Le débat n’est ni un
péché, ni une faute, ni une erreur, ni quelque chose dont il faut
s’accommoder au Parlement. Le débat est l’essence même
du Parlement.
Stanley Knowles, député (Winnipeg-Nord-Centre)
(Débats, 10 décembre 1968, p. 3763)
D
es événements parlementaires
ou des situations d’urgence amèneront parfois la Chambre à
laisser de côté ses délibérations normales pour
discuter de questions visées par des règles spéciales
regroupées dans un chapitre du Règlement consacré aux
« Débats spéciaux ». Ce chapitre traite entre autres du
débat sur l’Adresse en réponse au discours du Trône
(ou débat sur le discours du Trône), des débats
d’urgence, des débats visant à suspendre certains articles
du Règlement pour examiner des questions urgentes, et du débat de
prise en considération du Règlement. Ces débats et les
articles pertinents du Règlement feront ici l’objet d’un
examen.
Deux autres types de débats, que le
Règlement ne prévoit pas comme tels mais qui se déroulent
parfois selon des procédures spéciales, seront également
examinés. Le gouvernement a, à l’occasion, lancé des
débats sur diverses questions pour permettre aux députés
d’exprimer leurs points de vue avant de prendre une décision.
C’est le cas en particulier depuis le début de la 35e
législature en 1994. Outre ces débats exploratoires, la Chambre
tient parfois des débats prescrits par une disposition législative
qui demande un débat à la Chambre sur un décret, un
règlement, une déclaration, une instruction ou tout autre
instrument de décrets-lois.
Adresse en réponse au discours du Trône
Désignation d’une journée d’étude
La tradition veut que, au début
d’une session, lorsque la Chambre revient du Sénat après le
discours du Trône, une journée soit désignée pour
discuter du discours. Le premier ministre présente une motion pour la
tenue d’un tel débat plus tard dans la journée ou à
la séance suivante de la
Chambre [1] .
Aucun
préavis n’est requis et, bien qu’elle soit en
général proposée et adoptée sans débat, la
motion peut faire l’objet d’un débat et
d’amendements [2] .
Lancement du débat
Le jour précisé dans la
motion concernant l’étude du discours du Trône, un
député d’arrière-ban du parti ministériel
propose qu’une adresse soit envoyée au gouverneur
général (ou, selon la personne qui aura prononcé le
discours, au souverain ou à l’administrateur du gouvernement du
Canada) pour « prier respectueusement Votre Excellence d’agréer
nos humbles remerciements pour le gracieux discours qu’ Elle a
adressé… ». En plus de permettre un débat de portée
générale sur les politiques annoncées par le gouvernement
dans le discours du Trône, cela donne aux députés
l’occasion, rarissime, d’aborder tout sujet qui leur tient à
cœur.
De 1867 à 1893, la motion sur
l’Adresse en réponse au discours du Trône comportait
habituellement plusieurs paragraphes, lesquels étaient examinés
séparément. Pris globalement, ces paragraphes formaient une
résolution qui était adoptée et renvoyée à un
comité spécial. Celui-ci faisait ensuite rapport de
l’Adresse à la Chambre qui, après adoption, se chargeait de
la faire grossoyer (c’est-à-dire de la faire transcrire sur
parchemin) et de la présenter au gouverneur général. Cette
lourde procédure a été modifiée en 1893, lorsque la
Chambre a adopté comme pratique d’étudier elle-même
l’Adresse, qui prend la forme d’une présentation au
gouverneur
général [3] .
Ce n’est qu’en 1903 que la motion sur l’Adresse en
réponse a été ramenée à un court paragraphe
de remerciements pour le discours du
Trône [4] .
Après le discours du motionnaire, un
deuxième député d’arrière-ban du parti
ministériel (habituellement parlant la langue officielle qui n’est
pas celle du motionnaire) obtient la parole pour traiter de la motion et
l’appuyer. D’habitude, le motionnaire et l’appuyeur sont
choisis parmi les députés élus le plus
récemment [5] .
Leurs interventions n’ont pas été suivies, dans le
passé, par la période usuelle de questions et observations de 10
minutes et, lorsque l’appuyeur a terminé, le chef de
l’Opposition ajourne normalement le
débat [6] .
D’habitude, le premier ministre ou un autre ministre — le leader
parlementaire du gouvernement ou le président du Conseil privé le
plus souvent — propose ensuite l’ajournement de la
Chambre [7] .
Reprise du débat sur l’adresse
Le Règlement prévoit six
jours additionnels de débat sur la motion et sur tout amendement qui y
est proposé [8] .
Ces journées sont désignées par un ministre, habituellement
le leader parlementaire du gouvernement, et ne sont pas nécessairement
consécutives. Depuis 1955, le Règlement stipule que lorsque la
reprise du débat sur la motion concernant l’Adresse figure à
l’ordre du jour, ce point a priorité sur tous les autres travaux de
la Chambre, sauf les affaires courantes ordinaires, les déclarations de
députés et les questions
orales [9] .
Les affaires
émanant des députés sont suspendues ces
jours-là [10] .
Règles du débat sur l’adresse
Journée des chefs
Le premier jour de la reprise du
débat est appelé la « journée des chefs ». Selon la
tradition, le chef de l’Opposition parle le premier et propose un
amendement à la motion principale. En temps normal, le premier ministre
prend ensuite la parole, suivi du chef du deuxième parti
d’opposition en importance, qui peut proposer un amendement à
l’amendement. La parole est ensuite donnée à tour de
rôle aux autres chefs des partis qui sont reconnus officiellement à
la Chambre [11] ,
mais
les chefs de partis qui détiennent moins de 12 sièges
n’obtiennent pas automatiquement la
parole [12] .
Bien que ce soit l’ordre
traditionnel, aucune règle précise ne fixe l’ordre dans
lequel les chefs de parti prennent la parole lors du débat sur
l’Adresse. Au cours de ce débat en 1989, le chef du deuxième
parti d’opposition en importance a pris la parole après le chef de
l’Opposition, et le premier ministre a prononcé son discours le
lendemain [13] .
Lorsque, en 1991, le premier ministre ne s’est de nouveau pas levé
pour prendre la parole après le discours du chef de l’Opposition,
le leader parlementaire de l’opposition a porté plainte
auprès du Président. Celui-ci a décrété que,
à défaut de disposition en ce sens dans le Règlement, les
députés ne sont pas tenus de respecter un ordre
d’intervention
particulier [14] .
Le
lendemain, le premier ministre s’est adressé à la Chambre,
suivi immédiatement de la chef du deuxième parti
d’opposition en importance.
Durée du débat sur l’Adresse
Jusqu’en 1955, la durée du
débat sur l’Adresse en réponse n’était
limitée d’aucune façon; le débat a ainsi varié
d’un jour au nombre record de
28 [15] .
La Chambre
l’a alors limité pour la première fois en acceptant, selon
les recommandations d’un comité spécial sur la
procédure, de le restreindre à 10 jours et d’ajouter des
séances en matinée (qui ne faisaient pas alors partie des
séances normales) pour la durée du
débat [16] .
Cette durée a ensuite été ramenée à huit
jours en 1960 [17]
et
le Règlement a de nouveau été modifié en 1991 pour
le limiter à six
jours [18] .
À plusieurs reprises cependant la
Chambre s’est prononcée sur la motion sans que le débat ait
duré le nombre maximum de jours prévu par le
Règlement [19].
Il est aussi arrivé qu’une prorogation ou une dissolution vienne
interrompre le débat : en 1988, seuls le motionnaire et l’appuyeur
ont pris la parole avant que la session ne prenne fin par la prorogation
après seulement 11 séances, sans reprise du débat sur
l’Adresse; en 1997, lorsque la session a pris fin quand le Parlement fut
dissous pour des élections générales après 164
séances, la Chambre n’avait consacré que 5 des 6 jours
prévus au débat sur
l’Adresse [20].
Comme l’indique le Règlement,
toute journée inutilisée peut être ajoutée, si la
Chambre donne son aval, au nombre des jours désignés de la
période des subsides dont ils font partie, mais cette règle
n’a jamais été appliquée depuis son entrée en
vigueur en
1968 [21] .
Durée des interventions lors du débat sur l’Adresse
À l’exception du premier
ministre et du chef de l’Opposition (leur temps de parole est
illimité, mais leur intervention n’est pas suivie de questions et
d’observations), les députés peuvent parler pendant au plus
20 minutes, et une période de questions et d’observations de 10
minutes peut ensuite
s’engager [22] .
La Chambre a parfois donné l’occasion à d’autres chefs
de parti de parler pendant plus de 20 minutes sans période
subséquente de questions et
d’observations [23] .
Tout député peut intervenir dans ce débat, mais
l’ordre des intervenants suit l’ordre général de la
représentation des partis à la Chambre. Une tendance soit à
réduire la durée des interventions, y compris la période de
questions et d’observations, soit à supprimer complètement
celle-ci, s’est manifestée par moments au cours du débat
afin de permettre au plus grand nombre possible de députés
d’intervenir [24] .
Mise aux voix des amendements et conclusion du débat sur l’adresse
Aux premiers temps de la
Confédération, certains estimaient qu’on ne devrait pas
chercher à modifier la motion sur l’Adresse en réponse au
discours du
Trône [25] .
En
1873, les premiers amendements à la motion sur l’Adresse ont
été proposés lorsqu’on a formulé une motion de
blâme envers le gouvernement pour sa conduite dans le « scandale du
Pacifique ». Bien qu’un sous-amendement l’ait par la suite
transformée en vote de confiance à l’égard du
gouvernement [26] ,
le
Parlement a été prorogé à la suite d’un
changement de gouvernement avant que les amendements ne soient mis aux voix. Des
amendements ont de nouveau été proposés en 1893 et
1899 [27] .
Au cours des
40 années qui ont suivi, des amendements ont souvent été
proposés, mais pas de façon systématique. Ce n’est
qu’à partir de la Seconde Guerre mondiale que la pratique de
proposer des amendements à la motion sur l’Adresse s’est
enracinée.
Jusqu’en 1955, le Règlement ne
régissait aucunement la présentation des motions
d’amendement ou leur mise aux voix. Comme pour tout amendement
proposé à une motion, la question n’était mise aux
voix que lorsque plus un seul député ne se levait pour demander la
parole. Un nouvel article fixant la façon de disposer des propositions
d’amendement a alors été
adopté [28] .
Sans indiquer quand les amendements doivent
être présentés ou même s’il en faut, le
Règlement renferme des dispositions sur la mise aux voix de tous les
amendements proposés avant que la Chambre ne se prononce sur la motion
principale : le deuxième jour de la reprise du débat, la Chambre se
prononce sur tout sous-amendement dont elle est saisie; elle fait de même,
le quatrième jour du débat, pour tout amendement et
sous-amendement qui subsistent. La présentation d’amendements
pendant les deux derniers jours du débat est interdite.
Selon la pratique récente, le chef
de l’Opposition propose un amendement le premier jour de la reprise du
débat. En temps normal, un sous-amendement est ensuite proposé par
le chef du deuxième parti en importance. Il n’est cependant pas
rare qu’un autre député de ce parti s’en
charge [29] .
La Chambre doit se prononcer sur le premier
sous-amendement le deuxième jour désigné; le
Président interrompt alors le débat 15 minutes avant l’heure
habituelle d’ajournement pour le mettre aux
voix [30] .
Il est
permis de proposer d’autres sous-amendements le troisième ou le
quatrième jour. Le Président interrompt le débat 30 minutes
avant l’heure habituelle d’ajournement le quatrième jour pour
mettre aux voix tout amendement ou sous-amendement à
l’étude [31] .
Aucun autre amendement à la motion principale n’est autorisé
les cinquième et sixième
jours [32] .
À
moins que le débat ne soit déjà terminé, le
Président interrompt enfin les délibérations 15 minutes
avant l’heure habituelle d’ajournement le sixième jour pour
mettre aux voix toutes les questions nécessaires afin de pouvoir statuer
sur la motion
principale [33] .
Depuis
qu’à la suite des modifications de 1991 le Règlement limite
le débat sur le discours du Trône à six jours, la Chambre
s’est prononcée à trois reprises sur un sous-amendement le
deuxième jour et sur un sous-amendement et un amendement le
quatrième
jour [34] .
Étant donné la nature
générale de la motion, la règle de la pertinence ne
s’applique pas rigoureusement à l’amendement proposé
(contrairement aux sous-amendements). La jurisprudence indique toutefois
qu’un amendement doit ajouter un élémen distinct, tandis
qu’un sous-amendement doit, pour être pertinent, viser
l’amendement sans rien soulever de
nouveau [35] .
Un
sous-amendement qui aurait pour résultat, en y ajoutant des mots, de
faire de l’amendement une motion de défiance envers
l’Opposition officielle a été jugé irrecevable parce
que « les votes de confiance ne sont dirigés que vers le gouvernement
du jour [36] ».
Le
Président a jugé irrecevables des amendements qui ne lui
semblaient pas contester directement les politiques
gouvernementales [37]
ou qui visaient à augmenter les dépenses, ce qui exige une
recommandation
royale [38] .
Un
amendement semblable à un autre sur lequel la Chambre
s’était déjà prononcée au cours du
débat a également été
rejeté [39] .
L’Adresse en réponse au
discours du Trône a été modifiée par un amendement en
deux occasions seulement. Dans chaque cas, l’amendement d’un
député de l’opposition avait été
modifié par un sous-amendement proposé par un député
du parti
ministériel [40] .
Grossoiement de l’adresse
Immédiatement après
l’adoption de la motion sur l’Adresse en réponse au discours
du Trône, la Chambre adopte, sans débat ni amendement, une motion
priant les Présidents de la Chambre des communes et du Sénat, une
fois l’Adresse grossoyée (transcrite sur parchemin), de la
présenter en personne au gouverneur
général [41] .
Habituellement, les Présidents sont accompagnés de quelques
députés invités (dont le motionnaire et l’appuyeur de
l’Adresse, ainsi que les leaders parlementaires et les whips des
différents partis) et les Greffiers des deux chambres.
Règlement et procédure
Le Règlement exige un débat
spécial d’un jour sur le Règlement et la procédure de
la Chambre et de ses comités au début de chaque
législature [42] .
C’est sur la recommandation d’un comité spécial
d’examen de la procédure, qui jugeait bon de donner aux
députés l’occasion de s’exprimer à ce sujet,
que la Chambre a adopté cette mesure en
1982 [43] .
Lancement du débat
Le Règlement prévoit un
débat automatique sur la motion voulant « Que cette Chambre prenne en
considération le Règlement et la procédure de la Chambre et
de ses comités » lors d’un jour désigné par un
ministre entre le 60e et le 90e jour de séance de
la première session d’une législature. Si aucun jour
n’est désigné, le débat a lieu le 90e jour
de
séance [44] .
Après l’adoption de cet
article du Règlement en 1982, la première fois que
l’occasion s’est présentée de tenir un tel
débat sur les règles et procédures de la Chambre, en 1984,
la Chambre a toutefois convenu à l’unanimité, bien avant le
soixantième jour, de suspendre l’article en
question [45] .
L’occasion de tenir un tel débat s’est de nouveau
présentée en 1988, mais la première session de la
34e législature s’est terminée après
seulement 11 jours de séance, coupant ainsi court à
l’application de l’article 51. En 1994, lors de la première
session de la 35e législature, la Chambre a convenu de
suspendre cet article en même temps qu’elle adoptait plusieurs
modifications au Règlement et renvoyait plusieurs questions de
procédure au Comité permanent de la procédure et des
affaires de la
Chambre [46] .
Un
premier débat a donc eu lieu aux termes de cet article en 1998, lors de
la première session de la 36e
législature [47] .
Règles du débat
Le débat sur la motion a
priorité sur tout le reste et dure au maximum un jour de séance;
à moins qu’il ne se termine plus tôt, les
délibérations sur la motion prennent fin à l’heure
normale d’ajournement
quotidien [48] .
La
motion est réputée avoir été
proposée [49]
et, pour favoriser une large participation, aucun député ne peut
prendre la parole plus d’une fois ni pendant plus de 10
minutes [50] .
Débats d’urgence
Le Règlement donne aux
députés l’occasion d’examiner immédiatement une
question urgente en proposant une motion d’ajournement qui peut faire
l’objet d’un débat. Un député peut demander au
Président l’autorisation de « proposer l’ajournement de
la Chambre en vue de la discussion d’une affaire déterminée
et importante dont l’étude s’impose
d’urgence [51] ».
Il doit cependant s’agir d’une question qui se rapporte
« à une véritable
urgence [52] »
et,
si le Président accueille la demande, la Chambre peut renoncer au
préavis habituel de 48 heures pour en débattre sans
tarder.
Jusqu’au tournant du siècle,
tout député pouvait, à pratiquement n’importe quel
moment des délibérations, lancer la discussion sur un nouveau
sujet en proposant une motion d’ajournement de la Chambre. Comme ce genre
de motion pouvait être proposée n’importe quand et devait
toujours faire l’objet d’un débat, il en résultait une
interruption des travaux de la Chambre qui perturbait souvent le programme de
toute la journée. En 1906, le gouvernement a décidé de
remédier à la situation par l’adoption d’une nouvelle
règle, l’ancêtre de l’article actuel du
Règlement, selon laquelle seules les motions d’ajournement portant
sur des affaires déterminées et dont l’étude
s’impose d’urgence pourraient faire l’objet d’un
débat [53] .
De 1906 à 1968, une fois
acceptées, les motions demandant un débat d’urgence
étaient examinées immédiatement. Les autres travaux
étaient alors mis de côté. En décembre 1968, la
Chambre a modifié la règle de façon à ce que le
débat commence à 20 heures (15 heures le vendredi) lorsque la
question est mise à l’étude le jour
même [54] .
En
plus de perturber les travaux habituels de la Chambre, cela occasionnait
toujours un conflit. Après l’abolition, en 1982, des séances
normales de travail en
soirée [55] ,
le
conflit entre les débats d’urgence et les travaux courants de la
Chambre a été éliminé sauf le
vendredi.
Comme un Président l’a fait
remarquer, un débat d’urgence doit porter sur un sujet
« présentant un intérêt immédiat pour toute la
population [56] ».
Il s’ensuit que des problèmes chroniques, comme la situation
économique, le chômage et les affaires constitutionnelles, ont
été rejetés le plus souvent, tandis qu’on jugeait que
des sujets comme les arrêts de travail et les grèves, les
catastrophes naturelles, ainsi que les crises et événements
internationaux exigeaient une attention immédiate. D’autres sujets
comme la pêche, l’exploitation forestière,
l’agriculture et le commerce des fourrures ont été
jugés acceptables à divers moments; plusieurs débats
d’urgence ont porté, par exemple, sur des questions relatives aux
céréales depuis 1968, et il y a eu quatre débats
d’urgence sur l’industrie canadienne de la pêche depuis 1984.
Les questions jugées très partisanes ne sont pas
agréées aussi
volontiers [57].
Lancement du débat
Qu’il soit simple
député ou
ministre [58] ,
tout
député qui désire proposer l’ajournement de la
Chambre afin de discuter d’une question précise et importante sur
laquelle il est urgent de se pencher doit en aviser le Président par
écrit au moins une heure avant de se lever à la Chambre pour en
faire la demande
officiellement [59] .
À la fin des affaires courantes
ordinaires [60] ,
tout
député qui en a prévenu le Président peut se lever
pour demander l’autorisation de proposer l’ajournement de la Chambre
afin de débattre du sujet précisé dans
l’avis [61] .
Le
député fait alors une brève déclaration, qui se
résume d’habitude à lire simplement le texte de la demande
déposée auprès du
Président [62] .
La présentation ne doit s’accompagner d’aucune discussion ou
argumentation [63]
car,
comme un Président l’a souligné, un long exposé
risque de provoquer un
débat [64] .
À l’occasion, toutefois, un député sera
autorisé à étoffer sa demande si la présidence
indique qu’un supplément d’information pourrait l’aider
à prendre sa
décision [65] .
Lorsqu’il reçoit plus
d’un avis, le Président donne la parole aux députés
dans l’ordre où les demandes lui sont
parvenues [66] .
Si
l’on n’atteint pas, dans les affaires à l’ordre du
jour, la période réservée à l’audition des
demandes, ou si la Chambre décide de passer à autre chose en
adoptant, par exemple, une motion visant à passer à l’ordre
du jour pendant les affaires courantes, la présidence ne peut pas
entendre les demandes de débats d’urgence. Ces demandes doivent
être représentées à la prochaine séance
à moins que la Chambre n’autorise, par consentement unanime, le
Président à les entendre à un autre moment durant la
séance [67] .
Il est bien important de déposer
l’avis de motion au bon moment. En une occasion, le Président a
prié un député qui s’était levé pour
présenter une motion dont il avait donné avis quelques jours plus
tôt d’en redonner
avis [68] .
Même
si la Chambre peut, par consentement unanime, autoriser un député
à présenter une motion dont avis n’a pas été
donné le jour
même [69] ,
la
présidence a exprimé des réserves au sujet du report des
avis de motion. Un Président a maintenu qu’une question qui exige
des mesures urgentes un jour n’exigera pas nécessairement la
même attention le lendemain ou peut, au contraire, devenir encore plus
critique, ce qu’il faut laisser au motionnaire le soin de
déterminer [70] .
À une occasion, les avis de motion ont été
déposés pendant une longue interruption des travaux de la Chambre
et ont été pris en considération à la fin des
affaires courantes ordinaires le premier jour où la Chambre a repris ses
travaux [71] .
Latitude du Président
Après avoir entendu une demande de
débat d’urgence, le Président décide, sans discussion
aucune, si la question est suffisamment déterminée et importante
pour justifier son étude urgente à la
Chambre [72] .
Il se
fonde sur le Règlement, les textes faisant autorité et la
pratique, pour décider s’il y a lieu ou non d’autoriser la
demande.
Le Président n’est pas tenu de
motiver sa décision d’accueillir ou de rejeter une demande de
débat
d’urgence [73] .
Il arrive cependant que des raisons soient données, même si la
présidence cherche à s’en garder pour éviter
d’ajouter à la jurisprudence qui est elle-même susceptible de
susciter un débat à la
Chambre [74] .
Critères de
décision
Bien que le Règlement lui laisse
passablement de latitude pour décider si une question doit être
portée d’urgence devant la Chambre, le Président doit tenir
compte de certains critères. Pour décider si une question a trait
à une urgence réelle dont il ne serait pas possible de saisir la
Chambre dans un délai raisonnable par d’autres moyens, comme
à l’occasion d’un jour réservé aux travaux des
subsides [75] ,
le
Président prend dûment en considération, outre
l’importance et la nature précise de la
question [76] ,
la
mesure dans laquelle celle-ci relève des responsabilités
administratives du gouvernement ou pourrait relever de la compétence
ministérielle [77] .
Le Président vérifie ensuite
si la demande répond à d’autres critères. La motion
proposée doit porter sur une seule
question [78] .
La
motion d’ajournement de la Chambre en vue d’un débat
d’urgence ne saurait relancer la discussion sur une question qui a
déjà fait l’objet de pareils débats au cours de la
même session [79]
ni soulever une question de
privilège [80] .
Elle ne peut, d’autre part, porter sur une question qui exige normalement,
pour faire l’objet d’un débat, une motion de fond dont avis a
été donné et sur laquelle la Chambre doit se
prononcer [81] .
D’autres conditions découlant
de décisions antérieures sont également examinées.
La présidence a établi comme principe que, en temps normal, le
sujet proposé ne doit pas être uniquement
d’intérêt local ou régional, se rapporter uniquement
à un groupe ou à une industrie en
particulier [82] ,
ni
concerner l’administration d’un ministère du
gouvernement [83] .
Des
demandes de débat sur des situations
chroniques [84] ,
sur
des questions découlant des travaux de la session en
cours [85]
ou des
délibérations du
Sénat [86] ,
sur
des questions dont des tribunaux ou d’autres organismes administratifs
sont saisis [87]
et sur
des motions de défiance ou de
censure [88]
ont
été rejetées. La présidence a par ailleurs
décrété qu’il ne saurait y avoir de débat
d’urgence sur l’interprétation d’un article du
Règlement [89]
et que ce mécanisme ne saurait « servir de véhicule pour
exposer les déclarations et les allégations faites en dehors de la
Chambre par des organismes ou des personnes qui ne doivent pas y répondre
de leurs
actes [90] ».
Un
Président a décrété par ailleurs qu’on ne peut
pas se servir des dispositions relatives aux débats d’urgence pour
discuter de choses « qui, dans un programme législatif de la Chambre
des communes et au cours de l’étude normale des textes
législatifs, peuvent être présentées à la
Chambre sous forme de modifications à des lois existantes ou lui seront
de toute façon présentées sous une forme
différente [91] ».
Dans un cas exceptionnel, un débat
d’urgence a toutefois été autorisé à cause
« de la révélation soudaine et imprévue
d’événements qui, faute d’intervention, pourrait
précipiter l’adoption de mesures que l’on pourrait
incontestablement qualifier
d’urgentes [92] ».
Si la Chambre manifeste le désir de
tenir un débat d’urgence, le Président peut enfin en tenir
compte pour acquiescer à une demande en ce
sens [93] .
La
présidence a de même autorisé périodiquement des
débats d’urgence sur des questions qui n’étaient pas
nécessairement urgentes au sens de l’article du Règlement,
mais dont le calendrier parlementaire empêchait de discuter en temps
opportun [94] .
La responsabilité de décider
si une question constitue un sujet acceptable de débat d’urgence
est parfois retirée à la présidence. Il est arrivé
que la Chambre décide elle-même, à l’unanimité,
de tenir un débat d’urgence, parfois au moyen d’un ordre
spécial [95] .
En
une occasion notable, le Président n’a pas eu à rendre de
décision sur plusieurs demandes semblables, la Chambre ayant, plus tard
au cours de la séance, donné son consentement unanime à la
présentation d’un projet de loi sur le même sujet et
décidé de passer immédiatement au débat sur la
motion visant la deuxième lecture du projet de
loi [96] .
Le Président diffère dans
bien des cas sa décision sur une demande de débat d’urgence
pour y revenir plus tard dans la journée; il interrompt alors les travaux
de la Chambre pour annoncer sa
décision [97] .
Dans un cas exceptionnel, le Président n’est revenu en Chambre pour
rendre sa décision que le
lendemain [98] .
Le Règlement interdit la
présentation de plus d’une motion d’ajournement de la Chambre
en vue d’un débat d’urgence au cours d’une même
séance [99] ;
il
est toutefois possible de déposer plus d’un avis de motion, auquel
cas il appartient au Président de déterminer lequel est recevable,
le cas échéant. Si plusieurs demandes de débat
d’urgence sur un même sujet sont présentées au cours
d’une même séance et jugées recevables, le
Président autorise l’auteur du premier avis de motion jugé
recevable à proposer l’ajournement de la
Chambre [100] .
Heure et jour du débat
Le Règlement stipule qu’un
débat d’urgence doit se tenir entre 20 heures et minuit le jour
où une demande en ce sens est accueillie, à moins que le
Président n’ordonne que la motion soit examinée à une
heure qu’il reste à préciser le jour de séance
suivant [101] .
La
Chambre a également adopté périodiquement des ordres
spéciaux fixant l’heure d’un débat
d’urgence [102] .
Dans un cas, une demande de débat d’urgence a été
accordée à un moment où la Chambre avait prolongé
ses heures de séance en
juin [103] .
Lorsqu’un débat
d’urgence est prévu pour 20 heures, la séance est suspendue
à l’heure normale d’ajournement; la Chambre reprend ses
travaux à 20 heures et le député dont la demande a
été autorisée propose « Que cette Chambre
s’ajourne
maintenant [104] ».
Lorsqu’un débat d’urgence est prévu pour 20 heures les
lundi, mardi, mercredi et jeudi, les délibérations sur la
procédure normale d’ajournement sont éliminées
puisque la motion dont la Chambre est saisie est identique. Il est toutefois
arrivé que, par consentement unanime, cette procédure soit suivie;
dans ces cas, après le débat sur la motion d’ajournement,
celle-ci a été réputée retirée et la
séance suspendue jusqu’à 20
heures [105] .
Il est
aussi arrivé à l’occasion, par consentement unanime, que la
séance soit suspendue avant l’heure habituelle d’ajournement
afin de permettre aux députés de se préparer pour le
débat
d’urgence [106] .
Les débats d’urgence se
tiennent habituellement en dehors des heures de séance normales, sauf le
vendredi. Le Règlement donne toutefois la priorité aux
débats d’urgence le vendredi ou lorsque le Président en fixe
l’heure pendant les heures normales de la séance suivante. Il
appartient alors au Président de décider quand toute question
laissée de côté en vue du débat d’urgence sera
reprise ou mise aux
voix [107] .
Le vendredi, les débats
d’urgence commencent dès que le Président juge la demande
recevable [108] .
Si la
demande est présentée et accueillie immédiatement
après les affaires courantes, le débat commence à environ
12 h 15 et se poursuit jusqu’à 16 heures, heure à laquelle
la motion « Que cette Chambre s’ajourne maintenant » est
réputée adoptée. Lorsqu’un débat
d’urgence se tient le vendredi, où l’heure habituelle
d’ajournement est 14 h 30, environ deux heures ou deux heures et demie de
travaux de la Chambre sont donc déplacées. Depuis
l’entrée en vigueur de cet article du Règlement en
1987 [109] ,
aucun
débat d’urgence n’a eu lieu le vendredi, mais le
Président a dans deux cas reporté un tel débat à 20
heures le lundi
suivant [110] .
Règles du débat
Au cours d’un débat
d’urgence, aucun député ne peut prendre la parole pendant
plus de 20
minutes [111]
et il
n’y a pas de période de questions et
observations [112] .
Toutefois, pour permettre au plus grand nombre possible de députés
de participer, la durée des interventions a souvent été
réduite par consentement unanime à 10 ou 15
minutes [113] .
Les
règles établies pour les débats s’appliquent aux
débats
d’urgence [114].
Une motion d’ajournement de la Chambre pour discuter d’une question
importante dont l’étude s’impose d’urgence ne peut,
comme toute autre motion d’ajournement, faire l’objet
d’amendements [115] .
Interruption et conclusion du débat
Comme mentionné plus haut, une fois
lancé, un débat d’urgence a priorité sur tout le
reste. Du lundi au jeudi, le débat ne devrait, s’il se tient
après l’heure d’ajournement habituelle, causer aucun conflit.
S’il a lieu un vendredi, en plus des quelque 90 minutes
réservées aux affaires émanant du gouvernement, le
débat supplante également une heure des affaires émanant
des députés. En effet, le Règlement interdit
expressément toute interruption pour les affaires émanant des
députés [116] .
Comme la motion visant la tenue d’un
débat d’urgence est libellée simplement « Que cette
Chambre s’ajourne maintenant », la Chambre n’a pas à
prendre de décision sur le sujet débattu à la fin du
débat [117] .
À minuit (16 heures le vendredi) ou lorsqu’aucun
député ne se lève pour prendre la parole, la motion est
déclarée adoptée par le Président et la Chambre
s’ajourne jusqu’au jour de séance
suivant [118] .
Si le
débat se tient pendant les heures de séance normales de la Chambre
et prend fin avant l’heure d’ajournement habituelle, la motion est
réputée retirée et la Chambre passe à d’autres
questions [119] .
Le Règlement autorise un
député, dans l’heure qui précède l’heure
normale d’ajournement du débat, c’est-à-dire entre 23
heures et minuit (15 heures et 16 heures le vendredi), à présenter
une motion en vue de poursuivre le débat au-delà de minuit (16
heures le
vendredi) [120] .
Si
moins de 15 députés se lèvent pour signifier leur
opposition, la motion est réputée adoptée. Un petit nombre
seulement de débats ont été prolongés au-delà
de minuit en application du
Règlement [121] ,
alors que plusieurs ont été prolongés par consentement
unanime [122] .
Il est arrivé que la Chambre veuille
s’exprimer sur le thème d’un débat d’urgence par
l’adoption d’une motion ou d’une résolution. En 1970,
la Chambre a tenu un débat d’urgence sur le conflit
nigérian-biafrais; selon un ordre spécial donné plus
tôt au cours de la séance, le débat a été
interrompu à 22 h 30, la Chambre a adopté une motion sur le
même sujet puis elle a ajourné sans mettre la question aux
voix [123] .
En 1983,
après un débat d’urgence sur l’incident de
l’avion civil sud-coréen abattu par l’Union
soviétique, la motion d’ajournement de la Chambre a
été réputée retirée, la Chambre a
adopté une résolution dénonçant les actes du
gouvernement soviétique, puis elle a ajourné par consentement
unanime jusqu’au jour de séance
suivant [124] .
En
1989, un débat d’urgence sur le massacre de la Place Tiananmen
à Beijing, en Chine, a été interrompu pour permettre
à la Chambre d’adopter une résolution condamnant cet
acte [125] .
Motion de suspension de certains articles du Règlement
La Chambre peut suspendre certains articles
du Règlement à l’égard de toute question que le
gouvernement juge urgente, mais seulement dans des conditions bien
déterminées [126] .
Un ministre peut notamment proposer une motion (en tout temps où le
Président occupe le fauteuil) en vue de suspendre l’application du
Règlement concernant la nécessité d’un préavis
et l’horaire des séances. En présentant sa motion, le
ministre donne les raisons qui expliquent l’urgence de la situation. Une
fois que la motion a été appuyée, le Président la
soumet à la Chambre. Ce faisant, il peut permettre jusqu’à
une heure de débat ininterrompu, auquel cas les affaires dont la Chambre
est alors saisie sont laissées de côté temporairement et un
débat « spécial » s’engage sur la motion. Si aucun
député ne se lève, le Président met
immédiatement la question aux
voix [127] .
Lancement du débat
Lorsqu’il propose de suspendre le
Règlement, le ministre doit informer la Chambre des raisons qui
expliquent l’urgence de sa
motion [128] .
Une fois
que la motion est dûment présentée et appuyée, le
Président en saisit la
Chambre [129] .
De telles motions n’ont
été proposées que rarement. En 1991, une motion a
été proposée visant à suspendre l’application
du Règlement concernant les heures de séance de la Chambre afin
que celle-ci siège pendant trois soirées jusqu’à 22
heures pour faire franchir toutes les étapes à une mesure de
retour au travail. La motion a été retirée après
discussion lorsque plus de 10 députés se sont levés pour
indiquer leur
opposition [130] .
En
1992, une motion a été adoptée qui demandait de renoncer au
préavis de 48 heures requis pour entreprendre l’étude
à l’étape du rapport d’un projet de loi
prévoyant des référendums sur la
Constitution [131] .
En
mars 1995, la Chambre a adopté sans débat une motion lui demandant
de renoncer au préavis de 48 heures requis pour déposer un projet
de loi destiné à mettre fin à un arrêt de travail et
fixant les heures de séance pour en
discuter [132] .
Plus
tard au cours du même mois, une motion semblable a été
discutée et réputée retirée lorsque plus de 10
députés se sont levés pour s’y
opposer [133] .
En juin
1999, une motion proposant que la Chambre continue de siéger, pour
étudier un projet de loi et pour suspendre le préavis requis pour
une motion de clôture, a été débattue et
rétirée lorsque plus de 10 députés se sont
levés pour s’y
opposer [134] .
Règles du débat
Les débats sur les motions de ce
genre durent au plus une heure et ne peuvent être interrompus ou
ajournés par d’autres travaux ou ordres de la
Chambre [135] .
Les
députés ne peuvent prendre la parole qu’une fois et ce,
pendant au plus 10
minutes [136] .
Aucun
amendement n’est permis, à moins d’être proposé
par un ministre autre que le
motionnaire [137] .
Conclusion du débat
Lorsque le débat est terminé,
ou au bout d’une heure, selon le cas, le Président met la motion
aux voix et doit, ce faisant, demander aux députés qui s’y
opposent de se
lever [138] .
Si au
moins 10 députés se lèvent pour s’y opposer, la
motion est réputée
retirée [139] ;
autrement, la motion est
adoptée [140]
et devient un ordre de la Chambre restreint aux délibérations qui
y sont
précisées [141] .
Débats exploratoires
Au cours des dernières
années, plusieurs motions invitant la Chambre à « prendre
note » de certains éléments ont fait l’objet de
débats à la Chambre. Un ministre propose une motion où
figure l’expression « Que la Chambre prenne note de » ou « Que
la Chambre prenne en considération » pour solliciter l’avis des
députés sur un aspect donné de la politique
gouvernementale. Comme le premier ministre l’indiquait à la Chambre
le 25 janvier 1994, ces débats permettent aux députés de
participer à la formulation de la politique gouvernementale, et de donner
leur opinion avant que le gouvernement ne prenne une
décision [142] .
Ces motions ne sont habituellement pas mises aux voix.
Depuis le début de la 35e
législature en 1994, il y a eu beaucoup de débats de ce genre; ils
portaient pour la plupart sur les engagements du Canada en matière de
maintien de la paix à divers points chauds du
globe [143]
et sur la
politique budgétaire du
gouvernement [144] .
D’autres ont porté sur les essais du missile de croisière,
le NORAD, la violence contre les femmes, la réforme des programmes
canadiens de sécurité sociale, et la guerre au
Kosovo [145] .
Lancement du débat
Un ministre peut amorcer un débat
exploratoire en donnant l’habituel avis de 48 heures avant de pouvoir
proposer une motion de fond à la Chambre. Une fois inscrite au
Feuilleton sous la rubrique des affaires émanant du gouvernement,
la motion est mise en délibération au moment choisi par le
gouvernement pendant la période réservée aux ordres
émanant du gouvernement. À plusieurs reprises, il est cependant
arrivé que l’on renonce à l’exigence du préavis
de 48 heures lorsque la Chambre a adopté à
l’unanimité un ordre spécial invitant ses membres à
« prendre note » et précisant les règles du
débat [146] .
Dans bien des cas, la séance a été prolongée afin
que le débat puisse avoir lieu après l’heure habituelle
d’ajournement [147] .
Règles du débat
Sauf indication contraire dans un ordre
spécial [148] ,
les règles normales concernant la durée des interventions, du
débat et des
amendements [149]
s’appliquent. La Chambre a toutefois convenu plusieurs fois, à
l’unanimité, de siéger au-delà de l’heure
habituelle d’ajournement pour poursuivre le
débat [150] .
Dans chaque cas, l’ordre spécial stipulait qu’aucune motion
dilatoire ou intervention visant à signaler l’absence de quorum ne
serait permise.
Conclusion du débat
La pratique a voulu jusqu’ici que le
débat sur ce genre de motion dure un jour de séance, pendant soit
les heures normales, soit la prolongation de la séance. Il n’est
arrivé que trois fois à la Chambre de reprendre un débat
exploratoire un jour de séance
suivant [151].
À une exception près, aucune décision n’a
été prise sur une motion proposant ce genre de
débat [152] .
La
motion reste au Feuilleton à la rubrique des affaires
émanant du
gouvernement [153] .
Débats prescrits par la loi
Le Parlement a jugé bon, dans
plusieurs mesures législatives, d’exiger des débats
spéciaux. Ces débats constituent une forme de surveillance et
d’examen parlementaires de dispositions législatives
particulières. Dans certains cas, celles-ci laissent une certaine
latitude; dans d’autres, elles sont
exécutoires [154] .
Les
débats exigés par la loi peuvent se classer en deux grandes catégories, bien que
les procédures relatives aux débats soient similaires. La première catégorie
requiert l’examen global d’une loi ou l’examen d’un de ses éléments. La seconde,
qui est la plus commune, prévoit un débat en vue de ratifier, de révoquer ou de
modifier un décret, un règlement, une déclaration, une proclamation, une
instruction ou tout autre instrument de décrets-lois qui découle de la loi en
question. Les règlements pris en vertu de certaines de ces lois le sont sous
réserve d’une résolution affirmative du Parlement, ce qui oblige les deux
chambres à les adopter, selon toute vraisemblance après débat, avant qu’ils
n’entrent en vigueur [155] .
À l’inverse,
les règlements qui doivent faire l’objet d’une résolution négative du Parlement
restent en vigueur tant qu’ils n’ont pas été révoqués par une résolution des
deux chambres, vraisemblablement après débat également [156] .
Depuis les années 1960, il y a eu plusieurs débats de ce
genre. En 1971, par exemple, la Chambre a adopté, après délibérations, une
motion portant création du ministère d’État chargé des Sciences et de la
Technologie en vertu de la Loi de 1970 sur l’organisation du gouvernement [157] .
En 1974, la
Chambre a discuté d’une motion priant le ministre des Affaires des anciens
combattants de proroger la Loi sur les terres destinées
aux anciens combattants dont la date d’expiration était le 31 mars
1975 [158] .
Un autre a eu
lieu en 1977 pour tenter de devancer la date d’expiration de la Loi anti-inflation [159] .
Deux autres se
sont produits coup sur coup à la fin de 1980 lorsque des députés ont tenté de
faire révoquer deux proclamations déposées par le gouvernement à l’égard de la
Loi sur l’administration du
pétrole : l’une avait trait au règlement limitant la hausse des prix de
diverses qualités et variétés de pétrole, l’autre, au règlement fixant le prix
du gaz naturel [160] .
Un autre s’est
déroulé en 1985 lorsque des députés ont invoqué une disposition de lam Loi sur le transport du grain de l’Ouest pour proposer une motion visant à utiliser une
journée réservée au gouvernement pour examiner un rapport provisoire sur la Loi
et toute question en suspens intéressant les agriculteurs de l’Ouest [161] .
L’adoption par
la Chambre, en vertu de la Loi référendaire, d’une
motion portant approbation de la question référendaire a donné lieu à un autre
débat prescrit en septembre 1992 [162] .
Le dernier
débat du genre a eu lieu en décembre 1992 lorsque des députés ont voulu modifier
le Règlement sur les mesures économiques spéciales
visant les navires (Haïti) conformément aux dispositions de la Loi sur les mesures économiques spéciales visant à
modifier ou annuler les décrets ou règlements concernant les programmes de
sanctions économiques [163] .
Jusqu’en 1986, la Loi sur la
révision des limites des circonscriptions électorales renfermait des
dispositions permettant aux députés de discuter à la Chambre de leurs objections
à tout rapport d’une Commission de délimitation des circonscriptions
électorales. Quatre débats ont eu lieu en vertu de ces dispositions, soit en
1966, 1973, 1976 et 1983 [164] .
À la suite
d’une modification apportée en 1986, ces rapports sont maintenant déposés à la
Chambre et renvoyés automatiquement à un comité parlementaire chargé des
questions électorales [165] .
Les objections
sont adressées au comité qui les examine.
Lancement du débat
Le
déclenchement des débats prescrits par des textes législatifs dépend des
dispositions de chacun. Pour ceux qui autorisent un débat, l’initiative peut
être prise par un ministre qui, dans les limites de temps établies, adresse au
Président un avis de motion visant la ratification d’un décret, d’un règlement,
d’une déclaration, d’une proclamation, d’une instruction ou de tout autre
instrument de décrets-lois pris conformément à la loi [166] .
Il
faut habituellement, pour engager un débat en vue de révoquer de tels
instruments, adresser au Président un avis de motion signé par un nombre minimal
de députés ou de sénateurs [167] .
Lorsqu’un
texte législatif exige la tenue d’un débat sur l’utilisation d’un instrument de
délégation du pouvoir législatif, les dispositions applicables stipulent
habituellement qu’une motion de ratification signée par un ministre doit être
déposée devant le Parlement dans un délai donné [168] .
Une
fois qu’a été donné l’avis conformément au Règlement de la Chambre et qu’il est
paru au Feuilleton sous la rubrique « Ordre
statutaire [169] »,
le débat doit
se tenir dans le délai fixé par le texte législatif en cause. En 1974, par
exemple, le débat sur la Loi sur les terres destinées
aux anciens combattants devait avoir lieu dans un délai de 15 jours et la
Chambre a adopté une motion fixant les dates du débat [170] .
En 1977, le
débat exigé par la Loi anti-inflation devait se
dérouler dans un délai de 15 jours après le dépôt de l’avis [171] ,
tandis qu’en
1980 le débat requis par la Loi sur l’administration du pétrole devait se tenir dans un délai
de 4 jours de séance [172] .
Il semble que
dans les deux cas les dates du débat ont été fixées après consultation de tous
les partis. En 1985, le Président a fixé la date du débat en application du
paragraphe 62(6) de la Loi sur le transport du grain de
l’Ouest qui stipule que le débat doit se tenir
dans les 60 jours du dépôt de l’avis [173] .
En septembre
1992, le débat sur le texte de la question référendaire s’est déroulé, en
application de la Loi référendaire, 24 heures après
le dépôt de l’avis de motion [174] .
En décembre
1992, après l’inscription au Feuilleton d’une motion
en vue d’un débat conformément à la Loi sur les mesures
économiques spéciales, la présidence a été appelée à rendre une décision sur
sa recevabilité. L’ayant jugée recevable, le Président a décidé que, aux termes
de la Loi, la Chambre devait l’étudier dans les six jours de séance
suivants [175] .
La Chambre a
convenu de tenir le débat plus tard dans la journée [176] .
Règles du débat
Durée du débat
Lorsqu’un texte législatif exige un débat, il en fixe
habituellement la durée, qu’il s’agisse d’un ou plusieurs jours de séance ou de
seulement quelques heures. La Chambre a, à quelques reprises, adopté des motions
en vue d’ajouter des précisions [177].
Le paragraphe
1(3) de la Loi sur les terres destinées aux anciens
combattants stipulait, par exemple, que le débat devait s’étaler sur deux
jours sans interruption conformément au Règlement de la Chambre; la Chambre a
cependant adopté une motion fixant les jours du débat et suspendant les affaires
émanant des députés le premier jour [178] .
Les débats
tenus aux termes de la Loi anti-inflation et de la
Loi sur l’administration du
pétrole ont duré quatre et trois jours respectivement conformément à leurs
dispositions respectives [179] .
Comme le
paragraphe 62(6) de la Loi sur le transport des grains
de l’Ouest stipule que le rapport doit faire
l’objet d’un débat sans interruption pendant « une période qui ne dépasse pas la
durée des heures normales de travail de la Chambre ce jour-là », la Chambre a
adopté une motion en ce sens [180] .
La motion
précisait en outre que l’ordre serait le premier point à l’ordre du jour. Le
débat tenu en vertu de la Loi référendaire en
septembre 1992 a nécessité deux jours de séance. La Loi stipule que la motion doit être mise aux voix avant
la fin du troisième jour de séance consacré à ce débat [181] .
La Chambre a
adopté, par consentement unanime, une motion visant à disposer de la motion
après deux jours de débat [182] .
La longueur du
débat prescrit de 1992 fut établie selon le paragraphe 7(4) de la Loi sur les mesures économiques spéciales qui limite le
débat à une durée maximale de trois heures, à moins que la Chambre ne le
prolonge avec le consentement unanime des députés. En l’occurrence, la Chambre a
adopté un ordre spécial mettant un terme au débat après seulement deux
heures [183] .
La Loi sur les mesures d’urgence présente, au sujet de la durée du débat qu’elle prescrit, une exception
notable. Elle n’impose de durée limite ni au débat sur une motion de
ratification ou de prorogation d’une déclaration de situation de crise, ni au
débat sur une motion d’abrogation ou de modification d’un règlement ou d’un
décret. La loi stipule simplement que le débat doit se poursuivre sans
interruption jusqu’à ce que la Chambre soit prête à se prononcer [184] .
Durée des interventions
Sauf
indication contraire dans le texte législatif applicable, la durée des discours
pendant un débat prescrit est déterminée par le Règlement de la Chambre [185] .
Deux
exceptions se sont produites : en 1977 et 1985, la Chambre a adopté des motions
limitant la durée des discours [186] .
Interruption du débat
La
plupart des textes législatifs qui exigent un débat à la Chambre stipulent
également que le débat sera ininterrompu. À l’exception de la Loi sur l’administration du
pétrole [187],
les lois aux
termes desquelles la Chambre a tenu des débats prescrits précisaient que le
débat serait ininterrompu. En 1977, le débat sur la motion présentée en vertu de
la Loi anti-inflation, qui s’est étendu sur quatre
jours, a été interrompu à trois reprises pour le débat sur la motion
d’ajournement, après quoi la motion d’ajournement a été réputée retirée et le
débat a repris selon l’ordre de la Chambre adopté le 30 mai 1977 [188] .
En 1985, le
débat tenu aux termes de la Loi sur le transport du
grain de l’Ouest a été interrompu pour permettre
au ministre des Finances de faire une déclaration en vertu d’un ordre de la
Chambre [189] .
Conclusion du débat
Un
débat prescrit prend fin conformément aux dispositions de la loi applicable. En
général, si le débat n’est pas déjà terminé, le Président doit interrompre les
délibérations à la fin d’un jour de séance donné ou d’une heure prescrite et
mettre la motion aux voix [190] .
Si une motion
de ratification est adoptée par la chambre devant laquelle elle a été déposée,
la mesure législative exigera normalement qu’un message soit adressé à l’autre
chambre pour demander son agrément. Une fois que la motion est adoptée par
l’autre chambre, le règlement ou le décret se trouve ratifié, modifié ou
abrogé [191] .
Si une motion
d’abrogation n’est pas adoptée par la chambre devant laquelle elle a été déposée
ou par la chambre à laquelle elle a été adressée pour obtenir son agrément, le
règlement ou le décret entre en vigueur ou demeure inchangé selon le
cas [192] .
En
temps normal, toutes les motions présentées et étudiées pour satisfaire une
exigence législative sont mises aux voix à la fin du débat [193] .
En 1985, les
délibérations ont pris fin à l’heure habituelle d’ajournement, et ni la motion,
ni l’amendement qui y était proposé n’a été mis aux voix [194] .