le signe de la collaboration.
    Parmi les points que vous avez abordés, monsieur Pomeroy, vous avez dit un mot de la dimension internationale en évoquant le fait que les États-Unis utilisent certains modèles canadiens.
     Un de mes électeurs a une société d'hydrologie avancée qui travaille au Bangladesh. Il s'agit de Ahydtech Geomorphic, qui fait de la surveillance hydraulique. L'entreprise fait de la géomorphologie fluviale. Autant de mots qui ont trait aux sécheresses et aux inondations. Elle travaille donc au Bangladesh. Elle y a accès aux données et elle élabore des modèles. Elle travaille également avec les municipalités, aidant les administrations municipales à circonscrire les risques.
    Pourriez-vous, vous ou M. Scarpaleggia, nous parler du rôle du Canada sur la scène internationale? Dans quels domaines le Canada possède-t‑il une expertise particulière, ce qui pourrait avoir d'énormes retombées économiques à l'échelle locale et apporter des avantages au plan environnemental à l'extérieur de notre pays?
    Puis‑je proposer une entrée en matière? Je crois fermement — comme vous le savez peut-être, monsieur Longfield — que le Canada, en tant que pays doté de ressources en eau, devrait jouer un rôle de chef de file pour aider le monde à assurer la sécurité des approvisionnements en eau à l'échelle mondiale. C'est le nouveau rôle du Canada en matière de maintien de la paix. C'est un domaine dans lequel nous avons la capacité de faire preuve de leadership et d'en tirer un avantage économique tout en faisant profiter le reste du monde de notre expertise.
    Je cède la parole à M. Pomeroy.
    Merci.
    Excellente réponse, à moins que vous ayez quelque chose de substantiel à ajouter...
    Je vais vous donner quelques exemples.
    D'accord.
    Grâce au programme Global Water Futures, nous avons déployé les modèles que nous avons élaborés au Canada dans la zone du Gange, en Asie centrale, dans les Andes, en Amérique du Sud, et dans les Pyrénées, en Espagne, avec beaucoup de succès.
     Il est clair qu'il y a pour le Canada des possibilités d'aide et des débouchés commerciaux en la matière qui n'ont pas été exploités. Il s'agissait de projets pilotes ponctuels, mais on pourrait faire beaucoup plus.
    C'est très bien. J'aime beaucoup cette conception du maintien de la paix. L'environnement revêt une dimension mondiale; il n'est pas limité à la dimension locale.
    Au niveau local, j'ai rencontré aujourd'hui les Producteurs de grains du Canada. Nous avons discuté de l'Énoncé de Guelph sur l'agriculture durable et la voie à suivre d'ici 2050 et de la façon dont les agriculteurs font des efforts pour assurer la durabilité de l'agriculture. J'ai pu discuter avec des agriculteurs invités à la réunion. Il y en avait un de la région de Lethbridge, en Alberta. Une agricultrice venait de la Saskatchewan. Une autre personne venait de l'Alberta. Ils parlaient de faire des observations sur l'eau présente dans le sol.
     Pour ce qui est de l'autre aspect, la sécheresse, vous avez parlé de la répartition de l'eau. Un agriculteur de l'Alberta a dit qu'il aura droit à un pouce d'eau cette année. Étant donné l'information reçue, il opte pour des cultures peu gourmandes en eau. Il préfère l'orge aux betteraves à sucre. L'agricultrice de la Saskatchewan a dit que, même l'an dernier, elle a été en mesure de maintenir ses rendements à un niveau élevé en modifiant ses choix de cultures. C'est de cette façon que la modélisation peut avoir un impact sur le choix de cultures que les agriculteurs peuvent faire s'ils sont au courant des risques de sécheresse.
    À quel point est‑il important que nos agriculteurs aient accès à cette information?

  (1625)  

     Oui, c'est une chose qui ne se fait pas à l'heure actuelle, mais je crois que les capacités techniques sont là, et qu'il faut les mobiliser et les utiliser. Environnement Canada produit des prévisions mensuelles et saisonnières. Elles pourraient être utilisées pour imposer les mêmes modèles que nous utilisons pour la prévision des inondations ou des sécheresses sur une base saisonnière. Ce serait extrêmement avantageux, comme vous l'avez dit, parce qu'il s'agirait d'une information communiquée assez rapidement pour que les agriculteurs puissent prendre les mesures qui s'imposent pour préserver leur rentabilité.
    La surveillance ne porte pas nécessairement sur les réservoirs, mais plutôt sur la teneur en humidité du sol. L'agriculteur du Québec a dit qu'il avait besoin de drains, parce qu'il y a des inondations chez lui. Il doit donc prendre des décisions différentes sur l'installation des drains dans ses champs.
    On peut mesurer l'humidité du sol depuis l'espace avec une certaine précision, du moins l'humidité de surface, mais, pour mesurer l'humidité en profondeur, il faut des capteurs dans le sol, et c'est là que le réseau d'observatoires de Global Water Futures est intéressant. Cela ne fonctionne généralement pas à l'échelle provinciale, et le gouvernement fédéral en a seulement dans les stations d'Agriculture Canada.
    Excellent. Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Pauzé, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Pomeroy, les inondations et les sécheresses, qui sont toutes deux liées à la quantité d'eau disponible, peuvent se produire à diverses échelles de temps, à diverses échelles géographiques et dans divers endroits. C'est très diversifié et, selon vous, il y a vraiment des avantages à traiter tout ça ensemble. Cependant, y a-t-il vraiment des avantages à gérer les risques d'inondation et de sécheresse dans le cadre d'une même stratégie? Savez-vous si ça se fait ailleurs, par exemple dans un autre pays du G7? Si oui, y a-t-il un modèle optimal?

[Traduction]

    Cela fait partie, en effet, de ce qu'on appelle la modélisation du système terrestre, qui est un système prévisionnel, et c'est ce vers quoi l'Europe oriente ses stratégies, tout comme les États‑Unis. Les pays les plus avancés se tournent vers ces modèles plus complets, qui peuvent anticiper de façon générale les inondations et les sécheresses, et éventuellement les niveaux de qualité de l'eau selon les épisodes, au fur et à mesure que nous élaborons ces systèmes.

[Français]

    Selon un article publié dans la revue Nature, il serait possible d'évaluer les niveaux d'eau de façon extrêmement précise grâce à l'intelligence artificielle, même sans jauges dans les rivières. D'après vous, l'utilisation de l'intelligence artificielle pose-t-elle des risques sur le plan de la sécurité, et cette technologie est-elle assez avancée pour nous permettre de faire ça?

[Traduction]

    L'intelligence artificielle a évidemment un rôle à jouer. Il s'agit surtout de techniques fondées sur des données, et les modèles mis à l'essai au Canada n'ont pas été très concluants par manque de données. Certaines régions du Canada ont un réseau de stations hydrométriques aussi éparpillé que dans les pays en développement — comme dans le Nord ou dans les régions rurales vraiment éloignées —, de sorte qu'il manque de données pour entraîner l'IA. Par ailleurs, compte tenu des changements climatiques et des nouveaux types d'inondations et d'autres phénomènes, les données chronologiques qui permettraient d'entraîner les systèmes d'intelligence artificielle ne sont pas à la hauteur de ce que nous verrons à l'avenir.
    Cela dit, ces systèmes ont un rôle à jouer et pourraient être avantageux en combinaison avec certains modèles actuels fondés sur la physique. Du côté humain, ils pourraient effectivement être très avantageux.
    Merci beaucoup. Vos deux minutes et demie sont écoulées.
    Madame Collins, vous avez deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Pomeroy, vous avez parlé des frais d'assurance, et, parmi les prochains témoins, nous allons parler à des gens qui s'intéressent aux zones où il n'est pas possible d'être assuré en raison des répercussions climatiques.
    Je serais curieuse de savoir — et ma question s'adresse aussi bien à M. Scarpaleggia qu'à M. Pomeroy — si vous craignez que des prévisions de ce genre aient une incidence sur les Canadiens qui vivent dans ces zones et sur leur assurabilité? En quoi le gouvernement est‑il responsable de veiller à ce que les Canadiens aient toujours accès à une assurance?
    C'est une question très intéressante.
    Je sais qu'on est en train de redessiner la carte des zones d'inondation au Québec, et cela suscite beaucoup de controverse puisque les maisons qui se trouvent désormais dans les zones jugées inondables perdent beaucoup de valeur. Je crois que, si les prévisions sont exactes et qu'on obtient une idée exacte du risque, il n'y aura pas d'erreur ni de constat susceptible d'être contesté.
    Cela pourrait influer sur les frais d'assurance, mais une inondation aurait, de toute façon, une incidence sur votre assurance, et c'est pourquoi le gouvernement — je rappelle que je ne parle pas ici pour le gouvernement ou en son nom — s'est engagé à créer un programme national d'assurance à faible coût contre les inondations pour ceux qui ne peuvent plus être assurés. Certaines zones de ma circonscription ont été touchées deux fois par des inondations — en 2017 et en 2019 —, et les gens ne peuvent tout simplement plus trouver d'assureur.

  (1630)  

     Il y a deux choses.
    Premièrement, les compagnies d'assurances appliquent déjà leurs modèles en secret. Il y en a un certain nombre au Canada. Ils sont tous différents, et je ne pense pas qu'ils soient très bons. Certaines personnes ont été facturées pour des inondations pour lesquelles elles n'auraient pas dû l'être.
    Deuxièmement, si on peut prévoir les inondations, on peut limiter les dommages, et les coûts devraient en être réduits d'autant globalement. Imaginez les dommages causés aux cultures, compte tenu également, si nous n'avions pas de prévisions météorologiques. C'est la même chose pour les prévisions d'inondations. Si on peut réduire ainsi les dommages, on devrait pouvoir réduire les frais d'assurance.
    Très bien. C'est tout pour la série des deux minutes et demie.
    Monsieur Deltell, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Scarpaleggia, je suis content de vous voir dans cette fonction de député.

[Traduction]

    Merci beaucoup de votre témoignage, monsieur Pomeroy. Très intéressant.

[Français]

    Monsieur Pomeroy, tout à l'heure, vous avez utilisé une image qui m'est restée à l'esprit: vous avez dit que chaque province et territoire avait construit sa propre roue. Bref, le Canada se retrouve actuellement avec 13 roues. L'objectif du projet de loi de notre collègue de Lac‑Saint‑Louis est justement d'unifier ces roues. À votre connaissance et selon ce que vous savez du Canada, croyez-vous que nous sommes capables de le faire dans un délai raisonnable, ou est-ce que ça risque de prendre des années avant que les 13 roues tournent de la même façon?

[Traduction]

    Les roues sont toutes différentes à l'heure actuelle. Certaines sont assez perfectionnées, tandis que d'autres sont très simples. Les administrations qui ont des systèmes simples ou qui n'en ont pas en tireront dès le début d'énormes avantages. Les administrations plus avancées, aussi. L'administration provinciale du Québec a constaté qu'elle pourrait tirer parti du modèle fédéral et des modèles provinciaux pour mesurer le degré d'incertitude des prévisions.
    On peut constater des avantages immédiats partout, et, comme ces systèmes existent, je pense qu'il sera possible de les améliorer rapidement. Peut-être que la génération concertée de la prochaine étape — la prochaine génération de modèles prévisionnels — pourra finalement se faire à l'échelle nationale. Cela prendra plus de temps, mais c'est sûrement possible.
    Vous avez aussi parlé de l'exemple des États‑Unis. Vous avez dit tout à l'heure qu'ils auront un jour le genre de système qui intéresse le député de Lac‑Saint‑Louis.
    Pourriez-vous nous dire comment nous pourrions nous inspirer de l'expérience américaine?
    Il y a là un certain nombre d'éléments en jeu. Premièrement, tout ne se fait pas à partir de Washington. Il y a des centres régionaux. Même si ces systèmes relèvent de l'administration fédérale, ils sont répartis en fonction des bassins hydrographiques du nord-est, du centre-nord, de l'Alaska, du nord-ouest, etc. Il y a également une coordination très étroite avec les États en question et d'autres collectivités. Enfin, ces systèmes s'appuient sur les ressources centrales que sont les superordinateurs et l'armée de scientifiques travaillant dans différentes agences, comme la U.S. Geological Survey, le service météorologique et le U.S. Army Corps of Engineers. Tout cela doit également être coordonné.
    Ils s'en sont assez bien tirés jusqu'ici, mais ils estiment avoir encore besoin de faire des progrès beaucoup plus rapides, et ils ont créé ce nouvel institut coopératif précisément pour accélérer ces améliorations.
    Quand ont-ils adopté cette stratégie de collaboration sur le même front?
    Cela remonte au moins aux années 1960, peut-être même avant. On n'a pas l'habitude de voir les États agir ainsi, sauf pour fournir une expertise au système fédéral. C'est aussi une structure constitutionnelle un peu différente.

  (1635)  

[Français]

    Supposons que, d'ici les prochains moins, le projet de loi est soumis à un vote et adopté à la Chambre des communes, puis au Sénat. Selon ce que vous savez de la loi et selon votre expérience au Canada et aux États-Unis, environ combien de temps cela pourrait-il prendre avant que le Canada tourne vraiment d'une seule roue avec les 13 provinces et territoires, et que nous soyons responsables et efficaces à l'échelle nationale?

[Traduction]

    Je vois quand même 13 roues, mais avec un moteur leur fournissant une puissance supplémentaire au besoin, parce que les réalités provinciales sont très différentes sur le terrain. Je crois qu'on peut obtenir des gains immédiats grâce à la circulation des données, à la coordination et même à l'échange bilatéral d'information entre les provinces. L'Alberta, la Saskatchewan et le Manitoba ont toutes les trois prévu le comportement du réseau hydrographique de la Saskatchewan; c'est donc certainement un gain facile pour améliorer la situation.
    La dernière chose serait l'élaboration de systèmes adaptés au Canada, qui est un pays marqué par des phénomènes comme du sol gelé, de la fonte des neiges, de la fonte des glaces et des embâcles de rivière. Nous devrons trouver nous-mêmes ces solutions et nous assurer qu'elles sont intégrées à notre système, au lieu de nous fier à ce que d'autres pays ont créé.
     Voici ma dernière question. Pensez-vous qu'il soit possible de le faire sans investir de nouvelles ressources?
    Nous pouvons tirer parti de programmes comme Global Water Futures, doté d'un budget de 78 millions de dollars, mais qui arrive à son terme. On est en période de déploiement. Quand nous avons élaboré Global Water Futures, nous savions que nous allions produire ces modèles. Je voulais qu'ils soient hébergés. Je n'aurais jamais pensé qu'ils le seraient aux États‑Unis. J'aimerais qu'ils le soient ici. Vous avez ici des ressources qui pourraient être mises à profit avec seulement quelques employés, quelques réunions de plus et des gains d'efficacité.
    Je ne crois pas que cela coûterait cher, comparativement à ce que j'ai vu au gouvernement fédéral.
    Merci beaucoup.
    Notre dernière intervenante est Mme Chatel.
    Vous avez cinq minutes, madame.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Ce projet de loi est très important, surtout dans le contexte où le Canada est le seul pays du G7 à ne pas avoir de stratégie nationale pour la prévention des sécheresses et des inondations. Quelles sont les conséquences de ne pas avoir une stratégie coordonnée avec les provinces et les territoires, entre autres?
    C'est ce dont je voulais parler à la fin de mon allocution et M. Pomeroy l'a soulevé aussi.
    À Calgary, en 2013, on s'est servi d'un modèle assez nuancé, bien développé et sophistiqué, développé en Europe, dans le cadre d'un projet pilote pour analyser la situation dans l'Ouest canadien. Ce modèle a prédit une inondation dévastatrice huit jours avant l'événement, tandis que la province de l'Alberta n'a pas pu la prévoir aussi longtemps à l'avance. Les avantages de ce modèle sont donc assez évidents.
    Tout à l'heure, on disait qu'il y avait des coûts associés à la mise en œuvre d'une nouvelle stratégie.
    Cependant, monsieur Pomeroy, vous avez mentionné que le coût de l'inaction en matière de climat était énorme. Toutefois, avec des prévisions, des modèles et de l'agilité, on permettrait aux communautés d'éviter les sécheresses et les inondations, et d'éviter leurs effets dévastateurs sur leur économie régionale. Pouvez-vous confirmer que cela correspond à votre analyse?

  (1640)  

[Traduction]

    Des prévisions exactes des inondations permettent de réduire les dommages. Elles ne peuvent évidemment pas faire cesser la pluie ni la fonte des neiges, mais elles permettent d'avoir le temps d'adapter le fonctionnement des réservoirs, d'installer des sacs de sable et de prendre d'autres mesures, mais aussi de permettre aux gens d'agir, notamment d'évacuer la ville. Bien des choses ne sont pas possibles quand on n'est pas averti, alors que les dépenses sont considérablement réduites quand on est averti d'une inondation suffisamment à temps.
    On a pu le constater à maintes reprises partout dans le monde. Qu'on pense aux morts et aux dommages causés par les inondations dans les pays en développement, comme ce qui s'est passé en Libye l'an dernier. Il n'existait aucun système d'alerte à ce moment‑là. Les pertes humaines et matérielles ont été terribles.
     Nous avons déjà peu de pertes humaines et matérielles au Canada grâce à des services d'urgence exceptionnels, etc., mais nous ne pouvons pas compter entièrement sur eux pour réduire ces pertes. Il nous faut ce système d'alerte précoce.
    On commence à voir les avantages du système fédéral. Il a permis de collaborer avec l'administration provinciale du Québec il y a trois ans pour faire face aux inondations. Il a permis de fournir une alerte rapide et précise à cette région. Le système a été testé à cette occasion. Je le redis, il ne s'agit pas d'une relation officielle à l'échelle du pays. C'était la preuve que nous pouvons faire au moins aussi bien que les systèmes prévisionnels européens à cet égard.

[Français]

     Les changements climatiques causent beaucoup de difficultés aux fermiers, qui sont en première ligne. De quelle façon cette stratégie pourra-t-elle les aider à mieux planifier leur saison?

[Traduction]

     Les agriculteurs et les responsables de la gestion de l'eau sont témoins de phénomènes qu'ils n'ont jamais vus et dont ils n'ont aucune expérience. Un délai de trois mois, mais, mieux encore, de six mois, leur donne suffisamment de temps pour commander des semences différentes. Cela donne assez de temps pour prendre des décisions concernant le fourrage, etc. Cela permet aussi aux districts d'irrigation de dresser des plans et d'avertir les producteurs de ce qui sera mis à leur disposition pour l'irrigation afin qu'eux-mêmes puissent également dresser des plans. Si nous pouvons faire tout cela, nous en tirerons d'énormes avantages économiques.
     Nous disposons d'un remarquable système de surveillance de la sécheresse par l'entremise d'Agriculture Canada, mais ce n'est pas vraiment un système prévisionnel. Les mêmes logiciels et modèles informatiques peuvent servir à la fois pour les inondations, pour les sécheresses et pour bien d'autres choses, dont la productivité agricole et l'approvisionnement en eau pour l'hydroélectricité. Le système a de nombreuses applications, mais il faut qu'il soit installé et opérationnel.
    Cela met fin à notre période de questions.
    Félicitations à vous, monsieur Scarpaleggia. Vous vous en êtes sorti plutôt indemne.
    Merci de vos propos, monsieur Pomeroy, et merci d'avoir aidé M. Scarpaleggia. Vous avez élevé le débat et notre compréhension de l'enjeu de l'eau à un tout autre niveau. Je vous en remercie et je vous remercie de ce que vous faites chez vous dans le cadre de vos recherches. J'ai déjà eu l'occasion de prendre connaissance de vos recherches. On y trouve d'excellentes idées dont il nous faudra discuter davantage, c'est certain.
    Je vais conclure ici. Nous allons suspendre la séance pendant quelques minutes pour nous préparer à la prochaine heure.

  (1640)  


  (1650)  

[Français]

    Nous reprenons la séance.
    Madame Pauzé et monsieur Mazier, je vous remercie d'avoir assumé les responsabilités de la présidence et je vous félicite pour la façon dont vous avez maîtrisé la discussion et les échanges.
    Nous sommes rendus à la deuxième heure de la réunion, durant laquelle nous recevrons quatre groupes de témoins.
    Pour commencer, nous entendrons Mme Wanda McFadyen, directrice générale, Initiative du bassin de la rivière Assiniboine, qui a la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Bonjour et merci, monsieur le président et distingués membres du Comité. C'est un honneur pour moi de pouvoir vous parler du projet de loi C‑317 aujourd'hui.
    Comme chacun sait, l'eau ne respecte pas de frontières, en période d'inondation comme en période de sécheresse. Il est donc extrêmement important que les différentes autorités responsables de l'eau partagent des données normalisées et puissent le faire en temps opportun avec les intervenants qui travaillent sur le terrain et qui comptent sur ces données.
    Je voudrais vous parler de deux inondations survenues dans notre bassin hydrographique au cours des dernières années, celle de 2011, phénomène tricentennal, et celle de 2014, phénomène cinq fois centennal. Ces deux inondations ont été catastrophiques. Dans un cas, 11 000 résidants d'une collectivité ont été évacués et 4 000 maisons et entreprises ont été endommagées.
    Les répercussions des inondations sur la santé mentale des membres de ces collectivités sont incommensurables et durent des années. Les inondations de 2014 ont privé d'approvisionnement les collectivités et les résidants ruraux pendant des jours. Les inondations ont également des répercussions sur l'infrastructure, les terres agricoles, les entreprises, etc. Il faut donc analyser la situation et prendre des mesures à l'échelle du pays. Comme l'a expliqué M. Pomeroy, cela a aussi des effets sur la possibilité d'être assuré, et c'est, pour ceux qui vivent ces situations, une pièce très importante du casse-tête.
    À l'autre bout du spectre, il y a évidemment la sécheresse. On commence à en faire l'expérience à des niveaux sans précédent. La différence entre une sécheresse et une inondation, c'est que la sécheresse peut durer des mois, voire des années, tandis qu'une inondation aura plutôt des répercussions courtes, quoiqu'elle ravage les infrastructures pendant des années avant leur remplacement. Il me semble essentiel d'analyser la situation.
    Dans les deux cas, les répercussions ont une incidence sur la santé mentale des gens, sur le bien-être économique des collectivités, sur l'environnement, et sur le milieu naturel et toutes les créatures qui y habitent. Quand je parle de « collectivités », je parle de tout le monde, c'est‑à‑dire les Premières Nations, les résidants ruraux, les résidants urbains, etc. Ces phénomènes, faut‑il le rappeler, sont transfrontaliers. Il faut tenir compte du fait que l'eau traverse les frontières rurales.
    Au nom de notre organisation, j'invite instamment le Comité à travailler à l'élaboration d'une véritable stratégie nationale qui permettrait à toutes les administrations de partager des données normalisées et compréhensibles pour se préparer aux inondations et aux sécheresses et y réagir. Cette collaboration devra tenir compte du fait que les frontières sont municipales, provinciales et internationales. La communication, la coopération et la coordination sont autant d'objectifs communs qui mèneront au succès du programme si celui‑ci doit être mis en œuvre.
    Vous devez collaborer avec les partenaires locaux que nous sommes. Des groupes comme le nôtre, les communautés autochtones locales, les agriculteurs et les organismes de conservation sont une mine de connaissances et ont créé un réseau et un lien de confiance avec les intéressés sur le terrain. Ils sont bien souvent les premiers intervenants et travaillent avec les résidants locaux, en période d'inondation comme en période de sécheresse.
    Il faut aussi créer suffisamment de résilience pour donner à tous les intervenants la capacité et les outils nécessaires qui leur permettront de s'adapter au changement, non seulement pour veiller à la durabilité environnementale, mais aussi pour rester viables sur le plan économique, pour eux-mêmes et pour le bien-être de leurs collectivités. J'ajoute que les objectifs doivent aussi intégrer le fait que la recherche et l'adaptation des pratiques de gestion exemplaires, ainsi que l'utilisation des outils susceptibles de faciliter le processus élaboré, sont les clés du succès.
    Il faut que les processus soient transparents. Le succès des programmes dépend de la transparence des communications et de l'échange d'information.
    Par ailleurs, il ne faut jamais oublier la règle d'or de l'eau: Faites à ceux qui sont en aval comme vous voudriez que vous fassent ceux qui sont en amont.
    Je suis très heureuse de vous exposer ces éléments d'information aujourd'hui et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions. Nous suivons avec satisfaction le développement de cette stratégie et nous vous invitons tous ici à ne pas nous oublier, nous qui sommes sur le terrain et pouvons contribuer à la réussite de cette initiative à l'échelle du Canada.
    Merci.

  (1655)  

     Merci, madame McFadyen.
    Écoutons maintenant l'une des représentantes du Lobby Climatique des Citoyens. Je crois que c'est Mme Lindman qui va prendre la parole.
    Allez-vous partager votre temps avec Mme Orlando? Qui va commencer?
    C'est Cathy Orlando qui va commencer, et nous allons partager notre temps.
    Parfait.
    Allez‑y, madame Orlando.
     Je vous remercie de m'avoir accordé le privilège de m'adresser à vous aujourd'hui.
    Je m'appelle Cathy Orlando. Je suis directrice des programmes de Citizens' Climate International et directrice du Lobby Climatique des Citoyens du Canada.
    Je vis à Sudbury, en Ontario. Je me préoccupe de la crise climatique depuis le début de ma vie adulte. Mon beau-père était le Dr Sukhdev P. Mathur. C'était l'un des scientifiques qui ont produit le premier rapport du GIEC en 1990.
    J'apporte mon soutien, dans plus de 100 circonscriptions au Canada et dans plus de 50 pays, aux nobles efforts de bénévoles désireux de proposer à leurs gouvernements et à leurs concitoyens des solutions climatiques fondées sur des données probantes.
    Mme Lindman est l'une de ces bénévoles.
    À vous, chère collègue.
    Bonjour, je m'appelle Caterina Lindman et je suis...
    Excusez-moi, madame Lindman. Je suis désolé de vous interrompre.
    Compte tenu de la forme hybride de notre réunion, nous devons nous assurer que la qualité du son est appropriée pour les interprètes afin de ne pas leur causer de troubles auditifs.
    On me dit que, malheureusement et peut-être pour des raisons de branchement, ils ne pourront pas traduire vos propos. Je suis certain que vous nous avez transmis vos commentaires par écrit, mais cela ne réduira pas le temps dont dispose votre organisme.
    Je suis désolé, madame Lindman. C'est une simple question de santé et de sécurité. Nous avons essayé de régler le problème, mais ce n'était pas possible techniquement.
    Madame Orlando, voulez-vous continuer?
    Certainement.
    Mme Lindman est une actuaire à la retraite. Elle se préoccupe des changements climatiques depuis une trentaine d'années.
    Comme actuaire, elle s'est jointe à des comités actuariels qui étudient les changements climatiques et la durabilité environnementale. Elle a présidé le comité qui a créé l'Indice actuariel du climat vers 2013. L'indice actuariel du climat mesure la fréquence des extrêmes climatiques et révèle que ces extrêmes augmentent à un rythme sans précédent. Elle a fait tout ce qu'elle pouvait pour réduire les émissions de son ménage et elle voulait aider le Canada à adopter des politiques climatiques efficaces. C'est pourquoi elle est devenue membre du Lobby Climatique des Citoyens en 2013.
    Le Lobby Climatique des Citoyens est un organisme militant non partisan qui se consacre à la promotion de politiques climatiques efficaces. C'est en 2010 que nous avons commencé à agir au Canada.
    Nous avons deux histoires à vous raconter sur des phénomènes de précipitations et de sécheresse.
    Au cours de l'hiver 2018‑2019 à Sudbury, en Ontario, j'ai été la victime directe de précipitations exceptionnelles. De la glace s'est alors accumulée sur le toit de ma maison. Les professionnels du nettoyage n'ont pas pu l'enlever. Durant la première journée chaude du printemps, à la fin de mars 2019, la glace accumulée sur le toit à l'avant a fondu plus rapidement qu'à l'arrière de la maison. Le toit s'est alors effondré à l'intérieur. Les murs se sont décollés les uns des autres. Ma maison a été condamnée, et nous avons été obligés d'évacuer. Nous avons vécu dans un hôtel pendant plus de six mois. Tout le premier étage de la maison a dû être consolidé, et le toit a été remplacé. Nous avions une assurance spéciale, et tous nos coûts ont été couverts. Trois autres maisons de notre rue ont subi des défaillances structurelles internes semblables, mais pas aussi catastrophiques. Les gens doivent payer des fortunes pour faire réparer leurs toits et leurs maisons. Je vis dans une rue où il n'y a que 16 maisons.
    L'été dernier, le fils de Mme Lindman, qui vit à Yellowknife, dans les Territoires du Nord‑Ouest, a dû être évacué pendant trois semaines en raison d'incendies de forêt sans précédent dans le Grand Nord. Comme il n'y a qu'une seule route pour sortir de Yellowknife, il a dû conduire en direction de l'incendie pour ensuite se diriger vers le sud et s'en éloigner.
    La sécheresse attribuable aux changements climatiques a considérablement contribué aux feux de forêt. Les sécheresses ne font pas que nuire aux agriculteurs et aux cultures; elles contribuent également aux feux de forêt. Le Canada connaît actuellement une sécheresse généralisée avant la saison des feux, après en avoir subi une catastrophique l'année dernière.
    Voici quelques chiffres. Au Canada, en 2023, les pertes assurées se sont élevées à 3,1 milliards de dollars. Les pertes économiques et les pertes assurées, largement attribuables aux changements climatiques, ont augmenté de façon spectaculaire en 20 ans. Les pertes économiques mondiales de 380 milliards de dollars américains sont trois fois plus élevées que les pertes assurées de 118 milliards de dollars américains. Au Canada, les pertes économiques ont largement dépassé les 3 milliards de dollars. Si on extrapole, elles ont probablement été de l'ordre de 9 milliards de dollars.
    Nous avons soumis par écrit une version beaucoup plus longue de cet exposé.
    Pour terminer, nous sommes heureuses que le Canada élabore une stratégie nationale de prévision des sécheresses et des inondations.
    Merci.

  (1700)  

     Merci beaucoup. Nous avons également votre mémoire écrit, que les analystes pourront examiner de près.
    Nous allons maintenant écouter M. Sandford, qui a déjà comparu devant nous dans le cadre de cette étude. Il est le principal agent de liaison des relations gouvernementales pour Global Climate Emergency Response, à l'Institut universitaire pour l'eau, l'environnement et la santé des Nations unies.
    À vous, monsieur Sandford. Vous avez cinq minutes.
    J'aimerais, dans le temps dont je dispose, soulever la question de savoir si le Canada a besoin d'une stratégie nationale de prévision des inondations et des sécheresses dans un contexte mondial.
    Le réchauffement climatique nous a échappé à l'échelle mondiale, parce que nous avons trop attendu pour agir. Les scientifiques et les gouvernements doivent maintenant s'attaquer au problème dans l'espoir de le rattraper et de le devancer.
    Notre situation mondiale actuelle nous place au‑delà de la première vague d'impacts des changements climatiques, celle des phénomènes météorologiques extrêmes plus fréquents et plus intenses et des changements dans les régimes mondiaux de précipitations, et déjà à l'étape de la deuxième vague de phénomènes climatiques qui ont une incidence sur la sécurité nationale, qui entraînent une intensification des conflits intra-étatiques et entre États et qui font apparaître le spectre d'une explosion des migrations humaines involontaires et d'une augmentation rapide des réfugiés climatiques, auxquelles le monde n'est pas préparé. Bienvenue dans le monde de l'avenir.
    Si l'humanité ne parvient pas à contenir les émissions rapidement et fermement, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat prévoit que la moitié ou les trois quarts de la population humaine pourraient être régulièrement exposés à des degrés de chaleur et d'humidité mortels.
    Les systèmes de production alimentaire seront gravement compromis. En raison de l'augmentation de la chaleur, du stress, de la sécheresse, de la dégradation des sols, de la destruction des cultures par les maladies et les insectes, et des phénomènes extrêmes, environ un tiers des terres agricoles actuelles pourraient ne plus être cultivables d'ici 2100. Les multiples mauvaises récoltes frappant en même temps plusieurs régions considérées comme les greniers à blé du monde se produiraient régulièrement. Le nombre de personnes exposées au risque de famine, de malnutrition et de mortalité liée à la malnutrition pourrait augmenter de 80 millions. Ce serait la famine générale.
    D'ici la fin du siècle, on prévoit qu'environ 3,5 milliards de personnes pourraient être forcées de quitter leur région, leur pays ou leur continent en raison d'inondations, de tempêtes, d'incendies ou d'un degré extrême de chaleur et d'humidité.
    Souvenez-vous que l'Europe a failli s'effondrer quand elle a été submergée de réfugiés de la guerre civile syrienne. Nous avons déjà de la difficulté au Canada à harmoniser notre politique d'immigration avec notre parc de logements et l'augmentation de nos déficits d'infrastructure. Selon certaines estimations, en 2023 seulement, environ 200 000 Canadiens ont été évacués ou déplacés par des feux de forêt ou des inondations, et pour certains à titre permanent. On commence déjà à voir ce que les scientifiques ont prédit il y a un certain temps.
    Si nous n'agissons pas immédiatement dans le dossier du climat, nous pourrions nous retrouver dans une situation où nous n'arriverons pas à suivre le rythme des catastrophes qui y sont liées. À mesure que ces phénomènes se multiplieront, nous n'aurons pas le temps de nous remettre de l'un avant l'arrivée du suivant. Voyez la vague de chaleur, les feux de forêt et les inondations de 2021 et les inondations de 2023 en Colombie‑Britannique, mais aussi la vague de chaleur, le dégel du pergélisol, la sécheresse hydrologique et les évacuations récurrentes à la suite des feux de forêt dans les Territoires du Nord‑Ouest en 2023. Ces phénomènes conjugués se produisent déjà aux mêmes endroits sans guère de répit entre eux. Comme nous l'avons vu ailleurs, les catastrophes climatiques récurrentes de cette fréquence acculent des pays entiers à la faillite, et elles continueront de se produire.
    On oublie aussi les répercussions des catastrophes récurrentes sur la santé mentale. Selon l'avis des psychologues, si nous n'anticipons pas la menace climatique, les effets sur la santé mentale de la dégradation du climat mondial pourraient l'emporter sur les effets physiques directs selon un facteur de 40 pour 1. Là encore, nous ne sommes pas préparés.
    En terminant, je rappelle que nous sommes au beau milieu d'une urgence climatique nationale. À mon avis, le Canada a besoin d'une stratégie nationale de prévision des inondations, des sécheresses et des feux de forêt. Sans quoi, beaucoup de gens pourraient mourir inutilement ou être déplacés et inutilement traumatisés, et certaines parties du pays seraient appauvries.
    Les gouvernements qui se détournent de cette réalité imminente le feraient à leurs risques et périls.
    Merci beaucoup, monsieur le président.

  (1705)  

[Français]

     Merci, monsieur Sandford.
    Pour conclure les témoignages, nous allons entendre Mme Laura Reinsborough et Mme Larissa Holman, de Garde-rivière des Outaouais.
    Madame Reinsborough, vous avez la parole.

[Traduction]

    M. Sandford a brossé un tableau d'ensemble, et je vais maintenant vous parler du bassin versant de la rivière des Outaouais. Quand vous vous retrouvez dans la région de la capitale nationale, vous dépendez directement, pour votre survie, de la rivière des Outaouais et de ses affluents. C'est aussi notre eau potable aujourd'hui, alors à votre santé!
    Je vais faire cet exposé en compagnie de ma collègue, Larissa Holman, directrice des sciences et des politiques. Vous l'avez rencontrée récemment, car elle a également donné un exposé dans le cadre de l'étude sur l'eau douce.
    Cette invitation, qui remonte à quelques jours, est tombée à point nommé. Nous avons préparé un rapport sur les variations de débit dans le bassin versant de la rivière des Outaouais, à partir des données fédérales qui remontent à plusieurs années, mais qui n'ont jamais été analysées sous l'angle des bassins hydrographiques. Donc, pour examiner vraiment les données sur ce qui se passe dans le bassin versant de la rivière des Outaouais... Les résultats sont révélateurs.
    Le bassin versant de la rivière des Outaouais est vaste, avec deux fois la superficie de la province du Nouveau-Brunswick. Il fournit de l'eau potable à deux millions de personnes. Le débit de la rivière des Outaouais peut être si puissant qu'il peut dépasser celui de tous les Grands Lacs réunis. On lui a donné le surnom de « sixième Grand Lac ».
    C'est donc une puissante rivière qui traverse la capitale nationale.
    Je vais vous parler de ce qui s'est passé lors des inondations de 2017 et de 2019 et dont nous nous sommes inspirés pour nos commentaires d'aujourd'hui. Il est également important de noter que cette puissante rivière est aussi touchée par la sécheresse. Nous devons donc tenir compte du fait que même nos plus puissants cours d'eau sont également touchés par les crues et les étiages.
    Dans deux semaines à peine, nous publierons notre premier bulletin sur les bassins hydrographiques, et nous avons analysé 14 indicateurs différents. Comme je l'ai dit, les changements de débit en font partie. Par-delà les données de débit émises par la Division des relevés hydrologiques du Canada, notre bulletin sur les bassins hydrographiques est le premier rapport à fournir une analyse de tendance relative aux périodes de crue et d'étiage à l'échelle d'un bassin hydrographique. Les compétences dans ce bassin sont très complexes, la rivière étant la frontière entre l'Ontario et le Québec.
    Les crues majeures de la rivière des Outaouais en 2017 et en 2019 — bon nombre d'entre vous s'en souviendront — ont causé d'importants dommages aux infrastructures, aux propriétés et aux résidences. Les gouvernements de l'Ontario et du Québec ont tenté de remédier aux inondations de différentes façons, travaillant donc séparément pour faire face à un problème qui ne peut être réglé par des mesures appliquées d'un seul côté de la rivière à la fois. Nous voyons un besoin dans ce contexte, comme dans bien d'autres bassins hydrographiques, où les compétences politiques doivent être coordonnées afin de s'assurer que l'intervention est efficace. Cela s'applique également aux prévisions.
    Nous avons examiné le projet de loi C‑317 et avons quelques recommandations à formuler.

  (1710)  

    En ce qui concerne plus précisément le paragraphe 3(3), nous souhaitons faire quelques recommandations.
     Garde-rivière des Outaouais est d'avis qu'en ce qui concerne l'idée d'appliquer des « technologies innovantes en matière de prévision des inondations et des sécheresses », il faut absolument tenir compte des répercussions sur les écosystèmes aquatiques et veiller à ce que les milieux riverains ne soient pas perturbés. En été, par exemple, des activités récréatives prennent place derrière certains barrages et dans les bassins de retenue. En aval de ces ouvrages, nous constatons que les périodes de faible niveau d'eau se prolongent, ce qui a une très forte incidence sur la santé écologique et sur l'ensemble des écosystèmes.
    Je vais vous parler de l'alinéa 3(3)b). Nous vous recommandons de réfléchir à la façon dont nous pourrions partager l'expertise acquise entre les régions pour veiller à ce que tous les bassins hydrographiques soient en mesure de renforcer la capacité d'entreprendre des activités à l'échelle locale ou régionale. Cela rejoint en partie ce que disait Mme McFadyen, à savoir qu'à l'échelle locale, il existe un savoir et un contexte qui sont synonymes de valeur ajoutée et qui permettent de confirmer les prévisions faites à plus grande échelle.
    Ici, en Ontario, les offices de protection de la nature dans la partie sud du bassin versant de la rivière des Outaouais ont acquis d'excellentes capacités de cartographie des inondations, ainsi que de prévision des crues et des étiages.
     Je suis désolé de devoir vous interrompre, mais nous en sommes à cinq minutes. Cependant, nous avons votre exposé par écrit.
    Nous allons faire un tour de questions. Nous sommes un peu en retard.
    Nous allons commencer par M. Deltell, pour six minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je félicite de leurs témoignages les gens qui participent par vidéoconférence.
     Mesdames de Garde-rivière des Outaouais, bienvenue chez nous. qui est aussi chez vous. J'aimerais vous parler de ce qui s'est passé en 2017 et en 2019. La plupart d'entre nous ont été élus à ce moment-là, alors nous nous en souvenons très bien. Je traversais la rivière tous les jours, puisque mon appartement était à Gatineau. Nous avons tous été saisis par cela.
    Qu'est-ce que ces expériences vous ont appris sur les relations entre les deux provinces, puisque, comme vous le disiez, la rivière des Outaouais relève d'une compétence partagée entre celles-ci? Que pourrait-on faire de mieux maintenant et qui s'intégrerait très bien dans le projet de loi que nous étudions actuellement?
    Merci, monsieur Deltell.

[Traduction]

    Je vais partir de votre question pour compléter ma démonstration.
    Nous constatons qu'en Ontario, les offices de protection de la nature font un excellent travail pour cartographier les inondations. Cependant, les cartes ne couvrent pas l'ensemble de la province de l'Ontario, de sorte que des travaux semblables pourraient être effectués dans les régions où il n'y a pas d'offices de protection de la nature.
    Du côté québécois du bassin versant de la rivière des Outaouais, des erreurs de prévision ont eu des répercussions sur plusieurs propriétaires. L'exactitude des données disponibles et de l'analyse effectuée relativement à la cartographie des inondations doivent être confirmées à partir des connaissances locales et du contexte local, car les erreurs ont entraîné des répercussions considérables.

  (1715)  

    Si vous me permettez d'intervenir également, il y a un autre élément. Après les inondations de 2019, le gouvernement de l'Ontario a publié un rapport sur les inondations dans la rivière des Outaouais et le fleuve Saint-Laurent où l'on apprend que différents facteurs expliquent pourquoi il y a eu des crues aussi importantes à cette époque. L'accumulation de neige et la pluie ont joué un rôle déterminant à cet égard.
    Cependant, on a conclu que la communication entre les organismes concernés par les deux rivières aurait pu être nettement améliorée, comme cela a été souligné à la Commission de planification de la régularisation de la rivière des Outaouais. Malgré des progrès et l'amélioration des communications, il est toujours possible de transmettre ces données plus efficacement aux municipalités et aux résidants locaux.
    Quand vous parlez de communication, s'agit-il de communication entre deux provinces ou municipalités, ou entre les administrations et les gens?
    Les deux. Ces deux types de communication pourraient être nettement améliorés.
    Après les événements de 2017 et de 2019, a‑t‑on constaté des progrès, ou est‑ce que rien n'a changé depuis?
    La Commission de planification de la régularisation de la rivière des Outaouais a considérablement amélioré ses communications. Une autre crue importante a eu lieu en 2023, et la communication s'est beaucoup améliorée à ce moment‑là.
    Je pense que les municipalités ont aussi pris conscience de leur responsabilité d'informer les résidents de ce qui se passe. Cela s'explique par le fait que de nombreuses personnes ont été prises au dépourvu en 2017, et que la durée des inondations de 2019 a été tellement longue qu'il fallait manifestement offrir plus de soutien à l'échelle locale.
    Nous parlons beaucoup du niveau local et des provinces. Que peut faire le gouvernement fédéral?
    Que peut...
    Que peut faire le gouvernement fédéral?
    L'adoption d'une stratégie nationale, fédérale, permettrait de confirmer les données. Il serait possible de confirmer les données dont disposent les provinces. Je parle de confirmation à l'échelle provinciale et pas de simple transmission de grande échelle, vers le bas, des données publiées. Les informations et les données disponibles seraient contextualisées à l'échelle locale.
    Plusieurs possibilités peuvent découler de ces regroupements.
    Le gouvernement fédéral a également la capacité d'appuyer certaines de ces initiatives. Comme l'ont dit les témoins précédents, il y a beaucoup d'excellents exemples dans différentes régions du pays, et le fait d'instaurer une communication d'un point de vue national ne ferait qu'améliorer les modèles à l'échelle locale.
    Enfin, croyez-vous que nous pouvons apprendre beaucoup de choses de l'expérience que nous avons vécue ici en 2017 et en 2019, qui peut s'appliquer d'un océan à l'autre, quelle que soit le cours d'eau dont on parle?
    À l'instar de ce que Mme McFadyen disait, nous avons vu des gens s'adresser à des organismes comme Garde-rivière des Outaouais pour savoir ce qui se passait. Nous jouissons d'un certain niveau de confiance au sein de la communauté. Je pense que les organismes au niveau des bassins versants et au niveau local peuvent contribuer à maintenir la confiance du public sur ce qui se passe dans les moments de panique, lors d'événements extrêmes.
    Madame Taylor Roy, vous avez la parole.
    Je vais poursuivre dans la même voie.
    Vous avez dit plusieurs choses intéressantes au sujet du partage des connaissances locales. On a mentionné à quelques reprises que l'expertise développée dans les régions peut être partagée.
    Je sais que Sécurité publique Canada était en train d'élaborer un profil de risque national pour le Canada. Ce faisant, on a intégré les données scientifiques et les commentaires des parties prenantes à l'échelle nationale afin d'améliorer la compréhension des risques de catastrophe dans tous les secteurs de la société.
    Je me demandais si vous saviez quelque chose à ce sujet et si vous pensez que cela pourrait servir de modèle pour la façon dont l'information locale est intégrée à la planification de la prévision des inondations.
    Pourriez-vous également nous dire comment vous envisagez la diffusion de cette information, la communication entre les différentes municipalités ou régions du Canada?
    Ma question s'adresse aux représentantes de Garde-rivière des Outaouais.

  (1720)  

    Je ne crois pas connaître l'évaluation des risques dont vous parlez. Nous n'y avons pas répondu directement. Il me semble que ce serait une étape importante à franchir pour essayer de comprendre comment mettre en place correctement les prévisions de crue.
    Nous nous sommes notamment penchés sur les variations de débit et sur la façon dont le débit évolue dans les réseaux fluviaux, en particulier dans le bassin versant de la rivière des Outaouais. Nous avons constaté que les inondations — et ce n'est pas une grande surprise, surtout pas cette année où il fait si chaud et sec très tôt — surviennent plus tôt. Ce n'est pas seulement le cas cette année. Nous nous sommes penchés sur des ensembles de données sur 30 ans pour tenter de comprendre cela du point de vue climatique. Non seulement les inondations printanières se produisent plus tôt, mais les périodes estivales de faible débit se prolongent.
    Nous constatons les effets des variations du débit des rivières et nous devrions en tirer des enseignements quant au moment où les gens devraient se préparer aux inondations, qui surviennent de plus en plus tôt. Nous pourrions ainsi mieux comprendre ce qui peut être fait pour se préparer plus tôt dans la saison.
    Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse à M. Sandford, de l'Institut universitaire des Nations Unies.
    Vous avez dit avoir l'impression que nous poursuivons la lutte contre les changements climatiques dans l'espoir de rattraper le temps perdu. Nous avons entendu nombre de questions au sujet de ce projet de loi relativement au coût de mise en place d'un système national de prévision des crues et des sécheresses.
    Il semble souvent que les gens se concentrent sur le coût des choses sans tenir compte de ce qu'il en coûterait de ne pas mettre ces choses en place. Je me demandais si vous pouviez aborder certains des points spécifiques dont vous avez parlé, comme les répercussions sur la sécurité nationale, les migrations humaines et les zones de conflit.
    Pourriez-vous nous parler de façon générale du coût de ne pas nous préparer aux événements climatiques et de ne pas prendre de mesures pour freiner l'augmentation des gaz à effet de serre liée aux changements climatiques et au réchauffement de la planète? À quoi ressemblent généralement ces coûts pour notre planète?
     Tout d'abord, je vous remercie de cette question et de cette observation très importantes. Nous commençons à peine à voir à quoi pourraient ressembler ces coûts. Nous devons d'abord déterminer exactement de quel genre d'impact il s'agit.
    Quand les migrations dues aux changements climatiques se transforment en crises sur le plan de la sécurité nationale, les coûts peuvent être très élevés en termes de points de PIB, de productivité, de stabilité, de coûts de santé publique, de coûts de sécurité et ainsi de suite. Quand de grandes parties de la population mondiale subissent exactement les mêmes types de pressions, les coûts peuvent être exorbitants.
    Je pense que M. Pomeroy l'a très bien exprimé quand il a dit que nous avons beaucoup d'éléments en place. Nous sommes l'un des pays très chanceux d'avoir des programmes universitaires financés de façon pérenne par l'État, des programmes à même de nous permettre de devancer ces coûts. Nous disons bien sûr depuis très longtemps que le coût de l'inaction est beaucoup plus élevé que le coût de l'action. Le moyen proposé est assorti de coûts potentiellement minimes par rapport aux conséquences économiques et sociales absolument désastreuses et aux effets sur la santé mentale que nous pourrions subir si nous n'agissons pas.
    Pour poursuivre dans la même veine, une partie du problème, c'est d'évaluer le coût de l'inaction, contrairement au coût d'un programme, comme la mise en place d'un système de prévision des inondations et des sécheresses, qui peut être établi assez facilement, surtout par le biais de l'Agence canadienne de l'eau. Les coûts liés à l'inaction sont souvent difficiles à évaluer. Que proposez-vous pour régler ce problème? Nous constatons souvent que les gens n'établissent pas ce coût, ou n'essaient pas de l'évaluer. Nous ne disposons finalement que des coûts des interventions.

  (1725)  

    Pouvez-vous répondre en une quinzaine de secondes, monsieur Sandford?
    D'accord.
    Je pense qu'il en a été amplement question. En fait, nous connaissons les coûts des dommages causés. Si nous calculions combien il nous en coûte pour mettre en place une stratégie ou des mesures d'intervention, je suis certain que nous en arriverions à une fraction de ces coûts.
    Je vous remercie.

[Français]

     Madame Pauzé, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie aussi tous les témoins d'être des nôtres.
    Monsieur Sandford, je pense que vous avez tracé, dans votre allocution d'ouverture, le portrait le plus global des répercussions des changements climatiques sur l'ensemble de la vie humaine. Vous avez notamment parlé d'agriculture, de santé, et de réfugiés du climat. Tout y est passé.
    Je lisais dernièrement un article paru en mars à ce sujet. Les agriculteurs de l'Ouest canadien, par exemple, subissent une sécheresse depuis plusieurs années, en particulier en Alberta. Les agriculteurs de l'Alberta, et même les compagnies pétrolières de cette province, se préparent à une pénurie d'eau. Je trouvais ça assez intéressant de lire cet article, parce que nous savons qu'au Canada, le premier élément qui génère des gaz à effet de serre est l'exploitation des sables bitumineux. Là, même ces compagnies, qui veulent augmenter leur production, font maintenant face à une pénurie d'eau. Je trouve donc qu'il est assez risqué, en fin de compte, de la part de ces compagnies pétrolières de ne pas améliorer leurs processus en fonction des changements climatiques.
    Nous savons que les inondations et les sécheresses sont des phénomènes naturels qui sont amplifiés par les bouleversements climatiques. Je pense que les pouvoirs publics doivent mobiliser la science pour guider leur prise de décision. Est-ce que vous pouvez nous dire un peu ce qu'il se passe à l'international dans ce sens, outre le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, dont vous nous avez parlé? Pourquoi le Canada est-il si en retard, puisqu'il me semble bien que c'est ce que vous avez dit dans vos notes d'allocution? Comment pouvons-nous compenser cela?

[Traduction]

    Premièrement, il est important de reconnaître que l'agriculture est le secteur économique fondamental dont nous parlons ici. Si l'agriculture connaît de graves difficultés en matière de productivité, si les coûts augmentent de même que les dommages, cela se répercutera sur toutes les strates économiques du pays.
    À mon avis, nous ne sommes pas nécessairement en retard par rapport à d'autres pays. Certains tentent de gérer le problème et de comprendre ce que nous considérons comme des projections, surtout en ce qui a trait à la dynamique et aux perturbations démographiques. Je pense qu'aucun pays n'a encore pleinement saisi avec quelle rapidité ces changements se produisent et quelle pourrait être leur ampleur si nous n'arrivons pas à agir dans les plus brefs délais, avec les moyens dont nous disposons, pour protéger nos populations et prévoir avec le plus d'exactitude possible et de manière très anticipée, ce que ces répercussions pourraient signifier sur une base saisonnière et annuelle.

[Français]

     En effet, dans le passé, on parlait beaucoup d'adaptation aux changements climatiques ou de réduction des émissions de gaz à effet de serre. C'est peut-être parce que nous n'avons pas agi assez vite ou de façon assez rigoureuse au fil des ans, mais j'ai l'impression que nous parlons maintenant plus d'adaptation que d'atténuation, alors que les deux sont super importants.
    Merci beaucoup de votre présentation, monsieur Sandford.
    Je m'adresse maintenant aux représentantes de Garde-rivière des Outaouais. La rivière des Outaouais, on le sait, me préoccupe beaucoup, mais pour d'autres raisons.
    Comme vous le savez, Environnement et Changement climatique Canada, par le biais de son service météorologique, rend déjà accessibles des données fort intéressantes. Il fournit aux citoyens, aux entreprises, au gouvernement, aux provinces et aux territoires des informations météorologiques précises et des avertissements météo officiels. Cependant, pour vous, il serait important de se doter aussi d'une stratégie nationale, comme celle qui est proposée dans le projet de loi C‑317.
    Pourquoi alors ne pas revoir le mandat de cet organisme, qui est le mieux placé actuellement pour faire des prévisions?

  (1730)  

[Traduction]

    Nous recommandons notamment au gouvernement de mettre au point cette stratégie, mais en s'assurant que nous continuerons à avoir accès aux données à long terme dont nous avons besoin pour éclairer les prévisions. Il faut notamment continuer de colliger des données historiques, et c'est là un rôle que le gouvernement fédéral peut jouer. De toutes les stations hydrométriques qui étaient en activité dans ce bassin hydrographique jusqu'en 1990, 44 % ne sont plus en service; nous constatons donc une diminution du volume de données que nous mesurons. Je ne peux pas vous dire comment cela se compare aux services météorologiques, mais nous savons pertinemment qu'il y a une diminution de la mesure de ces niveaux d'écoulement dans ce bassin hydrographique. C'est là un domaine où nous recommandons une amélioration, et cela pourrait éclairer la stratégie.

[Français]

    Je veux rapidement dire qu'un autre rôle du gouvernement canadien dans le cadre de ce travail pourrait être de s'assurer que chaque région du Canada a le même accès aux informations, pas seulement les provinces qui ont plus de stations.
    Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Collins.
    Monsieur Longfield, avez-vous levé la main?

[Traduction]

    Je vais attendre que Mme Collins ait terminé.
    D'accord.
    Madame Collins, vous avez six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Merci également à tous les témoins de leur contribution.
    Ma première question est pour Mme Orlando du Lobby climatique des citoyens. Votre lobby a récemment publié un article sur la non-assurabilité du monde et a clairement mis en évidence certaines répercussions néfastes découlant de la gravité croissante des inondations, des sécheresses et de tous ces événements climatiques en ce qui a trait à l'assurance, y compris les faillites de compagnies d'assurance, la hausse des prix à la consommation, l'augmentation des indemnisations versées par l'État, ce qui signifie que les dommages sont payés directement par les contribuables, ainsi que le retrait de la couverture d'assurance. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet et sur le risque auquel nous sommes exposés au fur et à mesure que des régions deviennent non assurables.
    C'est une excellente question.
    Les bénévoles du Lobby climatique des citoyens recueillent des données et les publient ensuite sous forme condensée dans des documents que nous appelons les « discours lasers ». Nous avons été stupéfaits de voir les données colligées par nos bénévoles.
    Au Canada, plus de 1,5 million de ménages à risque élevé ne peuvent pas obtenir une assurance à prix abordable contre les inondations. De plus, des gens risquent de perdre leur assurance, parce que le prix de leur police peut augmenter d'une année à l'autre. Nous nous dirigeons vers un monde qui ne sera plus assurable et nous devons atténuer les catastrophes climatiques de toute urgence.
    L'une de nos recommandations porte sur toutes ces données de modélisation. Nous posons seulement la question suivante: serait‑il utile de suivre une trajectoire axée sur le maintien du statu quo par opposition à un scénario d'atténuation le plus rapide possible? Nous avons besoin de données pour agir face aux événements, parce que nous nous dirigeons vers un monde qui ne sera plus assurable. Les données sont assez pessimistes.
    Nous avons publié un deuxième discours laser pour l'Ontario qui s'appuie sur un rapport sur les risques climatiques publié discrètement à l'été 2023. Là encore, si nous ne faisons rien pour atténuer la crise climatique, les répercussions sur l'agriculture seront très graves. Je ne vous donnerai pas de chiffres, mais je vous encourage à lire ces rapports.
    Je tiens à vous remercier d'avoir lancé ce programme national sur les inondations et les sécheresses. Dans le passé, j'ai coprésidé le comité d'adaptation de Sudbury, et nous avons besoin de données pour prendre des décisions.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'aborder ce sujet et de tirer la sonnette d'alarme.
    Je remercie également M. Sandford de l'avoir fait également.
    J'ai vraiment apprécié vos propos, monsieur Sandford.

  (1735)  

    Ma prochaine question s'adresse à l'organisme Garde-rivière des Outaouais.
    Vous avez beaucoup parlé de l'importance et du partage des données. Vous avez fait quelques suggestions pour cette stratégie nationale. Vous concentrez vos efforts sur l'Outaouais, mais j'aimerais avoir votre avis sur les régions rurales et éloignées. Comment ces données leur permettront-elles de gérer leur bassin hydrographique?
    Même si notre travail porte sur la rivière des Outaouais, nous surveillons la totalité du bassin hydrographique, et bon nombre des affluents traversent des régions éloignées. Là encore, ce qui est vraiment important, c'est que tout le monde ait un accès égal à des systèmes d'alerte efficaces en cas d'inondation ou de sécheresse.
    Il faut aussi tenir compte de l'impact de ce qui se passe en amont ou en aval. Si les changements qui se produisent risquent d'avoir une incidence sur les populations rurales, il est important qu'ils soient pris en compte. Nous ne pouvons pas nous concentrer uniquement sur les régions les plus populeuses; nous devons vraiment comprendre ce qui se passe à l'échelle du bassin hydrographique.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Sandford, merci encore d'avoir insisté, dans votre témoignage, sur la menace existentielle à laquelle nous sommes exposés.
    Nous avons entendu le témoignage du Lobby climatique des citoyens sur la non-assurabilité de certaines régions. Dans un article publié aujourd'hui, une résidente de Kelowna raconte qu'elle a acheté une maison là-bas mais qu'il lui est impossible de l'assurer parce que cette maison se trouve à proximité des zones exposées aux incendies de forêt. De nombreuses compagnies d'assurance ont cessé leurs activités en Californie à cause des graves conditions de sécheresse.
    Dans le cadre de votre travail, vous penchez-vous sur les répercussions de la crise climatique sur les assurances?
    Oui, bien sûr, parce que les problèmes d'assurance sont généralisés.
    L'autre chose, c'est qu'à l'échelle mondiale, de nombreuses régions sont durement frappées par des phénomènes météorologiques extrêmes contre lesquels il n'y a jamais eu d'assurance. Les pays pauvres doivent compter sur leurs propres gouvernements pour venir en aide aux gens qui sont frappés par une succession de crises. Je pense notamment à des endroits comme le Mozambique et certaines régions du Pakistan.
    Ce qui m'intéresse à cet égard, c'est l'incertitude croissante et le coût qui y est lié. Je viens tout juste d'assister à une série de conférences dans l'Okanagan. Les résidents de la région sont très inquiets non seulement de la question des assurances, mais aussi de la perspective de devoir changer leur activité économique en raison de la rapidité à laquelle le climat change dans leur région.
    Ce qui m'intéresse à ce sujet, c'est le fait que l'urgence est de plus en plus imminente ici. L'urgence dont nous parlons est...
    Je vous remercie.
    J'invoque le Règlement.
    Oui, monsieur Mazier.
    Monsieur le président, j'aimerais soulever une question de privilège.
    Le jeudi 21 mars 2024, le Comité de l'environnement a adopté une motion ordonnant au ministère du ministre Guilbeault de produire de l'information sur l'efficacité de la taxe sur le carbone pour réduire les émissions. Le Comité a spécialement exigé la production du modèle d'équilibre calculable provincial-territorial du gouvernement appelé EC‑PRO. C'est le modèle que le gouvernement a mentionné quand il a été invité à expliquer comment sa taxe sur le carbone contribuerait à réduire les émissions de 30 %.
    Le Comité a aussi exigé la production de tous les paramètres économiques associés à ce modèle.
    Ordonner la production de document est un privilège dont jouissent les parlementaires afin de représenter efficacement les Canadiens. J'attire votre attention sur le chapitre 20 de l'ouvrage de Bosc et Gagnon, La procédure et les usages de la Chambre des communes, où on peut lire ceci:
Le Règlement de la Chambre des communes prévoit que les comités permanents ont le pouvoir d'exiger la production de documents et dossiers, un autre privilège d'origine constitutionnelle délégué par la Chambre. Dans leurs missions d'études et d'enquêtes, les comités permanents doivent souvent compter sur une foule de documents afin d'alimenter leurs travaux.
    Monsieur Mazier, puis‑je vous interrompre un instant?
    Je veux seulement dire aux témoins que nous avons terminé un premier tour de questions et que, malheureusement, nous n'aurons pas le temps d'en amorcer un deuxième, et cela n'a rien à voir avec votre intervention. J'en suis vraiment désolé.
    Je tiens à remercier tous les témoins de leur présence et de leurs réponses aux questions. Merci.
    Il s'agit d'une séance publique. Vous pouvez rester si vous le souhaitez, mais je suis certain que vous avez un emploi du temps chargé. Libre à vous de partir, mais je tiens à vous remercier d'être venus aujourd'hui.
    Monsieur Mazier, veuillez poursuivre.

  (1740)  

    J'attire à nouveau votre attention sur La procédure et les usages de la Chambre des communes de Bosc et Gagnon, qui précise que le pouvoir du Parlement d'exiger la production de documents n'est pas limité. Voici ce qu'on peut lire un peu plus loin:
Le libellé du Règlement ne circonscrit pas les contours du pouvoir d'exiger la production de documents et de dossiers. Il en résulte un pouvoir général et absolu qui ne comporte a priori aucune limitation. La nature des documents qui sont susceptibles d'être exigés est indéfinie,
    Monsieur le président, le Comité a exhorté le gouvernement à produire son modèle de projection des émissions dans la semaine suivant l'adoption de la motion. Non seulement Environnement et Changement climatique Canada n'a pas répondu dans le délai prescrit par le Comité, mais il n'a pas fourni toute l'information exigée par le Comité.
    Au lieu de fournir au Comité un modèle de réduction des émissions au moyen de la taxe sur le carbone, le gouvernement a fourni la version provisoire d'un document de 18 pages qui tente de décrire le modèle. En fait, toutes les pages du document sont estampillées de la mention « version provisoire ».
    Le titre du document est « Modèle EGC provincial d'Environnement Canada », ou modèle EC‑PRO, auquel est accolée une note de bas de page indiquant que ce document n'est pas, en fait, le modèle de réduction des émissions.
    Voici ce qu'on peut lire dans la note de bas de page: « À noter qu'il s'agit d'une version préliminaire en cours d'élaboration. Tout commentaire sera apprécié. Les opinions exprimées dans ce document sont celles des auteurs et ne reflètent pas celles d'Environnement et Changement climatique Canada ou du gouvernement du Canada. »
    J'attire aussi votre attention sur cette mention, à la page 14 du document: « Ce document présente une version provisoire en cours d'élaboration d'une description du modèle d'EGC provincial, au niveau D, d'ECCC utilisé pour l'analyse de la politique du carbone. »
    Nous avons donc la preuve que le gouvernement ne nous a pas fourni son analyse de sa politique du carbone. En fait, le gouvernement n'explique nulle part dans ce document comment il prévoit réduire les émissions de 30 % au moyen de sa taxe sur le carbone ni dans quelle mesure cette taxe a déjà contribué à réduire les émissions ni son impact sur l'économie.
    Cela est très préoccupant, étant donné que le Canada...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Comme il est assez rare qu'une question de privilège soit soulevée, puis-je demander s'il s'agit d'une motion dilatoire? Y aura‑t‑il un vote par la suite? Y a‑t‑il un débat en cours?
    Corrigez-moi si je fais erreur, madame la greffière, mais il semble que je vais devoir déterminer s'il s'agit bien d'une question de privilège. Je suis certain que, peu importe ce que je déciderai, il y aura des désaccords. Il pourrait donc y avoir une sorte de vote, si j'ai bien compris.
    D'après ce que je comprends, ma décision pourrait être contestée.
    Devons-nous supposer que nous allons en débattre pendant le reste de... jusqu'à 18 heures? Combien de temps allons-nous...?
     C'est une bonne question. Nous avons la salle jusqu'à 18 heures parce que nous nous attendons à discuter des travaux futurs.
    De toute façon, je ne peux pas interrompre M. Mazier à ce moment‑ci, n'est‑ce pas? Non. La seule chose qui pourrait arrêter M. Mazier serait que les ressources ne soient plus disponibles. Est‑ce exact? Nous avons les ressources. Personne n'a éteint les micros ou l'interprétation.
    Vous avez donc la parole, monsieur Mazier.
    Merci, monsieur le président.
    Encore une fois, c'est la preuve que le gouvernement a omis de fournir l'analyse des émissions liées à la taxe sur le carbone. En fait, le gouvernement n'indique nulle part en détail dans les documents comment il prévoit réduire les émissions de 30 %, ni combien d'émissions ont été réduites grâce à la taxe sur le carbone, ni encore l'incidence sur l'économie de la taxe sur le carbone. C'est très préoccupant, étant donné que le commissaire à l'environnement du Canada a déclaré que le gouvernement n'est pas en voie d'atteindre ses propres cibles de réduction des émissions pour 2030.
    Monsieur le président, lorsque le gouvernement ne fournit pas les documents demandés par le Comité, cela mine le travail du Comité et limite notre capacité de servir les Canadiens. Le fait de ne pas fournir les documents demandés par un comité constitue une atteinte au privilège. Je demande donc de présenter ma motion de privilège afin que nous puissions obtenir du gouvernement des renseignements sur la taxe sur le carbone.
    Merci.

  (1745)  

    C'est la première fois, je crois, que nous sommes confrontés à quelque chose de ce genre. À mon avis, les documents ont été fournis.
    Je vais demander à M. van Koeverden s'ils ont été fournis.
    J'ai trouvé qu'ils étaient excellents... un filigrane « Ébauche ».
     Quoi qu'il en soit, monsieur Mazier, disons que, théoriquement, vous avez dit que vous vouliez avoir les documents dans un délai d'une demi-heure...
    M. Dan Mazier: Non.
    Le président: Je dis cela de façon hypothétique. Évidemment, ce ne serait pas possible en une demi-heure. Serait‑ce une atteinte au privilège? Mon instinct me dit que non. Vous les avez demandés dans un délai d'une semaine. M. van Koeverden a mentionné à la dernière réunion que ce serait très difficile, et nous les avons reçus non pas une semaine plus tard, peut-être, mais presque une semaine plus tard. À mon avis, ce n'est pas la fin du monde que nous les recevions un peu en retard. C'est la première chose.
    Ensuite, je crois comprendre qu'il y a des estimations modélisées de la mesure dans laquelle le prix du carbone réduira les émissions de gaz à effet de serre. D'après ce que je comprends — et je me trompe peut-être —, il n'y a pas de données qui indiquent précisément que la tarification du carbone a entraîné une réduction d'une quantité X des émissions de gaz à effet de serre. Franchement, je ne pense même pas que ce soit possible. Je pense qu'on peut faire une modélisation et une estimation, et la tarification du carbone repose sur une bonne théorie économique. En un sens, nous demandons quelque chose qu'il n'est pas possible de produire.
    Monsieur le président, je suis curieuse.
    Êtes-vous en train de rendre votre décision, ou y a‑t‑il d'autres députés qui peuvent...
    Non, je décide s'il s'agit d' une question de privilège. J'essaie simplement de vous faire part de mon point de vue à ce sujet. Quoi qu'il en soit, je vais être contesté. Je le sais. Cependant, c'est ce que je pense.
    Personnellement, je ne pense pas que ce soit une atteinte au privilège, puisque l'information telle qu'elle existe a été fournie. Évidemment, vous êtes libres de contester cela.
    Oui, nous contestons cela.
    D'accord.
    Comment procède‑t‑on maintenant? Doit‑on passer à un vote?
    Y a‑t‑il un débat sur la contestation?
    Je ne le crois pas. Je pense que c'est dilatoire.
    Vous vous rendez compte, monsieur le président, qu'ils n'ont pas fourni le modèle que nous avons demandé. Qu'il y ait des preuves ou non, nous avons simplement demandé un modèle. C'est tout ce que nous avons demandé. Ils ne l'ont pas fourni. C'était un simple fait.
    Vous pouvez rendre votre décision.
    Nous pourrions tenir une réunion complète sur ce qui existe, ce qui n'existe pas et ce qui a été fourni.

[Français]

     Il n'y aura pas d'autre intervention au sujet de la question de privilège de M. Mazier, à moins que quelqu'un invoque le Règlement.
    Je peux invoquer le Règlement.
    Mme Collins a invoqué le Règlement en premier.

[Traduction]

    C'est plutôt une précision.
    En ce qui concerne le processus, quand une personne soulève une question de privilège, les députés ne sont-ils pas également autorisés à intervenir, comme cela se fait à la Chambre?
    Apparemment pas. C'est la toute première fois que je vois une telle situation, mais on me dit que non. Je dois simplement rendre une décision. C'est ce qu'on me dit.
    Madame Pauzé, vous avez la parole.

[Français]

    Mon recours au Règlement va un peu dans le même sens. Nous ne pouvons pas intervenir sur la question de privilège de M. Mazier. Ai-je bien compris?
     Je ne le crois pas, mais nous pouvons vérifier, si vous le voulez. Nous allons prendre une pause de cinq minutes et vérifier ça pour être absolument certains.

  (1745)  


  (1750)  

[Traduction]

     Nous allons passer directement au vote, mais j'aimerais dire une chose par souci d'équité. J'ai examiné les documents ici. Un modèle est un ensemble d'équations et de résultats. Il me semble que le modèle a été fourni.
    Si vous estimez avoir besoin de plus de renseignements et que les données recueillies ici soulèvent plus de questions, vous pouvez déposer une autre motion à une autre date.
    En ce qui me concerne, le modèle a été fourni. Vous pourriez dire: « Nous aimerions voir les codes informatiques qui régissent le calcul des équations. » C'est un débat sans fin. Si vous estimez que c'est insuffisant, je vous suggère de déposer une autre motion sur ce sujet, entre autres choses.
    Il n'y a pas de débat.
    J'invoque le Règlement.
    Plus tôt aujourd'hui à la Chambre des communes...
    Est‑ce un rappel au Règlement?
    Cela a trait à ce dont nous discutons ici.
    Un député: Ce n'est pas le cas.
    M. Adam van Koeverden: Si vous n'aimez pas...
    On m'a dit que vous faites erreur.
    Passons au vote. Nous devons discuter de nos travaux futurs à huis clos, sinon nous ne pourrons pas vraiment nous réunir jeudi.
     Monsieur Ali, avez-vous levé la main?
    Oui, monsieur le président.
    Il n'y a pas de débat. S'agit‑il d'un rappel au Règlement?
    J'aimerais obtenir une précision au sujet du vote.
    Votons-nous?
    J'ai décidé qu'il ne s'agissait pas d'une question de privilège, que cela n'avait rien à voir avec le privilège. Évidemment, il y en a qui ne sont pas d'accord.
    M. Mazier a contesté ma décision, alors nous votons pour savoir si les membres sont d'accord pour maintenir la décision du président ou s'ils sont d'accord avec le député.
    Nous allons passer au vote, et nous en aurons terminé avec ce point précis.
    J'aimerais obtenir une précision. Si je vote non, qui est‑ce que j'appuie?
    Si vous votez non, vous vous rangez du côté de M. Mazier.

  (1755)  

    D'accord.
    Si j'ai bien compris, je ne pense pas qu'il y aura de débat par la suite. Y en aura‑t‑il un?
    Si la réponse est non, alors M. Mazier propose sa motion.
    D'accord. Nous allons débattre de sa motion.
    Pouvez-vous répéter?
    Si ma décision est infirmée, M. Mazier déposera une motion, et nous en débattrons.
    Oh. Je vote « non ».
    Vous vous rangez du côté de M. Mazier.
    (La décision de la présidence est cassée par 6 voix contre 5.)
    Le président: Monsieur Mazier, vous pouvez déposer votre motion.
     Merci.
    En voici le texte:
Attendu que le Comité a adopté une motion le jeudi 21 mars 2024, qui disait notamment:
Le Comité ordonne la production du « modèle d'équilibre général calculable provincial territorial d'Environnement et Changement climatique Canada [EC-Pro] », y compris (i) « [l]a technique statistique permettant d'isoler la contribution du prix du carbone » (ii) une liste de tous les paramètres « Ref », dont les paramètres « Ref22 » et « Ref22A » utilisés dans EC-Pro, (iii) le modèle EC-Pro qui a prédit que « la tarification du carbone représentera jusqu'à un tiers des réductions des émissions du Canada », y compris l'ensemble (i) des paramètres, (ii) du modèle économique et (iii) des hypothèses; et que ces documents soient fournis au Comité dans la semaine suivant l'adoption de la présente motion.
Et attendu qu'Environnement et Changement climatique Canada n'a pas fourni toutes les informations demandées par le Comité dans les délais convenus.
Par conséquent, le Comité considère que ce manquement à un ordre du Comité...
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Nous avons un rappel au Règlement.
    M. Adam van Koeverden: Sommes-nous en train de débattre d'une nouvelle motion? S'agit‑il d'une toute nouvelle motion?
    Le président: Oui, c'est une nouvelle motion.

[Français]

     La motion porte sur une question de privilège.

[Traduction]

    Je vais reprendre là où j'ai été interrompu:
Et attendu qu'Environnement et Changement climatique Canada n'a pas fourni toutes les informations demandées par le Comité dans les délais convenus.
Par conséquent, le Comité considère que ce manquement à un ordre du Comité constitue une violation de ses privilèges, et que cette question doit être rapportée à la Chambre.
    Nous avons M. van Koeverden, puis M. Longfield, Mme Collins et Mme Pauzé.
    Avant de dire quoi que ce soit, je tiens à préciser que nous avons voté...
    Je n'avais pas tout à fait terminé.
    Oh, je croyais que vous aviez terminé.
    Quand nous avons tourné autour du pot au moment où vous rendiez votre décision, essentiellement, votre motion de privilège, les documents — et vous les avez brandis, monsieur le président — avaient un filigrane « Ébauche ». Je viens de lire la motion. Ils ne venaient même pas d'ECCC. Ils l'ont admis dans le document même, alors il est tout à fait faux de penser qu'ils ont répondu d'une façon ou d'une autre à toute la question du Comité et nous pouvons tout simplement la poser de nouveau. C'était très loin de ce que nous cherchions à obtenir.
    La raison pour laquelle il y a des détails, des renvois aux motions 22 et 22A, etc., c'est que c'était en réponse à une question inscrite au Feuilleton à l'égard de laquelle ils ont effectivement nié qu'il s'agissait des résultats. On allait en venir à leurs réductions des émissions et tout allait bien se passer: « Croyez-nous et croyez le modèle », alors nous avons simplement demandé au gouvernement de le prouver. Malheureusement, le gouvernement, ECCC, a choisi de ne pas du tout renvoyer au Comité...
    Allez‑y, madame Collins.
    J'essayais simplement d'attirer votre attention pour que je sois inscrite sur la liste des intervenants.
    Vous l'êtes.
    Vous pouvez poursuivre. Je suis désolé de vous interrompre.
    C'est le dilemme dans lequel je me trouve, surtout en ma qualité de député qui essaie de comprendre ce que fait le gouvernement. Il ne cesse de nous dire qu'il réduit les émissions et qu'il suffit de payer la taxe et que tout ira pour le mieux. C'est très frustrant, non seulement pour moi qui représente une région rurale et qui paie une part disproportionnée de la taxe sur le carbone, mais aussi pour tous les Canadiens.
    La grande question dont j'ai entendu parler au cours des deux dernières semaines, c'est l'abordabilité, et « Que faisons-nous avec cette taxe sur le carbone? » Les gens n'arrivaient pas à croire que cette taxe augmentait. La taxe sur le carbone a augmenté de 23 % le 1er avril. Tout le monde le savait, mais le gouvernement a continué. Pour ajouter l'insulte à l'injure, les gens paient, en fait... Une facture réelle de gaz naturel — j'ai utilisé cet exemple plus tôt aujourd'hui — de 100 $ correspond à une taxe sur le carbone d'environ 110 à 115 $.
    Le fait est que le gouvernement n'a pas du tout répondu à la question dans le cadre de ce régime, et je crois honnêtement que nous devons aller au fond des choses et obtenir des réponses à ces questions. Voyons ce que nous pouvons faire avec ce modèle, parce que ce n'est pas vraiment la prérogative du ministère de dire: « Non, nous devons renverser la vapeur et nous n'allons pas vous répondre, mesdames et messieurs. » Ce n'est pas la prérogative du ministère. Il doit rendre des comptes, et quelqu'un dit en fait que c'est correct.
    J'aimerais savoir qui, d'ECCC ou du ministère du ministre, a dit « Oui, donnons-leur ceci » et a écrit « Oh, ce n'est pas d'ECCC. Voyons s'ils le lisent vraiment. » Voici ce que c'est:
Veuillez noter qu'il s'agit d'une ébauche. Tous les commentaires sont les bienvenus.
    Je peux vous dire qu'ils vont découvrir le genre de commentaires qu'ils vont recevoir.

  (1800)  

     D'accord. Puis‑je passer à M. van Koeverden?
    On peut y lire:
Les opinions exprimées dans le présent document sont celles des auteurs et ne reflètent pas celles d'Environnement et Changement climatique Canada ou du gouvernement du Canada.
    Voici donc:
Le Comité ordonne la production du « Modèle d'équilibre général calculable provincial territorial d'Environnement et Changement climatique Canada... [ECCC]
    Vous savez, nous avons examiné les sous-alinéas (ii) et (iii) et tout cela, tous ces paramètres. Je poursuis:
Et attendu qu'Environnement et Changement climatique Canada n'a pas fourni toutes les informations demandées par le Comité dans les délais convenus.
     C'est quoi, la deuxième ou la troisième fois que nous le demandons, et ensuite ils nous envoient cela? C'est totalement inacceptable. Je pense que plus les gens découvrent... Que cachent-ils? Qu'est‑ce que le gouvernement cache? C'est ce que les gens ne cessent de demander. Je ne cesse de poser cette question, et je sais que tous mes collègues la posent.
     C'est scandaleux. Je crois sincèrement que nous devons en débattre. Nous devons aller au fond des choses. Il suffit de produire le modèle et de répondre aux questions. C'est tout ce qu'ils ont à faire. Je n'arrive absolument pas à comprendre pourquoi ils refusent de le faire. Je me demande pourquoi. Je me demande vraiment pourquoi.
     Vous vous demandez pourquoi nous demandons au premier ministre de réunir tous les premiers ministres provinciaux. Vous savez...
     J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je suis un peu curieux, car vous avez mentionné que nous pourrions manquer de ressources; pouvons-nous nous inscrire sur la liste des intervenants compte tenu des ressources disponibles aujourd'hui?
    Vous pouvez. Il y a quatre personnes avant vous, monsieur Leslie.
    Avions-nous l'intention de prolonger la séance?
    Nous devons en principe avoir fini à 18 h 15. Nous pourrions peut-être demander combien de temps il serait possible d'ajouter.
    Nous pourrions simplement suspendre la séance et vérifier si nous avons le temps.
    Jusqu'à quelle heure pouvons-nous poursuivre avec les ressources disponibles?
     Voulez-vous vous inscrire sur la liste?
    Oui. Merci, monsieur le président.

[Français]

     Avez-vous pris en note mon nom, monsieur le président?
    Oui, madame Pauzé.
    Monsieur Deltell, vous avez la parole.
    J'aimerais que vous ajoutiez mon nom sur la liste.
    D'accord.

[Traduction]

    Monsieur Mazier, parlez-vous toujours de la même chose?
    Oui. Je parlais donc plus tôt de l'ampleur du changement fondamental provoqué par la taxe sur le carbone.
     En 2016, j'étais essentiellement un dirigeant agricole à l'époque. J'ai été président des Keystone Agriculture Producers. En fait, j'étais là lorsque la ministre McKenna a institué la taxe sur le carbone.
     Nous avions la promesse que cela n'aurait aucune incidence sur les recettes et que nous ne dépasserions pas 50 $ la tonne. Je dois admettre que les agriculteurs étaient méfiants, mais nous essayions de leur donner une chance et de voir ce que donnerait cette nouvelle idée.
    Huit ans plus tard, la taxe a essentiellement triplé si l'on tient compte de l'augmentation du coût pour les agriculteurs en général. Nous en sommes à 65 $ la tonne et cela commence vraiment à plomber l'économie rurale. Elle a fondamentalement changé le modèle économique de l'agriculture. Honnêtement, je ne pense pas que la population comprend à quoi sert cette taxe.
     Nous parlions aujourd'hui de la mise en place de l'infrastructure pour l'eau. C'est toute une question de gestion du paysage. Il faut protéger les ressources au Canada, et nous ne pouvons pas le faire avec cette taxe sur le carbone qui nous afflige dans les régions rurales du pays.
    Sur ce, je termine. Merci.

  (1805)  

    Monsieur van Koeverden, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je rappelle simplement à tous ceux qui nous regardent que le Parti conservateur a fait campagne en 2021 en promettant de tarifer la pollution au prix d'aujourd'hui. Un organisme appelé Clean Prosperity a déclaré, dans un sondage effectué à la sortie des bureaux de scrutin, qu'Erin O'Toole « avait raison d'adopter la tarification du carbone ». Il a dit:
Dans le cadre de sa politique climatique, le chef conservateur Erin O'Toole [...] a proposé un système de tarification du carbone qui propulserait le coût de l'essence et du chauffage domestique. Cependant, toutes les contributions en taxe sur le carbone seraient déposées dans un compte d'épargne pour la réduction du carbone.
    « Plus vous polluez, plus vous gagnez », disait‑il. C'était une sorte de programme de fidélisation à l'utilisation des combustibles fossiles.
    Maintenant, dans un autre univers hypothétique, si les conservateurs avaient remporté les dernières élections fédérales, alors aujourd'hui, en 2024, la pollution aurait un prix. Si Erin O'Toole était premier ministre, il y aurait encore une taxe sur le carbone.
     Nous avons fait campagne en promettant de tarifer le carbone et la pollution au rythme d'aujourd'hui, ce qui représente l'intégrité de notre plateforme et le respect de notre engagement envers les Canadiens à réduire nos émissions.
    Maintenant, les conservateurs semblent s'être ravisés. Ils ne sont pas d'accord.
    M. Branden Leslie: J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    M. Adam van Koeverden: Je signale que M. Leslie n'a pas parlé de cela pendant sa campagne, qui a pris une autre tournure, si c'est ce qu'il veut dire.
     Je peux vous expliquer, merci beaucoup...
    Le président: Un peu de silence, s'il vous plaît.
    Un député: J'aimerais entendre la question dans ce brouhaha...
    M. Branden Leslie: À la motion dont nous sommes saisis, monsieur le président...
    Des députés: Oh, oh!
    M. Adam van Koeverden: Il a mené une campagne sur l'homophobie, pas sur la tarification du carbone...
    Le président: Silence.
    Excusez-moi, tout le monde.
     La discussion a été très vaste. M. Mazier a parlé du secteur agricole. Il s'est aventuré dans une discussion plus vaste sur la tarification du carbone et ses répercussions. Nous pourrions peut-être garder le cap.
    Je ne déclarerai pas que l'intervention de M. van Koeverden est irrecevable ou quoi que ce soit, mais essayons de nous en tenir au sujet de la production des documents que réclame M. Mazier.
    Le fait est que le comité de l'environnement passe tellement de temps à parler de la tarification du carbone, qui faisait l'objet d'un engagement dans nos deux dernières campagnes fédérales. C'est un engagement que nous avons tous les deux mis de l'avant pendant la campagne électorale.
    J'admets que M. Leslie a mené sa propre campagne — vous n'avez pas fait la même campagne, parce que votre chef était Pierre Poilievre —, mais plus tôt aujourd'hui, un député, Ted Falk, a dit que les océans produisaient plus de carbone que les humains. Il y a quelques semaines, un député conservateur a dit que la chaleur corporelle était la cause du réchauffement de la planète. Nous n'avons pas affaire à des gens qui s'appuient sur des faits, des preuves ou des recherches.
    Lorsque nous fournissons les documents qu'on réclame, il n'est pas surprenant que les conservateurs n'aiment pas les calculs ou les témoignages. Leur politique actuelle repose sur le déni des changements climatiques. Ce n'est pas qu'ils ne sont pas d'accord sur la réalité du changement climatique; ils ont décidé qu'ils n'aiment plus les réponses qu'ils ont obtenues...
    J'invoque le Règlement.
    Allez‑y, monsieur Mazier.
    Pouvons-nous garder la discussion pertinente? Je parle d'une motion pour la production d'un modèle. Je ne vois pas ce que cela a à voir avec quelque déni que ce soit.
    Merci.
    Pourriez-vous conclure, monsieur van Koeverden, et m'aider à comprendre?
    Je vais conclure.
    Je soupçonne que les conservateurs mènent une campagne de camouflage parce que, le même jour, le 1er avril, la première ministre Danielle Smith a augmenté le prix de l'essence en Alberta de plus que la tarification du carbone. Cela a fait paniquer la Fédération canadienne des contribuables. Là encore, c'est la base conservatrice, qui n'aime pas cela. Mais le problème avec la légère hausse du prix du carbone, c'est que les remises sur le carbone du Canada augmentent aussi. Les Canadiens continuent de recevoir plus d'argent que ce qu'ils paient à la pompe grâce à la tarification de la pollution sous forme de remise sur le carbone. Ce n'est pas la même chose que l'augmentation de 4 ¢ du prix de l'essence en Alberta.
    Ces quatre députés ne sont pas de l'Alberta, et ils ne se soucient peut-être pas autant d'une augmentation non remboursable supérieure à l'augmentation que vous venez d'exagérer, dont vous avez parlé ad nauseam, et que vous avez appelée une augmentation de 23 %. Le prix de l'essence a donc augmenté d'autant en Alberta, et vous n'en avez pas parlé une seule fois. Si le prix de l'essence est une si grande préoccupation pour nos électeurs, pourquoi ne pas dire qu'il a aussi été augmenté par la première ministre Danielle Smith? Vous n'en avez pas dit un mot.
    Monsieur le président, ce serait formidable si nous discutions en comité de notre façon de lutter contre le changement climatique — sans rejeter les faits et les preuves de centaines d'universitaires, de chercheurs et d'économistes canadiens qui se consacrent à la question; sans remettre en question le prix Nobel d'économie de William Nordhaus, qui a prouvé que la tarification du carbone réduit les émissions; et sans rejeter le fait que nos émissions ont baissé de plus de 8 % depuis huit ans, un recul directement attribuable, pour une bonne part, à la tarification de la pollution.

  (1810)  

    Des preuves! Des preuves!
    Nous passons maintenant à M. Longfield.
    Merci, monsieur le président.
    Pour ce qui est de la motion de privilège, je crois avoir vu entrer dans mon courriel hier matin, vers 10 h 41, des documents qui montraient des formules et des choses qu'on demandait pour illustrer comment les prévisions sont faites. Le document provenait d'une organisation différente, ce qui m'a un peu surpris, mais ensuite, compte tenu du temps que le ministère a eu pour préparer ce document et le faire traduire et essayer de le faire parvenir à notre comité avant notre réunion, je me suis contenté des formules et du processus suivi.
    Pour ce qui est d'une motion de privilège, je pense que l'information est arrivée avant la réunion, comme on l'avait demandé. L'information était peut-être incomplète pour certains députés. J'étais satisfait de ce que je voyais, alors je n'ai pas eu l'impression qu'on portait atteinte à mes privilèges. L'information que j'ai vue était suffisante. Nous en voudrons peut-être plus et, bien sûr, le Comité pourra en demander davantage si certains ne l'aiment pas, mais pas parce qu'il y a eu atteinte à leurs privilèges. Nous avons eu l'information demandée dans le peu de temps qu'on a consacré à sa traduction et à sa distribution.
    Nous avons de l'information. Nous pourrions peut-être en demander davantage, sans pour autant invoquer la question de privilège. Il ne faudrait pas dramatiser. Je ne suis pas en faveur d'une motion de privilège, mais j'aimerais qu'on me donne plus d'information.
    Merci.

[Français]

     Merci, monsieur Longfield.
    Madame Collins, vous avez la parole.

[Traduction]

     Pour moi, il est important que nous ayons cette discussion. Lorsque j'ai reçu les documents, je me suis vraiment demandé si les fonctionnaires ou le gouvernement avaient intentionnellement mal compris notre demande. Nous voulons les données qui montrent comment le gouvernement en est arrivé à la conclusion où il en est venu au sujet d'environ un tiers des émissions du Canada.
    Surtout dans le cas de la tarification du carbone dans le secteur industriel, il s'agit d'une politique cruciale. Je voudrais une politique climatique robuste. Notre comité est en droit d'avoir les données dont se sert le gouvernement.
    Dans un esprit de collaboration, et pour rassembler tout le monde autour de cette table, j'ai une motion pour que le Comité ordonne la production du modèle et des données d'Environnement et Changement climatique Canada qui démontrent que la tarification de la pollution par le carbone contribuera jusqu'à un tiers de la réduction des émissions du Canada, et pour que ces documents soient remis au Comité dans les deux semaines suivant l'adoption de la motion.
    Je ne sais pas trop si je peux la proposer tout de suite, mais j'espère que nous pourrons en débattre. Je proposerai cette motion par après, afin que nous puissions obtenir l'information dont nous avons besoin et que les membres du Comité sont en droit d'obtenir.
    C'est à juste titre que les conservateurs se plaignent aujourd'hui. Je ne sais pas s'il faut en faire une question de privilège, mais je serais peut-être en faveur de la question de privilège si le gouvernement refusait, une fois de plus, de nous donner l'information dont nous avons besoin.

[Français]

    Madame Collins, je vous remercie de nous aviser que, une fois cette discussion terminée, vous avez l'intention de déposer une motion supplémentaire.
    Madame Pauzé, vous avez la parole.
    Monsieur le président, ne vous sentez pas personnellement attaqué du fait que nous avons voté contre votre décision, mais je tenais beaucoup à ce que nous ayons ce débat.
    Ce que M. Longfield disait tantôt me convient tout à fait, et la motion de Mme Collins revient un peu à ce que j'avais proposé à M. Deltell tantôt pendant la pause, à savoir que, s'il manque des données, demandons-les, et fixons une date d'échéance. Il s'agit d'information importante dans les débats, les discussions et les réflexions que nous devons avoir sur ce qu'est une crise climatique et une urgence climatique.
    Ça me convient donc tout à fait. Cependant, un peu comme M. Longfield, je n'irais pas jusqu'à dire que mon privilège parlementaire a été bafoué. Toutefois, il s'agirait d'avoir plus d'information et une autre date d'échéance.

  (1815)  

[Traduction]

    Monsieur Leslie, allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie mon estimé collègue d'en face d'avoir souligné que je n'ai pas fait campagne sur la taxe sur le carbone et que je ne le ferais jamais.
    L'une des choses qui me viennent à l'esprit, c'est l'une des premières promesses du premier ministre selon laquelle, en 2015, son gouvernement serait ouvert par défaut. C'était de nature à rallier tout le monde. Cela semble être un excellent exemple d'une occasion d'être ouvert par défaut, soit demander de l'information sur le modèle économique et environnemental des émissions dont la taxe sur le carbone pourrait entraîner une réduction pour les consommateurs.
    Nous avons constaté des retards, qui sont justifiés, parce que ce sont là des questions complexes à traiter, mais comment peut‑on imaginer qu'on nous remette un document qui dit que c'est fait par Environnement et Changement climatique Canada, mais que cela ne reflète pas ECCC, en nous disant simplement que c'est cela le modèle?
    Vous me dites qu'ECCC n'a pas de meilleures données que celles de quatre personnes. Ce ne sont même pas des médecins. Ce sont des gens ordinaires. J'ignore même qui ils sont. Ils ont produit ce document, qu'ils ont peut-être produit à la hâte au cours des deux dernières semaines. Il serait soit très inquiétant, soit extrêmement surprenant, que l'on n'ait pas fait le travail nécessaire au cours des huit dernières années pour élaborer et mettre en place cette taxe sur le carbone.
    Ce n'est pas ouvert par défaut et, comme ma collègue, Mme Collins, y a fait allusion, c'est peut-être une tentative de dissimulation. C'est pourquoi nous demandons continuellement plus d'argent. La motion qui a été présentée est peut-être presque trop spécifique, mais après avoir entendu la motion de mon collègue, je serai heureux d'appuyer celle de Mme Collins, parce qu'elle est l'occasion de voir si le gouvernement essaie vraiment de se cacher derrière cela en envoyant une invitation très claire et très ouverte à partager à la fois les données et le modèle.
    Je vais appuyer la motion de ma collègue, mais il y a clairement quelque chose ici. Je m'attends à plus de la part d'ECCC. Je m'attends à plus de la part d'un gouvernement qui se prétend ouvert par défaut, de même que de tous les parlementaires de toutes les allégeances politiques.

[Français]

     Merci, monsieur Leslie.
    Monsieur Deltell, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Pour les gens qui suivent nos travaux, je rappelle que le débat actuel ne vise pas à déterminer si la taxe sur le carbone est bonne ou non, mais plutôt à avoir accès à toute l'information sur les mesures d'évaluation de celle-ci. De ce côté-ci de la Chambre, il y a des gens qui ont des points de vue complètement différents sur la taxe sur le carbone, mais qui ont tous la volonté d'avoir les informations les plus neutres et les plus objectives possibles.
     J'ai beaucoup d'estime pour ma collègue du Bloc québécois, même si nous ne partageons généralement pas du tout les mêmes idées. C'est ce qui s'appelle la démocratie, et soyons heureux de vivre dans un pays où la démocratie est célébrée tous les jours, comme elle l'est à la Chambre. Cela démontre qu'il faut aller au fond des choses. Il en va de même pour ma collègue du NPD. Je laisserai parler mes collègues du Canada anglais, où on sait que le NPD est un peu plus représenté, en tout respect pour mon collègue de Rosemont—La Petite‑Patrie.
    La raison du débat actuel est que nous voulons savoir si le gouvernement a déposé, comme le Comité l'a demandé, les documents pertinents qui étaient exigés. Le moins qu'on puisse dire, c'est que la motion du Comité était claire: nous voulions avoir les informations provenant directement d'Environnement et Changement climatique Canada, le ministère visé.
     Or, que retrouve-t-on dans le document qui nous a été remis? Permettez-moi de le citer en anglais:

[Traduction]

     « Veuillez noter que ceci est un travail en cours. »

[Français]

    C'est donc un document qui est en train d'être rédigé, un brouillon. C'est déjà un peu troublant, mais la phrase suivante l'est encore plus:

[Traduction]

    « Tout commentaire sera apprécié. » Bien oui, tiens.

[Français]

    Comme l'a si bien dit mon collègue M. Mazier tout à l'heure, nous aurons très certainement des choses à dire là-dessus, et ce, avant que tous les Canadiens aient la chance de se prononcer sur la pertinence d'une taxe sur le carbone. En effet, il ne fait aucun doute que la prochaine élection fédérale va porter sur cette question, et les Canadiens auront l'occasion de trancher.
    Maintenant, écoutez bien ce qui est écrit dans le document déposé par le gouvernement et que celui-ci présente comme réponse à toutes les questions:

[Traduction]

    « Les opinions exprimées dans le présent document sont celles des auteurs et ne reflètent pas celles d'Environnement et Changement climatique Canada ou du gouvernement du Canada. »

[Français]

    Il est là le problème. C'est tout simple, comme le disait ma collègue de Repentigny, qui est toujours très polie. Ce n'était en effet rien de personnel quand nous mis en doute votre jugement et l'avons contesté, monsieur le président. Ce que nous avions demandé, avec le concours des autres partis de l'opposition, était très clair: nous voulions des informations justes, objectives, chiffrées et calibrées. Après quoi, les politiciens feraient leur travail, puisque je ne suis pas du genre à vouloir mépriser la position adverse. Cela fait partie du débat public et c'est le cœur même de la démocratie.

  (1820)  

[Traduction]

    Nous sommes députés. Nous représentons notre monde, et nous sommes importants parce qu'ici, autour de cette table, il y a quatre partis différents. C'est cela la démocratie. Oui, nous nous battrons pour nos idées, nous nous battrons pour ou contre, mais nous nous y attaquerons et nous contesterons le point de vue de l'opposition. Eh bien, c'est cela, la démocratie, la Chambre des communes et notre comité. Nous reconnaissons tous que le changement climatique est réel et que nous devons nous y attaquer. Il y a de bonnes et de mauvaises façons d'aborder le problème, et c'est la population qui décidera aux prochaines élections.
    C'est pourquoi, monsieur le président, pour avoir un débat clair, un débat honnête et savoir exactement où on veut aller, il faut avoir toutes les données. Qui peut fournir ces données? Beaucoup de gens peuvent le faire. C'est pourquoi, monsieur le président, notre motion s'adresse directement au gouvernement.
    Soit dit en passant, nous ne sommes pas le gouvernement. Ce n'est pas un gouvernement conservateur, c'est le gouvernement du Canada. Techniquement parlant, il n'y a pas de parti dans notre gouvernement, le gouvernement n'a pas de couleur.
     C'est le gouvernement de ce pays, de tous les Canadiens. C'est pourquoi c'est à lui que nous demandons de nous fournir les données.

[Français]

     Donnez-nous toutes les informations nécessaires pour qu'on puisse avoir un débat éclairé sur la situation.
    J'ai beaucoup de respect et d'estime pour mon collègue le ministre de l'Environnement et du Changement climatique, qui est député de Laurier—Ste‑Marie. C'est un coin que madame Pauzé connaît bien, mais j'avoue que je suis un peu mêlé. Je sais que toutes les couleurs du spectre politique y sont: il y a du Bloc québécois, du Parti libéral et du NPD, tout le monde est là. Peut-être qu'un jour, il y aura aussi du Parti conservateur, nous le souhaitons, mais c'est la population qui va décider.
    Je disais donc que j'ai beaucoup d'estime et de respect pour mon collègue. Je le connais depuis des années, ayant été journaliste en d'autres temps. Quand je l'ai interviewé, j'ai toujours apprécié sa franchise et ses arguments. Même si je n'étais pas toujours d'accord avec lui, il était là.
    Combien de fois a‑t‑il dit à la Chambre, ici à ce comité, et partout en entrevue dans sa vie publique politique que la taxe sur le carbone était effectivement efficace et qu'il avait toutes les données nécessaires démontrant qu'elle nous permettait de diminuer les émissions de gaz à effet de serre? C'est un point de vue que je ne partage pas, mais notre motion lui donnait la chance de l'expliquer et de le prouver avec des documents du gouvernement qui nous démontreraient, hors de tout doute raisonnable et chiffre à l'appui, que nous sommes capables d'établir cette équation.
    Malheureusement, ce n'est pas ce qui s'est passé. C'est la raison pour laquelle nous sommes tout à fait déçus de voir que la vérité ne peut pas éclater au grand jour.

[Traduction]

    Nous avons besoin de la vérité, et le seul groupe qui peut nous la donner est — et je le dis avec des gants blancs — le gouvernement du Canada. C'est le ministère de l'Environnement et du Changement climatique qui peut nous la donner.

[Français]

    Ce qu'on voit malheureusement à l'heure actuelle, c'est que la demande avait été formulée de façon très claire et précise, indiquant qu'il nous fallait avoir ces éléments. Or, de façon très claire et précise, noir sur blanc, le ministère reconnaît dans le document qui a été déposé que ce dernier n'est finalement qu'une ébauche en progression, qu'il va changer en cours de route, que tous les commentaires possibles sont les bienvenus, — ce qui est bien —, mais que les points de vue exprimés dans ce document sont ceux des auteurs et ne reflètent pas du tout la position du ministère de l'Environnement et du Changement climatique du Canada ni celle du gouvernement du Canada.
    C'est donc exactement le contraire de ce que nous avions demandé. Il est certain que, si on examine plus à fond le document, on peut voir à la page 3 une formule mathématique assez impressionnante, que je ne vais pas lire. J'aurai quand même bientôt 60 ans et ça fait longtemps que je n'ai pas fait de chimie et de physique. Cela dit, on trouve dans ce document toutes sortes de formules intéressantes. C'est bien, d'accord, mais est‑ce bien la position du gouvernement? Est-ce ce que nous avions demandé, nous qui demandions que le Canada fasse connaître sa position, comment il s'y prend et quel est l'impact réel? La réponse est non, puisque ce document ne représente pas le point de vue du gouvernement du Canada, comme c'est écrit noir sur blanc dedans.
    En tant que parlementaire, je suis donc surpris de voir devant cette évidence des collègues qui trouvent ça correct ainsi. À mon avis, ce n'est pas correct. La proposition du NPD va un peu plus loin, précise davantage, veut chiffrer davantage, et veut donner des dates et des échéanciers. Je comprends que cette position est partagée par ma collègue du Bloc québécois, et nous y sommes ouverts, bien entendu. Il n'y a que la vérité qui va gagner avec notre motion. Il n'y aura que les faits qui vont être connus par notre motion. Il n'y aura que le fond des choses qui va être atteint. Par la suite, chacun pourra faire connaître son point de vue avec des arguments basés sur la science et sur des faits neutres et objectifs auxquels tout le monde aura eu accès.
    On a souvent vu dans des débats des gens qui disent être d'accord sur tel point de vue et qui citent telle personne ou telle étude. C'est bien. D'autres personnes ont une opinion contraire, basée sur telle étude ou telle analyse. C'est bien aussi. Les deux positions s'équilibrent et chacune se défend très bien. Cependant, pour avoir une discussion objective, on doit avoir un tronc commun, une seule information, précise, et égale pour tout le monde.

  (1825)  

    La meilleure façon, à notre point de vue, c'est au gouvernement canadien de la fournir. Nous l'avons demandée, nous l'avons réclamée, mais nous ne l'avons pas eue. Pire encore, le document qui nous a été transmis prévient noir sur blanc qu'il n'est pas complet et qu'on n'y parle pas au nom du gouvernement du Canada. Notre demande, en tant que parlementaires, était d'avoir accès à des documents. Notre motion avait d'ailleurs été appuyée par la majorité des membres du Comité. Par contre, puisque nous n'avons pas eu accès à ces documents, il est manifeste pour nous qu'il s'agit d'une atteinte à notre privilège.

[Traduction]

     J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Ma question est égoïste parce que je dois partir à 18 h 30 et que je suis curieux: allons-nous dépasser 18 h 30? Avons-nous les ressources voulues?
    Nous avons les ressources pour encore quatre heures.
    Je vais peut-être intervenir pour clarifier les choses.
    Pourriez-vous relire votre motion, monsieur Mazier?
    Voici:
Attendu que le Comité a adopté une motion, le jeudi 21 mars 2024, qui disait notamment:
Le Comité ordonne la production du « modèle d'équilibre général calculable provincial territorial d'Environnement et Changement climatique Canada [EC‑PRO] », y compris (i) « [l]a technique statistique permettant d'isoler la contribution du prix du carbone », (ii) une liste de tous les paramètres « Ref », dont les paramètres « Ref22 » et « Ref22A » utilisés dans EC‑Pro, (iii) le modèle EC‑Pro qui a prédit que « la tarification du carbone représentera jusqu'à un tiers des réductions des émissions du Canada », y compris l'ensemble (i) des paramètres, (ii) du modèle économique et (iii) des hypothèses; et que ces documents soient fournis au Comité dans la semaine suivant l'adoption de la présente motion.
Attendu qu'Environnement et Changement climatique Canada n'a pas fourni tous les renseignements demandés par le Comité dans le délai adopté.
Par conséquent, le Comité considère que ce non-respect de l'ordre du Comité constitue une violation de ses privilèges et ordonne que l'affaire soit renvoyée à la Chambre.
    C'est le choix qui s'offre à nous. Ou bien le comité appuie la motion de M. Mazier — j'ai l'impression que nous n'aurons pas le temps de la mettre aux voix dans les quatre heures, alors il y a cela — ou bien il y a un vote et le Comité n'appuie pas M. Mazier. Si j'ai bien compris, Mme Collins a l'intention de revenir avec une motion demandant plus d'information du genre de celle que M. Mazier et son parti souhaiteraient voir.
    C'est le choix qui s'offre à nous. Ou bien nous tenons une séance de quatre heures — auquel cas nous pouvons commander à manger — ou bien nous ne renvoyons pas l'affaire à la Chambre. Nous pourrions revenir, Mme Collins pourrait donner avis de sa motion et nous pourrions discuter de sa motion à la prochaine réunion. Tels sont nos choix.
    Pour l'instant, tout ce que je peux faire, c'est continuer jusqu'à ce que quelqu'un demande le vote pour ajourner le débat. Quelqu'un pourrait demander l'ajournement du débat sur cette question. Alors, il faudrait voter, ou nous pourrons continuer à parler.
    Nous allons maintenant entendre Mme Taylor Roy et Mme Chatel.
    Madame Taylor Roy, vous avez la parole.

  (1830)  

    Merci, monsieur le président.
    Je me demande, étant donné que nous avons reçu l'information demandée hier à 10 h 41... Nous avons reçu 21 pages d'information. Il me semble que tout ce que M. Mazier a demandé s'y trouvait.
    Pourquoi alors poursuivre avec cette conversation et cette motion?
    M. Mazier ne croit pas que le gouvernement a respecté sa motion initiale. Il ne croit pas que le gouvernement a répondu à sa demande. Il en fait donc une question de privilège. Il veut que le Comité convienne que tel est le cas et renvoie l'affaire à la Chambre.
    Tout le débat que nous avons entendu de M. Deltell et d'autres... Il ne s'agit pas d'obtenir l'information, puisque nous l'avons maintenant. C'est simplement que M. Mazier ne se sentait pas respecté.
    Oui, c'est une tentative de censure du gouvernement qui n'a pas fourni toute l'information demandée.
     Vous voulez dire assez rapidement.
    Eh bien, oui, cela aussi, mais cela va au‑delà d'« assez rapidement » pour ce qui est de la substance de ce qui a été fourni, qui a été jugé insuffisant.
    Donc, au‑delà des 21 pages que nous avons reçues hier matin à 10 h 41, avec trois ou quatre pièces jointes du ministère, qu'est‑ce qui manque encore? Qu'est‑ce que M. Mazier veut encore voir qui n'est pas là?
    Il soutient que cela ne montre pas comment le gouvernement en est arrivé à la conclusion que la tarification du carbone réduira les émissions du tiers d'ici 2030, je crois. M. Mazier n'est pas satisfait de l'information.
    Il pourrait peut-être préciser et communiquer au Comité ce qui manque en particulier à ces...
    Il l'a fait. Il l'a déjà fait.
    Nous allons maintenant passer à M. Kram, puis à Mme Chatel.
    Je devrais vous retirer de la liste? D'accord.
    Monsieur Kram, allez‑y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'espère au moins que nous conviendrons tous qu'il est de routine pour les comités parlementaires de demander des documents à la fonction publique. C'est fondamental dans notre démocratie, afin que nous puissions voir comment les opérations gouvernementales progressent et comment les parlementaires peuvent prendre de meilleures décisions à la lumière de ces données, de cette information et de ces documents.
    Je pense qu'il est parfaitement raisonnable et pertinent que notre comité ait demandé de l'information sur les modèles que le gouvernement utilise depuis plusieurs années, sur lesquels il prend des décisions concernant ces augmentations continuelles de la taxe sur le carbone, et sur l'effet qu'il prétend que cela devrait avoir sur la réduction des émissions.
    Cela a été au cœur du débat que nous avons au Canada depuis plusieurs années. Je pense que nous pouvons tous convenir, après avoir lu ce que nous avons reçu du gouvernement, que cette réponse est tout à fait insatisfaisante et inadéquate. Cela me rappelle comment, dans Le magicien d'Oz, ils sont finalement arrivés à la cité d'Émeraude et ont retiré un rideau et, tout d'un coup, le magicien a dit: « Ne faites pas attention à cet homme derrière le miroir. Il n'y a rien à voir ici. Faites ce que vous devez faire. » C'est ce à quoi je pensais lorsque j'ai reçu cette réponse d'Environnement et Changement climatique Canada.
    Il y a le gros filigrane « Ébauche » sur la première page et on peut lire à la page 1: « Veuillez noter que ceci est un travail en cours. Tout commentaire serait apprécié. Les opinions exprimées dans le présent document sont celles des auteurs et ne reflètent pas celles d'Environnement et Changement climatique Canada ou du gouvernement du Canada. »
    On ne peut s'empêcher de se demander, si cela ne reflète pas les opinions du gouvernement du Canada, sur quoi le gouvernement fonde ses décisions depuis des années. C'est ce que M. Mazier a demandé avant le congé de Pâques. Nous n'avons pas encore reçu le modèle complet. Du moins, c'est ce que j'espère. Si c'est tout ce qu'ils ont utilisé ces dernières années, c'est tout à fait insuffisant.
    Par conséquent, il est parfaitement légitime que M. Mazier continue de réclamer ces documents, et il est fondamental pour notre démocratie que nous recevions ce sur quoi reposent ces décisions. Moins que cela, c'est totalement inacceptable, monsieur le président.

  (1835)  

    Y a‑t‑il quelqu'un d'autre? Avons-nous épuisé la liste des intervenants?
     Je suppose que nous pouvons mettre aux voix la motion de M. Mazier.
     (La motion est rejetée par 6 voix contre 4.)
    Pouvons-nous faire une courte pause de deux minutes?
    Oui.

  (1835)  


  (1840)  

     D'accord.
    Quelqu'un d'autre veut‑il prendre la parole?
    Monsieur Longfield.
    Bien sûr.
    [Inaudible]...
    Où en sommes-nous maintenant?
    Une voix: Allez‑y, madame Collins [Inaudible].
    Le président: Oui. Je suis désolé.
    À vous, madame Collins.
    Une voix: Un simple avis de motion.
    Le président: D'accord. Nous avons voté et nous sommes de retour.
    Madame Collins, vous êtes sur la liste.
    J'ai une motion à proposer.
    D'accord.
    Nous avons besoin du consentement unanime parce que je ne pense pas que vous ayez donné...
    Je pense que nous avons le consentement unanime.
    Y a‑t‑il consentement unanime pour entendre la motion de Mme Collins?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Apparemment, oui.
    Allez‑y.
    Voici:
Que le Comité ordonne la production du modèle et des données d'Environnement et Changement climatique Canada qui démontrent que « la tarification de la pollution par le carbone représentera jusqu'à un tiers des réductions des émissions du Canada », y compris l'ensemble (i) des paramètres, (ii) des hypothèses, (iii) des variables, (iv) des modèles économiques, et (v) des modèles de réduction des émissions et que ces documents soient fournis au Comité dans les deux semaines suivant l'adoption de la motion.
    Est‑ce que tout le monde est d'accord sur cette motion? Est‑ce que nous l'adoptons avec dissidence, ou dois‑je supposer que nous avons le consentement unanime?
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Nous avons le consentement unanime.
    Félicitations. Votre motion est adoptée.
    Monsieur le président, je propose une motion pour lever la séance.
    Nous avons une motion d'ajournement. Est‑ce que tout le monde veut lever la séance?
    Des députés: D'accord.
    Le président: D'accord.
    La séance est levée.
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