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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 131 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 8 février 2018

[Enregistrement électronique]

  (0850)  

[Traduction]

    Bienvenue à tous.
    Conformément à l'ordre de renvoi du lundi 29 janvier et l'article 72 de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité (blanchiment d'argent) et le financement des activités terroristes, le Comité entame l'examen prévu par la loi. Nous allons entendre les premiers témoins dans le cadre de l'examen quinquennal de la loi, examen qui promet d'être une entreprise d'envergure.
    Nous accueillons, du ministère des Finances, Annette Ryan, sous-ministre adjointe déléguée, Direction de la politique du secteur financier; Ian Wright, directeur, Gouvernances et opérations des crimes financiers; ainsi que Maxime Beaupré, directeur, Politique sur les crimes financiers.
    Annette, la parole est à vous. Je crois que vous allez présenter une déclaration liminaire. Nous allons commencer par vous écouter et nous poursuivrons à partir de là.
    Merci d'être venus.
    C'est véritablement un plaisir pour moi de comparaître devant votre comité alors que vous entamez l'examen de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité (blanchiment d'argent) et le financement des activités terroristes. J'utilise aussi le sigle plus connu, soit LRPCFAT pour désigner la loi ou je dis tout simplement « la loi ».
    Aujourd'hui, j'ai l'intention de vous expliquer brièvement combien il est important de combattre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme et de vous présenter les buts et la structure du Régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Je parlerai également du processus d'examen par les pairs internationaux qu'applique le Canada et je décrirai les efforts que nous avons déployés conjointement avec nos partenaires fédéraux et du secteur privé en vue d'évaluer et de renforcer la participation des pairs internationaux. En collaboration avec nos partenaires fédéraux, nous avons résumé toutes ces données dans un document de travail publié hier. Ce document est destiné à appuyer l'examen qu'entreprend actuellement votre comité et nous espérons qu'il sera utile pour alimenter vos délibérations.

[Français]

     Le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes sont des crimes qui facilitent et récompensent la commission d'autres crimes, comme ceux qui sont perpétrés par le crime organisé, par des terroristes ou des groupes terroristes, de même que les actions de ceux qui pratiquent l'évitement fiscal et l'évasion fiscale.
    Ces crimes de nature financière peuvent prendre place au Canada ou à l'étranger, mais ils touchent tous les Canadiens. C'est pour faire face à ces menaces que le Régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité a été établi en 2000 et qu'on y a ajouté le mandat concernant la lutte contre le financement des activités terroristes en 2001.

  (0855)  

[Traduction]

    Le régime est destiné à couper les élans des individus qui cherchent à financer les activités criminelles et le terrorisme en utilisant à des fins criminelles les institutions financières et d'autres entités canadiennes. Il vise également à fournir des outils appropriés aux organismes d'application de la loi afin de lutter contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes tout en respectant les droits des Canadiens à la protection de leur vie privée, et en réduisant au minimum l'obligation pour les entités déclarantes du secteur privé en matière de divulgation.
    Le Canada a une économie stable et ouverte, un système financier accessible et avancé, ainsi que de solides institutions démocratiques. Les individus qui cherchent à blanchir des produits de la criminalité ou à amasser, transférer et utiliser des fonds à des fins terroristes, tentent d'exploiter certaines de ces forces à leur avantage.

[Français]

    Parce qu'ils agissent comme facteurs de dissuasion, il est important d'avoir des régimes efficaces en place afin de lutter contre ces crimes de nature financière et de protéger les Canadiens, l'intégrité des marchés et le système financier mondial.

[Traduction]

    Un cadre législatif et réglementaire solide est nécessaire pour détecter et prévenir les activités criminelles. Ce cadre a évolué et s'est renforcé au cours des dernières années en adoptant et en adaptant les meilleures pratiques internationales s'appuyant sur des évaluations des menaces et des risques à l'échelle nationale et sur une étroite collaboration avec nos partenaires. Cela permet au Canada de respecter ses engagements internationaux dans la lutte contre les activités criminelles et terroristes transnationales et d'apporter de nouveaux renseignements et de nouveaux outils aux efforts de sécurité nationale.
    Le Canada adopte une approche complète et coordonnée visant à lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Le régime fait intervenir 13 ministères et organismes fédéraux, en plus des organismes d'application de la loi des diverses régions du pays.
    Comme je l'ai dit, l'objectif central du régime et de la loi est de détecter et de prévenir les activités criminelles et le financement du terrorisme tout en facilitant les enquêtes et la poursuite de ces activités criminelles. Par conséquent, les objectifs du régime visent tout autant à empêcher l'entrée de fonds illicites dans le système financier canadien qu'à maintenir une piste susceptible d'aider les organismes d'application de la loi dans la détection et la poursuite de ces infractions.

[Français]

     Les entités déclarantes jouent aussi un rôle très important dans l'atteinte de ces objectifs. Il s'agit des institutions financières ainsi que des entreprises et professions non financières désignées, qui sont les gardiens du système financier.
     En vertu de la loi, il leur faut: identifier leurs clients de façon appropriée et tenir des registres de cette documentation; exercer leur devoir de vigilance à l'égard de leurs clients; et surveiller leurs opérations de façon continue et soumettre des rapports obligatoires.

[Traduction]

    Le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, le CANAFE, organisme canadien du renseignement financier, reçoit ces rapports et analyse les informations financières qu'ils contiennent. En outre, le CANAFE est un organisme de réglementation qui a pour mission de faire respecter les obligations que la loi impose aux entités déclarantes.
    Le cadre stratégique contient également des mesures indispensables pour l'application de la loi dans le cadre des efforts destinés à prévenir et déceler le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Ces mesures consistent notamment à exiger une documentation appropriée à laquelle les organismes d'application de la loi peuvent avoir accès sur ordonnance du tribunal. Cela comprend aussi les rapports que reçoit le CANAFE lorsque les soupçons dépassent un certain seuil.
    Une fois que le CANAFE a analysé les rapports, le renseignement financier résultant susceptible de donner matière à des poursuites est divulgué aux organismes d'application de la loi lorsque les soupçons sont suffisamment étayés pour que l'on puisse penser que ces informations seraient pertinentes dans le cadre de l'enquête relative à une infraction de blanchiment d'argent ou une infraction de financement d'activités terroristes. À leur tour, les organismes d'application de la loi et chargés de la sécurité nationale ainsi que d'autres organismes d'enquête, appuyés par les activités de collecte de renseignements financiers menées par le CANAFE, entreprennent des enquêtes sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, sur d'autres actes criminels axés sur la recherche de profits et les menaces à la sécurité du Canada, conformément à leurs mandats individuels, dans le but d'interrompre, de poursuivre et de sanctionner ces activités criminelles.

  (0900)  

[Français]

    Dans ses efforts visant à protéger les Canadiens au moyen des mesures prises pour lutter contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes, le gouvernement du Canada s'est engagé à respecter la répartition des compétences constitutionnelles, la Charte canadienne des droits et libertés, ainsi que le droit des Canadiens à la protection de leurs renseignements personnels.
     Bien que la loi exige que de l'information financière de nature privée soit fournie au CANAFE, elle contient aussi des dispositions strictes qui visent à s'assurer que les droits en vertu de la Charte et en matière de protection des renseignements personnels sont protégés.

[Traduction]

    La LRPCFAT précise l'information que le CANAFE peut recevoir et divulguer. La loi mentionne les organismes d'application de la loi et les organismes de renseignement précis auxquels le CANAFE peut divulguer son renseignement financier. La loi limite aussi les circonstances dans lesquelles le CANAFE peut divulguer de l'information à ces organismes. Le CANAFE doit avoir des motifs raisonnables de penser que l'information est pertinente à une enquête ou poursuite à l'égard d'une infraction liée au blanchiment d'argent, au financement d'activités terroristes, ou pertinente à l'enquête sur des menaces à la sécurité du Canada. Contrairement aux autres organismes de renseignement, le CANAFE ne mène pas d'enquête. Cet ensemble de garanties fait en sorte que le CANAFE demeure indépendant des organismes d'application de la loi.

[Français]

    Depuis la promulgation de la loi, en l'an 2000, le régime a fait l'objet de deux examens parlementaires, de trois examens du Commissariat à la protection de la vie privée et de plusieurs évaluations externes. Ces exercices ont contribué au développement de modifications du cadre législatif visant à répondre à l'évolution des menaces et à mieux soutenir les efforts des forces de l'ordre. Au fil du temps, le cadre a évolué pour permettre l'ajout de nouvelles entités déclarantes et de nouveaux destinataires pouvant recevoir les renseignements du CANAFE et pour approfondir les obligations existantes ou en ajouter de nouvelles.

[Traduction]

    Comme je l'ai mentionné, un cadre efficace est essentiel à la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes au Canada et dans le monde. Ces opérations malveillantes font fi des frontières nationales et les régimes nationaux stricts de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes renforcent l'intégrité et la stabilité des secteurs financiers du monde. En raison de l'interconnectivité du système financier, la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes peut souffrir de la faiblesse de certains liens dans la chaîne des efforts entrepris par les autorités nationales.

[Français]

     Le Groupe d'action financière, le GAFI, est un organisme intergouvernemental qui établit les normes mondiales en matière de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes. Le GAFI surveille la mise en oeuvre de ces normes par les États au moyen d'évaluations mutuelles et de la publication de rapports publics, afin de faire en sorte que tous les pays membres soient jugés sur un pied d'égalité. Le Canada est un membre fondateur du GAFI et participe toujours activement à ses travaux.

[Traduction]

    En 2016, le Groupe d'action financière a publié un rapport d'évaluation mutuelle du Canada. Globalement, le rapport souligne que le Canada dispose d'un ensemble solide de lois et de règlements sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et que le régime est efficace. Cependant, des faiblesses ont été observées et le rapport note certains secteurs où des mesures techniques pourraient être appliquées pour que le cadre respecte les normes internationales afin d'être encore plus efficace.
    Selon le rapport, le Canada comprend bien les risques auxquels il est exposé en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, et la collaboration et la coordination sont en général adéquates sur le plan des politiques et des opérations. En outre, le rapport considère que le Canada dispose d'institutions financières qui ont une bonne compréhension de leurs risques et obligations et qui appliquent généralement des mesures adéquates d'atténuation. Le rapport estime que le Canada a des entités déclarantes qui sont généralement soumises à un cadre approprié de surveillance sensible aux risques; un renseignement financier utilisé par les organismes d'application de la loi pour faciliter les enquêtes, pour donner la priorité à des poursuites en cas d'activités de financement du terrorisme et pour fournir une assistance juridique mutuelle et utile, ainsi que dans les cas d'extradition; un régime de sanction global contre l'Iran et la République populaire démocratique de Corée.
    Cela étant dit, le processus d'évaluation mutuelle a permis de repérer certains secteurs du régime canadien qui pourraient être améliorés. C'est le cas notamment de la disponibilité limitée d'informations précises sur la propriété effective pouvant servir aux autorités compétentes; du fait que la profession juridique n'est pas assujettie à la LRPCFAT au Canada; du fait que d'autres secteurs vulnérables ne sont pas couverts. C'est le cas par exemple des sociétés de financement et de crédit-bail, ainsi que des prêteurs hypothécaires non réglementés. Le rapport relève également une lacune dans l'application des obligations de la loi relativement aux personnes politiquement vulnérables, que l'on désigne par le sigle PPV, soit les dirigeants des organisations internationales, et aux exigences en matière d'information sur la propriété effective dans le secteur des entreprises et professions non financières désignées. L'évaluation internationale a noté également la nécessité d'enquêter davantage sur le blanchiment d'argent et de multiplier les poursuites, en particulier sur les stratagèmes plus sophistiqués de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, notamment les infractions commises par des blanchisseurs d'argent professionnels tiers. Je souligne également que le rapport estime que les pénalités prévues en cas d'infractions à nos lois ne sont pas assez proportionnelles ni dissuasives.
    Les conclusions de l'évaluation mutuelle sont les bienvenues et elles confirment dans de nombreux cas les points de vue présentés par nos partenaires fédéraux et d'autres intervenants du secteur privé. Nos partenaires fédéraux ont notamment présenté leurs points de vue dans le document intitulé Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada, rapport publié en 2015.

  (0905)  

[Français]

    Sachant que cet examen parlementaire aurait bientôt lieu, nous avons travaillé de concert avec nos partenaires afin de préparer un document de discussion soulignant des champs d'investigation potentiels qui pourraient permettre d'améliorer le cadre législatif.

[Traduction]

    Les orientations législatives possibles présentées dans le rapport publié hier s'inspirent grandement de l'évaluation mutuelle et sont organisées autour de cinq thèmes. Le premier concerne les lacunes législatives et réglementaires. Le deuxième porte sur l'amélioration de l'échange de l'information superposée à la protection des droits des Canadiens. Le troisième vise le renforcement de la capacité de renseignement et de l'exécution de la loi. Le quatrième porte sur la modernisation du cadre et de sa surveillance. Le dernier thème se rapporte aux définitions et dispositions administratives.

[Français]

    Le gouvernement a déjà commencé à agir sur la base des grandes orientations tracées dans le document. Par exemple, à leur réunion de décembre 2017, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux des Finances se sont engagés à collaborer avec leurs collègues ministériels respectifs afin de modifier les lois en place pour améliorer la transparence des sociétés, pour les obliger à détenir de l'information sur leurs propriétaires effectifs.
     Ces efforts permettront aux autorités compétentes de suivre la trace des transactions douteuses à travers les couches d'opacité jusqu'aux personnes physiques qui sont à l'origine de ces transactions ou qui en bénéficient.

[Traduction]

    Nous pensons que le Comité entendra des représentants de la société civile et du secteur privé et que les différentes parties exposeront des points de vue différents quant à la façon d'atteindre l'équilibre approprié entre les objectifs parfois conflictuels au sein du régime. Il faut trouver le bon équilibre entre les efforts visant à réduire le fardeau des entités déclarantes qui sont en première ligne dans la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes; l'utilisation de l'innovation afin de mettre en place de nouvelles façons de respecter les obligations tout en réduisant le fardeau du secteur privé; les efforts pour contrer les menaces nouvelles et changeantes, y compris de nouvelles mesures et des normes internationales renforcées afin d'améliorer la sécurité des Canadiens; les efforts visant à garantir activement les droits à la vie privée et les protections constitutionnelles des Canadiens en gardant constamment à l'esprit les limites et les contraintes qu'ils entraînent.
    Alors que vous êtes sur le point d'amorcer vos délibérations, nous tenons par ailleurs à préciser que toutes les améliorations que l'on souhaitera apporter au régime ne nécessitent pas des changements législatifs. Dans notre document de travail, nous présentons des exemples concrets qui illustrent de nouvelles façons pour le secteur public de collaborer avec ses partenaires du secteur privé afin de moderniser nos efforts et d'en améliorer l'efficacité. Le Projet Protection en est un exemple. Il s'agit d'une initiative du secteur privé visant à combattre la traite de personnes. Le Projet Protection a mobilisé des partenaires au sein des autorités existantes afin de mettre au jour les transactions particulières caractéristiques des crimes liés à la traite de personnes dans le commerce du sexe. Cette initiative a permis d'obtenir des résultats concrets utiles pour les organismes d'application de la loi. Ce modèle a été appliqué à d'autres types de criminalité et a permis de mener à bien des enquêtes dans différents types d'activités liées au trafic de drogue. Au cours des dernières semaines, le CANAFE a lancé une nouvelle alerte opérationnelle ciblant le trafic de fentanyl.

  (0910)  

[Français]

     En conclusion, il est important que le Canada reste activement engagé dans la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Cela nécessite que notre cadre continue d'évoluer afin de demeurer robuste et efficace, de répondre aux nouvelles menaces et vulnérabilités et de respecter les normes internationales.

[Traduction]

    Nous appuyons sincèrement le processus d'examen parlementaire. Nous avons travaillé en étroite collaboration et avec succès avec des partenaires nationaux et internationaux afin d'évaluer les mesures tangibles qui permettront d'intervenir dans le secteur toujours changeant du crime de nature financière. Notre document de travail fait état des secteurs où des mesures doivent être prises. Nous sommes prêts à appuyer vos délibérations, à entendre ce que vous pensez de notre travail et à découvrir les priorités que vous fixerez en matière de mesures à prendre.
    Monsieur le président, je vous remercie de votre attention et je me tiens prête à répondre aux questions.
    Merci, madame Ryan.
    Avant de passer aux questions, je tiens à préciser que le document intitulé Examen du Régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes est disponible sur notre site Web depuis hier. Je ne crois pas que les députés ont eu le temps de le consulter en profondeur. Je sais qu'il contient énormément d'informations et qu'il nous faudra sans doute vous demander de revenir témoigner, une fois que nous aurons entendu d'autres témoins. Je pense que nous serons alors mieux préparés et que nous connaîtrons mieux ce document particulier. Je sais qu'il aborde un grand nombre de domaines. Il est fort probable que nous devrons y revenir plus tard.
    Je rappelle également aux membres du Comité que la liste de demandes de témoins sera close dans une semaine à compter de demain.
    Je donne maintenant la parole à M. Fergus qui dispose de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Ryan, je vous remercie d'être venue aujourd'hui pour lancer nos discussions à propos de la loi que l'on peut facilement désigner, comme vous l'avez souligné, par le sigle LRPCFAT.
    Commençons par des considérations générales, puisque, comme l'a dit le président, nous n'avons pas encore eu l'occasion de nous familiariser avec le document de travail. À première vue, il me semble que nous sommes aux prises avec un objectif triple. D'une part, nous avons une obligation à l'égard des droits à la protection de la vie privée; d'autre part, nous avons l'obligation de réduire le fardeau administratif; enfin, nous devons aussi lutter contre le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes. Pouvons-nous atteindre conjointement ces trois objectifs?
    Si cela s'avère impossible, dans l'état actuel des choses, comment serons-nous les plus efficaces dans la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes? Quelle mesure devons-nous prendre pour nous mettre au diapason des normes internationales?
    Merci pour cette question qui touche un point sensible du régime. Nous parvenons actuellement à maintenir un équilibre entre la protection de la vie privée, le fardeau administratif et les résultats.
    J'aimerais souligner la grande efficacité du régime actuel dans la prévention des activités criminelles et terroristes grâce à l'information financière obtenue par ce système de renseignement. Les points que nous avons soulevés dans le document de travail et qui seront évoqués par vos témoins, concernent le renforcement de ce régime, de sa législation et de la collaboration entre les partenaires dans un contexte en constante évolution.
    Nous pensons qu'il est possible de prendre des mesures concrètes qui nous aideront à progresser. À la base, cet environnement dynamique nous donne aussi la possibilité de nous améliorer, par exemple en utilisant la technologie. De par sa nature même, le renseignement financier est un système d'opérations qui peut être interrogé, évalué et qui peut nous apprendre des choses intéressantes. Pour détecter les différents modèles d'opération, on peut faire appel aux algorithmes et à toutes les techniques modernes susceptibles de nous aider à utiliser l'information de manière efficace.
    L'objectif est de disposer d'une base de données cohérente et complète qui pose les bonnes questions et qui est structurée de la bonne manière, afin que nous puissions disposer d'une chaîne efficace de renseignements à transmettre aux organismes d'application de la loi afin qu'elle puisse servir par la suite à intenter des poursuites avec succès.
    Nous avons présenté nos meilleurs conseils et nous attendons avec impatience les commentaires du Comité.

  (0915)  

    Merci.
    Comme vous l'avez signalé, le Groupe d'action financière a précisé que le Canada a bien réussi à mettre plusieurs éléments en place, mais que certaines faiblesses ou vulnérabilités demeurent encore. C'est comme cela que vous l'avez dit, je crois. Qu'il s'agisse de la question des personnes politiquement vulnérables ou de celle de la propriété effective, il me semble que si nous voulions creuser plus profondément la question de la propriété effective, nous nous heurterions à la notion de protection de la vie privée et à nos pratiques internationales, car nous ignorons combien de chemin nous pourrions parcourir sans que nos autres partenaires sur la scène mondiale ne nous emboîtent le pas.
    Voilà une autre excellente question. L'intérêt que porte la communauté internationale au blanchiment d'argent et au financement des activités terroristes est actif, robuste, réfléchi et il apporte un niveau élevé d'excellence à ces questions.
    Le conseil que nous avons reçu du Groupe d'action financière se rapporte exactement aux objectifs que vous avez mentionnés: intégration des efforts mondiaux et capacité à vérifier qu'il n'existe pas de maillons faibles dans la chaîne des pays membres.
    La collaboration avec le GAFI nous a permis de recevoir des conseils concrets concernant les points auxquels nous devions être attentifs pour pouvoir demeurer conformes aux normes internationales. Le GAFI a déterminé les secteurs où nous devrions agir en priorité. Comme vous l'avez dit, c'est la question de la propriété effective, essentiellement pour que les mauvais joueurs ne puissent se dissimuler derrière une structure de société pour faire transiter des fonds. Cela revient à s'assurer que notre régime ne comporte pas de lacunes importantes.
    À la suite d'une décision rendue par la Cour suprême en 2015, le secteur juridique n'est actuellement pas couvert par notre régime. Il est important pour nous d'être en mesure de surveiller de manière globale les opérations menées habituellement par des acteurs malveillants. L'exclusion des avocats représente une lacune importante pour nous, car la constitution de sociétés fait partie de leur travail. Ils entérinent des transactions importantes et cette lacune dans le système crée une brèche stratégique que les criminels et les individus qui cherchent à transmettre des fonds aux terroristes peuvent exploiter sans vergogne.
    Nous avons contribué à l'élaboration de ces normes internationales. Nous y adhérons profondément et nos partenaires nous ont indiqué sur quels points le Canada devrait mettre l'accent pour mieux se conformer aux efforts internationaux et atteindre de façon plus efficace nos objectifs nationaux visant à protéger la sécurité des Canadiens.
    Merci, Greg.
    Monsieur Albas.
    Merci, madame Ryan. Je reconnais le travail que vous et votre ministère accomplissez pour la population canadienne. Je suis heureux également que nous puissions étudier en profondeur le document qui a été affiché sur notre site Web hier, ainsi que l'a mentionné le président. Pour ce qui est d'aujourd'hui, je pense que vous avez très bien exposé certaines questions.
    Vous avez souligné à juste titre que le CANAFE fait face à un angle mort dans le cas des prêteurs hypothécaires non réglementés par le gouvernement fédéral. L'étude consacrée à l'habitation en a fait la démonstration très nette. Certains députés se souviennent peut-être de la question posée par le député Grewal à propos de certaines transactions effectuées avec de l'argent comptant, et vous aviez des statistiques. Tant la SCHL que le BSIF ont confirmé que nous n'avons pas accès à ce type de données. Il y a un organisme qui a accès à ces données et c'est le CANAFE, bien que ces données soient disponibles seulement sur la base de transactions individuelles.
    Si je comprends parfaitement qu'il est nécessaire de protéger le caractère confidentiel des données personnelles, je pense que beaucoup de données pourraient être rendues publiques si elles étaient regroupées. Il est très louable de s'assurer que les transactions ne sont pas liées à des activités terroristes ou au crime organisé, mais il serait néanmoins très utile sur le plan social de pouvoir regrouper les données afin d'avoir une meilleure compréhension, en particulier dans le secteur des prêts hypothécaires actuellement non réglementé par le gouvernement fédéral.
    Est-ce que vous pensez qu'il s'agit d'un secteur que nous pourrions examiner, nous autres parlementaires?

  (0920)  

    Je suis d'accord avec vous sur beaucoup de points que vous avez soulevés. Le secteur immobilier pose véritablement problème, même si le régime impose déjà une série d'exigences dans ce secteur.
    Je vais d'abord souligner les efforts entrepris par le CANAFE pour augmenter la conformité avec ces exigences existantes. Le CANAFE collabore activement avec le secteur de l'immobilier afin que ce dernier soit conscient de ses responsabilités et qu'il fasse ses rapports au CANAFE de manière plus diligente.
    Quant à la meilleure façon de regrouper et d'évaluer les données afin d'éviter les angles morts et autres sujets de préoccupation, cela nous ramène au premier effort en vue d'obtenir les données, de les faire parvenir au CANAFE et de s'assurer qu'elles sont complètes. Pour ce qui est de l'étendue des données, nous savons que le secteur immobilier n'est pas intégralement couvert. Dans la mesure où nous pouvons intercepter toutes les opérations qui semblent présenter un intérêt, toutes les opérations effectuées à l'aide d'argent en espèces sont particulièrement préoccupantes. Il nous faut donc obtenir une meilleure agrégation à partir d'une meilleure base de données.
    En vertu de la loi qui le régit actuellement, le CANAFE ne peut agréger les données qu'il recueille. Je vous comprends quand vous dites que nous devons collecter toutes les données pour avoir un régime efficace.
    Permettez-moi de rappeler que, pour de nombreux agents immobiliers que j'ai rencontrés, le CANAFE est une véritable plaie. Ils détestent la paperasse qu'il faut remplir, même s'ils comprennent pourquoi ils doivent le faire. Beaucoup de gens seraient contents ou tout au moins se sentiraient mieux de savoir que ces informations qu'on leur demande contribuent à assurer la sécurité des Canadiens, mais également à mieux informer les décideurs. J'espère vraiment que vous le signalerez au CANAFE et à votre ministre car c'est une véritable occasion pour nous de commencer à utiliser ces données.
    Cependant, je reconnais avec vous que l'exemption accordée par la cour à un vaste secteur pose un sérieux problème. Notre comité a entendu de nombreux avocats ou... Je ne sais pas s'il y a un avocat parmi nous aujourd'hui, mais je crois bien qu'un avocat reconnaîtrait la nécessité d'avoir un meilleur équilibre que celui qui existe aujourd'hui. Je peux facilement comprendre cela.
    Vous avez parlé de notions telles que la propriété effective. Je suis content que le gouvernement se penche là-dessus, car je pense qu'il y a là un problème. Lors d'une récente allocution prononcée à Transparency International, M. Eby, nouveau procureur général de la Colombie-Britannique, a déclaré qu'il avait eu connaissance d'activités à grande échelle de recyclage transnational des produits de la criminalité dans les casinos de la Colombie-Britannique.
    Pouvez-vous nous dire si, à votre connaissance, cette assertion est exacte? Dans l'affirmative que faisons-nous pour lutter contre cette pratique?
    Nous avons également lu attentivement l'allocution du procureur général et nous sommes très préoccupés par le nombre de défis qu'il a soulevés. Le CANAFE collabore étroitement avec le secteur des casinos, en particulier en Colombie-Britannique, afin d'enquêter sur les allégations relatives à de telles activités dans la province.
    Je laisserai le soin à mes collègues du CANAFE de vous exposer les efforts entrepris dans ce secteur qui pose de véritables défis.

  (0925)  

    Croyez-vous qu'il s'agit d'un problème propre à la Colombie-Britannique ou pensez-vous que ce phénomène sévit à l'échelle nationale ou plus spécialement dans certains centres particuliers?
    Je dirais que ce secteur soulève régulièrement des préoccupations et que des efforts sont faits pour assurer le respect complet des exigences du régime, sans oublier que des mesures appropriées sont mises en place pour poursuivre l'examen de cette question.
    Très bien. Monsieur le président, j'ai l'intention de poser des questions plus précises à un autre moment, mais je vais terminer en abordant un autre sujet. De nombreux Canadiens envoient de l'argent à l'étranger. Souvent, ils ont de la famille dans un autre pays. J'aimerais simplement savoir si vous avez l'intention d'inclure ce type d'opération dans la proposition actuelle visant à examiner les activités de blanchiment d'argent, étant donné que nous devons resserrer notre propre régime au Canada. Mon intention n'est pas de dénigrer certains groupes, mais il est clair que de grandes sommes d'argent sont envoyées à l'extérieur du Canada. Par ailleurs, je veux savoir si le gouvernement s'efforce lui aussi de ne pas ajouter aux problèmes d'un autre pays et s'il prend les mesures nécessaires pour s'assurer que les sommes d'argent en provenance du Canada sont soumises à des contrôles, plutôt que d'entrer sans problème dans l'autre pays.
    Si vous voulez une réponse brève, je dirais que c'est absolument le cas. Cela témoigne de l'intégration des efforts internationaux pour s'assurer de la compatibilité de nos systèmes et nous accordons beaucoup d'attention à ce type d'opérations, à la fois par l'entremise du secteur officiel des institutions financières et au niveau du secteur des entreprises de services monétaires. Quand vous prendrez connaissance de notre document, vous noterez que nous avons accordé beaucoup d'attention au secteur des services monétaires dans les divers examens réalisés. Nous sommes absolument convaincus que, pour être efficaces, nous ne devons jamais perdre de vue ce secteur.
    Merci à tous les deux. Je précise pour votre information, que des représentants du CANAFE témoigneront devant notre comité mercredi prochain.
    Je voulais m'assurer qu'ils soient fins prêts, monsieur le président, qu'ils sachent que nous allons poser des questions qui peut-être... À vrai dire, ils vont se contenter d'indiquer ce que la loi les autorise à faire. Ces gens-là vont faire des suggestions aux administrateurs comme le ministre des Finances à propos de ce qu'il serait raisonnable d'examiner. Alors, je profite de cette occasion.
    C'était un bon échange.
    Monsieur Dusseault.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie de votre présence ici aujourd'hui pour cette première réunion sur le sujet. Justement, comme je n'aime pas travailler pour rien et que j'aime obtenir des résultats, ma première question vise à d'obtenir un suivi des deux derniers rapports qui ont été déposés, en 2006 et en 2013. Dans un rapport, il y avait 18 recommandations et dans l'autre, 16, si ma mémoire est bonne.
    Avez-vous quelque forme d'indication quant au progrès réalisé concernant chacune de ces recommandations? Est-ce possible pour le comité d'obtenir cette information afin de vérifier s'il y a eu un suivi après ces études? Nous allons mener la même étude au cours des prochaines semaines, et je ne voudrais pas que ce soit en vain. J'aimerais donc savoir s'il est possible d'avoir ce genre d'information et un énoncé du progrès accompli par votre ministère relativement à toutes les recommandations des deux derniers rapports?

[Traduction]

    Je vous remercie de cette question.

[Français]

    Afin de vous donner une réponse plus précise, je vais continuer en anglais.

[Traduction]

    Vous trouverez, dans le document de travail, un résumé qui décrit les récents efforts accomplis en vue de faire évoluer le régime. Un certain nombre de ces changements législatifs et réglementaires étaient des réponses au dernier examen parlementaire. L'étude du Sénat comprenait un certain nombre de recommandations concernant également le fonctionnement du régime.
    Je dirais que, dans de nombreux cas, nous avons adopté l'objectif de ce conseil. En pratique, la mise en oeuvre de ces objectifs peut avoir varié, en fonction de différentes réalités du gouvernement et autres. Permettez-moi d'ajouter, monsieur le président, que nous travaillons très fort pour fournir au Comité un certain nombre de documents d"information complémentaires, des chronologies et des résumés des changements apportés au régime au fil des années.

[Français]

     Cela soutiendra vos efforts afin que vous ne travailliez pas pour rien.

  (0930)  

    Ce serait vraiment bien pour la suite des travaux du Comité d'avoir plus de détails sur les progrès et les récents changements à la loi et aux règlements.
    Vous avez parlé de bénéficiaires effectifs. Les entreprises doivent avoir cette information à portée de la main si un organisme de réglementation financière ou une agence gouvernementale la lui demande, ce qui ne fournit pas l'information au public, malheureusement.
    Vous avez fait allusion aux paradis fiscaux. Est-ce que le fait qu'il y a encore dans le monde des pays qui ont un secret financier très important ou des pays extrêmement opaques, desquels il est à peu près impossible d'obtenir des informations, représente un des problèmes les plus importants dans la lutte contre le blanchiment d'argent, au financement du terrorisme et au recyclage des produits de la criminalité?
    À votre avis, à quel point cela serait-il un problème aujourd'hui de pouvoir accéder aux informations en vue de savoir qui est réellement derrière des stratagèmes ou des groupes du crime organisé?
    Selon vous, est-ce que c'est un problème très actuel sur lequel le comité devrait se pencher durant cette étude?
    Je vous remercie de votre question.
    La réponse courte est encore oui.

[Traduction]

    Dans le contexte canadien du recyclage des produits de la criminalité, du financement des activités terroristes et de l'évasion fiscale, nous considérons qu'il faut accorder la plus grande priorité aux enquêtes visant à pallier notre incapacité à connaître les personnes qui se cachent derrière une société. Nos partenaires des provinces et territoires partagent évidemment cette préoccupation. Nous sommes très satisfaits de l'engagement et du sérieux manifestés par nos partenaires provinciaux et territoriaux qui ont pris part aux groupes de travail que nous avons lancés après le dernier processus budgétaire et qui ont siégé au cours des derniers mois. On a pu le constater au moment de la conclusion de l'accord entériné par les provinces et territoires à la table du ministre des Finances, en décembre, de concert avec les ministères responsables des lois sur les sociétés, accord qui apportait des changements aux lois pertinentes pour exiger que les sociétés conservent ce type d'information. Ils ont également accepté d'éliminer les actions au porteur, qui ne sont pas enregistrées, car c'est également une question importante. Cela montre l'importance que toutes les régions accordent à ces problèmes et à la priorité d'agir dans ce domaine.
    Vous avez soulevé une autre question concernant l'impossibilité pour le public d'obtenir cette information. C'est une question que nous continuerons à étudier en compagnie de nos partenaires provinciaux, territoriaux et fédéraux. La première mesure importante à prendre consiste à harmoniser l'obligation pour toutes les sociétés de conserver des registres précisant quel est leur propriétaire effectif. Nous poursuivrons ensuite nos discussions et nos délibérations avec nos partenaires afin de juger de l'utilité d'établir un registre et quelles en seraient les meilleures modalités, ainsi que de trancher la difficile question de savoir si un tel registre devrait être rendu public ou accessible pour les organismes pertinents d'application de la loi et l'ARC.
    J'espère avoir répondu à votre question.

[Français]

     Oui, c'est très intéressant.
    Je pense que ce serait bien de s'orienter de cette manière éventuellement puisque, dans un récent palmarès, le Canada arrivait parmi les derniers en matière d'ouverture et de transparence financières, surtout dans le domaine des entreprises. Notre pays est pratiquement devenu un paradis pour l'enregistrement des sociétés à cause des frais modiques et des formalités très simples. Ce pourrait être correct dans un sens mais, dans un autre, le secret est très grand et certaines provinces ont plus de difficultés que d'autres à rendre l'information accessible et publique. Éventuellement, pour ne plus être un paradis pour ces entreprises, qui ne sont peut-être pas aussi bonnes qu'on pourrait l'espérer, un registre pourrait faire en sorte qu'elles ne s'installent pas au Canada pour ce genre de raisons.
    Comme il me reste un peu de temps de parole, j'aimerais vous entretenir de la question des sanctions monétaires et administratives imposées par le CANAFE. Peut-on s'attendre à ce que sa révision du programme aboutisse bientôt? Certaines sanctions ont été jugées par des cours de justice comme étant parfois excessives. De plus, il y avait tellement d'opacité dans la détermination des montants punitifs que les juges se sentaient dans l'obligation de dire que cela n'avait aucun sens et que les sanctions déterminées se fondaient sur des éléments très suggestifs.
    Est-ce que nous pouvons avoir un rapport sur la progression des discussions à ce sujet?

  (0935)  

[Traduction]

    Voilà une autre excellente question.
    La question des sanctions administratives et monétaires fait l'objet d'une intense discussion, en particulier au CANAFE, mais également avec nos autres partenaires. Il s'agit essentiellement de trouver le juste équilibre entre le pouvoir discrétionnaire et les règles.
    Il s'agit de savoir si le CANAFE peut obtenir de meilleurs résultats en collaborant avec les entités pour les inciter à se conformer et déterminer à quel moment il conviendrait d'imposer des sanctions administratives et de quel montant, par les canaux appropriés et en suivant la procédure établie. Selon moi, ce sont les éléments clés de cette discussion.
    Nous devons trouver le juste équilibre et mettre en place un régime qui saura trouver le bon équilibre entre l'efficacité, la transparence et la conformité.
    Merci à tous les deux.
    À propos des recommandations contenues dans le rapport du Sénat, j'ai déjà posé cette question à un représentant du ministère des Finances. On me dit qu'il est difficile de répondre directement à chaque recommandation, mais pour répondre à la question de Pierre, je pense qu'il serait très utile pour le Comité de savoir le plus exactement possible quelles sont les mesures qui ont été prises pour répondre à ces recommandations, afin que nous n'ayons pas à réinventer la roue, si vous voyez ce que je veux dire.
    Monsieur Sorbara.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à tous.
    J'ai fait une lecture préliminaire et je pense que tous les membres du Comité auront beaucoup de choses à lire au cours des prochaines semaines. La Bibliothèque du Parlement nous a fourni un excellent tableau répertoriant tous les organismes, qu'ils soient fédéraux ou provinciaux. La majorité sont des organismes fédéraux. C'est le cas par exemple de l'Agence des services frontaliers du Canada, du Service canadien du renseignement de sécurité, du Centre de la sécurité des télécommunications et de l'Agence du revenu du Canada. Cela représente beaucoup de ressources et, évidemment, d'énormes effectifs administratifs.
    C'est encourageant de constater que l'on consacre beaucoup de ressources à cette question extrêmement importante du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes. Il est intéressant de noter que la SCHL a fait paraître hier un rapport de 225 pages. J'en ai parcouru les grands titres. Une partie du rapport traite de l'achat de propriétés par des étrangers au Canada.
    Si je reviens un peu à ce que disait M. Albas et à la situation qui existe en Colombie-Britannique surtout, on se préoccupe de la difficulté à établir l'identité des investisseurs étrangers qui achètent des résidences au Canada et à préciser l'origine de leurs fonds. Je vais vous lire un article paru hier dans l'édition du Globe and Mail:
    La Law Society of B.C. a déclaré à la SCHL que la plupart des informations recueillies par les avocats sur l'identité des acheteurs étrangers et la provenance des fonds utilisés pour l'achat de propriétés sont protégées par les lois de protection de la vie privée. Par ailleurs, les avocats ont obtenu une exemption en vertu de laquelle ils ne sont pas tenus de déclarer les opérations financières de plus de 10 000 $ au Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, organisme qui surveille le blanchiment d'argent.
    Malgré tous les effectifs dont j'ai parlé un peu plus tôt, qui utilisent littéralement des dizaines de millions de dollars des deniers publics pour faire des recherches au niveau microscopique, nous sommes incapables de retracer et de connaître la provenance des fonds utilisés par des investisseurs étrangers pour acheter des propriétés immobilières au Canada. Je suis en faveur des investissements étrangers, mais nous ne savons même pas d'où provient cet argent.
    Est-ce que ces informations sont exactes?

  (0940)  

    Le marché de l'immobilier et les diverses autres questions que vous avez soulevées sont au coeur même des enjeux les plus délicats et les plus importants auxquels nous espérons trouver une solution au cours du présent examen et grâce aux changements législatifs qui suivront.
    Je crois que l'on peut dire que les questions que vous avez évoquées se rapportent à l'inclusion des avocats dans le régime et à la capacité de connaître l'identité des propriétaires effectifs d'une société. De nombreuses études sur les transactions immobilières citent le cas de sociétés qui font l'acquisition de biens.
    Quant aux avocats, vous précisez à juste titre qu'ils effectuent des opérations de type financier qui dans d'autres pays font l'objet d'analyses qui tiennent compte du principe du secret professionnel liant un avocat à son client plutôt que du caractère plus transactionnel des informations recueillies par le CANAFE dans le cadre de ses exigences de compte rendu.
    Je reconnais avec le député que ces questions se rapportent à des problèmes graves liés aux objectifs qui nous tiennent vraiment à coeur.
    Dans le cas du secteur immobilier plus particulièrement, j'aimerais signaler les efforts de nos collègues du CANAFE pour travailler en étroite collaboration avec les associations du secteur de l'immobilier afin de rappeler aux agents immobiliers qu'ils ont la responsabilité d'être à l'affût des transactions suspectes et de bien connaître leurs clients — un principe fondamental dans ce secteur. C'est une façon de connaître la provenance des fonds, la nature de la transaction, etc. Il me semble que ces questions sont au coeur même du mandat que s'est donné le Comité.
    De manière générale, je dirais que nous reconnaissons que les problèmes sont graves. Aucun effort n'est ménagé et les ressources mobilisées sont énormes. Le secteur privé consacre d'autres ressources à ce problème. Je crois que nous partageons tous ici aujourd'hui la volonté de disposer du régime le plus global et le plus pertinent possible pour régler ces problèmes.
    Merci.
    Est-ce que je peux poser une question complémentaire?
    La provenance des fonds est très importante pour les habitants de ma circonscription. Ce sont des gens qui travaillent, qui économisent pour faire un paiement initial à l'achat d'une maison. À mon avis, il n'est pas normal que des étrangers, ou des gens qui viennent d'autres régions du monde, puissent acheter une propriété au Canada sans avoir à divulguer la provenance de leurs fonds ni qu'ils soient protégés contre toute obligation de divulgation, alors qu'il y a des Canadiens qui travaillent fort pour économiser en vue de s'acheter une maison...
    En matière de propriété effective, je reconnais que nous devons trouver un juste équilibre entre la protection de la vie privée et l'obligation de divulgation. Mes convictions personnelles m'amènent à penser — elles évolueront peut-être au cours de notre étude — que les autorités pertinentes devraient avoir le droit d'exiger la divulgation, mais que le grand public ne devrait pas nécessairement avoir accès à ces informations.
    J'aimerais vous demander de nous indiquer brièvement ce qui se passe dans les autres pays au sujet de la propriété effective en matière de protection des droits à la vie privée des personnes qui prennent des risques, qui investissent et qui créent de la richesse.
    La propriété effective est une question importante. Je rappelle que nous estimons que les sociétés doivent en premier lieu tenir des documents comptables standardisés qui peuvent être utilisés par des entités chargées de l'application de la loi ou transmis à des institutions financières, comme l'exige le régime actuel. L'accès de ces sociétés au secteur financier est simplement une première étape importante qui nous permettra d'avoir cette discussion.
    À l'échelle internationale, la propriété effective est un secteur qui évolue rapidement. De nombreux pays s'efforcent d'augmenter leurs exigences pour faire en sorte que la propriété effective soit indiquée aux organismes d'application de la loi ou par l'intermédiaire de registres publics.
    Je vais demander à mon collègue Ian de parler des différents pays qui agissent en ce sens, car il est plus actif que moi dans le secteur international. Nous pourrons également faire parvenir un résumé au président.

  (0945)  

    À l'échelle internationale, le Royaume-Uni est actuellement considéré comme un modèle. Il dispose d'un registre public des « personnes exerçant un contrôle significatif ». La loi exige que les sociétés, mais également les actionnaires déclarent leurs avoirs au-delà d'un certain seuil.
    Une directive de la Commission européenne exige aussi que les pays membres créent des registres et l'on se dirige là-bas vers la création de registres publics.
    Comme l'a précisé Annette, nous visons le même objectif. Les Américains agissent aussi dans le même sens en vue d'imposer des exigences relativement à la collecte d'informations sur les propriétaires effectifs.
    À l'échelle internationale, le GAFI regroupe 37 pays. Par ailleurs, il existe un réseau d'organismes régionaux semblable au GAFI qui regroupe 190 pays. Comme vous le savez tous, certains de ces centres financiers internationaux sont à l'origine de divers problèmes. Je pense que l'utilité du GAFI et de notre participation au sein de cet organisme est la suivante: il nous permet de travailler avec ces organismes régionaux et d'exercer sur nos pairs le type de pressions qui nous permettra de constituer un bon réseau mondial pour nous attaquer à ce problème. Il s'agit en effet d'un problème mondial. Nous le savons. Certaines sociétés ont des structures compliquées. Un effort international regroupant les membres de tous ces groupes est indispensable.
    Merci à tous les deux.
    Nous allons maintenant passer à une série de questions de cinq minutes.
    Monsieur Albas.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais poursuivre dans la même ligne que le député qui m'a précédé. Vous avez parlé de « contrôle significatif ». Selon moi, il serait utile dans certains cas, pour des personnes en position d'autorité ou pour le grand public — je me garderai bien de préciser maintenant qui devrait pouvoir accéder aux informations concernant la propriété effective... Mais, dans le cas d'une personne qui détient un bail lui permettant d'exercer une certaine activité commerciale, il n'y a pas, à ma connaissance, de registre officiel des baux au Canada. Par exemple, le propriétaire d'une station-service pourrait louer son installation à un membre du crime organisé qui pourrait par la suite utiliser ce commerce... Est-ce que le registre que vous avez évoqué en parlant de contrôle significatif permettrait d'agir dans ce type de situation?
    En premier lieu, les efforts sont centrés sur le propriétaire effectif d'une société. Actuellement, les lois fédérales et provinciales appliquent des seuils et des concepts différents. Au niveau fédéral, la LRPCFAT fixe le niveau de contrôle à 25 %. Le niveau varie selon que la loi sur les sociétés est provinciale, territoriale ou fédérale.
    Pour répondre à votre question sur les baux, je peux dire que diverses entités et relations juridiques ont été reconnues comme des objets possibles de manipulation. Ce peut être le cas des fiducies, mais aussi des partenariats ou d'autres types d'opérations. Nous sommes bien conscients de l'étendue des relations susceptibles d'être menacées et nous avons pris des mesures en faveur d'une plus grande transparence dans les fiducies.
    Quant à la question plus précise des baux, je propose au Comité qu'on y revienne plus tard et je vais demander à Maxime de répondre.
    J’aimerais ajouter, dans le prolongement d’une réponse déjà donnée par Mme Ryan, que les entités déclarantes sont tenues par la LRPCFAT de bien connaître leurs clients.
    La vérification de l’identité des bénéficiaires effectifs de l’entité doit s’efforcer, dans ce cas particulier, de déterminer à qui appartient la société, mais lorsque l’exploitant de celle-ci instaure une relation d’affaires avec une entité déclarante, cette dernière doit s’assurer de bien connaître son client, y compris ses mandants, et de bien saisir la nature de leurs activités.
    Dans ce contexte précis, la banque devrait bien savoir qui sont les personnes impliquées dans l’entreprise. Cela suppose d’aller un peu plus loin pour tenter de recueillir des renseignements de meilleure qualité sur le propriétaire réel, dans ce cas-ci le propriétaire de la société.

  (0950)  

    Je sais que l’évocation de ces questions suscite un certain malaise, mais, une fois encore, si une personne qui possède un bien et le cède à bail à quelqu’un d’autre sans que cela soit enregistré nulle part, et que cette dernière personne exploite ce bien à des fins de blanchiment d’argent, nous ne le saurons pas en l’absence d’enregistrement officiel de ce bail.
    Je réalise fort bien que, dans le monde contemporain, nous voyons nombre d’ententes de cette nature et les éléments comme les bénéficiaires effectifs de l’entité et l’exercice d’un contrôle réel sont des notions relativement diffuses, et qu’il est difficile d’assurer un minimum de cohérence avec les normes internationales en la matière. Je pense que c’est probablement l’un des domaines dans lesquels le gouvernement pourrait avoir intérêt à étudier plus avant ces questions parce que, une fois encore, si vous apportez des modifications au système, le crime organisé va structurer ses affaires de façon à se conformer aux exigences tout en poursuivant ses activités criminelles.
    J’aimerais maintenant passer à la vitesse supérieure. Dans votre document de consultation, vous avez indiqué que le rapport du GAFI « note qu’en rendant plus proportionnelles et dissuasives les pénalités pour l’infraction de ces lois, la dissuasion face au recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes serait plus facile. » Quelles sont, à votre avis, les pénalités plus lourdes qui conviendraient ici?
    Comme ces questions relèvent davantage du domaine de M. Wright, je le laisse vous répondre.
    Actuellement, si vous examinez les condamnations des gens poursuivis pour blanchiment d’argent et financement d’activités terroristes, vous constaterez que les peines qui leur sont imposées ont tendance à être confondues et que leurs durées se rapprochent de celles qui auraient pu leur être imposées pour le délit sous-jacent passible de poursuites.
    L’un des domaines auquel nous collaborons avec nos collègues responsables de l’application de la loi et des poursuites, qui présente tout un défi, est la difficulté d’enquêter et d’entamer des poursuites dans les cas de blanchiment d’argent. Je crois que le GAFI a estimé qu’il arrive que les accusations de blanchiment d’argent soient abandonnées au profit de poursuites pour les délits sous-jacents, avec pour résultat qu’on parvient à mettre les coupables derrière les barreaux pour une durée appropriée.
    M. Beaupré pourrait vous confirmer que des discussions sont en cours sur le contenu du document pour tenter de résoudre certaines de ces questions ayant trait aux poursuites et à l’application de la loi.
    Monsieur le président, j’aimerais ajouter que nous avons réalisé un examen opérationnel de l’efficacité de notre régime qui nous a amenés à conclure que nous devons, dans ce domaine, aborder les normes en matière de poursuites.
    Actuellement, la norme de preuve que nous exigeons est un lien entre le responsable du blanchiment d’argent et la connaissance discrète du crime sous-jacent. Nous aimerions remplacer cette norme par une norme d’imprudence conduisant à croire qu’il y a un lien entre l’argent et des activités criminelles ou terroristes.
    Je vous remercie.
    Madame O’Connell, nous vous écoutons.
    La Loi d’exécution du budget de 2014 demande à CANAFE de mener des campagnes de sensibilisation du public pour l'amener à participer à la lutte contre le financement du terrorisme. Avez-vous, à la suite de ces campagnes, constaté des améliorations ou enregistré des réussites? Y a-t-il des aspects de ce financement sur lesquels nous devons continuer à nous pencher? Avez-vous observé des résultats tangibles depuis ces campagnes de sensibilisation du public, ou ont-elles permis de mettre en évidence des problèmes additionnels?
    Je suis certaine que nos collègues de CANAFE seraient heureux de vous entretenir de leurs efforts de sensibilisation du public. C’est là une activité importante de CANAFE qui a enregistré des progrès bien réels dans un certain nombre de domaines pour sensibiliser davantage toute une gamme de Canadiens, et en particulier les entités déclarantes, à l’utilité des renseignements qu’ils recueillent dans le cadre de leurs opérations.

  (0955)  

    Vous avez raison. Je leur poserai la question lorsqu’ils comparaîtront devant nous.
    Vous avez évoqué les lacunes dans le cas des personnes politiquement exposées. Pouvez-vous nous préciser quelles sont ces lacunes sur lesquelles nous devrions nous pencher?
    Avec plaisir.
    C’est le Groupe d’action financière, le GAFI, qui a élaboré le concept de personnes politiquement exposées. Il coiffe un risque précis de blanchiment d’argent et de financement des activités terroristes, en particulier dans les cas de corruption. Il joue à la fois un rôle dans l’intégration internationale des normes et des lois, ainsi que dans celle des objectifs nationaux pour s’assurer que des contrôles permettent de détecter et de combattre la corruption.
    Permettez-moi de commencer en vous signalant que, fort heureusement, le Canada est l’un des pays qui comptent le moins de cas de corruption dans le monde. Nous nous classons, parmi 170 pays, au neuvième rang de ceux dans lesquels la corruption ne pose pas vraiment de problème. Toutefois, signaler que toute une série de personnes allant du gouverneur général aux maires, ou aux dirigeants d’organismes internationaux, sont des personnes politiquement exposées, rappelle aux entités déclarantes des institutions financières que, lorsque leurs clients s’adonnent à des opérations soumises à des mécanismes de surveillance, elles doivent disposer des informations qui conviennent pour détecter des comportements propres à des cas de corruption.
    Le rôle essentiel des normes est de nous permettre de disposer d’une base de renseignements permettant l’identification d’un flux de données sur des opérations qui posent problème. C’est là une situation qui se présente plus fréquemment ailleurs dans le monde qu’au Canada, mais dans le cadre de cette intégration et pour l’atteinte d’un objectif national, ce type de renseignements est pertinent et c’est la raison pour laquelle il fait partie des exigences du régime.
    Très bien. Je vous remercie.
    En ce qui concerne la question sur les bénéficiaires effectifs de l’entité, et vous nous avez indiqué que le Royaume-Uni et la Commission européenne se rapprochent en la matière de la norme idéale, il semble, en me fiant la conversation que nous avons eue ici, qu’une partie du problème concerne les avocats. Il semble que nous ayons là une lacune importante, qui laisse des portes ouvertes, et je crois savoir que la décision d’un tribunal a permis qu’une partie de… mais le système juridique du Royaume-Uni n’est pas si différent. Bien évidemment, les lois sont différentes, mais je me demande si le ministère, mais c’est peut-être là une question qu’il vaudrait mieux poser au ministère de la Justice, analyse ce cadre juridique en vigueur au Royaume-Uni qui respecte les critères sans déroger à la législation britannique sur la protection des renseignements personnels. Pourrions-nous nous en inspirer pour combler cette lacune? Une fois encore, leur système juridique n’est pas complètement différent du nôtre. Pourquoi leur règle de droit pourrait-elle combler cette lacune et pas la nôtre ? Y a-t-il un problème de formulation ou un processus qu’il faudrait améliorer et que nous pourrions étudier?
    C’est une excellente question. Nous l’étudions très sérieusement, avec le ministère de la Justice ainsi qu’avec d’autres partenaires.
    Nous prenons également en compte d’autres exemples étrangers qui pourraient nous donner des indications sur la façon de formuler notre réponse à cette affaire judiciaire, sans oublier que la Cour suprême a cité dans sa décision la Charte canadienne des droits et libertés. Il nous faut donc élaborer une solution proprement canadienne, mais nous avons indiqué clairement vouloir parvenir à une solution juridique efficace dans le contexte canadien, tout en ayant des similitudes de structure et d’objectifs avec d’autres pays.
    C’est un sujet que nous n’avons pas encore abordé, mais je crois que les cryptomonnaies seront aussi un sujet important de cette étude. J’imagine que cette question cadre avec vos commentaires sur l’innovation. Vous en parlez dans le volet du contrôle, mais il me semble que ce comité peut convenir dans une certaine mesure que nous devons également nous pencher sur l’innovation dans le volet des activités criminelles. Même si les cryptomonnaies n’avaient pas été mises en place uniquement à cette fin, il semble qu’elles constituent un milieu très propice aux activités criminelles.
    Êtes-vous en mesure de nous faire quelques commentaires ou quelques suggestions sur la façon dont nous pourrions tenter d’englober ces cryptomonnaies dans notre étude?

  (1000)  

    C’est là une autre excellente question, monsieur le président.
    Toute la question des cryptomonnaies, qu’elles soient virtuelles ou numériques, fait l’objet d’une étude très attentive dans le cadre de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.
    Avec votre permission, j’aimerais aborder trois points. Le premier est que nous avons franchi des étapes. Nous avons fait part de notre intention de réglementer le travail des courtiers en monnaies virtuelles afin de ramener tout le monde sur un pied d’égalité dans ce domaine, en agissant sur les modalités des opérations des entreprises de services monétaires, comme l’a indiqué le député, dans le cas des opérations transfrontalières, etc. Vous entendrez parler sous peu des résultats de nos travaux dans ce domaine précis.
    Mon second point est que l’innovation en la matière s’accompagne à la fois de risques et de défis. La difficulté inhérente tient au caractère anonyme de ces monnaies alors que notre régime ne le permet pas. Il faut bien connaître son client. Il y a donc des tensions inhérentes entre la façon dont la nouvelle technologie est utilisée et les exigences du régime. C’est là un aspect du problème auquel nous accordons beaucoup d’attention.
    Cela dit, je crois que la technologie offre une autre possibilité qui a déjà été signalée, soit d’enregistrer l’identité de la personne à l’origine de l’opération. Ce problème de réglementation de la technologie soulève d’ailleurs quantité de discussions. Il s’agit de savoir s’il serait possible, dans une certaine mesure, de se doter d’exigences afin de connaître l’identité de votre client et de veiller à la conformité des opérations avec les objectifs et la structure du régime, de telle façon que lorsque ces technologies évolueront, nous pourrions peut-être alléger les exigences imposées au secteur privé et appliquer toutes les innovations de façon à en retirer tous les avantages qu’elles promettent, tout en dotant tout ce domaine de mesures de sécurité importantes pour faire face aux préoccupations qui sont soulevées.
    Je vous remercie. Nous avons largement dépassé le temps imparti à cette série de questions.
    Monsieur Albas, nous vous écoutons.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Toujours à la suite de nos échanges antérieurs, vous nous avez dit, Madame Ryan, que des régimes comme celui des personnes politiquement exposées semblent bien fonctionner.
    J’ai ouvert un CELI autogéré en passant par une banque virtuelle installée ici, au Canada, et j’ai constaté qu’elle suivait les procédures pour s’assurer que les députés comme moi, bien que je n’ai rien de plus que ma boîte à savon pour menacer le gouvernement… Il est toutefois rassurant d’observer que ces systèmes sont en place et que la banque utilise une liste de vérification. Les Canadiens savent ainsi que leurs députés doivent respecter un seuil plus élevé. Cela me plaît.
    Cela m’a également donné à penser que d’autres entreprises fonctionnent dans certains espaces. À titre d’exemple, il est évident que l’ARC a demandé à PayPal quantité d’informations, parce que le ministère pense que ce service aurait pu favoriser dans une certaine mesure l’évasion fiscale.
    Votre ministère s’est il également intéressé aux modalités de paiement non traditionnelles, comme celles de PayPal ou d’autres groupes, pour voir si ce type de service est utilisé pour le blanchiment d’argent?
    Votre question fait appel à plusieurs concepts différents. D’une part, elle porte sur les personnes politiquement exposées et l’obligation que nous faisons aux entités déclarantes de bien connaître leurs clients et d’exercer un suivi de leurs opérations afin d’être en mesure de déterminer si celles-ci comportent des éléments douteux aux yeux du régime.
    La seconde partie de votre question porte sur des entreprises comme PayPal, qui sont davantage des entreprises de services monétaires étant donné la façon dont la loi et le régime perçoivent les entités déclarantes. Pour vous répondre brièvement, je vous dirai que nous tenons à disposer de cette cohérence et du caractère complet des modalités appliquées par les diverses entités déclarantes, qu’elles soient des banques, des compagnies d’assurances, des entreprises de services monétaires ou d’autres types de…

  (1005)  

    Comme, par exemple, les cartes de crédit prépayées.
    Cela montre, incidemment, que nous essayons de nous tenir informés des modalités des divers types d'opérations coiffées par le régime. Comme l’innovation concerne aussi bien le nombre en augmentation des intervenants que les types d'opérations réalisées par les gens, il nous faut nous tenir informés des effets des opérations internationales et nationales sur notre régime actuel, et c’est là une partie du travail de votre comité que nous apprécions. Cela nous aide à nous assurer que nous restons informés des nouvelles techniques utilisées.
    Vous nous avez dit que nous essayons de nous doter d’une approche canadienne, tout en collaborant avec la communauté internationale, alors que j’aurais espéré que nous cherchions à jouer un rôle de leader. Y a-t-il des pays que vous pourriez citer comme de bons exemples et dont vous pourriez dire « Celui-ci a fait du bon travail dans ce domaine et nous pourrions peut-être voir si nous pouvons adapter son approche au contexte canadien » ? À votre avis, y a-t-il des régimes précis que le Canada devrait examiner? Pensez-vous que nous sommes des leaders dans ce domaine? Je m'intéresse vivement aux leçons à tirer des expériences des autres régimes.
    Je suis tout à fait d’accord. En ce qui concerne les domaines dans lesquels le Canada a fait preuve de leadership, je crois que le Projet PROTECT constitue un exemple important de la façon dont les régimes continuent à évoluer. L'analyse de flux précis d'opérations concernant des types très restreints d’activités criminelles pour, ensuite, réutiliser cette information pour détecter des opérations douteuses en protégeant les renseignements personnels des Canadiens est un domaine dans lequel on observe quantité d’innovations, y compris d’origine canadienne.
    Cela dit, il est tout à fait vrai que nous pouvons toujours apprendre des autres pays. Je crois qu’on peut s’intéresser à de nombreux exemples, mais comme l’a rappelé votre collègue, le régime en vigueur au Royaume-Uni est assez similaire à celui du Canada et adopte des innovations dont nous suivons attentivement la mise en œuvre. Ce pays s’est doté d’une variante de notre Projet PROTECT, le projet JMLIT, que, à mon avis, les membres du comité trouveront intéressant. D’autres pays sont également actifs dans ce domaine et le Canada peut en tirer des enseignements. On pense ici en particulier à l’Australie et à la Nouvelle-Zélande qui se trouvent dans des situations similaires à la nôtre. Les Américains travaillent aussi sur ces questions, et tous les modèles mis à l’essai ont leurs propres innovations. Ce sont là, à mon avis, les pays dont les régimes sont les plus proches du nôtre.
    Je vous remercie. J’en suis bien conscient. Le régime en vigueur au Royaume-Uni semble présenter quantité d’éléments intéressants dans la façon dont il s’attaque à la cybercriminalité et à d’autres délits du même genre. Je trouve très bien que nous étudiions comment les choses se passent dans d’autres pays ayant des valeurs comparables au nôtre et confrontés à des conditions similaires.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Wright, avez-vous quelque chose à ajouter?
    J’ajouterai simplement que nous sommes très actifs dans ce domaine. C’est lors de la réunion du G7 à la fin des années 1980 que les éléments qui devaient constituer le GAFI ont pris forme. Nous sommes toujours très actifs dans ce domaine. Nous rencontrons régulièrement nos collègues des pays membres du G7 parce que nous avons tous le même intérêt pour ces questions et nos discussions sont très animées. Nous discutons également très régulièrement de ces questions avec nos collègues du Groupe des cinq. Nous nous efforçons d’amener à ces discussions des personnes ayant le même type d’approche pour parvenir à donner des orientations précises au GAFI.
    Très bien. Je vous remercie.
    Nous allons maintenant entendre M. Grewal, et ensuite M. Dusseault.
    Je tiens à remercier les témoins d’être venus nous rencontrer aujourd’hui.
    Quelle est l’ampleur du blanchiment d’argent au Canada? Combien de cas ont vraiment donné lieu à des poursuites devant les tribunaux et combien de personnes ont été condamnées au cours, par exemple, de la dernière décennie?
    On a essayé à plusieurs occasions de chiffrer le montant du blanchiment d’argent. Ce montant se situerait entre 5 et 20 milliards de dollars, mais force est de reconnaître que nous ne pouvons chiffrer les opérations que nous ignorons. Si nous pouvions identifier les opérations de blanchiment d’argent, nous pourrions alors nous efforcer de détecter ce type d'opérations et de dissuader leurs auteurs de s’y adonner. C’est un montant important au point qu’il constitue une menace. Nous avons publié une évaluation nationale des risques inhérents au blanchiment d’argent et au financement du terrorisme afin de réussir à parler de façon plus qualitative de la nature de cette menace et de son intensité. Je vous invite à vous reporter à cette évaluation.
    Dans les cas de blanchiment d’argent et de financement des activités terroristes, le nombre de poursuites est relativement faible en regard des attentes des gens. M. Wright a abordé précédemment les conclusions du Groupe d’action financière qui soulignent qu’il est assez fréquent que les organismes d’application de la loi utilisent des renseignements financiers recueillis dans le cadre du régime pour cerner les crimes sous-jacents, et il leur arrive ensuite fréquemment de poursuivre ces crimes sous-jacents plutôt que le blanchiment d’argent ou le financement d’activités terroristes.
    Il me semble que nous avons là une forme de mesure indirecte de la réussite…

  (1010)  

    Oui. Je pose la question parce que les organismes qui cherchent à détecter les opérations de blanchiment d’argent et de financement d’activités terroristes reçoivent chaque année 70 millions de dollars de fonds publics. La question que se pose alors naturellement le décideur que je suis vise à connaître le rendement de ces investissements. Quel montant a été récupéré à même les marchés financiers? Combien de dossiers avons-nous soumis aux tribunaux? Combien de personnes ont été accusées de ces infractions? Lorsque nous analysons toute cette situation au niveau macro, je ne crois pas que quiconque conteste auprès de vous la nécessité de mécanismes de protection, en particulier dans le milieu global dans lequel nous vivons, mais il faudrait tout de même savoir concrètement quel est le rendement de ces investissements au Canada pour nous assurer que nous sommes sur la bonne voie.
    Ma seconde question porte sur le plafond de 10 000 $ en espèces qu’une personne peut transporter en franchissant la frontière entre les États-Unis et le Canada. Ce plafond a été fixé il y a plusieurs décennies et, dans votre rapport que j’ai sous les yeux, il est écrit qu’il faut imposer des pénalités plus lourdes dans les cas de liquidités non divulguées, mais discute-t-on du relèvement de ce plafond ? Celui-ci date d'une époque à laquelle les choses se passaient différemment. Si je ne me trompe, il a été fixé au cours des années 1990.
    Je dirais que ce plafond de 10 000 $ a toujours fait l’objet de discussions, sans que ce soit pour autant un sujet sur lequel on nous adresse beaucoup de commentaires demandant de modifier le régime, surtout quand on le compare à d’autres sujets.
    Toute opération de plus de 10 000 $ réalisée dans n’importe quelle banque implantée au Canada est signalée à CANAFE. J’imagine donc que, au quotidien, cela représente des milliers d'opérations. Lorsque j’étais avocat d’affaires à Bay Street, nous procédions sans cesse à des virements de centaines de milliers, voire de millions de dollars.
    Quels sont les moyens dont dispose CANAFE pour procéder au suivi de chaque opération de 10 000 $? Si j’entends blanchir de l’argent, je vais éviter de faire des virements de millions de dollars qui attireraient l’attention et je vais plutôt essayer de rester discret en ne virant que des montants de 10 000 à 15 000 $.
    Ma réponse à votre question sera double.
    Je vais d’abord vous entretenir des efforts que nous faisons avec le secteur privé pour ne pas nous en tenir uniquement à un plafond des opérations, mais pour trouver des façons de déceler des opérations vraiment douteuses. Il s’agit donc de bien comprendre les typologies des crimes que constituent le blanchiment d’argent et le financement d’activités terroristes et de trouver des façons de traduire ses typologies en algorithme et en pratique qui permettront de détecter l’aiguille dans la botte de foin.
    Comme vous l’avez rappelé, le nombre quotidien d'opérations dépassant les 10 000 $ est passablement élevé. La façon de détecter les opérations importantes pour nous dans cette botte de foin est l’une des plus importantes questions que nous ayons à aborder pour traiter avec nos collègues du secteur privé. Je suis convaincue qu’ils analyseront soigneusement les opérations ainsi détectées.
    Merci beaucoup.
    Ma dernière question porte sur les monnaies numériques. Je crois que c’est un domaine dans lequel nous avons pris du retard sur la marche du monde. Des milliards de dollars ont été créés dans le domaine des cryptomonnaies. Notre gouvernement et notre pays, comme beaucoup de pays occidentaux, sont lents à réglementer ce phénomène et semblent avoir du mal à comprendre ce dont il s’agit. Si vous lisez quantité d’articles d’opinion publiés sur Internet par des sources réputées, vous verrez que ces cryptomonnaies ont beaucoup à faire avec le blanchiment d’argent. Les personnes actives sur le marché noir tentent de légitimer leurs richesses en les faisant passer sur le marché des cryptomonnaies.
    Du point de vue de la réglementation, que faisons-nous pour détecter ces opérations et, en second lieu, pour les contrer et faire vraiment cesser le blanchiment d’argent sur ce marché des cryptomonnaies? Je pose la question parce que c’est le gros problème auquel nous allons être confrontés. Nous ne pouvons pas faire évoluer notre réglementation aussi lentement alors que des innovations apparaissent au quotidien sur ce marché.

  (1015)  

    Je mesure toute l’importance de cette question. Encore une fois, c’est une des questions les plus prioritaires auxquelles nous sommes confrontés.
    Nous vous avons parlé des efforts que nous avons faits, et dont vous verrez les résultats, en matière de réglementation des courtiers en monnaies virtuelles. La question qui se pose à nous est de supprimer le caractère anonyme des opérations qui entrent dans le système financier canadien afin d’être en mesure de bien connaître votre client et de détecter toute opération pouvant susciter un doute dans n’importe quel volet du régime. C’est une question qui nous préoccupe. Nous partageons vos préoccupations, que vous avez d’ailleurs fort bien décrites.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie, monsieur Grewal.
    Monsieur Dusseault, la parole est à vous.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    J'aimerais revenir sur l'idée d'obtenir un peu plus de précisions sur les tendances plutôt que de se centrer sur le montant précis de 10 000 $, qui déclenche une vérification alors que, dans la grande majorité des cas, il n'y a aucun problème, comme on le sait. Notre comité doit donc tenter de voir comment un système pourrait détecter ce qui peut constituer une situation inquiétante, par exemple des transactions récurrentes entre deux entités au cours d'une période donnée ou le fait que ces transactions soient à répétition d'un montant de 9 900 $.
     Ultimement, l'objectif ne devrait-il pas être d'avoir un système qui détecte ce qui est vraiment dangereux plutôt que de se fixer un montant précis?
    Oui, absolument.

[Traduction]

    La question qui nous préoccupe n’est pas de savoir si le montant de l’opération est inférieur ou supérieur à 10 000 $, mais plutôt de savoir s’il peut s’agir d’une opération douteuse. Cela nous ramène à un ensemble de lignes directrices détaillées destinées aux entités déclarantes pour leur permettre de déterminer quelles sont les opérations qu’elles devraient considérer comme douteuses en fonction de la connaissance qu’elles ont de leurs clients. Je me permets de suggérer aux membres du comité de ne pas s’intéresser uniquement aux opérations approchant les 10 000 $, ou les dépassant, mais plutôt à un modèle d'opérations qui susciterait des doutes. La question qui se pose à nous est d’être toujours plus précis, concrets et tangibles dans les conseils que nous donnons aux entités déclarantes. C’est toujours un point important pour nous.
    En ce qui concerne les opérations fractionnées, il existe des moyens de minimiser les risques de détection en limitant le montant des opérations à moins de 10 000 $. Notre document comporte également des conseils sur la façon de mieux détecter les tentatives de passer en dessous de ce seuil. La tentative de subdiviser une opération importante en une série d'opérations de plus faibles montants, pour les rendre indétectables, en allant ainsi à l’encontre des objectifs de la loi, est ce que nous appelons le « schtroumpfage » .
    Oui, nous voulons mettre l’accent sur les opérations qui soulèvent des doutes plutôt que de viser un montant ou un plafond précis. Nous tenons également à nous assurer que nous ne pénalisons pas les mécanismes de surveillance avec des angles morts, mais c’est une question d’ampleur.

[Français]

    C'est un peu par curiosité que je pose la prochaine question, mais c'est aussi parce que je prends en considération la transparence du gouvernement.
     Heureusement, le système fonctionne. On saisit les produits de la criminalité, que ce soit de l'argent ou autre chose. Cela dit, j'aimerais savoir ce que vous en faites.
    À la fin, où cet argent se retrouve-t-il? Sert-il à financer le système?

  (1020)  

[Traduction]

    C’est une question fort intéressante qui nous ramène à la discussion que nous avons eue avec le député.
    La réponse comprend plusieurs volets. Au niveau fédéral, les produits de la criminalité qui sont saisis dans le cadre d’opérations de lutte contre le blanchiment d’argent sont de 30 à 40 millions de dollars par année. Les responsabilités des provinces et des territoires en matière de confiscation, un domaine distinct, se recoupent et relèvent davantage du domaine des infractions sous-jacentes. Voici la réponse que je peux vous donner.
    Quant à savoir si cet argent retourne dans les caisses du régime, la réponse est oui, mais de façon indirecte. Il est versé au Trésor qui joue un rôle essentiel dans l’alimentation des budgets ministériels, etc. Existe-t-il un fonds dédié ? Non. Cette notion de fonds dédié poserait des problèmes car il se pourrait qu’au cours d’une année donnée son montant dépasse les besoins du régime ou encore soit insuffisant pour y répondre. De façon générale, nous préférerions obtenir les ressources nécessaires au régime, plutôt que de lier ces confiscations à une année donnée.
    Au sujet de la destination de ces fonds, vous nous avez dit plutôt qu’il arrive qu'au lieu de poursuivre ou de saisir les produits de la criminalité, il y a d’autres questions sous-jacentes que le blanchiment d’argent lui-même. Est-ce parce que des corps de police d’autres administrations que le fédéral sont impliqués? Si vous vous attaquez aux produits de la criminalité, ces fonds vont alors prendre la direction des coffres du gouvernement fédéral. Si vous entamez des poursuites en application d’autres textes de loi, ils vont probablement être dirigés vers les coffres d’une province ou d’une municipalité, là où le travail a été fait, dans une large mesure.
    Cela pose-t-il des problèmes?
    Je ne crois pas, monsieur le président.
    Je crois plutôt que la solution retenue par les organismes d’application de la loi pour entamer des poursuites, en fonction des éléments de preuve, y compris sur les mesures prises, dont elles disposent est davantage fonction de la capacité à obtenir une condamnation. C’est la raison pour laquelle nous aimerions doter les organismes d’application de la loi de moyens plus efficaces pour entamer des poursuites dans les cas de délit de blanchiment d’argent en modifiant la norme de la preuve. Nous pensons que c’est là une bonne façon de s’attaquer à ce type de problème.
    Je dirais a priori que la notion de rendement du capital investi dans les poursuites, par une voie ou par une autre, n’est pas une solution qui me pose un problème. J’ajouterai que CANAFE, la GRC et les organismes d’application de la loi collaborent déjà étroitement. Il pourrait sûrement discuter plus en détail de cette question.
    J’ai déjà eu l’occasion de m’entretenir avec ce sujet avec d’anciens chefs de corps de police, dans des administrations passablement importantes, et je ne crois pas qu’ils seraient d’accord avec vous à ce sujet. Nous devrions peut-être leur en parler également. Je crois que la dimension financière de ces questions, au niveau municipal, intervient dans ce type de questions. C’est un sujet sur lequel nous reviendrons.
    Avant de donner la parole à M. Ferguson, j’ai une seconde question à vous poser. Monsieur Beaupré, vous avez mentionné l’expression « bien connaître votre client » qui revient à dire que les banques devraient faire l’effort d’avoir une bonne connaissance de leurs clients. Pensez-vous que c’est vraiment ce qui se passe aujourd’hui?
    Si vous avez actuellement une entreprise, ou un prêt hypothécaire, il est probable que vous n’avez pas mis les pieds à la banque depuis bien longtemps, depuis que vous avez négocié ce prêt. J’ai constaté, dans le coin du pays où je vis, que lorsque vous traitez avec des banques, alors que vous croyez faire affaire avec une banque située à l’île-du-Prince-Édouard, la décision sera en réalité prise à Halifax, ou à Toronto, ou encore ailleurs. Pensez-vous réellement que les banques connaissent bien leurs clients?

  (1025)  

    Je vous dirai que les modalités utilisées par les entités déclarantes pour parvenir à bien connaître leurs clients, comme elles y sont tenues, varient selon le type d’activités auxquelles elles s’adonnent, et selon leur taille. Dans notre régime, nous comptons 30 000 entités déclarantes. Il y a parmi elles les plus importantes banques implantées au pays, que vous connaissez bien, alors que d’autres entités déclarantes sont des entreprises exploitées par quelques personnes. Il est bien évident qu’elles s’y prendront de façons différentes pour organiser leurs activités afin d’avoir une bonne connaissance de leurs clients et des objectifs de leurs relations d’affaires.
    J’ajouterai que, pour les mêmes raisons, c’est-à-dire étant donnée la variété des modèles, la mesure dans laquelle les diverses entités déclarantes sont conscientes de leurs obligations de bien connaître leurs clients variera également. Par contre, je peux vous affirmer que les moyens mis en œuvre par les institutions financières les plus importantes pour bien connaître leurs clients sont passablement sophistiqués. Ces mécanismes interviennent au moment où ces banques accueillent un nouveau client et, oui vous avez raison, de nos jours il se peut que vous n’ayez pas à aller fréquemment à votre succursale, et vous n’êtes même pas toujours tenus de vous rendre dans une telle succursale pour ouvrir un compte dans un établissement bancaire. Nous avons prévu dans notre régime des mécanismes souples permettant aux entités déclarantes d’accueillir de nouveaux clients « en l’absence de la personne ». Cela n’empêche pas que ces entités déclarantes sont tenues d’appliquer une série de mesures pour parvenir à une bonne connaissance de l’identité de leurs clients, en vérifiant entre autres celle-ci, et en notant les raisons pour lesquelles le client veut ouvrir un compte si c’est l’opération dont il s’agit.
    Les entités déclarantes sont tenues de respecter ces obligations non seulement au début d’une relation, mais pendant toute la durée de celle-ci. C’est ce que nous appelons le « contrôle continu » et c’est celui-ci qui nous permet… une fois encore, les entités déclarantes appliquent diversement les modalités pour respecter ces obligations. Les grandes banques se sont dotées de systèmes sophistiqués pour détecter l’apparition de comportements étranges ne cadrant pas avec les raisons données pour l’ouverture du compte.
    Je vais vous donner un exemple. Si un client vous dit qu’il ouvre un compte pour couvrir plus tard les frais de scolarité de son petit-fils et que vous observez un grand nombre d'opérations sur ce compte, les systèmes d’une banque devraient lui signaler un comportement passablement inhabituel et inciter à mener une enquête et à documenter ce qui se passe sur le compte. À l’autre bout des possibilités, si nous parlons d’entités très petites, elles pourront entretenir des relations plus personnelles avec leurs clients et disposer d’autres moyens pour détecter un problème en fonction de ce qu’elles croient savoir de leurs clients et de ce qui se passe avec la consommation des services qu’elles offrent.
    Je vous remercie.
    La parole est maintenant à vous, monsieur Fergus.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup, monsieur Beaupré. Cela permet de faire une distinction intéressante entre:

[Traduction]

... bien connaître votre client et le comprendre…

[Français]

    Il me semble qu'il y a une petite différence, selon la taille de l'institution financière.
    J'aimerais poser une question à Mme Ryan au sujet du blanchiment d'argent.

[Traduction]

    Vous nous avez expliqué que le blanchiment d’argent est un moyen utilisé par les criminels pour cacher ou déguiser l’origine des produits de la criminalité afin de leur donner l’apparence d’une origine légitime.
    Très bien, mais alors j’essaie de bien comprendre: si nous insistons pour avoir une bonne connaissance de nos clients, il me semble que la définition de blanchiment d’argent, ou de toute forme d’effort de lutte contre ce blanchiment, exigerait que nous connaissions la provenance, l’origine de ces fonds. Y a-t-il quelque chose qui m’échappe ou est-ce bien cela?
    Vous avez tout à fait raison. C’est l’objectif primordial du régime. Avoir une bonne connaissance du client fait partie intégrante de la façon dont vous évaluez si le doute sur la provenance des fonds en question suffit pour justifier le signalement d’une opération.
    On ne devrait pas voir très régulièrement 300 000 $ passés sur le compte d’un enseignant retraité vivant à Summerside.
    CANAFE a compilé toute une série de conseils qu’il a communiqués aux entités déclarantes pour déterminer ce qu’il entend par « opérations douteuses », mais vous avez tout à fait raison, c’est la logique propre au régime.
    J’aimerais maintenant revenir à certaines questions que mes collègues vous ont posées. Comment pourrions-nous renforcer le régime pour nous permettre de savoir, non seulement pour nos clients canadiens mais également pour les non canadiens qui investissent ici, quelle est la provenance ou l’origine de leurs revenus? Si vous en faites, quels sont les efforts entrepris de façon coordonnée au niveau international pour obtenir la réponse à cette question?
    C’est une priorité importante du régime et CANAFE a publié des conseils en la matière. Je crois que c’est un domaine dans lequel nous pourrions mieux faire, en particulier avec nos entités du secteur privé, en procédant à une identification plus nuancée des clients et des opérations sur lesquelles nous avons des doutes chez les partenaires du régime. Dans la mesure où il est difficile d’avoir une vision d’ensemble d’opérations de dimension internationale volontairement complexes et opaques, la possibilité de regrouper des informations de diverses sources en un tout plus facile à interpréter et à utiliser s’inscrit tout à fait dans la direction que vous évoquiez.

  (1030)  

    Encore une fois, en cette matière, nous voudrions nous assurer, et j’imagine que tout effort que nous serions prêts à faire en ce sens y contribuerait, d’empêcher les transferts de fonds chez nous provenant de sources indésirables. Il vaut mieux prendre des mesures pour empêcher de telles manœuvres et nous assurer que les fonds qui parviennent dans le système financier canadien sont légitimes et ne servent pas au blanchiment d’argent, des produits de la criminalité ou au financement des activités terroristes.
    J’essaie simplement de bien comprendre. Pour réussir notre mission, nos activités peuvent être de trois ordres: la prévention, la détection et, bien sûr, la perturbation. Consacrons-nous suffisamment d’efforts à la prévention pour nous assurer que les fonds qui entrent dans le système sont légitimes?
    Je m’en remets ici à l’évaluation du Groupe d’action financière pour vous dire que, dans l’ensemble, le régime canadien et les efforts que nous faisons sont efficaces. Les questions qui se posent dans ce domaine en évolution sont difficiles et nous disposons de conseils pour obtenir de meilleurs résultats en la matière.
    C’est le volet international qui pose le plus de difficultés. Nous exigeons des gens qui transfèrent de l’argent dans le système canadien qu’ils fassent preuve de la diligence appropriée pour bien comprendre qui sont leurs clients, quels sont les établissements avec lesquels ils traitent, afin que la provenance des fonds soit aussi conforme que possible à nos exigences. Nous espérons resserrer les règles. Nous espérons améliorer le régime mais, en résumé, je vous dirai que c’est très précisément dans ce sens que nous voulons faire évoluer le régime.
    Je donne maintenant la parole à M. Dusseault, et ce sera ensuite le tour de M. McLeod.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
J'aimerais poser une brève question. Je ne suis pas certain de la réponse qu'on pourra me donner, car ma question est un peu

[Traduction]

... décalée…

[Français]

    Cela va peut-être trahir mon âge.
    On parle de la cryptomonnaie comme d'une garantie d'anonymat, mais n'est-il pas vrai qu'une grande partie du problème est aussi l'argent liquide dans le système? C'est possible d'avoir des grandes sommes d'argent liquide, et le fait d'avoir des billets procure l'anonymat.
    Avez-vous fait une réflexion à cet égard? À plus long terme, l'abolition des transactions en argent liquide pourrait-elle régler une partie du problème?
     Encore une fois, je suis d'accord sur ce que vous dites.

[Traduction]

    L’argent liquide a toujours posé un problème pour le régime. Il est par nature anonyme et il est toujours difficile à suivre quand il franchit des frontières. La possibilité de retirer de l’argent liquide qui peut servir à de mauvaises fins constitue pour nous une difficulté bien réelle et nous donnons des conseils à ce sujet. On peut effectivement faire le parallèle avec certaines des difficultés que posent des technologies qui apparaissent. Le caractère anonyme de l’argent liquide, et la possibilité de transférer des fonds pour financer des activités terroristes, ou des fonds provenant d’activités criminelles pour accroître la rentabilité de celles-ci avec les achats qu’elle permet de façon transparente, constitue une difficulté pour le régime.
    Nous avons évoqué certains des risques posés par ces nouvelles technologies, mais nous envisageons également d’ajouter de nouvelles mesures de sécurité à ces technologies qui apparaissent alors que les solutions numériques offrent la possibilité à l’avenir de remplacer l’argent liquide.
    Je suis d’accord.

  (1035)  

    Monsieur McLeod, nous vous écoutons.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens aussi à remercier les témoins que nous entendons aujourd’hui. Le sujet dont ils ont à traiter est très vaste et très complexe. Je n’ai pas fini de digérer tous les renseignements qu'ils nous ont fournis. Votre exposé s’est avéré très utile et je l’ai beaucoup apprécié.
    J’ai néanmoins quelques questions à vous poser. Le sujet soulevé par M. Grewal, soit le seuil de 10 000 $, n’est pas clair pour moi. Il y a déjà des entités déclarantes qui sont tenues d’exercer leur pouvoir discrétionnaire en signalant des opérations dont le montant est inférieur à ce seuil. Êtes-vous en mesure de me dire si vous estimez que ce seuil actuel de 10 000 $ est à vos yeux efficace et efficient pour le bon fonctionnement du régime? Je ne crois pas que vous ayez répondu à cette question.
    J’y ai répondu plus tôt en expliquant quelles sont les opérations que nous signalons comme douteuses et comment nous évaluons les modèles d’opérations les plus pertinents auxquels nous pourrions accorder la priorité au lieu du simple seuil de 10 000 $.
    Alors, faudrait-il l’éliminer? En avons-nous encore besoin?
    Je crois qu’il est important de disposer d’un niveau afin de permettre aux opérations d’un faible montant d’aller de l’avant sans retenir l’attention de façon excessive. Je me ferais un plaisir de vous faire part de quelques réflexions sur ce plafond. Devrait-il être plus élevé ou plus faible? Je crois qu’il faut faire preuve d’un minimum de cohérence. Il y a des cas dans lesquels nous utilisons des seuils différents dans notre section administrative, soit 3 000 $ et 5 000 $. Il y aurait intérêt à mon avis à n’avoir qu’un seul seuil. Quant à savoir lequel il devrait être précisément, je préférerais reporter cette question à plus tard. J’en discuterai volontiers avec nos partenaires avant de dire au comité comment nous pouvons répondre à cette question.
    J’aimerais aborder une autre question que vous avez soulevée au sujet du projet Guardian et de la crise des opioïdes qui se manifestent dans tout le pays, y compris dans ma circonscription des Territoires du Nord-Ouest.
    De nombreux membres du régime, y compris CANAFE, sont impliqués dans cette initiative de lutte contre le blanchiment des produits du trafic du fentanyl, le projet Guardian. J’aimerais en savoir davantage à ce sujet. Pouvez-vous me donner de plus amples détails sur ce projet, sur la façon dont il fonctionne et peut-être sur ses répercussions?
    Avec votre permission, monsieur le président, je crois que c’est un sujet qu’il vaudrait mieux aborder avec les représentants de CANAFE. Je vous invite à vous adresser à eux parce qu’ils ont collaboré étroitement sur ce sujet avec de nombreux partenaires et ils seront en mesure de vous donner des détails.
    Très bien. Depuis le dernier examen de la loi, nous avons constaté des développements importants de technologies, la popularité des technologies pertinentes au régime dans les domaines des cryptomonnaies et du financement participatif. Je suis curieux de savoir comment le régime s’est adapté dans ces secteurs depuis le dernier examen.
    Nous…
    Vous pourriez peut-être nous dire s'il faut d'autres outils encore pour faire un meilleur travail.
    Le dernier examen nous a aiguillés vers les types de paiements en évolution. Cela comprenait des choses comme les cartes prépayées. Nous avons institué des changements législatifs et réglementaires pour faire face à l'innovation en cours dans l'espace financier. Au fur et à mesure que de nouvelles méthodes visant à mieux servir les Canadiens voient le jour, nous voulons nous assurer de les intégrer dans le régime, mais sans toutefois faire fi des réalités locales.
     Par exemple, lors des consultations, on nous a fait savoir que les cartes prépayées sont importantes dans les collectivités éloignées qui peuvent ne pas avoir une succursale bancaire. Nous voulons veiller à ne pas instituer de nouvelles exigences qui seraient pénibles pour les gens tentant de faire des opérations élémentaires.

  (1040)  

    Merci.
    Madame O'Connell, c'est votre tour.
    Je n'ai qu'une question en ce qui concerne les cryptomonnaies, à savoir si les collectivités mondiales s'entendent sur la définition. Je sais qu'au Canada ont les a définies dans certains rapports, et que le GAFI en a établi une définition également.
    À l'échelle mondiale, les cryptomonnaies sont-elles définies quelque peu uniformément? Si elles ne le sont pas, j'imagine que cela pourrait poser des problèmes dans la réglementation à l'échelle mondiale. Ou est-ce encore trop tôt pour les définir, parce que les administrations sont encore en train d'essayer de s'y retrouver elles-mêmes? Je suppose que ma question porte sur la définition de « cryptomonnaies » et sur la façon dont nous les réglementons à l'échelle mondiale.
    Je vais parler rapidement en ce qui concerne le GAFI et où nous en sommes. Je crois que Maxime pourra en dire davantage au sujet de où nous en sommes.
    De toute évidence, au sein du Groupe d'action financière et chez nous, il y a une claire compréhension de ce que sont les cryptomonnaies. Là encore, c'est une question d'équilibre. Nous ne tentons pas de réglementer les cryptomonnaies directement. Nous tentons simplement de veiller à ce qu'il y ait un mécanisme permettant de faire des paiements et de transférer des valeurs. Cela relève du régime en ce qui concerne la tenue de dossiers, savoir qui ils sont et gérer les risques. Je crois qu'il y a une assez bonne compréhension de ce que sont les exigences dans l'environnement du GAFI.
    Maxime peut parler un peu plus de là où nous en sommes dans nos travaux.
    C'est une chose que de définir exactement ce dont on parle dans un langage de réglementation, mais les gens savent de quoi nous parlons. Le problème n'est pas nécessairement là. Comme Ian l'a signalé, les règlements auxquels nous travaillons n'ont pas pour objet de réglementer les monnaies virtuelles elles-mêmes. À ma connaissance, aucun pays ne tente de le faire. Ce que nous tentons de faire, c'est ce que nous appelons les « passerelles d'entrée » et « passerelles de sortie ». Il y a un certain degré d'anonymat dans l'environnement des monnaies virtuelles, bien que je sois convaincu qu'il se fait une tenue de dossiers grandement détaillée; on ne sait tout simplement pas qui se trouve derrière.
    Pour ce qui est de notre objectif, une fois qu'on tente de faire des transferts de monnaies virtuelles, ou une conversion en ce que nous appelons les monnaies à cours forcé — le dollar canadien, par exemple —, pour toutes ces passerelles d'accès et de sortie, il y a des exigences bien établies. Quand ces courtiers en monnaie virtuelle offrent le service de convertir les monnaies virtuelles, en dollars par exemple, ils respectent le genre d'obligations que les entreprises de services monétaires doivent respecter en ce qui concerne la définition du client, un enregistrement des opérations et ainsi de suite.
    Merci.
    Monsieur Fergus.
    Je ne suis pas un avocat, et j'ignore si un de vous trois l'est. Dans quelle mesure la charte est-elle un poids pour vous pour ce qui est de recommander

[Français]

des pistes d'action

[Traduction]

pour faire face à ces problèmes?
    Elle exerce sur nous une énorme et considérable influence, fondamentalement. Je crois que votre question décrit bien les objectifs concurrentiels dans cet espace. Il y a le respect de la charte. Il y a l'efficacité sur le plan de la sécurité des Canadiens. Ensuite, il y a le fardeau, tant dans le secteur privé que dans le secteur public, que représente le problème des ressources appropriées.
     En ce qui concerne la conformité avec la charte, nous avons structuré le régime depuis le début de sorte que la division sur le plan des renseignements que le CANAFE reçoit soit en place. Ensuite, il y a le fait que cet organisme ne procède pas à des enquêtes, mais passe plutôt les renseignements, une fois qu'ils ont atteint un seuil raisonnable, aux organismes d'application de la loi, comme l'ARC et d'autres, qui disposent des pouvoirs de mandat et des garanties pour faire en sorte que les renseignements sur les Canadiens soient utilisés comme il se doit.

  (1045)  

    Cependant, la charte est aussi un document souple. Elle tient compte des attitudes changeantes du moment. Pense-t-on, du moins parmi les fonctionnaires, que la charte pourrait évoluer ou que le contexte pourrait évoluer de sorte que la charte puisse être plus souple sur la question du pistage, ou de l'application de plus de limites au droit à la confidentialité, de sorte que nous puissions nous assurer que nous ne participons pas au blanchiment d'argent ou au financement d'activités terroristes?
    Monsieur le président, je laisserai mes collègues de Justice répondre en grande partie à cette question; je crois comprendre qu'ils seront invités à comparaître.
    Je crois que l'évolution sur le plan juridique, conjuguée à l'évolution de la technologie, permet de supposer que ce sont les algorithmes, les tendances en cause qui sont problématiques et peuvent être rajustés, de sorte que ce soient les comportements suspects qui sont repérés, de même que les bonnes protections visant à s'assurer qu'il n'y a pas de perquisitions et saisies inappropriées, ainsi que le respect des autres concepts juridiques que la charte a pour objet de protéger dans cet équilibre de démocratie et de protection des renseignements personnels par opposition à la sécurité.
    Nous allons devoir nous arrêter là.
    Merci à tous.
    Pour ceux qui suivent les activités de ce comité plutôt que le site Web du ministère des Finances, je signale que le document de discussion se trouve sur le site Web du Ministère. Je crois comprendre que la date limite de présentation de réponse à ce document est le 30 avril. Ceci est à titre d'information seulement.
    Vous pouvez vous attendre, je crois, à être invités à revenir parler du document de discussion lui-même, quoique je remarque ici que vous présentez les développements clés depuis les derniers examens et amendements législatifs et réglementaires. En réponse à ce que M. Dusseault a demandé plus tôt, essayez — et je sais, m'a-t-on dit, que c'est plutôt difficile — de nous présenter une réponse en quelque sorte sur ce qu'il en est de chacune des 18 recommandations du dernier rapport d'examen du Sénat.
    Dan.
    En ce qui concerne le site Web, comme plusieurs personnes souhaitent suivre les travaux du Comité et comme nous avons parlé du document, peut-être que nous pourrions mettre sur notre site Web un lien vers celui-ci, ainsi que certains des renseignements que les analystes ont préparés. Je ne sais pas si le protocole le permet, mais je suis d'avis que plus de gens sont au courant et participent, mieux c'est.
    Nous pouvons envisager de faire cela en tant que comité des finances.
    Une fois de plus, merci. Nous avons eu un échange très intéressant.
    La séance est levée.
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