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TRAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON TRANSPORT

LE COMITÉ PERMANENT DES TRANSPORTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 9 juin 1999

• 1524

[Traduction]

Le président (M. Raymond Bonin (Nickel Belt, Lib.)): Nous allons ouvrir la séance.

Je vous remercie tous de votre présence ici et je remercie particulièrement M. Angus Kinnear, le président de Canada 3000. Nous sommes réunis conformément au paragraphe 108(2) du Règlement pour faire une étude sur la compétitivité du système de transport aérien du Canada.

Bonjour, monsieur Kinnear. Comme je vous l'ai expliqué, nos séances se déroulent dans une atmosphère détendue et nous aimons procéder ainsi, car nous avons beaucoup de choses à apprendre de vous. Nous vous demanderons de nous faire un exposé, après quoi nous passerons aux questions. La parole est à vous.

M. Angus Kinnear (président, Canada 3000): Merci, monsieur le président et merci de m'avoir invité.

• 1525

Je vous ai fait distribuer des brochures et des horaires afin que vous ayez une idée de ce que nous sommes. Canada 3000 est une compagnie aérienne qui possède 15 appareils. Nous volons dans le monde entier, jusqu'à Sydney en Australie et en Europe, jusqu'à Vienne. Nos activités se répartissent entre quatre secteurs différents.

Environ 25 p. 100 de nos recettes proviennent du service que nous assurons sur les lignes intérieures. Comme vous le savez, depuis la déréglementation, nous pouvons aller vers n'importe quelle destination, faire payer n'importe quel tarif et adopter n'importe quel horaire. Les vols entre le Canada et les États-Unis nous rapportent 25 p. 100 de nos revenus et les endroits des États- Unis que nous desservons, notre marché étant celui des vacanciers, sont principalement la Floride, la Californie, Las Vegas et Hawaï. Nos destinations plus au Sud, par exemple nos vols nolisés vers le Mexique, les Antilles et des îles comme les Bahamas représentent également 25 p. 100 de nos recettes. Les derniers 25 p. 100 proviennent des vols nolisés transatlantiques vers l'Europe.

Nous avons ajouté un cinquième élément à nos activités, mais il ne représente encore qu'une faible proportion de notre chiffre d'affaires total. Nous avons un vol nolisé hebdomadaire vers Hawaï, Fidji et l'Australie. En fait, nous sommes la seule compagnie aérienne canadienne qui va jusqu'en Australie même si certaines autres affirment le faire également.

Nous desservons donc un vaste éventail de destinations et nous cherchons avant tout à fournir un service de transport aérien fiable et abordable au marché des vacanciers plutôt qu'à celui des voyageurs d'affaires, ce qui représente la principale fonction des deux transporteurs nationaux, Air Canada et Canadien.

Bien entendu, le secteur du transport aérien a évolué au Canada au cours des années et chacun sait que le plus petit des deux transporteurs nationaux, soit Canadien, n'existerait pas sans son partenariat avec American Airlines.

En essayant de conserver deux transporteurs nationaux, le Canada se lance probablement dans une mission impossible étant donné que la plupart des autres pays, qui comptent une population beaucoup plus nombreuse, et qui ont voulu adopter le même genre de politique, n'ont pas réussi. J'ai la nette impression que la situation ne sera pas différente au Canada et que nous nous retrouverons avec un seul transporteur national et peut-être un petit nombre de petits transporteurs concurrents qui occuperont divers créneaux.

L'un des problèmes que crée la politique que le Canada a adoptée en décidant d'avoir deux transporteurs nationaux est que cela tend à affaiblir les deux compagnies. Cela désavantage particulièrement Air Canada, la plus solide des deux, et ne lui permet pas de soutenir efficacement la concurrence sur le marché mondial, comme elle pourrait le faire en l'absence des Lignes aériennes Canadien.

Au cours des cinq dernières années, la mondialisation du secteur du transport aérien a sans doute modifié de façon spectaculaire la dimension nationale de l'aviation. Il est beaucoup question de qui possède et contrôle les diverses compagnies aériennes. En fait, avec la mondialisation et les grandes alliances commerciales qui ont été conclues comme Star Alliance et Oneworld Alliance dans lesquelles Air Canada et d'autres compagnies ont uni leur force dans le cadre d'ententes de commercialisation, l'élément original de la propriété nationale disparaît sans doute presque entièrement.

Dans le cas d'Air Canada, la totalité des grandes décisions prises par Star Alliance se répercutent sur tous les membres de l'Alliance. Ce serait une erreur de croire que les grandes décisions qui touchent le groupe Star Alliance dont Air Canada fait partie sont prises à Montréal. Elles sont prises à Francfort et à Chicago où sont établies la Lufthansa et United Airlines, les principaux membres du groupe.

• 1530

Ce serait également se leurrer que de croire que Oneworld Alliance prend ses décisions à Calgary. Elles sont sans doute prises à Dallas et à Londres où se trouvent les bureaux d'American Airlines et de British Airways.

Compte tenu de cette association mondiale beaucoup plus vaste de compagnies aériennes, la façon dont nous considérions jusqu'ici la propriété de ces entreprises est sans doute chose du passé. Lorsque nous parlons des règles de propriété et de la possibilité de laisser des transporteurs étrangers ou des investisseurs étrangers posséder des compagnies aériennes, c'est sans doute déjà chose faite sauf que la loi n'a pas encore rattrapé la réalité. Je ne crois pas que les transporteurs aériens seront nécessairement nationaux d'ici 10 ou 15 ans; il s'agira d'entités internationales qui se comporteront comme toute autre grande entité internationale. Il ne s'agira plus d'entités purement nationales comme par le passé.

Est-il essentiel de maintenir les règles de propriété actuelles? Je ne crois pas qu'elles soient efficaces. Elles ont fait leur temps et elles n'auront aucun effet sur l'avenir du secteur du transport aérien. Pour le moment, il s'agit de simples restrictions qui empêchent de reconnaître l'existence d'une industrie internationale.

Au Canada, les services sont très concurrentiels. Je crois que la structure actuelle des réseaux et la concurrence sur le marché répondent assez bien aux besoins de tout le monde. Je ne crois pas que la concurrence se trouve menacée par la façon dont les activités sont menées.

Je pense qu'il y aura deux grands changements à l'avenir et j'espère que le Canada ne se laissera pas distancer. En plus de la mondialisation des transporteurs aériens résultant de leur association dans des entreprises comme Star Alliance, le principal changement auquel nous assisterons sera sans doute l'élargissement de l'accord sur l'ouverture des espaces aériens, ce qui représente pratiquement la poursuite du libre-échange.

En ce qui concerne l'aviation canadienne, l'une de plus grandes réussites récentes, dont on a peu parlé, a été le succès avec lequel le Canada a pénétré le marché transfrontière à la suite de la déréglementation de ces routes. Il ne fait aucun doute qu'Air Canada s'est révélée comme un concurrent très efficace et qu'elle l'a fait avec un avion canadien. C'est une double réussite, le RJ ayant servi à pénétrer ce que tout le monde considérait comme une forteresse impénétrable.

Comme American Airlines contrôle déjà Canadien, les États-Unis possèdent en fait 50 p. 100 de notre marché national du fait de cette association. Nous aurions intérêt à conclure avec les États- Unis un accord sur l'ouverture des espaces aériens qui permettrait aux transporteurs des deux pays de desservir le marché national du Canada ou des États-Unis. Au Canada, l'une de nos difficultés vient de ce que nous n'avons que 30 millions d'habitants. Il y en a 260 millions aux États-Unis. C'est un marché 10 fois plus gros que le nôtre. En tant que transporteurs canadiens, nous avons pu démontrer que nous étions très concurrentiels et que nous pouvions travailler dans ces marchés.

Pour le moment, les gouvernements américain et britannique préparent un accord Bermuda II révisé qui conduira probablement à un régime de Ciels ouverts. Si c'est le cas, cela se répandra très rapidement dans le reste de l'Europe. On peut sérieusement envisager que les transporteurs européens auront le droit de transporter des passagers aux États-Unis d'ici trois à cinq ans.

• 1535

Nous ne pouvons pas nous permettre de nous laisser reléguer sur une voie de garage, au nord de la ligne rouge qui sépare le Canada des États-Unis et de ne pas pouvoir profiter d'un marché encore plus vaste. J'espère que nous pourrons créer un marché canado-américain et développer ensuite un marché Amérique du Nord- Europe. Cela me paraît inévitable et si les transporteurs aériens du Canada ne sont pas abandonnés à leur sort, il est essentiel qu'ils puissent participer aux marchés plus vastes qui sont créés par ces accords internationaux.

Un problème qui se pose actuellement dans l'aviation canadienne est celui de la privatisation des aéroports canadiens, s'il est vrai que l'autre problème que nous avions ce matin a disparu étant donné que vous avez dit, monsieur le président, que Nav Can avait sans doute réglé son différend avec les syndicats.

Jusqu'à la cession des aéroports, Transports Canada gérait, bien entendu, le réseau d'aéroports du pays. La privatisation dont on a parlé n'était pas vraiment une privatisation. Les aéroports qui étaient gérés au niveau national ont été cédés aux autorités locales. Malheureusement, lorsque vous donnez à la classe politique l'occasion de bâtir quelque chose, elle a tendance à voir grand. La plupart des politiciens du pays tiennent à ce que leur aéroport soit une boîte de verre plus grosse que l'aéroport d'à-côté.

Du temps de Transports Canada, on ne pouvait entreprendre qu'un projet à la fois et si l'on construisait quelque chose en Alberta une année, Winnipeg devait attendre l'année suivante, et ainsi de suite. Au lieu d'avoir un aménagement plus ordonné de l'infrastructure aéroportuaire, pratiquement chaque aéroport du Canada est en pleins travaux de construction. Pour recouvrer le coût de ces travaux, on augmente les frais d'atterrissage et autres frais de service de façon exorbitante.

Une question très importante selon moi—et je ne suis pas du tout d'accord avec mes collègues de l'ATAC à ce sujet—est que l'ATAC négocie actuellement avec plusieurs de ses aéroports pour percevoir des frais d'améliorations aéroportuaires pour le compte des aéroports et les enterrer dans le prix du billet. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée étant donné qu'elle décharge les aéroports locaux de la responsabilité de justifier les dépenses qu'entraîne le programme d'agrandissement.

Comme Toronto laisse entendre que sa nouvelle aérogare va coûter 7,5 milliards de dollars, il semble bien qu'à l'avenir tous les passagers qui passeront par l'aéroport Pearson devront débourser environ 48 $ chacun pour avoir ce privilège. En ce qui nous concerne, comme nous transportons des familles à Orlando, à Disneyland ou ailleurs, je ne peux pas envisager qu'une famille qui part en vacances ait à payer près de 200 $ pour avoir le plaisir de passer par l'aéroport Pearson.

Nous devons vraiment essayer d'inciter les nouvelles administrations aéroportuaires à limiter leurs dépenses et à les justifier à l'électorat local qu'elles sont censées représenter. Rares sont les aéroports qui consultent les compagnies aériennes et je crains fort de voir augmenter dans une grande proportion des frais que nous avons très peu d'espoir de récupérer.

• 1540

Je crains que le développement actuel des aéroports ne nous fasse beaucoup de tort et ne nous empêche d'offrir aux Canadiens des tarifs aériens économiques. Compte tenu de la situation géographique du Canada, un vaste pays peu peuplé, le transport aérien est indispensable. Ce n'est plus une préférence, mais une nécessité pour faire des affaires et communiquer.

Il serait regrettable que nous essayions d'abaisser les tarifs et d'offrir un meilleur service, mais que ces efforts se trouvent compromis parce qu'on a construit de grandes infrastructures sans se soucier de leur coût et parce qu'il faudra inévitablement trouver un moyen de les payer. Ou il arrive aussi que ces coûts soient assumés par les contribuables, ce qui est le résultat inévitable de la façon dont on fait les choses actuellement.

Voilà donc notre position. Nous sommes pour le libre marché. Nous croyons que le secteur du transport aérien devrait être ouvert au maximum, qu'il faudrait négocier une réciprocité entre les divers pays afin de créer le climat le plus favorable qui soit au libre-échange. À l'heure actuelle, les transporteurs nationaux du Canada limitent notre compétitivité sur le marché mondial. Ces transporteurs devraient être représentatifs de l'industrie canadienne de l'aviation.

Je ne pense pas qu'il y ait lieu de se préoccuper de la concurrence. Il y aura toujours de la concurrence dans un libre marché.

Beaucoup de gens me demandent pourquoi nous ne desservons pas tel ou tel aéroport. Hamilton nous appelle pour nous dire: «Vous ne venez pas dans notre aéroport alors que vous allez à Pearson». Mirabel nous demande pourquoi nous ne sommes pas plus présents à Mirabel. J'essaie d'expliquer aux administrateurs de ces aéroports que si les gens voulaient se rendre là-bas pour prendre l'avion, nous y serions et que les jumbo jets attendraient en lignes interminables pour décoller. Nous offrons nos services là où les gens veulent aller. Ce n'est pas nous qui décidons. Le public choisit son lieu de destination et achète ses billets.

Tant qu'il sera possible d'augmenter le trafic et de répondre à la demande du marché—comme c'est arrivé depuis cinq ans au Canada—je ne crois pas que les membres du comité devraient s'inquiéter de la concurrence.

Le président: Merci beaucoup. C'était très intéressant.

Nous allons passer aux questions. Chacun aura cinq minutes au total pour la question et la réponse.

Nous allons commencer par M. Bailey et ce sera ensuite à M. Asselin, puis à M. Keyes.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Réf.): Merci, monsieur le président.

Je voudrais seulement quelques précisions, monsieur Kinnear. Vous avez dit que vous aviez une flotte de 15 appareils. Pourriez- vous nous indiquer de quel type d'appareil il s'agit? Est-ce que ce sont tous des 320?

M. Angus Kinnear: Nous avons six A-320, que nous utilisons dans la zone de l'Amérique du Nord.

M. Roy Bailey: C'est pour les vols nationaux.

M. Angus Kinnear: Pour les vols nationaux et transfrontières.

M. Roy Bailey: Très bien.

M. Angus Kinnear: Nous avons six Boeing 757 qui parcourent le monde. C'est notre avion le plus flexible. Nous l'utilisons pour développer nos réseaux et nos services.

La semaine dernière, nous avons pris livraison de notre troisième A-330, un gros porteur de 340 places et nous allons en recevoir un quatrième en mai, l'année prochaine.

Nous avons donc trois gros porteurs, six avions à fuselage étroit moyens-courriers et six appareils que nous utilisons pour le service local en Amérique du Nord.

M. Roy Bailey: Merci.

Il me manque des pourcentages. Vous avez dit que 25 p. 100 de vos revenus provenaient des vols intérieurs, 25 p. 100 des vols nolisés et 25 p. 100 des vols transatlantiques. Le reste provient- il de vos vols hebdomadaires vers Hawaï et l'Australie?

M. Angus Kinnear: Oui, nous desservons les États-Unis, la Floride, Las Vegas, la Californie et Hawaï.

M. Roy Bailey: Je voudrais vous poser une question. Dans votre exposé, vous avez mentionné que nos deux transporteurs, Air Canada et Canadien, avaient des difficultés sur le marché national et qu'ils risquaient tous les deux d'avoir des ennuis. Vous pensez qu'ils pourraient se fusionner avec ou sans l'intervention du gouvernement. Canada 3000 pourrait-elle desservir les destinations outre-mer tandis qu'Air Canada aurait l'exclusivité du marché national? Est-ce ce que vous avez dit?

• 1545

M. Angus Kinnear: Non, pas du tout. J'ai dit que le trafic est insuffisant sur le réseau canadien pour alimenter deux grandes compagnies aériennes. Air Canada et Canadien fournissent un très coûteux service de transport aérien à la demande. Je vais me servir d'une analogie.

Nous sommes un service d'autobus. Nous allons une ou deux fois par jour à Vancouver, à 10 heures ou à 15 heures. Vous faites la queue pour monter à bord de l'autobus. Nous vous offrons un tarif meilleur marché parce que plus de gens sont assis à l'arrière.

Air Canada est le service de taxi. À la fin d'une réunion, vous allez à l'aéroport pour prendre le vol de 18 heures, mais si vous arrivez à 17 heures, vous pouvez modifier votre horaire et partir une heure plus tôt.

Air Canada offre un service à la demande tandis que nous fournissons... en fait, nous desservons les gens qui paient de leur propre poche avec de l'argent durement gagné. La différence est que nos clients paient eux-mêmes leur billet tandis que ceux d'Air Canada et de Canadien ont leur billet payé par une organisation quelconque. C'est ainsi que se répartit la clientèle.

Le marché n'est pas assez grand pour qu'il soit rentable pour deux transporteurs d'offrir un service toutes les heures à partir de Vancouver, à midi, 1 heure, 2 heures, 3 heures et 4 heures. Et s'ils essaient de le faire, l'un des deux échouera. Ça ne veut pas dire qu'Air Canada devrait se réserver un secteur du marché et nous laisser l'autre, pas du tout. Il y aura automatiquement de la concurrence et nous assurerons cette concurrence, mais c'est la taille du marché qui déterminera la capacité nécessaire pour offrir ce service.

M. Roy Bailey: Puis-je poser une brève question, monsieur le président?

Le président: Oui.

M. Roy Bailey: J'ai l'impression que vous parlez de ces compagnies aériennes en disant qu'elles ont la clientèle d'affaires tandis que vous desservez la clientèle touristique. C'est cela?

M. Angus Kinnear: Un certain nombre de gens d'affaires voyagent à bord de nos avions. Nous ne transportons probablement pas le président du conseil d'administration, mais tous ceux qui gèrent des petites entreprises et pour qui l'argent est plus important que le temps.

M. Roy Bailey: Je reviendrai sur ce sujet.

Le président: Oui, au deuxième tour.

[Français]

Monsieur Asselin.

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Je vous souhaite la bienvenue au Comité des transports, qui a pour objectif d'étudier la compétitivité du système de transport aérien au Canada. Je me pose une question. Vous avez une très belle documentation, et je suis convaincu que vous avez une clientèle francophone, du moins au Canada où, comme vous le savez, il y a deux langues officielles, l'anglais et le français, et que cette clientèle francophone serait sûrement intéressée à lire cette excellente brochure qui, malheureusement, est exclusivement en anglais.

Je voudrais d'abord savoir si vous avez une clientèle francophone qui est intéressée à recevoir votre brochure et si cette brochure existe aussi en français.

Je vais vous laisser répondre à cette question et je reviendrai, monsieur le président, parce que je ne veux pas utiliser tout mon temps.

[Traduction]

M. Angus Kinnear: Je regrette, mais je n'ai pas compris votre question.

[Français]

M. Gérard Asselin: La traduction...

[Traduction]

Le président: Nous allons vous faire entendre l'interprétation. On vous a demandé si vous aviez une clientèle francophone. La publication que vous avez distribuée était unilingue et on vous a demandé si certains de vos passagers...

M. Angus Kinnear: Très bien. Nous avons une clientèle à Montréal...

Le président: Excusez-moi. Je voudrais simplement faire une observation...

[Français]

je vais le faire en anglais—

[Traduction]

à mon collègue. Canada 3000 n'est pas une société gouvernementale. Elle n'a aucune obligation, mais je comprends votre question. S'il s'agit d'un service à la clientèle, votre question est acceptable.

[Français]

Est-ce que vous recevez la traduction?

[Traduction]

M. Angus Kinnear: Maintenant, j'entends le français.

• 1550

[Français]

Le président: On recommence.

M. Gérard Asselin: Je vous souhaite la bienvenue au Comité des transports, qui a pour objectif d'étudier la compétitivité du système de transport aérien au Canada.

Je me pose quelques questions. Est-ce qu'il y a, parmi votre clientèle, des passagers unilingues francophones? Est-ce que vous offrez le service dans les deux langues officielles à votre clientèle? Il y a deux langues au Canada: l'anglais et le français. Dans vos appareils, lors des voyages, est-ce que votre personnel de bord offre le service dans les deux langues officielles du Canada, l'anglais et le français?

Je dois aussi vous féliciter pour votre excellente revue de marketing et d'information. Je déplore cependant qu'elle ne soit pas écrite dans les deux langues officielles. Vous en avez peut-être une version française qui pourrait être distribuée afin de mieux faire connaître votre compagnie et son produit aux francophones. Lorsqu'un francophone paie son billet d'avion pour un vol Montréal-Paris ou Montréal-Vancouver, son argent est aussi bon que celui d'un anglophone.

[Traduction]

M. Angus Kinnear: Tout d'abord, je vous remercie. Nous avons effectivement un service en français. Nous avons un équipage basé à Québec. Nous allons du Canada français jusqu'à Paris. Nous venons d'inaugurer un nouveau service Paris-Moncton parce que nous suscitons de l'intérêt dans les régions du Nouveau-Brunswick où s'étaient établies les premières colonies françaises. Ce service a un grand succès.

Toutes nos publications qui se trouvent à bord de nos appareils sont dans les deux langues officielles. Pour ce qui est de la brochure que vous avez sous les yeux, je peux vous la fournir en français. Je peux également vous la fournir en allemand et en néerlandais. Je peux aussi vous la fournir en portugais étant donné que nous desservons toutes ces communautés internationales. À bord de nos avions, lorsque nous volons vers la Hollande, nous avons des gens qui parlent le néerlandais. Lorsque nous volons vers l'Allemagne, nous avons des gens qui parlent l'allemand. Lorsque nous allons en France, nous avons des gens qui parlent le français. Lorsque nous allons au Portugal, nous avons des gens qui parlent le portugais. Lorsque nous allons en Espagne, nous avons des gens qui parlent l'espagnol. Lorsque nous allons en Australie, nous avons des gens qui parlent l'Australien. Nous desservons le marché en tenant compte des besoins.

Je regrette de ne pas parler français. Mon accent vous dira sans doute que je suis originaire de Grande-Bretagne. Je ne me suis pas bien entendu avec la maîtresse chargée de m'enseigner le français et lorsque je fréquentais l'école en Grande-Bretagne, on m'a fait travailler le bois. Je peux donc construire une table, mais je ne peux malheureusement pas parler français.

Des voix: Oh, oh!

M. Gérard Asselin: J'en suis désolé.

[Français]

Vous auriez un excellent français, mon cher ami, si vous aviez eu une maîtresse française.

[Traduction]

Des voix: Oh, oh!

Le président: Monsieur Keyes.

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Merci, monsieur le président. Merci, monsieur Kinnear, de votre exposé. Sans vouloir vous insulter, j'aimerais savoir où vous avez acheté votre boule de cristal qui vous a renseigné sur l'avenir du secteur du transport aérien, car j'aimerais bien m'en procurer une.

• 1555

Pour ce qui est des autres compagnies aériennes, par exemple, quand vous dites qu'il faudrait fusionner Air Canada et Canadien au lieu d'avoir deux transporteurs concurrents, je ne suis pas certain que le marché national serait mieux desservi étant donné que cela réduirait la concurrence sur la liaison Toronto-Ottawa, par exemple, qui est, comme vous l'avez dit, desservie à chaque heure. Cette concurrence pour les vols Toronto-Ottawa préserve l'honnêteté des compagnies aériennes si l'on sait quels sont les horaires de leurs vols et le prix de leurs billets.

Pour ce qui est d'avoir un seul transporteur, ce serait merveilleux si nous pouvions lire l'avenir dans une boule de cristal et trouver une solution permettant à Canadien et Air Canada de se fusionner et de desservir tous les deux le marché national ainsi que le marché international au lieu que ceux qui prennent l'avion pour se rendre à Ottawa constatent que le prix du billet est exorbitant parce qu'il n'y a pas de concurrence. Mais ce n'est pas M. Kinnear ou Stan Keyes ou le Comité des transports qui vont prendre cette décision pour les compagnies aériennes. Ce seront les gens qui achètent leurs actions.

M. Angus Kinnear: Si vous le permettez, la dernière fois que nous avons connu ce genre de situation, les gouvernements provinciaux et fédéral ont maintenu Canadien à flots. Canadien ne gagne pas d'argent sur ses vols Toronto-Ottawa et je doute que les gens de Dallas soient intéressés à subventionner vos déplacements entre Toronto et Ottawa ou qu'ils continueront de le faire. Inévitablement, un seul grand transporteur desservira cette route, car combien les Américains sont-ils prêts à perdre jusqu'à ce qu'ils décident de ne pas continuer à l'exploiter?

Mais si cela arrivait, d'autres gens entreraient sur le marché pour offrir ce service de façon légèrement différente. Je citerais l'exemple de WestJet dans l'ouest du pays. WestJet assure un service court-courrier très comparable au nôtre dont le succès dépend des bas tarifs plutôt que d'un service classe affaires. Elle a obtenu d'excellents résultats sur le marché de l'Ouest, mais en offrant un service différend de ce que les deux grands transporteurs ont à offrir.

M. Stan Keyes: Vous savez sans doute que le gouvernement n'a pas été seul à renflouer Canadien. Les employés ont également consenti un très grand sacrifice. Ils ont fait don de leur temps, d'argent, de réductions de salaire, etc., pour que la compagnie puisse survivre. Elle a encore des chances de résister. Peut-être va-t-elle devoir repenser la façon dont elle gère ses affaires. Peut-être qu'un jour les Lignes aériennes Canadien n'auront pas à disparaître, mais devront adopter des réformes en tenant éventuellement compte de vos suggestions.

L'autre question que je voulais aborder avec vous concerne ce que vous avez dit au sujet de l'aéroport Pearson et des lamentations des transporteurs devant la hausse des frais d'aéroport, des projets de rénovation et d'expansion qui doivent faire de l'Aéroport international de Toronto la principale plaque tournante du pays. Je dois en attribuer la responsabilité premièrement aux compagnies aériennes et, deuxièmement, à ceux qui vendent les billets.

Je viens de Hamilton et j'ai largement contribué à la promotion de l'aéroport de Hamilton, par exemple. Si Canada 3000, Canadien, Air Canada ou n'importe quelle compagnie aérienne décide que Toronto exige des frais trop élevés et qu'elle n'a pas les moyens de les payer... Vous avez dit que vous desserviez les destinations où les gens veulent aller. C'est vrai, mais vous pouvez également exercer une influence considérable sur les passagers et, tout à coup, si Canadien, Air Canada, Canada 3000 et d'autres estiment qu'il est plus avantageux d'opérer à partir de l'aéroport de Hamilton, si Toronto persiste à relever ses tarifs, ces compagnies décideront de déménager à Hamilton en Ontario.

• 1600

M. Angus Kinnear: Ce serait sans doute le résultat de hausses de tarifs importantes à Toronto. Il est certain que le coût de prestation d'un service influe sur le nombre de gens qui veulent l'utiliser et nous savons que le prix des billets d'avion en dépend dans une très large mesure.

À l'heure actuelle, il n'est pas rentable de déplacer un avion de Toronto à Hamilton. La différence de tarif n'est pas suffisamment importante pour convaincre les gens d'aller à Hamilton plutôt qu'à Toronto.

Si l'aéroport de Toronto continue son expansion comme il le fait et si les chiffres que j'ai cités se concrétisent, certains iront à Hamilton. Bien entendu, cela rendra les services d'autant plus coûteux pour ceux qui resteront à Toronto étant donné que si la clientèle baisse à Toronto, comme c'est inévitable si cela devient plus coûteux, ceux qui resteront devront assumer une part plus importante des coûts.

Selon moi, c'est ce que certains membres de la GTAA n'ont pas encore compris. Ils ont supposé qu'ils pourraient accroître énormément le trafic à Toronto et que cela paierait les coûts. Ils ne se sont pas encore rendu compte que si vous augmentez vos frais, vous diminuez le trafic.

[Français]

Le président: Monsieur Drouin.

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Monsieur Kinnear, veuillez excuser mon retard. J'ai dû aller à un autre comité. Je vais peut-être vous poser une question qui a déjà été posée.

Au tout début, avant que je ne quitte, vous disiez qu'on avait deux compagnies et qu'il y en avait une de trop. Ne croyez-vous pas que cela aurait un impact au niveau des coûts à la clientèle et que les grands perdants seraient alors les Canadiens et Canadiennes qui voyagent au Canada et dans les autres pays?

[Traduction]

M. Angus Kinnear: Je crois que vous avez mal compris ce que j'ai dit. Je vais essayer de le reformuler. De toute évidence, nous ne pouvons pas continuer d'avoir deux grandes compagnies aériennes nationales si l'une d'elles perd 100 millions de dollars par trimestre et l'autre 1 million de dollars. Cela ne peut pas continuer. Les choses vont devoir changer.

J'essaie de faire comprendre, premièrement, qu'en raison de la mondialisation du transport aérien, la concurrence subsistera s'il n'y a plus qu'un grand transporteur au Canada. Elle sera toujours là. Deuxièmement, si nous adoptons une politique de Ciels ouverts avec les États-Unis qui permettra aux transporteurs canadiens de se rendre aux États-Unis et aux transporteurs américains de venir au Canada... À l'heure actuelle, le fait que American Airlines contrôle Canadien signifie qu'elle a accès à 50 p. 100 du marché canadien, mais sans que nous ayons accès au marché national américain. Ce marché est entouré de fil barbelé et nous restons du mauvais côté de la frontière.

Nous devons veiller à ouvrir les marchés. Nous pourrons ainsi préserver la concurrence et avoir, dans l'aviation internationale, un représentant canadien qui sera en mesure d'exercer une influence.

C'est ce que j'essaie de faire comprendre. Une chose est absolument certaine, presque autant que la pesanteur, à savoir que l'industrie canadienne de l'aviation ne pourra pas survivre de la façon dont elle est actuellement structurée. Elle est déficitaire et personne n'est prêt à la renflouer à un tel rythme. La situation va changer. Il s'agit de savoir comment.

Une voix: Avec quelle rapidité?

M. Angus Kinnear: Oui, avec rapidité.

Le président: Voilà qui termine le premier tour de questions.

Monsieur Casey.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Merci beaucoup.

Je voudrais seulement avoir une idée de l'importance relative de Canada 3000. Je ne sais pas comment vous jugez les compagnies aériennes. Est-ce aux milles-passager? Est-ce un critère légitime?

• 1605

M. Angus Kinnear: C'est très difficile. Prenons les recettes totales. Nous avons actuellement un chiffre d'affaires d'environ 540 millions de dollars canadiens et nous transportons à peu près 2,7 millions de passagers par an, certains aussi loin que Sydney en Australie et d'autres de Toronto à Montréal ou de Montréal à Toronto, selon l'endroit dont vous partez.

M. Bill Casey: Et où se situent Canadien et Air Canada par rapport à ces chiffres?

M. Angus Kinnear: Air Canada est à peu près 10 fois plus gros que nous pour ce qui est du nombre d'avions et elle a probablement huit fois plus de passagers et des recettes huit fois plus élevées. Mais cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas beaucoup de gens qui ne pourraient pas accroître leur capacité si c'était nécessaire.

M. Bill Casey: Et Canadien?

M. Angus Kinnear: Canadien possède environ 125 appareils alors que nous n'en avons que 15 et elle atteint sans doute les deux tiers de la taille d'Air Canada pour ce qui est du millage et des revenus.

M. Bill Casey: Je m'étonne du nombre de vols que vous avez à votre horaire. Y a-t-il des périodes où vos avions restent au sol? Qu'en faites-vous s'ils ne sont pas utilisés?

M. Angus Kinnear: Nous sommes la compagnie aérienne exploitant des A-320 ou des 757 qui a le taux d'utilisation le plus élevé au monde. Si nous pouvons offrir des avions modernes et des bas tarifs c'est, comme notre collègue là-bas l'a mentionné tout à l'heure, non seulement parce que nous prenons 25 p. 100 de passagers de plus, mais aussi parce que nos avions volent 25 p. 100 de plus que ceux des grands transporteurs.

Air Canada attend l'homme d'affaires pour décoller le matin. Sa journée commence vers 7 h 30 et se termine le soir au retour de l'homme d'affaires. Tous ses avions se retrouvent au hangar pour 19 h 30 et volent sans doute huit heures par jour. Nous décollons à 6 h 30 le matin et nous rentrons à 1 heure du matin après une journée de 16 heures. Par conséquent, non seulement nous transportons 25 p. 100 de passagers de plus, mais nous faisons deux fois plus de vols dans une journée, et c'est grâce à cela que nous pouvons offrir des tarifs économiques.

Le président: Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Kinnear, je regrette, mais j'ai eu le même problème que mon collègue à savoir que j'avais deux réunions en même temps. Je vais vous poser une question à laquelle vous avez peut-être déjà répondu. Canada 3000 est-elle une société privée ou une société publique?

M. Angus Kinnear: C'est une société privée.

M. Roy Cullen: Est-elle rentable?

M. Angus Kinnear: Oui.

Une voix: Allez-vous acheter des actions?

M. Roy Cullen: Eh bien, à ce propos...

Réalisez-vous régulièrement un bénéfice, un bon rendement sur votre investissement?

M. Angus Kinnear: Je ne sais pas ce que vous considérez comme un bon rendement sur l'investissement, mais nous sommes en activité depuis 1988 et nous avons assez bien suivi les fluctuations du marché au cours des années.

Nous sommes assez bien positionnés car, au cours de la dernière récession, nous avons constaté que, lorsque les gens ont dû réduire leurs frais ou se soucier de leurs dépenses, ils ont délaissé les transporteurs à services à horaire fixe pour se tourner vers notre marché. Ensuite, quand tout va bien, les gens ont tendance à laisser de côté leur bicyclette et leur voiture pour s'adresser à nous.

Nous nous trouvons au milieu de la route, et nous suivons la direction du trafic dans un sens ou dans l'autre. Lorsque l'économie se porte bien, les gens ont un revenu disponible plus important. Ils vont davantage en vacances. Nos affaires vont bien. Lorsque l'économie décline et que les entreprises réduisent leurs dépenses, elles disent aux employés qu'ils doivent trouver un moyen économique de voyager et ils s'adressent alors de nouveau à nous. Nous profitons des deux tendances et c'est ce qui nous fait vivre.

M. Bill Casey: Comment vous positionnez-vous sur le marché? Est-ce en offrant des bas tarifs? Vous avez dit que vous vous débrouillez bien grâce à un taux d'utilisation plus élevé, mais pour ce qui est du marché, comment choisissez-vous vos destinations, par exemple, et comment vous positionnez-vous vis-à- vis d'Air Canada et de Canadien en particulier?

M. Angus Kinnear: La plupart de nos destinations sont des destinations touristiques. À part les destinations canadiennes pour lesquelles la clientèle est généralement composée de gens qui visitent des amis et des parents plutôt qu'une clientèle d'affaires, il s'agit de destinations touristiques. Par exemple, je parle souvent de Las Vegas. Les gens aiment aller à Las Vegas. Ils aiment aller à Los Angeles. Ils aiment aller en Floride et à Hawaï. Ils ne vont pas à Chicago. Peu de gens vont passer leurs vacances à Chicago. Nous sommes sur le marché du tourisme. Nous nous présentons comme un transporteur aérien fiable et abordable. Nous utilisons l'équipement le plus moderne et nous en faisons une très bonne utilisation. C'est ainsi que nous pouvons rentrer dans nos frais.

• 1610

Il ne faut pas non plus oublier que le Canada est une destination attrayante pour les étrangers. Personnellement, je crois que le potentiel de croissance du tourisme est plus important pour les voyageurs qui viennent au Canada que pour les Canadiens qui partent à l'extérieur. Il n'y a que 30 millions de Canadiens, mais il y a 260 millions d'Américains et 240 millions d'Européens. Cette année, 70 p. 100 de la clientèle de nos vols nolisés transatlantiques sont des Européens et non pas des Canadiens. La majorité de cette clientèle est constituée de gens qui viennent au Canada, principalement parce que les Canadiens n'ont pas les moyens d'aller passer plus d'une semaine en Europe.

Des voix: Oh, oh!

M. Angus Kinnear: Nos congés annuels sont beaucoup plus courts que ceux des Européens. Les Européens ont généralement un mois ou plus de vacances. Ils ont une monnaie forte et le Canada est pour eux un lieu de vacances très abordable. Par conséquent, un très grand nombre des passagers que nous transportons sont des Européens qui visitent le Canada plutôt que l'inverse. J'aimerais que ce soit la même chose aux États-Unis, mais ce n'est pas le cas.

Le président: Monsieur Dromisky.

M. Stan Dromisky (Thunder Bay—Atikokan, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'ignore si quelqu'un a déjà soulevé cette question. Je voudrais d'abord m'excuser de mon retard, mais la journée a été démente.

Les passagers qui deviennent enragés posent un problème. J'ai lu beaucoup d'articles à ce sujet. Vous emmenez les gens vers des endroits de vacances. Je ne vous demande pas ce que vous faites pour concurrencer les autres compagnies qui desservent à peu près les mêmes destinations, mais que peut-on faire pour remédier à ce problème? Les sièges sont-ils trop petits? Les avions sont-ils trop pleins? Les passagers sont-ils trop près les uns des autres? Le problème est-il aussi grave que le disent les articles que j'ai lus? Y a-t-il un manque d'oxygène? Le tabagisme est-il un facteur? Les gens qui n'ont pas fumé pendant des heures...? Il y a tellement de variables qui ont été invoquées que je me demande ce que vous faites ou ce que vous pensez de ce problème.

M. Angus Kinnear: Tout d'abord, je crois que c'est un phénomène de société. La société actuelle est beaucoup plus violente qu'elle ne l'a jamais été. Il suffit de lire le journal pour voir ce qui se passe dans les écoles et ailleurs.

Nous transportons des gens. Nous ne choisissons pas les gens qui prennent place dans nos avions. Ils nous choisissent. La situation est très différente lorsque vous enfermez quelqu'un dans un avion. En cas d'altercation ou d'incident dans un restaurant ou un bar, vous avez deux solutions. Premièrement, vous pouvez demander à l'intéressé de partir et, deuxièmement, vous pouvez appeler le 911. Quand vous êtes à 35 000 pieds au-dessus de l'Atlantique, vous n'avez ni l'une ni l'autre de ces possibilités.

Les gens que nous transportons à bord de nos avions sont les mêmes que partout ailleurs au Canada ou dans les autres pays. Le comportement de certains d'entre eux laisse certainement à désirer. Nous devons faire face à la situation comme nous le ferions dans toute autre circonstances, mais nous sommes assez limités alors que si nous étions au sol et dans un autre environnement, nous n'aurions sans doute pas à faire face à ce genre de problème.

Il nous est arrivé des aventures amusantes et d'autres qui l'étaient moins, mais la nature humaine étant ce qu'elle est, certaines personnes se comportent à bord d'un avion comme ils le font au sol et ce n'est pas toujours très joli.

M. Stan Dromisky: Merci.

Le président: Un deuxième tour, monsieur Bailey.

M. Roy Bailey: Merci, monsieur le président.

Monsieur Kinnear, vous avez fait allusion à l'augmentation des droits d'atterrissage dans les divers aéroports depuis qu'ils ont été... je ne devrais pas dire «privatisés», car ce n'est pas vraiment la bonne expression... Pourriez-vous m'indiquer le pourcentage d'augmentation approximatif à Pearson, par exemple? De combien les droits ou frais d'atterrissage ont-ils augmenté?

M. Angus Kinnear: Nous en sommes à 33 ou 34 p. 100, y compris 9 ou 10 p. 100 d'augmentation cette année.

M. Roy Bailey: Joyeux Noël!

M. Angus Kinnear: Au cours du dernier trimestre, les frais d'atterrissage qu'Air Canada a dû débourser au Canada se chiffraient à 192 millions de dollars... pour un seul trimestre. Cela représente un million par jour. Ce sont de gros chiffres. Ce n'est pas seulement une compagnie aérienne qui se plaint de l'augmentation de ces frais. Les frais augmentent de façon effrénée.

• 1615

M. Roy Bailey: Merci.

Vous avez également mentionné, monsieur Kinnear, qu'en ce qui concerne cette majoration des frais, la compagnie aérienne doit les récupérer d'une façon ou d'une autre, sur le prix du billet ou en imposant une taxe uniforme lorsque vous franchissez la porte. Mais si l'augmentation se poursuit au même rythme, n'y a-t-il aucun autre contrôle? Cela coûte un million de dollars par jour et nous n'en avons pas terminé avec cette privatisation si on peut l'appeler ainsi. Ai-je raison de croire que votre taxe sur le carburant n'a pas baissé non plus?

M. Angus Kinnear: Il y avait une taxe sur le transport aérien que l'on devait payer au gouvernement pour les services de Nav Canada et, bien entendu, pour les frais d'atterrissage. Malheureusement, tous les grands aéroports du pays ont entrepris un nouveau programme de construction. Au lieu de bâtir à Edmonton cette année, à Calgary l'année prochaine, à Vancouver l'année d'après et peut-être ensuite à St. John's et ailleurs, comme on l'aurait fait sous l'ancien régime de Transports Canada, parce que le ministère ne disposait que d'un budget limité, chacun des grands aéroports reconstruit pratiquement toute son infrastructure. C'est trop en même temps.

Il faut être très prudent lorsqu'on construit un aéroport. Les gens ne vivent pas dans les aéroports. Ils y arrivent et espèrent en repartir rapidement. Il faut un juste équilibre et, bien entendu, l'infrastructure représente une partie très importante des coûts. Certains de ces projets de construction ne seront pas remboursés avant 25, 30 ou 50 ans. L'infrastructure coûte extrêmement cher, ce qui alourdit énormément le coût du transport aérien au Canada.

Malheureusement, comme on cherche à enterrer ces frais dans le prix du billet d'avion, le grand public voit augmenter les prix, mais sans savoir pourquoi. Si les aéroports veulent percevoir des frais d'amélioration aéroportuaire, comme Vancouver et Montréal, ils devraient faire payer ces frais au public et également les justifier. Si les Montréalais veulent un nouvel aéroport flambant neuf et s'ils sont prêts à payer 10 $ chaque fois qu'ils le traversent, c'est très bien. Je ne crois pas que, pour le moment, les gens de Toronto savent quels sont les frais qui les attendent.

M. Roy Bailey: En effet.

M. Angus Kinnear: S'ils le savaient, les plans que l'on a proposés pour Pearson seraient modifiés, comme Air Canada l'a suggéré.

M. Roy Bailey: Merci beaucoup. Je ne... Les chiffres, le pourcentage d'augmentation... Vous dites qu'avec tous ces travaux entrepris en même temps, le coût de ce programme d'infrastructure gigantesque ne sera pas recouvré avant 25 ans. Combien de temps un aéroport mettra-t-il à payer l'infrastructure de Pearson, par exemple, compte tenu des tarifs qu'il exige actuellement?

M. Angus Kinnear: Combien de passagers vont traverser l'aéroport en combien de temps pour qu'on puisse récupérer 7,5 milliards de dollars plus l'intérêt?

M. Roy Bailey: Mon Dieu!

M. Angus Kinnear: Voilà la réponse.

Mais si vous augmentez les prix, le nombre de passagers va diminuer. Par conséquent, il faudra plus de temps ou cela coûtera plus cher.

M. Roy Bailey: J'ai une dernière question, monsieur le président.

Ces frais sont-ils...? Vous atterrissez dans de nombreux pays. Comment les frais d'atterrissage exigés à l'aéroport Pearson se comparent-ils à ceux de Sydney en Australie? Pourriez-vous me citer cet exemple?

M. Angus Kinnear: Avant, ils étaient sans doute très équivalents. Pearson n'était pas un aéroport très coûteux jusqu'à cette hausse récente. Il se situait sans doute dans le gros du peloton, mais il se rapproche rapidement des 10 premiers et même des cinq premiers. Par conséquent, nous étions à la vingtième ou vingt-cinquième place et nous nous retrouvons maintenant en tête.

C'est très bien de construire ces énormes aérogares, mais il faut être certain d'avoir suffisamment d'usagers. Comme je l'ai dit, le prix des billets d'avion est un facteur déterminant. Le nombre de gens qui voyagent est déterminé, dans une large mesure, par le prix qu'ils peuvent se permettre de payer. Si le prix des billets continue d'augmenter de façon spectaculaire, le nombre de passagers va diminuer de façon tout aussi spectaculaire.

• 1620

[Français]

Le président: Monsieur Asselin.

M. Gérard Asselin: Comme je l'ai dit tout à l'heure, le Comité des transports a pour objectif d'étudier la compétitivité du système aérien. On pourrait vous poser des questions sous tous les angles et sous toutes les formes, mais pour aider le comité à faire des recommandations appropriées au ministère des Transports et au ministre des transports, je vais vous demander de vous placer dans une situation hypothétique. Si vous siégiez régulièrement au comité et que vous étiez au centre des discussions et des décisions, quelles seraient les trois premières recommandations que vous feriez afin d'améliorer la compétitivité du système aérien?

[Traduction]

M. Angus Kinnear: D'abord, comme je l'ai dit, les forces du marché dicteront la taille et la forme que revêtira l'industrie canadienne du transport aérien et le gouvernement devrait les laisser s'exercer librement.

Deuxièmement, j'exhorte le gouvernement canadien à étendre la politique de Ciels ouverts avec les États-Unis et, si nécessaire, à permettre aux transporteurs américains de faire du cabotage au Canada afin d'obtenir la réciprocité. Je crois que cela réglerait les inquiétudes concernant la concurrence et rendrait plus équitables les conditions du marché où American Airlines possède en fait 50 p. 100 de l'industrie canadienne de l'aviation tandis que nous n'avons pas de droits réciproques aux États-Unis.

Troisièmement, j'aimerais que l'on réexamine la privatisation des aéroports, peut-être en assurant une plus grande représentation de l'industrie afin qu'on ne construise pas d'aéroports qui nuiront à notre compétitivité.

Telles sont les principales questions, mais tout d'abord, le gouvernement devrait s'abstenir d'intervenir et devrait laisser les forces du marché s'exercer librement au cours des prochains 18 à 24 mois.

Le président: Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président. J'ai quatre minutes et quatre questions. Cela donne une minute par question en incluant la réponse. Je vais donc être bref.

Une voix: Vous avez déjà perdu une minute.

M. Roy Cullen: Sur quelle période les frais d'atterrissage ont-ils augmenté de 33 p. 100, monsieur Kinnear? Je n'ai pas saisi.

M. Angus Kinnear: C'était au cours des 12 derniers mois.

M. Roy Cullen: Au cours des 12 derniers mois?

Le président: Monsieur Cullen, nous pourrons faire un troisième tour de table si vous avez d'autres questions.

M. Roy Cullen: Très bien.

Pour ce qui est de l'aéroport Lester B. Pearson, Air Canada a lancé l'attaque pour ce qui est de la construction, de la conception et des coûts. Si j'ai bien compris, Canadien a signé un bail. Je n'en suis pas certain. Et Canada 3000? Je n'ai pas entendu Canada 3000 se plaindre du coût des travaux à Pearson. Ai-je raté quelque chose?

M. Angus Kinnear: Nous faisons tous partie d'un comité général et nous avons émis nos inquiétudes concernant le coût de l'aéroport Pearson par l'entremise de l'ACC. Bien entendu, Air Canada se trouve dans une situation légèrement différente étant donné que le bail qu'elle a conclu à l'Aérogare 2 est visé par les frais de réaménagement et la modernisation de l'ensemble de l'aérogare. Air Canada a été la première à tenter de convaincre la GTAA de modifier son programme de construction.

Comme Canadien se trouve à l'Aérogare 3—où nous sommes également—elle a bénéficié du fait que certains transporteurs ont déménagé dans cet aérogare, car cela a réduit ses frais au lieu de les augmenter.

• 1625

Par conséquent, pour le moment, les frais de Canadien ont baissé tandis que ceux d'Air Canada ont augmenté.

M. Roy Cullen: Canada 3000 a-t-il un bail à long terme pour le moment?

M. Angus Kinnear: Oui. Nous sommes à l'Aérogare 3 et nous aidons Canadien à payer pour son terminal.

M. Roy Cullen: Pour ce qui est des forfaits-vacances—c'est un domaine auquel je ne connais pas grand-chose. Offrez-vous beaucoup de forfaits en collaboration avec les hôtels?

M. Angus Kinnear: Environ 30 p. 100 de notre chiffre d'affaires provient des forfaits-vacances et environ 70 p. 100 de ce qui nous appelons le «vol seulement».

M. Roy Cullen: Pour ce qui est des forfaits-vacances, je ne sais pas comment cela fonctionne. Peut-être pourriez-vous nous l'expliquer sans divulguer tout votre plan d'affaires. Y a-t-il un interfinancement quelconque ou des services sur lesquels vous perdez de l'argent? Les prix sont très attrayants. Tout le monde doit-il mettre un peu d'eau dans son vin? Comment cela fonctionne- t-il?

M. Angus Kinnear: Vous mettez beaucoup d'eau dans votre vin et vous faites beaucoup d'affaires.

M. Roy Cullen: Si vous offrez un ensemble de services, pouvez- vous offrir un prix un peu plus bas que pour un simple vol?

M. Angus Kinnear: Dans des conditions idéales, vous offrez une série de places à un voyagiste. Si vous êtes un voyagiste et si vous voulez acheter 60 places, vous vous attendez évidemment à obtenir un meilleur prix que celui qui n'achètera qu'une place. Vous allez donc acheter tout un avion ou un certain nombre de places à bord d'un avion. Mais comme nous sommes, pour la plupart, propriétaires de nos propres agences de voyages, il s'agit de voir si c'est rentable à l'intérieur de la compagnie. Nous essayons de satisfaire à la demande d'un segment différent du marché, celui du forfait-vacances plutôt que le vol seulement.

M. Roy Cullen: J'ai une dernière question. Vos employés font- ils tous partie du même syndicat qu'Air Canada ou Canadien, qui impose les mêmes salaires ou sont-ils non syndiqués ou encore avez- vous des unités de négociation différentes?

M. Angus Kinnear: C'est mélangé. Les TCA représentent notre personnel de manutention au sol, à Toronto et Vancouver; les autres membres du personnel ne sont pas syndiqués. Les pilotes ont leur propre association. Le SCFP essaie depuis quatre ans de syndiquer l'équipage de cabine, mais sans succès jusqu'ici.

M. Roy Cullen: Mais dans le cas des pilotes, par exemple, leur syndicat est-il le même que celui de Canadien et d'Air Canada?

M. Angus Kinnear: Non.

M. Roy Cullen: Ce sont des syndicats différents?

M. Angus Kinnear: Ils ont leur propre syndicat, qui est une filiale d'un syndicat américain, la Airline Pilots Association.

M. Roy Cullen: Les salaires sont-ils comparables? Prenons le salaire d'un pilote canadien par rapport au salaire d'un pilote à Canada 3000...

M. Angus Kinnear: Encore une fois, il faut tenir compte des différences. À Canada 3000, le salaire d'un commandant de bord s'échelonne entre 85 000 $ et 120 000 $. Nous payons le même salaire à nos commandants de bord quel que soit le type d'appareil qu'ils pilotent. À Air Canada, l'échelle salariale est légèrement différente. Si vous entrez à Canada 3000 comme copilote, vous gagnerez plus qu'à Air Canada, mais comme nous ne comptons que 10 années d'existence tandis qu'Air Canada est vieille comme Mathusalem, certains de ses pilotes qui comptent 20 ou 25 années d'ancienneté gagnent dans les 200 000 $.

Nos salaires sont donc légèrement inférieurs aux leurs, mais il n'y a pas une grande différence. N'oubliez pas, toutefois, qu'un grand nombre de nos employés sont plus jeunes et comptent moins d'années de service; quelqu'un qui travaille depuis 30 ans chez Air Canada a beaucoup plus d'ancienneté et bénéficie de plus d'avantages sociaux que quelqu'un qui travaille pour nous depuis cinq ans.

Le président: Madame Desjarlais.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Pour ce qui est des travaux de construction et d'infrastructure et du nombre d'aéroports, ces travaux étaient-ils nécessaires?

M. Angus Kinnear: Oui. Ils le sont. Malheureusement, tout est fait en même temps plutôt que par étapes. Selon moi, et c'est ce que pensent les autres transporteurs, certains projets d'aménagement sont trop ambitieux.

À ma connaissance, le Terminal 1 de Pearson est l'aérogare la plus efficace que je connaisse. Le seul problème est qu'il a été surutilisé parce que la capacité est restée insuffisante à Pearson pendant de nombreuses années. Une bonne partie de l'infrastructure n'a jamais été rénovée et le Terminal 1 doit probablement être démoli et reconstruit.

• 1630

Mais pourquoi démolir en même temps le Terminal 2 au complet? Air Canada vient de dépenser 9 millions de dollars pour le rénover. Les plans établis pour Pearson prévoient la démolition de toute la partie du Terminal 2 réservée aux vols intérieurs sur une période de trois ans. Je ne vois pas ce que l'on reproche à cette partie de l'aérogare qui a été entièrement reconstruite et rénovée. Néanmoins, le plan d'infrastructure prévoit la démolition de toute cette moitié de l'aérogare et, finalement, de la totalité du Terminal 2.

S'il s'agissait d'une entreprise privée, je me demande si on détruirait cette infrastructure pour la remplacer entièrement ou si l'on ne prévoirait pas une solution plus économique.

Mme Bev Desjarlais: À ce propos, ne pensez-vous pas que les administrations aéroportuaires sont des entreprises indépendantes maintenant qu'elles ne relèvent plus de Transports Canada? Vous avez dit que Transports Canada n'aurait pas procédé à tous ces travaux en même temps, mais il semble également qu'un grand nombre d'aéroports ont besoin de travaux une fois qu'ils ont été cédés. Ne les considérez-vous pas comme des entreprises indépendantes?

M. Angus Kinnear: Je ne les considère pas comme des entreprises indépendantes. Je les considère comme des fiefs fiscaux indépendants qui exploitent un monopole et qui font payer ce qu'ils croient pouvoir soutirer du public pour fournir un service. Nous construisons des palais de verre que l'on doit à l'ego de certaines personnes et non pas des aérogares économiques.

Mme Bev Desjarlais: Canada 3000 a-t-elle appuyé la dévolution des responsabilités de Transports Canada à l'égard des aéroports? Avez-vous soutenu la création des administrations aéroportuaires?

M. Angus Kinnear: Oui, nous l'avons fait. Nous sommes déçus de constater que les administrations aéroportuaires ne semblent pas gérer les aéroports comme votre question laissait entendre qu'elles pourraient le faire, c'est-à-dire comme des entreprises.

Je ne suis pas d'accord avec certaines décisions commerciales qui sont prises. Après tout, si vous examinez les résultats de l'industrie canadienne de l'aviation au cours du dernier trimestre, Canadien a perdu 130 millions de dollars en 120 jours. Comment cette compagnie pourrait-elle financer des travaux d'une valeur de 7,5 milliards de dollars? C'est insensé. Si les compagnies aériennes devaient décider de construire une nouvelle aérogare ou non, ce n'est pas qu'elles s'y opposeraient, mais qu'elles n'en auraient pas les moyens.

Mme Bev Desjarlais: Si nous partons du principe que les forces du marché vont déterminer l'avenir, comme l'a dit M. Keyes, il se peut que les compagnies aériennes choisissent d'aller ailleurs, comme à Hamilton.

Vous avez également parlé d'une augmentation de 33 p. 100 des frais d'atterrissage. Y a-t-il eu...

M. Angus Kinnear: Puis-je apporter un rectificatif? Je ne pense pas qu'il faudrait parler de frais d'atterrissage, mais plutôt de frais d'aéroport, car ce n'est pas seulement les frais d'atterrissage. Il y a eu aussi une hausse des loyers pour les guichets d'enregistrement et les bureaux. On a augmenté tous ces frais pour tenter de recouvrer les coûts de construction. Il ne s'agit pas seulement des «frais d'atterrissage». Désolé.

Mme Bev Desjarlais: D'accord. Y a-t-il eu une diminution de certains frais, que ce soit la taxe sur le carburant ou autre chose? Les frais des compagnies aériennes ont-ils diminué?

M. Angus Kinnear: Non. Le public n'a pas eu à payer la taxe de transport. Cette taxe, qui était ajoutée au prix du billet, a été supprimée, mais la hausse des frais dépasse le montant de l'ancienne taxe de transport. Par conséquent, alors que nous espérions des aéroports indépendants gérés comme des entreprises, une plus grande efficacité, tout le monde se plaint de ce que l'efficacité n'augmente pas tandis que les frais augmentent.

Mme Bev Desjarlais: J'ai une dernière observation, monsieur le président.

Je suis sidérée de voir que tous les groupes qui viennent ici nous parlent des problèmes que leur posent les administrations aéroportuaires, des coûts qui leur sont imposés... Les Canadiens n'ont rien gagné sur le plan de la concurrence. Beaucoup de gens nous disent que les coûts sont les mêmes pour les compagnies aériennes. En fait, les Canadiens n'obtiennent rien. Rien ne s'est amélioré. Il n'y a eu aucune diminution du prix des billets d'avion.

• 1635

Pendant ce temps, tout le monde nous dit qu'il faut déréglementer davantage l'industrie, ouvrir davantage le ciel. Je me dis que le système est pire qu'il n'était et qu'ont veut pourtant aller encore plus loin. De nombreux Canadiens ont l'impression, dans certaines régions, de subventionner les vols Montréal-Toronto et Toronto-Ottawa. Et cela parce que je ne peux pas acheter un billet Thompson-Winnipeg pour 199 $.

M. Angus Kinnear: Mais avec Canada 3000, vous pourriez vous rendre à Londres en Angleterre pour 279 $ et vous pourriez...

Mme Bev Desjarlais: Cela ne vous est pas très utile lorsque vous devez vous rendre de là-bas jusqu'ici, comme le font de nombreux Canadiens.

M. Angus Kinnear: Vous pourriez faire, ce soir, le trajet Toronto-Vancouver pour 299 $ et...

Mme Bev Desjarlais: J'en suis ravie.

M. Angus Kinnear: ...et je pourrais continuer ainsi. Les Canadiens n'ont jamais payé des tarifs aussi bas.

Mme Bev Desjarlais: Certains Canadiens. C'est là le problème. Dans l'ensemble, il ne semble pas que le système s'améliore. Telle est mon opinion d'après ce que j'entends dire lors des discussions.

M. Angus Kinnear: Je vous dirais qu'un des problèmes est peut- être que, dans certaines petites villes, vous n'avez pas de concurrence. Les grands transporteurs y offrent des services à perte. Par conséquent, il est impossible d'avoir une concurrence dans ces marchés. Si quelqu'un subventionne les services et les exploitent comme ils le sont actuellement, c'est nécessairement à perte.

Vous avez parlé de Thompson. Au Manitoba, je suppose?

Mme Bev Desjarlais: Oui.

M. Angus Kinnear: Combien de vols quotidiens y a-t-il de Thompson à Winnipeg?

Mme Bev Desjarlais: Trois par jour.

M. Angus Kinnear: Une compagnie aérienne ou deux?

Mme Bev Desjarlais: Une seule.

M. Angus Kinnear: Une compagnie...

Mme Bev Desjarlais: Je voulais dire, et je crois que vous l'avez dit aussi, que les gens de ces régions—ce n'est qu'un exemple—commencent à croire qu'ils ne vont jamais payer moins cher. Pendant ce temps, nous entendons constamment parler du nombre de vols entre Toronto et Ottawa et des vols qu'offrent les deux compagnies entre Vancouver et Toronto. Les gens commencent à se dire qu'ils subventionnent peut-être une partie du coût de ces autres destinations simplement pour que... Pendant ce temps, ces compagnies n'arrivent pas à survivre. La plupart sont rachetées par les transporteurs régionaux qui font...

M. Angus Kinnear: Je suis assez d'accord avec certaines choses que vous avez dites.

Le président: Je n'ai pas d'autres noms sur la liste.

J'aimerais poser une ou deux questions. Pouvez-vous transporter du fret sur certains de vos vols?

M. Angus Kinnear: Oui.

Le président: Vous le faites. C'est une autre bonne source de revenus.

J'aimerais poser une autre question pour nous éclairer. Au cours des 40 dernières années, nous avons assisté à un va-et-vient d'affréteurs sur le marché. Nous nous souvenons de Wardair qui semblait obtenir d'excellents résultats, mais qui a disparu comme les autres. Y a-t-il un facteur qui a causé la disparition de toutes ces compagnies? Faut-il une bonne concurrence au bon moment? Y a-t-il un facteur qui rend la survie de ces entreprises pratiquement impossible? Les deux grands transporteurs évincent-ils les autres du marché? Voyez-vous quoi que ce soit qui puisse nous aider dans notre étude?

M. Angus Kinnear: Prenons l'exemple de Max Ward. Max Ward gérait l'une des meilleures compagnies aériennes au monde et c'est ce qui lui a valu sa réputation. Il a été l'un des premiers à mettre des jets en service pour les vols nolisés transatlantiques. Il a été l'un des premiers à utiliser des gros porteurs pour les vols nolisés.

Il a passé toute sa vie à se battre contre l'Office des transports, à Ottawa quant à savoir s'il pouvait survivre et affronter la concurrence. S'il avait été à Singapour, il serait devenu la Singapore Airlines' Virgin Atlantic du Canada, mais les Canadiens n'ont pas l'habitude de donner un coup de pouce à ceux qui réussissent. Ils essaient plutôt de leur barrer la route, pour une raison ou pour une autre.

Max Ward a géré une très bonne compagnie aérienne et il a été un chef de file à son époque. Malheureusement, il a dû affronter le gouvernement canadien qui était déterminé à l'empêcher de réussir.

Finalement, avec la déréglementation, Max Ward a essayé de concurrencer Air Canada et Canadien. Il croyait que les gens seraient prêts à attendre deux heures à l'aéroport de Vancouver parce que la fille de Wardair leur souriait tandis que celle d'Air Canada leur faisait la grimace. Malheureusement, le temps est plus important et les gens ont préféré le service le plus régulier au plus irrégulier.

Par conséquent, lorsqu'il s'est cantonné dans son créneau et a été le chef de file du voyage de loisirs en jet, Max, le chef de file des vols transatlantiques en gros porteur, a connu la réussite.

• 1640

Malheureusement, le marché canadien n'est pas suffisamment grand pour deux grands transporteurs. Il ne l'était certainement pas assez pour trois. Max espérait pouvoir attirer la clientèle grâce à sa bonne réputation sur le plan du service, mais il n'a pas pu concurrencer le nombre et la fréquence des vols sur les routes principales et pour cette raison, il n'a pas pu obtenir ce marché.

Le président: Par conséquent, on ne peut pas dire que les grands transporteurs vendent des places au rabais pour vous évincer. Le problème n'est pas là.

M. Angus Kinnear: Ils sont concurrentiels, mais c'est normal. Ils doivent soutenir la concurrence comme nous. Air Canada vend actuellement des places au rabais et nous en faisons autant.

Le président: Oui. Si les deux compagnies aériennes s'entendaient pour vendre des places au rabais dans le but d'évincer un tiers, ce serait contraire à la Loi sur la concurrence.

M. Angus Kinnear: Je m'abstiendrai de tout commentaire.

Le président: Vous ne dites pas que c'est ce qui se passe?

M. Angus Kinnear: Lorsque j'ai commencé à desservir l'ensemble du pays lors de la déréglementation, j'ai bien veillé à ce que tous nos vols partent à des heures différentes de la journée afin qu'un lundi, nous allions à Vancouver à 3 heures, un mardi à 9 heures et un mercredi à 2 h 30.

J'étais très conscient du fait que si je partais à 9 heures chaque matin, je serais très vulnérable, car il suffirait d'augmenter la capacité et d'abaisser les prix pour le vol de 9 heures. Mais lorsque nous déplaçons nos vols à toutes sortes d'heures différentes, il est très difficile d'atteindre une cible mouvante. Il faudrait accorder des rabais pour tellement de vols que cela n'en vaut pas la peine. Vous allez sans doute me laisser mes 3 ou 4 p. 100 du marché parce qu'il vous coûterait trop cher de m'évincer.

Le président: Merci beaucoup. Vous nous avez fourni des renseignements très intéressants qui vont nous amener à soulever un tas de questions lors de nos futures consultations. Avez-vous un dernier mot à dire?

M. Angus Kinnear: Non, merci, monsieur le président. J'ai apprécié d'avoir pu vous parler et je vous remercie d'avoir invité un autre élément de l'industrie à vous faire part de ses opinions, en plus de consulter les grands transporteurs. Je l'apprécie.

Le président: Nous l'apprécions aussi. Merci beaucoup.