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ETHI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique


NUMÉRO 065 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 13 février 2013

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Français]

    Bienvenue à la 65e séance du Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique. Nous allons poursuivre l'examen prévu par la loi au sujet de la Loi sur les conflits d'intérêts.
     Au cours de la première heure, un représentant du Bureau du Conseil Privé, M. Joe Wild, va comparaître. M. Wild est sous-secrétaire intérimaire du Cabinet, Législation et planification parlementaire et Appareil gouvernemental.
    Monsieur Wild, nous avons bien hâte de vous entendre pendant une période de 10 minutes au sujet de l'examen de la Loi sur les conflits d'intérêts. Nous allons ensuite passer à une période de questions et commentaires.
     Sans plus tarder, je vous cède la parole.

[Traduction]

    Je vous remercie de m'avoir invité ici pour parler avec vous de la Loi sur les conflits d'intérêts. J'ai seulement quelques brefs commentaires préliminaires à faire, après quoi je répondrai avec plaisir à vos questions.

[Français]

    Comme vous le savez, la Loi sur les conflits d'intérêts était l'un des éléments clés de la Loi fédérale sur la responsabilité et elle est entrée en vigueur le 9 juillet 2007.
     Avant la mise en application de cette loi, les titulaires de charge publique occupant les plus hauts rangs du gouvernement, c'est-à-dire les ministres, le personnel des ministres et leurs conseillers, les secrétaires parlementaires, les sous-ministres et les personnes nommées par le gouverneur en conseil, étaient visés par le Code régissant la conduite des titulaires de charge publique en ce qui concerne les conflits d'intérêts et l'après-mandat.

[Traduction]

    Diverses versions de ce code se sont succédé depuis 1985. Administré par un commissaire à l'éthique, le code énonçait à la fois les grands principes et normes éthiques auxquels seraient tenus les titulaires de charge publique, et les mesures d'observation spécifiques qu'ils sont tenus de prendre, comme la déclaration de leurs biens et de leurs dettes, le dessaisissement, ce qui a trait aux activités extérieures, aux cadeaux et à l'après-mandat.
    Avec l'adoption de la Loi sur les conflits d'intérêts, la plupart des règles régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat incluses dans le code ont pris force de loi, ce qui garantit que les titulaires de charge publique sont visés par une série de règles claires et cohérentes même si le gouvernement change. Certaines des règles concernant le dessaisissement et le recours aux fiducies sans droit de regard ont aussi été renforcées par la même occasion. L'autre innovation majeure de la loi a été de renforcer son application grâce à la création du Commissariat aux conflits d'intérêts et à l'éthique. Le commissaire a reçu le pouvoir d'enquêter et de faire rapport sur les allégations de non-respect des règles, de percevoir le paiement des sanctions pécuniaires pour favoriser le respect de la loi en ce qui concerne les déclarations, et de faire rapport directement au Parlement sur la manière dont cette loi est administrée.
    L'objet de la loi est énoncé dans l'article 3 et décrit les divers objectifs visés en matière de politique publique:
a) d'établir à l'intention des titulaires de charge publique des règles de conduite claires au sujet des conflits d'intérêts et de l'après-mandat;

b) de réduire au minimum les possibilités de conflit entre les intérêts personnels des titulaires de charge publique et leurs fonctions officielles, et de prévoir les moyens de régler de tels conflits, le cas échéant, dans l'intérêt public;

c) de donner au commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique le mandat de déterminer les mesures nécessaires à prendre pour éviter les conflits d'intérêts et de décider s'il y a eu contravention à la loi;

d) d'encourager les personnes qui possèdent l'expérience et les compétences requises à solliciter et à accepter une charge publique;

e) de faciliter les échanges entre les secteurs privé et public.
    Comme cette disposition l'indique clairement, au fond, les règles de la loi visent à éviter les conflits d'intérêts entre les fonctions officielles des titulaires de charge publique et des intérêts privés.
    L'article 4 définit la notion de base sur laquelle reposent les conflits d'intérêts au sens de la loi:
un titulaire de charge publique se trouve en situation de conflit d'intérêts lorsqu'il exerce un pouvoir officiel ou une fonction officielle qui lui fournit la possibilité de favoriser son intérêt personnel ou celui d'un parent ou d'un ami ou de favoriser de façon irrégulière celui de toute autre personne.
    C'est sur cette notion que reposent les règles énoncées dans les articles 5 et 6, qui portent sur l'obligation fondamentale des titulaires de charge publique d'éviter les conflits d'intérêts et de ne pas participer à la prise de décisions qui les placeraient en situation de conflit d'intérêts. Elle définit aussi la portée des règles relatives au délit d'initié, dans l'article 8, et à l'influence, dans l'article 9.
    D'autres règles figurant dans la partie 1 de la loi portent sur des formes particulières d'intérêts privés: emplois ou activités extérieurs, cadeaux, contrats, financement et voyages. Comme le montre la disposition de déclaration d'objet, la loi vise à définir clairement les règles applicables aux titulaires de charge publique, tout en veillant à ce que ces lois ne soient pas restrictives ou lourdes au point de dissuader des personnes expérimentées et compétentes d'assumer une charge publique ou de nuire aux échanges entre les secteurs privé et public. Par exemple, la partie 2 de la loi contient des règles strictes sur le dessaisissement des biens qui peuvent être affectés directement ou indirectement par des décisions ou des politiques du gouvernement et qui doivent être déclarés à la commissaire. Même s'il est obligatoire de déclarer publiquement de nombreux biens, les biens destinés à l'usage privé des titulaires de charge publique et des membres de leur famille qui ne sont pas de nature commerciale ne sont pas visés par cette exigence. Donc, au moyen d'une série d'exigences relatives au dessaisissement, à la déclaration confidentielle ou publique et à des exemptions, ces dispositions permettent de montrer en toute transparence que les conflits d'intérêts sont évités, sans intrusion indue dans la vie et les finances personnelles des titulaires de charge publique.
    Si on cherche à déterminer comment cet équilibre est obtenu dans la loi, il vaut la peine de mentionner que certaines de ses dispositions — en particulier les dispositions relatives à la déclaration confidentielle des biens et aux cadeaux — concernent également les intérêts privés et les intérêts financiers des membres de la famille des titulaires de charge publique.

  (1535)  

[Français]

    Dans ses présentations à votre intention, la commissaire a laissé entendre que ce que prévoit actuellement la loi comme équilibre en rapport avec le dessaisissement est peut-être un peu plus restrictif que ce qui est nécessaire pour éviter de réels conflits d'intérêts.

[Traduction]

    On observe un équilibre analogue entre les objectifs et les intérêts dans les dispositions relatives à l'administration et à l'application, qui se trouvent dans la partie 4 de la loi. La commissaire est chargée, en application des articles 44 et 45, de mener des enquêtes et de faire rapport sur des allégations de non-respect, que ce soit en réponse à un parlementaire ou de son propre chef.
    De même, l'article 46 exige que les titulaires de charge publique aient l'occasion de présenter leur point de vue avant qu'un rapport pouvant porter atteinte à leur réputation ne soit rendu public, ce qui est conforme à un principe de base de l'équité procédurale.
    Une protection analogue est offerte pour ce qui est de la perception du paiement des sanctions administratives pécuniaires, et la confidentialité exigée vise à empêcher des dommages injustes ou prématurés aux réputations que risquent de causer des enquêtes sur des allégations non vérifiées.

[Français]

    Finalement, j'aimerais signaler que la Loi sur les conflits d'intérêts est seulement l'un des éléments d'un régime plus vaste en matière d'éthique et de reddition de comptes qui existe dans la fonction publique.

[Traduction]

    Ce régime plus vaste est couvert dans le document Un gouvernement responsable: Guide du ministre et du ministre d'État, qui énonce les attentes du premier ministre à l'égard de son conseil des ministres.
    L'annexe A du document Un gouvernement responsable contient les normes générales du comportement conforme à l'éthique pour tous les titulaires de charge publique, ce qui va bien au-delà des exigences de la Loi sur les conflits d'intérêts. Comme dans le cas de la loi, le respect de ces lignes directrices est une condition de la nomination de chacun des titulaires de charge publique. Le document Un gouvernement responsable contient aussi des lignes directrices relatives aux activités politiques des titulaires de charge publique impartiaux, ainsi que des règles particulières pour les ministres en rapport avec le financement et les lobbyistes.
    La Loi sur le lobbying interdit le lobbying pendant cinq ans après la fin du mandat à un grand nombre des titulaires de charge publique aussi visés par la Loi sur les conflits d'intérêts, notamment les ministres, les secrétaires parlementaires, le personnel des ministres et les administrateurs généraux. Les dispositions relatives à l'après-mandat contenues dans les deux lois se chevauchent pour ce qui est des activités couvertes, des périodes visées et des titulaires de charge publique auxquels elles s'appliquent, mais elles ne sont pas totalement alignées et elles sont administrées différemment par les différents commissaires.
    La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles régit la divulgation d'actes répréhensibles par des fonctionnaires et les enquêtes qui s'ensuivent, administrées par le Commissaire à l'intégrité de la fonction publique, ou CIFP. Lorsque la divulgation concerne un aspect relevant de la Loi sur les conflits d'intérêts, le CIFP renvoie le dossier à la Commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique, qui doit mener une enquête et faire rapport.
    La commissaire Dawson a recommandé que son bureau dispose d'une plus grande discrétion en rapport avec ces renvois et nous avons hâte de connaître les opinions du comité à cet égard.
    En vertu de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, le Conseil du Trésor a adopté un code de conduite qui s'applique à toutes les organisations du secteur public, en plus des codes spécifiques qui ont été adoptés par chaque organisation. Le respect de ces codes fait partie des conditions d'emploi de tous les fonctionnaires. Les fonctionnaires de l'administration publique centrale sont aussi visés par les règles régissant les conflits d'intérêts et l'après-mandat énoncées dans la politique du Conseil du Trésor.
    Ceci conclut mes commentaires préliminaires et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

  (1540)  

[Français]

    Je vous remercie de vos observations.
    Sans plus tarder, nous allons commencer la période des questions et commentaires.
    Monsieur Angus, vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci d'être venu, monsieur Wild.
    La discussion a été intéressante jusqu'ici, car nous essayons d'avoir une bonne idée de la façon dont la Loi sur les conflits d'intérêts est appliquée et de ce qu'il faut penser de ses divers éléments.
    Vous êtes bien au Bureau du Conseil privé?
    Oui, c'est exact.
    Quel rôle le Conseil privé joue-t-il pour résoudre les problèmes potentiels de conflits d'intérêts, pour sensibiliser les ministres ou les secrétaires parlementaires? A-t-il un rôle à jouer?
    Le Bureau du Conseil privé joue différents rôles. Nous sommes les principaux fonctionnaires chargés de conseiller le premier ministre et nous conseillons donc le premier ministre au sujet des normes de conduite ou de la politique que prévoit la Loi sur les conflits d'intérêts. Nous donnons notre avis à la fonction publique quant à la façon dont la loi fonctionne, quant à savoir s'il y a lieu ou non d'apporter des améliorations à la loi et si, à notre avis, la loi couvre bien tout ce qu'elle devrait couvrir.
    Nous conseillons aussi le premier ministre au sujet du document sur le gouvernement responsable, notamment en ce qui concerne les restrictions touchant les activités politiques des personnes nommées par décret. Nous veillons sur ce régime en ce sens que nous conseillons les personnes nommées par décret, qu'il s'agisse de ministres ou de dirigeants d'organismes gouvernementaux ou de sociétés d'État, à propos de leurs obligations.
    Désolé. Je n'ai pas beaucoup de temps, mais je voudrais vraiment comprendre comment cela fonctionne, si c'est proactif ou réactif. Certains problèmes se posent. Au cours des années, il arrive qu'un ministre ait des problèmes. Est-ce alors que vous intervenez ou y a-t-il un processus d'éducation permanente? Par exemple, un ministre sait qu'il n'est pas censé écrire des lettres à des tribunaux indépendants. Les ministres doivent connaître les règles à suivre. Leur expliquez-vous ces règles ou le faites-vous quand ils ont fait quelque chose de mal?
    Nous n'avons pas pour rôle d'informer directement les ministres des obligations que leur confère la Loi sur les conflits d'intérêts. Ce rôle incombe à la Commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique. La loi lui confie la responsabilité de dispenser l'information qu'elle juge appropriée. Nous conseillons le premier ministre quant à savoir si, du point de vue de la fonction publique, le système fonctionne bien ou non, s'il est nécessaire ou non d'y apporter des ajustements. Nous donnons des conseils dans ce domaine de la politique publique.
    Très bien.
    Je m'étonne que nous ne puissions pas dispenser ces connaissances aux membres du Cabinet. Les gens commettent des erreurs. Ceux qui se font prendre ne sont pas toujours mal intentionnés. C'est parfois parce qu'ils ne connaissent pas les règles. Je ne trouve pas normal que la Commissaire à l'éthique soit alors obligée d'intervenir au lieu que l'information ait été donnée à l'avance. En quelque sorte, la police vient sur le lieu du crime pour vous dire comment bien conduire votre automobile.
    Je sais que lorsque M. Christian Paradis a été déclaré coupable d'une contravention à la Loi sur les conflits d'intérêts, le premier ministre a dit qu'il y avait un « processus d'éducation ». Par conséquent, ce processus d'éducation n'a pas lieu au Cabinet, mais par l'intermédiaire de la Commissaire à l'éthique lorsqu'on constate de genre de choses?
    Je crois que la commissaire, Mme Dawson, rencontre les titulaires de charge publique aux termes de la loi. Elle doit régler avec eux la question de la déclaration de leurs biens et ce genre de choses lorsqu'ils sont nommés pour la première fois. Cela comporte un élément éducatif.
    Quant à savoir si mon bureau oriente ou informe les ministres au sujet de cette loi ou des lignes directrices du document sur le gouvernement responsable, en général, nous ne le faisons pas.
    Par conséquent, cela soulève le problème de l'écran éthique. Selon certaines allégations, M. Nigel Wright aurait subi des pressions de Barrick à trois occasions différentes, je pense. C'est le parrain du fils d'Anthony Munk. Anthony siège au conseil d'administration de Barrick avec son père, Peter Munk, qui est le fondateur et le président du conseil d'administration de Barrick Gold. Peter Munk a dit que Nigel Wright était l'une des rares personnes en qui il avait entièrement confiance. Par conséquent, on a établi un écran éthique pour que M. Wright et ses intérêts personnels et financiers potentiels ne fassent pas l'objet de lobbying, mais pourtant il en fait l'objet. Par conséquent, aucun critère n'est établi au Conseil privé et vous intervenez après coup pour expliquer quel était le problème. La Commissaire à l'éthique est-elle censée établir ces critères et supposer ensuite que les gens les suivront?

  (1545)  

    Nous avons aidé à établir la muraille éthique qui a été dressée à l'égard de M. Nigel Wright et la responsabilité de l'administrer incombe en partie au Bureau du Conseil privé. Il s'agit principalement des dossiers qui doivent être examinés au Cabinet. S'ils sont visés par la muraille éthique, nous veillons à ce qu'ils soient signalés et ne soient pas transmis ou communiqués à M. Wright, conformément aux dispositions de la muraille.
    Nous avons donc cette responsabilité, et nous l'assumons. Le chef de cabinet adjoint du Bureau du premier ministre se charge de l'administration des autres règles. Mme McNamara doit veiller à ce que la muraille éthique soit respectée.
    Elle est chef adjointe et se trouve donc en dessous de Nigel Wright, mais c'est elle qui est chargée de veiller sur sa muraille éthique?
    Elle est chargée de veiller à ce que les dossiers soient également signalés de son côté et ne soient pas communiqués à M. Wright. Elle doit aussi déclarer toute transgression potentielle à la Commissaire aux conflits d'intérêts et à l'éthique.
    Très bien, merci beaucoup.

[Français]

    Je vais céder la parole à M. Carmichael pour sept minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Et merci, monsieur Wild, de comparaître aujourd'hui.
    Nous avons reçu une longue liste de recommandations de la commissaire et de certains des témoins qui ont comparu devant nous. Je voudrais savoir ce que vous pensez de l'une d'elles qui semble susciter la controverse.
    La commissaire a recommandé d'abaisser de 200 $ à environ 30 $ le seuil fixé pour la déclaration des dons. J'aimerais connaître votre avis à ce sujet.
    En ce qui concerne cette recommandation, le comité pourrait peut-être se pencher sur la valeur à partir de laquelle un cadeau peut donner l'impression qu'une influence a été exercée sur un titulaire de charge publique et qui justifie donc l'application des exigences de la loi concernant la déclaration.
    Je ferais notamment remarquer qu'une série de petits dons faits par un même donateur dont la valeur totale atteint 200 $ doit être déclarée au commissaire. Par conséquent, cette exigence ne vise pas seulement un don unique de 200 $, mais aussi une multitude de petits dons faits par un même donateur au titulaire d'une charge publique. Quand ce seuil a été établi, quand la loi a été adoptée dans le cadre de la Loi fédérale sur la responsabilité, on a estimé qu'aux yeux du public, un cadeau de cette valeur ou d'un montant plus élevé était peut-être fait à des fins répréhensibles par opposition à un cadeau d'une valeur moins importante. On a vraiment cherché à voir quel serait le juste niveau aux yeux du public.
    Je ferais également remarquer que la loi n'oblige pas seulement les titulaires de charges publiques à déclarer les cadeaux qu'ils reçoivent. Cette exigence s'applique aussi aux époux, aux conjoints de fait et aux enfants indépendants des titulaires de charge publique. C'est donc une des dispositions de la loi qui ne s'applique pas uniquement au titulaire d'une charge publique. Cela empiète donc davantage sur sa vie privée en ce sens que cette exigence s'applique aussi à sa famille immédiate.
    Par exemple, si le conjoint d'un titulaire de charge publique qui fait carrière à l'extérieur du secteur public participe à un dîner d'affaires, comme c'est peut être la norme dans son secteur, si ce déjeuner d'affaires a été payé par le client ou la personne avec qui il déjeune et si ce déjeuner coûte plus de 35 $, il devra être déclaré et inscrit dans le registre. À mon avis, c'est une chose dont le comité devrait peut-être tenir compte. En ce qui concerne la déclaration des cadeaux, du moins selon les dispositions actuelles de la loi, l'obligation ne se limite pas au titulaire de charge publique. Elle s'applique aussi aux membres de sa famille. C'est simplement une chose à laquelle le comité voudra peut-être réfléchir.
    C'est intéressant. Je l'ignorais.
    Je craignais que, du point de vue administratif, en abaissant le seuil, nous alourdissions les tâches administratives du personnel du Commissariat. Néanmoins, cela a suscité un certain nombre de réactions.
    La commissaire a aussi recommandé d'étendre les sanctions administratives pécuniaires au non respect des dispositions de fond de la loi. Pourriez-vous nous dire quelles en seraient les conséquences et si vous êtes d'accord avec cette recommandation?

  (1550)  

    Comme je l'ai dit, le comité devrait peut-être examiner certaines choses à propos de cette recommandation. Le régime de sanctions administratives pécuniaires est conçu pour faire en sorte que les titulaires de charge publique fassent leurs déclarations publiques à temps. Il n'est pas là pour punir les transgressions graves. Il y avait des raisons à cela lorsque le gouvernement a fait adopter la loi.
    Il y a certaines questions sur lesquelles le comité devrait peut-être se pencher et je crois que d'autres témoins en ont soulevé quelques-unes. Il faudrait voir notamment si une sanction pécuniaire symbolique est la solution appropriée en cas de non-respect de la loi, surtout si la transgression est grave.
    La loi est conçue comme une sorte de régime de dénonciation. Si une grave infraction est commise, le commissaire la dénonce publiquement. La réputation du délinquant s'en trouve ternie et je pense qu'en fin de compte, cela nous ramène au rôle du premier ministre qui est responsable de la conduite de son conseil des ministres et des titulaires de charge publique dont il assume la responsabilité.
    Il ne faut pas oublier, je crois, que dans le système de gouvernement de Westminster, ce qui a donné naissance au rôle de premier ministre, c'était dans une large mesure le désir d'enlever au roi la nomination des ministres. Le principal rôle d'un premier ministre consiste à décider de la composition du Cabinet et recruter et congédier les ministres. La loi cherche à établir une limite de façon à respecter cette caractéristique du modèle de Westminster, à savoir qu'il revient au premier ministre de déterminer si une violation de la loi suffit à justifier un limogeage ou une autre forme de sanction telle que des excuses publiques ou quoi que ce soit d'autre.
    Vous parlez d'une sanction pécuniaire symbolique; je ne crois pas que ce soit l'intention de la commissaire. Premièrement, je pense qu'elle envisage une sanction importante et, deuxièmement, êtes-vous d'accord ou non pour dire qu'il faudrait suivre cette voie?
    Comme vous pouvez le voir, j'hésite un peu à me prononcer pour ou contre, car il est assez difficile pour un fonctionnaire de venir dire ici si une orientation politique est bonne ou mauvaise. Je dirais que cela modifierait largement la nature de la loi et l'équilibre que la loi essaie d'établir et qui correspond, je pense, à un gouvernement sur le modèle de Westminster.
    À mon avis, ce n'est pas une chose qui doit être faite à la légère. Il faut se demander sérieusement quelles en seront les conséquences si un commissaire impose des sanctions à des acteurs politiques alors qu'il y a un système d'imputabilité politique selon lequel la responsabilité de la conduite de ces personnes repose sur les épaules du premier ministre.

[Français]

    Je vous remercie de votre réponse.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    Merci, monsieur Carmichael.
    Je cède maintenant la parole à M. Andrews pour une période de sept minutes.

[Traduction]

    Merci d'être venu, monsieur Wild. J'ai trois questions à vous poser.
    Vous parlez des cinq ans d'interdiction de l'après-mandat et de la façon dont cela s'applique s'il s'agit de cinq ans en vertu de la Loi sur le lobbying ou d'une année en vertu de la Loi sur les conflits d'intérêts. Néanmoins, les gens qui n'obéissent pas à la loi sont dénoncés et c'est la seule sanction qui leur est imposée. Leur réputation est entachée et ils font l'objet d'un article dans le journal pendant une journée. Ensuite, leur vie reprend son cours normal et ils continuent à faire ce qu'ils faisaient. Il n'y a donc pas vraiment d'incitation à respecter les règles.
    Si vous n'imposez pas une sanction pécuniaire quelconque, comment punir ceux qui ne respectent pas leurs obligations d'après-mandat?
    Il y a, je crois, une distinction importante à faire entre l'interdiction du lobbying en vertu de la Loi sur le lobbying qui prévoit un régime de sanctions pénales et le régime plus générique que prévoit la Loi sur les conflits d'intérêts pour l'après-mandat.
    En ce qui concerne la Loi sur le lobbying, elle prévoit une ou deux choses en dehors de la sanction pénale. Il y a le rapport au Parlement qui, à mon avis, a d'importantes conséquences pour le lobbyiste. Vous êtes dénoncé publiquement comme ayant violé la Loi sur le lobbying, et je ne vois pas comment vous pourriez continuer à gagner votre vie grâce au lobbying. Je suppose que la plupart des gens ne voudront pas recourir à un lobbyiste qui s'est fait prendre…

  (1555)  

    Néanmoins, l'interdiction de travailler pendant un an dans le domaine dans lequel vous étiez employé au gouvernement que prévoit la Loi sur les conflits d'intérêts… C'est clair et comme je l'ai déjà dit, Loyola Sullivan était clairement en infraction. Il continue comme si de rien n'était. L'article à son sujet a été publié dans les journaux pendant une journée et sa vie a repris son cours normal.
    Je ne peux pas vous parler de ce cas particulier. Je ne le connais pas en détail.
    Il y a toujours des choix à faire quant à la façon de constituer ces régimes. Le régime en question compte sur les titulaires de charge publique pour qu'ils fassent les déclarations et respectent les règles. Cela dépend de la nature de la transgression des règles régissant l'après-mandat, mais en plus de la dénonciation, le commissaire peut aussi ordonner que les titulaires de charge publique ne fassent pas affaire avec une personne qui a enfreint le régime régissant l'après-mandat.
    L'idée est que vous pouvez fermer l'accès aux relations avec le gouvernement, si vous voulez. Cela ne règle pas forcément tous les aspects des manquements potentiels aux règles régissant l'après-mandat, mais certaines des mesures en place empêcheraient sans doute qu'il y ait un échange indu d'information entre le gouvernement et la personne qui viole les dispositions régissant l'après-mandat.
    Vous avez aussi mentionné que les lois ne sont pas entièrement alignées et qu'elles sont administrées par des commissaires différents. Y voyez-vous un problème? Devrions-nous essayer d'harmoniser les différents éléments ou vaut-il mieux qu'ils relèvent de chacun des commissaires?
    Cette question a été soulevée quand la Loi sur le lobbying a fait l'objet de son examen quinquennal. C'est votre comité, je crois, qui l'a examinée et son rapport recommandait d'envisager l'harmonisation du régime régissant l'après-mandat.
    À mon avis, le comité devrait probablement examiner cela de près. Dans sa réponse au rapport antérieur du comité concernant la Loi sur le lobbying, le gouvernement s'est clairement dit intéressé à entendre le point de vue du comité à ce sujet dans le cadre de l'examen de cette loi-ci. Lorsqu'il verra ce que le comité en pense sous l'angle de la Loi sur les conflits d'intérêts, il voudra sans doute voir s'il vaut la peine de le faire ou non.
    On reconnaît, je pense, que l'existence de ces deux régimes pose des problèmes et qu'il en résulte une certaine confusion. On peut se demander si le niveau des sanctions est bien proportionné. Désolé, je ne voulais pas parler de sanctions, mais de la durée des interdictions, des cinq ans au lieu de un ou deux ans en vertu de la Loi sur les conflits d'intérêts, selon que vous soyez ministre ou un autre type de titulaire de charge publique.
    Vous avez aussi parlé du régime plus général et du document Un gouvernement responsable: Guide du ministre et du ministre d'État. Comment ce guide est-il présenté exactement à un ministre ou ministre d'État? Qui lui dit: « Vous êtes maintenant ministre. Voici ce guide. Vous devez appliquer ces lignes directrices ». Les ministres doivent-ils signer le guide? Le lisent-ils?
    Qui administre cette question au BCP ou au BPM?
    Mon groupe est chargé de conseiller le premier ministre. Le guide est avant tout une publication du premier ministre. En réalité, depuis l'époque du premier ministre Trudeau, il y a eu une certaine forme de gouvernement responsable. Ces lignes directrices sont publiques depuis l'époque du premier ministre Chrétien.
    Ce document est toujours remis à tout nouveau ministre, ou chaque fois qu'un nouveau Cabinet est constitué après une élection. Il fait donc partie des documents qui sont remis à un nouveau ministre. De plus, chaque fois qu'il y a une transition — après une élection, quand le gouvernement reprend ses fonctions — le sujet est généralement abordé à la première réunion du Cabinet. La question est examinée pour rappeler quelles sont les exigences à inclure dans le cadre d'un gouvernement responsable.

  (1600)  

    Mais ce sont seulement des lignes directrices. Cela revient à dire: « Voici ce que vous devriez faire selon nous ».
    En réalité, j'ai lu le guide et une des choses qui me sidèrent le plus est qu'il y est dit que les ministres doivent répondre aux questions à la Chambre des communes au mieux de leur connaissance et de façon franche et pertinente. Les ministres ne semblent pas beaucoup prêter attention à cette ligne directrice lors de la période des questions à la Chambre des communes.
    Pour ce qui est du guide, je dirais seulement que ce sont les attentes du premier ministre à l'égard des membres de son cabinet. En fin de compte, c'est au premier ministre qu'il revient de juger si, compte tenu de ces paramètres, la conduite d'un ministre justifie ou non qu'il reste en poste.

[Français]

    Merci, monsieur Andrews.
    Je cède maintenant la parole à M. Warkentin.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Wild, de vous joindre à nous cet après-midi.
    Je l'ai déjà dit et je voudrais savoir ce que vous en pensez. J'ai l'impression que ce qui permet aux députés — et c'est peut-être la seule chose — de conserver leur poste, c'est leur réputation. Bien entendu, nous avons une loi qui est censée protéger les gens contre les fausses accusations.
    Ce système comporte certaines garanties pour protéger la réputation des personnes qui font l'objet d'allégations.
    Je voudrais savoir si vous croyez que les garanties voulues sont en place ou que le système présente certaines lacunes réelles ou potentielles dont nous devrions tenir compte en examinant cette loi.
    La loi impose, sans aucun doute, un certain nombre d'exigences au commissaire. Par exemple, en vertu des articles 44 et 45, le commissaire a le pouvoir d'enquêter et de faire rapport sur les allégations de contravention, que ce soit suite à une plainte d'un parlementaire ou de son propre chef.
    Ensuite, l'article 46 stipule que les titulaires de charge publique doivent avoir la possibilité de présenter leur point de vue avant qu'un rapport qui pourrait ternir leur réputation ne soit rendu public. Par conséquent, il y a une garantie en ce sens qu'avant que le commissaire ne dépose un rapport à l'issue d'une enquête, de son propre chef ou suite à une plainte, le titulaire d'une charge publique a la possibilité de répondre ou de présenter son point de vue au commissaire.
    Je dirais que c'est un principe assez fondamental d'équité procédurale. Le même genre de protection est prévue à l'égard des sanctions administratives pécuniaires. Avant qu'une sanction ne puisse être imposée, le commissaire doit donner au titulaire de charge publique la possibilité de répondre.
    De plus, des exigences de confidentialité sont prévues dans la loi pour éviter que des allégations non prouvées puissent ternir des réputations injustement ou prématurément pendant l'enquête. C'est encore le principe de la présomption d'innocence jusqu'à preuve du contraire. La loi repose en grande partie sur ces principes, si bien que le commissaire doit respecter une clause de confidentialité qui l'empêche de divulguer des renseignements avant de publier un rapport. Également, les parlementaires qui transmettent au commissaire des allégations qu'ils ont reçues du public selon lesquelles un titulaire de charge publique a contrevenu à la loi sont censés garder ces renseignements confidentiels jusqu'à ce que le commissaire publie un rapport.
    C'est la règle qui ne semble pas être suivie pour le moment. Il semble que toutes les allégations portées à l'attention de la commissaire soient rendues publiques immédiatement ou, dans certains cas, avant que la plainte ne soit déposée. La commissaire a parlé de son insatisfaction à cet égard.
    J'ai certainement entendu le témoignage de la commissaire à ce sujet et je pense que c'est au coeur des recommandations qu'elle a formulées afin de pouvoir rendre publics certains renseignements quand ce genre de divulgations ont lieu afin de corriger les allégations erronées ou d'essayer au moins de clarifier les choses. C'est une autre question sur laquelle nous aimerions connaître les opinions du comité quant à savoir si c'est ou non approprié.
    Un autre aspect qu'il vaut sans doute la peine d'examiner est l'utilisation que la commissaire fait des ordonnances prévues à l'article 30 de la loi. En général, les ordonnances devaient être proactives en ce sens qu'elles devaient dire ce que vous deviez faire pour éviter de vous placer dans une situation de conflit d'intérêts.
    Nous avons eu récemment des exemples d'ordonnances qui tiraient des conclusions au sujet de contraventions à la loi. Je ne veux pas dire que ce soit forcément indésirable. Je crois simplement que lorsque nous réexaminerons la loi, nous devrions essayer de voir si la façon dont l'ordonnance est utilisée dans ce genre de circonstances assure ou non l'équité procédurale. C'est peut-être également une question que le comité voudra examiner, simplement pour vérifier que l'équité procédurale est assurée au cas où l'on conclurait à une faute ou un blâme en vertu de la loi.

  (1605)  

    Nous avons posé la question à la commissaire et je pense qu'elle nous a donné son avis à ce sujet, mais estimez-vous qu'il faudrait une sanction quelconque pour les personnes qui enfreignent les règles de confidentialité lorsqu'elles communiquent des allégations?
    C'est une question complexe. Différentes façons de l'aborder ont été examinées. Je ne connais aucune instance qui ait prévu quelque chose à ce sujet. Peut-être faudrait-il s'en remettre au Président de la Chambre, si nous parlons de la conduite des députés et des sénateurs. C'est une question que le Président de l'une ou l'autre chambre devrait régler si cela se produisait. Il est difficile de placer un commissaire au milieu de cette arène, mais comme je l'ai dit, ce sont des questions sur lesquelles nous avons hâte d'entendre les opinions du comité.
    Me reste-t-il du temps?
    Oui, il vous reste une minute.
    En ce qui concerne le mot « ami » au regard de la loi, la commissaire en a donné une définition. Je ne suis pas certain qu'il soit précisé dans la loi ce qu'est un « ami ». Comment comprenez-vous ce mot? Faudrait-il ajouter d'autres définitions dans la loi? Êtes-vous satisfait du texte actuel? La commissaire a interprété ce mot d'une certaine façon. Se pourrait-il qu'un autre commissaire l'interprète de façon différente?
    Il est certainement toujours possible qu'un autre commissaire interprète les choses différemment. Nous pouvons toutefois supposer que l'avis donné par un commissaire établira certaines bases qui ne devraient pas trop varier à l'avenir. Selon moi, la commissaire a donné au mot « ami » une interprétation correspondant à l'emploi qui est fait de ce mot dans d'autres contextes dans lesquels la conduite est réglementée. Sa définition ne diffère en rien des notions des autres organismes professionnels qui ont des codes de conduite du même genre.
    Il est vrai que la loi ne définit pas un « ami », mais nous pensons que les avis de la commissaire ont suffi à permettre à la plupart des titulaires de charge publique de comprendre quelles sont les limites que prévoit la loi. Les conseils de la commissaire semblent correspondre aux sources que nous consulterions si nous devions établir une définition du mot « ami ».

[Français]

    Merci, monsieur Warkentin.
    À partir de maintenant, les périodes de questions seront d'une durée de cinq minutes.
     Madame Borg, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Je remercie les témoins d'être présents parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Wild, vous avez mentionné que vous fournissiez un guide au premier ministre et aux ministres leur expliquant le type d'activités de financement auxquelles ils pouvaient participer et les précautions qu'ils devaient prendre.
    Par ailleurs, la commissaire a recommandé que l'on fasse en sorte qu'une règle plus rigoureuse en matière de sollicitation de fonds soit mise en place pour les ministres et les secrétaires parlementaires. Êtes-vous favorable à cette idée? Pouvez-vous nous suggérer des gestes plus concrets que nous pourrions poser en nous inspirant du guide destiné aux ministres?

[Traduction]

    Je n'ai pas beaucoup réfléchi à cette question et je n'ai donc pas d'opinion particulière au sujet de la recommandation de la commissaire. Comme pour le reste, nous attendons de connaître les opinions du comité au sujet de cette recommandation.

  (1610)  

[Français]

    Merci.
    Une autre recommandation de la commissaire visait à faire en sorte que le code régissant les députés et la Loi sur les conflits d'intérêts soient combinés. Avez-vous une opinion à cet égard? Cela rendrait-il votre tâche un peu plus facile?

[Traduction]

    Je ne pense pas que cela facilitera ma tâche, principalement parce qu'en tant que fonctionnaires, nous n'avons aucun rôle à jouer dans l'élaboration de la politique à l'égard du code des députés ou des sénateurs. C'est fait sous les auspices du pouvoir législatif et nous n'y jouons aucun rôle.
    Je ne pense pas que cela changerait quoi que ce soit. Je ne peux pas imaginer qu'on puisse un jour me demander des conseils politiques au sujet du code à l'intention des députés. Par conséquent, si les deux régimes sont réunis dans une seule loi, il s'agira de voir comment organiser la révision de cette loi et comment la modifier étant donné que vous auriez des responsabilités politiques partagées. Une partie de la loi relèverait du pouvoir exécutif — le gouvernement et mon bureau — et l'autre du pouvoir législatif et du comité parlementaire qui réexaminera les règles s'appliquant aux députés.
    Cela crée un certain problème de logistique pour réexaminer une loi mixte tous les cinq ans, comme nous le faisons actuellement. Je ne vois pas très bien comment cela fonctionnerait. Je ne pense pas que ce soit un obstacle insurmontable. Je le souligne simplement comme une chose qu'il faudra étudier. Vous avez les deux branches du gouvernement, le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. Nous jouons des rôles très différents à l'égard de ces deux branches et je n'ai absolument aucun rôle à jouer dans le code de conduite des députés.

[Français]

    Merci.
    Je vais revenir un peu sur le guide à l'intention des ministres.
    Croyez-vous que les conseils prodigués dans le guide font en sorte qu'on est vraiment en mesure de prévenir des situations scandaleuses ou d'aider une personne qui pourrait se trouver dans une zone grise? Est-on bien outillés à cet égard?

[Traduction]

    Vous parlez du guide Un gouvernement responsable?

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    Personnellement, j'ai pu voir comment ce document a évolué au fil des ans, car j'en ai vu toutes les versions depuis la première qui a été produite par le premier ministre Trudeau, jusqu'à celle qui existe actuellement et qui a été publiée en 2011. Je peux dire qu'il est resté remarquablement fidèle aux principes fondamentaux qu'il énonce. Je pense que ces principes sont ceux qui prévalent non seulement au Canada, mais qu'on s'attend à voir dans la plupart des gouvernements sur le modèle de Westminster. Par conséquent, les fondements de ce guide sont pratiquement pérennes. Ils reflètent les centaines d'années d'évolution du gouvernement de Westminster. Ces principes fondamentaux ont tous fait leurs preuves.
    La notion de gouvernement par l'exécutif, le rôle d'un premier ministre, le rôle du gouverneur général, le rôle du pouvoir exécutif, le rôle du Parlement, la relation d'imputabilité entre les ministres et le Parlement, le rôle des sous-ministres, le rôle du personnel exonéré, tels sont les principes qui caractérisent notre forme de gouvernement. Ils ont tendance à ne pas changer radicalement au fil des ans. Il se peut qu'ils évoluent, mais je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit dans la version actuelle du guide qui laisse supposer la moindre faiblesse dans ces principes fondamentaux.
    En général, c'est un document assez solide. Quand je regarde sur la scène internationale du côté de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni, je vois qu'ils ont produit des documents très similaires énonçant ces principes de façon très semblable. Nous restons assez fidèles à la tradition de Westminster.

  (1615)  

[Français]

    Je vous remercie de votre réponse.
    Nous passons maintenant à M. Butt. Vous disposez de cinq minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur Wild, de vous joindre à nous aujourd'hui.
    Je tiens d'abord à dire qu'à mon avis, c'est une excellente chose que nous fassions cet examen quinquennal. C'est une excellente chose que nous ayons présenté la Loi fédérale sur la responsabilité dont la Loi sur les conflits d'intérêts fait partie et que nous ayons essayé d'établir certaines règles. Nous avons présenté un ensemble de mesures et nous avons fait de notre mieux. Cet examen a pour but d'obtenir votre opinion et celle des autres sur les questions suivantes. La loi est-elle encore pertinente cinq ans plus tard? Couvre-t-elle les bonnes personnes? Fait-on les déclarations qui doivent être faites? Le mandat de la commissaire est-il approprié?
    Dans cette veine, j'ai posé quelques questions à la commissaire, lundi, car un aspect de la loi me préoccupe. Bien entendu, cela couvre certains titulaires de charge publique, y compris les ministres, mais cela revient à dire qu'une fois que vous êtes nommé au Cabinet, vous n'êtes plus vraiment un député. Vous n'êtes plus vraiment là. Vous ne pouvez pas vraiment défendre les intérêts locaux de votre collectivité. Et cela me préoccupe.
    Je suis sûr que tous les députés qui sont du côté du gouvernement souhaitent recevoir un appel du premier ministre et être nommés ministres ou secrétaires parlementaires et qu'ils veulent remplir ce rôle et remplir ces fonctions de leur mieux. Néanmoins, étant donné la façon dont la loi est écrite, il semble que nous ayons pratiquement lié les mains à ces personnes, en les empêchant de défendre les intérêts de leur communauté sur certaines questions qui n'ont absolument aucun rapport avec le ministère qui est le leur.
    Est-ce un défaut de la loi? Ou est-ce à dessein que nous avons deux séries bien distinctes de personnes qui travaillent à la Chambre des communes, celles qui sont ministres ou secrétaires parlementaires et celles qui sont de simples députés?
    Il y a une ou deux choses à considérer au sujet de cette question. La réponse n'est pas vraiment évidente en ce sens que la loi cherche à tenir compte du fait que les ministres sont également des députés. Leurs électeurs ont le droit de recevoir les mêmes services de leur député que ceux des autres députés. Par conséquent, comment concilier ce droit avec le rôle qu'un ministre peut avoir à jouer et les problèmes que cela peut susciter?
    Le paragraphe 64(1) de la loi est une clause très importante. Il a fait l'objet de beaucoup de discussions quand la loi a été étudiée à la Chambre et au Sénat pour la première fois. C'est un article important, car il stipule que rien dans la loi n'interdit à un sénateur ou à un député, qui est aussi un titulaire de charge publique, de se livrer aux activités auxquelles il se livrerait normalement en tant que sénateur ou député.
    L'inclusion de cette disposition a été une décision délibérée. C'est parce qu'on a estimé que les ministres et les secrétaires parlementaires auraient un rôle à jouer en tant que députés et sénateurs et devraient se livrer à des activités dans l'intérêt de leurs électeurs. Les décisions récentes de la commissaire ont laissé entendre que ce travail doit être limité dans certains domaines.
    Je dirais que ce débat n'a rien de vraiment nouveau. Toute la question du rôle des ministres vis-à-vis certains types d'organismes et surtout ceux qui remplissent une fonction décisionnelle quelconque a fait l'objet de discussions et suscité la controverse depuis le début des années 1990 et sans doute même avant cela.
    Il est difficile de dire s'il est nécessaire ou non de rendre les choses plus claires quant à ce qui est permis et ce qui ne l'est pas. La commissaire a fait part de son opinion quand elle a comparu et le comité va devoir examiner attentivement cette question et y réfléchir.
    Je peux dire que le principal souci dans lequel la loi a été conçue, si vous regardez comment le guide sur le gouvernement responsable a évolué depuis 1990 — car il contient tout un chapitre sur le rôle des ministres vis-à-vis des tribunaux administratifs des sociétés d'État — et si vous prenez tous les problèmes qui ont surgi au cours des 20 ou 25 dernières années, il faut en conclure qu'il faut être particulièrement prudent si l'on est un ministre responsable d'une organisation.
    Si l'organisation fait partie de votre portefeuille, vous devez vous méfier particulièrement de toute interaction avec cette organisation visant à défendre les intérêts d'un électeur. Néanmoins, il faut que vous puissiez quand même faire les choses qu'un député pourrait faire autrement. Il faudrait mettre en place un système permettant à vos électeurs d'obtenir les mêmes services que ceux que les autres députés peuvent leur offrir.
    Pour le moment, étant donné les décisions récentes de la commissaire, nous ne savons pas exactement ce qu'il en est et si ce sont des domaines politiques que le comité voudra examiner. Nous attendrons sans doute de voir ce que le comité a à dire à ce sujet.
    Selon moi, du point de vue de la politique publique, nous devons nous pencher sur la question pour veiller à ce qu'il y ait un bon équilibre. Pour le moment, je vois une certaine distorsion entre les ordonnances que la commissaire a rendues et l'optique du guide sur le gouvernement responsable et nous allons devoir examiner cela.

  (1620)  

[Français]

    Je vous remercie de votre réponse.
    Je cède la parole à Mme Davies pour une période de cinq minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    La question dont nous avons parlé est très complexe. Ce qui m'a frappée dans votre déclaration préliminaire, c'est le nombre d'acteurs différents et le nombre de niveaux et de nuances, qu'il s'agisse de la Loi sur les conflits d'intérêts, du document Un gouvernement responsable, de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, sans oublier les lignes directrices du Conseil du Trésor concernant les cadres supérieurs ou tous les employés de la fonction publique, la Loi sur le lobbying et deux commissaires différents.
    En fin de compte, nous serons tous d'accord pour dire que nous voulons des règles éthiques claires et éviter les conflits d'intérêt. Par conséquent, je pense que l'examen prévu par la loi vise en partie à voir quels sont les problèmes, si le système manque de clarté ou s'il est bien appliqué ou, en fait, s'il ne l'est pas vraiment — et vous en avez parlé un peu aujourd'hui — si bien que certains actes n'ont, en réalité, aucune conséquence. Telles sont les questions sur lesquelles nous devons nous pencher.
    Vous venez de dire, en réponse à une des questions de mon collègue, qu'à votre avis, il y a un certain flou entre ce que peut faire un ministre et ce qu'il peut faire en tant que député. Quand Mme Dawson est venue lundi, elle semblait penser que la délimitation est claire.
    À mon avis, cela soulève beaucoup de questions: les lignes directrices ou règles sont-elles claires en ce qui concerne les personnes qui les administrent et celles qui doivent les respecter? Tout ce que vous avez dit aujourd'hui me porte à penser qu'en général, la clarté n'est pas suffisante et que toutes sortes de choses peuvent se produire, que ce soit délibérément ou non. Voilà sur quoi nous devons centrer notre attention, parce qu'en fin de compte, c'est une question de responsabilité publique et il faut que nous sachions très clairement où nous en sommes sur ce plan-là.
    Vous pourriez peut-être me dire s'il est nécessaire d'envisager une structure quelconque et pourquoi vous pensez qu'il y a une zone floue alors qu'apparemment, Mme Dawson ne partage pas cet avis. Vous avez certainement un point de vue différent.
    Je ne cherche certainement pas à contester l'opinion de la commissaire. Ce serait quelque peu présomptueux de ma part étant donné que c'est à elle que revient la responsabilité ultime d'interpréter la loi.
    Je dis seulement que l'annexe H de Un gouvernement responsable établit un cadre d'orientation au sujet de l'interaction des ministres avec les organismes quasi judiciaires, les organismes qui remplissent des fonctions décisionnelles. Les ordonnances récemment rendues nous obligeraient à modifier ce cadre d'orientation.
    Autrement dit, la commissaire a, pourrait-on dire, clarifié ce que nous pensions relever du paragraphe 64(1), mais cela ne relève pas vraiment de cette disposition. Nous devons tenir compte de l'annexe H, car cette annexe, qui a été révisée en 1993 et n'a pas changé beaucoup depuis, s'éloigne de l'interdiction totale de toute interaction entre un ministre et un organisme quasi judiciaire en disant que l'interdiction concerne la fonction décisionnelle comme telle, mais pas forcément les questions de licence ou de permis, par exemple, lorsque n'importe qui peut faire des instances.
    Je dis simplement qu'en raison des ordonnances qui ont été rendues, nous devrons maintenant nous pencher sur la question et voir quelles en sont les conséquences sur le cadre politique que nous pensions avoir établi dans la loi, voir ce que signifiait le paragraphe 64(1) et comment il se reflétait dans les lignes directrices du document Un gouvernement responsable au sujet de l'interaction entre les ministres et les organismes quasi judiciaires.
    Il me semble évident que nous avons un problème et que nous allons devoir réexaminer les règles du jeu, car elles semblent différentes de celles que nous pensions avoir.

  (1625)  

[Français]

    Madame Davies, le temps qui vous était alloué est écoulé.
    Je vais céder la parole à Mme Davidson pour quelques minutes avant de passer à notre prochain témoin.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Wild, merci d'être venu. Nous avons certainement entendu un témoignage intéressant cet après-midi. Je sais que j'ai appris certaines choses que j'ignorais avant que vous ne preniez la parole et j'apprécie donc vraiment votre présence ici.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé du BCP qui est le principal groupe de la fonction publique chargé de conseiller le premier ministre. Si j'ai bien compris, votre rôle consiste en partie à déterminer si la loi couvre ou non ce qu'elle doit couvrir, s'il faut prévoir autre chose et si elle s'applique aux titulaires de charge publique auxquels elle doit s'appliquer.
    J'ai deux questions à vous poser.
    Pensez-vous que la loi couvre ce qu'elle doit couvrir? Certaines personnes ont laissé entendre qu'elle devrait s'étendre à d'autres nominations par décret ou d'autres personnes. Qu'en pensez-vous?
    D'autre part, voici une des autres questions que je me suis posées à mon sujet. Les secrétaires parlementaires devraient-ils être soumis aux mêmes restrictions que les ministres à l'égard de la période d'attente et du reste?
    Pourriez-vous répondre à ces questions, s'il vous plaît?
    Pour ce qui est de la portée de la loi et, plus particulièrement, de la question des personnes nommées, il m'apparaît évident que le comité voudra peut-être se pencher sur une certaine forme de nomination pour voir s'il est nécessaire ou non de modifier les définitions de titulaire de charge publique ou de titulaire de charge publique principal afin d'englober ces personnes. C'est une forme de nomination assez particulière selon laquelle les premiers dirigeants sont nommés par leur conseil d'administration plutôt que par un ministre ou le gouverneur en conseil.
    Nous connaissons tous le cas du gouverneur de la Banque du Canada. Il y a des directeurs de sociétés de musée, ainsi que des administrations de pilotage qui entrent dans cette catégorie. Il serait sans doute utile de réexaminer cette définition pour veiller à n'oublier personne.
    La question du secrétaire parlementaire est intéressante du point de vue de l'objectif de la loi. C'est de faire en sorte que les personnes qui exercent l'autorité, les responsabilités et les fonctions du pouvoir exécutif le font de façon non seulement à ne pas sembler être, mais à ne pas être influencées par des intérêts personnels, n'est-ce pas? Tel est l'objectif général. Il s'agit de veiller à ce que le public soit convaincu que ceux qui exercent le pouvoir exécutif au gouvernement le font d'une manière appropriée, c'est-à-dire dans l'intérêt public et non pas sous l'influence d'un intérêt personnel.
    À mon avis, la situation des secrétaires parlementaires soulève une question importante. Ils n'exercent pas de pouvoirs, de responsabilités ou de fonctions au regard de la loi. Ils ont pour rôle d'aider les ministres à s'acquitter de leurs responsabilités à la Chambre des communes.
    Ils peuvent aussi aider les ministres à élaborer la politique gouvernementale, mais ils n'exercent pas de pouvoirs, de responsabilités ou de fonctions de la même façon que les ministres ou même les fonctionnaires qui exercent des pouvoirs au nom des ministres. Il y aurait donc lieu de voir s'ils n'entrent pas dans une catégorie légèrement différente. Ils n'ont pas forcément accès aux mêmes renseignements que les ministres. En général, ils n'ont pas accès aux renseignements du Cabinet; ils peuvent en obtenir quelques-uns s'ils travaillent sur un dossier politique donné pour le compte d'un ministre. Ils exercent une catégorie de fonctions légèrement différente et ont donc des relations légèrement différentes à l'égard des problèmes que vise la loi, du moins à mes yeux.
    C'est une question sur laquelle le comité voudra peut-être se pencher pour voir ce qu'un secrétaire parlementaire fait par opposition à un ministre, la différence entre les deux sur le plan de l'exercice des pouvoirs et de l'accès à l'information.

  (1630)  

[Français]

    Merci, monsieur Wild, de votre présentation.
     C'est ce qui met fin au témoignage de la première heure de notre séance.
    Nous allons interrompre les travaux du comité pendant quelques minutes pour permettre à un autre témoin de comparaître par vidéoconférence.

  (1630)  


  (1630)  

    Chers collègues, membres du comité, nous allons reprendre nos travaux. C'est la deuxième partie de notre réunion.
     Comme prévu à l'ordre du jour, nous entendrons par vidéoconférence M. Lorne Sossin, doyen de l'Osgoode Hall Law School de l'Université York de Toronto. Comme d'habitude, la présentation durera 10 minutes et nous passerons par la suite à la période des questions et commentaires.
     Monsieur Sossin, la parole est à vous. Je vous remercie de votre présence.

[Traduction]

    Je vous remercie infiniment de m'avoir invité, même si je ne peux pas être là en personne, comme je l'aurais vivement souhaité.
    Je n'aurai probablement pas besoin de 10 minutes et je tiens à laisser le maximum de temps pour les questions et les réponses afin de pouvoir vous être utile. Mon expérience dans ce domaine, que ce soit au niveau municipal, provincial ou fédéral, m'a convaincu de certains principes directeurs qui, je l'espère, vous seront utiles pour votre examen.
    Le premier principe concerne la granularité. Autrement dit, il est tentant de préciser de plus en plus ce qui constitue un conflit d'intérêts, car les gens doivent s'autoréglementer et veulent savoir le plus clairement possible quelles sont les règles auxquelles ils seront soumis.
    Néanmoins, si vous fixez des limites, comme le font certaines dispositions de la loi — tel que l'article 14, par exemple, au sujet des contrats, qui interdit d'en conclure avec un conjoint, un parent ou un enfant — je pense que vous allez inévitablement perdre de vue le principe directeur qui est de ne pas favoriser un intérêt personnel en exerçant un pouvoir public. Pourquoi, par exemple, cela ne s'applique-t-il pas aussi rigoureusement à un frère, à un cousin ou à une nièce? Quelle que soit la limite que vous fixez, vous allez inévitablement omettre des choses qui, aux yeux du public, entrent dans la même catégorie d'intérêts personnels.
    La structure d'ensemble de la loi repose sur des valeurs et est largement guidée par le désir d'améliorer la confiance du public. J'espère que votre examen validera cette approche, car j'ai constaté que, lorsque les lois municipales, provinciales et autres deviennent de plus en plus granulaires, le public finit par avoir de moins en moins confiance. C'est une observation générale.
    Mon autre commentaire est du même ordre. Une critique que j'ai entendu formuler à l'égard de la loi par d'autres commissaires à l'intégrité, d'autres personnes qui exercent dans ce domaine du droit et de la politique ou d'autres observateurs portait sur la distinction entre les conflits d'intérêts réels et la crainte ou la perception de conflits d'intérêts. Je dirais que les conflits réels sont très difficiles à établir dans de nombreux cas alors que la perception de conflit est souvent beaucoup plus claire.
    À mon avis, les gens se soucient de plus en plus de ne rien faire qui puisse donner l'impression d'un conflit d'intérêts aux yeux d'un observateur raisonnable. C'est certainement une norme juridique que l'on connaît bien en droit administratif à l'égard des prises de décisions. De plus en plus, dans les nouvelles lois municipales que je connais, par exemple, on a tendance à partir du principe que la perception de conflit d'intérêts peut être aussi préjudiciable qu'un conflit réel. Encore une fois, c'est une question que vous avez déjà examinée, de même que ceux qui ont conçu la loi, mais comme elle est d'actualité dans le milieu de la reddition de comptes, je tenais à en faire mention.
    Ma troisième observation porte sur les pouvoirs de la commissaire. Je sais qu'on s'est demandé dans les médias s'il était nécessaire d'imposer des sanctions pécuniaires supplémentaires. Nous avons eu un cas intéressant à Toronto dont tout le monde, autour de cette table, a certainement entendu parler. Un tribunal a jugé que notre commissaire à l'intégrité n'avait pas le pouvoir de demander au maire de rembourser certains fonds qui, selon elle, avaient été payés en contrevenant au code de conduite.
    Là encore, c'est surprenant sur le plan de la confiance du public. Si vous avez reçu un avantage, pourquoi ne serait-il pas logique, du point de vue de la restitution, que cet argent soit remboursé ou versé dans les coffres de la ville afin qu'il n'y ait pas d'avantage personnel?
    Ce troisième commentaire ne vise pas à dire quelle serait la sanction pécuniaire adéquate. La commissaire a déclaré fort justement qu'il est inhabituel d'imposer une sanction pécuniaire pour les entorses aux règles, mais pas pour les transgressions importantes. Néanmoins, je n'aimerais pas que cela entraîne une granularité allant jusqu'à fixer le montant de la sanction maximum à un certain niveau dans tel cas particulier.

  (1635)  

    À mon avis, l'approche fondée sur des valeurs — qui consiste à dire que les remèdes nécessaires pour assurer la confiance du public devraient être ceux que la commissaire a à sa disposition — permettra beaucoup mieux d'atteindre les objectifs de la loi que si l'on cherche à préciser exactement la nature de chaque sanction punissant chaque genre de conduite.
    Telles sont les trois principales questions qui me viennent à l'esprit et ce sont celles qui sont soulevées lors des conversations au sujet de cette loi. Cette loi a été bien accueillie lorsqu'elle est entrée en vigueur et elle a relativement bien réussi à améliorer la qualité de la conduite et la crédibilité de l'examen. Néanmoins, un succès relatif est, bien entendu, une arme à double tranchant et il y a certainement des éléments de ce travail qui restent à terminer.
    Je suis prêt à discuter avec vous ou à répondre à vos questions si cela peut vous être utile.
    Merci de m'avoir permis de partager avec vous ces premières réflexions.

  (1640)  

[Français]

    Je vous remercie de votre présentation.
    Nous passons à la période de questions. Nous commençons avec M. Angus. Vous avez sept minutes

[Traduction]

    Merci, monsieur Sossin, de vous joindre à nous aujourd'hui. Nous apprécions vraiment vos conseils. Je ne suis pas avocat moi-même, mais il y a de nombreux avocats, ici, au Parlement et nous étudions la loi.
    Par conséquent, je trouve parfois assez étonnant que mes collègues conservateurs ne sachent pas du tout quelles sont les règles à suivre et ce qu'il ne faut pas faire. Par exemple, le 18 janvier, la commissaire à l'éthique a jugé que le ministre des Finances, Jim Flaherty, avait clairement enfreint la Loi sur les conflits d'intérêts en écrivant une lettre, en tant que ministre, au nom d'un intérêt commercial qui n'était pas dans sa circonscription. La décision se fondait sur l'article 9 de la loi qui interdit aux ministres d'user de leur influence et c'était également contraire aux lignes directrices du premier ministre.
    Je viens maintenant d'entendre un représentant du Conseil privé dire que c'était une zone très floue que le comité devrait peut-être examiner. Nous avons posé la question à Mme Dawson et elle semblait croire que les règles étaient très claires.
    Les règles sont-elles claires au sujet d'un ministre qui écrit à un organisme quasi judiciaire ou est-il vrai que, comme l'a dit le représentant du Conseil privé, c'est une zone très floue et on ne sait pas exactement quelles sont les règles?
    À mon avis, ce n'est pas particulièrement flou. L'article 9 est clair. Ce qui pourrait être clarifié, et je ne sais pas si c'est vraiment flou — c'est à vous de voir — c'est l'application de l'article 64 qui parle de ne pas nuire aux activités ordinaires d'un député.
    Il est clair, je pense, que l'article 9 doit limiter cet autre article. Autrement dit, rien ne devrait limiter les activités ordinaires d'un député si ce n'est qu'il est interdit de se prévaloir de ses fonctions officielles pour obtenir une décision favorable d'un organisme décisionnel ou réglementaire.
    La confiance du public est le principal critère. J'ai un peu suivi les observations du représentant du Conseil privé au sujet d'une certaine annexe et d'un certain libellé et je ne parlerai pas en détail des protocoles ou guides existants et de ce qu'il faudrait réexaminer. Toutefois, l'approche de principe est assez claire: il ne serait pas logique d'avoir une disposition comme l'article 9 qui établit l'interdiction générale, pour tout titulaire de charge publique, d'user de son influence pour obtenir un résultat favorisant un intérêt personnel ou commercial s'il est permis de le faire chaque fois que c'est au profit d'un électeur ou dans cet autre contexte.
    Cela ne veut pas dire, dans le cas du ministre Flaherty, qu'il a cherché à contourner la loi ou à agir illégalement. Il ne faut pas non plus oublier que le commissariat et cette loi ont pour rôle de donner des conseils et de clarifier les règles. Autrement dit, je ne pense pas qu'il s'agisse de dire simplement, après coup, que quelqu'un a contrevenu à la loi. L'idéal est de pouvoir orienter la conduite des gens grâce à des bons conseils et en faisant des distinctions raisonnables à partir de la loi.
    Je ne crois donc pas que ce soit vraiment une zone floue, mais quand il y a deux dispositions concurrentes, il est important de voir comment les concilier. Dans ce cas-ci, la façon de les concilier est assez claire et l'article 9 doit prévaloir chaque fois qu'il y a ambiguïté. Lorsque vous êtes assis entre deux chaises et ne savez pas laquelle choisir, vous devez vous fier à l'objectif de la loi et il n'est pas nécessaire d'être avocat pour comprendre pourquoi c'est la meilleure façon d'interpréter la loi.
    C'est ainsi que je l'interprète. Nous ne nous attendions pas à ce que la commissaire Dawson mette le ministre des Finances en prison suite à cette affaire. Elle a clarifié la loi. Je pense que c'était assez clair. Elle a dit que l'article 9 avait préséance.
    Je ne sais pas vraiment si mes collègues d'en face cherchent à édulcorer la loi, mais cela semble les mettre très mal à l'aise. J'ai demandé si, en tant que simple député, l'article 64 me permettait d'écrire ce genre de lettre, et la commissaire a dit que c'était parfaitement acceptable. Mon collègue, M. Warkentin, a alors demandé s'il était répréhensible que Charlie Angus reçoive un intérêt financier d'Aboriginal Voices Radio. Elle a répondu qu'elle se pencherait sur la question. Toutefois, comme je n'ai reçu absolument aucun don d'Aboriginal Voices Radio, je demeure, comme mes collègues autour de la table, un simple député.
    La commissaire clarifie les règles. Nous devrions pouvoir aller de l'avant, mais mes collègues d'en face semblent vouloir revenir sur cette question et édulcorer la loi.
    Je voudrais simplement vous poser une autre question au sujet des préoccupations de mes collègues. Ils semblent vivement s'opposer à toute sanction administrative pécuniaire contre les ministres qui enfreignent la loi, mais ils laissent entendre qu'un député qui écrit à la commissaire à l'éthique au sujet d'une enquête et qui le fait savoir à quelqu'un devrait être puni, car cela devrait rester secret.
    L'exemple que je vais citer date de vendredi dernier. Est-ce M. O'Toole, le nouveau député de Durham? Il a publié un communiqué disant qu'il allait demander une enquête sur un de nos collègues. C'est une accusation fallacieuse, mais comme il en a parlé seulement lundi à la commissaire aux conflits d'intérêts, je vois cela comme une manoeuvre politique. Ce n'est pas très joli, mais c'est de la politicaillerie.
    Avons-nous quelque chose à gagner en décidant de garder les enquêtes secrètes? Apparemment, un ministre aurait certainement avantage à ce qu'une enquête reste secrète. Néanmoins, serons-nous vraiment plus avancés si nous imposons des sanctions pécuniaires à M. O'Toole pour s'être adressé aux médias avant d'être allé voir la commissaire à l'éthique? Ne pourrions-nous pas simplement mettre cela sur le compte de la politicaillerie?

  (1645)  

    C'est un élément absolument essentiel, dans un certain sens. Je ne prends parti ni d'un côté ni de l'autre, mais il me semble évident que si tout le processus était transparent du début à la fin, cela irait à l'encontre du but visé qui est de donner des conseils judicieux et de pouvoir mener des enquêtes qui doivent parfois se faire à l'abri du regard du public.
    D'un autre côté, il me semble tout à fait injuste qu'on demande une enquête un mercredi, qu'on porte plainte et que le vendredi, on puisse dire: « J'ai entendu que la commissaire à l'éthique enquêtait sur le ministre et c'est la raison numéro 15 pour laquelle il devrait démissionner » sans que la commissaire à l'éthique ou le ministre visé ne puisse rien dire pour sa défense.
    Je considère que l'objectif est de veiller à obtenir une enquête efficiente et efficace avec suffisamment de transparence pour améliorer la confiance du public et éviter ce genre d'injustice potentielle. Cela devient seulement un autre moyen d'exprimer sa partisanerie, et je pense que nous aurons perdu une occasion de rendre des comptes, comme le souhaite le public. Cela dit, il faut tenir compte des réalités…
    Mon temps est épuisé.

[Français]

    Malheureusement, le temps qui vous était alloué est écoulé.
    Je cède la parole à M. Carmichael qui dispose de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Sossin.
    Bien entendu, la partisanerie se joue à deux. Tout le monde autour de cette table sera sans doute d'accord pour dire que nous voulons tous une loi juste et équilibrée pour tout le monde.
    Toutefois, lorsqu'on demande à la commissaire d'envisager la tenue d'une enquête, des facteurs externes publics risquent de créer une présomption de culpabilité avant que ses conclusions ne soient connues. Cela nous ramène à la partisanerie. Je crains que cela ne nuise à la réputation des gens avant que l'enquête ne soit terminée. Je tiens à ce que nous trouvions une solution équitable. Je voudrais savoir si vous voyez un moyen d'atténuer les attaques lancées contre la réputation dans un but purement partisan.
    C'est, je pense, une réalité regrettable, mais dont il est nécessaire de tenir compte. Je ne suis pas certain que la bonne solution soit d'imposer des sanctions pécuniaires aux plaignants, mais une solution intermédiaire serait une certaine transparence permettant à un commissaire à l'éthique d'exercer son jugement en révélant, par exemple, qu'une enquête n'est pas terminée, qu'il ne tirera aucune conclusion tant que cette enquête ne sera pas achevée et qu'il serait imprudent de sa part de se prononcer au sujet de certaines allégations ou preuves.
    En fin de compte, si quelqu'un dépose continuellement des plaintes ou loge une plainte et essaie de l'exploiter dans les médias, la commissaire à l'éthique peut en tenir compte dans le cadre des pouvoirs qu'elle possède pour assurer l'intégrité du processus. Elle devrait avoir toute une panoplie de mesures à sa disposition pour veiller à ce que sa fonction ne soit pas utilisée à des fins partisanes.
    Des solutions mesurées et équilibrées existent, mais il faut partir du principe que la commissaire doit être au-dessus de la mêlée et doit être vue comme telle. Si la commissaire n'a pas cette crédibilité et cette confiance, aucune disposition de la loi, aucun pouvoir discrétionnaire ou aucune sanction n'y changera quoi que ce soit. Ce doit être le point de départ.

  (1650)  

    Je suis entièrement d'accord avec vous. Je pense qu'il faut régler le processus de façon juste et équilibrée et je n'envie pas la commissaire qui doit trouver un moyen d'y parvenir.
    C'était intéressant; le témoin précédent a parlé de sanctions pécuniaires dont vous avez fait mention. Nous l'avons interrogé au sujet des sanctions administratives pécuniaires importantes qui représentent l'une des recommandations de la commissaire et il a laissé entendre que ces sanctions modifieraient profondément la loi. Par conséquent, même si la loi est bien conçue pour atteindre son objectif, en essayant de trouver une bonne solution et de raffiner la loi après un certain temps, ne flirtons-nous pas avec quelque chose qui va nous faire dévier de la trajectoire?
    Le plus vous augmentez l'enjeu sous la forme de sanctions pécuniaires ou autres ou d'un pouvoir discrétionnaire à l'égard des recours, plus la personne assujettie à ces règles pourra dire: « Je mérite un meilleur processus. Je mérite une meilleure chance de me défendre ». Plus vous alourdissez les sanctions, plus vous judiciarisez le processus au lieu de simplement signaler le cas, de dire qu'il y a eu contravention et de laisser le Parlement ou une autre instance décider d'un remède. La commissaire peut alors exercer librement ses pouvoirs, car les enjeux sont moindres. Autrement dit vous ne pouvez pas simplement changer les recours sans changer le reste.
    Néanmoins, j'en reviens à l'équilibre dont vous avez parlé. Pour permettre à la commissaire de tenir compte à la fois de l'équité d'un processus pour le ministre visé et des mesures appropriées pour dissuader de mal agir et résoudre les problèmes… comme je l'ai dit, c'est l'exemple classique de la municipalité qui n'a pas la possibilité d'ordonner la restitution. Je ne vous dirai pas si je suis d'accord ou non avec le tribunal ou si la loi a été bien interprétée, mais il est étonnant qu'un règlement sur les conflits d'intérêts ou un code de conduite ne permette pas, par exemple, à un commissaire d'ordonner le remboursement d'une somme d'argent.
    Ce n'est pas la même chose pour les sanctions pécuniaires et l'importance qu'elles devraient revêtir pour régir la conduite des gens. Je ne pense pas que nous voulions d'un monde où tout tourne autour de l'argent. Ce que nous nous demandons, c'est ce dont la commissaire a besoin pour pouvoir jouer efficacement son rôle et accroître la confiance du public. À mes yeux, c'est plus important que toute sanction qui puisse être imposée à quelqu'un.
    Par conséquent, les sanctions et l'opinion de la commissaire à ce sujet sont valides, mais je crains que cela ne puisse faire perdre de vue l'objectif général de la loi.
    Combien de temps me reste-t-il? Me reste-t-il quelques minutes?
    Le président: Il vous reste une minute.
    M. John Carmichael: Une minute, alors je vais essayer d'être bref.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez parlé du conflit d'intérêts réel et perçu. J'aimerais que vous nous disiez comment vous faites la distinction et que vous approfondissiez un peu ce sujet.
    Certainement, et ce ne sera pas long. Nous disposons d'une jurisprudence considérable à ce sujet en raison du critère de « crainte raisonnable de partialité » dont se servent, en droit administratif, les décideurs et les organismes de réglementation administratifs ainsi que les entités quasi judiciaires et politiques. Nous sommes donc largement en mesure de dire lorsqu'il y a une perception de partialité aux yeux d'une personne raisonnable.
    C'est, je pense, ce que visent les dispositions à l'égard des conflits d'intérêts lorsqu'un intérêt personnel risque de saper la confiance du public dans l'exercice du pouvoir public. Pour la même raison, selon ce critère juridique, il n'est pas nécessaire de prouver la partialité. Il serait trop difficile, trop imprévisible de prouver ce que pense une personne. Par conséquent, la crainte raisonnable de partialité, ce critère objectif, doit être l'opinion d'un observateur raisonnable et non pas celle d'un observateur partisan. C'est pour empêcher un usage abusif de ce critère.
    Si nous faisons confiance à la commissaire, je crois possible d'ajouter une norme de crainte, de perception, de façon à accroître la confiance du public, mais sans nuire à l'équité.

  (1655)  

[Français]

    Merci, monsieur Carmichael.
     Je cède maintenant la parole à M. Andrews. Vous disposez d'une période de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, et bienvenue, monsieur Sossin.
    Au début de votre déclaration, vous avez dit qu'il faut savoir où fixer les limites de l'application de la loi en ce qui concerne les membres de la famille, votre conjoint, vos cousins, vos soeurs et frères. Vous avez laissé entendre que le public croit savoir où se situe la limite. Pourriez-vous m'expliquer où se trouve la limite aux yeux des gens ou selon votre propre opinion et jusqu'où il faut remonter dans l'arbre généalogique de la famille?
    Je me réjouis que vous posiez cette question. Quand je dis que le public connaît la limite, je veux dire que la distinction entre l'intérêt personnel et le pouvoir public légitime est assez claire aux yeux des gens. Par exemple, il peut s'agir du conjoint, des frères et soeurs ou d'un tas d'autres gens dont on peut penser qu'ils seront touchés par l'intérêt de votre enfant.
    Néanmoins, nous savons que dans certains cas, il peut s'agir du bon ami que vous connaissez depuis l'école primaire. Cela peut être la personne dont vous êtes amoureux et que vous essayez d'impressionner en exerçant votre pouvoir. Pourquoi se soucier des relations familiales, mais pas d'une situation dans laquelle il peut s'agir d'un parent assez éloigné? Il est clair, dans ce contexte, d'après les renseignements et les preuves fournies, que la situation a eu une influence matérielle sur l'exercice d'un pouvoir public. Voilà la question selon moi. La loi vise les conflits d'intérêts.
    Si je suis seulement partial en faveur de mon neveu ou si je m'intéresse seulement à des relations privées avec un ancien compagnon de classe, on considère que c'est légitime. Lorsqu'on trouve normal de compromettre l'intégrité d'une autorité publique du moment que c'est en faveur de tel intérêt personnel et non pas de tel autre, cela engendre du cynisme et le sentiment que l'on cherche des échappatoires aux règles établies. Cela ne rappelle aucune expérience vécue, n'est-ce pas?
    Chacun sait qu'il a, au cours de sa vie, été touché par une relation personnelle. Cela n'a généralement rien de mystérieux. Il faut que ce soit basé sur des preuves et non pas une simple allégation ou le fait qu'il y ait eu une association antérieure. C'est à cela que sert la commissaire: pour faire un examen objectif, non partisan, basé sur des preuves dont les résultats seront beaucoup plus fiables que ceux que nous aurions en nous contentant d'établir des catégories.
    L'enquête de Mississauga concernait un enfant du maire. À première vue, le cas semblait évident. Néanmoins, sans entrer dans les détails de cette affaire sur laquelle nous avons eu toute une enquête publique, il faut se poser la question suivante: si votre enfant est âgé dans la cinquantaine et que vous avez 80 ou 90 ans, à quel moment l'effet n'est plus le même que lorsque votre enfant a 15 ans ou 21 ans? Le contexte est donc plus important que le lien de parenté et c'est ce que j'essaie de faire valoir.
    Très bien, comment inclure les mots « selon le contexte » dans la loi sans spécifier qui sont ces personnes?
    C'est ce que fait la loi d'après moi. L'article 4, par exemple, renvoie aux intérêts privés et aux pouvoirs publics et la commissaire dispose d'un texte instructif qu'elle peut interpréter et appliquer par le biais de directives ou de recommandations selon les circonstances.
    Je suis convaincu que la commissaire peut faire cela et c'est bien mieux que de comptabiliser les uns, mais pas les autres. Le défi est d'arriver à une certaine transparence pour les personnes qui tomberont sous le coup de cette législation. Un ministre a le droit de savoir s'il sera visé par cette loi avant d'entreprendre une action ou de conclure une transaction.
    Il est donc important que la fonction fixe une orientation avec différents scénarios permettant de discerner la pensée de la commissaire sur la délimitation de l'intérêt privé. La loi intègre des exceptions qui découlent du bon sens. Une situation bénéfique à toute une région ou pour l'ensemble des contribuables ou pour tous les usagers d'un transport en commun sera acceptée, même si elle affecte le titulaire de la charge sur le plan privé.

  (1700)  

    Bien, permettez-moi cette digression, j'aimerai savoir ce que vous en pensez.
    La commissaire recommande qu'on rabaisse le montant des cadeaux à 35 $. Notre témoin précédent a indiqué que cela s'applique aux deux époux, si l'un d'eux reçoit des présents dans le cadre de sa fonction.
    Jusqu'où est-ce que cela va? Ma femme est enseignante et chaque année à Noël les enfants lui donnent 35 $ en coupons de Tim Hortons. Est-ce que je dois faire état des cadeaux que reçoit ma femme?
    Mon opinion diverge de celle de la commissaire sur ce point. J'ai beaucoup de respect pour elle et pour les personnes travaillant dans ce domaine. Comme David Mullen, par exemple, qui, comme moi, a été commissaire à l'intégrité pour la ville à différents moments. Nous avons des points de vue différents. D'après lui, il faut faire état de tous les cadeaux.
    La commissaire Dawson veut abaisser le seuil de déclaration obligatoire.
    Pour moi, établir un niveau minimum est une bonne idée, car je ne pense pas que le public s'intéresse aux cadeaux insignifiants. Un exemple que j'ai souvent employé est celui des conseillers municipaux qui se plaignaient de ne pas pouvoir distribuer de places pour les matches des Marlies dans les Clubs garçons et filles de quartier, car on leur disait que le commissaire à l'intégrité leur tomberait dessus étant donné que c'était considéré comme un cadeau qu'ils avaient reçus de l'organisation appartenant à la ville.
    Je pense que le public est capable de faire la différence entre des places pour les rencontre des Marlies données au Clubs garçons et filles et des places dans les boxes du Centre Air Canada pour voir les Leafs. En d'autres mots, ce n'est pas le fait de donner des places pour une partie de hockey qui est à remettre en cause, mais plutôt le pouvoir d'influence rattaché au cadeau en question.
    C'est ce que devrait indiquer une norme, la commissaire pourrait ainsi trancher, cela serait mieux que d'avoir ces critères arbitraires. Je comprends pourquoi, pour des raisons pratiques d'ordre administratif, il vous faut un chiffre. Ça ne peut pas toujours être une question de jugement. Mais je penserais plutôt à 200 $, 300 $ ou 400 $. Bien sûr il faut une limite, qui reste à déterminer. Mais je ne pense pas qu'un cadeau d'une valeur de 50 $ puisse être perçu comme étant susceptible de pousser un fonctionnaire à aller à l'encontre de l'intérêt public. Ça ne me semble pas plausible.
    Mais une fois de plus, je respecte l'avis de la commissaire et de confrères qui estiment qu'au-delà d'un certain montant tout doit être examiné.
    Les gens qui sont engagés en faveur de la reddition de comptes peuvent ne pas être d'accord avec moi.

[Français]

    Je vous remercie de votre réponse.
    Monsieur Butt, vous avez la parole. Vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Sossin, de vous joindre à nous par téléphone depuis l'Université York.
    L'une des taches de ce comité dans le cadre de l'examen prévu par la loi de la Loi sur les conflits d'intérêts est d'examiner les domaines où la loi fonctionne clairement, où elle est logique et respecte l'idée insufflée lors de sa rédaction, il y a cinq ans. Le comité doit aussi se pencher sur les façons d'améliorer la loi, de la changer ou de la rendre plus pertinente à la suite des expériences acquises au cours des cinq dernières années.
    Avez-vous examiné la situation dans d'autres gouvernements nationaux? Il me semble vous avoir entendu dire que vous avez travaillé sur les règlements municipaux et codes relatifs aux conflits d'intérêts, avec la ville de Toronto ou d'autres municipalités. Mais avez-vous des exemples à l'international de pays qui ont de meilleures pratiques qu'au Canada? Des aspects de leur législation qui pourraient servir à améliorer notre loi?
    C'est une excellente question, et certains experts d'autres niveaux de compétence ont examiné certaines innovations récentes.
    Le processus qui a mené à la Loi sur les conflits d'intérêts il y a cinq ans se retrouve ailleurs, très souvent à la suite d'un scandale. Je n'ai pas souvenir que l'un d'entre eux soit vu comme un modèle, les différentes lois provinciales offrent une variété d'applications. Mon travail empirique se concentre beaucoup sur des indicateurs comme les causes de la confiance accordée par le public plutôt que sur des vérités objectives touchant à l'efficacité des pénalités pécuniaires. Comme je vous le dis, le plus souvent, les autorités législatives font des compromis. Dans les cas où les commissaires à l'éthique ont des pouvoirs plus étendus, les procédures sont souvent inscrites dans un cadre législatif, ce qui ouvre souvent la porte à de nombreux litiges. Ceux bénéficiant d'un plus grand pouvoir discrétionnaire auront tendance à se concentrer sur les personnes nommées et le soutien accordé par tous les partis, si c'est un système parlementaire.
    Je sais que certains universitaires se limitent à des comparaisons et je suis malheureusement de ceux-là. À la suite de mes échanges et de mes lectures sur le sujet, je crois pouvoir dire qu'il n'existe pas d'autorité législative pouvant servir de mètre étalon. Bien sûr, cette loi est une évolution fédérale d'autres modèles qui ont été améliorés. Ce ne sera jamais parfait et il a toujours été prévu qu'il y aurait des modifications à apporter. Je ne sais pas si c'est possible de trouver le parfait équilibre qui fonctionne en tout temps et dans n'importe quelle situation, que ce soit ici ou autre part. Le mieux que l'on puisse faire, c'est de tenter de régler les problèmes au fur et à mesure qu'on les identifie. C'est la raison pour laquelle nous tenons ces examens parlementaires; il est important de revenir sur une loi pour voir comment elle fonctionne et ce qui peut être amélioré.

  (1705)  

    Diriez-vous, cependant, que les règles régissant les agissements des ministres et d'autres hauts fonctionnaires sont plus strictes maintenant qu'elles ne l'étaient jusqu'en 2006? Ne pensez-vous pas qu'à ce stade, après avoir examiné cette loi sur les cinq dernières années, nous avons à peu près trouvé le juste équilibre? Même si nous pouvons parfois être en désaccord avec les décisions de la commissaire, pensez-vous que nous avons trouvé le juste équilibre? Que les règles sont plus claires et plus strictes maintenant que nous avons cette législation?
    Oui, d'après moi — et je ne me base que sur l'évolution observée — la loi apporte une amélioration. L'aspect que vous n'avez pas mentionné, cependant, qui est intéressant pour vous tous autour de la table, c'est que le processus est en évolution constante. En d'autres mots, le public attend d'avantage de transparence et d'imputabilité. Et ce besoin est grandissant, ce qui aurait été satisfaisant en 2006 ou 2007 ne l'est plus, il faut évoluer en conséquence. Cela ne veut pas dire qu'il faut juste être plus strict ou augmenter le montant des pénalités ou donner plus de pouvoirs. Il faut une plus grande transparence, un commissaire qui est au fait des normes qui fonctionnent. Le public attend certaines normes, c'est pourquoi c'est en constante évolution.
    On ne peut pas juste se dire que l'équilibre est trouvé et se reposer sur ses lauriers. Le public veut toujours plus de transparence en temps réel et il s'attend à ce que les ministres et hauts fonctionnaires en soient conscients lorsqu'ils s'acquittent de leurs fonctions.
    Très rapidement, une dernière question avant que mon temps soit écoulé… Lorsque nous avons reçu M. Wild du Bureau du Conseil privé avant de vous recevoir aujourd'hui, il a indiqué qu'il y a deux processus de reddition de comptes. D'un côté au niveau politique par l'entremise du premier ministre et de son bureau, puisqu'il nomme les ministres qui travaillent sous sa houlette. Il y a également bien sûr, au travers de cette législation et d'autres lois, le niveau juridique puisque ce sont des ministres de la Couronne, des personnes nommées par le gouverneur en conseil, etc.
    Pensez-vous que c'est une bonne lecture du fonctionnement du système? Il est vrai qu'au bout du compte, la population va demander des comptes et juger politiquement le premier ministre et son cabinet, mais il est également vrai qu'il faut un outil législatif pour traiter de certaines problématiques tout en insufflant une orientation.

  (1710)  

    Oui, je pense qu'on peut se risquer à dire cela. C'est un concept difficile à appréhender. La personne pour laquelle vous avez voté, qui a fait campagne pour se faire élire, qui est maintenant au gouvernement, qui est un acteur sur la scène politique, doit aussi porter la casquette d'un individu impartial usant d'un pouvoir législatif dans l'intérêt du public.
    La délivrance d'un permis, les poursuites en justice ou l'allocation de ressources ne peuvent être soumises à une idéologie partisane. C'est là qu'on attend vraiment des ministres qu'ils fassent leur travail et portent deux casquettes distinctes, car même s'ils proviennent de la sphère politique, ils se font élire et doivent ensuite assumer leurs fonctions sans conflit d'intérêts. Même les aspects de leur vie privée ne doivent pas paraître comme étant susceptibles de générer un conflit d'intérêts.
    Je crois donc qu'ils doivent effectivement rendre des comptes à différents niveaux. Pour le premier ministre, il s'agit avant tout de conserver son poste. Il y a, par ailleurs, l'obligation de faire état dans les cas où il y a eu un manquement.
    Au final, même si ces responsabilités ne sont pas du même type, elles sont liées, car pour la plupart des individus, les conséquences seront d'ordre politique.

[Français]

    Je vous remercie de votre réponse.
     Merci, monsieur Butt.
    Madame Borg vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
     Je remercie M. Sossin d'avoir accepté notre invitation à comparaître.
    À plusieurs reprises, vous avez mentionné l'importance de la perspective citoyenne. Je suis d'accord avec vous. Nous voulons que les citoyens aient confiance en nous, les politiciens. L'une des idées qui a circulé au cours des témoignages est que les citoyens devraient être en mesure de porter plainte.
     D'après votre expérience variée, un tel modèle existe-t-il dans d'autres États? Cela redonnerait-il un peu plus de pouvoir aux citoyens? Cela permettrait-il d'accorder plus d'importance à cette perspective citoyenne dont vous avez parlé?

[Traduction]

    C'est une question très intrigante. Il n'y a pas que la population en général qui aura vent de situations qu'elle pourrait considérer comme présentant un conflit d'intérêts, ce pourrait être des fournisseurs du gouvernement ou toutes sortes d'autres personnes.
    En théorie, il n'y a pas de raison de ne pas prêter attention à ces préoccupations. D'un autre côté, si les adversaires politiques d'un ministre avaient l'idée d'inonder le commissaire à l'éthique de plaintes, la situation deviendrait intenable. Il y aurait tant de plaintes motivées par des raisons politiques qu'on n'aurait pas les ressources pour traiter correctement les plaintes effectivement justifiées.
    Il faudrait trouver un juste milieu permettant d'entendre les plaintes, puis les filtrer afin que le commissaire puisse décider lesquelles méritent qu'on y prête attention, sans avoir à enquêter de la même façon dans chacun des cas.
    La loi permet, en principe, de prendre acte des préoccupations des citoyens ou d'autres parties intéressées. Mais, en même temps, si on ouvrait les vannes sans retenue, on mettrait à mal l'objectif même de la loi.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Par ailleurs, dans une de vos analyses, vous avez écrit que le respect — c'est véritablement une no-go zone politique ou partisane — est de moins en moins présent. Comment remédier à la situation? Selon vous, peut-on apporter certains changements pour réduire la partisanerie qui semble de plus en plus présente?

[Traduction]

    La meilleure solution pourrait être d'appliquer des principes qui nous amèneraient à un juste milieu. Par exemple, une règle pourrait être qu'un ministre ne doit pas connaître le commettant qui se présente devant un organe de réglementation. Mais ce sont des politiciens et par nature, les politiciens veulent représenter et aider les gens de leur circonscription.
    Une solution qui a été testée avec succès, c'est la nécessité pour le ministre de faire part de son expérience personnelle. Par exemple, face à quelqu'un voulant obtenir une licence du CRTC, le ministre ne devrait pas dire: « Je pense que la licence devrait être accordée », mais il devrait plutôt faire part de son expérience en la matière et laisser le régulateur prendre sa décision, dans le respect de son intégrité et impartialité.
    On m'a demandé si je pensais qu'un ministre devrait intervenir par écrit dans un processus. Je pense qu'il y a des situations où le ministre peut faire cela tout en respectant l'intégrité du processus, sans orienter la décision. Faire part d'informations pertinentes et faire partie du processus est acceptable, influencer la décision ne l'est pas.
    Si l'on adopte cette approche basée sur certains principes, on arrivera à un juste équilibre permettant de concilier les intérêts légitimes des ministres en tant que politiciens, tout en renforçant l'intégrité et l'impartialité de ces organes quasi judiciaires ou de réglementation. Il faut fixer des limites, mais seulement pour les cas où il pourrait y avoir des conséquences négatives.

  (1715)  

[Français]

    Merci.
    Mme Borg, votre temps est écoulé.
    Je cède la parole à M. Warkentin qui dispose de cinq minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci pour ces observations. Nous avons couvert différents points, monsieur Sossin, mais j'aimerai savoir ce que vous pensez des règles d'après-mandat.
    Nous savons qu'il faut appliquer des règles à certaines personnes, y compris aux hauts fonctionnaires, pour contrôler ce qu'ils ont le droit de faire après leur mandat. Bien sûr, la Loi concernant le lobbying limite la communication liée au travail durant la période de restriction qui suit immédiatement la fin d'un emploi. Il y a bien sûr des choses qu'il sera possible de faire et d'autre pas, selon les informations confidentielles dont la personne aurait pu prendre connaissance pendant son mandat.
    Pensez-vous que des modifications doivent être apportées à cette loi concernant les hauts fonctionnaires après la fin de leur mandat?
    C'est un véritable défi, car on pourrait se montrer injuste envers un fonctionnaire en l'empêchant de gagner sa vie. Mais c'est une question délicate. Il y a l'aspect temporel, car on veut veiller au respect de la période de restriction et s'assurer que l'accès à l'information publique et à l'influence ne contribue pas à l'enrichissement personnel. On ne peut pas faire de compromis à ce niveau.
    Ce que j'aimerais voir, et qui n'est pas assez clairement défini, c'est un processus permanent de suivi, de conseils, de reddition de comptes, que ce soit pour le commissaire ou en vertu de la loi sur le lobbying. Ainsi, on pourrait obtenir des éclairages dans différentes situations ou contextes permettant de lever le voile sur certaines zones grises.
    Je crois que nous cherchons ici à dégager des grandes lignes. La loi tend à favoriser ceux qui rentrent dans le cadre établi, mais c'est souvent injuste pour ceux qui sont à la marge de ce cadre. Soit on est trop laxiste et cela met à mal la confiance du public, soit on restreint les agissements de certaines personnes alors que ça n'aurait pas porté à conséquence. Je me répète: je préfère qu'on laisse un pouvoir de discrétion, reposant sur de grandes idées, au titulaire d'une charge tel que le commissaire ou quelqu'un ayant un pouvoir équivalent plutôt qu'un cadre défini par la loi sans plus d'instructions.
    C'est une situation épineuse. D'un côté, si le cadre est établi clairement, que tout le monde le comprend, alors l'ancien titulaire d'une charge peut savoir clairement a priori ce qu'on attendra de lui et de son futur employeur. J'ai bien peur qu'en n'étant pas parfaitement clair on finisse par créer une situation ambiguë et personne n'aime ambiguïté. J'ai vu des cas où la transition vers un autre poste s'est bien passée, et d'autres où la personne a eu du mal à trouver quelque chose qui convienne. Avez-vous des observations à cet égard?
    Les autres questions qui me viennent souvent à l'esprit sont: Que pouvons-nous faire et dans quelle mesure pouvons-nous contrôler les agissements des titulaires d'une fonction après la fin de leur mandat? Et cela peut-il être en conformité avec notre charte?

  (1720)  

    Je pense qu'il y a des moyens d'avancer. Vous avez, je crois, assez bien défini le dilemme. Encore une fois, il sera question de trouver un moyen terme fondé sur des principes. Pour ce qui est des responsabilités, on envisage de rendre des décisions par anticipation. Quelqu'un pourrait demander au commissaire s'il peut assumer tel ou tel rôle et lui demander de rendre une décision par anticipation à son sujet pour savoir s'il risque d'enfreindre certaines règles. Les choses se préciseraient et deviendraient alors plus prévisibles. Le bureau du commissaire aurait ainsi la possibilité de délimiter, selon un ensemble de principes, ce qui contreviendrait aux dispositions et qu'il conviendrait d'améliorer. Il pourrait en faire état dans ses rapports annuels et autres et mentionner les conseils donnés, en termes généraux, pour que d'autres tirent le meilleur parti possible de la manière dont les règles sont interprétées.
    Il est donc possible d'injecter prévisibilité, cohérence et équité sans pour autant violer le caractère confidentiel des avis émis et sans avoir à attendre une décision relative à l'après-mandat qui pourrait renverser la certitude du titulaire qu'il a respecté les règles établies. Je sais que beaucoup d'anciens ministres se contentent de demander à d'anciens commissaires à l'éthique, aujourd'hui en pratique privée, de leur remettre une lettre d'opinion sur la façon dont la loi pourrait être interprétée dans tel ou tel contexte, lettre qu'ils gardent dans leur poche arrière comme s'il s'agissait d'une assurance susceptible de les protéger dans l'avenir.
    Pourquoi avoir recours à une décision par procuration tandis que la personne pourrait instaurer une relation beaucoup plus directe avec un haut fonctionnaire investi d'un mandat légal et agissant de façon non partisane dans l'intérêt du public, soit quelqu'un qui pourrait rendre un jugement anticipé sur la foi des faits disponibles? Évidemment, si l'intéressé ne divulgue pas tous les renseignements nécessaires ou si ces renseignements changent, l'issue peut être différente. Mais si vous examinez toutes ces questions... J'ai été invité à témoigner lors du procès Mulroney, plus exactement lors de l'enquête Oliphant, où cette question s'est retrouvée au coeur des débats. Je ne vois, pas de cas de figure, en quoi le futur titulaire de charge publique, demandant conseil à celui ou celle qui a pleine compétence en vertu de la loi pour en donner, pourrait faire erreur dans sa démarche.

[Français]

    Merci, monsieur Warkentin.
    Merci, monsieur Sossin, de votre réponse.
    Je cède la parole à Mme Davies qui dispose de cinq minutes.

[Traduction]

    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur le doyen, d'être venu nous rencontrer. Je vais revenir sur certains points que vous avez soulevés
    Je ne sais pas si la commissaire se plierait avec plaisir à l'exercice consistant à rendre des décisions anticipées. Cela représenterait un fardeau pour elle, presque une responsabilité, parce qu'elle se trouverait à donner une autorisation a priori, mais l'idée est intéressante. Pourriez-vous nous dire où une telle formule est appliquée, afin que nous puissions l'examiner de plus près?
    L'autre question que je me posais est celle-ci. Dans certains de vos écrits, vous vous êtes penché sur la question des conflits d'intérêts apparents qui, je crois, est également liée à la question des décisions anticipées. Je crois pouvoir dire que notre comité se demande si l'omission dans le texte de loi actuel — ou l'emploi de termes comme « réel, apparent ou potentiel » pour décrire le conflit d'intérêts — ne constitue pas une lacune importante. Il serait utile que vous nous disiez comment nous pourrions inclure cette précision, surtout dans le sillage de la commission Oliphant.
    Bien sûr.
    Commençons par les décisions anticipées qui ne sont pas rares. Elles font, par exemple, partie intégrante du fonctionnement de notre régime fiscal. Dans ce domaine, le commissaire à l'intégrité de l'Ontario estime que l'essentiel de son travail consiste à donner des conseils notamment à des titulaires de charge publique qui veulent savoir s'ils peuvent participer à un événement en fonction du commanditaire. Autrement dit, il est assez fréquent que les titulaires de charge publique obtiennent ce genre de décisions anticipées. Dans certaines lois ou dans certains codes de conduite, il est indiqué que le politicien ou le titulaire de charge publique recevant un tel conseil a le droit de s'en prévaloir. Cela revient à dire qu'en cas de plainte, aucun autre point de vue n'est ensuite sollicité.
    C'est en quelque sorte une politique d'assurance. Elle permet au commissaire de rendre un tel jugement, ce qui n'est pas toujours facile à cause de l'examen public qui, après coup, peut révéler un point de vue différent. La soupape de sécurité est fonction des informations disponibles au moment où la décision est rendue et le ministre ne doit pas fausser la divulgation pour obtenir une décision favorable et se sentir ensuite en droit de faire quelque chose qui, si la divulgation avait été pleine et entière, aurait pu donner lieu à une décision différente. La formule ne vaut que dans la mesure où la divulgation est pleine et transparente.
    J'estime d'ailleurs que c'est un bien meilleur système que les autres. Nous ne voulons pas d'un système qui serait exclusivement répressif. Nous voulons d'un système qui permette aux gens de travailler plus efficacement dans le sens de l'intérêt public et c'est sans doute sur ce point que je ne suis pas d'accord avec les députés. Cela s'est produit, il n'y a pas si longtemps, avec un autre commissaire à l'intégrité. Je vous pose la question: si personne n'a été poursuivi, alors qu'avez-vous fait? Il y a des commissaires qui n'ont pas eu recours aux poursuites, mais qui ont cherché à informer les politiciens et à leur donner des conseils afin qu'ils redressent leur conduite, et ils ont peut-être obtenu de bons résultats. Autrement dit, il ne faut pas juger de l'efficacité du chien de garde de ce principe de reddition de comptes par le nombre de plaintes qu'il traite, d'enquêtes qu'il effectue et de décisions qu'il rend. Le succès se mesure à l'évolution de la culture interne et à la façon dont l'intérêt du public est servi. Il est donc essentiel d'adopter une approche axée sur les décisions anticipées et la prestation de conseils.
    Comme je le disais tout à l'heure, je suis convaincu qu'on ne peut envisager un régime de gestion des conflits d'intérêts qui ne traiterait pas également des conflits apparents, surtout si l'on veut améliorer la confiance du public. Il ne faut donc pas raisonner en termes d'interdits. La loi parle de « conflits réels », ce qui revient à dire qu'elle pêche par excès d'équité envers ceux qui sont pris, parce que les normes concernant les conflits d'intérêts réels sont plus précises que celles qui concernent les conflits d'intérêts apparents. L'équilibre, selon moi, se situerait entre l'inclusion de la notion d'apparence de conflit, mais sous réserve d'appliquer le critère du caractère raisonnable pour limiter l'action éventuelle d'un commissaire renégat qui se livrerait à une vendetta politique, et le fait de permettre d'éviter une trop grande incertitude.
    N'oubliez pas qu'au bout du compte, tout cela peut faire l'objet d'un contrôle judiciaire en cas de sanction ou de contestation d'un titulaire de charge. J'estime que cette responsabilité demeure, même si vous décidez d'englober les conflits apparents, comme ce régime devrait le faire selon moi.

  (1725)  

[Français]

    Merci, Madame Davies.
    C'est ce qui met fin au témoignage de M. Sossin aujourd'hui. J'en profite pour vous remercier encore une fois de votre présence et du temps que vous avez accordé à notre étude.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    C'était un plaisir, merci.
    Sur ce, je souhaite une bonne semaine à mes collègues dans leur circonscription. Nous nous reverrons le lundi 25 février et nous pourrons poursuivre cette étude.
    (La séance est levée.)
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