Passer au contenu
;

JUST Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la justice et des droits de la personne


NUMÉRO 070 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 29 avril 2013

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Mesdames et messieurs, bienvenue à la 70e séance du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Voici notre ordre du jour: conformément à l'ordre de renvoi du mercredi 6 mars 2013, nous examinons le projet de loi C-452, Loi modifiant le Code criminel (exploitation et traite de personnes). Nous étudierons cette question aujourd'hui, mercredi, et lundi de la semaine prochaine.
    Avant de céder la parole à l'auteur du projet de loi, nous devons discuter de deux budgets. Ils sont tous deux présentés par des personnes qui ont témoigné sur les deux projets de loi d'initiative parlementaire précédents. L'un des budgets est une demande de 600 $ pour un exposé au comité permanent. C'était pour le projet de loi S-209, ayant trait aux combats concertés. Pourrais-je avoir une motion?
    J'en fais la proposition.
    (La motion est adoptée.)
    Votre budget correspond au projet de loi C-444, Loi modifiant le Code criminel (fausse représentation à titre d'agent de la paix ou de fonctionnaire public). C'est une demande de 3 000 $ pour les témoins. Pourrais-je avoir une motion?
    Une voix: J'en fais la proposition.
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Merci beaucoup.
    Madame Mourani a une heure à nous consacrer. Nous avons prévu une heure, soit 10 minutes d'introduction — de 16 h 30 à 17 h 30, et elle parlera de son projet de loi C-452.
    Vous avez la parole, madame.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je veux saluer tous mes collègues et les remercier de me permettre de prendre la parole au sujet de cet important projet de loi.
    Mon allocution comporte deux grandes parties. La première a pour but de vous informer de ce qui a mené à la naissance de ce projet de loi. Il s'agit en somme de vous dire comment il a germé. Dans la deuxième partie, je vais parler davantage de ses différents articles.
    Tout d'abord, la création de ce projet de loi s'est faite en trois grandes étapes et cela, en une année et demie. Il a donc fallu beaucoup de temps pour le faire. Mon objectif de départ était de prendre le pouls des gens sur le terrain. La première étape visait donc à rencontrer les spécialistes sur le terrain qui étaient en contact direct avec des victimes de traite des personnes, de proxénétisme ou en contact avec des trafiquants ou des proxénètes. Il s'agissait donc de groupes qui travaillent auprès des victimes et des policiers.
    Le but était de comprendre, par cette collecte de données, les besoins législatifs. Bien évidemment, on sait qu'il y a d'autres besoins, qu'il s'agisse de campagnes de sensibilisation, de ressources pour les enquêtes policières ou de ressources pour les victimes. D'ailleurs, il y a très peu de refuges. En fait, ce besoin est criant au Québec. Cependant, bien sûr, l'aspect législatif m'intéressait. Il est ressorti des points fort intéressants que je vais vous présenter plus tard.
    La deuxième étape, après cette collecte de données, était de pouvoir traduire ces besoins en un projet de loi. J'ai travaillé avec nos rédacteurs législatifs ici, à la Chambre, et on a pu présenter une ébauche de projet de loi.
    Finalement, je suis retournée revoir tous ces partenaires qui ont été consultés pour leur présenter la première mouture du projet de loi pour voir s'il y avait encore des choses à bonifier, modifier et ainsi de suite. Par la suite, le projet de loi a été présenté à d'autres groupes qui n'ont pas forcément participé à sa création et à son élaboration. Toutefois, on voulait quand même avoir leur opinion pour déterminer s'il y avait des problèmes d'ordre juridique, par exemple. J'ai donc rencontré des membres du Barreau du Québec. Je ne me souviens plus combien il y avait de criminalistes, mais ils étaient plusieurs lors de cette réunion. Si je me souviens bien, je les ai consultés en 2010. Je leur ai présenté le projet de loi qui a été fort bien accueilli.
    Finalement, le projet de loi C-612 a été déposé le 15 décembre 2010. Il a été lu en deuxième lecture le 24 mars 2011, mais à cause des élections, il est malheureusement mort au Feuilleton.
    Après les élections, je l'ai présenté de nouveau après lui avoir apporté des ajustements. Il a été renvoyé aux rédacteurs législatifs parce que, bien sûr, ma collègue Mme Joy Smith, avait déposé son propre projet de loi à ce sujet. Celui-ci contenait certaines dispositions qui étaient aussi dans mon projet de loi. Par exemple, l'extraterritorialité a été enlevée du projet de loi C-452 alors que cela était contenu dans le projet de loi initial.
    Il a donc été retourné aux rédacteurs législatifs et une nouvelle mouture de ce projet de loi a été produite avec quelques détails modifiés. En fait, approximativement, je vous dirais que 95 % du projet de loi C-612 existe toujours. Le projet de loi a été déposé le 16 octobre 2012 et adopté en deuxième lecture au mois de mars dernier. Je pense qu'il est important de mentionner les groupes qui ont travaillé à ce projet de loi parce que c'est leur projet de loi. Je ne suis que le porteur du ballon. Le Conseil du statut de la femme a demandé à comparaître devant le comité et a également présenté une opinion à ce sujet.
    J'ai consulté des experts policiers du SPVM. Ils ont travaillé sur ce projet de loi en ce qui a trait à la moralité et au module d'exploitation sexuelle des enfants. J'ai également consulté le Comité d'action contre la traite humaine interne et internationale, l'Association féminine d'éducation et d'action sociale qu'on connaît davantage sous le nom de l'AFEAS, le Regroupement québécois des centres d'aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, le Regroupement québécois des CALACS, Concertation-Femme, la Concertation des luttes contre l'exploitation sexuelle qui va aussi, je pense, comparaître devant vous, l'Association québécoise Plaidoyer-victimes, le Collectif de l'Outaouais contre l'exploitation sexuelle, qui est d'ailleurs présent parmi nous aujourd'hui, le diocèse de l'Outaouais de la condition des femmes, la Maison de Marthe et, bien sûr, le YMCA du Québec.
    Ces groupes ont demandé à être entendus dans le cadre des travaux du comité. Je tiens vraiment à les remercier pour le travail qu'ils ont accompli pendant plus d'un an et demi. Ils continuent de travailler à la promotion de ce projet de loi. Je dis un grand merci à toutes ces groupes.
    Je ne sais pas combien de temps il me reste, monsieur le président. J'ai beaucoup de choses à dire.
(1535)

[Traduction]

    Il vous reste cinq minutes.

[Français]

    D'accord.
     L'un des éléments intéressants qui est ressorti lors de mes consultations est que les procureurs, et parfois même les policiers, avaient souvent tendance à croire que la traite des personnes était internationale. Quand des femmes traversaient la frontière pour venir au Canada, on traitait cela comme de la traite, mais lorsque des filles de Montréal se retrouvaient à Québec ou même à Niagara, on considérait cela davantage comme du proxénétisme. Pour la traite, cela dépendait du procureur et du policier.
    Pour que tout le monde soit au diapason, j'ai apporté au paragraphe 279.01(1) les précisions suivantes: que ce soit dans un contexte national ou international, à partir du moment où il y a du recrutement, du transport et ainsi de suite, on entre dans le domaine de la traite. À ce sujet, des policiers vont témoigner plus tard. On sait que la traite est très importante à l'intérieur du Canada. À mon avis, elle est beaucoup plus importante que la traite internationale.
    Des filles du Québec se retrouvent malheureusement à Niagara, dans des bars de danseuses ou des bordels. Des filles de Montréal se retrouvent à Québec, et vice-versa. Des filles de Chicoutimi se retrouvent à Montréal et des filles de la Colombie-Britannique se retrouvent à Toronto ou ailleurs. La traite des personnes a lieu à l'intérieur du pays et elle nous concerne tous, quelles que soient les provinces. Il n'y a pas de frontières.
    Un autre point fort important qui a été beaucoup soulevé lors des discussions que j'ai tenues avec ces personnes est, bien sûr, la définition de l'exploitation. Il est question d'exploitation à l'article 279.04 du Code criminel. Il y a des dispositions sur le trafic d'organes et le travail forcé, mais la traite à des fins d'exploitation sexuelle n'est pas clairement définie. J'ai donc introduit une disposition spécifique sur l'exploitation sexuelle. Il s'agit du paragraphe (1.1), qui suit le paragraphe (1), où il est question d'offrir ou de fournir son travail, etc.
    Cette définition a été travaillée très attentivement pour répondre à toutes les situations qui pourraient survenir. En outre, elle est pratiquement calquée sur le protocole de Palerme, qui vise la traite des personnes et la criminalité transnationale, et que le Canada a ratifié le 13 mai 2002. Je pense qu'avec cet ajout, on clarifie la situation et toutes les dimensions du terme « exploitation ».
    La confiscation des fruits de la criminalité est un autre point très important qui a été soulevé. Des gens du milieu policier et des procureurs m'en ont beaucoup parlé. La traite est un crime très payant parce qu'il est extrêmement difficile à prouver dans le cadre du code actuel. En plus, cela implique très peu de risques. Le trafic de la drogue implique qu'il faut acheter celle-ci. Il y a alors un risque de se faire prendre. Or pour ce type de trafic, les gars n'ont qu'à recruter des filles. Pour ce faire, ils peuvent avoir recours à la manipulation ou à la séduction. En effet, ce qu'on appelle le « dressage » ne se fait pas tout de suite. Cela peut être lent ou rapide, selon les trafiquants. Ensuite, ces filles sont violées. Elles subissent un viol collectif. Elles se font torturer et leur famille est menacée. Par la suite, elles prennent leurs rendez-vous toutes seules. Il n'est même pas nécessaire de les obliger à le faire tant elles vivent dans la terreur.
    Or, une fille peut rapporter beaucoup d'argent, dépendant de sa beauté et de son âge. Plus elle est jeune, plus elle rapporte. J'ai rencontré, malheureusement, des filles qui avaient commencé à faire cela à l'âge de 12 ans. Une fille peut rapporter environ 280 000 $ par année. Vingt filles rapportent 6 552 000 $ par année et quarante filles 13 100 000 $ par année. Ce sont des données du Service canadien de renseignements criminels.
    Ici, je ne vous parle pas seulement de la petite prostitution de rue. Je vous parle d'un ensemble de choses, notamment des bars de danseuses. D'ailleurs, la SQ estime que 80 % des bars de danseuses qui relèvent de sa juridiction appartiennent au crime organisé, sous des prête-nom. On parle aussi des salons de massage, qui poussent comme des champignons un peu partout. Je ne sais pas si c'est le cas partout au Canada, mais je peux vous dire que ce l'est à Montréal. Dans mon comté, ils poussent déjà comme des champignons.
(1540)
    Il y a aussi les agences d'escortes et les bordels qu'on ne peut même pas dénombrer.
     Paradoxalement, la confiscation des fruits de la criminalité se fait par l'intermédiaire des infractions liées aux drogues et de toute infraction liée aux organisations criminelles. Si on le fait pour des drogues, il est plus que temps qu'on le fasse pour l'être humain, parce que c'est encore pire. L'esclavage est pire que le trafic de drogues. En fait, tout cela est décrit. On reconnaîtra que le fait de vendre de la drogue est aussi mauvais, mais de vendre des humains et de les traiter comme des marchandises est immonde. Il est plus que temps que ce crime ne soit plus payant pour les proxénètes parce que, actuellement, c'est payant. Si on ramasse leurs grosses baraques et leurs grosses bagnoles, ils vont y penser.
    Vous m'avez indiqué qu'il me restait deux minutes, je pourrai donc en dire plus lors des questions plus tard.
     L'autre point est la présomption. La présomption est un aspect fondamental. Ce projet de loi contient deux points très importants: la présomption ou ce qu'on appelle le « renversement de la preuve » et « les peines consécutives ». C'est fondamental pour les victimes. En fait, c'était l'un des points les plus importants pour les groupes de victimes et les policiers. On en parlait beaucoup.
    Actuellement, le Code criminel est rédigé de telle façon que tout le fardeau de la preuve repose sur les victimes. En effet, on sait que sans leur témoignage, il est extrêmement difficile de poursuivre quelqu'un devant la cour. Quand il ne s'agit pas de mineurs mais d'adultes, c'est encore pire. Il faut savoir que les victimes de traite ne vont pas témoigner très naturellement. Ces femmes ont vécu l'enfer. Elles vivent un stress post-traumatique important. Le fait de revoir leurs agresseurs, de reparler de tout cela et de raconter leurs histoires d'horreur les inhibe car, très souvent, elles ont peur que ces agresseurs ressortent de prison. Elles se demandent ce qu'ils vont leur faire. Envoyer une personne, quelle qu'elle soit, témoigner alors qu'elle était victime de ces réseaux est extrêmement difficile.
    En terminant, je dirai un mot sur le renversement du fardeau de la preuve. Je pourrai parler plus tard, si mes collègues le souhaitent, des peines consécutives. Plusieurs groupes de victimes m'ont demandé que l'on arrête de faire porter ce fardeau aux victimes comme c'est le cas actuellement pour le proxénétisme. En fait, la présomption, dans le cas du proxénétisme, existe dans le Code criminel à l'heure où on se parle. Faisons-le, non seulement pour aider les policiers et leur donner des outils, mais aussi pour soulager les victimes et pour leur rendre justice.
    Je vous remercie, monsieur le président. Si vous le souhaitez, je parlerai plus tard des peines consécutives.
    Merci, madame.

[Traduction]

    Les premières questions viendront de Mme Boivin, du Nouveau Parti démocratique.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Madame Mourani, je vous remercie de votre présence.
    Votre projet de loi touche à plusieurs questions qui nous préoccupent beaucoup. On en a parlé longuement depuis que je suis la porte-parole de mon parti en matière de justice et lors de la présentation du projet de loi de notre collègue, Mme Joy Smith. Bien sûr, n'importe quelles mesures qui pourraient enrayer la traite humaine seraient souhaitables. Il me semble que rien n'est plus dégradant que cela.
    Cela étant dit, il faut quand même considérer l'aspect légal. Je sais que vous avez travaillé avec les rédacteurs législatifs. Cette question me préoccupe beaucoup parce que si on adopte des lois qui vont par la suite être déboutées en cour parce qu'elles sont contraires à la Charte, on n'est pas plus avancés et il faut revenir à la case départ.
    Quelles démarches avez-vous entreprises, en plus de celles que vous avez faites auprès du Barreau du Québec, pour vérifier la conformité de votre projet de loi avec la Charte, spécialement, comme vous l'avez dit, en ce qui a trait aux questions du renversement du fardeau de la preuve, de la présomption et des peines consécutives? Comme vous, je n'ai pas de difficulté à comprendre que les peines consécutives que l'on trouve déjà dans le Code criminel existent certainement pour des choses comme un crime très grave. On pourrait dire que dans le contexte de la traite humaine et du proxénétisme, c'est peut-être la même chose.
    Avez-vous mené des consultations à cet égard? Quelles réponses avez-vous obtenues des spécialistes en la matière?
    La réponse est oui, parce que c'est une des premières questions qu'on s'est posées. On voulait savoir si c'était constitutionnel.
    En ce qui a trait aux rédacteurs législatifs, je n'ai obtenu aucun avis de cette sorte. Vous savez que si on rédige un projet de loi qui peut accrocher sur le plan constitutionnel, on va nous le dire.
    De plus, les criminalistes du Barreau du Québec ont aussi regardé cela. Ils ont dit que cela existait déjà pour le proxénétisme. Toutefois, il y a des causes en instance, il ne faut pas se le cacher. On peut contester n'importe quoi, soit dit en passant. On peut contester n'importe quoi qui se trouve dans le Code criminel. On le voit d'ailleurs avec l'affaire Bedford qui est devant la Cour suprême. Cela touche différentes dispositions.
(1545)
    C'était ma prochaine question.
    Dans votre projet de loi, vous avez inclus le concept de trafic interne.
    Oui.
    J'ai un peu de difficulté à voir la différence entre cela et la prostitution telle qu'on la connaît. Je pense ici à la cause qui est présentement devant les tribunaux. Je me demandais jusqu'à quel point l'adoption de votre projet de loi pourrait court-circuiter l'arrêt dans l'affaire Bedford. Nous attendons tous de voir ce que la Cour suprême du Canada va décider à ce sujet.
    J'essaie de voir, dans votre projet de loi, une nuance tangible entre le proxénétisme et la traite des personnes à l'interne. Je me demande si on ne devrait pas fondre les articles 212 et 279.
    Au Canada, nous n'avons pas tous les chiffres exacts, mais l'ONU les établit très bien: 80 % des victimes de la traite le sont à des fins de prostitution. On ne peut que travailler avec ce que l'on a, en l'occurrence le Code criminel. Les choses vont évoluer selon ce qui va se passer dans l'affaire Bedford et la façon dont le gouvernement va réagir. En effet, il va devoir réagir. On a pu voir qu'il avait renvoyé cette cause à la Cour suprême. C'est donc dire qu'il n'est pas d'accord avec le jugement. Selon ce que va statuer la Cour suprême et ce que le gouvernement va faire valoir, il va y avoir un ajustement à faire. Toutefois, pour l'instant, on ne peut utiliser que ce qu'on a, soit le Code criminel. C'est ce qu'on a fait.
    Est-ce que je me trompe en disant que la notion de « travailleuse du sexe », dont on entend parler dans certains milieux, risque de n'être guère une réalité dans le cadre d'un projet de loi comme celui-ci? Je ne sais pas si vous avez parlé avec des personnes de l'organisme Stella, par exemple, ou avec d'autres qui se situent à l'opposé. Les groupes féministes sont un peu divisés sur la question. On en est tous conscients.
    Oui, tout à fait. Je vous dirais d'ailleurs que ce projet de loi touche vraiment la traite des personnes. Vous comprenez?
    Vous avez raison sur un point. Si une loi exprimait clairement la position du Canada sur la prostitution, je pense que toutes les lois s'ajusteraient à cette vision. Il y a deux grands courants actuellement. Il y a ceux qui prônent la légalisation de la prostitution, avec tout ce que ça implique. Ils utilisent des mots comme « travail du sexe » et parlent presque de syndicalisation. Il y a d'autre part ceux qui prônent l'abolition de la prostitution. Ils emploient des mots comme « personne prostituée », « prostitueur » et « proxénète ».
    Pour ma part, je prône l'abolition de la prostitution parce que je suis d'avis que, dans tous les cas, ce n'est pas un travail mais une exploitation.
    Ça a le mérite d'être clair.
    J'ai toujours été très claire.
     Je veux vous dire, concernant le projet de loi, qu'il y a une petite différence entre la traite interne et la prostitution, à savoir la notion de déplacement. Dans la définition de la traite, on parle en effet de recrutement, de transport, de transfert, etc. C'est une petite nuance. Il reste que vous avez raison de dire que la traite interne touche en grande partie la prostitution. Par contre, il y a aussi le travail forcé. N'oubliez pas que la traite couvre aussi le travail forcé et le trafic d'organes, un problème que nous n'avons heureusement pas vraiment au Canada, enfin pas à ma connaissance.
    Merci, madame.

[Traduction]

    Nous passons maintenant au Parti conservateur, Mme Smith.
    Merci de comparaître, Maria. Félicitations pour votre travail sur la traite des personnes.
    Le projet de loi C-452 alourdirait les peines liées aux infractions de traite de personnes en exigeant l'imposition de peines consécutives pour quiconque s'adonne à ces activités qui sont horribles, à mon avis. C'est le genre de chose qu'on ne veut pas au Canada.
    Diriez-vous que les pénalités pour ce genre d'infraction devraient être très lourdes et, le cas échéant, pourquoi?
(1550)

[Français]

    Tout à fait, parce que ce crime en est un qui est odieux.
    On oublie parfois que l'esclavage existe à l'heure où on se parle. On se rappelle de la traite négrière. Toutefois, la traite des personnes suit les mêmes chemins que la traite négrière. La traite des personnes concerne aussi des enfants. Il ne faut jamais l'oublier et on n'a pas besoin d'aller en Thaïlande.
    Je vous donne un exemple. Le Service canadien de renseignements criminels établissait à 14 ans l'âge moyen d'entrée dans la prostitution.
    Quant à moi, les crimes dont on parle sont des crimes odieux qui méritent d'avoir des sentences sévères. Je pense que la peine consécutive permet non seulement de donner des sentences sévères, mais aussi de laisser toute la liberté aux juges de décider de la sentence.
    J'écoutais souvent certains discours où on me disait que la peine consécutive pourrait empêcher les juges de décider de la peine, ce qui est faux. D'ailleurs, je pourrais faire parvenir au comité, si les membres le souhaitent, les doctrines qui existent à ce sujet. Par exemple, François Dadour, dans son ouvrage publié en 2007 et intitulé De la détermination de la peine - principes et applications, dit comment il faut procéder pour donner des peines consécutives. La manière dont il le dit est très intéressante en soi. Il montre que le juge doit tenir compte du principe de totalité. Donc, cela veut dire concrètement que lorsque on établit pour différentes infractions différentes sentences pour la personne qui est coupable, on doit tenir compte de la totalité. Il ne s'agit pas de peines minimales que le juge doit l'imposer.

[Traduction]

    Merci de votre réponse.
    Je pense que nous nous sommes écartés du sujet.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Je voudrais parler de la façon dont les jeunes personnes sont leurrées et contraintes, car je crois que la population ne le comprend pas bien. Les criminels se présentent comme des amis.
    Ma question était la suivante: pensez-vous que les pénalités devraient être très lourdes et, le cas échéant, pourquoi? Je voudrais parler de la façon dont les jeunes sont leurrés — c'est-à-dire qu'ils se retrouvent dans le pétrin sans même le savoir — et de ce qui leur arrive lorsqu'ils sont isolés de leur système de soutien, de leurs familles, de leurs amis et d'autres personnes qui pourraient les aider. À mon avis, cette tromperie et cette coercition expliquent pourquoi les jeunes particulièrement vulnérables se font prendre dans l'engrenage.
    Qu'en pensez-vous?

[Français]

    Tout à fait. Je suis désolée. C'est mon côté juridique qui a pris le dessus. Je vais donc revêtir mon chapeau de criminologue.
    Je vais vous parler de ce que je connais le mieux pour les avoir vus quotidiennement et les avoir rencontrés, à savoir les gangs de rue. Ils ont été pendant longtemps des recruteurs de jeunes filles. Actuellement, les gangs de rue ne sont plus seulement des recruteurs, mais aussi des proxénètes de haut niveau, c'est-à-dire qu'ils déplacent les jeunes filles d'un endroit à l'autre. Par exemple, on retrouve des groupes à Niagara. Je vous parle particulièrement de cet endroit parce qu'ils sont bien liés avec les groupes de Montréal.
    La technique de recrutement est d'abord la séduction. Au début, les hommes vont séduire les jeunes filles. Il faut faire attention. Il ne faut pas croire que ce sont des jeunes filles forcément démunies. Il y a des jeunes filles démunies, mais il y a aussi des jeunes filles de la classe moyenne qui se font embarquer par ces gars-là.
    Au départ, une jeune fille pense qu'elle aime cet homme et qu'il est son petit ami. Donc, il y a de la tromperie et de la manipulation. Il lui fait vivre toutes sortes de choses. Il lui paie des sorties et lui offre des cadeaux. Toutefois, à un moment donné, il commence à lui dire qu'il faut qu'elle paie les dettes.
    Il y a beaucoup de désinhibition qui se fait. On envoie les jeunes filles dans des partys et on essaie de les attirer pour — excusez-moi, mais je vais employer des termes un peu crus — qu'elles couchent avec tout le monde et qu'il y ait des partouzes. Les hommes vont commencer à faire ce genre de choses et quand la fille commencera à dire non, c'est à ce moment-là qu'ils vont la prendre et la mettre dans un appartement. Elle ne saura même pas où elle est et des hommes vont la violer en série. C'est ce qu'ils appellent un gangbang. Parfois, il y a 15 gars qui vont la violer.
    Dernièrement, nous avions le témoignage d'une victime et elle disait que 40 gars l'avait violée au cours de la même soirée. Elle ne se rappelait plus quand cela avait commencé et quand cela s'était terminé. Ce cas est présentement devant la cour.
    Par la suite, les jeunes filles seront complètement isolées. Des gens vont menacer la famille, le petit frère et la petite soeur. Ils vont leur dire que ce n'est pas elles qui vont écoper, mais plutôt leur petit frère ou leur petite soeur. Ils vont mettre ces jeunes filles dans un état de terreur complet. Ils vont leur enlever tous leurs papiers d'identité. Tout ce qu'elles pourront faire sera de se maquiller. Ils vont même leur donner des vêtements et, à ce moment-là, elles devront avoir 10, 20 ou 30 clients par jour.
(1555)
    Merci, madame.

[Traduction]

    La parole est maintenant au Parti libéral, représenté par M. Bélanger.

[Français]

    Combien de temps ai-je à ma disposition, monsieur le président?

[Traduction]

    Vous avez cinq minutes ou, si je le permets, un peu plus longtemps.
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    Merci.
    Comme vous le savez, je ne suis pas membre du comité, je remplace mon collègue, M. Cotler. Il a fait une déclaration au sujet de votre projet de loi. L'avez-vous lue?
    Oui, je l'ai lue.
    Il appuie sans hésitation plusieurs éléments de votre projet de loi. Il vous félicite, d'ailleurs, pour votre projet de loi. Je fais la même chose.
    Merci.
    Par ailleurs, il souligne deux éléments. Il espérait qu'ils soient examinés d'un peu plus près par le comité.
    Le premier est une question que Mme Smith a déjà soulevée. Il s'agit de la question de la concurrence des peines. Peuvent-elles être concurrentes ou doivent-elles être consécutives?
     M. Cotler voulait savoir jusqu'à quel point vous seriez ouverte à cette notion. Il ne souhaite pas que l'on restreigne impunément le pouvoir discrétionnaire du juge. Forcément, les circonstances sont différentes ou peuvent être différentes dans chaque cas. Il y a donc un besoin pour un tel pouvoir .
    Il semblait favoriser un encouragement à des peines consécutives plutôt que d'imposer une obligation. On voit le résultat de vos discussions avec le Barreau du Québec. Si cette question a été soulevée, quel a été votre cheminement intellectuel par rapport à cette question?
    Je vous remercie de votre question.
    Tout d'abord, lors des discussions avec le Barreau du Québec, la question des peines consécutives n'a pas vraiment posé problème. Il y a eu plus de discussions sur le renversement de la preuve. Il y a eu cette discussion, mais...
    Parlez-vous de la présomption?
    Oui, c'est exact, il s'agit de la présomption.
    C'est le deuxième élément, et j'y reviendrai.
    En ce qui a trait aux peines consécutives, j'ai bien écouté le discours de mon collègue, M. Cotler. Je vous avoue que je ne comprends toujours pas quel est le problème qu'il perçoit en ce qui a trait à l'indépendance des juges. J'ai fait encore d'autres demandes de recherche pour être certaine de ne pas me tromper. J'aimerais parler de la doctrine présentée par M. Dadour en 2007. Je pourrais lui faire parvenir la documentation à ce sujet, mais je suis sûre que M. Cotler doit avoir tout ça. Il parle même de deux causes devant la Cour suprême relativement aux peines consécutives.
    On parle du principe de totalité. Je vous donne un exemple. Imaginons que quelqu'un soit arrêté pour traite, proxénétisme et voies de fait graves et qu'il soit reconnu coupable. Supposons que le juge impose des peines de trois ans pour traite, de deux ans pour proxénétisme et de deux ans pour voies de fait graves. Avec une peine concurrente, cela ferait trois ans. S'il y avait des peines consécutives, il pourrait donner exactement les mêmes peines. Rien ne l'empêche d'imposer ces peines. Il a toute la latitude pour le faire. Par le principe de totalité, il fera son calcul mathématique. S'il veut, au bout du compte, donner une peine de sept ans ou de cinq ans, il fera son calcul pour que le total des peines soit de cinq ans ou de sept ans.
    Je peux reprendre ce que mon collègue disait. Il était préoccupé par le danger que l'on limite le pouvoir discrétionnaire des juges. Quant à moi, ce n'est pas le cas parce que ce n'est pas une peine minimale en soi. Dans l'ouvrage de M. Dadour, il est écrit que « [...] le législateur a prévu [...] ». En effet, le Code criminel contient déjà des peines consécutives. Elles sont liées à des infractions comme l'usage d'une arme à feu, le terrorisme, la possession et la fabrication de substances explosives. Vous voyez le genre. Il y en a cinq dans le Code criminel. Il est écrit très clairement ceci: « [...] le principe de totalité est lui aussi une conséquence logique du principe de proportionnalité ». Le juge est donc non seulement indépendant dans sa façon de décider, mais en plus, il va tenir compte du principe de totalité, qui est en lien avec le principe de la proportionnalité du délit et de la sentence.
(1600)
    À vous écouter, madame Mourani, je perçois que le principe de totalité tend vers le haut, soit vers une peine plus prononcée et plus étendue. Je ne suis pas juriste, mais pourrait-il y avoir des circonstances où un juge voudrait aller dans le sens contraire et que la totalité de la peine soit moindre?
     Présentement, il y a des cas devant les tribunaux qui impliquent des jeunes filles qui auraient été proxénètes auprès d'autres jeunes filles, par exemple. Alors, dans une circonstance où le secteur judiciaire voudrait que la totalité de la peine soit moindre et non pas plus élevée, à ce moment-là, si le caractère consécutif des peines est obligatoire, cela lie-t-il les mains du secteur judiciaire?
    Je vous dirais que ce n'est pas du tout le cas étant donné que le principe de totalité est déterminé par le juge. C'est lui qui décide quelle sera la totalité de la sentence. Donc, s'il veut imposer un total de trois ans, il s'arrangera pour donner des peines d'un an, un an et un an. Comprenez-vous ?
    Sauf s'il y a des peines minimales.
    Ça, c'est autre chose. S'il y a des peines minimales, il est tenu de les imposer.
    Dans certains cas, elles peuvent être consécutives.
    Je ne suis pas certaine à cet égard.
    Moi non plus. Je laisserai à mon collègue Cotler le soin d'éclaircir cela.
    D'accord.

[Traduction]

    J'ai terminé.

[Français]

    Je veux seulement vous dire que les deux infractions qui ont des peines consécutives sont la traite des personnes et le proxénétisme. Il n'y a pas de minimum à cet égard.
    Pas encore.
    Il n'y en a pas. Je travaille avec le code que j'ai. Je ne peux pas travailler avec autre chose.
    D'accord.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Albas, du Parti conservateur.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier nos témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    Notre comité a reçu bon nombre de projets de loi d'initiative parlementaire qui touchaient au Code criminel. Cela m'a permis de mieux connaître les dispositions du Code criminel ainsi que les points de vue et les préoccupations des divers partis et députés.
    J'aimerais revenir à certains des propos que vous avez tenus dans votre déclaration liminaire.
    Notre comité a récemment étudié le projet de loi C-394, qui porte sur le recrutement dans une organisation criminelle. Ce projet de loi a été présenté par notre collègue conservateur Parm Gill. Son projet de loi propose de créer un nouvel acte criminel qui interdirait le recrutement, la sollicitation, l'encouragement ou encore l'initiation d'une personne au profit d'une organisation criminelle. Cet acte criminel serait passible d'une peine d'emprisonnement d'une durée maximale de cinq ans, assortie d'une peine d'emprisonnement obligatoire d'une durée minimale de six mois dans le cas où l'on a recruté un mineur.
    Dans votre témoignage, vous avez établi un lien entre la traite des personnes et les organisations criminelles, en soulignant plus particulièrement le rôle du crime organisé. À mon avis, on pourrait également faire un lien entre les gestes nocifs commis par les gangs de rue et la traite des femmes. Malheureusement, on peut voir que les gangs de rue ont de plus en recours à la traite des femmes et cela leur permet de promouvoir leurs objectifs.
    Auriez-vous l'obligeance de nous expliquer davantage le lien entre les gangs de rue et la traite des femmes?

[Français]

    Merci beaucoup de la question.
    Vous avez tout à fait raison de dire que le recrutement est très important. Ces groupes se nourrissent du recrutement des jeunes filles. Dans les années 1980 et 1990, les gangs de rue avaient beaucoup moins d'envergure, mais ils sont devenus des recruteurs de haut niveau et se spécialisent maintenant dans la prostitution juvénile. C'est leur spécialité.
    Ils recrutent malheureusement les filles vulnérables qui se trouvent, par exemple, dans les centres jeunesse. Pour ma part, j'ai travaillé dans ces centres. Je me rappelle qu'on devait même faire très attention à nos filles parce que les pavillons se touchaient parfois. Ils vont dans les zones où les filles sont plus fragiles. C'est connu. Des filles font parfois du recrutement pour eux. Ce n'est pas souvent le cas, mais il y en a de plus en plus. Ce sont des filles qui ont elles-mêmes été des victimes et qui vivent dans la terreur. Elles disent elles-mêmes être obligées de recruter d'autres filles pour ne pas être celles qui seront battues et torturées.
    Même si on est députés, on ne peut pas vraiment renier ce que l'on est. Ces filles viennent donc encore me voir, même si je suis députée. Je me rappellerai toute ma vie cette fille âgée d'environ 19 ans que j'ai rencontrée il n'y a pas très longtemps. Elle m'a dit que ce qui lui avait fait le plus mal s'était passé quand elle était âgée de 15 ans. C'était à l'arrière de la voiture qui la transportait de Montréal à Québec, avec d'autres filles, pour être exploitée sexuellement dans un duplex. Il y avait une petite fille de douze ans et elle pleurait.
    C'est un problème de taille. Les gangs de rue recrutent et recrutent. Des policiers que je connais me disent qu'aussitôt sortis, ces gars-là saisissent leur cellulaire et recommencent. Je vous parle des gars de gangs, mais n'oublions pas la mafia russe, la mafia asiatique ou les triades, dans des endroits comme Vancouver. N'oublions pas les organisations criminelles. On parle beaucoup des gangs de rue, mais les organisations criminelles transnationales sont très impliquées dans la traite, qu'elle soit internationale ou interne.
    Nos enfants sont recrutés très jeunes. Nos jeunes filles sont exposées à des images. On leur dit constamment que pour être quelqu'un, elles doivent exhibées leur corps à demi-nu et être belles. Des messages de ce genre circulent constamment, que ce soit dans les publicités ou à l'école, et ils contribuent à fragiliser nos filles. Elles se retrouvent avec des gars très sympa, très beaux, qui les abordent et leur disent qu'ils vont leur donner tout l'amour qu'elles n'ont pas reçu. Ils les embarquent dans des systèmes de ce genre. On n'arrive même pas à déterminer combien de jeunes filles mineures font présentement partie de ces réseaux de prostitution.
    Des mères de famille me font parvenir des courriels ou m'appellent pour me dire que leur fille est à Niagara, par exemple, et me supplient de les aider à la sortir de là. Ces jeunes filles croient que ces gars-là sont leur chum. Je demandais à quelqu'un quel âge a sa fille et elle m'a répondu qu'elle a 17 ans. Quand je lui demandais à quel âge cela a commencé, elle me dit que sa fille avait à ce moment-là 14 ans.
    Je peux vous dire une chose: on n'a pas besoin d'aller en Thaïlande pour voir des situations de ce genre impliquant des enfants. On pourra se battre et colmater tant et plus les brèches du Code criminel, tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas de vraie loi sur la prostitution, nous n'en finirons jamais de colmater les brèches.
(1605)

[Traduction]

    Avez-vous une brève question?
    Monsieur le président, je voulais tout simplement souligner qu'au cours des dernières réunions, nous avons entendu des témoins qui nous ont rappelé que l'objet de notre étude touche des gens. Que l'on songe au cas des gangs de rue qui recrutent des enfants ou, dans ce cas-ci, de l'exploitation de nos propres enfants; il incombe à tous les députés de ne pas perdre de vue les personnes que cela touche, et nous nous devons d'appuyer une mesure législative qui les protégera.
    Merci.
    Merci de votre question.
    Nous cédons maintenant la parole à M. Mai, du Nouveau Parti démocratique.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Merci, madame Mourani, d'être parmi nous aujourd'hui. Je pense qu'on ne peut pas rester insensibles à tout cela, surtout quand vous racontez ces histoires. La traite et l'exploitation des personnes est un sujet qui nous touche tous. Je suis très heureux que nous avancions dans cette direction.
    J'aimerais que nous parlions un peu des femmes autochtones, dont il a été peu question, mais qui vivent beaucoup de problèmes en ce sens.
    Vous vous apprêtiez à parler du fait qu'il fallait s'attaquer à la prostitution. Or j'aimerais savoir si l'objectif est de s'attaquer à la prostitution ou si ça peut toucher aussi les travailleurs domestiques, par exemple, étant donné qu'on parle de la traite des personnes.
    Je vous dirais que puisque ce projet de loi touche la traite des personnes, ça touche les travailleurs domestiques. Il est question de travail forcé, quel qu'il soit. Ça peut être le travail domestique ou autre chose. À partir du moment où une personne est exploitée pour son travail, c'est touché par ça.
    Par ailleurs, les femmes autochtones représentent un sujet tellement pertinent. D'ailleurs, je sais qu'un groupe de femmes autochtones a récemment pris position en faveur de l'abolition de la prostitution. Ça m'embête un peu, mais j'ai oublié le nom exact de l'organisation. C'est dommage. Je ne sais pas si ça dit quelque chose à mes collègues.
     Vous savez, la prostitution est basée non seulement sur des rapports inégalitaires, mais aussi sur des rapports racistes. J'écoutais dernièrement une femme autochtone raconter qu'elle avait été violée par deux hommes blancs. Excusez-moi de le dire comme ça, mais c'est comme ça que ça a été rapporté. Pendant qu'elle se faisait violer, ces deux gars lui disaient qu'ils la violaient parce qu'elle était Autochtone. La prostitution est basée non seulement sur des rapports inégalitaires, mais aussi sur le racisme, de même que sur des rapports de dénigrement envers les autres.
     Il faut dire que les clients de la prostitution sont majoritairement des hommes, que je nommerais les prostitueurs. D'ailleurs, je tiens à préciser que c'est une minorité d'hommes, et non pas tous les hommes, qui vont voir les prostituées. Malheureusement, souvent ces hommes vont rechercher aussi des rapports de domination et des rapports basés sur le racisme. Alors, ce sont des femmes asiatiques, russes ou latino-américaines. Récemment, j'ai rencontré des filles du Bangladesh tout nouvellement arrivées au Québec et qui ne connaissaient même pas la langue. Elles parlaient à peine le français. Justement, elles se faisaient aborder pour être recrutées dans ces milieux. En effet, les femmes exotiques — excusez-moi, mais c'est ainsi qu'on les appelle dans le milieu — sont très recherchées.
(1610)
    D'accord, mais j'aimerais mieux comprendre une chose. Pensez-vous que votre projet de loi s'en va justement dans cette direction, c'est-à-dire vers l'abolition de la prostitution?
    Malheureusement, non. Le projet de loi ne cherche pas à abolir la prostitution. Selon moi, il faudrait que ce soit abordé dans un projet de loi du gouvernement. C'est une grande question sociale. Une députée toute seule ne peut pas porter cette cause, même si ce projet de loi reçoit l'appui de plusieurs groupes qui sont en faveur de l'abolition de la prostitution et qui souhaiteraient voir ce genre de projet de loi germer au Parlement. Je peux vous dire que j'appuierais ça avec grand plaisir.
    Toutefois, ce projet de loi s'attaque à la traite des personnes et tente de colmater les brèches concernant la traite des personnes, et qu'on le veuille ou non, il reste que la traite des personnes se constitue à 80 % d'exploitation sexuelle. Ça touche donc également le proxénétisme.
    Vous avez parlé de l'appui que vous recevez. Je sais qu'au sein du Parlement, la situation est un peu différente pour vous maintenant. Avez-vous reçu un peu d'appui des autres partis? Sentez-vous que les autres partis peuvent vous aider? Comme vous le dites, vous êtes un peu toute seule pour mettre en avant ce projet de loi et le faire adopter.
    Parlez-vous de ce projet de loi-ci?
    Oui, tout à fait.
    En fait, j'ai été très contente de voir l'appui de tous les députés à l'étape de la deuxième lecture. Mme Smith et moi travaillons en concertation. Lors du vote à l'étape de la deuxième lecture, j'ai pu constater l'unanimité des députés. J'ose espérer, voire j'ai très bon espoir que, à l'étape de la troisième lecture, nous irons tous dans le même sens.
    Pour moi, c'est un projet de loi non partisan. Nous avons eu ces discussions au sein de notre parti, et j'ai dit que nous étions là pour travailler pour le bien de ces victimes, et pas pour faire de la petite politique. En tout cas, c'est ce que nous faisons de notre côté, je peux vous le garantir.
     Merci, madame.

[Traduction]

    Monsieur Goguen, du parti ministériel, la parole est à vous.

[Français]

    Merci, madame Mourani. Je suis d'accord avec vous: c'est non partisan. Ce sont des crimes absolument horribles qu'il faut dissuader, et je pense que c'est la direction dans laquelle vogue votre projet de loi.
     Le projet de loi exige que les peines pour traite des personnes et pour proxénétisme soient purgées consécutivement. À titre comparatif, les autres infractions pour lesquelles le Code criminel impose de telles peines sont le terrorisme, des actes commis par des organisations criminelles et des actes impliquant des armes à feu. Je pense que je connais déjà la réponse, mais je vous pose quand même la question. Vous élevez ce crime au même niveau parce que cela suit une même logique: à vrai dire, ça implique les armes à feu et ça relève du crime organisé, de la coercition et du terrorisme. Ai-je raison?
(1615)
    Ah, ah!
    Bon, ça me donne un peu la réponse.
    Selon moi, c'est un crime grave. Je pense que pour nous tous, autour de cette table, c'est un crime grave qui mérite des sentences sévères. Après avoir parlé aux procureurs et même aux policiers, j'ai voulu suivre le principe suivant, à savoir que le juge peut prononcer sa sentence à sa convenance, qu'il s'agisse de travail forcé ou d'exploitation sexuelle, mais que nous faisons savoir, en tant que législateurs, que c'est un crime très grave pour lequel nous voulons que des peines consécutives soient appliquées.
    Concernant la peine consécutive, au-delà du fait que la sentence sera assez importante selon les délits commis, il y a le phénomène suivant, qui est très important. Lorsque la victime voit que le gars qui l'a agressée pendant des semaines, des mois, voire des années, est accusé et reconnu coupable de traite, de proxénétisme et de voies de fait graves, mais n'écope que d'une peine de trois ans parce que seule la sentence pour la traite est retenue, elle ne comprend pas. Ce gars l'a violée, l'a torturée et elle a l'impression de n'être plus rien. Elle essaie de reconstruire son humanité et, pourtant, on condamne cet homme à une peine de trois ans d'emprisonnement. Il y a plusieurs cas de ce genre.
    À ma connaissance, la sentence la plus élevée à avoir été appliquée était de sept ans. Il s'agissait de crimes atroces impliquant plusieurs victimes. Les victimes ne comprennent pas pourquoi ces gars, alors qu'ils sont accusés de délits, ne purgent pas une peine en conséquence. Dans leur processus de guérison, elles ont l'impression de subir encore une injustice de la part de la société.
    Il est très important de ne pas oublier que ce projet de loi vise à offrir des outils aux policiers et aux procureurs, mais aussi à rendre justice concrètement aux victimes. On leur dit que ce n'est pas à elles de porter le fardeau de la preuve. Ces gars ont commis des crimes atroces et ils vont en payer le prix. De plus, s'ils sont reconnus coupables, on va leur confisquer le fruit de leur criminalité. Que ça se soit passé au Canada, entre Montréal et Québec, entre Niagara Falls et Toronto, ou en provenance de la Russie, c'est pareil.
    On vient de me donner le nom du

[Traduction]

    Aboriginal Women's Action Network.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup. Les personnes qui forment ce groupe ont officiellement établi qu'elles voulaient l'abolition de la prostitution, de façon à protéger les filles et les femmes adultes de leurs communautés.
     Oui, vous avez raison: il faut appliquer des sentences exemplaires et confisquer les fruits de la criminalité. Les victimes ne doivent plus être victimisées de nouveau.
    Je pense que l'actuel Code criminel va nous permettre de faire de grandes choses. J'ai bon espoir que, lors de la troisième lecture, tous mes collègues voteront en faveur de ce projet de loi, comme ils l'ont fait en deuxième lecture.

[Traduction]

    Merci.
    C'est maintenant au tour de Mme Marie Morin, du Parti néo-démocrate.
    Ah, ce n'est pas le nom qu'on nous a donné.
    Allez-y, monsieur Jacob.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, madame Mourani, d'être parmi nous.
    Le projet de loi C-452 dénonce la traite des personnes, qui est un crime odieux, et met à jour le Code criminel à ce sujet. On peut dire que, dans l'ensemble, c'est un pas dans la bonne direction. Nonobstant les bémols soulevés plus tôt par Françoise, j'aimerais savoir si vous seriez favorable à l'établissement d'une politique permanente sur la lutte contre la traite des personnes. En effet, sans une politique de ce genre, nous risquons de perdre la trace des victimes. Elles pourraient être oubliées.
    Par ailleurs, on a parlé un peu des Autochtones, Premières Nations, Inuits et Métis qui sont particulièrement touchés par ce phénomène et qui veulent participer activement à la lutte contre la traite des personnes. Le financement destiné aux femmes autochtones a été réduit par les conservateurs. Malgré cela, voulez-vous inclure les Autochtones de tout le pays dans votre projet de loi?
(1620)
    Pourriez-vous préciser votre question? Tous les Autochtones sont touchés, cela touche tout être humain qui vit au Canada.
    Lors de vos consultations, êtes-vous allée partout au Canada?
    Non, malheureusement. Humainement, c'était impossible. Il m'a fallu un an et demi pour consulter tous les groupes et mettre tout cela ensemble.
     Cependant, je vous dirais que ce projet de loi va dans le sens de ce que demandent d'autres groupes pancanadiens, qu'il s'agisses de femmes autochtones, de femmes d'origine chinoise ou même d'hommes. On parle beaucoup de femmes, mais ce pourrait aussi être des jeunes garçons. À compter du moment où un être humain est victime de trafic au Québec ou en Ontario, cela touche tout le Canada. Je dirais même qu'antérieurement, cela touchait l'extérieur du pays. À compter du moment où tu es victime de trafic, tu es concerné par la loi.
    Je n'ai pas consulté tous les groupes du Canada. Humainement, ce n'était pas possible.
    Vous vous êtes concentrée au Québec.
    C'est exact.
    Par contre, j'ai consulté des groupes pancanadiens, comme le CATHII. Les groupes avec qui ces gens font affaire au Canada sont informés et appuient le projet de loi. Mon point d'attache est le CATHII. La CLES a des liens un peu partout au Canada. Sinon, ce sont des groupes québécois.
    Je suis heureux de découvrir que vous êtes sensibilisée au pays en entier.
    Je suis sensibilisée au monde, mon cher monsieur. Je pense aussi aux enfants en Thaïlande qui subissent ces choses. C'est un crime odieux, quel que soit le pays où on est.
    Il y a un manque flagrant de ressources pour nos forces policières et de connaissances concernant la traite des personnes.
    Vous êtes-vous arrêtée à cela lors de vos consultations?
    Voulez-vous savoir si j'ai été interpellée par cela?
    En effet, c'est le cas à Montréal, certes, mais c'est le cas partout au pays, Beaucoup de forces policières manquent de moyens. Ce peut être parce que leur programme n'a pas été renouvelé. Bien sûr, il faut des lois, mais pour arrêter les criminels, il faut qu'il y ait des policiers sur le terrain.
    En fait, il y a un manque de ressources partout. Il y a un manque de ressources pour les enquêtes. Il y a un manque de ressources pour l'aide directe aux victimes. Je vais parler du Québec où il faut une stratégie nationale. Je parle de stratégie québécoise, comme la Colombie-Britannique l'a fait. En effet, la Colombie-Britannique a un plan provincial avec des campagnes de sensibilisation. On essaie d'investir de l'argent pour des refuges.
    Je pense qu'au Québec, il nous faut une stratégie nationale. Je sais que le gouvernement actuel est en discussion pour en venir à une stratégie nationale. J'espère que nous pourrons aboutir à cela.
    Au Canada, il faut — puisque nous sommes toujours dans le Canada — une vraie loi sur la prostitution. Le système actuel est — excusez le terme — un peu hypocrite. En effet, on dit que la prostitution est légale mais que la sollicitation est illégale. Cela n'a pas de sens, selon moi. Le Canada devrait être l'un des pays les plus avant-gardistes en Amérique. Il devrait imiter la Suède et criminaliser l'achat de services sexuels et mettre sur pied un plan, une loi-cadre, qui prévoit des ressources et des campagnes de sensibilisation. Il faut non seulement criminaliser les proxénètes, mais aussi les clients.
    Quant à moi, si nous avions une loi-cadre comme en Suède ou comme en Norvège, nous aurions une vision fort moderne et fort humaine au Canada. Je peux vous dire que je l'appuierais.
    Merci, madame.
(1625)
    Merci.

[Traduction]

    La dernière question revient à M. Wilks, du parti ministériel.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier les témoins de leurs exposés. Cette mesure législative est certainement requise partout au Canada.
    Je suis pleinement d'accord avec vous en ce qui a trait aux peines consécutives. À titre d'agent policier à la retraite, je trouve qu'il ne s'agit pas d'une mauvaise chose. Mais, cela dit, comme vous le savez, l'ancien projet de loi de Mme Smith, le projet de loi C-310, élargissait la portée de la disposition sur l'extraterritorialité du Code criminel pour inclure les infractions de traite et clarifiait la définition de l'exploitation à l'article 279.04 en créant des outils d'interprétation qui aiderait les tribunaux dans les cas où quelqu'un avait recours aux menaces, à la tromperie ou à l'abus d'autorité et, par conséquent, avait exploité une autre personne dans le but de l'assujettir à une traite.
    Certains des amendements que vous proposez recoupent les réformes récentes proposées dans le projet de loi de Mme Smith. Par conséquent, je me demande si, lorsque nous examinerons le projet de loi en comité, vous accepteriez qu'on propose des amendements qui garantiront une certaine cohérence par rapport à la loi qui existe déjà.

[Français]

    Tout à fait.
    Quant à moi, comme je le disais au début de mon discours, j'ai justement fait vérifier la cohérence des dispositions avec nos légistes. Certains éléments ont été modifiés parce que cela existait déjà dans le code actuel grâce au projet de loi de Mme Smith. L'extraterritorialité n'existe pas dans mon projet de loi.
     Au plan de la définition, cela a été bien fait. On a vraiment fait très attention de ne pas créer de chevauchements et de faire en sorte qu'il n'y ait pas d'incohérences entre la définition proposée par Mme Smith et la nouvelle définition. Elle ne fait que la bonifier. Par contre, il y a une chose à souligner. Il y a une disposition dans la définition qui existe en anglais, mais qui n'existe pas en français. On a donc fait cette modification. Donc, il faut faire très attention. Je n'ai aucun problème pour qu'il y ait des amendements pour assurer la cohérence, mais il faut faire attention. Je vous le dis très honnêtement. J'ai fait très attention pour qu'il n'y ait pas de chevauchements. À cet égard, la légiste a tout regardé. Toutefois, on est tous des humains. On peut commettre des oublis ou des erreurs. Si vous voyez des chevauchements et que vous souhaitez les modifier, je n'ai aucun problème avec cela.
    Je pense que le point principal est de ne pas expurger la force du projet de loi. Sa force est dans les peines consécutives, la présomption, l'aspect international versus l'aspect national et le fait d'avoir présenté une disposition spéciale pour l'exploitation sexuelle. Je pense que si nous gardons le corps, le coeur et le fond de ce projet de loi, nous avons un projet de loi qui a du mordant. Toutefois, si nous expurgeons tout le reste, je pense que nous avons un projet de loi qui a plus ou moins de mordant.

[Traduction]

    Merci.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Mourani. Vous avez fait un excellent travail et vous avez défendu votre projet de loi avec beaucoup de passion. Merci beaucoup.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Nous allons suspendre la séance pendant environ trois minutes pour permettre au prochain groupe de témoins de venir autour de la table. Nous allons entendre des témoins aujourd'hui et durant toute la séance de mercredi de cette semaine, ainsi qu'au cours de la première heure de séance lundi prochain. Nous passerons ensuite à l'examen article par article au cours de la deuxième heure de séance de lundi prochain.
    Merci beaucoup.

[Français]

    Merci beaucoup à tout le monde de m'avoir écoutée et merci beaucoup d'avoir accepté que ce projet de loi soit étudié en comité. J'espère que je le reverrai assez rapidement à la Chambre.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Bien.
    Monsieur Bélanger.
    Si on veut proposer des amendements, jusqu'à quand peut-on le faire?
    Nous accepterons des amendements jusqu'à... Eh bien, vous pouvez le faire sur place, ce serait bon de les avoir avant la fin de la séance, mercredi. Vendredi, ça va, mais... Donc, une fois les témoins entendus...
(1630)
    Ce n'est pas moi qui vais les présenter, alors je dois informer mes collègues.
    Idéalement, d'ici la fin de la semaine.
    Vous voulez dire avant vendredi, à 14 h 30?
    C'est exact.
    Merci.
    Nous allons prendre une pause de deux minutes.
(1630)

(1630)
    Nous allons reprendre la séance. Il s'agit de la seconde moitié de notre réunion d'aujourd'hui.
    Nous recevons du Service de police de la ville de Montréal, Dominic Monchamp, et du Service de police de Winnipeg, l'inspecteur Gordon Perrier.
    Messieurs, vous aurez chacun l'occasion de faire un exposé préliminaire qui ne doit pas dépasser plus de 10 minutes. Ensuite, comme vous l'avez vu avant, il y aura des questions des différents partis.
    Qui aimerait commencer?
    Dominic, aimeriez-vous être le premier à prendre la parole?
    Gordon, vous allez commencer?
    Vous avez la parole, monsieur.
    Bonjour. C'est un honneur d'être ici aujourd'hui pour représenter le Service de police de Winnipeg, et je suis ravi de m'adresser à vous sur un sujet si important.
    Comme d'autres centres urbains au Canada, Winnipeg fait face à des crimes tels que l'exploitation, le proxénétisme, le leurre, la prostitution et des comportements criminels connexes. L'exploitation ne se limite pas aux villes ou à un groupe de la population. C'est un problème pour toutes les collectivités canadiennes. Une grande partie de ces crimes tirent leurs origines dans la traite de personnes, ou ils y sont reliés. Je félicite le gouvernement d'ajouter des dispositions au Code criminel pour s'attaquer à ces actes terribles et donner aux policiers des capacités et des méthodes réelles pour améliorer la vie des victimes et créer de la stabilité dans la vie des personnes à risque. Un projet de loi comme celui-ci apporte des changements significatifs à nos collectivités et nous aide à créer une culture de sécurité.
    Le projet de loi C-452 comprend des dispositions sur la présomption de preuve pour les personnes exploitées, des références au contexte domestique dans les cas de traite, des dispositions sur la confiscation et des peines consécutives — voilà autant de mesures concrètes dont ont besoin les policiers et les procureurs. Combattre l'exploitation exige que l'on s'engage sur de nombreux fronts, et toutes les pratiques que les policiers et nos partenaires emploient se conjuguent lorsque les lois sont complètes.
    Comme pour un casse-tête, lorsque l'on assemble les morceaux, on peut voir toute l'image, ce qui nous donne de la force. Pour cette raison, je veux vous parler de certains de nos programmes, stratégies et méthodes, de leurs liens directs avec les lois actuelles et des modifications proposées dans le projet de loi C-452.
    Les initiatives, stratégies et méthodes de travail du Service de police de Winnipeg ont évolué sur une longue période, toujours dans l'objectif de maximiser nos ressources, nos compétences, nos connaissances et nos capacités de nous occuper des processus concernant les victimes, la collectivité ou les délinquants. Par exemple, depuis 1990, des agents de notre unité des crimes sexuels font partie d'un conseil qui comprend des membres du personnel médical, des représentants d'un programme de sensibilisation communautaire appelé Klinic, des travailleurs de services aux victimes et la GRC. L'objectif de ce groupe est de s'assurer que les pratiques et les processus en place lors des examens, des entrevues et de la collecte de preuves concernant les agressions sexuelles servent les intérêts de la justice et le bien-être, les soins et la dignité des victimes.
    De nombreuses victimes dont s'occupent ces équipes proviennent de populations exploitées; nous leur offrons des programmes et des soins à plus longue durée, et nous les aidons à faire des choix différents dans leur vie.
    Dans notre service, nous offrons une formation annuelle approfondie sur l'exploitation, les protocoles pour les victimes d'agression sexuelle, les cycles de violence et la façon d'offrir de l'aide. Cette formation est obligatoire pour les recrues et fait partie de la formation spécialisée pour tous les détectives.
    En 2012, l'unité de lutte contre la violence envers les enfants a créé un partenariat pour créer le centre d'appui aux enfants de Winnipeg. Il s'agit d'un centre pour les enfants victimes, dirigé par un conseil qui comprend des représentants des services de police, de la justice, de la santé, des organismes de services sociaux et de services aux victimes. La mission de ce centre autonome est de promouvoir une collaboration entre les différents systèmes et les pratiques exemplaires dans le cadre des enquêtes sur l'exploitation des enfants. De plus, le centre s'assure que les victimes reçoivent un appui adapté et immédiat dans un environnement qui place leurs besoins au premier plan. Cela réduit le stress imposé par le système aux enfants qui sont victimes de violence sexuelle ou physique grave.
    Le Service de police de Winnipeg est aussi un participant actif au Système d'analyse des liens entre les crimes de violence. Il y a plus de deux ans, nous avons changé nos méthodes de travail à l'interne et nous avons enregistré un taux de conformité de près de 100 % pour les demandes et les analyses. Cela a profité aux enquêtes locales et a permis de trouver des pistes concernant des dossiers non résolus. Le nombre de ces nouvelles pistes a décuplé à cause des changements apportés aux méthodes de travail et à la communication.
    Depuis 2005, notre unité intégrée des délinquants à risque élevé fonctionne en partenariat avec la GRC, les services correctionnels et les groupes communautaires. Cette unité surveille activement les délinquants pour déceler les bris d'ordonnance de libération conditionnelle et effectue des opérations de surveillance des personnes désignées comme étant des récidivistes à risque élevé. Elle s'occupe également de l'application des ordonnances en vertu de l'article 810 du Code criminel et des avis d'information publics.
    Notre unité des personnes disparues a connu une restructuration en 2009. À l'heure actuelle, l'unité gère environ 6 600 cas de personnes disparues par année, dont une bonne partie sont des enfants fugueurs chroniques qui ont besoin de notre aide. Nous avons élaboré une stratégie de protocole pour les victimes à risque élevé, qui vise à empêcher l'exploitation des jeunes et à créer de la stabilité dans leur vie. Nous y arrivons en jumelant un agent de police à un travailleur social; les deux travaillent côte à côte pour faire la planification, la gestion et l'évaluation des risques et aider chaque enfant. Le programme donne de bons résultats. Il apporte un mode de vie stable à de nombreux enfants et offre un mécanisme concret pour que les policiers identifient ceux qui s'en prennent aux enfants dans nos centres commerciaux, nos parcs et nos rues.
    Trouver les enfants disparus n'est que le premier pas. Nous examinons maintenant de façon plus approfondie ces dossiers, et si nous pouvons déposer des accusations de leurre ou d'enlèvement d'un enfant de moins de 14 ans parce qu'on l'a hébergé ou qu'on a essayé de cacher son emplacement, nous le faisons. Notre unité de la moralité utilise aussi différentes tactiques qui se concentrent sur l'exploitation, la prévention et la communication.
    Les rapports DISC pour dissuader et identifier les consommateurs du commerce sexuel font partie de notre système de gestion des dossiers depuis 2002. Ces rapports commencent souvent au niveau des agents de police de première ligne qui font des contrôles routiers. L'information est transmise automatiquement à l'unité de la moralité pour analyse, et les renseignements ou commentaires sur les comportements, les risques pour la collectivité ou les pratiques suspectes sont notés et comparés avec les dossiers en cours.
(1635)
    Lorsque les enfants courent des risques éventuels, cette information est partagée avec les services à l'enfance qui ont la possibilité, en vertu de la loi provinciale, de prendre des mesures proactives contre les contrevenants éventuels ou réels. L'escouade de la moralité surveille quotidiennement des sites Web connus faisant le commerce du sexe ainsi que des publicités sur Internet. Les opérations d'infiltration se déroulent en fonction de cette information ou de ces publicités et on accorde une attention particulière à l'exploitation, à la traite des personnes et à la prostitution infantile dans ces publicités. Ces efforts ont commencé il y a environ cinq ans.
    L'escouade de la moralité établit des relations régulièrement avec l'Armée du Salut, New Directions for Children, Youth, Adults & Families; Rossbrook House; Sage House; et le Native Women's Transition Centre Inc. Ces relations ont permis d'identifier des personnes qui s'en prennent aux vulnérables pour les forcer à faire le commerce du sexe. Les enquêtes sur la prostitution, la traite des personnes, les cycles d'exploitation et la toxicomanie, ainsi que les techniques pour aider les travailleuses du sexe sont enseignées depuis le niveau d'entrée jusqu'au poste d'enquêteur principal.
    En 2011, le Service de police de Winnipeg a contribué à la révision du programme provincial du cours de formation sur les compétences de base pour comprendre et travailler auprès des jeunes exploités sexuellement. Cette formation sur l'exploitation est le seul programme en Amérique du Nord et il est suivi par des travailleurs des services sociaux, des policiers, des parents d'accueil, des professionnels de la santé, des enseignants et des agents correctionnels.
    Nous offrons des programmes pour venir en aide aussi bien aux victimes qu'aux contrevenants. Notre programme sur le racolage pour les clients a vu le jour en 2002 et se poursuit. Environ 50 à 70 contrevenants participent à ce programme chaque année. Dans le même ordre d'idées, notre programme de diversion de la prostitution pour les travailleuses du sexe a commencé à 2003 et se poursuit également. Chaque année, environ 35 à 50 femmes suivent le programme sur plusieurs jours, avec nuitée. Les agents de police participent à tous les aspects du programme, en collaboration avec des travailleurs des services sociaux, des partenaires de la justice et des spécialistes communautaires. Nous voulons ainsi tisser des liens, bâtir la confiance, éduquer et oeuvrer pour le changement.
    Notre campagne publique, qui se concentre sur l'exploitation et qui vise à dresser un juste portrait du commerce du sexe, s'est servie de publicités publiques pour sensibiliser les gens. À ce jour, nous avons distribué plus de 9 000 affiches.
    Un autre événement trimestriel est le Project Return. Ce protocole inclut des travailleurs sociaux, aussi bien du gouvernement que du secteur privé, qui travaillent avec la police lors d'opérations d'infiltration pour venir en aide dans les cas de prostitution juvénile, de plans de traitement et de placement dans des milieux sûrs et protecteurs.
    Nous avons parrainé des événements de formation sur la traite des personnes à Winnipeg à l'intention des policiers, des procureurs de la Couronne et de nos partenaires pour les sensibiliser et les aider à passer à l'action. Les services de police de Winnipeg se sont alliés à l'Université de Winnipeg et à l'Université de la Saskatchewan en aidant les étudiants en doctorat qui ont étudié la dynamique de la traite des personnes et de l'exploitation.
    Toutes nos pratiques sont examinées de manière holistique et de manière très détaillée depuis deux ans, et nous avons récemment réuni notre brigade des personnes disparues et notre escouade de la moralité dans une seule et même unité. Toutes les unités dont je viens de parler se retrouvent maintenant dans cette même division. Cette nouvelle division a été renommée la Division des enquêtes spécialisées. Cela illustre notre engagement à offrir des services axés sur les victimes, ainsi qu'à mener des enquêtes solides qui feront en sorte que la justice demande des comptes aux personnes responsables d'exploitation.
    En fait, les enquêteurs de la police de Winnipeg ont été saisis d'un dossier l'an passé où les accusations pour traite de personnes n'ont pas tenu la route pour toutes sortes de facteurs, dont la plupart ne relevaient pas de nous. Heureusement, les enquêteurs ont été capables de reprendre les choses en main, de poursuivre l'enquête sur ce membre de gang et de porter des accusations qui ont mené à une condamnation et à une peine de prison appropriée. Ce cas contenait des éléments de proxénétisme, et il aurait été aussi bien prudent qu'avantageux de poursuivre l'enquête du point de vue de la confiscation.
    Le projet de loi C-452 apportera des améliorations et permettra de demander davantage de comptes aux contrevenants. Je peux dire avec confiance que la police s'y connaît très bien dans les enquêtes sur les confiscations ainsi que sur les processus de présomption et de preuve, étant donné les parallèles semblables et les expériences en matière de droit pénal. Les modifications proposées dans le projet de loi C-452 vont améliorer notre capacité de saisir les profits tirés de l'exploitation. D'après ma propre expérience en tant qu'enquêteur sur le crime organisé, je sais que les saisies et les peines consécutives fonctionnent. Si l'on a un effet dissuasif et que l'on brise le cycle de la rentabilité, cela peut changer les comportements et empêcher d'autres personnes d'entrer dans ce cycle de comportements délinquants, de cupidité et de manque de respect pour autrui.
    Je n'ai pas de recommandation directe aujourd'hui, mais j'aimerais indiquer que j'espère que la ténacité des législateurs ne va pas diminuer pour ce qui est de la traite des personnes et de l'exploitation en vue d'améliorer la vie de tous les habitants au Canada.
    Mesdames et messieurs, merci beaucoup.
(1640)
    Merci, inspecteur.
    Désirez-vous faire des commentaires, faire des remarques liminaires de 10 minutes ou simplement répondre aux questions?
    Très bien. Vous avez la parole, monsieur.

[Français]

    Bonjour. J'aimerais vous remercier de m'avoir invité aujourd'hui.
    Je travaille comme policier au Service de police de la Ville de Montréal depuis 19 ans, dont presque 15 ans aux enquêtes sur l'exploitation sexuelle. Aujourd'hui, j'ai choisi de vous parler du « portrait terrain », de vous décrire grosso modo comment s'articule la traite des personnes et quels outils le projet de loi C-452 pourrait nous offrir.
    Il faut comprendre qu'une victime de traite des personnes ne frappe pas à la porte d'un service de police. Ce qui est intéressant, dans ce type de situation, c'est que nous devons faire des enquêtes proactives pour découvrir une victime de traite des personnes. Cela doit être au coeur de nos préoccupations. L'article sur la traite des personnes ou le projet de loi C-452 ne limitent pas les libertés de ces victimes. Au contraire, ils donnent aux policiers des outils qui leur permettent de prendre les devants et de secourir ces victimes. Ces personnes sont victimes de crimes graves, qui s'apparentent souvent à de la torture.
    Il est bien évident qu'une personne qui a été violée, séquestrée, enlevée et brûlée craint pour sa sécurité, pour sa vie. Les victimes sont unanimes: lorsqu'elles acceptent finalement de venir nous voir, elles ont peur de mourir. Ce qui est au coeur de leurs préoccupations, ce n'est pas que l'individu soit arrêté: elles veulent avoir l'assurance que si elles parlent, elles vont être protégées. Le premier réflexe d'une personne qui a vécu de telles atrocités pendant aussi longtemps n'est pas de s'adresser à la police, mais plutôt de tenter de s'enfuir, d'essayer n'importe quoi, mais pas de parler.
    C'est ce qui explique que pour 80 % des dossiers que nous traitons, nous allons rencontrer les victimes, mais elles refusent de nous parler et de faire une déposition. Cette déposition n'a jamais lieu parce qu'elles sont terrorisées ou, dans une autre perspective, parce qu'elles ne se considèrent pas comme des victimes, selon le cycle. Il s'agit d'un long cycle. On a parlé plus tôt de la manipulation, de la désensibilisation, de la séduction, jusqu'à ce que la personne bascule vers les aspects plus violents de la traite des personnes.
     Il est extrêmement intéressant qu'un aspect de la loi prévoie une présomption. Je veux vous rassurer: la présomption existe dans les enquêtes sur le proxénétisme. On y a déjà recours, mais ce n'est pas une carte blanche pour la police. Cela ne nous libère pas de notre obligation d'aller au-delà du doute raisonnable.
     Voici un exemple de ce que permet concrètement la présomption. Si un trafiquant contrôle six filles en même temps, mais que l'une d'entre elles réussit à s'échapper et, par chance, accepte de porter plainte, les cinq autres seront terrorisées ou ne se considéreront pas comme des victimes et ne voudront pas porter plainte. Or cette présomption, accompagnée du témoignage de cette première victime et appuyée par d'autres techniques d'enquête, feront en sorte que nous pourrons déposer des accusations concernant les cinq autres victimes. C'est un outil que nous offre la présomption.
    Dans d'autres cas, nous savons qu'un trafiquant contrôle une jeune femme. Je pourrais vous entretenir tout l'après-midi de ce genre de cas. Pour avoir refusé de travailler, une jeune femme a été enfermée dans un coffre de voiture pendant une journée complète ou est restée à genoux dans un salon sur une poche de riz éventrée pendant un après-midi. Nous disposons de ces informations; nous savons que cette femme va aller se prostituer jour après jour et ramener de l'argent, mais nous ne pouvons pas créer de dossier si elle ne nous parle pas. Or cette présomption et l'usage de plusieurs techniques d'enquête vont nous permettre de porter des accusations.
    La traite des personne est un crime qui se perpètre sur une longue période, jour après jour, et qui est souvent associé à d'autres crimes graves, comme l'enlèvement, la séquestration, l'agression sexuelle, les voies de fait et les menaces de mort.
(1645)
    Lorsqu'on porte des accusations de traite des personnes, les accusations dont je viens de parler sont présentes dans 80 % des cas. Sans nier la gravité de quelque crime que ce soit, il ne s'agit pas d'un vol de banque. Il s'agit de prédateurs qui planifient l'exploitation de personnes pour les traiter comme de la marchandise jour après jour et de prendre tous les moyens pour maximiser les profits qu'ils feront avec ces personnes.
    En effet, des peines consécutives pour des crimes aussi graves et qui ont duré aussi longtemps sont nettement dissuasives. Si vous retenez la première partie de mon allocution, alors que j'ai mentionné que 80 % des victimes ne viendront jamais nous voir, et que vous pensez à des sentences de 5 ou 6 ans et au fait que les victimes veulent être protégées, vous comprendrez que ce sera extrêmement utile. Je dois vous mentionner aussi que presque 100 % d'entre celles qui accepteront finalement de nous parler voudront retirer leur témoignage en cours de route. Encore une fois, c'est pour les mêmes raisons, pour des raisons de crainte, de peur, etc.
    Dans un des derniers cas où un individu a été trouvé coupable de traite des personnes, la victime a dû revenir en cour 15 fois pour être contre-interrogée par la défense d'une façon indescriptible.
     Je m'excuse, je suis un peu ému, mais c'est un peu ce que je voulais vous mentionner. Pour le reste, je pourrai répondre à vos questions.
(1650)
    Merci, monsieur le sergent-enquêteur.

[Traduction]

    La première personne à poser des questions est Mme Boivin, du Nouveau Parti démocratique.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie à tous les deux d'être présents.
     C'est toujours émouvant, mais c'est aussi plus pratique pour moi d'entendre ceux qui travaillent au quotidien à ces dossiers.
    Un événement est arrivé dans ma région il n'y a pas si longtemps. Le 24 avril dernier, le journal Le Droit a fait paraître un article dont le titre était: « Proxénétisme: une jeune fille de 17 ans piégée ». On parle beaucoup présentement de proxénétisme, de traite des personnes, de prostitution, etc., mais les gens sont de plus en plus jeunes. Dans ce cas, on parle du procès de trois adolescentes accusées de proxénétisme. Il faut le faire!
    Dans les réseaux de criminalité, on ne parle plus seulement d'adultes et de crime organisé, mais aussi de gangs de rue. Ce n'est plus seulement le portrait-robot du mâle blanc de tel ou tel âge. On parle de jeunes qui, par l'entremise d'un réseau social, ont attiré cette jeune fille de 17 ans pour lui faire subir ce que vous racontiez, monsieur Monchamp. Elle était tellement craintive.
    Certaines personnes pourraient se dire qu'elle n'avait qu'à mettre son pied à terre, aller voir ses parents et que cela aurait réglé le problème. Ils l'ont mis dans des situations compromettantes, ont pris des photos et jouaient sur sa peur. Cela va suivre son cours normal sur le plan juridique, j'en n'ai pas de doute. Si on peut vous donner des outils, ce sera plus pratique.
    Par contre, en ce qui a trait à la présomption, je ne suis pas certaine que cela s'appliquera dans le cas d'une infraction de traite des personnes mineures. Je me demande si on n'est pas en train de laisser de côté quelque chose relativement à cela, mais vous n'êtes peut-être pas les mieux placés pour répondre à ces questions. Nous recevrons des gens provenant du domaine juridique qui pourront répondre à ces questions.
    Vous êtes sur le terrain et cela fait partie de votre quotidien. J'ai posé la question à Mme Mourani. Parfois, quand je lis le projet de loi et les articles 212 et 279 du Code criminel, j'ai un peu de difficulté. C'est au sujet du proxénétisme et de la traite des personnes à l'interne. C'est peut-être parce que je ne suis pas une spécialiste en droit criminel. En effet, j'ai fait du droit du travail toute ma vie, mais il me semble que cela se ressemble beaucoup. Je me demande s'il devrait y avoir une fusion de tout cela. Vous pouvez peut-être me guider en ce qui a trait à ces questions.
    Il y a une différence. La traite des personnes a fourni de nouveaux outils. La principale distinction, en ce qui concerne le proxénétisme, est qu'on doit absolument prouver la prostitution, ce qui n'est pas le cas pour la traite des personnes. À cet égard, on doit prouver l'exploitation. L'important dans la traite des personnes est l'exploitation d'une personne. En ce qui a trait au proxénétisme, il y a une forme d'exploitation, mais on doit prouver la prostitution. Or, cela nous enlève un certain fardeau. On doit prouver que la personne est exploitée, peu importe le travail ou le service qu'elle fournira. C'est la première distinction.
    La deuxième chose est qu'il y a une distinction de gravité. Pour ce qui est du proxénétisme, il n'est pas nécessaire qu'il y ait des menaces et de la coercition. La personne qui vit des fruits de la prostitution peut être accusée. Quant à la traite des personnes, il y a une gradation, il y a une coercition, des menaces et un enjeu pour la sécurité de la victime, ce qui fait en sorte qu'on peut séparer deux types de personne. Un n'empêche pas l'autre et les deux articles sont complémentaires. Les avantages de l'un et de l'autre pourraient s'additionner.
    Mais s'il y avait un cas de prostitution, ça pourrait être interprété comme une forme d'exploitation, comme une forme de traite avec certaines menaces. Par conséquent, quelqu'un pourrait être accusé des deux infractions en même temps, n'est-ce pas?
    Ces gens sont accusés des deux infractions.
(1655)
    D'accord.
    Présentement, ils sont accusés des deux infractions. L'avantage dans le cas de la traite, c'est qu'on n'a pas à prouver la prostitution ou à en avoir eu connaissance. Il faut comprendre que les trafiquants s'adaptent. Ils vont prendre des intermédiaires pour former les filles, pour les briser, pour s'enlever ce fardeau lié au proxénétisme. Ils disent alors qu'ils n'étaient pas au courant du service qui était donné, alors on ne peut pas porter d'accusation de proxénétisme.
    Dans le cas de la traite, par contre, lorsque le trafiquant est directement impliqué dans l'action de forcer la personne et de récupérer l'argent, cela nous décharge de notre fardeau. C'est la distinction que je peux faire.
    J'aimerais maintenant répondre à votre question sur la présomption pour les mineurs. Dans le cas du proxénétisme, cela s'applique autant aux personnes mineures qu'aux personnes majeures. Il n'y a pas de distinction, dans la mesure où une personne qui se trouve habituellement en présence d'une prostituée est réputée vivre des fruits de sa prostitution.
    Cependant, une présomption, ce n'est pas une preuve. C'est ce qu'il faut comprendre. Ce n'est pas quelque chose qui fait en sorte de clore l'enquête. Notre enquête n'est pas moins complexe. Cela ne nous permet pas de travailler moins fort.
    Ça renverse le fardeau de la preuve. Autrement dit, lorsqu'il y a présomption, c'est à l'accusé de faire la preuve. Théoriquement, certains pourraient vous dire que ça va à l'encontre de la présomption d'innocence, mais disons que c'est peut-être justifié dans un cas de société libre et démocratique.
    Oui, mais il faut nous décharger du doute raisonnable, ce qui met la barre extrêmement élevée.
    Excellent, merci.
     Merci, sergent-détective.

[Traduction]

    Notre prochain intervenant est M. Goguen, du Parti conservateur.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse aux deux témoins.
    J'aimerais revenir sur la question de la présomption et reprendre l'exemple que vous avez cité, sergent-détective Monchamp. Disons qu'il y a un groupe de six filles, puis une s'évade et veut témoigner. On présume que les cinq autres sont sous le même règne de terreur. Il y a toujours une difficulté à faire témoigner les autres, que ce soit pour incriminer ou pour innocenter la personne en cause. Le fait que les autres ne se prononcent pas viendrait-il étayer la présomption? Est-ce en ce sens que cela vient vous aider? Je sais bien que vous devez aller chercher votre preuve outre cette présomption, car c'est peut-être circonstanciel. Cependant, l'absence de témoignage des cinq autres personnes, qui pourraient affirmer que c'est vrai ou soutenir que c'est faux, ou encore refuser de témoigner, vous aide-t-il à faire la preuve de votre cause?
    Oui, tout à fait, cela nous aide. C'est ce qui nous permet de porter des accusations ou non. Si, par exemple, la première victime témoigne de sa propre cause en affirmant qu'elle était séquestrée et que les cinq autres étaient dans la même situation qu'elle, elle va pouvoir expliquer le contexte et les circonstances. Nous nous appuierons non pas uniquement sur ces affirmations, mais aussi sur d'autres éléments, par exemple la surveillance physique et l'écoute électronique. Beaucoup de moyens d'enquête vont nous permettre de porter des accusations même si les victimes refusent de témoigner ou ne veulent pas témoigner. C'est ce que nous permet cette présomption.
    J'aimerais ajouter une chose dont j'ai oublié de parler tout à l'heure et que je soumets à votre réflexion. Il est question ici de peines consécutives. C'est intéressant dans un cas où on a plusieurs victimes. Présentement, si un individu est condamné pour un tel acte, qu'il y ait une, trois, quatre ou six victimes, il n'y a aucune différence: il va être condamné à cinq ans. N'est-on pas en train de l'avantager et de l'encourager à faire plus de victimes, par exemple cinq ou six, puisqu'il n'écopera pas d'une peine plus sévère?
    Les cinq personnes soumises à ce règne de terreur pourraient être convaincues par les mauvaises personnes de témoigner en leur faveur. Ont-elles plus peur d'eux ou de témoigner en cour? Que fait-on pour les épauler, pour former un genre de réseau de soutien en vue de les soustraire à la terreur? Même si elles ne témoignent pas, c'est mieux que de témoigner en faveur des personnes accusées. Comment faites-vous pour créer un réseau de sauvetage?

[Traduction]

    C'est une très bonne question. C'est exactement ce dont nous parlons lorsque nous parlons de renforcer la confiance.
    Il faut que ça commence quelque part et je vais vous donner un exemple. À Winnipeg, nous avons connu un cas très semblable à celui que le sergent vient juste de décrire. Nous avons fini par arrêter ces personnes pour trafic de drogue, car elles étaient si réticentes à coopérer et à nous donner une déclaration à ce sujet. Lorsqu'elles ont vu que des mesures étaient prises pour le trafic de drogue et qu'elles étaient en état d'arrestation, cela a renforcé leur confiance et elles ont commencé à parler d'autres techniques et du fait qu'elles faisaient du travail imparti en Colombie-Britannique.
    Nous avons ensuite entrepris une vaste enquête où nous nous sommes rendu compte qu'elles dirigeaient une vaste arnaque très compliquée de chèques frauduleux et qui impliquait ces filles — elles commettaient donc d'autres infractions. Ensuite, une fois qu'elles obtenaient les billets d'avion avec les faux chèques, ces filles étaient envoyées vers la Colombie-Britannique pour participer au commerce du sexe.
    Il s'agit de renforcer la confiance. Il s'agit d'être crédible auprès des victimes et de reconnaître que chaque victime est une personne. Elles veulent être reconnues, elles veulent que le système de justice en tienne compte.
    Il semble très évident que, de nos jours, bon nombre d'activités illégales ont lieu sur Internet. Vous avez parlé du Web entre autres. Par le passé, le gouvernement a essayé de mettre en place le projet de loi C-30 qui proposait d'importants outils. On l'a retiré, à cause de certaines inquiétudes.
    Existe-t-il certains outils qui pourraient être utiles pour contrer ce type d'activités illégales en surveillant Internet, etc.?
    C'est une question à laquelle on ne peut pas répondre dans le temps qui reste, mais je vous la pose quand même comme matière à réflexion.
(1700)
    Je me suis assez exprimé sur les modifications apportées à d'autres projets de loi et je sais que nous nous aventurons dans d'autres domaines ici. Quand on parle de table d'écoute et de modernisation, il y a un chevauchement pour ce qui est de la technologie et de la façon dont les gens commettent des abus sur Internet, se cachent derrière les serveurs d'Internet, se cachent sur Internet par le biais d'outils comme Facebook ou Craiglist. Nous ne sommes pas à jour dans ce domaine.
    Même si la police a été capable d'intervenir en passant par d'autres systèmes et d'autres moyens, nous sommes en retard par rapport à la technologie, et cela pose certainement des problèmes, monsieur.
    Merci.
    Merci pour ces réponses.
    Nous allons maintenant entendre M. Bélanger, du Parti libéral. Allez-y, s'il vous plaît.
    Monsieur Perrier, vous avez cité un chiffre. Je veux simplement m'assurer d'avoir bien entendu. Vous avez dit 666. Est-ce bien le chiffre que vous avez utilisé?
    J'ai cité 6 600, mais le chiffre exact était 6 647 rapports.
    D'accord, le chiffre 666 a d'autres connotations. Lorsque je l'ai entendu, je me suis posé la question. Merci pour cet éclaircissement.
    Vous avez également dit que les initiatives que vous avez entreprises vous ont permis de multiplier par 10 le nombre de pistes. Où cela vous a-t-il mené?
    Un certain nombre de suspects ont été identifiés et les gens ont été arrêtés pour crimes sexuels; sinon, ils auraient échappé à la justice, et ces choses ne se seraient pas produites.
    Nous avons beaucoup de systèmes en place et au cours des deux dernières années, comme je l'ai mentionné, nous avons examiné de très près la façon dont nous fonctionnons dans ce domaine. Jusqu'ici, j'admets que nous avons été très segmentés. Mon service n'est pas différent des autres. Nous sommes très segmentés dans notre approche envers différents types d'infractions. Nous disons: « Ça, c'est l'unité des stupéfiants et elle s'occupe uniquement des infractions de drogues ». Et s'il s'agit de l'escouade de la moralité, elle est uniquement responsable de ce genre de crime. C'est pour cela que lorsque j'ai parlé de réalignement, cela avait peut-être l'air frivole, mais c'est très important, car il s'agit d'unir différents experts de différents domaines pour qu'ils puissent se rendre compte des différents types de chevauchements dans leurs activités. Cela permet d'obtenir un modèle plus efficace et de mieux servir les citoyens.
    Les mesures dont je vous parle sont extrêmement importantes.
    Est-ce que vous incluez dans ces programmes la désintoxication? C'est un domaine auquel je participe ici, à l'échelle locale, et il s'agit d'un programme dont nous avions désespérément besoin. Nous n'en avions pas. Nous commençons désormais à l'offrir dans la capitale nationale, et je crois que cela commence à avoir des effets. S'agit-il de quelque chose que vous incluez dans votre...
    En particulier pour les victimes d'exploitation ou pour notre programme des prostituées contrevenantes, nous avons en fait la possibilité d'accélérer leur admission au système pour leur venir en aide.
    S'agit-il du programme de désintoxication offert par les tribunaux?
    Non, il s'agit de programmes offerts par des organismes privés. Ils sont parrainés par des organismes non gouvernementaux. Il faut constamment que la police investisse dans cette relation, car elle est très puissante, et ses organismes ont beaucoup de capacité que la police ou les systèmes gouvernementaux n'ont pas. Ainsi, nous travaillons vraiment en collaboration avec cette collectivité et nous tirons parti de ces mesures pour aider les gens et utiliser les services que nous n'utiliserions pas normalement.

[Français]

    Sergent-détective Monchamp, je veux revenir à la question posée par M. Goguen.
    Il mentionnait une situation où l'on se servait de la présomption pour accuser quelqu'un d'avoir agi comme proxénète auprès de cinq autres victimes. À partir du témoignage d'une victime, on peut donc accuser l'individu d'avoir agi auprès de cinq autres victimes.
    M. Goguen semblait faire part d'une préoccupation selon laquelle si tel était effectivement le cas, non seulement l'accusé pourrait intimider les autres victimes pour les inciter à ne pas témoigner, mais il pourrait également les amener à témoigner en sa faveur et à se prononcer contre les accusations pesant contre lui, et ce, en se servant de toutes les techniques possibles.
    Vous avez parlé de gestes pour terroriser les victimes. Il pourrait donc terroriser la famille, les gens de son entourage et ainsi de suite.
    Y a-t-il une préoccupation à cet égard? S'agit-il là d'une des conséquences de l'utilisation de la présomption?
    Je ne crois pas que ce soit un effet direct de la présomption. À mon avis, c'est un effet direct du contrôle que ces individus ont sur ces victimes. On le vit déjà quotidiennement dans les dossiers. Ce genre d'événements ou de situations survient régulièrement.
    Je vais reprendre la question.
    Quelles mesures sont présentement en place pour prévenir cela?
    Ce sont des enquêtes extrêmement complexes qui ne reposent pas uniquement sur le témoignage des victimes. C'est la base. Ce qui est le plus important, c'est le témoignage de ces victimes.
    Cependant, il faut comprendre que ce sont des victimes aux prises avec de graves chocs post-traumatiques, avec des peurs et des craintes. Ces victimes peuvent être atteintes du syndrome de Stockholm ou de dissociation. Il faut donc s'associer avec les groupes communautaires et avec beaucoup de gens qui vont appuyer ces victimes.
(1705)
    Il s'agit ici de les encadrer complètement.
    Exactement. C'est une partie de l'approche.
    À cause de cela, ce sont des enquêtes de corroboration. On ne laisse pas une victime seule à un contre un. Ce n'est pas sa parole contre la nôtre. Notre travail consiste à appuyer ce témoignage en allant sur le terrain afin de corroborer méticuleusement chacun des faits de sa déclaration. De cette façon, si la victime revient sur son témoignage, le juge sera en mesure d'apprécier la preuve accumulée dans le cadre du premier témoignage, ce qui a été changé devant la cour et prendre sa décision en fonction des faits.
    Donc, selon vous, la présomption est un élément positif. Est-ce exact?
    Tout à fait. Nous en faisons l'expérience et, de toute façon, c'est un phénomène qui est prouvé depuis plusieurs années dans les cas de proxénétisme.

[Traduction]

    Merci à vous deux.

[Français]

    Votre présence est appréciée.

[Traduction]

    Merci, monsieur, pour ces réponses.
    C'est maintenant le tour de M. Seeback, du Parti conservateur.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais parler un petit peu de la partie du projet de loi qui porte sur les peines consécutives.
    Je sais, Dominic, que vous avez dit que si une personne s'adonne à la traite ou à l'exploitation de cinq personnes, elle risque uniquement de purger une peine de cinq ans, car elle pourra purger tous ces chefs d'accusation en même temps, ce qui est le cas avec un bon nombre de peines prévues par le Code criminel.
    D'après votre expérience, si une personne commet ces infractions contre cinq ou six femmes, pensez-vous qu'un juge, au lieu d'imposer une peine de cinq ans, va désormais rendre ces peines consécutives, à la suite des changements que nous apporterons, ce qui équivaudra à 25 ans, ou bien va-t-il se dire qu'étant donné que la jurisprudence est de cinq ans, la peine sera un équivalent d'un an par personne?
    D'après mon expérience, les juges ont du mal à sortir de la fourchette bien établie des peines.

[Français]

    J'espère que non.
    Pour moi, c'est impossible. Je ne peux pas concevoir qu'on impose une sentence d'un an pour éviter cette situation. Je serais extrêmement déçu si c'était le cas. Quoi qu'il en soit, je ne peux pas me prononcer sur cet aspect.
    Par contre, cela va certainement avoir un effet dissuasif. Présentement, pour les gangs de rue, le risque de se faire prendre est vraiment minimal dans le cas de la traite des personnes comparativement à ce qu'il est pour le trafic de stupéfiants. Si une personne se fait arrêter en possession d'un kilo de cocaïne, cette simple possession est illégale. Or, la possession d'une personne n'est pas illégale à l'heure actuelle. Ces gens ont toujours la possibilité de manipuler et de menacer leurs victimes. Ils ont toujours une porte de sortie.
     Je crois que ce message va rétablir l'équilibre. Le fait que des peines consécutives soient imposées va en effet rétablir l'équilibre. Ces individus vont réfléchir avant de passer à l'acte. Ils ne verront plus ce crime comme étant avantageux. C'est la façon dont ils le considèrent présentement.

[Traduction]

    Pour être honnête, avec ce type d'infraction, il est très difficile de prouver les choses en premier lieu.
    En ce qui concerne le trafic de stupéfiants, on peut établir un réseau. On peut arrêter une personne en possession d'un kilogramme de cocaïne et on peut dire qu'elle en faisait la distribution, auquel cas elle écoperait d'une peine de 15 ans. Cela n'est pas rare lorsqu'on commence à traiter avec le crime organisé et les organisations qui participent à des activités criminelles de manière organisée.
    Pouvoir monter un dossier quand il y a plusieurs victimes demeure très difficile. Même avec la présomption, cela va toujours être très difficile. On reconnaît que ces personnes sont des victimes et que les crimes perpétrés à leur égard sont importants.
    Je suis d'accord.
    Je préférerais que ce soit 25 ans plutôt que 5, je tiens à le préciser très clairement.
    Je m'étais dit qu'avec votre expérience notamment en matière d'établissement de la peine, vous risquez de savoir si ces peines consécutives allaient être la solution pour rendre ces crimes plus graves. Ou bien, pensez-vous que la solution serait un autre outil dont nous nous sommes servis plusieurs fois dans des projets de loi, à savoir les peines minimales obligatoires.
    D'après mon expérience avec les cas de crime organisé, très souvent, les juges fournissent une très longue explication sur la façon dont la peine a été compilée. Au bout du compte, je crois qu'ils imposent des peines justes, qui tiennent compte de tous les faits. Je crois que cette mesure législative leur fournit tout de même cette marge de manoeuvre et leur permet de tenir compte des victimes.
(1710)

[Français]

    Je ne vous donnerai pas de réponse personnelle, mais je vais vous parler de notre expérience en matière de peines minimales. Même si des peines minimales sont imposées, il est toujours possible de les éviter. Si ce n'est pas par l'entremise du juge, c'est au moyen de négociations ou d'une réduction des chefs d'accusation.
    Bref, c'est en effet une possibilité. Peu importe la solution, il va être intéressant de voir comment vous allez faire en sorte qu'on ne se retrouve pas dans cette situation.

[Traduction]

    Il vous reste une minute.
    Excellent.
    En ce qui a trait aux infractions liées aux drogues, des agents de police ont comparu devant le comité pour dire qu'il s'agit en quelque sorte des suspects habituels. Ils tombent sur les mêmes personnes, chaque fois, pour ce qui est de ces infractions. Trouvez-vous que ce soit également le cas avec ces infractions?
    Certainement, il y a des personnes que l'on retrouve de manière prédominante et qui sont sur notre écran radar.
    À Winnipeg, nous avons une très grande population migrante. Il y a beaucoup de gens qui traversent la ville. À l'heure actuelle, Winnipeg accueille beaucoup d'immigrants. C'est donc une situation très dynamique. Il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas. Nous entendons parler de certains incidents de manière périphérique, surtout de la part de nouveaux Canadiens, en ce qui concerne l'exploitation, le mariage forcé, les services sexuels pour de l'argent et la participation à d'autres infractions. Il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas là-dessus. Il y a certainement des personnes à propos desquelles nous connaissons beaucoup de renseignements. Nous connaissons beaucoup de choses à leur sujet, car bien des fois, ces gens ont fait l'objet d'une enquête pour crime organisé.
    Auparavant, la traite de personnes, pour être honnête, n'était pas la priorité absolue du service de police, mais elle l'est certainement devenue. Nous reconnaissons qu'elle doit faire partie de nos priorités et qu'elle se trouve au coeur de notre mission. Il s'agit de personnes et de leurs vies. On peut conquérir une dépendance, mais on ne peut probablement pas se remettre d'un viol.
    Merci beaucoup.
    Merci pour les questions. Merci pour les réponses.
    Notre prochaine intervenante est Mme Morin, du Nouveau Parti démocratique.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Puisque je n'ai pas pu poser de question au premier tour, je tiens tout d'abord à dire que je trouve ce projet de loi très intéressant. C'est important d'en parler, parce que trop peu de gens au Canada savent réellement ce qu'est la traite des personnes. Il faut en parler parce que cela se passe chez nous. Je trouve toutefois un peu dommage qu'on aborde seulement la question de l'exploitation sexuelle parce que la traite des personnes est un sujet beaucoup plus large.
    Je travaille beaucoup avec l'organisme PINAY, de Montréal, qui lutte justement contre la traite des aides familiales. À cet égard, je trouve qu'on oublie un peu de mentionner cet aspect de la traite des personnes.
    Monsieur Monchamp, sachant que votre domaine d'expertise est plutôt l'exploitation sexuelle, mes questions porteront sur cet enjeu.
    J'ai participé au congrès du CATHII, il y a deux ou trois semaines, et j'ai assisté à votre conférence. Depuis, une image m'est restée en tête. Je vais donc répéter ce que vous avez dit, à savoir qu'à Montréal, on se commande une femme comme on commande de la pizza. On peut choisir son poids, ses mensurations, son âge, la couleur de ses cheveux et la couleur de ses yeux. Cela m'a énormément marquée. De plus, ce qui est très malheureux, c'est que vous avez raison.
    À la lecture du projet de loi, je comprends mieux les outils qu'il vous apportera, comme le renversement du fardeau de la preuve ou les peines consécutives. Cela dit, je me demande à quel point cela empêchera le phénomène de la traite des personnes. Assurément, cela dissuadera certaines personnes. Toutefois, comme vous l'avez dit, il y a tellement peu de femmes qui sont prêtes à témoigner. De plus, même celles qui témoignent reviennent parfois sur leur témoignage.
    Puisqu'on aborde cet aspect, je vais profiter de l'occasion pour vous questionner à ce sujet.
    Y a-t-il d'autres outils qu'on aurait pu mettre à votre disposition pour vous aider à mieux trouver les victimes et à mieux les faire témoigner? Je m'adresse aussi à vous, monsieur Perrier.
    D'autres amendements au projet de loi pourraient-ils être faits afin de vous aider dans vos enquêtes?
    Tout d'abord, j'aimerais souligner que le projet de loi est utile parce que, comme je vous l'ai dit, la première préoccupation des victimes est leur sécurité. En effet, dans la grande majorité des cas, lorsque les victimes témoignent cinq, six ou quinze fois devant la cour et que cela se termine par un verdict de cinq ans de pénitencier — ce qui est une peine sévère, soit dit en passant, pour la traite des personnes —, si on leur demande si elles répéteraient l'expérience, leur réponse est non. Elles ne répéteraient pas l'expérience. Cela illustre le fait qu'il faut un appui relativement aux tribunaux. Le premier appui des victimes doit être devant les tribunaux.
    Par la suite, je ne sais pas si cette question se traite par une loi, mais pour soutenir ces victimes, il faut de la sensibilisation. À cet égard, on a connu beaucoup de succès. Mon confrère a parlé de ce qu'ils ont mis en place. Ces initiatives font en sorte qu'on peut aller vers les victimes en sensibilisant nos policiers, les intervenants et notre population. Il y a un besoin criant d'un plan national qui pourrait s'apparenter à ce qu'on a vécu, au Québec, en ce qui a trait à la violence conjugale, par exemple.
    Il y a 50 ans, quand il y avait de la violence conjugale, les policiers n'intervenaient pas. On ne considérait pas que c'était un crime, mais que c'était un conflit privé et on ne s'immisçait pas dans les conflits privés. Aujourd'hui, une femme est violentée sur la rue et 25 personnes vont composer le 911 parce qu'ils trouvent que c'est inacceptable. Cette évolution n'est pas venue toute seule. Elle est venue à la suite de campagnes parce qu'il y a eu une éducation des policiers et, surtout, de la population en général.
    Pour l'alcool au volant, c'est la même chose. Auparavant, quand on se croisait sur la route au volant, on pouvait faire un cheers et c'était parfaitement accepté. Aujourd'hui, je vous mets au défi de faire cela, car des gens vont composer le 911 ou vous vous ferez arrêter par des citoyens.
    On a donc besoin de sensibiliser les gens en ce qui a trait à la traite des personnes. Il n'est pas normal que cela se déroule encore à Montréal.
    Il faut s'occuper de l'éducation de nos enfants. C'est ce qui va nous permettre de rejoindre ces victimes. C'est ainsi qu'elles vont savoir qu'on est là pour elles et non pour les arrêter. Présentement, elles pensent qu'elles commettent un crime.
(1715)

[Traduction]

    J'aborderais les autres points que Dominic n'a pas couverts. Je voudrais parler d'asservissement domestique et de travail forcé.
    C'est intéressant quand nous organisons ces campagnes publiques; les gens viennent nous voir et nous disent « Je connais quelqu'un qui a été victime de tel ou tel incident ». Il y a toujours quelqu'un qui se manifeste ou parfois il s'agit de deux, trois ou quatre individus à la fois et ils mentionnent des situations d'asservissement domestique. Les victimes ne sont pas au courant. Elles pensent qu'elles sont simplement prises au piège et qu'il s'agit d'un arrangement civil et que c'est acceptable. C'est comme si on leur ouvrait la porte, et des parallèles avec la violence domestique deviennent très clairs lorsque nous en parlons. Je suis assez sûr que cette question reviendra et que ce sera quelque chose que nous devrons régler régulièrement.
    Lorsque nous parlons de travail forcé, j'ai été personnellement impliqué dans un dossier concernant 10 ressortissants chinois qui ont été introduits illégalement au Canada pour cultiver la marijuana. Ils étaient coincés dans une ferme au Manitoba et étaient forcés à cultiver, récolter, emballer... Nous avons saisi plus de six tonnes de marijuana et nous savons qu'ils y travaillaient depuis plus de deux ans. Il s'agit là de travail forcé. C'est de l'esclavage.
    Au départ, lorsque nous avons examiné cette enquête, elle ne figurait même pas sur notre écran radar, car elle remontait trop loin. Mais maintenant, lorsque nous parlons de cet incident, nous nous disons que nous aurions probablement changé l'angle de cette enquête, depuis le trafic de marijuana jusqu'à une enquête sur l'esclavage. Cela montre donc qu'on peut réaliser des progrès quand on commence à parler de ces choses et à tenir ces conversations difficiles.
    Merci, inspecteur.
    Nous passons maintenant à M. Calkins, du Parti conservateur.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, Gordon et Dominic, d'être venus ici aujourd'hui pour témoigner et de nous faire bénéficier de votre expérience, de vos idées et de votre sagesse dans ce dossier.
    Ma première question découle d'enjeux dans ma circonscription. Je représente les quatre bandes à Hobbema. Elles font les manchettes parfois pour toutes les mauvaises raisons, à cause de problèmes avec les gangs et certains meurtres non résolus. Une grosse partie du problème tient au fait que tout le monde là-bas connaît le coupable, mais personne n'est prêt à témoigner par peur de représailles ou d'intimidation et à cause du fonctionnement actuel du système pénal.
    Nous avons apporté certains changements au chapitre du renversement du fardeau de la preuve pour les libérations sous caution, entre autres, mais j'imagine que je vous pose une question à vous précisément. Si vous savez que quelque chose a eu lieu, mais que personne ne veut témoigner, pourriez-vous nous donner des exemples concrets ou peut-être des recommandations et nous dire comment nous pouvons renforcer davantage le projet de loi dont nous sommes saisis ou d'autres lois ou parties du Code criminel pour nous débarrasser de cette intimidation et de cette peur de représailles ou au moins en réduire l'impact, pour que les gens puissent se manifester pour parler?
    À vrai dire, il s'agit d'une grosse question qui contient bien des éléments.
    Je crois qu'un grand nombre des choses dont nous avons parlé au sujet de la sensibilisation s'applique à certains éléments ici. Mais j'aimerais vous raconter une histoire qui combine vraiment tout ce que vous avez mentionné ici.
    À Winnipeg, nous avons une communauté des Premières Nations très large et dynamique. Il y a une jeune fille que j'ai connue quand j'étais responsable de notre escouade de la moralité qui était venue à Winnipeg pour échapper à certaines des choses que vous avez mentionnées — la violence au sein de sa famille, l'alcoolisme. Elle était venue à Winnipeg et s'était installée dans un centre de transition. Elle n'était jamais venue en ville, ayant toujours vécu dans une réserve; elle n'avait jamais même pris de vacances pour venir en ville. Elle était adulte, mais était néanmoins très naïve.
    Une autre femme, qui avait également été victime et forcée à se prostituer, l'a recrutée directement dans ce centre et lui a dit: « Écoute, moi aussi, je suis Autochtone. Je suis ton amie. Joins-toi à nous. Joins-toi à notre famille ». Elle lui a acheté des choses comme des chaussures — pas de choses extravagantes, mais des vêtements, les nécessités de la vie, de la nourriture. Très rapidement, elle s'est retrouvée dehors, dans une voiture, et cette fille lui a dit: « Cela n'est pas gratuit. Il va falloir que tu ailles faire des passes et avoir des relations sexuelles avec des hommes pour de l'argent ». La fille a décidé de rentrer dans la réserve, car c'était mieux que l'indignité de faire des passes.
    Ainsi, la sensibilisation est vraiment très importante; il faut un véritable changement concernant les nécessités de base. C'est ce dont il s'agit vraiment, à savoir la nourriture, un toit sur sa tête et la sécurité.
(1720)

[Français]

    Je vais aborder un autre aspect.
     C'est effectivement une réalité à laquelle nous faisons face. Il y a beaucoup de dossiers où l'intimidation est en cause, même en cours de procès. Nous vivons cela présentement dans le cadre d'un procès. Il y a de l'intimidation des témoins, des menaces et des tentatives d'achat de témoignages. Ce genre de crimes devrait être puni sévèrement. Ce n'est pas le cas présentement. C'est le premier point que je voulais souligner.
    Le deuxième point est que le système de justice n'est aucunement centré sur la victime. Malheureusement ou heureusement, ce n'est pas ici que se décide l'administration de la justice, c'est à l'échelle provinciale. Une foule d'aspects devraient être améliorés en ce sens, notamment les délais à la cour. Une cause qui dure pendant trois ans, c'est impossible. Il est inhumain de maintenir cette épée de Damoclès au-dessus de la tête d'une victime.
    Il y a aussi le fait que les témoignages sont morcelés, c'est-à-dire qu'ils ne se font pas de façon continue. C'est fréquent, à cause de l'encombrement des tribunaux. Une victime témoigne pendant deux jours et doit revenir trois mois plus tard pour témoigner pendant deux autres jours, puis deux semaines plus tard et ainsi de suite. C'est inhumain, d'autant plus qu'elle a déjà subi une enquête préliminaire. Or tout le monde est au courant de la façon dont cela se passe, y compris les victimes, et elles n'ont pas envie de subir ça.
     Il faut faire en sorte que notre système de justice soit davantage axé sur les victimes. Ce n'est pas le cas présentement. Or, c'est le nerf de la guerre.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Notre dernier intervenant pour aujourd'hui est M. Mai, du Nouveau Parti démocratique.

[Français]

    Merci beaucoup, messieurs, de vos témoignages.
    Comme l'a dit Mme Boivin, cela nous permet vraiment de mieux comprendre ce qui se passe sur le terrain.
    Monsieur Monchamp, cela m'a permis pour ma part de mieux comprendre ce qui se passait en termes de justice, mais surtout de prendre connaissance des outils dont vous avez besoin. Je ne sais pas si c'est l'endroit approprié pour poser cette question, mais je suis vraiment heureux que vous soyez ici.
    Dans mon comté, Brossard—La Prairie, il y a le Quartier DIX30, dont on entend de plus en plus parler. Une avocate de la Couronne nous a dit à ce sujet que les policiers de plusieurs communautés pouvaient auparavant se rencontrer pour mettre sur pied des dossiers à long terme sur les gangs de rue, mais que des réductions avaient été appliquées à un programme fédéral.
    Avez-vous entendu parler de ces réductions? Avez-vous noté un impact, par exemple en ce qui concerne les programmes fédéraux? J'aimerais mieux comprendre ce qui se passe sur le terrain.
    D'après ce que j'ai compris, l’Escouade régionale mixte (ERM) gangs de rue est présentement démantelée. C'est, à ma connaissance, un programme provincial.
(1725)
    Pouvez-vous nous expliquer brièvement ce qu'est le programme en soi?
    Je ne connais pas beaucoup ce programme, mais selon ce que j'en sais, il s'agit du regroupement de plusieurs corps de police de différentes régions pour enquêter. Dans votre cas, il s'agirait des corps de police de Montréal et de Longueuil et de ceux environnants. Ces derniers enquêtaient sur les membres de gangs de rue. Cette façon de faire est extrêmement efficace, parce qu'elle met en commun les connaissances et les expertises de chaque corps de police.
    Il faut dire que ces individus ne se limitent pas à des frontières. Seuls les corps de police se fixent des frontières; eux, ils ne s'en fixent pas. L'utilité de ces équipes tient au fait qu'elles peuvent être transfrontalières, se déplacer et suivre cette criminalité sur un plus large territoire.
    Or, je dois dire que cette collaboration existe de façon plus informelle entre les corps de police. Notamment dans les cas de traite des personnes, nous n'avons pas le choix, puisque c'est partout au Canada. Je peux vous dire que nous avons d'excellentes relations avec tous les autres corps de police pour ces enquêtes.
    D'accord.
    Ce que je comprends du programme, c'est que son financement, qui provenait du fédéral, a été aboli, ce qui explique le démantèlement de ces équipes.
    Je ne sais pas d'où venait le financement.
    D'accord.
    Mme Morin a posé une question sur la possibilité d'avoir des outils pour faire témoigner les personnes. Vous avez effectivement mentionné que de faire témoigner les personnes posait beaucoup de problèmes. Considérez-vous l'option de la vidéoconférence? En avez-vous discuté?
    Ce sont des outils qui ont été mis en place et qui sont extrêmement utiles. On les utilise de façon régulière. Ce sont toutes des mesures extrêmement importantes pour les victimes.
    Cela peut vous paraître banal, mais les ordonnances de non-publication sont un bon exemple. Pour une victime qui se trouve dans le milieu de la prostitution et qui ne veut pas que sa famille ou ses proches le sachent, il est extrêmement important que son nom ne se retrouve pas dans les journaux. C'est un premier aspect, et c'est automatique. C'est donc extrêmement important.
     Dans certains cas où il y a des éléments plus sensibles, on procédera par huis clos. Le télétémoignage ou la vidéoconférence sont des mesures extrêmement importantes pour des victimes qui sont incapables de faire face à leur prédateur. Dans certains cas vécus, si on n'avait pas eu ces mesures, la victime n'aurait pas pu témoigner. Dans certains cas, il est impossible physiquement ou psychologiquement pour les victimes de témoigner.
    Par contre, ces mesures ne sont pas automatiques. La Couronne doit débattre devant la cour, contre la défense, pour obtenir qu'on procède par vidéoconférence ou télétémoignage.

[Traduction]

    Inspecteur Perrier, vous avez dit que la situation était en train de changer en ce qui concerne la façon dont nous percevons certaines infractions. Vous avez dit qu'avant, nous ciblions davantage la marijuana et qu'aujourd'hui, nous surveillons des dossiers comme l'esclavage.
    Pourriez-vous nous expliquer un peu plus en détail ce qui a changé et pourquoi les forces de l'ordre ou peut-être la population...? Y a-t-il quelque chose que nous puissions faire pour que les choses changent plus rapidement?
    Je sais que nous avons parlé d'information et de choses semblables, mais comment pouvons-nous changer la situation plus rapidement?
    Tout d'abord, il s'agit d'un enjeu national, je tiens à le préciser.
    J'ai parlé de beaucoup de programmes, notamment des programmes de grande envergure qui existent à Winnipeg. Je ne veux pas me vanter, mais je sais que certains de ces programmes existent depuis longtemps dans notre ville. Un de nos agents avait une fille qui s'est impliquée dans la prostitution et qui a fini par en mourir. Cet incident a profondément touché nos agents; c'est ce qui explique la façon dont ces programmes sont organisés et la façon dont ils sont offerts. L'important, c'est non seulement la programmation, mais aussi la façon dont on s'y prend.
    Si on tient à changer les choses à l'échelle nationale, on devra se doter d'un plan national.
    D'accord. C'est tout le temps dont vous disposez. Merci beaucoup.
    Merci, inspecteur, et merci, sergent, d'être venus ici aujourd'hui et de nous avoir fourni d'excellents commentaires sur le projet de loi dont nous sommes saisis.
    J'aimerais emboîter le pas à M. Bélanger et dire que vous êtes d'excellents représentants de votre profession. Nous n'avons pas souvent la chance de remercier nos policiers pour le travail qu'ils font sur le terrain. Je tiens à vous remercier pour l'excellent travail que vous accomplissez; vous représentez non seulement les policiers de vos forces respectives, mais aussi les services policiers en général dans l'ensemble du pays. Merci pour vos efforts et votre engagement au sein de vos collectivités.
    Merci beaucoup de votre présence.
    Mercredi, nous entendrons deux groupes de témoins. Nous recevrons deux témoins pendant la première heure et deux autres pendant la seconde, et nous continuerons d'examiner le projet C-452.
    Sur ce, la séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU