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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 18 octobre 2001

• 0908

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.)): Bonjour. La séance est ouverte. Nous abordons aujourd'hui le projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi sur l'expansion des exportations et d'autres lois en conséquence. Je souhaite la bienvenue aux fonctionnaires qui sont ici ce matin pour nous présenter un exposé.

À ce stade-ci, il y a un élément au sujet duquel j'ai besoin de l'autorisation du comité: le rapport du sous-comité sur le projet de loi C-32. M. Mac Harb, président du sous-comité, est ici. Par conséquent, avant d'aborder l'autre sujet, je voudrais que le comité me donne l'autorisation de lui soumettre le rapport lorsqu'il sera prêt.

Nous attendrons que le rapport nous soit soumis. À ce moment-là, nous aurons le quorum nécessaire pour nous en occuper.

Monsieur Paquette.

[Français]

M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Bonjour. Merci, madame la présidente. Je voudrais vous annoncer que je vais faire appel au Règlement quand on discutera du rapport du sous-comité concernant le projet de loi C-32.

Hier, lorsque la rencontre du sous-comité a eu lieu, j'ai annoncé que j'avais des amendements au projet de loi portant sur la mise en oeuvre de l'accord avec le Costa Rica. Le président du sous-comité m'a dit que ces amendements n'étaient pas recevables parce qu'un projet de loi de ce type-là était soit adopté en bloc, soit rejeté en bloc.

• 0910

Il me semble qu'une loi de mise en oeuvre peut être amendée. Ce qui ne peut pas l'être, c'est l'accord même de libre-échange entre le Canada et le Costa Rica. J'aimerais bien que vous me clarifiiez cela.

Je vais donc resoumettre mes amendements au comité pour que le grand comité en dispose lors de l'adoption du rapport du sous-comité.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Monsieur Harb.

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Madame la présidente, nous avons déjà eu un débat très long à ce sujet et, avec l'assentiment du comité, nous pourrions le présenter et le mettre aux voix sans plus attendre car nous avons vraiment épuisé le sujet. Nous avons accueilli des hauts fonctionnaires, nous avons entendu tous les intervenants qui avaient des préoccupations et nous avons également présenté une motion pour faire droit spécifiquement aux préoccupations de M. Paquette, qui sera intégrée au rapport que nous présenterons au Parlement.

À mon avis, si ce dernier voulait vraiment accélérer les choses, il pourrait se prévaloir d'une avenue très efficace, c'est-à-dire profiter des 48 heures avant l'étape du rapport pour présenter sa motion au Parlement. À mon avis, ce serait la meilleure façon de régler le problème. Il aurait ainsi l'occasion d'en faire état publiquement et il pourrait la faire consigner au compte rendu. Qui plus est, la Chambre des communes aurait la possibilité de se prononcer.

Pour l'heure, je pense que nous devrions renvoyer le projet de loi à la Chambre des communes aussi efficacement que possible pour qu'on puisse prévoir une date pour un débat éclairé. Si mon collègue est d'accord, je pense que cela serait utile.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci.

Monsieur Robinson.

M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, madame la présidente.

[Français]

J'aimerais appuyer M. Paquette dans sa demande voulant qu'on ait l'occasion de proposer des amendements. Je crois qu'il y a des précédents qui existent dans d'autres lois. On n'aura pas besoin d'un long débat, mais le principe de la possibilité d'amender ce projet de loi est un principe très important. D'après ce que j'ai compris des propos de M. Harb, on peut proposer des amendements et voter. Je suis d'accord sur ça aussi.

[Traduction]

M. Mac Harb: Je n'y vois pas d'objection, si l'on présente une motion qui permette de voter pour ou contre.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Dans ce cas-là, nous procéderons de cette façon le moment venu. Nous allons étudier le projet de loi C-31 et lorsque nous examinerons le rapport du sous-comité, nous aborderons cette question. Merci beaucoup.

J'invite maintenant les fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Nous accueillons Marie-Lucie Morin, directrice générale, Planification et politique, Service des délégués commerciaux; Sara Hradecky, directrice, Direction du financement à l'exportation, Wayne Robson, directeur adjoint, Direction du financement à l'exportation, et Martin Jensen, agent du financement à l'exportation.

Bienvenue. Vous avez déjà comparu devant nous au sujet de ce projet de loi en particulier. Veuillez maintenant faire votre exposé.

[Français]

Mme Marie-Lucie Morin (directrice générale, Service des délégués commerciaux, planification et politique, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, madame la présidente.

Distingués membres du comité, je suis très heureuse d'avoir l'occasion, ce matin, de présenter le projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi sur l'expansion des exportations et d'autres lois en conséquence. J'aimerais tout d'abord vous donner un aperçu de l'historique et de la raison d'être de ce projet de loi, après quoi nous répondrons volontiers aux questions que vous aurez à nous poser.

Le projet de loi C-31 est le fruit d'un processus de révision législative qui a été autorisé et amorcé en 1993. À cette époque, un certain nombre de modifications ont été apportées à la Loi sur l'expansion des exportations. Ces modifications visaient à améliorer la capacité de la Société pour l'expansion des exportations de desservir les exportateurs canadiens. L'élargissement des pouvoirs de la société proposé par les modifications de 1993 a obtenu l'appui de tous les partis.

Depuis l'entrée en vigueur des modifications de 1993, le volume d'affaires de la SEE a presque quadruplé, atteignant plus de 45 milliards de dollars l'an dernier. Il est donc clair que les changements de 1993 ont porté fruit, mais à l'époque où ils ont été proposés, ils étaient perçus comme audacieux. Par conséquent, le Parlement a du même coup décidé qu'il fallait surveiller de près la performance de la SEE. À cet égard, il a ordonné que l'on procède, cinq ans plus tard, à un examen minutieux du mandat et des activités de la SEE.

• 0915

[Traduction]

Conformément aux exigences, cet examen a été entrepris en 1998. Il a débuté par un rapport établi par le cabinet d'avocats Gowlings, Strathy & Henderson. Il s'agissait du document plus communément appelé «Rapport Gowlings», lequel a servi de point de départ à l'examen entrepris par votre comité à l'automne de 1999.

[Français]

Votre rapport a par la suite été présenté au Parlement en décembre 1999. Il a ensuite fait l'objet d'une réponse du gouvernement déposée au Parlement par le ministre Pettigrew en mai 2000. Dans l'ensemble, le gouvernement a donné son aval à vos conclusions.

[Traduction]

L'examen comportait le tenue de très vastes consultations auprès du public. Si vous jetez un coup d'oeil à la liste des témoins et des mémoires présentés par écrit au cours de l'examen, vous verrez que des dizaines de particuliers, d'entreprises et d'organismes ont été entendus. On a également procédé à des consultations supplémentaires sur des questions distinctes. L'examen a reçu énormément de publicité; ce qui n'a pas facilité la prise de décision.

Les avis exprimés sur les différentes questions étaient très diversifiés. La plupart d'entre eux sont défendables, mais difficiles à concilier. Nous nous sommes toutefois assurés de donner voix au chapitre à tout le monde et d'être ainsi bien informés sur la position des Canadiens.

[Français]

Un fort consensus s'est dégagé autour de certains points. Le bien-être économique du Canada dépend du commerce international. L'examen fait ressortir la contribution décisive de la SEE à ce chapitre. La société est un organisme bien géré, hautement apprécié par ses clients et respecté par ses concurrents. La SEE conçoit des programmes novateurs et elle contribue beaucoup au dialogue multilatéral sur les questions commerciales. Quelle que soit la nature des modifications proposées, il est important de préserver la marge de manoeuvre dont dispose la SEE pour offrir ses services et de protéger les programmes qui fonctionnent bien.

Parallèlement à tout cela, on s'entendait toutefois sur le fait que la SEE pouvait en faire davantage pour assurer le respect des valeurs auquel les Canadiens s'attendent de la part d'un organisme gouvernemental. C'était notamment le cas pour les questions relatives à l'environnement et aux droits de la personne. La SEE est effectivement l'émissaire du Canada à bien des égards. Tous les Canadiens ont un grand intérêt dans tout cela.

Par conséquent, vous nous avez dit que la SEE devait répondre à des normes environnementales et sociales raisonnables dans le cadre de ses activités. Pour ce faire, son cadre d'évaluation environnementale devait être fortement ancré dans la loi. En vue de promouvoir une transparence et une rigueur accrues au sein de ce cadre, le vérificateur général pourrait être chargé de surveiller son fonctionnement de manière régulière et transparente.

Vous vous êtes dits satisfaits de ce que la SEE se doit dotée, en matière de divulgation des renseignements, d'une politique allant dans le sens des recommandations du Rapport Gowlings, mais vous avez également recommandé qu'on soumette cette question à des consultations publiques et à un examen indépendant. Vous avez par ailleurs endossé la proposition voulant que la société envisage de créer un poste d'ombudsman pour administrer la politique.

[Traduction]

Enfin, vous avez recommandé que la Loi sur l'expansion des exportations soit modifiée afin d'enjoindre à la SEE de tenir compte des engagements et des obligations contractées par le Canada dans ses accords internationaux, notamment au chapitre des droits de la personne et des normes du travail.

Bien entendu, la SEE et les institutions financières internationales ne sont pas les seules à faire face à ces défis. De plus en plus, ces enjeux concernent n'importe quelle entreprise faisant affaire à une certaine échelle. Nous assistons d'ailleurs à l'adoption de mesures très ciblées, tant du côté des entreprises individuelles que de celui des organismes multilatéraux tels que l'Organisation de coopération et de développement économiques, où l'on est en train d'élaborer des codes d'éthique commerciale.

Les principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales constituent un parfait exemple de ce genre de code. Le Canada figure parmi les signataires de ces principes directeurs qui définissent des principes et des normes dans des domaines aussi variés que ceux de l'emploi et des relations de travail, des droits de la personne et de l'environnement, de la divulgation des renseignements et de la transparence, ainsi que de la concurrence et de la taxation. Il n'existe aucun exemple simple à suivre pour entreprendre ces initiatives.

• 0920

Ces nouveaux systèmes auront une incidence sur les coûts, sur les attentes des clients et sur les normes admises pour faire des affaires.

Ce genre d'initiative requiert du temps, des ressources et un véritable engagement. Le gouvernement estime que nos sociétés d'État disposent des moyens nécessaires et qu'elles ont le devoir de prendre les devants dans ce domaine. Toutefois, l'importance et la complexité des intérêts en jeu nécessitent que l'on procède avec prudence.

[Français]

J'aimerais maintenant vous décrire les modifications proposées à la Loi sur l'expansion des exportations en indiquant comment elles font écho aux préoccupations soulevées dans le cadre de l'examen législatif.

Le projet de loi C-31 propose de modifier le nom de la société et de la rebaptiser Export Development Canada, en anglais, et Exportation et Développement Canada, en français. Cette modification permettra d'utiliser l'acronyme bien connu EDC dans les deux langues officielles. Cela renforcera ainsi le lien entre la société et le Canada, et devrait faciliter les activités de commercialisation et de sensibilisation de la société, surtout auprès des petits exportateurs partout au Canada. De manière subtile, cette modification vient donc contribuer à un objectif vital auquel, je l'espère, nous pourrons tous souscrire.

Le projet de loi C-31 propose également deux modifications plutôt techniques aux pouvoirs conférés au conseil d'administration de la SEE. La première modification permettrait de déléguer les pouvoirs du conseil à des sous-comités composés de directeurs possédant une expertise spéciale sur les questions afférentes aux entreprises.

La seconde modification à caractère technique permettra au conseil de la SEE d'adopter des règlements relatifs à l'administration d'un régime de pension récemment mis sur pied. Le plan en question est entré en vigueur en avril 2000. Il a été créé en vertu des autorisations appropriées et est conforme à la politique du Conseil du Trésor stipulant que les sociétés d'État doivent élaborer un régime de pension indépendant de celui du gouvernement.

[Traduction]

Je passe maintenant aux modifications qui susciteront le plus d'intérêt de votre part.

En résumé, le projet de loi C-31 permettrait d'imposer une exigence juridique à la SEE, l'obligeant à procéder à un examen environnemental des projets qui font l'objet d'une demande d'aide de sa part. La SEE le fait déjà, mais cette modification donnerait force de loi à cette obligation.

Une modification connexe exigerait du vérificateur général qu'il effectue des examens réguliers du cadre d'évaluation environnementale de la SEE. Ces examens porteraient aussi bien sur la conception du cadre que sur la manière dont il est appliqué par la SEE. Il s'agirait d'examens quinquennaux qui feraient l'objet d'un rapport au Parlement.

Il existe également des modifications techniques connexes qui visent à prévenir le chevauchement avec les exigences découlant de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Certaines mesures ministérielles ou du Cabinet peuvent «déclencher» cette loi, notamment lorsqu'une transaction nécessite une autorisation ministérielle. Le projet de loi C-31 exigera des évaluations environnementales en vertu de la Loi sur l'expansion des exportations, mais il pourrait toujours y avoir des risques de chevauchement avec la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Cette modification permettrait justement d'éviter un tel chevauchement.

D'aucuns ont proposé que la SEE soit visée par la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Cette suggestion a été exprimée à plusieurs reprises au cours de l'examen législatif, mais ni le Rapport Gowlings, ni le comité ne l'a retenue.

En fait, le Rapport Gowlings a indiqué qu'il ne serait pas pratique de légiférer des exigences environnementales spéciales pour la SEE. Il recommande plutôt une démarche semblable à celle de l'Organisme américain de crédit à l'exportation, la Ex-Im Bank.

Cela fait près de 10 ans que, dans la loi qui la régit, la Ex-Im Bank est soumise à des exigences environnementales. Les pratiques de cette institution servent souvent de modèles aux autres organismes. Dans ce cas de figure, le mandat général consistant à effectuer des évaluations environnementales est établi par la loi, mais le conseil d'administration de la Ex-Im Bank est responsable de l'élaboration de lignes directrices et de procédures précises, en consultation avec les intervenants.

Après avoir examiné de nombreux modèles, c'est précisément ce que le projet de loi C-31 se propose de faire, à savoir établir un mandat général en matière d'environnement, tout en laissant au conseil d'administration de la SEE le soin d'en assurer la mise en oeuvre détaillée. Il s'agit de la solution qui a également été avalisée par votre comité avec toutefois certaines améliorations.

• 0925

La SEE a récemment achevé des consultations publiques sur la révision de son cadre d'examen environnemental. Elle s'est inspirée à la fois des recommandations du vérificateur général et des directives du gouvernement pour mener à bien ces consultations. La SEE a sollicité l'avis du secteur privé et des ONG, et en a tenu compte. Par ailleurs, elle a retenu les services d'un éminent expert-conseil en environnement pour qu'il l'aide au cours des consultations et qu'il prépare des recommandations détaillées sur la révision de son cadre. Aucun autre organisme de crédit à l'exportation n'avait, jusqu'ici, soumis ses procédures environnementales à un examen aussi méticuleux et approfondi.

La possibilité de soumettre la SEE à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale a fait l'objet d'une analyse poussée avant que l'on ne choisisse la voie actuelle. Pour prendre sa décision, le gouvernement s'est servi de critères tels que la garantie de projets écologiquement viables, la protection de la compétitivité canadienne, le respect de la souveraineté des gouvernements étrangers et la création d'une marge de manoeuvre suffisante pour évoluer au sein d'un environnement international diversifié, complexe et en mutation rapide.

La démarche que nous avons choisie est conforme aux nouvelles pratiques de la communauté internationale et à nos travaux sur la question, au sein de l'OCDE. Cela nous permettra de soumettre les projets à un processus uniforme et de nous adapter aux changements rapides en matière de concurrence et de progrès techniques. En vue de garantir le caractère adéquat des normes et procédures de la SEE, le vérificateur général continuera d'en surveiller la conception et le fonctionnement.

[Français]

Il a été recommandé que le mandat de la SEE comporte une exigence générale de manière à accorder une importance toute spéciale aux avantages pour le Canada et aux engagements internationaux contractés par le Canada, notamment aux chapitres des droits de la personne et des normes fondamentales du travail.

Le mandat de la SEE consiste à promouvoir le commerce dans l'intérêt des exportateurs canadiens et de notre prospérité commune. Par ailleurs, en tant que mandataire de la Couronne, la SEE est déjà tenue d'honorer les engagements internationaux du Canada à ces chapitres. Toutefois, certains ont fait remarquer qu'un tel mandat général conféré par la loi pourrait présenter des risques juridiques pour la société s'il ne définissait pas clairement les exigences précises à respecter dans un cas donné. Contrairement au mandat environnemental, il n'existe en ce moment aucun cadre antérieur permettant d'ancrer une telle obligation dans des mesures opérationnelles précises.

Toutefois, nous avons reconnu les préoccupations sérieuses qui ont inspiré votre recommandation et nous sommes déterminés à garantir la prise en compte des avantages économiques et des obligations internationales dans les décisions de la SEE. La SEE s'attaquera à cette question par le biais de deux mécanismes jumelés.

[Traduction]

En premier lieu, le plan général de la SEE exigera d'elle qu'elle tienne compte des avantages économiques pour le Canada et des engagements internationaux contractés par le Canada dans des domaines tels que les droits de la personne et les normes fondamentales du travail. La loi dominante des sociétés d'État—la Loi sur la gestion des finances publiques—requiert l'établissement annuel d'un plan général. Ce plan définit et limite l'étendue des activités d'une société d'État. Il est approuvé par les ministres, puis déposé au Parlement sous une forme récapitulative et une société d'État ne peut agir en dehors des paramètres qui y sont établis.

Par ailleurs, le ministère des Affaires étrangères et du commerce international collabore avec la SEE en vue d'affiner les mécanismes permettant un échange d'information continue sur les droits de la personne dans des pays précis. Cela sera appliqué dans le cadre de projets généraux et sectoriels ainsi qu'à l'égard de projets spécifiques.

En présentant le projet de loi C-31 au Parlement, le ministre du Commerce international a adopté une démarche équilibrée au chapitre de la réforme stratégique au sein de la SEE. D'un côté, ce projet de loi conférerait une importante responsabilité à la SEE pour ce qui est de l'élaboration de politiques environnementales et sociales crédibles et efficaces. De l'autre, ces politiques seraient soumises à la surveillance du gouvernement et à l'obligation de rendre des comptes, par le biais de consultations publiques et régulières et du Bureau du vérificateur général.

J'espère avoir réussi à éclaircir l'historique et l'objectif du présent projet de loi et je vous invite à nous poser vos éventuelles questions.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci beaucoup, madame Morin.

L'article 1 étant mis en délibération, nous allons maintenant passer aux questions.

• 0930

Compte tenu du temps dont nous disposons avec nos témoins, j'aimerais demander aux membres du comité s'il est possible de commencer par une ronde de cinq minutes afin de voir comment vont se dérouler les choses. Nous pourrions consacrer une partie du temps au projet de loi C-32. Nous allons toutefois passer aux députés qui peuvent maintenant poser des questions aux témoins.

Monsieur Martin.

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Merci, madame la présidente.

Merci beaucoup, madame Morin, et les autres. Désolé de ne pas avoir eu l'occasion de vous rencontrer, comme vous l'aviez demandé, dans mon bureau. Je suis heureux de vous voir ici aujourd'hui.

Nous sommes saisis d'une question qui nous a occupés pendant pas mal de temps. De graves questions se posent, même à propos de ce projet de loi. Étant donné que nous n'avons que cinq minutes, je vais être bref et poser ma question.

Il a été porté à notre attention que des projets soutenus par la SEE—par exemple en Papouasie-Nouvelle-Guinée où l'on a fait de l'exploitation à ciel ouvert et que des coupes à blanc, ainsi que des projets en Amérique du Sud et en Amérique Centrale—ont été autorisés malgré leurs conséquences dévastatrices sur le sol et l'environnement. En fait, comme vous le savez bien, la SEE est connue comme étant un organisme qui appuie et soutient des sociétés qui, au Canada, n'adopteraient pas ce genre de comportement désastreux pour l'environnement, mais qui, à l'étranger, exigent d'avoir pratiquement carte blanche à cet égard.

J'ai quelques questions au sujet de ce projet de loi. La SEE n'est pas assujettie à la Loi sur l'accès à l'information, autant que je sache. Cela n'est pas prévu dans le cadre du projet de loi. Pourquoi cela n'a-t-il pas été prévu et seriez-vous d'accord pour que la SEE soit assujettie à la Loi sur l'accès à l'information?

Ensuite, à propos des suggestions que vous avez faites, madame Morin—qui sont de bonnes suggestions—le problème qui se pose, c'est que si la SEE est responsable du cadre juridique et environnemental, quelle tierce partie va pouvoir mettre la SEE sur le qui-vive? Comment surveiller la SEE?

Si vous me permettez cette analogie, si c'est le renard qui garde le poulailler, comment assurer la sécurité des poules? Peut-être pourriez-vous expliquer comment cela pourrait s'intégrer à ce projet de loi?

Merci beaucoup.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Nous pourrions pousser l'analogie encore plus loin.

Des voix: Oh, oh!

Mme Marie-Lucie Morin: Merci pour ces questions, monsieur Martin.

Vous demandez pourquoi le gouvernement n'assujettit pas actuellement la SEE à la Loi sur l'accès à l'information, comme il le fait dans le cas d'autres sociétés d'État. C'est en raison de la protection de la confidentialité commerciale prévue par la Loi sur l'accès à l'information. Il ne conviendrait peut-être pas qu'une institution internationale de prêts et d'assurance, comme la SEE, soit assujettie à la loi. Les sociétés d'État commerciales sont censées fonctionner dans les mêmes conditions que leurs concurrents du secteur privé, lesquels ne sont pas assujettis à la Loi sur l'accès à l'information. En fait, il n'y a que quelques sociétés d'État qui sont assujetties à la Loi sur l'accès à l'information pour l'instant.

M. Keith Martin: Puis-je vous interrompre une seconde. Je suis désolé, mais nous n'avons que quelques secondes. Si je représentais une société privée et que je vous demandais une aide financière, j'aurais accès aux fonds publics; ne serait-il alors pas normal que je sois également assujetti à la même surveillance publique? Ce n'est pas la même chose qu'une simple opération entre deux sociétés privées, puisque l'élément public tierce partie entre en jeu.

M. Martin Jensen (agent, Direction du financement à l'exportation, ministère des Affaires étrangères et du commerce international): Monsieur Martin, si vous permettez que je réponde en partie à cette question relative à la Loi sur l'accès à l'information, vous savez qu'un groupe de travail fédéral se penche actuellement sur la question de l'application—de l'administration—de la loi. Si je ne me trompe, ce groupe est dirigé par la Justice et le Conseil du Trésor, mais il reste qu'il étudie la question et qu'il doit déposer un rapport au Parlement cet automne.

• 0935

Je crois qu'il serait prématuré d'agir avant d'en connaître les recommandations, lesquelles pourraient bien aller dans votre sens. Il est reconnu qu'il n'est pas toujours facile de décider que la Loi sur l'accès à l'information doit s'appliquer à une société d'État et non à l'autre.

En règle générale, il semble que dans le cas où l'orientation d'une société d'État est plus commerciale, il est justifié de ne pas appliquer cette loi, afin de préserver son caractère commercial et d'uniformiser les règles du jeu par rapport à ses concurrents du secteur privé. C'est donc une justification politique. Néanmoins, ce groupe de travail va déposer un rapport au Parlement cet automne.

En ce qui concerne la divulgation de l'information au sujet de la SEE, il faut noter que, conformément à une recommandation faite un peu plus tôt par ce comité, la SEE est en train de mettre au point un cadre de divulgation. De plus, ce cadre de divulgation est non seulement réceptif à des demandes précises en matière d'accès, mais il est aussi proactif. Il va agir à l'avance et rendre l'information disponible sans qu'une demande n'en soit présentée. Cette divulgation permettra donc de créer le genre de surveillance publique des activités de la Société, ce qui, nous le croyons aussi, est important.

Enfin, pour être très bref, le vérificateur général va dorénavant examiner nos activités de très près. Vous avez dans votre classeur, à l'onglet 7, je crois, le rapport du vérificateur général. C'est un rapport extrêmement complet sur la conception et le fonctionnement du cadre d'examen environnemental de la SEE. C'est un rapport sans complaisance—je veux parler de la divulgation et de la transparence. Nous pensons en tirer les leçons, tant du point de vue de la surveillance externe exercée par le vérificateur général, que par le biais du cadre de divulgation de la SEE, ce qui permettra de divulguer plus d'information de manière proactive.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci.

M. Svend Robinson: J'invoque le Règlement, madame la présidente. M. Jensen vient de faire mention d'un groupe de travail qui examine la question de l'assujettissement de la SEE à la Loi sur l'accès à l'information. Je me demande s'il pourrait fournir au comité de l'information sur ce groupe et nous dire quand ce dernier doit présenter son rapport.

M. Martin Jensen: Je n'ai pas ces données sur place, mais je peux vous les chercher. Est-ce que demain matin à la première heure vous convient, ou souhaitez-vous avoir ces renseignements d'ici la fin de la journée?

M. Svend Robinson: Pas de problème.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je crois que M. Robinson est d'accord pour demain matin à la première heure.

M. Martin Jensen: Je dois toutefois rester en ville toute la journée si bien que je peux retourner au bureau chercher ces renseignements à l'heure du déjeuner.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): M. Robinson est très conciliant et il peut attendre jusqu'à demain matin.

Monsieur Martin, je crois que la recommandation 20 dans votre rapport traite également de cette question.

M. Keith Martin: J'imagine que mon temps de parole est écoulé, n'est-ce pas?

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Effectivement.

Merci beaucoup, monsieur Jensen.

Nous passons maintenant à M. Paquette.

[Français]

M. Pierre Paquette: Madame la présidente, j'ai quelques questions. J'aimerais d'abord que vous nous disiez pourquoi le conseil de la Société d'expansion des exportations devrait définir lui-même les critères sur lesquels il se basera pour faire l'évaluation environnementale et pourquoi ça ne devrait pas être déjà contenu dans la loi.

Dans l'alinéa 10.1(2)a) proposé au projet de loi C-31, on dit que le conseil devrait définir un certain nombre de termes comme «opération», «projet», «effets environnementaux négatifs» et «mesures d'atténuation». Il me semble que si on avait vraiment voulu être en mesure de s'assurer du sérieux de l'opération, on aurait dû, dans le projet de loi, définir plus précisément ces termes-là.

Cela dit, je voudrais vous entendre sur cette question parce que ça nous chicotte énormément. Il y a aussi la proposition d'un ombudsman qui a été faite par plusieurs personnes. Vous ne l'avez pas retenue; je voudrais savoir pourquoi.

Au paragraphe 11(2), je pense, on dit qu'un processus d'évaluation a lieu à tous les cinq ans. Cela me semble beaucoup trop long. En particulier, je dirais que tout ce qui touche la sensibilité environnementale va à une vitesse très grande dans l'opinion publique. Alors, il me semble que cinq ans, c'est long. Je voudrais aussi qu'on me justifie cette durée-là. Pourquoi n'est-elle pas de deux ans?

Finalement, tout ce qui touche les droits humains et les droits du travail me semble extrêmement faible. Je voudrais savoir pourquoi on n'aurait pas, au minimum, le même type d'implication que dans le cas de l'environnement. Ce sont là quelques-unes de mes questions pour débuter. Merci.

• 0940

[Traduction]

M. Martin Jensen: Merci, monsieur.

En ce qui concerne votre première question sur les critères d'évaluation, dans le cas de l'examen environnemental des activités du financement compétitif des exportations, nous travaillons dans un contexte compétitif multilatéral. Nous ne travaillons pas simplement à l'intérieur des frontières du Canada, ou de tout autre pays. Nous travaillons dans le cadre d'un grand nombre de systèmes nationaux différents, etc.

Il n'y a pas de recette pour la façon dont cela doit se faire. Des négociations sont actuellement en cours au sein de l'Organisation de coopération et de développement économiques, au sujet d'un cadre multilatéral susceptible d'établir un genre de base en matière de normes et de procédures. Ce sont les personnalités politiques les plus en vue, soit les ministres de l'OCDE et les leaders des pays du G-8, qui ont demandé ce travail. Nous espérons bien sûr que ce cadre sera terminé et accepté d'ici la fin de l'année.

Dans un contexte comme celui-ci, il serait très difficile, et éventuellement contre-productif, de préciser des critères environnementaux dans la loi elle-même. C'est ce que Gowlings a observé dans son étude préliminaire, après avoir examiné plusieurs systèmes nationaux différents. Ce groupe a observé qu'il serait contre-productif d'inscrire de tels critères obligatoires dans la loi, alors que le domaine dont il est question en est un qui évolue très rapidement, techniquement parlant. Les normes changent constamment—à la fois les normes de procédure et les normes scientifiques—quantitatives.

Si vous examinez la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, vous verrez que même si elle établit des normes de procédure très définies, elle reste silencieuse au sujet de certains détails de ces facteurs spécifiques.

Si vous examinez l'article 58 de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, vous verrez que le ministre de l'Environnement peut fixer des critères et donner des lignes directrices pour faciliter la prise de décision à propos d'un projet—faut-il l'appuyer ou non—mais cela ne fait pas partie de la loi elle-même.

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Pourriez-vous répéter ces deux dernières phrases au sujet de la LCEE?

M. Martin Jensen: Si vous examinez l'article 58...

Mme Aileen Carroll: Je l'ai noté.

M. Martin Jensen: ... vous verrez que le ministre de l'Environnement peut fixer des critères pour faciliter l'application de la loi, mais il s'agit de lignes directrices; la loi elle-même ne les stipule pas.

Je devrais dire toutefois que si vous regardez le livre d'information que nous vous avons remis, vous verrez que la Société d'expansion des exportations a reçu beaucoup de conseils de la part du vérificateur général et du gouvernement lui-même, au sujet des pratiques que le vérificateur général et le gouvernement, respectivement, considèrent comme étant de bonnes pratiques environnementales.

Nous avons des normes de référence. Les leaders des pays du G-8 ont déclaré qu'à leur avis il faudrait s'inspirer des normes des banques multilatérales de développement; cela fait partie des conseils du gouvernement. La Société reçoit donc des directives politiques assez précises et le vérificateur général en fait l'examen.

Il est vrai que la loi stipule que le vérificateur général procède à un examen, au moins tous les cinq ans. Si vous regardez le rapport du vérificateur général, à l'onglet 7, vous verrez que le vérificateur général recommande à mon ministre, M. Pettigrew, que ce dernier demande au vérificateur général de vérifier le cadre de nouveau trois années après sa révision. À la page 27 de la version anglaise du rapport et à la page 31 de la version française, vous verrez que mon ministre répond: «Cependant, je demanderais au vérificateur général d'effectuer cette nouvelle vérification dans deux ans». Or, c'est toujours le minimum de cinq ans qui est prévu par la loi.

• 0945

Enfin, à propos de la question d'un ombudsman, dans son cadre de divulgation, la SEE a élaboré—ou est en train de le faire—les fonctions et attributions d'un tel poste au sein de la Société. Je crois qu'elles seront rendues publiques sous peu.

[Français]

M. Pierre Paquette: Et qu'en est-il des droits humains et des normes du travail?

[Traduction]

M. Martin Jensen: Oh, oui. Cette question a également fait l'objet de beaucoup d'étude. Le problème qui se pose ici, c'est qu'il ne sert à rien de prévoir une telle orientation dans le mandat de la SEE si aucune directive opérationnelle concrète ne permet d'y donner suite.

Comme je l'ai souligné, bien des procédures et des techniques sont mises au point au sujet de l'environnement, mais il n'existe pas de fondement opérationnel concret pour un tel mandat. On en reviendrait à créer une obligation juridique sans préciser comment s'en acquitter. Par conséquent, tout en reconnaissant son importance, nous recherchons à résoudre le problème de manière administrative.

Comme ma collègue l'a souligné, le plan général est une obligation juridique exécutoire en vertu de la Loi sur la gestion des finances publiques. De meilleurs et de plus nombreux échanges d'information systématisés se font entre le ministère des Affaires étrangères, la Société pour l'expansion des exportations et d'autres ministères canadiens, comme l'ACDI, qui peuvent être présents à l'étranger. Nous cherchons donc à le faire de manière administrative au lieu de nous contenter de simplement prévoir un mandat dans la législation.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci, monsieur Jensen.

Nous passons maintenant à M. Robinson.

M. Svend Robinson: Merci.

J'aimerais simplement reprendre ce dernier point car, franchement—et je vous le dis avec beaucoup de respect—cela manque complètement de logique. M. Jensen semble dire qu'en incluant dans ce projet de loi une obligation, de la part de la SEE, de respecter ses obligations internationales, les normes du BIT et les normes relatives aux droits de la personne, selon lui, nous créerions une obligation juridique, sans préciser comment s'en acquitter.

Eh bien, cette obligation juridique existe déjà et j'imagine que vous êtes d'accord avec moi sur ce point.

M. Martin Jensen: Oui.

M. Svend Robinson: C'est exact. Par conséquent, si cette obligation juridique existe, nous ne créons pas une nouvelle obligation, n'est-ce pas?

M. Martin Jensen: Effectivement.

M. Svend Robinson: C'est exact. Vous devez donc déjà observer ces engagements, comme vous le dites, et en fait, Mme Morin a elle-même dit que vous êtes déjà tenus de les observer. Après avoir entendu des témoignages incontestables à ce sujet, les membres de ce comité ont recommandé à l'unanimité que l'on fasse explicitement mention de cette obligation existante dans la loi pour rappeler à la SEE qu'il importe de s'acquitter de ces obligations.

Quel mal y a-t-il à inclure explicitement cette obligation dans la loi, alors que vous êtes déjà tenus légalement de vous en acquitter?

M. Martin Jensen: Nous craignons que cela ne crée matière à poursuite, ce qui pourrait, sans que cela n'avantage ou ne favorise les droits de la personne, causer en fait de graves problèmes opérationnels à la Société et aux exportateurs qui y ont recours.

M. Svend Robinson: Par contre, si l'obligation juridique existe déjà, pourquoi ne peut-on pas actuellement engager de poursuites?

M. Martin Jensen: Je ne peux pas répondre à cette question, je ne le sais pas.

M. Svend Robinson: Je suis convaincu que vous ne pouvez pas répondre à cette question, car il n'y a pas de réponse possible. En fait, nous ne demandons pas à la SEE, d'après vous, de s'acquitter de nouvelles obligations. Tout ce que ce comité dit, c'est que nous voulons faire en sorte que la loi qui crée la SEE reconnaisse explicitement vos obligations actuelles. J'ai certainement l'intention de proposer un amendement à cet égard. Je n'ai pas entendu dans les propos des témoins de ce matin quoi que ce soit qui expliquerait pourquoi cela créerait, selon les termes de Mme Morin, «de nouveaux risques juridiques». Cette obligation existe actuellement et elle est sans aucun doute tout aussi exécutoire maintenant qu'elle ne le serait si nous l'incluions.

• 0950

Je tiens à dire qu'il est particulièrement important de l'inclure, car ce qu'a fait la SEE dans le passé dans plusieurs domaines est particulièrement épouvantable. Lorsque j'examine son comportement environnemental—le barrage des Trois-Gorges, la mine d'or Omai en Guyane, le barrage Urra en Colombie...

J'ai rencontré des chefs autochtones en Colombie, madame la présidente, et je crois que d'autres membres de ce comité connaissent probablement la situation du peuple Embera Katio en Colombie. Ces Autochtones m'ont dit qu'ils avaient été traités avec mépris tout au long du processus, que les préoccupations des peuples autochtones dans cet endroit-là ont été complètement ignorées par la SEE.

Aux dires de l'ambassade, nos intérêts sont assez infimes à cet égard. Je suis sûr toutefois que vous conviendrez avec moi qu'il est inacceptable de dire que nous allons fermer les yeux là dessus. Le rapport du vérificateur général est un acte d'accusation assez implacable des politiques de la SEE jusqu'ici. Je crois qu'il est très important d'inclure une mention explicite dans ce projet de loi.

Pour ce qui est de la législation sur l'accès à l'information, j'ai siégé au sein du Comité de la justice chargé de la rédaction de ce projet de loi. Je me souviens avoir proposé dès le début un amendement qui aurait inclus la SEE dans le cadre du projet de loi. Cela n'a pas été fait à ce moment-là. Il est inutile d'attendre l'intervention d'un groupe de travail du gouvernement. Si nous croyons que c'est ce qu'il faut faire, nous pouvons le faire tout de suite. En fait, je crois que la Banque de développement du Canada est déjà assujettie au cadre de la Loi sur l'accès à l'information, monsieur Jensen, n'est-ce pas?

M. Martin Jensen: C'est exact, même si la Banque de développement du Canada bénéficie en vertu de la Loi sur la Banque de développement du Canada, si je ne me trompe—et je pourrais le confirmer—une exemption assez vaste pour toutes ses activités commerciales. On pourrait donc dire qu'elle y est assujettie et qu'ensuite elle en est exemptée.

M. Svend Robinson: Une dernière question, madame la présidente, à propos de la divulgation des évaluations environnementales. Je pense bien sûr que ce projet de loi doit être beaucoup plus ferme en matière d'évaluations environnementales. J'aimerais que la législation englobe les exigences LCEE, mais je pense qu'il faut, à tout le moins, fixer des critères explicites.

Pourquoi aucune disposition de divulgation n'est-elle prévue pour les évaluations environnementales dans le cadre de la loi elle-même? Je sais que des suggestions de politique administrative ont été faites, mais pourquoi le cadre de la loi elle-même ne renferme pas de dispositions explicites en matière de divulgation?

M. Wayne Robson (directeur adjoint, Direction du financement à l'exportation, ministère des Affaires étrangères et du commerce international): Peut-être puis-je répondre à ces questions l'une après l'autre, en commençant par celle relative aux droits de la personne.

Certaines questions reliées à la façon dont les droits de la personne pourraient influer sur des projets sont également traitées dans le cadre environnemental. Il faut souligner qu'il existe plusieurs mécanismes à propos des droits de la personne. Certains font déjà partie des obligations juridiques prévues par la politique mise au point pour l'environnement. Il faut citer notamment ceux qui se rapportent aux effets sociaux sur les projets menés à l'étranger.

D'après une directive du cadre d'examen environnemental et d'après les lignes directrices de la Banque mondiale, nous devons nous pencher sur les questions autochtones, comme la réinstallation, tout en prévoyant des consultations locales dans le contexte de chaque projet. Ces directives ont été fournies par le gouvernement et vont être englobées dans la politique environnementale que la SEE est en train d'élaborer.

Parallèlement, un autre mécanisme est mis au point pour s'assurer que la SEE continue d'échanger régulièrement de l'information avec le gouvernement canadien. Ainsi, elle pourra recevoir des rapports du gouvernement canadien sur les droits de la personne et être informée des politiques canadiennes en matière de droits de la personne dans certaines régions. Par la suite, des échanges avec la SEE porteront sur ce que les consultations sur les projets auront révélé, ce qui nous permettra de donner des conseils au cours du processus de consultation mené dans les divers pays.

Par conséquent, ces mécanismes existent déjà. On peut soutenir que les mécanismes relevant du cadre d'examen environnemental relèvent de ces principes et de l'obligation juridique prévue dans la mesure. Les obligations supplémentaires qui viendraient appuyer ce qui est déjà exigé par l'orientation gouvernementale sont concrétisées par l'entremise du plan directeur et par les instigations constantes du ministre. Il a été décidé qu'il n'était pas nécessaire d'intégrer cela à la loi pour l'instant—et nous pourrions peut-être revoir cette décision encore une fois à l'étape de l'étude article par article. La question des droits de la personne a été abordée sur bien des fronts, notamment dans le cadre d'examen environnemental, qui est soumis à une obligation juridique.

Je vais sauter la question concernant l'accès à l'information car je pense que Martin y a répondu tout à l'heure. J'aborderai la politique et les dispositions concernant la divulgation, particulièrement en ce qui a trait aux évaluations environnementales.

• 0955

La SEE, avec l'approbation de son conseil d'administration, a déjà partiellement mis en oeuvre la politique de divulgation. Elle a déjà pris des dispositions concernant la divulgation générale des mesures qu'elle prend régulièrement. Cela est rapporté dans ses rapports trimestriels et annuels, et même sur son site Web à l'heure actuelle. Pour ce qui est des transactions où les parties ont consenti à la divulgation, cela se fait au cas par cas.

La troisième étape de cette politique de divulgation concerne les projets environnementaux et le volet qui, en un sens, se rattache à l'apport de l'agent de conformité et aux consultations sur l'examen environnemental que mène à l'heure actuelle la SEE. Ces consultations viennent de prendre fin et elles devraient faire l'objet d'un rapport la semaine prochaine. J'espère que la SEE sera en mesure de vous fournir d'autres renseignements quant aux résultats de ces consultations...

M. Svend Robinson: Nous pourrions peut-être intégrer les dispositions sur la divulgation dans le cadre de la loi.

M. Wayne Robson: Je pense que vous pourrez avoir une bonne idée de la façon dont la politique de divulgation qui sera mise en oeuvre par la SEE influera sur le cadre d'examen environnemental. En effet, c'est ce cadre qui est l'avenue concrétisée par cette mesure.

M. Svend Robinson: Nous pourrions peut-être l'inclure dans la loi.

M. Wayne Robson: Ce n'est pas à moi de vous dire si vous pouvez ou non.

M. Svend Robinson: Merci.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci, monsieur Robinson. Si vous aviez posé la question une troisième fois, j'aurais dit que vous malmeniez le témoin.

M. Svend Robinson: Deux fois, c'est acceptable.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Monsieur Casey.

M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC/RD): Je trouve assez troublant que la SEE soit habilitée à élaborer ses propres normes environnementales et à les mettre en oeuvre. Cela a-t-il du bon sens? Serait-il logique que le ministère des Transports puisse élaborer ses propres règles, les mettre en oeuvre et en assurer l'observance et que le ministère des Ressources naturelles fasse de même? Serait-ce normal que chaque ministère puisse établir ses propres normes? Pensez-vous que chaque ministère et agence devrait avoir ses propres normes environnementales et être en mesure d'en assurer l'observation?

M. Stan Keyes (Hamilton-Ouest, Lib.): Bonne idée, Bill.

M. Bill Casey: Je veux le savoir. Pourquoi la SEE est-elle un cas particulier? Pourquoi peut-elle établir ses propres règles?

M. Martin Jensen: J'estime qu'elle n'a pas ses propres règles. Encore une fois, si vous consultez la trousse d'information, vous verrez que les plus hautes instances du gouvernement du Canada ont fourni à la Société de multiples principes directeurs. Ce sont ces principes dont elle doit tenir compte lorsqu'elle élabore des normes. Elle doit aussi appliquer des techniques et des procédures scientifiques d'examen environnemental qui respectent le contexte international, le contexte du développement et le contexte du commerce.

Par conséquent, bien que la SEE ait officiellement le pouvoir d'adopter ses propres règles et d'en assurer la mise en oeuvre, elle ne peut le faire en faisant fi de ce qui se passe dans le monde. Le gouvernement a énoncé très clairement ses attentes quant aux normes qu'elle devra respecter.

Je peux terminer très rapidement, monsieur. Le vérificateur général a fait de même. Et aux termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, la personne qui applique la loi est responsable au premier chef.

Les dirigeants de la SEE ont dit qu'ils s'adonneraient à l'autosurveillance. J'espère assurément qu'ils le feront et qu'ils verront à mettre en oeuvre leurs politiques fidèlement, mais il y aura aussi le vérificateur général qui sera là pour regarder par-dessus leur épaule. S'ils appliquent un nouveau cadre d'examen environnemental le 1er janvier 2002, le vérificateur général entreprendra un examen exhaustif tant du bien-fondé que de la mise en oeuvre du nouveau cadre dès 2004.

M. Bill Casey: Y a-t-il un autre ministère ou agence qui a ses propres règles environnementales? Ont-ils le même pouvoir que la SEE et, sinon, pourquoi pas?

M. Martin Jensen: Il y a d'autres sociétés de la Couronne qui ont des cadres d'examen environnemental, mais je ne pense pas qu'ils relèvent d'une obligation juridique exécutoire, comme nous le proposons en l'occurrence.

M. Bill Casey: Pourquoi la SEE ne suit-elle pas les mêmes règles que les autres ministères et agences du gouvernement? Pourquoi ne pouvez-vous pas accepter les règles environnementales des autres ministères? Pourquoi avez-vous vos propres règles et pouvez-vous établir vos propres critères?

M. Martin Jensen: En raison du contexte dans lequel évolue la SEE. En effet, elle opère dans le domaine du commerce international où les pratiques et les normes sont en mutation rapide. Elle doit aussi être en mesure de respecter les exigences concurrentielles des autres agences de crédit à l'exportation et des autres exportateurs des pays de l'OCDE avec lesquels nous coopérons.

• 1000

M. Bill Casey: On pourrait dire la même chose du secteur forestier. C'est un secteur international où les produits, les normes, et ainsi de suite, changent très rapidement.

Je veux maintenant parler de la Loi sur l'accès à l'information. Vous avez dit tout à l'heure que vous ne pouviez communiquer de l'information aux termes de la Loi sur l'accès à l'information parce que vous êtes en concurrence avec le secteur privé et que vous devez respecter les mêmes normes. L'instant d'après, en montrant ce livre, vous avez dit que l'orientation gouvernementale s'y faisait grandement sentir. Chose certaine, dans le secteur privé, il y a des assemblées annuelles où les actionnaires peuvent exiger des comptes des membres du conseil d'administration. La SEE tient-elle des assemblées annuelles où les actionnaires peuvent lui réclamer des comptes et élire de nouveaux membres au conseil?

M. Wayne Robson: Pour répondre brièvement au sujet des normes environnementales et de la question de l'accès à l'information, le gouvernement garde un oeil sur la SEE par l'entremise du conseil d'administration. Les membres du conseil d'administration sont nommés par le gouvernement, dont on peut dire qu'il est le principal actionnaire de la société.

M. Bill Casey: C'est discutable.

M. Wayne Robson: Cette surveillance est exercée par les membres du conseil d'administration, qui sont nommés par le gouverneur en conseil, et par les sous-ministres de deux ministères: le ministère des Finances et le ministère des Affaires étrangères et du commerce international. Ces derniers siègent au sein du conseil et surveillent les activités de la direction de la société. Il s'exerce donc une certaine surveillance grâce à cette méthode, par l'entremise du plan directeur et des examens que fait le vérificateur général des opérations de la SEE et en l'occurrence, lorsqu'on parle d'opérations, on parle du cadre.

Les mécanismes de divulgation et de transparence élaborés par la SEE, comme Martin l'a mentionné tout à l'heure, sont autant d'efforts pour communiquer les enjeux le plus susceptible d'intéresser le public. On veut que les citoyens puissent prendre connaissance de l'information qui les intéresse le plus, entre autres, en diffusant le plan directeur, le rapport annuel, et en rendant publiques les transactions, les activités générales et les projets spécifiques ayant un volet environnemental.

M. Bill Casey: Mais c'est vous qui choisissez l'information censément la plus susceptible d'intéresser les citoyens. Ce n'est pas le grand public qui choisit.

M. Wayne Robson: Le processus de divulgation est issu du processus de consultations, tout comme le cadre d'examen environnemental. Nous accédons aux voeux des intervenants que nous avons entendus dans le cadre de ce processus.

M. Bill Casey: Vous allez donc répondre aux questions du grand public? À toutes les questions qu'on vous posera?

M. Wayne Robson: Dans le contexte de la politique de divulgation en cours d'élaboration et à la suite de l'une des recommandations émanant du comité, il a été décidé d'intégrer à la SEE un poste d'ombudsman chargé de répondre aux demandes du public dans les cas où des citoyens estimeraient que la politique de divulgation n'a pas été à la hauteur. Ce poste devrait permettre aux parties insatisfaites de la transparence et de la divulgation concernant les activités de la SEE d'emprunter une autre avenue qui leur permettra d'accéder à l'information.

M. Bill Casey: Merci beaucoup.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci, monsieur Casey.

Madame Carroll.

Mme Aileen Carroll: Merci, madame la présidente. J'essaie de concilier tout ce que j'ai entendu avec la teneur du rapport du comité et les recommandations. Je n'ai pas pu trouver la recommandation à laquelle vous avez fait référence.

Je suis très satisfaite de ce que j'ai entendu jusqu'ici car je pense qu'on a fait un effort louable pour respecter les normes du vérificateur général. Il n'y a pas de meilleures normes que celles-là pour toutes les mesures législatives.

Je veux poser une question et obtenir une précision, monsieur Jensen ou monsieur Morin, en ce qui a trait à l'engagement et aux obligations du Canada aux termes d'accords internationaux. Estimez-vous que les changements apportés aux modifications nous amèneront à nous conformer à ces obligations dans les domaines dont nous avons discuté, comme l'a recommandé notre comité?

M. Martin Jensen: Oui, je le pense.

Mme Aileen Carroll: Comme je suis relativement nouvelle au comité, pouvez-vous m'éclairer quelque peu? En quoi cela laissait-il à désirer et comment pourrons-nous maintenant faire du meilleur travail?

M. Martin Jensen: Notre observance n'était pas en cause. La SEE est un mandataire du gouvernement du Canada et comme tel, elle doit respecter, comme nous sommes tous tenus de le faire, ses engagements internationaux. Mais il arrive que des transactions soient conclues dans des endroits très reculés. Nous devons disposer d'une information qui nous permette de savoir quelles sont les conditions et les préoccupations locales. Il se peut que le bilan d'un pays en matière de respect des droits de la personne soit bon, sauf peut-être les pratiques d'un secteur en particulier.

En pareil cas, nous prévoyons l'entrée en jeu de mécanismes administratifs, outre l'obligation qui nous est faite dans le plan directeur, qui est une obligation incontournable. Les plans directeurs sont revus par les ministres et approuvés par le Cabinet. Ils vous sont présentés sous forme de sommaire à la Chambre. Quant aux mécanismes administratifs, on s'en sert simplement pour s'assurer que nos agents sur le terrain, à l'étranger et au Canada, que les Canadiens et les employés de la SEE ayant des informations sur des conditions spécifiques, sont en mesure de les partager pour que nous puissions savoir ce qu'il convient de faire dans un cas précis. S'il s'avère qu'il y aurait de graves atteintes à nos obligations au plan du respect des droits de la personne, il va de soi que nous ne pourrions participer.

• 1005

Mme Aileen Carroll: Je vous remercie beaucoup de votre réponse.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Vous avez le temps pour une autre question. C'est tout pour vous?

Mme Aileen Carroll: Madame la présidente, on a répondu à mes autres questions.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Dans ce cas, c'est à vous, monsieur Duncan. C'est votre chance.

M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, AC): Que vaut la SEE?

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Vous voulez dire quel est son budget annuel?

M. John Duncan: Non, je ne parle pas de son budget annuel. Quelle est la valeur de la SEE?

M. Wayne Robson: Je ne sais pas trop comment répondre à cette question. Elle a un chiffre d'affaire imposant. La SEE conclut tous les ans des transactions de l'ordre de 45 milliards de dollars environ. Elle appuie 10 p. 100 du commerce du Canada dans le monde.

Si c'est sa capitalisation et sa rentabilité qui vous intéressent, je vous invite respectueusement à poser la question aux représentants de la SEE. Si vous voulez savoir quel est son effectif et sa capitalisation, je pense que ce sont eux qui seront mieux en mesure de répondre à ces questions précises.

M. John Duncan: Ma question est la suivante: Combien quelqu'un serait-il prêt à payer pour la SEE? Personne n'a fait le calcul?

M. Wayne Robson: Non, pas à ma connaissance.

M. John Duncan: Merci. C'est évident, vu la réponse ou plutôt l'absence de réponse.

M. Mac Harb: C'est une bonne question.

M. John Duncan: Merci, madame la présidente.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Monsieur Robinson.

M. Svend Robinson: Je m'intéresse aux politiques actuelles de la SEE en ce qui concerne le respect de l'environnement, les droits de la personne et les normes du travail, particulièrement les normes de l'Organisation internationale du travail. À votre connaissance, la SEE a-t-elle présentement pour politique d'examiner les demandes de financement à la lumière de ces critères?

M. Wayne Robson: Le cadre d'examen environnemental de cette année, par opposition à celui qui sera issu de l'étude et du processus de consultations en cours à l'heure actuelle, comporte des éléments de rapport social ainsi que les fruits de certaines consultations. D'ailleurs, cela s'inscrit non pas dans l'évaluation des projets menés par la SEE, mais dans la nécessité globale pour toute institution canadienne de respecter les normes et les obligations contractées par le gouvernement du Canada.

M. Svend Robinson: Dans ces normes, est-il question de normes du travail?

M. Wayne Robson: Les normes existantes concrétisent l'obligation générale, énoncée dans le plan directeur et le rapport annuel, de respecter les politiques et lignes directrices du gouvernement normalement exprimées par le truchement du ministère des Affaires étrangères et par le ministre directement.

M. Svend Robinson: Il n'y a donc absolument aucune référence aux normes du travail?

M. Wayne Robson: Je ne pense pas que l'on puisse trouver d'endroits précis où il est écrit que la SEE adhérera aux normes de l'OIT, bien qu'il soit acquis telle est l'obligation du gouvernement du Canada et qu'il s'ensuit qu'une agence comme la SEE devrait les respecter.

M. Svend Robinson: À votre connaissance, la SEE a-t-elle déjà refusé une demande de financement pour des motifs liés au non-respect des droits de la personne ou des normes du travail?

M. Wayne Robson: Pour être honnête, il faudrait que je demande à ses dirigeants car normalement, lorsqu'il y a un problème lié au respect des droits de la personne et aux normes du travail, il y a d'autres problèmes d'ordre financier, d'autres aspects du pays et d'autres risques qui sont en cause. Tous ces aspects se retrouvent dans un synopsis général des problèmes liés à un projet, qui essuie alors un refus.

M. Svend Robinson: Avez-vous déjà posé la question? Vous dites que la SEE applique ces normes. Savez-vous si leur application s'est soldée par le refus d'une demande de financement?

M. Wayne Robson: Nous avons soulevé directement la question des normes environnementales et du respect des droits de la personne et on nous a dit que dans certains cas, cela n'était tout simplement pas viable. Souvent ce qui arrive, c'est que le projet est soumis de nouveau d'une autre façon en vue de mitiger ces problèmes particuliers, en vue de les contourner.

M. Svend Robinson: Au meilleur de votre connaissance, la SEE a-t-elle rejeté une demande de financement en raison d'une évaluation insatisfaisante au titre de l'environnement, des droits de la personne ou des normes du travail?

M. Wayne Robson: Oui, et dans certains cas où je sais que cela s'est produit, il y a eu d'autres négociations et on a pris en compte des circonstances atténuantes pour contourner ces problèmes particuliers.

M. Svend Robinson: Au bout du compte, le financement a été accordé?

• 1010

M. Wayne Robson: Au bout du compte, on a donc accordé... Je pense qu'en l'occurrence, il s'agissait d'assurance plutôt que de financement, mais, oui.

M. Svend Robinson: L'assurance a été accordée. Par conséquent, vous n'êtes au courant d'aucun cas où une demande de financement ou d'assurance aurait été rejetée en bout de ligne?

M. Wayne Robson: Pas uniquement à cause de cela, mais encore une fois, pour ce qui est de transactions individuelles, je vous demanderais d'interroger les porte-parole de la SEE car les transactions sont soumises au gouvernement lorsque des dispositions concernant le Canada s'applique. Les évaluations du risque individuel entourant les transactions sont effectuées par la SEE. Par la suite, nous les recevons lorsqu'il est nécessaire de se pencher sur une question d'orientation gouvernementale.

M. Svend Robinson: Ne serait-il pas opportun, voir souhaitable et essentiel, que vous soyez au courant de telles circonstances? Je l'aurais cru.

M. Wayne Robson: Il est souhaitable que la SEE ait une politique qui aborde ces problèmes et qu'elle soit en mesure de les régler de façon autonome.

M. Svend Robinson: Je ne vous demande pas s'il est souhaitable que la SEE ait une politique. Je voudrais savoir si, à votre avis, il ne serait pas bon que vous sachiez comment cette politique est appliquée?

M. Wayne Robson: Les mécanismes de surveillance fonctionnent de telle façon que lorsque les transactions atteignent mon niveau, le niveau d'un agent du ministère des Affaires étrangères, elles ont déjà été soumises au conseil d'administration, elles ont fait l'objet d'évaluations du risque et d'évaluations politiques au sein de la SEE et il est fort possible qu'elles soient également passées par le bureau du ministre.

M. Svend Robinson: Juste.

M. Wayne Robson: Je m'excuse, mais ma connaissance personnelle des transactions de la SEE et, en fait, celle des personnes assises ici en face de nous, n'est pas tellement poussée.

M. Svend Robinson: Encore une fois, pour que cela soit bien clair, vous n'avez connaissance d'aucun cas où le financement où l'assurance aurait été refusée en fonction du critère du respect de l'environnement, des normes du travail ou des droits de la personne?

M. Wayne Robson: Encore une fois, tout ce que je peux vous dire pour vous éclairer, c'est que le processus d'évaluation du risque est long et compliqué...

M. Svend Robinson: Je comprends que c'est très compliqué et très long...

M. Wayne Robson: ... et qu'il traite de tous ces aspects en même temps.

M. Svend Robinson: Ce n'est pas ce que je vous ai demandé. Êtes-vous au courant—ou une autre personne autour de la table est-elle au courant—d'un cas où l'application de ces critères aurait provoqué un refus de financement?

M. Wayne Robson: Puis-je prendre votre question en délibéré et vous répondre ultérieurement, parce que je...

M. Svend Robinson: Vous le pouvez, mais peut-être que d'autres membres de votre groupe—je vois que certains hochent la tête...

M. Martin Jensen: Oui. Je ne peux vous donner le nom des demandes précises soumises à la SEE, et je n'ai pas passé en revue les dossiers, mais je crois savoir que la Société a déjà refusé des projets pour de tels motifs, des motifs environnementaux.

M. Svend Robinson: Et pour ce qui est des droits de la personne et des normes du travail?

M. Martin Jensen: Je ne peux parler précisément de ces deux volets. Souvent, lorsqu'il se pose des problèmes environnementaux graves, il y a aussi des problèmes liés au respect des droits de la personne.

M. Svend Robinson: Mais il se peut qu'il y ait des préoccupations à l'égard des droits de la personne sans qu'il y ait de problème environnemental.

M. Martin Jensen: C'est très juste.

M. Svend Robinson: Vous pourrez donc communiquer ultérieurement au comité l'information sur cette question précise?

M. Martin Jensen: Oui.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci, monsieur Robinson.

[Français]

M. Pierre Paquette: Dans la loi, les ministres du Commerce international et des Finances... Je ne sais pas exactement lesquels, mais j'ai remarqué qu'il y avait deux ministres qui pouvaient, sur décision discrétionnaire, outrepasser le mandat environnemental. Que signifie ce pouvoir discrétionnaire des ministres de passer outre à l'évaluation environnementale, de décider qu'un projet sera mis en oeuvre sans cette évaluation des effets environnementaux, et quel genre de décision cela pourrait-il toucher?

[Traduction]

M. Martin Jensen: Oui, c'est simplement pour empêcher le chevauchement entre la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale et les obligations environnementales au titre de la Loi sur l'expansion des exportations.

Les deux ministres compétents sont parfois chargés de donner des autorisations concernant des transactions spécifiques. S'ils le font aux termes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, ils risquent de déclencher l'application de l'article 5 de cette mesure. Étant donné que nous créons une obligation dans le domaine de l'environnement en vertu de la Loi sur l'expansion des exportations, nous ne voulons pas qu'une double obligation juridique découle de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

Mais cela ne confère pas à ces ministres le pouvoir d'exempter les transactions de la SEE d'un examen environnemental. C'est bien précisé dans la Loi sur l'expansion des exportations. Nous voulons simplement qu'il soit clair qu'il s'agit de l'examen environnemental relevant de la Loi sur l'expansion des exportations. Nous n'allons pas faire cet examen aux termes de la LCEE. C'est simplement pour empêcher les chevauchements.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci beaucoup, monsieur Paquette.

M. Svend Robinson: J'ai une autre brève question. Dans le projet de loi...

• 1015

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Vous savez que vous abusez de la présidence.

M. Svend Robinson: Absolument, madame la présidente.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Soyez très bref.

M. Svend Robinson: Je me demande pourquoi les directives énoncées dans le projet d'article 10.1 sur les critères environnementaux—ou ce qu'il en restera une fois que le conseil d'administration de la SEE aura décidé ce qui en est complètement exempté—ne pourrait pas être considérées comme des textes réglementaires aux termes de la Loi sur les textes réglementaires. Pourriez-vous nous dire pourquoi cette disposition figure dans le projet de loi?

M. Martin Jensen: Elle y figure en raison de la nature de la Loi sur les textes réglementaires, qui a un double objectif: soumettre un texte réglementaire à un comité d'examen des textes réglementaires ainsi qu'à un examen du ministère de la Justice.

M. Svend Robinson: Exact.

M. Martin Jensen: Ainsi, on donnera au texte une forme avec laquelle nous sommes tous familiers et qui s'inscrit dans la législation de nature réglementaire.

Nous souhaitons nous assurer que la SEE procède à des consultations exhaustives et que des normes élevées président à la création de ces directives. Cela dit, nous ne voulons pas qu'elles soient assujetties aux exigences de forme et de procédure de la Loi sur les textes réglementaires car cela pourrait donner lieu à une formulation inopportune dans un contexte national, qui ne le serait pas nécessairement dans le contexte de la concurrence internationale.

M. Svend Robinson: Comment cela?

M. Martin Jensen: Simplement en raison de la forme juridique du texte. Vous connaissez les règlements canadiens: ce sont des textes techniques, précis, fort détaillés. Or, nous envisageons un instrument dont les termes seraient plus généraux et plus souples.

M. Svend Robinson: Un texte qui ne serait pas assujetti aux mêmes critères rigoureux qu'un texte réglementaire ordinaire.

M. Martin Jensen: Non, il n'aurait à pas se conformer à cette rigueur procédurière.

M. Svend Robinson: Et il ne serait pas non plus soumis à l'examen du Comité parlementaire mixte de l'examen des textes réglementaires non plus, n'est-ce pas?

M. Martin Jensen: Non, il ne serait pas soumis à l'examen du comité prévu aux termes de la Loi sur les textes réglementaires.

M. Svend Robinson: Alors que s'il était assujetti à cette loi, il devrait subir cet examen.

M. Martin Jensen: Oui. C'est ainsi que j'interprète la loi.

M. Svend Robinson: Je pense que ce sont des très bonnes raisons de s'assurer qu'il soit traité comme un texte réglementaire.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci beaucoup, madame Morin, monsieur Jensen et monsieur Robson ainsi que madame Hradecky, d'avoir comparu devant nous et d'avoir répondu à autant de questions. Vous êtes maintenant au fait des préoccupations découlant de notre rapport de 1999 et de la réflexion que nous avons menée depuis.

Nous vous sommes reconnaissants de vous être déplacés et j'espère qu'à l'étape de l'étude article par article, nous pourrons encore une fois compter sur votre participation. Merci beaucoup d'être venus.

Avant d'inviter nos prochains témoins, nous allons prendre quelques minutes pour étudier l'ordre de renvoi du 2 octobre selon lequel l'étude du projet de loi C-32, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Costa Rica, a été confiée au Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux.

Je pense que le sous-comité a fait son travail. Le président, M. Mac Harb, est ici, et je lui demanderais de nous présenter le rapport du sous-comité.

M. Mac Harb: Merci, madame la présidente.

Comme on me dit que je n'ai plus le statut de remplaçant, je vais demander à ma collègue, Mme Marleau, de le présenter officiellement, mais je vais en faire la lecture:

    Le Sous-comité du commerce international, des différends commerciaux et des investissements internationaux du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, a l'honneur de présenter son

      DEUXIÈME RAPPORT

    Conformément à son Ordre de renvoi du mardi 2 octobre 2001, votre Sous-comité a étudié le projet de loi C-32, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Costa Rica, et a convenu le mercredi 17 octobre 2001, d'en faire rapport sans amendement.

    Une copie du compte rendu des délibérations pertinentes (Séance No. 11) est déposée.

    Respectueusement soumis.

Mme Diane Marleau (Sudbury, Lib.): J'aimerais en proposer l'adoption.

• 1020

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je vois que M. Paquette souhaite proposer un amendement.

[Français]

M. Pierre Paquette: J'ai trois amendements. Je me répète un peu. Hier, sans aucune arrière-pensée, on nous a indiqué qu'une loi de mise en oeuvre n'était pas amendable et qu'on devait donc l'adopter ou la rejeter en bloc. Je veux avoir une réponse à cet effet. Je veux savoir si les trois amendements que j'ai proposés sont recevables et, à ce moment-là, je voudrais que le comité en soit saisi pour prendre une décision. Si vous le voulez, je peux les présenter.

Comme le disait M. Robinson, il n'est pas nécessaire que ce soit long. Je veux juste que le comité soit saisi des amendements que nous avons préparés.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Monsieur Paquette, à ce stade-ci, je vous demanderais de bien vouloir présenter les amendements un à la fois, après quoi les membres du comité seront appelés à se prononcer sur chacun d'entre eux. Je ne puis prendre une décision au sujet de votre requête antérieure, mais je puis mettre chaque amendement aux voix.

[Français]

M. Pierre Paquette: Est-ce que je peux les distribuer?

M. Mac Harb: Oui.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): D'accord?

[Français]

M. Pierre Paquette: Ils ont été distribués, bon. Le premier amendement...

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Il faut distribuer le texte des amendements maintenant pour que tous sachent de quoi il s'agit.

Commencez par le premier.

[Français]

M. Pierre Paquette: Merci, madame la présidente.

Le premier amendement que je propose consiste à ajouter, à la ligne 8 de la page 4, un article 3.1 à la suite de l'article 3. Il se lirait comme suit:

    3.1 Il est entendu que l'accord ne doit pas servir de modèle à d'éventuels accords de libre-échange bilatéraux et que toutes futures négociations sur le sucre doivent avoir lieu dans un contexte multilatéral et dans le cadre de la future Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA).

Puis-je y aller du deuxième?

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Nous sommes en train de distribuer le texte.

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Madame la présidente, allons-nous les examiner un à la fois?

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Oui, un à la fois.

Nous allons commencer par l'article 3.1 du projet de loi, soit que le projet de loi C-32 soit modifié par adjonction, après la ligne 8, page 4, du nouvel article suivant:

    3.1 Il est entendu que l'accord ne doit pas servir de modèle à d'éventuels accords de libre-échange bilatéraux et que toutes futures négociations sur le sucre doivent avoir lieu dans un contexte multilatéral et dans le cadre de la future Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA).

Nous pouvons maintenant en débattre ou passer directement au vote.

[Français]

M. Pierre Paquette: D'accord. Hier, le sous-comité a reçu des témoins, dont des représentants d'une entreprise comme Sucre Lantic et aussi de l'Institut canadien du sucre. On nous a expliqué que le marché du sucre, au plan mondial, était complètement distorsionné. Aussi bien l'Union européenne que les Américains ont des mesures extrêmement protectionnistes. En ouvrant notre marché à des producteurs comme ceux du Costa Rica, au fond, on procède à une libéralisation unilatérale, parce qu'en aucun cas le Costa Rica ne pourra être un client éventuel du Canada.

On sait aussi qu'il y a une volonté de la part du ministre du Commerce international de négocier des accords de libre-échange avec quatre autres pays d'Amérique centrale, dont le Guatemala, qui est un très gros exportateur de sucre, et cela pourrait mettre en péril l'industrie du sucre.

• 1025

Donc, on a un accord avec le Costa Rica. À court terme, il semble que ce ne soit pas dommageable. Par contre, si ça servait de modèle pour les prochaines négociations, on pourrait effectivement voir notre industrie du sucre disparaître, aussi bien dans l'Est que dans l'Ouest.

Pour se prémunir contre ça, je propose qu'on inscrive dans la loi que ça ne doit pas servir de modèle et que toute libéralisation du commerce du sucre doit être négociée dans un cadre multilatéral ou continental.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Fort bien. Je cède maintenant la parole à M. Harvard.

M. John Harvard: Merci, madame la présidente.

Je suis sûr que cet amendement est proposé dans une bonne intention. Je ne comprends tout simplement pas comment on pourrait l'appliquer. À quel organe l'amendement fait-il allusion? Y est-il question du comité? Du gouvernement? D'un groupe futur de négociation?

Je ne crois pas que l'on puisse dire aux futurs négociateurs d'un autre accord de libre-échange qu'ils ne peuvent pas s'inspirer de cet accord particulier, en tout ou en partie. Je ne vois tout simplement pas comment on peut lier les mains de quelqu'un ainsi. Ce n'est tout simplement pas logique.

Je suis sûr que l'amendement est proposé dans une bonne intention, mais je ne vois pas comment je peux appuyer une proposition qui en réalité ne pourrait pas être mise en oeuvre. Nous ne pouvons pas imposer nos vues particulières à un organe qui traitera peut-être d'une question plus tard.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): C'est maintenant au tour de M. Robinson.

[Français]

M. Svend Robinson: J'appuie cet amendement. Je crois que ça répond aux témoins qu'on a entendus hier, surtout ceux de l'industrie du sucre. J'ai déjà exprimé mes fortes préoccupations quant à la possibilité que cet accord soit adopté comme modèle dans le futur. Nous appuyons donc le principe de cet amendement.

Néanmoins, j'aimerais proposer un sous-amendement. Le sous-amendement, madame la présidente, consisterait à éliminer les mots qui viennent après le mot «multilatéral», c'est-à-dire à éliminer les mots «et dans le cadre de la future Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA)». Nous sommes tout à fait contre la ZLEA. Nous pensons que, pour plusieurs raisons, ça nuit aux intérêts de l'environnement, des personnes et des droits de la personne. Nous sommes donc contre ça, et je propose qu'on élimine ces mots.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): M. Paquette est-il d'accord?

M. Pierre Paquette: Oui.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Il faudrait toutefois se prononcer au sujet de l'amendement.

M. Svend Robinson: Ces mots ont-ils été retranchés?

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): C'est ce que j'ai essayé de faire, de voir si la proposition était acceptée. À ce moment-là, il s'agirait d'un amendement favorable.

M. Svend Robinson: Parfait. Donc, les mots qui suivent «contexte multilatéral», la mention de la ZLEA, sont retranchés.

M. Pat O'Brien (London—Fanshawe, Lib.): Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Vous avez entendu l'amendement. Comme l'a dit M. Paquette, il est disposé à accepter la suggestion de M. Robinson et à l'intégrer à son amendement.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Effectivement, de sorte que nous débattons maintenant d'un amendement, plutôt que d'un quelconque sous-amendement.

Monsieur Duncan.

M. John Duncan: Je tenais simplement à dire que nous avons eu une bonne réunion hier soir avec les porte-parole des raffineurs et des producteurs de sucre. Nous avons inclus dans notre rapport, quand nous l'avons déposé, une disposition selon laquelle nous ferons des observations précises en rapport avec le fait que des négociations futures au sein du CA-4 ou de la Zone de libre-échange des Amériques tiendront compte des préoccupations particulières aux producteurs et aux raffineurs de sucre.

Je vais évaluer le gouvernement en fonction de sa réaction à ce rapport.

• 1030

Voilà qui reflète l'esprit fondamental de cet amendement. Je suppose que certaines des personnes qui sont ici aujourd'hui n'étaient pas là hier soir. J'essaie donc simplement de jeter un peu de lumière sur ce débat.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Monsieur O'Brien.

M. Pat O'Brien: Merci, madame la présidente.

Justement. Certains qui sont ici aujourd'hui n'étaient pas là hier soir. Certains assistaient même à la réunion du sous-comité, je crois, et avaient quitté au moment où a eu lieu ce débat. L'essentiel, toutefois, c'est que cet amendement est très différent de ce que proposait M. Paquette hier soir. Le texte d'aujourd'hui dit «doivent». Il avait parlé de «devraient». M. Harvard a tout à fait raison. On cherche à lier le gouvernement en imposant que cela ait lieu dans un contexte multilatéral.

Hier soir, l'esprit de l'amendement—je sais que mon collègue s'en souviendra—était d'exhorter le gouvernement à maintenir sa politique de promotion du commerce bilatéral, régional et multiculturel. Certains députés qui sont ici aujourd'hui ne sont peut-être pas d'accord avec les initiatives régionales comme la ZLEA, mais l'actuel gouvernement s'est très fermement engagé à poursuivre une politique de promotion du commerce sur trois fronts à la fois. C'est dans cet esprit qu'il en a été question hier soir.

Nous pourrions avoir un long débat philosophique ou idéologique aujourd'hui, mais cessons de tourner en rond et mettons la motion aux voix!

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je vous remercie.

Je vais céder la parole à Mme Lalonde qui a manifesté le désir d'intervenir, après quoi je mettrai la motion aux voix.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Merci, madame la présidente. Je n'ai pas participé aux travaux du sous-comité, mais j'ai rencontré des travailleurs du sucre et j'ai examiné cette question.

Je trouve que l'initiative de vouloir ouvrir des marchés est une initiative louable, mais nous croyons que, par ailleurs, il faut le faire de façon multilatérale. Autrement, on pénalise des secteurs très bien identifiés sans que, par exemple, les États-Unis ne changent d'aucune façon leur politique, alors qu'on sait que l'on ne peut même pas exporter aux États-Unis des biscuits dans lesquels il y a du sucre. Il faut le remplacer par des succédanés. Autrement, ils ne les acceptent pas. C'est ce que les travailleurs qui en fabriquent m'ont raconté.

Je suis très heureuse que cette question nous soit soumise, parce que ça démontre que les principes que nous poursuivons doivent l'être, mais il faut se donner un maximum de chances pour que ça puisse être efficace pour les pays du Sud et que ça crée, en même temps, une véritable ouverture.

Je voudrais aussi répondre, madame la présidente, à l'argument de M. Harvard. Si l'amendement n'avait pas été accepté, ç'aurait été qu'il n'était pas acceptable, mais s'il a été accepté, c'est qu'il était acceptable. C'est une intention que le comité indique au ministère, au gouvernement, et il me semble que ça va dans le sens... Nous ne sommes pas contre la Zone de libre-échange des Amériques, comme vous le savez. On a des craintes par rapport à la Zone de libre-échange et on les a exprimées.

On ne s'est pas parlé, mais si Pierre a été d'accord sur l'amendement, ce n'est pas parce qu'on est plus d'accord sur la Zone de libre-échange des Amériques, mais parce que c'est un cadre multilatéral. La Zone de libre-échange en est un, comme l'ALENA en est un.

Dans ces conditions, il me semble que ce serait vraiment un bon signal que d'accepter cet amendement, un signal qui correspond à des intentions que nous avons manifestées à ce même comité. Je vois les hochements de tête de M. Harb avec plaisir.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Fort bien. Nous allons passer au vote.

[Français]

Mme Francine Lalonde: Nous demandons qu'il y ait un vote par appel nominal, s'il vous plaît.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Nous allons faire un vote par appel nominal au sujet de l'amendement tel que proposé par M. Paquette. Vous êtes tous au courant qu'il y a eu un sous-amendement, par la suite intégré sous forme d'amendement favorable. Nous ne sommes donc saisis que d'un seul amendement.

• 1035

[Français]

Mme Aileen Carroll: Je comprends très bien. Merci, madame la présidente. Je vais voter contre cet amendement.

[Traduction]

(L'amendement est rejeté par 7 voix contre 3)

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Proposez-vous le deuxième amendement?

M. Stan Keyes: J'invoque le Règlement. Monsieur le greffier, M. Harb est-il officiellement membre du comité?

Le greffier du comité: M. Harb est officiellement membre substitut du comité pour M. Harvard. Son whip a signé le formulaire pertinent. Toutefois, quand M. Harvard entre dans la salle et prend son fauteuil à la table du comité, la substitution ne tient plus.

M. Mac Harb: Oui, mais j'ai maintenant changé de nom et je m'appelle Baker.

Le greffier: Ce que le greffier n'a ni vu ni signé, madame la présidente.

M. Stan Keyes: D'accord. Il sera prêt pour le prochain.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Il remplacera M. Baker pour le prochain amendement.

M. Svend Robinson: Nul ne peut remplacer M. Baker.

Des voix: Oh, oh!

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Auriez-vous l'obligeance de présenter votre deuxième amendement?

[Français]

M. Pierre Paquette: Mon deuxième amendement porte sur l'article 4.

Je propose que le projet de loi C-32, à l'article 4, soit modifié par substitution, à la ligne 43, page 4, de ce qui suit:

    règlement des différends, notamment en prévoyant l'abrogation de l'article XII de l'Accord entre le gouvernement du Canada et le gouvernement de la République du Costa Rica pour l'encouragement et la protection des investissements, signé le 18 mars 1998.

Je peux expliquer brièvement mon amendement. Il s'agit de la partie de l'accord qui prévoit que des entreprises privées peuvent conduire l'un ou l'autre des États devant des tribunaux d'arbitrage, alors que nous prônons plutôt un règlement des différends entre États.

M. Carrière nous avait dit qu'on ne retrouvait pas dans cet accord les éléments du chapitre 11 de l'ALENA, mais un des témoins entendus hier nous a fait la démonstration qu'il s'agissait, à quelques variantes près, d'une copie conforme du chapitre 11, chapitre qu'on nous a dit ne pas vouloir retrouver dans l'accord de la Zone de libre-échange des Amériques. Si on veut être cohérent, il faut d'abord s'assurer que les éléments irritants du chapitre 11 ne se retrouvent pas dans un nouvel accord.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Sommes-nous en train d'essayer de modifier quelque chose qui ne figure pas dans le projet de loi comme tel et qui fait partie d'un autre accord international? J'essaie simplement d'y voir clair.

[Français]

M. Pierre Paquette: Oui, exactement.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Cela déborde donc du cadre du projet de loi à l'étude.

Je crois que l'amendement est irrecevable.

M. John Harvard: Le greffier le déclare-t-il irrecevable?

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je crois qu'il est irrecevable parce...

M. John Harvard: Dossier clos.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): ... qu'il est hors de la portée de...

[Français]

M. Pierre Paquette: La loi de mise en oeuvre et l'accord font référence à l'accord Canada—Costa Rica. Cela fait partie de l'accord.

[Traduction]

M. Svend Robinson: Avec le consentement des membres du comité, nous pouvons l'insérer.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Si cela ne fait pas partie du projet de loi dont nous sommes...

M. Stan Keyes: Madame la présidente, j'invoque le Règlement.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Oui?

M. Stan Keyes: Nous avons ici à la table un conseiller juridique. Il peut peut-être nous aider à décider si l'amendement est admissible ou pas.

Posons la question à l'expert juridique. C'est justement pour cette raison qu'on le paie grassement.

Qu'a-t-il à dire?

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je crois qu'il ne s'agit pas tant d'une question de nature juridique que d'une question de nature procédurale.

M. Stan Keyes: Fort bien. Alors, quelle est la décision?

• 1040

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): La présidence a plus ou moins précisé la procédure à suivre. Nous sommes en train d'examiner le projet de loi C-32. L'amendement ne fait aucune allusion à une partie précise du projet de loi. Par conséquent, la situation est problématique.

M. Stan Keyes: Je ne comprends pas. Il vient de lire le texte qui dit: «que le projet de loi C-32, à l'article 4, soit modifié par substitution, à la ligne 43, page 4». On peut modifier un projet de loi en remplaçant un article par un autre.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): L'accord a été signé le 18 mars 1998.

M. John Harvard: Madame la présidente, vous avez rendu une décision. Le comité l'accepte, à moins que quelqu'un ne souhaite la contester. Donc, si vous vous êtes prononcée, acceptons votre décision. L'amendement est irrecevable.

M. Stan Keyes: Monsieur Harvard, nous posons simplement des questions. Détendez-vous. Nous nous renseignons simplement pour être sûrs que nous respectons bien la procédure. Il est inutile de sauter aux... Quoi qu'il en soit.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Monsieur Keyes, êtes-vous convaincu que l'amendement est irrecevable?

M. Stan Keyes: Oui. Vous dites que c'est parce que le texte a été signé le 18 mars 1998.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Oui.

M. Stan Keyes: Madame la présidente, je vous remercie.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): D'accord.

[Français]

Mme Francine Lalonde: J'aimerais avoir davantage d'explications. Chaque fois que nous faisons des interventions à la Chambre pour demander que les traités soient soumis à la Chambre avant d'être adoptés, on nous répond que nous pouvons nous prononcer sur la loi de mise en oeuvre. Si on ne peut rien changer à la loi de mise en oeuvre, il va falloir que les gens d'en face changent leur discours. Vous confirmez qu'on a raison d'exiger que ça vienne à la Chambre avant.

Cette question du chapitre 11 est au coeur des négociations de la Zone de libre-échange des Amériques. Quand, en pleine discussion, on vient reporter une entente qui comprend le coeur des dispositions du chapitre 11, on ne peut pas laisser passer ça sans le souligner et sans dire que si le gouvernement est cohérent, il va faire disparaître cette disposition dès maintenant, en renouvelant l'entente avec le Costa Rica. C'est tout. Je ne vois pas comment ce serait illégal. C'est une modification à l'article 4 qu'on peut adopter ici, en comité. Ce ne serait pas illégal. Au fond, ce sera une décision politique. On ne peut pas dire que ce n'est pas acceptable au plan de la procédure.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): J'ai déclaré la motion irrecevable et je maintiens ma décision. Passons à autre chose.

[Français]

M. Pierre Paquette: Voici mon prochain amendement. Je propose que le projet de loi C-32, à l'annexe 2, soit modifié par la suppression des lignes 1 à 11, page 2.

C'est l'ensemble des tarifs du sucre. Donc, je propose qu'on maintienne ces tarifs au niveau où ils sont présentement.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Laissez-moi simplement trouver le passage dans l'annexe. C'est à l'annexe 2, qui fait partie du traité. Je ne suis pas sûre qu'elle relève de la même catégorie que tout à l'heure. Je vais donc déclarer cette motion irrecevable également.

[Français]

M. Pierre Paquette: Que je sache, l'annexe 2 fait partie du projet de loi. On peut donc l'amender aussi.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je vais donc vous faire lecture d'un passage de La procédure et les usages de la Chambre des communes, page 657:

    Si l'annexe d'un tel projet de loi renferme le libellé de l'accord, elle ne peut alors faire l'objet d'amendements. Il est toutefois permis de proposer des amendements aux articles du projet de loi, en autant qu'ils ne touchent pas au libellé de l'accord en annexe [...]

Voilà en réalité ce sur quoi nous devons nous appuyer.

Nous devons nous assurer que nous traitons du projet de loi lui-même.

• 1045

Plaît-il aux députés d'adopter le rapport modifié?

(La motion est adoptée par 8 voix contre 3)

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Le rapport est adopté. Dois-je en faire rapport à la Chambre des communes?

Des voix: D'accord.

Des voix: À la majorité.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je vous remercie.

M. Mac Harb: Madame la présidente, puisque M. Duncan et M. Paquette sont tous deux ici, j'aimerais faire une observation. Je tiens à vous dire que, quelles que soient les motions dont nous sommes saisis, tant les partis d'opposition que le parti ministériel ont travaillé avec beaucoup de diligence hier soir, jusque tard dans la nuit, à régler cette question. Du fait que l'opposition a soulevé certaines questions, le comité a adopté à l'unanimité deux motions. L'une porte justement sur ce dont parle M. Paquette. Essentiellement, nous avons rejeté sa motion parce qu'elle ne correspond pas à ce que nous avons décidé hier soir. M. Paquette peut donc dire à ses électeurs qu'il a en fait fait une proposition qui a été adoptée par le comité hier soir. M. Duncan a également fait une recommandation portant particulièrement sur de futures négociations, recommandation qui a également été adoptée à l'unanimité par le comité.

Au nom du comité, je tiens à vous dire que le comité du commerce international a travaillé collectivement et avec beaucoup d'efficacité et qu'il a à l'unanimité adopté ces motions. Nous allons communiquer avec le ministre par lettre à ce sujet. Ces motions feront partie de nos délibérations. Je tiens donc à les remercier publiquement et officiellement.

Une voix: Bravo!

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je vous remercie et...

M. Mac Harb: Et mes collègues aussi, bien sûr, qui étaient tous là et qui ont tout fait pour que cela soit adopté.

La vice-présidente (Mme Augustine): Je tiens à vous remercier vous aussi, au nom du comité, pour le leadership dont vous avez fait preuve au sein du sous-comité pour l'adoption de ce rapport.

Nous allons maintenant faire une pause de deux minutes, après quoi nous accueillerons le groupe suivant de témoins. Je demande aux témoins qui peuvent m'entendre de bien vouloir patienter. Nous nous excusons d'avoir à régler ces questions auparavant.

• 1048




• 1053

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Nous examinons le projet de loi C-31, Loi modifiant la Loi sur l'expansion des exportations et d'autres lois en conséquence.

Nous accueillons aujourd'hui plusieurs témoins représentant Probe International, l'Institut Nord-Sud, le Groupe de travail des ONG sur la Société pour l'expansion des exportations, la Coalition Initiative d'Halifax ainsi que le Canadian Ecumenical Justice Initiative.

J'ignore si vous avez décidé entre vous tout à l'heure qui va prendre la parole en premier ou si c'est moi qui vais décider en désignant les interlocuteurs en commençant par la gauche.

• 1055

Je vous souhaite donc tous la bienvenue. Nous allons commencer par Patricia Adams, de Probe International.

Mme Patricia Adams (directrice générale, Probe International): Madame la présidente, je vous remercie.

Je vous remercie tout particulièrement de m'avoir invitée à nouveau à comparaître devant le comité pour vous parler de ce très important sujet que sont les changements envisagés à la loi régissant la Société pour l'expansion des exportations.

Probe International, organisme que je représente, a examiné les conséquences environnementales, financières et sociales des activités de la SEE au cours des 20 dernières années. Notre fondation a couramment recours aux démarches réglementaires et aux tribunaux pour contester la constitutionnalité de lois délétères sur le plan environnemental, pour établir les responsabilités et pour freiner les dommages environnementaux.

Forts de cette expérience, nous avons évalué le projet de loi C-31 et avons conclu que c'est une loi fondamentalement mauvaise. Plutôt que de la tenir responsable des conséquences environnementales de ses actes, le projet de loi C-31, s'il est adopté, donnera à la SEE la possibilité de détruire l'environnement et ce, en toute impunité. Le grand public souhaite que la SEE cesse d'appuyer les projets dommageables pour l'environnement, ce que ne fait pas cette loi.

Les avocats du gouvernement insistent pour dire que cette loi donnera ouverture à des poursuites parce que les rédacteurs de ce projet de loi ont pris soin d'insérer tant de seuils que la SEE est presque entièrement protégée contre toute poursuite. Si le projet de loi est adopté tel quel, la SEE pourra, en vertu de la loi, suivre ses propres procédures d'examen environnementales dans le cadre desquelles elle rédige les règles, établit les critères et effectue elle-même l'évaluation, après quoi elle décide s'il est justifié d'appuyer un projet qui détruira l'environnement.

Étant donné la situation, c'est-à-dire que la SEE est responsable des limites légales et environnementales, il est très peu probable qu'une activité de la SEE sera considérée comme une infraction à la loi, encore moins comme une infraction sur le plan environnemental qui donnerait aux citoyens matière à procès.

En fin de compte, le projet de loi C-31 donnera lieu à des évaluations environnementales pour la forme, dans le cadre desquelles la SEE pourra énoncer—sans contestation aucune parce que c'est elle qui établit les normes—ses propres vues sur les risques posés à l'environnement et sur les avantages d'un projet.

Probe International est constamment confrontée à de pareilles évaluations intéressées où l'on gonfle les avantages et diminue les coûts. Quand les lois permettent des évaluations intéressées et incontestables, un projet n'est jamais trop mauvais pour l'environnement.

Un exemple classique est le barrage des Trois Gorges sur le fleuve Yangtze, en Chine, qui exigera le déplacement de presque deux millions de personnes.

Le projet de loi C-31 est le fruit d'une étude exhaustive de trois ans au cours de laquelle le public a dit et redit au gouvernement qu'il voulait que la SEE soit assujettie à la Loi sur l'accès à l'information. Toutefois, cette réforme qui fait si cruellement défaut ne se trouve pas dans le projet de loi C-31. À nouveau, le public est laissé à la merci d'une directive intéressée de la SEE suivant laquelle la SEE est tenue de communiquer uniquement des exposés dépouillés de ses activités et des évaluations environnementales qui soulèvent des interrogations.

En outre, la SEE et ses sociétés clientes sont libres de communiquer ce qu'elles veulent bien et au moment qu'elles jugent opportun. Ce sont les sociétés bénéficiaires de la largesse de la SEE qui détermineront les pratiques relatives à la communication d'information de la SEE, plutôt que le grand public ou l'actuelle législature. Comme le projet de loi C-31 n'assujettit pas la SEE à la Loi sur l'accès à l'information, la société pourra continuer de mener ses activités nuisibles et coûteuses à l'abri des regards du public et elle compromettra peut-être des vies.

Dans le mémoire que je vous ai remis, j'en donne la raison, à la lumière de l'affaire troublante des barrages Chamera, en Inde.

• 1100

En 1984, la SEE et l'ACDI ont engagé 645 millions de dollars dans la construction en Inde du barrage Chamera I, sur la rivière Ravi. Probe International a déposé une demande d'accès à l'information à l'ACDI parce que celle-ci est assujettie à la loi, et nous avons récemment reçu 2 000 pages environ de documents, y compris de la correspondance, des notes de service et des courriels, des rapports adressés à la société nationale d'hydroélectricité de l'Inde et des rapports de rendement et de sécurité au sujet de ce projet controversé, préparés par un contrôleur de projet indépendant. Ces documents ont révélé des problèmes de sécurité qui auraient dû être rendu publics dès que les autorités du projet en ont pris connaissance.

Par exemple, dès 1993, RSW, la firme d'ingénierie engagée pour surveiller l'exécution du projet, a présenté un rapport troublant après l'autre pour prévenir que l'intégrité de la structure du barrage était compromise par la faiblesse inhérente de la roche à la culée droite du barrage. Puis, le 24 mai 1996, survient un important glissement de terrain. Selon le rapport de RSW, le glissement de terrain a révélé que «la hauteur des morts-terrains immédiatement en aval du barrage est bien supérieure aux valeurs généralement données». RSW poursuit en disant que, «compte tenu de ce qui précède, le contrôleur du projet juge très sérieux les signes d'instabilité».

Il faut considérer que tout autre signe de faiblesse structurelle, des glissements, l'augmentation des infiltrations dans le barrage et en aval de celui-ci ou des tourbillons dans le réservoir

    risquent d'avoir des conséquences catastrophiques; il s'agit de phénomènes qui nécessiteraient l'abaissement immédiat et contrôlé du réservoir et, éventuellement, la fermeture de la centrale et la notification de la direction de la NHPC, du gouvernement de l'Inde et des instances administratives concernées dans la région.

Le contrôleur du projet a rappelé à l'ACDI qu'il l'avait prévenue de l'instabilité géologique dès 1993—trois ans plus tôt—et qu'il trouvait «regrettable que si peu d'attention ait été portée à ce moment à l'opinion exprimée dans ce rapport».

RSW met ensuite l'ACDI en garde, et je cite:

    La détérioration de la situation déjà précaire pourrait aboutir à un événement catastrophique qui entraînerait, en plus d'une panne majeure de production d'électricité, la perte de vies humaines dans les villages situés en aval du barrage, ce qui serait encore plus grave.

Probe International a envoyé des copies de ces documents à des groupes de citoyens indiens qui sont en train de les examiner en compagnie d'ingénieurs indépendants dans le but d'évaluer les risques que courent les habitants en aval du barrage.

En quoi cette affaire a-t-elle un rapport avec le projet de loi C-31? Nous n'aurions jamais reçu ces documents si l'ACDI, qui est assujettie à la Loi sur l'accès à l'information, n'avait pas été un des bailleurs de fonds du projet.

En 1999, le conseil d'administration de la SEE a approuvé un prêt, de 175 millions de dollars cette fois, pour la construction de Chamera II, un deuxième barrage, à seulement 30 kilomètres en amont de la controversée Chamera I. Cette fois, cependant, l'ACDI s'est retirée du projet qui est maintenant financé uniquement par la SEE. Parce que le projet de loi C-31 n'assujettit pas la SEE à la Loi sur l'accès à l'information, les citoyens indiens qui vivent en aval de Chamera I et de Chamera II n'auront tout simplement pas le droit de savoir à partir de maintenant quels risques la SEE leur fait courir.

Enfin, j'aimerais réfuter l'argument fallacieux selon lequel la SEE doit tenir compte de l'avis de tous ses intervenants quand elle établit des règles s'appliquant aux évaluations environnementales et à la communication d'information. Cet argument laisse sous-entendre que les deux groupes d'intervenants, les sociétés qui profitent des fonds et le maître d'oeuvre public, ont des droits égaux. C'est faux.

Il se peut que la SEE soit liée par des contrats légaux à ses clients et qu'elle doive s'y conformer, mais là s'arrête son obligation. En revanche, elle est redevable aux personnes qui fournissent chaque dollar que la SEE emprunte et qui lui permet de continuer son travail, à savoir le contribuable canadien. Vouloir faire l'équivalence entre les deux ne sert qu'à confondre et à brouiller les droits et les responsabilités des parties et à compromettre les politiques et la loi qui régissent la SEE. Il est de votre devoir à vous, nos représentants élus, de jeter de la lumière sur cette confusion et de transposer la volonté du public dans des lois efficaces. Le projet de loi C-31 ne l'est pas.

• 1105

Voilà qui met fin à mon exposé.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Madame Adams, je vous remercie.

Nous allons maintenant céder la parole à Mme Gibb. Mme Gibb est la porte-parole de l'Institut Nord-Sud où elle est recherchiste principale.

Mme Heather Gibb (recherchiste principale, Institut Nord-Sud): Merci, madame la présidente. Je vous suis reconnaissante de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui. Mon propos concernera en règle générale des questions d'uniformité et de cohérence de la politique et des obligations du Canada en vertu des conventions et des traités internationaux dont il est signataire.

La mesure législative à l'étude est importante, je crois, non seulement parce qu'elle fait suite à un très long processus d'examen et de consultation qui a eu lieu au Canada, mais également parce qu'elle fait partie de discussions internationales beaucoup plus importantes au sujet de la régulation mondiale. En novembre, comme vous le savez, le groupe de travail de l'OCDE chargé des crédits à l'exportation et des garanties de crédit doit examiner une recommandation relative à des approches communes en matière d'environnement et de crédits à l'exportation officiellement subventionnés. Le Canada assume un rôle de leadership dans les discussions sur la régulation mondiale au sein de nombreuses tribunes, par exemple au sujet de l'architecture financière internationale.

Les modifications apportées à la Loi sur l'expansion des exportations devraient aller dans le sens de nos objectifs canadiens plus généraux qui consistent à mettre la barre plus haut. J'aimerais faire trois observations générales.

La première concerne l'établissement de normes environnementales s'appliquant à la Société pour l'expansion des exportations, soit que le Canada devrait viser le plus grand dénominateur commun. Les points de référence pour l'évaluation environnementale ont beaucoup changé depuis l'adoption de la première loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Ils comprennent maintenant des considérations d'ordre socio-économique de même que les obligations nationales contractées en vertu d'accords internationaux sur les droits de la personne et sur les normes du travail. Nous estimons que le projet de loi C-31 devrait disposer explicitement que l'évaluation comprend les effets sur les droits socio-économiques et sur les normes du travail.

Les changements proposés en ce qui concerne les effets environnementaux nous causent plusieurs préoccupations, notamment l'absence de libellé exigeant que la SEE rejette les projets qui ont d'importants effets nuisibles sur l'environnement. J'en reviens à ce que j'ai dit tout à l'heure au sujet de ce que nous savons maintenant être un effet environnemental. Nous sommes aussi préoccupés par le caractère vague des définitions et des critères et par la délégation à la Société pour l'expansion des exportations de la responsabilité de fixer ses propres critères quand pareils critères et normes existent déjà ailleurs, y compris à l'Agence canadienne d'évaluation environnementale.

Une troisième source de préoccupation est l'absence de dispositions concernant la communication de renseignements. Il s'agit là d'une grande faiblesse du projet de loi. La communication opportune et pertinente des examens environnementaux est essentielle pour faciliter la participation utile des intervenants et l'amélioration des projets. Je sais aussi qu'il s'agit d'un important outil de reddition de comptes.

Pour revenir plus particulièrement aux articles du projet de loi, j'aimerais m'arrêter à l'article 1, soit au titre intégral de la société. Bien qu'on puisse espérer que des organismes agissant au nom du gouvernement du Canada respectent toutes les obligations internationales de ce gouvernement, nous comprenons que l'on craigne qu'en cas d'éventuels conflits entre le soutien et le développement du commerce et la promotion de la compétitivité canadienne sur les marchés internationaux, d'une part, et des considérations d'ordre environnemental et humain ou relatives au travail, d'autre part, la priorité ne soit accordée aux premiers.

Pour mettre fin à toute ambiguïté, tant de la part de la SEE que de son personnel et de ses clients et pour permettre à la SEE de rejeter des projets environnementaux au sens large, nous proposons que l'on ajoute au projet de loi une disposition qui dit clairement que, lors de la prise de ses décisions d'affaires, la SEE accordera le respect qui leur est dû aux conventions et aux traités internationaux ratifiés par le Canada. C'est ce que font les Australiens dans leurs lois. Il importe aussi de fournir à la SEE les outils voulus pour qu'elle puisse se doter d'une capacité interne d'analyse de la portée de ses engagements. Pour plus de clarté, il serait peut-être utile d'y joindre une liste des conventions internationales en regard desquelles on vérifiera les transactions.

• 1110

Quant à l'article 9 du projet de loi, intitulé «Effets environnementaux», la SEE s'est lancée dans une ambitieuse initiative visant à renforcer son propre cadre d'examen environnemental. Dans les commentaires que nous avons faits lors d'une récente consultation par la SEE au sujet du cadre environnemental projeté, nous avons loué la société pour les importants progrès qu'elle avait réalisés à cet égard.

Nous avons aussi fait remarquer certaines préoccupations au sujet du projet de loi C-31, plus particulièrement en ce qui concerne l'article 10.1 projeté. Il exige que la société décide si le projet aura des effets environnementaux négatifs malgré l'application de mesures d'atténuation, puis décide, dans l'affirmative, si elle est justifiée d'aller de l'avant.

On pourrait renforcer cet article en ajoutant l'obligation pour la société de ne pas procéder à la transaction si l'évaluation environnementale révèle d'importants effets négatifs sur le plan environnemental, social, humain ou du travail, en dépit de mesures d'atténuation. Si l'on s'attend que la SEE va respecter des normes de comportement, sur le plan corporatif, social et environnemental, il faut qu'elle soit tenue de rejeter des possibilités d'affaires quand les évaluations environnementales révèlent qu'un projet ne peut pas respecter les normes. Il faudrait aussi que de pareilles décisions soient rendues publiques en vue de constituer un recueil de pratiques qui servirait de guide tant aux clients qu'à la société comme telle.

L'article projeté serait renforcé, et la société aurait plus de jeu pour remplir son mandat si l'on exigeait de cette dernière qu'elle demande aux parrains des projets de décrire d'autres moyens de l'exécuter. Il faudrait aussi que l'information sur les autres moyens soit communiquée.

Quant au paragraphe 10.1(2) projeté, pour dissiper toute ambiguïté et aux fins de l'uniformité et de la reddition de comptes, il faudrait que la loi comprenne une taxonomie précise, plutôt que de laisser la définition des termes et des expressions aux soins du conseil. La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, par exemple, comprend une liste détaillée de définitions.

Enfin, pour ce qui est de la communication des renseignements, un principe essentiel de bonne gestion publique est la transparence. Étant donné la tendance dans la pratique internationale en faveur de la communication des renseignements, ainsi qu'un public plus exigeant sur le plan du comportement à l'égard de ceux qui exercent des pouvoirs publics, nous croyons qu'il faudrait que la loi inclue des dispositions explicites exigeant la communication opportune et périodique de renseignements sur les projets. La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, par exemple, penche en faveur de la communication des renseignements. Elle permet que les renseignements ne soient pas communiqués seulement si cette communication est susceptible de faire un tort précis, direct et important.

Il existe très peu d'arguments contre la non-communication de secrets commerciaux—des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques de nature confidentielle—ou de renseignements qui pourraient entraîner des pertes financières importantes. L'Agence canadienne d'évaluation environnementale établit des lignes directrices claires au sujet de l'accès à l'information. D'autres agences de crédit financier nationales et multilatérales donnent aussi des instructions explicites.

Comme la SEE est soustraite aux dispositions de la Loi sur l'accès à l'information, il importe encore plus que la loi régissant la société exige clairement la communication adéquate et opportune des évaluations environnementales—des normes en fonction desquelles ont peut faire une évaluation claire du rendement de la société.

C'est la loi, non pas le conseil d'administration, qui devrait décrire la nature des exemptions à l'exigence de faire une évaluation. Dans les faits, tous les projets devraient être examinés, et la plupart des organismes se sont dotés de critères précis à cette fin. L'Agence canadienne d'évaluation environnementale, par exemple, a un règlement renfermant une liste d'exclusions et d'inclusions. Cette liste est précise et publique. D'autres organes de crédit à l'exportation et organismes financiers donnent des précisions au sujet des exceptions. La Banque mondiale est souvent citée en exemple. Voilà. C'est tout ce que j'avais à dire.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Madame Gibb, je vous remercie beaucoup. Nous allons maintenant demander à Mme Revil, du Groupe de travail des ONG, Coalition Initiative de Halifax, de prendre la parole.

[Français]

Mme Émilie Revil (coordonnatrice, Groupe de travail d'ONG sur la Société pour l'expansion des exportations, Coalition Initiative d'Halifax): Merci beaucoup, madame la présidente. Je m'appelle Émilie Revil et je suis coordonnatrice du Groupe de travail d'ONG sur la Société pour l'expansion des exportations.

• 1115

[Traduction]

Le groupe de travail des ONG sur la Société pour l'expansion des exportations travaille depuis trois ans déjà à ces dossiers, et je dois avouer que le projet de loi C-31 nous a profondément déçus. Nos études de cas des projets soutenus par la SEE décrivent le genre d'impact qu'a cette institution sur la vie des gens et sur l'environnement, sur nos engagements internationaux et sur notre réputation à l'étranger lorsqu'elle n'est pas soumise à une réglementation convenable.

Non seulement le projet de loi C-31 ne fournit-il pas les automatismes régulateurs qui conviennent ou l'orientation dont elle a tant besoin, mais il propose également de s'ancrer encore plus dans le statu quo qui pose tant de problème. Plus de 100 000 Canadiens ont écrit au gouvernement, cette année, pour lui communiquer leur consternation au sujet du statu quo, et des pages entières de journal ont été consacrées aux échecs de la SEE en tant qu'institution publique.

Pourtant, le projet de loi C-31 est muet dans tous les domaines d'intérêt public à l'exception de l'environnement, pour lequel tout ce qu'il dit essentiellement, c'est que la SEE peut agir comme bon lui semble. Le projet de loi C-31 consacre l'autonomie dont dispose déjà la SEE. Il inscrit dans la loi le genre d'échappatoires que comporte le processus d'évaluation environnementale qui, si elles sont utilisées, feront la honte des normes internationales et canadiennes d'évaluation environnementale.

Aucune autre institution gouvernementale, que nous sachions, n'a le pouvoir législatif de définir son propre processus d'évaluation environnementale. La majorité des institutions publiques du pays sont réglementées en vertu de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. Le projet de loi C-31 permet non seulement au conseil d'administration de la SEE de définir l'évaluation environnementale, mais il lui permet aussi de soustraire ses propres activités du processus d'évaluation environnementale et d'aller de l'avant avec un projet, même si le processus d'évaluation environnementale révèle de graves effets négatifs.

Ces échappatoires sont clairement exposées dans le résumé et l'analyse du projet de loi que l'on trouve sur le site Web du gouvernement. La délégation du pouvoir de décision au conseil d'administration de la SEE, sans limite ou critère est—et je cite—«inhabituelle». Je cite à nouveau:

    L'absence totale de limites sur le pouvoir de décision laisse croire que les directives du conseil d'administration ne pourraient pratiquement pas faire l'objet d'un examen judiciaire.

Le projet de loi C-31 confie les rênes à la SEE alors qu'elle n'a pas réussi à se montrer capable de se comporter d'une manière qui corresponde à l'intérêt public. Le cadre environnemental actuel de la SEE a fait l'objet de beaucoup de critiques de la part de Gowling, du Sous-comité des affaires étrangères et du commerce international et, plus récemment, du Bureau du vérificateur général.

Dans sa réponse au rapport du sous-comité des affaires étrangères de décembre 1999, le gouvernement demandait au vérificateur général d'examiner la directive environnementale actuelle qu'a élaborée la SEE. Le vérificateur général y a constaté des lacunes et l'a jugée mal mise en oeuvre dans 92 p. 100 des cas.

Le cadre environnemental de la SEE ne sera définitif qu'au printemps. Comment le Parlement peut-il décider que le cadre d'évaluation environnementale sera satisfaisant s'il n'oblige pas, dans la loi, la SEE à adopter de bonnes pratiques?

Le projet de loi à l'étude prévoit aussi que le vérificateur général examine tous les cinq ans la mise en oeuvre par la SEE de ses propres directives. Toutefois, quel recours a le grand public si la SEE n'obtient pas la note de passage? Quel recours a le public pour obliger la SEE à rendre des comptes alors qu'elle est exemptée du processus environnemental et qu'elle approuve un projet que l'on sait avoir de graves impacts sur l'environnement?

La loi devrait inclure les critères que la SEE est tenue de respecter.

Par exemple, toutes les transactions qui pourraient avoir ou qui ont d'importants effets nuisibles devraient être soumises à une évaluation environnementale.

Toutes les évaluations environnementales des transactions connues pour avoir d'importants impacts nuisibles devraient inclure la consultation des populations locales affectées.

Les renseignements réunis sur l'impact dans le cadre du processus d'évaluation devraient être rendus publics dans les 60 jours au moins qui précèdent l'approbation de la transaction par le conseil d'administration.

Il faudrait que les normes appliquées tiennent compte de l'imposante expertise qui existe en ce qui concerne le processus d'évaluation environnementale, par exemple à la Société financière internationale du Groupe de la Banque mondiale ou dans les agences de crédit à l'exportation américaines.

Enfin, il faut obliger le conseil d'administration de la SEE à examiner toutes les transactions ayant ou susceptibles d'avoir d'importants effets néfastes.

Ce dernier critère est important, parce que peu des transactions de la SEE sont actuellement approuvées par son conseil d'administration.

Il règne un peu de confusion ici. J'ignore si ce sont les projets qui excèdent 25 millions ou 250 millions de dollars qui doivent être approuvés par le conseil d'administration, alors que toutes les autres transactions d'une valeur inférieure à 25 millions de dollars ou à 250 millions de dollars—selon ce qu'est le seuil—sont laissées à la discrétion des gestionnaires.

M. Svend Robinson: Le seuil est de 225 millions de dollars.

Mme Émilie Revil: Est-ce de 225 millions de dollars? D'accord.

Je remarque aussi que le conseil d'administration de la Banque mondiale approuve toutes les transactions et que celui de la U.S. Ex-Im Bank approuve tous les projets d'une valeur supérieure à 10 millions de dollars.

• 1120

De plus, il faudrait assujettir la SEE à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale. L'inclusion dans le projet de loi C-31 d'un article qui renforce l'exemption actuelle de la SEE par rapport à la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale lie les mains des décideurs. La loi relative aux évaluations environnementales n'a pas besoin d'être modifiée pour y assujettir la SEE; toutefois, il faudrait modifier la Loi sur la SEE si le gouvernement décidait d'y appliquer la Loi sur l'évaluation environnementale, comme on espère qu'il le ferait à titre exemplaire étant donné la très mauvaise note que lui a accordée le vérificateur général.

Vous avez entendu les fonctionnaires du ministère des Affaires étrangères ce matin, plus particulièrement M. Jensen, vous dire que l'article concernant la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale avait été inclus pour faire en sorte que la SEE ne soit pas tenue de suivre deux processus différents d'évaluation. Certains éléments permettent de justifier que le compte du Canada administré par la SEE relève des projets menés à l'étranger qui ne sont pas soumis aux règlements d'application de la loi. On est en train de présenter cet argument devant les tribunaux, mais le projet de loi C-31 pourrait, en incluant cet article, prendre le pas sur la décision de la Cour.

De plus, sur le plan des droits de la personne, le projet de loi C-31 ne renforce pas le respect par la SEE des obligations et des engagements internationaux du Canada. Il faut changer la raison d'être de la SEE à l'article 10 de manière à inclure le respect des obligations internationales du Canada. J'ai fait des recommandations plus précises à ce sujet dans le mémoire qui a été présenté au Sous-comité des affaires étrangères et du commerce international.

Il faut aussi que le projet de loi établisse les exigences auxquelles doit satisfaire la SEE dans le domaine de la communication des renseignements. M. Warren Allmand m'a envoyé copie d'une lettre qu'il avait adressée au Sous-comité des affaires étrangères et du commerce international hier. Il s'excuse de ne pas être présent aujourd'hui. Il espère qu'il pourra assister à vos audiences la semaine prochaine. Aujourd'hui, il est à Montréal pour la diffusion d'un rapport sur le respect des droits de la personne en Chine.

Il écrit dans sa lettre, que j'ai ici, qu'on a été incapable d'obtenir les renseignements cruciaux dont on avait besoin de la SEE, c'est-à-dire de savoir quels projets la SEE avait appuyés au moyen de fonds ou de garanties, pendant combien de temps et à qui ce soutien avait été accordé. Il ajoute dans sa lettre que cela fait clairement ressortir le besoin d'ajouter dans le projet de loi une disposition exigeant la communication périodique de renseignements liés à des projets.

Mon dernier point, c'est qu'il faut explicitement exiger de la SEE, avant l'approbation, qu'elle communique les renseignements environnementaux et sociaux relatifs aux projets qui ont des impacts négatifs. Il en est question dans l'ébauche de documents d'orientation. Comme il est mentionné dans le résumé législatif, cela figure dans l'ébauche du document d'orientation, mais ne se retrouve pas dans la politique définitive qui a été arrêtée le 1er octobre. La SEE a déclaré à ce sujet que ce genre de communication sera envisagé en rapport avec le cadre environnemental que l'on est actuellement en train d'élaborer et auquel on apportera les dernières retouches au printemps.

En guise de conclusion, mon groupe de travail vous prie instamment de ne pas recommander l'adoption du projet de loi à l'étude dans sa version actuelle parce qu'il n'est pas à la hauteur des valeurs et des normes canadiennes.

Voilà qui met fin à mon exposé. Je vous remercie.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Madame Revil, je vous remercie. Il nous tarde de compter M. Allmand parmi nous. Il pourra peut-être faire directement au comité certaines des remarques faites dans la lettre.

Nous accueillons maintenant Mme Price, de Canadian Ecumenical Justice Initiatives.

Mme Kathy Price (porte-parole, Canadian Ecumenical Justice Initiatives): Madame la présidente, je vous remercie de m'avoir invitée à témoigner devant le comité.

La coalition avec laquelle je travaille est formée de l'Église anglicane, de l'Église unie, de l'Église presbytérienne, de la Christian Reformed Church et des Églises évangélique et luthérienne du Canada, de même que de la Conférence canadienne des évêques catholiques, de l'Organisation catholique canadienne pour le développement et la paix, de la Conférence religieuse canadienne, des Quakers et du Comité central mennonite.

Notre organisme comprend l'ex-Comité inter-églises des droits humains en Amérique latine avec lequel je travaille depuis une décennie presque. En fait, c'est en ma qualité de spécialiste des droits de la personne que je suis ici aujourd'hui pour émettre une opinion au sujet du projet de loi à l'étude et pour attirer votre attention sur une grave omission, soit le fait que la SEE n'est pas obligée de faire des investissements qui correspondent aux engagements pris par le Canada dans les accords internationaux de droits de la personne qu'il a signés et ratifiés.

Je vais faire des recommandations précises au sujet de modifications qui mettraient fin à cette omission, mais tout d'abord, j'aimerais vous expliquer brièvement pourquoi ces modifications sont essentielles, pourquoi elles sont cruciales.

Nous avons témoigné en compagnie du chef des Embera Katio, Kimy Pernia, devant votre comité durant les audiences qu'il a tenues en 1999. M. Pernia a témoigné au sujet de l'impact qu'a le barrage hydroélectrique Urra soutenu par la SEE dans le nord de la Colombie.

Kimy a décrit comment les terres sont inondées et les cultures, détruites par le barrage. Les stocks de poissons dans la rivière, en amont du barrage, ont été éliminés, dérobant aux Embera leur principale source d'alimentation, et de vastes bassins d'eaux stagnantes ont été créés. Désormais, les collectivités embera sont envahies par les moustiques qui causent des épidémies de malaria et de dengue.

• 1125

Ce qu'il faut absolument se rappeler, c'est que Kimy a déclaré que le barrage a été construit sans consultation des collectivités autochtones vivant dans la région qui serait touchée, ce qui contrevient à la fois à la Constitution colombienne et aux accords internationaux en matière de droits de la personne. Kimy a aussi déclaré que le fait de s'être exprimée au sujet de ces choses avait mis sa vie en danger et que quatre autres chefs de communautés d'Embera avaient déjà été tués par des forces paramilitaires pour avoir critiqué les répercussions néfastes du barrage.

Le 2 juin, Kimy Pernia a été enlevée par des paramilitaires armés. Depuis lors, c'est le mutisme total en ce qui concerne ses allées et venues. Depuis la disparition de Kimy, d'autres meurtres ont été commis et les menaces se sont poursuivies contre les collectivités Embera.

Alors que la Colombie vit un conflit armé sanglant et que les abus en matière de droits de la personne atteignent des niveaux terrifiants, il n'y a pas de doute que la disparition de Kimy et le meurtre d'autres chefs des communautés d'Embera Katio ont quelque chose à voir avec leur opposition à la construction du barrage. Il est aussi évident que le barrage, un projet dans lequel la SEE a choisi d'investir malgré l'opposition de collectivités autochtones locales touchées, dans un pays où l'opposition aux intérêts économiques puissants, comme ceux qui participent au projet Urra, fait régulièrement l'objet de répressions, a exacerbé la violence qui existait déjà.

Des centaines de milliers de membres de notre groupe ne veulent pas qu'une situation aussi lamentable se répète un jour. De plus, il faudrait signaler que les églises ont rassemblé plus de 140 000 lettres demandant que la Loi sur l'expansion des exportations soit modifiée de manière à obliger la SEE à respecter les engagements internationaux du Canada en matière de droits de la personne et les accords relatifs aux droits des Autochtones.

Pourtant il n'y a rien dans le projet de loi C-31 qui empêcherait la SEE d'investir dans des projets, je le répète, qui pourrait exacerber les violations des droits de la personne à l'avenir. Il importe donc de modifier le projet de loi de la façon suivante: l'article 10 qui énonce l'objectif de la SEE doit être modifié de manière à ajouter que la SEE répond aux occasions d'affaires internationales tout en respectant les accords internationaux dont le Canada est partie prenante, y compris la Déclaration universelle des droits de l'homme, les conventions des Nations Unies portant sur les droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, les normes fondamentales du travail du BIT et la Déclaration de Rio l'environnement et le développement. On ne peut permettre que le commerce et les investissements se fassent indépendamment de nos engagements à l'égard des normes portant sur les droits de la personne. La seule façon d'assurer que cela se fasse, c'est en précisant dans le mandat énoncé dans le projet de loi C-31.

Je veux aussi recommander de modifier le cadre opérationnel établi dans le projet de loi C-31. L'évaluation environnementale seule est inadéquate, surtout si elle n'inclut pas de critères pour évaluer les répercussions d'un projet donné sur les droits de la personne et pour surseoir à l'appui d'un projet en raison des effets négatifs sur les droits de la personne.

Il faut exiger de la SEE, par l'entremise de modifications au projet de loi C-31, qu'elle entreprenne un processus efficace d'évaluation des droits de la personne lorsqu'elle examine un projet qui risque d'avoir des effets négatifs. Ce processus d'évaluation doit comporter une consultation exhaustive et sérieuse des collectivités touchées, y compris les femmes et les peuples autochtones. Elle doit aussi inclure une consultation exhaustive et sérieuse des organismes nationaux et internationaux non gouvernementaux de défense des droits de la personne.

Une consultation de ce genre viserait à évaluer si un projet de développement proposé risque d'exacerber la violence existante et entraîner des violations des droits de la personne. Pour s'assurer que les investissements de la SEE respectent les obligations du Canada découlant d'ententes internationales en matière des droits de la personne dont il est partie prenante, il faut exiger de la SEE, par l'entremise de la loi, par l'entremise de modifications au projet de loi C-31, qu'elle évalue de façon appropriée les effets d'un projet sur les droits de la personne avant de l'approuver et qu'elle rejette un projet qui entraîne des répercussions néfastes en ce qui a trait aux droits de la personne.

Si une évaluation de ce genre avait été effectuée en Colombie, à savoir consulter les communautés d'Embera Katio et des organismes comme le National Indigenous Organization ainsi que le Colombian Commission of Jurists, qui représentaient les communautés d'Embara Katio dans leur tentative visant à obtenir une injonction d'un tribunal colombien en se fondant sur la façon dont le barrage violait leurs droits, les Canadiens ne se sentiraient pas maintenant responsables de la violence dont sont victimes les communautés d'Embara Katio.

Cela m'amène à mes dernières recommandations. Le projet de loi C-31 doit être modifié afin d'exiger légalement la divulgation de l'information relative au projet en temps utile et régulièrement. C'est une recommandation précise que m'a demandé de présenter ici aujourd'hui l'Organisation catholique canadienne pour le développement et la paix. Elle n'était pas mesure d'envoyer de représentants.

• 1130

Pourquoi est-ce si primordial? Dans le cas du projet du barrage Ralco dans le sud du Chili, un projet approuvé aux termes du nouveau cadre d'évaluation environnementale de la SEE, un groupe de consultants spécialisés a procédé à une étude d'impact dont les résultats ont convaincu la SEE que ses normes seraient respectées. Mais un groupe environnemental travaillant avec des Indiens Pehuenche des communautés locales ont dit à Développement et paix que le rapport initial de ce consultant avait été soumis au gouvernement chilien, qui a alors falsifié des aspects du rapport avant de l'envoyer aux organismes de financement. Cette allégation a été assortie d'un témoignage écrit d'un membre du personnel du groupe de consultants.

Si la SEE tombait sous le coup de la Loi sur l'accès à l'information, comme 140 000 de nos membres et églises membres l'ont demandé au moyen d'amendements au projet de loi C-31, les groupes environnementaux et la communauté locale Pehuenche auraient pu être mis au courant très tôt de l'évaluation des répercussions sur lesquelles s'est fondée la SEE et auraient pu démontrer que l'étude avait été falsifiée. Non seulement la SEE aurait-elle été obligée de revoir sa décision mais cela aurait soulevé des doutes au sujet de la légitimité du barrage à Ralco.

Une politique de divulgation volontaire ne suffit pas. La responsabilité n'existe pas tant que la divulgation n'est pas exigée par la loi.

Ces amendements au projet de loi permettront que les investissements d'une institution publique qui devrait rendre compte au Parlement canadien et au peuple canadien n'ont pas d'effets négatifs sur les populations ou sur l'environnement.

J'aimerais terminer en disant que je suis allée en Colombie l'été dernier filmer les répercussions du barrage Urra et que j'ai rencontré de nombreux Autochtones dont la situation est absolument horrible. Je ne peux oublier cette femme d'Embera Katio qui m'a dit: «Il se peut que cela n'ait pas d'importance pour les Canadiens parce que vos investissements ont des répercussions dans d'autres pays, mais c'est notre peuple qui meurt.»

Je vous exhorte donc à apporter des modifications au projet de loi C-31 pour éviter que cela se reproduise.

Merci.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci, madame Price.

Je crois que certains membres du comité se souviendront de la comparution de Kimy et de ce qu'il nous a dit. Nous regrettons qu'il soit disparu.

Nous allons maintenant poursuivre les questions. Nous avons une demi-heure.

Nous allons commencer par vous, monsieur Duncan.

M. John Duncan: Merci beaucoup.

Il semble de toute évidence avoir un fil conducteur dans votre témoignage. Ce qui me frappe le plus, c'est que les barrages ne semblent pas être de très bons projets si l'on tient compte de leurs répercussions et je dois me demander, si la SEE n'était pas un bailleur de fonds, si ces projets seraient menés à terme?

Un ou plus d'un entre vous peut me dire ce qu'il en pense, s'il vous plaît.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Madame Adams.

Mme Patricia Adams: Merci de cette question. Elle est importante.

Nous surveillons les barrages autour du monde. Nous sommes un des deux groupes dans le monde qui les suit religieusement. Nous avons constaté au cours des dix dernières années que les institutions du secteur public ont lentement mais sûrement disparu des barrages hydroélectriques importants en raison des conflits et du fait qu'ils ne sont pas rentables et qu'ils ne fonctionnent pas bien. Ils avaient espéré que le secteur privé interviendrait, mais il a refusé de le faire du fait qu'ils ne sont tout simplement pas rentables.

Si vous prenez l'exemple du barrage des Trois Gorges, aucun organisme de financement public n'a appuyé ce projet tant que la SEE n'a pas déclaré qu'elle le ferait. C'est alors que deux ou trois autres organismes de crédit à l'exportation ont embarqué parce que le barrage avait «éclaté», en quelque sorte.

Le barrage des Trois Gorges est en construction. Environ 150 000 à 200 000 personnes ont été réinstallées de force ailleurs de force. L'opposition ne manque pas. Les gens retournent chez eux. Plusieurs personnes ont été arrêtées pour avoir essayé de dénoncer le fait que ces paysans ne sont pas compensés.

• 1135

Au cours de la construction, on a constaté que le prix de l'électricité émanant des Trois Gorges serait d'environ 8 cents le kilowatt, comparativement à des centrales génératrices d'électricité de petite taille, moins dommageables pour l'environnement et manifestement beaucoup plus efficientes qui pourraient être mises en service en l'espace de deux ans environ, voire, dans certains cas, de six mois à peine.

Ce qui s'est passé dans le cas des barrages hydroélectriques, c'est que le secteur privé a refusé de s'engager et que les seules institutions qui financent ces projets maintenant sont celles qui n'ont pas à ce soucier de critères économiques, qui sont souvent mues par des intérêts politiques.

Cela nous ramène en fait à la question intéressante que vous avez posée ce matin, à savoir que vaut la SEE? La SEE, c'est nous, essentiellement. Il y a...

M. John Duncan: Excusez-moi, qu'avez vous dit?

Mme Patricia Adams: Les éléments d'actif de la SEE sont les contribuables canadiens.

M. John Duncan: Oh, d'accord.

Mme Patricia Adams: Les contribuables fournissent un milliard de dollars à la capitalisation de la SEE. Son ratio d'endettement n'est pas bon. Elle assure des entreprises qui ont probablement un actif meilleur que le sien. Pourquoi est-elle en mesure d'assurer des sociétés privées? Simplement parce qu'elle a accès aux goussets des consommateurs.

Pour répondre à vos deux questions, la SEE est une institution essentiellement financée par les contribuables. Il serait très difficile de la vendre au secteur privé car on ne peut vendre avec l'engagement des contribuables. Dans le cas des barrages hydroélectriques, il n'y a que les organismes de crédit à l'exportation et dans certains cas, des banques de développement multilatérales qui n'ont pas à se soucier du bien-fondé économique de ces projets et qui les appuieront.

M. John Duncan: Madame Price, auriez-vous l'obligeance de nous dire vous aussi ce que vous pensez de cela?

Mme Kathy Price: La question est de savoir si nous devrions participer à ces projets, et...

M. John Duncan: Vous aviez des préoccupations au sujet des projets proprement dits. Pensez-vous qu'ils auraient pu aller de l'avant en l'absence de mécanismes de type SEE pour les financer?

Mme Émilie Revil: Puis-je répondre?

M. John Duncan: Oui.

Mme Émilie Revil: Il arrive très souvent que la SEE ne soit qu'un acteur de second plan dans un projet et que celui-ci aurait été avalisé même sans la contribution de la SEE. C'est l'argument que la Société invoque toujours pour justifier qu'elle ne peut appliquer ses rigoureuses normes environnementales.

M. John Duncan: Mais vous soutenez que même si nous jouons un rôle de second plan, nous ne devrions pas participer.

Mme Émilie Revil: Exactement.

Dès que la SEE accorde une assurance de risque politique, ou encore un prêt ou des capitaux, dès qu'elle est partie prenante à un projet qui a des répercussions sur l'environnement, le processus d'évaluation environnementale devrait déterminer s'il y a lieu de participer ou non, indépendamment de l'importance du rôle de la SEE sur le plan financier.

Mme Kathy Price: Puis-je ajouter un commentaire?

M. John Duncan: Bien sûr.

Mme Kathy Price: Pour que l'engagement à l'égard des droits de la personne que nous avons pris dans les accords internationaux que nous avons signés se concrétise, nous devons faire une évaluation des répercussions dans ce domaine. Si le bilan est négatif, nous ne devrions pas participer. La même chose vaut pour tous nos autres engagements névralgiques, c'est ce qui doit prévaloir. Peu importe que le barrage se fasse à l'aide d'autres investisseurs, nous ne devrions pas participer.

M. John Duncan: J'ai une autre question. Ai-je le temps?

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Une petite question.

M. John Duncan: Elle s'adresse à Mme Gibb.

Vous avez parlé longuement de la nécessité pour la SEE de respecter les conventions internationales, et vous avez mentionné le modèle australien. L'une des choses qui inquiètent non seulement mon parti, mais aussi celui de Pierre, à la Chambre des communes, c'est que ces conventions internationales ne sont pas soumises à un examen parlementaire. Vous préconisez que ces conventions internationales deviennent exécutoires pour la SEE. Je voudrais savoir si, à votre avis, il serait opportun que les conventions internationales fassent l'objet d'un examen parlementaire, d'une forme de ratification. Nous adhérons à de nombreuses conventions qui sont exécutoires... et vous savez le reste.

• 1140

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Avons-nous outrepassé le champ de compétence de la SEE?

M. John Duncan: Pas vraiment, d'après ce qu'a dit la témoin. Selon sa proposition, ces conventions seraient jointes en annexe à tout projet de la SEE et constitueraient l'aulne à laquelle seraient mesurés son rendement ou ses normes, si j'ai bien compris.

Mme Heather Gibb: Oui, c'est une excellente question. Cela nous amène à une discussion très large, à savoir dans quelle mesure les ministères et les sociétés d'État sont tenus de respecter les obligations contractées par le gouvernement par l'entremise des Nations Unies, de l'OIT ou d'autres organisations. Je serais ravie de me lancer dans une telle discussion.

Dans l'exemple que nous avons donné, la loi qui régit la société australienne, l'Export Finance and Insurance Corporation Act, stipule que dans l'exercice de ses fonctions, la société doit respecter un certain nombre de principes mais qu'elle doit aussi tenir compte des obligations contractées par l'Australie en vertu d'accords internationaux. Je suggère que l'on fasse la même chose dans le cas de l'organe canadien, la Société pour l'expansion des exportations. On a tendance à s'enferrer dans des problèmes de partage des pouvoirs entre le gouvernement fédéral et les provinces. C'est l'un des problèmes de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.

Le but visé est d'exiger que la Société se dote de tous les outils possibles pour favoriser la compréhension et les mécanismes nécessaires pour donner effet aux accords que nous avons conclus en tant que gouvernement. Je suis une personne très pratique. Si je travaillais à la Société pour l'expansion des exportations, où il y a sans doute une seule personne qui s'occupe de la responsabilité sociale de l'entreprise et une seule qui s'occupe de l'évaluation environnementale, il me serait impossible de m'acquitter convenablement de mon travail. Mais si une loi exigeait que je tienne compte de ces ententes internationales, alors l'entreprise devrait—du moins je l'espère—, commencer à développer sa compétence à cet égard et sa capacité de collaborer avec le secteur privé. C'est précisément ce que font les agences de la Banque mondiale à l'heure actuelle.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci.

[Français]

Monsieur Paquette.

M. Pierre Paquette: Merci, madame la présidente.

J'ai une première question pour Mme Gibb. Dans la partie du document que vous nous avez distribué qui touche la divulgation de l'information, vous faites allusion aux pratiques du Groupe de la Banque mondiale, et j'aimerais que vous nous en parliez davantage, mais nulle part vous ne faites allusion à la Loi sur l'accès à l'information. Plusieurs des groupes ici nous suggèrent de soumettre la Société pour l'expansion des exportations à la Loi sur l'accès à l'information, mais vous n'en parlez pas. Est-ce parce que vous considérez que les normes de la Banque mondiale sont plus intéressantes à intégrer qu'une référence explicite à la Loi sur l'accès à l'information?

Mme Heather Gibb: Merci de votre question. Je vais y répondre en anglais.

[Traduction]

Pour répondre brièvement, mes collègues connaissent beaucoup mieux la Loi sur l'accès à l'information. Je savais qu'ils couvriraient fort bien le sujet. Encore une fois, je pense qu'il faut prendre les devants au lieu de se borner à réagir. Nous sommes confrontés à des délais considérables lorsque nous tentons d'obtenir de l'information en présentant une demande aux termes de la Loi sur l'accès à l'information. Au sein du Groupe de la Banque mondiale, on insiste sur la divulgation opportune irrégulière de l'information par l'entremise des sociétés financières internationales et de diverses autres agences de crédit à l'exportation. Interjeter un appel en vertu de la Loi sur l'accès à l'information peut prendre des années dans certains cas.

Le but de la divulgation est de fournir l'information de façon à ce que les personnes touchées—par exemple des aborigènes en Colombie—puissent comprendre ce que l'on se propose de faire dans une région qui les touche. Il est tout simplement futile d'attendre qu'une organisation canadienne loge un appel aux termes de la Loi sur l'accès à l'information. Voilà pourquoi d'autres organisations ont adopté des méthodes de divulgation opportunes et efficaces.

Certaines organisations proposent de relayer l'information par l'Internet. Cela peut très bien marcher dans les pays occidentaux, mais c'est tout à fait inutile dans des régions où des communautés aborigènes ont de bonnes chances d'être analphabètes et de ne pas avoir à des ordinateurs. Encore une fois, c'est aux instigateurs du projet de faire en sorte de divulguer l'information d'une façon qui la rende accessible aux collectivités concernées afin qu'elles puissent prendre connaissance de ce qui se prépare et exprimer leur avis. L'intention est constructive. En effet, un projet peut être amélioré à la suite de consultations avec des habitants qui connaissent bien la région, mais on souhaite aussi empêcher la répétition des scénarios que mes collègues vous ont décrits ce matin.

• 1145

Mme Patricia Adams: Puis-je répondre?

C'est une très bonne suggestion que de rendre accessible le plus d'information possible avant qu'un projet soit approuvé. Mais la question cruciale est de savoir qui décide quelle information sera divulguée. Le problème à la SEE, c'est que c'est elle qui décide ce qui sera divulgué et elle ne divulguera rien sans l'assentiment de ses entreprises clientes. Nous n'aurions jamais reçu cette information sur l'Inde sans la Loi sur l'accès à l'information. Cela n'aurait jamais été divulgué en temps opportun. Il faut que le grand public puisse définir l'information qu'il souhaite obtenir si l'on veut assurer une véritable responsabilisation de ces institutions. Autrement, on peut cacher des erreurs. En l'occurrence, il s'agissait d'une très grosse erreur.

[Français]

M. Pierre Paquette: J'ai une autre question pour Mme Revil, si j'ai encore du temps. Vous suggérez, et je suis tout à fait d'accord, qu'on ajoute à l'évaluation environnementale proprement dite, l'évaluation des effets sociaux et relatif aux droits de la personne dans l'évaluation globale. Pour l'évaluation environnementale, vous proposez un règlement sur le processus d'évaluation, mais je n'ai pas retrouvé de proposition concernant un processus d'évaluation des impacts sociaux et sur les droits de la personne qu'on imposerait à la Société pour l'expansion des exportations.

Ce matin, les représentants de la société nous ont dit qu'il était plus difficile de faire l'évaluation sociale et des droits de la personne, parce qu'il n'y avait pas de cadre aussi bien défini que pour ce qui est des effets environnementaux. Ne serait-il pas pertinent d'avoir un règlement sur le processus d'évaluation des effets sociaux et des effets touchant les droits de la personne?

Cela dit, j'avais oublié de dire au départ que j'ai trouvé très riche l'ensemble de vos contributions. Vous pouvez être sûrs que le Bloc québécois va s'inspirer très largement de vos recommandations dans ses amendements.

Mme Émilie Revil: En effet, je n'ai pas répété cette recommandation sur les aspects sociaux et environnementaux.

Par contre, une de nos recommandations était de modifier la section qui s'appelle «Effets environnementaux» de manière à ce qu'elle devienne «Effets environnementaux et sociaux». Dans son cadre environnemental, la SEE mentionne quelques fois les aspects sociaux, mais c'est très peu développé. Cela a surtout trait à la consultation des populations locales dans le cadre environnemental qui est en train d'être développé. Comme il ne sera finalisé que ce printemps, il est difficile de savoir ce qui sera là-dedans. Il serait en effet intéressant de développer davantage les aspects sociaux, parce qu'à part la consultation, il y a peu d'aspects sociaux qui sont pris en considération.

En ce qui concerne les droits de la personne, la SEE dit qu'elle considère les droits de la personne dans ses études et ses évaluations avant que les projets ne soient acceptés. On n'a jamais vu un processus clair de droits de la personne. Ils disent qu'ils considèrent les obligations internationales du Canada en matière de droits de la personne, mais ils n'ont pas de standards précis et bien élaborés pour voir si, oui ou non, ils respectent ces conventions et les droits de la personne. S'ils en ont, on ne les a jamais vus.

Très souvent, lorsque la SEE parle des droits de la personne, c'est surtout dans la perspective de la façon dont la situation des droits de la personne dans ce pays peut affecter les projets. Nous voulons qu'elle en parle dans l'autre sens: comment ce projet peut affecter la situation des droits de la personne dans le pays.

En effet, les droits de la personne devraient être clairement indiqués dans ce projet de loi. C'est inacceptable qu'ils ne soient même pas mentionnés.

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Merci. Je vais poursuivre. Peut-être aurez-vous l'occasion de revenir sur le sujet, mais le temps file et j'ai deux intervenants de ce côté-ci. Lorsqu'une occasion se présentera, vous pourrez peut-être fournir votre réponse.

• 1150

Nous allons passer à Mme Marleau.

Mme Diane Marleau: J'ai lu certains de vos mémoires et le langage que vous utilisez parfois ne me plaît guère.

Le défi tient en partie au fait qu'un grand nombre de ces projets se déroulent sur des années. Il peut arriver qu'ils soient en cours depuis 15 ou 20 ans. Souvent, la SEE intervient à la fin du projet plutôt qu'au commencement.

Je ne sais pas comment vous voyez cela dans l'optique de certaines de vos déclarations. Par exemple, je lis cette déclaration de Probe. À la page 3, vous donnez l'exemple du barrage des Trois Gorges en Chine. Vous dites: «Par exemple, dans le cas du barrage des Trois Gorges financé par l'ACDI et la SEE en Chine»... Si ma mémoire est bonne, l'ACDI n'a pas financé le barrage proprement dit. L'ACDI a participé à une étude environnementale il y a une quinzaine d'années et sa contribution s'est arrêtée là.

Je ne peux pas parler de la SEE, mais je sais que dans le cas de ce barrage en particulier, il s'agit d'un projet avalisé par le gouvernement de la Chine et qui est toujours en cours. Si la CEE y a participé, c'est plutôt tard que tôt. Son rôle s'est limité à la surveillance et à l'aspect technologique. Pensez-vous que la SEE aurait dû faire une évaluation environnementale avant le début des travaux et refuser de participer après coup lorsqu'on lui a demandé de veiller au bon fonctionnement d'une partie de l'équipement?

Il n'est pas facile pour moi de débrouiller ce dossier car tout n'est pas noir ou blanc. Ce n'est tout simplement pas le cas. De tels projets se déroulent pendant de nombreuses années. Souvent, on demandera à la SEE d'assurer l'installation d'une turbine canadienne dans l'un de ces projets. Le projet en question serait allé de l'avant, avec ou sans l'apport de la SEE et de cette turbine. N'est-il pas préférable d'intégrer à ce stade une technologie éprouvée?

Je vois très mal comment vos déclarations simplistes s'appliquent à de telles situations car tout n'est pas noir et blanc.

Je veux soulever un autre point. Le vérificateur général est chargé d'examiner le travail de la Société pour l'expansion des exportations tous les cinq ans. Je sais que pour bien des gens, cela signifie après le fait. Mais je peux vous dire qu'il n'y a pas une société de la Couronne dans notre pays, pas un ministère du gouvernement qui ne soit très sensible au fait qu'il ou elle fera l'objet d'un examen de la part du vérificateur général et que son rapport sera rendu public. Par conséquent, leurs dirigeants souhaitent ardemment passer cet examen haut la main.

En un sens, c'est sans doute un exercice plus rigoureux que ceux auxquels doivent se plier d'autres sociétés de développement à l'étranger. Je ne connais pas d'autres organismes qui soient soumis à ce genre d'examen public de la part d'un vérificateur général.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je pense que cette question est dirigée à Probe.

Mme Diane Marleau: Peu importe.

Mme Patricia Adams: Oui, c'est juste. Merci.

Mme Diane Marleau: L'une de mes questions s'adressait effectivement à Probe.

Mme Patricia Adams: Je peux aussi répondre à la seconde, mais d'autres voudront peut-être intervenir.

Dans le cas du barrage des Trois Gorges, l'ACDI a financé une étude de faisabilité du barrage.

Mme Diane Marleau: Oui, il y a très longtemps.

Mme Patricia Adams: Nous avons aussi obtenu cette information grâce à la Loi sur l'accès à l'information.

Nous avons commandé une étude indépendante à neuf experts internationaux. Après examen, ils nous ont dit que les documents comportaient des carences tellement graves que nous avons logé des plaintes contre les sociétés d'ingénierie qui avaient fait le travail.

Permettez-moi de vous donner quelques exemples. L'évaluation environnementale supposément menée par les ingénieurs n'a pas vraiment eu lieu. Ces derniers ont accepté une évaluation chinoise boiteuse qui a été rejetée. Ils n'ont jamais vu les données relatives à la sédimentation. Le Yangtze est le quatrième fleuve le plus limoneux du monde. Un barrage en aval des Trois Gorges a déjà perdu 40 p. 100 de sa capacité limoneuse, et il n'a que huit ans d'âge. Par conséquent, cette évaluation a été sérieusement bâclée.

• 1155

Mme Diane Marleau: Mais il y a 15 ans de cela.

Mme Patricia Adams: Cette évaluation avait pour but d'aider les autorités chinoises à recueillir des fonds auprès de la communauté internationale pour financer le projet. Mais à ce moment-là, il y avait déjà énormément de publicité concernant les problèmes multiples entourant le barrage qui, soit dit en passant, est un ouvrage qui remonte à 70 ans, que le gouvernement chinois a alors essayé d'aller chercher des fonds à l'étranger.

Personne ne voulait y toucher. La Banque export-import savait qu'elle ferait sans doute l'objet d'une poursuite aux termes de la Loi sur les espèces en voie de disparition si elle décidait d'appuyer les Trois Gorges. Elle a donc rejeté le projet. La SEE a lancé le mouvement. La SEE a donné le coup d'envoi. La SEE a donné son appui moral à ce barrage. Elle a financé un système informatique afin d'aider la gestion de la construction. Elle a aussi financé des turbines que fournit la General Electrique du Canada.

Je pense que les Trois Gorges est un cas où tout est noir et blanc. C'est un projet boiteux et l'histoire le prouvera. Il n'est pas rentable économiquement parlant. Il donne lieu à des violations flagrantes des droits de la personne. Les gens sont arrêtés sans être inculpés de quoi que ce soit, mis en détention sans procès, etc. Certains sont emprisonnés depuis le mois de mars de cette année. Qu'a fait le gouvernement du Canada pour les aider? Qu'a fait la SEE pour les aider? Rien.

Je reviens à votre second point au sujet de l'examen quinquennal du vérificateur général. J'ignore si vous faisiez référence au cadre d'examen environnemental ou à l'examen spécial que fait le vérificateur général tous les cinq ans. Pour votre information, le document produit une fois tous les cinq ans est un document confidentiel. Le vérificateur général n'est pas autorisé à le divulguer.

Nous avons tenté de l'obtenir grâce à la Loi sur l'accès à l'information, par l'intermédiaire du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Les fonctionnaires nous ont dit ne pas le trouver dans leurs dossiers, ce qui est plutôt inquiétant. Nous nous sommes adressés à la SEE. Nous leur avons dit: «Pouvez-vous nous communiquer les résultats de cet examen? Il est censé porter sur l'efficience et l'efficacité économique des activités de la SEE.» On nous a envoyé une lettre disant: «Il s'agit là d'un document confidentiel qui ne sera pas divulgué au public.»

Voilà le genre de surveillance auquel est soumise la SEE. Ses dirigeants ne craignent absolument pas que ce document soit rendu public car cela n'arrivera pas. Voilà pourquoi cette institution doit être assujettie à la Loi sur l'accès à l'information.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Mme Carroll, vous avez la dernière question.

Mme Aileen Carroll: Je poursuis dans la même veine. Mme Adams, avez-vous dit ne pas être en mesure d'obtenir un exemplaire du document du vérificateur général intitulé Rapport sur le cadre d'examen environnemental de la Société pour l'expansion des exportations, mai 2001?

Mme Patricia Adams: Je faisais référence à un autre...

Mme Aileen Carroll: [Note de la rédaction: Difficultés techniques]... car c'est son rôle.

Mme Patricia Adams: Permettez-moi de vous expliquer les rapports entre le vérificateur général et la SEE. J'ai d'ailleurs à ce sujet une correspondance que je communiquerai volontiers au comité. Le vérificateur général doit accepter la politique et les exigences de divulgation des entreprises que finance la SEE. Et c'est particulièrement vrai dans le cas des sociétés de la Couronne. Selon la politique de la SEE, aucune information ne sera divulguée sans l'assentiment de ses entreprises clientes.

J'ai demandé au vérificateur général de l'information pendant 15 ans au sujet de la SEE et des 26 projets qui ont fait l'objet d'un examen. À l'origine, rien n'a été divulgué, mais on a fini par rendre les examens publics, sauf trois car trois des entreprises n'ont pas donné leur accord pour que soit rendue publique la teneur de l'examen effectué dans le cadre de l'examen environnemental qui les concernait.

Dans le cas de l'examen spécial de la SEE, qui est effectué tous les cinq ans par le vérificateur général, ce dernier a signé avec la SEE une entente lui interdisant d'en divulguer les détails. Il n'est donc pas disponible au public. Nous avons écrit des lettres à la SEE, nous avons essayé la Loi sur l'accès à l'information et nous n'avons pas pu l'obtenir.

Mme Aileen Carroll: Merci de votre réponse.

J'ai lu avec plaisir dans la lettre de M. Pettigrew concernant le cadre d'examen environnemental de la SEE—non le plus vaste—qu'il avait demandé qu'une vérification ait lieu tous les deux ans au lieu de trois. C'est là la preuve que toutes nos discussions—qui sont bien sûr axées sur ce qui reste à faire plutôt que sur ce qui est déjà accompli—ont donné lieu à des changements considérables à bien des égards. C'est le fruit du travail du comité et de son rapport. Et notre travail dans le passé a pris en compte vos témoignages.

• 1200

Ma question fait suite à celle de Mme Marleau. Madame Price, vous avez dit ne pas trop savoir où loge la SEE pour ce qui est de ses pratiques relatives aux obligations internationales du Canada. Cela a été abordé plus tôt par Mme Morin. Étiez-vous là tout à l'heure pour...? Dans ce cas, vous auriez intérêt à lire les bleus car il y a eu une très bonne discussion à ce sujet.

Je tiens à faire état d'une chose que j'ai particulièrement remarquée dans le document qu'elle a fait circuler, et je suis sûr qu'il y a d'autres exemplaires disponibles. La démarche que nous avons choisie s'inscrit dans une pratique émergente dans la communauté internationale. Plus précisément, en ce qui a trait au volet environnemental, elle s'inscrit tout à fait dans la foulée de l'OCDE. L'OCDE fait évidemment de l'excellent travail. Je rentre tout juste d'une séance à l'OCDE à laquelle j'ai assisté il y a une semaine ou deux. J'ai d'ailleurs rencontré M. Johnston à cette occasion. Pour moi qui siège au comité de l'environnement, ce fut un plaisir de constater l'ampleur des progrès réalisés là-bas ainsi que de noter leurs priorités et les délais qu'ils se sont fixés pour réaliser leurs objectifs. Je dois donc dire en toute franchise que j'ai été heureux de constater les mêmes points névralgiques dans sa réponse ce matin comparativement à celle de l'OCDE.

Encore une fois, il nous incombe à tous de continuer d'exercer des pressions, mais je pense qu'à l'occasion, nous devrions marquer un temps d'arrêt et regarder tout le progrès qui a été accompli.

Enfin, pour ce qui est de savoir ce qu'il convient d'intégrer à la loi en vue d'obtenir une réponse du gouvernement, je pense qu'il ne faut pas être trop légaliste. En effet, on a souvent accompli des progrès grâce à des directives gouvernementales, aux priorités que nous avons imposées et à l'examen du vérificateur général. Ce sont là autant de moyens qui obligent les sociétés comme la SEE à répondre. Je ne pense pas que ce soit toujours la meilleure voie, en tout cas pas la seule, que d'inscrire ces obligations dans une mesure législative. Je pense qu'on peut accomplir beaucoup grâce aux pratiques courantes.

Je veux enfin répliquer à votre commentaire, selon lequel si vous étiez la seule employée, vous vous sentiriez plus appuyée s'il y avait à cet égard une disposition dans la loi. D'après moi, je pense que des directives ont été données et que votre travail a pris de l'importance—pour reprendre votre exemple—sans que chaque mot soit écrit dans la loi.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je vais donner à Mme Price la possibilité de répondre en premier, tout simplement parce que je vous ai offert cette possibilité tout à l'heure.

Mme Kathy Price: Je tiens simplement à dire que la responsabilisation découle de la législation. Les exigences en matière de respect des droits de la personne doivent figurer dans la loi pour qu'il y ait reddition de comptes. Les déclarations de bonne volonté ou d'adhésion volontaire aux principes ne suffisent pas. Il faut que cela soit inscrit dans la loi. Il faut reconnaître que les répercussions sur les droits de la personne sont tout aussi importantes que les répercussions sur l'environnement.

Nous savons qu'il y a eu d'horribles violations des droits de la personne et que des situations très sérieuses se sont aggravées. Le cas du barrage Urra et la situation dans le nord de la Colombie ne sont qu'un exemple. Il faut que l'obligation de faire une évaluation des répercussions d'un projet sur les droits de la personne soit énoncée dans le mandat et dans les lignes directrices opérationnelles. Cette évaluation doit être fondée sur des consultations avec les collectivités locales et les organismes de défense des droits de la personne non gouvernementaux oeuvrant dans la région.

Si cela avait été fait dans le cas du barrage Urra en Colombie, nous ne serions pas aux prises avec la situation actuelle.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Monsieur O'Brien, très brièvement.

M. Pat O'Brien: Je serai très bref. Merci, madame la présidente. Je ne voulais pas prendre la parole. J'attendais mes collègues.

Je signale simplement que le seul exemple qu'on a cité aujourd'hui était celui de la loi australienne et à ce propos, on a utilisé l'expression «prendre en compte». Je ne suis pas avocat, mais je suis en politique depuis un bon bout de temps et je ne pense qu'une déclaration stipulant qu'une instance doive prendre en compte quelque chose puisse être assimilée à l'obligation de le faire. Je voulais apporter cette précision.

• 1205

Je demanderais à nos témoins de déposer auprès du comité tout exemple précis de pays dotés de lois exigeant d'organismes correspondant à la Société pour l'expansion des exportations du Canada qu'elles se conforment à diverses normes.

Merci, madame la présidente.

La vice-présidente (Mme Jean Augustine): Je tiens à préciser aux témoins que toute la documentation qu'ils nous enverront sera examinée par le comité à l'étape de l'étude article par article.

Je vous suis très reconnaissante d'avoir accepté de comparaître ce matin et je vous remercie de votre contribution. Je vous invite également à poursuivre l'excellent travail que vous faites au sein de vos diverses organisations.

Merci.

La séance est levée.

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