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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 22 octobre 2001

• 0900

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): La séance est ouverte. À l'ordre s'il vous plaît. Bienvenue à tous ici ce matin à Vancouver.

Comme vous le savez, le Comité des finances parcourt le pays pour recueillir les opinions du public quant à ses priorités en prévision du prochain budget fédéral. Au nom du comité, je remercie tous les témoins d'être venus ici ce matin. Nous envisageons avec plaisir de vous entendre.

Nous accueillons parmi nous ce matin des représentants de la Technical University of British Columbia; de l'University Presidents' Council of B.C.; de la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada, section de la Colombie-Britannique; et de la B.C. Road Builders & Heavy Construction Association.

Nous allons commencer par la Technical University of British Columbia, ici représentée par Tom Calvert, professeur et vice-président, Recherche et diffusion, et Mme Linda Bartram, titulaire de bourse postdoctorale en recherche industrielle du CRSNG.

Vous disposez de cinq à sept minutes pour vos remarques liminaires. Nombre des mémoires ont été reçus dans le courant de l'été et les députés ont pu les parcourir. Si vous nous en donniez les éléments saillants, cela nous laisserait du temps pour une période de questions et réponses.

Nous allons commencer par M. Calvert. Bienvenue.

M. Tom Calvert (Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie): Merci de l'occasion qui nous est ici donnée de vous rencontrer ce matin.

Je comparais en vérité ici devant vous aujourd'hui au nom du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, ou CRSNG. Il s'agit de l'organisme fédéral qui appuie le gros de la recherche universitaire qui se fait dans le domaine des sciences naturelles et du génie. De jour, je suis vice-président de la recherche à la Technical University of B.C. Cette université était la plus nouvelle au Canada avant l'avènement de l'Institut de technologie de l'Ontario à Durham et à Oshawa.

Je suis aujourd'hui accompagné de ma collègue, Linda Bartram. Mme Bartram a récemment terminé son doctorat sur un projet qui a été indirectement appuyé par le CRSNG. Elle est aujourd'hui boursière post-doctorale du CRSNG et elle travaille avec une toute nouvelle boîte très intéressante ici à Vancouver.

Le gouvernement du Canada s'est fixé comme objectif de passer du quinzième au cinquième rang en matière d'investissement dans la R-D, exprimé en pourcentage du PIB. Il s'agit d'un classement établi par l'OCDE. Nous nous situons à l'heure actuelle au quinzième rang. Passer au cinquième rang va être un défi de taille au cours des dix prochaines années. Pour y parvenir, il nous faudra investir lourdement dans des personnes hautement qualifiées, chercheurs et ingénieurs.

Le CRSNG est l'organisme fédéral qui appuie la recherche universitaire en sciences naturelles et en génie. Il compte pour environ 25 p. 100 de toute la recherche faite dans ces domaines. Bien que les résultats de ces travaux de recherche soient importants et débouchent sur des innovations industrielles, le principal avantage de la recherche se sont les personnes formées qui pourront bâtir la nouvelle économie fondée sur le savoir.

Le CRSNG appuie environ 10 000 chercheurs universitaires avec un budget total de près de 620 millions de dollars. De ces 620 millions de dollars, près de 284 millions sont directement versés sous forme de bourses de recherche. Le restant de l'argent est consacré à des programmes axés sur des personnes ainsi qu'à des programmes d'innovation menés en collaboration avec l'industrie.

Je sais que vous avez entendu le président du CRSNG à Ottawa. Je suis certain qu'il aura couvert toutes les bases. Je tiens tout simplement à souligner le problème particulier auquel nous nous trouvons aujourd'hui confrontés.

Bien sûr qu'il nous faut augmenter le niveau des subventions à la recherche—cela va s'en dire. Nous n'en avons jamais assez. Mais l'actuel système fonctionne relativement bien. Il existe cependant un problème de taille. Les universités sont en train de recruter beaucoup de nouveaux et jeunes éléments pleins d'enthousiasme pour leurs corps enseignants, et certains moins jeunes quittent l'industrie. Le nombre de nouveaux professeurs qui demandent cette année une aide au CRSNG s'élève à 762. Or, seuls 269 vont prendre leur retraite.

Une partie de cette augmentation est due à des phénomènes démographiques. Cela s'explique en grande partie par les initiatives prises par les différentes provinces pour augmenter leur corps professoral et par l'ampleur de leurs programmes en informatique et en génie, ce que l'on appelle communément le secteur de la technologie de l'information et des communications. L'Ontario a un programme. L'Alberta a un programme. Le Québec a un programme. Le nouveau gouvernement de la Colombie-Britannique a annoncé un programme visant à doubler les débouchés dans le domaine des technologies de l'information.

Cela est merveilleux. Je félicite les provinces pour l'initiative qu'elles ont prise. Il existe clairement un besoin dans l'industrie, mais cela crée un problème. Les conseils subventionnaires qui appuient les corps professoraux dans ces domaines ont eu des budgets relativement stables; en tout cas, cela aura été le cas du CRSNG.

• 0905

Pour accueillir ces nouveaux chercheurs qui arrivent dans les universités, à un niveau relativement minimal, le CRSNG a besoin d'une augmentation d'environ 30 millions de dollars par an, mais pas pour une année seulement. Cela va se poursuivre au cours des trois à quatre prochaines années, peut-être plus; je ne sais pas. Il est difficile d'avoir les bons chiffres. En tout cas, pour ce qui est des trois ou quatre prochaines années, il va y avoir une augmentation continue du nombre de chercheurs dans les facultés.

Je suis ici pour vous demander votre aide. Nous comprenons qu'il existe d'autres besoins. Je sais que Don Avison, du University Presidents' Council, va vous parler de la nécessité de soutien pour l'infrastructure. Si nous voulons être en mesure de bien encadrer nos jeunes chercheurs, il nous faut vraiment les lancer dans des programmes de recherche bien nantis.

Pour vous donner une idée de ce que je veux dire par tout cela, ma collègue, Mme Linda Bartram, qui a terminé son doctorat cet été, va vous entretenir de certaines choses. En tant qu'étudiante au niveau doctoral, elle a pu compter sur une subvention du Réseau de centres d'excellence. Le Réseau de centres d'excellence a été appuyé conjointement par le CRSNG et par le CRSH. Ce soutien l'a aidé à terminer son doctorat. Depuis, elle s'est jointe à une toute jeune société, SynchroPoint Wireless, à Vancouver. Elle y bénéficie de nouveau d'une aide du CRSNG, en tant que titulaire d'une bourse post-doctorale industrielle. J'ai pensé qu'il serait peut-être utile que Linda vous parle un petit peu de ce que c'est que de participer à un projet de recherche universitaire et de ce que cela peut représenter pour sa société et pour d'autres.

Le président: Merci.

Mme Linda Bartram (titulaire de bourse postdoctorale industrielle, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie): Merci.

Bonjour.

Comme Tom l'a mentionné, j'ai bénéficié directement du programme de recherche d'ensemble du CRSNG et du CRSH. J'ai également bénéficié indirectement du soutien que cela a apporté à tous les excellents membres du corps professoral.

Je tiens à souligner que ce sont les professeurs qui encouragent les étudiants de premier cycle à rester dans le domaine et qui les inspirent à pousser jusqu'à la maîtrise ou au doctorat en recherche. Ce sont les carrières dans la recherche qui vont nous aider, surtout les plus petites entreprises, à progresser, en dépassant ce que fait tout le monde pour aller cerner et saisir de nouvelles possibilités.

SynchroPoint est ce que j'appellerais une jeune société mûre, bien engagée sur la voie de la vente de produits et de la création de nouveaux marchés. On dit de moi que je suis chercheure scientifique. Que cela signifie-t-il? Nous avons un dicton selon lequel la recherche c'est ce que l'on fait lorsque l'on ne sait pas ce que l'on fait.

Les analystes de marché de ma société nous disent ce que les gens font déjà. Ils nous disent comment ils desservent les marchés qui existent déjà. Ils ne regardent pas au-delà de cela. Moi, je regarde au-delà. Mon travail est de regarder ce dont les gens ont besoin, la façon dont ils travaillent, comment ils déploient la technologie, et les choses qui se font à l'heure actuelle mais qui ne servent pas les besoins qui existent mais qui pourraient être satisfaits grâce à notre orientation future. Les analystes de marché et les économistes ne sont pas formés pour faire cela. Nous, nous y sommes formés, car c'est de la recherche.

En fait, les gens comme moi regardent l'économie et constatent que tout le monde fabrique des tournevis, alors que ce qu'il nous faut, ce sont des séchoirs. Pendant que tous les autres dans le monde font vibrer leur tournevis pour essayer de se faire sécher les cheveux, nous, nous allons construire un produit, une direction ou une initiative qui nous fera avancer et qui bénéficiera à l'économie tout entière.

Je tiens à souligner que je ne fais pas cela sur une petite île dans ma société. Je fais partie d'une plus grosse communauté de recherche. J'ai accès aux ressources. Je connais les gens. Nous savons tous que nous oeuvrons à des choses qui peuvent s'imbriquer les unes dans les autres et se compléter de diverses façons.

Dans une économie hautement concurrentielle, il nous faut multiplier nos ressources. Nous bénéficions aux étudiants et aux universités autant qu'elles nous bénéficient à nous. En l'absence de financement de recherche de base pour les nouveaux membres du corps professoral, d'importantes compétences et connaissances vont dépérir. L'on se retrouvera de nouveau dans une situation dans laquelle un groupe d'entreprises foncera tout seul.

Je pense que c'est la mauvaise direction. J'ajoute donc fermement ma voix à celle de M. Calvert.

Le président: Monsieur Calvert, auriez-vous un commentaire à faire en guise de conclusion?

M. Tom Calvert: Non. J'espère que nous nous sommes fait bien comprendre.

Le président: Je pense que vous avez tout dit. En vérité, à y penser, beaucoup de gens partout au pays répètent les mêmes thèmes. Le comité devra donc réfléchir très sérieusement à ce que vous nous dites.

Il me faut maintenant passer au University Presidents' Council of British Columbia, ici représenté par son président, M. Don Avison. Bienvenue.

M. Don J. Avison (président, University Presidents' Council of British Columbia): Merci beaucoup, monsieur le président.

• 0910

Je fais ce que je fais souvent, c'est-à-dire que je gratte toutes sortes de choses au lieu d'écouter les autres, car j'ai été frappé, pendant que mes collègues parlaient il y a un instant, par la rareté de l'occasion qui m'est ici donnée de souligner une chose qui est pour moi importante. Cela m'est venu suite aux commentaires de la dernière intervenante, qui s'inspirait elle-même de ce qu'avait dit M. Calvert au sujet de l'importance de la recherche pour une nouvelle économie, de l'idée de chercher à faire les choses différemment, de façons que l'on ignore peut-être encore.

Permettez que je vous offre ce qui est selon moi l'un des exemples les plus parlants de cela: l'Internet lui-même, le produit de recherches basées sur la curiosité et menées dans le cadre d'universités financées par les deniers publics, moteurs de croissance incroyables dans nos économies, dans notre pays et ailleurs. Nous ne passons pas suffisamment de temps à discuter de l'envergure de la relation économique qui existe entre les nouvelles connaissances qui se développent dans nos universités, le travail effectué en milieu universitaire et ailleurs par les étudiants post-doctoraux et l'incidence que cela pourrait en définitive avoir sur des communautés comme celle-ci, dans laquelle les deux moteurs économiques les plus importants sont l'Université de Colombie-Britannique et l'université Simon Fraser et, incroyablement, la Technical University of British Columbia. Ce n'est là qu'une partie de ce dont je suis venu vous entretenir ici aujourd'hui.

J'aimerais parler des étudiants qui sont arrivés en classe il y a un peu plus d'un mois ici en Colombie-Britannique et, chose intéressante, je ne veux pas parler des étudiants qui sont arrivés ou à la Technical University of British Columbia, ou à l'université Simon Fraser, ou encore à l'Université de la Colombie-Britannique, mais bien des élèves qui sont entrés en troisième année ici à Vancouver et ailleurs en Colombie-Britannique et au Canada, car je pense que ce sont eux qui offrent le contexte le plus pertinent dans lequel répondre aux trois questions que vous nous avez soumises à tous lorsque vous nous avez invités à contribuer cette année au travail du Comité permanent des finances.

Pour ce faire, je vais rapidement évoquer trois documents. Le premier est le mémoire qui a été préparé pour le comité et que vous avez, je pense, devant vous.

Je vous ai également fourni une trousse de documentation qui a été déposée auprès du gouvernement provincial ici en Colombie-Britannique et qui traite de questions relatives à l'éducation postsecondaire, ce qui s'inscrit, je pense, tout à fait dans les questions que je viens de mentionner. Je pense qu'il serait à la fois intéressant et utile que je vous expose ce que nous disons au sujet de ces mêmes questions au gouvernement provincial.

Enfin, je vous soumets copie d'un rapport des universités de la Colombie-Britannique, rapport qui renferme quantité de données statistiques qui vous seront, je pense, très utiles pour comprendre à quoi ressemble la situation actuelle en Colombie-Britannique.

Munis du mémoire et de la documentation destinée au gouvernement provincial, vous verrez que le point de départ est le même.

J'ai une citation du Dr Pat McGeer, qui était chercheur et qui est de nouveau chercheur à UBC. Nombre d'entre vous savent peut-être que le Dr McGeer s'est également consacré à la politique pendant un certain temps ici en Colombie-Britannique.

J'ai relu il y a environ trois ans le livre de 1972 du Dr McGeer intitulé Politics in Paradise, et j'ai été frappé par son excellente compréhension des défis auxquels le pays étaient confronté. Vous trouverez la citation que voici au début de mon mémoire, et je vous en fais maintenant lecture afin que cela figure au procès-verbal:

    Les Canadiens en général, et les Britanno-Colombiens en particulier, doivent leur prospérité aux ressources naturelles. C'était le cas par le passé, mais nous aurions bien tort de supposer qu'il en sera de même à l'avenir.

    En l'espace de deux générations, la seule ressource pour ainsi dire qui vaut la peine d'être conservée sera une population bien instruite, et nous disposons d'à peu près le temps nécessaire pour convertir nos ressources naturelles en potentiel humain par l'entremise du système d'éducation.

Je vous dirais que le Dr McGeer est tombé dans le mille. Nous n'avons pas du tout bougé assez vite en Colombie-Britannique. Notre économie fondée sur l'extraction de ressources demeurera importante pour nous. Cela est et continuera d'être l'un des plus importants éléments de l'économie de la Colombie-Britannique. Nous n'avons pas bougé aussi vite qu'il aurait fallu pour veiller à ce que les Britanno-Colombiens aient cet accès à l'éducation postsecondaire.

Dans la documentation fournie, vous verrez comment la Colombie-Britannique se situe par rapport au reste du pays sur le plan obtention de diplômes. Je pense qu'il est important pour vous de voir cela, la Colombie-Britannique étant l'une des plus grosses provinces du pays.

À l'heure actuelle la Colombie-Britannique occupe le dernier rang parmi les provinces pour ce qui est des diplômes décernés, et nous nous faisons piéger, comme c'est le cas de beaucoup de gens, dans les comparaisons interprovinciales. Nous constatons, tant côté postsecondaire que côté recherche, dont on vient de vous parler, que nous perdons beaucoup de terrain par rapport aux autres provinces.

• 0915

Permettez que je mentionne brièvement que les renseignements généraux que vous avez sur les diplômes décernés en Colombie-Britannique nous situant à 80 p. 100 de la moyenne nationale sont davantage étoffés à la page suivante, où vous verrez, en y regardant de plus près et en voyant à quoi correspondent ces diplômes, que dans nombre des domaines liés à l'émergence de la nouvelle économie, nos chiffres sont sensiblement inférieurs. Dans le domaine du génie et dans certains autres, nous nous situons à environ 50 p. 100 de la moyenne canadienne.

Il y a cependant des raisons d'être optimistes. En Colombie-Britannique, nous avons récemment entendu certaines annonces importantes laissant entrevoir que nous allons avancer dans une direction nouvelle. Le Dr Calvert mentionne brièvement la décision prise par le gouvernement provincial de doubler le nombre de diplômes en informatique, en génie informatique et en génie électrique. Ce sont donc des chiffres qui devraient augmenter sensiblement dans les années à venir, et cela est d'une importance fondamentale pour la province de Colombie-Britannique.

Côté recherche, je pense que vous aurez entendu ce même thème répété ailleurs au pays, et je ne vais donc en traiter que brièvement aujourd'hui. L'élément critique est le soutien pour les coûts indirects de la recherche. C'est une question dont on parle depuis longtemps. Le gouvernement fédéral, au cours des derniers cycles budgétaires, a pris plusieurs initiatives face à l'importance de la recherche, en augmentant le financement consenti aux conseils subventionnaires et autres pour multiplier les possibilités en matière d'éducation postsecondaire, mais les coûts indirects demeurent un problème.

Je maintiens qu'il y a un lien entre cette question et les intérêts de l'élève qui a cette année commencé sa troisième ou sa quatrième, car sans soutien pour les coûts indirects de la recherche, l'argent doit venir de quelque part, et, en règle générale, il est venu des revenus d'exploitation généraux dont disposent les universités, ce qui veut dire que le nombre de places, le nombre des possibilités et la nature de l'expérience souffrent de l'absence de soutien pour les coûts indirects.

La situation est fondamentalement différente de celle qui existe de l'autre côté de la frontière, à l'Université de Washington et dans d'autres universités américaines, où le gouvernement fédéral a sans cesse fourni un soutien pour les coûts indirects de la recherche. Si nous jouissions d'une aide supplémentaire pour couvrir les coûts indirects, cela aurait une incidence marquante sur la capacité des universités canadiennes de satisfaire les besoins et les attentes raisonnables du Parlement.

Pour que nous demeurions un joueur dans la nouvelle économie, la seule question sur laquelle il vous faut vous concentrer est celle des coûts indirects—aux côtés de certaines des autres questions que j'ai déjà évoquées aujourd'hui, mais je maintiens que la plus importante est sans conteste celle des coûts indirects.

Pour offrir aux Canadiens la possibilité de réussir, il nous faut multiplier les occasions d'assurer l'accès à l'éducation postsecondaire. Ici, l'exigence fondamentale est une collaboration accrue entre les paliers fédéral et provincial, car la collaboration requise fait défaut dans ce pays depuis très longtemps—et je vous dis cela fort de mon expérience de deux ans comme président du comité qui rend compte au Conseil des ministres de l'Éducation du côté provincial. Pour créer l'environnement économique et social dans le cadre duquel les Canadiens pourront jouir de la meilleure qualité de vie, je pense que la réponse a été fournie dans le deuxième rapport sur la santé des Canadiens: l'éducation est l'une des clés essentielles à la réalisation de cet objectif.

Voilà donc un rapide résumé de toute la documentation qui vous a été fournie. Je vais m'arrêter là et je suis à votre disposition pour répondre à toutes les questions que vous aurez.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Avison.

Nous allons maintenant entendre, pour la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada, Section de la Colombie-Britannique, sa directrice en matière de conservation, Mme Sabine Jessen. Bienvenue.

Mme Sabine Jessen (directrice pour la conservation, Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada, Section de la Colombie-Britannique): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis très heureuse d'être ici devant vous.

Je vais vous parler un petit peu de notre organisation, après quoi je traiterai de deux questions qui sont importantes pour nous dans le cadre de vos consultations prébudgétaires.

Vous avez sans doute déjà reçu des communications de notre organisation, mais la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada a été fondée en 1963. Nous nous occupons de questions liées à des sites naturels un petit peu partout au Canada, et nous avons contribué à la protection de plus de 400 000 kilomètres carrés d'espaces sauvages au Canada. En Colombie-Britannique, nous avons été actifs dans des dossiers tant maritimes que terrestres. Je me suis pour ma part particulièrement occupée de dossiers de conservation marine ici en Colombie-Britannique, et c'est l'une des raisons pour lesquelles je mets l'accent dans mon mémoire sur les questions océaniques et marines.

Je soulignerai que je suis membre du Conseil consultatif sur les océans auprès du ministre, qui conseille le ministre des Pêches et des Océans, M. Dhaliwal, sur les dossiers océaniques nationaux.

Il y a deux principales questions dont j'aimerais vous entretenir aujourd'hui. Tout d'abord, l'appui pour la Stratégie sur les océans du Canada, qui est à l'étude depuis plusieurs années, et, deuxièmement, la perspective de l'Ouest à l'égard du travail de la Coalition pour un budget vert, dont vous avez, je le sais, déjà entendu parler. J'entends tout simplement vous exposer un petit peu l'approche de l'Ouest dans ce contexte, mais je vais traiter tout d'abord de la Stratégie sur les océans.

• 0920

Je suis certaine que la plupart d'entre vous savent que nous sommes un pays maritime et qu'une part importante de notre économie et de notre société est directement liée à ce qui arrive à nos océans. Nous avons le plus long littoral de tous les pays du monde. Huit des dix provinces et les trois territoires bordent un océan et 25 p. 100 de la population du pays vivent en zone côtière. Les industries océaniques sont d'une très grande importance pour l'économie canadienne, produisant une activité économique d'une valeur d'environ 20 milliards de dollars.

Une chose qui ressort de plus en plus en ce qui concerne les océans est que si nous nous y intéressions autrefois c'était principalement pour la pêche et le transport, alors qu'il est question aujourd'hui de toutes sortes d'activités nouvelles et naissantes. Dans ce contexte, nous sommes en même temps confrontés à des conflits créés par les différentes activités. Même s'il existe des possibilités que les océans produisent d'importants nouveaux avantages économiques, sociaux et culturels, il nous faut également savoir que ces activités nouvelles et émergentes entrent parfois en conflit les unes avec les autres. Il nous faut être en mesure de les gérer d'une façon plus intégrée.

L'autre question qui préoccupe notre organisation est celle de la protection de la biodiversité des océans du Canada. Ici et ailleurs dans le monde, la biodiversité et le milieu marin en général sont exposés à des risques dus à une variété de sources et de retombées, qu'il s'agisse de pollution produite par des activités terrestres et maritimes, de l'introduction d'espèces étrangères, de la destruction d'habitats ou autre. Nous avons constaté les résultats de certaines de ces choses, notamment les conséquences de la surpêche le long des côtes Est et Ouest et les énormes dislocations économiques et sociales que ces bouleversements ont apportées.

Bien que nous déployions des efforts pour régler certaines de ces questions, la dégradation des environnements océaniques ici et ailleurs dans le monde s'est poursuivie et il nous faut avoir une approche plus intégrée face à ces problèmes.

En 1997, le Canada est en fait devenu un leader mondial avec le dépôt et l'adoption de la Loi sur les océans. L'une des exigences de la Loi sur les océans est que le ministre élabore une Stratégie sur les océans dans le but de mieux gérer toutes les activités qui y sont menées. La mise en oeuvre de cette stratégie n'est pas la responsabilité du seul ministre des Pêches et Océans et il y a complexité non seulement du côté des activités qui sont menées dans les océans, mais également de celui de la gouvernance. Il y a quelque 20 organismes fédéraux qui ont une responsabilité ou une autre à l'égard des océans, ce en plus des gouvernements provinciaux et autres qui ont une certaine compétence en la matière. L'un des éléments clés de la Stratégie sur les océans est le rassemblement de toutes ces compétences et responsabilités en vue d'une approche coordonnée de collaboration dans la façon de gérer l'utilisation que nous faisons des océans.

Dans le discours du Trône de 2001, le gouvernement fédéral s'est engagé à assurer une gestion plus durable des océans du Canada, ce conformément à la Loi sur les océans. Le ministère des Pêches et des Océans a lancé un certain nombre de projets pilotes dans le pays depuis l'adoption de la Loi sur les océans en 1997. Cependant, ce que je tiens à vous dire ici aujourd'hui est que le ministère ne s'est pas vu accorder les nouvelles ressources dont il aurait besoin pour s'engager pleinement à l'égard d'une stratégie nationale sur les océans, stratégie dont nous avons urgemment besoin. D'après ce que j'ai compris, le ministre va cet automne demander au Cabinet les ressources nécessaires, et j'encourage le comité ici réuni à appuyer cette demande.

La deuxième question dont j'aimerais vous parler ici aujourd'hui est celle de la protection du patrimoine naturel, surtout terrestre, mais également marin. Comme je l'ai déjà dit, vous aurez déjà entendu parler de certaines de ces questions par l'entremise de la Coalition pour un budget vert, une vaste coalition de groupes de partout au pays qui oeuvrent à des questions environnementales. L'une des questions est la protection et la conservation du patrimoine naturel, ce qui englobe la création par Parcs Canada de nouveaux parcs nationaux et de zones de conservation maritimes.

• 0925

Encore une fois, ce ne sont pas là de nouvelles initiatives, mais l'actuel gouvernement a régulièrement pris des engagements dans ce sens au cours des dernières années. Nous avons en fait des chiffres assez concrets quant à ce qui est nécessaire, soit 493 millions de dollars au cours des cinq prochaines années. Il y a là-dedans plusieurs composantes. Certes, il y a un large soutien public pour assurer les ressources requises, et il y a une reconnaissance de la nécessité de créer des parcs nationaux et de veiller au maintien de l'intégrité écologique de toutes ces zones.

Pour vous donner un petit peu une perspective régionale, je mentionnerai qu'il y a deux régions en Colombie-Britannique qui n'ont pas encore de parcs nationaux. Je veux parler du nord de la Colombie-Britannique et des prairies intérieures. Ce dernier écosystème est le plus menacé de Colombie-Britannique. Le quart des espèces en péril au Canada ont besoin de prairies, alors ce devrait être là une plus grande priorité dans le contexte du parachèvement du réseau des parcs nationaux ici.

Par ailleurs, pour ce qui est du maintien de l'intégrité écologique, les rapports sur les parcs font ressortir qu'il y a à l'heure actuelle un certain nombre de parcs nationaux de Colombie-Britannique, y compris la réserve de parc Pacific Rim le long de la côte Ouest et les parcs nationaux de Revelstoke et des Glaciers dans l'intérieur, qui sont menacés par des stress internes et externes. Il faudra des fonds supplémentaires de part et d'autre si nous voulons régler ces problèmes.

Nous avons constaté que les avantages d'un système de parcs en bonne santé sont énormes. Ici en Colombie-Britannique, un certain nombre d'études ont été effectuées en vue de faire ressortir les avantages économiques de l'existence de parcs nationaux et provinciaux, et je vais vous donner certains chiffres. En Colombie-Britannique, les parcs produisent des revenus d'impôt de 170 millions de dollars pour les deux paliers de gouvernement, dont 130 millions de dollars qui sont directement versés au gouvernement fédéral. Chaque dollar dépensé au titre d'activités de parcs donne lieu à environ neuf dollars dépensés par les visiteurs, et l'on compte à l'heure actuelle quelque 200 000 emplois qui sont directement soutenus par des activités axées sur la nature.

Encore une fois, je tiens à souligner que le parachèvement du réseau des parcs nationaux et le maintien de l'intégrité écologique du pays sont une priorité pour les Canadiens, et je vous exhorte également à envisager d'appuyer la Stratégie sur les océans.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Jessen.

Nous allons maintenant entendre la B.C. Road Builders & Heavy Construction Association et son président, M. Jack Davidson. Bienvenue. Nous sommes heureux de vous revoir.

M. Jack Davidson (président, B.C. Road Builders & Heavy Construction Association): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Merci de nous donner de votre temps et de nous entendre.

Tout d'abord, quelques renseignements généraux. La B.C. Road Builders & Heavy Construction Association a été fondée en 1966. Elle regroupe le genre de personnes motivées, compétitives et libres penseurs qui ont ouvert cette province et qui continuent de faire en sorte qu'il soit possible pour les biens, les services et les touristes de se déplacer à l'intérieur de notre province. Nous souhaitons que vous reconnaissiez qu'en Colombie-Britannique, et, en fait, dans tout le pays, la force de nos économies a toujours été leur fondement sur de bons transports.

Voici ce que nous pensons. Le Canada doit créer les outils nécessaires pour attirer, appuyer et conserver le capital humain et financier. Le Canada ne peut pas être passif dans un environnement de plus en plus concurrentiel. L'un de ces outils, sans doute le plus important de tous, c'est une infrastructure de transport efficiente et concurrentielle. Le Canada doit bâtir sur les fondations de nos industries traditionnelles axées sur les ressources, tout en continuant de se diversifier dans le nouveau secteur axé sur les connaissances. Le Canada doit renforcer l'infrastructure de transport qui assure le lien entre nos provinces et les marchés continentaux et mondiaux.

Les transports et l'infrastructure routière sont une composante essentielle d'une économie forte. La productivité régionale dépend largement, voire entièrement, de réseaux de transport efficaces. Un emploi sur trois dépend du commerce; or, le système commercial en Colombie-Britannique est très exposé à des niveaux de congestion excessifs, et je suppose que le problème est national. La congestion et les retards augmentent les coûts de transport des produits, réduisant ainsi notre compétitivité sur les marchés mondiaux.

• 0930

L'état médiocre, voire honteux, de la route Transcanadienne pousse vers le sud le trafic de conteneurs, passant de l'Alberta aux États-Unis, puis aux ports américains. Nous perdons du volume.

Les possibilités pour le tourisme ne seront jamais maximisées tant et aussi longtemps que nos atouts les plus surnaturels sont difficiles à atteindre. Résidents et visiteurs ont tous besoin de systèmes de transport sûrs, confortables et abordables pour accéder à la splendeur naturelle de notre province et en fait de tout le pays.

Nous n'avons pas non plus de route nord-sud concurrentielle qui fasse le lien entre le Nord et les États-Unis par le biais de l'Okanagan, ce qui serait un formidable corridor de commerce pour nous. Partout en Colombie-Britannique l'accès par autoroute et par route secondaire à nos industries axées sur les ressources est insatisfaisant et délabré. Il n'y a pas d'accès efficient entre nos postes frontaliers, nos ports et nos aéroports.

Les accidents de circulation et les blessures attribuables au piètre état de notre réseau routier viennent grever notre système de soins de santé déjà surchargé et nuisent à notre qualité de vie. Et la qualité de vie est ce pour quoi nous vivons au Canada.

Le Canada doit, dans le budget, appuyer et promouvoir les avantages et la compétitivité mondiale de toutes ses régions.

Convenez—et nous y croyons profondément—qu'avant de pouvoir mettre en place le système de soins de santé et les programmes d'éducation que le public réclame il nous faudra d'abord avoir une économie forte et robuste pour en payer les frais. Pour bâtir une telle économie, il vous faut investir dans le renforcement du système de transport pour en faire un réseau viable et concurrentiel. L'argent consacré au transport produira des dividendes sous forme d'activité économique et l'investissement rapportera plus en revenus d'impôts qu'il en coûtera. Réseau routier égale emplois. Le Canada aborde à tout le moins une période d'inquiétude économique, et si nous voulons progresser et bâtir notre économie il nous faut une infrastructure de transport concurrentielle.

Les récentes mesures prises par le gouvernement pour améliorer la sécurité dans les aéroports seront telles qu'il sera moins intéressant pour les entreprises de recourir au mode aérien pour le transport de personnes et de produits. Elles vont réclamer et exiger de meilleurs services de transport terrestre, et c'est donc là-dessus qu'il vous faudra vous concentrer.

Voilà tout ce que j'avais à vous dire. Merci de m'avoir écouté.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Davidson.

Nous allons maintenant passer à la période de questions et réponses. Nous aurons un tour de sept minutes pour M. Epp et M. Nystrom, après quoi nous entendrons M. Cullen et Mme Barnes.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.

Merci à vous tous d'être venus ici et d'avoir partagé avec nous ce matin votre sagesse collective. J'aimerais commencer avec les universités, et j'espère avoir le temps de m'entretenir avec tous les groupes à tour de rôle.

L'une des choses que nous entendons répéter régulièrement, y compris par vous, est qu'en tant que pays il nous faut investir davantage dans la R-D. Auriez-vous quelques commentaires à faire quant à l'administration des fonds qui sont présentement désignés? Il semble qu'il y ait un genre de goulot d'étranglement pour faire parvenir l'argent aux bonnes personnes à l'heure actuelle, et je me demande si nous ne pourrions pas améliorer l'efficience à ce niveau-là et ainsi maximiser notre investissement.

M. Don Avison: Je vais commencer.

Il s'agit certainement d'une chose qui peut continuer de donner des résultats et d'apporter des améliorations, mais je crois qu'il est important de souligner qu'il y a à mon avis eu une amélioration sensible dans l'administration des bourses de recherche au cours des dernières années.

• 0935

Nous avons vu, avec les conseils subventionnaires, que l'acheminement des ressources jusqu'aux chercheurs est de beaucoup supérieur à ce qu'il était il y a cinq ou en tout cas il y a dix ans dans ce pays. Même si nous chercherions à obtenir un meilleur niveau de performance, je pense qu'il est important de reconnaître que nous avons constaté une nette amélioration au cours de la dernière décennie, en partie à cause de certaines des initiatives prises par le gouvernement fédéral dans le cadre de réinvestissements résultant des trois ou quatre derniers cycles budgétaires.

Par ailleurs, et je pense qu'il s'agit ici d'une question de plus en plus importante, les mécanismes de reddition de comptes mis en place autour de la recherche ont eux aussi résulté en une augmentation de l'efficience de la communication des résultats des milieux de recherche au public et au gouvernement. De ce côté-là également, donc, je pense que nous avons vu des améliorations.

En réponse à la question de savoir s'il y a de la place pour encore d'autres améliorations, la réponse est que bien sûr que oui, mais il est important de reconnaître que des améliorations ont eu lieu.

M. Tom Calvert: Je pourrais peut-être ajouter un bref commentaire.

Le Canada dispose de toute une gamme de modèles pour remettre de l'argent aux personnes concernées, et je pense qu'il est formidable que nous ayons des modèles adaptés aux différentes circonstances. Un modèle que je connais bien est celui du Réseau de centres d'excellence, grâce auquel un budget conséquent, dans ce cas-ci plus de trois millions de dollars par année, a été versé à ce Réseau puis redistribué à différents chercheurs oeuvrant sur le terrain.

Mais, comme l'a dit Don, il y a une tension entre l'exigence de reddition de comptes et le désir de favoriser la créativité. Je pense, pour parler franc, que certaines agences craignent qu'étant donné les inquiétudes à l'égard de Développement des ressources humaines Canada et de la façon dont certains de ces fonds étaient administrés, tout le monde soit tenu d'assurer une reddition de comptes telle qu'il faudrait remplir des fiches de temps par heure, par jour et par semaine. Je pense qu'en voulant assurer la reddition de comptes, l'on court également le risque d'étouffer l'activité.

M. Ken Epp: Et l'on nous a rapporté que des chercheurs consacrent un temps fou à la justification de leur projet au lieu d'y travailler, et il y a donc là un équilibre à établir.

Doit-on dire le Dr Avison?

M. Don Avison: Non.

M. Ken Epp: Non? Nous ne vous remettrons pas de diplôme honorifique ici au comité.

Alors ce sera monsieur le président Avison. Vous avez mentionné que la Colombie-Britannique a un retard d'environ 20 p. 100 par rapport à la moyenne nationale en matière de diplômes décernés. Avez-vous fait une étude pour déterminer la cause de ce phénomène? Dans l'affirmative, quels en ont été les résultats et qu'attendez-vous que le gouvernement fédéral y fasse? N'oubliez pas que nous sommes ici en tant que comité fédéral des finances. Nous sommes en train de préparer un rapport pour le ministère des Finances, qui va préparer un budget, sous peu, nous l'espérons. Ma question demeure donc. Quelle est votre réponse?

M. Don Avison: À quoi cela est-il attribuable et que cela signifie-t-il? Ce n'est pas bien difficile. Commençons par la bonne nouvelle. La situation s'est sensiblement améliorée au cours de la dernière décennie environ. Si vous vous étiez penchés sur la même question il y a dix ans dans la province de Colombie-Britannique, vous auriez constaté que les diplômés décernés... et nous avons en fait de très bons chiffres pour ce qui est des diplômes terminés. Une fois que les gens sont arrivés dans le système, ils se débrouillent très bien; ils obtiennent leurs diplômes.

Notre enquête de suivi auprès des diplômés de 1998 a révélé que 96 p. 100 des personnes qui ont reçu des diplômes ont intégré le marché du travail. La valeur de l'investissement est donc assez claire. Mais si vous aviez regardé la situation il y a dix ans, vous auriez constaté que les chiffres étaient de 65 p. 100 comparativement à la moyenne nationale. Nous sommes donc passés d'environ 65 p. 100 à 80 p. 100, et cela englobe non seulement les universités, mais également tous les autres établissements de Colombie-Britannique qui décernent des diplômes.

Cela résulte en partie d'une décision consciente de la part de la Colombie-Britannique face au constat qu'elle pouvait obtenir ses ressources, son capital intellectuel, ailleurs. L'idée était que si nous consentions nos investissements ailleurs, les gens viendraient en Colombie-Britannique et nous pourrions ainsi bénéficier de la formation de personnes formées dans d'autres provinces et ailleurs dans le monde. Cette proposition est de moins en moins soutenable.

La Colombie-Britannique a donc beaucoup de rattrapage à faire pour augmenter les possibilités pour les Britanno-Colombiens de bénéficier d'une éducation postsecondaire.

Permettez que je vous donne encore quelques renseignements de plus quant à ce que cela signifie. Ce n'est pas seulement que nous en sommes à 80 p. 100 de la moyenne nationale. L'on peut regarder certaines de ces facultés, certaines de ces disciplines qui sont identifiées dans la documentation que je vous ai fournie. Cette année, à UBC, il fallait une moyenne de 90 p. 100 pour être admis à la faculté de commerce de l'University of British Columbia, et l'on constate de plus en plus ce même phénomène dans d'autres universités et d'autres collèges universitaires de Colombie-Britannique.

• 0940

En quoi cela devrait-il intéresser le gouvernement fédéral? Je vous dirais que c'est parce qu'il y a une compétence mixte fédérale et provinciale. Si vous examinez la question d'un point de vue purement constitutionnel, c'est à la province que revient la responsabilité. Si vous examinez cela du point de vue international, si nous n'avons pas la capacité voulue pour développer le capital humain nécessaire pour être efficaces à l'avenir, alors cela finira par se traduire en un intérêt fédéral, étant donné que la province n'aura pas la capacité nécessaire pour être efficace à la table nationale. Et vous connaissez les chiffres économiques quant à l'actuelle situation de la Colombie-Britannique et vous savez la précarité de la position de la province en tant que moteur économique pour le pays dans son ensemble.

Nous vous soumettons qu'il est impératif de s'attaquer à cette question. Par où commencer? Certaines des pressions se dissiperont si l'on s'occupe au moins de la question des coûts indirects de la recherche, qui sont une responsabilité fédérale.

Il y a certains autres aspects auxquels le gouvernement fédéral pourrait, je pense, faire d'importantes contributions pour nous faire avancer, reconnaissant qu'il s'agit d'une question pressante et importante pour l'intérêt national, et non pas d'un intérêt purement provincial qui ne débouchera jamais sur le dialogue, à l'échelle fédérale et à l'échelle provinciale, qui est selon moi absolument essentiel.

Le président: Monsieur Epp, question suivante.

M. Ken Epp: Mon temps est écoulé. Devrais-je continuer?

Le président: Vous pouvez poser encore une autre question. Allez-y.

M. Ken Epp: Alors j'y vais pour une autre question.

Je suis vraiment intrigué par le fait que vous disiez que le Canada est en retard sur le plan investissement dans la recherche. J'imagine que l'on regarde principalement les États-Unis comme point de comparaison. Dans votre petit graphique, vous indiquez que la Colombie-Britannique est tout à fait en bas de la liste. Ce ne peut pas être de la faute du gouvernement fédéral; ce doit être de votre faute. Vous n'avez pas été là en train de vous démener, de vous battre pour décrocher ce qu'il fallait.

Je vous dis cela pour vous inciter à réagir.

M. Don Avison: Ken, vous savez que je le ferai.

J'aurai plusieurs choses à dire. Je vais commencer par ce graphique qui vous a été remis et que mon imprimante couleurs a eu honte d'imprimer, je pense, car il fait ressortir l'écart grandissant entre les États-Unis d'Amérique et le Canada.

Je pense que c'est ce même graphique qui a été mis devant les yeux du ministre fédéral des Finances, il y a de cela plusieurs années, et qui l'a convaincu que l'investissement dans la recherche est absolument essentiel pour que nous réussissions en tant que nation.

Est-ce une comparaison par rapport aux États-Unis uniquement? Non. Comme l'a dit M. Calvert tout à l'heure, nous nous classons au quinzième rang parmi les membres de l'OCDE pour ce qui est de l'investissement dans la R-D, ce qui n'est pas une situation très heureuse pour un pays qui siège à la table du G-7 ou du G-8.

Est-ce la responsabilité des universités? Je conviens que nous avons été loin de crier assez fort pour obtenir les ressources qui sont absolument essentielles à notre réussite. Mais il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'universités publiques; elles reçoivent leur financement pour la recherche du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux dans certains cas, et il y a également le secteur privé qui fait sa part. En Colombie-Britannique, le secteur privé compte à l'heure actuelle pour près de 13 p. 100 des fonds consacrés à la recherche par les universités de la province.

Collectivement, nous avons tous cette responsabilité. À moins de la prendre au sérieux et de nous attaquer à des problèmes comme les coûts indirects de la recherche, nous devrions nous attendre à stagner au quinzième ou au quatorzième rang. Et face à un monde concurrentiel axé sur la connaissance, ce n'est pas là une recette pour la réussite. Je vous soumets qu'il est important de s'attarder davantage sur les détails. Nous avons fait cela. Si vous regardez le graphique qui classe le Canada au quinzième rang, comme vous l'avez si bien fait ressortir, vous verrez que la Colombie-Britannique se situe encore plus bas. Nous sommes en vérité quelque part derrière l'Italie pour ce qui est de l'investissement en R-D.

Le président: Monsieur Nystrom.

M. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Je pourrais peut-être enchaîner sur la même chose.

Pour ce qui est de la recherche que vous avez faite, pourquoi sommes-nous si loin en arrière? Où est le problème? Il y a le gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux, le secteur privé, les universités, et ainsi de suite. Pourquoi nous débrouillons-nous si mal comparativement aux autres?

L'autre partie de la question est davantage axée sur l'avenir. Vous dites que l'objectif est de nous classer au cinquième rang, ou au quatrième ou au troisième, ou mieux encore, et je suis tout à fait de votre avis. Mais cela est-il réaliste compte tenu de ce qui se passe ailleurs dans le monde? Les autres pays ont eux aussi des objectifs. Sont-ils en train de faire des choses telles que nous nous maintiendrons vraisemblablement au quinzième rang, ou alors accéderons au dixième ou au douzième rang, ou encore plongerons au vingtième? J'imagine que les Suédois font pas mal de choses, tout comme les Allemands, les Français, les Japonais, etc.

Que vous dit votre boule de cristal? Vous êtes ici dans 15 ans et vous comparaissez devant le Comité des finances de l'époque et vous nous expliquez ce qui est arrivé et pourquoi.

M. Tom Calvert: Vous avez tout à fait raison de dire que ce n'est pas une cible fixe; nos concurrents courent, et ils courent vite, alors il nous faut courir encore plus vite pour les rattraper. C'est une question compliquée qui fait intervenir tous les aspects de l'économie. Comment faire pour bâtir la base industrielle qui soit en mesure d'appuyer, grâce aux revenus et à l'impôt, les genres d'universités qu'il nous faut pour produire les chercheurs et les ingénieurs qui nous aideront à bâtir cette économie?

• 0945

Mon collègue, Don, est un économiste, et j'imagine qu'il est un petit peu plus doué pour cela que moi. C'est pour moi tout un défi.

M. Don Avison: Je trouve cela plutôt préoccupant et votre question, formulée comme vous venez de le faire, tombe dans le mille: à quoi cela ressemblerait-il dans 15 ans? Dans cinq ans, ce sera sensiblement pire, à moins que nous ne reconnaissions qu'il s'agit d'une question qui exige une attention urgente.

Permettez que je tente de répondre à la question de la façon suivante. Nous nous sommes déjà trouvés dans cette situation en tant que pays. Au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, avec les importants changements survenus dans la nature de l'économie mondiale, le Canada a été confronté à plusieurs décisions importantes quant à la façon d'aborder l'avenir. Je pense que nous avions compris que nous n'allions pas réaliser notre avenir en continuant tout simplement de faire ce que nous avions fait par le passé. Il nous avait fallu reconnaître que le monde changeait autour de nous et que nous devions changer avec lui.

L'une des clés pour composer avec le changement a été d'investir dans l'éducation, ce que nous avons fait. Et au cours des 20 années qui ont suivi, le Canada a accumulé l'un des dossiers les plus enviables en matière d'investissement dans l'éducation postsecondaire et dans l'éducation de façon générale.

Je crois que c'est justement grâce à cela que nous avons pu prendre un siège à la table du G-7. C'est là l'une des choses qui ont apporté aux Canadiens et au Canada la proéminence mondiale dont il jouit à l'heure actuelle. Mais sommes-nous à risque? Absolument. Sommes-nous confrontés à des défis? Nous savons tous que c'est le cas, et que ces défis sont aujourd'hui plus grands et plus difficiles par suite des événements de la mi-septembre qu'ils ne l'étaient en août ou en juillet.

Le monde d'aujourd'hui n'est pas le même qu'à l'époque de la rédaction de notre mémoire, mais les questions sont, je pense, tout aussi pressantes, tout aussi importantes, tout aussi critiques pour l'avenir du pays. Nous ne pouvons pas uniquement planifier pour l'année à venir. Il nous faut choisir à l'horizon le point que vous avec identifié, monsieur Nystrom. À quoi cela va-t-il ressembler dans 15 ans? Où aimerions-nous être? Travaillons à reculons à partir de là pour planifier notre réussite.

J'estime que ce sur quoi nous devrons concentrer nos énergies c'est l'investissement dans la recherche, dans le capital humain—pour veiller à ce que nous soyons prêts pour cet élève de troisième année qui sera le plus touché par la situation que nous connaîtrons dans 15 ans.

Mme Linda Bartram: Permettez-moi de vous entretenir un petit peu du modèle de l'Union européenne, dont j'ai une certaine expérience personnelle, et, en guise d'exemple, de la façon dont les Allemands s'y sont pris.

Je suis boursière post-doctorale en recherche industrielle du CRSNG. Nous sommes 80 par an au Canada. Parmi l'ensemble des étudiants qui terminent leur doctorat, nous sommes 80 par an qui sommes chargés de mettre nos capacités, nos aptitudes et nos connaissances en matière de recherche à la disposition de l'industrie canadienne. C'est un nombre minuscule. Il y a une bien plus grande collaboration dans l'Union européenne—et c'est particulièrement le cas de l'Allemagne, de la France et du Royaume-Uni—entre chercheurs à différents niveaux dans leur carrière et l'industrie.

Et ce n'est pas aussi simple que de tout simplement payer les études d'un diplômé et de dire «Voici les 15 000 $ pour couvrir les frais de tel étudiant pour cette année-ci». Le modèle est plus vaste. Il permet à plus d'universités, de laboratoires, d'intervenants de l'industrie et du gouvernement de participer dans le cadre de consortiums qui ne sont pas ensevelis sous l'administration, pour revenir sur un problème qui a été mentionné plus tôt.

Ce que cela produit ce sont des personnes qui ont une connaissance intime des problèmes à régler au cours des cinq à dix prochaines années dans leurs économies, car elles ont une expérience et une certaine connaissance du domaine et elles n'ont donc pas à faire une énorme transition.

Cela produit, il me semble, m'appuyant sur mon expérience personnelle, un groupe d'industries et d'entreprises qui sont très sensibles à la valeur que représente pour elles cette ressource et qui l'appuient activement. C'est une relation qui, d'après mon expérience limitée ici—et j'ai participé pour le gros de ma carrière post-doctorale à des collaborations industrie-université—est beaucoup plus limitée. Je pense que c'est là une formule très viable pour enrichir l'économie.

M. Lorne Nystrom: Je suppose que mon autre question concerne les parcs nationaux. De combien de parcs nationaux de plus avons-nous besoin, si vous deviez faire une recommandation, et quel genre d'échéancier avez-vous en tête?

D'autre part, pour ce qui est du réseau routier—nous n'avons pas de programme national d'autoroutes et vous avez évoqué cela dans votre mémoire—quel pourcentage du programme routier devrait être financé par le gouvernement fédéral?

J'ai également relevé dans votre document que vous favorisiez dans certains cas l'application de frais d'utilisation. C'est là une question controversée. Dans certaines parties du pays... Samedi, j'étais au Nouveau-Brunswick, où il y a une controverse entourant les frais d'utilisation exigés pour certaines routes—là-bas, ils parlent de routes à péage.

Voilà donc quelles seraient mes deux questions—une pour chacun d'entre vous.

• 0950

Mme Sabine Jessen: Pour ce qui est des parcs nationaux, le Canada a encore 14 parcs nationaux à créer.

M. Lorne Nystrom: Quatorze?

Mme Sabine Jessen: Oui, quatorze. Parcs Canada a mis au point un plan. Il a divisé le pays en régions naturelles et il s'efforce d'avoir un site pour représenter chaque région. Il reste encore au Canada 14 régions qui ne sont pas encore représentées. Voilà pour ce qui est du volet terrestre.

Du côté maritime, nous accusons encore plus de retard. Il y a un programme de zones de conservation maritimes nationales. Le comité du patrimoine est à l'heure actuelle saisi du projet de loi. Côté marin, il reste encore à compléter 26 sites sur 29. Il reste encore beaucoup de travail à abattre.

M. Jack Davidson: Nous n'avons pas au Canada de programme routier national, et les constructeurs de routes de tout le pays font du lobbying en ce sens depuis 20 ans. Nous pensons que le Canada—que le gouvernement fédéral—a pour responsabilité de permettre aux Canadiens de commercer avec les États-Unis et vice-versa. Nos principales artères—est-ouest et nord-sud—devraient relever du fédéral.

Combien devrait-il payer pour cela? En Colombie-Britannique, nous aimerions que vous payiez 100 p. 100, car nous sommes fauchés; nous n'avons pas d'argent. Si nous voulons que quelque chose soit fait, il faut que ce soit le gouvernement fédéral qui intervienne.

D'un autre côté, nous sommes certainement réalistes et nous espérons que les gouvernements fédéral et provinciaux pourront en arriver à des ententes de partage 50-50. Le dernier programme d'infrastructure aurait pu nous aider s'il avait été davantage axé sur les transports. Nous pensons que la taxe sur le carburant, en vertu duquel vous percevez et investissez selon un ratio de dix pour un, est tout à fait exagérée, et nous aimerions qu'une partie de notre argent soit consacré aux routes de la Colombie-Britannique. L'économie est en train de s'étouffer en Colombie-Britannique, au Manitoba et en Saskatchewan. En Alberta, elle a en fait basculé de l'autre côté et est en train de chuter. Le transport est le gros problème.

J'ai oublié votre deuxième question.

M. Lorne Nystrom: La deuxième question concernait les frais d'utilisation. Ici, dans votre mémoire, vous mentionnez...

M. Jack Davidson: Oui, nous appuyons les projets trois P, absolument...

M. Lorne Nystrom: Les quoi? Je n'a pas compris.

M. Jack Davidson: «Les trois P»: partenariats publics-privés...

M. Lorne Nystrom: Oui.

M. Jack Davidson: ... en matière de routes à péage, de routes avec frais aux utilisateurs. Si vous aviez un poste frontalier permettant aux camionneurs de passer en l'espace d'une demi-heure, ils paieraient tous.

M. Lorne Nystrom: Parlez-vous de routes nationales, de certaines routes, ou quoi? J'imagine que vous ne parlez pas d'une route reliant la maison de quelqu'un ou autre chose du genre.

M. Jack Davidson: Non, je veux parler des routes nationales: accès aux frontières, accès aux terminaux, accès aux ports.

M. Lorne Nystrom: Très bien.

M. Jack Davidson: Nous pourrions construire un pont reliant l'île de Vancouver et leur demander 500 $ le voyage. Ils paieraient, parce que c'est ce que cela leur coûte en temps et en argent pour prendre le traversier.

M. Lorne Nystrom: Mais pourriez-vous construire le pont?

M. Jack Davidson: Eh bien, vous vous pourriez le faire. Ils n'en veulent pas dans l'île de Vancouver. C'est là le problème. Ils aiment cela là-bas.

Le président: Madame Barnes.

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Merci.

[Note de la rédaction: Inaudible]... Vous nous avez fait état de frais d'exploitation selon un ratio de un pour neuf. Disposez-vous par hasard des coûts d'immobilisation originaux, y compris les coûts opérationnels?

Mme Sabine Jessen: Je regrette, mais je n'ai pas ces chiffres ici avec moi.

Mme Sue Barnes: Très bien. Je n'y comptais pas beaucoup. Mais si vous tombez dessus, pourriez-vous nous les envoyer? Je crois fermement dans la création de parcs nationaux, mais je pense que cela est trompeur lorsqu'on nous donne tout simplement un ratio correspondant à un coût permanent.

La partie du mémoire du groupe des universités qui m'a le plus intriguée lorsque je l'ai lue est celle qui nous dit que nous perdons sans doute certains des étudiants qui ont les capacités voulues pour poursuivre des études universitaires. J'assiste chaque année à neuf remises de diplômes de fin d'études secondaires dans ma circonscription. Cela me scandalise qu'il faille avoir une moyenne supérieure à 80 p. 100 pour être admis—je viens de l'Ontario—dans la plupart des universités. Qu'en est-il des étudiants qui ont une moyenne de 70 p. 100, qui sont selon moi tout à fait capables et qui, il y a 15 ans, auraient été admis dans ces programmes? Je pense que c'est un problème plus vaste. Cela ne s'inscrit pas nécessairement dans ce processus budgétaire, mais c'est une grosse question à laquelle le Canada et tous les paliers de gouvernement doivent trouver une réponse.

• 0955

Nous sommes en train de préparer un budget à l'heure actuelle. Des deux questions que j'ai entendues relativement aux universités, je choisis d'aborder la plus simple en premier, car vous l'avez évoquée—il s'agit des budgets du CRSH. Historiquement, la dotation était bien moindre. Êtes-vous en faveur d'une augmentation pour le CRSH? J'aimerais que vous me donniez une réponse très simple.

M. Don Avison: Absolument.

Mme Sue Barnes: En ce qui concerne la FCI et les chaires, le gouvernement fédéral a contribué pour une partie des coûts d'infrastructure les entourant, alors j'en déduis que lorsque vous parlez des coûts indirects, vous songez plutôt aux principaux conseils subventionnaires.

M. Don Avison: C'est la question des dépenses de fonctionnement associées à plusieurs de ces activités, qu'il s'agisse des chaires de recherche du Canada ou des investissements essentiels effectués par le biais de la Fondation canadienne pour l'innovation.

Les coûts indirects sont en fait les dépenses de fonctionnement résultant de toute cette activité supplémentaire. Paradoxalement, il y une relation entre cette question et celle que vous avez mentionnée tout à l'heure—en refusant simplement de couvrir ces frais, on impose aux universités un fardeau considérable qu'elles ne peuvent assumer. Par conséquent, cela se répercute sur la capacité des universités à accueillir les étudiants ayant une moyenne pondérée inférieure et sur la qualité de l'enseignement qu'ils vont recevoir.

Le système ne ressemble plus à ce qu'il était il y a dix ans. Le ratio étudiants-enseignants a grimpé en flèche. La qualité pédagogique s'est détériorée considérablement et l'avenir est inquiétant.

Si vous regardez les chiffres en Colombie-Britannique, où nous avons le plus fort taux de croissance dans la tranche d'âge de 18 à 24 ans, vous verrez que nous connaîtrons une explosion dans cette tranche au cours des dix prochaines années. La croissance est de l'ordre de 12 à 14 p. 100, selon le nombre d'habitants qui ont pu quitter la Colombie-Britannique au cours des dernières années. Nous pensons qu'en fait le chiffre sera supérieur à cela, si l'on tient compte du nombre d'adultes en milieu de carrière qui reviennent étudier.

Je pense que la grande inconnue est la sensibilisation croissante à l'importance de l'éducation postsecondaire, qui augmente la demande dans cette tranche d'âge de 18 à 24 ans. La demande va croissant alors que la capacité diminue. De ce fait, avec tous ces coûts indirects non financés, la faculté de réellement répondre à ces besoins va être énormément mise sous tension au cours des dix années à venir.

Mme Sue Barnes: Les problèmes ne manquent pas à travers le pays. Je suis de l'Ontario et l'Ontario consacre le chiffre per capita le plus bas à l'éducation postsecondaire, alors qu'elle est aujourd'hui l'une des provinces les plus riches.

Je m'inquiète de l'inversion de l'accès entre régions rurales et urbaines. Je pense que nous allons devoir effectuer quelques études, car il y aura des écarts d'accès aux ressources pour l'éducation.

Je veux en revenir aux coûts indirects. Je tiens réellement à vous remercier pour le mémoire détaillé qui montre, par université, jusqu'à 78 p. 100 de coûts de... Je pense que nous sommes nombreux à avoir frémi lorsque nous avons vu pour la première fois le chiffre de 40 p. 100 de coûts indirects. C'est une bataille, et je peux vous dire qu'elle n'est pas encore gagnée autour de cette table. Je vous donne donc l'occasion de vraiment vous expliquer. Vous n'avez pas besoin de me convaincre; je viens d'une ville de chercheurs. J'ai des milliers de chercheurs—recherche médicale, industrielle—dans ma ville de London, en Ontario, et je suis donc convertie. Mais j'ai besoin que vous expliquiez pourquoi ces coûts indirects doivent être couverts et aussi en quoi, à l'heure actuelle, l'augmentation des droits de scolarité revient à dépouiller les étudiants de premier cycle. Je vais vous donner le temps de répéter ces arguments, car vous ne pouvez tenir pour acquis que la bataille est gagnée.

M. Don Avison: J'apprécie certainement cette occasion et je ne pars pas non plus du principe que la bataille est gagnée. C'est un problème difficile, car les coûts indirects ne sont pas l'un de ces enjeux qui vous saute aux yeux et vous fait dire que, oui, il faut régler le problème.

Pour ce qui est de l'accès des étudiants, l'argument est très facile à comprendre par ceux qui prennent les décisions de politique importantes. Pour ce qui est de l'augmentation de l'investissement dans la recherche, ce n'est pas trop difficile non plus. Les coûts indirects représentent l'argument le plus difficile à expliquer et à admettre. C'est peut-être dû au fait, comme M. Epp l'a suggéré, que nous n'avons pas su bien expliquer leur importance vitale.

Nous devons nous adresser aux décideurs et à ceux qui prennent les décisions politiques aux paliers fédéral et provincial et, surtout, au public si nous voulons que la problématique soit bien comprise.

Le problème n'est pas nouveau. Lorsque nous avons comparu devant le Comité permanent des finances, ici, il y a quelques années... J'ai même ressorti le mémoire que j'avais lu alors et il comporte quelques similitudes frappantes avec celui que je présente aujourd'hui. Les circonstances ont changé. Les problèmes sont devenus plus intraitables et les coûts indirects restent aussi importants aujourd'hui—je dirais plus—qu'alors, car les tensions et les pressions qui s'exercent sur le système sont nettement plus discernables et inquiétantes.

• 1000

Il ne sera tout simplement pas possible aux universités de tirer pleinement parti des possibilités de R-D qui s'offrent si la question des coûts indirects n'est pas réglée.

Mes collègues, M. Calvert et Mme Bartram, ont à juste titre souligné la nécessité d'accroître les budgets des conseils subventionnaires, et nous y sommes favorables, mais de plus en plus les universités sont amenées à conclure que nous arrivons au stade où nous allons devoir demander grâce. Si l'on ne prête pas attention aux coûts indirects engendrés par cet investissement de recherche, la pression exercée sur les universités va simplement devenir trop forte. L'érosion de notre capacité à répondre aux besoins de base de notre population estudiantine, à l'heure même où nous cherchons à améliorer l'accès, deviendra tout simplement trop forte pour que nous puissions maintenir la qualité qui est absolument essentielle si nous voulons parvenir à ce point de l'horizon, dans 15 ans.

Donc, le problème des coûts indirects de la recherche est probablement l'un des sujets les plus importants auxquels votre comité devra réfléchir lors de ses audiences, s'il veut donner de bons conseils au ministre des Finances et au gouvernement concernant les décisions budgétaires très difficiles devant être prises cette année.

Nous ne remplirons pas les objectifs en matière de R-D si les coûts indirects ne sont pas adéquatement couverts. C'est le mieux que je puisse dire en quelques mots. Nous pouvons vous fournir une documentation plus complète. C'est un sujet qui me tient véritablement à coeur. Je pense qu'il y a un fossé de compréhension incroyable, que les décideurs n'ont pas compris que cette pression pourrait nous empêcher de réaliser les objectifs de notre société. Nous n'avons pas réussi à expliquer suffisamment aux décideurs l'importance critique de cela.

Mme Sue Barnes: J'ajouterais simplement que les hôpitaux disent exactement la même chose concernant les subventions de l'IRSC. J'ai aussi un certain nombre d'hôpitaux universitaires dans ma circonscription, comptant plus d'un millier de chercheurs médicaux répartis en plusieurs instituts de recherche. Les universités ne sont pas seules à être touchées par les coûts indirects, car nombre de ces instituts sont affiliés à l'université mais leurs recherches sont effectuées dans un hôpital et ces hôpitaux eux-mêmes manquent d'infrastructure physique et de soutien.

En ce qui concerne les remarques de M. Calvert et de Mme Bartram, je pense que le gouvernement est très conscient du programme de l'innovation. Il figure tout en haut de notre liste de priorités, et c'est en gros ce dont vous parlez. Il ne s'agit pas de réinventer la roue, mais de trouver une nouvelle boîte.

M. Tom Calvert: Pourrais-je dire un mot sur les coûts indirects?

D'une façon ou d'une autre, les subventions versées aux universités sont habituellement plus ou moins proportionnelles au nombre d'étudiants de premier cycle. Les formules de calcul varient selon les provinces. Mais de façon générale, en gros, si vous doublez le nombre d'étudiants de premier cycle, vous multipliez par deux la subvention, laquelle n'est évidemment pas associée directement à la recherche entreprise. Cela signifie que si vous êtes administrateur universitaire, la façon d'optimiser votre budget est d'affamer le volet recherche et d'augmenter le nombre d'étudiants. C'est ce qui vous rapportera le plus gros budget. C'est une approche grossière, mais elle est efficace.

Il y a quelques années—en fait il y a 30 ans—j'ai enseigné pendant cinq ans aux États-Unis et j'avais une subvention du National Institute of Health, ce qui était excellent. Mais je crois savoir que cette subvention englobait 46 p. 100 pour les frais généraux de l'université. Elle englobait également mon salaire d'été et un tiers de mon salaire académique pour l'année. Ensuite, j'avais aussi un petit montant pour quelques étudiants diplômés assistants de recherche. Voilà la comparaison. Voilà comment l'Université de Washington, par exemple, paie ses factures.

Mme Sue Barnes: Je pense que les documents et tableaux ont très bien mis cela en lumière. J'ai été frappée par le fait qu'à Harvard, 78 p. 100 couvrent les frais accessoires.

Mme Linda Bartram: Je signale en passant que ce n'est pas seulement en commerce que les étudiants ont besoin d'une note de 90 p. 100 pour être admis; c'est vrai aussi en génie, en informatique, en génie informatique et dans quelques autres disciplines appliquées. Il faut donc bien voir que la MCP requise de nos étudiants actuels est hors de la portée de nombreux excellents élèves du secondaire. Je n'aurais pas pu entrer à l'université avec ma note moyenne de 89,9 au secondaire. Je n'aurais pas pu m'inscrire en informatique aujourd'hui à la fin du secondaire.

Le président: Merci, madame Barnes.

Monsieur Cullen.

• 1005

M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.

J'ai quelques questions pour M. Davidson et Mme Jessen, mais j'aimerais d'abord revenir sur les coûts indirects de la recherche.

J'ai rencontré un chef de département il y a peu. Il s'occupe de recherche et il m'a dit qu'il a entendu parler du problème des coûts indirects mais que ce qu'il lui fallait, c'était des crédits de recherche. Il a dit que les fonds pour les frais généraux afférents à la recherche financée par la province parvenaient à l'université d'une certaine façon et se trouvaient répartis, mais que lui ne les voyait jamais. Ce qu'il voulait, c'était des crédits de recherche.

Je place cela dans le contexte, à savoir que le gouvernement fédéral finance les chaires de recherche, la Fondation canadienne pour l'innovation à hauteur de plus de 3 milliards de dollars et augmente les budgets des conseils subventionnaires.

J'ai remarqué, monsieur Avison, que vous avez fait la même présentation à la province. Comment ont-ils réagi lorsque vous leur avez dit qu'il fallait couvrir les coûts indirects de la recherche? Si le gouvernement fédéral va réagir—et je pense que nous le faisons, même si l'on pourrait toujours faire plus—pourquoi la province ne fait-elle pas sa part pour soutenir ces investissements que nous faisons?

M. Don Avison: Certaines provinces le font, et en Colombie-Britannique le nouveau gouvernement a annoncé 20 chaires de recherche supplémentaires. Il y a néanmoins un problème, à savoir que lorsque la province finance des recherches, elle devrait elle aussi couvrir les frais indirects. Elle non plus ne peut pas se boucher les yeux. Au niveau fédéral, il reste encore à faire et les coûts indirects restent le principal problème non réglé.

Vous avez parlé de ce chercheur qui dit ne jamais voir l'argent. Eh bien, il voit les services de bibliothèque. Il voit les locaux dans lesquels il travaille. Il a le soutien d'une infrastructure universitaire qui lui permet de faire ses recherches. Que se passe-t-il si cet argent n'est pas fourni? Le chercheur continue et demande comment il se fait qu'il ne peut obtenir l'argent directement pour ce dont il a besoin. Cela nous ramène également à la question de M. Epp. Est-il possible de canaliser davantage de fonds directement vers les chercheurs et être sûrs qu'ils iront là où il faut?

M. Roy Cullen: Quand les provinces ont-elles décidé de ne pas fournir le soutien? Je n'ai pas étudié cela en profondeur, mais à un moment donné il a été décidé que les provinces financeraient l'éducation postsecondaire, aussi bien l'enseignement que la recherche. Ensuite, quelque part en chemin, elles ont dit qu'elles financeraient les coûts indirects associés aux recherches financées par la province, mais pour ce qui est des projets fédéraux, désolé, elle n'avait tout simplement pas les ressources ou n'était pas intéressée.

M. Don Avison: Plusieurs gouvernements provinciaux financent de plus en plus les coûts indirects résultant des projets de recherche provinciaux. Ces provinces—et l'Ontario et l'Alberta sont les deux qui viennent immédiatement à l'esprit—ont pour position que si le gouvernement fédéral fournit des crédits de recherche—et cela dans l'intérêt national, à mon sens—il devrait fournir un investissement correspondant dans les coûts indirects de la recherche.

Un certain nombre de gouvernements provinciaux comprennent l'importance de ce problème, mais je dois dire que la Colombie-Britannique n'en fait pas partie. J'ai commencé par parler de M. McGeer. Je pense que lui avait bien compris, mais il n'a pas réussi à émouvoir et mobiliser ses collègues...

M. Roy Cullen: J'imagine donc que la province n'a pas sauté pour dire qu'elle couvrirait les coûts indirects.

M. Don Avison: Nous ne savons pas encore, car le ministre fédéral des Finances va déposer son budget le 19 février et passer en revue les enjeux importants pour le pays. La même semaine—ou le même mois, en tout cas—le ministre des Finances provincial fera la même chose en Colombie-Britannique. Mon espoir est que, dans leur vision du futur, les deux reconnaîtront l'impératif de s'attaquer conjointement à ce problème, que la province reconnaîtra et remplira ses obligations et que le gouvernement fédéral fera de même, et ce dans l'intérêt public.

M. Roy Cullen: Je l'espère, car je pense que c'est un objectif national, un objectif national très louable, mais qui est victime actuellement d'un goulot d'étranglement. Je suis d'accord avec vous là-dessus.

J'aimerais passer à autre chose. Monsieur Davidson, vous avez parlé d'axe nord-sud et est-ouest. Les routes sont généralement de la responsabilité provinciale, mais vous parliez, je présume, du réseau routier national. En cette époque de pénurie de ressources, si vous deviez opérer un choix en Colombie-Britannique, choisiriez-vous de renforcer les artères est-ouest ou nord-sud?

M. Jack Davidson: Je choisirais nord-sud car c'est dans ce sens que se font la majorité de nos échanges. Je pense que les décisions en matière de transport devraient être fondées exclusivement sur l'avantage économique. Peu importe la circonscription ou la région de la province. Si vous pouvez justifier l'investissement routier par un accroissement des échanges ou le développement d'une région, alors il faut investir. Nos ports et notre frontière nous relient au reste du monde.

M. Roy Cullen: Vous avez mentionné la liaison avec l'Okanagan. Maintenant, vous avez l'autoroute de Coquihalla. Préconisez-vous une bretelle vers les États-Unis et, si oui, pourrait-on la financer par des péages?

• 1010

M. Jack Davidson: Nous avons un couloir: Prince George-Vernon-Kelowna-Penticton-Osoyoos et la frontière américaine. Les États-Unis ont convenu d'améliorer la route de leur côté si nous en construisons une jusqu'à la frontière. Cela détournerait beaucoup de trafic qui doit maintenant emprunter l'autoroute de Coquihalla par Vancouver ou les autres ports du Pacifique.

M. Roy Cullen: Quelle serait la ville frontière du côté de la Colombie-Britannique?

M. Jack Davidson: Osoyoos, je suppose. Je ne sais pas quelle est la localité de l'autre côté. C'est l'une de celles où l'on met un cône orange au milieu de la route après huit heures du soir.

M. Roy Cullen: Pourrait-on financer la construction par des péages?

M. Jack Davidson: Oui.

M. Roy Cullen: Madame Jessen, vous avez parlé des prairies intérieures. De quelle région s'agit-il? Est-ce l'Okanagan?

Mme Sabine Jessen: Nous parlons de la même région, soit l'Okanagan, mais également plus au nord.

M. Roy Cullen: D'accord. Il est question de créer un parc quelque part dans les îles Gulf, n'est-ce pas?

Mme Sabine Jessen: Oui.

M. Roy Cullen: Donc, dans les îles Gulf. Où en sont les choses à cet égard?

Mme Sabine Jessen: En ce qui concerne le parc national des îles Gulf, je pense qu'ils ont à peu près fini d'acheter les terrains. C'est une sorte différente de parc national car ils ont dû acheter beaucoup de terrains privés au lieu d'utiliser des terres domaniales. Ils sont actuellement en négociation avec le gouvernement provincial sur divers sujets pour pouvoir finaliser. Je crois savoir que c'est presque terminé et nous pourrions même avoir une annonce cet automne.

M. Roy Cullen: J'ai entendu dire que le prix de certains des terrains privés grimpe du fait d'une spéculation et que cela pourrait faire capoter le projet. Ce n'est pas vrai?

Mme Sabine Jessen: Non. Ils ont l'essentiel des terrains. Je sais qu'ils aimeraient pouvoir en acquérir d'autres, mais ils ont le gros de ce dont ils ont besoin pour le parc national.

M. Roy Cullen: Bien. Je vous remercie.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Cullen.

J'ai juste une question pour M. Avison concernant cette date du 19 février. D'où la tenez-vous? Cela nous conviendrait très bien car nous aurions beaucoup plus de temps pour rédiger notre rapport. Vous ne savez pas à quel point vous nous avez rendu heureux.

Mais j'ai une question portant sur le budget et sa date. Pensez-vous que les Canadiens souhaiteraient un budget avant le 19 février?

M. Don Avison: Oui, vu les incertitudes actuelles. Les Canadiens ont besoin d'en entendre plus sur notre vision d'avenir et la façon de faire face non seulement au présent mais aussi à l'avenir. Ils ont besoin de savoir que nous avons un plan pour surmonter la période difficile que nous traversons et que nous avons une vision pour l'avenir au-delà des difficultés immédiates.

Le président: Madame Bartram.

Mme Linda Bartram: Je dirais que c'est vrai aussi pour les petites entreprises de mon secteur qui bougent très vite.

Le président: Monsieur Calvert.

M. Tom Calvert: Oui.

Le président: Monsieur Davidson.

M. Jack Davidson: Si le budget va contenir quelque chose pour le transport, nous aimerions le savoir le plus tôt possible.

Le président: Et si ce n'est pas le cas?

M. Jack Davidson: Si ce n'est pas le cas, nous ne voulons rien savoir.

Le président: Madame Jessen.

Mme Sabine Jessen: Je dirais que les Canadiens comptent sur un budget dans les meilleurs délais.

Le président: Que pensez-vous de l'éventualité d'un déficit, monsieur Davidson? Si nous devons donner les milliards de dollars que vous et M. Calvert, M. Avison et Mme Jessen réclament... toutes ces choses coûtent cher. Quelle importance attachez-vous à un budget en équilibre? Quelle en est l'importance pour le pays?

M. Jack Davidson: Je pense que l'on peut dépenser s'il s'agit de créer un climat économique de croissance, permettant au Canada de prospérer. Je pense qu'il faut le faire. Je ne pense pas que les Canadiens se rendent déjà compte que l'économie dérape et que nous allons vers de gros problèmes. Il incombe au gouvernement fédéral de les prévenir.

Le président: Si nous repassons dans le rouge, il est évident que cela aura un impact sur la confiance des consommateurs et des entreprises. C'est un fait avéré. Dans ces conditions, où est l'avantage? Autrement dit, dans quelle mesure est-il important de continuer d'avoir des budgets équilibrés?

M. Jack Davidson: Je ne pense pas que ce soit si important, si cela nous empêche de tomber dans une grosse récession.

• 1015

Le président: Donc, le fait qu'il y aurait un déficit qui ferait augmenter les taux d'intérêt et aurait un effet négatif sur ce côté de l'économie...

M. Jack Davidson: Tout dépend de l'ampleur et de la justification.

Je pense que les déficits que nous avons connus par le passé étaient dus au fait que nous pensions pouvoir dépenser sans compter. Je pense que si l'on va afficher un déficit, il faut pouvoir le justifier sur une base strictement économique et qu'il ne doit pas s'agir de programmes pour faire plaisir ici et là. Chaque programme doit se justifier comme un outil pour renforcer notre économie, car nous ne pourrons acheter toutes ces choses que tout le monde réclame si nous n'avons pas une économie robuste.

Le président: Monsieur Avison.

M. Don Avison: Je répondrai de la façon suivante. Je ne minimise pas un instant les pressions immédiates qui s'exercent sur les dépenses en raison de la situation sensiblement nouvelle apparue à la mi-septembre. Il est très difficile d'ignorer l'ampleur des dépenses engagées ces dernières semaines en réaction à la crise et contre lesquelles il n'y a rien à redire.

Cependant, si le coût de la réaction à ces problèmes immédiats devait compromettre notre capacité à relever les défis du futur, si le prix à payer était le programme d'innovation, alors je considère ce prix comme trop élevé. Nous devons savoir quelle sera l'orientation une fois que les choses vont se calmer. S'il faut engager des dépenses supplémentaires qui mettent le pays dans le rouge pour préserver le programme d'innovation, alors je dirais que c'est le prix qu'il faut payer. Si c'est là le choix, je vous dirais de ne pas hésiter.

En fin de compte, il faudra bien prendre quelques décisions très difficiles et importantes. Nous comprenons l'importance de budgets en équilibre. Les universités en ont bien conscience étant tenues de par la loi d'équilibrer leurs budgets, et c'est quelque chose que nous prenons très au sérieux. Mais il y a des tournants critiques où les circonstances changent dans une telle mesure que des décisions fondamentales doivent être prises pour préparer l'avenir. Voilà comment se présente le choix, à mon avis.

Le président: Il y a plusieurs éléments à considérer à cet égard. Premièrement, je pense qu'il faut voir exactement quelle est la situation économique, avoir les chiffres pour déterminer exactement où nous en sommes. Je pense qu'il faudra probablement attendre pour cela un budget ou une mise à jour budgétaire. Deuxièmement, avant que notre comité puisse faire quoi que ce soit sur le programme d'innovation, il nous faut voir le plan. Nous avons besoin du rapport. Nous avons besoin de savoir exactement ce que le gouvernement cherche à réaliser et combien cela va coûter. Je pense qu'il serait prématuré pour le comité de dire quoi que ce soit concernant le programme d'innovation avant de voir ce document qui devrait être publié prochainement.

Il subsiste énormément de points d'interrogation.

Mme Sabine Jessen: Pourrais-je répondre à cela?

Le président: Oui.

Mme Sabine Jessen: Parcs Canada a vu son budget amputé de 25 p. 100 depuis 1993. Si l'on regarde ce qui se passe sur le terrain un peu partout au Canada, nous voyons disparaître les possibilités de protéger l'environnement naturel. Il faut agir vite, sinon nous ne pourrons achever le réseau des parcs nationaux. Nous perdrons alors ce que j'estime être des biens naturels irremplaçables que l'on ne pourrait jamais reconstituer. Je pense donc qu'il faut réfléchir de très près à cela.

Le président: Merci.

Nous allons écouter Mme Bartram avant de donner la parole à Mme Barnes.

Mme Linda Bartram: J'aimerais dire quelques mots très rapidement sur la psychologie du déficit, car cette sorte de psychologie cumulative a un effet déterminant sur nombre des forces à l'oeuvre. Actuellement règne une psychologie de désespoir, la notion que nous ne pouvons que réagir aux événements immédiats, alors qu'ils sont manifestement dus à des problèmes de long terme.

Je vous parle là de la population universitaire et de la masse de gens que je rencontre et qui sont, comme moi, de jeunes travailleurs qui se demandent ce qu'il va advenir de leurs familles et regardent ce qui se passe.

Je pense que si le gouvernement faisait preuve d'audace et exposait une vision pour l'avenir, pas pour les deux prochaines années ou jusqu'à la prochaine élection, et investissait réellement dans un projet d'avenir, dans quelque chose de réellement positif et réalisable, ce serait un message positif, au-delà des considérations financières immédiates.

Le président: Merci.

Nous allons passer à Mme Barnes pour une dernière question.

• 1020

Mme Sue Barnes: Mes questions vont dans le même sens que celle de notre président, car je pense que c'est important.

Nous cherchons à trouver un équilibre tel que le gouvernement et le Canada puissent maintenir leur crédibilité financière, quoi qu'il arrive. Aux yeux de certains, cela signifie, en termes très simplistes, que si l'on met un pied dans le déficit... Certains gouvernements provinciaux ont promulgué des lois qui interdisent un déficit budgétaire. S'ils veulent prendre des mesures d'urgence ou maintenir des réductions d'impôt, ils sont obligés de couper d'autres dépenses pour éviter un déficit. Nous n'avons pas ces contraintes au niveau fédéral. Nous avons théoriquement des options.

De nombreux économistes et entreprises disent qu'il faut considérer le ratio de la dette au PIB et les cycles d'activité, et pas seulement les déficits annuels. Sur la totalité d'un cycle économique, il va y avoir des périodes où l'on a un excédent et d'autres où l'on a un déficit et le véritable étalon pourrait être—et peut-être devrait être à leurs yeux—le ratio de la dette au PIB.

Théoriquement, nous sommes probablement actuellement dans une situation—encore que personne ne connaisse exactement les chiffres de croissance de cette année—où nous pourrions afficher un déficit de quelques milliards sans que le rapport de la dette au PIB ne remonte. J'aimerais avoir votre avis à ce sujet. Commençons par notre économiste.

M. Don Avison: Je crois que c'est à M. Calvert que je dois ce qualificatif. Ce n'est pas ma spécialité. Mais je pense que vous avez assez bien décrit la situation telle qu'elle se présente à ce stade. Il nous reste une assez grande marge de manoeuvre grâce aux décisions prudentes prises lors des exercices budgétaires précédents. Il y a une réticence compréhensible à mettre en cause ces résultats.

Mais encore une fois, la situation a considérablement changé. Elle avait déjà commencé à changer avant les événements récents et s'est encore aggravée. Mais je souscris totalement à ce que disait Mme Bartram, à savoir qu'il importe d'énoncer clairement une vision pour l'avenir et de montrer que nous avons réellement un plan pour la concrétiser. Si cela doit faire passer le budget un peu dans le rouge, je pense qu'il vaut la peine de payer ce prix, pour que les Canadiens puissent avoir un plan d'avenir qui nous fasse avancer.

M. Roy Cullen: J'ai une courte question, monsieur Avison. Dans votre tableau intitulé «Crédit IRSC», la part des crédits du Conseil de recherches médicales/Institut de recherche en santé du Canada accordée à la Colombie-Britannique est tombée d'un peu moins de 12 p. 100 à juste au-dessus de 7 p. 100. Est-ce dû au fait que vous aviez une part disproportionnée auparavant ou bien que vous êtes maintenant sous-représentés. Quelle est la raison?

J'ai une autre petite question. Je ne comprends pas très bien votre diagramme intitulé «Production de diplômés», car pour les pharmaciens vous indiquez plus de 120 p. 100. Je ne comprends pas comment vous pouvez avoir plus à vous seul que tout le Canada. J'interprète manifestement mal ce diagramme sur la production de diplômés.

M. Don Avison: Notre production de diplômés en pharmacie est supérieure à la moyenne nationale; il équivaut à 120 p. 100 de la moyenne nationale. Nous avons des chiffres de production de pharmaciens plus élevés que les autres régions du pays.

Nous utilisons ces renseignements. Nous avons soumis ces chiffres au sous-ministre de la Santé pour demander s'il y avait là un problème qu'il nous fallait rectifier. Il nous a assuré: «Non, nous en avons besoin de plus, ne faites donc rien pour changer le niveau de production». Je pense—je suis peut-être un peu sarcastique—que la réalité est que le pays ne produit pas assez de pharmaciens, en général. Il n'y a donc pas de problème au niveau de l'offre et de la demande de pharmaciens.

M. Roy Cullen: Ce n'est donc pas le nombre de diplômes de pharmaciens au Canada; c'est une comparaison avec la norme.

M. Don Avison: C'est par rapport à la moyenne nationale. Cela vous aidera à comprendre pourquoi ces autres chiffres sont aussi troublants, en génie et en gestion des affaires et commerce et ailleurs.

M. Calvert a expliqué les pressions naturelles qui résultent des modalités de financement. De fortes pressions s'exercent, pas seulement en Colombie-Britannique mais aussi ailleurs dans le pays, pour augmenter le nombre d'étudiants dans les diplômes de faible coût. C'est pourquoi on constate des dérapages considérables dans plusieurs de ces disciplines. Donc, nos chiffres sont à comparer, dans plusieurs cas, à une moyenne nationale qui peut s'avérer inadéquate si l'on y regarde de près.

La médecine est un excellent exemple, où nous sommes à 50 p. 100 de la moyenne nationale, mais cette dernière étant déjà très inférieure à ce qu'il faudrait vu l'évolution démographique du pays.

Votre autre question portait sur les fonds de recherche et la part de la Colombie-Britannique. Cette dernière a considérablement reculé au cours des années récentes. À un moment donné, nous recevions de l'ordre de 12,4 p. 100. Nous sommes maintenant tombés à 7,5 p. 100 à 8 p. 100. La Colombie-Britannique compte 13,5 p. 100 de la population nationale, mais nos crédits tournent autour de 8 p. 100. L'Alberta a 9 p. 100 de la population nationale et reçoit plus de 13 p. 100 du financement à ce stade.

• 1025

M. Roy Cullen: Comment cela se fait-il?

M. Don Avison: C'est dû en partie à la taille de l'infrastructure de recherche disponible en Colombie-Britannique. Les universités de Colombie-Britannique réussissent bien à attirer les crédits de recherche, mais le nombre de chercheurs per capita est considérablement moindre que dans les autres provinces.

Avons-nous eu la prévoyance, chez nous, d'un Peter Lougheed, qui comprenait réellement l'importance de la R-D pour l'avenir du pays et a investi dans l'Alberta Heritage Foundation? Nous n'avons malheureusement pas eu cela ici, en Colombie-Britannique.

Nous avons vu combien le Québec et l'Ontario se sont démenés pour récupérer chez eux autant de crédits fédéraux que possible. Incombe-t-il à la province d'organiser ses affaires de façon à profiter pleinement de ce qui est disponible à l'échelle nationale? Oui, absolument. Y a-t-il un intérêt national? Je dirais que oui, étant donné les mutations intervenant dans l'économie.

Si les provinces et le gouvernement fédéral ne collaborent pas étroitement pour assurer que les avantages de la R-D soient répartis dans tout le pays et éviter les clivages entre riches et pauvres, nous sommes peu susceptibles de parvenir à nos objectifs. La Colombie-Britannique deviendra économiquement sous-performante et l'intérêt national en souffrira.

Oui, absolument, il incombe en partie à la province d'augmenter son infrastructure de recherche de façon à tirer pleinement parti des fonds offerts par le gouvernement fédéral.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Cullen.

Je tiens à vous remercier tous, au nom du comité. Vous avez été un excellent panel. Nous savons exactement quels sont vos besoins.

Je veux vous transmettre un message très clair. Le fait est que le Comité des finances a toujours opté pour une vision à long terme des choses. C'est pourquoi nous nous penchons sur des aspects tels que la productivité, l'innovation et d'autres: pour proposer une action favorisant la croissance, une action indispensable si nous voulons disposer des moyens de financer nos programmes sociaux et la qualité de vie dont les Canadiens jouissent depuis de nombreuses années.

Le message que vous avez transmis, en nous demandant de présenter un rapport esquissant une vision à long terme, est tout à fait pertinent. Mais nous ne pouvons pas perdre de vue non plus les préoccupations immédiates, particulièrement les mesures à prendre pour la sécurité nationale. Nous sommes satisfaits de ce que le gouvernement a fait à cet égard jusqu'à présent, mais nous aurons nos propres recommandations sur ce qu'il convient de faire à plus longue échéance.

Merci beaucoup.

Nous allons faire une pause de dix minutes.

• 1028




• 1044

Le vice-président (M. Ken Epp): J'aimerais commercer cette séance d'audition de témoins dans le cadre de nos consultations pré-budgétaires. Je suis Ken Epp, et je remplace aujourd'hui Maurizio Bevilacqua, qui m'a demandé de présider cette partie de la réunion.

Nous avons quatre témoins dans ce groupe et je veux souhaiter la bienvenue à tous: Maureen Shaw, présidente du College Institute Educators' Association of B.C. et sa collègue Roseanne Moran, Harold Calla et Jason Calla de la First Nations Summit Society et Linda Mix de la Tenants Rights Action Coalition.

Mme Linda Mix (assistante juridique communautaire, Tenants Rights Action Coalition): Je suis accompagnée de Vanessa Geary.

Le vice-président (M. Ken Epp): D'accord, accompagnée de Vanessa Geary. Bienvenue.

Enfin, nous avons M. Manny Jules, de la Commission consultative de la fiscalité indienne.

• 1045

Comme vous le savez, vous disposez de cinq à sept minutes pour faire un exposé. Nous écouterons tous les exposés à la suite, après quoi nous aurons des questions à vous poser en espérant que vous aurez des réponses à toutes.

Commençons par la College Institute Educators' Association of B.C., Mme Shaw.

Mme Maureen Shaw (présidente, College Institute Educators' Association of B.C.): Merci. Je suis ravie de cette occasion de vous rencontrer ce matin.

La College Institute Educators' Association of B.C. représente plus de 7 000 enseignants de la province travaillant tant dans des collèges que des collèges universitaires, instituts et organismes de formation de toute la province. Nos établissements comptent l'équivalent de plus de 83 000 étudiants à temps plein, inscrit dans un vaste éventail de programmes, depuis la formation professionnelle jusqu'à des études académiques, l'enseignement technique, l'anglais langue seconde, l'alphabétisme, etc. Vous trouverez dans notre mémoire une description complète de notre système.

J'aimerais mettre en lumière certains des éléments saillants de notre mémoire: premièrement, l'importance d'un financement de base de nos établissements; deuxièmement, l'appui à la recherche dans notre secteur; troisièmement, l'importance de l'enseignement de la langue anglaise et le besoin d'un financement adéquat de celui-ci; quatrièmement, la formation professionnelle et son mode de financement, ainsi que certains des problèmes des comptes d'apprentissage individuels.

Nous savons tous combien il est important d'investir dans les hommes et femmes et dans l'éducation postsecondaire. Les Canadiens manifestent de plus en plus leur volonté en ce sens.

Nous savons que les événements tragiques du 11 septembre ont engendré davantage d'incertitude pour nous tous. Nous en constatons certains des effets négatifs, tant l'impact spirituel de cette journée que les conséquences économiques. Nous avons besoin d'un gouvernement qui va soutenir les gens et soutenir leur avenir et leurs espoirs pour l'avenir.

J'aimerais souligner certains des problèmes engendrés pour l'éducation postsecondaire par les réductions des transferts monétaires fédéraux.

Partout dans le pays on a vu grimper les droits de scolarité en flèche avec, pour conséquence, des niveaux d'endettement toujours accrus chez les étudiants. Pour ceux qui travaillent dans nos établissements, il en a résulté un environnement pédagogique et des conditions de travail plus stressants et, parfois, l'incapacité d'offrir à nos étudiants le soutien dont ils ont besoin.

Les locaux sont délabrés. Un rapport récent en Colombie-Britannique a calculé qu'il faudrait dépenser 400 millions de dollars pour l'entretien, ces dépenses ayant été reportées par les établissements cherchant par tous les moyens à dégager des ressources afin de les consacrer directement à l'enseignement.

Au cours des dix dernières années, le gouvernement provincial de la Colombie-Britannique a sensiblement accru les crédits pour l'éducation postsecondaire, face à la baisse des transferts fédéraux et une croissance démographique considérable. La population de la province est passée de 3,3 millions d'habitants en 1991 à un peu plus de quatre millions en 2000, soit une majoration de 21 p. 100. C'est le double de la moyenne nationale de 10,6 p. 100.

L'Association canadienne des professeures et professeurs d'université, dont nous sommes membres, estime que les dépenses provinciales devraient augmenter de 2 milliards de dollars pour retrouver le niveau réel per capita de 1992-1993. Cela signifie qu'en Colombie-Britannique il faudrait environ 126 millions de dollars de plus qu'aujourd'hui.

Nous avons conscience également du fait que les transferts fédéraux-provinciaux causent un problème considérable de reddition de comptes et que les provinces ne sont pas actuellement tenues de consacrer les transferts fédéraux à l'éducation postsecondaire.

C'est pourquoi nous avons recommandé, en accord avec l'ACPPU, que le gouvernement fédéral abolisse le TCSPS et se concerte avec les provinces en vue d'introduire une loi et un fonds sur l'éducation postsecondaire. Nous recommandons que ce fonds soit fixé à 0,5 p. 100 du produit intérieur brut, ce qui, selon les calculs de l'ACPPU, représenterait un investissement supplémentaire de 1,6 milliard de dollars par rapport au montant actuellement consacré à l'éducation postsecondaire.

Nous savons que le gouvernement fédéral a accru les crédits à la recherche, mais il existe des problèmes dans ce domaine et je veux faire ressortir la nécessité d'un meilleur soutien à la recherche et à l'innovation dans le secteur que je représente.

• 1050

Nous menons quantité de recherches importantes et novatrices, mais la plus grande part est faiblement assistée. Notre analyse de la Fondation canadienne pour l'innovation montre que, jusqu'en juillet 2001, sur les 113 millions de dollars touchés par les institutions de Colombie-Britannique, seuls 2 millions de dollars sont allés au secteur collégial de la province. Alors que les conseils subventionnaires commencent à nous soutenir davantage, la vaste majorité des crédits de recherche sont allés au Programme des chaires de recherche du Canada et à ceux de la FCI.

Nous formulons donc deux recommandations. La première est d'accroître le financement des conseils de subventions à la recherche. Nous songeons en particulier au budget du Conseil de recherche en sciences humaines, ce domaine ayant été négligé par les nouveaux programmes de financement de la recherche. Deuxièmement, nous recommandons que le gouvernement fédéral prenne des mesures immédiates pour améliorer l'accès des établissements collégiaux aux programmes de subvention existants.

Nous savons que le Conseil des ministres de l'Éducation manifeste un intérêt, ayant lancé une étude pour évaluer la recherche qui se fait dans le secteur collégial canadien. Nous saluons cette initiative et nous espérons que vous serez favorable à une action rapide à cet égard.

Le troisième domaine préoccupant est l'enseignement de la langue anglaise. Comme vous le savez, la Colombie-Britannique a absorbé un nombre énorme d'immigrants au cours de la dernière décennie et nous avons dans la province de forts besoins au niveau de l'enseignement de l'anglais. Nous savons que des coupures ont été apportées à ces programmes et nous craignons que le programme ELSA, qui offre des services de langue anglaise aux adultes, ne pourra assurer le même niveau de formation et de perfectionnement en langue anglaise que par le passé. Les listes d'attente continuent de s'allonger et nous craignons que nos établissements soient obligés de refuser un grand nombre d'étudiants ayant besoin de ces programmes. Nous vous demandons de revoir les niveaux de crédits et le niveau de soutien à l'enseignement de la langue anglaise du gouvernement fédéral.

Enfin, pour ce qui est de la formation professionnelle, nous sommes préoccupés par les comptes d'apprentissage individuels et proposons un mécanisme de remplacement: un congé de formation couvert par l'assurance-emploi. Nous savons que les employeurs canadiens sont peu empressés de former leurs employés. Le Conference Board of Canada l'a confirmé.

Il y a également des lacunes dans le domaine de l'alphabétisation. Il y a un manque de crédits pour les Canadiens qui ont besoin de ce rattrapage.

Les signes ne manquent pas d'une pénurie prochaine de main-d'oeuvre qualifiée et le compte d'apprentissage individuel n'est pas le moyen qui permettra de former cette main-d'oeuvre dans les domaines où on en a besoin. Les employés ne recevront pas nécessairement cette formation chez leurs employeurs.

Nous pensons que votre comité a la possibilité d'explorer une nouvelle approche du soutien à la formation professionnelle et nous vous invitons à recommander au gouvernement fédéral d'envisager cette option.

Merci de votre attention.

Le vice-président (M. Ken Epp): Merci beaucoup.

Nous allons passer à notre prochain témoin, M. Harold Calla.

M. Harold Calla (First Nations Summit Society): J'aimerais tout d'abord vous remercier de votre invitation à comparaître aujourd'hui.

Je suis membre du First Nations Summit. Je suis de Squamish, ici à Vancouver. Je suis directeur des finances depuis 15 ans et je travaillais auparavant dans le secteur privé. Je m'adresse donc à vous aujourd'hui en tant que quelqu'un ayant eu un pied dans les deux mondes.

Nous voulons vous parler aujourd'hui du processus des traités et vous transmettre quatre ou cinq messages.

Le premier message est qu'un traité devrait être considéré comme une occasion d'adapter la gouvernance et de promouvoir une plus grande certitude économique.

Les Premières nations n'ont pas d'économie. Elles ne commercent guère et ne participent pas à l'économie. L'une des choses qui m'a frappé et que j'ai découvertes à mon retour chez moi était de voir combien les Premières nations participent peu à l'économie et quelles difficultés elles rencontrent. Ce manque de participation conduit à la frustration et au désespoir. Le développement économique et social des Premières nations entamerait le désespoir qui nourrit le malaise. L'aboutissement des négociations sur les traités est une étape importante pour la promotion du développement économique et social.

• 1055

Nous avons lu avec intérêt un article récent dans le Globe and Mail du ministre du Commerce international du Canada, faisant ressortir les aspects suivants:

—L'accroissement des échanges est important si l'on veut réduire la pauvreté et accroître la sécurité.

—La pauvreté n'est pas inévitable.

—Au cours des dernières décennies, l'espérance de vie est passée de 45 à 64 ans.

—Les taux d'alphabétisme ont presque doublé.

—Le pourcentage de la population mondiale ayant accès à de l'eau potable est passé de 45 p. 100 à 70 p. 100.

—Les avantages des échanges pour les pays en développement sont clairs. Ceux ayant une économie ouverte ont affiché une croissance économique six fois supérieure à celle de leurs voisins au cours des années 70 et 80; ils rattrapent les pays riches, tandis que ceux ayant un marché fermé voient se creuser l'écart.

Nous pensions qu'il parlait des réserves des Premières nations au Canada.

Puisque le gouvernement fédéral vante ce concept pour le reste du monde, nous pensons qu'il importe de le promouvoir également chez nous, et nous croyons avoir l'occasion de faire cela ici en Colombie-Britannique avec le processus des traités.

Le deuxième message est que les traités peuvent potentiellement lever l'incertitude économique. L'incertitude quant aux droits de propriété pourrait être écartée grâce à une nouvelle relation financière. Les traités représentent une occasion unique d'améliorer la gouvernance. Les mécanismes financiers et administratifs applicables aux Premières nations contribuent à la confusion quant aux responsabilités pour les services et donc au manque de reddition de comptes; au manque d'incitation à développer un secteur privé et donc à dégager des revenus propres; au coût élevé actuel de l'activité économique, ce qui décourage l'investissement dans nos collectivités; enfin, aux mauvais résultats des programmes sociaux.

Les traités fournissent l'occasion de redistribuer les responsabilités afin de rectifier ces problèmes. Cette redistribution devrait viser, au niveau le plus élevé, à assurer une plus grande clarté dans le partage des compétences, attribuer la responsabilité des services au palier de gouvernement naturellement le plus apte à les assurer et redistribuer les capacités financières en conséquence.

Le message numéro trois est que les traités doivent être structurés de façon à améliorer le climat d'investissement chez les Premières nations et dans la province, de façon à en optimiser les avantages pour tous les paliers de gouvernement. Je crois me souvenir que ce processus de négociation des traités a été ouvert par le gouvernement créditiste à l'époque afin de remédier au manque d'investissements dans la province à cause de l'incertitude concernant la question territoriale.

Le secteur public a un rôle important dans une économie en bon état de marche. Il faut inscrire dans un traité ces éléments qui favorisent l'investissement et la participation des Premières nations à l'économie. Un exemple en est l'industrie du tourisme en Colombie-Britannique, où une plus grande participation des Premières nations s'impose dans ce secteur qui devient rapidement primordial dans l'économie de la province.

L'amélioration du climat d'investissement apportera des avantages à toutes les parties et améliorera la situation financière de tous les niveaux de gouvernement. Pour cela, il faut réduire les coûts de production. Si l'on veut accroître l'investissement et la participation des Premières nations à l'économie, il faut réduire les coûts de production.

Des études menées par le ministère des Affaires indiennes montrent qu'il faut six fois plus longtemps pour mener à bien un projet d'investissement sur le territoire des Premières nations que dans les juridictions voisines. Ces délais alourdissent les coûts. Il en coûte plus cher en honoraires professionnels et il en résulte des pertes de recettes fiscales pour tous les paliers de gouvernement et un manque à gagner pour les investisseurs.

Le développement économique améliore la vie des populations. On ne peut ignorer les conditions sociales régnant chez nous et le besoin de programmes et de services pour y remédier. Mais si l'on continue à focaliser de manière exclusive ou disproportionnée sur ces programmes, on ne pourra jamais s'en passer. Il faut plutôt se concentrer sur le développement économique afin d'améliorer la vie des Autochtones et leur permettre de rattraper la qualité de vie qui prévaut dans le reste de la province.

Le quatrième message est que le rythme de négociation des traités dans la province est trop lent. L'approche au cas par cas met sous tension les capacités et engendre des redondances pour toutes les parties. Il devient plus difficile d'assurer la cohérence, alors qu'il faudrait plutôt promouvoir des normes nationales et l'égalité des Premières nations et des autres Canadiens. Cette approche alourdit également les frais administratifs. Une démarche nouvelle commence à se faire jour dans la province et nous avons besoin d'un soutien continu en ce sens.

Une stratégie donnant de bons résultats a été la création de tables de hauts fonctionnaires. La table financière en est un exemple et je suis ici aujourd'hui comme représentant du sommet au groupe de travail tripartite financier. Cette approche globale est appliquée dans plusieurs domaines, pas seulement celui-ci, et elle est très bien accueillie car elle évite le coût de négociations redondantes. Elle n'est pas destinée à remplacer les négociations en cours aux tables individuelles ni à saper l'autonomie des Premières nations individuelles, et d'ailleurs nous ne négocions pas vraiment. Il s'agit plutôt d'élaborer des options à proposer aux tables individuelles et cela permet une discussion libre «sans préjudice».

• 1100

L'avantage est que l'on peut venir à la table et parler ouvertement et librement afin de chercher des solutions, et ne pas seulement être limité à identifier les problèmes ou les limites de mandat. Il s'agit donc de faire en sorte que ces processus se poursuivent. Ils sont un forum libre d'engagements, qui permettent une dissémination de l'information et une libre exploration des intérêts respectifs des parties.

Ce mécanisme surmonte la difficulté qui survient lorsque les négociateurs du gouvernement ont un mandat très étroit aux tables de négociation individuelles et contribue indirectement à l'objectif d'une harmonisation des règlements et arrangements administratifs, ainsi que de l'égalité de traitement des Premières nations.

Une autre difficulté que nous rencontrons, et qu'il va falloir surmonter, est celle des prêts. Le mandat limité des négociateurs fédéraux et provinciaux à l'heure actuelle conduit à signer des «accords de principe minces», où un certain nombre d'éléments—en particulier les mesures financières et fiscales—sont reportés jusqu'au traité final. Cela cause des tensions considérables à la table de négociation et contribue à un dilemme. Le compteur des intérêts commence à tourner dès que l'entente de principe est signée, alors que les négociations sur les questions financières et fiscales n'ont pas encore abouti.

Le dernier message que j'aimerais vous communiquer est que le processus des traités devrait être considéré comme l'occasion de créer un modèle pour d'autres régions du Canada et peut-être le monde. Ce processus devrait démontrer comment les parties peuvent collaborer en dépit des différences de culture. En travaillant ensemble, nous pourrons démontrer comment régler les différents et créer une économie forte à laquelle tous peuvent participer et parvenir ainsi à un niveau de vie élevé.

Ce modèle canadien pourrait être repris dans d'autres parties du monde. Nous avons là une possibilité de montrer la voie. Il convient d'affirmer et de réaffirmer notre engagement envers ce processus et les changements qu'il faudra apporter pour qu'il aboutisse, notamment en engageant les sommes voulues.

Nous avons conscience que les événements de septembre ont enclenché une dynamique et que le gouvernement va devoir prendre quelques décisions difficiles en matière de répartition de ses ressources. Mais le gouvernement devra continuer également à investir afin que notre économie redémarre. Les collectivités des Premières nations vivent actuellement dans un vide. Nous avons une grande contribution à offrir à ce pays.

J'aimerais vous faire part d'un dernier message. Nous ne sommes pas un élément du problème mais nous pouvons être un gros élément de la solution.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Nous passons maintenant à Mme Mix.

Mme Linda Mix: Je vous remercie de cette invitation à vous parler au nom de la B.C. Tenants Rights Action Coalition et du million de locataires de la province. Je suis accompagnée de ma collègue Vanessa Geary.

La Tenants Rights Action Coalition, ou TRAC, est une coalition de groupes communautaires de toute la province ayant pour mission de promouvoir et protéger les intérêts des locataires en Colombie-Britannique. Nous oeuvrons en vue de protéger le parc locatif actuel et promouvoir la construction de nouveaux logements de prix abordable à l'intention des ménages à revenu faible et modéré.

TRAC est également membre du National Housing and Homelessness Network. Il s'agit là d'un réseau national d'organismes de service en première ligne, de militants pour le logement et autres alliés.

Nous demandons au comité de recommander au ministre des Finances que le gouvernement du Canada s'engage à réaliser le programme de logements locatifs à prix modéré et restaure les crédits au logement afin de donner à tous les Canadiens une chance égale de réussir et de jouir de la meilleure qualité de vie et du meilleur niveau de vie possible.

Le programme des loyers abordables prévoit l'injection de 680 millions de dollars sur quatre ans, sur la base d'un partenariat de partage des coûts avec les provinces. Ce serait une mise de fonds pour la construction de logements de prix abordable pour des milliers de ménages canadiens qui en ont désespérément besoin. La construction d'une seule unité à loyer abordable évite d'avoir à fournir d'autres services sociaux et fournit l'équivalent de deux années et demie d'emploi à une personne.

En août de cette année, les ministres responsables du logement fédéral, provinciaux et territoriaux se sont réunis à London, en Ontario, pour discuter de leur rôle respectif s'agissant d'assurer un logement adéquat à tous les citoyens. Ils ont convenu de présenter à la table les stratégies provinciales respectives aux fins de la construction de ces logements. Ils se réuniront de nouveau en novembre. Ils ont besoin de l'assurance du gouvernement fédéral que le programme des loyers abordables verra le jour.

Le centre d'intérêt des Canadiens s'est déplacé au cours des six dernières semaines. Les tragédies quotidiennes que vivent les sans-abri apparaissent mineures comparées à ce qui est arrivé à nos voisins. Et le Canada est maintenant entré en guerre. Les sans-abri ne sont peut-être plus une priorité pour les médias et le grand public au Canada, mais le problème continue néanmoins à mettre en danger les familles canadiennes. Il est impératif de ne pas réaffecter à l'effort de guerre international les ressources prévues pour le logement.

• 1105

Selon la Société canadienne d'hypothèques et de logement, plus de 1,7 million de ménages—soit environ 4,6 millions de personnes—ont un «besoin impérieux» de logement à prix modéré. Il y a «besoin impérieux» lorsqu'une famille ou une personne paie pour le loyer plus de 30 p. 100 de son revenu. Ces chiffres englobent 2,25 millions de personnes, soit 833 000 ménages, vivant dans des logements locatifs surpeuplés, de prix excessif et vétustes. La vie dans des conditions assimilables à celle du tiers monde entame la capacité de ces hommes, femmes et enfants à réussir dans la vie.

Nous savons que la santé et le bien-être d'une personne sont directement liés à la qualité du logement. D'innombrables études effectuées au Canada et aux États-Unis le confirment. La capacité d'une personne à chercher du travail et à étudier, et à contribuer à la société, est directement liée aux conditions de logement. L'existence ou l'absence d'un toit sur la tête détermine directement la possibilité de réussite.

Le coût croissant des loyers, combiné à une baisse des revenus de milliers de locataires, accroît le risque de finir à la rue. Le marché offre moins de choix de logements aux personnes à faible revenu. Lorsque le gouvernement fédéral s'est retiré du logement social en 1993, on nous disait que le marché privé se substituerait à lui. Cela n'a pas été le cas. Pendant plus de dix ans, on n'a pratiquement pas construit de nouveaux logements locatifs, les rares exceptions, particulièrement dans la région de Vancouver, étant des logements de luxe hors de la portée de la majorité des locataires.

Les taux d'inoccupation sont au plus bas. Dans certains quartiers de Vancouver, il est inférieur à 1 p. 100. La SCHL considère que le marché est en équilibre à environ 2,5 p. 100. Les locataires s'arrachent le moindre appartement. Les locataires à faible revenu sont laissés pour compte.

La solution—l'issue du dilemme auquel nous sommes confrontés et notre recommandation à ce comité—c'est que le gouvernement fédéral instaure un nouveau programme national de logement en rétablissant un financement à hauteur de 2 milliards de dollars par an en vue de financer de nouveaux logements sociaux. Le programme de logements abordables proposé, avec 680 millions de dollars répartis sur quatre ans, financera de 3 000 à 4 000 unités par an pour tout le pays.

La Fédération canadienne des municipalités estime qu'il faudrait plutôt 30 000 unités par an au cours des dix prochaines années, rien que pour rattraper le retard.

Les dépenses fédérales dans le domaine du logement devraient cibler les ménages qui en ont le plus besoin par le biais de programmes de logements coopératifs et sans but lucratif.

Les Canadiens ont conscience qu'un logement à prix abordable est nécessaire à la réussite des individus. Un sondage Ipsos-Reid commandé par TRAC l'an dernier a établi que 83 p. 100 des répondants étaient favorables à une aide publique pour la construction de logements à loyer modéré sans but lucratif.

En conclusion, les Canadiens réussissent dans la vie et contribuent à la société lorsqu'ils sont correctement logés. Nous exhortons le comité à formuler une recommandation au ministre des Finances soulignant l'importance d'un programme national de logement.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Nous entendons enfin M. Jules, de la Commission consultative de la fiscalité indienne.

M. C.T. (Manny) Jules (président, Commission consultative de la fiscalité indienne): Merci. Je tiens à vous remercier tous de votre invitation.

J'imagine que vous avez été tous inondés ces derniers jours par toutes sortes de demandes et de revendications. Vous allez devoir réfléchir très sérieusement à toutes ces requêtes et à ce que vont être les priorités du gouvernement suite aux événements horrifiants du 11 septembre.

Je veux répéter moi aussi ce que tous les autres panélistes ont déjà dit: l'État a un rôle important à jouer. Qu'il s'agisse d'éducation ou de logement, les pouvoirs publics doivent pouvoir s'attaquer à ces problèmes, particulièrement ceux des plus pauvres d'entre les pauvres. Lorsqu'on évoque des situations dignes du tiers monde, il ne fait aucun doute que cela s'applique aux conditions de vie de certaines Premières nations.

Étant donné que les priorités du gouvernement dans l'avenir prévisible se situeront dans le domaine de la sécurité, particulièrement de la sécurité nationale, je suis convaincu que les Premières nations auront un rôle essentiel à jouer à cet égard. En outre, les Premières nations sont en mesure d'offrir un soutien, comme elles l'ont fait au cours des deux guerres mondiales qui ont précédé celle-ci... Il n'y a pas de guerre mondiale déclarée, mais les Premières nations ont conscience des dangers pour leur sécurité et de leur rôle à cet égard.

• 1110

Je me suis débattu ces dernières semaines avec la question de savoir comment les Premières nations s'inscrivent dans cette réalité nouvelle. Allons-nous être oubliés? Va-t-on étudier nos revendications pour les écarter? Malheureusement, notre histoire démontre amplement que c'est ce qui tend à arriver.

J'espère qu'à l'issue de vos délibérations vous recommanderez au gouvernement de continuer à faire des problèmes des Premières nations l'une de ses priorités.

À cet égard, je milite depuis quelques années pour la création de quatre institutions financières qui permettraient de s'attaquer très concrètement à la pauvreté des Autochtones.

Premièrement, sur le plan de la reddition de comptes, nous avons mis sur pied, en consultation avec les chefs et l'Assemblée des premières nations, un conseil de gestion des Premières nations chargé de mettre en place une institution qui pourra contribuer à assurer—non pas en jouant du bâton, mais par une série de carottes, si vous voulez—que les gouvernements des Premières nations soient aussi responsables que n'importe quel autre palier de gouvernement de ce pays.

Deuxièmement, il s'agirait de créer un organisme de statistiques—les niveaux provincial, territorial et fédéral ont leurs propres organismes de statistiques—pour suivre l'évolution des choses et faire des projections pour l'avenir. Vous savez tous ce qui va arriver si l'on ne s'attaque pas sérieusement au problème des Premières nations. À cet égard, un organisme de statistiques pour les Premières nations est absolument indispensable si l'on veut améliorer la gouvernance à l'avenir.

Troisièmement, il importe de mettre en place une commission fiscale de façon à formaliser ce que tous les autres tiennent pour acquis dans ce pays, soit des mécanismes ou institutions chargés des questions fiscales. La première étape pour nous constitue à lever des taxes immobilières, mais nous devrons ultérieurement étendre le champ à toutes les autres formes d'impôt.

La dernière institution est la mise en place d'une administration financière afin que nous puissions, comme tous les autres niveaux de gouvernement, accéder aux emprunts publics à long terme.

La commission consultative fiscale... Juste après l'échec de l'Accord de Charlottetown, nous avons coparrainé une étude nationale examinant les dépenses publiques consacrées aux Canadiens et constaté, à notre surprise, que le montant des dépenses pour les Premières nations est le même que pour tous les autres Canadiens. Or, il se trouve que nos collectivités sont totalement dénuées d'infrastructure, ce qui est une autre raison pour nous d'avoir notre propre administration financière.

Je vois dans ces éléments les pierres angulaires d'un édifice qui nous aideront non seulement à instaurer une nouvelle relation financière avec le Canada, mais aussi à définir notre relation avec les municipalités, districts régionaux, comtés et gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi qu'avec les citoyens qui habitent nos réserves et avec lesquels nous faisons affaires.

Lorsque nous parlons de l'avenir, étant donné les événements tragiques du 11 septembre, étant donné que nous devons tous maintenant réfléchir à ce qui est arrivé et pourrait arriver, nous voulons contribuer à construire un avenir prospère pour ce pays, un avenir qui soit propice à la paix internationale et qui démontre en même temps aux yeux du monde que le Canada a, certes, eu des problèmes dans le passé dans ses rapports avec les populations indigènes mais a réussi à les surmonter. Il pourra ainsi devenir un modèle pour tous les autres pays.

Je vous remercie.

Le vice-président (M. Ken Epp): Merci beaucoup. Nous apprécions vos présentations.

Nous allons maintenant passer aux questions. Habituellement, la première me revient—et j'en ai des quantités—mais je dois maintenant résister à la tentation. Nous allons donc procéder par tours d'une dizaine de minutes, en alternant d'un côté de la table à l'autre. Sue aura le deuxième tour, après M. Nystrom.

• 1115

M. Lorne Nystrom: J'ai tellement l'habitude que vous soyez le premier à poser des questions, monsieur le président.

Le vice-président (M. Ken Epp): D'habitude c'est moi, maintenant c'est vous.

M. Lorne Nystrom: Ma première question s'adresse à Manny Jules.

Vous avez fait état de la guerre, de la Première et de la Seconde Guerre mondiale. J'ai beaucoup travaillé ces trois dernières années avec la First Nations Veterans Association et le Grand chef Howard Anderson, de la Saskatchewan, qui coordonne cela. Ils espèrent trouver quelque chose pour eux dans le budget.

Êtes-vous informé de cette question? Pourriez-vous indiquer au comité ce que vous souhaitez à cet égard? Les dépenses en jeu ne sont pas énormes, mais c'est néanmoins un problème très important pour beaucoup de gens. Les anciens combattants autochtones ont été victimes de discrimination à leur retour de la guerre, car ils relevaient de la Loi sur les Indiens et non de la Loi sur les anciens combattants. Ainsi, à leur retour, les autres anciens combattants ont pu étudier et ont reçu des terres, etc.—qu'ils soient blancs ou de couleur, peu importe—mais les Autochtones relevaient de la Loi sur les Indiens et n'ont pas obtenu ces avantages.

Quoi qu'il en soit, c'est à vous de faire le discours, pas à moi.

M. Manny Jules: Non seulement cela, Lorne, mais il y a même eu le cas de Kettle Point, où l'on a pris des terres aux Indiens pour les donner aux anciens combattants... La même chose est arrivée à Kamloops.

C'est à cela que je faisais allusion dans mon exposé, à savoir qu'il n'y a aucun doute dans mon esprit sur le camp dans lequel se trouvent les Autochtones du pays. Ils se tiennent aux côtés du pays dans cette tragédie. Ils se sont tenus aux côtés du Canada par le passé. L'un de mes membres avait combattu pour le Canada dans la guerre des Boers avant la Première Guerre mondiale. Il est donc très important que votre comité sache bien que les Canadiens autochtones ont combattu et sont morts pour ce pays.

Mais cette reconnaissance a été lente à venir. À mes yeux, cela fait partie de la problématique financière d'ensemble, car nous avons été, à toutes fins pratiques, tenus à l'écart de l'économie, comme le montrent les exemples que vous avez cités, Lorne, avec la Loi sur les anciens combattants, etc.

Il s'agit donc d'amorcer toute une série d'initiatives pour démanteler ces barrières, pas seulement s'agissant des anciens combattants, mais surtout de nos jeunes. Nous avons la population la plus jeune du pays et nos jeunes aujourd'hui n'ont guère de perspectives.

M. Lorne Nystrom: Je m'adresse maintenant à l'association du logement locatif. Vous avez mentionné votre préoccupation au sujet du nouveau programme annoncé, le programme des logements à loyer modéré, à hauteur de 680 millions de dollars. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur les retombées pour l'économie?

À Toronto, l'autre jour, l'Association canadienne des constructeurs d'habitations a indiqué que la construction d'une maison donne du travail équivalent à 2,8 années-personnes. Vous citez le chiffre de 2,5, mais cela dépend évidemment de la taille de la maison. Mais qu'en est-il des autres retombées économiques lorsqu'on emploie des Canadiens, qui dépensent leur salaire en achetant à des compagnies canadiennes? Sans parler bien sûr de la valeur sociale d'une maison.

À une époque où le budget est sous pression à cause du ralentissement de l'économie et du 11 septembre, je pense que c'est un bon argument de dire qu'une façon de stimuler l'économie est d'injecter beaucoup d'argent dans la construction. C'est une façon très rapide de stimuler l'économie en créant très rapidement des emplois. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur les avantages économiques d'un tel programme, indépendamment des avantages sociaux?

Mme Linda Mix: La création de n'importe quel type de logement, qu'il s'agisse d'une maison individuelle ou d'un logement en copropriété, contribue à l'économie, mais les logements sociaux contribuent également au secteur des services, aux emplois. Cela élargit l'assiette fiscale car cela donne du travail à davantage de personnes, entrepreneurs en construction, architectes, promoteurs. Tous ces fournisseurs de service payent des impôts sur le revenu, ce qui augmente les recettes fiscales et contribue à l'économie. Plus on construit, plus on récupère d'impôts.

M. Lorne Nystrom: Voudriez-vous ajouter quelque chose à cela, madame Geary?

Mme Vanessa Geary (Tenants Rights Action Coalition): Comme vous l'avez dit, il n'y a pas que les emplois directs qui produisent des recettes fiscales, il y a aussi la consommation de matériaux canadiens. La construction d'un logement ne crée pas seulement 2,5 emplois, mais engendre aussi des retombées dans d'autres secteurs économiques, ceux qui fournissent les matériaux.

M. Lorne Nystrom: C'est également un moteur à démarrage rapide. On peut mettre en chantier des logements très rapidement.

• 1120

Mme Vanessa Geary: Oui, et il ne faut pas oublier non plus les coûts sociaux. Toutes les études montrent que si l'on dépense pour construire des logements sociaux, on va économiser dans le domaine de la santé. Par exemple, un lit d'hôpital coûte 600 $ par jour, et toutes les études montrent que les personnes mal logées sont en moins bonne santé et coûtent beaucoup plus cher au système de santé. Il y a aussi les coûts d'incarcération.

M. Lorne Nystrom: Avez-vous des chiffres établissant cette corrélation? Vous dites que les coûts de santé sont beaucoup plus lourds et qu'un logement convenable contribue énormément à la santé. Avez-vous des chiffres qui pourraient nous aider à convaincre le ministre?

Mme Vanessa Geary: De nombreuses études ont été faites. Anne Golden, de Toronto, a publié en 1998 un rapport très volumineux sur le logement et les sans-abri et la Colombie-Britannique vient d'achever une étude à quatre volets sur les causes et les effets du problème des sans-abri, et les coûts qui en résultent pour le système de santé et les services sociaux. Il y a toutes sortes d'études. Je vous renvoie en particulier au rapport Golden et au rapport de la Colombie-Britannique. Il y a également des rapports de la Fédération canadienne des municipalités, par exemple, le rapport sur les options concernant la politique nationale de logement, qui donnent des chiffres de coûts détaillés.

M. Lorne Nystrom: Je pense que ce serait utile pour convaincre le ministre des Finances qu'il s'agit là d'un investissement stratégique pour stimuler l'activité économique et créer des emplois, sans parler de l'intérêt énorme pour ceux qui ont besoin des logements.

Ma prochaine question s'adresse au College Institute Educators' Association of B.C. Certains pays ont aboli les droits de scolarité comme moyen de faciliter les études postsecondaires et de mettre les universités et établissements postsecondaires à la portée de tous, quelle que soit leur situation économique. Qu'en pensez-vous? Donnez-nous des idées. Faudrait-il mener une politique audacieuse et visionnaire visant à abolir totalement les droits de scolarité d'ici cinq ou six ans? Il n'y a pas de droits de scolarité pour les études élémentaires et secondaires, etc.

Mme Maureen Shaw: Oui, cela fait longtemps que nous préconisons une diminution progressive des droits de scolarité, jusqu'à leur élimination. On constate partout en Colombie-Britannique que les droits d'inscription peuvent être une barrière et psychologique et financière réelle. Si l'on voulait que les droits remplacent les crédits provinciaux ou fédéraux, il faudrait les porter à des niveaux astronomiques. À l'heure actuelle, les droits d'inscription représentent de l'ordre de 17,5 p. 100 des revenus des établissements postsecondaires.

M. Lorne Nystrom: C'est là à peu près la moyenne nationale, n'est-ce pas?

Mme Maureen Shaw: C'est la moyenne en Colombie-Britannique.

Mais le secteur collégial dépend beaucoup plus des crédits provinciaux que les universités. Ces dernières ont accès à d'autres fonds, d'autres sources—subventions de recherche, dons, etc.—alors que les institutions que nous représentons ne jouissent pas de ces mêmes possibilités.

Donc, s'agissant des droits de scolarité, nous estimons qu'il importe que les jeunes aient accès à l'éducation postsecondaire. On constate de plus en plus que plus le revenu des ménages est faible et moins grande est la probabilité de faire des études postsecondaires. Les programmes en place n'aident pas les étudiants de famille pauvre à poursuivre des études postsecondaires.

M. Lorne Nystrom: J'ai une question pour M. Calla. Je suis de la Saskatchewan, ma circonscription est Regina—Qu'Appelle et j'ai 12 réserves autochtones dans ma circonscription, beaucoup d'Autochtones, et de Métis, aussi au centre-ville de Regina. Nous sommes également dans la région couverte par le Traité 4. Nous avons des traités. Notre situation est très différente de la vôtre.

Pourriez-vous nous donner un peu plus une idée de la situation des Autochtones à l'échelle nationale? Vous vous êtes concentré aujourd'hui, tout naturellement, sur la Colombie-Britannique, et c'est votre rôle. Mais pouvez-vous nous donner quelques conseils, dans l'optique de la situation nationale des Premières nations, sur le plan du développement économique, des traités et de leur évolution, et des droits territoriaux en vertu des traités. Je sais que tout cela n'est pas au même état d'avancement à travers le pays.

Je sais ce qu'il en est en Saskatchewan et je sais que la Colombie-Britannique est radicalement différente car vous n'avez pas les traités que nous avons signés en Saskatchewan il y a de nombreuses années—pas nous, nos ancêtres. Pouvez-vous nous donner une perspective un peu plus nationale?

M. Harold Calla: Ce n'est pas souvent que quelqu'un de Colombie-Britannique a l'occasion de parler de problèmes nationaux.

Tout d'abord, la Saskatchewan, par le biais de la FSIN et des gouvernements provincial et fédéral, s'est engagée dans un processus pour régler ces questions et nous en avons conscience. Les affaires financières dont j'ai parlées sont indépendantes des traités. La négociation de traités en Colombie-Britannique donne une occasion de les régler. Fondamentalement, la problème est la pauvreté. Il s'agit de déterminer les causes profondes de cette pauvreté et les moyens d'y remédier.

• 1125

À l'échelle nationale, le gouvernement a un intérêt à trouver des solutions. Quel est l'intérêt du gouvernement? C'est d'éviter les coûts. L'interaction entre le coût de la protection sociale et le développement économique représente une occasion en or qui ne demande qu'à être cueillie. Elle réinjectera des milliers de dollars dans l'économie canadienne et c'est pourquoi il faut un effort national à cet égard. Des perspectives s'ouvrent en ce moment en Colombie-Britannique. Il y en a en Saskatchewan, car les deux ordres de gouvernement en Saskatchewan s'assoient à la table avec le gouvernement fédéral pour discuter de ces problèmes. Nous avons le même objectif. Une bonne part du travail de l'ex-chef, aujourd'hui président, Manny Jules constitue justement à mettre en place des processus régionaux à travers le pays. C'est un problème national. Ce mémoire est peut-être présenté sous le nom du sommet, mais nombre des points que j'ai abordés ici ont une application nationale.

Le vice-président (M. Ken Epp): Merci beaucoup, monsieur Nystrom, ainsi qu'aux témoins qui ont répondu jusqu'à présent.

Monsieur Jules, aviez-vous quelque chose à ajouter? Nous passerons ensuite à Mme Barnes.

M. Manny Jules: J'aimerais donner une réponse complémentaire à la question.

Le cabinet est saisi d'une proposition visant à créer un organe indépendant d'adjudication des revendications, chargé de ce que l'on appelle les revendications particulières. Je crois savoir que 500 millions de dollars ont été promis à cet effet. Ce type d'institution, tout comme celle traitant des affaires financières, est absolument essentiel si l'on veut régler une fois pour toutes ces questions.

La création d'un organe d'adjudication des revendications indépendant est l'une des propositions auxquelles réfléchit le gouvernement. Diverses tables se constituent à travers le pays, notamment une dans les provinces Maritimes, où des traités d'amitié ont été signés. On se dirige là-bas maintenant vers une table de type Colombie-Britannique. Évidemment, tout cela est la conséquence des conflits du Miramichi et de Burnt Church. Le Comité des finances va devoir suivre ces choses de très près et j'espère que nous pourrons compter sur son soutien.

Le vice-président (M. Ken Epp): Excellent, merci beaucoup.

Madame Barnes.

Mme Sue Barnes: Merci, monsieur le président.

Je vous remercie de vos exposés et d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui.

Le Comité des finances fédéral a entendu depuis le début de la matinée un certain nombre de témoins. Nul ne nous a demandé de réductions d'impôt. Nul n'a dit qu'il fallait réduire le rôle de l'État. Au contraire, on nous dit exactement le contraire, qu'en période de crise—comme M. Jules l'a souligné—l'État a un rôle substantiel à jouer. Il est étonnant de voir à quel point les mantras ont changé. Tout le monde, en substance, nous demande des majorations de dépenses. Vous imaginez donc la difficulté d'élaborer ce budget, surtout lorsqu'on se trouve en territoire inconnu, avec très peu d'expérience contextuelle dont on puisse s'inspirer.

Cela dit, j'aimerais tout d'abord dire une chose à M. Calla. Ma dernière visite en Colombie-Britannique était à titre de présidente du Comité des affaires autochtones lors des audiences sur le traité Nisga'a. Je peux affirmer catégoriquement que pendant toutes ces audiences que les milieux d'affaires n'ont jamais rien dit d'autre sinon qu'il fallait régler la question des traités pour lever l'incertitude économique en Colombie-Britannique. Le coût ne se chiffrait pas en millions, mais en milliards de dollars. Je suis donc on ne peut plus d'accord avec vous. Il faut avancer autant que possible sur les traités. Je soutiens donc tout à fait ce processus, car il est essentiel pour le développement économique, non seulement des Premières nations, mais aussi de toute la population de Colombie-Britannique et canadienne.

J'aimerais ensuite poser quelques questions spécifiques, d'abord une aux collèges et universités. Vous avez parlé des crédits de recherche et de votre expérience. Pour placer les choses en contexte, si je regarde à London, ma ville, les collèges ont pu y obtenir quelques subventions de recherche, mais le plus souvent au titre d'un partenariat avec des chercheurs universitaires. J'aimerais savoir s'il en est de même en Colombie-Britannique, car les collèges en Ontario nous demandent de pouvoir faire de la recherche autonome. J'aimerais connaître votre réponse à cela.

• 1130

Mme Maureen Shaw: Dans notre système, nous représentons cinq collèges universitaires. Ils décernent des diplômes de niveau baccalauréat. Certains aimeraient offrir des programmes de deuxième cycle. Ils ne le peuvent pas, sauf en partenariat avec d'autres établissements postsecondaires.

Par ailleurs, nos collèges offrent les deux premières années d'université et ont donc une foison de programmes d'enseignement technique et professionnel. Donc, oui, nous aimerions pouvoir obtenir des crédits de recherche à titre indépendant.

Certains des collèges universitaires ont maintenant des chaires de recherche du Canada, mais je crois que cela se limite à une ou deux dans trois établissements. Il n'y a donc pas énormément de subventions canalisées vers notre système. Je sais que beaucoup de facultés font de la recherche en liaison avec la collectivité. Ce sont souvent des recherches de type communautaire, visant des domaines d'intérêt local ou l'économie de la région.

Étant donné la manière dont les crédits de recherche sont structurés, il est très difficile pour nous d'accéder aux fonds des conseils subventionnaires, de la FCI ou des chaires de recherche du Canada. Les grandes universités sont favorisées et les établissements que nous représentons ont un accès moins facile.

Mme Sue Barnes: Je signale en passant que M. Davenport, qui est le président de l'université Western Ontario a fait une présentation à certains des députés de notre région, portant sur la corrélation entre les droits de scolarité et le coût de l'éducation et l'utilisation per capita. Il a comparé nos chiffres avec d'autres pays, comme la France et l'Allemagne, où les droits d'inscription sont faibles ou inexistants. La conclusion à laquelle il est parvenu, du moins c'est ce qu'il nous a dit il y a un an, est qu'il ne faut pas s'engager dans cette voie car le taux de participation de la population n'augmente pas sensiblement. Il n'en résulte donc pas plus d'étudiants postsecondaires.

Au Canada nous avons actuellement un système payant. Monsieur Jules, vous avez parlé de l'accroissement du nombre—et il est énorme—dans la tranche démographique d'âge des études collégiales et postsecondaires, surtout d'ici 2015. C'est une majoration de 25 p. 100, soit exactement l'inverse de la démographique canadienne d'ensemble.

Je crains donc qu'il n'y ait pas assez d'argent aujourd'hui dans l'enveloppe pour les études postsecondaires des Autochtones admissibles. Je connais des situations—et je peux vous donner comme exemple la situation en Ontario, où l'on va avoir une double cohorte, avec la disparition de la 13e année. Il n'y a pas assez d'argent pour absorber au niveau postsecondaire tous vos enfants admissibles et désireux d'étudier.

J'ai l'impression qu'un nombre insuffisant de voix s'élèvent pour réclamer des fonds suffisants—pas seulement pour tous les Canadiens, mais surtout pour nos Premières nations, le plus grand groupe démographique. J'aimerais donc savoir ce que vous faites ou comment les nombreuses organisations avec lesquelles vous travaillez communiquent ce message.

Mme Maureen Shaw: J'ai l'impression que cette question est pour vous.

Mme Sue Barnes: En fait, elle s'adresse à vous deux, car vous aurez tous deux à vous débattre avec le problème. Je pense que l'on n'en parle pas assez.

M. Manny Jules: Allez-y donc.

Mme Maureen Shaw: D'accord.

Nous représentons également deux instituts autochtones de la province: le Nicola Valley Institute of Technology et le Institute of Indigenous Government. Par ailleurs, un certain nombre de nos collèges et collèges universitaires offrent des programmes aux Autochtones.

Nous avons conscience des besoins des étudiants Autochtones, aussi bien à Terrace, dans l'est de Vancouver, que dans la région Malaspina à Nanaimo. Il y existe des programmes ciblés et des crédits ciblés mais nous réalisons qu'ils sont insuffisants. Les établissements font ce qu'ils peuvent pour offrir des places et des services de soutien aux étudiants Autochtones et je pense évidemment comme vous, qu'il faut faire davantage dans ce domaine.

M. Manny Jules: L'une des choses que j'ai réalisées au cours des dernières années est qu'une bonne approche, utilisée chez les Shuswap du sud, consiste à développer des relations. Nous avons donc une très bonne relation avec l'université Simon Fraser, qui a un programme de diplôme sur la réserve de Kamloops même. Nous avons, en moyenne, 30 diplômés universitaires par an, soit sensiblement plus que lorsque nous avons démarré, où le chiffre était de zéro. Évidemment, ces besoins vont aller croissant.

• 1135

En ce qui concerne l'investissement, il faudra en effectuer dans toutes sortes de domaines différents pour parvenir à l'objectif maximal, soit un pays où règne la sécurité, jouissant d'une bonne productivité et faisant le meilleur usage de tous ses citoyens. Ce n'est pas le cas à l'heure actuelle, très franchement.

Comment faire pour assurer la participation? Une façon est d'établir des mécanismes juridictionnels, et c'est ce que je vise avec les institutions financières. Si les outils juridictionnels sont au niveau voulu, ils faciliteront très concrètement le développement économique. Si nous avons les pouvoirs, nous pourrons avoir une plus grande participation dans les programmes éducatifs. Je considère l'éducation comme absolument vitale pour notre avenir.

Sans population instruite, nous aurons davantage de sans-abri et de gens qui ne pourront subvenir à leurs besoins. Dans nos collectivités, c'est une situation qui résulte de règlements imposés et de l'obligation de toujours quémander auprès d'un maître extérieur. Jadis, nous pouvions régler le problème au niveau communautaire, mais ce n'est plus le cas, cela nous a été interdit en 1918.

Mme Sue Barnes: Monsieur Calla, avant que vous répondiez à cette question, j'aimerais vous en poser une autre.

Vous déplorez que les intérêts s'accumulent dès la signature d'un accord de principe et j'aimerais savoir quelle date de début aurait votre préférence. J'aimerais également savoir où en sont vos pourparlers avec le ministre directement concerné, car je l'ignore.

M. Harold Calla: Merci, et je vous remercie de votre question sur l'éducation, car c'est un domaine important.

Je pense qu'il faut davantage de crédits pour l'éducation, mais il faut veiller, en effectuant cet investissement, de ne pas le limiter à l'éducation postsecondaire. Il faut considérer aussi les difficultés que nous avons au niveau secondaire et certains des besoins spéciaux dans nos collectivités. Autrement, nous allons créer ce groupe élitaire au sein des Premières nations, les jeunes venant de familles stables qui n'ont pas ces difficultés.

Nous avons des jeunes très brillants chez les Squamish qui sont dyslexiques, par exemple. Nous avons des besoins spéciaux. Il y a des problèmes historiques à régler. Nous constatons qu'une fois que nous avons pu investir dans ces jeunes—dans la plupart des cas sur nos propres fonds—nous en retirons des résultats extraordinaires.

Donc, sur le plan de l'éducation, oui, il faut davantage d'argent dans ces enveloppes, mais il faut commencer avec ces enfants dès la troisième, quatrième et cinquième année. C'est là qu'il faut identifier les difficultés et intervenir. Une fois qu'ils seront arrivés en douzième année, ils pourront se débrouiller tout seuls.

On voit de grandes réussites et mon fils Jason en est un exemple. Il a étudié à la London School of Economics et il est maintenant de retour et travaille. Les investissements consentis apportent de grandes réussites, avec toutes les contributions que ces diplômés apportent à leur collectivité et au pays.

Sur le plan des prêts, quand les intérêts devraient-ils commencer à courir? Si des intérêts sont dus, je pense qu'ils devraient courir à partir du moment où les négociations auront abouti sur tous les chapitres d'un traité.

En ce moment, tout le monde souhaite faire avancer les choses. Tout le monde veut voir des progrès. En Colombie-Britannique, on s'est rendu compte ces deux dernières années que les traités sont plus que seulement un territoire et des transferts en espèces, un montant versé en règlement, et que le coût de l'administration et les recettes requises à cet effet sont maintenant des enjeux importants. En effet, les Autochtones ne se satisfont plus des offres territoriales et monétaires. Il y a un énorme écart à combler et un énorme travail d'éducation à entreprendre.

Aujourd'hui on met beaucoup l'accent sur les questions fiscales et financières. Je ne pense pas que les intérêts devraient courir tant que ces questions n'auront pas été réglées dans un traité final.

• 1140

Le ministre en a pleinement conscience et ne peut plus l'ignorer. C'est un sujet qui revient dans chaque réunion de responsables, et c'est un sujet politique. Je pense qu'il faut en discuter dans une atmosphère libre de politique partisane, si vous me permettez cette réflexion. Nous recherchons une solution.

Le président: Merci, madame Barnes.

Mme Sue Barnes: Merci à tous.

Le président: Monsieur Pankiw.

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, PC/RD): Merci, monsieur le président. J'ai des questions pour trois des quatre groupes, et je vais donc commencer par la Tenants Rights Action Coalition.

On a dit tout à l'heure que nul ce matin n'a demandé de réductions d'impôt, mais à mon avis c'est parce que les familles laborieuses sont au travail. Elles ne sont pas ici pour réclamer ces coupures d'impôt.

Je vais vous donner l'exemple d'un électeur qui vit dans ma circonscription. Chez lui, sa famille a eu l'eau courante alors qu'il était déjà adolescent. Mais sa famille ne s'est jamais tournée vers le gouvernement pour réclamer de l'aide. Ils ont travaillé fort et se sont débrouillés. Il a payé ses propres études, s'est marié et a maintenant trois enfants. Il travaille très fort et fait des heures supplémentaires chaque fois que possible. La mère travaille à la demande et, chaque fois qu'on l'appelle, elle y va. Ils ont du mal à joindre les deux bouts.

Ce que vous dites, c'est qu'ils devraient payer plus d'impôt pour que quelqu'un d'autre jouisse d'une amélioration domiciliaire, et qu'ils renoncent pour cela à améliorer leur propre logis ou peut-être à des vacances en famille ou à une autre priorité de leur famille. Que suggérez-vous donc? Comment le ministre des Finances justifierait-il une telle chose?

Mme Linda Mix: Les ménages mal logés ne demandent pas la charité. L'économie s'est transformée: les gens travaillent aujourd'hui à contrat, ont plusieurs emplois à temps partiel, rien que pour faire vivre leur famille.

Les loyers augmentent sans cesse. Les revenus sont en baisse, à cause des changements intervenus dans l'économie. Je ne demande pas que vos mandants payent plus que leur juste part d'impôt pour subventionner d'autres qui ne travaillent pas et veulent vivre dans des logements subventionnés. Je dis en revanche que les priorités de notre gouvernement fédéral doivent changer en faveur des familles laborieuses à revenu faible et moyen forcées de consacrer de 30 à 50 p. 100 de leur revenu au logement. Voilà ce que je dis.

Si vous regardez le coût de l'option inaction en matière de logement, vous verrez qu'un grand nombre de ces familles à faible revenu qui travaillent très dur risquent de se retrouver à la rue. Voilà ce que je dis.

M. Jim Pankiw: Ce n'était pas ma question. Ma question était de savoir comment le ministre des Finances justifierait quelque chose comme cela. Regardons les choses en face, les familles laborieuses qui ont du mal à joindre les deux bouts paient des impôts, et leurs impôts iraient à ce type de programme.

Mme Linda Mix: Je pense qu'il serait très difficile au ministre des Finances de justifier l'absence de dépenses pour le logement.

M. Jim Pankiw: D'accord. Merci.

Monsieur Jules, vous avez mentionné quatre suggestions. Je n'ai pas compris celle concernant la commission fiscale.

M. Manny Jules: À l'heure actuelle, en vertu de l'article 83 de la Loi sur les Indiens, le ministre a la faculté d'accorder à une Première nation le droit de lever un impôt foncier. C'est ce que je réclame depuis plus de dix ans.

M. Jim Pankiw: Auprès des habitants de la réserve, voulez-vous dire?

M. Manny Jules: Des habitants et des entreprises situées dans la réserve. Actuellement cette taxe dégage chaque année une trentaine de millions de dollars qui vont dans les coffres des collectivités autochtones.

M. Jim Pankiw: Mais les droits de propriété sont collectifs. Il n'y a pas de propriété individuelle. Comment donc...

M. Manny Jules: Tout dépend de la réserve. Un certain nombre de collectivités ont ce que l'on appelle les certificats de possession, qui sont l'équivalent d'un droit de propriété irrévocable. Certaines ont ces CP, ou certificats de possession, qui sont très semblables à un titre de propriété individuelle. D'autres collectivités ont un régime de propriété de type traditionnel, qui peut varier selon les endroits. Dans l'ensemble, la plupart des collectivités des Premières nations perçoivent une taxe foncière auprès des entreprises situées sur la réserve.

• 1145

M. Jim Pankiw: D'accord, quelle est donc votre suggestion?

M. Manny Jules: Ce que je préconise—et cela a été adopté par l'Assemblée des Premières nations, l'organisation des chefs—est que cela cesse de relever de la Loi sur les Indiens. C'est un domaine de compétence que les Premières nations devraient pouvoir assumer, comme première étape dans la gouvernance. Cela remplacerait, dans la pratique, le rôle du ministre des Affaires indiennes en matière d'imposition des biens immobiliers. En gros, il y aurait un conseil d'administration qui prendrait les arrêtés fiscaux. Cela faciliterait les négociations—qu'il s'agisse de la protection contre l'incendie, de l'adduction d'eau ou d'autres services—entre municipalités et Premières nations.

M. Jim Pankiw: Cela se ferait donc au cas par cas?

M. Manny Jules: C'est juste. Je m'occupe des discussions sur la levée de taxes foncières pour environ 80 collectivités, dans tout le pays.

M. Jim Pankiw: Oui. Votre premier point, sur les quatre, intéressait la responsabilisation. Il me semble que cela améliorerait l'exercice de la responsabilité.

M. Manny Jules: C'est juste. Tous ces quatre éléments des institutions financières sont reliés entre eux. Pour qu'il y ait reddition de comptes, il faut mettre en place un certain nombre de régimes. Le conseil de gestion financière, qui serait distinct, s'occuperait de certains aspects de la reddition de comptes ainsi que de la formation et de l'éducation, du point de vue de la capacité administrative. La commission fiscale, s'occuperait, dans un premier stade, de lever la taxe foncière, mais je la vois acquérir également la faculté de lever d'autres impôts.

M. Jim Pankiw: Merci.

Ma dernière question s'adresse à la College Institute Educators' Association. L'éducation représente une grande priorité, ou le devrait—pour le gouvernement. L'un des problèmes que vous avez évoqués est le montant élevé des droits d'inscription. Le programme de prêts d'études connaît ses propres problèmes. Le taux de non-remboursement est très élevé, ce qui alourdit le coût, si bien que les ressources allouées aux prêts d'études n'ont pas autant d'effet qu'elles le pourraient.

Une proposition serait un remboursement des prêts d'études en fonction du revenu, qui rendrait très difficiles les carences de paiement car les remboursements seraient suspendus en dessous d'un certain seuil de revenu; ensuite, une fois que le revenu remonte au-dessus du seuil, le débiteur devrait recommencer à payer. Ainsi, au lieu que l'étudiant soit automatiquement astreint à rembourser une fois le diplôme obtenu, le système serait beaucoup plus flexible mais empêcherait en même temps les défauts de paiement: si les intéressés étaient incapables de faire leurs paiements ou étaient chômeurs pendant quelque temps, le système continuerait à les suivre.

Je ne sais pas si vous avez entendu parler de ce mécanisme ou si votre association a une position à ce sujet.

Mme Maureen Shaw: Je sais que les taux de carence sont plus élevés chez les étudiants ayant suivi des programmes de formation privés. C'est un problème que nous avons identifié. Les étudiants du secteur public, en moyenne nationale, ont de moindres taux de carence que ceux du secteur privé. Nous avons toujours préconisé que le gouvernement assure un financement public des établissements publics. Or, le gouvernement fédéral a détourné ces derniers temps les crédits de formation professionnelle vers le secteur privé, dont les droits de scolarité sont beaucoup plus élevés. Les étudiants doivent y absorber une part beaucoup plus grande du coût de leurs études, avec des droits pouvant atteindre 10 000 $ par an.

Nous savons que récemment certains établissements privés comme ITI ont fermé leurs portes, et il y a également un problème avec CompuCollege dans tout le Canada. Lorsque ces faillites interviennent, les étudiants n'obtiennent plus leur éducation. Ils ont payé les droits et on ne les rembourse pas. Donc, souvent, les taux de carence sont fonction du système dans lequel l'étudiant est inscrit: si c'est le secteur privé, le problème est beaucoup plus grand que dans le public.

• 1150

Je pense que le remboursement des prêts en fonction du revenu est un mécanisme assez complexe qui comporte ses propres problèmes. Il présume que les étudiants vont suivre le chemin dans lequel ils se sont engagés au moment de l'inscription et je demanderais aux gens dans cette salle s'ils sont tous restés dans le domaine qu'ils ont étudié. Si c'était le cas, vous devriez tous être diplômés en sciences politiques.

M. Jim Pankiw: Désolé, je ne veux pas vous interrompre, mais vous vous méprenez. C'est simplement fonction du revenu. Quelle que soit la profession ou la carrière que vous choisissez, votre remboursement de ce prêt d'études sera simplement lié à votre revenu et à votre capacité de rembourser.

Mme Roseanne Moran (recherche et communication, College Institute Educators' Association of B.C.): De nombreux modèles différents de remboursement des prêts d'études en fonction du revenu ont été mis à l'essai. L'une de nos objections à ces modèles est qu'ils s'accompagnent presque toujours d'une majoration astronomique des droits de scolarité. Ils sont habituellement mis en place pour financer une importante privatisation des coûts de l'éducation postsecondaire. Les étudiants empruntent énormément plus pour couvrir les frais de scolarité sachant que les remboursements seront plus flexibles.

Certaines des analyses des programmes de remboursement en fonction du revenu montrent que les étudiants à faible revenu finissent par payer beaucoup plus cher leur éducation, simplement parce qu'ils remboursent pendant très longtemps et paient des taux d'intérêt très élevés sur une longue période. Ces mécanismes ne sont généralement pas associés à une plus grande équité, mais à un système plus inéquitable.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Pankiw. Votre temps de parole est écoulé.

Monsieur Cullen.

M. Roy Cullen: Merci, monsieur le président, et merci aux intervenants.

Monsieur Calla, la plate-forme électorale du gouvernement provincial actuel, si je me souviens bien, prévoyait de tenir un référendum sur l'accord avec les Nisga'a. Ma question, je suppose, est double. Le gouvernement d'ici va-t-il tenir sa promesse et, dans l'affirmative, quelles en seront les répercussions sur le processus de négociation de traités en Colombie-Britannique?

M. Harold Calla: Je n'ai pas connaissance d'un référendum sur le traité avec les Nisga'a, mais je sais que le gouvernement provincial aimerait organiser un référendum pour définir son mandat dans le processus des traités.

Comme je l'ai dit au ministre Plant, et comme je suis sûr que quelqu'un l'a dit au premier ministre, nous ne considérons pas que les droits des minorités puissent être sujets d'un référendum. Qu'en résultera-t-il pour le processus des traités s'il tient un référendum? Cela pourrait en signifier la fin, si le mandat est tellement étroit qu'il ne peut venir à la table négocier.

En fin de compte, peu importe. Certains pensent que s'il y a référendum et qu'ils ont ce mandat, on va nous traîner à la table enchaînés pour négocier un traité. Or, c'est un processus non contraignant. Si nous ne parvenons pas à une entente, il n'y aura pas de traité. J'apprécie donc que le ministre Plant ait indiqué que les droits des Autochtones ne sont pas en cause, que la Constitution nous protège et qu'il ne veut pas de ces considérations dans le traité. Il ne laissera pas les racistes dominer le débat.

Nous sommes contre le principe. Les droits d'aucune autre minorité ne sont assujettis à un référendum mais le gouvernement provincial a clairement un mandat, il fera ce qu'il veut. Tout le monde devra en attendre les résultats et le gouvernement provincial sait pertinemment qu'un résultat qui ne satisfait pas les Premières nations, du point de vue de leur perception de ce mandat, anéantira ce processus. Le gouvernement provincial sait également qu'il a mis cette province sur un cap qui exige le développement économique et notre collaboration. Il doit donc concilier les deux.

M. Roy Cullen: Merci. Je ne suis pas non plus d'accord avec l'utilité d'un référendum, mais en quoi cela changera-t-il les choses, n'est-ce pas? C'est lui qui décide, après tout.

Madame Shaw, vous avez mentionné Conseil des ministres de l'Éducation. Normalement, dans les conseils de ce genre, il y a des ministres provinciaux et un ministre fédéral. Qui est notre ministre fédéral au sein de ce conseil, s'il y en a un?

Mme Roseanne Moran: C'est une bonne question.

M. Roy Cullen: J'aurais pensé que ce serait Jane Stewart.

Mme Roseanne Moran: Tout dépend du sujet discuté. Il n'y a pas réellement de participation du niveau fédéral lorsqu'il s'agit des cycles élémentaires et secondaires. Il y a quelques crédits pour la formation linguistique. Je crois qu'en général c'est le ministre du Développement des ressources humaines. J'imagine que c'est le cas. Parfois, c'est le ministre des Finances.

• 1155

M. Roy Cullen: D'accord. C'est un peu secondaire, mais j'étais curieux. Je me demandais qui écoutait votre message au niveau fédéral.

Je suis un peu dérouté par votre recommandation sur les coûts indirects de la recherche. D'une part, vous semblez adopter une position différente des universités et collèges, mais vous poursuivez en préconisant également l'option de rechange. Vous demandez d'augmenter les transferts fédéraux en espèces. Je peux comprendre cela, mais vous dites ensuite que le financement à un niveau adéquat de la recherche parrainée par les conseils subventionnaires constitue à ce stade la méthode la plus appropriée et la plus efficace.

N'est-ce pas dire la même chose que les collèges et universités—à savoir englober les coûts indirects de la recherche dans les subventions de recherche?

Mme Roseanne Moran: Si vous parlez de notre mémoire, plutôt que de mettre davantage de fonds dans des programmes de recherche comme la Fondation canadienne pour l'innovation ou les chaires de recherche du Canada, qui sont plus sélectifs et beaucoup plus ciblés sur des établissements de type spécifique, nous recommandons que les nouveaux crédits à la recherche soient canalisés par les conseils subventionnaires, lesquels les distribuent de façon beaucoup plus équitable entre les établissements.

Il reste encore pas mal de travail à faire pour mieux soutenir le secteur collégial, mais c'est dans ce contexte que s'inscrit la recommandation.

M. Roy Cullen: Si l'on va passer par les conseils subventionnaires, les gouvernements ont deux choix. On peut soit augmenter les fonds pour la recherche directe ou bien on peut dire qu'il y a une enveloppe fixe, ou peut-être augmentée, mais que de cette caisse x p. 100 sont réservés au coût indirect. Est-ce là l'approche que vous préféreriez?

Mme Maureen Shaw: Oui, à condition que l'accès à cette enveloppe soit équitable, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Il y a donc cet élément, et je sais que les universités font pression pour obtenir une plus grande assistance pour les coûts indirects de la recherche—l'infrastructure, etc.

Les universités sont mieux à même de se faire octroyer ces fonds. Les grandes universités en obtiennent une part disproportionnée—je crois que 85 p. 100 des chaires de recherche du Canada sont situées dans les dix plus grandes universités du Canada, ou quelque chose de cet ordre. Les petits établissements qui servent une population ou une région différente n'ont pas le même accès aux crédits de recherche, tout en ayant des besoins.

Nous demandons que le gouvernement fédéral réfléchisse à la manière dont les crédits de recherche sont structurés et aux modalités d'accès des établissements. Si cela va être un mécanisme de subvention, très bien, à condition que le processus soit équitable pour tous et que les fonds soient équitablement distribués.

M. Roy Cullen: D'accord.

La question suivante s'adresse à M. Jules et peut-être M. Calla pourrait-il également y répondre. Matthew Coon Come était récemment à Durban, si ma mémoire est bonne, et il a établi un parallèle entre le système des réserves canadiennes et les bantoustans ou le régime d'apartheid en Afrique du Sud. Franchement, j'ai trouvé la comparaison mauvaise. En Afrique du Sud, on a démantelé l'apartheid, on a démantelé les bantoustans. Devrions-nous faire la même chose et démanteler le système des réserves?

M. Manny Jules: La première chose qu'il faut considérer est que nul ne choisit de vivre dans la pauvreté, nul ne choisit de vivre dans l'oppression. Ce que j'entends les Autochtones dire d'un bout à l'autre du pays, c'est qu'ils veulent pouvoir suffire à leurs besoins et contribuer, comme tout un chacun dans ce pays.

Il est regrettable que notre chef national ait fait ces déclarations à Durban. Personnellement, je ne les approuve pas. Je pense que ces déclarations... Il n'y a pas que les actes terroristes qui peuvent diviser, les déclarations aussi, et celle-ci en est une.

• 1200

Le fait est que les bantoustans en Afrique du Sud étaient fondés sur le système des réserves qui existe ici, au Canada, et aux États-Unis. Cela, c'est l'histoire. Sachant cela, nous pouvons travailler ensemble pour façonner un monde nouveau, quitte à le changer. La seule façon dont nous pouvons le changer est de commencer à démonter les barrières, commencer à se comprendre les uns les autres, et commencer à réaliser que les Premières nations du Canada doivent trouver leur juste place, soit une place très importante dans ce pays. S'il y a une reconnaissance explicite de nos droits et de nos intérêts, une bonne partie des problèmes qui nous confrontent seront résolus.

On peut dire qu'il y a des problèmes de sécurité interne, en quelque sorte. Vous ne pouvez continuer avec une population si appauvrie qui continue, comme c'est le cas des Premières nations, à réclamer sa place à la table, un terrain de jeu égal—toutes ces belles choses dont nous parlons. Nous voulons avoir notre place et nous voulons participer. La seule façon d'y parvenir c'est par un dialogue constructif, et non pas en semant la dissension.

M. Roy Cullen: À la poursuite de ce plan, si l'on pouvait mettre en place les modèles de gouvernance des Premières nations que vous souhaitez—vous avez parlé des taxes foncières et certaines Premières nations ont maintenant compétence pour lever des impôts sur les produits primaires—pourrait-on en arriver à un stade où ces collectivités deviendraient autosuffisantes et où les arrangements financiers entre le MAIN et les Premières nations pourraient disparaître? Est-ce regarder trop loin vers l'avenir, vers un monde que nous ne connaîtrons jamais?

M. Manny Jules: Nous serions autosuffisants de la même façon que n'importe quel autre niveau de gouvernement de ce pays. Le pays n'est pas constitué d'une série d'États indépendants ou de provinces indépendantes vivant en autarcie. De fait, les événements du 11 septembre ont souligné que nous devons fonctionner comme une famille, pour assurer que notre famille dans ce pays pourra se perpétuer pendant de nombreuses générations.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous n'avons pas choisi de modifier la Loi sur les Indiens en 1918, de devenir des pupilles du gouvernement fédéral. Jusque-là, nous levions nos propres fonds, dans la pratique, nous nous imposions nous-mêmes pour faire un certain nombre de choses. Cela nous a été interdit. Je pense donc que ces problèmes sont solubles, car notre avenir en dépend—le vôtre et le mien.

Si nous ne commençons pas à régler ces problèmes, vous n'aurez pas seulement 7 milliards de dépenses sociales, vous aurez facilement le double et nul n'a les moyens de payer cela. Nous voulons faire partie intégrante de l'économie, non seulement pour générer des ressources, mais également être intégrés au tissu du pays, afin que nous puissions ensemble faire front contre toutes les forces.

Le vice-président (M. Ken Epp): Merci beaucoup, monsieur Cullen.

Avec votre permission, mesdames et messieurs les témoins, vu que nous avons commencé un peu en regard, nous allons poursuivre encore quelques minutes.

J'aimerais accorder à tous les membres du comité un tour rapide d'une question, s'ils le veulent. Nous commencerons avec M. Nystrom.

M. Lorne Nystrom: Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais donner à Jason l'occasion de dire quelques mots, afin que tout le monde puisse participer. Je n'ai qu'une question générale, Jason.

Vous appartenez manifestement à un génération plus jeune et très bien instruite. Si vous étiez le ministre des Affaires indiennes et du Nord, et si le premier ministre vous donnait carte blanche pour concevoir un système de gouvernance des Premières nations de ce pays, quelle serait votre vision de la gouvernance des Premières nations et du droit inhérent à l'autodétermination? C'est une question simple.

• 1205

M. Jason Calla (conseiller, First Nations Summit Society): Je pense que cela nous ramène à l'autre question, celle de savoir s'il faut démanteler les réserves.

Il y a peut-être deux façons différentes d'aborder le développement économique et social des Premières nations aujourd'hui. L'une consiste à supprimer les réserves, en faisant le constat de leur échec aujourd'hui, qui est très évident. Je pense que si l'on dressait l'indice de développement humain en prenant les chiffres pour les Autochtones vivant dans les réserves, nous serions au 63e rang. Le Canada était au premier rang, et je pense qu'il est tombé au troisième rang cette année.

On peut donc soit transposer les Autochtones dans les villes, là où les marchés fonctionnent et où ils peuvent participer à l'économie, ou bien on peut faire autre chose, c'est-à-dire adapter un peu les marchés et donner aux gouvernements des Premières nations les pouvoirs et l'autorité voulue pour prendre des décisions dans leur collectivité.

Je pense que la deuxième solution, faire fonctionner le marché sur les territoires des Premières nations, est probablement meilleure, car je pense que l'esprit communautaire est important, la culture est importante et transposer les Autochtones dans les villes ne va pas régler le problème de la pauvreté. Vous aurez quand même le coût financier de la pauvreté et vous n'aurez pas de participation des Premières nations.

À mon sens, le problème n'est pas tant celui d'un excès de gouvernement autochtone, mais d'un manque de juridiction claire, de répartition adéquate de l'assiette fiscale et de distribution appropriée des responsabilités pour les services sur une assise territoriale suffisante. C'est là ma vision à long terme—engager ces négociations de façon à élaborer une relation nouvelle avec le Canada et la Colombie-Britannique, afin que les gouvernements des Premières nations reçoivent les responsabilités appropriées et puissent prendre des décisions en faveur du développement économique.

Le président: Merci beaucoup.

Madame Barnes.

Mme Sue Barnes: Merci.

Ma question s'adresse aux collèges, car vos réponses à M. Cullen me laissent sur un doute.

Il y a trois enjeux distincts dans le domaine de la recherche dans ce pays. L'un est une augmentation du financement de la recherche, globalement. L'autre est la répartition équitable, ou une répartition différente, entre de grands centres de recherche, une répartition différente des centres de recherche à travers le pays. Le troisième enjeux, ce sont les coûts indirects de la recherche. J'aimerais que vous me disiez si vous êtes clairement en faveur ou opposé à chacun de ces trois éléments. Je pense que cela clarifierait les choses pour le comité.

Je vais vous faciliter le travail, c'est très simple. Êtes-vous en faveur de budgets de recherche accrus pour les conseils subventionnaires?

Mme Maureen Shaw: Oui.

Mme Sue Barnes: Êtes-vous en faveur d'une répartition plus équitable entre grands et petits centres de recherche?

Mme Maureen Shaw: Oui, exactement.

Mme Sue Barnes: Êtes-vous en faveur du financement des coûts indirects de la recherche? Je vais vous donner les paramètres de ce qui a été demandé au comité, soit 40 p. 100 pour le financement des coûts indirects, car votre position n'était pas très claire.

Mme Maureen Shaw: Oui.

Mme Roseanne Moran: Nous disons dans notre mémoire que nous souscrivons à la recommandation de l'Association canadienne des professeures et professeurs d'université. Nous pensons que les coûts indirects de la recherche devraient être financés principalement par le biais d'une augmentation des transferts.

Mme Sue Barnes: D'accord. La différence est que lorsque M. Cullen vous a posé la question, il parlait d'augmenter l'enveloppe et de prélever les coûts indirects sur cette somme accrue, et c'est là où je n'ai pas bien suivi vos réponses. Je ne comprend toujours pas très bien votre position.

Mme Roseanne Moran: Eh bien, ce serait nouveau pour nous, dans les collèges, d'obtenir quelques crédits de recherche, mais notre préférence, au lieu que les coûts indirects de la recherche soient englobés dans des crédits de recherche accrus, serait que ces coûts soient financés sous forme d'un financement de base, par l'intermédiaire des transferts.

Mme Sue Barnes: Dans ce cas, le seul problème est que nous ne pouvons imposer de conditions. Lorsque nous transférons de l'argent pour la santé, les services sociaux et l'éducation, nous n'avons aucun contrôle sur l'utilisation de l'argent.

Mme Roseanne Moran: Nous formulons une recommandation à ce sujet.

Mme Sue Barnes: D'accord. Merci.

Le président: Merci beaucoup, madame Barnes.

Monsieur Pankiw.

M. Jim Pankiw: Merci, monsieur le président.

J'aimerais poser une question à M. Jules, bien que Jason, dans sa réponse à M. Nystrom, allait également dans ce sens.

Jason, vous avez parlé d'intégration sociale et économique par opposition à une délimitation appropriée des responsabilités. Les deux me paraissent nécessaires.

Monsieur Jules, je ne veux pas vous mettre sur la sellette, mais vous n'avez pas répondu à la question de M. Cullen—du moins pas à ma satisfaction. Pensez-vous que l'objectif ultime—peu importe combien de temps il faudra pour le réaliser—serait de ne plus avoir besoin d'un ministère des Affaires indiennes? Les Indiens seraient alors des participants égaux et à part entière dans notre société et notre économie, comme n'importe quel autre groupe culturel?

M. Manny Jules: Évidemment, ce serait le rêve. C'est le rêve qui nous empêchait d'être un partenaire à part entière dans ce pays. C'est pourquoi j'ai utilisé l'exemple de 1918. Nous n'avons pas choisi de devenir les pupilles du gouvernement fédéral. C'est lui qui a pris cette décision en modifiant la Loi sur les Indiens et en décrétant que c'est ainsi que nous serions gouvernés.

• 1210

Lorsque j'envisage l'avenir, je vois un avenir où nous serons un partenaire à part entière dans la fédération canadienne. Je nous vois avec des responsabilités comme n'importe quel autre palier de gouvernement, de façon à avoir les compétences et à être des interlocuteurs, qu'il s'agisse de la pêche ou de tout ce que vous voudrez.

M. Jim Pankiw: Est-ce que l'individu aurait un rôle aussi?

M. Manny Jules: Oh oui, nécessairement. Vous ne pouvez avoir une situation où le gouvernement fait tout. Vous ne pouvez avoir une économie entièrement dirigée par le gouvernement. On l'a bien vu ces dix dernières années en Colombie-Britannique, cela n'a pas marché. S'il s'agit de renforcer le pays, il faut considérer la somme de toutes ses parties.

Lorsque je regarde notre communauté, en tant que Première nation—et j'ai beaucoup voyagé à travers tout le pays—je vois quelques collectivités que nous allons devoir soutenir. Ce n'est pas pour une raison économique, mais une raison culturelle. Il peut s'agir d'une collectivité Shuswap. Je suis Shuswap, et il sera dans mon intérêt de veiller à ce qu'ils aient une structure économique viable, des compagnies, tout ce que vous voudrez.

Ce que j'entrevois pour l'avenir, c'est que les Premières nations devront faire partie de la famille. Faire partie de la fédération. Ce n'est pas le cas aujourd'hui car nous sommes toujours obligés de venir ici quémander, supplier qu'on nous aide: les nôtres souffrent et meurent, pouvez-vous nous aider, s'il vous plaît? J'en ai assez de cela, de devoir mendier sur nos propres terres, alors que je voudrais que mon fils et les miens puissent se tenir debout par eux-mêmes et ne pas être des mendiants dans ce pays ou ailleurs. Je veux être fort et fier de qui nous sommes, et je ne parle pas seulement des Shuswap, mais de tout le pays.

Comme je l'ai dit, j'ai un grand-père qui a été gazé pendant la Première Guerre mondiale. Mon père raconte encore l'histoire. Son père est allé en guerre pour ce pays et, lorsqu'il est revenu, il n'avait pas de terre parce qu'il avait été élevé en dehors de la réserve de Kamloops par ma grand-mère, dans une maison en terre. Il est parti se battre pour le Canada pendant la Première mondiale, il a été gazé, il est revenu et il ne pouvait même plus retourner là où il a été élevé. On lui a dit qu'il devait s'installer ailleurs.

Ce que je dis est tellement important pour l'avenir de ce pays qu'on ne peut plus le balayer sous le tapis. On ne peut oublier que nous faisons partie intégrante du tissu de ce pays.

Cela s'applique même au problème de la sécurité nationale. Il y avait un joli petit article dans le journal sur Point Roberts et l'obligation pour les enfants de se lever plus tôt pour aller à l'école. Eh bien, le 11 septembre, j'étais en route pour Akwesasne. Akwesasne est aux prises avec cinq frontières: la frontière provinciale du Québec, la frontière provinciale de l'Ontario, la frontière de l'État de New York, la frontière entre le Canada et les États-Unis et les frontières municipales. L'expérience de cette seule collectivité montre que les Premières nations doivent se mêler de sécurité nationale car leur territoire peut être un point de passage clandestin vers les États-Unis. Il y a des peuples comme les Okanagan et les Stallauo chez qui les familles ont été littéralement séparées.

C'est l'une des raisons pour lesquelles je suis venu à ce comité. Je trouve que le Comité des finances a l'un des rôles les plus difficiles de tous les comités fédéraux. Vous avez demandé, Jim, ce qu'il convenait de faire aujourd'hui, après les événements du 11 septembre. Vous recevez toutes ces requêtes et c'est comme ce que j'ai vécu lorsque j'étais chef. «Manny, quelles vont être tes priorités? Tu es le chef, quelles sont tes priorités? Comment vas-tu changer le monde pour que nous puissions vivre mieux?»

C'est la responsabilité de chacun de vous qui siégez ici: comment faire pour que le Canada reste fort et comment faire pour que le Canada reste un véritable partenaire au plan international, tout en se débattant avec l'économie et tout ce que vous voudrez? Je vous le dis, vous devrez vous attaquer à tous ces problèmes car nous faisons tous partie de la même famille.

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Si l'on regarde en dessous de la peau de chacun d'entre nous, nous avons du sang rouge qui court dans nos veines, nous avons un coeur ici, nous avons une âme et nous avons un esprit. Il nous incombe, à chacun de nous, d'essayer de faire de ce monde un endroit meilleur pour tous. Je le fais car ce sont là mes convictions. Sinon, j'aurais pu tout aussi bien décider de rester chez moi et de faire autre chose. J'ai dû quitter ce matin ma maison de Kamloops, tout comme vous avez dû partir de, mettons, London—dites bonjour de ma part à Tom Bressette à votre retour.

Lorsque les événements du 11 septembre se sont produits, je me suis retrouvé coincé à Ottawa pendant une semaine. J'ai téléphoné à mon fils et je lui ai dit: «Clarence, je ne peux pas rentrer. Je suis coincé ici, à Ottawa». Il m'a dit: «Oh, où est-ce, papa?» Nous avions traversé le pays en voiture. C'est une expérience incroyable. Lorsque je traverse le pays en voiture, je ne regarde pas que les petites villes et bourgades; je réfléchis à l'histoire géologique. Qu'est-ce qui a fait ce pays? Il nous a fait tous. Il vous a fait vous, et m'a fait moi et il a fait tout le monde autour de cette table. Quand je n'ai pas pu rentrer et que je l'ai appelé, il savait pourquoi. Il a dit: «Oh, est-ce à cause des terroristes à New York?»—il n'a que sept ans—et je lui ai dit: «Oui, je ne peux pas rentrer, fils». Il m'a dit: «Eh bien, prend un taxi». J'ai dit: «C'est trop loin, fils». Il m'a répondu: «Alors, établit un record du monde».

M. Jim Pankiw: Et c'est ce que vous avez fait.

M. Manny Jules: Je n'ai pas pu parce que j'avais d'autres engagements à Ottawa. J'ai décidé alors que nous ne pouvions pas arrêter de vivre. Nous ne pouvons pas nous incliner devant les événements. Nous devons continuer à nous battre pour faire que sa vie, la vie de mon enfant, et la vie de tout le monde ici, soit meilleure.

Ce n'est pas une tâche facile. Prenez l'Afghanistan, Israël, et toutes ces choses. Nous n'avons pas besoin de cela ici, et pourtant quelqu'un a imaginé l'inimaginable le 11 septembre. Pensez-vous que nous serons à l'abri de telles choses? Non.

Il vous incombe à chacun de vous, membres du comité parlementaire, de faire en sorte, lorsque vous délibérez, de considérer toutes les priorités que ce pays réclame de vous. Il peut s'agir de réductions d'impôt, de plus d'éducation, ou de nourrir et de vêtir les sans-abri, et Dieu sait quoi encore. Où allez-vous mettre les priorités? C'est une responsabilité énorme.

Le vice-président (M. Ken Epp): Merci.

M. Manny Jules: Avant de terminer, je tiens à dire que je suis ici pour appuyer l'initiative sur la sécurité nationale, car je veux vivre en paix. Ce pourquoi je milite, dans les relations entre les Premières nations et les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, c'est la paix entre nous, afin que notre avenir soit toujours ensemble. À mon avis, c'est cela le Canada.

Le vice-président (M. Ken Epp): Merci infiniment. Merci infiniment, monsieur Pankiw et monsieur Jules. C'est ce qui rend si difficile la tâche du président, car comment peut-on interrompre une intervention comme celle-ci? C'est pratiquement impossible.

Monsieur Cullen, nous écoutons votre dernière question.

M. Roy Cullen: Merci. Je sais que le temps presse.

Vous avez parlé avec beaucoup d'éloquence, monsieur Jules.

Cela dit, je ne pense pas que vous vouliez formuler une menace, et je ne l'entendrai pas ainsi—je suis heureux que mes collègues épurent mes questions pour moi. Cependant, jusqu'à la fin, j'avais interprété vos remarques, monsieur, sur la viabilité comme signifiant qu'aucune collectivité au Canada n'est totalement viable par elle-même, puisque nous transférons le TCSPS, les paiements de péréquation, etc. C'est ainsi que j'ai interprété vos propos.

M. Manny Jules: C'est ainsi que...

M. Roy Cullen: Oui. Et madame Shaw, j'ai juste une courte question pour vous et une autre très brève pour Mme Mix.

Je conviens avec vous que les coûts indirects sont davantage une affaire de financement de base. Je fais valoir que dans certaines provinces, comme l'Ontario et peut-être maintenant la Colombie-Britannique, il y a une marge de manoeuvre pour augmenter le financement de base. Je pense que ce devrait être là le véhicule. C'est peut-être le point de vue d'un puriste, car nous savons que ces fonds ne sont pas toujours fournis.

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Je considère votre recommandation de mettre dans une caisse à part les crédits pour l'éducation comme une possibilité. En ce qui concerne les 2 milliards de dollars par an que vous recommandez, vous imaginez bien qu'il s'agit là d'un sacré paquet d'oseille dans le contexte d'aujourd'hui, si je puis utiliser l'expression populaire. Comment peut-on justifier cela? J'aimerais savoir quel rôle vous attribuez aux provinces. Pourquoi devrions-nous rétablir un financement direct pour les logements sociaux? N'y a-t-il pas d'autres instruments que l'on pourrait utiliser pour accroître le nombre de logements sociaux?

Mme Linda Mix: Je pense que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer. Comme vous le savez, en 1993, lorsque le gouvernement fédéral s'est désisté, la plupart des provinces, sauf la Colombie-Britannique et le Québec, ont continué à construire des logements sociaux. On constate dans le pays la multiplication des sans-abri en Ontario, et c'est un désastre en Alberta, où beaucoup de gens qui travaillent ne trouvent pas à se loger. Il n'y a pas de logements locatifs parce qu'on n'en construit plus.

À nos yeux, 2 millions de dollars ne représentent qu'une petite partie du budget. Il est question d'un excédent de l'ordre de 30 milliards de dollars, n'est-ce pas?

M. Roy Cullen: Non.

Mme Linda Mix: D'accord. Un gros excédent en tout cas, et 2 milliards de dollars représentent un investissement, à nos yeux, dans l'avenir des Canadiens, afin que nous puissions participer, afin que nous ayons une qualité de vie décente.

La Fédération canadienne des municipalités a demandé lors de sa conférence de la fin de semaine dernière 1,2 milliard de dollars par an. Nous allons un peu plus loin. Je pense que le coût de l'inaction... Nous avons vu ce qui s'est passé en Ontario; nous voyons ce qui se passe partout dans le pays. Nous vous encourageons à considérer cela très sérieusement.

Je pense que ma collègue veut intervenir.

Mme Vanessa Geary: J'ajouterais seulement que cela exigera des partenariats et, bien entendu, les provinces devront fournir des fonds et les municipalités peuvent faire des choses comme fournir des terrains.

Si le gouvernement ne veut plus subventionner les loyers, vous pourriez au moins offrir des subventions d'équipement pour faire baisser le coût de la construction des logements.

Le dernier argument que j'aimerais vous soumettre consiste à demander comment on peut justifier que des gens vivent dans la rue et littéralement meurent dans la rue dans un pays aussi riche que le nôtre? Voilà la question avec laquelle vous devez vous débattre. Oui, cela va coûter de l'argent pour régler ce problème, mais quelle est la priorité? Comment pouvons-nous justifier que des gens vivent à la rue?

Le vice-président (M. Ken Epp): Merci beaucoup. Nous allons clore là-dessus notre séance d'aujourd'hui.

Merci à tous les témoins. Vous avez très bien su défendre vos idées et opinions. Nous vous en sommes reconnaissants. Le comité tiendra compte, bien entendu de vos avis lors de la rédaction de son rapport.

Merci à tous les membres.

Là-dessus, la séance est levée. Merci.

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