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SINT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SUB-COMMITTEE ON INTERNATIONAL TRADE, TRADE DISPUTES AND INVESTMENT OF THE STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

SOUS-COMITÉ DU COMMERCE, DES DIFFÉRENDS COMMERCIAUX ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX DU COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 25 octobre 2001

• 1533

[Traduction]

Le président (M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.)): Bon après- midi à tous. Bienvenue à nos audiences sur les retards à la frontière canado-américaine en ce qui concerne les camions et la circulation des biens. Nous avons le quorum et nous pouvons donc entendre les témoins.

Nous allons entendre aujourd'hui M. John Bescec qui représente l'Association canadienne des importateurs et exportateurs ainsi que MM. Alexander Lofthouse et Serge Charette.

Je suggère de procéder de la façon suivante: nous allons donner à nos intervenants l'occasion de présenter leurs points de vue et leurs exposés. Lorsqu'ils auront terminé, nous passerons aux questions et aux commentaires.

Cette formule vous convient-elle?

Une voix: Tout à fait, monsieur le président.

Le président: Excellent.

Nous allons commencer par entendre vos remarques liminaires, monsieur Bescec. Si vous avez des documents, je vous propose de les remettre au secrétaire et ils seront versés au dossier comme si vous les aviez lus. Il n'est pas nécessaire de les lire. Dites-nous plutôt ce que vous pensez vraiment. Cela sera très bien.

Merci.

• 1535

M. John Bescec (vice-président, Association canadienne des importateurs et exportateurs): Monsieur le président, je n'ai malheureusement pas préparé de mémoire. J'ai remplacé à la dernière minute le président de l'association et je vais donc vous présenter un exposé oral.

Le président: C'est encore mieux.

M. John Bescec: Nous connaissons tous l'importance des échanges que fait le Canada avec les États-Unis et d'autres pays, de sorte que...

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, PC/RD): Excusez-moi, John, vous représentez...?

M. John Bescec: Je représente l'Association canadienne des importateurs et exportateurs.

Il n'est pas nécessaire d'insister sur l'importance du commerce. Le trafic qui passe par les postes frontière entre le Canada et les États-Unis s'est beaucoup amélioré depuis les événements du mois dernier. Les choses sont pratiquement revenues à la normale mais cela est peut-être un peu trompeur parce que le volume des échanges n'est pas revenu au niveau qui était le sien avant les événements du 11 septembre. Cela s'explique à la fois par la situation économique et par une diminution des échanges de biens et de services entre le Canada et les États-Unis.

Il va falloir examiner certaines questions importantes et essayer de discerner comment les choses vont évoluer. Aux États- Unis, un certain nombre de projets de loi qui pourraient avoir de graves conséquences pour notre commerce ont été présentés. On parle d'inspecter tous les chargements et d'imposer des droits de douane supplémentaires. Ce genre de mesures a un impact sur le commerce canadien. On pourrait presque parler de calme avant la tempête.

L'avenir est tellement incertain que l'industrie canadienne est inquiète des impacts que ces mesures pourraient avoir. Qu'est- ce que le gouvernement et Douanes Canada ont prévu au cas où l'on fermerait à nouveau la frontière?

Ce qui nous inquiète, c'est la collaboration. Auparavant, les autorités douanières des deux côtés de la frontière collaboraient étroitement mais elles sont en train d'élaborer des programmes chacune de leurs côtés. Il y a le service de douanes américain qui a mis sur pied de nouveaux systèmes automatisés et il y a le système canadien. Dans quelle mesure ces deux services collaborent- ils? Ces systèmes vont-ils être élaborés chacun de son côté? Nous allons vers l'informatisation. Les entreprises y sont favorables mais cela soulève des problèmes énormes pour les petites et moyennes entreprises. Il faudrait mettre sur pied un programme destiné à faciliter le passage à cette nouvelle étape pour ces entreprises. Si nous ne le faisons pas, les petites entreprises vont éprouver des difficultés à long terme.

Pour ce qui est des importations, tout le monde reconnaît qu'il faut renforcer la sécurité ainsi que l'inspection des marchandises. Pour certains programmes d'inspection, en particulier pour les conteneurs, les frais représentent entre 600 et 900 $ par conteneur. Cela correspond bien souvent à la marge bénéficiaire des entreprises pour les conteneurs. Il faut absolument faire quelque chose pour aider ces entreprises à absorber ces coûts. Il n'y a pas de solution à l'heure actuelle.

Nous examinons la possibilité d'utiliser des polices d'assurance pour résoudre ce problème mais il faut renforcer la collaboration entre l'ADRC et les entreprises pour que les Douanes se rendent mieux compte de ce que cela veut dire pour les petites entreprises. Elles sont durement touchées par ces inspections supplémentaires. Pour les entreprises plus importantes, cela touche leurs bénéfices, mais pas de façon aussi dramatique.

Les programmes CANPASS et NEXUS pourraient être étendus, ce qui faciliterait le passage de la frontière pour les personnes. L'enregistrement des chauffeurs de camion pourrait accélérer les expéditions internationales, faciliter la traversée des frontières, mais cette idée d'enregistrer les routiers rencontre une vive résistance.

On a commencé à remettre de nouvelles cartes d'immigration, les cartes d'identité avec la feuille d'érable, aux nouveaux immigrants. On pourrait envisager une carte d'identité comparable pour les Canadiens, pour qu'ils puissent s'identifier officiellement. Je suis arrivé de Toronto aujourd'hui et j'ai essayé d'utiliser mon permis de conduire. Un permis de conduire est une bonne chose mais ne serait-il pas possible de concevoir un document officiel qui pourrait convaincre les Américains que nous avons fait notre travail, ce qui accélérerait beaucoup le passage de la frontière?

• 1540

J'aimerais également insister sur l'aspect communication. Les divers organismes gouvernements et les entreprises communiquent très bien mais il faudrait en arriver à une sorte de partenariat. Les gens se parlent mais il faut aller plus loin et prendre des mesures concrètes pour réaliser nos objectifs. Tout le monde s'entend sur les objectifs à atteindre mais comment va-t-on faire pour les réaliser? C'est la grande question. Nous sommes tous directement touchés par ces questions et si nous pouvions parler d'une seule voix à nos homologues américains, tant ceux du gouvernement que du secteur commercial, nous progresserions beaucoup plus rapidement.

Au début de la semaine, j'ai assisté à une conférence de trois jours. D'anciens commissionnaires des douanes américains ont pris la parole au cours de cette réunion et ils ont brossé une image très sombre de la situation. Cela est très inquiétant. Ils parlent beaucoup de quelques incidents regrettables. Ils ont parlé de la personne qui avait passé la frontière pour se rendre dans l'État de Washington. Ils ont dit que, si cela se reproduisait, les États- Unis fermeraient leur frontière avec le Canada. Ces événements sont pris hors contexte, et si le Canada réussissait à envoyer un message unique, émanant de tous les niveaux de gouvernement, cela améliorerait beaucoup la situation.

Il faut trouver les moyens de mettre en oeuvre les solutions que nous proposons. L'ADRC a proposé d'excellentes solutions, notamment le passage à l'informatique et la communication de renseignements à l'avance. Les entreprises éprouvent toutefois beaucoup de difficultés à obtenir des renseignements par voie électronique. Elles appuient l'idée mais encore faut-il la réaliser.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons maintenant entendre M. Charette, le président national de l'Union Douanes Accise.

M. Serge Charette (président national d'Union Douanes Accise): Oui, c'est bien cela.

Merci, monsieur le président.

Je remercie les membres du comité d'avoir accepté de nous entendre malgré un calendrier très chargé. Nous sommes très heureux d'avoir cette possibilité et nous espérons que notre contribution vous sera de quelque utilité pour vos délibérations sur les retards à la frontière canado-américaine et sur les répercussions de ces retards sur le commerce. Nous allons vous présenter une recommandation que vous allez, je crois, trouver particulièrement utile, car elle répond à pratiquement toutes les préoccupations qui vous ont été exprimées.

Permettez-moi d'aller droit au but. Le Canada exporte près de 600 milliards de dollars de biens aux États-Unis, et les Américains nous en envoient l'équivalent de 500 milliards de dollars. Nous parlons donc d'un volume d'échanges annuel de 1 billion de dollars, chiffre qui devait augmenter de 10 p. 100 par an, au moins avant les événements du 11 septembre. Nous sommes malheureusement en train de constater que ce n'est pas ce qui va se produire, puisque nos voisins américains s'apprêtent à rendre notre frontière plus étanche de façon à en renforcer la sécurité.

En fait, les États-Unis s'apprêtent à bloquer la frontière avec des barricades, et pas avec n'importe quelles barricades. Les chiffres annoncés semblent indiquer qu'ils ont l'intention de construire un mur infranchissable. L'administration américaine répond aux événements du 11 septembre en investissant 609 millions de dollars US, près de 1 milliard de dollars canadiens, dans les services à la frontière. La moitié de cette somme va servir à tripler le personnel chargé de l'application des lois à la frontière et à embaucher 3 546 nouveaux agents, l'autre moitié va être consacrée à l'achat de nouveaux appareils, comme des lunettes de vision nocturne et des dispositifs de contrôle des déplacements. Ils vont en outre mettre en place un système de contrôle des entrées et des sorties qui obligera toutes les personnes qui entrent aux États-Unis ou qui quittent ce pays à s'enregistrer.

Ce ne sont pas de bonnes nouvelles, parce que je sais que ces mesures vont nuire au commerce et au tourisme, et parce que je sais également que certains d'entre vous ont fait beaucoup d'efforts pour empêcher les modifications que l'on voulait apporter à l'article 110 du Border Improvement and Immigration Act américain.

Monsieur le président, les Américains prennent des mesures pour renforcer la sécurité de leurs frontières. Ils ont déjà commencé à le faire et ils vont achever la mise en place de ces mesures. Comme David Bradley vous l'a dit le 18 octobre, c'est la sécurité qui prime aux frontières.

Je pourrais comparer nos relations avec les Américains à celles qu'a un couple marié quand un des partenaires n'est pas heureux, parce qu'il y a de la méfiance. À tort ou à raison, les Américains n'ont pas confiance dans notre capacité à assurer la sécurité de nos frontières. Nous devons rétablir cette confiance. Entre-temps, ils vont faire ce travail pour nous, en quelque sorte. C'est pour cette raison qu'ils ont commencé à inspecter les véhicules et à interroger les voyageurs qui quittent les États- Unis.

• 1545

Qu'avons-nous fait de notre côté pour réagir à cette situation qui est la même pour nous? Nous posons davantage de questions, nous vérifions plus souvent l'identité des voyageurs, et nous avons créé un centre de commandement au quartier général, mais pas beaucoup plus. Il aurait fallu davantage de personnel, mais nous n'en avons pas embauché. Nous avons simplement demandé au personnel actuel de faire plus d'heures supplémentaires. En fait, nous n'avons pas fait grand-chose pour répondre aux inquiétudes de nos voisins américains et nous espérons maintenant qu'avec un peu de lobbying, nous allons les convaincre de ne pas construire leurs barricades, pour que les marchandises puissent continuer à circuler librement entre nos pays. Pourquoi devraient-ils nous écouter? Qu'avons-nous fait pour leur montrer que nous étions prêts à faire nôtre leur besoin de sécurité?

Permettez-moi de vous décrire rapidement comment fonctionnent Douanes Canada. Je vais ainsi pouvoir placer dans son contexte la suggestion que je vais vous présenter. Je suis sûr que vous allez apprécier cette suggestion.

Il y a au Canada 147 postes frontière terrestres, 13 aéroports internationaux et 15 ports. On utilise à tous ces postes frontière un système à deux niveaux. Le premier niveau est la ligne d'inspection primaire, que l'on appelle la LIP. Les personnes et les marchandises qui entrent au Canada doivent passer par la LIP. Nous insistons pour que seuls des inspecteurs ou des agents des douanes compétents effectuent cette première inspection. Ce sont eux, et seulement eux, qui doivent décider s'il y a lieu de faire subir aux marchandises commerciales une deuxième inspection, qui représente le deuxième niveau, ou d'y renvoyer les marchandises suspectes ou qui ne sont pas accompagnées des documents exigés.

Les agents des douanes s'occupent d'évaluer le risque à la LIP. Ils laissent passer les marchandises représentant un risque faible et renvoient à l'inspection secondaire les marchandises apparemment irrégulières ou qui représentent un risque élevé. L'objectif est de séparer les marchandises à risque faible de celles qui représentent un risque élevé et de choisir la façon de traiter chacune de ces catégories. En bref, c'est la façon dont fonctionne la LIP et l'inspection secondaire.

La frontière efficace que vante Douanes Canada consiste essentiellement à augmenter la quantité de données qui nous sont communiquées avant que les marchandises arrivent à la LIP de façon à pouvoir évaluer le risque à l'avance. Cette façon de faire est efficace parce qu'elle réduit l'attente à la frontière. Cela devrait en théorie libérer les agents de la PIL, pour qu'ils puissent consacrer davantage de temps à l'évaluation des risques que représentent les expéditions qui arrivent sans préavis. Cela devrait également renforcer, grâce à des initiatives, la deuxième inspection.

Malheureusement, à cause du manque de personnel et de l'augmentation du travail, les ressources ainsi libérées n'ont pas été réinvesties dans les secteurs à haut risque. En fait, ces ressources ont simplement été utilisées pour faire face à une augmentation du trafic. C'est ce qui explique que les activités d'application de la loi à la frontière soient très faibles. C'est ce qui inquiète le vérificateur général, le SCRS et les membres de notre syndicat et c'est ce qui a finalement convaincu nos voisins américains qu'ils n'étaient pas suffisamment protégés. Le Canada doit répondre à cette préoccupation légitime. Si des milliers de Canadiens avaient péri dans un attentat terroriste, je suis certain que nous aurions réagi de la même façon.

Comment y parvenir? Eh bien, c'est là qu'intervient notre proposition. Nous pensons qu'il serait dans l'intérêt du Canada et des États-Unis d'investir dans la construction de centres internationaux de dédouanement des marchandises. Évidemment, ils ne seraient pas construits à la frontière mais à quelques kilomètres. Les voyageurs peuvent déjà passer la douane américaine dans les aéroports canadiens, avant d'entrer aux États-Unis, la loi l'autorise.

Ces centres seraient construits en territoire canadien et les deux pays pourraient procéder aux vérifications d'usage en utilisant des locaux modernes et un équipement de pointe. Nous parlons ici d'installations importantes qui permettraient d'examiner plusieurs chargements à la fois. À l'heure actuelle, les conteneurs sont parfois tellement bien remplis qu'il est difficile de les ouvrir. Comment peut-on examiner l'intérieur? Si l'on déballe les marchandises, comment les remballer?

Ces installations seraient construites à proximité de la frontière et leur personnel serait composé d'experts de différents domaines qui pourraient examiner les produits agricoles, les produits dangereux, et toutes les marchandises qui exigent des connaissances et une formation spéciales. Bien sûr, ces installations ne seraient pas construites à tous les points d'entrée; avec une demi-douzaine de ces centres, on pourrait y faire passer la plupart des expéditions commerciales avec un minimum d'inconvénients et réduire la durée des inspections. On pourrait, par exemple, en construire à Lacolle au Québec, à Fort Erie et à Windsor en Ontario, sur l'autoroute du Pacifique en Colombie-Britannique, à Coutts en Alberta et à St. Stephen au Nouveau-Brunswick.

Cette proposition comporte d'autres avantages. On pourrait agrandir les postes frontaliers pour tenir compte de l'augmentation du nombre des voyageurs qui doivent être contrôlés à la frontière, puisqu'on ne peut les sceller pour qu'ils continuent leur voyage. Ce système aurait un autre avantage; la circulation commerciale ne serait pas bloquée par les camions qu'on inspecte ou pendant que les camionneurs font traiter par le système SSMAEC leurs documents électroniques.

• 1550

Monsieur le président, les voyageurs passent déjà les douanes américaines à l'Aéroport international Pearson et à l'Aéroport international de Vancouver, pour ne donner que deux exemples. Il suffirait que les Américains étendent cette pratique au trafic commercial et autorisent le dédouanement des expéditions commerciales ou que le Canada envisage d'adopter des dispositions législatives semblables pour que nos agents puissent faire le même travail du côté américain.

Les agents des douanes qui travaillent aux postes frontaliers canadiens ont exprimé leur insatisfaction à cause de l'insuffisance et de la vétusté de l'équipement, de leur manque de formation, du manque de personnel, et d'autres problèmes qu'a constatés le vérificateur général dans son rapport d'avril 2000 dans lequel il évaluait la gestion du risque posé par les voyageurs.

Permettez-moi de vous signaler que le vérificateur général vient d'achever une vérification qui sera présentée au Parlement en décembre et nous croyons savoir qu'il fait état d'un certain nombre de lacunes graves dans la façon dont les douanes gèrent le risque que posent les expéditions commerciales. J'invite vivement le comité à se procurer ce rapport, à inviter le vérificateur général ou à demander à l'ADRC de le mettre au courant de ses conclusions avant de prendre une décision définitive.

Le rôle des Douanes a évolué. Il consiste aujourd'hui à protéger les Canadiens contre les activités illégales, comme la contrebande ou l'entrée des personnes qui arrivent illégalement. Monsieur le président, il est triste de constater que le Canada ne possède pas suffisamment d'inspecteurs des douanes pour faire le travail que les membres de mon syndicat doivent exécuter. Le Canada aurait besoin d'au moins 1 200 agents des douanes supplémentaires du côté des voyageurs, et d'après nous, d'au moins 400 dans le secteur commercial. Nous savons que cela représente un investissement de plusieurs millions de dollars mais c'est le prix à payer pour rétablir la confiance des Américains dans la sécurité de nos frontières et pour revenir au système de frontière ouverte qui s'appliquait au transport de marchandises.

Lorsqu'un sénateur américain brandit une balise routière en caoutchouc orange au cours d'une audience d'un comité du Congrès américain et déclare que c'est la réponse des États-Unis aux problèmes de sécurité à la frontière du Canada dans certains endroits, et lorsque nous agissons de la même façon, nous savons que les choses doivent changer. Le moment n'a jamais été plus favorable. Ces balises routières ne peuvent assurer la sécurité. Une frontière n'est pas sûre si elle n'est pas sûre partout.

Pour conclure, nous sommes en faveur de revenir à une proposition qui a été faite il y a des années et qui viserait à regrouper dans un seul ministère ou un seul organisme les douanes et les autres groupes chargés de l'application de la loi. Les douanes ont un mandat double et contradictoire—assurer la sécurité et faciliter la circulation des biens et des personnes. Comme je l'ai expliqué, nous favorisons à l'heure actuelle la libre circulation et il faudrait renforcer l'aspect application de la loi, sinon les Américains le feront pour nous.

Cela ne veut pas dire qu'il ne faut pas penser en terme de circulation. Cela veut simplement dire qu'il faut assurer la circulation sans compromettre la sécurité. Bien sûr, il va falloir davantage d'agents des douanes si l'on veut appliquer la réglementation, sinon la circulation va ralentir et nuire à notre économie. Cela dit, le choix paraît clair. Les Américains, et les Canadiens aussi, veulent davantage de sécurité. Les entreprises veulent pouvoir circuler librement et c'est un besoin essentiel pour elles. La construction d'installations conjointes modernes et l'embauche d'agents des douanes constituent, d'après nous, une solution avantageuse qui satisfera les deux groupes.

Merci.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Charette.

Nous allons maintenant entendre M. Lofthouse, analyste des politiques auprès de la Chambre de commerce du Canada.

M. Alexander Lofthouse (analyste des politiques, Chambre de commerce du Canada): Merci, monsieur le président.

Dommage que j'aie laissé ma balise à la maison mais j'espère que cela ne m'empêchera pas de faire quelques commentaires utiles.

Monsieur le président, mesdames et messieurs, je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous cet après-midi. Il est tout à fait opportun que le sous-comité examine cette question critique en ce moment. Je vais essayer de ne pas trop répéter ce qu'ont dit MM. Charette et Bescec, ni ce que vous avez entendu la semaine dernière.

Tout d'abord, il est important de faire remarquer, comme cela a d'ailleurs été mentionné, que les problèmes de gestion de la frontière canado-américaine sont bien antérieurs au 11 septembre. Il existait déjà de graves problèmes de personnel et d'infrastructure des deux côtés de la frontière canado-américaine bien avant le 11 septembre, à une époque où le 11 septembre était une date comme une autre. La Chambre de commerce avait signalé la plupart de ces problèmes il y a des années, tout comme l'avaient fait le vérificateur général et l'organisation que représente M. Charette. Cependant, si ces problèmes ne sont pas nouveaux, le 11 septembre a manifestement bouleversé la situation, et c'est ce qui explique notre présence ici aujourd'hui.

Le défi à court terme auquel fait face la gestion de la frontière canado-américaine découle principalement des mesures prises pour réagir aux événements du 11 septembre. Immédiatement après cette date, les postes frontaliers ont été fermés, il y a eu des embouteillages et les livraisons juste à temps ont été retardées. Nous le savons tous.

Nous craignons maintenant beaucoup que les ressources supplémentaires qui ont été consacrées à la frontière canado- américaine, en particulier du côté des États-Unis, vont disparaître bientôt, en particulier pour ce qui est des ressources humaines. De plus, l'apparence de «retour à la normale» que nous avons en ce moment est quelque peu illusoire, parce que le volume du trafic des voyageurs a baissé de 30 à 50 p. 100, selon le poste frontière considéré. La crainte est que, lorsque le trafic va reprendre complètement, nous soyons brutalement ramenés à la case départ.

• 1555

En plus de tout cela, il y a le fait que la situation est variable et tout à fait imprévisible. On peut visiter le site Web de l'ADRC ou du MAECI et constater que l'on prévoit aujourd'hui une attente de 15 minutes dans le tunnel qui relie Detroit et Windsor mais cette attente pourrait être de deux heures au moment où on arrive au tunnel. Il est impossible de le savoir tant qu'on n'est pas sur place. Ce genre d'incertitude nuit énormément au commerce. Cela veut dire que l'on ne peut être certain de faire circuler librement les personnes et les marchandises.

La Chambre de commerce du Canada va se réunir demain après- midi pour rencontrer son groupe de travail sur la frontière, auquel participent les chambres de commerce des différentes régions du Canada qui connaissent des difficultés de passage de la frontière. Je vais être mis au courant de la façon dont elles perçoivent la situation. Il demeure toutefois que tous nos membres, qu'il s'agisse d'entreprises ou de chambres de commerce—non pas seulement dans les collectivités situées près de la frontière, mais partout au Canada—nous disent que, si nous n'arrivons pas à résoudre les goulots d'étranglement à la frontière et si le passage de celle-ci n'est pas plus facile qu'il l'était avant le 11 septembre—la situation qui régnait à cette date n'était pas très bonne, nous voulons l'améliorer—nous risquons fort de voir des investissements quitter ou éviter le Canada et se diriger vers les États-Unis. Nous commençons à entendre des bruits de cette nature. La frontière joue un rôle stratégique dans ce domaine pour le Canada. Si l'on veut attirer les investissements étrangers et faire du Canada une base de départ pour les activités visant l'ALENA, il faut que la frontière ne soit pas un obstacle. Point à la ligne.

Vous avez déjà certainement entendu parler de l'établissement d'un périmètre de sécurité autour de l'Amérique du Nord. C'est une expression dont on parle beaucoup de nos jours mais personne ne s'entend sur ce que cela veut dire exactement. Je le reconnais. Je ne prétends pas avoir la définition de cette expression mais j'aimerais vous faire part de nos réflexions à ce sujet du point de vue des entreprises et de la façon dont nous avons examiné cette question jusqu'ici.

Les Canadiens partagent un continent avec les États-Unis. Nos économies sont inextricablement liées. C'est une donnée. Nous ne pouvons pas revenir en arrière et ce n'est pas non plus ce qu'il faut faire. Cela veut dire toutefois que les problèmes des Américains sont les nôtres, comme l'a mentionné M. Charette. Le contraire est toutefois également vrai. Cela veut dire aussi qu'il va falloir travailler ensemble pour résoudre nos problèmes, et collaborer sur tous les plans.

Si l'on veut réaliser ce périmètre de sécurité nord-américain, il va falloir un certain nombre de choses. Il va falloir tout d'abord améliorer la collaboration entre l'ADRC et le Service des douanes américain, entre CIC et le Service d'immigration et de naturalisation américain. Il se fait déjà beaucoup de choses au niveau opérationnel, et cela se fait discrètement. Il suffirait peut-être tout simplement d'améliorer la gestion et de mieux utiliser ce que nous avons déjà.

Il y a un autre aspect, dont vous avez déjà peut-être entendu parler, c'est d'avoir un système qui permette de mieux connaître les personnes et les marchandises qui s'approchent des rives de l'Amérique du Nord. En améliorant la coordination entre les services qui recueillent à l'avance des données provenant de l'étranger, il serait plus facile au Canada et aux États-Unis de déceler plus rapidement les secteurs où il risque d'y avoir des problèmes.

Le troisième aspect est la notion de périmètre de sécurité, et c'est une notion qui nous paraît importante, puisqu'elle implique que les deux pays tiennent compte des normes et des mesures prises par l'autre. Nous avons déjà des ententes communes dans divers domaines, comme la sécurité alimentaire, les normes industrielles, par exemple. Il est vrai qu'il n'est pas facile de conclure ce genre d'ententes, mais cela est possible. Pourquoi ne pas examiner, par exemple, la possibilité d'adapter les inspections effectuées par Douanes Canada aux besoins et aux critères américains, et vice et versa? C'est une façon qui nous permettrait de régler une bonne partie des problèmes auxquels nous faisons face.

J'ai parlé uniquement d'un modèle de périmètre de sécurité ou de zone de confiance, et je sais que le mot «périmètre» est quelque peu controversé. Toutefois, je ne voudrais pas que le débat sur la terminologie ou sur les étiquettes fasse passer au second plan les mesures que nous allons devoir adopter. Le point essentiel est que la plupart des éléments sur lesquels pourrait reposer un cadre conjoint plus large existent déjà. Nous pensons qu'avec un nouveau cadre de gestion unifié, nous renforcerions la collaboration des deux côtés de la frontière, ce qui améliorerait grandement la situation. Ce n'est pas une panacée mais nous pensons que cela serait utile.

Ces idées sont celles de la Chambre de commerce du Canada et d'une coalition qui regroupe quelque quarante associations d'entreprises. Vous avez peut-être entendu parler de la National Coalition for a Secure and Trade Efficient Border. Les membres de ce regroupement examinent ensemble les questions reliées à la frontière et vont collaborer avec le gouvernement fédéral pour trouver de nouvelles idées et de nouvelles solutions. L'organisme que je représente, la Chambre de commerce du Canada, participe activement à cette initiative. Comme vous le savez peut-être, nous avons trois groupes de travail—douanes, sécurité et immigration et transports—qui vont élaborer des recommandations précises sur les questions liées à la frontière au cours des semaines qui vont venir.

Le comité directeur du regroupement a rencontré l'ambassadeur des États-Unis, M. Paul Cellucci, cette semaine. Je n'ai pas assisté personnellement à cette rencontre parce que je me trouvais au Michigan mais je pense qu'ils ont procédé à un bon échange de vues sur la situation actuelle à la frontière. L'ambassadeur a également exprimé à nouveau l'importance que représentait pour son gouvernement la sécurité dans les ententes qui seront éventuellement conclues à ce sujet, et que cela représente la priorité des Américains, comme l'a dit M. Charette. Il est très important de bien comprendre cela.

Notre prochaine étape va être de rencontrer les députés des comtés frontaliers mardi prochain. Je crois savoir que votre collègue Susan Whelan va nous aider à organiser cette réunion et nous en sommes très heureux.

Je vais résumer tout cela et nous pourrons ensuite passer aux questions.

• 1600

La Chambre de commerce du Canada estime que notre objectif devrait être de faciliter et d'optimiser la circulation à la frontière, ce qui fait appel à une série d'éléments. Nous pensons que le périmètre de sécurité est un de ces éléments, tout comme l'amélioration des technologies. Il faut lancer en même temps plusieurs initiatives. Il faut gérer et réduire le risque. Il faut faciliter les échanges. Il faut que les personnes puissent facilement traverser la frontière lorsqu'elles le font pour des fins normales et légitimes. Si nous y parvenons, nous améliorerons la sécurité de tous les Canadiens. Nous pourrons également renforcer la sécurité des entreprises et nous réussirons à faire en sorte que la frontière canado-américaine demeure la plus longue frontière non défendue au monde.

Nous ne voulons pas être séparés par une clôture. Malgré l'attitude défensive qu'ont adoptée les États-Unis, je ne pense pas que les États-Unis aimeraient vraiment construire une clôture. C'est toutefois à nous de veiller à ne pas leur donner d'excuse pour le faire.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Nous allons passer aux questions. J'ai M. Casson, M. Duncan, M. Paquette, M. Lunn et Mme Longfield.

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.

Messieurs, je vous remercie de nous avoir présenté ces exposés. Vous avez mentionné Coutts, qui se trouve dans ma circonscription. Je pense qu'il y a cinq postes frontaliers. Coutts est le plus important, bien sûr, et c'est le plus commercial, j'aimerais parler de pré-dédouanement des marchandises et recevoir vos commentaires à ce sujet.

Tout d'abord, vous avez mentionné qu'il faudrait d'après vous 1 200 agents de plus pour les voyageurs et 400 pour les camions. Combien y en a-t-il à l'heure actuelle?

M. Serge Charette: En ce moment, il y a 2 400 inspecteurs des douanes du côté des voyageurs et près de 1 000 du côté commercial.

M. Rick Casson: Vous demandez donc une augmentation de 50 p. 100.

M. Serge Charette: Nous demandons une augmentation qui est bien inférieure à celle que proposent les Américains. Ils envisagent de multiplier par trois le nombre de leurs agents.

M. Rick Casson: Savez-vous combien cela coûterait par an?

M. Serge Charette: Le salaire d'un agent est d'environ 50 000 $, et multiplié par l 600, cela donne environ 80 millions de dollars.

Le président: Cent millions de dollars environ.

M. Serge Charette: Oui, à peu près 100 millions de dollars.

M. Rick Casson: Pour ce qui est du pré-dédouanement des marchandises, vous avez proposé, dans vos commentaires, que l'on choisisse un endroit distinct où l'on pourrait sceller ou inspecter ces chargements. Que pensez-vous d'utiliser cette méthode plus en amont, au point de chargement, dans les entreprises qui envoient tous les jours ces chargements et qui en dépendent pour leur survie? Pourquoi ne pas effectuer ces opérations à ce moment-là? Je ne sais pas si cela a déjà été envisagé.

Au poste frontalier de Coutts, il y a des centaines de chargements de produits agricoles qui passent tous les jours. Je dirais qu'il y a sans doute 80 chargements de bétail sur pied qui vont vers le sud pour y être abattus, il y a les céréales en vrac, le blé en vrac, il y a du foin... Ces camions ne devraient même pas avoir à ralentir pour traverser la frontière. Il faudrait peut-être que ces entreprises prennent une assurance de cautionnement ou quelque chose du genre mais on pourrait sceller les remorques au point de chargement et les laisser partir ensuite. Cela a-t-il déjà été envisagé?

M. Serge Charette: Je ne sais pas si l'agence y a déjà pensé. Je dirais que...

M. Rick Casson: Cela ne serait peut-être pas dans votre intérêt.

M. Serge Charette: Nous pensons que les Canadiens risquent gros ici. C'est pourquoi nous sommes venus présenter notre point de vue. Il nous paraît essentiel de protéger les intérêts économiques du Canada et cela est plus important que nos préoccupations particulières.

Je ne pense pas que cela constitue un problème grave pour nos membres, parce qu'il y a beaucoup de travail à faire à la frontière, que ce soit dans le domaine de l'application de la loi ou ailleurs. Nous ne pensons pas que cela se fasse à l'heure actuelle, parce que nous inspectons beaucoup de chargements de ce genre qui ne méritent pas vraiment d'être inspectés ainsi.

En outre, du côté commercial, on pourrait nous communiquer beaucoup de renseignements avant que les marchandises n'arrivent au Canada, et nous pouvons faire notre travail avant que ces marchandises n'entrent au Canada. Cela ne modifierait pas le nombre des inspecteurs de douanes dont nous avons besoin. En fait, il en faudrait sans doute davantage. Il faudrait examiner les données qui nous arrivent pour déterminer s'il s'agit de marchandises à risque élevé, à risque faible ou à risque inconnu.

Cela ne devrait pas nous nuire. Mais c'est effectivement une possibilité que l'agence pourrait et devrait examiner. Je ne pense pas qu'il y aurait une réponse négative de notre part, parce que nous pensons qu'il y a d'autres aspects dont nous devons également nous occuper.

• 1605

M. Rick Casson: J'aimerais poser une autre question, monsieur le président, si vous le permettez.

Cela fait déjà pas mal de temps que l'on examine le poste frontalier de Coutts et l'on parle depuis des années de construire un nouvel édifice, un édifice commun. Ils ne peuvent même pas se mettre d'accord sur les lieux auxquels les agents des douanes américains peuvent avoir accès, parce que ces agents ont des revolvers. Il y a tant de détails à régler et d'irritants à supprimer, cela fait des années que l'on essaie de s'entendre et nous en sommes pratiquement arrivés au point où nous allons commencer à construire ce complexe.

Vous avez dit que les Américains faisaient notre travail parce qu'ils vérifiaient les gens qui quittaient les États-Unis. S'ils continuent à faire ce travail et à tripler le nombre des personnes qui vont l'effectuer, est-il vraiment nécessaire que nous fassions la même chose? Devons-nous vraiment faire ce que vous proposez si les Américains sont prêts à effectuer ces vérifications? Allons- nous devoir faire la même chose qu'eux lorsque ces gens arrivent de notre côté?

M. Serge Charette: Je crois que oui, parce qu'ils n'appliquent pas les mêmes règles que nous. Je pourrais vous donner plusieurs exemples, notamment les armes à feu. Aux États-Unis, les armes à feu sont une chose tout à fait courante et ils les acceptent très facilement. Nous avons beaucoup de restrictions de notre côté. En fait, je crois que l'on pourrait même parler maintenant de prohibition.

Il y a aussi le fait que les Américains ne recherchent pas l'alcool, le vin, les cigarettes, ou les choses du genre parce que ce sont des achats qui se font aux États-Unis et il n'est pas illégal de passer ces produits de l'autre côté de la frontière canado-américaine. Cependant, une fois de notre côté, nous devons nous assurer que ces voyageurs ont agi correctement, et qu'ils n'apportent pas trop d'alcool et de cigarettes, parce que cela serait illégal.

Par exemple, nous venons tout juste de commencer à imposer des droits supplémentaires sur les produits du tabac, y compris sur les cartouches de cigarettes. Si vous avez quitté le pays pendant 48 heures et que vous avez le droit de rapporter des cigarettes hors taxes, nous sommes obligés de vous renvoyer à l'inspection secondaire parce que nous percevons maintenant dix dollars sur ce qui était auparavant une cartouche de cigarettes hors taxes. Tous les gens qui reviennent de vacances et qui ramènent des cigarettes doivent maintenant passer l'inspection secondaire. Nous n'avons pas le personnel pour le faire, mais cela est un problème grave. En fait, il arrive souvent aujourd'hui que les inspecteurs des douanes fassent semblant de ne rien voir, si vous n'avez qu'une seule cartouche.

M. Rick Casson: Merci, monsieur le président.

Le président: Merci.

[Français]

Monsieur Paquette, la parole est à vous.

M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Je voudrais d'abord m'excuser auprès des témoins parce que je devrai partir dans quelques instants. Je les remercie évidemment d'être venus rencontrer le comité.

Je suis tout à fait d'accord avec M. Lofthouse lorsqu'il dit qu'il ne faut pas s'arrêter à la terminologie quand on parle d'un périmètre de sécurité, mais il me semble que c'est une question qu'il faut aborder très sérieusement.

J'ai l'impression que le Canada aurait intérêt à entamer des discussions avec ses partenaires de l'ALENA afin d'en arriver à s'entendre sur les objectifs de sécurité. Je ne dis pas qu'il faut nécessairement s'entendre sur les modalités tant par rapport aux politiques d'immigration que par rapport aux politiques de réfugiés. Il faudrait déterminer les objectifs communs que nous visons afin d'assurer notre sécurité. On sait que la situation ne se réglera pas du jour au lendemain. On devrait donc entreprendre ce processus, d'autant plus qu'un certain nombre de pays européens ont déjà des accords de ce genre, les accords de Schengen, qui pourraient nous inspirer dans cette démarche.

Je voudrais que vous nous donniez quelques détails là-dessus. Pensez-vous que le gouvernement canadien devrait s'asseoir immédiatement avec ses partenaires de l'ALENA et commencer à discuter de ces choses-là, ou est-ce trop tôt? Devrait-on se contenter pour l'instant de la mise en application des mesures prévues à la loi S-23, une loi sur laquelle on est tout à fait d'accord pour ce qui est des objectifs? J'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Alexander Lofthouse: Merci, monsieur. Je vais répondre en anglais si ça ne vous dérange pas. Je me sens plus à l'aise en anglais.

[Traduction]

Je m'exprime mieux en anglais.

[Français]

M. Pierre Paquette: Moi, c'est le contraire. Je m'exprime mieux en français.

[Traduction]

M. Alexander Lofthouse: Je vais commencer par dire que je suis d'accord avec vous. Il faut démarrer ce dialogue le plus tôt possible. Il ne faut pas attendre. Comme on l'a dit, les pressions augmentent, et elles augmentent tous les jours. C'est ma première réaction.

• 1610

Deuxièmement, je ne pense pas que l'un exclut l'autre. Je ne pense pas qu'il faille mettre en place un périmètre de sécurité ou d'autres mesures. En fait, ces différentes mesures se complètent fort bien.

Rien ne nous empêche de progresser dans différentes directions. En fait, c'est ce que nous allons devoir faire parce que, comme nous le savons, le commerce international est une activité extraordinairement complexe. Ma tête me tourne un peu lorsque l'on parle de toutes les taxes qu'il faut percevoir sur une cartouche de cigarettes. Bien évidemment, il faut agir dans plusieurs directions, en particulier parce qu'il y a des choses que l'on peut faire immédiatement, comme embaucher des agents supplémentaires ou modifier les pratiques mais qu'il y en a d'autres qui ne peuvent être résolues qu'à moyen et à long terme.

Je voudrais également rappeler qu'il y a certains aspects que nous pourrons aborder sur une base trilatérale, entre partenaires de l'ALENA, et que pour d'autres, cela ne sera pas possible. La réalité est que la frontière canado-américaine est très différente de la frontière mexico-américaine. Il est vrai que nous partageons un espace économique commun, mais la distance physique et la distance sociale et économique qui existent entre ces deux frontières est très vaste. Il n'empêche qu'il y aura des sujets de discussion que nous pourrons aborder avec nos partenaires de l'ALENA et nous pourrons prendre des mesures trilatérales. Lorsqu'il s'agira de gestion de la frontière, des contrôles à la frontière, il faudra procéder de façon bilatérale parce que ces deux frontières sont trop différentes.

Mais si on me demandait s'il faut au moins dialoguer avec nos partenaires américains pour prendre de nouvelles mesures, je vous répondrais oui, absolument.

M. John Bescec: Pour revenir au périmètre de sécurité, il y a deux choses qui sont exclues pour ce qui est de la frontière canado-américaine. Il ne faut pas la fermer et la circulation des marchandises ne doit pas être ralentie. Il faut prendre un peu de recul et réfléchir aux produits que nous voulons essayer d'empêcher d'arriver au Canada et qui viennent des États-Unis. Il y a des marchandises réglementées, des marchandises interdites, mais pour ce qui est des marchandises commerciales habituelles, contre quoi cherchons-nous à nous protéger? Essayons-nous d'arrêter la contrebande? Oui. Il faut néanmoins reconnaître que la plupart des marchandises qui traversent la frontière tous les jours, en grande quantité, sont des marchandises tout à fait légitimes. Nous consacrons beaucoup de ressources à l'inspection de ces marchandises alors que nos points d'entrée avec l'étranger, nos aéroports, nos ports, n'ont pas des ressources suffisantes pour examiner les marchandises qui rentrent par ces points d'entrée.

Il faut que les autorités canadiennes et les autorités américaines collaborent davantage pour qu'elles arrivent à s'entendre sur certains aspects commerciaux. Il est vrai que nous sommes obligés d'examiner les produits qui sont réglementés ou interdits par les lois canadiennes mais pour l'immense majorité des marchandises, on pourrait adopter des méthodes qui accéléreraient la circulation des marchandises. Nous n'avons pas besoin d'inspecter certains produits pour lesquels nos normes sont pratiquement identiques, lorsqu'elles ne le sont pas déjà tout à fait.

Demandons davantage aux entreprises. L'idée de sceller une remorque à la sortie de l'entreprise me paraît bonne. Il y a toujours un risque, cela dépend du chauffeur. Qu'est-ce qui empêche le chauffeur de s'arrêter quelque part au lieu de se rendre directement à la frontière? Il faudrait approfondir cet aspect.

Les entreprises ont intérêt à ce que leurs expéditions ne contiennent pas de produits de contrebande. L'ADRC commence à mieux comprendre comment fonctionnent les entreprises et l'agence commence à leur faire confiance. Certaines entreprises seront autorisées à faire certaines choses, elles seront reconnues comme étant des entreprises qui se comportent en bons citoyens et ce statut s'accompagnera d'un certain nombre d'avantages. Elles devraient avoir le droit de dédouaner rapidement leurs marchandises, tant à l'importation qu'à l'exportation, et la même chose devrait se faire du côté américain.

Si l'économie ralentit, cela aura de graves conséquences pour le Canada. Toutes nos discussions n'auront servir à rien parce qu'il faudrait essayer de trouver du travail pour les Canadiens et non plus essayer de renforcer la sécurité de notre frontière.

[Français]

Le président: On passe à M. Charette.

M. Serge Charette: Merci beaucoup.

Monsieur Paquette, les membres que je représente ne sont pas du tout opposés au concept du périmètre. En fait, je pense que ce que l'on veut obtenir avec ce concept, c'est d'éviter que l'on fasse du travail deux fois pour rien. Je pense que, compte tenu de l'état actuel des choses, on ne peut pas nier le fait qu'il y a du travail qui doit être accompli deux fois. Toutefois, il n'y en a pas tant que ça.

• 1615

Pour ce qui est du transport de la marchandise en transit, lorsque cette marchandise arrive à Halifax et qu'elle s'en va aux États-Unis, par exemple, elle est déchargée, mais elle n'est pas vérifiée à Halifax. Le conteneur est mis sous scellés et est acheminé aux États-Unis. Il est vérifié seulement à son arrivée du côté américain. La même chose se produit quand la marchandise arrive à New York pour être livrée, par exemple, à Montréal.

Il y a certainement un double emploi, mais cela ne se produit peut-être pas aussi souvent qu'on peut le croire à prime abord. On ne s'oppose pas du tout à ça. Par contre, on pourrait s'opposer à ce qu'on élimine la frontière canadienne, parce qu'en éliminant la frontière canadienne, on éliminerait du même coup beaucoup de vérifications qui doivent être faites présentement par les douaniers canadiens.

Comme je le mentionnais plus tôt, il y a, par exemple, les armes à feu, les armes en général. Au Canada, 50 p. 100 des armes à feu qui sont utilisées dans certains crimes proviennent des États-Unis. Il y a donc certainement un problème qui existe quant aux armes à feu de provenance américaine. C'est tellement facile d'obtenir des armes à feu du côté américain et tellement difficile de les obtenir du côté canadien, surtout depuis que ces armes doivent être enregistrées, que l'on s'attend à une augmentation du nombre d'importations d'armes à feu.

À la frontière, on arrête maintenant les gens en état d'ébriété, chose que l'on ne faisait pas avant 1998, et les gens qui essaient de quitter le Canada avec leurs enfants alors que ceux-ci ont été confiés à l'autre parent. Il y a beaucoup de raisons très valables pour maintenir et la douane canadienne et la douane américaine à la frontière. Je suis convaincu que les Américains ne voudraient pas, eux non plus, laisser disparaître la frontière canado-américaine.

Ce que je vous suggérerais, par contre, et je l'ai déjà mentionné devant un autre comité, ce serait d'avoir, pour les voyageurs qui arrivent au Canada, des guérites spécifiquement réservées aux Canadiens et autres résidants nord-américains, et d'autres pour les personnes qui viennent d'autres pays. Cela pourrait nous aider à nous occuper plus rapidement des gens qui reviennent au Canada et qui sont des résidants canadiens ou des résidants nord-américains, et à porter une attention plus particulière à ceux qui ont des passeports, etc.

Il existe de bonnes méthodes de travail que l'on pourrait adopter. Elles n'ont pas encore été envisagées, mais je considère que ces mesures seraient très appropriées présentement en raison des incidents que nous avons connus.

M. Pierre Paquette: Les exemples que vous nous apportez sont très intéressants. Je pense que l'on a intérêt à entreprendre des discussions avec les Américains afin qu'ils s'aperçoivent que ce n'est pas aussi beau, dans leur cour, que ce qu'ils nous disent.

J'ai de la famille qui demeure présentement à New York. Il y a une propagande extraordinaire qui est véhiculée disant que l'on entre comme on le veut au Canada. On cherche un bouc émissaire actuellement.

Vous avez raison quand vous parlez des armes à feu, mais pensons un peu aux réfugiés aussi. Il y a entre 40 et 50 p. 100 des réfugiés qui arrivent au Canada par les États-Unis parce que le visa de touriste est plus facile à obtenir aux États-Unis qu'au Canada.

Dans le cadre de ces discussions, il va falloir que les Américains se regardent eux aussi dans le miroir et qu'ils voient leurs propres faiblesses au niveau de la sécurité. On aura peut-être aussi des ajustements à faire. Là où on ne s'entendra pas, on maintiendra effectivement des contrôles douaniers. Si, par contre, on peut arriver à harmoniser un certain nombre d'objectifs... Je parle bien d'objectifs parce qu'on peut concrétiser ces objectifs de toutes sortes de façons. C'est aussi pour ça que je pense qu'il sera important d'inclure, à un moment donné, les Mexicains dans la discussion, parce que ces objectifs devraient un jour être des objectifs nord-américains et pas seulement des objectifs propres au Canada et aux États-Unis.

J'ai bien apprécié vos commentaires. Encore une fois, je m'excuse, mais je dois partir.

Le président: Avant de vous retirer, monsieur Paquette, vous vous souviendrez qu'il y avait eu une motion voulant que l'on ait une autre réunion pour discuter du Costa Rica. M. Lunn va probablement proposer que l'on adopte le troisième rapport du sous-comité en ce qui concerne la question du sucre. On va d'abord présenter ce rapport au comité permanent et on le présentera ensuite au Parlement.

M. Pierre Paquette: Est-ce qu'il y a quorum?

Le président: Oui, il y a quorum.

M. Pierre Paquette: Heureusement qu'on est là.

Le président: Je compte six personnes. On a encore des gens.

[Traduction]

Monsieur Lunn, voulez-vous proposer le...?

M. Gary Lunn: Oui.

(La motion est adoptée)

Le président: Très bien, vous pouvez partir maintenant.

M. Pierre Paquette: Le président fera rapport au comité plénier?

• 1620

Le président: Je ferai rapport en votre nom au comité plénier, et j'espère que nous pourrons présenter rapidement un rapport à la Chambre.

Je demande aux témoins de nous excuser.

Monsieur Lunn.

M. Gary Lunn: Merci, monsieur le président.

J'ai trouvé tous ces exposés très intéressants.

Tous les autres comités s'occupent de cette question, monsieur le président, et tous nos collègues. S'il y a un thème commun que l'on retrouve à la Chambre, dans les comités, dans nos circonscriptions électorales, c'est qu'il est impératif d'assurer la libre circulation des personnes et des biens entre le Canada et les États-Unis. C'est le défi auquel nous faisons face. Bien sûr, le monde dans lequel nous vivons n'est plus le même.

Je vais lancer quelques idées et je vous demanderais ensuite de faire des commentaires.

Premièrement, je crois que M. Lofthouse a touché juste lorsqu'il dit qu'il faut procéder en même temps à la mise en place du périmètre de sécurité et au renforcement de la sécurité de la frontière.

J'aimerais avoir vos idées sur ce point mais je vais vous faire part de mes commentaires que j'ai entendus. Je vis dans une ville frontalière, même si c'est un port de mer. C'est très important...

Je ne pense pas qu'il y ait des gens qui pensent que notre frontière terrestre va disparaître. J'ai par contre le sentiment qu'ils aimeraient beaucoup que nous renforcions notre sécurité. J'aimerais avoir vos idées sur ce que nous devrions faire pour améliorer la sécurité de nos aéroports internationaux et de nos ports, pour que la frontière terrestre entre le Canada et les États-Unis soit tellement ouverte que les produits puissent la traverser encore plus facilement qu'ils le faisaient avant le 11 septembre et pour que nous en arrivions à un point où les contrôles ponctuels suffisent.

M. Casson a parlé des bétaillères qui traversent la frontière. Ces camions la traversent régulièrement. On utilise un système qui permet de procéder aux inspections et au dédouanement avant la frontière, et de cautionner le transporteur, même s'il faut faire de temps en temps quelques contrôles ponctuels pour compléter le processus. Nous allons prendre de l'assurance et nos partenaires de l'ALENA vont également s'apercevoir que nous avons mis en place un système qui va dans cette direction, et cela leur redonnera confiance. C'est là je crois qu'est le défi et c'est la direction dans laquelle nous devons aller.

Le sujet qui est à l'ordre du jour aujourd'hui, ce sont les retards à la frontière canado-américaine. Je me trompe peut- être—et je ne suis pas un expert dans ce domaine—mais je ne pense pas que nos ports posent un grave problème. Ils ne voient pas passer beaucoup de voyageurs, ils sont plus actifs du côté des marchandises et des produits.

M. Serge Charette: L'été, il y a beaucoup de navires de croisière.

M. Gary Lunn: Voilà qui est intéressant.

Nos aéroports s'occupent davantage des voyageurs, si on les compare à nos ports, même s'il y a également des marchandises qui transitent par nos aéroports.

J'aimerais savoir ce que vous pensez de la technologie. Quelles sont les possibilités que nous devrions examiner, même unilatéralement, pour modifier et accélérer les contrôles dans nos ports et nos aéroports, pour que les gens aient davantage confiance et que la frontière entre le Canada et les États-Unis soit plus ouverte? Si l'on veut que les biens et les personnes circulent plus librement qu'elles le faisaient avant le 11 septembre, quelles sont les solutions que nous devrions, d'après vous, étudier dans le but de supprimer les files d'attente dans les ports et les aéroports?

M. Serge Charette: Le projet de loi S-23 me paraît être une mesure qui va dans la bonne direction. C'est ce que nous avons dit au comité qui examinait ce projet de loi. Il prévoit l'acquisition de nouveaux appareils, et nous espérons que cela ne se limitera à quelques appareils électroniques et autres gadgets. Nous espérons que ces appareils vont véritablement nous permettre d'inspecter les marchandises.

Vous avez parlé des ports. La plupart des conteneurs qui transitent par les ports, j'en ai parlé dans mon exposé, sont remplis à l'aide d'ordinateurs. Ils sont tellement pleins qu'ils ne restent pas un endroit de libre dans ces conteneurs. Si on ouvre un conteneur, cela devient un casse-tête. Il est pratiquement impossible de le refermer à moins de procéder, comment devrais-je dire, de façon méticuleuse. Il faut avoir l'équipement nécessaire. La plupart des appareils dont nous disposons ne permettent pas de le faire.

• 1625

Il faut investir davantage dans l'équipement et dans les locaux pour que l'on puisse examiner ces marchandises lorsque cela est nécessaire. Bien évidemment, il ne s'agit pas de tout examiner, mais nous ne devrions pas procéder aux inspections à la frontière. Lorsque nous faisons des inspections à la frontière, cela ralentit le trafic. Nous pouvons inspecter un ou deux camions, mais pas plus.

Nous avons besoin d'installations plus vastes, et d'installations qui ne devraient pas se trouver à la frontière. Elles pourraient être situées du côté américain ou du côté canadien, à quelque distance de la frontière, de façon à ce qu'elles ne ralentissent pas la circulation des autres marchandises qui entrent.

Nous avons besoin d'appareils capables de décharger et de recharger rapidement les camions pour qu'ils repartent. Les douanes ne doivent pas être un obstacle. Nous le savons et les inspecteurs des douanes le savent aussi. Avec l'équipement et le personnel nécessaires, nous pourrions examiner des quantités impressionnantes...

Écoutez, il y a 1,3 milliard de dollars de marchandises qui passent la frontière tous les jours. Cela fait beaucoup d'appareils de télévision, de cuisinières, de bétail, par exemple. Le volume des marchandises dont nous nous occupons tous les jours est difficile à imaginer. Avec l'équipement actuel, nous ne pouvons en inspecter qu'une très faible partie, et nous le faisons au hasard dans le meilleur des cas. C'est ce que les Américains n'aiment pas.

Si nous avions l'équipement et le personnel, les Américains seraient convaincus que nous faisons du bon travail et je ne pense pas qu'ils réagiraient comme ils le font en ce moment. En fait, ils n'auraient pas pu se servir de nous comme d'un bouc émissaire, et je reconnais que c'est ce qu'ils ont fait, ce qui a été très pratique pour eux.

M. Alexander Lofthouse: Si vous le permettez, je vais revenir sur certains commentaires de M. Charette et aussi sur des observations faites par certains membres du comité.

Vous avez raison. Il est important de bien savoir ce dont on parle lorsqu'on parle de périmètre de sécurité. Il ne s'agit pas de supprimer la frontière entre le Canada et les États-Unis. Je tiens à ce que le compte rendu mentionne que ce n'est pas ce que nous voulons dire.

Il s'agit plutôt que lignes de défense successives. Il est vrai que nous parlons encore des aspects théoriques mais ce périmètre nord-américain, ces normes et procédures communes représenteraient la première ligne de défense tandis que la frontière canado-américaine actuelle représenterait la ligne de défense suivante, en cas de besoin. Voilà à quoi nous pensons et je crois que cela va dans le sens de vos observations.

Pour ce qui est des mesures concrètes, je vais lancer quelques idées. M. Charette en connaît beaucoup plus que moi dans ce domaine mais nous avons déjà eu ce genre de discussions entre nous à la chambre de commerce.

Il y a un fait qu'il faut accepter, et les Américains vont devoir l'accepter aussi; s'il vous arrive un jour de visiter un port comme Los Angeles, vous verrez le nombre de navires qui arrivent tous les jours, les autorités portuaires font face aux mêmes problèmes que les agents des douanes—il est important d'accepter qu'il ne sera jamais possible d'inspecter tous les passagers et tous les produits qui traversent la frontière. Cela est impossible. Cela veut dire qu'il faut consacrer les ressources sur les zones où le trafic est plus intense et les risques plus élevés, en fonction d'une stratégie de gestion des risques qui soit adaptée. C'est ce qu'il faut faire.

Mon chef aime bien l'Australie. Il y a passé des années et il m'a parlé du système qu'utilise le service des douanes de la Nouvelle-Zélande. Il s'est familiarisé avec ce système quand il voyageait entre l'Australie et la Nouvelle-Zélande.

Ils ont un système de manifestes informatisés. Avant qu'un porte-conteneurs n'entre dans les eaux territoriales de la Nouvelle-Zélande, il doit transmettre à l'avance un manifeste. Lorsque le navire arrive au port, les agents des douanes ont déjà examiné le manifeste pour voir si tout est normal. Lorsque le navire entre au port, les agents des douanes peuvent demander à voir le conteneur 1, le conteneur 4 et le conteneur 10. En disposant de tous ces renseignements à l'avance, il est plus facile de prendre des décisions au sujet des ressources qu'il faut consacrer à une situation donnée.

L'autre idée qu'il serait peut-être bon d'explorer davantage est celle qu'a proposée tout à l'heure M. Charette, celle qui consisterait à accorder un traitement particulier aux Canadiens et aux citoyens américains dans les aéroports. Cela se fait déjà en Europe. Si vous avez déjà été dans un aéroport européen, vous savez comment c'est. Si vous avez un passeport européen, vous vous mettez dans la file des Européens. Dans certains aéroports, si vous êtes en transit vers une autre destination européenne, il y a une file spéciale et tous les autres passagers vont dans une autre file. Malheureusement, à chaque fois, je suis forcé de prendre la file réservée aux autres.

• 1630

C'est un système qui permet aux Européens d'accélérer le contrôle des passagers. Les autorités regardent l'origine des vols et savent que, si le vol vient de Montréal, il y aura des citoyens européens et d'autres citoyens, certains étant en transit, d'autres non, selon l'aéroport concerné. Ils savent quels sont les inspecteurs qu'ils doivent prévoir pour ce vol et ils ne laissent pas les 300 passagers descendre de l'avion et se placer tous dans la même file. Il est vrai que nous le faisons déjà un peu mais nous pourrions probablement adopter un système de ce genre, tout en protégeant l'intégrité de notre espace économique nord-américain.

Quoi qu'il en soit, je crois qu'il serait bon d'examiner davantage ces deux idées.

M. John Bescec: Je vais ajouter quelques commentaires au sujet des conteneurs.

Je ne sais pas si le taux de succès de l'inspection des conteneurs par les douanes est un chiffre public ou non. Je sais que les renseignements qui ont été obtenus auprès des autorités des douanes à l'étranger sont confidentiels mais quelle est l'efficacité de nos procédures actuelles d'inspection? Nous envisageons d'augmenter le nombre des inspections sur les conteneurs, de déplacer les conteneurs vers d'autres installations où l'on puisse effectuer ces inspections. Il ne faut pas toutefois oublier que cela coûte très cher.

En ayant davantage recours à la technologie, ne serait-il pas possible de cibler davantage les inspections ou de les effectuer au moment du chargement? Bien sûr, nous n'allons pas tout inspecter mais l'on pourrait mieux cibler les inspections en utilisant davantage la technologie, comme les scanners à rayon gamma, ou à rayons X, je ne sais pas quel est le terme technique correct. Il est possible d'intervenir au moment où les conteneurs sont déchargés.

Nous ne proposons pas de supprimer la frontière canado- américaine mais nous devons viser une frontière efficace, une frontière qui s'appuie davantage sur la technologie. Les entreprises utilisent de plus en plus la technologie et le service des douanes devrait également le faire. Nous ne devrions pas continuer à lui consacrer toutes ces ressources, aussi bien humaines que financières, tout en conservant la même infrastructure et le même genre d'équipement.

Il faut prévoir des mécanismes de vérification et de dédouanement avec lesquels le chauffeur d'un camion a simplement à passer une carte électromagnétique dans un appareil pour que les douanes américaines et les douanes canadiennes reçoivent ces renseignements de façon électronique et pour que la marchandise puisse alors traverser la frontière. Cela est faisable. La technologie existe, les ressources peuvent être redéployées vers les secteurs où les risques sont élevés, d'après les données dont nous disposons.

Nous pouvons effectivement faire des choses. Personne ne s'oppose à ces grandes initiatives. Il faut travailler ensemble pour régler les questions opérationnelles, parce que c'est toujours là que les choses se compliquent, aussi bien au Canada que de l'autre côté de la frontière.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lunn.

M. Gary Lunn: Merci, monsieur le président.

Le président: Judi.

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Merci.

Lorsqu'on prend la parole à la fin, la plupart des questions qu'on avait préparées ont déjà été posées.

Monsieur Charette, ces centres de dédouanement constituent une solution à long terme. Ils ne vont pas apporter une solution à court terme mais nous devons faire quelque chose tout de suite. Si nous ne résolvons pas les problèmes à court terme, nous n'aurons plus besoin de solutions à long terme. Comme deux autres témoins l'ont indiqué, les entreprises vont tout simplement déménager dans le Sud et nous n'aurons plus rien à faire.

Combien de temps faudrait-il, d'après vous, pour ces centres de dédouanement soient fonctionnels? Combien coûteraient-ils? Cela ne reviendrait-il pas à tout simplement repousser un peu plus loin les files de camions? Va-t-on vraiment accélérer la circulation des marchandises à la frontière?

Je vis à l'extérieur de la région métropolitaine de Toronto et il me fallait toujours attendre une heure et demie pour passer Pickering. Il y a maintenant une autoroute à quatre voies mais je dois maintenant attendre une heure et demie à Ajax au lieu de Pickering. On n'obtient pas toujours les résultats escomptés. J'aimerais avoir vos commentaires sur ce point.

Je vais présenter toutes mes observations et vous pourrez ensuite y répondre.

Monsieur Lofthouse, vous avez parlé de travailler plus efficacement, avec une administration plus efficace. Je me demande si vous avez pensé au rail et aux ferries, en particulier sur les Grands Lacs, parce que les inspecteurs des douanes pourraient se trouver à bord des ferries et dédouaner la plupart des expéditions. C'est la même chose avec le rail. Il semble toutefois y avoir beaucoup de résistance.

Je ne veux pas critiquer les camionneurs mais chaque fois que je mentionne qu'il existe d'autres moyens plus faciles de faire circuler les marchandises et les services, la première chose qu'on me dit est que les camionneurs vont s'y opposer vigoureusement. Je sais que, lorsque les entreprises comme General Motors et les autres veulent prendre ce genre de mesures, elles ont des difficultés avec les gens à qui elles ont confié les livraisons.

Je veux savoir s'il n'y aurait pas moyen de mieux utiliser le rail et les ferries, en particulier les ferries sur les Grands Lacs.

• 1635

Ma dernière question s'adresse à vous, monsieur Bescec. Vous avez répété plusieurs fois que nous avons envoyé un message clair, un message unique. Quel est ce message d'après vous? Il n'est pas difficile de parler de cela mais je crois que nous essayons tous de savoir quel est ce message. Du point de vue canadien, il est évident que nous avons essayé de faire comprendre que la circulation des marchandises et des services était un besoin essentiel pour nous, et que la frontière ne devait pas être un obstacle.

Mon dernier commentaire porte sur le fait que nous devons veiller à faire une différence entre deux catégories différentes, lorsque nous parlons de frontière. Il y a d'un côté, les marchandises et de l'autre, les voyageurs. À cause du 11 septembre,... il faut savoir quels sont ceux qui traversent la frontière. Qui sont-ils? Quelle est leur nationalité? Ont-ils le droit d'être ici? Ont-ils un motif légitime de se trouver dans notre pays? Y a-t-il un endroit où l'on peut remettre des visas de sortie aux voyageurs, un endroit qui serait à part...? Je ne pense pas que les Américains fassent cette différence. Je crois qu'ils demandent des visas de sortie tant pour les voyageurs que pour les biens et les services. Ne devrait-on pas faire une différence entre les deux?

Voilà les questions que je voulais poser.

Le président: Je propose de donner la parole à M. Charette et ensuite à John.

M. Serge Charette: Pour ce qui est des installations dont nous avons parlé, elles représentent certainement davantage une solution à moyen et à long terme qu'une solution à court terme. Je pense toutefois que cela offrirait de grands avantages à court terme dans le sens que nous pourrions montrer aux Américains que nous ne pensons pas uniquement au court terme, mais également au moyen et au long terme, et que nous reconnaissons que leurs inquiétudes sont en partie légitimes. Nous pourrions ainsi leur montrer que nous recherchons des solutions. Cela suffirait peut-être à les encourager à regarder d'un oeil favorable les solutions à court terme. Je suis convaincu que cela serait très avantageux dans l'immédiat, pourvu que ce soit expliqué correctement aux Américains et pourvu qu'ils reconnaissent les avantages qu'offrirait à long terme une telle solution.

Un des autres avantages découlerait du fait que nous proposons que les agents des douanes travaillent côte à côte. Il y aurait des agents qui travailleraient pour le gouvernement américain et qui pourraient vérifier que les Canadiens font bien ce qu'ils doivent faire.

Il y aurait donc manifestement des avantages à court terme, mais les effets se feraient principalement sentir à moyen et à long terme. Je parle de moyen et de long terme parce que je ne pense pas que nous allons commencer demain matin à construire ces six ou douze centres douaniers. Il faudrait commencer par en construire un. Il faudrait probablement choisir un des principaux centres, Windsor vient immédiatement à l'esprit, et nous pourrions ensuite tirer profit de cette expérience.

Tout d'abord, Windsor souffre à l'heure actuelle de graves problèmes de congestion. Je sais qu'il a été suggéré de déménager nos locaux du côté américain et que les Américains utilisent ceux du côté canadien. On voudrait ainsi éviter qu'il y ait un refoulement du trafic qui donnerait aux terroristes la possibilité de se rendre au milieu du pont ou du tunnel et d'y faire exploser une bombe. Si c'est ce qu'ils veulent faire, ils pourront toujours le faire, qu'il y ait ou non un problème de refoulement, je ne pense donc pas que ce soit une excellente solution.

L'autre suggestion que vous avez faite, celle qui concerne les ferries et le rail, soulève un problème. Lorsque je suis arrivé aux douanes, il y avait des inspecteurs des douanes qui montaient dans le train Amtrak à New York et qui contrôlaient les passagers avant d'arriver à Montréal. Cela ne se fait plus et je crois que c'est parce que la loi a changé. Il n'est pas possible, je crois, d'appliquer aujourd'hui la loi canadienne à l'extérieur du territoire canadien, mais je ne sais pas si c'est parce que la loi canadienne a été modifiée ou non. Je sais que nous le faisions et que nous avons cessé de le faire, mais je ne suis pas sûr de savoir pourquoi. Il y a peut-être un problème juridique.

• 1640

Mme Judi Longfield: C'est peut-être un problème législatif mais est-ce que cela était efficace?

M. Serge Charette: Très efficace.

Mme Judi Longfield: S'il s'agit d'un problème législatif et si cela fonctionnait bien auparavant, nous pourrions peut-être commencer par négocier cela avec nos voisins américains.

Merci. Cela me paraît intéressant.

M. Alexander Lofthouse: Si je peux revenir brièvement sur le point qui vient d'être soulevé, que cela fonctionnait bien auparavant, on peut encore regarder ce qui se fait en Europe. Je ne dis pas qu'il faut tout faire comme en Europe; nous sommes en Amérique du Nord, et il est évident qu'il existe de grosses différences, mais là encore, si l'on prend le train pour se rendre de Londres à Paris, on constate que la police française monte à bord du train avant que celui-ci ne pénètre sur le territoire français. Avec de bons outils législatifs, ce genre de mesures peut donner d'excellents résultats. En France, on se rend à Paris, on monte dans le train et c'est fini.

Pour ce qui est des différents modes de transport dont vous avez parlé, je ferai un ou deux commentaires.

Mardi soir, j'essayais d'attraper mon vol de Toronto à Windsor et je l'ai presque manqué parce que j'étais bloqué à un passage à niveau situé juste au sud de l'aéroport de Windsor. Il y a des trains partout à Windsor. On ne peut pas faire dix pas au centre- ville de Vancouver sans entendre le sifflement des trains. Y a-t-il un rôle pour le rail? Certainement. On utilise déjà le rail. En fait, le rail connaît une véritable renaissance depuis dix ans, et c'est, je crois, parce que la situation économique l'a permis.

Cela m'amène à mon deuxième point, qui est que l'on utilise déjà énormément le transport intermodal pour les marchandises. Les marchandises qui sont expédiées vers des destinations lointaines vont probablement utiliser plusieurs modes de transport, selon le genre de transporteur qui peut le faire le plus efficacement. C'est pourquoi on a imaginé le transport multimodal. Est-ce que ce genre de transport peut jouer un rôle? Certainement. Le marché montre que c'est déjà ce qui se fait.

Pour ce qui est de votre dernier point, il faut faire une différence entre les marchandises et les personnes, jusqu'à un certain point. Je me trouvais à Windsor récemment, et j'ai entendu plusieurs personnes dire qu'il était difficile de traverser le pont Ambassador à cause du nombre de camions qui s'y trouvent. Les camionneurs trouvent que la circulation est lente sur le pont Ambassador à cause des voitures.

J'hésiterais beaucoup à demander un visa de sortie. Les Canadiens réagissent très rapidement lorsque les Américains commencent à parler de l'article 110, parce que dès que vous demandez aux gens... dès que l'on ajoute une formalité à la frontière, il faut faire la queue pour remplir des papiers. Je fais simplement une mise en garde. Les contrôles de ce genre ralentissent toujours le flot des voyageurs.

Voilà donc quelques remarques.

M. John Bescec: J'aimerais revenir sur une déclaration qui a été faite il y a un instant à propos d'un message unique.

Le Canada fait beaucoup de choses pour trouver une solution à ces problèmes. Malheureusement, nos homologues américains ne perçoivent pas toujours comme il faudrait les efforts que nous déployons dans ce domaine. Il y a aussi les médias qui ne donnent pas toujours une image fidèle de la réalité.

Je pensais davantage au message que notre Parlement pourrait envoyer aux Américains, un message qui montrerait ce que fait le Canada et les mesures que nous avons prises; cela se présenterait sous la forme d'un résumé. C'est très simple mais les Américains auraient quelque chose à se mettre sous la dent. Ils pourraient dire, nous n'avons pas raison de craindre que le Canada ne fasse rien parce que voilà ce qu'ils font dans ces différents domaines.

À un niveau opérationnel, il y a les divers ministères du gouvernement qui collaborent avec leurs homologues. Il y a des éléments qui se perdent lorsqu'ils sont transmis aux plus hauts niveaux. Au niveau du premier ministre et du président, et au niveau des hautes directions, les relations sont très amicales. Mais lorsqu'il faut prendre des décisions, il y a tellement de flou que les médias relèvent des détails, et c'est la façon dont les Américains les interprètent qui influence beaucoup les discussions.

Du point de vue des entreprises, il est important que les entreprises canadiennes fassent clairement savoir qu'elles appuient toutes les initiatives du gouvernement. Les regroupements en cours réunissent des associations très diverses. Il faut envoyer un message clair indiquant que le secteur commercial appuie le gouvernement et que nous agissons. Voilà ce que nous voulons dire aux Américains. Il faut présenter cela clairement et ne pas annoncer toutes ces initiatives de façon fragmentaire. Tout cela est très bien mais il faut présenter les choses comme un tout, ce qui aura davantage d'impact.

• 1645

Mme Judi Longfield: Cela est plus difficile lorsque les gens ont peur parce qu'ils ont vécu ce qu'ils ont vécu et qu'il y a les médias des deux côtés qui interprètent les choses à leur façon et que nous avons tous nos propres sujets d'inquiétude.

Merci beaucoup, messieurs. J'ai bien apprécié vos trois exposés.

Le président: Merci, Judi.

Monsieur Duncan.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Cela fait longtemps que je dis qu'il faut aller au devant des difficultés que nous connaissons à la frontière et que si nous laissons les Américains réagir seuls, nous aurons perdu la bataille. Je crois que c'est ce qui s'est passé. Il faut donc prendre les devants et confronter la situation.

La proposition que nous a présentée aujourd'hui Serge Charette, cette notion de centres de dédouanement, est un moyen de s'attaquer à ces difficultés. J'ai vu les nouvelles dans la presse aujourd'hui, et j'ai posé une question à la Chambre aujourd'hui qui appuyait cette idée. J'ai toutefois eu l'impression que le ministre du Revenu se portait à la défense du statu quo.

Franchement, je ne savais pas qui allait me répondre. Je ne savais pas si ce serait M. Manley, M. Cauchon ou le ministre Pettigrew. Cela fait probablement partie du problème, en particulier, si l'on tient compte de la remarque de M. Bescec selon laquelle il serait bon d'envoyer un message unique.

Je n'ai pas aimé que le ministre qui m'a répondu n'a pas indiqué qu'il était urgent de faire quelque chose et qu'il n'a pas non plus montré dans quelle direction il allait agir en plus de défendre le statu quo. Il est évident que le statu quo n'est pas la solution.

Je voulais vous dire tout cela et vous remercier de nous avoir proposé cette solution. J'espère que le comité intégrera cette proposition dans ses recommandations.

Je viens de lire un livre qui parlait de la construction de la route de l'Alaska. Je crois que cette route a été construite en seize mois. Si nous n'arrivons pas à construire bientôt un ou deux centres de dédouanement au Canada, je crois que cela démontrera que nous ne savons pas faire les choses, en particulier si nous obtenons l'appui des États-Unis. Je ne vois pas pourquoi, ils ne nous donneraient pas cet appui, si nous présentons les choses comme il faut et si nous y consacrons les ressources nécessaires.

J'aimerais poser quelques questions précises qui appellent des réponses brèves. Tout d'abord, je crois que le système CANPASS est uniquement utilisé dans la direction sud-nord à l'heure actuelle. Il n'est plus utilisé dans la direction nord-sud. Est-ce que cela vaut pour l'ensemble du pays ou uniquement pour certaines provinces? Est-ce que quelqu'un a la réponse? Serge, vous savez probablement cela, même si je n'ai peut-être pas été très précis.

M. Serge Charette: D'après ce que je sais, le programme CANPASS a été suspendu le 11 septembre pour tous les modes de transport sauf le transport maritime, et il n'a pas encore été réactivé; le Canada s'apprête cependant à le réactiver très prochainement. Il semble que les Américains n'aient aucune intention de réactiver le programme CANPASS ou NEXUS dans un avenir prévisible. Ils craignent que le CANPASS soit un document facile à falsifier, après tous les passeports et les autres documents falsifiés qu'ils ont découverts au cours de leurs enquêtes. Mais je ne peux pas vous en dire davantage, parce que je ne suis pas sûr de ce qui se passe.

• 1650

M. John Duncan: John, vous avez parlé du fait que l'enregistrement des chauffeurs de camion suscitait de la résistance. Je n'ai pas très bien compris d'où venait cette résistance? Était-ce celle des chauffeurs ou celle des fonctionnaires américains ou canadiens?

M. John Bescec: L'enregistrement des chauffeurs soulève de nombreux problèmes. Il y a la question des antécédents judiciaires et des dossiers des services de police. Les infractions même mineures sont inscrites dans le casier judiciaire des contrevenants. Lorsqu'il y avait des contrôles, ces personnes étaient refusées au départ, même si elles avaient obtenu par la suite une réhabilitation. Citoyenneté et Immigration Canada a revu la question et tient maintenant compte des cas où il y a eu réhabilitation.

Il faut beaucoup de chauffeurs pour transporter toutes ces marchandises et il est difficile de demander à tous les chauffeurs de camions de s'enregistrer. Les entreprises de transport ont du mal à faire subir à leurs employés ces enquêtes qui portent sur leurs antécédents. C'est là une des principales difficultés auxquelles font face les transporteurs. Si vous vous demandez si les transporteurs américains vont faire subir à leurs chauffeurs des enquêtes de ce genre pour qu'ils puissent se rendre au Canada à l'avenir, et bien je peux vous dire qu'ils ont déjà librement accès au Canada à l'heure actuelle.

M. John Duncan: Je crois que je comprends cela.

Serge, vous parliez du projet de loi S-23.

M. Serge Charette: Je crois l'avoir mentionné.

M. John Duncan: Vous avez dit que c'était un pas dans la bonne direction.

M. Serge Charette: Pas tout à fait.

M. John Duncan: Vous disiez que vous avez besoin d'équipement pour pouvoir voir les marchandises. Est-ce que les États-Unis possèdent ce genre d'équipement?

M. Serge Charette: Lorsque je parle de l'équipement dont nous avons besoin pour faire notre travail, je pense à des choses aussi simples que des chariots-élévateurs qui peuvent servir à décharger un conteneur ou ce qui se trouve dans un camion. Nous pensons que nous avons besoin d'appareils tout à fait courants grâce auxquels nous pourrions atteindre le niveau de sécurité souhaité. Un tel niveau serait accepté par les Américains.

Je dois reconnaître que les Américains avaient quelques raisons de penser que notre sécurité était compromise. Ils se sont procuré les rapports du vérificateur général, les rapports du SCRS, les rapports de la GRC, et ils ont entendu l'Association canadienne des policiers dire que nous manquions de personnel et qu'il n'y avait pas suffisamment de gens à la frontière. Le manque de ressources à la frontière a été mentionné par différentes sources et cela a manifestement créé une impression indélébile dans l'esprit des législateurs américains et du public américain. Nous devons leur faire savoir que nous reconnaissons avoir des difficultés, que nous essayons de les résoudre, et que nous ne faisons pas qu'essayer, mais que nous les résolvons. Si nous pouvons faire comprendre cela très rapidement, nous pouvons espérer obtenir des Américains qu'ils ne prennent pas les décisions qu'ils envisagent.

M. John Duncan: Est-ce qu'il existe quelque part au monde... est-ce qu'il n'y a pas des grands ports en Asie comme Hong Kong et Singapour, je ne suis pas sûr dans le cas de Singapour, qui ont un équipement qui permet de voir tout ce qu'il y a dans un conteneur sans l'ouvrir? Est-ce le genre d'appareil que vous envisagez également?

• 1655

M. Serge Charette: Cela n'est pas tout à fait ce que nous envisageons parce qu'il existe très peu de ces appareils dans le monde à l'heure actuelle. Il y a peut-être une demi-douzaine de ports qui possèdent ce genre d'appareil. Je crois me souvenir avoir vu une brochure de Hong Kong, je crois que c'est de là qu'elle venait, mais je n'en suis pas certain à 100 p. 100; elle montrait cette grosse machine à rayons X qui permettait de voir l'intérieur des conteneurs. Je ne sais pas très bien comment cela fonctionnait. Ce n'était pas vraiment des rayons X parce que le métal empêche ces rayons de passer. Mais je sais ce dont vous parlez et je sais qu'il y en a très peu et qu'ils coûtent très cher.

M. Alexander Lofthouse: À titre d'information, je pense que le port de New York et le New Jersey en ont un et John semble penser que le port de Miami possède également un scanner énorme, mais je n'en suis pas certain. Comme l'a suggéré M. Charette, on ne retrouve en général ce genre d'équipement que dans les grands ports, ceux qui reçoivent des conteneurs énormes.

M. John Duncan: Je crois qu'il faut envisager les choses de façon un peu différente...

M. Alexander Lofthouse: Tout à fait.

M. John Duncan: ... parce qu'il y a près de 44 000 camions qui traversent tous les jours le pont Ambassador, je crois que c'est à peu près cela.

M. Alexander Lofthouse: Et ce nombre ne fait qu'augmenter.

M. John Duncan: Notre pays a besoin de commercer. Si les Américains sont prêts à dépenser des milliards pour mettre une clôture, nous n'avons pas le choix, nous devons essayer de les en empêcher. Nous allons devoir consacrer des fonds à ce problème, il faut agir rapidement et efficacement.

Voilà qui répond à ma question et nous amène dans la direction que je voulais prendre. En résumé, nous ne le verrons sans doute pas mais lorsque je vois ce qui se passe, je pense que cette frontière devient un obstacle non tarifaire. Je suis sûr que vous vous intéressez aussi à cet aspect.

M. Alexander Lofthouse: Absolument.

M. John Duncan: Nous ne voulons pas en arriver là.

Le président: Au nom du comité, je vous remercie de nous avoir présenté d'excellents exposés, de nous avoir parlé franchement et directement, et de nous avoir offert des suggestions très concrètes et pratiques.

Nous tiendrons une dernière audience mercredi prochain à 15 h 30, et nous allons terminer ce rapport aussi rapidement que possible, étant donné l'urgence de la situation. Nous espérons pouvoir présenter un rapport au Parlement avant la fin du mois de novembre. Vous nous avez présenté des idées très intéressantes. Vous nous avez aussi fourni des outils qui nous aideront à préparer ce rapport, et aussi, à formuler des recommandations à la Chambre des communes et finalement, au gouvernement.

Au nom de mes collègues, je vous remercie tous encore une fois. Passez une excellente soirée.

La séance est levée.

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