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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 116 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 26 novembre 2018

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Nous accueillons plusieurs témoins, mais un seul est arrivé.
    Je tiens à souhaiter la bienvenue à David Barber et à le remercier de s'être joint à nous aujourd'hui. M. Barber est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en science du système arctique et vice-doyen à la recherche de la Faculté de l'environnement, de la terre et des ressources à l'Université du Manitoba. Nous avons déjà établi qu'il communique avec nous à partir de Winnipeg. M. Barber est aussi le directeur du Centre pour les sciences d'observation de la terre de l'université.
    Monsieur Barber, vous avez de 8 à 10 minutes pour livrer votre témoignage, et je suis sûr que, ensuite, mes collègues ont beaucoup de questions intéressantes et perspicaces à vous poser.
    Pour commencer, je remercie le Comité de m'avoir invité à témoigner aujourd'hui.
    Je suis un vieux routier de l'Arctique, pour ainsi dire. J'ai commencé ma carrière en recherche dans l'Arctique en 1981 et j'en suis donc maintenant à ma quatrième décennie de recherche dans ce domaine. J'ai constaté beaucoup de changements durant cette période, et j'aimerais vous parler, justement, de certains de ces changements.
    Je participe à une diversité de recherches dans l'Arctique. Toutes les activités de recherche sont liées à la glace de mer et à la façon dont les changements climatiques affectent cette glace de mer dans l'Arctique. Je me suis aussi beaucoup intéressé à divers enjeux liés à la souveraineté dans le Nord, et c'est un domaine sur lequel j'ai travaillé. Je travaille en collaboration avec de très importants programmes intégrés dans le Nord. Il y a une étroite collaboration avec les pays de la région circumarctique par l'intermédiaire du Conseil de l'Arctique. Une grande partie de notre travail de recherche se fait à partir de brise-glaces. Nous avons aussi accès à des camps de campagne un peu partout dans l'Arctique.
    Essentiellement, au cours de ma carrière, j'ai vu des changements très importants se produire dans le Nord. Durant ma première décennie de recherche, il n'y avait pas beaucoup de changements constatés dans l'Arctique. Nous pensions, à ce moment-là, que nous serions à même de voir les premiers plus importants signes ou les premières plus importantes données probantes des réchauffements climatiques à l'échelle mondiale dans l'Arctique, mais, au cours des 10 premières années de ma carrière, j'étais sceptique quant à savoir si les changements climatiques se produiraient vraiment dans le Nord et ce que tout ça faisait.
    Au cours des 10 années suivantes de ma carrière, nous avons commencé à avoir des signaux très distincts qui montraient un changement dans l'Arctique, et il y a donc eu beaucoup de changements au cours de ces 10 années. Les 10 années suivantes ont été dramatiques. Je parle ici de la fin des années 1990 jusqu'aux années 2000, et on a constaté à cette époque des changements très rapides tant du point de vue de l'étendue de la glace de mer que de son épaisseur. Puis, au cours de la dernière décennie, la tendance s'est accélérée, et tout ça entraîne beaucoup de changements tant dans l'Arctique qu'à l'extérieur de la région, par l'intermédiaire de processus que nous appelons téléconnexion.
    Beaucoup des changements qui se produisent de nos jours ne se limitent pas à l'Arctique, mais se répandent, si on peut le dire ainsi, dans les latitudes plus méridionales de la planète. Beaucoup de ces changements sont très contre-intuitifs. Au cours des deux ou trois dernières décennies, nous avons fait beaucoup d'expériences dans le cadre desquelles nous avons été surpris par ce qui se passe du côté de la glace de mer de l'Arctique et l'accessibilité de l'océan Arctique aux personnes qui s'intéressent au développement de cette région. Par conséquent, je pense qu'il y a beaucoup de choses à dire au sujet de la souveraineté.
    Je connais aussi le système depuis assez longtemps pour savoir qu'il est très difficile, pour un pays, de gérer une région comme l'Arctique, le plus long littoral de l'Arctique étant la fière propriété du Canada. C'est très difficile de gérer ce genre de changement, non seulement dans l'Arctique, mais aussi, comme je l'ai dit, en raison des téléconnexions, dans les latitudes inférieures de la planète.
    Selon moi, il y a beaucoup de défis et beaucoup de possibilités en ce qui concerne les changements climatiques dans l'Arctique. Les défis sont liés à la façon dont nous tous, en tant que nation, réagissons à ce qui se passe vraiment dans le Nord. Nous avons beaucoup de problèmes avec les brise-glaces. Notre flotte de brise-glaces vieillit. Elle passe beaucoup de temps à l'atelier de réparation de nos jours. Vous pouvez imaginer ce que serait l'expérience de conduire une voiture qui a 40 ans. Nous conduisons des brise-glaces qui ont plus de 40 ans, et ces derniers passent la majorité de leur temps au garage à se faire réparer. C'est un problème constant.
    Les changements climatiques offrent aussi de nombreuses possibilités dans le Nord. Ici, au Manitoba. On vient de vendre la ligne ferroviaire et le port. Il s'agit de l'unique port en eaux profondes relié au réseau ferroviaire que nous avons dans l'Arctique, et je ne parle pas seulement de nous, mais aussi des Américains. Ce port est unique en son genre en Amérique du Nord. La Russie compte quant à elle huit ports reliés par rails et elle les utilise tous pour développer son économie en mettant l'accent sur le Nord.
    Lorsque je parle au grand public, je mentionne souvent le fait que la Russie tire environ 23 % de son PIB de l'Arctique, tandis que nous n'en tirons qu'une fraction de 1 %. C'est la même région arctique qui possède les mêmes minéraux, les mêmes ressources et les mêmes ressources halieutiques, mais nous ne sommes pas organisés quant à la façon d'exploiter tout ça. Nous ne possédons pas l'infrastructure pour soutenir le développement de l'Arctique comme la Russie a réussi à le faire.
    Il y a beaucoup de préoccupations à cet égard et, selon moi, quant à la façon dont il faut aller de l'avant, en tant que nation, pour à la fois relever ces défis et saisir ces possibilités.
    Je suis surtout ici pour répondre à vos questions plutôt que de continuer à faire ma déclaration. Je crois donc que je vais arrêter ma brève introduction ici. Je serai heureux de participer au dialogue et de parler de certains de vos intérêts et de vos préoccupations concernant l'Arctique et les changements climatiques.
(1540)
    Merci beaucoup.
    Je pense que nous allons passer directement aux questions.
    Nous allons commencer par la députée Alleslev, s'il vous plaît.
    Vous avez soulevé des points extrêmement importants, et je me demande si vous pourriez nous en dire un peu plus à ce sujet. Évidemment, il est parfois difficile d'expliquer aux gens ce que j'appellerais les questions « oui, et alors » comme dans « oui, et alors? Pourquoi devrions-nous nous préoccuper de la souveraineté dans l'Arctique? Pourquoi est-ce important pour le Canada? »
    D'après votre expérience, sur quoi devrions-nous nous concentrer en tant que première étape?
    L'idée, c'est que l'Arctique et le Canada sont inséparables, à mon avis. Notre histoire est imprégnée de l'Arctique. Une bonne partie de l'immigration a en fait passé par la baie d'Hudson. York Factory en était une composante importante, ici, dans le Nord du Manitoba. Les liens associés à la traite de la fourrure entre la compagnie du Nord-Ouest et la Compagnie de la Baie d'Hudson font partie de notre riche histoire. Les Autochtones du pays, ceux qui vivent dans les régions nordiques des provinces ainsi que ceux qui vivent dans les territoires ont une longue et riche histoire de vie et de travail dans ces environnements.
    Dans le contexte moderne, il faut aussi penser aux possibilités économiques associées au Nord. Il est très clair pour moi — en tant que personne qui se trouve dans l'Arctique depuis maintenant près de 40 ans —, que cette région est vraiment la prochaine que nous devrons développer. On pense souvent que le Canada a accès à deux océans. Il y a l'Atlantique et le Pacifique qui permettent le développement. Ce développement a été effectué. Il y a aussi eu beaucoup de développement sur notre territoire terrestre. Il n'y en a quasiment pas eu dans le Nord, qu'on parle de développement terrestre ou maritime.
    Ce sont d'importantes possibilités. Il y a beaucoup de possibilités économiques dans le Nord. Nous sortons de l'époque où la société avait des œillères. Nous avons toujours pensé à nos deux côtes, l'Est et l'Ouest, et la bande de territoire au Sud, qui longe la frontière américaine. Il faut penser à l'ensemble de notre pays, et le Nord en constitue une grande partie.
    Je pense qu'il y a tout le côté de l'intendance, et nous devons assurer une bonne gestion du territoire, mais il faut aussi bâtir l'infrastructure nécessaire pour tirer parti de ces nouvelles possibilités découlant du changement climatique.
    À votre avis, si nous n'exerçons pas notre souveraineté là-bas, risquons-nous peut-être de la perdre?
    Je pense que l'adage selon lequel, « si on ne s'en sert pas, on le perd » est très bon. Il est très approprié dans le contexte actuel. Beaucoup de personnes aimeraient prendre le contrôle de l'Arctique canadien. Selon moi, le processus de la CNUDM qui est en cours actuellement — utiliser les Nations unies pour régler certains des désaccords — est une composante très importante du processus. Prenez le point de vue des Américains sur la nature du Passage du Nord-Ouest, soit qu'il devrait s'agir d'une voie navigable internationale. C'est très important pour nous qu'il s'agisse d'une voie navigable nationale si nous voulons maintenir et gérer ce corridor qui passe par nos territoires du Nord.
    Oui, je crois que c'est très important. Nous devons apposer notre marque nationale dans le Nord et nous assurer que nous sommes là et que nous l'utilisons. C'est un élément très important de tout le processus et des procédures des Nations unies en matière de souveraineté.
    Excellent.
    Croyez-vous que nous avons vraiment la possibilité de tirer un pourcentage important de notre PIB — comme la Russie l'a fait — de l'Arctique ou est-ce que notre région arctique est différente de la sienne? Selon vous, notre Arctique offre-t-il le même potentiel de croissance économique?
    L'Arctique est le même. C'est le même Arctique des deux côtés du pôle. Les ressources et la base de ressources sont très similaires dans les deux cas. La différence, c'est que la Russie a à l'œil le Nord et y réalise des activités de développement économique depuis des décennies, ce que nous n'avons pas fait. Nous avons été lents à agir. Nous devons rattraper le retard. Je crois qu'il y a une occasion très importante d'accroître notre PIB grâce aux ressources qui sont associées à l'Arctique et, bien sûr, de financer des corridors de transport qui passent par l'Arctique. Pensez au transport intercontinental et à tout ce qui s'y rattache.
    Oui. Il y a d'énormes possibilités à saisir là-bas. Je crois que, en tant que nation, nous devons porter une attention particulière à cette question et y consacrer des ressources pour rattraper notre retard en matière de développement afin que nous puissions commencer à concurrencer les Russes dans l'Arctique.
(1545)
    À bien des égards, nous ne partons de rien. C'est un peu un projet vertigineux. En tant que parlementaires, nous voulons nous assurer de pouvoir formuler une recommandation au gouvernement et aux citoyens sur la façon d'entreprendre le processus. Si vous pouviez nous prodiguer un conseil, par quoi devons-nous commencer?
    J'oeuvre dans le domaine marin. Mes recherches portent sur les zones maritimes, alors je comprends beaucoup mieux cet environnement que l'environnement terrestre.
    Selon moi, les grands secteurs du côté maritime sont ceux qui concernent le transport et la mise en valeur des ressources marines: les ressources halieutiques, les ressources non renouvelables comme l'exploitation minière, puis l'élément majeur: les transports. L'une des principales choses que nous pouvons faire en tant que pays, c'est de construire une meilleure infrastructure de transport maritime.
    Nous avons été confrontés à de nombreux exemples; lorsque nous traversions l'Arctique dans notre brise-glace de recherche, nous avons rencontré un navire rempli de touristes qui s'était échoué sur un atoll sous-marin qui n'avait pas bien été cartographié. Ces gens étaient coincés là. Cela aurait pu être une grave catastrophe pour les touristes à bord du navire. Cependant, puisque nous sommes passés dans le coin, nous avons pu les sortir de là et tout s'est bien passé. Très souvent, nous faisons cela de façon improvisée plutôt qu'au terme d'une bonne planification.
    Notre Arctique n'est même pas bien cartographié. Nous ne connaissons même pas les bathymétries de nos divers cours d'eau. On est en train d'essayer de créer des corridors de transport pour que nous puissions vraiment comprendre la bathymétrie dans ces régions et connaître la nature de ces écosystèmes. Selon moi, ce sont des investissements utiles pour le pays.
    Je crois aussi que des ports en eaux profondes sont importants. Ce que le gouvernement fédéral fait pour le port d'Iqaluit est très important. Les investissements qui ont été faits pour le port de Churchill sont très importants. Nous devons bâtir cette infrastructure afin que nous puissions tirer parti de l'ouverture de ce troisième océan du pays.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Barber.
    Nous allons maintenant passer au député Sidhu, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Barber de votre témoignage aujourd'hui.
    Comme je peux voir, vous avez fait beaucoup de recherches sur la climatologie arctique et les systèmes marins. Pouvez-vous nous parler de la menace que font peser les changements climatiques sur la culture autochtone dans l'Arctique?
    Bien sûr. Ces gens se trouvent sur la première ligne. La culture autochtone fait un avec l'environnement arctique.
    Lorsque j'ai commencé ma carrière dans le Nord il y a 40 ans, les connaissances traditionnelles des Inuits avec lesquels nous travaillons étaient très précises et tout à fait utilisables, parce qu'elles découlaient de générations de systèmes climatiques stables, et les choses étaient prévisibles. Les aînés ont maintenant beaucoup de difficulté à essayer de comprendre et prédire l'interaction du climat avec les autres composantes de leur système et, par conséquent, ils courent de grands risques.
    Tout simplement pour vous donner une idée de la situation, cet été nous nous sommes rendus dans la baie d'Hudson avec notre brise-glace de recherche. Pour la première fois, nous avons réalisé une étude portant sur ce qui se produit lorsque l'eau douce pénètre dans le bassin de la baie d'Hudson alors que la couverture de glace est toujours là. Durant l'expérience d'une durée de six semaines, nous avons dû répondre à cinq appels de recherche et de sauvetage. Ces appels de recherche et de sauvetage concernaient tous des chasseurs autochtones qui étaient sur le terrain et pour y chasser. Ils ont été pris au dépourvu, parce que les conditions étaient différentes de tout ce qu'ils avaient connu auparavant. Les connaissances traditionnelles qu'ils utilisaient pour s'adapter aux réalités du travail dans ces environnements extrêmes ne fonctionnent tout simplement plus comme avant parce que le climat crée des conditions très inhabituelles à leurs yeux. Cela ne relève pas de ce qu'ils considèrent comme normal.
    Les Inuits doivent s'adapter à ces conditions. Ils peuvent aussi s'appuyer sur le fait qu'ils sont des gens avec de très grandes capacités d'adaptation. Ne serait-ce que pour s'établir dans ces régions au départ, il fallait être très résilient et posséder une grande capacité d'adaptation. Ils s'adaptent, mais pas sans de grandes difficultés, parce que les changements créent des conditions inhabituelles qui...
    À l'avenir, pourront-ils chasser les animaux marins?
(1550)
    C'est une grande question. L'écosystème marin change complètement dans l'Arctique. Lorsque nous constatons que le climat entraîne des changements dans le biote marin, cela signifie que tout change, des plus petits organismes jusqu'aux ours polaires en passant par les phoques et tout le reste.
    Beaucoup d'espèces de l'Atlantique et du Pacifique remplacent les espèces qu'on trouvait historiquement dans l'Arctique. Bien sûr, certaines de ces espèces intéressaient beaucoup les Inuits, parce que ce sont des espèces qu'on peut exploiter à des fins commerciales. Dans certaines situations, les Inuits ont hâte de pouvoir chasser plus d'espèces, des espèces différentes qui peuvent se reproduire plus rapidement. Dans certaines régions, il peut y avoir un avantage, tandis que, dans d'autres, cela entraînera un important déclin. C'est quelque chose qui varie, selon l'endroit où on se trouve et à qui on parle dans l'Arctique.
    Monsieur Barber, le gouvernement du Canada a récemment publié un plan de cogestion avec la Nation Haïda et ma province d'origine, la Colombie-Britannique. Seriez-vous en faveur d'un plan similaire avec les Inuits pour protéger et gérer les eaux arctiques du Canada à l'avenir?
    Il y a déjà beaucoup de cadres de cogestion dans l'Arctique. Il y a déjà beaucoup de conseils de cogestion, où des Autochtones et des représentants des ministères assument des responsabilités de cogestion des espèces récoltables.
    Je pense en particulier au Secrétariat mixte des Inuvialuit dans l'Ouest de l'Arctique. Il y a un groupe de cogestion là-bas qui établit les priorités sur la façon dont auront lieu les pêches. Ils s'entendent sur des niveaux d'exploitation et ont des responsabilités connexes et assurent une cogestion.
    Vous avez parlé des brise-glaces, monsieur Barber.
    J'aimerais en savoir un peu plus à ce sujet. À ma connaissance, nous n'avons pas encore ce qu'on appelle des brise-glaces. Nous en avons deux ou trois en construction, et l'un d'eux sera prêt, on l'espère, en 2019. Ce sera probablement davantage un navire de surveillance.
    Les brise-glaces ne seront pas en mer avant 2021 ou 2022 à ma connaissance. Quel genre de brise-glaces a-t-on actuellement dans ces eaux?
    Nous avons toute une flotte de brise-glaces. Nous en avons environ 12 ou 13. Ce sont tous des brise-glaces de classe 1200. Ils sont tout à fait capables. Nous avons passé maintenant deux hivers dans l'Extrême-Arctique dans nos brise-glaces.
    Le problème, c'est que toute la flotte de brise-glaces, qui est exploitée par la Garde côtière, est très âgée. Ce sont tous des navires qui ont été construits dans les années 1970.
    Le Amundsen, le brise-glace de recherche canadien que nous utilisons, a été construit en 1979, et c'est l'un des plus récents que nous ayons. Je crois que vous parlez probablement du Diefenbaker, dont on a financé la mise au point, mais les délais sont importants. Il ne sera pas prêt en 2019, et il le sera peut-être en 2025 ou 2030, si jamais on le construit. Il y a d'importants problèmes à ce chapitre.
    Le gouvernement fédéral a pris quelques mesures provisoires pour essayer d'obtenir des brise-glaces supplémentaires. Il vient d'acheter trois brise-glaces usagés cette année pour réduire un peu la pression sur la flotte. Cependant, il reste encore très loin... Nous n'avons pas assez de brise-glaces pour assurer la gestion à l'échelle du pays. C'est le problème. Il faut des brise-glaces pour faire le travail.
    En ce qui concerne les frégates qui sont construites pour les militaires, ces frégates ne peuvent pas naviguer dans les glaces comme un brise-glace. Ils ne peuvent même pas naviguer directement dans la glace de mer. Il faut les utiliser en périphérie.
    Les frégates...
    Ce sont les frégates qui sont comme ça, oui.
    Merci beaucoup.
    Nous allons passer au député Blaikie, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur Barber, de votre témoignage.
    Je suis un député qui vient du Manitoba. Vous avez mentionné Churchill dans votre déclaration. L'une des choses qui m'ont intéressé dans le cadre de la présente étude, c'est d'essayer de déterminer la place qu'occupe Churchill dans une stratégie actualisée pour l'Arctique canadien.
    Je me demande si vous avez des réflexions à ce sujet dont vous pourriez nous faire part dans le cadre de notre étude.
    Oui, bien sûr.
    Je crois qu'il y a deux volets à cette question. Premièrement, je crois qu'il est très important que le gouvernement mette au point une stratégie pour l'Arctique et qu'on assure une certaine harmonisation entre les différents ministères fédéraux et qu'on crée des liens avec des organisations comme la mienne qui sont de nature universitaire dans le cadre de ce genre de structure. Actuellement, tout est fait de façon ponctuelle entre les différents intervenants de l'Arctique.
    Pour ce qui est du Manitoba et de sa place dans tout ça, certains d'entre vous seront surpris d'apprendre que le Manitoba possède le seul port en eaux profondes dans l'Arctique en Amérique du Nord, et nous sommes une province maritime. On ne voit pas souvent le Manitoba de la sorte, mais c'est le cas. Mon groupe à l'Université du Manitoba est le plus important groupe de recherche sur l'eau et sur la glace marine du monde. Nous sommes 150 à tous travailler sur ce dossier.
    Nous sommes ici parce que Churchill est l'endroit idéal pour ce genre de recherche. On a ainsi accès à tout l'Arctique. C'est relativement peu dispendieux d'y venir en raison du réseau ferroviaire, et on peut aussi prendre l'avion pour s'y rendre. Nous avons installé la Station canadienne de recherche dans l'Extrême-Arctique (SCREA) dans Cambridge Bay, par exemple. Nous construisons en ce moment une importante installation de recherche à Churchill, l'observatoire marin de Churchill, l'OMC comme on l'appelle.
    Tout ça a été retardé lorsqu'il y a eu le retard lié à la ligne ferroviaire, mais on a envisagé de déplacer le tout à Cambridge Bay quand tout ça se passait et nous avons envisagé la faisabilité de créer une base de recherche marine majeure dans Cambridge Bay plutôt qu'à Churchill. Les coûts sont devenus exorbitants parce qu'il faut constamment transporter le personnel de recherche et les étudiants qui vont à la SCREA en avion.
    L'autre chose qui est bien au sujet de Churchill, c'est qu'on a ainsi un accès peu coûteux à l'Arctique du point de vue du moyen de transport utilisé pour s'y rendre et en revenir.
    Le système marin de l'Arctique est comme le reste de l'Arctique. On est au-dessus de la limite forestière, et tous les processus qui se déroulent là-bas sont vraiment de nature arctique. L'autre chose intéressante, c'est qu'il y a beaucoup d'eau douce qui arrive dans la baie d'Hudson, situation analogue à ce qui se passe dans l'Extrême-Arctique. Lorsqu'on regarde le pôle Nord et le grand océan Arctique, il reçoit aussi beaucoup d'eau douce des continents, tant du côté nord-américain que du côté russe.
    Nous utilisons la baie d'Hudson quasiment comme un modèle représentant ce qui se passe dans l'Extrême-Arctique. On a ainsi un préavis parce que la latitude est un peu plus basse, de sorte que les changements climatiques ont une incidence un peu plus lente et que tout ça nous permet de comprendre de quelle façon les choses fonctionnent là-haut. De mon point de vue, le Manitoba, la baie d'Hudson et Churchill sont cruciaux à notre compréhension de ce qui se passe dans l'Extrême-Arctique et, d'un point de vue circumpolaire, dans l'Arctique. À mes yeux, cet endroit devrait jouer un rôle central dans toute stratégie future pour l'Arctique que nous entreprendrons en tant que pays.
    L'autre avantage, c'est que la région centrale et la région arctique de Pêches et Océans sont maintenant séparées en deux ministères. Il y aura le ministère qui s'intéresse à la zone arctique et l'autre, à la zone centrale. Les bureaux responsables de la région arctique du MPO seront situés à Winnipeg, et c'est donc là une autre bonne raison pour que le Manitoba joue un rôle central dans ce qui se passe à l'échelon fédéral dans l'Arctique.
(1555)
    Je vous remercie beaucoup de vos observations.
    De toute évidence, dans le cadre de la présente étude, il a été beaucoup question de la nécessité d'investir dans les infrastructures en particulier. Toutefois, j'ai constaté que la discussion a été particulièrement fructueuse lorsque nous parlons de besoins précis, par opposition au besoin indispensable général de disposer de nombreuses infrastructures dans l'Arctique.
    En ce qui concerne Churchill, à l'évidence, des investissements ont récemment été réalisés dans la ligne de chemin de fer. Il a fallu beaucoup de temps pour la remettre en place, mais nous y sommes finalement arrivés. Je me demande, au-delà de la simple réparation de la ligne de chemin de fer, quels autres types de projets seraient utiles pour faire de Churchill un lieu de recherche dans l'Arctique ou quels sont d'autres aspects que vous souhaiteriez voir figurer dans une stratégie pour l'Arctique.
    Je pense que j'aimerais en parler selon deux échelles différentes.
    Churchill, c'est bien. C'est en quelque sorte un lien local entre vous et moi, qui sommes tous deux Manitobains, et c'est un élément important du casse-tête de l'Arctique, mais je pense que des investissements dans cette région sont très importants. Je pense que l'un des éléments clés consiste à faire en sorte que cette ligne de chemin de fer et ce port soient pleinement opérationnels.
    La prochaine étape naturelle dans ce domaine est le transport maritime dans ce corridor, qui arrive au port de Churchill et qui en repart. Nous nous attendons à pouvoir nous déplacer toute l'année par cette voie au cours des 20 à 30 prochaines années. Il y aura une période pendant laquelle vous aurez besoin du soutien des brise-glaces. Actuellement, nous utilisons le soutien des brise-glaces sur la voie maritime du Saint-Laurent. C'est ce que notre brise-glace de recherche fait en hiver: il fournit des services de brise-glace pour la navigation commerciale le long de la route de navigation traversant le Saint-Laurent.
    Nous devrions en arriver à un point similaire dans l'Arctique, dans la baie d'Hudson en particulier. Nous devrions avoir le soutien des brise-glaces pour les navires afin de prolonger la saison de navigation à destination et en provenance du port. C'est une question de souveraineté importante, car nous avons alors un navire canadien et nous prolongeons les saisons de navigation canadienne dans l'Arctique.
    Ce soutien offrirait également une composante directe qui répondrait aux besoins de recherche et de sauvetage dans le Nord. À l'heure actuelle, nous subissons beaucoup de mouvements dans le Nord; il y a beaucoup plus d'activités inuites et énormément d'activités de recherche et de sauvetage associées aux peuples autochtones qui y vivent. De même, le tourisme est en train d'exploser dans le Nord. Nous recevons beaucoup de navires d'excursion, qu'il s'agisse de petites goélettes ou de gens qui font des choses folles, comme essayer de se rendre au pôle Nord en moto tout-terrain — toutes sortes de choses bizarres que font les gens. La recherche et le sauvetage deviennent un aspect très important.
    Nous avons toujours du mal à faire de la recherche et du sauvetage, car nous n'avons pas assez de capacités dans le Nord. La Garde côtière, depuis un an et demi environ, met en place des bases locales dans le Nord afin de soutenir et de stimuler les capacités de recherche et de sauvetage, mais nous avons également besoin de navires pour le faire. Afin que nous puissions gérer correctement l'Arctique, nous avons besoin de plus de brise-glaces relevant de la Garde côtière canadienne, ce qui lui permettra d'assurer correctement des services de recherche et de sauvetage en ce qui concerne les gros navires bloqués dans les glaces, par exemple, ou en cas de déversement pétrolier, entre autres.
    Dans une optique maritime, je pense que nous avons besoin de ressources qui sont investies dans de nouveaux brise-glaces, une mesure provisoire pour contrer une partie de ces pressions croissantes et de cette accessibilité accrue. Nous avons besoin de solutions à court et à long terme. Il s'agit d'améliorer la capacité de recherche et de sauvetage, d'enrichir la base des connaissances scientifiques sur ce qui se retrouve à certains emplacements, sur les données de la bathymétrie et sur la façon dont nous pouvons disposer de couloirs de navigation sûrs, puis d'investir dans des plans visant à obtenir un nouveau soutien des brise-glaces dans le pays pour atténuer les pressions exercées sur cette flotte vieillissante que nous avons.
(1600)
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Baylis, s'il vous plaît.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Barber, vous avez parlé de ces 40 années passées dans l'Arctique. Vous avez dit que, pendant les 10 premières années, vous étiez un peu sceptique face aux changements climatiques. Ensuite, vous avez dit qu'au cours des 10 années suivantes, vous avez commencé à percevoir des signes distincts. Puis vous avez dit que, au fil des 10 années qui ont suivi, la situation est devenue dramatique, et que ces 10 dernières années, le phénomène s'est accéléré.
    Vous étiez peut-être sceptique face aux changements climatiques et, en les observant dans le Nord, votre vision du monde à ce sujet a changé. Est-ce exact?
    Oui. C'est très vrai. C'est juste.
    Au cours de mes 10 premières années, les modèles que nous utilisions à l'époque indiquaient que nous devions observer les premiers et les plus forts signes de changements climatiques dans l'Arctique. Cependant, au cours des 10 premières années de notre présence, nous ne les avons pas vus, alors, comme le ferait tout bon scientifique, je suis devenu sceptique. J'ai pensé: « Non, cela ne se produit pas. Nous ne voyons pas ce genre de liens. »
    Puis, au fur et à mesure que je progressais dans ma carrière, je commençais à voir ces choses s'accélérer à un point où la situation est devenue très dramatique. Notre brise-glace de recherche a passé l'hiver dans le sud de la mer de Beaufort, au nord de Tuktoyaktuk, pendant l'Année polaire internationale en 2007, et le navire est demeuré mobile tout l'hiver.
    Je suis allé à la Garde côtière et j'ai dit que nous pouvions le faire en raison des changements climatiques, et les responsables ont pensé que j'étais fou. Ils ont dit: « Il n'en est pas question. Nous allons être coincés dans cette glace et tourner en rond, et les Russes vont devoir intervenir pour nous extirper de leur côté de la mer de Beaufort. »
    J'ai dit que non, nous allions pouvoir rester mobiles tout au long de cette année, et nous l'avons fait. Le navire a pu se déplacer tout au long de l'hiver. Cela n'aurait pas dû être possible. Historiquement, cette glace aurait dû être beaucoup plus solide qu'elle ne l'était, et c'est simplement parce qu'il n'y a pas autant de glace, même en hiver.
    Je comprends cela.
    En tant que scientifique, vous penchiez peut-être d'un côté et vous n'étiez pas sûr au sujet des changements climatiques. Vous avez maintenant constaté les effets dramatiques et vous dites même que la situation s'accélère.
    Si nous allons plus loin au sud, les gens commencent à peine à constater les effets sur les climats du Sud, comme les incendies de forêt, les inondations, les tornades, là où cela ne devrait pas se produire — ce n'est que le début. Y a-t-il un moyen de transmettre des messages plus forts ou d'aider, d'une manière scientifique, à dramatiser l'accélération des changements dont vous avez été témoin afin que les gens ici puissent emprunter la même voie que celle que vous avez dû suivre? Comprenez-vous?
    Oui, j'entends ce que vous dites. C'est une question que l'on me pose tout le temps. En fait, on veut savoir ce que la science peut faire afin d'aider à éduquer le public sur les changements climatiques et inciter ensuite les gens à porter attention à ces changements. Le problème est que j'ai passé pas mal de temps à le faire, il y a peut-être cinq ou sept ans. Je prononce souvent des conférences au sujet de mes recherches, et je suis en quelque sorte parvenu à une conclusion: si les gens veulent se renseigner, ils le feront. Ils peuvent en apprendre davantage sur ces choses. Vous trouverez ces renseignements partout. Ils sont omniprésents.
    Le problème, c'est que les gens ne veulent pas vraiment le savoir. Ils ne veulent pas entendre parler de ces choses. Ils veulent continuer...
(1605)
    Le problème, c'est qu'un problème n'en est pas un tant qu'il ne constitue pas un problème pour vous, et ce n'est pas encore un problème pour nous ici, mais vous voyez que c'en est un là-haut.
    Laissez-moi vous poser une autre question. En ce qui concerne les Inuits, vous avez dit que les Russes exploitaient... Nous utilisons ce terme. Nous « exploitons » des minéraux, mais nous exploitons également des gens. Je suis simplement curieux. Vous prétendez qu'il reste encore beaucoup à faire pour « exploiter » nos ressources, etc. Les Inuits veulent-ils que nous exploitions le territoire là-haut? Est-ce vraiment l'approche que nous devrions adopter ou devrions-nous peut-être repenser les changements climatiques et, au lieu de dire que cela va arriver, essayer plutôt de les arrêter? L'Inuit moyen serait-il enthousiaste à l'idée que nous exploitions la situation ou s'y opposerait-il?
    La situation dans nos régions arctiques en particulier est unique parce que nous y avons réglé des revendications territoriales et que la plupart de ces ressources appartiennent à des Inuits qui y vivent. Ils en sont donc responsables. L'année dernière, j'ai assisté à l'une des réunions de la CDP en Allemagne — la CDP 21 je pense —, et un participant s'est adressé à moi; il voulait convertir tout l'Arctique en un parc, car il voulait tout préserver et éviter toute exploitation ou tout aménagement. Il m'a demandé si je m'engagerais à soutenir une telle idée. Je lui ai expliqué que, eh bien, les Inuits ont besoin de développer leur économie, ils veulent développer leur économie, utiliser des ressources à cette fin, et ce sont leurs ressources. Qui suis-je pour dire que parce que nous avons fait des changements climatiques un problème dans le Nord, nous voulons transformer tout cela en un parc? De mon point de vue, cela semble un peu égoïste lorsque les Inuits ne sont pas opposés au développement. Ils veulent le développement.
    Le développement économique, par exemple, à l'échelle de la collectivité, se produit partout dans l'Arctique. Tout le monde crée des organisations économiques qui les aideront, des processus qui s'assimilent à des chambres de commerce. Lorsque vous parlez aux dirigeants inuits, ils expliquent comment ils gèrent ces ressources afin de s'assurer de pouvoir créer une économie dont ils pourront ensuite se servir pour réaliser leurs ambitions et leurs objectifs en tant que peuple, sans avoir à dépendre des fonds provenant du Sud. Je pense que c'est un aspect très important du processus de développement. Lorsque je parle de développement dans le Nord, ce développement est l'oeuvre des habitants du Nord pour des habitants du Nord. Il ne s'agit pas de développement facilité par le Sud. Nous devrons le stimuler en aidant avec les infrastructures et en mettant en place certains des partenariats.
    Ce que vous dites, c'est que l'Inuit moyen et le dirigeant inuit moyen seraient prêts à mettre en valeur le territoire d'une certaine manière.
    Oui, absolument. Ils sont très favorables à l'idée. Ils disposent de tous les volets économiques de leurs processus associés aux titres fonciers et à l'accord sur les revendications territoriales. Ils sont donc très intéressés par le développement économique, car ils doivent se tourner vers l'avenir. Comment vont-ils élever leurs enfants? Comment vont-ils avoir une société stable?
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer au député Wrzesnewskyj, s'il vous plaît.
    Je suis simplement curieux, et je veux revenir sur ce que M. Baylis a dit. Reste-t-il des sceptiques face aux changements climatiques dans l'Arctique?
    Je n'en ai jamais rencontré.
    D'accord, merci.
    Lorsque vous parliez des brise-glaces, vous avez dit que la flotte actuelle a 40 ans. Nous commençons à en construire de nouveaux. Si vous prévoyez 30 ou 40 ans, c'est peut-être étirer la durée de vie de ces brise-glaces, mais à partir de ce que vous avez vu, comment anticipez-vous les conditions de la glace dans 20, 30 ou 40 ans?
    C'est une très bonne question.
    C'est quelque chose qui me préoccupe beaucoup, car je pense que la glace est en train de disparaître; nous n'aurons pas une glace aussi épaisse, et il ne sera pas vraiment pénible et difficile de naviguer dans des eaux couvertes de glace. Alors, pourquoi aurons-nous besoin de brise-glaces? En fait, à court terme, au cours des 10 à 20 prochaines années, il y aura toujours des dangers causés par les glaces, et même au-delà, à mesure que la nouvelle glace commence à se former.
    Supposons que nous nous débarrassons de la glace de mer de plusieurs années. Voici un peu de contexte. Lorsque la glace de mer survit à un été et recommence à se former l'année suivante, nous l'appelons glace de mer pluriannuelle. Celle-ci a une épaisseur moyenne de six mètres environ. Elle est très dure, et il est très difficile d'y naviguer avec un navire. Lorsque vous obtenez de la glace annuelle — quand vous retirez cette glace pluriannuelle et que vous n'avez plus que de la glace annuelle cette année-là —, elle n'atteint que deux mètres d'épaisseur au maximum. En hiver, ce type de glace se formera très bien à l'avenir. Au cours des 100 prochaines années environ, ce type de glace se formera.
    Ce qui se passe, et ce qu'il est vraiment essentiel de comprendre, c'est que la glace devient plus mobile. Comme elle est plus mobile et qu'elle se déplace beaucoup, elle entre en collision avec d'autres glaces et forme des crêtes et des remblais de glace qui peuvent être très épais. Nous avons constaté que cela commençait à se produire dans différentes régions de l'Arctique, et il est parfois nécessaire d'avoir un brise-glace afin de pouvoir gérer ce type de glace. À d'autres moments, vous n'aurez pas besoin de brise-glaces.
    Au cours des 30 à 40 prochaines années, vous aurez toujours besoin de brise-glaces à certains moments de l'année, à certains endroits, si vous voulez naviguer sans entrave. Actuellement, les seuls à pouvoir le faire sur la planète sont les Russes. Ils sont les seuls à pouvoir aller où ils veulent dans l'Arctique, quand ils le souhaitent. Nous ne pouvons pas le faire, les Européens ne le peuvent pas non plus, ni les Américains.
(1610)
    Vous avez abordé d'emblée ma question suivante. Je comprends qu'ils ont les coques les plus épaisses, capables de traverser une glace beaucoup plus épaisse que nos brise-glaces ne peuvent le faire. Pensez-vous que nous avons besoin d'au moins un de ces types de navires ou est-ce excessif?
     Non. Nous avons besoin d'un brise-glace de classe polaire approprié et nous essayons de l'obtenir depuis des décennies. Le Diefenbaker en est l'incarnation actuelle. Il a été provisoirement financé et est censé être en construction, mais nous sommes en quelque sorte piégés dans cette situation qui nous oblige à construire nos brise-glaces à l'intérieur de notre propre système canadien. Pour être honnête, cela prend beaucoup de temps, car avec les chantiers navals que nous avons, nous subissons beaucoup de pression afin qu'ils construisent ces choses, et les délais sont de plus en plus longs.
    Je vais vous donner un exemple des aspects pratiques de la situation. Cette année, mon groupe fera le tour du Groenland à bord d'un brise-glace. L'extrémité Nord du Groenland possède une des glaces les plus épaisses et les plus lourdes de la planète, et il est très difficile de contourner l'extrémité Nord du Groenland. Un brise-glace russe à propulsion nucléaire escorte notre brise-glace dans le Nord du Groenland afin que nous puissions surmonter cette situation.
    Il y a environ un mois, on nous a dit que notre brise-glace de recherche, l'Amundsen, ne sera pas disponible pour ce parcours, car il doit passer en cale sèche. Il a plusieurs problèmes. C'est un problème typique avec l'Amundsen. Il tombe essentiellement en morceaux, car il a plus de 40 ans. Au lieu de cela, nous prenons un deuxième brise-glace russe pour cette mission. Nous prenons un brise-glace à propulsion nucléaire russe et un brise-glace électrique russe pour effectuer cette circumnavigation du Groenland.
    Voilà un projet scientifique international en cours dans l'Arctique, et il est entièrement soutenu par des infrastructures russes. C'est un très mauvais signe lorsque nous ne pouvons même pas amener notre infrastructure canadienne à collaborer avec les Russes pour une circumnavigation du Groenland. Notre flotte de brise-glaces n'offre pas de stabilité suffisante pour pouvoir le faire. Je pense que c'est un réel problème pour nous en tant que pays.
    J'aimerais donner la parole à M. Falcon Ouellette.
    Merci beaucoup, monsieur Barber. J'apprécie l'occasion que vous avez de prendre la parole.
    Je vais lancer trois questions auxquelles j'aimerais avoir une réponse.
    D'abord, vous avez parlé de souveraineté et de Churchill. Je me demandais si vous pouviez débattre de l'idée d'avoir une base militaire à temps plein dans l'Arctique, ce qui, à mon avis, serait très important.
    Ensuite, vous avez évoqué l'idée du manque de données dans la cartographie des îles et de la profondeur de certaines eaux dans la région. Qui devrait être chargé d'effectuer la cartographie? Devrait-il s'agir de l'armée canadienne ou de chercheurs? L'ancienne marine britannique le faisait dans les eaux canadiennes. Dans le Saint-Laurent, on avait l'habitude de laisser tomber la petite corde et de mesurer à quelle profondeur elle allait à certains endroits.
    Enfin, vous avez mentionné le tourisme. Quels types de permis devrions-nous exiger des personnes qui se rendent dans l'Arctique afin de contrôler leurs déplacements? Devrions-nous délivrer des permis pour veiller à ce que les gens se rendent là-haut en toute sécurité et de manière à ce que nous puissions surveiller la situation advenant un déversement, par exemple, ou une catastrophe quelconque? Manifestement, cet aspect fait partie de votre recherche également.
    Cela concerne la cartographie de base de l'océan Arctique et l'autorisation ou la surveillance de personnes qui entrent dans l'Arctique et en sortent.
    Monsieur Barber, avant de commencer votre réponse, permettez-moi de tempérer un peu votre enthousiasme. Nous avons environ deux minutes et demie pour votre réponse, car nos autres témoins viennent d'arriver.
    Désolé pour mon collègue. C'est une bonne question.
    Vous pourrez peut-être transmettre l'information par écrit au Comité. Prenez quelques minutes, puis nous devrons passer aux autres témoins.
    Merci, monsieur.
    D'accord. En version abrégée, nous avons certainement besoin d'une base militaire dans le Nord. Celle-ci est en voie d'être mise en place à Resolute Bay. Les stations de l'Étude du plateau continental polaire servent aussi de base d'opérations avancée pour nos Forces canadiennes.
    À l'heure actuelle, on offre beaucoup de programmes et de formation, entre autres, et je pense que cela doit continuer. Nous devons acquérir une plus grande expérience de nos forces armées dans le Nord afin de pouvoir y exercer des activités de manière efficace et efficiente. Nous devons également traiter avec les peuples autochtones dans ce contexte. Ce sont eux qui possèdent l'expertise sur le terrain. Tout le dossier des Rangers et de l'intégration de ces derniers dans notre armée est très important, à mon point de vue.
    Le deuxième point concernait Churchill et le rôle que Churchill pourrait jouer à cet égard. Bien sûr, Churchill était une base militaire. C'est la façon dont la ville a été créée au départ. Il est donc tout à fait possible de rétablir cette base d'opérations avancée. Je pense, plus probablement, que ce serait un bon endroit pour une base maritime, à partir de laquelle la marine peut exercer ses activités depuis la baie d'Hudson et le port en eaux profondes qui s'y trouve.
    Je ne me souviens pas de la troisième question.
(1615)
    C'est la cartographie des mers.
    Oui.
    Actuellement, le Service hydrographique, qui relève du ministère fédéral, en est responsable. Il manque simplement de ressources pour pouvoir cartographier les lieux adéquatement. Nous avons la technologie pour le faire. Les organismes fédéraux ont besoin d'argent pour pouvoir établir une cartographie adéquate. C'est une combinaison de la Garde côtière canadienne et du Service hydrographique. L'infrastructure est en place. Il suffit de disposer des ressources nécessaires pour effectuer la cartographie.
    Merci beaucoup, monsieur Barber. Nous apprécions vraiment votre témoignage ici. Nous vous remercions de nous avoir parlé depuis Winnipeg.
    Merci, monsieur.
    Merci beaucoup et bonne chance dans vos délibérations.
    Je vais maintenant souhaiter promptement la bienvenue à Mme Pezard et à Mme Tingstad de la RAND Corporation.
    Mesdames, pouvez-vous prendre cinq ou six minutes pour nous donner un aperçu rapide? Je sais qu'il y a des questions dans la salle.
    Nous avons jusqu'à 16 h 30. Malheureusement, une délégation est venue témoigner devant nous, et nous devrons donc nous en tenir à cet horaire.
    S'il vous plaît, allez-y.
    Monsieur le président Levitt, ainsi que messieurs et mesdames les membres du Comité, merci beaucoup de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Toutes nos excuses pour le malentendu en ce qui concerne le temps. Nous regrettons que cela soit abordé à toute vapeur.
    Mon exposé portera sur deux changements qui ont modifié la géopolitique de l'Arctique au cours des cinq à dix dernières années. L'un est l'affirmation croissante de la Russie dans la région, et l'autre, la présence grandissante d'États non arctiques, en particulier la Chine, dans une partie du monde qui intéressait presque exclusivement les États arctiques.
    Tout d'abord, je vais me concentrer sur la Russie. Les capacités militaires de la Russie dans l'Arctique ont régulièrement augmenté au cours des 10 dernières années, suscitant diverses préoccupations, notamment le fait que la Russie refuse l'accès à une zone pouvant couvrir une partie de la Norvège ou qu'elle perturbe les voies de communication ou les communications sous-marines dans l'Atlantique Nord. Dans ce contexte, je voudrais soulever trois points.
    Premièrement, les tensions avec la Russie ont tendance à se concentrer davantage sur l'Arctique européen que sur l'Arctique nord-américain. Pour le Canada, les principales sources de tension avec la Russie seront soit une confrontation potentielle avec l'OTAN, soit des questions émergentes relatives au plateau continental étendu, car l'allégation de la Russie risque de faire double emploi avec celle que le Canada devrait soumettre.
    Deuxièmement, la Russie est en train de reconstruire ses capacités militaires sur l'ensemble de son territoire, pas seulement dans l'Arctique, et ces capacités sont toujours inférieures à celles qui existaient pendant la guerre froide.
    Troisièmement, la coopération au niveau opérationnel reste élevée. Dernièrement, les États-Unis et la Russie ont présenté à l'OMI une proposition visant à établir de nouvelles routes de navigation pour une navigation plus sûre dans le détroit de Bering. La Russie est toujours fortement incitée à coopérer dans l'Arctique.
    Cela dit, l'affirmation croissante de la Russie a déjà eu certaines conséquences dans la région. La première est le rapprochement des États arctiques. Par exemple, nous voyons des Marines américains déployés par rotation en Norvège, tandis que la Suède et la Finlande se rapprochent de l'OTAN. Nous observons également le rapprochement prudent de l'OTAN vers l'Arctique grâce à son nouveau concept stratégique et à des exercices.
    Je vais à présent aborder la Chine, qui est également, comme l'OTAN, de plus en plus présente dans l'Arctique. À titre d'exemple, l'année dernière, 11 des 27 navires qui ont emprunté la voie maritime du Nord étaient à destination ou en provenance d'un port chinois.
    La Chine a publié sa première politique sur l'Arctique en janvier, ce qui montre clairement que, selon les responsables, l'Arctique est un problème mondial, qui ne peut être laissé aux seuls États arctiques. La Chine se qualifie d'« État quasi arctique » et voit un potentiel économique et d'investissement dans la région, avec une route de la soie polaire qui serait éventuellement intégrée à son initiative élargie « Une ceinture, une route ».
    Jusqu'à présent, la Chine est restée dans les limites des traités existants qui régissent l'Arctique.
    Les intérêts chinois offrent certes des possibilités aux collectivités arctiques, mais ils suscitent également des inquiétudes quant à savoir si la Chine tenterait d'imposer son interprétation du droit international maritime ou si la présence économique de la Chine pourrait accroître l'influence politique, voire la présence militaire.
    À l'instar d'autres pays arctiques, la Russie fait preuve d'un mélange d'intérêt et de prudence envers la Chine. La Chine est un investisseur clé dans le projet de gaz naturel liquéfié, Yamal LNG, et la Russie espère que la Chine participera à la mise en place des infrastructures le long de la route maritime du Nord. Parallèlement, la Russie tient à garder le contrôle de cette route et se méfie de la puissance militaire chinoise sur la frontière Sud.
    Pour conclure, je voudrais souligner ce que je considère peut-être comme le changement le plus important pour le Canada et les autres États arctiques, à savoir que l'Arctique est en train de passer de région périphérique à région centrale, de devenir un centre économique et un point de passage militaire obligé. Ainsi, le Canada et d'autres États arctiques sont confrontés au défi de trouver un équilibre entre leurs intérêts souverains et la présence toujours croissante d'États non arctiques dans la région.
    Je vous remercie.
(1620)
    Merci.
    Madame Tingstad.
    Merci beaucoup, monsieur le président, distingués membres du Comité. Permettez-moi de m'excuser, également, pour cette confusion sur l'horaire de la séance.
    J'aimerais ajouter certaines réflexions sur les répercussions du climat sur l'avenir des enjeux géopolitiques en Arctique. Dans nos recherches, nous avons trouvé utile d'examiner les effets potentiels des changements climatiques sur les enjeux géopolitiques de l'Arctique en fonction d'autres facteurs qui influencent de deux manières l'activité dans la région.
    Tout d'abord, des forces autres que le climat peuvent également jouer un rôle fondamental, quand il s'agit de favoriser, restreindre ou de modifier l'accès à l'Arctique. Ces forces comprennent les avancées technologiques, comme la capacité à évoluer dans les eaux glacées, l'automatisation des processus et la connexion aux différents réseaux; les conventions juridiques et les règlements; les dispositifs et les opérations militaires; et les normes opérationnelles et culturelles généralement observées, y compris celles relatives à la prise de risque. D'autres forces façonnent l'activité dans l'Arctique, soit en l'encourageant, soit en la décourageant. Mentionnons par exemple les débouchés économiques ainsi que les priorités socioculturelles, comme le soutien aux collectivités autochtones et l'importance symbolique du pôle Nord.
    Bien que les scénarios se révèlent souvent incorrects, nous les avons trouvés utiles dans l'étude des questions centrales qui pourraient ébranler, ou pas, la coopération et la sécurité dans l'Arctique. J'ai inclus dans mon témoignage écrit certains des thèmes que nous avons étudiés.
    Nos recherches n'ont cerné que peu de sujets chauds susceptibles de compromettre la coopération internationale dans l'Arctique dans les années 2020 et 2030, dans un contexte d'augmentation des changements provoqués par le climat. Cependant, il y a quelques inconnues qui pourraient, dans de rares circonstances, mener à des tensions croissantes et entraîner une certaine détérioration des communications entre les nations et les intervenants de l'Arctique, qui n'auraient plus la même vision des choses.
    Il y a trois inconnues: la première, si les voies et les activités maritimes devaient se développer plus rapidement que ce que les pays ont prévu et ce avec quoi ils peuvent composer, compte tenu des infrastructures matérielles, des règlements et des autres fonctions de soutien existants; la deuxième, si le pétrole et le gaz arctiques extracôtiers non exploités deviennent soudainement plus rentables, et que les pays estiment que leurs revendications des fonds marins sont contestées; et la troisième, et dernière, si les nations décident de prendre position sur des questions de sécurité à long terme, en raison d'une perception d'absence de sécurité dans la région, due à une série d'incidents de sûreté maritime qui auraient eu un effet négatif sur la coopération.
    En conclusion, les nations de l'Arctique pourraient davantage avoir besoin de trouver un forum ou des forums où discuter de manière appropriée des questions relatives à la sécurité. Étant donné les changements de l'accès physique, en raison du climat, il serait nécessaire d'envisager la possibilité d'ouvrir de nouveaux dialogues pour le bénéfice mutuel de tous les intervenants.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons écourter notre période de questions, tout simplement parce que les membres du comité des affaires étrangères de la Finlande vont arriver. Allons-y pour quatre minutes, car je veux que chaque parti ait un temps de parole de quatre minutes, si vous êtes d'accord.
    Commençons par le député Aboultaif, s'il vous plaît.
    Je vous remercie tous les deux d'être venus aujourd'hui comparaître devant le Comité. J'ai deux questions. J'espère pouvoir les aborder en deux minutes chacune.
    J'ai sous les yeux un mémoire intitulé The Arctic Lies at the Intersection of Challenge and Opportunity, où il est question des défis et des occasions qu'offre l'Arctique. Dans ce mémoire, vous examinez un certain nombre d'aspects ou de lacunes touchant la capacité des États-Unis d'agir dans l'Arctique. Comment ces lacunes sont-elles mesurées dans le contexte canadien? Est-ce que nous nous en sortons mieux ou plus mal que nos alliés américains?
    Cette question est adressée à Stéphanie ou à Abbie.
(1625)
    Je n'ai pas explicitement examiné quelles répercussions les lacunes des États-Unis pourraient avoir sur le Canada, mais les États-Unis ont des lacunes touchant la connaissance du domaine, les communications et l'accès à la région, mais aussi, en quelque sorte la communication de ces défis. Étant donné que l'Arctique est une région de grande coopération, historiquement, où il y a des besoins en matière de recherche et de sauvetage, entre autres, exigeant une coopération internationale, je crois que des lacunes dans la capacité de fonctionnement de n'importe quelle nation de l'Arctique pourraient affecter toutes les autres nations.
    J'aimerais souligner que les lacunes qui pourraient exister du côté américain ou du côté canadien peuvent être corrigées par la coopération qui existe depuis longtemps entre les deux pays. Cela permet également à chaque pays d'être le plus efficace dans les domaines où il a le plus de capacités. Les deux pays ont également coopéré en matière de connaissance du domaine maritime et d'alerte aérospatiale. Ce sont des atouts communs aux deux pays, et ils doivent continuer à développer ces points forts.
    Dans un autre mémoire que j'ai sous les yeux, intitulé Maintaining an Arctic Cooperation with Russia, vous avez dit que la Russie a renforcé sa présence militaire dans le Grand Nord, mais pas au même degré que lors de la guerre froide. Pourriez-vous nous en dire davantage sur cette présence accrue, s'il vous plaît? De quelle sorte d'augmentation parle-t-on? Est-ce que d'autres États de l'Arctique ont renforcé leur présence militaire dans la région en réaction?
    Nous avons constaté que la Russie a mis en place toute une série de capacités améliorées. Elle a remis à neuf les bases de l'ère soviétique. Elle a aménagé un certain nombre de postes de recherche et de sauvetage tout le long de la route maritime du Nord. Certaines de ces capacités militaires ont évidemment certaines fins civiles. La Russie a créé deux brigades arctiques et a également aujourd'hui un poste de commandement arctique. Elle a déployé un certain nombre de dispositifs de défense aérienne, une fois encore, à divers points le long de la route maritime du Nord. Elle a modernisé les capacités existantes, rétabli certaines capacités et créé de nouvelles structures.
    Oui, d'autres nations de l'Arctique en ont également fait plus dans la région. Par exemple, actuellement, il y a des déploiements de la Norvège, plus proches de ses frontières. Cela n'a pas toujours été le cas. Les États-Unis ont déployé des marines en Norvège, par roulement. Il y a également plus d'activités relatives à la détection de sous-marins. Ce n'est pas seulement la Russie. D'autres États de l'Arctique ont réagi.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons entendre la députée Vandenbeld, s'il vous plaît.
    J'ai été frappée par une des statistiques que vous avez données, selon laquelle 11 navires sur 27 circulent en direction ou en provenance d'un port chinois. J'aimerais en savoir davantage sur le rôle de la Chine en Arctique, car quand nous pensons à l'Arctique, nous pensons aux États de l'Arctique, mais vous avez mentionné quelque chose sur le fait que c'est maintenant un enjeu mondial.
    Dans quelle mesure cela change-t-il la dynamique, en particulier la dynamique à l'égard de la Russie et également à l'égard de l'OTAN?
    Dans une certaine mesure, il ne s'agit pas simplement de la Chine, c'est pourquoi, dans mon exposé, j'ai mis l'accent sur les États qui ne font pas partie de l'Arctique. La grande majorité des observateurs du Conseil de l'Arctique qui ne viennent pas d'un État de l'Arctique, ont élaboré une politique ou une stratégie sur l'Arctique.
    La Chine, bien sûr, est au premier plan en raison de sa seule puissance militaire et économique. La Chine poursuit un certain nombre d'objectifs dans l'Arctique, essentiellement économiques. Nous l'avons vu participer davantage aux côtés de la Russie, simplement parce que la Russie s'est tournée vers elle à cause des sanctions. La Russie cherchait une autre source d'investissement et de financement, ce qui a ouvert quelques portes à la Chine.
    La Chine investit également dans d'autres États de l'Arctique, mais c'est encore à un faible niveau. Par exemple, il y a quelques projets dans le secteur minier, mais il y a beaucoup d'exploration.
    Bien qu'elle reste provisoire, cette vision de la Chine selon laquelle l'Arctique est un bien public est importante, car la Chine considère que les changements climatiques qui ont lieu dans l'Arctique auront des répercussions considérables pour elle. En même temps, même si la Chine parle de l'Arctique comme d'un bien public, elle ne conteste pas les règles générales régissant l'Arctique actuellement, c'est-à-dire la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, la Déclaration d'Ilulissat, ni la perception générale selon laquelle les nations de l'Arctique sont toujours jusqu'ici responsables de la gouvernance.
(1630)
    Madame Tingstad, voulez-vous faire un commentaire là-dessus également?
    J'appuie ce que Mme Pezard a dit, merci.
    Simplement, concernant la souveraineté, nous avons entendu dire dans d'autres témoignages devant ce comité que ce n'est pas parce qu'il y a plus d'activités commerciales qu'il faut y voir une quelconque menace à la souveraineté. En fait, elle peut être renforcée.
    Si nous envisageons les choses sous l'angle de la souveraineté, quelles sont les choses les plus importantes que le Canada peut faire actuellement, que ce soit au sujet de l'économie, de la culture ou des Inuits? Quelles sont les choses que nous devons faire?
    Je peux peut-être commencer à répondre à cette question.
    Dans les scénarios d'avenir que nous avons évalués, un facteur très important a été mis en relief. J'en ai brièvement parlé: la perception de l'absence de sécurité. Si un certain nombre d'incidents liés à la sûreté et à la sécurité maritimes avaient eu lieu à plusieurs reprises, sans aucune intervention adéquate, cela pourrait créer une perception d'absence de sécurité. Je dis maritime simplement parce qu'il s'agit d'un domaine sur lequel la communauté internationale et les intervenants peuvent le plus concrètement se rassembler. La Chine et les autres nations qui veulent peut-être mener des activités dans la région pourraient considérer cela comme une invitation à apporter une sécurité supplémentaire. Selon le point, cela pourrait être tout à fait justifié.
    Tout ce qui a à voir avec la connaissance du domaine est également très important. Je ne peux pas parler du Canada précisément, mais je sais que, pendant nos interactions avec des collectivités locales des États-Unis, des collectivités de l'Alaska et de l'Arctique eurasien... Il arrive que, lorsqu'il se produit un incident, des personnes qu'ils ne connaissent pas interviennent. Ils voient certains changements avoir lieu, par exemple. Il sera important d'avoir une bonne connaissance de ce qui se passe et de faire un suivi, non seulement sur ce que constatent les collectivités locales, mais également des activités que les autres intervenants mènent dans l'Arctique.
    Selon moi, c'est l'une des raisons pour lesquelles il est si important d'avoir un forum ou un débat sur la sécurité, de sorte qu'il n'y ait pas de perceptions erronées qui pourraient mener à des conflits ou à des tensions accrues.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer au député Blaikie, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    Cela a été mentionné pendant les déclarations préliminaires, mais je me demandais si vous pouviez nous en dire davantage sur l'importance d'une potentielle participation croissante de l'OTAN dans la région de l'Arctique. J'essaie de me rappeler qui en a parlé. Nous avons un peu parlé de la question sous l'angle de la Chine. Pourriez-vous nous expliquer comment les autres intervenants pourraient interpréter la participation croissante de l'OTAN dans l'Arctique?
    L'OTAN a augmenté sa participation, mais très lentement. Les membres de l'OTAN savent très bien que l'Arctique n'est pas la région la plus importante pour l'OTAN. L'Arctique devient de plus en plus important à mesure que les membres de l'OTAN réalisent qu'ils ont peut-être perdu les connaissances relatives aux combats dans le froid qu'ils avaient acquises durant la guerre froide. Ils se sont tournés vers un style de combat plus expéditionnaire, et il y a tout simplement certaines capacités à rebâtir.... Franchement, un peu comme le fait la Russie. C'est pour cette raison précise que la Norvège a toujours insisté pour que l'OTAN joue un plus grand rôle, mais les autres membres n'ont pas ce sentiment d'urgence, simplement parce que la menace n'a pas été aussi proche.
    Je dirai que cette participation plus étroite de l'OTAN dans l'Arctique ne concerne pas nécessairement l'Arctique à proprement parler. Cela concerne plutôt l'Atlantique Nord. D'une certaine manière, l'Arctique est perçu comme une voie de passage vers l'Atlantique Nord.
    On s'efforce également à maintenir un bon équilibre entre la dissuasion et le risque de, non pas de provoquer la Russie, mais de créer un sentiment de menace chez les responsables russes. Étant donné que les deux tiers de ses dispositifs de dissuasion stratégiques se trouvent dans la presqu'île de Kola, elle tient beaucoup à protéger l'infrastructure industrielle qu'elle a mise sur pied le long de la route maritime du Nord. La Russie est très sensible à la question de l'Arctique. C'est une région d'une extrême importance pour elle. L'OTAN doit manifester sa présence et sa capacité de venir en aide à la Norvège, en tant que membre, si le besoin se fait sentir, sans inutilement créer un sentiment d'inquiétude chez les Russes. C'est un équilibre fragile.
(1635)
    Ce serait également important pour l'OTAN, pour faire passer son message, pour montrer qu'elle est présente un peu partout et à quoi elle sert.
    Merci.
    Que devrait demander le Canada à l'OTAN? Comment le Canada devrait-il aider et guider l'OTAN pour qu'elle puisse faire cela de la bonne manière? Quelle position devrons-nous prendre pour aider nos alliés de l'OTAN à s'assurer que nous avons les capacités nécessaires dans l'Arctique, si nous devions en arriver là, sans provoquer la Russie, pendant que nous mettons sur pied ou nous rétablissons ces capacités?
    Nous n'avons pas traité directement de cette question dans nos recherches. Franchement, c'est un dialogue qui se poursuit entre le Canada et ses alliés de l'OTAN.
    Actuellement, il y a une augmentation de la fréquence des exercices, surtout les exercices dans le froid, et des déploiements — une fois encore, au moyen d'exercices en Europe et dans l'Arctique —, et cela semble être satisfaisant, jusqu'ici.
    Y a-t-il des besoins supplémentaires ou des demandes à présenter au Canada? Je ne pourrais pas en parler. Cela doit venir des membres de l'OTAN.
    En ce qui concerne les récents événements, comme la capture de navires ukrainiens par les Russes, comment devrions-nous interpréter cela? Est-ce vraiment un résultat du conflit entre la Russie et l'Ukraine ou est-ce que le Canada devrait considérer cela comme une sorte d'attitude agressive adoptée par la Russie, et dont nous devons nous inquiéter?
    Puisqu'il en est question, nous nous posons souvent la question, dans le cadre de cette étude, du risque que représente la Russie. Elle a plus ou moins suivi les règles en vigueur dans l'Arctique, mais elle commence à changer d'attitude et devient plus agressive. Devrions-nous en déduire quelque chose ou pas?
    Selon moi, il y a une grande différence entre un quelconque acte de guerre contre un pays membre de l'OTAN et contre un pays qui n'en est pas membre. En ce qui concerne la Georgie en 2008 ou l'Ukraine en 2014, ces pays n'étaient pas membres de l'OTAN. Si la Russie faisait la même chose à des navires de pays membres de l'OTAN, les conséquences n'auraient aucune commune mesure avec ce qui se passe en ce moment.
    Selon moi, la Russie fait un tout autre calcul des coûts et des avantages, et je n'extrapolerais pas nécessairement pour parler de menace potentielle pour les membres de l'OTAN ou pour l'OTAN dans son ensemble.
    Merci beaucoup.
    Sur ce, je vous remercie tous les deux pour votre temps, même si nous en avons un peu moins que ce que nous avions souhaité. Nous avons couvert un grand nombre de sujets, et je sais que mes collègues apprécient vraiment votre présence ici.
    Nous devrons suspendre la séance et attendre l'arrivée de la délégation finlandaise. Nous devons préparer la salle pour cela.
    Merci.
(1635)

(1640)
    Bonjour à tous. Nous reprenons nos travaux.
    Nous avons l'honneur d'accueillir cet après-midi des membres du comité des affaires étrangères finlandais, des membres du Parlement de la République de Finlande ainsi que l'ambassadeur de Finlande au Canada, M. Vesa Lehtonen. J'ai eu l'occasion de rencontrer ces hommes et ces femmes tout à l'heure.
    C'est un réel plaisir de vous accueillir à notre comité des affaires étrangères.
    Notre étude concerne la souveraineté dans l'Arctique. Je sais qu'il y aura beaucoup de discussions à ce sujet, mais je sais également que nos deux pays collaborent et coopèrent sur un grand nombre de domaines, depuis maintenant 70 ans. Je suis sûr que certains de mes collègues feront des commentaires.
    Je sais que le député Vanhanen, le président de votre comité des affaires étrangères, est souffrant aujourd'hui. Nous lui souhaitons un prompt rétablissement. En son absence, j'ai le plaisir de saluer le député Salolainen, à qui je demanderais de présenter ses observations. Ensuite, nous donnerons la parole aux membres — à tous mes collègues — qui pourront poser leurs questions.
    Encore une fois, officiellement, bienvenue au Canada et dans notre Parlement.
(1645)
    Chers collègues parlementaires, mesdames et messieurs, nous sommes ravis d'être ici. Le Canada est devenu un pays encore plus important pour nous qu'il ne l'était avant, en raison de certains événements qui ont eu lieu en Amérique ces dernières années.
    J'éprouve un sentiment étrange, car ce discours avait été initialement préparé pour M. Vanhanen. J'ai le même sentiment qu'un parlementaire anglais a eu, à Londres, au moment de prononcer un discours devant le Parlement. Il avait de courtes notes écrites. Il les a regardées et a dit: « Eh bien, il y a beaucoup de problèmes importants, je vais tous les régler maintenant dans mon discours. » Il avait aussi une autre note qu'une autre personne, bien sûr, avait rédigée. Il l'a examinée attentivement et a dit: « C'est un argument plutôt faible, mais suffisamment bon pour le Parlement. »
    J'ai plus ou moins le même sentiment, car ces notes ont été initialement préparées pour M. Vanhanen, notre président, qui n'a malheureusement pas pu faire le voyage pour cause de maladie.
    La Finlande et le Canada ont eu un rôle déterminant, dès le début de la coopération dans l'Arctique. La stratégie relative à l'environnement de l'Arctique a été lancée en 1991, à l'initiative de la Finlande, à Rovaniemi, en Finlande; le Conseil de l'Arctique a été fondé cinq ans plus tard à Ottawa, à l'initiative du Canada. Nos deux pays ont été très présents lors de sa création.
    Aujourd'hui, c'est au tour de la Finlande de présider le Conseil de l'Arctique, jusqu'au prochain printemps, et je vais brièvement évaluer l'évolution de la coopération circumpolaire dans l'Arctique, selon notre point de vue.
    Le plus important, c'est que la région de l'Arctique demeure pacifique. Ce qui est évidemment fondamental. Malgré la tendance négative générale des relations interétatiques, le Conseil de l'Arctique a réussi à renforcer la stabilité régionale, et même à étendre les domaines de coopération constructive. Il est remarquable que le Conseil de l'Arctique ait acquis une forte position en produisant des évaluations et des rapports scientifiques et en soumettant des recommandations aux décideurs. Il a négocié trois accords internationaux: sur les activités de recherche et de sauvetage, sur la préparation et les interventions en cas de déversement d'hydrocarbures en mer, et plus récemment, sur la coopération scientifique.
    Aujourd'hui, il y a des organismes spécialisés dans certains domaines, comme le Conseil économique de l'Arctique, le Forum des gardes côtières de l'Arctique et l'Université de l'Arctique. Le fait de coopérer étroitement avec eux permet au Conseil de l'Arctique de participer aux activités relatives à l'économie, la sécurité préventive et l'éducation.
    Il est dans l'intérêt de la Finlande d'aider le Conseil de l'Arctique à jouer un rôle encore plus important dans la coopération régionale. La raison est claire: les problèmes communs exigent des efforts communs de recherche de solutions. C'est pourquoi nous avons choisi le slogan suivant pour notre présidence: « Explorer des solutions communes. »
    La plus importante raison de la coopération dans l'Arctique est la préoccupation environnementale, et il est évident que les questions environnementales et climatiques doivent rester l'objectif principal du Conseil de l'Arctique. Il est évident que tous les États de l'Arctique continuent à avoir d'importantes questions communes à régler dans la région. Dans les évaluations et recommandations, le Conseil de l'Arctique a clairement exprimé la nécessité de coopérer afin d'atténuer les répercussions des changements climatiques, de s'adapter aux nouvelles situations et de renforcer la résilience. Nulle part ailleurs que l'Arctique les changements climatiques ne sont aussi évidents, étant donné que la région se réchauffe deux fois plus vite que les autres. Pensez-y: deux fois plus vite. Un objectif du 1 % a été déclaré. Dans l'Arctique, cela signifie 3 %. C'est dangereux.
    Le récent rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat est peut-être le rappel le plus brutal du besoin de réduire radicalement les émissions de gaz à effet de serre et de commencer à construire un avenir neutre en carbone pour sauver notre planète. À l'échelon parlementaire, la coopération dans l'Arctique prend également de l'ampleur. Nous l'avons constaté quand nous avons célébré le 25e anniversaire de la coopération parlementaire de l'Arctique en septembre, à Inari, en Finlande. Nous sommes ravis que nos amis canadiens des deux chambres aient assisté à cet événement.
(1650)
    À la suite de la 13e Conférence des parlementaires de la région de l'Arctique, les députés de la région ont présenté leurs objectifs communs touchant la lutte contre les changements climatiques, le besoin d'améliorer les connexions numériques dans l'Arctique, le bien-être des collectivités et la responsabilité sociale des entreprises. Ensemble, les parlementaires de la région ont demandé à ce qu'il y ait des investissements en matière de connexions numériques, de sorte que les régions de l'Arctique ne soient laissées pour compte pendant que les régions du Sud progressent. Les députés de la région de l'Arctique ont également demandé aux entreprises de la région d'assumer leur responsabilité sociale et de tenir compte de la nature vulnérable de l'Arctique.
    Mesdames et messieurs, la coopération dans l'Arctique attire l'attention du monde entier, et ce progrès doit être bien accueilli. Le Conseil de l'Arctique a invité un grand nombre d'observateurs, à la fois des États et des organismes. Compte tenu de l'interdépendance accrue de l'Arctique et des autres régions, cet élargissement des horizons est maintenant nécessaire.
    L'une des questions fondamentales, pour le Conseil de l'Arctique, est la participation des pays qui ne font pas partie de l'Arctique, mais qui ont des intérêts dans la région. Le récent document sur la politique de l'Arctique de la République de Chine souligne le type de questions qui devront être réglées lorsque l'Arctique deviendra plus accessible. Ce sont les États de l'Arctique qui devraient faire preuve de leadership et orienter le développement de la région. Il est temps de faire participer les plus hauts décideurs. La Finlande prépare une conférence au sommet qui se tiendra le printemps prochain et qui réunira les huit États de l'Arctique. De plus, les députés de l'Arctique ont soutenu l'idée d'une conférence au sommet à Inari.
    Un tel sommet abordera clairement la question des efforts à déployer pour maintenir la paix et assurer une coopération durable et constructive dans la région. Il nous permettrait également de nous attaquer à certains des problèmes les plus aigus auxquels font face nos pays. La Finlande propose que nos deux pays fassent plus d'efforts pour réduire les émissions de carbone noir et augmenter la sécurité et la sûreté maritimes dans l'Arctique. Je constate avec satisfaction que le Canada partage notre sentiment d'urgence quant à la réduction des émissions de carbone noir.
    Mesdames et messieurs, la Finlande est très heureuse de voir que les Autochtones jouent un rôle important dans le cadre de la coopération dans l'Arctique. Les Lapons, les Inuits et les autres nations devraient continuer à participer pleinement au développement des pays de l'Arctique. Leur contribution et leur intégrité culturelle devront être prises en compte dans la planification de l'avenir de cette région.
    Au Conseil de l'Arctique, ainsi qu'auprès des députés de l'Arctique, le Canada met l'accent sur le besoin d'améliorer le bien-être des collectivités ainsi que les conditions de vie des habitants de l'Arctique. La Finlande est ravie de coopérer avec le Canada et les organismes autochtones dans le cadre de cet important travail. La Finlande a également grandement tiré profit de sa collaboration avec le Canada visant l'amélioration des possibilités d'éducation de tous les habitants de l'Arctique.
    Nous devrons être prêts à nous attaquer à des questions qui ne figurent pas encore au programme de la coopération dans l'Arctique. La Finlande aimerait que le Conseil de l'Arctique cherche comment on pourrait empêcher les feux de forêt, de plus en plus courants dans les régions nordiques, de détruire les collectivités de l'Arctique et de menacer leurs habitants.
    Enfin, mesdames et messieurs, j'ai réellement apprécié le débat animé que nous avons eu avec le Canada sur les questions relatives à l'Arctique, à l'échelle nationale et internationale. Vous avez fait participer tous les intervenants au processus, en commençant bien sûr par les Autochtones, et vous avez abordé toutes les facettes de la question. J'ai hâte de discuter de la souveraineté du Canada dans l'Arctique.
    J'aimerais remercier chaleureusement le Canada pour son soutien à la présidence finlandaise du Conseil de l'Arctique et pour ses précieuses contributions dans tous les domaines prioritaires: la protection de l'environnement, l'amélioration de la connectivité, la participation à l'expertise météorologique et l'amélioration des possibilités touchant une éducation de meilleure qualité.
(1655)
    Après nos discussions d'aujourd'hui, j'aimerais souligner à quel point il a été important pour nous d'avoir pu organiser des consultations et tenir des discussions bilatérales. Ainsi, nous pourrons compléter tous les progrès que nous pourrons réaliser au sein du Conseil de l'Arctique.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
    Comme le veut la procédure du Comité, nous allons passer à des questions de six minutes en donnant la parole aux membres des différents partis.
    Nous allons commencer par la députée Alleslev.
    Merci beaucoup.
    Quel plaisir et quel honneur pour nous que vous ayez fait tout ce voyage pour comparaître en personne devant notre comité, et en particulier pour donner votre point de vue sur un sujet aussi important. Merci beaucoup pour cela.
    Dans ma première série de questions, j'aimerais me concentrer sur l'économie. Pourriez-vous me donner une idée de la place qu'occupent l'Arctique et les questions relatives à l'Arctique dans votre économie et de ce que cela apporte à votre dynamisme économique?
    Je ne peux certainement pas citer de statistiques.
    Par ordre d'importance...
    Si le climat change et qu'il change complètement, par exemple, la nature de la Finlande, cela signifierait que les arbres pousseraient plus vite dans le sud et dans le nord, ce qui augmenterait la production forestière pour nous. C'est une possibilité positive. Cependant, d'un point de vue écologique, cela détruit aussi une grande partie de notre nature originelle. La diversité biologique serait fortement détruite par ce développement. Il m'est très difficile de citer des statistiques.
    Une chose, bien sûr, c'est que si, par exemple, le passage du Nord-Ouest était créé, si les navires pouvaient s'y rendre sans l'aide d'un gros brise-glace, cela favoriserait grandement le commerce entre le Japon, la Chine, l'Extrême-Orient et l'Europe.
    Cela aurait-il un effet positif?
    Nous discutons déjà de la possibilité d'établir des liaisons ferroviaires afin que les navires puissent livrer leurs marchandises pour qu'elles soient transportées par voie ferroviaire, mais ce n'est qu'une discussion en Finlande.
    J'aimerais parler de la souveraineté et de la sécurité. Constatez-vous une menace accrue ou un danger pour la souveraineté et la sécurité de la Finlande? Dans l'affirmative, pourriez-vous nous donner une idée de ce que vous aimeriez que l'on fasse à ce sujet, et du rôle, le cas échéant, que le Conseil de l'Arctique pourrait jouer à cet égard?
    Je pense que le développement de la sécurité doit certainement être le résultat d'autres éléments que cette question de l'Arctique. Cela aura certainement aussi quelques aspects. Par exemple, s'il y a plus de commerce, plus de transports et ainsi de suite, il peut également y avoir des complications. Cela pourrait créer des difficultés au chapitre de la sécurité.
    Honnêtement, directement, je ne vois aucune difficulté majeure à ce sujet, sauf que, si les gens commencent à utiliser les matières premières du fond de la mer, par exemple, ou les ressources halieutiques, qui seront accessibles parce que la glace fondra dans le Nord, davantage de fonds marins seront prêts à être explorés et utilisés. On verrait probablement ce genre de problèmes.
    Sachant que nous sommes tous des parlementaires et qu'il s'agit d'une question diplomatique délicate, votre emplacement physique près de votre voisin... Bien sûr, dans notre Arctique, nous constatons une présence militaire accrue de la Russie et de la Chine. J'aimerais savoir ce que vous pensez de tout changement à cet égard du point de vue de la souveraineté, de la stabilité et de la sécurité.
(1700)
    Ce n'est pas un hasard si nous avons l'une des armées les plus puissantes d'Europe occidentale, si cette réponse suffit.
    Très bien.
    Est-ce que quelqu'un d'autre souhaite intervenir à ce sujet?
    Mes collègues le feront, certainement. Il y a plus de détails à ce sujet.
    Allez-y.
    D'accord, je vous remercie. C'est une bonne question. Nous avons une frontière de 1 300 kilomètres avec la Russie.
    C'est exact.
    Nous sommes une sorte de point névralgique, mais, en même temps, comme notre président vient de le dire, nous avons une des armées les plus fortes d'Europe.
    Il s'agit, cependant, de la sécurité maritime.
    La mer Baltique est une question différente, mais nous ne voyons pas ce genre de menace. Nous essayons d'être plus des bâtisseurs de paix qu'autre chose. Quoi qu'il en soit, je pense que nous sommes dans une assez bonne position.
    En effet.
    Allez-y.
    Je vous remercie. Si nous prenons l'histoire de la Finlande, dans les années 1980, quelqu'un aux États-Unis a demandé à notre ministre des Affaires étrangères ce qui suit: « Est-il difficile d'avoir une si longue frontière avec l'Union soviétique? » Le ministre a répondu ce qui suit: « Nous préférons avoir la frontière que de n'en avoir aucune. »
    Depuis la Deuxième Guerre mondiale, nous entretenons une relation économique et culturelle très étroite, et la confiance entre les pays est de la plus grande importance pour notre sécurité. De notre point de vue, la Finlande est un pays non-membre de l'Alliance, tout comme la Suède, dans la région nordique.
    Non-membre de l'Alliance sur le plan militaire...
    Oui, je crois que nous parlons de l'armée.
    En effet, de l'OTAN.
    Cela signifie que, lorsque la Russie peut faire confiance, qu'elle peut voir que le territoire et le ciel de la Finlande ne sont pas utilisés de façon agressive par aucun des autres États contre elle, c'est notre meilleur moyen d'assurer notre propre sécurité.
    Très bien. Si vous me permettez de conclure cette partie de la conversation, n'avez-vous pas l'impression qu'il y a une pression ou une activité accrue qui en résulte?
    Oui...
    Je voudrais ajouter à cela que les événements de ces deux derniers jours en Ukraine, dans la mer d'Azov, ne nous ont pas rassurés.
    D'accord. Merci beaucoup.
    Votre temps est écoulé. Je vous remercie.
    Nous allons maintenant...
    Juste...
    Oui, bien sûr. Vous pouvez finir.
    Me permettez-vous d'ajouter ceci, parce qu'il s'agit également d'une question hautement politique? Nous représentons des partis différents, donc, évidemment, nous avons aussi des points de vue différents à ce sujet. Bien sûr, nous convenons tous que, lorsqu'il s'agit de la région de l'Arctique et de discuter du Conseil de l'Arctique, nous n'acceptons pas la militarisation de cette région, que ce soit par la Russie ou la Chine.
    Un des cas que nous avons eus est cet exercice militaire dans le cadre duquel nous avons établi un partenariat avec l'OTAN, soit l'exercice Trident Juncture. Nous avons eu un cas de brouillage GPS par la Russie, et nous avons tous affirmé savoir qu'il s'agissait des Russes. Ils ont nié, mais nous savons que c'était eux. Cela venait également de sources norvégiennes; nous avons donc ce genre d'incidents. Je conviens que nous ne voyons aucune menace directe ou de situation de ce genre, mais des incidents de ce type se produisent à l'occasion, et nous devons y faire face.
    Je pourrais peut-être ajouter une chose.
    Une voix: En tant que ministre de la Défense...
    M. Stefan Wallin: Oui... eh bien, peut-être en tant que député, ces jours-ci.
    Parce que nous avons une bonne relation avec la Russie, parce que nous sommes de bons voisins, nous pouvons avoir avec les dirigeants de ce pays une discussion honnête et un dialogue franc. Lorsque l'espace aérien finlandais est violé — cela s'est produit à plusieurs reprises  —, et nous avons eu cette perturbation du GPS il y a quelques semaines, nous sommes en mesure de publier ce qui s'est passé et de dire exactement aux Russes ce que nous en pensons, parce que nous sommes de bons amis. Ce serait un plus gros problème si nous ne pouvions pas avoir ce genre de dialogue. Ce serait un problème.
    En ce qui concerne les relations de la Finlande avec l'OTAN, nous avons bien sûr l'accord de partenariat. Depuis 1994, nous avons eu un partenariat, ainsi que des possibilités accrues aujourd'hui. Dans nos stratégies nationales en matière de politiques étrangères et de sécurité, nous disons aussi clairement que nous ne sommes pas un pays membre, bien sûr, mais la possibilité de demander à devenir membre à part entière demeure dans la trousse d'outils des Finlandais — en tant qu'option, pour ainsi dire.
(1705)
    C'est excellent.
    Avez-vous une dernière réflexion à ce sujet?
    C'est un sujet brûlant.
    Et important, très important...
    Pour ajouter quelques mots à ce que mes collègues ont dit, il est bon de se rappeler que nous avons aujourd'hui trois éléments fondamentaux dans notre politique qui concerne nos capacités militaires.
    Le premier est celui des investissements absolument énormes. Nous sommes présentement dans cette période. Tout au long de son histoire, la Finlande n'a jamais fait ce genre d'investissement massif, surtout pour les forces navales, de même que les avions-chasseurs. Cela représente environ 10 milliards d'euros. En même temps, nous faisons des investissements remarquables dans nos troupes au sol. Cela signifie que la Finlande atteindra à ce chapitre 2 % de son PIB. Vous savez ce que cela signifie pour nous. Ce sont d'énormes investissements.
    Deuxièmement, la Finlande accroît très rapidement ses réseaux militaires internationaux, principalement avec la Suède et la Norvège, ainsi que dans le cadre de la Coopération des pays nordiques en matière de défense. Le deuxième élément dans ce secteur est que les relations bilatérales entre la Finlande et les États-Unis se sont également développées très rapidement et, de façon tripartite, il y a en même temps une coopération entre la Finlande, la Suède et les États-Unis.
    Nous coopérons également avec le Royaume-Uni, dans le cadre des activités de la JEF, en particulier en raison du Brexit. Ensuite, il y a aussi l'Allemagne, mais également la France, dont le président, M. Macron, a proposé l'idée de troupes d'intervention. Nous entretenons également de nombreuses relations bilatérales avec différents pays européens, en particulier dans la région de la mer Baltique.
    Le troisième élément fondamental des investissements et de la coopération internationale est, bien entendu, nos réformes législatives. Après 2014, nous nous sommes rendu compte qu'il était nécessaire de procéder à ce genre de réformes, et cela a fait une énorme différence dans notre capacité militaire en ce qui concerne notre promptitude à réagir de diverses manières aux menaces qui pèsent sur la Finlande.
    Ces trois éléments signifient que nous accordons également beaucoup d'attention à ces activités, et ce qui est intéressant dans notre cas, c'est que presque tous les partis politiques sont d'accord, de sorte que notre consensus national est très fort en ce qui concerne nos activités de politique étrangère en matière de sécurité et de défense militaire.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer au député Saini.
    Bonjour, et bienvenue à vous tous.
    Je voulais revenir sur ce point, parce que c'est un sujet brûlant, et je pense que c'est très important. J'aimerais que vous me donniez une idée de la situation dans la région, en particulier compte tenu de ce qui s'est passé ces deux derniers jours dans le détroit de Kerch, dans la mer d'Azov et en Ukraine.
    Ces dernières années, j'ai constaté qu'il y a eu beaucoup plus d'exercices militaires que par le passé. Les Russes ont fait un exercice militaire de grande envergure avec l'opération ZAPAD, en 2017. Les Suédois ont fait l'exercice Aurora, en 2017. Vous avez indiqué que vous aimeriez faire votre propre exercice militaire en collaboration avec l'OTAN, probablement d'ici 2020.
    Compte tenu de l'influence russe, en particulier au Bélarus et dans l'oblast de Kaliningrad, et de l'imposition de missiles, quel est le sentiment des pays nordiques en ce qui concerne leur propre sécurité?
(1710)
    Je pense qu'il est important que nous fassions aussi des exercices. Nous procédons à beaucoup d'exercices avec les troupes de l'OTAN. Je peux vous dire que le nombre d'exercices auxquels nous participons — principalement des exercices de l'OTAN, dans les régions du Nord et de la mer Baltique — est d'environ 40 par année, sinon plus. C'est plus que ce que font certains pays de l'OTAN.
    Cela montre que nous sommes très actifs. Nous sommes prêts à donner et à recevoir de l'aide militaire. Il s'agit des modifications législatives que nous avons apportées il y a quelque temps à peine — selon lesquelles nous devons être prêts à recevoir et à offrir de l'aide. Il s'agit d'un changement fondamental dans la façon de penser.
    De plus, je voudrais aussi ajouter que nous suivons également à la lettre les sanctions de l'Ouest à l'égard de la Russie. C'est aussi un aspect très important qui n'est généralement pas bien connu.
    La raison pour laquelle j'ai posé cette question, c'est que, depuis l'éclatement de l'Union soviétique en 1995, la Finlande s'est jointe à l'Union européenne et elle est devenue un partenaire privilégié de l'OTAN, mais cela n'inclut pas la protection prévue à l'article 5 de la charte de l'OTAN.
    Par ailleurs, si on met cela de côté un instant, nous constatons actuellement qu'il y a de la désinformation dans bon nombre de pays qui ont des frontières communes avec la Russie. En ce qui concerne votre longue frontière avec la Russie, une des choses que j'ai lues, c'est que la Finlande a fait un meilleur travail que d'autres pays pour empêcher la désinformation de se glisser ou de s'imposer dans la vie quotidienne. Quelle est votre tactique ou votre approche pour vous assurer que la population ne soit exposée à aucun type de désinformation?
    Comme vous le savez probablement, nous avons établi à Helsinki le centre d'excellence, auquel le Canada participe maintenant lui aussi. Vous y participez aussi, et l'idée est de révéler toutes les méthodes qui sont utilisées contre nous, comme les fausses informations et les efforts pour influencer notre industrie et ce genre de choses. C'est un domaine très vaste.
    Nous avons été alertés de ce genre de changements dans le monde, et nous y préparons aussi notre société, mais c'est un domaine très difficile. J'ai récemment participé à une table ronde lors de laquelle tout le monde était d'accord pour dire qu'il n'est pas toujours facile de savoir qui fait ceci et qui fait cela. C'est un gros problème, mais j'espère que ce genre de centre que nous avons maintenant établi nous donnera plus d'information. Aussi, comme je l'ai dit, vous êtes là aussi.
    Pour ajouter aux commentaires de mon collègue, il est bon de mentionner qu'il a été établi par l'Union européenne et l'OTAN ensemble.
    Oui, exactement.
    J'ai une réponse très courte à la question. C'est l'éducation. Grâce à l'éducation, les Finlandais ont appris à reconnaître les nouvelles que l'on peut croire et à garder un esprit critique face à toutes les informations pour mieux mettre un frein à la diffusion de fausses nouvelles. Je suppose que c'est l'une de nos forces d'avoir des gens très instruits en Finlande. De plus, nous avons les antécédents culturels, parce que, depuis des décennies, nous sommes plus ou moins habitués à examiner de façon critique l'information que nous recevons de l'extérieur de nos frontières.
(1715)
    Si je veux continuer sur la question du niveau d'éducation, ce qui nous aide beaucoup à cet égard, c'est également la langue. Le finnois est une langue assez difficile, et, pour les Russes, par exemple, il n'est pas si facile de gérer des campagnes d'information massives en finnois.
    En ce qui concerne votre première question sur la sécurité dans la région, notre problème en Finlande, c'est la réforme militaire après 2010 en Russie. Avant cela, nous en riions un peu... Enfin, pas vraiment, mais le pays n'aurait pas eu de grandes chances de réussite contre la Finlande avec des armes conventionnelles. Après 2010, cela a changé. Leurs missiles sont plus précis, en particulier dans les systèmes de missiles Iskander et Kalilbr, de sorte qu'ils peuvent atteindre des cibles stratégiques avec des armes très précises. En outre, avec le nombre de forces spéciales qu'ils ont aujourd'hui, il n'y a plus matière à rire de leur armée.
    J'ai une dernière question. J'aimerais poser une question pragmatique, d'une certaine façon.
    En 2017, vous avez célébré votre 100e anniversaire d'indépendance. Vous avez eu cette capacité étonnante, au cours des 100 dernières années, de maintenir votre force et également votre neutralité. Une autre fois, nous pourrons nous pencher sur la façon dont vous avez réussi à le faire, mais à la lumière de ce qui s'est passé récemment en Ukraine, compte tenu de la militarisation russe ou de la promotion par la Russie de ses intérêts dans les anciennes républiques, de son contrôle de la mer Baltique, particulièrement avec Kaliningrad qui s'y trouve, d'un point de vue philosophique...
    Je sais que, en 1995, la Finlande s'est tournée vers l'Ouest en devenant membre de l'Union européenne, mais votre pays n'est pas devenu membre à part entière de l'OTAN. Le dernier pays à être devenu membre de l'OTAN a été le Monténégro. En dehors de cela, quand vous voyez le paysage géopolitique changer de façon aussi spectaculaire, pensez-vous que la Finlande pense différemment quant à savoir si, pour les 100 prochaines années, elle devrait se joindre à l'OTAN en tant que partenaire à part entière ou maintenir sa position de neutralité, comme elle le fait actuellement? Et est-ce la bonne ligne de conduite pour votre pays?
    Voici un point: nous ne sommes pas les seuls dans cette situation. Vous savez que la Suède est également dans la même situation que nous. Nous pensons que cela apporte un certain équilibre à l'heure actuelle. Si la Suède ou la Finlande devenait membre sans l'autre, cela briserait l'équilibre qu'il y a, l'équilibre très fragile. Nous avons souvent pensé que si un jour nous devenions membres de l'OTAN, nous le ferions de pair avec les Suédois, si ce jour arrivait. Il n'est pas encore arrivé.
    Je voudrais vous dire que ce n'est pas un gros problème pour le moment. Nous ne débattons pas de cette question tous les jours. On pourrait dire que nous sommes maintenant aussi proches de l'OTAN que c'est possible de l'être sans être membre.
    Si vous me le permettez, monsieur le président, il est important de souligner que la Finlande n'est pas neutre. Nous sommes membres de l'Union européenne. Nous entretenons un partenariat renforcé avec l'OTAN. La Russie ne nous considère pas comme neutre. Elle nous voit certainement comme faisant partie de l'Ouest. Évidemment, la différence avec d'autres pays, c'est l'appartenance à l'OTAN. Comme vous l'avez dit, nous ne sommes pas membres à part entière; par conséquent, l'article 5 ne s'applique pas à nous.
    Je veux également ajouter que, après 2014, la perception a un peu changé. Les gens pensent qu'être membre de l'Union européenne est encore plus important qu'avant. Lorsque nous sommes devenus membres en 1995, comme vous l'avez mentionné, la sécurité était l'une de nos principales raisons. À présent, c'est encore plus important. Si vous pensez à l'Ukraine, c'est un pays voisin de la Russie, qui n'est membre ni de l'Union européenne ni de l'OTAN. Nous ne voulons pas nécessairement être comme l'Ukraine. C'est un pays voisin de la Russie, et il n'est pas membre de l'Union européenne ni de l'OTAN. Les Finlandais connaissent assez bien notre point de vue géopolitique actuel.
    Juste avant de répondre à la question...
    J'ai un point à faire valoir. Le traité de Lisbonne de l'Union européenne est encore plus sévère que l'article 5 de l'OTAN, parce qu'il dit que, si un pays est attaqué, nous devons tous l'aider et le défendre par tous les moyens possibles. Bien entendu, nous n'avons pas de troupes, mais l'OTAN non plus. L'OTAN ne dispose que de troupes nationales.
(1720)
    Monsieur le président, si vous me le permettez, je parlerai un peu de l'équilibre.
    Le président: Allez-y.
    Mme Maarit Feldt-Ranta: Nous avons beaucoup parlé du volet militaire, mais je dirais que la diplomatie a été le meilleur moyen pour la Finlande de créer cet équilibre au cours de ces 100 années. Je pense que les Finlandais et aussi les Suédois, nos voisins, estiment que ce sera notre voie au cours des 100 prochaines années. L'opinion publique est également très favorable à cette approche.
    Merci beaucoup.
    Nous avons une autre question...
    Pardonnez-moi. Je dois ajouter quelque chose.
    Allez-y.
    M. Raj Saini: Je dois ajouter quelque chose également.
    Le président: Il peut ajouter quelque chose, mais pas vous.
    Des voix: Ha, ha!
    Le problème, c'est que lorsque vous nous posez une question, vous obtenez une réponse différente de chaque parti.
    La seule chose que je voudrais ajouter, c'est qu'une large majorité de la population finlandaise est contre l'adhésion à l'OTAN. On pourrait dire que ce qui est étrange, c'est que même ce qui s'est passé en Ukraine n'a eu aucun effet. Les chiffres restent presque toujours les mêmes, soit de 50 à 60 % en défaveur contre 25 % en faveur.
    Cela vient probablement aussi de l'idée que, selon les gens, une meilleure façon de maintenir la paix en Finlande n'est pas de former une alliance militaire. C'est plutôt en ayant une bonne relation avec les voisins. Les gens ne voient pas la situation de la Finlande comme étant la même que celle de l'Ukraine. Tout le monde peut voir que l'histoire est vraiment différente.
    Je vous remercie.
    Nous allons entendre une autre question, parce que nous voulons nous assurer qu'il reste du temps à la fin pour prendre une photo de groupe.
    Le député Blaikie posera la dernière question. Allez-y.
    Merci beaucoup.
    Pour ce qui est de la diplomatie, je pense qu'il est juste de dire que l'une des choses que nous avons entendues jusqu'ici dans notre étude sur la souveraineté du Canada dans l'Arctique est que la diplomatie qui se déroule au sein du Conseil de l'Arctique et dans les États arctiques suit une voie parallèle. Nonobstant ce que font les pays dans le reste du monde, il y a une très bonne coopération au sein du Conseil de l'Arctique.
    Je me pose deux questions. Tout d'abord, je sais que vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire que vous estimez que le Conseil de l'Arctique a un rôle à jouer pour élargir son mandat — je ne veux pas vous mettre des mots dans la bouche — afin d'aller au-delà des problèmes centraux et initiaux relatifs à l'environnement. Pourriez-vous en dire un peu plus sur ces possibilités?
    Ensuite, pour ce qui est de la diplomatie dans le cadre de cette relation avec la Russie, qui est un État arctique, y a-t-il des moyens de coopération qui, à votre avis, sont importants pour la Finlande sur le plan diplomatique pour ce qui est de la gestion de cette relation avec la Russie? Étant donné que nous ne parlons pas de militarisation du Conseil de l'Arctique ou des enjeux connexes, pour quel genre de questions pensez-vous que le Conseil puisse être un forum vous aidant à gérer cette relation avec la Russie?
    Je pense que c'est une valeur en soi que la Russie fasse partie du Conseil de l'Arctique, parce qu'il faut penser à ce qu'il serait sans la Russie. Pensez à l'immense superficie et au littoral de ce pays. Nous croyons que c'est une bonne chose que la Russie soit là et nous devons essayer de faire des compromis et de réaliser des projets communs pour que les choses avancent.
    Comme je l'ai mentionné, cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas avoir des communications bilatérales et des développements bilatéraux, mais c'est une valeur en soi que la Russie soit là. Voilà mon idée principale.
    Quels sont certains des domaines dans lesquels les États de l'Arctique pourraient collaborer davantage au Conseil de l'Arctique?
    Il y a tellement de possibilités. Si jamais le passage du Nord-Est est mis en place, cela créera beaucoup de problèmes. Nous devons avoir toutes sortes de ports depuis la Chine et ainsi de suite, de sorte qu'il y a des ports partout sur le territoire russe, des ports russes, par exemple, pour les services et autres choses.
    Il y a tellement de choses qui peuvent être mises en places, comme des liaisons ferroviaires, des routes et de nombreuses choses.
(1725)
    Y a-t-il quelqu'un d'autre qui aimerait intervenir?
    Sinon, on peut passer à la photo.
    Je tiens à vous remercier encore une fois. C'est la deuxième fois que j'ai l'occasion de siéger avec vous aujourd'hui.
    Ce n'est pas que nous puissions dire que les députés de différents partis sont en désaccord les uns avec les autres. Quand on s'assoit à une table, il y a toujours unanimité.
    Des députés: Ha, ha!
    Le président: Et voilà, j'attendais que vous riiez. C'est merveilleux d'avoir une rencontre aussi vive et dynamique avec vous. C'est très pertinent pour l'étude que nous menons, et je pense que l'importance de la relation entre parlementaires est pleinement mise en évidence à cette table cet après-midi. Au nom de tous mes collègues, au nom de tous les membres du Parlement canadien, je vous remercie beaucoup d'être venus témoigner dans le cadre de cette importante étude. Nous attendons avec impatience de nombreuses autres occasions d'avoir des discussions ensemble. Je vous remercie.
    Sur ce, la séance est levée.
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