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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 045 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 9 février 2017

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

     Distingués collègues, la séance est ouverte.
    Conformément à l’article 108(2) du Règlement, nous allons assister à un exposé pour le Partenariat mondial pour l’éducation.
    Ce matin, nous avons le plaisir et l'honneur de recevoir Mme Julia Gillard et sa collègue, M. Karen Mundy. Je crois que c'est Mme Gillard qui fera la présentation. Une fois la présentation terminée, nous passerons à la période des questions et nous pourrons avoir une discussion approfondie au sujet du travail de Partenariat mondial pour l’éducation.
    Nous sommes très heureux de vous avoir parmi nous.
    Nos entretiens dureront environ une heure. Après, nous aiguillerons nos travaux sur les affaires du Comité et nous laisserons Mme Gillard et sa collègue vaquer à leurs occupations. Je crois qu'il est environ 20 heures en Australie, alors elles sont toujours debout et bien disposées à nous parler, ce qui est toujours une bonne chose.
    Au nom du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international du Parlement, je vous souhaite la bienvenue.
    Nous sommes impatients d'entendre votre exposé, alors je vous laisse la parole.
     Merci beaucoup.
    Cher président, chers membres du Comité, merci de nous avoir invitées à comparaître aujourd'hui.
    Je suis ici en tant que présidente du Conseil d'administration de Partenariat mondial pour l’éducation, le PME. Permettez-moi de prendre quelques minutes pour vous dire un mot sur le travail de notre organisme et sur la place que le PME occupe au sein de la coopération internationale dans son ensemble.
    Je suis accompagnée par Mme Karen Mundy, qui est une Canadienne et non une Australienne, soit dit en passant. Elle est ici avec moi à titre de directrice technique, et je vais m'en remettre à elle pour vous communiquer certains des résultats provisoires de notre nouveau plan stratégique. J'ai bien hâte à la discussion qui suivra.
    Le Partenariat mondial pour l’éducation est le seul partenariat multilatéral et le seul mécanisme de financement exclusivement axés sur l'éducation dans les pays les plus pauvres de la planète. Au nombre de ses partenaires, notre organisme compte 65 pays en développement et plus de 20 pays donateurs, des organismes multilatéraux, des représentants de la société civile, des enseignants et des intervenants du secteur privé.
    Notre travail cherche à faire une plus grande place à un apprentissage de qualité exhaustif et équitable, à consolider les systèmes d'éducation et à promouvoir le leadership gouvernemental ainsi que l'harmonisation entre les donateurs. Nous faisons cela au niveau des pays en misant tout à la fois sur une meilleure planification sectorielle, une amélioration du dialogue au sujet des politiques et de la responsabilité partagée, et en offrant un financement axé sur les résultats.
    Le Partenariat mondial appuie la recherche et l'analyse dans les contextes particuliers de l'éducation dans nos pays partenaires. Nous offrons ensuite un financement névralgique pour appuyer l'élaboration et la mise en oeuvre de plans sectoriels complets en éducation, plans auxquels tous nos partenaires souscrivent.
    Le Partenariat mondial pour l’éducation est aussi le plus grand bailleur de fonds des organismes de la société civile qui militent dans le domaine de l'éducation. Cela fait partie de notre engagement à l'égard du dialogue inclusif fondé sur des données probantes que nous souhaitons promouvoir en ce qui concerne les politiques. Le PME dépense environ 500 millions de dollars américains par année, et la moitié de cette somme se retrouve dans des pays fragilisés et des pays touchés par des conflits.
    Le partenariat que nous avons avec le gouvernement du Canada est très précieux pour nous. Le Canada a d'ailleurs été l'un des architectes de l'Initiative accélérée, laquelle a été le précurseur de notre organisme. Depuis 2002, votre pays est l'un de nos donateurs principaux, et nous vous en remercions.
    Le Canada continue de jouer un rôle actif au sein de notre Conseil d'administration et de nos comités techniques, et ses contributions financières au Partenariat mondial pour l’éducation totalisent à ce jour 147 millions de dollars, ce à quoi il convient d'ajouter la somme de 45,5 millions de dollars qu'il s'est engagé à verser. Je tiens aussi à saluer et à remercier le Canada de s'être offert pour organiser la réunion de juin du Conseil d'administration. Ce sera la première fois que nous tiendrons une réunion chez vous.
    Les enjeux en éducation peuvent avoir une énorme incidence sur les progrès réalisés vers l'atteinte de tous leurs objectifs de développement durable. Selon l'UNESCO, 171 millions de personnes pourraient s'affranchir de la pauvreté si tous les étudiants des pays à faible revenu quittaient l'école avec des compétences de base en lecture. Les investissements dans l'éducation des filles peuvent réduire le nombre de mariages d'enfants, ainsi que la mortalité maternelle et infantile; ils peuvent aussi permettre d'améliorer la situation des familles en matière de santé et de finances. Nous savons que l'enfant d'une mère qui sait lire a 50 % plus de chances de se rendre à l'âge de 5 ans qu'un autre dont la mère ne sait pas lire, une statistique pour le moins renversante.
    Malgré l'importance centrale de l'éducation en tant que droit de la personne et comme vecteur d'autres droits, 121 millions d'enfants et d'adolescents ne vont pas à l'école. La plupart d'entre eux sont des filles et des enfants qui vivent dans des pays fragilisés et des pays touchés par des conflits. Soixante-quinze pour cent des jeunes réfugiés ne vont pas à l'école.
    Un cycle complet d'enseignement dans un pays en développement coûte 1,18 $ par jour par enfant, mais les ressources financières disponibles à l'échelle mondiale ont chuté. L'aide des donateurs à l'égard de l'éducation de base a diminué de plus de 14 % entre 2010 et 2014, et ce, même si l'ensemble de l'aide au développement a augmenté de 8 %.
    Je suis fière d'avoir occupé le poste de commissaire à la Commission internationale sur le financement des opportunités éducatives mondiales. Le dernier rapport de la Commission souligne que les pays à faible revenu reçoivent moins du quart de toute l'aide en matière d'éducation. Or, ces pays sont ceux qui en ont le plus besoin. Ce sont les pays où les filles vont le moins à l'école, où les enfants sont les plus susceptibles de souffrir des conséquences des conflits et de l'instabilité.
    Le même rapport indique que le financement international annuel devra passer des 16 milliards de dollars actuels à 89 milliards de dollars d'ici 2030 si nous voulons réaliser le plein potentiel de l'éducation et ainsi créer une génération d'apprenants.

  (0850)  

     Pour tout ce qu'il défend et tout ce qu'il peut accomplir, le PME est arrivé à un point névralgique de son évolution. Je suis très optimiste. Les 18 derniers mois ont permis d'accomplir un véritable pas de géant vers l'atteinte d'un nouveau consensus mondial selon lequel l'éducation devrait être mise au centre des efforts que déploie l'humanité pour réaliser ses objectifs de développement durable. L'heure de l'éducation a sonné, et le Partenariat mondial pour l’éducation est pressenti comme l'un des principaux organismes de mise en oeuvre qui piloteront la réalisation de l'objectif de développement durable 4, c'est-à-dire d'assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et de promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie.
    J'aimerais maintenant inviter Mme Karen Mundy à parler du plan stratégique du PME et des principaux résultats obtenus jusqu'ici.
    Je remercie le président et tous les membres du Comité. C'est vraiment un honneur d'être là aujourd'hui pour vous parler du Partenariat mondial pour l’éducation.
    L'année dernière, le PME a mis en branle le nouveau plan stratégique qui le guidera jusqu'en 2020. Comme l'a dit Julia, ce plan stratégique est aligné sur l'objectif de développement durable 4, la prestation d'une éducation de qualité et équitable pour tous les enfants et l'ensemble de la jeunesse.
    Notre organisme obéit à un certain nombre de principes directeurs qui accordent une place centrale à l'efficacité du développement, à la responsabilité partagée, à l'inclusivité et aux résultats. Ces principes sont au coeur de tout ce que nous faisons. Nous travaillons pour réaliser ces objectifs stratégiques et nous mesurons nos résultats par rapport à eux. Notre objectif stratégique est de réaliser des progrès en ce qui concerne l'apprentissage des étudiants en soutenant un enseignement et un apprentissage de qualité accessibles à tous. C'est à l'égard de cet objectif que nous allons mesurer nos résultats.
    Deuxièmement, nous espérons améliorer l'égalité des chances en général et l'égalité entre les sexes, et nous souhaitons promouvoir l'inclusion d'un cycle complet d'enseignement de qualité à l'intention des clientèles les plus pauvres et les plus marginalisées, dont les enfants qui sont touchés par des conflits.
    Troisièmement, nous cherchons à permettre aux systèmes d'éducation de devenir à la fois efficaces et efficients. En novembre dernier, j'ai présenté les résultats provisoires de notre partenariat à notre Conseil d'administration; les résultats complets seront quant à eux présentés en juin prochain. Comme nous l'avions anticipé, ces résultats provisoires permettent de cerner des domaines où nous avons dépassé nos objectifs et d'autres qui nécessitent un peu plus d'attention. Permettez-moi de vous parler de ces principaux domaines.
    Au sein de notre partenariat, il y a maintenant 9,3 millions de filles de plus qui vont à l'école, ce qui est attribuable au soutien à l'éducation que fournit notre organisme. Malgré cela, nous savons que nous avons certains problèmes d'égalité des chances à l'échelle des membres du partenariat. Conséquemment, cet enjeu continue d'être l'un des points centraux de notre travail.
    Je remercie sincèrement le Canada d'appuyer le PME par l'intermédiaire d'analyses comparatives entre les sexes à l'échelle institutionnelle qui permettront de mettre au point une stratégie en matière d'égalité des sexes. À ce jour, nous avons investi 1,5 milliard de dollars de nos subventions actives pour soutenir l'amélioration de l'égalité des sexes dans l'ensemble de nos pays partenaires.
    Cette année, nous nous faisons une joie à l'idée de travailler avec Plan Canada et d'autres partenaires afin de mettre en oeuvre une approche de prise en compte de l'égalité entre les sexes dans la planification sectorielle, approche qui incitera les États à tenir compte du coût de la sexospécificité dans leurs écoles et leur système d'éducation.
    Nous sommes par ailleurs enchantés de constater que le taux d'achèvement des étudiants à l'enseignement secondaire de premier cycle a augmenté dans l'ensemble de notre partenariat. Nous notons toutefois que dans un bon nombre des pays les plus pauvres, les taux d'achèvement des écoliers à l'enseignement primaire plafonnent autour de 80 %, ce qui nous préoccupe de plus en plus.
    La moitié des décaissements du Partenariat mondial pour l’éducation se retrouve dans des pays partenaires fragilisés ou touchés par des conflits, voire les deux. Comme vous le savez, environ le tiers des enfants du monde qui ne vont pas à l'école vivent dans des milieux touchés par des conflits. Notons également que 63 % de tous les enfants réfugiés du monde vivent à l'intérieur des frontières de nos 65 pays partenaires. C'est donc un aspect très important pour nous.
    Nous avons investi 2,2 milliards de dollars dans les pays touchés par des conflits, ce qui comprend Haïti, le Mali, la République centrafricaine, le Yémen et le Tchad. Malgré des obstacles colossaux, le taux d'achèvement des écoliers à l'enseignement primaire dans ces pays a augmenté considérablement, passant de 55 % de l'ensemble des enfants inscrits à 68 %.
    Nous avons dépassé l'objectif que nous nous étions fixé quant au nombre d'élèves par enseignant. Comme vous le savez, les bons enseignants sont un aspect central d'une bonne éducation. Dans nos pays partenaires, le pourcentage des salles de classe où les taux sont maintenant de 40 élèves ou moins par enseignant est passé de 25 à 29 % au cours de la dernière année, ce qui, à notre avis, est un résultat stupéfiant.
    Parmi nos résultats et nos points de focalisation les plus importants, il convient de mentionner ce que nous avons fait pour inciter les pays partenaires à mieux financer l'éducation. Chaque dollar que le PME investit devrait inciter les États à se focaliser sur l'amélioration de leur système d'éducation. Nous savons en effet que les pays à faible revenu et à revenu moyen devront tripler leurs dépenses en éducation pour que l'objectif de développement durable 4 soit réalisé.
    La norme mondiale pour le financement de l'éducation à l'échelle nationale veut que les États affectent de 15 à 20 % de leurs dépenses publiques au secteur de l'éducation, avec une attention particulière à l'enseignement de base. C'est d'ailleurs une condition que les États doivent respecter pour bénéficier du financement du Partenariat mondial pour l’éducation. Nous avons constaté une amélioration du financement de l'éducation chez nos pays partenaires. De plus, jusqu'à 30 % de nos subventions sont sous condition de l'obtention de résultats. Plus précisément, cela signifie que les gouvernements doivent faire des progrès en matière d'égalité des chances et d'apprentissage et démontrer que leur système d'éducation a gagné en efficience afin de recevoir les 30 % restants.

  (0855)  

    Comme le disait Julia, le Partenariat mondial pour l’éducation investit dans la société civile et dans des systèmes de responsabilisation multipartites à l'échelle des pays. Nous appuyons couramment nos partenaires pour qu'ils fassent des analyses sectorielles, c'est-à-dire un examen de leur secteur de l'éducation auquel sont conviées toutes les parties concernées et dont les résultats sont suivis de près.
    Depuis 2002, les dépenses publiques en éducation au sein des pays partenaires de notre organisme ont augmenté plus rapidement que dans les pays qui ne sont pas nos partenaires; entre 2014 et 2015, 72 % de nos pays partenaires ont augmenté leurs dépenses publiques ou les ont maintenues au-dessus de 20 %, et 22 pays du PME ont affecté plus de 20 % de leur budget à l'éducation. Selon nous, ce sont là d'excellents résultats.
     Nous nous sommes engagés à obtenir des résultats concrets en ce qui concerne l'apprentissage de tous les enfants. Pour cela, nous mettons l'accent sur l'édification des systèmes, sur l'égalité des chances et sur la qualité de l'enseignement. Nous accueillons favorablement le partenariat soutenu que nous avons avec le gouvernement du Canada pour la concrétisation de ces résultats.
    Merci.
    Merci beaucoup de cette présentation. Le PME est une institution de grande importance, et nous sommes très fiers, en tant que Canadiens, d'y participer de façon active.
    Chers collègues, je crois que nous allons tout de suite passer à la période de questions.
    Nous allons commencer par M. Allison.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, madame Gillard, de vous adresser à notre Comité, et merci aussi à Mme Mundy. J'ai bien aimé la conversation que nous avons eue, hier soir, lors de l'activité.
    J'ai trois questions à vous poser, alors je vais y aller tout de go.
    Il y a beaucoup d'organismes qui font des choses formidables. Il y a Gavi, le Fonds mondial et tous les autres. Pourquoi le Partenariat mondial pour l’éducation existe-t-il? En matière de rendement sur le capital investi — vous en avez glissé un mot dans votre déclaration liminaire — pourquoi avez-vous cet organisme?
    Deuxièmement, en quoi ce que vous faites est-il différent de ce que font les autres organismes qui oeuvrent en éducation?
    Ma troisième question renvoie en quelque sorte à la première question. Elle concerne l'essoufflement des donateurs. Quels sont les problèmes les plus lourds que vous rencontrez sur votre chemin, soit avec les autres gouvernements ou avec ce qui se passe relativement à la communauté du développement?

  (0900)  

    Je suis bien content de pouvoir répondre à ces questions, et je vais le faire le plus vite possible.
    En ce qui concerne nos choix, j'évoquerai la preuve de plus en plus évidente que nous ne pouvons pas accomplir ce que nous souhaitons accomplir dans des domaines comme la santé si nous ne mettons pas aussi l'accent sur l'éducation. En fait, le Partenariat mondial pour l’éducation travaille en étroite collaboration avec le Fonds mondial et avec Gavi, parce ces organismes reconnaissent que ce qu'ils veulent accomplir en santé ne pourra pas se matérialiser s'il n'y a pas d'éducation.
    Par exemple, il n'est plus à démontrer que le fait de permettre aux adolescentes de continuer l'école réduit de façon radicale les risques qu'elles courent de contracter le virus du sida. Étant donné que la vie des gens inclut tous ces aspects qui sont interreliés, les services dont ils ont besoin doivent, eux aussi, être interreliés. Nous n'atteindrons pas les résultats que nous souhaitons en matière de santé, de changement climatique, de paix ou de sécurité si nous ne mettons pas aussi l'accent sur l'éducation.
    Pour ce qui est de notre avantage comparatif, je dirais que c'est le fait que nous nous focalisons sur les systèmes d'éducation dans leur ensemble. Beaucoup de gens font des choses formidables, des choses novatrices qui permettent de faire des progrès, mais pour que ces choses puissent avoir un effet sur la vie de millions d'enfants, il faut qu'elles aient un effet sur le système d'éducation dans son ensemble. Nous savons cela à cause de ce que nous avons vu dans nos propres pays. Il y a peut-être cinq ou dix écoles au Canada qui ont une nouvelle approche formidable pour l'apprentissage de la lecture ou du calcul. Une telle approche ne pourra avoir d'incidence sur la vie de millions de petits Canadiens que si elle est appliquée à l'échelle d'une province entière, et que cette province la communique à ses voisines jusqu'à ce que toutes les écoles du pays l'adoptent. C'est là-dessus que nous insistons, sur les systèmes d'éducation dans leur ensemble.
    En ce qui concerne l'essoufflement des donateurs, nous reconnaissons effectivement que c'est une période difficile pour les gouvernements qui doivent décider de leurs priorités budgétaires, et c'est une dynamique à laquelle aucun pays n'échappe. Cependant, nous croyons que dans un monde où l'aide des donateurs connaît une certaine croissance — et la statistique qu'on nous a donnée à ce chapitre, c'est une augmentation de 8 % —, il est carrément navrant de voir que la part consacrée à l'éducation diminue. C'est la raison pour laquelle nous revendiquons qu'une part plus grande de cette aide soit accordée à l'éducation et que les gouvernements augmentent leurs investissements dans l'aide étrangère.
    Les statistiques que Karen vous a données au sujet de la mobilisation des ressources nationales sont très importantes. En fin de compte, le gros de l'argent qui ira à la scolarisation dans les pays en développement viendra des pays eux-mêmes. C'est pour cette raison que l'un des aspects clés de l'efficacité de notre modèle est de revendiquer que l'aide internationale déploie davantage de ressources à l'intention des économies nationales.
    Très bien. Pour rester dans la même veine, j'aimerais savoir comment vous choisissez vos pays? Je présume qu'ils vous contactent pour vous dire qu'ils auraient besoin d'un peu plus de ressources, ce qui ressemble beaucoup au fonctionnement du Fonds mondial. Est-ce le cas? Nous ne nous associons qu'avec les pays qui sont disposés à se prendre en main et à y mettre du leur.
    Je présume que votre façon de fonctionner ressemble un peu à cela.
    Le modèle d'admissibilité que nous utilisons est fondé sur la fourchette de revenu du pays. Nous couvrons donc les pays à faible revenu et ceux dont le revenu se situe dans la moyenne inférieure. Nous avons aussi une échelle d'admissibilité pour les subventions qui tient compte de la fourchette de revenu du pays et des résultats qu'il obtient dans ses écoles. Auparavant, l'échelle tenait compte de l'Objectif du Millénaire pour le développement qui portait sur l'accès universel à l'école primaire. La barre est maintenant plus haute, puisque le Programme pour le développement durable est plus ambitieux et qu'il s'intéresse aussi à l'enseignement secondaire.
    Alors, la réponse est oui. Ce sont les pays qui nous contactent. Néanmoins, comme nous nous focalisons sur les pays à faible revenu et sur ceux dont le revenu se situe dans la moyenne inférieure, nous rejoignons énormément de monde. Par conséquent, le partenariat a pris de l'ampleur au cours des dernières années, ce qui indique clairement que les pays considèrent que notre modèle est un vecteur efficace de changement.
    Très bien.
    J'ai une dernière question très rapide à vous poser: y a-t-il une vie après la politique?
    Des voix: Oh, oh!
    Eh bien, je suppose que vous n'avez qu'à regarder ma prestation d'aujourd'hui, et vous pourrez tirer vos propres conclusions. Je vous laisse en juger par vous-même.
    Merci beaucoup.
    La parole est à M. Fragiskatos.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à vous d'être là aujourd'hui.
    Cette réunion a une importance toute particulière pour moi, car je m'intéresse énormément à l'alphabétisation, et notamment en ce qui concerne les enfants. Comme vous le savez, le développement social, cognitif et émotionnel des enfants est un aspect crucial de leur croissance future et de leur épanouissement en tant qu'êtres humains. Il importe aussi de souligner que le cerveau d'un enfant est développé à 80 % dès l'âge de 3 ans. Malgré cela, les efforts que pourrait consacrer la communauté internationale, voire les États eux-mêmes, à l'enseignement préscolaire ont toujours été sous-financés. Je veux parler ici de cette éducation qui vise à préparer les enfants à l'école primaire, à la maternelle, par l'intermédiaire de jeux et de tâches élémentaires qui visent à développer leur intelligence. Pouvez-vous me dire si vous vous êtes aussi intéressés à l'enseignement préscolaire?

  (0905)  

    Je crois que je pourrais laisser notre directrice technique en chef, Mme Mundy, répondre à cela. Nous avons justement une nouvelle initiative pour le développement de la petite enfance, et c'est elle qui la supervise pour le PME.
    C'est tout à fait exact. Il y a désormais des recherches formidables en neurologie qui indiquent que la période névralgique du développement du cerveau est de zéro à trois ans.
    Mon point de vue pourra vous sembler un peu radical, mais je vais vous parler de l'importance que revêt l'éducation en amont — c'est-à-dire à des niveaux plus avancés — pour le développement des petits enfants. Lorsque les femmes sont alphabétisées, elles sont en mesure de stimuler leurs enfants qui sont dans ces trois premières années cruciales. Elles sont en mesure d'accéder à des services de santé, de mettre de la nourriture sur la table et de gagner de l'argent pour leur famille et de soutenir ainsi ceux qui sont dans la tranche des zéro à trois ans. Je dirais qu'il y a peut-être plus à tirer d'un dollar investi dans l'éducation des filles que dans n'importe quelle autre initiative axée sur le développement de la petite enfance. C'est donc sur l'éducation des filles que notre organisme se focalise.
     Nous faisons effectivement du travail avec les enfants d'âge préscolaire, la tranche des trois à six ans. Je tiens à rappeler à tous que chaque année de la vie d'un enfant est importante, et que beaucoup des enfants de cet âge — les trois à six ans — passent entre les mailles du filet de l'éducation. Il est très important que nous répondions à leurs besoins, notamment lorsqu'il s'agit d'enfants qui viennent de milieux très pauvres ou très marginalisés. Ils réussissent beaucoup mieux leur formation primaire et secondaire lorsqu'ils ont eu un enseignement préscolaire.
    Voilà effectivement le point de focalisation de notre travail. Encore une fois, nous ne remettons pas en question l'importance de la période de zéro à trois ans et l'ampleur des résultats que l'argent investi dans cette période peut avoir plus tard dans la vie, mais nous sommes d'avis que les investissements consacrés à la littératie des jeunes femmes contribuent grandement au développement des très jeunes enfants.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous pour dire qu'il est important de mettre l'accent sur l'éducation des jeunes femmes. Je cherchais simplement à savoir si vous vous focalisez aussi sur l'éducation préscolaire. Merci beaucoup d'en avoir parlé.
    Le lien entre la faiblesse du développement économique et les conflits, voire les guerres, n'est plus à démontrer. Cependant, on accorde moins d'importance au lien qui existe entre le manque de possibilités sur le plan éducationnel dans les sociétés et les conflits — lesquels ont tendance à dégénérer en guerres. Pouvez-vous parler de ce lien? Je pense que lorsque nous cherchons à trouver les causes des conflits dans les sociétés — ces conflits qui se transforment en guerres —, nous oublions le rôle important que joue le manque d'éducation.
     Il a été clairement prouvé que le fait d'augmenter les taux d'alphabétisation et de relever les niveaux de scolarité est une façon efficace de se prémunir des conflits. Cette proposition a été prouvée statistiquement, mais pour la mettre en oeuvre, ce n'est pas aussi simple que de se contenter de dire qu'il faut éduquer. Bien entendu, nous avons vu des exemples de par le monde qui montrent que les systèmes d'éducation ont été efficaces à cet égard, mais nous avons aussi vu des gens qui ont terminé leurs études dans des économies qui ne leur offraient aucun débouché et aucun espoir. La jeunesse désillusionnée peut parfois se retrouver à la source des conflits dans ces sociétés. L'éducation reste néanmoins une forme de protection contre les conflits et la violence. Il y a bien entendu un lien complexe qui existe entre l'éducation et la lutte à la radicalisation. Les experts en la matière soulignent que les terroristes les plus connus au monde étaient des personnes très scolarisées, y compris, par exemple, les gens qui ont conçu les attentats du 11 septembre.
    Alors la question ne se limite pas à la simple prestation d'un enseignement; il faut aussi se pencher sur le contenu de cet enseignement, sur l'image du monde qu'elle véhicule et sur la capacité qu'elle donne à chacun de se questionner sur les gestes qu'il pose et sur les conséquences de ces gestes.
    L'une des choses que le Partenariat mondial pour l'éducation a pu constater au sein de nos pays partenaires — et que la planification du PME et ses processus fondés sur les subventions ont certainement favorisée —, c'est le travail qui est fait à l'égard des madrasas. C'est le terme que nous utilisons dans notre région du monde, mais je sais que l'on ne l'utilise pas partout. Nous sommes d'avis que le fait d'intégrer ces écoles musulmanes au courant dominant du système d'éducation et de veiller à ce qu'elles enseignent le programme national ou le programme régulier est aussi une démarche importante pour se prémunir des conflits à long terme et de la violence.

  (0910)  

    Dans l'édition d'hier de l'Ottawa Citizen, j'ai lu un texte que vous avez écrit à propos de Khadija, une jeune fille de la Tanzanie qui a été forcée de se marier alors qu'elle n'avait que 12 ans. Elle n'avait pas eu la chance d'aller à l'école, mais elle élève présentement sa fille qui, elle, va à l'école, et qui semble très bien réussir. C'est un très bel exemple de réussite.
    Pouvez-vous nous expliquer comment vous procédez pour cerner ces exemples de réussite? Est-ce qu'il s'agit essentiellement de mesurer les résultats? Quelle méthode utilisez-vous pour trouver ces exemples?
    Nous mesurons les résultats que les filles obtiennent dans l'ensemble de notre partenariat. Nous aidons les États à investir dans des données de bonne tenue et dans des systèmes efficaces de suivi des données, et nous nous assurons qu'ils suivent à la fois les enfants qui sont à l'école et ceux qui n'y sont pas. Puis, sur une base annuelle, nous saisissons ces données dans notre cadre des résultats afin de produire des statistiques comme celle que je vous ai donnée sur le nombre de filles qui sont présentement à l'école dans l'ensemble du partenariat — il y en a 9,3 millions — et qui ne l'auraient peut-être pas été sans les efforts du PME.
    Je vais laisser la parole à Julia, car rien n'est plus évocateur pour le public que ces exemples de jeunes gens qui arrivent à quelque chose dans leur vie et qui doivent leur réussite aux investissements dans le domaine de l'éducation.
    Julia.
    Peu de temps avant de venir ici, j'étais au Malawi, où les fonds du PME sont utilisés pour la construction d'écoles, pour la formation des enseignants, pour l'aide financière visant à permettre aux plus marginalisés d'aller à l'école et pour prêter main-forte aux clubs de mères. Le Malawi est un pays très pauvre. Les droits qui permettent aux filles de se rendre jusqu'à la fin du secondaire sont très timides. En allant à la rencontre de l'un de ces clubs de mères et en visitant le village, nous avons fait la connaissance d'une fille de 14 ans qui avait un bébé d'un mois. Le travail des clubs de mères consiste à essayer d'aider ces filles à retourner à l'école en leur prêtant main-forte pour le soin des enfants et en tentant de leur inculquer des valeurs et des aspirations qui les inciteront à terminer leurs études.
    Nous sommes d'avis que ce travail de terrain est vraiment important et nous nous efforçons de lui fournir des ressources. Le Partenariat mondial pour l'éducation collabore également avec l'organisme Filles, pas épouses, qui cherche à persuader les gouvernements de légiférer sur le mariage des enfants. Contrairement au Canada et à l'Australie, de nombreux pays n'ont pas de loi matrimoniale qui définit l'âge minimum pour le mariage. C'est donc une question de réglementation, mais cela mis à part, il existe une relation directe entre la scolarisation et les mariages précoces. Il a été prouvé très clairement que le fait de permettre à une fille de rester à l'école secondaire diminue radicalement le risque qu'elle court de se marier très jeune.
    Nous devons nous assurer que les écoles sont là afin que les filles puissent y aller. Entretemps, les organismes comme Filles, pas épouses et d'autres organismes actifs sur le terrain s'efforceront de convaincre les familles de penser à des alternatives au mariage précoce et de garder leurs filles à l'école.
     Merci, monsieur Fragiskatos.
    Nous allons passer à Madame Laverdière.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence parmi nous et, surtout, du fantastique travail qu'ils accomplissent.
    Dans le secteur immobilier, on dit souvent que ce qui est fondamental, c'est l'emplacement, l'emplacement et l'emplacement. Or je crois qu'en matière de développement, même lorsqu'on parle de sécurité et de stabilité, ce qui est fondamental, c'est l'éducation, l'éducation et l'éducation. Encore une fois bravo pour tout le travail que vous faites.
    Cela dit, ce travail nécessite un financement important. Vous en avez parlé un peu dans votre présentation. Prévoyez-vous que le Partenariat mondial pour l'éducation connaîtra des difficultés ou des défis en matière de financement?
    Merci.

  (0915)  

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous avons effectivement des besoins très pressants en matière de financement. Nous entamons notre cycle de renflouement. La dernière fois que le PME s'est adressé à la communauté des donateurs — à la fois les pays et le milieu philanthropique — pour renflouer ses coffres, c'était en 2014. Nous avions amassé environ 2 milliards de dollars. Nous allons organiser une autre collecte de fonds vers la fin de la présente année ou au début de 2018, afin de nous remettre à flot et d'être en mesure de déployer le nouveau plan stratégique que nous décrivions plus tôt.
    Cela signifie que la présente période est d'une importance capitale pour nous, puisque nous devons plaider le bien-fondé d'un changement en éducation auprès de nos donateurs et de nos partenaires, dont les alliés traditionnels comme le Canada, mais aussi convaincre de nouveaux donateurs de partout dans le monde de s'investir dans la cause. Nous considérons que nous arrivons à cette partie de notre mandat au moment où la question de l'éducation prend de plus en plus de place sur la scène internationale et où l'idée d'un changement en éducation est sur une bonne lancée.
    Lorsque j'ai assisté à l'adoption des objectifs de développement durable à l’Assemblée générale des Nations unies, j'ai trouvé très révélateur et très encourageant que la première personne à parler après le discours du secrétaire général soit Malala, qui était dans la tribune réservée au public. Je crois que la structure même de l'événement signifiait que la communauté internationale réalise que la réussite du programme de développement est conditionnelle à l'éducation des enfants, et particulièrement à l'éducation des filles; le courage d'une enfant comme Malala doit trouver écho dans l'offre d'une école de qualité.
     Dans ces circonstances, nous croyons que ce que nous et d'autres organismes faisons est d'une importance fondamentale. J'aimerais attirer votre attention sur un fonds qui vient d'être créé, L’éducation ne peut attendre, et qui vise à répondre aux besoins précis de l'éducation dans le contexte des situations d'urgence, des crises humanitaires et des conflits. Nous sommes à l'heure où la communauté internationale se penchera sur la nécessité de mieux financer l'éducation dans son ensemble. Nous serons ici, en juin, pour la réunion de notre Conseil d'administration, mais nous serons en dialogue continu avec le Parlement du Canada pour l'appuyer dans ses réflexions sur le bien-fondé d'augmenter son soutien au Partenariat mondial pour l'éducation.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Vous avez mentionné également quelques pays qui sont en situation de conflit ou qui connaissent de très grandes difficultés, notamment le Mali et Haïti, où vous accomplissez un travail essentiel.
    De plus, vous travaillez auprès des réfugiés. J'aimerais savoir en quoi cela consiste. Comme votre travail tourne souvent autour des systèmes scolaires, c'est forcément plus compliqué dans le cas des réfugiés.

[Traduction]

    Merci.
    Pour des raisons évidentes, l'attention politique du monde a tendance à se porter sur la question des réfugiés lorsque les réfugiés cherchent à gagner les pays développés. Par exemple, les vagues très importantes de réfugiés qui ont déferlé sur l'Europe ont reçu beaucoup d'attention des médias et des milieux politiques. Or, la vaste majorité des réfugiés sont dans des pays à faible revenu, et plus de 60 % de l'ensemble des réfugiés à l'échelle internationale sont dans des pays qui adhèrent au PME, ces 65 pays que nous couvrons.
    Nous travaillons en collaboration avec nos pays en développement partenaires afin de les aider à se doter de plans de scolarisation et de ressources qui leur permettront d'intégrer l'éducation des enfants des réfugiés à leurs systèmes d'éducation. Pour les pays très pauvres où le système d'éducation est déjà en grande difficulté, c'est un défi énorme.
    Par exemple, lorsqu'il s'est vu submergé par une vague de réfugiés, un pays très pauvre comme le Tchad qui peine déjà énormément à développer son système d'éducation pour ses propres enfants s'est adressé au PME afin d'obtenir de l'aide pour lui permettre d'offrir une place dans ses écoles aux enfants réfugiés. Compte tenu de la base déjà très appauvrie d'où il provenait, c'était un acte de générosité inouï, mais nous avons tout de même été en mesure de travailler cela avec eux. C'est la principale chose que nous faisons présentement pour les enfants réfugiés.
    Nous appuyons sans réserve le nouveau fonds L'éducation ne peut attendre, qui se concentre sur les besoins des enfants victimes de conflits ou de crises. Nous allons travailler avec ce fonds pour voir ce qui peut être fait de plus dans la présente conjoncture humanitaire, mais aussi pour assurer la continuité de la réponse humanitaire et traduire cette aide en un travail de développement à plus long terme.

  (0920)  

[Français]

    J'aimerais poser une autre question.
    Vous avez parlé des pays couverts par le Partenariat mondial pour l'éducation. Considérez-vous la possibilité d'accroître le nombre de pays où vous exercez vos activités?

[Traduction]

    Nous continuerions de nous focaliser sur les pays à faible revenu et sur les pays dont le revenu se situe dans la moyenne inférieure. Nous croyons que ce sont ces pays qui ont les plus grands problèmes et les besoins les plus criants.
    Je continue de servir à titre de membre de la Commission internationale pour le financement de possibilités d'éducation dans le monde, et je recommanderais au Comité de s'intéresser au rapport de cet organisme. On y trouve des renseignements très précieux sur les pratiques qui président à l'affectation de l'aide en matière d'éducation. Lorsqu'on regarde cela de plus près, on constate qu'une très grande partie de l'aide internationale est consacrée à l'éducation postsecondaire. Les pays fournissent cette aide sous la forme de bourses pour inciter les gens à venir étudier chez eux. L'Australie le fait, et c'est bien sûr une bonne chose pour ceux qui en profitent. Cela signifie cependant que l'aide qui se rend effectivement jusqu'aux écoles ne compte pas pour grand-chose.
     Lorsqu'on regarde quels pays bénéficient de cette aide, force est de constater que le PME est un organisme d'exception puisqu'il s'intéresse avant tout aux plus pauvres. Alors nous allons poursuivre dans cette voie et continuer de nous focaliser sur les pays à faible revenu et sur les pays dont le revenu se situe dans la moyenne inférieure.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Laverdière.
    Monsieur Levitt, vous avez la parole.
    Madame Gillard et madame Mundy, merci beaucoup de votre témoignage. Je sais que vous avez eu quelques journées bien remplies à Ottawa, sur la Colline. C'est formidable que vous soyez venues nous voir ce matin, avant de rentrer chez vous.
    En ce qui concerne le soutien de 120 millions de dollars sur 4 ans que le Canada a accordé au Partenariat mondial pour l'éducation, je suis heureux de voir qu'il a été utilisé en grande partie pour financer l'éducation de base et la formation des enseignants puisque cela permettra d'assurer que les enfants continueront de recevoir un enseignement de qualité.
    Je me suis aussi intéressé à des aspects plus modestes de l'affection de cette contribution, comme les 2 et 3 % du fonds qui sont allés à la participation démocratique à la société civile et aussi à l'éducation générale en matière de droits de la personne. Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet des initiatives du PME à cet égard et de l'incidence qu'ont ces initiatives sur l'éducation dans ces domaines?
    Je vais répondre en premier, puis Mme Mundy pourra continuer.
    Le modèle du PME vise essentiellement à travailler avec le pays pour élaborer un plan d'éducation qui lui est propre. Pour ce faire, nous faisons appel au leadership des gouvernements parce qu'au bout du compte, ce sont eux qui gèrent une grande partie du système d'éducation et qui doivent planifier l'éducation de tous les enfants du pays.
    Nous avons recours à un processus de planification inclusif auquel participent les représentants de la société civile; nous offrons donc des ressources aux groupes de la société civile des pays en développement afin qu'ils puissent participer à ces processus de planification par l'entremise de ce que nous appelons un groupe d'éducation local. Selon nous, leur participation à ce groupe d'éducation local améliore la planification parce qu'ils connaissent bien le terrain et la situation, et savent ce que veulent les membres de la population, notamment les parents.
    Le groupe d'éducation local participe aussi à la mise en oeuvre du plan afin de veiller à ce que tout se passe comme prévu. Cela nous permet une plus grande couverture et de vérifier si le plan est mis en oeuvre de manière appropriée. Il se peut qu'un gouvernement croie sincèrement que le plan est sur la bonne voie ou qu'il veuille dire au monde qu'il est sur la bonne voie. Le groupe de la société civile travaille sur le terrain et peut parler de ce qui va moins bien. Nous pouvons ensuite travailler avec le pays pour corriger la situation.
    Nous croyons que la société civile joue le rôle de protecteur des ressources en éducation dans les pays en développement, mais nous croyons aussi qu'elle permet d'améliorer la planification et la mise en oeuvre des processus; nous utilisons donc notre fonds pour l'éducation de la société civile à cet égard.

  (0925)  

    Nous appuyons les coalitions de la société civile dans 62 de nos 65 pays en développement partenaires. Ces coalitions jouent un rôle essentiel en matière de responsabilisation sociale en vue d'atteindre des résultats dans le secteur de l'éducation. Elles assurent le suivi budgétaire en vue de réduire la corruption et la fraude au sein du système. Elles jouent un rôle très important en vue de représenter les populations marginalisées. Nous croyons qu'il s'agit d'un élément unique de l'approche du PME. Bien sûr, nous centrons nos efforts sur le gouvernement et le système gouvernemental, mais nous comprenons que ce système doit appartenir à tout le monde. Il faut de nombreux intervenants pour veiller à ce que le gouvernement ait la capacité d'aider les enfants marginalisés.
    Vous avez parlé de l'éducation en matière des droits de la personne et des efforts de promotion du PME à cet égard. Nous investissons beaucoup d'argent dans la mise sur pied des programmes d'éducation et l'élaboration des documents d'apprentissage. Nous vérifions ces documents afin de veiller à ce qu'ils abordent les droits de la personne de manière appropriée. Je crois toutefois que nous abordons un autre volet en matière des droits de la personne. Nous nous engageons à offrir une éducation inclusive — notamment aux enfants handicapés — qui répond aux besoins des filles et d'autres populations marginalisées. Notre plan sectoriel reconnaît l'importance de l'inclusion scolaire. Par définition, l'inclusion scolaire a trait au droit des enfants à une éducation inclusive.
    Merci.
    Je veux revenir sur vos propos, madame Gillard. Vous travaillez dans des zones assez sensibles. Je pense notamment au Burundi, parce que le Sous-comité des droits internationaux de la personne termine une étude sur le pays en ce moment.
    Vous avez parlé de prise en charge par les pays et de leadership. Au Burundi, depuis le début de l'année scolaire 2016, le gouvernement a coupé l'accès à l'éducation à plus de 80 000 élèves. Nous avons entendu des témoignages à ce sujet.
    Comment travaillez-vous...? Vous êtes probablement confrontés à des défis similaires dans d'autres pays, et ces défis sont importants. Comment y faites-vous face ou comment arrivez-vous à réaliser votre mandat dans un pays sans leadership où vous êtes à contre-courant?
    C'est une bonne question. Bien sûr, c'est un travail complexe et il varie selon le contexte. Selon notre modèle, lorsque nous offrons une subvention de mise en oeuvre à un pays, nous désignons un agent de subvention. Ce peut être la Banque mondiale, l'UNICEF, l'Aide à l'enfance ou un des donateurs bilatéraux qui travaillent dans ce pays. L'agent de subvention gère les fonds et les sorties d'argent et s'assure évidemment que nous sommes sur la bonne voie, et que les processus relatifs au groupe d'éducation local suivent leur cours.
    C'est difficile, mais nous avons ainsi la capacité de surveillance et la responsabilité fiduciaire nécessaires. Ce n'est pas la solution à tous les problèmes. Parfois, les circonstances sont trop difficiles; il n'est donc pas sécuritaire pour les agents de subvention de maintenir leur personnel en poste dans le pays. Parfois aussi, malgré toute notre volonté, le gouvernement peut être déterminé à ne pas faire la bonne chose. Le PME, comme le reste de la communauté internationale, est confronté à ces défis, et nous faisons de notre mieux. Nous avons réussi à maintenir notre présence dans certains milieux où les autres organisations s'étaient retirées ou avaient cessé leurs activités. Par exemple, nous avons continué de travailler au Yémen et au Soudan du Sud. Nous avons montré notre capacité de maintenir nos activités même lorsque l'environnement local est très sensible et très difficile.

  (0930)  

    Merci, monsieur Levitt.
    Nous pourrons y revenir, madame Mundy.
    La parole est maintenant à M. McKay. Allez-y, monsieur.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos deux témoins.
    Madame Gillard, il est bon de voir qu'il y a une vie après la politique. Vous en êtes une preuve admirable.
    Dans une autre vie, j'ai rédigé un projet de loi sur l'amélioration de l'aide au développement. Il visait trois objectifs: que l'aide du Canada vise la réduction de la pauvreté, que nous consultions les personnes qui reçoivent l'aide et que nos activités respectent les normes internationales en matière de droits de la personne. Il prévoyait aussi que dans les six mois suivant la fin de l'exercice, il fallait démontrer qu'on avait respecté le projet de loi. Le gouvernement précédent n'était pas très chaud à cette idée, notamment parce qu'il est difficile de mesurer l'efficacité de l'aide au développement.
    Comme tous les gouvernements visent certains objectifs politiques précis en matière d'aide au développement, comment établissez-vous la relation avec le gouvernement du pays bénéficiaire afin de pouvoir mesurer l'incidence des interventions? Est-ce qu'il arrive que vous constatiez que l'argent n'est pas dépensé efficacement?
    Je vais laisser Mme Mundy répondre à cette question. Je crois qu'elle voudra aussi vous parler de notre travail dans les milieux difficiles.
    J'aimerais seulement dire une chose, à propos du Conseil. Nous travaillons avec les pays à la préparation d'un plan d'éducation et nous nous servons de ce plan pour déterminer si nous allons octroyer une subvention. Il faut pour cela que le plan prévoie une augmentation des ressources nationales et qu'il soit robuste. Il est arrivé que le Conseil décide que le plan présenté n'était pas suffisant et qu'aucune subvention ne serait octroyée si le plan n'était pas amélioré. Le PME a donc une idée bien précise et n'investira pas dans des processus de planification insatisfaisants.
    Karen peut répondre à l'autre partie de la question.
    Je crois que pour que l'aide soit efficace, il faut que le développement le soit aussi. L'efficacité en matière de développement nécessite la prise en charge par le pays, mais aussi un engagement à l'égard de mesures et de résultats clairs.
    Le PME a présenté son modèle de financement fondé sur les résultats lors de son dernier réapprovisionnement en 2014, et nous continuons à apprendre comment utiliser ce financement à titre de levier et de mesure incitative pour nos partenaires des pays en développement.
    Chaque pays reçoit une tranche de 30 % de son affectation totale en fonction de ses résultats. Ainsi, le pays doit choisir une mesure claire dans trois domaines: l'apprentissage, l'égalité et l'efficacité. Il doit ensuite faire rapport sur cette mesure. Son rapport est validé par des vérificateurs externes et le pays obtient ensuite un paiement pour l'atteinte de ce résultat.
    Nous avons utilisé ce modèle dans le tiers des pays avec lesquels nous travaillons seulement. Ils n'ont pas encore fait état de leurs résultats, mais je sais que si les pays n'atteignent pas les résultats prévus, nous allons faire preuve de rigidité. Nous n'octroierons pas le financement si les résultats ne sont pas atteints.
    En même temps, nous travaillons très fort pour encourager les gouvernements à choisir des résultats qui sont atteignables et pour veiller à ce que leur plan contienne les bonnes interventions pour atteindre les résultats prévus. Ce n'est pas dans notre intérêt, ni dans celui de qui que ce soit, de ne pas octroyer le financement aux gouvernements, mais nous voulons aider les gouvernements à s'approprier les résultats dans leur plan sectoriel et à les atteindre.
    C'est notre modèle. C'est un modèle unique. Un chercheur s'est récemment penché sur notre modèle de financement fondé sur les résultats et a dit que parmi toutes les organisations similaires, nous étions la seule qui tentait de faire reposer tout un système sur le financement fondé sur les résultats. Nous ne visons pas un seul élément ou un seul programme. Nous tentons de rendre le système plus fort. Nous demandons aux gouvernements de choisir des indicateurs qui redresseront l'ensemble du système. C'est tout tout à fait unique.

  (0935)  

    J'ai assisté à une conférence de Bill Gates à Washington une fois. Ce n'est pas un conférencier très inspirant, disons, mais ce qu'il avait à dire était incroyable. Il est responsable de deux excellentes initiatives: l'une vise la santé internationale et l'autre, l'éducation aux États-Unis. À la grande surprise du milieu de l'éducation des États-Unis, il a vraiment fait bouger les choses, parce que le rendement des investissements dans l'éducation des enfants est faible aux États-Unis.
    Je me demandais si vous étiez associés à la fondation de Bill Gates. Il y en a peut-être d'autres, mais la sienne a beaucoup réfléchi sur l'utilisation efficace du financement.
    Oui, nous entretenons une relation avec la Fondation Gates. La semaine dernière, même, Mme Mundy a parlé à un des spécialistes et techniciens de la Fondation Gates; il y a certainement un échange d'idées qui s'opère.
    À l'heure actuelle, la Fondation Gates n'investit pas dans l'éducation pour le développement. Son travail en matière d'éducation se centre sur le système d'éducation des États-Unis et, bien sûr, les investissements et l'approche de la fondation en ce qui a trait au sida et à la vaccination ont entraîné des transformations profondes. Le travail du Fonds mondial et de Gavi a été transformé depuis que la Fondation Bill et Melinda Gates est leur donateur et partenaire.
    Nous collaborons avec Gavi et le Fonds mondial à la question de la santé et de l'éducation, et tout le monde est d'avis qu'il faut accroître la collaboration. Or, nous ne collaborons pas directement avec la Fondation Gates à l'éducation pour le développement, parce qu'elle n'agit pas à titre de donateur majeur, de philanthrope ou de catalyseur du changement dans ce domaine.
    Merci, monsieur McKay.
    La parole est maintenant à M. Kent. Allez-y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie pour vos témoignages et pour votre excellent travail.
    J'ai deux questions fondamentales à vous poser. D'abord, est-ce que le PME impose une norme à ses pays partenaires? Je sais que votre travail vise principalement l'enseignement primaire, mais avez-vous une norme relative à l'enseignement secondaire ou est-ce que vous travaillez en fonction des normes du pays partenaire?
    Ensuite, ma génération a été bien éduquée même si le numérique n'existait pas encore, mais aujourd'hui, l'informatique est une réalité dans les pays en développement, et, évidemment, dans le monde développé. Est-ce que le numérique fait partie de l'aide que vous offrez ou est-ce la responsabilité d'autres organismes de financement?
    Je vais répondre à la deuxième question. Je laisserais Mme Mundy répondre à la question sur les normes.
    Comme notre travail est axé sur les pays et est géré par eux, le volet numérique varie d'une place à l'autre, selon le degré de développement de chacun. Dans nombre des pays où nous travaillons, les écoles n'ont pas d'électricité, n'ont pas de connectivité et n'ont pas nécessairement d'eau courante ou de toilette pour les enfants. Il y a donc une limite. Cela ne signifie pas que la technologie ne peut pas être utilisée. On peut utiliser la technologie pour certaines formations ou services d'aide aux professeurs, mais on ne pourrait pas envisager une situation où tous les enfants utilisent un appareil et où tous les appareils peuvent être utilisés de manière appropriée. D'autres pays ont franchi une autre étape et sont très intéressés aux nouvelles technologies et à leurs avantages, surtout pour contrer l'éloignement. Si le recours à la technologie est approprié et fait partie du plan d'éducation d'un pays, alors nous allons travailler avec cela.

  (0940)  

    J'aimerais parler un peu de l'innovation, car dans un sens, votre question porte sur l'innovation, comme celle sur le travail que nous faisons avec la Fondation Gates. Cette année, dans le cadre d'un partenariat, nous allons élaborer une stratégie en matière d'innovation, et un des secteurs qui nous intéressent beaucoup, c'est la possibilité de tirer parti de l'innovation numérique, peut-être plus à l'échelle du système que dans la classe même. Nous pensons qu'il y a des possibilités liées à la numérisation et des façons d'obtenir de l'information sur la prestation de services. Votre enseignant est-il à l'intérieur ou à l'extérieur de l'école? Par exemple, nous croyons que les formats numériques, comme les messages textes, offrent des possibilités sur le plan de la formation des enseignants.
    La semaine dernière, lorsque j'ai rencontré les représentants de la Fondation Gates, nous avons parlé des secteurs d'innovation dans lesquels ils considèrent la possibilité — leur décision n'est pas prise, mais ils y songent — d'investir dans l'éducation. Nous avons discuté des secteurs d'innovation dans lesquels nous avons peut-être un intérêt commun.
    Le PME est un organisme de partenariat qui croit beaucoup au principe fondamental de l'efficacité du développement: l'appropriation par le pays. Selon nous, établir une norme internationale et l'imposer aux pays, c'est aller à l'encontre de cet engagement fondamental. Toutefois, nous croyons que les pays doivent mesurer les résultats d'apprentissage afin de suivre leurs propres progrès et, plus important encore, de cibler les ressources pour appuyer les personnes ayant les résultats d'apprentissage les plus faibles. Ce sont invariablement les enfants les plus marginalisés. Ce sont les filles. Ce sont les enfants handicapés.
    Notre objectif par rapport au processus de planification du secteur, que nous appuyons au moyen de nos subventions, c'est toujours de veiller à ce qu'on mesure bien les résultats pour tous les enfants — pas seulement pour les enfants les plus intelligents —, et à ce que les mesures soient axées sur l'apprentissage.
    À l'échelle internationale, nous savons que pour pouvoir mesurer les résultats afin d'atteindre l'ODD 4, il faudra un instrument mondial de mesure de l'apprentissage. Le PME collabore avec l'Institut de statistique de l'UNESCO, basé à Montréal et appuyé généreusement par le gouvernement canadien. Il travaille à l'élaboration d'une méthode complexe pour assurer une certaine équivalence des examens de 5e ou de 6e année, qu'on trouve de plus en plus chez les membres du PME, afin que nous puissions mesurer l'efficacité d'un système d'éducation en fonction d'une cible commune pour les résultats d'apprentissage.
    L'élaboration du mécanisme d'équivalence prendra quelques années. Entretemps, le PME continue d'encourager chaque pays à évaluer les résultats d'apprentissage de ses élèves, pas pour s'en servir comme bâton, mais pour trouver comment cibler les ressources à l'intérieur de son système afin que tous les enfants puissent obtenir de bons résultats.
    Ce sera très excitant, d'après moi, quand chaque pays se sera approprié un test décisif lui permettant de mesurer les résultats d'apprentissage et le succès de son système, et quand tous les pays partenaires pourront tirer des leçons des résultats d'apprentissage afin d'apporter des améliorations.
    Nous allons un peu dépasser le temps prévu, mais chacun aura l'occasion de poser ses questions.
    Je donne la parole à M. Saini, qui sera suivi de M. Kmiec.
    Merci beaucoup à vous deux pour vos témoignages très importants. Ce fut un plaisir de vous rencontrer toutes les deux hier soir.
    Un des thèmes principaux de votre exposé et de vos réponses est l'importance de l'éducation des femmes et des filles. L'éducation sanitaire — parler aux jeunes filles de leurs droits sexuels et génésiques — fait partie de cette éducation.
    Je suis certain que vous connaissez la politique de Mexico de 1984 — aussi connue sous le nom de « règle du bâillon mondiale » —, une politique mise en place par Ronald Reagan. Des présidents républicains l'instituent, des présidents démocratiques l'annulent.
    Dans les premiers jours de l'administration Trump, la règle du bâillon a été imposée à nouveau, mais cette fois, sa portée est encore plus vaste, et elle touche des organismes d'aide actifs, dont beaucoup doivent être vos partenaires. J'aimerais savoir comment vous pourrez accomplir votre travail efficacement. Y a-t-il un problème avec les partenariats que vous avez formés sur le terrain? Je présume que lorsque vous entrez dans une société fragile, il n'y a pas seulement l'éducation, mais aussi la santé, et vous devez coordonner vos systèmes avec ceux des organismes de santé. Quelle incidence cela aura-t-il sur vos travaux futurs?

  (0945)  

    Vous soulevez une question extrêmement importante. Le décret promulgué récemment ne devrait pas avoir d'incidence sur le travail du PME en raison du modèle que nous vous avons décrit aujourd'hui: nous ne sommes pas un organisme qui offre du financement pour qu'une personne se rende dans une école pour donner des cours sur la santé sexuelle et les droits génésiques, et pour transmettre de l'information qui irait à l'encontre du nouveau décret.
    Notre modèle est différent; notre approche et notre financement sont axés sur les systèmes. Nous savons que garder les adolescentes à l'école les protège contre les mariages et les grossesses précoces. Or, bien que la présence à l'école soit un facteur important, il y en a aussi d'autres. Beaucoup des organismes qui s'occupent des autres éléments — qui donnent directement des conseils aux femmes et aux filles au sujet de la santé sexuelle et du contrôle de la reproduction — seront manifestement touchés par l'approche adoptée par la nouvelle administration américaine.
    Le PME n'a pas émis de déclaration officielle à ce sujet, mais personnellement, je trouve cela très regrettable. D'après moi, les faits montrent clairement que lorsque les femmes et les filles n'ont pas accès à de l'information fiable, elles risquent de mourir par suite de grossesses précoces ou de problèmes de santé sexuelle non réglés. Si elles avaient droit à de l'information, elles seraient en mesure de faire leurs propres choix et d'éviter ces fins tragiques.
    Nous investissons dans la santé sexuelle et génésique en appuyant l'alphabétisation des filles mêmes, pour leur permettre d'accéder à l'information. Nous avons investi dans l'élaboration d'un programme éducatif sur les aptitudes sociales et les compétences de vie, mais je ne pense pas que ces investissements seraient soumis à un examen à cause de la nouvelle règle du bâillon.
    L'autre point que vous avez soulevé, un point très important dont on ne parle pas bien souvent, c'est le concept des madrasas, qui sont financées par des pays très riches dans des parties du monde où l'éducation est très importante, particulièrement dans les régions rurales ou éloignées. Lorsque vous entrez dans un pays, surtout un pays fragile comme le Malawi, le Yémen ou le Mali, comment faites-vous concurrence?
    L'éducation est présentée comme étant importante, mais elle est plutôt obsolète. Vous arrivez et vous voulez fournir de l'éducation qui comprend de la numératie et de la littératie. Comment faites-vous concurrence, surtout avec des traditions et des hiérarchies qui sont d'anciens héritages, alors que vous voulez fournir quelque chose qui changera la structure, l'organisation et la façon de penser de la communauté? De quels outils disposez-vous? Quelles compétences employez-vous pour montrer aux gens que ce que nous essayons de faire est bien mieux et bien plus progressiste qu'un établissement du passé, surtout lorsque l'influence vient de pays riches, précisément dans cette région?

  (0950)  

    Cette question est très complexe. Cela dépend vraiment de la situation et de l'attitude du gouvernement.
    Je vais vous donner un exemple dont j'ai été témoin personnellement. Le PME a collaboré avec le gouvernement du Sénégal, qui est maintenant un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. Dans sa planification de l'éducation, le gouvernement a décidé précisément qu'il nouerait des relations avec ces écoles — je pense que là-bas, on les appelle « daara » plutôt que « madrasa », mais c'est le même concept — et qu'il tenterait de les régulariser et de les intégrer dans le système. Si elles font partie du système, elles ont droit à du financement public.
    Dans ce cas-là, je crois que les fonds et les ressources que ces écoles recevaient de la part d'intérêts privés n'étaient pas assez considérables pour que le financement public ne les intéresse pas. Les écoles voulaient avoir droit au financement public; elles étaient donc prêtes à faire le travail d'enregistrement et de conformité nécessaire pour l'obtenir. La leçon que nous pouvons tirer de cet exemple, d'après moi, c'est que beaucoup de ces questions touchent la volonté politique, la réglementation du gouvernement et la structure du système, et ce sont justement les éléments sur lesquels le travail du PME est axé.
    Certaines des écoles en question sont peut-être bien nanties, et je suis d'accord avec vous qu'il y a un problème de concurrence, mais au bout du compte, les gouvernements peuvent réglementer et structurer les systèmes, y compris les systèmes d'écoles non gouvernementales.
    Merci, monsieur Saini.
    Je donne maintenant la parole à M. Kmiec.
    Merci à vous deux de vos témoignages. C'est intéressant de découvrir le travail de votre organisation.
    Je parlais à mon collègue. Un des problèmes que toutes les organisations internationales connaissent, c'est que les gouvernements prennent des engagements, et vous vous attendez à ce qu'ils les respectent et à ce que vous receviez le financement. Je dis que vous travaillez toutes dans le secteur de la perception parce que vous finissez toutes par devoir demander de l'argent ou la chose que vous avez annoncée publiquement et pour laquelle vous devez rendre des comptes. Vous qui avez été politicienne, vous savez que c'est notre fléau.
    J'ai consulté votre site Web. J'ai une question au sujet de l'état des contributions des donateurs. Selon un document qui se trouve sur votre site, en date du 30 septembre 2016, vous n'aviez toujours pas reçu la contribution du Canada et vous attendiez 45,5 millions de dollars des États-Unis. Est-ce toujours le cas? Dans l'affirmative, pourquoi? Quels sont vos plans pour l'avenir relativement aux nouvelles contributions?
    La dernière fois que nous avons reconstitué nos ressources, le Canada a pris un engagement de quatre ans, je crois; il nous versera des fonds sur toute cette période. Nous recevons les contributions du Canada à temps et tel que prévu.
    Pouvez-vous nous en dire plus sur la reconstitution des ressources? Vous avez employé ce terme toutes les deux à quelques reprises. Comment la reconstitution des ressources fonctionne-t-elle? J'ai remarqué que tous vos donateurs sont des gouvernements, à l'exception d'une fondation, la Children's Investment Fund Foundation. Comment fonctionne la reconstitution des ressources? Pouvez-vous nous expliquer ce concept?
    Nous avons ajouté d'autres organismes de bienfaisance récemment, qui appuient surtout le travail de partage du savoir et d'échanges techniques dirigé par Mme Mundy. Nous devrons ajouter ces renseignements sur le site Web.
    La façon dont la reconstitution des ressources fonctionne, c'est que nous créons un moment... Par exemple, je sais que le Canada a accueilli récemment la conférence de reconstitution des ressources du Fonds mondial. Nous organisons un événement mondial semblable, au cours duquel nous demandons à nos principaux partenaires d'annoncer des engagements pour les prochaines années de notre cycle de reconstitution des ressources. En 2014, des gouvernements ont conclu des engagements. Des pays en développement ont aussi pris des engagements et ont annoncé comment ils mobiliseraient les ressources nationales. Nous avons également reçu, à cette occasion, un engagement de la part de la CIFF, l'organisme de bienfaisance que vous avez mentionnée.
    Jusqu'à maintenant, les gouvernements ont toujours tenu leurs engagements. Nous ne nous sommes donc pas retrouvés dans la situation désagréable où de nombreux engagements ont été pris, mais non respectés. Nous avons pu planifier nos dépenses. Nous tiendrons un événement de ce genre à la fin de l'année ou au début de l'année prochaine et nous demanderons aux gouvernements de prendre des engagements.
    Évidemment, tous les gouvernements ne peuvent pas conclure le même type d'engagement. Certains gouvernements peuvent prendre des engagements pluriannuels; c'est ce que le Canada a fait. D'autres, en raison de leurs processus budgétaires, peuvent seulement conclure des engagements d'un an et indiquer ce qu'ils pensent pouvoir donner l'année suivante. C'est le cas des États-Unis. Les engagements pluriannuels sont évidemment très précieux, car ils nous donnent la plus grande stabilité.

  (0955)  

    Merci beaucoup, monsieur Kmiec.
    Chers collègues, je crois que nous allons nous arrêter là. Cette discussion a été très intéressante et utile.
    Madame Julia Gillard, madame Mundy, au nom du Comité, je vous remercie pour vos témoignages très utiles.
    Julia, bien sûr, nous sommes, pour la plupart, des politiciens encore en poste, et c'est toujours agréable de voir une ancienne première ministre accomplir du travail remarquable. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir pris le temps d'être des nôtres ce matin.
    Au nom du Comité, merci beaucoup.
    Merci beaucoup de nous avoir accueillies.
    Chers collègues, nous allons prendre cinq minutes de pause, puis nous poursuivrons à huis clos pour examiner trois points à l'ordre du jour. Nous devrions en avoir pour moins de 30 minutes.
    Merci.
    [La séance se poursuit à huis clos.]
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