Passer au contenu
;

AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document







CANADA

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 022 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 13 mai 2010

[Enregistrement électronique]

(0855)

[Traduction]

    Est-ce que les membres du comité et les témoins peuvent prendre place à la table, s'il vous plaît?
    La séance est ouverte. Il est bien agréable d'être ici à l'Île-du-Prince-Édouard, dernier arrêt dans notre périple d'un bout à l'autre du pays pour l'étude de l'agriculture de l'avenir. J'aimerais remercier tous les témoins d'être ici ce matin. Agriculteur moi-même, je sais ce que c'est que de prendre une journée, ou une partie de journée, loin de la ferme, mais c'est très important et nous sommes heureux d'entendre votre avis sur la question.
    Sept personnes vont présenter des exposés ce matin. Nous avons beaucoup moins de témoins pour la deuxième partie de la réunion, alors, si le comité est d'accord, il se pourrait que je prolonge la présente séance de 10 minutes, si nous pouvons avoir cette flexibilité.
    Je demande à nos témoins de limiter leur déclaration préliminaire à une période de cinq à sept minutes. Je vais faire preuve de souplesse si je pense que vous arrivez à la fin de votre exposé, mais après cinq minutes, je vous ferez signe pour vous indiquer qu'il vous reste deux minutes.
    Si vous avez des observations écrites que vous n'arrivez pas à lire en totalité, pourriez-vous, s'il vous plaît, les remettre à Isabelle, la greffière, à la fin de la réunion? Chacun des membres du comité en recevra une copie, alors, vous aurez tout de même fait votre exposé.
    Sans plus tarder, nous allons céder la parole à Morgan Smallman.
(0900)
    Je vais briser la glace. Je m'appelle Morgan Smallman.
    Avant de commencer, j'aimerais poser une question. C'est mon point de vue. Je veux savoir pourquoi le mois de mai a été choisi pour entendre des histoires et des arguments sur l'avenir de l'agriculture. Je pose cette question parce que le printemps est la période de préparation et la période des semailles. Il s'agit d'un moment crucial pour ensemencer, facteur qui influe sur la croissance de nos cultures pendant le reste de la saison. Je soulève cette question parce que je crois que le Canada est devenu de plus en plus déconnecté de l'agriculture.
    Je viens d'une ferme familiale qui est située dans l'ouest de l'Î-P.-É. et qui est actuellement exploitée par mon père, mon oncle et ma grand-mère. La ferme appartient à ma famille depuis plus de 125 ans et nous avons toujours eu un mélange de culture et d'élevage. Au cours des années, la ferme familiale s'est concentrée davantage sur l'élevage du porc et sur la culture du blé pour nourrir les porcs, ainsi que sur la culture de la pomme de terre de table et de transformation.
    Notre ferme fonctionne de cette façon depuis plus de 20 ans, chaque année amenant son lot de nouvelles règles et de nouveaux règlements que les politiques canadiennes nous imposent. J'ai toujours eu de l'intérêt pour l'agriculture, en particulier pour les activités de la ferme. J'ai regardé mon père s'occuper des animaux et des cultures. Il m'a enseigné beaucoup de leçons qui m'accompagneront pour le reste de ma vie, leçons que j'espérais utiliser pour poursuivre l'exploitation de la ferme familiale.
    Sachant que l'agriculture est une industrie qui s'oriente de plus en plus vers la technologie et qui se rapproche de plus en plus d'une entreprise, j'ai décidé de continuer mon éducation après avoir obtenu mon diplôme d'études secondaires, et j'ai fréquenté le Collège d'agriculture de la Nouvelle-Écosse. J'ai suivi un cours de baccalauréat en sciences dans le domaine de l'économie agricole et je pensais que ces nouvelles compétences que j'allais acquérir allaient m'aider à apporter un regard plus jeune et plus moderne sur l'exploitation de notre ferme familiale. Malheureusement, la taille de la ferme a diminué et avec la fermeture de l'usine de transformation du porc de l'Î.-P.-É, notre famille a jugé qu'il n'était pas faisable de payer le transport de nos porcs jusqu'en Nouvelle-Écosse étant donné que le prix du porc était si faible, alors, l'exploitation mixte que notre famille avait exploité pendant des années est maintenant devenue une exploitation de cultures commerciales de pommes de terre et de grain.
    Voilà pour l'histoire. Voilà maintenant pour le problème. J'ai 23 ans. J'ai fréquenté l'université. J'ai contracté une dette pour payer mes frais de scolarité et je veux être agriculteur. Combien de jeunes gens entendez-vous dire cela? Tout cela semble merveilleux, je sais, mais combien d'établissements vont financer un jeune de 23 ans pour acheter une exploitation agricole comprenant des terres, de la machinerie agricole, des bâtiments et, évidemment, sa propre dette? Laissez-moi vous rappeler que nous parlons d'un jeune de 23 ans qui n'a pas de nantissement, qui a déjà contracté une dette considérable.
    Ma famille a travaillé fort pour bâtir cette entreprise du mieux qu'elle a pu, et elle mérite d'avoir un juste prix pour tout le mal qu'elle s'est donnée pour y parvenir. Le problème, comme je l'ai dit plus tôt, c'est que je ne peux me permettre d'assumer le risque, ni même de payer pour cela aujourd'hui, surtout avec l'incertitude qui règne sur les marchés dans le cas de notre industrie.
    Nous, les jeunes agriculteurs, avons besoin d'aide. Nous voulons produire des aliments pour le reste du pays, pour nos amis, pour nos familles et pour nos voisins, des aliments que nous savons être salubres, des aliments que nous connaissons. Pourquoi ne peut-il pas y avoir un programme pour encourager les jeunes agriculteurs comme moi et d'autres dans cette salle, pour nous aider à entrer dans une industrie qui peut supporter un pays? Pourquoi n'investirions-nous pas de l'argent dans notre propre agriculture pour faire en sorte qu'elle puisse exister plutôt que de dépenser de l'argent sur le transport des aliments provenant d'autres pays? Pourquoi ne pourrait-il pas y avoir des programmes plus solides de gestion des risques pour les jeunes agriculteurs — même des prêts sans intérêt ou à faible taux d'intérêt seraient utiles — pour faire en sorte que nous puissions faire ce que nous aimons faire?
    Les agriculteurs sont des investisseurs. Ils ne peuvent s'accrocher à l'argent. Les agriculteurs font tourner l'économie. Ils sont toujours à la recherche de nouvelles façons d'améliorer leurs activités, que ce soit par l'achat d'équipements neufs, la rénovation de certains vieux bâtiments, l'acquisition d'un nouveau camion et la liste n'est pas terminée. À l'Île-du-Prince-Édouard, en particulier, l'agriculture fait vivre beaucoup de monde. J'ai entendu dire d'innombrables fois — et je crois que c'est vrai — que lorsque les agriculteurs ont de la difficulté, tout le monde a de la difficulté.
    Merci d'avoir écouté ce que j'avais à dire.
    Merci beaucoup, Morgan.
    Concernant votre question au sujet du voyage, en tant qu'agriculteur, je suppose que j'ai toujours dit qu'à moins que ce soit la première semaine de janvier, ce n'est jamais le bon moment. Le présent comité, depuis presque six ans que je suis à Ottawa, n'a jamais voyagé pour aller rencontrer les agriculteurs. Nous reconnaissons le fait que c'est le temps des semailles et que cela enlève du temps précieux, mais nous avons pensé que c'était beaucoup plus facile. Un jeune homme nous a dit hier, en Nouvelle-Écosse, qu'il s'était demandé s'il pouvait même prendre le temps de venir hier, mais il a dit qu'il est certain qu'il n'aurait jamais pu venir si la réunion avait eu lieu à Ottawa. Je sais que ce n'est jamais parfait, mais de toute façon, nous voulions venir vous voir.
    Notre prochain témoin est Gerard Mol, pour cinq à sept minutes.
(0905)
    Je m'appelle Gerard Mol. J'ai immigré de Hollande il y a 23 ans avec mon père. Nous avons commencé par une ferme de production de pommes de terre. Nous avons fait un peu de diversification au cours des 8 à 10 dernières années, et nous avons commencé à cultiver le canola, le maïs, le soya, le lin, différents produits.
    Nous avons acheté un appareil pour faire du carburant, pour commencer à battre l'huile de canola en vue de la fabrication de carburant et pour la consommation humaine. Nous ne sommes pas encore rendus à la consommation humaine, mais nous essayons d'y arriver. Nous exportons également du canola au Japon et nous aurons des cultures différentes à partir de l'année prochaine pour les exporter au Japon. Nous faisons de la recherche sur quatre ou cinq cultures différentes. Alors, voilà un peu de contexte.
    Je suis arrivé ici à l'âge de 17 ans, essentiellement. Nous avons commencé à investir immédiatement et, comme Morgan vient de le dire, nous avons commencé à faire un peu d'agriculture. Je suis allé chez Financement agricole Canada; à ce moment-là, cet établissement ne voulait rien savoir de moi. La SAT non plus. De toute façon, le type qui m'a vendu la terre était prêt à me prêter l'argent pendant l'année et c'est de cette façon que j'ai débuté, un peu par moi-même. De toute façon, il y a une occasion, mais c'était il y a 23 ans et les choses ont changé.
    Je suis heureux d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui et j'ai moi aussi un problème de temps. Je suis occupé dans les champs et tout le reste.
    Je trouve que l'agriculture à l'Î.-P.-É., c'est comme la pêche à la morue à Terre-Neuve. Nous savons tous ce qui est arrivé à Terre-Neuve — la morue a disparu et Terre-Neuve s'y retrouvée dans le pétrin. Je pense que c'est la même chose pour l'agriculture ici à l'Î.-P.-É. Lorsque l'agriculture aura disparu de l'Î.-P.-É., il ne restera plus rien et c'est un sérieux problème. Je pense que nous ne sommes pas très loin de ce moment-là. Évidemment, nous devons chercher à voir comment nous pouvons éviter cela. Je pense que nous sommes déjà rendus beaucoup trop loin pour pouvoir faire marche arrière complètement, mais peut-être pouvons-nous le faire.
    Ce qui arrive, c'est que c'est vraiment en train de devenir un marché mondial et c'est un problème. Nous sommes une province exportatrice et nous avons perdu des marchés pour des questions politiques, des questions de transport et également, certaines personnes ignoraient comment faire de l'agriculture, plus ou moins.
    Cela nécessite beaucoup d'efforts d'adaptation au marché de la part des agriculteurs. Nous ne pouvons pas trouver des marchés pour nos produits comme c'était le cas auparavant. Je ne me serais jamais attendu à devenir un exportateur de certains produits. Je croyais que j'aurais une ferme. Mais je pense que c'est dans cette direction que nous allons. La salubrité des aliments est devenue une importante question de commercialisation. Nous, les fermiers, produisions des aliments sûrs depuis 100 ans, et nous continuons de le faire, alors, je trouve que c'est un problème important. Pourquoi ajouter des coûts supplémentaires aux agriculteurs?
    Nous avons maintenant un programme d'investissement. Auparavant, il s'agissait du PCSRA. En tant qu'agriculteur, je n'aime pas recourir à ces programmes. Donnez-moi le coût de production et un petit supplément pour survivre et je serai heureux. Mais au cours des dernières années, tous les agriculteurs avaient bon espoir qu'ils obtiendraient un peu d'argent de certains de ces programmes pour pouvoir rester en affaires. Je pense que le programme n'est pas vraiment bon, mais ce qui importe, c'est que le gouvernement soit prêt à aider. Mais ce programme ne fonctionne pas. Nous avons une moyenne olympique. Je pense que c'est quelque chose qui doit être abandonné. Peut-être que je me trompe; peut-être que certaines personnes peuvent dire cela.
    J'ai fait de la diversification sur ma ferme au cours des 8, 9 et 10 dernières années et il me semble que plus j'ai fait un effort de diversification, moins j'ai pu retirer d'argent de ce programme. Ce n'est pas parce que je fais de l'argent à partir de cette diversification, mais je reste juste en-dessous du seuil de rentabilité et chaque fois que votre profit diminue, vous ne pouvez pas obtenir d'argent de ce programme. Alors, la moyenne olympique fonctionne et le coût des engrais et des semences augmente. Les hauts et les bas n'existent plus maintenant, alors, il n'y a plus de paiements.
    Voilà pour cette question, et il y a quelques autres points que j'aimerais soulever.
(0910)
    Le dollar américain est une question très importante, de même que l'euro à l'heure actuelle. McCain fait maintenant venir des frites en Amérique du Nord à partir de l'Europe, à cause du dollar américain.
    La salubrité des aliments — les OGM sont un problème. Je ne sais pas comment nous pouvons aborder certaines de ces choses, mais je pense que nous devrions les examiner. La production des semences est également contrôlée par certaines de ces grandes entreprises et je pense que les agriculteurs devraient avoir une plus grande participation dans ce domaine.
    Je vais m'arrêter ici et peut-être que vous aimeriez en discuter plus tard et voir ce que nous pouvons faire.
    Merci beaucoup, Gerard.
    C'est maintenant au tour de Raymond Loo.
    J'aimerais vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole devant vous. Nous travaillons en assez étroite collaboration sur beaucoup de questions dont Gerard vient tout juste de parler, l'expédition internationale et le reste.
    Je suis un agriculteur biologique. Il s'agit de la sixième génération, du côté de ma mère, qui exploite la ferme; alors, nous sommes là depuis pas mal de temps. Mon père est arrivé de Hollande et il a épousé toute la question de la révolution verte et il a coupé les haies, et tout le reste. Maintenant, nous replantons les haies; alors, il est curieux comme les choses suivent le mouvement du balancier.
    Nous avons vu au cours des dernières années que l'industrie de la culture biologique connaît une croissance assez rapide. Nous trouvons beaucoup de nouveaux marchés et de nouvelles occasions. Mais les normes canadiennes se sont révélées pour nous un défi important parce qu'aux États-Unis, ils ont déjà l'équivalence avec le Japon. Ils travaillent sur l'équivalence avec l'UE et cela leur donne un gros avantage pour ce qui est de l'expédition. Nous devons encore payer un supplément d'environ 1 000 $ pour notre ferme pour arriver à la norme agricole japonaise, tandis qu'aux États-Unis, cela coûte 50 $. Alors, c'est une différence considérable.
    Toute la question des OGM est également un enjeu important du point de vue biologique, mais également du point de vue traditionnel, parce que nous expédiions du canola cultivé traditionnellement sans OGM au Japon, que Gerard et beaucoup d'autres agriculteurs font pousser à l'Î.-P.-É.
    Nous devons déterminer à qui profite les cultures génétiquement modifiées, aux agriculteurs ou plutôt aux entreprises qui produisent les semences.
    Je veux simplement raconter quelque chose qui m'est arrivé l'automne dernier et qui m'a vraiment frappé. Je me suis rendu dans beaucoup de pays européens, mais j'étais au Danemark en train de négocier avec une entreprise d'aliments pour animaux et j'ai eu un choc lorsqu'une femme à Tvis m'a dit qu'elle ne voulait pas mettre la mention « Produit du Canada » sur son produit. L'entreprise achète actuellement le soya biologique de Chine. Elle s'inquiétait de mettre la mention « Produit du Canada » sur l'étiquette parce qu'elle pensait qu'elle aurait de la difficulté à vendre le produit, parce que le Canada a si mauvaise réputation du point de vue de l'environnement et du point de vue de la contamination par les OGM. J'étais là-bas pour discuter de la vente de farine de canola sans OGM et de soya biologique sans OGM.
    Je suis allé dans le bureau de Wayne Easter et j'ai obtenu des drapeaux du Canada que j'ai collés partout sur mes bagages. C'était la première fois que j'entendais quelqu'un me dire qu'il était préférable d'aller chercher le produit en Chine plutôt qu'au Canada pour pouvoir le vendre. Cela a été pour moi un véritable cri d'alarme.
    J'ai dû expliquer que je venais d'une île de la côte Est du Canada, que nous avions ici une grande capacité de production sans OGM, et ainsi de suite. C'est simplement quelque chose qu'il faut garder à l'esprit du point de vue du commerce international. Tout le monde a entendu parler des questions concernant le lin. C'est une grosse affaire.
    Certaines des choses que nous devons faire pour faire commerce... Les agriculteurs sont constamment remis en question. Nous produisons depuis longtemps, mais nous ne travaillons pas nécessairement aussi fort sur le marché. Nous comptons sur d'autres pour commercialiser nos produits après que nous les avons produits et je pense qu'en tant qu'agriculteurs, nous devrions faire un meilleur travail pour commercialiser nous-mêmes nos produits.
    Nous avons reçu beaucoup d'aide de la part du gouvernement provincial pour aller dans des foires commerciales au Japon. Nous avons fait six voyages aller-retour, je pense, à l'exposition FOODEX et je dirais que beaucoup de programmes fédéraux ne sont vraiment pas conçus pour aider nécessairement les agriculteurs. Ils s'adressent davantage aux entreprises. Peut-être qu'ils ne s'attendent pas à ce que des agriculteurs individuels essaient de vendre leurs produits directement aux consommateurs, mais je vois cela comme une occasion pour nous de pouvoir faire un meilleur travail à cet égard.
    Ce que nous faisons, c'est que nous établissons le profil de tous les agriculteurs, nous racontons leur histoire. Si vous achetez un pot de confiture au Japon, nous pouvons remonter jusqu'à l'agriculteur et nous pouvons donner le profil de la famille et nous avons un site Web de manière que les gens puissent voir la famille. Alors, nous voulons établir un contact et nous voulons que les consommateurs prennent conscience que lorsqu'ils achètent quelque chose, ils aident un agriculteur particulier ici.
    Nous pouvons faire la même chose avec le canola et avec toutes les différentes cultures, parce que nous avons maintenant la capacité en matière de traçabilité. Mais de notre point de vue d'agriculteur, c'est quelque chose de tout nouveau pour nous.
    Je suis beaucoup plus intéressé à avoir une discussion. Je ne parlerai pas plus longtemps. Si j'avais aimé prêcher, je serais devenu pasteur. Je préfère avoir des questions et réponses plus tard; alors, je vais laisser la place à quelqu'un d'autre.
(0915)
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant accueillir le Syndicat national des cultivateurs et je suppose que c'est Sally Bernard qui fera l'exposé. Sept minutes, s'il vous plaît.
    Bonjour. Me voici. Je suis votre fille. J'ai 27 ans, je suis une femme, je suis une agricultrice. Je suis une rareté, parce que je suis agricultrice dans un secteur en croissance, et non en déclin. J'aide à gérer une exploitation agricole de grains biologiques de 550 acres. Nous produisons également du poulet et de l'agneau biologiques. Je suis fière de la façon dont nous gérons notre terre et j'ai confiance que nous faisons les choses de la bonne manière.
    Vous avez fait beaucoup de chemin pour la trouver, mais me voilà. Je suis une agricultrice et j'en suis fière. À titre de directrice de la section jeunesse du Syndicat national des cultivateurs à l'Î.-P.-É, je suis ici pour représenter nos jeunes agriculteurs inquiets et, à première vue, cela semble probablement mon rôle principal. Mais je dirais toutefois que mon rôle de mère dans une famille agricole est sans doute mon rôle le plus important dans les circonstances. Dans le secteur de l'agriculture plus que dans d'autres domaines, les parents espèrent bâtir un héritage et une entreprise qu'ils pourront léguer à leurs enfants dans l'espoir de leur permettre d'élever une famille et de gagner leur vie sur la terre dont ils ont pris grand soin, comme les générations précédentes l'ont fait avant eux.
     Même dans un secteur en croissance comme les grains biologiques, ma famille est de plus en plus incertaine d'avoir quelque chose à léguer. Alors, en tant que jeune agricultrice, il m'est difficile d'être enthousiasmée par l'idée de passer ma vie à bâtir une entreprise que personne ne voudra reprendre ou même acheter.
    Au fur et à mesure que les Canadiens deviennent de plus en plus dépendants à l'égard des aliments importés produits à rabais, notre communauté agricole ici encaisse chaque jour des coups de plus en plus durs. Alors que l'agriculture vraiment durable repose sur une approche de systèmes, par exemple, que le grain produit pour l'alimentation des animaux dépend de l'engrais provenant de ces mêmes animaux, une fois qu'un des éléments du cycle a disparu, la communauté tout entière s'effondre. Malheureusement, c'est exactement ce que nous voyons à l'heure actuelle. Il semblerait que la politique actuelle consiste à abandonner les produits qui ne sont pas rentables et à concentrer les ressources sur ceux qui le sont, qui sont plus gros ou plus nouveaux. Il faut reconnaître que cela peux sembler un choix judicieux du point de vue fiscal, mais c'est une idée tout à fait ridicule dans la logique du cycle de la production alimentaire durable.
    Tant que tout le monde qui occupe un poste d'autorité ne reconnaîtra pas l'importance de chacun des aspects de l'agriculture, l'agriculture canadienne continuera de décliner à un rythme croissant et ce déclin est directement proportionnel à la vitesse avec laquelle nous continuons de perdre de jeunes agriculteurs et que nous échouons à en attirer de nouveaux.
    Toutefois — et voici la solution —, très récemment, le SNC a commencé à travailler sur un projet pour examiner le développement d'un système national de commerce équitable au sein du Canada. Après une série de consultations auprès de divers intervenants dans le domaine de la production alimentaire, y compris les détaillants, les spécialistes en marketing, les chefs cuisiniers, les consommateurs et, évidemment, les agriculteurs, certains éléments logistiques ont été décrits en vue de l'élaboration d'un tel système. Il a été établi que si les agriculteurs ne font pas d'argent, ce n'est pas parce qu'il n'y en a pas, puisque nous savons qu'il y en a dans le système plus vaste, du consommateur vers l'agriculteur. Les données statistiques montrent que depuis 1995, malgré une baisse de 40 p. 100 dans les paiements versés aux agriculteurs, les consommateurs ont constaté une hausse de 22 p. 100 des prix dans les magasins. L'argent est réparti inéquitablement au sein du système alimentaire à cause d'un énorme déséquilibre du point de vue économique et du point de vue du pouvoir des agriculteurs qui ont besoin d'un plus grand rapport de force sur les marchés pour traiter avec les fournisseurs, les acheteurs et les détaillants de plus en plus concentrés. Il y a des consommateurs qui se soucient véritablement de la survie de la ferme familiale au Canada et, malgré toutes leurs bonnes intentions, ne savent tout simplement pas quelle est la meilleure façon de l'appuyer. Un système national de commerce équitable serait fondé sur une relation mutuellement avantageuse pour l'agriculteur qui reçoit un juste prix, pour le consommateur qui paie un juste prix et pour les intermédiaires qui prélèvent un montant raisonnable pour les coûts de distribution.
    L'utilisation de la commercialisation d'un produit équitable qui garantit aux consommateurs qu'ils appuient un agriculteur et non une entreprise serait profitable non seulement pour l'agriculture canadienne, mais elle aiderait à accroître la sensibilisation au sujet de l'importance de conserver notre propre système alimentaire. Le commerce équitable national servirait à créer un nouveau degré de confiance au sujet de la provenance et de la salubrité des aliments, établissant des relations à long terme fondées sur le respect et la confiance entre les consommateurs et les producteurs. À l'occasion, les agriculteurs ont été représentés comme des gens qui ne se souciaient pas de l'environnement ou qui refuseraient de collaborer avec les nouvelles lois, mais souvent, ils n'ont tout simplement pas les moyens de mettre en oeuvre des changements coûteux à des méthodes de production qui ont résisté à l'épreuve du temps. Grâce à un système national de commerce équitable, la production adhérerait à des normes sociales, démocratiques et écologiques, que les agriculteurs aimeraient beaucoup avoir les moyens de mettre en oeuvre et que les consommateurs seraient heureux d'appuyer.
    Par sa nature même, le commerce équitable national sert à revitaliser le sens communautaire et ramène la vie dans les régions rurales du Canada. Si l'agriculture canadienne ne parvient pas à établir un lien durable avec les Canadiens, notre secteur agricole est condamné en partant. Un système national de commerce équitable commencerait à créer un lien entre les consommateurs et l'origine de leurs aliments, assurant un marché fort pour les produits agricoles canadiens ici même à la maison. Très peu de gens contesteraient l'idée que la vie sur la ferme est un endroit idéal pour élever une famille, avoir une bonne qualité de vie en produisant des aliments pour soi et pour les autres. Grâce à des visites sur les fermes et à des visites dans les écoles, de nombreux agriculteurs vous diront que de nombreux enfants sont véritablement intéressés à en savoir plus, à passer plus de temps sur la ferme et à envisager d'y vivre. Le commerce équitable national est un moyen très réalisable de maintenir ces rêves et de susciter des vocations agricoles au Canada.
    Merci.
(0920)
    Merci beaucoup, Sally.
    C'est maintenant au tour de Mike Nabuurs, de la P.E.I. Federation of Agriculture, de prendre la parole.
    Nous avons un exposé conjoint. Ernie Mutch est le président de l'association, alors, il va commencer.
    C'est très bien.
    J'aimerais remercier le comité permanent de l'invitation à faire un exposé.
    Puisque nous sommes la dernière province à vous parler, je pense que vous avez probablement déjà tout entendu. J'ai toujours été de ceux qui croient que plus vous entendez quelque chose souvent, qu'en bout de ligne, il doit bien y avoir un peu de vérité dans ce que vous avez entendu.
    De toute façon, la P.E.I. Federation of Agriculture est le plus important organisme agricole général de l'Î.-P.-É., représentant plus de 600 agriculteurs particuliers, et notre conseil de direction est constitué de représentants de chacun des principaux groupes de produits et des organismes de production agricole.
    Le but des discussions d'aujourd'hui, tel que nous le comprenons, c'est de voir comment encourager les jeunes ou de nouvelles personnes à s'intéresser à une carrière dans la production agricole primaire canadienne. Nous avons entendu certains jeunes agriculteurs déjà ce matin et il est clair que nous voyons à l'horizon des défis importants. Pourtant, ils sont optimistes et ils ont l'énergie pour foncer de l'avant et trouver des solutions. Nous allons avoir besoin d'une partie de cet optimisme et de cette énergie pour faire les changements qui s'imposent dans les politiques fédérales et provinciales afin de soutenir l'agriculture au pays.
    La première chose que nous devons reconnaître, c'est que planifier l'avenir est une bonne idée, mais planifier l'avenir sans reconnaître les besoins immédiats n'a aucun sens. Si nous pouvons stabiliser les défis actuels, alors, l'avenir, dans une certaine mesure, prendra soin de lui-même. Si l'agriculture est rentable, des nouveaux arrivants se pointeront d'eux-mêmes.
    Les besoins immédiats de nos entreprises agricoles doivent être comblés pour stabiliser les secteurs des grains, de l'horticulture et des animaux d'élevage. La meilleure façon de le faire, c'est de corriger les faiblesses du programme Agri-stabilité, qui n'a pas permis d'avoir une gestion des risques appropriée depuis sa création en 2008. Les ministres doivent modifier ces programmes de manière rétroactive, jusqu'à 2008, en mettant en oeuvre les éléments suivants: éliminer les marges négatives et les test de viabilité; donner aux agriculteurs le choix d'avoir soit la couverture de la partie supérieure de 15 p. 100 de la marge de référence soit la participation dans le programme Agri-investissement; augmenter le plafond des contributions au programme Agri-investissement de 1,5 million de dollars de ventes nettes annuelles à 3 millions de dollars de ventes nettes annuelles, contribution à taux double de 22 500  $ à 45 000 $; fournir la marge de référence la plus élevée en utilisant les calculs que ce soit sur une période de référence comportant une moyenne olympique de cinq cas ou une moyenne des trois années précédentes; augmenter la couverture de la marge négative de 60 à 70 p. 100; et accorder plus d'importance aux programmes de gestion des risques de l'entreprise, fondés sur le coût de production plutôt que sur la couverture fondée sur la marge. Ces modifications transformeraient Agri-stabilité en un programme mieux adapté, ayant la capacité de réagir efficacement aux changements touchant les conditions du marché. Le programme parviendrait enfin à satisfaire aux critères acceptés, à savoir être prévisible et être négociable en banque.
    La P.E.I. Federation of Agriculture recommande que le gouvernement élimine la disposition non liée à la GRE contenue actuellement dans la politique d'Agri-flexibilité et travaille avec l'industrie pour s'assurer que le programme dispose de ressources appropriées pour répondre aux besoins des agriculteurs canadiens. Les programmes de gestion des risques de l'entreprise doivent être flexibles pour tenir compte des différences régionale dans l'ensemble du pays. Il n'y a pas de solution universelle. C'est pourquoi Agri-flexibilité a été créé, pour tenir compte des différences régionales et créer de l'innovation pour améliorer ces différences qui coexistent. Nous applaudissons les efforts du gouvernement pour tenir compte de la réalité, mais cette reconnaissance doit s'appliquer également aux programmes de gestion des risques de l'entreprise. Un excellent exemple démontrant où les programmes de gestion des risques d'entreprises ont échoué dans la région de l'Atlantique, c'est dans le secteur du porc. Les problèmes touchant le secteur du porc étaient censés être réglés par l'intermédiaire du programme de transition des exploitations porcines, qui encourageait les producteurs à quitter l'industrie. Cette politique a été mise en oeuvre pour réduire la production nationale de porcs. La région de l'Atlantique ne contribue pas à la surproduction de porc au Canada. Nous sommes des importateurs nets de viande rouge. Pourquoi nos producteurs de porcs devraient-ils être encouragés à quitter l'industrie à cause d'un problème de surproduction dans l'Ouest du pays? Si on travaille sur une base régionale, tous nos programmes agricoles seront la seule façon de faire face à la situation à long terme et de créer de la stabilité dans le secteur agricole pour les générations à venir.
(0925)
    Je vais terminer l'exposé.
    Un autre domaine où la politique fédérale nécessite une attention immédiate est le cadre réglementaire pour les agriculteurs canadiens comparativement à ce qui existe pour les produits agricoles importés au Canada. Sommes-nous certains que tous les aliments importés au Canada répondent à la même norme que celle que les agriculteurs canadiennes doivent respecter? Est-ce que les exigences de l'Agence canadienne d'inspection des aliments sont respectées dans les autres pays où les produits sont cultivés ou transformés et ensuite, importés au Canada? Est-ce que les normes et les exigences alimentaires canadiennes font même l'objet de discussions lorsque que les ententes commerciales sont sur la table?
    Si la réponse à ces questions est « non » ou « nous n'en sommes pas certains », alors, nous plaçons l'agriculture canadienne dans une situation de désavantage, compromettant ainsi la sécurité alimentaire et la production alimentaire futures du pays.
    Payer les agriculteurs pour des biens et services environnementaux se fait aux États-Unis et en Europe. Reconnaître la valeur de préserver le capital naturel pour le reste de la société est crucial pour la durabilité de l'agriculture de notre pays. Payer pour les services environnementaux n'a pas un effet de distorsion du commerce. Le travail que font les agriculteurs pour protéger l'environnement est un avantage non seulement pour eux-mêmes, mais également pour leur communauté. Pourquoi le coût total devrait-il être assumé par les seuls agriculteurs? D'autres régions dans le monde ont reconnu cela et le Canada doit également le faire maintenant ou risquer de reléguer nos agriculteurs encore plus loin dans la course à la concurrence.
    Notre pays a besoin d'une stratégie alimentaire à long terme. Nous devons définir certains objectifs et mettre en place un processus pour leur réalisation. Ce développement de la stratégie n'est pas le travail du gouvernement. L'élaboration d'une stratégie alimentaire nationale à long terme est le travail de la collectivité agricole. Une fois que les intervenants de l'industrie agroalimentaire se seront réunis pour définir une stratégie alimentaire nationale, nous aurons besoin des gouvernements, tant fédéral que provinciaux, pour travailler avec nous à sa mise en oeuvre. Cette stratégie axée sur l'alimentation est en voie d'élaboration au niveau national à l'heure actuelle et nous avons bon espoir que le gouvernement travaillera en collaboration avec la collectivité agricole pour réaliser ces objectifs à long terme de manière que l'avenir soit plus certain et encourageant pour les jeunes agriculteurs d'aujourd'hui.
    Il y a des occasions pour l'agriculture et pour les générations futures en agriculture si les bonnes politiques sont mises en oeuvre. Cela signifie élaborer des politiques aussi bien pour les défis d'aujourd'hui que pour ceux de demain. Comment pouvons-nous nous attendre que de nouveaux agriculteurs entrent dans le secteur agricole d'aujourd'hui alors qu'un grand nombre d'agriculteurs d'aujourd'hui cherchent, malheureusement, une porte de sortie?
    Merci.
    Merci beaucoup, Mike.
    Nous entendrons maintenant le Dr Tim Ogilvie du Collège vétérinaire de l'Atlantique.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous souhaite la bienvenue ainsi qu'aux membres du comité permanent, non seulement à l'Î.-P.-É., mais également dans cette belle région de l'Î.-P.-É. C'est ici mon lieu favori. Je vis à quelques localités d'ici.
    J'ai été doyen de Collège vétérinaire de l'Atlantique et je suis maintenant l'ancien doyen, mais quand j'ai entendu dire que votre comité se réunissait à Stanley Bridge, je me suis dit que j'allais dormir un peu, prendre mon petit-déjeuner à la maison et venir vous voir ici plutôt que d'aller à Charlottetown pour le faire. Alors, soyez les bienvenus.
    J'ai également pensé que je saisirais l'occasion pour décrire un peu ce qu'est le Collège vétérinaire de l'Atlantique et ce que nous faisons. Je sais que certains d'entre vous le savent peut-être et peuvent être déjà passé par là. Wayne Easter est un grand défenseur du collège et je me souviens que Mark Eyking y est allé. D'autres peuvent avoir fréquenté le collège également.
    Si les établissements d'enseignement, en formant des diplômés hautement qualifiés, en offrant des services professionnels et en faisant de la recherche, peuvent aider l'agriculture et peuvent faire partie de la solution, j'ai pensé que peut-être vous aimeriez entendre parler un peu du Collège vétérinaire de l'Atlantique. Alors, c'est ce que je me suis préparé à vous décrire.
    Le collège est une faculté de l'Université de l'Île-du-Prince-Édouard depuis 1986. Il est financé en partie par le gouvernement fédéral et les quatre provinces de l'Atlantique le soutiennent maintenant financièrement. Notre budget de fonctionnement s'élève à environ 35 millions de dollars par année et nous avons un fonds de recherche d'environ 25 millions de dollars que nous conservons pour les activités de recherche au collège.
    C'est la seule école de médecine vétérinaire à l'est du Québec ainsi que l'une des cinq qui existent au Canada. Nous sommes un partenaire des écoles de médecine vétérinaire aux États-Unis dans ce sens que nous sommes entièrement accrédités par les organismes d'agrément d'Amérique du Nord, aux États-Unis et au Canada. Il y a 28 collèges vétérinaires aux États-Unis.
    Nous sommes également entièrement accrédités de point de vue international, alors, nos diplômés peuvent pratiquer n'importe où dans le monde. C'est quelque chose de très utile à prendre en considération lorsque nous pensons à la mondialisation de l'agriculture, à l'agriculture animale et à la santé animale.
    Nous avons 240 étudiants inscrits au programme. Cela représente 60 étudiants par année, dont 41 viennent des provinces de l'Atlantique et 19, d'ailleurs dans le monde, principalement des États-Unis, où il n'y a pas suffisamment de places dans les écoles de médecine vétérinaire pour tout le monde. Alors, nous sommes un bon fournisseur de vétérinaires aux États-Unis.
    Il s'agit d'un programme d'études d'une durée de quatre ans et les étudiants doivent à leur arrivée avoir fait entre deux et quatre années d'études pré-vétérinaires pour être admis. Alors, il faut environ huit années d'études, et c'est la même chose partout au pays. C'est la même chose à Guelph qu'ici.
    Nous avons également 50 étudiants de deuxième et troisième cycles. Ce que les gens ne savent habituellement pas, c'est que nous offrons également une formation au niveau du doctorat, de la maîtrise en science et de la maîtrise en sciences vétérinaires.
    Nous avons un corps professoral d'une centaine de personnes et un personnel d'environ 125 personnes. Nous sommes le seul centre de référence et de soins vétérinaires primaires offrant la gamme complète de services du Canada atlantique.
    Nos étudiants suivent un programme d'études très pratiques. Au cours de la dernière année, comme certains des membres faisant partie d'autres groupes de témoins peuvent le confirmer, nos étudiants se rendent sur les fermes pour fournir des services avec les professeurs cliniciens. Ils exercent la médecine pour les animaux de compagnie. Ils vont à Calgary pour suivre des études en médecine liée aux parcs d'engraissement. Ils vont au Québec pour suivre des études en médecine des bovins laitiers. Ils se rendent au Kenya pour suivre des études dans des activités de développement international concernant la santé animale et l'agriculture animale.
    Alors, si l'agriculture animale fait partie d'un système équilibré d'agriculture au Canada, j'aime croire qu'avec votre aide et l'aide d'autres, peut-être que nous pourrons continuer d'aider à trouver des solutions pour la recherche continue et continuer d'offrir de l'aide aux jeunes agriculteurs.
    Une chose que nous essayons de faire à cet égard au CVA, c'est de familiariser très tôt les jeunes à l'agriculture. Nous avons un programme de camp vétérinaire qui est très couru. Pendant quatre semaines, au cours de l'été, nous accueillons 50 étudiants de partout dans le monde, par semaine, pour leur parler en long et en large de la médecine vétérinaire. Ils suivent des cours magistraux donnés par des membres de notre corps professoral, notre personnel et nos étudiants qui leur décrivent les systèmes d'agriculture et d'autres éléments faisant intervenir la médecine vétérinaire.
    Je vous dirais que la liste d'attente pour participer à ce programme est tout aussi longue que la liste d'attente pour être admis à l'école de médecine vétérinaire. Alors, nous essayons d'inculquer à la jeunesse une connaissance de la médecine vétérinaire et de l'agriculture, parce que je suis d'accord pour dire qu'il y a un fossé de plus en plus grand entre les citoyens et l'agriculture telle qu'elle existe aujourd'hui.
(0930)
    Outre l'éducation et la formation des étudiants en médecine vétérinaire, nous réalisons également des programmes de recherche et je crois qu'il y a ici des occasions qui permettraient à l'agriculture de se distinguer, de distinguer ses produits, par le biais de la recherche. Une partie de la recherche que nous effectuons ici au CVA porte sur les domaines de l'épidémiologie vétérinaire, de l'aquaculture et de la santé des poissons, ainsi que de la recherche biomédicale humaine et de la santé humaine. Et lorsque nous pensons à ce que l'agriculture peut être et devrait être en termes de développement et de production d'aliments sains et en termes d'intersection entre la santé publique, la santé environnementale, la santé humaine et la santé animale, je pense que vous pouvez voir qu'il y a plein d'occasions pour la recherche en matière de différenciation et pour le développement de produits durables à partir de bons systèmes d'exploitation agricole qui sont sûrs.
    Merci beaucoup de m'avoir donné cette occasion. Si vous avez des questions, je serai heureux d'y répondre.
    Merci beaucoup, monsieur Ogilvie.
    Nous allons maintenant entendre les derniers témoins de la séance, Patrick Dunphy et Maria Smith, de la P.E.I. Young Farmers' Association.
    J'avais demandé d'être placée au début parce que j'occupe un emploi à l'extérieur de la ferme qui paie mes paiements hypothécaires sur la ferme et, après le travail, je vais travailler sur la ferme. C'est simplement pour dire que j'avais demandé de passer en premier.
    Bonjour et merci de l'invitation pour venir ici aujourd'hui. Patrick et moi sommes ici pour représenter la P.E.I. Young Farmers' Association. Nos membres sont des jeunes agriculteurs âgés de 17 à 30 ans qui proviennent de tous les secteurs de l'agriculture de la province, y compris les grandes et les petites exportations.
    L'histoire de la P.E.I. Young Farmers' Association remonte à il y a longtemps dans cette province, puisque l'association a été fondée en 1948 et qu'elle a continué de faire des efforts et de contribuer à la riche histoire de l'agriculture dans cette province. L'exposé qui suit comprend des défis et des solutions qui ont été signalés par nos membres et porte, en fin de compte, sur des questions nationales et provinciales.
    Comme Larry l'a dit, je m'appelle Maria Smith, et je suis présidente de la P.E.I. Young Farmers' Association. À ma gauche se trouve Patrick Dunphy, le vice-président de l'association, et il va présenter les défis nationaux et les solutions à ces défis signalés par nos membres qui nous ont donné de l'information.
(0935)
    Comme l'a dit Maria, je vais présenter quelques défis nationaux signalés par nos membres. Je vais en faire la liste. Ils sont décrits comme des problèmes et les réponses sont décrites comme des solutions.
    Le premier problème qui a été signalé par une grande partie de nos membres est l'accès au capital et les exigences de financement. La solution serait de faire en sorte qu'il soit plus facile pour les jeunes agriculteurs d'entrer dans l'industrie en offrant des paiements anticipés ou des garanties sur le maximum d'un prêt, et en accordant une aide à cet égard. L'allégement des intérêts sur un prêt constitue un assez bon exemple de cela. Nous avons besoin d'aide, surtout lorsque nous essayons de convaincre un établissement de crédit de croire dans l'industrie agricole canadienne et faire en sorte que cela fonctionne. Peut-être que nous pourrions avoir un programme national à l'intention des jeunes agriculteurs ou une stratégie nationale pour les jeunes agriculteurs.
    Le problème suivant est l'augmentation du coût des intrants et la diminution du rendement de la ferme. Une solution serait de plafonner les prix demandés par les fournisseurs d'électricité, de carburant et d'engrais. Nous avons tous besoin de faire de l'argent. Cependant, si une entreprise garantit un certain pourcentage à ses actionnaires, pourquoi les agriculteurs devraient-ils être pris pour payer la note? Où est le gouvernement lorsqu'il s'agit d'aider à protéger nos agriculteurs contre le mercantilisme de ces entreprises?
    Un autre problème est celui de la réglementation concurrentielle sur le marché mondial. Le Canada n'est plus un meneur dans le domaine de l'innovation et du développement agricoles. Le gouvernement a à toutes fins pratiques laissé tomber les agriculteurs et laissé d'autres pays contrôler les aliments qui entrent au Canada. Le Canada doit protéger ses agriculteurs contre ces règlements et exiger des autres pays qu'ils aient le même protocole que celui qui est exigé de nos producteurs, sous peine de leur interdire l'accès à nos marchés canadiens. Les États-Unis ont fait un excellent travail à cet égard avec leur système d'étiquetage du pays d'origine.
    Le problème suivant est la politique alimentaire nationale, ou son absence. Il n'y a pas de politique alimentaire nationale au Canada. Le Canada a besoin d'un système qui, au bout du compte, fournit des aliments salubres et nutritifs aux Canadiens et un revenu à ses agriculteurs. Le Canada doit adopter une politique qui empêchera l'importation d'aliments insalubres et permettra à ses propres agriculteurs, sur son territoire, de prospérer avant que les importations soient acceptées. Si les aliments sont importés, ils doivent respecter les mêmes normes que celles que doivent respecter nos produits canadiens.
    Le cinquième problème porte sur une approche canadienne uniforme, c'est-à-dire avoir un mécanisme fédéral, provincial et territorial. Comme nous le savons, nos provinces canadiennes ne travaillent pas suffisamment bien ensemble. Nous sommes tous conscients qu'il y a des défis dans chaque province. Il devrait y avoir un mécanisme par lequel des sous-ministres et des fonctionnaires de haut rang spécialisés en agriculture travaillent ensemble sur une base régulière pour élaborer une politique régionale et nationale fondée sur ce qui se passe dans les provinces individuelles. Nous pensons que la sensibilisation obtenue grâce à ce mécanisme aurait un effet extraordinaire étant donné que toutes les provinces s'appuieraient les unes les autres et seraient informées de leurs problèmes particuliers.
    Le problème suivant, c'est que les Canadiens ne comprennent pas l'industrie agricole. Que vous soyez un fonctionnaire, un sous-ministre, un ministre ou un citoyen ordinaire de Toronto, le grand public ne comprend absolument pas le système alimentaire. Ce manque d'éducation a permis à notre société de se déconnecter de la base agricole, ce qui n'aide pas à faire pression sur nos politiciens ou sur le gouvernement lorsque ces gens viennent frapper à notre porte pour solliciter notre vote.
    Si quelque chose arrivait à notre système alimentaire et que, soudainement, il n'y avait pas suffisamment d'aliments dans notre système pour nourrir les Canadiens, qui viendra en prendre la responsabilité?
    Tous les jours, les consommateurs, les fournisseurs et les entreprises qui, en fin de compte, dictent essentiellement aux agriculteurs combien ils seront payés profitent des agriculteurs du Canada.
    Nous allons maintenant parler des défis provinciaux.
    Merci, Patrick.
    Nous avons pensé qu'il était important de décrire les défis provinciaux de manière que le comité sache ce qui se passe dans la province. Nous avons fait un exposé devant le comité permanent de l'agriculture de la province, et le comité nous a dit que si nous avions l'occasion de faire un exposé devant le gouvernement fédéral, de le faire pour nous assurer que l'on sache que la province de ne peut pas vraiment faire grand-chose; c'est le fédéral qui est le grand responsable. Je voulais simplement signaler cela. C'est exactement ce qu'on nous a dit.
    Je vais poursuivre avec le programme pour la relève en agriculture et les défis et exigences provinciaux. Si vous ne le savez pas, nous avons sur l'île un programme pour les nouveaux arrivants qui sont de jeunes agriculteurs. C'est vraiment un excellent programme. Mais nous avons constaté certains problèmes et présenté certaines recommandations à la province avant qu'elle mette en oeuvre le second programme, l'an dernier. Il s'agit du programme amélioré pour la relève en agriculture. Je ne suis pas certaine de ce que l'on a amélioré dans ce programme, parce que c'est exactement la même chose que le précédent. Nous n'avons pas été consultés au sujet de nos recommandations ou des exigences qui devraient faire partie du programme. Je pensais que nous étions un élément important du casse-tête dans le cas du programme, alors ils auraient dû, peut-être, nous consulter pour voir ce que nous pensions du programme et comment il a été administré au cours des cinq dernières années.
    Nous avons certaines recommandations. Pour ce qui est de la réduction du taux d'intérêt, ne faites pas de discrimination à l'endroit de ceux qui n'ont pas la formation scolaire. Prolongez la période d'application du programme. Et aidez les agriculteurs à planifier l'avenir, du point de vue stratégique, et informez-les sur les tenants et aboutissants de ce qui arrivera dans l'avenir.
    Les jeunes agriculteurs en ont suffisamment sur les bras sans devoir se plier à toutes ces tracasseries administratives. Nos membres nous ont dit que cela semblait être beaucoup de travail pour s'inscrire au programme pour la relève en agriculture, alors, nous voudrions que cela devienne moins fastidieux dans l'avenir.
    Le second problème au niveau provincial, c'est la politique provinciale. On se querelle au sujet de la politique agricole et de la politique environnementale et les agriculteurs sont remis en question et sont pris au milieu du débat. Il semble que la politique agricole devra plier et que la politique environnementale prendra préséance. Il n'y a pas de responsable gouvernemental provincial qui défend l'industrie agricole au niveau provincial.
    Le troisième problème, c'est l'approche en matière de collaboration dans le Canada atlantique. C'est la même chose que dans le cas du problème national. Il devrait y avoir plus de collaboration. Il y a un débat entre le fédéral et le provincial pour savoir qui est effectivement responsable de cette crise et quelles solutions sont viables. Nous devons commencer à agir sur quelque chose. Nous ne faisons que parler, parler et encore parler. Qu'allons-nous faire? Faisons quelque chose. Ayons un plan d'action et mettons-le en oeuvre.
    Je fais des exposés depuis maintenant cinq ans et je commence à ressentir une certaine fatigue. Je me sens mal pour beaucoup de gens qui sont ici depuis les deux dernières années. J'aimerais vraiment voir quelque chose. Si vous devez nous consulter ou nous aider à nous réunir ensemble pendant une semaine... je me fiche que ce soit une conférence. Nous devons faire quelque chose à propos de cette situation.
    À titre de conclusion, j'aimerais vous remercier d'être venus et de nous avoir invités à faire un exposé aujourd'hui. Mais comme beaucoup d'entre nous l'ont dit, je dois souligner le fait qu'on a mal choisi le moment pour tenir ces réunions, au beau milieu de la saison des semailles.
    Si vous pouvez retenir quoi que ce soit de tout ceci, c'est qu'il y a des problèmes sérieux et vous allez dans une très mauvaise direction. Il se pourrait que je ne sois pas ici l'an prochain pour faire des exposés au gouvernement fédéral, parce que j'en serai arrivée à croire que ce n'est pas important. Je vais tout simplement occuper mon emploi à l'extérieur de la ferme et faire cela pour le reste de ma vie.
(0940)
    Merci, Maria.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Monsieur Easter, vous avez cinq minutes.
    Merci à tous de votre présence.
    Je souhaite également la bienvenue au comité dans la circonscription. Nous avons fait cela hier soir. Merci à tous d'être venus.
    Maria, peut-être que votre observation selon laquelle il y a des problèmes sérieux dit tout. Je vais simplement lire un grand titre qu'on peut lire dans un journal de Vancouver dans les coupures de presse d'aujourd'hui: « Le tiers de la production de porcs de la Colombie-Britannique cessera cette année: l'usine de transformation du porc se tourne vers la Saskatchewan pour trouver des porcs ». C'est ce que nous voyons ici.
    En définitive, si vous voulez corriger le problème, vous devez d'abord reconnaître que vous en avez un. Je pense que l'on peut débattre pour savoir si c'est un problème fédéral ou un problème provincial. Je pense que c'est les deux. Une chose avec laquelle je ne suis pas d'accord, Patrick, c'est le facteur fédéral-provincial. Les deux côtés se rencontrent. Ils discutent tout le temps. Mais aux deux paliers, on ne semble tout simplement pas être conscient du fait qu'il y a un problème. Nous avons eu une rencontre des ministres fédéral et provinciaux en février. L'industrie du porc est en train de disparaître. L'industrie du bovin n'est pas loin derrière. Votre industrie de la pomme de terre ici éprouve des difficultés. Et chacun des damnés ministres qui s'est présenté à cette réunion a dit que tout allait bien.
    La question que je veux vous poser, c'est si le régime de protection du revenu fonctionne. Sinon, comment doit-on le modifier? Je pense qu'Ernie a dit que vous devez passer à une forme quelconque de système lié au coût de production au moyen d'Agri-flexibilité.
    Est-ce que nos programmes actuels fonctionnent et quelles sont vos recommandations pour les modifier? Est-ce que chacun d'entre vous peut répondre? Qui veut être le premier?
    Je pense que vous avez parlé d'Agri-stabilité et je pense que c'est une grande source de préoccupation. Je suppose que partout au Canada, on vous a dit que les programmes ne fonctionnent pas. Notre ministre provincial veut que tout le monde participe à ce programme. Nous avons 87 ou 89 p. 100 de nos agriculteurs qui participent à ce programme à l'heure actuelle. Il pense que si tout le monde y participe, cela réglera tous les problèmes, mais ce n'est pas le cas, à moins que le programme soit lié au coût de production.
    Lorsqu'il est lié aux marges de référence, nos marges diminuent d'année en année, alors, comment un programme peut-il fonctionner de cette façon? Un exemple, c'est le programme ASRA au Québec. Cela a vraiment stabilisé l'industrie agricole québécoise au cours des dernières années. Il a été très difficile pour nous, dans la région de l'Atlantique, de faire concurrence au Québec dans le secteur des animaux d'élevage, en particulier. Ils ont ces programmes depuis des années et ici, nous n'avons rien. À moins que quelque chose change dans les programmes fédéraux et que le coût de production soit pris en compte, nous allons perdre des milliers et des milliers d'agriculteurs de plus.
(0945)
    Si vous me permettez d'ajouter rapidement quelque chose à ce sujet, un point qui a été soulevé, et je l'ai entendu à quelques reprises aujourd'hui, c'est que les programmes de gestion des risques de l'entreprise a versé un milliard de dollars de moins cette année et je pense que l'on prévoit qu'il versera 1,5 milliard de dollars de moins l'an prochain. Alors, la perception qui se dégage, c'est que c'est excellent: les programmes de GRE fonctionnent; ils versent moins d'argent. Ils versent moins d'argent tout simplement parce qu'il ne reste plus personne qui soit admissible à ces programmes.
    Ils n'assurent aucune forme de stabilisation. Ils sont conçus — et tout le monde a fait cela — pour payer sur un système qui paye sur les hauts et qui essaie de niveler les bas. Le problème, c'est que maintenant, il n'y a plus de hauts ni de bas; c'est un déclin constant et continu. Si vous ne prenez pas conscience de cela et n'arrivez pas avec un programme qui assure vraiment une certaine stabilisation, il n'y a plus aucune raison d'avoir encore ces programmes.
    Randall.
    Oui, je suis tout à fait d'accord avec les commentaires de Mike sur le PCSRA. Le programme Agri-stabilité, et le PCSRA avant lui, a été conçu pour un marché normal, et aurait pu fonctionner dans ce type de marché, mais il ne fonctionne tout simplement pas dans un marché où les marges sont basses de manière chronique.
    J'ai examiné les statistiques concernant l'assurance agricole à l'Île-du-Prince-Édouard. Le programme Agri-stabilité est géré ici sur l'île. Mike a très bien décrit la situation. Les paiements étaient assez importants au début, mais maintenant, les agriculteurs ne reçoivent plus rien.
    J'ai assisté à un exposé très intéressant d'un économiste de l'Université de la Saskatchewan. Le système utilisé au Canada, notre système d'assurance fondé sur la marge, en particulier lorsqu'il ne fonctionne pas et que le marché n'en est pas un qui fonctionne normalement, place vraiment le secteur de la transformation en danger. D'un point de vue stratégique, on a besoin d'une production de qualité constante et fiable pour que les transformateurs puissent investir et travailler dans ce type d'économie. Ce que nous avons actuellement, c'est un programme qui n'offre essentiellement aucune garantie aux investisseurs, qu'il s'agisse d'une coopérative de producteurs ou d'investisseurs externes, pour transformer nos pommes de terre ou tout autre produit.
    Le programme Agri-stabilité est déficient parce qu'il est fondé sur la marge et que nous n'avons pas un marché qui fonctionne normalement. La seule façon de pouvoir en bénéficier, c'est de parvenir à établir sa moyenne olympique et fermer boutique, n'est-ce pas? Cela n'a rien d'un programme.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de Mme Bonsant. Vous avez cinq minutes.

[Français]

    Madame Smith, vous avez dit que le Québec a des programmes. Oui, le Québec a des programmes pour aider les agriculteurs. C'est un choix de société.
     J'ai rencontré votre ministre de l'Agriculture hier, et le message a passé. Si ça existe au Québec, ça peut aussi exister ici, dans les Maritimes. Ce n'est qu'un choix politique à faire. Je lui ai dit qu'une aide sera nécessaire s'il voulait que l'agriculture survive ici.
    Vous êtes le dernier groupe que nous rencontrons. Je ne suis pas agricultrice comme la moitié des gens présents. Il y a trois ans, je n'étais pas membre du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire, que vous avez rencontré. Je voudrais savoir si quelque chose a changé ou si vous êtes au même point. Quelque chose a-t-il été fait depuis trois ans? Ne soyez pas gênés.
(0950)
    Merci de votre question.
     La réponse est non. Il n'y a rien qui a changé.
    Cependant, on a dit cela longtemps. Les fermiers continuent de perdre leur equity — comment dit-on cela en français? Le problème est qu'on dit cela chaque jour. Personne n'entend vraiment, ou personne ne veut être au courant de cette situation.
    Rien ne change.
    C'est peut-être parce que les fermiers l'ont dit pendant longtemps.
    C'est peut-être parce qu'on a l'air de cry wolf — comment dit-on cela en français?

[Traduction]

    On crie au loup sans doute depuis longtemps, mais le fait est que nous sommes tous au bord du précipice. Dans les provinces atlantiques, nous sommes sur le point d'y plonger. Et les programmes nationaux qui ont été mis en place pour nous aider, les programmes qui ont été mis en place dans la région atlantique pour le secteur porcin, pour le secteur de la viande rouge, visent simplement à encourager nos producteurs à fermer boutique.

[Français]

    D'accord. Je n'ai pas beaucoup de temps et j'ai de nombreuses questions à vous poser.
    Compte tenu de tout ce que j'ai constaté, je dis que vous n'êtes pas des lâches. Certaines personnes pensent que vous êtes paresseux en agriculture, et elles méritent une claque derrière la tête — excusez mon langage grivois.
    Pour ma part, j'ai remarqué deux problèmes. Je crois que deux programmes pourraient régler beaucoup de problèmes. Premièrement, il faudrait des garanties de prêts pour les jeunes agriculteurs qui veulent démarrer, et deuxièmement, des garanties de revenu décent. Grâce à ces deux mesures, les jeunes pourraient de lancer en agriculture, et les agriculteurs pourraient avoir une garantie de revenu décent. Ainsi, on n'aurait pas besoin de 72 000 programmes. Vous auriez des liquidités pour continuer —, pas seulement pour survivre sur vos fermes, mais aussi pour en vivre.
    Que pensez-vous de seulement deux programmes bien pensés plutôt que 52 amas de paperasses inutiles? Ne vous gênez pas.

[Traduction]

    Je pense que vous avez tout à fait raison. Quelques personnes ont mentionné qu'il faut couvrir les coûts de production et assurer un salaire de subsistance. Très bien, nous pouvons couvrir nos coûts de production, mais nous avons tous d'autres dépenses qu'il faut couvrir également. Vous avez entièrement raison. Il faut améliorer le programme actuel.

[Français]

    Monsieur Mol, les deux bras m'en sont tombés quand vous avez dit que les Européens n'achetaient pas les produits en provenance du Canada à cause de l'exploitation des sables bitumineux...
    Excusez-moi, c'est vous qui avez dit ça. Peu importe, c'est la première fois que j'entends parler de ça. Il n'y a donc pas seulement le dollar canadien qui est en hausse par suite des choix politiques environnementaux, il y a aussi l'agriculture qui en prend un coup.

[Traduction]

    Je suis presque tombé à la renverse moi aussi. L'entreprise avec laquelle je discutais là-bas me l'a mentionné très clairement, l'entreprise qui avait accepté de me rencontrer, et lorsque j'ai commencé à discuter et à expliquer... Je dirais que c'était tout juste avant le sommet de Copenhague, la question de l'environnement était très présente à ce moment. Ce que l'entreprise avait dit essentiellement, c'est qu'elle craignait que les consommateurs n'achètent pas les produits étiquetés « Canada ».

[Français]

    Je crois que les gens qui participaient à la conférence de Copenhague ont compris que ce n'est pas tout le monde au Canada qui est contre les mesures à prendre pour faire face aux changements climatiques, mais seulement une certaine partie des Canadiens.
    Si l'étiquetage indiquait seulement « produit des Maritimes », pensez-vous que vos produits seraient plus acceptés?

[Traduction]

    C'est exactement ce que j'ai fait, je leur ai montré où se trouvait l'Île-du-Prince-Édouard sur la carte, où nous étions situés. J'ai parlé de notre énergie éolienne, j'ai parlé de notre capacité de retracer tout produit provenant de l'Île-du-Prince-Édouard pour montrer... Je faisais face à ce problème pour la première fois, mais ce n'était pas vraiment surprenant dans la mesure où le Canada... En Amérique du Nord, nous n'avons pas... Ils étaient aussi inquiets au sujet des OGM. Il n'y avait pas que la question des sables bitumineux, il y avait également celle des OGM.
    Dans un grand nombre de régions ailleurs dans le monde, l'étiquetage est ce qui les préoccupe. Les consommateurs peuvent décider s'ils veulent acheter des produits contenant des OGM ou non. Lorsqu'on se rend au Japon avec nos produits, ils indiquent clairement sur ceux-ci « sans OGM », et en Europe, c'est clairement indiqué également. Cette question les préoccupait aussi.
(0955)
    Nous allons maintenant passer à M. Allan, du NPD. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci à tous nos témoins d'être venus nous rencontrer.
    J'aimerais reprendre une idée qui a été soulevée à trois reprises, mais dans un sens différent. Je pense que Mike et Ernie ont parlé d'une politique alimentaire qui doit être dirigée, non pas nécessairement par les politiciens, mais par le secteur agricole. Sally a parlé de la notion de durabilité, et bien sûr, Maria a mentionné assez clairement que nous avons besoin d'un plan d'action.
    N'hésitez pas à intervenir, mais j'aimerais reprendre ces trois sujets qui sont, à mon avis, interreliés, et qui concernent qui rédige la politique pour les agriculteurs et l'orientation que nous prenons. La question de la durabilité m'intéresse beaucoup, mais nous avons besoin en fin de compte d'un plan d'action. Je pense que c'est ce que Raymond, Gerard, Maria et d'autres aussi ont dit: assez parlé, merci beaucoup, réglons la question, dites-nous à la fin si nous continuons ou si nous arrêtons. Je crois que vous devez absolument savoir cela. Si nous allons faire quelque chose, vous devez savoir si vous voulez continuer ou arrêter. Maria l'a dit très clairement je crois. Vous voulez continuer votre vie — et c'est juste. Nous vous remercions de nous dire cela, parce que vous avez raison, vous avez besoin de continuer votre vie. Nous ne pouvons être ce qui vous empêche de décider de votre avenir pour vous et votre famille, à savoir si vous poursuivez vos activités ou fermer boutique.
     Pourriez-vous alors nous donner une idée de l'orientation que nous devrions prendre, de ce que devrait contenir la politique alimentaire nationale, de ce que nous devrions faire en matière de durabilité, de ce à quoi devrait ressembler le plan d'action, me dire cela en gros, bien sûr, parce que le président ne m'accordera que cinq minutes... et demie peut-être.
    Je vais commencer par vous dire rapidement que l'industrie croit fermement qu'elle devrait établir la politique de l'agriculture au pays. Ce ne devrait pas être l'affaire du gouvernement. C'est à l'industrie que revient cette responsabilité. Cela m'irrite énormément lorsque nous nous assoyons autour d'une table et pointons du doigt le gouvernement en disant: « Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas de stratégie pour l'agriculture? », alors que l'industrie n'en a pas une elle-même.
    Nous devons donc assumer cette responsabilité et établir la politique. Ensuite, nous avons besoin que le gouvernement nous écoute. Je crois que l'industrie s'y est employée, sans grand succès, mais nous avons à l'heure actuelle une initiative en marche à la Fédération canadienne de l'agriculture. Les responsables travaillent d'arrache-pied pour mobiliser un large éventail d'intervenants dans l'industrie, non seulement les producteurs primaires, mais également les transformateurs, les détaillants, les consommateurs, les associations agricoles, et pas seulement la FCA. La liste est longue. Nous voulons rassembler tout le monde et leur dire que nous avons un pays qui veut la sécurité alimentaire, et qu'en tant qu'industrie, nous devons accorder nos flûtes, nous donner des objectifs à long terme, une vision, une stratégie, et aller trouver le gouvernement pour lui dire voici l'objectif et voici le rôle que nous allons jouer en tant qu'industrie; nous avons maintenant besoin que le gouvernement établisse une politique pour concrétiser le tout.
    Le processus est en cours, mais ce dont nous avons réellement besoin, lorsque tout le monde sera assis autour de la table, c'est d'entendre le gouvernement dire qu'il est prêt à travailler avec nous pour concrétiser notre stratégie. C'est ce que nous souhaitons ardemment.
    En ce qui concerne la durabilité, je crois que tout le monde comprend que la durabilité a diverses facettes. Il y a la durabilité financière et la durabilité écologique. À mon avis, la politique actuelle est clairement orientée vers le toujours plus gros — agrandissez pour devenir toujours plus gros. Et c'est ce qui se passe. Les grandes fermes ont leur place; tant que nous aurons du carburant, nous aurons des grandes fermes. Je crois qu'on a voulu, en gros, se débarrasser des petites fermes, qui ont des activités diversifiées. Nous avons vraiment fait un pas en arrière ici en matière de durabilité, parce que nous avons besoin des petites fermes. Les grandes fermes ont besoin des petites fermes. Les petites fermes sont le visage du Canada rural, et on pourrait sans doute comparer la durabilité écologique dans les petites fermes à celle dans les grandes fermes et en débattre.
    Je crois que c'est l'un des problèmes de la politique actuelle, à savoir qu'elle favorise une expansion toujours plus grande des fermes comme remède à tous les maux. Je crois que c'est là un grave problème.
    Je suis d'accord avec vous, Mike. La communauté agricole doit établir l'orientation. Le travail du gouvernement, à mon avis, consiste à faciliter sa concrétisation. J'ai mentionné un peu plus tôt que le gouvernement provincial m'a accordé une aide précieuse lorsque j'ai voulu faire des affaires au Japon. Le gouvernement fédéral m'a aidé également. L'ambassade à Tokyo n'était pas préparée, toutefois, à répondre à mes questions en tant qu'agriculteur. Le personnel n'avait pas l'habitude de voir des agriculteurs s'y rendre directement, de les voir sauter dans un avion et débarquer à Tokyo pour tenter de trouver des débouchés. On ne savait pas comment procéder. Ce que je voulais, c'était me rendre quelque part, trouver des débouchés pour mes produits, puis revenir au pays pour voir si je pouvais les faire pousser. Nous, les agriculteurs, avons l'habitude de cultiver nos produits, puis d'attendre que le téléphone sonne. S'il ne sonne pas, nous avons de gros ennuis. Avec le système actuel, il est très difficile pour un agriculteur de partir en quête de débouchés internationaux.
    Je ne veux pas minimiser l'aide que j'ai reçue. J'ai reçu l'aide des fonctionnaires fédéraux à Charlottetown. Ils m'ont, en fait, beaucoup aidé, mais les programmes ne sont pas nécessairement là pour nous aider.
    Je tenais simplement à soulever ce point.
(1000)
    Merci.
    Monsieur Armstrong, vous avez cinq minutes.
    J'aimerais tout d'abord remercier tous nos témoins de s'être déplacés aujourd'hui et d'avoir pris le temps, malgré leur emploi du temps chargé, de venir nous rencontrer. Je sais qu'il est très difficile pour les agriculteurs de se libérer et nous vous en sommes très reconnaissants.
     Tim, lors de nos réunions hier, nous avons beaucoup parlé de l'importance de la recherche régionale et locale. Je pense que cela est en lien avec un point dont Raymond vient juste de parler, au sujet de la recherche de nouveaux débouchés, et l'idée peut-être de concevoir et de faire pousser des produits pour ces nouveaux marchés. Dans votre domaine, avez-vous une idée de l'importance de la recherche locale effectuée pour bâtir l'avenir de l'agriculture à l'Île-du-Prince-Édouard?
    Permettez-moi de vous raconter une histoire. La coopérative laitière à Summerside a collaboré avec le Collège vétérinaire de l'Atlantique sur une initiative visant à recenser les producteurs qui produisent et continuent de produire un lait de haute qualité pour lui permettre d'accroître la durée de conservation de ses produits fromagers. Notre recherche portait sur l'aspect épidémiologique, et nous examinions toutes les fermes de la région. Les résultats ont été si positifs et si impressionnants en termes de qualité et de marque pour la commercialisation de produits ayant une durée de conservation plus longue et plus d'attrait pour les consommateurs qu'elle s'est lancée dans l'aventure avant la fin du programme de recherche pour commencer à obtenir du lait de divers producteurs et l'utiliser de différentes façons pour marquer, identifier et différencier ses produits. Il peut donc y avoir des effets pas seulement à long terme, mais aussi immédiats très importants en matière de sécurité alimentaire, de qualité, et de différenciation de produit.
    Alors oui, je pense que divers processus peuvent se produire dans des établissements partout au pays, et pas seulement dans le domaine des soins vétérinaires, mais aussi de l'agriculture, de la santé humaine et de la santé publique.
    Merci.
    Patrick, vous avez parlé de différentes solutions. La première que nous avons souvent entendu mentionner est, bien sûr, l'accès au capital. L'accès au capital est un élément important. La stratégie nationale pour les jeunes fermiers, la politique alimentaire nationale, la politique régionale pour éliminer la concurrence interprovinciale et favoriser la collaboration entre les provinces. Vous avez également insisté sur l'établissement de règles équitables pour tous. Vous avez également parlé de l'étiquetage du pays d'origine aux États-Unis. Est-ce qu'un programme comme celui-là au Canada vous aiderait à obtenir une part plus importante du marché national?
    Je ne sais pas. Cela semblait une excellente idée à ce moment. Mais maintenant que vous soulevez la question, comme nous sommes un pays exportateur, il faut se demander quelles seraient les répercussions pour nos clients étrangers? Avant de faire quoi que ce soit, je crois que nous devrions examiner cela et examiner les répercussions que cela pourrait avoir pour les exportateurs de produits alimentaires au Canada.
    Est-ce que quelqu'un aimerait ajouter quelque chose au sujet de l'étiquetage du pays d'origine?
    J'aimerais faire une suggestion, que les exigences soient les mêmes que pour les produits destinés à l'exportation. Peu m'importe qu'on appelle cela COOL ou autrement. Il faut qu'il y ait des mesures en place pour les produits importés au Canada; il faut que les normes soient les mêmes. Peu m'importe que cela bousille le marché d'exportation, les normes doivent être les mêmes. Je ne suis donc pas d'accord avec ce qu'a dit Patrick.
    Désolé, Patrick.
    Vous avez le droit de ne pas être d'accord, c'est permis. Nous ne sommes pas toujours d'accord non plus.
    Il faut assurément que quelque chose soit mis en place. Je crois qu'on vous a déjà mentionné qu'il s'agissait d'un problème, sans doute au cours de votre périple de la Colombie-Britannique à l'Île-du-Prince-Édouard. Est-ce qu'on a soulevé souvent la question des produits importés qui ne sont pas assujettis aux mêmes normes? Sont-elles les mêmes? Très bien, je vous ai posé la question.
    En effet, oui.
    Je crois que la provenance d'un produit qui se trouve sur les tablettes devrait assurément être indiquée. J'ai vu une étiquette bleue hier sur un fromage parmesan. J'ai regardé l'étiquette. Il y avait seulement une adresse de Loblaws à Toronto. On ne sait absolument pas si ce fromage a été fabriqué au Canada. C'est probablement le cas, car nous avons un marché protégé. Mais c'est simplement un exemple pour dire que c'est difficile, très difficile. Loblaws et Sobeys ne font pas d'erreur; ils veulent s'assurer la loyauté de leurs clients. Ils ne veulent pas s'assurer la loyauté des fermiers. La seule loyauté qui compte pour eux, c'est celle de leurs clients à leur égard. Ils n'appuient donc pas nécessairement l'idée d'indiquer la provenance sur tous les produits. Mais de notre point de vue, il est très important pour les consommateurs de pouvoir choisir. Lorsqu'ils choisissent un produit, ils devraient savoir d'où il provient. Je ne pense pas que cela nuira à nos marchés internationaux que nos consommateurs sachent d'où un produit provient.
(1005)
    Sally, très brièvement, vous avez parlé d'un système de commerce national équitable. C'est un point qui a été souvent mentionné. J'étais ici hier et aujourd'hui, mais j'ai également discuté avec des agriculteurs de ma circonscription. Les détaillants prélèvent aussi leur part. Le prix payé par le consommateur est donc très différent de ce que vous recevez comme profit. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Croyez-vous que nous devrions légiférer pour établir une norme ou mettre en place un système de commerce équitable pour nous assurer que les détaillants versent une certaine part des profits aux producteurs agricoles? Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Quelqu'un d'autre pourrait également répondre.
    Oui, je pense que c'est l'idée.
    Randall, vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus.
    En gros, bon nombre de fermiers qui sont membres du Syndicat national des cultivateurs sont d'avis que le système alimentaire actuel ne fonctionne pas du tout. On propose donc une stratégie de remplacement, qui n'est pas une solution pour tout le monde, mais qui est fondée sur le système de commerce équitable pour le café et les bananes. Sur la scène internationale, nous sommes habitués à ce système qui permet aux consommateurs d'acheter des aliments produits en respectant une certaine norme ou une certaine façon de faire.
    Nous pourrions créer ce genre d'organisation au sein du pays, au sein du système alimentaire national. Essentiellement, en ce qui a trait à la durabilité, les négociations de prix seraient pour le coût de production plus; puis, tout ce que les consommateurs souhaitent comme norme se négocierait au sein de cette organisation.
    Il n'y aurait donc pas de loi comme telle contre les détaillants — bien que, personnellement, je ne vois pas d'inconvénient à imposer une loi aux détaillants.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Randall Affleck: Ce sont tous des bandits.
     Nous essayons essentiellement de concevoir, en tant que producteurs et consommateurs, un modèle différent du modèle actuel.
    Merci.
    J'ai deux points seulement.
    Maria, vos commentaires au sujet de l'étiquetage du pays d'origine et au sujet des normes similaires pour les produits alimentaires touchent à deux questions tout à fait différentes. Personnellement, je suis tout à fait pour que les mêmes normes s'appliquent aux produits importés. Je ne veux pas préjuger des conclusions de notre rapport, mais je serais surpris que cela ne soit pas au nombre des recommandations. L'avenir nous le dira.
     Raymond, en ce qui concerne ce que vous avez dit à propos de la provenance des produits que nous achetons, nous avons la mention « Produit du Canada » à l'heure actuelle. Je crois qu'il faut mieux informer les consommateurs à ce sujet, et que le gouvernement et l'industrie ont un rôle à jouer à cet égard. Mais on peut facilement supposer que si la mention « Produit du Canada » n'apparaît pas, ce n'en est pas un. C'est aussi simple que cela.
    Il existe encore quelques mentions trompeuses comme « Fabriqué au Canada »... Ce n'est peut-être pas une des mentions trompeuses, car nous voulons vraiment protéger nos fabricants de produits alimentaires. Mais il y a d'autres mentions. Sur les bouteilles de vin, on dit « Embouteillé au Canada ». Eh bien, on importe le produit d'Italie ou de France, ou d'un autre pays, et c'est parfois trompeur. Je pense que nous pourrions examiner ces produits, et d'autres aussi.
    On ne peut toutefois apposer la mention « Produit du Canada » que sur les produits qui sont vraiment d'origine canadienne. Il faut que le consommateur soit mieux informé à ce sujet. Je voulais simplement soulever ce point.
    C'est maintenant au tour de M. Eyking. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci aux témoins d'être venus nous rencontrer ce matin.
    Quand on se promène en voiture dans l'île et qu'on voit ce beau sol et ces fermes très bien entretenues... On apprend ce matin toutefois que tout n'est pas rose dans l'industrie agricole: que pouvons-nous faire pour que l'agriculture survive à l'Île-du-Prince-Édouard?
    Nous nous sommes rendus un peu partout au pays. Nous nous sommes rendus dans la vallée de l'Okanagan où on trouve de grands domaines, de grandes maisons bâties sur des terrains de 10 acres, où les gens gardent quelques chevaux dans la cour, mais le fait est qu'ils ne produisent pas de l'agriculture à long terme. Est-ce ce qui attend l'Île-du-Prince-Édouard, un endroit où les gens se rendront pour s'offrir du bon temps, mais où il n'y aura plus d'agriculture? Je pense que ce serait désastreux, notamment parce qu'on y trouve de si bonnes terres agricoles.
    Que pouvons-nous faire pour renverser la situation, si pour quelque raison tout l'argent du gouvernement...? Regardons la situation d'un autre angle. Regardons l'Île-du-Prince-Édouard différemment. Il n'y a pas très longtemps, j'étais à New York, où on trouve beaucoup de produits du Vermont. Le Vermont semble s'être donné une image nature, santé, et ses produits se vendent dans la région de la Nouvelle-Angleterre.
    Lorsqu'on pense à cet immense marché à une journée de route seulement, en particulier depuis que le pont a été construit — un marché de 100 millions d'habitants — on se demande s'il serait possible pour l'Île-du-Prince-Édouard de se donner une image santé comme celle-ci en examinant les méthodes de production particulières ici, qui sont peut-être uniques et différentes?
    Nous parlons souvent des problèmes que nous avons avec les producteurs de boeuf, et vous avez une usine ici. Je me rappelle avoir discuté avec des transformateurs de boeuf et leur avoir demandé ce qui arriverait si nous avions du boeuf d'embouche élevé ici, et au lieu de dire nous obtenons moins pour ce boeuf, comment pouvons-nous en obtenir plus sur le marché américain en vantant son côté plus sain, moins bourré d'antibiotiques? Ce que je me demande alors, devrions-nous examiner...? Je sais que certains d'entre vous s'intéressent déjà à la question, mais de manière plus générale, à long terme, est-ce que l'Île-du-Prince-Édouard devrait se tourner vers un concept d'agriculture plus biologique, plus durable — pas uniquement biologique, mais où l'Île-du-Prince-Édouard possède cette étiquette de produit unique afin que ces 100 millions d'habitants qui sont à une journée de route voient en vos produits quelque chose de différent, et pas uniquement les pommes de terre les moins chères ou le boeuf le moins cher ou les frites les moins chères.
    Je ne fais que lancer cette idée, car le marché est là. Il suffit d'offrir les bons produits aux bons consommateurs, afin qu'ils sachent que vous... Je pense dans ce sens: l'Île-du-Prince-Édouard devrait se doter d'un plan directeur différent pour les 50 prochaines années en termes de produits et de clients. Je pense qu'ils ont un créneau, une niche, mais que les choses devraient se passer différemment. Que faire pour que cela se produise? Est-ce que cela devrait se produire?
(1010)
    Je pense que vous avez entièrement raison.
    Je ne veux pas ajouter aux doléances, mais le problème est que l'Île-du-Prince-Édouard est cantonnée dans le secteur de la production depuis 30 ans. C'est une attitude ancrée. C'est ce qu'on encourageait les producteurs à faire quand le dollar était à 60 cents: produisez autant que vous pouvez, de la manière la plus efficiente possible, car nous allons exporter toute la production aux États-Unis et tout ira pour le mieux. La réalité n'est plus la même.
    Pour examiner ces nouvelles approches proactives et innovatrices... Mon père était un éleveur de porcs et il avait l'habitude de dire qu'il ne pouvait avoir une bonne portée quand la truie était malade. Le problème est donc que si l'industrie n'est pas solide, on ne peut pas envisager ces nouvelles approches novatrices...
    Vous avez absolument raison. Je pense que nous devons miser sur notre petitesse et notre caractère unique. Nous avons de réelles possibilités de ce côté. Mais ces possibilités nous fileront entre les doigts si nous ne faisons rien pour préserver notre infrastructure, pour atteindre ces objectifs dans 20 ans, car c'est un projet sur 20 ou 30 ans.
    Pour en revenir au tourisme à l'Île-du-Prince-Édouard, nous n'avons pas ces paysages magnifiques et ces belles fermes que les touristes peuvent venir admirer, et c'est un autre aspect important de notre économie. Nous devons nous assurer de pouvoir apporter de réels changements rapidement pour conserver ce que nous avons et pour mettre en place ces changements novateurs pour l'avenir.
    À titre de gouvernement fédéral, nous devons mettre en place des solutions conçues à l'Île-du-Prince-Édouard et non pas des programmes destinés à l'ensemble du pays — des solutions conçues à l'Île-du-Prince-Édouard pour permettre à l'île au cours des 50 prochaines années...
    Tout à fait.
    Je dois parler rapidement de ce programme de transition pour les exploitations porcines, dans le cadre duquel on encourageait les agriculteurs à se battre les uns contre les autres pour sortir de l'industrie, en raison de l'offre excédentaire de porcs au pays, alors que le Canada atlantique ne contribue pas à cet excédent. Voici un bel exemple de programme de GRE annoncé à l'échelle du pays contre lequel nous nous sommes insurgés parce que cela allait détruire ce qui restait de notre industrie, mais personne n'a écouté.
    Les programmes doivent tenir compte des différences régionales au pays, afin de préserver celles qui sont propres à la Colombie-Britannique, au Canada atlantique, etc. Si ce n'est pas le cas, les programmes ne répondront pas aux besoins.
     Randall a un bref commentaire à faire, je crois.
    Nous avons eu une commission sur l'avenir de l'agriculture. Nombre de points que vous avez mentionnés ont été soulevés dans le cadre de celle-ci, notamment le fait de trouver une image de marque à l'Île-du-Prince-Édouard, et je suis convaincu que nous ferons des progrès. Mais il faut reconnaître le principal problème de l'agriculture. Lorsque vous allez à l'épicerie, vous trouvez 50 000 produits sur les tablettes. En réalité, ces produits sont le fruit de différentes combinaisons de maïs, de soya, de blé, de pommes de terre et de boeuf, des produits de base qui ont été achetés par les transformateurs au meilleur prix possible sur la planète.
    Lorsque je me suis lancé en agriculture en 1987, on commençait à mettre en place des accords de libre-échange et les exportations agricoles ont atteint des sommets sans précédent. Les retombées économiques ne sont pas prises en compte à la ferme. Pendant ces 20 ans, au lieu de se donner un plan d'avenir, les agriculteurs ont essayé de préserver ce que les dirigeants précédents avaient mis en place, notamment la gestion des approvisionnements et la vente dirigée. L'industrie du porc a perdu sa coopérative de vente à guichet unique. Sur un graphique, on voit la diminution.
    Le principal problème à mon avis n'est pas l'absence de qualité, ou encore COOL, ou la réglementation; c'est l'absence de pouvoir des agriculteurs sur le marché, parce que les transformateurs et les détaillants ont consolidé leur position. Personnellement, je ne vois pas comment on pourrait corriger la situation. La solution consiste à donner aux agriculteurs un certain pouvoir de commercialisation qui leur permettrait de travailler ensemble à l'élaboration d'une politique alimentaire nationale, comme on l'a déjà mentionné. Je suis tout à fait d'accord avec cela.
    C'est le rôle du gouvernement, tant fédéral que provincial, d'établir le pouvoir réglementaire des agriculteurs pour mettre cela en oeuvre et leur permettre de négocier, dans une position de force, avec ces gens. C'est la base. Tout le reste est, en fait, des belles possibilités qui pourraient être exploitées par les producteurs sur une base individuelle, ou encore, et c'est ce que je privilégie, en collaboration avec le milieu de la recherche et les transformateurs pour créer réellement une industrie.
    Je parle sans doute trop, n'est-ce pas?
(1015)
    Il n'y a pas de problème, Randall.
    Mike, je voulais ajouter quelque chose au sujet de la stratégie nationale de sortie. Ce que je veux dire, c'est qu'aucun programme n'est parfait et je n'ai pas l'intention de le défendre et de dire qu'il est parfait. C'est un programme que réclamait le Conseil canadien du porc et qui a été préparé en collaboration avec lui. Je pense qu'on peut affirmer sans trop se tromper, et je suis certain que vous serez d'accord avec moi sur ce point, qu'il ne ciblait pas les Maritimes ou une autre région. En Ontario, un grand nombre d'éleveurs de porcs ont également cessé leurs activités. Lorsqu'on veut mettre en place un programme national, comment peut-on procéder autrement? On lance le programme. Personne n'avait le fusil sur la tempe en Ontario, parmi mes voisins, ou à l'Île-du-Prince-Édouard pour cesser leurs activités. Le fait est qu'il y en a eu un plus grand nombre dans ces régions. Je suis en train, plus ou moins, de penser à haute voix. Je ne sais pas comment on pourrait s'y prendre autrement. Le programme ne visait nullement à tuer l'industrie du porc en Ontario ou dans les Maritimes.
    Avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?
    Selon ce que j'en sais, le but du programme était de réduire l'offre excédentaire de porcs.
    Des voix: Bien sûr.
    M. Mike Nabuurs: Nous avons eu des discussions avec le CCP et nous savions que le conseil ne voulait pas être perçu comme appuyant une stratégie différente dans les provinces de l'Atlantique. Mais nous lui avons dit: « Vous êtes conscients que la région atlantique ne contribue pas à l'excédent; la région est un importateur net de porcs, alors nous ne contribuons pas à cet excédent. Donc, si nous réclamons une stratégie différente, en quelque sorte, pour la région atlantique, est-ce que vous vous y opposerez? » Ce à quoi on nous a répondu: « Non. Nous ne pouvons pas l'appuyer, mais nous ne nous y opposerons pas si vous la réclamez. »
    C'est ce que nous avons fait. Le CCP n'a pas dit un mot, à ce que je sache, mais personne n'était disposé à envisager une stratégie différente pour la région atlantique. Il faut qu'il y ait une volonté. Je sais que tout le monde craint les droits compensateurs, les différends commerciaux, et autres problèmes du même genre, mais je pense que quand on veut, on peut. Je ne sais pas si on a vraiment envisagé cette option dans ce cas.
    Très bien, merci.
     Monsieur Shipley, vous avez cinq minutes.
    Divers points intéressants ont été soulevés et j'aimerais revenir à ce que vous avez mentionné, Mike et Ernie, au sujet des pouvoirs provinciaux en matière de droits compensateurs. Vous avez parlé d'aide... Je cherche à faire en sorte que les règles du jeu soient équitables pour tous les agriculteurs et à leur offrir des programmes qui sont, à mon point de vue, justes et équitables. Vous avez parlé de la nécessité d'une refonte en profondeur de la politique, d'éliminer les marges négatives, de développer l'agriculture, de réexaminer les plafonds.
    Savez-vous si votre province appuie ces changements?
(1020)
    C'est une bonne question. La province ne dispose pas de fonds supplémentaires pour ce genre de choses — c'est habituellement la réponse qu'on nous sert. Nous sommes conscients que tout le monde a des budgets déficitaires, mais la question est de savoir s'il existe une volonté d'investir dans l'agriculture.
    J'essaie simplement de comprendre. Je ne montre personne du doigt, d'accord? Car nous avons un cadre stratégique pour l'agriculture, une entente entre les provinces et le gouvernement fédéral qui exige — en quelques mots, je ne devrais pas faire cela — l'accord de six ou sept autres provinces avant que nous puissions apporter des modifications aux programmes de gestion des risques des entreprises.
    C'est donc toujours le même problème — et Maria en a parlé —, « c'est vous; non, c'est nous ». Et vous êtes pris entre les deux. C'est ainsi que cela semble fonctionner, et d'un point de vue politique, si c'est ce que nous voulons accomplir, je pense qu'on y est arrivé. D'après ce que nous constatons ici aujourd'hui, notre façon d'aider les agriculteurs, de les aider à assurer leur avenir, n'est pas du tout la bonne.
    Dans l'ensemble, on dirait presque qu'il faut revoir les responsabilités du gouvernement fédéral, des gouvernements provinciaux et des organisations locales, pour savoir si c'est au gouvernement fédéral de réglementer la sécurité alimentaire et de s'occuper des marchés d'exportation. Nous sommes un pays exportateur. Règle générale, l'argent est transféré aux provinces qui s'occupent de gérer les programmes. Je constate que partout où l'on s'arrête, cela semble un sujet de préoccupation. Avez-vous une opinion à ce sujet?
    Ensuite, un thème récurrent à toutes les réunions auxquelles j'ai participé — je n'ai pas assisté aux rencontres dans toutes les régions cependant —, c'est la question de la réglementation au sujet... Sally l'a mentionné ainsi que Maria, et d'autres également. Nous importons des produits au Canada. Ils répondent à nos normes générales en matière de sécurité alimentaire. La sécurité alimentaire n'est pas, en soi, le problème. Le problème vient plutôt de l'accessibilité aux produits pour faire pousser les récoltes ou élever les animaux. Nous ne le faisons pas, mais cela entre en compétition directe avec nous. J'ai une motion adoptée par le Parlement qui traite exactement de cette question, et j'espère que le comité inclura ce genre de règlement ou de motion dans son rapport, car peu importe la province où l'on se trouve, ou le type de récolte qu'on fait pousser, c'est un problème qui touche tout le monde. Je pense qu'il faut simplement trouver une façon pour le gouvernement fédéral d'aider les producteurs en mettant en place des règles équitables pour eux, et je pense que c'est ce qu'il faut faire.
    Aidez-moi à comprendre ce que nous pouvons faire pour accroître la profitabilité du marché? Devons-nous assumer plus de risques pour accroître la profitabilité? Que devons-nous faire pour y arriver?
    J'ai un exemple à vous donner, au sujet des risques.
    Nous avons exporté des pommes de terre au Venezuela cette année et les normes de qualité étaient respectées. Lorsque le produit est arrivé, le Venezuela avait changé ses normes. À l'heure actuelle, le gouvernement canadien — on s'y emploie en ce moment même — n'est pas prêt à négocier par l'entremise d'Exportation et développement Canada, à prendre le risque. Je sais que nous savons comment Exportation et développement fonctionne, vous leur donnez le nom de votre client et on examine si vous avez de bonnes chances d'être payés.
    Ce qui s'est passé, dans ce cas, c'est que le Venezuela est un pays où le gouvernement est, naturellement, très instable. Le produit est donc arrivé à destination, et naturellement, le Venezuela avait changé les règles du jeu. De plus, les exportateurs n'ont pas été payés. Les exportateurs ont été bons joueurs, ils ont payé la facture, mais qui veut faire des affaires dans un marché incertain? Les exportateurs ne veulent plus s'occuper de cela. Ils ont perdu des centaines de milliers de dollars, tout cela parce qu'Exportation et développement Canada n'a pas voulu prendre le risque.
    Serait-il possible alors de changer un peu les règles du jeu? Ce marché en est un pour l'Île-du-Prince-Édouard depuis peut-être 20 ou 30 ans, et peut-être que quelqu'un pourrait nous en dire plus à ce sujet. Ce que je constate, c'est que pour des raisons politiques qui sont hors du contrôle des exportateurs et des agriculteurs, nous perdons beaucoup d'argent et de marchés, et c'est un problème. Les pommes de terre ont été livrées. Un représentant canadien a été dépêché pour examiner le produit sur place. Tout était en règle; le produit était en bon état.
    Nous avons donc besoin que le Canada agisse dans ce genre de situation. Ce sont des problèmes liés à l'exportation. Le Canada doit agir.
    Par ailleurs, ces programmes — PCSRA, Agri-stabilité — sont tous bons, mais ce n'est pas la source du problème. Vous devez faire quelque chose au sujet des importations, des denrées alimentaires qui traversent la frontière, peu importe leur provenance, que ce soit des États-Unis ou d'ailleurs. Nous devons trouver une façon de les limiter. Je ne sais pas comment, mais je pense que c'est la seule façon de permettre aux agriculteurs de survivre.
(1025)
    Merci.
    Ernie, vous pouvez faire le dernier commentaire.
    Vous avez parlé d'avoir des règles équitables pour tous. Si je comprends bien, 40 p. 100 des produits alimentaires que nous consommons sont importés. J'ai participé dernièrement à une rencontre à Moncton. Il y était question de négociations commerciales et quelques fonctionnaires d'Ottawa ont parlé des négociations avec d'autres pays et de l'importation de produits. Quelqu'un a posé la question suivante: au cours de la négociation des accords, est-ce que la sécurité alimentaire fait partie des principaux sujets de discussion? On lui a répondu que non. J'ai été très surpris de cette réponse.
    C'est ce qui est en train de tuer l'industrie. Si le gouvernement ne peut réglementer la sécurité des produits alimentaires importés au Canada et que nous devons, nous, respecter tous les règlements qu'il nous impose, ce serait à lui d'assumer la facture de tout ce qu'il nous en coûte à nous, agriculteurs, pour respecter ces règlements. C'est ce qui est en train de tuer notre industrie. Comme 40 p. 100 des produits sont importés... et cela ira toujours en augmentant, car nous allons continuer de perdre des agriculteurs.
    Si le gouvernement ne peut contrôler la façon dont le boeuf est élevé en Uruguay... En tant qu'éleveur de boeuf, je dois payer tous les frais d'inspection et bien d'autres frais, et cela coûte cher, et c'est en train de nous tuer.
    Merci.
    Monsieur Hoback, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins d'être venus nous rencontrer. Je sais que vous êtes très occupés à ce temps-ci de l'année, et nous vous sommes très reconnaissants de vous être déplacés. En Saskatchewan, la saison du vêlage commence en février, et l'an dernier, les récoltes ont duré jusqu'à la fin novembre. Il est donc difficile pour le comité de choisir le moment idéal pour venir vous rencontrer, et c'est pour cela que nous sommes ici aujourd'hui.
    Il y a un point dont j'aimerais discuter. Plusieurs d'entre vous ont parlé d'un programme de protection des coûts ou des risques. Dans les années 1980, nous avions un programme appelé Régime d'assurance-revenu brut.
    Wayne, vous vous rappellerez ce programme.
    J'étais agriculteur à l'époque. J'ai encore une ferme, mais je commençais dans ce métier à ce moment, et ce programme était en place. Je trouvais cela génial de pouvoir prévoir ce que j'allais gagner l'année suivante, et d'avoir un revenu garanti pour l'autre d'après. L'argent était là, et je pouvais prévoir.
    Quatre ans plus tard toutefois, nous avons eu un nouveau gouvernement en Saskatchewan, et tout à coup, la source s'est tarie. Entre-temps, sachant ce que le programme allait nous verser au cours des dix prochaines années, nous n'avons pas agrandi nos installations et avons opté, en quelque sorte, pour le statu quo. Mais beaucoup de mes voisins avaient décidé de prendre de l'expansion, et la valeur des terres est montée en flèche pendant cette période — sans doute de manière artificielle — et tout à coup, quatre ans plus tard, tous ces gens se demandaient: « Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait? », parce que cette source de revenus, sur laquelle ils comptaient, s'est tarie.
    C'est ce que je n'aime pas des programmes gouvernementaux. Les gouvernements changent, et les priorités des gouvernements changent, et tout à coup, on peut se retrouver encore une fois dans une situation qui n'est bonne pour personne.
    Je sais que vous avez mentionné le programme ASRA, mais je pense que le programme ASRA au Québec — beaucoup de gens l'ont oublié — accuse un déficit d'environ cinq milliards de dollars à l'heure actuelle. Tôt au tard, donc, quelque chose va se produire, la situation va changer, et je ne sais pas ce qui arrivera à ces agriculteurs québécois.
    C'est la réserve que j'ai au sujet des programmes.
    Un autre point que Mike a soulevé, c'est qu'on aurait dû avoir une solution pour l'Atlantique ou une solution pour l'Ouest canadien. Il est très difficile pour un gouvernement national de choisir parmi les régions celles qui seront gagnantes ou perdantes. Tout ce que nous pouvons faire essentiellement c'est de dire: « D'accord, nous pouvons faire cela à l'échelle nationale ». Cela n'empêche pas les gouvernements provinciaux d'intervenir et de dire: « Nous allons bonifier cette aide pour nous assurer d'atteindre tels résultats à l'Île-du-Prince-Édouard ».
    C'est ce que l'Alberta a fait. Je sais que les gens en Saskatchewan s'en sont plaint, parce que — et je vais utiliser l'exemple de l'industrie du boeuf — parce que l'Alberta a versé 100 dollars par tête, et la Saskatchewan, 40 dollars par tête, et les gens de la Saskatchewan avaient l'impression d'être à court de 60 dollars par tête.
    Lorsqu'on examine la question au niveau fédéral, on essaie d'avoir une approche juste et équilibrée pour l'ensemble du pays. Mais si le marché dicte la voie...
    Vous avez mentionné ne pas avoir contribué au problème dans l'industrie du porc, et c'est sans doute vrai. Mais dans l'ensemble, il y avait trop de porcs à l'échelle de la planète, et cela a contribué au problème de l'industrie. Alors, comment peut-on dire: « Ils n'ont pas contribué, mais comment le fédéral peut-il s'y prendre pour leur donner plus d'argent ou leur assurer plus de viabilité? » par rapport à une province comme la Saskatchewan, d'où je viens, où les coûts de production peuvent être beaucoup moindres? Ce sont les questions auxquelles il faut répondre d'un point de vue général.
    Il y a cinq ans, j'ai assisté à une rencontre avec l'association des agriculteurs, comme vous, pour tenter de trouver une façon d'accroître les revenus des agriculteurs. Et c'est pourquoi je participe aux réunions du comité. J'examine les mesures qui permettraient de tirer plus d'argent du marché, ou de réduire vos coûts, car il y a deux solutions: soit vous augmentez vos revenus, soit vous réduisez vos coûts.
    J'aime bien l'idée soulevée au sujet des importations. Il n'y a aucune raison, à mon avis, si nous importons du boeuf du Brésil ou de l'Argentine, que les producteurs là-bas ne satisfassent pas aux mêmes normes ou exigences que nos producteurs ici. Cela va de soi. Cela devrait être assez simple. Je pense que tout le monde ici est d'accord avec cette idée.
    Mais pouvons-nous faire autre chose du côté de la réglementation ou des coûts pour aider les jeunes agriculteurs à démarrer leur entreprise, pour leur assurer la stabilité au début jusqu'à ce qu'ils aient pu se constituer un fonds suffisant pour pouvoir survivre sur le marché? C'est le genre de solutions que je cherche.
    Raymond, vous avez eu une bonne idée d'aller outre-mer. J'y suis allé souvent aussi. C'est très bien. J'aimerais connaître le nom de l'entreprise avec laquelle Dave a eu des problèmes, la marque canadienne. Si vous le voulez bien, j'aimerais que vous me fournissiez cette information.
(1030)
    Je peux vous l'obtenir. C'est une entreprise danoise. J'ai l'information à la maison. Je vais vous la faire parvenir.
    Une des choses que j'aimerais mentionner, cependant, c'est ce qui m'a poussé à aller outre-mer ou à aller quelque part... je suis simplement allé au bureau de Wayne; il a le guide des ambassades. Je ne savais pas qu'il fallait composer le 011 pour faire un appel outre-mer, j'avais donc tout à apprendre. Mais l'une des façons de faire plus d'argent dans le marché, c'est de trouver des partenaires. La chaîne de valeur est un terme dont on abuse parfois, mais un système de commercialisation basé sur la chaîne de valeur, si vous pouvez trouver des partenaires... et il y a des gens, il y a des entreprises dans le monde qui sont prêts à travailler directement avec les agriculteurs, qui sont concernés.
    Sur nos bouteilles d'huile de canola au Japon, nous avons maintenant des photos de nous. Je vends des racines de pissenlit. Quand on m'a demandé si je peux faire pousser des pissenlits, je me suis dit, bon sens, où est-ce que je peux trouver des graines? Et j'ai dû trouver des contenants pour les faire pousser. Mais nous faisons pousser des pissenlits, et nous fabriquons du café de pissenlit et l'expédions outre-mer et ils ont une photo de moi dans le champ avec une poignée de pissenlits dans les mains.
    Il est donc possible pour nous de faire de l'argent avec des produits qu'on ne soupçonnerait même pas. Nous demandons aux entreprises sur le marché si nous pouvons faire pousser un produit qui les intéresse, au lieu de le faire pousser et d'essayer ensuite de le vendre, et si ça ne marche pas, d'aller trouver le gouvernement...
    Quelqu'un m'a demandé un jour quel type de ferme j'avais. Je lui ai répondu que nous avions des bovins à viande et il m'a demandé pourquoi. Je lui ai répondu que c'est parce que nous avions décidé il y de nombreuses années d'acheter des bovins à viande et de vendre nos vaches à lait. Il m'a demandé si nous avions fait une étude de marché et je lui ai répondu non. Il m'a demandé la race des bovins et je lui ai répondu Angus. Il m'a demandé si nous aimerions faire quelque chose de différent et je lui ai répondu non, etc. À la fin, il m'a dit: « Vous venez tout juste de me décrire un passe-temps. Vous faites ce que vous faites parce que c'est ce que vous voulez faire, et vous n'avez jamais fait de recherches sur le marché ».
    Je pense que les agriculteurs doivent être plus proactifs dans la recherche de marchés, mais nous avons besoin d'aide parfois pour y arriver.
    De quel type de soutien avez-vous besoin du point de vue de la recherche, du développement des exportations?
    Eh bien, du point de vue de la recherche, différentes choses. Mais je me suis rendu compte qu'on peut obtenir du soutien même pour les billets d'avion... Il y a quelques années, j'ai pu obtenir de l'aide dans le cadre de deux programmes différents pour me rendre à des conférences et à divers endroits. Ces programmes semblent avoir presque tous disparu. On ne veut pas que les gens voyagent. Eh bien, il faut parfois aller voir ailleurs ce que les gens font afin de rapporter des idées nouvelles à la maison. Il y a donc différentes choses qui peuvent être faites.
    Je pense que d'autres personnes veulent parler.
    Nous exportons du canola au Japon, mais le problème se trouve là-bas. Ce que je veux dire, c'est que le beau côté est que le Japon est un pays importateur; le pays ne produit que de 30 à 40 p. 100 de son approvisionnement alimentaire. Une entreprise au Japon nous a approchés pour produire des fèves adzuki. Les agriculteurs là-bas obtiennent environ 4 000 $ la tonne pour ce produit, mais ils protègent beaucoup leur marché.
    Ce que cela signifie, c'est qu'avant même que nous puissions produire ce produit, l'entreprise qui achète des fèves adzuki doit obtenir un permis et elle doit payer pour l'obtenir. Disons que ce permis coûte 100 $ la tonne — je donne un chiffre au hasard, je ne sais pas ce qu'il coûte. L'entreprise doit acheter un permis pour importer des fèves adzuki, et c'est de cette façon que le pays réglemente les quantités importées, ce qui permet de protéger les agriculteurs et de leur assurer un prix élevé. Nous ne recevrons pas 4 000 $ la tonne, mais le marché est réglementé au moins. Et c'est quelque chose que nous... À part les bananes et les oranges sans doute, nous pouvons produire essentiellement 100 p. 100 de notre approvisionnement alimentaire au Canada. Il s'agit tout simplement d'un autre marché, ces 30 ou 40 p. 100, et c'est la question je crois.
(1035)
    Merci, Gerard.
    Notre temps est écoulé. Ça passe toujours tellement vite.
    Monsieur Easter.
    J'aimerais apporter une petite précision concernant le point soulevé par Gerard sur l'accord de vente de pommes de terre avec le Venezuela parce que, selon moi, nous n'aurons pas le choix de nous entendre là-dessus.
    Voici ce qui s'est réellement passé: on a laissé les exportateurs de pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard à la merci des politiques vénézuéliennes. Alors que les Pays-Bas n'hésitent pas à envoyer une équipe de gens, avec le soutien du gouvernement, pour affronter le pays et appuyer leurs exportateurs, le Canada échoue dans cette tâche. Je tiens à apporter cette précision aux fins du compte rendu. Que ce soit bien clair: nous avons besoin d'une équipe d'intervention rapide pour appuyer les exportateurs canadiens, peu importe où ils se trouvent au pays, et pour les aider à affronter le système politique de l'autre pays, s'il y a lieu.
    D'accord, merci.
    Monsieur le président, je tiens à signaler qu'une équipe canadienne se trouve actuellement en Chine pour l'exportation du canola, par exemple; cette équipe s'est rendue sur place sans tarder, en l'espace d'une semaine. Alors, des efforts sont déployés pour accélérer le processus.
     Wayne a raison, malgré tout. Quand on constate ce genre de problèmes, on doit être en mesure de réagir assez rapidement.
    Merci beaucoup. Nous avons eu droit à une excellente discussion aujourd'hui. J'aurais voulu que l'on ait plus de temps, mais on a même dépassé ce qui était prévu.
    Je n'ai que quelques points à ajouter.
    Mike, en ce qui concerne votre commentaire sur le rôle clé que joue l'industrie, je sais qu'à titre de producteur, la crise de l'ESB en 2003 m'avait complètement assommé, comme bien d'autres personnes. Parfois, quand on est frustré, on veut blâmer quelqu'un ou mettre tous les torts sur le gouvernement. Certes, le gouvernement a un rôle à jouer dans cette affaire, mais l'industrie et la société y sont pour quelque chose, elles aussi; c'est une question de mentalité.
    Au Canada, il n'y a aucune politique d'aliments bon marché, ni au provincial ni au fédéral. Mais elle existe de façon artificielle, et c'est la société qui l'impose. Les gens doivent commencer à joindre le geste à la parole. S'ils disent vouloir appuyer l'agriculture, alors ils doivent le faire chaque fois qu'ils vont à l'épicerie ou au marché local, ou peu importe.
    Il y a un autre sujet sur lequel j'aimerais obtenir quelques observations — et nous n'avons pas le temps de les entendre, mais j'ai distribué une carte, et vous pourrez envoyer vos commentaires à notre greffière. Un thème qui est revenu assez souvent, c'est le Bureau de la concurrence; de l'avis de certains, le bureau ne semble pas utiliser les outils dont il dispose dans toute leur ampleur. Il y a même certaines personnes, dont moi-même, qui se demandent si on devrait lui accorder plus de pouvoir. Alors, j'aimerais connaître votre avis à ce sujet.
    Nous devons toujours garder à l'esprit une réalité. J'appuie sans réserve, tout comme la plupart  — en fait, peut-être la totalité — des gens ici présents, l'idée de protéger d'une certaine façon notre approvisionnement alimentaire national. Mais, en tant que contribuable — quand je retire mon chapeau d'agriculteur et mon chapeau de politicien —, je ne peux pas appuyer la subvention des exportations. D'une façon ou d'une autre, nous devons trouver un moyen de séparer les deux. Si certains d'entre vous ont des observations à faire là-dessus, je serais très heureux de les connaître, et le reste du comité aussi, je crois.
    Merci beaucoup d'être venus, en cette belle journée.
    Veuillez libérer la place le plus vite possible pour permettre au prochain groupe de témoins de s'installer — et encore une fois, j'encourage les députés à donner un bon exemple et à revenir dans cinq minutes.
    Merci.

(1040)
    Nous reprenons nos travaux. Nous entamons maintenant la deuxième partie de notre séance.
    J'aimerais remercier nos témoins de prendre le temps d'être venus malgré leurs horaires chargés, surtout par une si belle journée. Nous sommes contents d'être à l'Île-du-Prince-Édouard.
    Je vous demanderais de bien vouloir essayer de ne pas prendre plus de cinq à sept minutes pour vos déclarations; je vous ferai signe lorsqu'il vous restera deux minutes. Je serai aussi souple que possible.
    Mathieu Gallant, vous êtes le premier à prendre la parole. Vous disposez de cinq à sept minutes.
(1045)
    Je vais parler en français, je suppose.

[Français]

    Bonjour, je m'appelle Mathieu Gallant. Je possède une entreprise laitière. On élève à peu près 40 vaches laitières. L'entreprise est certifiée biologique depuis cinq ans. J'ai un diplôme en gestion et exploitation d'entreprise agricole. Notre ferme est une petite ferme familiale, tout le monde y travaille. J'ai décidé de m'établir parce que c'est quelque chose que je veux faire, mais il y aussi le fait que, quand on travaille à la maison..., I'll switch over to English, I guess.

[Traduction]

    Quand on travaille à la maison, on travaille pour préserver l'héritage familial. En revanche, il n'y a pas d'argent à faire. Nous travaillons dans l'industrie laitière. Disons que je suis en train de sacrifier mon revenu et mon temps pour la ferme familiale.
    Je me suis mis à regarder du côté des produits à valeur ajoutée. Je suis allé en France pour suivre un cours de fromagerie pendant cinq mois, puis je suis revenu pour me mettre à l'oeuvre. Je trouve qu'il est très difficile de tirer sa subsistance de l'agriculture en général. Une fois qu'on atteint l'étape de la valeur ajoutée, c'est une autre paire de manche parce qu'il n'y a aucun lien entre le producteur et le transformateur.
    Pour l'instant, j'en suis à l'étape de l'élaboration des plans d'affaires et de la visite de différents lieux, etc. Il faut travailler, disons, au moins 50 heures par semaine, puis courir à gauche et à droite. On consacre 50 heures par semaine à la ferme familiale, tout en essayant d'établir d'autres entreprises; on a besoin d'une certaine source de revenu parce que tout le monde veut essayer de mener une vie normale. Bien franchement, je sais que ce n'est pas toujours facile dans le milieu agricole.
    Je me suis rendu compte qu'il existe vraiment un énorme fossé entre les étapes de la production et de la transformation. Beaucoup de gens disent: « Nous sommes des agriculteurs. Nous savons semer des graines et traire des vaches; c'est là, notre expertise. » Mais, pour vous dire franchement, il y a lieu de gagner beaucoup d'argent dans le domaine de la transformation. Après avoir effectué quelques études de marché, je me suis dit: « Bon, je peux travailler 60 heures par semaine et faire un bénéfice de, disons, 75 ¢ le litre, ou je peux travailler, mettons, 20 heures par semaine et, pour le même litre de lait, faire un bénéfice de 3,50 $. »
    J'adore l'agriculture et tout qui s'y rattache, mais encore faut-il pouvoir en vivre. On a dû faire beaucoup de sacrifices. Si on veut assurer la viabilité de l'agriculture ici, surtout dans la région rurale de l'Île-du-Prince-Édouard, on doit trouver différentes solutions pour garder les jeunes agriculteurs ici; on doit s'assurer que ce secteur permet à tout le monde de gagner sa vie et de faire du profit, tout en offrant des perspectives de travail intéressantes.
    Je sais que c'est assez fondamental. Je ne suis rien qu'un jeune agriculteur de 25 ans qui travaille à la maison et qui essaie de démarrer sa propre entreprise en parallèle. Une chose est sûre: je ne veux pas abandonner la ferme familiale. Je travaille donc en même temps sur la ferme parce qu'il y aura, on l'espère, un plan de relève, et je prendrai les rênes pour la quatrième génération. Mais, entre-temps, je ne peux pas m'asseoir à ne rien faire et attendre un chèque de paye. Tout le monde doit faire quelque chose pour gagner sa vie.
    Merci.
(1050)
    Merci, Mathieu. Ce sont les jeunes de votre âge qui représentent l'avenir de l'agriculture. Alors, je vous remercie.
    Je cède la parole à Matthew Ramsay.
    Bonjour, tout le monde. Nous tenons à vous remercier de nous avoir invités ici.
    Je m'appelle Matt Ramsay, et je suis accompagné de Trent Cousins. Nous allons vous faire un exposé en deux parties.
    Nous aimerions vous faire part de notre point de vue sur un changement de paradigme que nous jugeons nécessaire dans le secteur agricole du XXIe siècle. Nous allons chacun souligner certains points clés qui figurent dans le mémoire que nous vous avons remis.
    Je vais commencer par donner un aperçu de certaines des préoccupations socioéconomiques qui, selon moi, devraient être traitées à un niveau supérieur, soit dans le cadre d'une réforme agricole. Trent va parler des principaux domaines prometteurs où, selon nous, il y a lieu de faire bouger les choses.
    D'entrée de jeu, je dirai qu'on doit accueillir l'agriculture, à bras ouverts, au XXIe siècle. L'efficacité et la durabilité ne sont plus des atouts, mais des exigences d'une économie de plus en plus mondialisée. Je penses que nous le savons tous. C'est ainsi que se font les choses.
    Nous ne pouvons plus nous accrocher à ces traditions ancestrales. Nous devons fusionner les paradigmes écologiques et économiques en des cadres hybrides qui tiennent compte de la valeur totale de l'agriculture. Par là, je n'entends pas seulement la rentabilité. La stabilité à long terme ne peut pas se limiter à la rentabilité, mais en même temps, nous ne pouvons pas faire fi des règles implicites d'un marché mondial. Nous devons trouver un terrain d'entente entre les deux, et c'est ce qui créera, selon moi, une stabilité holistique à long terme.
    Il faut jeter un regard neuf sur l'interrelation prolifique dans chaque économie et apprécier réellement l'importance cruciale de nos secteurs primaires. C'est grâce à eux que nous avons bâti notre pays. Quand on voit à quel point tous les éléments de notre économie sont interreliés, on ne peut s'empêcher de constater des signes avant-coureurs ici et là. Même si notre pays n'a pas été bâti sur les principes de l'économie mondiale, nous sommes voués à l'échec si nous ne parvenons pas à stabiliser nos industries.
    D'après ce que j'observe, il existe actuellement une division claire et nette entre une génération tournée vers le passé et une autre tournée vers l'avenir. Le vieil agriculteur est une espèce en péril, tout comme le jeune. Avec leur disparition, il n'y aura plus moyen de stabiliser et de nourrir un pays. Voilà pourquoi nous devons empêcher que cela se produise.
    Une nouvelle mentalité doit infiltrer les économies agricoles. La stabilité à long terme commence et s'arrête dans l'esprit et le coeur de ceux qui ne trouvent actuellement guère de refuge dans l'agriculture. Nous devons travaille de façon diligente, concertée et inédite. Donnons aux agriculteurs les outils nécessaires pour qu'ils puissent, une fois de plus, évoluer en toute liberté en tant que producteurs d'aliments.
    Nos attentes seront trop élevées si nous continuons de manger sans aucune réflexion. Nous devons permettre aux agriculteurs conventionnels de trouver un terrain d'entente entre leurs façons de faire et celles des jeunes agriculteurs à qui nous cherchons à offrir ces débouchés.
    Je vais maintenant céder la parole à Trent qui va vous parler de certains domaines clés où nous pourrions commencer à saisir des occasions d'intégration.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis, moi aussi, très heureux de l’occasion qui m’est donnée de vous adresser la parole.
    J'ai grandi sur une exploitation de pommes de terre et de bœuf à grande échelle dans la région de Kensington ici, à l'Île-du-Prince-Édouard. Je continue de participer activement au secteur agricole, à la fois en dirigeant ma propre exploitation de boeuf et en travaillant à la ferme de pommes de terre de mon oncle.
    Il y a plusieurs années, je ne voyais aucun avenir ni pour moi ni, bien franchement, pour la plupart des jeunes dans le domaine et ce, pour plusieurs raisons. Maintenant, après beaucoup de recherches et d'études universitaires sur l'économie mondiale et tout le reste, je vois bel et bien un avenir très prometteur. Or, pour y arriver, il faut réaliser des économies par la rationalisation de manière à assurer la viabilité des producteurs dans l'industrie. De nouveaux modes de pensée sont de rigueur, comme Matthew l'a dit, pour qu'une si petite fraction de l'économie mondiale comme l'Île-du-Prince-Édouard devienne concurrentielle et le reste.
    J'aimerais aborder seulement quelques points. Ils vont sembler assez disparates, mais ils traitent en fait du même sujet.
    On doit créer de nouveaux emplois hautement qualifiés dans les secteurs privé et public de l'agriculture, pour répondre aux nouvelles questions comme la salubrité alimentaire, la lutte antiparasitaire intégrée et le partage accru de l'information.
    Nous commençons à peine à nous rendre compte du pouvoir de l'information dans toutes les industries. Si les agriculteurs partagent leur information les uns avec les autres — leur information non concurrentielle —, ils seront en mesure de réaliser plus facilement des économies. De plus, grâce à la création de ces postes qualifiés, chargés de la salubrité alimentaire et de tout le reste, on allégera la charge des agriculteurs. Ils n'auront pas nécessairement besoin de s'inquiéter de ce genre de détails; ils pourront se concentrer sur l'agriculture et produire une récolte au meilleur de leur capacité.
    Comme je l'ai dit, il n'y a pas si longtemps, l'idée que les agriculteurs puissent partager de l'information à propos de leurs exploitations n'était même pas imaginable. Le milieu a maintenant changé, et les agriculteurs ressentent plus que jamais le besoin de travailler ensemble, non seulement par l'entremise des conseils et des organismes existants pour le marketing et l'achat, mais aussi au niveau de la production. On commence vraiment à comprendre à quel point le pouvoir de l'information revêt une valeur extraordinaire pour réaliser des économies.
    Je crois qu'il faut également établir un point de repère par rapport auquel les exploitations actuelles pourront se mesurer. Une industrie locale qui livre concurrence sur un marché mondial doit s'assurer qu'elle a extrait la valeur totale de ses exploitations. Les exploitations qui ne parviennent pas à être à la hauteur de ces normes devraient être considérées non viables et, le cas échéant, on devrait les amener à changer de stratégie.
    Par ailleurs, on doit éliminer les obstacles actuels à l'entrée de la jeune génération dans l’industrie; pour ce faire, on doit travailler avec la génération actuelle pour déterminer des méthodes mutuellement avantageuses destinées à transférer ces exploitations fermières à capital élevé, sans exposer la nouvelle génération à un risque indu.
    Ce n'est que lorsqu'on libérera les agriculteurs des fardeaux supplémentaires d'une économie mondiale qu'ils seront à même de transférer toutes les compétences et connaissances essentielles à une génération habilitée à faire plus.
(1055)
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Holmes. Vous disposez d'un maximum de sept minutes.
    Merci de m'avoir invité ici aujourd'hui.
    Mon histoire ressemble beaucoup à celle de Mathieu Gallant. J'ai grandi sur une ferme familiale et j'ai toujours été passionné par l'agriculture. J'ai participé à des expositions de bovins par l'entremise du Conseil des 4-H et j'ai rencontré là-bas bien des gens que je considère parmi les plus progressistes et les plus intéressants. Tous ont choisi d'autres professions pour assurer leur gagne-pain. J’étais le seul à s’être lancé dans l'agriculture à temps plein. Toutefois, j'ai dû récemment occuper un emploi à l'extérieur de la ferme.
    Bon nombre des défis auxquels font face les jeunes agriculteurs comme moi sont les mêmes que ceux de nos homologues plus âgés, des défis comme la réglementation environnementale et l'accès au capital — en somme, la capacité d'établir une entreprise assez rentable pour vous permettre d’assurer votre gagne-pain.
    À mon avis, un élément qui est particulièrement important pour le secteur de l'élevage bovin ici, sur l'île — si nous voulons en avoir une —, c'est le maintien d'une usine de transformation du boeuf à Albany. Sans le financement des gouvernements fédéral et provincial, et sans la collaboration des producteurs de boeuf de l'île, notre industrie est vouée à l'échec et à la disparition.
    Soyez patients avec l'usine. Je sais qu'elle est maintenant dotée d'une bonne gestion. Continuez votre financement, si les dirigeants en fait la demande, afin leur donner un peu plus de temps pour régler tous leurs problèmes.
    Il y a une solution qui pourrait faciliter un peu plus la vie des jeunes agriculteurs qui entrent dans l'industrie... Bon nombre de jeunes agriculteurs manquent d'argent; alors, quand ils décident d'adopter des pratiques de gestion avantageuses, comme les installations d'entreposage en silos et en soute, donnez-leur la chance de contribuer aux salaires, etc. S'ils font le travail eux-mêmes, reconnaissez leur mérite de manière décente et équitable.
    Un autre défi auquel nous faisons tous face, et je sais qu'il s'agit d'un défi difficile à relever, c'est la valeur des terres. J'habite juste à l'extérieur de la ville de Charlottetown. Il est très difficile pour moi de concurrencer le professeur ou le comptable qui veut acheter dix acres pour son cheval. Je sais que vous n'y pouvez pas grand-chose, mais sachez seulement qu’il s’agit d’un problème avec lequel nous sommes aux prises.
    C'est essentiellement tout ce que j'avais à dire.
(1100)
    Merci beaucoup, Allan.
    Je vis dans une région où la deuxième plus grande industrie est le tourisme, et tous les résidents de la ville viennent s’acheter un chalet là-bas. Alors, je comprends ce que vous dites au sujet des prix fonciers concurrentiels.
    Nous passons maintenant aux représentants de Prince Edward Island Cattle Producers, à savoir Brian Morrison et Rinnie Bradley. Vous disposez de cinq à sept minutes, s'il vous plaît.
    Je vais faire une brève introduction. Notre directrice exécutive, Rinnie Bradley, lira notre mémoire.
    J'aimerais vous souhaiter la bienvenue à l'Île-du-Prince-Édouard. Merci d'avoir pris le temps de venir nous rendre visite. Nous sommes conscients du fait que tout le monde a des horaires chargés. Bref, nous sommes ravis que vous soyez ici pour entendre nos observations.
    Bonjour, et merci encore une fois de nous avoir invités ici.
    J'aimerais vous parler un peu du programme de gestion des risques de l'entreprise. Je vais d'abord me pencher sur Agri-stabilité.
    Une baisse du nombre de producteurs participant à Agri-stabilité témoigne de l’insatisfaction face au programme. À l'Île-du-Prince-Édouard, le taux de participation au programme Agri-stabilité a chuté de plus de 30 p. 100 depuis 2003. Deux facteurs importants contribuent à cette baisse. Premièrement, de nombreux producteurs de boeuf ne sont pas en mesure de répondre aux exigences des marges de référence positives. Deuxièmement, beaucoup de...
    Rinnie, auriez-vous l'obligeance de ralentir un peu pour faciliter la tâche des interprètes?
    Merci.
    Deuxièmement, beaucoup de personnes estiment que le processus de demande est quelque peu lourd. Cette situation nous inquiète, parce que nous croyons que les producteurs laissent d'importants fonds fédéraux et provinciaux sur la table à cause de ces défis.
    Toutefois, il y a des solutions possibles. Les marges de production, qui sont utilisées pour calculer les marges de référence, comprennent uniquement les revenus admissibles moins les dépenses admissibles. Il y a lieu de rajuster la liste des revenus et des dépenses admissibles afin de produire une marge de référence plus positive.
    Pour être admissible au programme Agri-stabilité, on utilise les marges de référence des cinq dernières années afin de calculer la moyenne olympique et le critère de viabilité. Il y a lieu de laisser tomber la moyenne olympique et d'utiliser seulement les trois meilleures années et les cinq dernières années pour faire les calculs.
    Pour ce qui est du critère de viabilité, on pourrait soit l’abolir, soit l’améliorer. La CCA fait actuellement des pressions pour qu’on réduise l'exigence des marges de références positives totales à un ratio de un sur trois; le secteur du porc, pour sa part, demande que cette exigence soit complètement retirée pour permettre aux agriculteurs ayant des marges de référence négatives de se qualifier au programme Agri-stabilité.
    Des efforts devraient être déployés pour simplifier le processus de demande et les formulaires supplémentaires à remplir; on devrait offrir une formation aux producteurs pour leur montrer comment bien remplir les formulaires, en toute confiance, sans qu’ils soient obligés d’assumer les coûts élevés des services comptables professionnels. Ces frais supplémentaires constituent souvent le facteur déterminant pour bien des agriculteurs dans leur choix de participer au programme Agri-stabilité.
    Passons maintenant au programme Agri-investissement. Depuis le début du programme, les producteurs ont pu retirer leur argent sans aucune exigence de la part du gouvernement fédéral quant à la façon dont ils devraient le dépenser. Nous encourageons le gouvernement fédéral à éviter d'imposer des restrictions à la façon de dépenser les fonds jusqu'à ce que l'industrie soit en meilleure posture.
    En ce qui concerne Agri-protection, nous avons travaillé avec le bureau de Charlottetown pour mettre au point un programme d'assurance du bétail pour les producteurs de boeuf. D'autres provinces le font aussi, et nous encourageons le gouvernement fédéral à travailler avec l'industrie pour élaborer un programme qui offre une couverture égale aux producteurs, tout en tenant compte des différents besoins des régions du pays.
    Relativement au programme Agri-relance, nous ne sommes au courant que de l'industrie des pommes de terre qui en bénéficie. Toutefois, nous estimons que les directives ne sont pas claires et qu'il y a des retards indus dans le processus. Des mesures doivent être prises pour clarifier le tout, surtout en ce qui concerne la prochaine étape après le paiement.
    Il y a ensuite le programme d'avance de fonds. À l'Île-du-Prince-Édouard, on dit que s'il n'y avait pas de programme d'avance de fonds, il n'y aurait pas de secteur d’élevage bovin. À l'heure actuelle, certains de nos producteurs ont reçu des avances dans le cadre du programme d'avance de fonds à cause des difficultés économiques graves en 2008, et ils doivent les rembourser en septembre. Nous demandons encore une fois au gouvernement fédéral de reporter ces paiements d'un an, jusqu'à l'automne 2011.
    Il y a eu des discussions sur les stocks de bovins utilisés comme garantie pour les avances en période économique difficile; en fait, ces stocks pourraient être libérés afin de permettre aux producteurs de recevoir des avances de fonds supplémentaires. Cependant, c'est le gouvernement qui assumerait cette garantie; nous en sommes conscients.
    J’aimerais maintenant parler un peu du Programme de gérance agroalimentaire Canada-Île-du-Prince-Édouard. Ce programme, qui s'adresse aux producteurs de l'Île-du-Prince-Édouard, vise à résoudre un certain nombre de problèmes environnementaux préoccupants grâce à ce qu’on appelle des pratiques de gestion bénéfiques. Pour notre industrie, des mesures comme l'entreposage du fumier, les fosses d’ensilage, la retenue des hydrocarbures et le contrôle du ruissellement permettent aux producteurs d’accéder aux fonds. La participation est faible à cause du financement minimal disponible. Le programme ne couvre qu'un certain pourcentage du projet. En effet, le programme ne couvre que 15 à 30 p. 100 des frais liés aux pratiques de gestion les plus bénéfiques pour les producteurs de boeuf.
    Un demandeur n'est admissible qu'à un financement de 50 000 $. Une catégorie comme la gestion des produits et des déchets comprend notamment la retenue des hydrocarbures et l'amélioration de l'ensilage à la ferme; pourtant, les demandeurs sont admissibles seulement pour un projet de 15 000 $ sur quatre ans. Ils ont donc une marge de manoeuvre limitée parce qu'ils ne peuvent s’occuper que d'une seule préoccupation environnementale.
(1105)
    En ce qui concerne le coût de production, nous avons de moins en moins accès aux déchets de pommes de terre des Fermes Cavendish parce que ce produit est maintenant transféré à un biodigesteur. Par conséquent, nos producteurs dorénavant trouver de nouvelles sources d'aliments pour leur bétail.
    Nous croyons que le gouvernement pourrait travailler avec nous de façon à accorder aux producteurs des prêts à faible taux d'intérêt destiné à l’achat de nouveaux équipements pour leur permettre de planter, de cultiver et d'entreposer ces nouvelles variétés.
    Par ailleurs, on pourrait également consentir des prêts pour permettre des réparations essentielles aux exploitations actuelles et pour remplacer les granges et les entrepôts de fourrage qui, dans certains cas, sont sur le point de s'écrouler. Il y a donc un besoin d'investissement en capital.
    Rapidement, nous savons que dans d'autres provinces, il y a des pourparlers sur la possibilité d’établir un programme de prix national et d'assurance de base. Nous ignorons quel en sera l’impact sur nous parce que notre province n’est pas un grand exportateur, mais si le programme est mis en œuvre à la grandeur du pays, nous voulons être sûrs de son efficacité.
    Brian va parler de l'usine d'Atlantic Beef Products, pour conclure.
    Après deux ou trois ans de négociations, l'usine d'Atlantic Beef Products à Borden a réussi à obtenir du financement auprès de l'APECA; l’usine est maintenant dotée de nouveaux équipements et de certaines machines à valeur ajoutée. Les activités devraient reprendre d'ici environ un mois, ce qui devrait améliorer les bénéfices de l'usine et, en retour, ceux des agriculteurs, on l’espère.
    Autre point: les MRS. Pour l’instant, à l'usine de Borden, les éleveurs d'animaux de ferme se voient déduire 20 ¢ le livre pour ce . J’ai entendu dire qu’en Ontario, ce coût s'élève à 40 ¢ le livre. Un de nos marchands à l'Île-du-Prince-Édouard a commencé à expédier aux États-Unis parce qu’il n’y a aucune déduction pour les bovins âgés de plus de 30 mois. Il y a donc des exigences injustes au Canada dans notre secteur d’élevage bovin, et nous laissons de l'argent en trop. Personnellement, j'ai eu trois bovins de plus de 30 mois la semaine dernière qui m'ont presque coûté 700 $; en gros, tout est lié aux formalités administratives de l'ACIA. Si ces bovins étaient expédiés aux États-Unis, je n'aurais eu aucune déduction.
    En conclusion, il n'y pas de solution miracle pour régler les problèmes dans le secteur de l’élevage bovin à l'Île-du-Prince-Édouard. La réalité, c'est que nous devons essayer de prendre de petits pas pour changer les choses. Le gouvernement doit continuer de consulter les industries primaires pour assurer l'approvisionnement des produits primaires. Sachez qu’à l'Île-du-Prince-Édouard, le nombre de producteurs est passé de 700 à moins de 400 en l'espace de deux ans. Si leur nombre continue de chuter, nous n'aurons pas l'infrastructure nécessaire pour remettre l'usine à flots. C'est d'ailleurs ce qui se passe déjà dans le secteur du porc
    Il est à espérer que nous pourrons travailler ensemble afin de traiter une partie de ces formalités administratives pour que les agriculteurs puissent encaisser des bénéfices.
(1110)
    Merci, Brian.
    Nous passons maintenant aux questions. Monsieur Eyking, vous avez cinq minutes.
     Merci, monsieur le président.
    Et je remercie les témoins d'être des nôtres ce matin.
    Au cours de nos déplacements partout au pays, nous avons entendu le point de vue des jeunes dans différents secteurs agricoles. Ce qui est triste, bien entendu, c'est que nous entendons plus de choses négatives que positives. Quoi qu’il en soit, notre comité doit rassembler toutes les données et essayer de voir ce qu'on peut faire pour aider les nouvelles industries.
    Ma question porte davantage sur l'avenir de l'industrie des pommes de terre à l'Île-du-Prince-Édouard. Je sais que dans le contexte nord-américain, la consommation des pommes de terre est à la baisse. Nous avons entendu dire que les représentants des Fermes Cavendish demandent aux cultivateurs de produire moins de pommes de terre. Je crois également comprendre que l'orge joue un rôle important pour la rotation des cultures de pommes de terre. N’oublions pas qu’une bonne part de l'orge était cultivée pour le secteur du porc, un secteur qui tombe en chute libre. Il y a trop de choses pessimistes... comment l'industrie des pommes de terre va-t-elle s’en sortir? Prévoyez-vous une baisse de la production de pommes de terre à l'Île-du-Prince-Édouard? Y a-t-il un autre produit qu’on peut cultiver? Que peut-on faire? De nouveaux marchés se pointent-ils à l’horizon?
    L'autre partie triste de cette affaire, c'est que le prix des pommes de terre est resté relativement bas ces dernières années; par conséquent, vous ne pouvez pas compter sur la plupart des programmes qui sont maintenant offerts parce que vos prix du marché sont déjà trop faibles pour être admissibles.
    D'après ce que je constate, le bilan semble être très sombre, mais y a-t-il quelque chose de positif? Y a-t-il moyen de faire changer les choses? Y a-t-il une autre récolte qui est compatible? Nous avons entendu des cultivateurs de graines ce matin, dans le secteur du canola entre autres, mais où se trouvera l'industrie dans dix ans et que pouvons-nous faire au fédéral pour lui donner un coup de main ou pour la transformer en quelque chose d'autre?
    Je pense que cela revient encore une fois au partage de l'information entre les intervenants de l'industrie. Si le marché exige que nous produisions moins de pommes de terre, alors nous devons être en mesure de réagir à la demande et ce, plus rapidement que jamais.
    D'après moi, certaines énergies renouvelables présentent un énorme potentiel. Il y a lieu de cultiver d'autres produits, à part l'orge. De mémoire, je sais que le canola peut être cultivé ici. On peut produire du biodiesel à partir des oléagineux, ce qui peut en retour servir de carburant pour nos tracteurs. Ce n'est qu'un exemple parmi d'autres.
    Le message à retenir, c'est que nous devons prendre la situation en main et comprendre un peu mieux les dynamiques du marché, comme on s'y attendrait dans toute autre industrie. Nous devons établir des pratiques agricoles proactives. Pour l'instant, nous sommes en mode réactif, mais le temps est venu de se tourner vers l'avenir.
    D'après notre expérience, nous envisageons de présenter un nouveau modèle agricole, un modèle qui n'est pas basé sur une production linéaire, mais plutôt sur des réseaux de collaboration qui appuient des unités autonomes de production de façon à ce que la logistique soit gérée par un niveau supérieur. Ainsi, nous pouvons créer des unités de production échelonnables: si nous constatons qu'une récolte est moins en demande qu'une autre, nous aurons la marge de manoeuvre économique pour faire des ajustements et transformer l'exploitation de sorte qu'elle produise...
    Je crois que vous et Trent êtes, tous deux, des cultivateurs de pommes de terre, n'est-ce pas?
    Oui.
    Alors, comment cela se manifeste-t-il à la ferme? Je suppose que vous vendez tous deux vos produits aux Fermes Cavendish. Si les représentants de cette entreprise vous disent que la situation ne va pas s'améliorer, quelles en seront les répercussions sur vos récoltes? Je connais la technologie et l'interface, mais comment cela se traduira-t-il à la ferme, mis à part la rotation des récoltes? Prévoyez-vous cultiver de moins en moins de pommes de terre?
    Nous avions espéré que les marchés s'amélioreraient. C'est le meilleur des scénarios, mais d'après les résultats de notre recherche — je ne connais pas les chiffres exacts —, si je ne me trompe pas, en 2005 ou en 2007, la superficie des récoltes était de 96 000 acres, alors qu'elle est de 85 000 acres cette année.
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, je ne voyais aucun avenir à un moment donné. J'étais arrivé à cette conclusion parce que j'avais l'impression que l'agriculture était en quelque sorte laissée pour compte. Mais ce n'est pas tout à fait vrai, si on considère qu'une ferme est comme n'importe quelle entreprise dans tout autre secteur de l'économie: si la demande n'est pas là, on diminue la production, n'est-ce pas? En agriculture, ce n'est pas une tâche facile à cause de l'investissement en capital et de tout le reste.
    Si vous avez une moissonneuse qui peut couper 1 000 acres d'orge, alors pas de problème, mais si vous cultivez seulement 500 acres, alors il y a un petit problème. C'est là que le partage de l'information entre en jeu pour les agriculteurs. Deux agriculteurs n'ont besoin que d'une moissonneuse, au lieu d'avoir une machine par ferme. Ce genre de solution peut aider à réduire la production. N'empêche que je préfère ne pas être obligé de la réduire.
(1115)
    Alors, le gouvernement fédéral devrait-il encourager et favoriser cet esprit de collaboration entre les agriculteurs, grâce à des coopératives de machines, des prêts à intérêt réduit ou même des subventions pour aider les agriculteurs à travailler ensemble et à suivre cette voie?
    Il n'y a pas d'autres moyens, à mon avis. Nous devons rompre avec les traditions et encourager les agriculteurs à travailler ensemble. Nous pouvons quand même préserver une autonomie, mais nous avons besoin d'une vision plus large pour mieux utiliser les ressources; après tout, comme Trent l'a dit, nous n'avons plus les moyens de laisser cette machinerie et ces terres ramasser de la poussière.
    Quand on conjugue les efforts, on crée des choses qu'on n'aurait pas pu faire autrement, et c'est ce que nous visons. Nous pouvons vous citer plusieurs cas où nous aurions pu réaliser certaines de ces initiatives si seulement nous avions un réseau de collaboration. Mais un agriculteur à lui seul n'a pas le capital ni les économies d'échelle pour réaliser ces projets. Nous devons trouver le point de rencontre entre l'individu et le collectif. Nous devons rendre la production échelonnable, c'est-à-dire l'adapter aux besoins du marché. Pour l'instant, nous n'en sommes pas tout à fait là, j'ai bien l'impression.
    Merci.
    Madame Bonsant, cinq minutes.

[Français]

    Vous êtes le dernier groupe que nous recevons, et il est très intéressant de voir une brochette de jeunes hommes aussi passionnés de l'agriculture, je vous encourage à continuer votre travail. C'est vrai qu'au Québec, on a fait un choix de société, on a travaillé fort pour garder la gestion de l'offre, mais le gouvernement a aussi fait un choix en ce qui concerne la deuxième et la troisième transformations dans les fermes laitières.
    Vous avez dit plus tôt, monsieur Gallant, qu'il y a un écart entre le producteur, le transformateur et l'acheteur. Si le transformateur fait de l'argent, il est possible pour vous d'en faire aussi. Ils sont venus à Québec, ils sont venus voir les gens qui font du fromage, du lait cru, tous ces produits. Je ne veux pas vous dire ce que vous devriez faire, mais je pense qu'il y aurait une belle possibilité de ce côté, pour vous qui faites la production laitière. On a mangé du fromage, hier, il était bon. Le fromage, d'une région à l'autre du pays, n'a pas le même goût parce que le type de vaches est différent, la température n'est pas la même, etc.
     Que pensez-vous de l'idée d'une aide financière de la part du gouvernement provincial pour vous permettre de faire une deuxième et une troisième transformations? Est-ce que cela pourrait améliorer vos revenus?
    Vous pouvez répondre en anglais.
    Dans l'industrie laitière, il faut cogner à plusieurs portes pour mener ses activités: on fait affaire avec l'environnement, le health care et la fédération. En même temps, il faut consulter des organismes communautaires, cela fait beaucoup de démarches à suivre. Un jeune de 25 ans peut croire qu'il a beaucoup de bagage, mais lorsqu'il se présente devant tel ou tel organisme, il n'est pas nécessairement pris au sérieux. C'est vrai qu'on cherche une relève en agriculture, mais les jeunes ne sont pas tous au courant de toutes les démarches que cela demande de faire.
    Je ne savais pas que c'était comme ça ici, je suis bien contente de l'apprendre.
    Monsieur Ramsay, vous avez parlé d'une pénurie de main-d'oeuvre. Parlez-vous d'une pénurie de main-d'oeuvre spécialisée en réparation de camions, en réparation de tracteurs ou de spécialistes de l'agriculture?

[Traduction]

    Ce que nous préconisons, c'est la création de certains rôles professionnels qui n'existent pas actuellement pour les jeunes dans ces industries. À l'heure actuelle, nous avons beaucoup de travail saisonnier et beaucoup d'emplois que la plupart des étudiants du secondaire ou même du premier cycle universitaire ne considéreraient pas professionnels. Je pense que personne ne peut nier le fait que bon nombre de nos jeunes quittent la région pour aller vivre ailleurs.
    Si nous pouvions employer, si nous pouvions plonger dans l'ère de l'information... Nous sommes conscients du fardeau que représente la salubrité alimentaire; nous savons que la situation va empirer. Nous vivons dans un monde de plus en plus branché, ce qui signifie que nous avons tous besoin de plus d'informations. Il y a toute une génération de jeunes qui, dès leur naissance, savent utiliser intuitivement ces technologies de communication et de partage de l'information. Il existe donc, selon moi, d'énormes possibilités de créer un nouveau rôle, un nouveau professionnel de l'information pour le secteur agricole — bien entendu, ce n'est pas limité à l'agriculture, mais pour les besoins de notre discussion, nous allons nous en tenir à cela; bref, un professionnel qui comprend les flux d'information et les fardeaux administratifs qui sont imposés à une exploitation fermière typique et qui peut probablement s'en occuper en deux fois moins de temps que la plupart des agriculteurs. Je sais que, d'après mon expérience, mon père va écrire quelque chose quatre fois, et il ne comprend pas qu'un ordinateur lui permettrait d'éviter tous ces problèmes. C'est un petit exemple, mais cela montrer à quel point nos jeunes sont mieux équipés pour composer avec les dynamiques de l'information. Je crois que nous avons là d'énormes possibilités de créer des emplois à l'intérieur de ces structures axées sur la collaboration.
    Pour l'instant, il est très difficile d'embaucher une personne sur une ferme et de lui fournir assez de travail pour le garder occupé, mais quand on relie dix agriculteurs, il y a tout d'un coup des occasions qui se présentent.
(1120)

[Français]

    C'est vrai, cela.
     J'ai une autre question. Je comprends ce que vous dites en ce qui concerne la main-d'oeuvre, mais avez-vous accès à Internet haute vitesse partout ici? Le système est-il déployé ou bien êtes-vous encore à la vitesse slow and dead?

[Traduction]

    C'est toujours lent à mourir.
    On y arrive.
    Des voix: Oh, oh!
    Je sais. Je crois qu'il existe encore des zones non desservies un peu partout au pays, notamment dans ma circonscription. La situation s'améliore, mais à un rythme lent.
    Monsieur Allen, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Ma maison aussi est équipée d'une connexion Internet qui fonctionne à la vitesse d'une tortue, si bien que tout le monde chez moi refuse d'utiliser un ordinateur.
    J'ai quelques questions à poser à Matthew et à Trent, puis à Mathieu. Pour vous dire franchement, quand on commence à parler de changement à valeur ajoutée, ça me rend fou. Je viens du secteur de l'automobile, et je peux vous dire qu’on m’a rebattu les oreilles avec cette expression. Mais permettez-moi de vous présenter mon point de vue assez rapidement, puisque je n'ai que cinq minutes.
    Au bas de la chaîne à valeur ajoutée, il y a le petit gars qui fabrique des pièces; c'est lui qui fait rouler l'entreprise, au bout du compte. L’employeur trouve ensuite quelqu'un d'autre qui veut fabriquer des pièces. Le problème avec l'agriculture, c'est que vous produisez de grosses pièces. Vos produits finissent par être consommés à un moment donné. Mais, en ce qui concerne la valeur ajoutée dans le contexte de l'agriculture, bien franchement, nous ne mangerions pas la moitié des aliments à l'épicerie s’ils étaient à valeur ajoutée. Ce n'est pas bon pour ma santé, surtout à mon âge.
    J'ai donc parfois de la difficulté avec la terminologie. Je demanderais aux gens d'y penser, parce que vous n'ajoutez pas nécessairement de la valeur aux aliments; ce que vous produisez représente déjà la valeur optimale. Peu importe ce qu'on y ajoute, c'est quelqu'un d'autre qui marque le prix et empoche quelques sous de plus. On n'arrive tout simplement pas à vous refiler les bénéfices. Alors, je ne suis pas sûr d'aimer l'expression. Non, je me reprends: je sais que je n'aime pas l'expression. J'aimerais juste demander aux gens de penser à la terminologie.
    Dans le cas de Mathieu, il parle de se lancer dans le domaine de la transformation, sans nécessairement se limiter au rôle de producteur primaire — s'il parle de fabriquer du fromage. Alors, ma question pour Mathieu est la suivante: voyez-vous une compatibilité entre le fait d'être un producteur primaire et un transformateur ou voyez-vous une nette différence entre les deux qui vous force à choisir entre les deux? Je pose cette question parce que dans l'industrie laitière, nous ne pouvons pas tous être à la fois transformateurs, agriculteurs et producteurs. Je pourrais aller magasiner pour trouver du fromage au prix le plus bas, mais Allan voudrait peut-être en fabriquer à un prix plus bas que le vôtre, et vous revoilà au bas de la liste — et je doute que ce soit un bon endroit où se trouver.
    D'après mes recherches, pour l'instant — à l'Île-du-Prince-Édouard, en tout cas —, on est ou bien producteur, ou bien transformateur. Il n'y a aucun avantage à être l'un ou l'autre. Le hic, c'est qu'à cause du prix commun des P-5, tout le monde paie la même chose pour le marketing, l'administration, la comptabilité et le transport. Mais disons que je veux faire de la transformation sur place, à la ferme; j'aurai quand même besoin de payer les frais de transport nationaux, même si je transporte le lait moi-même. Ça va dans un sens et dans l'autre. Mais non, il n'y a pas vraiment de...
    Je crois qu'il y a une grande séparation entre le producteur et le transformateur, mais la valeur ajoutée n'est pas juste une science; c'est une possibilité. Pas besoin d'être un scientifique pour y arriver. Si je peux le faire, tout le monde le peut. C'est une façon d'encourager plus de gens à regarder les différents aspects parce qu'on peut essentiellement doubler notre revenu. Mais faute d'incitatif, personne n'ose s'y lancer parce qu'on doit livrer concurrence à Saputo, Agropur et à toutes les autres grandes sociétés — bien qu'on assiste maintenant à un développement du côté des marchés de créneau.
(1125)
    Pour les deux autres, vous avez parlé des technologies de l'information et du partage de l'information, ce que je trouve fascinant. Les jeunes, pensez-y: on dirait, bien franchement, que vous êtes branchés dès votre naissance. En tout cas, mes enfants ont à peu près votre âge, et j'utilise toujours un crayon et un bout de papier. Moi aussi, je fais comme votre père: j'écris probablement les choses sur six copies et je n'arrive pas à trouver les cinq autres.
    Mais comment entrevoyez-vous la structure? Après tout, il faudra bien que quelqu'un paie pour cela. Les spécialistes des technologues de l'information vont-ils désormais faire partie d'un ministère de l'agriculture, au niveau provincial ou fédéral, ou vont-ils travailler dans un coopératif? Et qui va réellement financer cela? Parce qu'il faudra bien payer ces gens, et on va devoir leur offrir un salaire assez alléchant pour pouvoir les attirer.
    Exactement.
    À l'heure actuelle, chaque fardeau administratif lié à la salubrité alimentaire est déjà payé par l'agriculteur. Nous voulons transposer la charge de travail totale vers, je dirai, un réseau hypothétique d'agriculteurs et créer un poste pour s'en occuper.
    Comme je l'ai dit, pour l'instant, il n'y a pas assez de travail sur les fermes pour employer un professionnel, et cela revient au concept de la valeur totale. Par là, je n'entends pas les marges sur le plan de la vente au détail; je fais plutôt allusion à l'idée de réunir un groupe de personnes qui sont dignes de confiance et capables de travailler ensemble. Ils peuvent faire plus de choses qu'individuellement.
    Le tout est plus grand que la somme des parties, et quand on commence à parler d'information, c'est là que la valeur totale entre en ligne de compte. Quand on commence à regrouper l'information de plusieurs agriculteurs, tout d'un coup, on voit des séries de données qui n'existaient pas auparavant. Voilà en quoi consiste notre valeur totale, et c'est aussi à ce moment-là que nous pouvons offrir du travail satisfaisant à un jeune professionnel. Mais, en réalité, la partie monétaire est déjà payée actuellement.
    Pour nous, il s'agit surtout d'une réorganisation des ressources pour créer des postes plus homogènes et plus rémunérateurs au lieu d'offrir de petits boulots saisonniers, éparpillés ici et là. C'est vraiment ce que nous visons; il ne s'agit pas de créer quelque chose de nouveau que nous devrons payer.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Armstrong. Vous disposez de cinq minutes.
    Merci à tous d'être ici aujourd'hui. J'ai trouvé la séance très encourageante; vous avez présenté de nouvelles approches et des idées novatrices.
    J'ai plusieurs questions.
    Matthew, je pense que si j'étais agriculteur à l'Île-du-Prince-Édouard, je me joindrais à votre réseau, car sinon, je craindrais de me laisser distancer.
    Vous avez beaucoup parlé de ce que j'appelle l'optimisation de la capacité organisationnelle, ainsi que de l'utilisation de cette capacité pour soutenir tout le monde et pour maximiser la valeur. Étant donné la nature de vos idées novatrices, je présume que vous vous intéressez beaucoup aux nouveaux produits.
    Avez-vous mené des recherches ou vous êtes-vous penchés sur la production d'énergie verte sur les exploitations agricoles? Plus précisément, l'Île-du-Prince-Édouard joue évidemment un rôle de chef de file sur le plan de l'énergie éolienne. L'autre sujet dont on parle beaucoup en ce moment dans ma circonscription, le comté de Colchester — nous faisons pousser beaucoup d'herbe —, c'est la possibilité de se lancer dans les granulats d'herbe. Je sais que l'Île-du-Prince-Édouard a aussi examiné cette option.
    Avez-vous quelque chose à dire sur la possibilité d'ajouter à cela pour augmenter les revenus et accroître la rentabilité des fermes?
    Oui. L'énergie renouvelable occupe une place prédominante dans nos discussions. Cela revient à l'idée que le tout peut être plus grand que la somme de ses parties. Pour qu'il soit possible de produire certaines choses, par exemple, de l'énergie éolienne et du biodiésel, il faut d'abord une masse critique de capitaux propres. Lorsque nous parlons de concilier l'aspect écologique avec l'aspect économique, nous devons nous pencher sur la structure qui permettrait de soutenir de telles entreprises, sur le plan des groupes d'agriculteurs.
    En fait, un de nos objectifs principaux, c'est de créer un réseau capable de soutenir l'énergie renouvelable, et que ces réseaux commencent à créer leurs propres carburants et à s'alimenter eux-mêmes. Certains l'ont déjà fait. La technologie nécessaire existe. Selon nous, il nous faut réorganiser le tout pour rendre cela efficace et raisonnable. En ce moment, il n'est pas possible d'installer une énorme éolienne V90 sur une seule ferme. Or, si l'on regroupe 10 agriculteurs, tout d'un coup, ils créent leur propre énergie, à un coût raisonnable, je dirais.
    S'il y a une observation que je peux faire à ce sujet, c'est que ces réseaux sont conçus précisément pour ce genre de choses, afin que nous utilisions au mieux la technologie et que nous créions des unités adaptables, qui nous permettent de faire concorder les besoins économiques et écologiques et de progresser en ce sens. Le but est de créer la flexibilité et les ressources nécessaires pour rendre ces choses possibles.
(1130)
    Ces idées novatrices rappellent un peu les très anciennes coopératives agricoles et la collaboration de ce genre. C'est parfois dans le passé qu'on trouve les meilleures idées de toute façon; il suffit de leur adjoindre une forme de technologie moderne.
    De plus, il existe d'autres sources d'énergie renouvelable. On peut utiliser, par exemple, les betteraves sucrières et d'autres nouvelles découvertes. Le gouvernement doit être en mesure de sortir des sentiers battus et de soutenir ce genre de système. Quels types de programmes ou de mesures de soutien le gouvernement fédéral pourrait-il mettre en oeuvre, à l'échelle nationale, pour appuyer votre projet de maximisation de la capacité?
    À notre sens, la première chose qu'il faut, c'est que les gens aient la confiance nécessaire pour collaborer. On ne peut pas associer une valeur monétaire à cela; c'est le genre de chose qui doit se produire à la base.
    Vous demandez au gouvernement fédéral d'inciter les agriculteurs à avoir confiance?
    Non, nous disons que nous allons essayer de réaliser cet objectif. Nous savons que nous ne pouvons pas nous croiser les bras et laisser le gouvernement nous lancer quelque chose qui pourrait fonctionner ou non. Nous voulons partir de la base et bâtir des réseaux de confiance, ce qui nécessitera du financement. Même pour obtenir de l'espace d'entreposage partagé et des trucs du genre, il nous faudra absolument l'appui du gouvernement fédéral. Je ne veux pas proposer tout bonnement des solutions précises avant d'avoir fait preuve de la diligence voulue et d'avoir accompli le travail préparatoire. Une fois que nous nous serons réunis et que nous aurons évalué les possibilités, nous pourrons dire: « Voici ce que notre groupe veut faire. Pouvez-vous nous aider à lancer le projet? »
    Ainsi, pour encourager les jeunes à devenir agriculteurs — c'est le sujet à l'étude aujourd'hui —, il faudrait, entre autres, offrir une subvention ou établir un fonds quelconque axé sur les techniques agricoles ou organisationnelles novatrices?
    Absolument. En ce moment, nous essayons très fort d'obtenir le financement nécessaire juste pour faire les recherches, car nous ne voulons pas commettre l'erreur de négliger un détail, ce qui nous pousserait à déclarer dans 20 ans que nous avons utilisé le mauvais modèle. Nous voulons nous assurer que le nouveau modèle répond aux besoins de toutes les parties intéressées. Notre expérience jusqu'à maintenant nous porte à croire qu'il est possible d'y arriver, en autant que nous abordions la question sous l'angle de la collaboration et, franchement, que nous travaillions de façon transparente et ouverte. Jusqu'à maintenant, nous avons obtenu de bons résultats en procédant de cette manière.
    Ainsi, à ce point-ci, je ne voudrais pas tenter de nommer précisément nos besoins, mais je sais qu'il faudra du financement pour mettre ces projets en oeuvre. Nous avons même parlé de fonds de stabilisation parmi les réseaux. Il est toujours possible de réaliser ce genre de projets avec l'aide d'un peu de financement initial. Nous commençons déjà à identifier des initiatives du genre qui nécessiteront du financement, et nous solliciterons l'aide du gouvernement une fois que nous aurons fait nos devoirs et que nous serons certains que tous sont d'accord. Notre façon de procéder a été comparée à la construction d'un tipi: toutes les pièces doivent être mises à leur place avant que nous puissions nommer ce que nous avons fait.
    Merci.
    Merci, monsieur Armstrong.
    Monsieur Easter, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci de votre présence, mesdames et messieurs, et merci de vos déclarations intéressantes.
    Je vais commencer par les producteurs de bétail. Allan, nous visiterons l'usine cet après-midi; le comité aura donc l'occasion de constater les difficultés liées à l'élimination des matières à risque spécifiées et au fonctionnement.
    Au sujet des marges de référence d'Agri-stabilité, je veux être certain de comprendre ce que vous demandez. L'an dernier, on a versé 900 millions de dollars de moins que ce qui aurait dû être dépensé, selon moi, pour les filets de sécurité. Franchement, je préférerais que l'argent se trouve entre les mains des agriculteurs qu'entre celles du ministère des Finances. Tout ce qu'il fallait faire, c'est modifier le critère de viabilité et la façon de calculer les marges de référence, ce qui aurait toujours été compatible avec les accords commerciaux. En gros, est-ce là ce que vous demandez lorsque vous parlez de la moyenne olympique: d'utiliser plutôt, disons, vos trois meilleures années?
(1135)
    Nous sommes d'avis que ce détail devrait être examiné de près afin d'augmenter le nombre de producteurs admissibles. Comme nous l'avons déjà dit aussi, on pourrait également étendre le champ des revenus et des dépenses utilisés pour calculer la marge de référence.
    Je parlais avec notre administrateur du programme hier. Selon lui, les producteurs ne participent tout simplement pas, surtout parce que le programme n'a pas satisfait leurs attentes, en particulier après ce qui s'est passé avec l'ESB. Une autre difficulté, je présume, c'est que le programme ne permet pas de faire la différence entre les produits. Il vise la ferme dans son ensemble. À l'Île-du-Prince-Édouard, nombre des exploitations importantes d'élevage de bovins font partie d'exploitations de pommes de terre; ainsi, lorsque les éleveurs de bovins ont subi des pertes considérables en raison de l'ESB, ils leur restaient encore 51 p. 100 du total de leurs revenus, ce qui signifie qu'ils n'avaient pas droit aux prestations du programme Agri-stabilité.
    Cela nous mène aux subventions internes pour les exploitations agricoles qui produisent plusieurs denrées, situation qu'il faut trouver un moyen d'éviter.
    Au sujet du — quelle expression avez-vous employée, Matthew? — changement de paradigme, une des difficultés, je présume, c'est que, peu importe ce qu'on fait sur l'exploitation, quelqu'un d'autre touche la majeure partie des gains d'efficacité. Il y a des années, il existait des offices de commercialisation, du porc par exemple, ce qui nous permettait de maîtriser le marché. La gestion des approvisionnements nous permet toujours de le faire. Or, si nous améliorons notre efficacité, les gains sont transmis à quelqu'un d'autre; c'est donc quelqu'un d'autre qui profite de l'efficacité accrue de notre production.
    J'aime votre approche axée sur la collaboration. En fait, je pense qu'un des meilleurs exemples à l'échelle mondiale se trouve en Allemagne. Là-bas, les éleveurs de bétail se sont regroupés et ils ont installé des fosses à purin dans toutes leurs exploitations. Le purin est recueilli de la même façon que le lait et il est camionné jusqu'à un dépôt central. À partir de cette matière, on produit de l'hydroélectricité; il reste de l'eau, qui sert à l'irrigation; et une partie de la biomasse retourne dans la terre sous forme de matière organique. Voilà ce qu'il est possible de faire.
    Sans tenir compte des gains d'efficacité que vous pouvez obtenir grâce à la collaboration et à d'autres moyens, qu'il soit question d'hydroélectricité à prix réduit, d'éoliennes ou d'autres formes de collaboration, comment peut-on équilibrer le pouvoir sur le marché entre les producteurs primaires, les agriculteurs, tout le reste de ce qu'ils font et le secteur industriel?
    D'abord, l'efficacité n'est pas le seul point que... L'efficacité va de soi. Elle sous-entend qu'il y a déjà quelque chose en place pour que ce soit logique — il existe un processus, et nous allons tenter de le rendre plus efficace.
    Nous cherchons à créer quelque chose de nouveau, un modèle de fonctionnement novateur. Je tiens simplement à préciser que nous ne croyons pas que l'efficacité soit toute la réponse.
    Je veux vous interrompre un instant, car nous allons manquer de temps.
    En ce qui a trait à votre proposition — et j'aime le fait que vous sortiez des sentiers battus —, quel rôle les gouvernements peuvent-ils jouer, tant à l'échelle fédérale que provinciale, ou quel rôle vous attendez-vous à ce qu'ils jouent?
    Comme je l'ai déjà dit, nous voulons partir de la base, car je crois que les agriculteurs doivent collaborer du début à la fin — quelques hommes dans une salle, et qui sait ce qui se produira ensuite. Nous avons dépassé ce point. Nous savons que nous pouvons réunir les agriculteurs. Nous le savons. Nous avons les données primaires.
    Le gouvernement pourra nous aider quand nous aurons établi nos réseaux, assigné les secteurs principaux qui relèveront de chacune de leurs parties et souligné certains projets que nous voulons commencer à mettre en branle. C'est à ce moment-là que le gouvernement interviendra et, nous l'espérons, nous offrira du financement. En fait, si nous réussissons à trouver un modèle convenable, adaptable et durable qui aidera à assurer un avenir en agriculture, nous aurons aussi besoin de l'aide du gouvernement pour le promouvoir et le répandre.
    Nous en avons déjà parlé avec le gouvernement provincial, mais je pense que si nous réussissons à travailler ensemble et à trouver un modèle qui réponde aux besoins de l'agriculteur d'aujourd'hui, le rôle de tous sera de l'adopter et de tenter de faire sa part, quelle qu'elle soit.
    Je le répète, je ne veux entrer dans les détails, car cela serait inutile. Or, nous ne vous demandons pas de régler le problème; nous voulons simplement que vous fassiez votre part. Nous planifions commencer à la base et nous espérons que si nous réussissons à démontrer la valeur de l'initiative, nous continuerons à recevoir de l'appui.
(1140)
    Merci, Matthew.
    Je donne maintenant la parole à M. Shipley; vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup de votre présence, mesdames et messieurs.
    En fait, au cours de la discussion ce matin, Matthew et monsieur Gallant, vous parliez de la transformation; si nous continuons, comment pouvons-nous devenir rentables sur le marché? Comment pouvons-nous participer à cela, si nous prenons le risque et tirons partie des avantages ainsi obtenus, c'est-à-dire si nous devenons un preneur de prix pour ce qui est de notre produit?
    Monsieur Gallant, je veux aborder deux ou trois points, premièrement en ce qui a trait à ce que vous avez dit sur la valeur ajoutée à la production primaire. J'aimerais aussi entendre ce que vous avez à dire au sujet de votre place et de la façon dont vous pensez que le plan de relève fonctionnera. Franchement, les familles agricoles planifient-elles beaucoup relativement à la transmission d'une génération à l'autre?
    Deuxièmement, vous avez mentionné quelque chose dont on a parlé au Nouveau-Brunswick. On avait créé un groupe de direction pour les produits laitiers. Il était surtout question de gérer la production, de mobiliser les ressources d'un groupe de sept ou neuf producteurs, ou peu importe le nombre qu'ils étaient. On leur a donné un A ou un B, ou un 1, un 2 ou un 3, sans joindre de noms. Ils ont en fait mobiliser leurs ressources et échangé des renseignements en fonction de celles-ci — ils connaissent maintenant l'identité des producteurs A et B — dans le but de devenir plus agressifs sur le plan de leurs gains d'efficacité.
    Troisièmement, il y a ce que vous devez faire, et ce qu'eux doivent faire, pour dépasser la question de l'efficacité. C'est la partie la plus excitante, car quand j'étais agriculteur, je travaillais dans le domaine des produits laitiers et je participais au marché libre; au début, nos récoltes servaient essentiellement à produire de la nourriture. C'est ce que nous faisions. Aujourd'hui — et c'est de ceci que vous parlez —, nous produisons non seulement de la nourriture, mais aussi des aliments fonctionnels, des produits pharmaceutiques peut-être, ainsi que pour l'industrie. Je ne sais pas à quoi nos récoltes serviront, mais nous revenons toujours au fait que nous sommes encore en mesure de produire de la nourriture. Voilà le point auquel vous nous amenez; voilà le plan sur lequel nous devons regrouper les idées pour offrir du financement pour l'innovation, avec les recherches à l'appui.
    Est-ce là ce dont il est question? Comprenons-nous bien ce que vous nous dites?
    Je le répète, nous n'avons pas de réponses précises à vous donner. Nous travaillons encore à ces questions.
    Comme cadre, dans ce cas.
    Oui, et ce que nous essayons de faire, je crois, c'est d'établir un cadre qui reflète l'ensemble du terrain, c'est-à-dire les côtés écologique et économique, ainsi que les enjeux dont les agriculteurs nous ont parlé, qui sont les mêmes dans tout le pays. Je pense qu'il serait bête de commencer à mettre des projets en oeuvre avant d'avoir mené davantage de recherches. Je crois donc qu'il est question d'argent et d'innovation, et qu'il faut tenter d'établir un modèle qui fonctionne avant de commencer à bâtir des châteaux.
    Une voix: Une étape à la fois.
    M. Matthew Ramsay: Oui.
(1145)
    À votre avis, ces choses doivent-elles se faire à l'échelle régionale? Travaillerait-on à l'échelle nationale, pour passer ensuite aux régions?
    Je vous donne un exemple. Nous avions un comité des présidents, dont le mandat était en fait de promouvoir l'agriculture et les produits agricoles.
    Nous pouvons faire certaines choses au fédéral. Les aliments canadiens sont bons et nutritifs; tout le monde devrait en acheter. À l'échelle régionale, on dit, par exemple, que les gens devraient se procurer des pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard. Les organisations municipales déclarent: « Voici ce que nous produisons dans nos marchés locaux. »
    Comment percevez-vous l'approche à prendre?
    Selon moi, il faut une approche régionale et ascendante, car, à mon avis, pour que la confiance nécessaire à la collaboration s'installe, il faut absolument commencer par quelques agriculteurs; puis, lorsqu'ils constateront la valeur ajoutée obtenue en coopérant et en utilisant les ressources inexploitées, une réaction en chaîne sera déclenchée.
    Je ne pense pas que nous puissions présenter un cadre prédéfini quelconque aux gens et leur dire: « Vous, suivez ce modèle, et vous, suivez celui-ci. » À mon avis, il faut des projets pilotes. Nous devons lancer l'initiative et en prouver la justesse en action.
    Ainsi, vous croyez qu'il faut commencer à l'échelle municipale, dans vos régions ou vos provinces? Vous diriez: « Ce projet a vraiment bien fonctionné à l'Île-du-Prince-Édouard et au Nouveau-Brunswick », puis vous passeriez au palier national pour demander comment obtenir du financement pour l'innovation?
    Oui, et c'est pour cette raison que nous tentons de créer un cadre abstrait pour l'agriculture. Nous ne voulons pas le lier à un lieu précis. Nous voulons tenir compte de l'ensemble du terrain, des exigences que les agriculteurs doivent satisfaire, des difficultés qu'ils affrontent; nous voulons aussi réconcilier tout cela avec l'économie mondiale. On a tendance à sous-estimer l'ampleur du dossier.
    On peut dire que la salubrité des aliments est liée aux tendances mondiales et aux demandes de renseignements, fait qui ne deviendra que pire avec le temps. Le nouveau cadre doit aussi tenir compte de ces aspects; il doit être global. Or, pour répondre à votre question, l'initiative commencera à la base; nous déterminerons quels sont nos besoins, et le gouvernement fera sa part en nous aidant à y répondre, car il s'agit d'un processus très répétitif qu'il faudra adapter à de nombreuses reprises. Je ne peux pas vous dire où nous serons rendus dans un mois, mais, si je me fie à notre élan, je suis certain que nous aurons progressé.
    Ainsi, pour répondre à votre question, il s'agit certainement d'un projet qui sera réalisé à l'échelle régionale plutôt que sur le plan national.
    Je sais que M. Gallant n'a pas le temps de parler, mais s'il peut nous remettre quelque chose après au sujet de la relève, je lui en serais reconnaissant.
    Si vous avez quelque chose à dire à ce sujet, Mathieu, je vous permets de le faire.
    Je vais tout simplement répondre.
    Deux choses: d'abord, au sujet du plan de relève, vous devez comprendre que nous menons des vies très occupées et que le sujet est un peu tabou dans toutes les entreprises agricoles. Nous travaillons avec les membres de notre famille, et c'est délicat. Or, si quelqu'un, du fédéral ou du provincial, pouvait venir nous aider à travailler ensemble — pas pour faire le plus gros du travail, mais pour nous mettre sur la bonne voie... Je sais comment mon père a obtenu la ferme: il a reçu un appel lorsqu'il était à l'université, et on lui a dit qu'on installait le pipeline, et que s'il ne venait pas, la famille quittait l'industrie laitière. C'était cela, le plan de relève. J'attendais donc le même appel au collège.
    Un autre point que j'aimerais souligner, c'est que, pendant la dernière crise économique, le gouvernement du Canada a mis en place un crédit d'impôt pour rénovation domiciliaire. J'ai trouvé l'idée très bonne, et on pourrait faire la même chose pour l'agriculture afin d'encourager les gens à acheter des produits locaux. Nous devons collaborer avec le ministère de l'Éducation et mettre sur pied un programme de souveraineté alimentaire. Évidemment, les consommateurs ne savent pas d'où vient leur nourriture. De plus, il y a un grand marché pour le détail, la transformation et la commercialisation, et les gens peuvent vivre de ces emplois; or, les jeunes qui finissent le secondaire se lancent tous dans l'administration, la plomberie, le soudage ou les emplois de base. Si nous pouvions établir quelque chose à l'échelle du Canada, un programme qui ressemblerait à celui des rénovations domiciliaires et qui serait aussi lié à l'impôt — donc si je suis à l'Île-du-Prince-Édouard et j'ai conservé tous les codes à barres des produits de l'Île, je pourrais avoir droit à un remboursement de 500 $ ou quelque chose du genre afin d'encourager l'agriculture locale et de m,montrer que de l'appuyer fait une différence.
(1150)
    Merci beaucoup, Mathieu.
    Nous passons à M. Hoback. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Malgré le fait que nous sommes à l'Île-du-Prince-Édouard et que je viens de la Saskatchewan, les enjeux se ressemblent. Si nous abordions la question des jeunes agriculteurs et d'attirer les jeunes vers l'agriculture, beaucoup d'entre eux diraient les mêmes choses. Ce serait peut-être au sujet de denrées ou de produits différents, mais ce serait très semblable.
    Là où il n'y avait pas de différence — je vais commencer par ce point —, c'est sur le plan de l'expédition des bovins âgés de 30 mois et plus aux États-Unis. C'est là un grave problème, non seulement ici, mais dans l'Ouest aussi, car si nous voulons établir une industrie du conditionnement, tout d'un coup, ils sont désavantagés de 30 ou 40 $ la bête à l'achat, et il est fort probable que l'animal soit renvoyé au Canada une fois abattu et transformé. Nous devons donc vraiment tenter de régler la question, surtout compte tenu du fait qu'il n'y a jamais eu si peu de vaches aux États-Unis. Je ne sais pas si la situation s'améliorera. Elle pourrait s'aggraver. L'éleveur pourrait en tirer profit à court terme, mais c'est le long terme qui m'inquiète.
    C'est là un des points qui me préoccupe au sujet de l'usine de transformation dont vous parlez. Nous avons essayé la même chose en Saskatchewan. Des éleveurs possédaient une usine de transformation. Lorsque l'ESB a éclaté, tout le monde voulait absolument l'appuyer — oui, on en avait besoin. Nous l'avons mise sur pied, et dès que les choses se sont calmées et qu'ils pouvaient obtenir cinq sous de plus ailleurs, devinez quoi? Ils sont allés ailleurs. Et devinez quoi d'autre? L'usine a fermé ses portes.
    Quelles mesures avez-vous prises pour que votre usine demeure viable dans une situation de ce genre?
    À l'usine de Borden, il y a une coopérative, et pour chaque animal qui y est transformé, essentiellement, les éleveurs ont acheté des parts, en quelque sorte. Jusqu'à maintenant, l'usine n'a jamais acheté à sa pleine capacité; l'approvisionnement n'a donc jamais posé problème, mais cela pourrait se produire. En tant qu'éleveurs de bétail, nous poussons très fort pour passer à un produit de marque; nous commençons par le naissage et nous faisons l'élevage jusqu'au moment où l'animal est envoyé à l'usine. Nous essayons d'établir un système de primes pour promouvoir le concept et pour encourager la fidélité entre nos éleveurs-naisseurs, notre parc d'engraissement et notre usine. Voilà à quoi l'association travaille pour veiller à ce que l'usine soit toujours approvisionnée.
    Je crois que ma prochaine question touche plutôt votre domaine, Matthew, soit les regroupements. Nous en avons examiné un à Lanigan, en Saskatchewan, où il y a un parc d'engraissement et une usine d'éthanol. Encore une fois, des agriculteurs se sont réunis et ont déclaré que le prix de l'orge ne leur convenait plus. Ils ont donc commencé par créer un parc d'engraissement comme moyen de transformer leur orge. Puis, ils se sont dits qu'en produisant de l'éthanol, ils multiplieraient leurs gains. L'éthanol serait vendu sur le marché des carburants et les drêches de distillerie seraient renvoyées au parc d'engraissement, où elles serviraient de protéines.
    Selon moi, nous, les agriculteurs, nous déprécions nous-mêmes parce que nous ne faisons plus nécessairement pousser de blé, d'orge, d'avoine et de pommes de terre. À la place, nous faisons pousser de l'amidon, des protéines et toutes sortes d'autres produits non alimentaires. Du même souffle, je ne présente pas d'excuses pour ce fait, car s'ils veulent des aliments, les prix augmenteront et ils les achèteront. S'ils ne les veulent pas... Si on me paie pour des récoltes de protéines ou d'amidon, c'est ce que je vais faire pousser.
    Avez-vous identifié certains de ces regroupements à l'Île-du-Prince-Édouard?
    Pour répondre brièvement à la question, selon moi, ce point donne encore plus de poids aux raisons pour lesquelles nous avons besoin de regroupements. Cette approche s'adapte facilement et est tournée vers l'avenir. J'ai un peu d'expérience dans les domaines de l'écologie industrielle et des écosystèmes intégrés. À un niveau très élevé, nous commençons à trouver des regroupements potentiels dans la région. Si une ferme laitière est située près d'une exploitation de pommes de terre, la digestion anaérobie offre de nombreuses possibilités. Même l'idée de chauffer un entrepôt avec ses propres pommes de terre pourries, qui seraient normalement gaspillées... En fait, on ne les gaspillerait pas vraiment, mais il serait beaucoup plus efficace de les utiliser de cette façon. Quelqu'un m'a dit que le produit de digestion ainsi obtenu forme le meilleur engrais qui soit. La terre l'absorbe 10 fois mieux que les engrais traditionnels.
    Encore une fois, on revient à la notion de la masse critique nécessaire pour réaliser de tels projets. Seul, un agriculteur ne peut y arriver, mais s'ils sont 10, oui.
(1155)
    Plutôt que de verser un paiement spécial ou donner un certain montant l'unité, somme qui sera essentiellement absorbée par le marché ou qui ira à quelqu'un d'autre, ne serait-il pas plus sage que le gouvernement offre du financement provisoire pour que des projets de ce genre soient mis en route?
    Oui, tout à fait. Je pense que c'est ce que nous préconisons ici. Nous ne voulons pas jeter de l'argent dans un projet, dans l'espoir qu'il fonctionnera de lui-même; non, nous souhaitons que vous nous laissiez — nous, les agriculteurs et les citoyens — faire le travail préparatoire et décider entre nous ce que nous voulons qu'il se produise. À mon sens, c'est de cette façon-là que la démocratie fonctionne. Nous ne pouvons pas nous croiser les bras et nous attendre à ce que vous trouviez les réponses pour nous. Ce pays est à nous aussi, et nous devons agir. J'aimerais que notre méthode nous permette de cerner et d'analyser la situation; nous pourrions ensuite vous expliquer exactement ce que nous voulons faire, à quoi les fonds serviront et pourquoi ils créeront ainsi de la valeur excédentaire. Nous ne voulons surtout pas que l'argent se dissipe, en quelque sorte, comme vous venez de le dire. Nous voulons qu'il génère de la valeur et qu'il nous permette de gagner du terrain.
    C'est exactement ce qui s'est produit à Lanigan dans cette situation, et aussi en Saskatchewan avec les terminaux de l'intérieur. L'éthanol n'est pas le seul produit dans lequel on peut investir; il y a aussi, par exemple, la fléole des prés.
    Il faudrait peut-être un certain montant de financement initial de la part du gouvernement, mais les fonds ne seraient plus nécessaires une fois que le projet aurait été mis en oeuvre, qu'il serait rendu viable et qu'il utiliserait des déchets d'une provenance quelconque.
    Merci beaucoup.
    Il ne nous reste que deux ou trois minutes. Nous ne semblons jamais avoir assez de temps.
    J'aimerais juste dire une chose. Matthew, vous avez parlé tout à l'heure de coopératives ou de partage d'équipement. Dans mon cas, c'est quelque chose qui me serait utile. Il y a 25 ou 30 ans, j'avais mon propre matériel de récolte pour faire de l'ensilage, tant de l'ensilage préfané que du maïs fourrage. À l'époque, je faisais pousser environ 150 acres d'orge et je considérais la possibilité de me procurer une moissonneuse-batteuse. Or, un de mes voisins en avait une toute nouvelle, et j'ai donc conclu un marché avec lui. Je faisais tout son ensilage, et lui faisait tout mon moissonnage-battage.
    Je ne crois pas que l’idée soit nouvelle. Si j’en parle, c’est parce que, selon moi, il s’agit d’une question de bon sens et de quelque chose que les producteurs devraient faire. Le problème, c’est que nous sommes tous tellement indépendants — moi je le suis, en tant qu’agriculteur — et que nous pensons que nous devons posséder quelque chose. C'est en fait à notre désavantage.
    Je vois que vous acquiescez de la tête.
    Nous avons vraiment essayé d’introduire une certaine autonomie dans le concept. Nous ne devons rien enlever aux agriculteurs; nous devons les laisser faire leurs affaires. Nous ne nions nullement ce fait et nous sommes tout à fait d’accord.
    D'accord. Merci.
    Un tout dernier point pour Rinnie et Brian.
    Nous parlons de programmes et de ce genre de choses. Je ne crois pas que nous réussirons un jour à créer des programmes parfaits, mais nous avons entendu un grand nombre de témoignages partout au pays au sujet de l’industrie du porc et du boeuf. J’ai élevé des vaches laitières au cours des années 1980, en plus de mes bovins; or, j’ai toujours été producteur de boeuf, et je sais donc ce qu’est l’ESB ainsi que ce qui se passe en ce moment.
    Toutefois, selon beaucoup de personnes dans la circonscription — et nous avons recueilli des témoignages dans différentes provinces —, les nombres sont trop élevés. Le dollar pose problème, mais, bien sûr, le gouvernement n’y peut rien. On pouvait toujours s’arranger quand il valait entre 65 et 75 sous. Or, on a maintenant perdu cet avantage, ce qui veut dire qu’il faut se débrouiller, et la seule façon d’y arriver, c’est en réduisant les populations de porcs et de bovins de façon à ce que les nombres favorisent les ventes.
    Si je soulève ce point, c’est parce que plus qu’un de mes électeurs et des témoins qui ont comparu devant le comité ont dit qu’en continuant à offrir de l’argent à un secteur saturé, on ne fait qu’empirer la situation. Cette affirmation provient de gens qui vivent la même chose que vos producteurs de boeuf et que mon frère cadet, qui cultive ma terre.
     La situation est inextricable. Nous voulons agir; or, si nous enlevons notre chapeau d’agriculteur et de politicien pour mettre celui de contribuable, nous nous rendons compte que nous ne devrions absolument pas — à mon avis, du moins — subventionner des aliments qui sont consommés par des gens à Hong Kong, en Californie ou ailleurs. Nous devons donc trouver un moyen de protéger l’approvisionnement alimentaire du pays, car je crois que tous s'entendent sur ce point, en ne contribuant aucunement à l’offre excédentaire. L’offre excédentaire ou, si nous l’envisageons du point de vue inverse, les exportations sont de la surproduction, et je ne crois tout simplement pas que nous devrions appuyer la surproduction. Je vois Rinnie hocher la tête. La question est très compliquée.
    Dans tous les cas, il faut conclure. Nous devons quitter la magnifique Île-du-Prince-Édouard plus tard aujourd'hui. Nous allons visiter Les Fermes Cavendish et une usine de transformation du boeuf, je crois.
     Merci beaucoup à tous d’avoir pris le temps d’être ici aujourd’hui. C’est très important. Nous savons que vous êtes très occupés à ce temps-ci de l’année, mais selon mon expérience, les agriculteurs le sont toujours.
    Merci encore, et bonne chance dans tous vos projets.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU