Passer au contenu
;

FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des finances


NUMÉRO 155 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 9 mai 2018

[Enregistrement électronique]

(1550)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
     Comme tout le monde le sait, conformément à l'ordre de renvoi de la Chambre du lundi 23 avril, nous examinons le projet de loi C-74, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 27 février 2018.
    Nous accueillons un bon nombre de témoins cet après-midi. Nous commençons avec un peu de retard et nous devrons absolument nous arrêter à 17 h 30. Parfois nous pouvons dépasser un peu, mais ce n'est pas possible aujourd'hui. Je vais demander aux témoins d'essayer de limiter leurs déclarations liminaires à cinq minutes, et nous allons diminuer aussi le temps accordé aux députés pour poser des questions afin qu'il soit possible d'en poser le plus possible.
    Nous allons commencer par Mme Annie MacEachern, qui témoigne à titre personnel et qui est une de mes collègues de l'Île-du-Prince-Édouard. Bienvenue, Annie.
    Bonjour, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité. Je vous remercie de me recevoir ici aujourd'hui pour discuter des modifications qu'on prévoit apporter à la taxe d'accise, en particulier en ce qui concerne le cannabis thérapeutique. Je suis ici aujourd'hui parce que je crains une atteinte à mes droits comme patiente utilisant du cannabis à des fins médicales et aux droits de tous les patients qui choisissent d'utiliser du cannabis.
     J'ai suivi de façon active l'évolution des projets de loi C-45 et C-46 pour m'assurer que les droits des patients utilisant du cannabis à des fins médicales ne sont pas oubliés. J'ai écouté nombre d'heures de réunions de comités sur ParlVu et CPAC. J'ai animé des discussions publiques à l'Île-du-Prince-Édouard. J'ai envoyé des lettres à des députés et à des sénateurs, j'ai rencontré des députés provinciaux et fédéraux, ainsi que des sénateurs et, bien sûr, des patients. En dépit de tous les efforts que j'ai consentis, je dois continuer de lutter pour obtenir un accès sûr et équitable à un traitement qui m'a été prescrit par mon médecin.
    Mon exposé aujourd'hui a pour but de combler certaines lacunes quant à la compréhension générale du cannabis thérapeutique, de vous informer des obstacles auxquels font face les patients utilisant ce produit et d'expliquer pourquoi le nouveau droit d'accise ne fera que réduire l'accès à ce type de traitement.
    La croyance selon laquelle les consommateurs de cannabis à des fins récréatives chercheront à obtenir une licence pour avoir accès à du cannabis thérapeutique afin d'économiser un dollar le gramme est tout simplement fausse. Le programme qui existe en vertu du RACFM ne correspond pas à une façon plus pratique ou moins dispendieuse d'avoir accès à du cannabis et ce sera d'autant plus le cas quand il sera possible de s'en procurer de façon légale dans des commerces de détail. Les patients doivent commander en ligne le cannabis qui leur est prescrit à des fins médicales, vu que ce produit n'est pas offert dans des commerces. Les frais de livraison varient d'un producteur autorisé à un autre, mais ils se situent entre 10 et 20 $ par commande. On pourrait penser qu'il serait logique pour les patients de commander la quantité de cannabis qui leur est prescrite une fois par mois pour éviter de multiples frais de livraison, mais de nombreux patients vivent dans une famille où il n'y a qu'un seul revenu ou reçoivent de l'assistance financière et doivent subvenir aux besoins de leur famille.
    Selon l'organisme CAEMM, un patient sur cinq n'a pas les moyens de se procurer toute la quantité prescrite, et encore moins s'il doit payer l'ordonnance complète avec son revenu d'un seul cycle de paye. Ces statistiques correspondent aux renseignements que j'ai recueillis de façon empirique auprès de patients partout au Canada dans le cadre de mes activités de défense des droits. J'aimerais prendre un moment pour vous expliquer en détail les coûts liés au cannabis à des fins médicales. Le prix d'un gramme de cannabis peut varier de 4 à 17 $, quand il s'agit de cannabis séché. Une ordonnance type correspond à 3 grammes par jour. En moyenne, les patients paient 10 $ le gramme.
    Beaucoup de personnes oublient que les patients doivent ensuite consommer leur cannabis. Bon nombre de médecins recommandent l'utilisation d'un vaporisateur pour éviter certains risques pour la santé associés à la combustion. Un vaporisateur de qualité coûte au moins 75 $. Actuellement, la seule solution de rechange à l'inhalation du cannabis offerte aux patients est la consommation d'huiles, administrées de façon sublinguale, au coût moyen de 100 $ la bouteille.
    Pour tout dire, les options moins dommageables pour la santé qui s'offrent aux patients qui utilisent du cannabis à des fins médicales sont très coûteuses. Le cannabis thérapeutique est le seul médicament sur ordonnance qui est assujetti à la TVH et à la TPS. En plus, ce médicament n'est pas couvert par le régime d'assurance pour les médicaments génériques, et un seul assureur offrira une couverture limitée pour certains diagnostics, comme le cancer, le VIH et l'arthrite rhumatoïde. C'est un bon début, mais ce n'est pas suffisant.
    Vu la crise des opioïdes qui sévit dans notre pays, il ne serait pas rigoureux de ma part de ne pas mentionner les résultats de travaux récents qui montrent une diminution du nombre d'ordonnances d'opioïdes dans les endroits où on a légalisé le cannabis à usage récréatif. Cela a entraîné une diminution des décès par surdose d'opioïdes.
    J'aimerais vous faire part d'une brève anecdote. Une de mes amies, une jeune femme dans la trentaine, a lutté contre la dépendance aux opioïdes et aux benzodiazépines pendant 10 ans. Elle a reçu un diagnostic de sclérose en plaques il y a deux ans. Avec l'aide du cannabis, elle a réussi à ne pas consommer d'opioïdes, malgré le fait qu'elle souffre de douleur chronique tous les jours. Récemment, lors d'un passage à l'hôpital pour une chirurgie d'un jour, on lui a offert des opioïdes pour calmer sa douleur. Elle a refusé et expliqué ses antécédents aux infirmières. Ce ne sont pas toutes les personnes dans cette situation qui auraient été assez fortes pour refuser.
    Je suis d'avis que les coûts actuels du cannabis thérapeutique et les frais qui y sont associés, en plus des droits d'accise, non seulement feront en sorte que les patients qui utilisent du cannabis à des fins médicales délaisseront le programme prévu par le RACFM, mais les inciteront à recommencer à s'approvisionner sur le marché noir ou possiblement à consommer des opioïdes.
(1555)
    Malgré les avantages d'acheter du cannabis d'un producteur de cannabis thérapeutique, le coût demeure ce qui est le plus important pour de nombreux Canadiens. Au lieu d'imposer des taxes aux patients qui utilisent du cannabis à des fins médicales, je demande avec insistance au gouvernement de bien vouloir examiner une approche différente pour ce qui est des taxes imposées aux utilisateurs de cannabis à des fins récréatives. Nous devrions soutenir les personnes qui ont choisi d'utiliser du cannabis comme traitement, autant que les patients qui choisissent d'utiliser des produits pharmaceutiques.
    Je vous remercie de votre attention.
    Merci, Annie.
    Nous poursuivons donc avec les représentants de Bière Canada, dont Luke Harford est le président. Bienvenue, Luke.
    Je tiens à vous remercier, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du Comité, de m'offrir l'occasion de témoigner aujourd'hui.
    Je m'appelle Luke Harford et je suis le président de Bière Canada, le représentant national du secteur de la bière. Je suis heureux de l'occasion qui m'est donnée de comparaître devant vous aujourd'hui pour expliquer les préoccupations de l'industrie brassicole canadienne au sujet de la partie 3 du projet de loi C-74
    Bière Canada représente plus de 50 entreprises brassicoles, dont certaines sont de grande et de moyenne taille, et beaucoup sont de petite taille. Ensemble, elles produisent 90 % de la bière fabriquée au Canada et sont établies dans les dix provinces et un territoire.
     La partie 3 du projet de loi C-74, portant sur l'exécution du budget, propose de modifier la Loi de 2001 sur l'accise dans le but d'introduire un nouveau cadre du droit d'accise sur les produits du cannabis. Le gouvernement fédéral a structuré le cadre du droit d'accise sur le cannabis afin de se coordonner avec les provinces et de garder les taxes sur les produits du cannabis à un faible taux afin de maintenir les prix bas et d'encourager les ventes sur le marché légal.
     Le projet de loi C-74 propose un droit d'accise fixe de 25 ¢ le gramme d'un produit du cannabis, ce qui sera la portion du gouvernement fédéral, et planifie d'introduire plus tard un droit de 75 ¢ le gramme qui sera remis à la province ou au territoire.
    Bière Canada considère que la taxe proposée est déraisonnablement faible dans le contexte de la politique fiscale actuelle du Canada et vu les données probantes provenant des États-Unis, lesquelles indiquent que le prix du cannabis chutera au fur et à mesure que des producteurs de cannabis à plus grand volume entreront en exploitation et produiront à plein rendement. En outre, l'analyse du marché récréatif faite par l'industrie au Canada indique également que le prix du cannabis baissera de moitié avec la légalisation.
    Depuis 2014, au Colorado, les recettes provenant de la taxe d'accise sur la marijuana pour consommation récréative ont connu une croissance de 540 %, l'État ayant fait passer la taxe de vente sur la marijuana de 10 % à 15 % en juillet 2017. Dans l'État de Washington, où la taxe d'accise sur la marijuana pour consommation récréative est établie à 37 %, les ventes ont augmenté de plus d'un milliard de dollars au cours des deux dernières années, et les recettes tirées des droits d'accise sont passées de 65 millions de dollars en 2015 à 314 millions de dollars en 2017.
    Au Canada, les niveaux de taxation de la marijuana ne devraient pas dépendre uniquement d'une préoccupation exagérée au sujet de prix trop élevés dans le but de cannibaliser le marché noir de la marijuana. La commodité, la connaissance du produit, l'assurance de la qualité et la sécurité personnelle amèneront les gens à s'approvisionner dans les marchés légaux en dépit de charges fiscales plus élevées.
    Ce qui mérite d'être spécialement souligné au sujet de l'expérience dans les États américains, c'est le fait que leurs taxes sur la marijuana sont bien plus élevées que leurs taxes sur la bière. Le Colorado, Washington et l'Oregon ont tous mis en œuvre des taxes sur la marijuana qui sont le double et le triple de celles qui s'appliquent à la bière.
    Au Canada, la possibilité que l'industrie de la marijuana légale cannibalise celle de la bière est beaucoup plus importante qu'aux États-Unis en raison de nos taxes plus élevées sur la bière et de nos prix plus élevés. Au Canada, la taxe sur une caisse de bière est cinq fois plus élevée qu'aux États-Unis. En plus de l'activité sur les marchés noirs, les taux de taxation de la marijuana doivent tenir compte des principes fondamentaux d'équité quant à leur incidence économique possible.
    Depuis 2010, il y a eu 45 augmentations des taxes sur la bière au Canada. Les taxes sur une caisse de bière représentent maintenant en moyenne 47 % du prix que les Canadiens doivent payer. L'an dernier, le gouvernement fédéral a augmenté la taxe d'accise sur la bière de 2 %. En avril dernier, elle a augmenté de 1,5 % et elle doit augmenter automatiquement tous les ans en raison de la nouvelle politique relative à la taxe sur la bière adoptée par le gouvernement fédéral.
    Les Canadiens sont mécontents des taxes élevées sur la bière. Cinquante mille Canadiens se sont inscrits à notre campagne « Axe The Beer Tax ». Ils ont montré qu'ils veulent participer à cet égard. La frustration à l'égard du taux élevé des taxes sur la bière s'est également manifestée au moyen de sentiments exprimés par les Canadiens sur les médias sociaux au sujet de l'arrêt Comeau de la Cour suprême rendu le 19 avril.
    Les brasseurs canadiens sont préoccupés par l'arrivée de la marijuana à des fins récréatives. Elle aura une incidence négative sur les ventes de bière, lesquelles, au prorata de la population, ont déjà chuté de 10 % au Canada au cours des 10 dernières années.
    Les répercussions sont claires: de faibles taxes sur le cannabis feront augmenter les ventes de cannabis tandis que les taxes élevées sur la bière feront diminuer les ventes de bière, ce qui laissera finalement le gouvernement avec moins de recettes. Nous en sommes au point où nous nous demandons s'il vaut la peine d'investir dans l'industrie brassicole canadienne.
    Aux États-Unis, non seulement les taxes sur le cannabis sont plus élevées que les taxes sur la bière, mais le gouvernement fédéral américain a récemment réduit les taxes fédérales d'accise sur la bière afin d'aider les brasseurs américains à prospérer et à être concurrentiels. La Tax Cuts and Jobs Act de 2017 aux États-Unis abaisse les taxes sur la bière tandis que le Canada fait le contraire. Entre le début de 2017 et la fin de 2019, le Canada ajoutera 63 millions de dollars en coûts de taxe d'accise sur la bière, tandis que les États-Unis réduisent le fardeau de la taxe d'accise fédérale de 280 millions de dollars. Au début de 2017, un brasseur qui produisait un million d'hectolitres de bière au Canada était assujetti à un taux d'accise de 60 % supérieur à celui d'un brasseur américain ayant la même production. En avril 2019, la différence s'élèvera à 93 %, au taux de change actuel.
(1600)
    Les Canadiens savent qu'ils payent plus pour la bière que leurs voisins du Sud. Ils le savent parce qu'ils vont aux États-Unis et reviennent en disant à quel point la bière est dispendieuse ici. Bière Canada cherche à expliquer que cette situation est due au fait que les Canadiens versent 20 $ de taxes pour une caisse de bière tandis que les Américains ne payent que 4 $ de taxes. Nous cherchons en outre à faire savoir que les gouvernements fédéral et provinciaux ajoutent une taxe sur une autre dans l'espoir que les Canadiens ne le remarqueront pas.
     Bière Canada est d'avis que l'approche d'une faible taxe sur le cannabis proposée dans le projet de loi C-74 est déraisonnable dans le contexte des taxes élevées sur la bière que payent les consommateurs canadiens. Ce n'est pas juste pour les consommateurs de bière canadiens. II n'est pas raisonnable que le gouvernement fixe les taxes sur la marijuana à un niveau aussi bas, tout en augmentant l'un des taux de taxes sur la bière les plus élevés au monde, et ce, année après année.
    Bière Canada exhorte le Comité des finances à tenir compte des répercussions qu'aura sur les ventes de bière et les recettes du gouvernement l'imposition d'une faible taxe sur la marijuana. Les taxes plus élevées sur la bière n'inciteront pas les brasseurs canadiens à investir dans leurs installations et leurs ressources humaines et n'aideront pas non plus à inverser le déclin dans les ventes de bière. Le Canada doit avoir une approche plus équilibrée et à adopter une politique fiscale qui est juste tant pour les consommateurs de bière que les brasseurs. Nous demandons que les augmentations à venir de la taxe d'accise fédérale sur la bière soient éliminées et que le gouvernement envisage un taux de taxe plus élevé sur les produits de marijuana qui se conforme davantage à son approche à l'égard des produits qui leur font concurrence.
    Merci, monsieur le président.
(1605)
    Merci beaucoup, Luke.
    Nous passons maintenant la parole à M. Brian Kingston, vice-président, Politiques internationale et budgétaire, Conseil canadien des affaires.
    Bienvenue, Brian.
    Je remercie les membres du Comité de m'avoir invité à participer à l'étude du projet de loi C-74.
    Le Conseil canadien des affaires représente les chefs de direction et les propriétaires de 150 entreprises canadiennes de premier plan dans tous les secteurs et toutes les régions du pays.
    Dans leurs propositions prébudgétaires, les membres du Conseil ont demandé au gouvernement de mettre en place une stratégie pour promouvoir la croissance économique, favoriser les investissements privés et renforcer la compétitivité. Parmi nos recommandations, nous avons demandé au gouvernement de mener un examen approfondi du système fiscal canadien dans le but de renforcer les mesures incitatives à l'égard des investissements et de la croissance. Depuis que nous avons présenté ces propositions au gouvernement, le besoin de mener un examen approfondi est devenu plus pressant à cause de la controverse soulevée par les propositions du gouvernement concernant les placements passifs, et, plus récemment, en raison de la Tax Cuts and Jobs Act adoptée aux États-Unis.
    Même si nous accueillons favorablement les modifications apportées aux propositions touchant les placements passifs dans le budget de 2018, nous sommes d'avis que le gouvernement aurait pu en faire davantage pour s'attaquer aux causes du problème. Au lieu de réduire encore plus le taux d'imposition des petites entreprises et de limiter l'accès à la déduction, le gouvernement aurait dû éliminer la déduction à l'égard des petites entreprises dans le cadre d'une initiative plus large de réforme de la fiscalité visant à simplifier le régime.
    En ce qui concerne la réforme fiscale aux États-Unis, nous sommes déçus que les défis importants au Canada sur le plan de la concurrence n'aient pas été abordés dans le budget de 2018. Aux États-Unis, le taux effectif marginal d'imposition sur les nouveaux investissements est maintenant de 18,8 %. Il était de 34,6 % auparavant, et il est maintenant inférieur au TEMI de 20,3 % en vigueur au Canada. L'avantage fiscal relatif dont jouissait le Canada par rapport aux États-Unis pendant plus d'une décennie a été éliminé du jour au lendemain.
    Selon un sondage récent mené auprès de 90 membres du Conseil canadien des affaires, près de deux tiers des répondants ont mentionné que la réforme fiscale américaine influencera certainement ou probablement les plans de leur entreprise relativement aux investissements futurs. Trois quarts des répondants sont préoccupés ou très préoccupés par la compétitivité du secteur commercial canadien. Selon nous, ces résultats sont fort alarmants dans une période où les investissements directs effectués au Canada ont chuté au point le plus bas depuis huit ans.
    Il est temps de suivre les recommandations du Conseil consultatif en matière de croissance économique, qui, dans son rapport définitif, a réclamé qu'un groupe d'experts indépendants mène un examen du système fiscal. Selon les mots employés par les membres du Conseil consultatif, le groupe devrait « se pencher sur des changements aux taux d’imposition des sociétés et des particuliers; sur l’équilibre entre les types d’impôts; et sur l’utilisation d’instruments fiscaux conçus pour appuyer l’investissement ».
    Avant de terminer, j'aimerais faire un commentaire sur les perspectives budgétaires. Nous demeurons très préoccupés par le fait que le gouvernement n'a pas dressé de plan clair pour rétablir l'équilibre budgétaire à moyen terme. Entre 2017 et 2023, le gouvernement fédéral prévoit ajouter près de 100 milliards de dollars à la dette, dont le total atteindra presque trois quarts de billions de dollars. Au cours de la même période, on prévoit que l'intérêt sur la dette publique augmentera de 36 %. C'est plus que le double du taux d'augmentation des dépenses sur les programmes directs.
    Même si nous partageons l'avis du gouvernement selon lequel des investissements ciblés en infrastructure et en innovation créent le fondement d'une croissance économique à long terme, nous savons aussi, par expérience, que l'augmentation de la dette et des déficits publics ne fera que miner la confiance des consommateurs et des dirigeants d'entreprise et entraîner des répercussions négatives sur la croissance commerciale et la création d'emploi.
    Je serai heureux de répondre à vos questions. Merci.
    Merci beaucoup, Brian.
    Nous recevons maintenant Mme Mason et M. Hannah, de l'Association des banquiers canadiens.
     Je tiens à remercier le Comité de son invitation pour discuter du projet de loi C-74. Comme toujours, l’Association est heureuse de communiquer son point de vue sur le projet de loi soumis au Parlement.
    L'ABC représente plus de 60 banques canadiennes et étrangères qui contribuent à l'essor et à la prospérité économiques du pays. Elle préconise l'adoption de politiques publiques favorisant le maintien d'un système bancaire solide et dynamique capable d'aider les Canadiens à atteindre leurs objectifs financiers.
    Aujourd'hui nos commentaires visent la section 16 de la partie 6 du projet de loi, qui traite des modifications à apporter à la Loi sur les banques.
    Le caractère évolutif du marché actuel des services financiers exige de mettre à jour le cadre législatif afin qu’il demeure adapté aux attentes et aux besoins changeants des consommateurs. Les modifications prévues à la section 16 de la partie 6 résultent du processus de consultation entrepris par le gouvernement dans son examen périodique du cadre fédéral régissant les services financiers.
    Nous serons ravis de répondre à vos questions relatives aux modifications apportées à la Loi sur les banques et à d’autres dispositions du projet de loi qui portent sur le secteur bancaire, dont la cybersécurité.
    Au cours des récentes années, les demandes des consommateurs ont entraîné de grands changements dans le paysage des services financiers. Maintenant, les consommateurs s’attendent à un accès sécuritaire et pratique aux services financiers en temps réel, n'importe quand et de n’importe où dans le monde. Afin d'offrir à leurs clients de meilleurs produits et services, les banques au Canada continuent donc d'innover et de mettre au point de nouvelles technologies.
    Grâce à Internet, les services bancaires sont devenus accessibles en ligne, à partir de la maison ou du bureau. De nos jours, les appareils mobiles prennent le dessus. Toute personne munie d'un téléphone intelligent se déplace avec une banque entre les mains, et chaque banque a son application mobile qu’elle met constamment à jour en ajoutant de nouvelles caractéristiques. II est maintenant possible de confirmer son identité par simple balayage du pouce, d'envoyer de l’argent a un ami par virement électronique et de déposer un chèque en en prenant une photo. En quelques années, le nombre de Canadiens qui ont recours aux services bancaires mobiles a augmenté considérablement, passant de 5 % en 2010 à 44 % en 2016. De fait, de nos jours, plus des deux tiers, 68 % des Canadiens effectuent la plupart de leurs opérations bancaires sur une plateforme numérique en utilisant soit les services bancaires en ligne, soit les services bancaires mobiles.
    II est clair que les Canadiens ont adopté la technologie pour leurs activités bancaires. Nous sommes d’avis que le cadre législatif relatif aux services financiers doit être modernisé afin de refléter cette réalité.
    Les banques sont en faveur d’un secteur des services financiers qui est ouvert, concurrentiel et novateur. Un nombre impressionnant de nouvelles entreprises de technologie financière ont déjà augmenté la concurrence et le choix dont bénéficient les clients dans les domaines des paiements, des placements et de l’établissement d’un budget.
    Actuellement, des entraves contenues dans la Loi sur les banques empêchent certains types de relations entre les banques et les entreprises de technologie financière. Parmi ces entraves, notons le long processus d’approbation réglementaire et les restrictions imposées sur les types d’investissements que les banques peuvent faire dans les entreprises de technologie financière. Par exemple, l’investissement des banques dans une entreprise de ce type qui possède une petite gamme de produits dans un domaine autre que les services financiers — comme un service de livraison de nourriture — sera limité, car cette entreprise offre un service qui n’est pas de nature bancaire. Le processus d’approbation réglementaire peut prendre des mois, soit une éternité dans le monde de la technologie financière. Cette contrainte peut priver les entreprises de technologie financière de la reconnaissance de marque, de la large base de clients et du partenariat que les banques sont capables de leur offrir. Elle pourra même pousser des entreprises de technologies financières canadiennes novatrices vers d'autres pays.
    Un grand nombre des mesures qui font obstacle actuellement à la collaboration entre banques et entreprises de technologie financière ont été adoptées à une époque où la notion d’entreprise de technologie financière n’existait même pas et où la technologie n’était pas aussi essentielle aux produits et aux services bancaires qu’elle ne l’est de nos jours. En plus de freiner l’innovation, ces obstacles d’une autre époque n’ont pas leur raison d'être dans un monde où la technologie fait partie intégrante des services financiers.
     S’il est adopté, le projet de loi C-74 effacera de nombreux obstacles contenus dans la Loi sur les banques et permettra une plus grande collaboration entre les banques et les entreprises de technologie financière.
    En outre, il faudra clarifier, dans la Loi sur les banques, la nature des activités de technologie financière que les banques peuvent entreprendre à l'interne. Il est plus essentiel encore de mettre à jour les références aux types de technologies pertinentes, comme « sites », « plateformes » et « portails », dans la Loi sur les banques, vu que le langage contenu dans cette loi est plutôt obsolète.
    Les consommateurs canadiens profiteront de nouveaux canaux de distribution, ainsi que de nouveaux produits, services et applications. Les entreprises de technologie financière auront accès aux capitaux, au financement, aux points de distribution et aux conseils offerts par les banques.
    Par ailleurs, ces dispositions rendront le Canada plus en phase avec d’autres pays qui favorisent activement la croissance de leur secteur de technologie financière.
(1610)
     En conclusion, les modifications proposées à la section 16 favoriseront une plus grande collaboration entre les entreprises de technologie financière et les banques. S’il est adopté, le projet de loi C-74 favorisera l'innovation et la concurrence dans le domaine des services financiers favorisera et assurera aux consommateurs l’accès à de meilleurs produits et services.
    Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, madame Mason.
    Nous allons entendre maintenant les représentants de l'organisme Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale, M. O'Hara, président-directeur général, et M. Zaid, fondateur et conseiller. Messieurs, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président et mesdames et messieurs les membres du comité permanent, de l'invitation à comparaître aujourd'hui.
    Je m'appelle Jonathan Zaid. Je suis le fondateur de l'organisme Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale, aussi connu sous le sigle CAEMM. Je suis moi-même un patient qui utilise de la marijuana thérapeutique.
    Je vais brièvement présenter notre organisme et je vais ensuite passer la parole à James, le président-directeur général.
    Les Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale sont un organisme à but non lucratif qui représente avec succès, depuis 2014, des patients qui utilisent le cannabis thérapeutique. L'organisation, qui compte plus de 20 000 membres au Canada, est devenue le représentant populaire et sérieux en matière de cannabis à des fins médicales parmi les organismes à but non lucratif qui défendent les intérêts de ces patients.
    Une coalition d'organismes à but non lucratif recommande, comme nous, de supprimer la taxe sur le cannabis thérapeutique. La coalition comprend la Société de l'arthrite, la Société canadienne du sida, la Canadian Arthritis Patient Alliance, l'Association canadienne de soins palliatifs, l'Association des infirmières et infirmiers du Canada, l'Association des pharmaciens du Canada, l'Association canadienne de spondylarthrite, la Cardiac Health Foundation of Canada, la Société GI, la Société Huntington du Canada et la Société canadienne de la sclérose en plaques.
    L'accès à du cannabis thérapeutique à prix abordable demeure un problème urgent pour la majorité des patients. Ce produit est rarement couvert par les assureurs, ce qui signifie que les patients doivent payer la majorité des dépenses liées au cannabis thérapeutique.
    Nous comparaissons ici aujourd'hui pour discuter de l'application d'une taxe sur le vice au cannabis thérapeutique proposée dans le projet de loi C-74, qui, s'il est adopté, nuira aux 269 000 Canadiens qui utilisent du cannabis à des fins médicales. Nous vous demandons de soutenir les droits des Canadiens malades et de laisser tomber la taxe d'accise sur le cannabis thérapeutique proposée.
    Je vais maintenant céder la parole à James.
(1615)
    Merci, Jonathan.
    Bonjour. Je m'appelle James O'Hara et je suis président-directeur général de Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale. Auparavant, j'étais vice-président d'une banque, et je suis présentement un patient qui consomme du cannabis à des fins médicales. Le cannabis thérapeutique traite efficacement certains problèmes de santé dont je souffre: des crises épileptiques partielles, l'arthrose et l'asthme.
    Le cannabis thérapeutique a changé radicalement ma vie, et je dis cela sincèrement. Je suis parvenu à réduire mes crises épileptiques d'environ 80 à 90 %, et ma qualité de vie en général s'est nettement améliorée. Je suis loin d'être seul dans cette situation. Aujourd'hui, plus de 250 000 patients consomment du cannabis thérapeutique au Canada pour soulager les symptômes des problèmes de santé et des maladies dont ils souffrent. Je pense entre autres au syndrome de la douleur chronique, à l'arthrite, à l'insomnie, à la sclérose en plaques, à la maladie de Crohn et à l'épilepsie, pour n'en nommer que quelques-uns.
    Malheureusement, pas moins de 60 % des patients n’ont pas les moyens de se payer une dose complète. C’est hors de leur portée. Des patients nous ont dit — et c’est quelque chose de très important — qu’ils ont dû faire des choix de vie très difficiles. Beaucoup nous ont dit qu’ils vont acheter leur produit sur le marché noir, parce qu’ils ont l’impression de n'avoir aucun autre choix. Même si le produit n’est pas nécessairement sûr, cela ne va pas les dissuader. D’autres ont dû piger dans leurs économies ou utiliser leur marge de crédit pour se payer le médicament. D’autres encore disent qu’ils vont s'en passer ou recommencent à utiliser des opiacés, qui eux sont couverts par leur assurance et soulagent un peu leurs douleurs. Je veux vous rappeler que ces médicaments sont assujettis à la TVH, ce qui constitue un fardeau qui n’a pas lieu d’être.
    D'autres médicaments au Canada sont détaxés et ne sont assujettis à aucun impôt. Les patients dont je parle ont déjà de la difficulté à payer le coût de leur médicament. Certains vont même jusqu'à mettre en danger l'avenir financier de leur famille. Honnêtement, ce genre de chose est complètement inacceptable dans un pays comme le Canada.
    Malgré tout, le gouvernement envisage aujourd'hui d'ajouter une autre taxe au cannabis thérapeutique: un droit d'accise que l'on appelle communément la « taxe sur le vice ». Avant de poursuivre, prenons une minute pour examiner ce qu'une taxe sur le vice est censée faire. La taxe sur le vice frappe les produits et que l'on considère comme préjudiciable à la société, comme l'alcool et le tabac. Sa principale fonction est de décourager la consommation de ces produits.
    Pour les patients qui en consomment à des fins médicales, le cannabis sert à soulager les problèmes et les symptômes. Il n'est pas nuisible et n'appartient pas aux catégories visées par la taxe sur le vice. En outre, la taxe sur le vice est censée décourager la consommation, mais un patient qui consomme du cannabis à des fins médicales n'a absolument aucun autre choix.
    Réfléchissez-y un instant. En imposant une taxe sur le vice sur le cannabis thérapeutique, on décourage la consommation. Dans les faits, cela revient à décourager les Canadiens malades de prendre leur médicament, ce qui est illogique. Pour revenir à ce que j'ai dit plus tôt, les patients qui consomment du cannabis à des fins médicales portent déjà un lourd fardeau et ont de la difficulté à payer leur médicament. Vous voyez où le bât blesse. Ce qui est proposé va mettre le médicament encore plus loin hors de leur portée.
    Les patients en difficulté, qui font tout leur possible pour prendre soin d'eux-mêmes, ne comprennent pas pourquoi le gouvernement voudrait taxer leur médicament comme s'il s'agissait d'alcool, de tabac ou d'essence. Il est tout à fait illogique de décourager la gestion responsable des besoins médicaux d'une personne. L'idée d'imposer une taxe sur le vice sur un médicament est à l'opposé de nos convictions morales et de nos principes collectifs en tant que Canadiens.
    C'est pour cette raison que, dans toutes les administrations des États-Unis qui ont des systèmes distincts pour le cannabis à des fins médicales et le cannabis à des fins récréatives, le cannabis thérapeutique est partiellement ou entièrement exonéré d'impôt. En Allemagne, les assureurs sont même obligés de couvrir le coût pour les patients.
    Un autre fait très important que je tiens à souligner est qu’il y a actuellement 269 000 patients inscrits au programme de cannabis thérapeutique de Santé Canada en vertu du Règlement sur l’accès au cannabis à des fins médicales. Ces patients consomment des produits de cannabis thérapeutique autorisés par leur fournisseur de soins de santé, même si ces produits ne sont pas réputés être des médicaments sur ordonnance et ne sont donc pas exonérés de la taxe d’accise. Cela veut dire que ces Canadiens devront peut-être assumer une augmentation inimaginable des coûts après la légalisation à cause des nouvelles taxes qui seront imposées sur leur médicament. Le gouvernement a tout de même fait un petit pas en exonérant les produits à faible teneur en THC, comme l’huile de cannabidiol, mais il semble avoir négligé un point important, c'est-à-dire le fait qu’il a été prouvé que le THC est un médicament efficace pour traiter la douleur chronique, l’hypertonie spastique liée à la sclérose en plaques, les nausées et les vomissements causés par la chimiothérapie ainsi que d’autres affections.
    En réaction à l'intention du gouvernement d'imposer une taxe sur le vice sur le cannabis thérapeutique, notre organisation a lancé la campagne « Dont't Tax Medicine », ce qui veut dire « Ne taxez pas les médicaments ». Jusqu'ici, plus de 20 000 Canadiens ont écrit à leurs députés pour leur demander d'éliminer la taxe sur le cannabis thérapeutique. Une dizaine d'importants organismes nationaux de bienfaisance oeuvrant dans le domaine de la santé se sont joints à notre coalition pour réclamer la même chose. Nous avons sondé l'opinion publique et avons découvert que deux Canadiens sur dix seulement sont en faveur d'une taxe sur le vice sur le cannabis thérapeutique.
    Il est clair que le grand public ainsi que le milieu des soins de santé sont largement en faveur de l'élimination de la taxe sur le cannabis thérapeutique. Il est temps que le gouvernement canadien agisse et commence à traiter le cannabis thérapeutique comme un médicament, ce qui suppose d'éliminer les taxes connexes, en particulier pour les patients consommant du cannabis à des fins médicales.
    Nous demandons au Comité de modifier le projet de loi C-74 de façon à exonérer le cannabis thérapeutique du droit d'accise. Ainsi, le gouvernement aidera à faire en sorte que les patients qui consomment du cannabis à des fins médicales soient traités équitablement et n'aient pas à payer une taxe sur le vice malavisée et injustifiable sur le médicament dont ils ont besoin.
(1620)
    Essentiellement, nous demandons un traitement fiscal juste et équitable en ce qui concerne le cannabis thérapeutique, et la réponse qui s'impose à notre demande est: « Ne taxez pas les médicaments ».
    Je remercie le Comité de son temps. Je répondrai à vos questions avec plaisir.
    Merci à vous deux.
    La parole va à M. Rewak, directeur général de Cannabis Canada.
    Je vous remercie de nous donner l'occasion de témoigner ici aujourd'hui. Comme cela a été dit, je m'appelle Allan Rewak. Je suis le directeur général de Cannabis Canada, l'association commerciale nationale qui représente les producteurs autorisés de cannabis thérapeutique en vertu du Règlement sur l'accès au cannabis à des fins médicales.
    Récemment, notre groupe a subi une transformation très profonde, mais très positive. Il y a à peine trois semaines, à notre assemblée générale annuelle, les membres de l'Association Cannabis Canada, du Conseil canadien du cannabis médical et de la Canopy Growth Corporation ont accepté de s'unir afin de créer une seule association dans notre secteur que nous exploiterons à l'avenir sous le nom de Conseil Cannabis Canada, ou C3.
    C'est avec un grand plaisir que je peux affirmer que notre organisation est maintenant plus forte et plus grande qu'auparavant. Je peux dire avec assurance que nous représentons la grande majorité des producteurs autorisés au pays, y compris les grands producteurs à grande échelle, les producteurs moyens et les producteurs autorisés émergents. Nous croyons que ce cadre de travail commun et inclusif sera d'une grande aide pour les personnes responsables des politiques, comme vous, qui vont devoir définir et réglementer notre industrie, qui est en pleine croissance.
    Nous sommes engagés collectivement à investir massivement au Canada et à créer de très bons emplois durables dans les collectivités où nous exerçons nos activités. Nous prévoyons que les choses avanceront rapidement une fois que le projet de loi C-45 sera adopté et mis en oeuvre dans son intégralité.
    Dans le cadre de notre participation à l'édification du Canada, nous ne nous opposons pas à l'imposition d'une taxe sur le cannabis destiné à être consommé par un utilisateur adulte, et ce, malgré le fardeau que peut constituer un nouveau régime d'imposition pour des systèmes naissants. Nous tirons fierté du rôle que nous jouons.
    Cela dit, nos membres — autant ceux des grandes organisations que ceux des petites — ont de grandes préoccupations par rapport à l'imposition d'un droit d'accise, une taxe sur le vice, sur le cannabis thérapeutique. Nous saluons et remercions le gouvernement fédéral des efforts très positifs qu'il a déployés en exonérant d'impôt les produits à haute teneur en cannabidiol et à faible teneur en THC. Cependant, nous croyons que les ratios établis dans le budget sont excessivement normatifs et vont à l'encontre de l'intérêt commun qui est de fournir aux Canadiens un accès équitable à un médicament.
    Compte tenu des préjudices financiers auxquels ce régime d'imposition exposerait les patients légitimes — et il y en a quelques-uns parmi nous aujourd'hui —, nous proposons comme solution de rechange l'adoption d'une approche collaborative et itérative. Notamment, C3 recommande de reporter d'au moins un an l'imposition de toute taxe sur le cannabis thérapeutique.
    Pendant cette période, nous proposons à votre comité de recommander à Santé Canada et aux ministères concernés de mettre sur pied un groupe de travail chargé d’étudier les limites d’âge appropriées et les autres mécanismes de contrôle liés au système de cannabis thérapeutique, dans le but de prévenir toute forme d’abus du système, et d’élaborer à partir de données probantes une matrice exhaustive des troubles médicaux pouvant être traités avec du cannabis. Nous espérons qu’une nouvelle matrice de ce genre servira à créer, avec confiance et de façon raisonnable, un régime de soins de santé légitime qui, au bout du compte, sera exonéré d’impôt, comme c’est le cas pour tous les autres médicaments.
    Nous croyons que cette approche nous permettra d'obtenir l'information dont nous avons besoin pour créer un système médical efficace qui protège les patients et qui répond à leurs besoins.
    Pour conclure, je tiens à remercier à nouveau le Comité de son invitation. Je serai heureux de répondre à vos questions et de vous faire part de l'information dont nous disposons.
    Merci beaucoup.
    La parole va maintenant à M. Killeen, vice-président d'Hydropothecary.

[Français]

    Je m'appelle Pierre Killeen. Je suis vice-président aux Relations gouvernementales chez Hydropothecary, un producteur autorisé de cannabis à des fins médicales qui est situé à Gatineau, au Québec. Nous avons été le premier producteur autorisé au Québec, et nous sommes à présent le seul producteur autorisé, au Québec, pouvant vendre du cannabis à des fins médicales. Le 11 avril dernier, nous avons annoncé que nous serions le fournisseur privilégié sur le marché québécois en fonction d'une entente conclue avec la Société des alcools du Québec.
    C'est un honneur pour notre entreprise et pour moi de comparaître devant le Comité permanent des finances au sujet des questions liées au projet de loi C-74. Nous aimerions remercier les membres du Comité de l'occasion qui nous est donnée de nous présenter, et nous aimerions également remercier les centaines de milliers de Canadiens qui ont plaidé pour le droit de consommer le cannabis à des fins médicales au Canada. Sans leur effort, il n'y aurait pas d'industrie légale de cannabis au Canada.
    Je limiterai aujourd'hui mes remarques à la partie 3 du projet de loi concernant l'application de la taxe d'accise sur les produits du cannabis à des fins médicales et récréatives, et l'impact économique de ces mesures sur notre industrie.
    Quant aux possibilités économiques s'offrant à l'industrie du cannabis, elles se chiffrent à près d'une dizaine de milliards de dollars au Canada. Lorsqu'il s'agit des possibilités économiques à l'échelle mondiale, les prévisions s'élèvent souvent à plus de 50 milliards de dollars par année.
    Notre industrie créera des milliers d'emplois au Canada et des centaines de millions de dollars en recettes fiscales pour nos gouvernements. En gardant cela en tête, concentrons-nous sur les signaux politiques envoyés par la partie 3 du projet de loi lorsqu'il s'agit des droits d'accise sur le cannabis.
(1625)

[Traduction]

     Dans la perspective des possibilités économiques qu'offre l'industrie du cannabis, commençons par étudier le message stratégique véhiculé par le projet de loi C-74.
    Le droit d'accise imposé sur le cannabis consommé par des adultes à des fins récréatives représentera le montant le plus élevé selon les calculs suivants: soit un dollar par gramme, soit 10 % du prix du produit. Le prix devrait permettre au cannabis légal vendu aux adultes à des fins récréatives de concurrencer le cannabis vendu sur le marché noir, un marché très évolué où les Canadiens peuvent acheter du cannabis en ligne et même s'en faire livrer en pianotant quelques secondes sur leur téléphone portable.
     L'approche adoptée dans le projet de loi C-74 à l'égard du cannabis à des fins récréatives envoie un message positif en matière de politique publique aux Canadiens et à l'industrie canadienne. Le message est que le gouvernement s'est engagé à mettre un terme au marché noir. Pour cette raison, nous félicitons le gouvernement d'avoir fixé le droit d'accise initial à ce taux.
    Cependant, le fait que le projet de loi C-74 prévoie d'imposer une taxe d'accise sur le cannabis à des fins médicales, le cannabis consommé à des fins thérapeutiques, envoie un mauvais message stratégique. Le Comité a déjà entendu les témoignages de groupes de patients ou d'autres personnes à propos des conséquences concrètes de cette décision sur la vie des Canadiens, et c'est pourquoi je vais restreindre mes commentaires aux conséquences de cette décision sur l'industrie canadienne du cannabis.
    Comme cela a été dit plus tôt, le cannabis thérapeutique deviendra une industrie représentant des milliards de dollars à l'échelle mondiale. Selon les dernières prévisions, l'industrie devrait représenter 55 milliards de dollars d'ici 2025. Nous commençons tout juste à comprendre les bienfaits thérapeutiques du cannabis consommé à des fins médicales, par exemple en ce qui a trait au soulagement des douleurs chroniques, au cancer, à l'arthrite, etc. L'intérêt suscité par les propriétés thérapeutiques du cannabis a fait bondir les investissements et les études menées par les entreprises de ce secteur ainsi que du secteur pharmaceutique et de l'industrie du bien-être, au Canada et dans le monde entier.
    Pour l'instant, les entreprises canadiennes de cannabis sont à l'avant-garde de ce secteur. Aux États-Unis, les entreprises de cannabis doivent composer avec toutes sortes d'interdits, ce qui nous donne l'avantage d'être les premiers à créer des entreprises qui seront des chefs de file sur la scène mondiale. Il convient aussi de souligner que l'approche adoptée par le Canada en ce qui concerne le cannabis thérapeutique est très différente de celle des États-Unis. En outre, de nombreux experts croient que notre promotion du cannabis thérapeutique sera probablement l'approche qui sera la plus imitée dans le reste du monde.
    Les autres pays observent ce que nous faisons. À l'étape où nous en sommes, le message stratégique que nous devons envoyer aux entreprises de cannabis thérapeutique, aux investisseurs et au reste du monde, c'est que le Canada soutient le cannabis à des fins médicales. Si nous voulons créer une industrie du cannabis thérapeutique de renommée mondiale, nous devons prendre un certain nombre de mesures de politique publique. En ce qui concerne les mesures fiscales, cela veut dire que nous devons encourager les gens à rester dans le secteur du cannabis thérapeutique; il ne faut pas les en dissuader.
    Un marché extérieur prospère suppose avant tout un marché national prospère. Il est difficile de trouver de bons exportateurs et des bonnes entreprises quand la demande au pays est faible. Comme preuve, vous n'avez qu'à regarder les problèmes avec lesquels notre secteur des technologies propres doit composer.
    En conclusion, nous recommandons que la partie 3 du projet de loi C-74 soit modifiée de façon à éliminer la taxe d'accise imposée sur le cannabis acheté à des fins médicales.
    Nous sommes tout disposés à répondre à vos questions.
(1630)
    Je vous remercie tous d'avoir été aussi rapides et brefs que possible.
    Je crois que nous allons faire une période de questions de six minutes. À la fin de la première heure, nous verrons où nous en sommes.
    Monsieur Grewal.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus ici aujourd'hui. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Monsieur Harford, vous avez dit que, selon le prix de la marijuana, on pourrait observer une diminution de la consommation de bière. Avez-vous des données probantes pour appuyer ce que vous dites, ou est-ce seulement une supposition?
    Des données à ce sujet commencent à nous parvenir des États-Unis. Dans l'État du Colorado, les ventes de bière ont diminué de 4,4 % depuis que le cannabis à des fins récréatives est légal. Selon certains articles de presse publiés en février à Aspen, au Colorado, les ventes de cannabis à des fins récréatives ont maintenant surpassé les ventes de boissons alcoolisées. Je crois qu'il est de plus en plus évident que ces produits sont en compétition directe. Un article du Globe and Mail de ce matin mentionnait un rapport de la Banque canadienne Impériale de Commerce selon lequel les ventes de cannabis à des fins récréatives au Canada vont surpasser d'ici deux ans les ventes de spiritueux et de vins. Il va sans dire que, du point de vue des brasseries...
    Mais au moment d'acheter, les gens ne font pas nécessairement un choix entre le cannabis et de la bière. À mon humble avis, c'est une supposition que vous faites. J'ai lu moi aussi le rapport du Globe and Mail, et ces prévisions d'expansion concernent un marché légal qui n'existe pas encore. Les gens fument du cannabis, et une fois que le marché sera légal, nous pourrons faire le décompte des fumeurs de cannabis. Nous aurons alors une idée de la taille du marché.
    Il semble y avoir eu une baisse similaire de la consommation de bière aux États-Unis. Même chez les Américains, il y a eu une diminution de 1,8 % de la consommation de bière l'année dernière. Je me demande donc, alors, pourquoi on ouvre de nouvelles brasseries. Entre 2015 et 2016, le nombre de brasseries a augmenté de 20 %, et ce, malgré le fait que la consommation de bière a chuté en même temps. Pourquoi les gens veulent-ils investir dans un marché en déclin?
    C'est une excellente question, et il y a toutes sortes d'explications que je peux vous donner. Entre autres, il y a le fait que les gouvernements ont constaté que le modèle ne fonctionnait pas; ils ont alors essayé de le restructurer de façon à encourager les gens à injecter du capital, à divers niveaux, dans le secteur de la bière. On a accordé aux petites brasseries des avantages fiscaux que les grandes brasseries n'ont pas, et c'est pourquoi il y a beaucoup d'entreprises qui veulent participer au secteur et y investir. C'est une très bonne chose. C'est une très bonne chose pour cette partie du secteur, mais personne ne croit que son taux d'imposition est trop faible et devrait être augmenté. Ce que tout le monde dit, c'est qu'il y a trop d'impôt et que cela nuit aux investissements futurs.
    Personne n'a jamais affirmé que son taux d'imposition était trop faible, mais je comprends très bien votre point.
    Je pose la question aux représentants de l'industrie du cannabis: avez-vous des données ou des études qui pourraient donner à penser que la légalisation du cannabis entraînera une diminution correspondante de la consommation de bière chez les consommateurs de cannabis?
    Nous ne disposons d'aucune donnée reflétant cela, à ma connaissance. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit d'un produit appartenant à une tout autre catégorie, et les consommateurs vont le choisir parce qu'il a moins d'effets nuisibles, que le taux de dépendance est plus faible, que le risque d'avoir un accident de voiture est moins élevé, etc. Avec tout le respect que je vous dois, je dois dire que la situation est un peu différente en ce qui concerne l'industrie brassicole, parce que vous avez une plus grande marge de manoeuvre que nous en ce qui concerne la publicité. Vous pouvez intervenir plus facilement sur les divers éléments de la chaîne d'approvisionnement. Prenez par exemple la chaîne de détaillants Beer Store en Ontario.
    Vous disposez de moyens que nous n'avons pas. Nous vendons notre produit à des organismes de la Couronne qui vont conserver la majeure partie des profits. Ces profits seront ensuite investis dans les écoles et les hôpitaux provinciaux. C'est un choix que les consommateurs feront.
    Ma prochaine question s'adresse à l'Association des banquiers canadiens. Merci d'être venus.
    À propos de la technologie financière, combien d'entreprises s'intéressent aujourd'hui à la monnaie numérique et à la cryptomonnaie? Ce doit être un domaine important dans le monde de la technologie financière. Quelles mesures les banques canadiennes et vos organisations membres ont-elles prises pour s'y adapter?
    Je ne peux pas vraiment me prononcer en ce qui concerne la mesure dans laquelle les entreprises de technologie financière s'intéressent à la cryptomonnaie. Elles ne sont pas membres de notre association, mais il est évident que cette question prend de plus en plus d'importance. L'usage de la cryptomonnaie se répand progressivement dans le monde entier. Il s'agit tout de même d'un domaine émergent, qui n'est assujetti à aucune réglementation présentement, alors il s'agit plus ou moins d'une variable inconnue. Malgré tout, tout le monde garde un oeil là-dessus.
(1635)
    Monsieur Kingston, je vous souhaite à nouveau la bienvenue devant notre comité. C'est toujours agréable de vous voir.
    Vous avez parlé de compétitivité. Évidemment, on a aussi beaucoup parlé de toute cette incertitude qui plane sur l'ALENA, de l'imprévisibilité de l'administration américaine et des modifications récentes de l'impôt des sociétés chez nos voisins du Sud. Vous ne trouverez personne pour vous contredire lorsque vous dites que les gens de Bay Street se préoccupent énormément de la compétitivité du Canada. Cependant, ce n'est pas ce que reflètent les données. La croissance du PIB est toujours solide, tout comme la croissance des emplois pendant la dernière année et le premier trimestre de l'année en cours.
    Donc, advenant un règlement convenable de l'ALENA, croyez-vous qu'il y aura un nouvel afflux de capitaux au Canada?
    Comme le montrent les données, l'année 2017 a effectivement été très bonne pour l'économie canadienne, en ce qui concerne autant le PIB que le taux de chômage. Cependant, ce sont les résultats à venir qui nous préoccupent.
    La croissance du PIB devait se stabiliser autour de 2,1 %. Selon le Conseil consultatif en matière de croissance économique présidé par Dominic Barton, la croissance potentielle à long terme de notre PIB est de 1,5 % par année. Je dirais que nous sommes en train de descendre du nuage sur lequel nous étions l'année dernière. En outre, les données les plus récentes sur les investissements directs étrangers nous préoccupent également; puisque nous avons atteint, en 2017, un creux inégalé en huit ans. Selon nous, cette tendance est préoccupante. J'ai aussi mentionné quelques données recueillies dans le cadre d'enquêtes prospectives qui montrent que la majorité de nos membres croient que la réforme fiscale aux États-Unis va probablement ou assurément avoir un impact sur leurs investissements au Canada. Ce genre de données prospectives nous préoccupent énormément.
    Vous avez tout à fait raison de dire que l'ALENA joue un grand rôle dans ce contexte. Ce n'est pas facile de distinguer les effets de la réforme fiscale aux États-Unis des effets liés à l'ALENA, et seul le temps pourra nous éclairer. J'espère que le règlement de l'ALENA pourra rétablir un certain niveau de certitude. Par exemple, disons qu'une entreprise songe à investir en Ontario dans le but d'exporter des biens vers les États-Unis; cette entreprise va probablement y songer à deux fois et attendre que le problème de l'ALENA soit réglé. Avec un peu de chance, si un règlement intervient sous peu, cela devrait résoudre une partie du problème, mais nous croyons que la compétitivité demeurera un point important, et la question des réformes fiscales devra être abordée.
    Merci.
    Merci à tous.
    La parole va à M. Albas.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être venus ici aujourd'hui. Je vais poursuivre dans le même ordre d'idées que M. Grewal.
    Avant tout, je crois que c'est Marshall ou Keynes qui a dit qu'en économie, il y a souvent deux forces combinées. Dans le cas qui nous occupe, il s'agit de l'ALENA et de la réforme fiscale. C'est comme une paire de ciseaux: peu importe laquelle des deux lames frappe la première ou le plus fort, le résultat est le même au bout du compte.
    Selon vous, le problème le plus important aujourd'hui est-il la réforme fiscale ou le manque de compétitivité? Devrions-nous encourager le gouvernement à prendre des mesures — la déduction pour amortissement, par exemple — jusqu'à ce que les investissements remontent? Je constate, présentement, que nous sommes dans un creux inégalé en huit ans.
    Oui, il est évident que la réforme fiscale a le plus d'incidence présentement, puisqu'elle a déjà été adoptée. Elle est en vigueur, et le taux effectif marginal d'imposition des entreprises qui s'applique au Canada est très différent de celui qui s'applique aux États-Unis.
    Le dossier de l'ALENA va continuer de créer de l'incertitude, mais nous savons, après avoir discuté avec nos organisations membres, que la réforme fiscale aux États-Unis a eu un impact immédiat sur les décisions d'investissement au Canada.
    M. Grewal a aussi mentionné le taux de chômage. Le directeur parlementaire du budget a dit, dans son rapport trimestriel, que 60 % des emplois qui ont été créés au Canada depuis octobre dernier étaient dans la fonction publique et que la baisse du taux de chômage était liée au fait que davantage de gens se sont retirés de la population active, du marché du travail.
    Cela vous préoccupe-t-il?
    Absolument. Nous voulons que le secteur privé au Canada soit dynamique, et nous voulons que les politiques adoptées soutiennent le secteur privé et favorisent la croissance des entreprises jusqu'à ce qu'elles acquièrent une renommée mondiale.
    Monsieur Harford, je crois savoir que, lorsqu'on augmente le prix d'une chose, que ce soit à cause d'une taxe ou des facteurs de production, cela réduit le nombre de personnes qui sont prêtes à acheter le produit à ce prix. Donc, puisque votre industrie subit toujours l'indexation de l'accise et que la taxe d'accise continue d'augmenter ici alors qu'elle diminue pour les entreprises concurrentes des États-Unis, cela veut dire, d'emblée, que la consommation de votre produit va diminuer, peu importe l'arrivée d'un autre marché légal.
    Comme je l'ai mentionné dans mon exposé, il y a eu 45 augmentations de la taxe sur la bière au Canada. Les taxes sur la bière, depuis 2010, ont augmenté à un rythme deux fois plus rapide que l'inflation. Au cours des 10 dernières années, nous avons assisté à une diminution de 10 % des ventes de bière par personne, ce qui a aussi un impact sur les recettes gouvernementales à long terme.
    Par rapport à votre industrie, savez-vous si la tendance est à la hausse ou à la baisse en ce qui concerne les investissements importants?
(1640)
    Pour l'instant, l'industrie est surtout préoccupée par la prochaine taxe qui lui sera infligée.
    Mais, à nouveau, est-ce que certains de vos membres songent à investir au sud de la frontière au lieu d'investir ici au Canada?
    C'est effectivement quelque chose qu'envisagent nos membres les plus importants, ceux dont les activités s'étendent aux États-Unis. Ils étudient la question sous tous les angles pour voir dans quelle mesure le Canada demeure intéressant pour eux, étant donné la quasi-disparition de la taxe d'accise sur la bière aux États-Unis, qui avantagera les brasseries et les installations américaines, ainsi que la réforme fiscale.
    Je pose la question aux quatre représentants de l'industrie du cannabis: le gouvernement vous a-t-il consultés à propos du droit d'accise avant d'apporter des changements dans le budget de 2018 et, le cas échéant, comment a-t-il réagi aux préoccupations que vous avez, j'en suis sûr, soulevées?
    Quelqu'un souhaite-t-il se lancer?
    Avez-vous été consultée, Annie?
    Oui, effectivement. J'ai discuté avec les députés Sean Casey et Wayne Easter à propos de la taxe d'accise.
    Sean Casey a décliné ma première invitation à prendre la parole à un événement concernant la taxe d'accise. Il a transmis une déclaration au nom du Parti libéral, mais il ne semblait pas bien comprendre de quoi il était question. Je lui ai présenté de nombreux patients pour qu'il entende leur histoire. Je crois que c'est le plus important. Les patients qui consomment du cannabis à des fins médicales sont encore très stigmatisés, et cela teinte l'opinion que les gens ont d'eux. C'est en humanisant les patients que nous amenons de plus en plus de gens à comprendre.
    Quelqu'un d'autre veut-il parler?
    Oui, le ministère des Finances a consulté Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale. On a également communiqué avec des députés de tous les partis, des sénateurs ainsi que différents bureaucrates dans différents ministères.
    Cela dit, je crois que la consultation n'a pas été aussi efficace que nous l'aurions souhaité, c'est-à-dire que les mémoires qui ont été présentés — la plus grande partie, à notre connaissance — appuyaient en grande majorité l'élimination de la taxe sur le cannabis thérapeutique.
    Comme je l'ai mentionné, une coalition de très grandes organisations crédibles et respectables — y compris la Société de l'arthrite, l'Association des pharmaciens du Canada et l'Association des infirmières et infirmiers du Canada — a présenté un mémoire dans le cadre du processus de consultation, mais nous ne croyons pas que le gouvernement est adéquatement à l'écoute.
    Un petit pas a été fait pour exempter les huiles à faible teneur en THC, mais elles représentent un infime pourcentage du marché. Cela dénote une incompréhension totale de l'utilisation qu'en font les patients, et au-delà de cela, il ne s'agit pas d'une décision fondée sur des données probantes. Les données probantes, comme l'a mentionné James, sont très solides et très concluantes pour ce qui est du traitement de douleurs chroniques chez les adultes, de la spasticité de la sclérose en plaques ainsi que des nausées et des vomissements causés par la chimiothérapie. Voilà pour le THC, et cela fait l'objet de la taxe d'accise.
    Dan, vous avez le temps pour une autre question.
    C'est merveilleux.
    Le directeur parlementaire du budget a publié un rapport sur cette taxe, lequel montre que la taxe sur le cannabis ne générera pas beaucoup de recettes parce que même une taxe assez modeste permettrait au marché noir de subsister et le gouvernement n'encaisserait pas les recettes. Avez-vous des commentaires à formuler à ce sujet? Il semblerait que le gouvernement laisse entendre qu'elle générera des recettes sur le dos des personnes qui ont du mal à payer en réalité pour avoir accès à de la marijuana thérapeutique tout en faisant fi complètement du fait qu'elle n'en générera pas beaucoup au départ.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous; avec cette taxe d'accise, le gouvernement utilise les patients pour établir ce nouveau programme de légalisation. Les patients sont déjà aux prises avec l'application continue de la TPS et de la TVH. Cette situation signifie que 6 Canadiens sur 10 qui consomment du cannabis thérapeutique n'ont pas les moyens de se procurer une dose complète. Ce chiffre est inconcevable.
    Le gouvernement envisage la mise en place d'un régime d'assurance-médicaments parce que 1 Canadien sur 10 ne peut pas se payer des médicaments sur ordonnance. Ensuite, il se retourne et applique une taxe d'accise au cannabis thérapeutique alors que 6 Canadiens sur 10 ne peuvent pas se permettre de se procurer une dose. Cela n'a aucun sens.
    Avant de donner la parole à M. Dusseault, monsieur Hartford, pour ce qui est de la baisse de 10 % au chapitre des ventes de bière, est-ce que cela comprend les brasseries artisanales?
    C'est l'ensemble du marché.
    L'ensemble du marché. D'accord.
    Oui, c'est fondé sur le volume.
    Allez-y, monsieur Dusseault.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous de votre présence.
    Mes commentaires et mes questions porteront sur le cannabis. Merci de nous faire part de votre expertise et de vos témoignages.
    Je fais bien la distinction entre les taxes que sont la TPS et la TVH, et les droits d'accise. Selon moi, ce sont vraiment deux enjeux différents, mais quand même liés, évidemment.
    Je ne sais pas qui exactement pourra répondre à ma question. Est-ce que la TPS et la TVH s'appliquent déjà?
    Monsieur Killeen, vous devez être au courant?
(1645)
    Oui, elles s'appliquent, et elle vont s'appliquer aux ventes de cannabis à des fins thérapeutiques et non thérapeutiques, une fois que la loi entrera en vigueur.
    Si j'ai bien compris, dans le projet de loi, il y a une possibilité d'exemption de TPS et de TVH, mais seulement en ce qui concerne les produits sous ordonnance et qui comportent un numéro d'identification de médicament, ou DIN.
    Selon vous, serait-il réaliste de demander un DIN?
    Cela va nous prendre du temps.
    Cela est également coûteux. N'est-ce pas?
    C'est coûteux et cela va nous prendre du temps. À l'heure actuelle, les Canadiens demandent à avoir accès à du cannabis à des fins thérapeutiques.
    Il est vrai que, avant d'obtenir un DIN, toute entreprise doit procéder à de nombreuses études cliniques susceptibles de lui permettre de confirmer l'efficacité d'un médicament.
    L'industrie prend cette orientation, mais cela va nous prendre du temps pour faire les études et nous organiser, pour avoir les moyens de présenter la demande à Santé Canada en vue d'obtenir l'approbation et un DIN.
    À court terme, ce n'est donc pas réaliste d'espérer obtenir cette exemption, qui va exister. Toutefois, en pratique, personne n'a un DIN en ce moment. N'est-ce pas?
    L'important, monsieur Dusseault, est de savoir que cette industrie en est vraiment à ses débuts. Nos connaissances sur le cannabis vont s'élargir rapidement, mais nous avons besoin de temps pour être prêts à obtenir la permission d'offrir le cannabis comme médicament.
    Est-ce que vous avez déjà des produits dont la teneur en tétrahydrocannabinol, ou THC, est inférieure à 0,3 % de ? Est-ce que cela existe sur le marché?
    Nous avons déjà des produits qui contiennent moins de 0,3 % de THC. Nous pourrions donc offrir ce genre de produits à des Canadiens, mais la douleur et les souffrances sont d'intensité très variables, et ce produit contenant moins de 0,3 % de THC ne suffirait pas à soulager certains patients. La portée de cette exemption va donc être limitée.
    Encore une fois, l'obtention d'un DIN et l'exemption relative à la teneur en THC inférieure à 0,3 % ne semblent donc pas réalistes dans le marché actuel. C'est cela?
    Pour certaines personnes, il sera réaliste d'offrir des produits ayant une faible teneur en THC, soit moins de 0,3 %, mais pas pour toutes.
    D'accord.
    Je vais maintenant parler des droits d'accise, qui constituent l'autre point majeur et qui est peut-être encore plus important que le premier. Il faudra maintenant posséder une licence délivrée par l'Agence du revenu du Canada pour être producteur de cannabis.
    À mon avis, le principal enjeu consiste, pour un producteur, à bien distinguer le cannabis à des fins récréatives du cannabis à des fins médicales.
    Connaissez-vous des entreprises qui comptent produire les deux types de cannabis et qui seront titulaires des deux licences — obtenues auprès de l'Agence du revenu du Canada —, soit d'une licence de cannabis à des fins médicales, comme c'est le cas pour vous, et d'une licence de cannabis à des fins récréatives?
     Comme vous le savez sans doute, notre industrie est très réglementée. Nous nous préparons en vue d'obtenir une licence relativement aux taxes et aux droits d'accise. Nous sommes vraiment prêts à répondre aux obligations d'ordre juridique qui nous incombent en tant que société et contribuables.
    Merci.
    Je vais adresser la question à M. Rewak, mais d'autres intervenants voudront peut-être répondre également.
    Avez-vous évalué l'écart de prix pour un patient en comparant le coût actuel du cannabis à des fins médicales et celui découlant du régime proposé?

[Traduction]

    La plupart des chiffres sont empiriques. Malheureusement, nous ne le savons pas parce que nous n'avons pas entièrement mis en place les systèmes. On est en train de conclure des accords d'approvisionnement et de mettre la dernière main aux réseaux de vente pour les consommateurs adultes.
    Ce que je peux dire, en général, c'est que je prévoirais que le cannabis thérapeutique soit légèrement plus abordable que le cannabis récréatif. Nous nous attendons à ce qu'on offre des catégories de produits différents dans le marché de consommation des adultes contrairement au marché thérapeutique, mais la taxe d'accise, qui s'ajoute à la TVH et à la TPS, augmentera de manière importante peut-être de 25 %, le coût de la production de cannabis thérapeutique. Le RACFM nous permet d'envoyer le cannabis directement aux patients. Cela nous permet de faire certaines économies pour maintenir les coûts relativement bas.
    Au bout du compte, il serait moins coûteux pour nous de simplement appliquer une taxe d'accise à tous les produits. C'est plus facile du point de vue de la production, mais c'est contraire à l'éthique. Nous ne ferons pas cela aux patients. Nous préférerions avoir un système plus compliqué du point de vue de la production parce que les patients ont fait de nous ce que nous sommes aujourd'hui. Ils continueront de nous appuyer, et nous ne les oublierons pas.
(1650)

[Français]

    Pour un producteur, il serait donc réaliste et possible de produire les deux types de cannabis. En distinguant la production du cannabis à des fins médicales de celle du cannabis à des fins récréatives, il ne paierait pas les droits d'accise sur cette deuxième partie de la production.
     Monsieur Killeen, pouvez-vous nous dire si vous considérez cela réaliste?
    À l'heure actuelle, nous offrons du cannabis à des fins médicales aux Canadiens par l'entremise de la vente en ligne. Nous avons donc déjà des systèmes sur pied pour offrir ce service aux personnes qui ont des problèmes de santé. Il s'agit maintenant de créer le régime d'accise pour couvrir l'aspect récréatif.
    Il y aurait deux systèmes parallèles. C'est cela?
    Comme l'a dit mon collègue M. Rewak, ce sera plus dispendieux pour nous, mais nous sommes conscients de l'obligation que nous avons envers les Canadiens qui consomment du cannabis à des fins thérapeutiques. Sans eux, nous ne serions pas ici aujourd'hui.

[Traduction]

    Nous devons nous arrêter ici, Pierre.
    Monsieur McLeod.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les intervenants. Nous tenons de très bonnes discussions ici aujourd'hui. J'ai certainement appris beaucoup de choses.
    Je représente les Territoires du Nord-Ouest. Pour ce qui est des frais de transport, je voulais dire que nous gérons la distribution d'alcool par l'intermédiaire de la Société des alcools des Territoires du Nord-Ouest, et le cannabis sera géré par cette Société. Il y a déjà beaucoup de controverse concernant le subventionnement du prix de l'alcool. Nous recevons de l'alcool dans les collectivités du Nord, et il est moins cher que dans le Sud. Nombre de personnes sont surprises.
    Je crois que nous allons éprouver le même problème avec le cannabis. Je n'ai pas la même préoccupation quand il s'agit de la marijuana thérapeutique parce que je connais les avantages de cette consommation.
    J'ai deux ou trois questions. Tout d'abord, je comprends l'enjeu de la taxe. Nous envisagions de n'avoir aucune taxe; ni TPS ni TVH. Nous allons traiter ce produit comme un médicament sur ordonnance plutôt qu'un médicament en vente libre. J'imagine que nous allons dans cette voie. Voilà ma première observation, si vous pouviez la commenter.
    J'aimerais ensuite avoir votre opinion sur la conférence tenue à Toronto à la fin d'avril dans le cadre de laquelle des médecins se sont demandé s'ils devaient continuer à prescrire de la marijuana si elle devenait légale pour tous. S'ils ne le faisaient pas, quelles en seraient les conséquences?
    Certains d'entre vous mettent l'accent sur... je pourrais demander à Annie de répondre à la question, et peut-être que les représentants de Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale pourraient également parler de ces questions.
    Qui veut commencer? Les représentants de Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale?
    Certainement.
     Pour ce qui est de la première question concernant le cannabis sur ordonnance par rapport au cannabis en vente libre, le projet de loi C-45 propose que le système de cannabis thérapeutique dans sa forme actuelle, comme il est décrit par Cannabis Canada et Hydropothecary, demeure essentiellement inchangé jusqu'à la légalisation du cannabis. Cela signifie un système de cannabis thérapeutique distinct du système de cannabis récréatif. Les patients devront continuer d'aller voir leur fournisseur de soins de santé. Ils devront encore subir une évaluation afin de s'assurer qu'ils sont admissibles à la consommation de cannabis thérapeutique et qu'il n'y a aucun risque à le faire.
    Ensuite, ils recevront directement leurs produits à la maison. Il existe un programme de cannabis thérapeutique distinct qui fonctionne en grande partie, à mon avis, de manière similaire à une pharmacie en ligne dans le cadre duquel on utilise encore un document semblable à une ordonnance qui est envoyé et utilisé uniquement à des fins médicales. Le système sera entièrement distinct. C'est pourquoi nous disons qu'il devrait être exempté de taxes. Lorsque le cannabis est consommé à des fins thérapeutiques à la suite d'une autorisation d'un fournisseur de soins de santé, il devrait être traité comme tous les autres médicaments utilisés avec l'autorisation d'un médecin, lesquels sont tous exempts de taxes.
    Quant à la deuxième question, je crois que vous parliez de la conférence du CCIC. J'ai assisté à la conférence et j'y ai présenté un exposé.
    CAEMM préconise un système de cannabis à des fins thérapeutiques distinct pour les raisons que nous avons soulignées aujourd'hui. Les patients ont des besoins uniques. Il est irresponsable, à mon avis, de proposer que les patients, dont certains souffrent de graves problèmes médicaux, comme la sclérose en plaques et le cancer, se rendent simplement dans un magasin de cannabis récréatif pour s'automédicamenter. Cela n'a aucun sens. Il ne s'agit pas d'une façon sécuritaire pour une personne d'intégrer le cannabis à son régime de santé, particulièrement lorsqu'elle prend d'autres médicaments.
    Je noterais également que plus de 11 000 ou 12 000 médecins canadiens ont actuellement autorisé la consommation de cannabis thérapeutique. Le nombre continue de croître. Je n'ai pas vu les dernières données du marché, pour le mois dernier, mais c'est un nombre qui croît considérablement de mois en mois.
    Je reconnais les préoccupations de l'AMC. Cela dit, les patients sont très clairs. Les tribunaux ont été très clairs. Et la plupart des autres associations qui représentent différentes autorités sanitaires, comme les infirmiers et les pharmaciens, ont recommandé un système de cannabis thérapeutique distinct.
(1655)
    Quelqu'un veut-il ajouter un commentaire à ce sujet?
    Michael, vous avez le temps pour une autre question.
    Monsieur le président, je soutiens la légalisation de la marijuana principalement parce que je désire qu'elle ne se retrouve plus entre les mains d'enfants. Dans le Nord, nous voyons trop d'enfants qui en ont en leur possession. À certains endroits, nous avons perdu le contrôle de la situation. Maintenant que je sais que la légalisation du cannabis diminuera la consommation d'opioïdes et d'alcool, je l'appuie davantage.
    J'aimerais demander à ceux d'entre vous qui se concentrent sur le cannabis ce qu'ils pensent du point soulevé par le représentant de Bière Canada selon lequel la légalisation de la marijuana réduira les prix de moitié. Je n'avais jamais entendu ça auparavant et je me demande si c'est quelque chose...
    Il s'agit d'une cible ambitieuse compte tenu de l'intensification de nos activités. On ne peut pas établir une comparaison exacte avec les États-Unis. Notre réglementation stricte de la production est un peu différente de la leur. Nous avons des coûts ajoutés.
    Cela dit, à mesure que nous étendrons nos activités, il y aura une réduction des prix au fil du temps. Mais, pour être franc, cette réduction ne se fera pas sentir chez le consommateur final. Dans nombre de cas, cela augmentera les recettes fiscales de nos partenaires provinciaux grâce à la vente et à la distribution de cannabis. Il y aura au bout du compte une rationalisation des prix, comme pour toute nouvelle industrie. À ce moment-là, nous pourrons toujours examiner le système fiscal dans l'avenir afin de nous assurer que nos partenaires gouvernementaux reçoivent toujours des recettes équitables.
    Sur ce, à moins que le représentant de Bière Canada ait quelque chose à ajouter à la discussion, nous allons passer à M. Kelly.
     Monsieur Kingston, vous avez dit, dans votre déclaration liminaire, si j'ai bien compris, que, au nom de la compétitivité fiscale ou de la compétitivité économique générale, vous appuyiez un examen indépendant approfondi du régime fiscal. Nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-74 qui, entre autres, mettra en oeuvre certaines modifications de l'imposition des sociétés privées. Vous n'avez pas beaucoup parlé de cet aspect dans votre déclaration liminaire. Je ne suis même pas certain que vous en ayez parlé. Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez dire à ce sujet?
    Oui, absolument. Merci de m'offrir l'occasion de le faire.
    Nous sommes heureux des modifications apportées à la proposition initiale sur les placements passifs, mais nous sommes d'avis que ce que le gouvernement essayait de régler découle de l'utilisation continue de la réduction accordée aux petites entreprises. Il s'agit d'une dépense fiscale très coûteuse, et peu de données probantes soutiennent la poursuite de cette dépense cette année. Le ministère des Finances estime qu'il en coûtera au gouvernement 5,5 milliards de dollars en recettes cédées.
    Au lieu de compliquer davantage le régime fiscal avec plus de modifications afin d'essayer de restreindre l'accès à cette réduction, pourquoi ne pas examiner de plus près le régime fiscal, élargir l'assiette fiscale, baisser les taux et se débarrasser de dépenses fiscales inefficaces, comme la réduction accordée aux petites entreprises? Nous pensons qu'il s'agit d'une approche plus raisonnable à cet égard.
    Comment vous y prendriez-vous pour réaliser cet examen approfondi? Désirez-vous qu'un organe indépendant l'effectue?
    Exactement. On pourrait mettre sur pied un organe indépendant composé de personnes issues du secteur privé et de fiscalistes examinerait le régime fiscal dans son ensemble et présenterait un rapport au gouvernement et, nous l'espérons, des mesures seraient prises à la suite des recommandations du rapport. C'est la meilleure approche à ce stade.
    Pour ce qui est du budget fédéral en général, et la poursuite du déficit dont vous avez parlé, combien serait-il ajouté au déficit à court terme à la suite de ce qui était, bien sûr, pour de nombreuses personnes, une année étonnamment positive et au cours de laquelle nous ne sommes pourtant pas plus près d'un budget équilibré? À quel moment devrait-on décider d'équilibrer un budget sinon au cours de périodes de croissance relative de l'économie?
(1700)
    Exactement. Nous pensons que le gouvernement devrait adopter une politique budgétaire qui est essentiellement contre-cyclique par rapport au cycle économique. En période de prospérité, vous devriez afficher des surplus et vous préparer à un ralentissement potentiel. Ensuite, lorsque l'économie entre en récession, vous avez les fonds disponibles pour soutenir les gens qui perdent leur emploi, ou les industries qui font face à des défis, plutôt que de continuer à augmenter le déficit quand l'économie va bien. Nous ne comprenons pas très bien la logique qui sous-tend une telle façon de faire.
    Avez-vous des préoccupations en particulier concernant la perspective que l'augmentation des taux d'intérêt soit supérieure, ou même à peine supérieure, aux prévisions qu'a faites le gouvernement ou les corrections du marché de l'habitation? Est-ce qu'un de ces éléments vous inquiète, en ce qui concerne la capacité d'équilibrer un budget dans l'avenir?
    Absolument. Une des choses que nous surveillons de près, c'est que l'économie américaine se trouve dans un marché à la hausse depuis 100 mois maintenant. Il s'agit du plus long marché à la hausse de l'histoire. Inévitablement, on connaîtra une récession. On ne sait jamais ce qui la provoquera. Ce pourrait être l'augmentation des taux d'intérêt. Mais le fait est que nous sommes un pays très endetté, alors lorsque nous entrerons en récession, les effets pourraient être importants. Appuyer votre bilan financier sur le ratio de la dette au PIB est très dangereux lorsque le PIB s'effondre soudainement. Nous aimerions voir une cible budgétaire plus concrète comme un retour à l'équilibre d'ici une date précise.
    Me reste-t-il du temps?
    Il vous reste du temps si vous voulez. Nous pouvons revenir à vous plus tard.
    J'ai seulement une petite question pour le représentant de Bière Canada sur l'indexation de la taxe d'accise. Si je vous ai bien entendu, vous n'êtes pas en faveur de cela. Voulez-vous formuler des observations à ce sujet? Je comprends les arguments présentés par les personnes qui disent que nous l'indexons simplement en fonction de l'inflation, mais le gouvernement ne devrait-il pas être contraint à s'expliquer devant le Parlement afin que nous puissions voter sur la question et que les votes soient consignés publiquement au lieu de seulement laisser le gouvernement augmenter une taxe en douce chaque année? C'est particulièrement le cas des types d'augmentations que vous avez déjà constaté dans votre industrie.
    Oui, et merci de la question. Je dirais que notre attente est, ou était, la suivante: si le gouvernement voulait augmenter les taxes, il nous consulterait, examinerait tous les autres faits, constaterait l'état de l'industrie, analyserait le marché compétitif dans lequel l'industrie doit évoluer et prendrait ensuite une décision concernant le taux d'imposition. Il ferait cela chaque année ou chaque fois que c'est nécessaire, mais il entamerait le processus afin que ce soit automatique et intégré à la loi.
    Il est très difficile de s'adapter aux changements qui se produisent dans le marché. L'indexation de la taxe sur l'inflation ne reflète certainement pas ce qui arrive à notre catégorie et ce qui se passe dans chaque région du pays.
    D'accord, sur ce, nous allons passer à M. Sorbara.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à tous.
    Commençons par Brian et John du Conseil canadien des affaires. Bienvenue à vous deux.
     J'en ai abondamment parlé au cours des deux ou trois dernières semaines. Le rapport A.T. Kearney, publié la semaine dernière, indique que le Canada occupe le deuxième rang des endroits préférés au monde pour réaliser un investissement direct étranger, grimpant de trois rangs, et se trouve juste derrière les États-Unis. Je crois que c'est un très bon rendement qui montre que nous avons pris un certain nombre de mesures. Elles comprennent la création du programme Investir au Canada; l'achèvement et la signature de l'AECG; le PTPGP; notre participation aux négociations avec les pays du Mercosur; évidemment les négociations continues de l'ALENA, que nous connaissons bien tous; et aussi nombre d'autres mesures que nous avons prises, comme le programme des supergrappes, ou superclusters, comme on dit en anglais.
    Il se passe beaucoup de bonnes choses. Notre ratio de la dette au PIB diminue également, ce qui, selon certains économistes, est une autre cible budgétaire que nous pouvons examiner. Nous avons créé 600 000 nouveaux emplois, et notre taux de chômage est à son plus bas en 40 ans.
    Ne diriez-vous qu'il s'agit de bonnes nouvelles?
    Je suis très heureux que vous ayez soulevé le rapport A.T. Kearney. Nous l'avons examiné. Ses conclusions nous ont surpris, honnêtement, vu que les membres de notre association nous disent que le rapport comporte deux ou trois lacunes graves.
    Tout d'abord, il s'agit d'un sondage réalisé auprès de cadres en janvier 2018 avant qu'on comprenne entièrement la réforme fiscale américaine. Nous essayons encore de comprendre sa complexité. Je ne pense pas que le rapport reflète précisément les conséquences de la réforme américaine.
    Ensuite, il mentionne quelques initiatives que le gouvernement a annoncées qui ne sont pas encore vraiment opérationnelles. Par exemple, le rapport mentionne que le programme Investir au Canada attire des investissements en 2018. Le programme n'est pas encore opérationnel, et nous ne nous attendons pas à ce qu'il le soit avant 2019.
(1705)
    Je vais vous arrêter ici parce que je dois souligner deux choses. Je ne crois pas que je critiquerais le rapport A.T. Kearney de janvier jusqu'à maintenant. Quatre mois se sont écoulés. La situation financière des États-Unis s'est détériorée en réalité en raison de leurs problèmes de balance des paiements. Je crois que notre ratio déficit-PIB est de 0,4 %, et le leur est de 5 %, si c'est exact.
    Les États-Unis se trouvent dans une situation financière pire que la nôtre, mais ils possèdent également l'une des principales monnaies de réserve à l'échelle mondiale, ce qui leur donne davantage...
    Je vous rappelle que je ne parle pas de devises, n'est-ce pas?
    ... de ressources que nous, juste pour souligner cet aspect.
    Mais ce que je vous dirais, c'est que notre...
    Je dois être équitable pour tout le monde, nous n'avons pas assez de temps. Laissez M. Kingston répondre.
    Voulez-vous terminer votre réponse?
    J'aimerais seulement souligner une autre chose concernant le rapport A.T. Kearney, qui, à mon avis, mine sa crédibilité.
    Le rapport mentionne également le fait que l'AECG attirera de nouveaux investissements de l'Europe et il cite le nouveau tribunal de la protection des investissemeurs. Nous savons qu'il n'est pas encore mis en place. L'AECG est seulement appliqué provisoirement. L'ensemble du chapitre sur l'investissement ne fera partie de l'accord que quand tous les membres l'auront signé. Après avoir vu la méthode, j'étais très inquiet de la validité du rapport. Compte tenu des données du sondage que je vous ai transmises, des chefs d'entreprise ici nous disent le contraire.
    Je crois que c'est tout à fait inexact. À mon avis, si vous regardez l'investissement de 1,4 milliard de dollars au Canada annoncé par Toyota la semaine passée, il s'agit d'un signe de ce que les participants étrangers et nationaux font pour notre croissance de l'emploi: 600 000 emplois ont été créés au cours des deux dernières années et demie. Je crois que c'est excellent. À mon sens, si vous compariez ce chiffre aux résultats de n'importe quelle autre économie dans le monde, il ferait bonne figure.
    Je veux passer rapidement à Angelina et parler des banques.
     Une partie de la LEB — le projet de loi C-74 — porte sur les banques, les entreprises de technologie financière et la capacité d'investir. Est-ce que cela a fourni assez de souplesse à l'heure actuelle pour les banques? Les entreprises de technologie financière ne sont pas assujetties au BSIF, dans une grande mesure. Elles n'ont pas à respecter des exigences en matière de capital. Il y a une multitude de mesures d'observation auxquelles elles ne sont pas assujetties. À l'heure actuelle, êtes-vous satisfaits de la façon dont fonctionne la structure réglementaire?
    Nous sommes satisfaits des changements. Ils prévoient la clarté et la souplesse permettant de soutenir la collaboration au chapitre de l'innovation et des entreprises de technologie financière. Bien sûr, nous allons continuer de surveiller ce secteur parce qu'il continue d'évoluer, mais nous sommes satisfaits des changements qu'on nous a présentés.
    D'accord.
    Merci, monsieur le président.
    Il vous reste encore du temps.
    J'ai encore du temps? D'accord.
    Je reviens donc à Angelina. Au sein du cadre des banques, nous effectuerons un examen. Pour ce qui est de l'accord de séparation concernant la Loi sur les banques, voyez-vous des problèmes pour vos membres?
    Je suis désolée, je ne comprends pas la question.
    Pour ce qui est de l'examen du cadre financier, y a-t-il d'autres problèmes que vous aimeriez soulever?
    Non, pas pour le moment. L'examen réalisé en vertu de la Loi sur les banques sera divisé en phases. Il s'agit de la phase 1...
    Oui.
    ... et il y en aura d'autres. Nous devons voir la proposition avant de pouvoir y réagir.
    Bien sûr.
    Allez-y.
    Luke, vous et moi avons discuté plusieurs fois. Je sais que vous avez cité certaines statistiques provenant de l'État du Colorado. Dans une vie antérieure, j'ai couvert toutes les brasseries internationales, y compris Molson Coors, et je sais depuis longtemps que la consommation de bière aux États-Unis a diminué en raison de la crise financière mondiale. Les volumes de bière sont faibles aux États-Unis depuis plusieurs années. D'abord, en raison des répercussions de la récession mondiale, et, ensuite, parce que les gens choisissent de consommer en général d'autres alcools. J'appelle cela le « sablier », ce qui signifie que vous allez vers le haut ou vers le bas et nombre de marques de bière se font prendre au milieu. Il y a quelque chose que nous devons souligner. Oui, la marijuana vous fera concurrence. Je comprends cela, mais, en même temps, un certain nombre d'autres tendances ont eu des incidences sur les volumes de bière, ici au Canada et aux États-Unis, au cours de la dernière décennie. Est-ce exact?
    C'est absolument exact. Je dis que même le café et le thé, avec Starbucks et Les Thés DavidsTea, font concurrence à la bière pour l'argent des Canadiens. C'est une tendance aux États-Unis, et c'est également une tendance ici.
    Cela a forcé l'industrie de la bière à innover.
    Absolument. Ce que je voudrais dire, c'est que nous sommes prêts et disposés à être concurrentiels. C'est seulement le niveau d'imposition: son augmentation chaque année ne nous renforce pas plus que si nous avions adopté une approche davantage équilibrée.
(1710)
    Merci.
    Merci à tous.
    Pendant que Francesco s'adressait aux représentants de l'ABC, vous avez mentionné que la section 16 du projet de loi propose de renouveler les dispositions de temporisation dans la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés d'assurance et la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt en les fixant à cinq années après la journée qui suit la sanction royale. Cela signifie qu'on n'effectuera pas vraiment d'examen parlementaire.
    Quelle est votre opinion à ce sujet?
    Pour le moment, avec les examens officiels qui ont été réalisés au cours des deux dernières années, on poursuivra le travail dans ce secteur. D'après ce que nous comprenons, d'autres examens seront effectués, dont un dans le cadre de la Loi no 1 d'exécution du budget et des amendements supplémentaires qui pourraient en découler. Même si le processus d'examen officiel ne se poursuit pas, des consultations ont encore lieu.
    Je vais admettre cela parce que nous avons parlé à certaines personnes ce matin. Des gens se disent inquiets, vu les modifications visant les entreprises de technologie financière, du fait qu'on pourrait soulever des problèmes de protection de la vie privée à la suite d'échange d'information entre les banques et d'autres instances.
    S'agit-il d'une véritable préoccupation?
    Cela ne devrait pas être une préoccupation, pas avec le solide de cadre de protection de la vie privée que prévoient la LPRDE et les lois provinciales et également notre approche pour mobiliser les entreprises de technologie financière. Les banques prennent très au sérieux la vie privée de leurs clients. Si nous nous retrouvions dans une situation où nous dirigions un client vers une entreprise de technologie financière, nous le ferions en toute clarté quant à l'information qui est recueillie et après avoir obtenu le plein consentement du client, et ce, en toute transparence. Également, les banques ne prennent pas ces relations à la légère. Nous faisons preuve de diligence raisonnable afin de nous assurer que, si nous aiguillons un client vers une entreprise de technologie financière, cette dernière gère l'information du client de manière raisonnable.
    D'accord, merci.
    Monsieur Poilievre.
    Monsieur Kingston, mon ami, M. Sorbara, n'était pas heureux de certains faits que vous lui avez transmis. Au risque de lui déplaire davantage, je vais vous demander de nous en transmettre d'autres.
    Tout d'abord, quels sont les chiffres précis de l'investissement étranger au Canada cette année en comparaison de ceux des années précédentes?
    Nous n'avons pas les données de 2018. Les données les plus récentes sont celles sur la balance des paiements de 2017. Statistique Canada les a publiées en mars dernier. L'IDE au Canada était de 33,8 milliards de dollars, ce qui représente en réalité l'IDE le plus bas en huit ans au Canada.
    S'agit-il de valeurs nominales ou réelles?
    De valeurs nominales.
    Il s'agit de valeurs nominales, alors si vous tenez compte de l'inflation, ce serait même pire.
    Oui.
    Il y a également une augmentation massive de l'investissement canadien aux États-Unis. Je comprends qu'il a augmenté de 66 %, alors que l'investissement américain au Canada a diminué de 50 % au cours de la même période. Alors notre argent quitte le pays, et nous savons que, lorsque cela se produit, les emplois le suivent.
    À votre avis, quelle est la principale cause de la baisse de l'investissement au Canada?
    Je crois que la cause principale à l'heure actuelle, c'est la réforme fiscale américaine et les conséquences graves qu'elle a sur un certain nombre d'industries. Ensuite, toutefois, je pense qu'il y a le facteur d'incertitude, dont j'ai parlé un peu plus tôt concernant l'ALENA. Vu que 76 % de nos exportations vont aux États-Unis — ils sont de loin notre plus grand marché d'exportation —, l'incertitude concernant l'accès à ce marché réduit assurément l'investissement au Canada.
    David Rosenberg, économiste en chef de Gluskin Sheff, a regroupé toutes les dettes des ménages, des entreprises et des gouvernements au Canada et constaté que le total est trois fois supérieur à l'ensemble de l'économie canadienne. C'est un ratio qui nous place devant la Grèce lorsqu'on regroupe toutes les données cumulatives.
    Est-ce que vous êtes préoccupé par ce qui arrivera à l'économie canadienne si les taux commencent à augmenter au cours des prochaines années?
    Absolument. À mesure que les taux augmenteront, des pressions seront exercées sur les ménages canadiens. Des pressions seront également exercées sur tous les ordres de gouvernement qui ont augmenté leur dette. J'ai remarqué que la croissance des dépenses directes sur les intérêts à l'échelon fédéral doit augmenter de 36 % pendant toute la durée de l'horizon budgétaire, si on utilise une prévision relativement modeste pour les taux d'intérêt.
    Si les taux d'intérêt augmentent à un rythme plus élevé que prévu, ce qui est possible, vous pourriez les voir augmenter beaucoup plus rapidement, ce qui placerait le gouvernement fédéral dans une position très difficile.
    En fait, vous comprenez le problème parce que je crois que vous utilisez cette année comme base pour l'horizon budgétaire. Si vous utilisez l'an dernier, nous allons passer de 24 milliards de dollars par année en paiements d'intérêt à 39 milliards de dollars en quatre ans, ce qui représente une augmentation de 66 %. C'est de l'argent pour lequel nous, en tant que Canadiens, n'obtenons absolument rien. Bien sûr, cela fera l'affaire des banques et des prêteurs. Ils obtiendront gracieusement plus d'argent des contribuables, mais tous les autres se retrouvent dans une situation qui est pire.
    Je note que la RBC et la TD — et je crois que la CIBC était la dernière — ont augmenté leur taux hypothécaire affiché pour cinq ans. Cela signifiera des coûts plus élevés pour les acheteurs de maison canadiens. Nombre d'économistes ont lié cette augmentation au rendement plus élevé des obligations d'État. Les obligations d'État offrent maintenant, je crois, le rendement le plus élevé en sept ans. Les banques et d'autres prêteurs peuvent obtenir plus d'intérêts en prêtant au gouvernement, alors ils font la même chose lorsqu'ils prêtent aux ménages.
    Voyez-vous un lien entre une dette du gouvernement et des coûts d'emprunt plus élevés pour les ménages canadiens?
(1715)
    Non. Ces augmentations des taux d'intérêt des banques — et mes collègues de l'Association des banquiers canadiens ajouteront peut-être quelque chose — dépendent en grande partie de ce que fait la Banque du Canada: elle tente de s'assurer que l'inflation ne dépasse pas le taux cible. Je vois cela comme le facteur principal des hausses de taux d'intérêt.
    Les représentants de l'Association des banquiers canadiens veulent-ils intervenir?
    Je dirais surtout que les décisions relatives aux prix sont prises au cas par cas par les institutions. Le domaine des emprunts demeure très concurrentiel. Les Canadiens continuent d'avoir une très bonne cote de crédit. En général, c'est vraiment tout ce que je voulais dire.
    Si c'est tout ce que vous vouliez dire, c'est très bien.
    Monsieur Poilievre, vous avez le temps pour une autre question.
    Le niveau de la dette des ménages au Canada est le plus élevé depuis qu'on tient des statistiques à ce sujet. Des témoins auraient-ils de l'information sur ce que l'augmentation prévue des taux d'intérêt au cours des cinq prochaines années coûtera à un ménage moyen?
    Je n'ai pas la réponse à cette question, mais ce que je peux dire, c'est que la plus grande partie de la dette d'un ménage tient habituellement à son hypothèque. Le BSIF a mis en place un test de tension — les emprunteurs doivent subir un test de tension afin d'être admissibles à une hypothèque — afin de régler précisément ce problème et de s'assurer que les gens sont en mesure de gérer leur dette lorsqu'ils font face à une augmentation de leur taux d'intérêt.
    Merci à tous.
    Nous allons passer à M. Sorbara et nous reviendrons ensuite à M. Dusseault.
    J'ai quelques remarques à faire et je passerai ensuite aux représentants de l'ABC.
    Tout d'abord, la principale raison pour laquelle il y a une augmentation des taux d'intérêt n'est pas l'inflation. L'augmentation est causée en réalité par une forte croissance économique et par l'économie. Si vous regardez les taux d'activité, et je peux probablement parler de cinq ou des six autres statistiques, ils sont très performants sur le plan économique.
    Ne seriez-vous pas d'accord ? Je crois que le gouverneur de la Banque du Canada a également fait des commentaires à ce sujet.
    Absolument. La cause profonde de l'inflation tient à l'état de l'économie, alors oui. Je ne faisais que noter que la Banque du Canada fixe les taux d'intérêt en se fondant sur le taux d'inflation.
    Je dirais qu'elle se fonde sur l'inflation et également la conjoncture économique.
    Pour ce qui est de l'ABC, un certain nombre de changements ont été apportés au marché de l'habitation. Je crois que la plupart des changements ont été très prudents en ce qui concerne les niveaux d'assurance de la SCHL, le test de tension qui est maintenant appliqué aux prêts hypothécaires à proportion faible et à proportion élevée pour l'ensemble du marché et la qualité de la dette que nous observons dans le marché et que les gens accumulent.
    Si vous examinez les pointages FICO ou les cotes de crédit, nous allons dans la bonne voie en général. Nous prenons des mesures prudentielles, comme je les appellerais, pour le marché de l'habitation et les personnes qui peuvent se permettre de contracter une dette et qui avaient éprouvé des difficultés financières auparavant.
    Ne s'agit-il pas d'une description générale de ce que nous tentons de faire avec tous les organismes?
    Les taux d'arriérés demeurent très bas. Ils n'ont jamais été aussi bas, bien plus bas que ce que l'on a vu aux États-Unis. Les Canadiens ont toujours été des emprunteurs très bien cotés et ils le demeurent.
    J'ai terminé.
    Monsieur Dusseault.
(1720)

[Français]

    Je vais revenir à la question du cannabis. Les représentants de Cannabis Canada sont peut-être les mieux placés pour répondre à ma question.
    Prend-on des précautions suffisantes pour éviter que les entreprises qui demandent une licence de production de cannabis soient financées par des fonds douteux, qu'ils proviennent de l'étranger ou du Canada? Le Journal de Montréal et d'autres journaux ont fait de bonnes enquêtes sur certaines entreprises financées par des fonds provenant de paradis fiscaux.
    Selon vous, le cadre est-il suffisant pour protéger l'industrie du cannabis à des fins récréatives des influences étrangères douteuses?

[Traduction]

    Absolument, et j'aimerais apporter quelques précisions, avec tout le respect que je vous dois, au sujet de l'investissement et de ces investisseurs douteux dont on a parlé.
     L'argent qui a souvent été cité dans le Journal de Montréal était lié à des fiducies résidantes à l'étranger. Ces fiducies sont créées pour diverses raisons, généralement légales, mais je ne suis pas ici pour en parler et les défendre. L'industrie du cannabis impose vraiment l'homologation et le processus de double réglementation les plus rigoureux des industries du Canada.
    Tout d'abord, tous nos membres doivent suivre le processus complet d'homologation en vertu du RACFM. Ils sont soumis à une enquête. Les membres de leur famille et quiconque qui est associé à l'entreprise ou qui y détient une participation majoritaire font l'objet d'une enquête approfondie. Ils doivent d'abord se soumettre à une vérification de sécurité de la GRC.
    Ils doivent respecter une double réglementation de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario ou de l'autorité en valeurs mobilières qui les régit. Malheureusement — et je crois que c'est un point important qui doit être souligné —, on ne peut pas nous demander de prouver que nous n'avons rien fait de répréhensible en enfreignant la loi, et la plupart des organismes de réglementation des actions exigeront que nous ne divulguions pas le nom de chaque investisseur de l'entreprise. Il s'agit également de placements passifs, et ces personnes n'ont aucune participation majoritaire dans les entreprises elles-mêmes. Je crois que nous protégeons adéquatement les Canadiens. Nous avons le système le plus rigoureux au monde, et je le confirme.

[Français]

    Vous semblez en être satisfait.
    Je vais maintenant aborder un autre sujet: la double taxation. Je crois que c'est le représentant de l'organisme Canadiens pour l'accès équitable à la marijuana médicale qui a fait des commentaires là-dessus, et je suis sûr que les producteurs de bière pensent la même chose. Dans le cas de la bière, le droit d'accise correspond à 47 % du prix. Il y a ensuite les taxes de vente qui s'appliquent.
    Pensez-vous que cette double taxation constitue une barrière à l'accès au cannabis à des fins médicales?

[Traduction]

    Oui, absolument. Aujourd'hui, 60 % des patients qui consomment du cannabis thérapeutique n'en ont pas les moyens parce qu'il n'est pas couvert par leur assureur, mais c'est également en raison de l'imposition très injuste de la TPS et de la TVH dont aucun autre médicament qui doit être autorisé par un médecin ne fait l'objet.
    Cela dit, cette nouvelle taxe d'accise sera appliquée à l'étape de la production, alors la TVH sera perçue sur d'autres taxes. Il s'agira d'une taxe double ou d'une taxe perçue sur les autres taxes d'un médicament. Je crois que c'est vraiment l'élément clé. Les patients et les personnes qui se trouvent dans des situations extrêmement difficiles — nous en représentons un bon nombre — touchent des prestations d'invalidité. Ils n'ont pas de revenu et ils souffrent déjà. Dans l'avenir, le fait de les taxer davantage va aggraver leurs souffrances.
    Mme MacEachern désire prendre la parole.
    Puis-je intervenir?

[Français]

    Madame MacEachern, je pense que vous avez aussi mentionné que plus les prix sont élevés, plus le danger est grand que les patients se tournent vers le marché noir. Est-ce exact?
    Oui, bien sûr.
    Les taxes qui s'appliqueront en plus du droit d'accise vont-elles exacerber le problème?

[Traduction]

    Comme les représentants de la CAEMM l'ont mentionné, nombre de patients à qui j'ai parlé directement n'ont pas les moyens de se procurer une dose suffisante de cannabis thérapeutique. Ils ne peuvent même pas obtenir la dose nécessaire ou prescrite par leur médecin. Je ne crois pas que vous trouverez des gens qui sont incapables d'obtenir une dose suffisante de médicaments en raison de leur faible revenu.
    Je connais nombre de personnes qui ressentent des douleurs vives et des excès de douleur qui choisiront de ne pas prendre leur médicament ou prendront des doses plus faibles pour le faire durer plus longtemps.
    Je sais pertinemment que le coût de mon médicament augmentera d'environ 200 $. Cela dépend du moment où je vais acheter de l'huile ou du cannabis séché. L'exemption du CBD par rapport à l'exemption du THC ne m'aidera pas du tout. Aucun produit offert par mon producteur ne serait visé par l'exemption du CBD.
    Je crois sincèrement que cette taxe d'accise aiguillera les patients qui consomment du cannabis thérapeutique vers le marché noir.
(1725)
    J'ai deux commentaires. Puis-je vous demander au cours de quelle période cette augmentation de 200 $ se produira, et pensez-vous seulement à la taxe d'accise?
    Un mois, et oui, je ne pense qu'à la taxe d'accise.
    Y a-t-il d'autres questions, ou quelqu'un veut-il ajouter un commentaire? Il ne nous reste que quelques minutes.
    Monsieur Dusseault.

[Français]

    Je veux revenir sur la question des assurances et du DIN.
    Selon votre expérience et votre expertise, pour qu'un produit soit admissible à un remboursement, faut-il absolument que ce soit considéré comme un médicament? Je crois que vous avez mentionné des pays, la Belgique et l'Allemagne, où les assurances couvrent l'achat de cannabis à des fins médicales.
    En Allemagne, y a-t-il du cannabis à des fins médicales ayant reçu l'autorisation de l'organisme central de santé du pays en tant que médicament?

[Traduction]

    D'après ce que je comprends, en Allemagne, le cannabis n'est pas un médicament autorisé selon le processus habituel. Le cannabis thérapeutique est accessible dans les pharmacies moyennant l'ordonnance d'un médecin, et il doit être couvert par l'assurance-maladie pour les personnes qui touchent des prestations d'invalidité ou d'aide sociale, alors l'Allemagne va un peu plus loin.
    Cela dit, un certain nombre d'assureurs canadiens sont allés de l'avant pour couvrir le cannabis thérapeutique, mais cela représente environ 3 ou 4 % du marché des personnes qui sont couvertes, et au moins 50 % de la dose est couverte pour 50 % de ces 3 ou 4 %. Nous parlons vraiment d'une infime fraction du marché qui possède une couverture. C'est principalement attribuable à ce qui est connu sous le nom de « comptes gestion-santé » dans les régimes d'avantages sociaux qui permettent de réclamer le cannabis thérapeutique, mais dont les réclamations maximales sont habituellement de 500 $ à 2 000 $ par année. Cela est bien loin de couvrir la dose complète dont aurait besoin une personne qui souffre d'une maladie chronique.
    Les assureurs peuvent couvrir le coût. Un certain nombre de raisons les poussent à ne pas le faire, mais, compte tenu des circonstances, je crois qu'il est plus prudent pour le gouvernement de se pencher sur cette question. Il s'agit d'une décision simple et rationnelle que le gouvernement peut prendre: traiter le cannabis thérapeutique comme tout autre médicament. Particulièrement à la lumière du manque de couverture d'assurance, cela paraît tout à fait logique.
    Mais il est vrai que, si vous regardez l'équivalence avec l'industrie pharmaceutique en ce qui concerne le DIN, il y a beaucoup d'autres facteurs liés à la recherche et au développement, alors ce n'est pas aussi simple que cela en a l'air.
    Quel est le pourcentage de marijuana thérapeutique consommée qui aurait un DIN à l'heure actuelle? Est-il très bas?
     Il s'agit d'un pourcentage extrêmement bas. Les 269 000 Canadiens qui consomment du cannabis thérapeutique le font grâce à une autorisation de leur fournisseur de soins de santé, mais il ne s'agit pas d'une ordonnance pour du cannabis thérapeutique. Quelques produits sur le marché sont considérés comme des produits du cannabis sous ordonnance, et ces produits sont seulement prescrits selon des conditions très strictes.
    Cela dit, permettez-moi de rappeler au Comité que les tribunaux ont été très clairs. En l'absence d'un DIN, le gouvernement du Canada doit encore fournir un accès raisonnable au cannabis thérapeutique, et nous croyons que traiter le cannabis comme un médicament est une approche raisonnable, et cela s'étend à la taxation.
    D'accord.
    Monsieur Albas, vous avez le temps pour une dernière petite question.
    Eh bien, j'espère qu'elle sera courte, monsieur le président.
    Le projet de loi dont nous parlons ici prévoit que les produits dérivés du cannabis qui sont approuvés par Santé Canada, qui possèdent un numéro d'identification du médicament et qui peuvent seulement être obtenus moyennant une ordonnance seront exemptés du droit d'accise pour les produits mis en vente.
    Quelles sont les limites imposées aux produits offerts qui exigent de la marijuana thérapeutique? Également, vous avez mentionné le 0,3 % de THC. Je suppose que cela ne serait pas très utile aux personnes qui souffrent de maladie ou de douleurs chroniques. Est-ce le cas?
(1730)
    C'est tout à fait exact.
    J'aimerais mentionner rapidement une chose que j'ai trouvée extrêmement instructive. Lorsque j'ai organisé un événement pour la campagne Don't Tax Medicine visant à informer les patients de l'Île-du-Prince-Édouard du fait que cette taxation aurait des incidences sur eux, un médecin, la Dre Sana-Ara Ahmed, a communiqué avec nous par téléconférence pour nous dire que le système endocannabinoïde avait été retiré du curriculum de l'école de médecine. Les étudiants en médecine ne l'étudient plus à l'école médicale. Ils étudient le système nerveux; ils étudient tous les autres systèmes du corps humain, mais ce système existe. Il fait partie du corps humain. Il en fait partie depuis toujours.
    Le fait que les produits dérivés du cannabis ne sont pas reconnus simplement parce qu'ils n'ont pas de DIN me donne à penser que c'est parce qu'on démonise depuis longtemps le cannabis. Je ne crois pas que nous allons obtenir un DIN, mais nous devons avoir la certitude que ce médicament aide des milliers de Canadiens.
    Monsieur Zaid.
    Absolument. Nous sommes d'accord. L'absence d'un DIN n'est pas une raison légitime pour taxer les patients. Nous ne parlons pas seulement de la TVH ou de la TPS qui sont appliquées à d'autres produits comme les produits de santé naturels qui n'ont pas de DIN. Ce sont des arguments — auxquels je ne souscris pas — qui pourraient être avancés à cet égard, mais, cela dit, il est très clair que, pour ce qui est de la taxe d'accise ou d'une sainte taxe, cela ne devrait pas s'appliquer aux médicaments. Cela n'a rien à voir avec un DIN.
    Le gouvernement fait une bonne chose en exemptant ces médicaments de l'obligation d'avoir un DIN, ce qui est seulement logique. La même logique devrait s'appliquer aux produits de cannabis thérapeutique auxquels les patients ont accès en vertu du RACFM. C'est la situation dans laquelle la plupart des patients se trouvent. Cela changerait les choses dans la vie des Canadiens.
    Sur ce, vous avez dit le mot de la fin.
    Merci à tous. Nous avons abordé un ensemble de sujets, de questions financières allant jusqu'au cannabis.
    Pour les personnes qui ont dû revenir à Ottawa une deuxième fois en raison de l'annulation de la séance de la semaine passée, je vous présente mes excuses.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU