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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 11 mai 1999

• 1033

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte et souhaite la bienvenue à tous.

Conformément à l'ordre de renvoi de la Chambre des communes du mardi 13 avril 1999, le comité reprend son examen du projet de loi C-67, Loi modifiant la Loi sur les banques, la Loi sur les liquidations et les restructurations et d'autres lois relatives aux institutions financières et apportant des modifications corrélatives à certaines lois.

Nous avons le plaisir ce matin de recevoir l'honorable Jim Peterson, secrétaire d'État aux institutions financières internationales.

Monsieur Peterson, bienvenue.

L'honorable Jim Peterson (secrétaire d'État aux institutions financières internationales): Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

et membres du comité. Je dois admettre que je suis beaucoup plus nerveux de ce côté-ci de la table que je l'étais de l'autre côté.

[Traduction]

Je suis très heureux d'être de retour devant le Comité des finances.

Le projet de loi C-67 permettra aux banques étrangères d'offrir, par l'entremise de leurs succursales, toute une gamme de services bancaires aux entreprises et aux consommateurs. Le but de ce projet de loi est simple. Le gouvernement veut faciliter la présence viable des banques étrangères au Canada pour que les Canadiens aient accès à un éventail élargi de ressources financières.

• 1035

Pour de nombreuses banques étrangères, il sera plus rentable d'établir une succursale au Canada dans la mesure où elles n'auront plus à créer de filiales distinctes assujetties à la réglementation bancaire normale.

Considération importante étant donné que le nombre de filiales étrangères au Canada est en déclin depuis plus de dix ans. En effet, du nombre record de 59 en 1987, elles n'étaient plus que 45 l'an dernier. Leur part du marché des actifs bancaires canadiens est tombé d'environ 12 p. 100 à moins de 10 p. 100.

Le gouvernement croit qu'il pourra remédier à cette situation en offrant aux banques étrangères un régime qui facilitera leur installation et les rendra plus compétitives. On s'attend à ce que les banques déjà présentes prennent de l'expansion, et à ce que d'autres banques étrangères soient plus tentées de s'établir chez nous.

[Français]

Les membres de ce comité connaissent bien les origines de ce projet de loi. La suggestion de permettre aux banques étrangères d'ouvrir des succursales au Canada est ressortie des consultations qui ont mené à l'examen des lois du secteur financier qui a eu lieu en 1997. À cette époque, la suggestion avait été avancée dans des rapports de ce comité et du comité du Sénat. En février de cette année, le gouvernement a annoncé son intention de permettre aux banques étrangères d'établir des succursales et il a commencé à élaborer un projet de loi.

Dans le cadre de ce processus, le ministre des Finances a diffusé un document de consultation sur l'accès des banques étrangères. Il a reçu près de 40 présentations d'un large éventail de parties, y compris des PME, des groupes de consommateurs, ainsi que des banques canadiennes et étrangères.

La décision de permettre aux banques étrangères d'ouvrir des succursales et la proposition contenue dans le projet de loi soumis à votre étude aujourd'hui sont issues d'un processus de consultation et de discussion très ouvert.

[Traduction]

Le groupe de travail MacKay a pu étudier la proposition sur l'établissement des succursales qui figurait dans le document de consultation du ministère. Dans son rapport, l'automne dernier, MacKay a appuyé avec enthousiasme notre proposition relative à l'établissement de succursales et encouragé le gouvernement à mettre en oeuvre cette proposition sans délai.

Monsieur le président, lorsque votre comité et celui du Sénat ont étudié le rapport MacKay, vous vous êtes dits en accord avec cette approche.

J'aimerais apporter quelques précisions concernant l'objet de ce projet de loi. Ce projet de loi modifiera la Loi sur les banques dans la mesure où il permettra aux banques étrangères de demander au ministre des Finances la permission d'établir des succursales au Canada. Ces succursales auront essentiellement les mêmes attributs que les banques canadiennes, sauf qu'elles ne pourront pas accepter de dépôts de détail. Pour les fins de ce projet de loi, un dépôt de détail est un dépôt de moins de 150 000 $.

Les succursales des banques étrangères ne seront nullement limitées dans le genre de prêts qu'elles pourront consentir. Certaines voudront, par exemple, établir des succursales au Canada afin d'offrir des cartes accréditives aux simples consommateurs. De même, les banques étrangères qui voudront accepter des dépôts de détail conserveront l'option d'établir des filiales au Canada qui auront tous les attributs d'une banque canadienne.

En vertu du régime que nous proposons, les banques étrangères auront l'option d'établir soit une succursale à services complets ou une succursale de prêt. Comme je l'ai dit, les succursales des banques étrangères n'auront pas le droit d'accepter des dépôts de moins de 150 000 $. Cependant, une succursale à services complets sera autorisée à accepter des dépôts de plus de 150 000 $. Une succursale de prêt, par contre, ne pourra accepter aucun dépôt, grand ou petit, des consommateurs canadiens. Comme son nom l'indique, sa seule raison d'être consistera à consentir des prêts aux Canadiens.

L'avantage principal qu'il y a à avoir deux types de succursales ici tient au fait que les exigences réglementaires peuvent être adaptées aux activités propres à chaque exploitation bancaire. Par exemple, la succursale de prêt sera assujettie à la réglementation prudentielle qui est généralement moins contraignante, et ainsi aucun déposant canadien ne prendra de risque.

• 1040

Nous savons qu'un certain nombre de banques étrangères sont désireuses de s'installer au Canada pour y consentir des prêts sans accepter de dépôts. Il est donc logique que notre projet de loi interdise explicitement les dépôts à certaines succursales de telle sorte que l'on pourra alléger en conséquence les exigences réglementaires.

Dans l'ensemble, les petites entreprises, les banques étrangères et les banques canadiennes sont favorables à l'assouplissement de nos règles relatives à l'installation des banques étrangères.

Mesdames et messieurs du comité, ce projet de loi est de toute évidence un pas dans cette direction. Je tiens à souligner que cette mesure ne provoquera pas de changements spectaculaires ou soudains dans le secteur financier du Canada. Ce projet de loi ne favorisera pas la mainmise étrangère sur notre secteur financier, contrairement à ce que vous diront de nombreux groupes.

Certains voudront savoir pourquoi le gouvernement n'ouvre pas le marché à la concurrence étrangère en permettant aux succursales étrangères d'accepter des dépôts. Il faut répondre à cela, en premier lieu, que les banques étrangères pourront encore s'installer ici et accepter des dépôts, mais seulement dans leurs succursales.

Pour ce qui est des autres raisons à cette restriction, la considération essentielle ici réside dans le degré de contrôle réglementaire auquel est assujettie la succursale de la banque étrangère. Étant donné que la succursale d'une banque étrangère fait partie d'une banque étrangère qui est constituée en société dans un autre pays, et que l'organisme qui la réglemente n'est pas au Canada, l'organisme de réglementation canadien ne pourrait exercer le même degré de contrôle prudentiel sur une succursale qu'il pourrait le faire sur la filiale d'une banque étrangère ou une banque canadienne. Ce sont donc des considérations prudentielles qui nous guident ici.

Pour les mêmes raisons, il serait très difficile d'étendre l'assurance-dépôt canadienne aux dépôts de détail de la succursale d'une banque étrangère. J'ajouterai ici que MacKay, ainsi que votre comité et le comité des banques du Sénat, étaient d'accord pour dire que les succursales étrangères ne devraient pas accepter de dépôts de détail.

Enfin, la restriction relative aux dépôts aura un effet positif sur les banques étrangères dans la mesure où les succursales de prêt seront assujetties à une réglementation moins contraignante. Tel est le but de ce projet de loi. Il est cependant un domaine où la réglementation ne sera pas moins contraignante, et je veux parler bien sûr de la protection du consommateur. Les succursales des banques étrangères seront assujetties aux dispositions normales relatives à la protection du consommateur, ce qui comprend les règlements traitant de la divulgation des frais d'emprunt, des intérêts et autres frais.

[Français]

Avant de clore mon allocution, je traiterai brièvement de quatre modifications techniques également prévues dans le projet de loi C-67.

Premièrement, les filiales des banques étrangères provenant de pays membres de l'Organisation mondiale du commerce ne seront plus tenues de demander une autorisation chaque fois qu'elles voudront ouvrir une succursale locale au Canada. Elles recevront plutôt une autorisation unique au moment où elles établiront leur première succursale au Canada.

La deuxième proposition consiste à éliminer les dispositions de réciprocité contenues dans les lois sur les institutions financières afin de faire état du principe de la nation la plus favorisée en vigueur au sein de l'OMC. En vertu de ce principe, les parties à l'entente ne doivent faire aucune discrimination à l'égard des institutions financières de différents pays. Cela signifie que les sociétés canadiennes pourront s'attendre à bénéficier du même traitement que les autres sociétés étrangères sur les marchés des autres pays de l'OMC. Troisièmement, la modification permettra au ministre des Finances de conclure des ententes avec les administrations provinciales qui veulent déléguer des responsabilités réglementaires à l'organisme fédéral de réglementation.

Enfin, une modification donnera au Bureau du surintendant des institutions financières le pouvoir d'appliquer des règlements relatifs à la divulgation des renseignements en matière de surveillance.

[Traduction]

Je rappelle que le projet de loi C-67 aura pour effet d'établir un environnement réglementaire qui permettra aux banques étrangères d'établir une présence viable au Canada. Cette mesure ne modifiera pas profondément la compétitivité dans le secteur bancaire mais donnera des avantages aux Canadiens. La petite et moyenne entreprise, les clients, les consommateurs, les utilisateurs de cartes de crédit, tous profiteront de l'accès à un éventail élargi de sources financières.

• 1045

Avant de conclure, j'aimerais ajouter que depuis le dépôt de ce projet de loi, le 11 février, nous avons tenu de nouvelles consultations exhaustives auprès des parties intéressées et de certains membres de votre comité. Faisant suite à ces discussions, nous avons dit que l'on pourrait apporter d'autres changements à ce régime favorisant l'établissement de succursales de banques étrangères au Canada.

En conséquence, le gouvernement va proposer un petit nombre d'amendements essentiellement de forme lorsque votre comité entreprendra son étude article par article. Je vais maintenant commenter brièvement certains de ces changements qui ont résulté de nos discussions constantes avec les parties intéressées.

Tout d'abord les succursales à services complets, comme je l'ai dit, ne pourront accepter que des dépôts de plus de 150 000 $. Ainsi, on s'assurera que les déposants d'une succursale à services complets sont des investisseurs avertis qui comprennent la nature de l'institution avec laquelle ils font affaire. Ces personnes ne demanderont pas à profiter de l'assurance-dépôt. Il s'agira d'investisseurs avertis.

Le projet de loi contient une disposition de minimis qui permet aux succursales à services complets d'accepter des dépôts de moins de 150 000 $ à la condition que ces dépôts ne totalisent pas plus de 1 p. 100 des dépôts totaux de ces banques.

On donne ainsi une certaine marge de manoeuvre à ces succursales, mais la communauté des banques étrangères craint, légitimement croyons-nous, que cette exigence de 1 p. 100 n'ait des conséquences inattendues et ne limite les opérations commerciales.

Pour apaiser leur crainte, nous allons inclure dans le règlement une mesure qui permettra la hausse de ce seuil de 1 p. 100 dans certains cas sans que l'on compromette la nécessité de protéger le consommateur. Nous croyons qu'il s'agit là d'une mesure importante qui permettra au gouvernement d'atteindre cet objectif fondamental qu'est l'élargissement du crédit pour les entreprises canadiennes.

Il y aura un autre amendement qui a trait aux options de financement pour les succursales de prêt. Le projet de loi permet aux succursales de prêt d'emprunter des institutions financières mais interdit la vente subséquente de créances, d'acceptations bancaires ou de garanties émises par la succursale de prêt. L'amendement permettra la vente subséquente de ces instruments de crédit, dans le respect des conditions énoncées dans le règlement. L'intention générale de cette disposition consiste à s'assurer que les ventes subséquentes seront limitées aux autres institutions financières, et seront bien sûr interdites aux investisseurs non avertis.

Troisièmement, le gouvernement proposera un amendement qui donnera plus de temps aux succursales des banques étrangères, pour ce qui est du dépôt des rapports de vérification comptable, ce qui leur permettra de se conformer aux exigences relatives à l'assurance. Ce délai sera allongé de 60 jours à environ cinq mois.

Les autres amendements sont purement de forme et nous pourrons en discuter au moment de l'étude article par article.

Côté fiscalité, je dois vous dire que nous proposons certains changements. Ceux-ci obligeront les succursales des banques étrangères à acquitter des impôts appropriés sur leurs opérations canadiennes. En particulier, les banques étrangères seront assujetties à un impôt sur leur capital réglementaire et devront retenir à la source des impôts pour les entreprises canadiennes de la même manière que les banques canadiennes. Les règlements fiscaux qui nous permettront de faire cela ne figurent pas dans le projet de loi. Ils seront soumis au Parlement plus tard, mais ils ont été décrits de manière générale dans un avis de motion de voies et moyens et ils ont fait l'objet de discussions exhaustives avec l'ensemble des banques étrangères.

Nous allons aussi proposer des règles transitoires. Nous allons nous assurer ainsi que les banques étrangères ne seront pas assujetties à des dettes fiscales indues lorsqu'elles convertiront leurs filiales en succursales. Ces filiales pourront, pour un temps limité seulement, transférer leurs biens à une succursale sans alourdir leur dette fiscale et sans perdre le droit d'utiliser toutes pertes fiscales qu'elles pourraient avoir accumulées au Canada. Cependant, les succursales étrangères seront assujetties aux mêmes dettes fiscales et obligations qui étaient imposées à l'ancienne filiale, et elles paieront les mêmes impôts lorsqu'elles vendront subséquemment tous biens qui leur auront été transférés.

Les succursales des banques étrangères seront également assujetties à l'impôt sur le revenu canadien, à l'impôt sur le capital et à l'obligation de retenir à la source les impôts canadiens. Autrement dit, nous offrons un report transitoire, ponctuel, aux banques qui ont déjà des filiales au Canada et qui veulent les convertir en succursales.

Vous trouverez dans le communiqué qui a été publié aujourd'hui par le ministère des Finances les détails de ces dispositions transitoires.

Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre.

Nous allons maintenant passer aux questions.

Monsieur Ritz.

• 1050

M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie, messieurs, d'avoir accepté notre invitation ce matin.

Comme on nous l'a expliqué, ce projet de loi vise essentiellement à favoriser la concurrence dans l'industrie bancaire au Canada. J'ai quelques questions.

Tout d'abord, au sujet de ce seuil de 150 000 $ que vous avez fixé, comment en a-t-on décidé? Qui a décidé que ce serait ce seuil-là?

M. Jim Peterson: C'est assez arbitraire. Je pense que nous nous sommes inspirés d'une autre loi où le seuil était fixé à 150 000 $. Il n'y a rien de magique ici.

Nous nous sommes dit que si une personne a 150 000 $ à déposer, il s'agit généralement d'une personne assez avertie qui comprendra qu'elle n'a pas droit à l'assurance-dépôt. Nous proposerons des dispositions qui nous permettrons de nous assurer que ces banques aviseront leurs clients qui n'ont pas droit à l'assurance de la SDAC. Le bordereau de dépôt devra indiquer que le déposant n'a pas droit à cette assurance.

Il n'y a donc vraiment rien de magique dans ce seuil de 150 000 $.

M. Gerry Ritz: D'accord.

Pour ce qui est des amendements de forme dont vous avez parlé et qui seront déposés plus tard, comme le veut la règle et ainsi de suite, est-ce qu'on va y aller au cas par cas, et qui va décider ce qu'on en fera?

M. Jim Peterson: Pardonnez-moi, je ne suis pas sûr de quels amendements vous...

M. Gerry Ritz: Vous avez dit que vous alliez proposer plus tard des amendements de forme.

M. Jim Peterson: Ah, oui. Nous allons proposer ces amendements au moment de l'étude article par article du projet de loi. Chose certaine, nous pouvons vous parler de certains d'entre eux aujourd'hui.

Il ne s'agira que de simples changements terminologiques, dans certains cas la version française ne correspondant pas parfaitement à la version anglaise. Je n'ai pas voulu entrer dans les détails étant donné que ces changements ne modifient pas grand-chose à notre politique.

M. Gerry Ritz: D'accord. Merci.

Le président: Monsieur Loubier.

[Français]

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur Peterson, bienvenue à votre ancien comité. Je suis très heureux de vous revoir. Nous avons passé de bons moments ensemble, bien que cela n'ait pas toujours le cas, mais mais disons qu'on s'en souvient. C'est cela qui est important en politique.

Monsieur Peterson, premièrement, j'aimerais vous dire que le Bloc québécois appuie ce projet de loi. Il y a toutefois une chose qui nous inquiète. J'ai eu l'honneur d'agir exactement comme vous le faites aujourd'hui, soit à titre de témoin après le dépôt du rapport MacKay. Nous avions alors établi que trois choses étaient essentielles pour qu'on puisse en arriver à renforcer le secteur financier canadien. Premièrement, il fallait changer les règles de propriété pour permettre aux petites et moyennes entreprises du secteur financier de former des groupes ou des consortiums pour affronter la concurrence des grandes banques fusionnées, puisqu'à ce moment-là, on parlait de la fusion des quatre grandes banques canadiennes. On disait que sans ces changements aux règles de propriété, notre secteur financier aurait moins de flexibilité pour affronter non seulement la concurrence intérieure, mais aussi la concurrence internationale.

En deuxième lieu, nous étions préoccupés par un problème au niveau de la concurrence intérieure. Cette préoccupation était particulièrement vive lors du débat sur la fusion des banques, où nous l'avions constatée avec force et vigueur. Dans ce sens, les consommateurs semblaient être moins bien servis qu'ils auraient dû l'être normalement s'il y avait eu une plus grande concurrence.

Troisièmement, nous avions incité le gouvernement à susciter cette concurrence, ce qui pouvait être en partie réalisé par l'entremise des entreprises financières internationales, et en particulier des banques, qui offriraient une meilleure gamme de produits aux consommateurs dans le cadre d'une plus grande concurrence domestique.

Bien que votre projet de loi m'apparaisse correct, j'ai l'impression qu'il y manque les deux premiers aspects. Il faut d'abord renforcer notre secteur financier et par la suite ouvrir un peu plus les frontières en facilitant aux entreprises étrangères la pénétration du marché canadien. Je ne sais pas ce que vous en pensez. Je vous poserai deux autres questions un peu plus tard.

M. Jim Peterson: Je suis d'accord sur la plupart de vos affirmations, monsieur Loubier.

Lorsqu'il était question de la fusion des banques canadiennes, le plus grand problème était celui que vous avez soulevé en deuxième lieu, soit la concurrence intérieure au Canada. Nous avons tous pris connaissance de l'opinion du Bureau de la concurrence à ce sujet. À la suite de ce rapport, il était évident que le gouvernement serait saisi des très nombreux problèmes que créerait la fusion des banques.

• 1055

Ce projet de loi s'inscrit dans le même ordre d'idées que les recommandations émises dans le rapport MacKay et par votre comité en vue de promouvoir la concurrence entre les institutions financières au Canada. Je ne saurais vous assurer qu'elles vont faire beaucoup de choses, mais nous allons leur donner la possibilité de concurrencer au Canada comme elles le font partout ailleurs dans le monde, c'est-à-dire avec des succursales au lieu de compagnies canadiennes. Nous espérons que cela aidera les Canadiens.

M. Yvan Loubier: Je comprends bien cela, monsieur le ministre, et je suis d'accord avec vous là-dessus. D'ailleurs, comme tout le monde ici pourra en témoigner, nous étions nous-mêmes les promoteurs de cette concurrence accrue dans le secteur financier.

Je m'inquiète de ce qu'à l'heure actuelle les entreprises financières et bancaires canadiennes éprouvent certaines faiblesses. Même dans le rapport MacKay, on faisait allusion à un rapport d'une agence de consultants dont le nom m'échappe, selon laquelle même les plus grandes banques canadiennes n'étaient pas nécessairement les meilleures banques au monde. Si nous ouvrons les frontières et suscitons plus de concurrence ici, éventuellement, dans quelques années, à la suite des prochaines négociations de l'Organisation mondiale du commerce et même au sein des trois Amériques—sait-on jamais—, les banques canadiennes et le secteur financier en général seront confrontés à une concurrence encore plus grande.

Je m'inquiète de ce qu'à l'heure actuelle, les banques canadiennes, même celles qu'on nous présente comme étant les plus importantes et qui étaient justement les quatre qui devaient fusionner, ne sont pas les plus efficaces au monde. Il faut faire attention à cela. Nous préconisions l'ouverture des frontières pour susciter une meilleure concurrence et pour mieux servir les consommateurs, mais nous préconisions aussi qu'on renforce parallèlement les institutions financières qui sont en place ici.

Il manque cette pièce au casse-tête. J'aimerais vous entendre là-dessus. Est-ce que vous prévoyez déposer bientôt un projet de loi qui nous permettrait de renforcer nos institutions financières nationales? Si tel est le cas, il ne faudrait pas trop attendre parce que si vous instaurez votre projet de loi C-67, que vous l'appliquez rapidement et que vous tardez à déposer l'autre partie de la pièce du puzzle, on risque d'avoir des difficultés. Ces difficultés se font déjà sentir dans les quatre grandes banques canadiennes.

M. Jim Peterson: Monsieur Loubier, comme nous l'indiquerons dans notre réponse au rapport MacKay, à l'avenir, le gouvernement et ce comité devront s'assurer que les banques et les institutions financières canadiennes restent fortes et concurrentielles partout dans le monde.

M. Yvan Loubier: Quand prévoyez-vous donner une réponse à ce rapport?

M. Jim Peterson: Ce sera avant juillet et, je l'espère, peut-être avant que la Chambre ajourne pour l'été.

De toute façon, vous aurez maintes occasions de discuter des questions qu'on y soulèvera. Je dois dire qu'en ce moment, je suis très fier de nos institutions financières. Elles restent concurrentielles partout dans le monde. Quarante pour cent de leurs revenus proviennent des exportations à l'étranger. Lorsqu'on voyage, on constate que nos banques et compagnies d'assurance sont présentes partout dans le monde. Les gens qui y travaillent sont parfois des leaders au niveau du commerce dans ces autres pays.

M. Yvan Loubier: Nos institutions sont des leaders ailleurs, monsieur le ministre, mais elles éprouvent ici certaines difficultés. Leurs succursales réussissent peut-être très bien dans des pays comme ceux des Antilles, où la réglementation est plus permissive, mais elles font ici l'objet de contraintes assez sérieuses.

• 1100

C'est pour cette raison que je faisais allusion à la deuxième partie de la réponse au rapport MacKay. Il faut qu'elle arrive sans tarder et qu'on instaure aussi des mesures, sinon on pourrait regretter plus tard de ne pas avoir posé des gestes adéquats.

J'aimerais vous poser une autre question, plus précise cette fois-ci. Vous avez parlé des impôts de succursale auxquels seront assujetties les banques étrangères qui exportent à l'étranger leurs gains. Est-ce que vous avez vérifié pour voir si ce nouvel impôt de succursale pour les banques étrangères risquait d'aller à l'encontre des règles de l'OMC? Nos banques canadiennes ne sont pas assujetties à un tel impôt de succursale. Vous proposez de créer un impôt différent pour les gains réalisés par des banques étrangères qui seraient peut-être exportés dans le pays d'attache de ces banques-là. Est-ce qu'on est certain qu'un pays membre de l'Organisation mondiale du commerce ne nous attaquera pas au sujet de cette mesure particulière?

M. Jim Peterson: Avant de répondre à cette question, j'aimerais vous présenter mes collègues qui m'accompagnent. Il s'agit de David Tobin, Charles Seeto et Paul Berg-Dick, du ministère des Finances, et de John Thompson et Brian Long, du Bureau du surintendant des institutions financières.

Lorsque nous avons élaboré cette retenue d'impôt, nous avons respecté les dispositions du code fiscal relatif aux succursales et compagnies établies au Canada, qui prévoit une équivalence entre les deux. Nous avons essayé de faire en sorte que les institutions étrangères qui entretiennent des relations avec le Canada soient exactement dans la même position, qu'elles soient des succursales ou des sociétés établies au Canada. C'est exactement ce que nous faisons ici avec les banques. En théorie, il n'y aura aucune différence entre les impôts auxquels seront assujetties les succursales et les sociétés.

M. Yvan Loubier: Lorsqu'on calculera cet impôt sur les gains de succursale, on tiendra aussi compte de l'autre type d'impôt sur 10 p. 100 des actifs à risque pondéré. Si on regarde la structure d'imposition globale, au bout du compte, on devrait pouvoir dire qu'une banque canadienne n'est pas traitée différemment d'une banque étrangère en sol canadien. Est-ce exact?

M. Jim Peterson: Dans le cadre de nos traités et accords fiscaux avec les autres pays, il y aura une espèce de réciprocité fiscale. Nous avons fait en sorte que ce régime-ci respecte les dispositions que contiennent les accords fiscaux que nous avons conclus avec tous les autres pays.

[Traduction]

Paul, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Français]

M. Paul Berg-Dick (directeur, Division de l'impôt des entreprises, ministère des Finances): Cette taxe qu'on imposera aux succursales ne causera aucun problème au niveau de l'OMC. D'ailleurs, les États-Unis imposent le même type d'impôt aux succursales. Il n'y a donc aucun problème au niveau de nos traités internationaux.

M. Yvan Loubier: D'accord. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour ces réponses et ces précisions.

[Traduction]

Le président: Monsieur Pillitteri.

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Merci, monsieur le président.

Bonjour, monsieur Peterson. Heureux de vous revoir ici.

Il s'agit bien sûr d'une mesure qu'on attendait depuis longtemps. Étant moi-même un homme d'affaires, je veux voir davantage de capitaux entrer au Canada. C'est particulièrement important pour la petite entreprise qui aura ainsi un meilleur accès aux prêts commerciaux.

J'ai deux questions. La première porte sur les succursales. Comme nous le savons, aujourd'hui, nos banques canadiennes, contrairement à ce que pourrait dire M. Loubier, sont en très bonne santé. Mais il est très difficile pour toute nouvelle banque entrant dans notre pays de profiter des mêmes possibilités. Ces banques étrangères pourront maintenant profiter de ces possibilités.

• 1105

Pour ce qui est des succursales étrangères et de la possibilité d'éponger les pertes de ces banques étrangères qui s'installent chez nous, si elles essuient des pertes au Canada, pourront-elles réclamer compensation dans leur pays d'origine?

C'est une chose. Pour ce qui est de l'autre chose, où... ce n'est pas que les banques soient totalement indépendantes dans certains de ces pays, où il arrive que le gouvernement intervient dans la gestion de la banque. Que fera le gouvernement ici? Il s'agirait de l'intervention d'autres États dans notre système bancaire. Qu'allons-nous faire de ce côté?

M. Jim Peterson: Ce sont deux questions importantes, monsieur Pillitteri.

Tout d'abord, dans nos règles transitoires, nous allons permettre à toute filiale d'une banque étrangère au Canada de transférer à sa succursale toute perte fiscale qu'elle aurait subie jusqu'à maintenant. Aujourd'hui, dans les faits, l'entité qui paie des impôts n'est plus la filiale canadienne; c'est la banque étrangère qui est constituée en société dans notre pays. Pour les fins de la fiscalité, toutefois, nous traitons cette succursale canadienne exactement de la même manière que la filiale.

Donc, pour les fins de la fiscalité, nous séparons les opérations de la succursale canadienne de la banque mère et nous la traitons de la même manière que la filiale. Tout ce que nous faisons, c'est permettre un report transitoire pour la conversion de la filiale en une succursale.

Très franchement, nous avons quelques raisons de faire cela. Tout d'abord, en 1980, nous avons obligé les banques étrangères à s'installer au Canada sous forme de filiales. Nous ne leur avons pas permis d'établir des succursales, interdiction inconnue dans tous les autres pays de l'OCDE, sauf le Mexique, et le Canada aujourd'hui. Ce qui nous met donc à l'écart du secteur international des services financiers, et nous voulons corriger cela. Nous ne pensons pas que ces banques devraient être pénalisées indûment parce que nous ne leur avons pas donné le choix lorsqu'elles ont établi des filiales chez nous. C'est essentiellement la raison pour laquelle nous proposons cela.

De même, nous voulons nous assurer qu'il n'y a pas d'obstacle fiscal à l'élargissement de leurs opérations et à leur accès aux capitaux étrangers pour faire affaire au Canada.

Votre seconde question porte sur le régime réglementaire. Vous avez parfaitement raison: l'organisme de réglementation de toute succursale étrangère sera l'organisme de réglementation de son pays d'origine, que ce soit les États-Unis, la Hollande, l'Allemagne, l'Angleterre ou la France—peu importe. Si ces banques conservent cependant des filiales au Canada, alors le BSIF sera le principal organisme de réglementation de ces filiales, mais comme elles le font aujourd'hui, elles vont consulter fréquemment l'organisme de réglementation du pays d'origine. Si elles établissent une succursale, en plus de cette filiale, ou si elles établissent simplement une succursale, la réglementation canadienne pèsera beaucoup moins.

Une succursale à services complets qui peut accepter des dépôts de plus de 150 000 $, mais seulement d'investisseurs avertis, ne sera pas assujettie au même degré de surveillance qu'une succursale au détail. Ainsi le BSIF exercera un certain degré de contrôle sur ces entités.

S'il ne s'agit que d'une succursale de prêt au Canada, cependant, qui n'accepte aucun dépôt, alors le degré de contrôle sera très faible. Je pense que c'est l'orientation que vont prendre de nombreuses banques étrangères dans la mesure où elles vont prêter davantage à des entrepreneurs canadiens.

La banque étrangère qui voudra donc s'installer au Canada aura trois options. Chacune sera assujettie à un degré de contrôle qui sera fondé non pas sur leur identité mais sur leurs activités.

M. Gary Pillitteri: J'aime bien ce passage dans votre exposé où vous dites que les déposants qui ont plus de 150 000 $ sont avertis.

• 1110

Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous. Je connais beaucoup d'immigrants qui connaissaient mal la langue anglaise, et je me demande ce qui arriverait si ces banques commençaient à leur offrir 0,5 p. 100 ou 1 p. 100 de plus en intérêt, ce qui, vraiment, en tant que Canadiens...

Ce que je veux dire, c'est que j'ai la certitude qu'il y a beaucoup de gens qui ne sont pas aussi avertis qu'on le croirait mais qui ont plus de 150 000 $ en banque. Quelle garantie pouvons- nous leur donner, à part le fait de dire que vous êtes...? Dans quelle mesure allons-nous informer ces gens?

M. Jim Peterson: Cela fera toujours problème. Vous faites référence à des choses qui se sont passées dans les années 70 et 80, lorsque certaines fiducies ont fait faillite au Canada. Elles ont fait perdre beaucoup d'argent à des Canadiens qui y avaient déposé plus que le montant permis, plus que le montant protégé par la SDAC, à savoir 60 000 $. Un bon nombre de ces institutions offraient des taux d'intérêt excessifs, et par conséquent, ont dû faire des placements très risqués pour récupérer les frais d'intérêt qu'elles payaient sur ces dépôts.

La meilleure protection que l'on a probablement contre ces institutions qui nous font perdre de l'argent, c'est un bureau du surintendant des institutions financières vigilant, doté d'un personnel compétent et très actif. Je ne peux pas le souligner assez. C'est sans doute pour moi l'aspect le plus important de mon mandat à titre de secrétaire d'État: m'assurer que notre secteur des services financiers est protégé par des mesures prudentielles. Je ne veux pas qu'il y ait de faillites et je ne veux pas non plus que les déposants canadiens subissent des pertes, qu'il s'agisse de déposants avertis, gros ou petits.

Je vais être très franc avec vous: Nous traversons une époque prospère maintenant, et notre secteur des services financiers est en excellente santé, mais si nous sommes victimes d'une forte récession, nous ne pourrons pas toujours garantir cela, et nous ne pourrons pas protéger les Canadiens contre les échecs des institutions financières.

Je pense que votre comité peut jouer un rôle important ici, dans ses rencontres avec le Bureau du surintendant des institutions financières, en s'assurant que ces choses soient connues de tous et en contrôlant le travail qu'effectue le BSIF.

C'est notre première ligne d'attaque. La seconde, c'est d'informer les gens par écrit que ces dépôts de 150 000 $ ou davantage ne sont pas protégés par la SDAC. Cette mention sera affichée dans toutes les banques étrangères qui s'installeront ici. Cette mention figurera sur tout document relatif à ces dépôts.

À part cela, si votre comité a d'autres suggestions, nous les écouterons avec intérêt.

M. Gary Pillitteri: J'ai en effet une suggestion.

Je propose qu'en plus des exigences dans nos règlements relatives aux deux langues officielles, l'on oblige les banques à communiquer les renseignements dans la langue des gens, qu'il s'agisse de l'italien, du polonais ou de l'allemand. Ce sont ces personnes qui vont faire de tels dépôts dans ces banques et qui ont besoin qu'on leur communique ces choses dans leur propre langue, parce que ces dépôts-là ne seront pas garantis.

M. Jim Peterson: Monsieur Pillitteri, je pense que c'est une très bonne suggestion. Je pense que la meilleure façon de mettre en oeuvre une telle idée, c'est d'en discuter avec ces banques qui acceptent des dépôts de gros ici au Canada. Je pense qu'il vaut la peine d'en discuter avec ceux qui travaillent au niveau du détail dans une filiale canadienne et qui desservent des groupes qui sont venus au Canada de divers pays et qui ont du mal à maîtriser l'une des deux langues officielles du Canada.

Je crois donc que la meilleure façon de donner suite à votre suggestion, ce n'est pas de procéder par voie de règlement ou d'amendement législatif, mais par voie de discussion avec chaque banque. Vous voudrez peut-être contrôler cette situation dans un an d'ici pour voir dans quelle mesure l'on met votre suggestion en oeuvre, sur une base volontaire, pour combler répondre aux besoins de clients particuliers.

M. Gary Pillitteri: Merci beaucoup.

• 1115

Le président: Merci, monsieur Pillitteri.

Nous allons passer à Mme Leung, suivie de M. Loubier et, ensuite, de M. Bonin.

Mme Sophia Leung (Vancouver Kingsway, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, je vous remercie pour ces propositions.

J'ai quelques questions à vous poser. Premièrement, je comprends que les banques étrangères sont moins présentes et que leur part du marché est tombée de 12 p. 100 pour se situer à 10 p. 100. Je me demande si les banques étrangères vous ont pressentis, vous ou votre ministère, pour faire valoir leurs préoccupations ou vous demander ces changements.

De même, après que ce nouveau projet de loi aura été adopté, seront-elles en meilleure posture?

M. Jim Peterson: Ce sont des questions importantes et je vous en remercie.

Oui, depuis que le Canada s'est ouvert aux banques étrangères au début des années 80, la présence des banques étrangères a diminué en fait, et leur pourcentage du marché canadien a diminué. Je pense qu'il y a deux raisons à cela. À mon avis, la raison la plus importante tient au fait qu'elles se sont butées à une très forte concurrence des banques canadiennes existantes, des banques qu'elles ont trouvé extrêmement bien implantées partout au pays.

Nous avons au Canada un système du succursales bancaires qui fait l'envie de beaucoup dans le monde. Notre système de réglementation des banques fait aussi l'envie de beaucoup dans le monde. À mon avis, un grand nombre d'entre elles n'ont tout simplement pas trouvé aussi facile de prendre pied au Canada à cause de la concurrence existante, ou elles ont trouvé aussi que ce n'était pas aussi facile que dans plusieurs autres pays du monde. Voilà pourquoi certaines d'entre elles ont plié bagage.

La deuxième raison, bien sûr, explique pourquoi nous proposons ce projet de loi aujourd'hui. Ce projet de loi vise à adapter le degré de réglementation aux activités qui sont menées ici au Canada. Autrefois, nous avions une manière très archaïque, je crois, de réglementer nos institutions financières. La réglementation était fonction de votre identité—c'est-à-dire que si vous étiez une banque provenant d'un autre pays, ou si vous étiez une banque faisant partie d'une chaîne mondiale, vous étiez réglementé comme une banque canadienne, même si tout ce que vous faisiez, c'était émettre des cartes de crédit ou prêter à des Canadiens.

C'est maintenant l'activité qui compte. Si vous ne faites que prêter à des Canadiens, vous serez alors assujetti à un degré de réglementation beaucoup moindre, et les exigences relatives aux capitaux ne seront pas les mêmes que si vous acceptez des dépôts—des dépôts de gros, par exemple, comme dans une succursale à services complets, ou qui accepte des dépôts au détail, par exemple une filiale. Donc en adaptant le régime réglementaire et les exigences relatives aux capitaux aux opérations en particulier, nous donnons à ces banques la souplesse qu'il leur faut pour être plus compétitives.

Voilà pourquoi tant de banques nous ont dit qu'elles voulaient voir le Canada adopter ce régime. Tout d'abord, elles y trouveront plus d'avantages, mais aussi, cette façon de faire sera compatible avec les mesures qui ont été mises en oeuvre dans tous les autres pays de l'OCDE, sauf le Mexique.

J'espère donc voir les banques étrangères augmenter leurs activités en conséquence de ce projet de loi.

Mme Sophia Leung: D'accord.

Le projet de loi C-67 permettra à une banque étrangère de transférer ses actifs existants et les dettes fiscales qui y sont associées aux succursales canadiennes nouvellement créées. C'est un aspect intéressant.

Vous avez dit qu'il y aurait une limite de temps ici, quoi, un an, trois ans, cinq ans? Qu'est-ce qui motive cela?

M. Jim Peterson: Merci. Je vais demander ici à Paul Berg- Dick de répondre.

M. Paul Berg-Dick: Oui, il y a une limite de temps ici qui permet aux banques de décider si elles veulent profiter de cette option. Elles doivent ensuite demander à l'organisme de réglementation la permission d'ouvrir une succursale. Elles auront jusqu'à la fin de l'an 2002 pour compléter cette transaction. C'est en fait dans les six mois après qu'elles ont reçu la permission d'ouvrir une succursale ou la fin de l'an 2002.

Cela leur donne la possibilité de décider de l'approche qu'elles veulent prendre et de voir ensuite si elles veulent tirer parti de cette disposition.

Mme Sophia Leung: Merci.

• 1120

[Français]

Le président: Monsieur Loubier.

M. Yvan Loubier: Une dernière question, monsieur le ministre. Vous avez mentionné tout à l'heure que vous déposerez probablement en juin un livre blanc en réponse au rapport MacKay. Quelles seront les suites du dépôt de ce livre blanc? Autrement dit, devrait-on s'attendre à ce que l'hiver prochain, par exemple, on puisse compléter la révision de la Loi sur les banques afin de tenir compte des grandes lignes du livre blanc, qui seront peut-être enrichies des débats que nous aurons ici et des consultations que nous tiendrons là-dessus? Quel est l'horizon et quelles sont les pièces de l'échiquier?

M. Jim Peterson: Mon problème, monsieur Loubier, est que je suis trop impatient.

M. Yvan Loubier: Moi aussi.

M. Jim Peterson: J'aimerais que nous puissions appliquer les dispositions des nouvelles lois cette année, avant Noël, mais ce n'est peut-être pas réaliste.

Nous déposerons un rapport avant juillet et j'espère que nous serons en mesure de présenter un projet de loi en septembre ou octobre et que votre comité aura l'occasion d'entendre des témoins au sujet des modifications que nous proposerons. Il sera très important que nous puissions bénéficier de la réaction de votre comité.

M. Yvan Loubier: Croyez-vous que les modifications que vous déposerez sauront vraiment fermer la boucle de la réforme de la Loi sur les banques qui a débuté en 1997? Vos propositions nous permettront-elles de compléter la révision de l'ensemble des aspects qui n'avaient pas été couverts lors de la révision de 1997?

M. Jim Peterson: Oui. Nous espérons que notre réponse au rapport MacKay sera complète, bien que nous soyons tous conscients que les projets de loi ne sont jamais parfaits. Nous sommes toujours prêts à entendre les amendements et suggestions qui nous sont soumis, sachant que seule une discussion avec tous les joueurs nous permettra de parfaire les dispositions de la loi. Nous ferons tout notre possible. Nous avons bénéficié de vos suggestions dans le passé et des discussions publiques qui ont eu lieu au cours des deux dernières années.

J'espère que nous pourrons adopter ce nouveau projet de loi sans trop de problèmes. Grâce à votre collaboration, nous pourrons perfectionner nos propositions et mettre en vigueur les dispositions de ce projet de loi aussi vite que possible.

M. Yvan Loubier: Si votre projet de loi est bon, monsieur le ministre, il n'y a aucune raison qu'on ne l'appuie pas.

M. Jim Peterson: On verra. Je suis bien confiant de pouvoir compter sur votre collaboration.

M. Yvan Loubier: Merci infiniment.

Le président: Monsieur Bonin.

M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.): Monsieur le ministre, merci de votre intéressante présentation. Bien que je ne sois pas un membre permanent de ce comité,...

M. Jim Peterson: C'est dommage.

M. Raymond Bonin: ...je n'ai pas eu trop de difficulté à comprendre.

[Traduction]

J'ai une question. Vous dites que grâce à cette loi, les banques étrangères pourront ouvrir des succursales ou des filiales. Pourront-elles réunir les deux types d'établissement sous un même toit, et dans l'affirmative, comment allons-nous protéger le consommateur non averti?

M. Jim Peterson: Non, ils ne seront pas sous un même toit.

Nous prévoyons que la banque qui continuera à accepter des dépôts de détail par l'intermédiaire d'une filiale canadienne ne pourra pas créer de succursales de prêt. Elle pourra ouvrir une succursale offrant tous les services, qui pourra notamment accepter les dépôts en gros, mais les deux établissements ne pourront pas fonctionner dans le même bâtiment. Ils devront être séparés, car ils font appel à des clientèles différentes, et nous tenons à prévenir tout risque de confusion.

• 1125

Il peut y avoir confusion dès qu'on trouve le mot «banque» sur une succursale de prêt offrant tous les services. C'est pourquoi nous mettons tout en oeuvre pour prévenir ce genre de confusion.

Par ailleurs, la proposition de M. Pillitteri est intéressante pour les gens qui ont des besoins linguistiques particuliers.

M. Raymond Bonin: Oui, car lorsque les baby-boomers commenceront à laisser leurs biens à leurs enfants, 150 000 $ ne représentera pas une très grosse somme.

Le fait de ne pas permettre la présence des deux types d'établissement sous un même toit est une bonne protection pour eux.

M. Jim Peterson: Merci.

Pour moi, 150 000 $ représente une grosse somme d'argent.

Des voix: Ah, ah!

M. Raymond Bonin: Je ne crois pas tout ce que j'entends à Ottawa.

Des voix: Ah, ah!

M. Jim Peterson: Moi aussi, je suis un baby-boomer.

M. Raymond Bonin: Ça, je le crois.

M. Jim Peterson: Vous ne devriez pas.

Des voix: Ah, ah!

Le président: Monsieur Ritz.

M. Gerry Ritz: Merci, monsieur le président.

Le président: Qu'en pensez-vous? Est-ce que 150 000 $ représente une grosse somme d'argent?

M. Gerry Ritz: Oui, c'est beaucoup d'argent, en particulier pour nous autres, pauvres agriculteurs.

Monsieur Peterson, donnez-moi une précision. Le projet de loi C-67 va manifestement dans la bonne direction et nous n'aurons pas de mal à l'approuver, mais en plus des changements importants qu'il apporte à la Loi sur les banques, il modifie aussi la législation fiscale. Or, on ne voit pas ces derniers changements. Vous avez parlé d'une motion des voies et moyens présentée à une date ultérieure, et j'aimerais savoir pourquoi on ne nous a pas remis une documentation complète.

M. Jim Peterson: Je vais vous parler bien franchement. Nous avons déposé des motions des voies et moyens le 11 février pour certaines dispositions. Je vais vous dire exactement ce qui s'est passé.

Après avoir déposé ce projet de loi, nous avons reçu d'autres demandes des banques étrangères et des banques de l'annexe I qui voulaient être autorisées, à titre transitoire, à effectuer des transferts libres d'impôt vers les succursales.

Nous avons demandé des détails, car nous ne pouvons donner ce genre d'autorisation à la légère. Il y a quelque temps, on nous a indiqué les conséquences fiscales éventuelles d'une telle demande et ses conséquences négatives sur le passage au statut de succursale, et nous avons dû décider si nous pouvions accorder cette faveur transitoire aux banques. Nous avons jugé très important de le faire pour les motifs que j'ai indiqués. Au départ, nous avons obligé les banques à faire affaire au Canada dans les conditions archaïques que vous connaissez, ce à quoi nous nous sommes engagés à renoncer vis-à-vis de l'OMC. Évidemment, nous voulions que ces banques fassent partie de ce vigoureux deuxième groupe de services financiers au Canada.

Nous n'avons pas encore arrêté la formulation exacte de la loi mais nous avons indiqué de façon précise que nous allions accorder à titre transitoire ce transfert libre d'impôt qui n'est pas étranger à notre régime fiscal.

Les documents ne sont pas encore prêts, mais nous les déposerons en temps utile, après avoir consulté tous les intéressés, comme nous l'avons fait lors de la rédaction de tous les autres documents.

M. Gerry Ritz: Est-ce que cela va modifier votre calendrier?

M. Jim Peterson: Non. Nous procéderons sans doute par une motion des voies et moyens.

Paul, c'est prévu pour quand?

M. Paul Berg-Dick: D'ici la fin de l'année.

M. Jim Peterson: Nous la déposerons certainement avant...

D'après nos discussions avec les banques étrangères, l'absence des détails dans la législation fiscale actuelle ne les empêche pas de passer au statut de succursale.

M. Gerry Ritz: C'est parfait.

Merci.

Le président: Merci, monsieur Ritz.

Je voudrais revenir sur la question posée par Mme Leung. Vous avez répondu en disant que jusqu'à maintenant, vous avez réglementé en fonction de l'identité des banques, et non pas en fonction de ce qu'elles faisaient au Canada. Vous vous souvenez d'avoir dit ça, n'est-ce pas?

M. Jim Peterson: Oui.

Le président: Par conséquent, est-ce qu'on passe d'une réglementation par institution à une réglementation par fonction?

• 1130

M. Jim Peterson: Je dirais que oui. C'est le résultat inéluctable de la quasi-dissolution ou l'abandon des quatre piliers traditionnels, et on constate dans le monde entier que les institutions financières ont changé. Il y a eu des convergences, et des institutions financières offrent une gamme de services dans toutes sortes de domaines. Il est donc illogique de vouloir réglementer en fonction de la situation de succursale que l'on attribue à une banque qui n'est même pas présente au Canada.

Il y a encore quelques années, une législation vétuste prévoyait que si une structure bancaire comportait une succursale quelque part dans le monde, elle était automatiquement qualifiée de succursale, et c'est encore ce qui se passe actuellement dans une certaine mesure.

Nous voulons nous départir de ce genre de mentalité pour alléger notre réglementation de façon qu'elle protège les Canadiens quand il faut, et qu'elle assure un contrôle de prudence quand il faut, alors que lorsqu'il n'y a pas d'intérêts canadiens à protéger, comme dans le cas d'un établissement qui ne fait que du prêt ou de la carte de crédit, la seule chose dont on doit s'inquiéter est la pleine divulgation des coûts, des taux d'intérêt et des frais de service. Il n'y a pas à se préoccuper de l'élément de prudence.

Si une banque étrangère qui a consenti des prêts à des Canadiens fait faillite, ces derniers n'ont pas vraiment à s'en inquiéter. Peut-être devront-ils rembourser un peu plus tôt, mais ce n'est pas comme s'ils avaient fait des dépôts auprès de cette banque.

C'est pourquoi nous essayons d'orienter notre législation de la façon que vous avez évoquée.

Le président: Est-ce que vous envoyez des messages particuliers?

M. Jim Peterson: J'espère que nous envoyons quelques messages, notamment que notre secteur des services financiers est sans doute l'un des plus importants au Canada, que nous voulons suivre l'évolution mondiale et s'en inspirer dans l'élaboration d'un régime réglementaire conforme au besoin de prudence et de protection des consommateurs, mais qui ne constitue pas de fardeau excessif, et qu'effectivement, les consommateurs bénéficient d'une protection supplémentaire lorsqu'ils en ont besoin.

Je pense que tous ces thèmes vont apparaître dans notre réponse au rapport MacKay, et c'est l'amorce d'une tendance qui consiste à s'interroger sur l'objectif public visé par la réglementation dans un domaine, et à alléger le régime de réglementation lorsqu'il ne sert pratiquement aucun objectif public dans le cas d'une banque qui n'offre que certains services.

Le président: Je sais que nous parlons ici de banques étrangères, mais quand on y réfléchit, si l'on passe effectivement de la réglementation par institution à la réglementation par fonction, la prochaine étape devrait être l'adoption de cette même perspective dans l'ensemble du secteur des services financiers au Canada, n'est-ce pas?

M. Jim Peterson: C'est une très bonne question. Votre comité a proposé plusieurs réponses au rapport MacKay. Dans votre excellent rapport, vous avez proposé que l'on renforce la réglementation pour protéger les consommateurs, et qu'on l'allège vis-à-vis des institutions qui présentent moins de risque.

Le gouvernement et le Parlement ont l'obligation, vis-à-vis des institutions financières, de réviser constamment de régime de réglementation pour vérifier s'il atteint les objectifs visés en faveur des Canadiens, sans imposer de fardeau excessif aux banques. Nous sommes en concurrence à l'échelle mondiale, et on ne peut contourner la mondialisation. Nous avons l'obligation de collaborer avec nos institutions financières pour leur proposer l'un des meilleurs régimes réglementaires au monde, sinon le meilleur.

• 1135

Le président: Évidemment, vous avez lu notre rapport. Dites- moi donc ce que signifie ce changement par rapport au modèle de société de portefeuille.

M. Jim Peterson: Comme le groupe MacKay et le comité sénatorial, vous avez demandé que l'on accorde aux banques et aux autres institutions financières davantage de souplesse dans l'organisation de leurs activités.

Dans le cas des banques étrangères—, et c'est sans doute le sens de votre question, monsieur le président—on constate que grâce au régime réglementaire plus souple, en fonction des activités réalisées au Canada selon les trois modalités différentes... et les banques ne peuvent pas le faire actuellement. Les banques n'ont pas de sociétés de portefeuille. Toutes les activités d'une banque doivent relever directement de celle-ci et sont assujetties au très lourd régime de réglementation des opérations de détail.

C'est pourquoi vous avez proposé que l'on autorise les sociétés de portefeuille pour donner plus de souplesse aux activités. Évidemment, nous avons lu vos propositions avec un grand intérêt et nous allons y répondre dans un proche avenir.

Cela étant dit, je sais que le BSIF s'inquiète toujours du risque qu'un dérapage de la société de portefeuille se répande par contagion dans l'ensemble de la structure du groupe. Sur cette question, il faut respecter l'équilibre entre le besoin de souplesse et une structure d'activité qui fasse prévaloir la prudence et la saine gestion des institutions financières, de façon qu'au sein d'une structure plus complexe, on puisse éviter qu'un élément contamine les autres.

C'est là notre préoccupation. C'est une question de compromis.

Le président: J'ai peut-être tendance à vouloir aller trop loin, mais si on passe à la réglementation par fonction, cela signifie que le modèle de la société de portefeuille n'est pas une mauvaise idée.

M. Jim Peterson: Je ne veux pas révéler à l'avance la réponse du ministère au rapport MacKay, mais je peux vous dire ceci: nous prenons toujours très au sérieux les recommandations de ce comité.

Le président: Après l'importante distinction que vous avez faite, je serais bien étonné que le gouvernement ne retienne pas le modèle de la société de portefeuille.

M. Jim Peterson: Nous avons toujours pris vos avis et vos propositions au sérieux, mais dans ce domaine, les choses ne sont jamais tranchées. En politique, lorsqu'une situation ne fait que des gagnants, elle passe rapidement et on l'oublie. Il n'y a pas de désaccord. Il faut toujours faire des compromis. Ne risque-t-on pas de sacrifier la possibilité de réglementer une institution selon le principe de prudence?

Comme je l'ai dit, nous devons prévoir les difficultés à venir. Nous devons nous doter d'un régime de réglementation capable de supporter les assauts d'un éventuel ralentissement de l'économie. Le principe de prudence est donc toujours à l'avant- scène de nos priorités.

Le président: Mais, monsieur le ministre, si l'on considère tous les changements qui se manifestent dans le secteur des services financiers, est-il encore raisonnable de réglementer par institution?

M. Jim Peterson: Je crois que nous évoluons dans la direction que vous avez proposée en adaptant le régime réglementaire à la réalité des activités effectuées au Canada. C'est du reste le modèle qui a été adopté par de nombreux autres pays.

• 1140

Encore une fois, soyez assurés de ceci: Ma préoccupation principale sera toujours la gestion prudentielle que nous avons pratiquée jusqu'ici explique en partie l'excellence réputation dont nous jouissons dans le monde. Les institutions de services financiers canadiens sont très respectées, en partie à cause de notre régime de réglementation.

Le président: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

Je crois que nous avons entendu pas mal de réponses aujourd'hui, et j'aimerais remercier le ministre et ses collaborateurs pour l'exposé fouillé et instructif qu'ils nous ont présenté, encore une fois.

Notre prochaine réunion aura lieu aujourd'hui à 15 h 30.

M. Jim Peterson: J'aimerais dire un grand merci aux députés pour l'aide et les suggestions qu'ils nous fournissent continuellement.

Le président: La séance est levée.