Passer au contenu
Début du contenu

AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain







CANADA

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 019 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 12 mars 2008

[Enregistrement électronique]

  (1535)  

[Traduction]

    Bienvenue à la 19e réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Nous poursuivons aujourd'hui nos audiences sur le projet de loi C-30, Loi constituant le Tribunal des revendications particulières et modifiant certaines lois en conséquence.
    Nous avons entendu les témoignages d'organismes-cadres et de groupes des provinces et des régions partout dans le pays. Nous en sommes à la dernière réunion de cette tournée. Nous entendrons aujourd'hui les témoins de l'Alberta et des territoires.
    Je voudrais soulever, à l'intention des membres du comité, deux ou trois points d'ordre administratif. Nous entendrons l'appel de la sonnerie à 17 h 15 aujourd'hui, donc notre réunion sera 15 minutes plus courte que d'habitude. Je suggère que nous commençions aussitôt. Je pourrais demander ou je demanderai au premier groupe de témoins d'arrêter à 16 h 25, nous aurons une courte pause avant de reprendre nos travaux avec le deuxième groupe avant 16 h 30 pour lever la séance à 17 h 15.
    Monsieur Lemay, voulez-vous dire quelque chose?

[Français]

    Monsieur le président, j'aurai des questions à poser aux témoins. Cependant, comme on doit rencontrer les représentants du Yukon, au lieu d'interrompre la séance, le chef et les personnes qui l'accompagnent pourraient se joindre au panel. Cela nous éviterait d'interrompre la séance, et nous pourrions siéger jusqu'à 17 h 15. On pourrait leur trouver de la place.
    Cela prend toujours de cinq à dix minutes avant de reprendre la séance. On pourrait simplement demander aux premiers témoins de faire de la place aux collègues du Yukon quand ils arriveront.

[Traduction]

    Voilà qui est intéressant. Je ne pense pas que les représentants du Yukon soient encore arrivés, mais c'est peut-être quelque chose que nous devrions considérer pour l'avenir, surtout lorsque nous recevons des petites délégations, comme c'est le cas aujourd'hui.
    Mais je ne vois pas encore la délégation du Yukon, et...

[Français]

    Leur comparution est prévue pour 16 h 30. Ils devraient donc arriver vers 16 h 15. Afin d'éviter d'interrompre la séance, on pourrait leur demander de se joindre à nous immédiatement. C'est ce que je vous soumets respectueusement.

[Traduction]

    Eh bien, commençons. Je pense que vous avez soulevé un bon point général. Une autre façon de procéder, très brièvement, serait que lorsque nous prenons notre pause, les membres du comité restent assis jusqu'à ce que le deuxième groupe de témoins arrive. Habituellement, ce qui nous retarde, c'est lorsque les membres du comité vont consommer des rafraîchissements.
    Quoi qu'il en soit, j'aimerais accueillir, dans l'ordre dans lequel ils sont énumérés dans la liste, les quatre représentants de l'Alberta : Jim Big Plume, directeur; Ron Lameman, chef de la direction de la Confédération du traité no 6; Ron Maurice, conseiller juridique, nation Tsuu T'ina et le grand chef Stanley Lagrelle.
    Bienvenue. Comme je l'ai dit avant de lever la séance, une délégation dispose normalement de 10 minutes pour faire l'exposé, les membres du comité poseront ensuite des questions. Si plusieurs d'entre vous vont prendre la parole, vous pouvez dépasser légèrement les 10 minutes; puis la série de questions commencera.
    Qui veut commencer?
    Je m'appelle Jim Big Plume. Je suis le directeur de la recherche pour les revendications territoriales de la nation Tsuu T'ina. En passant, quelques points administratifs nous concernant, la nation Tsuu T'ina se trouve carrément à deux pas de la ville de Calgary.
    Je suppose que certains membres du comité ont eu le temps de lire l'exposé qui a été adressé à vos bureaux; cela nous permettra de faire cet exposé le plus rapidement possible. Je sais que votre temps est limité et nous ferons notre possible pour respecter les délais.
    Je voudrais commencer par une citation de Lord Denning sur les droits —ancestraux ou issus de traités — des premières nations dans R. v. Secretary of State for Foreign and Commonwealth Affairs:
... Les peuples indiens pourront dire que leurs droits et libertés leur ont été garantis par la Couronne... Aucun Parlement ne devrait affaiblir ces garanties. Elles doivent être respectées par la Couronne du chef du Canada « tant que le soleil se lèvera et que la rivière coulera ». Cette promesse ne doit jamais être rompue.
    Les chefs des nations et des tribus visées par les Traités nos 6, 7 et 8 sont reconnaissants de la possibilité d'exprimer leurs points de vue sur le projet de loi du Canada d'établir un Tribunal des revendications particulières. L'objet prévu de la nouvelle loi consiste à accélérer la résolution équitable et juste des revendications non réglées des premières nations contre l'État.
    Lorsque les premières nations ont conclu les Traités nos 6, 7 et 8 avec l'État à la fin du XIXe siècle, ces discussions se sont tenues avec chacune des nations individuellement et la relation issue du traité était fondée sur la confiance et le respect mutuel. Toutefois, l'encre n'était pas encore sèche sur les traités quand l'État a commencé à trahir notre confiance en violant les traités et en nous refusant nos terres et nos ressources. Cette trahison, cet abus de confiance, est encore bien présent à l'esprit de nos peuples aujourd'hui et il nous est difficile d'aller de l'avant tant que les griefs du passé n'auront pas été traités et que des réparations n'auront pas été faites dans l'intérêt de la justice.
    Ce projet de loi est important pour les premières nations parce qu'il donne une occasion au gouvernement de créer un processus de règlement équitable, juste et accéléré de nos revendications. Bon nombre des premières nations, sinon toutes, qui sont signataires des Traités nos 6, 7 et 8, peuvent attester de l'énorme frustration causée par le processus actuel relatif aux revendications particulières. Depuis l'époque à laquelle les traités ont été signés, de nombreuses premières nations ont subi constamment des pressions et des mesures coercitives pour céder ou vendre leurs terres et territoires, de sorte que des personnes non autochtones puissent s'y installer et les exploiter.
    Par conséquent, la Couronne a violé les termes du traité et a dérogé à ses obligations à titre de fiduciaire de protéger les terres, les territoires et les ressources des premières nations. Par conséquent, l'honneur de l'État n'a pas été sauvegardé relativement à la mise en oeuvre des traités. C'est là un exemple du type de griefs historiques et du type de revendications historiques qui ont été défendues par les premières nations en vertu de la politique actuelle sur les revendications particulières.
    Les premières nations sont frustrées par cette politique parce que seulement un petit nombre de revendications ont été traitées relativement au non-respect par le Canada de ses obligations en vertu du traité. En outre, cela a nui à la gestion des fonds, terres, ressources et autres biens actifs des premières nations. Après qu'une première nation soumet une revendication au processus de revendications particulières, elle doit souvent attendre plusieurs années avant que la réclamation ne soit étudiée et qu'un examen juridique ne soit effectué de sorte qu'elle puisse être acceptée en vue des négociations, malgré les présentations globales et exhaustives de la première nation. Par conséquent, bon nombre de ces revendications ne sont pas résolues et sont enlisées dans le processus actuel. C'est là un exemple concret des problèmes inhérents à la politique et au processus de revendications particulières.

  (1540)  

    Le processus actuel est tout à fait inéquitable. Il est inacceptable que des années s'écoulent avant que les revendications ne soient résolues. Durant ces années, les premières nations peuvent faire peu ou sont complètement impuissantes pour accélérer le processus. Premièrement, les premières nations doivent présenter tous les atouts qu'elles ont en main et divulguer l'ensemble de la cause pour convaincre le ministère de la Justice que leur revendication est justifiée. Lorsque la revendication est enfin examinée par un avocat du ministère de la Justice, cette personne est en conflit d'intérêts inhérent parce qu'elle est à la fois juge, jury et défendeur quant à la validité des revendications contre l'État. Il n'est pas surprenant que lorsqu'une revendication est rejetée, une première nation contestera l'avis juridique du ministère de la Justice, parce qu'elle est basée sur le point de vue étroit et partial d'une seule partie.
    En fin de compte, les premières nations sont laissées dans la position non enviable de devoir attendre indéfiniment pour déterminer si l'État acceptera leurs revendications aux fins de négociation ou si elles devront avoir recours aux tribunaux. L'attente d'une réponse aux revendications des premières nations peut durer de nombreuses années et entre-temps, nous continuons de nous perdre nos aînés tous les jours. Il est tragique que bon nombre de nos aînés ne verront jamais le jour où notre cause sera jugée historiquement bonne et que justice sera faite pour les manquements par l'État à ses obligations envers nos ancêtres. Ce sentiment véritable de grief et d'injustice se conjugue au fait que nous avons perdus des preuves importantes et des aspects de notre histoire et de nos traditions transmises oralement et relatant comment les premières nations ont perdu leurs terres.
    Bien que le nombre des revendications continue d'augmenter, l'État n'a pas alloué les ressources financières et humaines pour les traiter. Le gouvernement Harper et l'ancien ministre des affaires indiennes, Jim Prentice, n'ont pas cherché à poursuivre le processus actuel qui ne fonctionne pas, ce qui est tout à leur honneur. Le gouvernement a plutôt entendu les préoccupations exprimées par les nombreuses premières nations du Canada et a accepté d'effectuer un nouvel examen du processus de traitement des revendications et de retourner à la table des négociations avec les représentants de l'Assemblée des Premières nations pour traiter quelques-unes des principales lacunes du projet de loi C-6 qui a été adopté mais non édicté.
    Soit dit en passant, la nation Tsuu T'ina compte parmi les tribus qui ont fait part au comité sénatorial de nos préoccupations concernant le projet de loi C-6.
    C'est dans ce contexte que le premier ministre Harper et le gouvernement conservateur ont présenté cette nouvelle loi pour établir un Tribunal des revendications particulières qui est censé amélioré le processus pour accélérer la résolution de nos revendications en toute équité et justice.
    Par cette introduction, les chefs des nations visées par les Traités nos 6, 7 et 8 présentent brièvement les commentaires et les points de préoccupation suivants, de même que les recommandations proposées relativement à la modification du projet de loi C-30. Le sommaire n'est pas exhaustif, mais il présente les points de préoccupation les plus importants concernant les secteurs de l'Alberta respectivement visés par les traités.
    Bien que nous ayons d'importantes réserves quant à des aspects particuliers de la loi et que nous voulions qu'il soit répondu à ces préoccupations, nous reconnaissons que le projet de loi C-30 représente une amélioration substantielle par rapport au processus actuel et aux démarches de modifications passées, comme le projet de loi C-6. Par conséquent, dans l'ensemble, nous appuyons le projet de loi C-30.
    Dans nos premières discussions avec les chefs des Traités nos 6, 7 et 8, la consultation — je devrais plutôt dire la « consultation inappropriée » — était la préoccupation la plus importante. Nous comprenons qu'à certains moments de nos vies, nous n'avons pas le temps de présenter nos préoccupations. Mais les tribus des Traités nos 6, 7 et 8 se préoccupent surtout de la présentation improvisée de cette loi et du fait que le Canada n'a pas donné suffisamment de possibilités de tenir des consultations avec les premières nations pour connaître leurs points de vue et répondre aux préoccupations précises qu'elles pourraient avoir relativement à la loi proposée avant qu'elle ne soit promulguée.
    Le groupe qui est devant vous aujourd'hui a fait état de cette préoccupation en décembre 2007. Bien que des informations aient été échangées depuis l'été 2007, le chef n'en a pas reçu beaucoup. En notre qualité de conseillers et d'assistants juridiques, nous devons fournir à notre chef et à nos conseils un examen plus global de ce qui est traité ou étudié au Parlement.
    L'État se doit, légalement et moralement, de tenir une consultation utile et appropriée. Ces obligations ne découlent pas seulement du droit national, mais également des instruments normatifs internationaux; le Canada en est signataire de quelques-uns et il a joué un rôle actif pour en rédiger quelques autres.

  (1545)  

    Monsieur le président, je laisse maintenant mon bon ami, le conseiller juridique Ron Maurice prendre le relais et terminer l'exposé.
    Monsieur Maurice, nous sommes presque arrivés à 10 minutes, mais je vous en prie, prenez la parole.
    Jim m'a appelé son « ami », on a l'impression d'être au tribunal.
    Je voudrais commencer par dire que j'ai étudié des processus, et celui-ci en particulier, pendant environ 17 ans. Avant d'ouvrir un cabinet privé à Calgary, j'ai travaillé à la Commission sur les Indiens de l'Ontario en tant que facilitateur dans les négociations portant sur les revendications territoriales entre les gouvernements du Canada, la province et les premières nations. Ensuite, j'ai été avocat-conseil principal à la Commission des revendications des Indiens dans quelque 66 enquêtes publiques. J'ai vu ce genre de revendications à la fois sous l'aspect de fond et celui de la procédure et j'ai eu la chance de voir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
    Ce que j'aimerais souligner, c'est qu'en dépit des critiques proférées à l'égard du projet de loi, je pense que dans l'ensemble c'est un bon projet de loi qui aboutira à des résultats très positifs. Il devrait accélérer la résolution équitable et juste des revendications territoriales qui attendent encore d'être réglées. Il peut bien sûr être amélioré et nous encourageons le gouvernement à tenir compte des recommandations faites à cet effet dans ce document.
    Je voulais parler de quelques points essentiels.
    Il semble qu'il y ait vraiment urgence à ce que cette loi soit adoptée. Depuis les années 1960, plusieurs aspects du projet de loi ont été délaissés en raison de changements de gouvernement, etc. J'espère que cela ne se reproduira pas; nous insistons sur l'importance d'aller de l'avant rapidement. Je répète que le projet de loi n'est pas parfait, mais il offre une bonne assise pour régler ces revendications.
    Le premier aspect positif essentiel est le principe fondamental de la mise sur pied d'un tribunal indépendant ayant des pouvoirs de décision exécutoires pour régler les questions et les différends sur la responsabilité de la Couronne ainsi que sur les questions d'indemnisation. Je pense que c'est extrêmement important parce qu'il fournira aux premières nations l'accès à la justice lorsque les négociations ne se déroulent pas très bien. Je crois que cela arrange bien les deux parties, car il apporte une certaine rigueur au processus. Il donne, aux deux parties, l'occasion de mieux évaluer les risques et la capacité de s'en servir pour aboutir à un accord négocié de bonne foi. Je pense que c'est important. Où il y a de vrais risques, il y a aussi un processus de prises de décisions éclairé des deux côtés de la table.
    Le deuxième autre aspect essentiel est la possibilité de verser jusqu'à 150 millions de dollars par revendication, cela permettra le règlement de la grande majorité des revendications particulières. Si cela se fait parallèlement à un accord politique distinct montrant que le gouvernement veut sérieusement régler les plus importantes revendications, je pense alors que les éléments d'un bon processus sont réunis.
    Bien sûr, il y a aussi le délai de réponse aux revendications et la possibilité d'examiner la façon dont le processus fonctionne et de l'améliorer au fur et à mesure.
    Au sujet des améliorations, je souligne — très brièvement pour vous permettre de poser des questions — que le projet de loi prévoit que les revendications soient traitées selon leurs mérites. Je pense qu'il est extrêmement important que la loi reconnaisse explicitement que les statuts de prescription et les moyens de défense technique ne s'appliquent pas aux revendications relevant de la compétence du tribunal.Je pense que ce principe est excellent. Il permet le traitement des revendications selon leurs mérites, en se fondant sur les faits et la loi et non pas en se cachant derrière des moyens de défense technique.
    Je propose au comité de considérer un amendement prévoyant que ce principe s'applique aussi aux revendications qui doivent être réglées devant les tribunaux. Cela ouvrira d'autres possibilités de règlement de ces revendications, encore une fois selon leurs mérites, et en particulier celles qui ne relèvent pas de la compétence du Tribunal des revendications particulières. Par exemple, je pense que si les revendications dépassant 150 millions de dollars pouvaient être réglées devant des tribunaux selon leurs mérites et sans délai de prescription, ce serait un pas dans la bonne direction.

  (1550)  

    À propos du plafond de 150 millions de dollars, nous proposons d'envisager un amendement qui permettrait aux revendications dépassant ce plafond d'être réglées soit par un arbitrage exécutoire soit même par la Cour fédérale pour ce qui est des questions portant exclusivement sur l'indemnisation. Un tel amendement ouvrira une autre possibilité pour régler ces questions.
    Finalement, le processus des nominations. En vertu du projet de loi actuel, le gouverneur en conseil aurait pratiquement carte blanche en ce qui concerne la nomination des arbitres du tribunal. Nous proposons, afin que les premières nations perçoivent le nouveau tribunal comme légitime, équitable et impartial, de faire quelque chose au niveau du contrôle qui semble être exercé uniquement par une partie au plan de la nomination des arbitres du tribunal. Peut-être qu'une sélection préliminaire avant les nominations faites par le gouverneur en conseil aiderait beaucoup à répondre à ces préoccupations et inquiétudes d'un possible parti pris de ceux qui devront assumer la lourde responsabilité d'arbitrer ces revendications.

  (1555)  

    Merci beaucoup. Votre déclaration préliminaire est terminée.
    Mesdames et messieurs du comité, nous passons au premier tour de sept minutes par parti. Ceux qui veulent partager leur temps peuvent le faire.
    Pour le Parti libéral, M. Russel est le premier.
    Merci, monsieur le président.
    Bon après-midi à chacun d'entre vous.
    Monsieur Maurice, c'est un plaisir de vous revoir. Nous nous sommes rencontrés lors de plusieurs forums.
    Je n'ai pas eu l'occasion de lire en détail votre exposé, mais j'ai entendu votre déclaration. Certains points m'ont assez intrigué, en voici quelques-uns.
    D'abord, je vais dire ce que je dis à la plupart des témoins. La plupart des exposés et des témoins disent qu'ils n'ont pas été consultés. Nous en avons parlé au gouvernement. Dans nos discussions avec le ministère, on nous a dit que la loi ne les obligeait pas à tenir des consultations sur ce projet de loi particulier, principalement parce que vous pouvez choisir volontairement de participer ou non au processus. Deuxièmement, parce qu'il offre ce choix, le projet de loi ne touche pas et ne peut pas toucher les droits des personnes ou leurs intérêts. Quelqu'un aura peut-être quelque chose à dire à ce sujet?
    Je passe à là page 6 où il est fait mention de l'article 15 et de la saisie du tribunal d'une revendication, de quelle façon la première nation doit saisir le tribunal d'une revendication? Comment sera-t-elle acceptée, et sans demander aucune indemnité, etc. Vous ne pouvez demander aucune autre indemnité si elle n'est pas strictement pécuniaire et elle ne doit pas excéder 150 millions de dollars. Vous dites que le tribunal devrait pouvoir ne pas nécessairement faire une offre ou décréter une ordonnance, mais il devrait pouvoir décider que certaines terres appartiennent au demandeur, au groupe ou à l'organisation autochtone. Est-ce exact?
    Vous semblez avoir un point de vue similaire en ce qui concerne l'indemnité maximale. Peut-être que le tribunal peut ne pas déclarer ou ordonner au gouvernement de vous payer plus de 150 millions de dollars, mais il peut conclure que l'on vous doit plus de 150 millions de dollars.
    Ce sont des concepts très intéressants qui ne sont pas particulièrement abordés par le projet de loi. Ils sont hors de la portée de ce que le projet de loi propose maintenant.
    Sur ces points particuliers, si nous modifions le projet de loi pour permettre que cela se fasse, sera-t-il alors conforme aux intérêts mentionnés ici, c'est-à-dire le règlement rapide des recommandations des revendications particulières en souffrance?
    Vous me corrigerez si je me trompe sur ces deux points différents concernant l'article 15 et l'article sur les indemnisations maximales. Ce sont des propositions fort intéressantes.
    Je vais peut-être commencer par le point sur la consultation.
    Premièrement, en substance, habituellement, il n'y a jamais suffisamment de temps pour consulter complètement et adéquatement chacune des collectivités sur ces questions. Ce que nous voyons ici, en réalité, est une sorte de compromis entre les efforts pour faire adopter le texte législatif tout en permettant aux premières nations qui, de toute évidence, seront touchées par ce texte législatif de s'exprimer. Étant donné que le processus est volontaire, il n'aura d'effet que sur les collectivités qui décident d'y avoir recours, qui décident de présenter leurs revendications par le biais de ce processus, et je pense que c'est un point important.
    De plus, la règle générale dans le cas de ces tribunaux administratifs, sur le plan juridique, c'est qu'ils ne sont pas comme les tribunaux dans ce sens qu'ils créent des précédents d'application obligatoire. En fait, les tribunaux ont la liberté de s'écarter de leur propre précédent. S'ils prennent une décision dans un cas, ils pourraient très bien, dans un cas subséquent, même s'il est très semblable, décider d'emprunter une direction très différente et juger, peut-être, à partir d'arguments différents, de considérations factuelles différentes, qu'ils ne sont pas liés par leur décision antérieure. Alors, voilà un autre élément important.
    Y aurait-il pu y avoir plus de temps? Oui, idéalement, cela aurait été merveilleux, mais lorsque l'on soupèse cet aspect par rapport à la nécessité de voir ce texte législatif adopter et d'avoir accès à un tribunal indépendant, je pense que la vaste majorité des gens diraient qu'ils appuient ce projet de loi, qu'ils aimeraient le voir adopter.
    Concernant l'autre point, c'est-à-dire les limites imposées à l'autorité des tribunaux, premièrement, en ce qui concerne les revendications touchant les droits fonciers issus des traités, je pense qu'il serait utile que le mandat soit clarifié de manière que le tribunal ait, en fait, la capacité de prendre une décision sur, par exemple, quels sont les droits fonciers d'une première nation. Dans de nombreux cas, cela permettrait de résoudre la revendication, avec la participation de la province appropriée. Dans certains cas, il y a des conventions sur le transfert des ressources naturelles qui imposent d'autres obligations aux provinces des Prairies, de respecter les obligations découlant des traités de la Couronne fédérale. Alors, cela pourrait entraîner la nécessité pour les provinces de fournir des terres.
    Ou encore, on pourrait toujours aborder la question en donnant au tribunal l'autorité de rendre une ordonnance d'indemnisation en remplacement des terres, plus spécifiquement. Je pense que c'est vraiment cela que contemple le projet de loi, mais il n'est pas parfaitement clair à mes yeux si, disons, une revendication touchant les droits fonciers issus des traités s'inscrit parfaitement dans le mandat du tribunal. Je pense que c'est quelque chose qui pourrait être clarifié.
    Pour ce qui est des limites d'indemnisation, oui, nous proposons, vraiment, quelque chose qui serait différent de ce qui est envisagé dans le projet de loi actuel. Ce que nous proposons, c'est que le tribunal puisse, dans les faits, prendre une décision, sur la question de la responsabilité, mais non sur la question de l'indemnisation. Si cela devait sortir de son mandat du fait que cela excède la somme de 150 millions de dollars, cette question d'indemnisation pourrait être renvoyée, disons, à la Cour fédérale pour qu'elle décide quelle indemnité est due à titre d'obligation légale.

  (1600)  

    Merci. C'est tout.
    Monsieur Lemay, vous avez sept minutes.

[Français]

    Je vous remercie d'être ici.
     Plusieurs choses me préoccupent. J'aurais aimé avoir plus de temps pour vous poser plus de questions. Je dois vous dire, à vous et aux autres qui sont ici aujourd'hui, que si vous avez déposé un mémoire et qu'il a été traduit à temps, vous pouvez tenir pour acquis que nous l'avons lu et que nous sommes prêts à vous poser des questions.
    Cette première remarque étant faite, je vous dirai que je ne suis pas d'accord avec vous en ce qui a trait à l'article 25. Vous avez écrit, et je cite:
L’article 25 prévoit qu’une Première nation ou une autre personne peut être autorisée à intervenir dans des procédures se déroulant devant le Tribunal. À notre avis, on ne doit pas donner à un tiers le statut d’intervenant étant donné que le Tribunal n’a pas le pouvoir d’ordonner à un tiers de payer une indemnité [...]
    Je ne suis pas d'accord avec vous parce que c'est exactement ce que prévoient l'article 22 et l'article 23 du projet de loi.
    Quelque chose m'a peut-être échappé, mais si un litige touche une province, elle peut intervenir, elle peut être partie à un litige et la décision pourrait être rendue. Je ne suis pas du tout favorable à ce qu'on amende l'article 25, à moins que vous ne me démontriez — et vous allez avoir du mal à le faire — que les provinces ne peuvent pas être parties à un litige. Elles sont parties à un litige, si elles le désirent, en vertu des articles 22 et 23 du projet de loi.
    Je vais tout vous dire d'un coup, alors si vous avez des remarques, vous pourrez les faire au cours du temps qu'il me restera.
    Une chose pose problème. J'ai le texte en français, mais pas celui en anglais. À la page 4, en français, le titre du paragraphe est « Pouvoir du Tribunal de prendre des décisions exécutoires ». Le deuxième paragraphe commence ainsi: « Nous sommes d'accord avec le principe fondamental [...] le Tribunal doit avoir le pouvoir de prendre des décisions exécutoires relativement à la nature [...] » Je suis totalement d'accord là-dessus. C'est la raison pour laquelle on appuie le projet de loi, il faut que les décisions soient exécutoires.
    Par contre, le milieu du paragraphe qui suit pose problème, pour moi. Je vais le lire lentement pour que vous puissiez le retrouver. Cela se trouve toujours à la page 4 en français, et cela commence ainsi:
Vu que la Commission sur les revendications particulières des Indiens sera dissoute, il est recommandé que le Canada envisage la création du nouveau centre de résolution extrajudiciaire des différends relativement aux revendications [...]
     D'où tenez-vous que la Commission sur les revendications particulières des Indiens sera dissoute? En tout cas, je n'ai pas vu cela dans le projet de loi. J'aimerais que vous me disiez où vous avez pris cela. C'est la première fois que j'entends cela. Vous avez peut-être des informations que le gouvernement vous a données et qu'on n'a pas. Pour moi, il n'était pas question qu'on abolisse cette commission. Si vous me dites que le gouvernement vous a dit que c'était le cas, on va jaser.
    Voici maintenant l'autre question. J'ai un peu de difficulté face à cela. Je suis avocat depuis 30 ans, membre du Barreau du Québec, et la magistrature n'est pas consultée lorsqu'on nomme un juge. J'ai un peu de difficulté à voir pourquoi les premières nations devraient être consultées lors de la désignation, de la nomination d'un juge. Je ne parle pas de la désignation du juge qui présidera le tribunal, je parle de la personne qui sera nommée juge. Le ministre nous a assuré qu'il y aura des critères. On a parlé au ministre de la Justice lors d'une réunion d'un autre comité et il nous a assuré qu'il y aurait des critères pour que les juges qui vont présider ces tribunaux soient compétents, c'est-à-dire pour qu'ils connaissent le droit autochtone. C'est mon troisième point et je vais vous laisser là-dessus afin que vous ayez le temps de répondre. Pourquoi faudrait-il absolument que les premières nations soient consultées avant que les juges soient nommés?

  (1605)  

[Traduction]

    Vous avez environ deux minutes pour répondre.
    Très bien, voyons si je peux répondre dans ce court laps de temps.
    Premièrement, laissez-moi parler des décisions exécutoires. Je crois savoir que la fonction d'enquête de la Commission des revendications des Indiens est appelée à disparaître. La commission pourrait se concentrer davantage sur la résolution des différends, assurant des services de facilitation ou de médiation de temps à autre. Je n'en suis pas tout à fait certain. Je ne sais pas vraiment comment cette disposition s'est retrouvée dans le projet de loi. Mais c'est ce que je comprends. Je crois qu'un décret a déjà été adopté, ayant pour effet fondamentalement de suspendre toutes les enquêtes publiques réalisées en vertu de cette partie du mandat de la Commission. Je pense que cela a été fait dans le but d'éviter un chevauchement de compétence entre la Commission et le nouveau tribunal, s'il était créé.
    En ce qui concerne le processus de nomination, vous l'avez comparé à la situation du barreau du Québec qui n'est pas consulté lorsqu'un juge est nommé par la province. C'est certainement la norme. Mais il ne s'agit cependant pas ici d'un différend ordinaire. Il fait intervenir les droits ancestraux et les droits issus de traités des premières nations, qui sont protégés par la Constitution et qui font intervenir la Couronne comme partie défenderesse. C'est différents dans ce sens qu'un juge, lorsqu'il est nommé, doit typiquement juger une variété de poursuites civiles, principalement entre des citoyens. Ici, il s'agit d'une situation unique dans laquelle la Couronne se trouve elle-même dans un conflit d'intérêts inhérent.
    Cela a davantage pour but d'essayer de s'assurer que le processus de nomination est géré de telle manière que les premières nations sachent que les gens qui sont nommés pour juger ces importantes revendications sont impartiales, équitable et suffisamment compétentes pour aider à résoudre ces questions. Tant et aussi longtemps qu'il y a une perception que le processus est équitable et transparent, et que les personnes nommées prennent leurs responsabilités au sérieux, alors, je pense que les premières nations considéreront qu'il s'agit d'un organisme légitime qui peut effectivement régler ces différends.

  (1610)  

    Elles auront suffisamment confiance pour présenter leurs revendications.
    Je veux faire valoir un autre point au sujet de l'article 25, l'influence réciproque entre intervenant et partie. Si, par exemple, une province décidait de faire partie du processus, disant qu'elle a un intérêt et qu'elle respecterait la décision du tribunal, alors, je pense que c'est tout à fait équitable. Je dirais que cela devrait également s'appliquer aux tierces parties, mais il faudrait que les tierces parties aient un intérêt dévolu dans le résultat du processus, qu'elles acceptent d'être liées par la décision et qu'elles reconnaissent qu'elles ont l'obligation de payer l'indemnité. Autrement, les premières nations seraient défavorisées. Alors, pour que les règles du jeu soient équitables, ces parties ne devraient pas avoir droit au statut d'intervenant dans le processus à moins d'être une partie ou un participant à part entière.
    Merci, monsieur le président.
    Je m'excuse de mon retard. Comme vous pouvez le voir, j'ai quelques défis additionnels en matière de déplacement, mais j'ai reçu votre mémoire à l'avance et j'ai pu en prendre connaissance.
    Je veux en fait continuer dans la même veine que M. Lemay concernant la CRI. Je comprends, moi aussi, que le volet enquête prendra fin le 31 décembre 2008 en raison d'un décret.
    Je veux parler de la médiation parce que j'ai noté dans votre mémoire que vous dites que la médiation pourrait être une autre voie de solution. Les détails sur ce à quoi pourrait ressembler ce processus sont vraiment vagues. Ce que je sais, c'est que dans le passé, dans les divers gouvernements, il fallait obtenir le consentement des deux parties pour pouvoir utiliser la médiation comme outil, et dans le passé, de façon générale, dans la plupart des cas le gouvernement fédéral a refusé de participer au processus de médiation.
    J'aimerais entendre vos observations sur cette question.
    Le deuxième point sur lequel j'aimerais entendre vos observations concerne le processus de nomination. D'autres témoins nous ont dit qu'il serait approprié que les premières nations participent au processus de nomination des juges qui feraient partie du tribunal, mais on a également proposé qu'il pourrait peut-être y avoir un groupe d'anciens qui serait choisi pour siéger avec les juges également pour fournir des conseils et une orientation au cours de ce processus.
    J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Le troisième point sur lequel j'aimerais vous entendre est le suivant: je suis d'accord pour dire que cette loi est nécessaire en raison de l'arriéré incroyable et du nombre d'années que les gens attendent. Mon problème, c'est que je ne suis pas convaincue que ce texte législatif traitera nécessairement de l'arriéré.
    Pour que ce soit clair pour mes collègues, je parle des gens qui acceptent volontairement de participer au processus et qui ont déjà suivi le processus. Au moment où ils vont présenter de nouveau leur demande, l'état de leur revendication reviendra à la case départ, et si elles ne décident pas volontairement de participer au processus, elles n'auront alors pas vraiment d'autre choix que d'aller devant les tribunaux. Si nous avons un nombre considérable de revendications qui sont déjà dans la file et qu'elles y sont depuis un certain nombre d'années, il n'est pas certain dans mon esprit que ce processus réglera nécessairement l'arriéré.
    Je vous demande si vous ne pourriez pas commenter ces différents points.
    Certainement. Je voudrais parler de la médiation et de l'arriéré et je demanderais aux autres participants du groupe de témoins s'ils aimeraient parler de la recommandation absolument unique et positive voulant qu'un groupe d'anciens puisse même, peut-être, prêter assistance dans ce processus.
    Premièrement, concernant la médiation et le règlement extrajudiciaire des différends, oui, historiquement, il a effectivement été très difficile d'amener la Couronne à participer volontairement au processus de médiation. En fait, habituellement, lorsqu'elle a accepté de le faire, c'était à la condition expresse qu'il ne s'agissait pas d'un processus de médiation, mais uniquement d'un processus de facilitation. Cette personne a un mandat très restreint et ne doit pas intervenir dans des questions de substance, etc. Cependant, je pense que tout cela va disparaître dès qu'un tribunal qui aura la capacité de rendre une décision exécutoire sera créé.
    Comme je l'ai dit, cela incite vraiment les deux parties à faire preuve de rigueur dans l'évaluation éclairée de leurs propres risques avant d'aller devant le tribunal. Ce n'est pas un hasard si 95 p. 100 de toutes les poursuites civiles se règlent avant le procès. Les gens ont tendance à régler dans les corridors du palais de justice alors que tout le monde envisage le scénario où le vainqueur rafle tout. C'est vraiment ce risque qui amène les gens à conclure un règlement hors cour. Cela oblige tout le monde à rester honnête. Cela donne à tout le monde une raison de vouloir régler le différend.
    Est-ce que vous laissez entendre alors que l'existence du tribunal encouragerait les gens à participer à la médiation avant d'aller devant le tribunal?

  (1615)  

    C'est exactement ce que je veux dire. Comme je l'ai dit, si vous créez un monstre, si vous donnez à ce tribunal le pouvoir de prendre des décisions exécutoires, les gens vont réfléchir avant de sauter dans le précipice, ils vont dire, un instant, pouvons nous régler cette question par une entente? C'est toujours la meilleure solution. Maintenant, si vous avez l'occasion de faire intervenir des facilitateurs et des médiateurs compétents, ils vont parvenir à créer ces occasions et à trouver ce terrain d'entente permettant d'en arriver à un règlement entre les parties. Je pense vraiment que le simple fait d'avoir ce type de décision comme moteur pour les règlements hors cour fera en sorte que ce processus fonctionnera.
    Concernant l'arriéré, un raisonnement très semblable s'applique. Je pense qu'il y a une recommandation ou un principe vraiment positif prévu dans le projet de loi lorsqu'on fixe un délai de trois ans pour répondre à une revendication. M. Big Plume peut en témoigner. Nous venons de recevoir récemment une réponse à une revendication de la nation Tsuu T'ina qui a été présentée en 1995; et on nous avait promis année après année que nous allions recevoir une réponse. Nous l'avons finalement reçue. Il a fallu 13 ans et maintenant nous avons la réponse. Au moins, ils ont quelque chose, non? Il ne s'agit pas d'une situation atypique non plus. J'ai de nombreux dossiers. Il y en a un autre qui a été présenté en 1985 et nous n'avons toujours pas de réponse aujourd'hui. J'en ai un autre qui a été présenté en 1997, et toujours pas de réponse. C'est endémique.
    En prévoyant une fenêtre de trois ans au cours de laquelle la Couronne devra dire si elle accepte ou non la revendication, je pense que c'est bon d'une façon ou de l'autre, tant et aussi longtemps que cela force une décision.
    Le seul problème, c'est que nous avons vu d'autres cas où le gouvernement ne répond pas. Je ne parle pas des conservateurs. Peu importe le parti politique au pouvoir, aucun gouvernement ne répond en temps opportun. Il va simplement lancer la balle au tribunal s'il ne répond pas dans le délai de trois ans. Alors, le tribunal n'aura pas, dans les faits, de calendrier.
    Je comprends. Je pense que certaines questions de ressource se poseront quant à la façon dont le tribunal fera face à la charge de travail. Peut-être que nous créons un nouveau problème en déplaçant l'arriéré. Comme un éléphant qui doit avaler un ballon de basket, cela ne se rendra pas jusqu'au tribunal; les choses seront bloquées là-haut.
    J'espère que cela n'arrivera pas. Je suppose que la Couronne est sincère lorsqu'elle dit vouloir régler ces revendications et qu'elle essaie de répondre aussi rapidement que possible dans le délai de trois ans. En fait, la Direction générale des revendications particulières réagit déjà à ce texte législatif avant même son adoption. Je vois un effort plus concerté de la part de la direction générale pour répondre à ces revendications en temps opportun. De toute évidence, elle continue de travailler pour aplanir les difficultés, mais j'y vois un élément très positif, à tout le moins.
    Nous avons entendu parler de certaines expériences différentes où des gens se font maintenant dire qu'ils sont refusés, alors cela aussi arrive.
    Vous avez dit que certains des autres témoins pourraient avoir des observations concernant les anciens.
    Oui. Du point de vue du respect que vouent les premières nations à leurs anciens, nous avons notre propre système judiciaire interne qui accorde beaucoup de place à nos anciens. Nous nous fions à l'expérience et à la sagesse de nos anciens. C'est pourquoi, je pense, beaucoup d'autres tribus et parties, avant notre comparution, ont indiqué qu'elles aimeraient que nos anciens participent à la sélection des juges, et ce genre de choses. Tout cas présenté par une première nation comporterait la participation des anciens dans tout le processus.
    Nos anciens sont traditionnellement reconnus comme nos dirigeants. Nos chefs et nos conseils se fient beaucoup à nos anciens. Lorsque le chef ou les membres du conseil n'ont pas d'expérience dans certains domaines, ils soumettent leurs préoccupations aux anciens et font appel à leur jugement estimé pour savoir comment résoudre certains problèmes. Cela existe à l'heure actuelle dans notre propre système judiciaire dans la nation Tsuu T'ina. Nous avons également cela dans les systèmes judiciaires provinciaux pour les cas relevant du tribunal criminel et de la cour des infractions routières. Les anciens sont autorisés à participer non seulement aux recommandations touchant toute solution applicable à certains cas, mais également aux recommandations sur la façon dont certains cas peuvent être présentés d'une manière qui ne cause pas de préjudice à la personne, mais qui aide à produire un jugement qui est pratique pour toutes les parties concernées.
    À titre d'exemple, lorsqu'un ancien participe à une cause au criminel, il n'y a pas beaucoup de choses qui seront examinées par l'une ou l'autre des parties. Peut-être qu'elles ne connaissent pas le contexte, l'histoire ou les circonstances entourant l'événement qui nécessite une recommandation ou une évaluation pour régler le problème.
    Nous aimerions vraiment que le comité envisage l'incorporation des anciens dans le projet de loi, peu importe le niveau qui pourrait être décidé, de sorte qu'ils puissent participer pleinement. C'est uniquement une question de droit traditionnel. C'est une question de respect à l'égard de personnes qui ont plus d'expérience que nous. Je serai un des premiers à le reconnaître.

  (1620)  

    Monsieur, pourriez-vous conclure rapidement, s'il vous plaît.
    Je me fie beaucoup à mes anciens pour qu'ils fassent partie du processus de validation des revendications. C'est notre expérience en tant que peuple des premières nations que nos anciens soient inclus dans tout ce que faisons. Nous n'aimerions pas que nos anciens ne soient pas inclus dans quelque chose comme cela.
    Merci beaucoup. Je m'excuse de l'interruption.
    Du parti conservateur, monsieur Bruinooge; vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier la délégation de l'Alberta de l'excellent exposé qu'elle a rédigé, j'en suis certain, après un court préavis. Je sais que la façon dont fonctionne le présent comité ne laisse pas beaucoup de temps pour préparer un exposé, alors, je veux vous remercier de cet exposé très bien pensé. Chef Big Plume, je tiens à féliciter votre délégation.
    J'aimerais vous poser des questions sur certaines des affirmations que vous avez faites concernant le fait que ce projet de loi constitue une nette amélioration par rapport au projet de loi C-6. Il semble y avoir une certaine convergence entre ce que vous avez dit et la position du gouvernement, à savoir qu'une réforme en profondeur du système s'impose dans ce domaine. S'il y a quelque chose que notre gouvernement aime faire, c'est bien de réparer le système.
    Chef Big Plume, pouvez-vous nous en dire davantage sur la différence entre ce que nous proposons et le système déficient qui existait auparavant?
    Merci.
    Encore une fois, je dois préciser, aux fins du compte rendu, que je ne suis pas le chef. En fait, mon cousin, le chef Sandford Big Plume, pourrait être offensé si j'arrivais au Parlement en m'annonçant comme le chef.
    Mais je vous remercie de la question.
    Les améliorations que nous voyons comprennent des choses comme celles-ci. Dans le projet de loi C-6, il y avait une limite de seulement, je pense, sept à 10 millions de dollars. En tant que premières nations en Alberta, nous reconnaissons que l'Alberta est une des provinces les plus riches du pays. Si ce projet de loi particulier, le projet de loi C-6, avait été adopté et que la question de l'indemnisation avait été limitée à sept à 10 millions de dollars, cela n'aurait pas fonctionné pour aucune des premières nations. En fait, nous aurions pu constater, à l'échelle nationale, qu'un grand nombre de cas seraient maintenant devant la Cour fédérale, paralysant le système. C'est la grande amélioration que nous avons vue dans le projet de loi C-30 dont il est question aujourd'hui et où la limite a été portée à 150 millions de dollars.
    Maintenant, il a été dit dans notre exposé, dans certaines régions, que nous sommes toujours insatisfaits que l'on ait imposé une limite aux revendications des nations visées par les traités nos 6, 7 et 8, en raison de la situation économique actuelle de l'Alberta, en raison des pertes qu'ont subies les premières nations depuis le moment de la signature des traités. Mais nous reconnaissons également qu'il est nécessaire d'avoir un effort de collaboration de la part de toutes les parties pour pouvoir en arriver à un règlement de ces questions dont, je suppose, nous connaissons tous deux la signification.
    À titre d'exemple, comme mon conseiller juridique l'a signalé, nous avons nous-mêmes une revendication portant sur un réservoir d'eau qui fournit à la ville de Calgary 80 p. 100 de ses besoins en eau. Nous avons travaillé énergiquement avec la ville de Calgary pour en arriver à une solution avantageuse pour les deux parties. Dans le cadre du processus actuel, il y a trop d'incertitude que la revendication, telle qu'elle a été présentée, reçoive la reconnaissance que nous aurions espéré qu'elle reçoive.
    Mes collègues, le chef Lagrelle et le chef de la direction Ron Lameman, peuvent également témoigner du fait qu'il y a un certain nombre de revendications et de problèmes en suspens dans le Nord de l'Alberta. Nous avons la question des sables bitumineux. Nous avons toutes sortes de problèmes d'eau qui s'annoncent et qui ont été prévus par nos anciens, et ces prévisions sont extrêmement inquiétantes.
    Quant à la limite de 150 millions de dollars qui a été imposée ici, bien que nous la considérions comme une amélioration par rapport au projet de loi C-6, nous estimons toujours qu'elle n'est pas appropriée. Mais encore une fois, nous estimons toujours qu'il est nécessaire d'aider à concrétiser le projet de loi actuel, pour la bonne raison que nous vivons tous sur cette terre, que nous devons la partager et que nous devons tous reconnaître qu'il faut passer à autre chose.
    J'ai travaillé à titre de directeur des revendications territoriales pour la nation Tsuu T'ina pendant près de 20 ans. Lorsque j'ai débuté, j'avais des cheveux noirs. Et oui, ce fut un travail épuisant, un travail frustrant. Ce fut un exercice qui, c'est le moins que l'on puisse dire, a été très dur pour nos gens, surtout pour nos anciens. J'ai mentionné dans mon exposé que nous avons perdu beaucoup de nos anciens, malheureusement. J'aurais aimé avoir exagéré, mais nous avons perdu environ la moitié de nos anciens de la nation Tsuu T'ina au cours des cinq dernières années. Il s'agissait d'anciens très informés et qui étaient... en fait, l'un d'entre eux accompagnait les gens qui participaient aux discussions sur le traité. Il était âgé de 107 ans. Alors, nous avons perdu ces gens.

  (1625)  

    Pour résumer, la première nation Tsuu T'ina a saisi l'occasion pour vous présenter son exposé et vous faire part de ses préoccupations, afin de faire entendre son point de vue sur le sujet. Lorsque le document a été présenté aux autres tribus de l'Alberta, elles l'ont tout de suite adopté et ont acquiescé à tout ce qui y est dit. Malheureusement, quelques-unes des personnes qui ont fait partie du comité informel et qui se trouvent dans les autres secteurs visés par les traités ne pouvaient pas venir ici aujourd'hui et, par conséquent, leurs opinions, qui sont aussi valables, ont été incluses dans le document.
    L'autre domaine où il y a place à amélioration, selon nous, ce sont les consultations. Encore une fois, je comprends que nous avons tous des emplois. Nous avons une vie à l'extérieur de cet immeuble, et les circonstances ne nous permettent pas toujours de tenir des consultations. Nous avons fait de notre mieux, à titre de techniciens, pour faire part des préoccupations à notre chef et nos conseils respectifs, ainsi qu'à nos aînés.
    Nous sommes essentiellement en faveur de cette loi, mais nous disons tout de même qu'il y a place à amélioration. Mais ce commentaire est vrai pour toute chose, et rien n'est parfait. Si nous vivions dans un monde parfait... Comme mon grand-père avait l'habitude de le dire, si tous les hommes pensaient de la même façon, ils auraient tous épousé ma grand-mère.
    Des voix: Oh, oh!

  (1630)  

    Merci.
    Est-ce assez bon pour vous?
    Ce dernier point me paraît tout à fait approprié.
    Je vous remercie de votre présence aujourd'hui. Je m'excuse de vous bousculer un peu, mais comme nous devons absolument terminer à 17 h 15, chaque minute de plus que nous passons ici est une minute de moins que nous aurons avec le groupe des territoires. Je vous remercie beaucoup.
    Je demanderais aux membres du comité de ne pas trop s'éloigner pendant que les gens se relaient le plus vite possible à la table.
    Nous allons suspendre nos travaux pendant une minute.

    


    

    Le président: Nous allons poursuivre, si mes collègues veulent bien reprendre place. Je bouscule tout le monde un peu aujourd'hui, mais lorsque la sonnerie commencera à retentir à 17 h 15, nous allons ajourner. Alors j'aimerais poursuivre pour que nous puissions avoir une bonne série de questions.
    Le deuxième groupe que nous accueillons aujourd'hui est le Conseil des Premières nations du Yukon, représenté par le chef Mark Wedge et David Joe, conseiller technique. Messieurs, si vous voulez présenter un exposé, je vous demanderais de vous limiter à 10 minutes, puis nous aurons une courte série de questions.
    Chef Wedge, vous pouvez commencer.

  (1635)  

    C'est un honneur de m'adresser à vous au nom du Conseil des Premières nations du Yukon. Je veux m'assurer que vous ayez une connaissance élémentaire de la dimension constitutionnelle dans laquelle s'inscrit la politique sur les revendications globales et particulières au Canada.
    En 1973, les premières nations du Yukon ont demandé par voie de pétition au gouvernement du Canada d'entamer des négociations en vue de conclure des traités contemporains. Le 8 août 1973, le ministre des Affaires indiennes d'alors, l'honorable Jean Chrétien, a annoncé la première politique sur les revendications globales immédiatement après notre pétition et l'arrêt de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Calder. C'est grâce à la clairvoyance des aînés que nous avons pu établir ces revendications. Le Yukon compte actuellement 14 premières nations; 11 d'entre elles ont signé des accords d'autonomie gouvernementale et des traités contemporains, et les trois autres ne l'ont pas fait.
    Je vais parler de certains aspects qu'il importe d'examiner au sujet du Yukon et de la politique sur les revendications particulières. En 1973, lorsque les premières nations du Yukon ont entrepris de négocier les revendications qui ont engendré la politique sur les revendications particulières, ces démarches se sont inscrites dans ce que nous appelons l'Accord-cadre définitif. Par la suite, chacune des premières nations a négocié des traités, c'est-à-dire 11 d'entre elles.
    Il n'y avait pas beaucoup de réserves au Yukon. Il y avait des réserves d'été, puisque quelques-uns de nos territoires chevauchent la frontière entre le Yukon et la Colombie-Britannique. Ce sont les secteurs qui font encore l'objet de négociations en vue de la signature de traités. Quelques-unes de nos premières nations autonomes ont des réserves en Colombie-Britannique, comme le Conseil de Teslin Tlingit. Certaines ont des réserves en Colombie-Britannique qui ne font toujours pas l'objet d'un traité, comme les Kaska.
    Ce n'est donc pas seulement le Yukon qui est en cause, mais aussi la Colombie-Britannique. Nous regardons le projet de loi et nous voyons des moyens de régler cette question, avec la participation de la Colombie-Britannique.
    Les gens comprennent, je crois, que la partie des ententes portant sur les traités est protégée par l'article 35 de la Constitution. Les ententes d'autonomie gouvernementale n'ont pas la même protection constitutionnelle. Dans le cadre de celles-ci, nous avons mis de côté une partie de nos terres de réserve; ces ententes nous confèrent une certaine autonomie gouvernementale dans ces secteurs. C'est une complication que les gens doivent comprendre.
    Ce qu'il faut retenir, entre autres choses — et je laisserai Dave en parler un peu plus tard quand vous poserez vos questions —, c'est que la politique sur les revendications particulières ne limite pas simplement les obligations de la Couronne à la cession illégitime des terres de réserve au sens de la Loi sur les Indiens. Nous avons récemment examiné l'application de ces ententes, et nous constatons certaines différences techniques. Nous ne sommes pas visés par les mêmes politiques de la Loi sur les Indiens et nous sortons de cette catégorie. Nous nous trouvons donc dans cette zone où les terres visées au paragraphe 91(24) et ces types de terres deviennent une question plus compliquée, parce que nous avons fait référence à un certain nombre de terres.
    Vous trouverez donc dans ce mémoire une section portant sur la façon dont ces terres sont établies. Pour ne pas perdre de temps, je ne vais pas m'attarder sur cette question.
    J'aimerais parler de la façon dont le projet de loi C-30 touche le Yukon.
    Dans nos mémoires antérieurs, nous étions en faveur des pouvoirs attribués et d'un tribunal indépendant. Nous croyons que c'est une très bonne chose: participation et représentation au tribunal, augmentation du plafond monétaire pour les indemnités, considération des délais pour le dépôt des revendications particulières, politique sur les revendications particulières plus éclairée pour tenir compte des principes changeants de la common law, comme l'honneur de la Couronne, exonération fiscale éventuelle des récompenses pécuniaires et compensations relatives au revenu autonome.

  (1640)  

    De façon générale, le Conseil des Premières nations du Yukon est en faveur de l'approche prévue dans le projet de loi C-30 pour la création d'un tribunal. Notre première nation a trois revendications particulières et, par le passé, il a été difficile de faire avancer ces dossiers. Nous croyons donc qu'il est très important d'établir ce tribunal quasi judiciaire et il s'agit, pour nous, d'un grand pas.
    Le pouvoir d'arbitrage des premières nations est aussi important, et je sais qu'on en a parlé précédemment. Au Yukon, nous commençons à examiner des ententes sur l'administration de la justice. Nous commençons à établir des tribunaux. Nous commençons à nous pencher sur la manière dont ces ententes seront intégrées au système judiciaire du Canada et du Yukon.
    Nous voulons voir comment seront intégrés les arbitres, à mesure que nous acquerrons de l'expérience. Par exemple, nous avons une personne ici qui compte plus de 35 ou 40 années d'expérience dans le domaine judiciaire et qui a fait plusieurs choses. Ce sont les personnes auxquelles on devrait faire appel. Vous devez vous pencher sur cette question. C'est une chose importante que nous avons examinée.
    Le projet de loi donne aussi une définition de « première nation ». Une première nation ne peut être qu'un revendicateur ayant saisi le tribunal d'une revendication. Il y a trois premières nations du Yukon qui sont encore des bandes au sens de la Loi sur les Indiens, comme je l'ai dit tout à l'heure. Elles n'ont pas signé d'entente sur des revendications territoriales. Il y a 11 premières nations qui entrent dans la définition donnée d'un « groupe de personnes qui, bien qu'il ne soit plus une bande visée à l'alinéaa) en raison d'une loi ou d'un accord figurant à l'annexe, n'a pas abandonné son droit de présenter une revendication particulière ».
    En vertu de l'Entente définitive des Premières Nations de Champagne et de Aishihik, par exemple, il y a sept réserves qui n'ont pas été cédées, mais qui doivent avoir été acceptées en vue de négociations avant le 31 mars 1994, par le ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien. Trois des sept revendications particulières ont été acceptées. Toutefois, le fait de donner le pouvoir au ministre de déterminer la validité des autres revendications particulières dans un délai donné est problématique.
    Même si la première nation réussit à maintenir que la renonciation n'était pas valable, il reste à déterminer si l'indemnité sera remise sous forme de terre, comme le prévoit l'entente définitive, ou sous forme monétaire, comme le précise le projet de loi C-30. L'article 4 stipule que le projet de loi C-30 l'emporte en cas d'incompatibilité ou de conflit avec une autre loi. Dans le cadre des ententes définitives plus récentes du Yukon, la terre est considérée comme faisant partie de tout règlement. Toutefois, je soupçonne que toutes les premières nations ayant des ententes de revendications territoriales auront les mêmes problèmes de définition.
    J'aimerais m'attarder un peu sur cette question. Chose importante pour nous, la population des premières nations augmente; c'est un des groupes démographiques qui connaît la plus forte croissance au Canada. Par le passé, il y a peut-être eu des transgressions et des choses pareilles, et souvent des terres ont été prises. Les terres sont importantes et il faut en tenir compte lorsqu'il est question d'indemnité ou de règlement, parce qu'elles jouent un rôle important dans notre accroissement démographique, surtout dans ces secteurs.
    Nous avons réussi quelque peu à faire avancer certains dossiers, mais je crois que c'est un aspect important lorsque nous parlons de la loi. C'est là où nous pouvons commencer à régler ces revendications particulières.
    L'article 14 présente les faits sur lesquels peut être fondée une revendication particulière. L'alinéa 14(1)a) invoque « l'inexécution d'une obligation légale de Sa Majesté liée à la fourniture d'une terre ou de tout autre élément d'actif en vertu d'un traité ou de tout autre accord conclu entre la première nation et Sa Majesté ».
    Cette définition ne s'applique qu'aux traités historiques, puisqu'une première nation ne peut présenter une revendication particulière pour une entente de revendication territoriale conclue après le 31 décembre 1973. Le Canada a annoncé cette politique sur les revendications globales en août 1973. À ma connaissance, il est pratiquement impossible de négocier un traité en l'espace de quatre mois et, par conséquent, le paragraphe 14(1) semble s'appliquer seulement aux traités historiques, et non aux ententes de revendication territoriale modernes. Cet aspect est important, surtout pour les trois premières nations du Yukon qui n'ont pas de traité moderne.
    Les alinéas 14(1)c) à 14(1)f) mentionnent seulement les terres de réserve et, bien que le terme ne soit pas défini dans le projet de loi C-30, il est clair que conformément à l'arrêt Delgamuukw, les titres ancestraux sont exclus, puisque l'alinéa 15(1)f) précise qu'une telle revendication ne peut être déposée parce qu'elle serait fondée sur des droits ou titres ancestraux ou invoquerait de tels droits ou titres.

  (1645)  

    Il s'agit d'une question importante pour toutes les premières nations du Yukon, puisque notre régime foncier maintient les titres ancestraux rattachés aux terres octroyées par ententes. C'est particulièrement important pour les premières nations qui n'ont pas d'entente définitive, puisque les titres ancestraux sont maintenus sur toutes les terres de réserve faisant l'objet d'une revendication. Je crois que la question des titres ancestraux est très importante, comme nous l'avons fait remarquer.
    Le plafond monétaire est fixé à 150 millions de dollars par revendication particulière, et nous sommes en faveur de la limite imposée à l'indemnité en vertu de l'article 20 du projet de loi. C'est important. Nous croyons qu'il s'agit là d'une amélioration, comme nous l'avons souligné.
    Enfin, le projet de loi C-30 ne prévoit aucune exonération fiscale des indemnités pécuniaires. Toutefois, les bandes visées par la Loi sur les Indiens sont généralement exemptées en vertu de la Loi sur les Indiens. Si les premières nations ayant signé des traités modernes peuvent éviter les contraintes de la loi et réussissent à obtenir une indemnité pécuniaire, alors l'indemnité reçue peut être traitée comme un revenu autonome et peut donc être utilisée comme un élément de compensation aux fins des ententes de transfert financier. Comme il s'agit de fonds du patrimoine, s'ils sont versés, ils ne devraient pas être imposés comme paiements du principal ou sur les intérêts et ne devraient pas être utilisés comme des compensations dans les ententes de transfert financier.
    Cela signifie qu'avec notre entente, puisque nos citoyens sont maintenant assujettis à l'impôt et que nous partageons les taxes, nous avons des compensations. Puisque ces revendications particulières portent sur des territoires anciens, les indemnités ne devraient pas être imposables ou être déduites des bases de dépenses que nous utilisons. C'est un aspect important que nous voulons faire valoir.
    Pour conclure, j'ai essayé d'exposer brièvement le statut constitutionnel particulier des premières nations du Yukon, qui peut avoir un lien avec les revendications particulières. Je vous ai fait part également de certaines préoccupations générales et j'ai proposé des solutions possibles pour répondre à ces préoccupations.
    Encore une fois, je tiens à remercier le comité permanent de nous écouter. Ce que nous disons en gros, c'est que nous devons avancer, parce que nous attendons de régler les revendications particulières et certains dossiers anciens pour construire nos centres d'éducation de la petite enfance. Nous n'avons pas assez d'indemnités ou d'infrastructures, et nous dépendons de ces choses pour construire une partie de l'infrastructure dont nous avons besoin. Nous aimerions avoir d'autres moyens de faire cela.
    Nous avons donc certaines revendications particulières au Yukon. Nous appuyons le processus visant à faire avancer le dossier et à régler la question. Nous savons qu'il y aura des améliorations. Nous sommes en faveur de cela et nous voulons que le dossier soit prioritaire. Mais comment faites-vous cela? Pouvez-vous en faire la demande et régler cette affaire?
    Merci. C'est tout ce que je voulais dire.
    Merci beaucoup.
    Il nous reste un peu moins d'une demi-heure. Nous avons du temps pour une série de questions de sept minutes. Je vais vous avertir lorsqu'il restera une minute, et je vais vous couper la parole au bout de sept minutes. J'encourage mes collègues à ne pas prendre cinq ou six minutes pour poser toute une série de questions, parce que je vais vous limiter à sept minutes.
    Nous allons écouter M. Bagnell, du Parti libéral.
    Merci. Nous pourrions prendre quelques minutes de plus après le début de la sonnerie, puisque c'est la salle juste à côté.
    Merci d'avoir abordé la question des revenus autonomes. C'est bien; je n'avais pas encore entendu cela. Nous allons veiller à ce que le ministre et le ministère précisent qu'ils ne feraient pas cette déduction.
    Je veux utiliser mon temps surtout pour vous donner plus de temps pour terminer et pour vous remercier d'être venus ici, depuis la circonscription la plus éloignée d'Ottawa. Je vais vous poser environ cinq questions, et vous pourrez répondre à celles que vous voudrez.
    Premièrement, voulez-vous ajouter quelque chose, monsieur Joe ou chef Wedge?
    Deuxièmement, vous êtes en faveur d'un tribunal. On pense toujours qu'un tribunal est formé de trois personnes. Je me demande si le fait qu'il s'agisse d'une seule personne vous inquiète, compte tenu qu'elle rend une décision exécutoire, sans appel. Qu'arrive-t-il si cette personne ne vous aime pas?
    Troisièmement, voulez-vous parler de l'exécution de la justice dans vos revendications globales? Comme vous le savez, nous avons signé un accord disant que vous pouvez avoir ceci, et maintenant... Pour votre première nation, comment les choses se passent avec votre loi sur le bien-être des enfants et, ce qui est encore plus important, avec le Conseil de Teslin Tlingit? Je crois qu'ils attendent depuis une décennie, et ce doit être terriblement frustrant. Nous avons signé un accord, et ils essaient toujours de le faire appliquer.
    Quatrièmement, je crois que les revendications transfrontalières avec la Colombie-Britannique peuvent être problématiques. Est-ce un problème? Est-ce qu'on ne fait aucun progrès parce que ce dossier touche deux côtés de la frontière?
    Enfin, le plus grand problème que vous avez au Yukon, je crois, c'est l'examen aux neuf ans et la mise en oeuvre de cette mesure. Vous pourriez faire des commentaires à ce sujet.
    Vous pouvez utiliser les minutes qui restent comme bon vous semble.
    Eh bien, je pourrais répondre à deux de vos questions, monsieur Bagnell.
    La première porte sur les cours supérieures.
    Les ententes concernant l'administration de la justice que nous avons actuellement ne prévoient pas la nomination de nos arbitres à une cour supérieure. C'est une question qui reste à régler avec le Canada. Disons simplement que les pouvoirs judiciaires que nous avons touchent à la compétence des cours supérieures, comme les testaments et les successions, alors si le chef Wedge et ses gens, par exemple, décidaient d'adopter une loi concernant les testaments et les successions, l'arbitrage de cette loi relèverait tout de même de la cour supérieure. Nous espérions et nous souhaitions que les juges que nous avions nommés, dans le cadre de nos processus et nos systèmes d'administration de la justice, permettraient la nomination de pacificateurs ou de juges des premières nations qui auraient des pouvoirs judiciaires équivalant à ceux d'un cour supérieure. Nous ne pensions pas qu'il y aurait un obstacle à franchir pour ce type de nomination, nonobstant tous les aspects liés à la nomination des juges des cours supérieures nommés par le Canada en vertu de l'article 96, et ainsi de suite. Nous croyons qu'il y a des façons de régler la chose, compte tenu de la primauté du caractère constitutionnel des ententes conclues en vertu de nos traités. C'était là une de nos préoccupations.
    Quant aux problèmes causés par la situation frontalière, les dispositions portant sur la renonciation dont le chef a parlé s'appliquent au territoire du Yukon seulement. Nonobstant le fait que pour les bandes qui existaient auparavant... tous les droits et titres de ces bandes sont maintenant dévolus à la première nation créée en vertu des traités et des ententes qui existent. Par conséquent, puisque la bande indienne de Teslin Tlingit possédait des terres de réserve en Colombie-Britannique, tous les droits, titres et intérêts qui étaient dévolus à cette bande sont maintenant dévolus au Conseil de Teslin Tlingit. Ils ont donc adopté tous les pouvoirs qui existent actuellement, et rien dans les ententes définitives ou les traités du Yukon pourraient vicier l'une de ces revendications en Colombie-Britannique, que ce soit une revendication particulière ou globale.

  (1650)  

    Vous avez parlé du fait que le tribunal serait formé d'une seule personne. Évidemment, ce serait fantastique s'il y en avait davantage.
    Ce qui est proposé vaut mieux que ce qu'il y avait auparavant, et c'est là l'important, selon moi. Comprenez-vous? Ce n'est pas ce qu'il y a de mieux. Nous utilisons des cercles, des consensus, des modèles de justice réparatrice. Nous intégrons ces processus dans nos ententes d'administration de la justice. Nous aimerions bien sûr que ces choses se reflètent dans le projet de loi. Toutefois, cela étant dit, un tribunal composé d'une personne vaut mieux que ce qu'il y avait auparavant.
    Je crois que c'est important et je veux en parler, puisque nous allons de l'avant. Nous voulons travailler avec le Canada, avec la loi. Nous avons négocié pendant 30 ans. Nous savons que nous n'allons pas rester au point de départ. Des examens sont prévus. Nous voulons croire que la communauté regardera ces choses et commencera à prendre confiance à mesure que nous établirons nos structures judiciaires. Nous utilisons nos conseils de famille et certaines lois sur l'autonomie gouvernementale pour aller de l'avant. À mesure que nous acquerrons cette capacité et cette expérience, cette loi les prendra en considération et nous verrons comment nous pourrons intégrer tout cela. C'est donc une question très importante.
    Concernant la situation frontalière, pour en parler rapidement, nous sommes au sommet de la Colombie-Britannique — notre première nation, les Teslin, un certain nombre d'entre nous — alors nous sommes encore à négocier les processus de traités. C'est très difficile, parce que nous essayons de négocier des traités, d'une part, et de mettre en oeuvre d'autres ententes, d'autre part. Alors rien ne bouge. Ce serait fantastique si le Canada pouvait faire avancer le dossier, parce que ce sont des choses importantes à régler. Nous ne sommes pas sur le point de dire comment nous allons déterminer quelles sont les revendications particulières visées ici.
    Dernière chose dont je vais parler: l'examen aux neuf ans que nous avons fait récemment. En fait, j'ai rencontré plusieurs d'entre vous lorsque nous sommes venus pour cet examen, et je vous remercie d'avoir pris le temps de nous recevoir. Ce qui importe, je crois, c'est que cette loi nous aide, comme première nation, à mieux avancer, parce que nous avançons, semble-t-il, à différents niveaux, sur le plan de l'administration de la justice, ce genre de choses. L'examen aux neuf ans montre qu'à titre de gouvernement, il faut que nous soyons perçus différemment et il faut commencer à mettre en oeuvre les ententes correctement. Et il est important d'examiner les ressources, n'est-ce pas? Graduellement, nous aimerions que ces choses soient intégrées dans des amendements au projet de loi C-30 et dans l'examen qui suivra.

  (1655)  

    Merci beaucoup, chef Wedge.
    Monsieur Lévesque, sept minutes.

[Français]

    Je vous remercie, messieurs, de vous être déplacés pour venir nous faire part de votre point de vue.
     Comme vous le savez sans doute, les décisions du tribunal ne permettront pas de satisfaire des revendications territoriales, mais d'accorder des sommes d'argent. La consultation préalable est toujours pertinente quand les dispositions législatives touchant les groupes autochtones sont évaluées. Dans son discours à l'étape de la deuxième lecture, le 4 décembre 2007, le ministre a décrit le projet de loi comme étant un exemple de l'esprit de collaboration dont il faut faire preuve pour assurer le succès d'un nouveau mode de règlement. Ce nouveau mode de règlement touchera des centaines de collectivités des premières nations dont les revendications n'ont pas encore été résolues.
    Le 6 février dernier, le ministre nous a dit, dans le cadre de ce comité, avoir l'impression que le projet de loi recueillait un large appui de la part des premières nations. Je ne sais pas si la consultation se résume seulement au dépôt du projet de loi que vous avez étudié ou si, lors de l'élaboration de ce projet de loi, vous avez été consultés.
    Dans quelle mesure le groupe de travail a-t-il consulté et a-t-il impliqué des groupes régionaux appartenant à vos collectivités? Pourriez-vous également me dire si votre organisation ou des collectivités qu'elle représente ont été mises à contribution lors de ces consultations?

[Traduction]

    Je vais commencer par la deuxième question.
    Nous sommes mis à contribution. L'APN est venue au Yukon pour présenter ces choses. À titre de dirigeants, nous avons examiné ce qui avait été fait. Nous avons participé aux discussions de l'Assemblée des Premières nations. Alors nous avons été consultés dans cette mesure. Je sais que nos experts techniques ont aussi contribué à certains processus, et ils ont suivi les travaux de l'APN et y ont participé, pour intégrer cela dans la loi actuelle. Je crois que c'était un aspect important.
    Concernant la question des terres, nous comprenons cela. Lorsque nous avons commencé en 1969 et que le livre blanc a été déposé, ils voulaient abolir la Loi sur les Indiens. Nous avons dit que ce ne serait pas juste. L'affaire a été entendue à la Cour suprême, qui a dit qu'il y avait des droits dont il fallait tenir compte. Nous le voyons très bien, et nous évoluons constamment.
    Si vous regardez l'injustice commise, c'était des terres traditionnellement occupées par nos peuples et, par l'établissement d'une série de gouvernements autonomes, un grand nombre de ces terres ont été perdues. Graduellement, nous avons commencé à négocier leur restitution. Dans les ententes du Yukon, nous nous sommes battus pour avoir une clause pour la non-extinction de nos droits. Le Canada et nos premières nations... ces droits existent. Chaque municipalité, chaque gouvernement au Canada peut agrandir son territoire. À l'heure actuelle, nous ne le pouvons pas. Ce n'est pas juste.
    Nous savons qu'à un moment donné, grâce aux échanges que nous avons, justice sera faite. Nous pourrons dire qu'il est logique d'étendre ces terres, surtout si notre population augmente. Ce n'est pas dans ce projet de loi, mais avec une bonne gouvernance et un bon leadership, nous croyons que nous finirons par y arriver.
    C'est pourquoi nous continuons de venir ici. C'est important. Nous savons que ce n'est pas parfait, mais chaque petit pas est important. Nous sommes des peuples. Nous sommes des nations. Nous allons établir des territoires. Nous ferons les choses correctement. Nous reconnaissons que ce n'est pas prévu dans le projet de loi, mais ça le sera peut-être dans l'avenir.

  (1700)  

[Français]

    Je vais céder une partie de mon temps à mon collègue M. Lemay.
     Dans le cadre de ce comité, nous avons reçu des représentants de communautés autochtones des provinces, mais c'est la première fois que nous entendons des représentants d'un territoire, le Yukon étant en effet un territoire et non une province.
    Je suis très heureux que cette occasion se présente. Je voudrais savoir comment se passent les choses avec le gouvernement du Yukon. Y a-t-il des ententes, des discussions? Comment le projet de loi C-30 peut-il cadrer avec vos revendications territoriales, les discussions avec le gouvernement du Yukon et vos communautés?

[Traduction]

    Si vous me le permettez, j'ajouterais très rapidement une chose.
    Au Yukon, c'est vrai que nous avons un territoire. Le Territoire du Yukon est un délégué du Canada. Le Canada l'a créé en adoptant une loi fédérale pour donner au territoire des pouvoirs législatifs et le contrôle sur ses terres et ses ressources.
    Nous présumons qu'aux fins du projet de loi C-30, Loi constituant le Tribunal des revendications particulières et modifiant certaines lois en conséquence , lorsque le mot « province » est utilisé... Selon la Loi d'interprétation, le mot « province » inclut les territoires de sorte que le projet de loi s'applique à eux. À cet égard, nous présumons que le Yukon est visé aux termes de la Loi d'interprétation. Même si ce n'était pas le cas, compte tenu que le Yukon est un délégué du Canada, le Canada pourrait lui ordonner, aux termes de la Loi sur le Yukon, de se conformer aux désirs de Sa Majesté.
    Alors nous présumons qu'il existe ce degré de cohérence dans le processus.
    Merci beaucoup.
    Madame Crowder, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup à nos témoins d'avoir fait le voyage jusqu'ici.
    J'ai deux courtes questions, et une autre plus longue.
    Je veux simplement m'assurer de bien comprendre. Lorsque nous parlons de la composition du tribunal, vous dites que la définition doit être élargie pour inclure des gens du Yukon qui ont ce genre d'expérience. Vous avez parlé des pacificateurs. Voilà donc une courte question.
    Voici la deuxième. Vous avez parlé de la définition de « revendicateur » que l'on trouve à l'article 2; avez-vous dit que certaines nations du Yukon seraient exclues du processus de revendications particulières prévu dans ce projet de loi? Je ne suis pas certaine d'avoir bien compris ce que vous avez dit.
    Vous pourriez peut-être commencer avec ces deux questions, et si j'ai assez de temps, je vous en poserai une autre.
    Je vais d'abord répondre à votre deuxième question. Avant de devenir un revendicateur, vous devez évidemment correspondre à la définition donnée, qui dit, entre autres, que vous n'avez pas renoncé à vos droits dans le cadre d'une revendication territoriale. Alors chaque revendicateur doit démontrer qu'il n'a pas abandonné ses droits ou n'y a pas renoncé pour déposer une revendication particulière.
    C'est exactement ce dont le chef Wedge a parlé. Les Champagne et Aishihik — ce sont mes origines — ont exclu sept revendications particulières, dont trois ont été acceptées. Ces revendications sont donc en cours. Nous présumons que, si elles ne sont pas réglées, elles peuvent être envisagées dans le cadre du projet de loi C-30. Pour les quatre autres revendications, il reste à déterminer si on doit y renoncer, selon la définition de revendicateur. Il n'est pas clair pour nous si c'est le cas. Nous aimerions présumer que ce ne l'est pas, que les premières nations peuvent continuer de présenter ces revendications particulières. Je crois que cette question devra être débattue plus tard, parce qu'il est clair que vous devrez vous soumettre à cette exigence pour prouver que vous êtes un revendicateur admissible.
    Concernant votre première question...
    Excusez-moi, monsieur Joe, pourrait-on alors proposer un amendement précis? Je ne vous demande pas de le faire maintenant, mais l'article 2 devrait-il être amendé?

  (1705)  

    Oui, si la Couronne ou le Canada a l'intention d'inclure les revendications qui peuvent avoir été abandonnées parce que le délai est dépassé, et si nous avons accès à cela, alors il faut se demander quelle loi a préséance. Est-ce que ce sont les articles d'exonération des traités ou bien les dispositions du projet de loi C-30 concernant l'accès? Nous aimons croire que cette question reste ouverte pour l'instant.
    Concernant la composition du tribunal, nous espérons et nous souhaitons que... Ce que nous avons essentiellement, c'est un tribunal composé de juges des cours supérieures. Comme nous le disons dans notre mémoire, il y a peut-être un ou deux citoyens des premières nations dans l'ensemble du Canada qui sont des juges de cours supérieures, et aucun n'est originaire du Yukon. Pour avoir une certaine crédibilité et une certaine acceptation lorsque nous présentons ces revendications sur la question dont nous venons de parler — à savoir si vous êtes un revendicateur ou non — et compte tenu du fait que nos juges peuvent être aussi impartiaux dans l'examen de l'administration du projet de loi C-30, dans sa forme actuelle, que d'autres juges, alors nous voulons avoir cette capacité également.
    Alors, il n'y aurait aucun obstacle concernant nos nominations, puisque nous répondons à certaines normes minimales qui sont acceptables. Nous croyons que cette approche est équitable.
    Encore une fois, il faudrait un amendement sur la façon dont les nominations sont faites, bien que cela soit en partie défini dans l'accord politique également. Il y a deux documents qui entrent en ligne de compte: l'accord politique et l'article du projet de loi qui porte sur les tribunaux.
    Oui.
    Très rapidement, vous m'avez peut-être entendue tout à l'heure poser des questions au sujet de la médiation. Je me demande si vous avez des commentaires à faire à ce sujet; vous avez probablement vu le gouvernement fédéral rejeter la voie de la médiation, puisque c'est ainsi qu'il a l'habitude d'agir. Je ne sais pas exactement quelle a été votre expérience dans ce domaine, mais le gouvernement fédéral a l'habitude de ne pas s'engager dans la voie de la médiation.
    Je me demande si vous voyez un secteur où la médiation serait utile.
    Je crois que la médiation est une excellente chose. En fait, la plupart de nos structures reposent sur des approches consensuelles et ce genre de choses. Je crois que c'est beaucoup plus logique; vous pouvez avoir des solutions plus créatives, des solutions plus acceptables, tout bien considéré.
    Que ce soit la médiation ou d'autres processus, comme la résolution de conflits... Ce n'est pas seulement la médiation. Nous utilisons les cercles et nous avons mis au point des processus par lesquels certains problèmes peuvent être traités et certaines solutions créatives peuvent être appliquées.
    Dans le domaine de la négociation, nous avons vu le Canada dire qu'il a mené des négociations fondées sur des principes. Le problème, c'est que ce n'est pas nécessairement vrai, d'après notre expérience. C'est compréhensible, puisque vous avez une grande organisation qui a de la difficulté à s'adapter à certaines situations. Toutefois, vous avez une occasion ici d'intégrer une chose comme celle-là, de commencer à vous servir de certains processus qui sont utilisés, comme les cercles de conciliation, entre autres. Notre système d'administration de la justice commence à appliquer ces modèles pour cerner et régler les problèmes.
    Je crois que ce serait très bien si vous pouviez intégrer ces choses. C'est un aspect important.
    Vous avez donc des modèles et des exemples qu'on pourrait utiliser pour être efficace.
    Merci.
    Le dernier intervenant sera M. Albrecht, du Parti conservateur.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais vous remercier tous les deux de comparaître ici aujourd'hui.
    Je crois comprendre que, de façon générale, vous êtes en faveur du projet de loi C-30et des questions qu'il traite. Je crois que c'est une bonne nouvelle, compte tenu du nombre important de revendications en suspens que nous avons au Canada, d'autant plus que le délai moyen de traitement est d'environ 13 ans. Ce projet de loi, espérons-le, améliorera les choses.
    Je me demande si vous pouvez nous dire combien de revendications particulières font actuellement l'objet d'un examen au Yukon. C'est possible que vous l'ayez déjà dit et que je ne l'aie pas entendu.
    Je crois qu'il y a entre 15 et 30 revendications particulières en suspens à l'heure actuelle.
    De 15 à 30?
    Approximativement, oui.
    Je ne m'attends pas à ce que vous ayez un chiffre précis, mais pouvez-vous nous dire approximativement depuis combien de temps ces revendications sont examinées? Cela fait-il longtemps, ou y a-t-il des revendications plus récentes? Pouvez-nous dire aussi l'ordre de grandeur de ces revendications?

  (1710)  

    Certaines revendications sont en suspens depuis environ 1974. Je sais que d'autres revendications dont je me suis occupé ont duré plus de dix ans. L'ordre de grandeur des revendications, sur le plan des compensations monétaires, ne dépasserait pas la limite prévue dans le projet de loi C-30, selon moi.
    Vous avez dit, je crois, dans votre exposé, que vous étiez en faveur de la limite de 150 millions de dollars prévue dans le projet de loi, probablement parce que vous n'avez pas de revendications au-delà de cette somme. Mais si c'était le cas — et je suis certain que vous avez des collègues dont les revendications dépassent les 150 millions de dollars — seriez-vous toujours d'avis que la limite de 150 millions de dollars est satisfaisante, en ce sens qu'on règle les revendications de moins de 150 millions de dollars et les autres continuent d'être traitées comme elles le sont actuellement, par le cabinet?
    Pour certaines revendications particulières, la limite est raisonnable. Dans d'autres secteurs, ce sont des revendications globales. C'est un processus différent. Je ne veux pas mêler les deux, parce que certaines revendications globales entrent dans une catégorie différente. Toutefois, en général, pour ce qui est des revendications particulières dont nous parlons, aucune ne pourrait dépasser cette limite, que je sache. Nous aimerions cela, mais...
    Eh bien, je crois qu'implicitement, dans la formulation actuelle de la loi, il y a un trou noir. Qu'arrive-t-il si une revendication particulière dépasse le plafond monétaire au Yukon? Est-ce encore une revendication valable? Nous ne connaissons pas la réponse à cette question pour l'instant, mais le vide qui peut exister est, en effet, une question préoccupante pour nous, parce que tous les moyens de défense que la Couronne ne peut pas utiliser qui se trouvent actuellement dans le projet de loi C-30 au-delà du plafond prévu — les nombreux délais prévus pour la présentation d'une revendication — pourraient devenir des moyen de défense que la Couronne ou le Canada pourrait vouloir utiliser dans le cas d'une revendication qui dépasserait ce plafond. Et cela est effectivement une question préoccupante pour nous, en ce qui concerne l'établissement et la catégorie de cette même revendication et le fait qu'elle pourrait être bloquée de cette façon.
    J'aimerais changer de sujet et aborder la question de la consultation.
    Je me souviens très clairement, en juin dernier, d'avoir été dans la salle juste à côté avec le ministre des Affaires indiennes, le chef Fontaine et le premier ministre, lorsque le plan d'action relatif aux revendications particulières a été annoncé. Puis, en novembre 2007, le ministre Strahl et le chef Fontaine ont signé ensemble l'entente politique qui accompagne cette réforme des revendications particulières.
    Depuis ce temps, nous avons aussi tenu une conférence de presse, lors de laquelle le chef Fontaine a affirmé ceci: « Le processus de collaboration mené par l'Assemblée des Premières nations et le gouvernement du Canada en vue de revoir le processus de règlement des revendications particulières a été efficient, efficace... ».
    Depuis ce temps, un certain nombre de témoins ont comparu devant notre comité pour nous faire part de leurs points de vue. Selon vous, les efforts de consultation, de discussion, de dialogue — peu importe le terme utilisé — ont-ils été suffisants? Avez-vous eu l'occasion de faire valoir votre point de vue? Les gens que vous représentez ont-ils été bien représentés?
    Si vous pouvez répondre à quelques-unes de ces questions, je vous en saurais gré.
    Comme je l'ai déjà dit, nous avons participé. Nous nous sommes entretenus avec l'Assemblée des Premières nations; nous sommes allés à des réunions pour discuter de certains sujets. À savoir si cela a été suffisant, c'est une grande question.
    Comme je l'ai dit, il y a place à amélioration. Nous avons fait remarquer qu'il pourrait y avoir des amendements — nous en voyons peut-être — mais compte tenu de notre situation actuelle, c'est un pas important. Nous sommes d'avis qu'il faut faire avancer ces dossiers. Nous aimerions voir certaines choses, comme je l'ai dit, qui pourraient améliorer le projet de loi, mais compte tenu de notre situation actuelle, c'est très important.
    C'est pourquoi nous appuyons cette mesure. C'est un pas important. Ce n'est pas nécessairement là où nous voulons en arriver, mais c'est un pas important.
    Je crois comprendre que vous n'avez pas eu accès au projet de loi lui-même lors des consultations, mais vous étiez au courant des principes généraux qui allaient être mis de l'avant, et certains de vos représentants ont participé au groupe de travail. Une des choses que nous entendons sans cesse, c'est que la limite de 150 millions de dollars n'est peut-être pas suffisante. Je me demande si cette question a été souvent soulevée par vos collègues qui représentent d'autres groupes des premières nations.

  (1715)  

    Je sais que cette question a été abordée parmi les dirigeants. Personne ne souhaite ce genre de plafond, mais en même temps, je répète que lorsque nous avons examiné la chose au Yukon, nous avons réalisé que nous devions aller de l'avant. Dans notre représentation, nous voulons respecter les autres premières nations qui dépasseront cette limite. Nous ne voulons pas leur nuire, mais ce qui importe, c'est d'avancer. C'est pourquoi nous avons dit que nous avons examiné la chose et nous sommes prêts à aller de l'avant.
    Vous avez dit au début de votre exposé, je crois, que nous devrions en faire notre première priorité.
    Merci, monsieur Albrecht. Nous terminons presque à temps avec cette dernière observation.
    Je tiens à remercier les témoins.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, très rapidement, lorsque nous serons de retour après le congé, le 31 mars, nous tiendrons notre séance supplémentaire. Pour l'instant, les représentants des chefs régionaux de l'APN de la Colombie-Britannique et de l'Alberta et ceux du Secrétariat de la nation algonquine ont confirmé leur présence. Il y a dix autres invitations qui sont restées sans réponse. Nous espérons que quelques-uns des groupes invités, mais pas tous, seront ici ce jour-là.
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.