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SRID Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON HUMAN RIGHTS AND INTERNATIONAL DEVELOPMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

SOUS-COMITÉ DES DROITS DE LA PERSONNE ET DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 31 octobre 2001

• 1533

[Traduction]

La présidente (Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.)): La 14e séance du Sous-comité des droits de la personne et du développement international du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international est ouverte.

Tous les membres du comité ont reçu la semaine dernière ce rapport—j'espère que vous l'avez devant vous et que vous l'avez lu. L'auteur de ce rapport est venu témoigner aujourd'hui, il s'agit de l'honorable Warren Allmand—soyez le bienvenu en ces lieux, où vous avez travaillé pendant de si nombreuses années—et son assistante aux communications, Mary Durran, l'accompagne.

M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Madame la présidente, j'aimerais intervenir rapidement, si vous me le permettez.

La présidente: Oui, Svend. Je n'ai pas le choix, que ça me plaise ou non. Vous allez intervenir de toute façon.

M. Svend Robinson: Oui, vous avez raison.

J'ai signalé à la présidente que Francisco Ramirez, le chef du Syndicat des mineurs de la Colombie...

La présidente: Oui, et nous l'avons fait savoir à M. Allmand. Nous sommes toujours d'accord pour qu'il dispose d'une heure, que le groupe de témoins suivant ait aussi une heure et que s'il reste du temps après cela, si tout le monde veut rester, nous lui permettrons alors d'intervenir.

M. Svend Robinson: Bon, très bien.

La présidente: Parce que l'on a bien averti chacun de ces groupes qu'il disposerait d'une heure.

M. Svend Robinson: Très bien.

La présidente: Nous l'entendrons donc par la suite, si c'est possible.

M. Svend Robinson: J'imagine que M. Ramirez est sur le point d'arriver.

La présidente: Je n'en sais rien, mais nous l'entendrons après avoir consacré nos deux heures à ces deux groupes.

Merci.

Monsieur Allmand.

• 1535

M. Warren Allmand (président, Droits et démocratie): Merci, madame la présidente.

Je suis venu ici aujourd'hui, en compagnie de Mary Durran, pour rendre compte du travail que nous avons effectué en Colombie, et plus particulièrement de notre mission en Colombie, qui s'est déroulée du 27 mai au 3 juin 2001. Avant d'en parler, toutefois, je vais vous donner quelques précisions au sujet de notre organisation. Droits et démocratie, appelé jusqu'alors Centre international des droits de la personne et du développement démocratique, est une institution canadienne indépendante établie par le Parlement il y a 12 ans. Nous avons pour mission de défendre et de promouvoir la démocratie et les droits de la personne et nous mettons en oeuvre quatre programmes et deux types d'opérations. Il s'agit des programmes des droits des Autochtones, des droits des femmes, de l'effet de la mondialisation sur les droits de la personne ainsi que du développement démocratique, et les deux opérations spéciales sont l'intervention urgente et la défense des droits de la personne au plan international. Nous oeuvrons principalement en menant des activités de défense et de promotion et nous sommes très présents dans les différents pays d'Amérique, en Afrique et en Asie. En Amérique latine, nous oeuvrons au Pérou, au Guatemala, au Mexique, au Salvador et en Haïti. Nous collaborons avec de nombreuses organisations autochtones en Amérique latine et nous avons aussi contribué à créer un groupe intitulé Femmes autochtones d'Amérique.

Nous avons intensifié notre action en Colombie à mesure que nous prenions conscience de la montée de la violence dans ce pays et à partir du moment où le père Javier Giraldo s'est vu décerner en 1997 le prix John Humphrey accordé à un défenseur des libertés. Il s'agit d'un prix décerné chaque année à un éminent défenseur des droits de la personne dans le monde entier, et le lauréat est choisi par un jury international. Lorsqu'on lui a décerné le prix en 1997, le père Giraldo est venu au Canada et il nous a exposé dans plusieurs discours la situation horrible qui régnait dans ce pays.

Nous nous sommes efforcés d'intensifier nos contacts avec la Colombie et, en l'an 2000, nous avons engagé un expert sur la Colombie pour qu'il nous aide à mettre sur pied un programme plus exhaustif. En conséquence, le 22 juin 2000, nous avons organisé à Montréal un forum d'une journée entière sur la Colombie réunissant des experts venus du Canada et de l'Amérique du Sud. L'un des grands sujets de préoccupation évoqués lors de ce forum a été le triste sort réservé aux Autochtones de ce pays. Cette question a par ailleurs été portée à notre attention par les représentants autochtones de la Colombie, que nous avons fait participer à l'assemblée général de l'Organisation des États américains à Windsor, en juin 2000. D'ailleurs, à ce moment-là, ces représentants autochtones de la Colombie nous ont invités, en compagnie de l'APN, à envoyer une mission en Colombie pour étudier sur place la situation.

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, c'est finalement ce que nous avons fait cette année pendant une semaine, du 27 mai au 3 juin, en collaboration avec l'APN et les représentants de la collectivité autochtone du Canada. Faisaient partie de cette mission, Georges Erasmus, ancien chef national et par ailleurs ancien coprésident de la Commission royale d'enquête sur les Autochtones, et actuellement président de la Fondation pour la guérison des Autochtones; Ghislain Picard, chef régional de l'Assemblée des premières nations pour le Québec et le Labrador et directeur du service des affaires étrangères de cette organisation; Lydia Hwitsum, chef de la Nation Cowichan de Colombie-Britannique et membre de notre conseil d'administration; l'honorable Beth Phinney, présidente de votre comité; Mary Durran, déléguée; Eleanor Douglas, coordonnatrice de la mission, une Canadienne ayant vécu pendant 20 ans en Colombie et spécialiste de ce pays; moi-même, enfin.

Cette mission avait globalement pour but de se faire une idée générale de la situation en parlant à un maximum de groupements autochtones ainsi qu'avec les représentants du gouvernement colombien et les fonctionnaires de l'ONU. Par ailleurs, les objectifs de la visite étaient tout d'abord de faire prendre conscience aux pouvoirs publics et aux communautés des Premières nations du Canada de la situation périlleuse dans laquelle se retrouvaient les peuples autochtones de la Colombie, pris dans l'étau des conflits armés; en second lieu, d'évaluer le potentiel offert par un appui et un suivi des peuples autochtones de la Colombie dont se chargerait en permanence l'APN et Droits et démocratie; troisièmement, de recueillir des renseignements sur la présence canadienne en Colombie et de renforcer les moyens de pression et d'orientation des politiques susceptibles d'être exercés au Canada auprès du gouvernement canadien et dans le secteur privé pour remédier à la triste situation des Autochtones en Colombie; quatrièmement, d'appuyer les efforts de paix en Colombie, plus particulièrement en ce qui a trait aux collectivités autochtones et dans le cadre du mouvement social pour la paix.

• 1540

Voici ce que nous avons pu constater, madame la présidente. Certes, il y a en permanence des conflits armés en Colombie depuis plus de cinquante ans, mais nous avons assisté à une terrible recrudescence des luttes intestines armées au cours de l'année qui vient de s'écouler. Des civils sans arme et innocents ont été victimes d'attaques brutales et de massacres commis par les escadrons de la mort paramilitaires de l'extrême droite, notamment l'AUC, connu aussi sous le nom de groupes d'autodéfense unis de la Colombie, d'un côté, et par les forces de guérillas de gauche, d'un autre côté. Les troupes de guérilleros se divisent en deux groupes: les FARC, les forces armées révolutionnaires de Colombie, et l'ELN, l'armée de libération nationale. Ces deux groupes de guérilleros ont ensemble quelque 25 000 hommes en armes, soit une force armée considérable.

Les agissements de ces paramilitaires et de la guérilla sont exacerbés par les activités des narcotrafiquants, qui versent d'énormes sommes d'argent pour être protégés par les guérilleros et les paramilitaires et contribuent donc à financer leur armement et leurs opérations. C'est triste à dire, mais ce sont par conséquent les consommateurs de cocaïne et de marijuana d'Amérique du Nord qui contribuent avant tout à financer les actes de violence et de mort en Colombie.

Les attaques brutales menées contre les Autochtones et d'autres personnes se font sous forme d'extorsion, d'enlèvements, de recrutement forcé, d'assassinats ciblés, de massacres, d'attentats contre les infrastructures, de confiscation des terres et d'aliénation des peuples. Il y a aussi la destruction des récoltes, du cheptel et des exploitations agricoles licites du fait de la fumigation par voie aérienne des cultures de coca dans le cadre du Plan Colombie appuyé par les États-Unis. Les gouverneurs du sud de la Colombie, les gouverneurs des États, se sont fortement opposés à cette fumigation par voie aérienne parce qu'elle n'est pas seulement efficace pour enrayer le commerce de la cocaïne, elle détruit par ailleurs, je viens de le dire, des récoltes licites. Elle détruit le cheptel de ces petits agriculteurs et elle nuit aussi à leur santé.

Madame la présidente, en l'an 2000, la dernière année pour laquelle nous ayons des statistiques, il y a eu près de 40 000 morts violentes en Colombie, et on estime que 20 p. 100 d'entre elles ont des motifs politiques—40 000 meurtres dans un pays de 40 millions d'habitants. Au Canada, je crois que nous avons eu l'année dernière un peu plus de 500 homicides, dans un pays de près de 30 millions d'habitants, et vous pouvez donc faire la comparaison. Toujours en l'an 2000, il y a eu en moyenne 20 meurtres sociopolitiques par jour, soit plus de 7 000 meurtres de ce type par an. Selon la Commission des juristes colombiens, 85 p. 100 de ces morts sont attribuées aux agents de l'État et aux paramilitaires, et 15 p. 100 aux guérilleros.

De plus, quelque 300 000 personnes ont été déplacées de leurs foyers en l'an 2000, ce qui porte le total de personnes déplacées en Colombie à 2 millions de personnes, 30 p. 100 d'entre elles étaient des Autochtones et des afro-Colombiens, alors qu'ils ne représentent que 14 p. 100 de la population colombienne.

Je dois aussi ajouter, même si ce n'était pas le but de notre visite, que pour les syndicalistes et les journalistes, la Colombie est l'un des endroits les plus dangereux du monde. C'est d'ailleurs effectivement le plus dangereux pour les syndicalistes. L'année dernière, 90 dirigeants syndicaux ont été assassinés. Il y en a eu 900 ces 10 dernières années et 1 500 ces 20 dernières années.

Certes, la constitution colombienne de 1991 comporte d'importantes mesures de protection en faveur des Autochtones—et en lisant cette constitution, on est très impressionné—mais, pour la plupart, ces dispositions ne sont pas appliquées ou elles ne sont pas applicables en raison de la lutte armée.

Il y a quelque 800 000 Autochtones en Colombie. Ils représentent deux pour cent de la population et ils disposent de 446 territoires que l'on peut appeler des réserves. Ces territoires réservés couvrent environ 30 millions d'hectares, soit 28 p. 100 du territoire colombien. Il s'agit là d'une part très significative du territoire, mais malheureusement, une fois de plus, une grande partie de ces terres se trouvent dans des régions éloignées et ne peuvent pas faire l'objet d'un développement agricole. De plus, une grande partie de ces terres sont proches des territoires occupés par les guérilleros, les paramilitaires et les narcotrafiquants, et font donc souvent l'objet d'attaques et de prises de contrôle. J'ai fait état du nombre important de personnes déplacées au sein des collectivités autochtones en raison des attaques émanant des paramilitaires ou des guérilleros, ainsi que de la présence des narcotrafiquants. Ces larges étendues de terres autochtones sont par ailleurs menacées par de grands projets d'infrastructure et par les entreprises d'extraction des ressources naturelles: mines, sociétés pétrolières, et aménagements divers.

• 1545

Vous avez le rapport, et je ne vais pas vous le lire intégralement, mais à la page 23 nous évoquons le rôle du Canada. Je tiens à vous dire que l'ambassadeur de la Colombie, Guillermo Rishchynski, ne nous a pas ménagé son aide et son appui. D'ailleurs, il préside une organisation regroupant différents pays qui s'efforcent d'aider la Colombie à retrouver la paix, et je considère qu'il a fait un immense travail. Lorsque nous sommes allés les voir en Colombie, des Autochtones nous ont dit que c'est le seul ambassadeur qui était jamais venu leur rendre visite dans leurs bureaux.

Alors qu'il semble faire un excellent travail en Colombie, les déclarations faites par notre gouvernement au Canada n'ont pas été aussi positives et aussi favorable que nous l'aurions aimé, et bien d'autres avec nous. Nous avons, bien entendu, critiqué les parties du plan colombien qui renforcent encore la militarisation de la Colombie ainsi que celles qui appuient la fumigation par voie aérienne. Le gouvernement canadien a déclaré que même s'il a signé le plan colombien, il ne joue aucun rôle en matière militaire, et il n'a pas pris position jusqu'à présent en ce qui a trait à la fumigation par voie aérienne. Nous aimerions qu'il se montre plus déterminé sur le plan militaire étant donné qu'au lieu d'essayer de parvenir à un règlement de cette horrible situation par des moyens pacifiques et diplomatiques, il semble que l'on s'efforce de plus en plus de tout régler par une intervention militaire, et bien des gens estiment qu'en agissant ainsi on ne pourra tout simplement pas atteindre les objectifs que l'on s'est fixé.

Quoi qu'il en soit, je vous le répète, nous traitons à partir de la page 23 de la politique étrangère du Canada, de l'appui à la paix en Colombie, du commerce avec la Colombie et de l'intérêt sans cesse grandissant du secteur privé canadien pour la Colombie.

Nous avons rencontré différentes entreprises canadiennes exerçant leur exploitation en Colombie. Je dois dire que nous n'avons pas entendu d'histoires à faire se dresser les cheveux sur la tête. D'ailleurs, la plupart de ces entreprises canadiennes étaient installées dans la ville de Bogota et exerçaient des activités ne les amenant pas à trop s'exposer, qu'il s'agisse d'installer des réseaux de téléphones cellulaires ou de travailler en collaboration avec les collèges commerciaux. Il y avait cependant certaines sociétés minières et pétrolières. L'une d'entre elles avait dû quitter une région en raison des menaces qui lui avaient été faites parce qu'elle refusait de collaborer avec les guérilleros. Toutefois, nous aimerions que le gouvernement contrôle de plus près les activités exercées par les entreprises canadiennes en Colombie pour s'assurer qu'aucune d'entre elles ne collabore avec des intérêts qui portent atteinte aux droits de la personne dans ce pays.

J'ai évoqué les meurtres, les assassinats et le recrutement forcé d'Autochtones et d'autres personnes. Étant donné que ces collectivités autochtones se trouvent dans des régions éloignées, si les paramilitaires soupçonnent le moindrement une communauté autochtone de favoriser les guérilleros, ils vont bien entendu s'en prendre à elle. Si elle est soupçonnée de favoriser l'autre camp, elle est attaquée par le camp adverse et ses habitants sont assassinés de tous côtés. Elles sont donc prises entre deux feux. Elles souhaitent rester neutres et pacifiques dans une telle situation, mais c'est bien difficile.

Il faut voir aussi que nombre de jeunes sont forcés de s'engager chez les guérilleros. Les combattants de la guérilla se présentent dans la localité et il faut les suivre ou sinon... Ils n'ont pas vraiment le choix, s'ils veulent rester en vie, il faut s'engager, et certains d'entre eux l'ont fait.

• 1550

Je dois aussi vous signaler qu'en raison de la situation qui règne en Colombie ces dernières années, certains de ces peuples autochtones, de petites communautés, sont menacés de disparition complète. D'ailleurs, quatre de ces nations comptent désormais moins de 100 membres.

Mary, c'est bien le bon chiffre, n'est-ce pas?

Mme Mary Durran (assistante aux communications, Droits et démocratie): C'est bien ça, effectivement.

M. Warren Allmand: Je pourrai vous communiquer plus tard le nom de ces peuples.

Nos recommandations se trouvent à la page 39 de notre rapport. Certaines d'entre elles ont été copiées directement sur les revendications des Autochtones en Colombie. Elles nous ont été communiquées directement, et nous les avons reproduites. Il y a aussi des recommandations qui ont été faites par notre délégation.

Nous vous rappelons que nous ne sommes restés sur place qu'une semaine, mais nous avons tenu de nombreuses réunions—la liste des organisations que nous avons rencontrées se trouve à la page 44 de notre rapport. Nous avons rencontré 11 ou 12 organisations autochtones. Nous avons rencontré les représentants du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Nous avons rencontré les fonctionnaires du Bureau du Haut-Commissariat aux droits de l'homme des Nations Unies. Nous avons rencontré les représentants du gouvernement colombien, le gouverneur du Cauca et le gouverneur d'Antioquia. Nous avons rencontré trois sénateurs et deux membres du congrès, qui étaient tous autochtones. Nous avons rencontré les représentants du bureau du protecteur des droits de la personne, la Defensoria del Pueblo. Nous avons rencontré les fonctionnaires du bureau du programme présidentiel pour les droits de la personne. Nous avons rencontré le ministre de l'environnement, la directrice des affaires indiennes et la ministre de l'Intérieur. Nous avons rencontré les représentants de six grandes ONG de la Colombie. Il y a donc eu de très nombreuses réunions, et la présidente le sait bien. On s'est entretenu du matin jusqu'au soir et nous n'avons pas ménagé notre temps. Compte tenu de ce que nous avons entendu et de tout ce que nous avons pu lire, nous avons fait les recommandations suivantes.

Nous faisons appel au gouvernement canadien et à la communauté internationale pour qu'ils dénoncent la gravité de la situation concernant la survie des peuples autochtones de la Colombie, et s'assure qu'un suivi soit donné aux solutions proposées eu égard aux préoccupations spécifiques des Autochtones.

Nous pressons aussi le gouvernement colombien et la communauté internationale, en particulier les pays amis, incluant le Canada, choisis pour soutenir le processus de paix initié entre la Colombie et les organisations d'insurgés de s'assurer que les peuples autochtones soient activement et significativement engagés dans les discussions et les négociations actuelles et futures. À l'heure actuelle, les Autochtones ne participent pas aux pourparlers de paix.

Troisièmement, le droit des peuples autochtones d'exercer une neutralité active dont le conflit doit être respecté. Nous sommes prêts à soutenir les campagnes nationales et internationales destinées à faire pression sur tous les groupes armés afin qu'ils renoncent au recrutement de force et qu'ils respectent tous les droits des peuples autochtones.

Quatrièmement, le gouvernement colombien doit s'assurer que les accords sur les droits humains et les lois humanitaires soient respectés dans le cadre du conflit armé actuel, et prendre en considération les besoins spécifiques des peuples autochtones.

Cinquièmement, le gouvernement colombien doit faire tout ce qui est possible pour empêcher le déplacement des communautés autochtones afin de préserver leurs territoires, leur culture et leur vie elle-même.

Sixièmement, le gouvernement canadien devrait adopter une position claire à l'encontre du soutien des forces armées par le gouvernement américain, par le biais d'envois d'équipement militaire en vertu du Plan Colombie. Le Canada, avec d'autres membres de la communauté internationale, devrait s'employer à aider le gouvernement colombien à élaborer un plan de développement qui accorde la priorité à la participation au processus de paix, la consultation de la société civile, incluant les Autochtones, la transparence et le développement local.

Septièmement, le gouvernement canadien doit se servir de ses bonnes relations avec la communauté internationale pour amener la suspension des fumigations aériennes des cultures illicites dans les territoires autochtones.

Huitièmement, nous pressons le gouvernement canadien d'édicter des directives spécifiques d'ordre éthique concernant les investissements du secteur privé canadien en Colombie, un pays aux prises avec de violents conflits armés, et d'en assurer le respect.

Neuvièmement, les citoyens et les organisations canadiens interpellés par la situation désespérée des Autochtones en Colombie devraient reconnaître qu'il est de leur devoir de surveiller les activités des sociétés canadiennes, en particulier celles spécialisées dans l'extraction des ressources naturelles.

• 1555

Il y a d'autres recommandations plus précises, dont la portée est plus générale, madame la présidente, et je laisserai au comité et à vous-même le soin de les lire.

Je crois comprendre que votre comité envisage d'aller en Colombie. Si vous le faites, je tiens à vous faire certaines recommandations touchant les questions qu'il vous faudra éventuellement examiner une fois là-bas.

Tout d'abord, je vous recommande fortement, une fois arrivés sur place, de rencontrer le représentant du bureau du Haut-Commissariat aux droits de la personne, qui est le porte-parole de Mary Robinson. Il a fait une étude très détaillée et a publié un rapport sur la Colombie. Le représentant du haut-commissariat, un ressortissant suédois, nous a rencontrés et nous a fourni de précieux renseignements qui sont susceptibles d'aider votre comité.

Je vous recommande aussi très fortement d'aller à Cauca rencontrer le gouverneur, Floro Tunubala, le premier gouverneur autochtone élu en Colombie, l'un des gouverneurs du sud qui, je vous l'ai dit, s'oppose au Plan Colombie, notamment sur la question de la fumigation. L'élection de M. Tunubala a été un véritable exploit étant donné qu'il ne représente aucun des partis traditionnels. Il s'est présenté en tant qu'indépendant, mais il a reçu un large appui dans cet État.

Nous aimerions aussi que vous alliez voir les députés. Nous avons rencontré, je vous l'ai dit, trois sénateurs et deux députés autochtones, mais je pense qu'il serait vraiment utile que vous rencontriez, étant donné que vous représentez des intérêts plus larges, les députés et, si possible, que vous fassiez un jumelage avec certains d'entre eux pour rester en contact et voir dans quelle mesure vous pouvez continuer à apporter une aide permanente.

Enfin, je tiens à évoquer l'affaire Kimy Pernia Domico. Comme je l'ai indiqué la semaine dernière lorsque j'ai comparu devant le comité plénier des affaires étrangères au sujet de la Loi sur l'expansion des exportations, la dernière fois que j'ai comparu devant ce comité, Kimy Pernia était à mes côtés. Il était venu protester contre le fait que la SEE avait contribué au financement d'un grand barrage sur le territoire de son peuple autochtone, ce qui avait inondé ses terres et lui avait retiré ses moyens d'existence. Par ailleurs, le barrage établi sur la rivière ne permettait plus aux poissons de remonter. En outre, le réservoir du barrage avait créé toute une zone marécageuse nuisible à la santé des habitants. Kimy Pernia était donc venu à plusieurs reprises au Canada pour faire connaître ce dossier. Lors de la semaine que nous avons passée en Colombie, nous l'avons rencontré le vendredi et, deux jours plus tard, il était enlevé. On n'a plus entendu parler de lui depuis et on présume qu'il est mort, assassiné pour avoir voulu défendre les droits de son peuple.

Nous conseillons à votre comité d'aller rendre visite, si possible, à Tierra Alta, dans la région de Monteria de la Colombie, soit la zone dont Kimy Pernia Domico est originaire, afin d'enquêter, non seulement en raison de ses liens avec le Canada, mais aussi du fait du rôle que le Canada et que la Société pour l'expansion des exportations ont joué pour financer ce projet.

Madame la présidente, c'est là un résumé rapide de notre rapport et de certaines de nos conclusions. Je vous le répète, la Colombie est aujourd'hui l'un des pays les plus dangereux et les plus violents du monde en raison de la présence de groupes de guérilleros et de paramilitaires très bien financés, principalement par le commerce de la drogue. Ils disposent d'armées incroyablement bien équipées et approvisionnées. Ils terrorisent la population, surtout les paysans, mais aussi les citadins. Le conflit déborde des frontières de la Colombie, et touche désormais le Panama et l'Équateur. Ils menacent toute la région. Il faut espérer que la communauté internationale, avec à sa tête le Canada, réussira à aider davantage ces gens.

Je vous signale en passant que la Colombie est un pays merveilleux. Elle a d'énormes ressources. Les gens, pris individuellement, sont formidables, mais ils subissent les terribles répercussions de la longue guerre qui a ravagé leur pays. On ne s'est pas intéressé suffisamment à la question. Je vous le répète, il y a eu l'année dernière 40 000 homicides dans un pays de 40 millions d'habitants, dont 8 000 avaient des motivations politiques—c'est dur, nous ne connaissons même pas l'ampleur du phénomène, il y en a peut-être davantage.

• 1600

Je suis prêt à répondre à vos questions et Mary m'aidera éventuellement.

La présidente: Merci, monsieur Allmand.

Madame Hinton.

Mme Betty Hinton (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, Alliance canadienne): C'est un rapport particulièrement intéressant et j'ai bien apprécié tout ce que vous avez dit. J'en conclus que nous sommes d'accord sur un point, à savoir que le problème de la Colombie est lié à la drogue.

M. Warren Allmand: En partie. Le trafic de drogues se fait principalement sous la forme de cocaïne, mais aussi de marijuana et d'héroïne, mais c'est surtout la cocaïne. Le conflit aurait peut-être existé de toute façon, mais le commerce de la cocaïne contribue à le financer. Les groupes de guérilleros et les paramilitaires taxent les narcotrafiquants et font payer leur protection, de sorte que ces derniers, pour pouvoir continuer à faire leur commerce, doivent payer pour s'assurer de la protection ou l'un ou l'autre des groupes, tout dépendant de celui qui domine la région et, bien entendu, cela contribue à financer les opérations de tous ces groupes.

Mme Betty Hinton: En effet, c'est un cercle vicieux. Nous sommes donc d'accord pour dire que probablement c'est le culte de la drogue qui est en arrière de tout cela.

M. Warren Allmand: Eh bien non. Il me faut être très prudent ici, parce que je considère que la guérilla, à tort ou à raison, est apparue au départ parce que l'on avait l'impression qu'il fallait redresser des injustices sociales, remédier à des disparités économiques, etc. Au fil des années, toutefois, elle est devenue moins idéaliste et davantage liée au trafic de la drogue, qui la finance. Toutefois, ce serait à mon avis trop généraliser que de dire que la guerre s'explique uniquement par le trafic de la drogue. Il y a aussi d'autres motivations.

Les groupes paramilitaires étaient licites à l'origine. Il s'agissait de forces de défense établies dans les régions rurales pour lutter contre la guérilla et ils ont opéré dans la légalité jusqu'au milieu des années 1980. Bientôt, on s'est aperçu que ces groupes paramilitaires commettaient eux aussi des atrocités, mais qu'ils se voulaient une force de riposte dans une véritable guerre. Les groupes paramilitaires et les guérilleros sont en guerre pour occuper le territoire et contrôler la population, et aujourd'hui pour contrôler le trafic de la drogue, mais au départ ce n'était pas comme ça.

Mme Betty Hinton: Très bien. Nous sommes donc d'accord puisque c'est en partie l'explication, que ce soit au départ, à la fin ou en tant que conséquence.

M. Warren Allmand: C'est une partie de l'explication, mais je ne veux pas donner l'impression que tout s'explique simplement par les recettes tirées du trafic de la drogue.

Mme Betty Hinton: Non, mais cela fait partie de ce qui est devenu aujourd'hui une grosse entreprise.

M. Warren Allmand: C'est aujourd'hui une grande partie du problème. Mary veut ajouter quelque chose.

Mme Betty Hinton: Très bien.

Mme Mary Durran: Je veux simplement ajouter que selon l'interprétation que l'on a pu faire, après avoir parlé à divers intervenants, c'est que les drogues compliquent largement le problème, mais qu'il y a des causes sous-jacentes. Si l'on arrêtait demain le trafic de drogue, la guerre ne prendrait pas fin immédiatement. Il reste des causes sous-jacentes comme la répartition inéquitable des ressources, une grande pauvreté et les abus des droits de la personne. Le problème de la drogue ne fait que compliquer et pérenniser la situation.

M. Warren Allmand: Et il renforce la puissance des groupes paramilitaires et des guérilleros.

Mme Betty Hinton: Des deux camps, oui.

Je comprends vos réticences au sujet de la fumigation par voie aérienne. De toute évidence, il en résulte toutes sortes de problèmes au niveau des eaux, du cheptel, des cultures licites, etc. Toutefois, est-ce qu'il y a d'autres solutions que la fumigation par voie aérienne? Car si j'ai bien compris ce que je viens de lire très rapidement, les forces américaines veulent détruire les récoltes. Je suis bien d'accord pour que l'on détruise les récoltes, mais je conviens aussi avec vous qu'il ne faut pas que cela porte préjudice par la même occasion à des personnes innocentes, à des cultures tout à fait licites, au cheptel et à l'eau. Quelles sont donc les solutions de rechange?

M. Warren Allmand: Vous avez raison. Les cinq gouverneurs du sud, avec à leur tête le gouverneur de Cauca auquel j'ai fait allusion—et ils ont pris cette décision après avoir consulté la population de la région—sont prêts à entreprendre de détruire manuellement les cultures de coca qui alimentent le trafic international de drogue. La fumigation par voie aérienne n'a pas mis fin au commerce de la drogue. On fait de la fumigation, on détruit peut-être une partie des récoltes, mais on n'a pas vraiment ralenti le commerce international des drogues. Les cinq gouverneurs du sud sont prêts à procéder à une destruction manuelle pour que ce soit simplement ces cultures qui soient touchées et non pas les autres. Bien entendu, le cheptel et les propriétés ne seraient pas non plus pollués si l'on procédait de cette manière.

C'est en cours de discussion et d'ailleurs nous en avons parlé avec l'ambassadeur du Canada. On examine la chose sérieusement, mais on ne s'est pas encore entendu.

• 1605

La présidente: N'a-t-on pas arrêté les fumigations par voie aérienne? Il n'y en a pas à l'heure actuelle, n'est-ce pas?

M. Warren Allmand: Si on a arrêté, je ne suis pas au courant.

La présidente: Très bien. Nous nous informerons.

Mme Betty Hinton: Je pense que l'on a suspendu l'opération pendant un certain temps dans certaines régions du pays mais que l'on a recommencé.

La destruction par des moyens manuels remédierait évidemment à une bonne partie des problèmes, même s'il faudrait pour cela employer beaucoup de main-d'oeuvre. D'après ce que l'on m'a dit et si j'en crois mes connaissances limitées du commerce de la drogue, je suppose que si on allait essayer de détruire manuellement ces cultures, ce serait bien plus dangereux pour la population que nous essayons de protéger en ce moment que ce n'est le cas avec les moyens actuels. Je ne peux pas imaginer que ceux qui ont investi dans ces cultures vont rester les bras croisés et laisser la population venir les détruire. Je crains donc que les gens qui vont venir détruire ces cultures par des moyens manuels seront bien plus en danger que dans le cadre du système actuel.

M. Warren Allmand: Voici ce qu'on m'a dit. La coca est utilisée depuis des siècles par les indigènes en Colombie. Pour en faire un narcotique, il faut la traiter par des moyens chimiques mais, telle qu'elle est récoltée dans la nature, cela fait partie de leur culture. C'est une plante curative. On la met dans l'eau et on en fait une boisson qui est bonne pour la santé. Elle peut toutefois être transformée. Ces cultures se font souvent sur leurs propres terres, sur leur propre territoire. Il ne leur en faut probablement pas une grande quantité pour leurs besoins personnels, pour leur usage personnel à des fins légitimes. Ce que l'on fait pousser à l'heure actuelle est destiné au trafic international de la drogue.

Tout ce que je peux vous dire, c'est qu'ils ont déclaré être prêts à détruire manuellement ces cultures. Il m'apparaît qu'il pourrait y avoir quelque danger. Toutefois, les cinq gouverneurs du Sud, avec l'appui de la population, sont prêts à le faire, plutôt que de voir détruire leurs cultures licites et leur cheptel, et de risquer la santé de la population en raison des effets de la fumigation par voie aérienne.

Mary a d'autres renseignements à vous donner.

Mme Mary Durran: Nous avons cru comprendre que bien des gens étaient prêts à arracher manuellement leurs propres récoltes, mais à condition qu'il y ait une solution de rechange viable qui leur permette de gagner leur vie. Il y a d'autres projets en cours en Colombie, d'après ce que nous avons cru comprendre. Ainsi, le programme de lutte contre la drogue des Nations Unies vient de lancer un projet incitant les agriculteurs à commercialiser des coeurs de palmier et d'autres cultures de substitution dans le cadre du programme d'éradication de la drogue. De nombreux Autochtones nous ont dit que les gens de leur communauté étaient prêts à se débarrasser de ces cultures si on pouvait les remplacer par autre chose pour leur permettre de vivre. Les Autochtones de la Colombie savent qu'à long terme il est dangereux pour eux d'être liés au trafic de la drogue et ils comprennent donc bien que c'est dans leur intérêt. La difficulté, toutefois, c'est qu'à leurs yeux, et aux nôtres, la fumigation par voie aérienne n'est qu'une solution à court terme et n'offre pas de perspectives à long terme à la population. C'est pourquoi la population est très réticente et ne veut pas accepter ce programme.

Mme Betty Hinton: Très bien.

Nous envisageons la question du point de vue canadien et vous nous avez parlé des mines en Colombie. Je suis originaire d'une région qui a la plus grosse mine de cuivre à ciel ouvert en Amérique du Nord. Je m'intéresse à l'exploitation minière depuis 30 ans et je connais donc assez bien la question. La plupart des entreprises qui sont installées en Colombie ont une société mère américaine et, en grande partie, lorsqu'elles s'installent en Colombie, ou dans tout autre pays dans lesquels elles exploitent des mines, elles créent des emplois pour la population, autochtone ou autre, et elles lui procurent par ailleurs une qualification. Il serait très difficile pour le Canada d'exercer des pressions étant donné que la plupart de ces sociétés minières ont des sociétés-mères américaines. Nous n'aurons donc absolument aucun pouvoir à cet égard. Je me demandais par conséquent où vous vouliez en venir.

M. Warren Allmand: Nous avons rencontré les responsables de certaines sociétés pétrolières dont la propriété, d'après ce que nous avons cru comprendre, était exclusivement canadienne.

La Colombie a des règlements en matière d'évaluation environnementale, par exemple, et elle a aussi des lois en ce qui a trait à l'exploitation minière. Je crois savoir que d'autres intervenants vont en parler un peu plus tard—je ne suis pas un spécialiste de la question. Une société canadienne a quitté le sud de la Colombie parce qu'on faisait pression sur elle pour qu'elle paie des taxes, soit aux guérilleros, soit aux paramilitaires, afin de rester en exploitation, ce qu'elle a refusé de faire. Elle s'est donc rapprochée de Bogota.

• 1610

Nous avons les mêmes démarches à faire au Canada—et j'ai été ministre des Affaires indiennes et du Nord. Il s'agit de procéder à des consultations et de s'entendre avec les gens qui sont propriétaires du terrain et qui l'occupent pour pouvoir faire de l'exploitation minière ou pétrolière sur leur territoire. Parfois ils sont d'accord, parfois non. Dans certains cas, ils réussissent à obtenir un accord équitable et parfois encore, ils sont exploités et leurs terres sont détruites contre leur volonté. Qu'il s'agisse de sociétés canadiennes, américaines ou à contrôle américain, je considère qu'il convient de respecter les droits de la personne lorsqu'on traite avec les populations qui se trouvent sur ces terres.

Comme je vous l'ai dit tout à l'heure, il y a dans la constitution colombienne des dispositions qui garantissent aux Autochtones certaines terres, qui sont les leurs. Il est mal, à mon avis, de les leur prendre purement et simplement et de les exploiter sans tenir compte de leur avis. C'est une faute sur le plan légal, c'est une faute sur le plan de la morale et c'est une faute selon la constitution colombienne. Nous demandons donc que l'on respecte les normes internationales, les normes colombiennes et les normes en vigueur dans notre propre pays s'il s'agit de sociétés canadiennes. Autrement dit, on ne devrait pas pouvoir faire dans un autre pays ce que l'on ne peut pas faire chez soi.

La présidente: Monsieur Dubé.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Monsieur Allmand, je pense que du temps où vous étiez député, les gens des différents partis vous reconnaissaient toujours votre droit à l'indépendance. Vous avez fait part de cet esprit de justice qui existait, même au Parlement, dans la plupart des dossiers. Je vous reconnais dans votre présentation d'aujourd'hui.

Peut-être ai-je mal compris parce que cela se déroulait vite, mais je crois vous avoir entendu dire que 80 p. 100 des crimes politiques ou des abus étaient commis par des agents gouvernementaux. Est-ce que je vous ai mal entendu?

M. Warren Allmand: La Commission des juristes de la Colombie a fait un rapport dans lequel elle a dit que 85 p. 100 des assassinats étaient commis par des agents de l'État et des paramilitaires, et que 15 p. 100 l'étaient par la guérilla. Ces statistiques sont au bas de la page 9 du rapport, à la note n° 3.

M. Antoine Dubé: Très bien.

M. Warren Allmand: Donc, au cours de l'année 2000, presque 85 p. 100...

[Traduction]

Mon rapport est rédigé en anglais, mais vous avez ici, je crois, la version française.

[Français]

M. Antoine Dubé: Oui.

M. Warren Allmand: Ces statistiques ont été publiées par la Commission des juristes de la Colombie.

M. Antoine Dubé: Je le vois. Merci. On met ensemble les deux catégories, celle de l'État et celle des paramilitaires. Est-ce qu'on peut connaître la proportion qui est attribuable à l'État?

M. Warren Allmand: Non. C'est très difficile. Comme je l'ai mentionné, nous avons rencontré des ministres, des sénateurs, des députés et des gens du gouvernement, et nous avons essayé de résoudre cette question.

Il semble que dans les territoires ruraux, il y ait des cas où les représentants des militaires ont collaboré avec les paramilitaires, mais d'un autre côté, le président et beaucoup des fonctionnaires, députés et gens du gouvernement ont une politique qui va à l'encontre de cela, et plusieurs militaires ont été arrêtés et même mis en prison. Donc, c'est contre leur politique, mais il y a quand même des problèmes à cet égard.

La raison de ces problèmes est que, comme je l'ai mentionné, quelque 85 p. 100 des paramilitaires étaient légaux. Cette fois-là, il y avait des relations entre les militaires et les paramilitaires, mais par la suite, parce que des atrocités, des massacres, etc. avaient été commis par les paramilitaires, on a décidé de rendre les paramilitaires illégaux, mais il y a tout de même encore des relations entre quelques colonels ou commandants et les paramilitaires. C'est pour cette raison qu'il y a encore des problèmes, même si la politique du gouvernement est maintenant contre cela.

• 1615

M. Antoine Dubé: Sur un tout autre aspect, je vantais tout à l'heure votre esprit d'indépendance au moment où vous étiez député, mais vous savez que pas plus tard qu'hier, on a eu un vote en troisième lecture sur le projet de loi sur la SEE, la Société pour l'expansion des exportations. M. Paquette, du Bloc québécois, avait proposé qu'on inscrive le respect des droits de la personne dans les conditions d'aide aux entreprises de la SEE. Cela a été rejeté, et on se demande pourquoi. Je ne vous demande pas de vous prononcer là-dessus, mais pensez-vous qu'on pourrait revenir à la charge là-dessus dans un proche avenir?

C'est extrêmement important. S'il n'est pas mentionné de façon spécifique que la SEE est tenue de respecter les traités internationaux... À votre point de vue, est-ce que, même si ce n'est pas mentionné, la SEE est liée par ces traités que le Canada a signés?

M. Warren Allmand: La semaine dernière, j'ai témoigné devant le Comité des affaires étrangères et du commerce international sur ce projet de loi, et j'ai demandé à la commission d'amender la loi en ce sens et aussi de s'assurer que

[Traduction]

la Société pour l'expansion des exportations soit soumise aux dispositions de la liberté d'information, de l'accès à l'information.

D'ailleurs, le comité des affaires étrangères, avant l'adoption du projet de loi, avait indiqué dans son rapport, parmi ses recommandations au gouvernement, que l'on tienne compte des droits de la personne en amendant le projet de loi et a recommandé par ailleurs—à l'unanimité—que la Société pour le développement des exportations soit soumise aux dispositions de la Loi sur l'accès à l'information.

J'ai simplement demandé au comité de faire ce qu'il avait lui-même préconisé de faire. Je suis déçu qu'il ne l'ait pas fait. Peut-être que le Sénat amendera ce projet de loi.

[Français]

M. Antoine Dubé: Je suis content de vous entendre dire cela.

Il y a autre chose. À la page 15, vous parlez des concepts fondamentaux des droits des peuples autochtones. Il y a des définitions de «peuples autochtones», de «territoire autochtone», de «communauté autochtone», de «réserve autochtone», et «resguardo autochtone». Il y a même des définitions de «cabildo autochtone» et d'«autonomie autochtone».

Je vous avoue que les choses me semblent plus simples au Canada. Il y a les autochtones qui vivent en réserve et il y a les autres. Est-ce que je me trompe ou si vous trouvez un peu compliquée cette façon de décrire les communautés autochtones?

M. Warren Allmand: En Colombie, il y a deux genres de réserves, qui sont plus ou moins les mêmes qu'ici. Les resguardos sont d'anciens terrains qui étaient réservés aux Indiens depuis même avant l'indépendance de la Colombie, pendant la période espagnole. C'est un genre de réserve. Mais il y a aussi 17 réserves nouvelles, je crois, qui ont un statut un peu différent. Ces réserves ont plus ou moins les mêmes qualités que les nôtres, mais il y en a deux genres, parce que ces deux genres de réserves ont connu des développements un peu différents.

Un cabildo est un genre de gouvernement sur les resguardos et les réserves des Indiens. C'est un genre de société du gouvernement. C'est plus ou moins comme notre conseil de bande en vertu de notre Loi sur les Indiens, mais c'est peut-être un peu différent ici et là.

M. Antoine Dubé: J'entends...

[Traduction]

La présidente: Je vous remercie. Votre temps est écoulé. S'il nous reste du temps, nous reviendrons à vous. Je ne le crois pas, cependant.

• 1620

Avant que M. Robinson n'intervienne, je veux simplement que vous sachiez, monsieur Allmand, que lorsque l'ambassadeur Rishchynski est venu témoigner en ces lieux en septembre, il a effectivement déclaré, comme vous-même, que rien ne prouvait que des sociétés étaient complices des abus commis en matière de droits de la personne et qu'il continuait à suivre la question de près. Je voulais simplement que vous le sachiez.

M. Warren Allmand: Nous sommes allés là-bas dans le but d'essayer de voir s'il y avait un lien, mais nous ne l'avons pas trouvé. Je vous dirai bien franchement que nous n'avons pas entendu d'histoires horribles et que nous n'avons pas vu de méchants. Toutefois, j'estime qu'il ne faut pas perdre la question de vue.

La présidente: Je pense, d'ailleurs, qu'il se référait aux sociétés canadiennes et pas aux autres.

M. Warren Allmand: Oui, en effet.

Mme Mary Durran: J'aimerais ajouter un mot à ce sujet.

La présidente: Oui, allez-y.

Mme Mary Durran: Pour ce qui est des entreprises, on nous a dit à maintes reprises en Colombie qu'une fois qu'une société minière s'installait dans une région peuplée d'Autochtones, elle attirait immédiatement les guérilleros, car ces derniers n'aiment pas de manière générale les sociétés minières étrangères. La présence des guérilleros attire à son tour celle des paramilitaires. Puis, si la population s'oppose au projet minier, dès qu'elle fait mine de s'opposer par des moyens démocratiques, en Colombie, notamment dans les campagnes, où la démocratie n'est pas établie comme elle l'est ici, il y a des gens qui se font tuer parce qu'ils ont tout simplement voulu exercer leurs droits de s'opposer démocratiquement à un projet. Nous avons vu ce genre de situation à Urra, dans la région d'Embera-Katio au nord de la Colombie.

La présidente: Je pense que c'est le seul exemple qu'on a pu nous donner.

M. Warren Allmand: Le cas de Kimy Pernia illustre bien cette situation. Il a voulu faire valoir ses droits et il semble qu'il ait été tué.

La présidente: Monsieur Robinson.

M. Svend Robinson: Merci, madame la présidente.

Je tiens à remercier Droits et démocratie d'avoir organisé cette mission en Colombie en compagnie de l'Assemblée des premières nations et à dire que j'appuie pleinement les recommandations qui ont été faites et que j'inviterai bien évidemment le gouvernement à y donner suite. J'ai été particulièrement frappé par vos recommandations au sujet du Plan Colombie. Je suis allé en Colombie cette année et on n'a pas manqué de me décrire cette triste situation. La politique du Canada sur la question des droits de la personne est très positive, très respectée, mais l'on s'inquiète beaucoup de notre silence au sujet du Plan Colombie.

J'ajouterai, au sujet du volet militaire du Plan Colombie, que bien des gens font état de l'hypocrisie flagrante d'un projet militaire qui s'attaque à la région contrôlée par les forces armées révolutionnaire et absolument pas aux forces paramilitaires, qui sont justement financées par le trafic de la drogue. Il est très clair que cette question a une dimension politique et que les États-Unis cherchent aussi à s'en prendre aux forces armées révolutionnaires en laissant tranquilles les forces paramilitaires.

Madame la présidente, je ne poserai pas de questions. Francisco Ramirez est ici et je suis prêt à lui laisser mon temps de parole pour que nous puissions l'entendre.

La présidente: Je ne pense pas que nous en aurons le temps.

Charles.

M. Charles Hubbard (Miramichi, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je tiens à féliciter M. Allmand. Warren; voilà déjà un certain temps que les peuples autochtones du monde entier ont obtenu une reconnaissance internationale et ont entrepris de s'unir pour améliorer leurs conditions de vie et la situation sociale dans leur pays. Je ne siège pas au sein de ce comité, mais j'ai suivi quelque peu la question.

Est-ce que le gouvernement de la Colombie verse des allocations à ses Autochtones au titre de l'assistance sociale et pour aider plus de 80 000 d'entre eux qui sont pauvres? Le Canada dépense quelque 6 milliards de dollars par an pour essayer d'aider ses Autochtones, mais que fait-on en Colombie pour ce qui est des programmes d'assistance?

M. Warren Allmand: Je n'ai pas les chiffres exacts inscrits au budget. Je vous l'ai signalé, la Colombie a depuis 1991 une nouvelle constitution qui prévoit d'importantes dispositions en faveur des Autochtones mais, pour l'instant, elles ne sont pas appliquées ou ne sont pas applicables dans bien des régions. Je ne sais pas quel est le budget.

Je sais par contre que 26 p. 100 du territoire de la Colombie est réservé aux Autochtones, mais bien souvent ce ne sont pas les meilleures terres. C'est comme un certain nombre de terres qui sont allouées au Canada. Même dans ces territoires, elles sont taxées par les guérilleros, les paramilitaires et les narcotrafiquants, et beaucoup de gens en sont partis, au point que certains d'entre eux vont jusqu'à perdre leur identité. Certaines communautés sont pratiquement au bord de l'extinction.

• 1625

M. Charles Hubbard: M. Dubé a évoqué le fait que l'on a étudié la situation régnant dans un autre pays, par exemple le fait que nous allions en Colombie. Je ne suis pas au courant, mais est-ce qu'il est arrivé que d'autres pays aient rendu visite au million de personnes qui ont le statut d'Indien inscrit ou non dans notre pays? Existe-t-il un rapport faisant la critique ou l'éloge du travail accompli au Canada? Nous allons dans un pays étranger et nous disons: voilà la situation. Existe-t-il un rapport permettant de répondre pleinement aux questions qu'a soulevées M. Dubé il y a quelques minutes?

M. Warren Allmand: Je vous signale tout d'abord que nous avons été invités par les Autochtones de la Colombie. D'ailleurs, je crois qu'ils ont dit à la présidente de votre comité qu'ils seraient heureux qu'un comité parlementaire se rende aussi sur place. Ils souhaitent que la communauté internationale se rende compte sur le terrain de la situation.

En ce qui concerne le Canada, oui, il y a effectivement un rapport. Vous pouvez lire dans le rapport du Comité sur les droits de l'homme, qui relève de la Commission de l'ONU sur les droits de l'homme, une critique très acerbe du Canada, qui n'a pas suivi les recommandations de la Commission royale sur les peuples autochtones. On y condamne longuement la politique du Canada en ce qui concerne les Autochtones. Ce rapport émane de la Commission de l'ONU sur les droits de l'homme. Il y en a peut-être d'autres. Je connais bien ce qu'a fait la commission parce que je me suis référé à ses travaux dans certaines de mes études.

D'ailleurs, cette même Commission de l'ONU sur les droits de l'homme, comme je vous l'ai indiqué, a publié un long rapport sur la Colombie, non seulement au sujet des Autochtones, mais sur toute la société colombienne. J'ai fait état de la situation horrible dans laquelle se trouvaient les dirigeants syndicaux. C'est la pire situation au monde. Nulle part ailleurs les dirigeants syndicaux sont tués avec une telle fréquence qu'en Colombie. Pour ce qui est des journalistes, il n'y a qu'un seul pays au monde qui soit pire. Par conséquent, celui qui cherche à rendre compte de la vérité risque d'être tué.

M. Charles Hubbard: Si vous lisez un article à ce sujet, que ce soit dans Time Magazine, dans Maclean's ou dans toute autre revue, vous verrez les terribles difficultés qu'éprouvent la population, les pauvres, les paysans de Colombie, avec leurs cultures. Ils s'efforcent de faire pousser d'autres cultures pour remplacer la drogue. Cette situation est un véritable attentat contre les droits de la personne et contre la dignité de la vie humaine dans le monde. Je tiens à faciliter votre groupe et votre organisation pour le travail que vous avez accompli afin d'informer les parlementaires. Espérons que nous pourrons inciter madame la présidente à améliorer la situation de toutes ces populations, non seulement en Colombie, mais dans de nombreux pays d'Amérique du centre et du Sud—et probablement chez nous.

M. Warren Allmand: Je vous ai indiqué qu'en dépit de nos ressources limitées, nous avons oeuvré au Pérou, au Guatemala, au Mexique et au Salvador. Toutefois, nous considérons qu'à l'heure actuelle, la priorité en Amérique du Sud, c'est la Colombie. Nous nous efforçons en fait de monter un projet en collaboration avec l'organisation pour le développement et la paix pour aider sur place les Autochtones et les afro-Colombiens à se donner les moyens de prendre part au processus de paix. Il y a aussi cette question. Nous recommandons fortement, madame la présidente, que l'on fasse pression pour que les Autochtones de la Colombie participent aux pourparlers de paix. Ils constituent un secteur important du pays, ils sont reconnus par la constitution mais, jusqu'à présent, ils n'ont pas pris part aux pourparlers de paix. Ils ont une organisation nationale, qui s'apparente à notre Assemblée des premières nations, ça s'appelle l'ONIC—que signifie ce sigle en espagnol?

Mme Mary Durran: L'Organizacion Nacional Indigena de Colombia.

La présidente: Merci, monsieur Allmand.

Nous avons deux groupes à entendre ce matin et malheureusement le temps qui vous était imparti est écoulé. Si vous avez quelque chose d'autre à nous communiquer avant que nous rédigions notre rapport, faites-le parvenir par courrier à notre greffière.

Nous allons faire maintenant une pause de deux minutes.

M. Warren Allmand: Très bien. Je tiens à remercier le comité ainsi que vous-même, madame la présidente. J'espère que vous irez bien en Colombie et que vous continuerez à évoquer ces questions auprès du gouvernement, de la population canadienne et du monde des affaires au Canada.

La présidente: Bien, je vous remercie.

• 1629




• 1633

La présidente: Nous reprenons la séance.

Nos prochains témoins représentent l'Agence canadienne de développement international; l'ACDI. Ce sont Bob Anderson, son vice-président, Romy Peters et Claude Beauséjour. Je pense que vous allez nous faire un exposé, après quoi nous vous poserons des questions.

M. Bob Anderson (vice-président, Amériques, Agence canadienne de développement international): Merci, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du sous-comité, de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui. Je sais que votre groupe a entendu de nombreuses interventions au cours des derniers mois et nous estimons que vous êtes bien placés pour commenter notre projet au moment où nous nous parlons. Nous comptons sur votre participation.

Je tiens à souligner que ce cadre de programmation n'a pas encore été discuté au sein de l'agence. Nous n'avons pas encore tenu de réunions d'information à ce sujet. Autrement dit, le ministre et le président ne l'ont pas encore vu et vous êtes le premier groupe à en prendre connaissance.

• 1635

Cet exposé, comme vous le voyez, s'articulera autour de ce premier cadre de programmation. Celui-ci prévoit que l'ACDI appuiera les initiatives qui répondent le mieux aux besoins de la Colombie. Je ne vais pas vous citer tout le document. Je me contenterai de souligner cinq ou six points importants.

Tout d'abord, comme l'a très bien fait remarquer M. Allmand et, je suis sûr, nombre d'intervenants qui se sont présentés avant lui, la situation en Colombie a énormément changé au cours des cinq ou six dernières années. Elle s'est fortement dégradée sur le plan de la sécurité. L'économie est entrée en récession. Pendant longtemps, la Colombie a eu l'une des économies les plus fortes de l'Amérique latine mais, ces deux ou trois dernières années, elle a fait une certaine expérience de la récession. Je pense qu'il y a une autre chose qui a changé, sur un point important pour nous, c'est que le gouvernement de la Colombie a fait de la paix l'une de ses priorités. C'est quelque chose qui doit nous permettre, à mon avis, de progresser.

J'estime donc que l'essentiel, pour nous, étant donné que la situation a évolué au cours des cinq ou six dernières années, c'est de faire en sorte que notre programme tienne compte de cette nouvelle réalité. Autrement dit, si l'on veut que le travail de l'ACDI continue à avoir un sens, il faut s'adapter à la nouvelle situation. Nous proposons donc dans ce document un nouveau type de programme qui à notre avis s'impose. Ce nouveau programme appliqué à la Colombie—et lorsque je parle de la Colombie, je tiens à bien préciser que nous ne parlons pas seulement du gouvernement, mais aussi de la société civile—doit répondre aux besoins du pays en matière de sécurité et de droits de la personne et l'on peut espérer que nos projets, à l'avenir, permettront à la Colombie de mieux répondre aux besoins fondamentaux de sa population et de protéger les droits de la personne, notamment pour ce qui est des gens directement touchés par le conflit.

Le deuxième volet consiste à promouvoir une participation équitable à l'établissement de la paix. J'entends par là, bien évidemment, qu'il s'agit d'un programme bilatéral; nous traitons avec le gouvernement de la Colombie, mais nous ne nous en tenons pas à cela; nous traitons et nous discutons par ailleurs avec toutes sortes de représentants de la société civile, y compris avec le secteur privé.

Troisièmement, nous devons faciliter la tâche de la Colombie dans sa lutte contre les éléments qui accentuent la violence. Au cours des discussions officieuses que nous avons eues avec toute une série d'interlocuteurs, qu'il s'agisse de représentants de la société civile, des organisations internationales, du gouvernement de la Colombie lui-même, d'un certain nombre de ministères, des affaires étrangères et d'autres encore, on nous a fait savoir que notre nouveau programme, tel qu'il est exposé ici, concorde assez bien avec les besoins de la Colombie et avec les priorités définies par ces intervenants.

Nous proposons que le programme de l'ACDI en Colombie s'intègre à un travail concerté du Canada. Cela signifie que nous devons au sein de l'ACDI faire un effort, à mon avis, pour que notre programme reflète la politique canadienne, non seulement celle du gouvernement, mais celle de toute une série d'intervenants au sein de la société civile, en incluant là encore le secteur privé. Nos activités viendront compléter les efforts de la diplomatie canadienne et feront appel à des compétences canadiennes au sein de la société civile et des organisations gouvernementales. Nous coordonnerons nos efforts avec ceux des autres donateurs et des organisations multilatérales oeuvrant en faveur de la paix en Colombie. Ce faisant, nous espérons pouvoir donner plus de poids à la contribution canadienne et atteindre des objectifs plus ambitieux. Nous espérons pouvoir renforcer par la même occasion la sécurité de nos partenaires locaux et canadiens.

Nous espérons que le nouveau programme que nous proposons en Colombie sera suffisamment souple et adaptable pour se plier à l'évolution de la situation en Colombie et répondre aux besoins relevés par le gouvernement colombien et la société civile. On ne voit pas encore bien sur quoi va déboucher toute cette évolution en Colombie et je pense que notre cadre de travail doit donc être suffisamment souple et adaptable pour faire face aux événements.

• 1640

Notre objectif en faveur de la paix et de l'amélioration de la société colombienne résulte des discussions permanentes que nous avons eues et que nous continuons à avoir avec le gouvernement canadien et les organisations de la société civile de notre pays ainsi qu'avec le gouvernement de la Colombie et les membres de la société civile de ce pays.

Voilà donc en quelque sorte le résumé de ce qui se trouve dans notre document. Je vais maintenant donner quelques instants la parole à Romy parce que nos services, et plus particulièrement Romy, ont pris part ces deux derniers jours à une série de réunions avec Jan Egeland.

Romy est le directeur de notre programme qui englobe la Colombie. Voilà trois ans qu'il occupe ces fonctions. Claude Beauséjour fait partie de notre direction depuis maintenant six ans, mais il vient juste de se joindre aux effectifs du bureau de la Colombie.

La présidente: Monsieur Peters.

M. Romy Peters (directeur intérimaire, Brésil, Cône sud et Colombie, Direction de l'Amérique du Sud, Agence canadienne de développement international): Ce matin, à la suite de notre réunion avec M. Jan Egeland, le MAECI a tenu une réunion au cours de laquelle M. Egeland devait faire l'analyse de la situation en Colombie. Par la même occasion, nous lui avons demandé s'il souhaitait que le Canada aide la Colombie. Il a répertorié huit ou neuf domaines d'intervention, dont je vous fournirai la liste, mais après l'avoir entendu, j'aurais juré qu'il avait lu notre document d'orientation stratégique, et c'est ce que je lui ai dit.

La présidente: Avant que nous commencions, est-ce que tout le monde comprend bien que M. Egeland est le représentant des Nations Unies en Colombie? Bien, allez-y.

M. Romy Peters: Il a proposé tout d'abord que l'on revoit les programmes actuels de l'ONU pour répertorier ceux qui manquent de crédits, ce qui coïncidait avec nos objectifs. Nous finançons d'ores et déjà quelque quatre ou cinq organisations différentes de l'ONU, ainsi l'UNESCO, l'UNICEF, le rôle du modérateur lui-même—le bureau de M. Egeland, le Haut-Commissariat aux droits de la personne et le Haut-Commissariat aux réfugiés. Tout cela se rattache précisément à leur intervention en Colombie. En outre, nous apportons un financement de base dans le cadre de notre groupement multilatéral.

En second lieu, il a proposé que l'on continue à financer les bonnes ONG colombiennes. Nous avons financé par le passé des ONG colombiennes dans les secteurs des droits de la personne et de l'accès à la justice. Nous envisageons de financer d'autres ONG colombiennes à l'avenir. Nous croyons savoir que nombre d'entre elles sont en mesure de mettre en application des programmes et nous voulons appuyer à l'avenir leurs efforts de paix.

Troisièmement, il a proposé que les pays ayant les mêmes objectifs envisagent un programme de coordination des ONG. Nous avons entamé des pourparlers avec d'autres donateurs internationaux afin de voir si nous pouvions définir des domaines de travail en commun. Je prévois d'aller bientôt en Colombie et nous ferons un suivi pour définir des domaines précis dans lesquels des donateurs ayant les mêmes objectifs sont en mesure de collaborer afin de créer des synergies et de coordonner notre action.

En quatrième lieu, il a proposé que les programmes soient d'application rapide et souple. Nous avons mis en place un certain nombre de fonds qui sont administrés au plan local. Nous avions auparavant le Fonds Canada, un fonds pour l'équité en fonction des sexes, un fonds pour la sécurité du gouvernement et de la population, et nous envisageons désormais la mise en place d'un fonds pour la paix et le développement économique, dont la portée sera bien plus large. Là encore, nous prévoyons qu'il sera administré au plan local pour que les décisions puissent être prises rapidement, que l'argent soit remis aux responsables sur le terrain et pour que la mise en oeuvre des programmes puisse être accélérée.

Cinquièmement, il a été proposé que l'on envisage la possibilité d'établir des groupes d'observateurs ou d'appui à la société civile. En l'occurrence, il se référait précisément à des contrôleurs internationaux. Vous savez qu'une deuxième zone démilitarisée a été proposée pour l'armée de libération nationale et qu'il a été demandé à cinq pays de faire venir des contrôleurs au cas où cette zone serait établie. Nous avons discuté avec la haute direction du MAECI de la possibilité de faire venir des contrôleurs internationaux.

Il a ensuite évoqué un certain nombre d'autres domaines qui concernent plus précisément le ministère des Affaires étrangères, mais avec la participation de l'ACDI. Je vais les évoquer rapidement.

• 1645

Il serait bon que le Canada prenne l'initiative de l'élaboration d'une nouvelle stratégie antidrogue visant à réduire la consommation. Il s'agit de coordonner nos efforts avec l'Union européenne et d'autres pays ayant les mêmes objectifs, parce qu'il nous faut réduire la consommation sans nous attaquer uniquement à l'offre.

Il convient aussi de trouver des experts susceptibles de prendre part à l'élaboration d'un accord de cessez-le-feu au cas où l'on progresserait sur la voie de la paix. Il faudra quelqu'un qui puisse structurer l'accord et le mettre rapidement en place.

Enfin, il faudrait que le Canada invite chez lui les candidats à la présidence pour connaître leurs points de vue et pour essayer par la même occasion de les inciter à faire du processus de paix un processus d'État par opposition à un processus gouvernemental.

Je vous remercie.

La présidente: Est-ce qu'on peut aussi voter pour les élire?

M. Romy Peters: Vous pourrez le leur demander.

La présidente: Je vous remercie.

Madame Hinton. Pour pouvoir faire plusieurs tours, nous allons nous en tenir à cinq minutes pour le premier tour plutôt qu'à dix minutes.

Mme Betty Hinton: J'ai une question qui ne devrait pas être longue.

Compte tenu de ce qui se passe en Afghanistan, est-ce que vous envisagez de revoir les priorités de dépenses dans ces différents domaines? Elles présentent toutes de l'intérêt, mais nous avons pris d'énormes engagements en Afghanistan et je me demande si vous ne pensez pas qu'ils doivent avoir priorité par rapport à ce programme. J'ai écrit à toute vitesse pour essayer de consigner tout ce que vous nous avez dit. Certaines propositions faites par le témoin paraissent excellentes. Quelle doit donc être votre priorité?

M. Bob Anderson: C'est précisément l'une des questions que nous avons évoquées avec Jan hier soir, quelles étaient les répercussions éventuelles du 11 septembre et comment nous devions réaffecter les crédits. Je pense qu'il est ressorti de la discussion que la situation afghane, notamment en ce qui a trait à la politique étrangère des États-Unis, risquait de détourner tellement l'attention sur ce qui se passait là-bas que l'on pourrait bien négliger certains problèmes qui se posent dans notre propre hémisphère. Je pense que ce serait regrettable. Au moment où nous nous parlons, nous disposons de ressources de quelque 60 millions de dollars sur cinq ans et, d'après ce que nous pouvons voir, nous estimons que ce devrait être suffisant pour faire ce que nous voulons faire.

Tout dépend de l'évolution de la situation et je pense qu'il nous faut tirer parti dès à présent des circonstances. Le gouvernement colombien fait un effort très courageux, à notre avis, pour amener la paix. Si la communauté internationale ne saisit pas cette chance dès à présent, ou si les différents intervenants au sein de la société colombienne ne le font pas, le risque serait énorme, à mon avis. Si la situation dégénère en une véritable guerre civile, ce ne serait pas dans notre intérêt ni dans celui de la Colombie. Faudrait-il donc, par conséquent, réaffecter en Afghanistan une partie des crédits consacrés au départ à ce programme? Nous ne le pensons pas.

Mme Betty Hinton: Très bien.

Étant donné la baisse actuelle de la valeur du dollar canadien, le chômage, l'engagement que nous avons pris de lutter contre le terrorisme, ce qui va être très onéreux, un milliard de dollars et même davantage, et le fait que nous nous sommes désormais engagés en Afghanistan, quel est le montant de crédits que vous envisagez? Vous nous avez parlé de 60 millions de dollars sur cinq ans.

M. Romy Peters: oui, 60 millions de dollars sur cinq ans, mais c'est dans le cadre d'un programme qui était déjà prévu. Cela fait partie des ressources existantes.

Mme Betty Hinton: Très bien. Qu'est-ce qui peut donc être abandonné pour que nous puissions remplir nos obligations? Avez-vous une idée?

M. Rob Anderson: Qu'est-ce qui peut disparaître?

Mme Betty Hinton: Qu'est-ce que vous pouvez supprimer dans l'immédiat? Vous nous dites qu'une intervention en Colombie est indispensable à l'heure actuelle et nous avons pris des engagements au sujet de l'Afghanistan. Par conséquent, où peut-on prélever de l'argent dans le cadre du programme d'ensemble pour répondre à ces deux impératifs?

• 1650

M. Bob Anderson: Je pense que c'est un exercice que nous sommes en train de faire à l'heure actuelle au sein de l'agence. Je ne peux pas vous donner une réponse précise. Si nous entreprenons de lutter contre le terrorisme, il nous faudra certainement mettre l'accent sur la question de la sécurité, mais je pense qu'il nous faut aussi essayer de corriger certains facteurs sous-jacents qui créent ce genre de situation. En Colombie, nous cherchons à aider le gouvernement colombien et la société colombienne, qui s'efforce d'instaurer la paix. On peut espérer que cet investissement sera rentable à long terme. C'est un bon investissement, à mon avis.

M. Romy Peters: Il faut aussi être très prudent, à mon avis, car cette situation risque de déborder sur d'autres pays. Il y a d'autres pays qui sont concernés à l'heure actuelle parce qu'un certain nombre de Colombiens qui ont été déplacés traversent les frontières et causent des difficultés. M. Egeland nous a dit hier soir qu'il y avait aussi des Colombiens qui entreprenaient d'acheter des terres en Équateur. Il ne nous a pas dit qui étaient ces Colombiens—il peut s'agir d'acquisitions légitimes ou illégitimes.

La présidente: Je vous remercie.

Monsieur Dubé.

[Français]

M. Antoine Dubé: Merci, madame la présidente.

Je voudrais avoir une précision. Les 60 millions de dollars sur cinq ans, c'est bien 12 millions de dollars par année, n'est-ce pas?

M. Romy Peters: C'est à peu près cela.

M. Antoine Dubé: Je veux d'abord vous dire qu'hier soir, la Chambre des communes a voté en faveur d'une motion que le Bloc québécois avait présentée pour que soit substantiellement augmentée l'aide humanitaire internationale. Dans notre optique, il ne s'agit pas de chercher à déplacer de l'argent d'un pays à l'autre, mais bien d'augmenter la somme. Il m'apparaît assez évident que la Colombie est le pays de l'hémisphère occidental ou des Amériques qui en a actuellement le plus besoin. On est d'accord sur cela.

Donc, je ne vous demanderai pas ce que vous élimineriez, mais plutôt ce que vous augmenteriez si on doublait le budget de l'aide internationale.

M. Romy Peters: Si on doublait le budget de l'aide, c'est sûr que de l'argent irait à l'Afghanistan, au Pakistan et aux autres pays comme ceux-là qui en ont besoin. Je ne pense pas que dans les Amériques, on ait besoin de doubler le budget. Il faut aussi voir la capacité des pays à absorber cela, et il faut du temps pour faire la programmation.

En Colombie, on peut se servir de l'argent parce qu'on peut faire la programmation. Il y a beaucoup d'organisations internationales des Nations Unies et aussi la Croix-Rouge qui font du bon travail. Si on avait plus d'argent, on pourrait en donner. On pourrait aussi faire d'autres types de programmation pour le processus d'appel et pour la résolution des conflits. On peut aider les personnes déplacées, parce qu'à ce jour, il y a à peu près deux millions de personnes déplacées, et ce nombre augmente.

M. Antoine Dubé: Je ne suis pas un spécialiste comme vous. C'est un nouveau mandat que j'ai depuis six mois ou, en tout cas, depuis l'élection. Il me semble qu'on doit penser en premier lieu aux personnes déplacées. À première vue, quand on parle de deux millions et demi de personnes déplacées, je trouve qu'une somme de 12 millions de dollars n'est pas élevée. Quelle proportion de l'aide que le Canada donne va aux personnes déplacées?

M. Romy Peters: Il est difficile de dire combien d'argent va directement à ces personnes. Nous avons la programmation de la santé. Il y a des personnes déplacées qui reçoivent maintenant des services de santé, mais il y a aussi des personnes de la communauté qui ne sont pas déplacées et qui reçoivent le même type de services. On ne peut pas faire la division.

Quand on fait de la programmation, il ne faut pas cibler seulement les personnes déplacées. Les personnes déplacées sont dans une communauté et, si on ne cible que ces personnes, cela peut déplaire aux autres personnes de la communauté, qui seront fâchées contre les personnes déplacées parce que ces dernières viennent dans leur communauté et utilisent les ressources de la communauté. Donc, il faut aider les deux côtés.

• 1655

M. Antoine Dubé: Je suis bien d'accord sur ça.

Lorsqu'il est allé à Genève cette année, le sous-comité a rencontré les gens du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Je ne suis pas un spécialiste, mais il me semble que c'est la priorité des priorités.

On entend parfois des gens dire qu'il faut montrer aux gens à pêcher, etc., mais quand les gens ne sont pas chez eux, qu'ils n'ont pas d'abri et qu'ils ont des problèmes d'alimentation et des problèmes médicaux, c'est difficile de les impliquer dans des projets de développement. Cette dimension me semble élémentaire.

M. Claude Beauséjour (analyste principal de programme, Brésil, Cône sud et Colombie, Direction de l'Amérique du Sud, Agence canadienne de développement international): Monsieur Dubé, le document qu'on vous a remis, celui de la présentation intégrale de Bob Anderson, résume un peu notre nouveau cadre de programmation, celui dont on discute aujourd'hui. Les personnes affectées par le conflit sont notre principale priorité. C'est là qu'ira la plus grande partie de notre argent.

Pour répondre à votre question, si le budget augmentait, c'est là qu'il serait le plus facile de dépenser, parce qu'on peut envoyer de l'argent par l'entremise des organisations des Nations Unies. On a déjà des projets et on pourrait tout simplement augmenter la somme qui leur est affectée. Notre contribution au programme des Nations Unies pour les droits de la personne que M. Kompass dirigeait peut être augmentée.

Donc, c'est vraiment notre principale priorité. En fait, notre priorité est d'aider non seulement les personnes déplacées, mais tous les gens affectés par le conflit armé. Mais les personnes déplacées sont la première priorité.

M. Antoine Dubé: Les personnes affectées directement, parce que tout le monde est affecté.

M. Claude Beauséjour: C'est cela. Ce sont les personnes affectées directement, les plus affectées, les plus pauvres.

[Traduction]

La présidente: Je vous remercie.

Monsieur Robinson.

M. Svend Robinson: Je tiens tout d'abord à remercier les témoins de l'ACDI de nous faire part de ce nouveau cadre de programmation bilatérale qui est proposé, et à féliciter l'ACDI de mettre l'accent sur la paix, la sécurité des populations et le respect des droits de la personne. Il est évident que compte tenu de la situation tragique dans laquelle se situe votre action en Colombie, ce sont là les priorités qui s'imposent. Je tiens tout particulièrement à vous encourager à appuyer les groupements de la société civile. Je relève dans votre mémoire que vous privilégiez cette initiative.

Je voulais vous demander si vous pouviez évaluer au moment où on se parle la part de l'ensemble des crédits qui sera affectée aux groupements de la société civile. J'estime bien franchement que la grande majorité, sinon la totalité, des crédits, devrait être affectée à la société civile, par opposition aux institutions gouvernementales. Il s'agit là d'un changement d'orientation, à mon avis, de l'ACDI en Colombie, et j'aimerais donc savoir vers quoi vous vous dirigez et si vous reconnaissez qu'il s'agit là d'un véritable tournant.

En second lieu, on a critiqué, vous le savez, l'ACDI pour avoir financé le secteur énergétique et minier, notamment en ce qui a trait à la mise en place du nouveau code minier, à la nouvelle législation sur les mines. Espérons que nous aurons la possibilité d'entendre le président du Syndicat des mineurs. Le syndicat a peur que cela entraîne d'autres abus des droits de la personne, et par ailleurs des dégâts sur l'environnement, alors que l'ACDI, du moins indirectement, a financé l'élaboration de ce code qui ne fait certainement rien pour améliorer le respect des droits des travailleurs, que le Canada s'est pourtant engagé à faire respecter aux termes des règles établies par le BIT. J'aimerais savoir ce que vous en pensez et, en particulier, si vous vous engagez à faire en sorte, avant de financer l'un quelconque de ces secteurs, que l'on consulte toutes les parties concernées, notamment les Autochtones et les représentants syndicaux de la région en cause.

Rapidement enfin, lors de la dernière comparution de l'ACDI, j'ai posé la question du financement de Peace Brigades International. On nous a répondu que le Fonds canadien, par l'entremise de l'ambassade, permettait de verser certains crédits, et je ne l'ignore pas. Toutefois, Peace Brigades International fait un magnifique travail. Cette organisation relève directement de ce mandat. Elle était antérieurement directement financée par l'ACDI. J'aimerais savoir si vous êtes prêt à donner une réponse favorable à une demande d'appui au travail qu'elle effectue à l'heure actuelle en Colombie.

M. Bob Anderson: Puis-je répondre dans l'ordre inverse des questions posées?

M. Svend Robinson: Bien entendu.

M. Bob Anderson: Je laisserai alors à Romy le soin de répondre en détail à la question précise que vous avez posée.

• 1700

Sur la question des mines, je pense qu'il y a un malentendu. Notre participation à l'élaboration du code minier a été très minime. Lorsque notre projet a été lancé, il y avait déjà un code minier. Le gouvernement de la Colombie était en train de réviser ce code et il avait été présenté au Parlement. La Colombie, comme la plupart des autres pays d'Amérique latine, cherchait à l'époque à moderniser de manière générale son cadre de réglementation. L'industrie minière n'était qu'un des secteurs concernés. Lorsque nous sommes entrés en action, le code révisé venait d'être rejeté par le Parlement et il n'a jamais fait véritablement partie du mandat original. Je crois que notre participation à l'élaboration du code minier lui-même n'était que de l'ordre de un pour cent—nous l'avons calculé hier—de l'ensemble du projet. Après le rejet de ce code, on nous a demandé d'examiner la question sous l'angle de la formulation juridique, sur un point très précis, pourrait-on dire, en ce qui a trait à ce que l'on appelle l'élément discrétionnaire. Les responsables se demandaient en substance si la formulation juridique allait entraîner des confusions ou au contraire apporter une certaine clarté. C'est essentiellement la seule chose que nous avons faite au sujet du code minier proprement dit.

En grande partie notre action dans le secteur minier a consisté à appuyer le gouvernement colombien, vous avez raison, les institutions du gouvernement—pour qu'il puisse se doter d'un cadre de réglementation en matière environnementale. Le pays venait d'établir un ministère de l'environnement et cherchait un appui auprès du Canada en matière de réglementation environnementale pour tirer parti, j'imagine, des compétences que l'on reconnaît au Canada au plan international. Des spécialistes de la Colombie-Britannique et d'autres régions du Canada se sont donc rendus sur place pour que l'on puisse profiter de nos compétences en matière réglementaire.

La présidente: Monsieur Robinson, est-ce que vous voulez que l'on réponde à vos autres questions, parce que votre temps est écoulé?

M. Svend Robinson: Oui.

La présidente: Je vous prierais de répondre rapidement aux autres questions.

M. Bob Anderson: Je laisserai à Romy le soin de répondre un peu plus en détail mais, en ce qui concerne la répartition entre le gouvernement, la société civile et les ONG, je pense qu'il est encore un peu trop tôt pour le dire parce que nous ne savons pas encore comment va évoluer la situation. Il y a une chose qui doit être bien claire: le Canada ni l'ACDI ne peuvent apporter la paix en Colombie. Nous ne pouvons qu'apporter notre aide si les différentes parties prenantes en Colombie y voient leur intérêt. On voit assez clairement, je pense, l'intérêt du gouvernement. Est-ce que les FARC considèrent qu'il est dans leur intérêt de faire la paix? Est-ce que les forces paramilitaires y voient leur intérêt? S'il y a un consensus dans ce sens en Colombie, nous pourrons apporter notre aide. C'est le déroulement des opérations, à mon avis, qui déterminera le genre d'équilibre que nous allons trouver. Il est pratiquement certain, toutefois, que l'on s'occupera bien plus de la société civile qu'on aurait pu le faire par le passé. Je pense qu'on peut légitimement le dire. Tout simplement, je ne sais pas exactement quelle sera la répartition.

M. Romy Peters: Je vous répète qu'un financement a déjà été fourni. Je crois savoir que par l'entremise de notre groupement multilatéral, par l'intermédiaire du programme AHI, des crédits ont déjà été versés. Malheureusement, je n'en connais pas le montant exact, mais j'ai vu passer la proposition il y a environ une semaine.

M. Svend Robinson: S'agissait-il d'une dotation internationale ou...

M. Romy Peters: J'ai cru comprendre que c'était le cas.

M. Svend Robinson: Oui. Si vous pouviez donner ces précisions à notre comité, ce serait bien.

M. Romy Peters: D'accord.

Quant à la société civile, vous proposez qu'on lui affecte tous les crédits. Une grande partie des crédits va être affectée à la société civile, mais une partie servira aussi à financer le gouvernement et, par exemple, la Defensoria del Pueblo, le protecteur du citoyen.

Nous collaborons par ailleurs avec le vérificateur général parce qu'à l'heure actuelle entre 4 et 5 milliards de dollars de fonds gouvernementaux sont détournés. Nous dispensons une certaine formation pour renforcer les normes de vérification, par exemple, et pour essayer de retrouver une partie de cet argent pour qu'il puisse être affecté directement aux programmes sociaux.

Nous collaborons aussi avec la GRC dans le cadre d'un programme de protection des témoins. Vous n'ignorez pas que le pourcentage de crimes impunis est de l'ordre de 96 à 97 p. 100 en Colombie. Cela s'explique en partie par le fait que les témoins doivent se taire. Dès qu'ils parlent, ils sont menacés. Nous envisageons donc avec la GRC de mettre sur pied un programme de protection des témoins.

• 1705

M. Bob Anderson: Nous envisagerons aussi probablement de collaborer avec le gouvernement fédéral et les gouvernements locaux, comme nous le faisons déjà actuellement, sur les questions liées à la résolution des conflits et à la consultation du public. C'est ce que nous aimerions faire.

M. Svend Robinson: Je vous remercie.

La présidente: Madame Jennings.

[Français]

Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): Merci, madame la présidente. Merci, monsieur Anderson, monsieur Peters et monsieur Beauséjour.

Dans le nouveau plan, qui n'est pas encore approuvé mais que vous allez soumettre à vos supérieurs, vous prévoyez 60 millions de dollars sur cinq ans, soit 12 millions de dollars par année.

Premièrement, j'aimerais savoir quel est le budget annuel de la région du Brésil, du Cône sud et de la Colombie. Comme vous l'avez dit, vous n'avez pas de nouvel argent et vous allez devoir déplacer l'argent qui était consacré à d'autres programmes. Quel est le budget actuel pour la Colombie? Qu'est-ce que la somme de 12 millions de dollars représente en termes d'augmentation?

[Traduction]

M. Bob Anderson: La région dont vous parlez s'étend à la Colombie, au Brésil, et au Cône sud et cela fait au total 20 millions de dollars par an, la Colombie touchant en moyenne, en ce moment, quelque 12 millions de dollars provenant du programme général, dont 4 millions de dollars à l'heure actuelle par l'entremise de notre programme bilatéral.

M. Romy Peters: Notre fonds de consolidation de la paix dispense certains crédits, de même que le programme d'assistance humanitaire international et que notre direction générale du partenariat. Au total, ça se monte à 12 millions de dollars parmi lesquels 4 millions de dollars d'aide bilatérale venant de nous.

La présidente: Puis-je vous interrompre? Lorsque vous parlez de 12 millions de dollars, est-ce que ça signifie que vous ne disposez pas de ces 12 millions de dollars, que c'est de l'argent qui provient d'autres institutions?

M. Romy Peters: Non, tout cet argent provient de l'ACDI. Il y a différentes directions générales au sein de l'ACDI.

La présidente: De différentes directions générales de l'ACDI.

M. Romy Peters: Oui, nous collaborons au niveau des programmes.

La présidente: Très bien.

M. Romy Peters: Donc, selon le mécanisme employé, chaque direction générale dispense certains crédits.

M. Bob Anderson: Il nous faudrait éclaircir la chose—il semble qu'il y ait une certaine confusion.

[Français]

Mme Marlene Jennings: Non, il l'a très bien expliqué. Les contributions de toutes provenances au sein de l'ACDI sont de 12 millions pour la Colombie.

M. Romy Peters: C'est ça.

Mme Marlene Jennings: Vous parlez de 12 millions de dollars pour la Colombie pour les cinq prochaines années. Expliquez-moi quelle est la différence. S'il y a une différence, quelles seront les contributions provenant de toutes les sources au sein de l'ACDI au cours des cinq prochaines années?

M. Romy Peters: Au total, on prévoit dépenser le même montant d'argent. La seule différence, c'est que le programme bilatéral va augmenter. Les gens de l'aide humanitaire internationale n'auront peut-être pas la capacité d'y dépenser autant d'argent parce qu'ils vont dépenser l'argent en Afghanistan, au Pakistan et dans d'autres pays. C'est le secteur de l'aide bilatérale qui va dépenser davantage.

M. Claude Beauséjour: Me permettez-vous d'ajouter quelque chose, madame Jennings?

Mme Marlene Jennings: Oui, rapidement.

M. Claude Beauséjour: Notre projet dans le secteur de l'énergie, des mines et de l'environnement qui se termine ou un programme de télécommunications sont des projets qui coûtent plus cher que ce qu'on a l'intention de faire avec la nouvelle programmation, où on va appuyer la société civile et faire des activités très pointues et ponctuelles. Il y aura des fonds locaux pour aider la société civile colombienne.

Mme Marlene Jennings: C'est plutôt la nature de la contribution qui va changer, et non pas le montant ou l'investissement. Ça, c'est important.

Je ne suis pas d'accord avec mes collègues qui ont dit que l'ACDI et le gouvernement canadien ne devraient pas financer des projets qui impliquent la participation du gouvernement. Je m'explique très rapidement.

• 1710

S'il s'agit d'un gouvernement démocratique faible et que l'on veut que la paix soit instaurée à un moment donné, il faut aider ce gouvernement s'il a une volonté de renforcer les structures de justice, etc.

Vous avez parlé de certains programmes qui existent déjà, dans lesquels la GRC est impliquée, de même que d'autres acteurs canadiens des forces de l'ordre. Quand M. Egeland est venu ici, je lui ai demandé s'il croyait qu'une des contributions du Canada pourrait être des programmes de conciliation et de formation des forces de l'ordre en Colombie, comme ce qu'on fait d'ailleurs actuellement au Brésil, par exemple à São Paulo, et il a dit oui. Êtes-vous d'accord? Est-ce quelque chose qui pourrait faire partie de la nouvelle orientation stratégique?

M. Romy Peters: Oui, c'est certainement possible. Comme je l'indiquais à M. Robinson, nous n'allons pas seulement dépenser de l'argent pour la société civile; nous allons aussi travailler avec le gouvernement. Quand nous avons fait notre voyage en Colombie, nous avons discuté de ces priorités avec le gouvernement. Nous avons rencontré le gouvernement et la société civile, et nous avons également eu des rencontres non officielles ici, au Canada, avec des acteurs du même genre pour leur demander si nos priorités sont vraiment celles de la Colombie. Ils nous ont tous indiqué que c'était le cas.

Mme Marlene Jennings: En dernier lieu, j'aimerais faire une suggestion. Si vous continuez à approuver des projets qui impliquent les forces de l'ordre en Colombie, je vous suggère de consulter les acteurs de la société civile avant d'approuver ces projets, comme mes collègues l'ont mentionné. Je m'explique.

Ici, au Canada, chaque fois qu'il y a eu une modernisation ou une nouvelle orientation stratégique de nos corps policiers, que ce soit au niveau provincial, au niveau national, c'est-à-dire au niveau de la GRC, ou au niveau municipal, cela a toujours été en réaction à une demande du public, de la communauté. Les projets de formation qui ont réussi sont ceux pour lesquels la société civile avait pu identifier le problème et dont elle avait participé à l'élaboration.

Merci.

[Traduction]

M. Bob Anderson: J'ajouterais, en quelques mots, que c'est certainement une possibilité, à condition que les Colombiens y voient une priorité. S'ils considèrent qu'il s'agit là d'une priorité, rien ne nous empêche de le faire. Le Canada est réputé pour sa police à vocation communautaire, par exemple, et nous sommes très en demande. C'est donc tout à fait possible si les Colombiens considèrent cela comme une priorité.

Mme Marlene Jennings: Je vous remercie.

La présidente: Je crois comprendre que M. Dubé et que M. Robinson ne poseront pas de questions au deuxième tour. Avez-vous une autre question à poser?

Mme Marlene Jennings: Non. Je veux simplement remercier les témoins de nous avoir donné tous ces éclaircissements.

La présidente: Je tiens moi aussi à les remercier d'être venus. Nous serons très intéressés par les changements qu'ils apporteront à leur rapport définitif.

M. Bob Anderson: Nous examinerons de près vos recommandations.

La présidente: Très bien. Je vous remercie. Vous êtes libres de partir si vous le voulez. Vous n'êtes pas tenus de rester. Il nous reste simplement quelques petites choses à faire.

Nous avons ici Francisco Ramirez, l'organisateur de la centrale des syndicats miniers de la fonction publique en Colombie, mais nous devons auparavant nous réunir brièvement entre nous. Nous avons une question à régler, que je vais vous exposer rapidement.

Nous avons déjà déposé une motion établissant que nous irons en Colombie avant Noël. Le gouvernement colombien nous a fait savoir que ce n'était pas le meilleur moment en ce qui le concerne et qu'il préférerait que nous ne partions pas avant Noël. Il nous faudra donc déposer une autre motion. J'en ai parlé à M. Graham et à notre whip et il paraît acceptable que nous partions avant la fin février, probablement la première ou la deuxième semaine de février. Il nous faudrait donc adopter une motion reportant notre voyage à cette date avant de passer aux affaires courantes.

Marlene?

• 1715

Mme Marlene Jennings: Si nous reportons notre voyage quelque part en février, pourquoi ne pas envisager, par exemple, de partir au moment de la conférence qui est organisé?

La présidente: Quelle conférence?

Mme Marlene Jennings: En mars.

La présidente: Nous voulions partir à cette date, le plus tôt possible, de façon à pouvoir ajouter à notre rapport tout ce que nous aurons appris. Si nous attendons trop...

Mme Marlene Jennings: Nous sommes déjà au courant du mécanisme de paix, de l'entente, des finalités, de tout ce qui va se passer en janvier, selon M. Egeland. Par conséquent, si nous n'envisageons pas de partir avant cette date, cela signifie que nous n'aurons aucune influence sur ce qui pourra se passer alors, aucun poids sur les événements. À partir du moment où nous partons plus tard, pourquoi ne pas envisager la possibilité d'y aller au moment où cette conférence est organisée de façon à pouvoir en tirer parti, rencontrer des gens et voir ce qui se passe?

La présidente: Nous avons bien indiqué dans une motion que nous ne voulions pas étudier deux choses en même temps et que nous voulions mettre la dernière main au rapport avant d'aller au Soudan, de sorte que nous avons reporté le démarrage et l'étude du Soudan au mois d'avril.

Svend.

M. Svend Robinson: J'ai une question à poser et un commentaire à faire. Vous nous dites que c'est le gouvernement de la Colombie qui juge inapproprié que nous arrivions au début décembre?

La présidente: Oui, et notre ambassadeur en Colombie le sait. J'ai reçu une lettre et je peux vous la communiquer.

M. Svend Robinson: Bien, nous avons donc reçu une lettre. Si vous pouviez la communiquer au comité, ce serait bien. Bien évidemment, si notre ambassadeur fait la même recommandation, nous devons en tenir compte.

Je suis d'accord avec Mme Jennings pour dire que nous devrions au moins nous garder une marge de manoeuvre dans la motion pour nous ménager la possibilité de voyager jusqu'à la fin mars. Si nous jugeons qu'il est important de partir avant, nous pourrons bien sûr le faire...

La présidente: Très bien, c'est une bonne idée.

M. Svend Robinson: ... mais nous devrions prolonger le délai jusqu'à la fin mars. Il nous faut aussi bien comprendre que nous n'allons pas manquer pour cela de passer à l'étude du Soudan.

La présidente: Le quorum n'est pas réuni et nous ne pouvons pas procéder de cette manière. Lorsque nous avions le quorum, nous avons dit que nous ne pouvions pas faire deux choses à la fois...

M. Svend Robinson: Je le comprends bien, mais ce que je propose...

La présidente: ... et trois membres du comité ne peuvent pas à eux seuls changer cette décision.

M. Svend Robinson: ... c'est que nous revoyons cette décision.

La présidente: Très bien.

Monsieur Dubé.

[Français]

M. Antoine Dubé: Je me rappelle le moment où on a pris cette décision, mais aujourd'hui, pour une fois, je suis d'accord avec Mme Jennings

Mme Marlene Jennings: Monsieur Dubé, on a déjà été d'accord au Comité de l'industrie.

M. Antoine Dubé: Oui, pour les choses importantes, on est d'accord. Pour le voyage, je me suis posé des questions sur la sécurité des témoins et tout ça. Si on doit faire ce voyage, il faut bien le faire. Il faut le faire de la façon la plus exhaustive possible. Il faut le faire de façon différente, complémentaire à ce qu'on a entendu aujourd'hui. Je trouve que c'est une excellente position.

Également, je suis prêt à envisager à nouveau l'idée de travailler sur une affaire à la fois. Personnellement, je serais prêt à siéger à plus de réunions s'il y avait lieu, même si je sais qu'il y a un règlement.

[Traduction]

La présidente: Avant que nous poursuivions—car vous remettez souvent cette question sur le tapis—je vous rappelle que le comité des affaires étrangères nous a donné le mandat de nous réunir une fois par semaine seulement, le mercredi. Ainsi, du moins, nous ne nous réunirons pas en même temps que le comité des affaires étrangères étant donné que nombre de personnes qui siègent autour de cette table sont membres des deux comités.

[Français]

M. Antoine Dubé: Oui, mais je suis prêt... J'ai mal compris l'autre jour. Je suis d'accord qu'on puisse travailler à d'autres choses si on n'est pas capables de compléter... [Note de la rédaction: inaudible].

[Traduction]

La présidente: Est-ce que nous pouvons alors adopter une motion? Est-ce que vous êtes d'accord pour qu'on envoie une lettre? Nous avons besoin que les crédits, par exemple, restent autorisés et, par conséquent, nous signifierons par lettre que nous irons avant la fin mars puis, lors de la prochaine séance, nous réglerons tous les détails car nous disposerons d'une demi-heure pour nous réunir à huis clos.

• 1720

J'espère que tout s'est passé à huis clos. J'ai oublié de le signaler. Pouvez-vous effacer la bande, d'une façon ou d'une autre?

Des voix: Oh, oh!

La présidente: Ça ne fait rien. Personne ne peut s'offusquer de ce que nous avons dit.

[Français]

Une voix: De toute façon, cela finit toujours par se savoir.

[Traduction]

Mme Marlene Jennings: Nous n'avons insulté personne.

La présidente: Non.

Nous avons ici aujourd'hui—nous ne savions pas qu'ils allaient venir—des témoins inattendus. Les membres du comité sont libres de partir à 17 h 30, parce que c'est à cette heure-là que nous terminons, mais ceux qui veulent rester pour entendre ce que ces témoins ont à dire peuvent le faire.

Je vous présente Francisco Ramirez, président de la centrale des syndicats miniers de la fonction publique de Colombie.

Je pense que nous avons un traducteur.

Mme Marlene Jennings: Avant que le témoin ne commence, je tiens à ce que l'on sache que je me félicite de leur comparution et que je regrette fortement que nous n'ayons pas été au courant de leur présence dans notre ville. Je suis sûre qu'il y a d'autres membres du comité qui pensent comme moi. Notre comité devait terminer ses travaux à 17 h 30, et j'ai d'autres obligations que je ne peux pas annuler. Il ne s'agit aucunement pour moi de manquer de respect aux témoins, mais je dois partir dans 15 minutes. Je vous prie de m'excuser à l'avance de ne pas pouvoir rester tout le temps que durera votre intervention.

La présidente: Nous espérons que vous serez encore là à la fin de l'exposé du témoin. Il y a bien des gens, vous le savez, qui ne viennent à Ottawa qu'une journée et nous essayons de leur donner satisfaction. Ce n'est pas facile.

Est-ce que le témoin va nous dire quelques phrases que vous traduirez ensuite?

M. Pablo Leal (interprète): Oui.

La présidente: Bon, allez-y.

M. Pablo Leal: Ce n'est pas la première fois que nous faisons cet exercice de haute voltige.

M. Francisco Ramirez (président, Syndicat des mineurs de la Colombie) (interprétation): Je tiens tout d'abord à vous remercier de m'avoir invité.

La présidente: Excusez-moi, mais nous entendons l'interprète dans nos écouteurs.

[Français]

M. Antoine Dubé: Si cela se passe lentement, je pourrai comprendre directement l'anglais pour une fois.

[Traduction]

La présidente: Très bien. Vous pouvez ainsi vous reposer, Pablo.

• 1725

M. Francisco Ramirez: [Le témoin s'exprime en espagnol]

• 1730

La présidente: Je vous signale que nous aurons les interprètes pendant encore quatre ou cinq minutes et que si ça se prolonge, il nous faudra recourir aux services de Pablo.

M. Francisco Ramirez: [Le témoin s'exprime en espagnol]

• 1735

La présidente: Je vous remercie.

Nous allons maintenant prendre congé des interprètes. Si les membres du comité ont des questions à poser, ils pourront éventuellement me dire combien de temps ils comptent rester. Voulez-vous qu'on reste encore dix minutes ou avez-vous le temps de faire chacun un tour de questions de cinq minutes? Qu'est-ce que vous préférez?

Qu'est-ce que vous voulez faire, Svend?

M. Svend Robinson: Je propose que puisque nous n'avons plus nos interprètes et que l'un de nos membres a d'autres engagements, ce qui est bien compréhensible, nous demandions au témoin s'il peut remettre par écrit des recommandations à notre comité. Le comité en prendra certainement bonne note et cela facilitera notre travail.

La présidente: Très bien. Nous allons attendre qu'on lui traduise cette proposition.

M. Francisco Ramirez: C'est très bien.

La présidente: C'est très bien? Bon.

Marlene.

Mme Marlene Jennings: M. Ramirez était là lorsque les fonctionnaires de l'ACDI ont évoqué l'implication de l'agence dans la question minière en Colombie. L'ACDI a expliqué qu'à la demande du gouvernement, elle n'avait pris part qu'à l'examen de certains articles du code minier qu'avait projeté le gouvernement colombien. Elle a simplement employé le mot «discrétionnaire», mais j'imagine qu'elle entendait par là des pouvoirs discrétionnaires; elle devait apporter une certaine clarté à ces articles. Est-ce bien là la seule participation de l'ACDI, aux yeux du témoin? Vous nous dites que l'ACDI doit faire bien attention lorsqu'elle s'occupe du secteur minier. Cela nous amène à penser que la participation de l'ACDI a été bien plus forte que ne l'avouent les fonctionnaires. Si c'est le cas, vous pourriez aussi l'indiquer dans vos conclusions écrites en nous faisant part, par ailleurs, des éléments de preuve dont vous disposez.

M. Francisco Ramirez: [Le témoin s'exprime en espagnol]

Mme Marlene Jennings: Excusez-moi, je demande que cela figure dans les conclusions écrites.

La présidente: Le témoin souhaitait s'exprimer.

Mme Marlene Jennings: Très bien.

M. Francisco Ramirez: [Le témoin s'exprime en espagnol]

La présidente: Je vous remercie.

Mme Marlene Jennings: Nous n'avons pas l'interprétation.

La présidente: Si, nous l'avons. L'intervention a été traduite.

Mme Marlene Jennings: Oh, excusez-moi.

La présidente: L'interprétation a été faite. Les interprètes sont toujours là.

Mme Marlene Jennings: Je pensais qu'ils nous avaient quittés puisque vous avez dit qu'ils devaient partir à 17 h 30.

M. Pablo Leal: Voulez-vous que je continue à interpréter?

Mme Marlene Jennings: Allez-y.

M. Pablo Leal: En substance, les juristes qui ont été engagés par l'ACDI se sont penchés sur les questions liées aux effets sur l'environnement et à l'évaluation de ces derniers. Ils ont fait savoir qu'ils allaient tenir compte de certains critères et, au bout du compte, ils en ont pris d'autres en considération. En substance, l'ACDI a été trompée par les gens qu'elle avait engagés. Le code minier, quelles qu'aient été les intentions au départ, a finalement toutes les conséquences mentionnées par le témoin: il est préjudiciable à l'environnement, aux droits des travailleurs et aux droits du secteur minier. Voilà donc ce que voulait dire le témoin lorsqu'il a demandé à l'ACDI de faire bien attention lorsqu'elle s'occupait de ce genre de chose.

Mme Marlene Jennings: Merci.

La présidente: Je propose que nous levions la séance maintenant.

Merci d'être venu. Excusez-nous de ne pas avoir eu plus de temps à vous consacrer.

• 1740

Je vais lever la séance jusqu'au mercredi 7 novembre. Pendant la première demi-heure, nous siégerons à huis clos pour discuter des voyages, etc.

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